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Liaison dangereuse 1st Edition Marie

Anjoy
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Liaison dangereuse

Marie Anjoy
© Marie Anjoy, 2023.
Tous droits réservés
Edité par Marie Anjoy
13110 Port de Bouc

Crédit photo : Freepik.com.


Image de graphicvil2
Vecteurs mise en page : Pngtree.com
Graphiste : Anne Cantore
ISBN : 9798850460747
Dépôt légal : Septembre 2023

Le code de la propriété intellectuelle interdit les copies, y compris le


droit de reproduction de ce livre ou de quelque citation que ce soit
sous n’importe quelle forme.
« Toute représentation ou reproduction intégrale, ou partielle,
réalisées sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droits
ou ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée
par les articles L 335-2 (alinéa 1er de l’article L.122-4). Cette
représentation ou reproduction par quelque procédé que ce soit,
constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles 425
et suivant du Code pénal ».
Table des matières
Prologue
1 : Retrouvailles
2 : Lili acte deux
3 : Quel connard
4 : Difficile de résister
5 : Retour à la case départ
6 : Rechute
7 : Tu ne tenteras pas le diable
8 : Tourner la page pour avancer
9 : Le début des emmerdes
10 : Malaise
11 : Dans l’intimité de Colin
12 : Impossible de la chasser de mon esprit
13 : Il ne peut pas me faire ça !
14 : Lui, moi, encore
15 : Regrets
16 : Prise de décision
17 : Confidences
18 : Jamais deux sans trois
19 : Une décision à prendre
20 : Le drame
21 : Une virée pour oublier
22 : La jalousie de Théo
23 : L’idée folle de Virginie
24 : Quand Héloïse s’en mêle
25 : L’heure des confidences
26 : Une note d’espoir
27 : L’interlude Corse
28 : À deux doigts du drame
29 : Retour
30 : A l’ombre des souvenirs
31 : Le regard des autres
32 : Des informations surprenantes
33 : Dans le viseur
34 : L’accident
35 : Tout n’est pas ce qu’il paraît
36 : Agression
37 : Une page se tourne
Epilogue
Remerciements
« La
culpabilité
est un sentiment irrationnel, le sentiment d'être responsable de tout
le mal du monde. Le remords, lui exprime une nostalgie, le regret de
ce qui aurait pu être et n'a pas été. »
Renaud

« La haine trouble la vie ; l’amour la rend harmonieuse. La haine


obscurcit la vie ; l’amour la rend lumineuse. »
Properce

« La meilleure façon de prédire l’avenir, c'est de le créer. »


Robert Metcalfe

« Le secret, c’est le petit caillou dans la chaussure. »


Kheira Chakor
À tous ceux qui ne sont coupables de rien, mais qui persistent à le
croire.
Prologue

Des hurlements de rage, des claquements de portes refermées


violemment me parviennent alors que je pénètre dans le service
dans lequel débute, dans un quart d’heure, mon stage.
Super, l’ambiance !
Je déteste les situations conflictuelles, j’apprécie les lieux calmes
et sereins. À l’instar du service des urgences, le bloc opératoire
génère du stress. Mais n’ayant pu décrocher la Réanimation, j’ai opté
pour celui-ci, ce qui me semblait le moindre mal et un passage
obligé dans ma formation d’infirmière. On peut dire que pour un
premier jour, je suis servie question atmosphère sereine !
Mirna, ma meilleure amie, m’avait prévenue.
« Pas sûre que tu t’y plaises. C’est un monde à part, peut-être
plus encore que les urgences. Certains chirs’ sont super mégalos ou
insupportables comme le docteur Vignaud dont tout le monde parle.
LE dragueur invétéré et LE chirurgien super talentueux, une bombe
à retardement à lui tout seul. Débrouille-toi pour ne pas te laisser
impressionner et encore moins séduire. »
Je chasse ses conseils totalement inutiles, car cela ne risque pas
d’arriver. La réputation de monsieur, qui ne paraît pas le déranger,
n’est plus à faire. Quant à moi, les types de ce genre ne
m’intéressent pas. Et je suis là pour apprendre et rien d’autre.
Perdue, ne sachant vers où orienter mes pas dans ce labyrinthe
que je n’ai visité que le jour de mon rendez-vous avec la cadre, je
me dirige vers les voix. Au détour d’un couloir, je tombe sur le
vestiaire d’où elles proviennent et découvre quelques soignants assis
devant, à même le sol, certains en pleurs, d’autres le regard ailleurs.
Malgré mon étonnement, je n’ose rien demander, ils me paraissent
très affectés par un événement venant de se produire et je ne suis
que la stagiaire de troisième année, donc illégitime pour les
interroger.
— Colin, calme-toi ! Pas besoin de démolir tout le matériel, tonne
une voix féminine que je reconnais être celle de la surveillante.
Après quelques secondes d’hésitation, je pénètre dans la pièce et
me retrouve face à elle, un petit bout de femme d’environ ma taille
— un mètre cinquante-huit. Celle-ci tente de maîtriser, en paroles,
un malabar d’une fois et demie la nôtre. Mon regard se pose sur le
local saccagé, comme si une tornade était passée par là. Après avoir
scanné la salle, mes yeux se posent sur ceux d’un bleu hypnotique
de son propriétaire : Colin Vignaud. L’homme qui fait mouiller votre
petite culotte, rien qu’en vous matant — ce que prétendent les
étudiantes de l’IFSI[1]— et sur lequel elles ne cessent de bavasser. Je
me fige face à l’homme qui, en cette minute, ne renvoie pas l'image
de l’arrogant séducteur dont tout le monde parle. Il me semble
abattu, blessé, dévasté. La douleur qui transparaît dans son regard
me percute, m’émeut. Un peu trop.
Je m’efforce de détourner mes iris de ses yeux, les laisse dériver
sur sa silhouette, sur ses abdominaux parfaitement sculptés, sur la
ligne de poils qui se perd dans son pantalon de bloc, pour seul
vêtement, porté bas sur la taille. Et je comprends qu’il puisse rendre
dingues toutes les femmes avec un tel physique — sans parler de
ses « autres talents ». Car même moi, qui prétend qu’une allure ne
peut suffire à m’attirer, ne reste pas indifférente à la sienne et,
occupée à le reluquer, je n’entends pas l’injonction de sortir ni ne
vois l’objet volant arriver dans ma direction. Le « attention », hurlé
par madame Simon arrive trop tard et un sabot heurte ma tempe. Je
chancelle sous le choc et laisse échapper un cri mi de douleur mi de
surprise.
— Merde ! s’exclame la cadre en se précipitant vers moi, tandis
que « beau gosse » se contente d’un « Putain, mais qu’est-ce qu’elle
fout ici, celle-là ?! »
Ça commence bien ! Mais c’est quoi son problème à ce type ? Ça
va être chaud pour m’entendre avec lui !
1 : Retrouvailles

