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Fonction W de

Lambert
fonction mathématique

En mathématiques, et plus précisément


en analyse, la fonction W de Lambert,
nommée ainsi d'après Jean-Henri
Lambert, et parfois aussi appelée la
fonction Oméga, est la réciproque de la
fonction de variable complexe f définie
par f(w) = w ew, c'est-à-dire que pour tous
nombres complexes z et w, nous avons :

Les deux branches de la fonction de Lambert sur l'ensemble ]– 1e , +∞[.

Puisque la fonction f n'est pas injective,


W est une fonction multivaluée ou
« multiforme » qui comprend deux
branches pour les valeurs réelles

. Une des branches, la branche


principale, W0 peut être prolongée
analytiquement en dehors de ]−∞, – 1e ].
Pour tout nombre complexe z ∉ ]−∞, – 1e ],
on a :

La fonction W de Lambert ne peut pas


être exprimée à l'aide de fonctions
élémentaires.

Historique
Lambert s'est intéressé à l'équation
connue sous le nom d'équation
transcendante de Lambert en 1758[1], ce
qui conduisit à une note de Leonhard
Euler en 1783[2] qui discutait le cas
particulier de w ew. La première
description de la fonction W semble due
à George Pólya et Gábor Szegő en
1925[3]. La fonction de Lambert fut
« redécouverte » tous les dix ans environ
dans des applications spécialisées, mais
son importance ne fut pas vraiment
appréciée avant les années 1990.
Lorsqu'il fut annoncé que la fonction de
Lambert donnait une solution exacte aux
valeurs propres de l'énergie du système
quantique correspondant au modèle
décrit par l'opérateur de Dirac à puits
double pour le cas de charges égales —
un problème physique fondamental —,
Corless et d'autres développeurs du
système Maple firent une recherche
bibliographique et découvrirent que cette
fonction apparait un peu partout dans
des applications pratiques[4].

Branches de la « fonction »
de Lambert

Représentation graphique de la branche W0 de la fonction W de Lambert.


La partie supérieure de la courbe (y > −1) est la branche W0 ; la partie inférieure (y < −1) est la branche W−1 définie pour
x < 0.

Si nous nous limitons aux arguments


réels x ≥ − 1e , il existe une fonction et une
seule W0 à valeurs réelles telle
que
c'est la branche principale de W dans ce
domaine. La représentation graphique de
W0 figure à droite.

On note généralement W−1 l'autre branche


à valeurs réelles, c'est-à-dire la branche
correspondant aux arguments x tels que
, et à valeurs .

Propriétés élémentaires

Expression de eW(y)

On a W(y) eW(y) = y, donc, si W désigne


une des deux branches W0 ou W−1 :
Conséquences de la définition

De l'égalité de la définition, on peut


déduire :

(où W désigne l'une


quelconque des deux branches)
si x ≥ - 1 .
si x ≤ - 1 .

(où W désigne

l'une quelconque des deux branches et


x est non nul)
si x >
0[5]

Valeurs particulières

Voici quelques valeurs remarquables de


W, obtenues simplement en remarquant
que f(0)=0, f(1)=e, f(–1)=–1/e, etc. :

Ω est la constante oméga

On peut obtenir de même des valeurs


complexes de W(x) pour certains x <  − 1e  ;

ainsi

Dérivée
Si W désigne une des deux branches W0
ou W−1, la formule de dérivation des
bijections réciproques montre que sa
dérivée est :

pour

pour x ≠ 0 et

ce qui a pour conséquence que chacune


des deux branches de W satisfait
l'équation différentielle :
pour x ≠ − 1e .

Cette équation est d'ailleurs à variables


séparables, et ses solutions sont toutes
de la forme (avec k ≠ 0)
ou .

Primitives

La fonction W désignant une des deux


branches W0 ou W−1, beaucoup de
fonctions impliquant W, peuvent être
intégrées en utilisant le changement de
variable w = W(x), i.e. x = wew :
Méthodes de calcul de W0

Par la série de Taylor

Représentation de la branche principale W0 de la fonction de Lambert dans le plan complexe (le code des couleurs
utilisé est commenté précisément au début de l'article « Fonction zêta »).

La série de Taylor de W0 au voisinage de


0 peut être obtenue par l'utilisation du
théorème d'inversion de Lagrange[6] et
est donnée par

Le rayon de convergence est égal à 1e .


