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CRISE DE LA DETTE SOUVERAINE DANS L’UNION EUROPÉENNE :

TRANSPARENCE DES BANQUES ET SPREADS DE CDS

Hervé Alexandre, François Guillemin, Catherine Refait-Alexandre

Presses de Sciences Po | « Revue économique »

2016/5 Vol. 67 | pages 1007 à 1035


ISSN 0035-2764
ISBN 9782724634594
DOI 10.3917/reco.675.1007
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-economique-2016-5-page-1007.htm
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Crise de la dette souveraine
dans l’Union européenne :
transparence des banques et spreads de CDS
Hervé Alexandre*
François Guillemin**
Catherine Refait-Alexandre**

Nous étudions l’impact de la transparence des banques sur l’évolution des


spreads de leurs credit default swaps (CDS) pendant la crise de la dette souveraine
au sein de l’Union européenne. La transparence aide les investisseurs à fonder
leurs anticipations et peut réduire la prime de risque informationnelle ainsi que les
spreads de CDS. Nous calculons la variation anormale cumulée du spread (VACS)
lors de seize annonces de dégradation de notation souveraine, de 2011 à mi-2013.
Nous construisons deux indices de transparence : l’un mesure la transparence
globale de la banque, l’autre mesure sa transparence vis-à-vis de l’exposition au
risque souverain. Nous montrons que l’exposition au risque souverain accroît la
VACS, alors que la transparence de la banque vis-à-vis de ce risque réduit la
VACS ; l’information tend donc à réduire la prime de risque. Cependant, la trans-
parence globale augmente la VACS ; les investisseurs semblent désapprouver une
communication trop large et trop abondante.
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DISCLOSURE, BANKS CDS SPREADS
AND THE EUROPEAN SOVEREIGN CRISIS

We investigate the impact of banks disclosure on the evolution of their CDS


spreads during the European sovereign debt crisis. We focus on the CDS spreads
changes following the announcements of sovereign credit rating downgrades. The
disclosure of information helps investors in building expectations and may partici-
pate into the reduction of the information risk premium and of the CDS spreads.
We assess the cumulative abnormal CDS spread changes (CASC) around sixteen
downgrades from 2011 to 2013. We build two disclosure indexes: one general
and one dedicated to sovereign exposure. We show that the bank exposure to
sovereign risk has a positive impact on the CASC whilst a sovereign disclosure has

* Université Paris-Dauphine, PSL Research University, CNRS, UMR 7088, DRM Finance.
Correspondance : Place du Maréchal de Lattre de Tassigny, 75016 Paris. Courriel : herve.
alexandre@dauphine.fr
** CRESE EA3190, Université de Bourgogne Franche-Comté. Correspondance : 30 avenue
de l’Observatoire, BP 1559, 25009 Besançon. Courriels : francois.guillemin@univ-fcomte.fr,
catherine.refait-alexandre@univ-fcomte.fr
Les auteurs remercient pour leurs commentaires constructifs les participants aux 32es Journées de
microéconomie appliquée, les participants au 32e colloque international du groupement de recherche
européen « Monnaie, banque et finance », et les participants au séminaire du CRESE (Université
de Franche-Comté). Ils remercient également les rapporteurs anonymes. Ils ont tous aidé à l’amé-
lioration de ce travail.

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Revue économique

a negative impact: information thus reduces risk premiums. However, the global
disclosure increases the CASC, since investors may disapprove the disclosure of
too much abundant and broad information.

Classification JEL : G14, G21.

INTRODUCTION

La crise de la dette souveraine dans l’Union Européenne au début des


années 2010 a eu de fortes répercussions négatives sur le risque de défaut et la
solvabilité des banques. Tout d’abord, l’accroissement du risque de crédit souve-
rain a réduit la valeur des portefeuilles d’actifs détenus par les banques euro-
péennes. Ensuite, le fort endettement des États a limité leur capacité à apporter
un soutien massif à leur secteur bancaire en cas de difficultés financières. Cet
aspect est aggravé par le biais domestique qui caractérise l’achat de titres : les
banques sont plus enclines à acheter des obligations d’État domestiques, cumu-
lant ainsi une possibilité de bailout réduite et un risque plus élevé sur les actifs
détenus. Enfin, la valeur réduite des obligations d’État – qui servent de collatéral
lors des opérations de prêts des banques centrales, dont la Banque centrale euro-
péenne (BCE) – a diminué la capacité des banques de second rang à se refinancer
et a accru leur risque d’illiquidité (voir par exemple Acharya et al. [2015] qui
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mettent en exergue les différents canaux de diffusion de la crise des souverains
et son influence négative sur l’offre de crédit bancaire).
La dégradation du risque de défaut des banques conduit à des variations dans
la valeur des actifs financiers qu’elles ont émis : une réduction du cours de
leurs actions mais surtout une baisse de la valeur des obligations dont elles sont
débitrices et un accroissement du spread (i.e. du prix, donc de la valeur d’une
protection contre le défaut de la banque) des credit default swaps (CDS) émis
sur ces obligations1. Lorsque la note de crédit d’un État est dégradée, le spread
du CDS d’une banque possédant des obligations émises par cet État doit donc
logiquement augmenter, et la valeur de ses obligations baisser. Les investisseurs
peuvent cependant surréagir à l’annonce de la dégradation du risque souverain,
et conduire à un ajustement trop important du spread des CDS ou de la valeur
des obligations, en exigeant une prime de risque informationnelle importante,
notamment lorsque l’incertitude est forte. La conséquence en est une grande
volatilité sur les marchés financiers et ainsi une grande instabilité financière.
Cependant, cette prime de risque informationnelle peut être réduite si les inves-
tisseurs sont bien informés, notamment si l’émetteur adopte une politique de
communication transparente (voir Baumann et Nier [2004] ou Akhigbe et Martin
[2008]).
Par voie de conséquence, une autre préoccupation des années 2010 réside dans
la communication d’informations aux investisseurs par les banques. De manière
générale, les exigences de transparence émanant des investisseurs institutionnels,

1. Pour plus de détails, voir par exemple Hull, Predescu et White [2004].

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du public, des instances de régulation et du législateur s’accroissent depuis le


début du xxIe siècle. Ainsi, les firmes – dont les banques – cotées sont soumises
à des obligations croissantes de divulgation d’informations, par exemple sur
leur bonne pratique de gouvernance avec les principes de say-on-pay et de
comply or explain. Les banques elles-mêmes, de manière volontaire, ont accru
leur transparence afin de satisfaire la demande de leurs partenaires. Concernant
plus précisément le secteur bancaire, la crise des subprimes avait déjà mis en
lumière son manque de transparence, incitant le Comité de Bâle à accroître les
exigences de transparence déjà présentes dans le pilier 3, de manière à améliorer
la résilience des banques (Frolov [2007]). La crise des subprimes puis la crise
de la dette souveraine ont conduit les autorités de régulation à accroître les
obligations qui s’imposent au secteur bancaire, afin d’accroître sa stabilité.
Dans ce but, la Banque centrale européenne (BCE) et l’Autorité bancaire euro-
péenne (European Banking Authority, EBA) ont organisé des stress tests afin
de préparer les banques à des scénarios extrêmes et de les aider à réagir à des
situations d’urgence2. Le premier exercice de stress test a eu lieu en 2009 avec
vingt-deux banques participantes, mais ni leur nom ni les résultats de l’exercice
n’ont été rendus publics. Après cela, l’EBA et la BCE ont décidé de divulguer
les résultats et les données utilisées pour les deux tests de résistance suivants ;
le deuxième et le troisième stress tests ont eu lieu en 2010 et 2011, et leurs
résultats ont été publiés respectivement en 2010 et 2011. Petrella et Resti [2013]
et Bishof et Daske [2013] montrent que ces stress tests fournissent effective-
ment des informations nouvelles dont les marchés financiers ne disposent pas
avant leur publication. Pour faire face à la crise de la dette souveraine, l’EBA
a également mené des exercices de recapitalisation (capital exercises) en 2011
et en 2012. Leur objectif était de recenser l’exposition au risque souverain des
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banques et de contrôler l’adéquation de leurs fonds propres à ce risque. L’EBA
a communiqué les résultats de ces exercices en 2011 et en 2012.
Dans ce cadre, l’objectif de cet article est d’analyser si la transparence des
banques joue un rôle dans la réaction des investisseurs financiers pendant la crise
de la dette souveraine au sein de l’Union européenne. Nous étudions la relation
entre le niveau de transparence des banques et le spread de leur CDS entre
2011 et mi-2013. Nous nous concentrons sur la réaction des spreads de CDS
des banques au moment de l’annonce par une agence de notation d’une dégra-
dation de la note de crédit d’un État européen. La transparence d’une banque
est supposée réduire la prime de risque informationnelle exigée par les investis-
seurs et, par conséquent, devrait atténuer la hausse du spread de son CDS. Nous
considérons deux sortes de transparence. La première est relative à l’exposition
des banques au risque souverain. Cela nous permet de savoir si les investisseurs
réagissent plus ou moins lorsqu’ils disposent d’informations de cette nature que
s’ils n’en disposent pas. La seconde est relative à des informations générales
sur l’activité de la banque (comme des informations relatives à sa corporate
governance par exemple), car une stratégie de transparence globale est à même
de créer de la confiance : si les investisseurs ont facilement accès à des infor-
mations relatives à la banque, ils peuvent réagir moins brutalement que si la
banque est opaque. La question est importante du point de vue de la régulation :
la transparence des banques accroît-elle la stabilité financière ? La transparence

2. L’objectif des exercices de stress tests au sein du secteur bancaire européen est de vérifier si
le niveau de fonds propres des banques est suffisant pour faire face à des chocs exogènes.

