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Le parrainage, d’une intuition à une stratégie de communication

Article  in  Décisions Marketing · July 2007

DOI: 10.7193/DM.047.07.20

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1 author:

Nathalie Fleck-Dousteyssier
Université du Maine
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LE PARRAINAGE : D’UNE INTUITION
À UNE STRATÉGIE DE COMMUNICATION
Le parrainage, terme qui regroupe les notions de
sponsoring et de mécénat, est un mode de
communication en plein essor, mais encore largement
géré de façon « artisanale » et intuitive en entreprise.
Que peut-on en attendre et comment en faire un outil
efficace de la stratégie de communication de
l’entreprise ? Quels sont les choix qui s’offrent à la
marque et comment en faire des leviers efficaces par
rapport à ses objectifs ?
F orce est de constater que le parrainage a
aujourd’hui envahi notre quotidien. Il n’est
quasiment plus possible de se rendre à une
manifestation sportive, une exposition de peinture, un
concert, un colloque médical, ni même dans une
association caritative sans trouver la présence de
partenaires, sponsors ou autres fournisseurs officiels... La
télévision n’y échappe pas puisqu’on y trouve des
émissions « proposées » par des marques commerciales...
on parle alors de parrainage audiovisuel.
Le parrainage, qui recouvre les activités de sponsoring et
mécénat, existe depuis des temps reculés si l’on se réfère
à l’étymologie du mot mécénat, liée à un certain Caius
Cilnius Maecenas, homme d’état romain et ami d’Horace,
Virgile et de nombreux savants et artistes qu’il invitait à
sa table (6, encadré 1). Néanmoins, son véritable essor
date plutôt des années 80. Il semble que cet essor résulte
certes, de l’opportunité que représente ce mode de
communication mais surtout, de l’intuition d’un certain
nombre de managers. Il est étonnant de constater que
nombre de grandes campagnes de parrainage ont débuté
sans que la stratégie de communication soit clairement
Communication ●
NATHALIE FLECK-DOUSTEYSSIER
établie, et ce, malgré l’investissement de budgets
significatifs. Les regards critiques parlent volontiers, et
parfois à juste titre, de « danseuse du Président » lorsqu’ils
évoquent ce type d’opérations où le parrainage est un
prétexte permettant au dirigeant de vivre un hobby ou
une passion de plus près (2). Une figure emblématique
de ces chefs d’entreprise passionnés est sans doute Paul
Ricard, qui fut l’un des pionniers en matière de mécénat
d’entreprise : dans le sport lorsqu’il devient le mécène
d’Alain Colas en 1973 et d’Eric Tabarly en 1979, dans
l’environnement avec la création de l’Institut
Océanographique Paul Ricard, dans les arts en créant des
espaces d’exposition à Paris, Bendor, Lyon, Toulouse et
Marseille. En 1970, il construit le circuit Paul Ricard qui
accueille aujourd’hui les plus grandes épreuves
internationales de sports mécaniques. « Je n’ai jamais
lésiné sur mes rêves », confiait Paul Ricard. « Il est certain
que Paul Ricard était un chef d’entreprise visionnaire
qui avait non seulement la faculté de croire en ses
propres rêves mais qui, grâce à sa générosité, se
donnait les moyens de les réaliser », souligne Jean-Paul
Richard (16).
Nathalie Fleck-Dousteyssier est Maître de Conférences,
Thema, UMR CNRS 8184, Université de Cergy-Pontoise,
Université de Paris Dauphine.
L’auteur tient à remercier Delphine Manceau, pour l’avoir
incitée à écrire cet article et pour son soutien. Elle est
également très reconnaissante à Xavier Quattrocchi-
Oubradous, Chief Executive Officer et co-fondateur de
SponsorClick, de lui avoir fourni les chiffres du marché
et les éléments sur Aquarel ; ainsi qu’à Pascale Quester,
Professeur et Dean à l’Université d’Adelaide, Australie,
pour les éléments sur Qantas. Elle remercie enfin les
reviewers pour leurs commentaires qui ont permis d’enri-
chir cette réflexion.
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● Le parrainage : d’une intuition à une stratégie de communication

Encadré 1 : Parrainage, sponsoring et mécénat...

Sponsoring et mécénat font depuis longtemps l’objet d’une polémique pour savoir si tous deux résultent ou pas d’une même
démarche (6).

Dans la pensée courante, le sponsoring serait plus tourné vers le sport, plus centré sur les intérêts du sponsor et plus médiatisé,
avec une finalité plutôt commerciale. Le mécénat, en revanche, concernerait davantage les activités culturelles ou caritatives,
serait moins médiatisé et davantage focalisé sur les intérêts de l’entité parrainée, sans recherche systématique de contrepartie.
En réalité, les différences sont moins tranchées et sponsoring et mécénat sont bien deux techniques de communication de
l’entreprise qui s’opposent à la philanthropie, bien désintéressée et non médiatisée, quant à elle.

Les termes promotion par l’action ou communication événementielle, également utilisés dans ce cadre, nous semblent quant à eux trop
restrictifs car ils évoquent une action ou un événement ponctuel qui n’est pas approprié pour décrire l’engagement d’une entreprise dans
le temps, ou auprès d’une association par exemple. Il n’y a pas forcément d’action ou d’événement à proprement parler.

Le terme parrainage semble être aujourd’hui unanimement admis comme un concept plus large qui regroupe toutes ces notions
(notamment sponsoring et mécénat) et permet ainsi d’éviter toute polémique.

Pourtant, le parrainage est en voie de professionnalisation
comme en témoigne le développement des structures qui
lui sont dédiées dans les entreprises ou les agences de
conseil spécialisées dans le domaine. L’objectif est ici de
faire le point sur cet outil dans une perspective
managériale. Que peut on attendre du parrainage et
comment rendre ce nouvel outil de communication le
plus efficace possible ?
noter que l’entité parrainée peut prendre de multiples
formes. Le terme « événement » souvent employé dans
la littérature sur le parrainage pour désigner l’objet de
l’opération ne nous semble par conséquent pas
approprié car il ne permet pas de prendre en compte
tous les cas de parrainages. Lorsqu’une entreprise
parraine une association caritative, une fondation pour
la recherche ou même un sportif, on ne peut réellement
parler d’événement.

