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Le Mariage de Figaro,
Maîtres et valets dans la comédie du XVIII° siècle.

BIBLIOGRAPHIE DE L’AUTEUR

Pierre Augustin Caron de Beaumarchais (1732-1799), est un auteur dramatique


français, dont l'œuvre apparut, à la veille de la Révolution, comme un éloge des capacités
et de l'intelligence du tiers état. Né à Paris d'un père horloger, il devient lui-même horloger
du roi en 1753. Deux ans plus tard, il commença une rapide ascension sociale en épousant
la veuve d'un membre de la maison du roi, et en gagnant la faveur des filles de Louis XV,
dont il était professeur de harpe. En 1761, il acheta une charge qui l'anoblit et lui permit de
prendre le nom de Beaumarchais. Associé au financier Pâris-Deverney, il se rendit, en
1764, à Madrid sous le prétexte romanesque de défendre l'honneur de sa sœur, plus
probablement pour négocier d'importantes affaires; Beaumarchais fut en effet mêlé à
des intérêts complexes (un héritage litigieux, un procès qui lui valut d'être emprisonné).
Outre sa charge de secrétaire du roi, il fit office d'agent secret pour Louis XV et Louis XVI
(notamment en livrant des armes aux Américains à partir de 1775). En 1791, il tenta de
procurer des fusils à la France révolutionnaire; mais l'affaire échoua. Suspect par
ailleurs, en raison du luxe de sa maison parisienne, il fut considéré comme émigré à cause
de ses nombreux voyages et vécut pauvrement à Hambourg jusqu'en 1796, date de son
retour à Paris. Parallèlement à ces activités, il mena une carrière d'auteur dramatique à
succès. Celle-ci avait commencé en 1767 avec un mélodrame moralisant, Eugénie, dont la
préface, Essai sur le genre dramatique sérieux développe des théories qui doivent
beaucoup à Diderot et à Sedaine; ceux-ci furent encore ses modèles pour, les Deux
Amis ou le Négociant de Lyon joué avec succès en 1770. Il composa ensuite des parades,
genre fort à la mode. La célébrité lui vint en février 1775 avec le Barbier de Séville ou la
Précaution inutile : cette comédie en quatre actes, sifflée lors de la première, fut d'abord un
opéra comique que refusa la troupe des Italiens; l'intrigue est empruntée à la tradition,
en particulier à l'École des femmes, de Molière, et à une nouvelle de Scarron, la
Précaution inutile, mais la grande nouveauté de la pièce réside à la fois dans la gaieté,
dans un comique franc que le théâtre français avait oublié au XVIIIe siècle, dans l'intérêt
porté aux caractères des personnages, qui ne sont pas seulement les types comiques
traditionnels — il y crée Figaro, homme du peuple doté d'un esprit d'entreprise, d'une
habilité et d'une liberté de ton profondément moderne —, dans le dynamisme de l'action,
mais surtout dans la verve satirique. Beaumarchais s'attacha aussi à protéger les droits
des dramaturges : en 1777, il les regroupa dans une société d'auteurs. Puis il entreprit
l'édition des œuvres complètes de Voltaire, qui furent imprimées à Kehl de 1783 à 1790
pour éviter la censure en France. Ce fut en 1784 que Beaumarchais atteignit le sommet de
sa carrière, avec le Mariage de Figaro ou la Folle Journée. Cette comédie en cinq actes
écrite quatre ans plus tôt fut acceptée à la Comédie-Française en 1781, mais il fallut trois
ans de bataille pour qu'elle puisse être jouée. Le roi la trouvant «détestable», elle dut
passer quatre fois à la censure. La première représentation, le 27 avril 1784, fut un
véritable événement. Les duchesses comme les laquais avaient fait la queue pour obtenir
des billets, la salle était comble, des spectatrices s'évanouirent, toute la cour et la ville
entière firent un énorme succès à la pièce, succès de scandale qui avait été savamment

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orchestré par l'auteur lui-même. Louis XVI fit emprisonner Beaumarchais à Saint-Lazare,
mais dut le libérer en raison de la pression de l'opinion publique. L'intrigue est empruntée à
des sources diverses, mais Beaumarchais s'en démarque par l'impertinence du ton et par
le relief tout nouveau qu'il donne a Figaro, en rivalité avec le comte Almaviva. Devenu le
concierge du château du comte, Figaro avait promis à Marceline, une femme de chambre,
qu'il l'épouserait s'il ne pouvait lui rembourser une dette. Or, il est très amoureux de
Suzanne, camériste de la comtesse, et prépare son mariage avec elle. Le comte, lassé des
charmes de son épouse, favorise ce projet de mariage afin de jouir de son droit de
cuissage sur Suzanne, qui lui plaît beaucoup. Suzanne avertit de ses intentions coupables
Figaro et la comtesse, elle-même admirée par un tout jeune page, Chérubin. Le comte
tente de se venger en favorisant les projets de Marceline, mais on apprend que celle-ci est
la mère de Figaro; le comte doit finalement demander pardon à sa femme et Figaro peut
épouser Suzanne. Les attaques des censeurs portèrent sur l'immoralité de la pièce; de
fait, le comte est cette fois-ci bel et bien supplanté par son domestique, la naissance par le
droit. Les idées nouvelles s'exprimaient par la bouche de Figaro, les vers célèbres sur le
peuple («Qu'on l'opprime, il peste, il crie, — Il s'agite en cent façons : — Tout finit par
des chansons») annoncent l'esprit de la Révolution, tout comme le fameux monologue
de Figaro, invective contre son noble rival («Qu'avez-vous fait pour tant de biens?
Vous vous êtes donné la peine de naître et rien de plus»). En effet, s'il veut encore faire
rire, Beaumarchais entend aussi donner à penser : «en faveur du badinage, faites grâce
à la raison», place-t-il en exergue. La pièce valut à son auteur une popularité extrême,
qui diminua cependant progressivement, en raison des polémiques dans lesquelles il
s'engagea. Il fit jouer encore un opéra, Tarare (1787), puis un drame, la Mère coupable
(1792). Mais son chef-d'œuvre demeure le Mariage de Figaro, sans cesse représenté
depuis sa création. Un des plus grands succès de Mozart à la scène, l'opéra comique en
quatre actes les Noces de Figaro (1786) est tiré de cette comédie. Le Barbier de Séville,
autre grand succès dramatique, est à l'origine d'un opéra en deux actes de Giacchino
Rossini (1816).

RESUME

LE MARIAGE DE FIGARO

Comédie en cinq actes et en prose de Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais (1732-1799),


créée à Paris à la Comédie-Française le 27 avril 1784, et publiée simultanément à Paris
chez Ruault et à Kehl à la Société littéraire et typographique en 1785, avec une Préface de
l’auteur.

Triomphe dramatique du siècle, le Mariage de Figaro en fut aussi l’un des événements
politico-littéraires. Entre la présentation de la pièce aux comédiens-français
le 29 septembre 1781 et la première de 1784, Beaumarchais dut affronter successivement
six censeurs, atténuer quelques audaces (la version initiale, assez scabreuse, s’en prenait
directement aux autorités françaises), vaincre l’opposition royale en mobilisant les milieux
éclairés de la cour, se livrer à une active campagne de lectures privées. La bataille de
l’édition ne fut pas moins acharnée, et valut même à l’auteur un bref séjour en prison
(mars 1785), alors que sa Préface venait d’attiser les polémiques tout en feignant de vouloir
calmer les esprits au sujet de «la plus badine des intrigues», habilement résumée et
ironiquement dédramatisée: «Un grand seigneur espagnol, amoureux d’une jeune fille qu’il

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veut séduire, et les efforts que cette fiancée, celui qu’elle doit épouser et la femme du
seigneur réunissent pour faire échouer dans son dessein un maître absolu que son rang, sa
fortune et sa prodigalité rendent tout-puissant pour l’accomplir. Voilà tout, rien de plus.» Rien
de plus? Car Beaumarchais, en remettant sur scène «trois ans» après (selon la chronologie
de la fiction) ses Espagnols du Barbier de Séville, donne aussi à voir la quasi-dislocation,
sous l’effet d’une lassitude tôt venue, du couple Almaviva. D’où, sous le mouvement
endiablé de la pièce, une mélancolie dont Mozart (le Nozze di Figaro, 1786) saura peindre
toutes les nuances, et que la Préface du Barbier, dix ans auparavant, laissait déjà prévoir:
«Son Excellence madame la comtesse Almaviva, l’exemple des femmes de son état et
vivant comme un ange avec son mari, quoiqu’elle ne l’aime plus...» Surtout, à travers la
rupture d’un autre couple, celui du maître et de son serviteur, Almaviva et Figaro jadis alliés
pour conquérir Rosine et maintenant rivaux, Beaumarchais a su «faire entrer» dans sa pièce
«la critique d’une foule d’abus qui désolent la société» (Préface du Mariage): les
complaisances de la justice, l’oppression seigneuriale et celle, plus subtile et moderne, de
l’argent. Rien toutefois, l’espace d’une «folle journée», ne semble irrémédiable, ni
l’inconstance, ni l’ingratitude, ni même les «abus», comme en témoignent les nouveaux
venus dans la «famille Almaviva»: le page Chérubin, cette figure du désir qui trouble la
Comtesse sa marraine, est encore un «morveux sans conséquence» (la conséquence
viendra, et ce sera la Mère coupable); Suzanne, courtisée par son maître, demeure
incorruptible, et d’une inflexible fidélité envers son fiancé Figaro.
Restent pourtant, gravés dans l’esprit du spectateur par-delà un dénouement heureux, ces
mots, ces slogans qui feront dire à Danton que «Figaro a tué la noblesse»: «Parce que vous
êtes un grand seigneur, vous vous croyez un grand génie [...]. Qu’avez-vous fait pour tant de
biens? Vous vous êtes donné la peine de naître, et rien de plus [...]. Tandis que moi,
morbleu!» (V, 3). En portant au théâtre, c’est-à-dire en donnant la force du vécu à des
formules que ses contemporains souvent étouffaient par la forme narrative ou philosophique,
Beaumarchais créait véritablement une œuvre révolutionnaire, et toujours perçue comme
telle: le Mariage fut interdit pendant l’occupation allemande, et lorsque, en 1958 on rétablit
provisoirement la censure, le Figaro, alors dirigé par Pierre Brisson, titra en gros caractères
sur la devise empruntée à son homonyme: «Sans la liberté de blâmer, il n’est point d’éloge
flatteur.» On conçoit donc que le Mariage de Figaro ait attiré les metteurs en scène attachés
à célébrer les droits de la libre parole, de l’homme dressé contre les privilèges, de l’avenir et
de la vie contre la sclérose de tous les anciens régimes: citons simplement, pour nous en
tenir à l’époque contemporaine, Stanislavski (Moscou, 1926), Jean Vilar (Paris, Théâtre
national de Paris, 1956), Jean-Pierre Vincent (Paris, Chaillot, 1987). Et lors du bicentenaire
de 1789, il apparut clairement que le Mariage de Figaro, avec sans doute la Mort de Danton
de Georg Büchner (1835), était encore la seule pièce susceptible de dire la Révolution au
public d’aujourd’hui; ou du moins, de coïncider aussi parfaitement avec notre image
mythique de l’époque prérévolutionnaire. Malentendu autour d’une «composition légère» qui
affirme — mais par la voix d’un benêt — que «tout finit par des chansons»? De toute façon, il
importe d’y aller voir.
Synopsis
Jour de noces au château d’Aguas Frescas, près de Séville, chez le comte Almaviva, «grand
corregidor» [juge suprême] d’Andalousie. Tandis que Figaro, «concierge» du château,
mesure la chambre nuptiale, sa fiancée Suzanne, camériste de la Comtesse, lui apprend
que le Comte, tout en ayant officiellement aboli le «droit du seigneur», veut faire d’elle sa
maîtresse, et a chargé Bazile (voir le Barbier de Séville) de la négociation. Resté seul, Figaro
s’indigne et réfléchit: comment empocher l’argent du Comte sans lui rien céder en échange?
Surcroît d’embarras: la vieille Marceline, aidée de Bartholo — autre revenant du Barbier —,
entend faire valoir auprès du Comte une promesse de mariage de Figaro. Elle se querelle
avec Suzanne, qui se moque de ses prétentions. Surgit, fort ému, le page Chérubin que le
Comte vient de chasser après l’avoir surpris chez Fanchette, la fille du jardinier. Mais
Chérubin courtise aussi Suzanne, tout en rêvant à la Comtesse sa marraine, dont il arrache
à Suzanne le ruban de nuit. Ils sont surpris par le Comte venu faire sa cour à la camériste:
terrifié, Chérubin se dissimule d’abord derrière un fauteuil, puis par un mouvement tournant