3 ans plus tard


Lili
Me voici prête à assurer ma première journée de travail dans un
établissement que je devrais, pourtant, éviter. Mais les circonstances
ne m’ont guère laissé d’opportunités. Refuser cette mutation
m’aurait obligé à attendre qu’un autre poste se libère. Or, je
n’aspirais qu’à revenir chez moi à Marseille et le plus rapidement
possible.
Après mon diplôme, j’avais suivi mon petit ami du moment,
Maxence, à Paris, dans sa folle envie d’y vivre. Nous avions tous
deux, grâce à ses relations familiales, obtenu des postes à Georges
Pompidou, un des grands centres médicaux de la capitale, lui comme
kinésithérapeute et moi comme infirmière en chirurgie digestive et
oncologie. Expérience enrichissante en début de carrière pour la
jeune IDE[2] que j’étais.
Mais après un an et demi de vie commune, rythmée de trop
fréquentes sorties – soirée de beuveries, devrais-je dire – et de
disputes, de plus en plus fréquentes et acrimonieuses, j’avais rendu
les armes. Notre vie de couple n’avait pas résisté à de trop tièdes
sentiments, reposant sur des fondations trop fragiles. Je m’étais
fourvoyée, jetée trop prématurément dans une relation pour en
oublier une autre, à la différence des femmes qui font un break
complet sur les hommes.
Une fois séparée, ma vie de célibataire ne me déplut pas.
Néanmoins, rapidement, l’attrait pour la capitale s’estompa, parasité
par la durée des trajets et des moyens financiers écornés par le prix
exorbitant du loyer, alors que je possédais un appartement avec vue
sur mer à Marseille. Je regrettai alors notre expatriation, j’en voulu
même à Maxence de m’y avoir entraînée, bien qu’en réalité je ne
devais m’en prendre qu’à moi-même, mais la nature humaine
cherche toujours un coupable à ses échecs. Je ne fais pas exception.
Après plus d’une année de célibat galère, me voilà de retour dans
la cité phocéenne à l’entrée du service de chirurgie digestive, la
boule au ventre. Pas pour des raisons professionnelles. Exercer dans
l’unité où je suis affectée ne devrait pas me poser de problème, vu
qu’il relève de mon domaine de compétences acquises à l’hôpital
Pompidou. De plus, la cadre de santé et les soignantes, présentes
lors de ma prise de contact, m’avaient chaleureusement accueillie. Il
est le motif de mon stress.
Au fil des heures, mon angoisse s’estompe tant je m’affaire, mes
pensées détournées de la personne que je crains de croiser. Une
rencontre inévitable, cependant. J’aspire simplement à ce que cela
n’arrive pas aujourd’hui. Et je prie, depuis hier, cent fois Dieu et tous
les saints pour qu’ils m’octroient ce répit. Pour que je puisse prendre
mes marques. Pour que j’aie le temps de me préparer à un face à
face avec lui.
La matinée achevée sans incident, je respire plus aisément sans
ce nœud qui m’obstruait la gorge, soulagée de voir le face à face
repoussé. C’est, bien évidemment, stupide, cela va se produire de
toute façon, demain, après-demain… et je devrais affronter son
regard. Mes souvenirs. Et j’ai peur. Peur de ma réaction autant que
de la sienne. Certainement plus de la mienne. C’est sur ce constat,
alors que je patiente pour régler mon repas à la cafétéria, que je
suis bousculée et manque laisser échapper mon plateau. Le
responsable me dépasse sans me regarder ni s’excuser et se campe
devant moi dans la file d’attente.
Encore un sale con qui se croit tout permis !
— Eh ! l’interpellé-je en lui tapotant le dos. Je peux comprendre
que vous soyez pressé, mais…
L’individu pivote, me foudroie de ses iris d’un bleu glacé, étouffant
dans l’œuf le commentaire désagréable sur le point de franchir mes
lèvres. À ma vue, ses sourcils se froncent, ses yeux s’écarquillent et
sa mâchoire tressaille. Moi, je retiens mon souffle tandis que mes
pensées virevoltent vers notre première rencontre, plutôt
mouvementée, les suivantes, pratiquement tout autant, et les…
réminiscences de nos instants ensemble. Elles suffisent à emballer
mon cœur et faire pulser le sang dans mes veines et… Je m’efforce
de repousser ces images, particulièrement celles de son corps
dénudé... de lui et moi…
Et merde, merci le Grand Puissant, là-haut !
Ouais, bon, c’est pas comme si tu t’y attendais pas ! Et Dieu et
ses acolytes, ben, ils sont peut-être bienveillants, mais ils ont autre
chose à faire qu’écouter tes : « S’il vous plaît, pas aujourd’hui, s’il
vous plaît ! »
— Toi ! lâche dans un souffle, le resquilleur de file qui me
dévisage avec insistance, tout aussi statufié que moi, probablement
parce qu’il ne parvient pas à croire ce qu’il voit.
Mais c’est bien moi, pas un sosie de Lili Mansouri !
— Colin tu fais chier ! Bouge, on n’a pas que ça à faire. Tu
flirteras une autre fois, l’interpelle un impatient derrière nous,
l’avancée vers les caisses, soudain à l’arrêt.
Le prénommé Colin détache ses yeux des miens pour les porter
par-dessus mon épaule, sur celui qui vient de le héler.
— Toujours aussi pressé, Wassim ! Pas étonnant que tu ne gardes
pas tes nanas si tu fais pareil quand tu baises !
— Ah, parce que toi, oui ? s’esclaffe son interlocuteur.
— Moi, c’est parce qu’elles savent d’entrée de jeu ce qui les
attend et, même si elles crèvent d’envie de recommencer, elles se
satisfont de ce que je leur donne.
Pour avoir côtoyé le personnage de très près, je ne devrais
pourtant pas m’étonner de cette cinglante répartie. Colin Vignaud,
trente-cinq ans, un mètre quatre-vingts, brun, yeux bleu céruléen,
physique de mannequin, mais surtout un aimant à gonzesses, à
l’évidence, les traite toujours avec autant de mépris que par le
passé. Mais après trois ans loin de lui, j’avais – presque – oublié que
Colin affectionne les situations dans lesquelles il se complaît à faire
étalage de ses pires traits de caractère.
— Ne fais pas attention, chuchote dans mon dos Victorine, ma
nouvelle collègue de travail. Le docteur Vignaud aime choquer. Je te
conseille de l’ignorer et de l’éviter autant que possible, sinon t’es
foutue. Déjà, il va t’asticoter au niveau professionnel pour te tester.
On y a toutes eu droit. Il est super chiant dans le boulot. Et comme
t’es nouvelle… il va sûrement aussi flirter avec toi jusqu’à ce qu’une
autre nana à son goût lui fasse de l’œil ou que tu cèdes.
Je ne le sais que trop pour être tombée dans le piège. Au vu de
notre histoire commune, à la manière dont nous nous sommes
séparés, je pense qu’il me laissera tranquille. Une bonne chose. Ou
pas. Parce que cette promiscuité ranime le désir charnel qu’il a
toujours remué en moi. Ce qui me fragilise. Or, il n’est pas question
de redevenir une marionnette entre ses bras.
— J’espère qu’il n’use pas de son statut pour harceler son
personnel féminin.
— Oh, mais il harcèle personne. Il propose et la nana accepte et
voilà, juste le temps de… enfin, tu comprends, murmure Victorine de
plus en plus bas. En plus, il a pas beaucoup d’efforts à faire, parce
que le plus souvent, c’est elles qui lui font du rentre-dedans.
Au lieu de débattre sur le sujet — à caution, enfin en ce qui me
concerne — je profite que le docteur Vignaud soit occupé par la
joute verbale qui se poursuit pour reprendre ma place devant lui,
mais rien ne lui échappe. D’un geste sec, il m’attrape le bras pour
me faire pivoter vers lui. Un frisson me parcourt à ce contact.
— Où tu comptes aller comme ça ? s’informe-t-il froidement.
Pas du tout prête pour un affrontement musclé dès mon arrivée,
et encore moins en cet endroit, je me dégage d’un mouvement vif,
abandonne mon plateau et fuis la cafétéria.
Ça promet pour la suite ! T’assures comme une cheffe, là !
En effet, je suis loin d’adapter mon attitude à mes résolutions.
Mais pour excuse, je ne pensais pas ressentir à nouveau autant
d’émotions en sa présence. Après ces années loin de lui, un petit
ami, je croyais fermement avoir tiré un trait sur cette aventure.
Visiblement pas.
— Eh, t’aurais pas dû faire ça. Tu as encore plus attiré son
attention sur toi. Maintenant, c’est sûr, il ne va plus te lâcher,
m’annonce Victorine de retour du self, tandis qu’à défaut d’un vrai
repas, je grignote un sandwich acheté à la boutique.
Certainement et, contrairement à ce qu’elle croit, pas pour me
draguer. Son regard exprime toujours ce qu’il ressent. Il n’a jamais
appris à l’apprivoiser. Me voir sur son lieu de travail lui déplaît.
L’horripile. Je n’ose imaginer ce qu’il adviendra lorsqu’il me
découvrira affectée à son service ! Ce qui ne va pas tarder.
Bien évidemment, je n’envisage pas d’informer quiconque du fait
que nous nous connaissons et encore moins évoquer notre courte
liaison.
Neuf mois, quand même !
Je préfère que tout le monde l’ignore. J’espère que lui aussi. Je
présume que oui.
Il n’y a rien à présumer, c’est certain à 99,99 %.
Je tente de me persuader que je me fourvoie sur la cause de
cette lueur dans ses yeux. Le motif de cette colère…
T’inquiète, il était juste furieux que tu lui sois passé devant ! se
moque mon moi intérieur.
Lorsque nous nous télescopons au détour d’un couloir, quelques
heures plus tard, tout dans son attitude me confirme ce que je
savais déjà : je ne suis pas la bienvenue.
— Putain ! Dis-moi que je rêve ?
J’amorce aussitôt une volte-face, mais il me rattrape en deux
enjambées, me pousse dans une réserve, me plaque au mur, et
aussitôt la tension sexuelle grimpe d’un cran chez moi. Chez lui
probablement aussi, car instinctivement, il recule de quelques pas,
autant que l’espace exigu le permet. Il me fusille de son regard
polaire, un muscle de sa mâchoire tressaute comme à chaque fois
qu’il est énervé.
Très énervé, on dirait !
— Qu’est-ce que tu fiches ici ? éructe-t-il de cette voix basse et
rauque qui m’a toujours émoustillée, même lorsque je m’efforçais de
lui résister.
— Je bosse, comme tu vois, réponds-je en croisant les bras sur
ma poitrine pour m’empêcher de le toucher, et tente d’afficher une
assurance que je suis loin de posséder.
— Non, tu ne peux pas, m’assène-t-il sèchement.
— Il va falloir t’adapter. Je suis de retour en ville et…
— Non, mais c’est pas vrai ! Il ne manque pourtant pas d’hostos à
Marseille ! Pourquoi avoir choisi celui-ci ? Et ce service, en plus ?!
s’agace-t-il en trifouillant sa chevelure, ses yeux partout ailleurs que
sur moi.
— La direction a accepté ma mutation, je n’allais pas continuer à
chercher indéfiniment ! Et mon expérience en chirurgie me vaut ce
poste. Tu crois que ça me plaît de travailler avec toi…
— Personne ne doit savoir pour nous, tu m’entends ?
J’éclate de rire. Habituellement, Colin se moque que ses
conquêtes se vantent d’en être. Je suis la seule qui souhaitait faire
en sorte que personne ne sache que, moi aussi, j’étais tombée sous
son charme, je refusais de faire partie des nanas incapables de lui
résister, de me retrouver affublée d’une étiquette. J’avais honte de
ma faiblesse. Et je m’étais tellement, ouvertement, moqué des
nanas qui bavaient sur « beau-gosse » …
— Il n’y a pas de quoi rire. Je suis, on ne peut plus sérieux. Tu
n’en parles à personne sinon…
— Sinon quoi ? Tu me menaces, là ? grondé-je, la colère grimpant
en flèche.
— Parfaitement. Si tu ouvres ton clapet, je ferai de ta vie dans
cette unité un enfer jusqu’à ce que tu démissionnes. Je suis doué
pour ça, tout le monde te le dira. Et tu connais parfaitement mon
sale caractère. Putain, Lil !
Je le fixe, hésite à répliquer que c’est déjà l’enfer rien qu’à l’idée
de devoir le côtoyer, mais ma propre inconstance me consterne.
J’estimais les avoir effacés de mon esprit – lui et son fichu caractère
– cru mes sentiments pour lui éteints, mais manifestement, ils
sommeillaient à l’état de braise qu’un souffle vient de ranimer. Ce
constat m’horripile et m’effraie. Mes yeux parviennent à accrocher
les siens dans lesquels la tempête fait rage, assombrissant la couleur
de ses iris désormais d’un gris foncé, et j’explose.
— Tu t’inquiètes pour la réputation de qui, là ? À moins que tu
n’aies peur que je ne fasse des confidences sur ta vie privée, sur ton
passé, que je dévoile tes failles et tes blessures ? Il n’y a pas de
honte à en avoir ! Encore moins à les montrer ! attaqué-je en lui
martelant le torse.
— Lili… arrête ! Je suis un sale con au cœur de glace, juste bon à
blesser les autres. Tu es bien placée pour le savoir, se défend-il sans
mettre fin à mon agression physique, probablement pour ne pas me
toucher. Tu n’as quand même pas oublié comment ça s’est terminé ?
Quoi qu’il en soit, ne t’amuse surtout pas à partager quoique ce soit
sur ce que j’ai eu tort de te révéler ! Je t’anéantirai, si tu le fais !
J’accuse le coup, choquée qu’il regrette ses confidences, mais
surtout par le fait qu’il s’imagine que je puisse parler de son histoire
à des étrangers, dévoiler ce qu’il m’a révélé sur le creux de l’oreiller,
de l’ordre de l’intime, évoquer le pan de son passé, ses souffrances,
sa vulnérabilité, tout ce qui a fait que je suis tombée amoureuse de
lui. Parce que derrière le masque, qu’il porte pour se protéger, se
cache un homme attachant, tendre, prévenant, soucieux de mon
bien-être ; un homme qui m’a fait découvrir ses passions ; laissé voir
l’homme à l’âme tourmentée, l’homme en proie à des démons dont il
ne peut se défaire ; l’homme loin de l’image du queutard de service.
Mais un connard qui t’a virée comme une malpropre !
— Comment tu peux croire que je ferais un truc pareil ?! Je t’ai
aimé ! Et je vois que tu continues à te planquer derrière ta pseudo-
arrogance, ta connerie et ta fausse méchanceté pour tenir à distance
tous celles et ceux qui pourraient t’aimer aussi, répliqué-je, irritée.
— Personne ne le peut. Où en tout cas pas longtemps. Tu viens
de le dire : tu ne m’aimes plus parce que je t’ai mal traitée. Car je ne
sais pas comment faire autrement, que depuis… elle… je suis un
handicapé des sentiments.
— Parce que tu le fais exprès pour que l’on te déteste ! fulminé-
je, les images de notre séparation affluant soudain. Et tu as bien
réussi ton coup. Tu m’as blessée, humiliée et je pensais tout ce que
je t’ai craché à la figure. Mais en réalité, je ne te hais pas,
contrairement à ce que je t’ai dit. Je ne peux pas. Et tu n’as besoin
de personne pour ça, tu te détestes suffisamment tout seul.
— Comment pourrait-il en être autrement, hein ? J’ai commis
l’erreur d’entretenir une relation exclusive avec toi et regarde où elle
t’a menée. Tu en as souffert pour avoir cru qu’il pourrait y avoir un
« nous ». C’est la seule chose que je regrette, je n’aime pas blesser
les gens. N’imagine pas qu’il puisse se passer quelque chose entre
nous, même si à l’époque je l’ai laissé entendre. Parce qu’on ne va
pas se mentir, nous avons passé de bons moments ensemble. Mais il
est inenvisageable aujourd’hui de remettre ça, d’une à cause de
cette idée à la con que tu as eu de venir bosser ici, de deux car ce
ne serait pas une bonne idée.
Adossée contre la porte, j’encaisse une nouvelle fois ses
explications sur les motifs de notre séparation. Cependant, je reste
persuadée qu’il a éprouvé des sentiments pour moi et qu’il m’a
plaqué, submergé par un vent de panique face à l’engagement, à
cette culpabilité qui le mine, son obsession, ses croyances ridicules.
Mais je préfère ne pas aborder le sujet, il démentirait avec force.
— De toute façon, ce n’est pas comme si j’avais envie de me
vanter d’être passée dans ton lit ! Je ne l’ai jamais souhaité. Tu sais
mieux que personne que j’ai toujours eu honte d’être soumise à
cette attirance que tu as longtemps exercée sur moi, jusqu’à ce que
je tombe amoureuse de celui que tu as bien voulu être, pendant un
moment. Alors gardons nos distances, ici comme dehors si l’occasion
se présente de nous croiser.
Décision essentielle, voire vitale, pour ma tranquillité d’esprit et
ma libido qui danse la samba depuis que nous sommes enfermés
dans cet espace clos.
Mes paroles semblent lui convenir, car un soupir, forcément de
soulagement, lui échappe. Moi, je dois quitter cet endroit illico, avant
de me mettre à pleurer. Tandis que je me contorsionne pour sortir de
ce placard à balais sans que nos corps se touchent, ma main frôle la
sienne qu’il pose soudain sur ma hanche pour m’attirer à lui malgré
ses propos. Nos souffles se mêlent dans ce trop grand
rapprochement ; je bloque le mien alors que ses iris, redevenus bleu
océan, fixent ma bouche.
— Ta présence va me compliquer la vie. Trop de souvenirs sont
venus brouiller mon cerveau à la minute où je t’ai revue au self. Il
est hors de question de céder à cette attirance, toujours présente,
on ne va pas le nier. Alors, je compte sur toi pour m’empêcher de
refaire la même connerie que la dernière fois.
La fois où j’aurais dû tourner les talons au lieu de céder à mon
envie de l’embrasser. Ce qui avait déclenché tous les événements en
chaîne.
— Et si j’ai envie de ce genre de… connerie ? murmuré-je tandis
que ses lèvres effleurent mon cou avant de reprendre leur distance
au moment où j’espérais qu’il m’embrasse.
Merde ! Deux minutes avec lui et je ne sais plus me tenir !
— Non, tu ne peux pas, tu ne te contenteras pas de… Dégageons
d’ici avant que je ne perde la tête, que je cède à ce désir qui me
titille. Vite et mal, lâche-t-il dans un souffle. Je ne crois pas que c’est
ce que tu veuilles, petite Lili.
L’emploi de ce petit surnom affectueux me touche. D’une certaine
manière, il laisse entrevoir que je ne suis pas une de ces femmes
anonymes, celles dont il oublie très souvent le prénom, même après
un moment d’intimité avec pour seul objectif de : « prendre son
pied, de se vider les couilles » dirait vulgairement Virginie, ma
cousine. Je ne suis pas certaine de vouloir lui faciliter la tâche. Après
tout, je pourrais jouer à mon tour. Il ne s’en est pas privé par le
passé. D’un mouvement vif, je crochète sa nuque et lui vole un
baiser.
Attention, Lili, tu risques de te brûler les ailes !
— Mais qu’est-ce que tu fais ? panique-t-il en me repoussant.
— Je réponds au mien… avoué-je en sortant du local, lui sur mes
talons.
— Ne t’aventure pas sur ce terrain, gronde-t-il à mon oreille. Tu y
perdrais des plumes, une nouvelle fois. Tu le sais.
Dans le couloir, serpillière en suspens, une femme d’entretien
nous dévisage.
Merde !
Je blêmis à l’idée qu’elle nous ait vus sortir d’un endroit qui laisse
peu de place à l’ambiguïté, tandis que Colin pose sa main sur mes
reins et me pousse en avant.
— Je fais visiter le service à mademoiselle Mansouri, explique-t-il
de sa voix rauque, empreinte, en l’instant, d’un soupçon de
moquerie.
L’ASH[3] affiche un sourire entendu, assorti d’un hochement de
tête qui me mortifie, persuadée qu’elle s’imagine que j’ai déjà cédé
au bad-boy de service.
Je ne veux pas être cataloguée à peine arrivée. Aussi, pour
effacer tout risque de malentendu, je me retourne, le foudroie du
regard et repousse sa main d’un geste sec. Mon attitude provoque
un éclat de rire, aussitôt étranglé, chez ma future collègue de travail.
— Je n’aime pas que des étrangers me touchent, informé-je celle
qui se présente comme Isabelle, pour justifier mon comportement,
Colin ayant tourné les talons tout en ricanement.
— T’es la nouvelle ?
— Oui, j’ai commencé ce matin et le docteur Vignaud a voulu me
faire visiter...
— La réserve… complète-t-elle avec sérieux. Au moins, tu sauras
où elle se trouve, des fois qu’Anna ne te l’aurait pas montrée.
— Je… il… bafouillé-je face à sa remarque ironique.
— T’inquiète, on a l’habitude que notre beau toubib tente sa
chance auprès des belles femmes. Si tu l’as envoyé promener il
n’insistera pas. Ce n’est pas son genre et il y a tellement de filles qui
lui courent après… Et si toi, ben… ça te regarde, il faut juste que tu
saches que ça dure pas. Je dis ça, mais si ça te dérange pas... Par
contre, fais gaffe à toi, ma belle, il risque de te faire la misère au
début, côté pro, que tu couches avec lui ou pas. Ta décision n’aura
rien à voir. C’est juste parce qu’il est très exigeant, qu’il ne passe
rien à personne. Il a fait pleurer plus d’une infirmière à son arrivée.
Pourtant, aucune n’a envie de partir, parce qu’il est aussi capable de
se battre auprès de la direction pour leurs conditions de travail.
— Je n’ai donc pas à avoir peur de lui. Je ne le laisserai pas
m’intimider, non plus. Et je n’ai pas la langue dans ma poche quand
je suis dans mon bon droit.
Isabelle m’observe, une lueur d’amusement au fond de ses
prunelles noisette.
— J’ai comme idée qu’on va rigoler. Bienvenue…
— Lili, me présenté-je.
— Bienvenue au Six sud, Lili.
Personnellement, je ne suis pas certaine que, moi, je vais rire
tous les jours.
2 : Lili acte deux