Le parrainage : principe,
évolution et caractéristiques Le parrainage : un outil
de communication
Le principe du parrainage consiste à créer ou soutenir en développement
un événement, une personne ou un groupe de
personnes, une association, une activité Le développement du parrainage depuis les années 80
socio-culturellement indépendante d’elle-même et à s’y (encadré 2, figures 1 et 2) résulte de deux phénomènes
associer médiatiquement en vue d’atteindre des cumulatifs : le développement de l’offre et celui de la
objectifs de communication marketing (3, 5). Il est à demande en matière de parrainage.

Encadré 2 : Les budgets investis dans le parrainage

Il est difficile d’évaluer réellement les budgets consacrés au parrainage, car ceux-ci sont souvent « éclatés » sur différents postes,
le parrainage étant relayé à tous les niveaux du mix de la marque. Ainsi une publicité présentant l’action de parrainage apparaîtra-
t-elle parfois dans le budget publicité et parfois dans le budget parrainage.

Le budget mondial du parrainage a été évalué à 43,5 Mds US$ en 2005 et il est estimé à 48,7 Mds US$ pour 2006. Au
cours des 10 dernières années, ce budget a cru en moyenne de 10 % par an. Le parrainage est donc en pleine expansion et
croit plus vite que la publicité, bien qu’il ne représente aujourd’hui qu’environ 5 % du budget total de communication. En
France, les droits de parrainage acquis par les annonceurs représentent 2,2 Mds e en 2002, soit 7,1 % des budgets mondiaux.
Ce budget exclue tous les budgets d’activation investis autour du parrainage (études, mise en place, communication...) qui
s’élèveraient à 150 millions e (sources : études « Sponsorship Marketing Global » et « Sponsorship Marketing France » de
SponsorClick en 2004 et 2005).

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Communication ●

Figure 1 : Budgets investis en parrainage au niveau mondial (en milliards de US$, source : SponsorClick)

Figure 2 : Les investissements en communication en France en 2005 (source : France Pub – IREP 2005)

Type de communication En millions Poids Évolution

d’euros 2005 vs 2000

Total marché 31 844 100,0 % + 9,6 %

Total médias 10 974 34,5 % + 0,5 %

Total hors médias 20 870 65,5 % + 15,0 %

Marketing direct 10 085 31,7 % + 12,4 %

Promotion 4 939 15,5 % + 9,2 %

Relations publiques 1 748 5,5 % + 11,8 %

Salons et foires 1 401 4,4 % + 5,3 %

Parrainage et mécénat 1 182 3,7 % + 60,5 %

dont mécénat 354 Non disponible

Annuaires imprimés et électroniques 1 133 3,6 % + 29,6 %

Achat d’espace internet 382 1,2 % + 165,3 %

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● Le parrainage : d’une intuition à une stratégie de communication

• Le développement de l’offre Quel que soit le domaine d’activités, les organisations

Il existe de plus en plus d’activités « parrainables ». Les
opérations de parrainage concernent en effet des
domaines d’action de plus en plus variés : même si le
sport reste un secteur privilégié pour les annonceurs,
la culture et le caritatif demeurent présents et certains
domaines sont aujourd’hui très en vogue, comme
l’environnement ou la santé (figures 3 et 4).
À l’élargissement des activités s’ajoute la
professionnalisation de la démarche de parrainage.
d’événements, les fondations ou encore les associations
ont aujourd’hui le réflexe de chercher des entreprises
partenaires pour les aider à boucler leurs budgets ou à
développer des projets plus ambitieux. Parfois même,
le désengagement de l’État, comme cela peut être le
cas dans le secteur culturel, implique l’obligation pour
les organismes culturels de trouver de tels partenaires
afin de survivre. Ainsi a-t-on vu naître des agences de
conseil en parrainage, dont le rôle consiste à mettre en
relation entreprises et entités en quête de partenaires.

Figure 3 : Répartition des budgets de parrainage en fonction du domaine de l’entité parrainée au niveau mondial
en 2004 (source : SponsorClick)

Figure 4 : Typologie des opérations de parrainage possibles (adapté de SponsorClick)

Organisme Individu Événement

Sport Club, fédération... Athlète Match, championnat, tournée

Culture Musée, opéra, salle de Artiste Concert, exposition, spectacle, opération de

concert, théâtre, fondation... sauvegarde du patrimoine

Caritatif Fondation, association NA* Événement, programme ou opération

caritative... scientifique

Sciences (santé, Projet environnemental, NA Prix scientifique, fête, salon, grand prix,
environnement...) animation parc à thème fondation...

Éducation Université, école, institut de Projet étudiant Soirée étudiante, forum, chaire d’entreprise,
recherche événement sportif, artistique ou caritatif...

B to B NA NA Conférence, salon, congrès, séminaire...

Médias Supports médias NA Programme radio ou TV, presse (colonne),

films, jeux vidéos, portails internet...

* NA : ne s’applique pas.