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s’y blottit sous une robe, lorsque le Comte, entendant entrer quelqu’un, lui prend sa première
cachette. Ce n’est que Bazile, venu jouer les entremetteurs. Mais une allusion aux
sentiments de Chérubin pour la Comtesse provoque la colère du Comte, qui se dresse
brusquement; en mimant sa découverte de Chérubin chez Fanchette, il tire sur la robe et,
stupéfait, voit de nouveau apparaître le page! Il en est d’autant plus irrité que Chérubin
connaît maintenant tous ses projets... Heureuse diversion: une foule de paysans et de valets
envahit la scène, conduits par la Comtesse et Figaro. Celui-ci demande au Comte de
célébrer sur-le-champ l’abandon du droit du seigneur; celle-là sollicite la grâce de son filleul.
Verdict embarrassé du Comte: la cérémonie aura lieu plus tard; quant à Chérubin, il partira
pour l’armée, à l’autre bout de l’Espagne. Mais Figaro, discrètement, lui souffle le moyen de
rester au château (Acte I).
Chez la Comtesse. Suzanne informe sa maîtresse, rêveuse et amère, des faits et gestes de
Chérubin et du Comte. Arrive Figaro, qui expose son plan: pour lui «donner le change», il a
fait adresser au Comte un billet anonyme l’informant que son épouse doit rencontrer un
galant le soir même. Quant à Suzanne, il faut qu’elle fixe un rendez-vous au Comte; mais
c’est Chérubin, déguisé, qui s’y rendra. Figaro va donc chercher le page, qui, en tenue
d’officier et son brevet à la main (non cacheté, remarque la Comtesse), reste avec les deux
femmes. Il chante une romance d’adieu à la Comtesse aussi émue que lui, et plus encore
lorsqu’elle découvre au bras du page le ruban volé, taché de sang par une blessure. Elle le
lui reprend, en feignant l’indifférence; au même moment, le Comte frappe à la porte fermée à
clé. Chérubin court s’enfermer dans le cabinet de toilette, mais y fait tomber une chaise. La
Comtesse, plus morte que vive, prétend qu’il s’agit de Suzanne, et le mari jaloux enjoint à
celle-ci, évidemment sans succès, de se montrer; puis il sort avec la Comtesse tremblante
pour chercher de quoi forcer la serrure, non sans avoir au préalable fermé à double tour la
chambre — où Suzanne, par bonheur, a pu se cacher. Elle ouvre donc à Chérubin, qui saute
par la fenêtre, et elle prend sa place. Retour du Comte et de la Comtesse, qui finit par tout
avouer et par donner au Comte la clé du cabinet. Stupeur: «C’est Suzanne!» Le Comte,
penaud, implore le pardon de son épouse, qui, se remettant peu à peu, feint d’avoir voulu
punir sa jalousie. Le Comte passe sa mauvaise humeur sur Figaro. Catastrophe: le jardinier
Antonio arrive avec à la main un pot de giroflées écrasées et le brevet de Chérubin, que
celui-ci a perdu dans sa chute. Mais Figaro sauve la situation: c’est lui, dit-il, qui a sauté par
la fenêtre, et a gardé le brevet pour y faire apposer le cachet... Rageusement, le Comte
vérifie et doit s’incliner. De nouveau une foule envahit la scène, avec Marceline qui vient
réclamer ses droits sur Figaro. Bazile, rudoyé par le Comte, est dépêché au bourg pour y
chercher les gens de justice. Demeurées seules, la Comtesse et Suzanne font le point:
impossible, désormais, d’envoyer Chérubin au rendez-vous! C’est donc la Comtesse qui,
sous l’apparence de Suzanne, ira elle-même. Mais on n’en dira rien à Figaro (Acte II).
La «salle du Trône», servant de salle d’audience au grand corregidor. Désarroi du Comte,
qui se sent joué de tous côtés. Il a convoqué Figaro pour tenter, du moins, de savoir s’il est
au courant de son intrigue avec Suzanne. Tête-à-tête aigre-doux entre les deux hommes,
également sur leurs gardes. Figaro se moque du Comte (tirade de God-dam, couplet sur la
politique), qui croit néanmoins l’avoir percé à jour: «Je vois qu’on lui a tout dit; il épousera la
duègne.» Mais Suzanne retourne la situation en promettant au Comte le rendez-vous tant
espéré, en échange de quoi il déboutera Marceline. Hélas! un mot de trop de Suzanne à
Figaro révèle au Comte toute la manœuvre, et il décide de se venger: «Un bon arrêt, bien
juste...» En attendant, Marceline puis Figaro essaient d’exposer leur cas à Brid’oison, le juge
assesseur d’Almaviva, bègue et formaliste. Le procès commence. Bartholo, promu avocat de
Marceline, et Figaro ergotent longuement sur les termes (et/ou, ou/où...) de la promesse de
mariage; le Comte tranche enfin, en condamnant Figaro à payer Marceline ou à l’épouser.
En désespoir de cause, Figaro, né de parents inconnus, se proclame gentilhomme afin
d’échapper au verdict. Coup de théâtre: ses «nobles parents» se révèlent n’être en réalité
que Marceline et Bartholo — lequel refuse obstinément d’épouser la mère de son fils.
Marceline profère alors une violente dénonciation de la cruauté masculine, et tombe dans les
bras de Figaro. Suzanne, qui arrive avec de l’argent donné par la Comtesse, se croit trahie,
mais le malentendu se dissipe, le Comte rage et Bartholo se laisse fléchir (Acte III).

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Une galerie du château. Badinage philosophique et amoureux entre les deux fiancés. La
Comtesse relance le jeu en dictant à Suzanne, à l’insu de Figaro, un billet donnant rendez-
vous au Comte. Une imprudence de Chérubin, arrivant déguisé en fille parmi une troupe de
villageoises, et bientôt reconnu, tourne à la confusion du seigneur dont les vues sur
Fanchette sont révélées à tous. La cérémonie décidée à l’acte I se déroule enfin, mais
Figaro aperçoit le Comte avec le billet entre les mains; une indiscrétion de Fanchette lui en
apprend la provenance, ainsi que le lieu du rendez-vous. Marceline tente d’apaiser son fils
ivre de jalousie, et qui voudrait maintenant tout rompre (Acte IV).

Une allée de marronniers avec deux pavillons. Dans la nuit, Fanchette cherche Chérubin.
Apparaît Figaro accompagné de Bartholo, Bazile, etc., et d’un groupe de «valets et de
travailleurs» qu’il poste aux alentours. Resté seul, il exhale sa rancœur dans un long
monologue, et dresse l’amer bilan de sa vie. Caché, il voit arriver successivement Suzanne
et la Comtesse, qui ont échangé leurs vêtements et qu’il prend l’une pour l’autre, puis
Chérubin qui lutine la Comtesse en la prenant pour Suzanne, enfin le Comte qui redécouvre
les appas de sa femme en s’imaginant lui aussi qu’il fait la cour à Suzanne. Mais Figaro
furieux trouble leur entretien; le Comte s’enfonce dans l’obscurité, la Comtesse se retire de
son côté et Suzanne, sous son déguisement, décide de punir Figaro de ses soupçons. Mais
il la reconnaît bientôt... Reste à punir aussi le Comte: celui-ci, de retour, croit apercevoir sa
femme avec Figaro. Fureur, scandale. Figaro est arrêté, Suzanne s’enfuit dans un des
pavillons — lequel, sous les yeux du Comte, se vide successivement de tous ses occupants:
Chérubin, Fanchette, Marceline... Tandis que la Comtesse, seule, sort de l’autre pavillon. Le
Comte, comprenant sa bévue, implore le pardon de son épouse, et «tout finit par des
chansons» (Acte V).

LES INTRIGUES DE LA PIECE

Le choix du titre de la pièce nous renseigne sur l'intrigue de la comédie de


Beaumarchais : le spectateur sait que le mariage annoncé, celui de Figaro, va être contrarié,
selon le schéma canonique de toute comédie, et que, les opposants deviendront des
adjuvants. La seule énigme réside dans les obstacles à ce mariage. La comédie de
Beaumarchais n'est pas aussi simple que cela.
La lecture de l'acte I nous conduit dans un dédale d'intrigues multiples qui se croisent et
s'entrecroisent ( "l'imbroglio"): quatre intrigues se mettent en place dans les quatre premières
scènes.

Intrigue I : l'obstacle au mariage de Figaro et de Suzanne : le comte veut faire de


Suzanne sa maîtresse au nom du "droit du seigneur" qu'il avait pourtant aboli dans "Le
Barbier de Séville" pour pouvoir épouser Rosine (la comtesse) alors pupille et future épouse
de Bartholo : c'est ce que Suzanne apprend à Figaro dés la première scène :"Monsieur le
comte veut rentrer au château, mais non pas chez sa femme ; c'est sur la tienne, entends-tu,
qu'il a jeté ses vues."

Intrigue II : Marceline nous apprend, scène 4, que Bazile veut l'épouser : " Le pis... est
cette ennuyeuse passion qu'il a pour moi depuis si longtemps."

Intrigue III : toujours scène 4, Marceline demande à Bartholo, l'amant bafoué du "Barbier
de Séville" de l'aider à " en épouser un autre.... le beau, le gai l'aimable Figaro."

Intrigue IV: scène 7, Chérubin annonce à Suzanne que le comte l'a renvoyé du château et
il a besoin de l'aide de sa marraine ( la comtesse) pour faire changer d'avis le comte.

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De plus , l'intérêt que Chérubin porte à la comtesse et les réflexions de Suzanne laissent
deviner que le jeune page est amoureux de la comtesse ; par ailleurs la tendresse de la
comtesse pour le page est explicite dés la scène 1 de l'acte II.

Aussi les obstacles au mariage de Figaro et de Suzanne sont-ils d'une part l'abus de
pouvoir du comte et d'autre part le désir de Marceline.

Le Mariage de Figaro est bien l'intrigue principale mais l'on ne sait pas qui sera son
épouse.
Ces différentes intrigues donnent lieu à plusieurs stratégies :
Celle de Figaro, dirigée contre le comte , exposée dans un court monologue, I,2 : "
D'abord avancer l'heure de votre petite fête, pour épouser plus sûrement ; écarter une
Marceline qui de vous est friande en diable ; empocher l'or et les présents ; donner le change
aux petites passions de Monsieur le Comte ; étriller rondement monsieur Bazile et..."

Cette stratégie sera finie d'être élaborée dans la scène 2 de l'acte II en présence de la
Comtesse et de Suzanne : d'abord, éveiller la jalousie du comte : "tempérons d'abord son
ardeur de nos possessions en l'inquiétant sur les siennes." aussi Figaro a-t-il fait parvenir au
comte un billet lui annonçant que la comtesse a un rendez-vous avec un galant.

Ensuite prendre le comte en flagrant délit de rendez-vos avec Suzanne : "tu feras dire à
Monseigneur que tu te rendras sur la brune au jardin" mais en fait, c'est Chérubin, déguisé
en Suzanne qui s'y rendra.

Celle de Marceline, dirigée contre Figaro pour le contraindre de l'épouser : elle peut
s'opposer au mariage de Figaro et de Suzanne parce qu'elle détient un engagement signé
de Figaro ( cf acte III, scène 15 : "Je soussigné reconnais avoir reçu de
Damoiselle...Marceline....la somme de deux mille piastres ... ; laquelle somme je lui rendrai...
et je l'épouserai par forme de reconnaissance.. signé Figaro")

De plus , Suzanne se refusant au Comte, elle est sûre qu'il la soutiendra pour se venger
du refus de la camériste de son épouse.

Celle de La Comtesse et de Suzanne, à l'insu de Figaro, à partir de la scène 3 de l'acte


IV, contre le Comte, en faveur de la Comtesse : Suzanne fixera un rendez-vous au Comte
mais c'est La Comtesse qui ira ,déguisée en Suzanne.

Aussi peut-on voir se dessiner les oppositions et les alliances

a) Le Comte, Bartholo, Marceline contre Figaro et Suzanne

b) Figaro, Suzanne, la Comtesse contre Marceline et le Comte.

Si l'opposition maître/valet est évidente en a), l'alliance maître/valet caractérise b).

Il faudra attendre l'acte III, scène16, pour que Marceline, ayant reconnu en Figaro son fils
Emmanuel, change de camp et œuvre pour la réussite du mariage de Suzanne et de Figaro
.Ce coup de théâtre contrarie le comte :" Sot événement qui me dérange"

Par ailleurs, il convient de constater que le Comte se retrouve seul dans sa


quête dés lors que Bartholo peut épouser Marceline : leur fils les réunissant.
Aussi, si au début de la pièce, tout semblait être en faveur du Comte, son pouvoir, son
argent, sa jalousie, vont se retourner contre lui
.

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PORTRAIT DES DIFFERENTS PROTAGONISTES


Les principaux personnages vus par leur auteur.

Dans sa préface et dans "caractères et habillements de la pièce", Beaumarchais donne


de précieuses indications au lecteur sur ses personnages :

- Le Comte est essentiellement caractérisé par son rang social et par sa puissance
:"Un grand seigneur espagnol...un maître absolu que son rang, sa fortune, sa prodigalité
rendent tout-puissant... C'est un mari peu délicat....assez galant,..., un peu libertin."De plus,
il doit être joué "très noblement avec grâce.... la corruption du cœur ne doit rien ôter au bon
ton de ses manières."