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est-elle indispensable à la discipline exercée par les marchés financiers ? S’il


s’avère qu’en effet la transparence facilite la stabilité sur le marché des CDS, les
recommandations et les réglementations qui tendent à accroître les exigences de
divulgation d’informations pour les banques sont alors souhaitables.
Pour répondre à ces questions, nous estimons l’impact que les dégradations
de note de crédit souverain ont eu sur l’évolution des spreads de CDS. Pour ce
faire, nous utilisons les données fournies par l’EBA. Les résultats des exercices
de recapitalisation menés en 2011 et en 2012 nous permettent en effet de disposer
des expositions au risque souverain des banques participantes. Nous utilisons
également les données de marché quotidiennes, relatives aux spreads de CDS.
Nous calculons les écarts des variations quotidiennes des spreads par rapport aux
variations quotidiennes d’un indice reflétant l’évolution moyenne du marché des
CDS. Puis nous cumulons ces variations dites anormales sur plusieurs jours aux
alentours de l’annonce d’une dégradation. Nous obtenons ainsi une variation
anormale cumulée des spreads de CDS (VACS). Puis nous analysons le rôle
joué par la transparence des banques dans la réaction du marché des CDS – réac-
tion mesurée par les VACS – en contrôlant l’exposition de la banque au risque
souverain des pays européens. Nous utilisons une régression par les moindres
carrés ordinaires corrigés de l’hétéroscédasticité par la méthode de White. Nous
montrons que la transparence spécifique au risque souverain réduit la variation
anormale cumulée des spreads de CDS. La transparence globale a l’influence
opposée, exacerbant la réaction du marché des CDS. Nous montrons également
que les banques de la zone euro voient leurs spreads de CDS réagir plus forte-
ment aux annonces de dégradations que les banques hors zone euro, traduisant
l’inquiétude des investisseurs sur la stabilité financière de la zone.
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Cet article offre plusieurs contributions. D’abord, nous analysons le rôle joué
par la transparence des banques lors de l’annonce d’une dégradation de note
souveraine, alors que la littérature n’analyse que l’impact de la communication
du résultat des stress tests (voir Petrella et Resti [2013] sur données européennes
et Neratina, Cenkhan et De Haan [2014] sur données américaines). Le rôle joué
par les banques comme productrices d’informations pendant la crise de l’Union
européenne n’a pas été analysé précédemment. Ensuite, nous créons un indice
de transparence original fondé sur les rapports d’activité annuels des banques.
Notre analyse de la communication des banques sur leur exposition vis-à-vis
du risque souverain est particulièrement novatrice. De plus, nous exploitons les
résultats des exercices de recapitalisation, alors que seuls les résultats des stress
tests ont été utilisés dans la littérature (par exemple par Petrella et Resti [2013]
ou par Ellahie [2012]). Notre dernier apport réside dans l’attention portée aux
CDS des banques, plutôt qu’à leurs actions ou à leurs obligations, comme cela est
plus généralement fait dans la littérature financière. Notre choix est légitimé par
les études montrant que les spreads de CDS fournissent des informations perti-
nentes. Ainsi, Hull, Predescu et White [2004] montrent que les spreads de CDS
procurent une information plus fiable que les spreads des obligations ; Delatte,
Gex et Lopez-Villavicencio [2012] nous enseignent que, en période de stress,
les informations sont transmises du marché des CDS vers le marché obligataire.
Cet article s’organise de la manière suivante : nous présentons tout d’abord
la littérature sur laquelle nous fondons notre analyse et les hypothèses que nous
testons. Puis nous décrivons notre échantillon, la méthode empirique retenue,
ainsi que les variables dépendantes et indépendantes de notre étude. Nous

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Hervé Alexandre, François Guillemin, Catherine Refait-Alexandre

proposons ensuite une analyse descriptive de ces dernières. Enfin, nous présen-
tons les résultats du modèle principal, ainsi que des tests de robustesse effectués,
avant de conclure.

REVUE DE LITTÉRATURE THÉORIQUE ET EMPIRIQUE

L’objectif de cette section est tout d’abord de présenter les deux champs de
littérature sur lesquels repose notre article : la littérature relative aux liens exis-
tants entre la transparence des banques et la stabilité financière d’une part et la
littérature consacrée à la résilience des banques durant la crise européenne des
souverains d’autre part. Nous explicitons ensuite les hypothèses testées dans cet
article.

Transparence des banques et stabilité financière

Une littérature de plus en plus abondante analyse l’impact de la transparence


sur la stabilité financière. Une large part de cette littérature est consacrée à l’im-
pact de la transparence – notamment des banques – sur les marchés d’actions.
Ainsi, Baumann et Nier [2004] montrent que la volatilité du cours des actions
est réduite par une transparence accrue de la part des émetteurs. Leurs résul-
tats suggèrent que la transparence est utile aux investisseurs car elle réduit la
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possibilité de fausses rumeurs – et donc de valorisation erronée – et participe à
la réduction d’une volatilité excessive et non souhaitée. Elle conduit également
à une réduction de la rentabilité exigée des actionnaires – donc à une baisse du
coût du capital – à travers une réduction de la prime de risque informationnelle.
Akhigbe et Martin [2008] mettent également en évidence une relation négative
entre transparence et volatilité. Ils montrent que la transparence décroît le risque
individuel et le risque total des actions même si elle n’a pas d’impact sur le risque
systématique3.
L’importance de la transparence pour la solvabilité des banques et pour la
stabilité du secteur bancaire a également été analysée. Cet aspect joue un rôle
important dans la perception que les investisseurs ont du risque de crédit des
banques. Tadesse [2006] s’intéresse à l’impact de la mise en place d’obli-
gations de transparence sur la stabilité bancaire. Il montre qu’une divulga-
tion d’informations à la fois plus abondante et de meilleure qualité réduit la
probabilité d’occurrence d’une crise bancaire systémique. L’impact positif de
la transparence sur la solvabilité des banques se retrouve dans Vauhkonen
[2011]. Dans ce modèle de concurrence bancaire, la probabilité que la banque
poursuive son activité dépend de la qualité de ses outils de gestion et de mesure
des risques. Les obligations de transparence, telles qu’imposées par le pilier 3
des accords de Bâle, concernent ces outils et incitent donc les banques à les
améliorer. De plus, en réduisant le coût des fonds propres, la transparence aide
les banques à respecter le capital réglementaire imposé par le pilier 1. Ces deux

3. Pour plus de détails sur l’impact de la transparence sur les marchés financiers, voir par exemple
Farvaque, Refait-Alexandre et Saïdane [2011].

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effets permettent ainsi à la transparence d’améliorer la pérennité des banques.


Cordella et Yeyati [2002] étudient l’impact de la transparence sur la prise de
risque des banques, via le contrôle exercé par les déposants. Ce contrôle – lors-
qu’il est possible, donc quand la banque divulgue des informations – devrait
inciter la banque à améliorer la qualité de son portefeuille et à réduire le risque
de ses actifs. Les déposants informés participent ainsi à accroître la stabilité
du système bancaire. Les conclusions de Cordella et Yeyati [1998] sont plus
nuancées. Ils montrent que si les banques ne choisissent pas le risque de leurs
actifs (à cause de l’existence d’un risque systématique par exemple) alors la
transparence des banques peut au contraire accroître leur risque de défaut, à
cause de ruées vers les dépôts sous-optimales. Enfin, à partir d’un échantillon
de banques américaines, Neretina, Cenkhan et De Haan [2014] montrent que
la divulgation des résultats des stress tests conduit à une réduction des spreads
des CDS des banques participantes et, à long terme, à une diminution du risque
systématique ; la transparence pourrait ainsi mener à une faible prise de risque
et à un risque systémique amoindri.

Exposition au risque de crédit souverain et résilience


des banques pendant la crise de l’Union européenne

Une littérature récente analyse la relation entre le risque souverain et le


risque des banques pendant la crise des souverains au sein de l’Union euro-
péenne. Grammatikos et Vermeulen [2012] montrent que la transmission du
risque souverain aux marchés financiers (aux obligations et aux actions des
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firmes financières) a commencé après l’effondrement de la banque Lehman
Brothers. Le lien entre les CDS souverains et les CDS des banques fait, quant
à lui, l’objet de plusieurs articles. Arnold [2012] montre que le risque souve-
rain a un impact positif sur le risque des banques pendant la première phase
de la crise, en 2010. Son étude permet de conclure que plus les banques sont
exposées au risque souverain, plus le rendement de leurs actions et le spread
de leurs CDS réagissent à la modification de la note d’un État. Cependant,
cette réaction est liée à des effets fixes pour les banques situées dans les pays
en crise (les « PEC » : Espagne, Irlande, Grèce et Portugal). Les banques de
ces pays apparaissent en effet plus vulnérables au risque souverain à la fois
directement à cause de leur détention de dette publique domestique, et indi-
rectement par l’impossibilité de leur État à leur apporter un soutien financier
important. Acharya, Drechsler et Schnabl [2014] montrent ainsi que les procé-
dures de bailout dans le secteur financier et le risque de crédit souverain sont
intimement liés : les annonces de bailout sont associées à un accroissement
immédiat des spreads de CDS souverains, et à une diminution des spreads
des CDS des banques. Cependant, après un bailout, ces auteurs observent un
comouvement significatif entre les spreads de CDS des banques et ceux des
souverains. Alexandre et Wang [2015] obtiennent des résultats plus nuancés :
les comouvements entre les spreads des CDS souverains et ceux des banques
ne sont significatifs que pour la Belgique et la Grèce. De Bruyckere et al.
[2013] analysent la contagion de la crise de la dette souveraine vers la dette
des banques en Europe sur la période 2006-2011. La contagion entre le risque
de crédit souverain et le risque de crédit des banques (défini comme un excès
de corrélation entre les spreads de CDS des banques et les spreads de CDS

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Hervé Alexandre, François Guillemin, Catherine Refait-Alexandre

souverains) existe, principalement lors de l’émergence de la crise, en 2009 (la


contagion est significative pour 86 % des banques de l’échantillon). Un impor-
tant canal de contagion réside dans l’important biais domestique qui affecte les
portefeuilles d’actifs détenus par les banques.
Un autre ensemble d’articles se consacre aux informations fournies par les
stress tests. Petrella et Resti [2013] montrent qu’en 2011, en Europe, les rende-
ments anormaux des cours des actions des banques sont fortement corrélés à la
divulgation des résultats des tests, signifiant que ceux-ci permettent de dévoiler
des informations nouvelles. Ce résultat est cohérent avec celui de Morgan,
Peristiani et Savino [2014], qui réalisent une étude d’événement sur le marché
des actions après des stress tests aux États-Unis : ceux-ci fournissent des infor-
mations sur l’écart entre le capital effectif des banques et le capital exigé par la
réglementation. Au contraire, Ellahie [2012], en lien avec la théorie en micro-
structure des marchés financiers, montre que les stress tests de 2010 et 2011 ont
conduit à un accroissement de l’asymétrie d’information sur les marchés finan-
ciers. Enfin, Bischof et Daske [2013] étudient les conséquences de l’obligation
faite aux banques par les régulateurs de communiquer des informations telles
que leur exposition au risque de crédit et les résultats des simulations lors des
stress tests. Ils analysent l’interaction entre la transparence obligatoire et la trans-
parence volontaire. Ils montrent qu’une forte augmentation des informations
volontairement fournies par les banques sur leur exposition au risque de crédit
souverain est observable entre 2009 et 2011. Ainsi, la pression des investisseurs,
des auditeurs, des régulateurs ou encore des agences de notation afin d’obtenir
une telle transparence que l’on peut qualifier de spécifique s’est accrue, et avec
succès, lors de la crise de la dette dans l’Union européenne.
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Hypothèses testées

L’objectif de cet article est d’analyser si la transparence des banques augmente


ou non la stabilité des spreads de leurs CDS. Lorsqu’un risque de crédit souverain
augmente, les conséquences pour les banques qui y sont exposées sont doubles :
tout d’abord, la valeur des obligations d’État qu’elles détiennent diminue ;
ensuite la valeur des collatéraux que les banques peuvent fournir à la BCE pour
se refinancer décroît, ce qui peut conduire à des problèmes de liquidité. Ainsi, le
risque de crédit des banques elles-mêmes est affecté et le spread de leur propre
CDS peut augmenter4. L’impact sur le risque de crédit de la banque est plus
important encore si elle est dans le pays dont la note vient d’être dégradée, car
la capacité de l’État à lui fournir un soutien financier en cas de difficultés finan-
cières est réduite.
Si les investisseurs sur le marché des CDS sont informés et rationnels, alors
ils perçoivent un accroissement du risque de défaut de la banque d’autant plus
important que son exposition au risque souverain est importante. Nous suppo-
sons donc que l’exposition de la banque vis-à-vis du pays dont la note vient
d’être dégradée a un impact positif sur le spread de ses CDS. Comme le risque
souverain a une dimension systématique importante (voir par exemple Longstaff

4. En effet, la littérature montre que les spreads de CDS s’accroissent lorsque le risque de défaut
augmente (voir par exemple Annaert et al. [2013]).