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• Le développement de la demande
Les entreprises sont elles-mêmes de plus en plus
sensibles à ce nouveau mode de communication
marketing et y trouvent leur intérêt.
De nombreuses entreprises ont abordé le parrainage
comme une alternative à la communication publicitaire
classique, en réponse à des contraintes. Pour certaines
d’entres elles, la décision de monter des opérations de
parrainage est née d’une contrainte légale. C’est le cas,
par exemple, dans les secteurs du tabac ou de l’alcool :
les entreprises ne peuvent plus communiquer par les
voies publicitaires traditionnelles suite à la loi Evin,
promulguée le 10 janvier 1991. Les grandes marques de
cigarettes ou d’alcool ont investi ou continué de
développer leur présence dans des domaines comme la
Formule 1 1 (Marlboro, Kronenbourg ou Fosters, par
exemple), où elles trouvaient une bonne affinité en
termes de cible (hommes jeunes). Certaines ont créé
leur propre événement, comme le Raid Gauloise ou le
Camel Trophy, deux épreuves sportives renforçant
l’image d’aventure de ces marques. Aussi a-t-on vu naître
La Cigale Kanterbräu, à travers laquelle le célèbre
brasseur a soutenu la salle de concert rock parisienne,
au design fraîchement repensé par Philippe Starck.
Cette opération permettait à Kanterbräu de véhiculer
une image de fête populaire et de convivialité, valeurs
ancrées dans la marque, auprès d’un public jeune dont
elle faisait sa cible. Pour d’autres marques, le fait de se
lancer dans le parrainage résulte plutôt d’une contrainte
budgétaire, le ticket d’entrée pour avoir une part de
voix raisonnable et pouvoir émerger en publicité étant
trop élevé sur certains marchés. Des marques régionales
ou locales préfèreront alors soutenir des activités
géographiquement proches d’elles et faire parler d’elles
auprès de leurs consommateurs avérés ou potentiels
locaux. Même les entreprises qui communiquent à
travers les canaux publicitaires classiques envisagent le
parrainage comme une alternative à l’encombrement et
à la saturation de ces médias et à l’indifférence
croissante du public envers les techniques
traditionnelles de communication (4, 9).
Au-delà de l’utilisation du parrainage dans le cadre de
stratégies de communication défensives, pour mieux
contourner des contraintes, certaines entreprises ont
choisi ce mode d’expression de façon délibérée, pour
ses bénéfices propres.
Le parrainage apporte aux entreprises de nouvelles
opportunités pour communiquer, du fait du
développement des activités de loisirs et de leur
couverture médiatique (9).
De plus, ce type de communication permet d’envisager
une stratégie au-delà des langues et des cultures,
Communication ●
comme Coca-Cola l’illustre si souvent en parrainant des
événements sportifs internationaux comme les Jeux
Olympiques, s’adressant ainsi en une fois à des millions
de téléspectateurs à travers plusieurs pays.
Enfin, outre ces bénéfices d’ordre quantitatif, le
parrainage présente un intérêt qualitatif dans la mesure
où il permet de répondre à des attentes en termes de
bénéfices attitudinaux, attentes de plus en plus
présentes dans l’esprit des consommateurs soucieux et
exigeants par rapport au rôle citoyen des entreprises :
en participant à des activités sportives, culturelles ou
caritatives, l’entreprise devient un acteur social aux
yeux du public (12). Elle peut en outre gagner en
crédibilité auprès de ce public puisqu’elle se construit
à travers des valeurs en s’engageant dans l’action et en
s’ancrant dans le réel, et pas seulement sur le mode du
discours publicitaire, fictif et souvent dans le domaine
du rêve (13). Le parrainage devient alors une source de
proximité vis-à-vis du consommateur intéressante et
complémentaire du dispositif publicitaire classique.
Le parrainage : des caractéristiques
spécifiques qui exigent un effort
de traitement
Le parrainage présente néanmoins des caractéristiques
dont il faut tenir compte si l’on souhaite en faire un
outil efficace : il est le plus souvent secondaire par
rapport à l’entité parrainée en termes d’attention, le
message véhiculé est de nature implicite et la marque
s’installe dans un contexte non commercial où elle
n’est pas forcément attendue...
• Le parrainage : une tâche secondaire
Le préambule à l’efficacité de toute communication est
que celle-ci soit perçue. C’est particulièrement vrai et
parfois problématique dans le cadre du parrainage
puisque le message du parrain est traité comme une
tâche secondaire. Il ne fait a priori pas l’objet de
l’attention du public. Lorsqu’un individu se rend à un
concert, une exposition, un match de tennis ou dans
une association, son attention est généralement
focalisée vers cet objet, et tout ce qui se trouve autour
est traité de façon secondaire, parfois même à un niveau
non conscient ou pré conscient. Le premier défi pour
le parrain va donc consister à émerger au milieu du
brouhaha occasionné par l’entité parrainée. Comment
maximiser ses chances d’être vu ?
• Le parrainage : une communication
implicite
Une autre difficulté du parrainage réside dans l’aspect
implicite du message qu’il délivre. En effet, il n’y a pas de
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● Le parrainage : d’une intuition à une stratégie de communication

message à proprement parler car celui-ci consiste bien
souvent dans la simple juxtaposition du nom de l’entité
parrainée et de celui de l’entreprise. C’est donc aux
individus exposés à cette association marque/entité
parrainée de lui donner du sens, de comprendre le
message que le parrain souhaite faire passer, voire
d’inférer des pensées ou des croyances sur la marque à
partir de sa présence auprès de cette entité. Le défi du
parrain va donc être de s’assurer par tous les moyens et
leviers dont il dispose que sa démarche est aussi claire que
possible et peut être comprise sans trop de difficultés.
• Le parrain : une entreprise dans un cadre
non commercial
Enfin, le parrain se trouve dans un cadre inhabituel où
il n’est pas en situation de se vendre. Il participe sans
avoir réellement la parole et doit laisser la vedette à
l’entité parrainée qu’il est sensé soutenir. Il serait par
conséquent mal venu qu’il se mette trop en avant et
qu’il cherche à tirer profit de la situation de façon trop
évidente et trop mercantile. Il n’est simplement pas là
pour cela et sa crédibilité en dépend. Le parrainage
n’est pour autant pas de la pure philanthropie et le but
est bien d’atteindre des objectifs de communication
marketing comme la définition le suggère. Tout le
dilemme pour l’entreprise qui parraine est alors de
trouver une façon acceptable, dans le contexte, de
s’exprimer et de faire passer un message.
Le parrainage,
avec quels objectifs ?
Le nombre d’études et de recherches empiriques sur
les effets du parrainage s’est nettement accru depuis
une dizaine d’années (17). Cependant, l’efficacité de ce
type d’opérations reste aujourd’hui peu mesurée, et
nombre d’entreprises se contentent d’estimer
l’équivalent en achat d’espace des retombées médias
concernant ces opérations, à partir des piges effectuées
par les instituts spécialisés (15). Comme si l’objectif
principal était de faire parler de l’entreprise à travers
le parrainage. Pourtant, lorsqu’on les interroge, les
entreprises attendent généralement beaucoup plus du
parrainage. C’est le cas, par exemple, de Nestlé Waters
qui a lancé l’eau de source Aquarel en 2001, en
s’appuyant au départ exclusivement sur le parrainage
du Tour de France (encadré 3).

