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Histoire de l 

’alimentation
 Pourquoi l ’étudier :

– Art de la table : reflet de l ’évolution des


courants de pensée de la société.

– Dis-moi ce que tu manges je te dirais qui tu


es.

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La cuisine : l ’affaire des cuisiniers
 Moyen âge : Taillevent (Le viandier, 1370), Platine de crémone,
(le traité de l ’honeste volupté, 1474).

 Renaissance : Olivier de Serres (Le théâtre d ’agriculture, 1600)

 Le règne de Louis XIV : Nicolas de Bonnefond (Les délices de la


campagne, 1654), LSR (L ’art de bien traiter, 1650), Massialot (Le
cuisinier Royal et Bourgeois, 1691).

 La révolution et l ’âge d ’or : Grimaud de la Reynière


(l ’almanach des gourmands, 1802), J.A Brillat Savarin (La
physiologie du goût, 1825), Nicolas Apert (Le conservateur, 1842).

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 Les palaces et l ’hôtellerie moderne :

– Le guide Michelin (1900), Escoffier (le guide culinaire,


1902), Gringoire et Saulnier (Le répertoire de la cuisine,
1918), Curnonsky (les terroirs gastronomiques, 1923)

 La nouvelle cuisine :

– Michel Guérard (la grande cuisine minceur, 1976), Paul


Bocuse (la cuisine du marché)

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Une affaire d ’intellectuels?
 Rupture Cartésienne : Clivage chaire et pensée.

 XVII siècle : non spécialistes (Chateaubriand, Baudelaire,


Dumas).

  1961 : Roland Barthes : « Psychologie de l ’alimentation


contemporaine » : Les intellectuels réinvestissent le champ
alimentaire :
• Intérêt pour son côté universel (Claude Lévi Strauss)
• Reconnaissance psychologique et culturelle de la table : lien avec la
psychanalyse (boulimie, anorexie mentale)
• La nourriture business est en marche Sociologues et économistes)
• Impérialisme américain : Retour des particularismes : Combat
idéologique
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Aujourd’hui
 Vision systémique de l ’acte alimentaire:
Corps psychisme

Acte
alimentaire

Société
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De l ’âge de fer à l ’antiquité
 Utilisation du feu : Griller, Rôtir, fumer
 Utilisation de la fermentation (texture, goût,
conservation). Naissance du vin
 L ’aliment ne cuit plus en contact du feu : bouilli,
soupe
 Passage du vagabondage alimentaire au
commensalisme alimentaire
 Fêtes dionysiaques : dimension rituelle et mystique du
repas
 Utilisation inconsidérée des épices.

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Le moyen âge : Début de l ’histoire
de notre cuisine
 Au moins 3 services : multitude de plats

 Les convives se servent eux-mêmes (noblesse d ’épée)

 La table est redressée pour chaque service (jongleurs


troubadours)

 Ni assiettes, ni fourchettes, ni serviettes :


– Les liquides : écuelles pour deux personnes
– Les solides : pains tranchoirs

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Des techniques rudimentaires
 4 cuissons : rôti, bouilli, frit, braisé.

 Les sauces : Pas de gras (développe le goût),


saveurs acides + épices, liées avec du pain ou des
jaunes d ’œufs.

 Les viandes (produit de la chasse) sont bouillies :


– pour éviter la prolifération microbienne
– Pour rendre moelleuse une viande sans maturation.

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La renaissance
 Naissance de l ’imprimerie : développement des
ouvrages et du savoir.

 Les produits du nouveau monde : Maïs, tomates,


dinde, pommes de terre, dinde, cacao.

 Influence de la cuisine Italienne (Catherine de Médicis


se marie avec Henri II en 1533) :
– Utilisation de la fourchette et naissance de l ’assiette éviter
les contacts directs avec les aliments.

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Le XVII : Naissance de la grande cuisine
 Polémiques culinaires violentes :
– Repas à la française : symétrie des services et des plats sur la
table.
– Imitation de l ’aristocratie par la bourgeoisie Distinction
– Naissance des mousses :
• Suivre le raffinement de la société
• Rupture cartésienne : les précieuses
– Naissance des ragoûts et sauces :
• Cuisson d ’un ragoût lié au pain ou au jaune d ’œuf
• Coulis universel (LSR), Sauce mère + dérivé (Massialot)
• Liaisons par réduction + le roux
– Baisse des consommations d ’épices car Baisse du prix :
• Augmentation de la technicité et de la recherche
• La rareté est remplacée par la complexité comme distinction

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Le XVIIIème siècle
 Base de la cuisine du XIXème siècle

 La tradition des alchimistes cuisiniers : La cuisine suit


les méthodes des alchimistes :
 Recherche de l ’essence, du principe sapide des aliments
(l ’osmazone) :
• Conquête de l ’or potable (panacée universelle)
• L ’œuvre au noir : putréfaction, dissolution de la matière
• L ’œuvre au blanc combustion lente et contrôlée sur l ’athanor

– Le cuisinier améliore ses sauces, se perfectionne et améliore le


monde.
– Endocanibalisme et principe d ’incorporation

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 Hégémonie du roi soleil : Grand service à la française

– L ’amphitryon sert les convives

– L ’amphitryon rayonne sur la table

– Le repas est un vagabondage alimentaire

– Les places sont définies à l ’avance

– On place les convives par affinités

– Le maître d ’hôtel régule l ’ébriété.