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et al. [2007]), nous supposons également que l’exposition totale de la banque


vis-à-vis des autres pays fragilisés pendant la crise de l’Union européenne a un
impact positif sur son spread de CDS.
Une variation du spread ne s’explique pas seulement par une modification
du risque de défaut des banques, mais également par une modification de la
prime de risque informationnelle. Aussi supposons-nous que la transparence a
un effet stabilisateur sur les spreads de CDS : elle réduit l’incertitude et ainsi la
prime de risque informationnelle. La transparence réduit le spread des banques
si la communication de la banque est apte à rassurer les investisseurs. En divul-
guant des données régulièrement, la banque peut lisser la réaction du marché à
une nouvelle information. Donc, plus les investisseurs disposent d’une bonne
connaissance de l’exposition au risque souverain d’une banque, plus leur réac-
tion à l’annonce de la dégradation d’un risque souverain sera faible et l’ac-
croissement de la prime de risque informationnelle sera d’autant réduit. Nous
supposons donc que l’information fournie par une banque sur son exposition
au risque souverain a un impact négatif sur l’évolution du spread de ses CDS.
Les banques procurent également des informations autres que celles relatives au
risque souverain : sur leur mode de gouvernance par exemple, leur responsabilité
éthique et sociétale ou encore leur conformité aux accords de Bâle. Ces infor-
mations peuvent avoir un impact sur la réaction des investisseurs en créant de
la confiance (voir notamment Coates [2007]) et en réduisant la prime de risque.
La transparence globale peut ainsi atténuer la réaction des investisseurs lors de
l’annonce de la dégradation d’une note souveraine. Nous supposons donc que
la transparence globale d’une banque (sans lien avec le risque souverain) a un
impact négatif sur la variation anormale cumulée du spread de ses CDS.
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DONNÉES ET MÉTHODOLOGIE EMPIRIQUE

Le paragraphe suivant présente l’échantillon et la base de données. Ensuite,


nous expliquons les critères de sélection des seize événements que nous rete-
nons dans notre analyse. Enfin, nous explicitons notre méthodologie empirique,
les variables dépendantes et les variables indépendantes : la transparence des
banques, leur exposition au risque souverain et les variables de contrôle.

Description de l’échantillon

Notre étude porte sur les banques européennes qui ont participé aux exer-
cices de recapitalisation organisés par l’EBA en 2011 et 2012, afin d’exploiter
les informations fournies par leurs rapports : l’exposition au risque souverain
et les actifs pondérés des risques (APR). Soixante-dix-neuf banques ont parti-
cipé à l’exercice en 2011 et 61 en 2012. Afin d’obtenir un échantillon unique
sur l’ensemble de la période, nous considérons uniquement les 59 banques qui
ont participé à l’exercice à la fois en 2011 et en 2012. De plus, nous restrei-
gnons l’échantillon aux banques pour lesquelles des CDS ont été émis. Notre
échantillon contient ainsi les 47 banques respectant ces trois conditions. Nous
utilisons également les bases de données Bloomberg et Bankscope (du Bureau

1014

Revue économique – vol. 67, n° 5, septembre 2016, p. 1007-1035


Hervé Alexandre, François Guillemin, Catherine Refait-Alexandre

van Dijk). La base de données Bloomberg fournit les spreads de CDS. La base
de données Bankscope fournit les données comptables et les informations
relatives au capital Tier 1 (les fonds propres de base). Nous construisons des
indices de transparence bancaire en nous fondant sur l’analyse de leurs rapports
d’activité. L’échantillon contient de larges banques internationales telles que
la Deutsche Bank, qui présente l’actif total le plus important de l’échantillon
(plus de 2 655 138 millions de USD). Notre échantillon inclut d’autres grandes
banques comme BNP Paribas, Crédit Agricole ou HSBC. La banque dont l’actif
total est le plus faible est Banco Pastor avec 39 301 millions de USD ; l’actif total
des banques de l’échantillon est en moyenne égal à 697 663 millions de USD.
La répartition géographique des banques au sein de l’Europe est assez uniforme,
mais laisse une plus grande place à l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne. Les plus
grandes banques sont situées en France, au Royaume-Uni et en Allemagne. De
plus, 37 banques sur les 47 font partie de la zone euro, et 14 banques ont leur
siège au Portugal, en Irlande, en Grèce et en Espagne.

Événements : dégradations des notes souveraines

Nous utilisons la base de données Europress.com afin de déterminer la date


exacte de chaque dégradation de note souveraine par Standard & Poor’s, Moody’s
et Fitch. Nous nous concentrons sur la période de janvier 2011 à juin 2013, car
les résultats des exercices de recapitalisation mis en œuvre par l’EBA ont été
communiqués à partir de 2011. Les trois agences de notation ont annoncé plus de
65 dégradations de risque de crédit souverain dans l’Union européenne pendant
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cette période. Elles ont parfois annoncé plusieurs dégradations le même jour,
concentrant les différentes annonces sur 56 dates. Nous ne considérons dans
l’analyse qu’un nombre réduit de dégradations afin de nous focaliser sur les
événements les plus importants. Trois différents types d’événements sont ainsi
retenus : premièrement lorsque l’amplitude de la dégradation est au moins égale
à trois, deuxièmement lorsqu’un pays perd sa note triple A (même si l’ampli-
tude est inférieure à trois) et troisièmement quand, à une même date, la note de
plusieurs pays est abaissée. En choisissant uniquement les événements d’une
amplitude importante, nous éliminons les dégradations qui ne sont que des ajus-
tements5. En intégrant les États qui perdent leur triple A, nous nous assurons
d’incorporer d’autres pays que le Portugal, la Grèce, l’Espagne ou l’Irlande ; de
plus, le fait qu’un État, tels la France et le Royaume-Uni, ne soit plus considéré
sans risque est un événement important que les investisseurs considèrent très
certainement aussi important qu’une dégradation de grande amplitude. Enfin,
lorsque plusieurs pays voient leur note dégradée le même jour, cela constitue
un événement important à même de modifier les anticipations des investisseurs.
Ainsi, le 13 janvier 2012, Standard & Poor’s a diminué la note de neuf pays, en
réponse à la politique européenne. Finalement, nous retenons seize événements.

5. La dégradation de la note d’un pays peut être interprétée comme un ajustement lorsque le
pays est dans une situation telle qu’elle correspond aux prévisions économiques antérieures. Par
exemple, si les prévisions économiques pour l’Espagne sont négatives, et que six mois plus tard
l’agence de notation dégrade sa note, cette dégradation peut être considérée comme un ajustement
car elle était anticipée.

1015

Revue économique – vol. 67, n° 5, septembre 2016, p. 1007-1035


Revue économique

Méthodologie empirique et description des variables

Nous analysons l’évolution des spreads de CDS des banques sur la période
allant du 1er janvier 2011 au 30 juin 2013. Notre échantillon contient 742 obser-
vations : 47 banques sur 16 événements. La variable dépendante est la VACS
de CDS afin de mesurer la réaction du marché à la dégradation d’une note de
crédit souverain. Pour chaque événement et pour chaque banque, nous déter-
minons la VACS sur différentes fenêtres : de cinq jours avant l’événement à
cinq jours après l’événement ; de deux jours avant l’événement à deux jours
après l’événement. Nous envisageons également des fenêtres post-événement :
cinq jours après l’événement et deux jours après l’événement. Le choix de
plusieurs fenêtres nous permet d’analyser plus en détail la réaction des spreads
de CDS et de vérifier la robustesse de nos résultats (voir MacKinlay [1997] ou
De Bruyckere et al. [2013]). Le modèle empirique estime la relation entre les
VACS et quatre différents groupes de variables indépendantes (cf. infra). Ces
variables mesurent la transparence vis-à-vis du risque souverain, la transparence
globale, l’exposition au risque souverain et des variables de contrôle explicitées
infra. Le modèle que nous estimons peut être résumé par :

VACSbT,−i ,+ j = α + β1Transparence vis-à-vis du risque souverain b,T


+ β2Transparence globaleb,T + β3Exposition au risque souverain b,T
+ β4 Contrôleb,T + εb,T , (1)
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où T est la date de l’événement, b désigne la banque, i est le nombre de jours
pendant lesquels nous observons le spread de CDS avant l’événement et j le
nombre de jours pendant lesquels nous observons le spread de CDS après l’évé-
nement. Afin de vérifier la présence d’une éventuelle hétéroscédasticité, nous
réalisons le test de White. Il est significatif pour la transparence globale et pour
l’exposition au risque souverain espagnol, portugais, irlandais et grec. Le modèle
est estimé par les moindres carrés ordinaires corrigés de l’hétéroscédasticité par
la méthode de White. Dans un premier temps, nous estimons le modèle par
la méthode des moindres carrés ordinaires. Puis, dans un second temps, nous
estimons la variance des erreurs en régressant le carré des résidus sur les régres-
seurs et leurs valeurs au carré. Enfin, dans une dernière étape, nous estimons un
modèle par les moindres carrés pondérés, en utilisant l’inverse de la matrice de
variance-covariance estimée comme pondération. Par ailleurs, n’ayant détecté
aucun lien non linéaire significatif entre les variables dépendantes et les variables
indépendantes, nous n’avons considéré que des spécifications linéaires.

Variables dépendantes

La variable dépendante est la variation anormale cumulée du spread de


CDS après l’annonce de la dégradation de la note d’un État. Suivant Norden
et Weber [2004], nous calculons tout d’abord la variation anormale du spread
de CDS (VAS). VASb,t pour la banque b à la date t est la différence entre la
variation quotidienne du spread de CDS et la variation quotidienne d’un indice
du marché des CDS (l’indice SNRFIN CDSI GEN 5Y publié par ITraxx). Le
choix d’un large indice plutôt qu’un indice européen des CDS permet d’éviter la

1016

Revue économique – vol. 67, n° 5, septembre 2016, p. 1007-1035


Hervé Alexandre, François Guillemin, Catherine Refait-Alexandre

surreprésentation de la crise des souverains dans l’indice et de limiter les effets


spécifiques aux pays européens. Ensuite nous calculons la variation anormale
cumulée du spread de CDS :
T+ j
VACSbT,−i ,+ j = ∑ t=T−i (Spread de CDSb,t − Indice CDSt )
T+ j
= ∑ t=T−i VASb, t , (2)

où T est la date de l’événement, b la banque, i le nombre de jours pendant


lesquels nous observons le spread de CDS avant l’événement et j le nombre de
jours pendant lesquels nous observons le spread de CDS après l’événement.
Pour chacun des seize événements et pour chaque banque, nous déterminons la
VACS sur quatre différentes fenêtres aux alentours de la date de l’événement :
T T T T
VACSb, −5,+5 , VACSb,−2,+2 , VACSb,0,+5 , VACSb,0,+2 .