- La Comtesse est identifiée à ses qualités morales : c'est "la plus vertueuse des
femmes... Un modèle de vertu, l'exemple de son sexe et l'amour du nôtre.... Un caractère
aimable et vertueux".L'éloge dithyrambique participe à la mise en place de l'image de la
femme victime du libertinage de son mari.

- Figaro est présenté comme un personnage dominant tant par ses qualités que par
son rôle. C'est "l'homme le plus dégourdi de sa nation..... il incarne "le feu et l'esprit.... Il ne
ruse avec son seigneur que pour garantir ce qu'il aime et sauver sa propriété." De plus, la
sagesse et la gaieté en font le parangon du valet émancipé , il est " de la sagesse
assaisonnée de gaieté et de saillies."

-Suzanne n'est pas une servante quelconque, elle est " spirituelle, adroite et rieuse ...
mais non de cette catégorie presque effrontée de nos soubrettes corruptrices... Dans tout
son rôle, il n'y a pas une phrase, pas un mot qui ne respire la sagesse et l'attachement à
ses devoirs."

- Chérubin est par avance excusé et justifié de ses penchants pour la Comtesse.
Beaumarchais insiste beaucoup sur sa jeunesse, ce qui ruine toute intention qui pourrait
porter atteinte à la décence et à la morale : "un enfant de treize ans, aux premiers
battements du cœur..., idolâtre [de] sa marraine est-il sujet de scandale ?... Aimé de tous, vif,
espiègle et brûlant comme tous les enfants spirituels.... Pour lui imprimer plus fortement le
caractère de l'enfance,nous le faisons exprès tutoyer par Figaro... Timide à l'excès devant la
Comtesse, ailleurs un charmant polisson."

- Marceline est " Une femme d'esprit, née un peu vive, mais dont les fautes et
l'expérience ont réformé le caractère."

Portrait selon les personnages.

Dans "Dom Juan", Molière fait faire à Sganarelle le portrait de son maître : véritable
tradition dramaturgique, la présentation du personnage principal est, le plus souvent , prise
en charge par un autre personnage qui lui est proche (autre exemple : Tartuffe est tour à tour
présenté par Madame Pernelle, Orgon, Dorine... bien avant qu'il n'arrive sur scène).
Beaumarchais respecte ce principe mais de façon plus discrète : les caractères sont
esquissés par petites touches et pris en charge par plusieurs personnages.

- Figaro apparaît d'abord comme un personnage aux multiples qualités aux dires de la
gente féminine : Marceline le considère comme un jeune homme gai et bon "Jamais fâché ;
toujours de belle humeur ; [...] sémillant, généreux, généreux."(I,4), séduisant, c'est "Le
beau, le gai, l'aimable Figaro" (I,4) et épicurien " Donnant le présent à la joie et s'inquiétant
de l'avenir tout aussi peu que du passé" ( I,4)

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Suzanne nous présente un fiancé malicieux et ingénieux, "De l'intrigue et de l'argent,


te voilà dans ta sphère."(I,1),particulièrement gai "J'aime ta joie parce-qu'elle est folle" la
Comtesse voit en lui l'élément indispensable pour rappeler le Comte à l'ordre "... lui seul peut
nous [...] aider... il a tant d'assurance." ( II,1)

En revanche, le regard des personnages masculins ne voit que ses défauts.

Pour Bartholo, Figaro est un personnage de la parole débridée, " Un bavard enragé"
et " le plus fier insolent" (I,3).

Le Comte considère son valet comme un menteur (II,20), toujours intéressé par
l'argent et sournois "Cent fois je t'ai vu marcher à la fortune et jamais aller droit" (III,5), un
insolent qui se trouve partout où on ne l'attend pas et qui brouille les pistes au point que le
comte ne sait plus où il en est "Le fil m'échappe"(III,4)

Pour parachever le portrait de Figaro, il suffit de lire son auto-portrait dans son
monologue (V,3). Il se peint tel "Un jeune homme ardent au plaisir, ayant tous les goûts pour
jouir... ambitieux par vanité, laborieux par nécessité, mais paresseux avec délices ! orateur
selon le danger, poète par délassement, amoureux par folles bouffées..."
Amoureux, il n'hésite pas à dire et à redire son amour pour Suzanne :" Il n'y a que
mon amour pour Suzon qui soit une vérité de bon aloi" et il ajoute " En fait d'amour [...] trop
n'est pas même assez."( IV?1)

Son amour est tel que sa jalousie éclate lorsqu'il croit que Suzanne a donné rendez-
vous au Comte sous les marronniers et sa colère est sans limite ( lui qui venait de confier à
sa mère que la jalousie "n'est qu'un sot enfant de l'orgueil" et que "si Suzanne doit me
tromper un jour, je le lui pardonne d'avance" ( IV,13) !!!). Figaro devient alors un personnage
très sérieux qui porte un regard cynique sur le monde qui l'entoure, remettant en cause les
fondements mêmes de la société(théâtre de société)et se posant des questions existentielles
qui préfigurent le héros romantique du début du XIXème siècle. A la question "Quel est le
moi dont je m'occupe" il répond "un assemblage informe de parties inconnues ; puis un chétif
être imbécile ; un petit animal folâtre". Le bilan amer qui clôt ce monologue "J'ai tout vu, tout
fait, tout usé. Puis l'illusion s'est détruite et trop désabusé...Désabusé ! ... Désabusé !" a des
accents de déréliction.

Personnage sensible, Figaro cache mal son émotion et, sans fausse pudeur,
apprenant que Marceline est sa mère, il laisse éclater l'intensité de sa joie "Je les ( les
larmes) retenais bêtement ! Va te promener la honte ! Je veux rire et pleurer en même
temps."(III,19)

Dans sa préface, Beaumarchais, disait de Figaro qu'il était "de la sagesse


assaisonnée de gaieté" et de fait il n'est pas un personnage excessif mais au contraire un
personnage nuancé qui use de deux armes pour combattre le Comte : la parole, le rire et la
ruse.( théâtre de société)

- Le Comte
Il s'agit d'un personnage beaucoup moins nuancé que celui de son valet et si Figaro
attire les sympathies, le Comte attise les réprobations. Deux traits de caractères dominants
sont mis en évidence par les différents personnages : Le libertinage et la jalousie.

Dés la scène 1 de l'acte I, Suzanne atteste le libertinage du Comte " C'est sur la
tienne qu'il a des vues"
Selon Marceline " il est jaloux et libertin"( I,4)
Bartholo précise " Libertin par ennui, jaloux par vanité" (I,4)

Copie à l'usage exclusif de ayla.rustamzadeh@gmail.com, IP 188.253.230.149.


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La Comtesse constate "Il ne m'aime plus"(II,1) et "la seule vanité" (II,16) est la cause de
sa jalousie.
Figaro ose lui dire " Vous êtes infidèle" (III,5)
La jalousie du Comte est telle qu'elle va jouer un véritable rôle dans la dramaturgie. Dés
la scène 2 de l'acte II, Figaro ajuste sa stratégie pour confondre le Comte :"... tempérons
d'abord ses ardeurs de nos possessions en l'inquiétant sur les siennes" : le rendez-vous
sous les grands marronniers, source de péripéties et de rebondissements, est élaboré et il
faudra attendre la fin de l'acte V pour sa mise en scène.
Dans les scènes 10,11,12,13,16,17,19 de l'acte II, la jalousie du Comte, poussée à
l'extrême, se met en scène et offre au spectateur l'image avilie de ce grand seigneur.
Soupçonneux, craintif, il s'emporte et ne se maîtrise plus "Furieux", "tapant du pied", il se
laisse dominer par la colère. Il prend "des précautions inutiles" en fermant à clef la porte de
la chambre de Suzanne alors qu'elle est dans la chambre de la Comtesse. Il est ridicule
lorsqu'il s'adresse" au cabinet". Il ne contrôle plus ses mouvements " il marche pour sortir et
revient" ; il oublie son honneur et n'hésite pas à faire "un scandale public" au risque de
devenir "la fable du château"; il manque de respect à sa femme en la tutoyant
familièrement "tu es bien audacieuse". Les attitudes du comte apparaissent d'autant plus
ridicules que la cause de sa jalousie est injustifiée : pour l'heure, il n'a rien à craindre d'un
enfant de treize ans ; de plus sa jalousie est en contradiction avec son libertinage.

Le libertinage(théâtre de société) joue lui aussi un rôle dans la dramaturgie. Son enjeu est
double : il est à l'origine, de l'intrigue principale de la pièce à savoir l'obstacle au mariage de
Suzanne et de Figaro et du conflit qui oppose le maître et le valet.
Séducteur impénitent le Comte est prêt à se renier en voulant user d'un droit( "le droit du
seigneur") aboli par lui-même dans "Le Barbier de Séville" pour séduire la future comtesse
Almaviva.
Enfin, pour assouvir ses désirs, il abuse de son autorité et agit en maître absolu. Les
verbes de volonté et les impératifs dominent le plus souvent les propos qu'il tient et quand
ces artifices de l'autorité ne suffisent pas il n'hésite pas à avoir recours au chantage "Si tu
manquais à ta parole... point de rendez-vous, point de dot, point de mariage" (III,9) ou à la
mauvaise foi ( cf le jugement qu'il prononce en la défaveur de Figaro dans le procès qui
l'oppose à Marceline)

- La Comtesse

Elle est un personnage diamétralement opposé à son mari. "Noble et belle mais
imposante"(I,7) selon Chérubin,elle est consciente des défauts du Comte et en souffre. "Il ne
m'aime plus" (II,1) confie-t-elle à Suzanne et la solitude à laquelle elle est contrainte lui pèse
: "je ne suis plus la Rosine que vous avez tant poursuivie ! Je suis la pauvre comtesse
Almaviva ; la triste femme délaissée, que vous n'aimez plus". La distance entre le prénom et
la patronyme est ici éloquente : la jeune fille aimée et arrachée à un vieux tuteur jaloux (
Bartholo) dans "le Barbier deSéville" n'est plus qu'un être social condamné à assurer un rôle
: celui de la femme trompée.

Vertueuse, elle reste néanmoins fidèle à ce mari volage ( même si d'aucuns considèrent sa
tendresse pour Chérubin plus importante qu'il n'y paraît) mais elle n'est pas résignée. Elle va
tout faire pour reconquérir son mari et par là même sauver l'honneur du Comte. A l'école de
Figaro, elle va , avec l'aide de Suzanne, élaborer une stratégie qui lui rendra son mari.
Espiègle et ingénieuse Comtesse qui aura la joie d'entendre son mari lui demander pardon
(II,19; V,19)
Contrairement à certaines critiques, je ne pense pas que la Comtesse soit un personnage
qui se laisse dominer. Certes elle craint la colère de son mari, lors de la "scène du cabinet"
et devant l'urgence de la situation elle est prête à avouer la présence de Chérubin mais elle
joue parfaitement la comédie au point que le comte ne peut se douter de la supercherie ; de
plus il faut lire la pièce dans le contexte de son époque et au XVIIIème siècle, la femme (

Reproduction et diffusion interdite.


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Marceline nous l'expliquera : théâtre de société) dépend entièrement de son mari et si les
hommes peuvent tromper leurs femme en toute impunité, la femme mariée doit rester
vertueuse. D'autre part, c'est à l'insu de Figaro et contre la volonté de Suzanne qu'elle se
rendra au rendez-vous sous les marronniers déguisée en Suzanne. C'est donc un
personnage qui évolue au fil de la pièce et qui s'enhardit au point de gagner seule la victoire
sur le Comte.

