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Résumé. – La chirurgie des artères digestives s’adresse à des lésions très diverses dominées par
l’athérosclérose ostiale ou juxtaostiale du tronc cœliaque et de l’artère mésentérique supérieure. L’abord de
ces artères profondément situées est difficile, ce qui explique la multiplicité des voies d’abord décrites. La
revascularisation est faite par l’une des trois grandes méthodes : endartériectomie, pontage ou transposition.
La discussion reste ouverte entre les partisans des pontages rétrogrades et ceux des pontages antérogrades et
entre les partisans d’une revascularisation complète ou incomplète. Les indications de chirurgie des artères
digestives peuvent être symptomatiques, préventives ou anatomiques. Les complications sont rares si la
chirurgie est réalisée de façon adaptée. La possibilité d’occlusion tardive par hyperplasie intimale nécessite
une surveillance à long terme par échographie-doppler.
© 2003 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Mots-clés : artères digestives, tronc cœliaque, artère mésentérique supérieure, artère mésentérique
inférieure, endartériectomie transaortique, pontage antérograde, pontage rétrograde,
transposition de l’artère mésentérique supérieure.
Rappel anatomique
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La vascularisation artérielle digestive est classiquement caractérisée
par un système à trois étages naissant de l’aorte abdominale : tronc
cœliaque, artère mésentérique supérieure (AMS) et artère
mésentérique inférieure (AMI) [12, 21, 93]. On peut y adjoindre un
Toute référence à cet article doit porter la mention : Kieffer E. Chirurgie des artères digestives. Encycl Méd Chir (Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Techniques chirurgicales - Chirurgie vasculaire, 43-105, Techniques
chirurgicales - Appareil digestif, 40-070, 2003, 17 p.
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DISSECTIONS SPONTANÉES
Les dissections aortiques peuvent s’étendre à l’AMS et déterminer
une ischémie intestinale aiguë, facteur de très mauvais pronostic car
elle est souvent méconnue ou reconnue seulement tardivement [67].
Les dissections autonomes des artères digestives sont
exceptionnelles [17, 62] (fig 5). Elles intéressent avant tout l’AMS.
Parfois favorisées par une DFM, elles entraînent plus souvent une
ischémie intestinale aiguë car intéressant la zone d’origine des
branches collatérales critiques.
MALADIE DE TAKAYASU
atypique [104]. Une forme particulière mais rare d’athérosclérose des Les lésions des artères digestives sont relativement fréquentes au
artères digestives, baptisée coral reef atherosclerosis [85], est représentée cours de la maladie de Takayasu et sont généralement associées à
par des calcifications circulaires de l’aorte avec bourgeons des lésions aortiques et des artères rénales [56]. La localisation
exubérants faisant saillie dans l’aorte et ses branches viscérales, préférentielle est l’AMS, souvent atteinte sur une grande longueur
rénales et digestives. (fig 6). Mais la traduction clinique de ces lésions est souvent
silencieuse, du fait de leur évolution lente.
LIGAMENT ARQUÉ DU DIAPHRAGME
Il s’agit d’une compression extrinsèque anatomiquement fréquente, ARTÉRITE RADIQUE
réalisant un conflit entre le tronc cœliaque (et parfois l’AMS) et le Les lésions radiques [66] intéressent les artères exposées dans le
ligament arqué du diaphragme (fig 4). Mais son expression clinique champ d’irradiation, ce qui explique l’absence habituelle de
est très variable et discutée [5, 10, 52, 88]. Dans tous les cas existe un collatéralité et leur caractère le plus souvent symptomatique.
risque important de dilatation poststénotique.
MALADIE DE RECKLINGHAUSEN
EMBOLIES Les lésions des troncs des artères digestives liées à la présence dans
Les embolies des artères digestives ne représentent que 10 % des l’adventice de l’artère de neurofibromes la comprimant sont rares
embolies artérielles périphériques mais sont responsables de 50 % au cours de la maladie de Recklinghausen. Elles sont généralement
environ des ischémies intestinales aiguës [3, 34, 59, 73]. Sans doute en associées à une coarctation de l’aorte abdominale et à des sténoses
raison de son calibre et de sa naissance de l’aorte à angle aigu, c’est des artères rénales [62].
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6 Aortographie de profil
montrant une occlusion
étendue de l’artère mésenté-
rique supérieure au cours
d’une maladie de Takayasu.
Voies d’abord
L’abord des artères digestives principales (tronc cœliaque et AMS)
est rendu difficile par leur caractère central, entre deux structures
fixes : le rachis en arrière et le pancréas en avant [14, 15, 48, 94, 111]. Le garde à une veine jéjunale qui la croise par en avant pour rejoindre
choix d’une voie d’abord adéquate est donc primordial. Il repose la veine mésentérique supérieure située à droite d’elle, et surtout à
sur une bonne analyse artériographique des lésions et sur le choix a la présence de plusieurs branches collatérales : premières artères
priori de la technique à utiliser. En cas de constatations jéjunales à gauche, branches coliques à droite. Cette voie d’abord est
peropératoires imprévues, il est important de pouvoir adapter la celle, élective, de l’embolectomie de l’AMS. Elle peut également être
voie d’abord au nouveau geste prévu. utilisée pour l’anastomose distale des pontages de l’AMS.
Nous distinguerons les voies abdominales pures des voies ¶ Voie interduodénopancréatique (fig 8)
thoracoabdominales.
Le côlon est récliné vers le haut, l’angle duodénojéjunal vers le bas.
Celui-ci est décroché par section du muscle de Treitz, ce qui permet
VOIES ABDOMINALES PURES d’aborder l’AMS depuis le voisinage de son origine, juste au-dessus
de la veine rénale gauche, jusqu’à la racine du mésentère, en
La voie d’abord la plus utilisée est la laparotomie médiane sus-
soulevant le corps du pancréas. À ce niveau, l’artère est dépourvue
ombilicale ; mais on peut également utiliser une laparotomie
de branches, sauf sur son bord droit d’où naissent l’artère
transversale ou bi-sous-costale [41, 42, 99].
pancréaticoduodénale gauche et éventuellement une artère
hépatique droite. Cette voie d’abord peut être prolongée en
¶ Voie intramésentérique, pré- et sous-duodénale (fig 7)
continuité par un abord latéroduodénal médian de l’aorte sous- et
Le côlon est récliné vers le haut et le grêle vers le bas, ce qui fait inter-rénale et de l’origine des artères rénales.
apparaître comme une corde qui se tend le pédicule mésentérique
supérieur. L’incision de la face antérieure du mésentère mène ¶ Voie interhépatogastrique (fig 9) [19, 79]
directement sur l’AMS, à l’endroit où elle croise le troisième Le lobe gauche du foie est mobilisé vers la droite après section du
duodénum. L’artère est à ce niveau superficielle, mais il faut prendre ligament triangulaire gauche. Le petit épiploon est effondré,
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30°
30°
L’exposition obtenue permet l’anastomose distale de pontages de permet la réalisation de pontages antérogrades vers le tronc
l’artère hépatique commune, du tronc cœliaque, ou plus rarement cœliaque ou l’artère hépatique commune, mais aussi, généralement
de l’artère splénique. Surtout, associée à un abord de l’aorte associés à un pontage du tronc cœliaque, vers l’AMS, si les lésions
supracœliaque par incision du pilier droit du diaphragme, elle ne dépassent pas les 2 premiers centimètres de l’artère.
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80°
¶ Décollement du mésogastre postérieur (ou rotation avant sur un appui-bras. Elle associe une thoracotomie antérieure
viscérale médiane des auteurs anglo-saxons) [80, 89] (fig 10) par le septième espace, une courte phrénotomie (6 à 8 cm) radiée et
une laparotomie sectionnant le muscle grand droit gauche dans l’axe
Ce décollement peut être fait par voie médiane (mais le risque de de la thoracotomie jusqu’à la ligne médiane. Cette incision est
décapsulation splénique et de pancréatite aiguë postopératoire est poursuivie éventuellement en laparotomie médiane ou, plus
important) ou mieux par voie sous-costale gauche, éventuellement rarement, prolongée dans l’axe de la thoracotomie jusqu’au niveau
élargie en lombotomie. du muscle grand droit droit. Une fois les berges de la phrénotomie
En incisant le feuillet péritonéal en arrière de la rate, on pénètre suspendues à celles de la thoracotomie, on dispose d’un excellent
dans un plan avasculaire qui permet de séparer en avant la rate et le jour sur la région sous-phrénique, en particulier pour un
corps du pancréas, en arrière la loge rénale, avec au premier plan la décollement du mésogastre postérieur et une endartériectomie
veine rénale gauche et la veine capsulaire moyenne. En poussant ce transaortique des artères digestives.
décollement jusqu’à la ligne médiane, on arrive ainsi sur l’aorte.
Après section de l’artère diaphragmatique inférieure gauche, on ¶ Thoracophrénolombotomie ou lombotomie [27, 83, 91, 95, 101,
Il permet d’aborder la face postérieure de l’AMS dans sa portion Elles sont multiples.
intramésentérique.
[2, 25, 41, 63, 84, 86, 104, 106, 107]
ENDARTÉRIECTOMIE
VOIES THORACOABDOMINALES
L’endartériectomie s’adresse essentiellement aux lésions
athéroscléreuses, bien que certains l’aient appliquée aux formes
¶ Thoracophrénolaparotomie [33, 40, 71, 108]
(fig 12)
chroniques de la maladie de Takayasu. L’endartériectomie
Elle est faite sur un malade en position de trois quarts, un billot transartérielle est abandonnée, de même que l’endartériectomie
longitudinal placé sous le côté gauche, le bras gauche ramené en ostiale, par clampage latéral de l’aorte autour de l’origine de
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l’artère et artériotomie longitudinale. Seule s’est imposée Si cet aspect en « langue de chat » de l’intima distale n’est pas
l’endartériectomie transaortique, généralement indiquée pour des obtenu, l’aortotomie est fermée de la même façon et un clamp
lésions ostiales des deux artères digestives principales (tronc appliqué à l’origine de l’AMS. On peut alors ouvrir celle-ci, soit
cœliaque et AMS) (fig 14). transversalement, soit mieux longitudinalement mais au prix d’un
La voie d’abord est soit abdominale pure (laparotomie médiane ou patch de fermeture, pour retirer la partie distale du séquestre sous
sous-costale, éventuellement étendue en lombotomie), soit mieux contrôle de la vue [2, 106] (fig 14D).
thoracoabdominale. Dans tous les cas est fait un décollement du L’existence de lésions athéroscléreuses de l’aorte viscérale ou des
mésogastre postérieur. Après contrôle de l’aorte de part et d’autre artères rénales n’ajoute pas grand-chose à l’intervention (fig 15, 16).
des artères digestives puis des artères digestives elles-mêmes au- L’aortotomie est poursuivie en inter-rénal (en réclinant vers le bas la
delà des lésions palpables, l’aorte est clampée. Une aortotomie en veine rénale gauche) et l’endartériectomie est faite
« crosse de hockey » est effectuée, permettant de réaliser un volet de circonférentiellement, intéressant l’aorte et les artères rénales à la
paroi aortique à charnière droite. L’endartériectomie est débutée au demande. L’important est d’avoir bien disséqué l’artère rénale droite
niveau de la berge du volet, à la spatule. Elle détache l’ensemble du sur plusieurs centimètres, pour qu’elle puisse s’invaginer dans
séquestre au niveau du tronc cœliaque, où celui-ci est généralement l’aorte jusqu’à la limite distale de l’endartériectomie, et de fixer
court (< 1 cm), puis l’intima aortique est sectionnée aux ciseaux de éventuellement l’intima aortique distale par 3 ou 4 points de
Potts de l’autre côté, de façon à pédiculiser le séquestre sur l’AMS, Prolènet 5×0.
où il est généralement plus important (4 à 5 cm). L’artère est
invaginée à l’intérieur de l’aorte jusqu’à ce que la fin du séquestre Les avantages de l’endartériectomie sont sa rapidité d’exécution : 15
apparaisse, avec son aspect typique en « langue de chat ». Le à 20 minutes de clampage aortique, même si la voie d’abord prend
passage d’un dilatateur s’assure de l’absence de ressaut distal de du temps ; l’absence de matériel prothétique ; et la possibilité
l’AMS. Puis l’aortotomie est fermée directement par un surjet de d’inclure les artères rénales et l’aorte viscérale dans l’intervention.
Prolènet 5×0. Après purge gazeuse, la circulation est rétablie, Ses inconvénients sont sa lourdeur, due à la voie d’abord et au
d’abord dans les artères digestives, puis dans les artères rénales et clampage de l’aorte viscérale, avec ses risques de retentissement
les artères des membres inférieurs. hémodynamique et thromboembolique.
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éviter ensuite une coudure du pontage au bord inférieur du – raccourcir au maximum le trajet, en donnant au pontage un aspect
pancréas. La veine est anastomosée par deux hémisurjets ou un en Z ou en T, ou même en lui donnant une configuration
surjet circulaire de Prolènet 6×0, puis elle est passée en avant du antérograde (entre l’aorte immédiatement sous-rénale et l’AMS
pancréas, dans l’arrière-cavité des épiploons, jusqu’au pied du distale) [23, 49] ;
pédicule hépatique où elle est anastomosée en terminolatéral à une
artériotomie longitudinale de l’artère hépatique commune, par deux – ou au contraire l’allonger, pour lui faire décrire une courbure
hémisurjets de Prolènet 7×0. Si, par manque de matériel veineux, harmonieuse en C [18, 81, 109]. Les modalités pratiques diffèrent suivant
une prothèse doit être utilisée, on a le choix entre un trajet que l’AMS est laissée en place ou sectionnée, que le pontage
rétropancréatique (mais comportant un risque de blessure veineuse provient de l’artère iliaque droite et passe sous le mésocôlon droit,
en arrière du pancréas et de trajet dysharmonieux) ou la couverture ou qu’il passe à gauche en arrière du hile rénal gauche [68].
de la prothèse dans son trajet prépancréatique par une Nous décrirons un pontage prothétique aorto- ou iliomésentérique
épiplooplastie, destinée à l’isoler de l’estomac. supérieur en arceau. L’aorte ayant été abordée par voie
Les pontages rétrogrades destinés à l’AMS posent davantage de latéroduodénale médiane et l’AMS par voie interduodéno-
problèmes car ils sont plus courts et anastomosent deux vaisseaux pancréatique, on administre l’héparine (0,5 mg/kg) par voie
de directions opposées. Deux tendances s’affrontent : générale et on clampe complètement l’aorte sous l’AMI (ou l’artère
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¶ Pontages antérogrades [6, 19, 20, 35, 50, 69, 82, 86, 115]
(fig 19)
Ils tirent habituellement leur origine de l’aorte supracœliaque,
exceptionnellement de l’aorte ascendante ou d’une artère sous-
clavière ou axillaire.
Nous décrirons le pontage prothétique aortocœliaque à partir de
l’aorte supracœliaque (fig 19A). Il ne nécessite habituellement qu’une
laparotomie médiane et un abord de l’aorte supracœliaque par voie
interhépatogastrique. Une fois l’aorte supracœliaque isolée sur 5 à
6 cm et sa bonne qualité reconnue par la palpation, elle est clampée,
le plus souvent complètement. Une pastille triangulaire à sommet
inférieur ou ovalaire, à grand axe oblique en bas et légèrement à
droite, est excisée à son flanc antérogauche. Une prothèse de
Dacront de 7 ou 8 mm de diamètre est anastomosée en palette
latérale, par deux hémisurjets de Prolènet 4×0. Comme
précédemment, il est généralement indiqué, pour ne pas rétrécir
l’anastomose, d’obtenir cette prothèse à partir d’une prothèse
bifurquée au niveau du corps de laquelle on découpe une collerette.
L’aorte est alors déclampée et la prothèse clampée au voisinage de
son origine. Après clampage de l’artère hépatique commune et de
l’artère splénique, le tronc cœliaque est alors sectionné
18 Plicature d’un pon-
transversalement, en suturant son origine par un point en X de
tage rétrograde aortomésen-
térique supérieur. Prolènet 2×0, éventuellement appuyé sur des attelles de feutre de
Téflont. L’artère coronaire stomachique est sectionnée peu après son
origine et une artériotomie longitudinale faite pour réaliser une
anastomose terminoterminale en palette de la prothèse au tronc
cœliaque, par deux hémisurjets de Prolènet 6×0.
Lorsque, cas relativement rare, une revascularisation de l’AMS isolée
est faite, la prothèse est passée en rétropancréatique ou en
prépancréatique (mais alors recouverte par une épiplooplastie)
jusqu’à l’AMS abordée par voie interduodénopancréatique ou par
voie intramésentérique (fig 19B). L’anastomose distale est faite le
plus souvent en terminolatéral à une artériotomie longitudinale de
2 cm par deux hémisurjets ou un surjet circulaire de Prolènet 6×0.
iliaque droite). On excise une pastille triangulaire à sommet Lorsque, cas beaucoup plus fréquent, tronc cœliaque et AMS doivent
supérieur ou ovalaire à grand axe oblique en haut et à gauche et on être revascularisés, la solution la plus simple consiste à implanter
lui anastomose une prothèse de Dacront de calibre 7 ou 8 mm. Il est sur l’aorte supracœliaque le corps coupé court d’une prothèse
souvent indiqué, pour ne pas rétrécir l’anastomose, d’obtenir cette bifurquée (fig 19D). La branche courte, destinée au tronc cœliaque,
prothèse à partir d’une prothèse bifurquée au niveau du corps de peut être la gauche ou la droite. Une autre solution consiste à réaliser
laquelle on découpe une collerette. La prothèse est anastomosée par un pontage séquentiel (fig 19E) avec une prothèse de Dacront de 7
deux hémisurjets ou un surjet circulaire de Prolènet 4×0 ou 5×0. ou 8 mm de diamètre, anastomosée à l’aorte supracœliaque et
Après déclampage aortique et reclampage de l’origine de la destinée à l’AMS, au flanc antérieur de laquelle on anastomose le
prothèse, on fait décrire à celle-ci un trajet en arceau qui l’amène tronc cœliaque, directement [114] ou par l’intermédiaire d’une courte
jusqu’au contact du mésocôlon transverse puis la fait repartir en sens prothèse. On peut également revasculariser le tronc cœliaque avec
inverse vers l’AMS. L’anastomose peut être faite en terminolatéral, cette prothèse et anastomoser au flanc de celle-ci une deuxième
à une artériotomie longitudinale de 2 cm de l’AMS ou en prothèse destinée à l’AMS [26, 96] (fig 19C).
terminoterminal, après section de l’AMS et éventuellement de Enfin, on peut, en clampant l’aorte autour du tronc cœliaque, ouvrir
certaines de ses branches. L’anastomose est faite par deux celui-ci par une incision à cheval sur l’aorte et patcher cette incision
hémisurjets ou un surjet circulaire de Prolènet 5×0 ou 6×0. La à l’aide d’une prothèse destinée à l’AMS.
prothèse doit être isolée du duodénum et des anses grêles, soit par
Les avantages des pontages antérogrades sont qu’ils ne posent pas
une épiplooplastie, soit si l’occlusion de l’AMI permet sa section à
de problème de plicature ou de torsion, qu’ils ont un sens
l’origine, par le mésocôlon gauche.
physiologique et qu’ils utilisent une artère donneuse le plus souvent
Les avantages des pontages rétrogrades sont qu’ils ne nécessitent saine et appelée à le rester.
qu’un clampage de l’aorte sous-rénale (voire même d’une artère
Leurs inconvénients sont un clampage aortique le plus souvent
iliaque) et une laparotomie.
complet, qui comporte un risque hémodynamique de retentissement
Leurs inconvénients sont liés aux difficultés de positionnement, déjà cardiaque et, dans une moindre mesure, un risque thrombo-
évoquées (fig 18), mais il est rare qu’on ne parvienne pas à trouver embolique des artères viscérales, rénales et des membres inférieurs.
une solution évitant la plicature ou la torsion du pontage ; au trajet Leurs indications sont donc les malades en bon état général, surtout
antiphysiologique ; et au fait qu’ils utilisent une artère donneuse peu si l’aorte sous-rénale est malade, mais insuffisamment pour justifier
sûre, l’évolutivité de l’athérome étant plus grande à ce niveau qu’à un remplacement qui n’aurait pas d’autre indication que de servir
celui de l’aorte supracœliaque. de point de départ à un pontage rétrograde.
Leurs indications sont donc :
– les malades fragiles, incapables de supporter un clampage de TRANSPOSITIONS [44, 57, 61]
(fig 20, 21)
l’aorte supracœliaque et/ou une thoracotomie ;
Elles intéressent essentiellement l’AMS. Celle-ci est abordée par
– les malades dont l’aorte (ou une artère iliaque) est satisfaisante, voie interduodénopancréatique et largement libérée depuis son
soit spontanément, soit après remplacement (le problème étant de origine jusqu’à ses premières branches. La présence d’une artère
savoir s’il est indiqué de remplacer l’aorte pour pouvoir faire le hépatique droite constitue habituellement une contre-indication à
pontage, alors qu’il n’y aurait pas eu d’indication sans cela). la technique. L’aorte sous-rénale est abordée par voie
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latéroduodénale médiane classique. Après ligature appuyée de des artères rénales, au flanc antérodroit de l’aorte. L’aorte est alors
l’AMS au voisinage de son origine (et éventuellement clampée et une pastille quadrangulaire excisée à ce niveau. Puis
endartériectomie par éversion du moignon distal), l’AMS est l’AMS est anastomosée directement à l’aorte, par un surjet de
amenée au contact de l’aorte, de façon à décrire un trajet Prolènet 5x0, en utilisant la technique du « parachute » pour faire
harmonieux et sans tension. Ce point est en général assez proche le plan postérieur de l’anastomose.
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Les avantages de cette technique sont sa simplicité et le fait qu’elle Ses inconvénients sont le fait qu’elle exige des lésions strictement ostiales
n’utilise pas de prothèse (si elle le fait, il s’agit d’une réimplantation ou juxtaostiales de l’AMS et qu’elle utilise comme artère donneuse
indirecte, qui n’est qu’une variante de pontage rétrograde). l’aorte sous-rénale, toujours susceptible d’évolution athéroscléreuse.
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permettent ; sinon pontages multiples : les deux artères digestives à dont la réanimation a tendance à masquer la symptomatologie. En
partir de l’aorte supracœliaque, les deux artères rénales à partir de pratique, la moindre anomalie dans les suites d’une
l’aorte sous-rénale ; revascularisation digestive doit entraîner la réalisation d’une
aortographie ou une réintervention [103]. Faute de quoi, on risque
– si seulement deux artères (par exemple l’AMS et l’artère rénale
d’intervenir trop tardivement, pour ne découvrir que des lésions
gauche) sont atteintes : pontage antérograde bifurqué à partir de
ischémiques dépassées. Ces occlusions précoces sont responsables
l’aorte supracœliaque.
d’environ la moitié des décès précoces [74].
¶ Lésions associées des artères digestives et de l’aorte Tardive, elle est généralement due à une hyperplasie intimale au
niveau des zones opérées. Elle peut être asymptomatique, surtout si
sous-rénale
la revascularisation initiale avait porté sur plusieurs artères. Sinon
– Endartériectomie transaortique, surtout en cas de lésions elle se traduit généralement par une récidive des symptômes
artérielles rénales associées et de lésions isolées de l’aorte sous- d’ischémie intestinale chronique, [65, 98] voire par une ischémie
rénale et des artères iliaques primitives, se prêtant à une intestinale aiguë. Leur fréquence non négligeable impose une
endartériectomie complète ; surveillance clinique et si possible par échographie-doppler régulière
de ces malades.
– le plus souvent remplacement prothétique de l’aorte sous-rénale
+ pontage rétrograde ou transposition de l’AMS ; L’infection est heureusement exceptionnelle et complique
exclusivement les interventions ayant comporté la mise en place
– parfois pontage antérograde à partir de l’aorte supracœliaque d’une prothèse.
(surtout pour le tronc cœliaque) et remplacement prothétique de
Le syndrome de revascularisation est rare mais constitue une
l’aorte sous-rénale.
complication particulière de la chirurgie des ischémies intestinales
chroniques sévères [ 8 9 , 11 5 ] . Immédiat, il se traduit par une
¶ Lésions associées des artères digestives et de l’aorte transsudation de la paroi intestinale, responsable d’une ascite
thoracoabdominale postopératoire, voire par une rupture spontanée de la rate ou, encore
– Lésions occlusives athéroscléreuses (coral reef) : endartériectomie plus grave, du foie. Secondaire, quelques jours après l’intervention,
transaortique ; il se manifeste par un vasospasme splanchnique à la reprise de
l’alimentation. Il peut être prévenu par la reprise progressive de
– anévrismes thoracoabdominaux : opération de Crawford avec l’alimentation et l’administration de calcium-bloqueurs.
endartériectomie transaortique ou pontages séparés suivant
l’extension distale des lésions ;
COMPLICATIONS LIÉES À LA VOIE D’ABORD
– coarctation (congénitale ou dans le cadre d’une maladie de
Takayasu) : résection-greffe aortique ou pontage aortique en Les traumatismes iatrogènes de la rate et les pancréatites
Dacront, associé à des revascularisations des artères viscérales par traumatiques ne sont pas rares après rotation viscérale médiane,
autogreffe artérielle fémorale superficielle [56]. Il faut en effet éviter surtout faite par laparotomie [18, 78, 89].
les réimplantations directes, source de traction et d’hyperplasie Un chylopéritoine peut s’observer après dissection de l’AMS au
intimale. voisinage de son origine [57].
COMPLICATIONS GÉNÉRALES
Revascularisation complète
Essentiellement cardiaques et respiratoires, elles expliquent une
ou incomplète ? partie de la mortalité postopératoire. Mais, lorsqu’on est en présence
d’une ischémie intestinale chronique, on se trouve parfois forcé
La présence de lésions chirurgicales des deux artères digestives d’accepter un certain risque opératoire pour saisir la chance d’une
principales (tronc cœliaque et AMS) pose le problème d’une guérison par la chirurgie. C’est ici que les techniques
revascularisation complète ou non. endovasculaires pourraient éventuellement avoir un rôle.
En faveur de la revascularisation incomplète plaident de nombreux
arguments : elle suffit presque toujours à faire disparaître la
symptomatologie ; elle est techniquement plus simple et mieux Cas particuliers
supportée ; les résultats à long terme ne semblent guère différents
dans certaines séries de ceux des revascularisations complètes [39, 57,
66, 105]
. SYNDROME DU LIGAMENT ARQUÉ DU DIAPHRAGME
En faveur de la revascularisation complète vient l’argument majeur La responsabilité du ligament arqué du diaphragme dans un tableau
que l’occlusion tardive d’une des deux revascularisations, qui n’est évoquant un angor intestinal est difficile à affirmer. Mais il existe
pas exceptionnelle, laisse persister le plus souvent un bon résultat certainement, une fois éliminées les autres causes de douleurs
clinique [22, 38, 46, 74, 75, 78, 99, 111]. abdominales, d’excellentes indications. La décompression
chirurgicale classique peut éventuellement être faite sous
En pratique, si l’état général le permet, nous sommes partisans d’une
laparoscopie. Mais elle ne suffit pas toujours et il peut être nécessaire
revascularisation complète. Si l’état général est médiocre, une
de pratiquer une dilatation, une angioplastie ou un pontage
chirurgie dirigée le plus souvent vers l’AMS est un compromis
antérograde du tronc cœliaque.
satisfaisant.
15
40-070 Chirurgie des artères digestives Techniques chirurgicales
TRAITEMENT DES ANÉVRISMES DES ARTÈRES rétablir la continuité par une prothèse ou une greffe veineuse
DIGESTIVES implantée soit sur un segment proximal sain de l’artère, soit sur
Le principal problème est d’apprécier la nécessité ou non du l’aorte.
rétablissement de la continuité artérielle. Ailleurs, la continuité artérielle n’a pas besoin d’être rétablie : c’est
Dans certains cas, la continuité artérielle doit être rétablie : c’est le le cas pour les anévrismes de l’artère splénique et pour les
cas pour les anévrismes du tronc cœliaque, de l’artère hépatique et anévrismes des branches des artères digestives. On a alors le choix
de l’AMS. Il faut alors s’assurer d’une voie d’abord permettant un entre d’une part l’endoanévrismorraphie oblitérante ou la résection,
abord direct de la lésion, la mettre à plat (ou parfois la réséquer) et et d’autre part et surtout, les techniques endovasculaires.
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17
¶ 40-095
Chez un traumatisé présentant une hémorragie intra-abdominale importante, la décision de réaliser une
laparotomie écourtée est basée sur la connaissance par le chirurgien des risques de coagulopathie que
court le patient. Chez le blessé, les antécédents, l’existence de lésions associées, la gravité de l’hémorragie
(volume transfusé) et du choc, l’existence d’une hypothermie et d’une acidose sont les principaux critères
de décision. Cette approche impose un consensus entre l’anesthésiste-réanimateur et le chirurgien. Sur le
plan technique, l’intervention doit se limiter à faire l’hémostase la meilleure le plus rapidement possible
pour diminuer le débit des transfusions, éviter les déperditions thermiques péritonéales et permettre au
plus tôt la réanimation en milieu spécialisé. Cette hémostase est souvent réalisée par la mise en place de
champs ou de compresses (tamponnement, en particulier hépatique et rétropéritonéal) et par clampage
ou ligature des vaisseaux en cause. Les atteintes digestives et de l’arbre urinaire sont également traitées
par des procédés rapides provisoires : suture simple, ligature, utilisation de pinces mécaniques ou
drainage. La fermeture de la paroi doit se faire sans tension pour éviter le syndrome du compartiment
abdominal, en utilisant au besoin des prothèses. L’embolisation artérielle radiologique a une place de
choix dans cette stratégie. La décision de relaparotomie est délicate dans les premières heures. En
revanche, les indications de réinterventions exploratrices ou de réparation programmées peuvent être
larges dans les jours qui suivent.
© 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
“ Point fort
conduction cardiaque n’apparaissent qu’en dessous de 32 °C
et la fibrillation ventriculaire en dessous de 28 °C. En
revanche, chez le patient présentant une hémorragie, l’échelle
La LAPEC correspond à la réalisation d’un geste le plus des risques est toute différente avec une hypothermie jugée
préoccupante à partir de 34 °C et sévère en dessous de
rapide possible et donc incomplet, limité au constat des
32 °C. [9] Par ailleurs, 57 % des blessés deviennent hypother-
lésions et au contrôle sommaire d’une hémorragie active miques entre le traumatisme et l’intervention. [10] De nom-
et/ou d’une fuite digestive, suivis de la fermeture de la breux facteurs interviennent dans la genèse de cette
laparotomie pour laisser la place au plus vite à la hypothermie. Il s’agit bien évidemment des circonstances de
réanimation qui s’impose. l’accident (incarcération prolongée dans un véhicule, acci-
dents de montagne en hiver). Une autre cause est liée au
patient lui-même : chez tout blessé grave, le traumatisme
entraîne une atteinte de la régulation thermique d’origine
centrale thalamique avec baisse du seuil du frisson, et
un centre plus équipé) ou lors de la prise en charge définitive. l’hypoxie secondaire à l’hémorragie diminue la perfusion
Cette option thérapeutique s’accorde bien avec la laparotomie tissulaire ce qui entraîne une diminution de la production de
d’extrême urgence, dont la pratique reste indispensable. On doit chaleur par l’organisme. Mais il existe également des étiolo-
souligner en effet que, selon des études rétrospectives portant gies iatrogènes qui sont principalement le déshabillage
sur la gestion des traumatisés avec revue des dossiers par panel complet du blessé exposé à la température de la pièce, et les
d’experts, [7] une proportion importante des « décès évitables » perfusions avec de grands volumes de solutés non réchauf-
est due à un retard dans la prise en charge chirurgicale des fés. [4] La durée du geste chirurgical et son étendue, avec en
traumatisés abdominaux. particulier l’exposition des viscères lors de l’exploration,
jouent également un rôle primordial dans le refroidissement
du blessé. [4] Un travail sur modèle informatique de blessé
■ Bases physiopathologiques présentant une hémorragie abondante [11] a montré l’impor-
tance des pertes thermiques lors de l’exposition péritonéale et
Dans la plupart des cas, c’est l’état de choc et l’existence ou le rôle bénéfique de l’augmentation de la température de la
un fort risque de coagulopathie progressivement irréversible qui salle d’opération. Dans ce modèle, la durée optimale d’une
imposent la LAPEC. Chez un traumatisé abdominal grave laparotomie réellement écourtée devrait être de 30 minutes.
subissant des transfusions massives, les effets de la coagulopa- • Chez un blessé présentant un état de choc non compensé, il
thie, de l’acidose et de l’hypothermie sont conjugués pour existe une acidose métabolique par dépassement des phéno-
réaliser l’hémorragie non chirurgicale [8] (Fig. 1). mènes adaptatifs à l’hypoperfusion et à l’hypo-oxygénation.
• Le rôle de l’hypothermie est complexe. Chez le patient ne Le risque de développer une coagulopathie chez les blessés en
présentant pas de traumatisme, ses effets sont modérés entre acidose est très important. [12, 13] Dans la série de Cosgriff,
78 % des opérés ayant eu une LAPEC et présentant à un
moment de leur hospitalisation un pH inférieur à 7,10 ont
développé un syndrome hémorragique sévère. [14]
• La coagulopathie présentée par les patients acides et hypo-
TRAUMATISME GRAVE thermiques consiste surtout en une thrombocytopathie, des
HÉMORRAGIE + CHOC
modifications de la fibrinolyse et une atteinte des enzymes de
la cascade de la coagulation. [9] Sur le plan clinique, elle se
manifeste par des hémorragies en nappe, des saignements
orificiels et des hématomes importants aux points de
COAGULOPATHIE REMPLISSAGE - TRANSFUSIONS
VASOPRESSEURS +/- CLAMPAGES ponction.
Hypothermie Consommation
■ Indications de laparotomie
écourtée
+
Acidose Fibrinolyse (?) Tableau gravissime d’emblée : laparotomie
Ischémie cellulaire + d’extrême urgence
À partir des données physiopathologiques exposées précé-
Hémodilution demment et des résultats de séries importantes, [8, 14-18] on peut
affirmer que le risque pour un traumatisé abdominal de déve-
Lésions des tissus + lopper une coagulopathie est d’autant plus grand que les critères
cliniques et biologiques, rassemblés dans le Tableau 1, sont
Polytransfusions
Sang conservé présents.
Plaquettes
Tableau 2.
Survie à court terme chez les patients victimes d’un traumatisme avec hémorragie intra-abdominale sévère. Résultats de séries portant sur plus de 50 patients.
Premier auteur, Mortalité globale : Survie corrigée :
année de la publication n décès/effectif (%) n survivants/réopérés (%)
Burch et al. [1] 1992 134/200 (67) 66/98 (67)
Morris et al. [33] 1993 64/107 (60) 43/58 (74)
Hirshberg et al. [31] 1994 72/124 (58) 52/73 (71)
Offner et al. [86] 2001 18/56 (32) 38/52 (73)
Arvieux et al. [35] 2003 46/109 (42) 63/76 (83)
Indication de clampage aortique intra- (ligature vasculaire, clampage), de tamponner les zones non
contrôlées et de s’adapter sans pertes de temps aux différents
abdominal types d’atteinte anatomique.
Il y a une indication de clampage aortique abdominal devant
un désamorçage signé par un arrêt cardiaque à l’incision. Mais Traumatisme splénique
ce geste peut être utile s’il apparaît au cours de l’intervention S’il existe une lésion splénique hémorragique, il n’y a aucune
une hypovolémie incontrôlable ou d’emblée chez le patient indication de réparation splénique au cours d’une LAPEC et la
moribond. [23] L’installation se fait en exposant les piliers avec splénectomie est réalisée selon la technique habituelle. [25] Les
une valve sous le foie gauche, [24] et en s’aidant d’un repérage pertes sanguines au cours de la mobilisation splénique seront
manuel de l’œsophage grâce à la perception de la sonde minimisées par la compression de la rate par la main gauche de
nasogastrique (Fig. 3). L’aorte vide peut être difficile à palper : l’opérateur tout en la libérant de la main droite du péritoine au
dans ce cas, une compression manuelle à droite de l’œsophage ciseau ou au bistouri électrique. [26]
est suffisante. Pendant ce temps, un remplissage massif doit
alors être réalisé par l’anesthésiste pour éviter le désamorçage à Traumatisme hépatique
la levée du clampage. L’indication du clampage premier de
l’aorte thoracique par thoracotomie n’est pratiquement plus Chez les patients présentant un tableau d’hémorragie intra-
retenue en dehors des grands délabrements abdominothoraci- abdominale sévère, le foie est de loin l’organe le plus souvent
ques. Les méthodes de clampage endoluminal par voie fémorale atteint. [12] Devant un patient présentant un traumatisme
sont intéressantes et demandent à être validées dans cette hépatique avec des facteurs de risque de coagulopathie, le
indication. [22] consensus actuel est a priori d’abandonner les manœuvres
d’exclusion vasculaire du foie, par triple ou quadruple clam-
page. [6, 27-33] De même, les hépatectomies larges [34] sont
Contrôle de l’hémorragie d’indication exceptionnelle.
Que la décision de LAPEC soit préopératoire parce que la Le clampage pédiculaire reste irremplaçable pour le traitement
situation est d’emblée dramatique, ou peropératoire devant la de certaines lésions, et permet de stopper certaines hémorragies
constatation de la multiplicité des lésions, des sites de saigne- de gros vaisseaux des pédicules glissoniens. La compression
ments et de la coagulopathie « biologique », elle implique de manuelle apparaît particulièrement efficace pour les lésions
contrôler sommairement les hémorragies les plus violentes veineuses. La technique du TPH est maintenant bien codifiée. Le
Hémorragie rétropéritonéale
Finalement, l’arsenal des techniques utilisables devant une L’hémorragie rétropéritonéale cataclysmique est d’emblée
lésion hépatique dans le contexte de la LAPEC se réduit à suspectée au déchocage chez un traumatisé présentant une
trois procédés principaux : la compression hépatique fracture du bassin avec éventuellement une disparition unilaté-
manuelle, le clampage pédiculaire et le TPH. rale des pouls et surtout un hématome pelvien s’aggravant
rapidement. Lors de la laparotomie, si le rétropéritoine n’est pas
ouvert, le volume de l’hématome rétropéritonéal qui bombe
alors dans la cavité péritonéale peut augmenter de volume
« sous les yeux ». Le chirurgien est alors devant une alternative.
TPH a pour but de refermer les lésions qui saignent, ce qui est
Soit il recherche un gros vaisseau lésé, en l’explorant chirurgi-
réalisé le plus souvent par une compression du foie à la fois sur
calement selon une technique opératoire rigoureuse, [43] et,
lui-même, vers l’avant, et vers le haut (Fig. 4). D’autres procédés
selon les lésions découvertes, effectue une réparation, une
hémostatiques (suture simple, résection limitée) peuvent être
ligature, voire un tamponnement ou un simple clampage du
utilisés sur des plaies vasculaires faciles à aborder à condition que
vaisseau lésé, qui sera laissé en place pendant la période de
ce traitement soit rapide. L’inefficacité du TPH est rarement
réchauffement. [1] Soit il considère comme réalisable de transfé-
rencontrée ; elle est due le plus souvent à une hémorragie de type
rer le blessé en salle d’artériographie sous réanimation hyperac-
artériel et doit faire envisager au mieux et si possible le recours à
tive dans les meilleurs délais et c’est dans ce cas la solution la
l’embolisation artérielle, ailleurs la ligature ou le clampage de
plus efficace sur l’hémorragie. [44, 45]
l’artère hépatique propre, voire le clampage provisoire par lacs et
Le plus souvent, il existe plutôt des zones hémorragiques
tube de Silastic® extériorisé par la cicatrice pour permettre le
diffuses rétropéritonéales et il faut savoir ne pas ouvrir le
transfert en radiologie. [35]
rétropéritoine quand il n’augmente pas de volume et que le
saignement intrapéritonéal explique à lui seul le tableau
Plaies et ruptures des organes creux et de leurs clinique, car il a en lui-même une efficacité compressive. Si le
mésos rétropéritoine a été ouvert par le traumatisme ou par le chirur-
Les plaies et pertes de substances digestives sont traitées gien et qu’il n’a pas été retrouvé d’hémorragie traitable par un
également en deux temps, après résection éventuelle et rapide geste simple, l’installation d’un tamponnement peut être utile,
des segments intestinaux détruits, par suture, ligature sommaire, en prenant garde de ne pas comprimer les veines rénales. [18] Ce
ou agrafage automatique à la pince mécanique [36] (Fig. 5). Les tamponnement rétropéritonéal peut être efficace, [1, 4, 15] mais
hémorragies d’origine mésentérique ou mésocolique sont doit être complété dans les délais les plus brefs par une artério-
traitées par ligatures vasculaires appuyées sans considération du graphie. Cet examen permettra un bilan exact des lésions et
risque d’ischémie intestinale en regard. Dans les délabrements surtout une embolisation sélective bien plus efficace qu’un geste
importants, il est possible de réaliser une fermeture complète du chirurgical dans les plaies des artères du petit bassin. [44, 45]
tractus digestif de part et d’autre de la zone détruite par Dans la série de Carillo [46] portant sur 27 blessés atteints de
application de pinces mécaniques, mais dans la mesure du plaies artérioveineuses de l’axe iliaque, 13 patients sur 14 (93 %)
possible, il est préférable de réséquer les segments coliques survivaient s’ils avaient eu une chirurgie en plusieurs temps
massivement détruits pour éviter les contaminations bactérien- avec ligature ou tamponnement premiers contre 5/13 (38 %)
nes qui exposent à un risque accru de défaillance pour les patients présentant les mêmes lésions réparées par une
multiviscérale. [37] chirurgie en un temps.
En cas de fracture de l’anneau pelvien osseux avec déplace-
ment, la mise en place d’un clamp type Clamp de Ganz® qui
Atteinte duodénopancréatique
referme le foyer de fracture ne prend que quelques minutes à
Chez les patients présentant un traumatisme abdominal un orthopédiste entraîné. [47] Cette manœuvre a une efficacité
sévère avec une atteinte duodénopancréatique grave, il est prouvée sur les pertes hémorragiques, [48] surtout lorsque
maintenant admis qu’il est préférable d’éviter la résection l’hémorragie est d’origine veineuse. [49-52]
radicale et de préférer des techniques de drainage, même s’ils ne
présentent pas de syndrome hémorragique dramatique. [38] Les Atteinte de l’arbre urinaire
gestes les plus simples basés sur le drainage et l’excision des Dans le cadre de la LAPEC, lorsqu’un blessé présente une
tissus avulsés sont à recommander. [39, 40] Lorsque seule la hémorragie active d’origine rénale, la néphrectomie doit être
résection de type duodénopancréatectomie céphalique permet réalisée lorsqu’il existe un fracas rénal avec une ouverture de
de contrôler une hémorragie artérielle, la technique de la l’espace rétropéritonéal. Dans tous les autres cas, l’artériographie
permet un diagnostic plus fiable et un traitement plus efficace cas de large brèche, le blessé peut présenter un faux tableau
et sélectif de l’hémorragie d’origine rénale. [53] Un uretère d’hémothorax aigu faisant réaliser une thoracotomie première
sectionné peut être lié, extériorisé ou mieux drainé en réalisant au cours de laquelle le chirurgien découvre que l’hémorragie est
une urétérostomie. En revanche, un hématome périrénal stable d’origine intra-abdominale. [58] Même chez un blessé instable, il
ne doit pas être ouvert puisque la pression maintenue dans est préférable d’effectuer la réparation diaphragmatique gauche
l’espace rétropéritonéal est un facteur d’hémostase ou au moins car elle est le plus souvent facile et rapide. À droite, cette
de stabilisation jusqu’à l’artériographie. [54-57] réparation dans le cadre d’une LAPEC est souhaitable : associée
à une rupture hépatique, elle rendra le TPH efficace ; le foie
Atteinte du diaphragme comprimé sur lui-même laisse voir la déchirure, transversale et
Les lésions du diaphragme sont plus souvent rencontrées au ras du ligament triangulaire ; ce n’est que si la réparation par
dans le cadre des plaies à trajet thoracoabdominal. En ce qui voie abdominale d’un brèche importante s’avérait impossible
concerne les traumatismes fermés, les ruptures du diaphragme sans aggravation des lésions hépatiques qu’il faudrait l’effectuer
sont dues soit à une hyperpression abdominale brutale, soit à par voie thoracique.
un écrasement de la base du thorax, et ces mêmes mécanismes
sont potentiellement responsables de traumatisme hépatique Hémorragie intrathoracique
sévère et hémorragique. Classiquement, la coupole gauche est En principe, il existe une indication de thoracotomie chez
plus souvent touchée que la droite (80 % des cas). L’atteinte tout traumatisé présentant un hémothorax de plus de 1,5 l (2 l
diaphragmatique est suspectée en préopératoire sur la radiogra- pour certains), ou un débit par le drain supérieur à 500 ml
phie du thorax sur la présence d’une image aérique intrathora- /h. [20, 59] Ces règles s’appliquent aussi chez le blessé présentant
cique, avec un niveau liquide, sur la visualisation de l’extrémité un traumatisme ou une plaie abdominothoracique, et la
de la sonde nasogastrique en intrathoracique ou sur la surélé- décision de thoracotomie ou de sternotomie sera prise dans ce
vation d’une coupole en l’absence d’une image d’atélectasie. En cas sur table opératoire, une fois les lésions abdominales traitées
Unité de réanimation
À la fin de l’intervention, le blessé est transféré dans l’unité
de réanimation où seront réalisées de manière très énergique la
poursuite du remplissage et la correction de l’acidose et des
troubles de la coagulation. Le réchauffement du patient doit
être la préoccupation primordiale et se poursuit par la perfusion
de solutés chauds, par l’utilisation de couverture chauffante à
air pulsé mais aussi par des moyens plus actifs si nécessaire. [9]
Figure 7. Vacuum pack. Dans les cas où la fermeture cutanée pure se fait Persistance de l’hémorragie
sous tension ou lorsqu’un syndrome du compartiment abdominal doit
Cette éventualité n’est pas exceptionnelle puisque la reprise
être prévenu ou traité, la paroi est laissée largement ouverte.
précoce pour hémorragie survient dans plus de 10 % des
A. Une feuille de type « sac à grêle » multiperforée est étalée sur le
LAPEC. Les signes d’appel sont la persistance d’une instabilité
contenu abdominal jusque loin dans les flancs.
hémodynamique, la transfusion de plus de 2 culots/h ou la
B. Un matelas de compresses remplit l’espace, équipé de deux drains
transfusion de plus de 10 culots en postopératoire, la chute de
aspiratifs assez rigides (drains thoraciques ou Redon qui traversent la peau
l’hématocrite, une acidose réfractaire et l’apparition de signes
à distance). Un adaptateur conique à trois voies doit être prévu entre le
d’hyperpression intra-abdominale. Avant de réopérer le patient,
système aspiratif et les deux drains.
l’indication d’une artériographie doit très soigneusement être
C. Un champ adhésif souple de type Stéri-Drape™ ou mieux Ioban™ (plus
pesée car la mortalité des patients réopérés pour hémorragie est
souple) recouvre l’ensemble, dépasse largement les limites du dispositif
particulièrement élevée : un tiers des blessés ayant subi une
pour réaliser un ensemble étanche. Les drains sont mis en aspiration à
réintervention non programmée décèdent en postopératoire. [1,
grande dépression (-100 mmHg) avant l’application de cette dernière 31, 33, 72]
couche pour éviter que des liquides viennent gêner l’adhésion de cette
dernière. L’aspiration ne doit plus être interrompue, même pendant le
transport du blessé.
Syndrome du compartiment abdominal
Il survient dans près de 15 % des laparotomies écourtées. [33]
Le syndrome du compartiment abdominal était connu avant la
Réanimation sur place au bloc opératoire diffusion des LAPEC car il a été décrit dans de nombreux
contextes aussi bien chirurgicaux (chirurgie aortique, transplan-
Il s’agit le plus souvent d’un patient moribond pour qui le
tation hépatique) que lors de la réanimation pour hypothermie
transfert n’est pas envisageable, ceci concernant 10 % des
ou au décours de pancréatite aiguë sévère, [73, 74] mais il était
patients. [1, 72] La coagulopathie est le plus souvent clinique-
exceptionnel. Dans le cadre de la LAPEC, il est grave, puisque
ment évidente, confirmée par les indicateurs biologiques qui
la mortalité se situe entre 30 et 50 % pour les cas sévères. [69,
montrent une acidose majeure, et une hypothermie profonde. 75] Sur le plan physiopathologique, [76] il est dû à l’effet nocif de
Le patient peut aussi décompenser de lésions cérébrales irréver-
l’élévation de la pression abdominale, due elle–même aux
sibles. Il est alors licite de refermer la laparotomie, de réanimer
événements suivants, plus ou moins associés :
et de réchauffer le blessé sur table pour réintervenir dans les
• œdème intestinal important par lésion d’ischémie-
30-60 minutes si le patient ne décède pas. [8]
reperfusion ;
• fermeture sous tension sur un tamponnement ou hématome
Salle de radiologie interventionnelle rétropéritonéal ;
Si le chirurgien trouve une hémorragie plus facilement • hémopéritoine et/ou biliopéritoine importants.
accessible à l’embolisation radiologique, le blessé doit être Cette hyperpression conduit à une atteinte circulatoire
transféré en unité de radiologie interventionnelle, dans le délai compromettant la fonction et la viabilité des organes intra-
le plus court possible, ce qui implique que le radiologue se soit abdominaux avec des répercussions principalement sur les
préparé à accueillir le blessé pendant la laparotomie. Les fonctions cardiaque, respiratoire, cérébrale et rénale. [77-80] En
hémorragies d’origine rétropéritonéale sont dans la majeure effet, l’élévation de la pression abdominale est responsable
Figure 8. Homme de 46 ans ayant eu un accident de trial en montagne avec un choc direct par le guidon sur le flanc droit. Admis au centre hospitalier
3 heures après l’accident, conscient, en état de choc hémorragique gravissime. Tension imprenable, Hémocue® à 40. À l’échographie, épanchement > 2 l et
contusion hépatique droite. Laparotomie 30 minutes après l’arrivée : hémopéritoine > 3 l, dû à une rupture Moore IV du foie droit. Pas d’autre lésion visible.
Tamponnement périhépatique partiellement efficace, clampage pédiculaire efficace, tension systolique remontée à 9. Fermeture cutanée pure et transfert en
salle d’artériographie : embolisation artère hépatique droite distale efficace (flèche, A, B, C). Mutation en réanimation. h20 : syndrome du compartiment
abdominal aigu. Laparotomie. Nécrose vésicule biliaire : cholécystectomie, drain transcystique. Installation du système vacuum pack (D, E, F). j5-j8 : ablation
du vacuum pack en deux temps. Drainage biliaire. Fermeture cutanée exclusive assistée par une incision de décharge gauche. j18 : abcès du foie droit, traité
par drainage chirurgical actif par drain de Van Kemmel (scanner) (G). j40 : sortie de réanimation. m11 : éventration (H) traitée par mise en place d’une plaque
de Mersilène® rétromusculaire prépéritonéale. Reprise de l’activité sportive professionnelle habituelle 15 mois après l’accident.
d’une compression directe des organes intra-abdominaux et coupoles diaphragmatiques et une hyperpression intrathoraci-
d’une ischémie hépatique et mésentérique. Elle aboutit à une que, elle-même responsable d’un syndrome de détresse respira-
hyperpression cave inférieure avec insuffisance rénale, ischémie toire d’une part, et d’une diminution de la fraction d’éjection
et œdème des parois intestinales, ce qui augmente encore la cardiaque d’autre part, ce qui contribue en retour au syndrome
pression intra-abdominale. Elle entraîne une surélévation des de bas débit, à l’insuffisance rénale et à l’ischémie digestive,
dans un autre cercle vicieux que seule la décompression Ablation du tamponnement périhépatique
abdominale peut briser. [77-80] L’hypertension intracrânienne,
particulièrement délétère en cas de traumatisme crânien, est en Cette réintervention doit être soigneusement préparée et cela
outre favorisée par l’hyperpression abdominale, à tel point que d’autant qu’il existe des atteintes parenchymateuses sévères. La
la laparotomie de décompression a été proposée pour traiter les voie d’abord doit être suffisante et il peut être utile de mettre
hypertensions intracrâniennes secondaires à un traumatisme en place avant l’ablation du tamponnement des lacs de contrôle
crânien isolé. [81] vasculaire sur le pédicule hépatique, voire plus exceptionnelle-
ment sur la veine cave. Après aspiration du sang et ablation des
Les premiers symptômes cliniques du syndrome du compar-
caillots, la vitalité de la vésicule biliaire doit être systématique-
timent abdominal sont une tension abdominale clinique qui
ment contrôlée, surtout s’il y a eu une embolisation hépatique,
peut s’accompagner de fuites au niveau de l’incision, l’aggrava-
car la nécrose ischémique de la vésicule est possible. L’ablation
tion ou l’apparition d’une oligoanurie, une hypercapnie, une
du tamponnement est en général facile, par ablation des
baisse du débit cardiaque, une augmentation de la pression de
mèches une par une sous irrigation de sérum chaud. Dans la
ventilation pulmonaire et une acidose. Le syndrome du com-
majorité des cas, il n’y a plus d’hémorragie active, mais un
partiment abdominal peut apparaître très précocement, [78, 79]
écoulement de bile est souvent visible au niveau du foyer
mais il survient le plus souvent dans les 36 premières heures
fracturaire, qu’il faut drainer largement avec une lame multitu-
après la laparotomie initiale. [82] Le test diagnostique de
bulée. En cas de reprise de l’hémorragie, il convient de clamper
référence est la mesure de la pression intravésicale (PiV) [77] qui
le pédicule pour en rechercher l’origine et tenter prudemment
décèle l’hyperpression abdominale. Cette mesure se fait à l’aide
d’aiguiller un petit pédicule saignant sur la tranche hépatique.
d’un manomètre relié à la sonde urinaire par une aiguille de
Si l’hémorragie persiste sous clampage, elle est très probable-
18 G, après avoir préalablement instillé dans la vessie 50 ml de
sérum. Suivant la PiV, Meldrum [82] a décrit trois stades de ment d’origine veineuse sus-hépatique et la solution la plus sage
gravité du syndrome du compartiment abdominal et précise est de confectionner un nouveau tamponnement.
aussi le caractère plus ou moins urgent de la laparotomie de
décompression. Il faut interpréter les résultats de la PiV en Vérification de l’ensemble des structures
fonction du contexte car il existe des variations individuelles en de la cavité péritonéale
fonction de la compliance vésicale, de la sédation du blessé, de
Cette réintervention doit permettre un véritable « second-
la présence d’une obésité ou d’une hypovolémie. Une PiV qui
look » de l’ensemble des organes intrapéritonéaux. En effet, dans
augmente chez un blessé corrélée avec des signes cliniques de
le contexte initial de grande hémorragie, le traitement priori-
sévérité comme l’anurie et les difficultés de ventilation condui-
taire des saignements a pu faire ignorer certaines lésions
sent à la réalisation en urgence d’une laparotomie de décom-
minimes digestives, qui pourront alors être réparées. D’autres
pression. Chez les patients chez qui la mesure de la PiV est
lésions ischémiques ont pu également se développer entre les
impossible du fait de lésions vésicales traumatiques, il est
deux laparotomies, favorisées par le choc hypovolémique et la
possible de mesurer la pression intragastrique, mais cette mesure
coagulopathie : nécrose de la vésicule biliaire après embolisation
est moins standardisée.
de l’artère hépatique droite, nécrose du côlon ou du grêle
colique ou par hématome des mésos, pancréatite traumatique,
Doute sur une lésion secondaire ou passée etc. Leur réparation se fera au cas par cas selon les règles de la
inaperçue à la première laparotomie chirurgie digestive réglée, en tenant compte des données
Lorsque le tableau hémorragique était cataclysmique, la cliniques et biologiques du patient.
nécessité de « faire vite » a rendu possible le fait que certaines
lésions aient pu passer inaperçues. Les atteintes le plus souvent Fermeture pariétale
ignorées sont la plaie duodénale (surtout si elle est postérieure),
Chez les patients porteurs d’un système de laparostomie de
les lésions pancréatiques, rénales, la perforation digestive
type vacuum pack, la fermeture de la paroi abdominale peut être
secondaire à l’ischémie du mésentère ou du mésocôlon (héma-
problématique. En effet, il s’installe en quelques jours, chez ces
tome mésentérique volumineux, hémostase « à la volée » lors de
patients, une rétraction importante des muscles de la paroi
la première laparotomie). Là encore, l’indication de relaparoto-
abdominale rendant la fermeture musculaire difficile, voire
mie précoce doit être pesée. Au moindre doute, l’indication de
impossible. De plus, une fois tout épanchement évacué, il
réintervention doit être mise en balance avec la récupération
persiste souvent un certain degré d’hyperpression abdominale
d’un état clinique et biologique globalement plus satisfaisant
lié à l’œdème intestinal et/ou à l’hématome rétropéritonéal.
permettant une réexploration et une réparation éventuelle des
Chez le blessé présentant une perte de substance pariétale
lésions dans de meilleures conditions.
importante (traumatisme ouvert, brûlure), il peut être réalisé
dans un délai de quelques jours une greffe de peau en résille sur
le grand épiploon déployé en avant des anses (Fig. 9).
Réintervention programmée Pour permettre une fermeture pariétale progressive, il a été
proposé certains artifices techniques, [71, 84] avec réalisation de
Elle s’effectue chez un malade parfaitement « cadré » tant au
vacuum packs successifs de plus en plus petits. En pratique, il
point de vue de la réanimation que de l’imagerie, par une
n’est souvent possible de n’effectuer qu’une fermeture cutanée
équipe de chirurgiens, de radiologues et d’anesthésistes expéri-
mentés. Sur le plan biologique, le patient doit avoir recouvré exclusive, sans fermeture musculoaponévrotique, en sachant
une capacité d’hémostase correcte, et il ne doit plus être en que le blessé développera immanquablement une éventration
acidose. La tomodensitométrie corps entier avec injection est qu’il faudra traiter dans un second temps. Quand il persiste une
indispensable car elle seule permet un bilan complet cérébral, tension importante à la fermeture, la technique des incisions
thoracique abdominal et des membres. En fait seuls deux tiers cutanéoaponévrotiques de relaxation ou de décharge qui est
des patients bénéficient de cette chirurgie « programmée », [19] utilisée dans le traitement des péritonites postopératoires peut
les autres blessés étant décédés ou ayant présenté un tableau avoir ici une application utile [85] et permettre d’éviter la mise
justifiant une reprise précoce. [31, 75] Le délai se situe en en place d’un nouveau vacuum pack.
moyenne 24 à 48 heures après la laparotomie initiale. [4] Si le
geste initial a comporté des agrafages ou des ligatures sommai-
res du tube digestif, la réintervention doit prendre place dans les ■ Conclusion
48 heures mais certains opérés ont été repris 4 à 7 jours après
un TPH isolé sans que le taux des complications septiques n’ait Chez les traumatisés de l’abdomen en choc hémorragique, la
été augmenté. [32, 83] technique de la LAPEC s’est rapidement diffusée au cours de la
Figure 9. Homme âgé de 28 ans incarcéré sous sa voiture au cours d’une course poursuite avec la police après un cambriolage. Initialement admis en hôpital
local : hémodynamique stable, volumineuse brûlure sous-ombilicale au troisième degré (empreinte du pot d’échappement) et hémoglobine à 13 g/l. La
tomodensitométrie (A) montre un hématome du foie droit avec hémorragie active (flèche), une zone d’infarcissement au niveau du rein droit et un
hémopéritoine évalué à 1 l . Impossibilité d’embolisation sur place. Décision de transfert au centre hospitalier où sont réalisées, dès l’arrivée, une artériographie
et une embolisation sélective hépatique (B). À h16 : survenue d’un syndrome du compartiment abdominal sévère (anurie, pression intravésicale = 22 mmHg),
avec aspartate aminotransférases (ASAT) > 800. Laparotomie en urgence avec évacuation d’un hémopéritoine de plus de 2 l, pas d’hémorragie active, excision
cutanée de 40 cm2 en sous-ombilical (nécrose par brûlure). La fermeture est cutanée exclusive à l’étage sus-ombilical et musculoaponévrotique à l’étage
sous-ombilical. Réalisation d’une contre-incision cutanée de décharge. Évolution initiale favorable. j6 : éviscération de l’étage sous-ombilical. Réalisation d’un
vacuum pack sur le defect (C). j14 : drainage bilome, ablation du vacuum pack et suture du grand épiploon autour des muscles (D). j21 : autogreffe en résille
(E). j30 : sortie de réanimation (F).
dernière décennie et n’est réalisable qu’au prix d’une collabora- ou surtout de ceux qui seraient décédés au cours de gestes
tion interdisciplinaire étroite entre chirurgien, anesthésiste- obstinés de réparation que la gravité du tableau biologique
réanimateur et radiologue. Plus largement, la gravité du tableau rendait désespérément futiles.
présenté par ces patients impose à l’ensemble des intervenants,
du début à la fin de la chaîne de prise en charge, une coordi-
nation parfaite et une rigueur totale, avec l’obsession de ne pas
perdre une seule minute. Même si la mortalité de ce geste
Remerciements. Les auteurs remercient pour leur aide, dans la rédaction de cet
demeure lourde (Tableau 2), [1, 31, 33, 35, 86] elle permet article, les docteurs Christian Sengel et Frédéric Thony, radiologues
aujourd’hui le sauvetage de patients qui auraient, il y a quel- interventionnels, les docteurs Nicolas Cardin, Jean-Philippe Mestrallet,
ques années, été jugés au-delà de toute possibilité thérapeutique, chirurgiens digestifs, et le docteur Axel Aubert, chirurgien thoracique.
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Arvieux C., Létoublon C. Laparotomie écourtée pour traitement des traumatismes abdominaux sévères :
principes de technique et de tactique chirurgicales. EMC (Elsevier SAS, Paris), Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-095, 2005.
40-050
Introduction L’espace de vision augmente si les écarteurs exercent une traction plus
importante, mais cela implique une contrainte continue sur les parois,
La laparoscopie modifie la vision et la manipulation des instruments, ce entraînant des souffrances pariétales (susceptibles de provoquer
qui entraîne un changement de la stratégie et de la technique de nécroses ou douleurs résiduelles) et des répercussions
dissection par rapport à la laparotomie. cardiopulmonaires.
La perception du site est tridimensionnelle et l’orientation du
Scialytiquet crée une ombre qui accentue cet effet.
Modification de la vision
Par laparoscopie
Par laparotomie
Elle est indirecte et matérialisée par un écran de télévision.
Elle est directe, limitée par la longueur de l’incision et dépend du degré
d’écartement des berges. Elle dépend de l’emplacement du trocart permettant l’introduction du
système optique, de l’angle d’inclinaison de l’extrémité du laparoscope
La localisation et la largeur de l’incision doivent permettre l’abord du (0°/30°/45°), de la largeur du champ de vision du système optique (90 à
viscère intéressé, le plus directement et avec le moins de délabrement en 100°) et de la qualité du système optique, de la caméra, du processeur et
tenant compte des nerfs, des muscles (risques d’éventration) et des de l’écran. Le champ opératoire est visualisé sous l’axe choisi, de près
vaisseaux. Si le diagnostic n’est pas certain, l’incision doit être orientée ou de loin, selon le déplacement de l’extrémité de l’optique. Approcher
pour pouvoir l’élargir en fonction de l’exploration diagnostique. le système optique permet d’agrandir l’image matérialisée par un écran
de télévision.
L’espace de vision est créé par le pneumopéritoine.
La perception est bidimensionnelle, effet renforcé par un éclairage dans
Guy-Bernard Cadière : Responsable de la clinique de chirurgie digestive, département l’axe de la vision.
de chirurgie digestive, centre hospitalier universitaire Saint-Pierre (université libre de
Bruxelles), rue Haute, 322, 1000 Bruxelles, Belgique, Professeur associé des
universités françaises, centre hospitalier universitaire, 31054 Toulouse cedex, France.
Joël Leroy : Professeur, Co-Directeur de l’IRCAD et de l’EITS, Hôpital Civil-Hôpitaux
Manipulations des instruments
Universitaires 67091 Strasbourg cedex, France.
© Elsevier, Paris
Par laparotomie
Toute référence à cet article doit porter la mention : Cadière GB et Leroy J. La main opposée à la main dominante (main gauche pour les droitiers)
Principes généraux de la chirurgie laparoscopique. Encycl Méd Chir (Elsevier,
Paris), Techniques chirurgicales – Appareil digestif, 40-050, 1999, 9 p.
exerce des tractions sur les organes à disséquer de manière à présenter
de façon appropriée un organe ou un plan de clivage à la main dominante
40-050 PRINCIPES GÉNÉRAUX DE LA CHIRURGIE LAPAROSCOPIQUE Techniques chirurgicales
(main droite des droitiers) ; cette main dominante manipule les ciseaux Les feuillets péritonéaux qui attachent les organes doivent souvent être
permettant la dissection. Il est essentiel de différencier la main qui sectionnés avant de mobiliser ceux-ci, puisqu’on ne peut exercer sans
expose, de celle qui ne fait qu’actionner des instruments. risques une traction appuyée avec des instruments rigides, effilés et
La main gauche des droitiers exerce une palpation atraumatique que transmettant mal les sensations tactiles.
permet la sensation tactile, elle est susceptible de présenter un plan de Une connaissance approfondie de l’anatomie appliquée à la
clivage lorsqu’une moindre résistance est ressentie. Elle peut à laparoscopie est donc indispensable. Cette anatomie insiste
l’occasion se glisser dans un espace sans traumatiser les organes particulièrement sur les différents feuillets péritonéaux, les plans de
avoisinants. clivage et les espaces limités par les fascias. Elle est vue sous un angle
Les degrés de liberté des mouvements sont limités par la mobilité des différent selon la position du système optique et la largeur et
doigts, des poignets, du coude et des épaules. l’inclinaison de son champ.
Ces mouvements ne sont limités que par l’endroit de l’incision, la taille
de l’ouverture et l’espace laissé par le refoulement des organes voisins. Les contraintes de manipulation des instruments impliquent un choix
judicieux des points de pénétration, une modification de la gestuelle et
Par laparoscopie parfois des stratégies de dissection.
La main gauche comme la main droite est armée d’un instrument, elle
perd l’essentiel de ses fonctions d’exposition. Conclusion
On perd la sensation tactile, même s’il peut exister une perception des
résistances transmises par le manche de l’instrument. La laparoscopie impose la connaissance d’une « anatomie
On manipule les organes avec des instruments rigides et effilés sous laparoscopique », et l’apprentissage de nouvelles stratégies et
contrôle d’une vision bidimensionnelle. techniques de dissection qui tiennent compte de la manipulation
Il est risqué d’exercer une traction appuyée sur les organes sans les d’instruments traumatiques sans sensation tactile avec moins de degrés
blesser. de liberté, et sous un angle de vision différent. Seul le principe de
l’intervention reste le même.
Il est beaucoup plus difficile de « créer » un plan de clivage qui ne
corresponde pas à un plan anatomique préexistant de moindre
résistance.
En revanche, le pneumopéritoine peut révéler un plan de clivage Techniques
anatomique en s’y insinuant.
Les degrés de liberté des instruments sont déterminés par la fixité des Installation de l’opéré
points de pénétration des trocarts, sommets d’un cône dans lequel des
mouvements d’entrée/sortie et de rotation restent possibles. La
disposition des trocarts par rapport à l’organe ciblé est donc La place de l’écran de télévision dépend de la position du chirurgien et
déterminante. de l’organe opéré. C’est la règle de l’axe (fig 1).
L’installation tient compte de l’encombrement du matériel
Implications pour la laparoscopie laparoscopique : colonne d’imagerie, écran, insufflateur... Si
l’intervention nécessite une dissection sur deux sites distants, il faut
Comme on ne peut chercher « à l’aveugle » un plan de clivage, avec un éviter tout encombrement empêchant la mobilité de la colonne pour
doigt atraumatique, une sensation tactile et en s’aidant d’une traction, la satisfaire la règle de l’axe (ainsi, dans la colectomie, il y a parfois deux
dissection doit partir d’un point visible par le laparoscope jusqu’à un sites : le pelvis et l’angle splénique ; tout le côté gauche du patient doit
autre point visible. Il faut parfaitement connaître et suivre les plans de être libre de tout tuyau ou fil pour permettre le déplacement du moniteur
clivage préexistants. de la jambe gauche vers l’épaule gauche du patient) (fig 2).
1 Règle de l’axe. Sont les points successifs d’un même axe : 1. le chirurgien ; 2. le système optique ; 3. l’organe opéré ; 4. le moniteur.
page 2
Techniques chirurgicales PRINCIPES GÉNÉRAUX DE LA CHIRURGIE LAPAROSCOPIQUE 40-050
20 cm
A 90°
page 3
40-050 PRINCIPES GÉNÉRAUX DE LA CHIRURGIE LAPAROSCOPIQUE Techniques chirurgicales
20°
B
4 A. Coude soulevé. Position fatigante. 5 Lorsqu’il existe deux organes cible, les trocarts sont placés à l’intersection de
B. Coude au corps. Position du pianiste. deux arcs de cercles.
Exposition
L’espace de vision est créé par le pneumopéritoine qui exerce une
pression sur la paroi et les viscères. 6 Exposition du pelvis grâce au refoulement de l’intestin grêle par la position
déclive du malade.
Le refoulement du côlon transverse, de l’intestin grêle et de l’épiploon
qui les recouvre est assuré par la position du malade (déclive, proclive, difficile d’exercer une traction avec des instruments rigides et effilés (par
décubitus latéral) et la pression exercée par le pneumopéritoine (fig 6). exemple, exposition de l’œsophage abdominal ou exposition du hile
Pour optimiser le volume de cette cavité, la flexion trop importante des splénique) (fig 8A, B).
jambes doit être évitée ainsi que le billot. La vue dépend du positionnement du laparoscope et de ses
L’écartement des organes voisins est réalisé par des instruments qui caractéristiques (inclinaison et champ) (exemple : exposition du plan de
offrent une surface maximale. Ce sont les assistants qui écartent, grâce clivage du fascia de Toldt gauche) (fig 9).
au trocart écarteur en périphérie qui ne gêne ni la vision ni le geste Les pinces utilisées pour améliorer l’exposition sont potentiellement
opératoire, sous contrôle de la vision. Une fois positionnés, ces traumatiques et sortent souvent du champ de vision. C’est pourquoi il
instruments ne bougent plus. Le chirurgien opère des deux mains sans est préférable d’utiliser une optique à champ large et d’imposer, une fois
participer à l’exposition. le site exposé, de ne plus bouger que les deux trocarts opérateurs (mains
L’exposition peut se faire par suspension à la paroi abdominale de droite et gauche du chirurgien).
certains organes à l’aide de fils transpariétaux. L’exposition de la
vésicule et de la voie biliaire principale est améliorée par la fixation du
ligament suspenseur du foie à la paroi par un fil transfixiant.
Dissection
L’exposition du petit bassin chez la jeune femme peut être réalisée par Elle est réalisée par le chirurgien par une gestuelle à deux mains.
la suspension de l’utérus à la paroi par un fil amené à mi-distance de La main gauche met sous tension la structure qui est sectionnée par la
l’ombilic et du pelvis afin d’ouvrir le cul-de-sac de Douglas (fig 7). main droite.
L’exposition d’un site nécessite parfois la section de fascias d’attache La section est réalisée aux ciseaux, au crochet coagulateur ou au
de certains organes, préalablement à toute mobilisation, parce qu’il est dissecteur à ultrasons.
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Techniques chirurgicales PRINCIPES GÉNÉRAUX DE LA CHIRURGIE LAPAROSCOPIQUE 40-050
Sutures
Elles peuvent être réalisées à la pince mécanique, à l’aide d’un porte-
aiguille ou avec un appareillage spécifique, en surjet ou en points
séparés. Les nœuds peuvent être réalisés en intracorporel ou en
extracorporel avec un pousse-nœud.
B Suture mécanique
7 Exposition par suspension. Plusieurs sutures sont possibles avec différentes pinces mécaniques
A. Exposition de la vésicule par suspension du ligament suspenseur du foie. (sutures linéaires ou circulaires), l’épaisseur des tissus imposant
B. Exposition du cul-de-sac de Douglas par suspension de l’utérus.
l’utilisation de différentes formes de cartouche (fig 10).
La section va d’un point anatomique visible à un autre point visible et
nécessite une parfaite connaissance de l’anatomie laparoscopique qui Ligature réalisée en intracorporel
insiste surtout sur le plan de clivage, les fascias, les attaches péritonéales
vues sous l’angle de vision du système optique. Matériel nécessaire
Le pneumopéritoine favorise parfois la découverte d’un plan de clivage. – Un fil tressé ou monofil.
– Une aiguille à courbure normale.
Hémostases – Un porte-aiguille à poignée palmaire dans l’axe.
Lorsqu’un vaisseau saigne, il faut en un premier temps le clamper dans – Une pince à préhension fine.
une pince et éviter l’utilisation immédiate de l’aspiration qui réduit le Le fil doit avoir une longueur de 10 cm. Il doit être plus long s’il s’agit
pneumopéritoine et donc l’espace de vision et l’exposition. Il faut d’une suture qui rapproche des structures (valve de Nissen).
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40-050 PRINCIPES GÉNÉRAUX DE LA CHIRURGIE LAPAROSCOPIQUE Techniques chirurgicales
90°
O
12 Position idéale des instruments pour réaliser une suture.
2
1
13 1.Appui gauche de l’aiguille sur l’organe ; 2. appui droit de l’aiguille sur l’organe ;
3. dépression de l’organe induite par l’appui de la mâchoire du porte-aiguille.
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Techniques chirurgicales PRINCIPES GÉNÉRAUX DE LA CHIRURGIE LAPAROSCOPIQUE 40-050
4 cm
– Afin de serrer le nœud, l’endostitch est fermé et la pince à préhension Système afférent
tenue fermement. Un double nœud plat est ainsi formé (fig 16B8, 16B9).
Jusqu’à présent, les problèmes du système afférent sont la qualité de
Extraction des pièces d’exérèse l’image, son aspect bidimensionnel et l’absence de sensation tactile.
Une première étape consiste à améliorer l’image optique grâce à une
Leur site est choisi selon les possibilités d’extraction, les risques caméra à haute définition. Cette image peut également être dédoublée
d’éventration et éventuellement les contraintes esthétiques. Elles de manière à recréer une troisième dimension par effet stéréotaxique.
dépendent beaucoup moins de l’organe visé que des paramètres
précédents. En cas d’exérèse de pièce néoplasique, une jupe de Comme l’afférence visuelle provient d’un écran vidéo, des informations
protection de la paroi doit être introduite à cheval sur la paroi. supplémentaires sous forme de textes ou d’images peuvent être
superposées ou mélangées à l’image optique et ceci en temps réel sur
l’écran.
Chirurgie laparoscopique du futur
Une image tridimensionnelle construite par CT-scan ou résonance
magnétique nucléaire (RMN) peut par exemple être projetée sous forme
Les nouvelles technologies visent à redonner au chirurgien une vision d’holographe dans une paire de lunettes stéréo et être ainsi superposée
tridimensionnelle, une sensation tactile et de meilleures conditions et comparée par le chirurgien à l’image réelle qu’il regarde dans son
ergonomiques en améliorant deux systèmes : le système afférent qui écran vidéo.
comporte les images perçues par le chirurgien et la sensation tactile, le
système efférent qui concerne les instruments chirurgicaux. Ces Une sensation tactile peut être procurée au chirurgien par un système de
améliorations vont changer complètement les principes généraux de la capteurs placé au bout de l’instrument. Ceux-ci sont sensibles au
laparoscopie. changement de pression statique ou dynamique.
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40-050 PRINCIPES GÉNÉRAUX DE LA CHIRURGIE LAPAROSCOPIQUE Techniques chirurgicales
A1 B1 B5 B9
A2 B2 B6
A3 B3 B7
Système efférent Pour résoudre ces inconvénients, une première amélioration consiste à
installer une articulation supplémentaire à l’intérieur de l’abdomen,
Ce système concerne essentiellement les instruments chirurgicaux. c’est-à-dire à l’extrémité de l’instrument. On récupère alors tous les
En chirurgie ouverte, la dextérité du chirurgien repose sur une variété degrés de liberté (fig 19).
pratiquement illimitée d’actions, permise par la mobilité des doigts, du À partir du moment où il existe une articulation à l’intérieur et à
poignet, du coude et de l’épaule (fig 17). l’extérieur de l’abdomen, de part et d’autre d’un point fixe, il est naturel
En chirurgie laparoscopique en revanche, le fait que de longs de penser à la robotique qui permet la manipulation des instruments à
instruments soient utilisés à travers une ouverture fixe de la paroi limite distance du patient dans une position ergonomique satisfaisante (fig 20).
les degrés de liberté à quatre : entrer et sortir, rotation autour d’un axe,
droite/gauche et haut/bas. Cette fixité du trocart met souvent le L’organisation du bloc opératoire du futur sera donc la suivante (fig 21) :
chirurgien dans une position inconfortable et l’empêche de mener à bien – des instruments chirurgicaux avec des capteurs de pression pour
certains actes chirurgicaux avec la même aisance qu’en chirurgie reproduire la sensation tactile sont articulés, soutenus et actionnés par
ouverte (fig 18). un robot ;
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40-080
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 40-080
Toute référence à cet article doit porter la mention : Parc Y, Frileux P, Dehni N, Ollivier JM, Tiret E et Parc R. Réinterventions pour complications infectieuses intrapéritonéales postopératoires. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques
et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-080, 2003, 24 p.
40-080 Réinterventions pour complications infectieuses intrapéritonéales postopératoires Techniques chirurgicales
– cholécystite aiguë ; L’apparition de manifestations susceptibles d’être liées à une
– nécrose intestinale ; péritonite postopératoire impose la mise en œuvre immédiate d’une
réanimation humorale intensive avec une antibiothérapie
– occlusion aiguë du grêle ;
probabiliste à large spectre, après les prélèvements nécessaires à la
– obstruction, défectuosité d’un montage (par exemple vasculaire détermination des germes en cause [47].
sur le système porte) etc ; Une surveillance clinique et biologique attentive doit être instituée
– éviscération. alors que sont faites, si nécessaire, des explorations morphologiques
En présence de suites opératoires précoces troublées, s’il faut savoir pour étayer le diagnostic et celles destinées à éliminer une autre
se reposer sur les examens complémentaires, en particulier cause aux phénomènes (électrocardiogramme [ECG], angioscanner
biologiques et morphologiques pour chercher une explication, il est à la recherche d’une embolie pulmonaire). En dehors des accidents
essentiel de mettre d’abord en cause les gestes réalisés et d’être prêt d’emblée menaçants avec défaillance d’une ou plusieurs fonctions
à une réintervention dont la simplicité et l’efficacité sont directement vitales, de la constatation de signes physiques abdominaux de
dépendantes de la célérité de la décision de reprise. Il vaut sans péritonite diffuse qui imposent l’intervention après une courte phase
doute mieux quelques réinterventions par excès que le choix d’une de réanimation, seule une surveillance minutieuse de l’évolution
attitude résolument conservatrice avec une réanimation s’adaptant permet de choisir la bonne attitude [33]. Il n’est pas interdit d’espérer
aux symptômes, sans connaissance précise des lésions anatomiques que l’accident infectieux reste localisé, éventuellement sans
sous-jacentes. Une réanimation abusive peut masquer des lésions lendemain, évolue vers un abcès réclamant un drainage secondaire
intrapéritonéales, qui se dévoileront tardivement par des ou encore annonce l’installation d’une fistule entérocutanée
défaillances polyviscérales qu’on ne devrait plus voir (insuffisance d’évolution spontanément favorable. Mais le risque est que cet
cardiocirculatoire, insuffisance rénale) ou des éviscérations avec leur accident infectieux ait de graves retentissements, qu’il diffuse ou non
risque de traumatisme intestinal [23]. dans le péritoine, et il ne faudrait pas, dans une telle éventualité,
retarder l’heure de la réintervention. Dans le cadre des péritonites
SUR QUELS ÉLÉMENTS REPOSE L’INDICATION postopératoires diffuses, généralisées à la grande cavité ou
DE RÉINTERVENTION PRÉCOCE ? multiloculaires, la date du cinquième jour après l’intervention
initiale constitue un cap important pour le pronostic [33] et la
¶ Indications de réintervention précoce
réintervention doit être entreprise autant que possible avant cette
pour phénomènes septiques d’origine anastomotique (5 date.
à 6 premiers jours)
Un certain nombre de critères doivent être regroupés pour surseoir à une
Tout phénomène septique survenant après chirurgie digestive réintervention [19, 33]. Ils sont conditionnels et doivent être réévalués
n’implique pas la nécessité de réintervenir, même s’il est lié à la au cours d’examens répétés dans les 24 heures. Ils doivent tous être
désunion d’une anastomose. De même, l’extériorisation d’une fistule réunis pour que soit adoptée une attitude conservatrice, et, fait
entérocutanée par un drainage, survenant précocement, n’est pas en important, les phénomènes en cause doivent être tous clairement
soi une indication opératoire formelle. À l’inverse, le même « explicables » :
écoulement précoce de liquide digestif par une cicatrice de
laparotomie constitue, lui, une bonne raison pour réopérer sans – une diurèse conservée (+ de 40 mL/h) ;
retard (sauf exception d’un abdomen cloisonné), car avant de – une condition cardiocirculatoire stable sans recours prolongé aux
s’extérioriser par l’incision, le liquide intestinal a pu s’épancher dans amines vasopressives et surtout sans nécessité d’augmenter
la grande cavité. Une irruption de liquide intestinal ou de bile dans progressivement les posologies ;
un trajet de drainage dans les 2 ou 3 premiers jours doit faire
craindre une faute technique dans la réalisation de l’anastomose ou – l’absence de signes toxi-infectieux généraux ;
son traumatisme par un drain et peut justifier une réintervention – l’absence de signes abdominaux de diffusion ;
immédiate susceptible d’éviter une évolution prolongée et
– un transit conservé ou rétabli, une production de la sonde
compliquée.
nasogastrique qui diminue ;
En toutes circonstances, c’est l’importance des phénomènes
infectieux et leur tolérance, la présence de signes physiques – la rétrocession rapide du signe d’appel ayant fait évoquer le
abdominaux et leur diffusion qui constituent les éléments diagnostic de péritonite postopératoire ;
déterminants de l’indication opératoire. – une faible élévation des polynucléaires neutrophiles, ou si le
Devant tout opéré abdominal récent, il faut être en mesure chiffre est élevé, une chute importante de celui-ci par rapport au
d’expliquer logiquement les phénomènes rencontrés et garder chiffre précédent ;
comme principe de base que l’« incompréhension médicale » de
– une insuffisance rénale fonctionnelle facilement corrigée ;
suites opératoires troublées est en soi une indication à
réintervenir [19]. – l’absence d’indication à une ventilation assistée ou à la
Les premières manifestations de l’infection péritonéale, secondaires prolongation d’une ventilation assistée chez un patient sans
à la perte d’étanchéité d’une réparation digestive, sont très précoces, insuffisance respiratoire préopératoire.
presque toujours présentes dans les 3 jours suivant l’intervention. L’amélioration des critères biologiques et cliniques doit être rapide
La diffusion de l’infection peut être, elle, retardée [19]. La fièvre (24 à 36 heures) pour que soit poursuivi le traitement conservateur.
apparaît, c’est l’anomalie révélatrice la plus fréquente, puis suivent À l’opposé, pour ne pas regretter des réinterventions trop tardives, il
la diarrhée, l’hypersécrétion et la stase gastrique, le hoquet, une faut respecter des critères formels de réintervention rapide, eux aussi à
tachycardie isolée, une chute de la diurèse et enfin l’absence de apprécier par des examens successifs rapprochés. Il suffit d’en réunir un
reprise ou l’arrêt secondaire du transit intestinal. Des troubles minimum pour poser l’indication d’une réintervention : un critère
psychiques peuvent apparaître au premier plan et faire errer le clinique et un critère biologique, voire un seul isolé :
diagnostic. Il ne faut pas attendre les signes physiques abdominaux
pour penser à la péritonite postopératoire. La défense, la contracture – non-réponse bioclinique satisfaisante à la réanimation ;
sont de recherche difficile ; elles sont souvent éphémères s’estompant – condition cardiocirculatoire défaillante allant en se dégradant ;
vite avec le météorisme. Au cours des péritonites postopératoires,
deux fois sur trois le ventre reste souple, une fois sur deux il se – oligoanurie ;
météorise, une fois sur dix il demeure plat et indolore [49]. Enfin, la – signes abdominaux de diffusion ;
défaillance cardiocirculatoire traduit le plus souvent une infection
– transit intestinal non rétabli ou arrêt secondaire ;
majeure de même que l’insuffisance rénale ; le diagnostic doit être
porté avant de telles complications. – gradient élevé d’hyperleucocytose ;
2
Techniques chirurgicales Réinterventions pour complications infectieuses intrapéritonéales postopératoires 40-080
– persistance d’une insuffisance rénale malgré la réanimation ou diminuer la rentabilité de cet examen. Toutefois, la possibilité
aggravation de l’insuffisance rénale ; d’associer une opacification digestive à la recherche d’une éventuelle
– nécessité d’une ventilation assistée. désunion anastomotique, la possibilité de réaliser des
reconstructions, de ponctionner et drainer les collections objectivées,
En respectant strictement ces critères formels de réintervention, il font du scanner abdominal postopératoire l’examen morphologique
est possible d’agir avant la survenue des accidents postopératoire déterminant dans la prise de décision. Il convient
cardiocirculatoires secondaires au choc toxi-infectieux. cependant d’interpréter avec précaution la nature précise
Quelle aide attendre, dans ces circonstances, des explorations d’épanchements très précoces ; ils peuvent être simplement séreux
morphologiques ? et ne pas expliquer le tableau clinique. Leur ponction doit être
Elles doivent en toutes circonstances être interprétées en fonction envisagée au moindre doute, si elle n’est pas dangereuse pour
des données biologiques et cliniques et, en cas de discordance, céder l’intestin ou les vaisseaux.
le pas à ces dernières. L’apport de l’imagerie est de deux ordres. Quelle place pour les opacifications des zones anastomotiques ?
D’une part elle aide à évaluer la gravité des lésions anatomiques, La moindre suspicion de fuite biliaire autour d’un drain
sans pour autant assurer une meilleure compréhension de celles-ci. transcystique ou de Kehr, toute anomalie du débit d’un tel drain
Il faut plus attendre d’elle un argument pour réintervenir dans les faisant suspecter son déplacement, doivent conduire à son
cas litigieux qu’un argument contre une réintervention, à moins opacification sans retard.
qu’elle n’apporte une possibilité de traitement. Les ponctions et
drainages radioguidés rendent possible la prise en charge d’un très Le transit œso-gastro-duodénal aux hydrosolubles ou le lavement
grand nombre d’abcès intra-abdominaux à la condition qu’ils soient opaque doivent être d’indication assez large en période
accessibles, en faible nombre et cloisonnés. Cette thérapeutique postopératoire troublée. L’opacification œso-gastro-duodénale doit
conservatrice est cependant le plus souvent retardée (après la être suivie de l’aspiration immédiate du contenu gastrique si le
première semaine) et s’adresse à des patients ne présentant pas de transit intestinal n’est pas rétabli au moment de l’examen. Il est
critères de gravité. impératif que le chirurgien soit présent au cours de l’examen pour
bien préciser les anomalies qu’il recherche et limiter la quantité de
– La radiographie thoracique est réalisée chaque fois que les suites produit ingéré. La crainte de fausses routes avec pneumopathie aux
opératoires ne sont pas parfaites. Toute anomalie sus- hydrosolubles doit réduire les indications du repas opaque à des
diaphragmatique (épanchement pleural ou condensation circonstances précises. Celles du lavement opaque peuvent être
parenchymateuse) doit être interprétée avec deux axes de réflexion : beaucoup plus larges ; les renseignements qu’il peut apporter,
complications bronchopulmonaires autonomes (atélectasie, embolie surtout si les clichés sont orientés, sont souvent plus contributifs
pulmonaire) ou manifestations thoraciques d’une complication que ceux obtenus par l’adjonction au scanner d’une opacification
abdominale. Qu’il s’agisse d’un foyer pulmonaire ou d’un rétrograde.
épanchement pleural, avant d’affirmer le diagnostic d’embolie Il convient cependant de ne pas perdre de vue qu’un examen en
pulmonaire dans les premiers jours postopératoires, il faudra avoir apparence normal n’élimine en aucune façon la désunion précoce
des arguments formels, donnés essentiellement par l’angioscanner. de l’anastomose redevenue apparemment étanche au moment de
– Les clichés d’abdomen sans préparation, de moins en moins l’examen, du fait de l’œdème des tissus. D’autre part, le produit
demandés, sont rarement contributifs. Il convient d’analyser les hydrosoluble hyperosmolaire utilisé pour l’opacification peut
masses viscérales pleines et les éléments visibles du tube digestif, contribuer à faire malheureusement résorber cet œdème et entraîner
ainsi que les espaces séparant ces diverses structures [41]. L’existence une fuite secondaire du contenu intestinal par la réouverture de la
de niveaux hydroaériques sur le grêle n’a guère de valeur très brèche. Cependant, devant une anastomose colorectale, lorsque le
précocement, surtout s’ils sont diffus. Sur le cliché de face en tableau clinique n’impose pas de façon formelle la réintervention, la
décubitus dorsal, souvent le seul que l’on puisse obtenir au lit du constatation d’une anastomose apparemment étanche ou d’une fuite
malade, il faut apprécier le degré de distension intestinale, discrète sera un argument pour temporiser, alors qu’une large fuite
rechercher les signes d’une nécrose de la paroi digestive sous la de produit d’opacification sera un argument pour faire pencher la
forme de petites bulles d’air alignées et bordant une clarté digestive ; décision vers la réintervention. Dans le cadre d’une anastomose
tout à fait exceptionnellement, la présence d’air dans le système œsojéjunale après gastrectomie totale ou d’une anastomose
porte. Le volume croissant de pneumopéritoine est très rarement gastrojéjunale, l’absence d’anomalie radiologique et la découverte
rencontré mais naturellement est de grande valeur pour affirmer la d’une autre cause évidente à la complication abdominale
solution de continuité intestinale communiquant avec la grande (cholécystite gangréneuse, désunion du moignon duodénal)
cavité péritonéale. constituent un argument de poids pour ne pas explorer le site
anastomotique œsophagien ou gastrique. Il convient cependant de
– L’échographie abdominale, lorsqu’elle est faite par un
se rappeler que ce n’est pas la désunion anastomotique,
échographiste averti, s’intègre parfaitement dans l’exploration
éventuellement compliquée de fistule entérocutanée, qui impose le
« clinique » au lit du malade devant toute anomalie postopératoire
recours à la chirurgie, mais l’infection qui en est la conséquence.
[45]
. Il est indispensable que l’échographiste connaisse parfaitement
Celle-ci est variable d’un patient à l’autre pour des mêmes dégâts
l’intervention réalisée et la complication suspectée. Précocement, il
anatomiques ; aussi, la démonstration d’une fuite anastomotique
faut demander à cet examen de préciser la présence ou non d’un
n’est pas en soi une indication à la réintervention, mais à l’opposé,
épanchement péritonéal, l’existence ou non d’une cholécystite, d’une
son absence, alors que le tableau est inquiétant, ne s’inscrit pas
thrombose portale ou d’une cause extradigestive évidente
contre une telle décision.
(rétropéritonéale, pleuropulmonaire ou péricardique). La distension
des anses grêles constitue cependant une gêne à cette exploration, ¶ Cholécystite aiguë postopératoire
qu’il faut savoir répéter et interpréter en fonction des constatations
(4e au 12e jour)
cliniques. Elle peut avantageusement précéder une éventuelle
ponction à l’aiguille fine cherchant à déterminer la qualité du liquide Elle réclame le recours à la cholécystectomie dès le diagnostic posé
épanché dans les flancs ou entre les anses. dans certaines circonstances (malade en état très précaire,
– La tomodensitométrie est l’examen clé en période postopératoire épaississement majeur de la paroi vésiculaire).
trouble après chirurgie abdominale. La présence de gaz n’est pas La particularité de la cholécystite aiguë, chez un opéré récent de
gênante mais le déplacement du malade au service de radiologie est l’abdomen, tient dans le fait que l’interprétation de la
indispensable, ce qui peut être dangereux lorsque la condition symptomatologie est souvent difficile. La douleur, la fièvre, le
cardiorespiratoire du patient est instable. L’existence d’une subictère éventuel n’attirent pas d’emblée l’attention sur la vésicule.
insuffisance rénale peut représenter une contre-indication à L’appréciation de l’état de la paroi vésiculaire peut être difficile en
l’injection de produit de contraste iodé en intraveineux et ainsi échographie du fait de la présence possible d’un peu de liquide
3
40-080 Réinterventions pour complications infectieuses intrapéritonéales postopératoires Techniques chirurgicales
péritonéal dans la poche de Morrison. L’essentiel est de penser répond à ces impératifs. Il peut être proposé, lorsque la
systématiquement à ce diagnostic. La place de la ponction réintervention est très précoce, de reprendre une incision sous-
vésiculaire sous échographie semble devoir être restreinte. costale éventuellement prolongée en bi-sous-costale ou une incision
transversale qui peut être, elle, transformée en grande transversale
¶ Pancréatite aiguë postopératoire de l’abdomen au-dessus ou au-dessous de l’ombilic. Pour une
pathologie sus-mésocolique spécialement pancréatique, l’incision bi-
Toute suspicion de pancréatite aiguë postopératoire ou la sous-costale permet une bonne exploration et favorise le drainage
surveillance d’une pancréatite opérée réclame l’étude ainsi que la protection du grêle. En revanche, les incisions
tomodensitométrique de l’abdomen, irremplaçable dans ces transversales très larges n’ont pas ces avantages et exposent à des
circonstances, sauf peut-être par l’imagerie par résonance nécroses et rétractions musculaires, source d’éventrations majeures.
magnétique [45]. Toute réintervention quelque peu tardive doit faire préférer l’incision
médiane (sauf affection pancréatique). Aucune réintervention n’est
¶ Abcès localisés menée par une incision oblique du flanc (Mac-Burney) ou
Ils sont maintenant plus aisés à mettre en évidence. Ils s’installent horizontale sus-pubienne. Lorsqu’il s’agit de drainer une collection
après des suites initialement troublées qui se sont secondairement bien limitée, de faire secondairement une cholécystectomie, une
améliorées sans devenir parfaites. L’échographie ou la incision élective peut être choisie si la certitude diagnostique est
tomodensitométrie sont tout à fait indiquées pour en préciser le acquise.
nombre et la localisation et éventuellement pour leur traitement non Après cœlioscopie, en cas d’indication de reprise, bien qu’aucune
opératoire [2, 26, 39]. Toutefois, des abcès multiples, entre les anses du étude n’ait spécifiquement été rapportée sur la prise en charge des
grêle ou les feuillets du mésentère, peuvent être méconnus par l’une péritonites postopératoires après abord cœlioscopique, une incision
ou l’autre de ces explorations [7], et surtout les abcès pancréatiques médiane semble préférable (sauf en cas de lésion pancréatique). La
ou infectés par des levures semblent moins bien répondre à de telles reprise par abord cœlioscopique dans un contexte septique ne
procédures et requièrent le plus souvent une réintervention [7, 36]. semble pas raisonnable, plusieurs études expérimentales ayant
montré des risques accrus de choc septique après abord
¶ Indications de réinterventions cœlioscopique d’infection intrapéritonéale [11, 30, 39].
pour phénomènes occlusifs
Elles ne sont pas évidentes en période postopératoire initiale. EXPLORATION ET TOILETTE
DE LA CAVITÉ ABDOMINALE
L’absence de reprise du transit intestinal s’intègre le plus souvent
dans le cadre des phénomènes infectieux et fait partie des signes Ce sont des temps déterminants de la réintervention [47].
invitant à la réintervention.
– Tout épanchement péritonéal rencontré au cours d’une
L’arrêt secondaire du même transit dans une atmosphère d’infection réintervention doit toujours être prélevé pour étude bactériologique
a la même valeur. en milieu aérobie et anaérobie.
Cependant, il convient de se rappeler qu’une occlusion du grêle par
– La facilité avec laquelle se fait l’exploration abdominale dépend de la
incarcération d’une anse, voire par volvulus sur bride, est possible
durée d’évolution de l’éventuelle péritonite postopératoire.
avant que le malade ne quitte l’hôpital, alors que les suites
opératoires initiales ont été parfaites. Précocement, dans le cours évolutif d’une péritonite, les feuillets
mésentériques et les anses intestinales se séparent aisément. Les
¶ Indications de réinterventions pour hémorragie fausses membranes sont à ce stade lâches et aisément fragmentées
entre pouce et index. La toilette péritonéale est au mieux assurée
La survenue d’une déglobulisation majeure en période par une irrigation-aspiration immédiate d’un soluté isotonique tiède.
postopératoire précoce, sans hémorragie digestive authentifiée par Un tel lavage péritonéal peropératoire est plus efficace que le simple
l’aspiration gastrique ou l’émission rectale, qu’elle s’accompagne ou essuyage des zones contaminées. L’utilisation de compresses de
non d’un débit excessif des drainages, ne pose pas de difficulté pour cellulose doit être limitée pour ne pas augmenter le risque de bride
arriver au diagnostic d’hémopéritoine. La meilleure attitude, même postopératoire. Le bénéfice de l’adjonction au liquide de lavage
si l’hémorragie se tarit, d’autant que l’on est plus proche de l’acte d’antiseptiques ou d’antibiotiques n’est pas démontré [47] . La
opératoire, est la réintervention pour une évacuation complète de libération intestinale ne doit pas négliger le jéjunum initial souvent
l’épanchement sanglant, meilleur garant de l’arrêt de l’hémorragie caché sous le côlon transverse et le grand épiploon. Le sigmoïde
et de l’absence d’infection, et le contrôle de la source de doit être libéré de son éventuelle adhérence à la margelle du petit
l’hémorragie. Cette reprise permet éventuellement d’installer des bassin. Le cul-de-sac de Douglas, l’arrière-cavité des épiploons, les
drains pour une irrigation locale, visant à éviter la reprise espaces sous-phréniques, les gouttières pariétocoliques sont
hémorragique, plus exceptionnellement à mettre en place un systématiquement explorés. Le liquide de lavage qui s’y accumule
méchage. doit être correctement évacué, au besoin en faisant varier
La prévention des lésions aiguës superficielles de la muqueuse l’orientation de la table d’opération. La quantité de liquide
gastroduodénale chez les patients à risque et les progrès de la nécessaire à la toilette péritonéale est très variable d’un patient à
réanimation ont, de façon quasi complète, éliminé les indications de l’autre ; elle peut atteindre 10 à 15 L dans les péritonites
réintervention pour contrôle d’une hémorragie gastroduodénale postopératoires sévères. Lorsque de tels volumes sont utilisés, et
massive [19, 50]. Lorsqu’une telle hémorragie survient, il convient impérativement s’il existe une insuffisance rénale, il faut préférer le
d’obtenir une description endoscopique des lésions après lavage liquide de dialyse péritonéale isotonique au sérum physiologique.
intensif de la cavité gastrique. La chirurgie ne doit être entreprise L’éradication totale des fausses membranes adhérentes est
que la main forcée par l’importance et/ou la récidive de la perte dangereuse pour la paroi intestinale et comporte de plus le risque
sanguine, et l’échec des traitements endoscopiques. Cette d’un suintement sanglant persistant. Il ne faut pas faire de
réintervention doit s’intégrer dans le cadre général du traitement de débridement systématique et complet mais enlever les seules fausses
la lésion infectieuse sous-jacente. membranes qui se décollent aisément [37].
Lorsque la péritonite postopératoire est évoluée, surtout s’il s’agit
d’une réintervention itérative, la libération intestinale devient plus
QUELLE VOIE D’ABORD POUR LA RÉINTERVENTION ? difficile. Spécialement derrière une incision partiellement désunie,
Assurer l’exploration complète et la toilette minutieuse de la cavité nécrotique, les anses grêles apparaissent recouvertes d’une
abdominale n’est possible que par une large cœliotomie. L’incision « couenne » à première vue indisséquable. Il convient devant de
médiane, au besoin agrandie sur toute la hauteur xiphopubienne, telles lésions de se porter au-dessus, au-dessous ou sur le côté par
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Techniques chirurgicales Réinterventions pour complications infectieuses intrapéritonéales postopératoires 40-080
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A
RÉPARATION PARIÉTALE
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B
L’attitude à adopter vis-à-vis de la paroi dépend en premier lieu de
son degré de dégradation. L’état des berges musculoaponévrotiques
lorsque l’ablation des mèches est envisagée ; dans ce dernier cas, conditionne, en effet, les possibilités de réparation. Il faut aussi tenir
elle n’est donc entreprise que vers le huitième-neuvième jour, en compte de l’agitation du malade, de l’intensité des complications
utilisant du sérum physiologique, voire du sérum additionné d’eau respiratoires, en prévoyant en particulier le rôle néfaste, pour la
oxygénée (fig 2B). réparation pariétale, d’une toux fréquente.
Les mèches ne sont retirées progressivement que vers le neuvième- Il est très souvent possible de refermer simplement une paroi non
dixième jour. suppurée aux berges trophiques chez un sujet indemne de
complications respiratoires. Cependant, une fois sur trois, surtout
Le même sac est laissé en place entre 12 et 14 jours et doit venir après laparotomies itératives rapprochées, cette réparation pariétale
sous l’effet d’une traction douce ; le recours à l’anesthésie générale classique n’est plus possible.
doit être l’exception ; sa nécessité traduit souvent un orifice de sortie
pariétal mal adapté. ¶ Réparation primaire par rapprochement direct
Dans la cavité restante, après ablation du sac de Mikulicz, surtout si des berges aponévrotiques (fig 3)
l’orifice pariétal est très étroit, on peut éventuellement laisser un Elle est possible dans deux cas sur trois, ce d’autant plus
drain fin et souple en élastomère de silicone durant quelques jours, fréquemment que la réintervention est précoce. Elle nécessite une
dans le but d’assurer quelques irrigations. hémostase rigoureuse de tous les plans pariétaux et l’excision de
toute nécrose pariétale, même modeste. Le choix d’un fil à résorption
¶ Choix des sites de drainage lente est impératif. Dans la mesure du possible, il convient de faire
Le choix des sites à drainer doit tenir le plus grand compte des un plan péritonéal (par exemple, en surjet à l’aide d’un fil fin). Pour
collections les plus fréquentes. Devant toute infection péritonéale le rapprochement aponévrotique, mieux que des courts segments de
sévère, il convient de drainer systématiquement l’espace inter- surjet, il semble préférable d’avoir recours à des points séparés,
hépatodiaphragmatique droit par un drain. Cette précaution fait passés une fois ou en X (fil anciennement 0). La peau doit être
disparaître le risque d’abcès interhépatodiaphragmatique résiduel. rapprochée par quelques points séparés mais sans rechercher une
L’espace sous-hépatique droit et les gouttières pariétocoliques sont fermeture étanche.
drainés par un drain entouré d’une lame ou par deux drains. Le La question qui se pose pour ce type de réparation est celle de son
mode de drainage quasi exclusif du cul-de-sac de Douglas est le sac renforcement temporaire. Les points totaux transfixiants n’ont pas
de Mikulicz, dont on ne saurait se priver dans le traitement d’une fait la preuve de leur efficacité pour la prévention d’une éviscération
péritonite postopératoire évoluée. Plusieurs sacs peuvent, si secondaire. Quels que soient leurs modes de fixation, ils exposent à
nécessaire, être disposés simultanément en des points différents de des complications spécifiques qui, bien que rares, sont tout à fait
l’abdomen pour exclure des zones nécrotiques. Lors des inadmissibles : nécrose pariétale, fistule du grêle. Nous n’y avons
réinterventions secondaires tardives, on est toujours frappé par plus jamais recours.
l’insignifiance des adhérences résiduelles après un tel drainage, dont La contention externe par « bas collé » a l’inconvénient d’entraîner
les séquelles pariétales sont des plus minimes. des érosions cutanées et s’accommode mal de stomies multiples. Les
6
Techniques chirurgicales Réinterventions pour complications infectieuses intrapéritonéales postopératoires 40-080
7
40-080 Réinterventions pour complications infectieuses intrapéritonéales postopératoires Techniques chirurgicales
6 L’aponévrose n’est pas libérée du muscle dans sa partie interne. L’écartement des
deux berges cutanées atteint en moyenne 10 cm.
10 Schéma général avec des stomies, des incisions de relaxation et des drainages qui
restent dans les flancs en dehors des incisions, un sac de Mikulicz à la partie inférieure
de la médiane ; une stomie non productive est placée dans une surface de glissement.
8
Techniques chirurgicales Réinterventions pour complications infectieuses intrapéritonéales postopératoires 40-080
*
A
12 Le treillis de polyglactine 910 est recouvert d’un pansement gras et l’abdomen re-
couvert de bandes de Transporet tendues.
souvent possibles et, à l’inverse, elle ne doit pas être adoptée devant Initialement utilisée en dernier recours devant des dégâts pariétaux
des dégâts pariétaux considérables et rétraction latérale des muscles rendant impossible la fermeture et avant que soit disponible le
droits. treillis de polyglactine, ou devant des péritonites récidivantes,
C’est dans ces circonstances que la réparation pariétale au moyen l’éviscération thérapeutique ou laparostomie (abouchement de la
d’une prothèse trouve ses meilleures indications. cavité péritonéale à la peau) repose sur un principe ambigu dont le
fondement physiopathologique n’a jamais été prouvé : nécessité de
¶ Fermeture pariétale au moyen d’une prothèse laparotomies itératives rapprochées pour reconnaître, évacuer et
en tissu résorbable mieux drainer au jour le jour les épanchements septiques
récidivants, de façon diffuse ou localisée. Après toilette péritonéale
Le treillis tricoté en polyglactine 910 (Vicrylt), à mailles assez larges, et traitement de la cause de la péritonite, il n’est fait aucune tentative
est remarquablement toléré en milieu infecté et il apporte un renfort de rapprochement des berges de la laparotomie. La protection du
pariétal temporaire efficace ; sa résorption se fait en quelques mois. grêle est assurée par des compresses vaselinées ou des compresses
Ce matériau a remis à l’honneur la technique décrite initialement imbibées d’antiseptiques, ou encore par une plaque de polyuréthane
par Ogilvie dans les plaies de guerre et qui consistait à utiliser des (Lyomousset), le tout étant tenu en place par une contention
plaques de coton pour protéger les viscères et combler la perte de externe. Des vérifications itératives systématiques dans les premiers
substance pariétale. Ultérieurement, des matériaux synthétiques non jours, puis guidées par une surveillance clinique et biologique, sont
résorbables ont été utilisés avec quelques succès, mais la persistance pratiquées jusqu’à ce qu’elles soient négatives. Ultérieurement, la
du sepsis pariétal et l’aggravation de la nécrose étaient fréquentes ; couverture de l’éviscération, qui était assurée dans les premières
aussi, ce type de réparation a été assez rapidement abandonné [17, 44, expériences par réépidermisation spontanée, peut être hâtée par
48]
. l’utilisation de greffes ou par mobilisations cutanées, éventuellement
L’avantage pratique des prothèses résorbables est d’éviter toutes obtenues par des incisions latérales de relaxation.
manœuvres traumatisantes sur le grêle, lors des pansements, et de Le bénéfice de l’éradication systématique de tous les foyers
réduire aussi considérablement le risque de fistule exposée du grêle septiques au jour le jour n’a pas démontré son efficacité. Il n’est pas
sans entretenir l’infection. La technique de mise en place du treillis évident que ces réinterventions systématiques ne détruisent pas les
de polyglactine 910 est simple (fig 11A, B). Il faut le fixer à la face possibilités naturelles de défense du péritoine.
9
40-080 Réinterventions pour complications infectieuses intrapéritonéales postopératoires Techniques chirurgicales
Cette technique a de nombreuses contraintes dont on peut citer Ces deux derniers procédés conservent cependant des indications,
quelques-unes. Elle exige : notamment la fermeture par prothèse perméable et résorbable,
devant des dégâts pariétaux très importants (perte de substance de
– une grande expérience de l’équipe chirurgicale et de l’ensemble
la paroi abdominale supérieure à 50 % de la surface
de l’équipe soignante ;
pariétoabdominale antérieure). De telles circonstances sont tout à fait
– une réanimation lourde et prolongée avec ses risques propres ; exceptionnelles, moins de 1,5 % des cas dans notre expérience [21].
– une sédation pharmacologique quasi continue et une ventilation
assistée pendant plusieurs jours ;
– une immobilisation prolongée du malade qui ne peut être levé Traitement de la solution
rapidement. de continuité intestinale
En fait, cette méthode lourde, avec une grande servitude de l’équipe
soignante et un coût élevé, est dangereuse pour l’intestin grêle avec
une fréquence de fistules exposées qui varie entre 6 et 35 % selon les PÉRITONITES POSTOPÉRATOIRES
D’ORIGINE SOUS-MÉSOCOLIQUE
expériences [23]. Ni l’utilisation de la mousse de polyuréthane ni les
diverses techniques de contention ne semblent mettre les patients à Il est admis à l’heure actuelle que, face à une solution de continuité
l’abri d’une telle complication, rançon encore inévitable de digestive postopératoire portant sur l’intestin grêle ou le côlon, ni la
l’exposition prolongée des anses intestinales aux multiples suture ni la résection suivie d’anastomose ne sont acceptables [15, 24,
traumatismes spontanés ou provoqués. 47]
. Ce traitement est donc largement dominé par les modalités de
Après une phase d’engouement, la technique a dû s’adapter à la réalisation des différentes stomies : entérostomies dites « de
rigueur des faits : diminution de la fréquence et de la durée des sauvetage » sur l’intestin grêle ou sur le côlon.
lavages itératifs, couverture précoce de la zone exposée, utilisant Nous envisageons dans un premier temps les techniques de
notamment des translations cutanées. Les indications sont devenues réalisation des différentes stomies avant d’en donner des exemples
rares : état pariétal désastreux. concrets au chapitre des indications.
L’évolution ultérieure, guère analysée dans les publications, n’est
pas sans difficulté. Le tissu de granulation et la néoépidermisation ¶ Techniques
qui recouvre les anses grêles sont mal vascularisés, ce qui rend
difficiles les réinterventions pour fermeture de stomie. La cure de Principes [37]
l’éventration résiduelle est souvent difficile, voire impossible, et ces Toute stomie, quels que soient son type, son caractère productif ou
patients deviennent de véritables handicapés pariétaux. non productif et son siège, doit être réalisée sur un intestin viable.
Aucun doute n’est permis, afin d’éviter une réintervention pour
¶ Peut-on schématiser les indications de ces différentes
nécrose stomiale dramatique chez ce type de patient.
techniques de réparation pariétale ?
Le siège de la stomie doit être réfléchi avant d’entreprendre sa
On ne répétera jamais assez que la réparation pariétale n’est qu’un réalisation. Il dépend de la mobilité de l’intestin, de l’état de la paroi,
des temps de la réintervention pour péritonite postopératoire. Quelle du type de lésion intestinale, et de la nécessité d’appareillage et
que soit l’importance de ce temps pariétal, il ne doit être envisagé d’utilisation nutritionnelle. La mobilité intestinale peut être
qu’après une éradication totale des foyers infectieux intra- fortement diminuée par les adhérences, par l’épaississement
péritonéaux et la réalisation des gestes adéquats pour la prévention inflammatoire des anses, des mésos et leurs accolements. Il faut
de la récidive de la péritonite. Dans la majorité des cas, une beaucoup de minutie pour mobiliser les mésos épaissis en évitant
réintervention unique est suffisante mais la réparation pariétale, de dévasculariser l’intestin. Il faut savoir mobiliser la racine du
quelle que soit sa technique, ne doit en aucune façon être considérée mésentère pour que le grêle vienne à la paroi sans traction excessive.
comme le terme définitif du traitement de la péritonite L’état pariétal peut être altéré par les interventions antérieures
postopératoire. Elle ne doit en aucune façon gêner une éventuelle (déhiscence pariétale, orifices de drainage ou de stomies, nécrose
réintervention précoce ou secondaire. septique). La place de la stomie est fonction de l’obligation ou non
Une prospective des complications pariétales possibles doit être d’effectuer des incisions cutanéoaponévrotiques de décharge.
toujours gardée en mémoire ; il ne faut pas risquer d’obérer
Le type de lésion conditionne le nombre et le type des stomies, la
l’évolution postopératoire par la survenue d’une éviscération qui
présence ou non d’anses exclues, le caractère productif ou non des
peut être évitée.
stomies. Les impératifs d’appareillage doivent rester présents à
Cette réparation pariétale doit permettre la mobilisation précoce du l’esprit. Il faut penser à l’application des poches collectrices,
patient et favoriser le retour à la normale de la fonction intestinale, ménager des espaces suffisants entre les stomies et les drainages,
afin de rendre le tractus digestif utilisable pour les apports depuis la place des jéjunostomies ou gastrostomies d’alimentation.
nutritionnels.
L’ensemble du montage doit figurer sur un schéma (fig 13) qui est
Enfin, il ne faut jamais perdre de vue que la pathologie initiale d’un beaucoup plus explicite qu’un long compte rendu opératoire.
tel patient pouvait être tout à fait bénigne et il convient, lorsqu’on a
le choix, de ne pas négliger les séquelles pariétales que peuvent Réalisation des stomies
entraîner certaines techniques, notamment les absences de fermeture
cutanée.
• Orifice pariétal
Chaque fois que possible, et c’est le cas deux fois sur trois, une
fermeture pariétale classique doit être réalisée. Cela est d’autant plus – Siège.
fréquent que les réinterventions sont entreprises précocement. Il ne doit être choisi qu’après réalisation des incisions de relaxation
Lorsqu’une telle réparation ne paraît pas réalisable dans (si elles sont nécessaires) et mise en place des drainages. Il est placé
d’excellentes conditions, la couverture cutanée du grêle, avec contre- avec le souci permanent d’en faciliter l’appareillage. Une stomie
incisions bilatérales cutanéoaponévrotiques de relaxation, apparaît productive doit au mieux être placée, soit en dehors des incisions de
tout à fait adaptée car simple à réaliser. Bien considérée comme un relaxation, en prenant garde de rester à distance de l’épine iliaque,
simple maillon d’une chaîne thérapeutique, cette technique se révèle soit en dedans, dans le lambeau cutanéoaponévrotique médian. Une
plus favorable, autant pour les suites immédiates que pour les suites stomie non productive peut être extériorisée dans une incision de
lointaines, que la simple mise en place d’une prothèse sans décharge, mais c’est un pis-aller. Elle est au mieux située à proximité
rapprochement des berges de la laparotomie ou encore plus que le de la stomie d’amont, du même côté de la ligne médiane, afin de
recours à la laparostomie. rendre réalisable le rétablissement de continuité ultérieure par une
10
Techniques chirurgicales Réinterventions pour complications infectieuses intrapéritonéales postopératoires 40-080
14 Création d’un orifice pariétal pour extériorisation d’une stomie : résection d’une pastille de peau et de tissu cellulaire sous-cutané ; incision en croix de l’aponévrose ; disso-
ciation du muscle.
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40-080 Réinterventions pour complications infectieuses intrapéritonéales postopératoires Techniques chirurgicales
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B
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A
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D
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C
Dans tous les cas, la baguette est maintenue en place entre 5 et • Colostomies
8 jours.
– Colostomie latérale sur baguette.
– Entérostomies terminales. C’est le seul type de colostomie latérale utilisé. L’orifice pariétal ne
Leur réalisation varie selon qu’il s’agit d’une entérostomie présente aucune différence avec celui décrit précédemment, hormis
productive (extrémité d’amont) ou non productive (extrémité une plus grande taille souvent nécessaire. Le côlon dépouillé au
d’aval). besoin de ses accolements épiploïques est extériorisé selon la même
Entérostomie terminale productive : le segment d’amont est abouché à technique que l’entérostomie latérale. Aucune fixation du côlon au
la peau dans la mesure du possible, selon la technique de Brooke. péritoine ou à l’aponévrose n’est requise. L’ouverture de la stomie
La confection de l’orifice obéit aux règles précédemment décrites. intervient après conclusion du temps pariétal de fermeture. Après
Le grêle est sectionné en ménageant l’intégrité du mésentère et sa hémostase de la sous-muqueuse, le côlon est ourlé à la paroi par
bonne vascularisation. Après hémostase de la sous-muqueuse, trois ou quatre points extramuqueux de fil 0000 à résorption lente
l’extrémité de l’intestin est saisie par une pince non traumatique disposés de chaque côté (fig 19). La baguette est maintenue environ
(type Duval ou Babcock) et extériorisée de 3 à 4 cm, avec douceur, à 6 jours puis retournée pour être ôtée au 8e jour. En aucune façon, il
travers l’orifice pariétal, en évitant toute avulsion du mésentère ne faut accoler les deux jambages coliques pour créer un éperon ou
(fig 16A). Deux pinces de Chaput introduites dans la lumière fixer le côlon à la paroi. Le risque de ces manœuvres tout à fait
saisissent la muqueuse à 2 ou 3 cm, permettant de retourner superflues est de créer une fistule par section des points passés dans
l’extrémité du grêle sur elle-même, créant ainsi un cylindre des tissus très œdématiés.
d’invagination (fig 16B). Le grêle est alors ourlé à la peau par huit – Colostomie terminale.
points de fil 0600 à résorption lente (fig 16C). Cette technique peut
Le côlon, après vérification soigneuse de sa viabilité (vascularisation
être rendue difficile par l’épaississement inflammatoire du grêle et
parfaite), est amené sans traction au travers de l’orifice pariétal
sa fragilité ; elle peut s’avérer impossible : le grêle est alors
directement, et ourlé à la peau par une couronne de points 0000 de
simplement fixé à la peau par une couronne de points 0000 (fig 17).
fil à résorption lente. Aucune autre fixation n’est effectuée.
Entérostomie terminale non productive : le grêle est simplement amené
à la peau, dans un orifice séparé et ourlé à la paroi par huit points – Colostomie double.
de fil 0000 à résorption lente (fig 18). Aucune autre fixation n’est Elle est au mieux effectuée par deux orifices séparés (fig 20A). En
requise. cas d’absence de place ou de stomies non productives, ces deux
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Techniques chirurgicales Réinterventions pour complications infectieuses intrapéritonéales postopératoires 40-080
*
C
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A
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B
16 A. Stomie terminale sur le grêle. L’intestin est extériorisé par une pince de Duval.
B, C. Stomie terminale sur le grêle avec retournement. Retournement du grêle terminal selon Turnbull (B). Le cylindre externe du grêle retourné est fixé à la peau (C).
• Principes généraux
Ils sont au nombre de trois : économie des exérèses, minutie dans la
dissection, mobilisation large du mésentère.
L’exérèse ne doit être effectuée que si nécessaire, en se limitant au
minimum, compatible avec l’autonomie nutritionnelle ultérieure du
patient, en sachant que 150 cm d’intestin grêle sont nécessaires pour
obtenir une bonne autonomie nutritionnelle, que l’iléon est plus
précieux que le jéjunum, et qu’il est important de laisser en place la
valvule de Bauhin.
La dissection du grêle doit être de ce fait minutieuse, patiente,
évitant au maximum les effractions séromuqueuses et les
perforations traumatiques obligeant à des exérèses inutiles. Les
18 Les stomies non pro- effractions séreuses ou séromusculeuses sont réparées à l’aide de
ductives sont simplement quelques points séroséreux de fil 00000 à résorption lente. Un
ourlées à la peau.
segment de grêle abîmé peut être conservé d’autant plus volontiers
qu’il est protégé en amont par une stomie. En fin de libération,
l’ensemble du grêle doit être examiné avec soin afin d’éviter de
méconnaître une perforation.
Enfin, le mésentère est mobilisé afin de permettre la réalisation des
stomies sans traction. Il faut savoir si nécessaire libérer la racine du
mésentère pour obtenir l’ascension du bloc mésentérique dans son
ensemble.
stomies peuvent être abouchées en « canon de fusil » dans un même
orifice pariétal et leurs bords ourlés à la peau (fig 20B). Ce qui est • Traitement des lésions
fondamental, c’est d’apporter le même soin à la confection de la
stomie d’aval qu’à celle de la stomie d’amont, c’est-à-dire : intestin – Perforation simple.
de vitalité parfaite et absence de traction. Il n’est d’aucune utilité de Elle est traitée par l’extériorisation sous forme d’une stomie latérale
fermer le segment d’aval et de l’abandonner sous la peau ou la paroi
simple ou, selon Turnbull, après résection des berges pour être en
si l’on peut réaliser une stomie. En effet, le segment colique
zone saine. En cas d’impossibilité d’extériorisation simple, une
abandonné en sous-cutané ou en intrapéritonéal fait courir le risque,
courte résection avec double stomie est réalisée (fig 21A).
en cas de suppuration persistante, de son ouverture secondaire avec,
dans le premier cas, un risque important de cellulite pariétale et, – Désunion d’une anastomose.
dans le deuxième cas, d’entretien de l’infection intrapéritonéale et
de difficulté au rétablissement de continuité ultérieure. Après vérification de la viabilité du grêle et résection économique
des berges des deux extrémités, une double stomie est effectuée,
¶ Indications selon Brooke pour la stomie productive si possible, et plane pour la
stomie non productive (fig 21B).
Traitement des solutions de continuité du grêle
– Solutions de continuité multiples.
(À l’exclusion de l’angle duodénojéjunal et de la partie proximale
de la première anse, envisagé avec le traitement des péritonites Quelle que soit leur étiologie, leur traitement doit respecter deux
d’origine sus-mésocolique.) exigences : réaliser le montage le plus simple avec le maximum
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40-080 Réinterventions pour complications infectieuses intrapéritonéales postopératoires Techniques chirurgicales
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B
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A
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C
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E
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F
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D
19 Colostomie latérale.
A. Un tube en Silastict est placé en transmésocolique en regard du siège de la co- C. Extériorisation du côlon sur 3 à 4 cm pour chaque jambage.
lostomie. D. Mise en place de la baguette.
B. Extériorisation du côlon par traction à l’aide d’une pince de Kelly sur le tube E. Ouverture transversale du côlon.
en Silastict. F. Celui-ci est ensuite ourlé à la peau.
20 Colostomie double.
A. Les deux extrémités coliques sont extériorisées par
deux orifices pariétaux distincts.
B. Les extrémités coliques sont amenées à la peau dans le
même orifice pariétal.
*
A *
B
d’économie du tube digestif. Des perforations multiples rapprochées exérèse économique et la confection de stomies étagées permettent
sont traitées par exérèse de la zone pathologique et réalisation d’une d’isoler un ou deux segments de grêle intermédiaires, qui pourront
double stomie (fig 21C). Si les lésions sont distantes, une double être ultérieurement utilisés pour la réinstillation du chyme [5, 22].
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Techniques chirurgicales Réinterventions pour complications infectieuses intrapéritonéales postopératoires 40-080
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B
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A1 "
A2
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C
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A
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B
– Cas particuliers. une gastrostomie d’alimentation est réalisée à la Witzel sur une
sonde en élastomère de silicone (calibre 14 ou 16 Ch). Celle-ci est
Si une lésion haut située sur le grêle (première ou deuxième anse indispensable pour le confort du malade, qui reçoit dans nombre de
jéjunale) justifie une stomie, celle-ci pourra servir à l’alimentation cas une alimentation entérale continue jusqu’au rétablissement de
entérale future du patient. En revanche, si les lésions sont distales, continuité 2 mois plus tard [5].
15
40-080 Réinterventions pour complications infectieuses intrapéritonéales postopératoires Techniques chirurgicales
Traitement des solutions de continuité coliques
• Principes
Contrairement à l’intestin grêle, l’exérèse colique peut être étendue
d’une manière raisonnable en fonction des besoins, afin de pouvoir
aboucher à la peau sans traction un segment plus mobile du côlon.
La mobilisation des accolements est souvent nécessaire dans le
même but.
16
Techniques chirurgicales Réinterventions pour complications infectieuses intrapéritonéales postopératoires 40-080
*
A
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B
PÉRITONITES POSTOPÉRATOIRES
D’ORIGINE SUS-MÉSOCOLIQUE
anse en Y montée si la fuite siège à ce niveau. Il paraît en revanche
Le traitement des péritonites postopératoires d’origine sus-
beaucoup plus hasardeux et déconseillé de refaire une anastomose
mésocolique obéit, sauf exception, au refus de toute suture digestive
œsojéjunale.
immédiate. Mais la profondeur et la fixité du bloc gastroduodénal
rendent irréalisable, dans la majorité des cas, l’extériorisation en Les conditions requises pour refaire une anastomose sont en fait
stomie d’un orifice fistuleux. De plus, la richesse enzymatique des exceptionnelles car il est rare que la réintervention ait lieu avant la
sécrétions gastroduodénales et biliopancréatiques confère à 24e heure. Elles supposent en toutes hypothèses un abdomen
l’écoulement fistuleux une agressivité particulière pour les tissus parfaitement propre, après la toilette péritonéale, un péritoine non
avoisinants, à l’origine d’hémorragies parfois fatales ou de nécrose encore épaissi, sans fausses membranes, sans collection purulente.
tissulaire et d’abcès résiduels.
Cas habituel : péritonite constituée
Pour tous ces patients, la réduction du volume des sécrétions
Dans tous les autres cas, les lésions de péritonite contre-indiquent la
gastriques et pancréatiques doit être recherchée par l’utilisation des
suture de la brèche ou la réalisation d’une nouvelle anastomose, en
inhibiteurs de la pompe à protons et de la somatostatine.
raison du risque important d’une nouvelle désunion. Plusieurs
Nous envisageons d’abord l’attitude à adopter dans les péritonites méthodes de traitement ont été proposées. Les trois premières que
postopératoires après chirurgie gastroduodénale, puis devant celles nous allons décrire n’ont plus pour nous d’indications.
survenant après désunion d’une anastomose biliodigestive ou
pancréaticojéjunale. – Drainage au contact de la brèche [28] sous couvert d’une aspiration
gastrique par sonde nasogastrique ou gastrostomie, et
¶ Péritonites postopératoires éventuellement associée à une jéjunostomie d’alimentation ou une
double jéjunostomie, la deuxième sonde étant dirigée en rétrograde
après chirurgie gastroduodénale
vers la déhiscence et mise en aspiration.
Exception : réintervention très précoce – Intubation de la brèche fistuleuse [13, 43] associée à un large
drainage au contact et une jéjunostomie d’alimentation (fig 25).
Lors d’une réintervention très précoce, en pratique avant la 24e
Ces deux méthodes ont en commun le risque de complication
heure, devant des lésions de péritonite encore peu importantes, on
hémorragique ou de nécrose tissulaire et d’abcès résiduels dus à
peut être amené à refaire une anastomose ou une nouvelle suture :
l’agressivité des fuites du liquide fistuleux, qui sont inéluctables
réfection d’une anastomose gastrojéjunale après recoupe des berges,
autour de la sonde d’intubation et tout le long du trajet de drainage.
transformation d’une anastomose gastroduodénale en anastomose
gastrojéjunale, après avoir fermé ou intubé le moignon duodénal ou – Exclusion bilatérale temporaire [6, 49] : elle se réalise différemment
bien encore fermeture après recoupe du cul-de-sac terminal d’une selon le montage confectionné lors de la première intervention. Une
17
40-080 Réinterventions pour complications infectieuses intrapéritonéales postopératoires Techniques chirurgicales
fistule sur anastomose gastroduodénale implique une recoupe et une
fermeture gastrique dont le moignon est drainé par une
gastrostomie, le duodénum étant intubé avec un drainage au
contact. L’alimentation est assurée par une sonde de jéjunostomie.
En cas de fuite sur une anastomose gastrojéjunale, l’anse afférente
est amenée en jéjunostomie si elle est suffisamment longue. Sinon, le
grêle est fermé sur une sonde de jéjunostomie, simple ou double, de
drainage en amont et d’alimentation en aval.
L’intubation translésionnelle associée à une irrigation endoluminale
continue constitue le traitement de base des solutions de continuité
intestinale sus-mésocolique [18, 35].
Cette approche, mise au point sous l’impulsion du docteur Étienne
Lévy, permet de réduire la fréquence des complications de
l’intubation seule en assurant une neutralisation de l’écoulement
fistuleux dans la lumière digestive elle-même, de telle manière qu’il
ait perdu son agressivité, au niveau de la brèche fistuleuse où il est
aspiré et drainé. La neutralisation de l’écoulement fistuleux est
assurée par une irrigation dont les deux caractères principaux sont 26 Module d’intubation : drain cylindrique n° 36 autour duquel sont enroulés de
d’être endoluminale et continue. manière hélicoïdale deux drains n° 9 et n° 10 (le drain s’ouvrant dans le gros drain sert
Nous prenons comme mode de description une fistule duodénale de prise d’air, l’autre apporte le liquide d’irrigation).
latérale (exemple : désunion d’une anastomose gastroduodénale,
d’une pyloroplastie ou d’une suture d’ulcère perforé). – deux tubulures de la même substance d’environ 1,5 mm de
diamètre intérieur (9 Ch) dépassant légèrement l’orifice distal de la
La technique repose sur quatre principes : sonde principale à laquelle ils sont solidarisés par trois fils non
– l’intubation transorificielle ; résorbables et destinés à servir de prise d’air pour l’un et de
– le drainage extraluminal de contact ; tubulure d’instillation pour l’autre (fig 28).
Le module est inséré dans la brèche sur une distance d’environ 5 à
– l’irrigation endoluminale continue ;
6 cm en direction de la papille duodénale. Il est fixé autour de la
– la jéjunostomie d’alimentation. brèche par une bourse de fil lentement résorbable qui réduit la taille
de l’orifice autour du drain. Il est extériorisé à travers la paroi de
• Module d’intubation (fig 26) l’abdomen par un trajet direct, en évitant toute coudure si on ne
Il intube la brèche fistuleuse. Un drain a été mis au point à cet effet. dispose pas du drain cylindrique multicanalaire. Il est solidement
Il s’agit d’un drain cylindrique n° 36 (Helisondet) autour duquel amarré à la peau et le tube principal est relié à un bocal d’aspiration
sont enroulés de manière hélicoïdale deux petits drains n° 9 ou 10, par une soupape de Janneret. La dépression doit se situer entre - 20
l’un servant de prise d’air et s’ouvrant à l’intérieur de l’extrémité du et - 30 cm d’eau.
gros drain, et l’autre servant de drain d’irrigation. L’enroulement Cas particulier : en cas de brèche latérale de petite taille, le modèle
hélicoïdal de ces deux petits drains forme un pas de vis autour du d’intubation transorificiel peut être remplacé par un drain de
gros drain, ce qui permet de le « visser » dans l’orifice de sortie silicone en T (fig 28B), type drain de Kehr, accompagné d’un petit
cutané, puis dans l’orifice fistuleux (fig 27A, B), et lui confère un drain qui sert de prise d’air.
caractère antipéristaltique qui l’empêche d’être « avalé » par le
péristaltisme intestinal. Il est de plus conçu pour ne pas se collaber • Drainage extraluminal du flux
en cas de coudure et peut donc supporter un trajet en chicane dans
la paroi abdominale, ce qui facilite le tarissement de la fistule à Les fuites de liquide fistuleux autour du module d’intubation sont
l’ablation du drain. inévitables et leur recueil est assuré par deux modules de drainage
situés en avant et en arrière du dispositif précédent, le plus près
Si on ne dispose pas de ce drain, il peut être remplacé par un
possible de la brèche fistuleuse. Ils comprennent une sonde en
module composé de trois drains tubulaires accolés :
élastomère de silicone n° 30, un drain n° 16 servant de prise d’air et
– une sonde en élastomère de silicone d’au moins 8 mm de diamètre une lame ondulée enveloppante (fig 29). La sonde principale de
(36 Ch), multiperforée sur ses 4 derniers centimètres ; chaque module est reliée à un bocal autonome d’aspiration par une
*
C
*
A
*
B
27 A. Mise en place de l’intubation. B. Le tube est vissé au travers de l’orifice pariétal. C. Le tube est vissé au travers de l’orifice duodénal.
18
Techniques chirurgicales Réinterventions pour complications infectieuses intrapéritonéales postopératoires 40-080
*
B
29 Installation du drai-
nage de recueil du flux ex-
traluminal. Un module de
drainage (lame et drain) est
placé en avant et en arrière
de l’intubation.
19
40-080 Réinterventions pour complications infectieuses intrapéritonéales postopératoires Techniques chirurgicales
*
A
*
B *
C
20
Techniques chirurgicales Réinterventions pour complications infectieuses intrapéritonéales postopératoires 40-080
*
A *
B *
C
21
40-080 Réinterventions pour complications infectieuses intrapéritonéales postopératoires Techniques chirurgicales
toutefois pas faire oublier la gravité des péritonites post-duodéno-
36 A. Désunion d’une
pancréatectomie céphalique, ce d’autant que la pathologie initiatrice
hépaticojéjunostomie.
B. Suppression de de l’intervention représente, avec la péritonite, les deux causes quasi
l’anastomose ; abou- exclusives de décès de ces patients.
chement indirect de la
voie biliaire principale ¶ Conclusion
à la peau.
Le traitement de ces péritonites postopératoires de l’étage sus-
mésocolique est lourd, prolongé et ne se conçoit qu’en milieu
spécialisé, au sein d’une équipe parfaitement entraînée à la
surveillance de montages souvent complexes. La méthode
d’intubation transorificielle associée à une irrigation endoluminale
est une méthode contraignante. Mais, même s’il est nécessaire de
réintervenir dans 10 % des cas pour fermer la fistule, son application
a entraîné dans notre expérience une diminution très significative
des taux de mortalité et de morbidité. La mortalité est maintenant
identique à celle des péritonites postopératoires d’origine sous-
mésocolique avec extériorisation des extrémités intestinales.
*
A Peut-on réduire la fréquence
des péritonites postopératoires ?
Sans avoir la prétention d’affirmer que les péritonites
postopératoires peuvent être totalement évitées, il apparaît que leur
nombre peut être réduit. À l’origine d’un tel accident, il y a très
souvent une erreur d’indication ou un défaut de prospective des
suites opératoires.
La majorité des patients admis pour péritonite postopératoire ont
initialement une pathologie bénigne (appendicite aiguë, ulcère
gastroduodénal, lithiase biliaire) qui a conduit à une intervention
d’urgence. Très souvent, c’est la réparation d’une solution de
continuité intestinale (suture ou anastomose) faite lors de cette
intervention d’urgence qui conduit, par désunion, à l’accident
*
B infectieux intrapéritonéal.
Il y a des éléments de sécurité dans la confection des anastomoses
digestives qui ne sont guère discutés mais qu’il faut toujours garder
présents à l’esprit.
– Dès qu’un geste intestinal s’impose, la voie d’abord doit toujours
être suffisamment large pour que les gestes soient réalisés sous
contrôle de la vue dans de très bonnes conditions d’exposition.
– Une anastomose doit être réalisée sans aucune traction :
– large décollement rétroduodénopancréatique pour confection-
ner une anastomose gastroduodénale ;
– anse afférente suffisamment longue lorsqu’une anastomose
gastrojéjunale est faite en précolique, du fait de la distension
colique postopératoire ;
– anse jéjunale en Y suffisamment mobilisée pour que son méso
ne soit pas tendu lorsqu’elle est anastomosée à l’œsophage ou à
37 Désunion d’une anastomose pancréaticojéjunale. Création d’une jéjunostomie et la voie biliaire ;
intubation pancréatique. – mobilisation du côlon gauche, y compris de sa portion
transverse, et spécialement de l’angle gauche et de son méso, pour
efficace. La mise en place dans l’anse anastomosée d’une sonde confectionner une anastomose colorectale sans aucune traction
enfouie selon Witzel, et dont l’extrémité vient au contact de (spécialement dans la sigmoïdite qui rétracte les mésos).
l’anastomose pancréaticojéjunale, peut être utile pour aspirer le – Les extrémités intestinales doivent être parfaitement vascularisées.
liquide pancréatique ou apporter une irrigation locale visant sa Au moindre doute, il faut savoir sectionner une frange épiploïque
neutralisation in situ. Mais il arrive que des lésions de nécrose pour s’assurer de la bonne vascularisation du côlon que l’on veut
pancréatique ou péripancréatique ou que l’infection intrapéritonéale abaisser. Il faut également se préoccuper du retour veineux chaque
et la péritonite amènent à supprimer l’anastomose. L’anse jéjunale fois qu’il peut être menacé.
est alors extériorisée en jéjunostomie terminale (fig 37). La
conservation d’un moignon pancréatique souvent infecté et siège – Il faut savoir éviter les anastomoses terminoterminales lorsqu’il y
d’une pancréatite n’est pas possible ; il faut alors compléter la a une grande incongruence entre les extrémités intestinales. Dans de
pancréatectomie. Être amené à réaliser une totalisation de telles circonstances, il faut confectionner une anastomose
pancréatectomie est une situation rare. La séquelle principale d’une terminolatérale ou latéroterminale ; la pathologie du cul-de-sac est
telle décision est la survenue d’un diabète apancréatique dont les tout à fait exceptionnelle.
difficultés de prise en charge sont surtout liées à l’absence de – La réalisation d’une anastomose à l’aide des pinces mécaniques
sécrétions de glucagon. Ces difficultés de prise en charge ne doivent n’est pas un facteur de sécurité. Les anastomoses manuelles, qu’elles
22
Techniques chirurgicales Réinterventions pour complications infectieuses intrapéritonéales postopératoires 40-080
soient à points séparés ou en surjets, sont aussi fiables que les viennent constituer des facteurs aggravants du risque
anastomoses mécaniques. L’avantage des agrafeuses est de faciliter anastomotique. Ils doivent toujours être pris en considération, leur
la réalisation des anastomoses dans des zones d’accès difficile : sommation doit faire renoncer à l’anastomose immédiate non
anastomose colorectale très basse et anastomose œsogastrique au protégée.
sommet du thorax.
– Les anastomoses en surjet de fil fin nous paraissent tout à fait
recommandables à tous les étages du tube digestif ; les prises en Conclusion
points totaux relativement larges sont facteurs de sécurité.
– Une hémostase parfaite est un élément essentiel de la sécurité des On peut avancer que lorsqu’il fait une réparation intestinale, le
anastomoses. L’idéal est d’obtenir un champ opératoire chirurgien doit toujours penser à ce qui se produirait si une désunion
suffisamment sec pour éviter tout drainage. Si un tel drainage est survenait. Une bonne prospective des suites opératoires est souvent le
placé, quel que soit son type, il doit rester à distance de la réparation meilleur garant d’un choix réfléchi. Dans les anastomoses à risque que
intestinale. l’on ne peut éviter, il apparaît intéressant, pour celles très proches de
L’absence de prise en compte du terrain, de thérapeutiques l’arrivée du flux biliopancréatique et duodénal, d’avoir recours à la
antérieurement entreprises, de modifications lésionnelles intestinales, et somatostatine : cette thérapeutique paraît bien préférable à cet étage aux
surtout de modifications structurales et physiologiques du péritoine liées tentatives d’exclusion plus ou moins complètes du site anastomotique.
à l’infection, est souvent à l’origine des complications anastomotiques. À l’étage rectal et anal, il faut savoir protéger facilement les
Lorsque le péritoine est modifié par l’infection, les conditions de la anastomoses par une dérivation d’amont, lorsque le montage est
cicatrisation intestinale sont tout à fait modifiées et les artifices complexe (anastomose iléoanale) ou lorsqu’une désunion serait
actuellement utilisables (suture mécanique, renforcement par colle catastrophique (anastomose colorectale basse).
biologique) n’ont aucunement fait la preuve de leur efficacité. Au niveau du rectum péritonisé, la protection d’une anastomose,
Lorsque dans de telles circonstances le chirurgien choisit de faire réalisée dans les conditions de l’urgence ou d’infection pelvienne
une suture intestinale, alors que la création d’une stomie est localisée, doit être mise en balance avec le refus d’une anastomose dans
possible, il doit, lors de l’appréciation des résultats, ne prendre en l’immédiat. Des indications prenant en compte les facteurs généraux et
considération que les échecs qui sont inadmissibles. La dénutrition, intrapéritonéaux, une chirurgie méticuleuse conduisent à un minimum
les traitements corticoïdes prolongés, les traitements de complications intrapéritonéales. Celles-ci restent toujours possibles
immunodépresseurs, la distension intestinale prolongée, l’absence et leur dépistage doit être la préoccupation essentielle devant des suites
de préparation intestinale, une maladie inflammatoire de l’intestin opératoires troublées.
Références ➤
23
40-080 Réinterventions pour complications infectieuses intrapéritonéales postopératoires Techniques chirurgicales
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24
¶ 40-045
Une optimisation de la prise en charge périopératoire (préopératoire et postopératoire), chez les patients
devant bénéficier d’un geste chirurgical, est une étape-clé pour améliorer les résultats de la chirurgie. La
diminution de la mortalité et de la morbidité postopératoires, dans toutes les catégories d’âges, est liée
aux progrès des techniques chirurgicales et anesthésiques, mais aussi à une amélioration de la prise en
charge périopératoire. Le succès de la réhabilitation rapide (fast-track surgery) en termes de
raccourcissement de la durée du séjour postopératoire repose essentiellement sur des mesures
périopératoires. Sont développés dans cet article, à partir d’une analyse de la littérature : l’état des
connaissances et des conclusions pratiques dans les domaines de l’hyperalimentation périopératoire
programmée de l’adulte, la préparation colique préopératoire, les soins cutanés périopératoires,
l’antibioprophylaxie, le drainage vésical, la transfusion périopératoire en chirurgie sus-mésocolique et
sous-mésocolique, la place de l’aspiration digestive par sonde nasogastrique après chirurgie élective, la
réalimentation orale précoce en chirurgie sous-mésocolique, et la thromboprophylaxie.
© 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
cette diminution étant liée aux progrès des techniques chirur- à 30-50 % par des lipides. Les besoins azotés recommandés
gicales et anesthésiques, mais aussi à une amélioration de la varient de 150-200 mg d’azote/kg/j en période préopératoire à
prise en charge périopératoire. 250-300 mg d’azote/kg/j en période postopératoire. Les besoins
La prise en charge préopératoire des patients doit se faire bien en glucides sont habituellement couverts par un apport de 3 à
en amont de l’acte chirurgical. Elle permet l’identification des 4 g/kg/j. Les besoins en lipides varient de 1,5 à 2 g/kg/j. Les
facteurs associés aux complications spécifiques et une mise en besoins en phosphore, magnésium, vitamines, éléments-traces
route des moyens permettant de limiter leur impact sur les doivent être assurés quotidiennement et les apports électrolyti-
suites opératoires. Nous développons successivement dans cet ques (Nacl et KCl) adaptés aux besoins estimés à partir des
article les points suivants : valeurs dans le sang.
• l’hyperalimentation périopératoire programmée de l’adulte ;
• la préparation colique préopératoire ; Voie parentérale
• les soins cutanés périopératoires ; L’alimentation parentérale ne modifie pas la mortalité
• l’antibioprophylaxie ; postopératoire [5] mais diminue la morbidité infectieuse post-
• le drainage vésical ; opératoire [6, 7]. La voie parentérale n’est indiquée que quand le
• la transfusion périopératoire en chirurgie sus- et sous- tube digestif n’est pas utilisable (malabsorption ou occlusion
mésocolique ; intestinales). Une voie veineuse centrale est alors le plus
• la place de l’aspiration digestive par sonde nasogastrique souvent utilisée. Les principales complications, infectieuses
après chirurgie élective ; essentiellement, mais aussi mécaniques et thromboemboliques,
• la réalimentation orale précoce en chirurgie sous-méso- sont liées au cathéter central. La nutrition parentérale préopé-
colique ; ratoire administrée à des patients non dénutris augmente la
• la thromboprophylaxie. morbidité infectieuse iatrogène.
Dans chacun de ces chapitres sont abordés successivement
une définition du problème, l’état des connaissances sur le sujet Voie entérale
à partir d’une revue de la littérature et une conclusion pratique.
La voie entérale est recommandée en première intention
quand l’état anatomique et fonctionnel du tube digestif le
permet. Par rapport à la parentérale, son efficacité semble
■ Nutrition périopératoire en supérieure [8, 9], sa morbidité et son coût sont inférieurs [7].
Le plus souvent, elle utilise une sonde nasogastrique. Dans
chirurgie programmée de l’adulte certains cas particuliers de durée prolongée (> 1 mois), une
gastrostomie ou une jéjunostomie peut être indiquée.
La dénutrition est définie comme une carence d’apports
énergétiques et/ou protéiques par rapport aux besoins de Durée
l’organisme, et la malnutrition comme une carence de certains
nutriments. Elle est responsable d’une diminution des mécanis- La durée optimale d’une nutrition artificielle préopératoire ne
mes de défense contre l’infection et d’un retard de cicatrisation. semble pas devoir être inférieure à 7 jours [4]. Il en est de même
La dénutrition est un facteur indépendant de morbidité et de pour la nutrition artificielle postopératoire [4].
mortalité, en relation directe avec la durée du séjour hospitalier La réalimentation entérale postopératoire précoce diminue
et le coût [2]. significativement le taux de complications infectieuses postopé-
L’identification de l’état nutritionnel en préopératoire et le ratoires et la durée de séjour par rapport à la nutrition parenté-
traitement préalable des carences doit donc faire partie d’une rale, mais est moins bien tolérée [9].
évaluation systématique avant l’intervention. En situation
d’urgence, la prise en charge devra se faire en postopératoire. La Conclusion
prévalence de la dénutrition dans les services de chirurgie est de
20 à 50 % [3]. Malades ne devant pas recevoir une nutrition
artificielle périopératoire
Définitions Dans la période périopératoire (2 semaines avant et 2 semai-
nes après l’intervention chirurgicale), la nutrition artificielle
La nutrition artificielle est définie comme un apport calorico- standard est inutile, chez les patients non ou peu dénutris
azoté exogène équivalant aux besoins du patient et comportant (< 10 %) qui peuvent, dans la semaine suivant l’intervention,
au moins deux des trois grands types de macronutriments reprendre une alimentation couvrant 60 % des besoins.
(glucides, lipides, protides), des électrolytes, des vitamines et des
oligoéléments. Malades devant recevoir une nutrition artificielle
L’évaluation clinique repose, en routine, sur la perte de poids périopératoire
par rapport au poids habituel du sujet en bonne santé. Une
meilleure évaluation est fournie par le nutritional risk index (NRI La nutrition préopératoire est recommandée chez les malades
= 1,519 × albuminémie g/l + 0,417 × poids actuel/poids usuel × sévèrement dénutris (perte de poids supérieure à 20 %) devant
100). Les malades sévèrement dénutris sont définis par une subir une intervention chirurgicale majeure sans que le type de
perte de poids supérieure à 20 % ou un NRI inférieur à 83,5. Les celui-ci constitue, à lui seul, une indication de nutrition
malades modérément dénutris sont définis par une perte de artificielle. On ne peut recommander une attitude univoque
poids supérieure à 10 % ou un NRI supérieur à 83,5 et inférieur chez les patients modérément dénutris (perte de poids de 10 à
à 97,5. 19 %).
La nutrition postopératoire de principe est indiquée :
• chez tous les malades ayant reçu une nutrition artificielle
Modalités de la nutrition artificielle préopératoire ;
périopératoire • chez tous les malades n’ayant pas reçu de nutrition artificielle
préopératoire et sévèrement dénutris ;
• chez les malades incapables de reprendre une alimentation
Besoins et apports
couvrant 60 % de leurs besoins nutritionnels dans un délai de
Les besoins énergétiques (caloriques) sont de l’ordre de 1 semaine après l’intervention ;
30 kcal/kg/j chez les sujets alités et de 35 kcal/kg/j chez les • chez tout patient présentant une complication postopératoire
sujets ambulatoires. En période postopératoire, on considère que précoce responsable d’un hypermétabolisme et de la prolon-
les patients incapables de reprendre une alimentation couvrant gation du jeûne ;
60 % des besoins relèvent d’un support nutritionnel [4]. Les • chez les autres malades on ne peut recommander une atti-
apports énergétiques sont assurés à 50-70 % par des glucides et tude univoque.
Produits
Les produits le plus souvent étudiés contiennent une associa-
Évaluation des différentes solutions de PMC
tion d’arginine, de glutamine, d’acides gras polyinsaturés Les produits de PMC les plus utilisés sont les laxatifs osmoti-
oméga-3, de nucléotides et de micronutriments antioxydants ques (polyéthylène glycol, dihydrogénophosphate de sodium),
(vitamine E, vitamine C, b-carotène, zinc et sélénium). les laxatifs stimulants (picophosphate de sodium), les laxatifs
La voie d’administration est soit parentérale (glutamine), soit salins (bisacodyl phosphate sodique), les purgatifs anthracéni-
entérale (le produit le plus souvent évalué est Impact®), soit ques (sennoside B), les autres solutions étant représentées par le
orale (le produit le plus souvent évalué est Oral Impact®). mannitol et le Ringer lactate®, tout en sachant que les produits
peuvent être associés dans certains protocoles. Alors que
Résultats la majorité des essais réalisés dans les années 1980-
L’utilisation d’immunonutriments est plus efficace qu’une 1990 suggéraient que le polyéthylène glycol (PEG) (4 litres) était
diète standard à même niveau énergétique et azoté lorsque l’une meilleur que la préparation classique par lavements en termes
et l’autre sont prescrites en postopératoire, et la réduction de la de propreté du côlon et accessoirement en termes de complica-
durée de séjour et des coûts est en faveur de l’immunonutrition. tions infectieuses, aucune étude récente n’a confirmé la supé-
Ceci est vérifié quel que soit l’état nutritionnel des riorité du PEG [15-17]. Un essai français [16] a montré qu’une
patients [10-13]. préparation mécanique du côlon par un sennoside (X-Prep®) et
Chez les patients dénutris (perte de poids ≥ 10 %), une un lavement par de la povidone iodée (Bétadine®) diluée à 5 %
immunonutrition préopératoire seule est moins efficace qu’une était plus efficace que le PEG. Les autres essais ont montré que
immunonutrition périopératoire mais, dans tous les cas, plus le phosphate de sodium (Fleet phospho-soda ® , Picolax ® ,
efficace qu’une nutrition standard. Son efficacité est démontrée Prépacol®) était aussi efficace et mieux toléré par les patients
en termes de diminution de la morbidité infectieuse postopéra- que le PEG. Si on exclut les PMC au sérum physiologique, on
toire et de la durée d’hospitalisation, mais reste faible ou nulle peut retenir, à la lumière de l’ensemble des essais, qu’en
sur la mortalité [10-12]. chirurgie colorectale le PEG ne peut être considéré comme la
Chez les patients non dénutris (perte de poids < 10 %), une référence dans la PMC avant chirurgie colorectale, et que le
immunonutrition préopératoire de courte durée (5 jours) réduit phosphate de sodium (Fleet phospho-soda®, Prépacol®) et le
l’incidence des complications infectieuses ainsi que la durée de lavement à la Bétadine® (± X-Prep®) peuvent être retenus, mais
séjour [13]. avec un faible niveau de preuve du fait des biais méthodologi-
ques des essais (non publiés). Cependant, le critère majeur
Conclusion d’efficacité qu’est la diminution de la fréquence des désunions
anastomotiques en chirurgie colorectale a été mal évalué dans
Une immunonutrition orale de 1 semaine est recommandée la majorité des études publiées. En chirurgie abdominale non
en préopératoire chez tous les patients soumis à une chirurgie colorectale, les deux essais publiés ne permettent pas d’identifier
digestive majeure. Elle sera poursuivie en postopératoire chez les la meilleure solution de PMC [18, 19].
patients dénutris en préopératoire, pendant une semaine en
l’absence de complications ou jusqu’à reprise d’une alimenta-
tion orale assurant au moins 60 % des besoins nutritionnels. Tolérance des solutions de PMC
Le phosphate de sodium apparaît supérieur au PEG en termes
de tolérance et de coût [20], bien que pouvant théoriquement
■ Préparation colique entraîner des troubles électrolytiques (diminution de la phos-
préopératoire phorémie, la calcémie et la kaliémie). Malgré deux essais
négatifs ayant cherché à évaluer le retentissement clinique de
Les complications infectieuses apparaissaient comme la ces troubles, il est prudent de ne pas recommander le phosphate
principale menace pour les patients devant subir une chirurgie de sodium en cas d’insuffisance rénale, et de l’utiliser avec
abdominale et notamment colorectale, et sont à l’origine d’au précaution en cas d’insuffisance cardiaque congestive, de
moins la moitié des décès postopératoires [14]. Ces complications cirrhose, ou chez les personnes âgées.
infectieuses (déhiscence anastomotique, péritonite postopéra-
toire localisée ou diffuse, abcès de paroi, éviscération, etc.),
survenant après ouverture de la lumière intestinale, sont La PMC est-elle nécessaire ?
rapportées au contenu intestinal riche en germes aérobies et Tous les essais randomisés et les méta-analyses [21-26] ont
anaérobies. montré que la PMC par le PEG était soit inutile soit délétère en
termes de complications infectieuses et de désunion anastomo-
Principe de la préparation mécanique tique avant chirurgie colorectale. Il faut noter que les bras
témoins dans les essais publiés et les méta-analyses compor-
colique taient un régime normal.
Le principe de la préparation mécanique du côlon (PMC) est Le seul essai contrôlé [27] ayant évalué une PMC par les
de provoquer une purge intestinale aboutissant à l’élimination phosphates de sodium a montré l’absence d’utilité de cette
des selles et du contenu intestinal riche en germes et obtenir préparation dans la prévention des complications postopératoi-
ainsi un côlon « vide et propre ». La PMC est devenue en moins res en chirurgie colorectale.
d’une décennie une pratique courante voire un dogme. Ses Le cas spécifique de la chirurgie rectale n’a pas été évalué
avantages théoriques sont de : dans les méta-analyses du fait d’un faible nombre de patients
• réduire la contamination de la cavité abdominale et de la inclus.
paroi en cas d’ouverture volontaire ou accidentelle du tube En chirurgie abdominale non colorectale, l’utilité de la PMC
digestif ; n’a pu être mise en évidence.
Tableau 1.
Antibioprophylaxie en chirurgie digestive en pratique (recommandations de la SFAR mises à jour).
Acte chirurgical Produit Posologie Durée Grade de
recommandation
Chirurgie digestive sans ouverture Céfazoline 2 g préopératoire Dose unique (réinjection de 1g si C
du tube digestif durée > 4 h)
Chirurgie gastroduodénale (y com- A
pris gastrostomie endoscopique)
Chirurgie biliaire ouverte A
Chirurgie biliaire sous cœlioscopie Pas d’ABP C
Chirurgie pancréatique sans Allergie : clindamycine 600 mg clindamycine Dose unique (réinjection de 600 mg A
anastomose digestive + gentamicine 2 à 3 mg/kg gentamicine clindamycine si durée > 4 h)
Chirurgie hépatique
Chirurgie œsophagienne C
(sans plastie colique)
Hernie simple Pas d’ABP A
Hernie ou éventration + prothèse Céfazoline 2 g préopératoire Dose unique (réinjection de 1 g si C
avec facteurs de risque durée > 4 h)
Allergie : clindamycine 600 mg clindamycine Dose unique (réinjection de 600 mg
+ gentamicine 2 à 3 mg/kg gentamicine clindamycine si durée > 4 h)
Risque carcinologique lié à la transfusion prospective évaluant la nécessité d’une SNG en postopératoire
sanguine après une hépatectomie est actuellement en cours.
Après une cholécystectomie élective pour lithiase vésiculaire,
Aucune méta-analyse visant à évaluer le risque carcinologique
deux études prospectives randomisées [185, 186] et une étude cas-
de la transfusion n’a été faite à partir d’études n’incluant que
témoin [187] concluent à l’absence d’utilité de la SNG.
des cancers sus-mésocoliques.
Après une gastrectomie partielle ou totale pour cancer, quatre
En l’absence d’études randomisées, le recours à la transfusion .
études prospectives randomisées [188-191] concluent à l’absence
sanguine (supérieur à 3 ou 4 culots) est associé à une survie
d’utilité de la SNG (morbimortalité identiques), y compris chez
diminuée dans le cancer de l’œsophage dans la majorité des
les patients présentant une obstruction gastrique préopératoire.
travaux [151, 152], mais avec un faible niveau de preuve.
Plusieurs études randomisées ont évalué de façon indirecte
l’impact de la transfusion sur le pronostic dans la chirurgie Aspiration digestive par SNG en chirurgie
gastrique pour cancer [153-156], mais aucune corrélation signifi- sous-mésocolique
cative n’a pu être établie.
Sur le plan carcinologique, l’effet délétère de la transfusion Sur la base de six études prospectives randomisées [191-197] et
sanguine est controversé dans les essais randomisés incluant des d’une étude cas-témoin [198], la SNG ne diminuait pas les taux
adénocarcinomes pancréatiques. Le nombre de culots globulai- de mortalité, de fistules anastomotiques ou d’abcès de paroi
res transfusés (supérieur à 2 ou 4) était un facteur de mauvais postopératoires, mais augmentait significativement le taux de
pronostic en analyse univariée [157] ou multivariée [158] dans complications pulmonaires à type d’atélectasie [193, 197]. De
certaines études, mais ne l’était pas dans d’autres [159]. façon globale, la pose secondaire d’une SNG du fait de vomis-
Après résection hépatique pour carcinome hépatocellulaire ou sements était nécessaire chez 11 % des patients. L’ensemble de
métastases de cancers colorectaux, la transfusion peropératoire ces données nous permet de conclure à l’absence d’utilité de
est associée à une récidive plus fréquente [160, 161] et à une l’aspiration digestive par SNG après une chirurgie colorectale
moindre survie [162] dans huit études [163-170], alors qu’elle ne élective.
l’est pas dans quatre autres [171-174]. En l’absence d’études spécifiques, aucune conclusion ne peut
Après transplantation hépatique pour cancer, aucune conclu- être formulée quant à l’utilité de l’aspiration digestive postopé-
sion valide ne peut être apportée du fait d’études peu informa- ratoire en chirurgie digestive d’urgence.
tives sur ce sujet et de résultats contradictoires [175, 176].
sujet de la chirurgie de l’œsophage ou du pancréas. Une étude volume des pertes sanguines.
Conclusion • tabagisme ;
• varices ;
L’utilité du jeûne alimentaire n’étant pas démontrée après • cathéter veineux central ;
une chirurgie colorectale élective, la réalimentation orale • thrombophilie congénitale acquise.
précoce et progressive, n’entraînant pas d’augmentation de la
morbimortalité et sous réserve de sa tolérance immédiate, est
préconisée. Efficacité et risques des stratégies
de prévention
■ Thromboprophylaxie Situations à risque faible
La rédaction de cette partie s’est appuyée sur les recomman- Il n’y a pas lieu d’envisager de prophylaxie médicamenteuse
dations de la Société française d’anesthésie et de réanimation dans les situations à risque chirurgical faible définies ci-dessus
pour la pratique clinique [209]. (risque patient exclu). Néanmoins, la contention élastique,
dénuée d’effets indésirables, pourrait être indiquée, compte tenu
de son efficacité démontrée pour tous les types de chirurgie
Incidence des évènements abdominale confondus.
thromboemboliques cliniques
et paracliniques en l’absence Situations à risque modéré
de prophylaxie Il n’existe pas d’études spécifiques concernant ces situations
à risque. Une prophylaxie peut être proposée avec des posolo-
Chirurgie abdominale majeure gies modérées d’héparine non fractionnée (HNF) (2 × 5 000 UI)
En chirurgie abdominale majeure (foie, pancréas, côlon, ou d’héparine de bas poids moléculaire (HBPM).
maladies inflammatoires ou cancéreuses du tractus digestif), le
risque de thrombose veineuse distale estimé par des examens Situations à risque élevé
paracliniques varie entre 20 et 40 %, et celui de la thrombose L’HNF (2 × 5 000 UI ou éventuellement 3 × 5 000 UI sous-
veineuse proximale de 3 à 8 %. L’incidence des embolies cutanée par jour) réduit de 60 % le risque de thrombose
pulmonaires est de 1,5 à 4 % ; elle atteint 0,4 à 1 % pour les veineuse paraclinique et de 60 % le risque d’embolie pulmo-
embolies pulmonaires mortelles. En chirurgie carcinologique, le naire. Les HBPM réduisent de 72 % l’incidence des évènements
risque global d’évènements thromboemboliques objectivé par phlébographiques et cliniques par rapport au placebo. Dans les
des examens paracliniques est de 30 %. Il atteint 35 % en deux cas, le risque hémorragique est multiplié par deux compa-
chirurgie colorectale et 45 % pour la chirurgie carcinologique du rativement au placebo, mais l’incidence reste faible (environ
petit bassin. Une étude prospective récente en chirurgie carci- 3 %). Comparés à l’HNF, les résultats concernant la réduction
nologique s’est penchée spécifiquement sur les évènements du risque de TVP paracliniques et cliniques et du risque
thromboemboliques cliniques chez 2373 patients [210]. L’inci- hémorragique sont tous en faveur des HBPM.
dence rapportée de thrombose veineuse profonde (TVP) clinique Les HBPM sont donc recommandées pour la chirurgie abdo-
était de 2,1 % et de 0,88 % pour l’embolie pulmonaire. Ces minale majeure et également en cas d’insuffisance rénale. Le
évènements survenaient dans 42 % des cas après le 21e jour danaparoïde sodique ne peut être considéré comme une alter-
postopératoire. Le risque thromboembolique est donc élevé, native qu’en cas de contre-indication à l’HNF ou aux HBPM.
même en l’absence de cancer. La chirurgie bariatrique entrerait L’aspirine et les antivitamines K (AVK) ne sont pas recomman-
dans cette catégorie de risque. dées dans cette indication.
La contention élastique est recommandée en cas de contre-
Chirurgie abdominale non majeure indication aux traitements anticoagulants et en association avec
En chirurgie abdominale non majeure (chirurgie pariétale, le traitement médical, car elle permet de réduire l’incidence des
appendice, vésicule non inflammatoire, proctologie) le risque évènements thromboemboliques paracliniques de 66 % en
thromboembolique est faible, avec une incidence clinique de chirurgie générale par rapport à l’absence de contention et de
0,1 à 0,6 %. Le risque n’est pas accru sous cœlioscopie pour la 72 % en association avec l’HNF par rapport à l’HNF seule.
chirurgie de la lithiase vésiculaire. Dans la chirurgie des varices, La compression pneumatique intermittente seule ou en
le risque apparaît faible, de l’ordre de 0,2 % de TVP, 0,11 % complément d’une prophylaxie médicamenteuse n’a pas fait la
d’embolies pulmonaires et 0,02 % de décès par embolie pulmo- preuve de son efficacité dans ce type de chirurgie.
naire. Pour ce même type de chirurgie, le risque devient modéré
en cas de dissection étendue et/ou hémorragique, de durée Début et durée de la prophylaxie
opératoire anormalement prolongée ou en cas d’urgence.
Début
Facteurs de risque de thrombose propres
au patient Dans la grande majorité des études, les schémas thérapeuti-
ques comportaient une injection préopératoire. L’intérêt de
Ces facteurs de risque sont également à prendre en compte. débuter la prophylaxie après l’intervention n’a pas été exploré.
Ce sont : Il n’y a pas d’arguments pour privilégier l’une ou l’autre
• immobilité, alitement, paralysie des membres ; attitude.
• cancer et traitement du cancer (hormonal, chimiothérapie,
radiothérapie) ; Durée
• antécédents d’événement thromboembolique veineux ;
• âge supérieur à 40 ans ; Dans les études disponibles, la durée habituelle de la préven-
• contraception orale contenant des œstrogènes ou hormono- tion est de 7 à 10 jours en chirurgie digestive. Les traitements
thérapie substitutive ; de plus longue durée ont été étudiés et sont recommandés pour
• traitements modulateurs des récepteurs aux œstrogènes ; la chirurgie abdominale carcinologique majeure où la prolonga-
• pathologie médicale aiguë ; tion de la prophylaxie à 1 mois réduit de 50 % les thromboses
• insuffisance cardiaque, insuffisance respiratoire ; paracliniques sans augmentation du risque hémorragique.
• maladies inflammatoires de l’intestin ;
• syndrome néphrotique ; Chirurgie ambulatoire
• syndrome myéloprolifératif ;
• hémoglobinurie paroxystique nocturne ; L’impact de la chirurgie ambulatoire et de l’hospitalisation de
• obésité (IMC > 30) ; courte durée n’a pas été évalué en chirurgie digestive.
Tableau 2.
Attitude thérapeutique.
Risque chirurgical Risque lié au patient Traitement recommandé
Faible Varices - Contention élastique ou rien
Chirurgie abdominale non majeure : appendice, vésicule
+ HBPM doses modérées ou contention élastique
non inflammatoire, proctologie, chirurgie pariétale
Modéré Dissection étendue et/ou hémorragique - HBPM doses modérées ou contention élastique
Durée opératoire anormalement prolongée
+ HBPM doses élevées
Urgences
Élevé Chirurgie abdominale majeure : foie, pancréas, côlon, HBPM doses élevées, avec contention élastique associée
maladie inflammatoire ou cancéreuse du tube digestif
Chirurgie bariatrique
Conclusion [16] Valverde A, Hay JM, Fingerhut A, Boudet MJ, Petroni R, Pouliquen X,
et al. Senna vs polyethylene glycol for mechanical preparation the
L’attitude thérapeutique est résumée dans le Tableau 2. evening before elective colonic or rectal resection: a multicenter
controlled trial. French Association for Surgical Research. Arch Surg
1999;134:514-9.
> Remerciements : ce travail a été réalisé sous l’égide de la Société française de [17] Habre-Gama A, Kiss DR, Araujo SE, Bringel RW. Bowel preparation
chirurgie digestive. Nous remercions donc ici les membres qui ont participé à for elective colorectal surgery: polyethylene glycol (PEG) vs sodium
son élaboration : A. Alves, N. Bataille, J.-E. Bazin, S. Benoist, S. Berdah, F. phosphate (SP): a prospective randomized trial. Rev Bras Proctol 1998;
Bretagnol, E. Chouillard, B. Castaglioni, H. Johanet, A. Mebazza, J.-Y. Mabrut,
T. Perniceni. 18:85-9.
.
[18] Kale TI, Kuzu MA, Tekeli A, Tanik A, Aksoy M, Cete M. Aggressive
bowel preparation does not enhance bacterial translocation, provided
■ Références the mucosal barrier is not disrupted: a prospective, randomized study.
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South Med J 1977;70:1070-1. que de la Société française d’anesthésie réanimation, 2005.
C. Mariette (c-mariette@chru-lille.fr).
Service de chirurgie digestive et générale, Hôpital C. Huriez, Centre hospitalier régional universitaire, 1 place de Verdun, 59000 Lille cedex, France.
K. Slim.
Service de chirurgie générale et digestive, Hôtel-Dieu, Centre hospitalier universitaire, boulevard Léon-Malfreyt, 63058 Clermont-Ferrand cedex 1, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Mariette C., Slim K. Soins périopératoires en chirurgie digestive. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris),
Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-045, 2007.
En transplantation, le greffon est le nerf de la guerre. Sans lui, point de greffe. Et quand il est disponible, il
doit être anatomiquement et fonctionnellement parfait. La vie du receveur en dépend. C’est dire la
minutie avec laquelle il doit être prélevé et conservé. Neuf fois sur dix, les greffons sont prélevés sur un
donneur en état de mort encéphalique et deux fois sur trois la procédure est multiorganes. Cœur,
poumons, foie, reins, pancréas, intestin, os, cornées et parfois peau ! Prendre le maximum, quand cela est
possible, pour réduire l’attente cruelle parce que mortelle des malades inscrits en liste de greffe.
L’opération est complexe. Elle réunit plusieurs équipes et il faut faire très vite. Elle est heureusement
parfaitement réglée. Tout bon chirurgien doit en connaître le détail parce qu’il y sera nécessairement
confronté un jour, quel que soit le lieu de son exercice. Un chapitre de techniques chirurgicales se lit en
essayant de vivre l’atmosphère qui entoure la procédure. Alors imaginez que votre geste a une dimension
inhabituelle. Une famille est en deuil, un homme a accepté de donner et votre implication, qui certes
concerne un « mort », va donner la vie. Dernier conseil. Comme vous êtes sûrement un chirurgien
chevronné de votre spécialité, attachez-vous particulièrement à comprendre le prélèvement de l’organe
qui ne vous concerne pas. C’est là que se reconnaissent les « bons préleveurs ».
© 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Plan ■ Introduction
¶ Introduction 1 Le prélèvement multiorganes est une intervention parfaite-
ment codifiée, dont le principe a été décrit, en 1984, par Starzl
¶ Notions générales 1
dans son article princeps A flexible procedure for multiple cadaveric
Principes et solutions de conservation 1
organ procurement. [1]
Principes de l’acte chirurgical 2
Face au manque de greffons, la règle est de prélever, chez un
¶ Prélèvement simultané du cœur, du foie et des reins chez un même donneur, le plus grand nombre possible d’organes. Trois
donneur hémodynamiquement stable dans un hôpital général à quatre équipes y participent et, bien qu’intéressées par des
habilité 2 greffons différents, elles doivent connaître l’ensemble de la
Instrumentation 2 procédure. En France, le nombre de sujets en état de mort
Installation du donneur 3 encéphalique recensé est de l’ordre de 2 000 par an. [2] La moitié
Phase I : préparation à cœur battant 3 seulement de ces donneurs potentiels font l’objet d’un prélève-
Phase II : mise en place des canules de perfusion abdominales et ment. Le nombre des greffons disponibles reste très en deçà des
réfrigération in situ 6 besoins, aussi cette intervention s’est-elle enrichie des prélève-
Phase III : explantation des greffons 8 ments sur le vivant qui, d’abord limités au rein, se sont étendus
Fermeture 11 au foie et au pancréas.
¶ Cas particuliers 11 . Dans cet article, nous traitons les prélèvements sur donneur
Donneur hémodynamiquement instable 11 cadavérique qui fournissent 95 % des greffons et que tout
Prélèvement simultané du pancréas total 11 chirurgien « général » doit savoir pratiquer.
Prélèvement en bloc du foie et du pancréas 12
Prélèvement isolé des deux reins 12
Prélèvement pulmonaire associé 12
Prélèvement intestinal associé
Prélèvement en bloc des viscères intrapéritonéaux
13
14
■ Notions générales
¶ Conclusion 14
Principes et solutions de conservation
L’hypothermie constitue le principe de base de la conserva-
tion des organes : la baisse de la température des tissus, aux
Techniques chirurgicales 1
40-090 / 42-747 / 43-300 ¶ Technique des prélèvements multiorganes
alentours de 4 °C, réduit de 95 % les besoins en oxygène des une courte phase opératoire à « cœur battant », réduite à
cellules et adapte leur métabolisme à la situation d’anoxie dans l’appréciation visuelle des différents greffons et à la préparation
laquelle les plonge le prélèvement. La distribution homogène de des sites de canulation, tous les organes sont simultanément
l’hypothermie est au mieux réalisée en perfusant chaque organe, lavés à partir de l’aorte. Ils sont ensuite explantés puis conservés
au travers de ses vaisseaux afférents, à l’aide d’une solution jusqu’au moment de la transplantation. La préparation minu-
réfrigérante. tieuse des pédicules est réalisée à distance du prélèvement, ex
Par leur action mécanique, ces solutions lavent les vaisseaux vivo, immédiatement avant la greffe, l’organe baignant dans un
des éléments figurés qu’ils contiennent et refroidissent instan- liquide réfrigéré. Cette phase n’est pas abordée ici.
tanément, de manière homogène, les tissus qu’elles irriguent. Les greffons abdominaux (foie, pancréas, reins et intestin)
Par leur composition chimique, elles améliorent les performan- sont réfrigérés à l’aide de la même solution. Ils sont isolés des
greffons thoraciques par le clampage de l’aorte sous-
ces de l’hypothermie en s’opposant aux méfaits du froid sur les
diaphragmatique, puis lavés à partir de deux canules introduites
cellules.
respectivement dans l’aorte distale (reins, pancréas, intestin), et
Les « solutions de conservation » sont nombreuses. Leur dans la veine porte ou l’un de ses affluents (foie). La mise en
efficacité est variable d’un organe à l’autre. Quatre d’entre elles place d’une canule de « décharge » à l’origine de la veine cave
semblent s’imposer aujourd’hui. inférieure (VCI) évite la congestion et améliore la perfusion
La solution de Stanford a fait la preuve de son efficacité pour passive, par gravité.
conserver le cœur. [3] Pourtant, elle n’autorise des durées de À l’étage thoracique, l’aorte est clampée en amont du tronc
conservation que de l’ordre de 4 à 5 heures. Beaucoup d’équipes artériel brachiocéphalique (TABC). La solution de cardioplégie
utilisent maintenant la solution de Celsior®. est perfusée dans le territoire coronaire à partir d’une canule
La solution développée par le groupe de Cambridge permet introduite dans l’aorte ascendante et l’effluent liquidien se
de conserver les poumons pendant environ 8 heures. La draine dans les cavités droites qui sont, elles aussi, « déchar-
nécessité d’y ajouter du sang provenant du donneur et d’utiliser gées » par la section d’une ou des deux veines caves.
un échangeur thermique pour porter la solution à 4 °C compli- Le territoire pulmonaire est anatomiquement isolé du cœur
que son utilisation. Pour cette raison, quelques équipes lui par les valves sigmoïdes. Il est réfrigéré à partir d’une canule
préfèrent la solution développée par Collins (Euro-Collins®) ou introduite dans le tronc de l’artère pulmonaire. La solution
la solution Celsior ® , dont les performances sont du même réfrigérante se draine dans l’oreillette gauche, « déchargée » par
ordre. [4] l’ouverture de l’auricule gauche.
La solution de l’université du Wisconsin (UW solution,
Viaspan®) est utilisée pour le foie, le pancréas et les reins. Pour
chacun de ces organes, elle est la solution la plus performante ■ Prélèvement simultané du cœur,
et permet des durées de conservation sans risques, respective- du foie et des reins chez un
ment, de 12, 12 et 48 heures. [5-7] . Sa supériorité dans la
conservation du greffon intestinal se confirme également. donneur hémodynamiquement
La solution de Celsior® est utilisée par de nombreuses équipes stable dans un hôpital général
de greffe rénale, hépatique ou pancréatique. Efficace dans la
conservation du cœur et des poumons, elle pourrait devenir la habilité
solution unique utilisable pour tous les organes.
C’est l’exemple le plus caractéristique et le plus fréquent du
prélèvement multiorganes. Le prélèvement associé des pou-
mons, du pancréas total et de l’intestin grêle est plus rare, mais
s’intègre parfaitement au sein de la procédure que nous décri-
“ Points forts
vons. Les cas particuliers sont nombreux. Pour des raisons
didactiques, nous les abordons séparément. En général, l’inter-
vention a lieu tard dans la nuit, dans un hôpital habilité à
• La protection des greffons contre l’ischémie repose sur réaliser des prélèvements. Dans le service de réanimation
séjourne un sujet en état de mort cérébrale et rien ne s’oppose
le principe de la réfrigération.
au prélèvement des organes destinés à être transplantés. Le plus
• La réfrigération est assurée par la perfusion, dans les
souvent, l’équipe chirurgicale locale est constituée d’un chirur-
vaisseaux afférents à chaque greffon, d’une solution gien général. L’« équipe du foie » et l’« équipe du cœur »
préalablement portée à 4 °C (température du réfri- proviennent d’un autre centre, parfois éloigné géographique-
gérateur). ment, et sont attendues au bloc opératoire par une « coordina-
• Les solutions de conservation sont nombreuses et trice locale », véritable chef d’orchestre d’une procédure qui
différentes pour chaque organe. Leurs caractéristiques implique plusieurs opérateurs. Elle a préparé, pour chaque
communes sont : équipe qu’elle accueille, un dossier comportant les renseigne-
C une forte concentration en cations (sodium ou ments cliniques, biologiques et morphologiques concernant le
potassium) ; donneur.
Au cours de la procédure, les équipes vont intervenir succes-
C une forte concentration en agents osmotiques
sivement : d’abord l’équipe locale, puis l’équipe du foie, enfin
(mannitol, raffinose, acide lactobionique) pour lutter
celle du cœur. Les greffons partent dans l’ordre inverse : d’abord
contre l’œdème cellulaire que génère l’hypothermie. le cœur, puis le foie, enfin les reins prélevés par l’équipe locale
• La spécificité de certaines solutions tient à la présence à qui revient la tâche essentielle de la restitution tégumentaire.
d’agents colloïdes (amidon, polyéthylène glycol, plasma) Toutes ces équipes ne se connaissent pas et opèrent dans des
et/ou d’agents antiradicaux libres (allopurinol, conditions rendues difficiles par la pression qu’exerce la
glutathion). nécessité de « rentrer chez soi » avec un greffon parfait. La vie
du receveur en dépend. La bonne ambiance est un élément
.
déterminant de la qualité du geste et il appartient à chacun de
la susciter. Les équipes invitées sont d’autant mieux accueillies
qu’elles se sont présentées à leur entrée en salle d’opération.
2 Techniques chirurgicales
Technique des prélèvements multiorganes ¶ 40-090 / 42-747 / 43-300
Figure 1. Installation du donneur : décubitus dorsal, bras en croix. Figure 2. Section du ligament falciforme au bistouri électrique ; l’aide
Noter la présence d’un cathéter veineux fémoral droit qui libère le tracte le ligament rond vers le bas.
territoire cave supérieur.