Cette série peut être prolongée en une
fonction holomorphe définie en tout
nombre complexe n'appartenant pas à
l'intervalle réel ]−∞, – 1e ] ; cette fonction
holomorphe est aussi appelée la branche
principale de la fonction W de Lambert.
Nous déduisons de la série de Taylor
l'équivalent suivant de W0(x) en 0 :

Comme limite d'une suite

On peut calculer W0(x) de manière


itérative, en commençant avec une valeur
initiale w0 égale à 1 et en calculant les
termes de la suite

Si cette suite converge, on voit aisément


que sa limite est W0(x). On démontre que
c'est en effet le cas si  :
Il est moins simple, mais beaucoup plus
efficace, d'utiliser la méthode de Newton,
partant de w0 = 1, et posant

cette suite converge (très rapidement)


vers W0(x) pour tout x > 1/e.

Développements
asymptotiques de W0
On a, pour x tendant vers , le
développement asymptotique à trois
termes suivant[7] :

On a pour x tendant vers –1/e, le


développement asymptotique de W0 :

Développement
asymptotique de W−1
On peut également obtenir un
développement asymptotique pour W−1
avec x tendant vers 0- :
Paramétrisation des deux
branches réelles de la
fonction W de Lambert
Les deux branches réelles W0(x) et W–
1(x) de la fonction W de Lambert peuvent
s'écrire de façon paramétrée.

En effet il existe qui permet

d'écrire :
[8]

Utilisation
Beaucoup d'équations impliquant des
exponentielles peuvent être résolues par
l'utilisation de la fonction W. La stratégie
générale est de déplacer toutes les
instances de l'inconnue d'un côté de
l'équation et de le faire ressembler à x ex.
À ce point, la « fonction » W nous fournit
les solutions :
(chaque branche différente de la
« fonction » W donne une solution
différente).

Exemples d'applications

Équation   2t = 5t

Par exemple, pour résoudre l'équation 2t

= 5t, nous divisons par pour

obtenir La

définition de la « fonction » W donne


alors , soit

Comme cette formule

donne deux solutions réelles :

et

Équations   xx = z   et   x logb (x) = a


Avec la « fonction » W de Lambert, on
peut résoudre des équations du type xx =
z (avec et ) par :

donc

et, si , .

Les solutions de l'équation :

(avec et ),
équivalente à , sont données
avec la « fonction » W de Lambert :

et, si ,

La tétration infinie

Article détaillé : Tétration infinie.

En général, la tour de puissances infinie


converge si et seulement si
.
Si r est un nombre réel avec
et x le nombre ,
alors la limite de la suite définie par
et est r :

Quand une tétration infinie


converge, la fonction W0 de Lambert
fournit la valeur de la limite réelle
comme :

( si x ≠ 1).

Cela peut être étendu aux nombres


complexes z avec la définition :
où Log z représente la branche principale
de la fonction logarithme complexe.

Équation   x + ex = y

La bijection réciproque de
peut être obtenue
explicitement : résolvant l'équation
on remarque
d'abord qu'elle équivaut, en posant
à et donc
soit :
Équations   a ex + bx + c = 0   et   a
ln(x) + bx + c = 0

Résolution des équations de forme :


avec
et x dans .

On pose , ce nombre est

appelé le discriminant. Il intervient dans


la détermination du nombre de solutions
de l'équation.

Théorème —  Les solutions


de l'équation
sont:

Si ou si

alors

l'équation admet une


solution dans .

Si alors

l'équation admet deux


solutions dans .
Si alors

n'admet pas de solution


dans .

Démonstration

Factorisons l'équation ci-


dessus de manière à la
mettre sous la forme
.

(produit par )
Posons et

. On a alors  :

. On trouve
alors  : . On
obtient finalement :

La fonction W de Lambert
étant multivaluée sur

, on en déduit la

quantité de solutions
réelles de l'équation.
À l'aide du changement de variable x =
ln(z), on en déduit la résolution des
équations de la forme :
avec
et x dans . Les
solutions sont alors (en n'oubliant pas
que W est multivaluée) de la forme :

où .

Équations   a λx + bx + c = 0   et   a
logλ(x) + bx + c = 0
Plus généralement, la fonction W de
Lambert permet de résoudre les
équations de la forme :
et
avec
et , x dans et
.

