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Paragraphe 2 

: Les obligations et sanctions du responsable du traitement


Les responsables du traitement des données à caractère personnel sont soumis à des
obligations (A), dont le non-respect peut être sanctionné (B).
A- Les Obligations du responsable de traitement des données à caractère personnel
Le traitement de fond des données à caractère personnel est soumis au respect de quelques
obligations (2). Mais avant ce traitement, des formalités doivent être respectées (1).
1- Le respect des formalités préalables à la mise en œuvre du traitement des
données à caractère personnel
Il faut distinguer les données dont le traitement est soumis à une demande à l’ANTIC, dont
l’une des missions au plan national est la protection des données (a), de celles dont le
traitement ne requiert aucune formalité (b).
a- Les données dont le traitement est soumis à formalités préalables
Sont soumis à autorisation préalable de l’Autorité nationale de protection :
- les traitements de données à caractère personnel portant sur les données génétiques et
sur la recherche dans le domaine de la santé ;
- les traitements de données à caractère personnel portant sur les données relatives aux
infractions, condamnation ou mesure de sureté ;
- les traitements des données à caractère personnel comportant des données
biométriques.
Sont soumis à déclaration préalable auprès de l’autorité nationale de protection les
traitements de données à caractère personnel portant sur :
- la sureté de l’Etat, la défense, ou la sécurité publique ;
- la prévention, la recherche, la constatation ou la poursuite des infractions pénales ou
l’exécution des condamnations pénales ;
- les données faisant apparaitre les origines raciales, ethniques, régionales, filiation,
opinion politiques, philosophique ou religieuses ou l’appartenance syndicale des
personnes, ou qui sont relatives à la santé ou la vie sexuelle.
En dehors de celles sus citées, le traitement des données à caractère personnel fait l’objet de
simple déclaration auprès de l’autorité nationale de protection.
b- Les données dont le traitement est dispensé de formalités préalables
Selon l’article 10 alinéa 1 de la convention de l’Union Africaine sus citées, l’exigence d’une
demande de traitement auprès de l’autorité nationale de protection ne s’applique pas aux
traitements de données mise en œuvre par une personne physique dans le cadre exclusif de ses
activités personnelles ou domestiques, à condition toutefois que les données ne soient pas
destinées à une communication systématique à des tiers ou à la diffusion.
Suivant le même texte, sont également dispensés de formalité les traitements ayant pour seul
objet la tenue d’un registre qui est destiné à usage exclusivement privé. Sont aussi concernés
par cette dispense les traitements mis en œuvre par une association ou tout organisme à but
non lucratif et à caractère religieux, philosophique, politique ou syndical, dès lors que ces
données correspondent à l’objet de cette association ou organisme, qu’elles ne concernent que
leurs membres et qu’elles ne doivent pas être communiquées aux tiers.
2- Le respect des règles de fond
Les règles de fond relatives au traitement des données à caractère personnel se déclinent en
principes (a) et obligations (b).
a- Les principes de bases gouvernant les traitements des données à caractère
personnel
Plusieurs principes, énoncés par l’article 13 de la convention de l’Union Africaine suscité,
encadrent le traitement des données à caractère personnel :
- le principe de légitimité du traitement des données à caractère personnel qui est une
conséquence du principe du consentement ;
- le principe de loyauté du consentement : les données à caractère personnel  ne
doivent pas recueillies de façon frauduleuse ;
- Le principe de finalité (Les données doivent être collectées pour des finalités
déterminées, explicites et légitimes et ne peuvent pas être traitées ultérieurement de
manière incompatible avec ces finalités), de pertinence (elles doivent être adéquates,
pertinentes et non excessives au regard des finalités pour lesquelles elles sont
collectées et traitées ultérieurement), de conservation des données à caractère
personnel (elles doivent être conservées pendant une durée qui n’excède pas la
période nécessaire aux finalités pour lesquelles elles ont été collectées ou traitées).
- Le principe d’exactitude des données à caractère personnel ;
- Le principe de transparence des données à caractère personnel ;
- Le principe de confidentialité et de sécurité des traitements de données à
caractère personnel : Les données à caractère personnel doivent être traitées de
manière confidentielle et être protégées, notamment lorsque le traitement comporte
des transmissions de données dans un réseau. Lorsque le traitement est mis en œuvre
pour le compte du responsable du traitement, celui-ci doit choisir un sous-traitant qui
apporte des garanties suffisantes.
Ces principes déteignent sur les obligations de fond auxquels sont soumis les
responsables du traitement des données à caractère personnel.
b- Les obligations auxquels sont soumis les responsables du traitement des données
à caractère personnel
La mise en œuvre des principes auxquels sont soumis les responsables de traitement des
données à caractère personnel se résume au respect de quelques obligations :
- Obligation de confidentialité : le traitement des données à caractère personnel est
confidentiel. Il est effectué exclusivement par des personnes qui agissent sous
l’autorité du responsable du traitement et seulement sous ses instructions.
- Obligation de sécurité : le responsable du traitement est tenu de prendre toutes les
précautions utiles au regard de la nature des données et, notamment, pour empêcher
qu’elles soient déformées, endommagées, ou que les tires non autorisé y aient accès.
- Obligation de conservation : les données à caractère personnel ne doivent pas être
conservées au-delà de la période requise pour les fins en vue desquelles elles ont été
recueillies et traitées. Il faut toutefois préciser qu’au Cameroun, les fournisseurs
d’accès, de service et de contenus sont tenus de conserver pendant 10 ans, les données
permettant l’identification de toute personne ayant contribué à la création du contenu
des services dont elles sont prestataires.
- Obligation de pérennité : le responsable du traitement es tenu de prendre toutes les
mesures utiles pour s’assurer que les données traitées pourront être exploitées quel que
soit le support technique utilisé. Il doit en conséquence s’arrimer à l’évolution
technologique afin que celle-ci ne soit pas un obstacle à cette exploitation.

