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Guide Du Jargon de Laelith: Aldron Kientol
Guide Du Jargon de Laelith: Aldron Kientol
Jargon de Laelith
III
Aldron Kientol
Professeur de linguistique appliquée à l’UMU
Argot ou jargon ?
« L’objectif de ce petit guide, destiné au MJ, est de fournir quelques
éléments de réflexion sur les différentes façons de parler que l’on
peut entendre à Laelith. Il ne s’agit pas de détailler les langues, telles
qu’on peut les connaître (le commun, le nain, l’elfe…), mais les dé-
formations qu’elles ont pu subir dans les couches de la société lae-
lithienne et sur les terrasses. Bien entendu, nous ne serons concernés
ici que par le “commun”, mais n’hésitez pas, pour ceux d’entre vous
parlant couramment l’elfe, à adapter ce qui est écrit.
Pour commencer, quelques définitions :
• Parfois taxé de langue spéciale, entouré d’une aura mystérieuse
de langue secrète, code marginal et marginalisé, l’argot s’affirme
comme langage de complicité tendant à exclure de la communica-
tion la multitude des non-initiés. On parlera donc plutôt d’argots,
car il peut en exister une multitude.
• À l’opposé, on peut considérer le jargon comme un parler tech-
nique qui peut être ésotérique pour le profane, mais dont la finalité
n’est pas de masquer l’objet du discours. Au contraire, elle est d’en
rendre l’expression plus rigoureuse, plus spécifique, plus rapide.
Mais il arrive souvent que les termes d’un jargon viennent com-
pléter un argot, pour en préciser la fonction technique, ou qu’un
argot passe dans le langage courant, car identifié, décrypté, par des
non-initiés, au hasard d’un événement.
Et donc, les deux fonctions, cryptique et technique, se rejoignent et
nous utiliserons alors le terme de jargot. »
Aldron Kientol, professeur de linguistique appliquée à l’UMU
Jargots à clé
Contrairement au jargot des voleurs, fait d’ajouts et d’interpréta-
tions particulières de la langue commune, compréhensible unique-
ment de ceux qui possèdent l’intégralité du vocabulaire, les jargots
à clé sont construits sur la base d’un procédé de transformation. Ce
procédé, parfois nommé code, basé sur une clé, permet d’assurer la
compréhension, quels que soient les mots employés.
On verra plus loin comment un meneur de jeu pourra modifier ce
codage, l’adapter à ses besoins, voire le complexifier.
La verlangue
Il s’agit d’une autre forme de jargot, simplement codé et sans clé,
qui est apparue dans Laelith toute entière il y a maintenant plusieurs
siècles, vraisemblablement importée par des pèlerins. Elle est encore
pratiquée, surtout sur la Chaussée du lac et la Main qui travaille, par
les travailleurs journaliers et autres « petits métiers », dans un esprit
de simplicité et de connivence. Entre membres de tandems de por-
tefaix, elle est utilisée pour communiquer rapidement des change-
ments de parcours.
La verlangue a été, dans un passé très récent, popularisée et remise
au goût du jour par certains ménestrels qui en ont fait un usage im-
modéré dans plusieurs de leurs compositions devenues célèbres.
Très simple en apparence, elle consiste principalement à inverser
les syllabes de certains mots. Le procédé est régulièrement complété
par une abréviation ou une inversion locale de lettres à l’intérieur du
mot. Des expressions complètes peuvent être aussi « verlanguisées »,
telles que vas-y (ziva) ou à ce soir (soirasse).
Cette complexité « à tiroirs » en fait un intermédiaire entre lan-
gage cryptique et langage économique, ce qui justifie pleinement sa
présence dans les jargots. Ce qu’on constate, c’est que la verlangue,
à Laelith, s’apparente à un organisme vivant, qui évolue, respire, à la
fois pour s’adapter aux nouveaux venus et aux nouvelles formes de
langages et les intégrer, ou, quand cela est nécessaire, les écarter et
conserver une intimité, une proximité.
La Baronnie de Kaoca
Voilà un exemple de jargot exotique codé mélangé à de la ver-
langue (qui pourrait même être à l’origine du nom de la Baronnie).
Le code est basé sur la lettre K et le suffixe ao ou oa, c’est selon. Cela
donne, pour la baronnie de Kaokakao, quelques sonorités bizarres
(jeu : keujao ; bonbon : konbonboa ; ville : killevao), surtout en pin-
çant légèrement le nez sur les voyelles finales. À Laelith, les gnomes
sont connus pour avoir un débit verbal très élevé. Mais ici, le simple
fait de les entendre prononcer des mots chantants avec un accent
traînant ajoute à l’exotisme et à l’atmosphère festive de ces lieux où
les touristes abondent.
Spécial MJ
Les quelques règles énoncées ci-dessus permettent ainsi au me-
neur de jeu de créer sa propre clé, son propre mode de codage et
d’inventer ainsi son langage.
Qu’il s’agisse des jargots de type largotji ou « terrasse », il suffira de
définir une clé (syllabe simple commençant par une consonne). Pour
un équivalent « utruz », un meneur de jeu inventif pourra dévelop-
per son propre langage, en intercalant, au début ou à la fin du mot, sa
propre clé, c’est-à-dire sa propre composition de voyelle-consonne.
Quant au MJ torturé, il pourra verlanguiser son « utruz »… ou
l’assortir de quelques mots tirés du jargot des voleurs passés par le
codage du jargot d’une terrasse.
