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Résilience d’un Géant Africain Volume II
Résilience d’un Géant Africain Volume II
Résilience d’un Géant Africain Volume II
Africain
Accélérer la Croissance et Promouvoir l’Emploi
en République Démocratique du Congo
Volume II :
Etudes Sectorielles
Editeurs
Johannes Herderschee
Daniel Mukoko Samba
Moïse Tshimenga Tshibangu
Résilience d’un Géant Africain
Accélérer la Croissance et Promouvoir l’Emploi
en République Démocratique du Congo
Volume II
Etudes sectorielles
Editeurs
Johannes Herderschee
Daniel Mukoko Samba
Moïse Tshimenga Tshibangu
ii
Dépôt légal
MM 3.01203-57060 Imprimerie Mediaspaul
Kinshasa
ISBN
978-2-7414-0720-1 Imprimé en RDC
www.mediaspaul.cd Printed in DRC
iii
Les fonds de Partenariat Belge pour le Réduction de la Pauvreté (BPRP) ont généreusement
fourni les ressources pour préparer la publication des papiers analytiques qui ont été commandés
par la Banque mondiale comme travaux d'analyse interne pour informer le Mémorandum
économique pays pour la République Démocratique du Congo et qui sont en cours de
publication à la demande des autorités congolaises. Les fonds BPRP ont également couvert la
composition et l'impression des 200 premiers exemplaires qui ont été distribués par la Banque
mondiale aux décideurs politiques en République Démocratique du Congo.
Les fonds reçus de l'Union Européenne ont facilité la distribution de 600 copies aux mem-
bres de l'Assemblée Nationale élus aux élections de 2011.
Copyright © 2012
La Banque Internationale pour la Reconstruction et le Développement/La Banque mondiale
1818 H Street,N.W, Washington, DC 20433. USA
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20433, USA, télécopieur : 202-522-2422, e-mail pubrights@worldbank.org.
iv
v
Chapitre 2 : La Gestion des Ressources Naturelles pour une Croissance Durable ............99
I. Introduction.....................................................................................................................99
II. Les industries extractives de la RDC ....................................................................... 101
III. Secteur forestier............................................................................................................ 151
IV. Maximiser le potentiel des ressources naturelles ................................................... 167
Notes........................................................................................................................................ 182
Avant-propos
Regorgeant de multiples potentialités au coeur du continent africain, la République
Démocratique du Congo, en tant que “pays au potentiel économique puissant” est
logiquement considérée non seulement comme une force stabilisatrice dans la Région,
mais aussi, comme locomotive dont l’attelage, pour ses nombreux voisins est susceptible
d'entraîner une parfaite et totale intégration régionale.
Ce souci d’intégration rend donc urgente la nécessité d’enlever le verrou qui bloque
le développement des nations africaines en général et de la R.D. Congo en particulier,
verrou qui s’est consolidé au cours des années écoulées à travers une histoire de
frustrations, marquée par une démission collective et l’absence d’un cadre fédérateur des
énergies du travail et de développement.
Il apparaît clairement que les enjeux présents et futurs, nationaux et sous-régionaux
devraient stimuler une dynamique institutionnelle appelée à favoriser la recherche d’une
sécurité nationale – accessible à travers la liquidation de différents litiges sécuritaires – et
allant de paire avec la recherche d’une sécurité économique, dans la mesure où il existe
une consubstantialité entre les deux variables de l’intégration.
Point n’est besoin de rappeler ici qu’après plusieurs décennies caractérisées par
une mauvaise gouvernance, notre pays, la République Démocratique du Congo, s’est
résolument engagée à améliorer la qualité de sa gouvernance dont l’incidence sur la
réduction de la pauvreté, et partant, sur la croissance et le développement dans divers
secteurs de la vie nationale n’est plus à démontrer.
La présente étude, fruit d’une synergie appréciable entre les experts congolais et ceux
de la Banque Mondiale, est l’aboutissement d’un diagnostic profond dont les résultats
permettent d’affirmer qu’un objectif et non des moindres a été atteint: celui d’attirer
l’attention des responsables congolais sur une gestion saine des ressources naturelles
et un recadrage macroéconomique susceptibles d’assurer une croissance durable et
multisectorielle à ce géant d’Afrique centrale qui est permanemment soucieux de
rencontrer les Objectifs du Millénaire pour le Développement ; en l’occurrence, son
volet “réduction de la pauvreté et de la faim” à l’horizon 2015.
Succinctement, hormis les me sures de la Zaïrianisation prises en 1973 et qui ont eu des
effets désastreux sur l’ensemble du tissu économico-industriel, on a longtemps observé
une déliquescence de la situation socio-économique, aggravée par d’interminables
guerres dans la sous-région des Grands lacs.
Fort heureusement, grâce à la politique de reconstruction nationale et au programme
des Cinq Chantiers de la République, les indicateurs objectivement vérifiables
témoignent que l’on assiste depuis cinq ans, à une reprise progressive de croissance
xii
Marlène KANGA,
Directrice Régionale pour l'Afrique Centrale
Banque Africaine de Développement
xv
Les cultures commerciales (palmier à huile, hévéa, café, cacao, thé, coton) consti-
tuaient une source importante de recettes d’exportation pour la RDC jusqu'à la fin des
années 60. Le secteur s’est effondré dès les années 70 en raison d’abord de la politique de
zaïrianisation qui a fortement amoindri les capacités techniques et managériales, puis des
différents conflits qui ont affecté les principales zones de production (pillages de 1991-
93, guerres 1996-2001). Aujourd’hui, la plupart des filières industrielles/d’exportation
sont sinistrées et leurs exportations ont chuté dramatiquement ou totalement disparu.
La RDC dispose d’un formidable potentiel pour l’élevage. Comme les autres
secteurs de l’économie congolaise, la production de viande a été fortement touchée par
les évènements sociopolitiques qui ont bouleversé le pays. La RDC dispose de 59.000
km2 de plans d’eaux intérieurs pour la pêche. Cela représente un potentiel productif
considérable, aujourd’hui largement sous-exploité.
La situation semble favorable a une reprise soutenue de la croissance agricole, tant
sur le marché national que sur les marchés régionaux et internationaux. La reprise de la
croissance nationale à partir de 2002 ainsi que la montée des prix des produits agricoles
sur les marchés internationaux ont créé une opportunité importante pour l’agriculture
congolaise. La demande intérieure est très porteuse pour les cultures vivrières et pour
les produits de l’élevage. La stratégie de relance du secteur, a été adoptée par l’ensemble
des acteurs du secteur agricole au cours d’un atelier organisé en 2006, est reflétée dans la
Note de Politique agricole (avril 2009) et dans le Code agricole récemment adopté par
le Gouvernement.
On pourrait dire que l’agriculture en RDC est à la croisée des chemins; la RDC
vient d’adhérer au processus PDDAA du NEPAD. L’Etape actuelle est l’élaboration du
Programme National d’Investissements Agricoles.
Ce chapitre offre une vue synthétique de la situation actuelle et comment on en est
arrivé à cette situation qu’on peut qualifier de catastrophique, la RDC étant maintenant
classé le dernier par l’IFPRI pour l’indice global de faim.
encaisse l’avance), le manque de spécialisation de sociétés qui fait qu’il y a peu de sous-
traitances, le fait qu’il y a peu de consortia de sociétés pour de gros projets spécifiques.
Donc une étude assez intéressante et originale sur un sujet spécifique qui est peu
connu et qui quand même concerne beaucoup de congolais. Car ne dit on pas que les
congolais ont hérité du colonisateur belge « la brique dans l’estomac » ?
Note de bienvenue
Cette publication est une initiative des autorités congolaises, préparée en collaboration
étroite avec les experts du pays et pour une audience d’abord congolaise. Elle a été
soutenue par la Banque mondiale ; et en tant que Directeur des Opérations, je suis très
honoré de pouvoir accompagner les autorités nationales dans leurs efforts de recueillir les
informations nécessaires relatives à l’économie congolaise et de les disséminer au public.
Le mandat de la Banque mondiale nous permet de soutenir la dissémination de ces études
au même moment qu’elle demeure la seule responsabilité des auteurs. Initialement, elles
étaient initiées par la Banque mondiale pour informer du Mémorandum Economique
Pays et nous sommes heureux que ces informations soient disponibles pour un large
public.
A la requête des autorités du pays en 2007, un rapport final du Mémorandum
économique pays pour la République Démocratique du Congo a été présenté en
Juin 2011. A cet effet, elles ont requis que toutes les études de fond (analytiques) y
afférant soient également publiées. Cette démarche démontre ainsi l’engagement à la
transparence et à la dissémination de l’information ; lequel devrait aider à la formulation
des politiques convenables et aussi des investissements.
La période de cette publication, qui coïncide avec celle de la formulation du
programme du nouveau gouvernement après les élections de Novembre 2011, assure
qu’elle servirait d’informer les nouvelles politiques du Gouvernement issu des élections
de 2011.
Faisant partie des partenaires au développement pour la République Démocratique
du Congo, je trouve aussi cette publication utile du moment où nous sommes en train
de préparer notre nouvelle Stratégie de Partenariat pour le Pays. Cette stratégie va
structurer notre engagement avec la RDC pendant la période 2012-2015, une période
qui coïncide aussi avec la seconde génération du document de Stratégie de Croissance et
de Réduction de la Pauvreté, adopté récemment par le gouvernement.
Eustache Ouayoro
Directeur des Opérations pour la
République Démocratique du Congo
Banque mondiale
xxii
Remerciements
Ce livre est le deuxième volume de la série intitulée « Résilience d’un Géant Africain »,
qui documente les développements économiques en République Démocratique du
Congo (RDC). La série vise à rendre accessible à un public plus large l’analyse sur
ces développements, afin de susciter le débat sur l’économie politique de ce géant en
puissance. Un tel débat bénéficiera, sans nul doute, de l’information la plus complète
sur la situation actuelle, le parcours qui l’a généré, ainsi que les coûts et avantages des
politiques alternatives. Le débat concerne chaque niveau décisionnel, des ménages qui
doivent choisir entre investir dans l’éducation des enfants et dépenser pour l’alimentation
et le logement jusqu’au Parlement et au Gouvernement qui doivent opérer des choix
d’intérêt national.
A la demande des autorités, le Mémorandum Economique de la Banque mondiale
pour la République Démocratique du Congo a examiné les obstacles à une croissance
économique plus forte en RDC. Rédigé par le personnel de la Banque mondiale, en étroite
collaboration avec des experts nationaux, le Mémorandum a puisé dans quatorze études
analytiques dont il constitue la synthèse. Les participants à l’atelier de présentation du
Mémorandum en juin 2011 ont souhaité la publication de toutes les études analytiques.
Les autorités ont également exprimé le même vœu. Vu leur nombre élevé, les études ont
été regroupées en trois volumes.
Les éditeurs expriment leur reconnaissance au Fonds de Partenariat Belge pour la
Réduction de la Pauvreté (BPRP) qui a financé la publication des trois volumes.
Le second volume analyse la situation des secteurs qui disposent d’un potentiel
susceptible de générer plus d’emplois et de stimuler la croissance économique. Ces
secteurs sont potentiellement en concurrence en raison soit de la dotation du pays en
plusieurs ressources (agriculture, mines et autres ressources naturelles), de la dynamique
démographique qui favorisent l'urbanisation ou soit des augmentations rapides de la
demande de services de construction en raison d'un boom des infrastructures. Il y a un
consensus national que la RDC devrait être plus compétitif dans ces secteurs. Cependant,
ceux-ci demeurent encore bien en dessous de leur potentiel. L'objectif de ce volume est
de présenter l'état actuel des choses, d'identifier les principaux obstacles à la croissance et
de suggérer des options pour surmonter ces contraintes.
Le premier chapitre traite des questions liées à l'agriculture. Il se concentre sur la
demande pour les produits agricoles et la façon dont l'offre de la RDC peut desservir
ces marchés. Ces marchés se composent de la demande locale, de la demande nationale
des centres urbains et de la demande internationale qui pourrait être satisfaite par les
exportations. Dans le passé, toutes ces demandes étaient fournies par la production
nationale, ce qui peut encore se faire. Cependant, l’isolement pendant longtemps des
xxiii
producteurs agricoles les a privés de l'accès aux capitaux et aux nouvelles technologies.
Les politiques publiques pourraient atténuer ces obstacles. Les nouvelles technologies
telles que celles liées aux semences seraient bénéfiques pour tous les producteurs, en
particulier dans une région donnée si elles sont fournies par un institut de recherche
national ou régional. L'agriculture pourrait aussi bénéficier de la reprise des larges
domaines agricoles, lesquels pourraient se transformer en pôles de croissance naturels.
Toutefois, la relance de ces domaines soulève de nombreuses questions qui ne pouvaient
être abordées dans ce chapitre. Ainsi ce nouveau défi n'est pas entièrement exploré, même
si certaines de ces questions sont abordées ailleurs dans le volume, tels que les questions
de droits fonciers, abordés dans le second chapitre, ainsi que les questions transversales
telles que l’emploi qualifié, qui sont abordées dans le troisième volume de cette série.
En reconnaissant l'importance de l'agriculture pour la croissance économique et la
réduction de la pauvreté, certaines questions substantielles de l’agriculture sont abordées
dans l’« Etude Diagnostique pour l’Intégration au Commerce» qui a été préparée par
la Banque Mondiale à la demande et en étroite coopération avec les autorités nationales
avec l'appui financier du « Secrétariat du cadre intégré renforcé » de l'OMC à Genève.
Cette étude, achevée en 2010, a été bien accueillie. Depuis lors, les auteurs ont ajouté
des sections sur certains secteurs qui sont particulièrement importants pour la réduction
de la pauvreté. L'agriculture contribue à cet objectif à la fois en créant des emplois et en
abaissant les prix des denrées alimentaires. Michael Morris a fourni des commentaires
pertinentes aux cours d'une revue interne de la Banque mondiale sur ce chapitre. Les
experts du pays ont fait des suggestions utiles lors des présentations à Kinshasa en
Octobre 2009, Février 2010 et Juillet 2010 et lors des présentations à Kisangani,
Kananga et Matadi au cours de la première moitié de 2010. La préparation du document
et le processus de consultation a été possible grâce aux contributions financières de
« Secrétariat du cadre intégré renforcé», le « Fonds pour la Facilitation du Commerce »
de la Banque Mondiale et les Fonds de Partenariat Belge pour la Réduction de la Pauvreté
(BPRP).
Le deuxième chapitre se concentre sur la gestion des ressources naturelles et les droits
fonciers. Il ne fait aucun doute que la RDC est richement dotée en ressources naturelles,
y compris les actifs du sous-sol, les forêts, et le potentiel agricole. Dans certains cas, la
technique d’exploitation la plus efficace consiste à des contrats à grande échelle avec
des entreprises internationales. Dans ce cas, la RDC pourrait bénéficier à travers les
contributions fiscales de ces entreprises. Cependant, ces contrats ne maximisent pas
nécessairement la contribution à la croissance et l'emploi. Cet article examine donc en
détail le potentiel de ces secteurs pour contribuer directement à la croissance et à l'emploi,
mais aussi indirectement en favorisant les liens en amont et en aval. Dans le cadre du
processus de revue de ce chapitre à la Banque mondiale, Jacques Morisset a fourni
des commentaires utiles. Les principales conclusions ont été présentées à l'Université
xxiv
c.-à-d. : c'est-à-dire
Équivalence monétaire
(En décembre 2010)
Chapitre I
L’Agriculture :
Pierre Angulaire de l’Economie
de la RDC
Jean-Paul Chausse, Thomas Kembola et Robert Ngonde
I. Introduction
L’agriculture est la base de l’économie congolaise. Sa part dans le revenu national a
atteint jusqu’à 50% dans les années 1990, en partie à cause de l’effondrement des autres
secteurs de l’économie (secteur minier en particulier). Depuis la restauration de la paix
en 2002, cette part a graduellement baissé, mais le secteur agricole fournissait encore
40,3% du PIB (contre environ 13% pour le secteur minier) et employait les trois quarts
de la population active en 2006.
De toutes les sources de croissance, le secteur agricole a le plus fort potentiel
de réduction de la pauvreté. Tout d’abord, il est intensif en main d’œuvre. Pour ne
mentionner qu’une filière, la production d’arabica requiert 450 jours de travail – soit
deux emplois agricoles à plein temps - à l’hectare, y compris la production et les activités
en aval. C’est donc 20 000 emplois a plein temps que créerait la mise en production de
10 000 ha supplémentaires et, donc, des revenus pour environ 160 000 personnes. Il en
est de même pour le palmier à huile et la plupart des autres cultures industrielles. Ces
emplois sont, de plus, créés à un coût très faible. En second lieu, les revenus agricoles
tendent à être dépensés sur des biens et services produits localement, ce qui a un effet
multiplicateur important sur l’économie locale. Enfin, la croissance de la productivité
agricole réduit les prix des denrées alimentaires, fournissant ainsi des « transferts
invisibles » à l’ensemble de la population et aux autres secteurs de l’économie. Ainsi,
on a constaté que la croissance des revenus ruraux réduisait non seulement la pauvreté
rurale mais encore la pauvreté urbaine (alors que l’inverse n’est pas vrai).1
L’effondrement de l’agriculture congolaise pendant le conflit de 1998-2002 (après
un long déclin) s’explique par l’extrême violence de celui-ci et par les déplacements
massifs de population qui ont suivi. Le rétablissement de la sécurité et le retour des
réfugiés sur leurs terroirs d’origine permettra, si l’on en croit l’expérience internationale,
2
6 000 t/an). De même, les productions d’hévéa, d’arabica, de robusta et de thé ont toutes
chuté de façon spectaculaire. Cette sous-utilisation des ressources naturelles du pays et
corollairement des ressources humaines représentent à la fois un immense gaspillage et
un gisement d’accroissement de la production très important, pourvu que les capacités
soient recréées pour que les producteurs puissent répondre aux besoins du marché.
a. Cultures vivrières
Les cultures vivrières représentent l’essentiel (80%) du PIB agricole. Le manioc est la
principale culture vivrière du pays. Il est cultivé dans toutes les régions de la RDC. Les
autres spéculations ont une importance variable en fonction des régions : le maïs dans
le sud (Katanga) et le haricot dans l’est. A cause de la détérioration des infrastructures
de transport et de la désorganisation des circuits de commercialisation, la production
vivrière est largement destinée à l’autoconsommation et/ou à l’approvisionnement des
marchés de proximité. Les principales cultures vivrières sont le manioc, le maïs, le riz, la
banane plantain et le haricot. La production est de type traditionnel sans utilisation de
variétés sélectionnées – sauf dans de rares cas pour le manioc – ou d’intrants (engrais,
produits phytosanitaires) et donc les rendements sont très faibles. D’après les statistiques
officielles, la production vivrière a connu au mieux une stagnation et probablement un
déclin depuis le début des années 1990. Il est certain toutefois que la production a été
très inférieure à la croissance démographique ce qui a aggravé l’insécurité alimentaire
dans l’ensemble du pays, et en particulier en zone urbaine, malgré un accroissement
considérable des importations alimentaires (riz, maïs, huile de palme…). Les raisons de
ce déclin sont largement les mêmes dans tous les cas : impossibilité de produire pour les
grands centres de consommation, absence de variétés améliorées et d’intrants, méthodes
culturales inadéquates, forte incidence des maladies et prédateurs et pertes après récolte
très élevées. Le déclin des productions vivrières, facteur d’insécurité alimentaire à la fois
au niveau national et au niveau des ménages, témoigne de la gravité de la crise traversée
par le pays depuis un demi-siècle. Leur croissance soutenue est donc la clé à la fois de la
croissance du secteur dans son ensemble et de la sécurité alimentaire du pays.
Le manioc est un produit essentiel sur la majeure partie du territoire, particulièrement
dans le nord-ouest du pays (Bas-Congo, Bandundu, Équateur, Kasaï et Province
orientale). La production totale actuelle est estimée à 15 millions de tonnes, en nette
régression par rapport à 1991 (20 millions). Les rendements moyens – entre 7 et 8 t/
ha – très faibles à cause de l’utilisation de variétés traditionnelles à faible productivité
et sensibles aux maladies et aux insectes (notamment la mosaïque, l’anthracnose et la
cochenille) et l’utilisation de techniques culturales inadéquates sont les problèmes
essentiels des producteurs de manioc. La FAO, le SECID (USAID) et l’IITA appuient
la relance de la production par le biais d’un programme visant à la multiplication et à la
distribution accélérée de boutures saines de variétés sélectionnées pour leur tolérance ou
4
leur résistance à la mosaïque. L’effet positif de ce programme est attesté par le fait que
de nombreux agriculteurs paraissent prêts à payer pour obtenir les boutures améliorées.
Le maïs est la principale céréale produite en RDC, avec un niveau de production
quatre fois plus important que le riz. Sa culture est très répandue en RDC, mais
particulièrement au Katanga, dans les deux Kasaï, le Bandundu et dans le nord de
l’Équateur. C’est le seul produit agricole dont la production semble avoir (faiblement)
augmenté depuis les années 90 (de 1 million de tonnes en 1990 à 1,2 million en 2002).
Les rendements sont variables d’une région à une autre – avec de grands exploitants
atteignant de très hauts rendements au Katanga – mais la moyenne nationale est faible,
à moins de 1 t/ha, du fait de la faible utilisation de variétés améliorées et d’intrants
agricoles, et de l’importance des dégâts causés par divers parasites. Les conditions agro-
climatiques de la RDC sont toutefois favorables à la production de maïs et permettent
au Congo non seulement de s’auto-suffire (éliminant les importations en particulier de
la Zambie), mais encore de se positionner – après réhabilitation des infrastructures de
transport et avec un accès satisfaisant aux semences de qualité et aux intrants – comme le
grenier à céréales de la sous-région.
Le riz est cultivé principalement dans plusieurs provinces : Équateur, Orientale, Maniema
et Kasaï. La riziculture pluviale extensive représente près de 98 % des superficies rizicoles.
Il est aussi produit en culture de bas-fonds et dans les plaines inondables irriguées du
Bandundu, dans le Bas-Congo, la périphérie de Kinshasa et dans les autres grandes villes.
La production a décliné régulièrement depuis le début des années 90, passant de 395 000
tonnes en 1991 à 325 000 tonnes en 2002, soit une diminution de l’ordre de 17,23%, alors
que la consommation a fortement augmenté en particulier en zone urbaine. Cela a entraîné
une augmentation spectaculaire des importations qui ont atteint 200 000 tonnes en 2006.
Comme dans le cas des autres cultures vivrières, les rendements sont très faibles (moins d’une
tonne de paddy/ha) et pourraient être considérablement accrus par l’utilisation de variétés
améliorées (NERICA par exemple) et de meilleures pratiques culturales. La RDC dispose
d’un potentiel rizicole important, tant en conditions pluviales (zones de Bumba et Maniema)
qu’en conditions irriguées (vallée de Ruzizi, etc.) ou en cultures de bas-fonds dans presque
toutes les provinces, et pourrait facilement atteindre l’autosuffisance en riz.
Les autres cultures vivrières importantes sont l’arachide, le haricot et la banane plantain.
Elles ont toutes connu des baisses importantes de production. La production d’arachide
a chuté de 30% entre 1990 et 2002 (de 500 000 à 370 000 tonnes). Celle de haricots a
connu une baisse encore plus accentuée pendant cette période (200 000 t à 110 000
tonnes). Une grande partie de la production se situe dans le Kivu, au Katanga et au Bas
Congo. La banane plantain est cultivée principalement pour l’autoconsommation et
dans bien des cas elle constitue la base alimentaire (Province orientale). On estime que la
production nationale était de 500 000 t. en 2002 alors qu’elle était de l’ordre de 2 millions
de t. en 1990 (soit une chute de 75%). Cependant, il n’y a aucun effort d’amélioration de
5
b. Cultures commerciales
Les cultures commerciales (palmier à huile, hévéa, café, cacao, thé, coton) constituaient
une source importante de recettes d’exportation pour la RDC jusqu’à la fin des années
60. Elles étaient produites essentiellement dans le nord du pays (Bas-Congo, Équateur,
Province orientale, Kivu) à l’exception du coton, qui était aussi produit dans le Kasaï et
le Katanga. Le secteur était dominé par de grandes exploitations commerciales bien que
l’agriculture familiale ait été très importante aussi, notamment pour le coton, le robusta,
le cacao et le palmier à huile. Elles se sont effondrées dès les années 70 en raison d’abord
de la politique de zaïrianisation qui a fortement amoindri les capacités techniques et
managériales du secteur, puis des différents conflits qui ont affecté les principales
zones de production (pillages de 1991-93, guerres 1996-2001). La disparition des
grandes exploitations modernes a entraîné celle des petites exploitations familiale qui
en dépendaient pour leur accès aux marchés et aux services. Aujourd’hui, la plupart
des filières industrielles/d’exportation sont sinistrées et leurs exportations ont chuté
dramatiquement ou totalement disparu.
Les filières commerciales principales (palmier à huile, hévéa, arabica, robusta, cacao,
thé et coton) sont résumées ci-dessous :
6
d’environ 5000 t en 1960 et a atteint environ 11 000 au milieu des années 1970, avant de
s’effondrer lorsque la plupart des domaines ont été abandonnés. La production actuelle
est de 2 000 t.
Coton. A l’indépendance, la RDC était le premier producteur africain de coton avec
environ 800 000 producteurs produisant 180 000 t de coton graine dans l’Équateur, la
Province orientale, le Maniema, le Katanga, les deux Kasaï et le Sud-Kivu. Depuis 1990,
la dégradation continue de la situation sécuritaire et économique de la RDC, l’instabilité
des prix internationaux et la concurrence accrue des tissus chinois sur le marché intérieur
ont graduellement détruit la production cotonnière et l’industrie textile congolaise. En
2006, la production totale du pays n’excédait pas 1 000 tonnes de coton graine. Une
seule entreprise textile était encore en activité (CODENOR à Kisangani).
c. Élevage
La RDC dispose d’un formidable potentiel pour l’élevage. Elle possède en effet près
de 90 millions d’hectares de pâturage, soit un plus du tiers de la superficie totale du
pays, qui pourraient accueillir quelque 40 millions de unités gros bovins et fournir près
de 1,5 millions de tonnes de viande par année, même en élevage extensif, soit 23 kg/
habitant. Comme les autres secteurs de l’économie congolaise, la production de viande
a été fortement touchée par les évènements sociopolitiques qui ont bouleversé le pays,
notamment les évènements de la fin des années 1990 et du début des années 2000. Bien
que le Service national de statistiques agricoles (SNSA) ne soit plus en mesure de produire
des statistiques fiables, il semble que la production de viande, après avoir atteint un
sommet de 84 663 tonnes en 1994, n’était que de 68 278 tonnes en 2006, avec un cheptel
national estimé à environ 7 millions de têtes de petits et gros bétails (dont 750 000 têtes
de gros bétail, en forte baisse depuis le début des années 90) : 60 % de caprins, 15 % de
porcins, 14 % d’ovins et 11 % de bovins.
Le tableau 1.1. indique que la production nationale est estimée à 68 300 tonnes par
an (2006). Elle serait ainsi revenue au même niveau qu’en 1974, 32 ans plus tôt. Pendant
cette période, la population ayant plus que doublé, la quantité de viande produite par
habitant aurait donc été presque divisées par 3 (de 3,2kg/an en 1974 à 1,2 kg/an). La
production nationale actuelle représente autour de 10% de la consommation de protéines
animales du pays (16kg/an par habitant). Le solde est couvert par les produits de la pêche
nationale (5 kg/an), des importations de viandes et de produits halieutiques (360 000
tonnes en 2006) en constante progression et, surtout en zone rurale, par la viande de
brousse (y-compris larves et insectes).3 Les importations de produits animaux ajoutent
environ 6 kg/an par habitant portant la disponibilité totale à environ 16 kg/an. Elles
sont surtout destinées à l’approvisionnement des grandes villes et sont dominées par le
poisson congelé (55% du total) et les viande et abats de volaille (60% des importations
de viande).
8
Tableau 1.1. Production et importations de viande
9
efficace pour la production de viande. Les porcs peuvent en effet consommer des aliments
plus divers que les poules et le taux de conversion des aliments des races améliorées est
environ le double de celui des races améliorées de volailles.
Volailles et œufs. Dans tout le pays, les Congolais élèvent des volailles: la production
traditionnelle extensive dans les zones rurales et la production intensive en zone
périurbaine. Comme les chèvres, les poules de brousse ne bénéficient d’aucune attention.
Les élevages commerciaux intensifs nécessitent eux des systèmes complexes tant pour
l’alimentation des volailles que pour les conditions sanitaires. Le secteur moderne de
la volaille et des œufs était jadis florissant en périphérie des villes, avec des exploitations
commerciales allant jusqu’à 30 000 pondeuses. Beaucoup d’entre elles ont disparu en
raison de problèmes de manque d’intrants et de services vétérinaires, de mauvaise qualité
des aliments et surtout de la concurrence des importations à bas prix. Bien qu’il existe
des restrictions aux importations, elles sont régulièrement contournées.
La croissance démographique de la RDC (3% par an), combinée à l’augmentation des
revenus et à la croissance urbaine, devrait entraîner une forte croissance de la demande
nationale en viandes/protéines animales au cours des prochaines années (de l’ordre
de 5%/an). La consommation actuelle (estimée à environ 15 kg/an/habitant) est très
inférieure aux recommandations de la FAO qui suggèrent 25 kg par personne et par an.
A cette croissance de la demande, s’ajoute pour les producteurs nationaux la possibilité
de combler une partie des importations. Comme mentionné ci-dessus, la production
nationale de représente en effet que 20% de la consommation du pays et le remplacement
des importations représente donc une opportunité de croissance considérable pour les
producteurs congolais, sans compter sur celle que pourrait fournir les marchés de des
pays voisins.
La RDC dispose d’atouts considérables pour répondre à cette demande. Les
vastes étendues de savanes aujourd’hui inexploitées peuvent être mises au service du
développement de la production bovine extensive. La RDC serait en effet dotée de près
de 90 millions d’hectares de pâturage, soit un plus du tiers de la superficie totale du
pays qui pourrait accueillir quelque 40 millions de unités gros bovins et fournir près
de 1,5 millions de tonnes de viande par année, même en élevage extensif, soit 23 kg/
habitant. Le pays dispose en outre d’amples opportunités pour l’implantation d’unités
de production avicole ou porcine du type industriel ou semi industriel autour des centres
urbains. En effet, le pays produit une grande variété de céréales, légumineuses (soja) et
tubercules (manioc) qui peuvent servir de base à l’alimentation du bétail. Ce potentiel
est à l’heure actuelle grandement sous-utilisé. Le développement des élevages à cycle
court en périphérie des grands centres urbains non seulement valoriserait les productions
végétales locales mais aussi fournirait des aliments à faible coût à une population urbaine
aux revenus encore modestes.
11
la conduite et la santé des élevages. Cela est particulièrement le cas pour les éleveurs du
secteur traditionnel et les petits élevages semi-modernes. Le développement du secteur
demandera enfin des appuis financiers à la reconstitution des troupeaux.
La faiblesse persistante des ressources de l’Etat et celle, probable, des services publics
implique que l’État recentre son effort sur (i) ses missions régaliennes -- réglementation,
recherche, contrôles sanitaires et des épizooties -- et (ii) un soutien à l’implication du
secteur privé dans les activités productives et dans la fourniture de services marchands
aux éleveurs par des opérateurs tels que les ONG5, les prestataires privés (y-compris
l’ appui aux vétérinaires privés) et les grandes exploitations commerciales pouvant
trouver leur intérêt a apporter un soutien aux petits producteurs individuels (ou à leurs
associations) établis dans leur zone d’influence.6 Ces propositions semblent offrir une
option crédible pour reconstituer rapidement le cheptel en s’appuyant sur l’expérience
et la capacité existante tant au niveau des maîtres d’œuvre qu’à celui des bénéficiaires.
Pour la relance de l’ aviculture et de la porciculture semi-industrielle périurbaine, qui
demandent une très bonne maîtrise technique et financière, une option intéressante
serait de mettre en place, comme recommandé dans la « Note d’orientation stratégique
pour le développement agricole », un partenariat public-privé chargé de fournir les
intrants de bonne qualité (poussins de un jour, géniteurs, aliments de bétail équilibrés)
et les services (vaccinations, formations, conseil en gestion d’ élevage) nécessaires. Cette
option demanderait cependant une très bonne coordination des actions et donc à être
mise en œuvre dans le cadre d’un projet spécifique de grande envergure.
d. Pêche
La RDC dispose de 59 000 km2 de plans d’eaux intérieurs pour la pêche : 34 000 km2 de
rivières et marais dans le vaste bassin du Congo et 25 000 km2 de lacs dans la Vallée du
Rift. Cela représente un potentiel productif considérable, aujourd’hui largement sous-
exploité. Les principaux plans d’eau intérieurs sont donnés dans l’encadré ci-dessous.
Par contre, le pays n’a pratiquement pas de côte sur l’Atlantique et son potentiel de
production de poissons de mer est très modeste. Dans les années 80, le produit de la
pêche maritime ne représentait que 2% du total national. Naguère, la pêche maritime de
la RDC dépendait d’accords pour l’exploitation des eaux territoriales des pays voisins :
Angola, République du Congo, Gabon et Namibie. Du fait de la guerre et de l’instabilité
politique, le maintien de ces accords a été aléatoire. En outre, la dégradation du climat
économique et des possibilités de commercialisation ont amené une détérioration de la
flotte de pêche faute d’entretien.
Le potentiel d’aquaculture en RDC est considérable notamment autour des grandes
villes, où l’on peut pratiquer plus aisément des techniques aquacoles intensives,
orientées vers le marché. L’aquaculture a commencé en RDC dès les années 1940. Lors
de l’indépendance, il y avait déjà 45 centres d’alevinage d’une capacité de production
totale de 10 000 tonnes par an. Ces centres fournissaient environ 15 000 aquaculteurs,
13
exploitant quelque 126 000 étangs représentant une superficie totale d’environ 9 000
hectares. Les rendements annuels étaient de l’ordre de 75 kg/ha et la production totale
était estimée à quelque 70 000 tonnes. Malheureusement, après l’indépendance, ces
centres ont rapidement décliné en raison de la situation économique, du retrait de
l’assistance technique extérieure et de dizaines d’années de guerres et de troubles civils.
Plusieurs projets ont été lancés dans les années 70 et 80 pour relancer le secteur, mais
ces efforts ont été interrompus au début des années 90, du fait de la suspension de l’aide
étrangère pendant les troubles civils de 1991 et 1993. On n’a pas d’informations récentes
de l’état de l’aquaculture en RDC.
Le lac Albert est commun à l’Ouganda (54%) et à la RDC (46%). Comme les autres
grands lacs de la Vallée du Rift occidentale, il porte une grande diversité de poissons.
Les statistiques des années 80 montrent que les volumes pêchés dans l’ensemble du
lac ont fortement varié : entre environ 7 000 à environ 20 000 t. Sur les quelques
unité industrielles qui pêchaient dans les eaux de la RDC au début des années 70,
une seule serait encore en exploitation.
Le Bassin du fleuve Congo. Le fleuve Congo et ses affluents représentent quelque
33 000 km de voies d’eau. Pendant les hautes eaux, les plaines d’inondation et les
marais couvrent des dizaines de milliers de km2. Les zones inondées n’ont pas été
mesurées précisément : les estimations vont de 25 000 à 50 000 km2. Les rapports
de la FAO du milieu des années 80 indiquent : un potentiel annuel de rendement
de 90 000 t ou plus ; un effort très dispersé, certains groupes de pêcheurs travaillant
à partir de petits villages ou de campements temporaires et utilisant des méthodes
traditionnelles de pêche et un volume de prises de l’ordre de 20 000 t atteignant les
marchés de Kinshasa.
Autres lieux de pêche : (i) l’ensemble de lacs et de zones inondables de Lualaba, aussi
appelé la Dépression de Kamolondo, qui comporte plus de 50 lacs de toutes tailles
était estimé, au début des années 80 produire un volume de prises compris entre
10 et 16 000 t ; (ii) les forêts inondés du bassin central du Congo dans la région de
Mbanda-ka au confluent entre l’Oubangui et le Congo , qui couvre près de 38 000
km2, dont le rendement potentiel annuel est estimé entre 100 000 et 120 000 t ; (iii)
le lac Tumba, pièce d’eau peu profonde dont le potentiel annuel est estimé entre 2
000 et 3 500 t ; (iv) le lac Mayi Ndombe, lac peu profond du mi-Congo et les forêts
inondées et marais qui l’entourent, d’un potentiel annuel estimé à environ 1 000 t
et enfin (v) le Pool Malebo (anciennement Stanley Pool), le grand lac fluvial formé
par l’élargissement du fleuve Congo entre les villes de Kinshasa et de Brazzaville où
le total annuel des prises, au milieu des années 80, était estimé, pour la RDC, entre
3 000 et 3 500 t.
La production nationale est estimée à environ 200 000 tonnes par an. La consommation
par habitant et par an est estimée à environ 6 kg, soit une consommation annuelle
totale de poisson d’environ 400 000 tonnes. Le solde des besoins est satisfait par des
importations de poissons congelés bon marché (200 000 tonnes en 2006) représentant
une valeur d’environ 75 millions d’USD.7 Au taux de croissance actuel (la population
du pays va doubler d’ici 25 ans), en supposant que la consommation par habitant reste
à son niveau actuel, la demande totale de poisson devrait atteindre 800 000 t par an vers
2035. Si on prend en compte une augmentation, même modeste, de la consommation
par habitant, la demande annuelle totale pourrait atteindre un million de tonnes.