B- Sanction du non-respect des règles liées au traitement des données à caractère


personnel
Le responsable de traitement de traitement qui ne respecte pas les règles s’expose aux
sanctions civiles, administratives ou pénales.
- La sanction civile
Toute personne qui à l’occasion d’un traitement non légitime de ses données à caractère
personnel a subi un préjudice, est en droit d’en réclamer réparation, sur le fondement de la
responsabilité civile délictuelle.
- Sanction administrative
La loi n°2013/0399/PM du 27 février 2013, fixant les modalités de protection des
consommateurs des services de communication électroniques, dispose en son article 21 que
l’Agence de Régulation des Télécommunication peut, soit d’office, soit à la demande d’une
organisation professionnelle, d’une association agréée d’utilisateurs ou d’une personne
physique ou morale, sanctionner, après constatation ou vérification, les manquements des
opérateurs et des fournisseurs de service de communication électronique, conformément aux
disposition législatives et réglementaires afférentes à leur activités. Cette sanction peut
consister en la suspension temporaire ou définitive de l’activité du contrevenant.
Par ailleurs, l’ANTIC intervient dans la mise en place « des mécanismes pour régler des
litiges d’une part, entre les opérateurs des TIC et, d’autre part, entre opérateurs et
utilisateurs, pour les problèmes spécifiquement liés aux contenus et à la qualité de service
(spamming, phishing, hacking).
- Sanction pénale
L’essentiel des sanctions pénales est contenus dans la loi n°2010/012 du 21 décembre 2020
relative à la cyber sécurité et à la cybercriminalité au Cameroun.
Est puni d’un emprisonnement d’un à 02 ans et d’une amende de 1 000 000 à 5 000 000
FCFA, les personnes qui sans droit, interceptent les données personnelles lors de leur
transmission d’un système d’information à un autre. (Article 74 al 2 de la loi n°2010/012 sus
citée)
Est puni d’un emprisonnement d’un à 03 ans et d’une amende de 1 000 000 à 5 000 000
FCFA ou l’une des deux peines seulement, quiconque fait procéder, même par négligence, au
traitement des données à caractère personnel en violation des formalités préalable à leur
mise en œuvre (Article 74 al 3 de la loi n°2010/012 sus citée)
Est puni d’un emprisonnement de 06 mois à 02 ans et d’une amende de 1 000 000 à 5 000
000 FCFA ou l’une des deux peines seulement, le fait de collecter par les moyens illicites,
les données nominatives d’une personne en vue de porter atteinte à son intimité et à sa
considération. (Article 74 al 4 de la loi n°2010/012 sus citée). Les peines ci-avant sont
doublées à l’encontre de celui qui met, fait mettre en ligne, conserve ou fait conserver en
mémoire informatisée, sans l’accord express de l’intéressé, des données nominatives qui,
directement ou indirectement, font apparaitre ses origines tribales, ses opinions politiques,
religieuses, ses appartenances syndicales ou mœurs.
Est puni d’un emprisonnement de 06 mois à 02 ans et d’une amende de 5 000 000 à 50 000
000 FCFA ou l’une des deux peines seulement, celui qui conserve des informations sous
une forme nominative ou chiffrée au-delà de la durée légale indiquée dans la demande
d’avis ou la déclaration préalable à la mise en œuvre du traitement automatisé (Article 74 al
7 de la loi n°2010/012 sus citée).
Est également réprimé le fait de divulguer les données nominatives portant atteinte à la
considération de la victime. Il apparait qu’entre la protection des données à caractère
personnel et la protection de la vie privée, la frontière est mince.
Section 2 : la protection de la vie privée en matière de communication numérique
La protection de la vie privée est une nécessité tant pour l’individu pris isolément que pour la
société entière. L’omniprésence du numérique et les facilités d’accès qu’elle offre ont conduit
à remodeler tant la notion de vie privée que le dispositif de protection. Le droit à la protection
de la vie privée (paragraphe I) a souvent englobé la protection du droit à l’image (paragraphe
II), pourtant les deux notions sont distinctes.
Paragraphe 1 : le droit au respect de la vie privée
Avant de faire étalage des règles qui sanctionnent les atteintes à la vie privée (B), il échet de
déterminer les caractéristiques de la notion (A).
A- La notion vie privée
En disposant que « nul ne fera l’objet d’immixtion arbitraire dans sa vie privée, sa famille,
