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Aomar Ibourk
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Résumé
Le système coopératif est un levier du développement socio-économique local, mais les coopératives
affrontent des obstacles qui les empêchent d’accomplir pleinement leur rôle de création de valeur écono-
mique et sociale. La principale difficulté que rencontrent les coopératives marocaines des jeunes diplômés
est le manque d’activité. L’article identifie les déterminants de l’inactivité par le biais d’une étude empirique
qui s’appuie sur des données aussi bien quantitatives que qualitatives. L’accent est mis sur les coopératives
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ensemble. En outre, un tel capital social13 de masse. Quant aux avantages pour la
contribue à l’amélioration de la perfor- communauté, ils permettent un meilleur
mance économico-financière. Grâce à accès à des produits et des services de
son approche participative, le système qualité tout en renforçant la loyauté de
coopératif tisse des liens forts entre les la clientèle. De plus, l’épanouissement
membres de la communauté, assurant de ce type d’organisation offre de plus
ainsi une autonomie de ces derniers tout grands débouchés d’emplois. Dans une
en garantissant une utilisation efficace de optique plus collective, les coopératives
leurs ressources. engendrent une croissance économique
et sociale dans la communauté tout en
Par ailleurs, selon le CoopZone14, il est
ouvrant l’accès à de nouveaux marchés.
possible également de distinguer deux
types d’avantages du système coopéra- La constitution d’un capital social collectif
tif : les avantages philosophiques et les actionnable par les membres est appelée
avantages pour la communauté. En effet, également à favoriser l’entrepreneuriat
le premier type permet à tous d’avoir de collectif grâce à deux types de méca-
modestes économies plutôt que d’entraî- nismes : d’une part des mécanismes de
ner l’enrichissement excessif de certains, propagation de l’information, qui mettent
limitant ainsi le risque de l’établissement en jeu un capital social distant caracté-
d’une inégalité béante des revenus. risé par des liens faibles ; et d’autre part
des mécanismes basés sur l’instauration
En plus, l’entraide, créée par le système
d’une confiance interpersonnelle et repo-
coopératif, offre un appoint solide au
sant sur un capital social fortement local
renforcement des liens communautaires.
et marqué par des liens forts (Aubert et
Enfin, les coopératives permettent aux
al., 2008)15.
membres de définir leurs propres besoins
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Nombre d’adhérents
Nombre de Taux de Nombre Taux de
Année moyen
coopératives croissance d’adhérents croissance
relative à tous les niveaux appropriés des systèmes nationaux d’éducation et de par coopérative
formation.
2000 3 815
Aomar Ibourk est économiste et spécialiste des méthodes quantitatives appliquées aux
2002 4 277 12,11 % 267 466
sciences sociales. Ses recherches portent entre autres sur les ajustements des marchés du
63
travail. Il enseigne à l’université Cadi Ayyad, Faculté de Sciences Juridiques Economiques et
2004 4 827
Sociales (FSJES) de Marrakech. 12,86 % 317 289 18,63 % 66
2006 5276 9,30 % 324 239 2,19 % 61
Annexes
2008 6 286 19,14 % 347 684 7,23 % 55
Tableau 1 : Évolution du nombre de coopératives et leurs adhérents au Maroc entre 2000 et
2010 7 804 2011 24,15 % 380 144 9,34 % 49
2011
Année
Nombre de 9046
Taux de Nombre 15,91 %
Taux de 399 558
Nombre d'adhérents 5,11 % 44
coopératives croissance d’adhérents croissance moyen par coopérative
2000 3 815
Graphique 1 : creation des cooperatives des jeunes dipômés Graphique 2 : Évolution des adhérents des coopératives des jeunes diplômés
Tableau 2 : Répartition des coopératives par secteurs d’activité (2005 et mars 2012)
Graphique 2 : Évolution des adhérents des coopératives des jeunes diplômés Secteurs 2005 mars 2012
Agriculture (HRA 105 140
Alphabétisation 29 59
Forets 20 21
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des coopératives à toutes les branches La position des quatre groupes sur la
de l’activité humaine, et la non-exigence cartographie socio-économique permet
d’un capital minimal pour la création d’aboutir aux conclusions suivantes :
d’une coopérative (Ahrouch, 2011)17.
