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Jilani Djellalil
La transformation
digitale
Introduction 1
Partie 1
Comprendre pour agir : les enjeux clés du digital
2 Marketing et engagement 17
Quelques données sur le digital 17
Vers une société organisée autour de l’information
et de la donnée 18
Les nouveaux consommateurs 19
La nouvelle consommation 33
L’excellence dans le commerce 35
Le marketing dans tous ses états 39
Changer son business model 49
3 L’expérience client 53
La concurrence des canaux est dépassée 53
Construire une expérience client autour des usages 56
Une stratégie mobile réussie 58
4 Innovations et technologies 63
No limit ! 63
« Innovate, don’t duplicate ! » 65
Les nouvelles nouvelles technologies 71
Partie 2
Conduire la transformation digitale
Années
38
40
35
30
25
20
13
15
10
4 3
5 0,25
0
k
od
TV
o
oo
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b
Ra
ce
Fa
Nous nous attacherons, tout au long de cet ouvrage, à éclairer les tenants
et les aboutissants des évolutions sans précédent auxquelles sont confron-
tées les entreprises et dont la révolution digitale est la matrice.
Notre ambition est de donner au lecteur les clés pour les comprendre, les
démystifier et évaluer les impacts pour l’entreprise, en particulier, ou son
secteur d’activité.
Notre objectif est simple : proposer dans un ouvrage accessible, destiné
aux dirigeants d’entreprises de taille moyenne ou grande, un modèle pour
passer à l’acte et engager une transformation digitale indispensable pour
préparer l’entreprise aux évolutions majeures des marchés, sous les effets
cumulés des nouveaux comportements des consommateurs, des nouveaux
Introduction 3
1. Dans cet ouvrage, nous utiliserons le terme générique de « contact » pour qualifier un indi-
vidu dont le statut peut varier d’une simple trace web (souvent mémorisée au travers d’un
cookie) jusqu’à l’ambassadeur fidèle d’une marque. Le contact peut être un suspect (pros-
pect non identifié), un prospect identifié, un client, un fan, un bloggeur, un suiveur ou
encore un collaborateur de l’entreprise.
2. Marco Tinelli, Marketing synchronisé, Eyrolles, 2012.
8 La transformation digitale
–– le « croud everything »1 :
–– la co-création constitue une disruption crédible pour les métiers de
l’intellect, comme le conseil ou la création publicitaire. Difficile,
en effet, pour une organisation de garantir que les talents indispen-
sables à une mission donnée sont bien présents dans l’entreprise.
Pour le Super Bowl 2013, c’est au travers d’un concours sur Poptent
(www.poptent.com), un site de croud creation vidéo, que Danone a
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
1. Cette expression regroupe l’utilisation du pouvoir des foules dans tous les domaines
comme le financement, la créativité (agences de pub), le développement logiciel (logiciel
libre), le calcul scientifique (mise à disposition des capacités de calcul de mon ordinateur),
la météorologie (adhésion volontaire à un programme de captation de données), la santé,
l’éducation…
2. Nicolas Colin et Henri Verdier, L’âge de la multitude, Armand Colin, 2e édition, 2015.
10 La transformation digitale
Demain (déjà)
Les business models Freemium, usage plus que propriété, partage, location,
abonnements… tout pour baisser le coût apparent des
services.
Le périmètre business des « Innovation came from the fringe »1. Les concurrents
entreprises et des secteurs changent (par exemple Google/Apple pour les
d’activité constructeurs automobile ou les assureurs), les cloisons
entre BtoB et BtoC tombent, la « coopétition » devient
incontournable.
Les écosystèmes qui Impossible de réussir seul, d’attirer tous les talents,
entourent l’entreprise de se transformer de l’intérieur, de développer
(concurrents, partenaires, l’innovation frugale : l’entreprise étendue concerne
fournisseurs…) tous les domaines et pas seulement les partenariats
de production (sous-traitants, fournisseurs).
Le sourcing des talents Rôle central des réseaux sociaux pour des approches
et le recrutement très qualitatives. Sollicitation des talents de manière
ponctuelle : le « slashing » (du caractère « / » : passer
d’un job à l’autre). Multiplication des managers de
transition ou des consultants indépendants en réseau.
☞
La distribution Disparition du cloisonnement entre virtuel et physique :
les objets connectés, la réalité augmentée sont des
technologies qui permettront de créer une expérience/
immersion continue dans l’univers des marques.
L’expérience et les services Tous les produits seront des services. Ils utiliseront les
smartphones comme orthèse. L’intelligence embarquée
et la contextualisation permettront à tous de bénéficier
de ces nouveaux usages ; les courbes d’adoption seront
réduites au minimum.
Le tableau 1.2 résume les clés que nous allons détailler dans le premier
chapitre.
Leadership,
Business Expérience
culture Technologie
& marketing client
& orga
Enjeux Nouveaux Expérience Vision. Vision moyen
consommateurs. omni-canal. Learning by terme.
Nouvelles Expérience doing. Qualité.
consommations. augmentée. Cooperation, Créer les
Nouvelles Personnalisation coopétition. passerelles entre
valeurs de et co- Cross- les legacy.
marque. construction. everything. Responsive
Marketing design.
de la connexion. Data equity.
Risques/ Perdre Insatisfaction, Tétanisation. Pic
menaces le contact. infidélité. Fossé d’investissements.
Nouvelles Réputation générationnel. Dépendances.
intermédiations. écornée. Retards.
Focus prix. Fossé métier/IT.
Opportunités Développer Allier excellence, Centrage Se forger
le CA, réduire plaisir et client (pour une vision.
les coûts. humanité. de vrai). Simplifier.
Engager Développer les Attirer, Être à l’écoute,
les clients. ambassadeurs. brasser essayer,
Renouveler la Étonner et conserver apprendre
communication. le plus souvent (toutes) et avancer.
possible. les diversités.
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
Tout ceci à un rythme jamais égalé : la loi de Moore applicable aux tech-
nologies de l’information se généralise aux business eux-mêmes grâce au
poids que prennent ces technologies dans la chaîne de valeur d’un nombre
toujours plus important de services.
Même si le digital est une source de simplification, d’amélioration de
l’efficacité des processus internes et externes et, par voie de conséquence, de
réduction des prix de revient, c’est la top line que le digital touche radicale-
ment au travers de l’évolution du consommateur et de la consommation,
du marketing, de la relation aux marques, avant tout en créant des produits
et services irrésistibles !
Le digital accroît considérablement le pouvoir du consommateur (nous
y reviendrons). Les stratégies de conversations puis de connexions doivent
permettre le dialogue entre les marques et les consommateurs. L’expérience
des contacts (bien avant d’être clients) joue un rôle essentiel dans la création
et la consolidation de l’attachement.
Le cœur de notre propos se situe dans la définition et la mise en œuvre
de la transformation digitale de l’entreprise. Pour repositionner l’entreprise
dans l’ère digitale, la conduite du changement doit aborder les questions de
culture, de leadership, de talents et d’organisation. Probablement touche-
t-on là à la dimension essentielle de la transformation : celle qui fait de la
transformation digitale un sujet global que la direction générale doit
impulser, promouvoir, suivre avec détermination et passion.
Enfin, la créativité technologique des start-up, les capacités écono-
miques considérables accumulées par les grands noms américains et asia-
tiques entretiennent un rythme effréné d’innovation et de développe-
ment de nouveaux services. Ce rythme est souvent un véritable challenge
pour les DSI. Dans le quatrième chapitre, nous nous attacherons à saisir à
la fois :
–– les enjeux des technologies digitales pour les entreprises et les consom-
mateurs ;
–– les challenges technologiques du digital pour le DSI.
Les révolutions du digital 15
1. Étude du cabinet Price Waterhouse Coopers réalisée sur 15 000 web-acheteurs de 15 pays,
février 2014.
18 La transformation digitale
Flux de données
L’Internet poursuit sa course effrénée au volume de données échangées
(selon des formats toujours plus variés et non structurés). Et ces chiffres
précèdent les 50 milliards d’objets connectés annoncés pour 2020 ! Ainsi,
toutes les 60 secondes, on peut comptabiliser :
–– 331 000 tweets publiés ;
–– 2,46 millions de contenus partagés sur Facebook ;
–– 112 millions d’e-mails envoyés ;
–– 2,4 millions de recherches Google ;
–– 72 heures de vidéos déposées sur YouTube et 8 333 vidéos partagées
sur Vine ;
–– 1,4 million de Gigaoctets de données transférées ;
–– 1 839 nouveaux utilisateurs web mobile ;
–– 56 451 applications downloadées sur les stores ;
–– 400 710 displays publicitaires ;
–– 80 nouveaux avis sur TripAdvisor ;
–– 216 000 nouvelles photos partagées sur Instagram et 347 222 sur
WhatsApp.
Déni Engagement
Temps
Résistance Exploration
• L’horizontal.
• Le consommateur média.
• Plus loin dans la prise de contrôle par le consommateur.
1. Seth Godin, Tribes : We Need You to Lead Us, Éditions Portfolio, 2008.
22 La transformation digitale
YouTube
Qzone
Google+
Sina Weibo
VK
Ren Ren
Friendster
Tumblr
FourSquare
Vine
MySpace
Orkut
SnapChat
Path
Tuenti
Bebo
–– les parents des jeunes s’étant inscrits sur Facebook, ces derniers se
dirigent vers des réseaux plus discrets comme les messageries instanta-
nées (WhatsApp, Wechat…) ou Snapchat ;
–– les membres les plus jeunes semblent segmenter leur présence sociale
entre la notoriété matérialisée par le nombre d’amis sur Facebook et des
réseaux plus proches et privés gérés sur les messageries instantanées.
En puisant dans la réserve des marques, en les sélectionnant, en les agen-
çant, en les combinant, nous créons notre style, nous stylisons notre vie.
Nous utilisons les marques à notre disposition pour créer notre système
singulier de différenciation et de reconnaissance par nos tribus.
La figure 2.4 modélise le réseau professionnel LinkedIn d’un des auteurs
incluant 8 sous-groupes.
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
Le cas Harley-Davidson
Harley-Davidson, créée en 1903, est une marque mythique et emblématique
des États-Unis. Le Harley Owners Group (HOG) est créé en 1983. Il compte
aujourd’hui plus de 800 000 adhérents dans le monde entier. C’est une des
meilleures réussites en matière de création de communauté de marque. Les
adhérents reconnaissent à une très large majorité :
24 La transformation digitale
L’être permanent
Contrairement aux autres outils de communication (dont le téléphone fixe
historique), avec la généralisation du mobile, trois phénomènes viennent
transformer notre relation au monde :
–– l’ubiquité : nous sommes connectés et joignables partout ;
–– la permanence : nous sommes connectés et joignables tout le temps ;
–– l’individualité : notre mobile nous identifie de manière unique (phéno-
mène renforcé avec l’implantation de la reconnaissance biométrique sur
l’iPhone 5S et les smartphones Samsung et LG).
Cet état de fait présente déjà des dangers d’addiction chez les enfants et
les adultes, voire de phobie en cas de perte ou d’indisponibilité (la « nomo-
phobie »).
En termes marketing, comme l’indique Jean-Marie Dru de TBWA,
nous sommes passés, non seulement au 360°, mais également au 365J,
rendant quasi impossible le marketing moderne sans automatisation (nous
y reviendrons plus loin).
Évidemment, cette surexposition provoque des rejets, comme le montre
la journée sans mobile (lancée par Phil Morso en France) ou les règles impo-
sées par les parents à la maison pour préserver des instants de « vraie
présence » les uns aux autres.
Marketing et engagement 25
La personnalisation
Depuis longtemps, le sujet de la personnalisation est présent dans les straté-
gies marketing des entreprises – en fait, avec l’arrivée à maturité des outils
CRM. Seulement voilà : le digital, une nouvelle fois, a tout changé.
La gestion de la relation client est apparue bien avant le développement
massif d’Internet, au moins comme canal de vente. Les programmes de
mise en œuvre d’une relation client, souvent associés à la mise en œuvre
d’une solution progicielle, n’ont pas toujours donné les résultats attendus.
Soyons clairs, les trois seuls domaines de progrès notoires apportés par ces
solutions CRM sont :
–– la gestion de l’efficacité des forces de vente (premier domaine de déve-
loppement de logiciel comme Siebel™) ;
–– la gestion de la vision 360° des centres d’appel et le suivi des événements
de relation ;
–– la gestion des programmes de fidélité.
L’arrivée du commerce électronique, du e-marketing puis de la
gestion des contacts sur l’ensemble des canaux et réseaux sociaux, et ce
bien avant un acte d’achat (inbound marketing), a enfin fourni à la
gestion de la relation client les moyens d’exprimer pleinement son
potentiel et d’accroître significativement le chiffre d’affaires et la marge
par client. Pourquoi ?
Les raisons suivantes peuvent, sans hésitation, être mentionnées.
• De manière générale, l’intelligence programmable des outils de mise en
relation permet de dérouler des scénarios fins et segmentés de conversa-
tions avec les contacts sans connaissance/identification a priori des clients
ni intervention humaine :
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
–– c’est la fin (enfin presque !) des débats sur les identifiants clients, les
critères pertinents de segmentation, la collecte et les achats de données
socio-démo, la collecte des données RFM1. Ce qui est ciblé, ce sont
les cookies et autres traces laissées par un contact, pas l’identité du
contact en tant que telle : une révolution !
–– la conversation peut s’appliquer à un nombre de plus en plus impor-
tant de contacts sans risque d’explosion des coûts marketing.
1. Initiales de Récence (date du dernier achat), Fréquence (fréquence des achats) et Montant
(montant moyen sur une période donnée). C’est une méthode de segmentation souvent
utilisée en marketing direct.