son domicile, ou d’atteinte à son honneur et à sa réputation », l’article 12 de la DUDH fait de
la protection de la vie privée un droit fondamental. Avec le développement de la
communication numérique, la notion de vie privée est moins aisée à encadrer. Une distinction
importante permet toutefois d’en saisir le contenu : celle entre le secret de la vie privée et la
liberté de la vie privée.
1- Le secret de la vie privée
La protection du secret de la vie privée comprend l’inviolabilité du domicile, certains aspects
de l’identité physique et sociale d’un individu, le droit de tenir caché ce qui se passe dans sa
famille, ainsi que l’inviolabilité des correspondances, ces dernières incluant les lettres, les
conversations téléphoniques, les correspondances téléphoniques, les communications
électroniques. La vie privée est donc personnelle et opaque. Personnelle par ce qu’elle
concerne une personne prise individuellement. En ce sens, une correspondance dont le
contenu est une publicité commerciale n’est pas personnelle, sauf si l’offre est adaptée au
destinataire et à ses choix précis de consommation. Opaque en ce que la vie n’a pas à être
connue des autres. Ces derniers n’ont pas la permission de prendre connaissance de ce qu’une
personne fait, lit ou échange avec d’autres personnes dans le cadre de sa sphère privée.
Concrètement, L’Article 44 alinéa 1 de la loi n° 2010/012 du 21 Décembre 2010 relative à la
cybersécurité et à la cybercriminalité au Cameroun précise qu’interdiction est faite à toute
personne physique ou morale d’écouter, d’intercepter, de stocker les communications et les
données relatives au trafic y afférent, ou de les soumettre à tout autre moyen d’interception ou
de surveillance, sans le consentement des utilisateurs concernés, sauf lorsque cette personne y
est légalement autorisée.
2- La liberté de la vie privée
La liberté de la vie privée peut être comprise comme étant la liberté d’établir et de développer
des relations avec autrui, y compris par voie des communications électroniques, mais aussi de
faire des choix culturels, sexuels, ludiques ou de consommation en ligne, ou simplement de
s’informer, de naviguer librement sur le réseau.
B- Protection de la vie privée
L’article 41 de la loi n° 2010/012 du 21 Décembre 2010 relative à la cybersécurité et à la
cybercriminalité au Cameroun dispose que « toute personne a droit au respect de sa vie
privée ». L’action de la victime d’une atteinte à la vie privée peut être fondée soit sur la
responsabilité civile délictuelle (1), soit sur la responsabilité pénale (2).
1- Sanction civile
La violation du secret de la vie privée ou de la liberté de vie privée peuvent être sanctionnées
sur le fondement de la responsabilité civile délictuelle. L’article 1382 du code dispose que
tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute
duquel il est arrivé, à le réparer. Il s’agit pour la victime de saisir le juge aux fins de
contraindre l’auteur de la violation à réparer le préjudice causé du fait de la violation de sa vie
privée. Le succès d’une telle action suppose l’acte fautif de l’auteur de la violation, le
dommage subit par la victime, et enfin, le lien de causalité entre l’acte fautif et le dommage.
2- Protection pénale
Avant l’avènement des nouvelles technologies, le droit pénal sanctionnait déjà les atteintes à
la vie privée. Des dispositions spéciales ont toutefois été édictées pour réprimer les atteintes
commises par voie de communication électronique.
La sanction de l’interception ou la transmission des données ayant un caractère privé ou
confidentiel est énoncée l’article 74 in fine qui dispose : « (1) Est puni d’un emprisonnement
de un (01) à deux (02) ans et d’une amende de 1.000.000 (un million) à 5.000.000 (cinq
millions) fcfa, quiconque, au moyen d’un procédé quelconque porte atteinte à l’intimité de la
vie privée d’autrui en fixant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de leur auteur,
les données électroniques ayant un caractère privé ou confidentiel.
La sanction de la violation de la correspondance électronique est énoncée à l’article 84 (1)
punissant « d’un emprisonnement de six mois (06) à deux (02) ans et d’une amende de
500.000 à 1.000.000 fcfa ou de l’une de ces deux peines seulement, celui qui accède, prend
frauduleusement connaissance, retarde l’accès ou supprime les communications électroniques
adressées à autrui.