Installation du donneur
Le sujet en état de mort cérébrale étant potentiellement
instable sur le plan hémodynamique, les mobilisations doivent
être prudentes, au risque de s’exposer à un désamorçage
cardiaque. Son transport, entre le secteur de réanimation où il
a séjourné et la salle d’opération, est réalisé sous monitorage
cardiaque, en présence d’un réanimateur. Lors de l’arrivée en
salle du donneur, un anesthésiste et un chirurgien doivent être
présents pour accélérer le déroulement de l’intervention en cas Figure 3. Voie d’abord abdominale : suture des quatre volets pariétaux.
de collapsus. Un cathéter de pression artérielle sanglante, deux
voies veineuses dont une voie centrale, une sonde gastrique,
une sonde thermique et une sonde urinaire sont indispensables. d’emblée une sternolaparotomie. La section du ligament rond
La panseuse « circulante », rompue à la logistique des prélè- entre deux ligatures fortes, puis la section du ligament
vements multiorganes, prépare une table-pont et deux tables falciforme au bistouri électrique complètent l’exposition du
accessoires pour le conditionnement des organes avant le champ abdominal (Fig. 2). Cette incision médiane et longue a
transport. Elle doit avoir accès rapidement à du sérum chaud l’immense avantage de contenir latéralement le champ opéra-
(40 °C), du sérum glacé (0 à 5 °C) ou de la glace. Gardienne des toire et d’éviter les fuites latérales de liquides, sources de
lieux, elle veille à ce qu’aucune faute d’asepsie ne soit commise contamination du champ opératoire. En attendant l’arrivée de
dans une salle où les mouvements de personnes sont nom- l’équipe cœur, l’ouverture du péricarde ou l’effondrement des
breux. Le donneur est installé en décubitus dorsal, bras en plèvres n’est pas indispensable d’emblée, ce qui évite le refroi-
abduction forcée. La peau est rasée, lavée, séchée, puis désinfec- dissement du cœur. La désinsertion antérieure et limitée des
tée du menton à mi-cuisse. Le champ opératoire est large, de la deux muscles diaphragmatiques permet d’écarter largement
fourchette sternale au pubis et latéralement jusqu’aux lignes l’abord xiphopubien. Cette incision est également facile à
axillaires (Fig. 1). L’opérateur se place à droite du patient. Son refermer. Cependant, lorsque l’opérateur en charge de débuter
aide est en face de lui. L’intervention va se dérouler en trois
l’intervention n’a pas l’expérience de la sternotomie (qui peut
temps : la préparation à cœur battant, la réfrigération in situ et
être très hémorragique), une incision cruciforme expose suffi-
l’explantation des greffons réfrigérés.
samment le champ abdominal. Les pédicules épigastriques sont
alors soigneusement liés, et les angles des quatre lambeaux
Phase I : préparation à cœur battant maintenus rétractés en les liant au fil fort sur la base du thorax
et sur la racine des cuisses (Fig. 3). Cette incision a l’inconvé-
L’équipe locale débute l’intervention nient de favoriser l’inondation des champs et par conséquent
C’est elle qui est responsable du prélèvement et de la les fautes d’asepsie. Elle est plus longue à refermer et moins
restauration tégumentaire. Idéalement, la voie d’abord est étanche.
Techniques chirurgicales 3
40-090 / 42-747 / 43-300 ¶ Technique des prélèvements multiorganes
Figure 4.
A. Décollement iléocæcal, abord de la racine du mésentère.
B. Exposition de la racine du mésentère : libération du bloc duodénopancréatique.
Exploration
On vérifie l’absence de lésions traumatiques, de tumeur ou de
malformations graves susceptibles de contre-indiquer tout ou
partie du prélèvement. La découverte d’une plaie de la rate
encore hémorragique impose de réaliser une splénectomie en
prenant garde de respecter l’intégrité anatomique des autres
organes intéressés par le prélèvement (pancréas, rein gauche). La
rate est conservée stérilement pour être partagée entre les
différentes équipes pour la réalisation des examens immunolo-
giques nécessaires à la transplantation. La découverte d’une
tumeur rénale ou hépatique impose bien sûr la réalisation d’une
biopsie et d’un examen histologique extemporané. Le diagnostic
de tumeur maligne interrompt le prélèvement multiorganes. La
découverte d’une tumeur bénigne n’est pas une contre-
indication au prélèvement, mais on sait la difficulté qu’il peut
y avoir à distinguer tumeurs malignes et tumeurs bénignes dans
ces conditions d’urgence et d’analyse de coupes congelées.
Exposition des gros vaisseaux rétropéritonéaux Figure 5. Début de l’exposition des gros vaisseaux et des organes
Le décollement de la racine du mésentère permet d’aborder rétropéritonéaux : veine cave inférieure et veine rénale gauche.
les gros vaisseaux rétropéritonéaux. La mobilisation du côlon
droit est réalisée à partir du cæcum jusqu’à l’angle colique
(Fig. 4A). Il faut veiller au cours de ce décollement à ne blesser
ni l’uretère droit, ni la veine génitale droite qui cheminent au
flanc droit de la VCI. Le décollement du bloc duodénopancréa-
tique jusqu’à l’angle de Treitz complète la libération de la racine
du mésentère (Fig. 4B). Le côlon droit et le grêle, enrobés dans
un champ, sont réclinés vers le haut. Ainsi se trouvent exposés
la loge rénale droite, les gros vaisseaux rétropéritonéaux et
l’origine de la veine rénale gauche qui peuvent être évalués
(Fig. 5). La taille, la régularité des contours et la consistance du
rein droit sont appréciées par la palpation. On recherche une
artère atypique à destinée rénale droite. L’uretère droit est
visible jusqu’à son croisement avec les vaisseaux iliaques.
Préparation du site d’implantation de la canule aortique
sous-rénale
En l’absence d’anomalie de distribution artérielle rénale ou de
plaque d’athérome, le site d’introduction de la canule aortique
est situé 2 à 3 cm au-dessus de l’origine des artères iliaques. La
section entre ligatures appuyées de l’origine de l’artère mésen-
térique inférieure facilite l’exposition du site de canulation.
L’aorte est chargée sur deux fils de fort calibre (Nylacap®) ou
deux lacs en prenant garde de ne pas blesser les artères lombai- Figure 6. Contrôle des gros vaisseaux rétropéritonéaux, veine cave
res qui s’implantent à sa face postérieure. inférieure et aorte sur lacs.
Préparation du site de décharge cave
Le site d’introduction de la canule cave inférieure est préparé fois la veine cave sous-rénale mise à nu, elle est chargée à son
à la même hauteur que le site de canulation aortique. La face origine sur deux fils forts (ou deux lacs) (Fig. 6). Les volumineu-
antérieure de la VCI est débarrassée de son enveloppe lympha- ses veines lombaires qui affluent à cette hauteur doivent être
tique jusqu’à l’origine de la veine rénale gauche en prenant soin évitées. Tous ces fils sont placés individuellement en attente sur
de ménager une éventuelle artère à destinée rénale droite. Une une pince-repère. La masse viscérale, entourée d’un champ, est
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Figure 7.
A. Greffon de bonne qualité : couleur rouge brun, bords fins, parenchyme souple.
B. Greffon de mauvaise qualité : couleur marron, bords tranchants, parenchyme rigide : à l’évidence, le foie est cirrhotique.
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Figure 17. Section du cholédoque repéré par un fil tracteur passé au ras
du duodénum avant le déjantage duodénopancréatique.
Explantation du foie
Lorsque 3 l de solution sont passés dans l’aorte et 1 l dans la
veine porte, les greffons intra-abdominaux sont en règle Figure 18. Séparation du petit épiploon en passant au ras du bord droit
décolorés et refroidis. Le prélèvement hépatique ne doit débuter de l’œsophage et de la petite courbure gastrique. Noter la présence d’une
que lorsque le foie est pâle et que le liquide de décharge cave artère hépatique gauche que l’opérateur soulève avec le médius de sa
est clair. Une deuxième évaluation de la qualité du greffon est main gauche.
réalisée, certaines stéatoses ne se démasquant qu’après
décoloration.
L’explantation comporte cinq grandes étapes qui vont Aorte cœliaque
intéresser dans l’ordre : la voie biliaire principale, le tronc porte,
La section de la veine rénale gauche à sa terminaison au
la veine cave sus-hépatique, la veine cave sous-hépatique et
contact de la VCI expose la face antérieure de l’aorte (Fig. 19).
enfin l’aorte cœliaque. Les deux dernières étapes de la dissection
Débarrassée de sa canule, l’aorte est sectionnée par le milieu
se déroulent au contact des pédicules rénaux et demandent
jusqu’à l’origine de l’AMS. Les ostia des artères rénales droite
toute l’attention des opérateurs pour ne pas compromettre
et gauche sont repérés dans la lumière aortique. Il est aussi
l’implantation de l’un ou l’autre des greffons.
aisé de repérer d’éventuelles polaires qu’il faut évidemment
Voie biliaire principale conserver. L’aorte est sectionnée sous l’origine de l’AMS très
en oblique vers le haut, presque au ras des ostia de l’AMS et
L’opérateur commence par déjanter le pancréas céphalique du
du TC (Fig. 20). Cette manœuvre ménage de larges patchs aux
duodénum. L’aide présente le cadre duodénal en le tenant par
artères rénales principales et éventuellement accessoires.
ses angles. Dès que le cholédoque est identifié, il est sectionné
L’aorte cœliaque est sectionnée loin au-dessus de l’implanta-
au contact du duodénum et repéré par un fil serti de Prolène®
tion du TC pour ménager une éventuelle artère hépatique
4/0 laissé long (Fig. 17). Le pancréas est désolidarisé du duodé-
gauche s’implantant directement dans l’aorte.
num jusqu’à l’angle de Treitz vers le bas et la dissection
remonte le long de la petite courbure gastrique vers le haut. Le Veine cave sus-hépatique
petit épiplon est donc emmené avec le greffon, ainsi qu’une
éventuelle artère gastrique gauche (Fig. 18). La dissection de la veine cave sus-hépatique commence par
l’ouverture du diaphragme en avant de la fente de Larrey. Dès
Tronc porte
que l’ouverture phrénique est suffisamment grande, l’opérateur
Le pédicule mésentérique supérieur est sectionné au bord empaume le lobe droit du foie avec le diaphragme pour abso-
inférieur du pancréas. La canule porte est basculée vers la lument éviter toute traction sur la pointe du ligament triangu-
droite sous la masse mésentérique. Le pancréas est sectionné au laire droit et toute lacération hépatique à ce niveau (Fig. 21). Le
niveau corporéal puis, à son bord supérieur, le pédicule diaphragme est sectionné au large de l’orifice cave sus-hépatique
splénique. et des attaches postérieures du foie.
Techniques chirurgicales 9
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10 Techniques chirurgicales
Technique des prélèvements multiorganes ¶ 40-090 / 42-747 / 43-300
“ Points forts
Au cours du prélèvement cœur-foie-reins.
Chaque équipe de prélèvement dispose d’une table
arrière où elle peut conditionner son ou ses greffons.
L’incision est une sternolaparotomie d’emblée. Mieux
vaut éviter les refends lombaires, source de contamination
du champ opératoire.
Les greffons sont à peine disséqués à cœur battant pour
réduire le risque d’arrêt cardiaque inopiné.
Le cœur est prélevé d’abord, puis le foie, enfin les reins.
Figure 23. Le foie et le pancréas ont été explantés. Section longitudi- sujet en état de mort cérébrale. Elle est la conséquence de
nale des deux faces de l’aorte pour séparer les ostia des artères à destinée l’hypothermie, de la déplétion en catécholamines, de l’arrêt de
gauche et droite. sécrétion d’hormone antidiurétique et de la probable sécrétion
de cytokines vasoplégiantes par le tissu cérébral nécrosé.
récipient plat contenant du sérum glacé. Il est étalé et examiné L’administration de drogues tonicardiaques et vasoconstrictrices
pour établir un compte rendu anatomique avec un dessin de la améliore les chiffres tensionnels, mais aggrave l’hypoperfusion
vascularisation du greffon. Cette technique est répétée pour le tissulaire. Le seul moyen d’éviter l’apparition de lésions isché-
greffon controlatéral. Chaque rein est plongé dans un conteneur miques irréversibles est de se dépêcher en raccourcissant la
stérile contenant 500 ml de sérum à 4 °C, hermétiquement phase de dissection à cœur battant, pour réfrigérer au plus vite
fermé, emballé dans un double sachet en plastique puis stocké, et mettre les greffons à l’abri.
entouré de glace, dans un caisson isotherme. L’incision et l’exposition des deux champs thoracique et
abdominal restent les mêmes (cf. supra). À l’étage thoracique, le
Vaisseaux et ganglions péricarde est ouvert d’emblée, suspendu, et les sites thoraciques
Les deux fourches artérielles iliaques sont prélevées depuis de canulation préparés. À l’étage abdominal, le côlon droit et la
l’origine de l’artère iliaque primitive, jusqu’à l’arcade crurale racine du mésentère sont décollés. La partie basse de l’aorte et
pour la branche externe et l’origine des artères fessières pour la l’origine de la veine cave sont exposées, contournées, puis
branche interne. Chaque veine iliaque est prélevée depuis canulées après avoir « hépariné » le receveur. On ne canule pas
l’arcade crurale jusqu’à l’origine de la VCI. Les branches la VMI : le foie est refroidi par l’effluent du territoire splanch-
hypogastriques sont sectionnées au fur et à mesure de leur nique, lavé à partir de l’aorte. On ne contourne pas non plus
découverte, au large de leur orifice de drainage pour faciliter l’aorte sous-diaphragmatique : elle est, au moins au début de la
leur ligature ex vivo. Un greffon artériel et un greffon veineux perfusion, clampée au-dessus du diaphragme à travers la
sont à « l’équipe pancréatique » lorsque le pancréas fait partie sternotomie. L’aorte est canulée à l’étage thoracique et la
des organes prélevés ; sinon, les vaisseaux sont attribués à perfusion débutée. Dans cette situation réputée difficile, les
« l’équipe foie ». Ces pièces sont indispensables à l’unification opérateurs doivent garder leur calme et privilégier : la réfrigéra-
des artères splénique et mésentérique supérieure du greffon tion aortique, la décharge cave des organes et la réfrigération de
pancréatique, ou à l’allongement des vaisseaux du pédicule contact par de la glace mise en place le plus vite possible. Cette
hépatique lorsque les sites d’implantation conventionnels du technique de « prélèvement rapide » est appliquée de manière
receveur sont impraticables. Elles sont conservées stérilement systématique par les préleveurs entraînés, même si la phase de
dans un petit flacon étanche contenant du liquide de conserva- dissection en hypothermie est plus fastidieuse et le risque de
tion et maintenues à 4 °C. De nombreux ganglions sont sections accidentelles de vaisseaux atypiques, qui n’ont pu être
prélevés dans le mésentère et conservés stérilement dans du repérés à cœur battant, plus grand.
sérum physiologique. Ils sont répartis entre les différentes
équipes, et permettent la réalisation des cross matches entre
lymphocytes du donneur et sérum du receveur. Prélèvement simultané du pancréas total
Le prélèvement hépatique doit épargner les vaisseaux destinés
Fermeture au pancréas. Plus question de déjanter la tête pancréatique ni de
La restitution tégumentaire doit être particulièrement bien sectionner l’isthme. Le pédicule hépatique est détaché au bord
soignée. Un lacs est noué autour de l’origine du rectum, le grêle supérieur du duodénum ; la veine porte est sectionnée 2 à 3 cm
et le côlon sont réintégrés dans la cavité abdominale. Le sous sa bifurcation ; l’artère gastroduodénale est sectionnée
sternum est refermé à l’aide de quatre points de fil d’acier et entre deux ligatures, l’artère splénique sectionnée au bistouri
l’aponévrose des droits à l’aide de surjets de fils forts. La peau froid à 2 mm de son origine sur le TC. Après que le foie ait été
est refermée à l’aide d’un surjet continu de fils fins, à mailles explanté et avant le prélèvement rénal, le cadre colique est
serrées afin d’améliorer encore l’étanchéité pariétale. Le thorax abaissé hors du champ opératoire. Le pancréas et les deux reins
et l’abdomen sont lavés et séchés avant de panser la plaie. Tous sont exposés dans leur totalité. Le duodénum est sectionné
les cathéters et sondes sont retirés. Des pansements propres sont entre deux rangées d’agrafes (GIA 55), immédiatement en aval
appliqués puis le corps est transporté à la chambre funéraire de du pylore, puis à l’angle de Treitz, après avoir lavé la lumière
l’hôpital. digestive en introduisant dans la sonde gastrique 150 ml de
La Figure 24 récapitule les temps qui s’enchaînent aux étages sérum bétadiné. Le pédicule mésentérique supérieur est lié en
thoracique et abdominal. trois ou quatre fois au bord inférieur de D3, puis sectionné.
Nous utilisons ici une double ligature de Nylon® 0. À l’aide de
■ Cas particuliers la rate, la queue du pancréas est réclinée vers la droite. L’origine
de l’AMS est débarrassée de son surtout lymphatique, méticu-
leusement lié parce qu’il peut être à l’origine d’une lymphorrhée
Donneur hémodynamiquement instable considérable sur le greffon revascularisé. L’AMS est sectionnée
C’est une situation fréquente parce que la détérioration au ras de l’aorte après avoir repéré une de ses berges à l’aide
hémodynamique progressive est l’évolution naturelle chez tout d’un fil serti. En effet, la prise d’un patch aortique autour de
Techniques chirurgicales 11
40-090 / 42-747 / 43-300 ¶ Technique des prélèvements multiorganes
Explantation du cœur
Explantation du foie
Fermeture
l’ostium de l’AMS n’est pas nécessaire, compte tenu de la Prélèvement isolé des deux reins
réalisation d’une plastie d’allongement ex vivo. [10] En revanche,
.
cette manœuvre amputerait largement les patchs d’aorte qui Il est devenu exceptionnel.
sont indispensables aux artères rénales. Le pancréas est alors La voie d’abord est une incision cruciforme : incision xipho-
libre. pubienne barrée transversalement au-dessus de l’ombilic. La
Quelques fragments de rate sont prélevés sur la convexité, dissection à cœur battant comporte successivement : le décolle-
puis conservés à 4 °C pour la réalisation des cross matches. Le ment du côlon droit et de la racine du mésocôlon transverse,
greffon est immédiatement plongé dans un bocal stérile, suivi du décollement du fascia de Treitz ; le décollement du
étanche, dans lequel 500 ml de liquide à 4 °C viennent d’être côlon gauche ; la préparation des sites de canulation aortique et
versés. Le conteneur est fermé, puis entouré de deux sacs de décharge cave ; la préparation du site de clampage aortique
étanches stériles. L’ensemble est enfermé dans un conteneur en amont de l’artère mésentérique pour limiter la perfusion
isotherme rempli de glace dans lequel il peut séjourner pendant réfrigérante au territoire rénal. Pour ce faire, le paquet digestif,
une quinzaine d’heures. enrobé dans un champ humide, est récliné et maintenu par
l’assistant à l’aide d’une valve de Leriche. L’AMS, tendue
verticalement, est palpée au bord supérieur de la veine rénale
Prélèvement en bloc du foie et du pancréas gauche. Débarrassée de son surtout fibreux, elle est sectionnée
entre deux ligatures fortes. Les piliers du diaphragme, qui à cet
Rarement réalisé dans le but de greffer les deux organes en endroit bordent l’aorte, sont chargés de proche en proche sur
continuité, le prélèvement en bloc du foie et du pancréas est un dissecteur et sectionnés au bistouri électrique. Il est alors
préconisé aujourd’hui pour faciliter la séparation des vaisseaux possible de contourner l’aorte bien à distance de l’AMS et de la
communs aux deux organes. [11, 12] En effet, la dissection du mettre sur un lacs en attente d’être clampée. Lors de cette
pédicule hépatique, sur une table « à part », au calme, sur des manœuvre, il faut garder à l’esprit qu’une artère rénale polaire
organes protégés par le froid et par les deux opérateurs impli- supérieure peut naître au-dessus de l’implantation de l’AMS.
qués, entoure cette séparation d’une sérénité favorable aux Après réfrigération in situ, le prélèvement monobloc des deux
partages équitables. La dissection au plus près de l’artère reins s’effectue comme précédemment décrit, après avoir amené
hépatique commune, de l’origine de l’artère splénique du TC et le rein gauche « dans la cavité péritonéale » à travers une brèche
de l’AMS, donne à ces vaisseaux une longueur et un calibre dans le mésocôlon gauche.
proches de la réalité et entoure leur section de la sécurité qu’elle
exige. Les temps restent les mêmes jusqu’au départ de « l’équipe
thoracique » ; puis, le pédicule hépatique n’est pas abordé in Prélèvement pulmonaire associé
situ ; le duodénum est sectionné en aval du pylore et de l’angle
Souvent, les deux poumons et le cœur sont prélevés en un
de Treitz, puis le pédicule mésentérique supérieur est lié et
seul bloc. Il est utilisé tel quel, ou séparé ex vivo sur la back-
sectionné au bord inférieur du pancréas ; la veine cave sous-
table en un cœur et un bloc bipulmonaire, ou un cœur et deux
hépatique est sectionnée au bord supérieur des veines rénales,
poumons séparés. La procédure s’intègre parfaitement dans le
suivie de la découpe d’une collerette diaphragmatique autour de
prélèvement multiorganes (cf. supra). Seuls varient quelques
l’orifice de la veine cave sus-hépatique. Le foie et la veine cave
temps de la dissection à l’étage thoracique.
rétrohépatique sont détachés du plan postérieur, en passant, à
droite, dans la glande surrénale droite. Le troisième duodénum
Incision
est récliné vers le haut, la perfusion aortique est arrêtée, puis
l’aorte est sectionnée au bord inférieur de l’AMS, en étant très Les champs sont installés de sorte que l’incision thoracique
oblique pour rester à distance des artères rénales. L’aorte sus- médiane puisse remonter à trois travers de doigt au-dessus de la
jacente est ensuite prélevée de bas en haut jusqu’au-dessus du fourchette sternale. L’intégrité des plèvres est respectée jusqu’à
TC. Cette manœuvre est au mieux contrôlée par le côté gauche, la fin de la préparation des greffons et des sites de canulation
exposé en réclinant la queue du pancréas vers la droite. La abdominaux. L’écartement sternal ne peut être que modéré et
perfusion mésentérique inférieure peut être maintenue jusqu’à la section des coupoles diaphragmatiques droite et gauche
l’ouverture, ex vivo, de la veine porte. amorcée sur quelques centimètres seulement.
12 Techniques chirurgicales
Technique des prélèvements multiorganes ¶ 40-090 / 42-747 / 43-300
Évaluation des poumons. Préparation des sites situés sur la face latérale droite de l’aorte. Elles sont en rapport
de canulation et réfrigération étroit avec l’œsophage, les artères à destinée bronchique droite
ayant un trajet rétro-œsophagien. Elles offrent de nombreuses
La qualité du greffon pulmonaire a d’abord été appréciée en anastomoses péricarénaires dans une région située sous la
préopératoire par l’analyse des antécédents du donneur, concavité aortique. Leur respect impose un prélèvement « au
l’importance des transfusions, la durée de l’intubation, la large » : section œsophagienne entre deux rangées d’agrafes
radiographie du thorax et les gaz du sang. Une fibroscopie a été (TA30) à l’aplomb de la section trachéale, puis décollement
effectuée dans les heures précédant le prélèvement, à la recher- médiastinal en passant dans le plan du ligament prévertébral
che d’une suppuration bronchique ou d’un syndrome tumoral poursuivi latéralement jusque dans les gouttières paravertébra-
qui ferait récuser les greffons. S’il n’a pas eu lieu, cet examen est les. Ce décollement est mené en bas jusqu’aux insertions
réalisé en peropératoire. L’évaluation peropératoire des pou- diaphragmatiques. L’aorte thoracique et l’œsophage sont
mons permet de valider définitivement le prélèvement pulmo- successivement sectionnés et la libération des organes thoraci-
naire et autorise la mise en route de la procédure chirurgicale ques est achevée par la section des ligaments triangulaires, du
sur le receveur. Le péricarde est fendu verticalement de la racine péricarde sur sa ligne de réflexion diaphragmatique et de la VCI
de l’aorte jusqu’à la pointe du cœur, puis suspendu sur des au ras du diaphragme. Lorsque la préservation des artères
pinces mobiles. Le tronc veineux innominé et le TABC sont bronchiques n’est pas jugée nécessaire, le plan de décollement
sectionnés entre deux ligatures (nécessité de disposer d’un médiastinal passe alors entre le plan trachéobronchique posté-
cathéter artériel radial gauche ou fémoral et de voies veineuses rieur et l’œsophage. La crosse aortique est sectionnée en aval du
de remplissage à droite). Les deux plèvres sont ouvertes au TABC. La dissection est poursuivie en arrière des deux pédicules
bistouri électrique, l’inspection minutieuse des deux poumons pulmonaires et en avant de l’aorte thoracique descendante puis,
permet la recherche d’une atélectasie, d’une contusion pulmo- plus bas, en arrière du sac péricardique jusqu’à sa réflexion
naire, d’un œdème pulmonaire. La VCS est disséquée et mise en diaphragmatique qui est sectionnée. La libération basse du bloc
attente sur deux fils qui seront noués ultérieurement. La VCI est cardiopulmonaire s’effectue de la même manière que précédem-
mise sur lacs (cf. supra). La veine azygos est sectionnée entre ment. Le bloc cœur-poumons peut être disposé ainsi dans un
deux ligatures. L’aorte ascendante est séparée de l’artère conteneur de transport. Dans le centre de transplantation, il est
pulmonaire afin de permettre son clampage sélectif. Enfin, la préparé immédiatement avant l’implantation (hémostase,
trachée est isolée aussi haut que possible, sans dissection lymphostase, stripping de l’œsophage, préparation de la colle-
intempestive pouvant léser ses rameaux vasculaires. Deux rette aortique portant les ostia bronchiques en vue d’une
bourses de fil vasculaire sont confectionnées respectivement sur revascularisation élective). Dans d’autres cas, il est amené sur la
l’aorte ascendante et sur le tronc de l’artère pulmonaire, afin de back-table, disposé dans un large récipient rempli de sérum
permettre le maintien des canules de cardioplégie et de pneu- glacé, et le cœur est séparé des poumons.
moplégie. Après une purge soigneuse des tubulures de cardio-
plégie et de pneumoplégie, l’aorte ascendante et l’artère Séparation ex vivo du cœur et des poumons
pulmonaire sont canulées au centre de chaque bourse à l’aide Séparation du greffon cardiaque
d’une aiguille de cardioplégie. L’extrémité de la canule pulmo-
naire est raccordée à un robinet en « Y ». Sur une branche est Cette étape est réalisée en collaboration avec les deux
connectée la ligne de perfusion du liquide de réfrigération, dont équipes. La séparation du cœur a un impératif : ménager un
on vérifie qu’elle a été vidée de ses bulles d’air et qu’elle est patch d’oreillettes autour des ostia des veines pulmonaires, au
pour l’instant clampée. Sur l’autre branche du « Y » est connec- bénéfice des greffons pulmonaires, tout en étant suffisamment
tée une perfusion de vasodilatateurs (prostaglandine E1) qui économe pour ne pas léser le greffon cardiaque. Pour ce faire,
sont administrés dans le lit artériel pulmonaire dans les l’oreillette gauche est d’abord ouverte à gauche à égale distance
secondes précédant la pneumoplégie. Aucun geste supplémen- entre les deux veines pulmonaires gauches et le sillon auriculo-
taire n’est fait. Lorsque toutes les équipes sont prêtes, la ventriculaire. L’écartement de chacune des berges permet de
réfrigération in situ peut commencer. À l’étage thoracique, elle visualiser les orifices veineux, et de découper une collerette
comporte l’enchaînement rapide des temps suivants : perfusion auriculaire en toute sécurité. Le tronc de l’artère pulmonaire est
dans l’artère pulmonaire de la solution vasodilatatrice ; clam- sectionné à l’origine de ses branches droite et gauche après
page de la VCS puis de la VCI ; clampage de l’aorte et lance- avoir prudemment libéré le toit de l’oreillette gauche.
ment simultané de la cardioplégie et de la pneumoplégie ; Séparation des poumons
section de la VCI en aval et au ras du clamp, et ouverture de
l’oreillette gauche en sectionnant la pointe de l’auricule. La Elle n’est réalisée qu’en cas de greffe unipulmonaire, et le plus
diffusion parenchymateuse de la solution utilisée est favorisée souvent lorsque l’équipe de prélèvement est de retour dans son
par le maintien d’une ventilation à faible volume et basse centre. La collerette auriculaire est coupée à égale distance des
fréquence durant le lavage réfrigérant et jusqu’au moment de la orifices veineux droit et gauche. Les artères pulmonaires droite
section trachéale. Contrairement à la perfusion cardiaque, la et gauche sont sectionnées à leur origine. Les bronches souches
perfusion pulmonaire est effectuée par gravité de façon à éviter droite et gauche sont sectionnées le plus proximalement
possible. Elles sont recoupées au moment de la transplantation.
les barotraumatismes capillaires et l’ouverture de shunts
Les greffons sont introduits dans un sac en plastique, étanche
vasculaires intraparenchymateux. Alors que l à 2 l de liquide de
et stérile, baignant dans sa solution de conservation à 4 °C, en
conservation lavent et refroidissent les poumons, ils sont arrosés
évitant bien sûr le contact direct de la glace sur les organes. Ce
.
du sérum glacé régulièrement renouvelé.
premier sac est emballé dans un ou deux autres sacs stériles, le
tout étant ensuite placé dans un conteneur isotherme rempli de
Explantation du bloc cœur-poumons
glaçons.
Elle débute par la section haute de la trachée (après avoir fait
retirer la sonde d’intubation) entre deux rangées d’agrafes (TA
30), du tissu péritrachéal riche en éléments vasculaires qu’il
convient de cliper et par la section de la VCS entre deux
Prélèvement intestinal associé
ligatures. Dès lors, deux techniques sont utilisables selon qu’il Bien que d’indication encore limitée, les succès récemment
est nécessaire de préserver les artères bronchiques en vue d’une rapportés chez l’enfant [13] comme chez l’adulte [14] laissent
revascularisation élective (transplantation cardiopulmonaire ou penser que la greffe d’intestin grêle constituera bientôt une
bipulmonaire monobloc) ou selon que cette préservation n’est thérapeutique efficace des syndromes du grêle court. La dissec-
pas jugée nécessaire (transplantation unipulmonaire). Les artères tion à cœur battant consiste à délimiter le territoire vasculaire
bronchiques naissent de l’aorte dans la région de l’isthme ; elles du segment d’intestin qui est emporté et qui varie selon les
sont en nombre variable (une à trois artères), leurs ostia sont équipes entre 1,5 m de grêle proximal [15] ou la totalité du
Techniques chirurgicales 13
40-090 / 42-747 / 43-300 ¶ Technique des prélèvements multiorganes
jéjuno-iléon [16]. Après lavage et réfrigération, l’explantation de sectionnée à sa terminaison et rabattue vers la gauche. La face
l’intestin grêle comporte successivement : la dissection des antérieure de l’aorte est alors fendue longitudinalement,
éléments du pédicule mésentérique supérieur au ras du bord exactement en son milieu. Cette section, conduite de bas en
inférieur du troisième duodénum ; le tissu fibrolymphatique est haut, s’arrête 1 cm en aval de l’origine de l’AMS, et se poursuit
lié et sectionné pas à pas, l’artère et la veine mésentérique latéralement à droite et à gauche en passant exactement entre
supérieure sont squelettisées puis sectionnées en amont d’une elle et les artères rénales, dont on voit parfaitement les ostia
ligature solide ; la section proximale (jéjunum), puis distale de dans la lumière aortique. Le conditionnement de ce greffon de
la lumière digestive entre deux rangées d’agrafes (GIA), après grande taille est au mieux réalisé en l’enfermant successivement
avoir exprimé avec douceur son contenu vers l’aval. La décon- dans trois sacs en plastique, stériles (type sacs à grêle), où il
tamination ex vivo du greffon intestinal par le lavage de sa flotte dans son liquide de conservation froid. Ce triple embal-
lumière à l’aide d’une solution glacée contenant antibiotiques et lage est ensuite recouvert de glace pilée dans un caisson
antifongiques est souhaitable. [15] Le greffon est conservé de la isotherme.
même manière que les greffons hépatiques, pancréatiques ou
rénaux : plongé dans du liquide glacé, dans un conteneur
protégé par deux sacs en plastique stériles.
■ Conclusion
Prélèvement en bloc des viscères Le prélèvement multiorganes est une intervention chirurgi-
intrapéritonéaux cale bien codifiée, facile (un « exercice de dissection ») parce que
réalisée sur un organisme en principe indemne de toute patho-
Le greffon, destiné à être transplanté en « grappe », comporte logie préexistante. Les difficultés sont liées à quatre facteurs qui
le foie, le duodénopancréas et un segment digestif incluant peuvent se conjuguer : l’instabilité hémodynamique du don-
l’estomac et le jéjuno-iléon. Le côlon y est parfois associé. [17] La neur, qui impose de se dépêcher pour éviter l’ischémie chaude
transplantation d’un tel greffon trouve une indication idéale aux conséquences catastrophiques ; les anomalies de distribu-
mais exceptionnelle chez les malades porteurs d’un syndrome tion artérielle, notamment hépatique et rénale, qui amènent un
du grêle court compliqué d’une cirrhose biliaire secondaire à la risque de plaie vasculaire accidentelle ; les fautes d’asepsie,
nutrition parentérale. Le pédicule afférent est constitué par l’axe favorisées par la multiplicité des équipes impliquées et leur
cœliomésentérique supérieur, implanté sur un patch aortique va-et-vient incessant ; les « incidents de frontière » qui peuvent
unique, et le pédicule efférent par les veines hépatiques et la parfois exister entre deux équipes et qui disparaissent lorsque
VCI adjacente au foie. Le prélèvement d’un tel greffon n’empê- chaque acteur connaît et respecte les besoins des autres.
che ni le prélèvement des organes thoraciques, ni le prélève- .
14 Techniques chirurgicales
Technique des prélèvements multiorganes ¶ 40-090 / 42-747 / 43-300
[16] Cohen Z, Silverman RE, Wassef R, Levy GA, Burnstein M, Cullen J, Manyalich M, Paredes D, Cabrer C, Manyalich R. Evaluation and quality
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Lechaux D., Dupont-Bierre É., Karam G., Corbineau H., Compagnon P., Noury D., Boudjema K.
Technique des prélèvements multiorganes. EMC (Elsevier SAS, Paris), Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-090, Techniques chirurgicales - Thorax,
42-747, Techniques chirurgicales - Chirurgie vasculaire, 43-300, 2005.
Techniques chirurgicales 15
40-085
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 40-085 (2004)
2
Techniques chirurgicales Traitement chirurgical à visée curatrice des carcinoses péritonéales 40-085
Figure 2 Installation du patient. Présence d’un billot placé de travers sous le dos
du patient, jambes écartées à plat.
– pour pouvoir comparer les résultats des différentes séries de la l’extrémité du bistouri électrique une boule de 2 à 3 mm de diamètre
littérature. (Fig. 3). Lorsqu’une plus grande surface de destruction tumorale sur
un organe plein (comme le foie par exemple) est requise, une boule
de 5 à 10 mm est plus adaptée. Dans ces formes mucoïdes
Techniques chirurgicales prédominantes, cette destruction par électrofulguration dégage une
fumée importante qui rend indispensable l’utilisation d’un filtre à
fumée spécifique (Air Safe ES 2000 Stackhouse). Après une
INSTALLATION ET EXPOSITION
exploration complète de toute la cavité abdominale qui peut être
Le patient est installé en décubitus dorsal et les jambes écartées longue de plusieurs heures, et qui explore en premier les « zones
(Fig. 2). Les membres inférieurs sont à plat sur leurs appuis de façon limitantes » de l’exérèse complète de la CP (cf. supra), la décision de
à éviter la survenue d’un syndrome de loge du mollet. Cette position faire le traitement combiné est prise ou abandonnée. D’une manière
permet d’utiliser par voie basse une pince pour anastomose générale l’exérèse commence dans la région de l’abdomen qui pose
circulaire afin de rétablir la continuité rectale après exérèse du le plus de problème, et ainsi de suite, de manière décroissante. Dans
rectum. Un billot est mis en regard de l’auvent costal afin l’exposé qui suit, dans un souci de simplification, les procédures
d’améliorer l’accès aux coupoles diaphragmatiques. L’utilisation d’exérèse seront décrites quadrant par quadrant, du haut vers le bas,
d’un écarteur autostatique particulier est très souhaitable (nous sans qu’il s’agisse de l’ordre suivi pour un patient donné.
utilisons un écarteur d’Olivier). La sonde vésicale est posée après le
badigeonnage et la mise en place des jambières stériles. ¶ Omentectomie et exploration de l’estomac
En cas d’envahissement important de l’épiploon par la CP, la
PÉRITONECTOMIES [18] première partie de l’opération consiste à réaliser une omentectomie
pour libérer le centre de l’abdomen d’un large volume tumoral. Le
¶ Principes généraux grand épiploon est élevé puis séparé du côlon transverse (Fig. 4).
Ceci expose tout le mésocôlon transverse et la face antérieure du
Seul le péritoine macroscopiquement tumoral est réséqué ou détruit
pancréas. L’épiploon est retiré systématiquement en totalité en
par électrofulguration. En revanche le péritoine normal ou
passant au raz de la courbure gastrique. Le petit épiploon est
apparemment normal n’est pas réséqué et n’est traité que par la
largement ouvert en réséquant la pars flaccida. L’étude de l’estomac
CHIP. Seul le grand épiploon est systématiquement réséqué en
et principalement des vaisseaux coronaires stomachiques en cas de
totalité même s’il semble normal, en raison de la fréquence de son
pseudomyxome est déterminante pour la poursuite du geste comme
atteinte microscopique. Les zones de CP qui infiltrent en profondeur
cela a été décrit plus haut. La squelettisation de ces vaisseaux
un viscère creux ne sont retirables qu’au prix de l’exérèse partielle
recouverts de péritoine tumoral, surtout de la fragile veine coronaire
de ce viscère. Les zones de CP superficielles peuvent être détruites
stomachique, se fait millimètre par millimètre, à leur contact
par électrofulguration très fugace. L’électrofulguration consiste à
immédiat et en s’aidant de clips vasculaires de petite taille (5 mm)
utiliser le bistouri électrique en position de « section », à très forte
(Fig. 5). L’antre gastrique, de par sa position relativement fixe, est
puissance. Il en résulte une destruction des tissus touchés par
assez souvent touchée par la CP. En cas de pseudomyxome, elle peut
vaporisation. Elle est utilisée sans refroidissement sur les mésos et
être totalement infiltrée et une antrectomie est alors nécessaire.
les parois de l’abdomen, et avec un refroidissement immédiat par
un jet à la seringue de sérum froid sur les parois des organes creux ¶ Traitement de l’hypocondre gauche (Fig. 6)
(pour prévenir les risques de perforation). En cas de pseudomyxome
ou de CP à composante mucoïde majoritaire, le passage entre organe Tout le péritoine pariétal envahi par la CP est pelé en partant en
sain et magma tumoral se fait par électrofulguration en utilisant à arrière des muscles grands droits et en se dirigeant vers la coupole
3
40-085 Traitement chirurgical à visée curatrice des carcinoses péritonéales Techniques chirurgicales
Figure 4 Séparation du
grand épiploon tumoral du
côlon transverse. a : gâteau
épiploïque ; b : plan de dis-
section entre l’épiploon et le
côlon transverse par électro-
chirurgie ; c : côlon trans-
verse.
4
Techniques chirurgicales Traitement chirurgical à visée curatrice des carcinoses péritonéales 40-085
d’Arantius s’il est infiltré, et en arrière, de réséquer tout le péritoine Figure 9 Reconstruc-
tumoral recouvrant la face antérieure gauche de la veine cave tion postgastrectomie to-
inférieure rétrohépatique. tale. a : duodénum ; b : jéju-
nostomie de dérivation
proximale.
¶ Traitement du grêle et du mésentère
L’intestin grêle dans sa totalité et le mésentère doivent être libérés et
inspectés millimètre par millimètre. Une atteinte étendue du grêle,
laissant présager un intestin court, est une contre-indication à la
cytoréduction chirurgicale. Les anses intestinales infiltrées sont
réséquées tandis que celles qui sont touchées superficiellement sont
traitées par électrofulguration élective. Les nodules mésentériques
sont également traités en évitant de traumatiser les vaisseaux et en
prenant soin de déplisser chaque cornet du mésentère.
¶ Traitement du côlon
Le côlon est exploré et traité de la même façon que le grêle, tout en
sachant que, partiellement fixé, il est souvent plus atteint. L’atteinte
fréquente de la gouttière pariétocolique droite impose souvent une
hémicolectomie droite. L’infiltration tumorale des mésos peut
demander des sacrifices vasculaires qui imposent ensuite une
colectomie étendue. La colectomie totale est souvent une nécessité
en cas de pseudomyxome évolué. RÉTABLISSEMENT DE LA CONTINUITÉ DIGESTIVE
Toutes les tranches d’organes creux sont fermées passagèrement par
¶ Traitement du pelvis (Fig. 8) des agrafes puis traitées par la CHIP. Les anastomoses sont réalisées
après la CHIP, soit par surjets de fils résorbables, soit par pinces
Le pelvis est souvent le siège d’une maladie importante. Une mécaniques. En cas de CIPPI, les tranches de section digestive ne
péritonectomie pelvienne complète est donc souvent nécessaire. En sont pas baignées par la chimiothérapie. Certaines situations
cas d’envahissement massif, les deux éléments majeurs qui vont particulières méritent cependant une description plus détaillée.
guider cette dissection sont en arrière les uretères et en avant la
musculeuse vésicale. Les uretères sont repérés et mis sur lacs au ¶ Après gastrectomie partielle
niveau du détroit supérieur. La dissection se poursuit ensuite à leur Une anastomose terminolatérale est confectionnée sur une anse
contact, pas à pas, en suivant leurs faces antérieure et interne jusqu’à jéjunale de 40 cm de long. La sonde gastrique est descendue
leur terminaison. En avant, si l’on ne distingue plus de plan de jusqu’au pied de l’anse montée pour dériver les sécrétions
clivage, on incise le péritoine vésical tumoral au niveau du dôme biliopancréatiques, et laissée en place jusqu’à la reprise d’un vrai
jusqu’à la musculeuse. On suit ensuite le plan de clivage entre transit intestinal. Si seule une courte antrectomie a été réalisée, il
musculeuse et péritoine tumoral jusqu’au cul-de-sac vaginal chez la faut faire une vagotomie tronculaire (avec mécanisme antireflux)
femme et jusqu’aux vésicules séminales chez l’homme. En cas pour éviter l’ulcère anastomotique.
d’envahissement pelvien massif, on réalise une pelvectomie
postérieure chez la femme (colpohystérectomie élargie plus résection ¶ Après gastrectomie totale
rectale monobloc), et une résection antérieure du rectum chez Une gastrectomie totale est exceptionnellement requise pour certains
l’homme. Dans ces deux cas, la section des vaisseaux mésentériques pseudomyxomes très étendus. Dans ce cas, le montage est particulier
inférieurs précède la mobilisation de la partie haute du rectum et du (Fig. 9) et une stomie temporaire est réalisée pour dériver les
côlon sigmoïde, la section du mésorectum à sa partie moyenne, puis sécrétions biliopancréatiques et éviter ainsi la mise en tension et
la section du rectum en dessous du cul-de-sac de Douglas tumoral. l’ouverture secondaire du moignon duodénal. La suppression de
Le cul-de-sac est réséqué en totalité. Le rectum est fermé par une cette stomie, c’est-à-dire la réalisation de l’anastomose au pied de
application de TA 55 et le vagin par un surjet de fil résorbable. En l’anse montée sur l’œsophage, est réalisée 2 mois plus tard.
cas d’envahissement pelvien minime, intéressant principalement le
cul-de-sac de Douglas, une douglassectomie élective est possible. ANASTOMOSE RECTALE
Elle retire en monobloc la totalité du péritoine douglassien en Elle est réalisée sur le rectum moyen (sous-douglassien) qui a été
cheminant millimètre par millimètre à la face antérieure du rectum fermé par une agrafeuse, au moyen d’une pince mécanique
que l’on expose et que l’on dépéritonise en totalité. circulaire introduite par l’anus. Cette anastomose est soit colorectale,
5
40-085 Traitement chirurgical à visée curatrice des carcinoses péritonéales Techniques chirurgicales
soit iléorectale, réalisée sans tension, puis testée sous pression. Elle
n’est pas protégée après une CHIP, alors qu’elle l’est par une
iléostomie d’amont en cas de CIPPI (en raison de la fragilisation de
cette anastomose déclive après 5 jours de chimiothérapie
intrapéritonéale).
Réalisation de la chimiohyperthermie
intrapéritonéale
DIFFÉRENTES TECHNIQUES
Pour être efficace, la CHIP doit d’une part baigner la totalité des
surfaces des viscères et parois de l’abdomen, et d’autre part assurer
une température homogène la plus proche possible de 43 °C. Pour
ce faire, un circuit fermé, avec réchauffage et recirculation
permanente du perfusat est nécessaire. Nous avons éliminé les
raccords en Y après avoir constaté que le débit n’est bon que dans
l’un des deux bras du Y. Puisqu’il y a deux drains d’entrée et deux
de sortie, cela impose d’utiliser en parallèle deux pompes et deux
échangeurs thermiques (Fig. 10). Après avoir testé six procédures
techniques différentes, [6] nous avons montré au moyen d’un colorant Figure 10 Schéma du montage. P : pompe ; ET : échangeur thermique ; CC : cir-
que les procédures de CHIP faites à ventre fermé (que ce soit la cuit continu.
totalité de la paroi ou seulement la peau), ne permettaient pas de
baigner la totalité des surfaces. Lorsque la totalité de la paroi DÉBIT DU PERFUSAT ET DRAINS
abdominale est fermée, il se fait même des circuits préférentiels qui
conduisent le perfusat directement d’un drain d’entrée vers un drain Pour chauffer vite et bien, nous avons appris que les débits doivent
de sortie. Seules les procédures à ventre ouvert, qui permettent au être élevés (1 l/min dans chacune des deux pompes) et les tubulures
chirurgien de mobiliser en permanence les organes, traitent la et drains doivent être de gros calibre (30-36 Fr). Chacun des quatre
totalité des surfaces. Elles permettent aussi d’obtenir aisément une drains comporte à son extrémité un capteur thermique qui permet
homogénéité thermique parfaite. Si on utilise un moule en plastique en permanence de suivre les températures sur l’écran de l’ordinateur
décrit par les Japonais sous le nom d’« expandeur » de cavité (Fig. 12) et, pour les trois drains situés en profondeur, nous fixons
péritonéale, les berges de l’incision ne sont pas traitées et sont le un bigoudi à son extrémité (Fig. 13). Ce bigoudi éloigne les viscères
siège de récidives précoces. Finalement, nous avons sélectionné la du drain et évite le phénomène de « ventouse » lorsqu’il fonctionne
technique de ventre ouvert, peau en traction vers le haut (encore comme drain de sortie. Il y a deux drains d’entrée, habituellement
appelée coliseum technique) (Fig. 11) comme étant de loin la plus le drain situé sous la coupole droite et le drain « superficiel »
efficace. Pour ce faire, nous utilisons un cadre maintenu 20 cm au- dépourvu lui de bigoudi, avec lequel on arrose en permanence les
dessus de l’abdomen (cadre d’Auvert) par deux bras articulés sur berges de l’incision et que l’on peut amener dans une région un peu
lequel la peau est tendue au maximum par un surjet de gros fil. plus froide que les autres.
6
Techniques chirurgicales Traitement chirurgical à visée curatrice des carcinoses péritonéales 40-085
43
41
39
37
35
13.28 13.30 13.40 13.45 13.55 14.02
Temps
TEMPÉRATURES
Ces drains d’entrée sont habituellement à une température de 44, Tableau 3. – Différentes drogues utilisables lors d’une chimiohyper-
thermie intrapéritonéale (CHIP)
voir 45 °C. Les drains de sortie sont situés sous la coupole
diaphragmatique gauche et dans le pelvis. Leur température ne doit Dose recommandée Volume du perfusat
jamais descendre au-dessous de 42 °C, ce qui assure que l’on a bien 2
Mitomycine C 30-35 mg/m 4l
une température comprise entre 44 et 42 °C dans toute la cavité Cisplatine 100-200 mg/m2 2-4 l
péritonéale. Les températures d’une CHIP pour un patient donné Mitomycine + cisplatine 20 mg/m2 et 200 mg/m2 2-4 l
sont enregistrées sur ordinateur puis imprimées pour être placées Cisplatine + doxorubicine < 40 mg et < 15 mg/l 4l
dans son dossier (Fig. 12). Oxaliplatine* 460 mg/m2 2 l/m2
Mitoxantrone 28 mg/m2 2l
Paclitaxel 60-65 mg/m2 2l
VOLUME DU PERFUSAT Docétaxel 75 mg/m2 4l
Pour beaucoup d’équipes, ce volume n’est pas fixe et dépend de ce Données issues de la littérature, pour une durée de 60 minutes, sauf * pour une durée de 30 minutes.
que la cavité du patient veut bien contenir. Le corollaire est une
variation de la concentration des drogues d’un patient à un autre.
Nous préférons, afin d’avoir une concentration identique chez tous magnésium), sont les produits les plus utilisés. D’autres produits
les patients, baser le volume du perfusat sur la surface corporelle, sont utilisables, dont les pharmacocinétiques ont été étudiées
comme cela est le cas pour la chimiothérapie. Nous utilisons récemment. Pour les tumeurs colorectales et les pseudomyxomes,
finalement 2 l/m2 de surface corporelle, volume adapté à chaque l’oxaliplatine [9, 10] et l’irinotécan sont des molécules particulièrement
patient. [6, 10] Il est dès lors possible (et recommandé) de parler d’une intéressantes. Les quantités habituellement utilisées en fonction de
quantité de chimiothérapie en mg/m2/l. la durée sont rapportées dans le Tableau 3.
DURÉE DE LA CHIP
Elle est de 60 minutes, de manière arbitraire, pour la majorité des Fin de l’intervention, drainages
équipes. Personnellement, nous la réalisons pendant 30 minutes à et remplissage intraveineux
température efficace (> 42 °C), préférant augmenter les doses de
chimiothérapie et économiser 30 minutes de bloc opératoire (ce qui
nous semble plus rentable que d’économiser la chimiothérapie). Une fois la CHIP terminée, le perfusat est aspiré et jeté, ainsi que les
Pour chaque durée et pour chaque drogue, une étude tubulures et les drains, dans un conteneur spécial pour produits
pharmacocinétique et de tolérance est indispensable. [9, 10] toxiques. Les rétablissements de la continuité digestive sont
effectués, puis trois drains autoaspiratifs doux sont placés sous
chacune des coupoles diaphragmatiques et dans le pelvis. L’incision
MOLÉCULES UTILISABLES médiane est fermée par un surjet aponévrotique et par un surjet
La mitomycine C et le cisplatine (en prenant soin d’assurer une intradermique résorbables. La durée d’une telle intervention n’est
bonne diurèse et de charger le patient au préalable en sulfate de jamais inférieure à 4 heures. Elle peut être de 12 à 14 heures en cas
7
40-085 Traitement chirurgical à visée curatrice des carcinoses péritonéales Techniques chirurgicales
de CP très étendue, notamment en cas de pseudomyxome. Les Les suites opératoires de ce triple traitement (chirurgie,
pertes sanguines sont habituellement comprises entre 0,5 et 2 l. En chimiothérapie et hyperthermie) sont assez particulières et lourdes [1,
cas d’exérèse majeure et d’électrofulguration étendue, le patient se 4, 14]
et demandent une certaine expérience. La mortalité
comporte comme un grand brûlé et doit être traité comme tel. Le postopératoire est comprise entre 3 et 8 % pour les équipes
remplissage per- et postopératoire est avant tout basé sur la diurèse. entraînées et la morbidité entre 30 et 60 %.
Références
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8
¶ 40-105
Une parfaite connaissance de l’anatomie complexe de l’aine est indispensable à la compréhension des
mécanismes de formation des hernies et à la réalisation des différentes techniques chirurgicales
disponibles. La fréquence des hernies de l’aine est en rapport avec la présence d’une zone de faiblesse de
la paroi, située entre bord inférieur des muscles oblique interne et transverse d’une part et ligament de
Cooper d’autre part, fermée seulement par le fascia transversalis. Tous les procédés de réparation
herniaire ont pour but de pallier la déficience du fascia transversalis.
© 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Mots clés : Hernie de l’aine ; Hernie crurale ; Fossette inguinale ; Canal inguinal ; Bandelette iliopubienne
Figure 4. Variations de la terminaison du muscle oblique interne, Figure 5. Variations de la terminaison du muscle transverse, d’après
d’après Anson et al. [4]. Anson et al. [4].
A. Bord inférieur du muscle interne en position basse recouvrant complè-
tement le fascia transversalis.
B. Bord inférieur du muscle en position haute découvrant le fascia inférieur du muscle est en position basse, au contact du faisceau
transversalis. principal externe du crémaster et du bord supérieur du cordon,
C. Defects dans l’épaisseur du muscle. l’orifice musculopectinéal est peu étendu et le plan de couver-
ture solide. Lorsque le bord inférieur de l’oblique interne est
plus ou moins haut situé, la paroi postérieure du canal inguinal
Muscle oblique externe est plus ou moins découverte, de sorte qu’il y a une zone de
(M obliquus externus abdominis) faiblesse. En outre, dans 48 % des cas, il existe des defects dans
le muscle, comblés par de la graisse. La présence de defects
Il s’insère en haut sur les côtes, de la 5e à la 12e. Aux fibres associée à une insertion haute du muscle dans 36,8 % des cas
charnues de la moitié postérieure fait suite une large lame compromet sérieusement l’efficacité de la barrière musculaire [4].
aponévrotique. Au niveau de l’aine, il est représenté par son
aponévrose de terminaison, lame mince et étalée s’unissant en Plan musculofascial profond
dedans au feuillet antérieur de la gaine des droits. En bas, elle
Il est formé par la partie basse du muscle transverse et son
adhère au fascia iliaca dans sa partie externe, puis en regard des
aponévrose de terminaison unie au fascia transversalis.
vaisseaux fémoraux, ses fibres se recourbent vers l’intérieur pour
former l’arcade crurale, également appelée arcade fémorale ou Muscle transverse (M transversus abdominis)
ligament de Poupart. Les fibres les plus internes se recourbent
Le muscle transverse s’insère en arrière au niveau des apo-
en dedans et en arrière et vont s’insérer sur la crête pectinéale,
physes transverses des vertèbres lombaires, en haut au niveau
formant le ligament de Gimbernat (ligamente lacunare). Un peu
des six derniers arcs costaux, en bas sur la crête iliaque, le tiers
au-dessus et en dehors de l’épine du pubis, les fibres de l’apo-
externe de l’arcade crurale et le fascia iliaca. Les fibres charnues
névrose du muscle oblique externe, plus minces et clairsemées,
ont une direction prédominante horizontale, les fibres inférieu-
s’écartent pour former les deux piliers de l’orifice inguinal
res ont une direction oblique descendante. Le transverse se
superficiel. L’étendue de ce defect est variable ; dans 20 % des
termine par une aponévrose qui s’unit à la gaine du muscle
cas, il peut remonter au-delà du canal inguinal [4].
droit. Il est situé dans un plan plus profond que le muscle
Muscle oblique interne oblique interne (Fig. 3). Selon Anson et al. [4], le bord inférieur
du transverse n’atteint le bord supérieur du canal inguinal que
(M obliquus internus abdominis)
dans 14 % des cas. Il recouvre seulement la moitié de la paroi
Il s’insère en arrière sur le fascia lombosacré, en bas sur les trois postérieure dans 67 % des cas et le quart dans 20 %. En largeur,
quarts antérieurs de la crête iliaque, la partie latérale de l’arcade il ne recouvre la moitié de la région que dans 67 % des cas et
crurale, le fascia iliaca et en haut sur les quatre derniers cartilages la laisse totalement découverte dans 22 % des cas (Fig. 5). Du
costaux. Ses fibres charnues divergent en éventail : elles ont une fait de cette disposition particulière des muscles, le plan
direction oblique ascendante dans la portion supérieure, horizon- musculofascial profond présente souvent une zone de faiblesse
tale dans la portion moyenne et oblique descendante dans la couverte par le seul fascia transversalis.
portion inférieure. En dedans, son aponévrose de terminaison
s’unit à la gaine des muscles droits. Son bord inférieur décrit une Fascia transversalis
arche qui passe à distance de la crête pectinéale. Le fascia transversalis a été décrit par Cooper en 1804 comme
Le développement du muscle oblique interne est variable suit : « lorsque les portions inférieures des muscles oblique interne
(Fig. 4). Anson et al. [4], sur 500 dissections cadavériques, ont et transverse sont relevées, on découvre un fascia interposé entre
constaté que dans le sens vertical, le corps charnu n’atteignait ces muscles et le péritoine, à travers lequel les vaisseaux sperma-
la limite inférieure du canal inguinal que dans 2 % des cas. Il tiques émergent de l’abdomen. Ce fascia que je me suis autorisé
couvrait plus de 75 % de la zone située au-dessous de la ligne à nommer fascia transversalis est de densité variable, il est solide
bi-iliaque dans 75 % des cas et ne recouvrait que la moitié en direction de l’os iliaque et faible, de nature plus celluleuse, en
supérieure dans 23 % des cas. Dans le sens transversal, le corps direction du pubis » [5] . Depuis cette description, le fascia
charnu ne recouvrait 75 % que dans 75 % des cas, plus de 75 % transversalis a fait l’objet de multiples controverses, concernant
dans 7 % et moins de 75 % dans 8 % des cas. Lorsque le bord entre autres sa véritable nature, certains le considérant comme
1
2
1 3
2
3 6
4
5
7
8
6
4
7
8
Figure 6. Zone faible inguinale, d’après Fruchaud [1]. 1. Aponévrose du
muscle oblique externe ; 2. muscle oblique interne ; 3. vaisseaux épigas-
triques ; 4. muscle transverse ; 5. fascia transversalis ; 6. arcade crurale ; 9
7. bandelette iliopubienne ; 8. ligament de Henle.
1
5
6
1
7
2
8 3
3 2
9
10
4
5
Figure 10. Constitution du cordon inguinal, d’après Fruchaud [1].
Nerfs
Les branches du plexus lombaire gagnent la cuisse en traver-
sant la région inguinale (Fig. 11). Leurs territoires sensitifs sont
représentés par la Figure 12.
Figure 12. Territoires sensitifs des nerfs de l’aine. 1. Nerf iliohypogas-
Nerf iliohypogastrique (nervus [N] trique ; 2. nerf ilio-inguinal ; 3. nerf génitofémoral ; 4. nerf cutané latéral
iliohypogastricus) de la cuisse.
Figure 16. Canal inguinal ouvert avec la distribution classique des nerfs
ilio-inguinal et iliohypogastrique. 1. Nerf iliohypogastrique ; 2. nerf ilio-
inguinal.
Figure 14. Lignes d’élasticité de Dupuytren et Langer.
traction sur le cordon permettent d’accéder au pédicule vascu-
laire funiculaire ou crémastérien, qui va du pédicule épigastri-
que au cordon et peut être sectionné sans dommage pour le
testicule.
La variabilité de la distribution nerveuse expose à un risque
élevé de traumatismes, responsables de séquelles douloureuses.
Leur prévention demande beaucoup de prudence et d’attention.
3 Les branches ilio-inguinale et iliohypogastrique sont particuliè-
1
rement exposées lors de l’incision de l’aponévrose oblique
2 externe, de la section du crémaster et des sutures placées sur le
muscle oblique interne ; la branche génitale du génitofémoral,
lors de la résection du crémaster ou de la section du pédicule
3 funiculaire.
4
5
Plan musculofascial profond
7
6 Il est formé par le muscle transverse et le fascia transversalis
en continuité. Dans la majorité des cas, le transverse est caché
par le muscle oblique interne, le tendon conjoint n’existe pas.
En écartant le muscle oblique interne, on découvre le trans-
verse et le fascia transversalis (Fig. 15). Cette zone de faiblesse
est plus ou moins étendue selon le développement des muscles.
Figure 15. Voie d’abord antérieure. 1. Muscle oblique interne ; La qualité de cette zone est appréciée au mieux sous anesthésie
2. muscle transverse ; 3. aponévrose oblique externe ; 4. branche génitale locale, en demandant à l’opéré de pousser et de tousser.
du nerf génitofémoral ; 5. bandelette iliopubienne ; 6. arcade crurale ; En réclinant le feuillet inférieur de l’aponévrose oblique
7. nerf ilio-inguinal. externe, on découvre l’arcade crurale. Les vaisseaux épigastri-
ques formant la limite interne de l’orifice inguinal profond, plus
ou moins visibles sous le fascia transversalis, constituent un
haut, on découvre le muscle oblique interne décrivant une repère anatomique essentiel.
arche au-dessus du cordon. Des éléments nerveux sensitifs En rabattant le feuillet aponévrotique inférieur vers le haut en
entourent le cordon. Classiquement le nerf ilio-inguinal position anatomique, et en clivant le fascia cribriformis, on
chemine sur la face superficielle du cordon, juste sous l’aponé- explore le siège d’extériorisation des hernies crurales en dedans
vrose oblique externe et quitte le canal inguinal par l’orifice de la veine fémorale (voir article Traitement chirurgical des
inguinal superficiel, avant de se terminer par ses branches hernies inguinales par voie inguinale).
sensitives ; le nerf iliohypogastrique traverse le muscle oblique
interne à un niveau variable et chemine sous l’aponévrose
Espace sous-péritonéal
oblique externe, avant de la perforer en dedans de l’orifice L’incision du fascia transversalis donne accès à l’espace de
inguinal superficiel (Fig. 16). Dans une série récente de 110 dis- Bogros. Le clivage est facile en dedans des vaisseaux épigastri-
sections peropératoires de ces nerfs [15], la disposition classique ques et permet de découvrir le ligament de Cooper. En suivant
n’a été observée que dans 41,8 % des cas, alors qu’il y avait une ce dernier de dedans en dehors, on découvre les vaisseaux
disposition variable dans plus de la moitié des cas. Un tronc iliofémoraux qui croisent la branche iliopubienne et les bran-
commun était fréquent, mais il faut retenir surtout la fréquence ches anastomotiques entre vaisseaux épigastriques et obturateurs
des cas où les fibres de terminaison avaient une direction appliquées sur le relief osseux.
oblique, croisant plus ou moins la direction du canal inguinal,
étant ainsi exposées à la section lors de l’incision de l’aponé- Abord postérieur
vrose oblique externe (Fig. 13). La branche génitale du nerf La face profonde de la paroi inguinale peut être abordée en
génitofémoral émerge de l’orifice inguinal profond et suit le chirurgie ouverte ou vidéoassistée, soit par voie transpéritonéale,
bord postéro-inférieur du cordon. Une étude récente a montré soit par voie extrapéritonéale.
que les branches des trois nerfs sont anastomosées entre elles de
façon variable et que la distribution même des différents Voie d’abord traditionnelle
contingents sensitifs peut être répartie de façon très variable à L’incision peut être médiane sous-ombilicale (Stoppa) ou de
l’intérieur de ces branches [16]. La section du crémaster et la type Pfannenstiel ou latérale (Nyhus). Dans tous les cas, après
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4
5
1 6
7
8
2 9
3
1
1
4
2 6
B 3
5 4
A
6
Figure 21. « Cercle de la mort », d’après Colborn et Skandalakis [5]. 1.
3
Vaisseaux iliaques externes ; 2. vaisseaux épigastriques ; 3. anastomose
entre vaisseaux épigastriques et obturateurs ; 4. vaisseaux obturateurs ; 5.
vaisseaux iliaques primitifs ; 6. vaisseaux hypogastriques.
Figure 20. « Triangle funeste » et « triangle des douleurs », d’après
Colborn et Skandalakis [5]. 1. Vaisseaux épigastriques ; 2. canal déférent ;
3. veine iliaque ; 4. nerfs ; 5. vaisseaux spermatiques ; 6. artère iliaque ; hernie. La dissection est progressivement étendue latéralement,
A. « triangle funeste » ; B. « triangle des douleurs ». dans le plan situé entre, en avant le muscle transverse tapissé
du fascia transversalis, auquel adhèrent les vaisseaux épigastri-
ques, et en arrière l’arcade de Douglas et le péritoine. Lorsque
iliaque n’est pas visible. La branche fémorale du nerf génitofé-
moral est proche des vaisseaux spermatiques. Le nerf cutané l’arcade de Douglas descend bas, il peut être nécessaire de
latéral de la cuisse plus latéral passe en dedans de l’épine iliaque sectionner son insertion latérale.
antérosupérieure. Lorsque ce plan est largement disséqué, on peut introduire
Les chirurgiens cœlioscopistes ont donné le nom de « triangle sous contrôle de la vue le deuxième trocart opérateur, latérale-
funeste » à la zone triangulaire dont le sommet correspond à ment sur une ligne passant à hauteur de l’ombilic, voire plus
l’orifice inguinal profond et les deux côtés au canal déférent en haut si la distance ombilicopubienne est courte.
dedans et aux vaisseaux spermatiques en dehors (Fig. 20). Dans Les repères anatomiques qui guident la dissection sont les
l’aire de ce triangle passent les vaisseaux iliaques, ainsi que la suivants (Fig. 17, 19, 20) :
branche génitale du génitofémoral. Le risque de blessure • en bas le pubis, la branche iliopubienne avec le ligament de
vasculaire est à l’origine de cette dénomination [5]. Cooper, croisée dans sa partie externe par les vaisseaux
Le « triangle des douleurs » (Fig. 20), délimité par les vais- iliaques externes et par l’anastomose entre les vaisseaux
seaux spermatiques en bas et en dedans et la bandelette épigastriques et les vaisseaux obturateurs ;
iliopubienne en haut, correspond au passage des nerfs. Ceux-ci • les vaisseaux épigastriques appliqués sur le fascia transversalis
ont une topographie variable et sont souvent cachés sous le montent obliques en haut et en dedans et rejoignent le
tissu sous-péritonéal et le fascia musculaire. L’agrafage doit être muscle droit ;
proscrit dans cette zone. • les éléments du cordon spermatique divergent : le canal
La hernie indirecte (ou latérale) se présente sous l’aspect d’un déférent se dirige en bas et en dedans, alors que les vaisseaux
orifice d’aspect semi-lunaire, situé en dehors du pli ombilical se dirigent en haut en en dehors ;
latéral, limité en bas par la bandelette iliopubienne. La hernie • le cul-de-sac péritonéal des hernies indirectes, en dehors des
directe (ou médiale) se présente sous la forme d’une dépression vaisseaux épigastriques, se présente comme un entonnoir à
plus ou moins profonde, située entre le relief du pli ombilical sommet inférieur s’engageant dans l’orifice inguinal profond,
latéral et du pli ombilical médial, au-dessus de la bandelette qu’il faudra réduire en l’attirant dans l’espace sous-péritonéal.
iliopubienne. La hernie crurale est caractérisée par une fossette Il y a parfois un lipome caractérisé par son aspect lisse,
située en dedans de la veine iliaque externe, au-dessous de la brillant, uniloculaire ;
bandelette iliopubienne. • plus en arrière on voit les vaisseaux iliaques, veine en dedans
L’incision et la mobilisation du péritoine permettent d’abor- de l’artère, croisés par le déférent et recouverts par une lame
der l’espace sous-péritonéal (Fig. 19). celluloganglionnaire plus ou moins développée entre canal
déférent en dedans et vaisseaux génitaux latéralement,
Voie extrapéritonéale (TEP) correspondant à la gaine spermatique de Stoppa ;
Dans cette voie d’abord, le champ opératoire se situe intégra- • la bandelette iliopubienne est plus ou moins visible car
lement dans l’espace sous-péritonéal. recouverte par un feuillet cellulograisseux parfois dense. Elle
Pour accéder à cet espace, on pratique une incision cutanée sépare la région en deux parties. L’une sus-jacente avec les
ombilicale basse, puis une incision transversale de 10 mm du vaisseaux épigastriques séparant l’orifice inguinal interne en
feuillet antérieur de la gaine du muscle droit homolatéral dehors et la fossette inguinale médiale, siège des hernies
paramédiane, qui permet d’accéder au bord interne du corps directes en dedans. L’autre sous-jacente séparée en deux
charnu du muscle. En soulevant le bord interne du muscle à parties. Dans la partie latérale passe le psoas sous l’aponévrose
l’aide du petit côté d’un écarteur de Farabeuf, on découvre le duquel cheminent le nerf fémoral, le nerf cutané latéral de la
feuillet postérieur de la gaine des droits. cuisse et la branche fémorale du nerf génitofémoral. Dans la
L’optique introduite dans cet espace progresse par dilacéra- partie médiale passent les vaisseaux iliaques et se trouve
tion des tractus conjonctifs entre, en avant le corps charnu du l’orifice crural, juste en dedans de la veine. Ces deux zones
muscle droit, tapissé de son périmysium (qui correspond au correspondent au triangle funeste et au triangle des douleurs,
fascia transversalis), et en arrière l’arcade de Douglas, le tissu dans lesquels tout agrafage est proscrit.
graisseux sous-péritonéal et la vessie. Le « cercle de la mort » (Fig. 21) est un terme excessif qui fait
Le clivage se fait d’abord à la face profonde du muscle droit ; référence aux variations vasculaires dans cette région et notam-
un premier trocart opérateur peut alors être introduit en ment aux branches anastomotiques entre vaisseaux épigastri-
position juxtamédiane controlatérale par rapport au côté de la ques et vaisseaux obturateurs, qui croisent la branche
iliopubienne en dedans, en dehors ou au niveau du passage des hernie indirecte. Par la suite, les analyses histologiques et
vaisseaux fémoraux, et dont la blessure peut être une cause biochimiques ont mis en évidence des altérations du tissu
d’hémorragie [5]. conjonctif : modifications du collagène, diminution du taux
d’hydroxyproline, anomalies des fibrilles au microscope électro-
nique et réduction de la prolifération des fibroblastes en culture.
■ Physiologie Pans [21], étudiant les caractéristiques biomécaniques du fascia
transversalis et de la gaine des droits, a constaté que le fascia
Les mécanismes destinés à éviter la protrusion du sac viscéral des patients porteurs de hernies directes était plus extensible et
hors du canal inguinal sont multiples, à la fois passifs et élastique que celui des témoins. Dans une étude immunohisto-
actifs [19]. logique ayant comparé des fragments de fascia transversalis et
L’obliquité du canal inguinal et la disposition en chicane de de gaine des droits prélevés au cours d’interventions de Stoppa
ses deux orifices, profond et superficiel, assurent une barrière à des fragments prélevés sur des sujets témoins au cours
passive par un effet de valve, la paroi postérieure s’appliquant d’autopsies ou de prélèvements d’organes, il a été mis en
contre la paroi antérieure lors des élévations de la pression évidence une augmentation du nombre de fibres conjonctives
intra-abdominale. La contraction musculaire tend à accentuer isolées (au lieu d’être groupées) et une plus grande désorganisa-
cet effet en mettant en tension les aponévroses. tion des réseaux de fibres collagènes dans le fascia des hernies
La contraction des muscles transverse et oblique interne attire directes [22].
l’orifice inguinal profond en haut et en dehors. De ce fait, elle Le tabac jouerait un rôle déterminant dans les altérations du
augmente l’obliquité du canal inguinal et elle tend à rétrécir tissu conjonctif . Les vétérans traités par Read qui étaient
l’orifice inguinal profond en mettant en tension son rebord souvent de gros fumeurs avaient un taux particulièrement élevé
inférieur. La contraction des muscles oblique interne et trans- de hernies, notamment directes ou bilatérales. Le tabagisme est
verse attire leurs tendons de terminaison en bas et en dehors, significativement plus fréquent chez les patients porteurs de
et tend à réduire la zone de faiblesse inguinale. Le bord inférieur hernie et notamment chez les femmes. Les hernies sont deux
du muscle oblique interne s’abaisse vers la branche iliopubienne fois plus fréquentes chez les patients ayant un anévrisme de
et tend à recouvrir par en avant la zone de faiblesse. L’abaisse- l’aorte que chez ceux qui ont un syndrome de Leriche ; cette
ment de ce muscle est bien visible lors des efforts de poussée et différence est rapportée à une activité protéolytique plus
de toux, lorsqu’on opère sous anesthésie locale un sujet musclé. importante chez les premiers. Le tabac est en effet un activateur
L’élévation du bord inférieur de l’orifice inguinal profond et puissant des collagénases [20].
l’abaissement du muscle oblique interne ferment la zone de Par ailleurs, des anomalies congénitales du collagène peuvent
faiblesse à la manière d’un diaphragme d’appareil photographi- également être en cause. Ainsi, chez les nourrissons, les filles
que : shutter mecanism des Anglo-Saxons. Enfin, la contraction atteintes de luxation congénitale de la hanche ont cinq fois
des crémasters attire le cordon vers l’orifice inguinal profond, plus de hernies que les autres et les garçons trois fois plus [23].
où il s’impacte à la manière d’un bouchon. Ces faits, qui tendent à démontrer l’existence d’une faiblesse
Ce mécanisme complexe fait appel à plusieurs éléments particulière du fascia dans la genèse des hernies et notamment
anatomiques. Il est bien imparfait comparé à celui d’un obtura- des hernies directes, plaident en faveur de l’usage des prothèses.
teur photographique et surtout, il dépend de la qualité des
éléments anatomiques : si le fascia est déficient ou le muscle
oblique interne peu développé, l’essentiel du mécanisme de
Différents types de hernies
fermeture est déstabilisé. Hernies inguinales
Elles correspondent au passage d’un diverticule péritonéal à
■ Anatomie pathologique travers la zone faible inguinale. On en décrit trois types
(Fig. 22).
1
5
2
4 B
oblique du cordon. De longueur variable, il s’étend plus ou • Type I : hernie indirecte avec un orifice profond de taille et de
moins à l’intérieur du cordon, il peut dépasser l’orifice inguinal configuration normales. Un sac indirect s’étend de façon
superficiel et atteindre le scrotum : hernie inguinoscrotale. Le variable, au maximum jusqu’au milieu du canal inguinal. La
sac peut être aussi extrafuniculaire et s’extérioriser en dehors de paroi postérieure est solide. C’est la hernie typique des
la gaine fibrocrémastérienne. Des lipomes plus ou moins enfants ou des adultes jeunes.
développés peuvent entourer le sac. Parfois volumineux, ils • Type II : hernie indirecte avec un orifice inguinal élargi et
peuvent constituer l’essentiel de la hernie alors que le sac est déformé mais n’empiétant pas sur la paroi postérieure.
petit. Celle-ci est normale quand on la palpe en introduisant un
Dans les hernies « jeunes », le collet herniaire de petit calibre doigt dans le sac herniaire ouvert. Le sac herniaire peut
siège au niveau de l’orifice inguinal profond. Dans les hernies occuper toute la longueur du canal inguinal sans atteindre le
volumineuses anciennes, l’orifice inguinal profond est élargi, les
scrotum.
vaisseaux épigastriques sont refoulés en dedans. L’élargissement
• Type III : les hernies de ce type III comportent une faiblesse
de l’orifice peut empiéter largement sur la paroi postérieure qui
de la paroi postérieure. On distingue trois sous-groupes :
est alors plus ou moins détruite. Le péritoine pariétal de la fosse
iliaque peut glisser à travers l’orifice herniaire, entraînant avec C type IIIa : toutes les hernies directes, quelle que soit leur
lui le côlon accolé, c’est la hernie par glissement. La vessie peut taille ; protrusion de la hernie en dedans des vaisseaux
également être adhérente à la partie interne du sac. épigastriques avec un fascia transversalis faible ;
C type IIIb : hernies indirectes avec un orifice herniaire large,
Hernies directes dilaté, qui refoule les vaisseaux épigastriques et empiète
Encore dénommées médiales, elles s’extériorisent par la plus ou moins sur la paroi postérieure. Ce groupe com-
fossette inguinale médiale, en dedans des vaisseaux épigastri- prend les hernies inguinoscrotales, les hernies par glisse-
ques. Le plus souvent, le sac est plus large que profond, arrondi ment ainsi que les hernies mixtes ;
comme un bol, correspondant à un relâchement étendu du
C type IIIc : hernies crurales réalisant une forme particulière
fascia transversalis au niveau de la fossette inguinale médiale.
de déficience de la paroi postérieure.
Parfois, le sac s’extériorise par un orifice limité et prend un
aspect diverticulaire. • Type IV : ce sont les hernies récidivées que l’on peut subdivi-
ser en quatre sous-types : IVa : directes ; IVb : indirectes ; IVc :
Hernies obliques internes crurales ; IVd : combinaison de plusieurs types.
Ce sont des hernies qui siègent au niveau de la fossette
inguinale interne, en dedans de l’artère ombilicale, et s’extério-
risent à l’angle interne du canal inguinal. Elles sont
.
exceptionnelles.
■ Références
Associations
[1] Fruchaud H. Anatomie chirurgicale des hernies de l’aine. Paris: Doin;
Chez l’adulte, les associations de différents types de hernies 1956.
sont fréquentes et doivent être recherchées. Une hernie indi- [2] Read RC. Cooper’s posterior lamina of transversalis fascia. Surg
recte peut être associée à un simple bombement du fascia Gynecol Obstet 1992;174:426-34.
transversalis en dedans des vaisseaux épigastriques, traduisant sa [3] Rath AM, Zhang J, Chevrel JP. The sheath of the rectus abdominis
faiblesse. Elle peut être associée à un véritable sac direct en muscle: an anatomical and biomechanical study. Hernia 1997;
dedans des vaisseaux épigastriques, réalisant une hernie mixte, 1:139-42.
biloculaire, « en pantalon ». C’est souvent le cas pour les hernies [4] Anson BJ, Morgan EH, McVay CB. Surgical anatomy of the inguinal
extrafuniculaires [1]. Il peut exister un relâchement diffus de la region based upon a study of 500 body-halves. Surg Gynecol Obstet
paroi postérieure englobant toute la zone de faiblesse inguinale 1960;3:707-25.
avec des vaisseaux épigastriques entraînés dans le déplacement. [5] Colborn GL, Skandalakis JE. Laparoscopic inguinal anatomy. Hernia
Une hernie crurale peut être associée à une hernie inguinale, 1998;2:179-91.
surtout dans le sexe masculin, alors que la hernie crurale pure [6] Bendavid R. The unified theory of hernia formation. Hernia 2004;
se voit surtout dans le sexe féminin. 8:171-6.
[7] Peiper C, Junge K, Prescher A, Stumpf M, Schumpelick V. Abdominal
Hernies crurales musculature and the transversalis fascia: an anatomical viewpoint.
Encore appelées fémorales, elles sont beaucoup plus rares que Hernia 2004;8:376-80.
les hernies inguinales et plus fréquentes dans le sexe féminin. [8] Arregui ME. Surgical anatomy of the preperitoneal fasciae and
Les hernies crurales s’extériorisent par la gaine extérieure des posterior transversalis fasciae in the inguinal region. Hernia 1997;
vaisseaux fémoraux qui prolonge le fascia transversalis à la 1:101-10.
cuisse. Cette gaine est normalement très serrée autour des [9] Abdalla RZ, Mittelstaedt WE. The importance of the size of Hessert’s
vaisseaux fémoraux, sauf à la face interne de la veine fémo- triangle in the etiology of inguinal hernia. Hernia 2001;5:119-23.
rale [5]. C’est à ce niveau que se développent les hernies crurales [10] Rodrigues Jr. AJ, Rodrigues CJ, Plopper C, Terra RM. Do the dimen-
communes. Le sac s’extériorise à travers l’anneau crural, sions of the femoral canal play a role in the genesis of femoral hernia?
au-dessous de l’arcade crurale, en dedans de la veine fémorale Hernia 2000;4:49-51.
(cf. article Traitement des hernies crurales). Il est habituellement [11] Couinaud C. In: Anatomie de l’abdomen. Paris: Doin; 1963. p. 84-9
petit, situé sous le fascia cribriformis, et le collet est serré. (101–21).
Les autres variétés de hernie crurale sont rares : hernie [12] Hureau J, Agossou-Voyeme AK, Germain M, Pradel J. Les espaces
prévasculaire, extériorisée à la face antérieure des vaisseaux interpariéto-péritonéaux postérieurs ou espaces rétropéritonéaux.
fémoraux, entre eux et l’arcade crurale distendue et soulevée en J Radiol 1991;72:101-16.
avant, parfois volumineuse. La hernie de Laugier extériorisée à [13] Stoppa R, Diarra B, Mertl P. The retroparietal spermatic sheath - an
travers le ligament de Gimbernat et les hernies situées en dehors anatomical structure of surgical interest. Hernia 1997;1:55-9.
de la gaine vasculaire entre psoas et artère iliofémorale sont [14] Heller CA, Marucci DD, Dunn T, Barr EM, Houang M, Dos
exceptionnelles. Remedios C. Inguinal canal “lipoma”. Clin Anat 2002;15:280-5.
[15] Al-DabbaghAK.Anatomical variations of the inguinal nerves and risks
of injury in 110 hernia repairs. Surg Radiol Anat 2002;24:102-7.
Classification des hernies [16] Rab M, Ebmer J, Dellon AL. Anatomic variability of the ilioinguinal
Il existe plusieurs classifications. Nous ne donnerons que la and genitofemoral nerve: implications for the treatment of groin pain.
classification de Nyhus [25], qui est la plus utilisée, une des plus Plast Reconstr Surg 2001;108:1618-23.
simples et qui permet pratiquement d’associer la classe de la [17] Liu WC, Chen TH, Shyu JF, Chen CH, Shih C, Wang JJ, et al. Applied
hernie au type de réparation, les hernies de types III et IV anatomy of the genital branch of the genitofemoral nerve in open
relevant en général d’une prothèse. inguinal herniorraphy. Eur J Surg 2002;168:145-9.
[18] Habib E, Elhadad A, Brassier D, Mekkouji M, Alhallak Y. Anatomie [22] Pans A, Piérard GE, Albert A, Desaive C. Biomechanical assessment of
cœlioscopique de la région inguino-abdominale. Chir Endosc 1995; the transversalis fascia and rectus abdominis aponeurosis in inguinal
4:13-7. herniation - Preliminary results. Hernia 1997;1:27-30.
[19] Spangen L. Shutter mechanisms in the inguinal canal. In: Arregui ME, [23] Uden A, Lindhagen T. Inguinal hernia in patients with congenital dis-
Nagan RF, editors. Inguinal hernia. Advances or controversies?. location of the hip. A sign of general connective tissue disorder. Acta
Oxford: Radcliffe Medical Press; 1994. p. 55-60. Orthop Scand 1988;59:667-8.
[20] Read RC. Metabolic factors contributing to herniation. A review. [24] Devlin HB. Management of abdominal hernias. London: Butterworths;
Hernia 1998;2:51-5. 1988.
[21] PansA, Piérard GE,AlbertA. Immunohistochemical study of the rectus [25] Nyhus LM. A classification of groin hernia. In: Arregui ME, Nagan RF,
sheath and transversalis fascia in adult groin hernias. Hernia 1999; editors. Inguinal hernia. Advances or controversies?. Oxford: Radcliffe
3:45-51. Medical Press; 1994. p. 99-102.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Pélissier E., Ngo P. Anatomie chirurgicale de l’aine. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Techniques
chirurgicales - Appareil digestif, 40-105, 2007.
La technique de « Kugel » est une technique chirurgicale mini-invasive de cure des hernies inguinales et
crurales. Elle consiste à mettre en place une prothèse en position prépéritonéale par une courte incision
inguinale de 3 à 5 cm. Elle profite ainsi des avantages des techniques de chirurgie pariétale dites « sans
tension » associés à la rapidité, à la facilité de réalisation et au coût moindre des techniques effectuées à
« ciel ouvert ».
© 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Fermeture
L’aponévrose musculaire est fermée par un surjet de fil
résorbable. La peau est fermée par des fils ou des agrafes.
■ Indication et contre-indication
Cette technique est parfaitement applicable à toutes les
hernies inguinales, qu’elles soient directes ou indirectes, ainsi
qu’aux hernies crurales. Si la hernie est bilatérale, il faut bien
entendu effectuer deux incisions. Les récidives herniaires
peuvent également être traitées par cette méthode, dès lors qu’il
Figure 3. Prothèse de Kugel. n’a pas été mis, lors de la première intervention, une prothèse
en position sous-péritonéale.
Les patients présentant une contre-indication à l’anesthésie
L’index de la main opposée au côté de la hernie est introduit générale ou locorégionale peuvent être traités sous anesthésie
dans l’encoche et la prothèse est enroulée sur celui-ci. La locale.
prothèse est ainsi introduite, la pointe de l’index visant le Les antécédents de chirurgie prostatique, et particulièrement
ligament de Cooper (Fig. 4A à C). Le doigt est ensuite remplacé s’il y a eu une radiothérapie complémentaire, peuvent rendre
par la lame malléable, ce qui permet, en effectuant des petits l’intervention difficile mais pas impossible.
mouvements de rotation, de terminer l’introduction de la En revanche, les très volumineuses hernies inguinoscrotales
prothèse dans la loge prépéritonéale (Fig. 4D). Avant de retirer ne doivent pas être traitées par cette méthode au risque d’un
Figure 4.
A. Introduction de l’index opposé au côté de la hernie dans l’encoche de la prothèse.
B, C, D. Mise en place de la prothèse.
taux de récidive ou d’échec particulièrement élevé. Il est d’avoir une bonne connaissance de l’anatomie de la région et
également déconseillé d’opérer par cette technique les patients déjà une grande expérience de la chirurgie des hernies de l’aine.
traités par des anticoagulants à dose efficace qui ne peuvent être
interrompus suffisamment longtemps en périopératoire. Le
décollement lié à la création de la loge les expose en effet à un
risque élevé d’hématome postopératoire.
■ Références
[1] McGillicuddy JE. Prospective randomized comparison of the
Shouldice and Lichtenstein hernia repair procedures. Arch Surg 1998;
■ Conclusion 133:974-8.
[2] Johansson B, Hallerbäck B, Glise H, Anesten B, Smedberg S, Roman J.
Le but recherché de la technique était de pouvoir mettre en Laparoscopic mesh versus open preperitoneal mesh versus
place une prothèse en position prépéritonéale dans le même conventional technique for inguinal hernia repair. A randomized
espace anatomique que celui utilisé en laparoscopie mais par multicenter trial (SCUR Hernia Repair Study). Ann Surg 1999;230:
une courte laparotomie. On pouvait ainsi espérer bénéficier des 225-31.
avantages des techniques laparoscopiques en évitant leurs [3] Kozol R, Lange PM, Kosir M, Beleski K, Mason K, Tennenberg S, et al.
inconvénients et en particulier leur coût élevé. À ce jour, A prospective, randomized study of open vs laparoscopic inguinal
aucune étude comparative entre les méthodes laparoscopiques hernia repair.An assessment of postoperative pain. Arch Surg 1997;132:
et la méthode de Kugel n’a été publiée. Il est donc impossible 292-5.
d’affirmer la supériorité ou la similitude de ces techniques. [4] Leibl B, Däubler P, Schmedt C, Kraft K, Bittner R. Long-term results of
a randomized clinical trial between laparoscopic hernioplasty and
Néanmoins, outre le coût opératoire évidemment moins élevé
Shouldice repair. Br J Surg 2000;87:780-3.
d’une technique non laparoscopique, les études rétrospectives
[5] Stoppa RE, Rives JL, Warlaumont CR, Palot JP, Verhaeghe PJ,
publiées montrent un taux de récidive faible ainsi qu’une
Delattre JF. The use of Dacron in the repair of hernias of the groin. Surg
disparition rapide de la douleur en postopératoire suivis d’une Clin North Am 1984;64:269-85.
reprise rapide de l’activité physique [8, 9]. L’avantage certain de [6] Stoppa RE, Warlaumont CR. The preperitoneal approach and prosthetic
la technique est sa facilité de réalisation avec une durée repair of groin hernia. In: Nyphus LM, Condon RE, editors. Hernia.
opératoire moyenne de 20 à 30 minutes. La possibilité de Philadelphia: JB Lippincott; 1989. p. 199-255.
réalisation sous anesthésie locale ou locorégionale est également [7] Kugel RD. Minimally invasive, nonlaparoscopic, preperitoneal, and
un atout appréciable. sutureless, inguinal herniorrhaphy. Am J Surg 1999;178:298-302.
En revanche, la visibilité est extrêmement réduite au cours de [8] Ceriani V, Faleschini E, Bignami P, Lodi T, Roncaglia O, Osio C, et al.
cette intervention. Celle-ci peut évidemment être améliorée en Kugel hernia repair: open ″mini-invasive″ technique. Personal
agrandissant l’incision, mais la technique perd ainsi une partie experience on 620 patients. Hernia 2005;9:344-7.
de ses avantages. Le repérage et la dissection au cours de cette [9] Fenoglio ME, Bermas HR, Haun WE, Moore JT. Inguinal hernia repair:
intervention sont essentiellement tactiles. Il convient donc results using an open preperitoneal approach. Hernia 2005;9:160-1.
P. Martel (phmartel@free.fr).
Service de chirurgie générale et digestive, Hôpital Beaujon, 100, boulevard Général-Leclerc, 92110 Clichy cedex, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Martel P. Cure des hernies de l’aine par la technique de Kugel. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris),
Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-120, 2007.
■ Préparation et anesthésie
La préparation locale comporte la désinfection de l’ombilic,
la vidange vésicale par miction ou par sondage en cas d’antécé-
dent de troubles fonctionnels du bas appareil. L’antibioprophy-
laxie est systématique. L’anesthésie doit être générale.
■ Technique opératoire
Instrumentation
• Un trocart de 10 mm ;
• deux trocarts de 5 mm ;
• des pinces à préhension atraumatiques ;
• un crochet monopolaire ;
• une paire de ciseaux ;
• un porte-aiguille de 5 mm ;
• un pousse-nœud de 5 mm ;
• une agrafeuse de 5 mm ;
• un insufflateur électronique à haut débit ;
• une source de lumière froide au xénon ;
• une caméra endoscopique ;
• une optique à 0° ; Figure 2. Position des trocarts (traitement d’une hernie inguinale
• un moniteur haute définition. droite).
Dissection
Elle commence par une incision du péritoine le long d’une
ligne tendue entre l’épine iliaque antérosupérieure et le bord
latéral du pédicule ombilical, 2 à 3 cm au-dessus de l’orifice
herniaire concerné. Cette incision est de plus en plus courte
avec l’expérience, limitant les éventuelles difficultés de périto-
nisation (Fig. 6).
La dissection doit se faire au contact du péritoine, en com-
mençant par l’espace de Retzius. Il est utile de prolonger
Figure 1. Installation de l’opéré (traitement d’une hernie inguinale l’incision péritonéale le long du pédicule ombilical et éventuel-
droite). lement de le sectionner après coagulation afin de retrouver
facilement le tissu celluleux paravésical, d’identifier une Figure 5. Triangle « funeste » (rouge) et triangle « de la dou-
leur » (bleu). 1. Canal déférent ; 2. veine iliaque externe ; 3. artère iliaque
éventuelle corne vésicale et de dégager l’épine du pubis et le
externe ; 4. branche génitale du nerf génitofémoral ; 5. pédicule sperma-
ligament de Cooper facilement reconnaissable. La traction sur la
tique ; 6. bandelette iliopubienne ; 7. branche fémorale du nerf génitofé-
lèvre inférieure de l’incision péritonéale facilite l’engagement de
moral ; 8. nerf fémorocutané ; 9. muscle psoas.
gaz dans l’espace sous-péritonéal, réalisant une pneumodissec-
tion. La dissection se prolonge en dehors dans l’espace de
Bogros jusqu’à voir la veine iliaque externe et le relief du psoas. La traction sur la lèvre supérieure du péritoine (Fig. 9), parfois
Dans le cas d’une hernie directe, la réduction a déjà été malaisée au niveau du pédicule épigastrique, permet de complé-
assurée par la dissection de l’espace de Retzius. Le « faux sac » ter le décollement et de faciliter la péritonisation. Le ligament
représenté par le fascia transversalis déhiscent est refoulé jusqu’à rond, chez la femme, peut être sectionné. Le sac péritonéal est
découvrir le ligament de Cooper. En cas de hernie indirecte, la habituellement simplement refoulé sans être réséqué. Un sac
volumineux peut être incisé au pourtour de l’orifice inguinal et
dissection, au contact strict du péritoine (Fig. 7), s’accompagne
sa partie distale laissée en place, ce qui évite les conséquences
d’une traction importante sur le sac péritonéal avec section des
d’une dissection étendue, facteur d’épanchement hématique ou
tractus fibreux, ce qui permet de libérer les éléments du cordon séreux. En cas de hernie crurale, la réduction d’un volumineux
sous-jacent, pédicule spermatique et canal déférent, jusqu’à lipome herniaire peut nécessiter un élargissement de l’orifice
retrouver l’aspect en V inversé délimité par ces deux structures. crural à sa partie interne.
Le canal déférent est ainsi libéré jusqu’à son croisement avec
l’artère ombilicale, et le pédicule spermatique est pariétalisé le
plus loin possible sur le muscle psoas (Fig. 8). Le ligament de Insertion de la prothèse
Cooper, facilement reconnaissable, est mis en évidence. Cette En cas de hernie directe, il est souvent utile, avant de placer
dissection s’effectue, soit avec des ciseaux fermés à bout mousse la prothèse, de fixer le fascia transversalis au niveau du ligament
et sans coagulation, soit par l’intermédiaire du crochet mono- de Cooper par agrafage afin de limiter l’espace mort et donc le
polaire. Les vaisseaux iliaques ne doivent pas être dénudés. risque de sérome.
Figure 6. Incision du péritoine au-dessus des éléments du cordon. Figure 8. Pariétalisation des éléments du cordon.
■ Variantes techniques
Voie d’abord
En cas de laparotomie médiane, l’insertion du trocart optique
dans la région sous-costale gauche est préférable permettant une
adhésiolyse éventuelle. La cure herniaire est en général réalisa-
ble par cette voie sans devoir mettre en place un trocart
supplémentaire sus-ombilical.
Trocarts
Certains implantent un trocart de 12 mm dans la région
pararectale droite. Par cette voie, on peut introduire une
agrafeuse de 12 mm, voire même l’optique, ce qui évite de
Figure 11. Introduction de la prothèse dans l’espace de Retzius et
croiser les mains de l’opérateur et de l’assistant.
déroulement de dedans en dehors.
Une stratégie différente consiste en l’utilisation d’un trocart
de 12 mm sus-ombilical permettant l’introduction de la pro-
thèse et de l’agrafeuse sous contrôle de la vue par l’intermé-
diaire d’une optique de 5 mm en position latérale.
Type de hernie
En cas de volumineuse hernie inguinoscrotale, le sac peut être
laissé en place et le péritoine incisé autour de l’orifice herniaire.
Un drainage peut être utile, introduit par un trocart de 5 mm
directement dans la bourse, sous contrôle de la vue. Le drainage
peut éventuellement traverser la péritonisation. En cas de
glissement colique gauche, la technique est identique après
réduction du contenu en s’abstenant de tout décollement du
côlon qui serait responsable d’importantes difficultés de
péritonisation.
En cas de hernie irréductible, la réduction est indispensable
avant de commencer toute dissection. Elle s’effectue par des
manœuvres externes et internes et peut nécessiter l’ouverture du
sac au niveau du collet, à distance des structures vasculaires,
notamment du pédicule épigastrique.
En cas de hernie récidivée après plastie prothétique par
laparotomie ou laparoscopie, il est nécessaire de laisser le
matériel existant en place. Le risque de brèche vésicale dans ce
Figure 12. Fixation par agrafage. 1. Deux agrafes sur le ligament de
cas peut justifier le sondage. La péritonisation peut être plus
Cooper ; 2. deux agrafes sur le muscle droit ; 3. une agrafe en dehors du
difficile, nécessitant des artifices de glissement du péritoine
pédicule épigastrique.
vésical, voire même l’utilisation de biomatériaux de type
composite.
En cas de hernie bilatérale, il est préférable d’utiliser deux
prothèses car la mise en place d’une grande prothèse unique
semi-rigide serait plus difficile.
Type de prothèse
Nombreux sont les produits manufacturés disponibles :
implants à mémoire de forme avec ou sans enduction, et
anatomiques, préformés ou prédécoupés pour le passage du
cordon nécessitant une dissection entre celui-ci et le plan
vasculaire sous-jacent, prémontés sur un système de pose avec
matériel de fixation intégré.
Les biomatériaux synthétiques non résorbables disponibles
sont de deux types : polyester et polypropylène. Les prothèses
de polypropylène seraient responsables d’une réaction fibro-
blastique plus importante. La rétraction de leur surface avec le
temps pouvant aller jusqu’à 30 % doit être connue. [10]
Figure 13. Fermeture du péritoine par surjet et bourse.
Type de péritonisation
faire glisser le péritoine vésical et de répartir également la Elle peut se faire par un simple surjet bloqué à chaque
pression au niveau de la suture. extrémité par des nœuds extracorporels. Elle peut se faire par
Une brèche résiduelle nécessite une suture ou un agrafage agrafage, ce qui suppose un péritoine suffisamment résistant et
complémentaire. de diminuer la pression intra-abdominale afin de faciliter le
Aucun drainage n’est justifié. rapprochement des berges.
■ Références
.
Conversion en laparotomie
Lorsqu’elle est justifiée par des difficultés ou des complica-
[1] Nyhus LM, Pollak R, Bombeck CT, Donahue PE. The preperitoneal
tions, l’attitude la plus logique est d’aborder l’espace prépérito-
approach and prosthetic buttress repair for recurrent hernia. The
néal par incision médiane avec implantation d’une prothèse.
evolution of a technique. Ann Surg 1988;208:733-7.
[2] Stoppa R. The treatment of complicated groin and incisional hernia.
World J Surg 1989;13:545-54.
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“ Points forts
preperitoneal approach. In: Laparoscopic surgery of the abdomen. New
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[4] Fitzgibbons RJ, Filipi CJ. The transabdominal preperitoneal
laparoscopic herniorraphy. In: Nyhus and Condon’s hernia.
• La connaissance de l’anatomie endoscopique est le Philadelphia: Lippincott and Wilkins; 2002. p. 255-68.
préalable indispensable à l’apprentissage de la [5] Felix EL, Michas CA, Gonzales Jr. MH. Laparoscopic hernioplasty.
hernioplastie TAPP. TAPP vs TEP. Surg Endosc 1995;9:984-9.
• L’apprentissage de la hernioplastie TAPP est plus simple [6] Cohen RV, Alvarez G, Roll S, Garcia ME, Kawahara N, Schiavon CA,
et plus rapide que celui de la TEP. et al. Transabdominal or totally extraperitoneal laparoscopic hernia
• Les impératifs de sécurité afin d’éviter les lésions des repair? Surg Laparosc Endosc 1998;8:264-8.
organes de l’espace prépéritonéal sont : [7] Spaw AT, Ennis BW, Spaw LP. Laparoscopic hernia repair: the
anatomic basis. J Laparoendosc Surg 1991;1:269-77.
C l’incision péritonéale initiale siégeant au-dessus des [8] Eubanks S, Newman 3rd L, Goehring L, Lucas GW, Adams CP,
fossettes inguinales ; Mason E, et al. Meralgia paresthetica: a complication of laparoscopic
C la dissection au contact même du péritoine à partir herniorraphy. Surg Laparosc Endosc 1993;3:381-5.
de l’espace de Retzius. [9] Patterson M, Walters D, Browder W. Postoperative bowel obstruction
• Pallier l’inconvénient de l’ouverture du péritoine, source following laparoscopic surgery. Am Surg 1993;59:656-7.
de complications occlusives, suppose une péritonisation [10] Schumpelick V, Arlt G, Schlachetzki A, Klosterhalfen B. Chronic
extrêmement rigoureuse. inguinal pain after tpansperitoneal mesh implantation. Case report of
net shrinkage. Chirurg 1998;68:1297-300.
G. Fromont (gfromont@nordnet.fr).
Clinique du Bois-Bernard, route de Neuvireuil, 62320 Bois-Bernard, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Fromont G. Technique de hernioplastie par voie transabdomino-prépéritonéale. EMC (Elsevier SAS, Paris),
Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-137-B, 2006.
La situation particulière de l’orifice crural au point de passage des vaisseaux fémoraux, à la frontière entre
l’abdomen et la cuisse, explique que l’on puisse l’aborder aussi bien par voie crurale que par voie
inguinale ou rétropéritonéale. La relative rigidité de ses bords rend compte d’un taux d’échec relativement
élevé en cas de suture directe. Le risque d’étranglement élevé implique une indication opératoire
systématique pour toute hernie crurale diagnostiquée. Chez la femme, la hernie crurale est le plus souvent
pure ; chez l’homme, elle est associée dans la moitié des cas à une hernie inguinale, qui doit être réparée
dans le même temps. Il est difficile d’établir la suprématie de tel ou tel procédé, en raison de la relative
rareté de cette hernie et du manque de séries comparatives.
© 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Plan
¶ Introduction 1
¶ Voie crurale 2
Voie d’abord 2
Traitement du sac 2
Temps de réparation 3
¶ Voie inguinale 4
1
Voie d’abord 4
Traitement du sac 4
Temps de réparation 5 2
¶ Voie rétropéritonéale 5
Voie traditionnelle 5
Chirurgie vidéoassistée 5
¶ Indications opératoires 5
Chirurgie programmée 6
Hernie étranglée 6
Cas particulier des hernies prévasculaires 6
■ Voie crurale
1 Voie d’abord
Pour la voie d’abord crurale, comme pour la voie inguinale,
2 l’incision est une incision inguinale située un peu plus bas que
pour la hernie inguinale, parallèle au pli inguinal et un peu
au-dessus de lui (Fig. 4). Elle mesure 5 à 6 cm. Après découverte
3 de l’aponévrose du muscle oblique externe, on incise le fascia
cribriformis le long de l’arcade crurale, depuis les vaisseaux
4
fémoraux jusqu’à hauteur de l’épine du pubis. Ceci permet de
découvrir le sac herniaire extériorisé sous le fascia cribriformis,
au bord inférieur de l’arcade crurale, en dedans des vaisseaux
5 fémoraux (Fig. 4). La veine fémorale, située en dehors du sac, à
l’intérieur de la gaine vasculaire, n’est pas visible. La veine
saphène interne, située dans le même plan que le sac en dehors
de lui, n’est habituellement pas découverte. Le sac est épais,
entouré de tissu sous-péritonéal évaginé avec lui et parcouru de
petits vaisseaux.
6 Traitement du sac
7 Le sac est individualisé par dissection mousse, puis il est
ouvert et son contenu est vérifié et réintégré, ou si besoin
Figure 2. Coupe sagittale d’après Lytle [2]. 1. Péritoine ; 2. aponévrose réséqué s’il s’agit d’épiploon qui gêne sa réintégration. Le sac est
du muscle oblique externe ; 3. fascia transversalis ; 4. fascia de Scarpa ; 5. ligaturé par un point transfixiant et réséqué, puis le moignon
arcade crurale ; 6. sac herniaire ; 7. muscle pectiné. est réduit dans l’orifice herniaire. Si besoin, la réduction du sac
peut être facilitée par une incision de quelques millimètres du
ligament de Gimbernat en dedans du sac. Il faut évidemment
se garder de toute incision latérale qui exposerait au risque de
blesser la veine fémorale, ou antérieure qui sectionnerait
l’arcade crurale.
2
4
Temps de réparation
Herniorraphies
Procédé de Marcy-Lytle
Ce procédé ancien est le plus simple de tous [2]. Lorsque
l’orifice herniaire est petit (moins de 1 cm) il peut être fermé
par une simple suture. La suture consiste en un point circulaire
de monofil non résorbable chargeant le bord supéro-interne de
l’orifice qui correspond au ligament de Gimbernat, puis le bord
inférieur qui correspond au fascia pectinéal, le bord externe qui
correspond à la gaine vasculaire, pour finir au niveau du point
de départ (Fig. 5). La prise au niveau de la gaine vasculaire doit Figure 6.
être prudente, pratiquée avec une aiguille sertie fine pour éviter A. Procédé de Bassini. 1. Aponévrose du muscle oblique externe ; 2.
de blesser la veine sous-jacente. Ce procédé simple est bien arcade crurale ; 3. gaine des vaisseaux fémoraux ; 4. moignon du sac ; 5.
adapté au traitement des petites hernies, notamment chez la ligament de Gimbernat ; 6. ligament de Cooper.
femme où la hernie crurale est habituellement pure. B. Plastie avec aponévrose du muscle pectiné.
Procédé de Bassini
Ce procédé consiste à fermer l’orifice en rapprochant par
suture l’arcade crurale du ligament de Cooper ou du fascia du
muscle pectiné (Fig. 6). La veine est identifiée en dehors de
l’orifice herniaire, le Cooper en arrière et l’arcade crurale en
avant. La suture est faite par quelques points de monofil non
résorbable, unissant l’arcade crurale et le ligament de Cooper
ainsi que le ligament de Gimbernat ; les points sont passés puis
serrés de dedans en dehors. On peut faire un point en « huit »,
chargeant ensemble toutes ces structures [3], ou suturer l’arcade
crurale au fascia pectinéal [4]. Ce procédé présente l’inconvé-
nient de comporter une suture sous tension ; il est peu pratiqué.
On peut aussi renforcer cette suture par un lambeau aponévro-
tique découpé dans le fascia pectinéal et rabattu sur la suture [5].
Plasties prothétiques
« Plug » cylindrique Figure 7. Procédé de Lichtenstein. 1. Arcade crurale ; 2. fascia du
Cette technique a été proposée par Lichtenstein en 1974 [6]. muscle pectiné.
L’intervention est pratiquée sous anesthésie locale. Après
dissection et résection du sac, l’orifice crural est obturé par un
plug cylindrique fabriqué en roulant sur elle-même une plaque taille adaptée à celle de la hernie, habituellement moyenne ou
de polypropylène de 5 × 2 cm (Fig. 7). Le plug est fixé par des petite. Si besoin, quelques pétales sont réséqués. Le plug est
points de suture l’unissant à l’arcade crurale, au fascia du introduit pointe en avant dans l’orifice crural, jusqu’à ce que sa
muscle pectiné et au ligament de Gimbernat. Ce type de plug base affleure la marge de l’orifice. Le plug est fixé au pourtour
exposé à l’induration et au rétrécissement avec le temps est fibreux de l’orifice par une couronne de points séparés de
pratiquement abandonné. monofil à résorption lente ou non résorbable (Fig. 8). Les efforts
de toux et de poussée permettent de contrôler la stabilité du
Perfix®-plug
montage. Ce procédé n’a donné aucune complication ni
L’intervention est pratiquée sous anesthésie locorégionale [7] récidive à ses promoteurs sur 24 cas [7]. Il est très largement
ou locale [8]. L’orifice crural est obturé par un Perfix®-plug de utilisé actuellement [9-12].
■ Voie inguinale
Méthodes de Wantz, Bendavid et Polysoft®
Voie d’abord
La technique de Wantz [13] est destinée au traitement des
hernies crurales prévasculaires ou récidivées (Fig. 9). Une L’incision est parallèle au pli inguinal, située un peu plus bas
incision inguinale basse permet de découvrir la face antérieure que l’incision habituelle de herniorraphie inguinale. Après
de l’aponévrose du muscle oblique externe et la région crurale division du plan sous-cutané, on se porte au niveau de l’arcade
en réclinant la berge inférieure vers le bas. Après résection du crurale, on incise le fascia cribriformis le long de l’arcade crurale
sac, l’espace sous-péritonéal est disséqué à l’aide du doigt depuis les vaisseaux fémoraux jusqu’au pubis. On découvre ainsi
introduit à travers l’orifice crural. Le clivage est limité en dehors le sac herniaire développé sous le fascia cribriformis, en dedans
par la naissance des vaisseaux épigastriques de la face antérieure de la veine fémorale (Fig. 2). On se porte alors au niveau
des vaisseaux iliaques. inguinal, on incise l’aponévrose du muscle oblique externe,
Un carré de Mersilène® de 8 cm de côté est introduit dans comme pour une hernie inguinale. On explore la totalité du
l’orifice crural pour être étalé dans l’espace sous-péritonéal. Il est canal inguinal à la recherche d’une hernie inguinale associée,
amarré à la face profonde de la paroi, à 3 cm au-dessus de plus fréquente chez l’homme que chez la femme. On incise le
l’arcade crurale, par trois points de suture transfixiants. Les fascia transversalis depuis l’orifice inguinal profond jusqu’au
points sont passés à l’aide d’une aiguille de Reverdin introduite pubis pour exposer l’espace sous-péritonéal. On découvre ainsi
dans l’orifice crural. Une cuillère ou une petite lame malléable la partie abdominale du sac qui pénètre dans l’orifice crural
refoule et protège le péritoine. Les fils de suture permettent pour s’extérioriser à la cuisse (Fig. 11).
d’immobiliser le bord supérieur de la prothèse pendant son
étalement, ils seront retirés en fin d’intervention. Les deux coins Traitement du sac
libres de la prothèse sont saisis par une pince courbe introduite
par l’orifice herniaire et attirés vers le Retzius en dedans et vers Le sac peut parfois être réduit de l’orifice crural vers l’abdo-
la fosse iliaque en dehors, de façon à étaler la prothèse. Le men par une traction exercée sur son versant sous-péritonéal. Si
defect pariétal n’est pas suturé. Wantz avait utilisé cette cela est impossible, on peut ouvrir le sac au niveau sous-
méthode six fois en 1996 avec succès ; nous n’en avons pas péritonéal et le vider de son contenu pour faciliter la réduction.
l’expérience. Il est plus simple d’aborder le sac au-dessous de l’arcade crurale,
On peut en rapprocher la prothèse « parapluie » de Benda- l’ouvrir, réduire ou réséquer son contenu, réséquer le sac lui-
vid [14]. Cette prothèse est un disque de polypropylène de 8 cm même et réduire ainsi plus facilement le moignon à travers
de diamètre, muni d’une tige axiale pour faciliter les manipula- l’orifice crural. Toutes ces manœuvres peuvent être facilitées par
tions (Fig. 10). Elle est destinée au traitement des hernies le débridement du ligament de Gimbernat.
comportant un large orifice. Le disque est introduit dans Le sac étant libéré et fermé, le péritoine est refoulé et le
l’espace sous-péritonéal et étalé à la face profonde du plan ligament de Cooper largement découvert dans l’espace sous-
musculoaponévrotique. L’étalement se fait à l’aide d’une pince péritonéal, par dissection mousse, en prenant garde de ne pas
1 Figure 11.
A, B. Voie d’abord inguinale. 1. Aponévrose du muscle oblique
externe ; 2. muscle oblique interne ; 3. feuillet inféroexterne du fascia
2 transversalis ouvert ; 4. veine iliaque ; 5. sac péritonéal incisé au-
dessus du collet herniaire ; 6. graisse sous-péritonéale.
4
5
6
A
B
Plasties prothétiques
La technique de Rives, qui comporte une fixation de la
prothèse au ligament de Cooper, permet de fermer efficacement
l’orifice crural. Elle serait bien adaptée à la cure de la hernie
crurale associée à une hernie inguinale chez l’homme (effondre-
2 ment de l’aine), mais elle est peu pratiquée actuellement.
1 La prothèse Polysoft ® couvre largement les zones faibles
3 inguinale et crurale. Après dissection des sacs inguinal et crural
4 et ouverture du fascia transversalis, elle est placée dans l’espace
sous-péritonéal et amarrée au Cooper par un point de suture
placé juste en dedans de la veine fémorale.
Ces procédés ne sont pas des procédés de traitement électif de
la hernie crurale, notamment chez la femme, mais ils permet-
Figure 12. Procédé de Moschcowitz. 1. Arcade crurale ; 2. fascia trans- tent un traitement efficace en cas de découverte d’une hernie
versalis ouvert ; 3. graisse sous-péritonéale ; 4. ligament de Cooper. crurale associée à une hernie inguinale, et notamment en cas
d’effondrement de l’aine dans le sexe masculin (cf. fascicule
40-110 : Traitement chirurgical des hernies inguinales par voie
inguinale).
blesser les branches vasculaires anastomotiques entre vaisseaux
épigastriques et obturateurs, qui croisent le ligament de Cooper.
■ Voie rétropéritonéale
Temps de réparation Voie traditionnelle
Herniorraphies Les voies d’abord de Stoppa et de Nyhus permettent d’expo-
ser la totalité des orifices herniaires. L’orifice crural se reconnaît
Procédé de McVay à sa situation en dedans de la veine fémorale. La réduction du
sac peut être facilitée par le débridement du ligament de
La suture abaissant le « tendon conjoint » au ligament de Gimbernat qui forme la limite médiale de l’orifice.
Cooper, ou procédé de Lotheissen, chargeant éventuellement Dans la technique initiale de Nyhus, la fermeture de l’orifice
aussi l’arcade crurale, se fait sous assez forte tension et est peu se faisait par suture de la bandelette iliopubienne au ligament
recommandée. Le procédé de McVay avec incision de décharge de Cooper [17]. Actuellement, on préfère mettre en place une
du grand droit semble le plus adapté, notamment chez prothèse étalée recouvrant la totalité des points faibles de la
l’homme où la hernie crurale est volontiers associée à une paroi, selon les procédés de Stoppa ou de Wantz. La technique
hernie inguinale directe (cf. fascicule 40-110 : Traitement est la même que pour la hernie inguinale (cf. fascicule 40-115 :
chirurgical des hernies inguinales par voie inguinale). Traitement des hernies inguinales par voie rétropéritonéale).
[12] Swarnkar K, Hopper N, Nelson M, Feroz A, Stephenson BM. [18] Hernandez-Richter T, Shardey HM, Rau HG, Schildberg FW, Meyer G.
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Pélissier É., Ngo P. Traitement chirurgical des hernies crurales ou fémorales. EMC (Elsevier Masson SAS,
Paris), Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-107, 2007.
L’objectif principal de la réparation herniaire est double : suppression de la hernie et prévention des
récidives. Durant la décennie précédente les procédés sans tension ont permis de réduire la douleur
postopératoire et la durée d’incapacité qui en résulte. Mais plusieurs études actuelles mettent l’accent sur
l’incidence élevée de la douleur chronique. La prévention de cette complication à long terme sera la
préoccupation principale des équipes spécialisées dans les années à venir. Le procédé de Lichtenstein a
ravi le titre de « gold standard » au Shouldice et, après le « plug », deux autres procédés notables ont vu
le jour : le PHS® et le Polysoft®.
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Figure 1. Procédé de Shouldice, incision de l’aponévrose du muscle
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oblique externe. 1. Nerf ilio-inguinal ; 2. aponévrose oblique externe ; 3. 3
cordon spermatique.
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Figure 6. Procédé de Shouldice. Le fascia transversalis est fendu de Figure 8. Procédé de Shouldice, surjet retour du premier plan, unissant
l’orifice inguinal profond à l’épine du pubis. 1. Moignon du sac ; 2. le bord libre du feuillet supéro-interne du fascia transversalis à l’arcade
moignon du crémaster ; 3. feuillet inférieur du fascia transversalis ; 4. crurale.
vaisseaux épigastriques ; 5. feuillet supérieur du fascia transversalis ; 6.
graisse sous-péritonéale.
Réparation pariétale
Le temps de réparation comporte trois surjets aller-retour.
Le premier plan de suture est destiné à remettre en tension
le fascia transversalis, en fixant le feuillet inférieur du fascia à
la face profonde du feuillet supérieur. Le premier point est placé
au niveau de l’épine du pubis. Il charge successivement le
lambeau inférieur du fascia, le bord latéral de la gaine des
droits, puis la face profonde du feuillet supérieur du fascia. Il
faut éviter la piqûre du périoste qui pourrait entraîner des
douleurs résiduelles. Le surjet est mené en direction de l’orifice
profond en suturant le feuillet inférieur du fascia à la face
profonde du feuillet supérieur (Fig. 7). Les points de suture Figure 10. Procédé de Shouldice, surjet retour du deuxième plan
doivent être rapprochés de 2 à 4 mm et passés alternativement unissant le muscle oblique interne à l’aponévrose oblique externe.
près et loin du bord libre du fascia, en « dents de scie », pour
éviter de déchirer le fascia. Le dernier point charge le moignon Le troisième plan consiste à suturer en « paletot » les deux
de crémaster situé au niveau de l’orifice profond. Puis le surjet feuillets de l’aponévrose oblique externe par un surjet aller-
en retour est effectué avec le même fil, en unissant le bord libre retour en avant du cordon. Le premier surjet commence au
du lambeau supérieur du fascia à l’arcade crurale, en direction niveau de l’orifice superficiel et unit le lambeau inférieur à la
de l’épine du pubis, où le surjet est arrêté (Fig. 8). face profonde du lambeau supérieur. Au retour, le bord libre du
Le deuxième plan commence au niveau de l’orifice profond lambeau supérieur est uni à la face superficielle du lambeau
et unit l’arcade crurale juste au-dessus du surjet précédent, au inférieur, recouvrant la ligne de suture précédente (Fig. 11).
bord inférieur du conjoint s’il existe ou du muscle oblique L’intervention se termine par la suture du fascia de Scarpa et de
interne, jusqu’à l’épine du pubis (Fig. 9). Au retour, le surjet la peau.
charge encore l’arcade au-dessus du surjet précédent et le muscle Au Shouldice Hospital, les sutures sont faites au fil d’acier.
oblique interne jusqu’à l’orifice profond (Fig. 10). L’aide maintient le fil en traction à l’aide d’un crochet pour
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4
Figure 11. Procédé de Shouldice, troisième plan de suture : le lambeau Figure 13. Procédé de McVay, dissection. 1. Muscle oblique interne ; 2.
inféroexterne de l’aponévrose oblique externe a été suturé à la face veine fémorale ; 3. arcade crurale ; 4. ligament de Cooper ; 5. incision de
profonde du lambeau supéro-interne, puis celui-ci est suturé au précédent décharge ; 6. gaine du droit ; 7. graisse sous-péritonéale.
en « paletot ».
Procédé de McVay
La technique de McVay, qui a longtemps prévalu aux États-
Unis, caractérisée par l’abaissement du tendon conjoint au
ligament de Cooper, avec une incision de décharge, est peu
pratiquée actuellement. L’abaissement du conjoint au ligament
1 de Cooper a été proposé en 1897 par Lotheissen, sans contre-
incision de décharge. McVay développa sa technique avec une
2 5 incision de décharge et la publia en 1948. Le procédé de McVay
est une intervention importante, pratiquée habituellement sous
anesthésie générale. Certains mettent même en place un
3 cathéter vésical [3]. Elle peut évidemment être pratiquée sous
4 anesthésie locorégionale.
Dissection
L’incision cutanée, l’ouverture de l’aponévrose oblique
externe, la dissection du cordon, l’incision étendue du fascia, se
font comme pour les procédés de Shouldice ou de Bassini. Le
Figure 12. Procédé de Bassini d’après Stoppa [2]. 1. Muscle oblique ligament de Cooper est dénudé dans l’espace sous-péritonéal, les
interne ; 2. fascia transversalis ; 3. arcade crurale ; 4. aponévrose oblique vaisseaux fémoraux et la gaine vasculaire sont dénudés en
externe ; 5. incision de décharge. dehors. Le tissu cellulograisseux et les ganglions du canal crural
sont réséqués. Le bord inférieur du transverse est libéré. Le
crémaster est incisé ; en cas de hernie indirecte, le sac est
éviter les boucles à contresens. En effet, la manipulation du fil réséqué et l’artère funiculaire est sectionnée (Fig. 13).
d’acier est difficile et demande expérience et attention. La
majorité des autres chirurgiens utilisent un monofilament non
Incision de décharge
résorbable. Une incision de décharge est alors pratiquée à la jonction de
l’aponévrose oblique externe et de la gaine des droits. Elle
s’étend sur une dizaine de centimètres, vers le haut à partir du
Procédé de Bassini pubis.
La technique conçue par Bassini en 1887 et décrite avec Réparation
précision par son élève, Catterina, dans les années 1930, était
Le temps de réparation commence par la suture du bord
déjà très élaborée et très proche du procédé de Shouldice. Ainsi
inférieur du transverse au ligament de Cooper. La suture
conçue, la technique de Bassini donnait de bons résultats aux commence au niveau de l’épine du pubis et se poursuit en
chirurgiens qui la pratiquaient. Les résultats médiocres qui lui dehors, jusqu’à la veine fémorale. Elle comporte une dizaine de
sont attribués proviennent probablement de ce que le procédé points séparés. Le canal crural est fermé par deux ou trois points
dit « de Bassini » était le plus souvent un Bassini simplifié, ne de transition unissant le ligament de Cooper à la gaine vascu-
comportant qu’une dissection limitée et une suture du laire. La suture se poursuit en dehors en unissant l’aponévrose
« conjoint » à l’arcade par quelques points, sans incision du du transverse au fascia prévasculaire et à l’arcade crurale. Tous
fascia. les points ont été passés et sont noués à la fin de dedans en
Le procédé original de Bassini comportait déjà une dissection dehors. Le nouvel orifice profond admet seulement le bout
extensive avec incision de l’aponévrose de l’oblique externe, d’une pince de Kelly (Fig. 14).
mobilisation du cordon, résection du crémaster, découverte de L’aponévrose oblique externe est suturée en avant du cordon.
l’orifice inguinal profond, incision du fascia transversalis de Au niveau de l’incision de décharge, l’aponévrose peut être fixée
l’orifice profond à l’épine du pubis, dissection de l’espace sous- aux muscles par quelques points séparés et le defect aponévro-
péritonéal et individualisation de l’oblique interne, du trans- tique peut même être rapiécé par un filet prothétique.
verse et du fascia, l’ensemble formant ce que Bassini dénommait
la « triple couche ». La réparation se faisait par six à huit points Autres procédés
de suture unissant la « triple couche » à l’arcade crurale en Bien qu’ils ne soient plus pratiqués, ces procédés ont le
arrière du cordon [2]. L’aponévrose oblique externe était suturée mérite, chacun à sa façon, d’avoir apporté un éclairage particu-
en avant du cordon par des points séparés (Fig. 12). lier à la herniorraphie.
Prothèse sous-péritonéale
Procédé de Rives
Bien qu’il soit moins pratiqué actuellement en raison de sa
relative complexité, le procédé de Rives reste la référence des
procédés de placement de la prothèse dans l’espace sous-
péritonéal par voie antérieure [13]. Ce procédé consiste à mettre
Figure 17. Procédé de Lichtenstein. Passage du point unissant le bord en place par voie inguinale une prothèse fixée dans l’espace
inférieur de chacune des deux bretelles de la prothèse à l’arcade crurale en sous-péritonéal, de sorte que la prothèse dépasse les limites de
dehors du point d’arrêt du surjet. la zone faible inguinale et soit appliquée à la face profonde de
la paroi par la pression abdominale (Fig. 19, 20).
Les deux bretelles sont alors suturées ensemble pour former
un nouvel anneau inguinal. La technique est très précise : on Exposition
passe un point qui charge successivement le bord inférieur de L’incision inguinale oblique est la même que pour la techni-
la bretelle interne, puis le bord inférieur de la bretelle externe que de Shouldice. Après incision de l’aponévrose oblique
et enfin l’arcade crurale juste en dehors du point d’arrêt du externe, dissection du cordon, résection d’un sac de hernie
surjet précédent (Fig. 17). Le cordon est ainsi cravaté par les indirecte, le fascia est incisé de l’orifice profond à l’épine du
deux bretelles de la prothèse, qui reproduisent l’anneau de pubis.
l’orifice inguinal profond (Fig. 18). On procède ensuite à une large dissection de l’espace sous-
Les extrémités des deux bretelles sont alors recoupées à péritonéal, comme pour la technique de McVay. La face pro-
environ 5 cm au-delà de l’anneau inguinal et enfouies sous fonde du fascia est séparée du tissu sous-péritonéal par
l’aponévrose oblique externe sans fixation. L’aponévrose est dissection mousse au doigt ou à la pince de Kelly. Elle doit être
suturée en avant du cordon par un fil à résorption lente. poussée assez loin pour que la prothèse dépasse les limites de la
Prothèse
Elle a une forme anatomique ovale, qui couvre toute la zone
faible inguinale et crurale (Fig. 21). Elle est faite d’un treillis de
polypropylène à maille large, munie d’un fin cerclage de
polyéthylène, qui lui confère mémoire de forme. Le cerclage est
Figure 20. Procédé de Rives, coupe antéropostérieure. 1. Muscle trans-
interrompu à une extrémité, de sorte que la prothèse peut être
verse ; 2. muscle oblique interne ; 3. aponévrose oblique externe ; 4.
fendue, et il présente une encoche en regard des vaisseaux
prothèse sous-péritonéale.
iliaques. La prothèse existe en deux tailles : medium (14 ×
7,5 cm) et large (16 × 9,5 cm).
zone faible inguinale, qu’elle doit recouvrir entièrement. Cette
dissection est facile vers le bas et en dedans au niveau de Technique opératoire
l’espace de Retzius. Elle est un peu plus difficile vers le haut et
L’intervention est pratiquée préférentiellement sous anesthé-
en dehors, du fait de la présence des vaisseaux épigastriques et
sie locorégionale ou locale.
de l’adhérence plus forte du tissu sous-péritonéal à la face
L’incision est une incision inguinale traditionnelle de 4 à
profonde du transverse et au pourtour de l’orifice inguinal
5 cm, dans le sens des plis. Après incision de l’aponévrose
profond. Le ligament de Cooper et les vaisseaux fémoraux sont
oblique externe, le cordon est mobilisé, le nerf ilio-inguinal est
largement découverts. Il faut éviter de blesser les branches
repéré et préservé. Le crémaster est incisé circulairement à son
anastomotiques entre vaisseaux épigastriques et obturateurs qui
origine, de façon à bien découvrir l’orifice interne. Les vaisseaux
croisent la branche iliopubienne en un point variable.
épigastriques, repère essentiel, sont localisés et les lésions sont
Prothèse évaluées en demandant au malade de pousser et de tousser.
Initialement, Rives utilisait une prothèse de Mersilène de Hernie directe
8 cm sur 6 cm [13]. Ses élèves utilisent une prothèse de 10 cm
de côté [2]. Un rabat est découpé dans le bord inféroexterne Le fascia transversalis est incisé circulairement à la base du
pour le passage des vaisseaux iliofémoraux. sac ; une longue incision comme dans le Shouldice n’est pas
La prothèse est d’abord fixée au ligament de Cooper par souhaitable. La hernie est réduite. Une compresse introduite
quelques points de fil non résorbable, en prenant soin de laisser dans l’orifice herniaire amorce la dissection de l’espace sous-
un revers de 3 à 4 cm vers le bas, qui est rabattu et étalé sur la péritonéal, qui est conduite au contact de la face profonde du
paroi au-dessous du ligament de Cooper après section des fils. fascia. Elle est amorcée à la pince de Kelly (Fig. 22) et complétée
La prothèse est ensuite fixée à la face profonde des muscles au doigt (Fig. 23). La dissection est conduite en direction du
droit en dedans, oblique interne et transverse en haut, par des pubis en dedans et de l’épine iliaque en dehors, de façon à créer
points transfixiants noués à la face antérieure des muscles. On la loge de la prothèse. Une dissection suffisante est indispensa-
pratique alors une fente au niveau du bord supéroexterne de la ble pour permettre l’étalement correct de la prothèse. Le doigt
prothèse pour le passage du cordon. On passe un point d’arrêt permet de repérer les structures profondes, dans le sens antiho-
pour éviter la déchirure. Les deux bretelles ainsi obtenues sont raire : Cooper et branche iliopubienne, symphyse, face profonde
passées de part et d’autre du cordon et fixées à la face profonde du grand droit, et du transverse, vaisseaux iliaques.
des muscles par des points transfixiants. Enfin, le bord inféro- La prothèse Polysoft ® est introduite dans l’espace sous-
externe est fixé par quelques points à la gaine vasculaire et à péritonéal à travers l’orifice du fascia ; pour cela le bord
l’arcade crurale pour éviter toute récidive prévasculaire. inférieur et médial de l’orifice est soulevé par un écarteur de
Farabeuf et une lame malléable refoule la graisse sous-
Fermeture péritonéale vers la ligne médiane. Après retrait de la compresse,
Un surjet chargeant les deux berges du fascia transversalis la prothèse tenue par une pince de Kelly au niveau de sa grosse
unit le conjoint à l’arcade crurale par devant la prothèse qui est extrémité est introduite dans l’orifice en direction du pubis
ainsi séparée des plans superficiels. On procède ensuite à la (Fig. 24). Les deux écarteurs sont retirés avant la pince. Puis le
suture de l’aponévrose oblique externe en avant du cordon. rebord supérieur et latéral de l’orifice (correspondant aux
Le procédé d’Alexandre diffère de la technique de Rives parce vaisseaux épigastriques) étant soulevé par un Farabeuf, l’intro-
que la prothèse n’est pas fendue, mais largement interposée duction de l’extrémité latérale de la prothèse sous le fascia, en
entre péritoine et paroi, après pariétalisation du cordon [14]. direction de l’épine iliaque, est complétée. L’étalement de la
prothèse se fait en demandant au patient de pousser et en
Procédé « Polysoft® » agissant sur le cerclage avec le doigt.
Ce procédé est une modernisation de la technique de Rives. La stabilité du montage est contrôlée en demandant au
Il consiste à introduire la prothèse dans l’espace sous-péritonéal patient de pousser et de tousser. Si nécessaire la prothèse peut
à travers l’orifice herniaire. Son étalement dans l’espace sous- être fixée par un point au Cooper. Le fascia est simplement
péritonéal est facilité par la présence d’un fin cerclage à .1
refermé par un surjet chargeant la prothèse (Fig. 25). L’aponé-
mémoire de forme [15]. Il a pour objectif d’associer les avantages vrose oblique externe est suturée en avant du cordon en
de la prothèse sous-péritonéale et de la voie d’abord antérieure. prenant soin de préserver le nerf ilio-inguinal.
1 2 3
4 B
Figure 22. Procédé Polysoft® : hernie directe.
A. Incision du fascia transversalis à la base du sac.
B. Dissection sous-péritonéale à travers l’orifice herniaire. 1. Vaisseaux
épigastriques ; 2. graisse sous-péritonéale ; 3. face profonde du fascia
transversalis ; 4. compresse.
1 2 3
A B
Figure 26.
A, B. Procédé Polysoft® ; hernie indirecte : dissection de l’espace sous-péritonéal à travers l’orifice inguinal interne. 1. Graisse sous-péritonéale ; 2. vaisseaux
épigastriques ; 3. compresse.
Figure 27.
A, B. Procédé Polysoft® ; hernie indirecte. A. La prothèse fendue est introduite dans l’espace sous-péritonéal à travers l’orifice inguinal interne. B. Les deux
branches sont placées de part et d’autre du cordon. 1. Vaisseaux épigastriques.
la prothèse et l’arcade crurale, à hauteur de l’orifice profond, être fendue (Fig. 29). Cette technique est bien adaptée aux
pour éviter une protrusion prévasculaire. L’aponévrose oblique .2
hernies comportant un large orifice. Dans ces cas la dissection
externe est refermée en avant du cordon en situation anatomi- étendue à travers le large orifice herniaire est facile. Le modèle
que. Cette technique est indiquée surtout lorsque l’orifice large est conseillé.
interne n’est pas très large. Elle rétablit une disposition anato-
mique normale, avec un néo-orifice interne, qui contrairement Cas particuliers
au Lichtenstein est situé en profondeur, et un trajet en baïon- En cas de hernie mixte, les deux sacs sont disséqués et une
nette du cordon. Le trajet oblique du cordon est en effet un large dissection de l’espace sous-péritonéal est pratiquée, le
élément important de prévention de la récidive indirecte [4, 7]. cordon est pariétalisé, les vaisseaux épigastriques peuvent être
On peut aussi pariétaliser le cordon en étendant la dissection préservés, « squelettisés », ou sectionnés.
latérale de façon à séparer plus largement le péritoine de la D’une manière générale il faut utiliser le modèle medium dans la
paroi sur laquelle sont appliqués les éléments du cordon. La majorité des cas et le modèle large pour les larges pertes de
prothèse est alors interposée entre sac péritonéal et paroi sans substance, un chevauchement suffisant de la prothèse étant
4
2
Figure 35. Procédé de Rutkow et Robbins (Perfix®-plug). Hernie indi- Figure 38. Procédé de Rutkow et Robbins (Perfix®-plug). La prothèse
recte. Le plug est introduit pointe en avant, refoulant le sac dans l’orifice fendue est appliquée sur la paroi postérieure. Les deux bretelles sont
inguinal profond. simplement rapprochées par un point de suture.
1
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4 3
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Figure 40.
A, B. Prothèse PHS®. 1. Prothèse superficielle (onlay) ; 2. prothèse pro-
fonde (underlay) ; 3. tube connecteur.
une prothèse circulaire de 10 cm de diamètre, plate, destinée à Figure 41. Procédé PHS® : la prothèse profonde est introduite, puis
être placée dans l’espace de Bogros, en arrière du fascia trans- étalée dans l’espace sous-péritonéal, en arrière des vaisseaux épigastri-
versalis. La partie supérieure (onlay) est de forme plutôt rectan- ques. 1. Aponévrose oblique externe ; 2. muscle oblique interne ; 3. fascia
gulaire et elle est destinée à être placée en avant du fascia transversalis ; 4. vaisseaux épigastriques ; 5. cordon spermatique.
transversalis, dans l’axe du canal inguinal, en arrière de
l’aponévrose de l’oblique externe. Un tube connecteur de 2 cm Les sacs herniaires sont ensuite disséqués : les sacs obliques
de diamètre et de 1 cm de haut solidarise le centre des deux externes sont séparés du cordon, disséqués le plus loin possible
prothèses. Il est destiné à se placer dans l’orifice herniaire. au-delà de l’orifice inguinal profond et repoussés dans la cavité
L’ensemble du système est fait de polypropylène et il est abdominale. De la même façon, les sacs directs sont séparés du
disponible en trois tailles, ce qui permet de l’adapter aux fascia transversalis et repoussés dans l’espace de Bogros à travers
dimensions de la région inguinale en fonction de la morpholo- l’orifice herniaire. Les sacs herniaires ne sont plus réséqués car
gie du patient. cette manœuvre est susceptible d’augmenter la douleur post-
Le principe du procédé PHS® est d’allier les avantages et la opératoire, ce qui est contraire au principe des interventions
sécurité d’une prothèse rétrofasciale, qui renforce le fascia sans tension.
transversalis en utilisant la pression intra-abdominale, avec la
simplicité de mise en place d’une prothèse préfasciale comme Mise en place de la prothèse
dans la technique de Lichtenstein. Seule la prothèse superficielle La taille de la prothèse est alors choisie en fonction de la
est fixée par quelques points à la paroi abdominale et la morphologie du patient. Dans l’immense majorité des cas, la
présence du tube connecteur interdit toute possibilité de prothèse moyenne est suffisante.
migration. Par ailleurs, le caractère plat des deux prothèses Le point le plus délicat est la mise en place et l’étalement de
supérieure et inférieure est le garant d’une réhabitation rapide la prothèse inférieure dans l’espace de Bogros. Deux points
et régulière par le tissu conjonctif. Toutes les formes anatomo- techniques doivent être soulignés : il faut d’une part décoller
cliniques de hernie peuvent être traitées par cette prothèse, aussi largement le péritoine de l’espace de Bogros dans toutes les
bien les hernies inguinales que les hernies crurales puisque la directions en dépassant en bas le ligament de Cooper et en
prothèse inférieure couvre l’orifice profond du canal fémoral. dehors le niveau de l’orifice inguinal profond. Cette dissection
peut se faire au tampon monté, au doigt ou à la compresse
Technique opératoire
comme le préconise Gilbert. Il faut, d’autre part, contrôler
Anesthésie. Cette intervention est généralement effectuée visuellement l’étalement de la prothèse inférieure sans hésiter à
sous anesthésie générale ou anesthésie locorégionale (rachianes- débrider plus ou moins largement l’orifice herniaire en section-
thésie), mais elle est tout à fait possible sous anesthésie locale nant le fascia transversalis.
comme le fait habituellement Gilbert à Miami [20]. Le choix de La mise en place de la prothèse est bien codifiée. Les deux
l’anesthésie est généralement laissé au patient sauf en cas de extrémités de la prothèse supérieure sont réunies par une pince
contre-indication d’ordre médical. sans griffe. La prothèse est plongée dans de la Bétadine® puis
Dissection. La dissection est réalisée par voie inguinale et ne introduite en totalité dans l’espace sous-péritonéal à travers
diffère en rien des méthodes classiques. Une incision horizon- l’orifice herniaire éventuellement débridé (orifice inguinal
tale d’environ 6 cm est effectuée, à peu près 1 cm au-dessus du profond ou orifice direct). Il faut s’assurer, pendant cette
niveau du ligament inguinal. Le pli cutané abdominal inférieur manœuvre, que la prothèse supérieure sera bien orientée dans
est utilisé chaque fois que cela est possible. En dedans, l’incision l’axe du canal inguinal après déploiement (Fig. 41).
atteint le niveau de l’épine pubienne. Après section des vais- Une traction vers le haut permet de ressortir la prothèse
seaux superficiels, l’aponévrose de l’oblique externe est ouverte supérieure. On contrôle alors l’étalement de la prothèse infé-
du dedans vers le dehors, dans le sens de ses fibres, jusqu’à rieure visuellement et manuellement, celle-ci se trouvant donc
l’orifice inguinal superficiel en respectant les nerfs iliohypogas- dans l’espace sous-péritonéal en arrière du pédicule épigastrique.
trique et ilio-inguinal. Les deux lambeaux de l’aponévrose de Si le fascia transversalis a été débridé, on peut alors le refermer
l’oblique externe doivent être largement disséqués de toutes par un point de fil non résorbable.
parts, en particulier en bas jusqu’au ligament inguinal, car c’est On déploie ensuite la prothèse supérieure qui vient s’appli-
dans cet espace qu’est étalée et fixée la prothèse superficielle. Le quer au-devant du fascia transversalis et, plus haut, au-devant
cordon spermatique est alors disséqué et chargé sur un lacs : on de l’arche musculaire des muscles oblique interne et transverse
peut alors faire le point de la situation, rechercher et disséquer (Fig. 42).
le ou le sacs herniaires et apprécier l’état du fascia transversalis. Une fente externe est pratiquée pour laisser passer les
Ces manœuvres permettent de définir précisément le type de éléments du cordon spermatique. Les deux jambages de la
hernie en utilisant, par exemple, la classification de Nyhus (cf. prothèse sont réunis par un point de fil non résorbable en
EMC TC appareil digestif, 40-105). dehors de l’orifice inguinal profond. Ils doivent se chevaucher
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2
3
6 5
Figure 45. Types de hernies par glissement selon Bendavid. A. Type I. B. Type II. C. Type III. 1. Péritoine viscéral ; 2. péritoine pariétal.
1 2
Tableau 1.
Composition de la solution pour anesthésie locale.
Présentation Poids lidocaïne Volume
Lidocaïne 0,5 % ; 1 flacon 100 mg 20 ml
Lidocaïne 1 % adrénalinée ; 2 flacons 400 mg 40 ml
Bicarbonate de Na isotonique ; 1 ampoule 10 ml
Sérum physiologique 30 ml
Total 500 mg 100 ml
d’anxiété liées à un réveil de la douleur dans la nuit au domi- [5] Pélissier EP, Blum D. Herniorraphie type Bassini-Houdard. Résultats à
cile. La Lidocaïne® dosée à 5 % adrénalinée n’étant pas com- long terme et facteurs de récidive. Chirurgie 1993-1994;119:252-6.
mercialisée, on utilise le mélange décrit dans le Tableau 1. [6] Vayre P, Petit Pazos C. Utilisation d’un lambeau de la gaine
aponévrotique du muscle grand droit de l’abdomen pour la cure chirur-
gicale de la hernie inguinale directe chez l’homme. Technique et résul-
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Pélissier É., Palot J.-P., Ngo P. Traitement chirurgical des hernies inguinales par voie inguinale. EMC
(Elsevier Masson SAS, Paris), Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-110, 2007.
Le choix d’un procédé de cure de hernie inguinale est difficile en raison du grand nombre de techniques
proposées et des résultats souvent peu différents, voire parfois contradictoires dans les études publiées,
quant à la supériorité de l’une ou l’autre d’entre elles. La difficulté est d’autant plus ardue que, dans ces
études, le critère de jugement principal peut être aussi bien la récidive que la qualité de vie, ou encore le
rapport coût-efficacité, et que l’on doit en outre tenir compte des possibilités techniques locales et des
souhaits des patients. Alors qu’il existe de plus en plus de preuves qu’une technique sans tension, au
moyen de la mise en place d’une prothèse synthétique, donne moins de récidives et est moins douloureuse
dans les suites immédiates que la herniorraphie, le chirurgien doit se poser un certain nombre de
questions dans son choix de procédé. Il a notamment la possibilité de choisir entre une voie d’abord
ouverte, antérieure ou postérieure, et la voie d’abord vidéoassistée, que cette dernière soit trans- ou
extrapéritonéale. S’il opte pour la mise en place d’une prothèse et, selon la voie d’abord, le chirurgien doit
choisir également le siège du placement et le type de la prothèse. En outre, les choix de la technique
opératoire et du type d’anesthésie sont étroitement liés. Enfin il doit intégrer dans son choix les
contraintes économiques, les moyens dont il dispose et, de plus en plus, la préférence du patient. Ce
chapitre se propose de passer en revue la littérature sur chacune de ces interrogations et de fournir des
éléments de réponse, en s’efforçant d’être aussi factuel que possible.
© 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Mots clés : Hernie inguinale ; Hernie crurale ; Hernie étranglée ; Herniorraphie ; Plasties prothétiques ;
Chirurgie factuelle
Plan ■ Introduction
¶ Introduction 1
Le choix d’un procédé de cure de hernie inguinale est
difficile pour plusieurs raisons :
¶ Choix d’un procédé de herniorraphie 2 • parmi les nombreux procédés décrits et utilisés actuellement,
¶ Choix entre herniorraphie et hernioplastie prothétique 2 on ne voit pas émerger de technique qui surpasserait nette-
Tolérance et âge limite 2 ment les autres ;
Taille de la prothèse 2 • les conclusions de quelques études prêtent à discussion tant
Risque de sepsis 2 du point de vue des résultats, parfois contradictoires, qu’au
¶ Type de prothèse 2 plan méthodologique ;
• la technique employée, le type de prothèse et son mode de
¶ Place de la prothèse 3
placement sont étroitement liés au type de hernie, au choix
¶ Fixation de la prothèse 3 de la voie d’abord, au type d’anesthésie et aux données
¶ Choix entre voies antérieure et postérieure 4 économiques locales ;
• chaque chirurgien a une technique de prédilection, qu’il
¶ Choix entre chirurgie traditionnelle et chirurgie vidéoassistée 4
considère comme celle qui donne les meilleurs résultats.
Considérations médicales 4
Considérations économiques 4
Quoi qu’il en soit, un certain nombre de principes de base ne
doivent jamais être perdus de vue :
Indications spécifiques 4
• la hernie est une maladie bénigne dont le retentissement est
¶ Choix de l’anesthésie 5 essentiellement fonctionnel ; l’intervention ne doit donc pas
¶ Indications opératoires schématiques 5 exposer à des complications graves, ni entraîner de séquelles ;
¶ Conclusion 5 • le risque d’une intervention chirurgicale pour cure de hernie,
aussi minime soit-il, doit être mis en balance avec celui de
l’abstention lorsque la hernie est asymptomatique [1, 2] ;
• le meilleur procédé est probablement celui que le chirurgien
possède parfaitement et dont il a pu contrôler les résultats [3].
Tableau 1.
Classification des principaux types de prothèses d’après Amid [55].
Le type III comporte les matériaux macroporeux avec une quatre études contrôlées comparant la prothèse PHS à la
composante multifilamenteuse ou microporeuse. Ces prothèses technique de Lichtenstein [68-71], totalisant 906 réparations. Il
sont suffisamment poreuses pour permettre la pénétration des n’y avait aucune différence statistiquement significative concer-
fibroblastes et des vaisseaux, mais l’élément microporeux a nant le taux de récidives. Un de ces essais [68] montrait une
l’inconvénient de pouvoir héberger les bactéries. Le type IV différence en faveur du PHS pour la douleur postopératoire et
correspond aux biomatériaux ayant une taille de pores infé- la reprise du travail, alors que les trois autres n’ont pas trouvé
rieure à 1 µm. Ces matériaux ne sont pas adaptés à la réparation de différence. Deux des études [68-71] ont mis en évidence une
des hernies. Cependant, en combinaison avec les prothèses de différence significative dans la durée de l’intervention en faveur
type I, en composite, ils se prêtent bien à l’implantation du PHS ; trois sur quatre [68-70] n’ont pas montré de différence
intrapéritonéale, avec un risque moindre de fistule [57]. Deux significative concernant la qualité de vie et la douleur
études contrôlées ont comparé les prothèses à grammage chronique.
« léger » et à grammage « lourd » [58, 59]. Si la douleur postopé- Un essai contrôlé ayant comparé les techniques du plug et de
ratoire semble être diminuée avec les prothèses « légères », le Bassini a montré que le plug donnait moins de douleurs
taux de récidives était plus élevé dans une étude [60], alors que postopératoires et de récidives que le Bassini [72]. Une comparai-
dans l’autre, il n’y avait pas de différence concernant le taux de son randomisée entre technique de Lichtenstein et plug a
récidives, de douleur ou de qualité de vie postopératoire [61]. montré qu’il y avait moins de douleurs postopératoires avec le
Quant à la morbidité associée aux prothèses, si le spectre d’un Plug, mais sans différence concernant les délais de reprise
risque carcinogène semble écarté pour l’instant, il existe des d’activité et de reprise du travail [73]. En revanche à 1 an, les
publications d’obstruction du canal déférent, cause d’azoosper- fonctions physiques étaient meilleures chez les patients qui
mie [60] . Au total, il est préférable de choisir un matériau
avaient eu un Lichtenstein et le nombre d’opérés qui ressen-
prothétique monofilament et à maille large.
taient un inconfort au niveau de l’aine, limitant le travail et les
activités sociales, était plus élevé chez ceux qui avaient eu un
■ Place de la prothèse plug ; en outre, quatre plug avaient dû être retirés en raison de
douleurs invalidantes [74].
L’étalement de la prothèse dans l’espace sous-péritonéal à la
Au contraire, une étude randomisée ayant comparé Lichtens-
face profonde du plan musculoaponévrotique, prôné par
tein, plug et PHS n’a pas démontré de différence significative
Stoppa [24], est le plus logique. En effet, dans cette situation, la
prothèse est appliquée contre la paroi par la pression intra- concernant la douleur et l’activité, 2 semaines, 3 mois et
abdominale. En outre, sa situation profonde la met à l’abri en 12 mois après intervention [69].
cas de complication septique superficielle. Elle n’entraîne
aucune induration perceptible des plans superficiels et elle siège
à distance des éléments nerveux qui cheminent dans le canal ■ Fixation de la prothèse
inguinal. En revanche, elle présente l’inconvénient d’être étalée
sur les vaisseaux iliaques et près de la vessie, ce qui peut être Les résultats d’au moins quatre études randomisées
source de difficultés en cas d’intervention ultérieure sur ces (845 patients), ayant comparé la voie vidéoassistée avec ou sans
organes ou sur la prostate [61-63]. fixation, semblent indiquer que la fixation n’est pas
La situation de la prothèse en avant du muscle oblique nécessaire [75-78]. En effet, il n’y a pas eu de différence en ce qui
interne dans le procédé de Lichtenstein est à première vue concernait les récidives ou le taux global de complications, mais
illogique, puisque la pression intra-abdominale tend à la séparer il y avait moins de douleur postopératoire et surtout une
de la paroi musculaire [64] . Les partisans de cette méthode réduction des coûts lorsqu’on ne faisait pas de fixation.
objectent que la plaque n’est pas en situation superficielle, mais Reconnues comme source potentielle de douleur chroni-
en position interstitielle, et que l’aponévrose oblique externe que [79], les agrafes doivent être posées avec précaution. Après le
contribue à l’appliquer sur le muscle oblique interne [65]. Après travail expérimental princeps de Katkhouda [80] , on assiste
Amid [39], au moins deux essais randomisés [66, 67] ont montré actuellement à une multiplication des études sur la fixation par
que la technique est facile à enseigner et à apprendre. Ces les colles biologiques.
avantages, combinés à un faible taux de récidives (avec les Au moins trois études contrôlées [81-83] pour la technique de
mêmes réserves que pour le Shouldice concernant les défauts de Lichtenstein et deux pour la vidéochirurgie [84, 85] ont rapporté
suivi complet), en font une des techniques les plus pratiquées des résultats en faveur de la colle concernant la sûreté, les
dans le monde actuellement. Dans une comparaison par méta- complications et le taux de récidives. Dans une comparaison
analyse des techniques de Lichtenstein aux réparations par historique [86], le taux de douleurs chroniques était statistique-
vidéoassistance [12], la récidive était deux fois plus probable pour ment plus élevé chez les patients opérés avec la colle (14,7 ver-
la seconde technique dans les mains de chirurgiens moyens (ces sus 4,5 % ; p = 0,037). En revanche, une étude cas-témoin [87],
résultats comportaient des résultats de chirurgiens « experts » ainsi qu’au moins une étude randomisée [84] ont montré que la
comme ceux provenant de chirurgiens « normaux », ce qui prévalence de douleur chronique était significativement plus
correspond à la réalité). élevée dans le groupe avec agrafes [79]. Pour Schwab et al. [87], la
Deux prothèses, le Perfix®-plug et le PHS® (Prolen Hernia sensation de corps étranger était moindre dans le groupe
System Ethicon®) comportent à la fois une composante sous- fibrine, mais la différence n’était pas significative. Dans aucune
péritonéale et une composante superficielle, ce qui leur confère des études citées l’utilisation des colles ne semble influer sur le
à la fois des avantages et des inconvénients. Il existe au moins taux de récidives.
■ Choix entre voies antérieure En outre, la majorité des spécialistes conseillent de mettre en
place une prothèse de grande taille, dépassant les limites de
et postérieure l’orifice myopectinéal [46, 47, 90-93], ce qui peut créer des difficul-
tés en cas de chirurgie urologique ou vasculaire ultérieure [61-63,
La voie antérieure par une incision inguinale est la plus simple, 94, 95]. Cette notion doit être prise en compte dans le choix d’un
elle est pratiquement la seule à être faisable sous anesthésie procédé, notamment chez l’homme d’un certain âge. Si l’on
locale et à offrir le choix entre réparation prothétique ou non. opte pour la voie sous-péritonéale, Cooperberg et al. [94]
La voie postérieure offre l’avantage de donner accès à l’ensem- suggèrent de ne pas placer la prothèse en dessous de la branche
ble des points de faiblesse de la paroi sans violer les plans pubienne, et d’utiliser, pour la cure bilatérale, deux prothèses
antérieurs et de permettre l’étalement d’une grande prothèse, séparées sur la ligne médiane laissée libre, plutôt qu’une grande
renforçant toute la zone faible inguinale et crurale. En cas de prévésicale.
récidive après abord antérieur, elle permettrait d’éviter les Pour les hernies de type II de Nyhus qui sont fréquentes, un
difficultés de dissection liées aux phénomènes cicatriciels. En large renforcement de la paroi n’est pas nécessaire et une large
revanche, elle ne peut être habituellement pratiquée que sous prothèse étalée sur les vaisseaux et la vessie constitue un moyen
anesthésie générale ou locorégionale. Parmi les voies postérieu- disproportionné par rapport à la lésion à traiter. Contrairement
res par abord traditionnel, la voie de Stoppa permet le traite- à la chirurgie endoscopique, la voie inguinale permet d’opter
ment en un temps des deux côtés, mais elle ne répond pas aux pour une réparation prothétique ou non selon le type de la
impératifs actuels de la chirurgie peu invasive. La voie de hernie.
Nyhus, moins délabrante, donne un jour plus limité et ne
permet de traiter qu’un côté à la fois.
Au total, la voie antérieure, plus simple et faisable sous Considérations économiques
anesthésie locale, est la plus répandue. La voie postérieure peut Le coût direct de la laparoscopie est plus élevé que celui de
être préférée en cas de récidive après voie antérieure ou en cas la chirurgie traditionnelle [33, 37, 96], essentiellement en raison de
de hernie bilatérale. Actuellement, la technique de Stoppa tend la durée d’intervention plus longue et de l’utilisation d’instru-
à être remplacée par la chirurgie endoscopique qui permet la ments à usage unique. Presque toutes les méta-analyses ont
même réparation prothétique par une voie d’abord moins montré que la cure de hernie par vidéochirurgie prend plus de
invasive. temps que la chirurgie traditionnelle (approximativement
Une technique consistant à placer la prothèse dans l’espace 16 minutes de plus que ce soit dans les études individuelles ou
sous-péritonéal par voie antérieure, à travers l’orifice herniaire, méta-analyses) [31, 34]. Si l’on multiplie ce chiffre par le nombre
grâce à un cerclage à mémoire de forme (prothèse Polysoft®), a de cures de hernies réalisées par chirurgie vidéoassistée aux
pour objectif d’associer les avantages de la prothèse sous- États-Unis en 2003 [49] , on voit que cela équivaut à 1 198
péritonéale et de l’incision inguinale traditionnelle, faisable sous journées de 24 heures de plus dans une année !
anesthésie locale ou locorégionale [88]. L’utilisation d’instruments restérilisables serait en théorie un
moyen de réduire le surcoût [97], mais peu de chirurgiens s’y
astreignent [41, 98]. En effet les instruments à usage unique ont
■ Choix entre chirurgie une meilleure précision, suppriment les frais liés à l’entretien et
à la stérilisation et minimisent le risque de transmission
traditionnelle et chirurgie iatrogène. Mais le coût de leur destruction n’est pas négligeable.
vidéoassistée Ce surcoût technique pourrait être compensé par une réduc-
tion du coût social grâce à une reprise d’activité plus rapide [99-
101], mais la démonstration en est difficile. En effet, près de la
Considérations médicales moitié des patients opérés de hernie ne sont plus en activité et
Selon la plupart des méta-analyses [11-14, 27-29, 33-35, 37, 87], la la reprise d’activité dépend plus du type de couverture
chirurgie vidéoassistée entraînerait moins de douleurs postopé- sociale [102] que de l’aptitude physique [33, 37, 49]. Vale et al. [37],
ratoires immédiates et permettrait une reprise d’activité plus en utilisant un modèle de coût-efficience selon Markov, qui
rapide que les techniques traditionnelles et notamment les permet d’inclure les coûts supplémentaires en temps d’opération
herniorraphies. Cependant, les résultats de ces méta-analyses et la perte de productivité en rapport avec les complications
méritent quelques commentaires et critiques. En effet, la graves, ont calculé qu’une cure sans tension traditionnelle
différence de douleur postopératoire en faveur de la chirurgie représentait un gain de 160 euros par rapport à la cure totale-
vidéoassistée par rapport au Shouldice était marginale et elle ment extrapéritonéale (TEP) et de 256 euros par rapport à la
n’était plus significative au-delà de 2 semaines après l’interven- transabdominale prépéritonéale (TAPP). Cependant une évalua-
tion [31]. En outre, comparée aux procédés sans tension par voie tion précise des coûts et du coût-efficacité ne peut se faire qu’au
ouverte, elle ne procure guère d’avantage concernant la douleur plan national car chaque pays a un système de coûts qui lui est
et permet une reprise des activités normales un peu plus rapide, propre [103]. En France, l’évaluation des coûts est compliquée car
mais avec une différence à peine significative au plan statisti- ce ne sont pas les mêmes organismes payeurs qui sont concer-
que [13] et pratiquement sans signification clinique. nés par les dépenses et les recettes. En outre, le mode de
Le taux global de récidives a été de 2,3 % dans les méta- tarification est différent pour les établissements publics et privés
analyses [31] et de 3 % dans les études individuelles ; les taux et est encore en remaniement.
pour la chirurgie vidéoassistée vont de 3,1 % à 4,9 %, jusqu’à
10,1 % [89]. Dans l’étude de Schmedt [11], comparant la techni-
que de Lichtenstein à la cure vidéoassistée, la récidive était deux
Indications spécifiques
fois plus probable après cette dernière. Que penser des avantages supposés de telle ou telle technique
Les taux de complications allaient, dans les études indivi- ou de telle ou telle voie d’abord [104, 105] selon qu’il s’agit d’une
duelles, de 25 % à 39 % pour la chirurgie vidéoassistée et de hernie récidivée ou bilatérale ?
30 % à 33 % pour les techniques conventionnelles [6, 89] alors Les problèmes principaux posés par la cure de hernie récidi-
que dans une méta-analyse [14], le taux de complications était de vée sont :
4,1 pour 1 000 interventions par chirurgie vidéoassistée compa- • le risque de nouvelle récidive, qui augmente avec le nombre
rées à 1,1 pour 1 000 avec la technique traditionnelle. Dans une de réparations précédentes [106], ce qui fait préférer la pro-
autre méta-analyse [11], il y avait moins de sepsis, d’hématomes thèse [107] ;
et de douleur chronique avec la chirurgie endoscopique qu’avec • la difficulté de dissection avec risque de lésions déférentielles
la technique de Lichtenstein. En revanche, celle-ci a été associée et nerveuses, ce qui a fait dire que la voie d’abord postérieure,
à moins de séromes. traditionnelle ou vidéoassistée, était meilleure en cas de
De plus, la chirurgie vidéoassistée ne permet pas aux patients récidive après cure primaire par voie antérieure [108].
de bénéficier des avantages de l’anesthésie locale et notamment Cependant, d’après la méta-analyse de McCormack [33], il
de la réduction du risque de complications générales et n’existe pas suffisamment de preuves pour soutenir ces deux
respiratoires. thèses, qui doivent donc rester à l’état de supposition.
Selon une étude récente du registre danois [109] ayant com- autre [65], quelle que soit sa progression sur la courbe d’appren-
paré 3 606 réparations consécutives par chirurgie vidéoassistée à tissage, ne se voit refuser le « droit » de pratiquer cette chirurgie.
39 537 réparations par la technique de Lichtenstein, la cure de La chirurgie endoscopique de la hernie étant plus difficile que
hernie bilatérale primitive par chirurgie vidéoassistée a été la chirurgie traditionnelle, sa maîtrise est plus longue à acqué-
associée à un taux de réinterventions supérieur (4,8 % versus rir [89, 126-128], sa courbe d’apprentissage varie de 30 à 300 inter-
3,0 % ; p = 0,017). L’étude coût-efficience de la EU Hernia ventions [34, 88, 89, 127] ; elle prend plus de temps à réaliser [122]
Trialists Collaboration [37] n’a pas démontré d’avantage à traiter et surtout elle expose à un risque plus élevé de complica-
les récidives par laparoscopie. Pour ajouter une note de confu- tions [92, 126, 128], dont certaines peuvent être graves (adhéren-
sion, certains auteurs préfèrent traiter les récidives après cure par ces), voire dramatiques (lésions vasculaires majeures, ou
chirurgie vidéoassistée par la voie d’abord TAPP [110, 111], mais viscérales) [3, 6, 28, 122].
on ne saurait recommander cette technique pour tout La variété anatomique des hernies est telle que l’application
chirurgien. d’une seule technique à tous les cas ne paraît pas adéquate. En
Au total, les bénéfices de la chirurgie vidéoassistée en matière pratique, il est malheureusement difficile de connaître le type
de hernie récidivée ou bilatérale sont probablement margi- précis de la hernie avant l’intervention car l’examen clinique
naux [3, 6] au risque de complications rares, mais gravissimes [6]. n’est pas assez fiable [129]. L’âge, la taille de la hernie et les
Cependant, pratiquée par des chirurgiens expérimentés, cette antécédents sont les meilleurs indicateurs.
méthode peut présenter un avantage pour les hernies relevant Pour les hernies de types I de Nyhus qui ne comportent pas
traditionnellement du procédé de Stoppa, à savoir les hernies de déficience de la paroi, nous pensons que la simple résection
volumineuses, récidivées et/ou bilatérales symptomatiques. Les du sac suffit. La hernie d’un adulte jeune et musclé a toutes les
résultats des études randomisées et méta-analyses futures se chances d’être de type Nyhus I ou II et est abordée de préfé-
focalisant sur ce sous-groupe de hernies devraient apporter une rence par voie antérieure, mais la cure par voie vidéoassistée a
réponse [12]. ses défenseurs. Pour les hernies de type II, on peut utiliser le
procédé de Marcy-Lytle, le plug ou le PHS, qui sont simples,
efficaces et peu douloureux [19, 22, 25].
■ Choix de l’anesthésie Chez le sujet âgé, il y a pratiquement toujours une faiblesse
de la paroi qu’il faut renforcer à l’aide d’une prothèse. Les
La cure de hernie peut se faire sous anesthésie générale,
hernies de type III comportent, à un degré variable, une
locorégionale ou locale.
faiblesse de la paroi postérieure du canal inguinal qui expose à
Les revues systématiques et méta-analyses disponibles [112-
114] donnent des résultats parfois contradictoires, en raison d’un un risque de récidive plus élevé [130] . Les techniques avec
prothèses sont de plus en plus largement utilisées et ont
biais dans la sélection des études analysées plus que dans la
supplanté la technique de Shouldice. Le chirurgien a le choix
méthodologie des méta-analyses [112]. Trois études comparatives
entre les procédés faisables par voie inguinale sous anesthésie
relativement anciennes ont montré que l’anesthésie locale
locale ou locorégionale : Lichtenstein, plug, PHS, Rives ou
donne moins de nausées, de vomissements et de céphalées que
Polysoft [131] ou la pose d’une prothèse rétropéritonéale par voie
l’anesthésie générale [115-118]. Ces résultats ont été confirmés par
de Nyhus ou par chirurgie vidéoassistée.
une méta-analyse récente [113], alors qu’une autre étude contrô-
En cas de hernie volumineuse, que celle-ci soit primaire ou
lée [118] n’a montré aucune différence significative en ce qui
récidivée, il faut prévoir la nécessité de renforcer la paroi par
concerne l’évolution clinique, les complications pariétales, les
une prothèse dans tous les cas.
scores de douleur, la sortie de l’hôpital ou le retour aux activités
Pour les hernies récidivées, le choix peut se fonder sur la
normales. L’anesthésie locorégionale donne plus de rétentions
taille de la hernie. Les hernies de petite taille correspondent en
d’urines [115], mais cet inconvénient peut être atténué par la
général à un defect limité de la paroi, orifice direct le plus
restriction hydrique. Trois études comparatives [115, 119, 120] et
souvent, parfois indirect ou crural ; un abord direct évitant la
une revue systématique [114] ont montré que l’anesthésie locale
dissection des éléments du cordon avec pose d’un plug dans
était le procédé qui perturbait le moins la fonction respiratoire,
l’orifice est une solution simple et peu agressive [21, 22]. En cas
alors que l’anesthésie locorégionale donnait des résultats moins
de large déficience, il est préférable de choisir une voie d’abord
bons que l’anesthésie locale et même, curieusement, que
différente de celle de la précédente intervention :
l’anesthésie générale. En outre, l’anesthésie locale contribue à
réduire le taux de complications générales [120] , la durée – voie postérieure pour éviter la dissection délicate des
d’hospitalisation [115, 116, 119, 121, 122] et la douleur postopéra- éléments du cordon si la réparation primaire était une voie
toire [9, 116, 120, 123]. antérieure (la laparoscopie trouve probablement ici sa meilleure
indication quand on en a la maîtrise) ;
Alors que l’anesthésie générale procure le plus grand confort
pour le chirurgien, un avantage indéniable des anesthésies – voie antérieure pour éviter les difficultés d’une nouvelle
locorégionale et locale est de permettre une évaluation dynami- dissection de l’espace rétropéritonéal en cas de récidive après
que des lésions et de la réparation. L’anesthésie locale, plus pose d’une prothèse par voie postérieure ; habituellement, un
difficile à maîtriser, est souvent proposée aux bronchitiques, aux defect limité dans une zone laissée à découvert par la prothèse
gros fumeurs et aux patients âgés à haut risque. Pour Kehlet, si du fait d’un mauvais positionnement.
l’on prend en compte les avantages de l’anesthésie locale, la Le plug ou le procédé de Lichtenstein permettent de fermer
cure laparoscopique de hernie inguinale devient une interven- facilement le defect pariétal par voie antérieure.
tion pratiquée contre toute évidence [124].
En cas d’anesthésie générale ou locorégionale l’infiltration
locale d’anesthésiques locaux soulage la douleur
■ Conclusion
postopératoire [125]. Le chirurgien a l’embarras du choix : les herniorrhaphies ont
leurs indications pour les hernies de petite taille et chez les
■ Indications opératoires jeunes ayant une bonne paroi. Pour les autres hernies, surtout
en cas de récidive, la prothèse posée soit par voie antérieure soit
schématiques par voie postérieure, mais alors volontiers vidéoassistée, est
conseillée. Pour les hernies récidivées, on doit préférer la voie
Comment se faire une opinion et établir un choix au vu des d’abord la plus facile et la moins dangereuse. Dans tous les cas,
différences considérables de résultats entre les nombreuses l’indication doit être discutée avec le patient. On peut s’aider de
études ? Il faut souligner, d’une part, que les taux de récidives ses préférences lorsqu’aucun autre argument n’est impérieux,
aux alentours de 1 % sont soit le fait de centres et de chirur- notamment en cas de hernie bilatérale, que le second côté soit
giens spécialisés [122], soit le résultat d’un suivi insuffisant [7] et, symptomatique ou pas. Si le chirurgien a également des préfé-
d’autre part, qu’un taux de complications dans l’expérience rences, qu’il contrôle ses propres résultats et les annonce aux
d’un chirurgien donné ne reflète pas la réalité de la chirurgie patients, si enfin il peut se rendre compte de ses dépenses, il
vidéoassistée à travers le monde aujourd’hui [49] où aucun doit faire la technique qui apporte les résultats escomptés par le
chirurgien, expérimenté ou pas, d’une génération ou d’une patient : le moins de douleur et de conséquences possibles, une
hospitalisation et une durée de soins la plus courte possible, et [25] Wantz GE. Experience with the tension-free hernioplasty for primary
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A. Fingerhut.
Centre hospitalier intercommunal, 10, rue Champ-Gaillard, 78303 Poissy, France.
É. Pélissier (pelissier.edouard@wanadoo.fr).
Institut de chirurgie herniaire, 50, rue Nicolo, 75016 Paris, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Fingerhut A., Pélissier É. Traitement chirurgical des hernies inguinales : choix d’un procédé. EMC (Elsevier
Masson SAS, Paris), Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-138, 2008.
Résumé. – Le traitement chirurgical des hernies de l’aine de l’enfant diffère considérablement de celui de
l’adulte en raison de particularités anatomiques et physiopathologiques notables. Il s’agit d’une intervention
très fréquemment pratiquée mais qui n’est pas banale en raison des risques gonadiques de la dissection du
pédicule spermatique. Indications, voie d’abord, principes et modalités de l’hernioraphie sont exposés, ainsi
que les particularités de traitement en cas de hernie étranglée, chez la fillette et chez le prématuré. Enfin, la
place des nouvelles techniques comme la cœliochirurgie est précisée, en tenant compte d’indications bien
ciblées.
© 2000 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Introduction au troisième mois de vie intra-utérine, alors que les gonades sont
encore en position rétropéritonéale. Entre le troisième mois de vie
intra-utérine et le terme, le testicule migre depuis sa position
Les hernies de l’aine de l’enfant sont des lésions congénitales
lombaire rétropéritonéale primitive jusque dans le scrotum du fait
résultant de la persistance anormale du canal péritonéovaginal
de la croissance rapide du plan postérieur et de la colonne
(CPV). De ce fait, elles sont le plus souvent obliques externes à
vertébrale. Le testicule est en fait « tracté » par le gubernaculum
travers une paroi musculaire normale, ce qui les oppose en tout
testis, structure ligamentaire s’étendant du testicule au fond du
point à celles de l’adulte. Ceci explique les différences de technique
scrotum. Ce ligament s’atrophie après le septième mois de vie intra-
chirurgicale et de pronostic : inutilité de la réfection pariétale le plus
utérine laissant ainsi perméable le canal inguinal qu’il a « calibré »
souvent chez le tout-petit, rareté de la récidive.
pour permettre la descente du testicule. Le CPV s’accole aux autres
Cependant, la pathologie du CPV est une pathologie faussement éléments du cordon spermatique et s’oblitère progressivement pour
banale. La hernie représente une pathologie à risque digestif et former un cordon unique et fibreux : le ligament de Cloquet. Cette
gonadique qui doit être prévenu par une chirurgie de principe dès oblitération est normalement terminée à la naissance mais peut
le diagnostic établi. s’achever dans les premiers mois de vie.
La herniotomie réglée est un geste simple mais spécialisé que l’on Le CPV passant dans le canal inguinal est une zone de faiblesse
peut pratiquer en ambulatoire dans le respect des règles dans la partie inférieure de la paroi abdominale. Sous l’effet de la
élémentaires de cette chirurgie. poussée abdominale, les viscères s’engagent dans le CPV non
oblitéré au niveau de l’orifice inguinal profond.
Avant l’âge de la marche, l’enfant restant couché, la pression
Considérations générales abdominale est essentiellement augmentée lors des cris, le CPV n’est
donc pas trop sollicité et peut se fermer spontanément dans les
premiers mois.
PHYSIOPATHOLOGIE : DÉVELOPPEMENT
DE LA PAROI ABDOMINALE ANTÉRIEURE À l’âge de la marche, deux éléments vont s’ajouter :
Les hernies inguinales congénitales sont liées à un défaut – la position debout qui provoque une surpression permanente de
d’oblitération du CPV. L’embryologie de ce canal permet d’en la partie inférieure de la paroi abdominale ;
comprendre la pathogénie. – un développement progressif de la paroi abdominale inférieure,
La cavité péritonéale du fœtus présente deux fossettes : les fossettes lié à la verticalisation, dont l’aspect le plus évident est l’ « ascen-
vaginales qui, du fait de l’hyperpression abdominale créée par le sion » de l’ombilic : la distance ombilic-xiphoïde, deux fois plus
développement rapide des organes intra-abdominaux, se grande que la distance ombilic-pubis (R = 2/1) chez le tout-petit,
transforment en deux diverticules qui traversent les régions devient égale à cette dernière chez l’enfant plus âgé (R = 1/1). Il est
inguinales en repoussant les différents plans musculo- souhaitable que le développement des muscles et du canal inguinal,
aponévrotiques. Ces diverticules se terminent dans les bourrelets qui en même temps s’allonge, puisse se faire normalement. Le
génitaux. Le processus péritonéovaginal est déjà en place « cylindre » du sac herniaire passant dans le canal empêche son bon
développement et explique en grande partie l’hypoplasie du tendon
conjoint, d’où l’intérêt de supprimer ce sac avant le développement
Hubert Lardy : Praticien hospitalier. de la paroi abdominale.
Michel Robert : Professeur des Universités, praticien hospitalier.
Service de chirurgie viscérale pédiatrique, hôpital Gatien de Clocheville, centre hospitalier universitaire de
Enfin, signalons que contrairement à l’adulte, l’orifice superficiel du
Tours, 49, boulevard Béranger, 37044 Tours, France. canal inguinal est très proche de la ligne médiane chez le petit
Toute référence à cet article doit porter la mention : Lardy H et Robert M. Traitement des hernies de l’aine chez l’enfant. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Techniques
chirurgicales — Appareil digestif, 40-125, 2000, 5 p.
40-125 Traitement des hernies de l’aine chez l’enfant Techniques chirurgicales
ÉPIDÉMIOLOGIE
Le canal ou processus péritonéovaginal est spontanément fermé à la
naissance dans 40 % des cas et dans 60 % des cas à la fin de la
première année de vie. Les hernies inguinales obliques externes
représentent 95 % des hernies inguinales de l’enfant et s’observent
de façon nettement majoritaire (90 %) chez le garçon. La fermeture
du CPV étant un processus évoluant jusque après la naissance, la
fréquence des hernies de l’aine est plus élevée chez les enfants
prématurés. Plus fréquentes du côté droit (60 %) que du côté gauche
(30 %), elles peuvent être bilatérales (15 %) [2]. De plus, en cas de
symptomatologie herniaire unilatérale, le CPV peut être perméable
du côté controlatéral dans 30 à 60 % des cas. Les hernies directes et
crurales sont rarissimes, ce qui pose le problème de leur diagnostic,
leur méconnaissance étant source éventuelle de récidive. Enfin, dans
5 % des cas, la hernie inguinale oblique externe du garçon peut être
associée à une cryptorchidie ou à une ectopie qu’il faudra traiter locorégional qui assure une analgésie postopératoire d’excellente
dans le même temps opératoire. Par ailleurs, la plupart des qualité, évitant tout recours à une prise d’antalgique supplémentaire.
cryptorchidies sont associées à un sac herniaire persistant. La Praticable en ambulatoire, elle nécessite avant la sortie de l’enfant
résection du CPV est donc un des temps de l’orchidopexie. une surveillance rigoureuse de la levée du bloc sensitivomoteur
(marche, diurèse).
INDICATIONS
Toute hernie dont la symptomatologie révélatrice est un épisode En décubitus dorsal, sans billot, l’enfant est examiné sous anesthésie
d’engouement herniaire doit conduire à la cure chirurgicale. Une de façon à vérifier la position des testicules et bien sûr le côté à
hernie constatée par les parents et/ou le médecin doit faire l’objet opérer. Lors de l’installation, on prend soin de dessiner au crayon le
d’une cure chirurgicale programmée chez l’enfant de plus de 6 mois. tracé de l’incision.
Avant cet âge, il faut mettre en balance le risque chirurgical
testiculaire et le risque d’étranglement herniaire en tenant compte
VOIE D’ABORD
bien sûr des conditions d’environnement et de l’angoisse parentale.
Les hernies des prématurés peuvent faire déroger à cette règle La herniotomie inguinale se pratique par une courte incision
attentiste, dans la mesure où elles sont symptomatiques horizontale dans le pli abdominal inférieur (fig 1). Cette incision
(bradycardies, cyanoses, difficultés alimentaires…), voire devant la s’arrête 1 cm en dehors de l’épine du pubis palpée au travers du
taille de ces hernies qui sont le plus souvent bilatérales. pannicule adipeux. Après incision du fascia superficialis épais et
bien individualisé chez l’enfant, l’orifice inguinal superficiel est
Les hernies de la fillette n’ayant aucune tendance à la fermeture
exposé à l’aide de deux écarteurs de Farabeuf (fig 2). La dissection
spontanée doivent faire l’objet d’une cure chirurgicale pour éviter
du sac herniaire jusqu’au niveau de l’orifice inguinal profond
tout risque d’extériorisation gonadique.
nécessite une ouverture du canal inguinal à partir de l’orifice
¶ Place de la chirurgie ambulatoire inguinal superficiel dans le sens des fibres du muscle grand oblique
(fig 3) ou comme dans la technique de Duhamel (abord sous-
La herniotomie inguinale de l’enfant est un geste chirurgical péritonéal sus-inguinal oblique respectant l’orifice inguinal
pouvant s’envisager en hospitalisation de jour, dans le respect superficiel) en ouvrant le grand oblique et en dissociant
évident des contre-indications d’ordre anesthésique (prématurité, transversalement les muscles petit oblique et transverse.
conditions de surveillance parentale…). Elle ne se conçoit qu’au sein
d’une équipe spécialisée et moyennant une information rigoureuse
des familles, tant sur le plan chirurgical qu’anesthésique. Pratiquée DISSECTION DU CORDON SPERMATIQUE
le plus souvent sous anesthésie locorégionale complémentaire d’une
Le cordon spermatique est disséqué tout d’abord dans sa globalité
légère anesthésie générale (caudale ou rachianesthésie), ces
sans chercher à en individualiser les éléments, puis présenté à l’aide
différentes techniques doivent être parfaitement maîtrisées par
d’une pince d’Ombrédanne ou d’un lac sans traction pour ne pas le
l’équipe et avoir fait l’objet d’une information claire et détaillée
léser. La branche génitale du nerf génitofémoral doit être
auprès des parents. Bref, ce n’est jamais « juste une hernie ! » [4].
soigneusement respectée pendant l’exposition du cordon.
Après incision de la fibreuse commune du cordon, le sac herniaire
Technique chirurgicale classique est repéré, pincé (fig 4) puis disséqué aux ciseaux en refoulant avec
douceur les éléments vasculonerveux du cordon et le canal déférent
ANESTHÉSIE (fig 5).
Elle peut être, soit exclusivement générale, soit idéalement Le canal déférent doit être parfaitement visualisé sans être disséqué
locorégionale après une légère anesthésie générale. Si les conditions pour ne pas risquer d’être lésé ; il a fréquemment un trajet en
requises sont respectées, une anesthésie caudale permet un bloc « boucle », ce qui doit être une préoccupation constante au long de
2
Techniques chirurgicales Traitement des hernies de l’aine chez l’enfant 40-125
3
40-125 Traitement des hernies de l’aine chez l’enfant Techniques chirurgicales
9 Fermeture cutanée à
6 Ligature proximale du sac herniaire. points séparés intradermi-
ques inversés.
[3]
HERNIES DU PRÉMATURÉ
L’intervention est idéalement conduite sous rachianesthésie pour
7 Vaginale testiculaire laissée ouverte. limiter les risques per- et postopératoires d’apnée et/ou de
bradycardie. Le principe opératoire est le même que la technique
décrite ci-dessus mais le risque gonadique d’une telle intervention
Le pansement idéal est un aérofilm imperméable, surtout chez le
est ici majoré par la taille des structures disséquées (risque
tout-petit. Un simple pansement sec est laissé en place pour
d’atrophie testiculaire). Il s’agit en fait d’un geste hautement
48 heures. Il n’y a pas de soin postopératoire particulier, les fils étant
spécialisé, tout particulièrement en cas de cryptorchidie associée. La
résorbables. Il faut proscrire les bains pendant une durée de 8 jours
petite taille des éléments du cordon et la brièveté de son trajet
et prévenir les parents de la possibilité d’un léger œdème scrotal
inguinal (10 à 13 mm à la naissance, 20 à 23 mm à 3 ans) rendent ce
pendant quelques jours.
temps délicat [5].
4
Techniques chirurgicales Traitement des hernies de l’aine chez l’enfant 40-125
TRAITEMENT DES HERNIES DE L’OVAIRE insuffisante du sac), soit par méconnaissance diagnostique (hernie
Chez la fille, la persistance du canal de Nuck est le support directe ou crurale), il devient logique d’en aborder le traitement par
anatomique de la hernie inguinale dont le contenu est en fait, dans une voie cœlioscopique qui a l’avantage de rectifier le diagnostic, de
la quasi-totalité des cas, représenté par l’ovaire. Lorsque l’ovaire est comprendre le processus de la récidive tout en évitant une dissection
présent dans le sac herniaire et palpable sous le pannicule adipeux, itérative du cordon particulièrement dangereuse en raison de la
sa viabilité est toujours menacée par une éventuelle strangulation. fibrose postopératoire.
