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Bibliothèque de l'école des

chartes

Requête en vers français adressée, le 25 février 1570, au parlement


de Normandie par les suppotz de la basoche de Rouen. Arrêt du
parlement sur cette requête.
Amable Floquet

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Floquet Amable. Requête en vers français adressée, le 25 février 1570, au parlement de Normandie par les suppotz de la
basoche de Rouen. Arrêt du parlement sur cette requête.. In: Bibliothèque de l'école des chartes. 1840, tome 1. pp. 99-102;

doi : https://doi.org/10.3406/bec.1840.444242

https://www.persee.fr/doc/bec_0373-6237_1840_num_1_1_444242

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REQUÊTE

EN VERS FRANÇAIS,

ADRESSEE, LE 25 FEVRIER 1570 , AU PARLEMENT DE NORMANDIE,

SUPPOSTZ DE LA BASOCHE DE ROUEN.

ARRÊT DU PARLEMENT SDR CETTE REQUETE.

L&Bazoche du parlement de Rouen fut instituée par Louis XII en


1499, c'est-à-dire l'année même où ce monarque avait rendu station-
naire et permanent l'Echiquier de Normandie, tenu irrégulièrement
jusqu'alors par des commissaires qu'envoyaient à Rouen íes rois de
France, depuis la réunion de la Normandie à la couronne par
Philippe-Auguste. Louis XII institua la Basoche par une charte en vers
français dont tous mes efforts n'ont jamais pu me faire découvrir
que les huit vers suivants, cités textuellement dans un arrêt du
parlement de Rouen en date du 17 décembre 17 1 1

« De plus faisons commandement.


A tous faisant esbfllemenis ,
Que, combien qu'ils se tiennent cliicr.s ,
Comme couards , coqueluchier
El autres, qu'ils fucent hommage
Au diet Régent ев tout passage ,
Et sans user de voye de faicL ,
Car ainsy doibt-il estre faief. •»

La Basoche de Rouen florissait encore sous Henri II. Ce monarque


étant attendu en juillet 1550 à Rouen, où il devait bientôt faire sa
joyeuse entrée, à MM: les échevins et les vingt quatre de î'hô-
ICO
tel de ville réunis en la salle de Y Hostel commun, et tout empêchés
à régler les préparatifs d'une si grande solennité, fut apportée une
requête du régent du palais, ou roy de la bazoche , qui demandait
tout uniment qu'il lui fut loisible, en sa dicte qualité (de roy) de
marcher à cheval, lui et sa compagnie, avec le corps de ville, lors de
l'entrée du monarque dont on attendait la venue.
L'hôtel de ville, trouvant la proposition de ce roy assez
impertinente, décida qu'il serait esconduicl de sa requête, et que a deffences
luy seroient faictes de se monstrer avec le corps de ville pendant le
temps que le roy y seroit. » Seulement ii lui serait loisible, ainsi
qu'aux siens, er d'aller avec les gons de pied, s'ils advisoient que bien
feust. »
Mais cette décision, prise le 17 juillet, on ne s'était point hâté de
la notifier à nos seigneurs de la Basoche, qui, déjà bien pétulants,
alors même que les choses marchaient à leur gré, allaient peut-être
se montrer plus mauvais garçons encore dans leur dépit de so voir
ainsi éconduits et relégués dans la vile plèbe des gens de pied. On le
craignait du moins, et, le 19 juillet encore, quelques conseillers de
ville demandaient a si on ne debvoit point tenir la chose en
dissimulation?» Mais la majorité se montrant plus brave, le roy de la Bazoche,
qui attendait aux huis la réponse à sa requête, fut introduit; et on lui
notifia a que l'intention de la ville n'estoit point qu'ilz assistassent â
l'entrée du roy. » Sa majesté sortit d'assez mauvaise humeur
apparemment; on ne voit pas, toutefois, qu'il en ait été autre chose.
Que devint la Basoche pendant les vingt années qui suivirent, je
n'en saurais que dire. Mais dans un registre du parlement pour
l'année 1570, à la date du 21 février, on est tout étonné de
rencontrer des vers, et ces vers sont de la façon de la Bazoche, qui n'a
point oublié sa poélique origine. C'est une requeste des anciens sup -
postz de cette association, tombée, à ce qu'il paraît, en désuétude, qui
supplient le parlement de la remettre sus, de la reconnaître, de la
favoriser, de la laisser, enfin, s'éjouir des droits et privilèges qui lui
furent octroyés naguère. Cette requête, le parlement la vise, et, ce
qui vaut mieux encore, la souscrit d'une réponse favorable, d'un
arrêt en bonne forme et dans toutes les règles. Nous consignons ici
cette étrange requête, et le non moins étrange arrêt du parlement,
comme une singularité dont les registres de cette cour souveraine
n'offrent, à notre connaissance, aucun analogue. La requête d'abord :

A NOS SEIGNEURS DU PARLEMENT.