15
Bien qu’il ne soit pas possible d’établir une image fiable de la production actuelle
et du potentiel des pêches de RDC (les données statistiques et autres sur les divers
plans d’eau font défaut ou sont périmées), il est évident que l’énorme potentiel du
pays est actuellement sous-exploité. En 1997, la FAO estimait que le potentiel national
de production représentait environ 700 000 t/an, dont moins de 10 000 t. venant
de la mer. Il y a donc une grande marge pour augmenter la production intérieure et
contenir les importations. Malheureusement, le très mauvais état des infrastructures de
transport et l’absence totale d’une chaîne du froid limite sérieusement les possibilités
d’approvisionnement des grands centres urbains, et donc l’incitation à augmenter l’effort
de pêche. La rénovation de la navigation fluviale, des routes rurales et des infrastructures
commerciales sont donc cruciales pour le développement du sous-secteur de la pêche. La
production de la pêche artisanale intérieure est de loin la principale source potentielle de
croissance. Elle pourrait être renforcée par : l’adoption de techniques et d’équipements
modernes de pêche (canots à moteur), par l’organisation des pêcheurs pour faciliter la
commercialisation de leurs produits et par la réduction des pertes après prises, qui sont
très élevées. L’expansion de la pêche maritime ne sera pas possible sans une expansion
vers les zones maritimes des pays voisins, ce qui nécessiterait des accords de pêche effectifs
avec eux. Enfin, le développement de la pisciculture offre un potentiel considérable pour
l’approvisionnement des grandes villes. Le grand obstacle à une croissance durable de
la production reste la concurrence des importations bon marché de poisson congelé
(chinchard). Il est très peu probable que la production intérieure soit capable de devenir
compétitive par rapport à ces importations de mauvaise qualité venant des flottes de
pêche industrielles océaniques. Toute stratégie de développement du secteur de la pêche
nécessitera donc une protection raisonnable contre les importations de produits de basse
qualité. Cela nécessitera un arbitrage difficile entre les intérêts de deux groupes sociaux
majeurs : les consommateurs et les producteurs ruraux pauvres.
Les importations de produits alimentaires, elles, ont connu une évolution inverse. Les
producteurs congolais ont été graduellement coupés de leurs principaux marchés par
l’insécurité grandissante dans les zones rurales, la forte augmentation des coûts de
transport due à la dégradation des infrastructures et le racket systématique pratiqué par
des administrations publiques et des groupes armés. Par ailleurs, ils ont aussi cessé d’avoir
accès aux services essentiels – semences, intrants, conseil – ce qui a entraîné une baisse
de la productivité agricole. Les producteurs, à l’exception de ceux situés à proximité
immédiate des grands centres de consommation, ont donc opté pour une stratégie
d’autosuffisance, ne commercialisant que le surplus occasionnel de leur production.
Les grandes villes, en particulier Kinshasa, ont donc cessé d’être approvisionnés par la
production intérieure et ont dû se tourner vers les importations, même pour des produits
pour lesquels le pays a des avantages comparatifs certains, comme le riz, le maïs, l’huile
de palme et la viande.
17
Bien que la déficience des statistiques agricoles ne permette pas encore de l’établir avec
certitude, il semble que le retour de la paix et de la sécurité dans une grande partie du pays
depuis 2002 ait permis une reprise de l’activité agricole et un début de redressement des
exportations (arabica, latex, thé). Il est encore trop tôt pour déterminer si le redressement
du secteur a permis une réduction structurelle des importations alimentaires.
L’accroissement de la population et des revenus, urbains en particulier, va provoquer une
augmentation de la demande alimentaire, mais il faudra que la production nationale soit
compétitive avec les importations concurrentes pour qu’elle puisse reconquérir de sa part
de marché et permette une réduction des importations. Bien que, comme on l’a dit, la
RDC possède des avantages comparatifs certains pour la production d’un grand nombre
de produits agricoles, de nombreuses contraintes devront être levées pour transformer
cet avantage comparatif en réelle compétitivité.
a. Le marché national
Étant donné l’importance déterminante des cultures vivrières dans la production
agricole de la RDC, le marché national est un débouché incontournable pour la
croissance du secteur agricole. En raison de la baisse des revenus, la demande intérieure
a été au mieux stagnante au cours des deux dernières décennies, le déclin des revenus
annulant l’accroissement de la population, comme le montre la dégradation continue
de la situation nutritionnelle des ménages dans les grands centres urbains. Cependant,
la reprise de la croissance économique depuis 2002 devrait permettre aux revenus,
en particulier urbains, de progresser et donc de soutenir une demande croissante en
produits alimentaires. En effet, la croissance du PIB par habitant a été d’environ 3% par
an au cours de la période 2003-2008. Les ménages devraient utiliser une grande partie
de l’augmentation de leurs revenus non seulement pour améliorer leur état nutritionnel
(pour la plus grande partie de la population), mais aussi de façon progressive, pour
réorienter leur consommation vers des produits à plus haute valeur ajoutée (fruits et
légumes, viandes…). L’effet combiné de la croissance démographique (au rythme très
élevé de 3% par an), de la hausse des revenus et de l’attrait croissant pour les produits de
plus haute valeur pourrait donc se traduire par une progression de la demande intérieure
en produits alimentaires d’au moins 6% par an à moyen terme.
De plus, la substitution de produits locaux aux importations alimentaires représente
un gisement non-négligeable de croissance pour le secteur. L’augmentation des prix des
produits agricoles sur les marchés internationaux constitue une excellente opportunité
pour l’agriculture congolaise et l’amélioration des infrastructures de transport entre les
principaux centres urbains. Leurs bassins de production des produits locaux devraient
leur permettre d’être pleinement compétitifs avec les produits importés. Cela semble
tout à fait possible pour le riz, le maïs, l’huile de palme, les produits carnés et peut-être
pour le sucre dont les prix, bien qu’ayant baissé depuis les plus hauts atteints à la fin 2008
devraient cependant rester élevés à l’horizon 2015 (470 $/tonne pour le riz, 780 $/tonne
pour l’huile de palme, voir ci-dessous). D’autre part, il existe un potentiel important
de substitution de la farine de manioc à la farine de blé importée pour la production
de pain (20% de farine de manioc n’altère pas le goût, et améliore la durée de vie et la
texture du produit) et la production de gari peut aussi constituer, comme en Afrique de
l’Ouest, une alternative à la consommation de pain et de riz. La substitution d’une partie
des importations actuelles représente une source de croissance additionnelle pouvant
entraîner une croissance globale de la demande nationale en produits alimentaires de
l’ordre de 7% à 8% par an sur les 5 à 7 prochaines années. Si la réponse des producteurs
congolais était proportionnelle à cette demande, cela aurait un effet majeur sur la
réduction de la pauvreté, en particulier en zone rurale. Il est en effet démontré que la
croissance des revenus agricoles non seulement a des effets multiplicateurs importants
sur l’économie non-agricole locale mais encore contribue à l’atténuation de la pauvreté
dans les autres secteurs de l’économie et dans les zones urbaines.
19
bonne partie des exportations de café du Rwanda est ainsi originaire des Kivu, transitant
par l’axe nord (Goma-Kigali-Kampala-Nairobi-Mombasa). La RDC est membre de
la SADC et du COMESA et les opportunités du marché régional ne peuvent que se
développer avec l’application des accords régionaux et le renfoncement de l’intégration
régionale.
exportations mondiales de thé. Sur le marché international le thé est en majorité vendu
aux enchères. Les prix sont très volatiles en relation directe avec la qualité et la quantité des
récoltes annuelles. En 2009, ils ont été de 2,70 USD/kg, soutenus par un déficit de l’offre
par rapport à la demande. La croissance soutenue de cette dernière, malgré l’augmentation
prévue de la production et l’entrée sur le marché international du Vietnam, devrait
permettre de stabiliser les prix autour de 2,30 USD/kg. Comme dans le cas de l’arabica,
il est important pour la RDC de positionner sa production sur les marchés du thé de
qualité qui obtient des prix très supérieurs à ceux du thé tout-venant. Ceci est tout à fait
envisageable vu les conditions agro-climatiques très favorables à la production de thé de
qualité dont dispose la RDC, mais demandera des investissements considérables en matière
de variétés et d’usinage.
Cacao. Le cacao est l’un des seuls produits de base à ne pas avoir enregistré l’impact négatif
de la récession économique et à avoir vu, au contraire, son cours ne cesser d’augmenter sur
les marchés internationaux pour atteindre 3,5 USD/kg en décembre 2009, plus haut depuis
près de 30 ans. Cette envolée est due principalement aux préoccupations du marché face
aux incertitudes pesant sur la production de Côte d’Ivoire, premier producteur mondial à
court terme, mais aussi à plus long terme à cause du vieillissement des plantations et d’un
éventuel déclin structurel de la production. Cependant cette hausse des cours internationaux
devrait freiner la demande et inciter les planteurs ivoiriens à renouveler les plantations et les
autres pays producteurs (Ghana, Indonésie) à accroître leur production. Le prix devrait donc
baisser au cours des prochaines années, tout en restant attractif (environ 2,0 USD/kg) pour
les producteurs.
Coton. Le cours du coton sur le marché international a été de 1,40 USD/kg en
moyenne en 2009, déprimé par une surproduction due aux subventions accordées dans
certains pays industrialisés (USA, EU), la concurrence des textiles synthétiques et le
ralentissement de la croissance économique mondiale. À court et moyen terme il devrait
osciller entre 1,40 et 1,60 USD/kg, car on peut s’attendre à une reprise économique.
La demande en coton qui y est associée étant compensée par l’augmentation de la
production tirée en partie par l’utilisation de plus en plus généralisée de semences Bt
(plus de 50% des surfaces plantées).
Le marché international semble donc très favorable au développement des produits
d’exportation traditionnels de la RDC, qui a, comme on l’a noté, d’importants
avantages comparatifs agro-climatiques pour leur production. Cependant, transformer
cet avantage comparatif en véritable compétitivité et ainsi profiter des opportunités
offertes par le marché international demandera que soient levées les sévères contraintes
qui ont provoqué la quasi-disparition de secteurs jadis florissants. Les paragraphes ci-
dessous abordent brièvement des contraintes transversales les plus importantes.
24
actuellement entre les mains d’un nombre important d’acteurs disparates – fermes privées,
fermes semencières dites « autonomes » et réseau d’ONG – mais le manque de suivi et de
contrôle ne permet pas d’en assurer la qualité. Les activités d’amélioration variétales et de
multiplication des semences demandent à être soutenues.
Utilisation. Seul ou mélangé à la farine du manioc, le maïs intervient dans le repas
quotidien des habitants de la plupart des régions du pays : sous forme d’épis (frais)
bouillis ou grillés, sous forme de bouillie surtout pour les enfants, de semoule ou de pâte.
Dans les grandes villes, la farine de maïs est mélangée à la farine de manioc pour former le
Foufou. Les principales régions consommatrices sont les provinces du sud – Katanga et les
Kasaï – et Kinshasa où la consommation annuelle par tête est depuis de nombreuses années
en forte hausse. Les provinces du sud représentent plus des deux-tiers de la consommation
nationale annuelle (Katanga, 34%, Kasaï oriental 18% et le Kasaï occidental 16%). Elles
sont très déficitaires, surtout le Katanga. Par le passé, les grandes sociétés minières y avaient
de grandes fermes (par exemple, Gécamines développement) et il existait aussi de grandes
fermes commerciales sur les hauts plateaux du Katanga (anciennes fermes des colons).
Mais à cause des guerres successives, toutes ces sociétés ont cessé de fonctionner à part
quelques-unes récemment installées avec l’aide/ à la demande du gouvernement. De
grandes quantités de mais sont importées de Zambie et d’Afrique du Sud (surtout sous
forme de farine).
Les autres utilisations du mais incluent : (i) la fabrication de bière artisanale appelé
Lotoko (de loin la plus importante utilisation) ; (ii) l’utilisation par les sociétés
brassicoles et (iii) la fabrication d’aliments de bétail (dans les villes de Kinshasa, Goma
et Lubumbashi), spécialement pour la volaille et le porc). La production d’amidon et
dérivés (sirops, dextrose, dextrine, polyols) issus du maïs et utilisés dans d’autres pays
dans l’agro-alimentaire, la papeterie et d’autres applications industrielles, telles que
l’éthanol, ne se trouvent pas encore en RDC et leur émergence ne se fera que dans le
long-terme.
Commercialisation. Le maïs est récolté sous deux états différents : frais et sec.
Lorsqu’il est récolté frais, les épis sont préparés bouillis ou braisés pour la consommation
immédiate. Le maïs grain est obtenu après séchage et égrenage, et sert soit à la production
de la farine par pilage ou broyage, soit à la fabrication de l’alcool. Les conditions de
conservation et de stockage sont défectueuses. Le séchage est insuffisant et les greniers,
généralement construits en terre battue, ne constituent pas des abris appropriés contre
les prédateurs et les intempéries. Les mauvaises conditions de récolte, de séchage et de
stockage provoquent des pertes très importantes.
Le paysan vend la plus grande partie de sa production de maïs frais sur le marché
local. La quasi-totalité de maïs grain est vendue pour être écoulée vers les grands centres
de consommation. Le prix du maïs au producteur varie d’une zone à une autre et il est
26
fortement lié au degré d’enclavement de ces zones. En milieu paysan comme en ville,
le maïs grain comme la farine sont vendus par diverses mesures (verre, gobelet et sac).
D’une manière générale, le maïs est vendu au comptant. En cas d’invendus, ceux-
ci trouvent un débouché auprès des fabricants d’alcool et d’aliments pour bétail. La
variation temporelle de prix du maïs suit le rythme de la campagne agricole. Le prix
baisse en période d’abondance de produit sur le marché (récolte) et augmente en période
de rareté de produit sur le marché (semis).
La commercialisation du maïs grain est dominée par des petits opérateurs qui
interviennent avec moyens très modestes. Les collecteurs ambulants achètent les produits
soit au grand marché du village, organisé hebdomadairement, soit de village à village et le
transport se fait en général par vélo ou chariot à deux roues du village d’achat au centre de
groupage, puis est acheminé par camion ou par bateau vers le centre de consommation.
Le maïs peut être transporté sur de longues distances sur les innombrables rivières et voies
fluviales de la RDC. Au niveau des centres de consommation, il est vendu à des grossistes
pour la fabrication d’alcool ou de farine. Au niveau des détaillants, les transactions
portent en général sur de petites quantités pour la consommation quotidienne.
Transformation. Une partie du mais frais est transformée au niveau local par les
producteurs ou des vendeuses ambulantes qui proposent des épis de maïs bouillis ou
grillés pour une consommation immédiate. La mais grain sert à la production farine,
l’alcool, les aliments de bétail et les produits de brasseries. Kinshasa, le Katanga et les
deux Kasaï constituent de grands centres pour les besoins industriels (provenderies et
fabrication d’alcool). Des producteurs, des ONG et des opérateurs artisanaux fabriquent
de l’alcool ou font la mouture par pilage ou au moyen de petits moulins. On trouve
du matériel de pilage (pilon et mortier), des moulins et des ustensiles de distillation de
l’alcool partout, tant en ville qu’à la campagne. Les moulins sont principalement installés
dans les centres urbains (chefs-lieux de provinces, de districts, de territoires). En dehors des
minoteries industrielles de CDI BWAMANDA (Équateur et Kinshasa) et de MIDEMA
à Kinshasa, les moulins des petits transformateurs sont de taille modeste (300 à 800 kg/
jour). Les ‘provenderies’ sont essentiellement installées dans les grands centres urbains,
surtout pour l’élevage de volailles et de porcs. Bien que la demande en aliments de bétail
se développe rapidement, elles fonctionnent pour le moment en surcapacité. Cette
surcapacité, les difficultés d’approvisionnement et les coûts de transport nuisent fortement
à leurs coûts de production9 et les éleveurs, dont le pouvoir d’achat est faible, ne peuvent
acheter les aliments qui seraient nécessaires à leur production.
Perspectives de croissance. Le maïs offre un potentiel important de développement
car c’est une culture qui se prête bien à l’intensification et dont les débouchés sont assurés
tant pour l’alimentation humaine que pour des utilisations industrielles et l’alimentation
animale, notamment volailles et porcs. L’accroissement de la consommation nationale
et le développement de débouchés agro-industriels (brasserie, pâtes alimentaires,
27
provenderies, etc.) laissent espérer que la filière maïs pourrait connaître un développement
soutenu à l’ avenir. A moyen terme, la croissance du secteur pourrait atteindre 4 à 5% par
an, tirée par la consommation humaine, surtout dans les villes, y-compris par la demande
en produits d’élevage. À plus long-terme, le développement des utilisations industrielles,
la reconquête du marché des provinces du sud et le marché régional pourraient permettre
une croissance plus soutenue encore. Les prix mondiaux du mais devraient se maintenir
à des niveaux assez élevés (autour de 270 USD/t), soutenus par la croissance de la
demande mondiale pour l’alimentation animale et la production d’éthanol. Cela devrait
se traduire par un renforcement des incitations données à la production nationale et à sa
compétitivité sur le marché régional.
Le marché régional offre un marché potentiel considérable aux producteurs
Congolais qui bénéficient de conditions agro-climatiques favorables, s’ils peuvent être
compétitifs avec les importations provenant du marché international. Le mais est en
effet l’aliment de base en Afrique de l’Est, et plus encore en Afrique Australe. Certains
des grands pays de la région sont en déficit chronique (Kenya), d’autres connaissent
des déficits périodiques dus aux sécheresses qui les affectent régulièrement (Malawi,
Zambie, Zimbabwe, Mozambique). C’est là un marché potentiel qui pourrait offrir
des perspectives considérables aux producteurs congolais qui bénéficient de conditions
agro-climatiques favorables si toutefois, ils parviennent à être compétitifs par rapport
aux importations provenant du marché international.
Le développement des utilisations industrielles demandera la mise en œuvre d’une
stratégie à moyen/long terme en coordination étroite avec celui du secteur élevage
et pisciculture10. Parmi les contraintes qui devront être levées on peut noter : (i) la
concurrence des importations ; (ii) le faible niveau de structuration de la filière, y-compris
le manque d’infrastructure de stockage, et une production très atomisée qui accroissent
le coût d’approvisionnement des industries de transformation ; (iii) les difficultés
d’approvisionnement et le coût élevé du transport (infrastructures, tracasseries), des
sources d’énergie (électrique ou carburant) et des pièces de rechange, y-compris pour les
moulins de moyenne capacités ; et (iv) l’accès au crédit, pour l’investissement mais aussi et
surtout pour le fonds de roulement. La stratégie de développement industriel de la filière
devrait être basés sur une approche « cluster » – ciblant des zones réunissant à la fois une
haute demande potentielle et pouvant s’approvisionner facilement en matière première
et permettant un bon accès aux services essentiels – et la promotion d’une agriculture
contractuelle liant les industriels aux gros producteurs capables de fournir de façon
régulière et fiable les quantités nécessaires.
b. Manioc
Production. Le manioc occupe une place centrale dans la production agricole de la
RDC (il représente en effet environ 75% en poids du volume total des produits vivriers).
28
Il est cultivé et consommé à travers toutes les provinces du pays, à des degrés divers,
particulièrement dans le Nord-Ouest du pays (Bas-Congo, Bandundu, Équateur, Kasaï
et Orientale). Il n’y a aucune statistique fiable sur les superficies plantées en manioc ou
sur la production (les dernières statistiques fiables datent de 1995). On estime que la
production est d’environ 15,0 millions de t (sur une superficie d’environ 2,2 millions
d’ha) ce qui place la RDC à la cinquième place dans le monde parmi les pays producteurs
de manioc et la deuxième place en Afrique (loin) derrière le Nigéria. Les rendements
moyens – entre 7 et 8 t/ha – sont très faibles très loin de ceux atteints au Brésil (30 t) ou
au Nigéria (22 t).
Tableau 1.5 : Production de manioc dans le monde
mais à capacité d’écoulement très faible. L’huile de palme est utilisée comme huile
alimentaire (très largement non-raffinée) ou pour la fabrication de savons et autres
produits de consommation courante (bougies, etc.).
Le secteur industriel est dominé par deux grands groupes (PHC et Blattner) qui
approvisionnent des industries de transformation (MARSAVCO) de Kinshasa. Les
plantations industrielles sont dans l’ensemble très vieilles et en fin de cycle productif.
Leur réhabilitation et extension ont repris dès 2002. Leur production a recommencé
à croître très sensiblement, passant de moins de 15 000 tonnes en 2001 à plus
de 50 000 tonnes aujourd’hui. Il semble que le secteur villageois n’ait pas cessé de
renouveler régulièrement ses plantations (essentiellement pour l’autoconsommation).
Cependant cela a été fait avec du matériel végétal non-sélectionné, de très faible
productivité. Les rendements moyens sont très bas : de 5 tonnes de régimes à l’hectare
en plantation villageoises à 10 tonnes en plantations industrielles (contre 25 ou même
30 tonnes/ha en Malaisie et en Indonésie). De plus, le rendement de la transformation
en huile est très faible : 15% en extraction industrielle, à cause d’équipements obsolètes,
contre 23% pour des unités modernes ; moins de 10% en extraction artisanale, à cause
de méthodes archaïques (presse manuelle) qui entraînent non seulement un taux
d’extraction très bas mais encore une mauvaise qualité (acidité) de l’huile. Il existe
aujourd’hui des mini-presses qui permettent des taux d’extraction de 18-20%.
Ces très faibles rendements à l’extraction entraînent un gaspillage énorme, puisque
le pays est obligé d’importer plus de 50 000 tonnes par an. Une amélioration du taux
d’extraction moyen de seulement 5% permettrait de produire environ 150 000 tonnes
d’huile supplémentaires (une augmentation de 50%) à partir de la même production de
régimes.
Le potentiel de croissance du secteur est considérable. En effet, la demande nationale
et internationale en huile de palme est forte, y compris pour le biodiesel, et les prix
sont et devraient rester attractifs (voir ci-dessous). La demande nationale devrait
connaître une croissance soutenue à cause de la croissance démographique (3% par an)
et l’augmentation de la consommation par habitant, faible à l’heure actuelle (environ 5
kg/an contre plus de 12 kg/an en Afrique de l’Ouest) – grâce à une hausse des revenus.
On peut raisonnablement estimer que la seule demande nationale, aujourd’hui estimée à
350 000 tonnes pourrait augmenter au rythme de près de 5% par an et dépasser le million
de tonnes en 2030. Cela représente près de trois fois le niveau actuel et demanderait
la plantation d’environ 160 000 ha de plantations additionnelles (avec un rendement
moyen de 20t/ha), soit 8 000 ha par an. Cela est possible, tant dans le secteur industriel
que dans le secteur villageois.
En effet (i) les conditions agro-climatiques de la RDC sont extrêmement favorables
au palmier à huile, surtout dans la province de l’Équateur et dans la Cuvette (où il existe
36
d’importantes superficies de palmeraie naturelle) et (ii) les cours de l’huile de palme sur
le marché international devraient rester élevés à l’avenir. A l’heure actuelle, le prix de
revient moyen de l’huile de palme brute (CPO) produite par les principales plantations
industrielles du pays peut être estimé à environ 700 USD/tonne rendue Kinshasa, ce
qui est déjà inférieur au prix de revient de l’huile importée (environ 900 USD/t). De
plus, des gains de productivité importants sont possibles à tous les niveaux de la chaîne –
productivité agricole, taux d’extraction de l’huile, réduction des coûts de transport – qui
permettraient de réduire substantiellement les coûts de production14 et donc d’accroître
les marges. La priorité devrait être accordée aux améliorations développées ci-après.
Accroissement de la productivité agricole. Comme on l’a dit, les rendements actuels
sont très bas (moins de la moitié ou même du tiers de ceux atteints en Asie du Sud-est)
à cause de l’âge avancé des plantations et de la faible productivité du matériel végétal.
Actuellement, la recherche congolaise ne produit plus de matériel végétal sélectionné et
les grandes plantations industrielles importent et multiplient ce dont elles ont besoin.
Elles sont aussi capables de mobiliser par elles-mêmes les intrants et services dont elles
ont besoin. Ce n’est pas le cas pour les planteurs villageois et à la grande majorité des
exploitations de taille moyenne qui n’ont à l’heure actuelle accès ni aux plants ni aux
conseils dont ils auraient besoin pour augmenter leur productivité. Il sera donc nécessaire
de mettre en place rapidement des mécanismes, par exemple en se servant des plantations
industrielles comme relais dans le cadre de partenariats public-privé, qui permettent la
diffusion du progrès technologique (plants sélectionnés, intrants, conseil) auprès des
planteurs villageois.
Amélioration du rendement de l’extraction. Les plantations industrielles sont
dotées d’équipements pour la plupart obsolètes, dont l’efficacité extrêmement basse grève
lourdement leurs prix de revient. Ces équipements doivent être renouvelés rapidement.
Pour cela les opérateurs se heurtent à l’absence d’offre de crédit à moyen terme, sauf cas
exceptionnel : accès au Fonds de Promotion de l’Industrie (FPI, voir ci-dessous) ou à des
crédits « off-shore ».
Mais le développement du secteur de l’huile de palme peut avoir des conséquences
sociales et environnementales très sérieuses. L’expansion incontrôlée des plantations
industrielles peut en effet déposséder les populations de leurs droits fonciers coutumiers
et les priver de leurs moyens de subsistance. Au plan environnemental, elle peut aussi
engendrer déforestation et perte de biodiversité massives ; pollution des cours d’eau
et des nappes phréatiques par les engrais et les produits phytosanitaires et émission
d’effluents toxiques et enfin production d’importantes quantités de gaz à effet de serre
(CO², méthane). Il sera donc très important de s’assurer que la politique de concession
agricole du Gouvernement permet de réduire au minimum ou d’éliminer les effets
sociaux et environnementaux indésirables du développement du secteur.
37
D. Filière de l’hévéa
La production de caoutchouc naturel (de plantation) a commencé en RDC en 1906.
En 1960, le Congo comptait environ 90 000 ha de plantations, dont 1/3 de plantations
villageoises (essentiellement dans le Bas-Congo, l’Équateur, le Bandundu et la Province
orientale) et produisait 60 000 tonnes de caoutchouc. A la fin des années 70, après la
zaïrianisation des plantations industrielles, la production avait chuté à 20 000 tonnes et
les exportations à 18 000 tonnes. Depuis, le déclin a continué et la production annuelle
se situe à environ 10 000 tonnes, produites presque exclusivement par 15 000 ha de
plantations industrielles, les plantations villageoises ayant pratiquement disparu. Les
¾ (7 500 tonnes) de la production est exportée, le reste (2 500 tonnes) étant utilisé
localement pour la production de pneumatiques (Cobra) et de chaussures.
Tableau 1.6 : Production industrielle et villageoise par province
Secteur agro-industriel Secteur villageois
Province
Surface (ha) Production (t) Surface (ha) Production (t)
Source : Etude des Filières Huile de palme et Caoutchouc ; Groupement AGRER – EARTH Gedif, 2006
Le prix de revient du principal produit (feuilles de caoutchouc fumé) est très élevé (750
USD/t, FOB) en raison, comme dans le cas du palmier à huile, de la faible productivité des
plantations (moins de 1 t/ha contre 2,5 t/ha en Côte d’Ivoire), de l’âge des plantations et
de la faible productivité de la main d’œuvre; d’installations industrielles obsolètes et d’un
coût de l’énergie très élevé entraînant des coûts d’usinage très élevés et des frais de transport
et d’exportation prohibitifs.15 De plus, l’absence de contrôle qualité entraîne une décote
importante du caoutchouc congolais sur le marché international (de l’ordre de 20%).
Le secteur de l’hévéa offre à la RDC une importante source de croissance potentielle.
En effet, le pays possède des conditions agro-climatiques très favorables, au moins aussi
bonnes que la Côte d’Ivoire et probablement meilleures que celles des pays asiatiques.
La demande et les prix internationaux devraient rester élevés (2,20-2,50 USD/kg), le
prix du caoutchouc naturel évoluant parallèlement à celui du caoutchouc synthétique
et donc du pétrole. Ce niveau de prix international, même avec les coûts de production
actuels (très élevés), permet de dégager des marges bénéficiaires très importantes. Les
gains de productivité possible à chaque niveau de la filière augmenteraient encore cette
marge. Il est donc probable que le secteur devrait intéresser tant les opérateurs industriels
que les planteurs villageois (s’ils ont accès à une usine de traitement). La RDC ne devrait
38
plus avoir aucun problème à placer une production beaucoup plus importante sur le
marché international où elle est un producteur très marginal. La contrainte principale est
donc au niveau de la réponse de l’offre des producteurs nationaux. Il semble raisonnable
d’envisager un programme de plantation/replantation d’au moins 50 000 ha au cours
des 20 prochaines années (2 500 ha/an quand la Côte d’Ivoire projette d’en planter
plus de 15 000 ha/an). Cela devrait permettre à la RDC de produire/exporter plus de
40 000 tonnes de caoutchouc (sec) en 2030 contre 10.000 tonnes à l’heure actuelle, une
croissance annuelle moyenne de 7% sur la période.16
La croissance soutenue du secteur de l’hévéa aurait des bénéfices substantiels pour
la RDC, non seulement en termes de recettes d’exportation, mais aussi de création
d’emploi, en particulier si ce développement inclut le secteur villageois. En effet, la
production de caoutchouc permet la création d’un emploi à plein temps pour deux
hectares de plantation en production (emploi agricole et agro-industriel). Comme
dans le secteur du palmier à huile, les contraintes principales à lever pour transformer
l’avantage comparatif du pays pour la production de caoutchouc en compétitivité réelle
sont : l’accès à du matériel végétal performant et l’accès au crédit à moyen/long terme
pour le financement des plantations et de l’outil industriel. De plus, le développement
soutenu du secteur exigera – facteur important pour le secteur de l’hévéa – la disponibilité
d’une main d’œuvre performante en particulier de saigneurs. Le développement des
plantations industrielles d’hévéa peut avoir des impacts négatifs (environnementaux,
sociaux) pratiquement similaires à ceux des plantations de palmier à huile et devra être
mené de façon très coordonnée pour en limiter les dangers. Finalement, contrairement
à l’huile de palme pour laquelle il existe un marché local très compétitif, la production
des plantations villageoises est totalement dépendante d’une unité industrielle pour son
usinage et sa commercialisation. Cela peut induire des comportements monopolistiques
de la part de l’industriel. Il sera donc nécessaire de mettre en place une politique de prix
au producteur transparente et équitable.
de sécurité dans les régions de production. On estime qu’il existait en 2006 environ
75 000 ha de plantation d’arabica dont plus de 85% constitués de petites plantations
villageoises de moins de 5ha (et environ 70 000 planteurs). Les domaines de plus de 50
ha ne représentant qu’une petite partie du total (3% soit 2 000 ha).
Les rendements sont très faibles – entre 150 et 300 kg/ha – à cause du vieillissement
et de la faible densité du verger (plus de 80% des plantations sont âgées de plus de 30
ans), du manque d’accès aux variétés améliorées et de mauvaises pratiques culturales.
La qualité est médiocre (seul 1,6% de la production se classait, en 2006, dans les
meilleures catégories, K1 à K3, contre 43,6% dans les années 50) ce qui entraîne une
décote importante du produit sur le marché international. Certains grands domaines tel
que celui de Katale (Goma) importent des variétés performantes des pays voisins, mais
l’immense majorité des (petits) producteurs n’a accès ni à du matériel végétal sélectionné
ni aux conseils dont ils ont besoin. Les programmes de recherche sur l’arabica (INERA)
se sont arrêtés au début des années 90 et l’Office national du Café (ONC) responsable de
l’appui aux producteurs a cessé de fonctionner au début des années 1990, se cantonnant
au contrôle des exportations.17
Les exportations officielles se montaient en 2006 à 4 500 tonnes, auxquelles il faut ajouter
un volume au moins égal d’exportations frauduleuses (par le Rwanda/Ouganda) suscitées
par le niveau trop élevé des droits sur les exportations. La production totale actuelle peut
donc être estimée à au moins 10 000 tonnes de café marchand. La plus grande partie des
exportations provient des planteurs villageois et se fait sous forme de café pré-séché (parche),
vendu à des acheteurs rwandais ou ougandais qui le transforment en café marchand et non
lieu de café déparché par voie humide (fully washed) qui permet des prix plus élevés sur le
marché international. La raison essentielle de la fraude et des exportations sous forme de
café en parche sont les surcoûts importants supportés par les exportations officielles dus (i)
aux nombreux prélèvements, légaux et illégaux, collectés par un nombre impressionnant de
services publics (une vingtaine) et peut être plus encore (ii) aux tracasseries et longs retards
subis par les exportations officielles.
40
Source : Études des filières thé, quinquina et arabica, Experco International, 2006
Le tableau ci-dessus montre que les coûts d’accès au marché sont substantiels. Les taxes et
autres prélèvements officiels et non-officiels représentent près de 10% du prix de vente et
13% du prix départ-usine ; les coûts de transport sur l’axe nord entre Goma et Mombasa
sont très élevés (240 USD/t, soit près du double de celui payé par les producteurs
ougandais ou rwandais (140 USD/t), les transporteurs facturant une prime de risque et
les grands délais d’immobilisation lors du chargement du produit.
41
Source : Études des filières thé, quinquina et arabica, Experco International, 2006
42
F. Filière du thé
La zone de production du thé est la même que celle de l’arabica, essentiellement le Kivu.
L’évolution de la production a également été similaire : long déclin après l’indépendance,
la zaïrianisation provoquant l’abandon d’un grand nombre de domaines, ce qui a entraîné
aussi l’arrêt de la production villageoise que ces domaines traitaient dans leurs usines.
Vers le milieu des années 60, il y avait environ 14 000 ha de plantations, dont 1 500 ha de
plantations villageoises (9%) et la production était de 11 000 tonnes de thé marchand.
La production n’était plus que de 4.500 tonnes en 1985 et elle s’est effondrée avec les
43
conflits de 1996-1998 (600 tonnes en 2001). Elle a légèrement repris depuis lors et était
estimée en 2007 à environ 2 000 tonnes de thé marchand, produites exclusivement par
les quelques grands domaines qui subsistent encore, la production villageoise ayant
pratiquement disparu (60 tonnes en 2006).
Les rendements sont très bas – 300 à 500 kg/ha de thé marchand (2,0/2,5 t. de
feuilles fraîches) pour les petits planteurs, une tonne/ha pour les plantations industrielles
(5,0 t. de feuilles fraîches) en raison de l’âge des plantations (entre 30 et 60 ans), de
la non-utilisation d’intrants et de mauvaises pratiques culturales. Il n’existe plus aucun
appui à la production. La recherche a cessé depuis le début des années 90 et l’ONC,
responsable du conseil technique aux producteurs a, comme dans le cas de l’arabica,
totalement cessé ses activités dans ce domaine. Les domaines toujours en production (en
2006) ont timidement commencé à réhabiliter leurs plantations. Ils s’approvisionnent
en matériel végétal sélectionné au Rwanda ou au Kenya. Les petits planteurs eux n’y ont
pas accès. Alors qu’il existait 22 usines en 1960, il n’en existe plus aujourd’hui que 5 en
fonctionnement, toutes vétustes. Elles ont une productivité très faible, consommation
trop de bois et produisent un thé de qualité inférieure qui souffre d’une décote
importante sur le marché.20 Toute relance du secteur exigera leur réhabilitation et donc
des investissements substantiels. La production est pour l’essentiel exportée (vendue
aux enchères à Mombasa), à l’ exception de faibles quantités vendues sur le marché de
Kinshasa.
La RDC possède un très bon avantage comparatif pour la production de thé et le
potentiel de production est considérable sur les hauts plateaux du Kivu qui offrent des
conditions agro-climatiques et des sols exceptionnellement favorables à sa production.
Les prix prévus à moyen terme sur le marché international sont attractifs (2,20/2,50
USD/kg). Le développement du secteur, qui est actuellement sinistré, exige la levée des
contraintes qui pénalisent la compétitivité de la production congolaise de thé et sont
semblables à celles affectant la production d’arabica : faible productivité agricole (accès
à des plants sélectionnés et renouvellement des plantations), faible productivité de
l’usinage (réhabilitation des usines nécessitant un accès à des crédits d’investissement),
frais de transport et d’exportation rendus prohibitifs par les tracasseries administratives
et des prélèvements importants21. Le fait que les producteurs congolais puissent opérer
profitablement dans les conditions actuelles démontre amplement l’avantage comparatif
dont jouit le pays pour la production de thé. Les gains de productivité possibles à tous les
stades de la filière rendent cette culture particulièrement attractive pour les investisseurs
et pour les planteurs villageois. Comme pour l’arabica, l’accès au foncier ne devrait pas
être une contrainte forte à moyen terme. La plantation/replantation de 1 000 ha par an
pendant les 10 prochaines années, permettrait d’atteindre une production de 15 000/20
000 tonnes en 2030, soit un taux de croissance de plus de 10% par an. Mais il faut noter
que, vu la nécessité d’usiner rapidement la production, le développement du secteur
villageois est très étroitement dépendant de la réhabilitation du secteur industriel.
44
Situation actuelle
Cacao. La culture ne s’est jamais développée en RDC malgré des conditions agro-
climatiques excellentes et le fait que la culture n’est pas très exigeante en main d’œuvre
ou en méthodes culturales. Alors que dans la grande majorité des pays producteurs, la
production vient essentiellement des plantations familiales, elle a été et est encore au
Congo largement le fait de plantations commerciales. A l’Indépendance, la production
était de 5 200 tonnes et largement le fait de sociétés agro-industrielles installées dans
les provinces de l’Équateur et du Bas-Congo. La Société Unilever réalisait 45% de la
production totale et 5 autres grandes plantations 40%. La production villageoise (10%)
s’est développée autour de ces agro-industries qui offraient les plants et les débouchés
aux planteurs villageois et grâce à des projets spécifiques tels que le Projet Cacao de
Bengamisa (CABEN) dans la Province orientale. La production n’a jamais dépassé un
niveau très faible surtout quand on la compare à celle d’autres pays africains comme la
Côte d’Ivoire (1,4 millions t.), le Ghana (750 000 t.), le Nigeria et même le Cameroun
voisin. Dans les années 80, elle a atteint un maximum de 6 300 t. avant de décliner
lentement autour de 3 500 tonnes par an au milieu des années 90. Elle était de 2.000
tonnes en 2006.
Il est difficile d’avoir une idée précise de l’état actuel de la filière, tant au niveau de
la production (superficies des plantations, rendements, production) que des circuits
de commercialisation. La production est localisée essentiellement dans le Bas-Congo,
l’Équateur (nord) et la Province orientale, avec de faibles productions subsistant encore
dans le Bandundu, le Maniema, le Kasaï (nord) et le Sud et le Nord-Kivu.22 Elle est
toujours largement le fait de grandes plantations (SCAM dans le Bas-Congo, PHC,
CACAOCO-Bulu et INERA dans l’Équateur, CABEN dans l’Orientale …) ; bien
que certaines de ces dernières soient maintenant en métayage telles que la SCAM –
auxquelles sont associées des plantations villageoises.23 Les plantations sont très vieilles.