Colin
Putain de merde ! Je n’arrive pas à y croire ! Voilà Lili de retour
dans ma vie, toujours effrontément sexy, même dans cette affreuse
tenue ! Re-merde ! Et je vais la côtoyer régulièrement, étant affectée
à mon service ! Elle n’est pas seulement aussi attirante que par le
passé, elle est aussi autant insolente dans ces répliques ! Elle sait
me toucher, mettre en exergue ce qu’elle voit de bon en moi,
aborder mes faiblesses, mon jeu de rôle. Elle a cerné ma
personnalité, osé me renvoyer dans les cordes alors que je la
menaçais. Et je n’ai pas mis de gants ! Pour autant, je n’ai pas
vraiment eu le choix. Si cela venait à se savoir, qui sait ce qui
pourrait advenir ! Je ne peux pas le permettre. Et je ne l’ai pas
fichue hors de ma vie pour rien !
Malgré mon odieuse attitude, elle ne s’est pas démontée pour
autant. Elle m’a montré qu’elle avait gagné en assurance durant ces
trois ans d’expérience dans le métier et, peut-être, que mon sale
comportement lui a apporté cette maturité qui lui manquait. Quoique
non, elle faisait déjà preuve de beaucoup de discernement et de
feeling. Elle avait perçu mes faiblesses au premier regard. Je lui
avais laissé voir mes fêlures lors d’une des crises de désespoir
auxquelles je ne sais toujours pas faire face et, durant lesquelles, je
pars totalement en vrille. Comme ce jour-là.
Je n’avais pu accepter la perte d’un patient, trop jeune pour
mourir par un beau matin de printemps. Pourtant, dès le premier
bilan, nous savions son pronostic vital engagé. Très engagé. Nos
chances de le sauver se trouvaient être infinitésimales. Malgré tout,
j’y avais mis toute mon âme et mes talents de chirurgien pour
finalement… échouer. Bien que conscient que la partie était jouée
d’avance, et tout le monde dans la salle n’avait cessé de me le
répéter, je me reprochais de n’avoir pu le maintenir en vie. J’avais
pété un câble, comme toujours dans ces cas-là. Encore aujourd’hui,
bien que je maîtrise mieux mes émotions, l’idée qu’un gosse puisse
mourir, suite à un accident de la route, reste intolérable et
douloureux. Chaque perte me renvoie à Ilana.
Alors que l’équipe accusait le décès, je hurlais ma douleur en
saccageant le vestiaire. Le seul moyen que je connaisse pour
extérioriser ma souffrance. Des larmes, je n’en verse plus depuis
qu’Héloïse m’en a dénié le droit. Depuis ce jour maudit. Seule Lisa,
la cadre, tentait de me raisonner, comme à chaque fois que je vrille.
La seule dont j’accepte la présence face à une pression trop forte. La
seule sur qui je peux compter pour me soutenir en toute
circonstance. La seule autorisée à m’engueuler — qui ne s’en prive
pas — et la seule avec laquelle je peux laisser ma colère se déverser.
Personne d’autre ne s’aventure à assister à ma fureur destructrice,
tout le monde m’évite jusqu’à ce que je me calme. Mais elle a bravé
l’interdit — à sa décharge, elle l’ignorait — en pénétrant dans le
vestiaire. Son regard m’a percuté. J’ignorais alors qu’elle allait mettre
ma vie et la sienne sens dessus dessous, m’obligeant à agir
odieusement, par la suite.
Pour de bonnes raisons.
Je pensais le problème réglé, et voilà qu’il se présente à nouveau.