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 Le décorum : Mesure, symétrie, esthétique du
XVIIIème siècle (jardins à la Lenôtre) :

• La table est construite à l ’avance (Levée de rideau)


• L ’esthétisme = la saveur

 Nouvelles occasions gourmandes :

• Collations : repas sucré en fin d ’après-midi


• Ambigus : souper + collation sur la même table
• Impromptus : repas en extérieur

 Le repas : mythe prométhéen


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 Le rôle des serviteurs :

– Le roi est servi par les nobles (honneur envié et


rémunérateur) : dresser, desservir, redresser la table.

– Les laquais font les basses besognes (seront remplacés


par des servantes ad ’hoc)

– L ’honneur de trancher et de servir les vins d ’entremets


revient à l ’amphitryon

– L ’amphitryon rythme le repas.

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Le premier restaurant
 En 1765 : Champ d ’oiseaux sert des « bouillons
restaurants »

 1674 : Premier café (lieu de discussion, réunion de beaux


esprits) : Le Procope rue de Turnon.
• Thé, chocolats, sorbets
• 300 en 1721, 2000 en 1800

 Avant : prédominance des corporations

 1776 : Sous l ’influence des physiocrates (lois naturelles du


marché) Abolition des corporations par édit de Louis XVI
sous l ’impulsion de Turgot.
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La révolution
 La révolution Française : une révolution bourgeoise
 La bourgeoisie éduquée accède au pouvoir :

– Volonté d ’imitation de l ’aristocratie


– Dialectique du montré/caché :
• Afficher son nouveau rang
• Ne pas trop l ’afficher car dangereux
 La bourgeoisie parvenue a besoin d ’être éduquée :
• L ’almanach des gourmands : premier guide
• Jurys dégustateurs : Grimaud de la Reynière

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Le dilemme des cuisiniers
Révolution
Française

Étrangers France

Rayonnement Locations dans Ouverture


de la cuisine des maisons de
française bourgeoises restaurants

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L ’âge d ’or des appellations
 Avant : le nom du plat est celui de la préparation
 3 types d ’appellation :
– Les grands noms de cuisiniers : hommage (Filet de barbue
Dugléré)
– Les représentants des arts, lettres et aristocratie :
Association du plat à un personnage prestigieux :
• hisser l ’aliment dans un monde de gloire
• Les mets consommés élèvent le mangeur au panthéon
(endocannibalisme)
– Baptiser du nom d ’un parvenu :
• Reconnaissance du parvenu
• Naissance d ’une bourgeoisie aristocratique

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J.P. Aron (1975) distingue trois modes de fonctionnement du nom du
plat :

  La parole du monde : L’appellation participe à cette fonction du repas


qui est de figurer le monde, de le réorganiser et de le fédérer.

  La rhétorique du sublime : Cette technique associe le nom d’un


personnage prestigieux à un plat.

  La métamorphose : Il est question ici d’entourer un aliment d’un


ensemble de connotations de classe, artistiques, poétiques, sexuelles...
Avec ce type d’appellation, les mots titillent le désir, exhalent les saveurs,
les amplifient dans la résonance du symbolique et de l’imaginaire.

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Le rôle des appellations
 Fonction évocatrice
 Fonction pratique
 Fonction symbolique amplificatrice du plaisir
gourmand

 Mythe Napoléonien :
– France : centralisée (Paris)
– France : sommet de la culture
– Les particularismes des goûts disparaissent

