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Idéaltype, division du travail et classes

sociales
Fabrizio LI VIGNI
Postdoctorant en sociologie à l’UPEM
fabrizio_livigni@hotmail.com
Idéaltype

• Comme le dit Norbert Elias : « Tout ‘désordre’ historique et son


déroulement peut s’expliquer ; c’est là en effet l’une des tâches de la
sociologie »
• « Le chaos absolu n’existe pas ; ni parmi les hommes, ni dans le
monde »
• Or, bien que « toutes les relations humaines sont des processus », l’un
des concepts classiques de la sociologie pour rendre compte des
structures sociétales est l’idéaltype de Max Weber, autre fondateur
de la sociologie
Idéaltype

• Max Weber : « On obtient un idéal-type en accentuant


unilatéralement un ou plusieurs points de vue et en enchaînant une
multitude de phénomènes isolés, diffus et discrets, que l’on trouve
tantôt en grand nombre, tantôt en petit nombre, par endroits pas du
tout, qu’on ordonne selon les précédents points de vue choisis
unilatéralement pour former un tableau de pensée homogène »
 
• Ce n’est pas une classe logique ou un concept générique
• Ce n’est pas non plus une description fidèle de la réalité
Idéaltype

• Catégorie à la fois individuelle et abstraite regroupant les traits


saillants d’un groupe hétérogène de personnes, qui partagent un
certain nombre de caractéristiques

• Les individus pouvant être décrits par un idéaltype peuvent ne pas


inclure toutes les caractéristiques listées dans la stylisation effectuée
par le sociologue, ou en tout cas pas toutes dans le même degré
Idéaltype

• Ce sont les régularités observées sur le terrain qui permettent de


concevoir des types sociaux, ceux-ci étant très utiles à rendre compte
de phénomènes plus généraux  

• Ces typologies ne se veulent pas définitives et closes, mais comme


des moyens conceptuels pour les comparer à la réalité et pour
mesurer celle-ci
Idéaltype

• L’idéaltype est un concept


illustratif d’une catégorie
d’individus
 
• Benjamin Franklin est
l’idéaltype du capitaliste,
selon le Weber de L’éthique
protestante et l’esprit du
capitalisme
Idéaltype
• « Songe que le temps, c’est de l’argent »
• « Songe que le crédit, c’est de l’argent »
• « Songe que l’argent est de nature productive et prolifique »
• « Songe que les bons payeurs sont maîtres de toutes les bourses »
• « Rien ne contribue mieux à l’ascension que la ponctualité »
Ces points de B. Franklin synthétisent pour Weber l’« esprit du
capitalisme », même si cela ne le représente pas exhaustivement
L’essentiel est que Franklin exprime un ethos capitaliste : chacun est
en devoir de s’intéresser à l’augmentation de son capital, censée être
une fin en soi
Parenthèse sur le capitalisme
• Éthique protestante, oui

• Mais aussi

• Textes théoriques (S. Mill, A. Smith)


• Mercantilisme atavique
• Avancée des technosciences (vidéo population growth)
• Déclin de l’aristocratie
• Ascension de la bourgeoisie
• Depuis 1750, le marché se désencastre (K. Polanyi)
Exercice
• Macron est l’idéaltype de quoi ?
• Trump est l’idéaltype de quoi ?
• Hanouna est l’idéaltype de quoi ?
• Beyoncé est l’idéaltype de quoi ?
• La Chine est l’idéaltype de quoi ?
• Le dernier des Marvel est l’idéaltype de quoi ?
• Les Coldplay sont l’idéaltype de quoi ?

Plusieurs réponses possibles, selon le modèle que l’on est en train de construire…
Division du travail
• Comment les sociétés maintiennent la cohésion
sociale, surtout face à la montée de
l’individualisme ?

• Le lien social est dans les interdépendances entre


les fonctions différentes que recouvrent les
individus dans un contexte d’une grande division
du travail, qui augmente la complexité sociale
• Les individus sont de plus en plus différenciés et
spécialisés, mais aussi complémentaires
Division du travail

• Pour lui, dans la société traditionnelle il y a une forme de solidarité


mécanique :

Les individus vivent ensemble dans des petites communautés


Ils sont très homogènes en termes de valeurs et de fonctions
Faible division du travail et risque grand de désagrégation si quelqu’un
est déviant
Division du travail

• Pour lui, dans la société industrielle il y a une forme de solidarité


organique :

L’individualisme est une force centrifuge qui différencie et éloigne les


individus
Haute division du travail et hétérogénéité en termes de valeurs
La cohésion réside dans les interdépendances
Division du travail
• Durkheim souhaite chercher une formule non-normative (même si
finalement elle l’est) de la tenue des sociétés industrielles

Notamment :
• Toute société peut avoir une forme pathologique, la pathologie étant
ce qui n’assure plus la solidarité sociale (le manque de collant porte à
la désintégration sociale, au chaos)
• La pathologie des sociétés industrielles se manifeste dans les crises
économiques, dans les faillites, dans l’augmentation des crimes et des
suicides, etc.
• Cela est dû à l’anomie
Division du travail
• L’anomie ou « absence de loi, d’ordre ou de structure » désigne un
stade de perte des valeurs qui font société, ce qui amène les individus
à se sentir insatisfaits, aliénés, déprimés, égarés