Premier groupe. Du point de vue des indi-
cateurs relatifs au secteur coopératif, la
Environnement principale caractéristique de la région de
socio-économique et Souss-Massa-Drâa réside dans le nombre
dynamique des coopératives élevé des coopératives de femmes créées
des jeunes diplômés au sein de cette région. De même, le
recours à la cartographie socio-écono-
L’objet de cette section est de présenter
mique régionale permet de constater que
les résultats empiriques portant sur l’ana-
cette région à vocation agricole est carac-
lyse des coopératives des jeunes diplômés
térisée par un niveau de pauvreté supé-
au Maroc
rieur à la moyenne nationale (Direction
des études et des prévisions financières,
Ű Ű Cartographie socio-économique
2006). Par ailleurs, cette région souffre
régionale d’un taux d’analphabétisme parmi les plus
Les résultats de la classification ascen- élevés du pays. Les étendues pastorales
dante hiérarchique ont abouti à la dont dispose cette région lui permettent
constitution de quatre groupes distincts de réaliser une part importante du chep-
consignés dans le tableau 3. Cette étape tel national arrivant à un pourcentage de
permet de procéder à la caractérisation de 14,1 % (Direction des études et des prévi-
ces groupes par les indicateurs relatifs au sions financières, 2006). L’essor de ce type
secteur coopératif. d’activités, dans une région rurale comme
celle-ci, est plus souvent accompagné par
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Graphique 4
d’huile d’argan et ses dérivés en produits L’analyse de la cartographie socio-éco-
cosmétiques (Ahrouch, 2010)19. nomique a montré que ces régions se
distinguent essentiellement des autres,
L’adhésion des femmes au secteur coopé-
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Graphique 4
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Graphique 5 :
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Graphique 5 :
Graphique 6
Il ressort du tableau de l’analyse des don- coopératives ne se créent plus spontané-
nées que la probabilité d’être inactive est ment (c’est-à-dire à l’initiative des coopé-
plus élevée pour les coopératives jeunes rateurs), mais elles relèvent généralement
(création après l’initiative de dévelop- d’une impulsion de l’administration pu
pement humain). Les jeunes créent des blique, des programmes de développement
coopératives pour bénéficier des subven- et des ONG. Ainsi, on observe l’émergence
tions et des aides de l’État et des ONG. de coopératives fantômes durant les der-
Aussi doit-on constater que le rythme de nières décennies et partant l’apparition
création des coopératives augmente là où de coopératives inactives sur plus de deux
il existe un programme ou une ONG qui ans, voir même des coopératives qui n’ont
accorde des subventions aux coopératives, exercé aucune activité dès leur création.
ce qui ne fait qu’amplifier l’esprit d’assis-
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Constante -0,52 ns
1. Secteur d'activité
Autres secteurs 0,8 ***
Agriculture Réf Réf
Alphabétisation 0,26 ns
2. Régions
L’Oriental -1,62 ****
Meknès Tafilalet 2,37 ****
Tanger Tétouan 0,07 ns
Autres régions Réf Réf
3. Nombre d'adhérents
D’après ce graphique on note que les
[0,7]
Tableau 3 : Déterminants d’inactivité des coopératives Réf Réf
coopératives opérant dans les secteurs
variables Coef. Sig.
Entreprendre & Innover / Mars 2014 / 119
Constante -0,52 ns
1. Secteur d'activité
Autres secteurs 0,8 ***
Dossier : L’entrepreneuriat coopératif, un enjeu pour l’emploi des jeunes diplômés marocains
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d’entente entre les adhérents sont les promotion des coopératives des jeunes
principales raisons avancées pour justifier diplômés est considérée alors comme une
cette attitude d’insatisfaction. Cette situa- des filières alternatives prometteuses. Ces
tion d’insatisfaction est reflétée égale- dernières permettent la création d’em-
ment par le pourcentage élevé (60 %) des plois décents, c’est-à-dire des emplois
adhérents qui se déclarent à la recherche capables de satisfaire les besoins vitaux et
d’un autre emploi. Cette recherche en assurent l’exercice des droits fondamen-
parallèle d’un autre emploi est suscep- taux à travers des revenus durables qui
tible d’enclencher et/ou de renforcer un peuvent contribuer de façon pérenne à
processus du détachement (baisse du maintenir ces emplois même en période
degré d’implication) des adhérents par de crise (Barbier, 2006)27.
rapport à leurs emplois d’adhérents-sala-
Les coopératives détiennent des avan-
riés. Les coopératives souffrent également
tages qui ne caractérisent pas les autres
d’une concurrence rude. Aussi, elles ont
formes d’organisation classiques. En effet,
difficilement accès au marché (marchés
par définition, elles sont autorisées juridi-
publics) en raison d’un manque de réfé-
quement à octroyer à leurs membres une
rence et de coordination requises. De plus,
partie de leurs bénéfices. Elles concluent
il y a un problème d’absence de synergie
des contrats d’affaires avec leurs propres
éventuelle entre les coopératives. Enfin,
membres. Elles limitent la responsabilité
l’absence d’infrastructure routière et de
légale de leurs membres et, en cas de dis-
moyens de communication et de désen-
solution, les biens privés de leurs membres
clavement de plusieurs zones pose de
sont épargnés. Par conséquent, on peut
sérieuses difficultés : cherté de l’appro-
affirmer que la coopérative cumule un
visionnement et de l’acheminement de
avantage comparatif pour contribuer à
la production. Cela condamne ainsi de
l’éradication de la pauvreté par rapport
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