— Alors, tu vas faire tes griffes sur la petite nouvelle ? m’interroge


Aubin, mon binôme, quarantenaire, blond aux allures de surfeur
australien, ce qui attire la gent féminine. En plus d’avoir des yeux
magnifiques, elle est super bandante, moulée dans un jeans qui
épouse ses courbes. Ce que cette horrible tenue de travail camoufle,
précise-t-il.
Nul besoin qu’il me rappelle la plastique de Lili, je ne la connais
que trop bien. Et j’espère que lui n’aura jamais l’occasion de la voir
de près. Pourtant, en quoi en ai-je quelque chose à faire ? Lili et
moi, c’est de l’histoire ancienne, un dérapage incontrôlé qui a failli lui
être fatal. Il peut donc la draguer, la mettre dans son lit, puisque je
ne le ferai pas. Cependant, qu’il puisse envisager de tenter sa
chance me déplaît. Si je lui fais croire qu’elle m’intéresse, il va lancer
un pari à la con, si je lui avoue que non, il ne va pas comprendre.
Quoi que je dise, il va lui tourner autour. Ce mec est totalement
accro au sexe. Accro, genre pathologique.
Marié, deux enfants, il partage son temps libre entre sa femme,
une maîtresse en titre et toute nana bien fichue, que ce soit un
membre du personnel ou une patiente. Un cliché sur pattes,
estimeraient certains. Un cliché bien réel. Je me demande, parfois,
comment il parvient à toutes les gérer. Je mène une vie beaucoup
moins compliquée, n’entretenant aucune relation suivie. Il m’en a
suffi de deux pour être mis à terre. Je ne suis pas maso pour m’en
prendre une nouvelle fois plein la figure, je change donc
fréquemment de partenaires, toutes au fait de mes habitudes. Pas
d’engagement, du sexe pur et dur lorsqu’une occasion se présente.
Et rien d’autre. Le moins souvent possible avec la même personne.
Les fréquentations régulières peuvent devenir dangereuses, pour
preuve : Lili qui peut bien coucher avec qui bon lui semble. Je ne
dois pas me mêler de sa vie sexuelle.
De toute façon, je ne vois pas pourquoi je m’inquiète, ce ne sera
pas avec Aubin, pas du tout son style. Ou plutôt, elle n’est pas « du
genre » à se laisser séduire par lui. Elle le fuira dès qu’elle
découvrira son pédigré. Le statut de maîtresse ne l’intéresse pas et
les cadeaux, dont il pourrait la couvrir, ne l’achèteront pas.
Face à cet argumentaire, mon moi intérieur se marre. OK. En
matière de fanfaron, je ne vaux pas mieux que lui… me rappelle ma
conscience. En plus d’être, tout aussi branleur, je suis un handicapé
des sentiments. Je ne l’ai pas toujours été. Je préfère ne pas songer
au motif, replonger dans le gouffre dans lequel j’ai bien failli, une
nouvelle fois, tomber. L’amour est dangereux. Ma deuxième
expérience en la matière ne fait que le confirmer.
En l’instant, Aubin me gonfle à blablater sur le physique de Lili,
alors que je crève d’envie de me retrouver à nouveau dans ses bras,
tout en lui ayant assuré le contraire. Mais j’ai des putains de bons
motifs pour faire que cela ne se produise pas ! Toutes aussi valables
aujourd’hui qu’hier.
— Je dois y aller. J’ai des protocoles à dicter, annoncé-je afin de
mettre un terme à la conversation.
Parce qu’entendre évoquer la silhouette de la brunette vient de
faire ressurgir des images qu’il me faut chasser à tout prix. Mais mon
cerveau n’en fait qu’à sa tête et m’en envoie certaines, de moments
hyper torrides en sa compagnie. Et la partie de mon anatomie dans
mon pantalon commence à se manifester.
Fais chier !
Je vais devoir me blinder pour résister à la tentation. Et j’espère
qu’elle est passée à autre chose, que son geste, quelques jours plus
tôt, n’était dû qu’à un rapprochement charnel malvenu. Ou à un
petit acte de représailles mesquin pour mon odieux comportement
passé, en paroles et en actions. Je veux absolument croire à ce
justificatif, qu’elle a seulement cherché à me tourmenter. L’idée
qu’elle puisse avoir, délibérément, pris ce poste pour se
venger m’effleure. Je ne peux le penser, Lili n’est pas machiavélique,
ne possède pas d’esprit retors. Et trois ans se sont écoulés depuis
notre rupture. Elle parlait d’aimer au passé.

— Tiens, j’ai croisé Lili Mansouri dans les couloirs. Tu ne m’as pas
dit qu’elle bossait ici et, dans ton service en plus, se plaint Lisa, alors
que je bois un café avec elle en attendant l’arrivée de mon patient.
— Lili Mansouri ? demandé-je en fronçant les sourcils comme si je
cherchais au fond de ma mémoire de qui elle peut bien parler.
— Arrête ton char, beau gosse. Ce n’est pas au vieux singe qu’on
apprend à faire la grimace. Et tu ne vas pas me faire croire que tu
ne connais pas les noms de tes infirmières !
— Ça va, t’es pas si vieille ni trop décatie pour ton âge.
— Passe-moi la pommade pour essayer de détourner la
conversation. Je te connais, minot.
— Pourquoi je ferais ça ?
— Parce que le sujet te dérange ?
En effet, mais je ne vais pas le lui avouer. Lisa, celle qui joue
auprès de moi, un rôle approchant de celui de mère, ne me lâchera
pas, et lui ayant caché ma relation passée, je ne vois pas comment
je pourrais l’aborder trois ans plus tard. Je me lève sans répondre et
elle m’intercepte avant que je ne quitte son bureau en s’accrochant
à ma blouse.
— Ça va aller ? Tu es sûr ?
— Évidemment ! assuré-je. Pourquoi ça n’irait pas ?
— Lili.
— Eh bien quoi, Lili ?!
— Colin ! Arrête de faire comme si tu ignorais de pourquoi nous
en parlons.
— Et pourtant…
Ma pseudo-maman me foudroie du regard. Je comprends que je
ne la dupe pas et que si je veux qu’elle me fiche la paix, je dois lui
donner un peu de grain à moudre.
— Elle a fait un stage ici, c’est ça ? Que tu te souviennes d’elle
avec toutes les étudiantes que tu vois passer, ça me tue.
— Certaines ne s’oublient pas et j’ai une excellente mémoire. Elle
était douée pour le bloc et aurait fait une super IBODE[4]. Je l’avais
suggéré sur sa feuille de stage. Et comment oublier le rentre dedans
que tu lui as fait ? C’était limite du harcèlement. Cela aurait pu très
mal se terminer. Elle t’a bien résisté, la petite, ceux qui ont parié sur
ta réussite ont perdu. Je crois pourtant…
Je ne le démentirai pas. J’attends la suite du « pourtant » qui ne
vient pas, puis déclare soudain, comme si la mémoire me revenait :
— Ah, oui ! Je me souviens d’une nana aux yeux verts
magnifiques que laissait voir son masque et de son joli petit cul, bien
moulé dans ses jeans.
Voilà, voilà, une belle réponse de connard !
— C’est tout ce que tu as à en dire ? insiste Lisa, son regard rivé
dans le mien.
— Bah, tu me connais, j’ai une mémoire de poisson rouge pour ce
qui est des femmes qui passent dans mon lit, ironisé-je en haussant
les épaules. Et donc, la nouvelle recrue de mon service et
l’étudiante…
Je note à la mine sérieuse et la lueur qui brille dans les yeux de
mon interlocutrice que mes réponses ne la satisfont pas. Elle sait
que je lui raconte des bobards. Elle possède un sixième sens pour
repérer les mensonges. Pourtant, elle se résout à lâcher l’affaire.
« Mamounette » — petit nom affectueux que je lui donne — m’a
ramassé à la petite cuillère après ma séparation avec Lili, sans en
connaître les motifs. Car, bien qu’elle soit la seule qui connaisse une
partie de ma vie, elle ignore tout de ma liaison avec la stagiaire, la
plus longue de toute mon existence, en dehors de celle avec mon
amour de jeunesse : Ilana. La seule relation ayant duré le temps
d’une grossesse et aurait pu aboutir sur une renaissance. Une
relation, basée sur des sentiments, qui m’a démoli, tout autant que
la première. Comme elle n’était pas informée, j’avais, pour la
rassurer, inventé des justificatifs bidons pour expliquer mon état
dépressif du moment. Dépression transitoire chassée en heures de
travail et dans les bras d’une multitude de femmes, après un petit
séjour dans la maison de Florian sur l’île de beauté. J’avais renoué
avec mes vieilles habitudes, une nana chaque soir, pour effacer
l’image de Lili, son regard, ses sourires, son corps à damner un
saint , pour oublier l’affection qu’elle me portait, celle d’une femme
qui m’aimait malgré mes casseroles, mais surtout pour l’ignominie de
mon attitude ; ce que j’avais dû faire pour l’éloigner définitivement
de moi, pour qu’elle me haïsse pour mieux la protéger. Celui qui
couche avec les filles sans s’engager en rien, devait reprendre le rôle
que je lui avais alloué, ne plus jamais déroger aux règles établies.
Trois.
Pas une de plus.
Pas une de moins.
Règle n°1 : Ne plus jamais se donner l’opportunité de s’attacher.
Règle n°2 : Accepter de passer pour un sale connard.
Règle n°3 : Assurer et assumer la réputation du connard.
Voilà les préceptes que je m’étais imposé de suivre des années
plus tôt. Et il n’était pas question que je faillisse à ce contrat établi
avec moi-même. Hors de question d’accepter un quelconque
dérapage. Et il n’y en avait jamais eu.
Jusqu’à… elle.
Et après elle, je ne m’accordai plus la chance ni l’opportunité
d’aimer ni me laisser aimer.
Parce qu’Aimer, c’est prendre le risque de souffrir. De faire
souffrir. Je ne voulais plus que cela arrive.
Personne ne devait être en danger par ma faute.
Personne ne le sera jamais. Lili, plus que tout autre.
Je contiens un soupir qui intriguerait Lisa et repousse le souvenir
d’événements qui auraient pu se terminer tragiquement. Alors que
j’envisageais de vivre au grand jour avec Lili, j’avais été rappelé à
l’ordre : je n’avais pas le droit au bonheur.
Sa présence ravive les souvenirs heureux de cette période, une
irrésistible envie d’elle et les sentiments que j’ai éprouvés. Des
sentiments que je ne peux laisser réapparaître.
Sa présence me trouble, c’est tout. Je n’en suis plus amoureux !
C’est juste une attirance physique ! tenté-je de convaincre mon
Jiminy Cricket qui me balance une flopée de stupidités.
— J’y vais. À plus tard.
— Tu sais où me trouver… si tu as besoin de parler.
— De quoi ? D’une nana qui n’a été probablement qu’une passade
dans ma vie, comme d’autres, et dont je me souviens à peine ?
insisté-je lourdement.
Lisa exhale un soupir d’agacement et lève les yeux au ciel.
— Bon, allez dégage, petit con.