26 La transformation digitale
– livraison à J+2.
Une exemple également très parlant, déjà abordé, est celui de l’App Store
d’Apple qui a permis de proposer un smartphone s’appuyant sur un système
d’exploitation très fermé (iOS), avec tous les avantages liés à la maîtrise de
28 La transformation digitale
L’horizontal
Il y a eu le e-business (Expédia, Amazon, Ebay…) puis le me-business
(Google, Facebook, Twitter…). Andreas Weigend (ex-Chief Scientist
d’Amazon) parle, lui, désormais de we-business : une relation nouvelle et
imbriquée entre consommateurs et entreprises. De quoi s’agit-il ?
La toute première et principale conséquence des technologies qui ont
soutenu le développement des réseaux sociaux (Facebook, LinkedIn,
Viadeo…) concerne la réduction drastique des « coûts » de transaction de la
relation horizontale entre un très grand nombre de « pairs ».
En économie, c’est Oliver Williamson (prix Nobel 2009) qui initie le
courant théorique lié aux coûts de transaction qui postule que toute tran-
saction économique engendre des coûts préalables à leur réalisation. Pour
limiter ces coûts, les agents économiques peuvent être amenés à rechercher
des arrangements institutionnels alternatifs permettant de minimiser ces
coûts pour simplifier les organisations hiérarchiques et l’entreprise.
Si les réseaux sociaux et les nouvelles formes de sourcing et de collabora-
tion qu’ils permettent s’avèrent plus efficaces pour réduire les coûts de tran-
saction que la hiérarchie et l’entreprise, nous sommes alors à l’aube d’une
organisation du travail, si ce n’est totalement, dans tous les cas beaucoup
plus horizontale qu’aujourd’hui.
À l’horizontale, la distinction entre fournisseurs, partenaires, entreprises
et clients est beaucoup plus ténue (c’est déjà un peu le cas dans les petites
entreprises comparées aux grands groupes). Les échanges entre ces diffé-
Marketing et engagement 29
Le consommateur média
Commençons par quelques chiffres sur le leader mondial des avis,
aujourd’hui focalisé sur le tourisme, TripAdvisor :
–– plus de 10 % des touristes dans le monde passent par TripAdvisor pour
la préparation de leur voyage ;
–– 260 millions de visiteurs uniques par mois ;
–– plus de 200 millions d’avis collectés à fin 2014.
Le débat sur la qualité et la fiabilité des avis n’a pas empêché son essor,
tant le volume d’avis pour un hôtel donné est important (exemple : Apos-
trophe Hôtel à Paris 6e - 392 avis fin 2013).
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1. Doc Searls, The Intention Economy : When Customers Take Charge, Harvard Business School
Press, 2012.
32 La transformation digitale
Cons-acteur
Conseil
Test Association de
consommateurs
Place de marché
Vendeurs/
Talents/Experts
entreprises Acteurs
Écosystème
existants
VRM (éditiques,
(tiers de routeurs,
confiance) solution
Échange logicielles)
Connaissance
Achat
RFP’s
Services à la
Consommateurs Pouvoir public personne
La nouvelle consommation
Après avoir analysé les transformations des comportements du consomma-
teur, attachons-nous à comprendre les grandes évolutions de la consomma-
tion. Une étude conduite par Ipsos1 fin 2013 montre le décalage qui se
creuse entre le marketing encore massivement déployé par les grandes
marques et les agences (en particulier au travers du média TV et de la grande
distribution) et la réalité de l’opinion des consommateurs :
• « Le modèle consommatoire qui inspire la pensée marketing voudrait que
le consommateur ait un intérêt pour les programmes de télévision et pour
la publicité, qu’il soit attiré par les grandes marques de produits, qu’il ait de
plus en plus de marques préférées, qu’il ait envie de dépenser, qu’il prenne
plaisir à faire ses courses et qu’il privilégie, pour ce faire, l’hypermarché. »
• En réalité, seuls 16 % des consommateurs adhèrent à ce modèle. Une
très large majorité est soit indifférente (34 %), soit s’y oppose (24 %), ou
fait preuve de lucidité et n’adhère plus aux plaisirs de la société de
consommation (26 %).
Le cas de l’hypermarché est de ce point de vue emblématique :
• Avant le déploiement du Drive, le hard-discount a pris environ 1 % de
part de marché annuelle de 1990 à 2005 : les deux promesses étant le prix
et la simplicité/rapidité (moins d’assortiment).
• Le Drive fait gagner du temps à l’achat avec un assortiment bien plus
large : la progression du Drive se fait en parallèle d’une chute du hard
discount pourtant paradoxale en temps de crise.
• Malgré cela, certaines enseignes parlent encore de « réenchantement
de l’hypermarché » alors qu’il est loin le temps de la fascination des
consommateurs pour la nouvelle abondance au sortir de la guerre et que
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90 % 22 21
24
27
37
80 % 42
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100 % Offline
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45 Processus
51 39 d'achat panaché
20 % 100 % Online
25 22 20
10 % 18
15
16
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Pr
Vê
Pr
Website (e-commerce) 32 % 21 % 42 % 5%
Email Marketing 15 % 49 % 30 % 6%
Search Marketing 43 % 30 % 17 % 10 %
Social media (not paid) 38 % 44 % 4% 14 %
Online display advertising 42 % 35 % 5% 18 %
Social display advertising 40 % 33 % 4% 23 %
Print advertising 37 % 33 % 6% 24 %
Direct mail 19 % 32 % 20 % 29 %
Mobile application 17 % 32 % 20 % 31 %
Radio 26 % 22 % 4% 48 %
TV 33 % 12 % 5% 49 %
SMS text messaging 13 % 18 % 12 % 57 %
1. Prix adaptés jusqu’à 2,5 millions de fois par jour selon le cabinet Profitero sur des critères
comme l’utilisation d’un PC ou d’un Mac…
Marketing et engagement 39
• Dans tous les cas, il s’agit d’être authentique et conforme aux valeurs de
la marque sans chercher à mimer les partis pris des leaders du digital.
Prenons l’exemple de la FNAC. Les attributs intimes de la marque
FNAC sont : agitateur d’idées, les fondateurs, je lis ma BD… sans
l’acheter, les essais comparatifs du Lab et la passion des vendeurs…
avant le commissionnement des fabricants. Que retrouve-t-on de ces
attributs sur Fnac.com ? Amazon s’est approprié le « no question
asked » ; Which ? en Angleterre, montre la voie des tests en ligne pour
aller au-delà des comparateurs de prix.
Demain (déjà)
Connaissance client Connaissance contacts et utilisateurs
Tendances marchés Tendances marchés et technologies
Design produit Design expérience utilisateur
Branding Communautés
Publicité Conversation
Agences Écosystème de partenaires
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« Brand connection »
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Alors, faut-il croire Sean Moffitt et Mike Dover qui ont développé le
concept de Wikibrand, marque collaborative qui succède à la Lovebrand,
marque « aspirationnelle » qui associe histoire et expérience originale ?
Oui, probablement en partie. Le consommateur veut participer et co-pro-
duire, mais il n’a pas que ça à faire et il adore zapper. Gageons que les
marques qui sauront développer le bon niveau d’écoute et de contribu-
tion du consommateur pourront conserver un degré raisonnable et suffi-
sant de fascination.
Pour entretenir la fascination, la marque doit se voir comme un média.
Face à la masse d’informations disponibles pour les consommateurs (dont
celles qu’ils produisent eux-mêmes car ils sont aussi des médias), la marque
doit produire et distribuer son information.
Marketing et engagement 43
Elle doit le faire pour que la qualité de son information améliore son
ranking et son attractivité sur les moteurs de recherche et autres compara-
teurs de prix :
–– le développement de la recherche sémantique (Facebook graph, nouvel
algorithme Google…) intensifie encore cette nécessité ;
–– l’écosystème de Google nécessite de bien gérer son empreinte Google
car tout est pris en compte : j’apparais mieux sur Google Maps si j’ai
un compte Google+ ; comment influencer l’auto-complete du champ
de recherche ou le contenu du knowledge graph affiché sur la droite de
la page de résultat ?
Elle doit le faire car les informations disponibles sur une marque
prolifèrent et ne sont pas toutes bienveillantes !
Elle doit être à la fois un média « broadcast » et un média ciblé car elle
peut accumuler de plus en plus d’informations sur les comportements,
goûts et intérêts de ses contacts.
Elle doit enfin emboîter le pas des nouvelles formes de consommation
média :
–– l’information chaude (dernière dispo en magasin, promo flash…) ;
–– le fil d’info continue (à l’écoute du monde…) ;
–– les différents supports et formats (mobile, réseaux sociaux, vidéo, anima-
tion, jeu…) ;
–– l’événementiel (retransmission d’un défilé…) ;
–– l’approfondissement (white paper…)…
Dans les exemples souvent cités, il y a celui de Redbull et de sa Brand
Content Factory. Le positionnement de boisson énergétique a naturelle-
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
1. Baromètre Fevad 2013 sur le comportement d’achat des entreprises en collaboration avec
CCM Benchmark.
Marketing et engagement 45
L’Internet mobile (mobiles ou tablettes) n’est encore utilisé que par 15 %
des professionnels. Catalogues, visites en showroom et visite d’un commer-
cial sont de moins en moins souvent utilisés, même s’ils restent encore très
présents :
–– catalogues : 33 % moins souvent vs. 22 % plus souvent ;
–– commercial : 52 % vs. 9 % ;
–– showroom : 52 % vs. 15 %.
Ainsi les principaux enjeux du marketing BtoB évoluent progressive-
ment vers une logique où « on ne vend plus, c’est le client qui achète » :
• Adieu le push, vive le pull : on doit intéresser le client et l’attirer par du
contenu (blog, livres blancs, catalogues, reportage, interview, support,
témoignages…) et des conversations (Twitter pour le support client,
LinkedIn pour les portails et communautés métiers…).
• Divertir et éduquer avant de vendre : pour intéresser, il faut étonner et
divertir.
• On ne parle pas de ses produits… tout de suite : penser douleurs et solu-
tions plutôt que produit.
• On doit penser et agir comme un éditeur : nouveau et pas simple : je suis
un média.
• Qui dit éditeur et média dit nouvelles ressources et nouvelle culture : en résumé,
très éloigné du marketing produit et de la culture publicitaire classique.
• On fonctionne en temps réel : de la vision 360° à la vision 365 jours.
Ces nouveaux enjeux ont de nombreux impacts pour les équipes marke-
ting en premier lieu, mais pas uniquement :
–– ré-allocation des ressources : réorienter les dépenses marketing… mais
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Identification
leads
Capture Développement
données Définition Négociation
partie- Qualification approche Closing
prenante commerciale Fidélisation
Capture
données lead
Cycle de fidélisation
Source : Inbound Marketing Funnel Do’s and Don’ts par Aaron Aders. Digital relevance™, février 2013.
Étapes dans la Aucune (mais longue Plusieurs étapes Créer des RDV dans la gestion
décision recherche) des contacts
2014
Ventes Online 8%
Ventes Offline influencées par le Online 41 %
Ventes Offline non influencées par le Online 51 %
$1,812
$1,780
$1,741 $1,771
$1,723
$1,672
$1,552 $1,660
$1,429
$1,206 $1,320
$1,103
1. « Aux Etats-Unis, le Black Friday, qui se tient chaque année le vendredi suivant Thanksgiving,
fait figure de tradition nationale et représente un temps fort commercial majeur. Lancée dans les
années 1970, ces promotions monstres occasionnent une véritable cohue, parfois proche de
l’émeute, dans les magasins d’outre-Atlantique. » (Source : Huffington Post, 18 janvier 2015).
56 La transformation digitale
et business et du bon sens pour passer des analyses mathématiques des data
scientists aux décisions commerciales et business.
1. www.youtube.com/watch?v=_mbdtupCbc4
58 La transformation digitale
Anticiper
les besoins
et développer
le prédictif
sur les smartphones low cost, Google s’est taillé une place de choix dans
l’univers de la connectivité mobile.
Avec Android comme cœur du système, Google va pouvoir déployer sa
stratégie d’objets connectés depuis la maison (acquisition de Nest), dans les
espaces ouverts (Google Maps) et jusqu’au magasin (Google Wallet). La
maîtrise des parcours clients entre online et offline sera monétisée au travers
du métier central publicitaire de Google. En créant un lien entre les données
générées par les recherches en ligne et celles utilisées pour le paiement ou le
couponing en magasin, Google peut prétendre capter une partie de la valeur
du « Drive to Store ». Aujourd’hui, Google ne capte, en effet, que 10 % du
marché publicitaire.
Le mobile est tout aussi stratégique pour Apple ou Facebook. Le premier
compte bien construire une expérience connectée inégalée où l’iPhone
jouerait le rôle de hub entre les différents objets moyennant des protocoles
maison. C’est l’arrivée de Beacon (basé sur le format BLE-Bluetooth Low
Energy) comme protocole de communication courte distance et de NFC
pour les usages très courte distance comme le paiement. Le second poursuit
la focalisation de sa stratégie sur les usages mobiles (rachat de WhatsApp
pour 19 milliards de dollars pour préserver le « reach » auprès des jeunes –
450 millions sur WhatsApp). Au vu du profil de l’action en 2014 (+ 37 %),
la focalisation semble réussir à Facebook.
Il ne fait aucun doute que le mobile doit se trouver au cœur d’une stra-
tégie digitale :
–– bon nombre d’usages n’ont de sens qu’en situation de mobilité (ceux
associés aux parcours web to store, une partie significative des usages
« sociaux »…) ;
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Ultra-contextualiser
Pour bien s’insérer dans les usages et pratiques et durer, l’ultra contextuali-
sation est le facteur clé de réussite. Que deviennent mon application et ses
services si je tiens compte de toutes les données disponibles issues des
capteurs, des données clients collectées sur le smartphone et les autres
devices ou lors de mes passages sur le web, des interactions avec d’autres
smartphones ou objets connectés ?