Encadré 3 : Un exemple de politique de parrainage... le lancement de Nestlé Aquarel

Le lancement de l’eau Nestlé Aquarel s’est appuyé sur une vaste opération de parrainage lors du Tour de France 2001, sans
communication publicitaire au départ. L’objectif de la marque était d’utiliser cette opération à travers tous les éléments du mix pour
fournir à la fois visibilité et opportunités d’actions événementielles de proximité, de manière à soutenir le lancement du nouveau produit.

L’opération a été relayée systématiquement à tous les niveaux du mix :

– 500 000 bouteilles échantillons distribuées ;
– promotions on-pack et sur les points de vente ;
– publicité dans la presse locale 3 jours avant et pendant toute la course ;
– présence de 13 véhicules publicitaires dans la caravane du Tour (15 millions de spectateurs) ;
– distribution de 300 000 lettres d’information une heure avant le passage des coureurs ;
– relations publiques avec la rencontre de 1 000 invités (presse, distributeurs, employés).

Résultats : la notoriété de la marque a doublé en 3 semaines, 10 millions de bouteilles ont été vendues pendant le Tour et Aquarel
a bénéficié de l’image d’un événement populaire et sportif prestigieux (source : SponsorClick).

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Rappelons tout d’abord que le parrainage est un outil
de communication qui ne s’adresse pas uniquement
aux consommateurs. Il permet également de
communiquer auprès d’une cible en interne, les
employés, ou en externe, les clients et fournisseurs
voire les actionnaires et investisseurs 2 (figure 5). Le
parrainage est alors l’occasion d’opérations de relations
publiques auprès de ces cibles. Toutefois, les relations
publiques ou la stimulation du personnel ne
justifieraient généralement pas à elles seules l’ampleur
des investissements consentis.
Lorsqu’il s’agit de communiquer auprès du grand
public, les principaux objectifs avancés par les
entreprises concernent la notoriété, l’image de marque,
l’attitude ou encore l’intention d’achat. Ces objectifs
s’appliquent tout autant à une marque de produits qu’à
une entreprise et le parrainage peut aisément faire
l’objet de communication institutionnelle. L’entreprise
communique ainsi sur les valeurs qui l’animent.
• Augmenter la notoriété
L’un des principaux objectifs déclarés du parrainage
est d’augmenter la notoriété. Le parrainage aiderait à
faire connaître une entreprise, du fait de l’apparition
de son nom et de sa répétition. Une entreprise comme
PRB, qui opère sur le marché des matériaux pour le
bâtiment, est sortie de l’anonymat en parrainant le
bateau vainqueur du Vendée Globe Challenge 2005.
Pourtant, il est à noter que les parrains sont la plupart
du temps des entreprises dont la notoriété n’est plus
à faire. Par ailleurs, les études concernant l’impact du
parrainage sur la notoriété laissent parfois perplexe :
les spectateurs d’une opération de parrainage ont
parfois (voire souvent) des difficultés à repérer la
présence des parrains. Sponsorclick ne dénombrait pas
moins de 33 marques parrains lors d’un match
Figure 5 : Les différents cibles et objectifs du parrainage
Communication ●
international de football en décembre 2002 3 ,
remettant en cause la visibilité de chacun de ces
sponsors, et par conséquent l’efficacité de l’opération.
Le parrainage n’échappe donc pas toujours au
phénomène de saturation dont on accuse la publicité.
La difficulté est encore plus grande lorsqu’il s’agit de
retenir la présence des parrains dans le temps. Après
quelques semaines, les individus ont bien du mal à se
rappeler les marques présentes (18) et procèdent par
inférence, imaginant les marques qui pourraient être
présentes dans ces circonstances en fonction de leur
importance et de leur rapport avec l’activité (8). Il
existe alors une confusion importante dont profitent
parfois de façon tout à fait calculée des marques dans
la même catégorie de produits que la marque parrain.
C’est le phénomène de l’« ambush marketing » (10)
qu’illustre l’exemple de Qantas. Pendant les Jeux
Olympiques de Sydney, Qantas était « sponsor officiel »
du nageur Ian Thorpe et de l’athlète Cathy Freeman,
et à ce titre, a lancé une campagne d’affichage de
grande ampleur sur des immeubles entiers de Sydney
et sur des abribus. Le problème est que le sponsor
officiel des Jeux Olympiques était Ansett Australia, une
compagnie aérienne concurrente de Qantas, qui avait
payé des droits colossaux pour ce privilège. Qantas
entretenait le doute dans l’esprit des consommateurs
en proposant des prix promotionnels de billets d’avion
pendant les Jeux, et nombre d’individus étaient
persuadés que Qantas était bien le partenaire officiel
des JO. La célèbre compagnie aérienne a finalement
dû annuler sa campagne publicitaire, le mot
« Olympic » étant clairement déterminé comme source
d’ambush marketing.
Il nous semble ainsi que, si le parrainage permet
éventuellement à une marque d’augmenter sa notoriété
grâce à un coup médiatique, son intérêt est davantage
dans ses effets sur l’image ou l’attitude.
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● Le parrainage : d’une intuition à une stratégie de communication
• Améliorer l’image de marque
Le renforcement de l’image est en effet l’un des
objectifs majeurs cités par les entreprises qui se lancent
dans le parrainage. Lorsque Fleury Michon se lance
dans le parrainage du trimaran éponyme de Philippe
Poupon, en 1982, Yves Gonnord, Président du Conseil
de Surveillance du Groupe Fleury Michon déclare
« Grâce à Philippe Poupon, l’image de notre marque
a été véhiculée par le sport auprès du grand public
pendant de longues années (...). Nous nous apprêtions
à délaisser la gamme des produits classiques au profit
de produits modernes (plats cuisinés, salades...). Pour