Quelques heures plus tard, installé dans mon bureau à mettre à


jour mes dossiers, la sonnerie du téléphone me vrille les tympans. Je
déteste être dérangé pendant que je m’acquitte des tâches
administratives. Nul ne l’ignore et le : « Je suis dans mon bureau »,
balancé dans la salle de soins avant de m’y rendre, ne peut être plus
explicite.
– Quoi ? aboyé-je.
Le silence au bout du fil va me faire sortir de mes gongs, tant je
suis à cran depuis l’arrivée de Lili, même si les occasions de la
croiser ont été rarissimes. Ce qui devrait me réjouir, sans que cela
soit le cas. Le problème tient du fait qu’elle occupe un peu trop mes
pensées, même sans la voir. La savoir là, dans mon service, suffit à
me perturber.
— Je n’ai pas de temps à perdre, alors qui que vous soyez et
quelle que soit la raison de votre appel, je vous suggère de cracher
le morceau, éructé-je, énervé.
— Excusez-moi de vous déranger, mais votre présence est requise
en salle de soins, me répond très protocolairement… Lili !
Après deux mois dans l’unité, elle ne peut ignorer qu’il est
formellement interdit de me contacter lorsque je suis en pleine
cotation de mes actes chirurgicaux. L’informatique me saoule, mais
je suis contraint de m’y plier pour tout. Même pour une prescription,
sans quoi les infirmières refusent de l’exécuter. Je comprends
qu’elles puissent craindre que je me défausse en cas de problème.
Ce que je ne ferai jamais, j’assume toujours mes actes.
Professionnellement, elles peuvent me faire confiance, nul ne peut
en douter. Pour le reste…
— Au cas où tu ne le saches pas encore ce que veut dire : « Je
suis dans mon bureau » demande à tes collègues. Aucune d’elles
n’ignore mes habitudes et mes petites manies. Voire mes tocs. Je
m’étonne que tu n’en sois pas informée, à moins qu’il s’agisse là
d’une forme de bizutage.
— Je suis au courant.
Bon, pas de bizutage ! Elle outrepasse simplement mes directives
en connaissance de cause et se fichant totalement des
conséquences. Pourquoi ne suis-je pas étonné qu’elle n’en fasse qu’à
sa tête ?
— Appelle Timéo ou Aubin.
Lili soupire, manifestement agacée.
— Timéo étant de repos post garde et le docteur Laborde
injoignable, il ne reste que vous pour venir régler le problème,
Docteur Vignaud.
Nouveau soupir, d’exaspération, cette-fois-ci, il me semble.
Pourtant, j’insiste.
— Développe, exigé-je, ne souhaitant pas me déplacer pour un
motif mineur.
Cela ne serait pas la première fois qu’une infirmière panique pour
rien, même si je doute que cela soit le cas de Lili.
Au bout du fil, cette dernière me paraît désormais excédée et, je
devine à la multitude de soupirs qui s’enchaînent, qu’elle se contient
d’exprimer son sentiment, probablement parce qu’elle n’est pas
seule, comme le laisse supposer l’usage du vouvoiement.
— Madame Dupy est revenue de la radio et son cliché ne me plait
pas, ni sa respiration. Je pense à une récidive de son
pneumothorax[5]. Possible que le drain ait été retiré trop tôt.
— Tu supposes, ou tu en es certaine ?
— C’est vous le médecin qui confirmerez ce que je crois. Je ne
suis qu’infirmière, après tout, réplique-t-elle, un soupçon ironique.
— Très bien, j’arrive. Et j’espère pas pour rien, ne puis-je
m’empêcher d’ajouter malgré le tableau qu’elle vient de me
dépeindre.
Oui, je sais, j’agis en connard ! Est-ce que je cherche la bagarre ?
Au lieu de rétorquer, Lili me raccroche au nez. Personne d’autre
n’a jamais osé. Les jeunes diplômés que j’effraie ont plutôt tendance
à se fondre en plates excuses, balbutiées du bout des lèvres.
Deux minutes plus tard, je la rejoins dans la salle de soins et
surprends Mélanie à l’interroger sur ma réaction. Cette dernière
rougit en me voyant, troublée par le regard que je lui adresse et
s’esquive aussitôt, prétextant qu’une tâche l’attend. J’adore la
déstabiliser. Elle réagit si instantanément que j’aime la mettre mal à
l’aise. Ce que je fais souvent, tant elle m’insupporte. C’est à la fois
épidermique et justifié, elle est la reine des bourdes ! En revanche,
Lili m’attend les bras croisés, les yeux pétillants de colère, dans une
posture assurée, voire prête à en découdre.
— Tu es devenu un sale con, m’assène-t-elle en guise de bonjour.
— Je l’étais déjà. T’as oublié ?
Elle me dévisage quelques secondes, exhale un nouveau soupir,
visiblement d’agacement, et me tend le cliché.
— Vous me trouverez dans sa chambre. Je l’ai mise sur O2[6] à 3
litres et je vais recontrôler sa sat[7], m’annonce-t-elle en s’apprêtant
à quitter la pièce.
— On se permet des initiatives ? la taquiné-je, néanmoins ravi
qu’elle les ait prises, une fois l’image radiologique examinée.
Lili ne se retourne pas, mais marque néanmoins une pause.
Probablement réfléchit-elle à une réplique mordante. Je ne lui laisse
pas le temps de me la balancer à la figure. Elle en est bien capable,
maintenant que nous sommes seuls.
— Contactez le bloc, Mademoiselle Mansouri, en effet, la patiente
a besoin d’un nouveau drain thoracique. Je me charge de lui
annoncer la mauvaise nouvelle. Et dites bien à Lisa que je veux une
salle maintenant, pas dans dix ans !
Lili revient sur ses pas et, lorsqu’elle passe près de moi pour
s’acquitter de mon ordre en décrochant le téléphone, une bouffée de
suaves senteurs de réglisse et d’anis m’assaille, Instantanément,
mille souvenirs me frappent de plein fouet. Mais, ce n’est ni le
moment ni l’endroit pour laisser ma mémoire dériver sur des images
d’elle avec ce seul parfum pour vêtement, sur celles de ma bouche
mordillant ses tétons, de mes mains... Je m’octroie une gifle mentale
pour me ramener à l’instant présent, m’impose de visualiser le
matériel nécessaire à l’intervention à venir pour faire retomber la
pression dans mon pantalon, mon sexe échappant à mon contrôle.
Je m’éloigne en deux enjambées, mais arrivé à la porte, je ne
peux m’empêcher de la féliciter, en m’abstenant toutefois d’ajouter :
« Et d’avoir dérogé aux consignes ». Au contraire, j’ajoute qu’elle,
comme les autres, doit respecter mes règles.
— Je n’appellerai jamais un interne des urgences quand un
médecin du service est dans les murs. Le patient reste ma priorité,
pas à satisfaire tes « règles », tes comportements de tyran avec les
infirmières. Et je doute que tu m’en tiennes rigueur, car autant que
je me souvienne, il est aussi la tienne et jamais, tu ne le mettrais en
danger, m’assène-t-elle.
Elle marque un point.
— Mais si, dans « règles » tu fais allusion à autre chose, tu n’as
pas à t’inquiéter, reprend-elle en ancrant ses yeux dans les miens.
En réalité, c’est moi qui dois me tenir, sans faiblir, à mes fichues
décisions, parce qu’en l’instant, j’éprouve une envie de la coucher
sur le bureau, d’assouvir ce désir qui enfle en moi depuis que je l’ai
revue et qui ne s’éteindra pas en une unique fois. Je le sais. Oui, je
le sais pour l’avoir cru par le passé et cela nous avait entraînés bien
plus loin que ce que j’imaginais. Bien trop loin dans une dangereuse
liaison. Une liaison que j’avais dû interrompre malgré — et à cause
— de ce que je ressentais pour elle. Ce qu’elle ignore.
3 : Quel connard

Lili
Je ne peux m’empêcher de répliquer. Je contiens, toutefois, mon
envie de l’insulter copieusement, tout comme celle de me jeter sur
sa bouche insolente. Un bon moyen de lui fermer le clapet. Mais pas
mon objectif premier.
Je sais pertinemment que je ne peux satisfaire une simple pulsion
sexuelle et espérer que nous soyons capables de nous contenter de
ce genre de relation. Et même en rester là après une seule session
de sexe. Lui, peut-être. Mais certainement pas moi. Je ne peux
réfuter ses arguments. Pour preuve, je n’y suis pas parvenue la
dernière fois et, bien que je refoule les émotions qui me
submergent, je ne pourrai jamais les contenir éternellement. Cette
folle idée reste donc inenvisageable. J’ai bien trop à perdre. Je dois
me tenir loin de lui. Ne rien montrer. N’échanger avec lui que
professionnellement.
Nous y parvenons plutôt bien, jusqu’à présent. Colin reste froid et
distant, ne m’adresse la parole que si nécessaire, ne me regarde
pas, ne flirte pas avec moi. Ce qui intrigue l’équipe, tant elle est
habituée à le voir faire avec les nouvelles arrivées, avec subtilité à ce
que mes collègues en disent, même si ses intentions sont
manifestes. Je ne peux répondre à celles qui m’interrogent que
d’un : « Je ne dois pas être son style », assorti d’un hochement
d’épaules, auxquels elles répondent : que Colin Vignaud n’a pas de
genre défini. Je le sais bien et je ne peux pas satisfaire leur curiosité
sur ce désintérêt pour ma personne. « Bah, peu importe ses raisons,
ça m’arrange, le toubib ne m’intéresse pas et cela m’évite de
l’envoyer bouler . » ne trouvé-je rien d’autre à répondre.
Menteuse !
OK, c’est un mensonge, car mes pensées, bien trop centrées sur
lui, de jour comme de nuit, ne me laissent aucun répit. Un petit ami
et l’éloignement l’en avait chassé, manifestement temporairement.
Et me voilà à crever d’envie de me couler dans ses bras, bien que je
sois consciente que cela malmènerait ma santé mentale. Mais le
corps a ses raisons que la raison ignore !
Tu perds la tête, ma fille. La bonne phrase est : « Le cœur a ses
raisons que la raison ignore[8] ».
Disons que je l’accommode à ma sauce, pour qu’elle colle avec
mon état d’esprit. Me voilà toujours dominée par mes pulsions. La
seule différence entre hier et aujourd’hui, c’est que Colin n’en profite
pas.