• Les crises qui traversent les sociétés d’aujourd’hui peuvent être vues
comme étant le fait de l’anomie ambiante (mondialisation qui met en
concurrence des gens lointains, dérégulation de la finance,
précarisation du travail, décalage entre désirs affichés et réalité)

• Une solution est la réglementation morale ou juridique qui puisse


éliminer le décalage entre la morale et le fonctionnement social
Classes sociales
• Groupe social de grande dimension (plus grand que les CS)
• Hiérarchie de fait entre classes sociales (et non institutionnalisée : castes, ordres)
• Critère principal : propriété des moyens de production
• Marx définit jusqu’à sept classes sociales :
1. l'aristocratie financière
2. la bourgeoisie industrielle
3. la bourgeoisie commerçante
4. La petite bourgeoisie
5. la paysannerie
6. Le prolétariat
7. Le sous-prolétariat
Classes sociales
• Toutefois Marx va à l’essentiel, en décrivant la lutte des classes de la
société industrielle comme étant l’affrontement entre deux pôles : le
prolétariat et la bourgeoisie capitaliste
Il distingue entre :
• La classe en soi qui existe de fait, c'est-à-dire objectivement : les
individus faisant partie de cette classe ont des interactions entre eux
et présentent les mêmes caractéristiques sociales. Cependant ils n'ont
pas forcément conscience d'une appartenance commune
• La classe pour soi dont les individus ont conscience d'une
appartenance commune. C'est la classe pour soi qui va permettre une
défense de ses intérêts propres (ex. Monique Pinçon-Charlot)
• « Il y a une lutte des classes, évidemment,
mais c'est ma classe, la classe des riches qui
mène la lutte. Et nous sommes en train de
gagner » (Warren Buffett)
Classes sociales
• Pour Bourdieu : « Les classes sociales n’existent pas. Ce qui existe,
c’est un espace social, un espace de différences, dans lequel les
classes existent en quelque sorte à l’état virtuel »

• « Les classes théoriques que je construis sont prédisposées à devenir


des classes au sens marxiste du terme. Ce qui ne veut pas dire que la
proximité dans l’espace social engendre automatiquement l’unité :
elle définit une potentialité objective d’unité ou une classe probable »

• Ex. des Gilets Jaunes


Classes sociales
• La classe sociale est un concept à la fois analytique et politique
• Elle désigne une domination dans le contexte moderne (sociétés
capitalistes et plus ou moins démocratiques)
• Les classes ne sont pas strictement héréditaires : mobilité relative
• Il est raisonnable (méthodologie, valeur heuristique et impact socio-
politique) d’éviter les deux extrêmes : dégager seulement deux
classes sociales (Marx) ou tout réduire aux individus (néolibéralisme)
• Les échelles d’inégalité, ainsi que les positionnements politiques, sont
multiples et ne sont pas toujours superposables (cube d’Alain
Deneault – 22,50 - 26,18)
Classes sociales
• La notion de classe a perdu son actualité, parce qu’il y a eu :

1. Des mutations dans l’ordre des rapports de production (prolétariat


déplacé aux périphéries de l’Occident)
2. Une multiplication des identités (la même classe moyenne ou
populaire ne partage plus des modes de vie et des visions du monde
homogènes ; l’âge, le sexe, l’ethnie et la myriade de goûts
différencient davantage ces « blocs » marxistes)
3. L’essor de mouvements sociaux qui ne sont pas réductibles à des
mouvements de classe (chez Greenpeace peuvent cohabiter
bourgeois, élite intellectuelle et classes populaires)
Classes sociales
4. Un fort lobbying sociétal ayant mené à
l’embourgeoisement général (la caissière de
province se définit comme classe moyenne et
peut voter Fillon) :

L’espace médiatique a effacé le vocable et a invisibilisé la vie, les valeurs, les


problèmes des membres des classes dominées : extrême centre, TINA, bonne
gouvernance [ex. PMO], diabolisation des black block versus démocratie apaisée,
etc.
Syndicats et gauche ont affaibli leur soutien à ces classes, un peu par le rejet de
l’opinion publique pour le communisme après la catastrophe soviétique, un peu par
la croissance des Trente Glorieuses, un peu par l’abandon du mouvement ouvrier
que l’élite intellectuelle a accompli ces dernières années
Classes sociales

• La pensée individualiste dominante ou « mainstream » nous mène à


nous penser comme des atomes

Ex. Les mauvais élèves se sentent responsables de leurs échecs bien


plus que d’une injustice sociale
Ex. Les habitants des banlieues se sentent coupables de la déviance
de leurs enfants, bien plus que d’une injustice collective
Catégories socioprofessionnelles
• La nomenclature des CS est importante pour les statisticiens, pour
Pole Emploi, pour le gouvernement, pour les employeurs, etc.
• On définit une profession comme le métier exercé par une personne
• Il y a 486 professions regroupées en 31 catégories
socioprofessionnelles (CS), elles-mêmes regroupées en 6 groupes
socioprofessionnels (GS)

• Le classement se construit par une synthèse entre :


Le point de vue des travailleurs, des corporations, etc.
Et l’analyse savante (sociologues, codeurs professionnels, etc.)
À ne pas confondre avec le code ROME
Ni avec les

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