Est puni des mêmes peines ci-dessus, celui qui intercepte sans autorisation, détourne, utilise
ou divulgue les communications électroniques émises, ou reçues par des voies électroniques
ou procède à l’installation d’appareils conçus pour réaliser de telles interceptions.
Paragraphe 2 : le droit à l’image
Le droit à l’image est un démembrement du droit au respect de la vie privée. Toutefois, son
contenu (A) et les modalités de sa sanction (B) méritent des développements distincts.
A- Le contenu du droit à l’image
Le droit à l’image est très proche du droit au respect de la vie privée. Il est le droit de
disposer de son image, entendu comme l’ensemble des caractéristiques visibles d’un individu
et permettant son identification. L’image bénéficie de la protection contre toute et/ou
divulgation en absence du consentement de l’intéressé. La violation du droit à l’image
consiste à faire sans le consentement d’une personne, des photographies de celle-ci dans un
lieu privé, ou faire de cette personne l’objet principal d’une photographie prise dans un
lieu public et à des fins privées.
B- Les modalités de sanction du droit à l’image
L’auteur d’une violation du droit à l’image s’expose aux sanctions civiles (1), sans préjudice
des sanctions pénales (2).
1- Les sanctions civiles
La réparation du préjudice subi du fait la violation du droit à l’image peut être obtenue sur le
fondement de la responsabilité civile délictuelle. En effet, l’article 1382 du Code civil dispose
que tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute
duquel il est arrivé, à le réparer. Tel a été le cas dans l’affaire YOMBA Madeleine contre
Brasserie du Cameroun. En l’espèce Dame YOMBA s’était fait photographier en 1960 lors
des festivités de la fête de l’indépendance du Cameroun (le 1er janvier) par une certaine dame
Kay Lawson, photographe basée à New York aux Etats-Unis. Quinze ans plus tard, alors
qu’elle était en visite à Paris, Dame YOMBA constatera que sa photo a servi à orner le
calendrier de l’année 1974 de la société des brasseries du Cameroun. Surprise de n’avoir pas
été consultée par cette utilisation inédite de sa photo, elle assignera en réparation devant le
Tribunal de Grande Instance de Yaoundé la société les Brasseries du Cameroun. Celle-ci, à
son tour, appellera en garantie, l’Agence Rapho qui lui avait choisi cette photo et les Editions
Hello Cachan qui avaient produit le calendrier litigieux. La Société Brasserie du Cameroun
qui a remis l’image à l’éditeur, et l’Agence Rapho qui a proposé la photographie tous sans le
consentement de la dame, ont été condamnées solidairement à réparer le préjudice le
préjudice subi par la requérante.
2- Les sanctions pénales
Avec l’essor des communications numérique, la protection du droit à l’image est devenue
incertaine car, les atteintes à l’image sur internet étaient difficiles à sanctionner. Cette
difficulté a été résolue par la loi n°2010/012 précitée. En son article 75, elle sanctionne de 02
ans à 05 ans d’emprisonnement et d’une amende de 1 million à 5 millions de francs ou l’une
des deux peines seulement, celui qui enregistre et diffuse à but lucratif, par la voie de
communications électroniques ou d’un système d’information, sans le consentement de
l’intéressé, des images portant atteinte à l’intégrité corporelle.
Si l’essor des technologies de la communication a multiplié et facilité les atteintes à la vie
privée, il a aussi à tort ou à raison étendu le champ de la liberté de s’exprimer.
CHAPITRE II : LA LIBERTE D’EXPRESSION
Si internet a conféré une nouvelle dimension à l’exercice de la liberté d’expression (Section1),
il a été aussi le terrain fertile a la prolifération d’abus qui ont reçu des sanctions (Section 2).
Section 1 : Extension des supports d’expression aux communications numériques
Le canal officiel de l’expression libre est l’organe de presse. La reconnaissance d’internet
comme nouveau support d’expression tant en matière de presse qu’en tout aspect de la vie
sociale et politique (paragraphe 1), connait quelques aménagements en vue de limiter les
dérives (paragraphe 2).
Paragraphe 1 : reconnaissance du droit à la liberté d’expression et de la liberté de la
presse
La reconnaissance de la liberté d’expression en général (A) ne peut être envisagée sans celle
de la liberté de la presse (B).
A- Reconnaissance de la Liberté d’expression en droit des communications numériques