— Alors comme ça, tu as scotché Colin ?


— Je n’ai fait que mon boulot.
— Belle, sexy, impliquée et compétente. Tout en un. C’est rare.
Je me crispe face à sa remarque hyper clichée sur l’inadéquation
entre beauté des femmes et intellect. Mais dans la bouche du
docteur Laborde, hyper macho, elle ne me surprend pas.
— Les compétences sont indispensables dans ce métier. J’ai
étudié pour les acquérir. Je mets en pratique ce que l’on m’a
enseigné, répliqué-je, ignorant délibérément l’allusion à mon
physique et usant du vouvoiement malgré sa demande à ce que je le
tutoie.
— Tout pour plaire, insiste-t-il, le regard voilé de l’envie de me
coincer quelque part.
— Docteur Laborde, sachez que les aventures à la « Urgences »
ou « Grey’s Anatomy » ne m’intéressent pas. Alors, je préférerais
que nous nous en tenions à des discussions professionnelles, lui
assené-je froidement, dans l’espoir de couper court à sa drague.
D’après les commérages, ce père de famille, marié, n’hésite pas à
séduire, en sus du personnel, les patientes, libres ou pas, ce qui le
rend, à mes yeux, bien plus détestable que je trouvais Colin,
pourtant tout aussi cavaleur.
— Dommage. Y a pas de mal à prendre un peu de bon temps,
insiste le chirurgien malgré ma fin de non-recevoir. Entre adultes
consentants, un petit extra…
— Je vous dérange, peut-être ? nous interrompt Colin d’une voix
sèche et glaciale, assortie à la couleur de ses yeux posés sur mon
avant-bras qu’Aubin caresse dans un mouvement rotatoire qui me
hérisse le poil.
Geste qu’il suspend sous le regard ombrageux de son associé,
tout en ne retirant pas ses doigts que j’étais sur le point de
repousser avant l’arrivée impromptue de mon trop attirant
chirurgien.
— Pas du tout, assure le quadra, un sourire dans la voix.
— Tu peux y aller, je vais faire la visite avec Lili.
Je m’étonne de cette décision, la contre-visite étant établie par
tour de garde notifiée sur un planning. Je ne comprends pas ce
changement de programme et, manifestement, Aubin non plus.
— En quel honneur ? C’est mon tour que je sache.
— Tu devrais être content, je te donne l’occasion de partir plus
tôt, retrouver qui tu sais, réplique Colin, le muscle de sa mâchoire
tressaillant, signe évident de sa contrariété.
Le docteur Laborde nous dévisage à tour de rôle, un rictus aux
lèvres visiblement chargé de sous-entendus, que son : « Elle est
toute à toi » vient infirmer. Ce qui me donne envie de leur hurler que
je ne suis pas un trophée à remporter dans leur combat de coqs, ce
qui me prêterait à rire, si je n’étais pas stressée à l’idée de me
trouver en tête à tête avec celui que je dois éviter. Mais j’interprète
probablement. Colin a été très explicite. Lui et moi, jamais plus.
Pourtant, son attitude m’interpelle, et je panique lorsqu’il se penche,
renifle mon cou et plaque sa main sur mes reins pour me diriger.
D’un geste sec, je la retire tandis qu’il chuchote à mon oreille pour
n’être entendu que par moi :
— Je note que tu portes toujours le même parfum.
Un éclat de rire nous incite à nous retourner vers Laborde à
quelques pas de nous, adossé au mur les bras croisés et qui semble
apprécier le spectacle.
— Mais à quoi tu joues ? maugrée-je entre mes dents.
— À lui faire croire que j’ai des vues sur toi et que j’ai toutes les
chances de gagner, contrairement à lui. N’est-ce pas ?
La gifle fuse et sa joue prend instantanément une belle teinte
incarnat et affiche la marque de mes doigts.
— Toujours aussi impétueuse, à ce que je vois. J’aimais ta fougue
au lit. Tu ne parais pas l’avoir perdue.
— Ah oui ! Pourtant, tu m’as larguée parce que tu t’ennuyais, que
tu avais envie de quelque chose de plus pimenté et dont tu m’as
offert l’aperçu, lui rappelé-je en me dégageant de ses doigts qui me
procurent un frisson pas désagréable du tout et qui risque de me
faire perdre la tête.
À ma réplique, le chirurgien se tend, le muscle de sa mâchoire
tressaute et je capte une lueur sombre dans ses iris bleutés. Du
regret ? De la tristesse ? Pour une fois, je peine à décoder ce qui lui
passe par la tête.
— Joue la comédie et je te laisse tranquille. Tu me remercieras.
Aubin est super lourd quand une nana lui plaît, surtout s’il pense que
la voie est libre, murmure-t-il dans le dos de son acolyte, toujours à
suivre la mise en scène.
Mais je n’ai besoin de personne pour me sortir des griffes de ce
genre d’individus. J’ai appris de mes erreurs. Grâce à lui.
— Ne soyez pas jaloux, Docteur Laborde, le docteur Vignaud n’a
pas plus de chance que vous, énoncé-je assez fort pour atteindre le
concerné. Il va falloir vous trouver quelqu’un d’autre pour vous
divertir.
— Je suis curieux de voir ça. Colin est très fort, meilleur que moi,
réplique-t-il avant de tourner les talons.
Génial ! En voilà un qui est certain de me voir chuter !
Le risque que cela arrive est élevé. Ma capacité à lui résister
avoisine le 0,999 %. On ne peut plus bas. Pour preuve, mes alarmes
internes et les conseils à la prudence de ma conscience n’ont jamais
eu aucun impact sur mes décisions. Il existe de fortes chances que
je ne les écoute pas davantage, aujourd’hui.
— Fais la visite avec Mélanie. Je ne suis pas d’humeur et je n’ai
pas besoin de toi pour tenir le queutard à distance, déclaré-je en
tournant les talons pour courir m’enfermer dans les toilettes, loin de
son regard, de sa voix rauque et suave et de ses mains expertes qui
m’évoquent trop de souvenirs en sa compagnie. Des bons et des
mauvais.
Accoudée au lavabo, je tente de contrôler ma respiration
erratique, les battements de mon cœur qui tambourine dans ma
poitrine, l’envie de lui qui échauffe mon corps.
Tu ne peux pas me trahir ! me plains-je.
Eh, ma cocotte, je ne suis pas tout seul dans l’histoire ! Hein, elle
fiche quoi ta raison ?
Elle s’est fait la malle, ne pouvant faire le poids face à mon cœur
et ma libido galopante, associés pour gagner la partie.
Je me laisse glisser au sol après un dernier coup d’œil à l’image
renvoyée par le miroir, celle d’une jeune femme de vingt-huit ans,
toujours amoureuse de cet homme. Et si…
Si aujourd’hui… je pouvais juste…
Et, pour me ramener à la raison, ma conscience me renvoie vers
ce passé que je me suis efforcé d’oublier.

3 ans plus tôt


Sonnée, à la fois, par la chaussure projetée avec violence et l’effet
du regard de cet homme qui se laisse glisser au sol en maugréant, je
ne sais quoi, je vacille. Madame Simon se précipite vers moi pour
m’intercepter avant que je ne chute. Elle m’incite à la suivre à
l’office[9], ce que je fais après un dernier coup d’œil sur le chirurgien
adossé aux casiers, la tête entre ses mains me masquant les
expressions de son visage. Sanglote-t-il comme les autres ? Son
attitude et sa souffrance visibles m’interpellent, me troublent. Que
s’est-il passé ici ?
— Je suis désolée que votre première journée débute ainsi. Nous
venons de perdre un gamin et… on ne s’habitue jamais aux décès de
personnes si jeunes. Certains d’entre nous sont très sensibles et
chacun exprime sa peine à sa manière, les uns pleurent, d’autres se
referment sur eux-mêmes. Colin, le Docteur Vignaud, a besoin
d’autres exutoires, m’explique la cadre, répondant ainsi à mes
questionnements intérieurs, tout en m’enjoignant à m’asseoir.
— Je cherchais votre bureau et je me suis perdue. J’ai suivi les
voix. Je ne voulais pas déranger, m’excusé-je, gênée d’avoir été
témoin d’une scène, limite intimiste.
— Il ne vous visait pas, vous savez, tente-t-elle de me rassurer en
m’offrant une tasse de café.
Encore heureux !
— Je me doute qu’il n’a pas pour habitude d’assommer les
étudiantes, à part, peut-être, avec des sarcasmes, à ce que l’on m’a
raconté, osé-je.
— Houlà ! On vous a bien mise au parfum, on dirait ! réplique
Madame Simon dans un éclat de rire face à mes propos audacieux,
vu mon statut d’élève.
Je hausse les épaules tout en répliquant :
— Vous savez ce que c’est, les réputations se font et se défont au
gré des rumeurs.
— Bah, pour être honnête, on ne peut nier une part de vérité
dans tout ça. Il ne faut cependant pas tout prendre au pied de la
lettre.
— J’en suis certaine, c’est pourquoi je me fais toujours ma propre
opinion, particulièrement sur les personnes affublées d’étiquettes, à
la différence de celles qui en collent juste sur les apparences.
— J’imagine que Colin vous a été présenté comme un sale con
prétentieux, avec un goût prononcé pour les belles femmes.
Je valide ses dires, sans préciser que « baiseur notoire, qui tire
plus vite que son ombre » sont les termes plus crus généralement
employés.
— Je me moque de ce genre de ragots, n’étant pas passionnée
par la vie tumultueuse du docteur Vignaud, ni de qui que ce soit. Je
suis là pour me former, pas pour draguer ni me faire draguer.
J’espère tirer profit de ce que je peux apprendre à ses côtés, car on
vante tout autant ses qualités et ses compétences professionnelles.
Ce qui m’intéresse davantage que sa réputation sulfureuse.
D’ailleurs son comportement me laisse penser qu’il s’emploie à
cacher quelques faiblesses – tout le monde en possède et n’aime
pas les montrer. Et je les ai entrevues au fin fond de ses iris d’un
bleu azuréen. Pas certaine qu’il apprécie mon intrusion, s’il en a pris
conscience. Je vais espérer que cet homme, au regard envoûtant et
perturbant, oubliera m’avoir croisée dans un moment chargé
d’intense émotion. J’avoue ne pas avoir été insensible, l’espace de
quelques secondes, à son physique de Dieu Grec, référence on ne
peut plus bateau, mais sur toutes les lèvres des élèves de l’IFSI, et
pas que, dont je me moque outrageusement. Certaines de mes
copines de promo rêvent de le côtoyer, d’attirer son intérêt sur elles,
même en s’accordant à dire, que l’arrogant praticien traite mal les
femmes. « Mais il baise si bien ! ». Du grand n'importe quoi !
Comme si cela suffisait.
À vingt-cinq ans, je m’estime plus mature que ces jeunettes de
vingt, envisage de me consacrer à mes études, retardées par les
aléas de ma vie, et non pas à fréquenter les soirées à l’internat, y
rencontrer médecins et internes pour assouvir des relations
charnelles sans lendemain ni avenir. Ce n’est pas mon trip, encore
moins d’être une nana interchangeable pour ceux qui ne cherchent
qu’à s’amuser.
Sans croire que le prince charmant, à l’image de ceux des contes
de fées, existe, j’espère rencontrer un homme empreint de valeurs
morales. J’aspire à un bonheur simple, une vie de couple avec
enfants, plus d’un, ayant souffert du statut d’enfant unique. Projet
qui amuse ma cousine, Virginie, mon aînée de deux ans, qui estime
que les hommes sont à consommer sans modération. « Ils le font
bien, eux ! » se plait-elle à dire. Malgré nos divergences de point de
vue sur les relations à avoir avec les « mâles », nous sommes très
complices. Elle est tout à la fois : ma cousine, la sœur que je n’ai
pas eue, mon amie intime, ma confidente, celle qui m’a soutenue à
la mort de maman et durant tout son long calvaire. Elle seule
pouvait me comprendre pour avoir souffert du décès prématuré de
la sienne lors d’une intervention chirurgicale s’étant mal terminée.
Vu ses goûts, Colin Vignaud serait forcément dans son viseur, si
elle le rencontrait. Et j’avoue que je ne pourrais l’en blâmer, étant,
moi-même, pas insensible, attirée par quelque chose
d’indéfinissable, difficilement explicable, malgré ce que je pense de
ce genre d’individus. Virginie se moquera certainement lorsque je lui
raconterai ma première journée, surtout si je lui avoue mes
ressentis. Elle m’incitera à lui donner une foule d’informations sur le
beau gosse – sujet à débat – avec désormais mon opinion
personnelle sur le physique dudit Adonis. Je devine déjà une de ses
questions : « Alors, il est aussi sexy qu’il se dit ? », sans parler des
conseils foireux : « S’il te drague, fonce, et tu me racontes si sa
réputation de baiseur n’est pas usurpée », « Je veux des
détails » etc... Je soupire de lassitude en imaginant ce futur échange
et me gifle mentalement d’avoir de telles pensées, centrées sur le
chirurgien.
Quant à Virginie tu n’es pas obligée de lui en parler !

