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Utilisation d’un Gastéropode marin Osilinus turbinatus en biosurveillance


marine: application aux métaux lourds du littoral algérien occidental

Article · January 2011

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Belhaouari Benkhedda
Higher School of Agronomy Mostaganem, Algeria (HSAM)
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Belhaouari et al. (2011) J. Sci. Hal. Aquat., 3:89‐96

Research paper

Utilisation d’un Gastéropode marin Osilinus turbinatus en biosurveillance


marine : application aux métaux lourds du littoral algérien occidental

Benkhedda BELHAOUARI1,*, Omar ROUANE‐HACENE1, Soltana BOUHADIBA1, Zitouni BOUTIBA1


1
Laboratoire Réseau de Surveillance Environnementale, Département de Biologie, Faculté des Sciences
Université d’Oran, BP 1524 El Mnaouer Oran, 31000, Algérie

*Correspondance : Tél. : (+213) 554‐98‐72‐86 ; Télécopie : (+213) 41‐58‐19‐31; Courriel :


belhaouaribio@hotmail.fr (B. BELHAOUARI)
Reçu le 18/05/2011 ; accepté le 02/08/2011 ; publié en ligne le 04/08/2011
Oceanraise © MS 180511‐20

Résumé
Cette étude a deux objectifs : (i) tester Osilinus turbinatus, Gastéropode marin
fréquentant l’estran rocheux, en tant qu’espèce bioindicatrice de la pollution marine par
les métaux lourds ; (ii) évaluer l’impact de la pollution métallique sur cette espèce. Nous
avons procédé à l’analyse de la bioaccumulation des éléments métalliques (Cd, Zn et Cu)
chez O. turbinatus durant deux saisons été et hiver (2010) dans trois sites sélectionnés
selon un gradient de pollution croissant, sur la partie ouest du littoral algérien. Les
résultats montrent une variation saisonnière significative des degrés de contamination. Sur
les trois sites, les valeurs les plus élevées sont enregistrées en saison hivernale. Durant les
deux saisons, l’indice de condition de l’espèce est évalué. Les valeurs les plus élevées sont
relevées en hiver. La bioaccumulation de la pollution métallique est corrélée avec l’indice
de condition de l’espèce. Les concentrations létales CL50 chez O. turbinatus pendant 96 h
d’exposition aux CdSO4, ZnSO4 et CuSO4, dans des conditions naturelles reproduites au
laboratoire, permettent de déterminer les valeurs limites à respecter dans les rejets des
eaux usées. Les résultats montrent que le CuSO4 est plus toxique que le CdSO4 suivi du
ZnSO4.
Mots clefs: métaux lourds, pollution marine, littoral algérien, biosurveillance marine, Osilinus turbinatus.
Abstract
This study has two objectives: (i) to test Osilinus turbinatus, marine gastropod
attending the rocky foreshore as a bioindicator species of marine pollution by heavy
metals; and (ii) evaluate the impact of metal pollution on the species. We analyzed the
bioaccumulation of metallic elements (Cd, Zn and Cu) at O. turbinatus during summer and
winter (2010) in three sites chosen according to a different gradient of pollution along the
Oran coast (Western Algeria). The results show a significant seasonal variation of the
degrees of contamination. Within the three sites, the highest values were registered in
wintry season. During both seasons, the condition index of the species was measured. The
highest values were in winter. The bio‐accumulation of metallic pollution was correlated
with the condition index of the species. We have determined the lethal concentrations
LC50 at O. turbinatus during 96 h of exposure in CdSO4, ZnSO4 and CuSO4 in natural
conditions reproduced in the laboratory to determine the limits values to meet in the
discharges of wastewater. The results show that CuSO4 was the most toxic followed CdSO4
and ZnSO4.
Keywords: heavy metal, marine pollution, Algerian coast, bio‐monitoring, Osilinus turbinatus.
1. Introduction
La côte algérienne s’étend sur 1280 km. La zone littorale représente 1.9 % de la superficie globale du pays,
qui compte à elle seule près de 40 % de la population totale (Grimes et al., 2004). La pollution métallique est
l’une des formes de pollution anthropique les plus dangereuses menaçant cette zone. Les métaux lourds sont