Toute manœuvre de réduction est proscrite et l’indication opératoire Sa réalisation est simple moyennant le respect des règles
doit être portée pour en assurer la réintégration dans l’abdomen et élémentaires de toute chirurgie laparoscopique et des précautions
la fermeture du sac herniaire. d’installation qui en facilitent sa pratique. Chez l’enfant jusqu’à
La cure chirurgicale est conduite de façon identique par voie environ 6 ou 7 ans, il est possible de s’installer à la tête du patient
inguinale, à quelques différences près : le ligament rond est de façon à ce que l’opérateur puisse travailler dans l’axe des orifices
sectionné ; le sac herniaire est systématiquement ouvert pour faire herniaires (la colonne vidéo est alors installée aux pieds du patient).
face à une ectopie de la trompe ; dans ce cas, le sac est invaginé par
Le principe de la chirurgie laparoscopique est une incision circulaire
deux bourses successives pour réintégrer la trompe dans la cavité
du sac herniaire au niveau de l’orifice inguinal profond sous
péritonéale.
contrôle visuel permanent des structures funiculaires puis une
fermeture de la partie proximale du péritoine par une bourse ou un
CÔTÉ OPPOSÉ surjet noué en intracorporel. La partie distale du sac est laissée en
La cure bilatérale ne doit pas être systématique, sauf parfois chez le place comme dans la technique conventionnelle. On profite de cet
prématuré qui présente un risque anesthésique significatif. Dans la abord intrapéritonéal pour vérifier le côté opposé.
mesure où le côté opposé est asymptomatique, cette attitude sous-
entendrait un nombre important de vérifications inutiles (surtout à HERNIES BILATÉRALES
gauche) et bilatéraliserait le risque de traumatisme
vasculodéférentiel. En cas de certitude diagnostique ou de forte présomption de hernie
controlatérale, certaines équipes pratiquent un abord et un
traitement cœlioscopique selon le même principe. L’avantage est la
HERNIES DIRECTES possibilité de réaliser un geste bilatéral par une seule voie d’abord.
Leur traitement chirurgical consiste en une suture du fascia L’inconvénient est de pénétrer en intrapéritonéal mais ceci semble
transversalis derrière le cordon spermatique avec ou sans procédé plus d’ordre théorique. Il est encore trop tôt, en l’absence d’analyse
de Bassini abaissant le tendon conjoint sur l’arcade crurale. Par comparative, pour adopter une attitude définitive, néanmoins la
ailleurs, lorsqu’une intervention est pratiquée sur la foi de faisabilité d’une herniorraphie par voie laparoscopique est
l’interrogatoire et qu’aucun sac indirect n’est trouvé, un defect direct parfaitement démontrée.
doit être recherché par une exploration soigneuse de la paroi
postérieure du canal inguinal.
Conclusion
HERNIES CRURALES
Rarissimes, elles sont de diagnostic difficile [4]. Néanmoins, en cas de La herniotomie inguinale de l’enfant est une chirurgie faussement
herniotomie pour hernie inguinale indirecte, si le sac herniaire simple qui peut comporter, chez le garçon, un réel risque testiculaire. Ce
n’apparaît pas clairement lors de l’intervention, il faut savoir risque doit être accepté compte tenu de l’indication opératoire
évoquer ce diagnostic différentiel. Il faut signaler que ces hernies impérative et précoce mais il doit être prévenu essentiellement par une
crurales peuvent être la conséquence d’une cure de hernie inguinale chirurgie atraumatique en milieu spécialisé.
chez la fillette avec abaissement intempestif du tendon conjoint à
l’arcade crurale, ce qui fragilise l’orifice crural.
Elles peuvent être abordées, soit par voie inguinale, soit plutôt par
une incision basse puis une dissection du sac la plus complète
Références
possible au sein d’un lipome préherniaire souvent présent. Après
résection du sac, l’arcade crurale est abaissée au ligament de Cooper.
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par mauvaise technique chirurgicale (non-dissection ou dissection Fr Pédiatr 1985 ; 41 : 3-6
5
¶ 40-139
La hernie étranglée est une urgence chirurgicale. Le risque d’étranglement est dix fois plus élevé pour les
hernies crurales que pour les hernies inguinales. Le traitement de la hernie étranglée doit être effectué en
urgence, et comporte un premier temps viscéral consistant à libérer l’intestin hernié, apprécier sa viabilité
et éventuellement pratiquer sa résection. Le temps de réparation pariétale consiste habituellement en une
herniorraphie, en raison du risque septique.
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Plan 14 (88 %) sur les 16 qui ont nécessité une résection intestinale
avaient été opérés avec un délai de plus de 6 heures, versus 22
(26 %) seulement sur les 86 qui n’ont pas nécessité de résection
¶ Introduction 1
(p < 0,05 %) [3].
¶ Rappel physiopathologique 1
Mécanisme et lésions 1
Cas particuliers 2 ■ Rappel physiopathologique
¶ Traitement 2
Préparation 2 Mécanisme et lésions
Intervention 2
Cas particuliers 4 Le facteur déclenchant de l’étranglement est une forte
hyperpression abdominale, liée le plus souvent à l’effort : toux,
poussée abdominale intense, soulèvement d’un poids lourd.
■ Introduction L’intestin ou l’épiploon s’engage alors à travers le collet
herniaire.
Il convient de distinguer l’incarcération, qui correspond Dans les hernies inguinales, l’agent d’étranglement est le plus
simplement au caractère irréductible, de l’étranglement caracté- souvent le collet du sac péritonéal (Fig. 1), ce qui explique que
risé par la présence de signes de souffrance viscérale à un degré l’étranglement complique principalement les hernies inguinales
variable. Environ 30 % des hernies incarcérées sont des hernies indirectes. Le collet du sac est en effet plus serré et plus rigide
étranglées [1]. Le pourcentage de résections intestinales au cours que l’anneau de l’orifice inguinal profond. Dans les hernies
des interventions en urgence pour hernie incarcérée ou étran- crurales interviennent aussi bien le collet du sac que l’anneau
glée est d’environ 13 à 16 % [2, 3]. L’intervention en urgence est crural lui-même, qui est habituellement de petit calibre.
plus fréquente dans le sexe masculin que dans le sexe féminin,
mais le taux de résection intestinale est plus élevé chez la
femme [3], peut-être du fait de la plus grande fréquence de la
hernie crurale dans ce sexe. Le taux de résection intestinale est
plus élevé après 65 ans [3]. L’intervention en urgence est plus
fréquente pour la hernie crurale (de 35 à 38 %) que pour la
hernie inguinale (de 5 à 8 %) [3, 4]. Le taux de résection intesti-
nale est plus élevé pour la hernie inguinale indirecte que pour
la hernie inguinale directe, mais il n’est pas nul pour celle-ci :
sur 222 hernies inguinales opérées en urgence, 29 (13 %) étaient
des hernies directes, avec un orifice étroit dans 21 cas et une 1 2
résection intestinale a été nécessaire dans deux cas [1]. L’inter- 3
vention en urgence est encore grave de nos jours : selon le
registre suédois des hernies, la mortalité de la cure élective de
hernie de l’aine est comparable à celle de la population géné-
rale, alors qu’elle est multipliée par cinq à dix en cas d’inter-
vention en urgence et par 15 en cas de résection intestinale [4].
Ces chiffres plaident en faveur d’une pratique non restrictive de
la chirurgie élective.
Toute hernie suspecte d’étranglement doit être opérée sans
délai ; le risque de résection intestinale augmente au-delà de Figure 1. Hernie étranglée. 1. Collet du sac ; 2. pourtour de l’orifice
6 heures. Dans une cohorte de 102 patients opérés en urgence, inguinal profond ; 3. sillon d’étranglement.
Hernie crurale
Voie inguinale
Voie d’abord. On pratique une incision inguinale basse,
parallèle et un peu au-dessus du pli de l’aine. Après division du
plan sous-cutané, on découvre l’aponévrose de l’oblique
externe, que l’on incise dans le sens de ses fibres à partir de
l’orifice inguinal superficiel. On se porte alors sur la saillie de la
hernie, au-dessous de l’arcade crurale. On incise le fascia
cribriformis pour découvrir le sac herniaire dont on fait le tour
par dissection mousse. On se porte alors à nouveau au plan
inguinal. Après avoir récliné le cordon ou le ligament rond, on
découvre le fascia transversalis que l’on incise de l’orifice
inguinal profond à l’épine du pubis. Par dissection mousse du
Figure 5. Traitement de la hernie inguinale étranglée : kélotomie. tissu sous-péritonéal, on découvre le ligament de Cooper et le
versant abdominal du sac.
Kélotomie. On incise transversalement le versant abdominal
du sac herniaire par voie inguinale, de façon à accéder au
segment d’intestin ou d’épiploon non hernié. On se reporte
alors au plan crural pour ouvrir le sac. L’ouverture à ce niveau
doit se faire progressivement et prudemment. Le sac est épais ;
on l’incise par petites touches successives au bistouri, jusqu’à
observer l’écoulement d’un peu de liquide intrasacculaire. On
découvre alors le contenu hernié qui n’est pas toujours facile à
distinguer des parois du sac.
La kélotomie proprement dite se fait de préférence à l’angle
interne de l’anneau crural : d’une main on maintient le sac à
l’aide d’un doigt appuyé, de l’autre main on incise prudemment
le ligament de Gimbernat et le collet du sac, de la pointe des
ciseaux de Metzenbaum (Fig. 7). Il est préférable d’éviter de
sectionner l’arcade crurale. Il ne faut évidemment pas inciser
latéralement en regard de la veine fémorale.
Temps viscéral. Après kélotomie, il est facile de réduire le
Figure 6. Traitement de la hernie inguinale étranglée : inspection de contenu dans l’abdomen et de l’extérioriser par l’incision
l’anse. 1. Sillon d’étranglement. pratiquée précédemment au niveau du sac. Le traitement se fait
alors comme pour la hernie inguinale.
Temps de réparation. Pour cette voie d’abord, le procédé de
contenu du sac. Il faut prendre garde de ne pas laisser filer le réparation de McVay est le plus adapté (cf. Fascicule 40-110 :
contenu dans l’abdomen. Si cela se produit, plutôt que de Traitement chirurgical des hernies inguinales par voie
pratiquer une laparotomie, on peut essayer de récupérer l’intes- inguinale).
tin à travers l’orifice herniaire, puis le dérouler jusqu’à retrouver
l’anse concernée. On a également proposé d’introduire un Voie crurale
cœlioscope dans le collet du sac, d’assurer l’étanchéité par une L’incision inguinale basse est peu différente de la précédente.
ligature, de créer un pneumopéritoine, d’inspecter l’anse L’incision verticale sur la saillie de la hernie, perpendiculaire au
intestinale et si besoin de la récupérer à l’aide d’un ou deux pli de flexion, est à éviter, car elle expose à une bride cicatri-
trocarts [7]. cielle. Après effondrement du fascia cribriformis, on découvre le
Traitement du contenu. S’il s’agit d’épiploon infarci, la sac herniaire. On procède alors à l’ouverture du sac, puis à la
résection est pratiquée sans hésiter. S’il s’agit d’intestin, l’anse kélotomie comme précédemment, en s’efforçant de maintenir le
intestinale est extériorisée largement en zone saine et observée contenu en place.
attentivement, ainsi que son mésentère (Fig. 6). Si l’anse est En cas d’épiplocèle, la résection de l’épiploon et du sac est
simplement rouge, œdématiée, congestive, les lésions sont aisée. La réparation peut se faire par suture de l’arcade crurale
probablement réversibles. Il faut arroser au sérum physiologique au Cooper ou à l’aponévrose du pectiné, selon le procédé de
1
2 3
Cas particuliers
Vidéochirurgie
Le traitement des hernies de l’aine étranglées par vidéochi-
rurgie, voie transabdominale prépéritonéale (TAPP) ou voie
totalement extrapéritonéale (TEP) n’est pas couramment
pratiqué, mais quelques séries de hernies étranglées ou incarcé-
rées ont été publiées par des experts [8-11]. La technique est plus
difficile qu’en chirurgie programmée. Elle nécessite une bonne
maîtrise de la méthode et ne saurait être conseillée aux débu-
tants. Une bonne expérience en chirurgie réglée est indispensa-
ble avant d’opérer les urgences, une centaine de cas selon
Saggar et al. [11]. Elle pose en outre deux problèmes particuliers.
Elle implique la nécessité d’une anesthésie générale, alors que
l’étranglement concerne préférentiellement des sujets âgés.
Elle implique l’usage systématique d’une prothèse, avec un
risque septique en cas de lésions avancées. Dans l’expérience
d’une équipe expérimentée [8], sur 16 hernies étranglées, 11 ont Figure 9. Traitement du phlegmon herniaire. L’anse étranglée réséquée
été opérées par TEP, trois ont dû être converties et sur les huit est encore en place. Le rétablissement de continuité intestinale par suture
réussies en TEP il y a eu un sepsis de paroi. Elle est contre- terminoterminale est effectué.
indiquée si on suspecte des lésions potentiellement septiques.
intestinale en tissu sain après avoir oblitéré chaque extrémité
Phlegmon herniaire distale par une rangée d’agrafes ou une grosse ligature. On
Si le contenu pyostercoral du sac et l’intestin nécrosé et rétablit la continuité intestinale (Fig. 9).
perforé sont découverts après abord direct de la hernie, on peut Après fermeture de la laparotomie, on se porte à la hernie.
procéder à la résection intestinale par cette voie et effectuer une Par une incision inguinale ou crurale, on ouvre le sac, on retire
toilette très soigneuse du champ opératoire à la Bétadine® en l’anse sphacélée, on procède à la résection du sac puis au lavage
évitant au maximum tout écoulement vers la cavité péritonéale. soigneux à la Bétadine ® avant de procéder à la réparation
Si le phlegmon herniaire est suspecté cliniquement sur pariétale par suture (Fig. 10). Un drainage du plan sous-cutané
l’ancienneté des premiers signes d’étranglement, l’existence est indiqué. La réparation prothétique est proscrite.
d’un syndrome infectieux, l’aspect inflammatoire, rouge,
œdématié, infiltré du scrotum ou des grandes lèvres, on peut Prothèses et hernie étranglée
opter pour une laparotomie première. Par laparotomie médiane, En principe, l’usage des prothèses est à proscrire pour le
on découvre les anses afférente et efférente sans chercher à traitement des hernies étranglées en raison du risque septique.
libérer l’anse herniée (Fig. 8). On pratique une résection Cependant, en cas de volumineuse hernie comportant une large
■ Références
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résection intestinale. Ils n’ont observé qu’un abcès superficiel et [10] Leibl BJ, Schnedt CG, Kraft K, Kraft B, Bittner R. Laparoscopic
un abcès profond qui ont guéri par traitement local et antibio- transperitoneal hernia repair of incarcerated hernias: is it feasible?
thérapie. Aucune prothèse n’a dû être retirée et aucune suppu- Results of a prospective study. Surg Endosc 2001;15:1179-83.
ration tardive n’a été observée. Dans la série d’Amiens [13], sur [11] Saggar VR, Sarangi R. Endoscopic totally extraperitoneal repair of
32 pièces de Mersilène® et 15 plugs, il n’y a eu qu’un abcès, qui incarcerated inguinal hernia. Hernia 2005;9:120-4.
[12] Pans A, Desaive C, Jacquet N. Use of a preperitoneal prosthesis for
a guéri. Dans la série de Reims [14], sur 30 prothèses de Mersi-
strangulated groin hernia. Br J Surg 1997;84:310-2.
lène®, il n’y a eu aucune complication septique. Des séries plus
[13] Henry V, Randriamanantsoa V, Verhaeghe P, Stoppa R. Le matériel
récentes ont donné des résultats comparables [15-17].
prothétique a-t-il une place raisonnable dans le traitement des urgences
Par conséquent, la contre-indication à l’usage des prothèses
herniaires? Chirurgie 1995;120:123-8.
en urgence n’est pas absolue. Néanmoins, il ne faut y recourir [14] Palot JP, Flament JB, Avisse C, Greffier D, Burde A. Utilisation des
que de façon exceptionnelle, dans les cas où la prothèse est prothèses dans les conditions de la chirurgie d’urgence. Chirurgie 1996;
vraiment nécessaire du fait de la grande taille du defect pariétal. 121:48-50.
L’indication doit rester raisonnable et la prothèse ne doit pas [15] Campanelli G, Nicolosi FM, Pettinari D, Avesani EC. Prosthetic repair,
être posée dans les cas où il y a du pus (phlegmon pyostercoral) intestinal resection and potentially contaminated areas: safe and
ou lorsque le contenu du sac est très louche, en cas de nécrose feasible? Hernia 2004;8:190-2.
et d’intervention tardive. Si l’on opte pour la pose d’une [16] Vix J, Meyer C, Rohr S, Bourtoul C. The treatment of incisional and
prothèse, il faut s’entourer de précautions draconiennes : faire abdominal hernia with a prosthesis in potentially infected tissues: a
un prélèvement bactériologique du liquide intrasacculaire pour series of 47 cases. Hernia 1997;1:157-61.
disposer éventuellement d’un antibiogramme en cas d’infection [17] Wysocki A, Pozniczek M, Krzywon J, Bolt L. Use of polypropylene
postopératoire, limiter au minimum les souillures, protéger la prostheses for strangulated and incisional hernias. Hernia 2001;5:
paroi par des champs imbibés de Bétadine® pendant le temps 105-6.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Pélissier E., Ngo P. Traitement des hernies de l’aine étranglées. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris),
Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-139, 2007.
Mots-clés : hernie inguinale, hernie crurale, hernie étranglée, chirurgie, herniorraphie, plasties prothétiques.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Pélissier E, Marre P et Damas JM. Traitement des hernies inguinales. Choix d’un procédé. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits
réservés), Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-138, 2000, 4 p.
40-138 Traitement des hernies inguinales. Choix d’un procédé Techniques chirurgicales
structurelles du collagène (cf « Anatomie des hernies de l’aine »). Le Place de la prothèse
rapprochement de structures anatomiques telles que le tendon du
petit oblique ou du transverse et l’arcade crurale, qui peuvent être L’étalement de la prothèse dans l’espace sous-péritonéal à la face
éloignées de plusieurs centimètres, se fait sous une tension qui peut profonde du plan musculoaponévrotique, prôné par Stoppa et par
entraîner la déchirure des tissus. Doran et Lonsdale [14] ont montré Rives, est le plus logique. En effet, dans cette situation, la prothèse
par des radiographies que des repères métalliques placés sur le est appliquée contre la paroi par la pression intra-abdominale. En
conjoint et l’arcade crurale au cours de la technique de Bassini se outre, sa situation profonde la met à l’abri en cas de complication
trouvaient dans certains cas écartés l’un de l’autre dans les mois qui septique superficielle. Elle n’entraîne aucune induration perceptible
suivent. Dans la pratique, les résultats plaident en faveur des des plans superficiels et elle siège à distance des éléments nerveux
procédés prothétiques qui donnent un taux de récidives faible : 1,5 % qui cheminent dans le canal inguinal. En contrepartie, elle présente
pour la technique de Stoppa [34, 55], 1,6 % pour celle de Rives [5], moins l’inconvénient d’être étalée sur les vaisseaux iliaques et la vessie, ce
de 1 % pour celle de Lichtenstein [2, 24, 51] et les plugs [16, 47, 48, 58]. Une qui peut être source de difficultés en cas d’intervention ultérieure
étude randomisée incluant 717 cures de hernies a montré qu’il y a sur ces organes. Actuellement Stoppa conseille de la réserver aux
moins de récidives avec la technique de Lichtenstein qu’avec celle hernies à haut risque de récidive et d’en exclure les patients
de Shouldice [36]. En outre, l’absence de tension que procure la souffrant d’hypertrophie prostatique, de polypose vésicale, ayant
prothèse contribue à réduire la douleur postopératoire [3, 46, 48]. une élévation du prostate specific antigen (PSA) ou atteints
d’athéromatose ou d’anévrisme aorto-iliaque [56].
La prévention vis-à-vis des prothèses concerne le risque septique et
la tolérance à long terme, notamment chez les sujets jeunes. En La situation de la prothèse en avant du petit oblique dans le procédé
réalité, la tolérance est bonne. Le risque de sepsis est faible : sur dix de Lichtenstein est à première vue illogique puisque la pression
études totalisant 22 916 cas, le taux de sepsis a varié de 0 à 0,94 % intra-abdominale tend à la séparer de la paroi musculaire [39]. Les
dans huit séries et n’a dépassé 1 % que dans deux [13]. La tolérance à partisans de cette méthode objectent que la plaque n’est pas en
situation superficielle mais interstitielle, et que l’aponévrose du
l’infection serait meilleure pour les prothèses dont les mailles
grand oblique contribue à l’appliquer sur le petit oblique [52].
laissent des orifices de plus de 75 µm et sont faites de monofilament.
Les prothèses microporeuses qui comportent des pores de moins de
10 µm et les prothèses à mailles larges mais faites de multifilaments
tressés présentent des interstices qui constituent des niches pour les
Choix entre chirurgies traditionnelle
microbes, dans lesquelles les macrophages et les granulocytes, qui et laparoscopique
font plus de 10 µm, ne peuvent pénétrer [1, 18].
Le choix repose essentiellement sur l’âge du patient et le type de la La chirurgie vidéoassistée entraîne moins de douleur postopératoire
et permet une reprise d’activité plus rapide que le procédé de
hernie. Les hernies directes ou mixtes (Nyhus type III) ont un risque
Stoppa traditionnel [10]. En revanche, l’avantage que l’on peut en
de récidives plus élevé en raison de la faiblesse des tissus [38, 45] qui
attendre par rapport à la voie d’abord antérieure est modeste, cette
justifie la pose d’une prothèse. D’après le registre des hernies de
voie étant déjà peu invasive. Une étude randomisée a montré que la
Suède, le taux de prothèses est passé de 7 % en 1992 à 51 % en
réponse métabolique après laparoscopie et technique de Shouldice
1996 [38].
était modérée et comparable dans les deux cas [49].
La question est de savoir s’il faut respecter une limite d’âge. L’âge Pour démontrer de façon claire une différence minime, les études
de 30 ou 40 ans est souvent cité dans les discussions, mais à notre randomisées devraient inclure un grand nombre de cas. Or, la
connaissance il n’y a pas d’études permettant de trancher. En majorité d’entre elles ne comportent que peu de cas [21, 28, 32, 41, 43, 50, 54],
pratique, s’il paraît sage de ne pas poser de prothèse chez un sujet à l’exception de celle de Liem et al [31]. Une méta-analyse portant sur
jeune porteur d’une hernie indirecte avec une bonne paroi, en 14 essais randomisés ayant inclus 2 471 patients a montré que la
revanche, il n’y a pas de raison fondée de refuser la solidité d’une cure de hernie par vidéochirurgie prend plus de temps que la
réparation prothétique à un homme jeune mais ayant un fascia chirurgie traditionnelle et donne les mêmes résultats concernant le
faible, ou à un travailleur de force. taux de récidive précoce. La vidéochirurgie entraîne un niveau de
douleur postopératoire moindre et autorise une reprise d’activité
plus rapide que les procédés de herniorraphie traditionnelle. En
Choix entre voies antérieure revanche, comparée aux procédés sans tension, elle ne procure pas
d’avantage concernant la douleur, elle permet une reprise d’activité
et postérieure un peu plus rapide, mais avec une différence à peine significative [12].
La chirurgie endoscopique de la hernie est plus difficile que la
La voie antérieure par une incision inguinale est la plus simple et elle chirurgie traditionnelle et sa maîtrise est plus longue à acquérir [7].
est pratiquement la seule faisable sous anesthésie locale. De ce fait, elle expose à un risque plus élevé de complications. De ce
La voie postérieure offre l’avantage de donner accès à l’ensemble des point de vue, l’article de Leroy et Barthélémy [30] est exemplaire :
points de faiblesse de la paroi et de permettre l’étalement d’une dans les mains de chirurgiens ayant une grande pratique de la
grande prothèse renforçant toute la zone faible inguinale et crurale. chirurgie laparoscopique et une expérience considérable de la cure
En cas de récidive après abord antérieur, elle permet d’éviter les laparoscopique de hernie, le taux des complications, colligées avec
difficultés de dissection liées aux phénomènes cicatriciels. En rigueur et honnêteté, est élevé. Dans une enquête réalisée auprès de
revanche, elle ne peut être habituellement pratiquée que sous 13 équipes chirurgicales françaises entraînées à la chirurgie
anesthésie générale ou locorégionale. laparoscopique, portant sur 16 177 cas, on a relevé cinq décès
(0,03 %), trois plaies des gros vaisseaux (0,02 %), sept plaies
La voie de Stoppa permet le traitement en un temps des deux côtés, intestinales (0,05 %), 25 plaies du tractus urogénital (0,2 %),
mais elle ne répond pas aux impératifs actuels de la chirurgie peu 15 occlusions intestinales (0,22 %) et 35 récidives immédiates
invasive. La voie de Nyhus, moins délabrante, donne un jour plus (0,28 %) [ 1 5 ] . Dans certaines séries, le taux de récidives est
limité et ne permet de traiter qu’un côté à la fois. anormalement élevé [8, 27]. D’autre part, la chirurgie laparoscopique
Au total, la voie antérieure plus simple et faisable sous anesthésie ne permet pas aux patients de bénéficier des avantages de
locale est la plus répandue. La voie postérieure peut être préférée en l’anesthésie locale et notamment de la réduction du risque de
cas de récidive après voie antérieure ou en cas de grosse hernie complications générales et respiratoires.
bilatérale. Actuellement, elle est concurrencée par la chirurgie Par ailleurs, la majorité des spécialistes conseillent de mettre en
vidéoassistée qui permet la même réparation prothétique par une place une prothèse de grande taille, dépassant les limites de l’orifice
voie d’abord moins invasive. myopectinéal [4, 19, 30, 35], ce qui peut créer des difficultés en cas de
2
Techniques chirurgicales Traitement des hernies inguinales. Choix d’un procédé 40-138
chirurgie urologique ou vasculaire ultérieure [56]. Or, pour les hernies utilisées. Le chirurgien a le choix entre procédé de Lichtenstein ou
de type II de Nyhus qui sont les plus fréquentes, un large de Rives par voie inguinale ou la pose d’une prothèse
renforcement de la paroi n’est pas nécessaire et une large prothèse rétropéritonéale par voie de Nyhus ou par vidéochirurgie.
étalée sur les vaisseaux et la vessie constitue un moyen
Pour les hernies récidivées, on peut distinguer, d’une part les hernies
disproportionné par rapport à la lésion à traiter.
de petite taille qui correspondent en général à un defect limité
Le coût direct de la laparoscopie est plus élevé que celui de la circulaire de la paroi : orifice direct le plus souvent, parfois indirect
chirurgie traditionnelle [6, 28, 31, 41, 59]. Ce surcoût technique pourrait ou crural, et d’autre part les larges déficiences de la paroi. Dans le
être compensé par une réduction du coût social, grâce à une reprise premier cas, un abord limité évitant la dissection des éléments du
d’activité plus rapide [21, 23, 31], mais près de la moitié des patients cordon avec pose d’un plug dans l’orifice est une solution simple et
opérés de hernie ne sont plus en activité.
peu agressive [47, 48]. Dans le deuxième cas, il est préférable de choisir
Au total, le bénéfice de la laparoscopie en matière de hernie est une voie d’abord différente de celle de la précédente intervention.
probablement modeste. Cependant, pratiquée par des chirurgiens La voie postérieure présente l’avantage d’éviter la dissection délicate
expérimentés, cette méthode peut présenter un avantage pour les des éléments du cordon et de permettre le renforcement de toute la
hernies relevant traditionnellement du procédé de Stoppa, à savoir zone de faiblesse par une large prothèse étalée dans l’espace
les hernies volumineuses, récidivées, bilatérales. Les études prépéritonéal. La laparoscopie trouve probablement ici sa meilleure
randomisées devraient se focaliser sur ce sous-groupe de hernies [12]. indication.
En cas de récidive après pose d’une prothèse par voie postérieure,
Indications opératoires schématiques celle-ci correspond habituellement à un defect limité, dans une zone
laissée à découvert par la prothèse du fait d’un mauvais
La variété anatomique des hernies est telle que l’application d’une positionnement. La voie d’abord antérieure évite les difficultés d’une
seule technique à tous les cas ne paraît pas adéquate. nouvelle dissection de l’espace rétropéritonéal. Le plug ou le procédé
Pour les hernies de types I et II de Nyhus qui ne comportent pas de de Lichtenstein permettent de fermer facilement le defect pariétal.
déficience de la paroi, nous pensons comme Nyhus [40] que le En pratique, il est malheureusement difficile de connaître le type de
procédé de Shouldice qui implique l’incision d’un fascia solide avant la hernie avant l’intervention car l’examen clinique n’est pas assez
de le réparer n’est pas logique. La simple résection du sac suffit pour fiable. L’âge, la taille de la hernie et les antécédents sont les meilleurs
les hernies de type I du jeune adulte musclé. Pour les hernies de indicateurs. La hernie d’un adulte jeune et musclé a toutes les
type II, les procédés de plug sont simples, efficaces et peu chances d’être de type Nyhus I ou II et est abordée de préférence
douloureux [16, 17, 48, 58]. par voie antérieure. Chez le sujet âgé au contraire, il y a
Les hernies de type III comportent, à un degré variable, une faiblesse pratiquement toujours une faiblesse de la paroi qui bénéficie au
de la paroi postérieure du canal inguinal qui expose à un risque de mieux d’une prothèse. En cas de hernie volumineuse, primaire ou
récidive plus élevé [45] . Le Shouldice demeure le procédé de récidivée, il faut prévoir la nécessité de renforcer la paroi par une
référence, néanmoins les prothèses sont de plus en plus largement prothèse dans tous les cas.
Références ➤
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40-138 Traitement des hernies inguinales. Choix d’un procédé Techniques chirurgicales
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4
¶ 40-137-A
Le traitement laparoscopique des hernies de l’aine par voie totalement extrapéritonéale (TEP) consiste en
la mise en place d’une prothèse de grande taille en situation postérieure par accès direct de l’espace
extrapéritonéal. Les indications sont représentées par la totalité des hernies de l’aine. Les hernies
étranglées et les antécédents de chirurgie prépéritonéale demandent un autre abord. La technique est
aujourd’hui parfaitement standardisée. La récidive est exceptionnelle entre les mains d’un opérateur
entraîné. La qualité du résultat obtenu permet la chirurgie ambulatoire avec reprise très précoce de
l’ensemble des activités antérieures.
© 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
1
■ Technique
Matériel (Fig. 1)
Il est constitué de :
• 2 trocarts de 10 mm, si possible transparents ;
• 1 trocart de 5 mm ;
• 1 optique de 30° de préférence à une optique à 0° ;
• 2 pinces préhensives atraumatiques de 5 mm ;
• 1 paire de ciseaux dissecteurs, si possible avec coagulation 2
monopolaire ;
• 1 pince de coagulation bipolaire ;
• 1 porte-aiguille endoscopique de 5 mm ;
• 1 agrafeuse de 5 ou 10 m ;
3 7
• 1 système d’aspiration-lavage à disposition ;
• 1 insufflateur électronique à haut débit ; 4
• 1 source de lumière froide au xénon ;
• 1 caméra endoscopique ;
• 1 moniteur haute-définition ; 5
• éventuellement un système d’imagerie si possible numérique.
6
Installation du patient (Fig. 2)
L’intervention est réalisée sous anesthésie générale. L’anes-
thésie péridurale ne doit être envisagée que sur contre-
indication absolue d’une anesthésie générale [5]. En effet, une
ouverture péritonéale accidentelle impose une anesthésie
générale complémentaire.
Le malade est en décubitus dorsal, les deux bras le long du A
corps. L’opérateur se positionne du côté opposé à la hernie.
L’assistant est en face. La colonne vidéo est aux pieds du
patient, la table est en position de Trendelenburg.
1
A
C
A
M T
1
3
2
1
2
3
4
Figure 3. Position des trocarts, hernie inguinale droite. 1. Trocart de 5
10 mm T1 ; 2. trocart de 5 mm T2 ; 3. trocart de 10 mm T3. 6
Hernie directe
Le sac est aisément repéré en dedans du pédicule épigastrique
et des éléments du cordon. Il est facilement séparé par simple
traction du fascia transversalis distendu. Le retournement de ce
1 2 3 4 5 B fascia et sa fixation au plan du ligament de Cooper ou à la face
postérieure du muscle droit évitent la formation d’un sérome
résiduel. Pour réaliser ce geste une pince introduite en
T2 retourne et maintient le fascia transversalis alors qu’une
agrafeuse en T3 le fixe sur les éléments anatomiques précités.
Hernie bilatérale
T3 La dissection est réalisée d’emblée avec les instruments placés
sur les trocarts T2 et T3 du dedans vers le dehors selon la
technique précédemment décrite.
Hernies fémorales
Elles sont disséquées de la même manière en prêtant une
attention particulière à l’axe de la veine artère fémorale situé
en-dehors du sac.
Nous défendons la mise en place d’une prothèse fendue qui
sera positionnée autour du cordon. Pour cette raison, la face
postérieure de celui-ci doit être séparée de l’axe vasculaire
fémoral, de l’orifice inguinal profond jusqu’au croisement du
C
canal déférent et du ligament de Cooper.
Figure 6. Hernie inguinale droite. En fin de dissection sont identifiés de dedans en dehors :
A. Dissection de l’espace extrapéritonéal : exposition du ligament de • la symphyse pubienne ;
Cooper. T2 : ciseaux coagulateurs. • le ligament de Cooper ;
B. Dissection de l’espace extrapéritonéal : exposition des différents élé- • le fascia transversalis distendu en cas de hernie directe ;
ments anatomiques. 1. Gaine postérieure du droit ; 2. linea arcuata ; 3. sac • l’orifice fémoral ;
péritonéal ; 4. pédicule épigastrique ; 5. orifice inguinal interne. • le pédicule épigastrique ;
C. Mise en place du trocart T3. • l’orifice inguinal profond et le cordon spermatique ;
• la bandelette iléopubienne ;
• le plan du muscle psoas ;
prothèse avec les éléments nerveux (grand nerf latéral de la • la face interne du muscle transverse.
cuisse, nerf génitofémoral).
La dissection est ensuite menée vers le haut au-dessus de Préparation de la prothèse (Fig. 8)
l’épine iliaque antérosupérieure jusqu’au point de rencontre de
la ligne ombilicale avec la ligne axillaire moyenne. Elle nécessite La distance moyenne entre la symphyse pubienne et l’épine
la plupart du temps la section de l’insertion de la gaine iliaque antérosupérieure est de 11 cm. La longueur de la
postérieure du droit sur le plan du transverse au niveau de prothèse doit donc être de 14 cm environ, sa hauteur maximale
l’arcade de Douglas. est de 12 cm.
Verticalement, elle est placée en bas sur la symphyse
pubienne, couvre le Cooper et va au maximum jusqu’au
Mise en place du trocart T3
foramen obturateur. En haut, elle atteint l’arcade de Douglas.
L’incision cutanée est située au croisement de la ligne Le matériau doit avoir une adaptabilité en rapport avec son
ombilicale et de la ligne axillaire moyenne, un trocart de grammage métrique et une mémoire de forme suffisante pour
10 mm traverse la paroi en direction de l’orifice inguinal une mise en place aisée.
profond pour arriver sous contrôle visuel à la partie haute de La découpe de la prothèse est adaptée à l’anatomie, plus
l’espace anatomique disséqué précédemment. haute en dedans pour couvrir le Cooper, moins en dehors au
7 cm
A B
T3 12 cm
T2
A
14 cm
Figure 8. Prothèse. Découpe pour côté droit. A : Interne ; B : externe.
T2
T3
T3
T2
B
Figure 9. Introduction de la prothèse, hernie inguinale droite.
T2 T2
T1
T1
Figure 10. Fixation de la prothèse, hernie inguinale droite. Figure 11. Fixation au ligament de Cooper du renfort prothétique par
agrafage, hernie inguinale droite.
• si la prothèse n’est pas fixée ; Sinon, une simple suture de la brèche avec mise en place des
• si elle est fixée par encollage ou à l’aide d’un système de écarteurs de Chigot suivie d’un replacement de T1 en bonne
fixation de 5 mm de diamètre. position peut suffire pour la poursuite de la procédure.
La prothèse est introduite par le trocart T1 de 10 mm et L’ouverture péritonéale lors de la dissection du pédicule et/ou
poussée dans l’espace extrapéritonéal pour y être positionnée. de la fosse iliaque droite peut conduire à une suture ou la mise
en place d’un Endoloop®. Le bon déroulement de la procédure
Variétés de hernies n’est pas stoppé par une telle brèche. En effet, la pression de
CO2 médical en intrapéritonéal est identique à celle qui règne
On a vu précédemment que les volumineuses hernies ingui- en extrapéritonéal. Aussi, le péritoine (à la manière d’un
noscrotales de type Nyhus 3 b peuvent poser des problèmes de tympan) se place verticalement, mais l’espace extrapéritonéal
dissection en voie totalement extrapéritonéale. Dans ce cas, le disséqué est respecté, autorisant la poursuite du geste opératoire.
fond du sac ne devant pas être abandonné dans le scrotum, une En revanche, sa fermeture en cas d’orifice trop important
dissection progressive et minutieuse s’impose avec une coagula- peut être faite par voie TAPP en fin d’intervention avec place-
tion soigneuse. Il est conseillé, lorsque l’hémostase ne peut être ment des trocarts dans la cavité abdominale, en conservant les
parfaitement obtenue, de laisser en place un drainage-aspiration mêmes orifices cutanés.
dans le scrotum au travers du canal inguinal et sortant par T3.
Celui-ci doit être laissé en place pour une courte durée, afin Lésion du pédicule épigastrique
d’éviter un hématome ou un sérome postopératoire.
Deux circonstances différentes peuvent se présenter :
Pour les hernies récidivées, le risque d’ouverture du sac
• soit le pédicule épigastrique est, ou a été détaché de la paroi
péritonéal est grand et il faut être particulièrement vigilant
abdominale postérieure par une volumineuse hernie ingui-
durant la dissection des éléments du cordon. L’ouverture du sac
noscrotale ou par une mauvaise dissection ;
nécessite sa fermeture par suture et/ou par Endoloop® après
• soit il a été lésé et une hémorragie se produit.
contrôle visuel pour éviter de saisir un élément intrapéritonéal.
Dans le premier cas, une refixation temporaire du pédicule
On peut rapprocher ce risque de celui auquel expose une
épigastrique à la paroi par une suture en U transfixiante de
cicatrice d’appendicectomie en fosse iliaque droite avec toujours
l’extérieur vers l’intérieur puis de l’intérieur avec l’extérieur peut
la nécessité de refermer les orifices péritonéaux.
permettre la poursuite de la procédure sans gêner le bon
positionnement de la prothèse. Le fil de fixation est temporaire
Prothèses [12, 13] et est déposé à la fin de l’intervention.
Plus que le type de matériau (polypropylène, polyester, Dans le deuxième cas, le contrôle de l’hémorragie peut être
composite), la forme des prothèses peut changer (anatomique, obtenu soit par coagulation bipolaire, soit par pose de clips de
préformée, fendue ou non fendue, etc.). 5 mm. À l’extrême, une conversion par laparotomie peut être
La seule constante importante est la taille de la prothèse nécessaire si le contrôle endoscopique est impossible.
utilisée qui doit couvrir très largement les defects herniaires en
tenant compte du potentiel de rétraction de la prothèse dû à la Majeures
cicatrisation variable selon les individus et les matériaux et qu’il Plaie du cordon
faut savoir anticiper.
Deux éléments peuvent être lésés :
Le principe et la mise en place d’une prothèse non fendue
• canal déférent ;
sont proposés par certains.
• vaisseaux spermatiques.
À l’avantage de cette option peuvent être retenus :
Pour éviter une lésion de ces éléments, une dissection aussi
• la plus grande facilité de mise en place ;
atraumatique que possible est faite lors de la libération du sac
• une pariétalisation simple du cordon sans dissection exten-
péritonéal.
sive ;
• la possibilité de ne pas fixer une prothèse dite anatomique. Il faut éviter de saisir le canal déférent avec un instrument
Le désavantage est un risque potentiel de récidive par chirurgical.
retournement ou déplacement d’une prothèse non stabilisée. On évite de coaguler un petit vaisseau sur le déférent,
l’hémostase se faisant en général spontanément.
Pour limiter le risque de lésion vasculaire du pédicule
Mode de conversion spermatique, on limite la dissection des éléments graisseux aux
Lorsque la poursuite de la voie TEP n’est pas faisable, le plus lipomes facilement mobilisables.
souvent par non-reconnaissance des éléments anatomiques ou En cas de saignement, le contrôle de l’hémostase est obtenu
lorsqu’une brèche péritonéale très importante s’est produite, la par une coagulation bipolaire très sélective.
voie de conversion est l’abord TAPP en repositionnant les
trocarts en intrapéritonéal sous contrôle visuel sans qu’il ne soit Plaie de vessie
nécessaire, la plupart du temps, de modifier leur taille et leur Elle peut se produire lorsqu’il y a des antécédents de chirurgie
position. sous-ombilicale singulièrement extrapéritonéale (prostatectomie,
La survenue d’une complication plus grave, saignement cure d’incontinence, etc.).
hémorragique mal contrôlable, doit conduire à une laparotomie La mise en place du 1er trocart T1 sous contrôle visuel évite
de contrôle de l’abord postérieur (plaie iliofémorale artérielle ou la lésion vésicale à ce stade. C’est souvent lors de l’exposition
veineuse) par médiane sous-ombilicale et abord extrapéritonéal. de la symphyse pubienne ou du ligament de Cooper que la
libération d’une adhérence de la vessie aux parois amincies peut
conduire à une brèche dans la muqueuse vésicale.
■ Complications [14, 15]
Ce qui importe, c’est de la reconnaître et d’en réaliser la
suture avec mise en place d’un sondage vésical. Sa méconnais-
Complications peropératoires sance conduit à un urinome extrapéritonéal qui doit être traité
aussitôt reconnu.
Mineures Lésion des nerfs [16]
Ouverture du péritoine L’ensemble des éléments nerveux se situe dans le triangle des
Les difficultés rencontrées par l’ouverture du péritoine sont nerfs, à l’exception du nerf obturateur rarement exposé lors de
différentes selon la précocité du dommage lors de la dissection la dissection, et dont seule la coagulation intempestive d’un
et selon son importance. vaisseau obturateur peut entraîner la lésion.
Une ouverture précoce lors de la mise en place du trocart T1, La blessure partielle ou section d’un élément nerveux peut se
surtout lors d’une erreur de plan de dissection initiale, peut produire soit pendant la dissection, soit lors de la fixation d’une
entraîner une conversion en TAPP si l’ouverture est importante. prothèse.
Pour éviter une lésion lors de la dissection, on conserve si L’hydrocèle vraie, surtout s’il s’agit d’un sujet jeune, est due
possible le tissu cellulograisseux qui recouvre ces éléments au à une compression du cordon du contact ou travers de la
niveau du psoas. De même, lors d’un saignement dans cette prothèse (en cas de prothèse fendue).
zone, on évite une coagulation intempestive en attendant, si L’examen préopératoire retrouve souvent chez le sujet de plus
possible, une hémostase spontanée. de 50 ans une lame liquidienne vaginale qu’une échographie
Lors de la fixation d’une prothèse, aucun élément n’est pourrait confirmer.
positionné dans le triangle des nerfs. La majoration d’un tel épanchement ou l’apparition d’une
En général, les éléments de fixation sont placés préférentiel- hydrocèle chez un sujet jeune peuvent conduire à la cure
lement en dedans du plan sagittal délimité par le pédicule
chirurgicale.
épigastrique et le canal déférent et les vaisseaux spermatiques ;
Sa prévention repose sur :
sinon, en hauteur, en dehors, toujours à distance de la bande-
• une dissection prudente des éléments du cordon en évitant
lette iliopubienne.
La pose d’un élément de fixation sur un élément nerveux est de traumatiser les éléments vasculaires ;
responsable d’une névralgie postopératoire immédiate qui doit • une prothèse posée sans tension sur le cordon en cas de
conduire aussitôt à sa dépose. pariétalisation (surtout en cas d’agrafage) ;
• une fermeture sans striction du cordon en cas de prothèse
Lésion des vaisseaux iliaques [17] fendue.
C’est lors de la libération du ligament de Cooper ou d’une
Douleurs résiduelles [19]
hernie fémorale que les risques sont les plus importants.
Ceci est particulièrement vrai lorsqu’il s’agit d’une hernie Elles représentent la complication tardive la plus difficile à
fémorale fixée. La réduction doit être douce et progressive, il ne traiter.
faut pas hésiter à sectionner en haut la bandelette iliopubienne Si ces douleurs pariétales à irradiation testiculaire peuvent
pour ouvrir l’anneau de striction. Une traction trop brutale peut s’observer 6 à 8 mois après l’intervention, leur persistance
entraîner une déchirure du tronc veineux iliofémoral qui doit au-delà d’un an pose le problème de douleurs tardives.
conduire à un contrôle immédiat à ciel ouvert. Deux éventualités se présentent :
La lésion de l’axe artériel iliofémoral est plus rare et peut être • il s’agit de douleurs à caractère topographique précis,
prévenue en conservant les éléments celluloganglionnaires s’accompagnant ou non de dysesthésies traduisant une
périvasculaires lors de l’usage de prothèse fendue ou/et en
origine neurologique à traiter comme telle, médicalement ou
laissant le cordon fixé sur l’axe vasculaire lors de la pariétalisa-
chirurgicalement ;
tion pour une prothèse non fendue.
• il s’agit de douleurs non systématisées, secondaires aux
phénomènes de fibrose cicatricielle périprothétique :
Complications postopératoires C tantôt des douleurs à l’effort cédant au repos dues à des
Complications précoces forces de cisaillement entre deux tissus de résistance et de
densité différentes ;
Les séromes et les hématomes représentent les complications C tantôt permanentes et très difficiles à traiter.
postopératoires précoces.
La dépose de la prothèse doit être la dernière solution en
Ils sont prévenus par une hémostase minutieuse lors de la
dissection de l’espace extrapéritonéal, par une libération raison de son caractère potentiellement très traumatisant.
complète du sac herniaire et surtout par un retournement du L’usage de moyens médicaux de traitements de la douleur est
fascia transversalis lors des hernies directes nommées 3 a dans préféré.
la classification de Nyhus. Occlusion intestinale
En général, ils se résorbent en 3-4 semaines. L’existence d’un
nodule douloureux résiduel correspondant à un hématome Le risque d’occlusion intestinale postopératoire est plus
collecté peut nécessiter sa ponction à distance avec les précau- important après un abord TAPP que TEP [20] . C’est l’absence de
tions d’asepsie rigoureuse d’usage. fermeture d’une bride péritonéale qui peut conduire à cette
complication.
Complications tardives Une réintervention urgente, si possible par voie laparoscopi-
Récidive [18] que, est réalisée.
Récidive précoce (de j1 à 1 an). Elle est la conséquence
d’erreurs techniques. Elles sont représentées par :
• la mise en place d’une prothèse de trop petite taille ne ■ Conclusion
couvrant pas la totalité des zones herniaires. Le rétrécissement
de la prothèse qui réduit la surface couverte aggrave encore La cure de la hernie de l’aine par voie cœlioscopique totale-
ce defect ; ment extrapéritonéale représente aujourd’hui la meilleure
• le déplacement d’une prothèse mal positionnée et non alternative technique d’abord cœlioscopique [21, 22].
stabilisée (par un moyen de fixation ou par la forme anato- Une bonne connaissance de l’anatomie de la paroi posté-
mique de la prothèse) ; rieure permet un net raccourcissement de la durée
• la mauvaise fermeture d’une prothèse fendue laissant en place d’apprentissage.
un orifice autour du cordon. La plupart des complications rencontrées en peropératoire
Récidive tardive. Elle est souvent l’évolution d’une récidive sont facilement gérables et surtout évitables par une pratique
précoce méconnue. Toutefois, des modifications anatomiques régulière [23].
locales (surtout lors d’une importante prise de poids, cause À l’inverse de la voie TAPP, les risques de blessure digestive
d’une distension musculoaponévrotique et d’une hyperpression
sont exceptionnels.
abdominale), et le vieillissement tissulaire associé, peuvent
La technique est aujourd’hui standardisée quant à l’abord et
conduire à une récidive à distance. Elles doivent rester
exceptionnelles. à la dissection de l’espace extrapéritonéal.
Les différences viennent de la prothèse utilisée (matériau,
Hydrocèle forme) et de la fixation (non-fixation ou différents moyens
Un épanchement temporaire dans la vaginale testiculaire utilisés).
secondaire à une réaction inflammatoire peut être observé ; sa Le principe même de la technique, décrit initialement par
résolution inflammatoire aussi. La résolution spontanée est la Stoppa, reste inchangé, à savoir la mise en place d’une prothèse
règle en 30 à 45 jours, parfois accélérée par la prise d’un de grande taille dans l’espace extrapéritonéal par voie extra-
traitement anti-inflammatoire non stéroïdien. abdominale.
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Begin G.-F. Traitement des hernies inguinales par laparoscopie par voie totalement extrapéritonéale. EMC
(Elsevier Masson SAS, Paris), Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-137-A, 2007.
Résumé. – La voie prépéritonéale pour la réparation des hernies de l’aine est une ressource de grande valeur
avec laquelle le chirurgien doit se familiariser. Simple et rapide, elle épargne à coup sûr les nerfs superficiels et
le cordon lors des cures primaires, elle évite les dissections itératives difficiles lors des interventions pour
récidives herniaires. Après traversée sans risque de la paroi, par divers types d’incision, et clivage rétropariétal
exsangue, elle met d’emblée au jour les hernies de la région, sans risque d’omettre les hernies associées. Après
traitement du (ou des) sac(s) herniaire(s), elle permet, avec une remarquable aisance, différents types de
réparation aujourd’hui classiques : soit une suture élective de l’orifice herniaire utilisant la bandelette
iliopubienne (opération de Nyhus), soit la fermeture globale de l’orifice musculopectinéal par l’un des
procédés suivants : celui de Rives (pièce prothétique unilatérale par voie médiane), la méthode de Stoppa
(enveloppement du sac viscéral dans une prothèse bilatérale par voie médiane), l’opération de Wantz (pièce
unilatérale par voie sus-inguinale). Quelques variantes, techniques et cas particuliers sont aussi envisagés.
© 2000 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Stoppa R. Traitement par voie prépéritonéale des hernies de l’aine de l’adulte. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés),
Techniques chirurgicales – Appareil digestif, 40-115, 2000, 7 p.
40-115 Traitement par voie prépéritonéale des hernies de l’aine de l’adulte Techniques chirurgicales
*
A
*
B
Réparation par voie prépéritonéale sectionnés de façon à en abandonner la partie scrotale qui sera
drainée ; cette attitude est conseillée par de nombreux auteurs pour
et suture utilisant la bandelette éviter le risque d’orchite ischémique par dissection du cordon
iliopubienne. Technique de Nyhus [5]
étendue au-dessous du niveau du pubis ; le collet proximal est fermé
soigneusement. Puis on réalise un rétrécissement de l’orifice inguinal
Cette opération classique, dont la diffusion outre-Atlantique a profond par des points séparés de fil non résorbable, unissant le
bénéficié de la notoriété de son auteur, est une application de la voie tendon conjoint et le fascia transversalis (en haut et en dedans) à la
prépéritonéale à la réparation par suture de l’orifice herniaire (fig 2). bandelette iliopubienne (en bas et en dehors), placés en dedans du
cordon dont la traversée est reportée le plus en dehors possible ;
¶ Anesthésie lorsque l’orifice herniaire est très large, on peut compléter par des
L’anesthésie locale n’a jamais été utilisée par Nyhus. Les anesthésies points placés en dehors du cordon.
rachidiennes conviennent dans notre expérience. – Hernies fémorales (type III-C) : après réduction, le sac,
habituellement petit, est simplement refoulé. La bandelette
¶ Technique iliopubienne est suturée au ligament de Cooper par points séparés
L’incision cutanée horizontale est pratiquée à deux travers de doigt de fil non résorbable.
au-dessus de la symphyse pubienne, centrée par le bord externe du
muscle grand droit. Puis l’incision de l’aponévrose antérieure du ¶ Variantes
muscle droit est poursuivie latéralement dans le sens des fibres
aponévrotiques du muscle oblique externe. Le corps du muscle droit Nyhus a proposé quelques variantes à sa technique (cf supra) :
est récliné et le fascia transversalis incisé horizontalement. Puis les
muscles obliques interne et transverse sont dissociés sur quelques – utilisation du ligament de Cooper et non plus de la bandelette
centimètres pour pénétrer dans l’espace clivable sous-péritonéal de iliopubienne de Thomson, pour donner aux sutures un point
Bogros. Le clivage prépéritonéal aisé et exsangue est poussé vers le d’amarrage solide en bas, dans le cas des hernies directes ou
bas, puis médialement et latéralement. Les sacs herniaires (inguinal indirectes volumineuses ; mais il en résulte une tension plus forte
direct ou indirect, ou fémoral) sont alors aisément repérés par leur exposant à l’échec par récidive ;
aspect de diverticule péritonéal passant à travers l’orifice herniaire.
– association d’une incision de décharge sur la gaine antérieure du
Tous les types de hernie peuvent être alors traités selon Nyhus.
droit pour réduire la tension sur les sutures ; mais l’efficacité en est
– Traitement d’une hernie inguinale directe (type III-A) : le sac est discutée ;
immédiatement en dedans des vaisseaux épigastriques ; de volume
souvent modeste, il est facilement réduit, éventuellement enfoui – des résultats multicentriques décevants, en particulier dans le cas
dans une bourse de fil à résorption lente : cette attitude nous paraît des hernies directes, ont récemment conduit Nyhus, jusque-là
préférable à la résection du sac, non indispensable, qui expose à résistant à l’utilisation des matériaux synthétiques, à accepter un
léser la vessie. Typiquement, la fermeture de l’orifice herniaire renforcement prothétique des sutures de l’opération qui porte son
consiste à placer quatre ou cinq points séparés de fil monofilament nom.
non résorbable n° 0, prenant en haut le fascia transversalis souvent
épaissi au bord supéromédian de l’orifice herniaire, et en bas la ¶ Indications
bandelette iliopubienne de Thomson.
– Traitement d’une hernie inguinale indirecte (type III-B) : le sac forme Au total, l’excellente voie postérieure facilite beaucoup l’inventaire
avec les éléments du cordon un pédicule qui traverse la paroi à des lésions herniaires et les gestes chirurgicaux sur le mur
travers l’orifice inguinal profond, en dehors des vaisseaux postérieur, mais ne peut éviter la tension sur la suture d’orifices
épigastriques inférieurs. Les petits sacs sont disséqués et séparés du herniaires volumineux. On doit donc logiquement réserver
cordon : cette manœuvre est facilitée par l’introduction d’un doigt l’opération de Nyhus aux réparations primaires de hernies de petit
par une petite ouverture pratiquée dans le sac. Les sacs scrotaux volume et aussi aux petites récidives après cure herniaire par voie
sont séparés du cordon seulement au niveau de leur collet et antérieure.
2
Techniques chirurgicales Traitement par voie prépéritonéale des hernies de l’aine de l’adulte 40-115
Réparations prothétiques
par voie prépéritonéale
Nous trouvons ici deux opérations types : l’une est une vraie
réparation directe de la paroi par fixation de matériel prothétique ;
l’autre est un très large enveloppement du sac viscéral qui rend le
péritoine inextensible et impropre à l’évagination herniaire.
¶ Anesthésie
La préparation générale et locale de l’opéré doit être aussi soigneuse
que chaque fois qu’on utilise un matériel étranger. L’anesthésie peut
être générale, ou épidurale. Le chirurgien se place du côté opposé à
la hernie. Le sondage vésical est inutile lorsque l’opéré a évacué
avant d’être conduit en salle d’opération.
¶ Technique
Incision médiane sous-ombilicale intéressant tous les plans pariétaux
3 Technique de Rives : réparation par voie médiane et pièce rétromusculaire unila-
mais respectant le péritoine. Celui-ci est séparé de la paroi à l’aide térale, fendue pour le passage du cordon et fixée.
d’un tampon monté ou au doigt, en commençant le clivage dans
l’espace de Retzius et en le poursuivant dans l’espace de Bogros
opposé au chirurgien, jusqu’à voir le psoas iliaque. Les sacs directs 4 Opération de Stoppa.1. Incision mé-
(inguinal ou fémoral) sont réduits par traction douce sans difficulté. diane sous-ombilicale habituelle ; 2. inci-
Les sacs de hernies indirectes, fusionnés avec le cordon, sont traités sion cutanée horizontale basse d’intérêt
cosmétique ; 3. incision séparée qui permet
différemment selon leur taille : petits, ils sont complètement séparés
d’aider, éventuellement, à libérer le contenu
du cordon aux ciseaux plutôt qu’au tampon, sans difficulté notable adhérent d’une hernie scrotale.
dans les cures primaires ; les grands sacs scrotaux sont de préférence
sectionnés au niveau de leur collet, l’infundibulum proximal est
suturé, la partie distale du sac est abandonnée dans le scrotum en y
plaçant un drain aspiré.
Une prothèse carrée de 10 cm de côté est découpée dans du tulle de
Dacront. Elle est fendue au niveau de son bord supérieur ou de son
bord latéral, pour le passage du cordon spermatique, et la fente sera
suturée autour du cordon ce qui, pour certains, aide à maintenir la
pièce en place. Rives fixe la prothèse par quelques sutures placées
aux points accessibles sans risque, c’est-à-dire la gaine du muscle 1
psoas, la face postérieure du muscle droit et le ligament pectinéal. 2
Lorsque la hernie est bilatérale, les mêmes gestes sont réalisés de
l’autre côté. L’incision musculoaponévrotique est alors suturée sur
drainage aspiratif. 3
¶ Remarques
Les points délicats de cette intervention sont le risque de blessure
des nerfs fémorocutané, crural ou obturateur ou encore des
vaisseaux du cercle rétropariétal, masqués par le patch au moment – la pariétalisation des éléments du cordon spermatique est un autre
où il est fixé. Il faut aussi suturer avec soin la fente de passage du important principe qui évite de fendre la prothèse - en préservant
cordon dans la pièce prothétique car c’est un point faible possible. ainsi la continuité du renforcement prothétique - et simplifie
Enfin, l’incision du raphé médian comporte un risque d’éventration l’opération ;
postopératoire chez les patients à paroi fragile. Cependant, la mise – le dernier principe met en jeu la loi d’hydrostatique de Pascal, en
en place du grand patch rétropariétal est largement facilitée par utilisant la pression intra-abdominale pour appliquer la grande pièce
l’utilisation de la voie postérieure comparée à la voie antérieure. contre la paroi abdominale, ce qui dispense de toute fixation du
matériel de renforcement.
TRAITEMENT DES HERNIES DE L’AINE PAR VOIE
MÉDIANE SOUS-OMBILICALE ET PROTHÈSE ¶ Technique
BILATÉRALE. OPÉRATION DE STOPPA [8-11]
L’anesthésie générale ou péridurale convient, en sachant que
¶ Principes l’opération ne dure que 20 à 45 minutes.
L’incision standard est une médiane sous-ombilicale n’atteignant ni
Outre l’utilisation de la voie prépéritonéale et du tulle de Mersilène,
le pubis ni l’ombilic, intéressant tous les plans pariétaux et
les autres principes de l’opération sont :
respectant le péritoine (fig 4). L’espace prépéritonéal est aisément
– un large enveloppement de la partie inférieure du sac viscéral trouvé par clivage au doigt ou au tampon monté ; dans le cas de
dans une grande prothèse de tulle de Dacront bilatérale qui rend le hernies multirécidivées, il peut être utile d’utiliser des ciseaux pour
péritoine inextensible et la herniation impossible ; il en résulte libérer le péritoine dans les zones cicatricielles. La dissection
qu’aucune réparation de l’orifice herniaire n’est nécessaire, donc pas commence dans l’espace rétropubien de Retzius, devant la vessie, et
de suture ; descend jusqu’à la prostate. Elle est ensuite étendue du côté opposé
3
40-115 Traitement par voie prépéritonéale des hernies de l’aine de l’adulte Techniques chirurgicales
1 2
5 Opération de Stoppa : vue par l’opérateur, placé du côté opposé, du sac d’une her-
nie inguinale droite directe en cours de réduction. 7 Opération de Stoppa : vue par l’opérateur, placé du côté opposé, du sac d’une her-
nie inguinale droite indirecte fusionné avec les composants du cordon spermatique
droit (en pointillé) ; la veine iliaque externe droite (2) et les vaisseaux épigastriques in-
férieurs droits (1) forment un angle-repère du pédicule herniaire.
1 2
6 Opération de Stoppa : vue par l’opérateur, placé du côté opposé, d’une hernie fé-
morale droite en cours de réduction.
4
Techniques chirurgicales Traitement par voie prépéritonéale des hernies de l’aine de l’adulte 40-115
1 2
2
5
1
9 Opération de Stoppa : vue par l’opérateur, placé du côté opposé, de la fin du temps 11 Opération de Stoppa : mise en place de la partie droite de la prothèse bilatérale
de pariétalisation des composants du cordon spermatique droit, vus par transparence du côté droit de l’opéré, en utilisant les longs clamps de Rochester-Kelly (1 à 5). NB :
dans la gaine spermatique qu’il est souhaitable de préserver. 1. Canal déférent ; 2. vais- les gestes accomplis du côté droit vont ensuite être exécutés symétriquement du côté
seaux spermatiques. gauche, mais ne sont pas représentés.
Préparation de la prothèse de tulle de Dacront (fig 10) ce moment, l’écarteur de paroi peut être retiré, puis les clamps sont
On dispose son élasticité transversalement et on découpe une pièce retirés dans la position même où ils ont été introduits, sans modifier
aux dimensions de l’opéré, dont la largeur moyenne (distance entre la position de la prothèse, ce qui est facile car le Dacront adhère
les deux épines iliaques antérosupérieures moins 2 cm) est de 24 cm légèrement aux tissus.
et la hauteur moyenne (distance ombilicopubienne) de 17 cm ; la Le chirurgien et son aide changent à nouveau de place pour
forme de la prothèse, en « chevron », donne à l’angle saillant de son positionner la prothèse du côté opposé. Lorsque tous les instruments
bord supérieur une flèche de 4 cm et à l’angle rentrant de son bord et les pinces ont été retirés, il reste à suspendre le milieu du bord
inférieur une flèche de 6 cm. supérieur de la prothèse par un seul point de suture au fascia
ombilical, de façon à éviter le déplacement du bord supérieur
Mise en place de la prothèse (fig 11) pendant la suture pariétale. Le plan musculoaponévrotique est
Après l’avoir rapidement plongée dans de la polyvidone iodée, la refermé par un surjet de fil à résorption lente n°1.
prothèse est saisie par huit longs clamps de Rochester-Kelly à
chacun de ses six angles et au milieu de ses deux bords latéraux. ¶ Remarques
Ces longs clamps sont d’un grand intérêt pour la manipulation
aseptique et le positionnement facile de la prothèse. Pour ce geste, Cette opération peut être considérée comme l’expression maximale
l’espace de clivage prépéritonéal est ouvert par écartement de la de l’utilisation de matériel prothétique pour traiter les hernies de
paroi à l’aide d’une valve à angle droit, tandis que le chirurgien l’aine (fig 12). Elle est cependant simple et facile à réaliser, sans
rétracte le sac péritonéal vers l’ombilic de sa main gauche. Le clamp expérience ni habileté particulières. Traverser la ligne médiane fait
médian inférieur entraîne la prothèse derrière le pubis et devant la théoriquement courir le risque d’éventration postopératoire ; mais
vessie ; le clamp latéro-inférieur est introduit le plus loin possible la prothèse bilatérale protège l’abord médian contre cette fâcheuse
derrière le cadre obturateur correspondant ; le clamp médiolatéral, éventualité : nous n’avons observé aucune éventration. Le risque
poussé presque verticalement, est placé en dedans des vaisseaux infectieux, considéré comme corrélé à la taille de la prothèse, fait
iliaques externes ; le clamp latérosupérieur place l’angle postérieur utiliser par certains une antibioprophylaxie en « flash »
de la prothèse le plus loin possible en haut et en arrière ; le clamp immédiatement préopératoire (céfazoline ou vancomycine) ; une
médian supérieur est poussé sous le fascia ombilical, en attente. À précaution particulièrement recommandable dans les cas complexes.
3 7
1
2 6
24 cm
*
A
*
B
5
40-115 Traitement par voie prépéritonéale des hernies de l’aine de l’adulte Techniques chirurgicales
VARIANTES TECHNIQUES
¶ Choix de matériaux prothétiques différents
¶ Voies d’abord différentes
Le tulle de Dacront a depuis longtemps prouvé ses qualités, ayant
Une incision horizontale (Pfannenstiel) avait déjà été utilisée, reçu en Europe la consécration d’une expérience très large. Ce
conjointement à la voie médiane sous-ombilicale, par Cheatle [3] dans polyester est léger, souple, sa conformation en tulle macroporeux le
sa publication princeps. Rignault [6] et Dumeige l’ont utilisée de rend facilement et rapidement pénétrable par le tissu cicatriciel qui
routine (fig 4). L’avantage cosmétique est certain, mais l’exposition l’incorpore. Il adhère légèrement aux tissus, ce qui lui confère une
anatomique des plans profonds latéraux est moins facile, nécessitant certaine stabilité immédiate. Enfin, il est peu coûteux.
plusieurs écarteurs alors que la voie médiane n’en nécessite qu’un Le tulle de polypropylène a lui aussi une très bonne tolérance. On
seul. peut lui reprocher une certaine rigidité qui le rend moins
conformable à la morphologie irrégulière de la fente d’insertion dans
Opération de Wantz [13, 14]
la région de l’aine ; raison pour laquelle Wantz a mis en garde contre
Elle combine le renforcement du sac viscéral (selon Stoppa) et la son utilisation dans le cas particulier des hernies de l’aine.
voie prépéritonéale à travers une incision transverse du quadrant Le tulle de Nylont, rigide, a été employé dans les années 1950 ; il
inférieur latéral de l’abdomen, semblable à celle de l’opération de perdait de sa solidité avec le temps. Les prothèses imperméables
Nyhus. Wantz a expliqué son choix d’une voie latérale par la sont à rejeter, qu’il s’agisse de feuille de silicone, de velours siliconé
possibilité d’utiliser une anesthésie locale et de satisfaire aux ou même de matériel microporeux comme l’ePTFE (expanded
habitudes nord-américaines de la « One Day Surgery ». L’incision polytetrafluoroethylene) : n’étant pas incorporés, ils favorisent la
cutanée s’étend donc depuis la ligne médiane latéralement sur 8 à formation de séromes qui compromettent une réparation solide.
9 cm ; elle est placée à 2 ou 3 cm au-dessous de la ligne bi-iliaque.
La gaine antérieure du droit et les muscles obliques sont incisés ¶ Prothèse unilatérale fixée
horizontalement, puis le fascia transversalis. L’espace prépéritonéal
est clivé dans toutes les directions comme dans les interventions Houdard, par voie médiane sous-ombilicale, réalise les mêmes
précédentes. Les sacs herniaires sont traités comme dans l’opération temps de clivage, de traitement du sac herniaire, de pariétalisation
de Nyhus ou notre technique. Le cordon spermatique est pariétalisé des éléments du cordon que dans l’opération de Stoppa. Sa prothèse
dans son trajet rétropariétal comme dans notre technique. Les en Dacront est rectangulaire, à grand axe transversal dans le sens
orifices herniaires ne sont pas suturés. Le patch de Mersilène est de son élasticité, et pliée transversalement à l’union du tiers inférieur
grossièrement trapézoïdal, d’une hauteur de 14 cm. Il est d’abord et des deux tiers supérieurs de sa hauteur. Le pli ainsi constitué est
mis en place sous le muscle droit et sous la partie supérieure de la fixé à la paroi de dedans en dehors par quelques points séparés de
paroi inguinale par l’utilisation de trois fils de traction traversant fils à résorption lente sur le ligament de Cooper, la bandelette
toute l’épaisseur de la paroi. L’utilisation d’une aiguille de Reverdin iliopubienne et la gaine du psoas. La pièce est ensuite étalée et le
est commode pour ce geste. Le bord inférieur du patch de Mersilène péritoine vient s’y appliquer sous l’action de la pression intra-
est mis en place à l’aide de trois longs clamps de Rochester qui abdominale (fig 13).
l’entraînent en bonne position derrière le pubis, le cadre obturateur Dans les hernies bilatérales, l’opération unilatérale doit être répétée
et latéralement. Un drainage aspiré est placé au contact de la du côté opposé. Mais l’utilisation de deux prothèses unilatérales ne
prothèse, en particulier lorsqu’on abandonne un grand sac scrotal. protège pas la cicatrice médiane contre le risque d’éventration
Un flash antibiotique intraveineux est prescrit immédiatement avant postopératoire.
l’opération.
¶ Prothèse fendue (sans pariétalisation du cordon)
¶ Fermeture de l’orifice herniaire
Certains chirurgiens n’effectuent pas la pariétalisation des éléments
Prônée par certains, elle n’est pas toujours techniquement simple du cordon ; la pièce doit alors être fendue à partir d’un de ses bords
par voie prépéritonéale pour les orifices indirects. Dans le cas des pour laisser passer le cordon en son milieu, puis refermée, ce qui a
grands orifices, la suture s’effectue sous tension, source de douleurs l’avantage, disent les adeptes du geste, de la maintenir en place ; en
postopératoires et exposant au lâchage ; lorsque celui-ci est précoce, réalité la fixité « centrale » de la prothèse est moins intéressante que
il peut être hémorragique, entraîner une collection hématique qui la stabilité de ses bords dont le déplacement est à l’origine des
induit un risque de déplacement des prothèses non fixées. C’est récidives après réparation prothétique. D’autre part, la fente
pourquoi Wantz et nous-mêmes avons mis en garde contre la suture introduit un point faible dans un plan dont la fonction principale
des orifices herniaires, inutile lorsqu’on emploie une très grande est d’être une barrière ; enfin, la fermeture de la fente peut être
pièce de renforcement. délicate (trop lâche ou trop serrée).
6
Techniques chirurgicales Traitement par voie prépéritonéale des hernies de l’aine de l’adulte 40-115
CAS PARTICULIERS jeune femme) où une cure primaire trouve des structures
tendinoaponévrotiques solides pour une suture efficace par voie
¶ Obésité antérieure. Voici ce qui nous paraît raisonnable :
L’obèse réclame une adaptation légère de la technique : mise en – hernies récidivées et multirécidivées : l’indication type est
position de Trendelenburg ; une incision médiane plus longue l’éventration de l’aine avec destruction de la bandelette de Thomson
portant sur la totalité de la ligne ombilicopubienne ; une prothèse et du ligament de Cooper et large orifice herniaire prévasculaire ;
de plus grande taille, telle que sa hauteur égale la distance
– en cures primaires, les hernies complexes à haut risque de récidive :
ombilicopubienne plus 1 ou 2 cm, et sa largeur, la distance entre les
énormes, par glissement, multiples, les hernies fémorales
deux épines iliaques antérosupérieures, plus 1 ou 2 cm.
prévasculaires ; chez des opérés obèses, ascitiques, atteints de
¶ Contenu de sac scrotal difficile à réduire collagénose ; les travailleurs de force ;
– contre-indications : certaines sont absolues : risque septique
C’est le cas des hernies géantes et des hernies par glissement. Il faut résultant d’une dermatose, de granulome sur fil, hernies étranglées.
d’abord tenter de réduire le contenu à travers une ouverture du D’autres sont relatives : cicatrice sous-ombilicale, séquelles de
péritoine en évitant des tractions trop fortes sur les viscères herniés. thrombose iliocave.
En cas de difficultés de réduction, et particulièrement dans le cas
des hernies par glissement, une incision horizontale à la partie haute
du scrotum permet soit d’aider à la réduction des viscères, soit de
réaliser une dissection périsaculaire des hernies par glissement, Références
suivie de réduction en masse pour éviter la dévascularisation des
viscères herniés (fig 4). [1] Annandale T. Case in which a reducible oblique and direct inguinal and femoral hernia existed
on the same side and were successfully treated by operation. Edinburgh Med J 1876 ; 21 : 1087
¶ Difficultés du clivage prépéritonéal [8] [2] Bassini E. Sulla cura radicale dell’ernia inguinale. Arch Soc Ital Chir 1887 ; 4 : 30
[3] Cheatle GL. An operation for the radical cure of inguinal and femoral hernia. Br Med J 1920 ; 2 :
Des antécédents de laparotomie sous-ombilicale n’entraînent 68
[4] Henry AK. Operation for femoral hernia by a midline extraperitoneal approach: with a pre-
ordinairement qu’une sclérose prépéritonéale linéaire limitée. Plus liminary note on the use of this route for reducible inguinal hernia. Lancet 1936 ; 1 : 531
délicates sont les scléroses diffuses succédant à des lésions [5] Nyhus LM, Stevenson LM, Listerud MB, Harkins HN. Preperitoneal herniorraphy. A prelimi-
traumatiques de la ceinture pelvienne, à des suppurations ou aux nary report on fifty patients. West J Surg 1959 ; 67 : 48
rares récidives herniaires après grande prothèse bilatérale. Les [6] Rignault DP. Properitoneal prosthetic hernioplasty through a Pfannenstiel approach. Surg
Gynecol Obstet 1986 ; 163 : 465-468
solutions de ces problèmes varient : une symphyse limitée du [7] Rives JL, Stoppa RE, Fortesa L, Nicaise H. Les pièces en Dacront et leur place dans la chirurgie
Retzius peut être dissociée aux ciseaux pour retrouver latéralement des hernies de l’aine. Ann Chir 1968 ; 22 : 159
un plan de clivage correct ; on peut aussi recourir à une incision [8] Stoppa R, Diarra B, Verhaeghe P, Henry X. Some problems encountered at reoperation fol-
lowing repair of groin hernias with preperitoneal prostheses. Hernia 1998 ; 2 : 35-38
latérale sus-inguinale pour mettre en place une prothèse unilatérale.
[9] Stoppa R, Petit J, Abourachid H. Procédé original de plastie des hernies de l’aine. L’interposi-
tion sans fixation d’une prothèse en tulle de Dacront par voie médiane sous-péritonéale.
Chirurgie 1973 ; 99 : 119
Indications et contre-indications [10] Stoppa R, Petit J, Henry X. Technique de cure de certaines hernies de l’aine par voie médiane
extra-péritonéale. Film 71e congrès français de chirurgie, Paris, 1969
des réparations prothétiques par voie [11] Stoppa RE, Rives JL, Warlaumont CR, Palot JP, Verhaeghe PJ, Delattre JF. The use of Dacront in
the repair of hernias of the groin. Surg Clin North Am 1984 ; 64 : 269-285
prépéritonéale [12] Tait L. A discussion on treatment of hernia by median abdominal section. Br Med J 1891 ; 2 :
685
Les indications sont sélectives. Le bon sens fait renoncer à [13] Wantz GE. Giant prosthetic reinforcement of the visceral sac. Surg Gynecol Obstet 1989 ; 169 :
408-413
l’utilisation du matériel synthétique chaque fois qu’il n’est pas [14] Wantz GE. The technique of giant prosthetic reinforcement of the visceral sac performed
indispensable, notamment chez l’adulte jeune (particulièrement la through an anterior groin incision. Surg Gynecol Obstet 1993 ; 176 : 497-500
7
¶ 40-142
L’omphalocèle est la malformation la plus fréquente de la paroi abdominale survenant durant les dix
premières semaines de développement. Sa fréquence est estimée à 1 pour 4 000 naissances. La taille de
l’ouverture pariétale et l’importance de l’omphalocèle sont variables, depuis la simple hernie dans le
cordon contenant quelques anses grêles, jusqu’à l’omphalocèle géante où une partie ou la totalité des
viscères et du foie peut être extériorisée. Classiquement, un defect pariétal supérieur à 5 cm et/ou la
présence du foie dans l’omphalocèle définissent les omphalocèles géantes et sont des éléments
pronostiques majeurs, compliquant la fermeture pariétale immédiate avec des conséquences
hémodynamiques et respiratoires. Différentes méthodes chirurgicales peuvent être utilisées. Le choix de la
technique chirurgicale à adopter dépend de plusieurs critères définissant l’importance de l’omphalocèle :
le diamètre de l’orifice pariétal et la taille de l’omphalocèle ; la présence ou non du foie dans
l’omphalocèle ; les conséquences hémodynamiques et respiratoires de la fermeture : la pression partielle
du gaz carbonique dans un tissu (PtCO2), la pression intravésicale, la pression veineuse centrale. On
distingue les techniques permettant une fermeture pariétale immédiate (rapprochement pariétal simple ;
fermeture prothétique ; rectomyoplastie) et celles induisant une fermeture progressive de la paroi
abdominale (technique de Schuster). En l’absence de complications hémodynamiques et respiratoires, la
fermeture primitive de la paroi abdominale reste le traitement de choix.
© 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Mots clés : Omphalocèle ; Omphalocèle géante ; Defect de la paroi abdominale ; Pentalogie de Cantrell ;
Réintégration progressive selon la technique du silo
Figure 3.
A, B. Décollement sous-cutané selon Gross.
Fermeture progressive pariétale Figure 4. Couverture cutanée selon Gross. Incisions de décharge.
Réintégration progressive selon la technique du silo
de Schuster (Fig. 5–7)
ligaturer les éléments du cordon. En cas d’extériorisation du
Cette technique permet, en cas d’omphalocèle volumineuse, foie, une libération prudente des veines sus-hépatiques très
d’éviter les phénomènes d’hyperpression abdominale et leurs souvent adhérentes au sac de l’omphalocèle doit être réalisée
conséquences [11, 12]. afin de permettre une réduction hépatique sans plicature de ces
La réintégration des viscères herniés s’effectue progressive- vaisseaux. L’exploration du contenu de l’omphalocèle et de la
ment à l’aide d’un matériel synthétique provisoire. Le premier cavité abdominale permet de rechercher des malformations
temps consiste à réséquer la membrane de l’omphalocèle et à associées. Une prothèse de Silastic® est ensuite suturée aux deux
Indications
Le choix de la technique chirurgicale à adopter dépend de
plusieurs critères définissant l’importance de l’omphalocèle :
• le diamètre de l’orifice pariétal et la taille de l’omphalocèle ;
• la présence ou non du foie dans l’omphalocèle ;
• les conséquences hémodynamiques et respiratoires de la
fermeture : la pression partielle du gaz carbonique dans un
tissu (PtCO2), la pression intravésicale, la pression veineuse
centrale.
En l’absence de complications hémodynamiques et respira-
toires, la fermeture primitive de la paroi abdominale reste le
traitement de choix.
La technique du recouvrement cutané selon Gross est une
technique simple limitant les risques septiques immédiats mais
Figure 6. Mise en place d’une prothèse de Silastic® selon la technique
qui laisse subsister une volumineuse éventration médiane dont
de Schuster.
la prise en charge secondaire peut s’avérer complexe.
À l’heure actuelle, cette technique est délaissée au profit de
la fermeture progressive selon Schuster mais elle reste intéres-
sante dans des centres où les structures chirurgicales et de
réanimation néonatale sont limitées.
Figure 7. Réintégration progressive des viscères dans l’abdomen par Omphalocèles géantes
agrafage régulier du silo. Elles se définissent par une base d’implantation supérieure à
5 cm et/ou contiennent le foie, en partie ou en totalité. La
berges aponévrotiques avec un fil non résorbable et est réunie fermeture progressive pariétale selon la technique du silo de
en haut, en bas et au-dessus des viscères herniés, réalisant ainsi Schuster est la technique utilisée par de nombreuses équipes. En
un silo autour de l’omphalocèle (Fig. 6). cas d’extériorisation du foie, le premier temps consiste à libérer
Le nouveau-né est placé ensuite sous incubateur et le silo est les veines sus-hépatiques du sac de l’omphalocèle. La réduction
suspendu à la couveuse par une traction douce, permettant ainsi hépatique doit être réalisée précautionneusement en évitant une
une réduction progressive du contenu de l’omphalocèle dans plicature de ces vaisseaux.
l’abdomen par gravité puis par fermeture progressive du silo. Si le diamètre du collet est large et le sac non rompu, une
Une fermeture progressive de la prothèse de Silastic® par une fermeture progressive par compression externe de l’omphalocèle
série de points en U ou par une pince à autosuture est réalisée à l’aide d’un bandage élastique peut être réalisée. Un recouvre-
de façon quotidienne, pluriquotidienne ou bihebdomadaire ment cutané selon Gross peut être réalisé en cas de rupture du
selon la tolérance ventilatoire et hémodynamique, en prenant sac de l’omphalocèle, notamment dans des centres aux condi-
soin de ne pas léser d’anse intestinale (Fig. 7). tions de chirurgie et de réanimation néonatales limitées.
■ Résultats [8] Yaster M, Scherer TL, Stone MM, Maxwell LG, Schleien CL,
Wetzel RC, et al. Prediction of successful primary closure of congenital
La mortalité des omphalocèles semble essentiellement liée abdominal wall defects using intraoperative measurements. J Pediatr
Surg 1989;24:1217-20.
aux malformations associées [17, 18]. La comparaison des diffé-
[9] Gross RE. A new method for surgical treatment of large omphaloceles.
rentes techniques est biaisée car les techniques varient en Surgery 1948;24:277-92.
fonction de l’importance de l’omphalocèle. La mortalité des [10] Diaz Jr. JJ, Gray BW, Dobson JM, Grogan EL, May AK, Miller R, et al.
omphalocèles ayant bénéficié d’une fermeture primitive immé- Repair of giant abdominal hernias: does the type of prosthesis matter?
diate ou d’une fermeture progressive semble identique. En Am Surg 2004;70:396-401.
revanche, la morbidité après fermeture progressive est significa- [11] Schuster SR. A new method for the staged repair of large omphaloceles.
tivement plus importante et semble liée à une durée de venti- Surg Gynecol Obstet 1967;125:837-50.
lation artificielle, une durée d’hospitalisation et à un taux [12] Allen RG, Wrenn Jr. EL. Silon as a sac in the treatment of omphalocele
d’infection plus importants [19-21]. and gastroschisis. J Pediatr Surg 1969;4:3-8.
.
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L. Méfat (laure.mefat@chru-strasbourg.fr).
F. Becmeur.
Service de chirurgie digestive infantile, Centre hospitalier universitaire de Hautepierre, 1, avenue Molière, 67098 Strasbourg, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Méfat L., Becmeur F. Chirurgie des omphalocèles. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Techniques
chirurgicales - Appareil digestif, 40-142, 2007.
La hernie ombilicale est une pathologie fréquente du cirrhotique, témoignant en règle d’une maladie
hépatique avancée, avec ascite et altération de la fonction hépatocellulaire. Parfois très inesthétique, elle
peut menacer le pronostic vital en se compliquant de rupture et d’étranglement. Le traitement en est
chirurgical mais l’intervention ne peut, sauf urgence, être envisagée qu’avec un traitement préalable ou
simultané de l’ascite. En effet, en l’absence de traitement de l’ascite, le risque de récidive est d’environ
70 %. Ce traitement de l’ascite peut être médical, radiologique (shunt portosystémique intrahépatique),
ou chirurgical (dérivation péritonéojugulaire, transplantation hépatique). Au plan technique, une
réparation « ouverte » sans matériel prothétique est le plus souvent utilisée. L’abord laparoscopique
semble avoir, dans ce contexte, des indications exceptionnelles.
© 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Plan ■ Introduction
¶ Introduction 1 La hernie ombilicale (HO) est la complication pariétale la plus
fréquente chez le cirrhotique. Sa prévalence est d’environ 20 %
¶ Rappel anatomique 1 contre 3 % dans la population générale [1-3]. La présence d’une
¶ Conséquences de l’hypertension portale sur l’ombilic 2 HO témoigne en général de la présence concomitante d’une
Ascite 2 ascite et d’une altération de la fonction hépatocellulaire. Ses
Hypertension portale 2 complications graves sont représentées par la rupture et l’étran-
Histoire naturelle de la hernie ombilicale chez le cirrhotique 2 glement. Le traitement des HO est chirurgical mais l’interven-
tion ne peut, sauf urgence, être envisagée qu’avec un traitement
¶ Indications opératoires 3
préalable ou simultané de l’ascite. En effet, en l’absence de
Traitement de l’ascite 3
traitement de l’ascite, le risque de récidive est très élevé (70 %).
Hernie asymptomatique 3
Le traitement habituel de l’ascite consiste en un régime pauvre
Hernie symptomatique 3 en sel et des diurétiques, mais dans 10 % des cas environ l’ascite
¶ Traitement chirurgical de la hernie 4 devient réfractaire malgré un traitement médical bien conduit.
Soins préopératoires 4 L’ascite réfractaire est définie par une réponse incomplète de
Intervention pour hernie non compliquée 4 l’ascite à un traitement diurétique optimal (400 mg/j de
Traitement chirurgical de la hernie étranglée 5 spironolactone et 160 mg/j de furosémide) [4, 5]. Dans ce cas,
Traitement chirurgical de la rupture d’ombilic 6 cinq options thérapeutiques sont possibles, pouvant aller de la
ponction évacuatrice à la transplantation hépatique. Au cours
¶ Soins postopératoires 6
des 15 dernières années, le traitement chirurgical de la HO s’est
¶ Traitement concomitant de la hernie et de l’ascite diversifié avec l’introduction de la cœlioscopie et une meilleure
(avec pose d’un shunt péritonéojugulaire) 6 connaissance du résultat des cures avec matériel prothétique. Au
Mise en place de la valve 7 cours de la même période, le traitement de l’ascite s’est enrichi
Réalisation du trajet sous-cutané et incision cervicale 7 avec le shunt portosystémique intrahépatique et la transplanta-
Cure de la hernie ombilicale 7 tion hépatique.
Mise en place du cathéter veineux 7
Soins postopératoires après cure de hernie associée à un shunt
péritonéojugulaire 8 ■ Rappel anatomique
Autres moyens pour traiter l’ascite 8
¶ Traitement chirurgical laparoscopique 8
L’ombilic est une cicatrice cutanée sous forme d’une dépres-
sion cupuliforme qui adhère à un anneau fibreux par l’intermé-
¶ Matériel prothétique 9 diaire d’un tissu cutané très mince comprenant un pannicule
¶ Conclusion 9 adipeux, le ligament rond et le fascia ombilical qui est un
épaississement du fascia transversalis. En profondeur, l’ombilic
est recouvert de péritoine et l’anneau ombilical est limité par
quatre cordons fibreux dont les fibres s’entrecroisent à ce
1
2
Figure 2.
A, B. Coupes schématiques d’un ombilic normal. a. Sillon ombili-
cal ; b. anneau ombilical ; c. péritoine.
■ Indications opératoires
Le traitement de la HO impose obligatoirement un traitement
de la cause déclenchante qui est l’ascite. Techniquement, la cure
de HO est facile à réaliser, et pour certains chirurgiens ce geste
peut même être fait sous anesthésie locale [7, 8]. En revanche, le
traitement de l’ascite est plus difficile, surtout si elle est
réfractaire, et demande une réflexion entre chirurgien et
hépatologue avant de choisir le traitement le plus adapté.
Traitement de l’ascite
Si l’ascite n’est pas réfractaire, la cure de la HO s’impose en
premier et celle de l’ascite secondairement.
Si l’ascite est réfractaire, son traitement s’impose en premier Figure 4. Hernie ombilicale étranglée survenue après ponction évacua-
– sauf en cas d’urgence – sinon le risque de récidive de la HO trice de plusieurs litres : le volume important de la hernie contraste avec la
est très élevé, de l’ordre de 75 % [6] . Il y a une vingtaine faible distension abdominale.
d’années, le shunt péritonéojugulaire avait été proposé dans
cette indication mais sa place s’est réduite en raison de ses
complications. Actuellement, le traitement de l’ascite réfractaire médicale. En effet, une étude de cohorte publiée en 2005 et
avant cure de HO semble reposer majoritairement sur le portant sur 32 033 malades qui ont eu une cure de hernie
transjugular intrahepatic porto-systemic shunt (TIPSS) qui permet pariétale (excluant les hernies inguinales) a comparé les résultats
un très bon contrôle de l’ascite dans un délai habituellement des patients cirrhotiques (1 197 malades) et des non cirrhoti-
compris entre 3 et 12 semaines, avec une réponse complète ques : pour la chirurgie élective, la mortalité était respective-
estimée à 75 % à 3 mois [9, 10]. Le TIPSS a également pour ment de 0,6 % et 0,1 % (p = 0,06) mais pour la chirurgie
avantage d’interférer peu avec la réalisation d’une transplanta- d’urgence, la différence était plus marquée (3,8 % versus 0,5 % ;
tion hépatique ultérieure [11, 12]. p < 0,0001) [15].
En cas d’ascite réfractaire et d’intervention urgente, le
traitement de l’ascite dépend du type de complication. En cas
d’étranglement, l’intervention doit être très rapide et le traite- Étranglement
ment de l’ascite en postopératoire reposera sur le drainage Sa prévalence est estimée à 10 % [3, 16]. Cette faible incidence
péritonéal par des drains fermés aspiratifs (type drain de Redon) est liée au fait que dans la majorité des cas, le collet herniaire
maintenus en place environ 1 semaine, puis sur des ponctions est étroit empêchant l’incarcération des viscères digestifs. De
itératives, voire la pose secondaire d’un TIPSS. En cas de plus, chez les patients qui ont un collet large, l’ascite joue un
rupture, il est possible de prendre un schéma identique au rôle de lubrifiant favorisant la mobilité des organes qui fran-
précédent mais aussi de mettre en place un TIPSS avant la cure chissent ce collet, ce qui explique la survenue plus fréquente de
de HO. En cas d’impossibilité de mettre en place un TIPSS et
cette complication après une diminution rapide du volume de
d’ascite stérile (affirmée par la présence de moins de 250 poly-
l’ascite (introduction d’un traitement médical efficace, ponction
nucléaires par mm3), la mise en place simultanée d’un shunt
évacuatrice, pose de shunt péritonéojugulaire, ou rupture de
péritonéojugulaire peut être envisagée.
l’ombilic) (Fig. 4). En cas d’étranglement, la mortalité postopé-
ratoire est estimée à 10 % [17].
Hernie asymptomatique
Une HO peut rester longtemps asymptomatique chez des Rupture de l’ombilic
patients ayant une fonction hépatocellulaire peu altérée et une
ascite modérée ; dans ce cas, une abstention chirurgicale est Cette complication plus rare mais plus grave témoigne
justifiée car la mortalité opératoire est élevée. La cure élective habituellement d’une fonction hépatocellulaire altérée et d’une
d’une HO chez un cirrhotique est associée à une mortalité qui ascite réfractaire. Une rupture de l’ombilic est précédée dans
atteignait 8 % dans une étude publiée en 1984 [13] et qui est 80 % des cas d’ulcérations cutanées qui imposent une prise en
quatre fois plus élevée que chez les malades non cirrhotiques charge efficace de la HO pour prévenir cette complication, car
dans une étude danoise publiée en 2002 [14]. La principale cause elle expose au risque constant d’infection du liquide d’ascite (le
de mortalité postopératoire est la décompensation de la fonc- plus souvent à staphylocoque) [6, 18-21]. La rupture survient le
tion hépatique, éventuellement favorisée par une complication plus souvent chez les hommes et sur cirrhose alcoolique. Son
infectieuse. Chez un cirrhotique ayant une fonction hépatique traitement est un sujet de controverses. Il a été décrit un
altérée, il est possible d’envisager la cure de HO en même temps traitement conservateur, qui associe pansement stérile, ponc-
que la transplantation hépatique si cette dernière est réalisée ou, tions répétées d’ascite et antibiotiques, et qui expose à une
en l’absence de transplantation, de ne traiter la HO que si elle mortalité très élevée (60-90 %) dans des séries anciennes [22]. Le
devient symptomatique. traitement chirurgical (cure de HO), éventuellement associé à
un traitement de l’ascite par shunt péritonéojugulaire ou shunt
Hernie symptomatique portosystémique intrahépatique, doit être privilégié en raison
La HO peut être symptomatique sous forme de douleurs, d’une mortalité plus basse. Dans une étude publiée en 1988, la
d’épisodes d’engouement, de troubles trophiques cutanés. Mais mortalité du traitement conservateur était de 60 % et celle du
les complications les plus graves sont représentées par la rupture traitement chirurgical de 14 % [22]. Depuis ce travail, la prise en
et l’étranglement qui nécessitent une prise en charge immédiate charge du cirrhotique s’est améliorée avec en particulier
avec une mortalité et une morbidité élevées. L’accroissement de l’introduction du shunt portosystémique intrahépatique ;
la mortalité observée en cas de HO compliquée de rupture ou plusieurs cas cliniques et des petites séries ont rapporté de très
d’étranglement justifie que la cure de la HO soit envisagée dès bons résultats de ce traitement qui doit être envisagé après une
la survenue de symptômes, après une période de préparation courte phase (24 à 72 h) de traitement médical [23].
Figure 5. Hernie ombilicale avec troubles trophiques (ulcérations cuta- Figure 6. Après incision cutanée, dissection au contact du sac
nées dont une est le siège de lésions nécrotiques). péritonéal.
■ Traitement chirurgical
de la hernie
Soins préopératoires
Si le malade est hospitalisé avec une rupture ou une ulcéra-
tion cutanée, la paroi est nettoyée tous les jours et protégée par
un pansement stérile qui doit être fixé et éventuellement
changé régulièrement en cas de suintement d’ascite. Compte
tenu du risque de surinfection de l’ascite et du terrain, la région
opératoire et l’ombilic doivent être soigneusement nettoyés la
veille et le matin de l’intervention.
Figure 13. Hernie étranglée : ouverture du sac et prélèvement d’ascite Figure 15. Après agrandissement du collet, le grêle a repris une colo-
pour bactériologie. ration normale.
■ Traitement concomitant
Figure 14. Hernie étranglée contenant une anse intestinale : le collet
de la hernie et de l’ascite
étroit est responsable de l’anneau de striction visible sur le mésentère. (avec pose d’un shunt
péritonéojugulaire)
Toutefois, ces drains constituent une porte d’entrée avec
risque de surinfection de l’ascite à des germes éventuellement Le traitement de l’ascite réfractaire par la valve péritonéoju-
résistants : l’ascite doit donc être prélevée régulièrement et les gulaire peut intervenir quelques mois avant la réparation
drains doivent être enlevés au bout de quelques jours. pariétale, mais cela expose aux risques d’incarcération de la
hernie après la pose de la valve à cause de l’évacuation brutale
de l’ascite, puis à l’embolie gazeuse lors de la cure secondaire de
Traitement chirurgical de la rupture la hernie, d’où l’intérêt de réaliser un traitement concomitant
d’ombilic dont la faisabilité a été démontrée, la récidive de la HO étant
Au plan technique, la particularité de cette indication est nulle en cas de perméabilité du shunt et d’absence de surinfec-
l’existence de lésions trophiques cutanées qui doivent être tion nécessitant le retrait du shunt [6].
réséquées. De plus, il existe un risque d’infection concomitante Ce shunt posé par voie chirurgicale entre la cavité péritonéale
de l’ascite qui doit obligatoirement être prélevée avec analyse et le système cave supérieur (veine jugulaire interne) est muni
cytologique (taux de polynucléaires) et mise en culture, ainsi d’une valve unidirectionnelle qui permet une réinfusion directe
qu’un risque de suppuration pariétale postopératoire justifiant du liquide péritonéal. Ce shunt expose dans la période posto-
un drainage sous-cutané par Redon. pératoire immédiate à un risque de coagulation intravasculaire
disséminée dû au passage du liquide péritonéal riche en facteurs
de coagulation dans la circulation systémique. Ce risque peut
■ Soins postopératoires être diminué par le remplacement du liquide ascitique par du
sérum physiologique avant la mise en route du circuit. Les
Le patient reste perfusé pendant 24 à 48 heures. Durant cette autres complications fréquentes du shunt péritonéojugulaire
phase ou dans les jours qui suivent, les apports hydrosodés sont l’infection à staphylocoque (50 %), l’obstruction (40 % à
doivent être restreints pour limiter la poussée d’ascite postopé- 1 an) du shunt conduisant en cas d’infection à l’ablation du
ratoire. À cette restriction peuvent être adjoints un traitement matériel, et l’occlusion intestinale parfois liée à une péritonite
diurétique à faibles doses (par furosémide, spironolactone ou encapsulante [25, 26].
Transplantation hépatique
La transplantation hépatique a pour avantage de traiter
l’ascite et sa maladie causale. Une proportion importante de
patients ayant une HO symptomatique peut en théorie relever
d’une transplantation hépatique. Mais en pratique, le manque
de donneurs en transplantation cadavérique et les fréquentes
contre-indications liées au receveur (âge avancé, sevrage
alcoolique non effectif, comorbidité) limitent le recours à ce
traitement qui n’est indiqué que chez une minorité des cirrho-
tiques ayant une HO.
■ Matériel prothétique [2] Chapman CB, Snell AM, Rowntree LG. Decompensated portal
cirrhosis. JAMA 1931;97:237-44.
Les cirrhotiques sont plus exposés aux infections et donc [3] Belghiti J, Rueff B, Fékété F. Umbilical hernia in cirrhotic with ascites.
l’utilisation d’un matériel prothétique est discutable. Toutefois, Prevalence, course and management. Gastroenterology 1983;84:
dans de très rares cas, la réparation musculoaponévrotique ne 1363A [abstract].
peut se faire sans matériel prothétique. Quelques cas cliniques [4] Ginès P, Cardenas A, Arroyo V, Rodés J. Management of cirrhosis and
et une série récente de huit patients [30] montrent la faisabilité ascites. N Engl J Med 2004;350:1646-54.
de ce traitement. Parmi ces huit patients, dont quatre étaient en [5] Moore KP, Wong F, Gines P, Bernardi M, Ochs A, Salerno F, et al. The
attente de transplantation, trois avaient des lésions trophiques management of ascites in cirrhosis. Report on the consensus conference
sans infection du liquide d’ascite et tous ont été traités par une of the international ascites club. Hepatology 2003;38:258-66.
prothèse en polytétrafluoroéthylène avec mise en place simul- [6] Belghiti J, Desgrandchamps F, Farges O, Fékété F. Herniorrhaphy and
tanée d’un cathéter de dialyse péritonéale pour évacuer l’ascite concomitant peritoneovenous shunting in cirrhotic patients with
postopératoire ; avec un suivi de 8 à 30 mois, il y a eu une seule umbilical hernia. World J Surg 1990;14:242-6.
récidive de HO, un décès lié à la cirrhose et aucun cas de [7] Belghiti J, Hakim M. Hernias and the patients with ascites. In: Bendavid
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La HO est une pathologie fréquente chez le cirrhotique, 1997. p. 1207-45.
témoignant d’une maladie hépatique déjà avancée. Elle est [9] Thuluvathe JP, Bal JS, Mitchell S, Lund G, Venbrux A. TIPS for mana-
parfois très inesthétique et ses complications graves sont gement of refractory ascites: response and survival are both
représentées par la rupture et l’étranglement. Le traitement unpredictable. Dig Dis Sci 2003;48:542-50.
chirurgical de la HO ne peut être décidé qu’après une confron- [10] Ochs A, Rossle M, Haag K, Hauenstein KH, Deibert P, Seigerstetter V,
tation médicochirurgicale établissant, si l’ascite est réfractaire ou et al. The transjugular intrahepatic portosystemic stent-shunt procedure
non, puis en cas d’ascite réfractaire, son traitement le plus for refractory ascites. N Engl J Med 1995;332:1192-7.
approprié (Fig. 20). Pour les formes non compliquées et peu [11] Tripathi D, Therapondos G, Redhead DN, Madhavan KK, Hayes PC.
symptomatiques, la cure chirurgicale n’est pas souhaitable en Transjugular intrahepatic portosystemic stent-shunt and its effects on
raison des risques liés au terrain ; si une transplantation est orthotopic liver transplantation. Eur J Gastroenterol Hepatol 2002;14:
ultérieurement réalisée, la cure de la HO pourra être réalisée lors 827-32.
de la transplantation ou à son décours. Pour les formes symp- [12] Clavien PA, Selzner M, Tuttle-Newhall JE, Harland RC, Suhocki P.
tomatiques, un traitement concomitant et efficace de l’ascite Liver transplantation complicated by misplaced TIPS in the portal vein.
(médical, radiologique par TIPSS, ou chirurgical par dérivation Ann Surg 1998;227:440-5.
péritonéojugulaire) est nécessaire sinon le risque de récidive de [13] Leonetti JP, Aranha GV, Wilkinson WA, Stanley M, Greenlee HB.
la HO est très élevé. En cas d’urgence, le traitement de l’ascite Umbilical herniorrhaphy in cirrhotic patients. Arch Surg 1984;119:
durant la période postopératoire peut nécessiter des ponctions 442-5.
d’ascite itérative ou un drainage de la cavité abdominale [14] Hansen JB, Thulstrup AM, Vilstup H, Sorensen HT. Danish nationwide
pendant les premiers jours postopératoires. Au plan technique, cohort study of postoperative death in patients with liver cirrhosis
une réparation « ouverte » sans matériel prothétique est le plus undergoing hernia repair. Br J Surg 2002;89:805-6.
souvent utilisée. Un abord laparoscopique avec mise en place [15] Carbonell Alfredo M, Wolfe Luke G, DeMaria Eric J. Poor outcomes in
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Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-146, 2007.
Résumé. – Contrairement à la hernie de l’enfant, la hernie ombilicale chez l’adulte n’a aucune tendance
spontanée à la régression et doit donc, compte tenu du risque important d’étranglement, être
systématiquement opérée.
La cure des hernies ombilicales de petite taille ne pose pas de problèmes techniques, la suture simple
permettant d’obtenir un taux de guérison définitive important. À l’inverse, les hernies plus volumineuses
comportant un véritable defect de la paroi doivent être traitées comme les éventrations. La raphie simple
entraîne un taux de récidive de l’ordre de 30 %. Aussi, leur réparation nécessite un renforcement de la paroi
par une prothèse pariétale non résorbable, seule à même d’assurer une paroi définitivement solide. Les
différentes modalités techniques de mise en place de ces prothèses sont décrites.
© 2000 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Rappel anatomique
L’ombilic est la cicatrice pariétale laissée par l’insertion du cordon.
Situé à mi-distance entre l’appendice xiphoïde et le pubis, il est
constitué par un anneau fibreux tapissé profondément par le tissu arrière, l’ombilic est tapissé par le tissu sous-péritonéal (fascia
sous-péritonéal et le péritoine et recouvert en superficie par des ombilicalis de Richet) et le péritoine [17]. Ce dernier est souvent
téguments. adhérent à l’anneau et difficilement clivable du plan cutané, mais en
L’anneau ombilical est comblé en partie par des cordons fibreux dehors de l’anneau, on peut trouver un plan de clivage entre
correspondant, à sa partie inférieure, à l’ouraque et aux deux artères péritoine et aponévrose postérieure des grands droits, plan où peut
ombilicales et, à sa partie supérieure, au ligament rond et à la veine être glissée une prothèse de petite taille (fig 1, 2).
ombilicale. En avant, la peau adhère à l’anneau ombilical car, à ce L’anneau ombilical constitue de ce fait un point de faiblesse de la
niveau, les différentes couches sous-cutanées (pannicule adipeux, ligne blanche. Mesurant normalement à l’âge adulte 2 à 3 mm, il
fascia superficialis, tissu cellulaire sous-cutané) sont très minces. En peut dans certaines circonstances s’élargir et laisser ainsi se
développer une véritable hernie. De petite taille au début, laissant
passer à travers l’anneau de la graisse sous-péritonéale, elle va peu
Jean-Luc Bouillot : Professeur des Universités, praticien hospitalier, service de chirurgie, Hôtel-Dieu de Paris,
à peu augmenter de volume, constituant une volumineuse hernie
1, place du Parvis-Notre-Dame, 75181 Paris cedex 4, France. ombilicale. La peau recouvrant ces hernies s’amincit, devient
Toute référence à cet article doit porter la mention : Bouillot JL. Hernie ombilicale de l’adulte. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Techniques chirurgicales – Appareil digestif,
40-145, 2000, 9 p.
40-145 Hernie ombilicale de l’adulte Techniques chirurgicales
4
Petite hernie
PRINCIPE
Ces hernies de petit volume (collet de la hernie inférieur à 2 cm)
résultent d’un élargissement de l’anneau ombilical. Le traitement
nécessite une résection du sac associée à une fermeture simple de
1 l’anneau ombilical.
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SOINS PRÉOPÉRATOIRES
Nettoyage soigneux la veille et le matin de l’intervention de la
cicatrice ombilicale.
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B 8 Prothèse mise par voie laparoscopique.
A. Prothèse de polytétrafluoroéthylène (PTFE) intrapéritonéale fixée aux quatre
coins par des fils non résorbables transfixiant la paroi abdominale.
lente à sa périphérie pour éviter le déplacement de cette prothèse en B. La prothèse déborde largement l’anneau ombilical. Après sa mise en place aux
postopératoire. L’anneau ombilical peut ensuite être refermé en quatre coins, elle est amarrée solidement à la paroi par de nombreuses agrafes.
avant de la prothèse à points séparés de fil à résorption lente,
puisque la solidité ultérieure est assurée par la prothèse incorporée
contacte pas d’adhérences avec les viscères mais dont la face
dans la paroi. Lorsque aucun plan de clivage prépéritonéal ne peut
superficielle de type treillis adhère et s’incorpore à la paroi.
être libéré, force est de mettre en place la prothèse en
rétromusculaire, en avant du feuillet postérieur de la gaine des Pour dimensionner exactement la prothèse à la taille requise, on peut
grands droits, comme on le réalise au cours d’une cure soit mesurer directement les dimensions de l’anneau herniaire sous
d’éventration. Le principe en sera exposé pour le traitement des laparoscopie, soit plus facilement repérer sur la peau, en s’aidant de
volumineuses hernies ombilicales. la palpation et du contrôle visuel laparoscopique, les limites du
defect pariétal. La prothèse est taillée à la dimension voulue. Elle
¶ Traitement laparoscopique doit dépasser latéralement dans toutes les dimensions d’au moins 3
à 4 cm les limites du collet herniaire. Des fils repères, en laissant les
Il s’agit d’une technique nouvelle, avec une expérience encore deux chefs longs, sont alors mis en place aux quatre coins de la
limitée des différentes équipes [4, 5, 20]. L’intervention est réalisée sous prothèse. La prothèse est introduite dans la cavité abdominale, soit
anesthésie générale, vessie vide. Le patient est placé en décubitus par le trocart d’optique, soit par l’intermédiaire d’un trocart
dorsal, jambes écartées. Le chirurgien se place soit sur le côté, soit supplémentaire de 10 mm placé en face du trocart d’optique, puis
entre les jambes. déployée dans la cavité abdominale. Quatre minimes incisions sont
L’intervention est débutée par la création du pneumopéritoine, au faites sur la peau, et par l’intermédiaire d’une aiguille de Reverdin
mieux par open-laparoscopie. Le trocart d’optique est inséré à ou d’un attrape-fil laparoscopique type Endo-close (USSC, Norwalk,
distance de l’ombilic, soit latéralement, sur le côté droit ou gauche, Ct, États-Unis) les quatre fils préalablement installés sur la prothèse
soit pour des raisons esthétiques en sus-pubien, le chirurgien étant sont récupérés en dehors. Ils sont noués s’appuyant sur l’aponévrose
entre les jambes. L’utilisation d’une optique à 30° facilite le geste antérieure, permettant ainsi de positionner correctement la prothèse
opératoire. Deux autres trocarts opérateurs de 5 mm sont installés qui s’applique profondément à la paroi abdominale (fig 8A). On
latéralement à distance du trocart d’optique. Après exploration de complète la fixation de la prothèse en périphérie par de nombreux
la cavité péritonéale, on se porte sur la région ombilicale. Le contenu points de suture intrapéritonéale ou par des agrafes métalliques
du sac est libéré de ses adhérences intrasacculaires et de l’anneau (Roticulator Endo-universalis 65°, USSC) ou hélicoïdales (Tacker,
ombilical, le sac péritonéal étant laissé en place. Ceci se fait comme Origin) (fig 8B). Certains placent un drainage aspiratif au-dessus de
lors de toute viscérolyse laparoscopique aux ciseaux ou au crochet la prothèse pour diminuer le risque de sérome. L’intervention est
coagulateur. Il est souvent utile de réduire manuellement la hernie terminée après exsufflation complète de la cavité péritonéale et
par pression externe sur l’ombilic pour faciliter ce temps de fermeture soigneuse des brèches aponévrotiques en regard des
libération herniaire. orifices de trocart de 10 mm pour éviter tout risque d’éventration
La réparation pariétale nécessite la mise en place d’une grande postopératoire.
prothèse intrapéritonéale qui déborde largement les limites du collet
herniaire. Pour ce type de réparation, on doit utiliser une prothèse
ne créant pas d’adhérences avec les viscères sous-jacents. On utilise Hernie volumineuse
ainsi soit une prothèse en polytétrafluoroéthylène (PTFE) qui a pour
inconvénient de ne jamais s’incorporer à la paroi, soit une prothèse Le traitement chirurgical des volumineuses hernies ombilicales de
d’un nouveau genre, type composite, qui par sa face profonde ne l’adulte s’apparente à celui des éventrations médianes de la paroi
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abdominale. L’anneau ombilical est ici très élargi avec une véritable électrique, afin de pouvoir réintégrer en totalité dans la cavité
perte de substance et l’objectif chirurgical est d’obtenir une paroi abdominale l’ensemble des viscères herniés, qui ne doivent plus
solide, les préoccupations esthétiques passant au second plan. De avoir aucune adhérence avec le sac ou le collet. Il est exceptionnel
fait, il est souvent nécessaire de réséquer une grande partie de peau, d’avoir à réséquer une anse intestinale du fait d’adhérences étendues
notamment ombilicale, en réalisant une véritable omphalectomie. ou inextricables. Ceci contre-indiquerait l’usage d’une prothèse non
Classiquement, lorsque la peau est ulcérée en regard de la hernie, résorbable de renforcement (fig 9).
l’incision est horizontale, passant à distance de la peau abîmée, On peut alors finir de réséquer le sac en le sectionnant sur tout son
réalisant une vaste incision en « quartier d’orange » (fig 9) (bien pourtour au niveau du collet ombilical. On enlève ainsi d’un bloc la
souvent cependant, notamment lorsque la peau est restée de bonne hernie et toutes ses enveloppes.
qualité, nous réalisons une incision verticale comme pour une cure
d’éventration sans traiter l’excédent cutané dont on ne se La réfection de la paroi se fait alors selon les mêmes modalités que
préoccupera qu’en fin d’intervention). Le tissu cellulaire sous- lors de la cure d’une éventration médiane.
cutané est incisé jusqu’au plan aponévrotique, facilement Il est parfois possible de réaliser une fermeture simple de la paroi :
reconnaissable par sa texture et sa couleur blanche. La masse après fermeture du plan péritonéal, l’aponévrose est fermée par des
herniaire (peau, graisse et sac) est ainsi libérée de la paroi. On peut points séparés de fil non résorbable placés soit horizontalement, soit
alors se diriger prudemment vers le collet herniaire en restant au au mieux verticalement, ce qui est plus fonctionnel car permettant
ras de l’aponévrose antérieure. L’hémostase de la paroi doit être faite une reconstitution anatomique de la paroi abdominale, avec des
pas à pas pour limiter au maximum les risques d’hématome muscles grands droits jointifs sur la ligne médiane. Il peut être
postopératoire fréquents dans ce type de chirurgie. Il faut alors nécessaire, en cas de tension excessive des sutures, d’y associer des
libérer le collet du sac qu’il est souvent utile d’élargir en incisant la incisions de relaxation type Gibson ou Clotteau-Prémont. Plus
ligne blanche au-dessus ou au-dessous de la hernie. L’ouverture du rarement, il a été préconisé l’utilisation d’autoplastie, type Welti-
sac doit être très prudente compte tenu des adhérences quasi Eudel, mais cette plastie fragilisant latéralement la paroi abdominale
constantes qu’ont contractées les viscères herniés avec le sac. ne nous paraît guère recommandable.
Dès qu’une brèche est faite dans le péritoine, on y insinue un doigt Il nous paraît préférable dans ces volumineuses hernies ombilicales,
et c’est sur celui-ci qu’on va pouvoir en toute sécurité élargir la pour obtenir une paroi solide, de renforcer la suture aponévrotique
brèche péritonéale. par une prothèse non résorbable. Celle-ci peut être placée dans
Le sac ouvert, il faut libérer son contenu qui y adhère toujours. Cette différents sites mais notre pratique nous fait préférer le site
libération doit être faite prudemment aux ciseaux ou au bistouri rétromusculaire prépéritonéal.
6
Techniques chirurgicales Hernie ombilicale de l’adulte 40-145
Prothèse intrapéritonéale
1
Elle suppose l’utilisation d’un matériau qui ne va pas contracter
d’adhérences avec les viscères intra-abdominaux. La prothèse la plus
utilisée est de type PTFE : elle doit être de grande taille, débordant
largement l’orifice ombilical, et nécessite de nombreux points de
fixation à sa périphérie par des fils non résorbables, car cette
prothèse ne s’incorpore pas à l’organisme [3]. Son emploi nous paraît
se limiter aux rares cas où la perte de substance est trop importante
pour permettre un rapprochement des deux berges de l’orifice
2 3 ombilical. Plus récemment sont apparues de nouvelles prothèses à
10 Site d’implantation d’une large prothèse rétromusculaire. La prothèse est située double face (type prothèse parietex composite, Sofradimt) dont
entre en avant le muscle grand droit et en arrière un plan constitué du péritoine et de l’une, superficielle, adhère à la paroi et l’autre, profonde, au contact
l’aponévrose postérieure du grand droit. des viscères, éviterait tous les risques inhérents aux prothèses
1. Suture de l’aponévrose antérieure ; 2. prothèse non résorbable fixée en périphérie ; 3.
pariétales placées dans la cavité péritonéale.
suture en un plan du péritoine et de l’aponévrose postérieure.
Prothèse prémusculoaponévrotique
¶ Prothèse rétromusculaire
Cette technique proposée par Chevrel pour la cure des grandes
Il s’agit à notre sens du site idéal de mise en place d’une prothèse éventrations médianes nous paraît peu satisfaisante car la prothèse
de renforcement pariétal (fig 10). La prothèse utilisée doit être non ne s’oppose pas aux forces de poussée de dedans en dehors et
résorbable, de type « treillis », ce qui permet son incorporation dans surtout son implantation superficielle sous la peau l’expose à un
la paroi en quelques semaines. Il en existe plusieurs types : notre risque infectieux important, notamment en cas de sérome ou de
préférence va au Dacront (Mersuturet) du fait de sa souplesse, mais désunion cutanée [7].
il existe aussi d’autres matériaux, notamment en polypropylène
(Prolènet ou Marlext) qui sont plus solides mais de moindre
souplesse. Elle doit être de grande taille, débordant largement la
zone de faiblesse pariétale ; elle nécessite une asepsie rigoureuse, Cas particuliers
renforcée par une antibioprophylaxie systématique.
Après le traitement du sac, l’anneau ombilical est agrandi de 2 ou HERNIE ÉTRANGLÉE
3 cm verticalement en haut et en bas, en incisant la ligne blanche. La
gaine des muscles grands droits est ensuite ouverte par incision la Le diagnostic de hernie ombilicale est souvent porté à l’occasion
plus médiale possible du feuillet postérieur au bistouri électrique. d’un étranglement. Celui-ci impose un traitement en urgence.
Le plan de clivage entre feuillet postérieur et muscle est avasculaire L’objectif est ici de traiter la complication aiguë, en levant
et se libère sans difficulté. Il convient d’éviter de sectionner les l’occlusion. Le traitement des viscères herniés est fonction des
rameaux perforants des nerfs intercostaux. On procède ainsi des lésions rencontrées en cours d’intervention, imposant ou non une
deux côtés. Vers le haut et vers le bas, il faut dépasser d’au moins 4 résection intestinale. La réparation pariétale devient ici secondaire.
ou 5 cm l’incision aponévrotique médiane en s’insinuant sous la Il faut refermer l’orifice ombilical par simple raphie (au fil résorbable
ligne blanche. La suture du plan postérieur par un surjet de fil à ou non résorbable). Dans tous les cas, il ne faut pas entreprendre de
résorption lente prenant ensemble le péritoine et le feuillet vastes décollements ni mettre en place de prothèse non résorbable
postérieur de la gaine des droits permet d’interposer une structure compte tenu du risque infectieux important. On peut dans certains
entre les viscères et la prothèse. Après avoir changé de gants et cas, pour éviter le risque de lâchage précoce de la suture
rebadigeonné le champ opératoire, la prothèse est mise en place. aponévrotique et d’éviscération, proposer la mise en place d’une
Elle est doit être bien tendue mais pas trop et fixée en périphérie par prothèse résorbable intrapéritonéale. Ultérieurement, en cas de
de très nombreux points de fil à résorption lente solidarisant la récidive de la hernie ombilicale, il sera toujours possible de
prothèse au feuillet postérieur de l’aponévrose sur laquelle elle réintervenir à froid pour réaliser un traitement idéal avec prothèse.
repose. Aucun point transfixiant la totalité de la paroi n’est
nécessaire pour fixer la prothèse, comme d’autres ont pu le décrire HERNIE OMBILICALE ET PLASTIE ABDOMINALE
dans le traitement des éventrations. La fixation de la prothèse par
agrafes métalliques, après avoir fait un ourlet, nous semble à Il est fréquent de retrouver à l’examen clinique des femmes
proscrire car elle expose au risque de névromes, la mise des agrafes porteuses d’un vaste tablier abdominal et souhaitant se faire opérer
étant faite à l’aveugle et risquant de blesser les branches des nerfs d’une plastie abdominale une hernie ombilicale jusque-là
intercostaux. Lorsque la prothèse est mise en place, on vérifie sa asymptomatique. En cas de hernie de petit ou moyen volume
bonne tenue, en fixant la partie centrale de la prothèse par quelques pouvant être traitée par raphie simple, il paraît possible de concilier
points supplémentaires, de telle façon qu’en aucun cas elle ne puisse les deux interventions dans le même temps opératoire. À l’inverse,
se déplacer dans les suites opératoires. Après vérification soigneuse en cas de très volumineuse hernie, il nous semble dangereux
de l’hémostase et mise en place de drains aspiratifs, le plan antérieur d’associer les deux gestes, compte tenu de l’importance des
est suturé par un surjet de fil à résorption lente. En cas de traction décollements. Nous préconisons un premier temps pariétal avec
excessive, des incisions de relaxation sont réalisées sur la gaine mise en place d’une prothèse rétromusculaire. Le tracé de l’incision
antérieure des grands droits (fig 11). cutanée doit tenir compte de la future plastie abdominale. Quelques
mois plus tard, il est alors possible de réaliser la plastie abdominale
La fermeture pariétale se fait sans difficulté : après mise en place de
chez une patiente avec une paroi abdominale solide et sans risque
drains sous-cutanés, capitonnage du tissu cutanéograisseux puis
infectieux pour la prothèse déjà incorporée.
suture cutanée. Un pansement compressif est laissé 24 à 48 heures,
remplacé ensuite par une gaine ou ceinture de contention
abdominale pour limiter au maximum les épanchements HERNIE OMBILICALE ET CHIRURGIE LAPAROSCOPIQUE
sérohématiques ; il est recommandé au patient de la conserver
Le développement de la chirurgie laparoscopique peut entraîner
pendant 1 mois.
l’apparition de petites éventrations ombilicales. En effet, la mise en
place d’un trocart de 10 mm au niveau ombilical crée les conditions
¶ Autres sites d’implantation de prothèse
idéales pour le développement d’une éventration postopératoire qui
Ils ont été décrits dans la cure des éventrations et des volumineuses a les mêmes caractéristiques qu’une petite hernie ombilicale. Au
hernies ombilicales. début de la chirurgie laparoscopique, l’orifice du trocart ombilical
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9
¶ 40-140
La hernie ombilicale de l’enfant est une affection bénigne et fréquente. Généralement asymptomatique,
l’évolution s’effectue vers une fermeture spontanée de l’anneau ombilical dans les trois premières années
de vie. Contrairement aux hernies inguinales, le risque d’étranglement est minime. La principale
indication chirurgicale reste la persistance d’une hernie ombilicale au-delà de l’âge de 4 ou 5 ans.
© 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Plan
¶ Introduction 1
¶ Technique chirurgicale 1
Installation 1
Incision cutanée 1
Dissection du sac herniaire 1
Incision du sac herniaire 1
Fermeture de l’anneau ombilical 2
Amarrage ombilical 2
Fermeture cutanée 2
¶ Indications 2
■ Introduction
La hernie ombilicale de l’enfant est une affection bénigne et
fréquente [1, 2] . Généralement asymptomatique, l’évolution
s’effectue vers une fermeture spontanée de l’anneau ombilical
dans les trois premières années de vie. Contrairement aux
hernies inguinales, le risque d’étranglement est minime [3, 4]. La
principale indication chirurgicale reste la persistance d’une
hernie ombilicale au-delà de l’âge de 4 ans [1, 5].
[2] Blumberg NA. Infantile umbilical hernia. Surg Gynecol Obstet 1980; [4] Papagrigoriadis S, Browse DJ, Howard ER. Incarceration of umbilical
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Méfat L., Becmeur F. Hernie ombilicale de l’enfant. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Techniques
chirurgicales - Appareil digestif, 40-140, 2007.
Résumé
Haut de page
NOTIONS ANATOMIQUES
Le muscle droit ou rectus abdominalis est né des insertions sur les 5e côte, 6e
côte, 7e cartilage dorsal : il est contenu, ainsi que le pyramidal, dans une gaine
fibreuse inextensible formée par les aponévroses de terminaison des muscles
larges de l'abdomen (fig. 1). Cette gaine est complète jusqu'à 4 cm au-dessous
de l'ombilic, faite des aponévroses des muscles larges passant en avant
(oblique interne et oblique externe) et en arrière (aponévrose du transverse et
oblique interne) et s'entrecroisant sur la ligne médiane : c'est la ligne blanche
(linea alba), véritable sternum fibreux [4] de 2 à 5 mm normalement, mais qui
peut être plus large en cas de « diastasis » (1 à 7 cm). La gaine est incomplète
au-dessous de l'arcade de Douglas ou linea arcuata, qui marque le passage de
l'aponévrose du transverse en avant des droits (fig. 2).
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INNERVATION ET VASCULARISATION PARIÉ TALES
L'innervation des muscles droits est assurée par les branches antérieures des
VIIe au XIIe nerfs intercostaux, et des nerfs iliohypogastriques et ilio-inguinaux
(ex-petit et grand abdominogénitaux) (fig. 3).
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Les réfections pariétales utilisent les espaces se situant entre les différentes
couches constitutives de la paroi :
Haut de page
RAPPEL CLINIQUE
Il faut différencier hernie et diastasis des droits : dans ce cas les muscles
peuvent être séparés de 5 à 6 cm. La « bandelette » fibreuse qui les sépare se
laisse distendre mais n'expose jamais à l'étranglement et n'impose pas la
chirurgie.
Avant d'opérer une hernie, il faut être sûr que la symptomatologie est à
rapporter à une lésion de la paroi : échographie vésiculaire, fibroscopie
gastrique et scanner sont conseillés. Il faut aviser le patient de l'importance de
tout geste de réfection de paroi, car présenter une intervention pariétale comme
« l'application de deux points » exposerait à en sous-estimer les risques.
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TRAITEMENT CHIRURGICAL
Anesthésie
Matériel de suture
Le matériel (fil) non résorbable doit être préféré, tissé ou monobrin, sauf chez
l'enfant [2].
Voie d'abord
L'incision cutanée médiane verticale est la plus usuelle. Sa longueur est
fonction du collet du sac et du souci esthétique. Il est bon de repérer le site de
la hernie, en préopératoire, sujet debout.
Deux solutions peuvent être adoptées : suture simple (avec ou sans incisions de
décharge), suture utilisant un matériel prothétique.
La technique est la même que celle décrite plus haut, avec incision verticale
sur la ligne blanche, refoulement du sac. S'il y a un sac avec rétrécissement sur
un contenu viscéral (épiploon, grêle), il faut ouvrir le péritoine, réduire le
contenu herniaire, réséquer le sac, fermer le péritoine [7].
Les points dits totaux, par fils habituels ou de type « Ventrofil® », utilisables
dans les éviscérations, ne sont pas recommandables non plus.
L'incision cutanée peut rester limitée à 6 cm ; elle permet, par jeu d'écarteur,
d'inciser verticalement la ligne blanche, de libérer la graisse sous-péritonéale.
On découvre le sac. Celui-ci est alors systématique ouvert, vidé de son
contenu, réséqué et fermé au fil résorbable, puis refoulé.
La prothèse sera mise en place sur ce plan, en arrière des muscles droits. Elle
est la plus haute possible (au moins 6 cm en dessus et sous le précédent
defect). Elle va transversalement jusqu'au bord externe du rectus. Les
dimensions habituelles sont de 12 cm de large sur 13 cm de haut.
Le plan de la gaine antérieure des droits est refermé par surjet au fil résorbable
monobrin no 1 (Maxon® ou PDS®).
Des agrafes cutanées ferment la peau. Un drain aspiratif doit être laissé en
arrière des muscles droits, retiré au 3e jour.
Cette approche récente apporte une ressource en cours d'évaluation. Elle peut
être indiquée en cas de petites hernies. Elle procède du même principe que la
cure des hernies inguinales par voie coelioscopique.
Haut de page
RÉ CIDIVES
Fig 1 :
Fig 1 :
Fig 2 :
Fig 2 :
Coupe des muscles de la paroi abdominale : dans le tiers cranial (A), les
aponévroses forment une gaine complète au rectus. Dans le tiers caudal (B), on
distingue le fascia transversalis qui double le péritoine. Toutes les aponévroses
passent en avant du rectus. Entre fascia transversalis et péritoine se situe le
fascia ombilicus prévésical avec les reliquats des artères ombilicales.
Fig 3 :
Fig 3 :
Fig 4 :
Fig 4 :
Fig 5 :
Fig 5 :
Fig 6 :
Fig 6 :
Abord par incision médiane limitée d'une hernie à petit sac et petit collet (A,
B). Après dissection et refoulement du sac, suture verticale à points séparés de
fil non résorbable no 0 (C).
Fig 7 :
Fig 7 :
Fig 8 :
Fig 8 :
Résumé
Rares mais non exceptionnelles (800 cas publiés), ces hernies ont été
décrites pour la première fois en 1764 par Klinkosh, qui leur donna le nom
de l'anatomiste flamand du XVIe siècle, Adrian Van der Spieghel exerçant à
Padoue qui avait décrit la ligne semi-lunaire. Cooper en collecte 23 cas en
1827 attribuant à la traversée musculonerveuse de la paroi un rôle dans la
survenue des hernies [10].
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RAPPEL ANATOMIQUE
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RÉ SUMÉ CLINIQUE
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Réparation pariétale
Variantes
Devant une suspicion de très petite hernie non palpable, une incision
latérale verticale sur la tuméfaction permet une exploration propéritonéale :
elle a été suggérée par Spangen [11].
La fermeture du sac réséqué est alors réalisée après suture des plans
aponévrotiques et musculaires par voie interne en deux plans.
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RÉ SULTATS
Après réparation des hernies de Spieghel, les récidives sont rares . Dans une
revue de la littérature portant sur 744 cas, Spangen n'a relevé que 6
récidives [11]. Sur 16 cas, Guivarc'h n'en a pas observé [1]. Toutefois, la
majorité des patients n'est pas revue à distance. Il nous semble cependant
que les grosses hernies représentent des indications à placer un matériel de
pariétosynthèse, soit en prépéritonéal, soit entre le plan transverse et celui
de l'oblique (prothèse de Dacron®).
Références
Fig 1 :
Fig 1 :
Fig 2 :
Fig 2 :
Fig 3 :
Fig 3 :
A, B. Hernie interstitielle.
C. Hernie extériorisée.
Fig 4 :
Fig 4 :
Fig 5 :
Fig 5 :
Fig 6 :
Fig 6 :
D. Fermeture du sac.
Fig 7 :
Fig 7 :
Résumé
Ce sont les hernies les plus rares : 100 cas environ publiés sous des
dénominations parfois différentes : hernies fessières ou hernies sciatiques.
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RAPPEL ANATOMIQUE
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RAPPEL CLINIQUE
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TRAITEMENT CHIRURGICAL
Voie médiane
Voie postérieure
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RÉ SULTATS
L'évaluation des résultats sur des cas isolés est bien difficile. Watson a
publié 35 cas [6] dont 10 ont été opérés seulement et 8 ont été des
découvertes nécropsiques. Il semble que la voie abdominale soit préférable,
l'abord postérieur est indiqué en cas de réduction viscérale difficile.
Références
Fig 1 :
Fig 1 :
Fig 2 :
Fig 2 :
Fig 3 :
Fig 3 :
Fermeture d'un orifice sus-pyramidal à l'aide d'une aponévrose pyramidale.
Fig 4 :
Fig 4 :
Fig 5 :
Fig 5 :
Fig 6 :
Fig 6 :
Fig 7 :
Fig 7 :
Résumé
Les hernies lombaires se font jour à travers l'une ou les deux failles de la
région sus-iliaque postérolatérale : le triangle superficiel lombaire dit de Petit
et le quadrilatère dit de Grynfelt. Ces hernies « costo-iliaques » (Larrey) sont
de taille variable, 2 à 20 cm de diamètre.
Il s'agit d'une pathologie rare (environ 400 cas publiés de hernies spontanées).
On rencontre surtout à ce niveau des éventrations après chirurgie rénale,
intitulées « incisional lumbar hernia » par les Anglo-Saxons.
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L'espace décrit en 1866 par Grynfelt [5] est limité sous le latissimo dorsi par la
12e côte, le bord postérieur du muscle oblique interne en avant, le serratus
postéro-inférieur en arrière (ex-petit dentelé postérieur et inférieur). En dedans,
le bord latéral de la masse des muscles spinaux représente une borne
inextensible. La toile de fond qu'un sac peut éventuellement refouler est
représentée par l'aponévrose du muscle transverse, zone affaiblie par le passage
de trois pédicules musculonerveux.
[3]
Des hernies peuvent donc apparaître soit directement par le triangle de Petit ,
soit au niveau du quadrilatère de Grynfelt.
On distingue :
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RAPPEL CLINIQUE
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TRAITEMENT CHIRURGICAL
Installation et incision
Le patient doit être installé, en décubitus latéral (fig. 5) sur la table cassée par
un billot.
Certains [8] utilisent une incision transversale à mi-chemin entre crête iliaque et
12e côte [7].
Le sac herniaire est rapidement repéré et isolé des parois musculaires que l'on
récline. Il n'est pas toujours nécessaire de réséquer, il suffit de le repousser.
Après refoulement du contenu herniaire, on dissèque les berges musculaires
qui ont été écartées, délimitant la brèche musculaire à refermer. Lors de
l'ouverture accidentelle du péritoine soufflé par la hernie, il faut éviter de léser
d'éventuels vaisseaux coliques accolés. Le contenu du sac vérifié, sa fermeture
doit être faite au fil résorbable. Un lipome peut être réséqué.
La suture des bords musculaires sans tension peut suffire si les orifices
sont petits, en cas de petite hernie : elle doit se faire en deux plans, au fil
non résorbable.
L'utilisation d'un lambeau musculaire taillé aux dépens du muscle
oblique externe ou du latissimus dorsi (grand dorsal) a été préconisée [9]. Le
muscle grand dorsal et rapproché du grand oblique en s'aidant d'une incision
du bord externe pour l'abaisser en drapeau vers la crête iliaque et le muscle
oblique externe (fig. 1, cf. pointillé).
En cas d'orifice large, la technique de Dowd ferme le triangle de Petit à
l'aide d'un lambeau pédiculé d'aponévrose fessière, à charnière iliaque,
rabattu vers le haut et suturé aux berges de l'orifice. Cette technique permet
d'obturer un orifice avec un fragment équivalent de fascia lata.
Celui-ci est découpé en descendant au besoin assez bas sur la face externe
de la cuisse (fig. 6).
Le fascia lata a également été proposé en autotransplant libre [15] ou en
laçage sous forme de bandelettes. Koontz [7] utilise deux lambeaux
quadrangulaires, l'un taillé aux dépens de l'aponévrose lombaire (fig. 7 :
petite flèche), l'autre de l'aponévrose fessière (fig. 7 : longue flèche).
Le treillis de tantale a été proposé par Thorak [18] et plus récemment la
pièce de Marlex® [6].
En fait, de préférence à tout procédé plastique, nous préconisons
l'utilisation d'une large prothèse de tulle de Dacron® ou de Gore-Tex® facile
à insérer entre deux plans musculaires. Cette prothèse doit être coupée large
de façon à recouvrir le plan profond en dépassant de 7 à 8 cm les limites du
quadrilatère de Grynfelt : la prothèse (de 15 × 15 cm) doit être fixée en bas
sur la crête iliaque et en profondeur par de nombreux points de fil
résorbable aux muscles sous-jacents. Lichtenstein en a publié un cas où la
pièce taillée de façon particulière était fixée par des languettes (fig. 8). Nous
utilisons une prothèse de Dacron®, amarrée par fils non résorbables sur la
crête iliaque et les dernières côtes (fig. 9 et 10) [1].
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RÉ SULTATS
Ils sont difficiles à analyser, chaque technique ayant ses adeptes à propos de 5
ou 6 cas seulement. Les récidives existent. Les plasties musculaires en
particulier y exposent, comme on a pu en voir décrites après plastie usant
l'aponévrose lombaire ou fessière ou le grand dorsal.
Références
Fig. 1 :
Fig. 1 :
Fig 2 :
Fig 2 :
Fig 3 :
Fig 3 :
Fig 4 :
Fig 4 :
Aspect scanographique des hernies lombaires.
A. Aspect normal.
Fig 5 :
Fig 5 :
A. Vue antérolatérale.
B. Vue postérieure.
Fig 6 :
Fig 6 :
Fig 7 :
Fig 7 :
Fig 8 :
Fig 8 :
Fig 9 :
Fig 9 :
Technique d'Alexandre.
Fig 10 :
Fig 10 :
Résumé
Les hernies obturatrices se définissent par le trajet du sac qui emprunte le canal
obturateur et se caractérisent par une relative rareté et par leur gravité, liée à la
fréquence de l'étranglement inaugural.
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Sac
Le sac est souvent précédé par un peloton adipeux. Il peut comprimer le nerf
obturateur et se frayer un passage entre les deux faisceaux du muscle
obturateur externe. Il contient souvent du grêle, mais on y a décrit également le
caecum, l'appendice, la trompe, la vésicule biliaire, un diverticule de Meckel,
l'épiploon ou la vessie).
Fréquence
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RAPPEL CLINIQUE
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TRAITEMENT CHIRURGICAL
En cas d'occlusion
Laparotomie médiane
Cette voie offre un choix : il faut préférer la voie médiane sous-ombilicale (la
plus souvent utilisée) à la voie paramédiane [6] que l'on ne doit réaliser que
devant une très forte suspicion de hernie obturatrice.
Dans certains cas, la réduction de la hernie et de son contenu est possible par
simple traction : l'état du viscère hernié en conditionne le traitement adapté
(résection ou non). Dans d'autres cas, la traction ne permet pas la réduction.
Les manoeuvres d'écartement périorificiel, qui doivent ménager les vaisseaux
et le nerf obturateur, peuvent s'avérer infructueuses. Il faut inciser la couverture
musculaire du trou obturateur dans le sens inféropostérieur. En cas d'échec, une
voie crurale s'impose .
Traitement de l'orifice
S'il est petit, l'orifice peut simplement être rétréci par un ou deux points. Le
péritoine est refermé par dessus.
S'il s'agit d'un large defect, celui-ci doit bénéficier en cas d'abord pelvien d'une
plastie par un segment d'aponévrose ou une prothèse endopelvienne (Dacron®,
polytétrafluoroéthylène, Vicryl® en cas de résection septique, ou encore un «
bouchon » de Marlex®).
A froid
La cure du contenu intestinal est faite en fonction des lésions : le péritoine est
refermé.
Fermeture de l'orifice
En l'absence de lésion septique
La suture simple à l'aide d'un fragment de fascia obturateur a été préconisée par
Bjö rk [2].
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RÉ SULTATS
Une mortalité de 13,27 % (sur 98 cas) a été rapportée par Gray en 1974 qui
contraste avec un taux de 48 % relevé en 1948 [7]. Arbman [1] rapporte assez
récemment encore une mortalité se situant entre 13 et 40 %. Bjö rk et coll. ont
eu deux décès sur neuf patients [2].
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CONCLUSION
Références
Fig 1 :
Fig 1 :
Fig 2 :
Fig 2 :
Fig 3 :
Fig 3 :
A. Incision verticale.
B. Dissection du sac.
Fig 4 :
Fig 4 :
C. Réduction du sac.
Fig 5 :
Fig 5 :
Fig 6 :
Fig 6 :
Fig 7 :
Fig 7 :
Voie d'abord inguinocrurale (A), selon Caby et Paya [3] : après fermeture du
sac et traitement du contenu, un lambeau du muscle moyen adducteur est
réalisé (B) et transposé dans l'orifice obturateur : il est fixé au ligament de
Cooper (C), intervention d'exception.
Traitement chirurgical des hernies périnéales latérales
Résumé
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RAPPEL CLINIQUE
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TRAITEMENT CHIRURGICAL
Voie abdominale
Une traction douce sur l'intestin permet de réduire la hernie. Le sac est attiré
dans le pelvis. On referme les lèvres musculaires de la brèche, par points
séparés de fil non résorbable, ce qui n'est pas toujours possible compte tenu de
la profondeur de la paroi. Si la brèche est large ou si la paroi paraît fragile, un
renforcement interne peut être réalisé par apposition-suture d'une prothèse :
tulle de Dacron®, Marlex®-mesh, ou polytétrafluoroéthylène (Gore-Tex®) .
En cas de hernie périnéale contenant du rectum, certains auteurs ont réalisé une
pexie du rectum au promontoire à l'aide de bandelettes de Dacron®, le
rapprochement musculaire apparaissant illusoire, et l'application d'une prothèse
difficile du fait de la profondeur de la paroi.
Voie périnéale
Elle peut être tentante, car superficielle, mais en fait elle est difficile et expose
à la récidive.
L'incision se fait sur la tumeur : voie directe, elle donne accès au sac herniaire.
Sa dissection est aisée ainsi que la réduction. Mais la réparation par cette voie
est toujours apparue délicate, le rapprochement musculaire est aléatoire. Il doit
se faire par points de fil non résorbable.
Cette voie mixte a été utilisée en cas de hernie volumineuse, lorsque le sac
descend et adhère aux parties molles du périnée. Elle trouve sa justification
quand la peau du périnée très distendue par le contenu herniaire doit être
réséquée. Koontz a pratiqué successivement deux temps : une voie abdominale
pour traiter la hernie et une voie périnéale deux semaines plus tard pour
réaliser l'excision-suture cutanée [4].
Résultat
Le pronostic est habituellement bon : des récidives ont été décrites, notamment
après cure par voie périnéale, d'où le conseil de renforcer la paroi musculaire
par voie pelvienne par une prothèse non résorbable apposée comme en cas de
hernie périnéale incisionnelle [1].
Références
Fig 1 :
Fig 1 :
Orifice des hernies périnéales, voie endopelvienne. Les hernies se font jour
entre releveur et ischiococcygien (1) entre les faisceaux du releveur (2).
Fig 2 :
Fig 2 :
Vue exopelvienne des hernies périnéales avec les passages herniaires en avant
et en arrière du muscle transverse (2). Noter en 1 et 3 le muscle releveur et en 4
le muscle grand fessier.
Fig 3 :
Fig 3 :
[2]
Coupe sagittale : vue d'une hernie périnéale supravésicale (d'après Devlin ).
Fig 4 :
Fig 4 :
A. Vue antérieure.
B. Vue postérieure.
40-165
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 40-165 (2004)
Méthodes thérapeutiques
PRINCIPES GÉNÉRAUX
L’objectif du traitement est de rétablir la continuité et la solidité de
la paroi. Le principe de la reconstitution anatomique, en particulier
de la ligne blanche par suture ou autoplastie aboutit à de fréquents
échecs. Sur le plan biologique, la cicatrisation d’une laparotomie aux
berges vascularisées n’est pas comparable à celle d’une cure
d’éventration aux berges cicatricielles. La tension nécessaire pour
affronter les berges est un élément majeur de la cicatrisation. Les
décollements larges et les incisions de relaxation ont pour but de
diminuer la tension excessive, facteur de récidive. Au principe de
reconstitution anatomique tend à succéder celui de substitution
prothétique sans tension où une prothèse résistante comble la brèche
pariétale et secondairement génère une nouvelle paroi. C’est
également le principe du traitement cœlioscopique.
La réduction des viscères herniés dans un « deuxième abdomen » a,
comme conséquence, une augmentation de la pression intra-
abdominale et, par retentissement diaphragmatique, une restriction
ventilatoire. Le pneumopéritoine thérapeutique préopératoire à dose
progressive a été préconisé pour favoriser la distension pariétale et
permettre l’adaptation à l’hyperpression abdominale. La
pariétoplastie prothétique sans tension a considérablement réduit les
indications de cette technique non dénuée d’inconvénients.
Figure 1 Projection pariétale des éléments musculoaponévrotiques de la paroi ab- Les manipulations des anses intestinales herniées et les viscérolyses
dominale antérieure. étendues doivent être évitées pour réduire l’intensité et la durée de
1. Ligne blanche. 2. Muscle transverse de l’abdomen (jonction musculoaponévrotique). l’iléus postopératoire. Ce serait l’un des avantages de l’abord
3. Muscle oblique externe de l’abdomen (jonction musculoaponévrotique). 4. Ligne ar- cœlioscopique.
quée. 5. Bord externe du muscle droit de l’abdomen. 6. Muscle oblique interne de l’ab- L’asepsie rigoureuse, la préparation cutanée et l’antibioprophylaxie
domen (jonction musculoaponévrotique). 7. Ligne blanche latérale.
permettent de réduire le risque septique et d’étendre les indications
2
Techniques chirurgicales Traitement des éventrations de la paroi abdominale 40-165
des prothèses. L’hémostase scrupuleuse, l’utilisation du bistouri des berges aponévrotiques. L’opérateur empaume et tracte de la
électrique pour les décollements sous-cutanés, les drainages main gauche le sac qui est clivé aux ciseaux ou au bistouri électrique
aspiratifs, voire l’utilisation de colles biologiques, [4, 5] les pansements pendant que l’aide rétracte la graisse sous-cutanée et la peau avec
compressifs et les gaines de contention pariétale permettent de des écarteurs de Farabeuf larges.
réduire le risque d’hématome et de sérome facteur d’infection. Dans
le choix de l’intervention, il faut privilégier celle qui comporte le ¶ Traitement du sac
moins de dissection et de décollement pariétal.
À l’exception d’éventrations de petite taille, inférieures à 3 cm, où,
Quelle que soit la technique, les sutures ne peuvent être effectuées par analogie avec une hernie ombilicale, le sac peut être réintégré et
que sur des aponévroses et non sur des muscles. une prothèse prépéritonéale mise en place pour le contenir, tout sac
La fixation des prothèses se fait par suture simple volumineux doit être ouvert et son contenu épiploïque ou intestinal
prothétoaponévrotique lorsqu’elles sont superficielles, par suture libéré en s’abstenant de toute viscérolyse injustifiée. Le sac est
transfixiantes, transpariétales largement appuyées lorsqu’elles sont ensuite réséqué de façon économique en conservant des larges
profondes. lambeaux périphériques dont la suture, sans valeur de soutien, est
Le matériel de suture doit permettre le maintien de l’affrontement indispensable pour couvrir une prothèse sous-jacente. La face
tissulaire pendant une durée suffisante pour assurer la cicatrisation. profonde de la paroi autour de la brèche doit être explorée sur toute
Les matériaux à résorption lente qui perdent 60 % de leur force de l’étendue de l’ancienne incision à la recherche d’orifices juxtaposés.
tension en 21 jours ne peuvent convenir. [15] En revanche, les Proches et séparés par des bandes fibreuses étroites, il faut les réunir
prothèses macroporeuses qui sont intégrées dans le tissu cicatriciel à la brèche principale. Distants, dans les éventrations plurifocales, il
en 2 semaines peuvent être fixées avec des sutures résorbables. [32] faut les inventorier, en réintégrer le sac et s’assurer que la couverture
Le résultat cosmétique doit être pris en considération. En chirurgie distale par la prothèse, indispensable dans ces cas, sera suffisante.
ouverte, l’excédent cutané doit être excisé. Il est illogique et Les anciens fils de suture doivent être supprimés et, si besoin,
préjudiciable au résultat d’associer une dermolipectomie à une cure cultivés pour étude bactériologique. Quant à l’avivement des berges,
d’éventration. En chirurgie cœlioscopique, la persistance de la il doit être limité à l’excision du tissu cicatriciel sans ouverture
disgrâce cutanée est un inconvénient qui peut nuire à la satisfaction aponévrotique intempestive avant d’avoir arrêté le choix du procédé
du patient. de réparation.
La qualité de vie, outre l’absence de récidive, doit être appréciée
¶ Procédés de réparation
après réparation. Elle est parfois affectée par la persistance de
douleurs et, après implantation de prothèse, par une restriction de Ils sont multiples mais un consensus tend à s’imposer en faveur de
la mobilité abdominale avec répercussion sur l’activité physique. la pariétoplastie prothétique.
Procédés autologues
PRÉPARATION ET ANESTHÉSIE
Leur objectif est la reconstitution anatomique et fonctionnelle de la
Localement, le traitement par antiseptique des lésions infectées, en
paroi abdominale, soit par suture simple, soit par autoplastie, soit
particulier chez l’obèse, est indispensable jusqu’à guérison complète.
par auto- et alloplastie combinées.
La préparation générale, dans les volumineuses éventrations, est
essentiellement respiratoire avec kinésithérapie, réduction du Sutures simples. Les réparations par suture simple, en un ou deux
tabagisme. Le pneumopéritoine thérapeutique préopératoire n’est plans, doivent être abandonnées du fait d’une incidence de récidive
plus guère utilisé. Son intérêt est contestable. Certains [36] lui dépassant 50 %. [2, 13, 24] La suture de tissus cicatriciels et la tension
préfèrent la ventilation artificielle postopératoire. Chez l’obèse, les nécessaire à l’affrontement sont des éléments péjoratifs, facteur de
tentatives de perte pondérale sont en général infructueuses. Des risque de récidive. L’artifice de Mayo-Judd (« vest-over-pants ») qui
contre-indications à la chirurgie peuvent apparaître au terme de la réalise une suture en deux plans superposés a donné un taux de
préparation. L’obésité morbide et l’insuffisance respiratoire récidive de 54 % à 10 ans dans une série prospective de 68
chronique sont des facteurs de risque vital. L’abord cœlioscopique patients. [23] Dans les éventrations de plus de 12 cm, l’incidence
serait plus efficace et moins risqué chez les patients obèses. d’échec à 5 ans a été de 78 %.
Le mode d’anesthésie dépend de la taille, du siège de l’éventration Les procédés de relaxation pariétale : afin de diminuer la tension
et des conditions générales. Une éventration de petite taille, de siège pariétale, outre le très large décollement sous-cutané qui s’impose
péri- et sous-ombilical peut être traitée sous anesthésie locorégionale. dans tous les cas, plusieurs procédés ont été décrits. Pas toujours
La réparation d’une volumineuse éventration avec réintégration suffisants pour garantir l’efficacité d’une suture simple, ils peuvent
viscérale et remise en tension pariétale impose la curarisation et être utiles pour assurer le recouvrement aponévrotique d’une
l’anesthésie générale. L’association d’une rachianesthésie par prothèse. La technique de Gibson [9] (Fig. 2) consiste en deux
cathéter avec infusion de bupivacaïne et de morphine permet une incisions verticales sur le feuillet antérieur de la gaine des droits de
analgésie postopératoire efficace. part et d’autre de la ligne médiane. Dans la technique de Clotteau-
Premont [6] (Fig. 3), de petites incisions aponévrotiques verticales,
L’antibioprophylaxie (Céporexinet 2 g à l’induction de l’anesthésie)
longues de 15 mm, séparées les unes des autres d’une longueur
est de pratique systématique en cas d’implantation prothétique.
identique, sont effectuées en quinconce sur trois ou quatre rangées,
permettant un élargissement transversal comparable à celui des
TRAITEMENT PAR LAPAROTOMIE greffes de peau en filet.
Sutures avec autoplasties. De nombreuses techniques d’avancement
¶ Incision de tissus sains pour combler le defect pariétal utilisant des lambeaux
aponévrotiques ou musculoaponévrotiques ont été décrites. Elles ont
L’incision cutanée comporte l’excision elliptique de l’ancienne toutes l’inconvénient de nécessiter une dissection plus ou moins
cicatrice. L’excédent cutané ne peut être apprécié et excisé qu’après complexe avec un risque hémorragique et de fragilisation d’autres
achèvement de la réparation pariétale en tenant compte de la zones pariétales. Les autoplasties aponévrotiques aux dépens de la
trophicité des berges. La conservation de l’ombilic est toujours gaine des muscles droits permettant une reconstitution de la ligne
préférable. blanche sont les plus courantes.
¶ Exposition du sac Procédé de Welti-Eudel [37] (Fig. 4) : le feuillet antérieur de la gaine
des droits est incisé longitudinalement à 15 mm de la berge de
Le sac herniaire constitué par le péritoine et le tissu fibreux cicatriciel l’éventration. Le lambeau interne est décollé du muscle et rabattu
est disséqué de la graisse sous-cutanée jusqu’au niveau du collet et vers la ligne médiane en évitant d’ouvrir la charnière entre feuillet
3
40-165 Traitement des éventrations de la paroi abdominale Techniques chirurgicales
4
Techniques chirurgicales Traitement des éventrations de la paroi abdominale 40-165
Figure 5 Autoplastie
d’Abrahamson.
L’opération de Welti-Eudel
est complétée par un laçage
des berges externes de l’in-
cision aponévrotique tra-
versant la suture médiane.
5
40-165 Traitement des éventrations de la paroi abdominale Techniques chirurgicales
6
Techniques chirurgicales Traitement des éventrations de la paroi abdominale 40-165
survient qu’à partir de la 6e semaine. [15] Le taux de récidive après Figure 10 Sites d’implantation des
cure par prothèse résorbable peut atteindre 75 %. [28] Ils ne sont prothèses.
indiqués que pour la réparation temporaire d’un defect pariétal dans 1. Intrapéritonéal. 2. Prépéritonéal. 3. Ré-
un contexte septique. Au contact de l’intestin, ils n’ont aucun effet tromusculaire préfascial. 4. Prémusculoa-
indésirable. ponévrotique.
7
40-165 Traitement des éventrations de la paroi abdominale Techniques chirurgicales
8
Techniques chirurgicales Traitement des éventrations de la paroi abdominale 40-165
Figure 13 Implantation rétromusculaire préfasciale (Rives). de dehors en dedans le feuillet antérieur de la gaine au niveau de la ligne blanche ex-
A. Ouverture du feuillet antérieur de la gaine du muscle droit près de la berge de l’éven- terne en évitant les pédicules vasculonerveux. E. L’aiguille charge un ourlet du bord de
tration. B. L’incision longitudinale du feuillet antérieur est agrandie aux ciseaux la prothèse. F. L’aiguille transfixie de dedans en dehors le feuillet antérieur de la gaine à
jusqu’aux limites de l’éventration. C. Le muscle droit est décollé aux ciseaux du feuillet 1 cm du point d’entrée. G. Coupe transversale de la prothèse rétromusculaire préfas-
postérieur de la gaine jusqu’à la ligne blanche externe. D. Début de la fixation de la pro- ciale fixée par des points en « U » à la face superficielle de l’aponévrose sur la ligne blan-
thèse rétromusculaire à l’aide d’aiguilles serties de fil non résorbable qui transfixient che externe.
tension est facilement clivée du corps musculaire qui est récliné et tension excessive grâce à la relaxation pariétale ainsi obtenue. Sinon,
soulevé par des écarteurs jusqu’à atteindre la ligne blanche externe une prothèse résorbable peut être suturée aux berges de l’orifice
reconnaissable aux pédicules vasculonerveux qu’il convient de évitant le contact avec les anses grêles. La prothèse choisie pour sa
respecter. Après dissection identique du côté opposé, la cavité souplesse et son grammage léger, de taille et de forme adéquates est
péritonéale est fermée par suture des berges aponévrotiques et/ou étalée dans l’espace rétromusculaire. Elle est fixée par des fils non
des lambeaux du sac de l’éventration à l’aide de points séparés de résorbables espacés d’environ 25 mm au niveau de la ligne blanche
fil non résorbable. Cet affrontement est en général possible sans externe en évitant les pédicules vasculonerveux. Dans la technique
9
40-165 Traitement des éventrations de la paroi abdominale Techniques chirurgicales
¶ Formes cliniques
Selon la topographie
Éventrations iliaques. Après appendicectomie compliquée ou
fermeture de colostomie, de taille en général peu importante, elles
siègent au niveau de la partie charnue des muscles larges. La règle
de n’affronter que des aponévroses ne peut être respectée. La suture
plan par plan au prix d’une dissection laborieuse est vouée à l’échec.
La plastie prothétique est le seul garant de succès. Le site privilégié
est l’espace prépéritonéal. La résection du sac n’est pas justifiée. Le
péritoine est décollé alentour aux doigts. Une prothèse
macroporeuse de forme arrondie débordant d’environ 5 cm les bords
de la brèche est disposée dans l’espace et fixée à sa périphérie par 6
à 8 points transfixiants en U, noués à la face superficielle de la paroi
musculoaponévrotique. Les muscles larges sont suturés au fil
résorbable au-devant de la prothèse avec un double drainage
aspiratif au contact de la prothèse et sous-cutané.
Éventrations sous-costales. Elles sont rares et surviennent, à droite,
après cholécystectomie compliquée de suppuration pariétale.
L’importance et la gravité du defect pariétal sont fonction de la
longueur et du siège de l’incision. Il convient à ce propos de rappeler
que la section exclusive du muscle droit par une incision
transversale à distance du gril costal est suffisante pour toute
chirurgie biliaire simple. L’élément lésionnel commun est la perte
anatomique et fonctionnelle du muscle droit qu’il convient de
reconstituer pour en préserver la physiologie. Dans le cas où
Figure 14 Implantation prémusculoaponévrotique (Chevrel). l’éventration est limitée au seul muscle droit, seule importe la
A. Autoplastie par retournement et suture en « paletot ». B. Fixation de la prothèse reconstruction de la gaine aponévrotique, toujours possible si la
prémusculoaponévrotique dépassant l’incision aponévrotique par des surjets de fils à
distance du gril costal a été respectée. Le feuillet postérieur ayant
résorption lente.
été suturé au fil non résorbable, une prothèse macroporeuse, de taille
et forme requises, est implantée en rétromusculaire préfascial,
originale de Rives, des points en U, après transfixion de toute la débordant d’au moins 5 cm les berges aponévrotiques. Elle est fixée
paroi et de la prothèse à l’aiguille de Reverdin, étaient serrés sur la par des points transfixiants en U à sa périphérie et, au centre,
peau sur des bourdonnets textiles. Il est préférable, après avoir libéré quelques points solidarisant la suture postérieure et la prothèse. Le
la face antérieure de l’aponévrose jusqu’à la ligne axillaire, de serrer feuillet antérieur est ensuite reconstitué et les moignons musculaires
les points, largement appuyés, sur l’aponévrose elle-même. La restés solidaires sont ainsi rapprochés. Dans le cas d’une incision
trop proche du gril costal avec perte de substance réelle, une
gestuelle comportant traction et élévation de l’aponévrose antérieure
prothèse superficielle avec ancrage aux reliquats fibreux costaux
par l’opérateur et écartement du muscle par l’aide est identique à
demeure la seule issue, éventuellement recouverte par une
celle de l’implantation intrapéritonéale. La suture du plan
autoplastie de retournement aux dépens du feuillet antérieur intact
aponévrotique antérieur, à points séparés en commençant par les
de la gaine controlatérale. Dans les cas où la solution de continuité
extrémités est possible avec ou sans procédé de relaxation pariétale. est limitée aux extrémités d’une longue incision sous-costale (ligne
Un drainage aspiratif par un ou deux tubes de Redon au contact de blanche et/ou muscles larges), une pièce prothétique macroporeuse
la prothèse est nécessaire. doit être implantée dans l’espace prépéritonéal et fixée à la
Implantation prémusculoaponévrotique : le principe est de renforcer périphérie par quelques points transfixiants. Une désunion totale ne
par une prothèse une réparation pariétale par suture et autoplastie. peut être traitée que par l’implantation intrapéritonéale d’une large
L’inconvénient de ce site est son caractère superficiel sans contre- prothèse fixée, si besoin, aux cartilages costaux. Le grand épiploon,
pression autre que le plan cutané, cause de fragilité à l’occasion à ce niveau, sépare efficacement la prothèse des viscères.
d’une augmentation de la pression abdominale. Toute infection
superficielle, toute nécrose cutanée expose inéluctablement la Selon la présentation clinique
prothèse. En urgence. Devant un syndrome occlusif aigu chez un patient
Technique : après réalisation de l’autoplastie par retournement porteur d’une éventration médiane, l’abord laparoscopique n’est
aponévrotique de Welti-Eudel ou de Chevrel, la perte de substance possible qu’en cas de brèche pariétale étroite manifestement
aponévrotique entre les berges externes de la gaine antérieure est responsable d’une incarcération intestinale avec distension
comblée par implantation d’une prothèse non résorbable. Dans la abdominale modérée. En revanche, devant une éventration
technique de Chevrel [4, 5] (Fig. 14), après autoplastie en paletot, la volumineuse avec incertitude quant au mécanisme de l’occlusion, la
laparotomie médiane itérative s’impose avec cure synchrone de
prothèse dépasse de 5 cm de chaque côté la perte de substance, fixée
l’éventration. L’obstruction du grêle implique une entérolyse
par quatre surjets de fil non résorbable à sa périphérie. L’encollage
souvent complexe et à haut risque de traumatisme intestinal. Le
favorise l’adhérence immédiate de la prothèse. Le drainage aspiratif
volvulus par bride avec ischémie irréversible nécessite une résection-
par deux tubes de Redon, voire davantage, et la contention
anastomose du grêle. Le traitement de l’éventration dans des
abdominale par bandage pendant 4 à 6 semaines permettent de
conditions de chirurgie propre-contaminée ne doit pas déroger au
diminuer la fréquence des séromes sous-cutanés, facteurs de risque principe de la pariétoplastie prothétique non résorbable, seul garant
infectieux. de la solidité pariétale immédiate supprimant le risque
Le choix entre ces quatre sites d’implantation n’obéit à aucune règle d’éviscération et de l’absence de récidive à distance. En contexte
stricte. La tendance actuelle est d’éviter le site superficiel et de septique potentiel, il faut limiter la dissection pariétale, renoncer aux
10
Techniques chirurgicales Traitement des éventrations de la paroi abdominale 40-165
autoplasties et préférer, après protection par le grand épiploon et en particulier l’adhésiolyse et certains inconvénients essentiels. Le
grand renfort de Bétadinet, faire une implantation intrapéritonéale principe est la pariétoplastie par prothèse non résorbable non
d’un biomatériau composite. Ce site met le mieux la prothèse à l’abri adhésiogène excluant toute reconstitution anatomique. La technique
de la survenue d’un sérome et d’une inoculation à partir d’un abcès habituelle est l’obturation du defect par une prothèse
superficiel. De nombreuses expériences, en chirurgie pariétale [8] ou intrapéritonéale débordant largement les limites sans résection du
viscérale [ 2 2 ] associant prothèse non résorbable et résection sac péritonéal. Les avantages sont ceux habituels de la
intestinale, en ont démontré l’innocuité. En revanche, toute cœliochirurgie : limitation des incisions, de la douleur, de la durée
péritonite interdit l’usage de prothèse non résorbable. L’étanchéité d’hospitalisation et de l’invalidité, diminution du coût auquel
temporaire de la paroi ne peut être assurée que par une prothèse s’ajoute l’absence de dissection pariétale garante d’une morbidité
résorbable en s’abstenant de toute dissection pariétale. moindre que par laparotomie. Quant à l’incidence des récidives, elle
En dehors de l’urgence. Devant une pathologie viscérale semble, dans les séries comparatives [11] égale ou inférieure à celle
abdominale chez un patient porteur d’une éventration médiane, il de la pariétoplastie par laparotomie. Les inconvénients tiennent à
faut choisir, lorsqu’elle convient, une voie d’abord élective, sous- une durée opératoire plus importante et, sur le plan
costale droite ou gauche, incision de Pfannenstiel, de préférence à la physiopathologique, à la persistance du sac, de la déformation
cure synchrone de l’éventration, facteur potentiel de majoration du cutanée et à l’absence de reconstitution de la physiologie musculaire
risque opératoire. pariétale.
La persistance du sac est contraire à tout principe de cure de hernie.
¶ Traitement des complications Elle explique la survenue constante de sérome dont la prévention
Hématome et sérome justifie la compression postopératoire par bandage. Pour pallier cet
inconvénient, certains préconisent la destruction du péritoine par
Ils favorisent la survenue d’une infection. L’hématome, conséquence
coagulation ou laser. D’autres préfèrent l’interposition prothétique
d’une dissection pariétale extensive et d’une hémostase incomplète
prépéritonéale au prix d’une intervention beaucoup plus longue et
n’est pas toujours prévenu par un drainage efficace. Les modalités
difficile. [29, 31]
thérapeutiques, évacuation précoce des caillots par incision limitée
ou drainage aspiratif percutané tardif, n’ont rien de spécifique. Le La persistance de la déformation cutanée et de l’incoordination
sérome est la complication la plus fréquente. Recherché par musculaire est source potentielle de non-satisfaction du patient. En
échographie systématique, son incidence peut atteindre 100 %, [32] le fait, la maturation de la cicatrisation qui survient en 90 ou 120 jours
plus souvent de taille minime sans traduction clinique. Il peut entraîne un rétrécissement de la surface de la prothèse pouvant
compliquer tout procédé de réfection pariétale. Le plus souvent, il atteindre 50 %. Ainsi, le defect original se comble, ce qui aboutit à
résulte de la réaction inflammatoire au corps étranger prothétique et un rapprochement des berges musculaires. Le déficit résiduel serait
se développe dans l’espace décollable au contact de celui-ci. Plus sans conséquence. Au plan fonctionnel, la cinétique de la paroi
rapide est l’incorporation de la prothèse (biomatériaux de type I) et prothétique se rapprocherait davantage de celle de la paroi normale
plus profonde est l’implantation sous une couche avec le PTFE qu’avec le polypropylène. [20] Le mode de fixation de la
musculoaponévrotique soumise à la pression abdominale, plus rares prothèse pourrait aussi intervenir. La fixation automatique
sont les séromes. La résorption spontanée est la règle. La ponction endoscopique n’intéressant pas la totalité de la musculature large
évacuatrice risque de favoriser l’infection. Le traitement par serait préjudiciable à la cinétique normale à l’inverse de la fixation
drainage aspiratif percutané n’est justifié que pour une collection par suture transaponévrotique. Enfin, la fibrose cicatricielle
importante et persistante après plusieurs semaines afin d’éviter succédant au sérome pourrait effacer en partie la redondance
l’enkystement. cutanée.
11
40-165 Traitement des éventrations de la paroi abdominale Techniques chirurgicales
Création du pneumopéritoine
Le pneumopéritoine peut être créé par l’aiguille de Veress introduite
dans l’hypocondre gauche mais il est préférable d’utiliser une
technique ouverte ou un trocart type Visiportt.
Figure 16 Traitement laparoscopique d’une éventration médiane périombilicale.
Quatre aiguilles longues délimitent l’éventration. Le tracé de la prothèse qui doit dé-
Adhésiolyse
passer les limites de 5 cm est effectué sur la peau avec des repères cardinaux. La pro-
Elle est effectuée en associant préhension et traction de la main thèse assortie au tracé est munie de repères identiques et de quatre points cardinaux de
gauche et section-coagulation de la main droite. La coagulation fixation.
monopolaire doit être évitée au contact de l’intestin. Il est
fondamental de s’assurer de l’intégrité de l’intestin. Toute plaie adhésiogène (Intramesht, Bard Composixt, Wallmesht), soit
méconnue est facteur de morbidité, voire de mortalité. Une plaie prothèse de PTFE expansé avec une face viscérale lisse microporeuse
limitée et franche peut être suturée par laparoscopie. Sinon, une et une face pariétale irrégulière permettant une incorporation rapide
courte laparotomie permet suture ou résection dans les meilleures (Dualmesh Plust). Sa taille doit dépasser de 3 à 5 cm les limites de
conditions. Une plaie du grêle avec souillure limitée ne contre- la brèche. Pour la définir de façon précise, en particulier chez les
indique pas la poursuite de l’intervention. L’adhésiolyse doit être patients obèses, des aiguilles longues sont introduites à travers la
suffisante pour délimiter la brèche pariétale en tenant compte du peau aux berges présumées de l’éventration et leur position est
débord nécessaire à l’implantation de la prothèse et pour repérer contrôlée par voie endoscopique. Les quatre points cardinaux sont
des orifices adjacents. ainsi repérés et le contour de la brèche est tracé sur la peau au
crayon feutre. L’abdomen ayant été exsufflé, la taille réelle de la
Préparation de la prothèse (Fig. 16) prothèse nécessaire est mesurée en ajoutant 3 à 5 cm de tous côtés.
Le biomatériau doit convenir à l’usage intrapéritonéal : soit prothèse Sur la prothèse découpée, des repères conventionnels sont dessinés
composite de polyester ou polypropylène avec couche viscérale aux points cardinaux de sa face pariétale et reproduits à l’identique
résorbable (Parietex Compositet, Sepramesht) ou microporeuse non sur la peau. À chaque point cardinal, un fil de suture non résorbable
12
Techniques chirurgicales Traitement des éventrations de la paroi abdominale 40-165
est passé et lié en laissant les deux chefs suffisamment longs. Pour
une large prothèse, mieux vaut mettre en place six sutures.
Introduction de la prothèse
La prothèse enroulée, face viscérale et fils de suture à l’intérieur, est
introduite par le trocart de 10 ou 12 mm. Pour un volume
prothétique plus important, l’introduction peut se faire par l’orifice
du trocart après l’ablation de celui-ci, en enveloppant la prothèse
dans un sac plastique, ce qui évite tout contact avec la peau et tout
traumatisme de la surface viscérale. Une pince à préhension
provenant du trocart controlatéral facilite cette manœuvre. Dans
l’abdomen, la prothèse est déroulée et sa face viscérale identifiée
grâce à sa texture ou à sa couleur ou aux repères préalablement
dessinés.
Fixation de la prothèse
Deux techniques sont utilisées. Figure 17 Fixation laparoscopique d’une prothèse composite intrapéritonéale par
suture transaponévrotique.
Sutures transaponévrotiques et agrafage automatique [21] (Fig. 17). Les deux chefs des points cardinaux sont extériorisés par la même incision cutanée mais
À chaque repère cutané, une petite incision est faite et les fils de par ponctions transaponévrotiques juxtaposées à l’aide du passe-fil. Les fils sont noués
suture sont extériorisés à l’aide du « passe-fil ». Les deux chefs de à la face superficielle de l’aponévrose. La fixation est complétée par des sutures inter-
médiaires et par agrafage.
chaque suture émergent par le même orifice cutané mais par une
ponction aponévrotique distincte à 1 cm d’intervalle. Toutes les Fermeture des orifices
sutures sont passées puis liées dans le tissu sous-cutané. La fixation La prévention des éventrations justifie de fermer tout orifice de
des berges est complétée par agrafage tous les 15 mm en exerçant trocart égal ou supérieur à 10 mm, par voie externe ou vidéoassistée.
une contre-pression abdominale. Des sutures transaponévrotiques
complémentaires à intervalle de 5 cm sont recommandées. La Soins postopératoires
tension de la prothèse doit être suffisante pour éviter toute Une compression par bandage pendant 1 semaine est appliquée à
protrusion dans le defect pariétal après exsufflation de l’abdomen. toute éventration importante. Elle n’évite pas la survenue constante
d’un sérome de résorption habituellement spontanée. Le drainage
Agrafage exclusif. Préconisée par Morales-Conde, [26] la fixation est
aspiratif préventif du sac péritonéal n’est pas recommandé.
assurée par une « double couronne » d’agrafes hélicoïdales. Une
première couronne fixe le bord externe de la prothèse en ¶ En urgence
commençant par les points cardinaux repérés, avec des intervalles Devant une occlusion aiguë du grêle chez un patient porteur d’une
de 1 cm, en débordant de 3 cm les limites de la brèche. Une petite éventration présumée responsable sans météorisme important,
deuxième couronne solidarise la prothèse aux berges de l’abord cœlioscopique est justifié. La réduction de l’anse herniée
l’éventration. En faveur de ce type de fixation plaident la rapidité dans l’orifice pariétal peut nécessiter un agrandissement de celui-ci
d’exécution, l’absence d’incision cutanée, un moindre risque au crochet coagulateur. Une ischémie irréversible impose la résection
d’infection et de douleur résiduelle. En revanche, il a été démontré par courte laparotomie incluant l’éventration. La pariétoplastie
que la résistance à la traction des sutures transaponévrotiques était prothétique non résorbable par cœlioscopie ou laparotomie reste
deux fois et demie supérieure à celle des agrafes hélicoïdales. [35] indiquée en l’absence d’inoculation péritonéale massive.
Références ➤
13
40-165 Traitement des éventrations de la paroi abdominale Techniques chirurgicales
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14
¶ 40-170
L’œsophage est la partie initiale du tube digestif, conduisant le bol alimentaire du pharynx à l’estomac. Il
traverse successivement la région cervicale, la région thoracique dans le médiastin postérieur, le
diaphragme, puis se termine dans la partie haute de l’abdomen en se jetant dans l’estomac. Nous
décrivons classiquement l’embryologie, l’anatomie descriptive, les rapports, la vascularisation et
l’innervation de l’œsophage en insistant sur l’importance de leur connaissance dans la compréhension de
la pathologie et de la chirurgie œsophagienne.
© 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
(Fig. 1)
¶ Introduction 1
¶ Embryologie de l’œsophage 1 L’œsophage dérive de l’intestin antérieur dès le 22e/23e jour
¶ Anatomie descriptive de l’œsophage 2 de gestation et s’étend depuis le diverticule respiratoire jusqu’à
Limites 2 la dilatation fusiforme de l’estomac. La séparation entre la
Direction 2 trachée et l’œsophage par le septum trachéo-œsophagien
Longueur 2 survient avant la fin de la 5e semaine de gestation. Les fistules
Forme 2 œsotrachéales sont dues à un trouble de cette séparation.
Structure de la paroi œsophagienne 3 Très court au début, l’œsophage s’allonge rapidement à cause
¶ Rapports de l’œsophage 4 du développement céphalique et cardiaque, et de la rétroflexion
Œsophage cervical 4 de la tête, pour atteindre sa taille finale à la 7e semaine de
Œsophage thoracique 5 gestation. Un défaut de cet allongement entraîne un risque
Œsophage supra-azygoaortique 5 d’atrésie.
Œsophage terminal 8 L’épithélium d’origine endodermique prolifère au cours des 7e
Œsophage diaphragmatique 9 et 8e semaines, oblitérant presque totalement la lumière et se
Œsophage abdominal 9 reperméabilise à la 10e semaine de gestation (phénomène de
¶ Vascularisation et innervation de l’œsophage 9 vacuolisation mis en cause dans la duplication de l’œsophage).
Artères 9 Les tissus de soutien, la musculeuse et la vascularisation sont
Veines 10 d’origine mésodermique.
Lymphatiques 10
Nerfs 10
¶ Conclusion 11 Figure 1. Embryologie,
8e semaine (17,5 mm). 1.
Trachée ; 2. C7 ; 3. œso-
■ Introduction
phage ; 4. poumon ; 5. es-
1
tomac ; 6. TH12.
Nous avons entrepris de remettre à jour l’anatomie chirurgi- 2
cale [1] de l’œsophage mais en préambule, nous voudrions
rendre hommage aux auteurs précédents et tout particulière- 3
ment, au regretté Dr D. Bastian, qui avait en collaboration avec
le Dr J. Mourot, rédigé un excellent article sur ce sujet. 4
Nous nous sommes attachés à introduire la nomenclature 5
anatomique internationale indispensable à la bonne compré-
6
hension des articles chirurgicaux anglo-saxons. Cet article est
enrichi d’une série de coupes horizontales avec correspondance
entre l’image anatomique et l’image tomodensitométrique.
Cette étude de coupes sériées permet une analyse précise des
rapports de l’œsophage et de l’extension des tumeurs
œsophagiennes.
Le muscle strié des deux tiers supérieurs de l’œsophage dérive une inflexion à droite au niveau TH4, une nouvelle inflexion
du mésenchyme des 4e et 6e arcs branchiaux caudaux (innervés sur la gauche de la 7e vertèbre thoracique (TH7).
par la Xe paire crânienne).
Le muscle lisse du tiers inférieur de l’œsophage se développe Longueur
à partir du mésenchyme splanchnique voisin (innervé par le
plexus nerveux viscéral splanchnique, dérivé des crêtes La longueur totale de l’œsophage est approximativement de
neurales). 25 cm, mais elle varie selon le sexe, l’âge et la taille. En
Les anomalies de développement des arcs aortiques peuvent pratique, on utilise le repère des mesures d’exploration endo-
avoir des retentissements sur l’œsophage et notamment dans les scopique : les incisives supérieures (ou arcade dentaire [AD]),
cas d’artère subclavière droite rétro-œsophagienne à l’origine de situées approximativement 15 cm au-dessus de la jonction
dysphagie à l’âge adulte (dysphagia lusoria). pharyngo-œsophagienne (2 ou 3 cm doivent être rajoutés si le
repère est la narine). La limite inférieure de l’œsophage se situe
alors à 40 cm des AD.
L’œsophage cervical mesure 5 à 6 cm et s’étend de C6 à la 1e
“ Points forts vertèbre cervicale (TH1). Sur sa partie initiale, les fibres du
muscle constricteur inférieur du pharynx associées à celles du
muscle cricopharyngien se mêlent aux fibres circulaires de la
L’origine commune de l’œsophage et de la trachée musculaire pour constituer le sphincter supérieur de l’œsophage.
explique les anomalies embryologiques que sont les L’œsophage thoracique s’étend de TH1 à TH10-TH11 et mesure
atrésies de l’œsophage et les fistules œsotrachéales. 16 cm (situé de 21 à 37 cm des AD).
L’œsophage diaphragmatique traverse l’hiatus œsophagien au
niveau de TH10-TH11.
L’œsophage abdominal présente une longueur variable selon les
■ Anatomie descriptive de auteurs, estimée à 3 cm (situé de 37 à 40 cm des AD).
La notion de sphincter inférieur de l’œsophage (SIO) ne
l’œsophage (Fig. 2) [3, 4]
correspond pas à l’existence d’un anneau musculaire de la paroi
œsophagienne mais à une zone de haute pression mise en
L’œsophage (oïx, φacEim) est un conduit musculomembra-
évidence par les explorations fonctionnelles manométriques.
neux élastique et contractile destiné à transmettre les aliments
du pharynx à l’estomac, en traversant successivement la région
cervicale, le médiastin postérieur et la région cœliaque. Forme
À l’état de vacuité, l’œsophage est aplati d’avant en arrière et
Limites plus particulièrement dans sa partie supérieure. Les zones
Au niveau du crâne, il se présente sur un plan horizontal constantes de rétrécissement sont au nombre de trois.
rasant le bord inférieur du cartilage cricoïde correspondant, tête Le rétrécissement cricopharyngien est le plus court et le plus
en position anatomique, à la 6e vertèbre cervicale (C6). Cette serré avec un diamètre de 1,4 à 1,6 cm sur 1,5 cm de hauteur.
limite supérieure est représentée extérieurement par le faisceau Le rétrécissement aortobronchique correspond au point de
cricoïdien du muscle constricteur inférieur du pharynx (où contact avec l’aorte et la bronche gauche qui se situe au niveau
s’engage le nerf laryngé inférieur). de TH4-TH5 et s’étend sur 4 à 5 cm ; son diamètre est de
Sa limite caudale correspond au cardia qui est l’ouverture sur 1,7 cm.
l’estomac, au niveau du bord gauche de la 10e ou 11e vertèbre Au niveau de la traversée diaphragmatique, un rétrécissement
thoracique (TH10 ou TH11), repérée extérieurement par l’angu- sur 1 à 2 cm donne à l’œsophage un diamètre de 1,9 cm
lation entre le bord gauche de l’œsophage et le fundus. (Fig. 3).
Entre ces trois rétrécissements, le conduit œsophagien est
séparé en trois segments plus dilatés : le segment cricoaortique,
Direction le segment bronchodiaphragmatique et le segment
Le trajet de l’œsophage est médian et longe le rachis, il en sous-diaphragmatique.
suit les inflexions jusqu’à la 4e vertèbre thoracique (TH4) puis L’œsophage peut aussi être divisé en plusieurs segments en
s’en écarte progressivement. fonction de la région qu’il traverse (cervicale, thoracique et
Dans le sens transversal, il présente trois légères courbures. abdominale) ou en fonction de ses principaux rapports (supra-
On note une inflexion sur la gauche dans la portion cervicale, aortique, rétroaortique, hilaire et terminal).
Total : 25 cm
■ Rapports de l’œsophage
Œsophage cervical
L’œsophage cervical fait suite au pharynx à travers la jonc-
tion pharyngo-œsophagienne au niveau de la 6 e vertèbre
cervicale, et se termine à l’orifice supérieur du thorax au niveau
de la 1e vertèbre thoracique.
Figure 11.
A, B. Vue latérale gauche du médiastin. 1. Artère
subclavière gauche ; 2. œsophage (dans le triangle
de Poirier) ; 3. trachée ; 4. artère carotide com-
mune gauche ; 5. conduit thoracique ; 6. veine
intercostale supérieure gauche ; 7. tronc artériel
brachiocéphalique ; 8. nerf pneumogastrique gau-
che (X) ; 9. nerf laryngé inférieur gauche ;
10. artère pulmonaire gauche ; 11. veine hémi-
azygos supérieure gauche ; 12. artère petite œso-
phagienne ; 13. veines pulmonaires gauches ;
14. nerf phrénique gauche ; 15. artère grande
œsophagienne ; 16. ligament pulmonaire gauche
récliné.