Il suffit pour cela de considérer une


fonction tel que
de
répéter la démonstration ci-dessus et de
considérer la formule de changement de
base : . On

obtient alors, avec  :

et avec :

Il faut alors considérer le nombre


pour déterminer la quantité de
solutions des équations.
Applications en physique

Constante de Wien

Dans la loi du déplacement de Wien :

. La constante de Wien, noté peut être


déterminée explicitement à l'aide de la
fonction W de Lambert.

Elle vaut : ,

avec h la constante de Planck, c la


vitesse de la lumière dans le vide et kB la
constante de Boltzmann.
Courant dans un circuit diode-
résistance

La solution pour connaître la valeur du


courant dans un circuit en série de
diode/résistance peut être donnée par la
fonction W de Lambert. Voir la
modélisation d'une diode  .
(en)

Diverses formules intégrales

(intégrale de Gauss en coordonnées


polaires)
On obtient alors par changements de
variable les égalités remarquables :

Représentations graphiques
Représentation de la partie réelle, de la
partie imaginaire et du module de la
fonction W de Lambert dans le plan
complexe
Les trois fonctions réunies

Généralisations
La fonction W de Lambert fournit des
solutions exactes aux équations
« algébriques-transcendantes » (en x) de
la forme :

ou a0, c et r sont des constantes réelles.


La solution est

Les généralisations de la fonction W de


Lambert[9],[10],[11] incluent :

un lien entre la relativité générale et la


mécanique quantique (gravité
quantique) en dimensions réduites[12]
où la partie de droite de l'équation (1)
est maintenant un polynôme
quadratique en x :

où r1 et r2 sont des constantes réelles,


les racines du polynôme quadratique.
Dans ce cas, la solution est une
fonction avec un seul argument x mais
les termes comme ri et a0 sont des
paramètres de la fonction. De ce point
de vue, la généralisation ressemble à la
série hypergéométrique et la fonction
de Meijer G mais appartient pourtant à
une « classe » différente de fonctions.
Quand r1 = r2, chaque côté de (2) peut
être factorisé et réduit à (1) et donc la
solution se réduit à celle de la fonction
standard de W.

L'équation (2) est celle gouvernant le


champ d'un dilaton parvenant du modèle
R=T- par lequel est dérivée la métrique du
système gravitationnel de deux corps
dans les dimensions 1+1 (c’est-à-dire
une dimension spatiale et une dimension
temporelle) pour le cas des masses (au
repos) inégales - ainsi que les valeurs
propres de l'énergie du système
quantique qui est constitué du modèle
décrit par l'opérateur de Dirac à puits
double pour le cas de charges inégales
en une dimension.

les solutions analytiques pour les


valeurs propres de l'énergie d'un cas
spécial de la version quantique du
problème des trois corps, c’est-à-dire
l’ion hydrogène moléculaire (en trois
dimensions)[13].

La partie de droite de (1) (ou (2)) est


maintenant un quotient de « polynômes »
d'ordre infini en x :
où ri et si sont des constantes réelles
distinctes et x est une fonction de la
valeur propre de l'énergie et la distance
internucléaire R. L'équation (3) avec ces
cas spécialisés et exprimés dans (1) et
(2) correspond à une classe
considérable d'équations à délai
différentiel. La « fausse dérivée » de
Hardy fournit des racines exactes pour
des cas spéciales de (3)[14].

Les applications de la fonction W de


Lambert dans les problèmes de la
physique fondamentale ne sont pas
épuisées même pour le cas standard
exprimé dans (1), comme on vient de le
voir dans les domaines de la physique
atomique et moléculaire, ainsi qu'en
optique[15].