Faire simple
Attention à la tentation du couteau suisse. Le nombre d’applications par
utilisateur est limité et le nombre d’écrans et d’interactions par application
aussi.
Apprenant
Plus je progresse dans l’utilisation de mon application, plus celle-ci s’adapte
à mes usages. La personnalisation se fait naturellement sans effort de ma
part pour renseigner la machine afin qu’elle devienne plus intelligente (ce
qui est parfois qualifié de « machine learning »).
Le jeu en vaut-il la chandelle ? Oui, si l’on en croit les statistiques qui
indiquent que le taux de conversion sur le mobile est dix fois supérieur à
celui du web. 70 % des recherches sur mobile sont suivies d’actions.
L’expérience client 61
Enchanter le client
Nous le savons tous, le combat digital/physique est dépassé : le digital est
présent partout et tout au long des parcours clients de plus en plus nombreux
et diversifiés. Grâce aux smartphones et au cloud, le consommateur/utilisa-
teur peut interagir en permanence. On ne peut non plus/pas opposer le
physique, source d’expériences émotionnelles intenses et le virtuel où tout
serait factice et fade. L’expérience digitale est différente mais vraie (a fortiori
pour les plus jeunes générations).
Ainsi, les cinq grands enjeux du digital in store sont :
• Améliorer l’expérience shopping et traiter les “irritants”.
• Renforcer l’attractivité en injectant du “fun”, du ludique et de l’imprévu.
• Susciter la fierté d’appartenance à la marque en impliquant l’interne.
• S’adapter en permanence à l’évolution des usages facilitée par l’arrivée de
nouvelles fonctionnalités et de nouvelles technologies.
• Segmenter la présence physique entre le vaisseau amiral (« flagship ») et
le point de retrait.
En s’appuyant sur une pyramide de Maslow adaptée au digital, il est
possible de définir les nouveaux usages et de coller au mieux aux attentes
et aux promesses qu’il suscite (souvent au travers de parallèles avec d’autres
secteurs d’activités). Aucun doute n’est possible sur la place centrale que le
mobile doit occuper dans une stratégie digitale : des usages lui sont propres
(et sont probablement plus addictifs que ceux de l’Internet fixe). Dans un
univers omnicanal et connecté, il permet le passage de contexte et joue le
rôle de télécommande ou de hub universel.
Mais comment élaborer la bonne stratégie ?
• Digitaliser des pratiques et usages existants.
• Ultra-contextualiser.
• Faire simple.
• Concevoir une application apprenante.
4
Innovations et technologies
No limit !
Devant la déferlante des superlatifs, il est devenu de bon ton de critiquer le
bien-fondé de l’extraordinaire révolution digitale en arguant – ce qui n’est
pas dénué de vérité – que ce ne serait pas la première fois dans l’histoire du
capitalisme que les effets escomptés seraient moindres ou plus lointains
qu’annoncés par les consultants et autres digital champions.
Dans une interview très intéressante donnée à « Enjeux Les Echos » en
mars 2014 sur son livre2, l’économiste américain Erik Brynjolfsson présente
sa vision : « Aujourd’hui, la puissance de calcul des ordinateurs couplée à la
démultiplication des réseaux est en train de produire un phénomène simi-
laire, à une échelle encore inédite : la mécanisation du travail cognitif.
Ce qui laisse augurer une nouvelle ère de prospérité. On en voit les
–– la proximité ;
–– l’interactivité.
Pour autant innovation et invention ne sont pas la même chose : Bob
McDonald ex-CEO de Procter & Gamble disait : « Pour nous, innover
n’est pas inventer. L’innovation, c’est la transformation d’une idée
nouvelle en satisfaction client et, in fine, en revenus et en profits. Si une
idée ou une technologie ne peut pas être commercialisée, ce n’est pas une
innovation ».
L’innovation n’est pas non plus (qu’) une affaire de moyens ; les dépenses
de R&D des grandes firmes pharmaceutiques sont passées de 15 milliards
66 La transformation digitale
Simple et frugal
De nos jours, les grandes réussites en matière d’innovation sont souvent la
combinaison de quatre facteurs (figure 4.1).
Simple Digital
Low
Frugal
cost
Il ne s’agit pas pour nous de rentrer dans le détail des concepts aussi
riches que le business low cost1, la simplicité ou l’innovation frugale2. Nous
pouvons néanmoins identifier des passerelles entre ces différents concepts
pour mieux décrire les pistes de l’innovation à l’origine d’une transforma-
tion digitale réussie.
Navi Radjou, Jaideep Prabhu et Simone Ahuja énoncent six principes
qui définissent l’innovation frugale :
–– rechercher les opportunités dans l’adversité ;
–– faire plus avec moins ;
–– penser et agir de manière flexible ;
–– viser la simplicité ;
–– intégrer les marges et les exclus ;
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1. Michel Santi, Véronique Nguyen, Le business model du low cost, Eyrolles, 2012.
2. Navi Radjou, Jaideep Prabhu, Simone Ahuja, L’innovation Jugaad. Redevenons ingénieux !,
Diateino, 2013.
70 La transformation digitale
1. Chaque collaborateur de Google pouvait consacrer 20 % de son temps à des projets person-
nels ou refusés par sa hiérarchie.
2. W. Chan Kim, Renée Mauborgne, Stratégie océan bleu, Pearson, 2010.
3. Indice de l’innovation par les TIC. Une initiative Cefrio avec la collaboration du Cigref,
mars 2013.
Innovations et technologies 71
les services proposés, les marques intégreront les éléments qu’il apporte
pour enrichir et personnaliser l’offre : c’est déjà le début de la co-construc-
tion. Prenons deux exemples :
• Si je possède Evernote™1 sur ma tablette, je souhaite que les documents
(notice, factures, contrats…) me soient fournis au format et intégrés
dans Evernote.
• Si je possède une Dropbox, celle-ci doit m’être proposée par défaut
lorsque je souhaite sauvegarder des documents partageables entre mes
différents devices (des photos par exemple).
Avec cette clé de lecture (deux technologies sont dans le même groupe si
elles engendrent la même famille d’usage). Il est possible de regrouper les
ruptures technologiques en cinq grandes catégories :
–– la puissance de traitement ;
–– l’extension des devices ;
–– les capteurs et les data associés ;
–– l’analytics et le prédictif ;
–– la nouvelle fabrication.
l’histoire des technologies s’écrit comme une course entre bande passante
des réseaux et puissance de calcul et de stockage des devices. Ainsi, les archi-
tectures ont évolué entre centralisation et répartition : le cloud est un acte de
centralisation, les Apps un acte de décentralisation. Dans la littérature sur
les réseaux d’objets connectés, certains imaginent des objets connectés
autonomes capables de déclencher des microactions ciblées sur la base des
data collectées en temps réel. Nous verrons bien.
74 La transformation digitale
Donnons ici quelques conseils simples pour se lancer dans une première
phase d’utilisation d’objets connectés :
• L’objet doit rester simple, le smartphone enrichit l’expérience.
• L’écosystème de son objet doit être bien intégré : l’interopérabilité et l’in-
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1. « évian, filiale du groupe Danone, en collaboration avec l’agence BETC et Joshfire ont
développé un petit boîtier qui permet de commander les bouteilles d’eau en un simple
clic. Ce service de livraison de packs de bouteilles à domicile est en phase d’étude depuis
2012 en région parisienne. Concrètement, cet objet connecté en forme de goutte d’eau est
doté d’un écran LED et fonctionne en Wifi. L’utilisateur est invité à sélectionner la taille
et la quantité de bouteilles ainsi que la date et le créneau horaire pour la livraison. Les
commandes sont transmises à un service de gestion baptisé Évian chez vous. » (Source :
www.webdesobjets.com)
76 La transformation digitale
–– l’écriture reste néanmoins très présente, en particulier sur les sites d’avis tel
que TripAdvisor, et nécessite la mise en place d’outils d’analyse sémantique ;
–– une part très importante de ces données est issue d’acteurs tiers avec
qui le sujet de la monétisation deviendra critique (cf. le débat sur le
reach (niveau de viralité d’un post) qualifié sur Facebook). La maîtrise
des points de contact client avec la marque, associée à une stratégie
de collecte des données sur ces points, s’avère donc essentielle pour
préserver un coût acceptable des data.
Bien entendu, de telles masses de données ne pouvaient être traitées sans
de nouvelles technologies qui ont permis l’éclosion des Facebook et autres
Twitter. Pour optimiser les temps de traitement sur des bases de données
gigantesques, plusieurs solutions peuvent être utilisées :
–– des bases de données NoSQL (comme MongoDB, Cassandra ou
Redis…) qui implémentent des systèmes de stockage plus performants
que le traditionnel SQL pour l’analyse de données en masse ;
–– des infrastructures de serveurs pour distribuer les traitements sur des
centaines, des milliers de nœuds. C’est ce qu’on appelle le traitement
massivement parallèle. Le framework Hadoop est sans doute le plus
connu d’entre eux. Il combine le système de fichiers distribué HDFS, la
base NoSQL HBase et l’algorithme MapReduce ;
–– le stockage des données en mémoire (Memtables) plutôt que sur disques
permet d’accélérer les temps de traitement des requêtes ;
–– enfin, d’innombrables outils de visualisation sous des formats très
variés (cartes, charts, data…), et leurs algorithmes associés, permettent
d’analyser, de comprendre et de restituer sous formes intelligibles des
grandes quantités de données.
Innovations et technologies 81
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1. Source : http://selection.datavisualization.ch.
82 La transformation digitale
seront utilisées pour améliorer le produit… mais aussi l’usine d’où il sort.
Il est ainsi intéressant de constater que le digital, en connectant l’usine et
le client (en tout cas ses usages) fournit de nouvelles raisons de rapprocher
les usines des marchés… à l’opposé du mouvement de déplacement de la
production vers des pays à faibles coûts salariaux.
À suivre… Ces technologies, et d’autres plus éloignés de notre propos,
sont détaillés dans une étude McKinsey de mai 2013.2
No limit !
Même s’il est parfois de bon ton de critiquer les superlatifs utilisés pour
cette révolution qui n’en serait pas une, nous sommes de ceux qui pensons,
comme l’économiste américain Erik Brynjolfsson, que nous entrons dans
une nouvelle ère qui, malgré toutes les turbulences qu’elle entraîne, devrait
nous conduire à une nouvelle ère de prospérité.
Il faut pour cela innover ; même si bon nombre d’innovations ne sont pas
de rupture, mais plus une remise en cause et une amélioration de la manière
de faire et de servir. Dans cette trajectoire les technologies jouent un rôle
central.
Nous proposons de regrouper les technologies (qui sont nouvelles depuis
bien longtemps !) selon la règle suivante : deux technologies sont dans le
même groupe si elles engendrent la même famille d’usage.
Avec cette clé de lecture, il est possible de regrouper, pour les analyser les
ruptures technologiques en cinq grandes catégories :
• La puissance de traitement : La puissance personnelle de traitement
mobile et la connectivité apparaissent comme sans limite (le cloud et
l’ubiquité).
• L’extension des devices à l’infini : les objets connectés.
• Les capteurs et les data associés.
• L’analytics, les algorithmes et le prédictif.
• La nouvelle fabrication : 3D printing, mouvement « maker » & Usine 4.0.
5
Les ruptures à l’œuvre : exemples parlants
Exemple de
↑ up / ↓ down Exemples de nouveaux usages Nouvelles technologies
marques
Deezer, ↑ Deezer, Spotify Plaisir de partager simplement la Amélioration de la qualité avec
Spotify, ↓ iTunes menacé ? musique que j’aime avec mes amis : le débit
iTunes radio création et partage de playlist, Immersion sociale totale : Partage
… Plaisir de découvrir et d’écouter sans smartphone à smartphone
engagement
Musique en Moteur d’intelligence artificielle pour
streaming proposer des artistes à l’écoute (The
Echo Nest)
86 La transformation digitale
Ergonomie incomparable à la
manipulation de CD
Possibilité d’écouter ce qu’écoute mon
voisin dans le métro
General Motors ↑ Google, Apple Voiture bourrée de capteurs Capteurs embarqués et voiture
Toyota ↓ Garmin, Tom- Assurance personnalisée connectée ou
Voiture
Renault Tom ? Aide à l’amélioration de la conduite Intégration du/des smartphone(s)
PSA Conduite automatique à bord
Airbnb ↑ Airbnb, Propriété → location → partage → Plateforme d’échange
Couchsurfing Couchsurfing échange Visite 3D
Jerevedunemaison ↓ Hôtellerie ? Plaisir de découvrir des logements plus Surveillance et engagement des
… personnels marques
Hôtellerie
Bénéficier d’un niveau de confort Avis sur les biens et les locataires
inaccessible en location
Un appartenant de 30 m2 pour le prix
d’une chambre d’hôtel
☞
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☞
Amazon ↑ Amazon Privé Kindle
FNAC ↓ Libraires Ma bibliothèque avec moi Kobo
Carrefour Ma librairie avec moi Tablettes
Livre … Business
Exportation numérique des passages
surlignés
Partage des passages les plus surlignés
Titres de presse ↑ YouTube 7 milliards de reporters (et d’espions…) Smartphone 4K
écrite ↓ TV Généralistes 100 heures de vidéos déposées sur Avec la 4G et les premiers
Pure players YouTube chaque minute smartphones 4K chaque individu
digitaux GoPro veut devenir un média pourra produire et diffuser des
(Newsweek, Slate, Beaucoup de blogs ont plus d’audience films à un standard meilleur que
Mediapart…) que les médias écrits, certains ont plus la TV actuelle
Presse et TV
Blogs (Mashable, d’influence
Techcrunch, The Comment qualifier l’information et
Corner…) valoriser l’analyse à l’ère du continu
Curateurs (Chaînes en continu et Twitter) ?