Variables relatives à la transparence des banques


Nous considérons deux sortes de transparence : la transparence relative à
l’exposition au risque souverain et la transparence globale. Nous construisons ces
deux variables à partir des rapports d’activité de chaque banque pour les années 2010
et 2011. Les rapports d’activité annuels sont en général publiés en mars de l’année
suivante. Les informations qu’ils renferment permettent de couvrir l’ensemble des
seize événements, du début 2011 à mi-2013. Les rapports d’activité de 2010 (publiés
en mars 2011) sont utilisés pour les indices de transparence allant de début 2011
à mars 2012. Les rapports d’activité de 2011 (publiés en mars 2012) sont utilisés
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pour les indices de transparence allant de mars 2012 à mi-2013. Nous construisons
un indice individuel de transparence relative à l’exposition au risque souverain à
partir de différents éléments. Tout d’abord, nous considérons le nombre de fois
où le mot « souverain » apparaît dans chaque rapport d’activité. Afin de disposer
d’un indicateur normé (Fois), nous divisons pour chaque banque et pour chaque
année ce nombre par le nombre maximal observé au sein de l’échantillon (i.e. la
communication la plus fréquente). Nous considérons ensuite le nombre de pages
consacrées au risque souverain dans chaque rapport d’activité. Afin de disposer d’un
indicateur normé (Pages), nous divisons pour chaque banque et pour chaque année
ce nombre par le nombre maximal de pages consacrées au risque souverain au sein
de l’échantillon (i.e. la communication la plus abondante). Nous considérons enfin
la qualité de la communication relative à l’exposition au risque souverain. Qualité
est mesurée par une échelle allant de 0 % à 100 %. Pour obtenir la note maximale
(100 %), le rapport d’activité doit fournir des analyses graphiques, des figures, des
diagrammes et doit être facilement trouvable dans le rapport (par exemple l’expo-
sition au risque souverain est indiquée dans la table des matières ou le sommaire).
La banque obtient la note de 66,66 % si aucune analyse graphique n’est fournie,
elle obtient la note de 33,33 % si les informations sont difficiles à trouver, et la note
de 0 % si l’exposition au souverain n’est pas – ou très peu – présentée. Finalement,
nous construisons l’indice de transparence vis-à-vis du risque souverain (appelé
Transparence vis-à-vis du risque souverain) en calculant, pour chaque banque et
pour chaque année, la moyenne des variables Fois, Pages et Qualité.
Nous construisons un second indice de transparence, appelé Transparence
globale. Il intègre différents éléments concernant la politique globale de commu-
nication de chaque banque (cf. tableau 1). Nous considérons la taille du rapport

1017

Revue économique – vol. 67, n° 5, septembre 2016, p. 1007-1035


Revue économique

d’activité (en nombre de pages), la présence ou l’absence d’annexes relatives


au pilier 3 des accords de Bâle II (B2P3), la présence d’informations relatives à
la rémunération des dirigeants (nombre de pages consacrées au Say-on-Pay), la
présence d’informations relatives à la conformité de la banque avec un code de
gouvernance national ou supranational (Comply or Explain), la présence d’in-
formations relatives aux actionnaires majoritaires (Actionnaires majoritaires),
la présence d’informations relatives aux actionnaires notables (détenant plus
de 3 % du capital) (Actionnaires notables) et enfin la présence d’informations
sur la présence effective des membres de direction au conseil d’administration.
Nous transformons les deux variables fondées sur le nombre de pages en variable
binaire, égale à 1 si le nombre de pages est supérieur à la médiane de l’échan-
tillon, 0 sinon. Pour les cinq autres variables, nous utilisons des variables binaires
qui valent 1 si l’information est communiquée (par exemple, si le rapport d’ac-
tivité contient des informations sur la présence des membres de direction au
conseil d’administration, la variable est égale à 1) et 0 sinon. Finalement, nous
construisons l’indice de transparence globale en calculant, pour chaque banque
et pour chaque année, la moyenne des sept variables présentées dans le tableau 1.
Sa valeur est comprise entre 0 et 1. Les deux indices Transparence vis-à-vis du
risque souverain et Transparence globale sont supposés avoir un impact négatif
sur la VACS, puisque la transparence est supposée atténuer la réaction des inves-
tisseurs lors de l’annonce d’une dégradation de note souveraine.

Tableau 1. Indice global de transparence

Nom de la variable Signification Valeur


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Taille du rapport d’activité 1 si supérieur à la médiane, 0
sinon
Annexe B2P3 Présence ou non de l’annexe 1 si l’annexe est fournie sur
le site web ou dans le rapport
d’activité, 0 sinon
Say-on-Pay Nombre de pages consacrées à 1 si supérieur à la médiane, 0
la rémunération des dirigeants sinon
Comply or Explain Présence ou non d’informa- 1 si informations fournies dans
tions relatives à la conformité le rapport d’activité, 0 sinon
avec un code de gouvernance
Actionnaires majoritaires Présence ou non d’informa- 1 si informations fournies dans
tions relatives aux actionnaires le rapport d’activité, 0 sinon
majoritaires dans le rapport
d’activité
Actionnaires notables Présence ou non d’informa- 1 si informations fournies dans
tions relatives aux actionnaires le rapport d’activité, 0 sinon
notables dans le rapport
d’activité
Présence des membres de Présence ou non d’informa- 1 si informations fournies dans
direction au conseil d’admi- tions relatives à cette présence le rapport d’activité, 0 sinon
nistration dans le rapport d’activité

Variables relatives à l’exposition au risque souverain des banques


Les exercices de recapitalisation menés par l’EBA en 2011 et 2012 ont
conduit à la divulgation de l’exposition au risque souverain par pays de chaque
banque participante. Les exercices ont fourni ces expositions trois fois : le

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Revue économique – vol. 67, n° 5, septembre 2016, p. 1007-1035


Hervé Alexandre, François Guillemin, Catherine Refait-Alexandre

31 décembre 2010, le 31 décembre 2011 et le 30 juin 2012. À chaque date,


l’EBA a donné des informations sur le montant, l’échéance et le type de risque
souverain – par pays – détenu par la banque. Nous en tirons neuf différentes
variables. Pour chaque événement, nous considérons l’exposition vis-à-vis du
pays concerné par la dégradation, mais également l’exposition vis-à-vis des
autres pays européens. En effet, comme le montrent Longstaff et al. [2007],
le risque souverain contient une importante composante systématique : après
l’augmentation du risque de crédit dans un pays, les investisseurs peuvent
anticiper un accroissement de ce risque au sein des autres pays européens. La
première variable considérée est l’exposition totale de chaque banque vis-à-vis
de tous les pays concernés par les exercices de l’EBA, divisée par l’actif total de
la banque, afin de contrôler l’effet taille (Exposition relative). L’impact attendu
de cette variable sur l’évolution du spread de CDS est positif. La deuxième
variable est l’exposition totale vis-à-vis de l’ensemble de tous les pays en crise
(Grèce, Portugal, Espagne, Irlande) afin d’identifier les banques qui sont expo-
sées aux dettes souveraines les plus risquées (Exposition aux PEC). La troi-
sième variable calculée est l’exposition de chaque banque vis-à-vis des pays
qui ont subi une dégradation de leur note sur la période, de janvier 2011 à
juin 2013 (Exposition aux dégradations de note). Cette variable ne prend donc
pas en compte l’exposition vis-à-vis de l’Allemagne, du Luxembourg, de la
Suède et de la Norvège. Les six dernières variables considèrent l’exposition
(brute ou nette) vis-à-vis du pays ou des pays dont la note a été dégradée à la
date de l’événement. Exposition à court terme brute (de 0 à 3 mois), Exposition
à moyen terme brute (de 3 mois à 1 an), Exposition à long terme brute (de 1
à 5 ans), Exposition à court terme nette (de 0 à 3 mois), Exposition à moyen
terme nette (de 3 mois à 1 an) et Exposition à long terme nette (de 1 à 5 ans)
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expriment respectivement l’exposition brute et nette pour différentes échéances
vis-à-vis du ou des pays directement concernés par chaque événement. Quand
plusieurs pays voient leur note dégradée le même jour (cela concerne l’événe-
ment du 13 janvier 2012), nous additionnons l’exposition vis-à-vis de chaque
pays subissant la dégradation (neuf au total le 13 janvier 2012). Chacune de ces
variables est supposée avoir un impact positif sur la variation anormale cumulée
des spreads de CDS.

Variables de contrôle
Il est tout d’abord nécessaire d’intégrer à l’analyse le fait qu’une banque
soit localisée dans le pays dont la note est dégradée. La variable Domestique
est égale à 1 dans ce cas, 0 sinon. Cette variable est censée avoir un impact
positif sur la VACS, car un État fortement endetté peut difficilement fournir
un soutien financier efficace au système bancaire national. Afin de tenir
compte des difficultés économiques particulières de la zone euro sur la
période, nous considérons la variable Zone euro, égale à 1 si la banque est
localisée dans un État de la zone euro, 0 sinon. Notre échantillon est composé
de 37 banques qui sont situées dans un pays membre de la zone euro. Deux
anticipations sur le signe de cette variable sont envisageables. D’un côté, la
variable Zone euro peut avoir un impact négatif sur la VACS, si les partici-
pants du marché des CDS anticipent que la puissance des institutions de la
zone euro est apte à assurer la stabilité de toute la zone, même en période de
troubles économiques et monétaires. De l’autre côté, la variable Zone euro
peut avoir un impact positif sur la VACS, si les participants du marché des

1019

Revue économique – vol. 67, n° 5, septembre 2016, p. 1007-1035


Revue économique

CDS anticipent que la situation dans cette zone est tellement fragilisée que
la stabilité ne peut être assurée. Nous portons ensuite une attention particu-
lière aux pays les plus touchés par la crise des souverains : Portugal, Irlande,
Grèce et Espagne. Ces quatre pays ont bénéficié d’un plan de sauvetage d’ur-
gence de la part de la BCE pendant notre période d’analyse. Ces pays sont
moins capables que les autres pays de l’échantillon d’assurer un processus
de bailout en cas de défaut des banques domestiques à cause de leur haut
niveau d’endettement. La variable PEC prend la valeur 1 si la banque est
localisée dans l’un de ces quatre pays. Cette variable est supposée avoir
un impact positif sur la VACS. Nous considérons également une variable
croisée mesurant l’exposition à la dette souveraine des PEC quand la banque
est localisée dans l’un de ces quatre pays : PECxExposition aux PEC. Nous
contrôlons aussi le risque de la banque avec trois variables. La variable Tier 1
est le ratio de fonds propres de base (actions ordinaires et titres subordonnés
sans maturité). Cette variable joue négativement sur le risque de défaut de
la banque, et elle est donc supposée influencer négativement la VACS. Les
actifs pondérés des risques (variable APR), qui servent au calcul du capital
réglementaire dans le cadre des accords de Bâle, constituent une mesure du
risque de la banque et sont donc supposés avoir une influence positive sur
la VACS. Enfin, nous considérons la variable Prêts non performants, égale
au pourcentage de prêts non performants dans le portefeuille de prêts de la
banque. Un prêt est considéré comme non performant si le débiteur n’a pas
respecté ses engagements financiers depuis au moins 90 jours. Cette variable
est supposée influencer positivement la VACS.
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ANALYSE STATISTIQUE

L’objectif de cette section est de présenter une analyse statistique des diffé-
rentes variables utilisées, en commençant par les variables dépendantes, puis les
différentes variables indépendantes : les mesures de la transparence, les mesures
de l’exposition au risque souverain et enfin les variables de contrôle.