attaquer ce nouveau marché, notre image était trop
classique. Nous devions la faire évoluer pour mieux
gagner sur un marché plus moderne et plus jeune...
La voile pouvait affirmer notre dynamique ». Ici, le
principe sous-jacent est le transfert d’image qui
s’effectue entre l’entité parrainée et le parrain. Ainsi les
attributs associés à l’entité parrainée se transfèrent-ils
au parrain, selon les techniques du conditionnement et
de l’endossement 4 (5).
• Renforcer la relation entre le consomma-
teur et la marque
L’une des spécificités du parrainage est qu’il s’ancre
dans la réalité de façon plus proche des individus que
la publicité qui reste de l’ordre du discours. C’est
pourquoi le parrainage a un impact sur l’attitude envers
la marque et sur la proximité et la relation affective que
la marque entretient avec le consommateur. Cet impact
peut résulter d’un simple phénomène de transfert :
j’aime l’équipe λ, la marque X est partenaire officiel de
cette équipe donc j’aime X (2). Il peut également
provenir d’un raisonnement plus construit : je suis
supporter de basket. La marque X fait beaucoup pour
promouvoir ce sport et aider les jeunes à le pratiquer,
en organisant des tournois d’amateurs. Je suis
reconnaissant envers cette marque et j’éprouve de la
sympathie et de l’estime pour elle.
• Accroître l’intention d’achat
L’augmentation des ventes est parfois citée comme l’un
des objectifs du parrainage. Pourtant, cela semble
hasardeux pour plusieurs raisons. Tout d’abord parce
que comme la publicité, le parrainage est un facteur
difficile à isoler des autres actions marketing menées
de façon concomitante pour en mesurer les effets
spécifiques. De plus, les effets du parrainage sur l’image
ou sur la relation entre la marque et le consommateur
sont difficiles à mesurer à court terme et se produisent
dans le temps. Enfin, que dire des entreprises d’énergie
atomique, des entreprises publiques ou les collectivités
locales qui apparaissent de plus en plus au titre de
14 – Nathalie FLECK-DOUSTEYSSIER
parrains ? Cela a-t-il un sens pour elles de vendre plus ?
Là encore, il semble que l’intérêt soit le plus souvent
dans l’image et la proximité avec les individus.
Néanmoins, il existe quelques cas où l’on peut mesurer
directement l’impact d’une opération de parrainage sur
les ventes. C’est le cas d’Aquarel de Nestlé qui a vendu
10 millions de bouteilles le long des routes du Tour de
France en 2001. Par ailleurs, s’il ne semble pas toujours
pertinent de parler d’accroissement des ventes, nous
pouvons imaginer de mesurer l’intention d’achat
comme une variable traduisant l’attitude favorable et la
bonne disposition des individus envers le parrain.
Les entreprises attendent donc beaucoup des
opérations de parrainage auxquelles elles participent.
Comment faire pour effectivement tirer le maximum
de ces opérations ?
Comment améliorer l’efficacité
du parrainage : les choix
du parrain et les leviers
dont il dispose
Lorsqu’une entreprise décide de se lancer dans le
parrainage, elle se trouve face à des choix qui sont
autant de leviers pour en optimiser l’efficacité
(encadré 4). Comme tout mode de communication, le
parrainage est efficace si le parrain est vu et mémorisé,
si son message est compris et s’il est finalement
apprécié de telle sorte qu’il crée ou renforce une
attitude positive et une intention d’achat favorable à
la marque ou à l’entreprise (encadré 5). Cela n’est pas
évident au vu des caractéristiques du parrainage
évoquées plus haut : le parrain est le plus souvent
secondaire en termes d’attention, le message est de
nature implicite et la marque apparaît dans un
contexte non commercial où elle n’est généralement
pas attendue...
Le type d’entité parrainée
Il s’agit de prendre prioritairement en considération le
domaine de l’activité parrainée, la taille, le nombre et
la durée des opérations.
• Le domaine d’activité de l’entité parrainée
C’est le tout premier choix face auquel se trouve
l’entreprise. La question est de deux ordres. Dans
l’absolu, faut-il lancer une opération dans le sport, la
culture, le caritatif, l’environnement, la santé... ? Faut-il
choisir un domaine proche de son propre domaine de
compétence ?
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Communication ●

Encadré 4 : Les 7 questions clés avant de se lancer dans une opération de parrainage

1. Dans quel domaine d’activité ?

Il s’agit de choisir une entité parrainée pertinente avec la marque, i.e. qui a du sens par rapport à son positionnement, et pas trop
attendue par le consommateur afin qu’elle éveille sa curiosité et l’incite à réfléchir.

2. Une opération de quelle taille ? locale, nationale ou internationale ?

Une opération internationale donne du statut au parrain mais une opération locale apporte de la proximité avec les consommateurs
et suggère des intentions plus désintéressées.

3. Une opération unique ou des opérations concomitantes ?

Des opérations concomitantes apportent au parrain une meilleure visibilité mais un risque d’éparpillement et sa démarche peut
paraître incohérente. Il est nécessaire de donner un fil conducteur, un lien logique entre les différentes opérations menées.

4. Une opération ponctuelle ou répétée dans le temps ?

Une opération répétée donne de la visibilité mais peut lasser et perdre en impact. Renouveler le partenariat, au moins sur sa
forme, permet d’attirer l’attention des individus.

5. Quelle place du nom du parrain et quel statut ?

Plus le nom du parrain est associé à l’événement, plus le parrain en tire profit en termes de mémorisation et d’image.

6. Quel type de présence du parrain in situ ?

Sur le terrain, l’objectif du parrain est de maximiser les occasions d’être vu, la limite étant un risque de saturation et de rejet de
la part des individus.

