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L’État royal face aux contestations, 1380-1715 

Doc 1 : La révolte des Maillotins (1382)

Miniature illustrant une chronique anonyme, en langue française, XVe siècle, Bibliothèque
municipale de Besançon, Ms 677
(https://memoirevive.besancon.fr/ark:/48565/nr85d3jb9gpv/dcee8c42-2288-4d6f-bf17-
6ed4ba2e24b5)

Doc 2 : Déclaration faicte par Monsieur le Prince de Condé pour monstrer les raisons qui
l’ont contrainct d’entreprendre la défense de l’authorité du Roy, du gouvernement de la
Royne et du repos de ce Royaume, 1562, p. 1-3

Combien que ce soit à ceux qui s’arment les premiers par leur authorité privée de rendre
raison de leur faict, si est-ce que Monsieur le Prince de Condé considerant combien la
presente émotion à cause de plusieurs circonstances est subjecte à beaucoup de divers
jugemens, avec ce que l’interest public requiert un certain et prompt remède : a bien voulu,
pour prevenir toutes calomnies, declarer ainsi que s’ensuit les raisons qui l’ont esmeu de
s’accompagner de ses parents, amis et serviteurs pour faire service au Roy, à la Royne et à
tout ce royaume en leur grand besoin.
Chacun sait, qu’apres les grans troubles advenus pour le faict de la Religion desquels il est
tout notoire que plusieurs, en abusant de la bonté naturelle de nos Rois, se sont servis pour
fonder et entretenir leur grandeur : finalement au mois de janvier dernier a esté dressé un edict
par sa Majesté pour reigler les deux parties avec l’advis de la plus notable et mieux choisie
assemblee que le Roy ait peu eslire en tous ses Parlemens.
Cest Edict ayant esté tost apres publié en la pluspart des Parlemens de ce royaume, donnoit un
fort grand espoir de repos, comme l’effect l’a monstré. Et ne faut douter, que si le Parlement
de Paris n’eust usé de telle longueur, la tranquillité eus testé et fust encores aujourd’huy trop
plus grande que l’on ne la voit.
L’empeschement de ceste publication a engendré, à bonne et iuste cause, plusieurs
souspeçons que cela ne se faisoit sans grandes pratiques, qui tendoyent plus loin. (…)
toutefois, cela n’a aucunement esmeu ledit seigneur Prince ni autres des Eglises reformees à
dire ou faire chose qui troublast le public repos de ce royaume. Ainçois, au milieu d’infinies
violences et outrages, dont jamais ils n’ont peu avoir justice, ils ont attendu l’issue de la
publication, avec la plus grande modestie et patience qu’ils ont peu. (…)
Sur ces entrefaites furent apportees les nouvelles du cruel et horrible carnage comis à Vassy
en la présence et compagnie de Monsieur de Guise là où ont été très inhumainement occis
plusieurs des subjects du roy, tant hommes que femmes et enfans, qui s’etoient assemblez
sans armes, à leur manière accoustumee, pour oui la predication et prier Dieu, suivant la
Religion et pure parole de Dieu (…)

Doc 3 : la révolte des Nu-Pieds normands (1639)