- Suzanne
Définie par Figaro, c'est "une charmante fille ! Toujours riante, verdissante,pleine de
gaieté, d'esprit, d'amour et de délices ! mais sage..."(I,2) Ce portrait élogieux dicté par un
amour sans borne corrobore celui de Beaumarchais et insiste sur la joie de vivre du
personnage. Toutefois, Figaro lui reproche sa trop grande sagesse. De fait, Suzanne, très
attachée aux traditions morales, garde les épanchements amoureux pour leur mariage et
lorsque son fiancé lui demande "un petit baiser", elle refuse "[..] Et quand dirait mon mari
demain ?" (I,1). Sauvegarder son honneur de jeune fille, sa dignité et son amour sont ses
buts et c'est au nom de ces trois principes qu'elle refuse de céder au Comte malgré la
promesse d'une dot conséquente : Suzanne ne se vend pas.
Elle entretient avec Marceline des relations conflictuelles. La scène 5 de l'acte I met en
présence les deux rivales et Suzanne persifle en traitant son aînée de "Duègne" (comprenez
: vieille femme). Le jeu scénique des révérences ponctue ironiquement la querelle des deux
femmes. Suzanne se laisse envahir par une colère jalouse lorsqu'elle voit Figaro embrasser
Marceline (III,8 : quiproquo oblige, Suzanne ignore tout de la scène de reconnaissance)"Tu
l'épouse à gré puisque tu la caresses"

Personnage plein de bon sens et d'esprit, elle a le sens de la répartie. Au chantage du


Comte elle répond par un autre chantage : "Point de mariage, point de droit du seigneur"
(II,9). Lorsque le Comte lui demande de ne rien dire de ses intentions à Figaro elle détourne
la réponse par une formule bien à propos : "Je lui dis tout hors ce qu'il faut taire."(III,19)

Perspicace, dans la scène 8 de l'acte I, elle utilise "le gros fauteuil de malade" comme
troisième lieu pourcacher Chérubin à l'arrivée du Comte. De même, à la scène 17 de l'acte II,
sortant du cabinet à la place de Chérubin,elle sauve la Comtesse d'une situation qui lui était
très défavorable.Sûre d'elle, elle n'hésite pas à se moquer des autres personnages en les
contrefaisant. Ainsi se moque-t-elle de la timidité de Chérubin en présence de la
Comtesse ( II,4) et traduit ses hésitations par des onomatopées péjoratives :
" Et gnian, gnian, gnian, gnian...". Elle ridiculise la jalousie du Comte quand apparaissant
devant lui elle dit : "Je le tuerai, je le tuerai. Tuez-le donc, ce méchant page."(III,17)
Enfin, servante dévouée au service de la Comtesse, elle est une complice attachante qui
ne recule devant rien(elle agira contre la volonté de Figaro) pour sauver l'amour de sa
maîtresse pour son mari. (La relation maître /valet)
- Marceline
Il s'agit du personnage qui du point de vue dramaturgique évolue le plus. Au début de la
pièce, rivale de Suzanne, alliée du Comte, amoureuse de Figaro, lucide quant aux relations
qu'entretiennent le Comte et la Comtesse"Elle languit... son mari la néglige."(I,4), elle devient
une mère aimante et secourable à partir de la scène 16 de l'acte III : "Sois heureux pour toi
,mon fils ; gai, libre et bon pour tout le monde : il ne manquera rien à ta mère" et elle
accueille Suzanne avec tendresse "Embrasse ta mère ma jolie Suzannette"(III,17). Dés lors,
elle change de camp, devient l'alliée de Figaro et le Comte se retrouve seul dans la quête de
son désir.
Marceline, c'est aussi, et surtout peut-être, cette femme de caractère qui, le verbe haut, ose
se lancer dans un réquisitoire contre le pouvoir des hommes et dans un plaidoyer pour les
femmes opprimées. Féministe avant l'heure Marceline ? Gardons-nous de ces étiquettes et
saluons seulement sa lucidité et sa clairvoyance quant à la précarité de la position de la
femme au XVIIIème siècle.

Copie à l'usage exclusif de ayla.rustamzadeh@gmail.com, IP 188.253.230.149.


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-Chérubin
" Ce rôle ne peut être joué [...] que par une jeune et très jolie femme" précise Beaumarchais
dans "Caractères et habillements" pour insister sur la jeunesse du personnage et
l'innocence de ses intentions. C'est un très jeune adolescent en pleine puberté, à la
sensualité naissante ; lui-même le confie à Suzanne : "Je sens ma poitrine agitée ; mon
cœur palpite au seul aspect d'une femme... Enfin, le besoin de dire à quelqu'un " je vous
aime" est devenu...si pesant, que je le dis tout seul."(I,7), et Suzanne ne voit en lui " qu'un
morveux(gamin) sans conséquence"(I,7).On peut à ce titre considérer comme injuste
l'éloignement que le comte lui impose. Mais Chérubin est celui qui permettra de mesurer
l'ampleur de la jalousie du Comte et de mettre en place une coalition de tous les
personnages contre l'autorité abusive du Comte. En effet, chacun s'applique à cacher et à
protéger Chérubin contre l'ordre du Comte : n'est-ce pas bafouer son autorité ?

Par ailleurs, la présence de Chérubin jusqu'à la fin de la pièce est nécessaire à


Beaumarchais pour annoncer la dernière pièce de sa trilogie, "La Mère coupable". Lorsque
suzanne affirme "Oh ! dans trois ou quatre ans, je prédis que vous serez le plus grand
vaurien"(I,7), elle annonce la relation amoureuse qu'il aura avec la Comtesse. De
même,Figaro entrevoit son destin tragique "A moins qu'un coup de feu"(I,10), destin qui se
réalisera dans l'intertexte( Chérubin meurt en 1770, c'est à dire 2 ans après la fin du
"Mariage de Figaro")

MAITRES ET VALETS, UNE RELATION COMPLEXE


LES RELATIONS DUELLES

LE COMTE / FIGARO
Dans l'introduction, nous avons précisé l'évolution de la relation entre Figaro et son
maître entre " Le Barbier de Séville" et "Le Mariage de Figaro" : la complicité a cédé la place
au conflit et le Comte ne manque pas de constater ce changement radical :" Autrefois tu me
disais tout" (III,5). Regret ? Sûrement pas puisque seul le comte est responsable de cette
mésentente.
L'opposition entre Figaro et son maître naît, dés la première scène de la comédie, de la
révélation,par Suzanne, des intentions du Comte : "Apprends qu'il la ( la dot) destine à
obtenir de moi, secrètement, certain quart d'heure,seul à seul, qu'un certain droit du
seigneur..."(I,1). Il s'agit alors d'un conflit de classe qui repose, non seulement sur la
supériorité du maître mais aussi et surtout sur l'abus de pouvoir. (cf "la disconvenance
sociale"). Or, "le droit du seigneur", "droit charmant" (I,7) pour le Comte, est un "droit qui
n'existe plus" comme le rappelle Figaro (I,10) puisque, le Comte lui-même l'a aboli dans "Le
Barbier de Séville" pour interdire à Bartholo, tuteur de la future Comtesse Almaviva, d'en
user. Dés lors, Figaro va s'appliquer à mettre son maître dans la situation de confirmer
publiquement cette abolition. Il y parvient à la scène 10 de l'acte I :

Figaro - Monseigneur, vos vassaux touchés de l'abolition d'un certain droit


fâcheux, que votre amour pour Madame...

Le Comte - Hé bien, ce droit n'existe plus, que veux-tu dire ?

Première victoire de Figaro qui, enhardi par ce succès rapide, prétend avancer son
mariage :

Figaro - Permettez donc que cette jeune créature, de qui votre sagesse a
préservé l'honneur, reçoive de vos mains, publiquement, la toque virginale [...] symbole de la
pureté de vos intentions."

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Deuxième situation d'échec pour le Comte, mais pas pour autant deuxième victoire de
Figaro puisque la Comte va essayer de gagner du temps : "Pour que la cérémonie eût plus
d'éclat, je voudrais seulement qu'on la remit à tantôt."

L'obstacle du droit du seigneur est donc écarté mais le Comte ne va pas pour autant
renoncer à son désir et le conflit social se double d'un conflit amoureux : le maître et le valet
sont rivaux. La pièce se transforme en un véritable duel dont les armes sont essentiellement,
la ruse et la parole.
Si Figaro respecte les règles sociales quand ils s'adressent à son maître , c'est toujours
avec une pointe d'ironie qu'il le gratifie de "Monseigneur" ou de "Votre excellence", et en son
absence, il l'appelle "Le grand trompeur" (I,1), "le perfide"(V, 111).
Le Comte , qui affirme " que Figaro, [est]un homme qu'[il] aime, et qu' [il] estime" (I, 9) le
nomme en des termes qui disent mal son affection : "Le maraud..Fripon" ( III,8) ; "Scélérat"
(V,12) Chacun se cache à l'autre pour mieux le tromper. Ainsi, le Comte, qui attend Figaro
mais qui ne l'entend pas arriver, explique dans un monologue ses intentions : il veut "le
sonder adroitement et tâcher .... de démêler d'une manière détournée s'il est instruit ou non
de mon amour pour Suzanne" ( III, 4). Figaro, qui a tout entendu se dit :"Voyons le venir et
jouons serré" et la scène 5 de l'acte III progressera rythme de : "elle n'a pas parlé" /
"Suzanne m'a trahi". Figaro est à son aise, il "l'enfile et le paye en sa monnaie". dans cette
joute oratoire, c'est Figaro qui l'emporte
Le Comte se trouve à chaque fois en situation d'infériorité ; Figaro possède la suprématie
de la parole, arme redoutable contre laquelle le Comte ne peut lutter. Il a réponse à tout et
surtout, il possède l'art du détour : il noie le Comte dans un flot de paroles illustré, entre
autre, par la tirade sur " God-dam", expression qui en soit ne veut rien dire. Scène 8 de l'acte
III, il est contraint d'avouer la supériorité de son valet "Le maraud m'embarrassait ! En
disputant, il prend son avantage, il vous serre, vous enveloppe... Ah ! friponne et fripon !
vous vous entendez pour me jouer ?"

Acte IV, scène 8, obligé de se résoudre à célébrer le mariage de Figaro et de Suzanne,


il confesse : "... Il faut bien souffrir ce qu'on ne peut empêcher." et, dan la dernière scène de
la pièce, il reconnaît sa défaite : "J'ai voulu ruser avec eux, ils m'ont traité comme un enfant."
Figaro ne se laisse pas impressionner par son maître et, lorsque le Comte croit tenir
l'argument contre lequel aucune réponse n'est possible, le valet, avec brio, retourne
l'argument contre lui :
Le Comte - Combien la comtesse t'a-t-elle donné pour cette belle association ?

Figaro - Combien me donnâtes-vous pour la tirer des mains du docteur ?( III,5)

Figaro prend de plus en plus de liberté et il ose reprocher à son maître son libertinage abusif
: "Votre excellence se permet de nous souffler toutes les jeunes " (III,5)

Audacieux quand il se rend compte qu'il est en train de perdre la partie, il ne craint pas de
se moquer du Comte en lui tenant des propos absurdes, déclinés sur le mode de la raison .
Tandis qu'il est pris en flagrant délit de mensonge, parce-qu'il ignore que la Comtesse vient
de tout révéler quant à la supercherie de la scène du "cabinet", il continue à soutenir sa
fausse vérité : "La rage de sauter peut gagner : voyez les moutons de Panurge ; et quand
vous êtes en colère... on aurait sauté deux douzaines" ( IV,5)
Bien décidé à aller jusqu'au bout, après avoir compris la supercherie des déguisements, il
dit à Suzanne, avec un plaisir non dissimulé : "Achevons-le,veux-tu ?" (V,9) et il obtient une
dernière revanche en égratignant, pour la dernière fois le Comte :
"Je sais qu'un grand seigneur s'en est occupé quelque temps : mais, soit qu'il l'ait
négligée, ou que je lui plaise mieux qu'un aimable, elle me donne aujourd'hui la préférence."
( V,17)
MAIS la fin de la pièce les place dans des situations identiques : celle du dupeur dupé : le
Comte et Figaro sont abusés par leurs épouses et tous deux sont contraints de leur

Copie à l'usage exclusif de ayla.rustamzadeh@gmail.com, IP 188.253.230.149.


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présenter des excuses. C'est à ce prix que la relation entre le maître et le valet va cesser
d'être conflictuelle ; Complices et alliés, ainsi les retrouverons-nous dans "La mère coupable"

SUZANNE / LE COMTE
Le conflit qui oppose Suzanne repose moins sur la différence de statut social que sur la
différence de sexe. en effet, c'est la femme qui est convoitée bien plus que la camériste et
l'abus de pouvoir des hommes sur le sexe féminin dénoncé par Marceline illustre cette
relation.Victime de son pouvoir de séduction, de sa jeunesse et de sa gaieté, Suzanne doit
se défendre des assiduités du Comte. Elle pourrait même se vanter d'avoir autant
d'importance pour lui si elle entendait ce que dit le comte à son sujet : "Qui donc m'enchaîne
à cette fantaisie ? j'ai voulu vingt fois y renoncer... Etrange effet de l'irrésolution ! Si je la
voulais sans débat, je la désirerais mille fois moins." (III,4)
La résistance de Suzanne et la ténacité de Figaro à vouloir protéger "son bien" attisent le
désir du Comte. Suzanne devra donc lutter jusqu'à la fin de la pièce. Elle oppose au Comte
sa ruse et son sens de la répartie. Elle prétexte un malaise de la Comtesse et laisse croire
au Comte qu'elle est prête à céder à son désir : "Et n'est-ce pas mon devoir d'écouter son
excellence ?" ( ,9),excellente comédienne(timidement ; baissant les yeux ; faisant la
révérence) et digne fiancée de Figaro, elle use de la parole pour ensorceler le séducteur
sans faire éveiller le moindre sur son hypocrisie.
Le Comte - Pourquoi donc, cruelle fille ! ne pas me l'avoir dit plus tôt ?

Suzanne - Est-il jamais trop tard pour dire la vérité ?

le Comte - Tu te rendrais sur la brune au jardin ?