12
l’œsophage pour rejoindre l’artère subclavière gauche et traversé par la veine intercostale supérieure gauche. Rejoi-
l’accompagner à sa sortie de l’orifice supérieur du thorax ; gnant le bord gauche de l’œsophage, le nerf laryngé inférieur
• en avant, à la face postérieure de la trachée à laquelle il est gauche remonte accompagné de lymphocentres appelés aussi
uni par le muscle trachéo-œsophagien. Il s’agit là d’un « chaîne lymphatique récurrentielle gauche ».
rapport intime expliquant l’envahissement précoce de la
trachée par les tumeurs malignes du tiers supérieur de Œsophage interazygoaortique (Fig. 11, 12)
l’œsophage thoracique ;
• à droite, à la plèvre médiastine droite. À sa partie basse, Il correspond au tiers moyen de l’œsophage thoracique et
l’œsophage est rejoint par le nerf pneumogastrique droit entre en rapport étroit à la fois avec l’arbre aérien du niveau
après avoir croisé la face latérale droite de la trachée. Cette de l’axe trachéobronchique et le système artériel au niveau de
région latérotrachéale droite, au-dessus de la crosse de la l’arc de l’aorte, et le début de l’aorte descendante. Il est
grande veine azygos et en arrière de la veine cave crâniale, est l’œsophage de tous les dangers dans son abord chirurgical et
le siège des lymphocentres de la loge dite de Barety ; dans l’extension des tumeurs du tiers moyen de l’œsophage
• à gauche, à la plèvre médiastine gauche. Ce segment œso- thoracique.
phagien plus court est inscrit dans un triangle (triangle de En arrière, l’œsophage répond au plan vertébral puis s’en
Poirier) limité par l’artère subclavière gauche, la face anté- détache progressivement du fait du cheminement vers le bas de
rieure du rachis et l’arc de l’aorte. Ce triangle d’abord l’aorte thoracique descendante. Celle-ci se place sur son bord
chirurgical de l’œsophage thoracique supra-aortique est gauche et le projette vers l’avant. Le conduit thoracique,
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10
appliqué contre la colonne thoracique, se rapproche de l’œso- En arrière, l’œsophage est progressivement refoulé par l’aorte
phage dans la partie haute du médiastin moyen en cheminant descendante, l’éloignant également du conduit thoracique et
dans l’angle dièdre formé par la partie postérieure de la crosse des veines azygos. Il se place à la face antérieure de l’aorte dont
de l’aorte et la veine hémiazygos accessoire. il est le rapport privilégié et auquel il est fixé par un tissu
En avant, l’œsophage est en rapport avec la face postérieure cellulograisseux et lymphatique porteur des artères œsopha-
de la trachée, puis la bifurcation trachéobronchique et enfin la giennes et auquel certains auteurs donnent le nom de
bronche souche gauche. Il est uni à l’arbre aérien par du tissu « méso-œsophage ».
cellulaire dense (muscle trachéo-œsophagien) épaissi au niveau En avant, l’œsophage prend contact avec le péricarde à
de la bronche souche gauche par la présence du plexus nerveux travers le sinus oblique. Il est en rapport direct avec l’atrium
pulmonaire, du nerf pneumogastrique gauche, des voies lym- gauche, ce qui explique la dysphagie de l’insuffisance cardiaque
phatiques et des artères œsophagiennes issues des artères gauche avec dilatation atriale gauche. Plus bas, l’œsophage perd
bronchiques. Au-dessous de la bifurcation bronchique, l’œso- le contact avec le péricarde pour contracter des rapports avec la
phage est au contact en avant avec les lymphocentres intertra- face postérieure du diaphragme.
chéobronchiques, eux-mêmes traversés par les artères À droite, l’œsophage recouvert de la plèvre médiastine
bronchiques. descend dans le médiastin inférieur entre la grande veine azygos
À droite, l’œsophage est croisé transversalement par la crosse en arrière et la « raquette » pulmonaire prolongée par le
de la grande veine azygos qui se jette dans la veine cave ligament pulmonaire en avant. Le nerf pneumogastrique droit
crâniale. Le nerf pneumogastrique droit se rapproche du bord gagne le bord droit puis la face postérieure de l’œsophage. Le
droit de l’œsophage. À ce niveau, il existe un lymphocentre conduit thoracique peut être exposé au cours de la dissection
constant de la crosse de la grande veine azygos (Bartels). Cette par voie droite.
crosse peut être liée et sectionnée sans conséquence faisant de À gauche, l’œsophage masqué partiellement en haut par
la voie thoracique droite, la voie privilégiée de l’abord de la l’aorte descendante devient plus superficiel et descend en arrière
totalité de l’œsophage thoracique. du pédicule pulmonaire puis du ligament pulmonaire. Il
À gauche, la crosse de l’aorte représente, elle, un obstacle à chemine à la partie basse dans un triangle (triangle de Trues-
la libération du tiers moyen de l’œsophage. À ce niveau, dale) délimité par le péricarde avant, l’aorte descendante en
l’œsophage reçoit les artères venant des artères bronchiques et arrière et le diaphragme en bas. Ce triangle expose la face
souvent une artère naissant directement de l’aorte (artère du latérale gauche de l’œsophage et est le lieu des perforations
croisement). À la face supérieure de la bronche gauche, le nerf spontanées de l’œsophage (syndrome de Boerhaave). Le nerf
laryngé inférieur gauche (nerf récurrent gauche) passe sous la pneumogastrique gauche rejoint la face antérieure de l’œso-
crosse de l’aorte et plus précisément en contournant le ligament phage sous l’arc de l’aorte.
artériel. Le nerf laryngé inférieur gauche rejoint alors l’angle On peut considérer autrement les rapports de l’œsophage
trachéo-œsophagien accompagné de sa chaîne lymphatique. thoracique en les étudiant en position de thoracotomie latérale
droite ou gauche.
Œsophage infra-azygoaortique (Fig. 13) Par voie de thoracotomie droite (Fig. 14), les rapports de
Le médiastin inférieur, plus vaste, laisse le tiers inférieur de l’œsophage thoracique sont les suivants :
l’œsophage thoracique plus libre quand on le compare aux tiers • au-dessus de la crosse de la grande veine azygos, l’œsophage
supérieur et moyen (aux rapports vasculaires et trachéobronchi- est directement accessible dans une fossette pleurale entre la
ques intimes). trachée en avant, la colonne vertébrale en arrière et la crosse
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13
de la grande veine azygos en bas. Cette fossette est traversée en arrière et, latéralement, la crosse de la grande veine azygos à
par le nerf pneumogastrique droit. À ce niveau l’œsophage est droite et l’arche aortique à gauche. Cette région est marquée par
en rapport avec le lymphocentre de la loge de Barety ; la présence du nerf laryngé inférieur gauche qui fait sa récur-
• au niveau de la crosse de la veine grande azygos, l’œsophage rence à la face inférieure de l’arche aortique en contournant le
est en rapport en avant avec la bronche droite et la division ligament artériel. La face inférieure de l’arche aortique et les
trachéale. La section et la ligature de la veine grande azygos premiers centimètres de l’aorte descendante donnent naissance
permet l’abord du tiers moyen thoracique de l’œsophage ; à des artères à destinée bronchique et œsophagienne.
• au-dessous de la crosse de la veine grande azygos, l’œsophage Au-dessous de l’arche aortique, l’œsophage est progressive-
est séparé de la cavité pleurale par la plèvre médiastine dont ment repoussé vers l’avant par l’aorte thoracique descendante,
il s’éloigne entre le péricarde en avant et la grande veine il est alors profondément situé dans un triangle à base
azygos en arrière. Le conduit thoracique peut être disséqué diaphragmatique entre le péricarde en avant et l’aorte thoraci-
dans cette région. que en arrière (triangle de Truesdale), lieu d’élection des
Par voie de thoracotomie gauche (Fig. 15A,B), l’œsophage perforations spontanées de l’œsophage. Le nerf pneumogastri-
thoracique est barré transversalement par le passage de l’arche que gauche rejoint la face antérieure de l’œsophage à ce niveau.
aortique.
Au-dessus de l’arche aortique, l’œsophage peut être abordé Œsophage terminal
chirurgicalement dans le triangle de Poirier traversé par la veine
intercostale gauche. À ce niveau, le conduit thoracique quitte la Il est considéré comme l’association de l’œsophage thoraci-
face postérieure de l’œsophage pour s’infléchir à gauche et que inférieur, de l’œsophage diaphragmatique et de l’œsophage
rejoindre le confluent veineux jugulosubclavier de Pirogoff. abdominal.
Au niveau de l’arche aortique, l’œsophage est pincé dans un L’œsophage thoracique inférieur ou œsophage infra-azygos-
défilé étroit entre la bifurcation bronchique en avant, le rachis aortique a été déjà étudié. Nous ne considérons alors que les
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“ Points forts
8
9 La connaissance des rapports anatomiques de l’œsophage
sur les coupes horizontales est indispensable à
l’interprétation des coupes horizontales tomo-
13 densitométriques qui font partie du bilan systématique
10 des cancers de l’œsophage.
12
11
■ Vascularisation et innervation
Figure 16. Traversée du diaphragme par l’œsophage. 1. Plèvre média-
stinale ; 2. adventice ; 3. musculeuse ; 4. plèvre pariétale ; 5. fascia endo- de l’œsophage
thoracique ; 6. diaphragme ; 7. fascia diaphragmatique inférieur ; 8.
péritoine pariétal diaphragmatique ; 9. péritoine viscéral gastrique ; 10. Artères (Fig. 17)
ligament phréno-œsophagien ; 11. valvule muqueuse de Gubarow ; 12.
ligne Z : jonction œsogastrique muqueuse ; 13. zone de glissement. L’embryologie explique la vascularisation artérielle étagée de
l’œsophage qui reste très variable dans sa distribution. Les
différentes artères, peu volumineuses, pénètrent dans la paroi de
l’œsophage en formant des réseaux dans les différentes couches.
rapports de l’œsophage diaphragmatique et de l’œsophage L’œsophage cervical est vascularisé par les deux artères
abdominal. thyroïdiennes inférieures ; la droite s’épanouissant plus fré-
quemment sur la face postérieure, la gauche sur la face
Œsophage diaphragmatique (Fig. 6) antérieure.
Une branche descendante de l’artère subclavière gauche
La traversée du diaphragme (Fig. 16) se produit à la hauteur
(artère de Luschka) participe à la vascularisation de cet étage.
de l’hiatus œsophagien, au niveau de TH10.
Cet orifice purement musculaire de 2,5 cm de long et de
forme ovalaire est constitué de fibres provenant du pilier droit
12
et divisées en deux faisceaux : l’un antérieur droit et l’autre
postérieur gauche. Ces deux faisceaux entourent l’œsophage en 1
formant alors un système sphinctérien externe qui peut coulis- 7
ser autour de l’œsophage, notamment au cours de la respiration
et de la déglutition. 13
Ce système musculaire échange quelques fibres avec la
musculature œsophagienne et participe à la continence cardiale
pour éviter le reflux gastro-œsophagien. Cette zone constitue
une zone de transition entre le thorax (de pression négative) et
S. Durand-Fontanier.
Service de chirurgie viscérale et transplantations (Pr B. Descottes), CHU Dupuytren, 2 avenue Martin-Luther-King, 87032 Limoges cedex, France.
D. Valleix (lab.anat@unilim.fr).
Laboratoire d’anatomie, Faculté de Médecine, 2 rue du Docteur-Marcland, 87025 Limoges cedex, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Durand-Fontanier S., Valleix D. Anatomie chirurgicale de l’œsophage. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris),
Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-170, 2007.
Cancers de l’œsophage :
voies d’abord de l’œsophage et du pharynx
A Sauvanet
Résumé. – La multiplicité des voies d’abord utilisables (abdominales, thoraciques et cervicales) est une des
spécificités de la chirurgie du cancer de l’œsophage. Ces voies d’abord sont choisies en fonction des impératifs
chirurgicaux d’exérèse et de reconstruction, mais doivent également tenir compte de leur retentissement qui
est essentiellement respiratoire. La chirurgie vidéoassistée est actuellement peu diffusée dans le traitement du
cancer de l’œsophage, ses avantages en termes de fonction respiratoire postopératoire n’apparaissant pas
encore très clairs.
© 2002 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Introduction LAPAROTOMIE
L’installation du malade est habituellement un décubitus dorsal
Du fait du siège cervical, thoracique et abdominal de l’œsophage, la strict, le membre supérieur droit à la perpendiculaire du corps.
chirurgie du cancer de l’œsophage nécessite le plus souvent le Toutefois, cette installation peut varier selon le type d’intervention
recours à une double ou une triple voie d’abord. retenu (œsophagectomie sans thoracotomie, résection par double
Une voie d’abord abdominale est toujours nécessaire pour assurer voie simultanée ; cf infra). Chez les malades corpulents, un billot
la gastrolyse. En fonction de l’étendue de l’œsophagectomie et de la transversal peut être placé sous la pointe des omoplates pour
réalisation ou non d’un curage ganglionnaire thoracique, on y améliorer l’exposition de la région hiatale. La voie d’abord
associe une voie d’abord thoracique (habituellement droite) et/ou habituellement utilisée est une incision médiane sus-ombilicale
une voie d’abord cervicale. La multiplicité des voies d’abord éventuellement agrandie en sous-ombilical chez les malades
complique le choix de la technique chirurgicale, augmente corpulents. Une valve autostatique (type valve de Rochard) est
l’importance du retentissement respiratoire de l’intervention et indispensable pour rétracter l’auvent costal vers le haut et donner
augmente le risque des complications postopératoires. du jour sur l’étage sus-mésocolique. Cet écarteur doit si possible
pouvoir être mobilisé dans le sens latéral pour améliorer l’exposition
Ce travail expose successivement les voies d’abord de l’œsophage et sur l’hypocondre gauche lors de la section des vaisseaux courts
du pharynx et précise les éléments qui permettent d’orienter le choix gastrospléniques, et sur l’hypocondre droit lors du décollement
de ces voies d’abord et donc du type d’intervention. duodénopancréatique et de la confection de la pyloroplastie. La mise
en place d’un deuxième écarteur autostatique dans le sens
transversal (type écarteur de Ricard ou de Gosset) permet encore
Abord abdominal d’améliorer l’exposition (fig 1).
Chez les malades obèses ou dont l’auvent costal est large, une
Un abord abdominal permet la dissection de l’œsophage abdominal, incision bi-sous-costale peut être préférée. Il est alors utile de placer
l’exérèse des chaînes ganglionnaires abdominales drainant un écarteur autostatique de chaque côté pour ouvrir, en le rétractant,
l’œsophage et la préparation de l’organe remplaçant l’œsophage. Ce l’auvent costal. L’incision bi-sous-costale est réputée moins
dernier point explique que l’abord abdominal est presque toujours douloureuse et amputant moins la fonction respiratoire que
nécessaire, la seule exception étant l’intervention de Sweet faite par l’incision médiane. Cependant, à notre connaissance, cet avantage
une thoracotomie gauche associée à une phrénotomie (cf infra). En n’est démontré par aucune étude contrôlée [13].
cas de cancer du cardia ou de l’œsophage inférieur, une voie d’abord
En cas de cancer épidermoïde, même localisé au bas œsophage, la
abdominale associée à une ouverture de l’hiatus peut être utilisée
carcinose péritonéale est exceptionnelle et l’exploration abdominale
pour réséquer la tumeur et faire une anastomose dans le médiastin
doit essentiellement rechercher des métastases hépatiques ou des
inférieur ; toutefois, la section œsophagienne porte alors à proximité
adénopathies métastatiques. En cas d’adénocarcinome du cardia ou
de la tumeur et l’anastomose est souvent de réalisation difficile
du bas œsophage, il est indispensable d’examiner le péritoine de la
même en utilisant une pince à suture mécanique.
totalité de la cavité abdominale, y compris celui de l’arrière-cavité
des épiploons.
Pour obtenir un jour suffisant sur la région hiatale, il faut mobiliser
Alain Sauvanet : Professeur des Universités, praticien hospitalier, service de chirurgie digestive, hôpital
le lobe gauche du foie en le réclinant vers le haut et la droite, le plus
Beaujon, 100, boulevard du Général-Leclerc, 92110 Clichy, France. souvent après avoir sectionné le ligament falciforme, le ligament
Toute référence à cet article doit porter la mention : Sauvanet A. Cancers de l’œsophage : voies d’abord de l’œsophage et du pharynx. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés),
Techniques chirurgicales – Appareil digestif, 40-190, 2002, 11 p.
40-190 Cancers de l’œsophage : voies d’abord de l’œsophage et du pharynx Techniques chirurgicales
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Techniques chirurgicales Cancers de l’œsophage : voies d’abord de l’œsophage et du pharynx 40-190
où les deux nerfs pneumogastriques sont coupés [11, 15]. Le cardia est d’une bonne exposition sur le médiastin supérieur, il faut laisser le
sectionné par agrafage linéaire (type Endo GIAt), le transplant membre supérieur droit pendant vers l’avant, ce qui ouvre l’angle
gastrique étant extériorisé transitoirement au travers d’une courte entre le bord postérieur de l’omoplate et le rachis et permet de
incision située en avant du pylore. Cette incision permet la prolonger l’incision vers l’arrière jusqu’à débuter la section du
tubulisation gastrique par voie extracorporelle et la pyloroplastie. muscle rhomboïde, et inciser le cinquième espace intercostal (fig 3).
Après tubulisation, l’estomac est réintroduit dans l’abdomen, Le muscle dentelé est sectionné après ligature de son pédicule
l’incision abdominale est fermée et l’œsophagectomie est complétée vasculonerveux ou partiellement désinséré vers le bas en sectionnant
par voie cervicale gauche. Le tube gastrique est finalement ses insertions costales.
ascensionné dans le médiastin postérieur et anastomosé à Si l’on souhaite disposer préférentiellement d’une bonne exposition
l’œsophage cervical. sur le médiastin inférieur, il faut inciser le sixième espace intercostal.
Cette technique nécessite une bonne expérience de la laparoscopie. Le membre supérieur droit est laissé pendant vers l’avant ou placé
Elle est encore mal évaluée et reste discutable dans les au-dessus de la tête de l’opéré dans un berceau ou fixé à un arceau.
adénocarcinomes du cardia et du bas œsophage en raison de la Dans ce dernier cas, la section du muscle dentelé est plus facile que
manipulation tumorale directe qu’elle suppose. Pour notre part, sa désinsertion.
nous la réservons aux carcinomes épidermoïdes de l’œsophage La résection d’une côte est généralement inutile. L’écarteur
thoracique sans extension ganglionnaire cœliaque décelable en autostatique (de type Finochietto ou Lortat-Jacob) est installé avec
imagerie [11] . Le bénéfice procuré en termes de fonction et de sa crémaillère placée vers l’aide. Il faut ouvrir progressivement la
complications respiratoires est également discuté. Certains auteurs thoracotomie en désinsérant les muscles intercostaux au bord
estiment qu’elle diminue le retentissement respiratoire des supérieur de la côte inférieure sur toute la longueur de l’espace pour
œsophagectomies et permet ainsi d’opérer des malades ayant une limiter les risques de plaie des vaisseaux intercostaux et de fracture
fonction respiratoire altérée [11] . D’autres n’ont observé aucun de côte. L’exposition peut être améliorée vers le haut ou vers le bas
bénéfice fonctionnel respiratoire comparativement à la par la section du col de la côte respectivement sus- ou sous-jacente.
laparotomie [28]. Combinée à une approche thoracoscopique (lors La recherche de métastases pulmonaires est faite au mieux sur un
d’une intervention de Lewis-Santy), cette voie d’abord permettrait poumon exsufflé à l’aide d’une sonde d’intubation sélective.
une diminution du séjour hospitalier mais ne diminuerait pas le taux L’exposition complète du médiastin nécessite la section du ligament
de complications respiratoires [22]. triangulaire (qui contient une artériole dont il faut assurer
l’hémostase) et la ligature-section de la crosse de la grande veine
azygos.
Abord thoracique En l’absence de radiothérapie préopératoire, une dissection de
l’œsophage sus- et sous-tumoral n’entraîne pas d’ischémie pariétale
L’abord droit est le plus souvent choisi. En effet, par thoracotomie œsophagienne et peut constituer une manœuvre utile pour mieux
gauche, la libération de l’œsophage est rendue difficile par la apprécier la résécabilité de la tumeur. Cependant, il est préférable
présence du massif cardiaque, de la crosse de l’aorte et de l’artère de faire porter la dissection directement sur la zone où la résécabilité
sous-clavière gauche. apparaît douteuse et de procéder éventuellement à un examen
histologique extemporané. L’intervention est parfois indiquée pour
une tumeur initialement volumineuse et traitée par
THORACOTOMIE DROITE radiochimiothérapie avec une bonne réponse. Dans ce cas, si l’on
L’incision habituelle est une thoracotomie postérolatérale droite craint une extension tumorale persistante aux structures
sectionnant le muscle grand dorsal et empruntant le cinquième ou médiastinales pouvant contre-indiquer une résection, il est
le sixième espace intercostal. Le malade est alors placé en décubitus souhaitable de ne pas mobiliser de façon extensive l’œsophage sus-
latéral gauche avec un billot transversal placé à l’aplomb de la et sous-tumoral afin de ne pas dévasculariser la tumeur et d’éviter
pointe de l’omoplate. Si l’on souhaite disposer préférentiellement ainsi la nécrose de celle-ci, si elle est finalement laissée en place.
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40-190 Cancers de l’œsophage : voies d’abord de l’œsophage et du pharynx Techniques chirurgicales
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Techniques chirurgicales Cancers de l’œsophage : voies d’abord de l’œsophage et du pharynx 40-190
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40-190 Cancers de l’œsophage : voies d’abord de l’œsophage et du pharynx Techniques chirurgicales
CERVICOMANUBRIOTOMIE
Cette incision peut être utile pour améliorer l’exposition sur
l’œsophage cervicomédiastinal (tumeur située à ce niveau,
réintervention). La cervicotomie, faite en avant du SCM gauche, est
prolongée vers le bas par une incision médiane dépassant
légèrement vers le bas les limites du manubrium (fig 9). Celui-ci est
incisé au ciseau à frapper ou à la scie oscillante après avoir décollé
au doigt les éléments du médiastin antérieur (loge thymique, tronc
veineux innominé). L’écartement est fait par un écarteur de type
8 Abord cervical de l’œsophage par cervicotomie en U. Exposition des plans muscu- Beckmann au niveau cervical et un écarteur de type Tuffier au
laires superficiels après décollement des lambeaux cutanés supérieur et inférieur. niveau sternal.
Lors de la fermeture, le manubrium est suturé par un ou deux fils
Ces deux lambeaux doivent être réclinés par un écarteur d’acier et les téguments thoraciques reconstitués en deux plans.
autostatique ou quelques points de suture temporaires chargeant les
téguments du thorax et du menton.
Choix de la voie d’abord
Il est nécessaire de mobiliser la face profonde et la face superficielle
des deux muscles SCM pour exposer de façon satisfaisante la totalité
du cou. Les creux sus-claviculaires peuvent être abordés en passant CRITÈRES DE CHOIX
en avant et/ou en arrière des muscles SCM. Pour améliorer En pratique :
l’exposition dans le défilé cervicomédiastinal, il est possible de
sectionner les deux chefs sternaux des muscles SCM et de les – un abord abdominal est presque toujours nécessaire ;
reconstituer lors de la fermeture. – un double abord abdominothoracique ou abdominocervical est
Les contre-indications à l’exérèse sont : fréquemment utilisé ;
– l’envahissement d’un axe artériel carotidien ; – un triple abord permettant l’exposition et la dissection de la
totalité de l’œsophage et des aires ganglionnaires de drainage est la
– une extension trachéale interdisant une section de la trachée en technique la plus rarement utilisée.
zone saine et la confection sans traction d’un trachéostome fixé à la Les voies d’abord, et donc finalement le type d’intervention, sont
peau au-dessus de la fourchette sternale ; choisis en fonction : du type histologique et de la hauteur du pôle
– un envahissement ganglionnaire fixé au plan postérieur ou supérieur de la tumeur, du type de curage ganglionnaire souhaité,
nécessitant le sacrifice des deux veines jugulaires internes. de l’organe utilisé pour le remplacement œsophagien, de l’état
général et de la fonction respiratoire de l’opéré.
Par ailleurs, la découverte d’adénopathies métastatiques à distance
de l’axe viscéral du cou (creux sus-claviculaires, partie haute de la
¶ Type histologique et pôle supérieur de la tumeur
chaîne jugulaire au contact du nerf spinal ou du muscle digastrique)
ne doit faire retenir l’indication de l’intervention qu’avec Pour le cancer épidermoïde, la marge à respecter varie selon
circonspection en raison du mauvais pronostic attendu. En revanche, l’extension pariétale [36] :
6
Techniques chirurgicales Cancers de l’œsophage : voies d’abord de l’œsophage et du pharynx 40-190
– en cas de cancer superficiel (limité à la muqueuse et à la sous- ceux du choix entre intervention d’Akiyama et intervention de Mac
muqueuse), la fréquence des lésions épithéliales satellites est telle Keown. Cependant, le côlon est habituellement considéré comme
que des marges de résection de 2, 4 et 6 cm in vivo exposent à un plus sensible à la radiothérapie que l’estomac : il est donc logique
risque d’envahissement de la tranche de section par un carcinome de préférer un trajet rétrosternal si une radiothérapie postopératoire
in situ de respectivement 14 %, 8 % et 3 % ; ces résultats plaident en apparaît probable.
faveur de la réalisation systématique d’une œsophagectomie
subtotale avec anastomose cervicale, ou d’une coloration vitale au ¶ État général et fonction respiratoire de l’opéré
Lugol pour localiser précisément le pôle supérieur d’une
tumeur superficielle [24] ; La plupart des auteurs réservent l’œsophagectomie sans
thoracotomie aux malades en mauvais état général [19] ou ayant une
– quelle que soit la profondeur de la tumeur, une marge de 6 cm in
insuffisance respiratoire mais d’autres utilisent systématiquement
vivo est associée à un risque d’envahissement de la recoupe
cette technique [17, 26]. Certains travaux rétrospectifs suggèrent que
proximale par des emboles lymphatiques ou vasculaires de 5 %.
l’œsophagectomie sans thoracotomie est l’intervention la mieux
À l’étage cervical, il faut essayer de conserver 2 cm d’œsophage sous tolérée et que l’œsophagectomie par triple voie d’abord est
la bouche œsophagienne pour limiter le risque de fausses routes. Le l’intervention ayant les suites opératoires les plus difficiles [5]. En
résultat en termes de survie à distance ne semble pas non plus réalité, aucun travail prospectif randomisé portant sur des effectifs
conditionné par le siège de l’anastomose [30]. Le résultat fonctionnel importants n’a confirmé ces données.
attendu ne peut également être un critère décisif car :
En pratique, l’expérience et les préférences de l’opérateur participent
– les anastomoses cervicales sont associées à une prévalence plus également largement au choix du type d’intervention.
importante des fistules [37] et des sténoses anastomotiques [14, 32] ;
– les anastomoses intrathoraciques sont associées à une prévalence DIFFÉRENTES INTERVENTIONS
plus importante du reflux gastroœsophagien [12].
Pour l’adénocarcinome, la prévalence des emboles lymphatiques ¶ Œsophagectomie par double abord abdominal
sous-muqueux est plus importante dans ce type histologique et la et thoracique droit (intervention de Lewis-Santy)
marge de résection proximale doit être comprise in vivo entre 8 et
10 cm pour obtenir un taux d’envahissement de la recoupe L’installation habituelle consiste à placer d’abord le malade en
proximale inférieur à 5 % [27, 31]. décubitus dorsal pour la réalisation du temps abdominal, puis en
décubitus latéral gauche pour le temps thoracique.
¶ Type de curage ganglionnaire En décubitus dorsal, la position du membre supérieur gauche est
L’extension ganglionnaire thoracique ne peut être appréciée indifférente, sauf si on envisage de convertir l’intervention en
précisément que par une lymphadénectomie médiastinale qui ne œsophagectomie sans thoracotomie. Il est souhaitable de préparer
peut être faite que par thoracotomie [19]. Lorsqu’une œsophagectomie un champ suffisamment large pour permettre le drainage des deux
est faite par voie thoracique droite, la plupart des auteurs cavités thoraciques si cela s’avère nécessaire (tumeur du cardia ou
s’accordent à réaliser un curage médiastinal sous-aortique, en du bas œsophage dont on commence la dissection par voie
complément du curage abdominal dans la région cœliaque (curage abdominale). Pour le temps thoracique, le malade est ensuite placé
« à deux étages »). Un curage ganglionnaire sus-aortique complet en décubitus latéral gauche avec le bras pendant. Un billot
associé à un curage cervical est proposé par certains auteurs dans le transversal est placé à hauteur de la pointe de l’omoplate, monté
but de diminuer le taux de récidives cervicomédiastinales et dès l’intervention et descendu immédiatement avant la fermeture
augmenter ainsi la survie à distance, en particulier pour les tumeurs pariétale. En cas de découverte dans le thorax d’une extension
de l’œsophage sus-aortique et cervicomédiastinal [1, 3, 6, 23]. tumorale inattendue signant le caractère palliatif de l’intervention, il
est cependant nécessaire de réaliser l’œsophagectomie et
Ce curage nécessite une bonne exposition sur le médiastin supérieur, l’anastomose œsogastrique.
une cervicotomie en U, et un drainage aspiratif cervical.
L’anastomose œsogastrique est faite dans le cou quelle que soit la Il est également possible de réaliser la même intervention en
hauteur du pôle supérieur de la tumeur. Pour cette raison, le temps installant le malade en position de double voie simultanée. Pour ce
thoracique est réalisé en premier, et suivi par le temps abdominal faire, il faut installer le malade de trois quarts sur une table
associé au temps cervical. La gastroplastie est alors montée dans le permettant un roulis de chaque côté (fig 10). Le bassin du malade
médiastin postérieur [23]. est légèrement incliné vers la gauche en mettant un coussin sous la
fesse droite. Le tronc du malade est légèrement tourné par rapport
¶ Organe utilisé pour le remplacement œsophagien au bassin afin que l’axe passant par les deux épaules soit incliné
d’environ 45° par rapport au plan de la table. Le membre supérieur
L’estomac, tubulisé ou non, est l’organe le plus souvent utilisé pour gauche est placé à plat perpendiculairement au tronc du malade, et
remplacer l’œsophage. Avec l’estomac, il est possible de faire porter le membre supérieur droit est fixé à un arceau à hauteur de la tête
l’anastomose œsogastrique dans le thorax ou dans le cou. Dans du malade. Un billot transversal est également placé et levé à
certains cas, une gastroplastie peut être impossible et une coloplastie hauteur de la pointe des omoplates. Le malade doit être calé
alors nécessaire (antécédent de gastrectomie pour ulcère ou de suffisamment pour éviter tout mouvement lors des inclinaisons
gastrostomie chirurgicale, antécédent de réfection chirurgicale des latérales de la table d’opération. L’incision abdominale est toujours
mécanismes antireflux, cancer sur œsophagite caustique avec une médiane car l’abord vers la région sous-costale gauche est
atteinte gastrique, ou plaie peropératoire des vaisseaux limité. L’œsophage est abordé par thoracotomie antérolatérale
gastroépiploïques droits). Il s’agit d’une indication de nécessité car droite. Lors du temps abdominal ou du temps thoracique, le roulis
les coloplasties sont associées à une morbidité plus importante que de la table doit être marqué dans un sens ou dans l’autre. Cette
les gastroplasties [7]. L’anastomose œsocolique doit être faite au installation permet un gain de temps, en particulier si deux
niveau cervical, en raison des conséquences plus graves d’une chirurgiens peuvent assurer simultanément les deux temps de
désunion intrathoracique [7]. Une colopastie est donc utilisée, soit au l’intervention [9, 10]. Elle permet également un bon contrôle des
cours d’une œsophagectomie par triple voie d’abord, soit au cours différents temps de l’intervention : exploration des deux étages
d’une œsophagectomie sans thoracotomie. Si l’intervention est une avant la tubulisation gastrique ou mobilisation de l’œsophage,
œsophagectomie sans thoracotomie, la coloplastie est positionnée sécurité de l’ascension de la gastroplastie dans le thorax. En
dans le médiastin postérieur. Si l’indication d’une thoracotomie a revanche, cette installation a pour inconvénient une exposition
été retenue, le trajet de la coloplastie peut être médiastinal postérieur moins bonne dans l’hypocondre gauche et sur le médiastin
ou antérieur ; les critères de choix entre les deux techniques sont postérieur en particulier à sa partie haute. Il faut donc disposer
7
40-190 Cancers de l’œsophage : voies d’abord de l’œsophage et du pharynx Techniques chirurgicales
11 Œsophagectomie sans
thoracotomie. Installation
de l’opéré. Le champ opéra-
toire doit être large pour
permettre le drainage des
deux cavités pleurales. En
pointillé : tracé des inci-
sions abdominale et cervi-
cale. Il est possible de pro-
longer l’incision cervicale
par une manubriotomie.
*
A *
B
8
Techniques chirurgicales Cancers de l’œsophage : voies d’abord de l’œsophage et du pharynx 40-190
9
40-190 Cancers de l’œsophage : voies d’abord de l’œsophage et du pharynx Techniques chirurgicales
10
Techniques chirurgicales Cancers de l’œsophage : voies d’abord de l’œsophage et du pharynx 40-190
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11
40-195
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 40-195
Toute référence à cet article doit porter la mention : Sauvanet A et Belghiti J. Chirurgie des cancers de l’œsophage. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Techniques
chirurgicales - Appareil digestif, 40-195, 2000, 33 p.
40-195 Chirurgie des cancers de l’œsophage Techniques chirurgicales
Voies d’abord
Du fait du siège cervical, thoracique et abdominal de l’œsophage, la
chirurgie du cancer de l’œsophage nécessite en règle une double ou
une triple voie d’abord. La multiplicité des voies d’abord complique
le choix de la technique chirurgicale, augmente l’importance du
retentissement respiratoire de l’intervention et augmente le risque
des complications postopératoires.
Les voies d’abord – et donc finalement le type d’intervention – sont
choisies en fonction de la hauteur du pôle supérieur de la tumeur,
de son type histologique (il faut sectionner plus haut l’œsophage
au-dessus du pôle supérieur de la tumeur en cas d’adénocarcinome),
de l’état général et de la fonction respiratoire de l’opéré, ainsi que
de l’expérience et des préférences du chirurgien.
En pratique :
– un abord abdominal est presque toujours nécessaire ;
– un double abord abdominothoracique ou abdominocervical est
fréquemment utilisé ;
– un triple abord permettant l’exposition et la dissection de la
totalité de l’œsophage est une technique plus rarement utilisée.
ABORD ABDOMINAL
Un abord abdominal permet la dissection de l’œsophage abdominal, 1 Abord abdominal par médiane sus-ombilicale. Le lobe hépatique gauche a été ré-
l’exérèse des chaînes ganglionnaires abdominales drainant cliné après section du ligament falciforme, du ligament triangulaire gauche et du petit
l’œsophage et la préparation de l’organe remplaçant l’œsophage. Ce épiploon. L’œsophage abdominal est mis sur lacs.
dernier point explique que l’abord abdominal est presque toujours
nécessaire, la seule exception étant l’intervention de Sweet faite par souvent après avoir sectionné le ligament falciforme, le ligament
une thoracotomie gauche associée à une phrénotomie. En cas de triangulaire gauche et le petit épiploon (fig 1). Lors de la section du
cancer du cardia ou de l’œsophage inférieur, une voie d’abord ligament triangulaire gauche, il faut veiller à ne pas blesser la veine
abdominale associée à une ouverture de l’hiatus peut hépatique gauche dans laquelle s’abouche habituellement la veine
exceptionnellement être utilisée pour réséquer la tumeur et faire une phrénique inférieure gauche. Si le petit épiploon contient une artère
anastomose dans le médiastin inférieur ; toutefois, la section hépatique gauche, il faut palper le pédicule hépatique à la recherche
œsophagienne porte alors à proximité de la tumeur et l’anastomose d’une artère hépatique moyenne ou d’une artère hépatique droite :
est de réalisation difficile, même en utilisant une pince à suture en cas d’absence d’artère dans le pédicule hépatique (disposition de
mécanique. type artère hépatique gauche-foie total, observée dans 1 % des cas)
La voie d’abord la plus utilisée est une incision médiane sus- ou si l’artère palpée dans le pédicule est de très petite taille, il faut
ombilicale, éventuellement agrandie en sous-ombilicale chez les préserver l’artère hépatique gauche et l’artère gastrique gauche en
malades corpulents. Une valve autostatique (type valve de Rochard) amont de celle-ci. Le lobe hépatique gauche doit être maintenu
est indispensable pour rétracter l’auvent costal vers le haut et récliné vers le haut et la droite par une valve solidarisée à l’écarteur
donner du jour sur l’étage sus-mésocolique (fig 1). Cet écarteur doit pariétal.
idéalement pouvoir être mobilisé dans le sens latéral pour améliorer La dissection de l’hiatus commence par l’ouverture du péritoine à la
l’exposition sur l’hypocondre gauche lors de la section des vaisseaux face antérieure de l’œsophage. Latéralement, le péritoine est incisé
courts gastrospléniques, et sur l’hypocondre droit lors du aux bords antérieurs du pilier droit sur toute sa longueur et du pilier
décollement duodénopancréatique et de la confection de la gauche à sa partie haute. L’espace inframédiastinal est ouvert après
pyloroplastie. La mise en place d’un deuxième écarteur autostatique incision du ligament phréno-œsophagien. L’œsophage est disséqué
dans le sens transversal (type écarteur de Ricard ou de Gosset) au doigt et chargé avec les deux nerfs pneumogastriques. Le passage
améliore encore l’exposition. rétro-œsophagien est plus aisé, si on l’effectue à la partie haute des
Chez les malades obèses ou dont l’auvent costal est large, une piliers. En cas de cancer du cardia ou de l’œsophage abdominal, il
incision bi-sous-costale peut être préférée. Il est alors utile de placer est souhaitable de laisser une collerette d’hiatus au contact de
un écarteur autostatique de chaque côté pour ouvrir, en le rétractant, l’œsophage et de la tumeur en incisant les piliers dans leur
l’auvent costal. L’incision bi-sous-costale est réputée moins épaisseur. L’œsophage est mis sur lacs avec les deux nerfs
douloureuse et amputant moins la fonction respiratoire que pneumogastriques et attiré vers le bas. Deux cas doivent alors être
l’incision médiane sus-ombilicale. Cependant, à notre connaissance, distingués :
cet avantage n’est démontré par aucune étude contrôlée [24]. Le – si l’on a choisi d’effectuer une œsophagectomie avec thoracotomie,
risque d’éventration est plus faible après incision bi-sous-costale. il n’est pas nécessaire d’agrandir davantage l’orifice hiatal pour
Pour obtenir un jour suffisant sur la région hiatale, il faut mobiliser poursuivre la dissection vers le haut ; l’abord déjà obtenu permet de
le lobe gauche du foie en le réclinant vers le haut et la droite, le plus visualiser la face postérieure du péricarde, les deux plèvres
2
Techniques chirurgicales Chirurgie des cancers de l’œsophage 40-195
ABORD THORACIQUE
¶ Thoracotomie droite
L’incision habituelle est une thoracotomie postérolatérale droite
sectionnant le muscle grand dorsal et empruntant le cinquième ou
le sixième espace intercostal. Le malade est alors placé en décubitus
latéral gauche avec un billot transversal placé à l’aplomb de la
pointe de l’omoplate. Si l’on souhaite disposer préférentiellement
d’une bonne exposition sur le médiastin supérieur, il faut laisser le
membre supérieur droit pendant vers l’avant, ce qui ouvre l’angle
entre le bord postérieur de l’omoplate et le rachis, et permet de
prolonger l’incision vers l’arrière jusqu’à débuter la section du
muscle rhomboïde et inciser le cinquième espace intercostal (fig 2).
Le muscle dentelé est sectionné après ligature de son pédicule
vasculonerveux ou partiellement désinséré à sa partie basse en
sectionnant ses insertions costales.
Si l’on souhaite disposer préférentiellement d’une bonne exposition
sur le médiastin inférieur, il faut inciser le sixième espace intercostal.
Le membre supérieur droit est laissé pendant vers l’avant ou placé pneumolyse difficile ayant entraîné une fuite aérienne importante
au-dessus de la tête de l’opéré dans un berceau ou fixé à un arceau pour laquelle on craint un emphysème pariétal malgré le drainage
(fig 3). Dans ce dernier cas, la section du muscle dentelé est plus thoracique.
facile que sa désinsertion.
La résection d’une côte est généralement inutile. L’écarteur ¶ Thoracotomie gauche
autostatique (de type Finochietto ou Lortat-Jacob) est installé avec
La thoracotomie gauche est actuellement utilisée de façon
sa crémaillère placée vers l’aide. Il faut ouvrir progressivement la
exceptionnelle pour aborder l’œsophage thoracique.
thoracotomie en désinsérant les muscles intercostaux au bord
supérieur de la côte inférieure sur toute la longueur de l’espace pour Deux cas sont à distinguer :
limiter les risques de plaie des vaisseaux intercostaux et de fracture – la thoracotomie gauche est choisie en raison de l’impossibilité
de côte. L’exposition peut être améliorée vers le haut ou vers le bas d’utiliser une thoracotomie droite (antécédent de chirurgie ou de
par la section du col de la côte, respectivement sus- ou sous-jacente. tuberculose pleuropulmonaire droite) ou parce qu’il faut explorer
La fermeture est faite plan par plan au fil résorbable. Les points chirurgicalement une lésion thoracique gauche (nodule pulmonaire
rapprochant les côtes peuvent être passés au travers de la côte par exemple) : l’incision est alors une thoracotomie postérolatérale
inférieure pour éviter de traumatiser le nerf intercostal sous-jacent à gauche empruntant le cinquième ou le sixième espace intercostal ;
l’incision. Le drainage pariétal n’a pas d’intérêt, sauf en cas de l’installation de l’opéré et l’incision pariétale ont les mêmes
3
40-195 Chirurgie des cancers de l’œsophage Techniques chirurgicales
5 Abord de l’œsophage
cervical par cervicotomie
présterno-cléido-mastoïdienne
gauche.
En pointillé : tracé de l’inci-
sion. La partie basse de l’in-
cision peut être horizontale
1 ou 2 cm au-dessus du ma-
nubrium sternal.
*
B
4
Techniques chirurgicales Chirurgie des cancers de l’œsophage 40-195
¶ Cervicotomie en « U »
Cette incision est indiquée lorsqu’on veut procéder à un curage
ganglionnaire cervical extensif ou en cas de pharyngolaryngectomie.
La tête est droite, en hyperextension, mais peut être tournée
facilement vers la droite ou la gauche. Latéralement, l’incision est
située en avant de chaque SCM et remonte à hauteur de l’os hyoïde.
Sur la ligne médiane, les deux incisions sont reliées par une courte
incision horizontale située 1 à 2 cm au-dessus de la fourchette
sternale (fig 8). Si l’on souhaite confectionner un trachéostome
définitif au travers du lambeau inférieur, la partie horizontale de
l’incision doit être placée plus haut. Il faut décoller le lambeau
musculoaponévrotique inférieur jusqu’à la fourchette sternale et le
lambeau supérieur jusqu’à 1 ou 2 cm au-dessus de l’os hyoïde. Ces
deux lambeaux doivent être réclinés par un écarteur autostatique ou
quelques points de suture chargeant les téguments du thorax et du
menton (fig 9).
Les creux sus-claviculaires peuvent être abordés en passant en avant
et/ou en arrière des muscles SCM. Pour améliorer l’exposition dans
7 Abord cervical de l’œsophage par cervicotomie gauche. Exposition de l’œsophage le défilé cervicomédiastinal, il est possible de sectionner les deux
cervical après ligature des vaisseaux thyroïdiens (veine thyroïdienne moyenne et artère chefs sternaux des muscles SCM et de les reconstituer lors de la
thyroïdienne inférieure) et extériorisation du pôle inférieur du lobe thyroïdien. fermeture.
Du fait de l’importance de la dissection cervicale, il est souhaitable
du muscle SCM 1 cm au-dessus du sternum. Ce chef musculaire est de mettre en place un drainage aspiratif de type Redon avant la
alors reconstitué par des points en « X » ou en « U » de fil résorbable fermeture qui est faite en deux plans (muscle peaucier et peau).
lors de la fermeture. Chez un malade ayant eu une radiothérapie, une suture cutanée par
fils est préférable à l’utilisation d’agrafes.
L’œsophage est abordé par son bord postérogauche. Il existe, en
arrière de l’œsophage, un plan prévertébral celluleux lâche qui peut ¶ Cervicomanubriotomie
être facilement décollé au doigt jusque dans le défilé
cervicomédiastinal et en arrière du pharynx. Le nerf récurrent Cette incision peut être utile pour améliorer l’exposition sur
gauche est repéré et progressivement séparé du bord gauche de l’œsophage cervicomédiastinal (tumeur située à hauteur du défilé
5
40-195 Chirurgie des cancers de l’œsophage Techniques chirurgicales
¶ Exploration thoracique
La recherche de métastases pulmonaires ou l’exploration de nodules
millimétriques, parfois dépistés mais non caractérisés par la
9 Abord cervical de l’œsophage par cervicotomie en « U ». Exposition des plans
tomodensitométrie (TDM) préopératoire, est faite au mieux sur un
musculaires superficiels après décollement des lambeaux cutanés supérieur et inférieur.
poumon exsufflé, à l’aide d’une sonde d’intubation sélective.
L’exposition complète du médiastin nécessite la section du ligament
10 Abord de l’œsophage triangulaire (qui contient une artériole dont il faut s’assurer de
cervicomédiastinal par cer- l’hémostase) et la ligature-section de la crosse de la grande veine
vicomanubriotomie.
azygos. En l’absence de radiothérapie préopératoire, une dissection
de l’œsophage sus- et sous-tumoral n’entraîne pas d’ischémie
pariétale œsophagienne et peut constituer une manœuvre utile pour
mieux apprécier la résécabilité de la tumeur. Cependant, il est
préférable, pour limiter le risque de lymphorrhée, de faire porter la
dissection directement sur la zone où la résécabilité apparaît
douteuse et de procéder éventuellement à un examen histologique
extemporané.
L’intervention est parfois indiquée pour une tumeur initialement
volumineuse et traitée par radiochimiothérapie avec une bonne
réponse. Dans ce cas, si l’on craint une extension tumorale
persistante aux structures médiastinales pouvant contre-indiquer
une résection, il est souhaitable de ne pas mobiliser de façon
extensive l’œsophage sus- et sous-tumoral, afin de ne pas
dévasculariser la tumeur et d’éviter ainsi la nécrose de celle-ci, si
elle est finalement laissée en place.
cervicomédiastinal, réintervention). La partie cervicale de l’incision
Pour un cancer épidermoïde, quelle que soit sa hauteur, ou un
est située en avant du SCM gauche. Cette incision est prolongée vers
adénocarcinome du cardia ou de l’œsophage inférieur, la découverte
le bas par une incision médiane dépassant légèrement vers le bas les
d’adénopathies médiastinales métastatiques ne contre-indique pas
limites du manubrium (fig 10). Celui-ci est incisé au ciseau à frapper
l’exérèse de la tumeur.
ou à la scie oscillante, après avoir décollé au doigt les éléments du
médiastin antérieur (loge thymique, tronc veineux innominé). Toutefois, le mauvais pronostic des adénocarcinomes du cardia ou
L’écartement est fait par un écarteur de type Beckman au niveau de l’œsophage avec adénopathies récurrentielles ou latérotrachéales
cervical et un écarteur de type Tuffier au niveau sternal. La ligature métastatiques [46] peut inciter à débuter l’intervention par l’exérèse
du tronc veineux innominé gauche peut être nécessaire. des ganglions suspects situés dans ces territoires et récuser
l’intervention si l’on souhaite éviter une chirurgie palliative.
Lors de la fermeture, le manubrium est suturé par deux fils d’acier
et les téguments thoraciques reconstitués en deux plans.
¶ Exploration cervicale
S’il existe un doute sur une extension trachéale par contiguïté, il est
Points techniques communs souhaitable de ne pas disséquer de façon circonférentielle
aux différentes interventions l’œsophage au-dessus de la tumeur avant d’avoir réussi à séparer
celle-ci de la trachée. En effet, le mauvais jour dont on dispose sur le
bord droit de l’œsophage dans cette circonstance expose à un risque
EXPLORATION accru de plaie de l’œsophage ou de lésion récurrentielle droite.
L’exploration ganglionnaire ne pose en règle guère de problème. Les
¶ Exploration abdominale deux seules difficultés sont :
En cas de cancer épidermoïde, même localisé au bas œsophage, la – éviter une plaie du canal thoracique ou d’une de ses racines lors
carcinose péritonéale est exceptionnelle et l’exploration abdominale de l’exérèse d’un ganglion sus-claviculaire, surtout s’il est situé en
doit essentiellement rechercher des métastases hépatiques ou des arrière du confluent jugulo-sous-clavier ; si l’on dissèque cette zone,
adénopathies métastatiques qui ne contre-indiquent formellement quel que soit le côté (il existe des variantes anatomiques de
6
Techniques chirurgicales Chirurgie des cancers de l’œsophage 40-195
7
40-195 Chirurgie des cancers de l’œsophage Techniques chirurgicales
*
A
13 Gastrolyse.
14 Gastrolyse : section du ligament gastrosplénique en commençant par sa partie in-
férieure.
A. Le décollement co-
loépiploïque est ter-
miné dans sa partie
droite.
B. Le décollement
duodénopancréatique
a été réalisé.
*
B
GASTROPLASTIE
Le but de la gastroplastie est de permettre un allongement de 15 Gastrolyse : section du ligament gastrosplénique ; les vaisseaux gastroépiploïques
gauches ont été ligaturés ; les vaisseaux courts gastrospléniques peuvent être clippés
l’estomac en réséquant sa courbure la plus courte et de procéder à
dans le hile de la rate et sont ligaturés du côté de l’estomac.
l’ablation des ganglions de la partie verticale de la petite courbure
qui peuvent être envahis quelle que soit la localisation de la tumeur en isopéristaltique, sa vascularisation étant alors assurée de façon
sur l’œsophage thoracique [1]. L’estomac est le plus souvent utilisé prédominante par les vaisseaux gastroépiploïques droits et, de façon
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Techniques chirurgicales Chirurgie des cancers de l’œsophage 40-195
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40-195 Chirurgie des cancers de l’œsophage Techniques chirurgicales
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Techniques chirurgicales Chirurgie des cancers de l’œsophage 40-195
21 Gastroplastie. Enfouissement des agrafes à points séparés. Si on réalise une anas- ¶ Thoracotomie droite
tomose intrathoracique, la tubulisation pourra être terminée dans le thorax.
La pyloroplastie a été fermée à points séparés transversaux. Le premier temps de ce geste est l’exposition du médiastin
postérieur par section du ligament triangulaire droit et section entre
ischémique, malgré un réchauffement du champ opératoire ou la ligatures de la crosse de la veine azygos (fig 22). Si le poumon droit
correction d’éventuelles anomalies hémodynamiques, il y a très est exclu par une intubation sélective, toute la hauteur de
probablement eu blessure ou ligature intempestive du pédicule l’œsophage peut facilement être exposée. Si le poumon droit n’est
gastroépiploïque : il faut alors réséquer la totalité de la gastroplastie pas exclu, le refouler en bloc vers l’avant peut comprimer le massif
et faire une coloplastie. cardiaque et altérer les conditions hémodynamiques. Il est alors
préférable d’exposer soit le médiastin inférieur et moyen en
extériorisant de la cavité pleurale le lobe pulmonaire inférieur droit,
PYLOROPLASTIE soit le médiastin supérieur en refoulant simplement le lobe supérieur
La réalisation d’une pyloroplastie – ou du moins d’un geste en direction du diaphragme.
améliorant la vidange gastrique – est recommandée car : Lorsque la tumeur ne pose pas de problème de résécabilité, le plus
simple est de procéder à la mobilisation de l’œsophage du bas vers
– deux études contrôlées [14, 33] ont montré que l’absence de le haut. La plèvre médiastine est incisée en arrière du péricarde et
pyloroplastie augmente le risque de complications respiratoires de la veine cave inférieure, en avant de l’aorte descendante et au
postopératoires ; ces complications sont secondaires à la bord supérieur du pilier diaphragmatique droit (fig 23). L’œsophage
régurgitation de liquide gastrique et peuvent être très graves ; dans et les tissus celluloganglionnaires avoisinants sont facilement clivés
cette optique, la pyloroplastie semble particulièrement importante si du péricarde et de l’aorte descendante à un endroit où celle-ci est
l’estomac est utilisé entier, sans tubulisation ; dépourvue de collatérale (fig 24). Il est ensuite souhaitable de repérer
– à distance de l’intervention, environ 10 % des malades n’ayant pas la plèvre médiastine gauche, de la refouler au tampon monté et de
eu de pyloroplastie sont très gênés par des troubles de la vidange mettre l’œsophage sur lacs. Si la plèvre gauche est ouverte, il faut la
gastrique qui sont corrigés par une pyloroplastie ou une dilatation fermer après exsufflation ou la drainer en fin d’intervention, une
endoscopique du pylore ; fois le malade remis en décubitus dorsal. Lors de ce temps
médiastinal inférieur, le canal thoracique doit être repéré et ligaturé
– et, dans les premiers mois suivant l’intervention, le confort
électivement, quelle que soit l’étendue latérale de la dissection sus-
alimentaire semble meilleur après pyloroplastie qu’en son absence ;
jacente (fig 24). Le repérage du canal thoracique peut être difficile
toutefois, cette différence s’estompe avec le temps [14, 33].
chez un malade gras ou ayant eu une radiochimiothérapie ; dans ce
La pyloroplastie est faite par une incision longitudinale de 1 à 1,5 cm cas, la ligature élective du canal peut être remplacée par une ligature
de long, centrée sur la face antérieure du pylore. Cette incision est en masse des tissus situés entre le rachis, l’aorte descendante et la
fermée transversalement par points séparés ou par surjet (fig 21). veine azygos. Après sa ligature, le canal thoracique peut être soit
Une incision de cette taille ne diminue pas la longueur totale du sectionné en aval et réséqué en bloc avec l’œsophage, soit laissé en
transplant gastrique. place le long de l’aorte descendante. L’intérêt carcinologique de la
L’efficacité de la pyloroplastie semble identique à celle de la résection systématique du canal thoracique n’a pas été établi. À
pyloromyotomie extramuqueuse [26]. Toutefois, dans notre expérience l’inverse, une ligature systématique du canal thoracique minimise le
et dans la littérature, des réinterventions pour sténose fibreuse sont risque de chylothorax postopératoire si une plaie du canal survient
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40-195 Chirurgie des cancers de l’œsophage Techniques chirurgicales
23 Abord de l’œsophage par thoracotomie droite. Tracé de l’incision pleurale le long 25 Dissection de l’œsophage par thoracotomie droite. Le curage intertrachéobronchi-
de la grande veine azygos, du pilier droit du diaphragme, du péricarde et de l’arbre tra- que a été effectué. Le nerf pneumogastrique droit a été coupé en aval de la naissance des
chéobronchique. nerfs bronchiques et le nerf pneumogastrique gauche en aval de la naissance du nerf ré-
current gauche.
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Techniques chirurgicales Chirurgie des cancers de l’œsophage 40-195
¶ Thoracotomie gauche
28 Abord de l’œsophage par thoracotomie droite. Dissection du médiastin supérieur. La libération de l’œsophage par thoracotomie gauche est rarement
Le curage ganglionnaire récurrentiel gauche a été réalisé en exposant le récurrent indiquée, du fait des difficultés d’exposition liées à la présence du
jusqu’au bord inférieur de la crosse de l’aorte. L’artère sous-clavière droite est réclinée massif cardiaque, de l’aorte descendante, de la crosse de l’aorte et
pour permettre l’ablation en monobloc des ganglions récurrentiels droits. La loge de l’artère sous-clavière gauche.
de Barety (loge intertrachéocave) a également été ouverte pour le curage ganglionnaire.
Le plus souvent, seul l’œsophage sous-aortique est mobilisé. Comme
récurrentiels droits sont fréquemment présents en dessous de cette par thoracotomie droite, il est plus facile de procéder du bas vers le
artère et peuvent être réséqués en bloc avec l’œsophage. En haut. Après section du ligament triangulaire gauche jusqu’à la veine
revanche, il est plus facile de procéder séparément à l’exérèse des pulmonaire inférieure gauche, la plèvre médiastine est incisée en
ganglions récurrentiels gauches et des ganglions intertrachéocaves. arrière du péricarde et en avant de l’aorte. La dissection est faite au
Le curage intertrachéocave ne doit pas être extensif sous peine de contact du péricarde et de la paroi aortique jusqu’à identifier la
dévasculariser l’axe trachéobronchique et d’augmenter ainsi le plèvre médiastine droite qui est refoulée au tampon monté.
risque de complications respiratoires postopératoires (fig 28). Pour L’œsophage est mis sur lacs avec les deux nerfs pneumogastriques
le curage récurrentiel droit, il faut repérer le nerf récurrent droit au (fig 29). L’identification du canal thoracique à son entrée dans le
bord inférieur de l’artère sous-clavière, en suivant au besoin le nerf thorax est difficile et nécessite la dissection du flanc droit de l’aorte
pneumogastrique droit à sa partie haute. L’usage de clips descendante. Il est parfois plus facile de l’isoler en dessous de la
hémostatiques fins ou d’une coagulation bipolaire facilite crosse de l’aorte.
l’hémostase et la lymphostase au contact des nerfs récurrents en La région intertrachéobronchique est abordée en incisant la plèvre
minimisant le risque de leur blessure. Au bord supérieur de la crosse en arrière de la bronche souche gauche et en débutant ainsi le curage
de l’aorte et en arrière de l’artère sous-clavière gauche, il est fréquent intertrachéobronchique (fig 30). En arrière de l’œsophage, les artères
d’identifier la partie distale du canal thoracique : bien que le canal naissant de l’aorte descendante sont liées ou clippées, puis
thoracique soit valvulé et qu’en théorie une fuite lymphatique à sectionnées. Le nerf pneumogastrique gauche est sectionné au bord
partir de son extrémité distale soit impossible, il est préférable de le inférieur de la crosse de l’aorte après avoir identifié formellement
ligaturer ou de le clipper pour limiter le risque de chylothorax l’origine du nerf récurrent gauche et, si possible, préservé les nerfs
postopératoire. De même, lors de la dissection de l’œsophage bronchiques gauches. Au bord droit de l’œsophage, on procède à la
thoracique, tout conduit dont l’aspect est compatible avec un canal dissection de la bronche souche droite, à la fin du curage
lymphatique doit être ligaturé ou clippé, car des variations intertrachéobronchique, et à la section du nerf pneumogastrique
anatomiques du canal thoracique sont possibles et peuvent expliquer droit si possible en aval des nerfs bronchiques droits.
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¶ Temps opératoires
39 Intervention de Lewis-Santy.
Position de l’opéré pour le temps ab- Intervention classique
dominal. En pointillé : incision mé-
diane sus-ombilicale. L’intervention est débutée par le temps abdominal. Après un temps
d’exploration, la gastrolyse puis la gastroplastie sont réalisées. La
tubulisation gastrique est soit complète (et il faut alors suturer le
sommet du tube gastrique à la petite courbure gastrique), soit
incomplète en laissant intact le sommet de la grosse tubérosité (dans
ce cas, la division de l’estomac sera achevée lors du temps
thoracique et le sommet de la plastie gastrique sera fermé par un
agrafage linéaire, éventuellement après réalisation de l’anastomose
œsogastrique à l’aide d’une agrafeuse introduite par l’orifice ainsi
disponible).
La pyloroplastie est pour nous systématique. Il est important de
vérifier que le pylore peut être facilement ascensionné jusqu’à
l’orifice hiatal. Celui-ci doit toujours être agrandi au minimum par
section du pilier droit. L’agrandissement de l’hiatus est suffisant si
quatre doigts peuvent être admis dans le médiastin. Un tel
agrandissement entraîne en règle l’ouverture de la cavité pleurale
droite, qui sera de toute façon drainée à la fin du temps thoracique,
et la section de l’artère diaphragmatique inférieure droite à
l’hémostase de laquelle il faut veiller. Si la section du pilier droit
paraît insuffisante, le bord antérieur de l’hiatus peut être ouvert
jusqu’à la veine diaphragmatique inférieure gauche. Le drainage
abdominal par un drain de Redon sous-phrénique gauche et un
deuxième drain de même type dans la région sous-hépatique est
suffisant. Nous ne réalisons jamais de jéjunostomie systématique
dans cette intervention en raison d’une part de la rareté des fistules
l’abord vers la région sous-costale gauche est limité. L’œsophage est anastomotiques œsogastriques, dont la prévalence est comprise
abordé par thoracotomie antérolatérale droite. entre 6 et 8 % [29, 45], et d’autre part de la morbidité de la jéjunostomie
Cette installation permet un gain de temps, surtout si deux qui est comprise entre 2 et 14 % [16, 54]. Le temps thoracique est
chirurgiens peuvent assurer simultanément les deux temps de ensuite réalisé. En cas de découverte dans le thorax d’une extension
[19, 20]
l’intervention . Elle permet également un bon contrôle des tumorale inattendue signant le caractère palliatif de l’intervention, il
différents temps de l’intervention, en particulier de l’ascension de la sera cependant nécessaire de réaliser l’œsophagectomie et
gastroplastie dans le thorax. En revanche, cette installation a pour l’anastomose œsogastrique. La libération de l’œsophage se fait
inconvénient une exposition légèrement moins bonne dans habituellement du bas vers le haut. Dans le médiastin sus-aortique,
l’hypocondre gauche et sur le médiastin postérieur, en particulier à la mobilisation de l’œsophage doit être suffisante pour permettre
sa partie haute. Il faut donc disposer d’une bonne expérience en une section de l’œsophage 6 cm au-dessus de la tumeur en cas de
chirurgie œsophagienne pour utiliser cette installation qui semble cancer épidermoïde et 8 cm en cas d’adénocarcinome. En pratique,
particulièrement utile chez les malades peu corpulents et/ou pour il faut toujours sectionner l’œsophage au-dessus de la crosse de
une tumeur bas située sur l’œsophage. À l’inverse, cette technique l’azygos afin de minimiser le risque de reflux gastro-œsophagien
doit à notre avis être évitée chez les malades obèses et/ou postopératoire. L’hémostase et la lymphostase doivent être parfaites
préalablement opérés à l’étage sus-mésocolique. avant l’ascension de la gastroplastie.
40 Intervention de Lewis-
Santy avec abord simultané ab-
dominal et thoracique droit.
A. Position de l’opéré sur la
table.
B. Inclinaison latérale de la
5e table d’opération facilitant
l’abord abdominal.
C. Inclinaison latérale op-
posée facilitant l’abord tho-
racique.
*
B *
C
*
A
18
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46 Œsophagectomie sans
thoracotomie. Les différents
trajets thoraciques de la
plastie. La voie présternale
est abandonnée ; 1. Voie ré-
trosternale ; 2. voie médias-
tinale postérieure dans le lit
de l’œsophage.
44 Œsophagectomie sans thoracotomie. Le nerf récurrent gauche est repéré l’avoir blessé, en particulier lors de la dissection d’une tumeur
et respecté. Le tour de l’œsophage est fait à distance de la bouche œsophagienne. Le nerf rétroaortique, il est possible de le lier par voie transhiatale en
récurrent droit n’est pas visible. ouvrant la plèvre médiastine droite. On repère alors la grande veine
azygos et on charge, à l’aide d’un dissecteur à bout mousse, tous les
45 Œsophagectomie sans tissus situés entre le flanc doit de l’aorte et le rachis, le dissecteur
thoracotomie. Dissection bi- devant ressortir immédiatement en avant de la veine azygos. Ces
manuelle de l’œsophage au tissus sont liés en masse avec un fil fort. Le seul danger de cette
niveau de la crosse de manœuvre est la blessure d’une artère ou d’une veine intercostale.
l’aorte.
Le trajet de la gastroplastie est discuté (fig 46). Deux études
contrôlées ont comparé le trajet médiastinal postérieur au trajet
rétrosternal. Une étude a conclu à la supériorité du trajet médiastinal
postérieur en raison d’une moindre prévalence de complications
cardiopulmonaires [5] . La deuxième étude ne montrait pas de
différence significative en faveur de l’une ou l’autre technique, mais
la prévalence des complications cardiopulmonaires était également
moindre lorsque la plastie siégeait dans le médiastin postérieur [52].
Dans la mesure où le trajet rétrosternal est plus long en moyenne de
5 à 10 cm [31], ce dernier ne doit être utilisé qu’en cas d’exérèse
carcinologiquement peu satisfaisante, si l’on craint une sténose de la
plastie par récidive néoplasique locale ; il faut alors fermer
complètement l’orifice hiatal avant l’ascension de la gastroplastie.
Le trajet transpleural gauche est exceptionnellement utilisé et peut
aboutir à une plaie du canal thoracique lors de la création de la
est de procéder à la dissection œsophagienne sus-aortique sous communication entre la région cervicale et le dôme pleural
contrôle de la vue à l’aide d’un médiastinoscope : cette technique gauche [31].
permet de prélever des ganglions récurrentiels gauches et des L’ascension de la gastroplastie est facilitée par la mise en place d’un
ganglions intertrachéocaves [6]. Nous n’avons pas l’expérience de sac huilé autour du sommet de la gastroplastie, une traction douce
cette technique. sur le lacs empruntant le médiastin postérieur et un contrôle direct
Une fois l’œsophage thoracique complètement mobilisé, l’œsophage de la plastie par une main placée en arrière du massif cardiaque et
cervical est sectionné et son extrémité distale est fermée de façon exerçant une poussée vers le haut. L’absence de rotation de la
étanche et fixée à un lacs. L’œsophage thoracique est ensuite attiré gastroplastie est affirmée par la palpation par la main médiastinale
dans le champ abdominal, ce qui permet une tubulisation gastrique qui suit l’épiploon et la ligne d’agrafes de la tubulisation, et par
du haut vers le bas, plus facile chez un malade obèse. Afin de l’inspection cervicale qui vérifie que la ligne d’agrafes est au bord
minimiser le risque de compression de la gastroplastie à l’étage des droit et que les derniers vaisseaux courts sont au bord gauche de la
crosses et dans le défilé cervicomédiastinal, l’utilisation d’un tube gastroplastie. L’anastomose œsogastrique est faite par suture
gastrique étroit (cf supra) et la résection du grand épiploon en manuelle au sommet de la plastie en terminolatéral ou en
excédent sont souhaitables. Avant l’ascension de la gastroplastie, il terminoterminal. Si la gastroplastie présente un excès de longueur,
faut confectionner la pyloroplastie et drainer les plèvres si elles ont celui-ci peut être réséqué. La section du transplant gastrique peut
été ouvertes. La dissection médiastinale aboutit à l’ouverture d’au être un peu hémorragique du fait d’un certain degré de stase
moins une plèvre médiastine dans 75 % des cas [39]. Si la plèvre n’a veineuse ; il faut alors veiller à l’hémostase des vaisseaux sous-
pas été ouverte, un épanchement pleural liquidien d’apparition muqueux gastriques en les liant électivement au fil fin serti.
retardée est très fréquent et peut, surtout s’il est bilatéral, altérer la Si un trajet médiastinal postérieur a été choisi, l’orifice hiatal est
fonction respiratoire postopératoire. C’est la raison pour laquelle fermé autour de la gastroplastie en évitant toute compression du
certains auteurs préfèrent ouvrir délibérément les deux cavités pédicule gastroépiploïque.
pleurales pour les drainer [34]. La confection d’une jéjunostomie d’alimentation doit être discutée
Le canal thoracique n’est habituellement pas visualisé dans une au cas par cas. Certains auteurs la font systématiquement pour
œsophagectomie sans thoracotomie. Toutefois, si l’on craint de permettre la reprise de l’alimentation entérale dès le troisième jour
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40-195 Chirurgie des cancers de l’œsophage Techniques chirurgicales
postopératoire et la suppression des apports par voie parentérale au – ce trajet est plus court que le trajet rétrosternal [31] ;
quatrième jour postopératoire ; si les suites opératoires sont
– dans certaines équipes, le taux de fistule anastomotique cervicale
favorables, la jéjunostomie est supprimée à la fin de la troisième
est inférieur à celui observé après utilisation d’un trajet
semaine postopératoire [16] . Si les suites sont compliquées, la
rétrosternal [47] ;
jéjunostomie est utilisée pendant plus de 3 semaines, mais cette
éventualité ne représente que 12 % des malades [16]. Notre attitude – il pourrait permettre un meilleur confort fonctionnel car il est
est de confectionner une jéjunostomie seulement si la dissection exempt d’angulation et, si une dilatation endoscopique de
médiastinale supérieure a été difficile et a pu traumatiser le nerf l’anastomose œsogastrique est nécessaire, cette dilatation est plus
récurrent gauche, ou si la vascularisation du sommet du transplant facile et plus efficace [39] ; or, le taux de sténoses anastomotiques
gastrique est imparfaite. Le drainage abdominal par un drain de cervicales bénignes nécessitant des dilatations endoscopiques peut
Redon sous-phrénique gauche et un deuxième drain de même type atteindre 25 à 30 % [25, 43, 47] ; pour ces raisons notre préférence va à
dans la région sous-hépatique est suffisant. l’intervention de Mac Keown.
Le drainage cervical n’est pas systématique (cf supra). La fermeture Quelle que soit l’intervention choisie, le niveau de section de
cervicale est faite en réinsérant lâchement les muscles sous- l’œsophage doit concilier des impératifs carcinologiques (cf supra)
hyoïdiens à la face profonde du muscle SCM à sa partie profonde, et physiologiques (préservation si possible de 2 cm d’œsophage sous
ce qui permet de couvrir partiellement le montage digestif. Le la bouche œsophagienne). Il est possible de sectionner l’œsophage
muscle peaucier et la peau sont suturés séparément. pratiquement au niveau de la bouche œsophagienne en ménageant
un peu de paroi à la face antérieure de l’œsophage pour permettre
¶ Problèmes techniques l’anastomose. Toutefois, une section si haute entraîne fréquemment
En peropératoire peuvent survenir une plaie vasculaire (crosse de des fausses routes dans la période postopératoire immédiate et il
l’azygos, artère du « décroisement ») et/ou une déchirure de la faut alors faire systématiquement une jéjunostomie. L’intervention
membraneuse trachéale. La survenue de ces complications est de Mac Keown est la seule intervention vraiment adaptée aux
favorisée par une volumineuse tumeur rétroaortique ou une cancers cervicomédiastinaux pour lesquels :
dissection trop latérale par rapport à la paroi œsophagienne. – une section proche de la bouche œsophagienne est nécessaire ;
En cas d’hémorragie, il faut, dans un premier temps, tamponner
– une plastie médiastinale postérieure est dans le même axe que le
quelques instants le médiastin avec une mèche à prostate pour
court segment œsophagien restant.
apprécier l’importance de l’hémorragie ; si celle-ci persiste ou
récidive immédiatement après l’ablation du tamponnement, il faut Lors d’une œsophagectomie par triple voie d’abord, certains auteurs
compléter celui-ci et faire une thoracotomie droite [39] . Une utilisent systématiquement une jéjunostomie d’alimentation [48].
thoracotomie antérolatérale, sans changement de position de l’opéré, Celle-ci permet de reprendre l’alimentation entérale avant la
permet de faire l’hémostase de la crosse de l’azygos. Une cicatrisation de l’anastomose œsogastrique, qu’elle soit obtenue de
thoracotomie postérolatérale, nécessitant de fermer rapidement les première intention ou après survenue d’une fistule. La jéjunostomie
incisions et de changer la position de l’opéré, est plus adaptée pour est recommandable si l’œsophage a été sectionné à proximité de la
l’hémostase d’une artère œsophagienne. bouche œsophagienne, si une blessure d’un nerf récurrent a été
Une déchirure membraneuse peut, si elle intéresse la trachée, être notée en peropératoire ou si la vascularisation du sommet du
suturée au moyen d’un agrandissement de l’incision par une transplant gastrique est imparfaite.
manubriotomie [39] . Une déchirure de la bifurcation trachéale
nécessite une thoracotomie droite, au besoin après intubation ¶ Temps opératoires
sélective du poumon gauche pour limiter la fuite aérienne [39].
Intervention d’Akiyama
ŒSOPHAGECTOMIE PAR TRIPLE ABORD ABDOMINAL, L’intervention débute par le temps abdominal et le temps cervical.
THORACIQUE ET CERVICAL Après avoir vérifié dans l’abdomen l’absence de métastases
hépatique et ganglionnaire cœliaque, et dans le cou l’absence de
¶ Choix du trajet médiastinal du transplant gastrique métastase ganglionnaire sus-claviculaire, la gastrolyse et la
Ce choix équivaut à celui de l’ordre des différents temps opératoires. gastroplastie sont réalisées selon la technique habituelle. Toutefois,
La première possibilité consiste à réaliser en premier la gastroplastie, la section et la suture étanche de l’œsophage au-dessus du cardia
à l’ascensionner dans un trajet rétrosternal et à l’anastomoser à permettent une tubulisation gastrique du haut vers le bas, qui est
l’œsophage cervical, puis de procéder à l’exérèse de l’œsophage et plus facile chez un malade obèse. Les piliers du diaphragme sont
de la tumeur par une thoracotomie droite (intervention d’Akiyama). suturés par-dessus la suture œsophagienne.
La deuxième possibilité consiste à procéder en premier à l’exérèse Le transplant gastrique devant être ascensionné en rétrosternal, on
de l’œsophage et de la tumeur par une thoracotomie droite, puis à commence la tunnellisation à l’étage abdominal en désinsérant le
réaliser la gastroplastie, à l’ascensionner dans un trajet médiastinal diaphragme de la face postérieure du sternum. Les deux plèvres
postérieur et à l’anastomoser à l’œsophage cervical (intervention de médiastines sont refoulées au tampon monté. Leur ouverture est
Mac Keown). sans conséquence si un drainage pleural est mis en place. Dans le
Les éléments pouvant faire préférer une intervention d’Akiyama (et défilé cervicomédiastinal, il faut sectionner à leur partie basse le
donc un trajet médiastinal antérieur) sont : sterno-cléido-hyoïdien et le sternothyroïdien, puis emprunter le plan
situé immédiatement au contact du manubrium sternal. Les
– en cas de récidive dans le lit œsophagien, la gastroplastie est à
insertions latérales de ces deux muscles doivent être effondrées pour
distance de la récidive et le risque de dysphagie a priori nul ;
obtenir un tunnel suffisamment large. En effet, le tunnel rétrosternal
– une irradiation du lit œsophagien est sans risque pour la doit admettre quatre doigts sur toute sa longueur pour éviter toute
gastroplastie ; en fait, les lésions de l’estomac après irradiation compression de la gastroplastie. Il n’est en règle pas nécessaire de
médiastinale postérieure sont exceptionnelles ; réséquer la moitié du manubrium et la partie interne de la clavicule
– en cas d’exérèse œsophagienne palliative ou impossible, gauche pour obtenir un trajet suffisamment large [47, 48].
l’intervention permet un traitement palliatif efficace ; toutefois, ce L’œsophage est ensuite sectionné et suturé au niveau du défilé
dernier argument a perdu presque toute valeur depuis l’avènement cervicomédiastinal. La plastie gastrique est entourée à sa partie
des moyens d’imagerie moderne et les progrès de la haute d’un sac ou d’un manchon en plastique huilé et le sommet de
radiochimiothérapie et des endoprothèses œsophagiennes. la plastie fixé à un lacs ou à un tube de Mousseaux. Cette technique
Les éléments pouvant faire préférer une intervention de Mac Keown permet à la plastie d’être ascensionnée de façon atraumatique, la
(et donc un trajet médiastinal postérieur) sont : traction s’exerçant de façon diffuse sur le corps de la plastie et non
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Techniques chirurgicales Chirurgie des cancers de l’œsophage 40-195
par une traction appliquée uniquement au sommet de celle-ci [48]. abdominale ou cervicale, il sera nécessaire de poursuivre
L’absence de rotation de la gastroplastie est affirmée par la palpation l’intervention car l’œsophage thoracique a été dévascularisé. La
par la main rétrosternale qui suit l’épiploon et la ligne d’agrafes de gastrolyse et la gastroplastie sont réalisées selon la technique
la tubulisation et exerce également une poussée vers le haut, et par habituelle. Lors du curage ganglionnaire abdominal, il est habituel
l’inspection cervicale qui vérifie que la ligne d’agrafes est bien au d’observer une congestion des vaisseaux lymphatiques et un œdème
bord droit et les derniers vaisseaux courts au bord gauche de la du rétropéritoine, qui sont la conséquence de la ligature préalable
gastroplastie. À la fin de l’ascension, il faut vérifier que le bord du canal thoracique dans le médiastin. La cervicotomie, faite au
antérieur du lobe hépatique gauche n’exerce pas un effet de billot mieux dans le même temps par une deuxième équipe, permet de
sur le pédicule gastroépiploïque droit. sectionner l’œsophage cervical dont l’extrémité distale est fermée de
L’anastomose œsogastrique est faite par suture manuelle au sommet façon étanche et fixée à un lacs. L’œsophage thoracique est ensuite
de la plastie ou à la face postérieure de la grosse tubérosité pour attiré dans le champ abdominal, ce qui permet une tubulisation
compenser l’angulation existante entre l’axe de l’œsophage et celui gastrique du haut vers le bas, plus facile chez un malade obèse. La
du transplant gastrique. pyloroplastie doit être faite avant l’ascension de la gastroplastie. Le
pilier droit du diaphragme est sectionné pour élargir l’orifice hiatal.
Le drainage cervical ne doit pas être systématique. La fermeture
L’agrandissement de l’hiatus est suffisant si quatre doigts peuvent
cervicale est faite en réinsérant lâchement les muscles sous-
être admis dans le médiastin. Un tel agrandissement entraîne en
hyoïdiens à la face profonde du muscle SCM à sa partie profonde,
règle la section de l’artère diaphragmatique inférieure droite à
ce qui permet de couvrir partiellement le montage digestif. Le
l’hémostase de laquelle il faut veiller. Si la section du pilier droit
muscle peaucier et la peau sont suturés séparément.
paraît insuffisante, le bord antérieur de l’hiatus peut être ouvert
La confection d’une jéjunostomie d’alimentation doit être discutée jusqu’à la veine diaphragmatique inférieure gauche.
avant la fermeture abdominale. Le drainage abdominal par un drain
de Redon sous-phrénique gauche et un deuxième drain de même L’ascension de la gastroplastie est facilitée par la mise en place d’un
type dans la région sous-hépatique est suffisant. Lors de la fermeture sac huilé autour du sommet de la gastroplastie, une traction douce
abdominale, il faut veiller à éviter de traumatiser ou de comprimer sur le lacs empruntant le médiastin postérieur et un contrôle direct
le pédicule gastroépiploïque droit, en particulier lors de la de la plastie par une main placée en arrière du massif cardiaque et
péritonisation. exerçant une poussée vers le haut. L’absence de rotation de la
gastroplastie est affirmée par la palpation par la main médiastinale
Le malade est alors installé en position de thoracotomie droite. En qui suit l’épiploon et la ligne d’agrafes de la tubulisation et par
cas de découverte d’une extension tumorale méconnue signant le l’inspection cervicale qui vérifie que la ligne d’agrafes est bien au
caractère palliatif de la résection, il est possible d’arrêter bord droit et les vaisseaux courts au bord gauche de la gastroplastie.
l’intervention en laissant l’œsophage exclu, à condition qu’il ait été Si la gastroplastie paraît manquer de longueur, il faut vérifier avec
préalablement suturé à ses deux extrémités de façon satisfaisante. la même main que la plastie n’a pas « basculé » vers l’arrière dans la
Le risque de cette attitude est la constitution d’une mucocèle mais, cavité pleurale droite, en empruntant alors un trajet plus long que le
habituellement, celle-ci demande plusieurs mois et n’entraîne aucun trajet médiastinal postérieur. L’anastomose œsogastrique est faite par
symptôme [32]. La mobilisation de l’œsophage est faite de bas en haut suture manuelle au sommet de la plastie en terminolatéral ou en
après avoir récupéré au-dessus de l’hiatus la zone de section distale terminoterminal. Si la gastroplastie présente un excès de longueur,
de l’œsophage. La mobilisation est complétée jusqu’au défilé celui-ci peut être réséqué. La section du transplant gastrique peut
cervicothoracique. La mobilisation de l’œsophage facilite le curage être un peu hémorragique du fait d’un certain degré de stase
récurrentiel gauche. L’exérèse des ganglions récurrentiels droits doit veineuse ; il faut alors veiller à l’hémostase des vaisseaux sous-
ménager la crosse du nerf récurrent droit au bord inférieur de la muqueux gastriques en les liant électivement au fil fin serti.
sous-clavière droite. Le drainage pleural est sans particularité. Le
drainage médiastinal est inutile. La confection d’une jéjunostomie d’alimentation doit être discutée
avant la fermeture abdominale. Le drainage abdominal par un drain
Intervention de Mac Keown de Redon sous-phrénique gauche et un deuxième drain de même
type dans la région sous-hépatique est suffisant.
L’intervention débute par le temps thoracique. Après avoir vérifié la
Le drainage cervical ne doit pas être systématique. La fermeture
résécabilité de la tumeur et l’absence de métastase pulmonaire, la
cervicale est faite en réinsérant lâchement les muscles sous-
mobilisation de l’œsophage dans le médiastin postérieur est
hyoïdiens à la face profonde du muscle SCM à sa partie profonde,
conduite du bas vers le haut. Dans le médiastin inférieur, il est
ce qui permet de couvrir partiellement le montage digestif. Le
important de refouler complètement la plèvre médiastine gauche
muscle peaucier et la peau sont suturés séparément.
pour éviter son ouverture lors de la dissection de l’hiatus pendant
le temps abdominal ; en pratique, il faut apercevoir le pilier gauche
du diaphragme pour être certain que l’œsophage inférieur a été
suffisamment mobilisé à son bord gauche. Le canal thoracique est Points techniques particuliers
lié le plus bas possible dans l’angle formé par l’aorte et le rachis.
Dans le médiastin supérieur, il faut s’efforcer de poursuivre la
ESTOMAC TUBULISÉ OU ENTIER ?
dissection le plus haut possible dans le défilé cervicothoracique pour
faciliter la dissection cervicale ultérieure ; ce temps est relativement La plupart des auteurs, dont nous-mêmes, utilisent le plus souvent
facile en arrière au contact du rachis et en avant au contact de la l’estomac tubulisé. Toutefois, ce type de transplant gastrique expose
trachée. Au bord droit de l’œsophage, il faut éviter le léser le nerf à la survenue d’une ischémie, en général modérée, à sa partie toute
récurrent droit tout en procédant à l’ablation en bloc des ganglions haute, le plus souvent du fait d’une stase veineuse, attribuée à la
récurrentiels droits. Au bord gauche de l’œsophage, il faut refouler résection plus ou moins étendue du réseau vasculaire sous-muqueux
le nerf récurrent gauche de façon atraumatique, tout en procédant à de l’estomac.
l’ablation des ganglions situés à son contact. Lors de ce temps, le Certains auteurs préfèrent utiliser l’estomac entier, sans tubulisation
champ opératoire est exigu du fait de la présence de l’œsophage : il ni résection de la petite courbure [9]. Dans cette technique, la partie
est donc souhaitable, pour que le repérage du nerf récurrent puisse verticale de la petite courbure est dénudée en ligaturant un par un
être facile en permanence, de procéder à une hémostase méthodique les vaisseaux droits issus de l’arcade vasculaire de la petite courbure
avec une coagulation bipolaire ou des clips. Le drainage pleural doit qui est sectionnée 4 à 5 cm en amont du pylore (fig 47). La
être relié à un système d’aspiration qui sera fonctionnel lors du dénudation de la petite courbure augmente la plasticité du
temps abdominal et cervical. Le drainage médiastinal est inutile. transplant gastrique qui est alors suffisamment long pour être
Le malade est ensuite réinstallé en décubitus dorsal. En cas de ascensionné au cou et anastomosé au pharynx si besoin [9, 47]. Cette
découverte d’une extension tumorale méconnue lors de l’exploration dénudation permet de réséquer les ganglions éventuellement
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CHIRURGIE VIDÉOASSISTÉE
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Si un trajet rétrosternal est retenu, il est plus facile de créer celui-ci – il existe des pouls artériels normaux en regard du segment de
immédiatement avant l’incision du péritoine en désinsérant le côlon ascendant devant être ascensionné au niveau du cou ;
diaphragme du manubrium et en refoulant les deux plèvres au – il n’existe pas de stase veineuse en regard de cette zone.
tampon monté. On procède ensuite aux ligatures vasculaires qui doivent être faites
Le premier temps de la coloplastie est la mobilisation complète du précisément là où les bull-dogs étaient positionnés. Au niveau des
côlon droit, du côlon transverse et de l’angle colique gauche. Le vaisseaux coliques supérieurs droits et moyens, la longueur
méso de celui-ci doit être mobilisé jusqu’à l’aorte. La mobilisation disponible pour ligaturer ces pédicules sans interrompre la
de la jonction sigmoïdo-iliaque et du côlon sigmoïde est inutile. En collatéralité indispensable au transplant colique peut être très courte.
cas d’antécédent de gastrectomie, il faut parfois reprendre le Dans ce cas, il peut être nécessaire de placer des ligatures appuyées
décollement coloépiploïque intégralement pour débarrasser le côlon de fil monobrin non résorbable au ras des vaisseaux mésentériques
transverse de reliquats de grand épiploon qui pourraient le brider et supérieurs et de sectionner les vaisseaux coliques au bistouri froid.
gêner son ascension. Nous ne sommes pas partisans de prélever une pastille d’artère ou
Le temps délicat est la dissection des vaisseaux coliques supérieurs de veine mésentérique supérieure pour disposer à tout prix d’une
droits et coliques moyens à leur origine sur les vaisseaux collatéralité entre les vaisseaux coliques moyens et coliques
mésentériques supérieurs. Schématiquement, les vaisseaux coliques supérieurs droits, comme cela a été décrit par certains auteurs [10].
moyens et supérieurs droits constituent un système obéissant à des La confection d’une coloplastie d’un autre type (en règle une
règles pratiquement constantes. Ces deux artères naissent soit d’un coloplastie transverse anisopéristaltique) nous paraît une option plus
tronc commun de l’artère mésentérique supérieure et ce tronc sûre.
commun constitue une anastomose qu’il faut absolument préserver La section du côlon droit se fait après agrafage du segment devant
en le sectionnant au ras de l’artère mésentérique supérieure (fig 52), être monté au cou. L’ascension du transplant doit éviter toute
soit séparément mais sont anastomosées par une arcade de premier traction excessive ou torsion du pédicule colique supérieur gauche.
ordre (fig 52). La disposition veineuse est identique. Les Anglo- L’arcade bordante doit être située au bord droit du sommet de la
Saxons utilisent souvent le terme de middle colic pour désigner ces coloplastie au niveau cervical. L’ascension de la coloplastie est
deux vaisseaux [42]. Le repérage de la disposition vasculaire au facilitée par la mise en place de son sommet dans un sac plastique
travers du mésocôlon peut être source d’erreurs, en particulier chez huilé et, si un trajet rétrosternal est retenu, par une traction au zénith
les malades obèses. En conséquence, il est indispensable de du sternum par deux écarteurs (type écarteur de Farabeuf ou valve
disséquer les vaisseaux coliques supérieur droit et moyen au niveau vaginale) placés en arrière du manubrium et de la xiphoïde.
de leur naissance et terminaison sur les vaisseaux mésentériques L’anastomose œsocolique peut alors être réalisée, si possible en
supérieurs. terminoterminal. Le drainage cervical est facultatif.
Du côté gauche, il faut ascensionner l’angle colique gauche en Au niveau abdominal, le côlon est sectionné en aval de l’angle
direction du diaphragme et déterminer sur le côlon quel est le point colique gauche après avoir vérifié que le côlon droit restant et que
situé dans l’axe des vaisseaux coliques supérieurs gauches. Au cours l’antre gastrique (s’il est utilisé) venaient facilement au contact du
de cette manœuvre, il faut veiller à ne pas étirer l’artère colique point choisi. Il ne faut pas sectionner l’arcade bordante colique à ce
supérieure gauche et à ne pas comprimer la veine mésentérique niveau car elle peut assurer une collatéralité efficace, en particulier
inférieure contre le bord inférieur du pancréas. Le point ainsi veineuse [10]. L’anastomose distale de la coloplastie est faite sur
déterminé sert ensuite de point fixe pour mesurer la longueur de l’antre (en terminoterminal) ou sur une anse jéjunale en « Y » (le
transplant colique nécessaire pour atteindre la bouche œsophagienne plus souvent en terminoterminal). L’anastomose colocolique (ou
(repère qui permet une marge de sécurité de 2 ou 3 cm par rapport iléocolique si le cæcum a été prélevé avec la coloplastie) est faite en
à la hauteur de l’anastomose œsocolique). Cette longueur est ensuite avant de la précédente après avoir tourné le cæcum (ou l’iléon) et
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33
¶ 40-210
Les indications des œsophagectomies pour lésions non tumorales sont peu nombreuses. Le plus souvent,
l’œsophagectomie est indiquée en urgence, soit dans le cadre d’une ingestion de caustique, soit pour
perforation œsophagienne. L’intervention a pour but de retirer l’œsophage en totalité, en étant la moins
invasive possible. L’œsophagectomie sans thoracotomie, en particulier le stripping œsophagien, permet
d’atteindre ces deux buts, rapidement et avec peu de morbidité. Les autres indications de
l’œsophagectomie sont plus rares. Il s’agit principalement des œsophagectomies pour sténose peptique
ou caustique. Les techniques habituelles d’œsophagectomie avec ou sans thoracotomie sont rarement
indiquées dans ces situations. Les techniques récentes de chirurgie mini-invasive, par cœlioscopie ou par
thoracoscopie, peuvent trouver une place dans ces indications. Les différentes techniques
d’œsophagectomie sont ici développées, détaillant les techniques ou les temps opératoires spécifiques
aux œsophagectomies pour lésions bénignes et les techniques de chirurgie mini-invasive de l’œsophage
dans ces indications.
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Mots clés : Œsophage ; Voie transhiatale ; Stripping de l’œsophage ; Brûlure caustique ; Thoracotomie ;
Thoracoscopie ; Cœlioscopie
Figure 2. Œsophagectomie sans thoracotomie. Temps de laparotomie. de l’absence d’artère hépatique gauche naissant de la gastrique
Mobilisation du lobe hépatique gauche par section du ligament triangu- gauche, la pars flaccida puis la pars condensa du petit épiploon
laire gauche. La région hiatale est protégée par un champ tassé sous le sont sectionnées. On libère ensuite le bord antérieur du pilier
lobe gauche. droit du diaphragme. L’espace entre ce pilier et le bord droit de
l’œsophage abdominal est ouvert de haut en bas. La membrane
cervicale, avec une table d’instrumentation, un bistouri électri- phréno-œsophagienne est ouverte en avant de l’œsophage
que et un système d’aspiration séparés (Fig. 1). abdominal, jusqu’à prendre contact avec le pilier diaphragmati-
que gauche (Fig. 3). La dissection à la face postérieure de
Laparotomie l’œsophage abdominal peut alors être menée au doigt ou au
Une laparotomie médiane sus-ombilicale, prolongée quelques dissecteur. Cette dissection achevée, un drain de Penrose cravate
centimètres sous l’ombilic, permet une bonne exposition de l’œsophage et permet une mobilisation dans toutes les direc-
l’étage sus-mésocolique. tions pour les temps suivants.
Après exploration systématique de la cavité abdominale, le La dissection dans le médiastin inférieur est faite au doigt ou
ligament rond est sectionné entre deux ligatures, et le ligament au tampon monté. Des hémostases péricardiales sont rarement
falciforme incisé largement afin de faciliter la mise en place des nécessaires. L’ouverture de l’orifice hiatal en avant est nécessaire
valves. L’abord de la région hiatale est facilité par la mobilisa- afin de poursuivre le plus haut possible la dissection médiasti-
tion du lobe hépatique gauche. Pour cela, un champ est placé nale. Avant de débuter l’incision antérieure d’élargissement de
en avant de l’hiatus, en arrière du lobe hépatique gauche. Le l’orifice hiatal, la face supérieure du diaphragme est séparée du
ligament triangulaire gauche est ensuite incisé au bistouri péricarde par un décollement prudent au doigt ou au dissecteur.
électrique sur ce champ, sous contrôle de la vue, et sans risque L’hémostase préventive des vaisseaux diaphragmatiques de part
de brûlure de la région hiatale (Fig. 2). Cette incision est et d’autre de l’incision diaphragmatique est faite par deux
poussée vers la droite à proximité de la veine sus-hépatique points en X de fil 3/0 non résorbable. Ces deux points sont
gauche. Le lobe gauche peut ainsi être récliné vers la droite, laissés sur pince-repère, permettant de tracter sur les berges de
sous une valve malléable. l’incision diaphragmatique (Fig. 4). La phrénotomie antérieure
La région hiatale est exposée par la main gauche de l’opéra- peut s’étendre sur 3 cm ; au-delà, il existe un risque de plaie
teur, qui attire l’estomac en bas et en arrière. Après vérification péricardique. Une valve malléable fine peut être introduite dans
Cervicotomie
L’incision est présterno-cléido-mastoïdienne gauche, remon-
tant sur une dizaine de centimètres depuis la fourchette
sternale. Après dissection du bord antérieur de ce muscle, les
muscles sous-hyoïdiens et omohyoïdien gauches sont section-
nés. La veine thyroïdienne moyenne et l’artère thyroïdienne
inférieure sont liées et sectionnées. Le nerf récurrent gauche est
repéré dans le dièdre œsotrachéal gauche, et suivi en arrière du
lobe thyroïdien. L’œsophage cervical est exposé au mieux par
positionnement d’un écarteur autostatique de Beckmann,
chargeant d’un côté le lobe thyroïdien, de l’autre l’axe jugulo-
carotidien (Fig. 6). L’écartement du lobe thyroïdien par un Figure 7. Œsophagectomie sans thoracotomie. Les dissections mé-
écarteur de Farabeuf doit être prudent et précis, en raison du diastinales supérieure et inférieure se rejoignent progressivement. Si la
risque de lésion récurrentielle gauche. jonction ne peut être faite, le tiers moyen non disséqué peut être
Le contact est pris avec la face antérieure du rachis cervical, ce strippé.
qui permet de disséquer la face postérieure de l’œsophage cervical
au doigt puis au tampon monté et d’entrer facilement dans le
médiastin postérieur. En avant, l’œsophage est doucement séparé Il est aussi possible de faire un stripping du tiers moyen de
de la membraneuse trachéale. Cette dissection prudente est l’œsophage, selon la technique décrite plus loin.
poursuivie vers le bas, au doigt et aux ciseaux, avec électrocoagu-
L’hémostase des vaisseaux périœsophagiens est difficile par
lation des petites branches vasculaires périœsophagiennes. Le tour
ces deux techniques. Une hémorragie modérée peut être
de l’œsophage cervical peut alors être fait au dissecteur, en restant
tamponnée par une mèche à prostate tassée dans le médiastin
au contact, de façon à ne pas blesser les nerfs récurrents droit et
gauche. Un drain de Penrose cravatant l’œsophage cervical postérieur. Une hémorragie plus abondante, rare, [6, 7] doit faire
permet de le tracter et de poursuivre la dissection périœsopha- suspecter une plaie de l’azygos. Ceci ne s’est pas produit dans
gienne jusqu’à hauteur de la crosse aortique. notre expérience, où les tamponnements successifs ont été
suffisants. La survenue d’une hémorragie massive doit conduire
Œsophagectomie à une thoracotomie droite d’hémostase, après fermeture rapide
Le tiers moyen de l’œsophage peut être alors libéré selon de la laparotomie.
deux techniques. Après section de l’œsophage cervical 3 cm sous la bouche
La main droite passée dans le médiastin inférieur rejoint œsophagienne, la pièce d’œsophagectomie est retirée par voie
progressivement la main gauche descendue dans le médiastin abdominale. Les temps de gastrolyse, de tubulisation gastrique,
supérieur (Fig. 7). L’anesthésiste doit être prévenu de la d’ascension de plastie dans le médiastin postérieur et d’anasto-
manœuvre et du risque de troubles du rythme ou d’hypo- mose cervicale sont décrits dans l’article « Chirurgie des cancers
tension. de l’œsophage ». [8]
Fibroscopie + TOGD
6 semaines
Dilatations et/ou
plastie
Suites opératoires
Le drain médiastinal est retiré 48 heures après l’intervention,
Figure 9. Œsophagectomie par stripping. Une sonde de Salem est
et les drains abdominaux progressivement à partir du 3e jour. La
descendue dans l’œsophage jusque dans l’abdomen. Elle est fixée à
réalimentation est débutée par la jéjunostomie après reprise du
l’extrémité œsophagienne.
transit, par du sérum glucosé à 5 ‰, puis par une solution de
nutrition entérale.
Indications
Largement utilisée dans le traitement des cancers œsopha-
giens, l’abord de l’œsophage par thoracotomie droite est rare en
pathologie non tumorale et a, selon nous, deux indications :
• en cas de perforation œsophagienne, quand elle survient sur
un œsophage pathologique (perforation sur dilatation endo-
Figure 10. Œsophagectomie par stripping. Si l’estomac peut être scopique), ou quand elle est ancienne, avec abcès ou média-
conservé, il est fermé sous le cardia par application d’une rangée d’agra- stinite étendue. Le traitement chirurgical doit être agressif,
fes. Une traction progressive est exercée sur la sonde de Salem, invaginant justifiant une œsophagectomie totale, [16] avec débridement
l’œsophage sur lui-même. large et drainage du médiastin postérieur. Le choix de cette
voie d’abord dépend donc de l’état général du patient, mais
aussi du siège de la perforation et de l’étendue de la média-
Drainage et stomies stinite. L’opacification aux hydrosolubles et le scanner
thoracoabdominal avec opacification haute permettent de
Le drainage cervical est identique. L’œsophage sectionné est guider la décision thérapeutique. Dans cette indication,
laissé en œsophagostomie au milieu de la cervicotomie, fixé à l’abord transthoracique est le premier temps opératoire, avant
la peau par des points séparés de fil résorbable. la laparotomie et la cervicotomie ;
• une sténose peptique ou caustique distale non dilatable.
Un drain siliconé est laissé dans le médiastin postérieur, Après l’œsophagectomie, une anastomose intrathoracique
aspiratif à –10 mm d’eau, sortant en hypocondre gauche. œsogastrique est faisable. L’abord transthoracique droit de
L’abdomen est drainé par un module drain-lame, partant de l’œsophage est donc le second temps opératoire, après la
l’hiatus vers le flanc droit, et par un drain sous-phrénique laparotomie. C’est cette technique, dans cette indication, que
gauche. nous décrivons ci-dessous.
Une jéjunostomie d’alimentation est mise en place. Lorsque
l’estomac est conservé, une sonde de gastrostomie de décharge Laparotomie
est mise en place à proximité de la petite courbure verticale Le patient est installé en décubitus dorsal. Les temps d’expo-
(Fig. 11). sition, de dissection de l’œsophage abdominal sont identiques.
Drainage et fermeture
Avant la réexpansion pulmonaire droite, un drain thoracique
postérieur est positionné à proximité immédiate de l’anasto-
mose. Un autre drain est laissé en place en avant et en haut de
la cavité pleurale.
Le billot de table est abaissé, et un anesthésique local à effet
prolongé (type Naropeine®) est infiltré à l’extrémité postérieure
de l’incision intercostale et par les drains thoraciques. Les côtes
sont rapprochées par des points de fil résorbable de gros calibre.
Les plans musculaires sont suturés en deux plans de fil résorbable.
Figure 13. Œsophagectomie par thoracotomie. Le poumon droit est
récliné, la plèvre médiastinale est ouverte de part et d’autre de l’œso-
phage. La crosse de l’azygos est liée. Suites opératoires
Une opacification aux hydrosolubles est effectuée au 7e jour,
avant de reprendre l’alimentation. [17] Le drain antérieur est
Les temps de gastrolyse, de pyloroplastie et de tubulisation
rapidement retiré (3e jour), et le drain postérieur est retiré après
gastrique sont sans particularités.
cette opacification et après réalimentation.
Figure 15.
A. Œsophagectomie mini-invasive.
Gastrolyse sous cœlioscopie. Instal-
lation.
B. Œsophagectomie mini-invasive.
Gastrolyse sous cœlioscopie. Dispo-
sition des trocarts.
Gastrolyse
La dissection porte d’abord sur le petit épiploon, remontant
jusqu’au bord antérieur du pilier diaphragmatique droit. Celui-ci
est alors exposé sur toute sa hauteur, en descendant en bas
jusqu’à l’insertion du pilier gauche. En haut, la membrane
phréno-œsophagienne est ouverte, jusqu’à rejoindre le bord
antérieur du pilier gauche. Celui-ci est ainsi exposé sur toute sa
hauteur, en descendant jusqu’à son insertion. Il est alors
possible de libérer le cardia du plan de l’aorte cœliaque, comme
on le pratique dans la chirurgie du reflux gastro-œsophagien, et
de faire le tour de l’œsophage abdominal, que l’on peut cravater
avec un drain de Penrose. Les deux piliers sont alors sectionnés
transversalement, sur 1 à 2 cm, et la dissection périœsopha-
gienne est poussée dans le médiastin inférieur (Fig. 16).
Le bulbe et le deuxième duodénum sont ensuite mobilisés par
décollement postérieur, mais il est difficile d’aller jusqu’à la face
antérieure de la veine cave. Même si cela est controversé, [24]
Figure 16. Œsophagectomie mini-invasive. Gastrolyse sous cœliosco-
nous effectuons une pyloroplastie de façon systématique. Dans
pie. La dissection au-dessus de l’orifice hiatal est facilitée par traction sur
notre expérience, le seul patient ayant été réopéré de l’abdomen
un drain de Penrose passé autour du cardia. Les deux piliers sont incisés
après gastrolyse cœlioscopique le fut en raison d’un pyloro-
latéralement.
spasme. Le pylore est ouvert transversalement, puis refermé par
points séparés ou surjet de fil résorbable 2/0. Une traction sur
la partie basse de l’antre prépylorique, par une pince introduite pince à ultrasons. Le ligament gastrosplénique est ensuite
dans le trocart le plus à gauche facilite l’exposition au cours de sectionné de bas en haut. Un palpateur écarte le bord antérieur
ce temps (Fig. 17). de la rate, mettant en tension les vaisseaux courts qui sont
Le ligament gastrocolique est ouvert en son milieu, en restant coagulés de proche en proche (Fig. 18). On décroche ainsi la
à distance de l’arcade gastroépiploïque, puis sa section se fait grosse tubérosité gastrique, en rejoignant le pilier gauche du
par prises successives vers la droite et la face antérieure de la diaphragme. Les quelques attaches postérieures du corps
tête pancréatique. Nous utilisons pour ce temps et les suivants gastrique sont sectionnées.
une pince coagulante à ultrasons, type Ultracision®. La face Il ne reste qu’à lier les vaisseaux gastriques gauches. Une
postérieure de l’antre et D1 sont décollés jusqu’à l’isthme et la pince introduite par le trocart le plus à gauche passe sous
tête du pancréas, par section des quelques attaches péritonéales l’estomac, en écartant la petite courbure vers la gauche. Une
à ce niveau. Ce décollement suit le bord supérieur du pancréas pince type endo-GIA® est alors positionnée par le trocart para-
jusqu’à l’origine des vaisseaux gastriques gauches, sur le tronc ombilical gauche et appliquée sur les vaisseaux gastriques
cœliaque. gauches (Fig. 19). Pour ce temps, nous passons le plus souvent
Une pince introduite par le trocart le plus à droite soulève la l’endo-GIA ® en avant de l’estomac. Une fois les vaisseaux
face postérieure de l’estomac. La section du ligament gastroco- gastriques gauches liés, l’estomac est totalement mobilisé. On
lique est reprise vers la gauche, en restant à distance de l’arcade s’assure que le pylore monte sans tension jusqu’à l’orifice hiatal.
gastroépiploïque. L’hémostase et la section des vaisseaux S’il s’agit du premier temps d’une intervention de Lewis-
gastroépiploïques gauches sont faites près de leur origine par la Santy, il n’est pas nécessaire de tubuliser l’estomac ; ceci sera fait
Suites opératoires
Les deux Redons sont retirés quand leur débit quotidien est
inférieur à 20 ml. La réalimentation est conditionnée par les
suites thoraciques et les résultats d’un transit œso-gastro-
duodénal de contrôle au 7e jour.
Installation
Le patient est en décubitus latéral gauche, le membre supé-
rieur droit étant maintenu en position haute. Une intubation
sélective est nécessaire à l’affaissement du poumon droit. Un
billot de table est mis en place, mais ne sera monté qu’en cas
Figure 18. Œsophagectomie mini-invasive. Gastrolyse sous cœliosco- de conversion. L’opérateur est dans le dos du patient, l’aide et
pie. Mobilisation de la grande courbure par section des vaisseaux courts. l’instrumentiste sont face à lui.
Une pince soulève l’estomac et l’écarte vers la droite. Un palpateur écarte Un trocart de 10 mm est placé dans le 7 e ou 8 e espace
la rate vers la gauche. intercostal, sur la ligne axillaire moyenne, pour l’optique de 30°.
Un trocart de 10 mm, pour l’écarteur à poumon, est placé dans
le 4e espace, en avant de la ligne axillaire antérieure. Un trocart
pendant le temps thoracique, après ascension de l’estomac à de 10 ou 12 mm est placé dans le 8e ou 9e espace, sur la ligne
travers l’orifice hiatal élargi. En revanche, si la gastrolyse est le axillaire postérieure, et un dernier trocart de 5 mm est placé
deuxième temps d’une œsophagectomie totale par triple voie, la près de la pointe de l’omoplate (Fig. 20).
tubulisation doit être faite sous cœlioscopie, par application de
plusieurs rangées d’endo-GIA®, préservant les vaisseaux gastri- Œsophagectomie
ques droits. L’extrémité supérieure du tube gastrique est fixée au Le poumon droit exclu est récliné en haut et en avant par un
moignon gastrique sous-cardial, pour être ascensionnée par la écarteur en éventail. Le ligament triangulaire est libéré jusqu’à
cervicotomie, avec l’œsophage. la veine pulmonaire inférieure, permettant la rétraction pulmo-
naire et l’exposition du médiastin postérieur. La plèvre média-
Drainage et fermeture stinale est ouverte en avant et en arrière de l’œsophage, en
Un drain de Redon est laissé sous la coupole diaphragmatique remontant jusqu’à la crosse de l’azygos, puis au-dessus de celle-
gauche, venant près de l’hiatus. Un autre drain est laissé en ci. La crosse est libérée au dissecteur puis sectionnée par
sous-hépatique, remontant vers la pyloroplastie et l’hiatus. Les application d’une pince type endo-GIA® 30 (Fig. 21).
Cœlioscopie et cervicotomie
La gastrolyse sous cœlioscopie est effectuée selon la technique
décrite plus haut. Il faut insister sur deux points.
• La nécessité de disséquer la membrane phréno-œsophagienne
en fin de cœlioscopie pour ne pas perdre de pression du
pneumopéritoine.
• Il est ensuite essentiel de décoller largement le bloc duodé-
nopancréatique, pour faciliter la montée de la plastie jusqu’au
cou.
Ce temps est terminé par la tubulisation gastrique et par la
fixation du tube au moignon gastrique.
La cervicotomie est identique à celle précédemment décrite.
Elle rejoint la dissection médiastinale supérieure. La pièce
d’œsophagectomie est sortie par cette incision, tractant douce-
ment sur le tube gastrique. L’anastomose œsogastrique est faite
à points séparés ou par deux hémisurjets de fil résorbable 3/0.
La cervicotomie est drainée par un drain de Penrose sortant par
l’incision.
Figure 21. Œsophagectomie mini-invasive. Thoracoscopie. Après
ouverture de la plèvre médiastinale, la crosse de l’azygos est agrafée et
Suites opératoires
sectionnée. Les principes sont similaires à ceux décrits pour les interven-
tions par thoracotomie.
[6] Hulscher JB, van Sandick JW, de Boer AG, Wijnhoven BP, Tijssen JG,
Fockens P, et al. Extended transthoracic resection compared with
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• C’est une indication peu fréquente, le traitement [8] Sauvanet A, Belghiti J. Chirurgie des cancers de l’œsophage. Encycl
conservateur devant être envisagé en première intention. Méd Chir (Elsevier SAS, Paris), Techniques chirurgicales-Appareil
Cependant, en cas d’échec de celui-ci, ou d’emblée dans digestif, 40-195, 2000: 8p.
un contexte de sepsis grave, une œsophagectomie totale [9] Gossot D, Sarfati E, Celerier M. Early blunt esophagectomy in severe
peut être indiquée. caustic burns of the upper digestive tract. Report of 29 cases. J Thorac
• Le choix entre abord transthoracique et transhiatal est Cardiovasc Surg 1987;94:188-91.
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médiastinite, et de l’état général du patient. Dans ce [11] Munoz-Bongrand N, Gornet JM, Sarfati E. Diagnostic and therapeutic
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dilatation sont devenues très rares. [13] Cattan P, Munoz-Bongrand N, Berney T, Halimi B, Sarfati E,
• Les techniques mini-invasives trouvent ici une bonne Celerier M. Extensive abdominal surgery after caustic ingestion. Ann
indication. L’intervention est alors une œsogastrectomie Surg 2000;231:519-23.
[14] Nguyen NT, Roberts P, Follette DM, Rivers R, Wolfe BM.
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• L’indication la plus fréquente de l’œsophagectomie [15] Gossot D, Fourquier P, Celerier M. Thoracoscopic esophagectomy:
pour lésion non tumorale est la nécrose caustique de technique and initial results. Ann Thorac Surg 1993;56:667-70.
l’œsophage (brûlure de stade IIIb). Dans ce contexte [16] Gupta NM, Kaman L. Personal management of 57 consecutive patients
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peu morbide. [17] Sauvanet A, Baltar J, Le Mee J, Belghiti J. Diagnosis and conservative
• Les brûlures moins sévères (stades IIb et IIIa) évoluent management of intrathoracic leakage after oesophagectomy. Br J Surg
1998;85:1446-9.
plus souvent vers la sténose. En cas d’échec du traitement
[18] Gossot D, Cattan P, Fritsch S, Halimi B, Sarfati E, Celerier M. Can the
endoscopique, nous préférons effectuer une coloplastie morbidity of esophagectomy be reduced by the thoracoscopic
rétrosternale de dérivation, et conserver l’œsophage en approach? Surg Endosc 1995;9:1113-5.
place, plutôt qu’une œsophagectomie transhiatale [19] Luketich JD, Alvelo-Rivera M, Buenaventura PO, Christie NA,
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Munoz-Bongrand N., Sarfati E. Œsophagectomie pour lésion non tumorale. EMC (Elsevier SAS, Paris),
Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-210, 2005.
Les rares diverticules de l’œsophage thoracique sont en général des pseudodiverticules de pulsion dus à
un trouble moteur de l’œsophage. Leur traitement chirurgical se doit de réséquer le diverticule, de traiter
les troubles moteurs par une myotomie et d’y adjoindre un procédé antireflux. Les voies d’abord peuvent
être thoraciques ou abdominales. L’avènement de la vidéochirurgie a sophistiqué les choix
thérapeutiques qui peuvent conduire à réaliser isolément ou en association une thoracoscopie ou une
laparoscopie.
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■ Indications
Seuls les diverticules symptomatiques doivent être opérés,
bien que certains auteurs recommandent de traiter systémati-
quement les volumineux diverticules de stase en raison du
risque d’accidents d’inhalation [4, 6].
Lorsqu’il existe une contre-indication à une thoracotomie ou
à une thoracoscopie ou en cas de diverticule peu développé à
collet large, le diverticule peut être négligé et l’on effectue, par
voie abdominale, le traitement indirect de la stase diverticulaire
par la seule correction de la dyskinésie et du reflux associé en Figure 3. Après incision de la plèvre médiastinale, l’œsophage est
réalisant une intervention de Heller remontant jusqu’au collet chargé sur un lacs.
du diverticule, associée à un geste antireflux.
En ce qui concerne les petits diverticules parabronchiques de
traction, l’indication opératoire est exceptionnelle car ceux-ci gouttière, le patient est calé par un appui au niveau de la région
sont asymptomatiques. iliaque droite ainsi que par un appui dorsal.
La seule indication résulte de la survenue d’une fistule Une table pont est placée au-dessus des membres inférieurs de
œsobronchique [16]. l’opéré. L’opérateur est en arrière de l’opéré, l’aide en face. Il
s’agit d’une thoracotomie antérolatérale gauche dans le 7 e
espace intercostal.
■ Techniques opératoires Exposition
Un écarteur de Finochietto est mis en place, la crémaillère
Traitement d’un diverticule épiphrénique étant disposée vers l’aide qui rétracte avec douceur le poumon
par thoracotomie gauche gauche exsufflé de façon à permettre la section du ligament
triangulaire gauche (Fig. 2).
C’est l’intervention de base encore pratiquée par la majorité Une valve autostatique peut être mise en place sur le poumon
des auteurs [16]. puis la plèvre médiastinale est incisée (Fig. 3), ce qui conduit sur
le relief de l’œsophage qui est identifié puis disséqué avec les
Installation et voie d’abord deux pneumogastriques.
L’œsophage est chargé sur deux lacs, l’un inférieur, l’autre
Le patient est installé en décubitus latéral incomplet de façon supérieur, de façon à encadrer le diverticule (Fig. 4).
à se présenter de trois quarts (Fig. 1), le membre inférieur droit La poche diverticulaire est de dissection plus ou moins aisée
fléchi, le membre inférieur gauche en extension, le membre suivant le degré de la péridiverticulite et le siège du développe-
supérieur gauche est placé en extension modérée dans une ment du diverticule ; son sommet est saisi par une pince de
Figure 4. Deux lacs sont mis en place de part et d’autre du diverticule. Figure 6. Deux fils de présentation sont mis en place de part et d’autre
de la myotomie péridiverticulaire.
Diverticulectomie
Dissection du collet
Celui-ci est souvent masqué par un tissu fibreux qu’il faut
sectionner au ras de la musculeuse saine de façon à repérer avec
précision l’orifice diverticulaire (Fig. 5) ; ce temps est grande-
ment facilité par la réalisation d’une myotomie sus- et sous-
jacente au collet diverticulaire qui permet d’identifier avec
certitude les plans muqueux et musculeux. On met alors en
place deux fils de présentation sus- et sous-jacents au diverticule Figure 7.
(Fig. 6). A. Section-agrafage du collet diverticulaire à l’aide d’une agrafeuse
linéaire.
Section du collet et suture œsophagienne B. La musculeuse est suturée au-dessus de la rangée d’agrafes.
Une fois la muqueuse isolée sur toute sa circonférence,
l’agrafeuse est mise en place et la muqueuse est sectionnée entre surjet renforçant cette suture ; en revanche, la musculeuse est
deux lignes d’agrafes (Fig. 7A). Il n’est pas nécessaire de faire un rapprochée par des points séparés de fils à résorption lente de
Figure 8.
A. Ouverture de la muqueuse œsophagienne au niveau du collet du diverticule.
B. Début de la suture muqueuse par un surjet de fil à résorption lente.
C. Surjet terminé.
D. Suture de la musculeuse.
calibre 5/0 (Fig. 7B). La seule difficulté de ce temps opératoire a trique, il faut effectuer une phrénotomie radiée à partir de
trait à l’étendue de l’exérèse muqueuse qui, trop importante, l’orifice hiatal ; les berges diaphragmatiques sont mises en
aboutirait à une sténose souvent précédée de fistule et qui trop traction par des fils repères puis la jonction œsogastrique est
parcimonieuse, exposerait à une récidive du diverticule ; c’est exposée (Fig. 10). Les vaisseaux cardiotubérositaires sont liés de
pourquoi, il faut insister sur l’utilité de faire mettre en place, par part et d’autre du tracé de la myotomie puis celle-ci est réalisée
l’anesthésiste, un tube de Faucher ou une bougie de calibre 50 F avec une particulière prudence en raison de la finesse de la
ou mieux de disposer d’une endoscopie peropératoire. musculeuse à ce niveau ; si une brèche muqueuse survient, elle
doit être tout simplement suturée par un fil à résorption lente.
Variantes
La fermeture muqueuse peut être réalisée manuellement : un Procédé antireflux
clamp de Satinski est placé à la base du diverticule, deux
champs de bordure isolent le champ opératoire et la muqueuse Par cette voie d’abord, le seul procédé réalisable s’apparente
est sectionnée progressivement, la brèche muqueuse étant au procédé de Belsey Mark IV. Il faut sectionner les premiers
refermée au fur et à mesure par un surjet de fil à résorption vaisseaux courts, ce qui permet d’ascensionner la grosse tubéro-
lente de calibre 5/0 (Fig. 8A à D). sité et de la suturer à chacune des berges latérales de la myoto-
mie par une série de points séparés permettant de recouvrir la
Myotomie partie intra-abdominale de la muqueuse œsophagienne sur une
hauteur de 4 à 5 cm (Fig. 9, 11A, B).
Elle est réalisée sur la face opposée à l’implantation du collet
En fin d’intervention, la phrénotomie est refermée par des
diverticulaire. La musculeuse est incisée verticalement au
bistouri jusqu’à repérer le plan muqueux blanchâtre (Fig. 9A) points séparés de fil à résorption lente 2/0, après réintégration
puis la lame des ciseaux est insinuée sur la musculeuse et dans l’abdomen de la valve (Fig. 12A, B).
celle-ci sectionnée verticalement jusqu’à la traversée diaphrag-
matique vers le bas et jusqu’à la crosse de l’aorte vers le haut Drainage-fermeture
(Fig. 9B). Puis la musculeuse est séparée latéralement de la
muqueuse et écartée pour laisser à découvert la moitié de la • Le tube de Faucher est retiré et remplacé par une sonde
circonférence œsophagienne. gastrique que l’anesthésiste fait progresser pas à pas sous
Cette myotomie limitée peut se concevoir lorsqu’il n’existe contrôle de l’opérateur.
pas de troubles moteurs sur la manométrie préopératoire. Si l’on • Un drain thoracique est placé au sommet du thorax.
décide de réaliser une myotomie étendue à la jonction œsogas- • La cavité abdominale n’est pas drainée.
Figure 11.
A. Ascension de la grosse tubérosité gastrique.
B. Suture de la grosse tubérosité aux berges de la myotomie par des points
séparés.
Figure 9.
A. La myotomie est réalisée sur la face opposée à l’implantation du
diverticule.
B. La résection vers le bas de la musculeuse est réalisée aux ciseaux.
Figure 12.
A. Fixation de la valve tubérositaire par un procédé voisin du Belsey Mark
IV.
B. Fermeture de la phrénotomie et aspect final de l’intervention.
Figure 13.
A. Installation du patient pour une intervention par thoracoscopie droite dégageant le creux axillaire (cas des diverticules haut situés).
B. Position de thoracoscopie droite pour les diverticulectomies du tiers inférieur de l’œsophage.
Anesthésie
Le poumon droit est exclu par une sonde d’intubation
sélective type Carlens. Sa position correcte est vérifiée par
fibroscopie.
Si une sonde œsogastrique est mise en place, elle ne doit être
enfoncée qu’une fois l’œsophage exposé, sous contrôle de la vue
de l’opérateur, pour ne pas risquer une perforation du
diverticule.
Intervention Exposition
Lorsque le diverticule siège sur le bord antérodroit de l’œso-
Disposition des trocarts
phage, il est immédiatement visible (Fig. 15). Mais il peut être
Il n’existe pas de position standard des trocarts, puisqu’elle sur son bord antérogauche et être non visible. Il faut alors
dépend de la hauteur du diverticule. Dans le cas pris pour type ouvrir la plèvre médiastinale en regard du siège présumé du
Figure 18. Libération du ligament triangulaire. Figure 21. Section des fibres circulaires de la jonction œsogastrique.
Figure 19. Exposition de la jonction œsogastrique. Figure 22. Aspect final de la myotomie.
Dissection médiastinale
En arrière, l’œsophage est séparé de l’aorte à l’aide de ciseaux
utilisés comme une spatule puis l’on sectionne latéralement ses
attaches pleurales en coagulant à gauche une ou deux artérioles
à la pince bipolaire. Enfin en avant, l’œsophage est séparé du
péricarde.
Au cours des différents temps, la traction sur la pince P3 est
fondamentale, permettant d’ouvrir les différents espaces de
dissection.
Localisation du diverticule
Ce temps est difficile sans l’aide d’un endoscope œsophagien
qui, en transilluminant l’œsophage et en alternant inflation et
déflation, permet d’orienter l’opérateur qui repère le collet du
diverticule.
Figure 24. Position des trocarts au cours d’une laparoscopie pure pour .2 Le pilier droit du diaphragme peut être partiellement sec-
diverticule épiphrénique. tionné pour obtenir une meilleure exposition de l’espace
inframédiastinal postérieur (Fig. 26).
un trocart de 12 mm est placé en sus- et paraombilical gauche
pour la main droite de l’opérateur armée de ciseaux et ultérieu- Section du collet et résection du diverticule
rement pour l’agrafeuse P4 (Fig. 24).
Le collet une fois repéré, il faut le libérer de toutes ses
adhérences en prenant garde de ne pas faire d’effraction
Exposition
pleurale. Cette libération est plus aisée si l’on parvient à attirer
Le petit épiploon est sectionné verticalement ; le péritoine le diverticule dans l’abdomen (Fig. 27).
latéro-œsophagien est incisé le long du bord interne du pilier L’agrafeuse linéaire orientable avec un chargeur vasculaire est
droit permettant de repérer le bord droit de l’œsophage puis introduite par le trocart de 12 mm latéral. Elle est placée sur le
d’amorcer sa libération vers le médiastin ; puis le péritoine pré- collet parallèlement à l’axe de l’œsophage sous le contrôle de
œsophagien est incisé aux ciseaux conduisant au bord gauche l’endoscope qui fait des manœuvres de va-et-vient, vérifiant que
de l’œsophage ; la section de la cravate d’Helvétius et celle du la muqueuse n’a pas été prise en excès (Fig. 28).
ligament phrénogastrique libèrent le bord gauche de l’œso- Plusieurs applications sont nécessaires puis on vérifie l’agra-
phage, ce qui permet à la pince P2 de passer aisément sous fage par endoscopie. La musculeuse est suturée par deux ou
l’œsophage pour disposer un lacs saisi par la pince P3 de façon trois points séparés de fil à résorption lente recouvrant la ligne
à permettre la traction de l’œsophage (Fig. 25). d’agrafes ; la poche diverticulaire est placée dans un sac
Figure 27. Section aux ciseaux des éléments fibreux au niveau du collet
et section de la musculeuse.
Fin de la myotomie
Ayant débuté sur la ligne médiane, la myotomie se dirige vers
le haut pour venir se placer sur le bord opposé à la suture du
collet, et doit en dépasser le niveau vers le haut d’environ 2 cm.
Vers le cardia, elle atteint un point situé 1,5 à 2 cm sous la
jonction œsogastrique repérée par les vaisseaux cardiotubérosi-
taires, ou mieux l’endoscope peropératoire.
L’utilisation du crochet coagulateur est préconisée pour
réaliser cette prolongation vers le bas de la myotomie, qui est
Figure 28. le temps le plus difficile car la musculeuse est très fine, ne
A. Application de la pince linéaire coupante sur la muqueuse mise à nu. comportant qu’une seule couche. Enfin, la musculeuse doit être
B. Ablation du diverticule qui est mis dans un sac d’extraction. décollée latéralement de la muqueuse aux ciseaux pour en
découvrir la moitié antérieure (Fig. 30).
.3 d’extraction que l’on laisse dans l’abdomen et dont l’extirpation
est réalisée à la fin de l’intervention en utilisant l’un des trocarts Procédé antireflux
de 12 mm.
Fermeture de l’hiatus œsophagien
Myotomie Les piliers sont rapprochés par un ou deux points séparés de
fil non résorbable tressé calibre 0.
Exposition
La pince P3 saisit le fundus et exerce une traction vers le bas. Valve antireflux
Les vaisseaux cardiotubérositaires sont sectionnés aux ciseaux Procédé de Dor par valve antérieure. Il ne présente que le
ultrasoniques ; P2 et P3 se saisissent des moignons et exercent seul avantage de venir recouvrir la myotomie au niveau de son
des tractions latérales opposées. segment inférieur. La grosse tubérosité est fixée au pilier droit au
niveau de son extrémité supérieure et au bord droit de la
Début de la myotomie myotomie vers le bas par des points séparés de fil non résorba-
On incise la musculeuse œsophagienne 1 cm environ ble calibre 00 (Fig. 31).
au-dessus du cardia ; cette incision réalisée aux ciseaux est Procédé de Toupet. Il peut être choisi pour sa meilleure
verticale. efficacité. Les vaisseaux courts ne sont pas en principe section-
En écartant les bords, on permet à P2 de saisir le bord gauche nés mais l’étroitesse de la grosse tubérosité peut rendre ce geste
de la musculeuse et l’on repère les fibres musculaires circulaires nécessaire pour obtenir une valve de bonne qualité. La pince
sous lesquelles on insinue une lame de ciseaux qui sectionne P2 passe en arrière de l’œsophage, saisit le fundus au niveau de
quelques fibres laissant la muqueuse en arrière ; on peut dès lors sa face antérieure à mi-distance entre l’angle de His et la grande
passer les ciseaux entre musculeuse et muqueuse qui sont alors courbure et la fait passer en arrière de l’œsophage. La pince
séparées. P3 saisit le bord du fundus présentant sa face postérieure qui est
Figure 30. Aspect de la myotomie achevée. Figure 32. Procédé antireflux type Toupet ; la valve est fixée au pilier
droit et aux deux berges de la myotomie sur une hauteur d’environ 4 cm
par des points séparés.
suturée au pilier droit sur une hauteur de 4 cm par des points suturées à la partie adjacente du fundus dont les deux zones
séparés de fil tressé non résorbable calibre 00. Puis la pince droite et gauche sont alors rapprochées sans tension pour venir
P3 reprend les deux brins du lacs qui sont tractés vers le bas et recouvrir la myotomie (Fig. 34).
l’on réalise la suture du fundus aux deux berges de la myotomie
par trois à quatre points séparés du même fil (Fig. 32).
Procédé de Nissen modifié. Le désir de réaliser le meilleur
Complications peropératoires
procédé antireflux peut conduire à choisir une valve type Nissen Si une plaie muqueuse survenait, elle serait suturée par des
qui n’est ici qu’un complément du procédé précédent et qui
points séparés de fil à résorption lente de calibre 5/0 et l’on
présente l’avantage de venir recouvrir la partie basse de la
déciderait de réaliser une valve type Dor qui a le mérite de la
myotomie. Cette procédure impose systématiquement, dans
facilité, ou de Nissen modifié de réalisation plus complexe, pour
cette indication, une libération des vaisseaux courts qui sont
venir recouvrir la suture muqueuse.
sectionnés aux ciseaux à ultrasons introduits dans le trocart de
12 mm paramédian ; cependant, P2 tire le fundus vers la droite
et P3 met en tension le ligament gastrosplénique. On progresse Fin d’intervention
ainsi pas à pas jusqu’à libérer la totalité de la grande courbure
(Fig. 33) ; celle-ci est attirée derrière l’œsophage par P2 et saisie Une sonde gastrique est placée prudemment sous contrôle de
par P3 qui, en la tractant vers l’avant, permet la suture au pilier la vue ; un drain de Redon médiastinal est mis en place ; un
droit de la face antérieure du fundus par une série de quatre contrôle à la Gastrografine® au 6e jour, montrant l’étanchéité de
points séparés. Puis les deux berges de la myotomie sont la suture, permet l’ablation de l’un et de l’autre.
P. Breil (ph.breil@gmail.com).
Clinique Turin, 9, rue de Turin, 75008 Paris, France.
D. Gossot.
Institut mutualiste Montsouris, 42, boulevard Jourdan, 75014 Paris, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Breil P., Gossot D. Traitement chirurgical des diverticules de l’œsophage thoracique. EMC (Elsevier
Masson SAS, Paris), Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-186, 2008.
Les diverticules pharyngo-œsophagiens sont acquis et surviennent chez l’adulte. Il sont en rapport avec
une hyperpression intraluminale de la jonction pharyngo-œsophagienne, leur traitement associe le plus
souvent une diverticulectomie associée à une myotomie crico-pharyngo-œsophagienne. Ce traitement ne
s’adresse qu’aux diverticules symptomatiques. Il existe une alternative chirurgicale représentée par
la diverticulopexie qui, si elle met à l’abri des complications, n’est pas nécessairement une intervention
plus simple. Il existe également une intervention endoscopique qui fait appel à une instru-
mentation particulière et qui consiste à mettre en communication la lumière du diverticule et celle de
l’œsophage tout en effectuant une myotomie endoscopique grâce à une agrafeuse endoscopique.
© 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
■ Introduction
■ Situation des diverticules
Les diverticules pharyngo-œsophagiens représentent plus de
60 % des diverticules de l’œsophage, le plus fréquent d’entre hypopharyngiens
eux est le diverticule dit de Zenker, développé postérieurement
à l’œsophage au niveau d’un point de faiblesse de la muscu- Ces diverticules naissent aux points de faiblesse de la muscu-
leuse. Ces diverticules sont parfois asymptomatiques mais de lature pharyngo-œsophagienne où se produit une hernie
nombreux patients développent des symptômes ; quelle que soit muqueuse (Fig. 1).
l’évolution du diverticule, il peut s’agir de signes bénins Le triangle de Killian est situé sur la ligne médiane posté-
dominés par la dysphagie, mais également des complications de rieure au bord supérieur du cricopharyngien entre les fibres
régurgitations gravissimes. La cancérisation du diverticule est horizontales de ce dernier et les fibres obliques du CIP. C’est le
exceptionnelle. siège du diverticule de Zenker qui est le plus fréquent des
Le diagnostic de ces diverticules est radiologique et leur diverticules hypopharyngiens.
traitement associe à la diverticulectomie, une myotomie crico- Le triangle de Laimer est situé au bord inférieur du cricopha-
pharyngo-œsophagienne. La diverticulopexie et le traitement ryngien entre les fibres horizontales du cricopharyngien et la
endoscopique sont moins fréquemment pratiqués. musculature circulaire de l’œsophage.
Figure 1.
A. Anatomie de la jonction pharyngo-œsophagienne (vue postérieure). 1. Constricteur inférieur du pharynx (CIP) ; 2. muscle cricopharyngien (CP) ; 3. point
faible de Killian : c’est là que la muqueuse fait hernie constituant le diverticule de Zenker ; 4. fibres œsophagiennes longitudinales.
B. Vue postérieure du diverticule dont l’origine se situe dans le triangle de Killian et le collet à la hauteur du triangle de Laimer au bord inférieur du
cricopharyngien.
C. Vue latérale gauche du diverticule qui adhère à la face postérieure de l’œsophage.
■ Conséquences thérapeutiques
Ces notions anatomiques et physiopathologiques imposent
de toujours réaliser une myotomie du cricopharyngien, ce qui
supprime le risque de récidive au prix d’une morbidité quasi-
ment nulle.
La myotomie isolée avec diverticule laissé en place améliore
la dysphagie, quel que soit le geste appliqué au diverticule [5].
Pour nous, elle n’est envisageable que pour les petits diverti-
cules inférieurs à 2 cm susceptibles de disparaître après une Figure 3. L’installation de l’opéré comporte un billot placé sous les
myotomie isolée [6]. épaules, la tête est tournée vers la droite. L’incision longe le bord antérieur
La diverticulectomie avec myotomie du cricopharyngien est du sterno-cléido-mastoïdien gauche.
le traitement le plus logique. Elle traite le problème de l’accu-
mulation de nourriture dans le diverticule avec ses régurgi-
tations et le risque d’inhalation ainsi que les rares
cancérisations [7].
La diverticulopexie n’est pas exempte de complications et
laisse le diverticule en place avec son risque de cancérisation.
Ses résultats fonctionnels sont identiques à la
diverticulectomie [3].
■ Indications opératoires
Il ne faut traiter que les diverticules symptomatiques.
La diverticulectomie avec myotomie du cricopharyngien doit
être privilégiée.
La diverticulopexie peut être proposée chez les patients très
âgés qui ne supporteraient pas une fistule.
Quant aux petits diverticules de moins de 2 cm de diamètre,
on ne peut leur proposer qu’une myotomie isolée.
■ Traitement chirurgical par voie Figure 4. L’omohyoïdien a été sectionné, un écarteur orthostatique est
cervicale mis en place.
Diverticulectomie avec myotomie Un écarteur orthostatique type Beckmann a été mis en place.
du cricopharyngien Le paquet jugulocarotidien est mis en tension en arrière par un
écarteur de Farabeuf, ce qui permet d’identifier et de sectionner
C’est l’intervention de base. l’artère thyroïdienne inférieure et/ou une veine thyroïdienne
moyenne. La recherche du nerf récurrent est inutile et dange-
Anesthésie .2
reuse (Fig. 4).
Figure 5. La face postérieure de l’œsophage a été décollée et le diver- Figure 7. Agrafage mécanique. La pince à agrafage latéral est position-
ticule repéré droit devant soi ; il est attiré par une pince de Duval, ce qui née au niveau du collet, le diverticule étant mis en légère traction.
met en tension ses adhérences œsophagiennes qui seront progressive-
ment sectionnées.
Myotomie du cricopharyngien
Figure 6. Les adhérences ont été sectionnées et la muqueuse est mise à
nu au niveau du collet, deux fils de représentation la repèrent. Elle peut être réalisée avant ou après la diverticulectomie.
Figure 12. Myotomie du cricopharyngien avant diverticulectomie, la Figure 13. Diverticulopexie : elle doit être réalisée le plus haut possible,
traction sur le diverticule permet de repérer le plan entre la muqueuse et en général, au muscle sterno-cléido-mastoïdien (SCM). 1. Muscle SCM.
les éléments musculaires.
Drainage
Il nous semble indispensable. On utilise en général une lame
multitubulée si le plan musculeux n’a pas été suturé, un drain
aspiratif de Jost-Redon dans le cas contraire.
Suites opératoires
L’antibiothérapie est instituée dès l’induction anesthésique.
Surveillance locale : recherche d’emphysème sous-cutané,
recherche de petites bulles salivaires dans le drainage, le
moindre doute sur une fistule conduisant à l’ingestion de bleu
de méthylène pour confirmation.
Drainage jusqu’à j3.
Ablation de la sonde à j1. Alimentation pâteuse à j1 puis
normale.
Figure 14. Traitement endoscopique des diverticules pharyngo-
Diverticulopexie œsophagiens : positionnement de l’agrafeuse linéaire coupante.
Les sténoses sont rares ; elles sont dues à un excès de résec- [4] Cook IJ, Gabb M, Panagopoulos V, Jamieson GG, Dodds WJ, Dent J,
tion muqueuse, elles seront traitées par dilatation. et al. Pharyngeal (Zenker’s) diverticulum is a disorder of
Si 93 % des patients ont d’excellents résultats fonctionnels [1], upper esophageal sphincter opening. Gastroenterology 1992;103:
3 à 4 % présentent une récidive qui doit être réopérée, en 1229-35.
sachant toutefois que si les résultats sont globalement bons, la [5] Shaw DW, Cook IJ, Jamieson GG, Gabb M, Simula ME, Dent J.
morbidité (fistules et paralysies récurrentielles) est plus élevée. Influence of surgery on deglutive upper oesophageal sphincter
.
mechanics in Zenker diverticulum. Gut 1996;38:806-11.
[6] Ekberg O, Lindgren S. Effect of cricopharyngeal myotomy on
■ Références pharyngoesophageal function : pre and postoperative cineradiographic
findings. Gastrointest Radiol 1987;12:1-6.
[1] Cassivi SD, Deschamps C, Nichols 3rd FC, Allen MS, Pairolero PC. [7] Rocco G, Deschamps C, Martel E, DuranceauA, Trastek VF,Allen MS,
Diverticula of the esophagus. Surg Clin North Am 2005;85:495-503. et al. Results of reoperation of the upper esophageal sphincter. J Thorac
[2] Peters JH, Mason M. The physiopathological basis for Zenker’s Cardiovasc Surg 1999;117:28-31.
diverticulum. Chirurg 1999;70:741-6. [8] Collard JM, Kestens PJ. Technique d’œsophago-diverticulostomie par
[3] Leporrier J, Salame E, Gignoux M, Segol P. Diverticule de Zenker : section agrafage endoscopique. In: Gossot D, editor. Techniques de
diverticulopexie contre diverticulotomie. Ann Chir 2001;126:42-5. chirurgie endoscopique du thorax. Paris: Springer-Verlag; 1994.
P. Breil (ph.breil@gmail.com).
Clinique Turin, 9, rue de Turin, 75008 Paris, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Breil P. Traitement chirurgical des diverticules pharyngo-œsophagiens. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris),
Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-185, 2008.
dans la décision. La meilleure acceptabilité de la voie d’abord Le chirurgien se place entre les jambes du patient, le premier
cœlioscopique ne doit pas modifier les indications du traitement aide à sa droite, et le deuxième à sa gauche. L’instrumentiste
chirurgical du reflux gastro-œsophagien. peut être à droite ou à gauche du chirurgien selon ses
Cependant, un certain nombre d’études prospectives compa- préférences.
ratives sont en faveur d’un traitement chirurgical [6-8], surtout Le moniteur se place en général à la droite de la tête du
s’il est réalisé par voie cœlioscopique [9] . Dans l’étude de patient afin que l’axe chirurgien-site-opératoire, moniteur forme
Mahon [9] comparant Nissen et traitement médical, le traite- une ligne droite. Un second moniteur de rappel peut être
ment par laparoscopie était supérieur au traitement médical en installé à gauche du patient pour favoriser la vision des aides.
termes de diminution de l’exposition acide de l’œsophage Pour libérer un aide, il est possible de fixer sur la table
mesurée par pHmétrie à 3 mois. Dans cette même étude, tous d’opération un bras qui sera utilisé pour soutenir l’écarteur à
les scores de qualité de vie étaient meilleurs après chirurgie avec foie.
un recul de 12 mois [9]. Tout récemment, une étude a montré Enfin, afin d’anticiper une conversion éventuelle, des piquets
la supériorité du Nissen sur le traitement médical dans la de Hautefeuille sont mis en place pour permettre un abord par
régression des dysplasies de bas grade sur endobrachyœsophage, laparotomie et la mise en place des écarteurs.
probablement par un meilleur contrôle du reflux
biliopancréatique [10]. Création du pneumopéritoine
Après avoir exsufflé l’estomac (par l’intermédiaire de la sonde
gastrique mise en place par l’anesthésiste), le pneumopéritoine
■ Principes du traitement du reflux est créé habituellement dans l’hypochondre gauche, à l’endroit
où l’on va positionner un trocart opérateur, c’est-à-dire au bord
gastro-œsophagien par cœlioscopie externe du grand droit gauche, à mi-chemin entre l’ombilic et
le rebord costal. Plusieurs techniques de réalisation du pneumo-
Comme pour toutes les techniques chirurgicales, le traitement péritoine sont possibles.
par cœlioscopie ne doit pas différer du traitement par laparoto-
mie, la cœlioscopie constituant une voie d’abord moins invasive Technique « aveugle »
qui modifie la technique de dissection. C’est la plus ancienne et la plus simple. Après une incision
Les principes restent les mêmes : cutanée de 2 mm et la suspension de la paroi par la main
• dissection et mobilisation de l’œsophage pour reconstituer un gauche de l’opérateur, l’aiguille de Veress ou de Palmer est
segment d’œsophage intra-abdominal ; introduite plan par plan avec la sensation des deux ressauts liés
• rapprochement des piliers en arrière de l’œsophage ; au passage des feuillets aponévrotiques. Un test de perméabilité
• confection d’une valve rétro-œsophagienne sans tension. et d’absence de reflux sanguin (manœuvre de sécurité consistant
en une aspiration suivie d’une injection d’air) est effectué à
l’aide d’une seringue en verre. L’aiguille est ensuite raccordée à
Matériel nécessaire l’insufflateur et l’insufflation débute à faible débit. Le débit est
Ces interventions nécessitent de disposer d’une colonne vidéo ensuite augmenté progressivement jusqu’à l’obtention d’un
comprenant une caméra, une source de lumière et un insuffla- pneumopéritoine homogène à une pression de 12 mmHg.
teur permettant un débit important et monitorant la pression
intra-abdominale et le volume cumulé de CO2 injecté.
Open laparoscopie
L’optique est une optique à vision directe. Cependant, Cette technique permet, en contrôlant la traversée périto-
l’utilisation d’une optique à vision latérale de 30°, très utile lors néale, d’éviter les complications liées à la ponction aveugle de
de la dissection du bord gauche de l’œsophage et sa face l’abdomen, essentiellement les blessures vasculaires, hépatiques
postérieure, est utilisée par certains opérateurs. ou digestives. Elle est indispensable en cas de distension
L’instrumentation comprend : digestive et surtout en cas d’antécédents de laparotomie. Après
• une aiguille de Veress ou de Palmer pour réaliser le pneumo- une incision cutanée autorisant le passage du trocart (une
péritoine, en cas de ponction directe de l’abdomen ou des incision large est nécessaire chez l’obèse), la dissection repère
trocarts spécifiques en cas de réalisation d’une laparoscopie l’aponévrose qui est saisie par deux pinces de Kocher permet-
« ouverte » ; tant la confection d’une bourse de fil résorbable. Après incision
• un ou deux trocarts de 10 mm et deux ou trois trocarts de des deux feuillets aponévrotiques, un cône de péritoine est
5 mm sont nécessaires à la réalisation de l’intervention. individualisé, et incisé afin de permettre l’introduction du
Les instruments utilisés sont les suivants : écarteur à foie, trocart. Le serrage de la bourse permet de réaliser l’étanchéité
pince à préhension atraumatique, pince à coagulation bipolaire, autour du trocart lors de la procédure. Là encore, le trocart est
ciseaux et porte-aiguilles. raccordé à l’insufflateur pour créer un pneumopéritoine à une
Une boîte d’instruments de laparotomie doit être présente pression maximale de 12 mmHg qui est maintenue pendant
dans la salle en cas de conversion. toute l’intervention.
Bien que la technique ouverte soit moins dangereuse, il
n’existe pas actuellement de recommandations officielles des
Installation du patient (Fig. 1) sociétés savantes sur le choix de l’une ou l’autre des techniques
Le patient sous anesthésie générale, muni d’une sonde de pneumopéritoine.
gastrique, est installé en décubitus dorsal, les jambes écartées et
les cuisses modérément fléchies. La table d’opération est en Position des trocarts (Fig. 2)
position proclive afin de permettre un abaissement de la graisse
intra-abdominale et en particulier du grand épiploon. Cinq trocarts sont habituellement nécessaires à l’intervention.
Chez l’obèse, il ne faut pas hésiter à placer les trocarts très haut
dans la région hiatale, pour éviter toute pression sur les
instruments, source de perte d’ergonomie.
Lorsque le pneumopéritoine est réalisé, le premier trocart de
10 mm (T1) est introduit par l’incision ayant servi à la création
du pneumopéritoine. La mise en place de ce trocart en cas de
réalisation d’un pneumopéritoine à l’aiguille se fait selon un
angle postérieur de 45°, en évitant de viser la ligne médiane
pour éviter une plaie aortique. Par cette voie est placé tempo-
rairement le système optique afin d’introduire sous contrôle de
la vue un 2e trocart de 10 mm (T2). L’intérêt de mettre tempo-
Figure 1. Installation du patient. rairement l’optique dans ce trocart est d’éviter de blesser sur la
T3
1 T5
3 3
4
4 2 1 5
5 A2
A1
2 1
T2
T4
T1
2
2
3 O
4
5
Figure 2. Position des trocarts.
Gestes essentiels
Ce sont les gestes communs aux deux techniques de Nissen
et de Toupet que nous allons décrire.
T3 T3
T5
T4
T4
T1
Figure 5. Abord de l’œsophage : incision de la pars condensa et dissec-
tion du pilier droit.
T1
Cette étape permet d’identifier clairement le pilier diaphragma-
tique droit qui est le repère anatomique essentiel avant d’abor-
der la dissection de l’œsophage. La dissection non traumatique
T5 A
du plan de clivage situé en avant puis en dedans du pilier droit
permet d’identifier la position de l’œsophage [11]. La découverte
de ce plan d’accolement se fait facilement en soulevant vers
l’avant et la gauche la partie distale de l’œsophage et du cardia
(Fig. 5).
Dissection du pilier gauche
L’incision du feuillet antérieur de la pars condensa se poursuit
ensuite en avant et de la droite vers la gauche par l’incision et
le refoulement vers le haut de la membrane phréno-
œsophagienne, laissant le nerf vague antérieur bien visible au
contact de l’œsophage. La membrane phréno-œsophagienne est
incisée transversalement le long du bord antérieur de l’orifice
hiatal vers le pilier gauche (Fig. 6). La dissection du pilier
gauche est ensuite menée en avant et au bord gauche de
l’œsophage par section de la membrane phréno-œsophagienne
et section de l’attache du fundus sur le diaphragme (Fig. 7). Lors
de cette dissection, l’aide situé à droite de l’opérateur va tracter
l’estomac vers le bas et la droite afin de dégager le pilier gauche
au ras du diaphragme. Il est important de contrôler d’éventuel-
les artères et veines diaphragmatiques afin d’éviter tout saigne-
ment de cette région. Une dissection non traumatique du Figure 6. Abord de l’œsophage : incision de la membrane phréno-
versant interne du pilier gauche est recommandée afin d’éviter œsophagienne (A, B).
de blesser le nerf vague antérieur qui peut y être accolé et qui
est parfaitement visible. Cette dissection est prolongée vers la supérieur de la rate. L’identification de points de repère est
partie la plus postérieure du pilier afin de préparer la dissection capitale durant cette dissection. Les piliers droit et gauche
rétro-œsophagienne. orientent la dissection. Une dissection au-dessus du pilier
gauche entraînerait un risque de blessure pleurale. Un lacs passé
Contrôle de l’œsophage
à travers la fenêtre rétro-œsophagienne est placé autour de
En revenant vers la partie droite et postérieure de l’œsophage, l’œsophage et tenu sur pince par l’assistant (Fig. 8). Il permet
la dissection de l’œsophage est poursuivie pour réaliser la d’éviter toute préhension traumatique des viscères et de
fenêtre rétro-œsophagienne. Celle-ci se fait progressivement de mobiliser dans les différentes directions la jonction cardio-
droite à gauche en restant en arrière de l’œsophage et au œsophagienne au cours des étapes chirurgicales suivantes.
contact de la face antérieure du pilier gauche. Il faut faire
attention dans cette manœuvre de ne pas disséquer le bord Mobilisation de l’œsophage (Fig. 9)
droit du pilier gauche car cette dissection conduirait à une Cette libération du bas œsophage et du cardia sur ses faces
dissection intrathoracique et au risque d’ouverture de la plèvre antérieures et postérieures a pour buts :
gauche. Le nerf vague postérieur est identifié et récliné contre • de créer une fenêtre rétro-œsophagienne de taille suffisante
la paroi de l’œsophage. La fenêtre est réalisée lorsque l’on voit pour permettre le passage de la valve antireflux, par la section
le tissu graisseux et le ligament gastrosplénique et/ou le pôle des fixations postérieures du cardia sur le diaphragme ;
T3
T4 T3
T5
T1
T3 T3
T5
T5
A
T4 T1
A
T3 T3
T5
T1
T4
A
■ Résultats
Morbimortalité
La mortalité de ces interventions est nulle dans l’ensemble
des séries publiées. La morbidité varie de 1,5 à 4 % [26-28].
causes de conversion sont les difficultés d’exposition de la Au total, concernant le choix de l’intervention, l’analyse de
région opératoire chez les patients obèses ou présentant une la littérature permet de démontrer que :
hépatomégalie avec un gros lobe gauche stéatosique, les • les résultats de la chirurgie du reflux par voie laparoscopique
difficultés de dissection de la région hiatale du fait d’une sont équivalents à ceux obtenus par laparotomie dans le
périœsophagite intense et les accidents hémorragiques incon- contrôle du reflux gastro-œsophagien ;
trôlables par cœlioscopie (plaie de la rate). Cette éventualité • la fundoplicature antérieure de Dor est supérieure au Nissen
nécessite la présence dans la salle d’intervention du matériel en termes de réintervention précoce pour échec ;
nécessaire à une conversion urgente et la possibilité de pouvoir • l’intervention de Toupet est supérieure à la fundoplicature
mettre en place des écarteurs de laparotomie (valves de Toupet) antérieure sur le contrôle du reflux ;
prévue lors de l’installation du patient. • les complications fonctionnelles sont plus fréquentes après
intervention de Nissen ;
Laparotomie versus laparoscopie • les résultats à long terme manquent encore pour affirmer la
La laparoscopie est une voie d’abord moins délabrante et supériorité d’une technique en termes de dysphagie, de
permettant une récupération postopératoire plus rapide que la récidive du reflux et de qualité de vie.
laparotomie. La faisabilité de la cure de reflux par cette voie
d’abord a été largement démontrée par de nombreux travaux,
montrant une efficacité comparable sur le contrôle du reflux
gastro-œsophagien [29-32]. Un certain nombre d’essais randomi-
■ Conclusions
sés et une méta-analyse [19] ont permis la comparaison des
Le traitement chirurgical du reflux gastro-œsophagien a vu
résultats obtenus par laparotomie versus laparoscopie.
ses indications évoluer par l’efficacité croissante des traitements
L’abord laparoscopique réduit la prise d’antalgiques, la durée
médicaux, ne réservant la chirurgie qu’aux formes résistantes au
d’hospitalisation, la durée de l’arrêt de travail et préserve la
traitement médical. Cependant, il constitue le seul traitement
fonction respiratoire. La mortalité est très faible quelle que soit
agissant sur l’histoire naturelle du reflux et semble supérieur au
la voie d’abord, mais la morbidité globale est diminuée par
l’abord laparoscopique, après une phase initiale d’apprentissage traitement médical. Une meilleure connaissance de l’anatomie
de la technique par laparoscopie (learning curve). fonctionnelle du reflux et des différentes situations cliniques a
En termes de résultats fonctionnels postopératoires, la permis d’adapter le geste chirurgical à chaque situation.
dysphagie, le gas bloat syndrome, la sensation de plénitude La laparoscopie constitue la voie d’abord de référence de la
gastrique et les scores de qualité de vie sont équivalents après chirurgie du reflux gastro-œsophagien car elle diminue les
laparotomie ou laparoscopie. De même, les taux de réinterven- douleurs postopératoires, la durée d’hospitalisation et la durée
tions pour récidive de reflux ou dysphagie sont d’arrêt de travail. Sa faisabilité a été démontrée dans de
comparables [33-41]. nombreuses études qui ont permis d’évaluer ses résultats et de
montrer qu’ils étaient équivalents à ceux observés au cours de
Comparaison des techniques la chirurgie par laparotomie.
Les principales interventions réalisées sont les fundoplicatures
Les différentes techniques décrites ci-dessus ont été compa- partielles ou totales. Ces interventions, efficaces sur le contrôle
rées dans de nombreux essais randomisés et ont donné lieu à des symptômes, s’accompagnent de complications fonctionnel-
une méta-analyse [19] permettant de choisir au mieux l’inter- les postopératoires à type de dysphagie, plus fréquemment
vention chirurgicale. Cependant, la technique de référence reste
observées après fundoplicatures totales. À long terme, les
très liée au choix des équipes chirurgicales.
résultats manquent pour permettre de choisir la meilleure
Nissen versus Dor intervention contrôlant de façon durable le reflux gastro-
œsophagien et assurant la meilleure qualité de vie.
Deux études randomisées [42, 43] ont comparé l’intervention
de Nissen et la fundoplicature antérieure selon Dor. Ces études
ont conclu à un meilleur contrôle du reflux clinique, endosco-
pique et pHmétrique mais avec une incidence plus importante
des effets secondaires (dysphagie, gas bloat syndrome, flatulences)
après intervention de Nissen.
“ Points essentiels
Nissen versus Toupet La comparaison au long cours des résultats des
[44-55] traitements médicaux et chirurgicaux du reflux gastro-
Plusieurs essais randomisés dont trois par
laparoscopie [46-48] et une méta-analyse [19] ont comparé la œsophagien sont en faveur de la chirurgie, surtout si elle
fundoplicature totale selon Nissen et la fundoplicature partielle est réalisée par cœlioscopie.
postérieure selon Toupet. La méta-analyse [19] et d’autres L’ordre de mise en place des trocarts peut varier. Il
études [51-55] ont confirmé l’équivalence des résultats en termes apparaît utile chez les patients obèses d’introduire
de durée opératoire ou de morbidité postopératoire. Si les deux initialement un trocart de 10 mm dans l’hypochondre
procédures sont efficaces sur le contrôle des symptômes du gauche pour éviter toute blessure du lobe gauche du foie,
reflux, le Nissen s’accompagne d’un taux plus élevé de compli- de mettre en place l’optique par ce trocart puis de
cations fonctionnelles précoces. À distance, les études manquent disposer les autres trocarts sous contrôle de la vue.
pour permettre de choisir entre ces deux interventions, ce qui
Quel que soit le procédé choisi, la technique chirurgicale
laisse actuellement libre le choix de l’une ou l’autre de ces
doit toujours reconstituer un œsophage abdominal et
fundoplicatures selon les habitudes d’écoles.
rapprocher les piliers du diaphragme.
Toupet versus Dor La section des vaisseaux courts n’est pas indispensable à la
réalisation d’un fundoplicature partielle ou totale.
Une étude [55] a comparé les résultats cliniques et pHmétri-
ques avec un recul de 1 an après valve de Toupet ou valve La voie d’abord laparoscopique est supérieure à la
antérieure selon Dor. Les complications postopératoires précoces laparotomie en réduisant la prise d’antalgiques, la durée
étaient comparables dans les deux groupes. En terme de résultat d’hospitalisation, la durée d’arrêt de travail et la morbidité
sur le reflux, les symptômes cliniques étaient significativement postopératoire.
mieux contrôlés dans le groupe Toupet et la pHmétrie montrait Les différentes fundoplicatures sont équivalentes sur le
une amélioration significative dans les deux groupes avec un contrôle des symptômes mais la dysphagie est plus
pourcentage de temps passé en dessous de pH 4 significative- fréquente après fundoplicature totale.
ment plus faible dans le groupe Toupet.
■ Références
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Scotté M., Lubrano J., Huet E. Traitement chirurgical du reflux gastro-œsophagien non compliqué par
cœlioscopie. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-188, 2008.
Figure 6. Morphotypes.
A. Bréviligne.
Figure 4. Membrane phréno-œsophagienne. 1. Plèvre médiastine ; 2. B. Longiligne.
péritoine ; 3. fixation du cône inférieur ; 4. fixation du cône supérieur ; 5.
diaphragme.
Ces rapports sont particulièrement importants dans les réinter-
ventions chirurgicales, mais le morphotype est un autre élément
méso persiste chez l’adulte selon des dispositions variant avec important de l’abord chirurgical de cette région [5]. Un auvent
les niveaux du tube digestif. Le méso-œsophage se situe dans costal plus ou moins ouvert, favorisant l’écartement vers le haut
l’écartement des deux feuillets péritonéaux qui relie le viscère à lors de l’intervention chirurgicale, permet un abord plus aisé de
la paroi postérieure. Il occupe toute la largeur de l’œsophage et l’œsophage (Fig. 6).
relie ainsi ses faces postérieures et latérales à l’aorte et aux piliers
du diaphragme. Le méso-œsophage est un tissu cellulofibreux
dense. C’est lui qui maintient l’œsophage et assure la perma-
nence d’un œsophage abdominal [1]. La section ou la dissection
du méso-œsophage permet l’ascension intrathoracique de
l’œsophage. Le ligament gastrophrénique, autre élément
“ Points importants
cellulofibreux dense, prolonge vers la gauche le méso-œsophage Le sphincter inférieur de l’œsophage, zone de haute
et amarre le fundus au diaphragme. pression de la jonction œsogastrique, n’a pas de
substratum anatomique. Il s’agit d’un sphincter
Musculature du corps de l’œsophage physiologique.
Les contractions normales de la paroi œsophagienne sont
nécessaires à une vidange complète et régulière de la lumière
digestive (clairance œsophagienne). La paroi musculaire de
l’œsophage comporte une couche de fibres superficielles ■ Traitement chirurgical du reflux
longitudinales et une couche de fibres profondes circulaires. Ce gastro-œsophagien
sont ces fibres qui s’épaissiraient à la partie basse pour former
le sphincter inférieur. Ces fibres circulaires cravatent l’angle de Définition
His, entrelacées avec les fibres obliques de l’estomac, et descen-
dent sur les deux faces de la petite courbure, formant la cravate Le reflux gastro-œsophagien est lié à la remontée anormale et
d’Helvétius. répétée du contenu gastrique dans l’œsophage. Ce contenu est
Le sphincter inférieur est une zone de haute pression : c’est habituellement acide et entraîne une brûlure de la muqueuse
le sphincter interne lisse ou musculature intrinsèque. œsophagienne qui se traduit cliniquement par l’existence d’un
pyrosis.
Rapports de l’œsophage (Fig. 5) Cependant, dans certaines circonstances, ce reflux peut être
alcalin, en particulier après une intervention chirurgicale telle
Ils concernent les rapports de l’œsophage au niveau des trois qu’une œsogastrectomie, une pyloroplastie, une vagotomie
étages : sus-diaphragmatique, diaphragmatique et abdominal. tronculaire, ou une anastomose gastrojéjunale.
Gestes essentiels
Ce sont les gestes communs à la plupart des techniques.
Dissection et mobilisation de l’œsophage (Fig. 9A à C)
Cette manœuvre est rendue possible par l’incision de la
membrane phréno-œsophagienne au ras de son insertion
diaphragmatique en prenant soin de respecter les nerfs pneu-
mogastriques. Il faut alors repérer sur les bords droits et gauches
de l’œsophage les piliers du diaphragme à droite et gauche,
isoler leur bord et faire le tour de l’œsophage à l’aide de l’index
ou d’un carré dissecteur. Cette manœuvre est facilitée si elle est
réalisée au sommet de l’hiatus œsophagien et/ou à la partie
basse du médiastin. En pratique, il faut faire le tour de l’œso-
phage pratiquement dans le thorax, ce qui simplifie beaucoup
la dissection de la partie postérieure et de la membrane phréno-
œsophagienne. Il est alors possible, une fois cette dissection
effectuée, de mettre en place un lacs permettant la dissection
plus large de l’œsophage et son abaissement sur 4 à 5 cm.
Certains auteurs suggèrent de refouler la membrane phréno-
œsophagienne vers le haut sans l’inciser, ce qui rend plus
difficile le contrôle de l’œsophage mais diminue le risque de
blessure pleurale, en particulier de la plèvre gauche, très proche
de l’œsophage à ce niveau.
La mobilisation de l’œsophage nécessite l’ouverture de la
Figure 8. Installation du patient. Installation opératoire comparative
partie haute du petit épiploon dans sa pars condensa. À ce
entre décubitus dorsal (A), billot (B) et coussin (C). Position de l’opéré
niveau, l’existence d’une artère hépatique gauche peut gêner la
cambré sur un coussin (D).
mobilisation œsophagienne et éventuellement le passage
ultérieur de la valve rétro-œsophagienne. La dissection de cette
artère et son refoulement vers le bas suffisent dans la majorité deux piliers à droite et en arrière de l’œsophage, et de pratiquer
des cas. Cependant, une section après ligature peut parfois être de haut en bas, ou de bas en haut, deux à trois points de
nécessaire en vérifiant par une épreuve de clampage l’absence rapprochement au fil non résorbable.
de retentissement significatif sur le parenchyme hépatique. Il est déconseillé de pratiquer ce rapprochement en avant du
fait de l’obliquité de l’orifice œsophage de haut en bas et
Rapprochement des piliers du diaphragme (Fig. 9D) d’avant en arrière. Une suture faite en avant, outre son caractère
Le temps d’exposition de l’œsophage et d’abaissement est dysphagiant, diminuerait la longueur d’œsophage abaissé en
habituellement terminé par le rapprochement, en arrière de intra-abdominal et donc la zone de haute pression.
l’œsophage, des piliers du diaphragme. Cette fermeture n’inter-
vient pas dans la continence cardio-œsophagienne mais elle Manœuvre de l’index de Collis (Fig. 9E, F)
évite au montage antireflux une ascension ultérieure dans le Elle consiste, après rapprochement des piliers du diaphragme
thorax [18]. Au mieux, le rapprochement des piliers est réalisé en en arrière de l’œsophage, à s’assurer du passage d’un index à
arrière de l’œsophage. Pour cela, le pilier gauche est saisi par côté de l’œsophage afin de vérifier que la fermeture des piliers
une pince de Babcock en arrière de l’œsophage et rapproché du n’est pas trop sténosante pour la traversée diaphragmatique de
pilier droit. Pour faciliter cette suture des piliers, il est recom- l’œsophage. Cette mesure peut être effectuée avec une sonde de
mandé de refouler l’œsophage vers la gauche à l’aide soit du calibrage atraumatique mise en place dans l’œsophage (avec
lacs, soit d’un carré dissecteur. Il est alors possible de suturer les risque de perforation iatrogène) ou sans sonde de calibrage,
Procédures chirurgicales
Les procédés chirurgicaux de traitement du reflux gastro- Figure 11. Procédé de Hill.
œsophagien peuvent être classés en procédures de reposition A. Passage des points entre les bords antérieur et postérieur de la petite
anatomique, procédés valvulaires, et interventions indirectes. courbure gastrique et le ligament arqué du diaphragme.
Les descriptions techniques sont limitées aux principales B. Aspect final. Points serrés entre la petite courbure gastrique et le
interventions validées et aux gestes spécifiques de ces inter- ligament arqué.
ventions, celles-ci commençant par les manœuvres commu-
nes qui ont été décrites ci-dessus concernant la voie d’abord, obtention d’une pression du sphincter inférieur de l’œsophage
la position opératoire, et les gestes essentiels du début de autour de 30 cm d’eau. La membrane phréno-œsophagienne est
l’intervention concernant l’abaissement de l’œsophage et la sectionnée au niveau de son insertion diaphragmatique et à
suture des piliers. distance de l’œsophage pour servir de point d’appui à la
cardioplastie. La pars flaccida et la pars condensa du petit
Procédés de repositions anatomiques
épiploon sont ensuite sectionnées en préservant les branches
Ce sont essentiellement les interventions de Lortat-Jacob et la gauches du nerf pneumogastrique, et le pilier droit du
cardiopexie postérieure de Hill. diaphragme est disséqué en arrière. La libération du ligament
arqué se fait par une incision du surtout fibreux préaortique
Intervention de Lortat-Jacob (Fig. 10)
entre les piliers du diaphragme au contact de l’aorte, en restant
Le principe de cette intervention, actuellement complètement au-dessus de l’origine du tronc cœliaque. Un dissecteur placé au
abandonnée du fait de mauvais résultats, est de restaurer une contact de l’aorte permet, par une manœuvre de soulèvement,
anatomie normale de la région œso-cardio-tubérositaire. Elle d’isoler le ligament arqué, et d’éviter une blessure vasculaire
associe le rapprochement des piliers du diaphragme par deux à aortique lors de la réparation. L’estomac est alors tourné dans
trois points séparés de fil non résorbable, la fermeture de l’angle le sens horaire pour exposer les feuillets antérieurs et postérieurs
de His par fixation du bord droit du fundus au bord gauche de de la membrane phréno-œsophagienne. Quelques fils non
l’œsophage, et la fixation du sommet de la grosse tubérosité à résorbables sont placés successivement dans les feuillets anté-
la coupole diaphragmatique par trois à quatre points de fil non rieurs et postérieurs de cette membrane puis dans le ligament
résorbable. arqué. Cette cardiopexie ferme l’angle de His, favorisant le
Pour ce qui est des résultats, l’auteur [33] a rapporté une rétablissement d’une valve gastro-œsophagienne de 1,5 à 4 cm
efficacité de 83 % sur le reflux gastro-œsophagien avec cette de longueur. L’hiatus œsophagien est ensuite fermé par deux à
technique. Cependant, une étude prospective comparant trois points de fils non résorbables.
Nissen, Toupet et Lortat-Jacob [34], a montré une meilleure Les résultats de cette intervention appréciés par son promo-
restauration du sphincter inférieur de l’œsophage avec les teur et par différentes études prospectives sont bons, avec 80 à
fundoplicatures et permis d’affirmer que ce procédé n’a plus sa 83 % de bons résultats à long terme, une mortalité faible à
place dans le traitement chirurgical moderne du reflux 0,2 % et une morbidité peu importante autour de 1 % [35, 36].
gastro-œsophagien. On peut observer des douleurs abdominales épisodiques dont la
pathogénie n’est pas claire mais probablement liée à une
Intervention de Hill (Fig. 11)
distension gastrique douloureuse. L’étude prospective de
Le principe de cette intervention décrite par Hill en 1967 [35] Demeester [19] comparant les interventions de Belsey, de Nissen
est de fixer la jonction cardiotubérositaire au ligament arqué du et de Hill, jugée sur des données pHmétriques objectives a
diaphragme. Cette fixation peut être adaptée aux données de la montré 71 % de bons résultats pour l’intervention de Hill
manométrie peropératoire en augmentant la tension jusqu’à contre 100 % pour l’intervention de Nissen. Il est probable que
cette intervention donne de bons résultats chez les opérateurs gauche de l’œsophage. Ces trois points préservent le pneu-
entraînés, certains réalisant cette intervention sous contrôle mogastrique gauche. Ils sont passés 2 cm au-dessus du cardia
cœlioscopique. Les équipes qui ont peu d’expérience de cette sur l’œsophage et 2 cm au-dessous sur l’estomac. La 2e rangée
intervention ont probablement des résultats moins bons et elle de points prenant appui 2 cm au-dessus sur l’œsophage et
ne peut donc pas être recommandée en routine pour le traitement du 2 cm en dessous de l’estomac ressort au travers du
reflux gastro-œsophagien. diaphragme au niveau de la zone de jonction musculotendi-
neuse. Ainsi, au moment du serrage de ces trois points,
Procédés valvulaires l’œsophage abdominal est réintégré en sous-diaphragmatique,
Ce sont essentiellement les interventions de Belsey et de les points séparés sur les piliers sont alors serrés afin de
Nissen, et des fundoplicatures partielles de type Toupet (180°) refermer l’orifice hiatal. Enfin, la phrénotomie est fermée.
ou subtotale de 270°. Pour son auteur [37], cette technique donne 85 % de bons
résultats à distance avec 11 % de récidive. Cependant, à 10 ans
Intervention de Belsey (Fig. 12) la mortalité est de 1 %.
Cette intervention réalise une fundoplicature partielle de Dans l’étude de Demeester réalisée en 1974 [19], 40 % d’échecs
240° pratiquée par voie thoracique gauche. Après une courte pHmétriques ont été observés après intervention de Belsey. La
phrénotomie postérolatérale, la membrane phréno- difficulté de la réalisation de cette intervention, la variabilité des
œsophagienne est incisée, l’œsophage abdominal, le cardia et résultats initiaux et la voie d’abord essentiellement thoracique
la partie supérieure de l’estomac sont libérés des piliers du décrite par son auteur limitent actuellement les indications
diaphragme permettant l’ascension de l’estomac à travers chirurgicales de cette intervention [20, 29, 38].
l’hiatus œsophagien. Cinq à 8 cm de grande courbure gastri-
Intervention de Nissen et variantes (Fig. 13)
que sont libérés par section des vaisseaux courts en préservant
les nerfs pneumogastriques. Le rapprochement des piliers du Comme toutes les interventions antireflux, elle commence
diaphragme est préparé avant la réalisation d’une fundoplica- par voie abdominale par une dissection de l’œsophage abdomi-
ture. Trois à quatre points de fils non résorbables sont passés nal, mis sur lacs et libéré sur 5 à 8 cm, et un rapprochement des
dans les deux jambages des piliers. La fundoplicature est piliers du diaphragme en arrière de l’œsophage. La dissection de
ensuite réalisée par deux rangées de trois points de fil non l’œsophage et de la petite courbure doit être suffisante pour
résorbable entraînant une invagination de l’œsophage dans la autoriser sans difficulté le passage de la grosse tubérosité
partie haute de l’estomac. Le 1er plan ferme l’angle de His. gastrique en arrière de l’œsophage. Les faces antérieure et
Trois séries de points sont passées, à droite, en avant et à postérieure de la grosse tubérosité sont mobilisées, et il est
souvent nécessaire de lier plusieurs vaisseaux courts gastrosplé- ramenée en avant de l’œsophage. La valve de 360° est fixée
niques. L’œsophage étant mis en traction à l’aide du lacs vers autour de l’œsophage abdominal à l’aide de points séparés d’un
le bas, la main droite de l’opérateur repousse la face postérieure fil non résorbable. Dans la technique initialement décrite par
droite de la grosse tubérosité en arrière de l’œsophage et en Nissen, la suture solidarise la face antérieure de la grosse
avant du pneumogastrique droit. Celle-ci est récupérée sur le tubérosité, l’œsophage abdominal puis à nouveau la grosse
bord droit de l’œsophage à l’aide d’une pince de Babcock, puis tubérosité sur le bord droit de l’œsophage. Quatre à cinq points
“ Points importants
bords droit et gauche de l’œsophage. La fundoplicature est
réalisée par fixation de la valve postérieure à droite et à gauche,
ménageant soit une hémicirconférence (valve de 180°), soit un
Décrite en 1956 par voie abdominale médiane sus- quart de la circonférence (valve de 270°) antérieure de l’œso-
ombilicale, l’intervention de Nissen réalise une phage. Elle est fixée à points séparés de fils non résorbables en
fundoplicature totale circulaire. Il s’agit de la technique de un ou deux plans sur les bords droit et gauche de l’œsophage,
référence la plus pratiquée dans le monde actuellement. et en s’appuyant sur la paroi œsophagienne et sur la grosse
tubérosité gastrique. En cas de valve de 270°, il est recommandé
Figure 15. Procédé de Dor. Fundoplicature antérieure de 180°. Le bord droit de la valve est fixé au pilier droit du diaphragme.
études ont rapporté des résultats moins bons par laparoto- Comparaison des techniques
mie [66, 73] et une étude a montré la supériorité de la laparosco-
pie [72]. Dans toutes les études, malgré un recul insuffisant, les L’analyse de la littérature et les résultats des différentes
scores de qualité de vie, diminués avant l’intervention, retrou- techniques ont permis d’abandonner un certain nombre
vaient des valeurs comparables après laparotomie ou laparosco- d’interventions inefficaces sur le reflux gastro-œsophagien, telles
pie. De même, les taux de réintervention pour récidive de reflux que l’intervention de Lortat-Jacob et la mise en place d’une
ou dysphagie étaient comparables quelle que soit la voie prothèse d’Angelchik. En présence d’un reflux gastro-
d’abord utilisée. œsophagien non compliqué, les procédés valvulaires (Nissen,
Toupet) constituent les interventions de choix. Le type de Hill [75]. Ces données, associées aux difficultés de réalisation de
procédé réalisé dépend essentiellement des habitudes des cette technique, ne permettent pas de retenir l’intervention de
équipes chirurgicales, sans qu’un argument scientifique formel Hill comme une technique de routine de traitement par lapa-
puisse affirmer la supériorité d’une technique par rapport aux roscopie du reflux gastro-œsophagien.
autres. Nissen et Dor. Deux études randomisées [34, 76, 77] ont
Nissen et Hill. Deux études randomisées ont comparé comparé l’intervention de Nissen et la fundoplicature antérieure
l’intervention de Nissen et l’intervention de Hill [75, 76]. Bien selon Dor. Dans l’étude de Watson [76], les résultats sur le reflux
que les effectifs de ces études soient faibles, la morbidité étaient similaires à 3 mois, mais le taux de dysphagie était plus
postopératoire était supérieure dans les groupes Hill (5,7 et 20 % important dans le groupe Nissen à 6 mois. À 5 ans, il n’y avait
contre 3,9 et 13,3 %) et le taux de récidive équivalent dans une pas de différence sur le contrôle des symptômes mais des
étude [19] mais supérieur dans l’autre après intervention de troubles fonctionnels (gas bloat syndrome, flatulences) plus
fréquents après Nissen, et une tendance à la récidive plus Œsophagite avec endo-brachy-œsophage
importante après fundoplicature antérieure. Ces résultats ont été
confirmés dans une seconde étude qui a montré, avec un recul L’endo-brachy-œsophage se définit comme la colonisation de
de 6 mois, un meilleur contrôle du reflux clinique, endoscopi- l’œsophage par une muqueuse de type gastrique [88]. La hauteur
que et pHmétrique, mais une incidence plus importante des minimale de l’endo-brachy-œsophage varie selon les auteurs de
effets secondaires (dysphagie, gas bloat syndrome, flatulences) 3 à 5 cm. Il peut exister des languettes d’hétérotopie gastrique
après une intervention de Nissen. à l’état normal remontant vers l’œsophage distal. L’origine
Nissen et Toupet. Plusieurs essais randomisés [78-86] dont trois acquise de l’endo-brachy-œsophage est probablement la plus
par laparoscopie [79, 80, 82] ont comparé la fundoplicature totale vraisemblable en réponse à l’agression de la muqueuse œsopha-
selon Nissen et la fundoplicature partielle postérieure selon gienne par le reflux gastro-œsophagien acide. L’endo-brachy-
Toupet. Dans l’étude de Laws [78], la morbidité postopératoire œsophage se complique d’adénocarcinome œsophagien dont
était plus élevée après Toupet (12,5 contre 0 %) mais les l’incidence est en nette augmentation au cours des dernières
résultats sur le reflux, jugés sur le score de Visick, étaient années. Le meilleur traitement de l’endo-brachy-œsophage est
similaires avec un recul de 27 mois. Dans l’étude de Zornig [79], l’œsophagectomie. Le traitement médical ou chirurgical du
comparant 100 patients dans chaque groupe, il n’existait pas de reflux gastro-œsophagien ne doit pas être différent du reflux
différence sur le contrôle du reflux mais un taux de dysphagie gastro-œsophagien non compliqué avec la réalisation des
plus important 4 mois après Nissen (18 contre 6 %). Dans interventions validées dans le traitement du reflux gastro-
l’étude de Chrysos [81], le taux de dysphagie postopératoire était œsophagien (Nissen, fundoplicature partielle postérieure,
significativement plus élevé dans le groupe Nissen à 3 mois intervention de Hill). La régression de l’endo-brachy-œsophage
(57 contre 16 %) ainsi que la survenue d’un gas bloat syndrome après chirurgie est rarement observée [89]. Aussi, une surveillance
(50 contre 21 %). À 1 an, les taux de dysphagie, de gas bloat endoscopique et biopsique est-elle nécessaire. Lorsque les
syndrome et le contrôle du reflux étaient similaires dans les dysplasies de haut grade sont retrouvées sur l’endo-brachy-
deux groupes. Cependant, la pression du sphincter inférieur de œsophage, le traitement chirurgical s’impose et ne concerne que
l’œsophage augmentait de façon plus significative après Nissen. la complication, ce qui nécessite la réalisation d’une œsogas-
D’autres études confirmaient cette équivalence des résultats en trectomie polaire supérieure avec gastroplastie et anastomose
termes de durée opératoire ou de morbidité postopératoire [8, intrathoracique de la gastroplastie au-dessus de la crosse de
83-86]. Si les deux procédures sont efficaces sur le contrôle des l’azygos, en fonction du siège et de l’extension de l’endo-
symptômes du reflux, l’intervention de Nissen s’accompagne brachy-œsophage. Cependant, l’amélioration des techniques
d’un taux plus élevé de complications fonctionnelles précoces. endoscopiques permet de traiter l’ensemble des lésions d’endo-
À distance, les études manquent pour permettre de faire un brachy-œsophage avant l’apparition d’une dysplasie sévère. Ces
choix entre ces deux interventions. techniques, associées à l’efficacité du traitement médical sur le
reflux acide, entraînent une diminution des indications
Toupet et Dor. Une étude a comparé les résultats cliniques et
opératoires.
pHmétriques avec un recul de 1 an chez 48 patients traités par
Toupet et 47 patients traités selon Dor par une hémivalve
antérieure [87] . Les complications postopératoires précoces
Œsophagite sténosante par reflux
étaient comparables dans les deux groupes. En termes de L’œsophage peptique sténosante par reflux correspond au
résultats sur le reflux, les symptômes cliniques étaient significa- rétrécissement bénin de l’œsophage. C’est la principale compli-
tivement mieux contrôlés dans le groupe Toupet. Les scores de cation de l’œsophagite par reflux. Les formes graves sont de
dysphagie étaient similaires dans les deux groupes. Objective- moins en moins fréquemment observées du fait de l’efficacité
ment, même si la pHmétrie montrait une amélioration signifi- du traitement médical dans le reflux gastro-œsophagien et de
cative dans les deux groupes par rapport aux données l’indication précoce de la chirurgie en cas d’échec du traitement
préopératoires, le pourcentage de temps passé en dessous de pH médical.
4 était significativement plus faible dans le groupe Toupet (1 % La prévalence est de 2 à 11 % selon les séries [90]. L’incidence
± 0,3 %) que dans le groupe Dor (5,6 % ± 1,1 %). réelle est beaucoup plus faible, de 0,8 % dans l’étude de
Savary [91]. Les sténoses œsophagiennes dilatables posent des
problèmes différents selon qu’il existe ou non un
brachyœsophage.
“ Points importants
En l’absence de brachyœsophage, le traitement peut se
discuter entre dilatation seule et traitement médical ou dilata-
tion et traitement chirurgical. Dans l’étude prospective de
Concernant le choix de l’intervention, l’analyse de la Watson [92], la dilatation endoscopique et le traitement médical
ont permis 41 % de guérison contre 75 % dans le groupe
littérature permet de démontrer que :
dilatation peropératoire et traitement chirurgical du reflux. Le
• les procédures de Nissen et de Toupet sont efficaces sur nombre de séances de dilatation varie mais il semble que le
le contrôle du reflux ; traitement chirurgical soit préférable, en réalisant une dilatation
• la fundoplicature antérieure est supérieure au Nissen en peropératoire de la sténose et en y associant un autre procédé
termes de réintervention précoce pour échec ; antireflux. Le diamètre de l’œsophage après dilatation doit être
• l’intervention de Toupet est supérieure à la au moins de 13 mm si l’on veut obtenir un résultat fonctionnel
fundoplicature antérieure sur le contrôle du reflux ; correct et en particulier l’absence de dysphagie.
• les complications fonctionnelles sont plus fréquentes En cas de brachyœsophage, il faut augmenter artificiellement
après intervention de Nissen ; la longueur d’œsophage abdominal par une intervention de
• l’intervention de Dor est adaptée au traitement du Collis-Nissen ou bien, si cela n’est pas possible en raison d’un
hiatus difficilement abordable, réaliser une intervention de
reflux au cours des myotomies de Heller, permettant,
diversion duodénale totale, malgré les risques de complications
outre un traitement antireflux, de recouvrir la brèche fonctionnelles postopératoires [50].
musculeuse antérieure et d’assurer une cicatrisation à
moindre risque de fistule postopératoire ;
• lorsqu’une voie d’abord thoracique est rendue
Réinterventions pour récidive ou échec
nécessaire (patient multiopéré, obésité), le procédé de de la chirurgie
Belsey constitue le meilleur traitement ; Les réinterventions sur l’hiatus œsophagien constituent une
• les résultats à long terme manquent encore pour indication persistante de la chirurgie du reflux par laparotomie.
affirmer la supériorité d’une technique en termes de La nécessité de réintervenir peut venir soit d’une récidive des
dysphagie, de récidive du reflux et de qualité de vie. symptômes, soit de la persistance ou de l’apparition de phéno-
mènes dysphagiques invalidants.