En juillet 1639, le sieur de la Bernardière Poupinel, lieutenant criminel à Coutances, étant allé
à Avranches, on crut qu’il venait pour établir la gabelle et abolir l’usage du sel blanc, parce
qu’il était beau-frère de Nicole, engagé dans ce parti.
Ce faux bruit passa pour une vérité certaine en l’esprit de ceux qui travaillent à faire le sel
blanc, quoiqu’en effet le sieur de Bernardière allât pour exécuter une commission dépendant
de sa charge, qu’il fût fort homme de bien et n’était mêlé aux partis de son beau-frère. Ce
néanmoins, les paysans travaillent au sel blanc, capables de tout entreprendre par leur extrême
misère, qui fit qu’ils ne craignaient rien pis que ce qu’ils souffraient, l’attaquèrent en son
hôtellerie et le tuèrent ainsi que deux de ses serviteurs.
Ce premier exemple fit soulever plusieurs paysans sous un chef qui se faisait nommer Jean
Nu-pieds et ceux de son partis, les Nu-pieds. Ils disaient vouloir empêcher la levée de tous
impôts établis depuis la mort du roi Henri IV. Ils se saisirent d’un des faubourgs d’Avranches
et tinrent la campagne ; et jusqu’à la fin de l’automne, faisant une exacte recherche de ceux
qu’ils croyaient faire des levées extraordinaires et ne faisant nul mal aux autres, ce qui faisait
que le peuple, bien loin de les attaquer, leur fournissait secrètement des vivres. MM. de
Matignon, lieutenant général en la Basse-Normandie et de Canisy ne purent ou ne voulurent
réprimés ces mutinés qui portaient pour étendard l’image de ST Jean-Baptiste (…).
On publia que ce Jean Nu-pieds était M. Jean Morel, vicaire de Saint-Saturnin, près
d’Avranches ; d’autres que c’était le sieur de Ponthebert, gentilhomme de ce pays là, que l’on
voulait dire s’être déguisé en paysan et avoir commission des princes et seigneurs mécontents
qui s’étaient retirés hors de France, ce qui est peu probable, ce désordre n’ayant eu autre sujet
que la misère d’un peuple lassé de souffrir.
Peu après les paysans des environs de Vire entrèrent par force à Vire et traitèrent si rudement
le sieur de la montagne- Petouf, président en l’élection de Bayeux, qu’ils le laissèrent pour
mort sur la place. Ils battirent aussi son fils, pillèrent sa maison et ensuite tinrent la campagne
comme les mutinés des environs d’Avranches. (…) Ces désordres excitèrent à Caen divers
propos tendant à sédition ; mais lorsqu’on y apprit la mort de Jacob Hais, le menu peuple se
souleva et pilla les maisons de ceux qu’il soupçonna être auteurs des impôts nouveaux. Leur
chef se faisait nommer Bras Nus
A peine les receveurs des tailles et autres ordinaires osaient-ils paraîtres à la campagne pour
demander ce que le peuple devait, car pour les droits nouveaux, on n’eut osé penser à les
demander.
(…) On envoya en Normandie les meilleures troupes de l’armée du maréchal de la
Meilleraye, commandées par le sieur de Gassion, maréchal de camp, avec un ample pouvoir.
Il entra en Normandie environ la Saint-Martin. A demie lieue de Caen, il fait marcher ses
troupes en ordre, tambour battant, et dès qu’il y entra, il se saisit des principales places de la
ville et donna à chaque soldat un billet de la maison en laquelle il devait loger. Il excepta
d’abord tous les officiers et gentilshommes de ces logements, mais depuis il révoqua partie de
ces exemptions, plusieurs des autres habitants ne pouvant plus nourrir leurs hôtes.
Peu de jours après, il commanda aux habitants de porter leurs armes en l’hôtel de ville. Ils y
obéirent, on laissa seulemet l’épée aux gentilshommes. Ce commandement étonna fort les
bourgeois qui crurent qu’après les avoir désarmes, on userait sur eux de grandes rigueur. En
suite, M. de la Poterie, conseiller d’Etat qui l’avait suivi comme intendant de la justice présida
au jugement des accusés. Branuds fut condamné à être rompu vif comme aussi un autre (il me
semble qu’il se nommait Morel), proche parent du sieur du Haguais, receveur des tailles. Ils
furent tous deux appliqués à la question, et après leur mort, leurs corps mis en quartiers, furent
exposés aux principales portes. (…)
Mémoires du président Bigot de Monville sur la sédition des nu-pieds et l’interdiction du
parlement de Normandie en 1639, Rouen, Métérie, 1876, p. 9-11 et p. 162-164.

Doc 4 : Les « délibérations de la chambre Saint-Louis » (1648)


« Art. 1. - Les intendants de justice, et toutes autres commissions extraordinaires non vérifiées
ès cours souveraines, seront révoqués dès à présent.