La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948 dispose que « tout individu a droit
à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses
opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considération de frontière, les
informations et les idées, par quelque moyen d’expression que ce soit ». On retrouve la même
idée exprimée à l’article 19 du Pacte International de 1966, relatif aux Droits Civils et
Politiques qui prescrit que « nul ne peut être inquiété pour ses opinions ». Sur le plan interne,
la constitution en son préambule, affirme garantir la liberté d’expression, dans les conditions
fixées par la loi.
Au regard des dispositions précitées, la liberté d’expression est un processus qui comprend la
liberté de penser (qui est le droit que possède tout individu de déterminer lui-même le
contenu de ses représentations intellectuelles, morales, politiques et religieuses), la liberté
d’opinion (qui la faculté qu’à un individu de penser comme il le souhaite et d’avoir des
opinions contraire à celle des autres, et même de la majorité), la liberté d’information (qui
est de pouvoir s'informer et prendre connaissance des différentes opinions sur un sujet donné
sur les médias de son choix), la liberté de conscience (c’est le droit d'un individu d'avoir le
libre choix de son système de valeurs et des principes qui guident son existence et de pouvoir
y adhérer publiquement et d'y conformer ses actes). La liberté d’expression appliquée à la
presse revêt quelques spécificités.
B- Reconnaissance de la Liberté de la presse en droit des communications numériques