Analyse descriptive des VACS

Le tableau 2 présente les statistiques descriptives relatives aux VACS autour


des seize événements retenus, et pour les quatre fenêtres que nous considérons.
Conformément au cadre théorique, en moyenne les VACS sont positives :
les annonces de dégradation du risque de crédit souverain conduisent à un
accroissement des spreads de CDS. Plus la fenêtre est longue, plus la VACS
est importante. Deux interprétations peuvent être données. Premièrement,
les investisseurs sur le marché des CDS en moyenne ne corrigent pas leur
première réaction après deux jours (puisque les moyennes de VACS0,+5
et de VACS−5,+5 sont plus élevées que les moyennes de VACS0,+2 et de
VACS−2,+2 ). Deuxièmement, les investisseurs sur le marché des CDS peuvent
anticiper la dégradation puisque, en moyenne, VACS−5,+5 est plus élevée que

1020

Revue économique – vol. 67, n° 5, septembre 2016, p. 1007-1035


Hervé Alexandre, François Guillemin, Catherine Refait-Alexandre

VACS0,+5 et que, en moyenne, VACS−2,+2 est plus élevée que VACS0,+2 .


Les écarts types sont élevés, révélant une hétérogénéité dans la réaction des
spreads de CDS.

Tableau 2. VACS – Statistiques descriptives – en points de base

VACS0,+5 VACS−5,+5 VACS0,+2 VACS−2,+2

Moyenne 904,19 1 644,10 459,85 760,20


Écart type 2 047,20 3 711,80 1 036,70 1 726,60
Médiane 84,41 155,55 41,06 63,80
Q1 200,23 271,23 – 24,63 – 44,89
Q3 1 079,50 1 820,20 530,94 885,47
Min – 898,86 – 1 665,00 – 469,09 – 789,17
Max 12 290,00 23 119,00 6 197,80 10 375,00

Afin de montrer les effets avant et après la dégradation des notes souveraines,
les figures 1 et 2 présentent l’évolution de la VAS de cinq jours avant à cinq jours
après l’annonce. Nous sélectionnons deux dégradations de note. Le 2 avril 2011
(figure 1) correspond à la dégradation de la note du Portugal par Fitch, passant
de A– à BBB+. Le 19 novembre 2012 (figure 2) correspond à la perte de la note
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triple A par la France (Moody’s passant la note de la France de Aaa à Aa1). On
peut observer une augmentation de la variation anormale des spreads commen-
çant à la date de l’annonce ou, de façon plus nette, le jour suivant l’annonce.

Figure 1. Événement du 2 avril 2011 – Dégradation de la note du Portugal

12,0000

10,0000

8,0000

6,0000

4,0000

2,0000

0,0000
11

11

11

11

11

11

11

11

11
1

1
3/

3/

3/

3/

4/

4/

4/

4/

4/

4/

4/

– 2,0000
/0

/0

/0

/0

/0

/0

/0

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/0

/0

/0
28

29

30

31

01

02

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04

05

06

07

– 4,0000

– 6,0000

– 8,0000

1021

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Revue économique

Figure 2. Événement du 19 novembre 2012 – Perte de la note Aaa par la France

8,0000

6,0000

4,0000

2,0000

0,0000
14/11/12 16/11/12 18/11/12 20/11/12 22/11/12 24/11/12
– 2,0000

– 4,0000

– 6,0000

– 8,0000

Analyse descriptive des variables de transparence

Le tableau 3 présente les statistiques descriptives relatives à la Transparence


vis-à-vis du risque souverain et à la Transparence globale en 2011 et 2012, ainsi
que l’évolution de ces deux variables entre 2011 et 2012. Le plus haut niveau de
transparence vis-à-vis de l’exposition au risque souverain est de 92 % en 2011,
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obtenu par la Deutsche Bank, alors que la plus forte valeur en 2012 est égale
à 88 %, obtenue par Allied Irish Bank. L’évolution sur la période est positive,
après la prise de conscience en Europe, et plus largement à travers le monde, de
l’existence d’une crise de la dette souveraine dans l’Union européenne : la valeur
moyenne augmente de plus de 16 % entre 2011 et 2012, et la médiane s’accroît
de plus de 30 %. Cinq banques (Bayerische Landesbank, Caja de Ahorros y
Pensiones de Barcelona, Norddeutsche Landesbank, Rabobank Nederland et
Swedbank) présentent un indice égal à 0 pendant l’année 2011, mais seule une
banque est dans ce cas en 2012 (Danske Bank). Les banques ont donc décidé
d’expliciter dans leurs rapports d’activité leur exposition aux différents risques
souverains européens. On peut également observer un accroissement de l’écart
type entre 2011 et 2012, traduisant une plus grande hétérogénéité dans les poli-
tiques de communication. Concernant la transparence globale, le constat est
quelque peu inverse. En moyenne, le niveau de transparence globale diminue
en 2012 comparé à son niveau de 2011 et sa dispersion se réduit également. Il
est possible que les banques réorientent leur communication sur ce qui importe
le plus à cette époque, décidant de donner plus d’éléments d’information sur
l’exposition au risque souverain et de réduire la communication d’autres types
d’informations.
Le niveau maximal de transparence globale en 2011 est égal à 75 %, obtenu
par trois banques (Allied Irish Bank, Barclays et HSBC). En 2012, le maximum
est toujours de 75 % et n’est obtenu que par deux banques (Royal Bank of
Scotland et Commerzbank). Simultanément, la valeur minimale est 0 % pour
les deux années, valeur obtenue par la Banque nationale de Grèce en 2011 et
en 2012.

1022

Revue économique – vol. 67, n° 5, septembre 2016, p. 1007-1035


Hervé Alexandre, François Guillemin, Catherine Refait-Alexandre

Tableau 3. Variables de transparence – Statistiques descriptives

2011 2012 Évolution


Trans- Trans- Trans- Trans- Trans- Trans-
parence parence parence parence parence parence
vis-à-vis globale vis-à-vis globale vis-à-vis globale
du risque du risque du risque
souverain souverain souverain
Moyenne 27,28 % 41,48 % 32,75 % 39,72 % 16,70 % – 4,45 %
Écart type 24,90 % 20,15 % 26,49 % 19,59 % 6,02 % – 2,87 %
Médiane 24,82 % 37,50 % 36,31 % 37,50 % 31,71 % 0,00 %
Q1 3,79 % 25,00 % 3,82 % 25,00 % 0,83 % 0,00 %
Q3 47,03 % 62,50 % 54,59 % 56,25 % 13,85 % – 11,11 %
Min 0,00 % 0,00 % 0,00 % 0,00 % 0,00 % 0,00 %
Max 92,00 % 75,00 % 88,00 % 75,00 % – 5,63 % 0,00 %

Analyse descriptive de l’exposition au risque souverain

Le tableau 4 présente les statistiques descriptives des variables d’exposition


au risque souverain en 2011 et 2012, et leur évolution entre les deux années.
L’exposition totale au risque souverain (Exposition totale = Exposition rela-
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tive × Actif total) diminue entre 2011 et 2012. La valeur maximale est celle
de BNP Paribas pour l’année 2011 et celle de Unicredit pour l’année 2012.
L’exposition minimale au risque souverain (qui fluctue beaucoup moins que
l’exposition maximale) est celle de Banco Pastor en 2011 et celle de Irish
Life & Permanent en 2012. L’exposition moyenne au risque des PEC diminue
également, et encore plus fortement, entre 2011 et 2012, même si la dispersion
reste stable. Trois banques ont décidé de ne pas détenir de dette des PEC en 2011,
et quatre banques ont pris la même décision pendant l’année 2012. L’exposition

Tableau 4. Variables d’exposition totale – Statistiques descriptives

Exposition totale Exposition aux PEC Exposition aux dégradations


(Millions USD) (Millions USD) de note (Millions USD)
2011 2012 Évolution 2011 2012 Évolution 2011 2012 Évolution
Moyenne 37 804,80 35 120,06 – 7,64 % 6 570,00 5 379,47 – 22,13 % 23 691,36 20 963,39 – 13,01 %
Écart type 31 512,95 26 073,45 – 20,86 % 11 698,00 11 644,30 0,46 % 25 597,53 21 445,29 – 19,36 %
Médiane 32 445,00 30 444,38 – 6 570 % 2 608,00 2 152,01 – 21,19 % 12 347,00 9 479,70 – 30,25 %
Q1 10 123,75 9 420,68 – 7,56 % 456,00 170,40 – 167,61 % 3 964,75 4 350,34 9,73 %
Q3 58 110,25 58 250,66 0,24 % 6 982,00 4 472,63 – 56,10 % 37 711,50 31 146,64 – 21,08 %
Min 2 553,00 2 434,67 – 4,86 % 0,00 0,00 0,00 % 0,00 0,00 0,00 %
Max 139 661,00 96 426,16 – 44,84 % 56 514,00 53 925,00 – 4.80 % 99 189,00 70 058,39 – 41,58 %

1023

Revue économique – vol. 67, n° 5, septembre 2016, p. 1007-1035


Revue économique

la plus forte aux PEC est celle de BBVA (banque espagnole) pendant les deux
années. Concernant la dernière variable (l’exposition aux dégradations de note),
les commentaires sont similaires : l’exposition moyenne aux pays dont la note
a été dégradée décroît, ainsi que la dispersion de cette exposition. L’exposition
maximale est détenue par BNP Paribas en 2011 et en 2012. L’évolution négative
de ces trois variables indique que le plan de la BCE pour réduire l’exposition
au risque crédit des pays sous sa surveillance et sous la surveillance du Fonds
monétaire international (FMI) a été une réussite.

Analyse statistique des variables de contrôle

En moyenne, seuls 9,04 % des banques ont la même nationalité que le


pays dont la note vient d’être dégradée (Domestique). Notre échantillon est
composé de 37 banques situées dans des pays de la zone euro (Zone euro) ;
les dix autres banques résident dans les pays suivants : Danemark (1 banque),
Norvège (1 banque), Royaume-Uni (4 banques) et Suède (4 banques). Notre
échantillon inclut 14 banques localisées dans des pays en crise (PEC) : Portugal
(2 banques), Irlande (3 banques), Grèce (2 banques) et Espagne (7 banques).
Seules 17 banques sont situées dans des pays dont la note n’a pas été dégradée
pendant la période ; elles résident dans des pays bénéficiant d’une note « AAA » :
l’Allemagne (7 banques), les Pays-Bas (4 banques), le Danemark (1 banque), la
Norvège (1 banque) et la Suède (4 banques).
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RÉSULTATS ET COMMENTAIRES

Cette section présente tout d’abord les résultats de nos modèles principaux.
Nous analysons l’impact de la transparence, de l’exposition au risque souverain
et des variables de contrôle. Puis différents tests de robustesse sont proposés afin
de conforter nos résultats.