Suzanne - Est-ce-que je ne m'y promène pas tous les soirs"

Son sens de la répartie vaut bien celui de Figaro quant au chantage du Comte elle
répond : "Mais aussi point de mariage, point de droit du Seigneur, Monseigneur."(III,9). Et le
Comte de saluer son talent : "Elle a réponse à tout" ; "Où prend-elle ce qu'elle dit ,
D'honneur j'en raffolerai."
L'aveuglement du Comte est un adjuvant inespéré pour Suzanne qui, sans se
compromettre, peut se jouer du Comte tout en servant les intérêts de sa maîtresse et ceux
de Figaro. Abuseur abusé par celle qu'il appelait "friponne" et qu'il appelle maintenant du
doux nom de "mon cœur", le Comte Almaviva accumule les défaites et se révèle être un
piètre stratège : soumis à son désir il manque de lucidité et de clairvoyance. Il a pu rire de
Bratholo dans "Le Barbier de Séville", il a, dans cette comédie le même rôle.

LES RELATIONS COMPLICES


LA COMTESSE / SUZANNE

Dans la première scène de la pièce, Suzanne présente ses relations avec sa


maîtresse sous le signe de la tendresse. En effet, elle rappelle à Figaro que la Comtesse
veut être la première à la voir le jour de son mariage , sûrement pour lui prodiguer conseils
et encouragements et en ce sens elle a presque le rôle de substitut de mère.
L'acte II les réunit seules pour la première fois et la discussion qui les occupe témoigne de
leur entière complicité et de leur affection réciproque. La Comtesse appelle Suzanne du
diminutif affectif "Suzon", la camériste"n'[a] rien caché à Madame" quant aux propos que le
comte lui a tenus, La Comtesse confie son désarroi "Il ne m'aime plus du tout" et affirme sa
détermination à aider Suzanne à épouser Figaro ...je veux que tu épouses Figaro". Dés lors
c'est une véritable alliance qui se conclue entre les deux femmes contre le mari et le maître.
Elles vont jouer un rôle important et se révéler être, au fur et à mesure que la pièce
progresse, bien meilleurs stratèges que Figaro.
Tout d'abord, la Comtesse recommande d'agir sous les directives de Figaro : "Lui seul peut
nous y aider" (II,1). Mais lorsque Figaro renonce à la stratégie du rendez-vous (IV,1), elle

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ordonne à Suzanne d'agir contre la volonté de son futur mari, pour l'aider à sauver son
couple : "En me cédant ta place au jardin, tu n'y vas pas, mon cœur ; tu tiens parole à ton
mari ; tu m'aides à ramener le mien."(IV,3). Dés lors, s'établit entre les deux femmes une
complicité telle que, par le truchement du déguisement, la seule solution qui s'offre à elles
est l'échange des identités : la frontière entre la maîtresse et la servante est abolie : le
marquage social n'existe plus.
Leurs échanges sont par moment semblables à ceux de deux "amies" : elles "chiffonnent"
ensemble, elles jouent à déguiser Chérubin en fille, la Comtesse prête sa guitare à Suzanne
pour qu'elle accompagne Chérubin dans sa romance ; lors de la cérémonie du mariage de
Figaro et de Suzanne, elles échangent "des signes d'intelligence(IV,9)
Quand elles n'agissent pas ensemble, c'est tantôt la Comtesse qui agit en faveur de
Suzanne, tantôt l'inverse.
Ainsi, à la scène 13 de l'acte II, Suzanne tourne en dérision une situation qui aurait pu être
dramatique de conséquences pour sa maîtresse lorsqu'elle prend la place de Chérubin dans
le cabinet qui jouxte la chambre de la Comtesse après avoir pris soin de faire sauter le petit
page par la fenêtre. Scène 24 de l'acte II, pour calmer la Comtesse qui craint que le Comte
ne découvre Chérubin au château alors qu'il lui a donné l'ordre de partir, Suzanne
va"recommander de le cacher si bien..." que personne ne pourra le découvrir.
Scène 20 de l'acte II, la Comtesse presse son mari de célébrer le mariage de sa camériste :
"Allons Monsieur le Comte, ils brûlent de s'unir ; leur impatience est naturelle ; Entrons pour
la cérémonie". Ignorante de la scène de reconnaissance entre Marceline et Figaro, elle
donne à Suzanne une dot pour qu'elle puisse s'acquitter des sommes dues par Figaro à
Marceline et ainsi rendre impossible une union qu'elle réprouve.(III,17) ce qui provoque la
colère du Comte : "au diable la maîtresse, il semble que tout conspire"(III,17)
La Comtesse et Suzanne symbolisent l'entente parfaite possible entre le maître et le valet
et forment un contrepoint sans équivoque au couple le Comte / Figaro. Beaumarchais
s'écarte ainsi du schéma traditionnel de la relation conflictuelle dictée par la dépendance.
Par ailleurs, si leur ingéniosité a triomphé de tous les pièges qui leur étaient tendus, c'est
qu'elles étaient déterminées à sauver ce qui leur importe le plus : leur amour.

SUZANNE / FIGARO / LA COMTESSE


Cette triple alliance est rendue nécessaire par le jeu de deux intrigues qui se croisent et se
superposent( l'imbroglio :" Deux, trois, quatre à la fois ; bien embrouillées, qui se croisent. II,
2) mais qui ont un but commun :déjouer les plans du Comte. Figaro et Suzanne veulent
protéger leur union, la Comtesse veut sauver son couple ; Or le comte en convoitant
Suzanne est infidèle à sa femme ; Donc les deux valets et l'épouse vont unir leur force dans
une lutte commune : c'est aussi logique qu'un syllogisme.
Outre la stratégie qu'ils élaborent ensemble, la scène 21 de l'acte II est tout à fait révélatrice
de leur complicité :tandis qu'Antonio vient se plaindre qu' un homme a abîmé les fleurs de
son jardin en sautant de la fenêtre de la chambre de la Comtesse, un dialogue en aparté se
met en place : c'est d'abord Suzanne qui a l'initiative : Suzanne, bas à Figaro. - Alerte,
Figaro ! Alerte.

...] - Détourne, détourne.

et Figaro va effrontément affirmer que c'est lui qui a sauté, sauvant ainsi Chérubin et la
Comtesse.Puis, à propos du papier ramassé dans le jardin qui compromet Chérubin, c'est la
comtesse qui intervient d'abord :

La Comtesse, bas à Suzanne. - Le cachet

Suzanne, bas à Figaro.- Le cachet manque

Figaro - C'est... qu'en effet il y manque [...] le sceau de vos armes.

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Le Comte, rouvre le papier et le chiffonne de colère.

Le Comte est obligé de se résigner et de subir une situation qu'il n'arrive pas à maîtriser :
seul contre trois, ayant pour seul témoin un jardinier ivrogne, la lutte est volontairement
inégale.

LE MARIAGE DE FIGARO, UNE COMEDIE AMBIGUE


UNE COMEDIE GAIE
"La Folle Journée" est une comédie dominée par "l'ancienne et franche gaieté" : celle
des caractères de Suzanne et de Figaro, celle des situations et celle du verbe.
Beaumarchais use de tous les ressorts du comique, en fidèle héritier de la farce, de la
commedia dell'arte et de la comédie moliéresque.
Le comique de gestes : nous proposons une série de références à titre d'exemple.
- L'échange des révérences entre Suzanne et Marceline (I,4), traduit sur le mode
plaisant l'antagonisme entre les deux femmes.
- Figaro qui se prosterne "à genoux, ventre à terre" (V,18).
- Le Comte "une pince à la main", se transforme en serrurier du château.
- "Il pleut des soufflets" : c'est Suzanne qui donne le premier à Figaro ( III, 8) et qui
s'amuse (V,8) à en distribuer en cascade, pour se venger du peu de confiance de son mari :
"Et voilà pour tes soupçons ; voilà pour tes vengeances et pour tes trahisons...."
- C'est Figaro qui reçoit le soufflet que le Comte destinait à Chérubin (V,6)
- Le Comte reçoit le baiser qui était destiné à la Comtesse ( déguisée en Suzanne) par
Chérubin.
Le comique de mots : il est de loin celui qui domine la pièce.
- On joue avec les mots : Antonio considère que sa réputation de jardinier "est
effleurée"(III,21) parce que ses fleurs ont été piétinées. Figaro, apprenant que "le badinage
est consommé", voudrait qu'il en fût de même de son mariage
- Balbutier devient "balbuciférer"(III,15) pour le jardinier qui ne comprend pas ce qui se
passe.
- Pour Figaro, Bazile n'est pas un musicien à faire "briller" un chanteur, mais à le faire
"brailler". La contrepétrie en dit long sur le peu d'estime de Figaro pour le maître de musique
!
- Tous deux se livrent à un échange d'injures, sur le rythme endiablé de la stichomythie
:(IV,10)

Figaro, vite - Un musicien de guinguette !


Bazile, vite - Un postillon de gazette !
Figaro, vite - Cuistre d'oratorio !
Bazile, vite - Jockey diplomatique !
- Bartholo et Figaro, lors du procès (III,15) ,se lancent dans une joute oratoire pédante
quant à l'emploi de "la conjonction copulative ET qui lie les membres corrélatifs de la phrase"
ou de "la conjonction alternative OU".
- Bazile et Figaro pastichent les proverbes: sur le mode du calembour ( bien nanti pour
bien né) : Figaro - Gaudeant bene nati / Bazile - non, gaudeant bene nanti ; sur le mode de
la "rénovation" : (I, 11) Figaro - "Tant va la cruche à l'eau qu'à la fin ".../ Bazile - "Elle
s'emplit" et (II, 13) : Bazile - "Je n'irai pas lutter contre le pot de fer moi qui ne suis"... / Figaro
- "Qu'une cruche"
- Tout un jeu d'apartés se met en place scène 7, acte V, tandis que le Comte et la
Comtesse ( déguisée en Suzanne) discutent de la nécessité pour une femme de tout faire
pour garder sa mari :
Le Comte - ..." on l'oublie trop"
La Comtesse - "Ce ne sera pas moi"
Le Comte - "Ni moi"
Figaro, à part - "Ni moi"
Suzanne, à part - "Ni moi"

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Le Comte - ... "Il y a de l'écho ici..."


- Quelques bons mots à retenir :
Suzanne : " Prouver que j'ai raison, c'est accorder que je puis avoir tort." ; " Je lui dis tout
hors ce ce qu'il faut taire" (III,9) ; "La jalousie de Madame est aussi connue que ses droits
sur Figaro sont légers" (I,5 en parlant de Marceline)
Figaro : "Ce n'est pas moi qui mens, c'est ma physionomie" (II,20) ; "Un plus adroit serait
resté en l'air" (à propos de sa chute) ; "... à pédant, pédant et demi" ; toute la tirade sur la
définition de la politique ( III,5) joue sur les antithèses" Feindre d'ignorer ce qu'on sait, de
savoir tout ce qu'on ignore [...] tâcher d'ennoblir la pauvreté des moyens par l'importance de
l'objet"; "Il ne me restait plus qu'à voler ; je me fais banquier de pharaons" (V,3)
Antonio "[...] je ne suis pas assez bête, moi, pour renvoyer un si bon maître" (II,21)

Le comique de situation
- La scène 8 de l'acte I, offre un exemple très intéressant de comique de situation : la
scène se passe dans la chambre de Suzanne, elle s'entretient avec Chérubin. Surpris par
l'arrivée du Comte, Chérubin se cache derrière le fauteuil sur le quel Suzanne jette une robe.
L'arrivée impromptue de Bazile contraint le Comte à trouver une cachette : une longue
didascalie nous précise le jeu scénique : "Suzanne lui barre le chemin ; il la pousse
doucement, elle recule, et se met ainsi entre lui et le petit page ; mais pendant que le Comte
s'abaisse et prend sa place, Chérubin tourne et se jette sur le fauteuil à genoux, et s'y
blottit. Suzanne prend la robe qu'elle apportait, en couvre le page, et se met devant le
fauteuil?" Ainsi le Comte ignore-t-il la présence du petit page qui a entendu tout ce qu'il a dit
à Suzanne, et tous deux vont être témoins de la conversation entre Bazile et Suzanne.
- L'acte V a recours aussi aux cachettes, mais la scène est rendue plus complexe par le jeu
des quiproquos générés par les déguisements : le Comte croit entraîner Suzanne et Figaro
croit parler à la Comtesse. Ce spectacle est amusant pour le spectateur qui est dans la
confidence et instaure une réelle complicité avec les deux femmes qui entendent des propos
qu'elles n'auraient jamais dû entendre.
- D'autres scènes de quiproquo sont moins comiques : c'est le cas lorsque Suzanne se
méprend quant au baiser que Figaro donne à Marceline ou quand Figaro pense que le billet
remis au Comte est de Suzanne.