7. Quel type de médiatisation de l’opération ?

Le parrainage doit être médiatisé par tous les moyens possibles (publicité, packaging, promotion, RP...) et auprès de toutes les
cibles de l’entreprise, en interne et en externe. Cette communication doit permettre de donner du sens à la présence du parrain
auprès de l’entité parrainée.

Tout d’abord, il est vrai que tous les domaines
d’activités n’ont pas la même cible, la même image et
ne véhiculent pas les mêmes valeurs. Le sport est très
populaire, assez porteur d’émotions, notamment
auprès des fans, et assez médiatisé si l’on reste dans les
activités phares avec enjeu national ou international.
En revanche, le sport connaît déjà une certaine
saturation en termes de nombre de parrains présents
et souffre parfois d’un lien à l’argent et au monde des
affaires qui peut nuire à la crédibilité d’un parrain. La
culture est souvent l’apanage des entreprises comme
les banques dont la priorité est une affinité en termes
de cible et la recherche d’un statut auprès de cette
cible. Elle garde une image élitiste. Le problème devient
alors qu’un même secteur, le secteur bancaire en
l’occurrence, risque de faire les mêmes choix en termes
de domaine de parrainage : sauvegarde du patrimoine,
ensembles de musique classique, art contemporain...
Le parrainage n’est alors plus un élément de
différenciation en termes de positionnement. Quant à
l’environnement et à la santé, ce sont des thèmes très
porteurs et de plus en plus ouverts au parrainage. Ces
thèmes correspondent à des préoccupations actuelles
des consommateurs et sont faciles à exploiter pour les
entreprises à l’origine de la société de consommation
qui est remise en cause. En revanche, si ces entreprises
veulent rester crédibles, elles doivent veiller à mettre
en application dans toutes leurs activités et tous leurs
procédés les idées et valeurs qu’elles défendent.
Difficile tâche que celle de Total, dont la réputation de
pollueur s’est largement aggravée lors de la catastrophe
de l’Erika, et qui défend néanmoins depuis 1992 la
fondation pour la préservation de la biodiversité et de
la mer.
Par ailleurs, la question est de savoir si une entreprise
doit rester dans l’univers dans lequel elle opère. Plus
généralement, il est ici question de la congruence

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● Le parrainage : d’une intuition à une stratégie de communication

entre le parrain et l’activité parrainée, c’est-à-dire le
fait que parrain et activité parrainée aillent bien
ensemble (4). Une certaine logique veut que les
entreprises parrainent des activités proches de leur
domaine de compétence : ainsi, les pneus ou huiles
pour moteurs parrainent les grands prix de Formule 1
ou les équipementiers sportifs semblent
incontournables dans les sports collectifs. On parle à
ce propos de parrainage de la preuve : si un fabricant
de pneus sait être à la pointe de la technologie dans
un domaine aussi exigeant que la Formule 1, il saura
a fortiori proposer des produits de grande qualité
aux particuliers. La limite de cette grande cohérence
est que la présence de la marque soit tellement
évidente qu’elle ne retienne pas l’attention. Voir
Adidas, Nike ou Puma sur un maillot de football ne
crée aucune surprise et n’incite pas à réfléchir sur la
raison de l’engagement de la marque. De plus, cette
présence de la marque peut être plutôt perçue
comme de la publicité que réellement comme du
parrainage. L’intérêt commercial semble trop évident
et les intentions de l’entreprise risquent d’être jugées
comme étant trop mercantiles. En revanche, choisir
un domaine d’activités qui ait du sens pour la marque
tout en étant assez étonnant pour inciter l’individu
exposé à réfléchir semble beaucoup plus profitable 5.
Si nous reprenons l’exemple Aquarel de Nestlé
Waters, son association avec le Tour de France est
pertinente dans la mesure où la consommation d’eau
est particulièrement liée à la chaleur de l’été et à
l’effort physique. Elle n’est pas particulièrement
attendue car ce type de produits n’est pas habituel
lors de cet événement.
Il s’agit donc, pour les parrains qui choisissent un
domaine de parrainage, de trouver le bon équilibre
entre la cohérence de leur activité avec ce domaine et
l’intérêt et la curiosité que suscitera cette association
(encadré 5).

Encadré 5 : Ce qui incite l’individu exposé à traiter un message...

Le niveau de traitement d’un message est important car plus on traite une information en profondeur, de façon intensive, mieux
on mémorisera la marque concernée, voire les arguments qu’elle avance à travers ce message ou l’interprétation que l’on en fait.
De plus, l’individu développera une attitude plus stable, plus forte et plus accessible en mémoire, s’il traite le message de façon
plus intensive. Ce niveau de traitement est d’autant plus déterminant pour le parrainage que le message est de nature implicite.
Il est donc important de tout mettre en œuvre pour améliorer le niveau de traitement du message.

Des chercheurs ont étudié les facteurs qui favorisaient le niveau de traitement d’une information dans le domaine de la publicité
(11). Ils ont montré que ce niveau de traitement, tout à fait adaptable au parrainage, dépend de trois facteurs :

• l’opportunité de traiter le message : Elle correspond à ce qui favorise ou limite l’exposition au message : cela peut être la
taille et le nombre de logos du parrain, le temps d’exposition à ces logos, le fait qu’il existe des éléments de distraction...
• la motivation à traiter le message : Elle correspond au désir de traiter cette information, qui peut être lié à l’attachement au
parrain, à l’intérêt pour sa catégorie de produit, à la forme que prend la participation du parrain (effet de surprise)...
• la capacité à le traiter : Elle correspond aux compétences et à l’aptitude de l’individu exposé à comprendre et interpréter le
message véhiculé. Cela dépend, par exemple, de la connaissance qu’il a du parrain, ou de sa catégorie de produits...