Transparence et réaction du marché des CDS

Deux régressions sont estimées pour chacune des quatre fenêtres autour des
dégradations de notes (tableaux 5 et 6). Dans la première colonne, les exposi-
tions brutes vis-à-vis du risque souverain sont prises en compte alors que dans la
seconde colonne, ce sont les expositions nettes vis-à-vis du risque souverain qui
sont considérées. Quelle que soit la fenêtre, et que l’on envisage les expositions
en valeur nette ou en valeur brute, la transparence vis-à-vis du risque souve-
rain exerce une influence négative sur la VACS. Ces résultats sont cohérents
avec le cadre théorique et les hypothèses testées : la transparence vis-à-vis du
risque souverain participe à la réduction de la valeur des spreads de CDS. Cet
impact confirme les résultats de la littérature relative au rôle de la transparence
dans la réduction de la volatilité sur les marchés financiers (voir Baumann et
Nier [2004] ou Akhigbe et Martin [2008]). Par ailleurs, la transparence globale
accroît la VACS : une communication générale et abondante ne rassure par les

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Revue économique – vol. 67, n° 5, septembre 2016, p. 1007-1035


Hervé Alexandre, François Guillemin, Catherine Refait-Alexandre

Tableau 5. Estimation du modèle avec VACS0,+5 et VACS-5,+5

VACS0,+5 VACS0,+5 VACS−5,+5 VACS−5,+5

Exposition Exposition Exposition Exposition


brute nette brute nette
Constante – 1 366,73*** – 1 192,84*** – 2 528,55*** – 2 618,83***
(– 14,42) (– 14,69) (– 14,11) (– 14,29)

Transparence vis-à-vis – 263,41*** – 224,39*** – 515,55*** – 530,95***


du risque souverain (– 3,49) (– 3,38) (– 3,65) (– 3,63)

Transparence globale 1 756,12*** 1 535,31*** 3 308,37*** 3 482,34***


(13,28) (13,46) (13,13) (13,41)

Exposition relative 3 954,30*** 3 427,60*** 7 184,41*** 7 318,81***


(6,38) (6,46) (6,25) (6,35)

Exposition aux PEC – 0,09*** – 0,08*** – 0,17*** – 0,18***


(– 8,09) (– 8,54) (– 8,24) (– 8,41)

Exposition aux dégradations 0,01*** 0,01*** 0,02*** 0,02***


de note (7,24) (6,67) (7,21) (6,74)

Exposition à court terme 0,06* – 0,02 0,11* – 0,08


(1,65) (– 0,49) (1,72) (– 1,07)

Exposition à moyen terme 0,02 0,05* 0,03 0,11*


(0,83) (1,72) (0,65) (1,74)

Exposition à long terme – 0,04** – 0,02 – 0,08** – 0,02


(– 2,24) (– 0,84) (– 2,45) (– 0,41)

Domestique 318,40** 258,75** 705,75** 521,14*


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(2,20) (2,00) (2,51) (1,79)

Zone euro 668,44*** 604,68*** 1 241,99*** 1 315,57***


(11,58) (12,35) (11,37) (11,83)

PEC 3 317,27*** 3 012,13*** 6 164,06*** 6 336,27***


(14,93) (16,29) (15,29) (15,50)

PECxExposition aux PEC 0,03*** 0,03*** 0,06*** 0,06***


(3,11) (3,32) (3,42) (3,44)

Tier 1 – 3,51e–06* – 2,49e–06 – 6,66e–06* – 6,70e–06*


(– 1,79) (– 1,57) (– 1,78) (– 1,88)

APR – 9,24e–08 – 1,06e–07 – 1,65e–07 – 2,21e–07


(– 0,44) (– 0,62) (– 0,43) (– 0,59)

Prêts non performants – 2,52e–06 – 2,34e–06 – 5,07e–06 – 5,51e–06


(– 1,01) (– 1,00) (– 1,09) (– 1,10)

R2
0,62 0,62 0,61 0,61
R2 ajusté 0,60 0,60 0,60 0,60
F(15, 477) 52,07 52,06 49,68 50,06
p-value 0,00 0,00 0,00 0,00
Note : L’échantillon complet contient 752 observations de 2011 à 2013. Les variables dépendantes sont les
variations anormales cumulées des spreads de CDS sur deux fenêtres différentes. Les variables ont été définies
précédemment. Elles sont toutes présentes dans les régressions. Les régressions par MCO sont corrigées de l’hété-
roscédasticité par la méthode de White. Les valeurs des tests t sont données entre parenthèses. ***, **,* indiquent
une significativité statistique respectivement à un seuil de 1 %, 5 % et 10 %.

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Revue économique – vol. 67, n° 5, septembre 2016, p. 1007-1035


Revue économique

Tableau 6. Estimation du modèle avec VACS0,+2 et VACS−2,+2

VACS0,+2 VACS0,+2 VACS−2,+2 VACS−2,+2

Exposition Exposition Exposition Exposition


brute nette brute nette
Constante – 643.38*** – 667,66*** – 1 157,66*** – 1 793,91***
(– 14,24) (– 14,63) (– 14,49) (– 10,77)

Transparence vis-à-vis – 92,53** – 99,54*** – 212,51*** – 612,62***


du risque souverain (– 2,48) (– 2,66) (– 3,26) (– 4,32)

Transparence globale 817,78*** 838,06*** 1 484,44*** 2 298,84***


(12,73) (13,11) (13,04) (11,09)

Exposition relative 1 850,89*** 1 979,69*** 3 274,66*** 6 895,79***


(6,15) (6,43) (6,23) (6,72)

Exposition aux PEC – 0,046*** – 0,047*** – 0,08*** – 0,11***


(– 8,76) (– 8,70) (– 8,18) (– 7,44)

Exposition aux dégradations 0,005*** 0,01*** 0,01*** 0,01**


de note (7,20) (6,95) (6,95) (2,39)

Exposition à court terme 0,03* – 0,01 0,07*** – 0,12***


(1,91) (– 0,46) (2,80) (– 2,98)

Exposition à moyen terme 0,01 0,03** 0,02 0,03


(0,80) (2,10) (0,77) (0,81)

Exposition à long terme – 0,02*** – 0,01 – 0,04*** 0,03


(– 2,67) (– 0,99) (– 3,03) (1,35)

Domestique 238,63*** 174,64** 372,63*** 639,82***


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(2,94) (2,07) (2,84) (3,90)

Zone euro 336,55*** 337,56*** 586,62*** 811,22***


(12,24) (12,17) (12,03) (8,72)

PEC 1 553,01*** 1 633,72*** 2 863,73*** 3 435,08***


(14,24) (14,51) (16,25) (26,86)

PECxExposition aux PEC 0,02*** 0,02*** 0,03*** 0,04***


(3,96) (3,66) (3,18) (3,38)

Tier 1 – 1,61e–06* – 1,56e–06* – 2,24e–06 3,38e–06


(– 1,72) (– 1,77) (– 1,32) (0,80)

APR – 1,05e–07 – 7,63e–08 – 1,29e–07 – 2,60e–08


(– 1,07) (– 0,82) (– 0,71) (– 0,06)

Prêts non performants – 1,32e–06 – 1,34e–06 – 2,10e–06 8,53e–07


(– 1,00) (– 0,98) (– 0,97) (0,15)

R2 0,62 0,62 0,62 0,63


R ajusté
2
0,60 0,61 0,61 0,62
F(15, 477) 53,19 54,38 53,88 56,25
p-value 0,00 0,00 0,00 0,00
Note : L’échantillon complet contient 752 observations de 2011 à 2013. Les variables dépendantes sont les
variations anormales cumulées des spreads de CDS sur deux fenêtres différentes. Les variables ont été définies
précédemment. Elles sont toutes présentes dans les régressions. Les régressions par MCO sont corrigées de l’hété-
roscédasticité par la méthode de White. Les valeurs des tests t sont données entre parenthèses. ***, **,* indiquent
une significativité statistique respectivement à un seuil de 1 %, 5 % et 10 %.

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Revue économique – vol. 67, n° 5, septembre 2016, p. 1007-1035


Hervé Alexandre, François Guillemin, Catherine Refait-Alexandre

Tableau 7. Estimation du modèle en décomposant les indices de transparence en


fonction de la nature qualitative ou quantitative

VACS0,+5 VACS0,+5 VACS−5,+5 VACS−5,+5


Exposition Exposition Exposition Exposition
brute nette brute nette
Constante – 1 468,12*** – 1 524,45*** – 2 728,71*** – 2 803,76***
(– 15,62) (– 15,64) (– 14,93) (– 14,78)
Transparence qualitative – 0,002*** – 179,37*** – 322,00*** – 321,14***
vis-à-vis du risque souverain (– 5,07) (– 4,33) (– 4,18) (– 4,00)
Transparence quantitative – 297,38*** – 302,74*** – 619,43*** – 576,62***
vis-à-vis du risque souverain (– 3,82) (– 3,64) (– 3,87) (– 3,56)
Transparence qualitative 1 386,63*** 1 453,85*** 2 615,81*** 2 717,87***
globale (12,48) (12,49) (12,019) (12,19)
Transparence quantitative 566,34*** 584,03*** 1 075,64*** 1 101,68***
globale (8,96) (9,04) (8,91) (8,79)
Exposition relative 4 920,15*** 4 970,59*** 8 556,38*** 8 741,94***
(8,20) (8,15) (7,84) (7,65)
Exposition aux PEC – 0,07*** – 0,07*** – 0,13*** – 0,14***
(– 8,17) (– 8,43) (– 7,91) (– 8,27)
Exposition aux dégradations 0,01*** 0,01*** 0,02*** 0,02***
de note (6,67) (6,82) (6,38) (7,03)
Exposition à court terme 0,03 – 0,02 0,05 – 0,03
(1,08) (– 0,66) (1,23) (– 0,43)
Exposition à moyen terme 0,004* 0,05 0,08* 0,08
(1,72) (1,55) (1,79) (1,30)
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Exposition à long terme – 0,003* – 0,01 – 0,05** – 0,02
(– 1,87) (– 0,56) (– 2,03) (– 0,65)
Domestique 80,80 129,33 2,77e+02* 388,10**
(1,07) (1,50) (1,66) (2,10)
Zone euro 620,30*** 649,29*** 1 190,88*** 1 205,38***
(11,86) (12,01) (11,55) (11,34)
PEC 3 684,54*** 3 563,53*** 6,66e+03*** 6 771,64***
(16,31) (14,98) (15,39) (14,73)
PECxExposition aux PEC 0,003 0,01 0,01 0,02
(0,33) (1,13) (0,77) (1,24)
Tier 1 – 2,78e–06*** – 3,74e–06*** – 5,98e–06*** – 7,03e–06***
(– 2,69) (– 2,75) (– 2,95) (– 2,78)
APR – 3,36e–07*** – 3,07e–07** – 6,11e–07*** – 7,36e–07***
(– 3,17) (– 1,95) (– 3,01) (– 2,65)
Prêts non performants – 2,98e–07 – 1,78e–06 – 9,51e–07 – 1,97e–06
(– 0,11) (– 0,64) (– 0,19) (– 0,41)
R2 0,66 0,65 0,66 0,65
R ajusté
2
0,65 0,64 0,66 0,64
F(15, 477) 55,60 53,14 53,90 51,82
p-value 0,00 0,00 0,00 0,00
Note : L’échantillon complet contient 752 observations de 2011 à 2013. Les variables dépendantes sont les variations
anormales cumulées des spreads de CDS sur quatre fenêtres différentes. Les variables ont été définies précédem-
ment. Elles sont toutes présentes dans les régressions. Les variables Transparence vis-à-vis du risque souverain et
Transparence globale sont décomposées selon leur nature qualitative ou quantitative afin de vérifier la robustesse
des résultats. Les régressions par MCO sont corrigées de l’hétéroscédasticité par la méthode de White. Les valeurs
des tests t sont données entre parenthèses. ***, **,* indiquent une significativité statistique respectivement à un
seuil de 1 %, 5 % et 10 %.

