Vous êtes sur la page 1sur 2

Correspondance avec Vasile

Lovinescu, René Guénon,


non publié, 1934-1940
p. 44

Le Caire, 28 Janvier 1940

 
     Cher Monsieur,
 
     
 
     J’ai
été très heureux d’avoir de vos nouvelles, car voilà bien longtemps que
je n’en avais
pas eu, sauf pourtant indirectement par M. Vâlsan.
 
     Je
vais beaucoup mieux maintenant, sans pourtant être encore tout à fait rétabli, car il me
reste une fatigue qui semble ne devoir disparaître qu’assez lentement ; cette crise
rhumatismale à été vraiment bien longue
cette fois… Enfin, depuis à peu près deux mois,
j’ai pu tout de même recommencer à travailler et écrire mes articles pour les prochains nos
des “Études Traditionnelles”.
 
     Nous
avons de bonnes nouvelles de Suisse ; M. Meyer est venu dernièrement passer ici
une dizaine de jours avec sa femme et sa fille aînée ; nous avons été heureux de cette
occasion de le revoir. M. Ceresole est venu avec eux et est resté pour quelque temps encore.
– Vous savez sans doute
que MM. Paterson et Lings sont ici et y ont tous deux des emplois.
 
     M. Schuon
s’est arrêté ici en allant dans l’Inde, avec MM. Levy et Mac Iver qui y
sont
encore ; mais lui-même a dû repartir presqu’aussitôt arrivé et rentrer immédiatement en
France. Quoiqu’il soit mobilisé, vous pouvez très bien lui écrire ; il n’y a aucun inconvénient
à cela, et je sais qu’il est même très content de recevoir des lettres de chacun ; le mieux
est
de les lui adresser ainsi :
 
     

  Aux bons soins du lieutenant Blétry


Hôpital du Val-de-Grâce
Service de Stomatologie
Paris (Ve)

 
     Il devait avoir une permission ces temps-ci, et il est sans doute à Paris en ce moment
même.
 
     Pour la surate Ya-Sîn,
je pense que vous feriez mieux de lui en parler avant de rien

entreprendre, d’autant plus que les circonstances ne sont pas bien favorables en ce
moment… (C’est en réalité 41 fois et encore 40.) – M. Lings prépare justement un travail sur
cette surate pour les “Études Traditionnelles”.
 
     Pour ce qui est de l’inscription latine dont vous me parlez, je me demande s’il n’y a pas

une inexactitude, car je n’arrive pas à comprendre ce que peut vouloir dire là le mot
deciderunt ; il me semble que ce devrait être plutôt quelque chose comme dedicaverunt ou
dedicarunt.
Je n’ai malheureusement pas le texte latin du passage de l’Apocalypse, auquel
cela se rapporte évidemment comme vous l’avez pensé. Quant au mot
Majors, je ne sais s’il
peut avoir le sens de “supérieurs” ; ce n’est pas impossible, mais, en tout cas, il signifie plus
habituellement
“anciens” (ce pourrait même être alors une allusion aux 24 vieillards de
l’Apocalypse). S’il s’agit d’“anciens” (ou d’ancêtres spirituels comme vous le dites), cela
indiquerait plutôt une chose remontant à un passé plus ou moins lointain, et il serait difficile
d’en conclure la continuation jusqu’à une époque récente ; mais assurément tout cela n’est
pas très clair…
 
     Croyez, je vous prie, cher Monsieur, à mes sentiments les meilleurs.

René Guénon

Vous aimerez peut-être aussi