Celles des planteurs villageois sont issues de matériel végétal “tout venant” de très faible
productivité. Les rendements sont très faibles (200 kg/ha contre 450 kg en Côte d’Ivoire,
plus d’une tonne au Viet Nam). Il n’y a pratiquement aucun traitement phytosanitaire
45
et si les méthodes culturales semblent correctes sur les domaines qui disposent en général
de personnel qualifié, elles sont très sommaires pour les plantations villageoises qui n’ont
en général accès à aucun conseil agricole.
Les services de l’Office national du Café (ONC), responsable du développement
du secteur café/cacao et du MAPE ont en effet totalement disparu du terrain et seuls
quelques domaines et ONG (IRM dans l’Équateur) offrent encore un appui aux
planteurs villageois. Toute recherche sur le cacao a cessé depuis longtemps. L’INERA
(stations de Yangambi, Luki et de Bongabo) dispose encore de clones de cacaoyers
hybrides mais la qualité de ce matériel génétique doit être vérifiée et il est très probable
qu’il n’est plus compétitif par rapport au matériel végétal disponible actuellement dans
les grands pays producteurs. De plus, les clones de l’INERA ne sont pas multipliés et mis
à la disposition des planteurs. Certains domaines (PHC dans l’Orientale par exemple)
qui ont récemment commencé à replanter le font avec du matériel végétal venant de
Côte d’Ivoire. Il faudra importer du matériel végétal très performant des principaux
pays producteurs, l’adapter aux conditions congolaises et relancer la multiplication de
ces clones par la recréation de parcs à bois et de champs semenciers au niveau des stations
de recherche et des centres de bouturage et/ou de greffage dans les zones de production.
Le traitement des fèves après récolte (fermentation, séchage) est en général de qualité
acceptable sur les domaines, mais de très mauvaise qualité pour les plantations villageoises.
Les planteurs vendent des fèves peu fermentées, mal séchées et souvent immatures. Les
producteurs sont d’ailleurs payés au même prix quelle que soit la qualité et n’ont donc
aucune incitation à bien traiter leur cacao avant de le vendre. Le traitement de la production
villageoise est donc fait par les acheteurs – domaines ou opérateurs indépendants – mais la
qualité finale est souvent compromise. Les domaines possèdent en général les équipements de
transformation et de stockage nécessaires, en principe agréés par l’ONC. Ces équipements
sont toutefois extrêmement vétustes et leur productivité est faible. Ils doivent être renouvelés
mais l’impossibilité actuelle d’obtenir des crédits ne permet pas de financer les investissements
nécessaires. L’indisponibilité de l’énergie (électricité, gasoil,….) grève lourdement les activités
de transformation (séchage). Les acheteurs indépendants sont de petits commerçants
ambulants qui achètent de petites quantités car leur capacité financière est très limitée. Ils
prennent de très grosses marges pour compenser la faiblesse des quantités qu’ils traitent et
couvrir les risques importants qu’ils courent du fait de la très mauvaise qualité du produit.
Le cacao congolais est essentiellement destiné à l’exportation via Kinshasa et Matadi
(il y a aussi des exportations frauduleuses à partir des zones de production situées prés
de la frontière nord du pays). La mauvaise qualité du cacao produite entraîne une décote
très importante sur le marché international (300/400 USD/tonne). Un prix indicatif au
producteur est en principe publié par l’ONC, calculé sur la base des prix internationaux
et d’un barème des coûts normatifs de commercialisation, mais il est peu connu des
planteurs et systématiquement ignoré par les acheteurs. Les coûts de commercialisation
46
sont très élevés : (i) faible densité du produit qui augmente le coût du groupage ; (ii)
délabrement des infrastructures de transport, faible efficacité et coût élevé des services de
transport et d’exportation (on estime que les coûts de transport et de mise à FOB peuvent
atteindre jusqu’a 500 USD/t.) et (iii) multiples taxes, légales ou non qui sont prélevées à
tous les niveaux de la filière. Le prix bord champ est donc faible, probablement pas plus
de 25% du prix FOB du produit. La faiblesse des prix payés aux producteurs et la de la
productivité des plantations semble avoir été un obstacle décisif au développement de
la production villageoise face à la concurrence du palmier à huile, des cultures vivrières
et des activités extra-agricoles (secteur minier artisanal) pour la main d’œuvre familiale.
Le café robusta. La filière du robusta a longtemps été un secteur clé de l’économie
nationale et une source de revenus considérables à la fois pour l’ensemble de l’économie
et pour un grand nombre de petits planteurs qui étaient responsables de prés de 90% de
la production totale. A son apogée vers la fin des années 1980, elle occupait prés de 800
000 ménages agricoles (représentant environ 5,0 millions de personnes), essentiellement
dans les provinces de l’Équateur et de l’Orientale. Aujourd’hui, elle est pratiquement
abandonnée. Les exportations officielles qui étaient en 1989 de 107 000 tonnes ont
chuté à environ 7 500 tonnes en 2008, auxquelles s’ajoutent des exportations illégales
vers les pays limitrophes (Tchad, Soudan, Centre Afrique) d’un volume équivalent. La
production annuelle totale peut donc être estimée à 15 000 tonnes. La chute dramatique
de la production est attribuable à plusieurs facteurs : (i) la zaïrianisation qui a provoqué
la disparition d’une grande partie des plantations commerciales qui servaient de relais
à la production villageoise ; (ii) la crise prolongée qui a affecté le pays et en particulier
les grandes zones de production (Équateur, Orientale), entraînant la dégradation des
infrastructures et la disparition des services d’appui étatiques (ONC, MAPE) ; (iii) le
bas niveau des cours internationaux pendant de longues périodes qui a éliminé toute
incitation pour maintenir une production devenue non-compétitive par rapport
à d’autres spéculations comme le palmier à huile et les productions vivrières et enfin
(iv) l’incidence de la trachéomycose dans une grande partie des zones de production
traditionnelles.
La superficie totale des plantations de café et de celles encore en production n’est
pas connue mais, à l’évidence, une grande partie a été abandonnée. Sur la base d’une
estimation de la production totale d’environ 15 000 tonnes de café marchand et de
rendements moyens d’environ 150 kg/ha (café marchand), la superficie occupée ne doit
pas être supérieure à 100 000 ha. Les principales régions productrices sont le Bas-Congo,
le Bandundu, le Kasaï Oriental, l’Équateur et, dans une moindre mesure la Province
Orientale. Bien que certaines plantations industrielles se soient maintenues jusqu’a
aujourd’hui (SCAM dans le Bas-Congo), la production est très largement dominée par
les plantations villageoises (90% de la production totale). L’âge moyen des plantations
est très élevé (35-40 ans). Les plantations industrielles ont été établies à partir de matériel
végétal sélectionné mais l’immense majorité des plantations paysannes l’ont été, et le
sont encore dans les rares cas où il y a replantation, à partir du matériel « tout venant »
47
très peu productif. L’INERA dispose encore au niveau de ses stations de quelques clones
élites robusta, mais ce matériel n’est pas diffusé au niveau paysan.24 Certaines plantations
agro-industrielles sont assez bien entretenues mais toutes souffrent du manque de main
d’œuvre. La grande majorité des plantations villageoises ne sont plus entretenues. Les
intrants ne sont utilisés ni par les plantations industrielles ni par les planteurs villageois,
ce qui favorise les maladies et infestations d’insectes. Les rendements sont donc très bas
(au mieux de l’ordre de 150 kg de café marchand/ha).
Les plantations industrielles observent le calendrier agricole et le séchage y est fait sur
des aires cimentées ou dans des séchoirs statiques ou rotatifs. La récolte du café est par
contre très mauvaise chez les planteurs villageois paysans qui récoltent les cerises vertes et
rouges en un seul passage (récolte au tamis), ce qui est à l’ origine d’un grand nombre de
grains immatures (grains noirs) dans le produit. Les baies sont séchées sur terre battue.
Les exploitations industrielles commercialisent elles-mêmes leur production (ventes aux
exportateurs ou aux torréfacteurs pour le marché national). Les producteurs villageois
vendent le café-coque soit aux plantations industrielles à proximité, soit aux commerçants
indépendants qui le décortiquent et le revendent en général pour la consommation
nationale soit pour l’exportation sur le marché régional. Comme dans le cas du cacao,
les producteurs sont payés au même prix pour le café de mauvaise et de bonne qualité.
Par le passé, le pays s’était doté d’un grand nombre d’unités de séchage/décorticage
réparties sur l’ensemble des zones de production. À la suite à la chute de la production,
la majorité de ces usines ont fermé. La plupart des usines encore en activité sont très
vétustes. Elles ont une efficacité très faible et ne peuvent en général respecter les normes
techniques. L’impossibilité actuelle d’obtenir des crédits empêche le financement des
investissements qui seraient nécessaires à leur renouvellement. La vieillesse du verger
ainsi que les mauvaises pratiques culturales, de récolte, de séchage et décorticage,
résultent en une très mauvaise qualité du café marchand. En conséquence, le robusta de
la RDC, jadis réputé pour sa haute qualité, subit aujourd’hui une importante décote sur
le marché international. Comme dans le cas du cacao, le prix bord champ est donc faible,
probablement pas plus de 25-30% du prix FOB du produit. Le café étant relativement
exigeant en main d’œuvre, ces bas prix représentent une contrainte très forte au
développement de la production, en particulier villageoise, face à la concurrence du
palmier à huile, des cultures vivrières (et même du cacao) et des activités extra-agricoles
(secteur minier artisanal). Toute relance de la production devra donc impérativement
privilégier l’amélioration de la qualité à chaque niveau de la filière, en ciblant la
production de robusta washed (lavé), c’est-à-dire traité par la méthode humide comme
l’arabica, qui bénéficie de primes substantielles (jusqu’à 30% et plus).25
La menace de la trachéomycose. Le problème le plus préoccupant est cependant,
et de loin, celui de la trachéomycose, un pathogène qui est réapparu en 1983 dans le
Haut-Uélé et qui s’est rapidement propagé à une grande partie des zones de production
des provinces Orientale et Équateur (Est) favorisée par la mauvaise gestion et l’abandon
48
des plantations (libre cours au pathogène) et l’absence d’un programme concerté pour
en combattre l’extension. Si elle n’est pas énergiquement combattue la trachéomycose
pourrait provoquer la disparition totale du verger caféier congolais. Mais les programmes
de lutte – le repérage, l’extirpage, le débitage et l’incinération – sont très coûteux (bien
au-delà des moyens des planteurs villageois et de la plupart des plantations industrielles)
et difficiles à réaliser.
Perspectives de développement
Perspectives favorables pour le cacao. Les perspectives pour le développement de la
production de cacao en RDC semblent très favorables. La croissance à moyen terme de la
consommation mondiale est projetée à 3%, de nouveaux marchés (Chine, Inde, Europe
de l’Est) prenant le relais des marchés traditionnels (Europe, États-Unis). L’évolution
de la production mondiale est plus incertaine. La production de la Côte d’Ivoire,
premier producteur du monde, est rendue difficile par la crise que traverse le pays et
semble avoir entamé un déclin structurel que les autres pays producteurs pourraient ne
pas être capables de compenser. Ces évolutions ont provoqué une augmentation du prix
international du cacao à 3 400 USD/t en janvier 2010, un plus haut de plus de 30 ans.
A l’heure actuelle, le prix est d’environ 3 100/t. et il devrait rester au dessus de 2 500/t.
à moyen terme. Un tel niveau de prix, même si la production congolaise souffre d’une
décote marquée sur le marché et si les coûts de commercialisation internes sont élevés,
permettent d’offrir des prix très compétitifs aux producteurs congolais, en particulier
dans les zones assez bien reliées au marché.
profondeur de ses statuts, de ses organes de gouvernance (ouverture à tous les acteurs
de la filière), de ses fonctions et modalités d’intervention, de ses capacités humaines et
de son mode de financement mais surtout de sa culture interne. Cette deuxième option
demanderait aussi que l’ONC, très largement décrédibilisé à l’heure actuelle auprès des
opérateurs de la filière, puisse regagner leur confiance. Le choix entre ces deux options
devrait être fait dans le cadre de la préparation participative d’une stratégie et d’un
programme opérationnel pour la relance du secteur.
Grandes lignes d’un programme de relance. Un programme de relance du secteur
pourrait s’articuler sur les grandes lignes suivantes :
• Ciblage des zones les plus propices du pays : bien reliées aux marchés et comportant
à la fois des planteurs villageois et des plantations industrielles ;
• Promotion des synergies et complémentarités entre les plantations industrielles et
les plantations villageoises ;
• Support intégré à tous les maillons critiques de la filière. Production : ouverture
de centres semenciers et de pépinières, production et diffusion da matériel végétal
amélioré auprès des producteurs, vulgarisation des techniques appropriées.
Transformation : appui aux planteurs villageois pour les techniques de séchage
et de fermentation, appui aux plantations industrielles pour la remise à niveau
de leurs installations de traitement et conditionnement. Commercialisation :
équipement, fonds de roulement.
• Exécution basée largement sur les capacités existant déjà sur le terrain et les acteurs
de la filière eux-mêmes, le Gouvernement se réservant un rôle de régulateur de la
filière et d’animateur temporaire (au moyen de subventions ciblées pendant la
phase de démarrage).
Un tel programme devrait être mis en œuvre par un opérateur spécialisé (comme par
exemple le STCP ou une ONG internationale) pour permettre une coordination étroite à la
fois verticale et horizontale entre les différents acteurs de la filière : domaines, coopératives,
acheteurs, exportateurs. Le programme devrait en particulier inclure, outre un appui à
l’amélioration de la productivité agricole, l’établissement d’un système de commercialisation
« témoin » permettant de rétrocéder une partie raisonnable du prix international aux
producteurs et de payer le produit à la qualité. Finalement, le programme serait l’instrument
pour établir une véritable interprofession, d’abord au niveau de chaque province puis au
niveau national.
Nécessité d’établir des partenariats avec l’industrie du cacao. Enfin la stratégie de relance du
secteur devrait intégrer les nouvelles exigences de responsabilité sociale et environnementale.
En effet, la plupart des sociétés dominant le négoce et l’utilisation du cacao au niveau
mondial (Cargill, ADM, Nestlé, Mars), réunies au sein de l’International Cocoa Initiative et
de la World Cocoa Foundation, se sont toutes engagées à n’acheter à l’horizon 2020 que du
52
cacao international dont la production respecterait les normes sociales (travail des enfants)
et environnementales exigées par les marchés du Nord. Ces sociétés ont, individuellement
ou collectivement, lancé une série d’initiatives visant (i) à encourager la culture du cacao à la
fois dans les principaux pays producteurs (Côte d’Ivoire, Ghana, Indonésie), (ii) à diversifier
leur sources d’approvisionnement en soutenant l’accroissement de la production dans de
nouveaux pays (Vietnam) et (iii) à développer des systèmes de traçabilité et de certification
du cacao. Il semblerait que la RDC ait intérêt à développer des partenariats avec des grandes
sociétés internationales dès le début d’un programme de relance du cacao, pour que ce
programme intègre les approches, mécanismes et instruments permettant de répondre à
leurs attentes en matière de certification. Le mode de production actuel en RDC, en grande
partie centré sur des plantations commerciales capables d’être des partenaires des acheteurs
internationaux, est particulièrement favorable à une telle stratégie.
H. La filière Coton
En 1960, le Congo était le premier producteur de coton en Afrique, avec une production
de 200 000 tonnes de coton graine produites par environ 800 000 petits agriculteurs,
53
et plus de 53 000 tonnes de coton-fibre exportées. La culture du coton était assez bien
repartie sur le territoire national (Équateur, Orientale, Maniema, Kasaï, Katanga). La
production s’est effondrée très rapidement après l’Indépendance avec les turbulences
politiques, la disparition des services d’appui à la production (le coton est une culture
annuelle très exigeante en engrais et produits phytosanitaires). Les exportations de
fibre de la RDC ont disparu dès 1977 et en 1989 la production était tombée à 11 000
tonnes de coton graine (5% de la production de 1960). Elle était de 800 tonnes en 2006,
produites par moins de 5 000 petits agriculteurs au Katanga et en Ituri. La production a
maintenant cessé au Katanga et seuls quelques petits producteurs continuent à produire
en Ituri, vendant leur coton graine à CODENOR/SOTEXKI (Kisangani) et à des
égreneurs Ougandais.
Carte 1.3 : Production de coton au Congo depuis 1960
54
Source : Étude de la filière coton en RDC, Centre d’étude et de Coopération Internationale, 2007
55
Le croisement des filières porteuses et des pôles de croissance (HHH) permet d’établir
le tableau de priorités suivant :
58
Tableau 1.8: Priorités selon les filières porteuses et pôles de croissance agricole
Zones Axe 1 : Axe 2 : Axe 3 : Axe 4
de l’Atlantique au arrière- région des partie
Kabinda - Kasaï pays villes grands lacs septentrionale de
Oriental minières du l’Équateur
Katanga
Source : Ministère des Infrastructures et des Travaux publics et Banque mondiale (Priorités pour les
investissements dans les infrastructures de transport, 2010).
Après des décennies de manque d’entretien, une grande partie de ce réseau n’est plus
fonctionnel. Les voies secondaires (terrestres ou fluviales) ne sont pratiquement plus
praticables, coupant ainsi la plus grande partie des bassins de production (en particulier
de produits vivriers) des principaux centres de consommation. La dégradation des grands
axes de transport interne, y compris la boucle du fleuve Congo essentielle pour drainer
les productions agricoles de l’Équateur, de la Province orientale et du Bandundu vers
Kinshasa et Matadi limite fortement le trafic, allonge les délais et renchérit les coûts de
transport, nuisant ainsi à la compétitivité des productions locales. Les coûts de transport
peuvent en effet atteindre 0,20 USD la tonne/km contre 0,13 la t/km dans les autres pays
60
b. Accès à la terre
La densité de population de la RDC est globalement peu élevée (22 habitants au
kilomètre carré) et seule une faible proportion des terres arables est actuellement
cultivée. Malgré cela, le problème de l’accès à la terre se pose de façon de plus en plus
pressante dans un nombre croissant de zones du pays, notamment dans les zones où
les populations se sont concentrées à cause de la fertilité des sols, de l’existence de voies
de communication et de la proximité de services essentiels et de marchés pour leur
produits : bassins d’approvisionnement agricole des principales villes du pays, axe Bas
Congo-Katanga, zones entourant la boucle du fleuve en Équateur et dans la Province
orientale, et surtout dans la région des grands lacs où la densité de population est très
élevée (plus de 200 h/km2). Les problèmes fonciers sont depuis longtemps à l’origine
62
c. Accès à la main-d’œuvre
Le marché du travail présente un autre paradoxe. Avec une démographie galopante, un
tissu industriel inexistant, et un chômage massif, on pourrait penser que le recrutement
de main d’œuvre agricole n’est pas un sérieux problème. Il n’en est rien : la plupart des
grandes exploitations agricoles signalent avoir des difficultés à mobiliser non seulement
65
d. Accès au crédit
Comme on l’a noté dans le chapitre 2, l’accès au crédit est très limité dans l’ensemble de
l’économie congolaise. Le système bancaire comprend plus d’une vingtaine de banques
commerciales dont les agences sont situées principalement à Kinshasa et dans les chefs
lieux des provinces. On estime qu’actuellement, il n’y a pas plus de 300 000 comptes
bancaires pour une population de plus de 65 millions d’habitants. Il existe par ailleurs un
nombre grandissant de coopératives d’épargne et de crédit (COOPEC) essentiellement
à Kinshasa, au Katanga, au Bas-Congo et dans les Kivu (il n’en existe encore aucune dans
66
Encadré 1.5 : L’accès au crédit : une contrainte pour les producteurs de thé
et d’arabica
Le retour de la stabilité a permis aux quelques planteurs de thé et d’arabica restés
dans les Kivu malgré les troubles d’envisager l’expansion de leurs activités. Certains
investisseurs extérieurs ont également exprimé un intérêt. Mais les investissements
sont lourds. Une nouvelle plantation de thé coûte environ 3 000 USD/hectare et
le coût d’une unité de traitement appropriée pour une plantation de 500 hectares
est de 2 à 3 millions de dollars.
Tous les investisseurs, existants et potentiels, ont souligné à la mission
l’impossibilité actuelle d’accéder à des crédits à moyen/long terme pour
financer ces investissements. Cela les oblige à les entreprendre progressivement,
au rythme de leur disponibilité en fonds propres. La plupart d’entre eux sont
décapitalisés, après des années de trouble et souvent de pillages, ce qui signifie que
les investissements ne pourront se faire que lentement et que la réponse de l’offre
à l’amélioration des opportunités du marché et du climat des affaires ne sera que
très graduelle.
Pour lever cette contrainte, le ministère de l’Agriculture a proposé dans son nouveau Code
agricole la création de deux nouvelles institutions : (i) une Caisse nationale de développement
agricole, alimentée par des fonds budgétaires et accordant des crédits à moyen et long terme
à des taux subventionnés (4% /an) aux investissements des exploitations commerciales et (ii)
des Fonds provinciaux de développement agricole, alimentés par les ressources budgétaires
des provinces, accordant des crédits subventionnés (2% /an). Mais l’expérience passée de la
RDC en matière de crédit agricole n’a pas été positive et ces nouvelles institutions devront faire
preuve d’une extrême transparence et rigueur dans leur gestion pour être efficaces dans leur
appui au développement agricole. Une autre inconnue reste bien sûr la capacité des pouvoirs
publics nationaux et provinciaux à mobiliser les ressources nécessaires. Bien que le désir de
réserver des ressources pour les petites exploitations familiales soit légitime, l’avantage de
créer ces deux institutions de crédit différentes – pour les moyennes/grandes exploitations et
les exploitations familiales – n’est pas évident. Ce ciblage augmente la complexité du système
dans un contexte où les ressources humaines sont rares et les contrôles très difficiles à mettre
en œuvre. Il semble que, à moyen terme au moins, très peu d’exploitations familiales puissent
efficacement utiliser et gérer des ressources empruntées et que le moyen le plus simple et le
plus efficace d’appuyer leur développement soit l’octroi de subventions à l’investissement
ou la distribution de semences et de plants sélectionnés. Par ailleurs, en ce qui concerne les
grandes exploitations commerciales, il semblerait opportun que le Gouvernement explore
la possibilité d’accorder : (i) des subventions partielles pour des investissements prioritaires
(par exemple pouvant servir aussi au développement du secteur villageois : extraction d’huile
68
de palme, stations de lavage pour l’arabica, usine de thé… et (ii) offrir des garanties partielles
pour des financements accordés par les banques commerciales.
Très peu d’agriculteurs ont accès à du matériel végétal amélioré. Certains opérateurs
industriels (palmier à huile, hévéa, arabica, thé, ainsi que maïs dans le Katanga) importent
directement des variétés améliorées de pays voisins (Kenya, Ouganda, Zambie) pour
leurs propres besoins. Les petits producteurs n’ont pas accès aux variétés améliorées,
sauf un nombre limité d’entre eux bénéficiant de programmes d’urgence ou de l’appui
d’ONG34. Mais ces actions non seulement ont un effet limité géographiquement, mais
encore sont engagées sans vision stratégique ni souci de pérennité. Si elles perdurent, elles
risquent d’être un frein à toute initiative privée et par conséquent, d’aller à l’encontre du
développement d’un programme semencier national viable.
Le ministère de l’Agriculture a préparé un projet de loi portant réglementation du
secteur semencier qui définit les bases de l’organisation ainsi que du développement
du sous-secteur des semences. Il fixe les conditions d’exercice de l’activité semencière
en RDC et définit les modalités et les conditions de contrôle de la production et de la
commercialisation des semences. Il a aussi préparé un Programme national semencier
(PNS) permettant, en première phase, d’assurer la transition entre les programmes
d’urgence et la mise en place, à terme, d’une filière semencière performante, apte à
répondre aux besoins en semences et plants de la qualité voulue et d’évoluer régulièrement
avec le développement général du secteur agricole. La stratégie du Gouvernement sépare
70
La situation de dégradation actuelle de l’Institut impose que soit menée au plus tôt
une réflexion stratégique sur la relance de la recherche agricole en RDC. Ce travail est
extrêmement urgent. Rebâtir un système de recherche performant ne pourra se faire que
sur des bases assainies (cadre institutionnel, gestion scientifique, ressources humaines,
situation financière, gestion administrative et financière). La stratégie de relance de
la recherche agricole devra prendre en compte les ressources financières et humaines
disponibles, qui sont très limitées, ce qui implique que la stratégie devra : (i) impliquer
un redimensionnement majeur de l’outil ; (ii) se focaliser à moyen terme sur la recherche-
développement et sur un nombre restreint de thèmes de recherche (productions vivrières
et industrielles stratégiques) identifiés par un processus participatif ; (iii) mobiliser tous
les acteurs impliqués dans la recherche – instituts, universités, ONG, entreprises privées
– et se fonder sur des partenariats étroits à la fois avec les producteurs, utilisateurs de
la recherche et les instituts de recherche internationaux et régionaux; (iv) établir des
liens étroits avec les producteurs semenciers et les systèmes de vulgarisation et (v) faire
appel à des mécanismes de financement qui assurent à la fois la réactivité du système à la
demande des utilisateurs et la sécurisation de son financement sur le long-terme.
Les premières mesures à prendre par le Gouvernement pour préparer cette relance
devraient être : (i) une revue institutionnelle approfondie de l’INERA comprenant :
l’analyse des organes de gouvernance de l’Institut, l’évaluation du personnel et la
préparation d’un plan de restructuration/gestion de ses ressources humaines et le
lancement d’un audit financier et la préparation d’un plan de restructuration financière
et (ii) l’actualisation du « Plan directeur de la Recherche » (élaboré en 1984 et révisé
en 1991 mais qui semble toujours d’actualité) pour déterminer les grandes orientations
de l’INERA au plan de la nature de ses programmes scientifiques et de leur gestion,
du dimensionnement de l’Institut lui-même (au plan géographique et des moyens
humains), des partenariats à rechercher et des moyens de financement devant assurer sa
viabilité à long-terme.
par les entreprises. Comme le démontre la Fédération des entreprises du Congo (FEC),
le climat des affaires est globalement très difficile : la RDC se classe à la 181ème place
sur 182 pays analysés par la Banque Mondiale dans son rapport sur la facilité à faire
des affaires de 2009 et à la 158ème place sur 163 selon Transparency International).
Parmi les facteurs qui rendent l’environnement particulièrement hostile, la FEC cite :
(i) une fiscalité foisonnante, complexe et peu transparente, prélevée par une multitude
d’organismes nationaux, régionaux et locaux (le FMI en a dénombré plus de 900) et
qui donne souvent lieu à une interprétation discrétionnaire de la part des agents de
l’État ; (ii) la corruption généralisée des services publics, qui se traduit par un racket
omniprésent et des prélèvements de « facilitation » généralisés ; (iii) le coût élevé et
l’issue incertaine des recours en justice et (iv) un Code des Investissements peu attractif
en particulier pour des entreprises agricoles et agroindustrielles dont les investissements
sont en général à long terme et à risque relativement élevé.
Une fiscalité de porte relativement favorable mais des formalités très pénalisantes.
Depuis 2002, le Gouvernement a instauré une protection tarifaire relativement favorable.
Les intrants et équipements agricoles sont faiblement taxés : tarif de 5% plus un impôt sur
le chiffre d’affaires (ICA) de 3% soit une taxation globale de 8,15%). Les importations de
produits alimentaires sont taxées à un niveau offrant en théorie une protection raisonnable
aux producteurs locaux : droits de 10% plus ICA de 13% soit un taux combiné de 24,3%
de la valeur CAF pour les produits de première nécessité (riz, maïs, viande et poissons
congelés) et 20% plus l’ICA soit une taxation globale de 35,6% du pris CAF pour les
produits autres que les denrées de base (huiles alimentaires raffinées, viandes et poissons de
premier choix). Cette protection en principe satisfaisante est toutefois souvent minée par la
fraude qui réduit de façon significative la protection réelle dont bénéficient les producteurs
locaux malgré les contrôles opérés par l’OCC (et maintenant le BIVAC). Enfin, les
exportations agricoles sont également soumises à une taxation modérée, tout au moins en
ce qui concerne les droits de douane proprement dits (0 à 2% de la valeur FOB). Ces taxes
sont toutefois augmentées par les prélèvements opérés par une multitude d’institutions
(OCC, ONC, MAPE, OGEFREM, BCC, Province…) qui portent la taxation globale des
exportations à environ 11 à 13%, à laquelle s’ajoute encore les «facilitations multiples »
dont les opérateurs privés doivent s’acquitter pour ne pas retarder leurs exportations et qui
peuvent ajouter 3 à 4% du prix FOB au coût des exportations.
Les prélèvements opérés par les divers organismes sur les exportations sont souvent
redondants et souvent sans contrepartie véritable au niveau des services reçus par les
exportateurs, correspondant plutôt à de simples rentes extraites de façon discrétionnaire
par des organismes ou des individus. Toutefois, l’effet le plus dommageable de la
prolifération des contrôles et des taxes37, plus que son impact direct sur le coût des
exportations, est de prolonger indûment la durée des formalités d’exportation, période
pendant laquelle la marchandise et le véhicule chargé de son transport sont bloqués (de
75
une à plusieurs semaines). Cela entraîne des pénalités substantielles (250 USD/jour) pour
le transporteur et explique que le coût du transport Bukavu-Mombassa (220 USD/t)
soit prés de deux fois plus élevé que celui du trajet Kigali-Mombassa (120 USD/t) pour
les mêmes marchandises et une distance similaire (ce surcoût est surnommé « la taxe
Congo »). Ces surcoûts sont l’une des raisons majeures de la fraude massive qui frappe
les exportations d’arabica du Kivu sous forme de parche via le Rwanda ou l’Ouganda.38
Il faudra du temps pour lever les contraintes structurelles qui pèsent sur l’agriculture
congolaise. À court-moyen terme, le Gouvernement doit s’efforcer de prendre toutes les
mesures en son pouvoir pour améliorer la compétitivité du secteur et par là promouvoir
son développement. Ces mesures sont les suivantes : (i) élimination de toute taxation sur
les importations d’intrants et d’équipements agricoles et sur les exportations agricoles ;
(ii) amélioration des incitations données par le Code des Investissements aux investisseurs
du secteur, pour tenir compte de leur spécificité et (iii) rationalisation des formalités
d’exportation pour réduire fortement à la fois le nombre de prélèvements et les retards
qu’elles occasionnent. Ces mesures n’entraîneraient que peu de pertes de recettes fiscales
pour l’État et réduiraient la fraude de façon significative. Leur effet fiscal net pourrait en
fait s’avérer positif.
Le Gouvernement a d’ailleurs commencé à établir un Guichet unique à chacun des
grands points d’exportation pour regrouper et faciliter les formalités administratives
d’importation et d’exportation de marchandises. A la fin de l’année 2009, 8 des 32
guichets prévus étaient opérationnels, les 24 restants devaient l’être au cours de 2010.
La création de Guichets uniques n’éliminera cependant pas totalement les tracasseries
auxquelles les exportateurs sont confrontés à l’heure actuelle, qui sont rendues possibles
par le nombre de formalités exigées et par l’existence de nombreux textes de tous ordres –
décrets, arrêtés et directives, pris au niveau national mais désormais aussi au niveau local,
qui sont parfois très anciens mais n’ont jamais été annulés. Cette accumulation de textes
parfois contradictoires permet une interprétation discrétionnaire et abusive de la part
des services concernés de l’État. Il est donc important que le Gouvernement entreprenne
immédiatement : (i) une revue approfondie qui permettrait d’identifier les services
réellement nécessaires au contrôle efficace des exportations/importations de produits
agricoles, qui devrait en avoir la responsabilité et quel devrait en être le coût raisonnable
et donc les frais correspondants et (ii) sur cette base, une simplification, harmonisation,
toilettage des textes et formalités concernant l’importation et l’exportation de produits
agricoles.
pas à des contraintes et régulations sanitaires, mais à des normes de qualité marchande –
prix, qualités – ou à des considérations environnementales et sociales, qui sont
essentiellement gouvernées par le secteur privé. Toutefois, les problèmes phytosanitaires
et zoo-sanitaires se poseront avec plus d’acuité à moyen terme, avec le développement et
la diversification des exportations agricoles du pays, avec l’accroissement de l’utilisation
de produits phytosanitaires par les producteurs congolais et avec le renforcement des
contrôles de la part des pays clients de la RDC, sur le marché international mais aussi sur
le marché régional (déjà, une attention croissante est portée au problème des résidus de
pesticides et d’ochratoxine dans l’arabica et le thé). La RDC est membre de la SADC
(1994) et du COMESA (1997) et est tenue de respecter la réglementation de ces
institutions en matière sanitaire. Bien que jusqu’ici peu de progrès ait été accompli au
niveau régional dans ce domaine, de nombreux pays potentiellement clients des produits
agricoles de la RDC ont commencé à renforcer leurs propres contrôles et il ne fait aucun
doute que la SADC et le COMESA feront de même dans le cadre du renforcement de
l’intégration régionale. Les récents événements de lait contaminé et de grippe aviaire ont
largement contribué à accroître les préoccupations des populations en matière sanitaire
et donc l’attention portée par les gouvernements aux problèmes de santé publique.
A l’heure actuelle, plusieurs institutions sont chargées de contrôles sanitaires et
de qualité à l’exportation et à l’importation des produits agricoles/alimentaires : le
ministère de l’Agriculture, de l’Élevage et de la Pèche (MAPE), l’Office Congolais de
contrôle et l’Office national du Café (ONC) ainsi que les ministères du Commerce,
de l’Environnement, et de la Santé publique. L’Office congolais de contrôle (OCC)
est chargé du contrôle systématique de qualité, de quantité, de conformité et de prix
de toutes marchandises à l’importation comme à l’exportation (contrôles qui sont en
fait des services rendus pour le compte du service des douanes). Pour ce faire, l’OCC
possède des laboratoires, dans les plus grandes villes du pays et aux principaux points
d’importation et d’exportation. Dans le cas de certaines exportations agricoles (café,
cacao, thé et quinquina), l’OCC est sensé (ce n’est pas toujours le cas) se reposer sur
les analyses de qualité faites par l’ONC (qui délivre alors les autorisations nécessaires).
L’OCC se finance en prélevant pour ses services une commission de 2% de la valeur
du produit (FOB ou CAF), à laquelle s’ajoute le coût des analyses de laboratoire. Il a
donc les moyens nécessaires à son fonctionnement et la qualité de ses services est dans
l’ensemble satisfaisante. L’OCC est aussi responsable pour la RDC de tout ce qui
concerne les normes et standards de la métrologie et de l’accréditation. Il participe
au nom de la RDC au programme Standards, Quality Assurance, Accreditation and
Metrology (SQAM) » lancé depuis 2000 par la SADC et qui vise à établir un cadre
juridique et réglementaire régional en matière de qualité concernant l’Accréditation, la
Certification, la Normalisation et les Mesures. L’Union a aussi préparé un cadre législatif
régional visant l’information et la protection des consommateurs de la zone SADC,
pour protéger leur population des risques de sécurité sanitaire/alimentaire.
77
Les activités de l’OCC portent essentiellement sur les aspects commerciaux (qualité,
conformité) mais très peu sur les aspects de santé publique. Pour un petit nombre
d’importations de produits dits « sensibles », y compris certains produits alimentaires,
l’OCC procède à des analyses physico-chimiques et microbiologiques, mais les aspects
purement sanitaires, de santé publique, en matière agricole et alimentaire, reste de la
responsabilité du MAPE. Ce dernier est chargé39 de la définition et de l’application des
normes et réglementations en matière de protection sanitaire alimentaire, phytosanitaire et
zoo-sanitaire, y compris le contrôle des importations et exportations de matériel végétal, de
produits phytosanitaires, vétérinaires ou alimentaires (certificat phytosanitaire nécessaire
pour l’obtention du permis d’importer et certificat phytosanitaire, de fumigation de salubrité
nécessaire pour l’obtention du permis d’exporter) ; de l’homologation et du contrôle de la
distribution des produits phytosanitaires et vétérinaires et de la répression des fraudes sur
l’ensemble du territoire dans ces domaines. Cependant, à cause d’un sévère manque de
moyens humains et financiers, le MAPE n’est pas en mesure de remplir ces fonctions. Les
aspects de santé publique dans le domaine agricole et alimentaire, pourtant critiques pour
la protection de la population, sont très insuffisamment couverts à l’heure actuelle et les
services publics ont la plus grande difficulté à prévenir ou enrayer l’émergence de maladies
végétales ou animales contagieuses (peste bovine, pleuropneumonie bovine).
A l’avenir, la RDC devra se doter des moyens à la fois (i) d’accompagner l’accroissement
de ses exportations agricoles sur les plans sanitaire et qualitatif, qui deviennent de plus
en plus déterminants dans l’accès aux marchés régional et international et (ii) de mieux
gérer les aspects de santé publique alimentaire et de protection végétale et zoo-sanitaire,
au plan national. Dans un contexte de contraintes financières et humaines fortes, il sera
nécessaire de prioriser très strictement les actions à court et moyen terme et de repartir
les responsabilités respectives de la puissance publique et du secteur privé. En vertu
de ses fonctions régaliennes, l’État devra concentrer ses moyens limités sur la mise en
place d’un cadre légal et réglementaire minimum permettant de gérer les aspects de
santé publique, alimentaire et phyto/zoo-sanitaire. Le secteur privé doit améliorer
ses capacités à gérer les aspects commerciaux (qualité, certification) du commerce des
denrées agricoles : adoption des « bonnes pratiques agricoles et agro-industrielles »,
adoption de l’approche HACCP, certification (ISO, EUROGAP).
Pour ces deux fonctions, la RDC doit faire l’effort à se doter des capacités nécessaires,
notamment en ce qui concerne les laboratoires accrédités de certification. Il faudrait
que le Gouvernement, en concertation avec le secteur privé et la société civile, prépare
un programme d’urgence concernant tant la protection du marché intérieur que les
exportations, qui pourrait inclure les mesures suivantes :
• adoption d’une loi-cadre sur l’information, le contrôle qualité et la sécurité
alimentaire pour protéger les consommateurs/utilisateurs nationaux ;
• amélioration/actualisation du cadre réglementaire national pour le contrôle
qualité des denrées alimentaires (importées ou produites localement) et des
78
Tableau 1.9: Part du secteur agricole dans les dépenses totales de l’État (en
millions de FC)
Total dépenses de l’État 183 729 322 358 449 579 737 653 1 018 429 870 070
(2)
Source : Données tirées des lois budgétaires respectives et des états de suivi budgétaire quand elles sont
disponibles, sinon des lois de règlement définitif du budget.
