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HAMLET. - Etre, ou ne pas tre : telle est la question.

Y a-t-il pour lme plus de noblesse endurer les coups et les revers dune injurieuse fortune, ou s'armer contre elle pour mettre frein une mare de douleurs ? Mourir... dormir, cest tout ;... Calmer enfin, dit-on, dans le sommeil les affreux battements du cur ; quelle conclusion des maux hrditaires serait plus dvotement souhaite ? Mourir... dormir, dormir ! Rver peut-tre ! Cest l le hic. Car, chapps des liens charnels, si, dans ce sommeil du trpas, il nous vient des songes haltel ! Cette considration prolonge la calamit de la vie. Car, sinon, qui supporterait du sort les soufflets et les avanies, les torts de l'oppresseur, les outrages de lorgueilleux, les affres de l'amour ddaign, les remises de la justice, l'insolence des gens officiels, et les rebuffades que les mritants rencontrent auprs des indignes, alors quun simple petit coup de pointe viendrait bout de tout cela ? William Shakespeare, Hamlet, Acte III, scne 1, extrait (1601), traduction dAndr Gide, in uvres compltes, tome 2, Gallimard, Bibliothque de la Pliade, 1959.

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