Les dispositions conventionnelles et constitutionnelles consacrant la liberté d’expression


s’étendent à la liberté de la presse. Celle-ci connait au Cameroun une organisation singulière
assurée par la loi n°90/052 du 19 décembre 1990 sur la liberté de la communication sociale
modifié par la n°96/04 du 04 janvier 1996 portant sur la liberté de communication sociale.
Elle dispose en son article premier que la liberté de la presse est garantie par la constitution.
Son intérêt tient de ce que dans une démocratie, les médias sont libres. Les informations sont
collectées et diffusées auprès du public par les différents médias (télévision, radio, presse,
Internet) et font l'objet de libres commentaires et d'analyses. Elles donnent lieu à des débats
dans lesquels s'expriment des idées différentes. Les médias permettent à chacun de former son
opinion, afin d'exercer librement ses responsabilités. La liberté de la presse est exercée à
travers les organes de presse qui selon l’article 5 de la loi n°90/052 précitée, désigne tout
journal, écrit périodique, magazine, feuille d’information, destinée à la communication de la
pensée, des idées, des opinions, des faits d’actualité ou de société, paraissant à intervalles
réguliers. L’article 6 du même texte précise que la publication des organes de presse est libre.
Internet a influencé l’activité médiatique sans modifier substantiellement le droit applicable.

Paragraphe 2 : Aménagement de la liberté d’expression


En vue de discipliner la liberté d’expression, quelques aménagements sont nécessaires. Il peut
s’agir de trouver une juste articulation entre liberté d’expression et vie privée (A), ou
d’assujettir le citoyen à un droit de réponse (B).
A- Articulation entre liberté d’expression et vie privée

On ne doit s’exprimer librement et publiquement sur la privée d’autrui qu’avec le plein


consentement de ce dernier. Sauf s’il y a une valeur supérieure à préserver. L’intérêt du public
à être informé peut donc justifier un certain nombre d’atteinte à la vie privée. Il ne s’agit pas
cependant d’assouvir la curiosité des individus. Le juge doit prendre en compte l’information
en cause (information pertinente pour le public), l’identité de la personne concernée
(personnalité publique), du contexte de l’actualité.

Le droit au respect de la vie privée et la liberté d’expression revêtant une même valeur, le juge
doit rechercher leur équilibre en privilégiant la solution la plus protectrice de l’intérêt le plus
légitime. Une récente étude semble indiquer que le droit à la vie privée serait en déclin face à
la liberté d’expression, le premier ayant tendance à assez largement s’effacer lorsqu’il est
confronté au droit à l’information du public (T. HASSLER, le respect dû à la vie privée en
déclin relatif face à la liberté d’expression, RLDI, avril 2014, p. 69).

B- Droit de rectification et droit de réponse

Selon l’article Article 39 alinéa (1) de la loi n° 2010/012 sur la cybercriminalité et la


cybersécurité, toute personne victime d’une diffamation au moyen d’un service de
communications électroniques, dispose d'un droit de réponse et peut en exiger la rectification.
Le droit de rectification est initié par l’autorité publique et le droit de réponse par une
personne privée.

Le directeur de publication est tenu d’insérer gratuitement, dans le plus prochain numéro,
toutes les rectifications qui lui sont adressées par l’autorité publique au sujet des actes de sa
fonction qui auraient été rapportés de façon inexactes. Les organes de communication
audiovisuelle sont tenus de diffuser gratuitement, dans leur plus proche programme
d’information et de même nature que celle qui les auront provoquées, toutes rectifications qui
leur sont adressées par l’autorité publique au sujet des actes de sa fonction dont il a été
inexactement rendu compte dans l’une de leurs émissions.

Le directeur de publication est tenu d’insérer gratuitement, la réponse de toute personne


nommée ou désignée dans sa publication. De la même façon, le directeur de l’organisme
audiovisuel est tenu de diffuser dans les 48 heures dès sa réception, toute réponse d’une
personne nommée, désignée ou mise en cause par un organe de communication audiovisuelle.

Dans certains cas, l’expression abusive est simplement sanctionnée.