Art. 2. - Les traités des tailles, talion 1, subsistance et toutes autres levées seront dès à présent
révoquées et lesdites tailles assises et imposées à la forme ancienne et comme auparavant ;
lesdits traités à la diminution du quart au profit du peuple, attendu que ladite
diminution du quart est beaucoup moindre que ce qu'en profitent les traitants, avec
remise de tout ce qui reste dû jusques et compris l'année 1646 ; pour raison de quoi tous
prisonniers détenus ès prisons seront élargis.

Art 3. - Ne seront faites aucunes impositions et taxes qu'en vertu d'édits et déclarations, bien
et dûment vérifiés ès cours souveraines (…)

Art. 10. - Que toutes les commissions extraordinaires demeureront révoquées, toutes les
ordonnances ou jugements rendus par les intendants de justice cassés et annulés (…)

Art. 15. - Seront les officiers des bureaux des finances, secrétaires du roi, présidiaux,
commissaires et contrôleurs des guerres, trésoriers et payeurs de la gendarmerie,
trésoriers et provinciaux, officiers des maréchaussées, bailliages, prévôtés, eaux et
forêts, traites foraines [...] élections, greniers à sel et autres officiers tant de judicature
que de finance, rétablis en la fonction et exercice de leur charge et en la jouissance de
leurs gages et droits.

Art, 19, - Qu'il ne pourra à l'avenir être fait aucune création d'office, tant de Judicature
que de finances, que par édits vérifiés ès cours souveraines, [...] et que l'établissement
ancien desdites compagnies souveraines, ne pourra être changé ni altéré soit par

1
Établi par Henri Ill en 1549, 1e talon était un supplément de taille destiné à l'entretien des troupes.
augmentation d'officiers et des chambres, établissements de semestres, ou par
démembrement du ressort desdites compagnies, pour en créer et établir de nouvelles.
Isambert et alii, Recueil général des anciennes lois françaises, Paris, Plon, 1829, t. XXVII,
p. 72.

Doc 5 : La répression de la révolte du papier timbré d’après Madame de Sévigné

16 octobre 1675, à Madame de Grignan


M. De Chaulnes est à Rennes avec les Forbin et les Vins et quatre mille hommes ; on croit
qu’il y aura bien de la penderie. M. de Chaulnes y a été reçu comme le Roi, mais comme c’est
la crainte qui a fait changer leur langage, M. d Chaulnes n’oublie point toutes les injures
qu’on lui a dites, dont la plus douce et la plus familière était gros cochon, sans compter les
pierres dans sa maison et dans son jardin, et des menaces dont il paraissait que Dieu seul
empêchait l’exécution ; c’est cela qu’on va punir. M. d’Hacqueville (…) me mande que M. de
Chaulnes et les troupes sont arrivées à Rennes le samedi 12 octobre.
Madame de Sévigné, Correspondance II, Paris Gallimard, 1974, p 132.

20 octobre 1675
M. de Chaulnes est à Rennes avec quatre mille hommes. Il a transféré le parlement à Vannes ;
c’est une désolation terrible. La ruine de Rennes emporte celle de la province. (…) Il s’en faut
beaucoup. Que je n’aie peur de ces troupes, mais je prends part à la tristesse et à la désolation
de toute la province. On ne croit pas que nous ayons d’États ; et si on les tient, ce sera pour
racheter encore les édits que nous achetâmes deux millions cinq cent mille livres, il y a deux
ans, et qu’on nous a tous redonnés, et on y ajoutera peut-être encore de mettre à prix le retour
du Parlement à Rennes. M. de Montoron s’est sauvé ici, pour ne point entendre les pleurs et
les cris de Rennes en voyant sortir son cher Parlement. Me voilà bien Bretonne, comme vous
voyez. Mais vous comprenez bien que cela tient à l’air que l’on respire, et aussi à quelque
chose de plus, car, de l’un à l’autre, toute la province est affligée.
Ibid. p. 136-137.