• Les ressources effectivement consacrées au secteur ont en fait été encore plus
faibles puisque les dépenses réellement effectuées sont systématiquement très
inférieures aux crédits budgétaires (7,2 milliards sur 16,8 milliards de FC en
2007, soit 43%).
• Les salaires/rémunérations représentent plus de 85% du total des montants
débloqués. Le solde (15%) est partagé entre les dépenses de fonctionnement hors-
salaires et les investissements. Cela montre que (i) les dépenses publiques n’ont,
depuis plusieurs décennies, contribué ni à l’accroissement du potentiel productif
du pays ni même à son entretien et que (ii) l’efficacité des services du ministère est
quasiment nulle car son personnel n’a aucun moyen pour mener à bien les activités
dont il est responsable.
Le processus de décentralisation budgétaire initié en 2008 implique le transfert aux
provinces de 40% des recettes à caractère national.44 Cette allocation porte sur un montant
global qui est alors affecté au niveau provincial en fonction des priorités locales. Il était
raisonnable de penser que les arbitrages budgétaires provinciaux, proches des réalités du
terrain, seraient plus favorables au secteur agricole. Mais il apparaît, à l’analyse du budget
de certaines provinces, que les premières décisions budgétaires provinciales sont dans
l’ensemble assez défavorables au secteur agricole.
82
Secteur Élasticités
Agriculture 0,15-0,30
Pistes rurales 0,07-0,10
Éducation 0,12-0,15
Santé 0,16-0,20
Source: Fan, Zhang and Rao (2004), IFPRI.
Importance des dépenses publiques pour le développement du secteur. Il est certain que
les dépenses publiques dans l’agriculture devront augmenter fortement pour permettre
au Gouvernement d’atteindre ses objectifs de croissance et de réduction de la pauvreté.
Des études menées dans de nombreux pays (Inde, Indonésie, Chine, Thaïlande, Éthiopie,
83
Ghana, Ouganda, Zambie, Rwanda) ont démontré le rôle capital des dépenses publiques
dans le secteur agricole et dans d’autres secteurs critiques pour son développement tel
que celui des infrastructures de transport. Le tableau ci-dessus présente les estimations de
l’élasticité de la production agricole aux dépenses publiques dans le secteur et à certaines
dépenses publiques non-agricoles45. Il montre que, en moyenne, un accroissement
des dépenses publiques agricoles de 10% induit un accroissement d’environ 2% de la
production agricole par habitant. Dans la plupart des pays en voie de développement les
dépenses publiques dans les infrastructures de transport (en particulier les pistes rurales)
et la génération/diffusion de nouvelles techniques ont le plus grand impact à la fois
sur la croissance agricole et sur la pauvreté46. Comme on l’a vu, une croissance agricole
annuelle d’au moins 7% par an (4% par an par habitant) serait nécessaire pour diminuer
de moitié le nombre des pauvres (OMD 1) à un horizon raisonnable (15 ans). Bien qu’il
soit très difficile de déterminer le niveau de dépenses publiques à allouer au secteur pour
atteindre cet objectif, il est certain que l’objectif minimum du Gouvernement devrait
être d’atteindre le niveau de 10% des dépenses publiques totales que les Gouvernements
africains se sont fixé à Maputo dans le cadre du NEPAD.47
Nécessité d’améliorer le ciblage des dépenses publiques. Les études réalisées par
l’IFPRI montrent aussi que, s’il est nécessaire d’accroître les crédits affectés au secteur
agricole, il faut aussi les utiliser de la façon la plus efficace possible. Cela demande
d’améliorer à la fois : (i) leur ciblage pour qu’ils aient le plus d’impact possible et (ii)
l’efficacité de la mise en œuvre des programmes qu’ils financent.
Privilégier l’investissement. L’impact sur la croissance des dépenses d’investissement
est beaucoup plus important que celui des dépenses de fonctionnement48 ; ce qui
implique que le simple payement des salaires et des autres dépenses courantes du secteur
public a peu d’effet sur la croissance agricole ;
Encadré 1.7: Impact des dépenses publiques : ciblage des filières porteuses
en Zambie
Des analyses menées sur la Zambie montrent que les dépenses publiques en faveur
des cultures vivrières dominantes (céréales et tubercules) sont les plus efficaces
pour réduire la pauvreté (une augmentation de 1% de la valeur ajoutée dans les
sous-secteurs entraîne une réduction de la pauvreté de 0,33 % pour les tubercules,
de 0,28% pour les céréales, de 0,25% pour les cultures industrielles et de 0,18%
pour l’élevage). Toutefois, l’importance des tubercules peut être largement illusoire
puisque la faible part du sous-secteur dans le PIBA total limite très largement
son impact potentiel. Par contre, la position dominante du maïs, combinée a son
impact potentiel important sur la pauvreté en fait un sous-secteur prioritaire,
bien que son potentiel de croissance soit modéré. Finalement, bien que le poids
des cultures industrielles/d’exportation dans le PIBA soit relativement faible, leur
potentiel de croissance est élevé et leur impact potentiel global sur la réduction de la
pauvreté est significatif. Ces analyses concernant la Zambie et sont données à titre
d’illustration. De telles analyses fines devraient être réalisées sur la RDC dont les
conclusions pourraient être très différentes dans la plupart des provinces puisque
les tubercules (le manioc) y jouent un rôle très important, à la possible exception du
Katanga, où le maïs est dominant.
Améliorer la mise en œuvre des programmes. Finalement, quel que soit le niveau des
dépenses publiques dans le secteur agricole, et la qualité de leur ciblage, leur impact dépend
en grande partie de l’efficacité de leur mise en œuvre. Cela implique en particulier que :
(i) le processus d’exécution budgétaire soit réformé en profondeur pour en améliorer
ses aspects fiduciaires ; (ii) les programmes de développement soient préparés et mis en
œuvre au moyen d’une approche décentralisée et participative, pour en améliorer non
seulement la pertinence, mais aussi l’appropriation et le suivi sur le terrain. L’emploi
d’instruments contractuels et de partenariats publics-privés permettrait par ailleurs
d’améliorer la recevabilité des agences responsables de la mise en œuvre des programmes.
Situation actuelle
La réflexion engagée par le Gouvernement a mis en évidence les graves dysfonctionnements
institutionnels liés (i) aux faibles capacités organisationnelles, humaines, matérielles et
financières du ministère de l’Agriculture, de l’Élevage et de la Pêche (MAPE), institution
principale du secteur et (ii) à l’existence de plusieurs ministères ayant des responsabilités
dans la gestion du secteur (en particulier le ministère du Développement rural) qui
conduit à des conflits d’attributions et à la dispersion des ressources et des efforts. À cela
s’ajoute, depuis 2006, un manque de cohérence entre l’organisation actuelle du MAPE
et la nouvelle architecture institutionnelle du pays stipulée par la Constitution du 18
février 2006 qui consacre la décentralisation comme mode d’organisation politique et
administrative du pays.
qui se traduit par l’affectation encore trop fréquente à des niveaux hiérarchiques élevés
d’agents recrutés sans tenir compte de leur niveau de qualification ou de leur capacité à
gérer), (ii) la persistance d’emplois fictifs et l’existence d’un système de paiement mal
adapté et mal maîtrisé.
Selon les informations disponibles, qui demandent à être actualisées, le ministère de
l’Agriculture comptait en 2003 près de 18.800 agents alors que les effectifs prévus par le
cadre organique étaient au maximum de 10.000 agents.55 Ces effectifs se caractérisaient
par :
• le nombre très important (près de 65%) d’agents ayant plus de 55 ans d’âge et qui
auraient donc du être admis à la retraite56 ;
• l’existence de deux groupes distincts de personnels : les agents « sous statut »
(55% de l’effectif total) qui sont des fonctionnaires immatriculés dans la Fonction
publique et les « nouvelles unités » (45%) constituées d’agents recrutés de façon
opportuniste, en particulier au niveau provincial, mais non-immatriculés et donc
difficilement contrôlables ;
• l’importance excessive du personnel administratif (environ 45%) par rapport
aux professionnels du secteur agricole (55%, et la très faible proportion de cadres
supérieurs (5%) – tandis que les cadres moyens représentaient 23%, les agents
techniques d’exécution 27% – la plus grande partie du personnel (45%) étant
composée de personnel de soutien ;
• une répartition inégale entre les structures relevant de l’administration centrale
(20 % de l’effectif global du ministère) et les services nationaux, centres agricoles,
projets et programmes (80%) dont les agents sont très difficiles à maîtriser.
la compétence des structures décentralisées. Cette répartition des rôles doit se traduire
par une réorganisation de l’architecture institutionnelle du secteur agricole, axée sur
des orientations stratégiques claires et bien définies dans le cadre d’un programme de
mesures prioritaires et d’un calendrier de réalisation.
La constitution du 18 février 2006 prévoit un transfert important de compétences au
profit des provinces : le rôle du pouvoir central est limité aux fonctions de législation, de
réglementation et de coordination tandis que la responsabilité des activités opérationnelles
est confiée aux provinces (élaboration et exécution des programmes agricoles provinciaux,
organisation et contrôle des campagnes agricoles etc.…), mieux à même de définir les
priorités locales et de mettre en œuvre les programmes de développement spécifiques.
La décentralisation a en particulier été initiée dans le secteur agricole, considéré comme
le moteur du développement économique. Les gouvernements provinciaux formés à la
suite des élections de 2006 comprennent tous des ministères de l’agriculture (en général
regroupant le MAPE et le MDR en un seul ministère) en principe seuls responsables
des aspects opérationnels du développement agricole dans leur province. Mais, l’exercice
effectif des attributions qui leur ont été transférées par les directions provinciales des
ministères nationaux est étroitement lié à leur capacité opérationnelle et administrative
d’élaborer, en collaboration avec les acteurs du secteur, et mettre en œuvre/coordonner
des programmes régionaux. Dans une large mesure, cette capacité reste encore à bâtir.
En effet, l’installation de ces départements ministériels semble avoir eu lieu dans
une certaine impréparation et, quatre ans après la création des ministères provinciaux
de l’agriculture, la nouvelle architecture institutionnelle peine à se mettre en place
(à l’exception des Conseils agricoles et ruraux de gestions (CARG, voir ci-dessous).
L’efficacité des institutions publiques du secteur, services déconcentrés du MAPE et
ministères provinciaux, est en effet fortement diminuée (au-delà du manque de moyens
matériels et financiers) par une série de contraintes légales et administratives.
Il n’existe toujours pas de loi organique sur la décentralisation qui définirait l’étendue
et les modalités de l’exercice des compétences transférées.
La loi portant statut général de la fonction publique nationale n’a pas été actualisée,
ce qui empêche de définir et clarifier les relations entre les exécutifs provinciaux et les
services déconcentrés du pouvoir central.
Il n’existe toujours pas de loi sur la fonction publique provinciale, ce qui retarde le
transfert du personnel concerné des services déconcentrés vers les exécutifs provinciaux.
Il en résulte (i) que les structures décentralisées ne peuvent pas se doter du personnel
dont elles ont besoin pour faire fonctionner leurs administrations et (ii) que les services
déconcentrés sont eux dans l’expectative, attendant la clarification de leurs relations avec
les exécutifs provinciaux57. Finalement, les Gouvernements et ministères provinciaux ne
disposent encore ni du personnel ni du cadre juridique pour assurer une gestion régulière
et transparente des budgets sectoriels58. Il est donc essentiel de prendre rapidement les
mesures nécessaires pour mener le processus de décentralisation à son terme, en clarifiant
89
les rôles respectifs du MAPE et des ministères provinciaux, et de doter les ministères
provinciaux des ressources dont ils ont besoin : financières, organisationnelles (en
particulier procédures de préparation et d’exécution des budgets) et humaines (par la
sélection et le redéploiement du personnel des services déconcentrés et/ou le recrutement
dans le cadre de la fonction publique locale ainsi qu’un vaste programme de formation à
l’élaboration de programmes régionaux et à la gestion budgétaire)59.
Ces activités devraient être menées à bien dans les plus brefs délais pour permettre une
mise en œuvre efficace de la politique de développement agricole du Gouvernement.
Les financements pour le redéploiement du personnel du MAPE ont déjà été mobilisés
auprès de la Banque mondiale. Mais il faut noter qu’il serait inefficace et éventuellement
dangereux d’engager le redéploiement/plan social du MAPE séparément de la
structuration/restructuration des ministères provinciaux et du MDR et des mesures
nécessaires pour contrôler les recrutements des différentes structures, en particulier au
niveau provincial.
Mise en place et renforcement des structures décentralisées. Comme on l’a dit,
les ministères provinciaux sont encore largement dépourvus du personnel et des
ressources budgétaires minimum pour fonctionner. Pour renforcer leurs capacités de
planification et de programmation, la plupart des ministères provinciaux ont déjà lancé,
en collaboration avec les services décentralisés du MAPE, la préparation d’une stratégie
et d’un programme de développement agricole provincial, dans le cadre d’un exercice
92
de Cadrage des dépenses à moyen terme (CDMT). Les provinces ont aussi commencé
à mettre en place les CARG. Cet instrument pourrait être extrêmement efficace pour
améliorer la pertinence de l’action de l’État dans le secteur, mobiliser les ressources
privées dans le cadre de partenariats opérationnels et améliorer la gouvernance dans le
secteur. Il se pose cependant la question de la pérennisation des CARG qui ne peuvent
pas fonctionner sur la seule base du volontariat et si leurs recommandations restent sans
effet. Il est donc important de leur donner non seulement un rôle de conseil mais aussi
des responsabilités opérationnelles et de financer le coût de leur fonctionnement et de
leurs activités. Une de leurs responsabilités opérationnelles possibles pourrait être la
gestion/supervision des fonds provinciaux de développement agricole que le nouveau
Code agricole propose de mettre en place pour soutenir les investissements productifs
privés.
93
Notes
1. En moyenne, sur un échantillon de 35 pays en développement, on a constaté qu’une augmentation de 10%
de la production agricole augmentait de 16% le revenu des ménages du quintile inférieur de la distribution
des revenus (contre seulement 12% pour la production industrielle et 8% pour les services).
2. On estime que chaque hectare de jardin urbain crée 20 à 40 emplois. Chaque emploi peut desservir 50 à 100
consommateurs de légumes et de légumineuses. Le revenu engendré par hectare est d’environ 1 000 USD/
an. On estime qu’en 2008 il y avait 148 896 emplois liés au jardinage urbain à Kinshasa. En raison du nombre
disproportionné de femmes concernées, il y a des effets secondaires sur la fréquentation scolaire pour les enfants,
en particulier les filles, ainsi que l’amélioration de la nutrition du ménage
3. Bien qu’il existe très peu de données quantitatives fiables sur le sujet, il semble que la consommation
moyenne par habitant en RDC pourrait se situer entre 5 et 7 kg/an (350-500 000 tonnes/an soit 5-7 fois
celle de la production de viande d’élevage déclarée. Cette estimation très élevée de la viande de brousse
contraste avec celle du SNSA qui situerait plutôt la consommation de viande de brousse dans une fourchette
de 78 000 à 91 000 tonnes sur la période 1991-2006 (le débat reste ouvert sur cette question). Ainsi, même
avec une faible production de viande d’élevage, le pays arriverait malgré tout à une disponibilité de protéines
animales se situant autour de 10 kg/an par habitant, hors importations.
4. On trouve des races de chèvres supérieures dans des zones proches du Kananga, venant d’efforts passés de
croisements. Il y en a sans doute d’autres qui permettraient la reprise des actions d’amélioration à grande
échelle.
5. Développement Durable Intégré (DID), une ONG ayant des liens avec le Centre international de
physiologie et d’écologie des insectes (ICIPE) de Nairobi, a proposé un programme similaire orienté vers
les producteurs de petits ruminants dans le Bandundu.
6. De tels arrangements existaient avant l’indépendance du pays : les producteurs ou les associations recevaient
un stock initial d’animaux et le soutien vétérinaire en terme zootechnique en retour d’un engagement à
commercialiser leurs animaux par l’intermédiaire de l’exploitation industrielle qui les leur avait fournis.
Actuellement, certaines grandes exploitations telles que l’ex-JVL, appuient fortement le système de
«métayage» pour augmenter leur capacités de production.
7. Selon les feuilles de données de la FAO sur les balances alimentaires remontant aux années 60, les
importations ont constamment représenté une part substantielle de l’offre totale annuelle de poisson et
produits de la pêche pour la consommation humaine. De ce fait, même pendant les périodes de relative
stabilité politique et économique, les prises et la production aquacole de la RDC n’ont pas été à même
d’atteindre le niveau nécessaire pour couvrir la demande intérieure.
8. Les exportations agricoles représentaient 39% des exportations totales en 1959 et 14% en 1969.
9. Le prix des aliments pour bétail est donc peu compétitif. Par exemple, l’aliment pour volaille se vend environ
475 USD sur le marché international. Le même aliment coûte à Kinshasa 660 USD et à Mbuji-Mayi plus de
1 500 USD.
10. A titre d’exemple, la mise en place d’une unité de production piscicole commerciale de tilapia de 5 000 t/
an nécessiterait le recours à environ 10 000 t/an d’aliment poisson
11. D’autres produits peuvent encore être mentionnés comme la Malemba, plat à base de racines de manioc
bouillies, et le Gari qui est une semoule obtenue à partir des racines de manioc, râpées, fermentées, tamisées
puis séchées au feu. La pâte est par la suite réhydratée et mangé avec des soupes, des sauces et parfois du
sucre. Le Gari, très consommé en Afrique de l’Ouest et centrale, n’est encore consommé en RDC que sur le
littoral côtier.
94
12. De meilleures routes et la réduction de « taxes » illicites devraient ramener le coût du transport à 30% du
coût total. Il s’agit là d’un objectif à atteindre. Ainsi, la réparation de la route asphaltée Kinshasa/Matadi
(la Nationale 1) et la réhabilitation des routes de desserte agricole au Bas Congo ont entraîné la réduction
de moitié les prix du transport de Matadi à Kinshasa, et un triplement des évacuations du Bas Congo sur
Kinshasa.
13. Comme au Nigéria. L’alcool utilisé à Kinshasa et au Bas-Congo provient actuellement dans sa quasi-totalité
de la Compagnie Sucrière de Kwilu Ngongo qui le produit à partir de la mélasse de la canne à sucre.
14. Le prix de revient de l’huile brute est d’environ 250 USD/t en Malaisie et de 350 USD/t en Côte d’Ivoire
15. Pour une plantation en Équateur, les coûts sont les suivants : coûts agricoles 150 $/t ; coûts d’usinage 100
$/t ; coût de transport jusqu’à Matadi 150 $/t, soit une fois et demie le coût du fret maritime entre Matadi
et l’Europe (100$) ; frais d’exportation 300 $/t, extraordinairement élevés.
16. La croissance initiale sera cependant très limitée à cause de la longue période nécessaire (7 ans) pour l’entrée
en production des jeunes arbres. On ne pourrait donc voir une croissance significative de la production
qu’après 2017.
17. L’ONC a trois bureaux régionaux dans la région et a installé quelques germoirs et pépinières, mais ses
activités d’appui sont très marginales.
18. Le coût d’établissement des plantations industrielles est estimé à environ 1.300 USD/ha et celui des
plantations villageoises à 400 USD/ha hors main d’œuvre (essentiellement pour l’achat de plantules).
19. Il existe de petits d’épulpeurs performants d’un coût modique, mais ils ne sont pour l’instant pas disponibles
au Kivu. Il existe même de petits équipements (éco pulper) permettant de produire du fully washed de haute
qualité, qui sont utilisés avec succès en Amérique Latine et au Kenya.
20. Un des autres facteurs ayant un impact négatif sur la qualité est le délai trop important entre cueillette et
l’usinage des feuilles fraîches.
21. A l’heure actuelle le prix moyen obtenu par le thé congolais aux enchères de Mombasa est d’environ 1.800-
2.000 USD/t (décote de 10% par rapport au thé Rwandais et de plus de 40% par rapport aux meilleurs thés
Kenyans). Son prix de revient est d’environ 1.500 USD/t ainsi répartis : coûts agricoles 450, coûts d’usinage
600, coûts de transport et d’exportation 450.
22. Butembo, ou un programme de replantation est en cours avec l’appui de la GTZ.
23. Cette production en “poche”, et la survivance de plantations commerciales utilisant du personnel salarié
alors que ce type de production a pratiquement disparu ailleurs dans le monde, est probablement liée au
besoin d’avoir une concentration suffisante de produit pour permettre sa commercialisation, et au fait que
les plantations de cacao des grand domaines sont en général associées à d’autres spéculations telles que le
palmier à huile et/ou l’hévéa, ce qui en diminue les coûts.
24. De plus, comme dans le cas du cacao, la productivité de ces vieux clones doit être testée et pourrait s’avérer
très inférieure aux clones plus récents utilisés dans les autres pays producteurs.
25. Dans le passé, le robusta washed du Congo était réputé, notamment sur le marché italien.
26. D’autant plus que le cacao est une denrée relativement peu différenciée, contrairement à l’arabica et au thé
par exemple. Il y a 3 qualités seulement : good fermented, fair fermented et sous-standard.
27. Cocobod est en effet une curiosité dans le contexte institutionnel africain. Il fonctionne avec une efficacité
relative qui se fonde sur une “culture” répandue chez les producteurs ghanéens et les personnels des services
publics qui s’est développée avec le temps et qui est unique au Ghana. Il est impensable de créer ce type de
“culture” ex- nihilo dans un pays comme la RDC.
95
28. La densité de population a tendance à être plus élevée dans les secteurs qui ont un bon potentiel agricole,
comme dans les montagnes de la région des Grands Lacs et un bon accès au marché, aussi la population qui
se déplacera dans ces secteurs recherchera les meilleures occasions de revenus.
29. Par exemple le coût de transport du thé ou de l’arabica entre le Kivu (Goma, Bukavu) et Mombasa est estimé
à 300-350 USD/t. contre 150 USD/t. pour les producteurs Ougandais ou Rwandais pour des distances a
peine moins longues.
30. On estime qu’une réduction de 10% des coûts de transport permet un accroissement de 6% de la production
agricole, i.e. une élasticité de 0,6 de la production agricole vis-à-vis des coûts de transport. Si cette réduction
était réalisée sur une période de 10 ans, cela ajouterait 0,6% annuellement au taux de croissance agricole.
31. Avec en particulier le soutien de la coopération belge.
32. Le cadastre agricole a pour missions : initier les contrats de concession agricole ; assurer la bonne
administration des terres rurales ; constater la mise en valeur des terres agricoles ; conserver des documents
cartographiques relatifs aux terres rurales ou agricoles. Les Comités locaux sont chargés de statuer sur les
contestations ayant pour objet des droits fonciers tant collectifs qu’individuels, de participer aux enquêtes
préalables à la concession des terres rurales, de contrôler régulièrement, au moins une fois l’an ou sur
réquisition du gouverneur de province la réalité de la mise en valeur des terres concédées par l’État.
33. Les revenus sont environ 20/25 millions d’USD/an provenant d’une taxe de 2% sur certains produits tels
que le ciment et le tabac, dont une partie non-négligeable est utilisée pour le fonctionnement de l’institution
elle-même.
34. Par exemple, un programme de l’INERA sur la manioc, en collaboration avec l’IITA, a permis la
multiplication et la distribution de variétés résistantes à la mosaïque.
35. Certains programmes pilotes ont déjà été lancés au cours des dernières années sur financement de l’Union
européenne et/ou de la FAO, basés sur l’approche des « champs-écoles». Un “ champ-école” est un groupe
de 20-25 agriculteurs qui sont formés à identifier les problèmes et à diffuser les techniques appropriées
parmi les producteurs de leur terroir. Cette approche semble prometteuse et pourrait être adoptée plus
largement.
36. Sur financement de l’Union européenne, « Évaluation des capacités opérationnelles des stations de
l’INERA », Moïse HOUSSOU, octobre 2004 et « Audit organisationnel et financier », Philippe
Pingannaud et Francis Tshamala, Juin 2009
37. Plus de 20 organismes divers procèdent à des « contrôles » et prélèvent des taxes pour l’exportation
d’arabica ou de quinquina à Bukavu.
38. On estime que les quantités exportées illégalement sont au moins équivalentes aux exportations déclarées a
l’ONC.
39. Décret du 18 novembre 2005, portant réglementation phytosanitaire. Un décret similaire a été préparé pour
la réglementation zoo-sanitaires/vétérinaires, mais ce décret n’a pas encore été promulgué.
40. Les producteurs et les petits commerçants n’ont pas l’habitude historique du travail en commun pour cette
thématique et se présentent en ordre dispersé devant leurs interlocuteurs du reste de la filière : transporteurs,
commerçants et administrations notamment.
41. De nombreuses structures de ce genre sont cependant des créations ad-hoc, créées en vue de capter des fonds
(effet d’aubaine) et sans vision de développement à long terme.
42. Selon certaines sources, près de 5.000 organisations formelles et informelles seraient opérationnelles au Nord
Kivu, Les trois plus importantes sont Action pour le Développement Intégré du Kivu (ADI Kivu) dans la
filière café arabica appuyée financièrement par deux ONG internationales : ICCO Holland et le Comité
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Catholique contre la Faim et pour le Développement (France) ; le Syndicat de Défense des Intérêts Paysans
(SYDIP) surtout actif dans la filière quinquina, mais qui intervient également dans la filière café, où il
appuie la relance du robusta et de l’arabica dans le Nord-Kivu en offrant un soutien technique et commercial
à l’ensemble des caféiculteurs dans sa zone d’intervention et Appui à la Communication Interculturelle
et à l’Autopromotion Rurale (ACIAR) qui anime un projet de relance de la filière café dans le Kivu et
l’Ituri ayant pour principal objectif de structurer les organisations paysannes autour des activités concrètes
de production et de commercialisation du café. La structuration des associations paysannes a débouché sur
la création de la Fédération des Producteurs de café arabica de l’Ituri en 2005 (selon l’ACIAR, 32 unions
ont été formées, regroupant quelque 15.000 planteurs dont 2.000 jeunes, y compris 350 démobilisés).
43. Tels que les services de la Présidence de la République, notamment le Service National.
44. Article 175 de la Constitution.
45. Taux d’accroissement de la production agricole par habitant dû à 1% d’accroissement des dépenses
publiques. Par exemple un doublement des dépenses publiques agricoles entraîne un accroissement de 15 à
30% de la croissance agricole par habitant.
46. Les dépenses publiques dans la recherche-développement ont le plus grand impact sur la productivité et la
croissance agricole. En Inde par exemple, chaque dollar investi dans la R-D génère plus de 13 dollars de valeur
ajoutée supplémentaire, suivi par les dépenses en faveur des pistes rurales (un rapport de 5 à 1). Au Rwanda,
les rapports sont respectivement de 12/1 et de 7/1. Les dépenses publiques dans les routes secondaires/
pistes rurales ont le plus grand impact sur la réduction de la pauvreté : en Inde pour chaque dollar investi
dans les pistes rurales, 124 personnes passaient au dessus du seuil de pauvreté ; les investissements dans la
recherche développement venaient en seconde position avec 86 personnes. En Chine et au Rwanda, les
dépenses publiques dans la R–D et les pistes rurales ont un impact assez semblable : 136 et 126 personnes
par dollar respectivement pour la Chine et 58 et 34 pour le Rwanda.
47. Les études d’IFPRI pour des pays comme le Togo, l’Ouganda, le Rwanda, la Zambie ou le Ghana – qui
consacrent pourtant une part plus importante de leurs ressources budgétaires au secteur agricole que la
RDC– soulignent l’effort énorme qui doit être consenti par la plupart des pays Africains, et donc par la
RDC, pour relancer une croissance soutenue dans le secteur. Elles indiquent que les dépenses publiques
dans l’agriculture devraient augmenter a un rythme annuel allant de 23% a 32% au cours des prochaines
années pour rapidement atteindre 20-30% of des dépenses publiques totales. Voir par exemple Fan et autres,
IFPRI 2008, et « Agricultural Growth and Investment Options for Poverty Reduction in Uganda», IFPRI
septembre 2008.
48. L’augmentation de 10% des dépenses d’investissement entraîne un accroissement de la production agricole
de 6% alors que l’effet d’une augmentation équivalente des dépenses de fonctionnement n’est que de 0,2%.
49. L’impact des dépenses publiques en faveur de l’agriculture varie aussi considérablement en fonction d’autres
facteurs, en particulier : (i) la densité de population agricole (économies d’échelle) ; (ii) le stock initial de
capital humain (en quantité et en qualité), de capital financier et de capital social et (iii) les institutions
locales telles que celles régissant l’accès et l’utilisation des ressources foncières.
50. Basé sur : « La décentralisation dans le secteur de l’agriculture » ; Évariste NIYONKURU et Patrick
MAKALA, juin 2008
51. Avec l’appui de la FAO et de la coopération belge.
52. Qui avait disparu en 2007 pour renaître en 2009.
53. Le ministère de l’Agriculture et celui de l’Environnement ont des conflits relatifs à l’aménagement du
territoire, à la perception de la taxe sur le permis de pêche, aux ressources forestières non ligneuses….
54. Les inspections provinciales supervisent 25 inspections de districts, 145 inspections de territoires,
comprenant 737 secteurs et 5.420 groupements.
97
"Citation : Chloe Dmoergue et Augustin Mpoyi Mbunga, 2012, “La Gestion des Ressources Naturelles
pour une croissance durable”, dans Johannes Herderschee, Daniel Mukoko Samba et Moїse Tshimenga
Tshibangu (éditeurs), Résilience d’un Géant Africain : Accélérer la Croissance et Promouvoir l'Emploi en
République Démocratique du Congo, Volume II : Etudes sectorielles, MÉDIASPAUL, Kinshasa, pages 99-
183.
Cet article a été préparé dans le cadre des travaux d’analyse de la Banque Mondiale autorisés en vertu
du code P106432-ESW pour « la préparation d’une étude Diagnostique d’Intégration du Commerce et
un Mémorandum Economique du Pays ». Les remerciements aux pages xxii-xxv de ce volume assurent la
reconnaissance aux nombreux collègues, experts et participants des séminaires qui ont généreusement contribué
à cet article de leur temps et de leurs idées; toutes les erreurs restantes sont celles des auteurs.
Copyright © 2012 La Banque Internationale pour la Reconstruction du Développement/ La Banque
Mondiale conformément à l’information de la page iii de ce volume."
99
Chapitre 2
Chapitre 2
I. Introduction
L’histoire de la République Démocratique du Congo est inextricablement liée à
l’exploitation des ressources naturelles. La dynamique d’expansion coloniale s'ancra à
l’exploitation des nombreuses richesses qu’offre le pays, entraînant la construction d’un
important réseau d’infrastructure, reliant les sites d’exploitation en différents points du
territoire congolais. La culture des arbres à caoutchouc, la découverte des ressources
minières du Katanga et l’exploitation industrielle des bois précieux, sont autant de
secteurs ayant attiré investissements, intérêts et tensions depuis maintenant plus d’un
siècle.
La RDC semble, à bien des égards, concentrer les symptômes de la malédiction
des ressources naturelles. L’incroyable richesse de son sous-sol, la fertilité de ses terres,
l’importance de son couvert forestier et de ses ressources hydrauliques n’ont pas empêché
un niveau élevé de pauvreté, touchant aujourd’hui plus de 70 % de la population. Bien
au contraire, le cercle vicieux de la pauvreté et des faibles performances économiques du
pays depuis plus de trente ans, sont largement entretenues par une économie de rente
dont la capture par des intérêts catégoriels est avérée et la redistribution vers l’ensemble
de la population n’est guère assurée.
Les causes de l’instabilité dans l’Est du pays dans les zones frontalières de la région
des Grands Lacs sont multiples. Elles relèvent de tensions ethniques et politiques et sont
entretenues par l’exploitation des ressources naturelles. Les industries extractives et, dans
une moindre mesure, le secteur forestier maintiennent une dynamique économique
favorable à la perpétuation des conflits armés1. Au regard des faibles opportunités
économiques dans les autres secteurs formels et du niveau de revenus générés par
l’exploitation informelle des ressources naturelles, les incitations à formaliser ces activités
sont faibles. Nombre d'opérateurs, à commencer par les éléments armés dans l’Est du
100
pays, tirent un avantage financier certain de la relative instabilité régnant dans cette
région, trouvant dans l’exploitation illégale et informelle des ressources naturelles une
source de revenus pour maintenir leurs activités.
L’instabilité et les problèmes de gouvernance ont bouleversé le paysage de l’exploitation
des ressources naturelles. Au sortir de la période coloniale et jusqu’à la fin des années 80,
l’exploitation des ressources minières et des forêts congolaises fut largement dominée
par des groupes industriels. L’effondrement des bassins industriels congolais a eu pour
effet de favoriser un transfert de la main d'oeuvre et de la production vers l’exploitation
informelle et artisanale, provoquant une diminution importante des recettes de l’Etat.
De plus, ce déclin entraîna la désarticulation de nombreux liens sociaux et économiques
entretenus par les industries. La détérioration des infrastructures de transports,
d’énergie et de distribution d’eau contraint aujourd’hui fortement le redémarrage d’une
production à l’échelle industrielle, dans l’ensemble des provinces minières du pays.
Depuis la signature des accords de paix et la mise en place de nouvelles règlementations
régissant ces secteurs à partir de 2002, la situation s’améliora progressivement. Mais la
production reste toujours largement en deçà de son niveau historique et de son potentiel.
La relance du secteur minier est perceptible, notamment dans la province du Katanga,
et les investisseurs internationaux recommencent à affluer. Cependant, la contribution
du secteur au PIB, aux recettes de l’Etat et à l’emploi formel reste limitée. Le secteur
des hydrocarbures, resté à un niveau de production stable et faible depuis plus de 30 ans
est aujourd’hui l’objet d’un regain d’intérêt des acteurs majeurs de ce secteur. En dépit
de sa productivité stagnante, les hydrocarbures ont contribué, à certaines périodes, plus
largement aux recettes de l’Etat que le secteur minier.
La hausse des investissements dans ces secteurs ne sera cependant pas la condition
suffisante à une accélération de la croissance économique, ni à une augmentation
de l’emploi formel. Les sites industriels emploient un nombre limité de travailleurs,
principalement qualifiés. La fiscalité du secteur minier correspond aux normes
internationales mais le taux de recouvrement fiscal reste à améliorer. Si les bénéfices
générés par les groupes industriels présents dans le pays sont difficiles à estimer, l’écart,
entre la valeur ajoutée domestique et la valeur ajoutée internationale dans ce secteur,
reste significatif. Le décalage entre les revenus générés par l’exploitation des ressources
naturelles, les recettes de l’Etat, le développement de liens économiques domestiques
et la redistribution vers des programmes sociaux et contribuant à une réduction de la
pauvreté risque de s'accroître si une meilleure gouvernance du secteur n’est pas assurée.
En période électorale, telle que la République Démocratique du Congo traverse
actuellement ; la stabilité, l’accélération de la croissance économiques, la hausse de
l’employabilité dans les secteurs formels sont des enjeux majeurs pour le pays. L’équation
emplois, revenus de l’état, investissements sociaux et économiques domestiques
101
favorisant une croissance partagée est seule à même d’établir un climat de confiance
entre les citoyens et l’Etat. Les secteurs des ressources naturelles ont donc un rôle central
à jouer pour permettre l’atteinte de ces différents objectifs.
La présente analyse propose donc de visiter les secteurs des industries extractives
(mines et hydrocarbures) ainsi que le secteur forestier ; d’identifier les opportunités
de croissance, les principaux blocages à une meilleure régulation de ces secteurs qui
contraignent leurs performances et les perspectives d’une croissance durable, attentive à
la préservation de l’environnement et aux enjeux sociaux. Ce chapitre s’articule autour
de ces deux secteurs, et fournit une analyse de leur environnement institutionnel et
réglementaire, étudie les performances actuelles, les blocages et opportunités pour
maximiser le potentiel de contribution à la croissance économique de ces secteurs,
notamment par le développement des liens en amont et en aval.
Province Minéraux
Bandundu Diamants, Or
Le Katanga, les deux Kivu, et la province du Maniema sont les provinces dont les
sous-sols recèlent les ressources minérales les plus diverses et les plus importantes.
L’ensemble des provinces de la RDC possède des sous-sols riches en minerais, métaux et
hydrocarbures ; mais les informations précises sur ce potentiel font défaut, et la majeur
partie de ces ressources sont supposées, inexplorées et inexploitées. Depuis le démarrage
de l’exploitation minière au début du vingtième siècle dans le Katanga, jusqu’en 2003, 18
millions de tonnes de cuivre furent produites, et les réserves estimées dans la ceinture de
cuivre de la province pourraient atteindre 70 millions de tonnes de cuivre, 5 millions de
tonnes de cobalt et 6 millions de tonnes de zinc. Des gisements de cuivre sont également
présents dans les sous-sols du Bas-Congo, mais de taille relativement modeste.
103
Les réserves de diamants estimées pourraient être importantes, avec 150 millions de carats.
Certaines estimations suggèrent même que jusqu’à 500 millions de carats pourraient
être présents dans les sous-sols du pays2. Seuls 5% seraient de qualité supérieure. Les
gisements de diamants sont principalement présents dans les deux Kassaï, dans le
Katanga et les Kivu, et près de 75% de la production en terme de carat se fait par le biais
d’une production artisanale.
104
Les principales ressources aurifères se trouvent dans la région de l’Ituri, dans la province
Orientale, dans les Kivu et dans le Maniema. Les trois sites principaux considérés pour
l’exploitation industrielle d’or contiendraient environ 850 tonnes3. Dans la région de
l’Ituri, dans les districts de Kilo et Moto, des ressources aurifères ont été exploitées, mais
les réserves ne sont pas connues avec précision. Les réserves du Moto s’élèveraient à 500
tonnes4, et pourraient être plus importantes dans le Kilo, bien qu’aucune estimation
précise ne soit disponible à ce jour.
Les gisements d’autres minéraux tels que le coltan ou la cassitérite se trouvent
principalement dans l’est et le sud du pays. Le potentiel de ces autres minéraux demeure
mal connu et leur exploitation se fait principalement de manière artisanale. Cependant,
un intérêt croissant à l’égard de ces minéraux, conduit des entreprises à acquérir des
permis d’explorations et d’exploitation pour déterminer le potentiel de certains sites et
s’engager dans l’exploitation semi-industrielle. Par exemple, l’entreprise MMR (Mineral
Mining Ressources – faisant partie du groupe SOMIKA), a conduit des explorations
aéroportées suivies de forage dans les zones de Kalemie et de Manono au nord du
Katanga, pour évaluer les ressources en coltan sur leurs différentes concessions.