Antécédents et conséquences du niveau de traitement d’après McInnis, Moorman & Jaworski, 1991

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• La taille de l’opération
La taille de l’opération est également un élément
significatif (7). Parrainer un événement international
comme les Jeux Olympiques ou un grand prix de
Formule 1 apporte une grande visibilité, un statut et/ou
une aura de grande marque ou de grande entreprise.
En revanche, il est clair pour les individus que c’est
avant tout une question d’argent et que l’événement
aurait eu lieu avec ou sans la marque concernée. La
crédibilité de cette marque en termes d’intentions
philanthropiques est donc très faible et le parrainage
est dans ce cas perçu comme un « coup médiatique ».
Il en est tout autre chose du parrainage d’opérations
locales. Le parrain apparaît alors comme le fournisseur
d’une aide substantielle sans laquelle l’opération
n’aurait pu avoir lieu, et les individus lui en sont
d’autant plus reconnaissants et lui prêtent des
intentions tout à fait louables (14). Sa crédibilité est
forte, tout autant que la sympathie qu’il dégage auprès
de toutes les personnes attachées à l’événement en
question. Elle est perçue comme une entreprise
citoyenne dans la mesure où elle redistribue une partie
des bénéfices qu’elle gagne à la communauté dans
laquelle elle est installée. C’est la raison pour laquelle
une marque comme Adidas a organisé des tournois de
basket « de rue ». Elle a trouvé là un moyen de se
rapprocher de sa jeune cible, qui percevait parfois mal
le fait que la marque dépense des centaines de milliers
d’euros pour parrainer de grands sportifs.
Pour ce qui est d’Aquarel, l’objectif est plutôt le statut,
puisque cette marque en lancement devait convaincre
les distributeurs et les consommateurs qu’elle avait sa
place sur le marché déjà mature des eaux.
• Opération unique ou opérations
concomitantes
Dans le même ordre d’idée, certaines entreprises
parrainent de nombreuses opérations dans tous les
domaines. Cet éparpillement assure, il est vrai, une
certaine visibilité mais risque de nuire à la cohérence
globale de la démarche de l’entreprise. Il semble
opportun de maintenir un fil conducteur entre les
différentes opérations parrainées, afin de donner du
sens à cette démarche. Ainsi la Fondation d’Entreprise
France Télécom, créée en 1987, se concentre-t-elle sur
trois domaines de mécénat, autour du thème de la
communication, valeur centrale de l’entreprise : la
culture à travers la musique vocale, moyen de
communication universel ; la santé à travers la lutte
contre les troubles de la communication comme
l’autisme ou les déficiences visuelle ou auditive ; et
l’éducation à travers la lutte contre l’illettrisme, pour
mieux communiquer et donc mieux s’intégrer dans la
société. L’entreprise renforce ainsi l’idée louable que
Communication ●
sa mission est d’aider les gens à mieux communiquer
les uns avec les autres.
• La durée de l’opération dans le temps
Là encore, le fait d’installer une opération dans la durée
donne au parrain de la visibilité et montre son intention de
s’engager auprès de l’entité parrainée en véritable
partenaire et non pas de l’utiliser pour en faire une
opération ponctuelle. En revanche, le risque est de
banaliser la présence de la marque, et que celle-ci finisse
par tellement se fondre dans le paysage qu’elle passe
inaperçue. C’est cette difficulté que gère la BNP,
partenaire de Roland Garros depuis 1973 : si la banque
s’en tenait à placer son logo sur les bâches vertes, le risque
serait qu’on ne la remarque plus tant cette présence est
habituelle. C’est pourquoi la BNP a bâti un vaste
programme dynamique de parrainage autour du tennis, en
collaboration avec la Fédération Française de Tennis, qui
lui permet d’éviter toute banalisation de son engagement.
Le type de présence du parrain
Il s’agit ici de considérer la place du nom du parrain et
sa présence in situ.
• La place du nom du parrain
Plus le nom du parrain est associé à celui de l’entité
parrainée, plus il en tirera profit (14). Mieux vaut
apparaître dans le titre de l’événement (par exemple :
le Trophée Lalique, l’Open Gaz de France, la Fondation
Ronald McDonald’s), qu’en tant que partenaire officiel,
au même titre que d’autres parrains. La mémorisation
de l’association parrain/entité parrainée sera alors plus
forte, et le transfert d’image sera d’autant plus aisé.
• La présence du parrain in situ
Le parrain doit faire en sorte d’être remarqué, sans
agacer. Il peut marquer sa présence simplement de son
nom. Il peut faire intervenir des hôtesses pour distribuer
des prospectus informatifs voire des échantillons. Le
tout est de ne pas choquer la cible de l’entité parrainée.
Aquarel a utilisé des moyens particulièrement créatifs
lors du Tour de France, comme des voitures en forme de
bouteilles géantes dans la caravane du Tour ou la
distribution de lettres d’informations à chaque étape, ce
qui fait partie du « folklore » organisé autour de
l’événement et est tout à fait admis.
Le type de médiatisation
de l’opération
Les actions engagées doivent prendre en considération
cible directe et cible indirecte.
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● Le parrainage : d’une intuition à une stratégie de communication
• Auprès de la cible directe
Le parrain doit marquer sa présence auprès des
spectateurs présents sur l’événement et qui constituent
la cible directe, ne serait-ce qu’en apposant son nom.
Certaines marques ont la possibilité d’ajouter une
accroche publicitaire ou une signature à l’opération
qu’elles parrainent. Prenons l’exemple de la Société
Générale qui fonde son principal axe de sponsoring
sportif sur le rugby français en étant partenaire officiel
de la Fédération française de rugby, du XV de France,
et de la Ligue nationale de rugby. Cette association
entre une grande banque et le rugby n’a spontanément
rien d’évident aux yeux d’un quidam et la simple
apposition du nom de la Société Générale à côté des
événements rugbystiques concernés a toutes les
chances de laisser les spectateurs au mieux perplexes.
En proposant la signature « l’esprit d’équipe », la Société
Générale donne la clé pour comprendre cette
association et tout le sens de son engagement dans ce
sport, qui s’appuie sur des valeurs partagées telles que
stratégie, combativité, dynamisme, éthique, ou encore
esprit d’équipe. Même si ce message est rudimentaire,
il est bien souvent indispensable pour permettre aux
spectateurs de comprendre la présence de la marque
sur l’opération 6.
• Auprès de la cible indirecte
Le parrain doit se faire connaître en tant que tel à
travers les médias, auprès d’une cible dite indirecte car
elle n’aura pas participé à l’événement. Il est
indispensable à ce niveau de communication, que le
parrain explique la raison de sa présence et ne soit pas
simplement cité, s’il veut inciter les individus à enrichir
l’image qu’ils ont de l’entreprise. Un point essentiel est
la source de cette communication : il est bon que
Figure 6 : La crédibilité de la marque en fonction de son degré de contrôle de la source du message
18 – Nathalie FLECK-DOUSTEYSSIER
l’entreprise communique à travers la publicité sur son
action en tant que parrain pour la faire connaître et
donner un sens à sa démarche. Il sera encore plus
crédible si la source de ce communiqué est perçue
comme désintéressée, ce qui est le cas de l’entité
parrainée ou plus encore, de journalistes indépendants
(figure 6).
Plus globalement, le parrainage donne l’occasion à la
marque de communiquer autour de sa mission et des
valeurs qu’elle défend, et elle a intérêt pour cela à
mobiliser tous les éléments du mix qui le permettent,
outre la publicité (packaging, promotion, relations
publiques...). Notons que l’ensemble des cibles sont
concernées.
Les choix auxquels le parrain est confronté sont donc
souvent subtils. Ils relèvent d’un équilibre entre le désir
d’être vu, de faire passer un message et la nécessité de
rester crédible et perçu comme bien intentionné.
Conclusion
Le parrainage peut constituer un outil très efficace au
sein du mix de communication (figure 7). Il permet à
l’entreprise d’enrichir son image non seulement à
travers un discours, mais en s’engageant concrètement
dans l’action. Elle gagne alors en crédibilité et en
proximité auprès des consommateurs. Le parrainage
n’est cependant pas sans limite. Le plus grand risque
est sans doute que le parrain soit peu remarqué ou que
le message soit peu compris, auquel cas les effets seront
quasi inexistants. Peut-être même peut-on imaginer des
effets négatifs, si l’association parrain/entité parrainée
est choquante, ou si les éléments d’image de l’entité
parrainée qui se transfèrent sur la marque lui sont
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Communication ●