20 octobre 1675, à Bussy Rabutin


Cette province est dans une grande désolation. M. de Chaulnes a ôté le Parlement de Rennes
pour punir la ville ; ces messieurs sont allés à Vannes, qui est une petite ville où ils seront fort
pressés. Les mutins de Rennes se sont sauvés, il y a longtemps. Ainsi les bons patiront pour
les méchants, mais je trouve tout fort bon, pourvu que les quatre mille hommes de guerre qui
sont à Rennes sous MM. de Forbin et de Vins ne m’empêchent point de me promener dans
mes bois qui sont d’une hauteur et d’une beauté merveilleuse.
Ibid., p. 139

27 octobre 1675, à Madame de Grignan


(…) en un mot, cette province a grand tort. Mais elle est rudement punie, et au point de ne
s’en remettre jamais. Il y a cinq mille hommes à Rennes, dont plus de la moitié y passera
l’hiver. Ce sera assez pour y faire des petits, comme dit le maréchal de Gramont. MM. de
Forbin et de Vins s’ennuient fort de leur emploi. (…) Ils s’en retourneront dans quinze jours,
mais toute l’infanterie demeurera. On a pris à l’aventure vingt-cinq ou trente hommes que l’on
va pendre. On a ôté le Parlement. C’est le dernier coup, car Rennes, sans cela, ne vaut pas
Vitré. Mme de Tarente nous a sauvé des contributions. Je ne veux point dire ce que M. de
Chaulnes m’a mandé, quand je serais seule dans le pays, et comme il ménage Sévigné, qui est
aux portes de Rennes. Tous ces malheurs retardent toutes les affaires et achèvent de tout
ruiner.
Ibid., p. 143

30 octobre 1675
Voulez-vous savoir des nouvelles de Rennes ? Il y a toujours cinq mille hommes, car il en est
venu encore de Nantes. On a fait une taxe de cent mille écus sur le bourgeois ; et si on ne les
trouve pas dans vingt-quatre heures, elle sera doublée et exigible par les soldats. On a chassé
et banni toute une grande rue, et défendu de les recueillir sur peine de la vie, de sorte qu’on
voyait tous ces misérables, vieillards, femmes accouchées, enfants, errer en pleurs au sortir de
cette ville, sans savoir où aller, sans avoir de nourriture ni de quoi se coucher.
On roua avant-hier un violon qui avait commencé la danse et la pillerie du papier timbré ; il a
été écartelé après sa mort, et ses quatre quartiers exposés aux quatre coins de la ville comme
ceux de Josseran à Aix. Il dit en mourant que c’étaient les fermiers du papier timbré qui lui
avaient donné vingt-cinq écus pour commencer la sédition, et jamais on n’en a pu tirer autre
chose. On a pris soixante bourgeois ; on commence demain les punitions. Cette province est
un bel exemple pour les autres, et surtout de respecter les gouverneurs et les gouvernantes, de
ne leur point dire d’injures, et de ne point jeter des pierres dans leur jardins. (…) Tous les
villages contribuent pour nourrir les troupes, et l’on sauve son pain en sauvant ses denrées.
Autrefois on les vendait, et l’on avait de l’argent, mais ce n’est plus la mode, on a changé tout
cela. (…) Enfin vous pouvez compter qu’il n’y a plus de Bretagne, c’et dommage.
Ibid., p. 146-147.

3 novembre 1675
M. et Mme de Chaulnes ne sont plus à Rennes. Les rigueurs s’adoucissent ; à force d’avoir
pendu, on ne pendra plus. Il ne reste que deux mille hommes à Rennes. Je crois que Forbin et
Vins s’en vont par Nantes.
Ibid., p. 149