1027

Revue économique – vol. 67, n° 5, septembre 2016, p. 1007-1035


Revue économique

intervenants sur le marché des CDS. Ce résultat montre que les investisseurs
recherchent une information plus orientée, plus spécifique, pour fonder leurs
anticipations et calculer la prime de risque exigée. Au contraire, la communica-
tion d’éléments qui sont plus en lien avec la situation financière et économique
préoccupante de l’époque est plus à même de réduire les spreads de CDS. La
transparence spécifique est donc récompensée par les investisseurs via une valeur
amoindrie des spreads, alors que la transparence globale, potentiellement jugée
vague, augmente les spreads. Ce résultat est en lien avec celui d’Ellahie [2012]
et avec la littérature théorique en microstructure des marchés qui montre que la
transparence peut accroître l’asymétrie d’information sur les marchés financiers
et ainsi conduire à des primes de risque accrues. Nous estimons à nouveau nos
principaux modèles économétriques afin de vérifier si les investisseurs sont plus
sensibles à la dimension qualitative (par exemple la qualité des éléments relatifs
au risque souverain) ou, au contraire, la dimension quantitative (par exemple le
nombre de pages consacrées au risque souverain) de l’information communi-
quée. Nous décomposons les deux indices de transparence de manière à séparer,
au sein des éléments qui les constituent, ceux dont la nature est qualitative de
ceux dont la nature est quantitative. Nous considérons deux fenêtres et réalisons
les régressions pour VACS0,+5 et VACS−5,+5 . Les résultats sont présentés dans
le tableau 7. La stabilité des résultats montre que les investisseurs sont plus
attentifs au sujet de l’information communiquée qu’à la nature de cette commu-
nication. Ils semblent en effet souhaiter et valoriser à la fois une information
plus abondante et de meilleure qualité, dès lors que cette information porte sur
le risque souverain.
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Exposition au risque souverain et réaction du marché des CDS

L’analyse du rôle joué par l’exposition des banques au risque souverain fournit
plusieurs résultats. Le ratio de l’exposition totale sur l’actif total (Exposition rela-
tive) a une influence positive et significative sur la variation anormale cumulée
du spread de CDS. Ce résultat est cohérent avec les hypothèses testées : plus une
banque est impliquée dans le marché de la dette souveraine, plus l’accroissement
du spread de ses CDS est fort. Les investisseurs informés réagissent au montant
de l’exposition globale aux dettes souveraines, y compris celles qui ne sont pas
directement concernées par la dégradation. Ce résultat, robuste quelle que soit la
fenêtre considérée, confirme que les investisseurs prennent en compte la nature
systématique du risque souverain (Longstaff et al. [2007]).
Les investisseurs sont également attentifs à l’exposition de la banque à la
dette souveraine des pays en crise. En effet, Exposition aux PEC a un impact
significatif et négatif sur la variation anormale cumulée du spread de CDS. Ce
résultat est un peu surprenant, car on peut au contraire s’attendre à ce qu’une
banque voit le spread de ses CDS augmenter plus lorsqu’elle est plus fortement
exposée aux pays les plus fragiles. Le résultat obtenu peut être expliqué par la
nationalité des banques qui, tout en détenant de la dette des pays en crise, ne sont
pas localisées dans l’un de ces quatre pays. Si une banque allemande possède
un montant important de titres de dette de l’État italien, les investisseurs sont
peu inquiets de cette situation grâce à la solvabilité du gouvernement allemand.
Cette idée est confirmée par le rôle joué par la variable croisée PECxExposition

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aux PEC qui, en effet, a un impact positif et significatif sur la variation anormale
cumulée du spread de CDS. Ce résultat montre que les investisseurs sont plus
enclins à réviser à la hausse leur exigence de spread de CDS quand la banque
exposée au risque des PEC est elle-même localisée dans l’un de ces quatre pays :
le niveau d’endettement élevé des gouvernements grec, italien, portugais et irlan-
dais réduit leur capacité à assurer un soutien au système bancaire national et
donc à garantir la stabilité de ce système. Nos résultats sont cohérents avec ceux
d’Arnold [2012] qui montre que la réaction des CDS des banques aux variations
des spreads de CDS des risques souverains est plus importante lorsqu’elles sont
plus exposées au risque souverain, spécialement pour les banques situées dans
les PEC.
L’exposition totale aux pays dont la note a été dégradée pendant la période
(Exposition aux dégradations de note) influence positivement et significative-
ment la variation anormale cumulée du spread des CDS, ce qui est cohérent avec
nos hypothèses. Ce résultat est robuste quelle que soit la fenêtre considérée. Les
investisseurs réagissent donc aux annonces de dégradation lorsqu’une banque
détient de la dette souveraine qui a été, qui est ou qui sera dégradée. Les inves-
tisseurs sont ainsi fortement sensibles à l’ensemble des dégradations de note
pendant la période, quel que soit le pays affecté par l’événement considéré. Le
risque souverain est donc bien perçu comme global (en lien avec Longstaff et al.
[2007]). Ce résultat est cohérent avec le fait que l’exposition nette et l’exposition
brute n’ont pas toujours un impact significatif sur la VACS, et ce, aussi bien à
court terme qu’à moyen ou long terme. Cela pourrait être expliqué par le fait
que les banques ne sont pas spécifiquement affectées par un événement pour un
pays unique, mais de manière globale, en fonction de leur exposition totale au
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risque souverain.
Plus précisément, nous observons que l’exposition à court terme (et moins
fortement l’exposition à moyen terme) au risque du pays dont la note est dégradée
a un impact positif sur la VACS, quand le coefficient est significatif. Même si ce
résultat n’est pas aussi robuste que les autres, il est cohérent avec nos commen-
taires : les investisseurs anticipent des pertes pour la banque et donc un risque de
défaut accru. Cependant, l’impact de l’exposition à long terme est négatif quand
le coefficient est significatif. Ce résultat pourrait signifier que les investisseurs
anticipent une résolution de la crise européenne des souverains à long terme.

Nationalité, risque de la banque et réaction du marché des CDS

Les variables de contrôle apportent également des résultats intéressants. La


variable Domestique influence positivement la VACS. Ce résultat indique que
les investisseurs réagissent négativement à l’annonce d’une dégradation de note
en exigeant une prime de risque plus élevée pour les CDS des banques situées
dans les pays concernés par cette dégradation. Cette plus forte exigence se traduit
par un accroissement du spread allant de 174 points de base pour la fenêtre la
plus courte (de l’annonce à deux jours après) à 705 points de base pour la fenêtre
la plus longue (de cinq jours avant l’annonce à cinq jours après). Les investis-
seurs attachent donc de l’importance à la nationalité de la banque et prennent
en compte la capacité des États à aider plus ou moins leur système bancaire. Ce
résultat est robuste quelle que soit la fenêtre considérée.

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Revue économique – vol. 67, n° 5, septembre 2016, p. 1007-1035


Revue économique

Les conclusions relatives à la relation entre les variables PEC et VACS vont
dans le même sens. En effet, la variable PEC a un impact significatif et positif sur
la variation anormale cumulée du spread de CDS. Ce résultat montre à nouveau
que les investisseurs tiennent compte de la nationalité de la banque dans leur
exigence de spread. Qu’une banque soit localisée dans l’un des quatre pays les
plus touchés par la crise des souverains conduit à une augmentation de son risque
de défaut perçu, car la capacité de ces États à assurer une procédure de bailout
aux banques en difficulté est jugée faible.
Le fait que les investisseurs soient sensibles à la nationalité de la banque est
également confirmé par l’impact positif de la variable Zone euro sur VACS :
ceteris paribus, une dégradation affecte plus le spread du CDS d’une banque si
celle-ci est localisée au sein de la zone euro que si elle n’en fait par partie. Ce
résultat est robuste quelle que soit la fenêtre considérée. Il tend à montrer que
les investisseurs sont inquiets vis-à-vis de la stabilité financière et monétaire au
sein de la zone euro et certainement vis-à-vis de la cohésion même du système
bancaire au sein de cette zone.
Enfin, concernant les variables qui appréhendent le risque de défaut de la
banque, la variable Tier 1 présente un coefficient globalement significatif et
négatif. Cela signifie qu’en moyenne, plus la banque présente un ratio de capital
Tier 1 élevé, plus la variation anormale cumulée du spread de CDS est faible à
l’annonce d’une dégradation, ceteris paribus. Ce résultat est cohérent avec les
objectifs des accords de Bâle III : un Tier 1 élevé renforce la stabilité financière
des banques, ce que les investisseurs reconnaissent en exigeant un accroissement
moindre de la prime de risque à l’annonce d’une dégradation. Par contre, la
variable APR n’est jamais significative. Ce résultat est intéressant dans le sens
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où les investisseurs ne réagissent pas aux actifs pondérés des risques alors qu’ils
réagissent au ratio de Tier 1. Cela pourrait signifier que les APR ne fournissent
pas d’informations jugées suffisamment pertinentes par les investisseurs. Enfin,
la variable Prêts non performants ne présente pas d’influence significative sur
la variation anormale cumulée du spread de CDS.