(Flipboard,
Scoopit…)
Facebook ↑ Images et vidéos Pour ces 10 ans Facebook affiche une Mobile, Mobile, Mobile
Instagram ↓ Texte légère décroissance chez les adolescents Combinaison des capteurs
Pinterest au profit de Twitter ou Ask et des réseaux (au-delà de la
Réseaux Twitter Alors que Facebook permet de gérer géolocalisation)
sociaux LinkedIn son « image » publique et de tester
Viadeo sa popularité d’autres permettent
… une communication plus fermée
Les ruptures à l’œuvre : exemples parlants 87
(Snapshot…)
☞
☞
Nikon ↑ GoPro, Kodak tué par le numérique Convergence des capteurs
Canon smartphones Convergence mobile/appareil photo Flux montant à haut débit avec
GoPro ↓ Compacts Convergence Reflex/camera la 4G
Photographie
Nokia professionnelle La technologie tirée par les
et films
Sony Le streaming montant (me too many) mobiles (marché de masse)
Leica avec la 4G Frontière pro/masse qui
… s’estompe
AXA ↑ Comparateurs, Nouvelles solidarités Smartphones
MAAF constructeurs Assurance mensualisée Capteurs médicaux
Assurance BNP automobiles, Économie horizontale Télédiagnostic
Direct Assurance nouvel entrant ? Croud everything
… ↓ Assureurs ? Assurance on demand
88 La transformation digitale
☞
Walmart ↑ Drive, livraison Préparation de plus en plus poussée Objets connectés et Beacon
Amazon J+1 Immersion digitale Indoor (BLE)
Carrefour ↓ Hyper, Livraison E-wallet / e-payment Geoloc Indoor
Distribution Zara J+3 Reconnaissance d’objet (Amazon)
FNAC
Paypal
…
Schneider ↑ Inbound Brand content (notoriété) et marketing Objets connectés = digitalisation
Evernote marketing, réseaux content (engagement contacts) de mes produits
Salesforce sociaux, Réseaux sociaux films (YouTube, Open electronic : Arduino
… services Dailymotion…), images (Pinterest,
↓ Oubound Instagram…), infographies (Pinterest,
BtoB
marketing, Blogs…), présentations (Slideshares…)
commerciaux, Mouvement maker
produits Plus de services
La distinction des usages BtoC et BtoB
s’estompe
Les ruptures à l’œuvre : exemples parlants 89
90 La transformation digitale
SEB
SEB a présenté au CES de Las Vegas en 2014 NutriCook® Connect, la
première cocotte connectée, après Actifry™ la friteuse (presque) sans huile
ou Cookéo™, le multicuiseur intelligent. Rodolphe Roux, responsable
digital de SEB, identifiait cinq piliers du digital chez SEB :
• « Le contenu : il s’agit de raconter de belles histoires ».
• « La médiatisation : autour du display et de la performance. Au total, le
groupe a 30 millions de visiteurs uniques par an sur les 180 sites de ses 23
marques dans 83 pays ».
• « Le e-business : le groupe démarre dans la vente en ligne avec
100 millions de dollars de chiffre d’affaires dans ce secteur ».
• « L’e-réputation ».
• « Le numérique : il s’agit de faire émerger des initiatives digitales pour
accompagner les produits d’aujourd’hui et de demain. On ne peut pas
avoir raison tout seul. Il faut planter des graines dans toutes les orga-
nisations en entretenant des contacts directs avec les personnes clés du
groupe et de l’écosystème ».
se dessine sous nos yeux depuis plus d’une décennie et dont la matrice est
constituée par les technologies digitales ? Essayons de résumer son propos qui
explique l’apparition d’un nouveau monde dominé par le codage et le digital
en général.
L’ordinateur présente une solution originale dans le couple support-mes-
sage qui a été transformé trois fois dans l’histoire de l’humanité.
La première fois, dans les millénaires avant J.-C., l’homme était encore
au stade oral. Le support matériel était le corps humain et le message était la
voix. Avec l’arrivée de l’écriture, le support se déplace du corps sur le papier
et le message se déplace du langage à l’écriture. Il s’ensuit deux révolutions
aux impacts gigantesques grâce à des innovations d’une portée extraordi-
naire.
Avec l’écriture :
–– le droit oral devient écrit, le serment devient la signature, la parole
devient un acte ;
–– la politique et les classes sociales se transforment avec l’arrivée des scribes
et des experts ;
–– les Grecs anciens créent la géométrie, socle technologique de toutes les
sciences dites dures ;
–– la monnaie devient le troc, rendant les échanges plus faciles et le déve-
loppement du commerce ;
–– le monothéisme, religion du livre, naît et connaît un développement
rapide…
Toutes ces innovations se sont conjuguées pour marquer une étape
majeure de l’histoire des hommes.
La deuxième fois, ce fût bien plus tard, au XVe siècle, grâce à Johannes
Gutenberg.
Avec l’imprimerie, la deuxième transformation du support-message ne
voit pas encore le changement du support matériel qui reste le papier mais
du processus industriel d’élaboration du message sur le papier. Elle induit
des changements et des innovations dont le spectre est comparable à celui
de ceux survenus à l’époque de l’antiquité :
–– le commerce avec les premiers traités de comptabilité et les premières
institutions bancaires ;
–– la religion avec l’arrivée de la réforme ;
Prendre ses marques 97
déclarait : « Je préfère une tête bien faite à une tête bien pleine. » Avant
l’écriture, la connaissance, c’était le savoir par cœur. L’homme a été libéré
d’un poids : celui de la mémoire. « Sa tête a changé. »
Avec l’ordinateur, notre tête change encore et nous assistons à l’externa-
lisation de la connaissance humaine et de ses trois facultés : la mémoire,
l’imagination et la raison. Elle se trouve devant nous, dans cette machine
qui peut recevoir, conserver et accéder à des volumes croissants de données.
Elle possède ses propres capacités de résolution de diagnostic et de résolu-
tion de problèmes et nous relie aux autres.
Ainsi « Petite Poucette » tient maintenant, entre ses mains, un nouvel
espace (GPS…), un nouvel accès à l’information (Wikipedia…),
98 la transformation digitale
1. L’auteur désigne ainsi les personnes ayant grandi enfants avec le web et les nouvelles techno-
logies de l’information et de la communication.
2. « 50 start-up qui peuvent tuer votre business », www.usine-digitale.fr, 11 décembre 2013.
Prendre ses marques 99
Il ressort de cette analyse sans concession que tous les secteurs d’activités
sont touchés, comme le prédit Michel Serres. Nous donnerons ici quelques
exemples. Combien le lecteur connaît-il de ces acteurs qui partent à l’abor-
dage sans complexe ? Les « tribus » de ces attaquants sont nommées, comme
au temps des barbares, et nous verrons plus loin la portée de ce terme qui a
sa noblesse.
☞
Apparu en 2011, Filpboard agrège des contenus
éditoriaux de sites web et de réseaux, qu’il présente sous
forme de magazine personnalisé à lire sur tablette et
smartphone. Ce service intègre des publicités. Ainsi,
Flipboard il valorise le temps d’attention des utilisateurs, tout en
donnant à la publicité la force qu’elle a sur le papier.
TRIBU Pulse (LinkedIn), Google Newsstand
UNE MENACE POUR les médias, la communication,
la publicité
Née en avril 2009, c’est l’une des premières plateformes
de financement collaboratif (crowdfunding). Avec
plus de 850 millions de dollars investis dans plus de
50 000 projets par 5 millions de personnes, Kickstarter a
Kickstarter ouvert la voie de l’innovation à la multitude.
TRIBU KissKissBankBank, Ulule, My Major Company,
My Pharma Company, WiSeed, lndiegogo
UNE MENACE POUR les biens d’équipement et de
la maison, l’industrie du divertissement
Airbnb permet à des particuliers de louer une chambre
ou leur appartement à d’autres particuliers. Plus de
9 millions de touristes ont utilisé la plateforme, qui met à
disposition 500 000 logements dans 192 pays. Le service
Airbnb repose sur la confiance. Outre les hôtels, Airbnb menace,
comme Facebook, de s’interfacer entre les fournisseurs
d’équipement et services pour la maison… et leurs clients.
TRIBU TripAdvisor, 9flats, Wimdu, House Trip
UNE MENACE POUR le tourisme, la domotique
Et pourtant
Selon une étude récente1 (1 500 personnes interrogées online d’entreprises
de toute taille dans 106 pays) :
–– 79 % des entreprises sont conservatrices (14 %) ou débutantes (65 %) dans
le digital ;
–– 6 % sont très agressives dans l’adoption des nouvelles technologies mais
sans véritable vision d’ensemble centrée sur les usages clients (« Fashio-
nistas ») ;
–– 15 % ont défini et exécutent une vision digitale (« Digirati ») ;
1. « MIT Sloan management Review School », Cap Gemini consulting, octobre 2013.
Prendre ses marques 101
FASHIONISTAS DIGIRATI
• Many advanced digital features • Strong overarching digital vision
(such as sociatl, mobile) in silos • Good governance
• No overarching vision • Many digital initiatives
• Underdeveloped coordination generating business value in
• Digital culture may exist in silos measurable ways
• Strong Digital culture
Digital intensity
BEGINNERS CONSERVATIVES
• Management skeptical of the • Overarching digital vision exists,
business value fo advanced but may be underdeveloped
digital technologies • Few advanced digital features,
• May carry out some experimentaion though traditional digital
• Immature digital culture capabilities many be mature.
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1. MIT for Digital Center for Digital Business et Cap Gemini Consulting, 2011.
2. « Les entreprises françaises et le numérique », L’Usine nouvelle, 16 octobre 2014.
102 la transformation digitale
Avec l’accroissement des flux d’échange, c’est la notion même d’œuvre qui
évolue avec les techniques de transformation (compilation, sampling…).
La littérature sur le déclin de l’industrie musicale ne manque pas et nous
sommes, pour notre part, convaincus que la révolution digitale continuera
à être un accélérateur de déclin dans un grand nombre de cas.
Il nous fallait donc nous intéresser au processus de déclin « générique »,
si l’on peut dire, afin d’en donner la meilleure lecture possible au lecteur.
Nous y reviendrons donc.
1. Quality Time de Jaap Favier, ancien dirigeant de Forrester et fondateur de « The Small
Circle » (www.thesmallcircle.com).
104 la transformation digitale
1. www.covoiturage.fr
2. www.drivy.com
106 la transformation digitale
Stade 2 Stade 4
Quête Salut à tout prix
indisciplinée du
« toujours
plus »
Stade 5
Capitulation
insignifiance ou
mort
Stade 1
Hubris né de la
réussite
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Stade 5
Redressement
et renouveau
Stade 3
Déni du risque
et du danger
Stade 4
Salut à tout prix
Stade 2
Quête
indisciplinée du
« toujours
plus »
Stade 1
Hubris né de la
réussite
Le déclin n’est donc pas une fatalité. Il suppose, a minima, une grande
lucidité individuelle et collective, une bonne interprétation des signaux
faibles ou forts et, bien sûr de l’humilité. Il faudra également beaucoup
d’énergie, mais aussi adopter les comportements adéquats, eu égard à la
difficulté de la situation.
Tableau 6.2 – L’alternative
Information et formation
Le 26 février 2008, 7 100 salons de café Starbucks sont fermés pendant trois
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Romantisme et spectacle
Si le passage aux machines à expresso automatiques a permis de réels gains
de productivité, il a fait disparaître le côté spectacle de la préparation.
Chaleur et ambiance
Les boutiques ont perdu « l’âme des temps anciens » et l’ambiance du café
de quartier. Elles sont aseptisées et stéréotypées. La passion des partenaires
pour le produit n’est plus une « évidence visible ».
Le cas Starbucks
Dans ce roman industriel qui fait fi de la crise, une transformation digitale
d’une exceptionnelle ambition a été conduite. Jugeons sur pièce (chiffres
2012) :
••Opérationnel :
––100 000 téléchargements de l’application mobile/semaine ;
––3 milliards de dollars encaissés à l’aide de la carte de fidélité ;
––900 000 heures économisées sur les temps d’attente pour les transactions
par carte et mobile, soit 10 secondes par transaction (application mobile
incluant commande et paiement) ;
––50 000 idées d’innovation soumises par les clients ;
––30 % de transactions prépayées.
••Paiement mobile :
––7 millions d’utilisateurs actifs ;
––3 millions de paiement/semaine ;
––20 % des transactions sur carte de fidélité réalisées sur mobile.
••Réseaux sociaux :
––94 % des utilisateurs Facebook sont des fans de Starbucks Coffee ou ont
un ami qui est fan ;
––34,8 millions de visiteurs sur le site web et les applications mobile ;
––54 millions de fans sur Facebook ;
––3.4 millions de followers sur Twitter ;
––900 000 followers sur Instagram.
Prendre ses marques 113
!
CÉE
PER
Affrontement
Leader de D’abord qui, Concept du Culture de la Catalyseurs
de la brutalité
niveau 5 ensuite quoi hérisson discipline technologiques
des faits
VOLANT
Le leadership de niveau 5
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DIRIGEANT EFFICACE
Niveau 4 Catalyse l’engagement et la poursuite vigoureuse
d’une vision claire et incontestable en stimulant des
niveaux de résultats plus élevés.