Section 2 : la sanction des abus


Tout comme la liberté des uns s’arrête où commence celle des autres, la liberté d’expression
trouve ses limites dans le respect de l’ordre public et la réputation d’autrui. L’article 11 de la
Déclaration Universelle des Droits de l’Homme rappelle que ce droit s’exerce « sauf à
répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi ». Certains abus sont
sanctionnés parce que commises par voie de presse (paragraphe 1), tandis que d’autres sont
sanctionnés même commises en dehors de toute presse (paragraphe 2).
Paragraphe 1 : les abus sanctionnés par la loi relative à la liberté de la presse
Internet n’a pas modifié fondamentalement le droit de la presse et le répertoire des délits qui
sanctionnent les abus. Avant de faire étalages des faits susceptibles d’être sanctionnés (B), il
convient d’analyser la responsabilité éditoriale à l’ère d’internet (A).
A- La responsabilité éditoriale à l’ère d’internet
Les organes de presse publiant en ligne sont soumis au droit classique de la presse. Selon
l’article 74 de la n°90/052 précitée, sont passibles dans l’ordre, comme auteurs principaux des
peines qui répriment les infractions commises par voie de presse et de communication
audiovisuelle telles que prévues par le Code pénal :
1) Les Directeurs des Publication ou Editeurs, quelles que soient leurs professions et
leurs dénominations, ainsi que les auteurs ;
2) A défaut des personnes visées à l’alinéa 1 ci-dessus, les imprimeurs, les distributeurs,
les directeurs des entreprises d’enregistrement ou de diffusion ;
3) A défaut des personnes citées à l’alinéa 2 ci-dessus, les afficheurs, les colporteurs, les
vendeurs à la criée.
Peuvent également être poursuivie au même titre tous les complices du fait délictueux. La
volonté du législateur est de tenir pour responsable principal d’abord le Directeur de
publication en vertu de la présomption de la fixation préalable des informations avant sa
communication au public. Puis les éditeurs et auteurs parce qu’ils ont forcément connaissance
du contenu.
Il est dès lors question de savoir, si ces principes de responsabilité en cascade peuvent être
appliqués à la communication sur Internet. Le forum de discussion ou le blog est-il soumis au
droit de la presse ?
Le gestionnaire du site est assimilable au directeur de publication, car il a un contrôle éditorial
sur le contenu de son site. Le responsable d’un site peut donc être condamné pour délit de
diffamation et d’injure pour des propos se trouvant sur son site.
A titre de droit comparé, l’auteur d’un blog considéré par la jurisprudence française 1 comme
un éditeur. Il encourt à cet effet la même sanction qu’un directeur de publication. Tout
bloggeur doit ainsi comprendre qu’il est responsable du contenu de sa page internet, car il
exerce un contrôle éditorial sur le contenu des messages qui y sont publiés.
Quant au forum de discussion, la réponse est moins aisée. Le gestionnaire d’un forum peut
être considéré comme éditeur d’un service de communication au public en ligne. Mais là
encore, il importe de distinguer si le gestionnaire exerce un contrôle éditorial effectif sur le
contenu des échanges réalisés sur son forum, dans ce cas, il sera tenu pour responsable de ce
qui y est diffusé. Ou au cas contraire, il sera simplement considéré comme hébergeur.
Certains juges, à défaut de retenir la responsabilité du gestionnaire du forum en qualité
d’éditeur, le font en qualité de producteur. Le souci est ici de ne pas laisser impunis les
comportements abusifs.
B- Les comportements punissables
La liberté d’expression est un droit dont l’exercice ne revêt un caractère abusif que dans les
cas spécialement déterminés par la loi. Les comportements punissables sont nombreux.
La diffamation : suivant l’article 305 du Code pénal, est puni de 06 jours à 06 mois et d’une
amende à 5000 FCFA à 2 millions de francs ou l’une de ces deux peines seulement, celui qui,
par des gestes, paroles, ou cris proférés dans les lieux ouverts au public, soit pas tout procédé
destiné à atteindre le public, porte atteinte à l’honneur ou à la considération d’une personne,
en lui imputant directement ou non des faits donc il ne peut rapporter la preuve. Commise par
voie de presse écrite, radio ou télévision, cette infraction donne lieu au droit de réponse ou de
rectification. Dans le cadre de l’usage d’internet, lorsque la personne éditant à titre non
professionnel a conservé l’anonymat, le demandeur peut s’adresser au fournisseur d’accès ou
d’hébergement de fournir son identité.
L’auteur présumé de la diffamation peut prouver la vérité de l’imputation sauf :
- Lorsqu’elle concerne la vie privée de la victime ;
- Lorsqu’elle se réfère à un fait remontant à plus de 10 ans ;
- Lorsqu’elle se réfère à un fait concernant une infraction amnistiée ou ayant fait l’objet
d’une condamnation autrement effacée.
Les peines sont réduites de moitié si la diffamation n’est pas publique et sont doublées si la
diffamation est anonyme.
L’injure (art 307 du code pénal): est puni d’un emprisonnement de 05 jours à 03 mois et
d’une amende de 5000 à 100 000 FCFA ou l’une des deux peines seulement, celui qui, dans
les lieux ouverts au public, soit par tout procédé destiné à atteindre le public, sans avoir été
provoqué, use à l’encontre d’une personne d’une expression outrageante, d’un geste, d’un
terme de mépris ou d’une invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait.