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Le XIXème siècle : l ’âge d ’or
 Naissance du service à la Russe (montré/caché)
– L ’organisation chronologique remplace l ’espace
– Nouvelles règles : les mouillés précèdent les rôtis, le repas
va du salé au sucré.
 Dans les restaurants :
– Le maître d ’hôtel est commerçant, artiste, diplomate,
éducateur, metteur en scène (flambages, découpages).
 Vers une science culinaire :
– Jules Gouffé rédige ses recettes avec balance et montre
– Cuisine : combinatoire (7000 combinaisons Gringoire et
Saulnier)
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L ’apport technologique
 Apparition des fourneaux en fonte
 1795 : Nicolas Appert invente la conserve
 1812 : Benjamin Delessert extrait le sucre de la
betterave
 1850 : 1ère cuisinière à gaz
 1857 : Ferdinand Carré met au point le premier
appareil à faire du froid
 1876 : Charles Tellier transporte des denrées
périssable entre l ’Amérique et la France à bord du
frigorifique
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La vie de château
 Naissance du tourisme
 Naissance des palaces
 Développement du savoir-faire français en matière
d ’organisation (Auguste Escoffier et Cesare Ritz)
 1850 :
• Mode du thermalisme (développement de la côte d ’azur)
• réponse médicale aux excès de table
• Nostalgie de la vie de château
 Auguste Escoffier :
• Gand codificateur de la cuisine française
• classification sophistiquée qui permet la multiplication des recettes

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L ’époque moderne
 1ère moitié XXème :

– Liaison tourisme gastronomie : On recherche l ’inspiration


dans la cuisine des régions

– 1936 : démocratisation de la restauration (congés payés)

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1960 : La nouvelle cuisine :
• Croissance économique
• Modèle esthétique
• Contrainte diététique
• Aspiration à l ’harmonie avec la nature
• Refus de l ’ordre social établi
• Négation des valeurs gastronomiques
• Individualisme (travail à l ’assiette)
• Starification des chefs (Oliver, Bocuse)

• Guérard déculpabilise la gourmandise :


– Respect du goût
– Légèreté
– Nouvelles formes de cuisson et de liaison des sauces

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La genèse des cuisines
 La cuisine trouve sa source dans deux lieux opposés :

– L ’un est populaire

– L ’autre est savant

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La cuisine populaire dite « de terroir »
 Terroir :

• Lieu défini par des qualités physiques particulières : pente,


exposition, nature du sol, climat.
• La campagne en général, quoi que renvoyant à tel canton en
particulier, et même à un certain confinement.

 Deux éléments importants :

• Inscription dans un lieu géographique


• ensemble de particularismes socio-économiques locaux

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 La cuisine de terroir est liée à :
– une notion de revendication de l ’autonomie
– de dépendance par rapport au biotope
– de condition sociale modeste

Revendication de Dépendance / biotope


l ’autonomie

Condition sociale
modeste

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La cuisine savante
 La cuisine savante, aristocratique , professionnelle
est liée à :
• Une notion de distinction
• une distanciation / biotope
• Condition sociale élevée

Distinction / société Indépendance / biotope

Condition sociale
élevée

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La cuisine dérivée bourgeoise
 Compromis entre cuisine populaire et savante, liée à une notion
de reconnaissance sociale, de liberté / biotope et de condition
sociale moyenne.

Revendication de Dépendance / biotope


l ’autonomie
Cuisine
bourgeoise Cuisine de
Cuisine terroir
savante
Condition sociale
modeste

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La cuisine dérivée de nécessité
 La cuisine de nécessité découle de la cuisine de
terroir, elle est liée à :
• une notion de survie
• une très large dépendance / biotope
• une condition sociale très modeste

Cuisine de
terroir

survie Large dépendance au


biotope
Cuisine de
nécessité

Condition sociale
très modeste 31
La signification de la résurgence du
terroir
 Urbanisation croissante de la population française

 Industrialisation croissante de la sphère alimentaire :

• Économie de temps
• Seuil de sensibilité
• Souci d ’hygiène grandissant
• Qualité nutritionnelle
• Durée de conservation
• Commodité d ’emploi
• Individualisation des parts

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La gestion des paradoxes
 1 / Répulsion / réunification entre les cuisines
savantes et populaires :
• La cuisine savante se ressource dans les pratiques populaires
• Les cuisines de terroir puisent dans les savoirs professionnels

 2 / Réduction du nombre d ’offreurs /


élargissement de l ’éventail de choix :
• concentration de l ’offre
• diminution des espèces biologiques (pommes..)
• ouverture à des niches écologiques extérieures

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 3/ Discours médical / conséquences :
• D ’une pénurie quasi-existentielle à la profusion
• La minceur montre le contrôle à la profusion
• Les régimes médicaux prônent la minceur
• Les sujets sont victimes des conséquences physiques et
psychologiques
 4/ Individualisme / Commensalisme :
Vagabondage Commensalisme
alimentaire alimentaire

Structures sociales Biotopes pauvres Structures sociales


lâches contraignantes
Biotopes généreux

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 5/ Uniformisation particularisme :

• Modèle global de consommation


• Sur-valorisation des particularismes

 Conclusion

– La résurgence du terroir :
• Attitude frileuse ou porteuse de renouveau?
• Mode ou changement profond de la société?
• Retour au commensalisme alimentaire donc aux normes?

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