« Les an tiens supposlz de la Noble Régence


Ont . de longtemps , congneu la doulceur et clémence
Dont, vous avez usd, Nos Sieurs de parlement ,
101
Pour conserver leurs droictz, en suivanl leur patent ',
Le confermant encor par mainct arrest en forme
En tout son contenu au diet patent conforme ,
Et, suivant icelluy , évitans tous débat*,
Présenté, le passé, mainetz plaisirs et esbatz,
Lorsqu'un certain malheur courant par nostre France
Au lieu de tout plaisir a produict déplaisance ,
Ayant fait pulluler mainte espèce de veaulx
Qui se font appeller praticiens nouveaulx* ,
Et semblent, à bien veoir , tant son pleins d'inconstance,
Que, conduictzde fureur, ilz tombent en démence.
Si l'un sçait colorer ses déceptifz propos,
Pour tromper ung chacun l'autre ne prend repos
Jusqu'à tant qu'il ait eu et l'argent et la bourse ,
Et, par ces beaulx moyens , a d'argent une source.
Maint preblre on voit souvent plus le paltais hanter
Pour y solliciter , qu'églises fréquenter.
Le soldat , de sa part , se plaist plus à conduire
Ung nombre de procès que veoir armes reluire.
L'ariisan , d'autre part , est tousjours par chemyn
Quiclant là son meslier pour brouiller parchemyn :
Si, que (non repoulséz) on en voit plus de mille
Venir, de toutes paru, en ceste noble ville ;
Et, non contents, s'en vont à La Bouille , et mainetz lieux,
Fripper lettres royaulx , tronipans jeunes et vieulx ,
Butinans finement soit teston ou monnoie
Que le pauvre plaideur à son conseil envoyé.
Puis , le plus fin d'entre eulx luy va dire, à Tescart ,
Qu'il gouverne Messieurs , au moins la plus grand'part.
Par telz blandissements ainsi l'argent desrobe
Pour païer ung Baumer de quelque vieille robe ,
El n'est plain le pallais que de telz affronteurs
Qui vivent sans adveu , tous larrons et menteurj".
A ces causes, Nos Sieurs , il vous plaise permettre
Aux susdietz supplians la Régence remettre
En les laissant joïr de tout le contenu
Au patent et arrest qu'avez leu et tenu,
Vous asseûrant-, JYos Sieurs, de ne rien entreprendre
Que, premier, à la Court il ne soit faict entendre.
Puis, ensemble d'un cœur noble, gentil et gay
Planterons ung sapin le premier jour de may,
Priant le Dieu des dieux que vostre auclorilé
Demeure longuement avec prospérité.
« Signé, suivant l'advis, en la présence et du consentement du
collège des procureurs de la court, le 19e de febvrier 1570.
« Le Seigneur. »
Sur quoi, le parlement rendit l'arrêt qui suit :
1 Les lettres patentes de Louis XII qui instituaient la Basoche.
= II s'agit ici des solliciteurs de procès , fléaux du palais à celle époque ; ia Ba-
5oc!ic avait surtout pour mission de les en bannir.
102
« Veuo, par la court, la requeste à elle présentée par les
procureurs et antiens suppostz de la Régence du pallais ďicelíe; la chartre
du roy Louis douziesme, de bonne mémoire, donnée au mois d'avril
1499 ; arrests de la dicte court, des 7 dudict mois et an, 26 avril 1501
<3t 5 may 1550, produictz par les dictz suppostz; conclusion, sur ce,
du procureur général du roy, auquel, par ordonnance de la court,
le tout a esté communicqué,
« Tout considéré,
« La court, en ayant esgard à la dicte requeste, du consentement
du procureur général, a permis et permect aux dictz procureurs et
suppostz remètre sus la dicte régence, et joïr et user du contenu des
lettres patentes du mois d'avril 1499, et arrestz de la dicte court
des 7e du diet mois et an, 26e avril 1501 et 5 may 1550, ainsy que,
par су-devant, ilz en ont bien et deuement joï et usé , à la charge de
mectre par devers le diet procureur général la liste et déclaration
des corbineux i, et exacteurs par eulx prétenduz , pour y
requérir ce qu'il advisera bien estre; et, luy oï,en estre ordonné ce que de
raison.
» De Bauquemaue 2. »

II nous a semblé qu'une telle requête et un tel arrêt méritaient


d'être signalés aux curieux.
A. Floquet.

- Corbineur. Solliciteur de procès, prêt à abuser et rançonner les plaideurs


crédules. A L'audience du pparlement ligueur
igueur de Rouen , le 3 juillet iSSg, Marc se
plaint de Dti i ' d' à l ll j

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