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Quatrième volution, dernière figure de danse pour le moment, dernière traîtrise. Il faut
suivre les textes d'Hocquenghem, sa position par rapport au Fhar et dans le Fhar, comme
groupe spécifique, les rapports avec le M.L.F. Et même l'idée que l'éclatement des
groupes n'est jamais tragique. Loin de se fermer sur « le même », l'homosexualité va
s'ouvrir sur toutes sortes de relations nouvelles possibles, micrologiques ou
micropsychiques, essentiellement réversibles, transversales, avec autant de sexes qu'il y
a d'agencements, n'excluant même pas de nouveaux rapports entre hommes et femmes
: la mobilité de certaines relations SM, les puissances du travesti, les 36000 formes
d'amour à la Fourier, ou les n-sexes (ni un ni deux sexes). Il ne s'agit plus d'être ni
homme ni femme, mais d'inventer des sexes, si bien qu'un homosexuel homme peut
trouver chez une femme les plaisirs que lui donnerait un homme et inversement (Proust
opposait déjà à l'homosexualité exclusive du Même cette homosexualité davantage
multiple et plus « localisée » qui inclut toutes sortes de communications trans-sexuelles,
y compris les fleurs et les bicyclettes). Dans une très belle page sur le travesti,
Hocquenghem parle d'une transmutation d'un ordre à un autre, comme d'un continuum
intensif de substances : « Pas l'intermédiaire entre l'homme et la femme, ou le médiateur
universel, c'est une part d'un monde transférée dans un autre comme on passe d'un
univers à un autre univers, parallèle au premier, ou perpendiculaire, ou de biais; ou
plutôt c'est un million de gestes déplacés, de traits reportés, d'événements... » Loin de
se fermer sur l'identité d'un sexe, cette homosexualité s'ouvre sur une perte d'identité,
sur le « système en acte des branchements non exclusifs du désir polyvoque». A ce point
précis de la spirale, on comprend comment le ton a changé : il ne s'agit plus du tout pour
l'homosexuel de se faire reconnaître, et de se poser comme sujet pourvu de droits
(laissez-nous vivre, après tout, tout le monde l'est un peu... homosexualité - demande,
homosexualité - récognition, homosexualité du même, forme œdipienne, style Arcadie).
Il s'agit pour le nouvel homosexuel de réclamer d'être ainsi, pour pouvoir dire enfin :
Personne ne l'est, ça n'existe pas. Vous nous traitez d'homosexuels, d'accord, mais nous
sommes déjà ailleurs.
Il n'y a plus de sujet homosexuel, mais des productions homosexuelles de désir, et des
agencements homosexuels producteurs d'énoncés, qui essaiment partout, SM et
travestis, dans des relations d'amour autant que dans des luttes politiques. Il n'y a plus
de sujet-Gide emporté divisé, ni même de sujet-Proust encore coupable, encore moins le
lamentable Moi-Peyrefitte. On comprend mieux comment Hocquenghem peut être
partout sur sa spirale, et dire à la fois : le désir homosexuel est spécifique, il y a des
énoncés homosexuels, mais l'homosexualité n'est rien, ce n'est qu'un mot, et pourtant
prenons le mot au sérieux, passons nécessairement par lui, pour lui faire rendre tout ce
qu'il contient d'autre - et qui n'est pas l'inconscient de la psychanalyse, mais la
progression d'un devenir sexuel à venir.
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