Des réserves d’hydrocarbure mal connues. Si la RDC est avant tout perçue comme un
pays riche en ressources minérales ; son sous-sol recélerait des réservoirs d’hydrocarbures
qui seraient importants et qui pourraient ; à moyen et long termes ; substantiellement
modifier la composition du PIB et des recettes de l’Etat. Si les ressources ne sont pas
connues avec précision, la RDC semble aujourd’hui vouloir s’engager sur la voie des pays
producteurs de pétrole.
Les stocks identifiés sont principalement situés dans trois bassins sédimentaires. Le
bassin côtier d’une superficie de 6 000 km2 ; le bassin géant de la cuvette centrale, d’une
superficie de 800 000 km2 ; et le bassin de la branche ouest du rift Est Africain, composé
de 6 grabens, pour une superficie totale de 50 000 Km2 5. Le bassin côtier est le seul site
d’exploitation actif depuis une trentaine d’année mais ayant une production moyenne
limitée à 25 000 barils (10 000 on shore et 15 000 off shore) de brut par jours, ayant
atteint un pic à 28 000 barils en 2008, sur environ 300 puits, on et off shore.
Les différents bassins sont divisés en blocs comme suit :
• Le bassin côtier est subdivisé en 6 blocs dans sa partie des Rendus, par les sociétés :
Soco (1), Energulf (1), Surestream (3) qui sont en phase d’exploration. Pour le
bloc des sables Asphaltique de Mavuma, le contrat est en cours de négociation est
doit obtenir l’approbation par ordonnance présidentielle.
105
• Le bassin géant de la cuvette centrale couvre une partie de l’Equateur, des Kasaï
Occidental et Oriental, du Bandundu, du Maniema et de la province Orientale.
Cette cuvette est subdivisée en 25 blocs d’exploration pétrolière, dont beaucoup
couvrent des zones forestières protégées, donnant lieu à des tensions d’usage des
sols et des sous-sols.
• La branche Ouest du rift Est Africain contient : le graben Albertine (5 blocs) ;
le Graben Tanganyika (11 blocs) ; le Graben Upemba et le Graben Moero, qui
ont fait l’objet de missions et campagnes de reconnaissance mais ne sont pas
encore divisés en bloc a ce jour. Le lac Kivu, contiendrait des ressources de gaz
méthane estimées à 50 milliards de Nm3, et est divisé en 6 blocs, suivant un décret
ministériel de 2011.
A ce jour, si les réserves exploitées demeurent limitées, la production pétrolière
fournit en moyenne 331 millions de dollars annuellement aux recettes de l’Etat, et
considérant les réserves estimées, elle pourrait devenir un pilier central de l’économie de
la RDC à long terme. Il sera nécessaire de procéder à une évaluation affinée des ressources
existantes, et de résoudre les problèmes liés aux ressources aux frontières des pays voisins,
aujourd’hui source de tensions et de désaccords.
106
RDC
Le secteur minier de la RDC est extrêmement vulnérable aux fluctuations du cours des
matières premières. La crise de 2008/09 a entraîné une chute du cours des minéraux
sur les marchés internationaux, provoquant une forte diminution de la part du secteur
minier dans le PIB de la RDC, et un ralentissement de la croissance du PIB en terme réel.
Cette forte vulnérabilité s’explique par la reprise récente des activités minières à échelle
industrielle dans le pays. Le nombre limité de sites exploités industriellement accroit la
vulnérabilité aux chocs extérieurs. Ils entraînent un ralentissement des investissements
de le secteur et impactent immédiatement les revenus générés par les sites engagés dans
la production. De plus, l’impact de ces chocs exogènes est démultiplié, car ils affectent la
production actuelle et future, du fait du ralentissement des investissements (voir Figure
2.1 ci-dessus).
Figure 2.2 - Cours historique et tendances de quelques métaux
cuivre
zinc
aluminium
plomb
or
tungstène
La part du secteur minier artisanal dans la production nationale est un autre facteur clés
pour comprendre cette très forte vulnérabilité de la structure de l’économie nationale aux
fluctuations du cours des matières premières. En effet, le secteur artisanal entretient de
nombreux lien avec l’économie locale des zones où il est prédominant. Les fluctuations
du cours des matières premières impacte non seulement le secteur minier mais également
les autres secteurs.
Figure 2.4 - Composition du PIB de la RDC – 1996-2010
1er Semestre
2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010
2011
Produit Minier Unité
Diamant C 18 037 433 21 601 819 27 111 526 29 988 062 31 733 747 28 253 571 28 269 336 22 897 805 18 030 305 17 082 105 9 816 856
Production
C 11 842 914 16 174 451 19 141 474 22 119 173 26 838 726 26 030 814 27 222 860 22 096 488 17 879 970 16 963 422
artisanale
Production
C 6 194 518 5 427 368 7 970 051 7 868 888 4 895 020 2 222 756 1 046 476 801 316 150 334 118 683
Industrielle
Production
Kg nd nd nd 12 613 95 122 70 220 178
artisanale
Production
Kg nd nd nd 0 0 0 0 0 0 0 0
Industrielle
Cuivre T 37 845 26 311 16 359 18 995 26 389 99 121 236 742 335 066 309 610 468 681 213 331
Cobalt T 11 637 11 865 7 341 8 851 8 234 15 384 41 464 42 461 56 103 93 633 51 578
Zinc T 1 014 828 4 886 5 067 15 110 33 784 11 925 15 465 19 696 13 145 9 712
Cassitérite T nd nd 2 986 2 945 5 970 2 388 14 694 19 189 15 512 13 415 4 115
Source : Cellule Technique de Coordination et de Planification Minière, République Démocratique du Congo. 2011
nd : non disponible
113
Tableau 2.3 – PIB dans quelques provinces de la RDC et part des industries
extractives
b. La production industrielle
Historiquement, le secteur minier de la RDC fut dominé par de grands groupes
industriels parapublics. Après l’indépendance de 1960, le gouvernement procéda en
1967, à la nationalisation de l’Union Minière du Haut Katanga (UMHK) et à la création
de plusieurs entreprises d’exploitation et de production minière telle que : la Générale des
Carrières et des Mines, la GECAMINES, l’Office des Mines de Kilomoto (OKIMO),
la Compagnie Minière de Bakwanga (MIBA), la Société Miniere et Industrielle du Kivi
(SOMINKI), l’Entreprise Minière de Kisenge-Manganese (EMK-Mn) et la Société de
Développement Industriel et Minier du Congo (SODIMICO).
Ces entreprises ont exercé pendant des décennies un rôle central dans l’économie
de la RDC. Elles entretinrent également d’importants liens avec l’économie et le
développement local. Elles assuraient la construction et la gestion des écoles, des
productions agricoles pour la fourniture de produits alimentaires à leurs employés,
supervisaient et finançaient centres sociaux, hôpitaux, infrastructures d’énergie et de
transport dans la proximité des zones d’exploitations. Les entreprises minières opéraient
comme de véritables leviers de développement pour leurs employés et l’environnement
social et économique proche des exploitations.
Ces entreprises contrôlent toujours une part importante des réserves minières de
la RDC. Elles détiennent des permis d’exploration, et un important capital industriel,
bien que largement tombé en désuétude du fait de l’absence d’investissement de
renouvellement de l’appareil productif. Avec l’effondrement de la production
industrielle et les changements dans l’environnement réglementaire du secteur à partir
années 1990, les entreprises parapubliques ont pu développer des partenariats avec des
entreprises privées congolaises et internationales, pour l’exploration ou l’exploitation.
En 2008, ces entreprises possédaient 416 permis miniers (107 permis de recherche et
208 permis d’exploitation) dont seulement 33 tombaient sous un accord de partenariat
avec le secteur privé.
Malgré l’importance des concessions détenues par ces entreprises, elles se trouvent en
situation de faillite, qui pèse sur les performances du secteur et sur l’ensemble de l’économie
de la RDC. Cette situation est notamment due à l’utilisation inappropriée des revenus
miniers qui ne furent pas réinvestis dans l’appareil productif et le renouvellement des
intrants. Les rentes générées servirent à financer des régimes autocratiques (notamment
durant la période du Général Mobutu) et les réseaux clientélistes proches du pouvoir.
Ainsi, il est estimé qu’à partir des années 1980, entre 150 et 400 millions de dollars
auraient été détournés des revenus du cuivre et du cobalt, soit près de 30% de l’ensemble
des exportations annuelles8. L’appareil productif des entreprises publiques s’est
détérioré, conduisant à une faillite, renforcée par les décisions de gestion économiques
peu adaptées.
La production de cuivre de la GECAMINES s’est ainsi dramatiquement effondrée
depuis la fin des années 1980, passant de 500 000 tonnes par an, à 26 000 tonnes en
115
2008 et 7 400 tonnes en 2009. En Juin 2009, la dette cumulée de la GECAMINES fut
estimée à 1 750 millions de dollars9, et ses pertes évaluées entre 15 et 20 millions par
mois ou 167 millions de dollars par an sur les 16 dernières années. Son chiffre d’affaire
mensuel en 2009 fut évalué à 4 millions de dollars pour des charges totales avoisinant de
20 millions de dollars. Le poids de ces dettes rend difficile le paiement des salaires de ses
13.000 employés, mais également fournir les ressources nécessaires au fonctionnement
des 96 écoles et 7 hôpitaux dont elle a la charge. Leur effondrement a conduit à une
désarticulation économique et sociale à proximité des sites d’exploitation.
Aujourd’hui, la Gecamine vit principalement de la vente des permis d’exploration et
d’exploitation dont elle dispose et des revenus issus des accords de partage de production
dans le cadre de ses partenariats avec des entrepreneurs privés, qui lui aurait rapporté
autour de 640 millions de dollars en 2008. Il s’agit cependant d’une stratégie de court
terme, la compagnie ne détenant plus, en 2008, qu’entre 44 et 48 permis de recherches,
mais qui sembleraient être de faible valeur sur le court terme, ses meilleurs sites ayant
déjà été mis en exploitation dans le cadre de divers partenariats.
116
Au delà des partenariats commerciaux classiques, la RDC s’appuie dorénavant sur ses
ressources minières pour développer des partenariats commerciaux non traditionnels.
Ainsi, le gouvernement de la RDC s’est engagé dans un partenariat commercial avec le
Groupement d’Entreprises Chinoises composé de China Railway Group Limited, China
Sinohydro Corporation, China Metallurgical Group and Zhejiang Huayou Cobalt
Company. Cet accord combine investissement productif sur plusieurs concessions
minières, et contrepartie financière pour réaliser des infrastructures d’urgences dans
118
Cartes 2.6 & 2.7 - Localisation des permis enregistrés par le cadastre minier à l’Est et
au Sud de la RDC, 201114
Si la majorité de ces permis sont encore au stade de recherche, les permis d’exploitation
et les conversions de permis de recherche en permis d’exploitation sont en hausse. Les
perspectives de croissance de la production dans le secteur du secteur sur la prochaine
décennie sont positive (cf. Tableau 2.4)
Dans la province de l’Oriental, les compagnies Randgold et AngloGold Ashanti se
sont associées à l’entreprise d’Etat OKIMO pour monter le partenariat commercial
KibaliGoldmines (90% Randgold/ AngloGold et 10% OKIMO). Elles prévoient le
démarrage rapide de son site d’exploitation industriel (selon les déclarations faites en
juillet 2010, la construction du site pourrait commencer en juin 2011), sur des réserves
estimées de 63,80 tonnes d’or (9,2 millions d’onces). La production prévue pourrait
s’élever entre 30 et 35 tonnes sur les 5 à 10 premières années d’exploitation, pouvant ainsi
générer des recettes d’exportation atteignant les 1 milliards de dollars. La compagnie
Banro, possédant une mine d’or dans le Sud-Kivu envisage également de commencer
l’exploitation de son site des 2011.
Figure 2.6 – Part des filiales étrangères dans la production de métaux de certains pays
d’accueil qui possèdent des gisements importants – 2006
Les sites de cuivre et de cobalt du Katanga ont concentré l’affluence des investisseurs
(voir les cartes 4 et 5), notamment par le biais de l’établissement d’accords de partenariat
122
commerciaux avec la Gécamines, tel que détaillés ci-dessus. Le tissu industriel minier du
Katanga est caractérisé par une diversité d’acteurs, partagés entre des géants internationaux
du secteur, des acteurs de plus petites tailles explorant ou exploitant des concessions plus
modestes. Tenke Fugurume Mining (TFM), partenariat commercial entre Freeport
McMoran (57,75%), Lundin Mining Corporation (27,75%) et la GECAMINES
(17,5%), est le site le plus important ayant bénéficié d’un investissement de 1,7 milliards.
Frontier, Ruashi, Kamoto KCC, Nikanor KOV sont d'autres partenariats commerciaux
de grande échelle dans la province.
Selon les projections effectuées sur base des investissements actuels, la production de
cuivre pourrait passer de 310.000 tonnes en 2009 à 1 million 300 mille tonnes en 2014.
Les capacités productives du groupe SICOMINES restent cependant mal évaluées, et
pourraient influer fortement sur ces scénarios de croissance de la production (600,000
tonnes en 2014 hors SICOMINES). La production de cobalt pourrait également croître
fortement, atteignant 174 milles tonnes en 2014. Le volume des investissements et la
conversion des 2250 permis de recherche en permis d’exploitation pourraient influer sur
les scénarios de croissance du secteur.15
Si en 2006, la part des filiales des filiales étrangères dans la production de métaux en
RDC dépassée les 50% (voir Figure 2.6), au regard de la croissance du flux d’investissement
étranger, la production industrielle de minéraux en RDC est aujourd’hui largement
dominée par des entreprises étrangères.
Tableau 2.5- Evolution de la production et projection de la production minière de 2007 a 2014 par filière
2007 2008 2009 2010 (*) 2010 (**) 2011 2012 2013 2014
Production Cuivre cathode 40 119 127 748 158 112 189 326 253 952 304 742 381 482 539 226 779 372
cuivre
Cuivre contenu 145 028 208 806 152 369 161 713 243 585 137 555 254 322 359 484 519 581
Total cuivre 185 147 336 554 310 481 351 040 497 537 442 297 635 804 898 709 1 298 953
Total cuivre - - - -
Production Cobalt électro 731 2 556 3 048 4 060 5 265 5 805 7 558 8 707
cobalt Cobalt contenu 25 286 41 730 53 573 64 021 93 633 100 036 110 303 143 609 165 439
Total cobalt 25 286 42 461 56 129 67 070 97 693 105 301 116 108 151 168 174 146
Cassitérite (t) 14 694 19 189 15 200 7 736 13 415 12 000 10 000 10 000 10 000
Source : “Cellule Technique de Coordination et de Planification Minière, République Démocratique du Congo. 2011
124
Suivant le code minier de 2002, les zones minières artisanales ne peuvent être créées
sur des sites déjà couverts par un permis d’exploitation. Suivant la course à l’achat de
permis d’exploitation et d’exploration et l’ouverture du secteur minier aux investisseurs
étrangers, de nombreux conflits d’allocation et d’utilisation des sites miniers ont émergé.
Bien que les zones d’exploitation artisanale ne sont, en principe, qu’attribuable sur des
zones impropres à l’exploitation industrielle, l’absence de production de ce type pendant
des décennies a poussé les mineurs artisanaux vers des sites qui ne leurs sont en principe
pas destinés. .
En 2008, le CAMI a dénombré la création de 194 zones d’exploitation artisanale,
couvrant une superficie de 5 570 km2 soit 0,2% du territoire national. Parmi les zones
d’exploitation artisanale19, le Sud Kivu comptait 7 sites, le nord Kivu 6 sites, le Maniema
11 sites, le Kasaï Occidental 6 sites, l’Equateur 12 sites, l’Oriental 9 sites, et le Katanga
17 sites. Au regard du nombre limité de zone d’exploitations artisanales enregistrées,
de l’importance de la production, et du nombre de mineurs artisanaux, il apparaît que
l’essentiel des activités d’exploitation artisanales se déroulent en dehors du champ des
zones règlementaires, tel que prévu par le code minier de 2002 et le règlement minier
de 2003.
Le secteur minier artisanal est particulièrement complexe et sensible à appréhender
et réguler du fait que la règlementation s’appliquant sur ce secteur est apparue bien après
son développement, rendant sa structuration complexe à posteriori.
Le travail artisanal minier exerce un fort pouvoir d’attraction sur la main d’œuvre
rurale aux revenus limités. Le travail de jeunes artisans, et parfois d’enfants a été
observé sur certains sites (principalement sur le tri des rejets). Les problématiques de
genre sont également omniprésentes. Peu de femmes travaillent directement sur des
postes d’extraction ou autres fonctions autour des puits. Elles sont par contre souvent
impliquées dans le transport des minerais, et dans d’autres activités indirectement liées
aux sites d’exploitation minière (telle que des petits commerces). La prostitution, ou les
violences faites aux femmes sont très souvent associées à ces activités.
Des systèmes de mines mixtes, telles que développées dans la zone de Kisengo au
Katanga pourraient constituer des alternatives intéressantes à moyen termes. En effet, les
mineurs artisanaux opérants sur des sites appartenant à des groupes industriels peuvent
bénéficier d’améliorations substantielles de leurs conditions de travail, et transiter
progressivement vers un secteur semi industriel.
Sur le site de Kisengo, visité dans le cadre de la rédaction de ce rapport, une coopérative
d’exploitants artisanaux, bénéficie d’un certain nombre d’apports financiers structurant
et d’intrants de la part du groupe MRR (qui détient les permis d’exploitation du site),
tels que l’achat de moyens de transport, d’outils de production etc. La production
restant artisanale, le site reste intensif en main d’œuvre. Le groupe MRR est en train de
développer, à proximité des exploitations existantes, des sites d’exploitations mixtes. Sur
130
ces sites, la couche sédimentaire supérieure, pauvre en coltan, est ôtée à l’aide d’engins
mécanisés (bulldozer et pelleteuses) pour faciliter l’extraction par les mineurs artisanaux.
Des stations de lavages bétonnées et rationalisées sont en cours de construction, et
pourraient permettre une récupération et facilitée du coltan.
Les exploitations sur modèle mixte permettent de conserver l’intensité de main
d’œuvre indispensable pour les communautés locales, tout en améliorant les conditions
de travail et permettant un meilleur rendement des sites. Cependant, de nombreux
problèmes perdurent, et le cadre règlementaire de ces exploitations mixtes reste à
déterminer. En effet, dans les modèles mixtes existant en RDC, les coopératives sont
rarement fondées a l’initiative des creuseurs locaux, mais plutôt par les détenteurs des
permis d’exploitation, qui souhaite exploiter leurs concessions rapidement, sans engager
d’importants investissements productifs. Ces investisseurs fixent généralement les prix
des minerais qu’ils achètent aux creuseurs, à des taux largement inferieurs au marché.
Le renforcement des liens en amont et en aval pourrait permettre de renforcer la
valeur ajoutée domestique générée par le secteur minier. Ce potentiel reste largement
sous exploité, principalement du fait de la relance modérée des investissements en RDC
à ce jour et des contraintes au développement du secteur privé dans le pays.
Les liens en amont du secteur minier pourraient être importants, et avoir un impact
positif sur la diversification des activités économiques locales. La dynamisation récente
du secteur minier a commencé à avoir des effets sur un certain nombre de secteur
connexes, notamment dans la ville de Lubumbashi22. La construction d’hôtels et
d’infrastructures, a eu un effet d’entrainement sur une série de sous secteurs tels que la
production de matériaux de construction, le développement d’entreprises de nettoyage,
et le renforcement des réseaux de télécommunication. La contribution des industries
extractives à la construction et à l’entretien des infrastructures est un lien en amont
particulièrement important. Les décideurs publics se focalisent généralement sur les
liens fiscaux. Cependant, la contribution investisseurs aux des infrastructures locales et
nationales ; si elles sont implantées dans le cadre d’une stratégie de pôle de développement
inclusifs ; peuvent contribuer à bouleverser la dynamique de développement économique
locale.
Le groupe MINTEK, a produit une analyse du potentiel de développement de lien
en amont, en fonction de leur impact sur le développement local à court, moyen et
long termes et de six critères : (i) potentiel pour l’emploi; (ii) taille du marché; (iii)
capacité existante; (iv) potentiel de diversification; (v) potentiel de croissance; (vi)
limitations. Le potentiel de développement en amont a été identifié comme suit : 1.
Transport local ; 2. Sécurité et maintenance ; 3. Services de traiteurs/ alimentation/
nettoyage ; 4. Maintenance des véhicules ; 5. Santé et équipement de sécurité ; 6. Travaux
de terrassement ; 7. Equipements électriques ; 8. Produits en plastique ; 9. Énergie ; 10.
131
des exploitants, des négociants et de l’ensemble des travailleurs impliqués sur la chaîne
de production des minerais.
Des activités d’exploitation minière sont menées par des groupes armés, mais
également par les FARDC, contrairement au code minier qui stipule l’interdiction
de mener des activités minières pour tous les fonctionnaires, y compris les militaires.
D’après le rapport S/2010/596 du Conseil de Sécurité des Nations Unies, l’implication
des groupes militaires et FARDC dans l’exploitation des ressources minières peut être
distinguée en quatre catégories24 :
• La taxation : les groupes armés et FARDC exigent un pourcentage du chiffre
d’affaire ou de la production totale, font payer des droits d’entrée et de sortie des
sites miniers, perçoivent des redevances aux différentes étapes de traitement des
minerais. Ces taxes sont collectées de manière régulière ou de façon exceptionnelle
pour financer des opérations armées.
• La protection : les groupes militaires et armés se concurrencent pour percevoir
des frais de protection de la part des chefs de puits locaux. Ainsi, les FARDC
sont rémunérés localement pour éviter le pillage des ressources exploitées, mais
également dans les villes de négoce telles que Goma ou Bukavu, pour assurer la
protection des comptoirs. Des milices de protection armées sont déployées pour
protéger les transports, en fonction des accords conclus avec les exploitants et les
commerçants.
• Le contrôle des circuits commerciaux : des éléments des FARDC et des groupes
armés sont impliqués dans des activités d’achat et de vente de minéraux,
notamment par le biais d’intermédiaire. Des membres des forces armés jouent
parfois le rôle de « manager» ou « supporter » d’un puit, fournissant les
capitaux aux chefs de puits pour acheter des intrants nécessaires à la production.
• Pillage et moyens coercitifs : sur les sites de production ou lors du transport des
minéraux, les groupes armés se livrent à des activités de pillage. Confisquant une
partie de la production des mineurs, ou exigeant l’accès à leur puits une partie
de la journée, pour collecter des minerais directement, le recours à la force est
courant dans les zones d’exploitation.
Des exemples et témoignages de la conduite des telles activités sont multiples.
Principalement, les FDLR et les Maï Maï sont impliqués dans les activités aurifères et de
cassitérite dans la région de Walikale. Dans la zone de Bissie, cœur de la production de
cassitérite, la 212ème brigade des FARDC fut fortement impliquée dans de nombreuses
activités illégales liées à l’exploitation de ce minéral. Dans le sud Kivu, FDLR et FARDC
sont fortement impliqués dans des activités commerciales liées à l’exploitation des
minerais, collectant taxes et faisant usage de la force pour confisquer des stocks. Ces
situations sont également signalées dans la région de l’Ituri dans la province Orientale, et
dans des zones du Maniema. Les minerais collectés par les groupes armés réintègrent les
134
marchés légaux, souvent dans les pays voisins tels que le Rwanda, après être passés entre
les mains de plusieurs intermédiaires.
Le gouvernement reconnaît publiquement le cercle vicieux liant exploitation minière,
maintien des groupes armés et instabilité dans l’Est du pays. Ainsi, le 11 septembre 2010
une suspension des activités minières fut ordonnée par le Président de la République de
la RDC, dans les provinces du Sud Kivu, du Nord Kivu et du Maniema, afin de faire
disparaître ces réseaux illégaux. Cette interdiction a entraîné un recul des exportations
provinciales, mais il semblerait que de nombreux minerais aient continué à être exploité
et exporté illégalement vers les pays voisins. Si certain minéraux, tels que le coltan et
la cassitérite, supposent le transport de quantités importantes pour générer des profits,
d’autres minerais tels que l’or ou les diamants sont rentables sur de très petites quantités.
Faire traverser la frontière de quantité réduite n’est donc pas une opération complexe
pour ce type de minerais. Malgré le gel des activités minières, ils se sont retrouvés sur les
marchés internationaux, par le bais des marchés des pays voisins.
Tableau 2.6 - Impact de l’embargo de l'Etat sur la structure du PIB de la province du sud Kivu
Secteur primaire 342 809,6 73,0 312 898,0 67,7 444 274,8 72,1 521 048,5 68,2 682 52,4 70,8
I. Agriculture, pêche et elevage 331 932,4 70,7 300 782,0 65,1 420 466,6 68,2 489 350,6 64,1 659 291,4 68,3
A. Agriculture 328 223,7 69,9 294 649,6 63,8 413 589,0 67,1 473 782,7 62,1 645 878,5 66,9
B. Pêche 1 172,5 0,2 1 286,2 0,3 1 641,3 0,3 3 407,2 0,4 4 331,7 0,4
C. Élevage 2 536,1 0,5 4 846,2 1,0 5 236,4 0,8 12 160,7 1,6 9 081,2 0,9
II. Foresterie 131,0 0,0 241,3 0,1 409,1 0,1 449,8 0,1 481,8 0,0
III. Mines 10 746,2 2,3 11 874,7 2,6 23 399,1 3,8 31 248,2 4,1 23 079,1 2,4
Secteur secondaire 31 931,5 6,8 35 400,0 7,7 39 878,2 6., 73 312,6 9,6 69 619,9 7,2
Pour certains minerais, la régulation de l’offre par des mesures drastiques telles que ce gel
total des activités peut se montrer efficace, elle aura un impact limité sur d’autres minerais.
D’autres leviers internationaux tel que le processus Kimberley pour les diamants, et les
articles spécifiques du décret Dodd-Frank adopté aux Etats-Unis en Juillet 2010, ont
un impact significatif sur les exigences de transparence du secteur, et pourraient jouer
un rôle dans la gouvernance du secteur. En effet, si ce décret concerne en premier chef
la régulation du secteur financier, la section 1502 traite des minerais en provenance de
la RDC et de ses pays voisins. Les entreprises tombant sous cette législation, soit toutes
les entreprises sous juridiction américaine, doivent disposer des preuves de la provenance
« non-conflictuelle » des minerais utilisés dans les produits et ce, quelque soit le niveau
de la chaîne de production et de manufacture.
Cette section est rentrée en application le premier avril 2011, et fut suivie par la
promulgation du principe de gouvernance non-contraignant du secteur par l’OCDE, le
25 mai 2011, que quarante pays se sont engagés à promouvoir. Afin de se conformer à cette
exigence de transparence accrue du secteur, un processus de certification des mineraux
a commencé à être mis en application dans la province du Katanga dès avril 2011. Ce
processus implique l’ensemble de la chaîne de production, du puits à l’exportation,
et garanti la traçabilité des ressources, par la mise en place d’un système d’étiquetage
rigoureux. Ce processus fut testé par l’ONG PACT et des ONG locales dans le sud
Kivu en 2010, avant la promulgation du gel des activités minières par le gouvernement,
L’ONG PACT et IPIS collaborent avec les autorités locales et les administrations
minières pour aujourd’hui étendre le processus de certification à l’ensemble des zones
sécurisées, et non affectées par les interventions illégales des groupes armés et militaires.
Ce système a démarré dans un contexte de forte pression et tension sur l’ensemble
des acteurs. En effet, survenant suite à la promulgation du gel du gouvernement,
dans les provinces de l’Est, de nombreux artisans miniers ont accumulé des stocks de
minerais importants qu’ils n’ont pu écouler depuis plusieurs mois, et la certification ne
peut s’appliquer sur de nombreuses zones encore occupées de manière plus ou moins
régulière par des groupes armés. La certification est un processus intensif en main
d’œuvre et en ressources financières et à ce jour, seule une entreprise, MRR, a avancé
les fonds nécessaires a son financement. Les artisans miniers entretiennent des relations
complexes avec les groupes armés et si les violences et pressions sont indéniables, des
relations de financements lient les groupes armés aux chefs de puits. En l’absence d’un
marché du crédit fonctionnel, les groupes armés sont souvent les seules sources d’accès
au financement dans des zones reculés, nécessitant parfois plusieurs jours de marches
en forêt. Ils fournissent crédits, outillage pour l’exploitation, biens de consommation
courante et produits manufacturés aux mineurs. Délier ces relations complexes nécessite
donc une approche au cas par cas que ne permet pas le décret Dodd-Frank et ses
mécanismes de mise en application.
137
Dans les zones d’exploitation du Katanga, largement épargnées par les groupes armés,
le processus de certification rencontrera certainement des succès. Dans les provinces
du Kivu, il risque de se montrer insuffisant à rétablir un environnement sécuritaire,
Les craintes partagées par l’ensemble du secteur sont que cette régulation risque de
confirmer le départ des acheteurs vers d’autres marchés, qu’il sera difficile de faire
revenir en RDC à moyen terme. L’arrêt des activités minières, source d’emplois directs
et indirecte pour des millions de congolais, risque, en l’absence d’alternative, d’avoir des
conséquences désastreuses. Plusieurs acteurs du secteur rencontrés dans le cadre de la
préparation de ce rapport, on confirmé l’arrêt quasi complet des activités dans des zones
telles que Walikale. Plusieurs milliers de mineurs et leurs dépendant ont « disparu dans
la nature », et plusieurs témoins ont signalé une recrudescence de la criminalité (vols,
cambriolages) dans les villes voisines.
Finalement, cette mesure ne pourra s’appliquer principalement qu’aux exportations
« visibles », de minerais destinés à la transformation pour des produits industriels, tel
que le coltan et la cassitérite. La certification telle que proposée dans ce processus ne
pourra s’appliquer à l’or ou aux diamants, facilement exportables par les circuits officieux.
Photo 2 – Certification du Coltan à Kisengo, Nord Katanga, 2011.
principal apporté par le code minier de 2002, réside dans la possibilité pour un
investisseur étranger de pouvoir accéder à des titres miniers directement, sans devoir
établir de partenariat avec les structures parapubliques existantes.
Les permis de recherche permettent de mener des explorations sur une zone
déterminée. La durée de validité du permis dépend du type de minéral recherché, il est de
4 ans pour les pierres précieuses et de 5 ans pour tous les autres minéraux, et est disponible
aux premières entreprises ayant les capacités techniques nécessaires qui présentent une
requête. Les détenteurs de permis de recherche ne peuvent détenir plus de 50 titres, pour
une surface maximale de 20.000 km2. En 2007, le CAMI25 avait délivrée 4.353 permis
de recherche, 471 permis d’exploitation, 59 permis d’exploitation de petites. Un plan
d’exploration détaillé doit être fourni par les entreprises et des rapports d’avancement
des recherches doivent être soumis régulièrement aux autorités concernées.
Les permis d’exploitation sont délivrés pour une période de trente ans, pouvant
être renouvelée pour des périodes de quinze ans. Ils sont délivrés pour des minéraux
spécifiques mais peuvent cependant être négociés pour plusieurs minéraux, et suivent
généralement des permis d’exploration préalablement délivrés. Depuis le code minier de
2002, les permis d’exploration ne sont pas nécessairement mis en œuvre en partenariat
avec des entreprises publiques. Comme pour les permis de recherche, l’allocation de
permis d’exploitation se fait sous condition de présentation d’un plan opérationnel
technique et financier, devant intégrer une analyse l’impact environnemental et social
du projet.
L’intégration des dimensions sociales et environnementales de l’exploitation minière,
particulièrement suite au long conflit qu’a traversé le pays, est fondamentale. Le nouveau
code minier intègre ses dimensions de la manière suivante :
• Les projets de développement de sites miniers doivent obtenir l’autorisation
préalable des occupants, et obtenir un accord avec les autorités compétentes sur
le territoire concerné, et des indemnités doivent être versées aux occupants légaux
du site. La responsabilité totale des dommages causés du fait de son occupation
du site, est assumée par le propriétaire des titres
• L’unité de protection de l’environnement minier au sein du ministère des mines
est responsable pour la gestion de l’environnement dans le secteur minier, en
coordination avec les autre agences gouvernementales, dans les activités couvrant
la l’exploration minière, les activités minières artisanales, l’exploitation et
l’exploration dans les mines et carrières, le suivi de la protection de l’environnement,
le contrôle et l’évaluation des plans de mitigation et de réhabilitation liés aux
activités exploratoires, l’évaluation techniques des Evaluations de l’Impact
Environnemental et des Plan de Gestion de l’environnement des Projets présentés
139
Les relations entretenue entre les creuseurs artisanaux, les entreprises parapubliques
et les tenants de titres d’exploitation expliquent également le faible nombre de zones
d’exploitation artisanale. L'exemple des mines visitées dans le cadre de ce rapport illustre
ces relations dans ces mines de coltan du nord du Katanga, de nombreux exploitants
artisanaux opèrent sur des concessions appartenant au groupe MRR. Les artisans se voient
délivrer des autorisations d’exploitation par les représentants locaux de la SAESCAM,
mais sur des concessions attribuées au groupe MRR. Il ne s’agit donc pas d’exploitations
artisanales. Le groupe MRR encourage les activités des mineurs artisanaux et leurs fournit,
par le biais de leur coopérative, un certain nombre d’intrants nécessaires à l’amélioration
de leur productivité, telle que des motos pour le transport des minerais, des pompes à eau
pour le lavage du coltan, et des instruments pour le contrôle de la qualité des minerais.
Pour le groupe MRR, l’exploitation de leurs concessions par des mineurs artisanaux est
un moyen d’extraire des ressources dans un contexte d’infrastructures trop limitées pour
une exploitation industrielle. Par ce biais, MRR peut exploiter les ressources de son site
en rachetant la production des mineurs artisanaux, tout en préparant la mise en place de
sites de production semis industriels. Il s'agit donc de status hybride ne correspondant
pas a des ZEA.
Au Katanga, 150.000 exploitants miniers artisanaux étaient supposés occuper six
zones ouvertes à l’exploitation minière artisanale en 200526. Malheureusement, cinq
d’entre elles ont été fermées une année plus tard, pour des raisons liées à des difficultés
économiques et techniques. La seule zone demeurée ouverte à l’exploitation est trop
petite pour contenir tous les exploitants miniers artisanaux de la province. Dans tous les
cas, les zones ouvertes étaient trop éloignées des centres urbains et des infrastructures
de transport. Un autre problème concerne la pratique, qui prévalait particulièrement
de 2002 à 2005 et qui est encore entretenue par le personnel de la GECAMINES,
qui consistait à « vendre » des autorisations aux exploitants miniers artisanaux pour
travailler sur les concessions de l’entreprise. En principe, le CAMI devait enregistrer et
afficher les éléments techniques et les détails concernant les zones officiellement ouvertes
à l’exploitation minière artisanale, chaque fois que l’attribution est faite. Aucune zone
ouverte à l’exploitation minière artisanale n’est répertoriée au CAMI.
141
Source : PROMINES STUDY. “Artisanal Mining in the Democratic Republic of Congo”. PACT, 2010
Les faibles capacités des acteurs impliqués dans le secteur minier artisanal pèsent sur
sa régulation. Le SAESSCAM27 est l’interlocuteur principal des exploitants miniers
artisanaux. Crée en 2003, il a pour mandat d’organiser et de superviser l’ensemble du
secteur minier artisanal. Il travaille au niveau provincial, et sur les principales zones
142
part, que nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et
moyennant une juste et préalable indemnité octroyée dans les conditions fixées par
la loi (article 34).
Ces dispositions introduisent dans le droit foncier congolais un nouveau concept
en matière d’appartenance des terres : celui de la propriété coutumière, qui devient
ainsi un titre, disposant d’une garantie de protection comme tout autre titre
foncier établi et détenu en vertu du droit écrit. L’on en arrive ainsi à la notion de
l’appropriation coutumière des terres. Aucune constitution antérieure, depuis la
charte coloniale, n’avait pu aussi clairement qualifier les droits fonciers coutumiers
des communautés locales comme des véritables « droits de propriété », même s’ils
trouvent leur fondement dans la coutume. La notion initialement utilisée pour
qualifier les droits fonciers coutumiers était celle d’occupation coutumière (voir les
décrets des 3 juin 1906 et du 31 mai 1934 ainsi que les articles 388 et 389 de la loi
73-021 du 20 juillet 1973). Enfin, les articles 56 et suivants de la constitution qui
interdisent tout acte, tout accord, toute convention, tout arrangement ou tout autre
fait, qui a pour conséquence de priver la nation, les personnes physiques ou morales
de tout ou partie de leurs propres moyens d’existence tirés de leurs ressources ou de
leurs richesses naturelles. Elles les érigent respectivement en infraction de pillage et
de haute trahison.
Ainsi, pour offrir plus de clarté au régime congolais sur la question du statut des
terres et des ressources naturelles, il s’impose un travail de mise en cohérence des
lois sectorielles ayant chacune un volet de compétence sur les espaces (les mines,
les hydrocarbures, le foncier, les forêts, la faune, la conservation de la nature, les
ressources en eau) avec les nouvelles dispositions constitutionnelles sus évoquées.
En attendant, ces clarifications qui s’avèrent à la fois nécessaires et urgentes, la
RDC se trouve dans une transition qui prendra certainement quelques années
avant d’entrer dans la nouvelle configuration du statut de ses terres et ressources
naturelles, telle qu’il ressort de la nouvelle constitution
147
moyens légaux tels que les déductions sur les crédits d’investissements, de provisions
sur les amortissements, de droits sur les permis de recherche, ou de barrières fiscales.
Ces allègements fiscaux négociés par les compagnies dans le cadre de l’allocation de leur
concession et la détermination des investissements nécessaires. S’ils paraissent réduire les
recettes de l’Etat sur l’exploitation des ressources minérales, ils constituent néanmoins
un levier incitatif important pour les opérateurs.