CHEF COMPETENT
Niveau 3 Organise personnel et ressources en vue de la
poursuite réelle et efficace d’objectifs
prédéterminés.
LA OÙ ON CE QUI
PEUT ÊTRE PASSIONNE
LE MEILLEUR LE PLUS
Le volant
Il s’agit de représenter l’inertie relative à tout lancement d’un changement.
Il faut tourner le volant plusieurs fois en commençant lentement et en
respectant bien les phases. Au bout d’un moment, tout le monde pousse le
volant : l’inertie est vaincue. En marche vers l’excellence.
De
ga
ge ch
n ire
S’e s
critui tiens
s
que
Prend Militants
I’initiative
So
è re
op
Co
s
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Irreductibles
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S’ in
Opposants
Ne prend
pas
I’initiative
Passifs
u Insatisfaits
oo
Pe p a s é
g “grognons”
ga
en
Antagonisme
Conciliant Résistant Opposant Irréconciliant
projet. Leur offrir une porte de sortie est souvent un moyen diploma-
tique de leur permettre de rentrer dans le rang sans perdre la face ni renier
leurs idées. »
• « Les hésitants ont besoin de victoires rapides, d’éléments témoignant
du succès imminent du projet pour le soutenir. Leur implication reste
faible à moyenne sans cela. »
• « Les militants (ou encore les engagés) développent une grande éner-
gie pour s’impliquer dans le projet. Sur la carte, cela se traduit par un
niveau de synergie élevé. Sevrés d’objectifs, de directives, d’arguments
et de dates butoirs, ils constituent un soutien au projet. Attention, mal
canalisé, leur engagement peut se transformer en une forme d’in-
tolérance qui repoussera les hésitants, par exemple, et déstabilisera le
projet. »
• « Les soutiens critiques sont les éléments les plus précieux à la disposi-
tion des porteurs du projet. Fauvet, Herbemont et César ont d’ailleurs
appelé ce groupe d’acteurs le « triangle d’or » car ils demeurent impli-
qués, créatifs, et constructifs. Ces personnes sont celles qui alerteront le
chef de projet s’il va dans le mur et qui chercheront des solutions alterna-
tives pour réussir le changement. »
• « Les acteurs déchirés sont enfin des individus à la fois antagonistes et
très synergiques qui apprécient l’organisation à laquelle ils appartien-
nent. Opposés au changement, ils développeront des trésors d’ingénios-
ité pour convaincre leur entourage de la menace que représente ce projet,
qu’ils vivent d’ailleurs assez mal. »
La sociodynamique propose des recommandations dans la mise en
œuvre de stratégies avec les acteurs identifiés comme des alliés1. Même si la
tendance naturelle est d’essayer de convaincre ses opposants quitte à
s’épuiser, les experts de la sociodynamique proposent des recommanda-
tions pour consolider les relations avec les alliés afin de faciliter le change-
ment :
–– bien identifier les alliés par point d’application au moyen de la carte des
partenaires ;
–– accepter les alliés comme ils sont, avec leurs humeurs, leurs critiques et
même leurs attitudes passagères de rupture ;
–– soutenir les alliés avec du jeu commun et un crédit d’intention en utili-
sant les leviers nombreux qu’offre la synergie ;
–– rechercher l’alliance avec le plus grand nombre d’acteurs quel que soit
leur niveau d’expertise, d’autorité ou de pouvoir ;
–– investir sur la ligne hiérarchique ;
–– faire preuve de jeu personnel ;
–– consacrer aux alliés l’essentiel de ses efforts et de son temps ;
–– veiller à ce qu’il soit payant d’appartenir à l’alliance et coûteux d’en être
exclu ;
–– mettre les alliés à contribution leur demandant des efforts ;
–– rester attentif au terrain car rien n’est acquis.
Largement développée en France, la sociodynamique a accompagné
l’informatisation des entreprises, le développement des ERP, les change-
ments organisationnels et les restructurations. Dans tous ces cas, la desti-
nation du changement était connue. Il fallait trouver le moyen
d’embarquer le maximum de passagers à bord et faire en sorte que le
navire arrive à bon port et que le voyage ne soit pas coûteux pour l’entre-
prise.
Cette approche qui a connu un engouement certain et que nous avons
personnellement utilisée utilement, est-elle toujours adaptée pour entre-
prendre une transformation digitale ?
Stéphane Richard1, PDG d’Orange, estime que les collaborateurs
connaissent souvent, avant qu’on les leur propose, les outils du digital car
ils les ont adopté avant l’entreprise. Ainsi, ils ont de l’avance sur elle et
deviennent demandeurs et moteurs du changement.
Nous sommes en phase avec cette assertion et nous ajoutons que
jusque-là, ils en étaient la « cible » et il fallait concevoir et mettre en œuvre
des stratégies pour venir à bout de leurs résistances. Aujourd’hui, ils
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
travaux mettent en évidence qu’il est plus aisé de faire changer des individus
constitués en groupe que des individus pris séparément. Il appréhende le
groupe comme un système en état « quasi stationnaire ». Cet état, stable en
apparence, ne serait en fait qu’un état maintenu en équilibre dans un champ
dynamique de forces opposées, les unes favorables au changement (moteurs)
et les autres à la stabilité (freins).
Le changement d’état d’équilibre s’opère alors de deux façons :
–– soit en augmentant l’intensité ou le nombre de forces motrices, favo-
rables au changement (cf. position 2 sur le schéma ci-après) ;
–– soit en diminuant l’intensité des forces restrictives au changement ou
forces pour la stabilité (cf. position 3 sur le schéma ci-après).
Niveau de
production
Diminution des
forces restrictives
pour attteindre la
situation souhaitée
Forces propulsives
Situation actuell
(relativement stable)
Ajoutons qu’il s’agit par ailleurs d’un changement qui ne propose pas de
partir d’un point A vers un point B, mais vers un point d’interrogation, tant
les forces qui s’exercent dans l’environnement des entreprises ont gagné en
intensité et en imprédictibilité. Le changement est devenu permanent et
l’objectif est avant tout d’offrir à l’entreprise agilité stratégique et flexibilité
opérationnelle. Si l’on adhère au modèle de Lewin, le mouvement cristalli-
sation-décristallisation devient donc une constante de l’organisation et
même une compétence si l’on en croit Peter Senge1 pour qui le changement
est une discipline à part entière dans l’entreprise : la cinquième discipline.2
1. Peter Senge, La danse du changement. Maintenir l’élan des organisations apprenantes, Éditions
First, 1999.
2. Peter Senge, La Cinquième Discipline. L’Art et la manière des organisations qui apprennent,
Éditions First, 1992.
7
Un modèle pour construire et piloter
la transformation digitale
Environnement
Leadership
Membership
1. Il publie dans la totale indifférence « The structure and Dynamics of Organizations and
Groups ». Ce concept est repris plus tard par Elliot M. Fox qui synthétise cet ouvrage sous la
forme du schéma de Fox.
2. François Vergonjeanne, Coacher groupes et organisations, InterEditions, 2010.
Un modèle pour construire et piloter la transformation digitale 127
Frontière Frontière
majeure externe mineure interne
(FME) (fmi)
Frontière
majeure interne
(FMI)
Fmi poreuse
Illustration : les rôles sont mal répartis dans l’organisation.
1. Elliot M. Fox synthétise en 1975, dans un article intitulé « Eric Berne’s Theory of Organiza-
tions », les travaux de celui-ci parus dans son ouvrage The Structure and Dynamics of Organi-
zations and Groups.
Un modèle pour construire et piloter la transformation digitale 131
CULTURE
LEADERSHIP MEMBERSHIP ACTIVITÉ CUSTOMERSHIP
& RÈGLES
Chaîne de valeur
VALEURS Compétences
HISTOIRE
Attentes
n ts
LOGIQUE me Activités et
te l
DE TRANSFOR-
p o r a va i actifs stratégiques
MATION m tr
Co a u
USAGES
EXPERIENCE CLIENT
MODES DE
CONSOMMATION
O
JE
B
CT
IFS
ORGANISATION
& MOYENS
GOUVERNANCE Cœ u r
sible
DIGITALE ex ten
TRIBUS
In
SAVOIR-FAIRE
le
ac
ÉTIQUETTE
ga
he
N
u
CARACTÈRE T IO
vé
Fr
VA
e
O
I NN
Ouverte
ENVIRONNEMENT
L’environnement
Amazon a été créée il y a 20 ans et s’est implantée en France il y a 12 ans déjà.
En passe de devenir le premier libraire en France, d’après XERFI, sa domina-
tion ne s’est pas faite en un jour. Or, ce n’est que depuis un ou deux ans que
Darty, FNAC, Espaces culturels Leclerc, commencent à mieux résister. Ils
ont enfin compris qu’être digital, c’est être un acteur de l’économie digitale.
Ainsi, KOBO (la liseuse de FNAC) est devenue une alternative reconnue face
à la KINDLE d’Amazon.
132 la transformation digitale
Bien sûr, cela n’allait pas de soi. La révolution digitale est issue d’une contre-
culture radicale, notamment avec l’open source, qui porte des revendications
politiques, sociologiques et économiques, derrière des options technologiques.
Dans le film de Luchini Visconti, Le Guépard, Tancrede Falconeri,
neveu du comte de Salina, s’investit dans la révolution Garibaldienne
puis rejoint l’armée régulière. Il est conscient que le changement est
nécessaire pour sauvegarder une partie des privilèges de l’aristocratie et
prononce une réplique culte : « Pour que tout reste comme avant, il faut
que tout change ».
Le web a réduit le monde en abolissant les frontières, mais il a aussi
changé le temps qui avait une autre « valeur » et était plus long. Le
monde du web est d’une surprenante rapidité et la contre-culture s’est
imposée. Les entreprises doivent devenir sensitives et, comme Tancrede
Falconeri, épouser le mouvement, non pas pour conserver des positions
mais pour continuer à exister et s’imposer ou s’imposer pour continuer
à exister.
Comprendre le web n’est pas qu’une affaire de technologie. Faut-il
rappeler que Mark Zuckerberg est diplômé en psychologie et que Steve Jobs
était avant tout un génie du design intransigeant et visionnaire ? C’est une
affaire de sensibilité, d’enthousiasme, de disruption, de culture, de vision
du monde, de compétences…
PlayStation
Omnicom Group Publicis Fullsix Group IPG Next Idea Havas WPP Aegis Media
Lycos
Amazon
Skype
Double clik Nelads ExoClick Weborama AFFlight
Cadremploi.fr
Acer
Affilinet Illyx Waffiliation Shop Mediafilliation
Firefox
Kayak Public Idées Commission Google Display/ Effiliation
Affiz Adserver TF1 Publicité OpenX Hi média
junction Network
SpotXchange Rightmedia BittAds Android
Bing Ads NetAffiliation Facebook Yahoo
networking Advertising Amaury médias Facebook Exchange Opera software AdECN
Zanox Hi media Pubdigitale Clicmanager.fr Doubleclick for Lagardère Figaro medias
Yahoo Microsoft Advertising LinkedIn
Orange Millenialmedia Microsoft TradeDoubler publishers Publicité
Exchange
Advertising AdCloud
iAd, Lagardère AOL Abc média
eBay Advertising Orange Ad Market
Reactivpub.com Publicité Free
Wanadoo
SFR
The Trade Desk Adconion PubMatic DataXu MediaMath Triggit Turn
Orange
Efficient Frontier Sociomantic Appnexus Advertising.com Dfpi by Google
AOL
NetADge Rubicon Google Admeld ValueClick media Invite media AD Portal Webgains
Dell
France
Francité Télécom
DreamWorks Microsoft Hotmail Gmail by Google YouTube Disney Dailymotion Instagram Activision
Twitter Zynga Facebook Outlook.com Ubisoft Yahoo AOL Nintendo Electronic Arts
Samsung
Orange
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Explorer
KGB Deals Groupon Bon-privé Foursquare ClubDeal Google others
Dealissime Pages Jaunes Irvingsocial MyFab Letrader.fr Dealgroop Make the price
Numericable
MSN
Google
Voila
Bouygues
Ge Edge Sales force Maxifier ComScore Mediaplex Weborama Télécom
OpenX Yahoo Web Analytics Nielsen Phorm Double click
Indeed
Adobe AdTechn DoubleVerify Google Analytics Omniture Emediate AdTruth 24/7 media Sony
Le customership
mieux que personne ne peut évaluer mieux qu’eux ce qu’ils traversent. Mais les
fondateurs de patientslikeme.com sont néanmoins des leaders. Ils ont créé une
tribu qui voulait désespérément communiquer et ils ont donné à leurs membres
les moyens pour le faire. Ils ont resserré les liens de la tribu. C’est aussi du
leadership. »
Figure 7.9 – Patientslikeme.com
et fort prisé des touristes. On y passe des soirées délicieuses avec une vue
imprenable sur le port de Sidi Bou Saïd et la baie de Carthage qui a vu partir
le fameux et très disruptif général Hannibal Barca vers l’Espagne où il a
formé une armée pour traverser les Alpes avec des éléphants et défaire Rome
sur ses propres terres pendant près de dix ans. Un émule des Scythes, à n’en
pas douter.
La direction du Café des Délices a cru que le réel succès de son établisse-
ment pouvait justifier une augmentation des tarifs sans précédent et un
comportement de plus en plus cavalier avec sa clientèle. La réaction fut
brutale, durable et… digitale. Une véritable bataille orchestrée sur Face-
book. Touristes et locaux confondus l’ont rebaptisé « Café des Arnaques ».
Des groupes de réflexion ont été organisés pour mettre au point des actions.