- Comique de situation aussi, lorsque Figaro dit à Brid'oison,à demi-mots qu'il a eu sa


femme pour maîtresse (dans l'intertexte qui sépare "Le Barbier de Séville " du "Mariage de
Figaro") et que l'enfant qu'il chérit est le fruit de l'adultère". Mais le juge ne comprend rien.
Le comique de caractères naît du contraste entre le personnage et sa situation.
- C'est le cas de Brid'oison, juge ridicule qui illustre la discordance entre le sérieux de son
métier et son incompétence.
- C'est Bazile qui se croit un grand musicien alors qu'il n'est qu'un "musicien de guinguette".
- C'est le Comte, grand Seigneur et maître du château, qui crie, tape du pied et est prêt, une
pince à la main, à défoncer la porte du "cabinet".
- C'est Antonio qui dit au Comte qu' "on jette toutes sortes de choses par ces fenêtres ; et
tout à l'heure on vient d'en jeter un homme."(II,21)
- C'est Figaro qui juste après avoir affirmé à sa mère "Si Suzanne doit [le] tromper un jour, [il]
le lui pardonne par avance" (IV,12)" se laisse gagner par une colère jalouse.

La mise en abyme
- Nous assistons par endroit à de véritables scènes de comédie dans la comédie.
Ainsi,scène 19 de l'acte II, la Comtesse feint d'avoir joué une farce à son mari qui, voyant
Suzanne sortir du "cabinet" déclare : "... vous jouez fort bien la comédie". Dés lors elle va
jouer la comédie de la femme choquée et déçue de la méfiance jalouse de son mari,en
prenant soin "d'assur(er] son ton par degré"
- Scène 11, acte I, rappelle que pour la cérémonie de son mariage,"Il faut bravement nous
accorder ; ne faisons point comme ces mauvais acteurs qui ne jouent jamais si mal que le
jour où la critique est la plus éveillée ... Sachons bien nos rôles aujourd'hui."

Copie à l'usage exclusif de ayla.rustamzadeh@gmail.com, IP 188.253.230.149.


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- Les dernières scènes de l'acte V, par le truchement des déguisements est une farce pour
le Comte et pour Figaro ;puis Suzanne, ayant manqué à son rôle en oubliant de masquer sa
voix va être identifiée par Figaro et tous deux, vont regarder le spectacle du comte se
faisant abuser par sa femme.
La gaieté : une philosophie
Il est indubitable que le spectateur rit beaucoup. La gaieté est une disposition naturelle
chez Suzanne et chez Figaro et le ton du badinage domine le plus souvent leurs
conversations. Mais la gaieté est plus qu'une tradition littéraire, elle devient un véritable art
de vivre voire une philosophie pour Figaro. Déjà dans "Le Barbier de Séville", il répondait au
Comte qui l'interrogeait sur l'origine de sa gaieté : " L'habitude du malheur. Je me presse de
rire de tout, de peur d'être obligé d'en pleurer."
- De fait, la joie de vivre génère chez le personnage un optimisme qui l'aide à triompher de
la nécessité comme il le confie dans son monologue : "[...] laborieux par nécessité mais
paresseux... avec délices."(V,3). Opportuniste, il s'adapte aux différentes situations "Valet ici,
maître là, selon qu'il plaît à la fortune". Personnage pragmatique, il est conscient qu'il faut
posséder "un savoir faire plus qu'un grand savoir" et il devient le maître incontesté de la
ruse.
- Bouffon qui fait rire par ses bons mots et par ses pitreries, il amuse le spectateur qui
partage le sentiment de Suzanne : "J'aime ta gaieté parce qu'elle est folle"(IV,1), mais il
devient grave quand il s'interroge sur sa gaieté : " Je dis ma gaieté, sans savoir si elle est à
moi"(V,3).
- Ainsi la gaieté devient-elle un thème de réflexion de la pièce et, rire de tout n'est pas
possible, même lorsqu'on s'appelle Figaro. Force est de constater que bien souvent, au
cours de la pièce, la gaieté, le rire, sont des moyens pour détourner une situation et éviter
qu'elle ne devienne tragique. Beaumarchais explique dans sa préface qu'il suffisait de mettre
"un poignard à la main de l'époux outragé" pour que la comédie soit "une tragédie bien
sanguinaire".

UNE COMEDIE AUX FRONTIERES DU DRAME


La pièce de Beaumarchais obéit au schéma classique de la comédie : un mariage
annoncé est contrarié et il faudra vaincre les obstacles pour qu'à la fin, le mariage puisse
avoir lieu. Néanmoins, il aurait fallu peu de choses pour que cette comédie ne tourne au
drame.
D'abord, l'obstacle majeur est une atteinte à la morale , à la bienséance, à l'ordre social, à
l'honneur et à la dignité, c'est-à-dire autant de motifs qui portent atteinte à l'intégrité de la
personne et que l'on retrouve dans des pièces tragiques ( Rodrigue ne peut épouser
Chimène au nom de l'honneur : on n'épouse pas l'assassin de son père et on n'est pas digne
de se marier si on n'a pas vengé l'honneur bafoué de son propre père.)
De plus, à plusieurs reprises au cours de la pièce, des péripéties viennent contrarier les
actions des personnages et la tension devient telle que toute issue heureuse semble
impossible. Ainsi, si l'acte II s'ouvre sur une séance de déguisement au cours de laquelle, la
Comtesse, Suzanne et Chérubin s'amusent beaucoup, l'arrivée inattendue du Comte
provoque une inquiétude, une angoisse telle que la comtesse est contrainte d'avouer que
Chérubin est caché dans son cabinet. Jalousie, colère, cris incontrôlés chez le Comte,
trouble grandissant, désespoir, supplications pour la comtesse, le temps n'est plus de rire
même des attitudes démesurées du Comte, tant la comtesse nous émeut :donner raison aux
inquiétudes de son mari et compromettre son honneur pour un jeu invitent à la pitié. Certes
la scène, grâce à l'ingénue Suzanne, se termine bien, mais nous avons frôlé le drame. Le
désir de Marceline a failli engendrer un inceste.Le long monologue de Figaro, par son
contenu, sa tonalité pathétique sied mal à une comédie légère.Beaucoup s'accordent à dire
que ce monologue est proche de la parabase de la tragédie antique et si Figaro nous a
beaucoup amusé jusqu'à la fin de l'acte IV, force est de constater que le lecteur/spectateur
est enclin à plaindre ce valet qui ne sait lus qui il est et où il va.
Enfin, si la comédie, par tradition littéraire étudie les caractères des personnages , la
comédie de Beaumarchais étudie davantage les conditions sociales et morales de ses

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personnages et en cela, il se rapproche du "genre dramatique sérieux". Il considère que "la


comédie légère" privilégie le rire en offrant " à la risée publique un pédant, un fat...un
imbécile... en un mot tous les ridicules de la société". Mais ce qui importe à l'auteur de
théâtre, c'est de présenter "des sujets touchants" qui invitent à la réflexion et qui aient pour
objet une morale. Au "rire bruyant ennemi de la réflexion", Beaumarchais préfère
"l'attendrissement" et on ne peut nier que certaines scènes nous attendrissent bien plus
qu'elles ne déclenchent des rires fracassants.

UN THEATRE DE SOCIETE
La satire de la justice : L'acte III consacre plus de quatre scènes au procès qui oppose
Figaro à Marceline (scènes 12,13,14,15, et une partie de la scène 16), ce qui peut paraître
disproportionné par rapport à son enjeu.Certes, ce procès nous est annoncé dés le début de
l'acte I et nous savons combien il importe à Marceline de le gagner pour pouvoir épouser
Figaro. Par ailleurs, il devient un moyen pour le comte de ruiner les espoirs de mariage entre
Figaro et Suzanne. Mais le déroulement même du procès et sa mise en scène cachent mal
les véritables intentions de Beaumarchais, à savoir régler ses propres comptes avec une
justice injuste.
Marceline (12) déplore le principe de recrutement des juges : être juge ne dépend en rien de
la compétence mais de la possibilité matérielle d'acheter une charge : "C'est un grand abus
que de les vendre" ce qui d'ailleurs consterne le juge Brid'oison qui pense qu'"on ferait mieux

om
de [...]les donner pour rien"( !!!)
Le choix du juge est révélateur de l'intention satirique : Ridicule par son nom : Brid'oison
l.c
signifie " oison bridé", c'est à dire une jeune volaille à qui on a passé une baguette dans le
ai
bec pour l'empêcher de franchir le poulailler. Son prénom : GUSMAN est homophonique de
gm

GOEZMAN, juge alsacien contre lequel Beaumarchais a soutenu un procès pour corruption.
Son défaut d'élocution, le bégaiement, sied mal à qui doit faire preuve d'éloquence.
h@

Ridiculement sot, il transforme l'absence de patronyme en patronyme et Figaro "fils de


de

personne"devient: " anonyme Figaro". Il affiche son incompétence en rétorquant au Comte,


qui venait de lui faire remarquer que "En robe ici, seigneur Brid'oison..."(III,14) était un
za

habit inutile pour une affaire domestique, "Tel rit d'un juge en habit court qui-i tremble au seul
am

aspect d'un procureur en robe"(III,14).( Monsieur de La Fontaine auriez-vous écrit en vain "
st

que l'habit ne fait pas le moine" !!! Mais on peut pas exiger des juges qu'ils soient cultivés !!!)
.ru

Le personnage de Double-Main ,qui comme l'illustre son nom cumule deux charges, celle
de greffier et celle de secrétaire du juge, dénonce ce que l'on appellerait aujourd'hui "le
la

cumul des mandats" et la vénalité de la justice.


ay

Beaumarchais nous offre une véritable parodie de procès qui atteint son paroxysme lorsque
Bartholo, avocat de Marceline et Figaro, avocat de lui-même, s'opposent dans une joute
verbale dont l'enjeu est l'emploi de "la conjonction copulative "et" ou l'emploi de "la
conjonction alternative "ou".
Enfin, Le jugement rendu par le Comte est tel que la justice est tournée en dérision et
devient un moyen officiel de servir des intérêts personnels sans lien aucun avec l'objet du
procès. En effet, en condamnant Figaro "à payer deux mille piastre fortes à la demanderesse
; ou bien à l'épouser dans le jour", Le comte condamne Figaro à épouser Marceline : il sait
que son valet est dans l'impossibilité de s'acquitter d'une telle somme. D'autre part, en
demandant l'exécution immédiate de la sentence, il s'autorise toute liberté avec Suzanne,
devenue libre de tout lien malgré elle.

La critique des privilèges


Le véritable sujet de la pièce est, "la disconvenance sociale"( petite histoire d'une trilogie),
c'est-à-dire, l'abus de pouvoir que le Comte exerce sur ses "vassaux". La relation
hiérarchique féodale qui justifie une relation dominant/dominé est remise en cause et
dénoncée , non seulement par ceux qui la subissent mais aussi par la Comtesse : il s'agit
dés lors de démontrer que cette relation n'a plus lieu d'être à une époque en pleine mutation
sociale ( rappelons que l'action de la pièce se situe en 1768). Figaro est le personnage qui,

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de loin ose dire haut et fort ce que les autres déplorent : il est l'interprète des valets
opprimés.
Dans son monologue ( V,3) il dénonce le privilège de la naissance qui préside aux autres
privilèges :"Parce que vous êtes un grand seigneur, vous vous croyez un grand génie ! ...
noblesse, fortune, un rang, des places ; tout cela rend si fier ! Qu'avez-vous fait pour tant de
biens ! vous vous êtes donné la peine de naître, et rien de plus."
L'absence de relation de cause à effet entre l'appartenance à une classe sociale et
l'intelligence, l'orgueil de classe, le pouvoir de l'argent, mettent en évidence, non seulement
la "bêtise" de certains nobles mais aussi l'injustice de leur situation d'autant qu'elle n'est due
qu'au hasard de la naissance .( c'est ce que rappelle le VIIème couplet du vaudeville qui clôt
la pièce :" Par le sort de la naissance,/L'un est roi, l'autre est berger...") Etre noble c'est
avoir tous les pouvoirs sans pour autant les mériter et être incapable d'en user avec
discernement. Figaro condamne cette société qui repose sur des acquis sans fondements et
il oppose sa valeur à la médiocrité du Comte : "Du reste homme assez ordinaire ! tandis que
moi, morbleu !"L'évocation des divers métiers qu'il a exercés et les difficultés qu'il a
rencontrées pour mener à bien ses entreprises sont autant d'exemples qui attestent l'énergie
qu'il a due déployer et l'intelligence et de la ruse dont il a dû faire preuve pour ne pas se
laisser anéantir :"Perdu dans la foule obscure, il m'a fallu déployer plus de science et de
calculs pour subsister seulement, qu'on n'en a mis depuis cent ans à gouverner toutes les
Espagnes."
Figaro remet en cause l'ordre social sur un ton amusé qui relève de l'humour grinçant.
Ainsi, lorsque le Comte déplore que "les domestiques sont plus longs à s'habiller que les
maîtres", Figaro s'empresse de lui répondre que"c'est parce qu'ils n'ont pas de valets pour
les y aider."
Pour réussir dans une carrière, il ne faut pas avoir de l'esprit mais être "médiocre et
rampant." (V,3) ce qui confirme la caricature qu'il fait du courtisan : "Recevoir, prendre, et
demander, voilà le secret en trois mots" (II,2)
La définition qu'il propose de la politique insiste sur son hypocrisie,sa bêtise,son inutilité, ses
incompétences : "Feindre d'ignorer ce qu'on sait, de savoir tout ce qu'on ignore ; d'entendre
ce qu'on ne comprend pas, de ne point ouïr ce que l'on comprend[...] s'enfermer pour tailler
des plumes et paraître profond, quand on est, comme on dit, vide et creux [...] répandre des
espions et pensionner des traîtres..."(III,5)

Si les valets manquent à la morale et ont recours à la ruse c'est parce qu'ils n'ont pas
le choix et que pour survivre, ils sont obligés de se battre . Au Comte qui lui reproche de ne
"jamais aller droit", Figaro répond "Comment voulez-vous ? La foule est là : chacun veut
courir, on se presse, on pousse, on coudoie, on renverse, arrive qui peut ; le reste est
écrasé..."(III,5)
Enfin, Figaro considère que la supériorité sociale ne permet pas le non respect d'autrui .
"[...]n'humilions pas l'homme qui nous sert bien, crainte d'en faire un mauvais valet."(III,5),
telle est la leçon de sagesse qu'il donne à son maître qui tente de lui démontrer que seul
l'appât du gain dicte sa conduite.