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des micropolluants qui peuvent affecter la salubrité du milieu marin, car ils ne subissent pas de dégradation
biologique ou chimique. Ils peuvent de ce fait s'accumuler dans les différents maillons des chaînes trophiques à
des concentrations toxiques dans les organismes marins (Neathery et al., 1975).
En raison de la solubilité des métaux lourds, l'analyse de l'échantillon d'eau de mer ne peut pas être
considérée comme un moyen fiable pour déterminer le degré de pollution métallique du milieu marin (Phillips,
1977). Toutefois l’étude de la bioaccumulation des métaux traces au niveau des organismes qui y sont exposés
constitue un moyen important pour l’évaluation de la pollution métallique (Lagadic et al,. 1997). Ces dernières
années les gastéropodes sont de plus en plus utilisés comme espèces bioindicatrices de la pollution marine
(Amiard et al., 1998). Cependant Osilinus turbinatus a été utilisé dans peu de programmes de biosurveillance
(Campanella et al., 2001), bien qu’il soit classé parmi les espèces caractéristiques de l’estran rocheux dans la
Méditerranée (Boudouresque, 2005). Ce gastéropode est très disponible au niveau de la côte occidentale
algérienne (Belhaouari & Boutiba, 2009), mais l'analyse des travaux d’auteurs algériens a révélé une très faible
utilisation en écotoxicologie.
Au cours de ce travail, la bioaccumulation des métaux lourds (Cu, Cd, Zn) a été corrélée avec l’indice de
condition de l’espèce sur trois sites d’échantillonnage choisis selon un gradient de pollution différent, durant
deux saisons été et hiver (août et décembre 2010). Par ailleurs, des essais biologiques basés sur la mortalité
CL50‐96 h ont été effectués pour déterminer les valeurs limites de CdSO4, ZnSO4 et CuSO4 à respecter dans les
rejets des eaux usées.
2. Matériels et Méthodes
2.1 Echantillonnage
Les individus de O. turbinatus ont été prélevés à partir des trois sites sur la côte de la ville d’Oran (Algérie
ouest) (Figure 1). Le site S1 (Cueva d’El Awa) se trouve à proximité du port d’Oran, il est caractérisé par la
présence d’un important réceptacle des effluents à la fois urbains et industriels. Le site S2 se trouve à environ
500 m du site S1. Le site S3 est exempté de tout point de rejet industriel ou urbain, il se situe à environ 1000 m
de la plage In Defla et 20
Km de la ville d’Oran, Côté
Est.
Figure 1.
Localisation des sites
d’échantillonnage (S1, S2 et
S3) de O. turbinatus le long
de la côte oranaise (Ouest
algérien).
Durant la saison d’été
(août 2010) et la saison
d’hiver (décembre 2010),
des individus ont été
échantillonnés au niveau des trois sites afin d’analyser leur concentration en métaux lourds et d’évaluer leur
indice de condition. En outre, des individus provenant du site S3 ont fait l’objet d’essais biologiques basés sur la
mortalité.
2.2 Analyse chimique
Le dosage de métaux dans les organismes marins utilise couramment la méthode de spectroscopie
d’absorption atomique (SAA). En effet, l’échantillon de gastéropode doit subir préalablement la minéralisation.
Les tissus biologiques ont été récupérés et séchés à l’étuve à 55°C pendant 48h. Sur chaque lot de 30 individus,
trois prises d'essai d’environ 0.25 g ont été réalisées. Ces différents échantillons ont été minéralisés à chaud
(95°C) en présence de 1 ml d'acide nitrique pendant 1 h puis ajustés à 4 ml d'eau bidistillée (Amiard et al.,
1987). Des blancs de protocole ont été réalisés. La procédure d'analyse a été vérifiée en utilisant un matériel de
référence standard de tissu de Mytilus galloprovincialis (SRM 2976) provenant de l’Agence Internationale de
l’Energie Atomique de Monaco.
2.3 Indice de condition
L'indice de condition (IC) est un indice biométrique utilisé en conchyliculture pour rendre compte du degré
de remplissage des coquilles des animaux (Merzouki et al., 2009). Pour cette étude nous avons opté pour

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l’indice AFNOR (NF V 45056, sep 85), exprimé par l’équation :