Il était, à titre d’exemple, demandé aux membres de cette nouvelle tribu,
qui entendait laver l’affront fait à la clientèle, de se rendre dans l’établisse-
ment, d’y prendre place avant de se lever en groupe, sans commander, pour
quitter le lieu. Il va sans dire que l’évaluation TripAdvisor en a été impactée
avec les conséquences sur l’image de marque et les ventes.
Rappelons qu’en France, le boycott est rigoureusement interdit mais les
applications se développent. Ivan Prado, créateur, de www.buycott.com
souhaite « transformer des millions de gens en activistes amateurs »1. Le
principe est simple : des informations sont données sur les entreprises qui
fabriquent les produits dont les codes barres sont scannés grâce au smart-
phone durant les courses. L’application indique si l’achat est conforme au
code éthique du consommateur. Il ne s’agit pas de boycotter un produit en
ne l’achetant pas, mais de « répertorier les pratiques des sociétés agroali-
mentaires » pour organiser la cohérence entre le budget achat du consom-
mateur et ses principes.
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L’activité
L’activité de l’entreprise s’entend au sens générique. Nous entendons par
activité les domaines d’activités industrielles, les processus qui les portent et
constituent la chaîne de valeur et les actifs stratégiques qui intègrent bien
les données et les systèmes afférents.
1. « Buycott : une application pour faire des courses responsables », www.lefigaro.fr, 22 juin
2014.
146 la transformation digitale
1. Nicolas Colin et Henri Verdier, L’âge de la multitude, Armand Colin, 2e édition, 2015.
Un modèle pour construire et piloter la transformation digitale 147
1. Jean-Marie Ducreux, René Abate, Nicolas Kachaner, Le grand livre de la stratégie, Eyrolles,
2009.
148 la transformation digitale
L’ORCHESTRATEUR L’INTÉGRATEUR
Complète
M
Chaîne de valeur
Partielle
M
Lien direct Réintégration Savoir Standards Échelle Actifs
Le cœur extensible
Prenons deux exemples dans des secteurs voisins : le transport et l’hôtel-
lerie. La dépendance vis-à-vis des sites de réservation s’est construite avec
l’inversement progressif d’un rapport de force entre l’amont (recherche et
conception du produit-service) et l’aval (distribution).
Les sites de réservation en ligne, comme Expedia, ont investi la filière du
transport aérien avec une offre axée sur la recherche du meilleur prix sur un
marché fragmenté à forte intensité concurrentielle. La bonne qualité de
l’expérience utilisateur sur le maillon de la distribution online a été acquise
par la performance du comparateur et la réputation des transporteurs. Elle
a permis de prospérer et de passer une alliance objective avec les utilisateurs
internautes dont le nombre croissant a inversé le rapport de force avec les
acteurs de l’aval qui portent tous les risques et supportent tous les investis-
sements. Une fois la plateforme en place, elle peut offrir d’autres services au
sein de sa même filière, se positionner comme l’acteur incontournable grâce
au comparateur. Le « price taker » est devenu le « price maker » et a investi
d’autres filières, comme l’hôtellerie. La logique est la même : capter le client
et l’essentiel de la valeur produite.
À l’évidence, les filières ont sous-estimé la menace que représentaient ces
nouveaux entrants qui ont été considérés comme des canaux d’acquisition
additionnels et ils ont tardé à réagir. Les écarts culturels et technologiques,
le poids des organisations et des systèmes dits « legacy », le déficit d’esprit
entrepreneurial… n’ont pas aidé à rattraper le retard.
A contrario, la SNCF s’est lancée très tôt dans le digital et a fait de
Voyages-sncf.com une plateforme, sur laquelle on peut réserver une
voiture, un vol ou un hôtel. Certes la SNCF agit sur un secteur qui a été
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
jusque-là protégé ; elle n’en suit pas moins la même logique. Sa plate-
forme a fait du transporteur ferroviaire historique un voyagiste à part
entière qui se paie le luxe d’être un comparateur. Comme Apple, la SNCF,
a construit, à partir d’un produit traditionnel un actif stratégique (l’en-
semble des données transporteur) qui lui offre un champ stratégique plus
large.
150 la transformation digitale
Figure 7.12 – Voyages-sncf.com
Plus intéressant encore, ce nouveau lit est mis en vente, ainsi que les
oreillers et les différents linges de lit afin que les clients puissent dormir
aussi bien chez eux qu’à l’hôtel. Quand les fabricants de lits deviendront-ils
des hôteliers ?
Dans les deux cas que nous venons d’évoquer, une innovation a été un
moteur qui a amélioré l’agilité stratégique de l’entreprise et a permis le
développement d’un cœur extensible.
L’extension de la gamme des produits et services offerts à une clientèle
connue constitue un développement du cœur extensible de toutes les plate-
formes. Dans un secteur industriel traditionnel, les ruptures et la mise en
place d’un cœur extensible sont d’autant plus envisageables que cinq types
de barrières classées dans un ordre croissant d’importance sont plus ou
moins franchissables1 :
• Inertie : les clients ne s’accommodent pas du statu quo.
• Mise en œuvre technique : elle peut être surmontée en utilisant le porte
feuille technologique existant et accessible.
• Écosystème : la barrière peut être surmontée sans altération de l’envi-
ronnement de l’entreprise.
• Nouvelles technologies : la nouvelle technologie peut altérer la concur-
rence.
• Modèle d’entreprise : il n’est pas nécessaire d’adopter la structure de
coût des acteurs traditionnels.
En revisitant ces barrières, mesurons à quel point la révolution digitale,
s’appuyant sur les aspirations des internautes, a favorisé le franchissement
de certaines d’entre elles. On peut évidemment penser à toute l’industrie de
l’entertainment et des loisirs qui ont été les premières touchées, mais toutes
les entreprises sont menacées à court ou à long terme. Dans ce contexte,
une entreprise menacée se doit de créer sa propre rupture, comme Four
Seasons. Les GAFA prendront tous les espaces qu’ils peuvent prendre.
Google est devenu un comparateur et il suffit de taper « Vol Paris Genève »
comme nous l’avons fait pour obtenir ce qui suit. Quid de la réaction des
spécialistes (Opodo, Kayak…) ?
1. « Pleins feux sur les ruptures », Harvard Busines Review, février-mars 2014.
Un modèle pour construire et piloter la transformation digitale 155
Jeff Bezos explique sa vision de la technologie dans une lettre aux action-
naires d’Amazon (extrait) :
« Si vous consultez un manuel récent d’architecture logicielle, vous trou-
verez peu de choses que nous n’appliquons pas chez Amazon. Nous utili-
sons les systèmes transactionnels de haute performance, le rendu complexe
et la mise en cache d’objets, les flux de travaux et les files d’attente, l’intelli-
gence économique et l’analyse de données, l’apprentissage et la reconnais-
sance de motifs, les réseaux de neurones et les prises de décision probabilistes
et encore maintes autres techniques plus diverses les unes que les autres. Et
bien que nos systèmes se fondent sur les résultats les plus récents de la
recherche en informatique, ça n’a pas toujours été suffisant : nos architectes
et ingénieurs ont dû conduire leurs propres travaux de recherche dans des
directions encore in explorées par le monde académique. Nombre de
problèmes auxquels nous sommes confrontés n’ont pas de solution toute
faite. Nous devons donc, non sans plaisir, inventer des approches nouvelles.
[...]
Tous ces efforts consacrés à la technologie auraient bien peu d’impor-
tance si nous isolions cette technologie aux confins d’une sorte de départe-
ment de R&D. Mais telle n’est pas notre approche. La technologie irrigue
toutes nos équipes, tous nos processus, notre façon de prendre des décisions
et l’approche de l’innovation dans tous nos métiers. La technologie est
profondément intégrée à toutes les activités d’Amazon. [...]
Ces techniques ne sont pas mises en œuvre en vain – c’est grâce à elles
que nous gagnons de l’argent. Nous vivons dans une période d’augmenta-
tion extraordinaire de la bande passante disponible, de l’espace disque et de
la puissance de traitement. Tout cela va continuer d’être de moins en moins
cher de plus en plus vite. Nous avons dans nos équipes certains des experts
technologiques les plus compétents du monde. Ils nous aident à relever des
défis qui sont à l’extrême limite de ce qu’il est possible de faire aujourd’hui.
Comme nous l’avons discuté à de nombreuses reprises, nous avons la
conviction inébranlable que les intérêts de long terme de nos actionnaires
sont parfaitement alignés avec les intérêts de long terme de nos clients. »1
La compréhension, le goût et la maîtrise de la technologie sont donc au
cœur d’un avantage compétitif nouveau à construire et/ou à défendre. Ils
doivent s’accompagner des évolutions culturelles qui la sous-tendent et
1. Traduction. Source : « La transition numérique au cœur de la stratégie d’entreprise », étude
financée par La Poste et la Caisse des dépôts et consignations, réalisée par The Family.
Un modèle pour construire et piloter la transformation digitale 157
enrichir tous les métiers, tous les processus et toutes les fonctions de l’entre-
prise, des fonctions opérationnelles aux fonctions de support. La mise en
place de logiques de réseaux internes à l’entreprise ou externes, avec des
partenaires, devient alors le vecteur d’une porosité créatrice et consubstan-
tielle au monde du web.
Citons, à titre d’exemple, le partenariat entre Amazon et Netflix qui loue
les services d’Amazon Web Services, géant du cloud computing, alors que le
groupe possède lui-même un service concurrent de Netflix pour la diffu-
sion de vidéos en streaming.
Si la coopétition est un concept au succès très relatif dans l’économie
traditionnelle, c’est une réalité dans l’économie digitale. Grâce aux techno-
logies. Elles permettent également le passage au statut de plateforme avec la
monétisation de données recueillies de façon innombrable et transmises
grâce à l’interconnexion des systèmes et à la mise disposition de ressources
souvent et en partie gratuites pour favoriser l’amorçage.
Il n’est de position dominante dans le web sans développement d’une
plateforme. Pour les entreprises du secteur traditionnel, il peut se heurter à
des obstacles bien connus en matière de système d’information qui consti-
tuent déjà des obstacles pour le développement de l’agilité de l’organisa-
tion :
–– vétusté ;
–– modularité faible ;
–– stratification historique ;
–– manque d’ouverture ;
–– déficit de compétences pour l’évolution.
Il faut y ajouter la problématique complexe de la prise en compte des
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
Le membership
Comme nous l’avons vu, la cohésion est un facteur essentiel. Ses ciments sont :
–– la confiance ;
–– le respect de la « promesse » ;
–– la bonne régulation des processus relationnels internes et externes.
CO
HÉ
SI
O
N
la
p er
lop ce
e ve fian
D con
Engagement du leader
M
er
ES
o nn ir
SE
D spo
e
Pour ne pas subir la bataille pour les talents digitaux, et ce ne sera pas
une mince affaire, il faut être reconnue comme une destination digitale
c’est-à-dire une organisation où les conditions sont réunies pour que
s’expriment dans la durée l’innovation digitale et une culture d’ouverture
dans toutes ses fonctions et dans tous ces domaines d’actions : marketing,
technologies, commerce et service client, mais aussi ressources humaines…
Banalité que de le rappeler, mais comment embarquer dans une démarche
de transformation sans que le top management s’exprime sur la vision. Et
pourtant cette étape manque souvent pour deux raisons essentielles :
–– certaines entreprises séparent encore les sachants des exécutants ;
–– il est difficile de définir la cible d’une transformation digitale qui pour-
rait s’apparenter à un processus continu d’évolution.
La formulation doit pouvoir exprimer les changements attendus en interne :
–– organisation ;
–– mode de fonction ;
–– principes de collaboration ;
–– mesure du succès individuel et collectif ;
–– performance opérationnelle.
Et en externe :
–– périmètre et ambition business ;
–– connexion clients ;
–– partenaires ;
–– cas inspirants ;
–– concurrents.
Mais le digital permet aussi de nouveaux modes de recrutement avec le
rôle incontournable pris par les réseaux sociaux, et en particulier LinkedIn,
Facebook et Viadeo.
Avec Graphsearch, Facebook permet de rechercher un candidat non
seulement sur les attributs renseignés de son profil, mais sur les traces lais-
sées par chaque membre Facebook :
–– essentiellement aux états-Unis ou pour les « cols bleus » à ce stade ;
–– sur 5 millions de candidats aux états-Unis, 16 % se manifestent via
leurs profils Facebook ;
Un modèle pour construire et piloter la transformation digitale 161
–– gap recrute ses vendeurs sur Facebook. Quoi de plus efficace que de
proposer à une personne qui suit plusieurs marques de vêtements et qui
adore converser sur son réseau social préféré sur les dernières tendances
de la mode de travailler comme vendeur chez Gap ?
LinkedIn (330 millions de membres en 2014 et 187 millions de visi-
teurs uniques par mois), dont 60 % des utilisateurs sont des salariés qui
ne cherchent pas un job, développe à grande vitesse des services de plus en
plus sophistiqués destinés aux entreprises… et aux chasseurs de têtes.
Ces derniers ont à faire face de plus en plus à des concurrents 100 %
digitaux.
QAPA1 s’est lancé avec succès dans l’intermédiation du marché du recru-
tement en permettant la mise en relation directe de l’employeur qui a mis
en ligne une annonce avec des mots clés soigneusement sélectionnés et de
candidats qui mettent en ligne leur CV. Un algorithme de pertinence
permet de faire un tri puis adresse régulièrement à l’employeur les CV
correspondant à sa recherche et fait les relances nécessaires. Le coût pour
l’employeur (quelques dizaines d’euros par CV transmis) est sans commune
mesure avec les honoraires des cabinets de recrutement : quelques milliers,
voire dizaine milliers d’euros selon les profils et la nature du recrutement
(recrutement sur vivier ou chasse directe).
