COURS 2.

LA SOCIOLOGIE Francis Douville Vigeant

COMME SCIENCE Individu et Société
OBJECTIFS

1. Connaître l’histoire de la sociologie

2. Comprendre pourquoi la sociologie est une science
PLAN DE LA SÉANCE

1. Une histoire de la sociologie en trois révolutions

2. La sociologie : une science
3. Atelier. La société en nous
1. UNE HISTOIRE DE LA
SOCIOLOGIE EN TROIS
RÉVOLUTIONS
 1.1. TROIS RÉVOLUTIONS
Europe, 16e au 18e siècle…

A) Révolution politique en France

- Chute de l’Ancien Régime et fin de la féodalité (↓ noblesse, ↑ bourgeoisie)
- Fin de la féodalité (Rois tout puissant)
- Concept d’individu

L’ordre social n’est pas immuable, mais

construit par les individus !
 1.2. TROIS RÉVOLUTIONS
Europe, 16e au 18e siècle…
A) Révolution politique en France
B) Révolution industrielle
- Apparition de la machine (à vapeur, puis à combustion)
- Déplacement des populations de la campagne vers la ville; urbanisation
- Chute de la main d’œuvre, des métiers spécialisés et des conditions de
travail
- La naissance d’une nouvelle classe sociale : la classe ouvrière et la
détérioration des conditions de vie des ouvriers
- La division du travail
- Progrès technologique
- Le changement de nature de la propriété
- Transformation de la famille
Nous rencontrons de nouveaux problèmes sociaux
dont l’origine est sociale !
 1.3. TROIS RÉVOLUTIONS
« La mathématique est une
Europe, 16 au 18 siècle…
e e
science dangereuse : elle dévoile
les supercheries et les erreurs de
A) Révolution politique en France calcul. »

B) Révolution industrielle
C) Révolution scientifique
- Nouvelle idée : la nécessité de la preuve (raison; causalité)
- « Systématisation » des sciences naturelles
- Institutionnalisation des sciences (revues, instituts, universités)
- Développement de nouveaux outils (conceptuels, techniques) pour
penser le monde rationnellement
- Rationalité
Nous pouvons « nous rendre maître et
possesseur de la nature » !
1.4. CHANGEMENT DE
PERSPECTIVE

Origine : volonté divine

« on ne peut rien y changer »
1.4. CHANGEMENT DE PERSPECTIVE

Origine : humaine et sociale

« on peut agir sur notre monde et le
transformer »
 1.5. TROIS RÉVOLUTIONS
Europe, 16e au 18e siècle…

A)Révolution politique en France

B)Révolution industrielle RUPTURE
C)Révolution scientifique MAÎTRISE

Naissance de la
sociologie (19e)
2. LA SOCIOLOGIE :
UNE SCIENCE ?
 Selon vous,
qu’est-ce que la science ?
 2.1. ARISTOTE, GALILÉE ET LA CHUTE
DES CORPS

(1564-1642)

(384 -322 av. J.-C.)

L’expérience actualisée par la BBC : https://www.youtube.com/watch?v=E43-CfukEgs

2.2. LES CARACTÉRISTIQUES DU
SAVOIR SCIENTIFIQUE
 Nature : basé sur la raison
 Démontrable → reproductible → vérifiable → remis en
question → réfutable ou amendable
 ≠ spéculatif, mais basé sur l’observation
2.2. LES CARACTÉRISTIQUES DU
SAVOIR SCIENTIFIQUE
 Nature : basé sur la raison
 Méthode : résulte d’un travail de longue haleine
 Fruit d’une démarche scientifique rigoureuse
2.2. LES CARACTÉRISTIQUES DU
SAVOIR SCIENTIFIQUE
 Nature : basé sur la raison
 Méthode : résulte d’un travail de longue haleine
 Visée : décrire le monde tel qu’il est
 Dire ce qui est et non ce qui devrait être
 Vise la neutralité et l’objectivité
2.2. LES CARACTÉRISTIQUES DU
SAVOIR SCIENTIFIQUE
 Nature : basé sur la raison
 Méthode : résulte d’un travail de longue haleine
 Visée : décrire le monde tel qu’il est