Tests de robustesse

Afin de vérifier la solidité de nos résultats, nous proposons des estimations


alternatives des régressions précédentes, en nous concentrant sur VACS0,+5
et VACS−5,+5 . Tout d’abord, nous souhaitons introduire des indicateurs de
stabilité macroéconomique, afin d’étudier si cet élément modifie la réaction du
marché des CDS. Nous considérons deux indicateurs, le VIX et le CISS. Le
VIX est un indice de volatilité (Volatility IndeX) proposé par le Chicago Board
Options Exchange (CBOE). Le VIX rend compte des anticipations de volatilité
à court terme par le marché dérivé, en considérant la volatilité implicite reflétée
par les prix d’options sur l’indice boursier S&P 500. Comme les causes de la
variabilité d’un indice boursier sont principalement des causes systématiques,
notamment macroéconomiques, le VIX peut être considéré comme un proxy
de la stabilité macrofinancière anticipée. Le CISS est le Composite Indicator
of Systematic Stress (Indice composite de tensions systématiques) élaboré
par la BCE. Son objectif est de quantifier la présence de tensions au sein du
système financier européen, en agrégeant quinze indicateurs relatifs au marché

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monétaire, au marché des actions, au marché obligataire, mais également au


marché interbancaire et au marché des devises. Les résultats de ces régressions
sont donnés dans le tableau 8. Ils sont très proches des résultats présentés dans
les tableaux 5 et 6, montrant la stabilité de ceux-ci. Il apparaît que ces indicateurs
de stabilité macroéconomique n’ont pas d’influence significative sur l’évolution
des spreads. L’impact des facteurs macroéconomiques est très certainement pris
en compte dans notre modèle de base par les variables relatives à la zone euro et
aux pays en crise, variables qui jouent un rôle important dans la détermination
de la VACS.
Ensuite, nous étudions si la réaction du marché des CDS est différente
selon que la banque est systémique ou non. Une banque systémique a une
plus forte probabilité d’être aidée par l’État en cas de difficulté, et ses actifs
bénéficient d’une très forte diversification des risques, deux arguments qui
pourraient atténuer la variation anormale cumulée du spread de son CDS.
A contrario, une banque systémique est plus sensible aux risques systéma-
tiques, dont le risque souverain fait partie, argument qui plaide en faveur
d’une VACS plus forte. Nous estimons le modèle empirique sur deux
sous-échantillons, celui des banques SIFI (systemically important financial
institution), telles que définies par le Financial Stability Board, et celui des
banques qui ne sont pas SIFI6. Les résultats obtenus sont très proches pour les
deux sous-échantillons et très proches des résultats obtenus précédemment.
Cependant, quelques différences intéressantes apparaissent. Premièrement,
le ratio de capital Tier 1 n’est pas significatif pour les banques systémiques,
alors qu’il l’est pour les autres. Les investisseurs semblent certains de la
résilience des banques SIFI (ou du soutien implicite de l’État) et ne se préoc-
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cupent donc pas du niveau de leur capital. Deuxièmement, la transparence
vis-à-vis du risque souverain n’est pas significative pour les banques non
systémiques, comme si, quand le risque est véritablement très important, une
stratégie de transparence et de communication de la part d’une banque n’est
plus suffisante pour rassurer les investisseurs.
Suivant Delatte, Fouquau et Portes [2014], nous tâchons également de voir
si la localisation géographique d’une banque dans un pays en crise modifie
la réaction des intervenants sur le marché des CDS. Les résultats obtenus
sont très proches pour les deux sous-échantillons et très proches des résultats
obtenus précédemment. Cependant, à nouveau, quelques différences intéres-
santes apparaissent. Premièrement, les actifs pondérés par les risques, alors
qu’ils restent non significatifs pour les banques qui ne sont pas localisées
dans les pays en crise, jouent positivement et significativement sur la VACS
pour les autres banques. Les investisseurs semblent donc faire attention
aux risques des actifs pour les banques qui sont les plus exposées au risque
souverain. Deuxièmement, la transparence vis-à-vis du risque souverain est
significative pour les banques situées dans les pays en crise, mais elle ne
joue pas de rôle significatif pour les autres banques. Au sein des banques les
plus exposées, une fois prise en compte l’exposition véritable au risque, une
bonne communication semble donc avoir été capable d’atténuer les consé-
quences des dégradations de note.

6. L’ensemble des résultats suivants est disponible sur requête.

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Revue économique

Tableau 8. Estimation du modèle incluant VIX et CISS

VACS0,+5 VACS0,+5 VACS−5,+5 VACS−5,+5


Exposition Exposition Exposition Exposition
brute nette brute nette
Constante – 1 331,15*** – 1 376,08*** – 2 486,21*** – 2 542,36***
(– 10,41) (– 10,51) (– 10,43) (– 10,71)
Transparence vis-à-vis – 279,99*** – 300,24*** – 553,53*** – 559,40***
du risque souverain (– 4,20) (– 4,33) (– 4,40) (– 4,30)

Transparence globale 1 684,35*** 1 750,62*** 3 162,77*** 3 222,53***


(12,37) (12,58) (12,41) (12,48)
Exposition relative 4 399,68*** 4 522,08*** 7 713,44*** 7 965,36***
(7,91) (8,13) (7,68) (7,91)
Exposition aux PEC – 0,07*** – 0,07*** – 0,12*** – 0,13***
(– 7,65) (– 7,50) (– 7,39) (– 7,34)
Exposition aux dégradations 0,01*** 0,009*** 0,02*** 0,02***
de note (5,95) (5,51) (5,60) (5,31)

Exposition à court terme 0,10*** 0,06 0,18*** – 0,06


(3,05) (– 0,54) (2,91) (– 0,72)
Exposition à moyen terme 0,01 – 0,06* 0,03 0,11*
(0,42) (1,76) (0,55) (1,74)
Exposition à long terme – 0,06*** – 0,03 – 0,11*** – 0,03
(– 4,15) (– 1,13) (– 3,83) (– 0,84)
Domestique 690,84*** 528,68*** 1 019,71*** 863,05***
(5,26) (3,456) (4,42) (3,04)
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Zone euro 582,40*** 605,86*** 1 094,51*** 1 125,97***
(10,31) (10,42) (10,49) (10,51)
PEC 3 794,50*** 3 914,81*** 6 932,73*** 7 046,84***
(16,36) (17,16) (16,05) (16,32)
PECxExposition aux PEC 0,004 0,003 0,003 – 0,01
(0,36) (0,29) (0,19) (0,53)
Tier 1 – 1,69e–06 – 1,86e–06 – 4,04e–06 – 3,62e–06
(– 0,88) (– 0,98) (– 1,23) (– 1,51)
APR – 1,66e–07 – 9,82e–08 – 1,89e–07 – 1,33e–07
(– 0,78) (– 0,46) (– 0,54) (– 0,35)
Prêts non performants – 8,61e–07 – 7,59e–07 – 1,44e–06 – 1,41e–06
(– 0,34) (– 0,27) (– 0,30) (– 0,27)
VIX – 0,15 – 0,17 0,02 – 0,01
(– 0,20) (– 0,22) (0,02) (– 0,01)
CISS 27,41 19,63 89,35 – 0,01
(0,48) (– 0,34) (0,81) (0,49)
R2
0,65 0,63 0,63 0,63
R2 ajusté 0,64 0,62 0,62 0,61
F(15, 477) 50,80 48,57 45,89 45,20
p-value 0,00 0,00 0,00 0,00
Note : L’échantillon complet contient 752 observations de 2011 à 2013. Les variables dépendantes sont les varia-
tions anormales cumulées des spreads de CDS sur quatre fenêtres différentes. Les variables ont été définies précé-
demment. Elles sont toutes présentes dans les régressions. Les variables VIX et CISS sont incluses afin de vérifier
la robustesse des résultats. Les régressions par MCO sont corrigées de l’hétéroscédasticité par la méthode de White.
Les valeurs des tests t sont données entre parenthèses. ***, **,* indiquent une significativité statistique respecti-
vement à un seuil de 1 %, 5 % et 10 %.

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Nous analysons également les différences temporelles dans les réactions du


marché des CDS en estimant notre modèle sur deux périodes : 2011 d’une part,
2012 et 2013 d’autre part. Les résultats sont globalement les mêmes, mais la
transparence vis-à-vis du risque souverain n’est significative que sur la première
période : on peut supposer en effet que la transparence est particulièrement impor-
tante au début de la crise, lorsque les investisseurs sont particulièrement inquiets
et que, par conséquent, toute information vis-à-vis des expositions est primordiale.
Enfin, compte tenu de la nature de notre échantillon, nous estimons des régres-
sions robustes aux clusters, en choisissant des clusters selon le pays de la banque
(suivant par exemple Neretina, Cenkhan et De Haan [2014]) ou selon la date de
l’événement, afin d’éviter le problème de clusterisation d’événements, mis en
évidence par exemple par Kolari et Pynnönen [2010]. Les résultats obtenus sont
similaires aux résultats précédents, tendant à prouver leur robustesse.

CONCLUSION

Les autorités de régulation sont soucieuses non seulement de la résilience du


système bancaire, mais également de la stabilité financière. À cet égard, nous
apportons des résultats originaux sur l’impact que la transparence des banques
peut avoir sur la réaction des participants sur le marché des CDS, plus précisé-
ment sur la variation anormale cumulée des spreads de leurs CDS. Nous montrons
qu’une communication trop large et trop globale n’a pas les effets stabilisants
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escomptés et ne participe pas à réduire la variabilité des spreads de CDS. Ce
résultat est cohérent avec une part importante de la littérature théorique et empi-
rique qui met en exergue les conséquences négatives d’un excès de transparence
(voir Coates [2007] par exemple). Ce résultat peut également être expliqué par le
fait que la situation financière des banques européennes et leur niveau de risque
n’étaient pas stables pendant la période de l’étude (de 2011 à 2013) et que, dans
de tels moments de turbulences macroéconomiques, ce n’est pas tant la transpa-
rence générale qui est recherchée par les investisseurs qu’une communication
plus spécifique. Ainsi, nous montrons que la stratégie des banques consistant à
être transparentes sur leur exposition vis-à-vis des risques souverains a participé
à réduire la variation anormale cumulée des spreads de leurs CDS. Une trans-
parence spécifique accroît donc la stabilité sur le marché des CDS, en période
d’instabilité macroéconomique et financière. Nous montrons que ce rôle s’avère
particulièrement important au moment où l’incertitude est la plus forte, en début
de crise, et pour les banques les plus exposées, celles localisées en Espagne, au
Portugal, en Grèce et en Irlande. De plus, les banques localisées dans la zone
euro ont vu leurs spreads de CDS augmenter plus que ceux des autres banques
ceteris paribus, montrant l’inquiétude des investisseurs quant à l’affaiblissement
de la zone euro pendant la crise de la dette souveraine. Ces banques détenaient de
larges montants de dettes publiques de plus en plus risquées, dégradation après
dégradation, et leur risque de défaut, implicitement mesuré par les spreads de
CDS, augmentait. Un transfert du risque souverain vers les banques a donc bien
eu lieu et nous confirmons ici l’effet de contagion mis en évidence par Arnold
[2012]. Nous apportons un dernier résultat important. Comme l’on pouvait s’en
douter, la variation anormale cumulée des spreads de CDS est d’autant plus forte

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que l’exposition de la banque au risque souverain est forte. Ce qui est frappant,
c’est que l’exposition globale à l’ensemble des pays touchés par la crise a un
rôle prépondérant, et influence plus la variation anormale cumulée des spreads
de CDS que l’exposition au pays dont la note vient d’être dégradée. Ce résultat
montre que les marchés financiers ont perçu le risque de crédit souverain en
Europe non pas comme un risque idiosyncratique, spécifique à chaque pays,
mais comme un risque systématique, dû à des causes communes à tous les pays
de l’Union européenne. Cela est sans doute le signe de la confiance que les
investisseurs portaient en la volonté des institutions européennes de trouver une
solution et une issue communes à la crise.

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Revue économique – vol. 67, n° 5, septembre 2016, p. 1007-1035

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