Qapa.fr est le site d’emploi qui connaît la plus forte croissance en
France avec une progression du trafic de 43 % d’un mois sur l’autre2 et
180 000 nouveaux candidats de tous secteurs qui s’inscrivent chaque mois sur
www.qapa.fr pour trouver un emploi. Le système de mise en relation entre
candidats et recruteurs basé sur le « matching » a séduit plus de 2 millions de
candidats et présente plus de 90 000 offres d’emplois. De quoi constituer une
belle plateforme.
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
1. www.qapa.com
2. Nielsen-Médiamétrie février 2014 - mars 2014
162 la transformation digitale
Figure 7.17 – Qapa.fr
Culture et règles
Si le mot culture est souvent un « mot-valise », Eric Berne la définit de façon
très restrictive, ce qui nous facilite bien les choses. Elle comprend :
–– l’étiquette : ensemble des us, coutumes et des traditions comporte-
mentales à adopter pour faciliter son intégration. L’étiquette intègre les
valeurs du groupe et est plus ou moins rigide ;
Un modèle pour construire et piloter la transformation digitale 163
par la simple création d’une division web au sein de la direction des ventes
de TGV. En termes managériaux, cette configuration a attiré des talents du
web : les jeunes collaborateurs rejoignaient Voyages-sncf.com pour travailler
dans le web avec le risque assumé de les voir partir, pas chez Air France ou la
Société Générale, mais dans des start-up ou des pure players web.
La filialisation est une réponse parmi d’autres, mais le détourage qui, au
moins dans un premier temps et dans des conditions à ajuster selon les
contextes, permet l’attractivité nous paraît une étape incontournable.
1. Anna Davies, Devin Fidler, Marina Gorbis, « Future work skills 2020 », Institute for the
Future Phoenix, avril 2011.
Un modèle pour construire et piloter la transformation digitale 167
1. Anna Davies, Devin Fidler, Marina Gorbis, « Future work skills 2020 », Institute for the
Future Phoenix, avril 2011.
168 la transformation digitale
1. « La mauvaise gestion des compétences coûte cher aux entreprises », Le Figaro Économie,
www.lefigaro.fr, 22 avril 2014.
2. Étude MIT-Cap Gemini Consulting : « The Digital Advantage: How digital leaders outper-
form their peers in every industry », 2012.
Un modèle pour construire et piloter la transformation digitale 169
L’organisation digitale
La révolution digitale est déjà passée et les nouvelles « nouvelles » technologies
(web sémantique, Internet des objets…) annoncent encore des innovations
majeures qu’il faudra intégrer. Le temps est à la transformation permanente
depuis plusieurs années. Le digital en accélère le niveau d’urgence, le rythme et
le nombre d’itérations nécessaires pour rester dans la course. Elle suppose une
connexion et une compréhension intime du web et l’import, au sein de l’entre-
prise, de tout ce qui fera sa force et sa singularité dans le futur.
Pour y parvenir, la veille, sous toutes ses formes, est évidemment indis-
pensable, mais non suffisante, il faut s’ouvrir pour se nourrir de toute
l’énergie et de l’activité du web qui ne demande qu’à circuler. La Frontière
Majeure Externe (FME) doit se « perméabiliser » sans compromettre son
intégrité, notamment pour permettre l’open innovation.
Cette ouverture peut demander, ou non selon les cas, l’ajustement de
principes de sécurité parfois portés au pinacle dans certains secteurs. Elle
doit s’accompagner d’une véritable activité politique pour s’imposer,
guidée par le développement d’une forme de sensitivité qu’ont parfois du
mal à développer certaines industries traditionnelles.
Ce ne sont pas les activités qui sont en cause, mais plutôt le poids de
schémas de management trop longtemps tournés vers l’interne et le main-
tien d’une forme de statu quo rassurante, alors même que la création de
valeur se fait à l’extérieur de l’organisation, là ou les gens s’activent, créent,
échangent… sur le web.
Il faut admettre au préalable que l’ouverture d’une organisation n’est
pas naturelle mais chaque organisation trouvera sa propre voie pour y
parvenir en s’appuyant sur ses collaborateurs qui sont tous des enfants du
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
digital et font preuve à titre individuel d’une remarquable agilité sur le web.
–– la complexité ;
–– la transparence.
Être en phase avec cet environnement nécessite une agilité et une flexibi-
lité qui ne peut être acquise que par la maîtrise parfaite de tous ses processus
et par un pilotage serré de ceux-ci. Michel Raquin et Hugues Morley-Pegge1
(Will Be Group), sont des ardents défenseurs du pilotage par les processus.
Lorsqu’on observe le fonctionnement de beaucoup d’entreprises organisées
par fonction, notamment lorsqu’elles atteignent une certaine taille, on
constate que la chaîne des différentes activités qui concourent à assurer au
client la prestation attendue n’est pas maîtrisée.
En effet, chacun, dans sa propre « sphère » de responsabilité s’efforce de
bien faire sans pour autant se sentir coresponsable de la prestation servie au
client. Cela est d’autant plus vrai que bien souvent chaque contributeur,
au-delà de sa propre activité, n’a pas connaissance et donc conscience de
celles des autres contributeurs.
Nos organisations en silos ne sont pas adéquates pour assurer de manière
stable et durable la prestation attendue par le client. Le pilotage par les
processus devient alors une réponse. C’est remettre le client au centre des
préoccupations en confiant à quelqu’un (le pilote de processus) une respon-
sabilité transversale pour :
–– assurer de manière permanente la maîtrise des chaînes d’activités, donc
des processus ;
–– les améliorer en coordonnant les différents contributeurs (améliora-
tions, optimisations, reconstruction des processus) dans un souci d’ali-
gnement avec la stratégie de l’entreprise.
À une organisation par fonction, on ajoute, avec le pilote de processus,
une organisation matricielle ».
1. Michel Raquin, Hugues Morley-Pegge, Piloter par les processus, Éditions Maxima, 2e édition,
2013.
Un modèle pour construire et piloter la transformation digitale 171
1. www.sengager.fr
2. Photos des doigts de pied en éventail sur la plage sur les réseaux sociaux.
172 la transformation digitale
plus le rôle central qu’elle détient aujourd’hui. Si c’est vrai à l’échelle des
entreprises, ça l’est, a fortiori, à l’échelle des organisations.
Les technologies créent des passerelles entre les secteurs d’activité et les
écosystèmes et elles en créeront entre les silos historiques des organisations.
C’est ainsi qu’Olivier Charbonnier1 évoque les « entreprises latérales » et
cite deux modèles :
–– l’intermédiation « qui valorise la création de valeur hors les murs à
orchestrer à partir des réseaux sociaux » ;
–– l’excubation « qui encourage l’éclosion de start-up accolées au lieu
de faire la révolution en interne ». Il s’agit bien de créer les externa-
lités nécessaires au développement de l’innovation de rupture.
Il sera intéressant de suivre la transformation drastique et militante de
Tony Hsieh, fondateur de Zappos, qui supprime tous les postes de mana-
gers et opte pour l’holacratie. L’e-marchand de chaussures a décidé
d’adopter une organisation totalement agile. Exit les managers. Le travail
est effectué par des équipes auto-organisées. Sûrement extrême et inappli-
cable aux grandes entreprises, mais à coup sûr riche d’enseignements.
Quel rôle peut encore jouer le manager dans ce type d’organisation ?
À l’exclusion, au moins partielle, des managers de proximité chez qui
perdure la nécessité de garantir la bonne exécution des tâches (mais avec
plus de prise d’autonomie selon l’esprit du Lean), l’attitude du manager
doit être moins directive pour aller vers l’influence et la transmission.
Accenture évoque le « stewardship » : un coaching rapproché où il s’agit plus
de transférer les valeurs d’engagement, de service client, d’exemplarité,
d’authenticité que de micro-manager les collaborateurs. Il a aussi un rôle
important à jouer dans la réduction de la complexité et de « l’infobésité »
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
1. Olivier Charbonnier, Sandra Enlart, à quoi ressemblera le travail demain ?, Dunod, 2013.
174 la transformation digitale
SNCF logique de constituer une filiale au format d’une agence de voyage : les
modèles économiques prévalaient à cette création car le voyage venait d’un
monde intermédié où les distributeurs jouaient un rôle essentiel (toutefois
bien moindre dans le ferroviaire que dans l’aérien par exemple).
Mais la filiale a aussi des inconvénients :
–– elle génère du frottement et peut amplifier les luttes de pouvoir et les
logiques de territoire ;
–– selon la configuration, elle peut créer des surcoûts structurels.
Pour autant, elle permet :
–– une meilleure visibilité sur le modèle économique ;
–– la capacité de nouer des partenariats capitalistiques et de créer ainsi un
écosystème agile ;
–– l’attractivité de profils différents et l’incubation d’une culture moins
mainstream.
Le leadership
La littérature sur le leadership est très abondante. Éric Berne distingue deux
catégories de leadership (il est important de faire la distinction entre
leadership et leader). Il en fait une fonction dans l’entreprise et distingue
deux catégories :
• Le leadership historique.
• Le leadership actuel.
Le leadership historique intègre :
–– le leader primal qui a créé l’entreprise et l’a structurée ;
–– le leader éphémère, un leader qui est décédé et auquel il est fait encore
référence car il a marqué l’histoire ;
–– le leader actuel, en fonction.
Le leadership actuel intègre :
–– le leader responsable qui possède « le titre » et la légitimité au sein de
l’entreprise par sa nomination et sa place dans l’organigramme ;
–– le leader effectif sur lequel nous reviendrons ;
–– le leader psychologique qui est très influent dans la structure au sein de
laquelle il jouit d’une grande reconnaissance.
Un modèle pour construire et piloter la transformation digitale 175
Ces trois fonctions peuvent être cumulées par une même personne à un
instant donné de la vie de l’entreprise.
Le manager gère, le leader inspire et entraîne. Le thème du leadership est
fondamental pour entreprendre un changement et a fortiori une transfor-
mation digitale.
Le leader se distingue par ses qualités professionnelles et relationnelles.
• Qualités professionnelles :
–– comprendre et répondre à son environnement ;
–– avoir une vision ;
–– partager sa vision ;
–– capter les signaux faibles.
• Qualités relationnelles :
–– singularité ;
–– authenticité.
Pour Seth Godin1 : « Le top management recherche maintenant des
leaders. Il veut des hérétiques pour créer le changement avant que le chan-
gement ne leur tombe dessus… Pas de leader sans tribu, pas de tribu sans
leader ». Il considère que le leader peut et se doit d’améliorer l’efficacité de
sa tribu en :
–– « transformant l’intérêt commun en un objectif guidé par la passion et
un désir de changement ;
–– fournissant les outils permettant aux membres de consolider leur com-
munication ;
–– influençant la tribu pour lui permettre de développer et d’attirer de
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
nouveaux membres ».
Il précise que « la plupart des leaders ne se concentrent que sur le troi-
sième procédé. Une tribu plus grande serait en quelque sorte meilleure alors
que les deux premiers ont toujours plus d’impact ».
Les réseaux sociaux publics ou d’entreprise offrent aux leaders des
moyens considérables de démultiplication. Martin Luther, qui a défié l’au-
torité du pape au début du XVIe siècle et lancé son fameux « Tout homme,
une bible à la main est pape » s’est déclaré « soumis à la seule autorité reli-
gieuse de la Bible ». Il crée alors le protestantisme qui s’est développé et qui
1. Seth Godin, Tribus, nous avons besoin de vous pour nous guider, Diateino, 2009.
176 la transformation digitale
1. Fondateur de Virgin qui a développé des activités dans plusieurs domaines, notamment le
transport aérien.
Un modèle pour construire et piloter la transformation digitale 177
1. Vineet Nayar, Les employés d’abord, les clients ensuite, Diateino, 2011.
178 la transformation digitale
qui ne fait que rendre plus difficile le travail de ceux qui sont dans la « zone de
création de valeur » qui regroupent les collaborateurs et les clients.
Tout son travail a eu pour objectif de libérer cette zone de création valeur
et de l’étendre en inversant la pyramide organisationnelle :
–– les employés d’abord ;
–– les clients ensuite ;
–– la direction… en dernière position.
Il lui fallait, au préalable, exposer et partager une vision :
• L’industrie est dominée par des géants américains (IBM, EDS, Accenture)
alors que le top 5 des sociétés indiennes, HCL compris, se contente de
1 % du marché.
• Les clients, souvent engagés dans des contrats de dix ans, souhaitent
reprendre le contrôle (nouveau mode de collaboration, transparence,
flexibilité et « attention » de la part de leurs prestataires…).
Il lui fallait aussi exposer une ambition :
• Les géants américains se partagent les 200 premières entreprises du
G1000.
• Il faut se focaliser sur les 800 autres en portant les efforts sur la valeur
apportée au client plutôt que sur le volume d’affaire réalisé avec eux.
C’est le principe de « value-centricity » qui s’accompagne de nouveaux
critères de la valeur délivrée.
En avril 2007, The Economist écrit : « Le cinquième plus grand sous-trai-
tant indien, HCL Technologies, rend de plus en plus nerveux IBM et les
autres mutinationales. »1
Les employés de HCL, comme les clients, ont été invités à s’exprimer sur
un portail de valeur pour émettre des suggestions et lancer des projets et
Vineet Nayar a partagé ses propres responsabilités dans la transformation,
notamment grâce au portail U&I (Vous et Moi) où il invite ses collabora-
teurs à lui faire des suggestions de solutions pour des problèmes qu’il se pose.