Tableau 2.8 - Synthèse des impôts et taxes sur le secteur minier
Redevance minière 2% Sur les revenus bruts
Droits superficiaires 5,08 $ par hectare des zones exploitées
La fiscalité dans le secteur minier artisanal est difficile à évaluer du fait de la nature
majoritairement informelle de ses activités. L’essentiel des taxes sur les productions du
secteur artisanal sont prélevées à l’exportation. Cependant, dans le cadre de la régulation
croissante de ces activités, des normes fiscales et les droits auxquels sont assujettis les
exploitants artisanaux ont été formulés comme suit29:
149
Tableau 2.9 - Synthèse des impôts et taxes sur le secteur minier30 artisanal
Catégorie Taxe Valeur Service
Creuseurs Carte de creuseur 25$ DGRAD
Frais d’entrée pour les réactifs 2% OFIDA
DGI (direction
Taxes sur le roulement des exportations 3 à 13% générale des
impôts)
Exportateurs
Taxe pour la rémunération pour les services
1% DGRAD
d’intervention
Permit de travailleur étranger DGRAD
Taux de
Taxe Source
recouvrement
ITIE rapport de conciliation de 2007
Redevance minière 96%
(produit en 2009)
ITIE rapport de conciliation de 2007
Taxes superficiaires 60%
(produit en 2009)
Droits d’importation 100% Pas d’informations précises
Droits d’exportation 100% Pas d’informations précises
ITIE rapport de conciliation de 2007
Impôt sur le revenu 76%
(produit en 2009)
Prélèvement a la source, dividendes 100% Pas d’informations précises
Source : « Rapport du Conciliateur Indépendant Exercice 2007. Initiative pour la Transparence
dans la gestion des Industries Extractives en RDC » Price Water house Coopers 2009
Un rapport du Sénat de 2009, estime que le niveau des taxes collectées dans le secteur
minier est largement inférieur au niveau estimé dans le rapport ITIE. Selon ce rapport,
en 2009, seul 48% des taxes potentielles seraient effectivement collectées, soit un
différentiel d’environ 92 millions de dollars, et pourrait atteindre 379 millions en 2014
et 820 millions en 2020.
151
Taux de
Taxe Source
recouvrement
ITIE rapport de conciliation de
Redevance minière 72%
2007 (produit en 2009)
ITIE rapport de conciliation de
Taxes superficiaires 31%
2007 (produit en 2009)
Prélèvement à la source,
100% Pas d’informations précises
dividendes
Cette contribution limite du secteur minier aux recettes de l’Etat est particulièrement
problématique dans un contexte de faible disponibilité de ressources. Le maintien d’une
partie de l’exploitation dans le secteur informel, la faible capacité de mobilisation de
l’administration, et le manque de transparence dans les revenus collectés effectivement
déclarés sont les freins majeurs à l’augmentation de la base des revenus de l’Etat tirés du
secteur minier.
Sur l’ensemble du territoire de la RDC, les provinces les plus riches en ressources
forestières sont l’Equateur (40 millions d’hectares), l’Oriental (37 millions d’hectares)
et le Bandundu (12 millions d’hectares). Les différents types de forêts sont repartis
suivant trois grandes zones sur le territoire congolais31 :
• Les forêts tropicales de basses terres couvrent environ 86 millions d’hectares,
principalement dans le bassin central du pays et dans la province du Bas-Congo,
et des galeries de forêts tropicales partent du bassin central et descendent vers le
sud, dans les provinces du Kasaï et du Maniema.
• Les hautes terres s’étendent du Rift Albertin et les forêts de types montagnardes
présentes dans cette région sont partagées entre cinq pays. En RDC, elles
couvrent une partie importante de la région des deux Kivu, une partie des régions
orientales, du Maniema et du Katanga. Les forêts situées dans cette zone abritent
une biodiversité exceptionnelle, partagée avec l’Ouganda, la Tanzanie, le Burundi
et le Rwanda.
• Les forêts claires se situent de part et d’autres du bassin central, au nord dans les
provinces de l’Equateur et de l’Oriental et au Sud dans les provinces du Kassaï et
du Katanga. Ces forêts claires sont également appelées « miombo ».
153
Les cinq parcs naturels de la RDC classés au patrimoine mondial de l’UNESCO sont
le Parc National de la Garamba, situé au Nord-est du pays et créé en 1938, le parc de la
Solonga situé dans le bassin central du pays. Le rift Albertin abrite trois parcs nationaux
classés : le parc national de Kahuzi-Biega, le parc national de la Maiko, et le parc national
des Virunga créé en 1925 qui est le plus ancien parc naturel d’Afrique. La RDC possède
également deux parcs naturels sous la convention de Ramsar, et une soixantaine de
réserves, de domaines de chasses bénéficiant de degrés de protections et de préservation
variables.
L’ensemble de ces forêts situés sur le territoire congolais sont non seulement des
ressources cruciales à l’échelle planétaire, jouant un rôle de régulateur de l’environnement,
mais elles constituent également le milieu de vie et un moyen de subsistance pour près de
40 millions de congolais. La forêt leur fournit nourriture, plantes médicinales, sources
d’énergie et matériaux pour la construction d’habitats. En plus, la forêt joue un rôle
clé dans la régulation du climat global. Les forêts congolaises stockent plus de 140 giga
tonnes de CO2 dans leur biomasse.
Ce patrimoine exceptionnel n’est pas seulement un enjeu économique pour les
populations locales vivant directement des ressources qu’elles abritent. Les forêts de la
RDC furent historiquement au cœur d’un double enjeu d’exploitation par l’industrie
forestière et de préservation historique de la biodiversité. Au delà de ce double usage,
l’importance du couvert forestier pose un autre enjeu majeur pour le développement
économique de la RDC, nombre de ses ressources sous terraine, et de ses terres fertiles
se situant sur des zones forestières. La gestion du patrimoine forestier est plus que jamais
un enjeu de développement économique et environnemental à l’échelle du pays et à
l’échelle mondiale.
b. Revue de l’exploitation forestière
Les forêts congolaises ont, depuis plus d’un siècle, toujours été une source d’exploitation
industrielle. Environ 80 espèces d’arbres sont l’objet d’exploitation forestière.
L’envergure des exploitations a cependant fortement varié au cours du temps, en fonction
des troubles institutionnels et politiques du pays. L’Exploitation forestière industrielle a
commencé en RDC des 1890, dans la région du Bas-Congo, et fut fortement dynamisée
par la construction du chemin de fer entre Kinshasa et Matadi. En 1960, après la fin
de l’époque coloniale, la RDC était le premier pays en termes d’industrie forestière en
Afrique, avec une production avoisinant les 575,000 mètres cubes par an32, provenant
principalement de la province du Bas-Congo.
A partir des années 1970, l’industrie forestière atteint un niveau dépassant la simple
exploitation locale et devint dominée par des entreprises commerciales de grandes
échelles. L’exploitation commerciale industrielle se déplaça alors vers le bassin du
154
Ecotourisme Marginal
des bois adaptés au besoin des marchés locaux ont un coûts moyen estimé à 5,2 euros
par tonnes de CO2. Les activités liées aux activités de la population ont un coût limité,
estimé à 0,2 euros par tonne de CO2.
L’agriculture et l’élevage en milieu forestier pourraient contribuer à hauteur de 43%
au potentiel de mitigation des émissions de carbones. Ainsi, la régulation de l’agriculture
vivrière sur brulis est un enjeu majeur nécessitant la mise en place de programme sociaux
adaptés et de solutions de production alternatives. Le coûts estimé serait de 6,5 euros
par tonne de CO2. Réduire l’ancrage de l’agriculture commerciale extensive et intensive,
destinée respectivement aux marchés locaux et à l’export auraient des coûts de 5 euros
par tonnes pour la première et 13 euros par tonne pour la deuxième. La structuration
du secteur agricole commercial nécessitera notamment la réhabilitation d’anciennes
plantations. L’amélioration de la productivité de l’élevage aurait un coût de 0.5 euros
par tonnes de CO2.
La croissance urbaine et le développement des secteurs industriels, dont les industries
extractives ont également un potentiel de mitigation des émissions de carbones, estimé
à hauteur de 12%. La réduction de la production non soutenable de bois de chauffe
pour les ménages, nécessitera la mise en place de programmes de fourniture d’énergie
alternatifs, tels que des fours améliorés, la mise en place de zone de production durable
de bois de chauffe dans les périphéries urbaines. Un tel programme a un coût estimé à 4
euros par tonne de CO2. La réduction de l’ancrage des secteurs des industries extractives
sur le secteur forestier présente un potentiel de mitigation des émissions de CO2, mais
dont les coûts sont extrêmement élevés, estimés à plus de 60 euros par tonnes de CO2.
En parallèle, un programme d’afforestation sur les aires marginales, à une échelle de
7 millions d’hectares et de reforestation sur les 4 millions d’hectares de forêts dégradées
devrait également être mis en place pour réhabiliter le couvert forestier du pays. Deux
techniques sont envisageables : mécanisées ou à haute intensité de main d’œuvre
(HIMO). Les techniques mécanisées ont un coût estimé respectivement à 4 euros par
tonnes de CO2 (ou des coûts de capital autour de 270 euros par hectares et des coûts
d’opérations autour de 10 euros par hectares et par ans) ; et 1,5 euros par tonnes de
CO2 (ou des coûts de capitaux autour de 300 euros par hectares et des coûts d’opération
autour de 10 euros par hectares et par an). L’afforestation et la reforestation HIMO ont
un coût estimé respectivement à 3 euros par tonnes de CO2 (ou un coût de capital autour
de 155 euros par hectares et des coûts d’opérations autour de 9 euros par hectares et par
an) ; et de 1 euros par tonnes de CO2 (ou des coûts de capital autour de 170 euros par
an et des coûts d’opération autour de 9 euros par hectares et par an). Si l’afforestation
et le reboisement mécanisés sont plus rapides, ils sont cependant plus onéreux, et dans
une économie caractérisée par un déficit d’emplois, le développement de projet à haute
intensité de main d’œuvre peu avoir une série de bénéfices pour les travailleurs et les
ménages dépendants.
162
Directions normatives :
Directions normatives :
Etude et planification
Assainissement
Inspection
Horticulture et reboisement
Services généraux et personnels
Établissement humains et protection de
l’environnement
Développement durable
Directions techniques :
Conservation de la nature
Tourisme et accords internationaux
Contrôle et vérification interne
Ressources touristiques
Ressources en eau
Hôtellerie
Inventaire et aménagement forestiers
Agence de voyage et associations
Gestion forestière
touristiques
Etude et planification
Personnel et services généraux
Cellules spécialisées :
Groupe d’étude environnementale du Congo
Centre national d’information sur l’environnement
Réglementation et contentieux environnementaux
Le nouveau code forestier insiste également sur la promotion d’usages alternatifs des
ressources forestières, notamment des secteurs non extractifs et encourage la préservation
environnementale. Trois grandes catégories d’usages prioritaires mais non exclusifs des
zones forestières furent introduites dans le code de 2002.
Tableau 2.14 – Les catégories forestières selon le code forestier de 2002
Le nouveau code forestier présente certaines limitations qui laissent présager de difficultés
d’interprétation pour sa mise en œuvre. Le Gouvernement a pris un décret en juillet
2011 limitant l’attribution des concessions gré-à-gré aux concessions de conservation,
qui restait un problème perdurant dans le nouveau code. Le rôle des petites compagnies
d’abatages de petite échelle n’est pas clairement défini et l’allocation de leurs permis
d’exploitation demeure floue.
La RDC est également signataire de plusieurs conventions internationales et traités
régionaux visant à promouvoir la conservation et l’utilisation durable des ressources
forestières. Dans un contexte de post conflit, un ancrage des initiatives de reformes
dans un cadre régional et international peut encourager le renforcement des institutions
nationales, notamment par le transfert de bonnes pratiques. Ainsi, au delà du REDD+
décrit ci-dessus, le gouvernement de la RDC est signataire de : (i) la Convention sur la
Diversité Biologique de 1992, (ii) de la Convention des Nations Unis sur le Changement
Climatique de 1992, (iii) de la Convention sur la Désertification de 1992, et (iv) de la
Convention Africaine pour la Protection de la Nature.
La RDC est membre de la Commission des Forêts d’Afrique Centrale (COMIFAC)
et du Partenariat pour les Forêts du Bassin du Congo (CBPF). Dans le cadre de la
COMIFAC, les pays de la région dont la RDC se sont engagés à harmoniser leurs
politiques forestières, en adoptant un plan de convergence, incluant la mise en place de
l’initiative REDD+42. Avec le renforcement de ces institutions nationales, la RDC, au
regard de l’importance de ses ressources forestières au niveau africain et mondial, a un
rôle crucial à jouer pour la mise en application de ces différents instruments juridiques.
Année de Ressources
Première estimées Extraction
Ressources Unités
Exploitation jusqu'à 2003
Industrielle (2008)
Or ** 850 Tonnes nd
Diamants
(précieux 150 Millions de carats 563,2
industriels)
Pétrole 1975 187 M barils nd
Zinc* 36
L’exploitation des ressources naturelles est largement en deçà des capacités potentielles
du pays. Ces secteurs requièrent des choix de politiques sensibles, devant prendre en
considération le caractère non renouvelable de ses ressources. L’impact environnemental
et social de leur exploitation doit pondérer l’intérêt généré par les contributions
fiscales potentielles de ces secteurs. La section suivante présente les problématiques
transversales aux secteurs analysés dans le cadre de ce chapitre, et propose une série de
recommandations, synthétisées dans un tableau d’actions dans la conclusion.
chantiers : (i) la mise en place d’un cadre légal et institutionnel adapté incluant
l’adoption d’une loi sur l’aménagement du territoire, de la mise en cohérence
des lois sectorielles et de la mise en place des structures d’aménagement (comités
interministériels et provinciaux d’aménagement du territoire) ; (ii) l’appui à la
décision intégrant la REDD+ en renforçant les capacités de la RDC à évaluer
les impacts potentiels aux niveaux économique, social et environnemental de
différents itinéraires de développement possibles, en intégrant notamment la
dimension REDD+, en utilisant l’outil de définition et de révision des niveaux
de référence de la RDC nécessaires au processus REDD+ ; (iii) l’élaboration de
schémas d’aménagement à décliner dans la planification et programmation du
pays : il s’agit d’élaborer le schéma national ainsi que les schémas provinciaux
d’aménagement accompagnés de plans d’actions à moyen et court terme, eux-
mêmes déclinés dans les programmations sectorielles44.
sur les capacités de l’Etat à maximiser les revenus générés. Le gouvernement a engagé un
processus de reforme des entreprises publiques. Cependant, le statut particulier de la
GECAMINES n’est pas encore résolu, et n’a à ce jour pas donné lieu à une orientation
faisant consensus entre les différents acteurs.
De nombreux rapports et propositions de réformes ont été discutés avec les autorités
de la RDC, pour engager un processus de réforme des entreprises publiques, notamment
dans le cadre de l’entrée en vigueur possible de la Uniform Law, suite à l’adhésion de
la RDC à l’OHADA. Cette adhésion a de nombreuses conséquences sur le statut et
l’avenir des entreprises parapubliques de la RDC. En effet, les entreprises publiques
en cours de transformation bénéficieront d’un délai de 2 ans pour uniformiser leur
cadre règlementaire. L’exemption de 3 ans accordée aux entreprises parapubliques par le
gouvernement de la RDC par la loi sur les faillites No.08/007 du 7 juillet 2008 devenant
caduque. Si le parlement a ratifié l’adhésion de la RDC à l’OHADA, le processus doit
être finalisé. Ainsi, le règlement et reformes des entreprises publiques tombent donc
encore sous la loi sur leur transformation de 2008.
Les institutions publiques qui supervisent les secteurs des ressources naturelles
pâtissent, comme l’ensemble des institutions de la RDC, de problèmes de capacités.
Ainsi, les directions administratives en charge du suivi du secteur minier artisanal n’ont
que peu de moyens à leur disposition pour accomplir leur mandat. Les institutions sensées
gérer les dimensions environnementales et sociales des contrats liés a l’exploitation des
ressources naturelles tardent à se mettre en place, et celles qui existent ont souvent des
moyens limités. Une meilleure régulation et réglementation de l’ensemble de ces secteurs
nécessitera le renforcement de leurs capacités institutionnelles, la mise en adéquation de
leurs moyens avec leur mandat et un suivi de leurs performances. L’ancrage extérieur de
certaines opérations de suivi de ces secteurs, tels que le REDD+, le processus FLEGT
ou le processus ITIE, permettent de renforcer la régulation et le contrôle de ces secteurs.
Cependant, les reformes de l’administration publique, le développement d’une culture
des résultats et de l’intérêt public seront des transformations endogènes nécessaires à un
meilleur contrôle des performances et d’une transparence accrue.
c. Renforcement de la sécurité
Le renforcement de la sécurité et l’arrêt des incursions des groupes armés dans le secteur
minier sont, depuis la mise en application de la règlementation sur la certification des
minerais, les préalables à la reprise des activités minières dans les provinces de l’Est. Sans
un renforcement de la reforme du secteur de la sécurité, mais également une meilleure
discipline au sein de l’armée nationale, qui se rend également coupable de nombreux
forfaits liés à l’exploitation des ressources naturelles, l’exploitation des ressources minière
ne pourra redémarrer dans cette région.
172
venir, la multiplicité des acteurs, et la hausse des enjeux financiers en l’absence d’un
environnement institutionnel plus transparent, risque de pâtir de la même opacité dans
la collecte des revenus.
Dans le secteur forestier, la dégradation du couvert forestier répond, dans une
large mesure, à des logiques de subsistance de la population, tel que l’agriculture de
subsistance, la production de bois de chauffe et de matériaux de construction. Ainsi,
près de 40 millions de congolais dépendent directement des forets pour leur survie. Des
projets de reforestation et d’afforestation auraient un potentiel important pour fournir
de nombreux emplois à la population. La régulation des émissions de carbone et la
protection du patrimoine forestier doivent prendre en considération ces dimensions. La
dégradation du patrimoine forestier et le potentiel de revenus des industries forestières
sont intimement liés à d’autres secteurs productifs. Leur régulation nécessitera donc une
approche coordonnée, telle que détaillée et proposée dans le cadre du REDD+.
A ce jour, en RDC, la mise en œuvre du processus ITIE s’est attachée à la consolidation des
données relevant de la collecte des taxes déclarées par les operateurs privés et les acteurs
175
Encadré 2.8 : Les droits des populations indigènes et le rôle des organisations
de la société civile
Dans le cadre des restitutions des travaux préliminaires ayant conduit à la rédaction
de ce rapport, une conférence fût organisée à l’Université Catholique de Bukavu,
le 15 juin 2011. Une présentation relative aux droits des populations dans le cadre
de l’exploitation des ressources naturelles, menée par un représentant de la société
civile permis de dégager la nécessité de renforcer les principes du « Consentement
Libre Préalable et Informé » (CLIP), outils de gestion permettant de définir les
relations contractuelles entre les parties prenantes à un projet d’exploitation des
ressources naturelles.
En effet, si la prise en considération de l’impact social des projets d’exploitation des
ressources forestières et minières fut renforcée dans les codes miniers et forestiers
de 2002, des conflits d’usages demeurent entre les communautés locales, les
populations autochtones et les exploitants. Les projets d’exploitation de minerais
ont souvent de lourdes conséquences telles que la relocalisation des populations
locales, et semblent souvent négliger les dynamiques sociales spécifiques des
communautés affectées, ne développant pas de stratégies de communication et
d’information appropriées, conduisant au rejet des solutions proposées par les
responsables de projets. De même, le découpage des aires forestières et l’érection
d’aires protégées sur des zones de vie des populations autochtones ont donné lieu à
de nombreux conflits avec les autorités forestières.
Les représentants de la société civile mènent un plaidoyer actif pour que les principes
du CLIP soient intégrés aux codes miniers et forestiers suivant les axes suivants :
• Renforcement des compétences institutionnelles des acteurs
• Développement de stratégies de communication et d’information appropriées
• Création d’un partenariat d’usage des communautés locales et des peuples
autochtones, dont les pygmées
• Protection des ressources et négociation des compensations en cas de
dommages
• Partage équitable des bénéfices, enregistrement et formalisation des processus
d’obtention de consensus entre les exploitants, les communautés locales et les
populations autochtones et suivi des normes et relations telles qu’établies par
le consentement formel initial
Il est proposé que le respect de ces principes donne lui à un amendement des codes
existants, notamment dans le cadre de la révision du code miniers d’ici à 2012.
S’il est vrai que le régime foncier consacre en faveur des communautés locales, par le
biais de l’enquête de vacance des terres, un droit à la consultation préalable et obligatoire
177
avant l’attribution à des tiers des terres qu’elles occupent régulièrement en vertu de
la coutume, il reste que la sécurisation foncière pour les populations locales n’est pas
efficace. En effet, la procédure d’enquête de vacance des terres telle qu’elle est organisée
par la loi du 20 juillet 1973 n’offre aucune garantie d’indemnisation consécutive à des
pertes des droits fonciers coutumiers lorsque l’enquête doit conduire à l’attribution à
des tiers de terres qu’elles occupent. De plus, les dispositions de l’article 203 du même
texte décident de l’attribution du titre au tiers requérant si, dans les six mois à dater du
démarrage de l’enquête, cette dernière n’aboutit à aucune suite en sa faveur. En décidant
ainsi, ce texte exclut le droit au consentement préalable des communautés locales ayant
droit sur les terres sollicitées par le tiers requérant. L’Etat congolais peut donc passer
outre le consentement des communautés locales et attribuer des droits de concession
et/ou d’exploitation à des tiers sur les terres occupées par les communautés locales ; il
lui suffit d’attester qu’il les a régulièrement consultées. Et, à l’inverse, les communautés
locales n’ont pas le droit de s’opposer à l’attribution d’une concession ou des droits
d’exploitation sur les terres qu’elles occupent.
Telle qu’elle ressort du droit foncier congolais, la consultation des populations locales
n’est réalisée que pour la pure forme. La loi du 20 juillet 1973 ne détermine même pas
à quoi elle devrait donner lieu si elle aboutissait au constat que des tiers détiennent
effectivement des droits sur les terres demandées en concession.
Le renforcement de l’imputabilité des institutions et des investisseurs, nécessitera
de renforcer les mécanismes de redevabilité et de contrôle par les populations locales.
L’utilisation des technologies mobiles, telle que proposée dans de nombreux secteurs à
des fin de contrôle citoyen pourrait également être d’une grande utilité dans le suivi des
secteurs des ressources naturelles.
Le dernier maillon de la chaîne ITIE++, l’utilisation des revenus générés par les
industries extractives dans des projets durables est un enjeu important. La coordination
de constructions d’infrastructures, initiées dans le cadre des projets miniers et
pétroliers, avec des pôles de développement économique, pourra permettre de faciliter
la maintenance de ces infrastructures. Le déficit de maintenance est l’un des principaux
défis à relever pour les infrastructures congolaises. Leur intégration renforcée à d’autres
pôles de développement économique pourrait permettre leur pérennisation au-delà
du cycle de vie des exploitations de minerais et d’hydrocarbures. Les recettes fiscales
générées par les industries extractives doivent être utilisées dans des activités visant
à réduire l’impact environnemental et social de ces projets, à mitiger les disparités
régionales, à contribuer à la formalisation progressive du secteur artisanal et à financer
des activités contribuant au développement économique local, national et régional. Une
meilleure intégration régionale des industries extractives, ainsi que le renforcement de
la régulation du secteur par les autorités sera nécessaire à l’atteinte de progrès sur ces
maillons de la chaîne ITIE++.
178
C. Challenges environnementaux
La Constitution de la RDC oblige l’Etat Congolais à protéger l’environnement
(article 53) et renvoie au domaine de la loi la détermination du régime de la protection
de l’environnement et du tourisme (article 123, point 15). Pour donner effet à cette
orientation constitutionnelle pertinente, la RDC s’est dotée d’une loi fixant les principes
fondamentaux relatifs à la protection de l’environnement, en même temps que d’une
loi relative à la conservation de la nature ; cette dernière vient abroger et remplacer
l’actuelle Ordonnance loi n°69-041 du 22/08/1969, qui prévalait jusqu’à présent sur la
conservation de la nature. Cette loi a été adoptée le 16 juillet 2011.
La loi du 16 juillet 2011 introduit un certain nombre d’innovations, relativement à
la conservation et la protection de l’environnement. Cette loi institue la mise en place
d’un Conseil National de l’environnement et du développement durable, place sous
l’autorité du premier Ministre (article 17), donnant des avis sur les plans sectoriels et
la politique nationale de l’environnement. Le chapitre 3 de la loi institue de nouveaux
mécanismes procéduraux, relatifs à l’évaluation environnementale systématique
de tous les programmes, politiques et plans élaborés par l’état. De plus, les études
d’impact environnemental et social sont désormais obligatoires, pour tout projet de
développement, d’infrastructure ou d’exploitation.
Cependant, un certain nombre de décrets de mise en application doivent encore être
adoptés pour garantir l’opérationnalisation de cette loi. Au total, 24 décrets devraient
suivre la promulgation de cette loi, dont les articles 5, 6, 9, 17, 19, 21, 22, 23, 24, 25, 38, 42,
45, 46, 48, 49, 50, 54, 60, 61 et 64, qui sont considérés comme prioritaires. Notamment,
la création d’une agence nationale, étant un établissement public, est une priorité. Elle
devrait permettre, selon son mandat explicité à l’article 22, de se fixer sur les grandes
exploitations privées, et de valider les audits environnementaux réalisés. Par ailleurs
elle doit permettre la cohabitation de différentes structures qui ont l’environnement
dans leurs attributions (dont les mines et les hydrocarbures) pour la conduite des
audits environnementaux, sous la coordination du Ministère de l’Environnement. La
supervision des impacts environnementaux du secteur artisanal devra cependant être
confié à une autre structure. L’ensemble du chapitre 3 de la loi, définissant les mécanismes
procéduraux est prioritaire. Le gouvernement conserve la responsabilité d’élaborer un
plan stratégique, et le scénario de référence, nécessaire a la conduite ultérieure des audits
(article 15).
La loi comprend également des mécanismes rétroactifs pour les exploitations
existantes, définis en ses articles 85 et 86. Les installations existantes disposent d’un délai
de 24 mois pour se mettre en conformité avec les dispositions de la loi.
Avant son adoption, deux textes réglementaires avaient été adoptés par le Ministre de
l’Environnement pour prendre en compte la dimension environnementale des projets
179
Industries 1. Renforcement du processus de 1. Renforcement du processus de 1. Réalisation du scénario de 1. Renforcement des structures
extractives certification des minerais certification des minerais référence pour l’évaluation de de suivi et soutien au secteur
2. Développement de sites de 2. Mise en place des principes du CLIP l’impact environnemental minier artisanal
transformation 3. Mise en place de structures de suivi et de 2. Renforcement des capacités 2. Reforme de la loi foncière
3. Appui au développement de contrôle indépendant des consensus locaux des entités en charge du 3. Promulgation d’un nouveau
mines mixtes obtenus suivi du respect des normes code des hydrocarbures
environnementales
4. Intégration économique 3. Utilisation des nouvelles technologies 4. Sécurisation des contrats
nationale et régionale renforcées. pour accéder à l’information au niveau 3. Mise en œuvre de projet
de mitigation de l’impact 5. Renforcement de la chaine
Développement de pôles de local ITIE++
croissance environnemental au niveau des
4. Utilisation des revenus générés vers des sites d’exploitation 6. Amélioration du climat des
projets de développement durable affaires
Secteur 1. Appui au développement 1. Mise en œuvre effective des principes du 1. Réalisation du scénario de 1. Reforme du code foncier
forestier au développement des sites CLIP référence pour l’évaluation de 2. Sécurisation des contrats
d’exploitation forestière pérennes 2. Utilisation des nouvelles technologies l’impact environnemental
3. Amélioration du climat des
2. Mise en œuvre du zonage pour accéder à l’information au niveau 2. Renforcement des capacités affaires
forestier pour une bonne local des entités en charge du
administration du domaine 3. Prise en considération des droits des suivi du respect des normes
forestier populations autochtones et communautés environnementales
3. Appui au développement de locales dans les processus de création des 3. Opérationnalisation du
la foresterie communautaire et aires protégées programme REDD+
d’activités génératrices de revenus 4. Appui au développement d’activités 3. Mise en œuvre de projet
alternatives génératrices de revenus alternatives de mitigation de l’impact
4. Renforcement du secteur 3. Mise en place de structures de suivi et de environnemental au niveau des
agricole contrôle indépendant des consensus locaux sites d’exploitation
4. Renforcement de la fourniture obtenus
181
énergétique
182
Notes
1. Mary Kaldor – New and Old Wars: Organized Violence in a Global Era, 1999.
2. Democratic Republic of Congo; growth with governance in the mining sector”, World Bank, 2008.
3. Ibid
4. Ibid
6. http://www.mediacongo.net/show.asp?doc=17104
5. Source: Ministere des hydrocarbures, Direction d’Etudes et Planification, 2011.
7. https://www.cia.gov/library/publications/the-world-factbook/geos/cg.html.
8. “Democratic Republic of Congo; growth with governance in the mining sector”, World Bank, 2008.
9. Banque mondiale
10. Source: site de la Gecamines: http://www.gecamines.cd/partenariat.php
11. Banque mondiale
12. CAMI : www.flexicadastre.com/DotNetNukeDRC/LinkClick.aspx?fileticket=IEsc3frpdoA%3d&tabid=
132&language=fr-FR
13. Source: http://www.flexicadastre.com/DotNetNukeDRC/MineralTitleMap/tabid/72/language/en-GB/
Default.aspx
14. Source: http://www.flexicadastre.com/DotNetNukeDRC/MineralTitleMap/tabid/72/language/en-GB/
Default.aspx.
15. Les scénarios de croissance haut et bas sont détaillés dans le rapport « Croissance et gouvernance dans le
secteur minier », Banque mondiale, 2008.
16. http://www.anapi.org/spip.php?article 472
17. « Croissance et gouvernance dans le secteur minier ». Banque mondiale, 2008.
18. « Croissance et gouvernance dans le secteur minier ». Banque mondiale, 2008.
19. P ROMINES STUDY. “Artisanal Mining in the Democratic Republic of Congo”, PACT, 2010.
20. http://www.lundinmining.com/s/CR_Tenke.asp.
21. De gauche à droite, de haut en bas, on peut observer: un poste de lavage de coltan, des tunnels pour
l’extraction (qui sont interdits pour des raisons sécuritaires dans les mines artisanales); un poste de séchage
du coltan; et un creuseur artisanal qui tente de soulever la couche sédimentaire pour accéder aux couches
contenant le coltan. Ces photos démontrent le caractère extrêmement rudimentaire des outils utilisés par les
creuseurs, et l’absence totale d’équipement et de mesures de sécurité.
22. « Mining with growth in the DR Congo ». Garret, 2010.
23. « Mining with growth in the DR Congo ». Garret, 2010.
24. Rapport du conseil de sécurité des Nations Unies – S/2010/596, du 29 novembre 2010
25. PROMINES STUDY. “Artisanal Mining in the Democratic Republic of Congo”, PACT, 2010.
26. PROMINES STUDY. “Artisanal Mining in the Democratic Republic of Congo”. PACT, 2010
27. PROMINES STUDY. “Artisanal Mining in the Democratic Republic of Congo”. PACT, 2010
28. « Croissance et gouvernance dans le secteur minier », Banque mondiale, 2008.
38. « Croissance et gouvernance dans le secteur minier ». Banque mondiale, 2008.
29. PROMINES STUDY. “Artisanal Mining in the Democratic Republic of Congo”. PACT, 2010
30. « Croissance et gouvernance dans le secteur minier ». Banque mondiale, 2008.
31. “Forest in post conflict Congo”, Banque mondiale, 2007.
32. Lumbwe 2001; “Forest in post conflict Congo”, Banque mondiale, 2007.
183
33. Ibid.
34. ARD. 2003.
35. Ibid.
36. Lumbwe 2001; “Forest in post conflict Congo”. Banque mondiale, 2007.
37. “Le Potentiel REDD+ de la RDC”. MECNT, 2009.
38. Ibid.
39. “Forest in post conflict Congo”, Banque mondiale, 2007.
40. Ibid.
41. “Le Potentiel REDD+ de la RDC”. MECNT, 2009. Les estimations présentées dans ces paragraphes ont été
élaborées dans le document d’analyse du potentiel REDD+ en RDC. Il s’agit de projection, produite par le
cabinet McKinsey.
42. “Le Potentiel REDD+ de la RDC”. MECNT, 2009
43. Coordination Nationale REDD, Programme REDD+, Note d'orientation sur la modernisation et
sécurisation foncière, novembre 2010.
44. Coordination Nationale REDD, Programme REDD+, Note d'orientation sur la modernisation et
sécurisation foncière, novembre 2010.
184
"Citation : Claude Baissac, Anne Sinet, Alphonse Soh et Florence Verdet, 2012, “Contribution des
villes à la croissance économique et à la réduction de la pauvreté”, dans Johannes Herderschee, Daniel
Mukoko Samba et Moїse Tshimenga Tshibangu (éditeurs), Résilience d’un Géant Africain : Accélérer la
Croissance et Promouvoir l'Emploi en République Démocratique du Congo, Volume II : Etudes sectorielles,
MÉDIASPAUL, Kinshasa, pages 185-257.
Cet article a été préparé dans le cadre des travaux d’analyse de la Banque Mondiale autorisés en vertu
du code P106432-ESW pour « la préparation d’une étude Diagnostique d’Intégration du Commerce et
un Mémorandum Economique du Pays ». Les remerciements aux pages xxii-xxv de ce volume assurent la
reconnaissance aux nombreux collègues, experts et participants des séminaires qui ont généreusement contribué
à cet article de leur temps et de leurs idées; toutes les erreurs restantes sont celles des auteurs.
Copyright © 2012 La Banque Internationale pour la Reconstruction du Développement/ La Banque
Mondiale conformément à l’information de la page iii de ce volume."
185
Chapitre 3
I. Introduction
Les villes sont le « moteur » du développement. Elles sont le lieu privilégié d’implantation
et de développement des activités à caractère économique.
La République Démocratique du Congo n’échappe pas à la règle : avec une économie
encore dépendante de la rente minière, sa capitale, Kinshasa, et les principales villes du
pays, en forte expansion ces dernières décennies, apparaissent comme des éléments clé de
la reprise économique, capables de stimuler la production agricole, la ré-industrialisation
du pays et le développement d’un secteur tertiaire moderne. Au Congo, les villes quelque
soit leur taille, jouent un rôle essentiel dans la première transformation, la distribution
locale et l’exportation des produits, principalement agricoles.
Aider le pays à sortir de la crise sociopolitique dans laquelle il s’est installé, en mettant
en place une politique active de développement des infrastructures et des services urbains,
devrait être un élément essentiel de l’agenda économique et social du pays dans son
ensemble et de la politique de soutien à la croissance des partenaires au développement.
Stimuler l’investissement public est le seul moyen d’inciter le secteur privé à investir, à la
fois dans les activités économiques et dans l’habitat.
Ne pas inscrire le secteur urbain dans les axes prioritaires de la politique de
développement économique du pays ferait ainsi courir le risque de voir non seulement
affluer massivement la population dans les villes (processus déjà en cours), mais également
de voir s’aggraver la pauvreté en zone urbaine, faute d’anticipation et de politique
d’accueil, et de compromettre ainsi toute perspective de développement du pays dans
son ensemble. Il est donc urgent d’agir, à la fois au niveau des grands investissements
de fonction urbaine, et par des actions en faveur de la réduction de la pauvreté en zone
urbaine.
186
de ressources. En effet, dans les années 1980 et 1990, Gécamines à elle seule représentait
60 % des exportations nationales, et le secteur minier dans son ensemble environ 80 %.
Le secteur minier générait 50 % des recettes d’Etat. Entre 1988 et 1995, la production
de cuivre s’effondra de 90 % passant de 470 000 tonnes à 34 000 tonnes. La production
de zinc et de cobalt cessa presque entièrement. La production de manganèse pris fin en
1975.
Le Gouvernement répondit à la crise en émettant des devises, alimentant ainsi la
bulle inflationniste. En 1991, le pays (les agences gouvernementales, l’administration
et le secteur parapublic) se retrouva pratiquement en cessation de paiement: le
Gouvernement arrêta d’honorer ses dettes3, mis fin aux investissements et à la
maintenance des infrastructures. La fourniture de services de base, y compris dans le
transport, cessa. Les salaires ne furent plus versés, les importations et la consommation
intérieure s’effondrèrent.
Dans un deuxième temps, en Septembre 1991, les soldats non payés se mutinèrent et
menèrent ce qui fut appelé les « grands pillages », une campagne de pillages spontanés
dans l’ensemble du pays. En décembre 1992, une nouvelle vague de pillage eut lieu,
visant les principales villes du pays, puis de nouveau en janvier 1993. Ces pillages eurent
des effets dévastateurs sur l’économie urbaine: l’industrie, le secteur manufacturier et les
services s’écroulèrent. De 10 % du PIB en 1990, la part du secteur manufacturier tomba
à environ 4 % en 1992.
Alors que l’économie rurale avait été largement détruite par les politiques menées
dans les années 1970, l’économie urbaine s’effondra principalement du fait des crises
des années 1990. A Kinshasa, on estime que les pillages conduisirent à la destruction de
près de 800 millions de dollars d’infrastructures et d’équipements et à la disparition de
90 000 emplois.
Enfin, les guerres menées entre 1997 et 2003 ont accentué les destructions et
dislocations. Dans l’Est, les villes furent directement affectées – Kisangani fut
partiellement détruites par une des batailles menées successivement en 1997, 1999 et
2000 – et demeurent à ce jour affectées par des conflits. Dans le reste du pays, les villes
furent plus indirectement affectées: d’abord le déjà ténu lien avec le monde rural fut
encore fragilisé; ensuite les migrations massives de population, exacerbant la pauvreté en
ville, exerça une pression forte sur les infrastructures et contribuant au développement
d’une économie informelle et de survie.
L’impact des guerres sur l’industrialisation est visible. A partir de 1993 le secteur se
releva progressivement des crises financières et des pillages, puis s’effondra de nouveau à
partir de 1996 pour passer en dessous de 4 % du PIB entre 1999 et 2001.
189
infrastructures telles que les usines de production d’énergie locale et les routes et a
eu des impacts économiques directs et indirects importants.
Source : Ulloa et al. 2010. La République Démocratique du Congo et cinq Provinces.
Une étude des contraintes imposées à la croissance. Non publié.
Source : MITPR
récemment par la Banque mondiale à partir d’analyses par secteur peuvent également
être utilisées pour estimer les performances de l’économie urbaine. Enfin, les estimations
menées pour la province de Kinshasa valent pour la ville qui représente près de 90 % de
l’économie provinciale.