La récidive du reflux gastro-œsophagien pose un problème réalisées en priorité dans le traitement du reflux gastro-
d’indication thérapeutique difficile. En cas de réapparition des œsophagien sont la fundoplicature totale de Nissen ou ses
symptômes, il faut d’abord affirmer la récidive par une endo- variantes et les fundoplicatures partielles postérieures.
scopie, une pHmétrie et une manométrie. Une opacification La chirurgie par voie ouverte appartient maintenant à
peut être utile dans cette indication pour analyser les causes l’histoire de la médecine, tant la chirurgie par voie cœlioscopi-
d’échec : démontage partiel ou total de la valve, migration de que s’est développée et a supplanté totalement la laparotomie
la valve vers le haut ou le bas, fundoplicature trop serrée ou dans cette indication. Cependant, son expérience n’a conduit à
trop longue. réaliser par cœlioscopie que les interventions validées pour leur
Il paraît utile, dans cette indication de reprise de reflux efficacité dans le traitement chirurgical du reflux
gastro-œsophagien, de réaliser une mesure de la vidange gastro-œsophagien.
gastrique afin de vérifier l’absence de traumatisme vagal lors des
interventions précédentes. Enfin, un nouveau traitement
chirurgical n’est indiqué que si le reflux est résistant au
traitement médical ou qu’il récidive à l’arrêt de celui-ci. ■ Références
La voie d’abord pour certains peut être thoracique [93], évitant
[1] Borelly J, Vaysse P. La jonction œsogastrique. Anat Clin 1978;
le réabord abdominal, en particulier chez le patient multiopéré
1:157-66.
ou le grand obèse. En fait, la thoracotomie est de morbidité
[2] Lortat-Jacob JL, Robert F. Les malpositions cardiotubérositaires. Arch
élevée et les résultats des procédés antireflux par thoracotomie
Mal App Dig 1953;42:750-74.
sont inférieurs à ceux de la voie abdominale. Ainsi, une
[3] Teniere P, Le Blanc I, Scotte M. In: Hernie du diaphragme de l’adulte.
réintervention par voie abdominale semble préférable mais est
Pathologie chirurgicale. Paris: Masson; 1991. p. 317-30.
techniquement difficile, avec une mortalité non nulle et une
[4] Delattre JF, Palot JP, Ducasse A, Flament JB, Hureau J. The crura of the
morbidité également élevée. Cette morbidité augmente avec le
diaphragm and diaphragmatic passage. Applications to
nombre de gestes chirurgicaux tandis que l’efficacité du traite- gastroesophageal reflux, its investigation and treatment. Anat Clin
ment antireflux diminue avec le nombre de réinterventions [94, 1985;7:271-83.
95].
[5] Caix M, Cubertafond P. Étude anatomique de la région thoraco-
L’intervention nécessite une viscérolyse parfois longue et abdominale considérée en fonction du type morphologique, incidence
difficile de réabord de la région hiatale. Le premier temps médico-chirurgicale. Anat Clin 1978;1:177-84.
consiste à libérer la face antérieure de l’œsophage et du mon- [6] Csendes A, Larrain A. Effect of a posterior gastro-pexy on
tage chirurgical de la face postérieure du lobe gauche. Il paraît gastrooesophageal sphincter pressure and symptomatic reflux in patient
utile d’essayer de se remettre en situation anatomique et de with hiatal hernia. Gastroenterology 1972;63:19-24.
contrôler l’œsophage au-dessus du précédent montage, habi- [7] Fournet J, Hostein J. Physiologie du reflux gastro-œsophagien et de
tuellement en ouvrant l’orifice hiatal. Cette manœuvre est l’œsophagite de reflux. In: Progrès en hépato-gastro-entérologie.
difficile en cas d’ascension intrathoracique du montage, avec un Paris: Doin; 1987. p. 85-102.
risque important de plaie œsogastrique. L’analyse de la cause [8] Lundell L, Abrahamsson H, Ruth M, Sandberg N, Olbe LC. Lower
d’échec conditionne la suite de l’intervention. En présence oesophageal sphincter characteristis and oesophageal acid exposure
d’une migration intrathoracique, le procédé antireflux est following partial or 360° fundoplications. Results of a prospective
abaissé dans la cavité abdominale, sans tension, et l’orifice randomized clinical study. World J Surg 1991;15:115-21.
hiatal est rétréci par rapprochement des piliers, voire par [9] Skinner DB, Belsey HR. Surgical management of oesophageal reflux
l’utilisation d’une prothèse. En cas de dysphagie, liée soit à un and hiatus hernia. Long term results with 1030 patients. J Thorac
orifice hiatal trop étroit, soit à une malfaçon de la valve (réalisée Cardiovasc Surg 1967;53:33-8.
avec la partie basse du fundus), il faut se résoudre à démonter [10] Jamieson CG, Duranceau A. Gastro-oesophageal reflux. Philadelphia:
le procédé valvulaire et à confectionner une nouvelle valve en WB Saunders; 1988.
général partielle. [11] Galmiche JP, Denis P, Desechallier JP. Valeur diagnostique des
Les difficultés des réinterventions, le risque de lésions examens complémentaires au cours du reflux gastro-œsophagien de
spléniques, et surtout de plaies œsophagiennes ou gastriques l’adulte. Gastroenterol Clin Biol 1981;5:1014-25.
doivent conduire à une plus grande prudence dans l’indication [12] Tefera L, Fein M, Ritter MP, Bremner CG, Crookes PF, Peters JH, et al.
chirurgicale. On peut définir une stratégie chirurgicale raison- Can the combination of symptoms and endoscopy confirm the presence
nable en fonction des conditions locales sous-diaphragmatiques, of gastrooesophageal reflux disease. Am Surg 1997;63:933-6.
cette même stratégie pouvant parfaitement s’adapter à la [13] Brand DL, Eastwood IR, Martin D, Carter WB, Pope 2nd CE.
situation difficile d’un reflux sévère après une intervention de Oesophageal symptoms manometry and histology before and after
Heller. antireflux surgery. A long term follow-up study. Gastroenterology
Si la région œsogastrique permet une dissection de l’œso- 1979;76:1393-401.
phage et de l’estomac de difficulté modérée, il faut préférer [14] Segol P, Baptiste P, L’Hirondel C, Marchand P, Gignoux M. Effets de la
réaliser une nouvelle fundoplicature partielle postérieure ou fundoplicature sur le sphincter inférieur de l’œsophage. Etude
totale, voire une intervention de Hill. Au contraire, si la manométrique pré et postopératoire. Gastroenterol Clin Biol 1982;
situation locale rend toute dissection dangereuse avec un risque 6:222-8.
majeur de plaie œsophagienne ou gastrique, l’intervention de [15] Jian R. Reflux gastro-œsophagien et motricité gastrique. Gastroenterol
Holt et Large [49] garde encore, dans cette indication, une place Clin Biol 1986;10:319-21.
importante, permettant une intervention antireflux sans risque, [16] Michot F, Le Blanc I, Denis P. Surgical treatment of gastrooesophageal
et sans redisséquer la région œsogastrique. reflux 180° or 270° fundoplications. Results on the basis of preoperative
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Scotté M., Lubrano J., Muller J.-M., Huet E. Traitement chirurgical par laparotomie du reflux
gastro-œsophagien de l’adulte. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-189, 2007.
muscle constricteur du pharynx et en bas par le muscle par la sonde de tamponnement œsogastrique pour l’hémostase de
cricopharyngien. La position en hyperextension du cou ou la varices œsophagiennes reste un grand classique, surtout si le patient
présence d’un ostéophyte vertébral majorent le risque de est agité ou s’il fait des efforts pour vomir. [16, 44]
perforation. La deuxième zone se situe au niveau du tiers moyen de Il est intéressant de rapporter les cas de plus en plus fréquents de
l’œsophage en regard du rétrécissement lié à la crosse aortique et à perforation lors d’échoendoscopie œsophagienne et lors
la bronche souche gauche. Le troisième niveau est constitué d’une d’échocardiographie par voie transœsophagienne. [13, 74]
zone de rétrécissement et d’incurvation de l’œsophage liée à son
passage à travers l’hiatus diaphragmatique ; [24, 32]
SYNDROME DE BOERHAAVE
– comme la pression intrathoracique est moindre que la pression
intraluminale de l’œsophage, le gradient de pression ainsi constitué Ce syndrome a été décrit en 1724 par Boerhaave, un médecin
exerce continuellement une tension sur la paroi œsophagienne. De hollandais qui relatait le cas d’une perforation survenue chez un
plus, lors de vomissement, le diamètre de l’œsophage inférieur grand amiral de la flotte hollandaise le Baron van Wassenaer.
augmente rapidement jusqu’à cinq fois plus. Ce gradient de pression
associé à l’absence de séreuse et à une brutale dilatation de
l’œsophage explique le risque de perforation lors de vomissement Menu du baron van Wassenaer, Grand amiral
incoercible ; [75] de la flotte hollandaise,1723
– la présence d’une affection sous-jacente en particulier les Bouillon de veau aux herbes
diverticules, les varices, les tumeurs et les sténoses peptiques ou Agneau bouilli et choux
caustiques prédispose également à la survenue d’une telle
Ris de veau frits aux épinards
complication lors d’une instrumentation. [32]
Canard
Deux alouettes
Compote de pommes
Étiologie Dessert
Poires, raisins, biscuits
Les étiologies sont nombreuses et sont reprises dans le Tableau 1.
Depuis quelques années, de nouvelles causes apparaissent et Bière et vin de Moselle
concernent non seulement les gastro-entérologues et les chirurgiens
digestifs mais aussi les chirurgiens cardiothoraciques, les La perforation était apparue au décours de vomissements
orthopédistes, les neurochirurgiens, les cardiologues, les importants après un repas copieux et bien arrosé. Il s’applique à
pneumologues et les chirurgiens ORL. [64] une perforation spontanée postémétique en l’absence d’une affection
œsophagienne prédisposante même si, dans 10 % des cas,
l’œsophage présente une œsophagite peptique, une hernie hiatale,
PERFORATIONS INSTRUMENTALES
un ulcère de Barrett, un diverticule ou un cancer. [45] L’élément
Les perforations instrumentales représentent la moitié des cas. La déclenchant est habituellement un épisode de vomissement bien que
fréquence d’une perforation après endoscopie diagnostique est d’autres causes aient été rapportées comme la manœuvre d’Hemlich
devenue très rare avec un pourcentage de 0,04 % grâce à une (trois cas décrits) ou des efforts de soulèvement qui augmentent
meilleure formation des médecins et à l’utilisation d’instruments brutalement la pression intra-abdominale. [52] De rares cas de
souples. [18] En revanche, elle survient dans 2 à 6 % des endoscopies perforation spontanée sans aucun facteur déclenchant ont également
interventionnelles, en particulier dans la dilatation pour sténose liée été décrits. La perforation siège le plus souvent sur le bord
à une achalasie ou à une œsophagite caustique, dans les scléroses postérolatéral gauche de l’œsophage thoracique inférieur 3 à 5 cm
multiples de varices œsophagiennes et, plus récemment, dans la au-dessus de l’hiatus diaphragmatique.
résection endoscopique de tumeurs œsophagiennes superficielles. [30,
33, 36, 62, 76]
2
Techniques chirurgicales Traitement des perforations œsophagiennes 40-220
PRÉSENTATION CLINIQUE
Il est important de rappeler que 7 % des perforations restent
asymptomatiques et que les manifestations cliniques immédiates ne
permettent un diagnostic précoce dans les 6 heures que dans 33 %
des cas. [44] Dans les autres cas, les symptômes surviennent plus
tardivement. Dès lors, l’apparition d’une ou plusieurs plaintes
suivantes au décours de vomissement ou d’un acte concernant
l’œsophage ou un organe avoisinant doit faire suspecter une
perforation (Fig. 1).
La douleur est le symptôme le plus précoce et le plus constant. Elle
permet de localiser le niveau de la perforation. Une perforation de
l’œsophage cervical peut se manifester seulement par une simple
Figure 3 Élargissement de
gêne associée à une raideur de nuque. Dans les localisations l’espace rétropharyngien témoi-
thoraciques, la douleur est souvent intense et évoque en premier gnant la présence d’un abcès sur
lieu un infarctus du myocarde ou une dissection de l’aorte perforation de l’œsophage cervical.
thoracique. De même, dans les localisations abdominales, elle est
identique à celle d’une perforation gastrique ou d’une pancréatite. [5,
24, 44]
3
40-220 Traitement des perforations œsophagiennes Techniques chirurgicales
¶ Transit œsophagien
Option non opératoire
Il permet de confirmer le diagnostic et la localisation précise de la
perforation. Les produits hydrosolubles (Gastrografinet) sont INDICATIONS
utilisés en première intention mais n’identifient la perforation que Un traitement conservateur peut se révéler efficace en prenant en
dans 80 % des cas. [24] L’opacification à la baryte augmente considération les critères d’éligibilité décrits par Mengoli et Klassen
significativement le taux de diagnostic mais avec le risque en 1965 puis modifiés par Cameron en 1979, par Shaffer en 1992 et
d’apparition d’un granulome médiastinal ou pleural. [ 8 ] par Altorjay en 1997. [2, 10, 47, 73] Plus il y a de critères présents au
L’opacification de l’œsophage doit également permettre de vérifier moment du diagnostic, plus les chances de succès sont élevées. [6]
l’absence d’un obstacle sous-jacent ou d’un reflux gastro- Ces critères sont :
œsophagien et c’est la raison pour laquelle elle doit être réalisée en
position verticale et horizontale. – une perforation intramurale ;
– une perforation transmurale si elle est bien circonscrite,
¶ Examens tomodensitométriques diagnostiquée tôt ou au contraire très tardivement ;
Réalisés après l’opacification de l’œsophage, ils permettent – un transit œsophagien montrant le passage du produit de
d’identifier une petite perforation non visible sur le transit contraste préférentiellement dans la lumière œsophagienne et non
œsophagien mais aussi d’affiner l’extension de l’infection dans les vers le trajet fistuleux (Fig. 6) ;
espaces para-œsophagiens (Fig. 5). Ils sont utiles dans le choix de la
meilleure voie d’abord en cas d’option chirurgicale. Ils sont – l’absence d’obstacle sous-jacent liée à une tumeur ou à une sténose
également indispensables lorsque l’évolution est défavorable quelle non dilatable ;
que soit la tactique thérapeutique choisie afin de documenter une – des signes cliniques de sepsis minimes ;
éventuelle complication.
– l’apparition d’une amélioration clinique dans les 24 heures qui
¶ Tests biologiques suivent le début du traitement.
4
Techniques chirurgicales Traitement des perforations œsophagiennes 40-220
¶ Tactique opératoire
Plusieurs procédés techniques sont possibles : la suture simple, le
drainage seul, la suture renforcée par un lambeau musculaire
(Fig. 7).
Quel que soit le délai du diagnostic, la meilleure option est une
Un apport nutritionnel suffisant est assuré au moyen d’une suture simple associée à un drainage. La survenue d’une fistule n’est
alimentation parentérale. pas catastrophique car elle est souvent de petit débit, facilement
Toute collection ou tout épanchement pleural est drainé. drainable et spontanément résolutive. [17, 43]
Un examen tomodensitométrique est réalisé devant l’apparition de Un simple drainage de l’abcès suffit, sans exploration de l’œsophage
toute détérioration clinique. ni identification de la perforation si le diagnostic est tardif.
Un renforcement par un lambeau musculaire est indispensable si la
Ce traitement est maintenu pendant 7 jours sans le modifier et une
plaie est étendue ou s’il y a perte de substance. [65] Dans ces deux
opacification de l’œsophage est programmée au 7e jour avant toute
circonstances, la suture peut être précaire, voire impossible. Deux
réalimentation orale.
lambeaux sont le plus souvent cités : le meilleur est le lambeau du
muscle grand pectoral parce qu’il est solide, très bien vascularisé et
APPROCHE ENDOSCOPIQUE situé dans une zone non contaminée par l’infection. [12, 29, 79] De plus,
il est possible d’y associer un lambeau cutané qui réépithélialisera la
Cette approche dérive essentiellement de la prise en charge des
plaie œsophagienne. Le second lambeau est celui du sterno-cléido-
fistules survenant après œsophagectomie. Leur application dans le
mastoïdien qui est très facile à réaliser mais sa vascularisation est
traitement de la perforation œsophagienne a permis d’élargir le
hasardeuse et son taux de nécrose proche de 10 à 25 %. [4, 35, 38, 54]
recours à un traitement conservateur. Comme cela est souvent le cas
avec ces nouvelles méthodes endoscopiques, leur utilisation ne doit Une gastrostomie de décharge et une jéjunostomie d’alimentation
pas remplacer une approche chirurgicale. Les seules indications sont sont indiquées si le patient est en mauvais état général, si la
les cancers œsophagiens dépassés, les perforations avec fistule réparation est précaire et s’il y a un obstacle sous-jacent.
persistante et les patients en très mauvais état général. Deux
techniques sont possibles : le drainage transœsophagien ¶ Voie d’abord et exposition de l’œsophage
endoscopique décrit par Ofek en 1986 ou la mise en place d’une Le patient est positionné en décubitus dorsal, le cou en extension et
endoprothèse semi-rigide et expansible. Les résultats sont assez la tête tournée vers la droite. L’incision cutanée est réalisée le long
impressionnants puisque le taux de fermeture de la perforation ou du bord antérieur du muscle sterno-cléido-mastoïdien gauche et doit
de la fistule est proche de 90 % avec un taux très faible de morbidité être large jusqu’au manubrium sternal. Après avoir incisé le muscle
et de mortalité lié à l’acte. [49, 53, 72] Cependant, l’évolution ultérieure peaucier et l’aponévrose cervicale superficielle, le muscle sterno-
dépend essentiellement de l’état clinique et septique du patient. cléido-mastoïdien est écarté latéralement et le plan entre la carotide
et le lobe gauche de la thyroïde est disséqué prudemment. L’abord
APPLICATION
de la gouttière trachéo-œsophagienne est facilité par la section de la
veine thyroïdienne moyenne, de l’artère thyroïdienne inférieure et
Une approche non opératoire a le plus de chances de succès dans éventuellement du muscle omohyoïdien. En cas de perforation
les perforations situées sur l’œsophage cervical ; [5, 37, 43, 77] 60 à 80 %
de celles-ci peuvent être traitées ainsi parce qu’il s’agit souvent de
perforation instrumentale survenant chez un patient à jeun dans un Perforation œsophage cervical Figure 7 Arbre déci-
environnement hospitalier adéquat. De plus, le diagnostic est sionnel du traitement chi-
rurgical d’une perforation
précoce et l’extension reste limitée à la région cervicale dans 85 % de l’œsophage cervical.
des cas. [43]
Suture Suture Drainage seul
En revanche, pour les localisations thoraciques, cette option ne doit + • ∆ très tardif
être envisagée qu’avec beaucoup de circonspection. En effet, même lambeau • perf. non visible
• perf. large
dans le cas d’une perforation minime diagnostiquée tôt, l’évolution
peut être imprévisible et une médiastinite ou un empyème peuvent + +
+
apparaître rapidement avec augmentation de la morbidité et de la
mortalité. Seules 10 à 15 % des perforations thoraciques peuvent être
traitées ainsi avec succès. [37, 77] Gastrostomie
+
Jéjunostomie
De même, pour les perforations abdominales, cette approche ne peut • réparation précaire
être envisagée que si l’extension reste limitée en sous- si • ASA IV - V
• obstacle sous-jacent
diaphragmatique et en para-œsophagien. [27, 77]
5
40-220 Traitement des perforations œsophagiennes Techniques chirurgicales
6
Techniques chirurgicales Traitement des perforations œsophagiennes 40-220
+ + +
+
7
40-220 Traitement des perforations œsophagiennes Techniques chirurgicales
perforation de l’œsophage thoracique. [1] Les défenseurs de cette azygos est facilement repérée et il n’est pas nécessaire de la
technique insistent sur sa simplicité et son efficacité avec un taux de sectionner au niveau de la crosse. La plèvre médiastinale est ouverte
réussite proche de 60 %. [39, 51, 68] en arrière du péricarde. L’œsophage et la perforation sont parfois
La résection œsophagienne emportant la lésion et la perforation difficiles à repérer en raison des phénomènes infectieux. À ce stade,
suivie de rétablissement de la continuité est la meilleure option en la mise en place d’une sonde gastrique sous contrôle digital et
cas d’œsophage pathologique. Cependant, les indications doivent l’insufflation d’air ou l’administration de bleu de méthylène aident
être adaptées à chaque patient et impliquent l’absence de à leur localisation. La mobilisation de l’œsophage doit être minimale
médiastinite sévère, une lésion raisonnablement résécable et un état afin de ne pas blesser les deux nerfs pneumogastriques et le canal
général correct. [25, 42, 69, 70] thoracique.
Une exclusion œsophagienne est préconisée dans les cas d’une Thoracotomie gauche
médiastinite sévère, d’une lésion non résécable, d’un patient en Le patient est installé en décubitus latéral droit avec un billot sous
mauvais état général. Elle consiste en la suppression du passage de la pointe de l’omoplate et le membre supérieur gauche placé vers
la salive et du liquide gastrique à travers la perforation par une l’avant. Un crochet est également positionné de manière à rétracter
interruption de la continuité au niveau de l’œsophage cervical et de vers le haut la pointe de l’omoplate. L’incision cutanée est faite à
l’œsophage juxta-hiatal ; une gastrostomie de drainage et une hauteur du septième espace intercostal. Le muscle grand dorsal est
jéjunostomie d’alimentation y sont associées. Le premier à l’avoir sectionné de même que le rebord chondrocostal de la huitième côte.
réalisé est Johnson en 1956 avec une interruption de la continuité de Après ouverture de la cavité thoracique, le ligament triangulaire
l’œsophage cervical par une œsophagostomie cervicale et celle de gauche est sectionné et la plèvre médiastinale est incisée en arrière
l’œsophage inférieur par une section du cardia. [31] Puis, Urschel, en du péricarde et en avant de l’aorte. Après décortication, aspiration
1974, a amélioré la technique en proposant une exclusion qui et lavage, l’œsophage et la perforation sont localisées comme décrit
respecte la continuité œsogastrique au moyen d’une simple ligature précédemment.
du bas œsophage par une bandelette de Teflony. [81] Cependant, ces
procédés restent invalidants car ils nécessitent un second temps ¶ Suture
opératoire pour le rétablissement de la continuité. Pour l’éviter, La réalisation d’une myotomie, d’un débridement et d’une suture
Mayer en 1976, Assens en 1984 et Gossot en 1986 ont proposé une en deux plans sont également d’application ici. Il faut s’assurer en
exclusion par un agrafage automatique de l’œsophage uni- ou plus que les orifices de la sonde naso-œsophagienne ou
bipolaire avec une reperméabilisation spontanée en 3 à 4 semaines nasogastrique sont positionnés de part et d’autre de la suture.
dans un grand nombre de cas. [3, 19, 40] La technique a sans cesse été
modifiée vers la simplification et Vidrequin et Grosdidier ont publié, ¶ Lambeau de renforcement
en 1988, les résultats d’un protocole thérapeutique en un temps du Lambeau de plèvre pariétal
syndrome de Boerhaave avec utilisation d’agrafes résorbables. [83]
Ce type de lambeau décrit par Grillo en 1975 est le lambeau de
Nous pensons comme Grillo, Brichon et Platel que l’exclusion doit
référence car il est efficace et simple à réaliser. [22] Il convient pour
être réservée aux cas désespérés en raison de son aspect
renforcer une suture située sur n’importe quelle portion de
inconfortable et nous préférons un abord direct de la perforation
l’œsophage thoracique. De plus, la plèvre est devenue épaisse en
avec une bonne dérivation des sécrétions salivaires par une sonde
réponse à l’inflammation et constitue un lambeau solide.
naso-œsophagienne placée en regard de la suture et une dérivation
du suc gastrique par une gastrostomie de décharge. [6, 23, 56, 65] Une En cas d’abord thoracique droit, la plèvre est incisée en forme de U
autre indication de l’exclusion œsophagienne est la prise en charge en regard de la perforation et décollée en avant de la veine azygos
d’une fistule persistante compliquant une suture réalisée et des artères et veines intercostales droites. En cas de thoracotomie
initialement. gauche, le lambeau pleural est disséqué en avant de l’aorte et des
branches vasculaires intercostales gauches. Il est important de
En cas de diagnostic très tardif, l’identification de la perforation peut délimiter des extrémités latérales suffisamment longues pour
être impossible et il ne faut pas s’obstiner à la rechercher. Un simple recouvrir soit la face antérieure de l’œsophage soit toute sa
drainage avec décortication pleurale par minithoracotomie ou circonférence. La largeur du lambeau doit également être appréciée
-thoracoscopie suffit. C’est également l’option choisie en cas de afin de recouvrir toute la suture. Après mobilisation du lambeau,
patients très débilités en attente d’un second geste plus radical si la celui-ci est fixé sur l’œsophage par des points séparés de fil non
récupération d’un état général satisfaisant le permet. [6, 18, 34] résorbable 3-0 (Fig. 12).
¶ Voie d’abord et exposition de l’œsophage Lambeau gastrique
Classiquement, la voie d’abord pour une perforation de l’œsophage Décrit par Thall en 1964, ce type de lambeau permet de renforcer
située sur les deux tiers supérieurs est une thoracotomie latérale une suture située sur l’œsophage thoracique inférieur. [78] Comme il
droite centrée sur le cinquième ou sixième espace intercostal et, pour est très résistant, mobile et très bien vascularisé, il constitue le
le tiers inférieur, une thoracotomie postérolatérale gauche centrée lambeau de référence en cas de syndrome de Boerhaave. Cependant,
sur le septième espace intercostal. D’autres comme Platel il ne peut être réalisé que par une thoracotomie gauche et nécessite
recommandent de choisir le côté en fonction de la localisation de une phrénotomie.
l’épanchement pleural, du trajet de la fuite sur le transit opaque ou La phrénotomie est habituellement une section diaphragmatique
encore des données tomodensitométriques. [22, 56] radiée qui démarre à la partie moyenne du diaphragme entre les
reliefs du foie et de la rate et qui se dirige vers l’hiatus œsophagien
Thoracotomie droite (Fig.13A). Elle condamne la branche postérieure du nerf phrénique.
La grosse tubérosité gastrique est saisie sur pince de Babcock
Le patient est positionné en décubitus latéral gauche avec un billot (Fig. 13B) et la section de deux ou trois vaisseaux courts
placé sous la pointe de l’omoplate et le membre supérieur droit dans gastrospléniques permet une bonne ascension de l’estomac dans le
un appui au-dessus de la tête du patient. Une intubation sélective thorax. Le renforcement de la suture est réalisé soit en fixant la
pour exsuffler le poumon droit facilite l’exposition du médiastin. Si séreuse gastrique à la musculeuse œsophagienne de part et d’autre
un épanchement pleural est présent du côté opposé, un drain pleural de la perforation (Fig. 13C), soit en confectionnant un manchon
doit être placé avant l’installation du patient de manière à assurer gastrique de 360° autour de l’œsophage (Fig. 13D).
une ventilation correcte du poumon. Après ouverture de la cavité
thoracique, une exploration minutieuse est débutée avec Lambeau intercostal
décortication pleurale, aspiration des collections, prélèvement Le premier à avoir décrit ce type de lambeau en cas de perforation
bactériologique et lavage abondant. La section du ligament œsophagienne est Richardson en 1985. [59] Il est obligatoire de le
triangulaire droit permet d’aborder le médiastin postérieur. La veine confectionner avant la mise en place du rétracteur costal afin d’éviter
8
Techniques chirurgicales Traitement des perforations œsophagiennes 40-220
Figure 12 Lambeau de plèvre pariétal (A). Le lambeau est incisé en regard de la perforation avec des dimensions suffisamment larges pour recouvrir la suture ou
l’œsophage (B, C).
de blesser le paquet vasculonerveux. Malgré cela, il a ses défenseurs de V. L’incision démarre à la partie postérieure du diaphragme 3 cm
en raison de sa solidité, de sa très bonne vascularisation et de sa en avant du pilier droit afin de ne pas blesser l’artère
situation dans une zone non contaminée par l’infection. En effet, la diaphragmatique inférieure (Fig. 15A). L’incision est prolongée en
nécessité d’une décortication pleurale étendue peut rendre avant et à gauche en forme d’arche. La longueur du lambeau est
impraticable un lambeau pleural. De plus, il peut renforcer estimée en fonction de la distance de la perforation en ajoutant 2 cm
n’importe quelle portion de l’œsophage thoracique et peut être par sécurité. Il est important que la largeur mesure plus ou moins
réalisé aussi bien par voie thoracique droite que gauche. un quart de la longueur. Le lambeau est amené vers la perforation
Le muscle intercostal choisi comme lambeau est exposé sur toute sa par rotation prudente et fixé par des points séparés de fil non
longueur. Le périoste de la côte sus-jacente est incisé au niveau de résorbable 3-0 (Fig. 15B). Le diaphragme est refermé solidement par
sa face antérieure au bistouri électrique et séparé de l’os au moyen des points séparés de fil non résorbable afin d’éviter une éventuelle
d’une rugine en continuité avec le muscle intercostal sous-jacent ; il rupture postopératoire.
est important de préserver l’insertion musculaire du périoste afin de
ne pas traumatiser le paquet vasculonerveux (Fig. 14A). La côte sus- Lambeau épiploïque
jacente est soulevée délicatement vers le haut et la plèvre pariétale
En 1988, Mathisen a décrit les résultats de l’utilisation de l’épiploon
est incisée en continuité avec le lambeau musculaire. Le muscle
pour renforcer une suture œsophagienne. [41] En cas de thoracotomie
intercostal est alors incisé au voisinage du bord supérieur de la côte
gauche, il peut être réalisé par une phrénotomie radiaire et un large
sous-jacente en laissant en place le périoste et l’insertion musculaire
décollement coloépiploïque permet de pédiculiser l’épiploon sur les
(Fig.14B). Cette côte est également rétractée au doigt vers le bas et la
vaisseaux gastro-épiploïques droits et de le mobiliser sans difficulté
plèvre est sectionnée en continuité avec le muscle. Le lambeau n’est
dans la cavité thoracique. En cas de thoracotomie droite, une courte
plus suspendu que par ses attaches antérieure et postérieure. Le
laparotomie est nécessaire et le lambeau épiploïque est mobilisé
bord antérieur du lambeau est clampé et sectionné à la lame froide.
dans le thorax à travers un tunnel rétrosternal. Une incision de la
L’extrémité antérieure du lambeau doit montrer un flux sanguin
plèvre médiastinale permet de le récupérer dans ce trajet et de le
correct et les vaisseaux sont ligaturés soigneusement (Fig.14C). Le
positionner autour de l’œsophage.
lambeau est protégé par une compresse imbibée de sérum
physiologique et est positionné dans la partie postérieure de la
thoracotomie. Le rétracteur costal peut être mis en place et ¶ Œsophagectomie
l’exploration thoracique poursuivie. Le lambeau viendra recouvrir Les techniques d’œsophagectomie sont décrites dans les fascicules
la suture en fin d’intervention (Fig. 14D). 40-195 (Chirurgie des cancers de l’œsophage) et 40-210
(Œsophagectomie pour lésion bénigne). [20, 71] Le seul commentaire à
Lambeau diaphragmatique
apporter concerne la confection de l’anastomose œsogastrique.
Proposé par Rao en 1974, il a les mêmes qualités que le lambeau Celle-ci doit être réalisée idéalement au niveau cervical à distance
intercostal mais il ne peut renforcer qu’une perforation située sur le des foyers infectieux. [42, 69] Le rétablissement de la continuité peut
tiers inférieur de l’œsophage. [57] Il représente une bonne alternative également être effectué dans un second temps opératoire de même
à un lambeau de Thall en cas d’antécédents chirurgicaux gastriques. que la résection œsophagienne peut succéder à une exclusion
Le lambeau est préparé en incisant le diaphragme en forme de U ou œsophagienne première.
9
40-220 Traitement des perforations œsophagiennes Techniques chirurgicales
Figure 16 Exclusion
œsophagienne bipolaire.
L’exclusion haute de
l’œsophage représentée
sur cette figure par une
stomie latérale peut être
remplacée par un agrafage
automatique comme pour
l’exclusion basse.
A B
Figure 15 Lambeau diaphragmatique.
A. Incision du lambeau en forme d’arche en respectant l’artère diaphragmatique
inférieure.
B. Fixation du lambeau autour de la suture par retournement sans traction.
¶ Drainage
Le drain doit être de type Jackson-Pratt avec l’avantage d’être large,
souple et raccordé à un système d’aspiration étanche. En cas de
suture, ce drain doit être positionné près de celle-ci mais pas à son
contact immédiat. Deux drains pleuraux sont également mis en
place, l’un en postéro-inférieur, l’autre en antérosupérieur. Le drain
de Jackson-Pratt doit être laissé en place au moins 7 jours et ne peut L’interruption de l’œsophage cervical est réalisée par une
être mobilisé qu’après s’être assuré d’une cicatrisation correcte par cervicotomie gauche classique. En cas d’option d’une
une opacification de contrôle de l’œsophage. œsophagostomie cervicale, celle-ci peut être terminale si une
résection œsophagienne est prévue dans un second temps ou
¶ Exclusion œsophagienne (Fig. 16) latérale si l’œsophage reste en place. Il est important de mobiliser
l’œsophage cervical le plus loin possible dans le médiastin en
La première étape consiste en la réalisation de l’interruption de la prenant garde de ne pas léser le nerf récurrent gauche. Cette
continuité du bas œsophage soit par voie thoracique si un drainage, mobilisation doit permettre de confectionner la stomie à la partie
une suture ou une fistulisation dirigée sont nécessaires soit par voie inférieure de la cervicotomie sans traction. La stomie est maturée
abdominale. L’œsophage juxtahiatal est exclu par une ligne par des points séparés de fil résorbable 4-0 chargeant toute la paroi
d’agrafes résorbables ou non avec un appareil de type TA 60. œsophagienne et le derme. Si l’exclusion haute est réalisée par
10
Techniques chirurgicales Traitement des perforations œsophagiennes 40-220
Suture Œsogastrectomie
+ • lésion obstructive
lambeau
+ + + +
¶ Voie d’abord
Actuellement, la voie d’abord la plus utilisée reste une laparotomie
médiane sus-ombilicale bien qu’une approche cœlioscopique soit
envisageable. Le patient est placé en décubitus dorsal strict. Après
Figure 17 Mise en place d’un drain de Kehr de gros calibre (1). Un drain de type exploration, prélèvement bactériologique et lavage, une courte
Jackson-Pratt doit être positionné au voisinage (2). phrénotomie antérieure doit être systématiquement réalisée afin
d’exposer l’œsophage thoracique inférieur. Cette phrénotomie est
agrafage automatique, on utilise un appareil de type TA 60 en facilitée par l’introduction de l’index par l’orifice hiatal, ce qui
laissant en place l’œsophage. Une sonde naso-œsophagienne est permet de refouler le péricarde et d’inciser les fibres musculaires
positionnée pour aspirer les sécrétions salivaires. sans risque (Fig. 19). L’œsophage abdominal est mobilisé par rapport
Une gastrostomie de drainage et une jéjunostomie d’alimentation à la membrane phréno-œsophagienne et aux deux piliers du
sont effectuées par une courte laparotomie sus-ombilicale. diaphragme. Il est important de respecter les nerfs
pneumogastriques. La mise en place d’un lacs autour de l’œsophage
¶ Fistulisation dirigée permet une dissection de celui-ci dans le médiastin en prenant garde
de ne pas ouvrir la plèvre ou le péricarde. L’identification de la
Après réalisation de la thoracotomie, débridement, lavage et examen perforation est généralement aisée.
de la perforation, les deux bras d’un drain en T de gros calibre sont
positionnés dans l’œsophage à travers la perforation et une suture ¶ Suture
de celle-ci est réalisée par des points totaux de fil non résorbable
3-0. Le drain est extériorisé par une contre-incision antérolatérale Les gestes sont identiques à ceux décrits pour les autres localisations.
basse en s’assurant qu’il n’est pas sous tension (Fig. 17A,B). Un drain
de Jackson-Pratt est également positionné à proximité de la suture ¶ Lambeau de renforcement
ainsi que les deux drains pleuraux classiques. Le drain est raccordé
à une colonne d’aspiration étanche sous 15 à 20 cm d’eau. Après Lambeau gastrique
réalisation d’une opacification de contrôle à la 3e ou 4e semaine, le La réalisation d’un lambeau gastrique représente le meilleur moyen
drain de Kehr est progressivement mobilisé et enlevé en laissant de renforcer la suture. Il peut être confectionné selon Thall ou selon
encore en place le drain de Jackson-Pratt. Une fistule œsocutanée Nissen (Fig. 20).
peut apparaître avec un tarissement spontané dans la plupart des
cas. Lambeau épiploïque
En cas d’antécédent de chirurgie gastrique, il constitue la meilleure
PERFORATION DE L’ŒSOPHAGE ABDOMINAL alternative.
¶ Tactique opératoire
¶ Drainage
Les options possibles sont une suture avec lambeau de renforcement,
Deux drains de Jackson-Pratt sont recommandés, l’un en sous-
une résection œsogastrique et une suture avec renforcement
phrénique gauche, l’autre en sous-hépatique à côté du bord droit de
accompagnée du traitement local d’une affection sous-jacente
l’œsophage.
(Fig. 18).
Si l’œsophage est sain, quel que soit le délai du diagnostic et l’état
général du patient, la meilleure option est une suture avec lambeau
de renforcement et drainage. [27, 65]
Conclusion
En cas de cancer limité ou d’une sténose non dilatable, une résection
Le pronostic d’une perforation œsophagienne dépend essentiellement de
œsogastrique, même limitée, s’impose. [18, 43]
la rapidité du diagnostic et du choix du meilleur traitement décidé en
En cas de perforation après sclérothérapie ou ligature endoscopique première ligne. Actuellement encore, seule une perforation sur trois est
de varices, nous avons rapporté notre expérience d’une suture diagnostiquée dans les six heures. Selon des indications qui doivent
renforcée par un lambeau gastrique en association avec une rester strictes, le patient peut bénéficier avec succès d’une approche non
déconnexion azygoportale. [63] chirurgicale. Sinon, l’option est résolument opératoire. Dans cette
En cas de perforation après dilatation pour achalasie, la option, le lâchage de la suture représente le principal problème auquel
recommandation était de réaliser une myotomie sur le versant est confronté le chirurgien. Le renforcement de la suture permet de
11
40-220 Traitement des perforations œsophagiennes Techniques chirurgicales
diminuer ce risque et, bien qu’il s’agisse d’un concept simple, peu de redresser une situation compromise. Le recours à une œsophagectomie
chirurgiens l’appliquent systématiquement. Plusieurs types de lambeau ne devrait être réservé que dans le traitement définitif d’une perforation
peuvent être utilisés et il est toujours possible d’en confectionner un associée à un obstacle sous-jacent si l’état général du patient le permet.
sans difficulté. Lorsque la suture est hasardeuse, des alternatives comme Quelle que soit l’option décidée, une concertation interdisciplinaire
la fistulisation dirigée (procédé simple mais peu utilisé) ou l’exclusion associant les gastroentérologues, les chirurgiens, les anesthésistes-
œsophagienne (technique très invalidante) permettent parfois de réanimateurs et les radiologues permet d’obtenir les meilleurs résultats.
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13
¶ 40-255
Les hernies diaphragmatiques de l’enfant regroupent d’une part les hernies hiatales, associées au reflux
gastro-œsophagien, et d’autre part les hernies diaphragmatiques congénitales. Le reflux gastro-
œsophagien est fréquent chez le nourrisson et disparaît dans la plupart des cas dans les premières années
de vie. La chirurgie n’est indiquée que dans les formes persistantes et invalidantes, résistant à un
traitement médical bien conduit, et parfois associées à des anomalies anatomiques (hernie hiatale). Les
techniques actuellement préférées sont la fundoplicature complète (Nissen) ou partielle (Toupet) par
cœlioscopie. Les hernies diaphragmatiques congénitales provoquent en général une détresse respiratoire
néonatale, dont le pronostic peut être réservé en fonction de l’hypoplasie pulmonaire et de l’hypertension
artérielle pulmonaire. Le traitement chirurgical consiste, après stabilisation de l’état respiratoire de
l’enfant, à fermer la brèche diaphragmatique et à traiter la malrotation intestinale fréquemment
associée.
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Chirurgie ouverte
Le but de l’intervention est de redonner au sphincter infé-
rieur de l’œsophage son efficacité : les principes sont le reposi-
tionnement de l’œsophage intra-abdominal, le calibrage de
l’orifice hiatal et la création d’un mécanisme antireflux.
Figure 1. Ouverture du ligament triangulaire gauche. Une compresse
Installation abdominale est glissée sous le lobe gauche de façon à être vue par
L’intervention doit être réalisée en respectant les règles transparence sous le ligament triangulaire, alors qu’une traction douce est
générales de la chirurgie et de l’anesthésie pédiatriques. La durée exercée sur le lobe gauche vers le bas. Le ligament triangulaire gauche est
du jeûne préopératoire varie de 4 heures (nourrissons) à incisé de gauche à droite en regard de la compresse abdominale. 1.
6 heures (grand enfant), en veillant au risque d’hypoglycémie Compresse abdominale ; 2. traction douce du lobe gauche vers le bas ; 3.
chez les tout-petits. Chez l’enfant de plus de 3 mois, une rate.
application d’anesthésiques à pénétration transcutanée (crème
Emla®) sous pansement hermétique 1 heure avant le passage en
salle d’opération permet de diminuer la douleur aux sites de découvrir le grêle pendant toute l’intervention, cela afin de
ponction veineuse. Les mesures visant à éviter le refroidissement limiter le risque d’occlusion sur bride, qui est grave et de
de l’enfant sont indispensables : température ambiante élevée diagnostic difficile en cas de montage antireflux. L’exposition de
en salle d’opération, matelas et/ou couverture chauffante(s), la région hiatale nécessite de récliner le lobe gauche du foie : on
voire, en cas de petit nourrisson, intervention sur lit radiant. introduit un champ abdominal humide sous le lobe gauche, de
Outre les éléments purement cliniques, la surveillance peropé- façon que, avec une traction douce sur le lobe gauche vers le
ratoire porte sur le rythme cardiaque (électrocardioscope), la bas, le champ soit vu par transparence à travers le ligament
saturation capillaire en oxygène (saturomètre), la pression triangulaire gauche. On incise alors le ligament triangulaire de
artérielle (Dinamap®), la température corporelle (sonde thermi- la gauche vers la droite, le champ abdominal protégeant les
que rectale), la concentration de l’air expiré en CO2 (capnomè- structures sous-jacentes (Fig. 1). Lorsque, sur la droite, les deux
tre, plus particulièrement utile en cas de chirurgie cœlio- feuillets péritonéaux antérieur et postérieur s’écartent, on
scopique). L’enfant est installé en décubitus dorsal, avec un poursuit l’incision plan par plan aux ciseaux en prenant garde
petit billot à la base du thorax et léger proclive. En fonction de à ne pas léser la veine sus-hépatique gauche. Le lobe gauche est
l’analgésie prévue en postopératoire (notamment péridurale), alors récliné, et la pars tensa du petit épiploon est incisée en
une sonde vésicale peut être nécessaire. Des piquets sont prévus veillant à ne pas léser une éventuelle artère hépatique gauche.
pour l’écartement peropératoire. Chez le petit, il faut veiller, si Le lobe de Spigel est récliné vers la droite. Le bilan lésionnel
l’on utilise des champs collants, à protéger toutes les prothèses apprécie alors le degré d’ascension de l’estomac vers le média-
(sonde d’intubation, voies veineuses, etc.) de façon qu’elles ne
stin, l’existence d’une périœsophagite ou d’un sac herniaire.
soient pas collées dans les champs avec un risque d’arrachement
en fin d’intervention. En cas d’utilisation de films adhésifs sur Dissection de l’œsophage médiastinal inférieur
la peau, il est souhaitable de repérer préalablement l’incision
avec un crayon dermographique. On installe aussi une aspira- Abord des piliers
tion et un bistouri électrique, au mieux avec une pointe ou un
L’estomac est attiré vers le bas et l’œsophage récliné vers la
couteau monopolaire et une pince bipolaire pour coagulations
gauche. Le péritoine est incisé sur le pilier droit, qui est repéré
douces et électives sans diffusion. Enfin il est recommandé,
sur fil (Fig. 2). L’œsophage est alors récliné vers la droite. Le
surtout chez le nourrisson, d’opérer assis.
péritoine est ouvert en avant du pilier gauche, qui est égale-
Voie d’abord ment repéré sur fil (Fig. 3).
L’incision peut être soit médiane sus-ombilicale, soit trans- Libération de l’œsophage
versale sus-ombilicale (en regard de la pointe de la 10e côte) Le péritoine préœsophagien est ouvert entre les deux précé-
décalée à gauche, soit sous-costale gauche. Chez le nourrisson, dentes incisions. L’œsophage est libéré d’abord sur ses faces
la forme plus étalée de l’abdomen et la souplesse du rebord antérieure et latérale, puis un lacs est passé derrière celui-ci
costal sont en général bien adaptées à la voie transversale, qui (Fig. 4). Après repérage des pneumogastriques, la dissection de
semble exposer moins aux complications pariétales (éventration, l’œsophage médiastinal peut être poursuivie en arrière, à la
éviscération) que la médiane. L’écartement peut être réalisé par boulette et aux ciseaux (Fig. 5). En cas de sac herniaire (en
écarteurs autostatiques ou par valve(s) ou, chez les nourrissons, général antérieur et latéral), la dissection de ce sac est faite
par de gros fils tracteurs passés dans la paroi. depuis sa périphérie. Si son exérèse est difficile, il n’y a pas
d’inconvénient à laisser un « fond de coquetier » de sac dans le
Abord de la région hiatale et bilan lésionnel médiastin. Dans tous les cas, il faut veiller à ne pas ouvrir la
L’intervention étant limitée strictement à l’étage sus- plèvre gauche : une ouverture accidentelle peut éventuellement
mésocolique, il est recommandé (sauf cas particuliers) de ne pas être refermée par un point en X après exsufflation du pneumo-
explorer l’étage sous-mésocolique, et de faire en sorte de ne pas thorax. Un cliché de thorax postopératoire est systématique à la
Fermeture des piliers Figure 6. Rapprochement des piliers. Le rapprochement est effectué
avec calibrage de l’œsophage par une ou deux sonde(s) gastrique(s). Le
Une sonde gastrique est passée dans l’œsophage. Les piliers calibrage étant terminé, on doit pouvoir passer la pointe d’une pince de
sont rapprochés derrière l’œsophage, par un ou plusieurs points Kelly en arrière entre l’œsophage et les piliers rapprochés.
séparés, serrés avec modération pour éviter une section muscu-
laire (Fig. 6). Les points peuvent être simples, ou en U appuyés
sur pledgets, de fil tressé non résorbable 2/0. Il faut veiller à ne Création d’un mécanisme antireflux
pas sténoser l’œsophage lors de cette reconstruction, et l’on doit
pouvoir passer la pointe d’une pince de Kelly derrière l’œso- Réfection de l’angle de His (Lortat-Jacob)
phage après le rapprochement des piliers. Certains préfèrent L’œsophage abaissé est fixé au pilier droit. L’angle de His est
mettre deux sondes dans l’œsophage pour éviter toute sténose reconstitué par adossement de la grosse tubérosité à l’œsophage
par fermeture excessive de l’orifice hiatal. abdominal : le bord gauche de l’œsophage est suturé en deux
Figure 7. Réfection de l’angle de His (Lortat-Jacob). Figure 9. Valve tubérositaire postérieure ouverte (non circulaire)
(Toupet).
plans au bord droit de la grosse tubérosité. De même, le sommet Hémivalve tubérositaire antérieure (Thal, Jaubert de Beaujeu)
de la grosse tubérosité est suturé au diaphragme (Fig. 7). Cette La grosse tubérosité est rabattue en avant de l’œsophage
intervention, simple, semble néanmoins donner de moins bons abdominal, avec création d’une hémivalve antérieure (Fig. 10) [9-
résultats que les valves sur la suppression du reflux [8]. 12]. La technique de Boix-Ochoa est une variante de ce type de
Un manchon complet (360°) est créé autour de l’œsophage. Allongement de l’œsophage par tubulisation gastrique
Afin de mobiliser la grosse tubérosité, il faut ouvrir largement à la pince TA® et valve tubérositaire postérieure
le péritoine rétro-œsophagien, sectionner le ligament gastro- (Collis-Nissen « sans section ») [14, 15]
phrénique et, si nécessaire, quelques vaisseaux courts gastro- Cette intervention ne nécessite aucune dissection de l’œso-
spléniques. Le manchon tubérositaire est passé derrière l’œso- phage médiastinal. Un néo-œsophage abdominal est créé par
phage, et une série de points solidarisent l’hémivalve postérieure tubulisation de l’estomac par une rangée d’agrafes type TA®
droite à la face antérieure de l’œsophage abdominal et à (Fig. 11A). La partie postérieure de la grosse tubérosité est
l’hémivalve antérieure gauche. Le bord droit de l’hémivalve ensuite passée derrière le néo-œsophage et une valve postérieure
postérieure droite est fixé au pilier droit et le sommet de la est confectionnée (Fig. 11B, 11C).
valve peut être fixé à la coupole diaphragmatique (Fig. 8).
Voie d’abord thoracique
Valve tubérositaire postérieure ouverte (non circulaire)
L’abord par thoracotomie postérolatérale dans le 7e espace
(Toupet)
intercostal gauche donne un jour excellent sur l’œsophage
Comme dans la valve type Nissen, le manchon tubérositaire médiastinal inférieur. Plusieurs types de valves sont possibles :
est passé derrière l’œsophage abdominal, mais en l’entourant • adossement de l’estomac à la face antérieure de l’œsophage
sur 270°, sans en faire le tour complet. Trois rangées de deux à (Belsey-Mark IV) [16] ;
quatre points fixent l’hémivalve postérieure droite à la face • allongement œsophagien par tubulisation gastrique à la pince
antérieure de l’œsophage abdominal et au pilier droit, ainsi que GIA et valve tubérositaire postérieure (Collis-Nissen) [17].
l’hémivalve antérieure gauche au bord gauche de l’œsophage Ces procédés sont plus rarement utilisés chez l’enfant, mais
abdominal (Fig. 9). La fixation de l’hémivalve antérieure gauche peuvent être utiles en cas de difficultés de l’abord abdominal
au diaphragme n’est habituellement pas nécessaire. (antécédents chirurgicaux) [18].
Figure 11.
A, B, C. Allongement œsophagien par tubulisation gastrique et valve tubérositaire postérieure (Collis-Nissen « sans section »).
Gestes associés costal, mais sa localisation doit être adaptée de façon à permet-
tre un appareillage facile de la stomie en fonction des déforma-
La position de la sonde gastrique est contrôlée par l’opérateur. tions éventuelles de l’enfant (scoliose). La paroi gastrique est
Afin d’éviter tout arrachement postopératoire, une fixation fixée, via l’incision de gastrostomie, au plan musculoaponévro-
solide est recommandée, en veillant à protéger les zones d’appui tique par quatre points puis au plan cutané par quatre points,
cutané (par exemple avec une plaque de Duoderm®, sur laquelle et la sonde de gastrostomie est immédiatement mise en place
la sonde est fixée avec un Tégaderm®). Chez les petits nourris- avec contrôle du bon positionnement du ballonnet dans
sons, il faut surveiller particulièrement l’absence d’appui excessif l’estomac, sans obstruction du défilé antropylorique. Chez les
de la sonde sur la narine. D’autres gestes sont facultatifs. très petits nourrissons, il est préférable d’utiliser une sonde de
Pylorotomie extramuqueuse ou pyloroplastie Pezzer afin d’éviter l’obstruction de l’estomac par le ballonnet
de la sonde de gastrostomie.
Le reflux gastro-œsophagien est fréquemment associé à des
troubles de la vidange gastrique [19, 20] , en particulier chez Drainage
l’enfant neurologique. Une controverse persiste quant à l’indi- Il est inutile dans la plupart des cas.
cation d’une pyloroplastie ou d’une pylorotomie extramuqueuse
chez les patients dont la vidange gastrique est ralentie avant
l’intervention. L’interprétation des examens isotopiques est
Soins postopératoires
délicate et dépend (entre autres) des médications en cours, de Une radiographie de thorax est systématique en postopéra-
la consistance liquide ou solide du repas [21], et de la position toire immédiat à la recherche d’un pneumothorax. La sonde
de l’enfant lors de l’examen [22]. Pour ses partisans, la pyloro- gastrique est retirée immédiatement si une gastrostomie est en
plastie réduit le risque de récidive du reflux après l’intervention, place, sinon, après reprise du transit. L’alimentation est reprise
sans augmenter les complications postopératoires [23, 24] . sous forme semi-liquide ou mixée, de façon fractionnée. La
D’autres auteurs indiquent que le retard de vidange gastrique est réintroduction de petits morceaux aura lieu secondairement en
fréquemment corrigé par la fundoplicature isolée [25], qu’il existe fonction de la tolérance, habituellement après 1 mois.
peu de corrélation entre les résultats des scintigraphies pré- et L’antibiothérapie est limitée à une injection peropératoire.
postopératoires chez un même patient [21, 25] et qu’un retard de L’analgésie initiale peut être administrée par intraveineuse ou
vidange persistant après fundoplicature peut ne pas être corrigé voie péridurale, continue ou contrôlée par le patient (PCA ou
par une pyloroplastie secondaire [21]. La pyloroplastie pourrait PCEA : patient controlled [epidural] analgesia) ou ses parents
contribuer à la survenue d’hypoglycémies fonctionnelles (PPNCA ou PPNCEA : patient parents nurse controlled [epidural]
(« dumping syndrome »), parfois sévères. En pratique, nous analgesia). La sonde vésicale est retirée après arrêt de la péridu-
évaluons la vidange gastrique sur le TOGD préopératoire. Une rale et/ou des morphiniques.
pylorotomie extramuqueuse (plutôt qu’une pyloroplastie) nous
paraît indiquée en cas de retard sévère de la vidange gastrique Complications
préopératoire et/ou de doute sur une lésion peropératoire des
Complications peropératoires
nerfs vagues (c’est-à-dire très rarement).
Les hémorragies par lésion de la rate, des vaisseaux courts
Gastrostomie
gastrospléniques, voire de la veine sus-hépatique gauche sont
Nous la réalisons souvent chez les patients neurologiques : rares. Elles sont prévenues par une manipulation douce et des
soit à titre définitif, lorsque l’enfant présente des troubles gestes précis. Une perforation de l’œsophage doit être reconnue
importants de la succion-déglutition ; soit à titre temporaire, et traitée (le plus souvent par suture simple, drainage au
jusqu’à ce que l’enfant se réalimente normalement per os et contact, aspiration postopératoire continue par la sonde
qu’il récupère un bon état nutritionnel. La gastrostomie est gastrique et antibiothérapie) sous peine de laisser se développer
réalisée au niveau du fundus, après vérification que la zone une médiastinite gravissime [26]. Une brèche pleurale, si elle est
choisie monte sans traction excessive vers la zone envisagée reconnue pendant l’intervention, doit être fermée après exsuf-
pour l’incision cutanée. Celle-ci est habituellement dans flation du pneumothorax. Si le pneumothorax est découvert
l’hypocondre gauche, à mi-distance entre l’ombilic et le rebord secondairement, il sera exsufflé par ponction à l’aiguille.
A1
“ Point fort
La méthode sous contrôle de la vue est vivement
Figure 12. Installation pour cure de reflux gastro-œsophagien sous recommandée car elle a l’avantage de la sécurité,
cœlioscopie. 1. Colonne de cœlioscopie ; 2. table d’instruments ; notamment chez les jeunes enfants où la distance qui
3. coagulation ; 4. irrigation ; C : opérateur ; A1 : aide ; A2 : deuxième
sépare la paroi abdominale antérieure des gros vaisseaux
aide (facultatif).
est très réduite.
T1-A2 T1-A2
T2-C
T2-C
T1-A2 T1-A2
3
2
T2-C
T2-C
T4-C
Opt-A1 T3-A1
Opt-A1 T3-C T4-A1
Figure 19. Rapprochement des piliers.
Figure 17. Ouverture de la membrane phréno-œsophagienne. 1. Lobe Instrument-personne qui le tient (cf. Fig. 12 et 13) : T1-A2 : palpateur ou
gauche récliné vers le haut ; 2. segment I ; 3. rameaux du pneumogastri- aspiration ; T2-C : porte-aiguille ; T3-A1 : pince atraumatique ; T4-C :
que gauche. porte-aiguille ; Opt-A1 : optique.
Instrument-personne qui le tient (cf. Fig. 12 et 13) : T1-A2 : palpateur ou
aspiration ; T2-C : pince atraumatique ; T3-C : crochet coagulateur ; T4- Rapprochement des piliers
A1 : pince atraumatique ; Opt-A1 : optique.
L’œsophage et le pneumogastrique droit étant réclinés en
haut à gauche, les piliers sont suturés entre eux derrière
l’œsophage abdominal. Pendant ce temps et les temps de suture
T1-A2
suivants, l’œsophage est récliné à gauche par le palpateur. En
cas de technique à cinq trocarts, l’œsophage peut être attiré vers
le bas par une pince atraumatique en T3 placée sur l’estomac,
ou par un lacs passé autour de l’œsophage abdominal. Les
points de fil non résorbable tressés 2/0 aiguille ski sont passés
par le porte-aiguille en T4 (Fig. 19). Deux à trois points sont
.5
noués suivant la taille de l’enfant. Dans tous les cas, la pointe
d’une pince atraumatique peut être passée derrière l’œsophage
après rapprochement des piliers.
Confection de la valve
Valve postérieure complète (Nissen)
.6
Par le jeu des pinces atraumatiques en T2 et T3, la face
postérieure de la grosse tubérosité est attirée derrière l’œsophage
abdominal.
La partie postérieure de la valve est disposée de façon qu’elle
T2-C « tombe » bien, sans pli. Il ne doit pas y avoir de traction sur
l’hémivalve postérieure : un test simple consiste à la lâcher, elle
doit rester en place spontanément, sans se rétracter. Un point
.7
« cadre » est passé entre l’hémivalve antérieure et l’hémivalve
postérieure, de façon à maintenir grossièrement la forme de la
valve pendant sa confection.
Opt-A1 T3-C T4-A1 La partie postérieure de la valve étant maintenue par une pince
atraumatique en T3, le bord droit de la valve est solidarisé au
Figure 18. Ouverture du ligament gastrophrénique. pilier droit par un à trois points. Puis la valve est circularisée sur
Instrument-personne qui le tient (cf. Fig. 12 et 13) : T1-A2 : palpateur ou .8
la face antérieure de l’œsophage par une série de deux à quatre
aspiration ; T2-C : pince atraumatique ; T3-C : crochet coagulateur ; T4- points prenant la face antérieure de la grosse tubérosité, la paroi
A1 : pince atraumatique ; Opt-A1 : optique. antérieure de l’œsophage et le bord antérieur de la valve (Fig. 20).
façon à pouvoir attirer sans difficulté la face postérieure de la Valve postérieure ouverte (Toupet)
grosse tubérosité autour de l’œsophage pour créer la valve. En Après fixation du bord droit de la valve au pilier droit comme
effet, dans notre expérience chez l’enfant, la section des .9
précédemment, le bord antérieur droit de la valve est solidarisé
vaisseaux courts gastrospléniques n’est pas nécessaire pour au bord antérieur droit de l’œsophage abdominal par deux à
réaliser cette manœuvre. quatre points.
.4
En cas de technique à quatre trocarts, l’œsophage est écarté .10
La face antérieure de la grosse tubérosité est rabattue au
et le pilier gauche est exposé par T3 et le ligament gastrophré- niveau du bord antérieur gauche de l’œsophage par une autre
nique sectionné par T2. série de deux à quatre points (Fig. 21).
Suites
La radiographie de thorax postopératoire est systématique,
comme après chirurgie classique. La sonde gastrique peut
habituellement être retirée à J1. La réalimentation, d’abord avec
un régime liquide, est élargie en fonction de la tolérance.
Expérience actuelle
Les résultats de la chirurgie classique du reflux gastro-
œsophagien sont connus de longue date [15, 26, 33-37] . Les
résultats à moyen terme de la chirurgie cœlioscopique du reflux
semblent similaires à la technique ouverte, aussi bien chez
l’adulte [47] que chez l’enfant [48-50]. La durée de l’intervention
cœlioscopique va de 3 heures pour un chirurgien peu expéri-
menté à 1 heure pour un opérateur entraîné [50].
Les avantages de l’abord cœlioscopique sont principalement
T2-C la réduction des douleurs postopératoires avec un confort
T4-C beaucoup plus grand de l’enfant, qui souvent reprend une
activité quasi normale dès le lendemain de l’intervention. La
durée du séjour hospitalier est moindre et les cicatrices sont
réduites.
Opt-A1 T3-A1 Les inconvénients possibles sont de trois ordres :
• d’une part anesthésiques, avec retentissement éventuel du
Figure 20. Valve postérieure complète (Nissen).
pneumopéritoine prolongé sur l’hémodynamique (gêne au
Instrument-personne qui le tient (cf. Fig. 12 et 13) : T1-A2 : palpateur ou
retour veineux) ou l’équilibre acide-base (hypercapnie) du
aspiration ; T2-C : porte-aiguille ; T3-A1 : pince atraumatique ; T4-C :
patient : ce retentissement est en général nul ou minime, sans
porte-aiguille ; Opt-A1 : optique.
conséquence sur la poursuite de l’anesthésie [51]. Pour les
contourner, un artifice possible est la suspension mécanique
de la paroi abdominale par des fils tracteurs ;
T1-A2 • ensuite la possibilité d’accidents graves [52] (perforation
vasculaire ou digestive à l’introduction des trocarts notam-
ment) et une durée opératoire plus longue : ces éventualités
paraissent liées à des fautes techniques et/ou au manque
d’expérience du chirurgien ;
• enfin, l’incertitude sur la qualité des résultats à long terme :
actuellement, les résultats à moyen terme (5 ans) sont
équivalents à ceux obtenus par laparotomie.
■ Hernies diaphragmatiques
congénitales
La hernie diaphragmatique congénitale est caractérisée par un
orifice diaphragmatique malformatif de siège le plus souvent
postérolatéral par le foramen de Bochdalek, avec hernie des
viscères abdominaux dans le thorax : elle est plus souvent
parlante à gauche qu’à droite, où le foie peut faire « couvercle »
devant un orifice diaphragmatique limité. Si les formes à
révélation secondaire, après plusieurs heures de vie, ont une
évolution habituellement favorable après correction chirurgicale,
les formes révélées par une détresse respiratoire néonatale
T2-C immédiate gardent, malgré les progrès de la réanimation
T4-C néonatale, un pronostic réservé en raison de l’hypoplasie
pulmonaire et de l’hypertension artérielle pulmonaire associées.
Rappel embryologique
Opt-A1 T3-A1
La formation du diaphragme s’échelonne entre la 4e semaine
Figure 21. Valve postérieure ouverte (Toupet). et le 3e mois de l’embryogenèse. Chez l’embryon de 4 semaines,
Instrument-personne qui le tient (cf. Fig. 12 et 13) : T1-A2 : palpateur ou les trois cavités (cœlomes) péritonéal, pleural et péricardique
aspiration ; T2-C : porte-aiguille ; T3-A1 : pince atraumatique ; T4-C : communiquent. Les séreuses se forment alors avec isolement
porte-aiguille ; Opt-A1 : optique. des trois cavités (fermeture des membranes pleuropéritonéales)
à la 6e semaine. Initialement, les séreuses sont simplement
adossées, puis à partir de la 8e semaine et pendant le 3e mois,
Fin de l’intervention
.11
4 semaines 4 semaines
1
2
4
Hypoxémie
3 Acidose Hypertension
artérielle
pulmonaire
Shunt droite-gauche
Les cœlomes communiquent Hernies sans sac
Figure 23. Aperçu physiopathologique.
6 semaines 6 semaines
mais avant la colonisation myoblastique, il s’agit d’une
2 hernie avec sac (deux feuillets séreux sans muscle) ;
C si le trouble du développement s’est produit après la 8e
semaine, la colonisation myoblastique du diaphragme est
1 incomplète : éventration diaphragmatique (deux feuillets
4 séreux et une couche musculaire hypoplasique) ;
5 • les anomalies de rotation intestinale associées : la persistance
d’une brèche diaphragmatique va perturber le processus de
3 réintégration et l’accolement de l’anse intestinale ; à l’inverse,
une réintégration trop précoce de l’intestin pourrait perturber
la fermeture diaphragmatique et être à l’origine de certaines
hernies diaphragmatiques ;
• l’hypoplasie pulmonaire associée. Cette hypoplasie est
caractérisée par une diminution du nombre de générations
Isolement des cœlomes Hernies avec sac bronchiques et d’alvéoles. La surface d’échanges gazeux est
Fermeture de la membrane
diminuée et la compliance des voies aériennes est diminuée
pleuropéritonéale
par la dysplasie bronchique. Le lit vasculaire pulmonaire est
réduit, avec dysplasie des artérioles pulmonaires, à l’origine
8 semaines à 3 mois 8 semaines à 3 mois d’une hypertension artérielle pulmonaire.
Aperçu physiopathologique
2
La réduction des échanges gazeux (diminution de la surface
1 d’échange, dysplasie bronchique) est à l’origine d’une hypoxé-
6 mie et d’une acidose.
4 La réduction du territoire vasculaire pulmonaire, la dysplasie
7 artériolaire entraînent une hypertension artérielle pulmonaire,
8
5 majorée par l’acidose.
L’hypertension artérielle pulmonaire provoque un shunt
3 droit-gauche, majorant l’hypoxémie et l’acidose ; l’acidose en
retour va accentuer l’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP).
Il y a donc déclenchement d’un cercle vicieux qui explique le
pronostic défavorable des formes révélées par une détresse
Colonisation myoblastique Éventrations diaphragmatiques respiratoire immédiate (Fig. 23).
Voie d’abord
La voie transversale sus-ombilicale au niveau de la pointe des
10es côtes et décalée à gauche est bien adaptée au nouveau-né
dont l’abdomen est large et le rebord costal souple. La voie
médiane sus-ombilicale peut également être utilisée mais semble
davantage exposer aux complications pariétales postopératoires
(éviscération).
Bilan lésionnel
Le bilan est complété après réduction des viscères herniés :
existence d’un sac herniaire, degré d’hypoplasie pulmonaire,
existence d’une séquestration pulmonaire associée. Celle-ci,
vascularisée par des artérioles systémiques naissant directement
de l’aorte, devrait être retirée. Un petit miroir (type miroir de
dentiste) peut être utile pour l’exploration endothoracique. Par
ailleurs, après réduction de l’intestin dans l’abdomen, une
malrotation intestinale est recherchée.
Figure 24.
Réparation diaphragmatique A, B. Réduction de la hernie.
Le premier temps consiste à mettre en place un drain thora-
cique extériorisé sur la ligne axillaire moyenne. Un éventuel sac (les deux pieds de l’anse intestinale primitive), il existe un
herniaire est réséqué. Les berges du defect diaphragmatique sont risque de volvulus de tout le grêle. Le traitement consiste à
repérées et avivées. En arrière, le reliquat diaphragmatique est écarter au maximum les deux pieds de l’anse intestinale
parfois enroulé sur lui-même et peut ne pas apparaître au primitive en positionnant l’intestin en position de mésentère
premier abord : il faut inciser le péritoine postérieur et dérouler commun complet (90° de rotation). Pour ce faire, les accole-
le muscle. L’orifice diaphragmatique est fermé en un plan à ments pathologiques du grêle et du côlon sont libérés, le grêle
points séparés de fil non résorbable 3/0. Les fils sont passés et est disposé complètement à droite de l’axe mésentérique
gardés sur pinces, puis noués secondairement (Fig. 25). En cas supérieur et le côlon complètement à gauche. L’appendice se
de muscle très hypoplasique en arrière, les points peuvent retrouvant en fosse iliaque gauche est habituellement retiré
prendre appui sur les côtes. L’utilisation d’une prothèse est (Fig. 26). S’il est conservé, la famille de l’enfant doit être
rarement nécessaire (absence complète d’un hémidiaphragme) informée que l’appendice est à gauche.
et doit être évitée en raison des multiples complications
auxquelles elle expose [67]. Fermeture pariétale
Elle est le plus souvent possible sans tension exagérée. La
Rangement du grêle pression intragastrique ou intravésicale peut être mesurée en cas
En cas d’anomalie de rotation associée, avec proximité de doute, et ne doit pas dépasser 15 mmHg. En cas de tension
anormale de l’angle duodénojéjunal et de la région iléocæcale excessive, on peut ne fermer que la peau, avec traitement
Plicatures diaphragmatiques
En cas d’éventration diaphragmatique ou de paralysie phré-
nique, l’atonie du diaphragme se traduit par une respiration
paradoxale (ascension dans le thorax de la coupole atteinte
lorsque l’autre coupole se contracte) qui peut être à l’origine
d’une dépendance prolongée à la ventilation assistée. La remise
en tension du diaphragme atteint diminue cette respiration
paradoxale, et permet d’autonomiser plus rapidement ces
enfants sur le plan ventilatoire. La plicature diaphragmatique
peut être réalisée par voie abdominale ou thoracique.
Figure 25. Fermeture de la brèche diaphragmatique.
Voie abdominale
Par une incision transversale sus-ombilicale, le diaphragme est
secondaire de cette éviscération couverte. La nécessité de exposé. Les filets du phrénique, dont la distribution est radiaire
recourir à une plaque pariétale prothétique est rare. Des à partir du médiastin, sont repérés. Plusieurs rangées de points
manœuvres telles que la vidange du méconium colique vers non résorbables sont passés d’avant en arrière, en respectant les
l’anus, l’étirement de la paroi abdominale, peuvent être un filets du phrénique, de façon à plicaturer le diaphragme selon
appoint utile pour permettre la fermeture abdominale. un axe sagittal (Fig. 27). Le diaphragme est avivé et les points
sont noués. L’abdomen est fermé sans drainage. Il faut contrôler
Soins postopératoires sur la radiographie de thorax l’absence de pneumothorax lié au
Le drain thoracique est laissé au bocal sans aspiration : mis en passage trop profond des points.
aspiration, il provoquerait une attraction brutale du médiastin
dans l’hémithorax déshabité. Le drain est retiré lorsqu’il est Voie thoracique
exclu, dans la première semaine postopératoire. La sonde Par une thoracotomie postérolatérale dans le 5e ou 6e espace,
gastrique est laissée jusqu’à reprise d’un transit franc. La la plicature est réalisée de la même manière : rangée de points
nutrition entérale est débutée très progressivement en raison des selon un axe antéropostérieur, pouvant prendre appui sur les
difficultés fréquentes de reprise d’un transit normal de ces côtes, avec respect des fibres du phrénique. Le thorax est fermé
patients. Sur le plan respiratoire, que l’extubation soit rapide- sur un drain aspiratif.
ment possible ou non, une kinésithérapie intensive doit être
entreprise afin de lutter contre l’encombrement bronchique.
Autres formes
Hernie diaphragmatique droite Hernies diaphragmatiques congénitales
Elle est beaucoup plus rare. Le foie est basculé dans le thorax,
à révélation tardive
avec issue d’une partie des viscères abdominaux. La technique Elles correspondent à un orifice diaphragmatique limité,
est identique, avec quelques points particuliers : l’incision est obturé par la rate ou le foie, avec hernie secondaire des viscères
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Chardot C., Montupet P. Hernies diaphragmatiques de l’enfant. EMC (Elsevier SAS, Paris), Techniques
chirurgicales - Appareil digestif, 40-255, 2006.
Une éventration diaphragmatique est une surélévation permanente d’une partie ou de la totalité du
diaphragme sans solution de continuité. Les éventrations du nouveau-né et de l’enfant, d’origine
congénitale, se distinguent des paralysies de l’adulte, le plus souvent consécutives à une paralysie du nerf
phrénique. Le muscle diaphragmatique paralysé ne se contracte plus et devient une membrane flaccide
responsable d’une respiration paradoxale. Dans les éventrations gauches, l’estomac peut basculer sous la
coupole diaphragmatique avec le risque de troubles de la vidange gastrique, de dysphagie ou de volvulus.
Une indication chirurgicale ne doit être posée que lorsqu’une éventration diaphragmatique est
symptomatique. Deux types d’interventions sont proposés : les gastropexies qui fixent l’estomac dans
l’abdomen et les sutures ou plicatures diaphragmatiques qui retendent le diaphragme. En dehors du
volvulus gastrique, qui nécessite une laparotomie, la phrénoplicature par voie thoracique est
l’intervention la plus pratiquée.
© 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Figure 1. L’éventration diaphragmatique se définit comme étant une hypoplasie musculaire partielle (1A) ou totale (B) avec un recouvrement séreux normal.
Dans la hernie diaphragmatique on note une absence complète de muscle sans séreuse (C) ou avec un sac constitué de deux séreuses accolées (D).
phrénique ont été réalisées autrefois dans le traitement de la Les formes gauches sont plus fréquemment symptomatiques.
maladie tuberculeuse. En chirurgie cardiaque, l’emploi de La triade de Fatoux associe :
liquide de refroidissement et de glace dans le thorax peut • dextrocardie : déplacement du cœur vers la droite par l’effet
entraîner une cryosidération du nerf phrénique. Cette paralysie de masse des viscères abdominaux dans le thorax. Clinique-
est réversible mais peut nécessiter une assistance ventilatoire ment, les battements du cœur sont perçus à droite de
dans les formes bilatérales. [11] l’appendice xiphoïde. Il peut exister des troubles du rythme
Les paralysies médicales du nerf phrénique sont évoquées dès cardiaque ;
qu’il existe une irritation médiastinale ou pleurale d’origine • retentissement respiratoire : dans les grandes éventrations, un
tumorale ou inflammatoire. syndrome restrictif avec une dyspnée peut se produire. Dans
Des pathologies nerveuses périphériques (névrites, myélites) les formes bilatérales, souvent après chirurgie cardiaque, la
ou centrales peuvent entraîner une paralysie du nerf phrénique. détresse respiratoire peut obliger à maintenir une ventilation
Après avoir éliminé ces causes, la paralysie est dite idiopathi- artificielle ;
que. Certains auteurs ont suggéré une origine dégénérative du • modification des rapports des viscères abdominaux : la
nerf. [3] Cette étiologie n’est évoquée qu’après avoir éliminé une
bascule de l’estomac sous le diaphragme entraîne des troubles
pathologie organique, en particulier tumorale thoracique ou
de la vidange gastrique avec dysphagie et sensation de
médiastinale.
plénitude gastrique.
■ Indication opératoire
L’indication opératoire est posée devant le retentissement Figure 3.
viscéral de l’éventration. Principalement les troubles de la A, B. Transit œso-gastro-duodénal mettant en évidence la bascule de
vidange gastrique et les accidents aigus de volvulus gastrique. [6] l’estomac sous le diaphragme distendu avec trouble de la vidange gas-
trique.
Figure 5.
A. Vue cœlioscopique peropératoire d’une
éventration diaphragmatique gauche avec
volvulus gastrique.
B. Réduction du volvulus et gastropexie de
la grande courbure à la paroi abdominale.
Le feuillet aminci du diaphragme est saisi par deux pinces de Par laparotomie médiane sus-ombilicale. La face antérieure de
manière à former un pli frontal. Un premier plan de suture, l’estomac est fixée à la paroi abdominale antérolatérale gauche
prenant les deux pieds du pli, est réalisé par points séparés en par une série de points séparés de fils non résorbables ou par un
U de fils non résorbables. Ce plan permet de mettre en tension surjet.
le diaphragme. Le pli de la coupole est alors rabattu et fixé sur Par cœlioscopie (Fig. 5). Un trocart ombilical de 10 mm, deux
son bord libre par une nouvelle série de points en U. Ces trocarts de 5 mm dans le flanc gauche associés à un trocart de
sutures peuvent aussi être réalisées à l’aide de deux surjets de fils 5 mm dans le flanc droit sont nécessaires. L’estomac est attiré
non résorbables. vers le bas par l’aide, au moyen du trocart de 5 mm le plus
Certains auteurs préconisent le renforcement de la plastie par externe à gauche, réduisant ainsi la bascule gastrique sous la
une plaque prothétique tendue et fixée latéralement autour des coupole diaphragmatique. La face antérieure de l’estomac est
côtes et médialement sur le centre phrénique et le rachis. [9] Un fixée à la paroi abdominale antérolatérale gauche par un surjet
drain thoracique aspiratif est positionné en fin d’intervention. de fils résorbables à l’aide d’une machine à suturer.
Phrénoplicature par minithoracotomie vidéoassistée. Une
optique à 0 degré est introduite par un trocart de 10 mm placé
sur la ligne axillaire antérieure au niveau du 5e espace intercos- ■ Résultats
tal et une pince à préhension est introduite par un trocart de
5 mm situé sur la ligne axillaire postérieure au niveau du Les gastropexies apportent une très rapide amélioration des
5e espace intercostal. La minithoracotomie se réalise dans le symptômes digestifs. Il s’agit d’interventions simples, rapides,
6e ou le 7e espace intercostal. Le pli du diaphragme est surélevé réalisables chez les sujets âgés mais qui ne corrigent pas la
par la pince à préhension introduite en avant. La même distension du muscle diaphragmatique. [13] Les interventions
technique de plicature que par thoracotomie peut être réalisée qui remettent en tension le diaphragme ont l’avantage d’amé-
en introduisant un porte-aiguille et une pince par l’orifice de liorer la gêne respiratoire immédiatement en postopératoire avec
thoracotomie. Il est possible de réaliser un double surjet de diminution de la dyspnée, amélioration de la capacité vitale et
plicature plutôt que des points séparés, l’aide gardant tendu ce du VEMS de 10 à 20 %. [4] Ces résultats semblent maintenus à
surjet par l’orifice thoracique. long terme dans quelques séries de la littérature. [5] Dans un
Mouroux [8] recommande la réalisation de deux surjets en modèle expérimental de paralysie phrénique chez le chien,
invaginant le diaphragme à l’aide d’une pince introduite par le Takeda a montré que la plicature du diaphragme augmentait la
trocart de 5 mm antérieur. Le premier surjet de fil non résorba- motricité du diaphragme intact. [10] Ce pourrait être aussi le cas
ble est réalisé en fermant la dépression de la périphérie du chez l’homme.
diaphragme vers la minithoracotomie. La prise des tissus par
l’aiguille doit être prudente afin de ne pas léser les organes
intra-abdominaux. Un deuxième surjet est réalisé en superficie
■ Références
du premier, maintenu tendu par l’intermédiaire du trocart de [1] Akel S, Nasr W. Multiple ipsilateral congenital diaphragmatic
5 mm antérieur. Cette technique a l’avantage de pouvoir réaliser pathologies: rarities to consider. Eur J Pediatr Surg 2001;11:200-3.
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J.-P. Favre, Professeur des Universités, chirurgien des Hôpitaux, chef de service (j-p.favre@chu-dijon.fr).
P. Favoulet, Chef de clinique, assistant des Hôpitaux.
N. Cheynel, Maître de conférences des Universités, chirurgien des Hôpitaux.
L. Benoit, Chirurgien des Hôpitaux.
Service de chirurgie digestive, thoracique et cancérologique, centre hospitalier universitaire du Bocage, 2, boulevard du Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny,
21079 Dijon cedex.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Favre J-P, Favoulet P, Cheynel N, Benoit L. Traitement chirurgical des éventrations diaphragmatiques.
EMC (Elsevier SAS, Paris), Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-245, 2005.
Traitement chirurgical
des hernies diaphragmatiques rares
JP Favre
O Hagry
N Cheynel
Résumé. – Les hernies diaphragmatiques rares sont représentées par les hernies rétro-costo-xiphoïdiennes
ou de Morgagni-Larrey et les hernies des coupoles ou de Bochdalek. Les hernies de Morgagni-Larrey sont plus
fréquentes chez l’adulte. Elles sont le plus souvent asymptomatiques, mais peuvent être à l’origine d’un
tableau aigu dès la naissance. Les symptômes lorsqu’ils existent, sont peu spécifiques. Les hernies de
Bochdalek se manifestent surtout en période néonatale par un tableau bruyant. Chez l’adulte, elles sont en
général bien supportées. Pour les hernies de Morgagni et de Bochdalek, le diagnostic repose sur la
radiographie de thorax et l’opacification barytée. La tomodensitométrie et l’imagerie par résonance
magnétique nucléaire peuvent aider au diagnostic. Le traitement est chirurgical, en cas de symptômes ou de
récidive. Il est réalisé par laparotomie ou laparoscopie et consiste en une suture primaire à points séparés ou
en l’utilisation d’une prothèse.
© 2002 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Jean-Pierre Favre : Professeur des Universités, chirurgien des Hôpitaux, chef de service.
Olivier Hagry : Chef de clinique, assistant des Hôpitaux.
Nicolas Cheynel : Maître de conférence des Universités, chirurgien des Hôpitaux. 1 Orifices diaphragmatiques congénitaux. 1. Foramen de Bochdalek ; 2. aorte ;
Service de chirurgie digestive, thoracique et cancérologique, centre hospitalier universitaire Le Bocage, 2,
boulevard du Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, 21079 Dijon, France.
3. foramen de Morgagni ; 4. veine cave ; 5. œsophage.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Favre JP, Hagry O et Cheynel N. Traitement chirurgical des hernies diaphragmatiques rares. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits
réservés), Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-247, 2002, 7 p.
40-247 Traitement chirurgical des hernies diaphragmatiques rares Techniques chirurgicales
détermine l’orifice de Bochdalek [39]. Celui-ci est plus fréquent à diaphragmatiques traitées chirurgicalement [31]. Elles siègent à la
gauche. Il siège à la partie postérolatérale du diaphragme, en dehors jonction du diaphragme et de la partie antérieure du tronc [39]. Plus
des piliers, en regard des 10e et 11e côtes. Selon le point d’arrêt du fréquentes à droite (70 à 90 % des cas) [13, 34] qu’à gauche ou sur la
développement des membranes, la surface de l’orifice de Bochdalek ligne médiane, elles sont bilatérales dans 7 % des cas [13, 40]. Quelques
varie d’un defect ovalaire de 2 à 3 cm de grand diamètre jusqu’à rares cas de hernies de Morgagni intrapéricardiques ont été
une perte de substance pouvant intéresser la majeure partie d’un décrits [31]. Le sac herniaire est invariablement présent, ce qui les
hémidiaphragme. Le bord antérieur de l’orifice, concave en arrière, distingue des hernies de Bochdalek [31]. Ce sac contient, dans 80 %
est bien défini. Son bord postérieur peut se réduire à un simple des cas, une boucle de côlon transverse et l’épiploon correspondant,
bourrelet conjonctif ou musculaire. Son bord médial est musculaire, plus rarement une partie d’estomac ou du lobe gauche du foie, le
alors que son bord latéral peut venir au contact de la paroi pancréas ou la vésicule [31, 34].
thoracique, et n’être signalé que par un léger ressaut de la séreuse [39].
Initialement formé de tissu conjonctif, le diaphragme est envahi de
ÉTIOLOGIE. FACTEURS FAVORISANTS
tissu musculaire (phénomène de musculation) qui migre à partir des
troisième, quatrième et cinquième myotomes cervicaux et des Les hernies de Morgagni sont congénitales. Quelques cas post-
myoblastes des parois latérales du corps. Certaines portions du traumatiques ont été décrits [15, 20] . Certains facteurs peuvent
muscle ont leur origine in situ, par condensation des cellules favoriser l’apparition d’une hernie de Morgagni, en augmentant la
mésenchymateuses du septum transversum. pression intra-abdominale : obésité, grossesse, constipation
Située initialement au niveau des somites cervicaux supérieurs, la chronique, certaines maladies du tissu conjonctif ou tout processus
partie dorsale du diaphragme se trouve au niveau de la première pathologique intra-abdominal comme une poussée de pancréatite
vertèbre lombaire à la huitième semaine du développement. Ce aiguë [17, 31, 32].
déplacement caudal apparent s’explique par la croissance plus
rapide de la partie dorsale par rapport à la partie ventrale du corps DIAGNOSTIC
de l’embryon. Cette migration est rappelée chez l’adulte par la
naissance cervicale (troisième, quatrième et cinquième nerfs Une hernie de Morgagni peut se manifester à la naissance par un
cervicaux) du nerf phrénique et les irradiations scapulaires des tableau aigu [13, 43], plus tard dans l’enfance [43] ou à l’âge adulte [6, 31].
douleurs diaphragmatiques. L’âge moyen au moment du diagnostic est de 50 ans [26]. Ces hernies
Les insertions périphériques du diaphragme se répartissent en trois sont le plus souvent asymptomatiques, découvertes au hasard d’une
portions : d’une part la portion lombale, d’autre part les portions radiographie de thorax. Dans 20 à 30 % des cas sont observés un
chondrocostale et sternale qui donnent naissance aux coupoles, inconfort épigastrique, des douleurs, des nausées, une constipation
assemblage de muscles digastriques dont les faisceaux musculaires ou, plus rarement, des troubles respiratoires (dyspnée, sensation
sont périphériques et rayonnants alors que les tendons d’oppression thoracique, détresse respiratoire aiguë) [40, 41, 46]. La
intermédiaires s’entrecroisent au niveau de chaque centre phrénique variété des symptômes dépend de la taille de l’orifice
(centrum tendineum). diaphragmatique, du volume et du contenu du sac herniaire. Le
caractère peu spécifique des symptômes peut entraîner un retard
La portion lombale (pars lumbalis), postérieure et verticale, s’insère
diagnostique. Les complications (étranglement du côlon hernié ou
sur les vertèbres lombaires par l’intermédiaire des piliers et du
de l’estomac hernié par striction) sont exceptionnelles, notamment
ligament arqué médial (lig arcuatum mediale) ou arcade du psoas.
chez l’enfant [27].
La portion chondrocostale (pars costalis) s’insère selon un axe
Le diagnostic est posé devant la présence d’une opacité arrondie
oblique en bas et en arrière à la paroi lombaire, médialement par
surmontant la coupole droite, au niveau de l’angle cardiophrénique
l’intermédiaire d’arches tendineuses : ligament arqué latéral (lig
droit sur le cliché thoracique de face (fig 2A), antérieure sur le cliché
arcuatum laterale) ou arcade du carré des lombes puis une ou deux
de profil (fig 2B). L’existence d’images gazeuses au sein de cette
arcades de Sénac, latéralement directement à la paroi.
opacité signe la présence d’organes creux (fig 3). L’opacification
La portion sternale se détache de la face dorsale de l’appendice
barytée du côlon et/ou de l’estomac affirme le diagnostic et précise
xiphoïde (processus xiphoideus). Elle est formée par deux faisceaux
le contenu du sac herniaire (fig 4). La tomodensitométrie ou
ascendants, verticaux, tendus parallèlement de la base de
l’imagerie par résonance magnétique nucléaire peuvent aider au
l’appendice xiphoïde au bord antérieur du centre phrénique. Ces
diagnostic [24, 34] en cas d’échec des autres examens. La création d’un
deux faisceaux peuvent être séparés par un orifice médian,
pneumopéritoine permet de reconnaître la hernie en cas de doute.
avasculaire, la fente de Marfan. Elle est séparée de chaque côté de la
portion chondrocostale qui la précède latéralement par l’hiatus
costoxiphoïdien (hiatus costoxiphoideus) ou hiatus sternocostal ou DIAGNOSTICS DIFFÉRENTIELS
fente de Larrey. Il s’agit d’un orifice triangulaire à sommet
Les tumeurs médiastinales antérieures, le kyste pleuropéricardique,
postérieur, dont la face latérale répond à la portion chondrocostale
le pneumothorax incomplet, les tumeurs ou les atélectasies
et la face médiale à la portion sternale du diaphragme. La base
pulmonaires ou le simple lipome en cas d’image opaque et
antérieure du triangle, rétroxiphoïdienne, est tapissée par les chefs
homogène constituent les principaux diagnostics différentiels.
inférieurs du muscle triangulaire du sternum (m transversus
thoracis), qui se confondent à ce niveau avec le muscle transverse
(m transversus abdominis). Ce hiatus livre passage à quelques troncs TECHNIQUE CHIRURGICALE
lymphatiques et possiblement à un filet du nerf phrénique. La
Le sujet est installé en position de lordose dorsolombaire, un épais
branche abdominale de l’artère thoracique interne (a thoracica
coussin étant glissé sous le thorax au niveau D10-D11. Dans cette
interna) passe en avant du muscle triangulaire du sternum pour
position, l’exposition des coupoles et des insertions postérieures du
devenir artère épigastrique supérieure (a epigastrica superior) au
diaphragme est excellente.
niveau du sixième espace intercostal [4].
La laparotomie est la voie classique [34] ; l’incision est médiane, sus-
ombilicale, remontant jusqu’à la xyphoïde. Elle permet une
Hernies antérieures exploration du diaphragme controlatéral dans le même temps
ou rétrocostoxiphoïdiennes opératoire [27, 43]. En cas de processus infectieux intra-abdominal à
l’origine du tableau (pancréatite...) [31], la thoracotomie peut être
ou de Morgagni choisie afin de rester à distance du foyer septique si la mise en place
Décrites par Morgagni en 1761, elles constituent la forme la plus d’une plaque s’avère nécessaire.
rare des hernies diaphragmatiques (incidence comprise entre 1 et Une fois le péritoine ouvert et les lèvres de l’incision légèrement
6 %) [13, 15, 32, 44] et représentent 2,5 % de la totalité des hernies écartées, on reconnaît aussitôt l’orifice de la hernie, en « gueule de
2
Techniques chirurgicales Traitement chirurgical des hernies diaphragmatiques rares 40-247
2 Hernie de Morgagni.
A. Radiographie de thorax (face). Opacité
arrondie dans l’angle cardiophrénique
droit (flèche).
B. Radiographie de thorax (profil). Opacité
arrondie antérieure (flèche).
*
A *
B
*
A *
B
3
40-247 Traitement chirurgical des hernies diaphragmatiques rares Techniques chirurgicales
INDICATIONS CHIRURGICALES
L’indication opératoire est portée devant une hernie symptomatique
ou volumineuse, du fait du risque d’étranglement, ou devant une
récidive, ce qui est très rare. L’intérêt de la voie laparoscopique par
rapport à la voie classique réside dans son effet de grossissement,
7 Vue opératoire après réduction du contenu d’une hernie de Morgagni. 1. Berge du un traumatisme opératoire moins sévère et un résultat cosmétique
diaphragme ; 2. foie ; 3. grand épiploon ; 4. cavité thoracique. excellent [18, 32, 40].
4
Techniques chirurgicales Traitement chirurgical des hernies diaphragmatiques rares 40-247
entretient le processus. Le tableau est en général bruyant avec une thorax pour lui faire franchir le relief de la berge orificielle. Lorsque
détresse respiratoire aiguë qui nécessite une intervention toute la masse intestinale est ainsi extériorisée et protégée par un
chirurgicale en urgence. Les formes contenant le lobe gauche du foie champ humide, elle glisse vers le bas du fait de la position
ont généralement un pronostic défavorable par rapport aux formes opératoire et la vue est excellente sur la coupole et l’orifice herniaire.
ne contenant pas la glande hépatique [1, 7]. La mortalité de ces formes Pour mieux repérer ses limites internes, on sectionne le ligament
néonatales atteint 50 à 60 % [12, 23, 44]. triangulaire gauche du foie qui est ensuite refoulé vers la droite. Si
Elles sont découvertes au cours de la grande enfance ou à l’âge le rein a également migré dans la cavité thoracique, on le réduit
adulte dans seulement 5 % des cas [37]. Dans ce cas, elles peuvent dans la fosse lombaire sans difficulté particulière. En cas de
être bien supportées et découvertes au hasard d’un cliché séquestration pulmonaire associée, celle-ci est réséquée après section
thoracique. Lorsqu’elles sont symptomatiques, elles peuvent des artérioles systémiques directement issues de l’aorte. Le sac
entraîner des douleurs postprandiales souvent positionnelles, des herniaire, s’il existe, est réséqué.
vomissements, une dysphagie, voire un véritable syndrome occlusif, Si les berges de l’orifice diaphragmatique sont bien individualisées,
haut ou bas. Elles peuvent se révéler dans 46 % des cas [16] sous la on peut refermer en un plan à points séparés assez rapprochés de fil
forme sévère de complications des viscères herniés (ulcère gastrique, non résorbable. Lorsque tous les points sont passés, ils sont
perforation gastrique, volvulus gastrique, fistule colopleurale, progressivement noués et la suture terminale est transversale sur la
hémorragie du viscère hernié) [11, 25, 33, 38, 42]. La mortalité de ces formes coupole. S’il n’existe pas d’ébauche musculaire sur un des segments
sévères chez l’adulte est de 32 % [16]. Des troubles respiratoires de l’orifice (en général en arrière), les fils prennent appui sur l’arc
peuvent accompagner le tableau, tels qu’une douleur thoracique, postérieur de la huitième ou de la neuvième côte. La prise du tissu
une dyspnée, une toux avec ou sans épanchement pleural ou une fibrocelluleux qui recouvre le relief costal est insuffisante et à
pneumopathie. l’origine d’une récidive de la hernie. Les fils sont passés autour de
La radiographie du thorax et surtout l’opacification barytée du tube la côte, régulièrement disposés (fig 10) jusqu’à ce que l’on rencontre
digestif permettent de faire le diagnostic en montrant la présence en dehors l’ébauche musculaire diaphragmatique. Ils prennent
d’anses grêles et de côlon dans le thorax. Le siège postérolatéral de ensuite appui sur la berge antérieure de l’orifice et sont enfin serrés
la brèche sur le cliché de profil permet d’affirmer le caractère sans difficulté particulière. L’utilisation d’une prothèse est rarement
congénital de la hernie. nécessaire (sauf en cas d’agénésie complète d’un hémidiaphragme)
et doit être évitée [2]. En cas de malrotation intestinale associée, on
écarte au maximum les deux pieds de l’anse primitive après
TECHNIQUE CHIRURGICALE libération des accolements pathologiques du grêle et du côlon, le
grêle étant disposé à droite de l’axe mésentérique supérieur et le
¶ Enfant côlon à gauche.
L’opéré est installé en position de lordose dorsolombaire. La
laparotomie est la voie classique ; la voie médiane sus-ombilicale est ¶ Adulte
habituellement choisie, mais la voie transverse sus-ombilicale, et La voie abdominale est aussi préférable, offrant un bon accès sur la
décalée à gauche à la pointe de la dixième côte, est bien adaptée au coupole et permettant une bonne remise en place des anses
nouveau-né. intestinales, surtout en cas de mésentère commun associé. En cas
Le péritoine ouvert, on constate que les viscères abdominaux ont d’orifice diaphragmatique étroit, la fermeture peut se faire par
migré dans le thorax (fig 9) et l’orifice herniaire est très facilement suture transversale à points séparés de fil non résorbable. En cas
repéré au niveau de la coupole gauche. On recherche les d’orifice large ou de cavité péritonéale trop petite pour permettre
malformations associées (séquestration pulmonaire, malrotation une réintégration complète des viscères, une plaque prothétique
intestinale...) et un éventuel sac herniaire. La réparation peut être mise en place. Cette prothèse est fixée à la face inférieure
diaphragmatique consiste d’abord à mettre en place un drain dans des vestiges du diaphragme et, si besoin, aux espaces intercostaux
la cavité thoracique pour annuler la dépression thoracique et réduire correspondants ; elle doit déborder largement le pourtour de l’orifice
la hernie. L’abaissement de la rate est souvent difficile ; il ne faut et être fixée si possible par une double rangée de points séparés de
pas tirer sur son méso, mais l’accrocher d’un doigt glissé dans le fil non résorbable.
5
40-247 Traitement chirurgical des hernies diaphragmatiques rares Techniques chirurgicales
6
Techniques chirurgicales Traitement chirurgical des hernies diaphragmatiques rares 40-247
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7
¶ 40-240
Une rupture diaphragmatique est souvent intégrée dans un polytraumatisme, dont elle est un critère de
gravité. Un traumatisé victime d’un choc latéral a trois fois plus de risques d’avoir une rupture
diaphragmatique que celui victime d’un choc frontal. Une rupture du diaphragme peut être difficile à
mettre en évidence en phase aiguë, car ses signes sont peu spécifiques et l’imagerie, qui visualise les
organes ascensionnés mais plus difficilement la rupture elle-même, peut être prise en défaut. Ainsi, elle est
souvent méconnue à la phase aiguë, et peut se révéler tardivement. Une fois diagnostiquée, le traitement
chirurgical est la suture par voie abdominale, souvent préférée à la voie thoracique qui a des indications
limitées. La voie cœlioscopie est une nouvelle voie d’abord, légitime chez un traumatisé stable.
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■ Épidémiologie Tableau 1.
Classification des traumatismes diaphragmatiques : score AIS (abbreviated
Une rupture du diaphragme est présente chez 0,2 à 4 % des injury scale) proposé par l’Association for the Advancement of Automobile
traumatisés hospitalisés pour une contusion thoracique et/ou Medicine (AAAM) [4, 5] et score OIS (organ injury scale) proposé par
abdominale. [8, 17, 18, 29, 36] Les ruptures doivent être distinguées l’American Association for Surgery of Trauma [1] (AAST).
des plaies, fréquentes dans les séries nord-américaines qui Grade Coefficient Description de la lésion
incluent plus de blessures par arme à feu ou arme blanche que OIS a AIS
les séries européennes. [10, 30, 35]
I 440699. 2 Contusion
Quatre-vingt-dix pour cent des ruptures traumatiques du II 440604. 3 Plaie inférieure à 2 cm
diaphragme sont consécutives à des accidents de la circula- III 440604. 3 Plaie de 2 à 10 cm
tion. [7, 8, 21, 33] La ceinture de sécurité ne semble pas avoir IV 440604. 3 Plaie supérieure à 10 cm avec perte de substance
d’effet protecteur sur le diaphragme. [33] Soixante à 70 % des inférieure ou égale à 25 cm2
traumatisés victimes d’une rupture du diaphragme lors d’un V 440606. 4 OIS : plaie avec perte de substance supérieure
accident de la route sont des hommes, 30 à 40 % des femmes, à 25 cm2
d’âge moyen entre 30 et 45 ans. [7, 22, 33] AIS : rupture avec ascension d’organe
Une chute d’un lieu élevé, un écrasement par éboulement ou a
Pour les lésions bilatérales : augmenter d’un grade, jusqu’au grade III.
entre deux tampons de wagons peuvent également rompre le
diaphragme. [13, 19, 30, 32]
Des ruptures spontanées, ou après un effort minime (toux), - Classification AIS
sont exceptionnelles ; elles semblent favorisées par un acte de
chirurgie pulmonaire antérieur et par la grossesse. [6] proposée par l'Association for the Advancement of Automobile
Medicine (AAAM) adaptée aux traumatismes de la route
■ Mécanismes et lésions Chaque lésion est repérée par un code à six chiffres et affectée
d'un coefficient AIS de gravité
anatomiques /...../ /..../ /....//..../ /....//..../. /..../
Deux mécanismes sont évoqués pour expliquer les ruptures
du diaphragme : [13, 22, 26, 32]
• l’augmentation de la pression abdominale, maximale lors Région anatomique
d’un choc frontal, rompt le diaphragme à la manière d’un
ballon écrasé, le diaphragme représentant la paroi abdominale Structure anatomique
la plus faible ;
• la déformation de l’orifice inférieur du thorax, maximale lors
Type de lésion
d’un choc latéral (compression du plus grand diamètre)
cisaille le diaphragme à ses insertions.
Un traumatisé victime d’un choc latéral a trois fois plus de Lésion spécifique
risques d’avoir une rupture diaphragmatique que celui victime
d’un choc frontal. [22] Le côté de l’impact du choc est corrélé Coefficient AIS de gravité
avec le côté de la coupole atteinte. [22] 1 : mineur
Soixante à 70 % des ruptures concernent la coupole gauche, 2 : modéré
30 à 40 % la coupole droite. [29, 36] Les lésions de la coupole 3 : sérieux
- Calcul de l'ISS 4 : sévère
droite sont probablement sous-estimées. Elles sont souvent
associées à des lésions graves entraînant le décès avant l’arrivée 5 : critique
Six régions sont définies : 6 : maximal
à l’hôpital. [8, 21, 30] Le rôle protecteur de la masse hépatique est 1 : tête et cou (au-delà de tout traitement)
classiquement invoqué pour expliquer le plus faible nombre des 2 : face
lésions droites. En fait, la latéralisation du point d’impact est à 3 : thorax
prendre en considération. Dans les pays où la conduite est à 4 : abdomen et pelvis
droite, les conducteurs ont deux fois plus de lésions diaphrag- 5 : extrémités (membres) et anneau pelvien
matiques droites que les passagers avant gauche. [40] 6 : peau et sous-cutanée
Les lésions bilatérales sont exceptionnelles, autour de 1 à
5 %. [18, 29] Elles intéressent fréquemment le péricarde. [18] L'AIS régional est l'AIS de l'organe régional atteint le plus élevé
Les lésions diaphragmatiques mesurent en moyenne 11 cm
(extrêmes de quelques millimètres à 30 cm). [34] Elles sont L'ISS est la somme des carrés des trois AIS régionaux
affectées d’un score de gravité de 2 à 4 sur l’échelle AIS les plus élevés
(abbreviated injury scale) et de I à V sur l’échelle OIS (organ injury
Un AIS régional à 6 entraîne automatiquement un ISS de 75
scale) (Tableau 1) (Fig. 1). [1, 4, 5, 11]
Ces lésions sont de trois types :
L'ISS varie de 1 à 75
• les ruptures de coupoles, dont l’orifice, primitivement
linéaire, devint béant du fait de la rétraction des fibres
musculaires ; [32] Figure 1. Classification AIS (abbreviated injury score) et calcul de l’ISS
• les désinsertions, à la périphérie du diaphragme ; (injury severity score). [4, 5, 11]
• les rares ruptures centrales paravertébrales, au niveau des
piliers du diaphragme, de l’hiatus œsophagien ou aortique,
pouvant se prolonger en direction du centre phrénique.
Les viscères abdominaux (estomac, rate, grêle ou côlon), attirés
■ Conséquences
par l’aspiration thoracique, s’engagent dans la brèche de 60 % physiopathologiques
des ruptures de la coupole gauche, immédiatement ou après un
délai de quelques heures voire de quelques jours. [8, 32] À droite, L’inefficacité diaphragmatique entraîne une diminution de la
un déplacement majeur intrathoracique du foie est possible. [9] capacité ventilatoire. [27] Un déplacement médiastinal, propor-
La plicature des veines hépatiques (veines sus-hépatiques) peut tionnel au volume des organes ascensionnés dans le thorax,
provoquer un syndrome de Budd-Chiari aigu. provoque une élévation paradoxale de la pression veineuse
Une hémorragie significative provenant de la rupture elle- centrale, au même titre qu’une tamponnade ou qu’un pneumo-
même est exceptionnelle. [2] thorax compressif. [34]
Tableau 2.
Lésions associées aux ruptures du diaphragme, à partir de 8 397 traumatisés porteurs d’une rupture du diaphragme sur une série rétrospective de 397 182
traumatisés thoraciques (AIS [abbreviated injury scale] thoracique supérieur ou égal à 2) et/ou abdominaux (AIS abdominal supérieur ou égal à 2), d’après Reiff
et al. [33]
Type de lésion Blessé avec rupture du Blessé sans rupture du Odd ratio Sensitivité Spécificité
diaphragme (%) diaphragme (%) Intervalle de
confiance = 95 %
Contusion pulmonaire 3 770 (44,9) 87 183 (22,4) 2,8 (1,9-4,2) 44,9 77,6
Fracture de côte 5 368 (63,9) 209 940 (54,0) 1,5 (0,9-2,5) 63,9 46,0
Lésion de l’aorte thoracique 1 294 (15,4) 13 083 (3,4) 5,2 (2,2-12,5) 14,4 96,6
Lésion de la rate 4 483 (53,4) 46 844 (12,1) 8,4 (3,9-17,8) 53,4 88,0
Lésion du foie 3 048 (36,3) 46 740 (12,0) 4,2 (1,7-10,6) 36,3 88,0
Fracture du bassin 3 565 (42,5) 52 960 (13,6) 4,7 (2,7-8,0) 42,5 86,4
■ Lésions associées
Quatre-vingts à 95 % des blessés victimes d’une rupture du
diaphragme présentent d’autres lésions (Tableau 2). [35, 36] Une
lésion de l’aorte thoracique doit être évoquée lors d’une rupture
du diaphragme, principalement après un choc frontal ou une
chute. [14, 19]
La gravité des polytraumatismes qui impliquent une lésion du
diaphragme est attestée par l’ISS (injury severity score) (Fig. 1) de
ces traumatisés, qui se situe entre 30 et 41. [8, 22, 30, 33] Un blessé
est considéré comme grave à partir d’un score ISS supérieur à
16. [11]
■ Diagnostic
Une rupture traumatique du diaphragme peut être asympto-
matique, se révéler par une dyspnée, une immobilité d’un Figure 2. Radiographie pulmonaire : image hydroaérique de la base
hémidiaphragme, des bruits hydroaériques intrathoraciques. [34] pulmonaire gauche. Rupture de la coupole gauche.
Ces signes, peu spécifiques, sont souvent occultés par d’autres
lésions mettant le pronostic en jeu. L’imagerie peut être prise à
défaut. Ainsi, le diagnostic est posé en préopératoire chez
seulement 30 à 50 % des blessés. [13, 28, 35]
Vingt à 40 % des ruptures du diaphragme sont découvertes
lors d’une laparotomie réalisée pour une autre lésion. [29, 36] La
“ Points forts
part croissante du traitement non opératoire des lésions
traumatiques abdominales augmente le risque d’ignorer ce Diagnostic
diagnostic. [18, 33] Une ventilation assistée en pression positive • Soixante à 70 % des ruptures du diaphragme concer-
peut contenir une rupture diaphragmatique qui ne se révélera nent la coupole gauche, 30 à 40 % la coupole droite.
qu’au retour à une ventilation spontanée. [37]
Dix à 20 % des ruptures du diaphragme ne sont pas diagnos- • Le diagnostic de rupture du diaphragme est posé en
tiquées en phase aiguë. [10, 18, 36] Une rupture trop petite pour préopératoire chez seulement 30 à 50 % des blessés.
être mise en évidence peut s’agrandir progressivement. Une Vingt à 40 % des ruptures du diaphragme sont décou-
rupture méconnue peut se révéler très tardivement, jusqu’à vertes lors d’une laparotomie réalisée pour une autre
50 ans après le traumatisme, soit à l’occasion d’une imagerie lésion.
demandée pour un autre motif, soit à l’occasion de douleurs
• Une rupture du diaphragme peut être découverte très
épigastriques ou thoraciques non spécifiques. Plus rarement, elle
est découverte lors d’un étranglement. [3, 10] tardivement après le traumatisme causal.
• Sur la radiographie thoracique, la présence d’éléments
Examens complémentaires digestifs ou le trajet de la sonde nasogastrique dans un
champ pulmonaire affirment le diagnostic. Une grande
L’imagerie visualise les organes ascensionnés, mais plus
difficilement la rupture elle-même. image aérique ou des images aériques multiples de la
Sur la radiographie thoracique, la présence d’éléments base gauche refoulant le poumon vers le haut et le
digestifs ou le trajet de la sonde nasogastrique dans un champ médiastin vers la droite sont très caractéristiques.
pulmonaire affirment le diagnostic dans 20 à 60 % des ruptures • Le scanner thoracoabdominal en coupe fine, permet-
gauches et 33 % des ruptures droites. [30] Une grande image tant des reconstructions coronale et sagittale, reconnaît
aérique ou des images aériques multiples de la base gauche 80 % des ruptures gauches, et 50 % des ruptures
refoulant le poumon vers le haut et le médiastin vers la droite
droites. L’emploi de l’IRM en urgence est limité.
sont très caractéristiques (Fig. 2). [2] L’estomac ascensionné peut
prendre l’apparence d’un hémopneumothorax, ce qui doit être • Le pneumopéritoine diagnostique conserve une place
systématiquement évoqué avant le drainage d’un épanchement en l’absence d’imagerie médicale performante ou en cas
hydroaérique dans un contexte traumatique, même ancien. [2, de doute non levé par les autres examens.
21] La surélévation de la base pulmonaire (et non de la coupole
Figure 4.
A, B. Scanner abdominal : rupture de la coupole droite.
Figure 5.
A, B. Imagerie par résonance magnétique abdominale (séquence T1) :
rupture de la coupole gauche.
Le scanner thoracoabdominal en coupe fine, permettant des
reconstructions coronale et sagittale, est l’examen de référence
pour les ruptures récentes et anciennes (Fig. 4). Il reconnaît
80 % des ruptures gauches et 50 % des ruptures droites. [23] bande hypo-intense, entre d’une part la graisse médiastinale
L’emploi de l’imagerie par résonance magnétique en urgence hyperintense et d’autre part les viscères abdominaux relative-
est limité. En séquence T1, le diaphragme apparaît comme une ment hyperintenses (Fig. 5). [38]
■ Traitement chirurgical
Figure 6. Laparotomie médiane : rupture de la coupole gauche avec
Une rupture diaphragmatique reconnue constitue une indica- ascension du côlon.
tion opératoire, dès le diagnostic posé, s’il n’y a pas d’autres
priorités. Elle n’a aucune tendance à la réparation spontanée. Le
risque évolutif, outre d’éventuelles douleurs ou troubles aspéci- La cœlioscopie en position latérale a été initialement préco-
fiques, est le volvulus d’un organe ascensionné, dont le pronos- nisée pour les splénectomies. [31] Cette position donne une
tic est péjoratif. [3] bonne vision de la coupole diaphragmatique. Elle facilite à
gauche la réduction des viscères ascensionnés et à droite le
désenclavement du foie par effet de pesanteur. Elle permet une
Délai du traitement exploration de l’étage thoracique après introduction de l’opti-
que dans la brèche diaphragmatique puis une réparation facile
L’intervention d’urgence est nécessaire quand le volume des de celle-ci. Elle ne permet pas une exploration complète de
viscères ascensionnés dans le thorax entraîne des troubles l’abdomen. [12] La conversion immédiate par voie sous-costale
respiratoires par refoulement du poumon ou du médiastin, ou est possible. [17]
lorsque l’on suspecte un étranglement d’emblée.
Sur un patient sans détresse vitale, un délai de quelques
heures est acceptable, sans augmenter la morbidité. [7]
L’intervention peut être différée lorsque la rupture du
■ Technique chirurgicale
diaphragme n’entraîne pas de perturbation respiratoire et que
les lésions associées sont préoccupantes (traumatisme crânien
ou rachidien, par exemple). [32] Vidange de l’estomac
En préopératoire, une sonde gastrique, permettant de vider
Choix de la voie d’abord l’estomac, peut améliorer la fonction respiratoire. [2] Les
difficultés de vidange de l’estomac peuvent nécessiter la
Laparotomie/Thoracotomie descente peropératoire, guidée par la main du chirurgien, d’un
tube de Faucher. La sonde nasogastrique, laissée en postopéra-
Pour les lésions opérées en urgence, la voie abdominale est la
toire, prévient la dilatation gastrique. [32]
voie de référence. Elle permet l’exploration et le traitement des
viscères abdominaux. À gauche, la suture du diaphragme est
réalisée dans d’excellentes conditions, mais à droite elle peut Voie d’abord
être gênée par le foie, malgré la section de ses attaches posté-
rieures. Ceci entraîne certains auteurs à proposer une voie Abdominale
thoracique. Le contrôle d’une hémorragie intrathoracique ou un
L’incision médiane sus-ombilicale, pouvant être agrandie
geste sur l’aorte thoracique rend nécessaire d’emblée la voie
pour traiter une lésion associée, est préférable à l’incision sous-
thoracique. [14, 34]
costale. La résection de la xiphoïde n’est pas nécessaire. Une
Pour les lésions opérées à distance du traumatisme, la voie valve sous-costale maintient ouvert l’auvent costal (Fig. 6).
thoracique est classiquement préconisée du fait du risque
d’adhérences intrathoraciques des organes ascensionnés. [21] En
fait, la réduction des viscères est généralement simple. La voie Thoracique
abdominale est parfaitement adaptée aux lésions de la coupole Il s’agit d’une thoracotomie postérolatérale dans le sixième
gauche, la réparation diaphragmatique étant facilitée par la espace intercostal.
possibilité d’extérioriser les viscères abdominaux par la laparo-
tomie. La voie thoracique se justifie pour les lésions de la Cœlioscopique
coupole droite.
Le patient est installé en décubitus latéral, le bras au cadre,
Vidéoscopie le bassin à 45 ° par rapport au plan de la table. Un billot
protège le creux axillaire. L’espace compris entre le rebord costal
La vidéoscopie est envisageable chez un patient en bon état et l’aile iliaque peut être ouvert en « cassant » la table ou en
hémodynamique, sans traumatisme crânien et sans lésion positionnant un second billot à la pointe de l’omoplate
associée pouvant se décompenser rapidement, soit de 14 % à (Fig. 7). [12] Trois ou quatre trocarts sont utilisés (un de 10 mm
50 % des blessés porteurs d’une rupture du diaphragme. [17] pour l’optique, les autres de 5 mm). La pression d’insufflation,
La thoracoscopie nécessite une exclusion pulmonaire. Comme de 10 mmHg en début de procédure, peut être diminuée
la thoracotomie, elle ne donne pas un bon confort à ensuite, la rigidité de l’auvent costal maintenant un espace de
l’opérateur. [12] travail confortable. [17] Les trocarts sont insérés à deux travers de
La cœlioscopie en décubitus dorsal ne permet pas une bonne doigts de l’auvent costal. À droite, le foie est récliné par une
exploration des coupoles qui sont masquées par les viscères pince passée dans un trocart inséré près de l’apophyse
ascensionnés. [12] xiphoïde. [12]
Figure 10. Suture bord à bord par des points séparés d’une rupture
diaphragmatique gauche.
Exposition de la brèche au fil non résorbable, même si il n’existe pas de preuve scienti-
La totalité du pourtour de la brèche doit être dégagée, ce qui fique de sa supériorité sur le surjet ou l’utilisation de fils
peut rendre nécessaire de libérer, à gauche, la grosse tubérosité résorbables. [6, 18, 21, 39] En cœlioscopie (Fig. 11), les nœuds sont
gastrique et la rate, et à droite les attaches postérieures du foie liés en intra- ou extracorporel, mais il peut être plus facile de
(Fig. 9). réaliser un surjet, grâce à l’utilisation d’un instrument à suturer
(Endo stich®, laboratoires Tyco-Healthcare France S.A.S, Plaisir,
France). [17, 20]
Drainage thoracique Dans les ruptures anciennes et importantes, l’utilisation de
En l’absence d’une lésion parenchymateuse associée, le drain matériel prothétique non résorbable en polytétrafluoréthylène
pulmonaire est enlevé dès la réexpansion pulmonaire obtenue. (Gore-Tex® [laboratoires W.L. Gore et Associés, S.A.R.L., Evry,
France]) ou en polypropylène (Bard Mesh® [laboratoires Bard
S.A., Voisins le Bretonneux, France]) est parfois nécessaire. [39] La
Suture du diaphragme prothèse doit largement dépasser les limites de la brèche
La suture bord à bord des berges de la rupture est la règle diaphragmatique pour être fixée sur du muscle sain par des
(Fig. 10). Le consensus s’est fait pour une suture à points séparés points séparés transfixiants.
En cas de rupture d’un pilier principal, l’hiatus œsophagien [6] Bekassy SM, Dave KS, Wooler GH, Ionescu MI. Spontaneous and
doit être reconstitué à l’aide de quelques points en U de fils non traumatic rupture of the diaphragm: long-term results. Ann Surg 1973;
résorbables. Il semble utile de refermer l’incisure cardiale (angle 177:320-4.
de His), et, le cas échéant, de réaliser un dispositif antireflux [7] Bergeron E, Clas D, Ratte S, Beauchamp G, Denis R, Evans D, et al.
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En cas de rupture périphérique, le diaphragme doit être 15-year experience in six trauma centers in Quebec. J Trauma 2002;
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mechanism, diagnosis, and treatment. Ann Emerg Med 1989;18:
■ Résultats [23]
1326-30.
Killeen KL, Mirvis SE, Shanmuganathan K. Helical CT of
La mortalité des traumatisés victimes d’une rupture du diaphragmatic rupture caused by blunt trauma. AJR Am J Roentgenol
diaphragme est estimée entre 20 et 60 %. [10, 22, 27, 30, 33] Elle est 1999;173:1611-6.
supérieure à celle des traumatisés sans lésions du diaphragme : [24] Kim HH, Shin YR, Kim KJ, Hwang SS, Ha HK, Byun JY, et al. Blunt
51 % versus 16 % (p = 0,0007). [33] Cette mortalité est le fait des traumatic rupture of the diaphragm: sonographic diagnosis.
lésions associées. [27] J Ultrasound Med 1997;16:593-8.
La morbidité, de l’ordre de 40 %, est principalement pulmo- [25] Krempf M, Giron J. Le diaphragme. Montpellier: Sauramps Médical;
naire. [27, 34] L’absence de séquelle respiratoire est la règle. [2] Les 1996.
récidives semblent rares, mais ne sont pas chiffrées. [6, 21] Les [26] Magee R. Rupture of the diaphragm. Can Med Assoc J 1935;32:
procédures vidéoscopiques ne sont pas encore validées avec 506-9.
assez de recul. [20] [27] Menegaux F. Ruptures diaphragmatiques. In: Beydon L, Carli P,
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J.-P. Favre, Professeur des Universités, Chirurgien des Hôpitaux, Chef de Service* (j-p.favre@chu-dijon.fr).
N. Cheynel, Maître de conférences des Universités, Chirurgien des Hôpitaux.
L. Benoit, Chirurgien des Hôpitaux.
P. Favoulet, Chef de clinique-assistant des Hôpitaux.
Service de chirurgie digestive, thoracique et cancérologique, Centre hospitalier universitaire Le Bocage, 2, boulevard du Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny,
21079 Dijon cedex, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Favre J.-P., Cheynel N., Benoit L., Favoulet P. Traitement chirurgical des ruptures traumatiques du
diaphragme. EMC (Elsevier SAS, Paris), Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-240, 2005.
40-290
La réalisation d’une vagotomie (chirurgicale ou laparoscopique) Les pneumogastriques droit et gauche, descendant de chaque côté de
complète, impératif anatomique absolu, suppose une connaissance la trachée, constituent au-dessous des bronches souches un plexus
approfondie de la distribution du système parasympathique à périœsophagien qui donne naissance à deux nouveaux troncs,
l’estomac. antérieur et postérieur, individualisés plus ou moins tôt avant le
diaphragme.
Les travaux anatomiques de référence étonnent par leur
ancienneté [3, 4, 26, 31, 35]. La description princeps des nerfs de la petite
courbure par Latarjet et Wertheimer [29, 50] date de 1921. Variations anatomiques
Des études anglo-saxonnes suivent [8, 9, 15, 18, 24, 34] après la redécouverte
de la vagotomie tronculaire par Dragstedt [13]. Le nombre, la qualité, le niveau d’individualisation des troncs entre le
Des constatations peropératoires [6, 17, 20, 21, 38, 39] , plutôt que des plexus périœsophagien et le diaphragme sont très variables.
arguments de dissection anatomique, reprennent ensuite en Les troncs sont uniques dans 60 % des cas environ (fig 1A, B, D) [8, 24].
considération des données jusqu’alors déconsidérées ou tombées dans
l’oubli. Des branches communicantes sont fréquentes entre les deux troncs
Plus récemment, des études expérimentales chez l’animal [11, 33, 51], des (fig 1D).
tests peropératoires de vagotomie complète chez l’homme ont confirmé Dans 25 % des cas, il n’y a pas de troncs individualisables à partir du
l’existence de variantes de distribution nerveuse antérieurement plexus, mais plusieurs branches nerveuses qui descendent vers
discutées. l’abdomen (fig 1C, F).
Dans l’exposé qui suit, la description de l’anatomie modale théorique Dans 15 % des cas, les troncs, après avoir été individualisés, se
sera schématisée, les variations responsables de pièges anatomiques redivisent en deux ou plusieurs branches avant l’arrivée au hiatus
pouvant conduire à la vagotomie incomplète (quel que soit son type) diaphragmatique.
seront soulignées.
La distance existant entre la limite inférieure du plexus périœsophagien
et le diaphragme est très inconstante (0,2 à 6,5 cm).
Pneumogastriques thoraciques
La disposition anatomique des vagues thoraciques explique en partie les Pneumogastrique abdominal :
variations observées au niveau de la traversée diaphragmatique. traversée diaphragmatique
A B C
D E F
1 Nerf vague antérieur : variations anatomiques aux niveaux sus- et sous- Nerf vague postérieur : variations anatomiques aux niveaux sus- et sous-
diaphragmatiques (A, B, C). diaphragmatiques (D, E, F).
A, B. Troncs uniques. D. Tronc unique (branches communicantes avec le tronc antérieur).
C. Structures nerveuses multiples. 1. Par branche collatérale précoce issue du E. Individualisation tardive du tronc.
tronc ; 2. par branches issues du plexus antérieur. F. Division précoce et branches gastriques directes issues du plexus posté-
rieur. 3. Ramus criminali (Grassi).
Variations anatomiques
Cette disposition idéale sur le plan chirurgical est exceptionnelle, sa
caractéristique est en fait la variabilité.
Nombre
La variabilité du nombre de structures nerveuses aux niveaux
diaphragmatique et sous-diaphragmatique est classique [4, 26, 31, 34, 35, 50].
Le tronc antérieur est multiple ou accompagné de structures nerveuses
secondaires dans 30 % des cas environ, aussi bien dans les études
anatomiques [23, 29] que dans les constatations peropératoires [40, 41]. La
fréquence de nerfs antérieurs multiples peut être évaluée jusqu’à
55 % [48].
2 La terminaison des pneumogastriques et la traversée diaphragmatique sont des
rapports anatomiques fortuits sans relation embryologique.
Le tronc postérieur est plus constamment unique (90 à 95 % des cas),
rarement multiple et, dans ce cas, exceptionnellement divisé en plus de
deux branches (fig 1F).
Distribution modale Les structures nerveuses accessoires sont l’explication de la variabilité
de nombre précitée. Il peut s’agir :
Nombre – soit de nerfs haut situés dus à une individualisation tardive du tronc et
Les troncs antérieur et postérieur issus des plexus périœsophagiens sont correspondant à des éléments du plexus périœsophagien (fig 1B) ;
uniques, traversent le diaphragme isolément, conservent un trajet unique – soit des branches de division au contraire précoces après une
intra-abdominal avant de donner naissance à leurs branches de divisions individualisation tronculaire qui s ’est faite au niveau ou au-dessus du
gastriques et extragastriques (fig 1A, D). diaphragme (fig 1C) ;
– soit de branches gastriques directes issues du plexus périœsophagien,
Situation voire du nerf vague droit sus-bronchique, pouvant traverser
– Le tronc antérieur est normalement appliqué à la face antérieure de individuellement le diaphragme sur le bord gauche de l’œsophage, ou
l’œsophage abdominal, sous le feuillet péritonéal, en position médiane. même à distance de ce dernier (fig 1C, F).
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Techniques chirurgicales BASES ANATOMIQUES DES VAGOTOMIES ABDOMINALES 40-290
3 Rotation embryologique.
Conséquences pratiques
L’inconstance numérique de distribution vagale est manifeste. La
section théorique transversale de l’œsophage abdominal peut mettre en
évidence de deux à sept structures nerveuses [27]. Ces chiffres paraissent
souvent plus élevés chez les anatomistes que chez les chirurgiens
rendant compte de la difficulté d’individualisation de ces structures
nerveuses accessoires. On peut estimer valablement qu’une vagotomie 5 Distribution modale du système parasympathique à l’estomac. 1. Tronc anté-
rieur ; 2. tronc postérieur ; 3. branche « criminelle » de Grassi ; 4. branches œsocar-
tronculaire sous-diaphragmatique ne sectionnant qu’un tronc antérieur diotubérositaires antérieures ; 5. branches œsocardiotubérositaires postérieures ; 6.
et un tronc postérieur a globalement au moins 30 % de probabilités nerfs de Latarjet ; 7. « patte d’oie » ; 8. nerf de la grande courbure ; 9. nerf pyloro-
d’être incomplète (cf fig 4). duodénal ; 10. branche cœliaque ; 11. branches gastrohépatiques.
Situation
pilier droit à droite, le bord droit du cardia et le pédicule coronaire en
Les variations de position peuvent être expliquées selon le schéma bas ;
classique de Griffith [18] par la rotation embryologique de l’estomac – les structures vagales accessoires sont essentiellement situées sur la
de gauche à droite à partir de sa position initiale sagittale. Le tronc face antérieure de l ’œsophage :
droit devient postérieur, le gauche antérieur. La rotation plus ou
moins appuyée explique en partie les variations positionnelles – soit à gauche du tronc principal, toujours sur la face antérieure ou
(fig 3) : même le long du bord gauche de l’œsophage jusqu’à l’angle de
His [20, 27] , voire à distance dans l’épaisseur du ligament
– le vague antérieur (fig 4) est soit médian, soit décalé vers la droite, phrénogastrique [39] ;
soit plus souvent vers la gauche. Après avoir croisé, selon un trajet
oblique de haut en bas et de gauche à droite, la face antérieure de – soit à droite du tronc principal, pouvant même être accolées au bord
l’œsophage abdominal, il se termine plus ou moins près du bord droit du droit de l ’œsophage abdominal, puis au ras de la petite courbure de
cardia. Il est toujours appliqué sur la face antérieure de l’œsophage par l’estomac.
le péritoine préœsophagien et plus haut par un tissu fibreux émanant du Sur la face postérieure de l’œsophage, ces structures sont beaucoup plus
diaphragme, la membrane de Laimer-Bertelli ; rarement rencontrées et sont surtout trouvées à gauche du tronc
– le vague postérieur (fig 4) est plus constant, en arrière du bord droit principal. Ainsi, les branches de division précoce du tronc vagal
de l ’œsophage ; il peut être décalé vers la ligne médiane mais surtout il postérieur, nées haut, croisant la face postérieure de l’œsophage puis se
est situé au sein d’un tissu cellulaire rétropéritonéal lâche, donc plus distribuant à la partie gauche de la région cardiotubérositaire
mobile ; il est parfois plus proche de l’aorte abdominale que de postérieure, ont été qualifiées par Grassi [16] de « rameaux criminels »
l’œsophage, il doit être alors recherché dans l’espace compris entre le (fig 1F, 5) [3, 10].
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40-290 BASES ANATOMIQUES DES VAGOTOMIES ABDOMINALES Techniques chirurgicales
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Techniques chirurgicales BASES ANATOMIQUES DES VAGOTOMIES ABDOMINALES 40-290
6 Contingent hépatique se détachant du nerf de Latarjet. 7 Variante de distribution du nerf de Latarjet. Naissance d’une branche surnumé-
raire à partir des nerfs gastrohépatiques.
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40-290 BASES ANATOMIQUES DES VAGOTOMIES ABDOMINALES Techniques chirurgicales
Références ➤
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Techniques chirurgicales BASES ANATOMIQUES DES VAGOTOMIES ABDOMINALES 40-290
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page 7
¶ 40-380
Chirurgie laparoscopique
de l’obésité morbide
P. Lointier
L’obésité géante est une maladie fréquente actuellement. Elle correspond souvent à une surcharge
pondérale compliquée d’autres pathologies et devient par définition morbide. L’obésité morbide ou
pathologique, dite aussi « maladive », est définie par l’indice de masse corporelle qui se fonde sur des
profils de morbidité et de mortalité définis par les compagnies d’assurance pour des populations de type
caucasien. Pour traiter ces patients à haut risque, dont l’approche médicale et le suivi nutritionnel ont été
un échec, on peut utiliser la chirurgie. Plusieurs types d’opérations destinées à faire maigrir ces malades
pour diminuer la sévérité de cette affection et améliorer la qualité de vie (et peut-être l’espérance de vie !)
sont utilisées en chirurgie « ouverte », c’est-à-dire par laparotomie. On utilise schématiquement des
interventions basées sur deux principes fondamentaux de restriction gastrique et/ou de malabsorption
intestinale. Il s’agit essentiellement des gastroplasties et des courts-circuits (« bypass ») gastriques.
Pendant longtemps, à quelques exceptions près, ces traitements chirurgicaux ont été en France
largement méconnus et décriés. La chirurgie laparoscopique a permis une application moins invasive de
ces procédés et ainsi leur développement. Elle ne doit pas en modifier les indications. Quoiqu’il en soit, il
n’existe pas encore d’intervention bariatrique idéale ou universelle, et chaque procédé laparoscopique a
une courbe d’apprentissage.
© 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
¶ Réflexions générales sur l’utilisation des techniques ¶ Commentaires sur l’intérêt des courts-circuits gastriques 34
chirurgicales 3 ¶ Stimulation gastrique implantable transpariétale 35
¶ Cerclage gastrique laparoscopique utilisant l’anneau modulable 3 ¶ Essai pour des indications sélectives 35
Généralités 3 ¶ Conclusion 35
Mécanisme d’action 3
Technique opératoire 4
Soins postopératoires 9
Ajustage de l’anneau modulable 9 ■ Introduction
Complications opératoires immédiates et à distance 10
Conclusions et remarques 14 Définition de l’obésité morbide
¶ Technique de la gastroplastie verticale calibrée
L’obésité est définie comme un excès de masse grasse,
sous laparoscopie 15
quantifiée par l’indice de masse corporelle (IMC), correspondant
Généralités et mécanisme d’action 15 au rapport du poids en kilogrammes au carré de la taille en
Technique opératoire 15 mètre. La répartition corporelle du tissu graisseux appréciée par
Déroulement de l’intervention 16 le rapport taille/hanche ou le tour de taille est un deuxième
Variantes techniques 18 paramètre à prendre en compte, plus particulièrement vis-à-vis
Commentaires et analyse des complications 19 des complications.
¶ Court-circuit gastrique (« by pass » gastrique) L’obésité morbide correspond à une pathologie sévère recon-
avec anse en Y de Roux sous laparoscopie (CCGL) 21 nue comme un problème majeur de santé publique dans le
Généralités 21 monde entier, et plus particulièrement aux États-Unis. Dans ce
Physiopathologie du court-circuit gastrique 21 pays, 32 % des adultes souffrent de surpoids et 22, 5 % sont
Principes techniques du court-circuit gastrique 22 obèses. [33] Huit à 9 millions d’Américains sont obèses morbides
Évolution postopératoire 30 et ce taux augmente de 1 % par an. En France, la prévalence de
Installation du patient
Elle est commune aux interventions de restriction gastrique.
1 Les patients sont installés initialement en décubitus dorsal,
vessie vide avant leur entrée au bloc ou avec mise en place
2 d’une sonde à demeure. Ils sont porteurs d’une contention (bas
3 élastiques ou système pneumatique) des membres inférieurs.
Une antibioprophylaxie par céfazoline 2 g est faite par l’anes-
thésiste. Une prévention des possibles thrombophlébites est
réalisée par des héparines de bas poids moléculaire dont la dose
est adaptée en fonction du poids, en sachant que l’effet
d’anticoagulation est mal précisé chez les obèses.
Le patient ainsi placé sur une table spécifique pour la
chirurgie de l’obésité est mis en extrême proclive position semi-
assise à 30° ou 45° selon les habitudes de l’opérateur (Fig. 2).
▲ Attention
Figure 1. Technique « pars flaccida » décrite pour l’anneau suédois. 1.
Pars flaccida du petit épiploon ; 2. ligament gastrophrénique ; 3. arrière- L’hypotension orthostatique liée à la position assise chez
cavité des épiploon. un obèse sous anesthésie générale est fréquente en début
d’intervention. Il faut préventivement engager un
l’estomac n’est pas le seul phénomène responsable de la perte remplissage vasculaire adapté et éventuellement user
de poids. La plupart du temps (et de façon étonnante), on note d’amines vasopressives sous la surveillance du médecin
à la consultation postopératoire que les patients ne souffrent anesthésiste.
aucunement de sensation de faim. Cela est expliqué par la
stimulation des stretch récepteurs de la paroi gastrique trans-
mise à l’hypothalamus par voie vagale. [29] Le passage ralenti de
la nourriture au travers du pylore entraîne la production
prolongée de cholécystokinine et la sensation de satiété. [26] Au Son maintien sur la table opératoire demande aussi beaucoup
phénomène restrictif purement mécanique s’associent égale- de précautions pour veiller à éviter des points de compression
ment des facteurs neurophysiologiques plus complexes. (coude et nerf cubital, élongation du plexus brachial) par une
position des bras précise comme si le malade était assis dans un
Technique opératoire fauteuil. On peut choisir une traction inférieure sur l’abdomen
et supérieure sur les seins hypertrophiques à l’aide de bandes
Différents trajets de dissection collantes et élastiques pour obtenir un ventre plat avec une
Plusieurs trajets de dissection ont été décrits pour la mise en peau « tendue » sans repli permettant une introduction facile
place de l’anneau. La voie de l’arrière-cavité des épiploons est des trocarts opératoires.
abandonnée en raison du taux important de glissements de
l’anneau. La voie rétroligamentaire [92] (Forsell) qui utilise
l’ouverture de la pars flaccida du petit épiploon est préférée
actuellement à la voie transligamentaire [8] (Belachew) utilisant Dans tous les cas, l’intervention débute par la mise en
une dissection au contact de la paroi gastrique. La technique place par l’anesthésiste d’une sonde gastrique de
périgastrique proposait une dissection à l’équateur du ballonnet calibrage à ballonnet antérieur de type 36 French et
antérieur de la sonde de calibrage. Celle-ci débutait au contact fournie habituellement avec l’anneau utilisé.
de la paroi gastrique avec un risque important de lésion directe
(effraction ou brûlure par électrocoagulation).
La technique pars flaccida (Fig. 1) est décrite avec l’anneau de
type suédois.
La dissection commence par une ouverture du ligament Création du pneumopéritoine
gastrohépatique du petit omentum dans sa partie pellucide avec
Une aiguille de Verress est introduite au-dessus de l’ombilic
un repérage facile du pilier droit du diaphragme. L’ouverture
pour insuffler le pneumopéritoine. Il faut éviter de blesser le
péritonéale très limitée se situe au niveau de la décussation des
foie ou le ligament rond. Le passage dans la paroi en cas d’open
piliers. L’anneau est placé au-dessus de l’arrière-cavité des
laparoscopie se fait plan par plan grâce à un trocart à vis après
épiploons. La dissection se fait de façon éloignée par rapport à
l’exsufflation de l’estomac qui aura été réalisée par l’anesthésiste
la petite courbure gastrique.
grâce au tube de calibrage introduit dans l’œsophage en début
Matériel nécessaire à l’intervention d’intervention, quand le patient était en position de décubitus
dorsal. Une pression intra-abdominale de 12 à 15 mmHg est
On utilise quatre ou cinq trocarts : un trocart de 10 mm, un maintenue pendant l’intervention.
trocart de 12 ou 15 mm, trois trocarts de 5 mm.
La liste des instruments nécessaires à l’intervention est la
Position des trocarts opératoires
suivante : deux pinces à préhension atraumatiques fenêtrées, un
crochet coagulateur, un palpateur rond ou en patte d’oie, une Le positionnement des trocarts s’apparente à celui de la
paire de ciseaux, un porte-aiguille, un pousse-nœud coupe-fil. chirurgie fonctionnelle de la région hiatale (geste antireflux et
L’anneau de cerclage gastrique peut être positionné autour de myotomie de Heller). Quatre ou cinq trocarts sont habituelle-
l’estomac par l’utilisation d’un instrument mousse articulé et ment placés pour cette intervention de cerclage gastrique sous
flexible nommé goldfinger. laparoscopie (Fig. 3). L’utilisation laparoscopique des instru-
Dans tous les cas, l’intervention débute par la mise en place ments opératoires doit souligner que, comme pour un levier, le
par l’anesthésiste d’une sonde gastrique de calibrage à ballonnet maximum de précision et de maniabilité s’obtient quand la
antérieur de type 36 French et fournie habituellement avec longueur de l’instrument placé en intra-abdominal est égale à
l’anneau utilisé. celle située en dehors. Chez l’obèse, cela est plus difficile à
5
1 4
3
▲ Mise en garde
Un mauvais positionnement va conduire à exercer une
pression sur les instruments opératoires et cela est une
B source de friction au niveau des trocarts.
Déroulement de l’intervention
Cette description (Fig. 4) résulte de l’analyse des publications
faites par les premières équipes ayant utilisé cette approche. [1,
C 8, 18, 92, 113]
1
Figure 2. Position opératoire du patient pour les gastroplasties. Exposition de l’hiatus œsophagien
A. Vue de face. Le lobe gauche du foie est récliné simplement avec un
B. Vue de profil. palpateur de 5 mm ou 10 mm (« patte d’oie » ou rétracteur
C. Position de l’équipe chirurgicale (1. Chirurgien ; 2. premier aide ; malléable en cadre). La voie d’abord de la région œso-cardio-
3. deuxième aide). tubérositaire est infrahépatique (Fig. 4A) dans la majorité des
cas. Parfois, il est nécessaire de pratiquer une lyse du ligament
triangulaire hépatique gauche pour écarter le foie stéatosique
assurer. Il faut en tenir compte pour l’accès aux viscères, aux hypertrophié à droite et vers le bas ; il s’agit d’un abord
zones à disséquer, et l’épaisseur de la paroi abdominale va gêner suprahépatique [98] (Fig. 4B). On vérifie l’affaissement complet
l’amplitude des gestes. de l’estomac et on demande en début d’intervention à l’anes-
Lorsque le pneumopéritoine est réalisé (2,5 l), on introduit un thésiste de procéder à un retrait partiel du tube de calibration
trocart de 10 mm quatre à six travers de doigt sous la xyphoïde. tout en le positionnant près du cardia sous contrôle direct de
Par cette voie est placé le laparoscope de 0° ou mieux de 30°. la vision laparoscopique.
Les autres trocarts sont placés successivement et sous contrôle
de la vue, le premier (5 ou 10 mm) sous la xyphoïde pour Dissection de la petite courbure gastrique
introduire l’écarteur pour le foie, le second (5 ou 10 mm) sur la L’abord premier de la pars flaccida (Fig. 4C) qui est sectionnée
ligne médioclaviculaire au niveau du quadrant supérieur à permet l’exposition de la portion inférieure du pilier droit du
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A
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T3 C
Figure 4. Déroulement d’une intervention de gastroplastie avec un anneau ajustable.
A. Abord infrahépatique de la région œso-cardio-tubérositaire.
B1. Abord suprahépatique en cas de lobe gauche hypertrophique.
B2. Foie abaissé après section du ligament triangulaire gauche pour mettre à jour la région hiatale.
C. Exposition de la décussation des piliers du diaphragme.
“ Conduite à tenir
sujet masculin. Il faut s’aider de la cinquième pince pour écarter
ce tissu graisseux aberrant. La présence d’une artère hépatique
gauche ne gêne pas cet abord. La section du ligament gastrohé-
Toutes les manipulations opératoires sur l’œsophage patique n’est donc pas nécessaire pour cette intervention.
abdominal et l’estomac sont faites en l’absence du tube de Section du ligament gastrophrénique
calibrage qui rigidifie cette région et peut favoriser les Ensuite, on pratique une incision du ligament gastrophréni-
traumatismes et effractions des parois de ces deux que (Fig. 4D) pour mettre à nu le pilier gauche du diaphragme
organes. par une dissection limitée non hémorragique au niveau de
l’angle de His. On peut s’aider d’une traction sur le fundus et
sur la graisse paraœsophagienne.
diaphragme (décussation des piliers) où on fait une minime Création du tunnel rétrogastrique
incision péritonéale au crochet coagulateur. Il existe à ce niveau Le passage rétrogastrique (Fig. 4E) est fait par introduction
des tractus fibreux blanchâtres denses facilement repérables. d’un instrument mousse atraumatique rigide ou flexible selon
Parfois, des franges épiploïques épaisses dépendantes du petit les habitudes de l’opérateur, de la droite du malade vers la
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T4 T4 E
D
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G
T3
gauche de celui-ci. La pince fenêtrée longue de 42 cm permet maintien) dans la graisse de l’épiploon au niveau de la petite
ce geste facilement et ne doit jamais rencontrer de résistance courbure gastrique (technique en deux étapes). [83] Ce chenal
dans l’espace cellulograisseux qui est traversé du pilier droit correspond en général au premier vaisseau œso-cardio-
diaphragmatique jusqu’à l’angle de His. tubérositaire (Fig. 4G) cheminant sur la face antérieure de
Introduction et mise en place de l’anneau modulable l’estomac.
L’anneau modulable est préparé et testé avant sa mise en Calibration et fermeture de l’anneau
place dans l’abdomen. Il est introduit par le trocart de 12 ou Quoiqu’il en soit, ce repère est précisé par la mise en place du
15 mm, ou au travers de la paroi abdominale directement. tube de calibrage (taille : 36 F, diamètre : 12 mm) dans l’estomac
Surtout on doit veiller à ce qu’il n’y ait aucun frottement contre
après avoir gonflé son hémiballonnet antérieur à 15 ml et
les parois du fourreau pour ne pas léser la chambre interne
l’avoir retiré jusqu’au cardia. Cela permet d’évaluer correcte-
ajustable de l’anneau. Le cathéter relié à l’anneau est saisi par
ment le volume de la poche gastrique. L’anneau est alors attiré
la pince fenêtrée longue et attiré sous le foie (Fig. 4F). À ce
moment, on peut créer une fenêtre (pseudo-« bague » de dans ce deuxième tunnel par l’intermédiaire du cathéter. Cet
T2
15 ml
H2
artifice diminuerait le risque de glissement de l’anneau, mais il faut souligner l’intérêt mini-invasif de la laparoscopie chez les
est en fait peu utilisé par la majorité des auteurs. obèses et ses avantages en termes de morbidité opératoire sur la
On fait l’encliquetage de l’anneau avec le tube de calibrage en paroi abdominale (infection pariétale inférieure à 1 %). En
place avec le ballonnet gonflé (Fig. 4H). dehors d’un geste urgent pour traiter une complication peropé-
ratoire non contrôlable sous laparoscopie, la conversion en
Fixation de l’anneau chirurgie ouverte peut compliquer les suites de cette
En revanche, il semble recommandable de ne jamais faire les intervention.
sutures séromusculaires gastrogastriques en présence du tube de
calibrage, qui est retiré totalement après dégonflage du ballon-
net. Le risque est de prendre le ballonnet de la sonde de
calibrage avec des sutures profondes et de déchirer ensuite
l’estomac lors de son retrait par traction sur les fils. On fait un
surjet de recouvrement ou quatre points séparés (Fig. 4I) en
“ Conduite à tenir
partant de l’angle de His, prenant le pilier gauche du
diaphragme et en terminant au niveau du verrou de l’anneau. Si le malade a été informé en préopératoire, il vaut mieux
On utilise un fil non résorbable type Ethibon® 2/0. Il s’agit différer cette opération en faisant maigrir ces patients
d’une suture extra- ou intracorporelle qui ne prend que l’étoffe avant une prochaine réintervention sous laparoscopie. On
gastrique nécessaire au recouvrement de l’anneau, c’est-à-dire peut proposer par exemple un « régime yaourt » (six par
que l’aiguille va charger en même temps l’estomac au-dessous jour pendant 10 jours) pour faire diminuer le volume
et au-dessus de l’anneau de silicone. d’une stéatose hépatique majeure ou l’implantation d’un
Mise en place du réservoir implantable (Fig. 4J) ballon intragastrique pour 6 à 8 mois.
L’extrémité distale du tube relié à l’anneau est saisie par la
pince fenêtrée positionnée dans le trocart de 12 ou 15 mm. Ce
site d’extraction est utilisé pour mettre le boîtier nécessaire à
l’ajustage de l’anneau. La chambre d’injection est glissée dans la Soins postopératoires
loge sous-cutanée créée avec l’index qui décolle le tissu grais-
L’abord « mini-invasif » permet au patient de se lever rapide-
seux. Cette chambre d’ajustage peut être fixée ou non au plan
ment, souvent le soir même de l’intervention. On ne laisse
aponévrotique par trois points de fil non résorbable une fois
habituellement pas de sonde gastrique, ni de sonde urinaire ou
raccordée au cathéter. Ce même boîtier peut être implanté sur
de drain intra-abdominal. Il faut se méfier chez les patients
le bas du sternum, lieu non mobile et où le risque infectieux
obèses du relargage des drogues utilisées (anesthésiques et
serait moindre. [115] La fixation à l’aponévrose est souvent
antalgiques), surtout chez les malades ayant des troubles
difficile chez les sujets très gros et impose alors une large
respiratoires sévères. L’antibioprophylaxie et l’administration
incision avec un risque infectieux local. Elle ne prévient pas les
d’anticoagulants de bas poids moléculaire sont systématiques.
rotations du boîtier lorsque l’amaigrissement est important. La
La douleur postopératoire est traitée par voie veineuse pendant
fonte des tissus graisseux laisse alors la chambre flotter et rend
24 heures, puis le relais est pris per os. On peut réaliser un
son capotage facile.
transit œso-gastro-duodénal (TOGD) aux hydrosolubles [108]
avant de décider une reprise de l’alimentation. Il sert de
référence dans la surveillance (Fig. 5) pour le volume de la
néopoche gastrique et pour la position de l’anneau. Cette poche
“ Rappels est initialement vide et invisible sur le premier contrôle
postopératoire (Fig. 5A) ; on devine l’empreinte des plis gastri-
ques. Elle apparaît en fait au cours des 2 années qui suivent
La technique « pars flaccida » est la plus utilisée ; elle l’intervention et l’anneau a une position caractéristique oblique
permet un repérage facile du pilier droit du diaphragme. (Fig. 5B). La sortie du patient est souvent autorisée au deuxième
La création du tunnel rétrogastrique est obligatoirement ou troisième jour après l’intervention. Une alimentation mixée
faite au-dessus de l’arrière-cavité des épiploons, dans est conseillée pendant les 2 semaines qui suivent.
Ensuite, il doit simplement suivre les recommandations
l’espace celluleux rétro-œsophagien en avant des piliers
diététiques, c’est-à-dire bien mâcher les solides, manger douce-
du diaphragme.
ment, éviter les fibres ainsi que les fruits secs (risque de
On recommande toujours une poche gastrique proximale bézoards), et surtout ne jamais boire pour pousser les aliments
« virtuelle » de 15 ml pour prévenir les dilatations de celle- (spasme douloureux épigastrique et vomissements).
ci. Il faut toujours créer une poche gastrique pour avoir
une sensation de satiété.
Ajustage de l’anneau modulable
Le recouvrement antérieur de l’anneau par une valve
gastrique de points séromusculaires au fil non résorbable Ce geste est corrélé au suivi du patient opéré. [8, 49, 57] Le suivi
est nécessaire après retrait du tube de calibrage et est toujours pluridisciplinaire. Il ne faut pas se précipiter pour
préviendrait son glissement. Ce recouvrement doit être faire un resserrage ; il faut laisser au patient un délai pour
s’habituer aux nouvelles contraintes alimentaires. Un serrage
lâche et certains auteurs pensent qu’il est inutile.
trop précoce, avant le premier mois, est susceptible de favoriser
Le boîtier de la chambre d’ajustage doit être laissé libre le glissement de l’anneau sur l’estomac. Il y a une coque
dans le tissu cellulaire sous-cutané. fibreuse qui se forme autour de l’anneau et cette « cicatrisa-
tion » est le garant de sa bonne position. Il faut aussi un
apprentissage de la sensation de satiété et de la tolérance
alimentaire. Il faut se référer à la courbe de perte de poids
Le temps opératoire (de 35 à 90 minutes) d’une annuloplastie (stagnation) et à l’aspect radiologique. Il existe un diamètre
diminue avec l’expérience des opérateurs et correspond à moins interne optimal pour chaque type d’anneau (Fig. 5C). Il existe
de 1 heure dans 98 % des procédures. [1, 8, 18, 31, 80] La plupart aussi une capacité maximale du ballonnet de chaque type
des résultats pour des séries importantes (plus de 200 patients) d’anneau qui peut varier de 4 à 10 ml.
sont publiés par les auteurs européens et australiens. Dans la technique d’ajustement, il faut toujours procéder par
La conversion en laparotomie survient dans 3 à 9,5 % des paliers et ne jamais injecter de grandes quantités de liquide à la
cas, surtout pour les 50 premiers opérés, cela à cause d’une fois (moins de 1,5 ml en général). Il est demandé au patient de
mauvaise exposition opératoire, des difficultés pour la dissection boire un verre d’eau en fin de procédure pour tester le passage
rétrogastrique, des saignements et des blessures des viscères. Il au niveau de l’anneau réglé.
30-60°
B2
Figure 5. Aspects radiologiques du chenal de vidange créé
par le cerclage gastrique au niveau de la gastroplastie (aspect en
« sablier »).
A. Néopoche gastrique initialement virtuelle, non visible.
B1. Aspect radiologique de la position normale oblique de
l’anneau gastrique.
B2. Schéma de représentation de l’angle phi (30° à 60°) sur le
transit œso-gastro-duodénal.
C. Exemple de poche de 15 ml, le chenal optimal de vidange est
de 7 à 9 mm de diamètre après insufflation du ballonnet de
l’anneau gastrique.
A
Figure 6. Aspect radiographique du transit œso-gastro-duodénal en cas de dilatation de la gastroplastie.
A. Aspect d’une dilatation globale « asymptomatique ».
B. Dilatation modérée associée à des troubles moteurs de l’œsophage.
C. Volumineuse dilatation nécessitant un desserrage du cerclage gastrique (C1, C2).
Des perforations gastriques sont décrites lors de la création du volontiers à des symptômes de reflux, de pyrosis et de difficultés
tunnel rétrogastrique et lors de la courbe d’apprentissage. d’alimentation. Préoccupante, elle se manifeste par des douleurs
L’utilisation de la technique dite de la « pars flaccida » diminue lors de l’alimentation avec des vomissements, donc correspond
ce risque de façon considérable. La réparation peropératoire sous à une symptomatologie d’obstruction haute. Un TOGD s’impose
cœlioscopie est possible. La question se pose alors de savoir si et confirme le diagnostic d’une dilatation antérieure (Fig. 7) ou
on laisse en place le matériel prothétique implanté avec un postérieure (Fig. 8). Un desserrage de l’anneau par ponction du
risque de fistulisation. La perforation passée inaperçue et boîtier est faite ; si cela n’améliore pas le patient, il faut
découverte tardivement est une complication redoutable suspecter une strangulation (véritable volvulus) gastrique qui
souvent létale.
doit conduire en urgence à une réintervention pour éviter une
Le plus souvent, il s’agit d’une péritonite asthénique. L’appa-
nécrose gastrique [51] au pronostic sévère (péritonite en péritoine
rition rapide d’une détresse respiratoire confirme la gravité de
cet évènement. libre, gastrectomie totale) pouvant conduire au décès de l’obèse.
L’anneau est enlevé, repositionné ou changé selon l’importance
des lésions de la paroi gastrique. Si la symptomatologie s’amé-
liore, l’anneau est laissé en place et ajusté ultérieurement,
quelques semaines plus tard.
▲ Mise en garde La cause de ces complications est variable ; elle a été attribuée
aux procédés initiaux de pose du cerclage gastrique (voie
périgastrique) et leur incidence a bien diminué avec les modifi-
Tout patient présentant le lendemain d’une gastroplastie cations techniques. Quand elle est précoce, elle est due à des
de la fièvre, des douleurs abdominales, une tachycardie erreurs diététiques. Cette complication surviendrait plus souvent
inexpliquées et des troubles respiratoires est un opéré qui avec l’anneau américain.
se complique pour lequel une exploration cœlioscopique Le glissement de l’anneau conduit le plus souvent à une
(ou une laparotomie) urgente s’impose. réintervention sous laparoscopie. [105] On fait une ablation de
l’anneau ; on peut le changer par un autre modèle ou le
repositionner comme cela est possible avec l’anneau Heliogast®
dont une des caractéristiques est un possible désencliquetage du
Le taux de conversion en laparotomie est évalué à 3,6 %. système de fermeture. On utilise souvent un autre trajet en
amont du précédent pour repositionner l’anneau. Il existe
Complications tardives (au-delà de 1 mois) toujours un risque de récidive. C’est une intervention difficile ;
Elles sont beaucoup plus fréquentes que les précoces et leur il faut parfois sectionner l’anneau et envisager un nouveau
pourcentage varie entre 1,7 % et 16 %. cerclage ou une autre intervention de chirurgie bariatrique à
distance. Certains auteurs positionnent l’anneau très haut sur
Dilatation de la poche de gastroplastie (5 %) et glissement l’estomac (ou l’œsophage) afin d’obtenir une poche « virtuelle ».
de l’anneau (de 2,2 à 8 %) Il y a alors une dysphagie et parfois à un mégaœsophage
Si ces deux événements sont à décrire de façon différente, ils secondaire, avec les risques que cela comporte à long terme.
sont liés et seul leur mode de survenue change l’attitude à L’utilisation d’anneau de grand diamètre, 11 cm, diminuerait le
adopter. La dilatation est la complication la plus fréquente (de risque de dilatation. Enfin, il faut signaler que le glissement
5 à 10 %). Le délai moyen de survenue peut varier de 7 à d’un anneau peut être lié à une rupture de son système de
24 mois. La dilatation est définie comme une augmentation fermeture ou du corps de l’anneau lui-même.
radiologique du volume de l’estomac au-dessus du cerclage
gastrique avec un surplomb. L’anneau se déplace vers le bas et Érosion de la paroi gastrique (1 %) par l’anneau
a tendance à s’horizontaliser ; il glisse. de gastroplastie et migration intragastrique
La dilatation peut être asymptomatique (Fig. 6) lorsque elle
est progressive. Elle correspond à une ulcération progressive de la paroi
L’incidence de cet événement est probablement sous-estimée. gastrique. Il en résulte une migration intragastrique du dispositif
Précoce, elle est liée aux erreurs diététiques. Elle s’associe avec des complications de type obstructif. L’incidence moyenne
90°
A
Figure 8. Aspect radiographique d’une dilatation postérieure d’une gastroplastie.
A . Représentation schématique montrant un anneau verticalisé.
B. Aspect radiologique du transit œso-gastro-duodénal.
C. Il existe un volvulus de la gastroplastie et on note l’absence de passage du produit de contraste dans
l’estomac distal.
D. Estomac après explantation de l’anneau gastrique.
de cette complication est de 1,9 %. Le délai moyen de survenue Il s’agit alors d’une migration limitée, mais il faut rechercher la
est de 6 à 24 mois. Cette complication survient plus souvent solution de continuité gastrique (test au bleu de méthylène) qui
avec l’anneau suédois SAGB (Fig. 9) ; elle est souvent asympto- en résulte pour la suturer. Un drainage au contact permet de
matique, en dehors d’une reprise pondérale. Les signes cliniques diriger une éventuelle fistule. Lorsque l’anneau est inclus
peuvent être graves ; il peut survenir des abcès, des hémorragies totalement dans l’estomac, il faut laisser intact le tissu de
ou une occlusion. C’est un événement potentiellement grave sclérose cicatricielle autour du cerclage gastrique. On doit
qui impose une réintervention par laparoscopie (ou en chirurgie préférer une gastrotomie à distance en tissu sain pour identifier
ouverte). On peut aborder directement l’anneau et le sectionner. et enlever l’anneau.
“ Résultats
Dans l’étude de Favretti et al., [31] les meilleurs résultats
sont obtenus pour les IMC les plus faibles. Dans le cas des
« superobèses » (IMC > 55 kg/m2) avec un IMC moyen de Figure 12. Placement des trocarts opératoires pour la gastroplastie
55,7 en préopératoire, ils obtenaient un résultat d’IMC de verticale calibrée sous laparoscopie. Variations selon les auteurs (a : Nata-
56,0 à 5 ans. Pendant cette même période, les patients lini, b : Azagra, c : Morino) utilisant une voie droite pour la création de la
avec un IMC moyen de 42,7 achevaient une perte de fenêtre gastrogastrique. 1. Laparoscope 0° ou 30° de 10 mm ; 2. écarteur
poids avec un IMC à 29,5 ! à foie de 5 ou 10 mm ; 3. pince à préhension fenêtrée de 5 mm ;
4. instruments opératoires et pinces à agrafage–section linéaire de
12 mm ; 5. pince de présentation et de traction sur l’estomac de 5 mm ;
6. incision cutanée pour le passage direct au travers de la paroi abdomi-
Ces résultats sont aussi ceux de l’étude de Chevallier et al. [18] nale de la pince circulaire ou avec mise en place d’un trocart de 33 mm.
mais sont en contradiction avec ceux de Fielding. [32] Cet auteur
démontrait chez des obèses avec un IMC moyen préopératoire
aliments donne très vite une sensation de satiété. Ce « néogas-
de 67 kg/m2 une perte de poids importante aboutissant à un
tre » communique avec le reste de l’estomac par un orifice de
IMC entre 35 et 36 kg/m2 !
petit diamètre. Son calibrage est fait par un anneau inextensible
Les résultats sont également liés au perfectionnement des
dont l’effet est de créer un « pseudopylore » qui va ralentir la
techniques et à l’expérience de la chirurgie laparoscopique
vidange du « néogastre ». Ce geste chirurgical ne nécessite ni
« avancée » des opérateurs.
anastomose viscérale, ni ouverture du tube digestif. Il en résulte
une faible morbidité et mortalité. Il y a dans cette intervention
une préservation de la continuité digestive avec un chemine-
ment alimentaire gastroduodénal physiologique. Il n’y a
“ Cerclage gastrique habituellement pas de carence nutritionnelle. Elle impose
toutefois une forte contrainte alimentaire justifiant en préopé-
et grossesse ratoire une analyse psychiatrique précise du comportement
alimentaire des malades à traiter. Le non-respect d’une hygiène
alimentaire et d’une bonne compliance au suivi postopératoire
En cas de grossesse, [28] qui ne devrait pas survenir dans la conduit aux vomissements postprandiaux.
première année postopératoire (usage d’une Les premières GVC par laparoscopie ont été réalisées en juillet
contraception), il est recommandé de faire un desserrage 1993 par Catona en Italie puis par Chua, [20] et Lonroth. [64]
complet de l’anneau et d’insister sur la surveillance Cette chirurgie laparoscopique applique les modifications de
nutritionnelle. Il a été décrit chez le fœtus des Mac Lean au procédé initial de la GVC de type Mason sans
complications neurologiques (spina bifida) et des division de l’estomac.
complications mécaniques plus fréquentes des anneaux.
Technique opératoire
Matériel spécifique
En conclusion, l’amaigrissement à long terme (et sa stabilité) Outre le matériel nécessaire pour une laparoscopie standard
dépend de l’éducation, de la surveillance clinique et de la de mise en place d’anneau ajustable, il faut une pince à agrafage
motivation à conserver une ligne de conduite alimentaire circulaire de 21 ou 25 mm, une pince à agrafage linéaire avec
exemplaire, seuls critères de réussite de ce procédé chirurgical. des chargeurs de 45 ou 60 mm, un bras Martin pour la fixation
Il peut même être proposé aux mangeurs de sucre. [46] du rétracteur à foie, une pince de Babcock de 10 mm, une règle,
un matériel de calibrage mèche ou anneau de silicone.
■ Technique de la gastroplastie Installation du patient et création
verticale calibrée sous laparoscopie du pneumopéritoine
Elles restent identiques à celles décrites précédemment pour
Généralités et mécanisme d’action l’annuloplastie.
Nous présentons la deuxième technique de gastroplastie et les
artifices permettant de réaliser cette intervention de référence en
Disposition des trocarts
chirurgie de l’obésité morbide utilisant aussi une restriction De façon identique au cerclage gastrique, quatre ou cinq
gastrique. L’opération la plus pratiquée en « chirurgie ouverte » trocarts sont nécessaires à l’intervention (Figs. 12,13). À noter
et qui reste un standard en Europe est la GVC décrite par qu’un trocart de 10 mm placé dans l’hypochondre droit sert à
Mason [70, 71] et modifiée par Mc Lean. [65] l’utilisation de la pince de Babcock.
Cette intervention consiste à agrafer l’estomac de façon à Un trocart opératoire gauche de 15 mm permet d’introduire
délimiter une petite poche gastrique proximale où l’arrivée des la règle pour mesurer la hauteur de la gastroplastie, de préparer
6c
m
3 cm
anneau Caligast® (16 mm) produit par Helioscopie, Vienne, d’intervention ; aucune aspiration gastrique n’est utilisée en
France. Ces anneaux encliquetables sont solidarisés au tissu postopératoire. La sonde gastrique en postopératoire favorise le
graisseux de la petite courbure gastrique. reflux acide et les vomissements en laissant un cardia béant. On
On utilise des sutures intra- ou extracorporelles, mais il n’est peut mettre « in situ » entre les lignes d’agrafes de la bipartition
jamais fait de fixation à la paroi gastrique. Les sutures prennent gastrique un drainage.
la graisse du petit épiploon de la petite courbure gastrique Certains auteurs [104] utilisent une bande de polypropylène,
(Fig. 14E). Ainsi est confectionné un néopylore destiné à de Silastic®, de PTFE de 2 mm d’épaisseur, de 1,5 cm de haut et
retarder la vidange de l’estomac proximal. de 7 à 10 cm de long marquée pour une longueur de 5 cm par
L’ensemble de ces gestes est fait en maintenant en place le des repères indélébiles sur lesquels est appliquée une agrafeuse
tube de calibrage. La sonde nasogastrique est retirée en fin qui sectionne et suture le calibrage. D’autres ont utilisé des
“ Règles
Sous laparoscopie, il faut rester fidèle aux standards et aux
règles dictées par Mason. [70]
On doit utiliser un anneau de 5 cm de circonférence idéale
dont le rôle est de stabiliser l’orifice de vidange du
néogastre sans produire d’obstruction.
T2
Le Marlex™ semblait être le matériau de choix jusqu’à ce
jour, mais le développement d’un anneau de silicone peut
être une évolution applicable à cette technique. Il s’agit
d’un anneau encliquetable, atraumatique, et qui devrait
s’entourer d’une coque protectrice et stabilisatrice comme A
les anneaux ajustables actuels. Cela pourrait éviter le T4
risque d’érosion ou d’incrustation dans la paroi gastrique ;
de plus, il réduit le temps d’intervention final (calibrage) et T3
fondamental de cette opération de restriction gastrique.
Sa déformabilité permet une alimentation sans réelle
contrainte comparativement aux systèmes comme le
polypropylène ou le Marlex™ qui sont plus rigides et
sclérosent la zone distale du néogastre. Il s’agit aussi d’un
critère fondamental pour faire une ablation facile de cet
anneau en cas de nécessité (en évitant des gastrectomies
totales !). On peut aussi souligner sur le plan pratique que, T2
dans nos cas de sténoses (cinq cas sur 95 patients) du
néopylore, nous avons toujours pu obtenir une dilatation
efficace en utilisant des ballonnets de 18 mm et avec deux
séances à 3 mois d’intervalle.
Il n’y a toutefois à l’heure actuelle pas d’étude comparant
deux matériaux tels qu’une bandelette de treillis
synthétique versus silicone.
Le diamètre de l’anneau idéal serait de 5,5 ou 6 mm plutôt B
que celui admis par Mason. T4
Figure 15. Gastroplastie verticale calibrée par voie sous-costale gauche
et artifices techniques.
A. Un lasso maintient l’axe de perforation du corps de la pince circulaire
qui a transpercé les deux parois gastriques simultanément.
Variantes techniques B. L’estomac est positionné par une pince à préhension pendant le serrage
de la pince circulaire ; au cours de cette manœuvre, le tube de calibrage a
Gastroplastie verticale calibrée laparoscopique
été retiré au cardia.
par voie gauche
On peut utiliser l’emplacement du trocart de 15 mm pour
l’introduction de cette pince à agrafage si on choisit un abord épiploon de la petite courbure dont dépend la bonne vasculari-
gauche [59] pour confectionner la fenêtre gastrique initiale. sation du néogastre.
Personnellement nous utilisons un lasso qui est introduit en
même temps que la pince circulaire. Celui-ci sert de tracteur
pour maintenir en place les parois gastriques après leur perfo- Gastroplastie verticale calibrée laparoscopique
ration (Fig. 15). Si cette pince circulaire est introduite dans le sans fenêtre gastrique (Fig. 17)
flanc gauche de l’abdomen, directement en transcutané, on Il a été décrit deux autres modalités de GVC laparoscopique
utilise le site d’implantation du trocart de 15 mm que l’on sans gastrotomie. Il s’agit d’abord de la technique dite de
élargit de 1 cm environ pour la placer aussi sous contrôle direct « Jovo »47 (Fig. 17A) utilisant une pince GIA articulée pour
de la vue. sectionner l’estomac de l’angle de His vers la zone de calibrage.
Le risque majeur est une blessure splénique.
Gastroplastie verticale calibrée avec geste Melissas utilise une section et résection du fundus gastri-
« antireflux » (Fig. 16) que [73] (Fig. 17B), ce qui rend encore plus rapide le geste
Cette intervention s’apparente à celle de la gastroplastie de opératoire.
Collis utilisée dans les plasties d’allongement des brachyœso- Une intervention de gastroplastie sans anneau de calibrage a
phages pour réaliser un geste antireflux. été décrite par laparotomie et semble très applicable à la
La grosse tubérosité gastrique peut être utilisée en cas de laparoscopie, c’est celle de Magenstrasse et Mill (Fig. 17C) qui
hernie hiatale ou de RGO pour confectionner une valve antire- consiste à faire un long tube gastrique après la création de la
flux après section des vaisseaux courts. [27, 78] gastrotomie. La fenêtre gastrique est faite au niveau de l’antre,
Nous soulignons toutefois qu’il faut être prudent lors de la à 6 cm du pylore. Un tube gastrique jusqu’à l’angle de His est
partition verticale gastrique et bien utiliser le tunnel rétrogastri- ensuite construit par des agrafages linéaires successifs avec un
que sans sectionner les vaisseaux contenus dans le petit tube de calibrage de 32 French, soit 10 mm de diamètre.
T3 T3
T4
T2
A
T3
vidange. L’intervention de partition gastrique est aussi réversi- Les publications [38, 56, 66] faisant état de réinterventions pour
ble. Il suffit de retirer le matériel prothétique de calibrage de la transformation de la GVC en court-circuit gastrique apparaissent
gastroplastie bandée avec ou non une reconstruction de la actuellement. Les deux raisons essentielles de ce choix sont une
cavité gastrique. Ce matériel peut s’incruster parfois dans la perte pondérale insuffisante (ou une reprise de poids) ou un
paroi, surtout en cas de prothèse synthétique. Le taux d’érosion RGO avec œsophagite sévère.
Généralités
Le court-circuit gastrique (CCG) devient actuellement pour de
nombreux auteurs l’ « intervention de référence » du traitement
chirurgical de l’obésité morbide. [2, 13, 19, 34, 36, 106] En 1993,
Wittgrove et Clark [119] aux États-Unis et Lonroth [64] en Europe
en 1996 furent les premiers à pratiquer cette intervention sous
laparoscopie. Gagner [38] et Higa [42] ont développé des artifices
techniques différents. Quoiqu’il en soit, le CCGL est une
procédure plus difficile à réaliser que les interventions de
restriction gastriques « pures » car il faut faire des sutures sur
l’estomac proximal haut situé. [111] À cela s’ajoute la difficulté
et les imperfections sur la mesure du grêle [45] sous laparoscopie,
point essentiel sur les critiques et les discordances de l’efficacité
du court-circuit gastrojéjunal. Cette intervention est plutôt
indiquée pour les mangeurs de sucres, les obèses compulsifs et
en cas de RGO compliqué d’œsophagite sévère. Elle est utilisée
en deuxième intention en cas d’échec des interventions de
1
restriction gastrique.
2
C’est une intervention qui actuellement ne devrait être Figure 19. Configuration élémentaire de l’anse en Y de Roux pour le
réservée en première intention qu’aux « superobèses » (IMC court-circuit gastrique. 1. Anse biliopancréatique ; 2. anse alimentaire
supérieur ou égal à 50 kg/m2). efférente ; 3. anse commune.
La plupart des séries ont un suivi de moins de 2 ans mais
démontrent une perte de l’excès de poids estimée entre 62 et
77 % de l’excès de poids.
21 mm ou par des sutures manuelles [42] va aussi varier avec le
Les CCG entraînent une malabsorption intestinale et le
temps. Il en résulte une dilatation de cet orifice 2 à 10 ans
chirurgien doit connaître l’essentiel de la physiopathologie des
après. Pour limiter cela, on propose la mise en place d’anneau
phénomènes induits par la modification du circuit alimentaire
conduisant à l’amaigrissement. Pouvant être responsable de de calibrage en Silastic ® , en silicone, ou de l’aponévrose
troubles nutritionnels graves (ou d’échec), l’utilisation du CCGL postérieure des muscles de la paroi antérieure de l’abdomen. [13,
35]
doit aussi offrir une possibilité de réversibilité. Quelle solution
technique peut être alors envisagée ? Nous allons essayer de
répondre à ces questions pratiques. Configuration élémentaire de l’anse en Y de Roux
conçue en chirurgie bariatrique
ingérés, d’où une malabsorption de graisses en particulier. Cette dont l’IMC est supérieur à 60 kg/m2 en raison du taux élevé de
anse n’est pas « aveugle » ou exclue car constamment « lavée » complications opératoires comparativement à la chirurgie par
par les sécrétions gastriques et biliopancréatiques. laparotomie. [48]
L’anse « commune » absorbe la majorité des nutriments Nous allons décrire maintenant les procédés actuels de CCGL,
ingérés et préserve la circulation entérohépatique des sels leurs complications et les solutions potentielles utilisées pour
biliaires et des graisses. une parfaite reproductibilité de la technique.
Pour optimiser les facteurs prédictifs d’une perte de poids en
cas de bypass gastrique, il faudrait aussi connaître la motricité
gastro-intestinale ; les capacités d’absorption de la muqueuse du
Principes techniques du court-circuit
grêle et la découverte d’hormones de contrôle de l’appétit gastrique
compliquent encore ce schéma. Il faut toujours user des mêmes précautions pour la création
Conclusions du pneumopéritoine et pour le placement des trocarts.
Sur le plan pratique, on notera que chez les Notre technique du CCG, inspirée de celle pratiquée par Higa
« superobèses » l’ombilic va « glisser » vers le bas avec le Nous avons choisi d’utiliser des modifications techniques sur
pli du ventre en besace qui caractérise leur morphologie. la base de la construction du CCG décrite par Higa [42] car il
L’emplacement théorique à figurer sur le patient s’agit d’un procédé simple, reproductible et efficace. Le moni-
correspond en fait au milieu d’une ligne tendue entre les teur vidéo est situé en haut et à gauche du patient. Le foie est
deux épines iliaques antérosupérieures. un organe qui va varier en grosseur ou en consistance, et de
cela dépend la voie d’abord infra- ou suprahépatique à utiliser.
Il faut parfois lyser le ligament triangulaire du foie gauche pour
l’abaisser et le luxer vers la droite afin de dégager la région
Le CCG est devenu un outil indispensable lorsqu’on pratique œsogastrique. Il faut alors se méfier d’une compression paren-
la chirurgie de l’obésité pathologique en raison du nombre chymateuse prolongée qui peut conduire à une thrombocytopé-
croissant de patients consultant pour des échecs ou des compli- nie associée à une élévation des enzymes hépatocellulaires
cations des gastroplasties. (transaminases). En général, un seul écarteur de 5 mm suffit et
B
5
1 4
2
3
A
T2
T3
C B2
est placé en sous-xyphoïdien à gauche du ligament Teres. Un On utilise pour ce geste une position de Trendelenburg à 25°-
écarteur autostatique (bras Martin) est utile pour le maintenir. 30° pour découvrir l’angle duodénojéjunal (Fig. 21B1) car il faut
L’intervention se déroule suivant les temps suivants. déplacer le grand épiploon, ce dernier étant souvent pléthorique
.1
Création de l’anse en Y. À notre avis, il vaut mieux commen- et alourdi par la graisse, surtout chez le sujet masculin. Le
cer par ce geste. En effet, il est toujours plus facile de construi- ligament de Treitz peut être parfois visualisé à travers le
reun tube gastrique long que de refaire une anse en Y trop ligament gastrocolique et le mésocolon transverse. L’accès se fait
courte. par l’arrière-cavité des épiploons de haut en bas après ouverture
T4
T2 D
T3
T3
T2
E
T2
Figure 21. (Suite) Court-circuit gastrique sous laparoscopie (technique de l’auteur).
D. Ascension de l’anse jéjunale efférente alimentaire en situation précolique après section du grand épiploon.
E. Création de la poche gastrique verticale calibrée sur un tube de Faucher n° 34 French.
F. Anastomose gastrojéjunale antégastrique terminolatérale calibrée sur le tube de Faucher n° 34 French.
selon l’IMC. Une jéjuno-jéjunostomie latérolatérale est faite La première sur le bord antimésentérique du jéjunum, 2 à 3 cm
mécaniquement (pince mécanique GIA endoscopique) en en aval de sa zone de section. La deuxième est faite sur la
utilisant aussi des chargeurs vasculaires, alors que les entéroto- section horizontale de la poche gastrique. La gastrojéjunostomie
mies sont suturées manuellement en faisant deux hémisurjets est calibrée par le tube de calibrage (34 French) qui est poussé
.2
de fil résorbable (type PDS® 3/0) pour ne pas sténoser l’anasto- par l’anesthésiste vers l’anse jéjunale alimentaire sous contrôle
mose. Les brèches mésentériques sont toujours fermées et visuel laparoscopique avant la fermeture de la face antérieure de
suturées au fil non résorbable (type Ethibon® 2/0) (Fig. 21C). l’anastomose. Le diamètre de l’anastomose est de 12 à 14 mm.
Dans tous les cas, un test d’étanchéité de l’anastomose gastro-
jéjunale est fait en utilisant 150 ml de bleu de méthylène. Un
clamp intestinal placé 5 cm sous la zone d’anastomose permet
Les sutures au niveau des fenêtres mésentériques ne sont
d’occlure le grêle pendant ce test.
réalisées qu’après ascension du grêle à l’étage sus-
Un drain de Vankemmel souple est placé en fin d’interven-
mésocolique pour ne pas limiter sa traction vers la poche
tion sous la zone d’anastomose gastrojéjunale et extériorisé par
gastrique.
le trocart n°2. Il est laissé 4 jours.
Cette technique a été décrite par Higa et al. [42, 43] qui ont
opéré plus de 1 000 patients depuis février 1998. Cette série est
la plus importante de toute la littérature actuelle, le geste
Il faut fermer (Fig. 20C) la fenêtre mésentérique de l’anasto- toujours réalisé par la même équipe et parfois en 1 heure !
mose du pied de l’anse en Y, et aussi l’espace de Peterson entre Nous utilisons les principes de ce procédé car il est relative-
le mésocolon transverse et le mésentère de l’anse alimentaire ment facile à exécuter par un seul chirurgien et un aide.
qui va être ascensionnée.
L’utilisation rationnelle de cinq trocarts nous a toujours
Construction de la poche gastrique. En procédant de cette
permis de réaliser le montage du CCG dans un temps opératoire
façon, la préparation de l’anse en Y permet une ascension facile
(comprenant l’installation du patient, soit en moyenne
antécolique. Le grand épiploon peut être sectionné verticale-
ment avec les pinces endoscopiques GIA (ou autre méthode) ou 30 minutes) de 150 minutes en moyenne sur une série de
non selon sa corpulence pour faciliter le passage précolique. Si 72 patients. Les temps opératoires les plus long sont ceux des
on choisit l’autre voie, rétrocolique, le mésocolon transverse est interventions de deuxième intention.
ouvert 2 cm au-dessus du ligament de Treitz dans une zone Variantes et précisions techniques pour la réalisation
avasculaire. La dissection se fait ensuite par effondrement des des différentes étapes d’un court-circuit gastrique sous
tissus à l’aide d’une pince atraumatique ou au crochet jusqu’à laparoscopie
l’arrière-cavité des épiploons au-dessus de la face antérieure du
pancréas et on atteint alors la face antérieure ou postérieure de Poche proximale gastrique. La partition gastrique sans
l’estomac. L’ascension de cette anse jéjunale est guidée par le division est souvent responsable de fistule gastrogastrique avec
chirurgien situé encore à droite du patient en utilisant des pour conséquence un échec sur l’amaigrissement. L’utilisation
pinces fenêtrées (trocarts n°2 et n°3) en tractant la tranche de d’une poche construite sur la petite courbure permet d’éviter la
section agrafage (Fig. 21C). Cette anse grêle est mise en attente dilatation car la paroi gastrique est ici moins élastique. La poche
à l’étage sus-mésocolique et maintenue en place par une pince gastrique doit être aussi petite qu’elle puisse être construite (de
fenêtrée occupant le trocart n°3. 15 à 30 ml). Une petite poche qui se dilate (cela arrive dans
La dissection de l’hiatus œsophagien est difficile sur le 100 % des cas !) reste quand même petite. Sa mesure peut être
« superobèse » et le sujet masculin en particulier en raison de la faite sur la face antérieure gastrique (règle souple) ou par
surcharge graisseuse. Le chirurgien se positionne maintenant calibration avec un ballon intragastrique (le même que celui
entre les membres inférieurs de l’obèse pour effectuer ce geste. utilisé pour les gastroplasties horizontales par anneau
Le ligament phrénogastrique est effondré avec repérage et mise modulable).
à nu du pilier gauche du diaphragme. La poche gastrique Il faut respecter les nerfs de Latarjet au niveau de la petite
(Fig. 21E) est préparée par des applications successives de pinces courbure et rester à distance de la vascularisation gastrohépati-
linéaires GIA endoscopiques de 4,5 cm avec des agrafes de que gauche pour pénétrer dans l’arrière-cavité des épiploons.
3,5 mm (quatre chargeurs bleus en général). Elle est confection- La transection gastrique va créer une poche en forme de club
née à partir de la petite courbure au-dessus de la patte d’oie, de hockey en partant de la petite courbure pour rejoindre
initiée horizontalement 6 à 7 cm sous le cardia puis verticale- l’angle de His nécessitant une ouverture du ligament gastroph-
ment le long du tube de calibrage jusqu’à l’angle de His. rénique. Il faut se méfier lors de l’application des pinces à
L’anesthésiste doit veiller à retirer partiellement ce tube de
agrafage linéaire, car leur chevauchement peut entraîner des
calibration afin de ne pas le voir s’interposer entre les mors de
distorsions sources de fistule. Il faut utiliser des agrafes de
la pince mécanique lors de la première application.