Il ira encore plus loin avec le partage de la responsabilité de la définition
et de l’évaluation de la stratégie et la redéfinition de son propre rôle de PDG
en se posant les questions les plus sincères sur sa propre valeur ajoutée dans
le processus. Ainsi, les trois cents directeurs ayant la responsabilité d’éla-
1. « Hungry Tiger, Dancing Elephant : How India is changing IBM’s World », The Economist,
4 avril 2007.
Un modèle pour construire et piloter la transformation digitale 179
borer des plans stratégiques pour leurs zones ou domaines les ont-ils postés,
enregistrements audio à l’appui, sur le portail MyBlueprint afin de les
partager avec les huit mille managers. L’idée étant d’aller vers une évalua-
tion peer to peer plutôt que top-down. Cette transparence nouvelle a eu pour
effet direct l’amélioration de la qualité des travaux produits, chacun se
sachant lu et écouté par un grand nombre, et la création de relations
nouvelles et fructueuses entre pairs. Les employés ont eu la possibilité de
formuler des commentaires sur MyBlueprint et les contributions étaient
bien plus pertinentes que ce qui était proposé dans les évaluations de fin
d’année.
Ce que nous devons retenir de cette formidable transformation pour
conduire la transformation digitale, c’est que la transparence a créé de la
confiance qui a créé une dynamique de changement qui a créé de la valeur.
Dans son projet de transformation, la transparence a été, pour Vineet
Nayar, un élément essentiel de fabrication de la confiance :
–– les objectifs sont connus de chaque membre de l’organisation qui peut
évaluer sa contribution à l’atteinte de ceux-ci ;
–– l’engagement de chaque partie prenante est plus aisé à mesurer ;
–– pour la génération Y, la transparence est une donnée de base, habituée
qu’elle est à échanger sur les réseaux en toute liberté ; elle n’attend pas
d’en faire moins au sein de son entreprise ;
–– dans une économie du savoir où les clients partagent l’information sur
leur entreprise avec leurs prestataires et fournisseurs pour s’améliorer,
comment ceux-ci pourraient-ils expliquer qu’ils ne le font pas eux-
mêmes avec leurs collaborateurs ?
Partie 3
Que fait-on lundi ?
Réalisations tangibles
• Part de vente en ligne.
• ARPU : revenu moyen par utilisateurs.
• Audience (totale et visiteurs uniques) par device, taux de conversion, churn.
• Engagement client sur les réseaux sociaux.
Que fait-on lundi ? 183
Préparer un séminaire
Un séminaire se prépare ! Bien en amont (6 à 8 semaines avant), soumettre
au top management de la « matière à réflexion » sur les grandes tendances et
les disruptions constatées ou identifiables dans des industries ne se limitant
(surtout !) pas à la sienne.
Souvenez-vous : « Innovation came from the fringe. »
Que fait-on lundi ? 185
pointer les enjeux de pouvoir avant même toute réflexion sur le fond straté-
gique. Pour autant, il n’en est pas moins vrai que dans le cas du digital, la
question d’un porteur clairement identifié se pose. Pourquoi ?
• Le digital est un sujet qui combine généralement au moins trois organi-
sations différentes dans l’entreprise :
–– le marketing ;
–– la relation client et la distribution (toute organisation qui traite de
l’expérience client) ;
–– l’informatique ;
–– sans parler des directions opérationnelles qui managent le personnel
au contact des clients et qui ont un rôle très important à jouer en tant
qu’ambassadeur-acteur des parcours omni-canal.
• Il n’est pas facile, dans ces conditions, de faire avancer des sujets néces-
sairement transversaux : le profil de directeur de projet ou de programme
ne suffit pas toujours.
• Pour articuler la transformation digitale, il faut, a minima :
–– produire de la veille articulée autour des métiers de l’entreprise ;
–– développer l’écosystème à l’origine de l’open innovation ;
–– tester, apprendre, développer et accélérer ;
–– mettre à bord les métiers et « dealer » avec eux ;
–– définir et conduire la feuille de route des systèmes d’informations ;
–– définir et piloter l’évolution des expériences clients ;
–– mesurer l’impact et itérer ;
–– créer et animer la communauté des numériques, diffuser dans les
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
2. Culture et règles :
structurer son ouverture digitale
L’innovation fermée
• L’investissement en R&D est l’Alpha et l’Omega de la réussite.
• Les entreprises doivent générer leurs propres idées et les développer seules
pour rentabiliser les investissements et acquérir un avantage compétitif.
• Les processus d’innovation doivent être contrôlés en interne et la
propriété intellectuelle doit être défendue férocement pour ne pas être
dépossédée d’un actif immatériel.
• L’entreprise met l’innovation sur le marché et en assure le suivi.
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• …
L’open innovation
• Il n’est pas nécessaire d’être à l’origine de l’innovation pour en tirer profit.
L’efficacité du business model prime sur la date de mise sur le marché. Il
faut se mettre en posture plutôt qu’essayer d’imaginer l’avenir.
1. Henry Chesbrough, Open innovation : the new imperative for creating and profiting from
technology, Harvard Business Review Press, 2005.
190 La transformation digitale
1. « Les barbares attaquent » par The Family fondée par Alice Zagury, Oussama Amar et
Nicolas Colin.
Que fait-on lundi ? 195
4. Activité :
consolider le socle technique digital
Loin de nous l’idée de placer la solution technologique avant la définition
des premières étapes de la stratégie digitale : nouveaux business models,
transformation du marketing, de l’expérience client et des usages. Pour
autant, le digital introduit des besoins essentiels parfois assez résistants aux
décisions stratégiques. Ce sont ces développements que nous souhaitons
présenter ici car ils nous semblent faire partie des sujets à démarrer dès lundi
prochain. Nous ferons cette présentation de la façon la plus accessible
possible et nous assumons de paraître outrageusement simplificateur aux
yeux des spécialistes des architectures et technologies digitales.
Nous avons identifié quatre domaines d’actions sur le court terme qui
concernent :
–– les nouvelles architectures ;
–– les plateformes e-commerce ;
–– les applications e-commerce ;
–– les data.
La mise en place des nouvelles architectures dites services est un préa-
lable indispensable au développement « propre » du commerce en ligne, a
fortiori de l’omnicanal. Ces services, dénommés API, normalisent les
échanges et les ordres d’exécution entre différentes applications. À titre
exemple, une architecture de services normalisés ne possédera qu’une appli-
cation autorisée à mettre à jour les avis clients au travers d’un service (API)
de mise à jour des avis. Simple sur le papier, la mise en place de ces architec-
tures nécessite un travail approfondi dont l’ampleur croit avec l’ancienneté
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
des objets digitaux (vidéos, images, sons…) avec la baisse des coûts de créa-
tion et d’achat.
Il en va de même, dans un deuxième temps, des applications e-com-
merce. À supposer que des applications existent déjà, ce qui est souvent le
cas, la convergence nécessite une réflexion plus approfondie qui ne peut
trouver sa place qu’après une réflexion stratégique portant a minima sur les
questions suivantes :
• Comment s’articule le online et le physique par pays et jusqu’où adapter
l’expérience aux usages locaux parfois très différents ?
• Y a-t-il des pays exclusivement e-commerce, au moins à l’ouverture. Si
oui, ont-ils une application spécifique ?
• Comment mettre en scène la montée en puissance de l’expérience
client sur le web et le multidevices ?
• Quelle déclinaison dans les pays ?
Enfin, le vaste sujet des data et la manière de le traiter. Si l’on entend
par big data le déluge de données, sous des formats très variés, généré par
les traces laissées par le surf sur Internet (sites et réseaux sociaux), les nom-
breux capteurs inclus dans nos chers smartphones et tablettes et, de
manière générale, toutes les traces d’échanges entre objets connectés (les
transactions avec ou sans contact, les identifications lors de passages dans
des lieux physiques…), il apparaît utile de mettre en œuvre une démarche
progressive visant à :
–– chercher le sens que l’on veut donner à sa démarche big data pour l’en-
treprise et pour le consommateur ;
–– apprendre par l’expérimentation avant de construire des « cathédrales ».
Les applications des big data sont pour la plupart encore à inventer.
Donner du sens au big data, c’est se fixer des priorités entre ces différents
domaines de contribution et… apprendre en testant.
Mais il y a un revers à ces démarches : leur durée. Dans des industries
où les systèmes d’informations « legacy » sont plutôt issus de développe-
ments spécifiques (et non de progiciels) comme la banque et l’assurance
ou le transport et le tourisme, ces délais peuvent être très longs en ne
bénéficiant pas de la vitesse de l’éditeur externe de solutions progicielles
(les ERP par exemple). Il faut alors construire la démarche en deux
temps :
–– faire des développements agiles, en parallèle des systèmes « legacy » pour
activer des « options » permettant le développement du digital (en béné-
ficiant par exemple des capacités récentes de traitement des données
issues des technologies big data) ;
–– entamer en parallèle l’évolution des systèmes « legacy » avec la difficulté
de projeter les besoins à au moins trois ans.
contenu digital sur l’ensemble du groupe. Définir, sur cette base, une
trajectoire de convergence de la nomenclature produit (PIM) et digitale
(DAM) respectueuse des priorités business (BU, Pays, marques…).
• Lancer une analyse des données stratégiques présentes dans le système
d’information. Les moments de vérité clients perdus faute d’outil de
collecte (que ce soit online ou dans les magasins/points de contacts)
doivent être identifiés afin de lancer le chantier data par la structuration
et l’enrichissement des données « propriétaires » qui seront résolument
« smart » avant d’être « big ».
• Mettre en place des cycles de développements court terme afin de se
doter d’options pour accélérer dans le digital.
198 La transformation digitale
5. Customership :
comprendre son écosystème client
L’amélioration de la « loyauté du client » et de « l’intimité client » emprunte
différentes voies non exclusives. Dans les environnements contraints, que
toutes les entreprises connaissent actuellement, la réduction des coûts est
plus que jamais de mise au moment même où le client attend la même
« attention » à n’importe quel point de contact avec l’entreprise :
–– call centers ;
–– sites web ;
–– boutiques en ligne ;
–– boutiques physiques ;
–– applications mobiles :
–– réseaux sociaux…
Les consommateurs ont pris du pouvoir, et parfois le pouvoir, au point
d’organiser des campagnes digitales de boycott (pratique rigoureusement
interdite en France).
Avec l’avènement des réseaux sociaux, de nouveaux systèmes d’influence
et de recommandation se mettent en place. Chaque consommateur devient
donc un prescripteur au mieux, un « basher » au pire et est beaucoup plus
écouté par ses pairs consommateurs que tous les canaux de communication
que les marques ont mis en place.
Les entreprises n’étaient pas préparées à ce nouveau rapport de force qui
met chaque jour plus à mal le modèle de communication dit « broadcast »
dans lequel une marque envoie un message à destination d’une cible qui a
des moyens d’interactions faibles.
L’image de la marque, longtemps fonction de l’importance du budget
communication et publicité, est de plus en plus fonction de l’interaction de
la marque avec ses clients (expérience client) à laquelle on peut appliquer un
facteur multiplicatif qui serait la communication que font les clients, entre
eux, sur la marque. Nous parlons donc de conversations entre la marque et
son client et de conversations entre les clients eux-mêmes. Ces conversations
bénéficient de lieux et de temps étendus, grâce au web, pour se développer.
Si les choses ont changé avec les possibilités offertes par le web et ses
plateformes, mais aussi grâce à un mouvement sociétal de fond chez les
consommateurs qui peuvent se montrer de plus en plus exigeants et
défiants, il est donc temps de passer d’une organisation Brand Centric à une
Que fait-on lundi ? 199
Mais attention ! Les premières victoires sont décisives, il faut les préparer
méthodiquement en adaptant les approches et les trajectoires aux contextes
des entreprises :
–– « hard » (les marchés, la rentabilité, la compétition…) ;
–– « soft » (les femmes et hommes en place, la culture, l’histoire récente et
plus ancienne, la raison d’être, les marques, la nature de la relation aux
clients…).
Au terme de cet ouvrage, nous remercions le lecteur pour son attention
et nous souhaitons sincèrement à toutes les entreprises, et particulièrement
celles du secteur dit traditionnel, de réussir une transformation digitale,
chacune à sa manière et selon ses moyens, qui leur permettra de se consoli-
der, de se développer et de se réinventer.
LEXIQUE
Space X 190 W
Spotify 56, 86
Walmart 89
Starbucks 110, 176
WhatsApp 59
Sun Micro Systems 190
Will Be Group 170
T Withings 31, 60, 76, 185
TabletHotels 137 X
Tesla Motors 190 XERFI 131
Toyota 86
TripAdvisor 29 Y
Twitter 87, 152, 171 Yahoo 194
Yunomi 104
U
Z
Unilever 103
Zappos 8, 173
V Zara 89
Zynga 99
Viadeo 87, 160
Volvo 103
Voyages-sncf.com 67, 185
Index Général
B M
BOFU (Bottom of the funnel) 47 Marketing 33
Business models 11 Marketing BtoB 44
Marketing digital 135
C me-business 28
Chaîne de valeur 148 Membership 127
Collaboration intra-entreprises 11 MOFU (Middle of the funnel) 47
Connexion client 11
Croud everything 9
P
Crowdfunding 100 Plan marketing 11
Customership 131 Pricing 12
D R
Drive 33 Réputation 12
Réseaux sociaux 22
E
e-business 28
S
Sourcing 11
F Stratégie océan bleu 50
Freemium 10
T
H Théorique organisationnelle de Berne
Hard-discount 33 126
Hérisson (concept du) 117 TOFU (Top of the funnel) 47
Hypermarché 33
W
I we-business 28, 29
Innovation frugale 69 Wikibrand 42
L Z
Leadership 127 ZMOT (Zero Moment of Truth) 47, 48
Lovebrand 42