Affublée de ma tenue de bloc, je me tiens face à Colin Vignaud


pour la deuxième fois depuis mon arrivée. Ses yeux, bleu outremer,
interrogateurs, s’ancrent aux miens et je devine qu’il ne reconnaît
pas sous le masque ni celle qu’il a mise K-O. ni une des IBODE
habituelles avec qui il bosse. L’agacement transparaît dans son
regard alors que je tarde à me présenter.
— Lili va te servir aujourd’hui, l’informe madame Simon en
pointant son nez à la porte de la salle.
— Lili ? s’étonne-t-il en arquant un sourcil sous ses lunettes de
protection et me dévisageant intensément.
— Elle est en troisième année et avec nous depuis quinze jours.
Elle se débrouille hyper bien, argumente Lola, l’IBODE qui m’encadre
depuis le début de stage. Et le docteur…
— Mon temps est précieux pour le perdre à cause d’une novice,
éructe-t-il en me fusillant du regard.
— Oh, ça va, ce n’est qu’une appendicectomie ! Elle a servi
Thibaut, tout aussi exigeant que toi sur ses petites mains, durant
une thyroïdectomie, il a en été très content, intervient la cadre. Et
de toute façon, tout le monde est occupé, ton interne de repos, et je
n’ai pas d’autre infirmière disponible. Alors tu vas faire avec et dans
la bonne humeur, s’il te plaît.
— Fais chier ! Téléphone au secrétariat du directeur pour me
prendre un rendez-vous, que j’aille lui souffler dans les bronches et
réclamer du personnel.
— Si tu as du temps à perdre à écouter de belles promesses qu’il
te fera et ne tiendra pas… je t’en prie, fais-toi plaisir, réplique
madame Simon. En attendant, fais confiance à la petite. Crois-moi,
tu ne seras pas déçu.
Le chirurgien lève les yeux sur moi, s’abstient de tout
commentaire, mais je saisis parfaitement le message dans la lueur
expressive de ses iris. Sa menace stimule mon souhait de lui rabattre
le caquet. Les défis me boostent. Et je relèverai celui-ci. Je m’en sais
capable pour avoir assisté le docteur Niala, chef de service de
chirurgie digestive, pas plus tard qu’hier sur une intervention
similaire. Dès que Colin Vignaud cessera de me fixer de la sorte, je
retrouverai mon assurance.
Au terme d’une intervention sans anicroches ni faux pas de ma
part, le chirurgien balance ses instruments dans le plateau après
avoir fermé les plans sous-cutanés.
— Puisque Lili semble si douée, qu’elle s’occupe des dernières
sutures, crache-t-il en arrachant sa surblouse papier. Je vous laisse
terminer.
— Mais non, je ne suis pas habilitée… balbutié-je avant de saisir
le ton sarcastique de sa remarque.
— Ignore-le. Tu t’es parfaitement débrouillée. Colin peut être un
vrai connard qui aime déstabiliser les gens, les nouvelles, surtout.
Blinde-toi et fais ton boulot correctement et tout ira bien.
Un quart d’heure plus tard, la porte battante du vestiaire claque
et je me stupéfie en découvrant le médecin qui s’adosse au mur,
croise les bras et me reluque de la tête aux pieds, tandis que je
m’apprête à me changer.
— Je crois que vous vous êtes trompé de salle, l’informé-je.
— Non, je suis bien à l’endroit où je veux être, me rétorque-t-il,
insolemment, sourire narquois aux lèvres.
— C’est le vestiaire des femmes, ici.
— Sachez, jeune demoiselle, qu’ici, au bloc, hommes et femmes
se mélangent parfois sans que cela pose de problèmes.
— Pourtant, j’ai bien vu un sigle différent sur chaque porte.
— Oh, ça !? C’est purement formel.
— Peut-être, mais j’apprécierais que vous partiez.
Visiblement, il se fiche de ce que je veux, plus centré sur ce qu’il
veut lui. Et manifestement, il me désire, moi. D’une démarche féline,
il s’approche, se poste à quelques centimètres, me toise de son
mètre quatre-vingts, fixe mes lèvres. Je retiens ma respiration.
Il ne va pas oser m’embrasser, si ?
Étonnamment, son attitude provoque en moi des envies
ambivalentes : qu’il le fasse, prendre plaisir à ce baiser ou lui
assener une claque en retour. La gifle me correspondrait davantage.
— J’étais curieux de découvrir si tu possédais d’autres atouts que
tes yeux, déclare-t-il, les siens dérivant sur mon corps avant de se
poser sur mes mains, de se saisir d’une d’elles. Un de ces jours, je
m’assurerai qu’elles sont capables d’autre chose que de manier les
instruments.
Troublée par cette proximité et la lueur de désir flagrante dans le
regard, je recule pour m’éloigner de lui, et me retrouve plaquée
contre un casier.
Eh, oh ! Attention ! Ce mec est le diable en personne ! Recadre-le
tout de suite !
— Jamais je ne coucherai avec vous, affirmé-je, mais d’une voix,
cependant, bien peu assurée.
— Il ne faut jamais dire jamais, petite Lili, certifie-t-il après avoir
effleuré ma bouche de son pouce, avant de pivoter, si vite que je ne
peux réagir.
Arrivé à la porte, il se retourne vers moi, toujours vissée contre le
placard.
— Désormais, tu m’assisteras dans toutes mes interventions. Je
vais en informer Lisa. Tu apprendras bien mieux qu’avec les autres.
Non, mais je rêve ! Mais quel prétentieux !
— Si vous pensez que je vais devenir votre jouet du moment,
vous vous fourrez le doigt dans l’œil. Choisissez quelqu’un d’autre.
Nos contacts resteront strictement professionnels, tout le temps que
durera mon stage et ne tentez rien d’équivoque, je ne le permettrai
pas.
Les battants claquent violemment derrière lui sous l’impulsion qu’il
leur donne, tandis qu’il sort en riant après un : « On verra ».
Il peut se marrer. Il ne me connaît pas. Je ne suis pas le genre de
fille qui se laisse contrôler par ses pulsions sexuelles. Et ce n’est pas
un baiser qui va me faire craquer. D’une, cela n’arrive que dans les
romans et les comédies romantiques et de deux, je laisse ces
croyances à la bande de midinettes qui me tient lieu de copines et
qui en rêvent. Je les imagine à ma place, émoustillées à l’idée d’un
prochain round. Et pourtant, bien que révoltée par son arrogance,
mon esprit s’égare sur des images de sa bouche sur la mienne, ses
belles mains en promenade sur mon corps pour de sensuelles
caresses. Aussitôt, des papillons tourneboulent dans mon ventre.
Eh Lili ! reprends-toi, tu ne vaux pas mieux que ces nanas dont tu
te moques !
Je m’envoie une gifle virtuelle pour me ramener à la raison, à la
place de celle que j’aurais dû balancer tout à l’heure à l’arrogant
personnage pour calmer ses ardeurs lorsqu’il a osé toucher mes
lèvres.
Et pour calmer un peu les tiennes, parce que tes pensées, là, ma
vieille, elles sont un peu libidineuses.
En effet, mon cerveau part en cacahouètes, alors que je ne
possède pas la carrure pour des jeux coquins, encore moins le
mental pour une aventure centrée sur du sexe.
Houlà ! Une aventure ? Comme tu y vas ! C’est Colin Vignaud, là,
celui qui change de nana comme de slip ! Alors, y a pas de risques
que cela aille plus loin que le coup d’un soir ! Mais si tu veux…
essayer, Virginie te conseillerait d’en profiter.
Oui, mais non ! Je ne peux pas faire ça ! Cela va à l’encontre de
mes valeurs, de mes désirs et mes rêves. Je ne veux pas me
dévoyer, être une de ses conquêtes de plus. Je vais résister. Quand
on veut, on peut. Mon credo dans la vie.
Sauf que les jours passent et que le docteur Vignaud ne joue pas
à la loyale. Sa fâcheuse tendance à squatter le vestiaire des femmes
mettent à mal mes résolutions. Sans parler de tous ces petits gestes,
a priori anodins, qui suscitent, à chaque effleurement — délibéré,
j’en suis certaine —, une foule de frissons inexpliqués et terriblement
excitants. N’y tenant plus, je migre vers les toilettes pour me
changer et notre jeu, du chat et de la souris, divertit follement les
infirmières auxquelles notre manège n’a pas échappé. Que le
médecin s’impose parmi nous ne les perturbe nullement. C’est
visiblement habituel et j’ai pu constater qu’inversement certaines
d’entre elles squattent celui des hommes. À l’évidence, la mixité
n’est un problème que pour moi.
— Pourquoi tu t’escrimes à éviter Vignaud ? se gausse
ouvertement Amélia, l’IADE[10], avec qui je partage un café entre
deux interventions. Tu es jeune, amuse-toi un peu.
— Non, mais je n’ai pas envie d’être une nana de plus dans sa
collection, me justifié-je.
Réponse qui amuse Amélia.
— Mais t’as quel âge ?
— Vingt-cinq ans.
— Et tu te tapes pas de mecs, juste pour le fun ? s’étonne-t-elle.
— Ce genre de relation ne m’intéresse pas. J’ai besoin de me
projeter plus loin. Et de toute façon, en ce moment, j’ai pas le temps
de penser aux mecs avec mon mémoire qui me prend le carafon.
— Eh bien, Colin, y a pas mieux pour te la vider, la tête.
— Tu as couché avec lui ? Qu’il change de nana tout de suite
après ne te dérangeait pas ?
— Ben non. Au moins avec lui, tu sais où tu vas. Pas comme
certains, ici, avec leurs maîtresses attitrées qu’ils mènent en bateau.
Je suis scotchée de découvrir que, malgré tout, ses partenaires
sexuelles ne s’offusquent pas de sa conduite. Elles l’en excusent
presque. Mais quoiqu’Amélia me dise, je ne veux pas lui céder,
conditionnée par la raison. Je m’efforce donc de l’éviter autant que
possible pour que mon corps, lui, ne me trahisse pas. Je parviens
même à me désister de certaines interventions programmées avec
lui, arguant que je dois élargir mon apprentissage en assistant des
chirurgiens dans d’autres spécialités. Moins souvent en sa présence,
je respire mieux.
Après cette décision, Colin Vignaud semble m’ignorer, vexé, peut-
être. Face à son attitude, je me persuade que mes efforts portent
leurs fruits. Mais c’est mal présumer de la persévérance d’un homme
qui n’a pas pour habitude qu’une femme lui résiste. Pour preuve, ce
dernier me surprend alors que je sors des sanitaires où je persiste à
me changer, bien que les filles m’aient assuré qu’il ne vient plus dans
le vestiaire depuis que je le boycotte.
— Alors, c’est comme ça que tu penses t’en sortir ? En te cachant,
petite Lili ? m’assène-t-il, goguenard.
Je grince des dents au terme dont il m’affuble, comme si j’étais
une gamine alors qu’il n’est mon aîné que de quelques années.
— Je ne me cache pas, démens-je. Je n’ai juste pas pour habitude
de m’afficher en petite tenue devant des hommes que je ne connais
pas.
— Disons plutôt que tu m’évites, parce que tu as peur de te faire
dévorer par le grand-méchant loup.
— Non, mais, quel prétentieux ! Mais vous vous trompez de cible.
Je ne suis pas aussi naïve que le petit Chaperon Rouge de la fable.
— Oh, tiens, mademoiselle connaît ses classiques ! ironise-t-il.
Pourtant, si j’ai bonne mémoire, l’animal n’en fait qu’une bouchée.
— Mais sa gourmandise l’a perdu. Prenez garde que cela ne vous
arrive pas.
— Hum, le jeu en vaut peut-être la chandelle. Après tout, le loup
a quand même eu ce qu’il désirait avant que quelqu’un ne vienne
sauver l’imprudente.
Je tressaille lorsque ses doigts caressent mon bras nu, que son
souffle effleure mon cou, ranimant une libido en berne.
Mais quel manipulateur !
Consciente d’être incapable de céder à ses pratiques déloyales, je
le repousse et m’enfuis sous son rire moqueur.
Vivement que ce stage s’achève ! Mon attention dans ce service
est mise à rude épreuve tant au niveau personnel que professionnel.
Je vais finir avec un ulcère à l’estomac.