IC = (poids frais / poids total) * 100 Eq. 1
Nous avons sélectionné des individus adultes ayant un diamètre ≥ 13mm. Durant chaque saison, au niveau
de chaque site, 50 individus ont été sacrifiés pour l’étude de l’indice de condition.
2.4 Essais biologiques basés sur la mortalité
Des sulfates de cadmium, de zinc et de cuivre ont été dilués dans l’eau de mer pure d’une salinité de 36g L‐1.
Les gastéropodes ont été exposés pendant 96 h aux concentrations suivantes : CdSO4 : 1, 2, 3, 4 et 5 mg L‐1 ;
ZnSO4 : 1, 2, 3, 4 et 5 mg L‐1 ; CuSO4 : 0.1, 0.2, 0.3, 0.4 et 0.5 mg L‐1. Neuf animaux ont été utilisés pour chaque
dilution. Des témoins ont été utilisés dans des bassins contenant de l’eau de mer pure.
Les bassins ont été continuellement aérés par des pompes pendant la période expérimentale. Les essais
biologiques ont été réalisés dans une salle acclimatée à 20 ± 1 °C et sous une photopériode : 16 h de lumière
puis 8 h d’obscurité (Cunha et al., 2007). Les individus morts sont reconnus par leur immobilité, le détachement
de l’animal des parois du bassin et le relâchement du pied à l'extérieur de la coquille.
2.5 Traitement statistique
Le traitement statistique des données a été réalisé à l’aide du logiciel SPSS (15.0). Le test de Student (t) a été
utilisé pour déterminer la significativité des différences entre les moyennes calculées. La différence a été
considérée significative à un seuil de probabilité (p) inférieur à 5 % (p < 0.05).
3. Résultats
3.1 Analyses chimiques
Les concentrations les plus élevées en Cd, Zn et Cu au niveau des trois sites S1, S2 et S3 sont observées en
hiver. C’est au niveau du site S1 que la contamination est plus marquée (1,89 ± 0,12 mg de Cd, 64,32 ± ,039 mg
de Zn, 30,92 ± 0,69 de mg Cu). Dans le site S1 et le site S2, la concentration des trois métaux est
significativement plus élevée en hiver, mais il n’y a pas de différence significative au niveau du site S3. Durant
les deux saisons, la concentration des trois métaux dans le site S1 et S2 est significativement plus élevée que
dans le site S3 (Table 1) (Figure 2).

Figure 2. Concentrations de Cd, Zn et Cu dans la chair de O. turbinatus dans les trois sites d’échantillonnage S1,
S2 et S3. Les résultats avec la même lettre indiquent qu'ils ne diffèrent pas significativement (p > 0,05).

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Table 1. Concentrations de métaux en mg kg‐1


Stations Cd Zn Cu
(sec) dans la chair de O. turbinatus.
Eté 1,39 ± 0,16 56,07 ± 3,81 25,70 ± 1,07
S2
Hiver 1,7 ± 0,52 62,48 ± 0,77 28,92 ± 1,08
Eté 1,55 ± 0,22 59,13 ± 2,41 26,58 ± 2,69
S1
Hiver 1,89 ± 0,12 64,32 ± ,039 30,92 ± 0,69
Eté 0,56 ± 0,52 13,92 ± 1,14 5,61 ± 0,42
S3
Hiver 0,59 ± 0,02 15,65 ± 1,00 6,39 ± 0,11

3.2 Indice de condition


Les indices de condition les plus élevés d’O. turbinatus au niveau des trois sites S1, S2 et S3 sont observés en
hiver. Durant cette saison, la valeur la plus élevée est enregistrée au niveau du site S2 (29,90 ± 5,66) ; la valeur
la moins élevée (29,02) est enregistrée au niveau du site S3
(Table 2). Stations Saisons Indices de condition
Table 2. Indice de condition d’O. turbinatus pendant l’été et Eté 26,13 ± 3,86
S2
l’hiver au niveau des trois sites S1, S2 et S3. Hiver 29,90 ± 5,66
Eté 25,72 ± 3,91
S1
Hiver 29,50 ± 5,54
Eté 26,54 ± 3,86
S3
Hiver 29,02 ± 5,11

3.3 Essais biologiques basés sur la mortalité


Les résultats des essais biologiques basés sur la mortalité montrent que le cuivre est le plus toxique vis‐à‐vis
O. turbinatus, suivi par le cadmium et le zinc (Table 3).