Libertinage et ordre social


Au dix-septième siècle, les libertins étaient, selon la définition de Luce Rudent, de "jeunes
nobles débauchés,érudits et critiques à l'égard des traditions et de l'autorité". Affranchis de
toute considération d'ordre moral, ils poursuivent le plaisir sans tenir compte des obligations
et des convenances. Opportunisme, plaisirs épicuriens, absence de morale , frivolité, tels
sont les termes qui caractérisent les libertins . Le Comte correspond en tous points à cette
définition : négligeant la fidélité conjugale, il convoite, pour se divertir, une femme qui ne lui
appartient pas mais qu'il peut obtenir en faisant fi des convenances sociales et morales et en
ne suivant que les lois de la nature, c'est-à-dire son plaisir. Ce libertinage menace l'ordre du
château d'Aguas-Frescas : les lois sont transgressées( celle du mariage, du droit du
seigneur) et deux couples sont déchirés.L'ordre social est renversé : le valet qui doit
obéissance à son maître va tout mettre en œuvre pour déjouer ses plans. En affrontant son

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maître, Figaro rompt le pacte social qui déterminait leurs relations. La Comtesse va déroger
à sa position sociale en scellant une alliance avec sa camériste ; elle va se moquer
publiquement de son mari en empruntant le costume de Suzanne à la fin de l'acte V. Le
Comte sera obligé de constater qu'il y a " de la liberté chez [ses]vassaux (III,4) et de fait, tous
vont bafouer ses ordres en cachant et en protégeant Chérubin, injustement renvoyé du
château par la jalousie du Comte.
Aussi peut-on lire dans cette comédie un véritable désordre où chacun n'est plus à la
place qui lui est normalement attribuée. Il faudra attendre la fin de la pièce pour que l'ordre
soit rétabli. Chacun retrouve sa vraie place et "tout finit-it par des chansons"(V,19)
Outre que le retour à l'ordre établi condamne le libertinage, Beaumarchais, en mettant le
Comte, à plusieurs reprises, en situation d'échec, illustre la vanité et l'impudence de ses
intentions. Ainsi, à la scène 16, de l'acte III, la reconnaissance mère/fils est "un sot
événement qui [le]dérange" ; scène 17 de l'acte III, il lui "semble que tout conspire"; scène 4
de l'acte III, il se rend compte que "le fil [lui]échappe" et scène5 de l'acte V, il pense qu' "il y a
un mauvais génie qui tourne tout ici contre moi."
Enfin, condamné à demander publiquement pardon à sa femme ( II, 19 et V,19), le Comte
est obligé de reconnaître qu'être maître et mari ne donne pas tous les droits.

La femme dans la société du XVIIIème siècle


La pièce de Beaumarchais, insiste sur les caractéristiques de la situation de la femme: : l'
absence de droits juridiques pour la femme mariée qui la place sous la totale dépendance
matérielle de son mari et et la primauté du désir de l'homme auquel la jeune fille doit se
soumettre. Marceline part en guerre contre ces états de fait et devient la porte-parole des
femmes.
Dés la scène 4 de l'acte I, elle dresse un portrait de la femme qui en dit long sur sa précarité
: "Sois belle si tu peux, sage si tu veux ; mais sois considérée, il le faut" Le problème du
respect de la femme domine la pièce : Suzanne veut que son désir soit respecté, Marceline
attend depuis de longues années que Bartholo répare l'injustice qui lui a été faite (
maîtresse mais pas épouse), la Comtesse se bat pour retrouver son honneur et ne plus être
une femme trompée.
Elle se lance dans un long réquisitoire contre les hommes(III,16), les accusant d'user des
femmes pour leur seul plaisir en abusant de leur pauvreté : "... les séducteurs nous
assiègent pendant que la pauvreté nous poignarde,que peut opposer une enfant à tant
d'ennemis rassemblés ?"
Elle dénonce ensuite le mépris dont elles sont payées pour avoir assouvi leurs désirs :
"Hommes plus qu'ingrats, qui flétrissez par le mépris les jouets de vos passions, vos
victimes" Elle demande justice et qu'ils soient reconnus coupables : "C'est vous qu'il faut
punir des erreurs de notre jeunesse."
Elle s'insurge contre le pouvoir des hommes sur leur femme et contre l'inégalité dont elles
sont victimes : "...les femmes n'obtiennent de vous qu'une considération dérisoire ; leurrées
de respects apparents, dans une servitude réelle; traitées en mineur pour leurs biens, punies
en majeur pour leurs fautes..."
Si Marceline exprime une critique personnelle, très vite le "Je" se transforme en "nous" et
son discours devient celui de toutes les femmes, qu'importe leur milieu social, puisque "
Dans les rangs même plus élevés" les femmes souffrent des mêmes contraintes.

Enfin, en accusant les hommes, c'est le procès de la société que nous offre Marceline . Si
les femmes sont obligées de se prostituer, c'est parce que le travail qui leur était réservé ( la
broderie) est donné aux hommes : "Elles avaient un droit naturel à toute la parure des
femmes : on y laisse former mille ouvriers de l'autre sexe."
Il faut donc que les femmes se soutiennent entre elles contre les hommes : la Comtesse,
Suzanne, puis Marceline uniront leurs volontés et leurs ruses pour lutter contre l'emprise des
hommes (même de Figaro puisqu'il sera exclu de la dernière ruse et Suzanne agira contre
sa volonté.) : "... nous sommes toutes portées à soutenir notre pauvre sexe opprimé, contre
ce fier, ce terrible.. (en riant) et pourtant un peu nigaud de sexe masculin."(IV,16)

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CONCLUSION
Même si tout ce que Figaro avait prévu "n'est pourtant pas arrivé" ( IV,1), même si Figaro
est obligé de constater que "le hasard a fait mieux que nous tous... : ainsi va le monde ; on
travaille, on projette, on arrange d'un côté ; la fortune accomplit de l'autre..." (IV,1), il n'en
demeure pas moins vrai que le hasard a été provoqué et qu'il n'a servi que les valets et la
sagesse et non les projets du Comte. "Le Mariage de Figaro", c'est le triomphe des humbles
sur les puissants, c'est la victoire du bon sens et de la morale, c'est la faillite de la
suprématie du pouvoir de l'argent, de la noblesse . La défaite du Comte Almaviva consacre
la supériorité du héros populaire et lui décerne ses lettres de noblesse : noblesse du cœur
contre noblesse sociale, pureté des intentions contre libertinage honteux, respect des lois
contre abus de pouvoir, sont autant de coups assenés à la disconvenance sociale.
Beaumarchais s'était donné pour but de corriger en amusant : "chaque rôle important a
quelque but moral", précise-t-il dans sa préface et si Figaro fait référence à Alceste en
fredonnant "J'aime mieux ma mie, ô gué !" , c'est peut-être pour que le lecteur /spectateur,
par le jeu de l'intertextualité, ne se méprenne pas sur la légèreté apparente de cette
comédie.

EXPLICATIONS DE TEXTE

Acte I, scène 10

C'est le premier affrontement direct ente le Comte et Figaro. Le Comte est énervé
depuis la scène précédente, Figaro, lui, peut enfin mettre en œuvre sa stratégie.

Le plan
1-Le piège provoqué par la foule
2-La défaîte du comte

Le piège provoqué par la foule

Emmenée par Figaro, la foule est, apparemment, toute entière supportant le Comte, i
s'agit évidemment de la stratégie de Figaro. On remarque d'ailleurs que certains
personnages paradoxaux ne parlent pas: Bazile supporte le Comte mais veut
épouser Marceline Chérubin et Fanchette n'ont pas une situation très claire.

1/ La foule, mise en scène de figaro, son auteur

Le valet n'arrive pas seul: "chanté en coeur", toute la foule est là pour le soutenir.
Figaro a en fait mis un choeur à son service, il lui demande: "soutiens bien mes
efforts", la foule est prise à témoin avec les "vassaux". Le mot "vassaux" renvoie à
l'univers féodal.
figaro utilise plusieurs termes qui montrent l'unité de cette foule. Il leur demande:
"joignez-vous", ce qui symbolyse l'union et les appelle ses "amis". Figaro utilise en
plus un impératif et la didascalie montre le chorus obtenu de la foule entière: "tous
ensemble". Les pronoms "ovus à moi" montrent le caractère révolutionnaire de cette
foule, Figaro a rassemblé la foule pour faire plier le maître.
On remarque également l'unité d'habillement, ils sont tos en blanc comme des anges
reprsantant le bien. C'est une réelle preuve d'habileté que nous montre Figaro dans
la mise en scène de cette manifestation.

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2/L'apparence: un hommage à un maître parfait

Figaro se présente comme un valet parfait, ce qui est un succès pour son maître. Il a
mené ici la foule pour glorifier son maître avec respect. Il fait donc l'éloge de son
maître, en l'appelant un "si bon maître", il énumère ensuite les vertus, la "sagesse",
la "pureté" et utilise même des intensifs comme "un éloge que vous méritez si bien".
On observe une soumission dans cette relation maître-valet, Figaro utilise ainsi les
titres ("Monsieur le Comte" et "Monseigneur") et le vouvoiement ("votre") pour
s'adresser à son maître.
Les cris de la foule et les "vassaux" semblent montrer la popularité du Comte. Ils ont
tous une dette, de la reconnaissance et de la gratitude envers leur maître à cause
"de l'abolition d'un droit fâcheux". Il s'agit en fait bien entendu de la dette personnel
de Figaro et le caractère obséquieux traduit l'ironie du valet.

3/Le piège

La situation semble sans issue pour le comte, Figaro est allé chercher une foule de

om
témoins pour authentifier le comte, il ne peut donc rien faire, l'adverbe
"publiquement" lui interdit d'ailleurs de mentir. Il force son adversaire à cesser de
l.c
courtiser Suzanne en lui parlant de sa "sagesse" et de son "honneur" qui ont su la
ai
"préserver". Le comte doit même reconnaître le mariage et Figaro souhaite qu'il
gm

"recoive de votre main" sa fiancée. Les personnages peuvennt donc se venger et la


h@

didascalie montre l'ironie de Figaro "malignement". Avec la flatterie abusive "un si


bon maître", il nous montre qu'il veut que le comte soit conscient de cette ironie, cette
de

phrase est d'ailleurs une antithèse, le comte n'est PAS un bon maître.
za

En parlant de la "beauté" de Suzanne et de la grandeur du sacrifice du Comte, il


am

l'attaque un peu plus. Suzanne en profite elle-aussi puisqu'elle lui dit "ne vantons que
vos mérites" , la Comtesse, elle tâche avec l'imparfait "aviez" de lui rappeler qu'elle
st

est oubliée: "l'amour charmant que vous aviez pour moi".


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la

Derrière l'apparence de fête, il s'agit donc d'un assault général contre le Comte.
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Celui-ci se trouve isolé, il ne peut que céder.

La réaction du comte et sa défaîte

1/Le Comte est embarrassé

Le Comte vient de se trahir auprès de Chérubin et d'apprendre que celui-ci tente de


séduire sa femme, il est donc piqué sur le vif. La didascalie montre son embarras:
"embarassé", "à part". Il interrompt en plus Figaro à deux reprises: "votre amour pour
Madame..." et "à jamais le souvenir...".