Les villes ont très largement bénéficié du retour à la croissance après 2002, conséquence
des accords de partage du pouvoir conclus la même année.
Les statistiques au niveau national fournissent des informations sur les performances
du secteur urbain. Le graphique ci-après (2a) illustre l’évolution des performances du
secteur rural, appréhendé au travers de l’agriculture (incluant forêt, élevage, chasse et
pêche) et des industries extractives (incluant le secteur minier, le gaz et le pétrole). Le
graphique 2b montre comment le secteur urbain (appréhendé au travers des industries
de transformation, des secteurs de la construction et des travaux publics, du commerce,
du transport et des télécommunications et enfin des services) a joué un rôle principal
dans la croissance. En effet, les transports et les télécommunications ont connu une
croissance rapide entre 2001 et 2003 ; le secteur de la construction et des travaux publics
affiche une croissance à deux chiffres chaque année depuis 2001, à l’exception de 2007 ;
en revanche, le secteur industriel affiche un très net retard.
Figure 3.1 : Comparaison des performances de la croissance des secteurs majoritairement
ruraux (2a) et urbains (2b) 2000 à 2008
Les données sur la composition du PIB fournissent des indications sur le poids de
l’économie urbaine. En prenant 2008 pour référence on constate que le secteur primaire
(agriculture et industries extractives) représentait 50,7 % de l’économie, contre 57 %
en 2003. La diminution relative du secteur primaire s’explique principalement par
la croissance ralentie de l’agriculture par rapport à celle des autres secteurs. La RDC
demeure donc très largement une économie rurale et de subsistance.
Les secteurs de la construction et des travaux publics, du commerce, des transports et
des télécommunications et des services, sont passés de 35 % de l’économie en 2003 à 41,6
196
Ce constat est renforcé par les données sur les investissement fournies par l’ANAPI ;
données utiles même si elles présentent des lacunes: (i) l’ANAPI ne prend pas en compte
les investissement des secteurs minier et financier – compte tenu du poids du secteur
minier dans l’économie nationale, les statistiques sont donc biaisées; (ii) les données
compilées par l’ANAPI sur la valeur des investissement sont peu fiables ; elles devraient
être surtout utilisées pour fournir des indications sommaires sur le poids des différents
secteurs et leur répartition géographique.
En termes de demande, une analyse des données de 2005 à 2009 démontre la forte
attractivité du secteur des services, mais également la surprenante attractivité du secteur
industriel ou de transformation, l’agriculture étant à la traîne.
197
Tableau 3.2: Les projets d’investissement par secteur (hors mines et secteur
financier) de 2005 à 2009
Agriculture 8 8 8 5 9
Industries manufacturières 41 41 45 47 34
Construction et travaux publics 7 19 11 22 12
Transports et télécom. 13 11 13 20 13
Commerce 10 1 2 4 1
Services 24 16 20 13 24
Source: Estimations des auteurs basées sur les données de l’ANAPI, 2010
Carte 3.2 : Plan Kinshasa - Concentration géographique des activités inventoriées par
Beltrade à Kinshasa
Source: IFC, Etude de Faisabilité pour la Zone Economique Spéciale Pilote en RDC. Analyse de la
Demande,2010
199
La situation de Kinshasa
Les défis auxquels est confronté Kinshasa sont nombreux, multidimensionnels et d’un
certain point de vue, accablants9. Si la métropole s’est partiellement redressée depuis
2002, après des décennies de mauvaise gestion, de pillages et des conséquences des
guerres, ce redressement est essentiellement le résultat de changements massifs dans la
composition du PIB ; il est intervenu sans l’investissement public pourtant nécessaire, et
sans aucune réforme de la gestion urbaine
201
D’un point de vue structurel, l’économie de la ville est largement dominée par le secteur
des services (cf. tableau ci-dessous) qui représente près de 67 % en 2008. L’agriculture ne
représente que 10,8 % du PIB, une proportion faible, mais non insignifiante. Le secteur
industriel atteint à peine 8,7 %, ce qui est toutefois deux fois plus important que le taux
constaté au niveau national.
Dans les années 1970, des milliers f industrielles existaient, connectées à l’économie
rurale et urbaine grâce à un réseau complexe de relations de production dans les secteurs
de l’agriculture, de l’agro-industrie, du bois, des produits de base, et des services
financiers ; cet ensemble s’appuyait sur un système de transport national multimodal
intégré et efficace (cf. carte 1 ci-dessous).
Aujourd’hui, très peu de ce système a perduré: le peu d’industries ayant survécu
est principalement orienté vers la substitution aux importations de biens et de services
de bases (ciment, matériaux de construction, farine, savon et détergents), et rencontre
d’importantes difficultés opérationnelles, car dépendant principalement de l’importation
d’équipement et de produits primaires et secondaires. Il y a peu d’activités exportatrices,
celles-ci étant entravées par le climat général des affaires, le manque d’infrastructures,
les pressions fiscales officielles et non officielles, le coût des services bancaires, entre
202
autres. Une visite rapide dans les quartiers industriels de Kanagawa et Limette, autrefois
poumons industriels de la ville et du pays, témoigne de l’ampleur catastrophique de la
désindustrialisation de Kinshasa et de ses environs et de la destruction de ces échanges
commerciaux avec son hinterland national. Ces zones sont aujourd’hui de vastes
friches industrielles squattées par l’informel; les équipements rouillent sur place, les
infrastructures de chemin de fer et de transport fluvial sont à l’abandon.
Kinshasa est maintenant une économie de services. Les services marchands dominent
largement, avec les échanges et le commerce formel et informel représentant 47,9 % du
PIB (2008). La tendance est à l’augmentation de ce secteur. Cette dépendance crois-
sante au secteur commercial est le produit de plusieurs facteurs: (i) le rétablissement de
l’économie en 2002, (ii) la croissance démographique, (iii) l’accès facile aux activités
commerciales, particulièrement dans l’informel et la micro-entreprise.
En l’absence d’une industrie de transformation locale capable de fournir plus qu’une
portion minime des produits de base, et avec un secteur agricole fortement limité,
la presque totalité des produits consommés est importée. Cela est reflété de manière
spectaculaire dans la balance commerciale de la province, qui s’est rapidement détériorée:
en 2008, la balance commerciale des biens et services était négative à 2 225 milliards de
FC à prix courants (environ 1 554 milliards de FC aux prix de 2006). En parallèle, les
exportations s’élevaient à peine à 25 milliards FC, soit un taux de couverture de 1,1 %,
possiblement un record mondial. La balance commerciale domestique est restée positive
avec 94 milliards de FC. Kinshasa exporte principalement vers le reste du pays, surtout
vers le Bas-Congo, le Bandundu et l’Equateur.
En fait, il ne serait pas incongru de décrire la ville comme représentant une sorte
de zone de consommation de produits d’importations enclavé – l’inverse d’une zone
franche d’exportation en somme – , et qui en retour exporte les richesses du reste du pays
pour financer cette boulimie. Les chiffres de la consommation et des investissements
démontrent l’étendue du phénomène: (i) en 2008, la consommation totale était de
4 087 milliards FC dont 82 % étaient privée (2 818 milliard de FC au taux de 2006);
(ii) les investissements étaient de 470 milliards FC, à 91 % privés. Les investissements
représentaient donc moins de 11 % de la consommation et 20,4 % du PIB. Ainsi,
Kinshasa « exportait » près de 50 % de « ses » richesses vers l’étranger.
203
Consommation 2 034 680 2 939 855 4 086 999 2 034 680 2 504 028 2 818 105
Publique 385 656 534 655 743 66 385 656 455 393 512 776
Privée 1 649 023 2 405 200 3 343 338 1 649 023 2 048 634 2 305 329
Investissements 192 558 469 576 470 416 192 558 399 962 324 365
Publics 25 144 28 698 42 041 25 144 24 443 28 988
Privés 167 414 44 ,878 428 375 167 414 375 519 295 377
Absorption 2 227 238 3 409 431 4 557 415 2 227 238 2 903 990 3 142 470
Demande
-748 221 -1 519 245 -2 255 010 -748 221 -1 294 020 - 1 554 895
extérieure nette
PIB 1 479 016 1 890 186 2 302 404 1 479 016 1 609 970 1 587 575
Etude de fonds vol. I. Annexe A
Ce déficit massif est largement financé par la rente minière et, dans une moindre mesure,
par les transferts internationaux provenant des bailleurs bilatéraux et multilatéraux.
Il est intéressant de noter que le Katanga a exporté à lui seul en 2008 – et seulement
dans le secteur minier – 2 053 milliards de FC, et a eu une balance commerciale positive
de 803 millions de FC.
De manière simplifiée, Kinshasa joue le rôle d’un vaste siphon des ressources
naturelles du pays. Ce siphon consomme de manière indirecte cette richesse, au travers
les importations massives de biens de consommation, consommées brutes, non-intégrées
dans une productive de valeur ajoutée durable. Kinshasa, générant très peu de richesse
réelle, exporte la richesse réelle produites par le reste du pays.
D’une fonction de « pôle-réseau » dans les années 1960, caractérisée par « l’existence
d’un enchevêtrement d’industries dynamiques qui ont permis des effets d’entraînement
sur le reste de l’économie nationale et notamment dans les régions environnantes »10,
Kinshasa est devenue une métropole vivant sur les rentes, sur la consommation
ostentatoire d’une petite minorité, et sur une économie informelle et de survie pour une
large majorité en expansion rapide et continue.
L’économie informelle est une conséquence collatérale de l’effondrement du secteur
industriel et du secteur formel. Bien que peu de données précises soient disponibles,
une littérature croissante s’intéresse à ce secteur. Ainsi, sa taille, son organisation et la
204
sécurité qu’il confère aux communautés, sont vues comme des opportunités potentielles,
ainsi que comme une expression de sa créativité et de sa résilience.
Le secteur formel fournissait un emploi pour 3,3 habitants à l’indépendance. Ce
taux est passé à 1 emploi pour 6,3 habitants en 1967. Supposant qu’environ 4 millions
d’habitants sont employés dans la ville, et environ 800 00011 sont employés dans le secteur
formel, ce taux serait aujourd’hui de moins de 1 pour 10. Kinshasa est une métropole à
l’économie principalement informelle, probablement une des villes les moins formelles
dans le monde.
La situation de Bukavu
A première vue, Bukavu et Kinshasa sont à l’opposé. Bukavu est une petite ville, à
l’économie principalement rurale, ravagée par près de vingt années de conflits, et
subissant toujours les conséquences d’une importante insécurité, bien qu’en diminution.
Cependant, la raison d’être de Bukavu était autrefois identique à celle de Kinshasa, à une
échelle moindre: Bukavu était alors une ville administrative, de commerce et un centre
logistique pour l’économie régionale. En dehors de la taille, la différence principale
résidait dans le fait que Bukavu n’était pas une ville industrielle, et n’accueillait qu’un
nombre limité d’unités industrielles. Trouver des informations pertinentes sur Bukavu
est encore plus difficile que pour Kinshasa. Les données à l’échelle de la ville sont
inexistantes, la ville n’ayant pas bénéficié de l’intérêt qu’a pu susciter Kinshasa. Le
profil économique de la ville présenté ci-dessous est donc très largement basé sur des
hypothèses étayées par les données provinciales.
205
que la population soit d’environ 750 000 habitants, cela signifie que le revenu quotidien
moyen est de 0,82 dollars par jour. La pauvreté urbaine est estimée à 84,6 %, soit un
niveau équivalent de celui de la pauvreté rurale. Cela contraste fortement avec Kinshasa
dont le taux de pauvreté est aux alentours de 41 % (2008). Bukavu est donc bien en deçà
du taux national de pauvreté qui est aux alentours de 71,3%.
Aux revenus générés localement doivent être ajoutés les transferts du Gouvernement
central, dont une très faible partie est consommée hors de la ville. Ils ont augmenté de
manière significative dans les dernières années: de 1,76 milliards de FC a 15,24 milliards
en 2008. L’assistance humanitaire représente une autre source importante de revenus:
22,26 milliards de FC en 2008 qui auraient semble-t-il augmenté depuis lors. Au total,
les revenus du Gouvernement provincial ont atteint 89,5 milliards de FC et auraient
augmenté en termes réels. Les transferts du Gouvernement central et l’assistance
humanitaire ont représenté chacun 6,2% du PIB de la province, soit à peu près autant
que l’ensemble de la contribution du secteur secondaire.
Ensuite viennent les maigres revenus d’un secteur agricole limité à une agriculture
vivrière, dont la production et essentiellement consommé sur place, revendue localement
et sert à la consommation de produits importés, et du secteur minier. Ces revenus sont
partiellement réinvestis à Bukavu, et les observations empiriques suggèrent que ces
investissements profitent essentiellement à un secteur immobilier en forte expansion à
Bukavu (non comptabilisé dans les données ci-dessus, probablement du fait de l’origine
illégale d’une partie des revenus tirés des activités minières). Le revenu moyen quotidien
est donc certainement supérieur aux estimations fournies ci-avant, mais dans des
proportions relativement limitées.
Un autre indicateur de l’économie de la ville est la balance commerciale de la
province. En 2008, celle-ci était déficitaire de 154 millions de FC, les importations
ayant atteint 126 milliards de FC, et les exportations étant à peine de 15 milliards (soit
un taux de couverture de 11,9 %). Ces résultats sont supérieurs à ceux de Kinshasa,
mais doivent être contrastés avec ceux de la fin des années 1980, lorsque le Sud- Kivu
était un exportateur net de produits alimentaires vers le reste du pays, mais également
vers l’étranger. Bukavu était le centre de ces échanges, servant de point d’entrée vers le
cœur productif de la région, concentrant les capacités de production, de logistique et de
support, et fonctionnant comme que hub régional de transport.
Aujourd’hui, Bukavu sert d’îlot de sécurité pour les populations victimes de décennies
de guerres, déracinées de leurs terres et de leurs communautés, et luttant pour survivre
dans une ville physiquement étranglée dont les capacités d’accueil ont été largement
dépassées. La densité de population est d’environ 7 000 habitants au km2. Le chômage
est supérieur à la moyenne nationale (22 % contre 11 %), et plus élevé dans la ville que
dans les zones rurales. Les infrastructures urbaines ont été dilapidées et la fourniture en
énergie est sporadique. La gestion urbaine manque de ressources et est inefficace. Avec
l’effondrement de l’économie rurale et l’absence d’alternatives adaptées, l’économie de
Bukavu est en déclin.
207
D’après la Loi Organique de 2008, on entend par Ville « tout chef-lieu de province ou
toute agglomération d’au moins 100 000 habitants disposant des équipements collectifs
et des infrastructures économiques et sociales à laquelle un décret du Premier ministre
aura conféré le statut de ville » et on entend par commune « tout chef-lieu de territoire
ou toute subdivision de la ville ou toute agglomération ayant une population d’au moins
20 000 habitants à laquelle un décret du Premier ministre aura conféré le statut de
commune ».
A part les Provinces qui ont une Assemblée provinciale et un Gouvernement avec
ses ministères, le manque de moyens financiers n’a pas permis de créer des services
administratifs spécifiques pour chaque échelon. Pour les villes, la « solution » a consisté
à appliquer l’un des principes du modèle populaire et révolutionnaire mis en place en
1967 et consistant à sauvegarder le système unitaire de l’Etat en nommant à tous les
échelons des fonctionnaires de l’Etat sous tutelle directe de l’Etat. Ainsi, la Ville n’a pas
de services techniques municipaux ; elle doit composer avec les divisions urbaines des
administrations centrales qui relèvent de Kinshasa et qui ont leur propre organisation,
indépendante de celle de l’administration municipale pour laquelle elles sont supposées
209
toutefois agir. Ainsi, une ville de plus d’un million d’habitants dispose des mêmes
services, compétences techniques et matérielles identiques, qu’une ville de 100 000.
Kinshasa, avec son statut de Ville-Province, est un cas à part, puisque l’Hôtel de Ville et
le Gouvernement Provincial ne font qu’un.
Par ailleurs, jusqu’à la loi de 2008, une commune était nécessairement une subdivision
de la ville dont elle dépend. Avec la nouvelle loi, la commune est supposée disposer de la
personnalité morale et de l’autonomie financière, même si la mise en pratique rencontre
des obstacles.
La nouvelle loi ouvre également la possibilité d’ériger une localité au rang de
commune en dehors d’une ville. Mais sur le terrain, certaines agglomérations ayant une
population de plusieurs dizaines de milliers d’habitants gardent le statut de « cité ».
Elles restent ainsi incluses dans les « territoires » qui sont des entités rurales, et sont
privées d’autonomie financière, de personnalité juridique et de toute structure technique
pouvant gérer les problèmes urbains de base comme l’occupation des sols.
Sources: Auteur à partir des données PIB et budget Etat (FMI), Population (Banque mondiale
& UN-Habitat).
Les relations entre les différentes entités sont définies par divers textes, et en
particulier par la nouvelle Constitution, promulguée le 18 février 2006, qui instaure un
quasi-fédéralisme (bien que l’Etat reste de forme unitaire), conformément au compromis
de Sun City signé en 2002. Les Provinces ne sont plus des collectivités décentralisées
mais des entités politiques régionales, disposant d’un Parlement et d’un Gouvernement
provincial, sur lesquels l’Etat n’a aucun pouvoir de révocation. La loi organique n°08-
016 du 07 octobre 2008 précise la composition, l’organisation et le fonctionnement des
entités territoriales décentralisées et leurs rapports avec l’Etat et les Provinces.
Le financement des ETD est opéré dans le cadre d’un vaste système de
redistribution nationale des ressources fiscales recouvrées localement15. La
centralisation se retrouve tant en recettes qu’en dépenses. La fiscalité locale est
constituée de quelques impôts peu rentables (impôts fonciers, impôts sur les
véhicules et patente sur les petites activités artisanales et commerciales) cédés
dès les années 1980 en contrepartie de la prise en charge par les ETD d’un
certain nombre de «menues dépenses». L’essentiel des ressources des ETD, et
notamment des Provinces, provient donc des rétrocessions des grands impôts
nationaux sur les revenus et sur la consommation. La rétrocession aux provinces
et ETD s’opère sur la base d’une retenue à la source par les Provinces de 40 %
des recettes d’intérêt national recouvrées localement ; ce pourcentage est supposé
donner lieu à la répartition de 25 % des montants correspondants à la Province et
15% aux ETD (Villes et communes). Ce dispositif, institué par la Constitution de
2006, cristallise l’essentiel des débats sur le financement de la décentralisation. Les
dépenses d’investissements, les frais de personnel et les frais de fonctionnement
sont quasi intégralement couverts par l’Etat.
En ce qui concerne les communes, elles n’ont pas de personnalité juridique et dépendent
de la Ville tant administrativement que financièrement. Les bourgmestres, autorités
politiques, sont placés sous l’autorité du Maire de la Ville et les relations entre les deux
entités semblent se limiter aux aspects administratifs. Ainsi, dans le cas de Lubumbashi
par exemple, les bourgmestres doivent un rapport quotidien tous les matins entre 9h et
9h30. De la même manière, le Maire fait un rapport au Gouverneur de la Province tous
les jours avant 13h. Cette situation pourrait évoluer avec l’application de la loi organique
de 2008. L’augmentation récente des moyens financiers et matériels dévolus à la ville par
la Province entraîne d’ailleurs une pression croissante des Bourgmestres sur le Ministère
de l’Intérieur pour assumer leur rôle d’Entité Décentralisée.
A l’inverse, la Province apparaît comme l’acteur clé de la gestion et du développement
urbain. Pour le Katanga par exemple, le budget Provincial 2008 (réalisé et en grande
partie affecté à la ville de Lubumbashi) s’élevait à 69 milliards FC, à comparer au budget
de la Ville (0,6 milliards FC). Les compétences de la Province sont définies en termes
généraux par la Constitution de 2006 (art. 204) : elle exerce des compétences en propre
et des compétences exercées pour le compte de l’Etat. En matière de gestion urbaine,
la Province est compétente pour les questions « d’habitat urbain et d’équipements
collectifs provinciaux et locaux ». La Province intervient dans l’attribution des
parcelles et la gestion des extensions urbaines, ainsi que dans la réalisation de tous les
investissements d’importance sur la ville. Compte tenu de ses moyens financiers, elle se
substitue très souvent à la Ville dans la plupart des domaines listés comme relevant de
cette dernière, y compris dans la gestion des déchets solides.
Les grands services urbains relèvent d’offices et de sociétés nationales intervenant
sous le contrôle direct de l’Etat central (Ministères de l’Energie et du Portefeuille). Il
s’agit de la REGIDESO (Régie de Distribution d’Eau) et de la SNEL (Société Nationale
d’Electricité). S’ajoutent à ces deux concessionnaires l’OVD (Office des Voiries et
du Drainage), sous la tutelle du Ministère des Infrastructures et Travaux Publics, qui
dispose d’antennes dans chacune des villes capitales provinciales, mais se trouve prise en
étau entre sa hiérarchie (nationale) et le Gouvernement provincial.
La mise en place de Ministères provinciaux en 2007 a encore complexifié le paysage
institutionnel. Les services déconcentrés, autrefois sous le contrôle du Ministère central
et sous l’autorité de l’administration territoriale, sont désormais soumis à une troisième
autorité hiérarchique : le ministère provincial dont la relation avec l’administration
centrale à Kinshasa nécessite d’être clarifiée. En clair, le mouvement de déconcentration
engagé avec le renforcement des Provinces n’a pas supprimé l’intervention du pouvoir
central ; la fusion des services déconcentrés et décentralisés au sein du Gouvernorat
entraîne, à ce jour, une relation de tutelle entre l’échelon Ville et l’échelon Provincial.
215
Au final, dans l’attente de l’application de la loi de 2008, la Ville n’est pas aujourd’hui
l’acteur principal de la gestion et du développement urbain. Elle a essentiellement une
mission générale de contrôle et de coordination de ses propres services et de ceux mis
à sa disposition par l’Etat. Elle n’est responsable de la production d’aucun service
public urbain en particulier. En conséquence, ses dépenses effectivement consacrées à la
production de services urbains sont quasi inexistantes.
Une forte centralisation du système administratif et politique: (i) une tutelle de l’Etat
omniprésente à travers la représentation des services centraux jusqu’au niveau local ; (ii)
jusqu’à présent, pas de transfert financiers de l’Etat vers les collectivités avec et donc un
système basé sur le « chacun pour soi » ;
L’absence de fiscalité locale. Dans la pratique, le système est basé sur une fiscalité
nationale partagée, dont l’efficacité en termes de perception et de répartition aux échelons
inférieurs représente une difficulté majeure du développement local. Les nouveaux
textes préfigurent un début de fiscalité locale en confiant la responsabilité exclusive de
trois impôts directs à la Province et en affectant l’impôt personnel minimum au profit
exclusif des communes, secteurs et chefferies. L’essentiel des ressources fiscales reste dans
l’escarcelle étatique. Une réforme est à l’étude ;
La difficile répartition des produits de la fiscalité entre provinces et ETD. La constitution
de 2006 instaure un quasi-fédéralisme de Provinces sans remettre en cause la centralisation
des financements des ETD. C’est maintenant au niveau de la Province que seront définis
les mécanismes de répartition des recettes rétrocédées ou cédées entre ETD d’un même
territoire provincial, enjeu crucial de la gestion locale ;
La rigidité du système hiérarchique de l’administration congolaise : les agents affectés
dans les divisions provinciales, puis urbaines, puis services doivent respecter la grille
hiérarchique en vigueur. Ce qui fait que les agents affectés à des services provinciaux, et
surtout ceux affectés aux services urbains, même pour des villes importantes, n’ont ni la
marge de manœuvre ni les compétences nécessaires ;
L’attente d’élections locales : les élections locales n’ayant pas encore été organisées, les
Villes sont dirigées uniquement par un Maire et un Maire adjoint, nommés par Décret
Présidentiel. Le Conseil Consultatif Urbain ne sera mis en place qu’avec les élections ;
cette situation, qui perdure depuis 1997, fragilise la Ville, notamment vis-à-vis de la
Province dont l’assemblée délibérante a été élue en 2006 et le Gouverneur en 2007.
proposant des actions pour réformer le système et, à terme, refondre les textes de loi
relatifs au foncier, afin de mettre en place des procédures plus simples et adaptées.
des constructions en hauteur, sur plus de deux niveaux, phénomènes encore plus
rares dans les villes de cette taille et contraire à la culture du pays affichée dans
les autres provinces. Se pose aussi le problème de ces quartiers, construits sur des
pentes fortes et érosives, sans équipement, sans voies d’accès, et dont les habitants
pourtant ont des titres de propriété délivrés par les autorités.
Les enquêtes menées par CIMA en 2006 indiquent également que, contrairement
à ce que l’on pourrait croire, il ne se pose pas un problème de capacité du réseau,
ce qui semble confirmé par l’évolution de la situation consécutive aux récents
aménagements : la circulation est principalement ralentie par l’état des chaussées,
l’indiscipline des usagers et l’influence néfaste des activités riveraines le long de
certains axes.
L’exemple ci-dessus et diverses analysent montrent également que, dans la plupart des
villes, la demande est en fait contrainte par l’offre, tant en termes quantitatifs que de coût
du service.
malgré ses 8 millions d’habitants, ne dispose que de 4 véritables marchés, les nombreux
autres espaces marchands étant, pour l’essentiel, constitués de simples points de
regroupements, squattant des espaces publics, sans la moindre commodité.
En particulier, les activités de vente en gros s’exercent dans des conditions difficiles,
qui renchérissent le coût des produits et, au final, pénalisent les consommateurs finaux
comme les producteurs ruraux. L’absence ou l’insuffisance d’équipements de stockage,
les mauvaises conditions de conservation, le manque de place pour le stationnement des
véhicules et les opérations de chargement/déchargement, les problèmes d’hygiène et
d’insécurité sont généraux. Le débordement ou tout simplement l’exercice des activités
de gros sur la chaussée sont sources de nuisances multiples.
La déperdition des marchandises est élevée au niveau des marchés de détail et
contribue au renchérissement des produits aux consommateurs.
Au total, ce déficit en équipements à l’échelle urbaine engendre une série de coûts
économiques :
L’occupation des emprises et le désordre dans lequel fonctionnent les marchés
d’approvisionnement et de redistribution créent d’importants dysfonctionnements de
circulation qui renchérissent les coûts d’exploitation des véhicules ; le désordre dans lequel
fonctionnent les marchés complique la perception des droits et pèse sur les rendements
de l’équipement et les possibilités d’entretien ; la dégradation continue du service fourni
rend de plus en plus difficilement acceptable par les opérateurs les réajustements des
tarifs ; les conditions d’hygiène désastreuses engendrent probablement des coûts de
santé.
228
Il n’y a donc pas, à proprement parler, de stratégie urbaine. Mais, comme on le voit, ces
axes d’intervention et les actions qui y sont associées, ont le mérite d’exister, de répondre
à certaines préoccupations évoquées ci avant et, surtout, de n’être en contradiction avec
aucune d’entre elles.
Les contraintes
Au regard du contexte ci-dessus décrit et de l’histoire récente du Congo, il est évident
que l’environnement reste porteur de nombreuses contingences qui constituent des
facteurs limitatifs.
234
urbaine du Congo, afin de déterminer son impact sur la croissance à l’échelle du pays.
En l’absence de ces données, le choix des villes d’intervention et la définition des actions
prioritaires à réaliser dans chacune d’entre elles risquent de relever de l’arbitraire. Face
à l’ampleur des besoins à satisfaire à l’échelle du pays, une allocation non optimisée des
ressources serait un frein majeur pour le développement économique du pays tout entier.
Au regard de l’architecture institutionnelle du pays et des capacités limitées des
institutions chargées de la gestion urbaine, la structure la plus appropriée pour accueillir
un tel système est probablement le Bureau d’Etudes d’Aménagement et d’Urbanisme
(B.E.A.U.), qui est une structure rattachée au Ministère des Infrastructures, mais qui
assure une interface efficace avec le Ministère de l’Urbanisme. Pendant les années 1970 et
1980, cette structure a réalisé de nombreuses études d’urbanisme et d’aménagement du
territoire au Congo, grâce à un important appui financier et technique de la Coopération
française. Malheureusement, elle n’a pas résisté au difficile contexte traversé par le pays
ces dernières décennies ; les programmes ont été suspendus et les locaux ont été victimes
de pillages au cours desquels l’essentiel de la documentation a été perdu.
Avec l’appui de l’Agence Française de Développement et de l’Union Européenne,
le B.E.A.U. vient de voir ses locaux réhabilités et dispose désormais d’un atelier de
cartographie numérique entièrement équipé. Ces moyens lui permettent de se redéployer,
en particulier sur Kinshasa où, grâce au SIG produit par la Coopération Japonaise
( JICA), il apporte une importante contribution aux études de préfaisabilité de projets
(« 5 Chantiers »). La réputation établie et la place que cette structure a toujours occupée
dans la gestion urbaine au Congo font qu’il apparaît bien placées pour développer un tel
système, à partir de l’embryon existant, puisqu’il jouit d’une légitimité certaine auprès
de la plupart des acteurs du secteur.
Toutefois, il s’agira de rester réaliste, en collant au plus près de la réalité du pays et aux
besoins immédiats des utilisateurs des données, sans viser tout de suite des niveaux de
complexité sans rapport avec les capacités de gestion. Ainsi, cet observatoire des villes 24
pourrait s’attacher prioritairement à collecter, traiter et restituer les données sur les
aspects ci-après, d’abord pour les principaux pôles démo-économiques régionaux puis
pour les centres de moindre importance :
• géographie : élaboration de fonds de plans (« croquis urbains ») à partir des
images satellites complétées par de légères enquêtes au sol ;
• infrastructures : numérisation des linéaires des réseaux de voirie, électricité et
eau potable, transport public, dispositifs de collecte des ordures ménagères, puis
progressivement données numériques sur leurs caractéristiques (état, dimensions
etc.) ;
• équipements : localisation des écoles, centres de santé et autres, avec si possible,
données numériques sur leur niveau d’occupation ;
• démo-économie : population par quartier, budget de la commune, mais aussi
investissements publics et poids économique.
236
Pour cela, il s’agira principalement, dans un premier temps, d’acquérir les images
satellite des villes et d’en faire une restitution ; celles fournies par google earth sont
suffisantes dans un premier temps. Par la suite, il faudra collecter des données existantes
auprès des organismes qui sont en charge de les produire de manière régulière (autres
administrations, communes, concessionnaires des réseaux, agences d’exécution de
projets, établissements publics etc.), les mettre en cohérence et les traiter pour assurer le
suivi de l’évolution des indicateurs clés. Il s’agira donc plus de mettre en place un système
d’information commun entre le B.E.A.U. et les principaux producteurs de données au
niveau des secteurs public, parapublic et privé. En fonction des moyens disponibles, un
« Atlas des villes de la RD Congo » pourrait être produit, à une périodicité biennale.
Cela nécessitera probablement une assistance technique temporaire au B.E.A.U. ainsi
qu’aux fournisseurs de données pour que ces derniers produisent régulièrement celles
nécessaires au système d’informations sur les villes et la gestion urbaine.
En ce sens, les décideurs doivent disposer d’outils pouvant leur permettre de faire des
choix cohérents dans l’espace et dans le temps, avec une vision prospective, fixant des
objectifs à moyen et long termes, ainsi que la recherche d’actions concrètes à mettre en
œuvre rapidement.
Pour les villes de plus d’un million d’habitants, et en particulier Kinshasa et
Lubumbashi où les enjeux sont importants, il sera indispensable d’avoir recours à des
outils élaborés du type Plan des Déplacements Urbains.
(Fonds National d’Entretien Routier). Si cet organe, lorsqu’il aura atteint sa vitesse de
croisière, sera un élément pivot de l’entretien routier, il n’en demeure pas moins qu’il est
d’abord destiné aux routes interurbaines.
De ce fait, la part qui revient à l’entretien des voiries urbaines devra être gérée
judicieusement, la tentation étant en général forte, dans un contexte de pénurie comme
c’est le cas ici, d’utiliser cette ressource pour la réhabilitation, voire des constructions
neuves. Il apparaît donc urgent d’ouvrir un champ de réflexion sur les modalités
d’affectation de cette ressource aux centres urbains : clé de répartition entre les villes,
réseaux privilégiés à l’intérieur des villes, types d’intervention etc. En tout état de cause
donc, dans les villes, l’éventuelle dotation du FONER devra simplement être utilisée
pour amorcer le dispositif d’entretien, des moyens propres devant être mobilisés pour
l’entretien.
Améliorer la réglementation et la régulation
Les infrastructures et en particulier la voirie ne doivent pas être considérées comme une
finalité, mais plutôt comme le support d’un service qu’il faut réglementer et contrôler.
Les interventions sur l’offre en infrastructures, si elles sont indispensables, ne seront
malheureusement pas suffisantes pour atteindre les objectifs de réduction de la durée et
du coût des déplacements. Contrairement aux apparences, le taux de motorisation dans
les centres urbains du Congo reste relativement bas, la mobilité (motorisée) limitée,
par rapport aux autres villes africaines. C’est que, ici comme ailleurs, la réglementation
et la régulation des transports publics sont indispensables car les gains attendus des
importants travaux en cours risquent d’être substantiellement réduits par les différents
désordres observés dans la circulation. Ces désordres, en pénalisant l’ensemble des
usagers et opérateurs économiques, réduisent la capacité des transporteurs à s’investir
pour moderniser leurs moyens. Même sans action sur l’offre en voiries urbaines, une
meilleure réglementation et une régulation des activités de transports permettraient de
limiter les effets néfastes de la concurrence sauvage que se livrent les artisans.
Il est dès lors indispensable d’agir sur les plans réglementaire et institutionnel. L’accès
à l’exercice de cette profession devrait être réglementé avec la mise en place d’un système
d’autorisations dont le renouvellement serait conditionné par le respect d’un cahier de
charges.
Les règles de circulation devraient également être revues, en accompagnement des
aménagements sur la voirie, pour accorder la priorité aux véhicules de transport de masse,
en particulier au niveau des carrefours.
La réglementation n’a de sens que s’il y a une autorité pour la faire respecter. En ce
sens, il apparaît urgent de mettre en place, au niveau de chacune des grandes villes, une
structure chargée de l’organisation et du contrôle. Celle-ci serait chargée de l’analyse
des besoins, de la définition du réseau (plan des déplacements ou de circulation), de
la répartition du marché (attribution des lignes de transport), du contrôle de l’accès
245
Un nouveau modèle de croissance pour Kinshasa devrait être fondée sur deux
objectifs principaux: (i) permettre le retour des activités à haute valeur ajoutée et créatrices
d’emplois et, (ii) se focaliser sur la lutte contre la pauvreté urbaine, la décroissance du le
chômage et du sous-emploi.
Concernant le premier objectif, plusieurs volets pourraient être développés. Un
premier volet pourrait se concentrer sur l’augmentation des activités urbaines à haute
valeur ajoutée; un second sur le rétablissement de la position historique et centrale de la
ville, au cœur d’un système d’investissement, de production, de transport et de circuit de
commercialisation et d’exportation de produits d’origine rurale – un retour au modèle
de croissance du pole-réseau.
Concernant le premier volet, il y a d’importantes opportunités d’investissement dans
les industries de substitution aux importations, onéreuses, hautement consommatrices
en infrastructure et créant peu d’emplois. Les premiers signes de cette dynamique sont
visibles, mais à très petite échelle. Les obstacles aux investissements et à la rentabilité des
opérations commerciales sont trop élevés. Ce fait est largement documenté. Cependant,
une orientation concertée vers les industries de substitutions aux importations pourrait
produire d’énormes bénéfices: investissement, emploi, ressources fiscales, prix à la
consommation moins élevés et réduction du déficit commercial résultant d’une rétention
croissante de la rente minière, etc.
Une telle orientation pourrait générer de la valeur ajoutée significative et inverser
en partie le caractère non viable du paradigme économique de la métropole. Cela
pourrait également servir de catalyseur au redéveloppement de la culture industrielle,
au développement des compétences, à la création d’une culture entrepreneuriale et
industrielle, formelle et structurée. Développé sur le principe des pôles de croissance,
cette orientation pourrait permettre de cibler les efforts d’infrastructures à consentir, et
améliorer le climat des affaires en général. Cette orientation pourrait permettre d’obtenir
des résultats significatifs à court terme, compte tenu du volume du marché intérieur et la
perspective de marges élevées.
Le second volet est orienté vers le développement progressif d’une agriculture à la fois
exportatrice et capable de répondre à la demande intérieure. Cet effort devra s’inscrire
dans la durée, est à l’échelle d’une génération et doit être mené avec prudence ; il exige
la remise en marche préalable du système de transports, et des efforts d’investissement
public importants et une amélioration sensible du climat des affaires. Des projets
pionniers dans la région de Bandundu et dans l’Equateur ont montré qu’il est possible
de rétablir l’agriculture formelle, mais les risques sont encore élevés. Une économie
rurale prospère créerait de nombreux avantages pour Kinshasa comme pour le monde
rural: (i) elle apporterait la renaissance du secteur agro-industriel de Kinshasa; (ii) elle
permettrait de fixer la population rurale à travers l’augmentation de l’emploi, notamment
247
Bukavu
Comme Kinshasa, Bukavu a besoin de prendre une nouvelle perspective de terme de
croissance. La ville est incapable de s’auto suffire, et n’a pas les opportunités de rente que
possède Kinshasa. Si la rétrocession va certainement améliorer les revenus de la ville, cela
ne changera pas cette donne.
A l’inverse de Kinshasa, et vue la taille réduite de son marché, la ville ne dispose
pas d’importantes opportunités d’industrialisation, à l’exception du secteur limité et
spécialisé de l’agro-industrie (transformation du thé, du sucre et du café, entre autres).
Le développement de Bukavu repose sur la reconstitution de ses relations avec une
économie rurale revitalisée. Cela est essentiel pour deux raisons principales: (i) d’abord,
Bukavu n’est pas en mesure de fournir le foncier, les emplois et les revenus requis par sa
population, dont une grande partie pourrait bénéficier d’un retour à la vie rurale; (ii)
deuxièmement, la ville elle-même tirerait d’important bénéfices à redécouvrir son rôle
de centre agricole et agro-logistique.
A cet égard, la ville représente une opportunité unique pour l’ensemble de la
province. Elle a servi de refuge pour le Gouvernement et les forces de maintien de la
paix des Nations Unies. A partir de Bukavu, la sécurité s’est progressivement améliorée
aux abords de la ville, et principalement au long des routes principales. La tendance au
redémarrage économique à proximité de Bukavu et le long de ces routes est manifeste.