Présent
Des coups brefs à la porte m’éjectent de mes souvenirs.
— Lili ? Ça va ? s’enquiert Victorine.
— Très bien. Pourquoi ?
— Eh bien, je t’ai vue partir en trombe et entendu le docteur
Vignaud exiger de Mélanie qu’elle te remplace parce que tu ne te
sentais pas bien. D’ailleurs, si tu vas mieux, tu veux bien y
retourner ? Tu sais comment il est avec elle.
Depuis ma prise de poste, j’ai pu constater que Colin aime
torturer la pauvre fille, tout juste diplômée, qui panique dès qu’il
l’observe et de ce fait accumule les bourdes. Je me fiche qu’il soit un
connard dans sa vie privée, mais professionnellement… jamais, je ne
l’accepterai et je ne me gênerai pas pour lui exposer mon point de
vue. Son attitude provoque sans cesse des tensions, raison pour
laquelle, bien souvent les incidents se produisent. Nous ne sommes
pas des machines, les humeurs peuvent troubler nos
comportements.
— OK. J’arrive.
… À point nommé pour assister à une avalanche de reproches sur
ma collègue.
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: . 1
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561 Mauikalana Mauiokalana 1
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684 kaieleele kai-eleele 1
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653 haoho hoaho 2
655 amau ama’u 1
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691 KE’LII KE ’LII 1
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701 Kaneikiwahineaoha Kanewahineikiaoha 6
705 — 1
i, ii,
; , 1
ii, ii
i Ahumaiaapakanaloa Ahuimaiaapakanaloa 1
i Halekala Haleakala 1
i Anahoha Anahola 1
i Apu Apua 1
ii, ii,
. ; 1
ii
ii Pharoah Pharaoh 2
ii Maniniholokuaau’s Maniniholokuaua’s 2
iii,
; . 1
xvii
iii man-’o-war man-o’-war 2
iii Kuili Kaulu 3
iii Hanakapiaia Hanakapiai 1
iii Hana-na-lani-haahaa Hana-ua-lani-haahaa 1
iv Koko Coco 2
iv Kaniloloa Kanilolou 1
iv mamoth mammoth 1
iv Makao Makoa 2
v Kaikaa Kaikea 1
v Kinimakua Kaikimakua 2
v Kiwalo Kiwalao 1
v Kapapaapuli Kapapaapuhi 1
v Kahui Kahuoi 1
v Huakaikapoliopele Hiiakaikapoliopele 2
v sandlewood sandalwood 2
v Omao Kamau Omaokamau 2
v Indigeneous Indigenous 1
vi Kaelehuluhu Kaelehuluhulu 2
vi Kauluakahui Kauluakahai 1
vi Kahakaawae Kahakaauwae 1
vi Kalapuna Kalapana 1
vi Kahule Kahaule 1
vi Kaalameo Kaalaneo 1
vii Kanapakaa Kuapakaa 2
vii Kanapau Kainapau 1
vii Kanemilokai Kanemilohai 1
ix Kaweloikaikoo Kaweloikiakoo 2
ix Peopele Paopele 1
ix Kepuniwai Kepaniwai 1
x Aiohikapua Aiohikupua 1
x Koihelameki Koihelaumeki 1
xi Kumahaohuohu Kumakaohuohu 1
xi Kauluau Kauaula 3
xi Hanaka Haunaka 1
xii Lonomoku Lonomuku 1
xii bonebreaking bone-breaking 1
xii Waikikikai Waikiki-kai 1
xii sandwicemsis sandwicensis 1
xii Paahala Puahala 1
xii Maniniholokuaau Maniniholokuaua 2
xii Kapakailiula’s Kepakailiula’s 1
xiii [Not in source] , 562 5
xiii Nululu Nunulu 1
xiv Omaumaukiae Omaumaukioe 1
xiv Piimawaa Piimaiwaa 1
xv estern eastern 1
xv Red mouthed Red-mouthed 1
xv Maniniholokuaaua Maniniholokuaua 1
xvi Pumaiwaa Piimaiwaa 2
xvi Pimaiwaa Piimaiwaa 1
xvi [Not in source] ( 1
xvi Laeniki Laenihi 1
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COLLECTION OF HAWAIIAN ANTIQUITIES AND FOLK-LORE,
VOLUME 2 (OF 3) ***

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Section 2. Information about the Mission of


Project Gutenberg™
Project Gutenberg™ is synonymous with the free distribution of
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computers including obsolete, old, middle-aged and new
computers. It exists because of the efforts of hundreds of
volunteers and donations from people in all walks of life.

Volunteers and financial support to provide volunteers with the


assistance they need are critical to reaching Project
Gutenberg™’s goals and ensuring that the Project Gutenberg™
collection will remain freely available for generations to come. In
2001, the Project Gutenberg Literary Archive Foundation was
created to provide a secure and permanent future for Project
Gutenberg™ and future generations. To learn more about the
Project Gutenberg Literary Archive Foundation and how your
efforts and donations can help, see Sections 3 and 4 and the
Foundation information page at www.gutenberg.org.

Section 3. Information about the Project


Gutenberg Literary Archive Foundation
The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non-
profit 501(c)(3) educational corporation organized under the
laws of the state of Mississippi and granted tax exempt status by
the Internal Revenue Service. The Foundation’s EIN or federal
tax identification number is 64-6221541. Contributions to the
Project Gutenberg Literary Archive Foundation are tax
deductible to the full extent permitted by U.S. federal laws and
your state’s laws.

The Foundation’s business office is located at 809 North 1500


West, Salt Lake City, UT 84116, (801) 596-1887. Email contact
links and up to date contact information can be found at the
Foundation’s website and official page at
www.gutenberg.org/contact

Section 4. Information about Donations to


the Project Gutenberg Literary Archive
Foundation
Project Gutenberg™ depends upon and cannot survive without
widespread public support and donations to carry out its mission
of increasing the number of public domain and licensed works
that can be freely distributed in machine-readable form
accessible by the widest array of equipment including outdated
equipment. Many small donations ($1 to $5,000) are particularly
important to maintaining tax exempt status with the IRS.

The Foundation is committed to complying with the laws


regulating charities and charitable donations in all 50 states of
the United States. Compliance requirements are not uniform
and it takes a considerable effort, much paperwork and many
fees to meet and keep up with these requirements. We do not
solicit donations in locations where we have not received written
confirmation of compliance. To SEND DONATIONS or
determine the status of compliance for any particular state visit
www.gutenberg.org/donate.

While we cannot and do not solicit contributions from states


where we have not met the solicitation requirements, we know
of no prohibition against accepting unsolicited donations from
donors in such states who approach us with offers to donate.

International donations are gratefully accepted, but we cannot


make any statements concerning tax treatment of donations
received from outside the United States. U.S. laws alone swamp
our small staff.

Please check the Project Gutenberg web pages for current


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number of other ways including checks, online payments and
credit card donations. To donate, please visit:
www.gutenberg.org/donate.

Section 5. General Information About Project


Gutenberg™ electronic works
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be freely shared with anyone. For forty years, he produced and
distributed Project Gutenberg™ eBooks with only a loose
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