2/La reprise apparente

Le Comte va cependant tenter une reprise, il minimise donc l'importance du geste et


entre dans le jeu de Figaro: "l'acquit d'une dette envers l'honnêteté". Avec la
restriction "que" et l'"honnêteté" caractéristique des nobles, il nous oppose deux
figures du maître. ce maître rappelle en plus les principes féodaux, il est un "noble

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castillan" et se permet d'"exiger" au "servile". Il ne se donne en fait pas le droit


d'exiger mais simplement celui de courtiser Suzanne.

3/Le Comte est conscient de sa défaîte

Le Comte n'est cependant pas dupe du jeu de figaro, il le lui dit clairement "tu te
moques". Mais cette lucidité ne lui sert pas et il est défait. Il l'admet donc: "je suis
pris" et déclare: "c'est à ce titre que je me rends". En réponse à cet avoeu, la foule se
contente de hurler "Vivat".

4/Le Comte se ressaisit

Le Comte est un adversaire de taille pour figaro et, bien qu'il admette avoir ici été pris
au piège, il a pour premier objectif de repousser le mariage: "qu'on la remit à tantôt".
La condition d'affirmation est atténuée par l'adverbe "seulement" et le conditionnel "je
voudrais". Il a bien entendu son plan, "Faisons vite chercher Marceline".

Conclusion

Premier affrontement Maître-Valet, cette scène est donc pour Figaro l'occasion de se
servir de la foule pour faire plier le comte. Cette foule est la véritable originalité de
cette scène, Beaumarchais, via Figaro, fait venir une foule entière sur scène, cette
masse populaire va cependant être berné par Figaro, tout comme le comte sa
principale victime

ACTE III SCENE 5

INTRODUCTION :
- Auteur : Beaumarchais (1732-1799), surnom de Pierre Augustin Caron.
Nommé horloger du roi fait du théâtre : Tarare (1787). Il se met alors à écrire sa
trilogie composée du "Barbier de Séville" (censuré pendant un an), "Le Mariage de
Figaro ou la folle journée" (censuré pendant six ans et jouée en 1784) et enfin "La
mère coupable ou Tartuffe" (jouée en 1792). Ces oeuvres ont un succès incroyable
mais attirent beaucoup d'ennemis ; Beaumarchais est donc contraint de s'exiler en
Angleterre et devient l'homme le plus connu de France. C'est donc un homme
combatif tout au long de sa vie en se servant de l'opinion publique, il écrit pour agir
comme les philosophes des lumières.
- Oeuvre : Pièce de théâtre comique et dénonciatrice des valeurs morales et
des rapport hiérarchique entre maître et valets principalement. Elle fait parti des
oeuvres de la trilogie (Barbier de Séville, Mariage de figaro et La mère coupable), et
a été censuré pendant six ans.
- Extrait : La scène 5 de l'acte III est un dialogue entre le Comte et Figaro.
L'entretient dure toute la scène. On retrouve donc Figaro et le Comte.

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ANNONCE DU PLAN CHOISI

Analyse thématique selon trois axes :


- Un duel verbal
- Stratégie et piège
- Tirade de Figaro

EXPLICATION DU TEXTE

1) Le duel verbal

Le jeu des questions/réponses est très important dans cette scène : les deux
personnages mentent chacun à leur tour (comique de situation) mais c'est du Comte
dont on rit le plus car il est perçu comme mal-honnête. Figaro enchaine les
réponses sans réfléchir, il n'hésite pas, il utilise sa finesse d'esprit : rythme rapide et
haché « chacun veut courir…. Ecrasé »
A ce jeu, Figaro est vainqueur, de plus Suzanne (la convoitise) préfère Figaro au
Comte.
Face à ces attaques, le Comte utilise son autorité et rappelle qu'il est le maître : « il
ne faudrait qu’étudier un peu sous moi la politique » Mais Figaro conteste vivement
ce système (une révolution dans l'écriture théâtrale entraînant la censure). Le valet
est quand même perdant à ce jeu, il est réprimandé (retard de réaction, parole trop
lâche) et se réfugie dans un air de chanson.

2) La stratégie
- Dans l’ensemble de la scène 5, la stratégie est identique chez les deux
hommes: prêcher le faux pour le vrai. Le Comte fait semblant d'hésiter pour que
Figaro oriente la discussion sur le thème du voyage. alors Figaro laisse penser qu'il
veut aller à Londres pour faire croire au Comte qu'il n'est pas au courant de sa
convoitise sur Suzanne. Les nombreuses apartés (dialogue à part, adressé
seulement au public) se contredisent. En fin de compte, personne n'est trompé, les
pièges ont échoués des deux côté.
Tout le long de la scène, Figaro s’efforce de ne pas faire connaître au Comte si
Suzanne a parlé ou non. Et lorsqu’il a vu que le Comte s’imagine qu’il ne sait rien, il
change brusquement de tactique pour achever de l’embrouiller.
Figaro profite donc dans cette scène de l’avantage qu’il possède sur son maître,
forcé de l ‘écouter pour obtenir ses informations. C’est ainsi que le valet s’en prend à
la valeur des aristocrates : « Y a-t-il beaucoup de seigneurs qui puissent en dire
autant ? ». En cela, cette scène annonce le monologue et la critique qui y est
contenue. Il semblerait donc que le valet qu’est Figaro apparaisse comme un porte
parole de la bourgeoisie car le peuple ne peut prétendre se battre contre la
noblesse : en cela, il est le reflet du XVIIII° siècle, la montée de la bourgeoisie et son
désir de pouvoir.
La stratégie de Figaro connaît deux grand temps. Dans un premier temps, il
prétend ou veut faire croire au Comte qu’il est faible et qu’il pense que la fatalité
s’acharne sur lui. Il ne semble pas croire à un destin très heureux : « comment
voulez vous ? ». il montre cependant, dans cette même réplique, sa supériorité :
généralisation des autres / « j’y renonce »
Dans un deuxième temps, Figaro « attaque » le Comte : voir la didascalie « à mon
tour maintenant ». Et contrairement au Comte, son discours n’est pas négatif mais

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plutôt mélioratif « votre excellence » « heureux ». c’est lui qui a les cartes en main et
il le fait comprendre au Comte : « je ne serai pas…. » « mais en
revanche….heureux…en Andalousie »

3) Tirade de Figaro

Dans cette scène, il y a deux tirades importantes, c’est celle du "god-dam" qui
critique le système politique, et montre que Figaro est capable de parler anglais
simplement parce qu'il connaît deux mots. Il y a aussi une critique très forte de la
politique (succession d'action qui la définissent).
Dans cette dernière, qui apparaît dans notre extrait, il n’y a pas d'effet comique mais
effet critique, dénonciation du système par Beaumarchais par un intermédiaire :
Figaro. Le Comte n'est pas du tout d'accord de ce que vient de dire Figaro.
Le fait que cette scène comporte deux tirades pourrait être un problème pour le
rythme de la pièce. Mais elle n’est pas trop longue, ce qui évite l ‘ennui du
spectateur, d’autant plus que celle-ci ne possède pas de régularité dans le rythme.
On peut y remarquer le champ lexical de l’apparence avec le lexique suivant
« feindre », secret », « espion » »tacher d’ennoblir ». Ainsi Beaumarchais veut
montrer que l’univers politique est un univers de mensonge et de masque.

Conclusion

Nouveau duel verbal entre le maître et le valet duquel Le tiers état ressort gagnant.

Acte V, scène 3

Figaro exprime son désespoir a travers un long monologue, une des pièces
maîtresses de la littérature française.

Introduction

Figaro raconte sa vie. Le plan de la Comtesse lui est inconnu, il se croit trahi et
exprime ses sentiments; Le monologue fait la connexion avec les sentiments de
Figaro: il se sent trahi, dupe du Comte et de Suzanne. Figaro veut surprendre
Suzanne et le Comte sur le fait. La scène se passe dans l’obscurité, figaro guette
dans le silence. Les didascalies scandent le texte. Figaro se montre pleinement, le
valet et l'homme.
Le monologue présente divers qualités, c'est un monologue en mouvement
concrétise par l'attitude du valet. Il est bien structure. figaro porte un regard sur lui-
même. Il est jaloux et le sait, il se sent ridicule.

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Le Monologue: la Comédie

1/ construction du Monologue

La didascalie scande la scène: « seul,… sombre » « figaro s'assied sur un banc... »


L'emploi des points de suspension interrompt le discours pour agir: il traduit soit
l’énervement, soit une mise en attente, Figaro prépare son attaque.
Les nombreux points d'exclamation nous montrent la vivacité que Figaro donne a
son récit.
Il revit son aventure:
- On observe les présents de narration: "je m'en dégoûté et veux..."
- Les interrogatives oratoires: "Qu'avez-vous fait pour tant de biens ?", »le
tien…tromper »
On remarque également l'emploi de propositions très brèves qui donnent de la vie au
monologue: "on vient", Figaro est en effet dans l'attente du rendez-vous. Enfin, les
énumérations accumulatives rappellent Rabelais: "la pharmacie, la chirurgie, la
chimie". Figaro nous montre ainsi qu'il a tire beaucoup d’expérience, c'est un
personnage de roman.
Le mouvement est sur la scène et le langage appelle le mouvement. Malgré tout,
Figaro utilise le vocabulaire de l'homme du peuple, ce qui lui donne l’éloquence d'un
tribun.

2/Figaro

a- Ses origines:

Elles sont inconnues, il utilise la locution indéfini: "fils de je ne sais qui". Le


personnage a également des origines romanesques, ce qui donne a son histoire un
caractère épique, il a été "vole", il est "perdu dans la foule obscure".
Figaro évoque son éducation, il était chez des "bandits" et a "été élevé dans leurs
mœurs", il se montre vertueux puisqu'il déclare "je m'en dégoûte" et s'en sépare.

b- L'autodidacte

Figaro énumère tout ce qu'il a appris "la chimie, la pharmacie, la chirurgie". On


apprend ainsi le milieu bandit dans lequel il a appris tout cela et surtout l'injustice de
la société, que le comique dénonce avec la" lancette veterinaire »

c- Contre le Maître

La Métaphore de la foule nous montre la dureté du combat, figaro est "perdu" mais il
a acquis de l'assurance et déclare au Comte qui lui n'a pas d’expériences: "et vous
voulez jouter";

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Il sait aussi tirer ne leçon et déclare: "est-il rien de plus bizarre que la destinée",
montrant également son sentiment romantique de la destinée. On a ici le sentiment
de l'absurde.

3/Le Sage qui tire des Leçons de la Vie

Figaro fait une réflexion sur sa vie: "est-il".


A plusieurs reprises, il contraste et oppose ses tentatives et ses chutes: "pharmacie"
et "vétérinaire",

Figaro pense bel et bien qu'il est ridicule et se dit bien malheureux de "faire le sot
métier de mari quoiqu'il ne le soit pas encore". On retrouve la philosophie du barbier.
Il est cependant plus lucide et "désabusé", moins candide.
On a en fait sur scène le sursaut de l'homme blase qui a perdu ses illusions.
Fort de tout ca, il veut devenir le défenseur du peuple.

Le Tribun de la Plebe

1/ L’éloquence populaire
Figaro a recours a un langage familier: il jure "morbleu" et utilise des expressions
populaires: "noire en diable",
Il projette des images: il dresse ainsi le portrait du "vétérinaire" et utilise des
accumulations qui font sourire.

2/La Satire
Figaro attaque avec ironie, il fait des maximes cinglantes et concises. Il critique deux
sujets majeures: la liberté d'expression et l’inégalité sociale:

a- L’inégalité sociale

Figaro oppose la naissance et la fierté du Comte: "Seigneur...Génie", il oppose


également l'effort que chacun d'eux ont du fournir pour en arriver ou ils sont: "la
peine de naître...tandis que moi". Il énumère: "noblesse...fortune...rang...des places"
montrant ainsi que ceux qui ont a la fois la fortune et la noblesse ont tout de suite les
places; il y a bien sur un rapport cause- conséquence.
Figaro souligne l'arrogance des aristocrates: "tout cela rend si fier".
Lui, l'homme du peuple ne parvient qu'a subsister, c'est sa seule position. Il demande
au comte: "qu'avez-vous fait ?". L’antithèse est dénonciatrice: "peine", l'aristocrate
n'a en effet pas de mérite et Figaro le méprise: "homme assez ordinaire".
L'homme du peuple, lui, n'a pas le choix: "il m'a fallu". les hyperboles "toutes les
Espagnes" et "cent ans" ainsi que les énumérations nous montre tous les efforts que
Figaro a du fournir pour ne devenir que vétérinaire.

Conclusion

Beaumarchais dénonce donc une société inégalitaire dans laquelle il faut se battre.
Les hommes de valeur doivent trouver une place dans cette société. figaro peut être
compare a un tribun de la révolution.
La scène présente les intérêts suivants:

Reproduction et diffusion interdite.


Reproduction et diffusion interdite.

- dans la dramaturgie: on apprend les sentiments de Figaro, le valet devient ou reste


un être humain
- la satire de l’inégalité sociale.
On peut également souligner la densité humaine de la pièce, on a la bien entendu
une dette a l’égard de Voltaire.

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