17 novembre 1675
Voici des nouvelles de notre province. J’en ai reçu des lettres (un fagot), des Boucherats,
Lavardin, d’Harouys ; ils me rendent compte de tout. M. de Harlay demanda trois millions,
chose qui ne s’est jamais donnée que quand le Roi vint à Nantes ; pour moi, j’aurais cru que
c’eût été pour rire. Ils promirent d’abord, comme des insensés de les donner, et, en même
temps, M. de Chaulnes proposa de faire une députation au Roi pour l’assurer de la fidélité de
province et de l’obligation qu’elle lui a d’avoir bien voulu envoyer ses troupes pour les
remettre en paix, et que la noblesse n’a eu nulle part aux désordres qui sont arrivés. En même
temps, M. de Saint-Malo se botte pour le clergé ; Tonquedec voulut aller pour la noblesse,
mais M. de Rohan, président, a voulu aller lui-même, et un autre pour le tiers. Ils passèrent
tous trois à Vitré avant-hier. Il est sans exemple qu’un président de la noblesse ait jamais fait
une pareille course. (…) On ne voit point l’effet de cette députation. Pour moi, je crois que
tout est réglé et joué et qu’ils nous rapporteront quelques grâces ; je vous le manderai. Mais
jusqu’ici, nous n’en voyons pas davantage.
Ibid, p. 166

27 novembre 1675
Vous me parlez bien plaisamment de nos misères. Nous ne sommes plus si roués : un en huit
jours, seulement pour entretenir la justice. Il est vrai que la penderie me paraît maintenant un
rafraichissement. J’ai une toute autre idée de la justice depuis que je suis en ce pays ; vos
galériens me paraissent une société d’honnêtes gens, qui se sont retirés du monde pour mener
une vie douce. Nous vous en avons bien envoyé par centaines ; ceux qui sont demeurés sont
plus malheureux que ceux-là. Je vous parlais des Etats dans la crainte qu’on ne les supprimât
pour nous punir, mais nous les avons encore et vous voyez même que nous donnons trois
millions comme si nous ne donnions rien du tout. Nous nous mettons au dessus de la
circonstance de ne les pouvoir payer ; nous la traitons de bagatelle. Vous me demandez si tout
de bon nous sommes ruinés ; oui, et non. Si nous voulions ne point partir d’ici, nous y vivons
pour rien, parce que rien ne se vend ; mais il est vrai que, pour de l’argent, il n’y en a plus
dans cette province.
Ibid., p. 171

1er décembre 1675


Voilà la pauvre Gascogne bien malmenée aussi bien que nous. On nous envoie encore six
mille hommes pour l’hiver ; si les provinces ne faisaient rien de mal à propos, on serait assez
embarrassé de toutes ces troupes.
Ibid., p. 175

Doc 6 : Résistances religieuses et répression


Louvois à M. Foucaut du 1er mars 1688, à Versailles
Monsieur,
J’ay receu la lettre que vous avez pris la peine de m’escrire le 19 du mois passé sur les
assemblées qui se sont faites en Poictou, le Roy a aprouvé la diligence avec laquelle vous
vous êtes porté sur les lieux et que s’il arrive encore que l’on puisse tomber sur de pareilles,
l’on ordonna aux dragons de tuer la plus grande partie des religionnaires qu’ils pourront
joindre, sans épargner les femmes, afin que cela les puisse intimider, et empêcher d’autres de
retomber en semblable faute.
A l’esgard du jeune homme agé de 15 ans qui a leu un sermon dans l’assemblée de Granry, il
faut le mettre dans quelque college ou seminaire ou il puisse estre chastié et instruit dans la
religion catholique.
Quant aux femmes qui ont esté arrestées, Sa Majesté trouvera bon que l’on en condmane
quelques unes au fouet et pour ce qui est des hommes son intention est qu’ils soyent tous
condamnez aux galères.
Sa Majesté désire de plus que dans les paroisses ou il s’est tenu des assemblées et dont les
habitants y ont assisté, vous y respendiez une ou deux compagnies de dragons suivant leur
forces ou ils subsisteront en pure perte pour ces communautez qui leur fourniront la solde et le
fourage sans aucun remboursement de la part du trésorier de l’extraordinaire, et après qu’elles
y auront esté un mois, Sa Majesté aura bien agréable que l’on les en retire pour les loger dans
les lieux ou vous et M. de Verac jugerez estre necessaires, pour que lesdittes compagnies
puissent estre a portée de tomber sur les assemblées qui se pourroient faire.
L’intention de Sa Majesté estant en faisant loger des dragons en pure perte dans ces
communautez, ainsi que je viens de vous l’expliquer de faire connoistre aux peuples l’interest
qu’ils ont , non seulement de ne se pas trouver à de pareilles assemblées mais encores
d’empescher que aucun d’eux n’y assiste, et s’ils ne le peuvent pas faire, d’en declarer les
coupables et de les faire arrester.
Au mesme dudit jour
Monsieur, j’ay receu la lettre que vous avez pris la peine de m’escrire le 25 du mois passé, par
laquelle le Roy ayant veu ce que vous me mandez au sujet de l’assemblée qui s’est tenue dans
un pré à deux lieues de St Maixant, Sa Majesté a aprouvé l’exemple que vous avez fait faire
de deux des six qui ont esté arrestez, et m’a commandé de vous faire scavoir que son intention
est que les quatre autres soyent envoyez aux galères, que s’il y en a quelques uns de trop
jeunes pour subir cette peine, elle trouvera bon que vous en usiez comme je vous ay marqué
par mon autre lettre de ce jourd’huy a l’esgard du jeune homme qui a leu un sermon dans
l’assemblée de Grancy.
SHD GR A1 835, 1er mars 1688.