Le savoir scientifique se distingue ainsi du sens commun (« les filles

sont comme ça parce que… »), des jugements de valeurs («
malheureusement, il y a … »), des opinions (« je pense qu’on devrait…
»), des croyances, des préjugés…
« La science commence dès que le savoir […] est recherché
pour lui-même. Sans doute, le savant sait bien que ses
découvertes seront vraisemblablement susceptibles d'être
utilisées. […] Mais en tant qu'il se livre à l'investigation
scientifique, il se désintéresse des conséquences pratiques. Il
dit ce qui est ; il constate ce que sont les choses, et il s'en
tient là. Il ne se préoccupe pas de savoir si les vérités qu'il
découvre seront agréables ou déconcertantes […]. Son rôle
est d'exprimer le réel, non de le juger. »

Durkheim, Éducation et sociologie

 « Il est infiniment plus facile de prendre
position pour ou contre une idée, une
valeur, une personne, une institution ou
une situation, que d’analyser ce qu’elle est
en vérité, dans toute sa complexité. »

Pierre Bourdieu
Contre-feux, T1.
2.3. LE SOCIOLOGUE COMME
SCIENTIFIQUE
 Avec son propre laboratoire

Le sociologue Vincent Paris dans le métro de Montréal :

https://cve.grics.ca/fr/1175/38403?destination=/
2.3. LE SOCIOLOGUE COMME
SCIENTIFIQUE
 Avec son propre laboratoire
 Avec son propre sarrau (invisible !)
2.3. LE SOCIOLOGUE COMME
SCIENTIFIQUE
 Avec son propre laboratoire
 Avec son propre sarrau
 Avec un mode d’emploi qui s’apparente à celui du détective

« Le travail sociologique passe par la mise en

énigme de ce qui semble aller de soi. »
Serge Paugam
2.3. LE SOCIOLOGUE COMME
SCIENTIFIQUE
 Avec son propre laboratoire
 Avec son propre sarrau
 Avec un mode d’emploi qui s’apparente à celui du détective
 Avec son propre objet de recherche
 Selon vous, la sociologie est-elle une
science plutôt simple… ou complexe ?
 2.4. SCIENCE SIMPLE OU COMPLEXE :
LA NATURE DE L’OBJET DE RECHERCHE

Pas de
valeur
sn
d’opin i Inerte,
ions
simple et
prévisible

Se traine
partout…

e
Aucun ion ge
i m pl i c
at Ne chan
le
affecti
ve p as a v ec
temps…
 2.4. SCIENCE SIMPLE OU COMPLEXE :
LA NATURE DE L’OBJET DE RECHERCHE

Pas de Valeurs,
valeur
sn opinions.. Complexe et
d’opin i Inerte,
. Il
ions pense et difficilement
simple et parle… prévisible (nombre
prévisible de disciplines…)

Se traine Se transfo
rme avec
partout… Implication le temps
affective
e
Aucun ion ge A d é j à un e idée
i m pl i c
at Ne chan t i n c om p l èt e )
ve p as a v ec
le (souven e monde
affecti Réagit aux de co m m e n t l
temps… e
résultats fonctionn
 2.4. SCIENCE SIMPLE OU COMPLEXE : LA
NATURE DE L’OBJET DE RECHERCHE

« Les sciences se sont développées dans l’ordre

inverse de celui qu’on aurait pu attendre. Ce qui
était le plus loin de nous a d’abord été soumis à
des lois, puis ce qui était plus près : d’abord les
cieux, puis la terre, puis la vie animale et
végétale, puis le corps humain, et en dernier lieu
(très imparfaitement encore) l’esprit humain. »
Bertrand Russell
 3. LE PRÉNOM : UN
«CHOIX»… MAIS DANS
QUELLE MESURE ?
28
https://www.prenomsquebec.ca/
SI VOUS AVIEZ UN ENFANT
NOUVELLEMENT NÉ, LEQUEL DE CES
NOMS LUI DONNERIEZ-VOUS ?
Éric Emma
Maxime Julie
William Stéphanie
Serge Manon
SI VOUS AVIEZ UN ENFANT
NOUVELLEMENT NÉ, LEQUEL DE CES
NOMS LUI DONNERIEZ-VOUS ?
Éric Emma
Maxime Julie
William Stéphanie
Serge Manon
 3.1. L’ÉPOQUE, LA GÉNÉRATION,
LES TENDANCES
2017 : William et Emma

1990 : Maxime et Stéphanie

1980 : Éric et Julie…

Les goûts sont plus collectifs qu’on le pense !

31
Quels sont les critères sociaux qui guident, en général, le choix
des parents ? (qu’est-ce que ces prénoms ont en commun ?)