Table 3. Concentration létale CL50‐96 h de CdSO4, ZnSO4 et CuSO4 pour O turbinatus. Métal CL50‐96 h
CdSO4 3 mg L‐1
ZnSO4 5 mg L‐1
4. Discussions CuSO4 0.2 mg L‐1
4.1 Analyses chimiques
Les résultats d’analyse obtenus au niveau du troisième site S3 révèlent des taux de bioaccumulation
minimes. Il n’existe aucune différence significative entre les deux saisons (Figure 2). La comparaison de ces
valeurs avec celles relevées au niveau des deux sites S1 et S2 montre une différence significative (Figure 2), cela
confirme que le site S3 est peu pollué.
En été comme en hiver, la comparaison de la bioaccumulation des trois métaux entre les deux sites S1 et S2
ne montre aucune différence significative (Figure 2). La pollution est peu diluée, la contamination du site S1 et
aussi importante que celle du site S2 bien qu’une distance de 500 m les sépare.
Durant les deux saisons, au niveau des deux sites pollués, les résultats se présentent sous l’ordre décroissant
suivant : Zn > Cu > Cd (Table 1). Ces résultats concordent avec ceux trouvés par Boutiba et al., (2003) chez
Mytilus galloprovincialis au niveau du port d’Oran. En effet, le Zn et le Cu sont très répandus dans les effluents
vu leur présence dans de nombreux rejets ménagers. De plus, le cuivre est présent dans les réseaux publics de
distribution d'eau. Le cadmium, bien qu’il ne soit pas aussi utilisé que le zinc et le cuivre, fait partie, comme ces
deux métaux, de la composition des peintures ‘antifouling’. Le trafic maritime constitue une source de pollution
métallique dans les deux sites (S1 et S2).
Au niveau de ces derniers, la bioaccumulation des trois métaux en hiver est plus importante qu’en été, la
différence est significative (Figure 2). Cette variation saisonnière est peut‐être la conséquence de la différence
du débit des effluents durant les deux saisons, mais nous ne pouvons confirmer que ces sites reçoivent plus
d’effluents pendant l’hiver, car nous ne disposons pas de données précises concernant le taux des effluents
émis dans le milieu. D’autre part, il est possible que cette différence de bioaccumulation soit conditionnée par
la fluctuation de certains facteurs biologiques tels que l’âge, la taille et la ponte. Ces facteurs contribuent
énormément à la variabilité de la bioaccumulation des métaux lourds (Langston & Spence, 1995). Des variations
saisonnières similaires ont été observées chez Mytilus galloprovincialis (Majori et al., 1978) et chez Mytilus
edulis (Ritz et al., 1982).

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Ces résultats nous montrent que l’utilisation de O. turbinatus, de manière simultanée, afin d’évaluer la
pollution métallique de plusieurs sites est prometteuse. Mais nous restons réticents par rapport à son
utilisation comme bioindicateur de pollution métallique pour des variations temporelles.
4.2 Indice de condition
Au cours de la même saison, aucune différence de l’indice de condition n’est enregistrée chez les individus
échantillonnés dans les trois sites (Figure 3). Cela peut être dû aux systèmes de réparation développés par
l’organisme. Selon Amiard et al., (2008), après une exposition chronique, quelques espèces peuvent acquérir
une tolérance à certains polluants. Ces dernières investissent de l’énergie dans des mécanismes de défense, de
réparation et de régénération des cellules.

Figure 3. Variation saisonnière de l'indice de condition de O. turbinatus sur les trois sites d'échantillonnage S1,
S2 et S3. Les résultats avec la même lettre indiquent qu'ils ne diffèrent pas significativement (p > 0,05).
Pour chaque site, l’indice de condition des individus échantillonnés durant l’hiver est plus élevé que celui
des individus échantillonnés durant l’été ; la différence est significative (Figure 3). Ce fait peut être dû à la
période de ponte qui coïncide avec la saison estivale chez O. turbinatus (Hickman, 1992). Certains auteurs ont
signalé qu’à la ponte, les mollusques perdent une grande quantité de réserves nutritives (Bryan, 1973; Cossa et
al., 1980; Metayer et al., 1985). Afin de voir le type de relation entre l’indice de condition d’O. turbinatus et la
bioaccumulation des métaux durant les deux saisons, nous avons tracé une courbe à trois axes englobant les
trois dimensions (Figure 4).

Figure 4. Relation entre la contamination de O. turbinatus par les métaux lourds (Cd, Zn, Cu) et l’indice de
condition durant les deux saisons (été et hiver) au niveau des trois sites (S1, S2 et S3).