Doc 7 : La guerre des Camisards 


Les chefs des fanatiques armés sont : Cavalier qui a eu quelquefois avec lui jusqu’à 6 ou 700
hommes armés. C’est la troupe la plus nombreuse et la plus aguerrie, celle qui a battu le plus
souvent les troupes du roi et fait le plus de ravage.
Celle de Castanet vient après ; elle a eu quelquefois jusqu’à 200 hommes armés, quelquefois
plus, quelquefois moins ; il y a d’assez bons hommes. Comme celle de Cavalier se tient
ordinairement dans la plaine du Languedoc où il serait fort facile de la défaire, si l’on voulait,
celle de Castanet habite dans les montagnes ; sa retraite ordinaire est du côté de Vébron, dans
quelques petits villages où il n’y a point de troupes, et de là fait ses courses, tantôt d’un côté,
tantôt de l’autre.
Celle de Roland est à peu près de même nombre, se tenant tantôt dans la plaine, tantôt dans la
montagne, se joignant la plupart du temps à celle de Cavalier.
Celle d’Abraham (Mazel) a été d’environ 150 à 200 hommes tout au plus, elle fait sa demeure
du côté de Génolhac et fait ses courses comme les autres.
Celle de Salomon (Couderc) a été jusqu’à 200 hommes ; mais la dernière fois que je l’ai vue
elle n’était plus que d’une quarantaine de très méchants hommes, si on en excepte une
quinzaine. Elle fait pourtant beaucoup de ravages et exerce de très grandes cruautés,
massacrant et brûlant inhumainement. Elle fait sa demeure ordinaire du côté du Collet, terre
appartenant à Mgr le prince de Conti, et autres sept ou huit villages qui sont dans le voisinage.
Il y a d’autres petites troupes d’une douzaine ou quinzaine qui sont plutôt des brigands que
des rebelles, qui ne laissent pas de faire des meurtres et des incendies.
Ces troupes ne manquent pas de tenir des assemblées fort nombreuses deux ou trois fois la
semaine pour le moins, chacune dans son quartier, où ils entretiennent le peuple dans l’esprit
de révolte et d’irréligion ; ils apprennent par ceux qui viennent aux assemblées l’état et le
mouvement des troupes, reçoivent tout ce qui leur est nécessaire comme longe, souliers,
habits, vivres, etc. Ils les tiennent en plein jour et en rase campagne, sans que les troupes ne
soient jamais mises en devoir de les dissiper ni de leur tomber dessus ce qui serait très aisé.
Après les jours de ces assemblées, on apprend ordinairement des meurtres ou des incendies
qui y ont été résolus ou décrétés, pour me servir de leurs propres termes.
« État des fanatiques armés », Mémoire de Terisseau adressé au ministre de la guerre, août
1703, cité Par Joutard, Les Camisards, p. 179-180

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