32
- William (5e années consécutive ; dernière décennie = 8793)
- Prénoms courts (où sont les prénoms composés ?)
- Influences anglo-saxonne

33
Quels sont les critères sociaux qui guident, en général, le choix
des parents ? (qu’est-ce que ces prénoms ont en commun ?)

34
- Emma (3e années consécutive ; dernière décennie = 7735)
- Prénoms courts (où sont les prénoms composés ?)
- Termine en « E » et en « A » (et non en « ette », par exemple)

35
« Après une période
d’accélération de quelques
années, le prénom arrive à un
sommet et la fréquence retombe
aussi vite qu’elle avait
augmentée »
(Coulmont, 2014, p. 35)

36
3.2. L’ORIGINE SOCIALE DES
PARENTS CLASSE SOCIALE
-Capital économique
-Capital culturel
-Capital social

Entre 20% et 25% Moins de 3%

Diane (24.7) Jordan (2.1)
Adèle (23.5) Ryan (2.8)
Joséphine (21.8) Tony (3.1)

Le prénom n'est pas magique. Il ne

favorise pas de lui-même un résultat
plutôt qu'un autre. Le prénom est le reflet
indirect de l'origine sociale.

37
Référence : http://coulmont.com/bac/results.php
3.2. L’ORIGINE SOCIALE DES
PARENTS

Choisir un prénom rare n’est pas une pratique marginale

échappant au social, mais plutôt une tendance marquée chez
les groupes au capital culturel plus élevé.
38
Référence : http://coulmont.com/bac/results.php
3.3. LE GENRE, LA CULTURE…

e ll e et
Ga b ri
l a Mike
ri e l Fatim lsine
Gab a

Oscar Sa r a h-A nn

39
3.4. EN QUOI LE PRÉNOM EST-IL
SOCIAL?
 Un fait social est un fait objectif dont
les attributs sont le produit de

3.4. EN QUOI LE PRÉNOM EST-IL

l’association entre plusieurs
personnes ou le produit des rapports
entre les groupes. (Fortier et Pizarro Noël,
SOCIAL? 2013)

Le fait social…

… = pas biologique, génétique,

organique… ;

‫ﯮﯱﮰﭵﯪﯧ‬ … extérieur aux consciences (ou

volontés) individuelles (bien que
produit par leur association) ;

… contraignant ; il s’impose aux

individus ;

… partagé par plusieurs individus ;

… constitue donc un ordre de fait, un

niveau de réalité particulier qu’il s’agit
1) Niveau de réalité engendré par d’étudier comme tel.
l’association des individus
2) Niveau de réalité qui façonnent les
individus
3.5. LE PRÉNOM NOUS INDIQUE…

▪… que les goûts « personnels » sont aussi « sociaux » ; peu importe le type
de société, ils doivent toujours être pensés en relation avec la société ;
▪… qu’il est souvent un indicateur des caractéristiques sociales des gens qui le
portent (genre, culture, âge, origine sociale, type de société) ;
▪… que des forces sociales et « invisibles » nous traversent et nous modèlent
sans que nous en soyons nécessairement conscients ; aléatoire
▪ … que nos manières d’agir, de sentir ou de penser relèvent souvent du social
et ne sont pas le résultat d’un simple « choix personnel », réalisé en dehors de
tout ancrage socio-culturel.

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 3.6. LE PRÉNOM COMME « FAIT
SOCIAL »

Si le choix du prénom de votre futur enfant vous apparaît, à première vue, comme
étant personnel, « ces choix n’ont rien de purement individuels, qu’agrégés par la
statistique ils révèlent des régularités, et donc des représentations collectives
produites par les actions et réactions entre les esprits individuels qui forment la
société »

Galland, 2004 : 130

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BIBLIOGRAPHIE
COULMONT, Baptiste (2014), Sociologie des prénoms, Paris, La Découverte.

DUMONT, Louis (1983), Essais sur l’individualisme. Une perspective anthropologique sur
l’idéologie moderne, Paris, Le Seuil.

FORTIER, Jean-François et François Pizarro Noël (2013), La sociologie de A à Z, Montréal, ERPI.

GUERTIN-TARDIF, Etienne (2018), « Dis-moi ton nom et je te dirai qui tu es », La Presse.

LE BART, Christian (2008), L’individualisation, Paris, SciencesPo.

PIOTTE, Jean-Marc (2007), Les Neuf clés de la modernité, Montréal, Québec Amérique.

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