Normes comptables
CLASSEMENT COMPTABLE DES BONS
DE SOUSCRIPTION D’ACTIONS :
UN AMENDEMENT À IAS 32
La norme IAS 32 indique que les
instruments dérivés sur un instrument
de capitaux propres de l’entité sont
eux-mêmes des instruments de capitaux
propres, à condition qu’ils aient pour
effet d’échanger un nombre fixe
d’instruments de capitaux propres
de l’entité contre un montant fixe de
liquidités ou d’autres actifs financiers.
Historique
En 2005, l’IFRIC a examiné des obligations
convertibles en actions dans lesquelles le
nominal de l’obligation est exprimé en
devises et le nombre d’actions à recevoir
lors de l’exercice du droit à conversion
dépend de ce nominal après conversion
dans la monnaie fonctionnelle de l’entité.
Dans une telle circonstance, le nombre
d’instruments de capitaux propres à
émettre lors du dénouement du dérivé
incorporé n’est pas fixe. L’IFRIC en a conclu
que ce dérivé n’était pas un instrument de
capitaux propres en application de la dis-
position précitée de la norme IAS 32.
En 2009, l’IFRIC a été à nouveau interrogé
sur une question voisine : lorsque le dérivé
prévoit que le porteur du titre reçoit un
nombre fixe d’actions contre un montant
fixe de devises étrangères, ce dérivé est-il
un instrument de capitaux propres ?
Constatant que, exprimé dans la monnaie
fonctionnelle de l’entité, le montant de
liquidités à recevoir est variable, l’organisme
d’interprétation conclut que l’application
stricte de la norme IAS 32 ne permet pas de
comptabiliser ce dérivé en tant qu’instru-
ment de capitaux propres. Conscient de ce
que cette solution comptable ne reflète pas
la substance de l’opération, l’IFRIC a deman-
dé à l’IASB de modifier la norme IAS 32.
Illustration
Pour illustrer la difficulté, on peut prendre
l’exemple d’une entité qui attribue le 1er
mars gratuitement à l’ensemble de ses
actionnaires des bons de souscription d’ac-
tions donnant droit à souscrire une action.
Le prix de souscription de l’action est de
15 dollars. La monnaie fonctionnelle de
l’entité est la livre. Le nombre de bons émis
est de 100 et sont exerçables pendant
15 jours jusqu’au 15 mars. Leur cours à
l’émission est de 2 dollars, soit 200 dollars
pour 100 bons. A l’échéance de la période
de souscription, les bons ont été intégrale-
ment souscrits. Le cours de l’action le
15 mars est de 18 dollars et le cours des
bons immédiatement avant cette date est
de 3 dollars, soit le cours de l’action de
18 dollars sous déduction du prix d’exerci-
ce d’un bon de 15 dollars. Le cours du dol-
lar contre la livre reste de 1,5 dollars pour
un euro pendant la période.
Les bons de souscription sont comptabilisés
en tant que dérivés et non en tant qu’ins-
truments de capitaux propres, puisque le
montant de liquidités exprimé en livres, à
recevoir lors de l’exercice des bons de sous-
cription, est variable et non fixé. En l’occur-
rence, ce dérivé est une vente d’option,
l’actionnaire détenteur ayant le choix de
souscrire ou non aux actions auxquelles les
bons lui donnent droit. Ce dérivé ne peut
dès lors être qu’un passif pour l’entité.
Exprimée en livres, la juste valeur du dérivé
à la date d’émission est de 133 livres
(200/1,5). Il est comptabilisé dans les
dettes, en contrepartie d’une imputation
sur un poste de capitaux propres, par
exemple en prime d’émission. Immédia-
tement avant l’exercice des bons, celui-ci a
une juste valeur de 3 dollars, soit 300 dollars
au total ou 200 livres. L’entité doit revalori-
ser les bons à son passif pour un montant de
67 livres (200-133) en constatant une perte
au compte de résultat. Lors de l’exercice
des bons de souscription, l’entité reçoit
1500 dollars, soit 1000 livres. Le montant
est crédité aux postes capital et primes
d’émission. Par ailleurs, la dernière juste
valeur des bons, soit 200 livres, est transférée
en capitaux propres.
L’amendement limité
décidé par l’IASB
Selon l’IASB, la difficulté soulevée par cette
règle se serait développée à la faveur de la
crise financière. Un certain nombre
d’émetteurs, dont la monnaie de fonction-
nement est différente de la monnaie de
cotation de leurs actions, ont dû procéder
à des émissions de bons de souscription
dans la monnaie de cotation de leurs
actions et non dans leur monnaie de fonc-
tionnement. L’organisme de normalisation
a également constaté que des émissions
de bons étaient souvent effectuées au pro-
rata des droits des actionnaires à l’intérieur
d’une même catégorie d’actionnaires et
qu’elles étaient effectuées à des prix
d’exercice inférieurs au cours de bourse. Il
en résulte une valeur de marché non nulle
du bon dès son émission, qui nécessite
l’enregistrement d’une perte et d’un passif.
L’amendement publié à titre définitif par
l’IASB le 8 octobre 2009 modifie la défini-
tion des dettes financières. Selon lui, les
droits, options ou bons, conférant au por-
teur le droit d’acquérir un nombre fixe
d’instruments de capitaux propres contre
un nombre fixe de liquidités, quelle que
soit la devise d’émission, sont des instru-
ments de capitaux propres de l’entité
émettrice, à condition que l’émission
bénéficie à tous les actionnaires d’une
même catégorie d’actions au prorata de
leurs droits dans cette catégorie.
Si on reprend l’exemple fourni précédem-
ment, les bons de souscription sont
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comptabilisés, suivant cette nouvelle dis-
position, en tant qu’instruments de capi-
taux propres à l’émission et ultérieure-
ment. Etant émis à titre gratuit, ils ne font
l’objet d’aucune valorisation à l’émission
et ultérieurement. L’entité se borne à
comptabiliser en capitaux propres les
liquidités reçues à la suite de l’exercice de
leurs bons par les actionnaires, converties
au cours du change, soit 1 000 livres au
cas particulier.
Cet amendement est en définitive relative-
ment étroit. Il ne règle pas le cas où les
actions de l’émetteur sont obtenues à la
suite de l’exercice d’une option de conver-
sion incorporée à un emprunt obligataire. Il
permet de rappeler la rigueur de la norme
IAS 32 sur cet aspect : toute émission
d’obligations convertibles en actions pour
lesquelles le nombre d’actions à recevoir est
aléatoire nécessite la valorisation à la juste
valeur de l’option de conversion.
Référence
IASB : « Classification of right issues,
amendment to IAS 32 financial instru-
ments presentation », adopted 8 October
2009, disponible sur www.iasb.org
■ Benoît LEBRUN
Expert-comptable,
commissaire aux comptes
Associé KPMG
R.F.C. 426 Novembre 2009