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Stengers Jean. Quelques réflexions sur le jugement moral en histoire. In: Revue belge de philologie et d'histoire. Tome 82 fasc.
1-2, 2004. Histoire medievale, moderne et contemporaine - Middeleeuwse. moderne en hedendaagse geschiedenis. pp. 123-
139.
doi : 10.3406/rbph.2004.4816
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rbph_0035-0818_2004_num_82_1_4816
Quelques réflexions sur
Paru clans le Bulletin de la Classe des Lettres et des Sciences morales et poli
tiques de l'Académie royale de Belgii/ue. 5e série. 58/5 (1972), pp. 189-205.
1 24 L'HISTOIRE ET SES MÉTHODES [ 1 90]
(x) Ethical values in history, 1903, reprod. dans H.Ch. Lea, Minor historical
writings and other essays, publ. p. A.C. Howland, (Philadelphie, 1942), p. 56
et sv.
1 26 L'HISTOIRE ET SES MÉTHODES [ 1 92]
(x) G.M. Trevelyan, Bias in history, dans History. The Journal of the Histo
rical Association, mars 1947, p. 12.
(2) « Tous les maîtres qui ont eu à corriger des travaux d'étudiants », note
Marc Bloch, « savent combien ces jeunes gens se laissent difficilement dissuader
de jouer, du haut de leurs pupitres, les Minos ou les Osiris » (Apologie pour
l'histoire, op. cit., p. 70).
130 L'HISTOIRE ET SES MÉTHODES [ 1 96]
(*) L.E. Halkin, Godefroid Kurth. Documents sur les débuts de sa carrière
universitaire (Liège, 1960), p. 17.
(2) G.P. GoocH, History and historians in the Nineteenth century, 2e éd. (Lon
dres, 1952), p. 357·
[201] QUELQUES RÉFLEXIONS SUR LE JUGEMENT MORAL EN HISTOIRE 135
(*) Inaugural lecture on the study of history, 1895, reprod. dans Lord Acton,
Essays in the liberal interpretation of history. Selected papers, publ. p. W.H.
McNeill (Chicago-Londres, 1967), p. 350-351.
(a) Bias in history, article cité, p. 12.
136 L'HISTOIRE ET SES MÉTHODES [202]
i1) ibid.
(2) Les « aventuriers », au XVIe siècle, étaient des soldats à pied servant en
volontaires et sans solde (E. Huguet, L'évolution du sens des mots depuis le
XVIe siècle, Paris, 1934, p. 24).
[203 ] QUELQUES RÉFLEXIONS SUR LE JUGEMENT MORAL EN HISTOIRE 1 37
nettement, non par vanité, mais parce que dans une question
de cet ordre, on ne peut s'engager que pour soi, et en se décou
vrant) .
L'histoire est un instrument de connaissance, elle nous fournit
des éléments de savoir. Mais dans le domaine des sciences hu
maines, ce serait une bien pauvre discipline intellectuelle que
celle qui ne ferait qu'enrichir nos connaissances. Toute étude
de l'homme doit contribuer à former en nous notre propre
conception de l'homme, elle doit nous aider à bâtir notre système
de vie et notre système de valeurs. Or quelle peut être à cet
égard la contribution la plus haute, et à vrai dire la contribu
tion décisive de l'histoire ? N'est-elle pas d'inspirer par l'exemple
le respect de cette valeur toujours si fragile et si menacée et
qui est l'attachement à la vérité ?
Attachement à la vérité, respect de la vérité : nous savons où
et quand cette valeur est battue en brèche de manière grossière
et brutale. Elle l'est dans les sociétés totalitaires. « Nous ne
sommes pas objectifs, nous sommes Allemands », proclamait
en 1933 le ministre de l'Instruction publique de Bavière. « Pour
nous, tout ce qui nuit au peuple allemand est un crime, même
si des multitudes venaient nous déclarer que du point de vue
objectif c'est la vérité » (1). Mais même dans les sociétés d'esprit
le plus libéral, combien de forces antagonistes le respect de la
vérité ne rencontre-t-il pas presque à chaque détour du chemin ?
Dans combien de circonstances l'esprit de parti, les intérêts
nationaux, les intérêts de classe, les intérêts personnels n'exigent-
ils pas de passer les premiers ? On n'entend guère chez nous
de paroles aussi brutales que celles du ministre allemand de
1933. Mais combien de fois le modeste historien, surtout lorsqu'il
s'occupe d'événements récents, n'entend-il pas des gens aimables
lui rappeler que « toutes les vérités ne sont pas bonnes à dire » ?
C'est alors qu'il peut cesser lui-même d'être aimable et mod
este. Il ne se prend pas pour plus qu'il n'est, mais s'il est quelque
chose, il l'est par les principes qu'il sert. Et pour lui, le respect
de ce qu'il croit être la vérité est bien le principe premier, celui
dont il vit.
(x) Cité dans J. Isaac, Paradoxe sur la science homicide et autres hérésies
(Paris, 1936), p. 277-278.
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