3,5 mm d’épaisseur (chargeurs bleus). La création d’une poche
On préserve le nerf vague et le cercle vasculaire de la petite
verticale permet d’utiliser un cerclage de renfort [13] (Fig. 22)
courbure en faisant une dissection prudente au contact de la
(Silastic®) ou d’autre nature [50] pour éviter sa dilatation et la
paroi gastrique pour pénétrer dans l’arrière-cavité des épiploons.
face séromusculaire de l’intestin suturé sur son agrafage sert de
Une application transversale et trois verticales sont habituelle-
patch pour minimiser le risque de fistules gastriques. Il est donc
ment nécessaires pour avoir une « gastroplastie » de 20 à 30 ml.
Gastrojéjunostomie ou bypass proprement dit (Fig. 21F). recommandable de faire un surjet sur les lignes d’agrafes pour
L’anastomose entre le jéjunum et l’estomac se fait après un recouvrement avec la séreuse.
repositionnement du rétracteur à foie qui écarte largement le Certains auteurs font un CCG avec une minipoche proximale
lobe gauche et charge le ligament rond. Cette manœuvre expose gastrique (Fig. 23). La division de l’estomac se fait à la jonction
bien la région et permet à l’aide de positionner la caméra sans cardiofundique, et une gastrojéjunostomie [107] sur la grande
avoir de gêne par la graisse de ce dernier. Il est préférable de courbure avec une anse en Y de Roux de 200 cm. Le conduit
garder pour l’anse jéjunale une position antérieure sur l’antre biliopancréatique mesure 150 cm et le conduit intestinal
gastrique. commun 200 cm. L’estomac proximal qui sert de réservoir est
Le chirurgien se place maintenant entre les membres infé- limité au cardia de l’estomac, diminuant ainsi le risque de
rieurs de l’opéré. Cette anastomose est terminolatérale et dilatation de la néopoche gastrique et le risque d’ulcère anasto-
« manuelle », en utilisant des surjets de PDS® 2/0 ou tout autre motique. Il y a en effet peu de cellules pariétales oxyphiles dans
fil résorbable. Pour faciliter ce geste, on suspend d’abord l’anse cette région gastrique. On parle alors de near total gastric bypass
jéjunale par deux points de fixation de fil non résorbable (NTGBP). [120]
2/0 sur la ligne d’agrafage de la gastroplastie en adossant sa face Création de l’anse en Y de Roux. L’anastomose jéjunojéjunale
séromusculeuse. Il faut contrôler l’absence de torsion du est irréalisable en extra-abdominal chez l’obèse (mésentère court
mésentère lors de son ascension. Deux entérotomies sont faites. et paroi épaisse). Elle est faite en intracorporel plutôt que par
1
2
b
Le CCG dit « fonctionnel » (Fig. 25A, B) cité par Cariani, [14] droit. Cette incision verticale minimise le risque d’éventration.
Furbetta, [37] Himpens [44] et Zimmerman [122] a été décrit On peut dans cette technique éviscérer le grêle pour réaliser
comme une solution potentielle mais se heurte à une impor- l’anastomose jéjunojéjunale. L’utilisation d’une incision
tante morbidité (fistule, sutures digestives et proximité de médiane près de l’ombilic évite une seconde incision en cas de
matériel prothétique). C’est un procédé de conversion laissant conversion en laparotomie. Il peut alors introduire en toute
en place le matériel de silicone médical initialement implanté, sécurité les trocarts opératoires sans un recours initial au
en principe un anneau ajustable. pneumopéritoine. Toutefois, les saignements peropératoires, les
Ceci permet d’aborder un problème difficile qui est celui du difficultés d’exposition et d’autres problèmes techniques
devenir de l’estomac exclu. Du fait du montage chirurgical, on requièrent aussi une conversion de cette technique en
ne peut accéder directement au reste de l’estomac par endosco- laparotomie.
pie ou transit radio-opaque. Cette poche qui ne reçoit pas
La main du chirurgien permet aussi d’écarter les organes pour
d’aliment est le siège de métaplasie gastrique dans 5 % des cas.
une meilleure exposition. Elle va aider à disséquer, en particulier
Il n’a jamais été publié d’augmentation du risque de cancer
pour l’accès à l’arrière de la cavité des épiploons. Cela permet
dans les CCG.
Court-circuit gastrique assisté manuellement (hand-assisted) d’ascensionner l’intestin grêle sans le traumatiser et de faciliter
sous laparoscopie (Fig. 29). C’est une technique [102] qui permet l’anastomose gastrojéjunale sans tension. La fermeture du
de conserver les avantages de l’abord laparoscopique et apporte mésocolon est plus facile par cette technique assistée manuelle
en plus une sensation tactile, ce qui est appréciable en cas de comme la réalisation de l’anastomose gastrojéjunale. Le temps
d’épais tissus graisseux chez ces « superobèses ». Le chirurgien opératoire est de 205 minutes et la durée moyenne de séjour est
peut introduire une main, habituellement la « non dominante » de 5 jours.
dans l’abdomen au travers d’une gaine plastique circulaire La question se pose de savoir si l’adjonction d’une incision à
occlusive pendant que le pneumopéritoine est maintenu. la technique laparoscopique du CCG fait mieux que l’utilisation
L’incision complémentaire se fait en transrectal et sous-costal d’une unique incision de 12 cm à la partie supérieure de
Il faut surtout noter que les malades vont maigrir vite ; cela
va retentir sur leur « image corporelle » et il faut un suivi
psychologique parfait.
1
Complications postopératoires immédiates
2 Ce paragraphe est fondamental.
Les décès postopératoires (mortalité de 0,5 %) sont essentiel-
3 lement le fait d’embolies pulmonaires.
Les complications majeures initiales du bypass gastrique sont
Figure 28. Court-circuit gastrique sur une anse en « omega » (Lonröth les fistules digestives et les hémorragies gastro-intestinales.
et Cadière). 1. Anse biliopancréatique ; 2. anse alimentaire efférente ; Fistules digestives [69]
3. anse commune.
Les fistules gastriques (1 %) se traduisent par des signes
cliniques parfois trompeurs. Il faut se méfier d’une douleur
dorsale, de l’épaule gauche, d’un ténesme rectal ou de mictions
impérieuses. Tout patient opéré d’un bypass gastrique et qui
souffre au troisième jour postopératoire est suspect d’une
complication.
8 cm 2
5
“ Conduite à tenir
4
1 Les fistules sur l’entéroentérostomie sont d’expression
clinique plus précoce, en général vers le deuxième jour au
lieu de 7 jours pour l’anastomose gastrojéjunale. Elles sont
de diagnostic clinique et sont confirmées par une
exploration chirurgicale, associées à un sepsis, une
péritonite et un collapsus vasculaire. Devant les signes
cliniques précités, il faut réintervenir précocement pour
contrôler la fistule digestive. Le plus souvent, le geste est
Figure 29. Court-circuit gastrique assisté manuellement. fait par laparotomie pour la plupart des auteurs. La
radiographie utilisant des hydrosolubles est négative en
l’abdomen en cas de chirurgie ouverte choisie d’emblée. Le cas de fistule distale, qui est la plus grave.
bénéfice postopératoire de l’abord laparoscopique « pur » La gravité de cette complication serait liée au fait que les
disparaît. obèses géants ont une réponse inflammatoire majeure,
même pour une agression mineure, et se défendent mal. Il
Évolution postopératoire faut donc être très rapide dans la décision de reprise
Pour Higa, [43] le temps opératoire était de 60 à 90 minutes, chirurgicale, seule chance pour ces malades fragiles.
avec un délai d’hospitalisation moyen de 1 à 6 jours ou de 2 à
7 jours en cas de conversion en chirurgie ouverte. Pour Wit-
tgrove et Clark, [119] le temps opératoire était de 90 minutes et
la durée moyenne de séjour était de 2,6 jours. En règle générale, Les fistules digestives conduisent à une péritonite et peuvent
il faut admettre de façon raisonnable un temps opératoire entre se produire sur trois sites : l’anastomose gastrojéjunale, l’esto-
2 et 4 heures, n’incluant pas le temps d’installation du patient mac distal exclu et la jéjuno-jéjunostomie. Leur incidence est
qui est de 30 minutes environ. Les patients ont au deuxième estimée entre 1 % et 5,1 %. Les fistules digestives sont plus
jour postopératoire un examen de la gastroentérostomie avec un fréquentes en début d’expérience pour le bypass gastrique
TOGD par des hydrosolubles et ils commencent alors une diète (jusqu’à 19 %) et lors des procédés de révision chirurgicale. Les
liquide. Ils débutent une alimentation au bout de 1 semaine, signes complémentaires sont une fièvre, une tachypnée, une
“ Règles d’indication opératoire tolérance aux régimes postopératoires imposés sont des argu-
ments d’information « éclairée » fondamentaux pour la décision
opératoire.
Il faut toutefois respecter des règles d’indication La multiplicité des techniques utilisées, la connaissance
opératoire (décision et responsabilité collégiale) et un suivi actuelle des complications chirurgicales et le perfectionnement
postopératoire strict pour obtenir une réelle efficacité de de l’instrumentation laparoscopique (alliée à la robotique [75])
cette chirurgie encore controversée. Un registre des soulignent l’importance du développement mais aussi la
nécessité du contrôle et d’une évaluation de la chirurgie
malades opérés sera une référence dans ce domaine.
bariatrique.
Schématiquement, on peut proposer un cerclage Sachant que la majorité des opérés sont des adultes jeunes et
gastrique par anneau modulable aux patients jeunes (sexe que leur espérance de vie est longue, il faut privilégier actuelle-
féminin, désir de grossesse), non hyperphages, sans ment l’utilisation des anneaux gastriques ajustables en première
hernie hiatale supérieure à 2 cm et/ou RGO, sans trouble intention. De ce fait, un suivi à long terme est primordial, mais
majeur du comportement (mangeurs de sucre, il se heurte à une population dont la psychologie est souvent
compulsifs, vomisseurs). particulière et plus difficile à dominer que les contraintes
techniques puisqu’elle nous échappe.
■ Conclusion ■ Références
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Actuellement, trois types d’interventions sont pratiqués et adjustable gastric banding: an early and intermediate experience. Obes
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Lointier P. Chirurgie laparoscopique de l’obésité morbide. EMC (Elsevier SAS, Paris), Techniques
chirurgicales - Appareil digestif, 40-380, 2005.
Résumé. – Les gastrectomies, partielles ou totales, sont marquées d’une morbidité et d’une mortalité
significatives dues aux complications périopératoires et aux troubles fonctionnels postopératoires. Les
reconstructions après gastrectomie partielle font appel à une anastomose gastroduodénale rétablissant le
circuit digestif physiologique ou à une anastomose gastrojéjunale. Chaque type de rétablissement présente
ses avantages et ses inconvénients. Précocement, on peut observer des fistules et des hémorragies digestives.
Plus tardivement, ce sont les troubles de l’évacuation et de la motricité gastrique, le reflux ainsi que les
troubles de l’alimentation qui dominent. La prise en charge de ces complications fait souvent appel à des
mesures diététiques, mais une solution chirurgicale est parfois nécessaire. À distance, les ulcères
anastomotiques et les cancers du moignon gastrique sont deux complications évolutives et imprévisibles, dont
la prise en charge chirurgicale est toujours difficile. Les gestes opératoires secondaires sont compliqués en
raison des antécédents chirurgicaux. Dans le cas de troubles fonctionnels, une amélioration n’est obtenue
après une reprise chirurgicale que dans 50 à 75 % des cas. Pour ces raisons, les indications opératoires
doivent être posées avec discernement. Les réinterventions consistent en la réfection d’un circuit digestif
physiologique ou, au contraire, en une résection gastrique complémentaire avec un nouveau montage. Dans
certains cas, la totalisation de la gastrectomie est nécessaire.
© 2002 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Le nombre des gastrectomies réalisées pour le traitement des cancers HÉMORRAGIE PEROPÉRATOIRE
diminue, en raison de la baisse de l’incidence observée des cancers
de l’estomac. La prise en charge médicale de la pathologie ulcéreuse ¶ Hémorragies par lâchage de suture vasculaire
et l’éradication d’Helicobacter pylori ont quasiment fait disparaître
les indications de gastrectomie pour complications de la maladie Une hémorragie peut survenir à l’occasion du simple « lâchage »
ulcéreuse dans les pays occidentaux. L’incidence de la chirurgie d’une suture vasculaire. Elle est d’abord contrôlée par compression
locale, puis par identification précise du mécanisme lésionnel et du
pour ulcère est estimée entre 45 et 60 pour 100 000 habitants dans
vaisseau atteint. Habituellement, la plaie est réparée par suture
les pays occidentaux [ 1 6 ] . Lorsqu’elles sont pratiquées, les
élective en utilisant un fil résorbable, non résorbable en cas
gastrectomies bénéficient d’une technique rigoureuse et de l’apport
d’hémorragie artérielle (type Prolènet 3/0 ou 4/0), ou par
de nouvelles technologies facilitant la réalisation du geste coagulation bipolaire. Dans tous les cas, on s’assure que la mise en
chirurgical. Les complications opératoires des gastrectomies peuvent place de la suture n’est pas responsable de l’oblitération d’un tronc
être liées à des conditions locales défavorables (envahissement vasculaire majeur, laquelle implique une réparation artérielle
tumoral ou inflammatoire imprévu, séquelles d’interventions préservant le flux sanguin. Ce risque existe en cas de lâchage de la
précédentes, cancer) ou à un incident opératoire. Les complications suture à l’origine de l’artère gastrique gauche. Le saignement est
postopératoires, en dehors des complications chirurgicales, sont responsable d’un hématome diffusant dans les mésos, rendant le
surtout fonctionnelles. Moins fréquemment, on peut observer la contrôle de l’hémorragie laborieux. L’application d’un point à
survenue d’ulcères ou de cancers. La prise en charge de ces l’aveugle peut prendre l’artère hépatique commune, l’artère
complications doit alors être adaptée et rapide pour éviter, par des splénique ou le tronc cœliaque. La palpation de ces pédicules
manœuvres inappropriées, une aggravation du problème rencontré. s’assure de leur perméabilité. Cette suture hémostatique peut
également inclure la voie biliaire principale, entraînant une
obstruction biliaire.
Une plaie des troncs vasculaires majeurs (artère hépatique, tronc
cœliaque) doit impérativement être réparée par une suture
Didier Mutter : Professeur des Universités, praticien hospitalier. microvasculaire (Prolènet 6/0, 7/0 ou 8/0 selon son diamètre), si
Jacques Marescaux : Professeur des Universités, praticien hospitalier, chef de service.
Clinique chirurgicale A et European Institute of Telesurgery (EITS)-IRCAD, hôpital civil, 1, place de l’Hôpital,
possible sous contrôle de lunettes grossissantes. Une plaie de l’artère
67091 Strasbourg cedex, France. splénique impose en général une splénectomie de nécessité.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Mutter D et Marescaux J. Complications des gastrectomies. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Techniques chirurgicales
- Appareil digestif, 40-350, 2002, 19 p.
40-350 Complications des gastrectomies Techniques chirurgicales
Des saignements mineurs sont facilement contrôlés par une La dissection laborieuse du pédicule hépatique ou du premier
coagulation monopolaire ou au mieux de façon élective par une duodénum lors de la prise en charge d’ulcères chroniques ou lors
coagulation bipolaire. de la réalisation de curages peut être à l’origine de plaies de la voie
Les plaies veineuses sont souvent plus difficiles à contrôler et biliaire principale ou des canaux pancréatiques. Une plaie biliaire
imposent la mise en place de suture « en masse » au sein des tissus. peut être constituée par une plaie latérale, une section complète ou
La survenue d’une plaie veineuse lors de la dissection du confluent une résection segmentaire de la voie biliaire principale. La lésion
gastrocolique (tronc de Henlé) est difficile à contrôler. L’application des canaux pancréatiques peut consister en un arrachement de la
à l’aveugle d’une pince hémostatique doit être évitée, afin de ne pas papille ou un arrachement du canal de Santorini. Souvent, la plaie
provoquer de plaie latérale de la veine porte. La lésion doit être est liée à des conditions de dissection difficiles et est ignorée. Elle
identifiée avec certitude et la plaie suturée au fil fin (Prolènet 4/0, survient lors d’une manœuvre de mobilisation du duodénopancréas
5/0 ou 6/0). Lorsque la plaie est contrôlée, il faut aborder la veine à l’aveugle, par traction excessive sur des tissus fragilisés par une
mésentérique et la veine porte pour s’assurer de leur perméabilité. tumeur ou par une inflammation locale réactionnelle. L’opérateur
La prévention de ces lésions passe par une parfaite connaissance de est alors confronté à une fistule postopératoire, plus grave qu’une
l’anatomie locale, par la recherche systématique des éléments simple désinsertion de la papille, dont l’origine est difficile à mettre
vasculaires, et nous recommandons le « doublage » des ligatures en évidence dans ce contexte. Pour cette raison, il faut toujours
vasculaires par des clips ou des points appuyés en cas de doutes ou s’attacher à identifier l’origine de tout suintement souillant le champ
de difficultés de réalisation. opératoire en fin d’intervention. Au moindre doute, un test au bleu,
une cholangiographie peropératoire ou une wirsungographie
¶ Hémorragies parenchymateuses
s’imposent, à la recherche d’une lésion biliaire ou pancréatique.
Les manœuvres de dissection de l’estomac imposent l’écartement Test au bleu : le canal cystique est disséqué, et lié au contact de la
de la rate et du foie. Ces procédures sont parfois responsables de vésicule. Il est cathétérisé, et, après assèchement par une compresse
plaies parenchymateuses à l’origine de saignements pouvant être du champ opératoire, l’opérateur y injecte une solution de bleu de
importants.
méthylène dilué à 50 %. Pendant cette injection, l’opérateur
Plaies hépatiques recherche un écoulement du bleu dans le champ opératoire.
Une plaie hépatique est habituellement bénigne. Elle est traitée par Cholangiographie peropératoire : le canal cystique est disséqué, et lié
tamponnement. En cas d’échec, il est possible d’avoir recours aux au contact de la vésicule. Il est cathétérisé. Sous contrôle d’un
divers procédés d’hémostase des parenchymes solides disponibles : amplificateur de brillance, du liquide radio-opaque est lentement
coagulation à l’argon, coagulation bipolaire, colle biologique et instillé dans les voies biliaires, à la recherche d’un écoulement
compresses hémostatiques à base de collagène. À l’inverse, il faut anormal, d’un obstacle ou d’une désinsertion de la papille.
s’abstenir d’écarter les berges de la plaie pour chercher à obtenir
une coagulation en profondeur, ce geste risquant d’aggraver la ¶ Traitement d’une plaie de la voie biliaire principale
situation.
Une plaie latérale et peu importante du cholédoque peut être traitée
Plaies spléniques par suture directe, faite au fil fin résorbable (5/0), sous couvert d’un
Une plaie du parenchyme splénique implique une splénectomie de drainage biliaire par le biais d’un drain transcystique. Une plaie
nécessité si elle ne peut être contrôlée par tamponnement, au besoin latérale plus importante, ou exceptionnellement une section
associé à des compresses hémostatiques et à de la colle biologique. complète d’un cholédoque de bonne qualité, dans un contexte non
Le traitement conservateur est réservé à des érosions superficielles inflammatoire et sans perte de substance, peuvent être traitées par
de la capsule splénique. Il existe dans ce cas un risque significatif une suture terminoterminale transversale sous couvert d’un drain
d’hématome sous-capsulaire et de rupture secondaire de la rate. Le tuteur en T (drain de Kehr) (fig 1). Le drain est alors extériorisé par
placement de drains de surveillance est inefficace et la surveillance un trajet aussi court que possible. Il est conservé pendant une durée
échographique ne constitue pas une sécurité satisfaisante dans le minimale de 15 jours pour une plaie latérale, de 1 à 2 mois pour une
contexte de la période postopératoire immédiate. Il faut connaître le section, et une cholangiographie est effectuée avant son retrait. Dans
risque de dévascularisation du moignon gastrique après tous les autres cas, il est impératif d’avoir recours à une dérivation
gastrectomie subtotale. La ligature des vaisseaux spléniques est biliodigestive, qui est idéalement une suture biliodigestive sur anse
responsable de la suppression de la vascularisation de suppléance en Y (fig 2).
de l’estomac. La totalisation de la gastrectomie s’impose dans ce cas.
¶ Traitement d’une désinsertion de la papille
¶ Hémorragies de la tranche de résection
duodénale
ou de l’anastomose
Cette complication est le plus souvent liée à l’importante Cet accident survient après une dissection duodénale poussée loin
vascularisation de la paroi gastrique. Il est de ce fait impératif de sur le deuxième duodénum, lorsque la position de la papille a été
compléter la section de l’estomac par la réalisation d’un surjet mal évaluée. Pour la réparation, il est possible d’utiliser, comme
hémostatique sur la tranche. Cette complication est également une pour la voie biliaire, le duodénum ou une anse en Y. Le principe de
particularité des anastomoses mécaniques. Les pinces de section- la réparation consiste en la réalisation d’un « ventousage » digestif
agrafage linéaire appliquent des agrafes réalisant parfois une sur le moignon distal du pancréas.
compression insuffisante de la paroi de l’estomac ou de l’intestin Le montage peut utiliser le moignon duodénal. Il est mobilisé plus
grêle. Il peut en résulter une hémorragie de la tranche d’anastomose. en aval pour pouvoir couvrir totalement la tête du pancréas,
Il convient de ce fait de réaliser systématiquement une éversion de englobant la jonction biliopancréatique. Une suture latéroterminale
toute suture mécanique par agrafage, afin de s’assurer de la parfaite est effectuée entre le duodénum libéré et le moignon pancréatique.
hémostase de la tranche d’anastomose et, au besoin, de compléter Le premier plan de cette suture est réalisé à la face postérieure du
l’hémostase par électrocoagulation ou par application d’une suture pancréas, le second à sa face antérieure, par des points séparés de fil
hémostatique au fil résorbable 3/0 ou 4/0. résorbable 4/0 ou 5/0. L’intérêt de l’utilisation du duodénum est de
rétablir un circuit digestif physiologique, pouvant prévenir la
LÉSIONS BILIAIRES ET PANCRÉATIQUES survenue d’ulcères anastomotiques. Son inconvénient est d’être
Une plaie de la vésicule biliaire ou la ligature de l’artère cystique, réalisée sur un duodénum souvent de mauvaise qualité, parfois
qui est impérative au cours d’un curage du pédicule hépatique, sont ischémié par une dissection prolongée, exposant dans ces conditions
traitées par une cholécystectomie. à la fistule pancréatique postopératoire.
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Elle peut être plus tardive, due à une chute d’escarre survenant entre de la bile ou du suc pancréatique. Les fistules digestives sont
les septième et dixième jours postopératoires. Elle n’est pas caractérisées par le débit fistuleux, par la toxicité du produit
spécifique du type d’anastomose réalisée (manuelle ou mécanique). fistuleux et par sa septicité. Le débit de la fistule a une valeur
Elle est diagnostiquée par l’apparition d’un méléna ou par pronostique certaine. Un débit important entraîne une déperdition
l’aspiration de sang rouge par la sonde nasogastrique chez un majeure en liquides, électrolytes, protéines, vitamines, lipides, qui
malade gastrectomisé. Le traitement est dans un premier temps contribue à l’altération de l’état général du patient. À ces facteurs
conservateur avec maintien d’une aspiration gastrique et s’ajoutent une maldigestion par défaut en enzymes pancréatiques,
réanimation hydroélectrolytique. Cette hémorragie reste le plus une malabsorption et une anorexie. Le produit fistuleux est septique,
souvent modérée et ne nécessite pas de geste chirurgical. Un geste ce qui accroît son caractère délétère et augmente les besoins
endoscopique n’est pas indiqué en période postopératoire précoce, énergétiques du patient, aggravant de ce fait la dénutrition par
l’insufflation requise pour effectuer l’exploration risquant d’entraîner malabsorption.
une désunion anastomotique.
En cas de persistance ou d’aggravation, une hémorragie sur tranche ¶ Bilan des fistules digestives
de section gastrique doit être contrôlée par voie chirurgicale. Le La gravité d’une fistule dépend de son évolution clinique. Une fuite
geste consiste en une reprise de l’incision chirurgicale. La face minime, colmatée au plus près de l’organe, reste souvent
antérieure de l’estomac est exposée. Une gastrotomie verticale est asymptomatique. L’anastomose peut parfois évoluer vers une
réalisée au-dessus de l’anastomose. L’estomac est décaillotté et lavé. sténose secondaire. La fistule est le plus souvent mise en évidence
Un surjet hémostatique est mis en place sur la zone hémorragique. par des examens complémentaires (transit ou lavement opaques,
Il est conseillé à ce moment de doubler l’ensemble de l’anastomose tomodensitométrie) (fig 4). Une fuite peut être cloisonnée par une
par un surjet. L’estomac est ensuite refermé en double plan et réaction inflammatoire réactionnelle locale (péritoine ou organes de
drainé. voisinage). Dans ce cas, le contenu intestinal se draine vers la peau,
Exceptionnellement, une hémorragie peut être due à l’apparition cas le plus fréquent, ou vers un autre viscère. Il constitue une fistule
précoce d’un ulcère peptique anastomotique. Le traitement en est postopératoire, interne ou externe. Le taux de fistule observé en
médical, avant d’envisager une dégastrogastrectomie en cas de chirurgie gastrique est de 4 % pour les sutures œsophagiennes
résistance au traitement médical. intrathoraciques [6] et de 2,7 % pour les sutures gastriques. Enfin, une
fuite abondante et précoce aboutit à la constitution d’une péritonite
FISTULES DIGESTIVES généralisée ou multifocale. Cette péritonite postopératoire précoce
¶ Facteurs de risque des fistules digestives constitue une véritable catastrophe, responsable à ce jour d’une
mortalité globale de 50 %.
La principale étiologie des fistules digestives est la désunion
Les fistules sont mises en évidence par la surveillance clinique des
anastomotique. Rare pour les anastomoses gastrojéjunales, elle est
drainages, éventuellement complétée par des examens d’imagerie :
plus fréquente pour les anastomoses œsojéjunales (4 %) [6] ou sur les
échographie pour mettre en évidence un abcès, transit œsogastrique
fermetures du moignon duodénal (0,1 à 2 %) [3, 8] . Une faute
aux hydrosolubles pour visualiser un trajet fistuleux, épreuve au
technique peut avoir diverses origines qui sont : la réalisation d’une
bleu de méthylène. À terme, le bon sens détermine le plus souvent
anastomose en tension, l’existence d’une vascularisation insuffisante
l’urgence d’un geste de réintervention.
ou une mauvaise préparation des berges anastomotiques. Il peut
s’agir du résultat d’une agression viscérale peropératoire telle
¶ Traitement des fistules digestives
qu’une dépéritonisation ou une dilacération musculaire.
Certains facteurs favorisent la survenue d’une fistule postopératoire : Traitement médical des fistules digestives
le plus fréquent est la réalisation d’une anastomose sur un tube
digestif pathologique. Les fistules postopératoires surviennent Les fistules correctement et totalement drainées, qui ne
volontiers dans un contexte de réintervention et donc d’adhérences s’accompagnent pas d’un retentissement clinique ou septique
cicatricielles, sur maladies inflammatoires de l’intestin, sur affections important, peuvent être traitées par une simple prolongation de la
tumorales [13] ou sur lésions radiques. L’infection péritonéale et la durée du drainage.
distension intestinale par une occlusion altèrent la qualité de la De nombreux produits et techniques ont été proposés pour tenter
cicatrisation. Enfin, l’état général et les tares associées, telles que de favoriser le tarissement et la cicatrisation des fistules. Aucun
l’âge, la dénutrition, l’hypoprotéinémie, l’hypovitaminose C, produit n’a, à ce jour, fait la preuve de son efficacité. Seule
l’anémie, les pathologies vasculaires, certains médicaments comme l’administration de somatostatine (6 mg/j par voie intraveineuse
les corticoïdes, sont autant de raisons fréquemment invoquées, continue) accompagnée d’une mise au repos totale du tube digestif
même si elles sont rarement démontrées. (aspiration nasogastrique, alimentation parentérale totale) peut
significativement tarir les sécrétions digestives, entraînant une
¶ Clinique des fistules digestives fermeture précoce de la fistule. Il faut noter que ce traitement
La fistule digestive se définit par l’écoulement de liquide digestif n’augmente pas le taux de guérison des fistules. Ce traitement est
hors du tube digestif. Elle peut concerner du liquide « intestinal », complété par une antibiothérapie à large spectre. Enfin, la paroi
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Techniques chirurgicales Complications des gastrectomies 40-350
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Dans tous les cas de fistules postopératoires, il est associé au conditions difficiles. L’organe nécrosé doit être réséqué et son
drainage une alimentation hypercalorique par voie entérale si une remplacement par un élément anatomique de substitution envisagé
jéjunostomie d’alimentation a été mise en place ou le cas échéant dans des conditions opératoires défavorables, chez un malade en
une alimentation parentérale, ainsi qu’une antibiothérapie à large mauvais état général. Leur pronostic est redoutable. De ce fait, seul
spectre s’il existe des signes de sepsis. un geste de sauvetage avec résection des éléments nécrosés sans
reconstruction immédiate doit être effectué en urgence. La meilleure
ABCÈS POSTOPÉRATOIRE prévention des ischémies postopératoires est l’abstention de tout
Un abcès postopératoire est suspecté de principe devant l’apparition montage ou résection excessive sans test de clampage peropératoire.
d’une fièvre au décours de la réalisation d’une suture digestive. Les Il faut aussi s’assurer de la viabilité du segment digestif suturé, en
moyens d’imagerie moderne, le recours facile au scanner, permettent évitant tant le serrage ischémique d’une suture qu’une dissection
d’identifier rapidement les abcès. Ceux-ci sont si possible excessive des pédicules vasculaires.
ponctionnés et drainés sous contrôle radiologique (fig 4B).
¶ Nécrose duodénale
PÉRITONITE AIGUË POSTOPÉRATOIRE
Elle peut survenir après une dissection excessive du moignon
Une désunion anastomotique importante, responsable précocement duodénal ou parfois après ligature sus- et sous-duodénale de l’artère
d’un tableau clinique bruyant, impose une reprise chirurgicale. gastroduodénale. Proximale et limitée, elle est responsable d’une
L’objectif est alors un geste de sauvetage. fistule duodénale. Bien drainée, elle peut être traitée de façon
conservatrice, avec un drainage prolongé. En cas de reprise
PANCRÉATITES POSTOPÉRATOIRES chirurgicale, la partie proximale du moignon duodénal est réséquée,
Elles sont souvent déclenchées par un traumatisme peropératoire puis drainée en fistule dirigée. Une exceptionnelle nécrose étendue
du pancréas, qu’il s’agisse de lésions méconnues des canaux du duodénum qui survient sur un terrain débilité (patient
pancréatiques (en particulier de l’effraction du canal de Santorini) présentant une insuffisance vasculaire) impose une duodénectomie
ou de blessures des vaisseaux pancréatiques avec nécrose avec réimplantation de la papille ou une duodénopancréatectomie
pancréatique localisée. Mais l’obstruction aiguë de l’anse afférente céphalique de sauvetage. Le pronostic est sombre.
et le reflux dans le canal de Wirsung qu’elle provoque peuvent
également déclencher une poussée aiguë de pancréatite, volontiers ¶ Nécroses gastrique, colique ou grêle
suppurée et nécrosante.
Le traitement est celui de la pancréatite aiguë. Le pronostic est Ces complications sont dues aux ligatures des artères gastriques
sombre. gauches et de la plupart des vaisseaux courts pour l’estomac, des
artères coliques de suppléance en l’absence de l’arcade bordante
pour le côlon ou des pédicules vascularisant l’anse montée pour
ÉCOULEMENTS LYMPHATIQUES
l’intestin grêle. Si le diagnostic en est toutefois souvent réalisé au
Les curages lymphatiques étendus, tels qu’ils sont réalisés dans les cours de l’intervention (cf supra), il peut être retardé et mis en
gastrectomies D2 ou D3, sont souvent à l’origine d’écoulements évidence tardivement, en particulier chez un malade nécessitant une
prolongés. Une fistule pancréatique est éliminée par le dosage des réanimation difficile impliquant l’utilisation de drogues
amylases dans le liquide de drainage. Le traitement consiste en un vasopressives au cours de la période postopératoire. Elles se
drainage prolongé de l’écoulement.
manifestent par des douleurs abdominales et un état de choc,
rapidement complétés par une fistule digestive par lâchage des
ISCHÉMIES POSTOPÉRATOIRES anastomoses des segments en cause. Elles impliquent une reprise
Les lésions ischémiques postopératoires sont exceptionnelles mais chirurgicale urgente avec réalisation d’une nouvelle anastomose ou
graves. Elles impliquent toujours une reprise chirurgicale dans des le plus souvent un drainage de sauvetage.
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Troubles fonctionnels par laquelle s’écoulent toutes les sécrétions biliaires et pancréatiques,
aboutit rapidement à une gêne fonctionnelle importante.
L’obstruction survient parce que l’anse est trop courte et qu’elle est
TROUBLES DU TRANSIT
étirée sur le chevalet colique après un montage précolique, ou parce
Les vomissements postopératoires précoces sont fréquents et bénins. qu’elle est trop longue et qu’elle se volvule au remplissage.
Ils sont liés à un œdème de l’anastomose et sont traités par le Cliniquement, on peut palper une masse dans l’hypocondre droit.
maintien d’une aspiration digestive pendant quelques jours. On observe un tableau d’occlusion haute avec vomissements non
Les troubles tardifs de la vidange gastrique sont plus rares. Ils sont bilieux. À la radiographie abdominale sans préparation, on constate
explorés par une scintigraphie gastrique. Dans certains cas, ils un seul niveau liquide. La distension de l’anse peut être responsable
peuvent être liés à la vagotomie associée à l’antrectomie lors du d’une fistule anastomotique ou d’une nécrose de l’anse. Le
traitement d’un ulcère [2, 14]. Les vomissements tardifs peuvent avoir traitement consiste en une dérivation de l’anse sténosée par une
de nombreuses étiologies [7]. Certaines sont chirurgicales, d’autres anastomose latérolatérale au pied de l’anse (fig 7) ou en la réduction
uniquement médicales. Dans ce cas, de nombreux auteurs ont et la fixation de l’anse volvulée. Le suc biliopancréatique ne circulant
proposé différents produits pour améliorer le transit et l’évacuation plus au contact de l’anastomose gastrojéjunale, il faut essayer de
gastrique : ce sont les agents prokinétiques (métoclopramide, prévenir l’apparition d’un ulcère peptique en réalisant une
cisapride, renzapride) ou l’érythromycine pour son effet agoniste de vagotomie complémentaire.
la motiline [ 2 1 ] . Aucun n’a confirmé son efficacité. Une
dégastrogastrectomie avec anastomose œsojéjunale n’améliore que ¶ Obstructions chroniques
deux tiers des patients [2], confirmant l’origine non mécanique de ces Elles réalisent ce qui a été dénommé le « syndrome de l’anse
troubles. Les causes « chirurgicales » de troubles du transit sont afférente ». Ce syndrome est en rapport avec une gêne à l’évacuation
détaillées ci-après. des liquides biliopancréatiques, entraînant une distension
duodénale. La gêne à l’évacuation de l’anse afférente a de
STÉNOSES ANASTOMOTIQUES nombreuses causes, souvent mécaniques, parfois fonctionnelles :
Les sténoses anastomotiques après gastrectomie sont peu fréquentes. angulation d’une anse courte ; torsion de l’anse afférente ;
Au cours de la période postopératoire précoce, on peut observer, adhérence ; coudure par le mésocôlon transverse ; invagination de
après gastrectomie partielle, des sténoses anastomotiques modérées l’anse afférente dans la bouche anastomotique.
liées à un œdème opératoire. Elles peuvent être mises en évidence Le signe caractéristique est marqué par des vomissements qui
par la réalisation d’un transit opaque aux hydrosolubles. Elles se surviennent 10 à 20 minutes après le repas. Le malade ressent une
traitent par une aspiration digestive de quelques jours et cèdent gêne abdominale avec état nauséeux qui peut durer de quelques
spontanément. minutes à une heure. Le soulagement est obtenu par un
Après gastrectomie totale, les sténoses sont peu fréquentes, vomissement de nourriture et de bile. Ce tableau évocateur se
habituellement inférieures à 1 % [9], et quasi inexistantes lorsque le reproduit au repas suivant, après une période d’accalmie complète.
diamètre des anastomoses effectuées à l’aide d’une pince mécanique Le transit ou le scanner montrent une anse afférente distendue ; le
est supérieur à 28 mm [18]. Ces sténoses, qui sont présentes pendant tubage met en évidence l’apparition très retardée de bile dans l’anse
les 3 premiers mois, s’amendent spontanément dans la majorité des efférente.
cas. Le diagnostic, porté par la clinique, nécessite d’abord la Le traitement du syndrome de l’anse afférente n’est pas univoque. Il
réalisation d’une dilatation endoscopique, à même de venir à bout existe parfois une cause évidente : une adhérence à supprimer, une
des sténoses peu symptomatiques. Les reprises chirurgicales pour anse trop longue à raccourcir. Certains ont proposé une dérivation
réfection de l’anastomose sont exceptionnelles. de l’anse afférente par duodénojéjunostomie, mais un tel montage
favorise l’apparition d’un ulcère peptique.
TROUBLES DU TRANSIT APRÈS ANASTOMOSE ¶ Syndrome de l’anse borgne
GASTROJÉJUNALE (POLYA/FINSTERER)
On peut rattacher aux syndromes obstructifs de l’anse afférente le
¶ Obstruction aiguë de l’anse afférente syndrome de l’anse borgne.
L’anse afférente comprend le duodénum et le segment jéjunal allant Cette complication est difficile à reconnaître, car l’intervalle entre la
du duodénum à l’anastomose gastrique. L’obstruction de cette anse, gastrectomie et son apparition peut être long et les symptômes
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Techniques chirurgicales Complications des gastrectomies 40-350
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subits non spécifiques. Le tableau clinique comprend une anémie, prolapsus muqueux dans l’anse efférente. Son diagnostic est
une stéatorrhée ou une diarrhée, souvent des signes de malnutrition. radiographique ou endoscopique. Elle est traitée chirurgicalement
Une gêne abdominale, des vomissements, sont rares. Le bilan par dégastrogastrectomie.
montre une dilatation de l’anse afférente, parfois l’image
radiologique de l’obstruction de l’anse afférente [4] : pas de passage ¶ Erreurs de montage
au transit, ou passage sur 1 à 2 cm puis arrêt abrupt, ou effet
Elles sont nombreuses et tout a été décrit.
pendulaire de passage et vidange dans l’estomac. Ce syndrome
serait lié à la prolifération des germes dans l’anse qui se vidange L’estomac peut avoir été anastomosé au côlon transverse, au
mal, avec une évacuation brutale du contenu septique de l’anse sigmoïde, voire au cæcum. Mais l’erreur la plus fréquente est la
expliquant les diarrhées. gastro-iléostomie qui conduit, en quelques mois, à un état de
malnutrition inquiétant. Le diagnostic de ces vices de montage est
Le traitement implique une remise en circuit du duodénum par
radiologique… ou parfois peropératoire au cours d’une reprise
conversion de l’anastomose gastrojéjunale en anastomose
chirurgicale pour troubles persistants. Le traitement est la réfection
gastroduodénale ou par anse interposée (cf infra).
des anastomoses.
¶ Obstruction de l’anse efférente
TROUBLES DU TRANSIT APRÈS ANASTOMOSE
Elle s’observe plutôt après montage transmésocolique et traduit une
GASTRODUODÉNALE (PÉAN)
incarcération de l’anse dans la brèche mésocolique ou une ascension
de l’anastomose à l’étage sus-mésocolique. Cliniquement, cet ¶ Dilatation aiguë du moignon gastrique
obstacle se présente sous la forme d’un tableau d’occlusion haute
avec des vomissements bilieux. Le cliché radiographique de Elle suit volontiers une vagotomie-antrectomie selon Péan, réalisée
l’abdomen montre plusieurs niveaux liquides sur le grêle proximal. pour sténose pylorique sur un estomac atone et dilaté : l’aspiration
Le traitement de ces occlusions est chirurgical si aucune amélioration gastrique couplée à une alimentation parentérale stricte suffit
ne se manifeste sous aspiration gastrique et alimentation parentérale souvent à rétablir l’évacuation gastrique. Si on doit réintervenir, une
exclusive. Il faut réaliser une nouvelle laparotomie pour identifier et gastrectomie itérative avec anastomose gastrojéjunale est logique et
traiter l’anomalie : désincarcérer une anse grêle ou réintégrer donne de bons résultats (fig 8) ; chez un malade fragile, une simple
l’anastomose à l’étage sous-mésocolique. Une anse efférente trop gastrostomie de décharge avec ou sans jéjunostomie peut représenter
longue doit être fixée. Dans certains cas, il est nécessaire de réaliser le geste salvateur.
une gastrostomie de décharge et une jéjunostomie d’alimentation de
sécurité. Le meilleur traitement de ces hernies internes est préventif ¶ Œsophagite peptique aiguë
avec une fermeture, lors de la première intervention, de toutes les Elle peut compliquer une ancienne hernie hiatale : la sonde gastrique
brèches mésentériques. ou l’étirement de l’angle de His après gastrectomie polaire inférieure
sont les facteurs déclenchants de cette œsophagite [1].
¶ Obstruction de la bouche anastomotique
Une gastrectomie partielle peut déclencher un reflux gastro-
Elle est due à l’invagination intragastrique du jéjunum ou à œsophagien bilieux agressif : il peut s’agir d’une gastrectomie
l’invagination intrajéjunale de l’estomac, sous la forme d’un polaire supérieure qui supprime le cardia, mais également d’une
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40-350 Complications des gastrectomies Techniques chirurgicales
¶ « Dumping syndrome »
La fréquence de ce syndrome est variable : de 2 à 88 % selon que les
vagotomie-antrectomie, dont le temps hiatal endommage toujours troubles frustes et transitoires sont ou non inclus [2]. Il se voit plus
l’appareil sphinctérien inférieur de l’œsophage. Il est donc souvent après anastomose gastrojéjunale. Il comprend deux entités.
indispensable de refermer l’hiatus et de reconstruire l’angle de His
après vagotomie-antrectomie. – Le syndrome postprandial précoce survient aussitôt après le repas
Cette œsophagite peptique a pour caractéristiques d’être précoce, (5 minutes à 1 heure). Le malade ressent une impression de faiblesse
aiguë et grave, et de se traduire volontiers par des hématémèses. La qui l’oblige à s’étendre avec une sensation de chaleur, de plénitude
gastroscopie découvre des lésions ulcérées. Le risque est l’évolution gastrique, avec ballonnement et une rougeur du visage. Il existe
vers une sténose peptique qui peut nécessiter une réintervention. souvent une tachycardie et une hypotension associées. Dans les
Celle-ci peut être une simple réfection de l’hiatus ou, pour des tableaux sévères apparaissent des nausées et des vomissements,
raisons techniques (hiatus déjà abordé), on peut lui préférer une parfois des coliques intestinales avec diarrhée. De nombreuses
« diversion duodénale » (fig 9). théories ont été invoquées : l’arrivée massive dans l’anse efférente
d’aliments non préparés par une digestion gastrique entraîne du fait
Néanmoins, le traitement médical suffit le plus souvent : pansements de leur hyperosmolarité un appel de liquides au niveau de l’intestin
gastriques, soins posturaux et suppression de la sonde et provoque une chute du volume plasmatique. D’autres hypothèses
nasogastrique. ont été avancées, comme la sécrétion de sérotonine déclenchée par
l’arrivée des aliments qui entraîne un véritable flush.
¶ Dysfonctionnement de la bouche anastomotique
– Le syndrome postprandial tardif survient 2 à 3 heures environ après
La sténose cicatricielle tardive est rare et s’observe surtout après la le repas et est calmé par la prise d’aliments. Il s’agit d’une
réalisation d’une anastomose gastroduodénale mécanique lipothymie avec sueurs. Dans quelques cas, le tableau, sévère, est
(principalement après utilisation d’une pince à anastomose circulaire fait de tremblements, de confusion mentale, et peut conduire à une
de calibre insuffisant) [7]. perte de connaissance. Le syndrome tardif est en rapport avec une
hypoglycémie : l’absorption rapide des sucres au niveau de l’anse
efférente entraîne une hypersécrétion insulinique et une
SYNDROME DU « PETIT ESTOMAC » hypoglycémie secondaire importante.
Il s’observe après gastrectomie polaire inférieure étendue ; il est dû L’évolution est en général régressive, mais impose parfois une
à l’atonie et à la réduction de volume du réservoir gastrique. Il se reprise chirurgicale pour réaliser une interposition jéjunale, qui peut
traduit par une sensation de plénitude gastrique douloureuse améliorer le transit et diminuer les troubles. Le plus souvent, un
pendant le repas. Des vomissements alimentaires libérateurs suivi diététique permet l’amendement de ces symptômes.
soulagent ensuite le malade. L’évolution se fait spontanément vers
la guérison à l’aide de quelques conseils hygiénodiététiques simples ¶ Diarrhées
et de produits antiémétisants (Motiliumt). Le traitement chirurgical
Elles sont aspécifiques et suivent une gastrectomie partielle dans 5 à
possible est l’interposition d’une anse jéjunale.
20 % des cas. Le diagnostic est uniquement clinique. Elles sont
traitées par des règles hygiénodiététiques.
BÉZOARD
Un bézoard peut provoquer l’obstruction de l’anastomose, surtout Techniques chirurgicales
si la bouche est étroite (Péan ou Finsterer) ; il est souvent le corollaire
d’une gastroplégie chronique (vagotomie associée). Il se traduit par La décision de réaliser une reprise chirurgicale après une
des ballonnements épigastriques suivis de vomissements gastrectomie partielle n’est jamais anodine. Il faut définir
10
Techniques chirurgicales Complications des gastrectomies 40-350
60 cm
*
A
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B
11
40-350 Complications des gastrectomies Techniques chirurgicales
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A
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B
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A
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B
disséquant surtout la grande courbure, puis une dissection du et l’anse est supprimée. L’estomac est refermé par un surjet ou par
moignon duodénal qui est anastomosé sur le moignon gastrique. agrafage à la pince à suture linéaire. L’anse isolée est anastomosée
L’extrémité libre de l’anse efférente est anastomosée à celle de l’anse entre l’estomac et le moignon duodénal, en terminal au niveau de
afférente, rétablissant ainsi un circuit physiologique du jéjunum. l’anse libre, et en latéral au niveau de l’estomac et du duodénum.
Cette procédure nous semble trop risquée dans le contexte de la L’extrémité libre de l’anse efférente est anastomosée à celle de l’anse
reprise chirurgicale (fig 12). afférente, rétablissant ainsi un circuit physiologique du jéjunum.
La reconversion indirecte (Henley) consiste à isoler un segment Cette procédure nous semble là encore trop risquée lors d’une
intestinal que l’on interpose entre le moignon duodénal et le reprise chirurgicale : les adhérences et la difficulté d’isoler une anse
moignon gastrique. Les deux pieds de l’anse jéjunale sont sectionnés libre exposent à un risque de nécrose de l’anse (fig 13).
12
Techniques chirurgicales Complications des gastrectomies 40-350
13
40-350 Complications des gastrectomies Techniques chirurgicales
*
A
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B
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C
*
D
Le premier temps comprend la dissection des adhérences parfois région constitue un bloc inflammatoire et œdémateux. Il faut alors
importantes : il faut libérer le côlon transverse, le bord antérieur et mener la dissection en contrôlant le mésocôlon par ses deux faces,
la face inférieure du foie. Après exploration des lésions, la vagotomie en menant la dissection au bistouri ou aux ciseaux, éventuellement
(fig 17A) est effectuée, en s’aidant au besoin d’un rétracteur costal. bipolaires. Souvent l’ulcère est ouvert dans le mésocôlon ; il ne faut
Puis l’ulcère peptique est disséqué. En soulevant le côlon et en pas chercher à l’enlever, mais ouvrir l’ulcération et s’aider du doigt
exposant sa face inférieure, on commence la mobilisation de l’anse dans la lumière anastomotique pour sectionner les attaches au ras
anastomotique. On libère les deux pieds de cette anse et, par une de l’estomac. Une fois la brèche mésocolique libérée, la suite de
traction légère et constante, on pédiculise l’anastomose (fig 17B). Il l’intervention est plus simple. On examine l’importance de la lésion
est utile à ce moment de passer un lacs autour de l’anastomose, ce ulcéreuse : si l’ulcération est étendue sur le grêle, il faut faire une
qui permet de bien l’exposer. On sépare ensuite l’anastomose de la résection en passant à distance des lésions et en restant au ras du
brèche mésocolique en restant au ras de l’estomac. Le danger de ce mésentère. La continuité digestive est rétablie d’emblée par la
temps est la blessure de l’arcade colique. Cette libération est facile si confection d’une anastomose jéjunojéjunale terminoterminale
l’ulcère est petit, sans réaction inflammatoire, mais souvent cette (fig 17C).
14
Techniques chirurgicales Complications des gastrectomies 40-350
*
E *
F
*
G
Le moignon gastrique, avec l’anse anastomotique réséquée, est attiré nouvel orifice mésocolique, car la brèche mésocolique antérieure est
dans l’étage sus-mésocolique. L’estomac est libéré des plans le siège de phénomènes inflammatoires risquant d’aboutir à une
postérieurs, la grande et la petite courbure dégagées jusqu’à la sténose de la bouche si elle est à nouveau utilisée. Elle est ensuite
hauteur désirée de la nouvelle section gastrique. La section gastrique refermée (fig 17D).
est effectuée selon la méthode habituelle (cf gastrectomie partielle
inférieure). La continuité est rétablie par anastomose gastrojéjunale,
en faisant monter une anse grêle située en général à une dizaine de RISQUE OPÉRATOIRE
centimètres en aval de l’anastomose jéjunojéjunale. Si la distance Au cours de la libération de l’anastomose, et surtout s’il existe un
séparant l’angle duodénojéjunal de la jéjunorraphie est volumineux ulcère remaniant la région, il y a un risque de blessure
anormalement longue, l’anastomose gastrojéjunale est faite en amont de l’arcade vasculaire du côlon transverse. La dissection doit être
de cette dernière. Il est préférable de faire passer l’anse à travers un menée par l’intérieur de la bouche anastomotique, en laissant le fond
15
40-350 Complications des gastrectomies Techniques chirurgicales
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A
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B *
C
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A
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B
16 Reconversion effectuée en sous-mésocolique. B. On repère le genu inferius en sous-mésocolique et on incise le péritoine en avant
A. Les anses efférente et afférente sont sectionnées sans dissection de l’anasto- du deuxième duodénum : on libère ainsi sa face antérieure et on y implante l’anse
mose, en sous-mésocolique. efférente.
de l’ulcère dans le mésocôlon. Si une plaie de cette arcade survient TECHNIQUES CHIRURGICALES APPLICABLES
au cours de la dissection, il peut être nécessaire de pratiquer une AUX COMPLICATIONS DES ULCÈRES PEPTIQUES
résection colique segmentaire, d’où l’intérêt de réaliser une Deux complications révèlent volontiers l’ulcère peptique :
préparation colique systématique. l’hémorragie et la perforation.
16
Techniques chirurgicales Complications des gastrectomies 40-350
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A
*
B
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D
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C
17 Gastrectomie itérative pour ulcère peptique après anastomose gastrojéjunale : C. La continuité digestive est rétablie d’emblée par la confection d’une anastomose
résection en « monobloc » de l’ulcère, de l’estomac et de la partie anastomotique du jéjunojéjunale terminoterminale.
jéjunum. D. Le moignon gastrique, avec l’anse anastomotique réséquée, est replacé à l’étage
A. Vagotomie. sus-mésocolique. L’estomac est libéré et la section gastrique est effectuée en em-
B. L’ulcère peptique est disséqué avec mobilisation de l’anse anastomotique : il portant le segment grêle attenant, puis la continuité est rétablie par anastomose
est utile de passer un lacs autour de l’anastomose, ce qui permet de bien gastrojéjunale en faisant monter une anse grêle située à une dizaine de centimè-
l’exposer. tres en aval de l’anastomose jéjunojéjunale.
17
40-350 Complications des gastrectomies Techniques chirurgicales
*
B
*
A
18 Traitement d’une fistule gastro-jéjuno-colique sur ulcère peptique en un temps. B. Duodénojéjunostomie, anastomose colique terminoterminale, nouvelle gastrojéju-
A. Section des pieds de l’anse, colectomie segmentaire, recoupe gastrique. nostomie précolique.
de contraste. Il ne faut pas emboliser l’artère colique moyenne (colica • Dérivation externe préalable
media) en raison du risque de nécrose colique. Le traitement est la La réalisation d’une colostomie « de proche amont » semble la
dégastrogastrectomie ou la gastrectomie itérative, et surtout méthode la plus simple : elle permet d’attendre une amélioration de
l’hémostase chirurgicale de l’arcade colique, qui impose souvent une l’état général avec guérison de l’inflammation jéjunale et ne coupe
colectomie transverse de nécessité. aucun pont pour une intervention ultérieure (fig 19A, B). En cas de
¶ Ulcère peptique perforé perforation d’un ulcère en péritoine libre, donnant un syndrome de
péritonite, une intervention s’impose. Il faut dans ce cas réaliser un
La perforation peut être couverte et se faire dans la lumière colique : geste a minima (suture simple, gastrostomie de décharge…)
c’est la fistule gastro-jéjuno-colique. L’ulcère est souvent calleux, permettant d’attendre une amélioration de l’état général, avant
térébrant le mésocôlon qu’il rétracte ; le montage initial est presque d’envisager une dégastrogastrectomie qui s’impose.
toujours transmésocolique. Le diagnostic se pose devant un
syndrome diarrhéique avec amaigrissement, associé à des Dans tous les cas de perforation d’ulcère peptique, il est souhaitable
vomissements fécaloïdes et à une odeur fétide de l’haleine. Le de compléter le geste chirurgical par une jéjunostomie
lavement opaque visualise mieux la fistule que le transit. Selon le d’alimentation : elle permet une réalimentation entérale précoce,
degré d’urgence et la qualité de la préparation colique, l’intervention gage d’une cicatrisation accélérée et d’une amélioration rapide de
sera menée en un ou plusieurs temps. l’état nutritionnel.
18
Techniques chirurgicales Complications des gastrectomies 40-350
*
B
*
A
19 Traitement en deux temps d’une fistule gastro-jéjuno-colique. B. Cure radicale avec résection de la colostomie.
A. Colostomie de proche amont.
s’il s’agit d’un cancer du jéjunum lié à l’agression acide de l’estomac l’opérabilité : échographie hépatique à la recherche de métastases ;
ou s’il s’agit d’un cancer de l’estomac lié à l’agression par les sucs tomodensitométrie pour explorer la région cœliaque et les
biliaires et pancréatiques. En tout état de cause, son pronostic est connexions de la tumeur avec les viscères de l’étage sus-mésocolique
sombre. Son traitement fait appel aux techniques des gastrectomies et les gros vaisseaux. Le traitement chirurgical, quand il est possible,
habituelles. est la totalisation de la gastrectomie, avec splénectomie le plus
Rare, la cancérisation du moignon gastrique est grave, avec un souvent et parfois élargissement de nécessité au pancréas ou au
envahissement des organes de voisinage dans 40 à 50 % des cas [17]. côlon, voire au lobe gauche du foie. Le rétablissement de la
Son diagnostic est souvent retardé, car le tableau est trompeur. Les continuité est assuré par une anastomose œsojéjunale sur anse en Y.
signes d’appel sont variables : dyspepsie récente, baisse de l’état Toutefois, ce cancer reste particulièrement grave et il n’est pas établi
général, plus rarement dysphagie. Le diagnostic repose sur qu’un traitement agressif avec curage large soit bénéfique en termes
l’endoscopie avec biopsies ; le bilan d’extension permet d’apprécier de survie [11].
Références
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19
40-330-B
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 40-330-B
Résumé. – L’incidence du cancer de l’estomac diminue depuis 50 ans (de 250 à 100/100 000), mais il reste
un cancer dramatique avec une survie globale inférieure à 10 % à 5 ans. L’adénocarcinome gastrique est un
cancer à extension locale et ganglionnaire, dont le seul traitement potentiellement curatif est chirurgical.
L’augmentation de la survie passe par une détection plus précoce des cancers. La stratégie chirurgicale
dépend du type et du stade d’évolution du cancer. Le cancer gastrique superficiel peut bénéficier d’un
traitement conservateur, ou mini-invasif. Les cancers plus avancés sont traités par une gastrectomie, toujours
complétée d’une lymphadénectomie. Depuis les années 1960, la Japanese Research Society for Gastric
Cancer prône la réalisation de curages étendus. Cette attitude est justifiée par les résultats prometteurs des
premières séries publiées. Néanmoins, quelques études récentes font état d’un accroissement significatif de la
morbidité et de la mortalité secondaires à ces curages et ont remis en cause leur réalisation systématique.
Actuellement, la gastrectomie, souvent partielle, associée à un curage de proximité, est une option
raisonnable dans l’arsenal thérapeutique, même si des résections avec curages plus radicaux peuvent rester
de mise dans certaines indications. Nous présentons les bases chirurgicales des résections gastriques et des
lymphadénectomies, ainsi que les moyens de rétablissement de la continuité après résection gastrique
étendue.
© 2001 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Selon une étude de l’American College of Surgeons portant sur plus Dissémination péritonéale Omentectomie et résection péritonéale
de 18 000 patients, la localisation des cancers de l’estomac est, dans Métastases hépatiques Hépatectomie
31 % des cas, au tiers supérieur, dans 14 % au tiers moyen et dans
26 % au tiers inférieur. La tumeur envahit la totalité de l’estomac
dans 10 % des cas (la localisation exacte de la tumeur n’était pas Indications chirurgicales
précisée dans 20 % des cas) [30]. La situation, la nature histologique
et l’envahissement locorégional de la tumeur permettent de préciser
les indications du type de gastrectomie et du curage à effectuer [6]. BILAN PRÉOPÉRATOIRE
L’extension des cancers de l’estomac prend cinq directions : une
Il a pour but de caractériser précisément la tumeur gastrique et sa
extension horizontale dans la paroi gastrique, une extension verticale
classification tumor-nodes-metastases (TNM) afin de définir le
vers les organes de proximité, une extension lymphatique, une traitement le plus approprié. Nous n’envisageons pas le bilan
dissémination péritonéale et une dissémination hépatique se oncologique en général, mais le bilan chirurgical d’extirpabilité et
traduisant par des métastases. Le traitement chirurgical doit agir d’extension. L’incidence du cancer gastrique est en diminution dans
dans ces cinq directions (tableau I). le monde, mais il reste un problème grave en raison de sa faible
survie dans les séries (5 % à 5 ans, tous stades confondus) [6].
L’endoscopie digestive est à l’origine du diagnostic de cancer dans
Didier Mutter : Professeur des Universités, praticien hospitalier. 94 % des cas [30]. Elle confirme l’aspect macroscopique de la tumeur,
Jacques Marescaux : Professeur des Universités, praticien hospitalier, chef de service.
Clinique chirurgicale A et European Institute of Telesurgery (EITS)-IRCAD, hôpital civil, 1, place de l’Hôpital,
sa taille, précise sa localisation et permet de définir le type de
67091 Strasbourg cedex, France. résection qui peut être envisagé. Elle permet de réaliser une biopsie
Toute référence à cet article doit porter la mention : Mutter D et Marescaux J. Gastrectomie pour cancer. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Techniques chirurgicales -
Appareil digestif, 40-330-B, 2001, 16 p.
40-330-B Gastrectomie pour cancer Techniques chirurgicales
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Techniques chirurgicales Gastrectomie pour cancer 40-330-B
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40-330-B Gastrectomie pour cancer Techniques chirurgicales
6
3 7
1
3 Principes de la gastrectomie.
Premier temps : décollement coloépiploïque (1) ; deuxième temps : section de l’artère
gastroépiploïque droite (2) ; troisième temps : section de l’artère gastrique droite (3) ;
quatrième temps : section du duodénum (4); cinquième temps : dissection du petit épi-
ploon (5) ; sixième temps : section de l’artère gastrique gauche (6) ; septième temps :
section de l’estomac (7).
4
Techniques chirurgicales Gastrectomie pour cancer 40-330-B
TROISIÈME TEMPS : selon Péan n’est pas recommandée dans les gastrectomies pour
DISSECTION DE L’ARTÈRE GASTRIQUE DROITE cancer en raison du risque d’envahissement de l’anastomose en cas
La dissection de l’artère gastrique droite permet de libérer de récidive locale. La section duodénale est donc toujours complétée
totalement le pylore et le premier duodénum. L’épiploon et par sa fermeture, mécanique ou manuelle. Nous préférons
l’estomac sont rabattus vers le bas et vers la gauche. Une valve est l’utilisation de pinces à agrafage linéaire. La solution la plus simple,
placée sur le lobe hépatique gauche pour présenter l’espace de la plus rapide et la plus sûre est d’utiliser une pince réalisant
dissection. Le petit épiploon est incisé au ras du foie, de la pars agrafage et section qui est à même d’assurer l’hémostase, l’étanchéité
flaccida au pédicule hépatique. Cette incision laisse les adénopathies et la section du duodénum sans ouverture de l’organe et donc sans
du groupe 3 au contact de l’estomac. L’artère hépatique propre est contamination du champ opératoire. Un surjet complémentaire doit
identifiée et disséquée de haut en bas. Cette dissection retrouve être effectué afin d’enfouir les rangées d’agrafes du moignon
l’origine de l’artère gastrique droite, ou artère pylorique. Elle doit (fig 6A). La section peut également être réalisée à l’aide d’une
être liée à son origine, en emportant le tissu cellulograisseux qui agrafeuse linéaire sans section qui assure la fermeture du moignon
l’entoure, celui-ci contenant les adénopathies du groupe 5 (fig 5). La duodénal en un temps. Un clamp est alors placé au niveau de
présence éventuelle d’une ou deux branches directes, allant de l’estomac avant section pour éviter une contamination du champ
l’artère gastroduodénale au premier duodénum, nécessite leur opératoire (fig 6B). Cette ouverture gastrique peut éventuellement
ligature. Le premier duodénum est ainsi totalement disséqué. permettre de s’assurer de l’existence d’une marge de sécurité
suffisante par rapport à la tumeur. Enfin, une section duodénale avec
suture entièrement manuelle est réalisable : deux clamps droits sont
QUATRIÈME TEMPS : SECTION DU DUODÉNUM placés de part et d’autre de la zone de section. La section duodénale
Le pylore agit habituellement comme une « barrière » et n’est que est effectuée aux ciseaux droits ou à l’aide d’un bistouri, manuel ou
rarement franchi par la tumeur. La section sur le duodénum est électrique (position coupe). Une fermeture par points séparés ou par
réalisée à 1 cm en aval du pylore [17]. La réalisation d’une anastomose surjet extramuqueux est réalisée. La plupart des auteurs effectuent
*
C
6 Section du duodénum.
A. Pince à agrafage et section linéaire.
B. Pince à agrafage linéaire sans section.
C. Suture manuelle et enfouissement.
*
A *
B
5
40-330-B Gastrectomie pour cancer Techniques chirurgicales
Tableau III.
N1 1 3 3 1
2 4 4 2
3 5 5 3
4 6 6 4
5 1
6
N2 7 7 2 5
8 8 7 6
9 9 8 7
10 1 9 8
11 10 9
11 10
11
N3 12 2 12 12
13 10 13 13
14 11 14 14
12
13
14
N4 15 15 15 15
16 16 16 16
C : tumeur du tiers supérieur ; M : tumeur du tiers moyen ; A : tumeur du tiers inférieur ; groupes N1 et N2 :
ganglions régionaux ; groupes N3 et N4 : métastases.
6
Techniques chirurgicales Gastrectomie pour cancer 40-330-B
*
A *
B
9 Dissection, contrôle et ligature pas à pas des vaisseaux courts.
A. Ligature par fils. B. Application de clips.
7
40-330-B Gastrectomie pour cancer Techniques chirurgicales
8
Techniques chirurgicales Gastrectomie pour cancer 40-330-B
12 Curage du tronc cœliaque (groupe 9), de l’artère hépatique (groupe 8), du pédicule
hépatique (groupe 12) et de l’artère splénique (groupe 11). Les artères hépatique
et splénique sont mises sur lacs afin de faciliter la cellulectomie qui peut être réalisée
à l’aide de clips en titane. À noter le sacrifice de la vésicule biliaire et la préparation de la
résection à leurs émergences de l’artère et de la veine gastriques gauches.
9
40-330-B Gastrectomie pour cancer Techniques chirurgicales
Gastrectomie D4
Nous citons pour principe la gastrectomie D4. Proposée par
quelques équipes japonaises [15] , elle nécessite une dissection
ganglionnaire bien au-delà de la dissection du groupe N3. Elle
emporte les adénopathies du groupe 15, en réalisant une colectomie
transverse pour réséquer les vaisseaux coliques médians, ainsi que
le curage complet du groupe 16 situé autour de l’aorte. Celui-ci
comprend les ganglions du hiatus aortique (16a1), du bord supérieur 15 Curage ganglionnaire préservant le parenchyme pancréatique. Les vaisseaux
spléniques sont emportés avec les ganglions des groupes 10 et 11 ainsi que la rate.
du tronc cœliaque au bord inférieur de la veine rénale gauche (16a2),
du bord inférieur de la veine rénale gauche à la partie supérieure de
l’artère mésentérique inférieure (16b1) et de la partie supérieure de troubles alimentaires, d’œsophagite et de troubles fonctionnels. La
l’artère mésentérique inférieure à la bifurcation aortique (16b2). préservation du pylore pourrait être une solution permettant de
L’intérêt de ce type de curage n’est pas démontré [15] (cf « Principes pallier ces problèmes [10] . La gastrectomie avec préservation
de la gastrectomie. Curages »). pylorique a d’abord été proposée uniquement dans le traitement
chirurgical du cancer superficiel, en raison des difficultés de
réalisation des curages liées à la conservation du pylore et à la
Variantes des gastrectomies préservation de sa vascularisation [8, 28] . Plus récemment, les
possibilités de réalisation de curages avec conservation pylorique
pour cancer ont été montrées [31].
La résection gastrique suit les modalités habituelles. Au niveau du
GASTRECTOMIE TOTALE TYPE D2 pylore, l’artère infrapylorique issue de l’artère gastroduodénale est
AVEC CONSERVATION PANCRÉATIQUE préservée, alors que l’artère gastrique droite est liée classiquement à
La fréquence des complications liées à l’exérèse pancréatique a son origine. La dissection des ganglions juxtapyloriques est réalisée
amené Maruyama à mettre au point une technique de gastrectomie en liant électivement les branches distales du nerf vague et en
avec curage D2 préservant le pancréas [18] . L’intérêt de cette réséquant les ganglions à son contact. La longueur d’estomac
technique est démontré par des études autopsiques qui montrent conservée en amont du pylore est de 1,5 cm. Le rétablissement de la
que si le pancréas peut être envahi par le cancer gastrique, il n’existe continuité est réalisé par une anastomose selon Péan en cas de
jamais de ganglions intraparenchymateux et que la résection gastrectomie polaire inférieure ou par une anse grêle libre avec
artérielle avec son tissu celluleux permet une exérèse ne éventuelle réalisation d’un réservoir pour recréer un circuit digestif
compromettant pas la radicalité du curage D2. Une étude physiologique [26].
artériographique a précisé que la viabilité du pancréas est préservée La préservation pylorique diminuerait les séquelles fonctionnelles
par l’apport vasculaire des artères intrapancréatiques. La technique de la gastrectomie, sans morbidité ajoutée. Les indications en sont
implique de peler la séreuse pancréatique du tissu pancréatique, peu nombreuses.
emportant le tissu cellulograisseux avec l’artère splénique. L’artère
pancréatique dorsale est habituellement issue du tronc cœliaque et
doit être préservée. Au cas où elle naît de la partie proximale de Rétablissement de la continuité
l’artère splénique, ce segment doit être préservé. L’obtention d’un
champ opératoire satisfaisant impose une mobilisation du bloc digestive après gastrectomie totale
splénopancréatique avant de débuter la dissection. Quelques artères
communicantes, entre le corps et la queue du pancréas et l’artère Les modalités de rétablissement de la continuité sont multiples. Elles
splénique, sont liées individuellement. La rate est progressivement ont longtemps fait appel à des montages simples : une anse jéjunale
séparée du pancréas, avec ligature élective des vaisseaux artériels à montée en « Y », en « oméga », ou interposée entre l’œsophage et le
destinée pancréatique. La veine splénique est sectionnée au contact duodénum. Plus récemment ont été décrits différents montages
de la queue du pancréas. La résection de la pièce opératoire ayant pour but la création d’un réservoir qui reproduirait de façon
implique encore la ligature de l’artère pancréatique destinée au plus fidèle la physiologie gastrique. Ces réservoirs utilisent l’intestin
corps du pancréas et de la veine gastrique postérieure qui rejoint grêle ou la jonction iléocæcale. Nous décrivons les principaux
habituellement la veine splénique. Tout le bord supérieur du montages proposés.
pancréas est alors disséqué avec un curage complet (fig 15). L’objectif de ces montages, outre le rétablissement de la continuité
digestive, est d’offrir au patient un confort maximal après
gastrectomie. Plusieurs dizaines de montages avec leurs variantes
GASTRECTOMIE AVEC CONSERVATION PYLORIQUE ont été proposés pour rétablir le circuit digestif. Nous décrivons les
Après réalisation d’une gastrectomie classique, les moyens de principales modalités de restauration de la continuité digestive, en
rétablissement de la continuité digestive peuvent utiliser des sachant que de nombreuses variantes existent par la réalisation des
greffons iléocæcaux ou des transplants grêles pour rétablir la sutures (terminales ou latérales, manuelles ou mécaniques), par la
continuité. Dans ce cas, un reflux biliaire peut être à l’origine de confection de réservoirs associés ou par des dérivations latérales et
10
Techniques chirurgicales Gastrectomie pour cancer 40-330-B
¶ Anastomose œsojéjunale
La réalisation de l’anastomose peut être effectuée par une suture
manuelle ou par une suture mécanique, utilisant une pince à
agrafage circulaire.
Anastomose mécanique
L’œsophage a été préparé avant sa section avec mise en place d’une
bourse automatique. En son absence, il est possible d’utiliser une
pince à bourse conventionnelle ou encore de réaliser une bourse
manuelle. Une pince à agrafage circulaire est choisie pour réaliser
l’anastomose. Son diamètre doit être le plus large possible, mais est
souvent limité à 25 ou 28 mm. La tête de la pince doit rentrer sans
forcer dans l’œsophage abdominal. Il est éventuellement possible de
dilater légèrement celui-ci à l’aide de bougies de Hegar de taille
croissante, mais elles sont rapidement à l’origine de brèches
musculaires risquant de compromettre la sûreté de l’anastomose. La
tête est introduite et la bourse serrée. La pince à anastomose
circulaire est introduite par l’extrémité du grêle ouverte. La pince
est ouverte et perfore le bord antimésentérique du grêle à environ
16 Choix de l’anse en « Y » : identification et conservation d’un pédicule vasculaire. 5 cm de son extrémité (fig 17A). La pince est encliquetée et
l’anastomose réalisée. Après ouverture de la pince, les deux
courts-circuits ajoutés. Aujourd’hui, notre préférence va à l’anse collerettes sont soigneusement contrôlées pour vérifier leur intégrité,
montée en « Y », montage simple, bien codifié et facilement gage d’étanchéité de l’anastomose. L’orifice d’entrée de la pince est
réalisable par la plupart des équipes. alors refermé par application d’un coup de pince à agrafage linéaire
(fig 17B). Cette méthode a notre préférence en raison de sa simplicité
ANSE MONTÉE EN « Y » et de sa reproductibilité. Toutefois, son coût plus élevé peut faire
opter pour la réalisation d’une anastomose manuelle.
L’anse en « Y » est la solution chirurgicale la plus simple, qui a
notre préférence. Ce procédé, décrit par Roux, est facile à mettre en Anastomose manuelle
œuvre et presque toujours réalisable. Il consiste en la section d’une
L’anastomose entre l’anse jéjunale et l’œsophage peut être réalisée
anse jéjunale, puis en la montée sur son pédicule vasculaire de sa
manuellement, en un ou en deux plans. Elle peut également être
portion distale, sa portion proximale étant réanastomosée en aval.
effectuée en terminoterminal ou en terminolatéral. L’anastomose
L’anse doit être longue, de l’ordre de 60 cm, pour éviter les risques
terminoterminale a ses partisans : elle paraît plus logique et évite
de reflux biliaire. Elle est passée en transmésocolique ou en
une suture digestive. Ses principaux inconvénients en sont une
prémésocolique, ce qui préviendrait son envahissement précoce en
fréquente incongruence entre les deux extrémités et une
cas de récidive locale.
vascularisation souvent précaire de la partie toute terminale du
Le choix de l’anse est important : il faut qu’elle soit suffisamment grêle. Nous prenons comme modèle de description l’anastomose
longue, mobile et bien vascularisée. terminolatérale réalisée sur clamp. Elle permet de présenter
l’œsophage pendant tout le temps de la suture et d’éviter sa
¶ Choix de l’anse rétraction vers le haut. L’anastomose est réalisée en deux temps. Les
L’anse est choisie le plus près possible de l’angle de Treitz pour fils sont des sutures résorbables, 2 ou 3/0. Deux points d’angles sont
limiter autant que possible la longueur de grêle exclue. Le segment passés et mis sur pincette en attente. Ils délimitent les plans
choisi doit être suffisamment mobile pour monter sans tension au antérieur et postérieur. Le premier temps réalise l’anastomose
niveau de l’œsophage. Habituellement, la première ou la deuxième postérieure. Un premier plan postérieur est réalisé par des points
anse jéjunale se présente bien : la longueur de l’anse doit sembler d’adossement, séreux sur le grêle et musculaires sur l’œsophage. Les
suffisante en position précolique. Lorsqu’elle est placée en fils sont préférentiellement mis en attente sur des pinces fines puis
transmésocolique, les quelques centimètres gagnés permettent de sont noués après rapprochement de l’œsophage et de l’intestin grêle
réaliser l’anastomose sans tension. où ils peuvent être noués au fur et à mesure, les nœuds étant en
extraluminal sur la séreuse (fig 18A). Une dizaine de points est
¶ Préparation de l’anse nécessaire pour réaliser ce plan postérieur. Le grêle est ensuite
ouvert ainsi que la moitié de la circonférence de l’œsophage. Le
La préparation de l’anse utilise la transillumination. Un assistant second plan est réalisé par des points extramuqueux sur le grêle de
place une lumière rasante par rapport au champ opératoire pour dedans en dehors et prend toute la paroi de l’œsophage de dehors
transilluminer le méso du grêle, présenté par un second assistant. en dedans (fig 18B). Les points sont noués avec un nœud dans la
L’opérateur peut identifier la localisation des arcades vasculaires et lumière digestive. Le grêle et l’œsophage sont alors bien solidaires.
sélectionner idéalement la zone à sectionner. La première arcade Il est possible d’effectuer le plan antérieur. On termine la recoupe
vasculaire du grêle doit être coupée pour avoir une anse libre œsophagienne (fig 18C). La suture des plans antérieurs est réalisée
longue. Les ligatures sont doublées pour éviter leur arrachement lors de la même façon que les plans postérieurs mais les points passent
de la traversée des mésos. La section intestinale est alors réalisée du dehors vers le dedans de la paroi du grêle, puis du dedans vers
perpendiculaire au grêle, après mise en place d’un clamp sur la le dehors de la paroi œsophagienne, les nœuds étant alors situés à
section d’amont (fig 16). l’extérieur. Les points peuvent être noués immédiatement, car il n’y
Durant le même temps opératoire, il est possible d’utiliser la a pas de problème d’exposition. Le premier plan est effectué entre la
transillumination pour effectuer de façon sûre une brèche du paroi séromusculaire du grêle et toute la paroi de l’œsophage. Le
mésocôlon. Le segment distal du grêle peut alors être monté au second plan prend la musculaire œsophagienne et la séreuse grêle
travers de cette brèche et placé à proximité du moignon œsophagien. (fig 18D).
11
40-330-B Gastrectomie pour cancer Techniques chirurgicales
*
B
*
A
*
A
*C *D
18 Anastomose œsojéjunale sur anse en « Y » avec suture manuelle.
A. Adossement du plan postérieur.
B. Ouverture de l’œsophage et du jéjunum et suture du plan muqueux postérieur.
C. Serrage du plan postérieur et recoupe œsophagienne.
D. Suture du plan antérieur.
*B
17 Anastomose œsojéjunale sur anse en « Y » avec suture mécanique. ANSE INTERPOSÉE
A. L’enclume est introduite dans l’œsophage distal. La pince est introduite dans Le principe de l’anse interposée réalise en fait un néoréservoir
l’extrémité distale de l’anse jéjunale sectionnée.
B. Après réalisation de l’anastomose, le grêle est refermé par application d’une
gastrique par interposition d’un segment isolé de grêle. La technique
agrafeuse linéaire. est simple. Le grêle est isolé à une distance de 30 cm de l’angle de
Treitz. Son méso est transilluminé pour identifier précisément le
réseau vasculaire et délimiter une zone vascularisée par une arcade
¶ Anastomose jéjunojéjunale au pied de l’anse de bonne qualité et pouvant être isolée. Le grêle est sectionné au
niveau de la première anse et à nouveau 25 à 30 cm en aval. Son
Après confection de l’anastomose œsophagienne, il faut rétablir la méso est préservé. Le segment isolé est passé en transmésocolique.
continuité digestive par une anastomose au pied de l’anse montée L’extrémité proximale est anastomosée à l’œsophage. Comme pour
en « Y ». Celle-ci peut être réalisée à l’aide de pinces mécaniques l’anastomose de l’anse en « Y », l’anastomose peut être manuelle ou,
(anastomose latérolatérale à la pince à agrafage et section linéaire) de préférence, mécanique. Elle est réalisée en terminoterminal ou
ou à la main. Nous préférons ici effectuer une anastomose manuelle, latéral. La pince peut être passée au travers de toute l’anse libre
terminolatérale, par des points séparés ou par un surjet. Les résultats pour effectuer l’anastomose œsophagienne. La seconde anastomose
des deux méthodes sont identiques avec un coût moindre pour la est réalisée entre la partie distale du segment libre de grêle et le
suture manuelle. L’anse proximale est présentée à 40-60 cm de duodénum. L’anastomose est réalisée à points séparés de fil
l’anastomose œsophagienne. Le jéjunum est ouvert sur une longueur résorbable 2 ou 3/0 (fig 20). La seconde possibilité est de réaliser
de 4 cm par une entérotomie longitudinale. L’anastomose est réalisée une ouverture à la partie moyenne du segment libre de grêle. On
par des points extramuqueux, sur un plan antérieur, puis après peut alors passer une pince à anastomose circulaire vers le haut,
12
Techniques chirurgicales Gastrectomie pour cancer 40-330-B
21 Rétablissement de la con-
tinuité avec réalisation d’un ré-
servoir grêle sur une anse libre.
13
40-330-B Gastrectomie pour cancer Techniques chirurgicales
CHOIX DU MONTAGE
Les études comparatives évaluant les bénéfices potentiels des
différents types de montages en termes de confort et de qualité de
vie sont peu nombreuses. Toutefois, les méthodes le plus souvent
utilisées ont été évaluées dans des séries comparatives [4, 25]. Les
procédés utilisant des anses en « oméga » ne sont que très rarement
étudiés, même avec ses variantes qui compliquent singulièrement le
ANSE EN « OMÉGA »
procédé. Ils nécessitent une longueur importante de grêle non
L’anastomose sur anse en « oméga » consiste à monter au niveau de fonctionnel par rapport aux procédés n’utilisant qu’un seul segment
l’œsophage une anse jéjunale suffisamment longue, d’en de grêle, en « Y » ou en interposition. Le rétablissement de continuité
anastomoser la convexité avec l’œsophage, puis d’exécuter une par interposition d’une anse entre l’œsophage et le duodénum
anastomose latérolatérale au pied de l’anse (fig 23). Elle utilise une contraint l’opérateur à effectuer une anastomose digestive
longueur importante de grêle puisqu’il faut théoriquement une supplémentaire. Ce montage semble plus physiologique que l’anse
longueur égale des jambages. Elle n’est donc pas toujours réalisable, en « Y », mais il expose au risque de reflux biliaire, en l’absence de
en particulier en cas de mésentère court. Le grêle après l’angle de pylore. Sa principale critique est théorique : une récidive locale du
Treitz est déroulé jusqu’à mettre en évidence une boucle qui cancer oblitérerait plus rapidement le montage que lors de la
« monte » sans tension en précolique au niveau de l’œsophage. Cette réalisation d’une anse en « Y ». En fait, cet inconvénient n’a jamais
anse est alors passée en transmésocolique et présentée à proximité été démontré, ni mis en évidence dans les études prospectives. Ce
de l’œsophage. Une anastomose terminolatérale est réalisée à la rétablissement est plus long et plus délicat à réaliser que l’anse en
main ou à la machine, après introduction d’une pince à anastomose « Y ». L’apport théorique d’un réservoir, grêle ou colique, serait de
circulaire par une incision latérale dans un jambage. Le sommet de recréer un réservoir reproduisant la fonctionnalité de l’estomac.
l’anse peut être fixé par quelques points au pilier du diaphragme L’intérêt de la réalisation d’un réservoir grêle, aussi bien pour une
pour éviter toute tension au niveau de l’anastomose. L’anastomose anse libre que pour une anse en « Y », ne présente que peu
latérolatérale entre les deux jambages est réalisée au pied de l’anse d’avantage pour le patient en termes de qualité de vie,
en sous-mésocolique. Ici encore, cette anastomose peut être réalisée d’alimentation et de confort [4]. À long terme, la présence d’un
à la main ou au mieux à l’aide d’une pince à agrafage et section réservoir sur une anse libre permettrait un meilleur maintien
linéaire. pondéral des patients [14]. Il serait lié à une meilleure assimilation
alimentaire par passage duodénal du bol alimentaire [7]. L’anse en
¶ Procédé de Tomoda « Y » simple est de réalisation plus rapide et plus simple. Tout au
Il résulte du montage, sur une anse en « oméga », d’un long segment plus l’adjonction d’un réservoir à une anse en « Y » permettrait des
de grêle non fonctionnel. Le procédé de Tomoda permet de prises alimentaires unitaires plus importantes qu’en l’absence de
contourner ce problème. Il consiste en la réalisation, après confection réservoir, mais sans avantage démontré sur la reprise pondérale des
de l’anse en « oméga », d’une anastomose duodénojéjunale patients. L’intérêt du réservoir iléocæcal serait identique, en
terminolatérale sur le versant efférent de l’anse. On exclut ensuite permettant une prise alimentaire unitaire plus importante et en
l’anse efférente en aval de cette anastomose par ligature ou par évitant le reflux biliaire grâce à la présence de la valvule
agrafage mécanique, et également l’anse afférente en amont de iléocæcale [21]. Le réservoir iléocolique peut également être proposé
l’anastomose œsojéjunale. On « contraint » ainsi le transit à passer dans les gastrectomies préservant le pylore [28]. Il a l’inconvénient de
par le duodénum et le grêle proximal, laissant une minime longueur rajouter une anastomose colique au geste opératoire. Toutefois, il
de grêle exclue. La complexité de ce montage en rend sa réalisation n’existe pas d’études comparatives évaluant ce procédé.
exceptionnelle. En conclusion, la réalisation d’une anse montée en « Y » que nous
préconisons reste la solution la plus simple, avec des résultats
fonctionnels tout à fait satisfaisants dans les études réalisées.
RÉSERVOIR ILÉOCÆCAL D’autres montages présentent un intérêt certain dans des indications
L’usage de la jonction iléocæcale comme transplant de particulières, comme l’anse libre pour rétablissement de la continuité
reconstruction gastrique a été proposé dès 1950 par Lee [13]. L’intérêt après gastrectomie subtotale avec préservation pylorique. Ils doivent
de ce montage est double. Il permet, d’une part de recréer un alors être discutés au cas par cas et en fonction de l’expérience de
réservoir grâce à un segment du côlon ascendant. Il empêcherait l’équipe opératoire.
14
Techniques chirurgicales Gastrectomie pour cancer 40-330-B
*
A *
B
24 Rétablissement de la continuité par plastie iléocæcale.
A. Isolement et préparation de la jonction iléocæcale pédiculée sur l’artère colique B. Rotation et passage du transplant en transmésocolique. Réalisation des trois anas-
droite. tomoses : œsojéjunale, coloduodénale, et rétablissement iléocolique.
Soins et suivi postopératoires drainage est retiré entre les quatrième et septième jours. Nous avons
pour habitude de réaliser un transit œsojéjunal au septième jour
Après réalisation du rétablissement de la continuité, une sonde postopératoire à la recherche d’une éventuelle fistule anastomotique
gastrique est passée au travers de la suture et est maintenue en avant la reprise de l’alimentation.
aspiration douce pendant quelques jours. Il faut toujours penser à Certains auteurs préconisent la mise en place d’une jéjunostomie
refermer la brèche mésentérique transmésocolique en fin de d’alimentation provisoire afin de pouvoir envisager une
procédure pour éviter une incarcération d’une anse. L’intérêt du alimentation entérale précoce en cas de fistule postopératoire. Nous
drainage n’est pas démontré, sauf pour le moignon duodénal où il réservons cette indication aux anastomoses « fragiles », hautes, ou
est systématique. Il peut être réalisé à l’aide de drains passifs (lames en cas d’altération importante de l’état général du patient,
de Delbey, drains multitubulés) ou par des drains aspiratifs. Le présentant alors un risque de fistule significatif.
Références ➤
15
40-330-B Gastrectomie pour cancer Techniques chirurgicales
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16
40-330-A
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 40-330-A
Résumé. – La chirurgie d’exérèse gastrique pour cancer implique une parfaite connaissance de l’anatomie,
tant vasculaire que lymphatique. En effet, sous l’impulsion des écoles japonaises, cette chirurgie a
considérablement évolué et requiert actuellement une méthodologie rigoureuse, tant pour la réalisation du
geste opératoire que dans la présentation des pièces d’anatomopathologie dont l’analyse permet un
pronostic précis de la maladie. Cet article décrit l’anatomie vasculaire de l’estomac et précise l’anatomie
chirurgicale des 16 groupes ganglionnaires composant les éléments des différents niveaux de curages
gastriques. La standardisation de leur identification et leur analyse individuelle permettraient de comparer de
façon correcte les séries chirurgicales européennes et japonaises d’exérèse de cancer gastrique.
© 2001 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Mutter D et Marescaux J. Gastrectomies pour cancer : principes généraux, anatomie vasculaire, anatomie lymphatique, curages. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et
Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Techniques chirurgicales – Appareil digestif, 40-330-A, 2001, 8 p.
Gastrectomies pour cancer :
40-330-A Techniques chirurgicales
principes généraux, anatomie vasculaire, anatomie lymphatique, curages
3 Vascularisation arté-
6 rielle de la région pyloro-
1 7 duodénale.
1. Artère gastroduodénale ;
2 2. artère pancréaticoduodé-
8
nale supérieure ; 3. artère
3 9 pancréaticoduodénale infé-
1 rieure ; 4. artère gastro-
4 épiploïque droite.
2
5
3
4
2
Gastrectomies pour cancer :
Techniques chirurgicales 40-330-A
principes généraux, anatomie vasculaire, anatomie lymphatique, curages
¶ Vaisseaux courts
Les vaisseaux courts sont constitués de branches terminales de 2
l’artère splénique. Ils peuvent se détacher du tronc de l’artère 4a
splénique ou de ses branches terminales. Au nombre de deux à six, 1
7
ils cheminent du hile splénique à l’estomac par l’épiploon
gastrosplénique. L’un d’eux, plus volumineux, rejoint la face 12p
postérieure de l’estomac et se ramifie de la grosse tubérosité au 12a
4sa
cardia : il s’agit de l’artère gastrique postérieure ou artère 8
9 3
cardiotubérositaire postérieure. 12b
Entre le dernier vaisseau court et l’origine de l’artère
5
gastroépiploïque gauche existe une fenêtre avasculaire constituée
uniquement de deux feuillets péritonéaux. Leur effondrement
permet d’entrer dans l’arrière-cavité des épiploons en regard de 6
l’artère splénique (fig 4).
4sb
VASCULARISATION VEINEUSE
Le système veineux est satellite du réseau artériel, avec une veine 4d
pour une artère. Le réseau veineux gastrique droit rejoint
directement la veine porte. Le réseau veineux gastroépiploïque droit
rejoint la veine colique supérieure droite pour former le tronc
veineux gastrocolique (ou tronc de Henle) et se jeter dans la veine
mésentérique supérieure avant son abouchement dans la veine 11 10
porte. Le réseau veineux gastrique gauche rejoint la veine splénique 12
après son passage dans le ligament gastrosplénique où il est satellite
du réseau artériel. 8
9
Anatomie lymphatique 14 16
La connaissance du système lymphatique remonte à plusieurs
siècles. Sa description détaillée est réalisée par Rouvière dès 1932.
Les ganglions sont satellites des artères et un même organe peut se
drainer dans plusieurs chaînes ganglionnaires à la fois. Les 13
ganglions sont désignés sous le nom de l’organe auquel ils sont
annexés, ou bien sous le nom de l’artère à laquelle ils sont accolés. Il 15
est ainsi possible d’en effectuer une description topographique [9].
Toutefois, la description actuelle du drainage lymphatique gastrique
a une orientation chirurgicale et suit les recommandations de la
Japanese Research Society for Gastric Cancer (JRSGC) éditée en 1962.
Elle représente une description systématique du drainage
lymphatique de l’estomac, définissant des groupes d’envahissement
5 Drainage lymphatique de l’estomac.
ganglionnaire de gravité croissante en fonction de la localisation de
la tumeur primitive de l’estomac. Nous décrivons dans ce chapitre Tableau I.
les 16 sites de drainage ganglionnaire gastrique tels qu’ils sont
définis par la classification de la JRSGC. Elle est adoptée aujourd’hui Localisation de la tumeur primitive
Groupe
par la majorité des équipes chirurgicales (fig 5) [5]. Nous présentons CMA A, AM MA, M C, CM, MC
les principes chirurgicaux des curages et nous précisons à quels
stades de l’intervention pour gastrectomie ces groupes N1 1 3 3 1
ganglionnaires sont réséqués. Les indications des curages et la 2 4 4 2
3 5 5 3
conduite à tenir en fonction des tumeurs rencontrées sont traitées
4 6 6 4
dans l’article Gastrectomies pour cancer, fascicule 40-330-B2 de 5 1
l’Encyclopédie Médico-Chirurgicale. 6
N2 7 7 2 5
CLASSIFICATION DES RELAIS GANGLIONNAIRES
8 8 7 6
GASTRIQUES
9 9 8 7
La classification des relais ganglionnaires gastriques (tableau I) 10 1 9 8
permet de distinguer les relais locorégionaux (N1 et N2) et les relais 11 10 9
considérés en cas de tumeur comme métastatiques (N3 et N4). Parmi 11 10
les relais « régionaux », il est possible de distinguer les relais 11
ganglionnaires « de proximité : N1 », qui sont toujours réséqués lors N3 12 2 12 12
de la réalisation d’une gastrectomie pour cancer, des relais « distaux : 13 10 13 13
N2 ». Ainsi, les groupes 1, 2, 3 et 4 sont considérés de proximité 14 11 14 14
(N1) pour les cancers du cardia et du corps de l’estomac, et distaux 12
(N2) pour les cancers de l’antre. De la même façon, les groupes 3, 4, 13
14
5 et 6 sont de proximité (N1) pour les tumeurs antrales et distaux
(N2) pour les tumeurs du cardia. Les autres groupes ganglionnaires N4 15 15 15 15
distaux sont les groupes 7, 8, 9, 10 (N2). Enfin, les ganglions à 16 16 16 16
distance situés au-delà de ces limites définissent des atteintes
C : tumeur du tiers supérieur ; M : tumeur du tiers moyen ; A : tumeur du tiers inférieur ; groupes N1 et N2 :
métastatiques lorsqu’ils sont envahis : ce sont les groupes 12-13 (N3) ganglions régionaux ; groupes N3 et N4 : métastases.
et 15-16 (N4) (tableau I) [7].
3
Gastrectomies pour cancer :
40-330-A Techniques chirurgicales
principes généraux, anatomie vasculaire, anatomie lymphatique, curages
1
7
5
3
4
Gastrectomies pour cancer :
Techniques chirurgicales 40-330-A
principes généraux, anatomie vasculaire, anatomie lymphatique, curages
10 Exérèse des ganglions
du groupe 6 (l’estomac
et l’épiploon sont basculés
vers le haut).
5
6
4a
5
Gastrectomies pour cancer :
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principes généraux, anatomie vasculaire, anatomie lymphatique, curages
8
9
6
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Techniques chirurgicales 40-330-A
principes généraux, anatomie vasculaire, anatomie lymphatique, curages
12
3
14
1
2
15
15 Exérèse des ganglions 16 Dissection des groupes ganglionnaires 14 et 15, situés an contact de l’artère mé-
rétroduodénaux (groupe 13). sentérique supérieure et de l’artère colique moyenne.
16
7
Gastrectomies pour cancer :
40-330-A Techniques chirurgicales
principes généraux, anatomie vasculaire, anatomie lymphatique, curages
CURAGE D1 Enjeux et bénéfices des curages
Le curage D1 fait partie intégrante des règles classiques occidentales La pratique des curages ganglionnaires a considérablement évolué
de l’exérèse d’un cancer de l’estomac et consiste en l’ablation des au cours de ces 20 dernières années. L’enjeu des curages est double.
premiers relais ganglionnaires périgastriques, les groupes 1 à 6. En premier lieu, il doit accroître le caractère carcinologique de
Ainsi, la réalisation d’une omentectomie totale, réalisée en monobloc l’exérèse tumorale et augmenter la survie des patients. En second
avec la gastrectomie par clivage coloépiploïque, complétée par la lieu, il doit permettre de classer plus précisément la pathologie
ligature à l’origine des pédicules artériels (artères gastriques droite cancéreuse, permettant de comparer les groupes de patients et
et gauche, artères gastroépiploïques droite et gauche, vaisseaux d’évaluer précisément les thérapeutiques nouvelles. Après les
courts) et l’exérèse de leur atmosphère cellulograisseuse, correspond publications des séries japonaises montrant un bénéfice important
à ce curage. pour les patients en termes de survie, plusieurs équipes occidentales
ont pratiqué des curages extensifs et ont mis en évidence des
résultats comparables à ceux des équipes japonaises [8, 10]. Toutefois,
CURAGE D2
certaines études sont critiquables dans leur méthodologie (caractère
rétrospectif du receuil des données…) [8]. Une étude prospective a
Le curage de type D2, indépendant du type de gastrectomie réalisé été réalisée par le Dutch Gastric Cancer Group. Elle concilie les
(totale ou partielle) emporte le grand et le petit épiploon, ainsi que principes de la chirurgie et des curages de la JRSGC sous contrôle
tous les relais ganglionnaires du groupe N2, définis en fonction de d’un chirurgien japonais expérimenté (Sasako) et la pratique
la localisation de la tumeur (tableau I). européenne. Elle a mis en évidence, de façon significative, un
accroissement de la morbidité et de la mortalité lié aux curages
étendus [2]. Les complications sont significativement plus fréquentes
pour les résections de type D2 que D1 (43 % vs 25 %, p < 0,001), la
CURAGE D3
mortalité supérieure (10 % versus 4 %, p = 0,004) et la durée
Le curage D3 complète le curage D2 par l’exérèse de tous les relais d’hospitalisation plus longue (16 versus 14 jours, p < 0,001) alors
ganglionnaires situés à distance de l’estomac. Ce type de curage est que la survie était comparable. Pour ces raisons, l’intérêt d’une
à l’heure actuelle pratiquement abandonné par la plupart des gastrectomie avec curage D2 est remise en cause par de nombreux
équipes puisqu’il est démontré que les envahissements de ganglions auteurs et ne peut être proposée comme une procédure standard
de troisième ordre doivent être considérés comme des métastases. dans le traitement des cancers de l’estomac.
Par ailleurs, la réalisation d’une gastrectomie de type D3 est grevée
d’une lourde morbidité sans bénéfice pour le patient [1]. Néanmoins, Conclusion
il est intéressant de connaître les principes de ces curages permettant La parfaite connaissance de la vascularisation et du drainage
éventuellement la réalisation de biopsies ganglionnaires utiles pour lymphatique de l’estomac a permis de préciser les possibilités et
classer précisément une tumeur. indications des traitements des cancers gastriques. Les séries japonaises
ont démontré que l’envahissement ganglionnaire des cancers gastriques
était avant tout un envahissement de proximité, justifiant un curage de
CURAGE D4 proximité (N1). À l’inverse, les indications de curages étendus ne
doivent pas être une règle pour tous les types de tumeurs. Les curages
Le curage D4 complète le curage D3 par l’exérèse des relais permettent une analyse précise de l’extension ganglionnaire de la
ganglionnaires aortiques, caves, du hile rénal gauche et de l’artère maladie et un pronostic en termes de survie. Le bénéfice pour les
colique médiane. patients de curages extensifs n’est à ce jour pas démontré [2].
Références
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8
40-320
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 40-320
Résumé. – Les gastrectomies sont des interventions réalisant une résection gastrique plus ou moins étendue.
La principale indication des gastrectomies pour lésions bénignes était représentée par le traitement radical de
la maladie ulcéreuse. Ce sont les antrectomies et les gastrectomies des deux tiers. La vagotomie puis les
médications antagonistes des récepteurs H2 de l’histamine (anti-H2) et enfin la mise en œuvre de traitements
éradiquant « Helicobacter pylori » ont réduit de façon spectaculaire les indications de gastrectomie pour
maladie ulcéreuse. Moins de 5 % des patients ont un échec de guérison de l’ulcère après traitement médical.
De ce fait, moins de 1 % des interventions pour ulcère sont des gastrectomies.
Les indications chirurgicales de résection gastrique, typique ou atypique, pour des tumeurs bénignes ou pour
des troubles fonctionnels sont elles aussi exceptionnelles et les revues de la littérature faisant état de
résections gastriques dans ces indications se résument le plus souvent à quelques cas.
Enfin, la chirurgie mini-invasive a démontré ses possibilités thérapeutiques et ses bénéfices dans la réalisation
de gastrectomies réglées et atypiques pour ces indications hors pathologie cancéreuse. Cette technique
chirurgicale constitue à ce jour une voie d’abord fréquemment utilisée pour la réalisation des résections de
tumeurs bénignes.
La baisse significative des indications de gastrectomies réglées et atypiques par abord conventionnel nous a
amené à restreindre la description des gastrectomies pour lésions bénignes et à décrire essentiellement les
procédures de base les plus utilisées permettant la réalisation des gastrectomies partielles et des
gastrectomies atypiques.
© 2001 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Mutter D et Marescaux J. Gastrectomies pour lésions bénignes. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Techniques
chirurgicales - Appareil digestif, 40-320, 2001, 16 p.
40-320 Gastrectomies pour lésions bénignes Techniques chirurgicales
DÉFINITIONS
1 Installation du patient
Les gastrectomies partielles, habituellement réservées aux lésions et de l’équipe opératoire.
bénignes, consistent en l’ablation d’un secteur gastrique déterminé.
Il s’agit rarement du secteur polaire supérieur. Il s’agit en général
d’un secteur inférieur, l’antre ou les deux tiers de la poche gastrique.
A2
À l’inverse, les gastrectomies atypiques réalisent l’ablation à
l’emporte-pièce d’un fragment non défini anatomiquement de la
paroi gastrique.
Lors de la réalisation d’une gastrectomie polaire inférieure, la limite
droite de l’exérèse est située en aval du pylore, à la partie initiale du A1
premier duodénum, 1 cm à gauche de l’artère gastroduodénale. 1
Cette limite marque la frontière entre le duodénum mobile et le
duodénum fixe. o
¶ Antrectomie
L’antrectomie réalise une section plus économique de l’estomac. La
ligne de section gastrique est plus horizontale. Elle part d’un point
situé un travers de doigt au-dessus de l’angulus, jonction des parties
horizontale et verticale de la petite courbure. Elle se termine sur la 2 Tracé de l’incision.
grande courbure au niveau d’un point situé à la partie médiane de
l’arcade gastroépiploïque. Sur le plan technique, il n’y a
pratiquement aucune modification entre les deux techniques en
dehors d’une dissection plus limitée de la grande courbure.
Le rétablissement de continuité est assuré selon deux modalités
distinctes en fonction des choix des opérateurs et des considérations
anatomiques locales constatées en peropératoire. Le rétablissement
peut faire appel :
– à une anastomose gastroduodénale, manuelle ou mécanique, qui
rétablit le circuit digestif normal, encore appelée Billroth I ou Péan ;
– ou une anastomose gastrojéjunale qui réunit le moignon restant
de l’estomac à la première anse jéjunale, encore appelée Billroth II.
Là encore, l’anastomose est manuelle ou mécanique ;
– dans le cadre des anastomoses gastrojéjunales, il faut distinguer
les rétablissements selon Polya, historiquement anastomose à
bouche totale, des rétablissements selon Finsterer, anastomose à
bouche partielle. Par extension, et depuis l’avènement des sutures
mécaniques réalisant des anastomoses habituellement à bouche
partielle, cette distinction n’est plus toujours respectée.
Nous décrivons ci-après la technique de la gastrectomie des deux tiers en l’estomac. Un billot, gonflable de préférence, ou une cassure de la
précisant, chaque fois que cela est nécessaire, les particularités de table au niveau de la pointe des omoplates du patient permettent
l’antrectomie. une meilleure exposition. On n’oublie pas de supprimer cet artifice
La description de la technique opératoire suit les principes généraux lors de la fermeture pariétale. Le chirurgien se place à la droite du
de l’intervention qui sont : patient, son (ou ses) aide(s) en face de lui. L’instrumentiste se place
en face du chirurgien, à la gauche de l’assistant (fig 1).
– installation du patient et voie d’abord ;
L’incision est une médiane allant de la xiphoïde à l’ombilic. La partie
– mobilisation et libération de la grande courbure ; haute de l’incision dégage largement l’appendice xiphoïde pour
– mobilisation et section du duodénum ; donner un jour suffisant à la portion haute de l’estomac. La partie
inférieure de l’incision déborde légèrement l’ombilic vers la gauche
– mobilisation et libération de la petite courbure ;
si le patient est pléthorique (fig 2). L’incision préserve le ligament
– section de l’estomac ; rond pour faciliter l’exposition. Certaines équipes préfèrent une voie
– rétablissement de la continuité. d’abord horizontale (bi-sous-costale), mais nous n’y voyons aucun
avantage particulier.
Une protection pariétale par une jupette en plastique est
INSTALLATION DU PATIENT ET VOIE D’ABORD habituellement mise en place et un écarteur pariétal de type Gosset
L’intervention est menée sous anesthésie générale, le patient en maintient l’exposition du champ opératoire. Il est dans la plupart
décubitus dorsal. Une antibioprophylaxie est systématiquement des cas inutile de réaliser une traction supérieure sous-costale. Une
utilisée. Une sonde nasogastrique permet de vider totalement exploration rapide de la cavité abdominale est réalisée.
2
Techniques chirurgicales Gastrectomies pour lésions bénignes 40-320
3 Le premier geste consiste en une traction vers le haut du corps de l’estomac. 4 Nous préférons réaliser une dissection passant entre la paroi gastrique et les vais-
Celui-ci est saisi par l’aide avec une compresse pour éviter qu’il ne glisse ou à l’aide seaux afin de préserver ces derniers. La grande courbure est dévascularisée de proche en
d’une ou deux pinces de Babcock. Le côlon transverse est laissé dans le champ opéra- proche, avec ligature élective par des points résorbables de tous les vaisseaux unissant
toire et l’épiploon est légèrement soulevé afin de tendre les vaisseaux l’unissant à l’es- l’épiploon à l’estomac. Chaque paquet artérioveineux doit être lié de manière sélective.
tomac.
MOBILISATION ET LIBÉRATION
DE LA GRANDE COURBURE
Ce temps réalise la libération de la face postérieure de l’estomac qui
représente la clef de la gastrectomie polaire inférieure. Le premier
geste consiste en la traction vers le haut du corps de l’estomac.
Celui-ci est saisi par l’aide avec une compresse pour éviter qu’il ne
glisse ou à l’aide d’une ou deux pinces de Babcock. Le côlon
transverse est laissé à la partie inférieure du champ opératoire et
l’épiploon est légèrement soulevé afin de tendre les vaisseaux
l’unissant à l’estomac (fig 3). Nous préférons réaliser une dissection
passant entre la paroi gastrique et les vaisseaux gastroépiploïques
afin de les préserver, même si leur utilité pour vasculariser
l’épiploon n’est pas primordiale. À l’inverse, s’il est envisagé de
réaliser un rétablissement de la continuité avec passage d’une anse
précolique, il est parfois nécessaire de procéder à une omentectomie.
Dans ce cas, l’épiploon est enlevé en monobloc avec l’estomac.
La grande courbure est dévascularisée de proche en proche, avec
ligature élective de tous les vaisseaux unissant l’épiploon à
l’estomac. Chaque paquet artérioveineux doit être lié de manière
sélective (fig 4). La ligature peut être réalisée indifféremment à l’aide
de points résorbables, notre préférence, mais également non
résorbables, de clips, ou à l’aide d’une pince automatique appliquant
deux agrafes et sectionnant au centre (pince LDSt, Autosuture-
Tyco) (fig 5). Cette dissection est menée de la partie moyenne de
5 Cette ligature peut également être réalisée en utilisant une pince automatique ap-
l’estomac vers la gauche, jusqu’à la fin de l’arcade gastroépiploïque, pliquant deux agrafes et sectionnant au centre (pince LDSt, Autosuture-Tyco).
avec ligature de l’artère gastroépiploïque gauche au contact de
l’estomac. Pour la réalisation d’une antrectomie simple, cette coaguler les quelques rameaux vasculaires qui y cheminent. La
dissection est plus limitée, s’arrêtant à la partie moyenne de l’arcade dissection est alors poursuivie vers la droite jusqu’au niveau du
gastroépiploïque. Il est ici impératif de conserver l’arcade vasculaire, pylore.
alimentée par l’artère gastroépiploïque gauche, qui participe à la
vascularisation du corps de l’estomac.
Ce temps permet d’aborder l’arrière-cavité des épiploons qui est MOBILISATION ET SECTION DU DUODÉNUM
libérée en effondrant les quelques adhérences postérieures unissant Les adhérences postérieures du pylore, constantes, sont dégagées de
l’estomac au pancréas. Ces adhérences prédominent à droite. Elles proche en proche avec hémostase par coagulation ou ligatures des
sont idéalement disséquées au bistouri électrique, ce qui permet de petits pédicules vasculaires. Cette dissection bénéficie de l’usage
3
40-320 Gastrectomies pour lésions bénignes Techniques chirurgicales
4
Techniques chirurgicales Gastrectomies pour lésions bénignes 40-320
*
B
*
A
d’enfouissement nécessite une longueur de 2,5 cm de paroi satisfaisante, la suture est faite par des points séparés dans le sens
duodénale, longueur supérieure à celle requise pour appliquer une longitudinal, ce qui prévient le risque de passage d’un point dans le
agrafeuse. Certains auteurs ont prôné l’adjonction de colle pancréas, dans le canal de Santorini ou dans le cholédoque. Si
biologique au contact de la suture du moignon, mais les résultats aucune suture de qualité n’est réalisable, le geste le plus simple est
n’objectivent pas de réduction significative du taux de fistule de réaliser une duodénostomie, ou fistule dirigée sur sonde. Après
postopératoire [2]. Ce taux, bien que faible, de l’ordre de 4,5 % [11], libération et section du duodénum, une sonde en caoutchouc, sonde
reste une complication grave de cette chirurgie. multiperforée ou sonde de Pezzer, est introduite dans la lumière du
moignon duodénal sur 3 à 4 cm. Une bourse ou des points ferment
Prise en charge des duodénums difficiles le moignon autour de la sonde (fig 9C). La sonde est extériorisée
dans le flanc droit par un trajet aussi direct que possible, et est
La disponibilité des systèmes d’agrafage mécanique et la relative
doublée par une lame de drainage. Cette duodénostomie ramène
rareté des indications tendent à faire oublier les difficultés pouvant
300 à 600 mL de liquide par jour. Elle est maintenue pendant 8 à 15
être liées à la dissection du duodénum. Une maladie ulcéreuse
jours, puis est progressivement retirée. Le trajet se ferme
chronique ou aiguë peut avoir totalement remanié la région
spontanément dans la majorité des cas.
pylorique et rendre la dissection et le contrôle du duodénum
difficiles. En effet, l’évolution du processus ulcéreux en arrière du
duodénum intéresse le bloc duodénopancréatique, c’est-à-dire le ¶ Anastomose gastroduodénale
pancréas, le cholédoque et le canal de Santorini. Le processus de La réalisation d’une anastomose gastroduodénale impose la
sclérose périulcéreux fait disparaître le plan de clivage entre le conservation d’un moignon duodénal de bonne qualité et la
duodénum et le cholédoque et explique la possibilité de lésion de la possibilité d’affronter les deux segments digestifs, estomac et
voie biliaire pendant la dissection. L’opacification de la papille et du duodénum sans tension. Afin de gagner un peu de longueur et
cholédoque par la vésicule, la canulation du cholédoque sont des avant de réaliser l’anastomose, il convient de décoller le bloc
artifices théoriquement efficaces mais en réalité de réalisation duodénopancréatique de ses attaches postérieures. La dissection
difficile en raison de l’état inflammatoire local. La dissection débute par une incision du péritoine en regard du deuxième
progressive du duodénum, dont le but est de réséquer en totalité duodénum. Le décollement en arrière du duodénum et du pancréas
l’ulcère, peut en outre léser le pancréas, le canal de Santorini et être et en avant de la veine cave est réalisé sous contrôle direct de la vue
responsable d’une fistule pancréatique. Pour cette raison, il nous avec coagulation progressive de tous les petits vaisseaux rencontrés.
semble aujourd’hui préférable de laisser l’ulcère en place et de Cette dissection est préférable au décollement manuel réalisé à
réaliser une fermeture duodénale protégée. l’aveugle et risquant d’entraîner un hématome de la loge
Plusieurs cas de figure peuvent se présenter. Si l’état du duodénum rétropancréatique (manœuvre de Kocher). Il permet de « remonter »
ou la longueur de duodénum sain disponible ne permet pas le bloc duodénopancréatique de plusieurs centimètres et d’affronter
d’appliquer une pince à agrafage linéaire, le duodénum doit être le duodénum et l’estomac. Deux clamps droits rigides sont placés
suturé sans dissection, car celle-ci peut se révéler très laborieuse et de part et d’autre de la zone de section duodénale. La section est
entraîner une déchirure de la paroi sans possibilité de résection de effectuée aux ciseaux droits ou à l’aide d’un bistouri, manuel ou
l’ulcère. Il est alors préférable de laisser l’ulcère en place et de électrique (position coupe). La tranche duodénale est laissée en
suturer le duodénum par des points séparés. Le duodénum est attente jusqu’à la réalisation de la suture. On peut également
suturé transversalement si une longueur suffisante est disponible s’abstenir de la mise en place du clamp duodénal. Le duodénum est
pour réaliser deux plans. Si le bord postérieur n’est pas dissécable exposé et sectionné à l’aide d’un bistouri froid ou aux ciseaux. Ceci
en raison de l’ulcère et de sa réaction inflammatoire au contact du laisse plus d’étoffe sur le moignon et est moins traumatisant pour la
pancréas et si ses bords supérieurs et inférieurs sont de qualité tranche duodénale. La lumière duodénale est obturée à l’aide d’une
5
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"
B1 "
B2
*
A
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B3 "
B4
9 A. Utilisation d’une pince à agrafage linéaire, 55 mm, chargeur bleu.
B. Réalisation d’une suture manuelle complétée d’une bourse d’enfouissement.
C. Réalisation d’une duodénostomie temporaire.
*
C
compresse bétadinée pendant la dissection finale de l’estomac. Il est la petite courbure, avec ligature successive de ses branches
encore possible d’utiliser une pince automatique d’agrafage linéaire antérieures et postérieures (fig 10). Cette ligature effectuée à
(type GIAt, ou TLCt). Celle-ci est placée 1 cm en amont de la zone proximité de l’estomac préserve une branche collatérale du tronc
retenue pour l’anastomose. Le fragment comportant les agrafes est cœliaque à destinée du foie : l’artère hépatique gauche accessoire
recoupé au dernier moment pour la réalisation de l’anastomose. qui peut être dominante ainsi que l’artère cardiotubérositaire qui
Cette méthode présente l’avantage de réaliser toute la dissection de vascularise le cardia.
l’estomac à pièce « fermée », mais fait perdre environ 1 cm de paroi Après section des branches de l’artère gastrique gauche, un fil repère
duodénale pour l’anastomose. Enfin, certains auteurs proposent la est placé sur la paroi de l’estomac : il représente le point de départ
réalisation de l’anastomose gastroduodénale à l’aide d’une pince à de la ligne de section d’une gastrectomie des deux tiers. Pour une
agrafage circulaire (de type PCEEAt, Autosuture-Tyco ou CDHt, antrectomie, l’artère gastrique gauche est préservée au contact de
Ethicon). Le moignon duodénal est alors coupé après mise en place l’estomac. La dissection de la petite courbure est effectuée à
d’une pince à bourse. Celle-ci permet le positionnement de l’angulus, zone quasi avasculaire.
l’enclume de pince à anastomose circulaire (cf anastomose selon
Péan).
SECTION DE L’ESTOMAC
Certains auteurs proposent de réaliser une anastomose préservant
le pylore et l’innervation vague. Cette technique diminuerait les Les modalités de section de l’estomac ne dépendent pas de la
séquelles fonctionnelles de la gastrectomie. Elle n’est toutefois pas procédure choisie pour effectuer le rétablissement de la continuité.
de pratique courante [26]. En effet, l’usage des systèmes d’agrafage automatique est
aujourd’hui la solution qui doit être considérée comme la plus
simple, rapide et efficace. La section utilisant l’agrafage linéaire est
MOBILISATION ET LIBÉRATION employée aussi bien dans l’optique d’une anastomose selon Péan
DE LA PETITE COURBURE que pour une anastomose selon Polya. Un second fil repère est placé
Cette dernière étape de la mobilisation gastrique impose d’écarter le à la partie gauche de la ligne de section. Pour une gastrectomie des
lobe gauche du foie. Une valve récline le lobe hépatique gauche vers deux tiers, la partie gauche de la ligne de section se situe sur la
le haut et la droite. L’assistant peut alors relever la partie distale de grande courbure (fig 11A), au niveau des premiers vaisseaux courts.
l’estomac vers le haut et la gauche de façon à exposer l’origine de Pour la réalisation d’une antrectomie, la ligne de section gastrique
l’artère gastrique gauche. Celle-ci est liée peu après son arrivée sur se termine sur la grande courbure à la partie terminale de l’artère
6
Techniques chirurgicales Gastrectomies pour lésions bénignes 40-320
*
A *
B
11 Tracé des lignes de section.
A. Gastrectomie des deux tiers. B. Antrectomie.
7
40-320 Gastrectomies pour lésions bénignes Techniques chirurgicales
12 Après mise en place d’une compresse abdominale protectrice sur le pancréas, sous la zone
de section, une agrafeuse linéaire de type TAt 90 mm, agrafes vertes, est appliquée et fermée. Elle
réalise un agrafage à trois rangées d’agrafes ; application d’un clamp et section.
8
Techniques chirurgicales Gastrectomies pour lésions bénignes 40-320
9
40-320 Gastrectomies pour lésions bénignes Techniques chirurgicales
*
A *
B
*
C
*
D *
E
15 Anastomose gastroduodénale à la pince mécanique circulaire. C. Introduction de la pince dans l’estomac.
A. Réalisation d’une bourse sur le moignon duodénal. D. La pince perfore la face postérieure de l’estomac.
B. Introduction et serrage de l’enclume de la pince à anastomose circulaire. E. Anastomose.
Anastomose manuelle par la réalisation d’un second surjet antérieur, séroséreux (fig 17A).
L’anastomose est placée en position sous-mésocolique par la
Bien entendu, cette anastomose est réalisable de façon classique, par
réalisation de la suture du mésocôlon à la face antérieure de
une suture manuelle. L’anastomose peut être réalisée sur toute la
l’estomac.
largeur de la section de l’estomac (technique de Polya), soit sur une
partie de celle-ci (technique de Finsterer). Le principe technique reste Variante : ce type d’anastomose peut également être réalisé à la face
le même, la différence essentielle réside en la réalisation d’une postérieure de l’estomac. Après section de l’estomac par une
raquette comme décrit précédemment en cas de réalisation d’une agrafeuse linéaire de 90 mm, la face postérieure de l’estomac est
anastomose partielle. Nous décrivons l’anastomose la plus longue, présentée en regard du grêle comme pour l’anastomose mécanique.
sans raquette, et en variation les particularités de l’anastomose La suture latérolatérale est alors réalisée en quatre plans.
partielle. Cette anastomose n’est habituellement pas drainée. Une sonde
L’estomac est totalement disséqué, la zone de section repérée, mais gastrique peut être passée au travers de l’anastomose et maintenue
l’estomac non sectionné. Après réalisation et suture de la berge quelques jours jusqu’à reprise du transit.
postérieure de la brèche mésocolique, l’anse grêle est présentée au
Variantes
contact de l’estomac. Un premier surjet séromusculaire solidarise
l’anse grêle et l’estomac. Pendant sa réalisation, l’estomac et l’anse De nombreuses variantes de cette anastomose sont retrouvées dans
grêle restent fermés. Les deux extrémités du surjet sont présentées la littérature. Pour notre part, nous nous en tenons à l’anastomose
tendues. Le grêle et l’estomac sont ouverts de part et d’autre de ce mécanique sous-mésocolique anisopéristaltique.
surjet d’adossement. Un second surjet réalisé au fil résorbable On cite pour mémoire :
décimale 3 est réalisé de la petite à la grande courbure, à points
totaux : c’est un surjet d’hémostase. La section de l’estomac est alors – les anastomoses isopéristaltiques ;
complétée. Un premier surjet à points totaux est à nouveau réalisé – les anastomoses réalisées en précolique, qui nécessitent parfois la
entre l’estomac et le bord antérieur du grêle. La suture est achevée réalisation d’une omentectomie complémentaire. Ces anastomoses
10
Techniques chirurgicales Gastrectomies pour lésions bénignes 40-320
*
F *
G
15 (suite) F. Réalisation de la gastrectomie par une pince à agrafage linéaire de G. Aspect final.
90 mm.
*
B
*
A
*
C
11
40-320 Gastrectomies pour lésions bénignes Techniques chirurgicales
"
A1
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A2
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A3 "
A4
17 A. Anastomose manuelle : A1. repérage de la première anse jéjunale ; A2. suture de la brèche postérieure ; A3. surjet d’adossement postérieur ; A4. surjet interne postérieur ;
entrent souvent dans le cadre d’interventions palliatives, lorsque (fig 17B). La tranche de section gastrique est partiellement fermée
l’arrière-cavité des épiploons est inaccessible ; par des points séparés à partir de la petite courbure, réalisant ainsi
– les anastomoses sur anse en « Y », qui sont en général réservées une raquette, comparable à celle réalisée pour une anastomose selon
aux diversions duodénales totales ; Péan. Ce qui caractérise l’anastomose selon Finsterer est l’accolement
de l’intestin grêle au « manche » de la raquette gastrique, ce qui
– les anastomoses réalisées sur la face antérieure de l’estomac, créerait une coudure s’opposant au reflux biliaire dans l’estomac.
moins fonctionnelles, parfois utilisées dans des exérèses de propreté Pour cela, trois ou quatre points sont passés et noués, chargeant
hors du cadre des gastrectomies pour lésions bénignes ; successivement la face antérieure puis postérieure de l’estomac et
– l’anastomose selon Finsterer : elle est également réalisée en sous- l’intestin grêle (fig 17B1). L’anastomose entre la première anse
mésocolique. Sa principale variation par rapport à l’anastomose jéjunale et le moignon gastrique distal est ensuite réalisée selon les
selon Polya est sa longueur. Si l’anastomose selon Polya est une mêmes étapes que l’anastomose selon Polya : adossement du
anastomose à bouche totale, effectuée sur la quasi-totalité de la péritoine sous-mésocolique à la face postérieure de l’estomac ;
tranche gastrique, l’anastomose selon Finsterer est à bouche partielle, réalisation du plan postérieur entre l’extrémité de la raquette
réalisée sur la partie gauche de la tranche de section gastrique gastrique et l’anse jéjunale (fig 17B2) ; ouverture du jéjunum ;
12
Techniques chirurgicales Gastrectomies pour lésions bénignes 40-320
"
A5 "
B1
"
B2
réalisation du plan antérieur ; adossement du mésocôlon à la face surtout dans les régions où le coût et la disponibilité du traitement
antérieure de l’estomac. Cette technique est aujourd’hui délaissée médical restent aléatoires [1]. Leurs indications doivent être mesurées
au profit des anastomoses postérieures à bouche totale, mécaniques, en fonction des troubles fonctionnels marquant la vie de ces
[8, 9]
qui sont rapides et sûres. patients , en particulier le dumping syndrome.
Évolution
Ce type d’anastomose (Polya ou Billroth II) est particulièrement sûr Gastrectomies atypiques
et les désunions anastomotiques sont exceptionnelles. Après
anastomose mécanique, on peut observer des chutes d’escarre avec
La qualité des bilans d’imagerie (examens échographiques,
méléna et éventuellement anémie transitoire. Parfois, il peut être
tomodensitométriques et imagerie par résonance magnétique) ainsi
nécessaire de réintervenir pour compléter l’hémostase d’une tranche
que les progrès de la fibroscopie ont permis d’accroître la mise en
de section [11].
évidence de tumeurs bénignes. Devant ce diagnostic se pose le
problème d’une éventuelle indication opératoire pour en réaliser
CONCLUSION l’exérèse. L’absence de diagnostic histologique exact, les risques
Les gastrectomies pour pathologies bénignes sont devenues rares, éventuels de dégénérescence, la répétition des examens de
leur utilité étant même mise en doute pour certains auteurs [24, 25]. surveillance et l’inquiétude des patients ou des médecins traitants
Elles restent toutefois d’actualité dans la pathologie ulcéreuse [12], amènent ces patients à décider l’ablation de leur lésion. Celle-ci est
13
40-320 Gastrectomies pour lésions bénignes Techniques chirurgicales
18 Procédé de Wangensteen,
1940. Modification avec ajout
d’une gastro-entéro-anastomose.
alors réalisée par résections gastriques partielles ou, souvent, mobilisation de la grosse tubérosité est poursuivie jusqu’au contact
atypiques. Les gastrectomies atypiques sont des gastrectomies qui du bord gauche de l’œsophage en liant tous les vaisseaux courts de
ne suivent pas de repères stricts. Elles ont pour but de réséquer des la rate. L’estomac est mobilisé sur sa face postérieure vers le haut.
tumeurs avec une marge de sécurité minimale et suffisante, en L’artère gastrique gauche est libérée et liée à son origine. La
préservant au maximum le réservoir gastrique. Habituellement, elles dissection se termine par la mobilisation de l’œsophage abdominal.
préservent au moins une des deux courbures gastriques afin de La petite courbure de l’estomac est réséquée par applications
respecter la vascularisation de l’estomac. Les procédés anciennement successives d’agrafes par plusieurs chargeurs d’une pince à
décrits (procédé de Wangensteen, 1940) (fig 18) réséquant la grande anastomose et section linéaire (de type GIAt ou TLCt) : la première
courbure, ou la réalisation de tubulisations gastriques pour rangée d’agrafes débute 3 à 4 cm en avant du pylore et la réalisation
œsophagoplastie réalisant, par agrafage, la résection de la petite d’un tube est poursuivie jusqu’à la partie moyenne de la grosse
courbure, permettent l’ablation de la plupart des lésions gastriques. tubérosité. L’agrafage doit emporter la lésion bénigne, mais le tube
Il est admis que l’estomac accepte toute forme de résection atypique. n’a pas besoin de monter dans le thorax et peut rester court (fig 19B).
Ces méthodes ont ouvert la voie à de nombreuses formes de Les agrafes sont enfouies par un surjet. L’œsophage intra-abdominal
résections partielles. Tout au plus faut-il respecter certaines règles, est sectionné sur une bourse. L’enclume d’une pince à agrafage
comme la réalisation d’une pyloroplastie en cas de sacrifice des nerfs circulaire est introduite et nouée. Une anastomose gastro-
vagues, afin de prévenir un trouble de la vidange gastrique pouvant œsophagienne est réalisée par la pince à anastomose circulaire avant
entraîner un lâchage précoce des sutures. L’utilisation des agrafeuses ablation de la pièce opératoire par application d’une agrafeuse
linéaires a rendu ces résections partielles rapides et sûres. linéaire (TAt 55 ou TX) puis section de la pièce opératoire. Une
L’avènement de la chirurgie mini-invasive laparoscopique, pyloroplastie complète le geste en raison du risque de trouble de
éventuellement associée à une endoscopie haute [22] permet vidange gastrique (fig 19C).
aujourd’hui de procéder à de multiples gestes de façon mini- Les indications de ces gestes pour lésions bénignes sont
invasive. Depuis 1991 [6], de nombreuses publications rapportent des exceptionnelles. Le principal inconvénient de cette reconstruction est
exérèses laparoscopiques [7] et nous traitons ces aspects dans un de laisser l’œsophage à proximité du duodénum après suppression
chapitre spécifique. du pylore, avec un risque de reflux biliaire et une possible
Nous limitons ce chapitre aux principales techniques, simples, qui œsophagite peptique. Pour cette raison, les indications de ces
permettent de procéder à l’ablation de toute tumeur de l’estomac. procédures sont discutées. Dans les reconstructions pour cancer, il
En effet, la gastrectomie polaire inférieure (antrectomie et n’est le plus souvent pas indiqué de conserver la grosse tubérosité
gastrectomie des deux tiers) permet de procéder à l’ablation des et des montages incluant des systèmes de prévention du reflux
tumeurs inférieures. Nous décrivons ci-après une technique simple (interposition iléocæcale, résection avec conservation pylorique) sont
de résection partielle de la partie supérieure de l’estomac, ainsi que proposés (voir gastrectomies pour cancer).
les techniques de résection cunéiformes.
¶ Résection atypique par agrafage
¶ Gastrectomie supérieure
Il est admis que toute forme de résection cunéiforme, réalisée par
La résection de la partie supérieure de l’estomac fait classiquement une ou plusieurs applications d’agrafeuses linéaires, permet de
appel à la technique de gastrectomie polaire supérieure. Nous réaliser l’exérèse d’une partie de la paroi gastrique (fig 20A, B).La
préférons réaliser, dans cette indication, l’équivalent d’un geste de lésion peut éventuellement être repérée au cours de l’intervention
tubulisation gastrique. Celui-ci permet de procéder à la résection de par endoscopie, de façon à préserver au maximum la vascularisation
la petite courbure et de la partie supérieure de la grosse tubérosité de la paroi gastrique. Les seules règles qui guident ces résections
de l’estomac (fig 19A, B). Il reprend exactement les principes de sont une conservation d’au moins un pédicule vasculaire de bonne
l’œsophagectomie selon Santi-Lewis, sans œsophagectomie associée qualité sur l’estomac. Les indications de ce type de résections restent
et donc sans temps thoracique. rares. En fait, ces techniques ont trouvé des indications privilégiées
Dans un premier temps, l’estomac est libéré de ses attaches au en chirurgie mini-invasive [7]. Dans ces techniques, l’absence de
niveau de la grosse tubérosité. L’arcade gastroépiploïque constituée palpation impose de repérer les lésions par d’autres moyens
des artères gastroépiploïques droite et gauche est conservée au (endoscopie peropératoire, gastroscopie cœlioscopique
contact de l’estomac car elle assure sa vascularisation. La transpariétale).
14
Techniques chirurgicales Gastrectomies pour lésions bénignes 40-320
*
B
*
A
19 A. Tubulisation gastrique : mobilisation de la grosse tubérosité ; section des vaisseaux courts vers la rate.
B. Section de l’estomac par application de quatre coups de pince à section-anastomose linéaire, du cardia à la
grosse tubérosité.
C. Anastomose œsojéjunale à la pince à agrafage circulaire.
*
C
*
B
*
A
20 Résection cunéiforme.
A. Résection partielle de la grosse tubérosité. B. Résection partielle du sommet de la grosse tubérosité.
15
40-320 Gastrectomies pour lésions bénignes Techniques chirurgicales
Conclusion permettent parfois de les mettre en évidence et ce sont alors les moyens
et techniques mini-invasifs qui sont utilisés pour réaliser leur exérèse.
Les gastrectomies pour lésions bénignes sont devenues rares. Les Les gastrectomies réglées pour lésions gastriques bénignes ont par
indications liées à la maladie ulcéreuse sont exceptionnelles et les ailleurs largement bénéficié de l’apport des systèmes d’agrafage
tumeurs bénignes, qui représentent moins de 2 % des tumeurs automatiques, permettant la réalisation standardisée de résections
gastriques, sont le plus souvent silencieuses. Les progrès diagnostiques rapides et sûres.
Références
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16
40-328
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 40-328
Gastrectomies vidéoassistées
D Mutter
J Leroy
J Marescaux
Résumé. – L’abord laparoscopique est considéré comme la méthode de référence pour la chirurgie
fonctionnelle de l’estomac. Les gastrectomies laparoscopiques restent de réalisation plus difficile et
nécessitent une bonne pratique de la cœlioscopie.
Les résections gastriques réglées par voie laparoscopique reproduisent les procédures effectuées par un abord
conventionnel. Toutefois, les anastomoses sont souvent réalisées par l’incision requise pour extraire la pièce
opératoire, raison pour laquelle nous préférons parler de chirurgie vidéoassistée. Les résections gastriques
atypiques, portant sur les parois gastriques antérieure ou postérieure, ont été rendues possibles par la mise au
point des agrafeuses automatiques cœlioscopiques. Souvent, ces résections atypiques sont facilitées par la
réalisation concomitante d’une endoscopie précisant la localisation de la lésion et guidant sa résection. Enfin,
la qualité du matériel et la performance de certains opérateurs permettent de proposer des résections de
tumeurs superficielles par abord totalement endogastrique. Grâce à ces méthodes, l’abord de l’estomac
devient de moins en moins invasif.
Ces différentes techniques sont actuellement en cours d’évaluation. Nous en décrivons les principes et les
principales indications.
© 2001 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Introduction Généralités
Toute référence à cet article doit porter la mention : Mutter D, Leroy J et Marescaux J. Gastrectomies vidéoassistées. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Techniques
chirurgicales – Appareil digestif, 40-328, 2001, 8 p.
40-328 Gastrectomies vidéoassistées Techniques chirurgicales
Ulcère chronique + +
Ulcère hémorragique + +
Cancer superficiel + + + +
Tumeurs malignes autres que sarcomes/lymphomes + + + + +
Chirurgie palliative du cancer avancé + + +
Tumeurs bénignes (léiomyome, adénome, + + + + +
angiodysplasie, etc...)
1
6
2
7
3
2 3
8
3 4
1 42
2 Matériel nécessaire à la chirurgie gastrique vidéoassistée.
1. Pince atraumatique ; 2. pince à disséquer ; 3. crochet coagulateur ; 4. pince bipolaire ;
5. ciseaux coagulateurs ; 6. écarteur hépatique ; 7. porte-aiguille ; 8. pince à clips ; 9.
1 Position du patient, de l’équipe chirurgicale et des moniteurs. agrafeuse automatique linéaire (type GIAt) avec la possibilité d’utiliser les différents
types d’agrafes (agrafes vasculaires, agrafes pour tissus fins et épais en différentes lon-
gueurs).
Résections gastriques réglées
La première gastrectomie réglée par voie laparoscopique était 3 Gastrectomie selon Billroth II : posi-
réalisée en 1992 [8] : il s’agissait d’une gastrectomie selon Billroth II tion des trocarts.
pour maladie ulcéreuse chronique. Cet abord permet de reproduire 1. Trocart ombilical ; 2. trocart sous-
par voie vidéoscopique les principes de la chirurgie « à ciel ouvert ». costal droit ; 3. trocart sous-costal gau-
che ; 4. trocart situé à mi-chemin entre
Depuis ces premiers pas ont été décrites les gastrectomies selon Péan les trocarts ombilical et sous-costal gau-
[14, 20]
et les gastrectomies totales pour cancer [4], bien que cette che ; 5. trocart épigastrique.
indication reste discutée.
5
2 3
GASTRECTOMIE DES DEUX TIERS SELON BILLROTH II
4
La technique des gastrectomies réglées laparoscopiques suit les
grands principes des gastrectomies conventionnelles. Chaque
opérateur développe des astuces lui permettant de faciliter 1
l’exposition et la dissection par voie laparoscopique. En raison de la
variété des solutions proposées (abord endoscopique associé,
introduction d’une main dans l’abdomen, incision pour la réalisation
des anastomoses hors de l’abdomen), nous préférons parler de
gastrectomies vidéoasssistées, car si la résection et le rétablissement
de la continuité sont réalisables par abord totalement
laparoscopique, de nombreux opérateurs utilisent une
minilaparotomie pour extraire la pièce opératoire et réaliser les
anastomoses digestives.
Nous décrivons la technique de gastrectomie laparoscopique selon placer à tout endroit des clips ou une agrafeuse linéaire. Le premier
Billroth II pour lésion bénigne, puis précisons les particularités des trocart est inséré dans l’ombilic (T1), deux trocarts sont placés sous
autres types de gastrectomies réglées. les rebords costaux droit (T2) et gauche (T3) sur la ligne
médioclaviculaire, un quatrième trocart est placé à mi-chemin entre
¶ Position des trocarts
le trocart ombilical et le trocart sous-costal gauche (T4). Un
La procédure est réalisée à l’aide de quatre ou de cinq trocarts. Ce cinquième trocart, si nécessaire, est placé au niveau de l’appendice
sont essentiellement des trocarts de 10/12 mm, ce qui permet de xiphoïde (T5) (fig 3).
2
Techniques chirurgicales Gastrectomies vidéoassistées 40-328
T3 T5
T3
T2
T2
T4
Exploration
Une exploration de la cavité abdominale permet de confirmer les T2
possibilités opératoires par laparoscopie (absence d’adhérences,
visibilité satisfaisante, opérabilité en cas de cancer) et de définir les
limites de la résection qui sont marquées par des fils repères, des
clips ou par électrocoagulation.
3
40-328 Gastrectomies vidéoassistées Techniques chirurgicales
T3
T2
T4 T4
7 Section de l’estomac par pince à agrafage linéaire.
Anastomose digestive
Deux solutions permettent d’effectuer le rétablissement de la
continuité digestive. Le geste chirurgical peut être poursuivi par voie
laparoscopique : l’anastomose est réalisée avant extraction de la
pièce opératoire [17]. Il est également possible de considérer que
l’incision requise pour extraire la pièce opératoire permet d’effectuer
le rétablissement de la continuité digestive. Nous décrivons
brièvement le rétablissement par voie laparoscopique, celui réalisé 8 Exposition de la face postérieure de l’estomac en vue de la réalisation de l’anasto-
par une mini-incision étant en tous points comparable à une voie mose. L’anse jéjunale est préparée.
ouverte conventionnelle.
L’estomac est fixé à la paroi abdominale antérieure par deux sutures GASTRECTOMIE SELON PÉAN (OU BILLROTH I)
(fig 8). Un fil serti sur aiguille droite est introduit au travers de la La dissection et la résection gastriques pour gastrectomie selon Péan
paroi abdominale en regard d’une extrémité de la tranche de section suivent les mêmes principes que la résection selon Polya (cf supra).
gastrique. Le fil est passé au travers de l’estomac et ressorti à La résection gastrique est plus limitée, en suivant les repères décrits
proximité de son point d’entrée. La suture sous tension de ce fil dans le chapitre « Gastrectomies pour lésions bénignes », fascicule
ainsi que celle d’un second fil placé à l’autre extrémité du moignon 40-320 de l’Encyclopédie Médico-Chirurgicale.
gastrique permettent d’exposer la face postérieure de l’estomac. La
Le rétablissement de la continuité selon Péan est réalisable par voie
caméra est placée en position sous-mésocolique afin de choisir l’anse
totalement vidéoscopique en utilisant une pince à agrafage
utilisée pour le rétablissement de la continuité. Le grêle est déroulé
circulaire [14]. Après la résection de l’antre gastrique, une pince à
et saisi à 40 cm de l’angle de Treitz. Le passage de l’anse peut se
anastomose circulaire est introduite au travers d’un trocart de 33 mm
faire en précolique, solution simple souvent choisie par plusieurs
qui remplace le trocart latéro-ombilical gauche (T4) ou directement
auteurs [17, 19] (fig 8), ou en transmésocolique, solution plus difficile à
à travers la paroi abdominale. Le moignon duodénal est ouvert,
réaliser mais préférable à nos yeux [3]. L’anastomose est réalisée de
l’enclume de la pince est introduite et le moignon refermé par une
façon anisopéristaltique. Une incision de la paroi du grêle et de
bourse (fig 10). Une boucle préformée peut également fermer le
l’estomac est réalisée à l’aide des ciseaux (Ci4) ou du crochet (CR4)
moignon duodénal sur l’enclume. Une gastrotomie est réalisée sur
à l’extrémité gauche de la ligne anastomotique prévue. L’agrafeuse
la face antérieure de la grosse tubérosité. La pince est insérée dans
passe par le trocart latéro-ombilical gauche (T4). Ses mors sont
l’estomac et sa pointe perfore la face postérieure de l’estomac,
introduits dans les deux orifices, grêle et gastrique, et deux
permettant de réaliser l’anastomose avec le duodénum (fig 11).
applications successives d’agrafes linéaires, chargeur bleu,
L’orifice d’introduction de la pince est refermé par un surjet ou des
permettent de réaliser une anastomose de longueur suffisante (fig 9).
points séparés. La pièce opératoire, introduite dans un sac, est
La brèche d’introduction de l’agrafeuse est fermée par suture
extraite. Le bénéfice de cette approche ne nous semble pas
endoscopique (surjet ou points séparés). Les points de suspension
déterminant en raison du temps nécessaire à la réalisation de cette
gastrique sont retirés. La qualité de l’anastomose peut être contrôlée
procédure (4 à 6 heures) [14, 20] et de la possibilité de réaliser
par gastroscopie ou son étanchéité vérifiée par injection
l’anastomose par l’incision nécessaire à l’extraction de la pièce
intragastrique de bleu de méthylène [17].
opératoire (évaluée entre 4 et 8 cm) [20].
Extraction de la pièce opératoire
La pièce opératoire est introduite dans un sac et extraite par une GASTRECTOMIE TOTALE
minilaparotomie. Il est également possible de protéger les berges de La gastrectomie totale, indiquée en cas de cancer gastrique, peut
la minilaparotomie à l’aide d’une jupette et d’extraire la pièce. également être réalisée par un abord laparoscopique. Toutefois, cette
La prise en charge et le suivi postopératoires ne diffèrent pas d’un indication reste controversée. La difficulté de cette intervention
abord conventionnel. L’utilité du drainage reste discutée et est réside dans la difficulté de mobiliser la pièce opératoire, qui est
décidée en fonction des habitudes de chacun. volumineuse, et dans la difficulté du curage.
4
Techniques chirurgicales Gastrectomies vidéoassistées 40-328
T3 T3
T2
T2
T4
T4
T2
T4
T4*
B *
C
*
A B
12 A. Passage de l’enclume dans l’œsophage au travers de la gastrotomie.
B, C. Après section de l’œsophage, une traction sur le fil permet d’extérioriser
T2 l’extrémité de l’enclume au travers de la paroi œsophagienne.
5
40-328 Gastrectomies vidéoassistées Techniques chirurgicales
CONCLUSION
Les techniques de gastrectomie partielle sont bien définies et
reproduisent les procédures réalisées par un abord conventionnel.
Les indications en sont essentiellement les maladies ulcéreuses
chroniques, pathologies de plus en plus rarement opérées, et les
tumeurs bénignes. Comme pour d’autres organes, le problème de
l’approche laparoscopique des cancers n’est pas résolu. La T4
vidéoscopie permet une excellente exploration de la cavité 13 Résection laparoscopique d’une tumeur située à la face antérieure de l’estomac
abdominale. Certaines équipes, en particulier japonaises, défendent par application de pinces à agrafage linéaire.
l’abord mini-invasif du cancer gastrique, surtout superficiel
(tableau I). La réalisation du rétablissement de la continuité par voie proposer une solution plus rapide pour pratiquer l’exérèse de
laparoscopique après gastrectomie nous semble d’un intérêt lésions postérieures [10]. Le premier geste consiste en la réalisation
discutable. L’extraction de la pièce opératoire, a fortiori en cas d’une gastrotomie antérieure (fig 14A). Celle-ci permet
d’omentectomie associée, implique une incision de grande taille l’identification de la lésion. Deux pinces présentent la paroi
permettant la confection rapide d’une anastomose de qualité. Si gastrique postérieure de part et d’autre de la lésion, en évitant une
l’abord laparoscopique permet une bonne dissection de l’estomac, prise directe risquant de la rompre. La tumeur et une partie de la
nous sommes partisans de la réalisation des anastomoses à ciel paroi gastrique postérieure sont extériorisées par la gastrotomie
ouvert. antérieure. Des applications successives d’agrafes permettent
d’assurer l’exérèse de la lésion (fig 14B). La gastrotomie antérieure
Résections gastriques atypiques est refermée par suture en surjet ou par application d’agrafes.
La chirurgie mini-invasive associée à l’usage des pinces à sutures TUMEURS D’IDENTIFICATION DIFFICILE
linéaires automatiques a transformé la prise en charge des tumeurs
bénignes de l’estomac. Il est difficile de donner une description De petites lésions, des lésions hémorragiques ou des lésions
exhaustive de toutes les techniques proposées pour procéder à cancéreuses superficielles peuvent bénéficier du même type de
l’ablation partielle de la paroi gastrique, antérieure ou postérieure. résection pourvu qu’elles soient parfaitement localisées [1, 23] .
Le nombre de publications faisant état de un, deux ou trois cas L’opérateur ne pouvant palper efficacement la paroi gastrique, il est
cliniques témoigne de l’engouement des chirurgiens pour cette fait appel à une gastroscopie pour localiser la lésion. Le premier
approche, d’autant qu’elle s’adresse à une pathologie supposée temps opératoire doit oblitérer le grêle proximal pour éviter une
bénigne [5, 10, 12]. Toutefois, aucune série ne rapporte les résultats de insufflation intraluminale du duodénum et du grêle au cours de la
l’application de ces techniques pour un nombre significatif de procédure (clampage chirurgical du jéjunum ou placement
patients avec un recul suffisant. La résection atypique est également endoscopique d’une sonde à ballonnet dans le premier
proposée pour des tumeurs malignes, cancers superficiels ou pour duodénum [21]). L’endoscopie localise la lésion (fig 15). L’opérateur
des sarcomes [24] (tableau I).L’association d’une gastroscopie de saisit la zone ainsi identifiée à l’aide d’une pince de Babcock et la
repérage à la laparoscopie dans le même temps opératoire permet résèque comme il le ferait pour une tumeur facilement reconnue. La
de procéder à l’exérèse de petites tumeurs ne déformant pas gastroscopie permet de vérifier le caractère complet de la résection
l’estomac et qui peuvent rester difficiles à identifier en laparoscopie et l’existence d’une marge de sécurité suffisante en cas de lésion
[1, 9]
. potentiellement maligne.
6
Techniques chirurgicales Gastrectomies vidéoassistées 40-328
T2 T3
T3 T2
T4 *
A
T4
*
B
14 Gastrotomie antérieure
A. Extériorisation de la tumeur. B. Résection de la tumeur par agrafage.
7
40-328 Gastrectomies vidéoassistées Techniques chirurgicales
La chirurgie transgastrique connaît un essor grandissant, en semble pas présenter de bénéfice évident. L’incision nécessaire à
particulier lié à la qualité technique du matériel. Les indications sont l’exérèse de la pièce opératoire permet le plus souvent la réalisation
rares, mais le caractère mini-invasif de ces résections fait qu’elles d’anastomoses conventionnelles de façon aisée.
seront probablement une des voies amenées à se développer de La complexité du geste opératoire laparoscopique et l’absence de
façon importante dans les années à venir. sensations tactiles amènent certains auteurs à proposer l’usage de gants
endoscopiques qui permettent l’introduction d’une main dans
l’abdomen en conservant le pneumopéritoine (Dexterity Glovet ou
Conclusion Dexterity Pneumo Sleevet) [15]. Il est possible de réaliser une palpation
des organes et une manipulation facilitant la dissection. Les résections
L’intérêt de l’approche laparoscopique des résections gastriques réglées atypiques et les résections muqueuses endogastriques cœlioassistées
est de permettre une exploration abdominale complète et une dissection complètent l’arsenal thérapeutique mis à la disposition des opérateurs.
en tous points comparable à celle réalisée par voie ouverte pour des L’abord laparoscopique peut être envisagé pour toutes les petites
équipes entraînées. Les premiers résultats de la littérature ne mettent tumeurs bénignes et malignes. Néanmoins, les indications de ces
pas en évidence de complications spécifiquement liées à cet abord, tout dernières techniques sont limitées à des indications très spécifiques.
en notant, au prix d’une durée opératoire nettement plus longue, un Ce sont les tumeurs très localisées et/ou pédiculées qui bénéficient
gain en termes de confort postopératoire. La reprise du transit, l’index d’une résection atypique. Les résultats de ces techniques, leur bénéfice
de performances et la satisfaction des patients sont meilleurs après une à long terme et leur comparaison avec des techniques plus
approche vidéoassistée qu’après un abord conventionnel [2]. À l’inverse, conventionnelles ne sont pas connus. Seule leur faisabilité est, à ce
la réalisation des anastomoses par voie totalement endoscopique ne jour, démontrée.
Références
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8
¶ 40-285
Gastro-entéro-anastomoses
F. Reche, C. Brigand, C. Meyer
La voie d’abord est classiquement une laparotomie médiane Réalisation de l’anastomose (Fig. 3, 4)
sus-ombilicale pouvant être agrandie en sous-ombilical.
Certains lui préfèrent une incision bi-sous-costale qui offre Si l’accès à la cavité omentale est fait par voie transmésoco-
une exposition idéale de l’étage sus-mésocolique. lique isolée, l’anastomose ne peut être effectuée que dans l’étage
1
7
2
8
3 9
4
10
5
3
2
4
B
C
Figure 1.
Figure 2. Passage du mésocôlon transverse, voies d’abord.
A. Situation des éléments anatomiques sur une coupe antéropostérieure.
A. Abord sous-mésocolique.
1. Estomac ; 2. cavité omentale ; 3. arcade vasculaire gastroépiploïque ; 4.
B. Passage sus-mésocolique. Abord mixte.
ligament gastrocolique ; 5. côlon transverse ; 6. grand épiploon ; 7.
C. Contrôle sous-mésocolique. Abord mixte.
pancréas ; 8. angle duodénojéjunal ; 9. mésocôlon transverse ; 10. arcade
de Riolan.
B. Zone avasculaire du mésocôlon transverse : disposition vasculaire conditions d’exposition, dans l’étage sus-mésocolique après
habituelle. 1. Arcade de Riolan ; 2. artère colique supérieure droite ; 3. avoir attiré l’anse jéjunale à travers la brèche dans la cavité
racine du mésocôlon transverse ; 4. artère colique supérieure gauche ; 5. omentale. En cas d’anastomose isopéristaltique, l’anse est
zone de passage. disposée de telle façon que sa branche efférente soit à droite
C. Zone avasculaire du mésocôlon transverse : présence d’une artère près du pylore.
colica media (5) ; zone de passage (6). Les parois gastrique et jéjunale sont alors incisées au
bistouri électrique sur 6 cm de longueur ce qui correspond à
sous-mésocolique, la paroi gastrique étant abaissée à travers la deux fois le diamètre du grêle, respectivement à 1-2 cm du
brèche. Alors qu’en cas d’abord combiné sus- et transmésocoli- bord de la grande courbure et sur le bord antimésentérique de
que, elle peut être également effectuée, et dans de meilleures l’intestin.
antimésentérique et une courte gastrotomie d’environ 5 à agrafeuse est appliquée, soit longitudinalement dans le même
10 mm chacune. Au moment de rapprocher et de serrer les sens que l’anastomose, soit perpendiculairement, mais ceci a
deux branches, il faut prendre soin de placer la branche jéjunale peu d’importance. Il faut en revanche surtout veiller à ce que
strictement à l’aplomb du bord mésentérique et parallèlement à l’agrafage ne soit pas oblique et qu’il soit économe de paroi
l’axe intestinal. jéjunale afin de ne pas être sténosant.
Une fois l’agrafage réalisé à l’aide d’un chargeur de 90 ou
75 mm, doté de grandes agrafes (4,5 mm) ou de deux chargeurs
de 50 ou 55 mm et après le retrait des deux branches de la Variantes anastomotiques
pince, il est impératif de contrôler l’hémostase intraluminale des
lignes d’agrafage que l’on extériorisera par éversion à l’aide de GEA anisopéristaltique (Fig. 6)
pinces à préhension type Babcock. Si besoin, l’hémostase est
complétée par coagulation ou par des points d’hémostase. L’anse efférente ne se situe plus à l’aplomb de la petite
L’orifice d’introduction de la pince est refermé, soit manuel- courbure gastrique, au plus près du pylore, mais est positionnée
lement par des points séparés ou par un surjet, soit mécanique- du côté gauche de l’anastomose qui est réalisée le plus près
ment à l’aide d’une pince à agrafage linéaire simple (modèle possible de l’angle duodénojéjunal, raccourcissant de ce fait la
grandes agrafes en raison de l’épaisseur gastrique). Cette longueur de l’anse afférente.
GEA à travers une ouverture distale du ligament ne devant pas dépasser un tiers de la circonférence intestinale
gastrocolique afin d’obtenir un calibre anastomotique maximal et optimal.
L’anastomose est réalisée perpendiculairement, l’estomac se
La technique est la même s’agissant de l’anastomose elle- situant dans le plan frontal et l’anse jéjunale se plaçant en un
même. Elle diffère par un abord plus rapide de la cavité plan sagittal. L’anse afférente se place en arrière de l’estomac et
omentale à travers l’ouverture du ligament gastrocolique, en l’anse efférente en avant.
une zone peu vascularisée située au-delà de l’arcade vasculaire Ce procédé réalise une anastomose à double lumière en
de la grande courbure qu’elle a l’avantage de préserver. « canon de fusil ».
Par rapport à l’entérotomie longitudinale, cette technique
ménagerait en effet les fibres musculaires lisses circulaires qui
GEA sur entérotomie transversale (Fig. 7) ont un rôle essentiel dans le péristaltisme intestinal ainsi que les
vaisseaux droits intestinaux.
Cette technique, préconisée par certains auteurs mais très peu Elle permettrait de ce fait une meilleure vidange gastrique.
diffusée, consiste à réaliser l’anastomose sur une entérotomie Elle éviterait le reflux dans l’anse afférente et réduirait le risque
transversale effectuée de part et d’autre du bord antimésentéri- de dumping syndrome en favorisant le phénomène de « sphinc-
que jusqu’à environ 1 cm du bord mésentérique, sa longueur térisation » de l’anastomose.
Hémorragie anastomotique
Elle survient le plus souvent sur une anastomose mécanique.
Il faut contrôler et obtenir une hémostase parfaite en peropéra-
toire en éversant les lignes de suture. Elle est favorisée par les
troubles de la crase souvent présents en cas d’ictère cholestati-
que sévère.
Fistule anastomotique
Elle est rare, secondaire en général à un défaut technique. Elle
ne devrait plus se voir.
Troubles fonctionnels tardifs Figure 11. Syndrome de l’anse afférente (stase). Traitement par anas-
tomose latérolatérale au pied de l’anse.
Ils sont représentés par :
• les diarrhées postprandiales sévères et le dumping syndrome ;
• les diarrhées motrices liées à la vagotomie ;
• le syndrome de l’anse afférente lié à la stase au niveau d’une reproductibilité [13-16]. En dehors des cas d’invasion néoplasique
anse afférente trop longue ; dans ces cas, une réintervention du mésocôlon, la technique habituelle transmésocolique avec
peut parfois être nécessaire, s’agissant soit d’une anastomose anastomose sur le versant postérieur de l’estomac est également
au pied de l’anse entre l’anse afférente trop longue et dilatée possible. Elle est cependant techniquement plus difficile à
et l’anse efférente (Fig. 11), soit d’une dégastrogastrectomie réaliser avec des résultats comparables à la voie précolique.
avec confection d’une nouvelle anastomose gastrojéjunale. L’intervention débute par la bipartition du grand épiploon,
de son bord libre jusqu’à la face antérieure et moyenne du
côlon transverse, à l’aide d’un ciseau ultrasonique. Ce geste
■ Technique opératoire permet l’ascension de l’anse jéjunale sans tension vers l’estomac
(Fig. 13).
par laparoscopie Le côlon transverse est tendu vers le haut avec une pince
fenêtrée, ce qui permet l’indentification de l’angle de Treitz à la
Installation du patient (Fig. 12A) racine du mésocôlon transverse. L’anse jéjunale choisie (habi-
tuellement la deuxième) est la plus courte possible, mais
L’intervention se réalise sous anesthésie générale avec une suffisamment longue pour arriver facilement au niveau de
sonde nasogastrique en place. Une antibioprophylaxie est l’antre gastrique.
débutée au moment de l’induction anesthésique. Sur le versant gastrique, la zone anastomotique doit être la
Le patient est installé les membres inférieurs écartés, cuisses plus déclive possible, c’est-à-dire sur la grande courbure antrale,
fléchies. La table opératoire est inclinée de 20° en proclive. Le à 1-2 cm du pylore. Deux ou trois branches artérielles prove-
chirurgien se place entre les jambes avec un assistant si possible nant de l’artère gastroépiploïque droite peuvent être sectionnées
de chaque côté. La colonne de laparoscopie est placée à côté de avec l’Ultracision® pour libérer cette région (Fig. 14A).
l’épaule gauche du patient.
Réalisation de l’anastomose
Position des trocarts et procédure (Fig. 12B)
L’anse jéjunale est fixée horizontalement sur l’estomac sur
Tous les sites de trocarts sont infiltrés avec de la ropivacaïne une longueur de 6 cm par deux points de Vicryl® 2-0 (polyglac-
7,5 mg/ml avant incision. tine 910) afin de maintenir les deux structures en tension. Les
Un trocart-optique de 10 mm est placé par la technique dite nœuds sont faits en intra- ou extracorporel selon les habitudes
« ouverte » à 1 cm au-dessus de l’ombilic. Le pneumopéritoine du chirurgien (Fig. 14B).
est réalisé avec une pression d’insufflation moyenne de On réalise une courte entérotomie antimésentérique de même
12 mmHg. Une optique de 0° est utilisée. qu’une courte gastrotomie de 5 mm chacune avec l’Ultracision®
Sous vision directe, un trocart de 5 mm est placé sous (Fig. 15).
l’appendice xiphoïde pour récliner éventuellement le foie. Deux Une agrafeuse linéaire coupante endoscopique articulée de
trocarts opérateurs de 10-12 mm sont introduits dans les 45 mm de long est placée dans le trocart de l’hypocondre droit.
hypocondres droit et gauche, sur les lignes médioclaviculaires, Un chargeur vert est utilisé (4,1 mm d’épaisseur).
3 cm au-dessus de l’ombilic. Les deux branches de la pince sont introduites dans la
Comme la plupart des équipes, nous effectuons une anasto- lumière gastrique et jéjunale. Avant de fermer la pince, il faut
mose précolique isopéristaltique eu égard à sa simplicité et à sa prendre soin de placer la branche jéjunale dans l’axe de
4 4
3
2
T3
T4
A
910) (Fig. 17A, B). Alternativement, l’orifice d’introduction de la
pince à suture peut être fermé par une agrafeuse linéaire
endoscopique, en veillant à ne pas prendre de façon oblique
l’anse jéjunale (risque de sténose) [17].
L’étanchéité de l’anastomose est contrôlée par un test au bleu
de méthylène par la sonde gastrique. Il n’est pas nécessaire de
laisser en place de drainage. Les orifices de trocarts de 10 mm
sont fermés avec du Vicryl® 1.
La sonde nasogastrique est retirée au deuxième jour ; une
alimentation progressive est instaurée à partir du troisième jour,
2 après un contrôle radiologique de l’anastomose par un transit à
la Gastrografine® (Hypaque®).
1
3 4
5
■ Gestes associés
à la gastro-entéro-anastomose
sous laparoscopie
S’agissant d’une lésion bénigne, nous réalisons une vagotomie
tronculaire pour prévenir la survenue d’un ulcère anastomoti-
B que. Ce geste pourrait augmenter le risque de gastroplégie
postopératoire, événement que nous n’avons pas observé dans
Figure 12. notre expérience.
A. Patient en décubitus dorsal, proclive 20°. 1. Chirurgien ; 2. assistant ; Le lobe gauche du foie est récliné par un écarteur placé à
3. assistant-caméra ; 4. moniteurs. travers le trocart de 5 mm sous-xiphoïdien. L’estomac est attiré
B. Position des trocarts. 1. Caméra ; 2. trocart 5 mm ; 3, 4. trocarts vers le bas et la gauche par une pince de préhension de type
10-12 mm ; 5. trocart 5 mm supplémentaire. Babcock au niveau de la grande courbure. Cette manœuvre
facilite l’exposition de la région hiatale. La membrane phréno-
œsophagienne est ouverte avec l’Ultracision®. On expose la face
l’intestin avec la surface des agrafes sur le bord antimésentéri- antérieure et le bord droit de l’œsophage abdominal pour une
que pour éviter une rotation et prendre le mésentère (Fig. 16). dissection atraumatique. Une fois identifiés, les nerfs vagues
Une fois agrafé, la pince est laissée en place pendant 2 minutes antérieurs et postérieurs sont sectionnés entre deux clips. Cette
pour favoriser l’hémostase au niveau de la ligne d’agrafage. section se fait le plus haut possible dans l’orifice hiatal. Les deux
Deux applications sont nécessaires pour obtenir un calibre segments nerveux sont adressés pour confirmation histologique
anastomotique suffisant. Après le retrait de la pince, le laparos- à l’examen anatomopathologique (Fig. 18).
cope est introduit à travers l’orifice résiduel, pour contrôler la Dans le cas d’une intervention palliative pour obstacle
qualité de l’hémostase qui au besoin peut être complétée à néoplasique non réséquable, et compte tenu d’une espérance de
l’aide d’une pince à coagulation bipolaire. vie moyenne de 7 à 9 mois [18-20], il est prescrit un inhibiteur
La gastroentérotomie est refermée par une suture continue de de la pompe à protons pour pallier le risque d’ulcère
Prolène® 2-0 (polypropylène) ou de Vicryl® 2-0 (polyglactine anastomotique.
1
2
T3
T4
T4
T3 T4
T3
T4
B
Figure 14.
A, B. Anse jéjunale montée en précolique et isopéristaltique.
T2
T4
T3
T4
T3
T5
Figure 18. Vagotomie tronculaire.
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B. Anastomose terminée. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Techniques chirurgicales-Appareil
digestif ; 40–410, 1996:1–8.
[8] Perissat J, Collet D, Arnoux R, Salloum J, Bikandou G. Traumatismes
associée à une vagotomie tronculaire si la durée de survie est du duodéno-pancréas. Principes de technique et de tactique chirurgica-
longue. Dans le cas contraire se discute la prescription d’inhi- les. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Techniques chirurgicales-
biteurs de la pompe à protons. En cas de dérivation pour un Appareil digestif ; 40-898, 1991:1-15.
cancer gastrique non extirpable, le procédé de bipartition [9] Meyer CH, Jobard D, Thiry L, DeManzini N, Rohr S. Perforation
gastrique évite les aléas d’une GEA « suspendue ». Enfin, si la papillaire rétro-duodénale après sphinctérotomie endoscopique. La
sténose pyloroduodénale est modérée, l’exclusion duodénale par place du traitement chirurgical par exclusion du duodénum. À propos
agrafage pallie les risques de circulus viciosus. de 3 cas. J Chir (Paris) 1995;132:118-22.
L’abord laparoscopique peut être réalisé avec une faible [10] Popovici Z, Borcean G. Anastomose jéjunale transversale dans la
morbimortalité tout en permettant de réduire la durée d’hospi- gastrectomie. Lyon Chir 1986;82:126-8.
talisation. Cette technique mini-invasive associée à la maîtrise [11] Siewert JR, Becker HD, Bünte H, Feifel G, Hölscher AH, Koch B, et al.
des procédés percutanés ou endoscopiques de mise en place des Chirurgie des Abdomens 2: Ösophagus, Magen und Duodenum
endoprothèses biliaires et à la meilleure tolérance des nouveaux breitner chirurgische Operationslehre - Band IV. In: München: Urban
protocoles de chimiothérapie est à l’origine de l’amélioration du u Schwartzenberg ed; 1989. p. 271-3 (213–215).
confort et de la qualité de vie des malades. Une bonne expé- [12] Kwok SP, Chung SC, Griffin SM, Li AK. Devine exclusion
rience des techniques de laparoscopie est cependant nécessaire for unresectable carcinoma of the stomach. Br J Surg 1991;78:
à la réalisation de cette opération. 684-5.
[13] Ghanem AM, Hamade AM, Sheen AJ, Owera A, Al-Bahrani AZ, [19] Tjarda Van Heek N, De castro SM, Van Eijck C, Van Green R,
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Reche F., Brigand C., Meyer C. Gastro-entéro-anastomoses. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Techniques
chirurgicales - Appareil digestif, 40-285, 2007.
Gastrostomies chirurgicales
A. Valverde
■ Principes ■ Indications
La gastrostomie d’alimentation est une intervention grevée Les gastrostomies d’alimentation représentent la principale
d’une mortalité et d’une morbidité non négligeables. Elle est en indication de ce type d’intervention et doivent être mises en
effet indiquée chez des patients souvent fragilisés, voire balance avec toutes les autres méthodes d’alimentation entérales
cachectiques, et expose aux risques de reflux de liquide acide, et parentérales dont on dispose actuellement (Fig. 1).
de brûlures cutanées péristomiales, de désunion stomiale et de Il s’agit essentiellement de gastrostomies définitives en aval
sepsis pariétal, au maximum d’éviscération septique avec fuite de tumeurs oropharyngées ou œsophagiennes rendues soit
de liquide gastrique dans la cavité péritonéale [2, 3]. Il s’agit inextirpables, soit infranchissables par les différentes techniques
Entérostomie d'alimentation
Gastrostomie percutanée
Échec
Impossiblité
Une bourse au fil résorbable 4/0 est confectionnée. Gastrostomie tubulée (Fig. 6)
On réalise l’incision au bistouri électrique de la musculeuse,
l’hémostase des vaisseaux sous-muqueux, l’incision de la Ce type de gastrostomie est de réalisation un peu plus longue
muqueuse et l’ouverture de l’orifice à la pince de Kelly afin et délicate, mais améliore considérablement les suites postopé-
d’introduire la sonde de gastrostomie. Il est important de ratoires : l’interposition d’un lambeau gastrique tubulé permet
réaliser un orifice gastrique le plus étroit possible. de créer un système antireflux efficace et de rendre la sonde
La bourse est serrée autour de la sonde, puis on confectionne inutile [6, 9]. De plus, la traversée musculaire du tube gastrique
une deuxième bourse au fil résorbable 4/0 afin d’invaginer le augmente la continence du système et diminue les risques de
cône gastrique d’introduction de la sonde. suppuration pariétale. L’apport des pinces automatiques facilite
La sonde de gastrostomie est alors extériorisée par une contre- ce type de gastrostomie.
incision transrectale gauche de 1 cm. Après incision cutanée et La méthode la plus répandue consiste à confectionner aux
ouverture de l’aponévrose antérieure, le muscle grand droit est dépens de la face antérieure de l’estomac (parfois de la grande
traversé à la pince de Kelly en veillant à ne pas blesser les courbure) un lambeau tubulé de 1 cm de diamètre environ.
vaisseaux épigastriques. Il est essentiel de repérer d’emblée la base du tube gastrique,
Après extériorisation de la sonde, la paroi gastrique péristo- que l’on situe comme pour les gastrostomies directes sur le haut
miale est fixée au péritoine pariétal antérieur par quatre points de la grosse tubérosité, à proximité de la grande courbure.
cardinaux de fil résorbable 4/0. Selon la plasticité de l’estomac et la largeur du fundus, on
réalise un tube horizontal de droite à gauche, ou oblique en
L’étanchéité du montage est vérifiée par injection d’eau à
haut et à gauche. On peut aussi réaliser un tube vertical.
chacune des étapes de cette intervention.
Deux pinces de Babcock réalisent le pli gastrique correspon-
La sonde de gastrostomie est fixée à la peau au fil non
dant au futur tube. La pince GIA est appliquée dans le sens
résorbable en veillant à ne pas sténoser le montage.
choisi (horizontal ou oblique), et avant de pousser le couteau
on vérifie deux points :
Gastrostomie indirecte de type Witzel (Fig. 5) • l’épaisseur du pli gastrique, qui doit mesurer environ 3 cm ;
• la base du tube, qui doit être large d’au moins 2 cm.
Il s’agit d’une gastrostomie indirecte avec enfouissement de la Après section gastrique (parfois deux applications de pince
sonde [7, 8]. Cette gastrostomie crée un système antireflux et GIA sont nécessaires), il faut compléter l’hémostase de la ligne
permet un changement ultérieur plus facile de la sonde. d’agrafes au bistouri électrique, au mieux à la pince bipolaire.
L’introduction de la sonde dans l’estomac et la confection de En cas de paroi gastrique épaisse, il peut être utile de renfor-
la bourse d’enfouissement sont identiques. cer la ligne d’agrafes par un surjet de Vicryl® 4/0 en évitant le
La sonde est alors tunnellisée sur 10 cm à la face antérieure tube lui-même sous peine de le sténoser.
de l’estomac afin de ressortir sur une contre-incision transrectale L’extrémité du tube est extériorisée en transrectal gauche
gauche. dans les mêmes conditions qu’une sonde de gastrostomie
Cette tunnellisation est faite par un surjet de fil résorbable directe. L’incision cutanée excise une pastille de 1 cm. Le tube
4/0 : il est préférable d’inciser la couche séromusculaire sur gastrique est ouvert puis directement ourlé à la peau par des
toute la longueur du tunnel afin de mieux enfouir la sonde. On points séparés de fil résorbable 4/0. Ces points prennent
peut cependant utiliser toute l’épaisseur gastrique. La sonde est largement la séromusculeuse du tube gastrique et le tissu
extériorisée et fixée comme dans la technique précédente. cutané, sans fixation aponévrotique ou péritonéale complémen-
taire. L’ouverture de la gastrostomie a donc été faite au dernier l’expérience pratique de l’opérateur, bien que cette technique
moment et l’étanchéité du système est vérifiée par injection ne présente pas de difficulté majeure.
d’eau ou de bleu de méthylène. Une sonde d’aspiration de petit Nous décrirons la gastrostomie tubulée laparoscopique qui
calibre est introduite pendant les premières heures dans le tube. n’est autre que la gastrostomie tubulée précédemment décrite,
réalisée par laparoscopie.
■ Gastrostomies
Instrumentation
par laparoscopie [10, 11]
En fin d’intervention, on vérifie l’absence d’hémorragie aux Des orifices aponévrotiques de 10 et 12 mm sont suturés au
points d’introduction des trocarts que l’on retire avant fil résorbable. Une sonde d’aspiration est placée temporairement
exsufflation. dans le tube.
2
3 1 4
A B
T2
T4
T3
D
Figure 7. Gastrostomie tubulée par laparoscopie.
A. Installation opératoire. L’opérateur (1) est entre les jambes du malade, l’aide (2) qui est à gauche du malade, manipule la caméra et une pince xiphoïdienne.
B. Position des trocarts. L’optique de 10 mm (1) est légèrement au-dessus de l’ombilic et peut éventuellement être décalée sur la gauche. Le trocart 12 mm
(3) permet le passage de la pince EndoGIA®. Le trocart de 5 mm sous-costal droit (2) permet d’introduire une pince pour récliner le foie.
C. Le lobe gauche est récliné par une pince sous-costale droite passant dans un trocart de 5 mm (T2) qui traverse le ligament suspenseur et soulève la face
inférieure du foie. Cette pince est soit maintenue par un aide, soit autobloquée sur le diaphragme qu’elle accroche.
D. Le pli gastrique est présenté par la pince T4. La pince EndoGIA® est introduite par le trocart 12 mm de l’hypocondre droit (T3), ce qui lui permet d’être dans
l’axe de tubulisation gastrique.
T2
T4
T3
E
Figure 7. (suite) Gastrostomie tubulée par laparoscopie.
E. La tubulisation gastrique est obtenue par application d’au moins deux coups de pince automatique (T3).
F. L’extrémité du tube est présentée par la pince T3 puis attirée par la pince T4. Le trocart T4 est alors retiré et l’extrémité du tube est sortie au travers de la
paroi abdominale.
doit être traitée aussitôt par application d’une pâte à l’eau ou, [4] Hoffer EK, Cosgrove JM, Levin DQ, Herskowitz MM, Sclafani SL.
mieux, par mise en place d’une poche étanche adhésive à base Radiologic gastrojejunostomy and percutaneous endoscopic
de poudre de karaya. gastrostomy: a prospective, randomized comparison. J Vasc Interv
Le premier changement de sonde peut avoir lieu dès j21. La Radiol 1999;10:413-20.
perméabilité des sondes doit être régulièrement vérifiée, ainsi [5] Scott F, Beech R, Smedley F, Timmis L, Stokes E, Jones P, et al.
que leur fixation à la peau. En l’absence de sonde tutrice, le Prospective, randomized, controlled, single-blind trial of the costs and
trajet d’une gastrostomie non tubulée se ferme rapidement en consequences of systematic nutrition team follow-up over 12 months
quelques jours. Pour retrouver un ancien trajet de gastrostomie, after percutaneous endoscopic gastrostomy. Nutrition 2005;21:1071-7.
il faut avoir recours à des sondes de petit calibre (type sonde [6] Moss G. A simple technique for permanent gastrostomy. Surgery 1972;
urétérale) et tenter de passer un guide sous contrôle 71:369-70.
radiologique. [7] Webster MW, Carey LC, Ravitch MM. The permanent gastrostomy.
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A. Valverde, Ancien interne des hôpitaux de Paris, ancien chef de clinique-assistant des hôpitaux de Paris, chirurgien des Hôpitaux (alain.valverde@mac.com).
Fédération de chirurgie viscérale, Centre hospitalier Victor Dupouy, boulevard du lieutenant Cl Prud’hon, 95107 Argenteuil cedex, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Valverde A. Gastrostomies chirurgicales. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Techniques chirurgicales -
Appareil digestif, 40-280, 2007.
Gastrostomies percutanées
endoscopiques
C. Barthélémy, N. Dilou
■ Indications que dans la lumière gastrique. Ce fil sera récupéré par une pince
puis ressorti par la bouche grâce à l’endoscope. Il servira de fil
Le but de la gastrostomie est de permettre une alimentation tracteur ou de fil guide.
entérale chez les sujets présentant une dysphagie grave ou Il est attaché à une sonde de gastrostomie. Par traction sur
d’éviter l’alimentation orale en cas de fausses routes répétées. l’extrémité abdominale, la sonde est descendue dans l’estomac
Elle est justifiée si la durée de l’alimentation est supérieure à et son extrémité distale vient se bloquer contre la paroi gastri-
4 semaines. que grâce à une collerette butoir (méthode pull).
Les principales indications sont les affections neurologiques Le fil peut être aussi utilisé comme guide : la sonde est
(pathologies dégénératives, accident vasculaire cérébral [AVC], ensuite poussée jusque dans l’estomac à travers la paroi de
coma prolongé), les cancers (notamment oto-rhino- .
dedans en dehors après dilatation jusqu’à un diamètre suffisant
laryngologique [ORL] et œsophagien), et la décompression (technique push de Sacks-Vine). [7]
gastrique en cas de carcinose péritonéale ou dans les pseudo- On peut également, après ablation du trocart, mettre un
obstructions intestinales chroniques. .
désilet sur le fil guide, enlever le fil guide et introduire la sonde
Un cas particulier est celui de la personne âgée où l’indication à travers le désilet (technique Russell). [8]
est difficile à poser et doit être prise en accord avec la famille. D’autres variantes existent : mise en place de la GPE par voie
La mortalité est en effet de l’ordre de 25 % à 1 mois [3] avec .
nasale grâce à un nasofibroscope [9], pose d’une jéjunostomie en
comme facteur de pronostic défavorable l’âge, l’existence d’une poussant à travers la GPE une sonde de petit calibre qui sera
démence et d’une hypoalbuminémie. [4] positionnée dans le jéjunum grâce à un gastroscope.
■ Surveillance et suivi
L’alimentation entérale est débutée dans les 24 heures suivant
la pose en position semi-assise. Des soins locaux sont réalisés à
J1 ; J2 ; J4 et J6 puis la sonde est laissée à l’air. Par la suite, il
suffit de nettoyer quotidiennement la peau avec de l’eau et du
savon.
■ Remplacement de la sonde
La durée de vie moyenne d’une sonde de GPE est de
730 jours. [10]
Il est préférable d’attendre 2 à 3 mois avant le remplacement
d’une sonde afin que le trajet pariétal soit bien organisé.
La sonde est remplacée généralement lorsqu’elle est détério-
rée. Certains auteurs préconisent néanmoins un remplacement
systématique afin d’éviter des difficultés d’extraction de la
collerette (durcissement des matériaux).
Si la sonde est arrachée, le remplacement doit être réalisé
dans les 6 heures avant la fermeture de l’orifice.
Deux types de dispositifs sont disponibles.
Il s’agit de sondes à ballonnet en silicone qui sont réintrodui-
tes par le même orifice. Le changement en est très simple et
peut être effectué par l’entourage.
On peut également mettre en place un bouton de gastrosto-
mie qui a l’avantage d’être plus esthétique mais de coût plus
élevé. Il en existe deux types : ceux à collerette interne et ceux
à ballonnet. Les boutons ne peuvent se mettre en place qu’après
2 à 3 mois afin que le trajet pariétal soit mature.
■ Complications
Les complications majeures sont rares (péritonite, pneumopa-
thie d’inhalation, fasciite nécrosante, perforation de l’artère
gastroépiploïque, pneumopéritoine, nécrose pariétale, fistule
biliaire ou gastrocolique).
Les complications mineures sont nettement plus fréquen-
tes. [11, 12] Il s’agit de l’infection pariétale, de la fuite péristomi-
ale, de l’obstruction ou de l’expulsion de la sonde, de
l’incarcération de la collerette interne dans la paroi, des
hémorragies digestives (par œsophagite traumatique ou ulcères
gastriques). Il peut également se former, après ablation de la
sonde, une fistule gastrique chronique nécessitant une inter-
vention chirurgicale. Des cas d’occlusion intestinale ont été
décrits lorsque la collerette interne n’a pas été extraite par
endoscopie.
■ Jéjunostomie
On peut, en cas de pneumopathie d’inhalation ou de reflux
gastro-œsophagien, mettre en place une sonde de jéjunostomie
en poussant à travers la gastrostomie une sonde entérale qui va
être positionnée dans le jéjunum sous contrôle endoscopique.
inférieure à 1 mois).
Le geste peut être également impossible techniquement
■ Références
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chirurgicales - Appareil digestif, 40-282, 2006.
40-300
Pyloroplasties
O Firtion R é s u m é. – Ces dernières années, les indications des pyloroplasties ont été
C Meyer largement modifiées du fait de l’efficacité du traitement médical de la maladie
ulcéreuse gastroduodénale. Il existe principalement deux types de techniques, les
unes sans résection tissulaire, au premier rang desquelles se place le procédé de
Heineke-Mikulicz, et les autres d’indication beaucoup plus rare depuis la quasi-
disparition des pylores remaniés, avec résection tissulaire, le procédé de Judd restant
le plus classique.
© 1999, Elsevier, Paris.
Introduction Historique
Geste visant à assurer la vidange gastrique notamment après vagotomie, Les premières pyloroplasties ont été décrites par Heineke en 1886, puis
la pyloroplastie a longtemps été un centre d’intérêt pour les chirurgiens, par Mikulicz en 1888 [8] . Elles ne s’intéressaient qu’aux lésions
de nombreuses techniques étant décrites témoignant de la complexité organiques du pylore, la relation entre innervation vagale et fonction
des situations rencontrées, particulièrement en matière de pathologie pylorique n’étant pas encore établie. Cette méconnaissance
ulcéreuse. Les progrès réalisés dans la compréhension de la physiologique sera longtemps une entrave à l’essor de la vagotomie, les
physiopathologie de la maladie ulcéreuse et les progrès des traitements auteurs ne soupçonnant pas la nécessité d’un drainage gastrique après
médicamenteux en découlant ont beaucoup réduit et simplifié les dénervation [2]. C’est Dragstedt qui établira, après 1946, la nécessité
indications chirurgicales dans ce domaine, rendant de nombreuses d’une pyloroplastie après vagotomie, permettant l’essor de la chirurgie
techniques chirurgicales actuellement obsolètes. de la maladie ulcéreuse.
A B
C E
1 Pyloroplastie selon Heineke-Mikulicz.
A. Ouverture antro-pyloro-duodénale horizontale. D. Incision sur le pylore et verticalisation de l’incision.
B, C. Suture verticale par points séparés extramuqueux. E. Suture transversale de Heineke-Mikulicz.
pyloroplastie, dont nous verrons plus loin les modalités techniques Techniques
adaptées aux remaniement locaux et aux résultats aléatoires, soit par une
gastro-entéro-anastomose aux résultats plus constants sur la vidange Voie d’abord
gastrique mais laissant la zone ulcéreuse en place, soit au mieux, lorsque
les conditions anatomiques locales le permettent, par une antrectomie Elle dépend du type de chirurgie éventuellement associée à la
emportant la zone ulcérée [7]. pyloroplastie. Elle peut être médiane sus-ombilicale ou bi-sous-costale,
surtout en cas de chirurgie de résection de l’œsophage.
Autres indications Exposition
Elles correspondent de fait actuellement à l’essentiel des indications de Elle est facilitée par un décollement duodénopancréatique : le péritoine
pyloroplastie et sont représentées par la chirurgie de résection pariétal postérieur est incisé le long de la deuxième portion du
œsophagienne ou gastrique polaire supérieure nécessitant le sacrifice duodénum depuis le genu superius jusqu’au genu inferius. Un large
des nerfs vagues. Le pylore n’étant pas remanié par une pathologie sous- décollement est pratiqué selon la manœuvre de Kocher, permettant de
jacente, la technique originelle de Heineke-Mikulicz est donc ici superficialiser la région pylorique et de pratiquer la pyloroplastie sans
parfaitement adaptée. tension tissulaire.
page 2
Techniques chirurgicales PYLOROPLASTIES 40-300
A B
L’anneau sphinctérien est alors facilement repéré par la palpation au Incision (fig 1A)
doigt. L’antre gastrique est attiré vers la gauche par l’assistant, le pylore
étant ainsi amené dans le champ opératoire. Une incision longitudinale antérieure antro-pyloro-duodénale est alors
réalisée.