1
TGI paris, 17e chambre, 26 nov. 2007, SA Switch c/ Monsieur P. B
Non publication d’un droit de réponse : Le directeur de la publication est tenu d'insérer,
sous peine d'une amende de 100.000 (cent mille) à 2.000.000 (deux millions) F CFA, dans les
quarante-huit (48) heures de leur réception, les réponses de toute personne désignée dans le
service de communications électroniques.
Outrage aux races et aux religions : l’article 241 nouveau du Code Pénal, modifié et
complété par la loi n°2019/020 du 24 décembre 2019 dispose :
(1) Est puni celui qui, par des gestes, paroles, ou cris proférés dans les lieux ouverts au
public, soit pas tout procédé destiné à atteindre le public, commet un outrage à
l’encontre d’une race ou d’une religion à laquelle appartient un ou plusieurs citoyens
ou résidents.
(2) Si l’infraction est commise par voie de presse, de radio, de télévision, de réseaux
sociaux, ou de tout autre moyen susceptible d’atteindre le public, l’amende est portée
de 500 000 F à 20 000 000 F.
(3) Les peines sont doublées lorsque l’infraction est commise dans le but de susciter la
haine ou le mépris entre les citoyens ou les résidents.
Outrage à la tribu ou à l’ethnie (art 241-1 du Code pénal) : est puni d’un emprisonnement
de 1 an à 2 ans et d’une amende de 300 000 f à 3 millions, celui qui par quelque moyen que ce
soit, tient des discours de haine ou procède aux incitations à la violence contre les personnes
en raison de leur appartenance tribale ou ethnique. Cet article consacre comme moyens de
commission la voie de presse, la voie de radio, la voie de télévision, la voie de réseaux
sociaux et la voie de tout autre moyen susceptible d’atteindre le public.
Lorsque l’auteur du discours est un fonctionnaire, un responsable de formation politique, un
média, une ONG ou une institution religieuse, les peines sont doublées.
Apologie des actes de terrorisme : est puni d’un emprisonnement de 15 à 20 ans et d’une
amende de 20 000 000 FCFA à 50 000 000 FCFA ou l’une des deux peines seulement, celui
qui fait publiquement l’apologie des actes de terrorisme.
L’infraction est caractérisée même si l’apologie est faite par voie de média, de tracts ou par
tout autre moyen destiné à atteindre le public.
Publications obscène (art 265 du Code pénal) : est puni d’un emprisonnement d’un mois à
deux ans et d’une amende de 10 000 F à 500 000 F celui qui expose ou distribue même à titre
gratuit tout écrit, dessins ou objet tendant à corrompre les mœurs.
Publications équivoques (art 266 du Code pénal) : est puni d’une amende de 20 000 f à 2
millions de franc celui qui rend compte, sauf en publiant le jugement, des procès en
déclaration de paternité, en divorce, en séparation de corps et d’avortement. Est puni des
mêmes peines celui qui, sans autorisation écrite du procureur de la république, donne une
publicité par quelque moyen que ce soit, au suicide des mineurs de 18 ans.
Propagation de fausses nouvelles : Est également puni celui qui émet ou propage des
nouvelles mensongères lorsque ces nouvelles sont susceptibles de nuire aux autorités publique
ou à la cohésion nationale.
Cette liste n’est pas exhaustive, d’autres infractions pouvant être commises même en dehors
d’un organe de presse.
Paragraphe 2 : les abus sanctionnés en dehors de la loi relative à la liberté de la presse

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