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Les comparaisons des niveaux de bioaccumulation des métaux lourds chez O. turbinastus durant les deux
périodes d’échantillonnage par rapport à l’indice de condition montrent l'existence d'une relation
proportionnelle entre les deux facteurs (Figure 4). L’espèce bioaccumule moins les métaux en été avec un indice
de condition moins important. Ce fait nous laisse penser qu’en période de ponte, lorsque les réserves nutritives
chutent chez O. turbinatus, le taux des métaux lourds bioaccumulés est réduit.
4.3 Essais biologiques basés sur la mortalité
La CL50‐96 h enregistrée pour CdSO4 est de 3 mg L‐1. Ce résultat concorde avec ceux enregistrés chez
certains mollusques, par exemple une CL50‐96 h de Cd+ de 2.441 mg L‐1 a été trouvée pour O. linéatus (Cunha
et al., 2007), une CL50‐96 h de Cd+ de 2,2 mg L‐1 pour Mya arenaria (Eisler, 1971). La CL50‐96 h de CdSO4
enregistrée chez O. turbinatus nous laisse penser que l’espèce tend à stocker le cadmium sous forme non
toxique. Ce métal n’est pas essentiel au développement des organismes vivant et ne participe pas aux
métabolismes cellulaires (Lauwerys et al., 2007). La résistance de O. turbinatus à ce xénobiotique peut être due
à la présence de la metallothioeine dont la propriété essentielle est l’immobilisation des métaux sous forme
non toxique à l’intérieur de la cellule (Pelletier et al., 2004).
La CL50‐96 h de ZnSO4 trouvée est de 5 mg L‐1. Pour Crassostrea virginica, Calabrese et al., (1973) montrent
que 50 % des larves meurent lorsqu'elles sont en présence de solutions de ZnCl2 à 0,310 mg/L. Chez Haliotis
tuberculata, la CL50‐48 de Zn+ est de 1 mg L‐1 (Levet Danielle Le hen et al., 2008). Le zinc est parmi les
oligoéléments les plus indispensables pour les organismes vivants, ce métal essentiel est régulé par l’organisme
suite à son implication dans de nombreux processus biologiques (Lauwerys et al., 2007), ce qui peut expliquer
qu’il est moins toxique que le cadmium.
La CL50‐96 h de CuSO4 trouvée est 0,2 mg L‐1. D’autres CL50‐96 h ont été enregistrées chez des mollusques
marins : 0,086 mg L‐1 de Cu+ pour Perna viridis (Krishnakumar et al., 1990), et 0,5 mg L‐1 de Cu+ pour Ostrea
edulis (Bouhallaoui et al., 2003). Le Cuivre est aussi un élément essentiel pour les organismes vivants (Lauwerys
et al., 2007). Cependant, nous constatons qu’il est plus toxique que le cadmium. Un constat similaire a été
trouvé pour Ostrea edulis (Bouhallaoui et al., 2003).
Ces résultats nous montrent que bien que le gastéropode O. turbinatatus tolère la présence des métaux
lourds dans l’eau de mer et que cette tolérance le qualifie comme espèce bioindicatrice de pollution marine, les
concentrations de ces métaux dans le milieu marin ne doivent pas dépasser les valeurs détectées dans ces
essais biologiques basés sur la mortalité. Cette exigence est primordiale pour la préservation de l’espèce.
5. Conclusions
Les résultats obtenus au cours de ce travail nous montrent que O. turbinatus possède de grandes
potentialités en tant qu’outil d’évaluation de la pollution métallique dans le milieu marin ; son utilisation, de
manière simultanée dans plusieurs sites, s’avère prometteuse. D’autant plus que ce gastéropode est très
répandu sur le littoral algérien et méditerranéen et que sa bioécologie est bien connue. Par ailleurs, le respect
des CL50‐96 h de CdSO4, ZnSO4 et CuSO4 dans les rejets des eaux, contribuera à la préservation de cette espèce.
Remerciements
Nous remercions le Dr. François Galgani (directeur de la station de l’Ifremer de Corse à Bastia) pour sa
critique constructive de notre article. Nous remercions aussi Dr. Wilfried Sanchez (INERIS), Dr. Benoit Leblanc
(Université de Sherbrooke) et Dr. Ahmed Belguermi (Université Paris 10) pour leurs précieux conseils qui nous
ont été très utiles.
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