Pyloroplasties sans résection tissulaire (fig 1, 2, 3) – Sa direction doit suivre l’axe du tube digestif. On peut conseiller
Ces pyloroplasties supposent a priori une face antérieure de la région d’ouvrir d’abord le côté antral, de manière à introduire dans la lumière
antro-pyloro-duodénale praticable chirugicalement, c’est-à-dire non digestive une pince qui permettra de prolonger l’incision vers la droite
concernée par l’ulcère. strictement dans l’axe antro-pyloro-duodénal.
Méthode de Heineke-Mikulicz (fig 1) – Son siège doit être situé strictement à mi-hauteur de l’anneau
pylorique.
Il s’agit du premier procédé décrit, le plus simple et partant le plus
pratique. – Sa longueur, d’environ 5 à 6 cm, doit être centrée sur le pylore, et
L’anneau pylorique est mis en tension par l’intermédiaire de deux pinces d’égale longueur des côtés duodénal et antral. Dans le cadre d’une
d’Allis séparées de 1 cm environ et positionnées sur les bords supérieurs œsophagectomie, la longueur de l’incision doit être la plus courte
et inférieurs de la face antérieure du pylore. La traction sur ces pinces possible, c’est-à-dire à peine plus large que l’anneau pylorique, afin de
soulève la face antérieure du pylore. ne pas entraver l’ascension du transplant gastrique dans le thorax.
page 3
40-300 PYLOROPLASTIES Techniques chirurgicales
A B
– Sa profondeur doit concerner toute la paroi digestive. Après incision Il est raisonnable de laisser en place, quel que soit le type de
séromusculeuse, l’hémostase des vaisseaux sous-muqueux est réalisée pyloroplastie réalisé, une sonde gastrique positionnée, soit
au bistouri électrique puis la muqueuse est incisée. immédiatement en amont de la pyloroplastie, soit à travers le canal
pylorique.
Suture (fig 1B, C)
La mise en tension vers le haut et le bas des pinces d’Allis transforme Autres procédés
l’incision, qui d’horizontale devient verticale (fig 1D). La suture se fait De nombreux autres procédés de pyloroplastie ont été proposés, parfois
selon ce plan vertical par des points séparés extramuqueux de fil dans le but de mieux répondre aux remaniements locaux éventuels de la
monofilament 0000 à résorption lente. Le premier point est passé au région pylorique. Ils sont actuellement très peu utilisés.
milieu de l’incision aux angles droit duodénal et gauche antral initiaux.
La fermeture de la pyloroplastie nécessite en moyenne huit à dix points, Pyloroplastie en Y selon Moschel-Murat (fig 2)
tous passés avant d’être noués. Les nœuds sont posés du côté antral, afin
d’éviter de déchirer la paroi duodénale moins épaisse et plus fragile. On reproche à cette méthode un agrandissement insuffisant du passage
La suture une fois terminée, l’aspect local est fréquemment celui de deux pylorique et le danger possible d’une nécrose tissulaire en cas de tracé
cornes, supérieure et inférieure, dont l’importance est proportionnelle à initial à angle insuffisamment ouvert.
la taille de la pyloroplastie. Cet aspect n’a aucune conséquence
fonctionnelle (fig 1E). Pyloroplastie en « fer à cheval » selon Finney [3] (fig 3)
Une épiplooplastie de sécurité peut y être associée sans aucun caractère Les inconvénients de cette technique sont représentés, d’une part par le
d’obligation. risque de protrusion intraluminale du bord interne de l’anastomose
page 4
Techniques chirurgicales PYLOROPLASTIES 40-300
A B
C D
E F
4 Pyloroplastie selon Judd.
A, B. Résection pylorique antérieure horizontale. D, E. Résection pylorique antérieure verticale.
C. Suture verticale. F. Suture verticale.
page 5
40-300 PYLOROPLASTIES Techniques chirurgicales
rétrécissant le passage vers le duodénum, et d’autre part le risque de réalisent une excision complète de la lésion et de la face antérieure du
réaliser une suture en tension, les tissus à ce niveau étant peu pylore. La largeur de l’excision et son grand axe horizontal ou vertical
mobilisables. dépendent de la localisation de l’ulcère et de la qualité des tissus
l’entourant, la résection devant passer en tissus sains.
Pyloroplastie extramuqueuse [1, 5]
Suture (fig 4C, F)
À l’instar de la technique proposée dans le traitement de l’hypertrophie
La mise en tension des fils d’appui supérieur et inférieur transforme
congénitale du pylore, seul l’anneau pylorique est incisé, la muqueuse
l’orifice en une brèche verticale suturée bord à bord, de la même façon
laissée intacte et le plan séromusculeux non suturé. Cette technique a
que dans la technique de Heineke-Mikulicz.
notamment été proposée lors des résections œsophagiennes, afin de ne
pas raccourcir la longueur du tractus digestif supérieur qui doit être Variante de Richardson (fig 5)
ascensionné dans le thorax. Elle est en fait de réalisation difficile,
compromise par la moindre effraction muqueuse, et doit être oubliée. Elle est indiquée lorsque l’ulcère siège sur le versant antral du pylore.
Variante de Horsley (fig 6)
Pyloroclasie digitale [6]
Elle est indiquée au contraire pour les ulcères siégeant sur le versant
Elle consiste à dilacérer le pylore entre le pouce et l’index. Si elle offre duodénal du pylore.
l’avantage d’éviter une suture digestive, son résultat reste néanmoins
aussi aléatoire qu’une dilatation endoscopique du pylore. •
• •
Pyloroplasties avec résection tissulaire Les principes de base n’ont pas évolué au cours du temps : il faut
En règle, elles sont indiquées lorsque l’ulcère est localisé à la face choisir la technique la plus simple et l’adapter en fonction des
antérieure de la région pylorique. Dans la technique de Judd [4], il s’agit remaniements locaux pouvant nécessiter la réalisation d’une
pratiquement d’une résection pylorique antérieure. résection tissulaire associée. En pratique, l’évolution du traitement
de la maladie ulcéreuse laisse actuellement peu de place à la
Excision (fig 4A, B, D, E) chirurgie, et moins encore à la classique association vagotomie-
pyloroplastie. La pyloroplastie garde néanmoins sa place dans
Quatre fils d’appui sont mis en place aux bords supérieur et inférieur de d’autres types de chirurgie tels que la chirurgie de l’œsophage, le
l’anneau pylorique, sur le premier duodénum et sur l’antre, aux limites pylore non remanié se prêtant très bien à la première des techniques
prévues de l’excision. Leur mise en tension délimite une surface décrites, il y a maintenant plus d’un siècle, celle de Heineke-Mikulicz
contenant l’ulcère. Deux incisions curvilignes circonscrivent l’ulcère et qui reste plus que jamais d’actualité.
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page 6
¶ 40-310
Pylorotomie extramuqueuse
du nourrisson
V. Fouquet, P. Montupet, H. Martelli
au pli supérieur de l’ombilic, suivie d’un décollement sous- La brèche muqueuse est la complication la plus fréquente
cutané permettant une incision verticale de la ligne blanche. (5 %) [3]. Si elle est de petite taille, elle est simplement suturée
En cas de grande difficulté à extérioriser l’olive, l’incision par un point séromusculaire extramuqueux avec un fil de
cutanée peut être agrandie au moyen d’un refend vertical ou PDS® 6/0. Plus importante, la pylorotomie est alors suturée et
d’une excision en « quartier d’orange ». une deuxième est alors réalisée parallèle.
L’avantage de la voie ombilicale est de laisser une cicatrice
quasi inapparente. Elle nécessite une préparation préopératoire Cœlioscopie
par application d’antiseptiques locaux. Actuellement, la voie
transrectale est principalement réservée aux enfants présentant L’historique de la technique de pyloromyotomie sous cœlio-
un suintement ombilical [5, 6]. scopie date de 1991 [7, 8] par Alain et Grousseau. Depuis, malgré
L’extériorisation de l’olive, premier geste quelle que soit la de bons résultats publiés par les équipes françaises et surtout
voie d’abord, demande patience et expérience nécessitant une étrangères [9, 10], la progression de cette nouvelle méthode est
très bonne analgésie. L’olive pylorique est la dénomination lente.
habituelle de l’hypertrophie musculaire située au niveau du La seule contre-indication à la chirurgie sous cœlioscopie
pylore. Le foie est écarté avec précaution, pour éviter tout chez le nouveau-né serait une anomalie cardiorespiratoire sévère
saignement traumatique. L’antre gastrique est ensuite saisi avec responsable d’hypoxémie. Si en effet le pneumopéritoine reste
une pince de Kelly, à distance de l’olive et extériorisé. À l’aide utile pour éclaircir le champ opératoire en évitant la brillance
d’une compresse dépliée, on exerce une traction sur l’antre des sécrétions séreuses, la pression recommandable à cet
permettant à l’aide de petits mouvements latéraux d’extérioriser âge peut et doit être contrôlée en dessous de 6 mmHg. Ce
l’olive. Cette dernière apparaît comme une masse blanchâtre, niveau met à l’abri de toute complication ventilatoire ou
ferme, avec à sa surface les branches des vaisseaux pyloriques hémodynamique.
sous-séreux. Sur le versant gastrique, il n’existe pas de ligne de Pour la pyloromyotomie en vidéochirurgie, plusieurs condi-
démarcation entre l’estomac et le pylore. À l’inverse, la limite tions doivent être réunies. La première est de disposer d’un
avec le duodénum gris rosé est nette, c’est l’endroit des brèches matériel performant parce qu’adapté, c’est-à-dire d’une optique
muqueuses. L’olive est maintenue entre le pouce et l’index de de 5 mm angulée à 30°, d’un bistouri cœlioscopique à lame
l’opérateur. La séreuse de l’olive est alors incisée au bistouri rétractable, et d’un distracteur spécialement conçu pour écarter
froid longitudinalement sur la ligne antérieure avasculaire. Cette les berges musculaires de l’olive. Les mises au point successives
incision doit remonter largement sur l’antre (environ 15 mm) depuis 15 ans ont permis la commercialisation d’instruments
mais doit s’arrêter 2 mm avant la démarcation pylore- parfaitement efficaces. La deuxième condition est une désinfec-
duodénum (Fig. 1). Les berges de l’incision sont écartées à l’aide tion préalable de l’ombilic comme dans la voie décrite par
d’une petite spatule. La dissociation des fibres musculaires se Bianchi. La troisième est le propre de toute chirurgie, qui
fait alors à l’aide d’une pince mousse atraumatique, sur toute la requiert un apprentissage encadré ou bien une expertise de la
longueur et, en profondeur, jusqu’au plan muqueux. Ceci technique dont les principes sont aujourd’hui largement
permet d’obtenir une bonne hernie de la muqueuse (Fig. 2). décrits [11-13].
Cependant, cette dissociation doit être particulièrement pru- Notre description fait suite à une expérience ayant commencé
dente sur le versant duodénal pour éviter toute brèche en 1991 qui a fait que, pour l’auteur de ce chapitre (Montupet),
muqueuse. La pylorotomie terminée, l’intégrité muqueuse est la pyloromyotomie laparoscopique est un standard : la qualité
vérifiée sous contrôle de la vue et l’olive est réintégrée. Ceci de vision, l’absence de toute traction viscérale intempestive, la
permet la suppression de la stase veineuse faisant cesser toutes précision atraumatique des gestes afin de respecter les principes
les suffusions hémorragiques sur les berges de la pylorotomie. généraux de la chirurgie pédiatrique.
Une dernière inspection intra-abdominale vérifie l’absence
d’hémopéritoine, avant la fermeture pariétale particulièrement Installation et anesthésie en cœlioscopie
méticuleuse, plan par plan, aux fils résorbables.
L’anesthésie générale avec intubation, évitant le protoxyde
Complications peropératoires d’azote, reste la règle ; la curarisation est inutile dans la majorité
des cas. En revanche le bloc paraombilical est très recomman-
La difficulté d’extériorisation de l’olive est le plus souvent liée dable [14, 15]. La sonde gastrique est gardée en place pour la
à une incision insuffisante pour le volume de celle-ci. Il est alors durée de l’opération. Le nouveau-né est allongé en travers du
utile d’agrandir l’incision aponévrotique mais surtout cutanée et haut de la table d’opération, permettant l’accès facile pour
d’enlever tout écarteur. l’anesthésiste, et une bonne proximité du chirurgien ; la
Figure 3. Prise et incision de l’olive en cœlioscopie. Figure 4. Écartement des berges musculaires en cœlioscopie.
Technique en cœlioscopie
Le premier trocart est introduit sous contrôle de la vue
(technique dite open vivement recommandée) dans le pli
supérieur de l’ombilic et admet un endoscope de 4 ou 5 mm
angulé de 30 ou 45°, ce qui permet de voir l’olive par sa face
antérieure. Les deux trocarts latéraux, de 5 ou mieux 3 mm,
sont introduits sous contrôle vidéoscopique aux bords latéraux Figure 5. Versant antral de l’olive en cœlioscopie.
des muscles grands droits, symétriquement et le plus souvent
dans le pli abdominal supérieur ; si ce dernier n’est pas appa-
rent, la ponction est faite 2 à 3 cm au-dessus du niveau
ombilical, à l’aide d’abord d’une lame de bistouri n° 11, puis du
trocart. Il est important que l’opérateur contrôle sa pression
d’introduction en maintenant de l’autre main la paroi en
contre-pression, et ce geste constitue habituellement une étape
essentielle et un peu difficile de l’apprentissage. Certains passent
directement les instruments sans trocart au travers de la paroi,
avec l’inconvénient qu’il est plus difficile de changer d’instru-
ment et que cela les abîme rapidement.
Le choix d’instruments de 3 mm permet, par la rigidité de
leurs mors requise, une meilleure efficacité. Une pince atrauma-
tique, au mieux de type Babcock, est introduite par le flanc
droit, et le manche du bistouri rétractable par le flanc gauche.
Le rebord inférieur du foie est soulevé, l’olive apparaît d’emblée,
Figure 6. Versant duodénal de l’olive en cœlioscopie.
parfois recouverte d’un voile épiploïque qu’il faut récliner vers
le bas. La pince saisit le milieu du relief de l’olive dans sa partie
la plus épaisse et résistante. Nous évitons ainsi, à la différence
d’autres auteurs, de saisir le duodénum car des plaies ou inférieure et améliorer l’exposition. Les limites de l’incision sont
déchirures de ce dernier ont été décrites. Il est plus simple de atteintes et soigneusement respectées (Fig. 5, 6). La sécurité
mobiliser l’olive elle-même, et d’orienter sa face antérieure et sa exige un contrôle de l’étanchéité muqueuse : l’anesthésiste
ligne avasculaire longitudinale devant l’optique (Fig. 3). La lame insuffle par la sonde gastrique 60 ml d’air qui doivent dilater la
du bistouri rétractable de 3 ou 5 mm qui a été introduit par le muqueuse en passant au travers du pylore dilacéré pour attein-
trocart de gauche est sortie de son fourreau, et l’incision dre librement le duodénum (Fig. 7). Les trocarts sont retirés sous
commence au centre de l’olive, là où elle est la plus épaisse. La contrôle vidéoscopique, et chaque orifice est soigneusement
profondeur de l’incision à ce niveau peut atteindre sans danger refermé avec un point (4 ou 5/0) dans l’épaisseur pariétale. Des
plusieurs millimètres. Son étendue progresse ensuite vers adhésifs suffisent au rapprochement cutané. La durée de
l’estomac et entame sa musculeuse en remontant d’environ l’intervention peut varier de 10 à 20 minutes, ce qui la rend
2 cm sur l’antre. Enfin, vers le cul-de-sac duodénal, l’incision plus courte en général que l’approche ouverte, grâce à l’absence
s’arrête au niveau de l’artériole pylorique qui est visible et des temps d’extériorisation de l’olive et d’ouverture/fermeture
perpendiculaire. Une fois la pylorotomie effectuée, la lame est pariétale. La courbe d’apprentissage requise est de dix à 15 opé-
rétractée dans son fourreau, et la pince distractrice remplace le rations, c’est-à-dire conforme à ce qui est usuel pour toute
bistouri. La dilacération des fibres musculaires va être débutée chirurgie simple.
également au centre de l’olive. C’est là qu’il est le plus facile L’accès cœlioscopie chez le nouveau-né est particulier par
d’insinuer entre les berges de l’incision préalable cet instrument l’élasticité de la paroi abdominale. Le trocart ombilical peut
fin aux « dents de souris » dirigées à l’extérieur, connu sous le induire une fuite de CO2, ou encore sortir de l’incision lors
nom de distracteur pylorique, dont plusieurs modèles sont d’une traction par l’aide. Il faut donc le fixer initialement par
commercialisés (Fig. 4). L’écartement des mors produit la un simple point en U passé dans le fascia ombilical, qui servira
dilacération des fibres musculaires et laisse rapidement apparaî- d’ailleurs à sa fermeture ultérieure. La pénétration des deux
tre la muqueuse. Ceci est fait de proche en proche, la pince de trocarts instrumentaux est gênée par un péritoine qui a ten-
Babcock pouvant saisir alternativement les berges supérieure ou dance à se décoller, ce qui rend le geste potentiellement
[14] Courrèges P, Podevin F, Lecoutre D, Bayart R. Le bloc para-ombilical [17] Fujimoto T, Lane GJ, Segawa O, Esaki S, Miyano T. Laparoscopy
chez l’enfant : technique, résultats à propos de 54 cas. Cah Anesthesiol extramucosal pyloromyotomy versus open pyloromyotomy for infan-
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Fouquet V., Montupet P., Martelli H. Pylorotomie extramuqueuse du nourrisson. EMC (Elsevier Masson
SAS, Paris), Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-310, 2007.
40-292
Introduction Incision
La remise en cause de certaines notions étiopathogéniques, les progrès – Elle est habituellement médiane et xipho-ombilicale.
spectaculaires du traitement médical, ont considérablement raréfié – Une incision transversale bi-sous-costale peut être préférée.
l’indication du traitement chirurgical de l’ulcère duodénal par
vagotomie abdominale. Installation
La filiation des vagotomies tronculaire, sélective, suprasélective puis
tronculaire postérieure avec séromyotomie antérieure, rendait compte – Une rétraction costale efficace est indispensable (rétracteurs d’Olivier
d’une évolution progressive des idées et des techniques. Celle-ci tendait ou de Rochard, valve réglable de Foucault).
à supprimer la sécrétion acide sans compromettre la motricité gastrique. – Un cadre abdominal avec valves latérales ou un grand écarteur de
Dans les circonstances, rares actuellement, de résistance au traitement Gosset complètent l’installation.
médical, ces notions restent valables. La vagotomie abdominale ne – Une sonde gastrique est mise en place.
disparaît pas totalement de l’arsenal thérapeutique chirurgical.
Sa réalisation en chirurgie classique sera peut-être supplantée par la Exploration
laparoscopie. Elle est cependant à la base du traitement chirurgical de
l’ulcère duodénal. L’inventaire de la cavité abdominale est systématique. Le siège, le stade
évolutif de l’ulcère, l’existence d’une sténose pylorique sont appréciés.
Les rapports de la rate, sa taille, sa situation plus ou moins près de
Temps opératoires communs l’œsophage et de la grande courbure sont précisés. Des adhérences
à toutes vagotomies éventuelles entre la grande courbure et la capsule splénique sont
soigneusement et délicatement sectionnées sur ligatures.
Position opératoire Au cours de l’intervention, des tractions seront exercées sur l’estomac,
– Le malade est en décubitus dorsal. leurs conséquences éventuelles sur l’intégrité splénique sont ainsi
minimisées.
– L’usage d’un billot dorsal situé haut sous la base thoracique, la
position proclive de la table sont utiles. La mobilisation du lobe gauche du foie facilite l’exposition de la région
hiatale par section du ligament triangulaire gauche. Une valve
– L’opérateur est à droite. suffisamment longue, bien placée, remontant le foie, peut suffire.
incisé transversalement.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Marrie A. Techniques des Le temps suivant concerne la membrane phréno-œsophagienne de
vagotomies abdominales. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Techniques
chirurgicales – Appareil digestif, 40-292, 1998, 8 p.
Leimer-Bertelli. Il s’agit d’une formation fibroconjonctive qui unit
l’œsophage aux bords de l’hiatus diaphragmatique. Elle est constituée
40-292 TECHNIQUES DES VAGOTOMIES ABDOMINALES Techniques chirurgicales
page 2
Techniques chirurgicales TECHNIQUES DES VAGOTOMIES ABDOMINALES 40-292
4 Vagotomie sélective antérieure. 5 Vagotomie sélective antérieure : branche gastrique directe sur le bord gauche
de l’œsophage.
page 3
40-292 TECHNIQUES DES VAGOTOMIES ABDOMINALES Techniques chirurgicales
Temps œsocardiotubérositaire
Au voisinage du cardia, la dissection change d’orientation. Elle est
menée de droite à gauche, très obliquement du bas vers le haut. Elle
sectionne tous les tissus jusqu’au plan séreux œsophagien et à gauche
du tronc antérieur. Le pneumogastrique gauche mis en tension est
progressivement récliné vers la droite et libéré de toutes les attaches
tissulaires.
La dissection est poussée haut. La face antérieure de l’œsophage
abdominal est totalement libre sur une longueur de 5 à 7 cm.
Le bord gauche de l’œsophage est soigneusement exploré à la recherche
de branches gastriques nerveuses directes latérales (fig 11).
Le ligament phrénogastrique est sectionné.
Vagotomie postérieure
Temps épiploïque
La section du plan antérieur, la mise en traction du pédicule de Latarjet
facilitent la dénervation complète de la petite courbure (fig 12).
Au fur et à mesure de la montée de cette dissection au plus près, la petite
courbure est progressivement libérée totalement du pédicule
8 Principe technique de la vagotomie suprasélective. comprenant les nerfs de Latarjet et les branches terminales de l’artère
Suppression de toute attache tissulaire épiploïque, vasculaire et nerveuse de l’œso- coronaire.
phage abdominal dans son ensemble, du cardia, de la petite courbure gastrique
depuis la terminaison des nerfs de Latarjet.
Le plan intermédiaire est sectionné au ras de la petite courbure. La
section du plan postérieur est faite en arrière et un peu à gauche du bord
droit de l’estomac, légèrement sur sa face postérieure (fig 13).
Temps cardiotubérositaire
en place sur les pédicules, sectionnés entre eux. Les ligatures assurées
par un fil à résorption lente, sont minutieuses et nombreuses. Toute La dissection de la petite courbure a atteint le niveau du sommet de la
précipitation donne rapidement lieu à des hématomes extensifs dans crosse de l’artère coronaire stomachique qui correspond le plus souvent
l’épaisseur des pédicules de Latarjet (fig 10). au cardia anatomique.
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Techniques chirurgicales TECHNIQUES DES VAGOTOMIES ABDOMINALES 40-292
A B
10 Temps épiploïque antérieur : prises vasculonerveuses et ligatures électives.
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40-292 TECHNIQUES DES VAGOTOMIES ABDOMINALES Techniques chirurgicales
A B
13 Plan de coupe de la squelettisation de la petite courbure, qui correspond à un segment de cylindre.
Gestes associés
Repéritonisation de la petite courbure
Elle est faite par points séparés solidarisant les plans séreux gastriques
antérieur et postérieur de la petite courbure.
Trois arguments la justifient pleinement :
– éliminer un hypothétique phénomène de régénérescence nerveuse ;
– compléter l’hémostase ;
B
– surtout pallier les manifestations d’une éventuelle nécrose de la petite
15 A. Nerf de Grassi découvert dans l’angle de His.
courbure gastrique. B. Nerf de Grassi découvert en bas et en arrière.
page 6
Techniques chirurgicales TECHNIQUES DES VAGOTOMIES ABDOMINALES 40-292
Séromyotomie antérieure
Elle est réalisée à 1,5 cm de la petite courbure.
Elle commence au niveau de la terminaison du nerf de Latarjet antérieur.
Les deux branches droites de division sont respectées, la branche gauche
est sectionnée.
La face antérieure de l’estomac est étalée, la séromyotomie est pratiquée
au bistouri électrique ou au bistouri froid. Elle sectionne les plans séreux
puis musculaires jusqu’à la muqueuse.
En remontant, l’hémostase de quelques vaisseaux plus ou moins
importants est faite par ligatures appuyées (fig 19).
Au niveau du cardia, la séromyotomie doit retrouver l’angle
cardiotubérositaire. Il est prudent de la prolonger un peu sur la face
postérieure de la grosse tubérosité gastrique.
En fin de dissection, l’intégrité de la muqueuse est soigneusement
vérifiée. Une suture en paletot des deux berges de la séromyotomie est
17 Zone inférieure de vagotomie incomplète : possibles rameaux récurrents
issus de la terminaison des nerfs de Latarjet.
conseillée.
La section du ligament phrénogastrique est systématique.
Enfin, la section du pédicule gastroépiploïque droit est conseillée.
Section du pédicule pancréatogastrique. Section du pédicule Les sections du pédicule pancréatogastrique et du pédicule
gastroépiploïque gauche gastroépiploïque gauche sont plus discutées.
Certains auteurs (Donahue) proposent aussi d’associer de principe la La séromyotomie antérieure peut enfin être pratiquée selon les mêmes
section du pédicule pancréatogastrique quand il existe, contenant principes anatomiques par applications successives de pinces GIA
l’artère gastrique gauche, la section du pédicule gastroépiploïque assurant section-anastomose (Gomez-Ferrer) du tissu digestif.
gauche. Il s’agit alors d’une vagotomie suprasélective dite étendue. L’intervention est alors plus rapide et peut-être plus sûre sur le plan de
l’intégrité muqueuse. Elle reçoit la dénomination de gastrectomie
linéaire antérieure (fig 20).
Vagotomie tronculaire postérieure
avec séromyotomie antérieure •
• •
Vagotomie tronculaire postérieure Quel que soit le type de vagotomie réalisé, sa finalité est une
dénervation parasympathique complète de l’estomac (vagotomie
Déjà décrite, elle est toujours pratiquée le plus haut possible. tronculaire) ou du fundus (vagotomie distale).
page 7
40-292 TECHNIQUES DES VAGOTOMIES ABDOMINALES Techniques chirurgicales
19 Séromyotomie antérieure.
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page 8
¶ 40-326
Mots clés : Ulcère gastrique ; Ulcère duodénal ; Perforation ; Hémorragie gastrique ; Sténose peptique ;
Laparoscopie
Colonne Écran 2
Pincette fenêtrée
Écran 1
Assistant
Porte-aiguille Ciseaux
Lavage/aspiration
Figure 2. Instrumentation.
Opérateur
Figure 3. Approche laparoscopi-
que : position des trocarts.
Figure 1. Installation du patient et des opérateurs.
5
Technique chirurgicale
L’abord laparoscopique est aujourd’hui la méthode de réfé-
rence [1, 6, 7]. Il implique la disponibilité d’un matériel laparo-
scopique de bonne qualité au bloc opératoire d’urgence. La
technique chirurgicale est simple. 5 5
10
Installation du patient
L’intervention est réalisée sous anesthésie générale, avec
intubation orotrachéale. Une sonde gastrique est mise en place
pour vidanger totalement l’estomac, une sonde urinaire peut
être utilisée selon l’état d’hydratation du patient, mais elle sera
alors retirée dès la fin de l’intervention. Elle n’est pas systéma-
tique. Le patient est installé en décubitus dorsal, les bras le long
du corps ou le bras gauche à l’extérieur, et les jambes écartées. 1,5 cm est effectuée juste au-dessus de l’ombilic. Le péritoine est
Le chirurgien est installé entre les jambes du patient, ses aides ouvert sous contrôle de la vue et un trocart à pointe mousse de
(instrumentiste, assistant) placés de part et d’autre. Chaque 10/12 mm est mis en place. Un pneumopéritoine de 12 mmHg
assistant doit être en mesure de voir un moniteur en face de lui. de CO2 est insufflé. Les autres trocarts sont insérés sous contrôle
L’usage d’un moniteur d’appoint, en plus du moniteur opéra- de la vue. Deux trocarts de 5 mm sont placés à hauteur de
toire destiné à l’opérateur, est donc recommandé (Fig. 1). l’ombilic, à 5 cm de part et d’autre du premier trocart. Un
quatrième trocart de 5 mm est placé à hauteur de l’appendice
Instrumentation (Fig. 2) xiphoïde sur la ligne médiane pour récliner le foie au cours de
la procédure. Le premier temps opératoire est une exploration
Le traitement de l’ulcère perforé par voie laparoscopique de la cavité péritonéale pour confirmer le diagnostic et effectuer
nécessite des instruments « standards » à tout geste opératoire un prélèvement à des fins d’examen bactériologique. Le net-
par laparoscopie : une caméra, au mieux tri-CCD, une source de toyage de la cavité péritonéale est effectué par aspiration du pus
lumière froide de forte puissance (200 à 300 watts, au xénon), ou des débris alimentaires. L’intérêt et le bénéfice du lavage
un insufflateur et deux moniteurs de bonne qualité. Les classiquement décrit [1, 6] et souvent effectué systématiquement
systèmes optiques disponibles sont à 0 ° et à 30 ° d’angulation. lors du traitement des péritonites n’a jamais été validé scienti-
Quatre trocarts (un de 10 mm, trois de 5 mm) sont utilisés de fiquement et tient peut-être plus du rituel de l’urgence [8]. Il
façon habituelle. Les instruments comportent deux pinces pourrait dans certains cas favoriser la survenue d’abcès intrapé-
atraumatiques fenêtrées, des ciseaux, un système de lavage- ritonéaux postopératoires si la totalité du liquide n’est pas
aspiration. Un porte-aiguille et des fils sertis (résorbable 2/0, réaspirée [6] . Actuellement, un lavage de faible volume est
tressé ou monobrin) sont utilisés pour la raphie de la perfora- effectué au sérum tiède si la péritonite est généralisée. Il permet
tion. Des fils résorbables sont préférés à des fils non résorbables de rincer des logettes de collections liquidiennes localisées entre
qui risquent, dans un milieu septique, d’induire un abcès les anses, sous les coupoles diaphragmatiques, dans les gouttiè-
chronique préjudiciable à l’évolution à long terme. Il peut être res pariétocoliques et dans le cul-de-sac de Douglas. Il est
nécessaire d’utiliser un écarteur atraumatique pour récliner le poursuivi jusqu’à l’obtention d’un liquide de lavage clair. Le
foie gauche. grand lavage systématique avec 6 à 9 litres de sérum n’est plus
considéré comme une règle.
Procédure chirurgicale
La perforation est en général facile à découvrir, parfois après
La réalisation d’une open-laparoscopie est toujours recom- avoir récliné le foie. L’orifice est souvent punctiforme et siège
mandée. Quatre trocarts sont utilisés (Fig. 3). Une incision de au centre d’une zone remaniée, parfois recouverte de fausses
Laparotomie
La réalisation d’une laparotomie est envisagée d’emblée en
cas d’occlusion majeure avec distension abdominale ou en
présence d’un état de choc non compensé. Dans tous les autres
cas, y compris en cas d’antécédents chirurgicaux abdominaux,
une exploration laparoscopique est réalisée pour explorer
l’abdomen et évaluer si le traitement est envisageable par cette
voie. La procédure chirurgicale de l’approche par laparotomie
est identique à celle de l’approche par laparoscopie. L’incision
est alors une laparotomie médiane sus-ombilicale et péri-
ombilicale. Elle permet une exposition de bonne qualité du
bulbe duodénal, mais aussi un contrôle de la cavité péritonéale
et un lavage.
La durée opératoire d’un abord laparoscopique tend à être
comparable à un abord classique [15]. La morbidité postopéra- Figure 4.
toire est de 10 % et est essentiellement liée à la survenue de A. Suture de la perforation.
surinfections pulmonaires. La mortalité de l’ulcère duodénal B. Suture transversale sans sténose.
perforé opéré en urgence est de 0 à 30 % [16], ce taux élevé étant C. Omentoplastie.
expliqué par l’âge et le mauvais état général des patients opérés
(choc préopératoire, insuffisance rénale aiguë, retard diagnosti-
inflammatoires au contact de l’angle colique droit ou par un
que). Dans nos régions, la perforation survient chez des patients
plastron. La perforation peut être ouverte dans le pied du
âgés et présentant de nombreuses tares associées. La récidive
pédicule hépatique, située sur la face postérieure du premier
reste rare, de l’ordre de 4 à 10 %.
duodénum ou être obstruée par la vésicule et en imposer pour
Ulcères duodénaux difficiles une cholécystite aiguë. À l’inverse, elle peut être très volumi-
neuse avec une perte de substance duodénale. Dans tous ces cas,
La perforation peut être difficile à trouver en raison d’une une conversion en laparotomie s’impose : elle permet de réaliser
localisation atypique. Elle peut être masquée par des adhérences un bilan lésionnel précis pour adapter le geste chirurgical. Dans
2
1
générale) une conversion s’impose. La réalisation d’une gastrec- Traitement chirurgical de l’ulcère duodénal
tomie en urgence chez un malade en péritonite est grevée d’une
lourde mortalité et est rarement carcinologique. Là encore et si
hémorragique
les conditions le permettent, un geste de sauvetage est préféra- Le contrôle, même temporaire, de l’hémorragie par voie
ble. Il consiste en une suture simple de la perforation avec des endoscopique permet d’envisager le traitement chirurgical dans
biopsies gastriques et péritonéales. Un bilan d’extension est de bonnes conditions chez un patient stable. Ce contrôle est
effectué au décours de l’épisode aigu afin d’envisager une obtenu dans 95 à 99 % des cas. De ce fait, l’intervention en
gastrectomie dans un deuxième temps. Toutefois, une suture urgence est devenue peu fréquente. L’indication opératoire en
n’est pas toujours possible et une gastrectomie est parfois urgence est retenue chez un patient instable malgré un remplis-
nécessaire (subtotale ou totale selon les cas – cf. articles sage massif (plus de 5 culots érythrocytaires transfusés) [19] ou
Gastrectomies dans ce traité). lorsque l’origine de l’hémorragie est identifiée, active, et ne peut
être contrôlée par endoscopie : cela représente 1 à 2 % des
patients. L’objectif de l’intervention est le contrôle de l’hémor-
■ Hémorragies ulcéreuses ragie, mais un consensus existe pour réaliser dans le même
temps le traitement radical de la maladie ulcéreuse [19] . Le
gastroduodénales traitement de la maladie, en urgence, associe une vagotomie
(tronculaire, sélective, suprasélective) à une opération de
L’hémorragie sur ulcère représente encore aujourd’hui 30 % vidange (gastroentéroanastomose ou pyloroplastie). On pourra
des hémorragies digestives hautes. Les médicaments et les aussi effectuer une antrectomie selon Polya (Finsterer ou Billroth
situations de stress sont les facteurs de risque les plus souvent II) associée à une vagotomie et une fermeture du moignon
identifiés. La plupart des hémorragies d’origine ulcéreuse (70 % duodénal (cf. articles Gastrectomies dans ce traité). Seuls les
à 80 %) se tarissent spontanément sous traitement médical gestes d’hémostase sont décrits ci-après.
(inhibiteurs de la pompe à protons) ou lors de la suppression
des facteurs associés tels que la prise d’anti-inflammatoires non Hémostase directe de l’ulcère duodénal
stéroïdiens (AINS) ou d’aspirine, observée dans un tiers des
cas [18-20]. En période hémorragique, la fibroscopie œsogastro- Elle a pour but l’hémostase par suture locale du foyer hémor-
duodénale permet de distinguer l’origine gastrique ou duodé- ragique. Ce procédé est à privilégier en raison de sa simplicité. Il
nale du saignement. Elle différencie les petits ulcères de stress a l’inconvénient de laisser l’ulcère en place et de ne pas contrôler
ou médicamenteux et les ulcères en nappe des autres causes parfaitement l’artère gastroduodénale. À l’inverse, il est rapide et
d’hémorragie digestive haute qui devront bénéficier d’un consiste en une duodénotomie qui permettra ensuite une pyloro-
traitement médical (anti-H 2 ou inhibiteurs de la pompe à plastie. Les récidives sont devenues rares du fait de l’introduction
protons) ou chirurgical (tumeur hémorragique). Elle identifie les systématique d’un traitement médical éradiquant l’Helicobacter
érosions de l’artère gastroduodénale nécessitant une interven- pylori. L’intervention est menée par laparotomie. Le patient est
tion d’hémostase. La fibroscopie permet une hémostase locale installé en décubitus dorsal avec un billot sous la pointe des
par application de colle, coagulation à l’argon, hyperthermie, omoplates. Une laparotomie médiane sus-ombilicale expose la
scléroses [18], applications de ligatures ou clips ou injection région opératoire. Le premier temps est un décollement rétro-
d’adrénaline à visée vasoconstrictrice, qui permettent d’éviter le duodénopancréatique permettant à l’opérateur de mettre une
recours à la chirurgie dans 80 à 99 % des cas [18-20] . Sans main en arrière du premier duodénum. On pratique une
diagnostic de certitude, chez un patient en mauvais état général pyloroduodénotomie longitudinale de 4 centimètres qui sec-
ou multiopéré, l’artériographie interventionnelle permet tionne le pylore et expose en général un ulcère calleux posté-
d’identifier l’origine du saignement, et de le traiter par emboli- rieur térébrant sur l’artère gastroduodénale ou une de ses
sation sélective de l’artère gastroduodénale. Le recours à la branches. La main gauche de l’opérateur, placée en arrière du
chirurgie, indiqué dans 10 à 15 % des cas [20], est nécessaire bloc duodénopancréatique, présente l’ulcère. L’hémostase est
lorsque les traitements médical et endoscopique ont échoué ou réalisée à l’aide de plusieurs points de fil non résorbable
en cas de saignement actif ne cédant pas rapidement (Fig. 8). (Prolène 2/0®). Le premier prend en masse le socle ulcéreux en
Endoscopie œsogastroduodénale
Traitement médical
Récidive Chirurgie
Surveillance
ayant à l’esprit la proximité du cholédoque (Fig. 9A). Deux suture isolée directe de l’ulcère est parfois insuffisante et le
points complémentaires sont placés, l’un au-dessus de l’ulcère, saignement peut s’aggraver après une tentative d’hémostase. Le
le second en dessous, de façon à contrôler l’artère gastroduodé- fond de l’ulcère se déchire et l’artère débite à plein canal. La
nale en dehors de la zone ulcéreuse (Fig. 9B). L’incision est plaie artérielle est aveuglée temporairement au doigt. L’artère
refermée transversalement en réalisant une pyloroplastie. Si la gastroduodénale doit être liée au-dessus et en dessous du
suture duodénale transversale s’avère impossible ou de mauvaise duodénum. La ligature en amont se fait par dissection de
qualité (sténose/tissus de mauvaise qualité), le duodénum est l’artère hépatique commune au bord supérieur du pancréas juste
refermé dans le sens longitudinal. Cette suture est alors facile avant sa pénétration dans le pédicule hépatique. Il faut s’atta-
mais sténosante. Dans ce cas, la procédure est complétée par la cher à trouver d’emblée le bon plan de clivage pour disséquer
réalisation d’une gastroentéroanastomose (Fig. 5). Une vagoto-
l’artère dans sa gaine car la région est inflammatoire. La
mie complète le geste. Le problème de sténose pylorique ne se
première branche de division de l’artère hépatique commune, à
posant plus, la vagotomie la plus simple et la plus rapide
direction descendante derrière le duodénum est l’artère gastro-
(vagotomie tronculaire), dans le contexte de l’urgence, sera
duodénale. Un passe-fil en fait le tour et une double ligature est
préférée. Si le moignon duodénal est de très mauvaise qualité,
ne permettant pas sa fermeture, il faut envisager la réalisation posée (Fig. 10A). Par sécurité, il est possible de sectionner
d’une duodénostomie (fistule dirigée) sur sonde (Foley, Pezzer l’artère entre deux ligatures. Si l’hémostase n’est pas obtenue
ou équivalent) avec une exclusion duodénale par fermeture du après la première ligature, il faut lier l’artère en aval du
duodénum en amont de l’ulcère (application d’une pince à duodénum, car elle peut être alimentée par les branches
agrafage linéaire sans section, agrafes résorbables, immédiate- pancréatiques directes. Son abord se réalise par l’ouverture du
ment en aval du pylore). Ce geste est complété d’une vagotomie prolongement droit de l’arrière cavité des épiploons en respec-
et d’une gastro-entéro-anastomose (Fig. 6). tant si possible l’artère gastroépiploïque droite. L’artère gastro-
duodénale est contrôlée au contact de la tête du pancréas au
Hémostase indirecte de l’ulcère duodénal bord inférieur du premier duodénum. Là encore, l’artère peut
être liée ou sectionnée (Fig. 10B).
Il est possible de contrôler les phénomènes hémorragiques en Ce procédé de « triple hémostase » est très efficace : son
réalisant un abord électif de l’artère gastroduodénale. Une intérêt est d’éviter une gastrectomie toujours difficile sur un
■ Traitement chirurgical
Figure 11. Ulcère gastrique hémorragique. Suture directe de en urgence de la maladie ulcéreuse
l’hémorragie.
La réalisation du traitement chirurgical radical de la maladie
ulcéreuse en urgence lors de la prise en charge d’une complica-
malade en choc et anémié. Son inconvénient est de dévascula- tion (perforation, hémorragie) a longtemps été considérée
riser le duodénum et d’exposer au risque de fistule duodénale comme un principe indiscutable [12, 21, 22]. Cette attitude est
postopératoire, tout en laissant l’ulcère en place. aujourd’hui réservée aux cas spécifiques décrits plus haut. Sa
remise en cause repose sur plusieurs arguments. Effectuée dans
Hémostase de l’ulcère gastrique le contexte de l’urgence, elle est compliquée d’une morbidité
élevée, tant générale que pariétale [22] . Le bénéfice de la
Si l’on excepte les gastrites diffuses, la localisation d’un ulcère vagotomie n’est pas démontré chez ces malades. Elle est grevée
gastrique est souvent sous-cardiale ou juxtacardiale. Une de retards à l’évacuation gastrique (3 %) et de diarrhées. La
gastrectomie d’hémostase semble dans ce cas excessive, et un maladie ulcéreuse est liée à la présence d’Helicobacter pylori dans
traitement local est indiqué. Il doit être tenté sous contrôle 60 % des cas [21]. Ces patients sont alors guéris par traitement
endoscopique par coagulation ou injection d’adrénaline, médical. Certains patients présentent un accès unique de
efficaces dans 90 % des cas. En cas d’échec, l’ulcère est traité par poussée ulcéreuse ne récidivant jamais. D’autres ont un ulcère
une hémostase chirurgicale directe. L’abord est une laparotomie aigu lié à la prise d’AINS ou d’aspirine [20]. De plus, il n’est pas
médiane sus-ombilicale. L’estomac est exposé, et une gastroto- toujours possible d’identifier en urgence les patients qui
mie exploratrice verticale est réalisée à mi-distance des deux pourraient bénéficier du traitement chirurgical, la reconstitution
courbures, sur 5 à 10 centimètres. L’estomac est décaillotté et de l’histoire clinique et l’interrogatoire étant difficiles dans ce
lavé au sérum physiologique chaud. La lésion ulcérée siège en contexte. Enfin, lorsque la vagotomie est réalisée, elle est parfois
général sur la petite courbure, en avant ou en arrière, à proxi- incomplète [23] et alors inefficace [24].
mité du pédicule vasculaire gastrique gauche. On déplisse au La connaissance de la physiopathologie de la maladie ulcé-
tampon monté les plis gastriques à la recherche du point de reuse et la diminution de l’incidence de ses complications grâce
saignement. L’ulcère est repéré et suturé à l’aide d’un ou de à l’éradication de l’Helicobacter pylori ont changé les données du
plusieurs points en X de fil résorbable ou non (Prolène 2/0®) problème. L’éradication de l’Helicobacter pylori prévient la
(Fig. 11). L’hémostase faite, une seconde lésion est recherchée récidive de la maladie ulcéreuse après perforation [25]. L’évolu-
par exploration de l’ensemble de la paroi gastrique. L’estomac tion démographique des sujets présentant un ulcère perforé
est refermé par un surjet effectuant une suture muqueuse tend vers des patients plus âgés et souvent tarés [18, 20]. Le taux
hémostatique, et par un second plan séromusculaire. Une de récidive des complications de la maladie ulcéreuse chez la
vagotomie n’est pas nécessaire en présence d’un ulcère personne âgée est rare (inférieur à 14 %) et ne justifie pas un
gastrique. traitement chirurgical systématique [26]. Il n’est plus indiqué de
réaliser le traitement chirurgical radical de la maladie ulcéreuse
Gastrectomie d’hémostase perforée en urgence [6, 19]. Le même raisonnement peut s’appli-
quer pour l’accident hémorragique [19], même si l’absence de
La réalisation d’une gastrectomie pour contrôler une hémor- problème septique aigu permet de réaliser une vagotomie avec
ragie est d’indication rare. Le plus souvent, un traitement opération de vidange sans risque particulier si le patient est
médical vient à bout des hémorragies gastriques. Parfois, le stable.
problème se pose devant la nécessité de poursuivre un traite- Lorsque l’indication chirurgicale est retenue, l’opérateur
ment anticoagulant chez un patient qui a une hémorragie adaptera sa stratégie aux contraintes locales. Celles-ci pourront
persistante (ex : patient porteur d’une valve cardiaque mécani- être techniques, et la disponibilité du bloc opératoire et
que). La réalisation d’une gastrectomie d’hémostase a l’avantage éventuellement d’un matériel laparoscopique pourront faire
de réaliser le traitement de l’hémorragie et de la maladie préférer certaines options plus que d’autres. Si la disponibilité
ulcéreuse en un temps. Mais ce geste est grevé d’une mortalité du matériel laparoscopique peut sembler courante en chirurgie
lourde, car effectué chez des patients instables avec d’importants conventionnelle, elle reste souvent problématique dans le
facteurs de risque. contexte de l’urgence. Les contraintes géopolitiques et écono-
Une gastrectomie totale est à éviter chez des malades ané- miques vont également avoir une influence particulière dans la
miés, fragiles, âgés et peu préparés à une lourde intervention prise en charge d’un ulcère gastroduodénal compliqué. Si
chirurgicale. En cas d’ulcère gastrique localisé, sous-cardial, il est l’éradication de l’Helicobacter pylori a actuellement démontré son
préférable d’effectuer un geste limité, comme une résection de efficacité dans la prévention de la récidive de la maladie
l’ulcère ou une gastrectomie en gouttière. Ces procédés traitent ulcéreuse, le coût de ce traitement et sa disponibilité peuvent
l’hémorragie, enlèvent l’ulcère et réalisent une biopsie à la amener à choisir de régler définitivement le problème par la
recherche d’un cancer associé. voie de la chirurgie. Les indications et méthodes thérapeutiques
En présence d’un ulcère de l’antre, lorsque les conditions tiendront compte de ces différents aspects au moment de la
locales sont favorables, une antrectomie avec réalisation réalisation du geste chirurgical en urgence.
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Mutter D., Marescaux J. Traitement chirurgical des complications des ulcères gastroduodénaux. EMC
(Elsevier Masson SAS, Paris), Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-326, 2007.
Résumé
L'abord coelioscopique entraîne une meilleure acuité visuelle par son effet
grossissant et la possibilité d'explorer facilement la face postérieure de
l'oesophage grâce à la mobilité du système optique. La qualité de la dissection
est ainsi améliorée et assure une vagotomie aussi complète que possible.
Haut de page
Matériel nécessaire
Imagerie (fig 1 A)
Instrumentation (fig 1 B)
L'instrumentation comprend :
Le premier assistant (A1) tient PFA-3 et le deuxième assistant (A2) tient PA-2
et O-1.
L'hiatus oesophagien est exposé aisément après avoir récliné le lobe gauche du
foie au moyen du palpateur tenu par le deuxième assistant (fig 5).
Contrairement à la technique par laparotomie, le ligament triangulaire du foie
est préservé. Le premier assistant saisit l'estomac par la pince à préhension
PFA-3 et attire l'angle de His vers le bas et la gauche du patient. Le pilier droit
est facilement reconnaissable sous le feuillet péritonéal qui recouvre la
membrane phréno-oesophagienne et sous le petit épiploon mis sous tension.
Le nerf vague postérieur est isolé et disséqué le plus haut possible vers le
médiastin pour éviter de laisser en place le nerf “criminel” de Grassi ou
d'autres branches communicantes. Celles-ci peuvent, en effet, venir très haut
du pneumogastrique postérieur mais aussi directement du plexus péri-
oesophagien intrathoracique. C'est pour cette raison qu'il faut disséquer toute la
face postérieure de l'oesophage et de l'angle de His et ne pas se contenter
d'aller saisir le vague postérieur et de le sectionner isolément.
Un segment du nerf est ensuite réséqué aux ciseaux, entre deux clips, pour
contrôle histologique.
Vagotomie antérieure (fig 9 et 10)
Un fil non résorbable 2.0 serti de 10 cm de long est introduit par une porte-
aiguille (PA) en 3. La pince (PF) est introduite en 2. PF-2 et PA-3 sont tenues
par le chirurgien. Une pince fenêtrée atraumatique (PFA) est introduite en 4.
Le premier assistant (A1) tient PFA-4 et P-5.
L'angle de His est reconstruit par quelques points unissant la grosse tubérosité
au bord gauche de l'oesophage. Cette suture est réalisée par des points 2.0
noués en intracorporel.
Vagotomie suprasélective
Introduction d'une optique à vision latérale de 30° (O) dans le trocart sus-
ombilical (1) (fig 26). Une pince à préhension (PF) est introduite dans le
trocart de 5 mm (2) sous le rebord costal droit. Une pince à préhension
atraumatique (PFA), qui agrippera la petite courbure de l'estomac, est
introduite dans le trocart de 10 mm (3), sous le rebord costal gauche. Le
crochet coagulateur (Cr) est introduit dans un trocart (4) situé au milieu de la
ligne joignant le 1er et le 3e trocart. Enfin, une deuxième pince fine (PF) est
introduite dans un trocart de 10 mm en sous-xiphoïdien (5).
La petite courbure doit être étalée. Plusieurs moyens pour y parvenir sont
possibles. Une pince atraumatique saisit l'estomac à 2 cm de la patte l'oie et
l'attire vers le bas, antérieurement et vers la gauche du patient, ce qui permet de
le dégager du lobe hépatique gauche et de bien présenter la petite courbure.
Une seconde pince à préhension (PF-5) introduite en sous-xiphoïdien soulève
et étire “en rideaux” la petite courbure (fig 27).
Dans certains cas, la mise en place d'une sonde gastrique, déployant la grande
courbure, a l'avantage d'étaler la petite courbure et d'abaisser l'estomac, évitant
ainsi de devoir récliner le foie. En revanche elle rend la dissection de la région
oeso-cario-tubérositaire plus difficile en diminuant les possibilités de
mobilisation de celle-ci. L'optique à vision latérale de 30° permet une vue
quasi perpendiculaire de la petite courbure et du petit épiploon (fig 27 en
cartouche). L'assistant qui tient l'optique doit bien maîtriser la pronation-
supination pour obtenir une image optimale.
Une pince à clip automatique (clip de 5 mm) (PC) est introduite en 5 à la place
de la PF-5, son rôle est de récliner le foie et d'être prête à contrôler toute
hémorragie au cours de la dissection (fig 29). L'estomac est attiré vers le bas et
vers la gauche du patient par la pince à préhension en 3 (PFA-3). La pince à
préhension en 2 (PF-2) soulève le ligament phréno-oesophagien vers le haut
(fig 30). Au voisinage du cardia, la dissection du feuillet péritonéal change
d'orientation et croise l'oesophage de droite à gauche. Elle se continue par
l'incision du feuillet phrénogastrique. Pour améliorer l'exposition de celui-ci, la
pince à préhension en 3 (PFA-3) attire l'estomac vers le bas, postérieurement et
vers la droite du patient. Le système optique se place au-dessus de l'oesophage,
sa facette latérale regardant d'avant en arrière (fig 31).
La petite courbure gastrique agrippée en son milieu par PFA-3 est soulevée.
L'optique latérale présente le champ opératoire perpendiculairement (fig 32).
Le crochet coagulateur s'insinue entre les tractus au plus près de la paroi
gastrique, les isole de la paroi et les coagule (fig 32 en cartouche). Lorsque les
vaisseaux sont suffisamment isolés dans l'épaisseur du petit épiploon, ils sont
contrôlés par la pince à clip (fig 33).
PA est placée en 3. Un rétracteur de foie (R) en 5. PA-3 et PF-2 sont tenus par
le chirurgien. A1 tient R-5 (fig 40). On se contente de reconstruire l'angle de
His par quelques points placés entre la grosse tubérosité et le bord gauche de
l'oesophage (fig 41). Une fundoplicature expose en effet à de mauvais résultats
fonctionnels.
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VAGOTOMIE TRONCULAIRE PAR THORACOSCOPIE
Matériel nécessaire
C'est le même que pour la vagotomie par voie abdominale (fig 42 A, B).
Installation de l'opéré
Le nerf vague gauche est situé sur le versant gauche de l'oesophage et est
immédiatement crocheté et coagulé (fig 46). Parfois, il est déjà ramifié.
L'oesophage est ensuite disséqué du côté droit (fig 47). Il faut être très prudent
afin de ne pas perforer la plèvre droite, d'autant que le nerf vague droit n'est
pas toujours intimement accolé à l'oesophage.
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Références
Fig. 1 :
Fig. 1 :
Imagerie : 1. module de caméra, 2. source de lumière, 3. gaine de lumière, 4.
insufflateur, 5. moniteur, 6. système optique à vision latéral de 30°.
Fig 2 :
Fig 2 :
Fig 3 :
Fig 3 :
Fig 4 :
Fig 4 :
Fig 5 :
Fig 5 :
Fig 6 :
Fig 6 :
Fig 7 :
Fig 7 :
Fig 8 :
Fig 8 :
Fig 9 :
Fig 9 :
Fig 10 :
Fig 10 :
Fig 11 :
Fig 11 :
Fig 12 :
Fig 12 :
Fig 13 :
Fig 13 :
Fig 14 :
Fig 14 :
Fig 15 :
Fig 15 :
Fig 16 :
Fig 16 :
Séromyotomie.
R : rétracteur du foie.
Fig 17 :
Fig 17 :
Myotomie.
R : rétracteur du foie.
Fig 18 :
Fig 18 :
R : rétracteur du foie.
Fig 19 :
Fig 19 :
Fig 20 :
Fig 20 :
Suture de la séromyotomie.
Fig 21 :
Fig 21 :
Fig 22 :
Fig 22 :
Fig 23 :
Fig 23 :
Fig 24 :
Fig 24 :
Fig 25 :
Fig 25 :
Fig 26 :
Fig 26 :
Fig 27 :
Fig 27 :
Fig 28 :
Fig 28 :
Fig 29 :
Fig 29 :
Fig 30 :
Fig 30 :
Fig 31 :
Fig 31 :
Fig 32 :
Fig 32 :
Fig 33 :
Fig 33 :
Les vaisseaux isolés sont contrôlés par la pince à clip qui rétracte le foie.
Fig 34 :
Fig 34 :
Fig 35 :
Fig 35 :
Fig 36 :
Fig 36 :
Fig 37 :
Fig 37 :
Fig 38 :
Fig 38 :
Fig 39 :
Fig 39 :
Fig 40 :
Fig 40 :
Fig 41 :
Fig 41 :
PA : porte-aiguille.
Fig 42 :
Fig 42 :
Vagotomie tronculaire par thoracoscopie.
Fig 43 :
Fig 43 :
Fig 44 :
Fig 44 :
Fig 45 :
Fig 45 :
Fig 46 :
Fig 46 :
Fig 47 :
Fig 47 :
Résumé
Si les diverticules de découverte fortuite lors d'un transit baryté sont à ignorer
sur le plan chirurgical, en revanche, les formes compliquées à type de
perforation et d'hémorragie grave nécessitent un traitement chirurgical et
posent dès lors, à la fois des difficultés diagnostiques et thérapeutiques.
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ANATOMIE ET ANATOMIE PATHOLOGIQUE
Anatomie pathologique
Les diverticules des faces libres sont totaux alors que les diverticules de la
fenêtre duodénale sont muqueux [8].
Formes particulières
Fréquemment rencontrés dans les études autopsiques, ils ont une responsabilité
controversée dans certaines affections biliopancréatiques, en augmentant le
taux d'infection de la bile tout en favorisant le reflux dans le canal de Wirsung.
La connaissance anatomique de la fenêtre duodénale permet de mieux
comprendre les deux variantes de diverticule décrits à ce niveau par Flament et
al [8]. L'utilisation de techniques radiographiques de mouvements (radioscopie,
magnétoscopie et ampliphotographie à cadence rapide) avec l'emploi de
modificateurs du comportement amène à la description (fig 1) :
Diverticules internes
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Une sonde gastrique est mise en place en début d'intervention (laissée en place
7 jours en cas de duodénotomie). Une antibioprophylaxie employant une
céphalosporine de deuxième génération et un nitro-imidazolé est administrée à
l'induction anesthésique.
Position opératoire
Exposition
Après mise en place d'un rétracteur sous-costal, l'estomac est refoulé vers la
gauche, le foie récliné et maintenu vers le haut par une valve alors que l'angle
colique droit est abaissé vers le bas par un aide.
Décollement duodénopancréatique
Duodénotomie
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Les modalités thérapeutiques reposent soit sur des interventions directes à type
de diverticulectomie ou indirectes à type de sphinctérotomie ou de dérivation.
Méthodes directes
La diverticulectomie transduodénale est la méthode la plus courante. Elle doit
être choisie en toute connaissance de cause, en sachant que la mortalité est de
l'ordre de 5 à 10 % [23].
Diverticulectomie transduodénale
Elle comporte les mêmes temps opératoires que la diverticulectomie par voie
transduodénale avec notamment la réalisation d'une duodénotomie, d'un
repérage de la papille, et d'une dissection du diverticule de dehors en dedans,
en utilisant l'index comme pour réséquer le sac d'une hernie inguinale ; cet
artifice est utile à connaître si le collet est difficile à individualiser par la
duodénotomie, ou encore si le diverticule se prête difficilement au
retournement. La dissection du diverticule par rapport au duodénopancréas doit
être prudente, pouvant se compliquer d'hémorragie ou de fistule pancréatique.
Méthodes indirectes
Dérivation biliodigestive
Méthodes endoscopiques
Elle peut nécessiter une incision du mésocôlon au bord inférieur de D3, voire
une libération de l'angle duodénojéjunal.
Autres méthodes
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DIVERTICULES INTERNES
[16]
Le traitement consistera dans la diverticulectomie chirurgicale ou sa
résection partielle par voie endoscopique [1].
Diverticulectomie chirurgicale
Les temps d'incision et d'exposition sont identiques aux techniques
directes des diverticules de la fenêtre duodénale.
La duodénotomie est dans ces cas habituellement longitudinale du fait
de la difficulté de repérage du diverticule et centrée sur la papille. Un
cathétérisme de la voie biliaire par le canal cystique ou par une
cholédocotomie sus-duodénale, à l'aide d'une sonde tutrice est
particulièrement utile pour prévenir toute désinsertion de la papille lors de
la diverticulectomie. Le repérage, après duodénotomie de la papille, peut
également se faire par l'injection de bleu de méthylène dans la vésicule
biliaire.
Le diverticule est extériorisé de la lumière duodénale à l'aide d'une
pince de Babcock.
Excision du diverticule en laissant une marge circonférentielle de 5 mm
de muqueuse afin d'éviter des points transfixiants au niveau de l'ampoule de
Vater. Cette margelle diverticulaire est recouverte d'un surjet de fil fin
résorbable.
Fermeture transversale du duodénum.
Drainage au voisinage de la duodénotomie par une lame de silicone
ressortant par contre-incision.
Diverticulectomie endoscopique
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DIVERTICULES COMPLIQUÉ S
Hémorragie
Perforation
tomodensitométrie. La laparotomie découvre rarement une péritonite
généralisée mais plus volontiers un phlegmon rétropéritonéal droit. Le
diagnostic étiologique est fait après réalisation d'un décollement
duodénopancréatique et l'exploration de tout le duodénum. Le traitement
commande la diverticulectomie, après avoir contrôlé la voie biliaire principale
par la mise en place d'un drain tuteur par une cholédocotomie sus-duodénale
ou par voie transcystique. La fermeture duodénale peut s'aider des pinces à
suture mécanique. Toutefois, la simple suture après diverticulectomie expose à
une fistule duodénale dont la mortalité est de 20 à 30 %. Pour minimiser les
conséquences de telles fistules, il est ainsi recommandé d'y associer une
gastrostomie et une jéjunostomie d'alimentation [6].
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CONCLUSION
Les perforations diverticulaires sont les formes les plus graves. Les techniques
de dérivation biliaire et digestive seront associées à la diverticulectomie pour
minimiser la gravité des fistules duodénales postopératoires.
Références
Fig 1 :
Fig 1 :
A. Fenêtre duodénale.
B. Diverticule juxtaposé.
C. Diverticule interposé.
Fig 2 :
Fig 2 :
A. Diverticule interne du duodénum avec diaphragme.
B. Diverticule latéral.
Fig 3 :
Fig 3 :
Fig 4 :
Fig 4 :
Fig 5 :
Fig 5 :
Fig 6 :
Fig 6 :
Fig 7 :
Fig 7 :
Fig 8 :
Fig 8 :
Fig 9 :
Fig 9 :
Fig 10 :
Fig 10 :
Fig 11 :
Fig 11 :
Evagination du diverticule.
Fig 12 :
Fig 12 :
Fig 13 :
Fig 13 :
[5]
Anastomose duodénojéjunale terminoterminale sur anse en Y .
Fig 14 :
Fig 14 :
B. Exérèse du diverticule.
Fig 15 :
Fig 15 :
[9]
Traitement endoscopique d'un diverticule interne .
Christian Meyer : Professeur des Universités, chirurgien des Hôpitaux, chef du service de
chirurgie générale et digestive
Nicolo de Manzini : Professeur des Universités, attaché des Hôpitaux
Serge Rohr : Professeur des Universités, chirurgien des Hôpitaux
Centre hospitalier universitaire de Hautepierre, avenue Molière, 67098 Strasbourg
cedex France
Résumé
Entrent dans cette définition les résections partielles du duodénum et les résections
de l'angle duodénojéjunal. Les résections totales et les exérèses de l'ampoule de
Vater sont exclues. Les duodénectomies partielles peuvent être distinguées en :
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RAPPEL ANATOMIQUE
Structure
Vascularisation
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VOIES D'ABORD
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EXPOSITION DU DUODÉ NUM
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Cette intervention trouve une indication lors des traumatismes duodénaux isolés de
D1 ou, plus souvent, quand un ulcère duodénal compliqué (perforation ou surtout
pénétration dans le pancréas avec hémorragie) commande l'exérèse du viscère.
Après mobilisation par décollement duodénopancréatique, et exposition par
ouverture du récessus droit de l'arrière-cavité, le duodénum mobile est
progressivement libéré par section entre ligatures des vaisseaux suprapyloriques,
ce qui permet de repérer la face antérieure du cholédoque sus-duodénal.
C'est ainsi que plusieurs méthodes ont été décrites [1], allant de la fistulisation
dirigée aux fermetures qui suturent, avec des artifices variés, la paroi duodénale
libre au socle de l'ulcère (fig 7). Les risques sont, d'une part ceux de la désunion
de ces sutures réalisée sur des tissus pathologiques, et d'autre part ceux des
lésions de la voie biliaire, d'où l'utilité de son repérage par une sonde tutrice. A cet
égard, la dissection intramurale du duodénum apporte une solution valable à ces
problèmes.
La berge muqueuse hypertrophique en aval de l'ulcère est saisie par des pinces
atraumatiques et la dissection du plan entre les deux couches musculaires
duodénales est amorcée au bistouri avec une petite lame ronde, puis se poursuit à
l'aide d'une spatule ou le dos du bistouri. Les éléments de repère sont constitués
par la présence des fibres musculaires blanchâtres sur les deux berges, duodénale
et pancréatique : ce plan est peu hémorragique, quelques hémostases par
électrocoagulation étant nécessaires sur de petits vaisseaux perforants ; la couche
musculaire interne et la muqueuse sont assez solides et leur épaisseur peut être
contrôlée au doigt.
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Duodénojéjunectomie
Cette résection est indiquée pour des traumatisme isolés de cette région (rares),
aussi bien que pour des tumeurs de D4 ou de la première anse jéjunale, voire pour
des tumeurs du côlon transverse envahissant l'angle de Treitz, avec l'éventuel
ailleurs, le décollement duodénopancréatique est également indispensable pour une
mobilisation aisée de la partie distale du duodénum. L'exposition étant complète, le
passage de l'index est possible à la face postérieure de D3, jusqu'à la première
anse jéjunale ; le pouce posé à la face antérieure de la racine du mésentère
permettra de palper les vaisseaux mésentériques et de s'assurer de la résécabilité.
Les vaisseaux mésentériques peuvent être individualisés par rapport à la face
antérieure de D3-D4 et isolés sur un lacs, cette manoeuvre n'étant cependant pas
indispensable.
La section de petits vaisseaux est amorcée sur le jéjunum (fig 10) à gauche de
l'axe mésentérique, au niveau choisi pour la section distale, et poursuivie de proche
en proche jusqu'à l'angle de Treitz. La section viscérale proximale peut se faire au
niveau de D4, avec les aléas vasculaires décrits auparavant, ou se continuer sur
D3.
Cette deuxième solution nous paraît la plus sûre, alors que la précédente n'est
employée que de nécessité si la pièce opératoire est de grande taille et donc ne
peut pas être décroisée. Le rétablissement de la continuité se fait par une
anastomose terminoterminale manuelle entre le genu inferius et le jéjunum,
l'ensemble du jéjunum étant refoulé en haut et à gauche, et se plaçant au-dessus
de l'anastomose en fin de réalisation (fig 14). L'anastomose peut aussi se faire par
réimplantation du jéjunum sur la face antérieure de D2, le moignon duodénal distal
ayant été fermé au préalable à l'agrafeuse linéaire. Une telle anastomose peut être
« protégée » par une aspiration duodénale douce et par une jéjunostomie
alimentaire distale, surtout si le contexte pathologique du malade incite à la
prudence (par exemple résection pour ischémie intestinale).
Exérèses élargies
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Si la suture risque d'être sous tension ou sténosante, il semble plus prudent d'avoir
recours à l'un de deux procédés suivants.
Duodénojéjunostomie
Elle peut se faire par une anse exclue en Y passée en transmésocolique dans la
fenêtre avasculaire comprise entre l'artère colica media et l'iléocolique, et suturée
ensuite à la perte de substance en latérolatéral ou terminolatéral (fig 15).
L'extrémité de l'anse peut être élargie par une incision longitudinale sur le versant
antimésentérique ou par une coupe oblique aux dépens du même versant. Ce
procédé, simple et fiable, s'applique aux pertes de substance de D2 ou de D3 [8].
L'anastomose duodénojéjunale latérolatérale a des indications plus limitées dans la
mesure où l'anse intestinale reste dans le circuit digestif ; elle est parfois utilisée
dans le syndrome de la pince mésentérique, en alternative à la dérotation
intestinale.
Patch jéjunal
Une courte anse jéjunale est isolée et ouverte sur le versant antimésentérique ;
son axe est ensuite transposé à travers le mésocôlon transverse et la perte de
substance duodénale est réparée par le patch ainsi réalisé (fig 16). L'avantage
d'une restitutio ad integrum anatomique et physiologique ne semble pas être un
argument déterminant par rapport à l'anse en Y, celle-ci étant de réalisation
indéniablement plus aisée. Le patch jéjunal peut s'autonomiser, encore que cela ne
soit pas prouvé [5] ; en cas de réintervention, son pédicule isolé semble en
revanche plus fragile que celui d'une anse en Y.
Références
[1] Burch JM, Cox CL, Feliciano DV, Richardson RJ, Martin RR Management of
the difficult duodenal stump. Am J Surg 1991 ; 162 : 522-526
[2] Dubois F, Grenier G, Rousselet J, Toulet J Légitimité de la gastrectomie avec
anastomose gastro-duodénale dans les ulcères post-bulbaires du duodénum. A
propos de 44 cas. J Chir 1971 ; 101 : 177-186 [crossref]
[3] Landier JF, Calmat A, Honnart F, Clot JP, Cabrol C Nouvelles acquisitions sur
la vascularisation artérielle de la 3e et de la 4e portion du duodénum. J Chir 1977
; 113 : 405-412
[4] Lowell JA, Rossi RL, Munson JL, Braasch JW Primary adenocarcinoma of third
and fourth portion of duodenum. Favorable prognosis after resection. Arch Surg
1992 ; 127 : 557-560
[5] Mambrini A, Blanc G, Chevrant-Breton O, Julou P, Guesnon J, Lancien G
Réparation des brèches duodénales par patch jéjunal pédiculé. J Chir 1980 ;
117 : 259-263
[6] Mendonca J, de Carvalho CA, de Souza RR Functional anatomy of the tunica
muscularis in the upper human duodenum. Anat Anz 1991 ; 172 : 287-292
[7] Meyer CH, Rohr S, de Manzini N, Dai B Reliable procedure for closing the
duodenal stump for bleeding posterior duodenal ulcer. World J Surg 1994 ; 18
: 286-289 [crossref]
[8] Richelme H, Benchimol D, Chazal M, Mouroux J Traumatismes du duodénum.
Ann Chir 1993 ; 47 : 659-663
[9] Sabiani P, Le Treut YP, Mallet B, Bozon-Verduraz E, Bricot R Les
adénocarcinomes de l'angle duodénojéjunal. Problèmes diagnostiques et
thérapeutiques. J Chir 1987 ; 124 : 30-34
Fig 1 :
Fig 1 :
Les quatre portions du duodénum et leurs rapports avec les racines des mésos. I : D1 ;
II : D2 ; III : D3 ; IV : D4.
Fig 2 :
Fig 2 :
Segment duodénal mal vascularisé, du fait d'un fréquent hiatus vasculaire à ce niveau.
Fig 3 :
Fig 3 :
Fig 4 :
Fig 4 :
Fig 5 :
Fig 5 :
L'incision est poursuivie vers le bas, après abaissement de l'angle colique droit.
Fig 6 :
Fig 6 :
Fig 7 :
Fig 7 :
Fig 8 :
Fig 8 :
Fig 9 :
Fig 9 :
Fig 10 :
Fig 10 :
Fig 11 :
Fig 11 :
Section des vaisseaux du troisième duodénum : l'espace est limité par le bord inférieur
du pancréas et les vaisseaux mésentériques avec la lame rétroportale.
Fig 12 :
Fig 12 :
Fig 13 :
Fig 13 :
Fig 14 :
Fig 14 :
Fig 15 :
Fig 15 :
Fig 16 :
Fig 16 :
Résumé
Haut de page
INTRODUCTION
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RAPPEL PHYSIOPATHOLOGIQUE
Déperditions hydroélectrolytiques
Ischémie intestinale
Elle peut être la conséquence d'une distension extrême des anses grêles en
amont de l'obstacle ou surtout de la torsion ou de la strangulation du grêle.
Elle peut devenir irréversible en quelques heures, aboutissant à des lésions de
nécrose pariétale, voire de perforation.
Pullulation microbienne
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TRAITEMENT MÉ DICAL
L'aspiration digestive haute et la rééquilibration hydroélectrolytique doivent
être entreprises en urgence de façon à préparer le malade à une intervention
chirurgicale dans les meilleures conditions. Cette préparation ne doit pas
excéder quelques heures dès lors qu'une indication chirurgicale est portée,
surtout lorsqu'il existe une ischémie digestive. Ces traitements sont
naturellement poursuivis durant l'intervention et dans la phase postopératoire
précoce jusqu'à une reprise franche du transit intestinal.
Rééquilibration hydroélectrolytique
Autres thérapeutiques
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Anesthésie
L'intervention doit être menée sous anesthésie générale. Après une vidange
aussi complète que possible de l'estomac par la sonde nasogastrique de façon
à limiter le risque d'inhalation bronchique par le liquide de stase gastrique lors
de l'induction ou de l'intubation, le malade est intubé par voie orotrachéale ou
par voie nasotrachéale lorsqu'une ventilation postopératoire prolongée paraît
nécessaire. La curarisation doit être profonde de façon à obtenir un
relâchement complet de la paroi abdominale qui permette des gestes
opératoires atraumatiques et une exploration complète de la cavité
péritonéale.
La rachianesthésie, voire l'anesthésie locale, trouvent des indications
exceptionnelles lors de la cure d'une hernie inguinocrurale étranglée, chez le
grand vieillard, l'obèse ou l'insuffisant respiratoire chronique.
Installation du malade
Une table d'instrumentation est installée au-dessus des jambes du malade. Les
champs abdominaux doivent permettre un libre accès à la totalité de la paroi
abdominale antérieure, de l'appendice xyphoïde à la symphyse pubienne, les
champs latéraux étant placés dans les flancs de façon à permettre en fin
d'intervention l'installation éventuelle d'un drainage déclive des gouttières
pariétocoliques.
Voie d'abord
Laparotomie
La voie d'abord est en règle une laparotomie médiane à cheval sur l'ombilic,
longue de 8 à 10 cm, qu'il est possible d'agrandir en fonction des lésions
constatées.
Dans tous les cas, après avoir franchi les plans musculoaponévrotiques,
l'incision du péritoine pariétal antérieur doit être prudente. La possibilité
d'adhérences du grêle à la face profonde de la paroi abdominale antérieure si
le malade a des antécédents chirurgicaux abdominaux, la présence d'anses
grêles dilatées et sous tension immédiatement sous le péritoine, peuvent en
effet conduire à une ouverture accidentelle du tube digestif lors de la
laparotomie, source de contamination péritonéale et de complications
postopératoires sévères (fistule digestive, éviscération).
Abord coelioscopique
En tout état de cause, la coelioscopie n'est qu'une voie d'abord et les différents
principes généraux du traitement chirurgical des occlusions du grêle doivent
être respectés, à l'exception de l'entérovidange rétrograde qui est impossible
par cette voie.
Entérovidange
Une vidange aussi complète que possible du grêle d'amont doit toujours être
faite, la décompression assurée par la sonde nasogastrique n'étant jamais
suffisante. Il est en effet souhaitable d'évacuer le troisième secteur liquidien
intraluminal accumulé en amont de l'obstacle, toujours septique.
L'affaissement du grêle permet par ailleurs un traitement plus aisé des lésions
constatées, une exploration complète de la cavité péritonéale, une fermeture
pariétale plus facile. Ce geste permet enfin de limiter les complications
bronchopulmonaires postopératoires et laisse espérer une reprise plus facile
du transit après l'intervention.
L'entérovidange rétrograde (fig 1) est la technique la plus sûre, qui doit être
utilisée dans la quasi-totalité des cas, puisqu'elle ne comporte aucune
ouverture digestive et évite par conséquent tout risque de contamination de la
cavité abdominale ou de fistule postopératoire du grêle. La colonne de liquide
contenue dans le grêle distendu en amont de l'obstacle est progressivement
mobilisée et refoulée dans le sens antipéristaltique vers la lumière gastrique, à
partir de laquelle elle est évacuée par la sonde gastrique. Le grêle distendu est
saisi par l'opérateur fermement entre l'index et le médius de la main gauche,
l'index et le médius de la main droite effectuant des manoeuvres de chasse en
refoulant le contenu du grêle vers le haut sur 20 à 30 cm, avant que la main
gauche ne se déplace pour rejoindre la main droite et recommencer une
nouvelle manoeuvre de vidange rétrograde. Il est difficile de mobiliser une
colonne importante de liquide de stase sur une grande longueur d'intestin et il
est recommandé d'effectuer cette vidange par manoeuvres successives, en
évacuant d'abord les 50 à 80 premiers centimètres du jéjunum, puis en
recommançant la même manoeuvre 50 à 80 cm plus en aval et ainsi de suite...
Il faut ainsi arriver à évacuer la totalité du liquide de stase contenu dans
l'intestin grêle entre l'angle duodénojéjunal et l'obstacle lui-même. Lorsque
l'entérovidange est difficile, il faut parfois effectuer des manoeuvres douces
de pression ou de massage de la première anse jéjunale et surtout de l'angle
duodénojéjunal dont le franchissement par la colonne de liquide peut être
malaisé. Lorsque la sonde nasogastrique est en bonne place et ne ramène rien
au cours de l'entérovidange, l'anesthésiste doit s'assurer qu'elle n'est pas
bouchée et éventuellement la remplacer par une sonde de plus gros calibre.
Des manoeuvres de massages faites par l'opérateur sur un estomac très
distendu peuvent également faciliter l'amorçage de l'évacuation par la sonde
gastrique dont les oeillets peuvent être ventousés sur la muqueuse gastrique
en raison de la dépression liée à l'aspiration.
Elle doit emporter la totalité des lésions ischémiques jugées irréversibles, les
limites de la résection passant à 5 cm au moins au-delà des lésions
macroscopiques. L'anse intestinale d'amont sur laquelle porte l'anastomose
fait l'objet d'une vidange rétrograde, puis des clamps intestinaux souples sont
placés en zone saine de part et d'autre de l'anse à réséquer. Le champ
opératoire est isolé du reste de la cavité péritonéale par des compresses
abdominales imbibées de sérum chaud, de façon à limiter au maximum le
risque de contamination péritonéale.
Toilette péritonéale
La mise en place d'un drainage intrapéritonéal est le plus souvent superflue (il
est en tout cas illusoire de mettre en place quelque drainage que ce soit au
contact d'une suture ou d'une anastomose siégeant sur l'intestin grêle, dont la
position centrale dans la cavité abdominale et la mobilité ne permettent pas
d'espérer une fistulisation dirigée en cas de déhiscence anastomotique
postopératoire). Lorsque l'intervention a nécessité une longue entérolyse avec
un suintement hémorragique diffus et persistant, la mise en place d'un ou deux
drains aspiratifs souples (type drains de Shirley) peut être utile. Lorsque
l'occlusion est compliquée d'une perforation du grêle ou lorsque la cavité
péritonéale a été largement contaminée par une ouverture digestive
peropératoire, le drainage des gouttières pariétocoliques et du cul-de-sac de
Douglas est indispensable.
Après un contrôle du compte des compresses, les anses grêles doivent être
remises en place dans la cavité abdominale de façon harmonieuse, décrivant
des sinuosités régulières sans aucune angulation ni torsion du mésentère, le
plus simple étant de mettre d'abord en bonne place la dernière anse iléale et de
ranger ensuite les anses grêles de l'iléon jusqu'au jéjunum. Le tablier
épiplooïque est enfin interposé entre les anses grêles et la paroi abdominale
antérieure.
Fermeture pariétale
Soins postopératoires
Haut de page
La section de la bride (fig 3) est réalisée soit aux ciseaux, soit par
électrocoagulation ou section entre deux ligatures lorsque la bride paraît
vascularisée. Ce geste peut être difficile lorsque la bride est très courte, avec
de nombreuses anses grêles très dilatées en amont qui gênent l'exposition du
foyer lésionnel, ou encore lorsque la bride siège dans une zone d'accès
malaisé (bride pelvienne, bride siégeant dans l'hypocondre gauche après
splénectomie...). Dans ces situations, il peut être utile de mieux exposer la
bride en la sous-tendant par un passe-fil d'O'Shaw-Gnessy et mieux vaut, si
besoin est, agrandir la laparotomie initialement réalisée plutôt que de blesser
accidentellement par un geste aveugle une anse grêle fragilisée.
Obstacles endoluminaux
Les occlusions aiguës du grêle par obstacle intrinsèque sont peu fréquentes. Il
s'agit généralement d'un iléus biliaire, qui représente 1 à 3 % des occlusions
du grêle, plus rarement encore d'un corps étranger.
Iléus biliaire
Obstacles pariétaux
Tumeurs primitives du grêle
Occlusions inflammatoires
Sténoses ischémiques
Ces lésions sont exceptionnelles et, comme les précédentes, sont plus souvent
révélées par des crises subocclusives à répétition que par une occlusion aiguë
vraie. Elles ne se rencontrent guère chez l'artéritique dans le cadre d'une
ischémie mésentérique chronique (beaucoup plus souvent à l'origine de
claudication intermittente de l'abdomen ou d'infarctus iléomésentériques) et
sont généralement la conséquence de l'évolution de lésions ischémiques
intestinales très localisées telles qu'on les rencontre dans le volvulus du grêle
ou la striction du grêle par bride ou par un orifice herniaire, chez un malade
opéré quelques semaines ou quelques mois auparavant et chez lequel ces
lésions avaient initialement été jugées conservables.
Volvulus du grêle
C'est la torsion d'une partie ou de la totalité de l'intestin grêle sur son axe
mésentérique (fig 6 et 7). Le volvulus est :
Si l'anse semble viable, elle doit être détordue puis réchauffée après
entérovidange, selon les principes vus plus haut. C'est alors que l'on peut
décider d'une réintégration ou au contraire d'une résection intestinale selon la
réversibilité définitive des lésions.
Hernies pelviennes
en cas de hernie obturatrice, le collet peut être traité par une suture
simple à points séparés lorsqu'il est étroit ; dans le cas contraire, le
comblement de l'orifice obturateur fait appel à une plastie aponévrotique
ou épiploïque, voire en l'absence de tout risque septique à la mise en place
d'une prothèse endopelvienne ;
la réduction du contenu viscéral d'une hernie ischiatique étranglée est
souvent difficile et peut nécessiter un agrandissement prudent du collet en
incisant sur le muscle pyramidal ; la réparation pariétale fait appel à un
retournement du sac qui est plicaturé sur lui-même ou à la mise en place
d'une prothèse synthétique ;
les hernies périnéales postérieures s'extériorisent en arrière du muscle
transverse du périnée, dans la fosse ischiorectale, entre rectum et vessie
chez l'homme, rectum et vagin chez la femme ; la réparation de l'orifice
herniaire fait appel comme dans les cas précédents à une suture directe des
berges ou à défaut à la mise en place d'une prothèse, en y associant une
péritonisation haute du petit bassin.
Hernies lombaires
Hernies internes
Sous ce terme, on regroupe des lésions disparates [15] dont la découverte est
généralement une surprise opératoire et qui ont en commun l'existence d'un
orifice intrapéritonéal au niveau duquel le grêle peut s'étrangler. Il peut s'agir
d'un orifice anormal (hernies transépiploïques, transmésentériques ou
transmésocoliques), d'un orifice normal (hernies de l'hiatus de Winslow [6])
ou encore d'un orifice résultant d'une anomalie de développement ou d'un
défaut de coalescence des feuillets péritonéaux (hernies para- ou
rétroduodénales, hernies péricoliques ou intersigmoïdiennes).
Hernies paraduodénales
La hernie paraduodénale gauche (fig 8) est la plus fréquente. Son sac peut
atteindre en haut la rate et le pancréas, plonger en bas dans le pelvis, atteindre
à droite le caecum et le côlon ascendant. L'orifice herniaire est trouvé au
voisinage du caecum, sur la partie postérieure et droite de la masse qu'il faut
basculer vers la gauche. Il est limité en arrière par la paroi postérieure de
l'abdomen, en haut par le pancréas, en avant par un repli falciforme contenant
la veine mésentérique inférieure et l'artère colique supérieure gauche. Une
fois le contenu herniaire réduit, l'orifice doit être obturé par quelques points
de suture prenant le péritoine seul pour ne pas blesser l'aorte en arrière ou les
vaisseaux mésentériques inférieurs en avant.
La hernie paraduodénale droite (fig 9), moins fréquente, forme une masse
s'étendant du foie à la fosse iliaque droite et pouvant dépasser la ligne
médiane, refoulant en avant et à gauche le côlon droit. L'orifice est situé sur la
partie postéro-inférieure gauche du sac, devant la colonne lombaire, son bord
libre est longé par l'artère mésentérique supérieure ou par ses branches (sauf
dans sa variété prévasculaire exceptionnelle où la paroi antérieure du sac et du
collet est avasculaire). Une fois la hernie réduite, la résection du sac herniaire
serait comme à gauche dangereuse compte tenu des rapports vasculaires et
l'orifice doit être obturé par quelques points séparés ne prenant que le
péritoine.
Les hernies avec sac, les plus rares, siègent en plein milieu du mésocôlon
transverse, au sein des arcades vasculaires.
Hernies transmésentériques
Le diagnostic opératoire est facile dès lors que l'on constate une projection de
l'estomac en avant et la présence d'anses fixées vers le hile du foie. Si la
désincarcération du grêle n'est pas possible par des manoeuvres de traction
douce à travers l'hiatus de Winslow, il faut s'aider d'une large ouverture de
l'arrière-cavité des épiploons, grâce à un décollement coloépiploïque et non
pas par une transsection du ligament gastrocolique qui pourrait conduire à
blesser le grêle hernié. Une fois la réduction obtenue, la fermeture de l'orifice
herniaire se fait soit par un lambeau péritonéal postérieur fixé prudemment au
bord droit du pédicule hépatique et sur le genu superius, soit par une fixation
de l'angle colique droit à la paroi abdominale antérieure.
Hernies diaphragmatiques
Dans le cadre d'une occlusion aiguë du grêle, une voie d'abord thoracique
n'est pas discutée et la laparotomie médiane s'impose. Après réduction des
viscères herniés, le sac péritonéal éventuellement présent peut être réséqué par
traction douce grâce à des pinces à mors plats s'il est de petit volume, ou
abandonné en position intrathoracique après section du péritoine à la limite de
l'orifice diaphragmatique s'il est plus important. Lorsqu'il existe une
communication pleurale (hernie post-traumatique), la mise en place d'un ou
deux drains thoraciques aspiratifs à travers la brèche diaphragmatique précède
la réparation de celle-ci, le plus souvent par suture directe à points séparés
d'un fil non résorbable, en s'appuyant sur les berges musculaires et
éventuellement sur les rebords costaux, parfois par mise en place d'une
prothèse synthétique non résorbable si l'orifice diaphragmatique est trop large.
Cas particuliers
Dans d'autres circonstances, l'obstacle est encore ponctuel, sous forme d'une
anse grêle incarcérée dans une récidive tumorale locorégionale ou d'une
sténose localisée du grêle par un foyer de carcinose péritonéale. L'obstacle
peut être traité par une résection-anastomose dans les meilleurs cas, par une
dérivation interne si la lésion s'avère inextirpable.
Occlusions à double étage
Les occlusions mécaniques, les plus rares, sont de diagnostic facile chez un
malade qui avait repris son transit dans la phase postopératoire et qui présente
brutalement un tableau d'occlusion aiguë en l'absence de tout phénomène
infectieux. L'intervention s'impose en urgence et la laparotomie retrouve le
plus souvent une bride précoce, une anse incarcérée dans une brèche créée par
la première intervention ou encore un agglutinat d'anses sans phénomène
septique.
Occlusions fonctionnelles
Haut de page
Ces différents procédés, très utilisés jusqu'au début des années 1980, sont
maintenant pratiquement abandonnés : ils s'avèrent en effet inefficaces sur le
maintien prolongé d'un rangement harmonieux des anses grêles (quel que soit
le procédé de plicature, la fixation a partiellement ou totalement disparu dans
50 à 80 % des cas lors d'interventions ultérieures), dangereuses, avec un taux
de mortalité de 4 à 26 % lié au risque d'ischémie intestinale, de fistule interne
ou externe du grêle, de perforation, d'occlusions à répétition [18].
La plicature du grêle sur sonde, proposée par White en 1956 [23], fait appel à
une longue sonde intubant la totalité du grêle, introduite par une jéjunostomie,
par une gastrostomie ou le plus souvent par voie nasale, cette sonde étant
supposée servir de tuteur de façon à organiser les adhérences entre les anses.
L'inconfort lié au maintien prolongé de cette sonde et les complications
bronchopulmonaires qui en résultent sont à mettre au débit de cette technique
dont l'efficacité reste discutable puisque seules les zones du grêle ou du
mésentère dépéritonisées sont susceptibles de s'accoler ultérieurement.
Références
Fig 1 :
Fig 1 :
Fig 2 :
Fig 2 :
Fig 3 :
Fig 3 :
Fig 4 :
Fig 4 :
Fig 5 :
Fig 5 :
Fig 6 :
Fig 6 :
Fig 7 :
Fig 7 :
Fig 8 :
Fig 8 :
Fig 9 :
Fig 9 :
Fig 10 :
Fig 10 :
Fig 11 :
Fig 11 :
Fig 12 :
Fig 12 :
Fig 13 :
Fig 13 :
Plan
¶ Introduction 1
“ Point important
¶ Rappel anatomique 1
La chirurgie du diverticule de Meckel a lieu dans deux
Anatomie macroscopique 1
types de circonstances : en urgence, lors d’une
Anatomie microscopique 2
complication, ou lors d’une découverte fortuite.
¶ Techniques chirurgicales 2
Résection segmentaire avec anastomose terminoterminale 2
Résection losangique 3
Résection à la base du diverticule, à la pince automatique 3 La question de sa recherche et de son exérèse systématique
Résection par laparoscopie 3 demeure d’actualité. [4]
¶ Indications opératoires 5
Meckel découvert à l’occasion d’une complication 5 ■ Rappel anatomique
Meckel découvert au cours d’une appendicectomie 5
Meckel découvert de façon fortuite 5 Anatomie macroscopique
¶ Conclusion 6
Du fait de son origine embryologique, le diverticule de
Meckel possède certaines particularités.
Il s’agit d’un segment d’intestin grêle, vestige du canal
omphalomésentérique. Il est, de ce fait, constitué des quatre
tuniques (séreuse, musculeuse, musculaire muqueuse, muqueuse), ce
qui le différencie des diverticules par pulsion qui ne sont constitués
■ Introduction que de muqueuse.
Il est situé habituellement sur la partie distale de l’iléon
Le diverticule de Meckel (DM) est la persistance partielle du (Fig. 2), à une distance variable de la valvule iléocæcale, qui
canal omphalomésentérique (Fig. 1), qui, chez l’embryon, fait peut aller jusqu’à 1 m. [5] C’est dire qu’une exploration com-
communiquer l’intestin primitif avec la vésicule ombilicale plète du grêle est nécessaire afin de ne pas le méconnaître.
avant de disparaître totalement. Il est rare : seuls 2 % des Il reste parfois relié à l’ombilic par des brides fibreuses ou
vasculaires qu’il importe de reconnaître, notamment lors d’un
individus en sont porteurs. [1]
abord par laparoscopie. Ces dernières peuvent provoquer un
Généralement latent, il peut être découvert de façon fortuite.
volvulus.
Son exérèse préventive est alors discutée. Il est toujours unique, implanté en regard de la terminaison
Il peut donner lieu en effet à certaines complications qui en de l’artère mésentérique supérieure. Sa vascularisation est
imposent l’ablation. C’est le cas en particulier chez l’enfant, assurée par une branche artérielle distincte, issue de l’arcade
d’autant plus s’il est jeune : 30 % de complications avant bordante (Fig. 3). À ce niveau, la vascularisation du grêle se
1 an, [2] 40 % avant 10 ans [3]. Il peut s’agir d’une péritonite, modifie : d’unique, l’arcade iléale se ramifie en deux ou trois
d’une occlusion ou d’une hémorragie digestive qui ne sont branches.
rapportées à leur cause que par l’exploration chirurgicale, Il siège sur le bord antimésentérique de l’intestin, à l’inverse
aucune autre méthode n’étant parfaitement fiable. des duplications digestives, qui siègent sur le bord mésentérique.
■ Techniques chirurgicales
Le diverticule de Meckel peut être recherché et retiré par
laparotomie, ou par laparoscopie.
“ Point important
Quelle que soit la voie d’abord utilisée, les sutures
digestives doivent porter sur une zone parfaitement saine,
non inflammatoire, et bien vascularisée.
• l’aspect du diverticule ? Est-il long et étroit, susceptible de [2] Pellerin D, Harouchi A, Delmas P. Le diverticule de Meckel : revue de
s’infecter, existe-t-il une hétérotopie palpable ou une ombili- 250 cas chez l’enfant. Ann Chir Infant 1975;17:157-72.
cation pouvant donner lieu à une invagination ? Le diverti- [3] Yamaguchi M, Takeuchi S, Awazu S. Meckel’s diverticulum: investi-
cule est-il relié à l’ombilic par une bride ? Toutes conditions gation of 600 patients in Japanese literature. Am J Surg 1978;136:247-9.
qui en imposent l’ablation. [4] Onen A, Cigdem MK, Ozturk H, Otcu S, Dokucu AI. When to resect
Cette exérèse peut se faire soit pendant l’intervention au and when to not resect an asymptomatic Meckel: an ongoing challenge.
cours de laquelle il a été découvert, à condition qu’il n’existe Pediatr Surg Int 2003;19:57-61.
aucune contre-indication locale ou générale, soit à distance, de
[5] Gruner MJ, Grapin C. Diverticule de Meckel et pathologie
façon programmée (découverte d’un Meckel lors d’une périto-
omphalomésentérique. Encycl Méd Chir (Elsevier SAS, Paris), Pédia-
nite d’une autre origine).
trie, 4-018-P-30, 1992: 6p.
[6] Maggi G, Navarra L, Cianc G, Vittorini V, Ciccarelli O, Pietroletti R,
■ Conclusion et al. Ectopic pancreas in Meckel’s diverticulitis: a description of a new
clinical case. Ann Ital Chir 2002;73:647-9.
Du fait de sa fréquente latence, mais aussi de l’existence
[7] Dixon PM, Nollan G. The diagnosis of Meckel’s diverticulum: a
connue de complications dont certaines peuvent mettre en jeu
continuing challenge. Clin Radiol 1987;38:615-9.
le pronostic vital, le diverticule de Meckel pose essentiellement
aux chirurgiens un problème d’indication opératoire. [8] Steffen H, Ludwig K, Scharlau U, Czarnetzki HD. Laparoscopic
S’il est acquis que le diverticule de Meckel pathologique doit Treatment of small bowell obstruction with intussuception, volvulus
être retiré par résection-anastomose, certaines questions demeu- end appendicitis caused by an inflammatory Meckel’s diverticulum.
rent encore posées : faut-il rechercher systématiquement le Zentralbl Chir 2003;128:99-101.
diverticule de Meckel lors d’une intervention abdominale, faut-il [9] Karahasanoglu T, Memisoglu K, Korman U, Tunckale A, Curgunlu A,
retirer systématiquement un diverticule rencontré fortuitement ? Karter Y. Adult intussuception due to inverted Meckel’s diverticulum:
Dans tous les cas, le risque de l’ablation doit être mis en laparoscopic approach. Surg Laparosc Endosc Percutan Tech 2003;13:
rapport avec le risque de l’abstention. 39-41.
En fonction du contexte, on pourra soit laisser délibérément [10] Tashjian DB, Moriarty KP. Laparoscopy for treating a small bowel obs-
en place le diverticule, en prenant soin d’en informer le patient truction due to a Meckel’s diverticulum. JSLS 2003;7:253-5.
ou ses parents s’il s’agit d’un enfant, soit procéder à son
ablation immédiate. [11] Loth DL, Munro FD. The role of laparoscopy in the management of
Chez l’enfant, l’indication d’exérèse soit immédiate, soit lower gastro-intestinal bleeding. Pediatr Surg Int 2003;19:266-7.
retardée doit être large, en raison de la fréquence des [12] Ha-Kawa S, Yoshida T, Aoki Y, Sougawa M, Sawada S. Extravasation
complications. of Tc-99 sodium pertechnetate detected on Meckel’s cine scintigraphy
. in hemorrhagic diverticulum. Clin Nucl Med 2003;28:582-3.
[13] Mathon G, Frampas E, D’Alincourt A, Lerat F, Letessier E, Masliah C,
■ Références et al. Diagnostic d’un diverticule de Meckel hémorragique par
[1] Skandalakis JE, Gray SW. Embryology for surgeons: the embryological entéroscanner. J Radiol 2003;84:712-4.
basis for the treatment of congenital anomalies. Baltimore: Williams [14] Rivas H, Cacchione RN, Allen JW. Laparoscopic management of
and Wilkins; 1994. Meckel’s diverticulum in adults. Surg Endosc 2003;17:620-2.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Grapin C., Bonnard A., Helardot P.-G. Chirurgie du diverticule de Meckel. EMC (Elsevier SAS, Paris),
Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-480, 2005.
Résumé. – Les anomalies de rotation intestinales peuvent être responsables de complications tant chez
l’enfant que chez l’adulte. La complication la plus grave chez l’adulte est le volvulus total du grêle survenant
sur anomalie de rotation de type mésentère commun incomplet à 180°. La gravité du volvulus total du grêle
sur anomalie de rotation (VTGAR), engageant le pronostic vital, associé à son incidence exceptionnelle,
justifient que tout chirurgien ait connaissance de cette pathologie, des méthodes pour en faire le diagnostic et
des principes de son traitement chirurgical. Cette mise au point a pour objectif de rappeler les principes
embryologiques de la rotation de l’intestin primitif, l’anatomie des anomalies de rotation intestinale, les
moyens permettant de réaliser le diagnostic d’anomalie de rotation et de VTGAR ainsi que les principes de sa
correction chirurgicale étape par étape, en insistant sur les gestes à proscrire et les moyens préventifs pour
éviter toute récidive. Seront évoquées également les particularités des formes chroniques de VTGAR ainsi que
les principes thérapeutiques des autres formes anatomiques d’anomalie de rotation que sont les rotations
inverses et les hyper-rotations, plus exceptionnelles encore.
© 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Mots-clés : Anomalie de rotation intestinale ; Volvulus total du grêle ; Mésentère commun incomplet ;
Procédure de Ladd ; Rotation inverse ; Hyper-rotation
EMBRYOLOGIE
H. Kotobi, D. Gallot
Adresse e-mail: denis.gallot@bch.ap-hop-paris.fr
Meckel fut le premier en 1817 à décrire la hernie physiologique de
[6]
Hôpital Bichat, chirurgie générale et digestive, 46, rue Henri-Huchard, 75018 Paris, France. l’intestin primitif au stade embryonnaire, puis Mall [ 7 ] en
Complications des anomalies embryologiques de la rotation intestinale :
40-440 Techniques chirurgicales
prise en charge chez l’adulte
Figure 1 Anse ombili- Figure 2 Rotation de l’anse ombili-
cale : position embryologi- cale : premier stade.
que initiale. 1. Antérieure ; 1. Droite ; 2. Gauche.
2. postérieure.
Figure 3 Rotation de
1898 décrivit la réintégration de l’intestin dans la cavité abdominale. l’anse ombilicale : deuxième
Par la suite, les embryologistes Frazer et Robbins [8] firent, en 1915, stade.
une description des trois stades de la rotation intestinale qui sert
encore aujourd’hui de référence. Sur le plan chirurgical, c’est Dott [9]
qui, en 1923, envisagea le premier le traitement des AR, suivi par
Gardner et Hart [10] en 1934. À la même époque, Ladd [11] mit en
évidence, en 1932, l’importance des brides congénitales
préduodénales fréquemment associées aux AR, et dont il décrivit la
pathogénie. En 1941, [12] Ladd détailla la cure chirurgicale du VTG
sur AR de façon réglée. Cette technique dite « procédure de Ladd »
reste aujourd’hui le traitement de référence du VTG sur AR chez
l’adulte comme chez l’enfant.
¶ Embryologie normale
La portion de l’intestin primitif concernée par la rotation intestinale
(« anse ombilicale ») correspond à l’intestin moyen qui s’étend du
deuxième duodénum au tiers droit du côlon transverse et qui est
vascularisé par l’artère mésentérique supérieure. Celle-ci est l’axe
autour duquel se fait la rotation intestinale.
Entre la 5e et la 10e semaine du développement embryonnaire, l’anse
ombilicale est en dehors de la cavité abdominale. Puis elle va
amorcer sa rotation dans le sens antihoraire en réintégrant la cavité
abdominale, et achever sa rotation pour s’accoler de façon définitive.
Cette rotation embryologique comporte trois stades et c’est son
interruption prématurée qui va conditionner le positionnement
définitif de l’intestin dans une situation plus ou moins à risque de Deuxième stade
volvulus.
Beaucoup plus rapide, il se produit au cours de la 10e semaine. Ce
Premier stade stade consiste d’une part en une nouvelle rotation de 90° toujours
Il correspond à la période où l’anse ombilicale est située en dehors dans le sens antihoraire (soit une rotation globale de 180° depuis
de la cavité abdominale. Initialement placée dans un plan vertical la position initiale) et d’autre part, en une réintégration de l’anse
sagittal (Fig. 1), l’anse ombilicale va progressivement subir une ombilicale dans la cavité abdominale (Fig. 3). À ce stade, l’angle
rotation de 90° dans le sens antihoraire, centrée sur l’axe duodénojéjunal se situe toujours à droite de l’axe mésentérique
mésentérique supérieur, qui va l’amener dans un plan horizontal, ou sur la ligne médiane, tandis que la jonction iléocæcale est située
toujours sagittal (Fig. 2). À ce stade, l’angle duodénojéjunal est à dans la région sous-hépatique, en avant et au-dessus de l’axe
droite de l’axe mésentérique supérieur et la jonction iléocæcale à mésentérique supérieur. La première anse jéjunale et la dernière
gauche. anse iléale se trouvent alors très proches l’une de l’autre.
2
Complications des anomalies embryologiques de la rotation intestinale :
Techniques chirurgicales 40-440
prise en charge chez l’adulte
Figure 4 Rotation de Figure 5 Position de
l’anse ombilicale : troisième « mésentère commun com-
stade. plet ».
Figure 6 Position de
« mésentère commun in-
complet ».
Troisième stade
Dernier temps de la rotation intestinale, il se produit durant la 11e et
le début de la 12e semaine. Il consiste en une dernière rotation
antihoraire de 90° (aboutissant donc à une rotation globale de 270°
par rapport à la position initiale). Une fois la rotation ainsi achevée,
l’intestin s’accole au péritoine pariétal postérieur primitif de façon
définitive à différents niveaux : au niveau du duodénum (fascia de
Treitz), de la racine du mésentère et des côlons ascendants et
descendants (fascias de Toldt) (Fig. 4). L’angle duodénojéjunal passe
sous l’axe mésentérique et se retrouve à gauche du rachis, tandis
que la jonction iléocæcale se place dans le flanc droit, à droite de
l’axe mésentérique supérieur ; la première anse jéjunale est alors
dans l’hypocondre gauche et la dernière anse iléale dans la fosse
iliaque droite avec, entre les deux, une longue racine du mésentère
accolée. Cette position correspond à la position intestinale dite
« normale » (seul le cæcum peut se mobiliser encore en venant se
positionner au cours de la première année de vie dans la fosse
iliaque droite).
¶ Anomalies de rotation
L’interruption de la rotation intestinale à 90° avec réintégration et
accolements aboutit à une position où l’ensemble de l’intestin grêle, l’intestin grêle se trouve « pédiculé » sur son axe vasculaire
y compris l’angle duodénojéjunal, se situe à droite du rachis, tandis mésentérique. Cette position, dite en « mésentère commun
que la totalité du côlon se retrouve à gauche. La racine du mésentère incomplet », est à haut risque de VTG du fait de la brièveté de la
s’étend donc de l’hypocondre droit à la fosse iliaque gauche (Fig. 5). racine du mésentère.
Cette position, dite en « mésentère commun complet », n’est pas à Les trois positions anatomiques dites « normale », en « mésentère
risque de VTG du fait de la longueur de la racine du mésentère. commun complet » et en « mésentère commun incomplet » sont les
L’interruption de la rotation intestinale à 180° aboutit à une position trois situations anatomiques les plus fréquentes, mais toutes les
où la jonction iléocæcale vient s’accoler dans la région sous- rotations intermédiaires entre 90° et 270° sont théoriquement
hépatique. Cet accolement, s’il est situé en regard du duodénum, possibles. Le risque de VTG est d’autant plus important que la
peut, inconstamment, provoquer une compression extrinsèque du racine du mésentère est courte du fait d’une rotation interrompue
premier ou du deuxième duodénum : on parle alors de « brides de autour de 180°. Enfin, signalons que plusieurs classifications des AR
Ladd » (Fig. 6). L’angle duodénojéjunal se situe, lui, à droite du ont été proposées dans la littérature, notamment par Snyder et
rachis, et de ce fait la première anse jéjunale et la dernière anse iléale Chaffin en 1954 [14] puis par Estrada en 1958. [15]
se trouvent très proches et toutes les deux à proximité de l’axe
mésentérique supérieur. De plus, il peut parfois exister un ANATOMIE
accolement congénital entre le méso de ces deux anses intestinales La connaissance de l’anatomie des AR est indispensable pour savoir
(« fusion mésentérique de Pellerin » [13]). Dans cette position à 180°, les reconnaître en peropératoire et pour comprendre les principes
la racine du mésentère est extrêmement courte et l’ensemble de de la cure chirurgicale.
3
Complications des anomalies embryologiques de la rotation intestinale :
40-440 Techniques chirurgicales
prise en charge chez l’adulte
Nous décrivons ici la forme anatomique classique de la rotation soit un infarctus veineux mésentérique, tout aussi redoutable que
intestinale à 180° dite « en mésentère commun incomplet » et ses l’infarctus artériel mais d’installation plus progressive, soit une ascite
variantes, en dehors de toute complication. parfois abondante, secondaire à une stase veineuse majeure. Enfin,
Classiquement, cette position se définit par : en cas d’accident subaigu ou chronique, il a été décrit l’apparition
d’une ascite chyleuse secondaire à l’obstruction isolée des vaisseaux
– un duodénum court s’interrompant après D2 avec un angle de lymphatiques dilatés.
Treitz à droite du rachis ;
Quel que soit le degré d’ischémie, le tube digestif peut rester
– un cæcum situé en position sous-hépatique et accolé au perméable car moins « vrillé » que le mésentère lui-même, ce qui a
rétropéritoine en regard du duodénum ; pour conséquences, d’une part de constater parfois un passage
– une racine du mésentère centrée par l’axe vasculaire mésentérique jéjunal de produit de contraste en cas d’opacification digestive haute,
supérieur et excessivement courte, donnant parfois un aspect quasi et d’autre part d’avoir une aération intestinale très variable sur les
pédiculé du mésentère. images radiologiques.
Dans le détail, l’angle de Treitz est souvent le siège de remaniements
fibreux, généralement en rapport avec des épisodes de torsions DIAGNOSTIC
incomplètes, parfois répétés et anciens. La première et la dernière
Le diagnostic de VTG peut se faire dans deux circonstances
anse grêle sont parfois solidarisées, soit directement, soit par leur
totalement différentes :
méso respectif, il s’agit alors d’une « fusion mésentérique »,
caractéristique de l’anomalie. L’adhérence du cæcum en regard du – en urgence, devant un tableau d’occlusion intestinale aiguë, voire
duodénum se fait, lui, par l’intermédiaire de fibres qui, lorsqu’elles un état de choc ;
compriment le duodénum au niveau du genu superius ou de D2,
– devant un tableau douloureux abdominal plus ou moins
prennent le nom de brides de Ladd : [11] s’il y a compression
chronique.
extrinsèque du duodénum, celle-ci est le plus souvent distale sur
D2, en aval de la papille. Enfin, l’accolement du grand épiploon sur Nous détaillons ici le tableau aigu.
le côlon transverse étant un phénomène postérieur à la rotation
intestinale, en cas d’AR, l’épiploon va s’accoler « où il peut » et se ¶ Symptomatologie
retrouve le plus souvent sur le côlon droit.
Le VTG peut être inaugural [16] mais est le plus souvent précédé par
Les variantes de cette forme classique à 180° peuvent correspondre une symptomatologie digestive récurrente comparable au tableau
à une rotation, soit légèrement supérieure, soit légèrement inférieure chronique décrit plus loin. Le tableau clinique est peu spécifique ; il
à 180°. peut être protéiforme et se révéler déroutant. Il s’agit le plus souvent
– Si la rotation est légèrement inférieure à 180° : l’angle de Treitz d’un syndrome occlusif haut associant des douleurs abdominales
reste à droite du rachis, en revanche le cæcum peut siéger dans parfois violentes à début brutal, des vomissements alimentaires puis
l’hémiabdomen gauche, voire être mobile et se projeter dans le flanc rapidement bileux, un arrêt des matières et des gaz retardé et un
ou la fosse iliaque gauche, faisant ainsi penser à un mésentère ballonnement abdominal inconstant mais parfois majeur. Il s’associe
commun complet à 90°. Il est alors essentiel, pour savoir s’il y a volontiers à ces signes une rectorragie ou une diarrhée sanglante, [17]
risque de VTG, de vérifier trois points : la mobilité éventuelle du une hématémèse qui doivent être interprétées comme des signes de
cæcum pouvant ramener celui-ci dans la région sous-hépatique ; la gravité mais qui parfois ne traduisent qu’une ischémie muqueuse
présence d’une fusion mésentérique au niveau de la première et de encore réversible, ainsi qu’une défense abdominale, reflet de la
la dernière anse grêle ; une brièveté de la racine du mésentère. Si ces souffrance intestinale. Parfois, les signes de choc peuvent être au
trois conditions sont retrouvées, l’AR est plus proche d’une forme à premier plan, en cas de volvulus suraigu ou d’une nécrose
180° que d’une forme à 90° : elle est, de ce fait, à risque de VTG et intestinale déjà constituée : tachycardie, hypotension artérielle, voire
doit donc être traitée préventivement. collapsus, anurie, marbrure, angoisse.
– Si la rotation est légèrement supérieure à 180° : l’angle de Treitz
¶ Imagerie
peut se situer, soit à droite du rachis, soit sur la ligne médiane. Le
cæcum se situe, lui, dans l’hypocondre droit ou le flanc droit mais le
Abdomen sans préparation (ASP)
plus souvent libre et c’est donc le côlon descendant qui se retrouve
accolé au rétropéritoine en regard du duodénum. Néanmoins, la Extrêmement variable d’un cas à l’autre, l’ASP ne montre aucun
racine du mésentère est très courte et le risque de VTG bien réel : en signe spécifique de VTG. En revanche, il est rarement normal et
cas de volvulus, le cæcum, voire le côlon ascendant peuvent alors régulièrement interprété comme « inhabituel » ou « discordant ». En
être entraînés avec la totalité du grêle. cas de distension digestive, celle-ci est souvent majeure au point
qu’il est parfois difficile de distinguer s’il s’agit de côlon ou de grêle.
Parfois, l’orientation des anses distendues est franchement
PHYSIOPATHOLOGIE incompréhensible, faisant suspecter un obstacle mécanique. La
Le VTG est la complication des AR à 180° ou proches de 180° et distension est d’ailleurs d’autant plus importante que l’épisode aigu
plus la racine du mésentère est courte, plus le VTG risque de se a été précédé par une symptomatologie récurrente d’épisodes
produire précocement dans la vie. C’est la raison pour laquelle plus subocclusifs. Enfin, l’ASP peut également être le siège d’une grisaille
de la moitié des VTG sur AR se produisent dans la première semaine diffuse avec peu ou prou de gaz intestinaux, essentiellement dans
de vie et environ 80 % de la totalité des VTG dans le premier mois les cas de volvulus subaigu avec ascite.
de vie.
L’arrivée du bol alimentaire, en alourdissant la masse intestinale, Transit œso-gastro-duodénal (TOGD)
déséquilibre ainsi le mésentère et entraîne sa torsion. Le volvulus se Examen de référence en pédiatrie pour les AR, [2, 18, 19] chez l’adulte,
produit classiquement dans le sens horaire, [5] mais certaines le TOGD n’est qu’exceptionnellement demandé en cas de syndrome
publications insistent sur le fait qu’il peut exceptionnellement se occlusif aigu. Et lorsqu’il est prescrit dans le cadre d’un bilan pour
produire dans le sens antihoraire. [13] vomissements, celui-ci n’est pas toujours analysé jusqu’à l’angle de
L’ischémie qui résulte du volvulus peut être, soit aiguë en cas Treitz…Néanmoins, lorsqu’un TOGD est réalisé, il permet de faire
d’ischémie artérielle, la torsion du mésentère étant au moins d’un le diagnostic d’AR en montrant un arrêt du produit de contraste à
tour de spire, soit subaiguë en cas d’ischémie veineuse, lorsque la droite du rachis avec le plus souvent une image en « bec de flûte »
torsion du mésentère est peu serrée et généralement inférieure à un ou plus rarement un passage tardif de produit de contraste dans un
tour de spire. Dans ce cas, il peut alors se produire avec le temps jéjunum en position non anatomique (soit médian, soit dans
4
Complications des anomalies embryologiques de la rotation intestinale :
Techniques chirurgicales 40-440
prise en charge chez l’adulte
l’hypocondre droit). Un aspect du jéjunum en « tire-bouchon » peut Attention : la présence d’une cicatrice abdominale ne permet en
même être retrouvé. [20] Notons que les clichés de profil sont aucun cas d’éliminer le diagnostic de VTG, tant il est vrai que
essentiels pour identifier formellement l’angle de Treitz. certains patients ont déjà pu « bénéficier » d’une appendicectomie,
voire d’une laparotomie pour dévolvuler le grêle une première fois
Lavement aux hydrosolubles (LHS) sans qu’une cure adéquate de l’AR n’ait été réalisée dans le même
S’il est réalisé, en cas de VTG, le LHS montre alors un cadre colique temps opératoire.
incomplet avec un cæcum (identifié formellement lorsque Attention : en cas de signes de choc présents d’emblée, il faut savoir
l’appendice est opacifié) anormalement haut, [21] le plus souvent renoncer au scanner pour procéder à une laparotomie exploratrice
sous-hépatique. Parfois, lorsque le côlon droit est entraîné par le en extrême urgence.
volvulus, il peut alors exister une image d’arrêt de produit de
contraste de type « bec de flûte » au niveau du côlon transverse.
TRAITEMENT
Échographie Quelle voie d’abord utiliser ? Comment reconnaître la pathologie en
Souvent gênée par les gaz intestinaux, l’échographie n’est pas peropératoire ? Quels sont les temps opératoires de la cure
toujours contributive. Cependant, elle peut montrer des anses chirurgicale selon les principes de Ladd ? Quels gestes doivent être
digestives pleines de liquide, contrastant ainsi avec un ASP grisâtre à tout prix évités ? Que doit-on faire lorsque le grêle ne semble pas
ou peu aéré, signant l’occlusion ; montrer un épanchement intra- récupérer ? Quand doit-on appeler à l’aide ?
abdominal en rapport avec, soit une ischémie aiguë, soit une gêne Telles sont les questions que doit se poser tout chirurgien digestif
au retour veineux, soit une ascite chyleuse. Enfin, l’échographie peut confronté à un VTG chez l’adulte.
au mieux montrer la vrille du mésentère sous forme d’une image
médiane en cocarde, tissulaire, traversée de vaisseaux et ¶ Quelle voie d’abord utiliser ?
correspondant au signe du tourbillon décrit au scanner. L’examen Devant un tableau aigu, la laparotomie médiane doit être choisie de
peut être optimisé par la réalisation d’un doppler des vaisseaux première intention.
mésentériques qui met alors en évidence une verticalisation des
La voie d’abord cœlioscopique sera contre-indiquée de principe en
vaisseaux mésentériques supérieurs, voire leur inversion, avec une
raison de la difficulté technique majeure que constitue la détorsion
veine mésentérique supérieure située à gauche de son artère. [22]
de la masse de l’intestin grêle, fragilisé par l’occlusion.
Exceptionnellement, on peut voir un arrêt du flux sanguin dans
l’artère mésentérique supérieure, alors de mauvais pronostic.
¶ Reconnaître la pathologie en peropératoire
Tomodensitométrie Le VTG est identifié sur le fait que le grêle est intéressé en totalité
Le scanner avec injection est l’examen de référence chez l’adulte par le volvulus et se trouve, une fois extériorisé, « pédiculisé » sur
pour le diagnostic de VTG sur AR. [16, 20, 23] En effet, le signe du son mésentère. L’inspection du mésentère révèle alors la présence
« tourbillon » décrit par Fischer [24] en 1981 sous le nom de whirl-like d’un ou plusieurs tours de spires. À ce stade, il est important de
pattern, semble être pathognomonique du VTG pour la majorité des noter le sens du volvulus (le plus souvent horaire), le nombre
auteurs. Il correspond à la vrille du mésentère visible en position approximatif de tours de spires et la coloration du grêle.
médiane, en avant de l’aorte et au niveau de l’artère mésentérique L’AR est identifiée par la position non anatomique du cæcum (et
supérieure, autour de laquelle vient s’ « enrouler » le jéjunum ses éventuelles adhérences en regard du duodénum), la position de
proximal. Les clichés avec injections permettent de visualiser la l’angle de Treitz à droite du rachis et le défaut d’accolement du
verticalisation ou l’inversion des vaisseaux mésentériques supérieurs mésentère dont la racine apparaît toujours courte.
avec une veine venant se placer au-dessus ou à gauche de l’artère. [25]
En revanche, l’AR est plus difficile à diagnostiquer sur le simple ¶ Principes de la procédure de Ladd
scanner avec injection, ce qui peut s’avérer essentiel lorsque le signe
Bien que certains auteurs aient proposé plusieurs variantes
du tourbillon fait défaut en cas de volvulus peu serré. C’est la raison
techniques, comme la fixation du cæcum [26] ou du mésentère, [27] la
pour laquelle il est préférable d’associer une opacification haute au
procédure de Ladd reste à ce jour le traitement de référence du VTG
cours du scanner. [24] Idéalement, l’opacification se fera par la sonde
sur AR aussi bien chez l’adulte que chez l’enfant. Cette procédure
gastrique et en tout début d’examen, pour laisser le temps au
consiste en une réduction du volvulus, suivie d’une mise en
produit de franchir le pylore. L’absence de passage du duodénum
mésentère commun complet de l’intestin pour éviter toute récidive
dans la pince aortomésentérique et la stagnation du produit de
du volvulus.
contraste à droite de la ligne médiane signent alors l’AR.
Elle peut être décomposée en cinq temps opératoires successifs.
Artériographie
Détorsion
Bien que décrit, cet examen long, coûteux et invasif ne doit plus être
retenu dans cette indication. Le premier temps consiste à extérioriser prudemment la totalité de
la masse du grêle de la cavité abdominale puis à procéder à la
¶ Conduite à tenir diagnostique réduction du volvulus (Fig. 7). Pour cela, le grêle doit être
progressivement soulevé à deux mains sans traction excessive et
En pratique, chez l’adulte, le diagnostic préopératoire doit ainsi être
immédiatement placé dans des champs chauds et humides. Cette
au mieux réalisé à l’aide d’un scanner avec injection et opacification
manœuvre permet d’une part d’inspecter le mésentère en
haute. Pour cela, il est indispensable de demander cet examen en
authentifiant les tours de spires et leur sens horaire (ou
urgence devant tout syndrome douloureux abdominal auquel
exceptionnellement antihoraire) et d’autre part de procéder à la
s’associe l’un des éléments suivants :
réduction du volvulus en faisant faire à la masse de l’ensemble des
– un syndrome occlusif haut quel qu’il soit (a fortiori si le patient anses grêles soulevées un ou plusieurs demi-tours successifs dans le
ne présente pas de cicatrice abdominale) ; sens inverse du volvulus. La progression de la réduction par demi-
– un passé digestif fait de symptômes postprandiaux récurrents, tours successifs a pour avantages de permettre à l’opérateur de
parfois anciens ; vérifier qu’elle se fait dans le bon sens et de lui permettre de la
poursuivre jusqu’à réduction complète, sans laisser une torsion
– une étiquette diagnostique d’affection digestive non ou mal partielle qui pourrait secondairement entraîner un infarctus veineux
documentée ; à bas bruit. La qualité de la réduction peut alors être vérifiée par la
– un ASP ininterprétable ou discordant par rapport au tableau bonne recoloration du grêle et la palpation d’un pouls mésentérique
clinique. distal.
5
Complications des anomalies embryologiques de la rotation intestinale :
40-440 Techniques chirurgicales
prise en charge chez l’adulte
Figure 7 Volvulus total
du grêle. 1. Sens de la tor-
sion.
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Complications des anomalies embryologiques de la rotation intestinale :
Techniques chirurgicales 40-440
prise en charge chez l’adulte
¶ Doit-on appeler à l’aide ? …Et qui ?
Figure 9 A. Libération
de l’angle de Treitz. Lorsque le diagnostic a pu être évoqué en préopératoire, on a
B. Positionnement en généralement le temps de contacter un chirurgien-pédiatre et de
mésentère commun programmer une intervention avec son assistance. Dans l’urgence et
complet. lorsque le chirurgien d’adulte se voit confronté à cette situation pour
la première fois, toute incompréhension ou hésitation doit conduire
à interrompre l’intervention et à contacter par téléphone un collègue
pédiatre pour s’informer. Cet appel doit être fait avant toute
« section de bride » car il serait dramatique de sectionner le pédicule
mésentérique. Très fréquemment, les conseils des collègues pédiatres
avertis conduiront à limiter le geste et en aucun cas, il ne faudra
chercher à reconstituer une anatomie « normale ».
¶ Diagnostic
Symptomatologie
Le plus souvent, il s’agit d’une symptomatologie digestive à type
d’occlusion haute incomplète habituellement récurrente. Cette
symptomatologie peut remonter à quelques mois, voire à quelques
années et jusqu’à l’enfance dans certains cas. [17] Les symptômes les
plus fréquents sont des ballonnements abdominaux postprandiaux,
les douleurs abdominales, des borborygmes « bruyants », voire des
clapotis plusieurs heures après les repas ou l’ingestion de boissons.
La période de digestion peut alors être marquée par une diarrhée
profuse soulageant généralement le patient, ou bien des
vomissements alimentaires également salutaires. Une ascite est
parfois associée. La plupart du temps, les patients ont
progressivement d’eux-mêmes éliminé de leur alimentation certains
aliments riches en fibres ou certaines boissons gazeuses par exemple.
Enfin, il est rare chez ces patients d’observer un surpoids en rapport
avec une alimentation hypercalorique…
Lorsque ces prodromes sont présents, il n’est pas rare alors que ces
patients soient porteurs d’une « étiquette » diagnostique pouvant
dramatiquement égarer le clinicien en cas de VTG avéré. [28] La
plupart du temps, ces diagnostics ne sont pas ou peu documentés et
souvent anciens. Ainsi retrouvons-nous dans la littérature [16, 29, 30, 31]
des cas de patients ayant été suivis préalablement pour « gastrite
chronique », « maladie de Crohn », « pancréatite aiguë récidivante »,
« colite spasmodique », « migraine intestinale » (sic !)… De façon
Il ne faut pas non exceptionnelle, au moment du VTG, on s’aperçoit que le patient
Effectuer une manœuvre de réduction du volvulus dans le mauvais a déjà été « appendicectomisé », ce qui peut détourner le diagnostic
sens, qui peut temporairement aggraver l’ischémie intestinale. vers un problème de bride postopératoire… La voie d’abord utilisée
Réduire insuffisamment le volvulus, ce qui peut entraîner est d’ailleurs souvent « inhabituelle », de type McBurney élargi,
secondairement une ischémie, voire un infarctus veineux de la Jalaggier…Quant aux comptes-rendus, une fois récupérés, on
totalité du territoire mésentérique supérieur… constate souvent que l’appendicite n’était pas si « aiguë » ou même
Prendre le pédicule mésentérique supérieur pour une bride qu’un « mésentère commun » avait été signalé…
congénitale responsable du volvulus.
Imagerie
Tenter de rétablir l’anatomie « normale » de l’intestin par des
manœuvres de décroisement avec résections-anastomoses, en Comme dans les formes aiguës, le diagnostic repose désormais
laissant en place la torsion du mésentère… avant tout sur le scanner avec injection et opacification haute. Les
autres examens d’imagerie apportent sensiblement les mêmes
Une fois l’intestin dévolvulé, tenter coûte que coûte de le placer en
informations que devant un tableau aigu.
position anatomique dite « normale » à 270°, le risque étant alors
d’une part de voir l’intestin se repositionner spontanément à 180° ¶ Traitement
et d’autre part de créer une obstruction duodénale extrinsèque au
niveau de la pince aortomésentérique. Voie d’abord
Se contenter de réduire le volvulus sans traiter l’AR, exposant ainsi L’abord chirurgical par voie médiane est recommandé ; cependant,
le patient à une récidive certaine. l’abord cœlioscopique peut être discuté pour les chirurgiens rompus
à cette technique. [32]
7
Complications des anomalies embryologiques de la rotation intestinale :
40-440 Techniques chirurgicales
prise en charge chez l’adulte
En cas d’abord chirurgical classique : les manœuvres de détorsions correspondant ainsi à une position « en miroir » du mésentère
suivent les mêmes principes qu’en phase aiguë. commun complet avec, cependant, un duodénum en avant des
En cas d’abord cœlioscopique, l’exposition optimale est la suivante : vaisseaux mésentériques.
l’opérateur se place à gauche du patient, la colonne étant placée à Enfin, dans certains cas, la totalité du grêle s’étant réintégrée avant
l’épaule droite. le côlon, le mésocôlon peut l’envelopper en totalité ; ce qui
Un trocart d’optique de 10 mm est introduit par voie d’open à travers expliquerait le mécanisme de formation des exceptionnelles hernies
l’ombilic, la réalisation du pneumopéritoine à l’aide de l’aiguille de paraduodénales droites et gauches [35] dont l’origine congénitale est
Vriess est contre-indiquée en raison de la distension intestinale fortement suspectée sur le fait qu’elles intéressent toujours la totalité
possible et de la position aléatoire du cadre colique. Le du grêle et que le grand épiploon n’est jamais retrouvé en
pneumopéritoine est réalisé avec une pression de 15 mm de mercure, intraherniaire. [36] Dans le cas de ces hernies paraduodénales, le cadre
puis deux trocarts opérateurs de 5 mm sont placés dans colique et le cadre duodénal sont en place, en revanche la racine du
l’hypocondre gauche et dans la fosse iliaque droite sous contrôle de mésentère peut s’avérer courte dans la forme gauche.
la vue.
¶ Hyper-rotations
La table est inclinée avec du roulis sur la gauche, de telle façon que
la région duodénale puisse être parfaitement exposée. Pour ce faire, Les hyper-rotations correspondent à une migration du cæcum dans
il est parfois nécessaire d’introduire un troisième trocart de 5 mm le pelvis, trop précoce et avant tout accolement, voire, à l’extrême, à
dans l’épigastre. une réascension du cæcum dans l’hémiabdomen gauche, en
Par voie cœlioscopique, le grêle ne pouvant être mobilisé en direction de l’angle colique gauche. [37] Cependant, le cadre duodénal
monobloc, celui-ci doit être manipulé avec beaucoup de précaution ainsi que le cadre colique sont toujours en place.
et déroulé progressivement dans le sens inverse de la torsion en
commençant par le jéjunum proximal et jusqu’à réduction complète
COMPLICATIONS
de la torsion du mésentère.
Une fois le volvulus détordu, les différents temps de la procédure Parmi toutes ces formes exceptionnelles d’AR, il n’est pas logique
de Ladd seront réalisés par voie cœlioscopique en suivant la même de rencontrer une situation à risque similaire à celle de l’AR à 180°,
chronologie qu’à ciel ouvert. à savoir un mésentère très court et à proximité de la première et de
la dernière anse grêle, sauf peut-être dans un sous-groupe de
rotation inverse à 90°, lorsque le cæcum reste en avant du
duodénum tandis que la dernière anse grêle reste, elle, en arrière
Autres formes anatomiques des vaisseaux mésentériques (où dans ce cas, il existerait un risque
d’anomalies de rotation théorique de VTG, non retrouvé dans la littérature…).
Autrement dit, les complications que l’on peut rencontrer dans ces
Les autres formes d’AR sont encore plus exceptionnelles chez formes de rotation inverse ou d’hyper-rotations sont plutôt de trois
l’adulte que la forme dite « de mésentère commun incomplet » à ordres :
180° que nous venons d’étudier. Il s’agit de l’exceptionnelle absence
totale de rotation, des rotations inversées et des hyper-rotations. – soit un obstacle mécanique par compression extrinsèque d’un
segment intestinal sur lequel est venu s’accoler de façon aberrante
un autre segment intestinal ;
PATHOGÉNIE
– soit un volvulus de la région iléocæcale, libre ou trop allongée ;
¶ Absence totale de rotation – soit enfin, l’exceptionnelle hernie paraduodénale droite ou
gauche [33] dont le mécanisme d’occlusion n’est autre qu’une
Tout à fait exceptionnelle, l’absence de rotation intestinale se
plicature intestinale au niveau du collet herniaire, sans ischémie
présente sous la forme d’un mésentère vertical avec un intestin non
intestinale. [36]
accolé qui ne se rencontre qu’en cas de hernie diaphragmatique,
d’omphalocèle ou de laparoschisis. [5] Exclusivement rencontrées en Dans tous les cas, malgré la gravité potentielle de ces complications,
période néonatale, elles sont donc ici hors sujet. le pronostic reste meilleur du fait du caractère localisé de l’ischémie
intestinale, contrairement au VTG qui intéresse, lui, la totalité du
¶ Rotations inverses territoire mésentérique supérieur.
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Complications des anomalies embryologiques de la rotation intestinale :
Techniques chirurgicales 40-440
prise en charge chez l’adulte
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9
Entérostomies
Résumé
Les entérostomies résultent de l'ouverture à la peau d'un segment de l'intestin
grêle. Les jéjunostomies siègent sur le grêle proximal ; elles ont pour but
l'alimentation d'un patient dont le circuit digestif est interrompu, fragile (résection
d'oesophage, intervention sur le duodénum, brûlure caustique) ou empêche un
apport calorique suffisant. Les iléostomies, sur le grêle terminal, assurent une
dérivation des liquides digestifs. Elles sont latérales ou terminales. Leur but est la
protection d'une anastomose sous-jacente ou l'interruption complète, définitive ou
non, du circuit digestif.
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JÉ JUNOSTOMIES
Le trocart est retiré. Une bourse de fil résorbable (déc. 2) est confectionnée au
point de pénétration du trocart. La bourse est serrée autour de l'orifice de
pénétration du cathéter. Un enfouissement du cathéter sur 3 à 4 cm est ensuite
effectué par un surjet chargeant la séreuse du grêle (fig. 1 B).
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ILÉ OSTOMIES
Elles n'ont pas habituellement pour but l'alimentation puisque l'absorption digestive
est à sa phase finale à ce niveau. Elles peuvent éventuellement être utilisées, en
cas de double stomie, pour une instillation de nutriments ou une réinstallation du
liquide digestif chez des patients dont le tube digestif en amont est extrêmement
court, ou avant un rétablissement de la continuité.
Principes généraux
Une iléostomie est un handicap important qu'il faut s'efforcer de minimiser par une
excellente technique qui a pour but de limiter le débit, de faciliter l'appareillage et
d'éviter les complications pariétales que sont l'éventration péristomiale ou le
prolapsus de la stomie. Le choix du siège de l'iléostomie est fait en préopératoire le
malade étant examiné couché puis debout. Le siège de l'iléostomie répond à des
critères précis. Elle doit être positionnée dans une région de l'abdomen facile à
appareiller, à distance d'un relief osseux, d'un pli de flexion gênant. Elle peut être
difficile à réaliser chez un sujet obèse ou chez un patient présentant des zones
d'éventration. Le siège électif est en dehors de la gaine du muscle grand droit, à
mi-distance entre l'ombilic et l'épine iliaque antérosupérieure, à l'emplacement du
point de Mac Burney à droite et de son équivalent à gauche (fig. 2 A). Il peut être
à travers le muscle grand droit, surtout en cas d'iléostomie terminale, pour
minimiser le risque d'éventration [1].
Le grêle est saisi et extériorisé, à travers l'orifice réalisé, par une pince peu
traumatique (Babcock, Duval...). Cette pince dirige le grêle hors de l'abdomen
pendant que la main abdominale le pousse. Enfin, il est important que le méso ne
subisse pas de traction excessive (fig. 2 C).
Le grêle ne doit pas être fixé à la paroi musculaire sous peine de léser la paroi
iléale. Les berges iléales sont toujours ourlées à la peau en fin d'intervention. Il est
important que la muqueuse du grêle soit bien affrontée aux berges cutanées afin
d'une part de réaliser une étanchéité du montage et d'autre part de ne pas
entraîner d'augmentation du débit de l'iléostomie par irritation péritonéale. La
fixation est assurée par des points séparés de fil monobrin (déc. 2) non résorbable
afin d'éviter tout granulome au pourtour de la stomie.
Iléostomies latérales
Elle permet une exclusion totale du segment d'aval ainsi qu'un retournement de la
paroi du grêle d'amont, facilitant l'appareillage. Cette iléostomie vise à protéger
une anastomose digestive en aval (anastomose iléorectale ou surtout iléoanale en
cas de colectomie totale). Cette technique nécessite, pour pouvoir être réalisée de
façon satisfaisante, une paroi iléale peu modifiée.
L'anse grêle est choisie en fonction de deux critères : montée facile à la peau et
courte distance entre l'iléostomie et l'anastomose digestive d'aval. Cette distance
est d'environ 30 cm. La partie afférente de l'anse grêle est positionnée du côté
inférieur de l'incision afin d'étaler correctement l'anse en amont de l'iléostomie.
Pour maintenir le grêle extériorisé hors de l'abdomen, il est utilisé une baguette de
plastique de 5 à 6 cm de long ce qui nécessite habituellement de raccourcir les
baguettes du commerce (baguette de Larget®, laboratoires Porgès). Cette baguette
est positionnée dans un tunnel réalisé aux ciseaux en avant de l'aponévrose du
grand oblique, sous la graisse sous-cutanée (fig. 3 A). Ce tunnel, situé de part et
d'autre de l'incision, est perpendiculaire à l'ouverture musculoaponévrotique. A
chaque extrémité de ce tunnel, un fil à résorption lente (déc. 3), est passé dans
l'aponévrose ; il sert à fixer temporairement la baguette en le passant dans
l'oeilleton de son extrémité (fig. 3 B). La baguette repose donc en
préaponévrotique, elle est passée à travers le mésentère, sous le grêle (fig. 3 C).
Le tunnel et donc la baguette sont décalés vers le segment d'aval de l'iléon,
réalisant un léger effet de compression du segment distal, alors qu'on favorise
l'expansion du segment proximal. Cette striction reste limitée et est appréciée par
l'exploration digitale et par l'aspect du grêle qui ne doit en aucun cas se cyanoser.
Elle est à éviter et n'est utilisée qu'en cas de difficultés d'extériorisation du grêle
empêchant de réaliser une iléostomie avec retournement (lésions majeures de
péritonite, obésité très importante) ou éventuellement l'extériorisation simple d'une
perforation de petit diamètre.
Des lésions septiques majeures, peuvent imposer de placer la baguette, non pas en
sous-cutané, mais sur la peau, pour ne pas inoculer la paroi. L'appareillage est
alors difficile, l'orifice iléal affleurant la surface cutanée. Il peut être utile d'utiliser
des baguettes très courtes, voire de simples drains de caoutchouc fixés à la peau
[9]
pour faciliter l'appareillage.
Fermeture d'iléostomie
Après résection d'une collerette cutanée circonscrivant la stomie, mais présentant
deux angles très aigus pour faciliter la fermeture secondaire, l'anse grêle est
disséquée jusqu'en intrapéritonéal. La baguette sous-cutanée est facilement
repérée et retirée. Il est ensuite réalisé une courte résection du grêle, puis une
anastomose terminoterminale par deux surjets de fil résorbable (déc. 1). La paroi
est refermée plan par plan. Habituellement la peau peut être d'emblée fermée par
quelques points séparés.
Iléostomies terminales
L'indication essentielle est la maladie de Crohn quand elle impose une colectomie
totale avec proctectomie.
Le grêle est habituellement passé à travers le muscle grand droit, près de son bord
externe, habituellement 3 à 4 cm sous l'ombilic. Lors du temps initial de résection,
le grêle a été temporairement fermé afin de ne pas souiller la paroi. Le plus simple
est d'utiliser pour cela une pince à agrafage mécanique. Une pince de Duval saisit
la berge externe du péritoine pariétal au niveau du décollement pariétocolique, à
proximité de l'orifice d'iléostomie (fig. 4 A). Le péritoine est décollé au doigt
jusqu'à retrouver l'ouverture de la gaine du grand droit (fig. 4 B). L'ensemble de
cette dissection permet de réaliser un trajet en baïonnette qui permet d'éviter un
prolapsus de la stomie.
Le grêle doit dépasser la surface cutanée d'environ 4 à 5 cm. Il doit rester dans
cette position spontanément, sans qu'il soit nécessaire de maintenir une traction.
La péritonisation est effectuée à points séparés de fil résorbable (déc. 2) (fig. 4 C).
Elle n'a pas pour but de maintenir le grêle, mais uniquement d'éviter une
incarcération d'anse.
La recoupe de l'iléon extériorisé porte sur quelques millimètres. Elle est débutée
par le bord antimésentérique (fig. 4 D).
L'aspirateur est préparé pour éviter dans ce temps toute souillure de la paroi par du
liquide digestif accumulé en amont de la fermeture temporaire. Il est effectué un
retournement de la paroi du grêle à l'aide d'un dissecteur mousse, en commençant
par le côté antimésentérique (fig. 4 E, F).
La position respective des deux orifices d'iléostomie est importante : si les stomies
sont trop éloignées, cela complique le temps secondaire de rétablissement de la
continuité digestive. Il est donc souhaitable de placer les deux extrémités du grêle
dans la même région de l'abdomen. Ceci n'est pas toujours possible en urgence,
l'infection pouvant entraîner une rétraction mésentérique importante. Lorsque les
deux extrémités peuvent être amenées du même côté de l'abdomen, plusieurs
modalités sont possibles, les deux extrémités iléales pouvant être extériorisées par
deux orifices distincts ou par le même orifice.
Dans l'idéal, on réalise deux incisions horizontales d'environ 3 cm, du même côté
de l'abdomen, l'une au-dessus de l'autre, écartées d'environ 5 à 6 cm,
habituellement en dehors de la gaine du droit. Il faut veiller à ne pas laisser de
brèche péritonéale pouvant entraîner une occlusion par hernie interne entre les
deux extrémités grêliques. Il est ainsi nécessaire de fixer le mésentère par
quelques points à la paroi péritonéale entre les deux orifices (fig. 5). Au niveau de
l'extrémité du grêle d'amont, un petit retournement est réalisé afin de faciliter
l'appareillage. Le rétablissement de continuité de ce type de double iléostomie
nécessite une désinsertion des deux jambages et leur extériorisation par l'un des
orifices pariétaux agrandi pour permettre une anastomose hors du ventre.
L'avantage de ce montage est une grande sécurité dans l'extériorisation digestive,
par contre elle est source de difficultés de rétablissement de continuité et parfois de
problème d'appareillage si les deux orifices sont à moins de 5 cm l'un de l'autre.
Ce sont des iléostomies en canon de fusil où les deux extrémités du grêle sont
accolées et extériorisées par la même ouverture. Il est impératif d'éviter toute
torsion du grêle et de bien positionner les deux anses afférente et efférente.
Habituellement l'anse afférente est située à la partie inférieure de l'orifice. Elle est
extériorisée sur 3 cm, puis retournée comme dans une iléostomie terminale simple,
alors que l'anse efférente affleure la peau. Le segment de grêle d'aval peut être
ouvert, (ourlé à la peau en dehors et solidarisé à l'anse d'amont en dedans [17]) ou
laissé fermé [14] ; l'inconvénient de cette dernière technique est de ne pas
permettre d'accès au segment d'aval du grêle et donc d'empêcher toute
réinstillation secondaire. L'avantage est la confection d'un seul orifice à appareiller
et la facilité de rétablissement de continuité ultérieure.
La sonde est laissée en place dans le réservoir pendant une semaine. Ce n'est
qu'après ce délai qu'il est effectué des épreuves de clampage de durée croissante.
Vers le 12e jour, la sonde est retirée et il est réalisé des sondages multiples
quotidiens. Dans les mois suivant l'intervention, le réservoir augmente
progressivement de volume et dans les meilleurs cas, il n'est nécessaire d'effectuer
que trois sondages quotidiens.
Variantes : plusieurs artifices ont été proposés pour éviter cette complication :
Références
Fig 1 :
Fig 1 :
Fig 2 :
Iléostomies : généralités
B. Incision aponévrotique
Fig 3 :
Fig 3 :
Fig 4 :
Fig 4 :
D. Recoupe du grêle
E. Retournement
Fig 5 :
Fig 5 :
Fig 6 :
Fig 6 :
D. Positionnement du réservoir.
¶ 40-445
Les hernies internes de l’adulte correspondent à une issue d’intestin à travers un orifice intra-abdominal
congénital acquis. Malgré leur rareté, leurs caractéristiques anatomiques et cliniques sont variées. Trois
groupes de hernies internes peuvent être distingués au plan anatomique : hernies à travers un orifice
naturel, dont la hernie à travers l’hiatus de Winslow ; hernies à travers un orifice anormal, regroupant les
hernies transépiploïques, transmésentériques, transmésocoliques et à travers le ligament large ; hernies
rétropéritonéales, principalement paraduodénales gauches ou droites, péricæcales, intersigmoïdiennes et
supravésicales. L’épidémiologie, la pathologie, les aspects cliniques, le diagnostic, les complications et le
traitement chirurgical sont décrits pour chaque type.
© 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Physiopathologie
Il existe essentiellement deux variétés de hernies à travers
l’hiatus de Winslow : le type I (Fig. 1), qui correspond à une
hernie isolée de l’intestin grêle et représente environ deux tiers
des cas ; le type II (Fig. 2), qui correspond à une hernie
■ Introduction comprenant l’iléon distal, le cæcum et le côlon ascendant, et
représente un tiers des cas. [5] Certains ont décrit un type III
Les hernies rares de l’abdomen sont de localisation très (côlon transverse) et un type IV (vésicule biliaire), cependant
variable. Néanmoins, elles ont pour similitude de toutes beaucoup plus rares. [6]
correspondre à une issue d’intestin à travers un orifice abdomi-
nal. De ce fait, elles prennent alors le nom de hernies internes. Diagnostic
Trois groupes de hernies internes peuvent être distingués, Le tableau clinique est celui d’un syndrome occlusif aigu
suivant que celles-ci se développent soit dans un orifice intra- comprenant toujours des douleurs épigastriques associées à des
abdominal naturel, soit dans un orifice intra-abdominal anor- vomissements [7] et parfois à une voussure épigastrique. [2] La
mal, soit dans un espace rétro- ou sous-péritonéal. Enfin, leur biologie peut révéler une hyperglycémie qui serait en rapport
rareté est attestée par le fait que l’ensemble des hernies avec une compression aiguë de la veine porte, empêchant tout
Traitement
Voie d’abord
Habituellement, la voie médiane est préconisée devant un
syndrome occlusif aigu, en l’absence de diagnostic préopéra-
toire. La voie cœlioscopique, bien que non rapportée dans la
littérature, peut néanmoins être envisagée à visée diagnostique,
voire thérapeutique, essentiellement en cas d’étranglement
herniaire peu serré, permettant une réintégration de l’intestin
sans difficulté. Cependant, l’hiatus de Winslow, dans tous les
cas, reste difficile d’accès en cœlioscopie.
Diagnostic peropératoire
L’hiatus étant généralement inaccessible à la vue, le diagnos-
tic est fait sur la conjonction d’un estomac qui apparaît projeté
vers l’avant par une masse intestinale située dans l’arrière-
cavité des épiploons, et la présence anormale d’anses intestina-
les ascensionnées et fixées vers la région du hile hépatique.
Manœuvres de réduction
La réduction est réalisée le plus souvent par simple traction.
Celle-ci doit toujours être douce et prolongée. Sinon, lorsque
l’intestin hernié ne peut être réduit ainsi, plusieurs manœuvres
sont envisageables. La dilatation au doigt, ainsi que le débride-
ment de l’hiatus ont été proposés, [5] mais ne sont plus recom-
mandés aujourd’hui. En revanche, deux manœuvres paraissent
moins dangereuses : le décollement duodénopancréatique selon la
Figure 1. Hernie de type I à travers l’hiatus de Winslow. manœuvre de Kocher, [9] ou bien l’ouverture de l’arrière-cavité des
épiploons par décollement coloépiploïque ou section du ligament
gastrocolique. [5] En cas de nécrose intestinale, le traitement
chirurgical répond aux critères habituels de la résection.
Traitement préventif
Pour éviter toute récidive, il est essentiel de replacer l’intestin
et le grand épiploon en position anatomique. L’obturation de
l’hiatus de Winslow par suture directe n’est cependant pas
recommandée, d’une part en raison des risques de plaie vascu-
laire, voire de thrombose de la veine porte, [9] et d’autre part du
fait que celui-ci s’obture le plus souvent spontanément, en
raison de la réaction inflammatoire locale postopératoire. [2]
Enfin, certain proposent de libérer l’angle colique droit pour le
fixer à la paroi abdominale antérieure afin d’interdire au grêle
tout accès à l’étage sus-mésocolique.
Épidémiologie
Les hernies transépiploïques représentent de 1 à 4 % de la
totalité des hernies internes. [10] Parmi les différentes localisa-
tions possibles, la hernie isolée à travers le petit épiploon est la
plus exceptionnelle. Ces hernies se révèlent le plus souvent à
l’âge adulte et n’ont été qu’exceptionnellement décrites chez
Figure 2. Hernie de type II à travers l’hiatus de Winslow. l’enfant. [11] Enfin, le sex-ratio serait proche de 1.
Physiopathologie
passage d’insuline dans la circulation générale. [2] Le cliché Concernant le grand épiploon, la hernie peut se situer soit au
radiographique de l’abdomen sans préparation (ASP) peut niveau du ligament gastrocolique [12] (Fig. 3), soit au niveau du
montrer un refoulement de la poche à air gastrique vers la tablier épiploïque [13] (Fig. 4). Lorsque le defect intéresse le
gauche avec la présence, parfois, de niveaux hydroaériques tablier épiploïque, il est plus souvent situé à la partie droite de
grêliques en regard de l’estomac. [2] Le diagnostic peut être ce dernier. [5] Le grêle vient alors s’incarcérer d’arrière en avant,
confirmé soit par un transit du grêle, [7] soit par un scanner avec pour venir parfois refouler en dedans le côlon, en se plaçant
injection qui montre alors la présence d’intestin grêle dans dans la gouttière pariétocolique droite. [13] Lorsque le defect
l’arrière-cavité des épiploons, ainsi que des vaisseaux mésenté- intéresse le ligament gastrocolique, le grêle pénètre alors dans
riques distaux sous tension passant au travers de l’hiatus de l’arrière-cavité des épiploons. Parfois le petit épiploon est
Winslow. [2] Dans la littérature, environ 10 % des cas seulement distendu, voire effondré par l’intestin qui peut ainsi se retrouver
sont diagnostiqués en préopératoire. [8] en avant de l’estomac, formant alors une hernie transépiploïque
Traitement
Voie d’abord
Habituellement, la voie médiane est préconisée devant un
syndrome occlusif aigu, en l’absence de diagnostic préopéra-
toire. La voie cœlioscopique peut cependant être envisagée, tant
à visée diagnostique que dans un but thérapeutique, dans la
mesure où le defect est antérieur, généralement facile à identi-
fier et réparable sans difficulté particulière avec cette technique.
Diagnostic peropératoire
Celui-ci ne pose généralement aucun problème, en dehors des
très exceptionnelles hernies mixtes, qui peuvent modifier
considérablement l’anatomie en entraînant un refoulement
majeur de l’estomac en avant et en dehors.
Manœuvres de réduction
La réduction est réalisée le plus souvent par simple traction,
quel que soit le type de hernie épiploïque. Cette réduction peut
être rendue difficile par des adhérences acquises entre l’intestin
et le péritoine tapissant l’arrière-cavité des épiploons, par
exemple. Dans ces conditions, il est préférable d’ouvrir plus
Figure 4. Hernie transépiploïque au travers du tablier épiploïque. largement l’arrière-cavité des épiploons, soit en incisant le
ligament gastrocolique, soit en agrandissant le defect. En cas de
nécrose intestinale, la résection intestinale respecte les règles
dite mixte [14] (Fig. 5). Concernant le petit épiploon, lorsque la habituelles de la résection.
hernie est isolée, elle se situe généralement à la pars flaccida. [3]
Traitement préventif
Diagnostic Quelle que soit la localisation du defect, le traitement
Le tableau clinique correspond à un syndrome occlusif aigu, préventif consiste simplement en une fermeture de ce defect par
généralement non spécifique, comportant toujours des douleurs points séparés de fils résorbables ou non, suivi d’un reposition-
abdominales et des vomissements. L’ASP montre des niveaux nent anatomique de l’intestin et de l’épiploon. [10] Parfois, il
hydroaériques grêliques, qui ne permettent d’évoquer le dia- peut être nécessaire de réséquer le tablier épiploïque lorsque
gnostic que dans le cas où ils occupent l’arrière-cavité des celui-ci paraît trop remanié. [5]
épiploons et refoulent l’estomac. [3] Le transit du grêle peut
confirmer le diagnostic, [11] au mieux, si l’occlusion est incom- Hernies transmésentériques
plète. [3] Cependant, de nombreux auteurs insistent sur l’intérêt
du scanner avec injection pour faire le diagnostic en préopéra- Épidémiologie
toire, [12, 14, 15] notamment parce qu’il permet parfois de Les hernies transmésentériques, bien que classiques, sont
visualiser le passage de vaisseaux mésentériques à travers le exceptionnelles. Il n’existe pas suffisamment de cas rapportés
Hernies transmésocoliques
Épidémiologie
Figure 6. Hernie transmésentérique.
Les hernies transmésocoliques sont parmi les hernies internes
dans la littérature pour avoir une idée précise de leur incidence. les plus rares. Très peu de cas ont été rapportés dans la littéra-
Les complications ont souvent été décrites à un âge pédiatri- ture ; c’est la raison pour laquelle l’incidence de ces hernies
que, [16] alimentant l’hypothèse d’une origine congénitale du exceptionnelles reste inconnue. Ces hernies sont classiquement
defect. Néanmoins, des cas de hernies transmésentériques ont découvertes à l’âge adulte ; cependant, des cas pédiatriques ont
également été décrits à l’âge adulte. été rapportés. [18] Enfin, signalons qu’autrefois un ulcère
duodénal ou de la petite courbure était découvert une fois sur
Physiopathologie deux lors d’une exploration pour hernie transmésocolique. [5]
Les hernies transmésentériques intéressent presque toujours
l’aire triangulaire avasculaire de Trèves, située entre l’axe Physiopathologie
mésentérique supérieur, en dedans, et l’axe iléo-cæco-appen- La hernie transmésocolique intéresse toujours le mésocolon
diculaire, en dehors. Le defect prend le plus souvent la forme transverse. L’orifice herniaire est habituellement large et se situe
d’une fente, s’étendant parfois sur toute la hauteur du mésen- en règle à gauche de la colica media. Lorsque celle-ci n’existe
tère [5] (Fig. 6). Enfin, l’orifice est généralement unique et la pas, l’orifice peut alors se révéler énorme. [5] Deux variétés ont
hernie ne comporte jamais de sac. été décrites : les hernies sans sac péritonéal et les hernies avec
sac, qui sont les plus rares. [19] Concernant les hernies sans sac,
Diagnostic la totalité du grêle peut alors occuper l’arrière-cavité des
Le tableau clinique est celui d’une occlusion aiguë du grêle. épiploons. Dans certaines formes dites complexes, le grêle peut
L’ASP montre qu’il s’agit le plus souvent d’une occlusion non même aller jusqu’à rompre le ligament gastrocolique ou le petit
spécifique du grêle distal. [17] Cependant, il existe fréquemment épiploon pour ressortir devant l’estomac, ou bien s’échapper par
une ou plusieurs anses fixées dans la fosse iliaque droite ce qui, l’hiatus de Winslow, ou encore s’immiscer dans le grand
pour certains, doit faire évoquer le diagnostic face à un patient épiploon en le dédoublant [5] (Fig. 7).
sans syndrome infectieux ni antécédents chirurgicaux. [16] Le
transit du grêle confirme l’occlusion distale du grêle sans pour Diagnostic
autant permettre d’identifier formellement le mécanisme. Le
Le tableau clinique n’est pas toujours celui d’un syndrome
scanner abdominal avec injection semble être le meilleur
occlusif. Parfois, le patient présente simplement une gêne ou
examen pour confirmer le mécanisme de l’occlusion, lorsqu’il
une voussure épigastrique. L’ASP peut montrer un refoulement
montre la présence d’anses grêles fixées et épaissies en arrière du
de l’estomac vers la gauche et des anses grêles anormalement
mésentère, qui apparaît lui-même projeté en avant. Mais, en
hautes. Cependant, l’abdomen peut également se révéler non
réalité, le diagnostic préopératoire reste exceptionnel.
aéré avec un simple niveau gastrique isolé. [18] Le transit du
grêle ainsi que le scanner abdominal, s’ils sont demandés en
Traitement
préopératoire, permettent le plus souvent d’évoquer le diagnos-
Voie d’abord tic de hernie interne, sans toutefois qu’il soit aisé d’en définir
La voie d’abord médiane reste indiquée devant tout syn- le type.
drome occlusif du grêle d’étiologie indéterminée. Cependant, la
voie d’abord cœlioscopique paraît particulièrement intéressante Traitement
dans cette indication, à visée diagnostique mais également à Voie d’abord
visée thérapeutique, en dehors de toute distension majeure du
grêle qui contre-indiquerait alors cette méthode. La voie médiane reste la voie d’abord de choix devant une
suspicion de hernie interne dont le mécanisme reste imprécis en
Diagnostic peropératoire préopératoire. Bien qu’en théorie possible, la voie d’abord
Il est le plus souvent aisé, car l’identification du defect cœlioscopique n’a cependant pas été encore décrite dans cette
mésentérique ne représente pas de difficulté particulière. indication et ne paraît envisageable à visée thérapeutique que
dans les formes simples.
Manœuvres de réduction
La manœuvre consiste à réduire progressivement le grêle Diagnostic peropératoire
hernié par traction douce mais également en refoulant conjoin- Dans les formes simples, le diagnostic est facile devant une
tement celui-ci à travers le defect mésentérique. Lorsque le voussure de l’estomac ou du ligament gastrocolique derrière
Physiopathologie
Certains ont proposé une classification des hernies du
ligament large en trois types (Fig. 8) selon la localisation de
l’orifice herniaire : en dessous du ligament rond (type 1) ;
au-dessus, dans le mésosalpinx (type 2) ou dans le mésovarium
(type 3). [22] Le plus souvent, il s’agit de defects complets sans
sac herniaire. Cependant, certaines hernies sont développées
aux dépens soit d’un seul feuillet persistant du ligament large,
soit d’une distension sacculaire des deux feuillets. [21] En dehors
des causes postopératoires, qui ne nous intéressent pas ici, ces
hernies peuvent être soit congénitales, soit acquises. L’origine
congénitale correspondrait à la rupture spontanée de kystes ou
de reliquats vestigiaux mullériens, le defect étant alors volon-
Figure 7. Hernies transmésocoliques complexes. tiers horizontal, [23] tandis que l’origine acquise serait secondaire
1. Foie ; 2. estomac ; 3. côlon transverse ; 4. étage sous-mésocolique ; 5. à des traumatismes obstétricaux, dans la mesure où la plupart
arrière-cavité des épiploons ; 6. pancréas ; 7. duodénum. des patientes sont multipares, aboutissant à une lacération du
ligament large, le defect étant alors plutôt vertical. [20] Enfin,
lequel viennent bomber les anses grêles herniées. Dans les dans presque tous les cas, la hernie se produit d’arrière en
formes complexes, le diagnostic peut être rendu très difficile par avant. [5]
l’absence de visualisation du côlon transverse, totalement
recouvert par la masse du grêle hernié à travers un second Diagnostic
orifice ou entre les deux feuillets du tablier épiploïque. Dans ce
cas, il faut : soit repérer l’angle colique droit, puis le suivre en Le tableau clinique est celui d’une occlusion aiguë du grêle.
dedans pour pouvoir identifier le côlon transverse, [5] soit L’ASP montre habituellement que l’occlusion du grêle est
extérioriser la totalité de la masse intestinale pour comprendre... distale. Enfin, le scanner abdominal avec injection permet de
De cette manière, le defect mésocolique finit toujours par être suspecter le mécanisme de l’occlusion en montrant une ou
identifié. plusieurs anses dilatées et épaissies fixées dans le cul-de-sac de
Manœuvres de réduction Douglas et refoulant les organes adjacents. Plus rarement
encore, le defect du ligament large, correspondant au collet de
Une fois le mécanisme de la hernie compris, la réduction ne
la hernie, a même pu être identifié en préopératoire. [21]
pose habituellement pas de difficulté particulière, du fait que ces
hernies sont généralement peu ou non occlusives. Il suffit pour
cela de tracter doucement le grêle vers le bas, en le déroulant à Traitement
travers l’orifice herniaire préalablement exposé. Si la réduction Voie d’abord
s’avère tout de même difficile, il suffit alors de réaliser un
décollement coloépiploïque pour avoir un accès direct à La voie d’abord peut être indifféremment classique, par voie
l’arrière-cavité des épiploons, ce qui facilite grandement la médiane, ou cœlioscopique, particulièrement intéressante au
réduction. plan diagnostique. Seule l’importance de la distension du grêle
doit faire préférer la voie médiane à titre systématique.
Traitement préventif
Il consiste à obturer l’orifice herniaire à l’aide de points Diagnostic peropératoire
séparés de fils résorbables ou non, tout en prenant soin de
Le diagnostic est aisé en peropératoire, une fois la patiente
respecter les vaisseaux mésocoliques adjacents. S’il existe un sac,
mise en position de Trendelenburg et le pelvis exposé. Dans
celui-ci peut être soit plicaturé, soit réséqué. [18] Enfin, si le
defect est particulièrement important, on peut alors s’aider de tous les cas, la recherche de la jonction grêle plat-grêle dilaté
la face postérieure de l’estomac pour le combler, en cousant conduit rapidement à identifier le ligament large en cause.
celle-ci au pourtour de la brèche, au fil non résorbable. [5] Manœuvres de réduction
Hernies à travers le ligament large Celles-ci sont non spécifiques ; il est parfois nécessaire
d’élargir le collet pour réduire la hernie. La section du ligament
Épidémiologie rond ou l’agrandissement de l’orifice en zone avasculaire vers
Cause rare de hernie interne, la hernie à travers le ligament l’arrière est alors souhaitable. Exceptionnellement, l’annexecto-
large représente entre 4 et 7 % de toutes les formes de hernies mie peut s’avérer nécessaire en cas de réduction impossible ou
internes. [20, 21] Elle ne touche par définition que la femme, le de brèche particulièrement vaste. [5] La nécrose intestinale n’est
plus souvent multipare. [21] pas exceptionnelle du fait du diamètre le plus souvent modéré
Physiopathologie
Hernies dans l’arrière-cavité des épiploons Pour expliquer la formation d’une hernie paraduodénale
Déjà étudiées séparément dans les chapitres précédents, pour gauche, deux théories s’opposent de longue date. D’une part la
mémoire rappelons donc que celles-ci peuvent se produire par théorie mécanique, proposée par Treitz [26] en 1857 et par
quatre mécanismes différents (Fig. 9) : Jonnesco [5] en 1890, puis reprise plus récemment par différents
• au travers de l’hiatus de Winslow ; auteurs dont Freund [32] en 1977 et Khan [33] en 1998 ; celle-ci
• à travers un defect mésocolique transverse ; suggère que la hernie paraduodénale gauche se développe à
• à travers un defect du grand épiploon ; partir d’une faiblesse ou d’un défaut de fusion au niveau de la
• à travers un defect du petit épiploon ; fossette paraduodénale décrite par Landzert. Elle serait donc
• à travers plusieurs des defects précités, formant ainsi une acquise à partir de phénomènes répétés d’hyperpressions
hernie mixte. abdominales. [27] D’autre part la théorie embryologique, défen-
due par Andrew [34] en 1923 et Dott [35] la même année, puis
par Callender [36] en 1935 et actuellement reconnue par la
■ Hernies rétropéritonéales majorité des auteurs ; [24, 37, 38] celle-ci suggère que, au moment
de la réintégration embryonnaire de l’intestin dans l’abdomen,
L’essentiel des hernies rétropéritonéales correspond aux vers la 11e semaine d’aménorrhée, la partie proximale de l’anse
hernies dites « paraduodénales », qui représentent à elles seules primitive reste coincée en arrière du mésocolon descendant qui
environ 50 % de toutes les hernies internes. [24, 25] Celles-ci, vient alors l’enserrer. De fait, la hernie paraduodénale gauche se
bien que leur description initiale remonte au XIXe siècle [26] sous présente comme une masse intestinale située sous le mésocolon
diverses appellations selon qu’elles soient droites ou gauches, descendant, dont tout ou partie de l’iléon fait issue à travers un
relèvent de mécanismes dont la physiopathologie reste encore orifice paraduodénal. Celui-ci se trouve à la partie postérieure
aujourd’hui controversée. Les autres hernies rétropérito- droite de la masse et son collet est bordé systématiquement par
néales sont dénommées soit péricæcales, soit intersigmoï- la veine mésentérique inférieure ainsi que l’artère colique
diennes. supérieure gauche, un peu plus à distance (Fig. 10).
Diagnostic
Le mode de révélation correspond le plus souvent à un
tableau aigu d’occlusion du grêle associant des douleurs abdo-
minales, des vomissements et plus rarement la présence d’une
masse abdominale dans l’hémiabdomen gauche. Il n’est pas
exceptionnel de retrouver un long passé de douleurs abdomina-
les récurrentes, ayant même nécessité des hospitalisations à
répétition sans diagnostic précis, voire avec diagnostics erronés.
Ailleurs, un tableau plus fruste, fait de douleurs abdominales
intermittentes spontanément résolutives, peut conduire avec
l’aide d’examens complémentaires à une exploration chirurgi-
cale, qui confirme alors le diagnostic. L’ASP est le plus souvent
peu contributif. L’examen de choix est classiquement le transit
du grêle, [38] qui permet de visualiser une masse intestinale
comme « enserrée » dans un sac. L’artériographie, [39] l’écho-
doppler, [40] ainsi que l’imagerie par résonance magnétique [41]
ont également été proposés, du fait d’un trajet anormalement
antérieur de la veine mésentérique inférieure, repérable sur ces
différents examens et qui doit permettre d’évoquer le diagnos-
tic. Cependant, l’examen de choix est actuellement le scanner
avec injection. Celui-ci est préconisé par la majorité des
auteurs, [42, 43] bien que certains aient signalé ses limites dans Figure 11. Hernie paraduodénale droite.
cette indication. [44] Enfin, en dehors de l’urgence, l’entéroscan-
ner semble devoir être préféré à tout autre examen. [38]
diminuer la pression intra-abdominale, puis de programmer un
Traitement second look de principe à la vingt-quatrième heure.
Voie d’abord Traitement préventif
La voie d’abord médiane reste la voie classique dans cette Toute tentative d’excision du sac herniaire doit être pros-
indication. Cependant, plusieurs publications font état de crite. [5] Car il est suffisant de procéder à la fermeture de l’orifice
l’intérêt de l’abord cœlioscopique, à visée aussi bien diagnosti- herniaire à l’aide de points séparés de fils résorbables on non.
que [45] que thérapeutique. [46] Néanmoins, comme le soulignent Cette fermeture doit, bien sûr, respecter les vaisseaux qui
certains auteurs, la voie d’abord cœlioscopique reste hasardeuse cheminent aussi bien dans le bord libre du collet en avant
dans l’urgence, en cas de tableau occlusif sévère. [38] (veine mésentérique inférieure, artère colique supérieure
Diagnostic peropératoire gauche), que dans le rétropéritoine en arrière (aorte, artère
mésentérique inférieure...).
Dans tous les cas, le grêle hernié est d’abord repéré sous un
feuillet péritonéal, qui n’est autre que le mésocolon descendant. Hernies paraduodénales droites
Lorsque la hernie n’intéresse que le jéjunum proximal et que le
volume de la hernie est modéré, le diagnostic est alors facile. Synonymes [5]
Lorsque la hernie est volumineuse, celle-ci peut s’étendre
jusqu’au pancréas en haut, descendre jusqu’au pelvis et dépasser Hernie de la fossette mésentéricopariétale de Waldeyer, hernie
en dehors le côlon descendant, qui se trouve ainsi soit projeté derrière le mésocolon ascendant de Callender, hernie parajéju-
en avant, soit totalement caché vers l’arrière. [5] Le diagnostic, nale, hernie duodénale droite...
plus difficile, nécessite alors de repérer d’abord l’orifice her-
niaire, toujours situé à droite et en arrière de la masse. Pour ce Épidémiologie
faire, il est souvent nécessaire de basculer sur la gauche la masse
Moins fréquentes, les formes droites représentent environ un
intestinale herniée. Enfin, le bord libre du collet herniaire étant
quart de la totalité des hernies paraduodénales. [27, 38] Elles
constamment longé par un vaisseau qui n’est autre que la veine
touchent aussi plus fréquemment le sexe masculin. [47] L’âge de
mésentérique inférieure, son identification participe également
découverte est également variable, s’étendant de l’enfance [47, 48]
au diagnostic étiologique.
à l’âge adulte, avec un âge médian, au moment du diagnostic,
Manœuvres de réduction estimé à 36 ans. [25]
Tout d’abord, il faut repérer l’iléon terminal qui s’extériorise
Physiopathologie
à travers le collet, puis se contenter de le tracter progressive-
ment sans brutalité. En effet, la majorité de ces hernies sont à Contrairement aux formes gauches, le mécanisme de forma-
collet large et peu serré, permettant ainsi d’obtenir une réduc- tion des hernies paraduodénales droites semble moins contro-
tion complète par simple traction. Sinon, si tel n’est pas le cas versé. Ainsi, il s’agirait d’un défaut de rotation de l’intestin
et que le contenu est trop œdémateux ou adhérent, il peut être grêle, immobilisé à 180° dans le sens antihoraire, tandis que le
nécessaire de débrider le collet pour faciliter la réduction. Le côlon poursuit, lui, sa rotation antihoraire physiologique jusqu’à
débridement doit alors toujours se faire vers le bas, car le haut 270°, de telle sorte que tout ou partie du grêle se trouverait ainsi
du collet est généralement bordé par le duodénum. Néanmoins, piégé en arrière du mésocolon ascendant, venu le recouvrir. [38]
le risque vasculaire de ce débridement est important. C’est la La hernie paraduodénale droite se présente donc habituellement
raison pour laquelle certains proposent d’inciser la paroi comme une masse intestinale médiane ou latéralisée à droite,
antérieure du sac tout en se rappelant qu’il s’agit du mésocolon visible derrière le mésocolon ascendant et refoulant parfois le
descendant, afin de faciliter la réduction manuelle de la hernie côlon ascendant vers l’avant ou bien le recouvrant en passant
par un abord direct du grêle. [5] Dans ce cas, la fermeture de la par en avant. Dans tous les cas, l’orifice herniaire se situe à
brèche mésocolique ainsi créée est indispensable. En cas de gauche de la masse, le plus souvent en haut et en arrière. Le
nécrose intestinale, la résection doit être la plus économe bord libre du collet herniaire est systématiquement longé par
possible, du fait du risque de grêle court lorsque l’ischémie est l’artère mésentérique supérieure ou l’une de ses branches
étendue. C’est la raison pour laquelle il est parfois nécessaire, droites : soit l’artère colique supérieure droite, soit l’artère iléo-
dans le doute, de renoncer initialement à une résection étendue cæco-appendiculaire, ainsi que par leurs veines correspondan-
du grêle, de procéder à une fermeture cutanée exclusive pour tes [5] (Fig. 11).
Diagnostic
Le mode de révélation correspond le plus souvent à un
tableau aigu d’occlusion du grêle associant des douleurs abdo-
minales, des vomissements, parfois de la diarrhée. Le plus
souvent, l’examen physique est normal, mais exceptionnelle-
ment on note la présence d’une masse abdominale médiane ou
développée aux dépens de l’hémiabdomen droit. Nombres
d’auteurs signalent chez ces patients l’existence de douleurs
abdominales récurrentes depuis plusieurs années, [25] voire
depuis l’enfance, [28] avec hospitalisations répétées sans dia-
gnostic étiologique précis. Ailleurs, le tableau aigu peut être
précédé de quelques épisodes plus frustes de douleurs abdomi-
nales postprandiales isolées, intermittentes, dont l’exploration
par imagerie permet parfois d’évoquer le diagnostic. L’ASP est
souvent normal ou révèle un syndrome occlusif grêlique non
spécifique, cependant souvent asymétrique. L’examen de
référence dans cette indication reste le transit du grêle, qui
permet de faire le diagnostic sur l’aspect fixé du grêle, comme
enserré dans un sac. [25, 28, 47, 49] Récemment, certains auteurs
proposent de réaliser un scanner avec injection et opacification
haute, [48] avec cependant quelques réserves quant à la sensibi-
lité de cet examen pour permettre d’affirmer le diagnostic en
préopératoire. [50] Enfin, l’entéroscanner, en dehors de l’urgence,
pourrait bien devenir l’examen de choix dans cette
indication. [38] Figure 12. Hernies paracæcales.
1. hernie externe rétrocæcocolique ; 2. hernie interne rétro-iléo-colique ;
Traitement 3. hernie iléoappendiculaire.
Voie d’abord
Traitement préventif
La voie d’abord médiane reste la voie classique dans cette
indication. Cependant, quelques publications récentes font état Contrairement aux formes gauches, où l’obturation de
de l’intérêt de l’abord cœlioscopique. [49] Le recul est cependant l’orifice herniaire est en règle suffisante, cette situation est
insuffisant pour conclure sur l’intérêt de cette voie d’abord, beaucoup plus rare pour les formes droites [25] qui nécessitent
notamment lorsqu’il existe une distension majeure du grêle souvent un décollement colique droit pour réduire au mieux la
occlus. hernie. Dès lors, le plus logique est de compléter cette dissection
par un décollement coloépiploïque droit et de placer l’intestin
Diagnostic peropératoire en position dite de mésentère commun complet [47, 48] avec la
En premier lieu, le grêle hernié est identifié sous un feuillet totalité du grêle dans l’hémiabdomen droit et la totalité du
péritonéal qui n’est autre que le mésocolon ascendant. Suivant côlon dans l’hémiabdomen gauche, le cæcum étant lui placé
que la totalité du grêle ou seulement sa partie proximale, ou dans la fosse iliaque gauche, après avoir pris soin de réaliser une
plus rarement sa partie médiane, se trouve prisonnière dans la appendicectomie de principe.
hernie, le sac herniaire peut s’étendre vers le haut, vers le bas,
ou bien en dehors, en passant alors soit en avant, soit en arrière Hernies péricæcales
du côlon ascendant. Il faut ensuite repérer l’orifice herniaire qui
se trouve toujours à gauche, et le plus souvent en haut et en Épidémiologie
arrière de la masse intestinale. Parfois, lorsque la hernie est Elles sont extrêmement rares ; très peu de cas ont été rappor-
volumineuse, il est nécessaire de basculer sur la droite la masse tés dans la littérature. De fait, la fréquence et le sex-ratio restent
intestinale pour pouvoir accéder à l’orifice de la hernie. Enfin, encore inconnus. En revanche, leur découverte semble être
une fois le collet de la hernie repéré, il est alors possible systématiquement faite à l’âge adulte.
d’identifier les vaisseaux mésentériques supérieurs ou leurs
branches, constamment présents au bord libre de l’orifice [5] et Physiopathologie
dont la présence participe au diagnostic peropératoire.
Ces hernies acquises se développent aux dépens des différen-
Manœuvres de réduction tes fossettes rétrocæcales. Trois variétés ont été décrites [5]
Tout d’abord, il faut repérer l’iléon ou parfois le jéjunum qui (Fig. 12) : une variété externe, dite rétrocæcocolique, et une
s’extériorise à travers le collet et se contenter de le tracter variété interne, dite rétro-iléocæcale. Ces deux variétés ont en
progressivement sans brutalité. En effet, lorsque ces hernies sont commun de se développer aux dépens de la même fossette
à collet large et peu serré, il suffit d’une simple traction pour rétrocæcale, située entre le repli (ou ligament) latérocolique
obtenir une réduction complète. Sinon, si tel n’est pas le cas et ascendant en dehors, et le repli (ou ligament) rétro-iléocolique
que le contenu est trop œdémateux ou adhérent, il peut être en dedans. La hernie peut alors remonter soit jusqu’au rein, soit
nécessaire, pour faciliter la réduction, de débrider le collet. jusqu’au duodénum, projetant ainsi le côlon vers l’avant, puis
Néanmoins, du fait de la proximité des vaisseaux mésentériques soit en dedans, soit en dehors. La troisième variété, dite
supérieurs, la majorité des auteurs recommandent plutôt de iléoappendiculaire, se développe aux dépens de la fossette
procéder à un décollement du côlon droit dans le plan du fascia iléoappendiculaire, située entre le mésoappendice, en arrière, et
de Toldt, manœuvre qui permet alors une réduction directe de le repli constitué par une branche récurrente iléale de l’artère
la hernie, que le sac s’étende en avant ou en arrière du côlon appendiculaire, en avant. Dans ce cas, la hernie se développe en
ascendant d’ailleurs. [25, 28, 47, 49] En cas de nécrose intestinale, arrière de la dernière anse iléale, projetant celle-ci vers l’avant.
la résection doit être la plus économe possible, du fait du risque Enfin, dans tous les cas, le volume de la hernie reste modéré,
de grêle court, lorsque l’ischémie est étendue. C’est la raison n’intéressant généralement que la ou les dernières anses grêles,
pour laquelle il est parfois nécessaire, dans le doute, de renoncer ainsi que l’appendice, le plus souvent.
à une résection étendue du grêle tout en procédant à une
fermeture cutanée exclusive, pour diminuer la pression intra-
Diagnostic
abdominale, puis en programmant un second look de principe à Le tableau clinique correspond à une occlusion aiguë de grêle
la vingt-quatrième heure. non spécifique, généralement en dehors de toute cicatrice
Traitement
Voie d’abord
La voie d’abord médiane reste indiquée de première intention
devant tout syndrome occlusif grêlique d’origine indéterminée.
Cependant, bien qu’aucune publication n’ait encore été rappor-
tée, la voie d’abord cœlioscopique paraît théoriquement parfai-
tement adaptée à cette situation, pour au moins trois raisons :
du fait de la grande expérience acquise par les chirurgiens
digestifs dans cette région anatomique par voie cœlioscopique,
d’une part ; du fait du volume généralement modéré de la
hernie à réduire, d’autre part ; enfin, du fait de la simplicité du
traitement préventif, parfaitement réalisable en cœlioscopie.
Diagnostic peropératoire
Évident en peropératoire, le diagnostic est confirmé dès que
l’on constate une projection antérieure du cæcum, en arrière
duquel s’engage l’iléon terminal. L’orifice herniaire regarde Figure 13. Hernies intersigmoïdiennes.
généralement en bas et en dedans.
Manœuvres de réduction rapportée, il semble que la voie d’abord cœlioscopique puisse
être envisagée dans cette indication, dès lors que le chirurgien
La réduction consiste en une traction douce sur l’iléon possède une bonne expérience de cette technique en chirurgie
terminal hernié qui s’avère généralement suffisante. Dans le cas colorectale.
contraire, il est possible, soit d’agrandir l’orifice herniaire en
sectionnant l’un des replis péritonéaux formant le collet Diagnostic peropératoire
herniaire, soit, plus radicalement, de procéder à un décollement Jamais évident à première vue, confirmer ce diagnostic
du côlon ascendant dans le plan du fascia de Toldt droit. nécessite préalablement de rechercher la jonction grêle plat-
grêle dilaté. Pour ce faire, le chirurgien est amené à soulever la
Traitement préventif boucle sigmoïdienne en arrière de laquelle se situe l’orifice
La fermeture de l’orifice herniaire par points séparés de fils herniaire qui regarde vers le bas. Généralement, le repérage de
résorbables ou non est suffisante. En cas de décollement colique l’anse grêle située en amont de la hernie est facilité par le fait
droit, il suffit alors de repositionner anatomiquement celui-ci, que celle-ci cravate anormalement le côlon sigmoïde pour
puis de fixer le cæcum au péritoine postérieur. ensuite plonger en arrière de ce dernier jusqu’au collet her-
niaire, siège de l’étranglement.
Hernies intersigmoïdiennes Manœuvres de réduction
Épidémiologie L’orifice herniaire étant le plus souvent étroit, il n’est pas
toujours facile de réduire l’anse herniée, régulièrement isché-
La fréquence réelle et le sex-ratio de ces hernies, exception- miée et souvent déjà nécrosée. Si la réduction manuelle par
nellement rapportées dans la littérature, restent encore incon- traction prudente sur le grêle s’avère impossible, il faut alors
nus. Généralement acquises, elles sont le plus souvent procéder à un décollement du côlon iliaque et de la racine
symptomatiques à l’âge adulte. secondaire du côlon sigmoïde, pour pouvoir ainsi extraire l’anse
herniée. En cas de nécrose intestinale, le traitement se fait
Physiopathologie suivant les critères et les principes habituels de la résection
Ces hernies se forment à partir de la fossette formée par la intestinale en urgence.
réunion des deux racines du mésocolon sigmoïde, puis s’éten- Traitement préventif
dent vers le haut, en arrière du mésocolon descendant, et entre
Il consiste à fermer l’orifice herniaire par deux ou trois points
la colonne lombaire et le rein gauche [5] (Fig. 13). Habituelle-
séparés de fils résorbables ou non, en prenant soin de ne pas
ment de faible volume, ces hernies ne modifient guère l’anato-
léser les structures vasculaires voisines, toujours présentes. En
mie du côlon gauche, qui reste généralement en place.
cas de décollement de la racine secondaire du côlon sigmoïde,
Diagnostic celle-ci est alors fixée au péritoine postérieur, également par
points séparés.
Le tableau clinique correspond à une occlusion aiguë de grêle
non spécifique, en dehors de toute cicatrice abdominale. L’ASP
confirme l’origine grêlique du syndrome occlusif et révèle son ■ Hernies sous-péritonéales
caractère plutôt distal. Enfin, le scanner avec injection et
opacification basse confirme l’occlusion aiguë du grêle et peut Hernies supravésicales
permettre dans le meilleur des cas d’évoquer le diagnostic en
préopératoire, s’il montre la présence d’une anse grêle en Épidémiologie
position rétropéritonéale, latérorachidienne gauche. Il s’agit d’une cause particulièrement rare de hernies internes,
peu rapportée dans la littérature, dont l’incidence reste incer-
Traitement taine. Les hernies supravésicales touchent préférentiellement les
hommes âgés de plus de 50 ans. [51]
Voie d’abord
La voie d’abord médiane reste indiquée de première intention Physiopathologie
devant tout syndrome occlusif grêlique d’origine indéterminée. Les hernies supravésicales se développent aux dépens des
Cependant, bien qu’aucune publication n’ait encore été encore fossettes supravésicales, décrites dans le détail par Skandalakis et
“ Points essentiels
• Les hernies internes, le plus souvent congénitales,
représentent une cause exceptionnelle (moins de 1 %) des
occlusions intestinales aiguës de l’adulte.