Figure 7 : Les spécificités du parrainage par rapport aux autres outils de communication

Publicité Promotion Marketing direct Relations Parrainage

publiques

Objectifs Notoriété, image, Intention d’achat, Intention d’achat, Image, attitude, Image, attitude,
principaux attitude. (image). image, notoriété. proximité
fidélisation. (notoriété).

Points forts Média de masse à Outil de Outil de Outil de Outil de

forte visibilité et communication de communication communication communication
forte couverture, masse (forte ciblé, discret vis- destiné avant tout moins coûteux que
totalement visibilité), avec à-vis de la aux prescripteurs la publicité, encore
contrôlé par la effets rapides et concurrence, plus et basé sur la peu saturé et
marque. directement ou moins sympathie envers mettant en avant
mesurables. personnalisé, avec la marque. l’image et la
retours rapides et citoyenneté de
mesurables. l’entreprise dans
un cadre non
commercial.

Points faibles Coûteux, saturé, Coûteux, pas Relativement Démultiplication Visibilité du

pas toujours toujours qualitatif coûteux à mettre du message de la parrain parfois
crédible auprès des pour l’image, en place, avec une marque mauvaise, risque
individus car perçu perçu comme couverture dépendante du bon d’inefficacité si
comme commercial avant difficilement large, vouloir des message pas vu ou
commercial. tout. parfois remis en prescripteurs, pas compris.
cause par les gens impact modéré.
(saturation).

préjudiciables. L’objet n’est pas ici de faire l’apologie
du parrainage comme solution miracle à tous les
problèmes de communication. Il s’agit plutôt d’un
plaidoyer en faveur d’une vision stratégique du
parrainage. Pour cela, le parrainage doit
nécessairement être géré avec le même
professionnalisme que celui dont on fait preuve
aujourd’hui en publicité. Cela commence par le fait de
fixer très clairement des objectifs au parrainage en
amont et d’en mesurer les effets en aval. Surtout, cela
signifie qu’il faut quitter le domaine de la passion pour
celui de la raison.
◆
Notes
1 En France, la loi Evin interdit l’association d’évé-
nements sportifs et de marques d’alcool ou de tabac.
Cependant, certains événements comme les grands prix de
Formule 1 se déroulent dans des pays où ces interdictions
n’ont pas lieu. Ils bénéficient alors de dérogations qui per-
mettent leur retransmission à la télévision alors que les
circuits ou les voitures comportent des marques de bière
ou de cigarettes, par exemple.
2 C’est la raison pour laquelle on parle parfois d’outil de
« communication globale » pour le parrainage.
3 Match République Tchèque/France, Sponsorclick,
« The Chronicle of Sponsorship Marketing », Issue 6,
July-August 2003.
4 Le conditionnement consiste à créer un lien si fort, pour
un individu, entre le parrain et l’entité parrainée que
lorsque cet individu est exposé au parrain, il ressent les
émotions et sentiments éprouvés envers l’entité parrainée.
On parle de conditionnement affectif.
L’endossement fait référence au fait que, dans une publi-
cité, une marque qui utilise une personnalité porte parole
voit certaines significations initialement associées à cette
personnalité transférées sur elle même.
5 On parle alors d’« incongruence modérée ».
6 Notons par ailleurs que la Société Générale reprend
cette accroche « l’esprit d’équipe » dans le spot qui pré-
sente les différentes entreprises partenaires avant chaque

Décisions Marketing No 47 Juillet-Septembre 2007 – 19

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● Le parrainage : d’une intuition à une stratégie de communication
match de rugby à la télévision, touchant ainsi l’audience
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