« Couper la bourse d’un pèlerin de l’Oiseau de feu sous le nez d’un
rahel du contingent de ville sans se faire prendre » pourrait deve-
nir (jargot des voleurs, simple) « détacher le bouchon d’un marron
sous le nez d’un bigorneau sans être chouette » ou « métachédain le
choubon d’un muzarron sous le zeznu d’un buziguzorneau sans être
teuchoué ». Admirez la construction de zeznu, pour nez, en utruz
verlanguisé.
Ce guide est complété, dans les pages qui suivent, d’exemples de
mots tirés du jargot des soldats. Les contacts des aventuriers avec
cette catégorie de la population de Laelith seront suffisamment fré-
quents pour que le MJ dispose d’un vocabulaire, parfois « fleuri »,
qui lui permette de se glisser facilement dans ce type de rôle.
Le reste du guide est consacré à quelques expressions propres à
Laelith, leur signification et leur origine.
Deux strates
L’expression originale est « ce magicien est un deux strates ! ». Elle
signifie de manière très péjorative que l’intéressé est de faible niveau.
En effet, les étages supérieurs (également appelés strates) des Pics des
Mages sont occupés par les maîtres magiciens. Selon un protocole
immuable, plus un mage est puissant, plus son appartement est situé
haut dans l’édifice !
Par extension, traiter quelqu’un de « deux strates » revient à dire
de lui qu’il travaille mal.
Échellisme
Terme sociologique désignant un individu ou un groupe d’indivi-
dus pensant « qu’il ne faut quand même pas pousser le Roi-Dieu dans
le Cloaque et confondre pèlerinage et immigration ».
Attitude populiste, non structurée et très diffuse dans la masse, il
n’en demeure pas moins qu’il s’agit bel et bien de nationalisme de
cité. Car il est bien connu que dès que quelque chose va mal au quo-
tidien à Laelith, c’est forcément la faute de l’autre et des dirigeants
qui ne s’occupent pas assez des Laelithiens de souche. Quant à savoir
quand, pourquoi et comment quelqu’un est considéré comme étant
un Laelithien de souche, c’est un autre débat.
Faire bedaine
Faire le tour des temples de la ville pour bénéficier des repas offerts
aux nécessiteux. Par extension, pique-assiette professionnel.
À l’origine, cette expression était employée pour désigner, avec
élégance et compassion, toute personne respectable n’ayant que la
charité des Temples pour nourrir honnêtement sa famille.
Désigne désormais péjorativement toute personne cherchant à
vivre gratuitement au crochet de la société laelithienne.
Faire sabot
Fait référence à l’échelle éponyme. Signifie « flatter quelqu’un ou-
trageusement dans le but d’obtenir quelque chose de lui ».
Flugistik !
Expression de mépris chez les gopneldauns de Laelith.
Flugistik de Ponton, pour ne pas rembourser ses dettes à ses congé-
nères, voulut se faire engager dans une puissante guilde d’assassins. Il
fut retrouvé au matin, quai des Contrebandiers, dans une marmite,
bouilli et accompagné d’une sauce gopneldaun. Un des rares cas où des
cuisiniers gopneldauns ne se vantèrent pas de leur création culinaire.
Ookhab
Les ookhabs, animaux de bât puissants et endurants, sont à l’ori-
gine de plusieurs expressions courantes à Laelith :
• « Voir des ookhabs roses » : sans surprise, arrive souvent lorsqu’on
a bu trop d’alcool.
• « Bien sûr, prends-moi pour un ookhab ! » : peut se dire à quelqu’un
qui tente de vous faire croire quelque chose de trop gros pour être
vrai.
• « Ne pas voir un ookhab dans une échelle » : être étourdi, aveugle,
inconscient.
Toponymes de Laelith
Le langage populaire est composé d’une quantité impressionnante
de noms écornés, modifiés, et le pèlerin non averti pourrait se perdre
face à de tels propos. Ce qui suit n’est qu’une petite partie des appel-
lations rencontrées dans la Cité sainte.
• Le Nuage : peut désigner la terrasse ou le Temple, en fonction du
contexte ; on dit aussi la Vapeur, les Vappes.
• La Haute : la Haute Terrasse, on dit aussi les Hauts.
• Le Lac : peut désigner la Chaussée du lac, ou l’Altalith, en fonction
du contexte ; on dit aussi l’Humide, la Flotte.
• L’Oiseau : le Temple de l’Oiseau de feu, on dit aussi la Flambée, le Feu.
• La Main : la terrasse de la Main qui travaille ; on dit aussi la
Fatigue, la Fourmilière, la Ruche ou le Rucher en raison de l’acti-
vité incessante.
• La Prosp’ : la terrasse de la Prospérité ; on rencontre aussi un cu-
rieux « la fontaine à sieur Péaut », ce vieux nom est une sorte de
déformation de po (pièces d’or), qui désigne une monnaie ayant
cours à Laelith. Plusieurs scribes ont cherché dans les archives qui
pouvait bien être ce fameux sieur Péaut.
• Les Planches : le Grand Théâtre, sobriquet très ancien qui rappelle
l’antique établissement.
• L’Escalle : le Chariot qui monte ; on dit aussi l’Écale, par élision.
• Le Chate : le Châtiment (la terrasse ou l’événement).
• L’In : l’Inlam, la Faille.
• La Crève-pèlerin : l’échelle des Mille Marches, à noter qu’on peut
aussi désigner de cette manière le raidillon qui monte le long de la
falaise de Vorn.
• Les Septères : la place des Sept Royaumes.
• La Solitude : la porte de l’Immense Solitude septentrionale, on dit
aussi l’Oubliée.
• La Bouteille : la porte de l’Ivresse enchanteresse, on dit aussi
l’Ivresse, le Flacon, la Chopine.
Guide du jargon de Laelith