• Il faut néanmoins y penser devant une occlusion
survenant en l’absence de tout antécédent de chirurgie
abdominale ou pelvienne.
• Le déroulement de l’intervention doit toujours
comporter une exploration complète de toute la cavité
abdominopelvienne et de tout le grêle.
• Aucune section ne doit être faite avant l’identification
de tous les éléments, la reconnaissance d’une éventuelle
anomalie embryologique et la compréhension de
l’anatomie de l’occlusion.
• Le traitement comporte dans tous les cas un
repositionnement intestinal et la fermeture prudente des
berges péritonéales de l’orifice en cause.
Figure 14. Hernies supravésicales.
1. Fosse supravésicale.
al. [52] Elles se forment, par définition, en dedans des artères ■ Références
ombilicales puis s’épanouissent le plus souvent dans l’espace de [1] MacDonagh T, Jelinek GA. Two cases of paraduodenal hernia, a rare
Retzius, mais peuvent également s’engager latéralement, internal hernia. J Accid Emerg Med 1996;13:64-8.
formant ainsi les hernies supravésicales externes ou hernies [2] Iisalo P, Mero M. Hernia through the foramen of Winslow. Ann Chir
latérovésicales (Fig. 14). En dehors des hernies postopératoires, Gynaecol 1978;67:195-7.
qui ne nous intéresse pas ici, les hernies supravésicales sont [3] Tran TL, Regan F,Al Kutoubi MA. Computed tomography of lesser sac
presque toujours acquises et parfois associées à d’authentiques hernia through the gastrohepatic omentum. Br J Radiol 1991;64:
hernies inguinales. 372-4.
[4] Zer M, Dintsman M. Incarcerated foramen of Winslow hernia in a
Diagnostic newborn. J Pediatr Surg 1973;8:325.
Le tableau clinique est celui d’une occlusion aiguë du grêle. [5] Quénu J, Loygue J, Perrotin J, Dubost C, Moreaux J. Laparotomies
L’ASP montre le caractère distal de l’occlusion sur le grêle. Le pour occlusion intestinale. In: Opérations sur les parois de l’abdomen
scanner abdominal avec injection de produit de contraste et sur le tube digestif. Paris: Masson; 1967. p. 1140-52.
confirme le diagnostic d’occlusion mais ne permet généralement [6] Le Douarec P, Lecoissais JC, Testart J, Jouanneau P. La hernie du hiatus
pas d’en découvrir la cause. [53] Néanmoins, l’attention peut de Winslow. À propos de 4 cas. Ann Chir 1974;28:67-74.
parfois être attirée par la présence de grêle entre les muscles [7] Wojtasek DA, Codner MA, Nowak EJ. CT diagnosis of cecal herniation
droits et la vessie, faisant alors suspecter le mécanisme en through the foramen of Winslow. Gastrointest Radiol 1991;16:77-9.
cause. [54] [8] Ohkuma R, Miyazaki K. Hernia through the foramen of Winslow. Jpn
J Surg 1977;7:151-7.
Traitement [9] Dorian AL, Stein GN. Hernia through foramen of Winslow: report of a
case with preoperative Roentgen diagnosis and successful surgical
Voie d’abord management. Surgery 1954;35:795-801.
La voie d’abord doit être une médiane en cas de dilatation [10] Gharemani GG. Internal abdominal hernia. Surg Clin North Am 1984;
majeure du grêle. Cependant, la voie cœlioscopique paraît 64:393-406.
particulièrement indiquée au plan tant diagnostique que [11] Luchtman M, Berant M, Assa J. Transomental strangulation. J Pediatr
Surg 1978;13:439-40.
thérapeutique, du fait de l’accès facile en cœlioscopie de la
[12] Takagi Y, Yasuda K, Nakada T, Abe T, Matsuura H, Saji S. A case of
région prévésicale et de la banalisation de l’exploration cœlios-
strangulated transomental hernia diagnosed preoperatively. Am
copique de la région inguinale aujourd’hui.
J Gastroenterol 1996;91:1659-60.
Diagnostic peropératoire [13] Delabrousse E, Couvreur M, Saguet O, Heyd B, Brunelle S, Kastler B.
Strangulated transomental hernia: CT findings. Abdom Imaging 2001;
Il est toujours aisé du fait du caractère superficiel du collet
26:86-8.
herniaire. [14] Okayasu K, Tamamoto F, Nakanishi A, Takanashi T, Maehara T. A case
Manœuvres de réduction of incarcerated lesser sac hernia protruding simultaneously throuth both
the gastrocolic and gastrohepatic omenta. Radiat Med 2002;20:105-7.
La technique de réduction est non spécifique ; cependant [15] Kobayashi T, Mouri T, Fujii T. A case report and literature reviews of
celle-ci nécessite, le plus souvent, une section préalable du collet trans-omantal hernia. Rinsho Geka 1994;49:1501-5.
herniaire, du fait de son caractère étroit et, le plus souvent, [16] Fujita A, Takaya J, Takada K, Ishihara T, Hamada Y, Harada Y, et al.
scléreux. [5] La section de l’artère ombilicale ne pose aucun Transmesenteric hernia: report of two patients with diagnostic
problème, en revanche l’artère épigastrique doit être préalable- emphasis on plain abdominal X-ray finding. Eur J Pediatr 2003;162:
ment repérée et, si possible, respectée. Si nécrose intestinale il y 147-9.
a, le traitement respecte alors les principes de la résection [17] Janin Y, Stone AM, Wise L. Mesenteric hernia. Surg Gynecol Obstet
intestinale. 1980;150:747-54.
[18] Merrot T, Anastasescu R, Pankevych T, Chaumoître K, Alessandrini P.
Traitement préventif
Small bowel obstruction caused by congenital mesocolic hernia: case
Bien que certains auteurs aient proposé l’éversion puis la report. J Pediatr Surg 2003;38:E11-E12.
résection du sac herniaire, [5] la majorité opte pour une ferme- [19] Menegaux G. J Chir (Paris) 1934;43:321-62.
ture simple de l’orifice, par points séparés de fils résorbables ou [20] Bolin TE. Internal herniation through the broad ligament. Acta Chir
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[21] Coulier B, Menten R, Ramboux A. Herniation through a defect in broad [39] Meyers MA. Arteriographic diagnosis of internal (paraduodenal)
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Kotobi H., Echaieb A., Gallot D. Traitement chirurgical des hernies rares. EMC (Elsevier SAS, Paris),
Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-445, 2005.
Appendicectomie laparoscopique
G.-F. Begin
Les avantages de l’appendicectomie laparoscopique sont, outre ceux de toute procédure laparoscopique,
la réduction de la douleur, de la morbidité pariétale, de la durée de séjour et d’invalidité et le fait d’éviter,
par une exploration abdominale complète, en particulier chez la femme jeune, les erreurs de diagnostic et
de réduire les appendicectomies inutiles. Deux techniques sont utilisées : l’appendicectomie totalement
intra-abdominale avec mise en place d’un trocart optique ombilical de préférence sous contrôle visuel et
celle avec deux trocarts de 5 mm. En modifiant le site d’implantation de ces trocarts et la position de la
table, l’exérèse de l’appendice par coagulation du méso et section entre ligatures est possible quels que
soient son siège et son état pathologique. L’appendice est extrait, à l’aide d’un sac, par un trocart de
10 mm. Dans les formes suppurées et, plus encore, dans les péritonites, le lavage de la cavité péritonéale
est un autre avantage de la laparoscopie. La résection du bas fond cæcal par agrafage linéaire à la faveur
d’un trocart de 12 mm peut sembler préférable à la simple ligature. L’existence d’un abcès avec masse
abdominale représente la situation la plus difficile et la cause majeure de conversion qui survient dans 5 %
des cas. Dans l’appendicectomie extra-abdominale, la ligature du méso et l’exérèse de l’appendice sont
effectuées après extériorisation au travers d’un trocart. La variante par mono-abord ombilical (Begin),
particulièrement indiquée chez l’enfant, nécessite une optique spécifique à canal opératoire. La fréquence
des complications peropératoires, hémorragie lors de la section du méso ou rupture d’un appendice
pathologique, diminue avec l’expérience de l’opérateur.
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■ Principes techniques
Consentement éclairé
Il doit être obtenu au terme d’une information claire et
précise concernant le diagnostic supposé, les différentes techni-
ques avec leurs avantages et inconvénients, les complications
éventuelles même les plus exceptionnelles. Après l’intervention,
les gestes effectués doivent être exposés avec remise d’un
document écrit confirmant l’exérèse de l’appendice malgré
l’absence d’incision iliaque droite.
Préparation et anesthésie
L’anesthésie générale est précédée du bilan habituel avec
recherche d’éventuelles contre-indications à la création du
pneumopéritoine. La préparation locale comporte le rasage
abdominal, la désinfection ombilicale et l’évacuation de la
vessie par miction. Le sondage peut être justifié chez la femme
en cas de doute diagnostique. L’antibioprophylaxie est
systématique.
Installation
Installation du patient
Le patient est en décubitus dorsal, les deux bras le long du
corps, les membres inférieurs sur des appuis afin de permettre à
l’opérateur de se placer éventuellement entre les jambes. La
mobilisation de la table en position de Trendelenburg, proclive,
roulis latéral gauche ou droit, doit être possible. Le champ
opératoire est large, exposant l’ensemble de l’abdomen et Figure 1.
permettant la mise en place de trocarts supplémentaires. A. Position du patient et de l’équipe chirurgicale. (A. assistant ; C. chirur-
L’opérateur est à gauche du patient, l’assistant en face de lui et gie ; I. instrumentiste).
l’instrumentiste à sa gauche (Fig. 1A). B. Axe chirurgien, zone opératoire, moniteur. 1. Système optique ; 2. axe
Comme dans toute procédure laparoscopique, l’axe de vision de vision ; 3. moniteur.
du chirurgien, le site de l’intervention et l’écran doivent être
situés sur la même ligne (Fig. 1B). L’écran doit être mobilisé en • un palpateur de 5 mm ;
fonction de la situation de l’appendice, à la partie inférieure • un pousse-nœud ;
droite du patient en cas de siège habituel, à la partie supérieure • un ou deux porte-aiguilles ;
droite en cas d’appendice haut situé sous-hépatique. • une canule d’aspiration-lavage de 5 ou 10 mm ;
• un sac de récupération de tissus.
Matériel La technique extra-abdominale transombilicale nécessite une
L’instrumentation est identique (Fig. 2 A-C) quelle que soit la optique spécifique à canal opérateur. Pinces, coagulateur,
technique utilisée à l’exception de la voie transombilicale aspirateur, ciseaux doivent avoir une longueur suffisante.
(Fig. 2B). Elle comporte : Le matériel ancillaire pour la fermeture des orifices de trocarts
• un système vidéo complet (Fig. 2A) ; est identique quelle que soit la technique.
• une optique à vision droite ou fore-oblique 30° ou 45° ;
• un bistouri électrique permettant la coagulation mono- et Technique de l’appendicectomie totalement
bipolaire ; intra-abdominale (dite « in »)
• un système d’irrigation-lavage à haut débit ;
• une aiguille de type Veress ; Création du pneumopéritoine et mise en place
• deux petits écarteurs de type Chigot de 5 mm ; du trocart optique T1
• un trocart optique T1 de 10 mm ; Afin d’avoir le champ visuel le plus large possible, le premier
• un trocart opérateur T2 de 5 ou 10 mm avec, si nécessaire, un trocart T1 (Fig. 3) doit être idéalement placé dans le tiers
trocart de 12 mm ; supérieur de la cavité abdominale. [12] L’ombilic est en général
• un second trocart opérateur T3 de 5 mm ; choisi pour des raisons esthétiques.
• une pince coagulante bipolaire de 5 mm ;
• des ciseaux de 5 mm (avec possibilité de coagulation mono- Création du pneumopéritoine à l’aiguille de Veress
ou bipolaire) ; L’aiguille de Veress est introduite à la partie supérieure de
• un jeu de pinces fenêtrées atraumatiques de 5 mm ; l’ombilic en l’absence d’antécédent de chirurgie abdominale.
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3
3 4
1
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5 7
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9 9
B
10
11
Figure 2.
A. Circuit vidéo avec optique à 30 ou 45°. 1. Caméra ; 2. insufflateur ; 3. processeur vidéo ; 4. source de lumière froide ; 5. système d’imagerie photo ; 6. moniteur.
B. Matériel pour appendicectomie transombilicale vidéo-assistée avec : 1. Optique décalée à canal opératoire ; 2. trocart de 10 mm. ; 3. mandrin mousse ; 4.
trocart et mandrin de 5 mm ; 5. palpateur ; 6. pince fine ; 7. crochet coagulateur ; 8. ciseaux ; 9. aspirateur.
C. Matériel pour appendicectomie laparoscopique. 1. Optique de 30° ; 2. trocart de 10 mm ; 3. trocart et mandrin mousse de 5 mm ; 4. pince bipolaire
coagulante de 5 mm ; 5. pince atraumatique de 5 mm ; 6. ciseau de 5 mm ; 7. pousse-nœud ; 8. Endoloop® ; 9. porte-aiguille ; 10. palpateur mousse ; 11. sac
de récupération des tissus mous.
Sinon, on privilégie la situation dans l’hypocondre gauche. La 10 mm, une pince à disséquer à griffe saisit l’insertion ombilicale.
bonne position est vérifiée par un test de perméabilité à l’air et En soulevant cette insertion, une incision transversale de 8 mm
un test d’instillation – aspiration avec 10 ml de sérum physio- est effectuée à sa base.
logique. Le pneumopéritoine est réalisé par insufflation de CO2 À ce niveau, il n’existe qu’un seul plan aponévrotique accolé
à un débit de 4 l min–1 jusqu’à une pression de 10 mmHg. au péritoine. Après s’être assuré, à l’aide des écarteurs, de
Un trocart T1 de 10 mm est introduit par une incision verticale l’absence d’adhérence, un trocart atraumatique (mousse ou
inférieure dans les plis radiés de l’ombilic, avec un trajet en trocart verrouillé), de 10 mm, est introduit en direction de la
baïonnette en direction de la cavité pelvienne. Chez l’enfant, un cavité pelvienne. L’étroitesse de l’incision aponévrotique permet
trocart de 5 ou 7 mm peut être utilisé. L’exploration endoscopique d’éviter toute fuite de gaz. Après insufflation d’environ 1 l de
initiale vérifie la bonne position de l’aiguille et l’absence de toutes CO 2 à un débit de 1 l/min, l’endoscope vérifie la bonne
lésions provoquées par son extraction. [8-13] position du trocart et l’absence de toute lésion provoquée par
ce temps opératoire. Ainsi, aucun geste aveugle n’est effectué. La
Création du pneumopéritoine sous contrôle visuel (« open »)
pression intra-abdominale au cours de la procédure doit être la
Le risque de plaie vasculaire ou viscérale [14] justifie d’utiliser la plus basse possible, compatible avec le bon déroulement de
mise en place sous contrôle visuel. [15, 16, 17] Après une incision l’intervention. Sauf en cas d’obésité, une pression intra-
cutanée verticale dans les plis radiés de l’ombilic de moins de abdominale de 7 mmHg est suffisante.
3 2
3 2
B
Figure 4.
A, B. Position des trocarts et de l’instrumentation pour l’appendicectomie
latérocæcale interne ou pelvienne. 1. Trocart optique ; 2. instrumentation
main gauche ; 3. instrumentation main droite.
Figure 10. Position des trocarts mise en tension. Lorsque le méso est fixé au plan péritonéal
pour appendicectomie avec cæcum postérieur, il est libéré aux ciseaux ou à l’aide d’une coagulation
ectopique sous-hépatique. monopolaire en s’aidant, si besoin, d’un trocart T2 de 5 mm
placé en position sus-pubienne. On peut également effectuer,
lorsque l’appendice est rétrocæcal ou sous-séreux, un décolle-
ment limité du fascia de Toldt droit aux ciseaux permettant la
mobilisation cæcoappendiculaire. Le déplacement des viscères se
fait uniquement par gravité en raison de la position latérale du
patient. Dans la plupart des cas, la pince, en saisissant l’extré-
mité de l’appendice, permet son extériorisation par un trocart
de 10 mm. En cas d’appendice volumineux et de méso épais, le
dessin spécifique de la pince permet de saisir les tissus sans
risque de lésion. Dans ces circonstances, un agrandissement de
l’incision ombilicale peut être nécessaire. L’appendicectomie est
ensuite réalisée de manière conventionnelle en position extra-
abdominale. La base appendiculaire est constamment visualisée.
Après réintégration du cæcum, une antibiothérapie locale est
instillée et la paroi aponévrotique refermée. On veillera à ce que
ainsi aisé, à la faveur, des mouvements de translation latéraux la suture du plan superficiel soit lâche avec réalisation de plans
du système optique-instrument, de dérouler l’ensemble de sous-cutanés sans fermeture cutanée afin d’éviter les collections
l’intestin grêle. La cavité abdominale est ainsi explorée dans sa et les cellulites. Dans les appendicites aiguës, le lavage et
totalité. Des prélèvements peuvent être effectués et une aspira- l’aspiration de la cavité péritonéale peuvent être réalisés à l’aide
tion réalisée grâce à un instrument passé dans le canal opéra- de la canule introduite par le canal opératoire. L’expérience de
toire. L’appendice étant localisé, la pince en saisit l’extrémité et l’opérateur est essentielle dans ces cas difficiles. Toutefois,
on apprécie la capacité d’extériorisation transombilicale par sa lorsque la technique ne paraît pas réalisable sans risque, la mise
Complications précoces
Complications mineures “ Points forts
Ce sont les abcès de paroi, en général dus à une fermeture
pariétale trop étanche. Un hématome peut survenir. L’exploration laparoscopique permet d’éviter les
appendicectomies injustifiées, en particulier chez la
Complications majeures femme jeune.
La technique intra-abdominale avec deux trocarts
Les complications majeures peuvent être un abcès profond opérateurs permet l’exérèse de l’appendice quels qu’en
souvent dû à un stercolithe appendiculaire abandonné lors de
soient le siège et l’état pathologique.
l’appendicectomie. Il est donc important de faire systématique-
ment une double ligature au niveau de la base appendiculaire La technique extra-abdominale par monoabord ombilical
afin d’éviter cette complication. [25, 26] Ces abcès peuvent permet la mobilisation et l’exérèse de l’appendice grâce à
survenir tardivement, une semaine à plusieurs mois après un système optique spécifique à canal opérateur.
l’intervention. Il convient alors d’extraire le stercolithe et de L’irrigation large de la cavité péritonéale est un avantage
drainer l’abcès sous couverture antibiotique. Ce geste peut être majeur de la laparoscopie dans les appendicites suppurées
réalisé, en fonction de l’expérience de l’opérateur, par voie et les péritonites diffuses.
cœlioscopique ou par drainage du cul-de-sac de Douglas par
voie transrectale.
La persistance d’un moignon appendiculaire peut être .
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Begin G.-F. Appendicectomie laparoscopique. EMC (Elsevier SAS, Paris), Techniques chirurgicales -
Appareil digestif, 40-505, 2006.
L’appendicectomie par laparotomie pour appendicite garde des indications justifiées de principe et de
nécessité. Les bases anatomiques sont rappelées. Les arguments en faveur de l’appendicectomie de
principe sont analysés. La technique chirurgicale conventionnelle, le contrôle vasculaire, le traitement du
moignon, les variantes techniques des appendicectomies atypiques ou difficiles, les complications
peropératoires sont successivement étudiés. Les causes et les modalités de conversion chirurgicale de
laparoscopie sont rapportées avant d’envisager les complications postopératoires.
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Plan ■ Anatomie
¶ Introduction 1 Anatomie normale
¶ Anatomie 1
Anatomie normale 1
Morphologie et implantation
Variations positionnelles 2 De forme vermiculaire, l’appendice a une longueur moyenne
Anomalies numériques 3 de 6 à 12 cm (extrêmes de 1 à 20 cm) pour un calibre de
0,8 mm ; il est normalement perméable. Sa base d’implantation
¶ Appendicectomie par laparotomie de principe 3
est constante sur la face interne ou postéro-interne du cæcum,
Appendicectomie dite simple pour appendicite aiguë catarrhale 3
2 à 3 cm en dessous de la jonction iléocæcale au point de
Variantes techniques 6
convergence des trois bandelettes musculaires coliques anté-
Complications peropératoires 10
rieure, postéroexterne et postéro-interne. Il est descendant en
¶ Appendicectomie par laparotomie de nécessité : position latéro-interne.
conversion chirurgicale d’une laparoscopie 10 Le méso appendiculaire est normalement large et étalé, tendu
Difficultés de dissection 10 entre l’appendice et la face postérieure du mésentère de la
Anomalies positionnelles 10 dernière anse grêle. C’est le repli formé par l’artère appendicu-
Complications peropératoires 10 laire qui constitue ce méso.
Conclusion 11
Topographie
¶ Complications postopératoires 11
Complications hémorragiques 11 Le cæcum est libre dans la fosse iliaque droite sans accole-
Complications septiques 11
ment péritonéal :
• son extériorisation est facile par un abord pariétal électif dans
¶ Conclusion 12 la fosse iliaque droite ;
• les rapports chirurgicaux postérieurs sont à distance, rétropé-
ritonéaux ; vaisseaux iliaques externes et uretère en dedans,
muscle psoas et nerf fémorocutané en dehors.
■ Introduction
Vascularisation (Fig. 1)
En deux décennies, la fréquence de l’appendicectomie pour L’artère appendiculaire proprement dite naît de l’artère cæcale
appendicite a diminué de moitié en France. postérieure ou de l’arcade iléocolique.
Depuis 1982 [1], les abords par laparotomie ou par laparosco- Elle descend derrière l’iléon et gagne le bord mésentérique de
pie sont en compétition. l’appendice :
Dans l’état actuel des études comparatives, la laparotomie • soit en s’accolant à celui-ci près de sa base, puis en le suivant
garde des indications justifiées : jusqu’à sa pointe ;
• de principe ; • soit, le plus fréquemment, en se rapprochant peu à peu de
• de nécessité (conversion chirurgicale des laparoscopies). l’appendice en le pénétrant près de sa pointe.
Variations positionnelles
Anomalies de position de l’appendice par rapport
au cæcum
Si la base d’implantation est constante, la direction,
les rapports pariétaux et vasculaires de l’appendice sont
variables.
Anomalies positionnelles classiques
• Rétrocæcale (25 %) (Fig. 2B) ;
• pelvienne (5 %) (Fig. 2C) ;
• mésocœliaque (1 %) (Fig. 2D) ;
• disposition en entonnoir (Fig. 2E).
Anomalie positionnelle rare
Intramurale : elle correspond à un appendice localisé dans le
mur cæcal extrinsèque par rapport à sa séreuse et lui-même
Figure 1. Vascularisation normale. recouvert de péritoine.
Figure 2.
A. Position anatomique normale.
B. Appendice rétrocæcal.
C. Appendice pelvien.
D. Appendice mésocœliaque.
E. Appendice en entonnoir.
Anomalies numériques
L’absence congénitale complète d’appendice est rarissime
mais connue. La duplication appendiculaire est également très
rare (0,004 %) [2]. Dans le même ordre d’idée doit être signalée
la probabilité de diverticule appendiculaire (1 %) [3].
■ Appendicectomie
par laparotomie de principe
Les arguments principalement reconnus en faveur de la
laparoscopie sont [4] :
• l’avantage esthétique ;
• la diminution de la douleur et de la morbidité pariétale ;
• la réduction de la durée du séjour et de l’invalidité ;
• la possibilité de redresser un diagnostic erroné, surtout chez
la femme ;
• l’obésité [5].
En faveur de la laparotomie doivent être retenus :
• une reproductibilité plus accessible ; Figure 4. Incision aponévrotique.
• une durée d’intervention moyenne plus courte ;
• une fréquence moindre des abcès intra-abdominaux postopé-
ratoires [6] ;
• un coût hospitalier indiscutablement plus bas [7].
Les résultats des méta-analyses vont tous dans ce sens, mais
leurs qualités méthodologiques sont souvent critiquables [8-15].
Les avantages de l’appendicectomie par laparoscopie par
rapport à la laparotomie nécessitent des évaluations complé-
mentaires. Pour ces raisons, l’appendicectomie par laparotomie
reste à l’ordre du jour comme une technique encore
adaptée [16-18].
Figure 10.
A. Section appendiculaire.
B. Abrasion de la muqueuse du moignon.
C. Réintégration.
Figure 15.
A, B. Fermeture péritonéale.
Figure 17. Abord selon Jalaguier. Incision du feuillet postérieur de la Figure 18. Application d’une pince d’autosuture sur le bas-fond cæcal.
gaine.
Traitement du moignon appendiculaire
Agrandissement. L’incision cutanée verticale ou horizontale
est agrandie franchement vers le haut et/ou vers le bas en La querelle de l’enfouissement reste ancestrale. Les études
dehors et/ou en dedans. L’incision de l’aponévrose est large- prospectives randomisées sont très rares ; la supériorité de l’une
ment prolongée. Le plan musculaire est individualisé du plan ou l’autre méthode n’a jamais été prouvée. Seule pourrait être
péritonéal. Il est sectionné au bistouri électrique vers le haut et retenue une incidence toute relative sur les occlusions postopé-
vers le bas à distance du bord droit de la gaine du droit. ratoires tardives en faveur de la ligature simple [19].
Vers le bas, l’agrandissement peut éventuellement être en C’est de la qualité du traitement du moignon appendiculaire
conflit avec les vaisseaux épigastriques qui devront être alors liés et de son évolution que dépendent les probabilités de compli-
de principe. cations septiques locorégionales, voire générales de
La fermeture comprend, outre les plans déjà décrits, une l’appendicectomie.
réparation du plan musculaire. Il faut donc encore insister sur l’attention, la méticulosité, la
Cet agrandissement, quand il est nécessaire, suscite une des précision à accorder à ce moment de l’intervention.
critiques de l’abord de MacBurney puisqu’il réalise un délabre- L’attitude la plus logique est à notre sens :
ment musculaire. Les avantages de l’abord de MacBurney • de pratiquer l’enfouissement lorsque la base appendiculaire
compensent largement cet inconvénient peu fréquent. Incision est saine et qu’il est aisé à réaliser ;
par dissociation dans le sens des fibres de chaque plan muscu- • de ne pas pratiquer d’enfouissement lorsque les conditions
laire, il est au contraire, a priori, peu délabrant et surtout sa anatomiques ne s’y prêtent pas ou s’y prêtent mal (disposi-
réparation est solide. tion en entonnoir de l’implantation iléocæcale, appendice et
cæcum fixés en profondeur) ;
Abord de Jalaguier • de ne jamais pratiquer d’enfouissement lorsque la base
L’incision cutanée est verticale au niveau du bord externe du appendiculaire est inflammatoire.
grand droit. L’aponévrose antérieure de la gaine du grand droit Ligature simple sans enfouissement
est ouverte un peu en dedans de son bord externe. Le corps
musculaire est récliné en dedans (Fig. 17). Le feuillet postérieur Technique classique. C’est une ligature simple de la base
de la gaine est incisé également en dedans. Enfin, le péritoine appendiculaire déjà décrite. Elle est faite avant celle du méso. Le
est ouvert. La fermeture est réalisée si possible, plan par plan, traitement du moignon lui-même est réalisé après. Ces temps
péritoine et aponévrose postérieure puis aponévrose antérieure. peuvent être inversés.
Les avantages de l’abord de Jalaguier sont sa facilité d’agran- Autres techniques. Utilisation des appareils d’autosuture
dissement vers le haut et vers le bas et son caractère peu mécanique : il s’agit de la pince GIA® ou de la pince TA®. Cette
mutilant. utilisation paraît disproportionnée pour un appendice banal ; en
Ses désavantages tiennent : revanche, elle peut être valablement retenue et même sauver la
• à son inadéquation anatomique ; la zone opératoire iléoap- mise dans les cas rares d’une nécrose appendiculaire étendue au
pendiculaire est plus basse et plus externe ; bas-fond cæcal [20]. Il s’agit alors en fait d’une véritable résection
• au risque d’inoculation septique de la gaine du droit en cas cæcale. La pince TA® 55 est appliquée à distance de l’inflamma-
d’appendicite suppurée. tion (Fig. 18) et des limites de la nécrose qui peut s’étendre plus
Les indications devraient être réservées à l’incertitude dia- loin sur les plans muqueux internes. L’enfouissement du plan
gnostique, aux parois épaisses. d’agrafes par un surjet séroséreux est ici à proscrire du fait de
l’état inflammatoire et de la fragilité de la paroi cæcale.
Incision basse (Fig. 3)
Enfouissement
L’incision est horizontale oblique, basse, parallèle à l’arcade
crurale. La traversée des muscles devenus aponévrotiques se fait Outre la technique simple déjà décrite, de nombreuses
par section et non par dissociation. Le pédicule épigastrique options différentes ont été utilisées : enfouissement sans ligature
peut être rencontré. Cet abord est certainement plus esthétique de technique classique, selon la technique de Parker-Kerr [21], ou
parce que bas situé. En revanche, il s’adresse exclusivement à le procédé d’Halstedt et Leonel [22]). Ces procédés rarement
des lésions pelviennes. pratiqués n’ont plus qu’à être cités.
L’abcès vidé est largement drainé par contre-incision. La des écoulements de liquide digestif. La bourse d’enfouissement
fermeture cutanée est volontairement lâche. doit être parfaite ; le passage des points est strictement sous-
Abcès rétrocæcal. L’incision est plus haute et plus externe. séreux, sans transfixion. Si ceux-ci entraînent la formation d’un
Après évacuation et drainage, la localisation ectopique rétrocæ- hématome dans la paroi cæcale, le serrage de la bourse doit
cale de l’appendice est un argument pour remettre son exérèse normalement le contrôler.
à un temps ultérieur.
Abcès mésocœliaque. Dans la mesure où le diagnostic préopé- Plaies extradigestives
ratoire est certain, l’abord par voie médiane sous-ombilicale est
Tout existe, tout a été décrit. L’opérateur peut s’égarer lors de
préféré à celui de la fosse iliaque droite. La zone opératoire est
l’abord chirurgical dans l’espace rétropéritonéal lorsque l’inci-
isolée par des champs de la cavité abdominale ; l’abcès est
sion est trop externe ou trop basse. C’est ainsi que des plaies de
incisé, évacué, les anses abdominales sont libérées, les fausses
l’uretère, des plaies vasculaires extrapéritonéales, voire des plaies
membranes évacuées, l’appendicectomie réalisée. Le drainage est
du nerf crural [25] ont été vues.
indispensable et également extériorisé de principe par
Rappelons simplement le détail technique déjà décrit, qui a
contre-incision.
son importance : savoir, après la traversée du plan du transverse,
Abcès pelviens (abcès de Douglas). Ces localisations peuvent
chercher le péritoine vers le dedans, vers la ligne médiane, pour
justifier un drainage par voie extra-abdominale, l’appendicecto-
ne pas s’égarer dans l’espace rétropéritonéal.
mie étant pratiquée ultérieurement. Dans tous les cas d’évolu-
tion septique avancée lors de l’appendicectomie, la recherche du
Appendicectomies partielles
diverticule de Meckel est contre-indiquée, de même que son
traitement. Les conditions locorégionales difficiles ne justifient pas une
exérèse partielle. Si l’appendice est rompu lors des manipula-
Complications peropératoires tions, la partie restante doit être à tout prix enlevée, justifiant
un agrandissement et un complément de dissection.
Complications vasculaires
La qualité du contrôle du méso appendiculaire est évidem-
ment essentielle ; d’une part pour des raisons élémentaires qui
■ Appendicectomie
pourraient nécessiter une reprise chirurgicale urgente ; d’autre par laparotomie de nécessité :
part pour des raisons septiques, une suffusion hémorragique qui
en elle-même ne nécessite pas de geste immédiat peut être une conversion chirurgicale d’une
source d’infection locorégionale.
Dans le cas de méso bien individualisé à base étroite, la
laparoscopie
ligature est au besoin doublée de principe, et surtout, la section Indépendamment d’une éventuelle courbe d’apprentissage ou
du méso doit laisser un moignon étoffé. Toutes les variétés de l’expérience laparoscopique de l’opérateur, il est couramment
anatomiques peuvent naturellement être rencontrées. Dès que admis que le taux de conversion est de l’ordre de 5 à 10 % [26].
celle-ci est inhabituelle, plusieurs prises successives doivent être Quelles en sont les causes ?
assurées, d’autant que le méso est large et épais. Des points
complémentaires à l’aiguille sertie peuvent être nécessaires.
Un méso gras et épais œdématié et surtout inflammatoire
Difficultés de dissection
peut lâcher, déchirer sous les ligatures. Le contrôle du méso ne
Plastron appendiculaire
souffre aucune imperfection ni incertitude. Si le méso lâche
totalement ou partiellement, il doit être calmement repris et à L’impossibilité complète d’individualiser l’appendice dans un
nouveau contrôlé. magma inflammatoire locorégional peut obliger à une attitude
Si par malheur, et cela se voit, ce méso incorrectement raisonnable de conversion pour certains. Pour d’autres, l’appen-
contrôlé se rétracte et réintègre la cavité abdominale, il doit être dicectomie sera envisagée ultérieurement après antibiothérapie
complètement extériorisé. Ceci peut nécessiter un agrandisse- et simple drainage.
ment large de l’abord chirurgical initial, l’extériorisation
complète du cæcum et de la dernière anse grêle. Ce « sacrifice » Abcès appendiculaires
pariétal relatif est indispensable et ne se discute pas. Mieux vaut
Selon leur localisation (dans la fosse iliaque droite rétrocæcale
agrandir et contrôler un méso que refermer avec un doute sur
ou mésocœliaque), leur importance, leur retentissement sur les
la qualité d’une hémostase, sur le développement d’un héma-
organes de voisinage, ils peuvent aussi justifier un abord second
tome, voire sur la survenue d’un hémopéritoine qui nécessitera
par laparotomie.
de toute façon une réintervention.
Péritonites appendiculaires
Complications digestives
L’intervention en cœlioscopie est longue et difficile et
Plaies intestinales
nécessite un opérateur entraîné. C’est sur cet argument que la
Les plaies séreuses, séromusculaires, voire complètes, de la conversion peut être jugée recevable.
paroi intestinale (côlon ou grêle) peuvent survenir au moment
d’une ouverture péritonéale désinvolte. L’attention et la
précaution à accorder à l’ouverture péritonéale ont déjà été
Anomalies positionnelles
soulignées. La dissection d’un appendice rétrocæcal sous-séreux ou d’un
La plaie digestive reconnue est naturellement réparée immé- appendice mésocœliaque peut dépasser les possibilités de la
diatement. Méconnue, elle aurait des conséquences qu’il n’est cœlioscopie selon l’expérience de l’opérateur.
pas besoin de préciser. Une appendicectomie partielle, qui ne peut être complétée
Dans le même ordre d’idées, mais de moindre gravité, les dans le cadre de la cœlioscopie, nécessite une laparotomie.
dépéritonisations survenues lors des manœuvres de libération
« d’appendices difficiles » doivent être réparées avec soin par
points séparés de fil à résorption lente.
Complications peropératoires [27]
Moignon appendiculaire Hémorragie
Les gestes pratiqués dans le traitement du moignon appendi- Un saignement artériel sur le pédicule appendiculaire surve-
culaire doivent être simples et très attentionnés. Les manœuvres nant lors de sa section après coagulation bipolaire doit être
parfois compliquées de certaines techniques d’enfouissement rapidement contrôlé, sinon la conversion rapide est une
avec ou surtout sans ligature peuvent entraîner des suintements, nécessité.
pas d’explication, avec le plus souvent une région appendicu- extériorisation de la fistule, réanimation parentérale, voire
laire intacte, un peu de pus péritonéal. La fermeture sur résection intestinale avec anastomose immédiate, geste qui ne
drainage est réalisée. devrait être pratiqué qu’après régression des phénomènes
Dans le deuxième cas, la règle absolue est la réintervention inflammatoires.
immédiate [33] par voie de MacBurney élargie ou plutôt par voie
médiane, avec toilette péritonéale et drainage découvrant un Occlusions
état de fonte purulente de la base appendiculaire qui nécessite
une résection cæcale. • Précoces, elles surviennent dans le premier mois postopéra-
toire ; fonctionnelles en grande majorité, elles peuvent être
Péritonites [35] aussi dues à des adhérences au niveau d’un foyer inflamma-
Elles sont dues : toire persistant avec des zones de dépéritonisation. La
• soit à un lâchage du moignon ; résistance à une réanimation correcte impose une réinterven-
• soit à des nécroses du moignon sans lâchage ; tion toujours par voie médiane pour supprimer la cause
• soit à des nécroses du bas-fond cæcal sphacélé [36]. mécanique de l’occlusion.
Le tableau péritonéal et fébrile avec une note occlusive plus • Tardives, elles sont exclusivement dues à des brides. La
ou moins prononcée est précoce. Il n’existe pas d’intervalle réintervention, toujours par voie médiane, consiste la plupart
libre. La reprise du transit a été souvent incomplète ou sous du temps en la simple section de la bride.
forme de diarrhées. Les signes généraux sont marqués ; l’état
général est rapidement atteint.
La réintervention est obligatoirement faite par larges incisions ■ Conclusion
médianes sus- et sous-ombilicale ; les adhérences sont libérées,
l’abcès collecté est évacué, la cavité péritonéale est lavée et Si l’appendicectomie pour appendicite est moins fréquente,
drainée avec éventuellement une irrigation-lavage. Des gestes elle reste totalement banalisée dans l’esprit du grand public. De
particuliers sont discutés par les remaniements de la région ce fait les complications évolutives en sont encore moins
iléocæcale : tolérées. Les éviter suppose :
• une suture à points séparés, une réparation par des bourses, • un respect draconien des principes d’hémostase et de traite-
une section cæcale à la pince TA® sont adaptées à l’état du ment du moignon appendiculaire ;
moignon appendiculaire ; • un agrandissement de l’abord chirurgical dès que l’appendi-
• une résection iléocæcale et une mise à la peau constituent un cectomie est difficile quelles qu’en soient les raisons ;
extrême parfois inévitable. • une attitude raisonnable :
Il faut rappeler également l’existence de péritonites multilo- C de laparotomie de principe en fonction des données
culaires avec plusieurs localisations d’abcès collectés. Elles préopératoires et du terrain ;
posent en particulier le problème difficile d’une voie d’abord C de conversion de cœlioscopie en laparotomie devant
élective pour un abcès, qui méconnaîtrait la diffusion périto- certaines complications peropératoires et en fonction de
néale du sepsis. l’expérience cœlioscopique de l’opérateur.
Abcès résiduels .
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A. Marrie, ancien interne et assistant des hôpitaux de Strasbourg, ancien chef de clinique à la faculté de médecine (docteur.marrie@wanadoo.fr).
2A, boulevard Roosevelt, 68200 Mulhouse, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Marrie A. Appendicectomies par laparotomie pour appendicite. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris),
Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-500, 2008.
Le côlon, ou gros intestin, s’interpose entre grêle et rectum. Pour le chirurgien, il comporte principalement
deux portions : le côlon droit vascularisé par les branches de l’artère mésentérique supérieure, et le côlon
gauche vascularisé par l’artère mésentérique inférieure. Il dessine un cadre dans la cavité abdominale et,
dans ses différents segments, entre ainsi successivement en rapport avec la presque totalité des viscères
intra-abdominaux. On doit distinguer les segments coliques accolés (ascendant et descendant) des
segments mobiles (transverse et sigmoïde) amarrés par un long méso libre. Le mésocôlon transverse
sépare la cavité abdominale en deux étages distincts, sus- et sous-mésocolique. Le mésosigmoïde isole le
petit bassin. La vascularisation colique est décrite en tenant compte de l’importance pratique des arcades
artérielles (coloplasties) et du drainage lymphatique (chirurgie carcinologique).
© 2006 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Morphologie externe
Le côlon se différencie en principe aisément de l’intestin
grêle par son calibre plus important, son apparence bosselée
et sa coloration plus pâle, gris bleuté. Les bosselures ou
haustrations sont séparées par des étranglements qui font
saillie dans la lumière sous la forme de plis semi-lunaires. La
surface colique est en outre parcourue par des bandelettes
blanchâtres, condensation de la couche musculaire externe
longitudinale d’environ 1 cm de large, qui le segmentent
longitudinalement. Ces bandelettes sont au nombre de trois
du cæcum au sigmoïde, l’une antérieure (sur le bord libre), les
deux autres postérolatérales. Au niveau du sigmoïde, les
bandelettes se réduisent à deux, une antérieure, l’autre
postérieure, pour disparaître un peu au-dessus de la jonction
colorectale. [2]
Ces bandelettes coliques sont souvent, pour le chirurgien, la
zone élective d’une colotomie : la paroi épaissie et fibreuse à
leur niveau est plus aisée à saisir et elle présente plus de
résistance. Lorsque l’on incise le côlon sur une bandelette, il
faut le faire en son milieu afin d’éviter une rétraction asymétri-
que de la paroi. Au niveau des haustrations, la paroi colique est
plus mince, la musculeuse s’y trouvant réduite à la seule couche
circulaire.
Figure 1. Situation générale du cadre colique. Outre le grand épiploon, des amas graisseux, les franges
épiploïques, s’insèrent sur les portions droites et surtout gauches
avec leur vascularisation artérielle et veineuse propre, leur du côlon, de part et d’autre des bandelettes. Elles peuvent être
drainage lymphatique indépendant et une innervation particulièrement volumineuses et gênantes chez l’obèse.
séparée. [1] Lorsqu’elles doivent être réséquées, il faut les sectionner après
Selon Loygue, le côlon droit, et plus particulièrement le côlon les avoir liées au fil fin, à petite distance de la paroi car un
ascendant « gros et court, sorte de sac distendu par les gaz, que diverticule muqueux peut s’y inclure.
5
3
2
6
7
A
Figure 2.
A. Morphologie générale du côlon, transverse et épiploon relevés. 1. Cæcum ; 2. côlon ascendant ; 3. angle droit ou angle hépatique ; 4. côlon transverse ;
5. angle gauche ou angle splénique ; 6. côlon descendant ; 7. côlon iliaque.
B, C. Apparence radiologique. Le sommet d’une anse sigmoïde longue, en réplétion, peut se situer dans la fosse iliaque droite.
Figure 4.
A, B, C, D. Développement et rotation de l’anse intestinale primitive.
Figure 6. Les zones fixes (côlon accolé) (3) s’opposent aux zones
mobiles (côlon flottant) (1). Des zones charnières (angles coliques et côlon
un V renversé qui limite vers le haut la fosse sigmoïde (Fig. 8).
iliaque) (2) les séparent.
D’autant plus long que l’anse sigmoïde est longue, il a une
morphologie variable avec le degré d’infiltration graisseuse : il
peut être pellucide et long, et le sigmoïde est alors facilement
manipulable, ou court et épais fixant pratiquement le côlon
dans la fosse iliaque.
Grand épiploon
Au niveau du transverse, le côlon donne attache au grand
épiploon (grand omentum). Celui-ci a la forme d’un tablier
appendu à l’estomac et étalé dans la cavité abdominale devant
la masse des anses grêles. Il passe au-devant du côlon transverse
et est fixé latéralement au diaphragme par des replis infiltrés de
graisse : les « ligaments » phrénicocoliques. Son aspect varie
avec l’âge et l’obésité. Il est formé d’un repli du péritoine du
mésogastre postérieur qui se détache de la grande courbure
gastrique, descend devant le côlon puis remonte pour adhérer
à la face supérieure du mésocôlon transverse avant de rejoindre
le péritoine pariétal postérieur, limitant ainsi l’arrière-cavité des
épiploons ou bourse omentale. Entre grande courbure gastrique
et côlon, fusionné avec le feuillet supérieur du mésocôlon
transverse, il prend le nom de ligament gastrocolique. Celui-ci
peut être clivé (décollement coloépiploïque) sans toucher à la
vascularisation colique. Un plan avasculaire (Fig. 9) entre
feuillet épiploïque et feuillet mésocolique est plus ou moins aisé
à trouver selon l’adiposité du méso : le chirurgien peut être aidé
par la différence entre la structure fine du méso et le caractère
granuleux de l’épiploon. En pratique, ce décollement coloépi-
ploïque est rarement totalement avasculaire et il est plus aisé à
gauche qu’à droite de la ligne médiane, sans doute en raison du
repli que forment les veines d’origine du tronc gastrocolique.
■ Exploration et exposition
du côlon
Figure 7. La racine du mésocôlon transverse croise de droite à gauche L’exploration de la totalité du cadre colique nécessite en
et de bas en haut le duodénopancréas, puis elle longe le bord inférieur du chirurgie ouverte une voie d’abord large : longue médiane ou
corps et de la queue du pancréas. Au-dessous, la racine du mésentère est transversale. La voie d’abord cœlioscopique peut être utilisée :
oblique vers le bas et la droite. La racine du mésosigmoïde dessine un V elle permet de suivre la morphologie externe des segments
inversé au-dessus des vaisseaux iliaques gauches. coliques mobiles mais sauf pour leur face superficielle, les
segments fixes, tout comme en chirurgie ouverte, ne pourront
être explorés qu’après décollement colopariétal. La voie cœlio-
verticale, amarrant de court la portion terminale du sigmoïde et scopique ne permet pas de palper une éventuelle lésion :
la jonction rectosigmoïdienne. Sa ligne d’insertion dessine donc l’association d’une endoscopie peropératoire peut être un
elle s’étale plus ou moins, ou rectum et organes génitaux chez La disposition la plus habituelle serait, dans 66 % des cas, un
la femme. Elle atteint ainsi la paroi latérale droite du pelvis. Elle tronc commun donnant une artère colique gauche et une artère
peut parfois avoir un trajet pelviabdominal et aller jusqu’à la sigmoïdienne associée à une seconde artère sigmoïdienne, la
fosse iliaque droite. Elle est toujours en rapport direct en haut vascularisation du sigmoïde pouvant se faire à partir d’une
avec les anses intestinales. artère unique (10 %), de deux artères (58 %), de trois (28 %),
ou de quatre (4 %).
Les veines coliques gauches suivent, comme à droite, les axes
■ Vascularisation artériels correspondants. Le confluent des veines sigmoïdiennes
constitue l’origine de la veine mésentérique inférieure. Celle-ci,
Vaisseaux du côlon droit en haut, se détache du tronc de l’artère mésentérique inférieure
pour rejoindre l’artère colique gauche (formant ainsi l’arc
Les artères viennent de l’artère mésentérique supérieure. On vasculaire du mésocôlon gauche ou arc de Treitz). Elle s’en
distingue ainsi : sépare pour, derrière le pancréas, se jeter dans la veine splénique
• l’artère colique ascendante, branche de l’artère iléocolique, et constituer le tronc splénomésaraïque.
qui vascularise la portion initiale du côlon ascendant, Les lymphatiques ont également la même topographie qu’à
l’appendice et le cæcum par ses branches appendiculaires, droite. Le groupe central mésentérique inférieur se situe à
cæcales antérieures et postérieures ; l’origine de l’artère, autour de l’aorte sous-mésocolique. Son
• l’artère colique droite, ou artère de l’angle droit, qui remonte extirpation implique la ligature « sur l’aorte » de l’artère
vers l’angle droit à la partie haute du fascia d’accolement ; mésentérique inférieure après libération et bascule du quatrième
• une artère intermédiaire (inconstante) qui peut aller de la duodénum.
mésentérique supérieure vers la partie moyenne du côlon Le drainage lymphatique du côlon transverse pose un pro-
ascendant. Elle ne serait présente que dans 10 % des cas ; [4] blème au chirurgien car il s’effectue, soit vers les collecteurs
• l’artère colique ascendante et l’artère colique moyenne droits, soit vers les collecteurs gauches, soit, lorsqu’il existe, le
peuvent naître d’un court tronc commun dans 40 % des cas long du pédicule colique moyen (colica media), c’est-à-dire
selon Nelson ; [5] directement vers les collecteurs périaortiques rétropancréatiques
• l’artère colique moyenne (colica media) qui naît haut, qui sont inaccessibles à l’exérèse.
directement de la mésentérique supérieure au bord inférieur
du pancréas. Elle est courte et se dirige dans le mésocôlon
transverse vers l’union tiers moyen-tiers gauche du côlon Répartition des artères coliques.
transverse : cette artère est très variable dans son calibre, son Arcade paracolique
trajet et son mode de division. Une origine à partir de l’artère À 2 ou 3 cm du bord interne du côlon, chaque artère colique
splénique a été décrite. [6] Elle est inconstante, présente dans se divise en T et s’anastomose avec les branches correspondan-
environ 80 % des cas mais elle peut, paradoxalement, être tes des artères sus- et sous-jacentes. Ainsi se forme tout le long
exceptionnellement prédominante. [7] du cadre colique, du cæcum à la jonction rectosigmoïdienne,
Les veines coliques droites suivent les axes artériels en les une arcade marginale, parfois dédoublée, notamment au niveau
croisant par en avant pour se jeter dans la veine mésentérique de l’angle droit ou du transverse. Cette arcade vasculaire
supérieure à son bord droit. La veine colique droite peut s’unir paracolique ou arcade de Riolan (Drummond marginal artery pour
à la veine gastroépiploïque droite et la veine pancréaticoduodé- les anatomistes anglo-saxons) relie les territoires mésentériques
nale supérieure et antérieure pour former le tronc veineux supérieur et inférieur et permet une suppléance artérielle
gastrocolique (tronc de Henle). Pour le chirurgien, ce tronc suffisante sur tout le cadre colique en cas d’interruption d’un de
veineux relativement court chemine dans une condensation ses piliers. Cette arcade n’est pas normalement visible sur une
cellulograisseuse à la partie haute du fascia d’accolement artériographie : elle n’apparaît qu’en cas d’anomalie circula-
colique, vers le bord droit du mésentère, juste sous la racine du toire. [10] De ce fait, le « point critique » au niveau de l’angle
mésocôlon transverse : il peut être d’identification et de gauche (point de Griffith) est de signification discutée. [11]
contrôle malaisés lors de la ligature première des vaisseaux L’arcade bordante serait absente dans 5 % des cas au niveau du
coliques droits dans les colectomies réglées pour cancer. côlon droit, l’anastomose côlon droit/côlon gauche étant
Les lymphatiques coliques suivent les pédicules artériovei- constante. [5]
neux. Les ganglions (nœuds) lymphatiques se répartissent en De l’arcade naissent les vaisseaux droits qui gagnent le bord
cinq groupes : interne du côlon. La vascularisation pariétale colique a des axes
• groupe épicolique, au contact de la paroi intestinale ; essentiellement transversaux : les colotomies transversales sont
• groupe paracolique, au contact de l’arcade bordante ; moins hémorragiques que les incisions longitudinales.
• groupe intermédiaire, le long des pédicules ;
• groupe principal à l’origine des branches coliques sur l’artère Conséquences pratiques
mésentérique ;
• groupe central, périaorticocave, à la face postérieure de la tête Lors de la ligature de l’artère mésentérique inférieure, le
pancréatique (confluent rétroportal). chirurgien devra prendre garde à respecter les branches nerveu-
Le curage lymphatique, lorsqu’il est nécessaire, implique ses qui sont proches de son origine : les rameaux préganglion-
toujours le sacrifice des pédicules vasculaires correspondants. [8] naires sympathiques vont former le plexus hypogastrique
Le groupe central n’est pas accessible à l’exérèse. supérieur devant l’aorte abdominale, entre l’origine de l’artère
mésentérique inférieure et la bifurcation aortique. Si le plexus
est en dehors et en arrière du plan du fascia, ses éléments
Vaisseaux du côlon gauche restent proches du plan de dissection carcinologique. Il est donc
Les artères coliques gauches viennent de la mésentérique conseillé de ménager les tissus celluloganglionnaires qui
inférieure ; elles comprennent dans la description classique : entourent le premier centimètre de l’artère. [12] L’ouverture du
• l’artère colique gauche (artère de l’angle gauche) qui naît de plan d’accolement postérieur (qui prolonge en haut le plan du
la mésentérique inférieure à 2 ou 3 cm de son origine fascia recti) permet ensuite le décollement atraumatique du
aortique, derrière le duodénopancréas. Elle gagne l’angle mésosigmoïde.
gauche par un trajet récurrent proche de la racine du méso- Sauf intervention antérieure ou pathologie artérielle associée,
côlon transverse gauche ; la ligature à l’origine des pédicules artériels droits ou gauches en
• les artères sigmoïdiennes, au nombre de trois, qui peuvent cas d’exérèse carcinologique réglée ne met pas en jeu la vascu-
naître d’un tronc commun, branche de la mésentérique, ou larisation du côlon restant. La mobilisation complète du côlon
isolément à partir de celle-ci. Une origine commune artère gauche et du transverse, pédiculisés après résection rectale sur
colique gauche/tronc des sigmoïdes a été décrite. [9] les vaisseaux coliques droits, permet ainsi des anastomoses
Cette disposition classique ne serait pas la plus fréquente ; colonales avec suffisamment de longueur pour y associer la
selon Nelson, [5] elle ne concernerait que 16 % à 30 % des cas. réalisation d’un court réservoir colique.
■ Innervation
“ Points forts L’innervation autonome du côlon provient d’un réseau
préaortique complexe, formé à partir de la chaîne prévertébrale
• Pour le chirurgien, le côlon comprend deux parties : le abdominale qui reçoit des fibres parasympathiques du nerf
côlon droit vascularisé par des branches de l’artère pneumogastrique droit par l’intermédiaire des ganglions
cœliaques, et des fibres sympathiques (orthosympathiques) du
mésentérique supérieure, le côlon gauche vascularisé par
tronc latérovertébral (nerfs petits splanchniques). Les ganglions
l’artère mésentérique inférieure. La limite entre ces deux forment deux plexus : le plexus mésentérique crânial (supé-
parties se situe à l’union tiers moyen/tiers gauche du côlon rieur), destiné à l’innervation du côlon droit, est autour de
transverse. l’origine de l’artère mésentérique supérieure. Ses fibres suivent
• Les segments latéraux, verticaux du côlon (côlons les axes artériels. Les ganglions du plexus mésentérique infé-
ascendant et descendant) sont fixés en arrière par les rieur, destiné au côlon gauche, sont groupés autour de l’origine
accolements des fascias de Toldt. Les segments médians de l’artère mésentérique inférieure. Entre les deux plexus se
(transverse et sigmoïde) sont mobiles avec un mésocôlon situe un riche réseau anastomotique : le plexus inter-
libre et flottant. mésentérique.
• Encadrant la cavité abdominopelvienne, le côlon est en La reconnaissance de ces éléments nerveux et de leur systé-
matisation n’a pas d’utilité pratique pour le chirurgien.
rapport direct ou indirect avec pratiquement tous les
.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Gallot D. Anatomie chirurgicale du côlon. EMC (Elsevier SAS, Paris), Techniques chirurgicales - Appareil
digestif, 40-535, 2006.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Guyot M, Conge M et Montandon S. Appareillages des dérivations digestives. Prise en charge technique et relationnelle des colostomisés et iléostomisés définitifs ou temporaires.
Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-550, 2000, 9 p.
40-550 Appareillages des dérivations digestives Techniques chirurgicales
non stomathérapeute, dans une action complémentaire à celle du 3 Malposition d’une co-
chirurgien, représente la présence nécessaire qui adoucit la rigueur, lostomie : dans un pli en po-
et la brutalité d’un diagnostic, dit sans joie, quelle que soit la sition assise.
douceur avec laquelle il a été formulé.
En décembre 1994, l’Association nationale pour le développement
de l’évaluation médicale (ANDEM [4]), au terme de la conférence de
consensus sur le choix des thérapeutiques du cancer du rectum,
précise : « L’information préalable des malades est indispensable.
La qualité de vie doit être prise en considération dans le choix du
traitement proposé, sans remettre en cause l’efficacité carcinologique.
Le jury recommande que les répercussions psychologiques, sociales
et économiques des traitements soient mieux appréciées et que la
qualité de vie soit évaluée dans les études thérapeutiques avec la
contribution de stomathérapeutes, de psychologues cliniciens et des
associations de stomisés. »
2
Techniques chirurgicales Appareillages des dérivations digestives 40-550
*
A *
B
*
C *
D
*
C *
D
3
40-550 Appareillages des dérivations digestives Techniques chirurgicales
6 Laboratoire Convatec.
A. Poches une pièce fermées Naturesst (A et D) et Colo-
dressy Plus avec protecteur cutané intégral. Filtre.
B. Poches fermées deux pièces Consécurat et Combihé-
sivet avec supports normaux, protecteur cutané intégral
(ultra ou plus ou protecteur + adhésif microporeux (sou-
ple) et support convexe. Emboîtage sans clip. Filtre.
C. Poches vidables une pièce Iléodressy Plus ; Stoma-
dressy ; Naturesst. Protecteur cutané intégral. Clamp de
fermeture. Filtre sur Naturesst.
*
A *
C D. Poches vidables deux pièces : Consécurat et Combihé-
sivet avec supports normaux, protecteur cutané intégral
(ultra ou plus) ou protecteur + adhésif microporeux sou-
ple et support convexe. Pas de filtre sauf sur poche grande
capacité (non photographiée).
*
B *
D
7 Laboratoire Hollister.
A. Poches fermées une pièce Nuancet Confort ; Mo-
dermat. Protecteur cutané intégral. Filtre.
B. Poches fermées deux pièces Duo avec support normal
et convexe, protecteur cutané intégral. Emboîtage sans
clip. Filtre. Poches fermées ovales Solo, une pièce avec pro-
tecteur cutané intégral, à découper si stomie ovale ou dans
un pli. Filtre.
C. Poches vidables une pièce Nuance Maxit ; Nuance
Solot ovale ; Nuancet Light et Nuancet Confort. Protec-
teur cutané intégral. Clamp de fermeture. Filtre sur la
Nuancet Lightt.
*
A *
C D. Poches vidables deux pièces Duo avec support normal
protecteur cutané intégral et support convexe. Clamp
de fermeture. Pas de filtre. Emboîtage sans clip.
*
B *
D
¶ Accessoires
– Une ceinture peut être adaptée pour renforcer un appareillage, en
particulier chez des personnes peu actives ou au contraire très
actives, comme des enfants par exemple ; de toute façon, la ceinture
ne doit pas être portée très serrée.
– Protecteurs cutanés : ils existent en plaques, pâte en tube,
bandelettes, anneaux (fig 8).
RÉALISATION DE L’APPAREILLAGE
D’UNE STOMIE NORMALE [3, 10, 13] – nettoyage de la peau : elle sera simplement lavée à l’eau du robinet.
Elle comporte quatre temps : C’est un soin d’hygiène courant, semblable à celui réalisé lors de la
– mesure du diamètre de la stomie : des anneaux de mesure sont toilette après avoir été à la selle. Il n’est nul besoin de compresses, a
disponibles dans les boîtes, pour effectuer le calibrage. La découpe fortiori de compresses stériles. Le séchage doit être parfait ;
de la poche ou du support est supérieure de 3 mm au diamètre de – pose de la poche : elle est faite minutieusement en commençant par
la stomie ; la partie inférieure, puis en remontant et en appliquant le tout à
4
Techniques chirurgicales Appareillages des dérivations digestives 40-550
l’aide d’une pression du plat de la main (poche une pièce). Le SOINS SELON LE TYPE DE STOMIE
support du système deux pièces est appliqué en insistant pour faire
adhérer le centre de l’anneau avant l’emboîtage de la poche ; ¶ Soins aux porteur d’une colostomie sigmoïdienne
(tableau I)
– entretien : si une poche une pièce est utilisée, celle-ci est remplacée
une à deux fois par 24 heures (colostomisés). Les stomisés Les selles sont moulées et des gaz en quantité variable sont évacués.
choisissent le moment de ce soin en fonction de leur mode Le stomisé utilise généralement une poche fermée munie d’un filtre.
d’évacuation : à jeun pour les iléostomisés, après une selle émise à Une possibilité peut lui être offerte : c’est la pratique de l’irrigation
heure régulière pour les colostomisés sigmoïdiens. colique, qui peut compenser la perte du contrôle de l’évacuation
En cas d’utilisation d’un système deux pièces, le support peut rester des selles par la stomie, en pouvant choisir le moment de
en place plusieurs jours (de 2 à 7) tant qu’il n’y a pas de fuite. Si la l’évacuation.
poche utilisée est fermée, elle est changée une à deux fois par Son principe repose sur l’évacuation du gros intestin par
24 heures ; si la poche est vidable, elle est fermée à l’aide d’un clamp l’administration d’un lavement évacuateur tous les 2 ou 3 jours, à
qui permet la vidange au moment et à l’endroit souhaités, toujours heure fixe.
avant que la poche ne soit trop pleine et risque ainsi de faire décoller
le système. Indications. Contre-indications
L’achat du matériel se fait sur ordonnance détaillée établie après le Cette technique est exclusivement réservée aux porteurs de
choix définitif par le chirurgien (préciser le type de stomie, le colostomie gauche qui ont la totalité de leur tube digestif et donc
diamètre de prédécoupe ou de l’anneau, le modèle de poche et le des selles de consistance normale, pouvant être stockées dans le
laboratoire fabricant). Les produits de stomathérapie sont côlon pendant plusieurs jours.
remboursés par la Sécurité sociale selon des tarifs régulièrement L’irrigation est contre-indiquée, ou du moins risque d’être moins
révisés, les produits remboursables doivent être vendus au prix efficace, chez des personnes âgées, en mauvais état général,
indiqué sur les boîtes. débilitées, gênées visuellement ou manuellement. L’indication doit
Les ordonnances doivent être faites pour 2 à 3 mois et le être posée avec précaution en cas de maladie diverticulaire ou de
renouvellement par un médecin doit se faire après vérification de la côlon irradié ; elle peut être déconseillée chez des sujets ayant des
stomie, de sa taille, de l’état de la peau, afin d’adapter la nouvelle antécédents d’angine de poitrine grave ; en cas de colopathie
prescription à la situation actuelle. spasmodique, elle peut être inefficace.
Les infirmières stomathérapeutes (entérostomathérapeutes [ET]) sont Les irrigations doivent être interrompues en cas de diarrhées, et ne
régulièrement informées par les fabricants des améliorations doivent être reprises qu’après vérification et traitement éventuel de
apportées et des nouveaux produits. Elles doivent être les conseillers la cause déclenchante, et le retour d’un transit normal.
en matière de choix pour les stomisés, car la taille, l’aspect de la Cette dernière recommandation explique en partie la diminution
stomie peuvent évoluer en fonction de la modification de poids, de constatée depuis quelques années du nombre de stomisés adoptant
l’apparition de prolapsus, d’éventration (fig 9) ; négliger ces cette méthode. En effet, une chimiothérapie ou une radiothérapie
évolutions peut créer des incidents : compressions, blessures, postopératoires sont de plus en plus souvent mises en route. Les
hémorragies. modifications du transit occasionnées par ces traitements font que
Le rôle des ET est de savoir reconnaître ces incidents, leur origine la technique de l’irrigation colique ne peut être enseignée
locale ou générale : récidive de la maladie causale, association rapidement après l’intervention. Cette situation est responsable de
morbide telle que la caput medusae, signe d’une hypertension la moindre motivation des stomisés à utiliser une méthode
portale. Elle doit en avertir le chirurgien ou le médecin traitant. demandant environ 1 heure alors qu’ils ont pris l’habitude de
changer leur appareillage en quelques minutes.
5
40-550 Appareillages des dérivations digestives Techniques chirurgicales
11 Introduction du cône.
6
Techniques chirurgicales Appareillages des dérivations digestives 40-550
¶ Soins aux porteurs d’une iléostomie (tableau III) [1, 3, 10, 13]
7
40-550 Appareillages des dérivations digestives Techniques chirurgicales
Le port d’un appareillage de recueil ne peut être supprimé. Il faut ulcérohémorragique, maladie de Crohn) ou d’un cancer, le dégoût à
donc que celui-ci soit effectué de manière correcte ; un montage l’idée de la présence sur son corps de matières dans une poche de
(pâte, protecteur, poche) peut demander impérativement la présence recueil, constituent pour le malade autant de chocs successifs devant
d’une infirmière stomathérapeute. lesquels il a besoin de temps pour faire face à l’épreuve.
Ce temps d’apprentissage est très variable, mais le but est que la
personne stomisée devienne autonome le plus rapidement possible.
Approche psychologique Les durées de séjour de plus en plus réduites ne permettent pas
de la personne stomisée [3, 7, 8, 10, 13] toujours d’atteindre ce but avant la sortie. C’est pourquoi il est
indispensable que la continuité des soins soit organisée, en maison
de convalescence, au domicile, en consultation externe par une
La création d’une dérivation digestive entraîne des répercussions infirmière stomathérapeute.
psychologiques variables selon que la stomie est définitive ou
temporaire. Les laboratoires éditent des brochures qui peuvent servir de base et
sont très utiles pour les nouveaux stomisés : il ne faut pas hésiter à
En cas de stomie définitive, un travail de deuil débute dès l’annonce leur distribuer.
de la nécessité de la chirurgie ; il est lié aux pertes que va subir le
malade : perte de la santé, de sa fonction d’élimination ; modification
de son image corporelle (cicatrice et stomie) ; parfois perturbations Stomathérapeutes [3, 6, 10, 13]
8
Techniques chirurgicales Appareillages des dérivations digestives 40-550
Buts de la fédération : La FSF est présente sur tout le territoire par ses associations locales
et régionales. Son adresse est : 76-78 rue Balard, 75015 Paris ; tél :
– aider les stomisés qui le désirent à résoudre leurs problèmes de
01 45 57 40 02 ; fax : 01 45 57 29 26 ; Web : www. fsf. asso.fr ; E-mail :
réinsertion ;
contact @ fsf.asso.fr.
– encourager la formation médicale et paramédicale
(stomathérapie) ;
– favoriser l’information sur les appareillages et sur certaines Conclusion
pratiques médicales en vue d’assurer un meilleur confort aux
stomisés tout en allégeant les charges de la collectivité ; En conclusion, nous ne saurions trop souligner l’importance des soins
adaptés, personnalisés et compétents que nécessitent les malades
– promouvoir la recherche afin de perfectionner les techniques stomisés afin de faciliter leur retour à une vie aussi normale et aussi
chirurgicales et les appareillages ; satisfaisante que possible.
– informer l’opinion publique par tout moyen, à propos des La mise en assurance qualité des soins aux personnes stomisées
problèmes médicaux et sociaux des stomisés ; représente un atout à l’heure des demandes d’accréditation des
établissements de soins. Elle permet également, en assurant une gestion
– encourager la réalisation de centres de réinsertion ;
efficace des soins et des matériels, de diminuer les coûts, en particulier
– développer, sous toutes les formes, des échanges avec les en évitant les gaspillages de matériels et des complications locales aux
associations analogues et notamment avec celles groupées au sein traitements longs et coûteux.
de l’International Ostomy Association (IOA) et l’European Ostomy Une équipe pluridisciplinaire, avec une infirmière ET, représente donc
Association (EOA). un avantage certain.
Références
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Springer-Verlag, 1993 tion et l’aide aux stomisés. Hier, aujourd’hui et encore nique. Rev Infirm (Fiche technique) 1980 ; n° 22
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9
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 40-575
40-575
Mots-clés : occlusion, côlon, cancer colique, lavage colique peropératoire, colectomie subtotale.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Tuech JJ, Pessaux P et Arnaud JP. Cancers du côlon en occlusion. Principes de tactiques et de techniques opératoires. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier
SAS, Paris, tous droits réservés), Techniques chirurgicales – Appareil digestif, 40-575, 2001, 7 p.
40-575 Cancers du côlon en occlusion Techniques chirurgicales
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Techniques chirurgicales Cancers du côlon en occlusion 40-575
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40-575 Cancers du côlon en occlusion Techniques chirurgicales
4
Techniques chirurgicales Cancers du côlon en occlusion 40-575
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40-575 Cancers du côlon en occlusion Techniques chirurgicales
ANASTOMOSE
LAVAGE COLIQUE
ILÉORECTALE
PEROPÉRATOIRE
ILÉOSIGMOÏDIENNE
ANASTOMOSE
8 Organigramme décisionnel devant un cancer colique en occlusion.
de l’intestin (fig 7). La mobilisation du côlon droit et du côlon
transverse se fait de façon prudente et délicate car le contenu
intestinal est hautement septique et une effraction colique peut avoir Conclusion
des conséquences désastreuses.
En cas de deuxième localisation néoplasique, les ligatures Le traitement du cancer du côlon droit en occlusion est relativement
vasculaires se font à l’origine des pédicules vasculaires concernés. simple et n’est pas source de polémique. En revanche, le traitement du
Le rétablissement de la continuité se fait en général par une cancer du côlon gauche en occlusion est un problème complexe ayant
anastomose iléosigmoïdienne latérolatérale ou iléorectale considérablement évolué au cours de ces dernières d’années. Ce
latéroterminale manuelle. Pour notre part, nous préférons réaliser problème demeure une cause de débat entre chirurgiens. Même si nous
une anastomose iléosigmoïdienne ou iléorectale latéroterminale défendons la résection avec lavage colique peropératoire et anastomose
manuelle, l’iléon terminal étant sectionné à l’aide d’une pince d’emblée (fig 8), il est des cas où la réalisation d’une simple stomie
d’agrafage section linéaire. permet de régler temporairement un problème aigu.
6
Techniques chirurgicales Cancers du côlon en occlusion 40-575
Références
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Paris), Techniques chirurgicales – Appareil digestif, 40-500, gnant left-sited large bowel obstruction managed by tion in the management of obstructed left colon carci-
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7
¶ 40-560
L’hémicolectomie droite est l’exérèse réglée pour les cancers situés entre le cæcum et l’angle droit. Cet
article décrit : le dispositif opératoire et la voie d’abord ; l’exposition du champ opératoire ; les différents
temps de l’exérèse (ligatures vasculaires et curage lymphatique, sections intestinales) ; les modalités de
rétablissement de la continuité digestive avec les différents procédés d’anastomoses manuelles et
mécaniques ; les difficultés opératoires et les variantes tactiques, avant tout liées au siège et à l’extension
tumorale.
© 2006 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Plan
A 2
1 B
6 5
Rétablissement de la continuité digestive Si l’on ne dispose pas d’agrafeuse, c’est seulement au moment
de l’anastomose qu’est sectionné le côlon et il est possible de
Dans la technique prise pour type de description, la section réaliser alors une anastomose terminoterminale manuelle.
de principe, en cours d’exérèse, du côlon à la pince agrafeuse Nous décrirons successivement :
conduit à faire une anastomose iléocolique terminolatérale. • l’anastomose terminolatérale manuelle qui, dans notre
Nous avons l’habitude de la faire manuellement. technique, succède au temps d’exérèse décrit ;
Figure 9. Péritonisation. Affrontement par points séparés du mésentère Figure 10. Section iléale. La pose d’une pince de Kocher présente le
et du mésocôlon, la pièce opératoire étant attirée vers le haut. Le rappro- grêle pour la coupe.
chement de l’iléon terminal et du transverse se fait naturellement.
La suture est faite en commençant par l’angle gauche (supé-
• l’anastomose terminoterminale manuelle ; rieur) du plan postérieur (Fig. 11) qui est noué en dedans. Il est
• les anastomoses mécaniques. utile, pour coudre avec un parfait contrôle de l’écartement des
points, d’ouvrir l’angle que font le côlon et l’iléon. Le plan
Anastomoses manuelles antérieur est fait ensuite, les points étant noués à l’extérieur.
La suture digestive terminée, la brèche péritonéale restante,
Anastomose terminolatérale manuelle
entre mésentère et mésocôlon, est refermée par des points en X,
Le côlon droit ayant été attiré sur la base du thorax, l’iléon jusqu’au contact de l’intestin.
terminal est rapproché « naturellement » de l’extrémité colique
transverse distale. Ce rapprochement doit se faire sans aucune Anastomose terminoterminale manuelle
tension. Au point choisi pour sa section, le grêle est dénudé sur Les zones de section iléale et colique isolées par les champs
15 à 25 mm, puis une pince type Kocher est posée perpendicu- sont sectionnées en même temps. Si la section colique est
lairement en aval. toujours strictement perpendiculaire, la section iléale doit
Le champ opératoire est alors protégé par deux grandes presque toujours être oblique pour corriger l’incongruence des
compresses abdominales qui vont isoler le temps d’ouverture extrémités à suturer. Afin de préserver la vascularisation iléale,
intestinale. L’iléon est sectionné, soit aux ciseaux droits (ce qui cette coupe oblique se fait aux dépens du bord
donne une coupe nette et un utile « débord » de muqueuse), antimésentérique.
soit au bistouri (une face après l’autre, en exposant à chaque Quatre pinces de Babcock présentent alors côte à côte les
fois le plan sous-muqueux, ce qui permet la coagulation élective segments intestinaux que l’on suture, toujours au fil fin à
immédiate des petits vaisseaux pariétaux (Fig. 10). Une section résorption lente, là encore soit par surjet, soit par points séparés
au bistouri électrique est également possible. extramuqueux, la suture se faisant toujours pour l’opérateur « de
La colotomie est faite longitudinalement ou plutôt, pour loin vers soi ».
nous, transversalement, à 2 ou 3 cm de la ligne d’agrafes, sur S’il supprime le temps de suture du cul-de-sac colique, il ne
une hauteur égale au diamètre iléal : le cul-de-sac colique doit semble pas que ce type d’anastomose ait d’autres avantages,
être court. Nous faisons la colotomie le plus souvent sur la face fonctionnels notamment, qui en justifieraient la pratique
inférieure du transverse : cela facilite le positionnement de systématique.
l’anastomose et son isolement de la paroi par l’épiploon restant.
Deux pinces atraumatiques, type pince de Babcock, présentent Anastomoses mécaniques
la paroi colique qui est incisée jusqu’au plan sous-muqueux, L’usage des pinces à suture automatique permet un établisse-
pour nous au bistouri à lame, pour d’autres au bistouri ment de la continuité digestive peut-être plus rapide que
électrique. l’anastomose manuelle, mais il n’est pas démontré que ce mode
Pour nettoyer les lumière iléale et colique, nous utilisons des de rétablissement soit plus sûr [1].
compresses imbibées d’une solution iodée, en évitant autant Les modalités d’utilisation des pinces automatiques pour la
que possible l’usage d’un aspirateur qui traumatiserait la réalisation de ces anastomoses iléotransverses sont diverses, avec
muqueuse et la ferait saigner. l’usage d’une ou de deux agrafeuses linéaires.
L’extrémité iléale sectionnée est mise en place en regard de Leur usage est limité par leur coût et l’absence de bénéfice
la colotomie : des pinces de Babcock ne prenant que les démontré par rapport aux techniques manuelles.
muqueuses présentent les berges à suturer.
La suture iléocolique est faite en un plan unique, soit par Anastomose latérolatérale mécanique
points séparés extramuqueux, soit le plus souvent par deux Elle peut se faire à l’aide d’une seule pince linéaire d’agrafage/
hémisurjets toujours extramuqueux. On utilise du fil serti à section, en utilisant trois chargeurs.
résorption lente, très fin : 0000, voire 00000 lorsque le grêle est Au moment où la pièce est enlevée, l’iléon est sectionné
de petit calibre. comme l’a été le côlon. Puis le grêle est appliqué parallèlement
Figure 11.
A, B, C. Anastomose manuelle terminolatérale. La colotomie peut aussi se faire longitudinalement sur la bandelette inférieure. L’anastomose est
immédiatement suivie de la fin de la péritonisation.
▲ Mise en garde
Précautions à prendre, quelle que soit l’anasto-
mose réalisée
• L’intestin grêle et le côlon doivent être méticuleu-
sement dépouillés afin de permettre une parfaite
application des agrafes sans interposition
• Ce dépouillement ne doit en rien compromettre la
vitalité des tranches intestinales : comme pour une
anastomose manuelle, il faut toujours s’assurer de la
bonne vascularisation des extrémités coliques et iléales, en
particulier en cas de recoupe après agrafage latérolatéral
premier Figure 12. Anastomose mécanique latérolatérale. Quelques points re-
fermeront les orifices d’introduction des branches de la pince agrafeuse.
• Il faut toujours vérifier l’hémostase des lignes
d’agrafage : ceci nécessite l’exposition correcte et
complète de la ligne d’anastomose à l’aide d’écarteurs L’anastomose, laissée libre, est recouverte si possible par
type Farabeuf ou de pinces de Babcock à travers les orifices l’épiploon restant. Il est surtout essentiel qu’elle repose « natu-
d’introduction des branches de la pince agrafeuse rellement » à distance de la médiane : ici, à droite du billot
rachidien.
Sauf difficulté particulière, un drainage de la zone de décol-
lement n’est pas le plus souvent nécessaire. Lorsqu’il paraît
utile, on utilise soit un ou deux drains aspiratifs (type drain de
au transverse de façon isopéristaltique (Fig. 12) et la pince Jost-Redon), soit une lame tubulée siliconée (Scurasil®), courte
introduite par deux courtes incisions. L’anastomose iléocolique
et sortant par une contre-incision latérale déclive sus-iliaque.
latérolatérale faite, les orifices d’introduction de la pince sont
Les derniers champs abdominaux sont enlevés, le grêle libéré
refermés par un court surjet de fil à résorption lente.
est remis en ordre et la paroi est fermée plan par plan (surjets
Anastomose mécanique « terminalisée » de fil à résorption lente), de haut en bas.
Cette technique nécessite l’utilisation d’une pince d’agrafage
linéaire et d’une pince d’agrafage/section.
Deux points appliquent parallèlement, de façon anisopéris-
■ Variantes tactiques et difficultés
taltique, l’iléon et le transverse l’un contre l’autre. Les incisions opératoires
nécessaires à l’introduction de la pince d’agrafage/section sont
faites au bistouri : ces orifices partiront avec la pièce : ils doivent Certaines variantes tactiques peuvent être rendues nécessaires
donc être plutôt en amont sur les zones dépouillées, mais pas du fait :
trop, pour ne pas compromettre la vascularisation des tranches • de la conformation du malade ;
intestinales. • du siège de la tumeur ;
L’anastomose faite, les culs-de-sac sont simultanément fermés • de l’extension de la maladie cancéreuse.
et l’intestin est sectionné (Fig. 13). Les cancers en occlusion sont traités dans un autre article.
Conformation du malade
Drainage et fermeture
Elle peut amener à modifier la voie d’abord et à choisir un
Les champs de protection sont enlevés, puis les champs abord transversal plutôt que l’habituelle médiane. Ceci est assez
humides encore tassés dans la loge d’exérèse. exceptionnel pour nous : sujet bréviligne, particulièrement
La dernière anse grêle est étendue dans le flanc droit devant obèse. On peut dans ces cas, mais d’autres le font de routine,
la zone dépéritonisée qu’elle recouvre : il est inutile de la fixer. utiliser un abord horizontal du flanc droit, débordant la ligne
Figure 13.
A, B. Anastomose mécanique latérale terminali-
sée. Il n’y a pas dans cette technique de section
intestinale préalable à l’anastomose.
médiane en passant à un ou deux travers de doigt au-dessus de Il est, la plupart du temps, possible de refermer la brèche
l’ombilic. Cette incision va dans le flanc jusqu’à la ligne péritonéale. Un drain aspiratif intrapariétal peut être nécessaire.
axillaire moyenne. Lorsque l’envahissement intéresse la paroi postérolatérale et
Il est moins rare de devoir renoncer à une ligature première fixe la tumeur en arrière, il faut avant la section pariétale, dans
des vaisseaux chez un opéré particulièrement profond et gras, la masse musculaire, s’être assuré, par une dissection aussi
en raison de l’épaisseur des mésos : la sécurité de la dissection poussée que nécessaire, que l’uretère n’est pas englobé dans la
peut nécessiter un décollement colopariétal premier. lésion.
Figure 14.
A, B. Recouvrement d’une perte de substance duodénale.
Si l’anse préanastomotique vient facilement sur D2, une autre anse plus proximale peut aussi être utilisée.
Si donc une réimplantation dans une vessie psoïque n’est pas Lorsque la tumeur paraît fixée ou peu mobile, il faut avant
possible, il faut envisager, lorsque l’état du rein gauche le toute ligature vasculaire ouvrir le péritoine en dehors, au niveau
permet et si l’extension de la maladie l’autorise, une néphrec- de la tumeur, mais à distance de celle-ci, et commencer le
tomie associée. clivage du fascia de Toldt droit, aux ciseaux spatulés, au tampon
ou au doigt, en réclinant si nécessaire le côlon et la masse
Envahissement du fond de la vésicule biliaire tumorale par une valve malléable.
Il peut se faire par contiguïté pour les cancers proches de Si le passage est libre, si la lésion exposée peut être prise dans
l’angle droit : il est traité par cholécystectomie associée [4, 5]. la main et le duodénum bien dégagé, il est possible de repren-
dre l’exérèse de façon réglée, de dedans en dehors, après ligature
des vaisseaux.
Adhérence limitée au foie (segment V)
En revanche, lorsque la tumeur fait corps avec le bloc
Elle peut justifier une exérèse atypique, emportant en mono- duodénopancréatique, il faut poursuivre de dehors en dedans,
bloc la tumeur colique et son extension hépatique [6]. en ouvrant complètement la gouttière pariétocolique, en
Cet élargissement de l’exérèse ne nous paraît justifié que si libérant l’angle droit et en dégageant largement le côlon
l’envahissement hépatique est limité et n’interdit pas un but au-dessus et au-dessous de la zone fixée. Ceci doit permettre
curatif à l’exérèse. De façon pratique, la décision étant prise, il d’apprécier s’il s’agit d’un envahissement duodénal limité ou
nous paraît préférable de commencer par libérer complètement d’une adhérence large, débordant sur la face antérieure de la
le côlon pour pédiculiser la pièce sur l’adhérence hépatique :
tête pancréatique. Il faut se méfier d’une « adhérence inflam-
ceci permet au mieux d’en apprécier les limites avant la section
matoire » : toute adhérence serrée suppose, si l’on veut garder
du foie.
un but curatif, un élargissement de l’exérèse. Des extemporanées
Celle-ci peut se faire sous clampage total du pédicule hépati-
peuvent être utiles.
que, pris en masse dans un gros clamp vasculaire. L’incision de
la capsule de Glisson au bistouri électrique délimite les limites C’est en l’absence d’extension à distance (foie, péritoine,
de l’exérèse, puis on sectionne le parenchyme en l’écrasant par ganglions centraux ...) et en fonction des facteurs de risques
digitoclasie, ou à l’aide d’une pince avec hémostases électives opératoires que se discute, pour chaque opéré, une exérèse
des pédicules. Une application de colle biologique sur la tranche élargie ; celle-ci n’est justifiée [8] que pour une chirurgie R0 :
peut être utile. • en cas d’envahissement duodénal limité, le duodénum est
Les exérèses hépatiques ainsi réalisées sont le plus souvent des ouvert, au bistouri, au pourtour de l’adhérence tumorale, à
résections cunéiformes de la pointe du foie droit : il peut environ 1 cm des limites macroscopiques de la lésion ;
cependant être légitime de faire une véritable lobectomie droite. après exérèse, les berges sont rapprochées en un plan
Un drainage sous- et rétrohépatique peut être nécessaire. Il extramuqueux par une suture que l’on s’efforce de transver-
n’est pas systématique. saliser ;
• en cas de perte de substance étendue sur le duodénum, une
Envahissement du bloc duodénopancréatique suture directe fiable n’est plus possible ; on peut utiliser soit
C’est la plus fréquente des contre-indications à l’exérèse. Elle un patch séreux, en montant une anse grêle proche, soit plus
peut être soupçonnée sur l’imagerie préopératoire [6-8]. volontiers pour nous une anse jéjunale exclue en J (Fig. 14,
Lorsque le cancer siège sur la partie haute du côlon ascendant 15).
ou sur l’angle droit, il est essentiel de toujours s’assurer, dès le De telles exérèses duodénales partielles ne sont possibles que
début de l’intervention, de la liberté de passage à ce niveau. sur la face antéroexterne du deuxième duodénum ou du genu
■ Cancers infectés
Souvent, la suppuration péricolique, résultat d’une perfora-
tion tumorale cloisonnée, est une découverte opératoire : elle
n’est une contre-indication ni à l’exérèse, ni au rétablissement
immédiat de la continuité digestive.
Elle impose toutefois certaines modifications tactiques et
B certaines précautions opératoires :
Figure 15. • isolement immédiat du champ opératoire afin d’éviter une
A, B. Montage en Y. En cas de large perte de substance, en particulier dissémination septique péritonéale ;
dans la région périampulaire, la confection d’une anse en Y peut permet- • assèchement de la suppuration à l’aspirateur après prélève-
tre d’éviter une exérèse duodénopancréatique. ment du pus pour culture et antibiogramme ;
• ligatures vasculaires seulement après libération complète de la
tumeur et mobilisation colopariétale, que les phénomènes
inferius : il faut toujours, si l’on se rapproche du bord interne, inflammatoires rendent toujours malaisées ;
penser à la papille et la repérer de principe, par canulation • drainage large de la zone d’exérèse ;
transcysticocholédocienne, avant toute résection. • report de l’anastomose très à distance de la zone de suppura-
Lorsque l’extension tumorale s’étend vers le bord interne du tion et en la faisant porter sur des parois intestinales parfai-
deuxième duodénum, on peut essayer de réaliser une duodé- tement saines, c’est-à-dire sur le transverse, à gauche de la
nectomie partielle, ainsi que l’a proposé Gautier-Benoit (Fig. 16). ligne médiane.
Ce geste n’est toutefois envisageable que si l’atteinte duodénale Le développement d’une suppuration péritumorale n’est
est basse, sous-papillaire, et il est carcinologiquement moins qu’exceptionnellement l’indication d’un drainage direct pre-
logique que la duodénopancréactectomie céphalique associée. mier, chirurgical ou mieux échoguidé, d’une collection du flanc
Celle-ci est, de toute façon, le seul geste possible si la tumeur ou de la fosse iliaque. L’excision de ce trajet de drainage doit
déborde le bord interne du duodénum et envahit la face être associée à l’exérèse.
A
Figure 17. Colectomie droite et duodénopancréatectomie associée.
A. Schéma de l’exérèse.
B. Vue opératoire de la fin du temps d’exérèse. La section pancréatique se
fait à droite de l’axe veineux. La section duodénale peut se faire sans
décroisement.
C. Schéma du montage terminal. Une péritonisation complète est néces-
saire ; elle peut être malaisée.
■ Cancers avec métastases faire au sein d’une unité de concertation multidisciplinaire. Elle
impose la réalisation d’un examen tomodensitométrique
La prise en charge des cancers du côlon droit avec métastases thoraco-abdomino-pelvien avec injection d’un produit de
hépatiques synchrones dépend du caractère résécable ou non contraste iodé. Elle doit déterminer la stratégie thérapeutique et
des localisations secondaires [2, 9, 10]. « au mieux amener à inclure le patient dans un essai
La résécabilité des métastases doit toujours être discutée sur clinique » [2].
des critères techniques et carcinologiques. Cette discussion, En pratique, la chirurgie des métastases hépatiques synchro-
reposant sur le rapport risque/bénéfice de l’intervention, doit se nes est recommandée lorsque la résection est complète (R0) au
D. Gallot (denis.gallot@bjn.aphp.fr).
Hôpital Beaujon, service de chirurgie colorectale, 100, boulevard du Général-Leclerc, 92118 Clichy cedex, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Gallot D. Colectomie pour cancer du côlon droit par voie ouverte. EMC (Elsevier SAS, Paris), Techniques
chirurgicales - Appareil digestif, 40-560, 2006.
La colectomie segmentaire gauche basse réglée pour cancer du sommet de l’anse sigmoïde est prise pour
type de description détaillée de l’intervention. Sont successivement décrits : le dispositif opératoire et la
voie d’abord ; l’exposition du champ opératoire ; les différents temps de l’exérèse : ligatures vasculaires et
curage lymphatique, sections intestinales ; les modalités de rétablissement de la continuité digestive avec
les différents procédés d’anastomoses manuelles et mécaniques. Les difficultés opératoires et les variantes
tactiques, avant tout liées au siège et à l’extension tumorale, sont ensuite décrites.
© 2006 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Plan
3
Exérèse
Ligatures vasculaires
Figure 2. Installation et voie d’abord : une position permettant un L’exérèse débute par le temps de ligature vasculaire.
double abord peut être une précaution utile en cas de lésion « rectosig- La ligature de l’artère mésentérique inférieure doit se faire au
moïdienne ». 1. Opérateur : il passe à droite de l’opéré pour le temps de ras du bord inférieur du troisième duodénum, donc pratique-
mobilisation colique ; 2. premier aide ; 3. deuxième aide ; 4. anesthésiste. ment toujours en aval de l’artère colique supérieure gauche qui
n’est pas recherchée de principe.
De façon pratique, deux valves tenues par l’aide et placées de
à gauche vers le haut : il faut toujours penser à de possibles part et d’autre de la saillie aortique refoulent la masse intesti-
difficultés d’abaissement du côlon gauche et à la nécessité de nale vers le haut et exposent le bord inférieur du duodénum.
rétracter le rebord costal pour mobiliser largement l’angle L’opérateur saisit le pédicule mésentérique de sa main gauche -
gauche. même lorsque le mésosigmoïde est très épais, les battements
La tablette d’instruments, indépendante de la table pour en artériels sont facilement repérés -, et le tend à 45° vers le bas.
permettre la bascule ou le roulis, est au-dessus de la tête de Le péritoine pariétal est alors incisé, à droite, verticalement sur
l’opéré, toujours à main droite pour l’opérateur : celui-ci est à toute la hauteur de la racine primitive du mésosigmoïde puis
gauche. Deux aides, à droite, lui font face. sur la saillie du paquet vasculaire aussi haut que possible
Il est dans certains cas prudent d’installer de principe l’opéré (Fig. 3). Le décollement postérieur, séparant le méso du plan
en position dite « à double équipe », par exemple lorsque l’on cellulograisseux rétropéritonéal, est amorcé afin de protéger les
a une localisation endoscopique « sigmoïdienne distale », et que éléments nerveux pré- et latéroaortique [1, 2]. Le pédicule est
l’on envisage l’utilisation d’une pince à suture automatique par aminci, chargé en plusieurs prises et lié. Il nous paraît préférable
voie transanale. de lier tout le tissu celluloadipeux périartériel en raison de
Une sonde vésicale est mise en place par le chirurgien en l’importance des troncs lymphatiques qui le parcourent. On
début d’installation. peut, pour faciliter le temps suivant, poser en retour une pince
La voie d’abord est pour nous médiane, aussi longue que forte, type pince de Kelly, qui sera laissée en place comme
nécessaire. En bas, l’incision doit descendre jusqu’au pubis, tracteur.
fendre la gaine des droits, jusqu’à leur insertion, et ouvrir le La section du feuillet antérieur du mésosigmoïde est poursui-
péritoine jusqu’à la vessie. vie à gauche jusqu’à la découverte de la veine mésentérique,
séparée là de 10 à 15 mm de l’artère. Elle est à son tour liée et
Exploration et exposition du champ sectionnée au même niveau ; l’uretère gauche plus profond
opératoire peut, par sécurité, être préalablement repéré, notamment chez
les sujets maigres (Fig. 4).
Avant la mise en place des écarteurs autostatiques, les aides
Une traction douce dans l’axe du mésosigmoïde écarte
écartent et soulèvent la paroi à l’aide d’une ou de deux valves
celui-ci du plan préaortique qu’il convient de respecter. Il ne
et l’opérateur s’assure de l’absence de métastases hépatiques : la
faut pas racler la face antérieure de l’aorte sur laquelle chemine
palpation d’une anomalie au niveau du foie peut nécessiter
le plexus hypogastrique : ses éléments nerveux, visibles chez le
d’agrandir l’incision pour la voir, et éventuellement, la biopsier.
sujet maigre, sont difficiles à reconnaître chez un obèse.
La main explore ainsi tout l’étage sus-mésocolique, puis la valve
de Rochard est mise en place vers le bas, l’écarteur de Gosset Mobilisation du côlon sigmoïde.
vers le haut, et le malade est basculé en position de Trende-
lenburg aussi accentuée que possible.
Sections mésocoliques
L’épiploon et le transverse sont extériorisés, la masse des Ce temps débute par le repérage et le dégagement de l’uretère
anses grêles est maintenue par les mains de l’aide et l’on gauche (Fig. 5). Nous avons l’habitude de l’enchaîner directe-
apprécie les conditions d’extirpabilité locale de la tumeur. On ment après les ligatures artérielles et veineuses principales en
évalue son volume, sa topographie, sa mobilité. La fixité de la recherchant l’uretère par en dedans derrière le plan du fascia de
lésion, son adhérence au plan profond, en particulier au niveau Toldt.
des vaisseaux iliaques, interdisent toute ligature vasculaire Le segment d’aval du pédicule mésentérique étant maintenu
première : il faut d’abord s’assurer de la possibilité de l’exérèse. en traction plus ou moins verticale par l’aide, l’opérateur
On apprécie l’existence d’adhérences aux organes voisins recherche le plan de dissection à partir de la veine, de la pointe
(épiploon, grêle, annexes gauches, dôme vésical...). On recher- de ses ciseaux fermés, en repoussant doucement vers le bas les
che une extension métastatique péritonéale pelvienne. Enfin, tissus qu’il soulève. L’uretère est très vite vu : cordon blanchâtre,
Figure 3. Section de l’artère mésentérique au bord inférieur de D3 : le Figure 4. Section de la veine mésentérique. Dans le tissu celluleux
péritoine est ouvert au bord droit de la racine du mésocôlon, de la préaortique descend le plexus hypogastrique.
gouttière pararectale au duodénum. Une discrète traction sur l’axe vascu-
laire ouvre dans le tissu celluleux le plan séparant le mésocôlon des tissus
rétropéritonéaux. un court rétrécissement du calibre intestinal là où disparaissent
les bandelettes coliques. Se repérer par rapport au fond du cul-
entouré de fins vaisseaux, parallèle à l’axe rachidien dans ce de-sac de Douglas nous paraît une erreur : la profondeur et la
segment, et surtout mobile. Ses contractions péristaltiques morphologie de celui-ci sont trop variables.
caractéristiques peuvent, si besoin, être déclenchées par une Dans l’intervention prise pour type (tumeur du sommet de
chiquenaude du bout des ciseaux. l’anse sigmoïde), les incisions droite et gauche du péritoine
Une fois repéré, l’uretère est dégagé et suivi sur toute la pariétal vont donc devoir être poursuivies jusqu’aux bords
hauteur accessible, de son segment iliaque au croisement avec latéraux du haut rectum, en regard du point choisi pour la
les vaisseaux iliaques primitifs gauches. Le pédicule génital, en section. À droite, le décollement du méso est poursuivi dans le
dehors, est de même dégagé et refoulé en arrière. La main plan avasculaire qui prolonge vers le haut le plan du mésorec-
gauche de l’opérateur peut alors charger le sigmoïde et son tum. On expose ainsi l’origine de l’artère iliaque primitive droite
méso, et les rabattre vers la droite : la libération de la racine et l’uretère droit est vu, en dehors. À gauche, la dissection se
secondaire du mésosigmoïde se fera ainsi simplement, l’uretère fait dans le même plan, en suivant l’uretère de très près, puis
étant en sûreté derrière la main du chirurgien (Fig. 6). en le repoussant après le croisement des vaisseaux iliaques
En dehors, dans la gouttière, de fréquentes adhérences lorsqu’il s’éloigne en dehors dans le pelvis. Au niveau même du
colopariétales sont coagulées et sectionnées. La réflexion de la croisement avec les vaisseaux iliaques, l’uretère, immédiatement
racine secondaire du mésosigmoïde proprement dite est ensuite sous-péritonéal, est très proche. Une traction excessive sur le
incisée et cette ouverture remonte d’emblée, haut dans la rectum vers le haut et l’avant peut aussi exposer les nerfs
gouttière pariétocolique : il est en effet toujours nécessaire de hypogastriques. L’intégrité nerveuse n’est difficile à respecter
décoller largement le fascia de Toldt gauche pour rétablir que lorsque la tumeur est bas située, volumineuse, envahissant
correctement, c’est-à-dire sans aucune tension, la continuité en arrière le méso et atteignant le plan du fascia.
digestive. Hémostase par coagulations. La section du méso doit se faire avec une marge d’au moins
L’opérateur se retourne alors vers le bas : une traction 5 cm par rapport au pôle inférieur de la tumeur colique. Elle
supplémentaire peut être nécessaire sur l’écarteur de Rochard, et comporte la section des deux branches terminales de l’artère
une valve malléable est parfois utile pour refouler la vessie et rectale supérieure [3].
mieux exposer la charnière rectosigmoïdienne. L’aide bascule le côlon vers le bas, ce que la libération du
Quel que soit le siège de la lésion cancéreuse sur l’anse sigmoïde rend possible, et les ciseaux vont charger en prises
sigmoïde, la ligature haute de l’artère mésentérique inférieure successives tout le tissu celluloadipeux qui se tend entre le haut
implique l’ablation complète du côlon sigmoïde : la vascularisa- rectum et la paroi postérieure. L’usage d’un bistouri ultrasoni-
tion de sa portion terminale devient en effet dans ces condi- que est également possible, mais il n’a pas d’avantage démontré.
tions trop incertaine pour y faire porter l’anastomose. La coupe La face postérieure de la jonction colorectale est ainsi dépouillée
distale doit donc se faire sur le haut rectum, juste en dessous de sur environ 3 cm.
la charnière rectosigmoïdienne. Lorsqu’on attire l’intestin vers le Vers l’amont, la coupe doit se faire au moins à une dizaine
haut, celle-ci, dont la position anatomique normale est au de centimètres de la limite supérieure de la lésion : dans le cas
niveau de S3-S4, remonte pratiquement en regard du promon- d’une lésion du sommet de l’anse sigmoïde, elle portera sur la
toire. Elle est presque toujours nettement visible, marquée par jonction sigmoïdo-iliaque (Fig. 7). L’anse sigmoïde est donc
Figure 8. La charnière rectosigmoïdienne dégagée est prise entre deux Figure 9. Préparation des extrémités coliques et rectales. Le rectum
clamps. La pièce est enlevée. Les compresses abdominales isolant le peut aussi être pris dans un clamp vasculaire placé en aval de la section.
champ opératoire pendant le temps « septique » ne sont pas représen-
tées.
région opératoire, par une incision longitudinale faite plus
souvent entre deux bandelettes que sur l’une d’elles. Cette
Rétablissement de la continuité digestive colotomie est faite au bistouri en exposant progressivement le
plan sous-muqueux et en coagulant au fur et à mesure des
Dans la technique prise pour type de description, nous vaisseaux sous-muqueux. Une ouverture au bistouri électrique
rétablissons la continuité digestive par anastomose colorectale est possible. Lors de l’ouverture muqueuse, le contenu colique
manuelle latéroterminale. doit être aspiré ou évacué en s’aidant de compresses humides.
D’autres procédés sont possibles : anastomose terminotermi- Les berges de l’incision sont présentées par deux pinces
nale ou utilisation de pinces à suture automatique mais celle-ci atraumatiques (type pince de Babcock) ne prenant que la
n’a pas, à ce niveau, les indiscutables avantages qui sont les muqueuse.
siens au niveau du rectum moyen [4].
Le rectum, attiré vers le haut et l’avant, est exposé à l’aide du
Nous décrivons successivement :
clamp. Sa face postérieure est incisée aux ciseaux au ras du
• l’anastomose latéroterminale manuelle qui, dans notre
clamp tracteur (Fig. 9). La musculeuse se rétracte et expose le
pratique, succède au temps d’exérèse décrit ;
plan sous-muqueux et ses vaisseaux qui sont coagulés. Cette
• l’anastomose terminoterminale manuelle ;
section musculaire doit déborder sur les angles pour faciliter le
• les principes des anastomoses mécaniques.
repérage du tracé antérieur. La suture du plan postérieur peut se
faire avant ouverture de la muqueuse rectale (ce qui a l’avantage
Anastomoses manuelles
d’éviter la « fuite » vers le bas de la paroi rectale postérieure), en
Anastomose latéroterminale faisant bouffer celle-ci à l’aide du clamp, abaissé à chaque passée
Critiqué par certains car laissant un cul-de-sac dont la d’aiguille (Fig. 10).
surveillance endoscopique pourrait être difficile, ce mode de La suture manuelle est faite au fil fin à résorption lente
rétablissement de la continuité a notre préférence car il sup- (0000), soit à points séparés, soit par surjets. Dans tous les cas,
prime les difficultés liées à une possible incongruence, et qu’il la suture colorectale se fait, pour nous, en un seul plan extra-
est le plus facile, la convexité de l’anse colique d’amont se muqueux, le plan postérieur étant noué en dedans et la suture
positionnant naturellement en regard du rectum. De toute étant menée de la droite vers la gauche (« de loin vers soi » pour
façon, le cul-de-sac colique est très court (1 ou 2 cm). La l’opérateur).
longueur de la colotomie dépend du calibre du rectum exposé Le serrage des nœuds en profondeur peut être délicat : le
sur clamp. risque pour l’opérateur néophyte est beaucoup plus dans l’excès
Nous employons la technique dite de l’anastomose sur clamp - et le fil coupe - que dans le défaut de serrage.
avec recoupe. L’ablation de la pièce facilite l’exposition de la La face antérieure du rectum est ensuite sectionnée progres-
face postérieure du rectum, et permet d’en compléter plus sivement d’un angle à l’autre, l’hémostase sous-muqueuse par
aisément la préparation, en particulier au niveau de ses bords coagulations fines étant faite pas à pas. La muqueuse est
latéraux qui doivent être nettement dégagés. Il n’y a pas, la sectionnée et la recoupe dans le clamp jointe à la pièce princi-
plupart du temps, de préparation nécessaire sur la face anté- pale pour examen anatomopathologique. Lorsque après ablation
rieure, péritonisée, du haut rectum. du clamp la paroi rectale a tendance à trop fuir vers le bas, il
Le côlon ayant été sectionné de façon « propre », son ouver- peut être utile de passer immédiatement un point médian sur
ture se fait sur le bord antimésocolique, après isolement de la ce plan antérieur.
Anastomoses mécaniques
Ces anastomoses colorectales qui portent sur le haut rectum
- la « jonction rectosigmoïdienne » - peuvent se faire mécani-
quement en combinant l’utilisation de pinces automatiques
linéaires d’agrafage simple ou d’agrafage/section.
Anastomoses latéroterminale
et terminoterminale avec pince agrafeuse
circulaire
Ces techniques ne sont pas d’utilisation courante au niveau
du haut rectum. La description détaillée de ces gestes est faite
dans le chapitre traitant des exérèses rectales.
B
Péritonisation, drainage, fermeture
Figure 12. Anastomose mécanique latérolatérale isopéristaltique.
Le temps de péritonisation n’est plus aujourd’hui considéré
A. Introduction des mors de l’agrafeuse.
comme indispensable.
B. Aspect final après fermeture par agrafage des orifices d’introduction
Lorsqu’elle est faite, la fermeture du péritoine rapproche bord
des mors.
à bord le péritoine pariétal postérieur à droite (attention à
l’uretère, car la séreuse s’est rétractée !), et le feuillet antérieur du
mésocôlon gauche. Cette suture est menée jusqu’au contact de
l’anastomose par surjet ou points séparés de fil fin (0000) à
résorption lente (Fig. 14).
Si certains ne drainent pas, ou rarement, pour notre part,
nous drainons volontiers l’espace de décollement postérieur par
un drain aspiratif, type Redon, positionné derrière l’anastomose.
Il peut s’y associer un deuxième drain aspiratif en haut, en cas
de décollement large du fascia de Toldt.
Enfin, le grêle est remis en ordre. La dernière anse est étendue
pour exclure le petit bassin, l’épiploon recouvre la masse des
anses intestinales et la paroi est refermée plan par plan, de haut
en bas.
Conformation du malade
Il est tout à fait exceptionnel d’avoir à choisir, du fait de la
conformation de l’opéré, une autre voie d’abord que la
médiane. On a pu proposer, chez le bréviligne obèse, une
incision transversale sous-ombilicale : nous ne pensons pas
qu’elle facilite réellement l’intervention, et il n’est pas certain
qu’elle ait un moindre retentissement respiratoire.
Une incision « cosmétique » dans le pli abdominal inférieur
peut aussi être utilisée.
Il est très rare pour nous d’avoir à renoncer à la ligature
première haute des vaisseaux mésentériques chez un malade
particulièrement obèse et nous ne croyons pas à l’expérience
qu’il soit plus facile de trouver l’uretère en le cherchant de
dehors en dedans. Si elle n’impose donc pas de réelle variante
tactique, la conformation du patient, c’est-à-dire avant tout son
adiposité, peut néanmoins complètement transformer l’atmo-
sphère de l’intervention et la rendre très laborieuse et longue...
Siège de la tumeur
Le siège de la tumeur peut nécessiter une modification de la
résection. Pour les cancers situés sur la branche d’amont du
sigmoïde, la coupe colique doit être plus haute, et le traitement
des cancers du sigmoïde initial se rapproche de celui des cancers
du côlon iliaque. De même la tactique chirurgicale pour les
cancers du bas sigmoïde (« rectosigmoïdiens ») est, à peu de
chose près, celle des cancers ampullaires du rectum.
Dans un cas comme dans l’autre, l’élargissement de la
résection implique toujours une large mobilisation du côlon Figure 15. Mobilisation complète du côlon gauche : libération de tout
restant pour le descendre avec sécurité au contact de la tranche le fascia de Toldt gauche.
rectale. Cette mobilisation peut successivement imposer :
• un décollement complet du fascia de Toldt gauche ; Il faut libérer l’angle de bas en haut, en disséquant par en
• une mobilisation de l’angle gauche ; arrière en laissant la rate à distance et en restant sous son
• une ou plusieurs recoupes vasculaires. ligament suspenseur. Il sera néanmoins parfois nécessaire de
sectionner délicatement de petites brides fibroadipeuses unissant
Décollement du fascia de Toldt le pôle inférieur de la rate à la corne gauche du grand épiploon :
ceci évite les arrachements intempestifs. La rate doit parfois être
Il nécessite que l’opérateur passe à droite de l’opéré. Un réclinée doucement par un tampon monté la refoulant vers le
certain degré de roulis vers la droite peut être donné à la table haut. L’angle colique est effacé sous un champ que maintient
d’opération : cette bascule écarte du flanc la masse des anses la main gauche de l’opérateur, et l’incision du péritoine pariétal
grêles et facilite l’exposition de la gouttière pariétocolique. Une est prolongée, de bas en haut, au pourtour de la convexité de
valve tenue par un aide écarte et soulève la paroi, la main l’angle splénique. Celui-ci est progressivement complètement
gauche de l’opérateur efface le côlon. dégagé, d’abord en arrière. Durant cette manœuvre, l’intestin est
On ouvre alors vers le haut, aux ciseaux, le péritoine pariétal récliné vers le haut : il n’y a aucune traction sur le ligament
postérieur au bord externe du côlon, en prolongeant l’incision suspenseur (Fig. 16). Le tissu celluleux sous-péritonéal est
faite au temps de mobilisation du sigmoïde (Fig. 15). progressivement repoussé, toujours de bas en haut, puis de
Puis, les ciseaux fermés repoussent en arrière le tissu celluleux gauche à droite. L’hémostase est assurée pas à pas par coagula-
rétropéritonéal, la main gauche attirant progressivement le tions successives. Cette libération de l’angle gauche se fait au
côlon vers la droite : le pédicule génital et l’uretère repérés en contact de l’intestin : le sustentaculum lienis n’est pas
bas sont suivis en remontant. Toute la face postérieure du sectionné.
mésocôlon gauche est libérée très largement en dedans. Le Une fois l’angle libéré, un champ humide est mollement tassé
décollement est poussé jusqu’à la face postérieure de la branche devant la rate et la mobilisation du transverse gauche est
descendante de l’angle gauche, en évitant de tirer sur celle-ci poursuivie par décollement épiploïque de gauche à droite. La
(attention à la rate !). Il peut être nécessaire de drainer ce section de la racine du mésocôlon transverse gauche est le
décollement. dernier temps de la mobilisation de l’angle gauche : c’est celui
qui donne le plus de longueur au côlon abaissé. Elle se fait de
Mobilisation de l’angle gauche gauche à droite, juste au bord inférieur du pancréas, jusque sur
Après décollement du fascia de Toldt, la technique habituel- la ligne médiane. La veine mésentérique inférieure fait alors
lement préconisée consiste à ouvrir, à gauche de la ligne parfois corde : elle doit être recoupée au bord inférieur du
médiane, l’arrière-cavité des épiploons, par décollement coloé- pancréas.
piploïque de droite à gauche, puis les deux jambages de l’angle
splénique étant dégagés, à les prendre dans la main gauche pour Ligatures vasculaires d’abaissement
les attirer ensemble vers le bas, afin de tendre, puis de section- Au cours des colectomies pour cancer du côlon sigmoïde, les
ner le ligament suspenseur de l’angle gauche. ligatures vasculaires d’abaissement sont d’indication très rare. La
Cette technique classique nous paraît exposer dangereuse- mobilisation complète du côlon gauche avec libération et
ment au risque d’incident hémorragique, avant tout par arra- bascule de l’angle gauche permet en effet pratiquement toujours
chement de petites adhérences épiploïques à la capsule d’amener au contact les coupes coliques et rectales.
splénique. Nous avons donc l’habitude de procéder Mais dans certains cas - coupe d’amont haute - seule la
différemment. convexité de l’anse colique descend au contact du rectum du
Figure 18.
A, B. Extension tumorale à une anse grêle. En fin d’intervention, le grand épiploon sépare les deux sutures.
disséquer en sous-péritonéal, au contact des bords latéraux de Rappelons ici que si l’examen des ovaires doit être systéma-
l’intestin, voire de faire monter le bloc tumoral en décollant tique lors de toute colectomie pour cancer, leur ablation de
d’emblée, très largement, en arrière du rectum (Fig. 19). principe n’est pas recommandée [7].
Si l’exérèse est jugée possible la vessie est ouverte en avant à
2 ou 3 cm des limites tumorales. L’hémostase de la paroi Adhérences en arrière, au plan vasculaire
vésicale se fait par prises électives. Après suspension des berges
C’est la plus fréquente – et presque la seule – des contre-
de la cystotomie, sous contrôle de la vue, on libère progressive-
indications locales à l’exérèse.
ment toute l’adhérence tumorale. Lorsque cette cystectomie
Il faut y penser devant une tumeur sigmoïdienne basse et
partielle s’étend en arrière et en bas, il est impératif de repérer
fixée mais aussi devant toute lésion volumineuse reposant sur
les orifices urétéraux : l’injection intraveineuse de colorant par
la margelle du petit bassin.
l’anesthésiste peut être utile.
Il peut être malaisé d’apprécier l’importance de l’envahisse-
La vessie est ensuite refermée par un surjet muqueux de fil à
ment vasculaire, en particulier veineux. Là encore, il faut ouvrir
résorption lente (0000), puis par un plan musculaire, recouvert
la séreuse pariétale à distance et mobiliser autant que possible
si possible par un plan péritonéal.
le sigmoïde avec beaucoup de prudence : une plaie vasculaire,
En fin d’intervention, il faudra s’efforcer de séparer les sutures
avant tout un arrachement de la veine iliaque, peut être une
vésicale et intestinale en interposant l’épiploon, éventuellement
catastrophe opératoire difficilement réparable. Aussi, en cas de
pédiculisé.
tumeur fixée sur l’axe vasculaire iliaque, mieux vaut souvent
La sonde urinaire reste en place un dizaine de jour.
renoncer à une exérèse complète dangereuse et sectionner la
lésion au bistouri électrique en clipant le reliquat tumoral
Adhérences aux organes génitaux prévasculaire pour une radiothérapie palliative complémentaire.
chez la femme
Elle concerne plus particulièrement les tumeurs du bas
sigmoïde Mais une tumeur du sommet de l’anse, prolabée en
■ Cancers infectés
avant, peut aussi venir adhérer au fond utérin ou à la corne Nous n’envisageons pas ici les problèmes diagnostiques qui
utérine. peuvent se poser avec certaines sigmoïdites diverticulaires
L’exérèse associée de l’annexe gauche est toujours légitime, pseudotumorales.
tout comme l’élargissement à l’utérus. Résultant d’une perforation tumorale cloisonnée, la suppura-
Ce temps d’exérèse, toujours en monobloc, est parfois plus tion péricolique est exceptionnellement aujourd’hui une
facile après mobilisation colique partielle. découverte opératoire. Elle n’est jamais une contre-indication à
En cas d’hystérectomie associée, il semble préférable de la l’exérèse ni le plus souvent au rétablissement de la continuité
faire de droite à gauche en commençant par le repérage de digestive, en particulier lorsqu’elle reste à distance de la
l’uretère droit (Fig. 20A,B). Elle peut être totale ou subtotale. On jonction rectosigmoïdienne.
peut s’aider d’une fermeture par agrafage du cul-de-sac vaginal. Elle impose toutefois certaines précautions dans la tactique
La péritonisation doit être complète, avec décollement large du chirurgicale :
péritoine vésical. Le drainage, s’il est nécessaire, est toujours • isolement immédiat du champ opératoire pour éviter dans
sous-péritonéal. Si cela est possible, l’épiploon sera descendu toute la mesure du possible une dissémination septique
devant la suture colorectale. péritonéale ;
Figure 19.
A, B, C. Extension tumorale au dôme vésical. Le repérage des uretères n’est indispensable que lorsque
la lésion s’étend en arrière.
• assèchement de la suppuration à l’aspirateur après prélève- La résécabilité des métastases doit toujours être discutée sur
ments pour examen bactériologique ; des critères techniques et carcinologiques. Cette discussion,
• mobilisation première du côlon ; reposant sur le rapport risque/bénéfice de l’intervention, doit se
• drainage large de la zone de suppuration. faire au sein d’une unité de concertation multidisciplinaire. Elle
Il faut aussi, dans de telles circonstances, être large dans les impose la réalisation d’un examen tomodensitométrique thoraco-
indications d’une iléostomie de protection. abdomino-pelvien avec injection d’un produit de contraste iodé.
En cas de péritonite compliquant une perforation tumorale, Elle doit déterminer la stratégie thérapeutique et « au mieux
l’exérèse s’impose toujours, si la lésion est extirpable. Elle se fait amener à inclure le patient dans un essai clinique » [9].
pratiquement toujours sous la forme d’une opération de En pratique, la chirurgie des métastases hépatiques synchro-
Hartmann, associée à un drainage selon Mikulicz sortant par la nes est recommandée lorsque la résection est complète (R0)
partie basse de la médiane. au prix d’une hépatectomie classique (hépatectomie conven-
tionnelle de quatre segments ou moins) et carcinologique-
■ Cancers avec métastases ment incontestable (moins de quatre métastases et/ou
unilobaires).
La prise en charge des cancers du côlon pelvien avec méta- Dans ces cas, la résection colique est entreprise dans une
stases hépatiques synchrone dépend du caractère résécable ou intention curative et sa technique est celle d’une colectomie
non des localisations secondaires [8]. réglée avec curage ganglionnaire complet.
Figure 20.
A, B, C, D. Hystérectomie associée pour envahissement de l’utérus. Elle est faite après la mobilisation colorectale en arrière. La fermeture vaginale peut se faire
par agrafage. La ligne d’agrafes est enfouie par la péritonisation qui sépare la suture vaginale de l’anastomose.
Faut-il faire dans le même temps la résection colique et la temps faite en même temps que la colectomie, ce choix étant
résection des métastases hépatiques ? laissé à l’appréciation de l’équipe médicochirurgicale. La possibi-
Cette double résection est contre-indiquée en urgence, pour lité d’avoir une évaluation de la réponse tumorale à la chimio-
les cancers infectés et en cas d’élargissement « lourd ». En dehors thérapie est en effet un argument qui pousse à une résection
de l’urgence, aucune publication ne permet de valider une différée des métastases : dans ce cas, le délai proposé est de 2 à
attitude plutôt qu’une autre. Si donc l’exérèse hépatique n’est 3 mois. Aucune étude contrôlée n’a démontré l’efficacité de la
pas supérieure à trois segments, elle est aujourd’hui la plupart du chimiothérapie systémique instaurée dans l’intervalle.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Gallot D. Colectomie pour cancer du côlon pelvien par voie ouverte. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris),
Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-565, 2006.
Les techniques des colectomies réglées pour cancer siégeant sur le côlon transverse, iliaque ou descendant
sont successivement décrites. La colectomie segmentaire gauche haute est l’intervention type pour les
cancers siégeant à proximité de l’angle gauche. Ses différents temps sont décrits : ligatures vasculaires,
mobilisation colique, rétablissement de la continuité digestive. L’hémicolectomie gauche reprend les
principaux temps des colectomies segmentaires. Ses modalités sont rappelées, ainsi que les artifices
permettant l’abaissement du côlon transverse au rectum. Les principes de traitement des cancers du
côlon transverse sont précisés. Sont enfin envisagées les variantes liées à l’extension tumorale :
élargissement de l’exérèse au jéjunum, à la rate et au pancréas, à l’arbre urinaire.
© 2006 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Plan
2
1
Figure 3. Après exclusion luminale par serrage d’un lacs sur le côlon de
part et d’autre du cancer, le mésocôlon est incisé. L’artère colique supé-
Figure 2. Installation de l’opéré et voie d’abord. La table d’instruments rieure gauche est découverte à son origine juste en dehors du duodénum.
est toujours à main droite pour l’opérateur. 1. Opérateur ; 2,3. aides ;
4. anesthésiste ; 5. table d’instruments.
Exérèse
Ligatures vasculaires
la mise en place vers le bas d’une valve de Rochard, mais c’est
vers le haut qu’il faut prévoir une large exposition, avec une Une exérèse à visée curatrice paraissant possible, la tumeur est
bonne rétraction du rebord costal. tout d’abord exclue par deux lacs serrés de part et d’autre sur le
côlon.
La tablette d’instruments est au-dessus des membres inférieurs
Dans l’exposition du champ opératoire, une attention parti-
de l’opéré, toujours à main droite pour l’opérateur qui se place
culière doit alors être portée sur la rate : on libère les petites
à droite, un ou deux aides lui faisant face (Fig. 2).
adhérences qui relient fréquemment son pôle inférieur ou sa
La voie d’abord est, pour nous, toujours médiane, remontant face interne à la corne gauche du grand épiploon afin d’en
jusqu’à l’appendice xiphoïde et descendant aussi bas que éviter l’arrachement intempestif. On peut la refouler jusqu’au
nécessaire. temps de libération de l’angle gauche par un champ humide
mollement tassé. L’incision du feuillet superficiel du péritoine
mésocolique dessine un triangle centré sur le pédicule de l’angle
Exploration gauche qui relie les points choisis pour les sections coliques,
Le péritoine ouvert, les aides écartent et soulèvent la paroi, et c’est-à-dire, dans le cas pris pour type d’un cancer du côlon
l’opérateur s’assure de l’absence de métastase, de carcinose et descendant, le côlon iliaque en bas au moins 5 cm en aval des
recherche d’éventuelles adénopathies le long du pédicule limites macroscopiques de la tumeur (ou mieux, en aval d’un
colique supérieur gauche en le suivant jusqu’au bord gauche du éventuel pédicule colique moyen), et le côlon transverse en
duodénum. Durant ce temps, un aide soulève et tend le méso- haut à l’union du tiers moyen et du tiers gauche. Cette incision
côlon transverse gauche. L’abdomen exploré, un écarteur de se fait au bistouri électrique ou aux ciseaux, associée à de petites
Gosset est mis en place en bas et une valve de Rochard rétracte coagulations des vaisseaux sous-séreux (Fig. 3). Le sommet de ce
le rebord costal en l’attirant vers le haut et la gauche. Tout triangle est au bord gauche du quatrième duodénum : il
correspond à l’origine du pédicule colique supérieur gauche. Le
l’épiploon et le transverse sont extériorisés, la masse des anses
péritoine ouvert, le duodénum est refoulé à droite et l’origine
grêles enveloppée d’un champ humide est écartée par le roulis
de l’artère est dégagée, derrière le bord gauche de D4, puis elle
de la table vers l’opérateur. Un deuxième champ exclut le
est prise entre deux pinces de Bengoléa, sectionnée et liée. Il est
pelvis : l’angle duodénojéjunal, la première anse grêle et le
utile, durant tout ce temps, que l’aide, de sa main droite,
côlon gauche demeurent seuls apparents dans le champ opéra- maintienne en tension, à peu près verticalement, le mésocôlon
toire. C’est alors que peuvent être au mieux appréciés les transverse. Pour éviter tout « incident » splénique, la mise en
caractères de la tumeur : sa topographie, son volume, son tension du pédicule colique supérieur se fait par rétraction vers
extension et sa mobilité. L’extension locale des cancers du la droite du bloc duodénal, et non par traction sur l’angle
côlon descendant est fréquente, vers le diaphragme, la première gauche. Une forte pince, type Kelly, peut être laissée en retour
anse jéjunale ou l’angle duodénojéjunal, la racine du mésentère et servir de tracteur pour l’exposition du méso.
ou, en arrière, vers la loge rénale. Si elle peut imposer d’élargir La ligature veineuse suit immédiatement : elle porte sur la
l’intervention, cette extension locale est assez rarement une veine mésentérique inférieure elle-même, juste au bord inférieur
contre-indication à l’exérèse. Toutefois, lorsqu’un doute subsiste du pancréas. On la recherche au-dessus de la ligature artérielle,
sur l’extirpabilité, on ne peut commencer par le temps de et le tissu celluleux qui sépare les vaisseaux est chargé sur pince
ligatures vasculaires : la mobilisation colique doit précéder et lié en raison de sa richesse en lymphatiques (Fig. 4). La veine
celui-ci. doit être parfaitement vue et dégagée car l’uretère gauche est
présentées par trois fils et l’intestin est refermé par une dernière
application de pince d’agrafage linéaire (Fig. 11).
Cette anastomose, simple à réaliser, nécessite toutefois de
mobiliser une plus grande longueur de côlon que pour une
anastomose terminoterminale manuelle et, si elle est peut-être
plus rapide, rien ne démontre qu’elle soit plus sûre [1]. Il est
possible de la faire « pièce en place », sans section préalable du
côlon.
Drainage et fermeture
Les champs de protection du temps « septique » sont enlevés,
l’hémostase de la loge d’exérèse est une dernière fois vérifiée.
Nous drainons volontiers l’espace de décollement du fascia de
Toldt par un drain aspiratif type Redon. Un drainage plus
important, par lame (Scurasil®), peut être nécessaire en cas
d’élargissement de l’exérèse. L’épiploon est étendu devant
l’anastomose et il est parfois possible de lui faire partiellement
combler la gouttière dépéritonisée du flanc gauche. Les anses
grêles sont remises en ordre et la paroi est fermée plan par plan
de haut en bas (surjets de fil à résorption lente).
Figure 13. Extension tumorale à la première anse jéjunale : double résection avec réimplantation du
jéjunum dans le troisième duodénum. Schéma du montage.
clivage en avant de celui-ci ne paraît toujours pas possible, on Comme pour toutes les localisations coliques, la résécabilité
ouvre la loge rénale : le passage est pratiquement alors toujours des métastases doit toujours être discutée sur des critères
libre au contact du parenchyme (Fig. 15). techniques et carcinologiques. Cette discussion doit se faire au
Si l’extension est sous-rénale, englobant l’uretère, on com- sein d’une unité de concertation multidisciplinaire [4] . En
mence par repérer celui-ci tout en bas dans son segment iliaque, pratique, la chirurgie des métastases hépatiques synchrones est
puis on remonte en le disséquant pas à pas. recommandée lorsque la résection est complète (R0) au prix
En cas d’envahissement vrai de l’uretère lombaire ou du rein, d’une hépatectomie, de quatre segments ou moins avec moins
c’est en fonction de l’état fonctionnel du rein controlatéral, de de quatre métastases.
l’extension de la maladie cancéreuse et des facteurs de risque
propres à l’opéré que l’on décide d’associer une néphro- Dans ces cas, la résection colique est entreprise dans une
urétérectomie gauche à la colectomie. intention curative et la technique est celle décrite ci-dessus.
Cancer avec métastases hépatiques Une double résection (colique et hépatique) est contre-
La prise en charge d’un cancer colique avec métastases indiquée en urgence. En dehors de l’urgence, aucune publica-
hépatiques synchrones dépend du caractère résécable ou non tion ne permet de valider une attitude plutôt qu’une autre. Si
des localisations secondaires [3]. l’exérèse hépatique n’est pas supérieure à trois segments, elle est
Exérèse
Ligatures vasculaires
Tout le grêle est écarté à droite sous des champs humides,
seuls demeurent apparents avec le côlon la première anse
jéjunale et la fin du duodénum. On trace alors une grande
incision, pratiquement verticale sur le feuillet superficiel du
péritoine. Cette incision est faite aux ciseaux ou au bistouri
électrique, en partant en bas du détroit supérieur, au flanc droit
de la racine du mésosigmoïde, en remontant vers le bord
inférieur du troisième duodénum, passant devant l’aorte et
contournant enfin le quatrième duodénum jusqu’à l’angle
duodénojéjunal où elle rejoint la racine du mésocôlon trans-
verse. Elle est enfin prolongée sur celle-ci jusqu’au point choisi B
pour la section colique d’amont (Fig. 17).
Le quatrième duodénum est alors basculé vers la droite par la
main gauche de l’aide qui, de la droite, met en tension vers le A
bas le pédicule mésentérique inférieur. Une rapide dissection
dans le tissu celluleux rétroduodénal amène alors sur l’artère Figure 19. Manœuvre de Deloyers : le côlon droit bascule autour du
mésentérique inférieure dont on fait le tour et que l’on lie au pédicule de l’angle droit après décollement du fascia de Toldt.
ras de l’aorte. Le tissu celluleux périartériel est pris en plusieurs
ligatures et non coagulé, car il est riche en lymphatiques. La
veine mésentérique est recherchée et liée, en dehors, juste sous L’abaissement au contact du haut rectum du côlon transverse
le bord inférieur du pancréas. On termine par la ligature et la nécessite souvent de prolonger la libération de la racine du
section de l’arcade bordante du transverse. mésocôlon transverse jusqu’à l’angle droit. Le passage transmé-
sentérique est pour nous la règle, l’ouverture du mésentère étant
Mobilisation du côlon gauche, sections colique faite à travers le méso de la dernière anse iléale. Il est aussi
et rectale possible, le côlon transverse ayant été complètement mobilisé,
L’uretère gauche ayant été repéré, on poursuit vers le bas le de l’abaisser à droite du mésentère après avoir complété le
décollement complet de tout le fascia de Toldt gauche, on décollement coloépiploïque (Fig. 18).
mobilise le sigmoïde et l’on dégage la jonction rectosigmoï- Il est très rare d’avoir à mobiliser l’angle droit et à décoller
dienne dans le plan du fascia recti. Puis, l’opérateur passant à tout le fascia de Toldt droit pour basculer complètement le
droite, on prolonge l’incision péritonéale de la gouttière côlon droit selon Deloyers (Fig. 19).
pariétocolique vers le haut, au contact de la convexité de l’angle
gauche et l’on mobilise celui-ci. Le décollement coloépiploïque Anastomose
est enfin prolongé jusqu’au-delà de la ligne médiane.
Après section de la partie haute du mésorectum et prépara- L’approximation des extrémités colique et rectale doit être
tion de la face postérieure de la jonction rectosigmoïdienne, le appréciée avant toute section intestinale. Le rétablissement de la
rectum agrafé ou pris sur clamp est sectionné. continuité se fait par anastomose manuelle, pour nous le plus
■ Colectomies transverses
Les cancers du côlon transverse représentent de 5 à 10 % de
l’ensemble des cancers du côlon. Leur traitement chirurgical
dépend de leur localisation.
Les cancers du tiers gauche du transverse sont traités par
colectomie segmentaire gauche haute étendue à droite et les
cancers du tiers droit sont traités par hémicolectomie droite
étendue à gauche. Les techniques de ces colectomies sont
comparables, aux niveaux de coupes près, aux interventions-
types précédemment décrites.
Pour les rares cancers du tiers moyen persiste une certaine
controverse. Au plan carcinologique, il n’a pas été démontré
qu’une exérèse large améliorait le pronostic par rapport à une
simple colectomie segmentaire transverse, puisque le curage
ganglionnaire est toujours incomplet, limité au bord inférieur
du pancréas. Certains, dans ces cancers médians, et d’autant Figure 20. Colectomie segmentaire gauche élargie à droite pour can-
plus que l’anse transverse est longue, demeurent donc fidèles cer du transverse gauche.
aux colectomies segmentaires transverses, la continuité digestive
étant rétablie grâce à la mobilisation de l’un ou des deux angles.
Il existe toutefois un certain consensus pour éviter ces limité au ligament gastrocolique et à la grande courbure, antrale
colectomies médianes en raison de la morbidité spécifique de ce ou angulaire ; il est rare que le bloc tumoral s’étende loin sur le
type d’intervention. Celle-ci nous paraît, pour une grande part, corps de l’estomac. Dans tous les cas, vouloir « cliver » une
la conséquence de la disposition de l’anastomose qui, après adhérence serrée est une faute exposant au risque de récidive
« transversectomie », vient se placer sur la ligne médiane, locale.
directement sous l’incision pariétale et plus ou moins en L’appréciation du volume et de l’extirpabilité de la lésion
tension sur le billot des gros vaisseaux prérachidiens. Cette nécessite d’ouvrir dès le début l’arrière-cavité des épiploons en
disposition est un facteur de risque de désunion et il nous paraît passant à travers le ligament gastrocolique, à gauche ou à droite
essentiel, pour la sécurité des suites, de positionner l’anastomose de la lésion. Il peut être également utile d’effondrer la pars
à distance de la ligne médiane, loin de l’incision pariétale et à flaccida du petit épiploon au-dessus de l’estomac. On recherche
côté de la saillie du rachis [7, 9]. ainsi : une extension de la tumeur en arrière vers le pancréas et
Pour cette raison « technique », nous traitons donc tous les la racine du mésentère ; des métastases ganglionnaires, mésen-
cancers des deux tiers droits par hémicolectomie droite élargie tériques, sous-pyloriques ou cœliaques ; une carcinose.
à gauche, en emportant le grand épiploon jusqu’à la section En l’absence de métastases, les résultats lointains des colecto-
colique (Fig. 20, 21). mies élargies à l’estomac justifient ce geste chaque fois que les
risques propres à l’opéré le permettent. Il est moins justifié de
Variantes tactiques et élargissements réaliser cette exérèse élargie dans un but strictement palliatif,
encore que certains le proposent en raison de l’évolution
Si l’incision médiane est pour nous la règle, certains inter-
fréquente vers la constitution d’une fistule cologastrique.
viennent par voie horizontale sus-ombilicale plus ou moins
La décision d’une colectomie élargie à l’estomac étant prise,
large.
et les décollements nécessaires pour s’assurer de l’extirpabilité de
L’essentiel des variantes tactiques concerne ici les élargisse-
la lésion ayant été faits, l’exérèse peut débuter, selon les cas, soit
ments de l’exérèse nécessités par l’extension de la maladie
par le temps colique, soit par le temps gastrique, ce qui est
cancéreuse, résections gastriques et pancréatiques associées
théoriquement préférable, le temps septique étant fait en
avant tout.
dernier, mais l’utilisation de pinces agrafeuses permet une
section colique première « propre ».
Élargissement à l’estomac
L’exérèse gastrique peut être très limitée, cunéiforme, ou
L’envahissement de l’estomac par une tumeur du transverse large, segmentaire. Lorsque l’extension extracolique s’est surtout
doit être craint chaque fois que cette lésion est palpable faite aux dépens du ligament gastrocolique et que l’estomac
cliniquement. Une telle constatation justifie toujours une n’est envahi que sur une très petite surface, il est possible de ne
exploration par scanner. réséquer qu’un petit segment losangique de grande courbure. La
Les cancers du transverse médian ou gauche sont le plus perte de substance est refermée transversalement.
souvent en cause. Beaucoup plus rarement, il s’agit d’un cancer En cas d’atteinte plus importante, il serait possible de ne
du tiers droit ; l’envahissement gastrique est presque toujours réaliser qu’une exérèse limitée : gastrectomie en « selle », de part
B
Figure 28.
A, B. Extension tumorale à la rate et à la queue du pancréas. Après
décollement complet du fascia de Toldt gauche, la dissection est menée
dans le plan du mésogastre postérieur. Elle permet la bascule du pancréas et
de la rate, et la ligature des vaisseaux spléniques juste à gauche de l’aorte.
La ligature de l’artère colique supérieure gauche dégage le [2] Izbicki JR, Hosch SB, Knoeffel WT, Passlick B, Bloechle C,
bord inférieur de l’isthme : celui-ci est alors sectionné. Nous Broelsch CE. Extender resection are beneficial for patients with
faisons cette section au bistouri avec hémostase par points en locally advanced colorectal carcinoma. Dis Colon Rectum 1995;38:
X de soie fine (0000), fermeture élective du Wirsung et ferme- 1251-6.
ture de la tranche parenchymateuse par des points en X de fil [3] Nordlinger B, Jaeck D. Traitement des métastases hépatiques des
à résorption lente (Fig. 30). L’exérèse colique, qui est ici le plus cancers colorectaux. Paris: Springer-Verlag; 1992.
souvent une colectomie segmentaire gauche étendue sur le [4] Association Française de Chirurgie. Recommandations pour la prati-
que clinique : Prise en charge des métastases hépatiques des cancers
transverse, est alors poursuivie de façon réglée.
colorectaux. Gastroenterol Clin Biol 2003;27:B5-B97.
Il est important de placer l’anastomose colique à distance de [5] Laurent C, Rullier E. Cancer colorectal et métastases hépatiques
la zone de décollement pancréatique : un montage transmésen- synchrones : faut-il toujours réséquer la tumeur primitive?
térique est ici particulièrement utile. Gastroenterol Clin Biol 2004;28:431-2.
Le drainage de l’hypocondre gauche est toujours indispensa- [6] Joffe J, Gordon PH. Palliative resection for colorectal carcinoma. Dis
ble. Il doit être large et associe, pour nous, drain (30 Ch) et Colon Rectum 1981;24:355-6.
lame de Scurasil ® sortant par une contre-incision gauche [7] Loygue J. Colectomies gauches. In: Opérations sur les parois de
déclive. l’abdomen et sur le tube digestif. Paris: Masson; 1971.
.
[8] Rouffet F, Hay JM, Vacher B, Fingerhut A, Alhaddad A, Flamant Y,
et al. Curative resection for left colonic carcinoma: hemicolectomy vs.
■ Références segmental colectomy. A prospective, controlled, multicenter trial.
French Association for Surgical Research. Dis Colon Rectum 1994;37:
[1] Association Française de Chirurgie. Recommandations pour la prati- 651-9.
que clinique dans l’usage des agrafeuses automatiques et des clips. [9] Goligher JC. Surgery of the anus, rectum and colon. London: Baillière-
1996. Tindall; 1991.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Gallot D. Colectomies pour cancer des côlons descendant, iliaque et transverse par voie ouverte. EMC
(Elsevier Masson SAS, Paris), Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-570, 2006.
40-580
Toute référence à cet article doit porter la mention : Domergue J, Fabre JM et Castorina S. Colectomies pour maladie diverticulaire. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés),
Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-580, 2001, 14 p.
40-580 Colectomies pour maladie diverticulaire Techniques chirurgicales
MATÉRIEL NÉCESSAIRE
La chirurgie colique appartient au groupe des interventions
majeures en chirurgie laparoscopique. Elle a été rendue possible par C
l’apparition d’une instrumentation spécifique qui complète
l’instrumentation traditionnelle.
Instrumentation traditionnelle
Elle comprend :
– une aiguille de Veres ;
– deux trocarts de 10 mm, deux de 5 mm, un de 12 mm ; A2
– trois à quatre pinces fenêtrées pour préhension du côlon et
exposition du grêle ;
– un ciseau coagulateur et, accessoirement, un crochet coagulateur ; 1 Installation de l’opéré et de l’équipe chirurgicale.
– des pinces à clips ;
– un système d’aspiration-lavage.
Instrumentation spécifique
Elle comprend :
– une agrafeuse linéaire coupante endoscopique et des recharges
vasculaires et digestives ;
– une agrafeuse circulaire pour l’anastomose ;
– un scalpel ultrasonique : c’est un instrument à ultrasons qui
permet l’hémostase des vaisseaux de moins de 3 mm. Il évite le
risque de brûlures thermiques des tissus voisins et les chutes
d’escarres secondaires.
T1
Gros matériel
T3
Il est représenté par : T5
– une optique axiale de 0° et/ou une optique de 30° ;
T2
– une caméra mono- ou tri-CCD permettant d’obtenir la meilleure
T4
résolution ;
– une lumière froide avec lampe au xénon d’au moins 300 W ;
– un moniteur vidéo mobile avec les différents temps opératoires,
ou mieux deux moniteurs ;
– un insufflateur à haut débit (30 L/min). *
A
2
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PHASES OPÉRATOIRES
3
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T4
T3
T2
*
A
T4
*
A
T2
*
B
4 Décollement centrifuge de l’angle gauche (A, B).
T3 *
B
5 A. Décollement coloépiploïque et abaissement de l’angle gauche.
Mobilisation de l’angle gauche B. Section de l’artère mésentérique inférieure.
4
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5
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9 Laparotomie d’extrac-
tion.
T5
T2
T3
7 Hémostase du mésorectum.
T5
¶ Extraction de la pièce opératoire (fig 9)
La laparotomie d’extraction peut être effectuée dans la fosse iliaque
gauche ou droite, ou en sus-pubien en cas de laparotomie médiane
antérieure. Nous utilisons volontiers la cicatrice d’appendicectomie
quand elle est présente. La section colique doit être effectuée dans
T2
une zone non inflammatoire et bien vitalisée après section-ligature
de l’arcade bordante à l’extérieur de l’abdomen.
Nous considérons que l’extraction dans la fosse iliaque droite offre
plusieurs avantages. Elle se fait par élargissement de l’orifice de
8 Section du rectum. 12 mm du trocart en T2. Elle reprend le plus souvent une cicatrice
d’appendicectomie déjà existante. Enfin, le rayon de l’arc de cercle
est effectué par l’extrémité du côlon gauche abaissé et le point de
à la fin de la section du mésorectum qui débute sur le bord droit. Le fixité sur le méso est plus long lorsque la pièce est extraite par la
rectosigmoïde est verticalisé par la pince en T5 qui passe sous le fosse iliaque droite que dans la fosse iliaque gauche, ce qui risque
mésocôlon sigmoïde. Les instruments de travail sont positionnés en moins de conduire à une anastomose sans traction.
T3 et T2 pour les ciseaux. Il existe un plan de dissection avasculaire
en passant au contact du rectum (+++) qui permet d’isoler le Après confection de l’anastomose, la laparotomie d’extraction doit
mésorectum en arrière de la paroi rectale. L’hémostase peut être être soigneusement refermée en vue d’éviter tous risques de
effectuée de plusieurs manières. Coagulation au scalpel harmonique désunion précoce ou tardive rapportés dans toutes les séries de
ou à la coagulation bipolaire : le mésorectum est coagulé de proche résection colique par laparoscopie.
en proche sur un rectum verticalisé vers en avant. Les pinces à clips
ne sont utilisées que lors du contrôle du pédicule hémorroïdal ¶ Anastomose colorectale (fig 10)
supérieur qui, rappelons-le, n’est contrôlé qu’en fin d’hémostase du Elle est obligatoirement mécanique. L’anastomose mécanique trans-
mésorectum sur le bord gauche du rectosigmoïde. Nous ne suturaire selon Knight et Griffen est la technique de choix. La tête
recommandons pas l’utilisation de clips qui peuvent gêner de la pince circulaire est introduite après calibrage à la bougie et
l’agrafage de la paroi rectale. Dans des circonstances exceptionnelles, réalisation d’une bourse. L’ensemble est réintroduit dans l’abdomen
le contrôle du mésorectum est effectué par une application de pince et le plan péritonéal suturé par un surjet étanche de monofil.
vasculaire coupante linéaire.
Le pneumopéritoine est à nouveau réalisé et le malade est mis dans
Section du rectum (fig 8) une position de Trendelenburg de 20°. L’agrafeuse circulaire est
introduite par l’anus après désinfection du rectum au sérum
Elle doit porter sur le haut rectum, sous la charnière bétadiné, le rectum est perforé par la pointe en évitant la ligne
rectosigmoïdienne, afin de réduire le risque de récidive. Elle est d’agrafage, et l’encliquetage est réalisé comme en chirurgie ouverte,
effectuée par deux à trois applications d’agrafeuse linéaire 45 par exposition de l’enclume saisie par les pinces introduites en T3 et
introduite en T2. Le côlon doit être verticalisé et latéralisé vers la T4, l’accès en T2 ayant disparu lors de la laparotomie d’extraction.
gauche pour que la pince soit le plus perpendiculaire possible. Les Après agrafage-section, la pince est extraite par voie endorectale, les
agrafeuses rotatives offrent un meilleur angle d’attaque. Il faut éviter collerettes vérifiées, ainsi que l’étanchéité, par une épreuve au bleu
une section en « biseau » en corrigeant, après chaque application, de méthylène ou à l’eau.
l’exposition et l’angle d’attaque de l’agrafeuse. Le niveau de section
du rectum est parfois difficile à déterminer. La profondeur du cul- ¶ Fin de l’intervention
de-sac de Douglas chez la femme doit inciter à ne pas effectuer une
section trop basse. Chez l’homme, au contraire, il faut éviter une Une toilette du pelvis au sérum est réalisée à grande eau, les
section trop haute sur le sigmoïde. Le rectum peut être repéré par la hémostases sont contrôlées. Puis le Trendelenburg est supprimé et
disparition des bandelettes coliques. le grêle repositionné dans l’abdomen. Il est important que le grêle
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Anastomose latéroterminale
Anastomose mécanique
¶ Fermeture et drainage
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risque de récidive des poussées. Le signal d’alarme doit être tiré laparoscopique permet de savoir si le geste est mené à bien sous
lors de la première poussée. Globalement, seulement un tiers des laparoscopie en totalité ou risque d’être converti. C’est pourquoi
malades faisant une poussée aiguë doivent être opérés en urgence. beaucoup d’équipes, dont nous sommes, préconisent d’effectuer le
Pour les deux tiers restants, la sanction chirurgicale doit être temps haut de la colectomie gauche laparoscopique en premier
envisagée de manière élective en essayant de répondre à trois avant de disséquer la région pathologique d’abord parfois difficile.
questions : quels malades doit-on opérer ? Quand faut-il les opérer ? Ainsi, si une conversion doit être réalisée, le préjudice pariétal est
Quel est le geste chirurgical le mieux adapté ? réduit au minimum puisque l’angle gauche est déjà mobilisé. Car la
réalisation d’une colectomie gauche pour sigmoïdite nécessite le plus
Quels malades faut-il opérer ? souvent une mobilisation de l’angle gauche afin que l’anastomose
L’étude de l’histoire naturelle de la maladie permet de répondre à soit effectuée sans traction et, surtout, que la résection du segment
cette question. Sur une série prospective de 226 malades ayant fait pathologique emporte le côlon sigmoïde dans sa totalité [4]. Les
une première poussée, 160 ont été traités médicalement et suivis diverticules siègent souvent sur la totalité du cadre colique, mais ne
pendant 2 ans ; 25 % d’entre eux ont récidivé dans les 2 ans, et ce justifient pas de résection extensive. Tous les diverticules ne doivent
d’autant plus qu’ils avaient moins de 50 ans. Ce risque est également pas être réséqués.
accru chez les malades qui ont des facteurs favorisants, La résection-anastomose par laparotomie reste préconisée par
corticothérapie ou anti-inflammatoire non stéroïdien [1]. certaines équipes avec d’excellents résultats. Dans une série
Sur une série anglo-saxonne de 120 malades suivis pendant 5 ans, rétrospective de 100 colectomies électives pour maladie
77 (65 %) ont été opérés et 43 non opérés ont été suivis diverticulaire sans mortalité opératoire, la morbidité est faible : 14 %,
médicalement. Dans le groupe opéré, deux malades ont récidivé et dont 8 % pour la morbidité chirurgicale, avec un seul cas de fistule
un est décédé d’une complication. Parmi les 43 malades non opérés, postopératoire [23]. Tous les malades bénéficiaient d’une anastomose
37 ont récidivé (85 %) et neuf (20 %) sont décédés de terminoterminale manuelle en surjet.
complications [6]. Parmi les critères qui peuvent influer sur la décision technique, le
choix du type d’anastomose est important. L’anastomose mécanique
Quand faut-il opérer ? est obligatoire en cas de résection laparoscopique, alors qu’une
anastomose manuelle peut être réalisée en cas de résection par
Le consensus semble établi pour la chirurgie élective au-delà de la
laparotomie. Une méta-analyse [16] regroupant 13 essais prospectifs
deuxième poussée de sigmoïdite [11], alors que tous les experts
de résections colorectales avec anastomose manuelle ou mécanique
s’accordent à penser qu’il n’y a pas d’indication de colectomie
a permis de conclure que les deux méthodes étaient identiques sur
prophylactique chez un malade asymptomatique. Il paraît sage de
le taux de fistules, d’infections postopératoires et sur la mortalité
recommander une colectomie élective au-delà de la première
globale. Seul le taux de sténose anastomotique était supérieur dans
poussée sévère nécessitant une hospitalisation, d’autant plus
le groupe d’anastomoses mécaniques, variant de 0 à 16 %. Il était
volontiers que le malade est jeune (< 50 ans), qu’il a des facteurs de
précisé que le résultat fonctionnel de ces malades était peu altéré
risque (immunodépression chronique), qu’il a des signes locaux
car les sténoses étaient facilement dilatables et, par voie de
importants sur l’échographie ou le scanner.
conséquence, sans retentissement sur la qualité de vie des patients.
Certains chirurgiens considèrent ce problème suffisant pour effectuer
Quel type de chirurgie proposer ?
une anastomose manuelle chaque fois qu’elle est techniquement
L’intervention de choix en chirurgie élective est la résection possible. Dans ce cas, seule une colectomie par laparotomie est
anastomose en un temps. Exceptionnellement, la discordance entre réalisable. Certains effectuent une chirurgie cœlioassistée, en
la clinique et l’intensité des lésions anatomiques [17] conduit à une réalisant l’anastomose manuelle par une courte laparotomie sus-
intervention de Hartmann ou, mieux, à une résection-anastomose pubienne d’extraction de la pièce opératoire. Choisir le mode
protégée. d’anastomose détermine donc, en partie, le type de voie d’abord qui
La colectomie gauche laparoscopique est devenue aujourd’hui est réalisée.
l’intervention de référence de la maladie diverticulaire dans de Les facteurs limitant l’abord laparoscopique sont [12] :
nombreux centres experts. Certes, aucune étude randomisée n’a été
publiée. Les études comparatives ont montré un bénéfice pour les – l’obésité du malade et la difficulté de repérage des vaisseaux au
malades opérés par laparoscopie sur plusieurs paramètres : douleur sein des mésos ;
postopératoire et son corollaire, la réduction de la durée et de la – la difficulté de mobilisation du sigmoïde en raison des
prise d’antalgiques, reprise plus précoce du transit et de la phénomènes adhérentiels inflammatoires ;
réalimentation, réduction de la durée d’hospitalisation, maintien du
– la distension du grêle due à une préparation colique trop tardive,
capital pariétal et réduction des complications de paroi (abcès,
rendant l’exposition du champ opératoire impossible. Il est
éventrations). Deux paramètres sont à ce jour en défaveur de l’abord
impossible d’agir sur le premier de ces trois paramètres ; on peut en
laparoscopique : la durée d’intervention qui est significativement
revanche influer sur les deux autres : le respect d’un délai de 2 à
plus longue dans toutes les séries, le surcoût du geste opératoire en
3 mois entre la dernière poussée réduit les phénomènes
rapport avec l’utilisation du matériel à usage unique. La durée
inflammatoires ; une bonne préparation colique réduit les difficultés
opératoire décroît avec l’expérience des opérateurs : dans une série
d’exposition.
prospective de 100 colectomies gauches laparoscopiques, la durée
opératoire est passée de 225 minutes pour les 20 premiers malades à
150 minutes pour les 20 derniers. Il est probable qu’avec l’expérience
et dans des cas sélectionnés, les durées opératoires sont voisines de Indications chirurgicales en urgence
celles de la chirurgie ouverte [21]. Il est probable que, comme pour la
cholécystectomie ou la chirurgie antireflux, il faille attendre La comparaison des techniques de prise en charge suppose une
plusieurs années avant de démontrer les avantages de l’abord évaluation précise des malades lors de l’intervention (tableau I).
laparoscopique pour le malade ; on peut penser que la technique Plusieurs classifications sont utilisées pour analyser ces paramètres.
laparoscopique va s’imposer avant d’avoir été scientifiquement La classification de Hinchey [10] en quatre stades évalue l’état local
évaluée. Dans la plupart des séries publiées [3, 7, 15, 22], 15 % des des lésions sans prendre en compte l’état général et/ou septique du
malades doivent bénéficier d’une laparotomie de conversion, le plus malade (tableau I). Elle est recommandée par la Société américaine
souvent en raison de l’intensité des phénomènes inflammatoires de chirurgie colorectale [19]. Ce paramètre paraît mieux appréhendé
résiduels, pseudotumeurs inflammatoires et abcès périsigmoïdien. par le score APACHE II (Acute Physiology And Chronic Health
À ce jour, aucun facteur prédictif préopératoire de faisabilité d’une Evaluation) (tableau II). Un score APACHE supérieur à 30 est associé
colectomie laparoscopique n’a été démontré. Seule l’exploration à un taux de mortalité de 70 %.
12
Techniques chirurgicales Colectomies pour maladie diverticulaire 40-580
Références ➤
13
40-580 Colectomies pour maladie diverticulaire Techniques chirurgicales
Références
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14
40-540
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 40-540
Colostomies
D Gallot
P Lasser
JP Lechaux
Résumé. – Les différentes modalités d’abouchement du côlon à la peau sont passées en revue. Les
colostomies latérales ne peuvent être faites que sur un segment mobile du côlon : côlon iliaque gauche ou
transverse. Pour être efficaces, elles doivent dériver la totalité des matières. Elles sont faites et refermées par
un abord électif latéral. La cæcostomie n’est pas un geste de dérivation mais de décompression, utile dans
certaines pseudo-obstructions (syndrome d’Ogilvie). Les colostomies terminales sont le plus souvent iliaques
gauches et définitives. Le confort de l’opéré dépend en grande partie du choix du site d’abouchement cutané.
Les techniques laparoscopiques semblent apporter un bénéfice dans les carcinoses obstructrices. Les
colostomies continentes ont peu de place en pratique, sauf peut-être la technique de Schmidt qui est décrite.
© 2002 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Colostomies latérales
¶ Voies d’abord
Denis Gallot : Professeur des Universités, praticien hospitalier, chef de service, service de chirurgie générale
et digestive B, groupe hospitalier Bichat-Claude Bernard, 46, rue Henri-Huchard, 75018 Paris, France. La voie d’abord nécessaire à la confection d’une colostomie latérale
Philippe Lasser : Praticien hospitalier, chef du département de chirurgie, institut Gustave Roussy, 39, rue est la même, que celle-ci soit faite isolément par un abord électif,
Camille-Desmoulins, 94805 Villejuif cedex, France.
Jean-Pierre Lechaux : Chirurgien, clinique Geoffroy Saint-Hilaire, 59, rue Geoffroy Saint-Hilaire, 75005 Paris,
soit qu’elle prenne place dans un acte chirurgical complexe
France. comportant, par exemple, un temps d’exérèse mené par médiane.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Gallot D, Lasser P et Lechaux JP. Colostomies. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Techniques chirurgicales - Appareil
digestif, 40-540, 2002, 11 p.
40-540 Colostomies Techniques chirurgicales
Ces incisions se font au bord externe de la gaine des droits : une fois
2 Incisions électives pour
traversés les plans cellulograisseux sous-cutanés, on ouvre donc le
colostomie latérale. Elles
sont toujours au bord ex- feuillet antérieur de la gaine du droit et l’aponévrose du grand
terne des muscles droits. oblique (fig 3).
Il nous paraît important, afin de diminuer le risque d’éventration
postopératoire, de ne pas sectionner le muscle droit mais d’en
récliner le corps charnu, au besoin après avoir libéré ses fibres de la
gaine. Cette façon de procéder a en outre l’intérêt, dans les
localisations transverses droites et iliaques gauches, d’entraîner un
refoulement de l’anse efférente par le muscle qui renforce l’effet
d’éperon.
Le feuillet postérieur de la gaine est ensuite incisé avec le péritoine
qui est immédiatement repéré par quatre points.
¶ Extériorisation du côlon
En cas d’abord électif par une voie limitée, le repérage du côlon est
plus ou moins aisé selon les circonstances, et l’identification du
segment colique aperçu doit être certaine. On reconnaît le sigmoïde
à ses appendices épiploïques, et le transverse à l’insertion du grand
épiploon.
3 Incision du feuillet su- Si l’on intervient pour occlusion, la distension colique peut faire
perficiel de la gaine du droit. obstacle à l’extériorisation : il faut donc d’abord affaisser l’intestin.
Les fibres charnues sont ré- Cette évacuation préalable ne concerne que les gaz. Elle peut
clinées en dedans. nécessiter une ponction : une petite bourse est faite sur le côlon au
point choisi pour son extériorisation, et l’on ponctionne en son
centre à l’aide d’un trocart (si possible à l’aide d’un trocart à prise
d’air latérale, type trocart de Potain). Une fois les gaz intestinaux
évacués, la bourse est serrée, obturant le point de ponction qui est
au sommet de la boucle extériorisée. Tout ce temps doit se faire en
isolant le champ opératoire du reste de la cavité abdominale par des
compresses ou des mèches.
L’intestin est extériorisé avec une pince atraumatique type Duval.
Un drain ou une baguette plastique est ensuite passé à travers le
mésocôlon. En cas d’extériorisation transverse, il peut être nécessaire
de décoller partiellement l’épiploon du segment extériorisé.
¶ Fixation colique
Ce temps nous paraît essentiel afin de prévenir les rétractions de
stomie et les éviscérations parastomiales (fig 4, 5).
Trois voies d’abord peuvent être utilisées : iliaque gauche, transverse Le côlon est fixé au plan péritonéal par les quatre points de repérage
droite et transverse gauche (fig 2). précédemment mis en place, en chargeant l’épaisseur de la
séromusculeuse colique. Des points intermédiaires peuvent être
L’incision cutanée est le temps le plus important de cette voie placés si la brèche péritonéale est large. Certains auteurs se
d’abord : c’est elle qui conditionne le siège de la colostomie et ses dispensent de cette fixation colique.
facilités d’appareillage. Elle doit donc ne pas être trop importante, Le maintien d’une traction douce sur l’anse colique pendant sa
être à distance d’un relief osseux (rebord chondral ou crête iliaque), fixation aide à la formation d’un éperon colique. Celui-ci est fait de
et ne pas gêner une éventuelle incision médiane. Sa longueur est l’adossement des deux pieds de l’anse colique par quelques points
variable avec la morphologie de l’opéré. (fil 0000 à résorption lente).
*
B
*
A
2
Techniques chirurgicales Colostomies 40-540
6 Ouverture du côlon :
un refend en « T » est possi-
ble sur la branche d’amont.
¶ Fermeture
La fermeture d’une colostomie n’est pas un geste de chirurgie
colique « négligeable » [23].
C’est une suture colique, avant laquelle il faut s’être assuré de
l’absence de tout obstacle en aval, et pour lequel il faut préparer le
côlon à la fois par lavements pour le segment d’aval et par
irrigations (mannitol, polyéthylène glycol [PEG], X-Prept...) pour le
segment d’amont.
¶ Fermeture cutanée pariétale
Cette suture colique ne peut être entreprise sans risque avant un
Lorsque l’on est intervenu par voie élective, il peut être nécessaire certain délai nécessaire à la maturation de la stomie et à la
de refermer très partiellement l’incision aponévrotique de part et disparition des phénomènes inflammatoires locaux : un délai de 2 à
d’autre du côlon extériorisé, par un ou deux points de fil à 3 mois est pour nous habituel.
résorption lente. L’incision cutanée est refermée sans serrer l’intestin Cette fermeture débute par une incision circonscrivant la stomie et
par un ou deux points passés de chaque côté. emportant à son pourtour quelques millimètres de peau (fig 7). Puis
le côlon est dégagé du tissu celluleux sous-cutané. La libération du
¶ Ouverture du côlon et appareillage plan musculoaponévrotique et péritonéal est parfois laborieuse : elle
doit être absolument complète. Une fois dégagé, le côlon est présenté
Le côlon, ainsi extériorisé sans aucune traction, est ouvert en fin par deux pinces type Babcock et les berges de la stomie sont excisées
d’intervention (après pansement d’une éventuelle médiane associée). avec économie, l’hémostase des vaisseaux sous-muqueux se faisant
L’ouverture se fait par colotomie transversale au sommet de la par coagulations fines. Les berges coliques doivent être souples, bien
boucle (fig 6). Elle devrait se faire au bistouri à lame, d’exceptionnels dégagées, et venir au contact sans aucune traction. Un surjet
accidents ayant été rapportés lors d’ouverture au bistouri électrique. extramuqueux de fil à résorption lente referme transversalement
Une hémostase par coagulation des vaisseaux sous-muqueux est l’intestin (fig 8) qui est ensuite doucement repoussé dans l’abdomen
nécessaire. Cette colotomie transversale peut être complétée d’un aussi loin que possible de la brèche pariétale.
refend en « T » sur la branche d’amont de la colostomie. Dans certains cas, les remaniements locaux imposent une très courte
Une fois ouverte, la colostomie est immédiatement appareillée à résection et une anastomose terminoterminale immédiate. Il n’est
l’aide d’une poche autocollante transparente passée sous la baguette pas démontré que les risques de désunion soient alors majorés.
et collée au plus près de l’intestin. L’ouverture musculoaponévrotique est refermée en deux plans de
fil 0 à résorption lente, points simples ou en « X ». La peau est
¶ Appareillage postopératoire refermée sur un drainage filiforme ou, exceptionnellement, laissée
ouverte avec un pansement gras.
L’idéal est de pouvoir placer d’emblée en salle d’opération une
poche de grande taille vidangeable. Ce type de poche peut rester en
place 1 semaine, tout en permettant l’accès à la colostomie : un VARIANTES TECHNIQUES
toucher le lendemain de l’opération peut être utile pour s’assurer de La technique prise pour type de description et qui est notre
l’absence de chicane. Drain et baguette sont enlevés au 10e jour, technique habituelle dérive des techniques de l’anus sur baguette
l’appareillage avec une poche plus petite étant alors possible. de Maydl et de l’anus à éperon de Quenu.
3
40-540 Colostomies Techniques chirurgicales
*
A
¶ Variantes de détail *
B
De nombreuses variantes de détail ont été proposées :
9 Colostomie avec ouverture différée : la baguette « écrase » la branche d’aval (A, B).
– voie d’abord : certains proposent de principe une voie médiane, ce
qui paraît peu justifié, même en cas d’occlusion intestinale complète
10 Terminalisation d’une
par cancer ; stomie latérale par appli-
– siège de la colostomie : la localisation médiane en particulier, au cation d’une agrafeuse li-
niveau de l’ombilic, a une certaine vogue outre-Atlantique ; néaire fermant la branche
distale.
– modalités de confection de l’éperon : le simple adossement des deux
anses coliques par quelques points séparés de fil à résorption lente
est suffisant, et l’interposition d’un coin pariétal selon Quenu est en
pratique abandonnée ;
– l’ouverture immédiate des colostomies latérales est pour nous la
règle. Elle est pour certains différée : en cas d’occlusion, il pourrait
ainsi paraître préférable d’attendre 48 heures que des adhérences
colmatent le trajet transpariétal et évitent une contamination de
dehors en dedans de la paroi ou de la cavité péritonéale. Ce délai ne
nous paraît pas sans risque (distension colique, entretien de
l’infection...), et il ne nous paraît pas toujours indispensable si l’on
prend la peine de fixer soigneusement le côlon à la paroi et de
refermer celle-ci correctement ;
– la colostomie « non ouverte » (fig 9) a eu une certaine vogue dans le
cadre des colostomies de protection [6]. Cette façon de faire consiste
à extérioriser le côlon transverse droit au-dessus d’une anastomose
à haut risque (anastomose basse, sigmoïdite, obstruction colique...)
en comprimant le segment colique d’aval par la baguette qui est
décalée et fixée à la peau par deux fils de Nylon. Cette « occlusion
iatrogène » est maintenue 8 jours, l’aspiration gastrique étant
poursuivie : l’anastomose est alors contrôlée par une opacification (fig 10). Cette terminalisation peut être complétée par la mise en
avec un produit hydrosoluble. En cas de fistule anastomotique, la place d’un cathéter pour irrigations du segment d’aval. Il est
colostomie est ouverte. Dans le cas contraire, le côlon est simplement toutefois important de souligner que cette exclusion par agrafage
réintégré sous anesthésie. Pour ses promoteurs, cette méthode est est temporaire, et que dans un délai de quelques mois les agrafes
« très maniable, d’exécution rapide et simple ». Dans le même esprit, s’éliminent, ouvrant à nouveau l’orifice distal de la colostomie
Chapman [4] propose une ouverture retardée au lit du malade par latérale au passage des matières. Dans certaines situations (exclusion
simple application d’agrafeuse GIA à la 48e heure ; d’un rectum radique par exemple), cette remise en circuit peut être
très gênante : à l’agrafage simple doivent être préférées la section et
– l’utilisation des agrafeuses automatiques a été proposée selon deux la fermeture du segment d’aval, à condition que celui-ci ne soit pas
modalités. Soit, comme pour Chung, pour la confection même de la sténosé.
stomie latérale, par un agrafage direct colocutané à l’agrafeuse
circulaire [5] : cette technique ne nous paraît pas devoir être ¶ Principale variante
encouragée, non seulement en raison de son coût, mais aussi parce
qu’elle nécessite une voie médiane, et surtout parce qu’elle ne Elle est représentée par le siège cæcal de la stomie.
comporte aucun éperon et ne dérive que très incomplètement. À La cæcostomie (ou typhlostomie selon les auteurs anciens) est
l’inverse, la fermeture du bout d’aval par une agrafeuse linéaire peut l’abouchement du cæcum à la peau. Elle ne doit pas être considérée
être un adjuvant intéressant, terminalisant une colostomie latérale comme une véritable colostomie car elle ne dérive que très
4
Techniques chirurgicales Colostomies 40-540
5
40-540 Colostomies Techniques chirurgicales
Colostomies terminales
17 Après fixation des
COLOSTOMIES LATÉRALES TERMINALISÉES deux jambages coliques au
Le souci d’une dérivation totale des matières est à l’origine de péritoine pariétal, l’intestin
plusieurs procédés de colostomie qui ont en commun une section est sectionné avec une
marge suffisante au-dessus
colique, avec ou sans résection d’un segment intestinal. Ces du plan cutané pour éviter
techniques aboutissent à la confection d’une double stomie : stomie tout risque de rétraction.
d’amont productive et stomie d’aval non productive (mucous
fistula).
¶ Anus à pont
Ils sont aujourd’hui peu utilisés. Ils dérivent de l’intervention
proposée par Witzel en 1890. L’inconvénient de ces techniques
d’anus à pont était de compliquer l’appareillage. Diverses variantes
en ont néanmoins été récemment décrites. Ein [7] propose une
colostomie terminalisée (divided loop colostomy) de siège transverse
avec un trajet sous-cutané assez long destiné à prévenir le risque de
prolapsus. Sigurdson [25] propose un agrafage du segment distal
destiné à diminuer la taille de la stomie d’aval et à faciliter
l’appareillage.
6
Techniques chirurgicales Colostomies 40-540
Extériorisation colique
Deux trajets sont possibles :
– trajet direct, si la colostomie semble devoir être temporaire ;
– trajet sous-péritonéal en cas de colostomie définitive.
• Trajet direct
On commence par une petite incision circulaire au point choisi pour
la stomie (fig 19), puis l’on excise le tissu sous-cutané en regard, ce
qui expose la face antérieure de la gaine du droit : incision en croix
de celle-ci, puis le muscle est récliné en dedans. Le feuillet postérieur
de la gaine et le péritoine sont alors ouverts. Le côlon refermé de
façon à n’entraîner aucune souillure pariétale (si possible par
application d’une agrafeuse automatique) est alors attiré au-dehors,
et le mésocôlon suturé au péritoine pariétal afin d’obturer la
gouttière pariétocolique, puis la colostomie est ourlée à la peau
21 Colostomie terminale définitive (ici après Hartmann) : le côlon passe à travers
la paroi dans un trajet en « chicane » d’abord sous-péritonéal.
(fig 20).
extramuqueux. Huit à dix points sont habituellement nécessaires.
• Trajet sous-péritonéal Ils doivent permettre un affrontement mucocutané parfait. Une
poche transparente autocollante taillée à la dimension de la stomie
La traversée pariétale se fait de façon identique jusqu’au péritoine
est ensuite immédiatement mise en place.
qui n’est pas ouvert, mais progressivement décollé de la face
postérieure des muscles larges. On dégage ainsi un passage sous- Soins postopératoires
péritonéal qui rejoint l’ouverture péritonéale faite par la section du Les fils à résorption lente utilisés pour la suture colocutanée tombent
mésocôlon lors de la résection sigmoïdienne ou rectal. Refermé, le spontanément.
côlon est alors attiré par une pince atraumatique hors du ventre
La mise en place immédiate en postopératoire d’un appareillage
(fig 21).
moderne adhésif avec protecteur cutané est un élément essentiel du
Il est nécessaire de dépouiller un bon centimètre de côlon et parfois confort de l’opéré. Les matériels actuellement commercialisés en
de couper plusieurs franges épiploïques, avant de suturer à points France sont très nombreux et permettent de répondre à toutes les
séparés l’intestin à la peau (fig 22). situations.
L’utilisation des irrigations coliques améliore grandement le confort
Ouverture colique et fixation à la peau des opérés, en leur permettant d’éviter le port d’une poche que
La ligne d’agrafage n’est recoupée qu’après fermeture et pansement remplacent efficacement de petits appareillages protecteurs munis
de la médiane. L’hémostase de la sous-muqueuse se fait par de filtres pour désodoriser les gaz.
coagulations fines, et le côlon est fixé à la peau par une série de Ces irrigations doivent être commencées dès le 8 e -10 e jour
points chargeant toute l’épaisseur cutanée et l’intestin en postopératoire. Elles sont généralement très bien acceptées par les
7
40-540 Colostomies Techniques chirurgicales
23 Colostomie latérale
cœlioscopique. Dans la
technique de Lyerly, le
trocart optique est à
l’ombilic et l’unique trocart
opérateur, placé au site
choisi pour la stomie, per-
met le passage d’une pince
qui attire le côlon.
22 Suture colocutanée après péritonisation (un drainage aspiratif peut être mis en
place au contact du court moignon rectal).
¶ Variantes techniques 24 Le trajet du trocart est agrandi, puis, après extériorisation de l’anse, une baguette
est mise en place comme en chirurgie ouverte.
Les conditions pathologiques qui aboutissent à la confection d’une
colostomie terminale peuvent imposer une résection colique plus ou maladies de Crohn compliquées de fistule rectovaginale, et surtout
moins large : le siège de la colostomie est donc variable. Deux points les lésions tumorales inextirpables. Cet abord mini-invasif a
doivent toutefois être soulignés : également été proposé pour la prise en charge de certains
– il est important d’essayer de garder la plus grande longueur délabrements traumatiques [1].
possible de côlon afin de diminuer le volume des selles, d’en Le technique comporte, en préopératoire, le repérage cutané du site
augmenter la consistance et de garder une bonne efficacité aux d’abouchement du côlon, selon les règles décrites ci-dessus. Le
irrigations coliques : une colostomie transverse droite doit ainsi être premier temps est exploratoire, par un trocart optique placé, soit à
considérée comme peu confortable ; l’ombilic, soit dans un flanc, le plus souvent droit, à distance du site
prévu pour la stomie. Un ou deux trocarts opérateurs sont ensuite
– le siège de la colostomie dépend certes du segment colique
mis en place (fig 25B), l’anse sigmoïde ou le transverse est repéré, sa
abouché à la peau, mais les règles générales demeurent : elle doit
mobilité est évaluée. Une mobilisation du côlon gauche par
être distante des plis et des reliefs osseux. Ces colostomies
décollement du fascia de Toldt gauche peut être faite : le côlon doit
« ectopiques » se font le plus souvent par un trajet direct.
venir très facilement en regard du point choisi pour son
extériorisation. Une incision pariétale est alors faite et le côlon est
attiré à l’extérieur, soit en colostomie latérale, soit après section par
Techniques laparoscopiques application d’une agrafeuse linéaire, en colostomie terminale.
L’intérêt de cette technique, outre le bilan assez complet de
Plusieurs articles [11, 12, 17, 18, 20] ces dernières années ont proposé l’extension d’une carcinose [11], vient essentiellement de ce qu’elle
l’utilisation de la voie d’abord cœlioscopique pour la confection permet, dans certaines situations difficiles, d’évaluer au mieux les
d’une colostomie, soit latérale, soit terminale (fig 23, 24, 25A). possibilités d’extériorisation [22] et d’éviter, soit une large et
Une telle voie d’abord ne s’envisage bien évidemment que lorsque délabrante laparotomie, soit deux incisions (iliaque puis sous-
la colostomie est un geste isolé : les principales indications en costale) lorsque, en cas d’impossibilité de mobilisation du côlon
seraient les maladies inflammatoires colorectales, notamment les sigmoïde, on doit se rabattre sur une colostomie transverse.
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Techniques chirurgicales Colostomies 40-540
9
40-540 Colostomies Techniques chirurgicales
*
A *
C
*
B
26 Colostomie continente selon Schmidt : prélèvement et préparation du segment de muscle lisse (A, B, C).
¶ Soins postopératoires
Les irrigations coliques font partie intégrante de la technique : elles
sont indispensables pour assurer l’absence de souillures et le confort
des patients.
Elles sont faites avec le matériel d’irrigation habituel des colostomies
enroulé sur lui-même autour du côlon, ce qui correspond iliaques. Les premières irrigations sont faites dès le 3e ou 4e jour,
habituellement à un tour et demi. Puis il est fixé sur lui-même par sans attendre la reprise du transit, avec une injection quotidienne de
des points séparés de Prolènet (fig 28B, C). Schmidt a montré, dans 200 mL d’eau tiède sur un patient en décubitus latéral. On augmente
ses études expérimentales [24], qu’un fragment de muscle colique se progressivement les quantités de liquide, et à partir du 9e ou
rétractait à 80 % lorsqu’il était libéré de toutes ses attaches. C’est 10e jour, le patient fait lui-même ses irrigations au moyen du cône
pourquoi le greffon doit être fixé autour du côlon avec une tension de l’irrigateur.
maximale pour qu’il garde sa force de contraction optimale
Les irrigations sont quotidiennes pendant les 3 premières semaines.
(60 g/mm2). Pour éviter une rétraction transversale, les bords
Ultérieurement, une irrigation de 1 à 1,5 L tous les 2 jours, le matin,
supérieur et inférieur sont également amarrés sous tension à la paroi
peut être suffisante.
colique.
L’extrémité colique est ensuite abaissée au périnée, ouverte et fixée ¶ Complications
à la peau par des points séparés (fig 29). Chez la femme, la
colostomie doit siéger à égale distance du coccyx et de l’orifice À court terme, des désunions cutanées partielles ou des
vulvaire. suppurations périnéales retardent la cicatrisation mais ne
*
A *
B *
C
28 Le greffon musculaire est étiré et suturé à lui-même en faisant un tour et demi sur le côlon (A, B, C).
10
Techniques chirurgicales Colostomies 40-540
¶ Indications
Le principal avantage est d’ordre psychologique et réside dans le
respect de l’intégrité corporelle. Ce souci est primordial dans
certaines ethnies afin d’éviter le rejet par la société des sujets ayant
subi une amputation abdominopérinéale.
La colostomie périnéale permet aussi une surveillance clinique et
éventuellement échoendoscopique afin de dépister précocement des
récidives pelviennes chez l’homme.
Le principal inconvénient réside dans l’impossibilité de tout
appareillage en cas d’échec fonctionnel, ce qui impose une
réintervention pour faire une colostomie iliaque gauche.
Ne peuvent bénéficier de la colostomie périnéale pseudocontinente
que des patients parfaitement instruits de son fonctionnement et de
ses résultats au terme de plusieurs entretiens avec le chirurgien,
mais aussi le stomathérapeute et le personnel infirmier.
Ainsi informés, 50 % des patients refusent la technique proposée.
Les contre-indications sont liées au patient et à la tumeur. Il faut
écarter tous les patients qui, par leur âge avancé, leur contexte
psychique ou social défavorable, paraissent incapables de
comprendre ou d’assumer les irrigations. L’obésité est un élément
29 Colostomie périnéale : aspect terminal. défavorable. La station assise prolongée pour motif professionnel
n’est pas une contre-indication.
Il faut renoncer à cette technique en cas de tumeur évoluée à haut
compromettent pas le résultat fonctionnel. Une sténose par un risque de récidive locale, donc d’envahissement ou de compression
greffon trop serré peut nécessiter une dilatation pour permettre de la stomie périnéale, ou lorsqu’une radiothérapie postopératoire
l’évacuation complète. apparaît nécessaire. Les cancers épidermoïdes de l’anus traités par
À distance, on peut observer une éventration périnéale, radiochimiothérapie et exérèse chirurgicale large ne sont pas de
probablement favorisée par une épiplooplastie trop volumineuse. bonnes indications, du fait de la sclérose induite par la
Un prolapsus muqueux de la colostomie nécessite rarement une radiothérapie. Une chimiothérapie adjuvante n’est pas une
réfection chirurgicale [8]. contre-indication.
Références
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11
¶ 40-555
Avec 36 000 nouveaux cas par an et 16 000 décès, le cancer colorectal (qui comprend 65 % de cancers
coliques) est un problème de santé publique. Le diagnostic est fait à un stade trop tardif et le dépistage
par l’Hémocult® devrait permettre de détecter les cancers coliques à un stade précoce, permettant une
guérison par la chirurgie seule. Un des facteurs pronostiques essentiels est la qualité de l’exérèse
chirurgicale. Le respect des règles d’exérèse carcinologique afin de prélever un nombre suffisant de
ganglions suffit à améliorer le pronostic quelle que soit la voie d’abord (cœlioscopie ou laparotomie).
Depuis plusieurs années, la chimiothérapie adjuvante a prouvé son efficacité dans les stades III (N+). Elle
reste discutée pour les stades II (N). Les standards thérapeutiques ont évolué avec l’apparition de
nouvelles molécules efficaces. Les anticorps monoclonaux, qui ont prouvé leur efficacité en situation
métastatique, vont être testés en situation adjuvante. Cependant, ces traitements adjuvants, toxiques et
onéreux, ne doivent pas être utilisés pour rattraper une chirurgie inadéquate et incomplète.
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grade pour les adénocarcinomes bien et moyennement différence entre les deux groupes concernant les complications
différenciés et le haut grade pour les adénocarcinomes peu ou per- et postopératoires. Il n’y a pas de différence significative
indifférenciés ; entre des deux groupes concernant le nombre et le délai
• préciser la présence d’emboles vasculaires. Veineux ou d’apparition des métastases hépatiques (p = 0,14). Seul un sous-
lymphatiques péritumoraux ? Ou la présence d’engainements groupe de patients ayant un cancer sigmoïdien avec présence
périnerveux qui, pour certains auteurs, sont un facteur d’emboles tumoraux veineux semblait bénéficier de la techni-
prédictif de métastase hépatique. que du « no touch » avec une diminution d’apparition des
Enfin, l’anatomopathologiste doit préciser la qualité de la métastases hépatiques.
résection chirurgicale et l’on oppose actuellement trois types de Salsbury et al. [12] avaient montré que la ligature première des
résections : vaisseaux n’empêchait pas la présence de cellules tumorales
• les résections R2 qui sont des résections incomplètes macro- circulantes. Ils ont montré que si 10 % des patients opérés d’un
scopiquement lorsque le chirurgien laisse en place du tissu cancer sigmoïdien présentaient des cellules circulantes 5 minu-
tumoral ; tes avant la ligature des vaisseaux mésentériques inférieurs,
• les résections de type R 1, qui sont macroscopiquement 60 % des patients présentaient des cellules cancéreuses circulan-
complètes mais microscopiquement incomplètes. En effet, le tes 5 minutes après la ligature de ces vaisseaux. On sait que la
contrôle histologique des limites proximales, distales ou dissémination vasculaire intraopératoire ne joue qu’un petit rôle
latérales trouve un envahissement à ce niveau. Pour affirmer dans le processus métastatique. En effet, les micrométastases
qu’une exérèse est complète latéralement, il faut que l’anato- existent et sont implantées avant que la tumeur primitive ne
mopathologiste mesure la clairance latérale. Cette clairance se soit réséquée. Actuellement, aucune étude n’a prouvé l’efficacité
définit comme la mesure en millimètres de la distance de la ligature lymphovasculaire première lors de la résection
existant entre la zone d’extension maximum de la tumeur et d’un cancer colique.
la section chirurgicale ;
• enfin, la résection de type R0 qui correspond à une exérèse Ligature vasculaire
complète à la fois macroscopique et microscopique.
De très nombreux autres facteurs pronostiques ont été L’envahissement ganglionnaire à partir de la tumeur se fait de
étudiés, ils sont rarement indépendants et ne sont pas actuelle- proche en proche. Les vaisseaux lymphatiques sont satellites des
ment utilisés pour justifier un traitement adjuvant. Qu’il s’agisse pédicules artériels et les ganglions envahis sont successivement
de la ploïdie étudiée par cytométrie de flux, de la protéine p53, les ganglions péricoliques, intermédiaires et principaux ou
de la thymidilate synthase, de la perte du bras long du chromo- pédiculaires.
some 18 ou du statut MSI. Les ganglions péricoliques siègent au contact de l’origine des
principaux troncs artériels (artère iléo-cæco-colo-appendiculaire,
artère iléocolique droite, moyenne et gauche, artère mésentéri-
que inférieure). Si la tumeur siège entre deux pédicules vascu-
laires majeurs, le drainage lymphatique peut se faire dans l’une
“ Mise au point ou l’autre direction ou dans les deux. En principe, cet envahis-
sement ganglionnaire est continu, progressif, anatomique, et ne
saute pas de relais. Cependant dans moins de 5 % des cas, des
Les seuls critères histopronostiques validés et reconnus, skips métastases peuvent être observées (trois sur 197 cancers
reproductibles et