Notes
1. (la) J. H. Lambert, « Observationes
variae in mathesin puram », Acta
Helveticae physico-mathematico-
anatomico-botanico-medica, vol. III,
1758, p. 128-168 (lire en ligne (http://
www.kuttaka.org/~JHL/L1758c.pdf)
 [archive]).
2. (la) L. Euler, « De serie Lambertina
Plurimisque eius insignibus
proprietatibus », Acta Acad. Scient.
Petropol., vol. 2, 1783, p. 29-51,
réimprimée dans (la) L. Euler, Opera
Omnia, Series Prima, vol. 6 :
Commentationes Algebraicae,
Leipzig, Teubner, 1921 (lire en ligne
(http://math.dartmouth.edu/~euler/d
ocs/originals/E532.pdf)  [archive]),
p. 350-369.
3. (en) George Pólya et Gábor Szegő (titre
en anglais : Problems and Theorems
in Analysis (1998)), Aufgaben und
Lehrsätze der Analysis, Berlin,
Springer-Verlag, 1925.
4. (en) R. M. Corless, G. H. Gonnet, D. E.
G. Hare et D. J. Jeffrey, « Lambert's
W function in Maple », The Maple
Technical Newsletter (MapleTech),
vol. 9, 1993, p. 12-22.
5. (en) Eric W. Weisstein, « Lambert W-
Function » (http://mathworld.wolfra
m.com/%7B%7B%7Bnom_url%7D%7
D%7D.html)  [archive], sur MathWorld
. (en) Donatella Merlini, Renzo Sprugnoli
et Maria Cecilia Verri, « The method
of coefficients », Amer. Math.
Monthly, vol. 114, no 1, janvier 2007,
p. 40-57.
7. On trouvera beaucoup plus de
termes de ce développement dans (en)

Trott, « Lambert W-Function » (http://


mathworld.wolfram.com/LambertW-
Function.html)  [archive], sur
MathWorld
. (en) « reference request - Parametric
representation of the real branches
$\operatorname{W_{0}},\operatorna
me{W_{-1}}$ of the Lambert W
function » (https://math.stackexchan
ge.com/questions/3233107/parame
tric-representation-of-the-real-branch
es-operatornamew-0-
operatorna)  [archive], sur
Mathematics Stack Exchange
(consulté le 18 mai 2022)
9. (en) T. C. Scott et R. B. Mann, « General
Relativity and Quantum Mechanics:
Towards a Generalization of the
Lambert W Function », AAECC
(Applicable Algebra in Engineering,
Communication and Computing),
vol. 17, no 1, avril 2006, p. 41-47 (lire
en ligne (https://arxiv.org/abs/math-
ph/0607011)  [archive])
10. (en) T. C. Scott, G. Fee et J.
Grotendorst, « Asymptotic series of
Generalized Lambert W Function »,
SIGSAM (ACM Special Interest Group
in Symbolic and Algebraic
Manipulation), vol. 47, no 185, 2013,
p. 75–83 (lire en ligne (http://www.si
gsam.org/cca/issues/issue185.htm
l)  [archive])
11. T. C. Scott, G. Fee, J. Grotendorst et
W.Z. Zhang, « Numerics of the
Generalized Lambert W Function »,
SIGSAM, nos 1/2, 2014, p. 42–56 (lire
en ligne (http://www.sigsam.org/cca/
issues/issue188.html)  [archive])
12. (en) P. S. Farrugia, R. B. Mann et T. C.
Scott, « N-body Gravity and the
Schrödinger Equation », Class.
Quantum Grav., vol. 24, 2007,
p. 4647-4659 (lire en ligne (https://ar
xiv.org/abs/gr-
qc/0611144)  [archive])
13. (en) T. C. Scott, M. Aubert-Frécon et J.
Grotendorst, « New Approach for the
Electronic Energies of the Hydrogen
Molecular Ion », Chem. Phys.,
vol. 324, 2006, p. 323-338 (lire en
ligne (https://arxiv.org/abs/physics/0
607081)  [archive])
14. (en) Aude Maignan et T. C. Scott,
« Fleshing out the Generalized
Lambert W Function », SIGSAM,
vol. 50, no 2, 2016, p. 45–60
(DOI 10.1145/2992274.2992275 (https://d
)
15. (en) T. C. Scott, A. Lüchow, D.
Bressanini et J. D. Morgan III, « The
Nodal Surfaces of Helium Atom
Eigenfunctions », Phys. Rev. A,
vol. 75, 2007, p. 060101
(DOI 10.1103/PhysRevA.75.060101 (https
)

Références
(en) R. M. Corless et al., « On the Lambert
W function », Adv. Comput. Math.,
vol. 5, 1996, p. 329-359 (lire en ligne (ht
tp://www.apmaths.uwo.ca/~djeffrey/O
ffprints/W-adv-cm.pdf)  [archive]) ou là
(http://www.cs.uwaterloo.ca/research/
tr/1993/03/W.pdf)  [archive]
(en) Cet article est partiellement ou en
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ttps://en.wikipedia.org/wiki/Lambert_
W_function?oldid=322794773)  » (voir
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