En effet, la conjonction de la sécurité et de l’amélioration des infrastructures a conduit
de manière visible à redynamiser les communautés rurales. Tout aussi crucial, le retour
progressif de la distribution des produits agricoles agit comme catalyseur des tentatives
de relance de l’économie rurale dans ces zones.
248
Le volet import-substitution
Un élément central de cette stratégie serait la création de pôles de croissance industrielle
appuyés par:
• Une infrastructure et un environnement commercial amélioré mettant en relation
les villes pilotes aux points d’entrées et de distribution ; c’est-à-dire d’abord
Kinshasa, puis d’autres villes, avec une approche graduelle. Cela reviendrait à
réduire progressivement les goulots d’étranglement le long de l’axe stratégique
de Matadi-Kingabwa-Limete, en ouvrant également la route vers la future zone
économique spéciale de N’Sele. Cette composante devrait faire partie du pôle de
croissance industrielle, mais ne devrait pas être la seule. Kingabwa et Limete ont
une longue vocation industrielle qui bénéficie d’activités déjà existantes, d’une
main d’œuvre déjà en place, et d’une liaison directe au port de Kinshasa. Pour la
plupart des entreprises déjà existantes qui pourraient jouer un rôle dans le pôle de
croissance industrielle, N’Sele est une option, mais elle ne devrait pas être la seule.
L’électricité reste une priorité majeure. Des solutions à court et moyen termes
devront être trouvées.
249
2 000 emplois directs à court terme sans compter les emplois indirects. Du point de vue
des recettes de l’Etat, cette diminution des droits et taxes pourrait être compensée par
l’augmentation des volumes de marchandises produites et commercialisées.
Le financement est également un facteur déterminant, compte tenu des moyens
limités et du coût des investissements à engager à Bukavu. La clé du succès de cette
stratégie repose sur une collaboration efficace entre les différentes parties prenantes au
développement de Bukavu comme pôle de croissance agricole: (i) le secteur privé; (ii) les
communautés; (iii) les organisations non gouvernementales; et (iv) le Gouvernement.
Pour que cette stratégie soit un succès, la collaboration de l’ensemble des partenaires est
nécessaire, chacun apportant son savoir-faire et ses ressources. Cette approche conjointe
devrait progressivement générer une appropriation partagée et réduire le risque de
capture des bénéfices par certains au détriment des autres. Le Gouvernement a un rôle
de régulateur à jouer ; il doit apporter les infrastructures, améliorer l’environnement
administratif pour encourager les investissements et offrir des conditions favorables à la
croissance. Concernant le secteur privé, on attend qu’il investisse de manière responsable
et développe des partenariats exemplaires, sources de croissance. Pour les communautés,
il s’agirait qu’elle fournit la main d’œuvre, pour passer d’une économie de subsistance
à une économie génératrice de marges et de bénéfices. On attendrait des ONG qu’elles
appuient les communautés sur la durée, en offrant des formations, en renforçant les
compétences, etc.
Dans le cadre de la stratégie des pôles de croissance agricole, ces mesures pourraient
être rapidement mises en œuvre avec le « pôle de croissance prioritaire de Bukavu et
de son hinterland », correspondant aux zones actuellement sécurisées où la production
existe et où les effets de ces mesures pourraient être évalués après une période de 2 ans à 2
ans et demi. Une stratégie de développement du tourisme pourrait être intégrée au pôle
de croissance agricole prioritaire, compte tenu du vaste potentiel que représentent le lac
Kivu et le Parc national de Kauzi-Biega, refuge des gorilles et des éléphants, et dans la
frange Est a ont été en grande partie sécurisée.
Bukavu
Au niveau de Bukavu, plusieurs axes sont envisageables :
• le renforcement de la relation avec l’hinterland à travers une amélioration des
voies de communication en général et du réseau routier en particulier ;
• le renforcement des relations internationales via la Tanzanie (route d’Uvira puis
transport sur le lac Tanganyika) et le Rwanda (route) ;
• l’amélioration de l’accès aux zones d’activités économiques de la ville et en
particulier aménagement/réhabilitation de la route de la zone industrielle qui
dessert également le grand marché de Kadutu.
252
Disposer de l’information pertinente est essentielle pour permettre des prises de décision
responsables, en bonne connaissance de cause. L’initiative de rassembler et de présenter
en un document synthèse, le diagnostic de la problématique du développement urbain en
R.D.C. ne peut être que bien accueilli et correspond à une attente, en tant que référence
devant servir de justification au choix des actions à entreprendre. Ce rapport a le mérite de
traiter du phénomène urbain en RDC dans toutes ses facettes, en privilégiant l’économie
comme porte d’entrée, et en touchant aux aspects d’aménagement du territoire, de la
décentralisation et du développement local qui y sont liés.
L’approche territoriale consistant à articuler la programmation des investissements
publics dans une perspective qui distingue le monde rural du monde urbain est une
pratique nouvelle qui complète l’approche purement sectorielle utilisée jusque là, comme
axe de répartition des masses budgétaires (secteur agricole, transports et communications,
énergétique,…).
Elle est intéressante dans la mesure où elle permet d’inscrire la planification
économique dans une vision spatiale, compatible avec la politique de décentralisation en
cours d’expérimentation en RDC, et dans laquelle la Ville émerge comme centre d’intérêt,
une entité autonome vivante et vivifiante, rayonnant sur l’espace rural environnant où elle
assume le rôle moteur d’animation du développement intégré.
Ce rapport, dans ses constats établis et les solutions préconisées, contient des faits
qui s’affichent comme des constantes, bien en phase avec les conclusions et projections
de nombreuses études antérieures menées par le B.E.A.U.; les problèmes majeurs relevés
demeurent sensiblement les mêmes, mais se sont amplifiés au fil des années pour cause
d’inaction et laisser faire, des principaux acteurs que sont, la population, les gouvernants
et les partenaires financiers internationaux. Une telle inaction ne peut se prolonger
indéfinitivement sans susciter des réactions appropriées.
Ce constat, dans le volet qui traite du fait urbain, dans une perspective d’aménagement
du territoire, souligne l’existence d’une armature urbaine diffuse sur le territoire national,
en omettant de souligner que la plus part de ces centres, n’ont de ville que le nom, et
sont dépourvus des fonctions essentielles qui confèrent à une entité le statut d’une ville
véritable. Bien plus, ces centres nombreux et d’importances très relatives, ne constituent
pas « un réseau urbain » interconnecté qui fonctionne. A l’image de l’espace physique
congolais dont la caractéristique principale est d’être écartelée par manque d’un réseau
routier national intégrateur, ce sont des ilots de concentration humaine relative, sans
254
activités économiques et sans équipements, reflet de la grande pauvreté qui accable nos
populations.
Les besoins ressentis et exprimés dans le secteur urbain sont énormes et bien connus.
Ils nécessitent des solutions urgentes et une mobilisation des ressources financières
conséquentes. Tout est prioritaire, tout est urgent. Vouloir tout faire à la fois est le meilleur
moyen de ne rien réussir de consistant.
Le plan d’action qui se dégage de l’analyse est cohérent et susceptible d’apporter
quelques améliorations sur certains aspects de la situation décrite, à condition que l’Etat
joue son rôle d’aiguilleur et de régulateur du développement urbain, et que soient prises
des mesures d’intervention ambitieuses, à la hauteur des problèmes posés. L’urbanisme est
en effet, un secteur d’activité où l’intervention de la Puissance Publique est primordiale,
particulièrement en période de crise, en agissant soit directement soit au moyen des mesures
incitatives impliquant des partenaires bien identifiés.
• Toutes les actions préconisées sont importantes au regard des effets attendus,
mais les ressources qu’elles requièrent varient ; les financements lourds reviennent
aux infrastructures et équipement de viabilisation des sites, ceux touchant à
l’organisation, à la conception, à la réglementation et à l’information représentent
des coûts moindres. Ces dernières peuvent donc être privilégiées comme
interventions amont, prioritaires et indispensables.
• Quelles que soient les raisons que l’on puisse faire prévaloir, la priorité des priorités
aujourd’hui s’appelle « AGIR ». Le diagnostic est suffisamment connus ; on
ne peut admettre que le Congo demeure un des rares pays, pourtant réputé pour
la croissance spectaculaire de sa population urbaine, à n’avoir jamais bénéficié
d’un projet urbain d’envergure, financé par la Banque Mondiale et portant
sur des composantes multiples et essentielles telles que le logement, le foncier,
l’assainissement, la planification urbaine etc.
• La priorisation des actions à entreprendre est nécessaire ; elle devrait tenir compte de
la hiérarchie des besoins ressentis et exprimés par la population et ses gouvernants,
en tant que sujets des besoins et agents de la mise en valeur. Il y a lieu d’y distinguer
celles liées à la fonction planification spatiale, réglementation de la construction
et de la gestion du foncier, pour maîtriser l’épineux problème des constructions
anarchiques, et celles plus onéreuses touchant aux équipements et infrastructures
de première nécessité (eau, électricité, transport urbain et son corolaire, la voirie,…).
Enfin, au plan organisationnel, se pose la question des outils de mise en œuvre du plan
d’action sur lesquels il faudra s’appuyer. Une évaluation sérieuse du secteur dans ce
255
domaine nous semble capitale pour prendre la réelle mesure des carences et en sortir un
programme de valorisation et de mise à niveau des ressources humaines et matérielles,
ainsi que de formation aux nouveaux métiers de l’urbanisme, thème non suffisamment
abordé dans le rapport. Des structures existent qui détiennent un potentiel à exploiter et à
promouvoir, telles que le B.E.A.U., souvent cité comme point d’appui solide pouvant servir
de rampe de lancement, de creuset d’animation et de coordination d’un vaste programme
de développement urbain concerté à plusieurs composantes, qu’il faut engager tout de
suite afin de rattraper le temps perdu.
256
Notes
1. Réappropriation nationale de l'économie au travers d'un retour à l'authenticité culturelle et à la
nationalisation des biens et des terres.
2. Cf. Ulloa, Kast and Khekhe, non-publié.
3. A la fin de 1995, le gouvernement devait US$ 217 millions à la SNEL (électricité) et US$ 156 millions à la
REGIDESO (Eau). Gécamines, REGIDESO et les autres entreprises publiques devaient US$ 152 millions
à la SNEL.
4. Le Schéma National d’Aménagement du Territoire de 1982 reposait d’ailleurs sur un réseau structurant
organisé autour de 3 métropoles d’influence (Kinshasa, Lubumbashi et Kisangani), 4 centres régionaux
(Matadi, Kananga, Mbuji-Mayi et Bukavu), 9 centres sous-régionaux ainsi que 13 autres localités. Il n’a pas
connu d’application.
5. Dans PMPTR en RDC - 2004
6. Au moins 800 m², avec une prédominance de 1 200 m². Ces parcelles sont par la suite subdivisées et
revendues en lots, constituant ainsi des îlots de promiscuité.
7. Document d’évaluation du “Regional and Domestic Power Markets Development Project” (Southern
African Power Market Program), Banque mondiale, 2007
8. Les données sur la localisation sont issues du rapport final de « l’Etude de Faisabilité pour la Zone
Economique Spéciale Pilote en République Démocratique du Congo », Analyse de la demande, 14 avril
2010, IFC & World Bank.
9. Pain écrit en 1984 que: « Au delà du schéma classique d’une grande ville tropicale, on méconnaît le
vrai visage de Kinshasa. Ce qu’on dit de la capitale du Zaïre reste le plus souvent le fait de témoignages
étroits et partiels dont la formulation prouve l’ignorance des faits essentiels (…). On sait peu de choses
finalement sur la pauvreté et les efforts du plus grand nombre pour subsister sur la vie quotidienne, si
abusivement simplifiée par ceux qui ne la vivent pas » (page 5). Plus récemment, Freund écrit: « Kinshasa
est une ville particulière, dont le fonctionnement est particulièrement difficile à comprendre. D’un coté,
la ville continue d’être le lieu ou l’Etat congolais exerce sa présence, de manière problématique en termes
politiques. L’Etat continue d’être présent pour délivrer les titres de propriété, imposer une bureaucratie,
et injecter des revenus, y compris des revenus émanant de l’extérieur du pays. Kinshasa a un rôle clé de
transit et de communication pour l’Ouest du pays. L’aide extérieure implique une multitude de personnes.
Un nombre croissant de congolais, vivant hors du pays comme dans les provinces aspirent à posséder une
propriété à Kinshasa. La ville a les meilleurs services en termes de santé et d’éducation, tout comme le
meilleur accès aux produits importés. Malgré cela, la logique du fonctionnement économique de Kinshasa
est difficile à comprendre. Un cliché répandu est que les gens arrivent à subvenir à leurs besoins dans cette
ville de manière mystérieuse» (Page 17).
10. Jean-Louis Lacroix, 1967.
11. Basé sur plusieurs sources dont l’Enquête 1-2-3, PNUD 2009, et Shapiro et al.
12. UCLG 2007 « Support paper on local finance » et « dynamics of urban expansion »
13. D’autres méthodes, davantage axées sur la réalité des besoins par pays, peuvent être citées : méthode AICD
ou encore évaluation développée à partir des données UN-Habitat sur le traitement des slums et les besoins
de financement liés aux extensions urbaines.
14. Mouvement Populaire de la Révolution.
15. Cf. Rapport de mission préparatoire, Groupe Huit, mars 2009.
16. Alimentation en eau et assainissement – OTUI – LCHF – BIRD/PNUD
17. Les développements faits ici sont largement inspirés des rapports phase 1 (proposition de solutions) de
l’« étude de réforme du cadre institutionnel des transports urbains en République Démocratique du
Congo ». CIMA International, avril 2006. Programme Multisectoriel d’Urgence pour la Réhabilitation et
la Reconstruction (PMURR).
257
18. La plupart des villes africaines se situent autour de 1 déplacement/jour/personne. Il s’agit de déplacements
motorisés, y compris en deux roues. Ouagadougou présente l’un des taux les plus élevés, en raison de la place
faite aux deux roues dans cette ville.
19. « Satisfaction des besoins de mobilité : Enjeux sociaux, économiques et politiques - Cas du phénomène des
passagers non payants dans le transport en commun à Kinshasa en République Démocratique du Congo »,
Venance WOTO NDJONDO, 2008
20. ONATRA, Département des Chemins de fer, Direction des Chemins de fer urbains, « Rapport d’activités
2008 », Kinshasa, Janvier 2009, p.4.
21. D’une manière générale, on y dénombre plusieurs marchés aménagés et leur distribution est plus équitable
sur le territoire de l’agglomération. Situés pour la plupart aux entrées de la ville, ils sont commodes pour le
monde rural en même temps qu’ils gênent peu la circulation.
22. Extrait du rapport « Plan de Gestion pour le Développement Urbain de Fungurume », TFM, réalisé par
GROUPE HUIT, novembre 2009.
23. Programme d’Assainissement Urbain de Kinshasa.
24. Il pourrait être dénommé CIVIC : Centre d’Information sur les Villes du Congo.
25. La politique du « réseau prioritaire » sur lequel on concentrerait les moyens suppose que ceux-ci soient
suffisants pour réaliser un entretien « normal ». Or, dans la plupart des cas – et ce sera probablement le
cas au Congo, ceux-ci sont insuffisants. Résultat : non seulement la part en « bon état » sur le réseau dit
prioritaire stagne voire régresse, mais surtout le « non prioritaire » est à l’abandon.
26. Tous les itinéraires seraient caractérisés à partir d’un indice de circulation, qui pourrait être défini pour
un véhicule type (même le camion dans un premier temps) comme suit : NS0 : Interrompue de façon
permanente, NS1 : Interrompue de façon momentanée, NS2 : Pas d’interruption mais gêne permanente;
NS3 : Pas d’interruption mais vitesse réduite ; NS4 : Ni interruption ni gêne particulière. En raison de la
modicité attendue du trafic, on ne viserait pas des niveaux de confort très élevés (le NS3 serait un maximum,
le NS4 étant réservé aux routes nationales en terre).
27. A Kinshasa, ce serait plutôt entre l’Etat et la Province.
28. A titre d’exemple, en ce qui concerne Kinshasa, il n’est pas certain que l’élargissement de certaines voies soit
justifié, tout au moins du point de vue de leur capacité.
29. On citera à cet effet les villes de Douala et Yaoundé, qui ont mis sur pied chacune son « Compte d’Entretien
Voirie », sorte de fonds routier local, alimenté à hauteur d’un minimum de 15% de leurs ressources.
258
"Citation : Mario Jametti, Paul Tshiula Tshimanga et Salim Malouf, 2012, “ La construction :
un goulot d’étranglement économique pour l’avenir ”, dans Johannes Herderschee, Daniel Mukoko
Samba et Moїse Tshimenga Tshibangu (éditeurs), Résilience d’un Géant Africain : Accélérer la
Croissance et Promouvoir l'Emploi en République Démocratique du Congo, Volume II : Etudes sectorielles,
MÉDIASPAUL, Kinshasa, pages 259-306.
Cet chapitre a été préparé dans le cadre des travaux d’analyse de la Banque Mondiale autorisés en vertu
du code P106432-ESW pour « la préparation d’une étude Diagnostique d’Intégration du Commerce et
un Mémorandum Economique du Pays ». Les remerciements aux pages xxii-xxv de ce volume assurent
la reconnaissance aux nombreux collègues, experts et participants des séminaires qui ont généreusement
contribué à cet article de leur temps et de leurs idées; toutes les erreurs restantes sont celles des auteurs.
Copyright © 2012 La Banque Internationale pour la Reconstruction du Développement/ La Banque
Mondiale conformément à l’information de la page iii de ce volume."
259
Chapitre 4
La Construction : un goulot
d’étranglement économique
pour l’avenir
Mario Jametti, Paul Tshiula Tshimanga et Salim Malouf
Sommaire
Le secteur de la construction représente, actuellement, environ 8 % du PIB en RDC.
Il a contribué, pour plus que la moyenne de tous les secteurs, à la croissance économique
depuis le début de la décennie. Cependant, cette croissance a quelque peu ralenti au cours des
dernières années.
Le secteur est fortement concentré. Un sous-échantillon des compagnies de construction,
incluant deux compagnies chinoises exécutant la plupart des contrats « infrastructures contre
ressources », implique un indice Herfindahl de l’ordre de 1700, un nombre généralement
considéré comme étant anti-compétitif quant à la concentration des marchés.
Les entreprises nationales sont petites quant aux standards internationaux. Nous
n’avons identifié que deux compagnies actives au niveau national. En outre, il y a quelques
compagnies régionales qui existent depuis quelques années et une multitude de PME qui se
retrouvent dans une situation très précaire.
Nous avons constitué une base de données à partir de dossiers d’appels d’offres de
travaux publics. Nous mesurons la pression concurrentielle par le nombre de participants
aux appels d’offres et l’étendue des soumissions. En réalisant une analyse de régression, où
nous pouvons contrôler pour des effets fixes par type de projets, nous avons découvert que le
nombre de soumissionnaires diminue le prix de l’offre retenue, quoique ce résultat ne soit pas
statistiquement significatif. Par contre, un plus grand écart des prix soumis, pour une même
offre, augmente de manière statistiquement significative le prix de l’offre retenue.
Du côté des intrants, nous nous concentrons sur le ciment. Ce marché est aussi fortement
concentré, car pratiquement toute la production nationale est entre les mains d’une
compagnie (Heidelberg Cement). Le prix du ciment est élevé comparativement aux prix
internationaux et les importations (du moins dans la région de Kinshasa) ne peuvent pas
exercer beaucoup de pression concurrentielle.
260
Le secteur public joue un rôle important dans le marché du ciment car il y maintient un
contrôle sur la quantité des importations. De plus, un comité, incluant des représentants des
producteurs nationaux, établit des prix planchers. Les importateurs ne peuvent pas vendre
en-dessous de ces prix. Essentiellement, le producteur national exerce un monopole de prix
limite.
Pour analyser la situation du facteur travail dans le marché de la construction, nous
avons réalisé une étude auprès de 42 représentants d’entreprises. Nous concentrant sur trois
emplois prédéfinis (gestionnaire des travaux, gestionnaire des stocks et maçon), nous avons
établi le niveau d’éducation et de formation demandé ainsi que les principales difficultés
liées à l’embauche et à l’exécution du travail.
Outre les difficultés généralement signalées, nous avons découvert que le secteur de la
construction souffre particulièrement d’un manque de main-d’œuvre qualifiée. En plus, les
entreprises ne souhaitent pas, ou n’ont pas les ressources nécessaires pour, offrir des formations
spécifiques aux employés. Le manque de main-d’œuvre qualifiée pourrait être résorbé par
l’établissement d’une politique sur celle-ci. Selon l’opinion de l’auteur, une issue importante
est de faciliter la formation en milieu de travail dans les sociétés, notamment par un soutien
favorisant les apprentissages. Contrairement à d’autres secteurs économiques, la formation
en milieu de travail joue un rôle essentiel en construction.
Quelques institutions sont impliquées dans l’organisation et l’exécution des travaux
publics. Nous avons résumé la situation de BCECO, actuellement le principal exécutant des
appels d’offres publics. Des initiatives considérables de renforcement des compétences ont déjà
été entreprises, mais ils subsistent d’importantes difficultés. Parmi elles, le fait que plusieurs
projets ne sont pas achevés ainsi que l’existence de sociétés fictives sans compétence technique
réelle.
Les recommandations de politiques pour favoriser un meilleur fonctionnement du
secteur de la construction concernent le potentiel de spécialisation des sociétés et la formation
de consortium pour des projets spécifiques. En effet, il n’y a quasi aucun sous-traitant dans le
secteur, ce qui est inhabituel.
Les offres publiques pourraient contribuer à favoriser la continuité des sociétés. En effet,
la forte rotation représente un important problème dans le secteur.
Le marché du ciment présente certaines particularités en vertu desquelles la
recommandation de politiques est une affaire intéressante. Il est important de noter que
la demande nationale actuelle ne permet pas d’avoir plus de deux producteurs œuvrant à
l’échelle d’efficacité minimale (EEM). De plus, des investissements ont été annoncés par
Heidelberg Cement pour le principal centre de production dans le bassin de Kinshasa.
Plutôt que de lourds investissements dans de nouvelles installations, une politique pour
favoriser la concurrence devrait envisager la libéralisation des importations et une étude sur
les investissements possibles dans CINAT, l’autre producteur national.
261
I. Introduction
Vraisemblablement, le secteur de la construction sera une des principales contraintes à la
croissance économique dans les années à venir pour l’économie congolaise.
L’objectif de la présente étude est de déterminer les principales contraintes
auxquelles ce secteur fait face et de mettre en place les discussions initiales quant aux
recommandations de politiques. Nous débutons (en section 2) avec un aperçu de l’état
actuel des affaires dans ce secteur à base d’informations disponibles. Dans la section 3, au
cœur de l’analyse, nous nous penchons sur quelques contraintes qui font entrave au plein
potentiel de développement du secteur de la construction. Nous traitons notamment :
la structure du marché et celle de la concurrence, le marché du ciment, le travail et le
capital humain, la capacité institutionnelle, le secteur officieux, ainsi que les standards et
régulations. Au cours du projet, nous avons assemblé deux bases de données. La première
contient des informations sur les appels d’offres de travaux publics dans les dernières
années et la seconde est une enquête sur les compétences et le capital humain. La section
4 présente les recommandations proposées et nous concluons à la section 5.
Ventes moyennes
Forme
Nom de la compagnie Ville (2003 — 2008) en
légale
millions USD
EGMF (Enterprise Générale
Sarl Lubumbashi 32,0
Malta Forrest)
Safricas Sarl Kinshasa 30,0
MW Afritec Sprl Kinshasa 20,0
Number One Contractors Sprl Kinshasa 14,0
Bego Congo Sprl Kinshasa- Kisangani 8,0
Sefoco Sprl Ingende 6,0
AVC Construct Sprl Kinshasa 3,0
Const - Soco (Groupe Ledya) Sprl Kinshasa 3,0
Enterprise Fretin Sprl Matadi 3,0
b. Intrants
Nous nous concentrons sur le marché du ciment. Alors que le ciment est en quelque
sorte un marché particulier (voir la section ci-dessous), il est un important apport au
secteur de la construction.
Le Tableau 4.2 présente les installations de production au pays. En ce moment, il y
a quatre installations existantes. Deux sont dans la province du Bas-Congo, une (non
opérationnelle) est dans la province de Katanga (au sud-est) et une (non opérationnelle)
est dans la province du Sud-Kivu.
265
Cimenterie du Non
n.a. Katanga <50
Katanga (CIMKAT) opérationnelle
Groupe Malta
Forrest (EGMF) Non
Cimenteries Interlacs Sud-Kivu <50
– Heidelberg opérationnelle
Cement
Source : Autorités nationales
n.a : non accessible
Les prix du ciment sont élevés en comparaison avec d’autres marchés à l’international, et
en comparaison à ceux d’autres pays d’Afrique (tel que montré dans le Tableau 4.4). Des
rapports indiquent que les prix en Zambie ont été réduits de près de 10 % depuis 2007.
Tableau 4.4: Comparaison Internationale des Prix du Ciment
Sac de 50 kg, 2007/082
Kenya 10,31
RD Congo 13,84
Zambie 18,57
Le Tableau 4.5 montre les prix dans différents points de vente à Kinshasa et à Brazzaville
pendant la dernière semaine d’août et la première semaine de septembre 2010. Nous
observons que le prix moyen est similaire dans les deux villes. De manière intéressante,
nous observons une variation des prix de près de 10 % à Kinshasa (de 15,38 USD à 16,85
USD), alors que la variation est de 46 % à Brazzaville (de 12,65 USD à 18,46 USD).
Cela peut indiquer une situation de haut degré de collusion dans le marché au détail en
RDC. Notez également que le ciment importé à Brazzaville, provenant de la RDC, est
près de 20 % ou 3 $US plus cher, ce qui indique un coût de transport considérable par
le fleuve Congo.
267
Moyenne 15,89
De même, le Tableau 4.6 représente la distribution spatiale des prix pour le ciment de la
RDC. Les différences de prix paraissent être conditionnées par les coûts de transport.
Pour illustrer cela, le tableau présente également les prix pour le carburant.
Tableau 4.6: Évolution Spatiale des Prix du Ciment
Corridor Kinshasa – Kabinda
Ciment
Carburant
Prix par sac
Ville Prix par litre
50kg
USD
USD
La Figure 4.3 montre l’évolution spatiale des prix du ciment pour le corridor Kinshasa –
Kabinda. La figure présente les prix par kilomètre pour un sac de ciment (50 kg)
pour chacun des segments identifiés au Tableau 4.6. Nous constatons la croissance
constante des prix unitaires le long du corridor, seulement interrompu pour le segment
(rails) Mweneditu-Mbujimayi. Il est certain que ces différences ne peuvent toutes être
expliquées par la seule qualité des infrastructures de transport.
Figure 4.3: Évolution Spatiale des Prix du Ciment
Prix par Km
Source : CILU
c. Économie politique
questions tant du côté des organisateurs des appels d’offres que du côté des sociétés
soumissionnaires. Le principal problème était l’existence de compagnies sur papier
ou fictives. BCECO était incapable de distinguer les compagnies opérationnelles
des compagnies non-opérationnelles. D’autre part, les sociétés qui voulaient
obtenir des contrats et qui étaient réellement en mesure d’accomplir les projets
manquaient de compétences en gestion de projets et d’actifs financiers. Plusieurs
projets furent donc entrepris avec de grandes difficultés et ne furent pas achevés.
Dans d’autres cas, les professionnels de BCECO ont dû prendre le gros de la
gestion du projet en main.
En réaction aux compagnies « virtuelles », la Banque Mondiale introduisit des
conditions financières strictes. Cela permit d’éliminer quelques-unes de ces
compagnies virtuelles.
Les principales entreprises en RDC sont détenues par des propriétaires étrangers et
opèrent dans un marché largement séparé. Elles dominent les ententes d’échange de
« ressources contre infrastructure essentielles». De plus, elles participent aux plus
importants appels d’offres (internationaux) et les obtiennent généralement. Ces sociétés
possèdent des avantages financiers significatifs par rapport aux compagnies qui opèrent
nationalement, ayant accès à des conditions financières favorables et à de la main-d’œuvre
qualifiée et bon marché. En effet, les compagnies chinoises travaillent essentiellement de
manière isolée. Elles importent tout leur équipement et tout ce dont elles ont besoin,
à l’exception de la main-d’œuvre non qualifiée. De plus, elles n’effectuent que très peu
de sous-traitance pour des travaux non spécialisés (nettoyage des sites et terrassement
manuels). En effet, quelques projets d’infrastructures essentielles incluent de manière
explicite la participation de compagnies locales de l’ordre de 20 %. Il n’est pas certain
cependant que ces ententes soient respectées, ni qu’il en résulte un transfert de
compétences au profit des compagnies locales.
D’un côté concurrentiel, puisque ce segment consiste en seulement deux compagnies,
il est peu probable qu’ils opèrent dans un cadre concurrentiel. Néanmoins, hormis des
considérations liées à la qualité des travaux (voir la Section 4), ces compagnies ont mené
des projets à des coûts très inférieurs à ceux de leurs concurrents.
Ensuite, il y a deux compagnies œuvrant nationalement, Malta Forrest et Safricas. Les
deux sociétés sont établies depuis longtemps dans le pays. Elles étaient originalement
financées avec des capitaux étrangers, auxquelles elles semblent toujours recourir pour les
grands projets. Ces deux compagnies dirigent à elles seules le secteur de la construction
nationale, avec une concurrence marginale pour les plus petits projets. Deux éléments
sont intéressants à noter pour une perspective d’organisation industrielle. Premièrement,
les deux compagnies œuvrent comme entrepreneurs généraux. En effet, les deux
compagnies fournissent des services complets pour leurs projets et n’engagent aucun
sous-traitant. Elles possèdent et bénéficient également d’importants équipements.
Deuxièmement, selon nos entrevues, les deux compagnies ont fortement réduit la
part des ventes provenant des travaux publics. Elles ont, toutes deux, de nombreuses
demandes du secteur privé, ce qui réduit grandement leur dépendance quant aux projets
publics. Notez que tant Safricas que Malta Forrest, participent régulièrement à des
273
appels d’offres de moyenne ou grande envergure (voir l’Encadré 4.2 ci-dessous sur les
projets du secteur privé et l’entrée dans le secteur)4. En conclusion, il faudrait noter que,
selon les standards internationaux, les deux principales entreprises nationales seraient
considérées, au mieux, comme des compagnies d’envergure moyenne.
Le fait que les plus grandes compagnies ont l’avantage concurrentiel d’être capables
d’éviter les sous-traitants démontre la fragilité de l’environnement contractuel, tant dans
le secteur de la construction que dans l’économie en RDC.
l’UNOPS, pour des projets récents aux autres Provinces. Malheureusement, nous ne
pouvons analyser la dimension temporelle avec les données dont nous disposons. Les
projets de BCECO vont de 2004 à 2006, alors que ceux de UNOPS vont de 2008 à
2010.
De plus, il n’a pas été possible d’assembler des informations sur les descriptions
des projets puisque cela aurait nécessité de retrouver des documents supplémentaires.
L’idée originale était d’utiliser les descriptions pour obtenir des mesures sur les coûts
unitaires des projets6. Malheureusement, cette partie de l’analyse n’est pas possible avec
les données dont nous disposons.
Le Tableau 4.8 illustre la distribution des appels d’offres par Province et par source7.
Des difficultés dans l’accès aux données expliquent la large concentration de projets dans
la région de la capitale8.
Tableau 4.8 : Distribution des Appels d’Offres par Province et par Source
L’accent a été mis sur la sélection de projets qui pouvaient être comparables. Après
discussion dans l’équipe du projet, nous nous sommes concentrés sur la construction
de bâtiments (publics) et de routes. Dans la base de données, nous avons distingué sept
types de travaux. La figure 4.5 illustre la distribution du volume de contrats pour chaque
type.
276
Finalement, le Tableau 4.9 présente des statistiques sommaires quant aux variables
principales de la base de données.
277
(1) Prix du contrat 107 987 985 3 234 469 3 435 15 500 000
(5) Plus basse soumission 106 994 424 3 275 380 2 608 15 900 000
(6) Plus haute soumission 106 1 652 756 5 252 427 4 255 28 400 000
(7) Moyenne de soumission 106 1 274 766 4 110 219 3 565 19 800 000
(8) Médiane des soumissions 106 1 220 207 3 954 137 3 625 18 300 000
Le projet moyen est d’un peu moins de 1 million de USD, se situant entre juste au-dessus
de 3 000 USD jusqu’à 15,5 millions de USD. Pour certains des projets de l’UNOPS
nous avons obtenu des informations quant au prix attendu par les organisateurs des
appels d’offres. Cela est résumé dans la variable « Prix de référence ». De plus, environ
10 sociétés participent en moyenne à chaque appel d’offres (lot), dans une gamme
allant de 3 à 35 soumissionnaires. Cependant, seulement la moitié des participants (5)
étaient qualifiés et concurrentiels. Notez que dans deux cas, un seul soumissionnaire a
été qualifié.
La base de données contient l’identification et le prix offert de chaque soumissionnaire
qualifié pour le concours. La plus basse soumission, parmi tous les participants, est
résumée dans la 5e rangée. Il convient de noter que la moyenne de la soumission minimum
n’est pas égale à la moyenne des soumissions gagnantes (= prix du contrat). En effet,
nous avons remarqué que pour 39 observations (sur un total de 107 = 37 %) le prix du
contrat est plus élevé que le prix le plus bas. Alors qu’il pourrait y avoir des explications
pour ces occurrences, nous n’avons pas été en mesure de déterminer la raison de cette
anomalie dans chacun des cas.
Finalement, les deux dernières rangées fournissent quelques indications des variations
entre les soumissionnaires pour un même appel d’offres. Le premier est le coefficient
278
de variation (CV) des soumissions (c.-à-d. le ratio de l’écart type et de la moyenne des
soumissions). Notez que le CV est petit en moyenne (0,32), ce qui indique une assez faible
variation dans les montants des soumissions. Le second est la dispersion des soumissions,
définie comme étant la différence entre la plus haute et la plus basse soumission comme
pourcentage de la plus basse soumission9. Une dispersion moyenne de 1,23 signifie que la
plus haute soumission est plus du double de la plus basse soumission. Une vaste dispersion
peut être interprétée comme réduisant la pression concurrentielle, particulièrement si les
différences ne peuvent être expliquées par les coûts10.
Un autre regroupement des projets peut être fait selon la taille de la soumission. Nous
avons défini les petits projets sous 150 000 USD. La figure 4.6 illustre la distribution des
prix des contrats pour de petits projets.
Idéalement, nous souhaitions utiliser la base de données pour analyser si les appels
d’offres pour les travaux publics en RDC sont concurrentiels ou non. Malheureusement,
l’information disponible ne nous permet d’effectuer cette analyse que partiellement.
D’abord parce que l’échantillon est très hétérogène et, ensuite, parce qu’il n’y a pas assez
de variables explicatives disponibles pour suffisamment contrôler les différences entre les
prix des contrats. Afin de régir quelque peu ces différences, nous avons créé une mesure
relative des prix des contrats :
279
Moyenne du contrat
Nous avons observé que le nombre de soumissionnaires qualifiés a un impact positif sur
le prix normalisé, ce qui ne confirme pas notre hypothèse. D’un autre côté, une plus vaste
dispersion de soumission augmente le prix tel que prévu.
280
Variable dépendante :
Erreur Erreur
Prix normalisé des Coefficient Coefficient
standard standard
contrats
Soumissionnaires
-0.001 0.010 -0.008 0.012
qualifiés
Dispersion des
0.140*** 0.014 0.133*** 0.016
soumissions
Constante 0.198*** 0.052 0.249*** 0.063
Nombre
99 69
d’observations
Il est clair que l’importation ne constitue pas une importante source de concurrence
dans le secteur du ciment en RDC. L’intervention importante du gouvernement
est largement dirigée vers la protection du producteur national. Les importations
peuvent difficilement être vues comme complètement libéralisées, tant à cause des
quotas sur les importations qu’à cause du prix plancher.
Il semblerait que le gouvernement ne serait pas à même d’imposer un prix plancher
fonctionnant dans la région de Kinshasa. Cependant, ce n’est pas le cas. Comme
discuté davantage ci-dessous, CILU administre essentiellement, avec l’appui du
gouvernement, la stratégie de limite des prix. Ainsi, le prix plancher (ou le prix
limite) représente le coût, prix assurance et transport compris, de ciment à Matadi
en plus du coût du transport jusqu’à Kinshasa.
Finalement, le ciment a un coût de transport relativement élevé. En RDC cela
est un problème particulier compte tenu de l’importance des difficultés dans les
infrastructures de transport. Cela signifie qu’il y a des différences géographiques
considérables à travers le pays. Principalement dans les régions éloignées qui sont
approvisionnées par le Bas Congo, où les prix peuvent être plus du triple de ceux
observés à Kinshasa (voir le Tableau 4.5 ci-dessus).
Les sociétés de l’échantillon sont assez jeunes. Comme le montre la figure 4.8, seulement
6 sur 39 ont été créées avant 1990 et plusieurs nouvelles sociétés sont apparues seulement
ces dernières années.
Les ventes moyennes signalées par les entreprises pour l’année 2009 s’élèvent à environ
1 million USD avec des variations importantes selon leur taille. Les plus petites sociétés
(ventes en 2009 d’environ 10 000 USD) sont 1 000 fois plus petites que les sociétés les
plus grosses (ventes de 10 millions USD). De même, les sociétés emploient en moyenne
un peu plus de 100 travailleurs, variant entre 20 et presque 800 employés. Ce qui a été
mentionné plus tôt est confirmé dans notre échantillon; les sociétés sont généralement
petites si on les compare internationalement. 31 % des sociétés de l’échantillon emploient
moins de 50 personnes, alors que 75 % d’entre elles en emploient moins de 100. 30 %
du personnel est en gestion (incluant les contremaîtres), alors que 23 % sont des ouvriers
qualifiés et que les 47 % restant sont non qualifiés.
Comme illustré, la plupart des salaires sont en dessous de 500 USD. En effet, le revenu
médian est de 400 USD.
Gestionnaire des stocks (GS): En moyenne, il y a 1,9 gestionnaire des stocks par
société, bien que la plupart (56 %) n’emploient qu’une seule personne à ce poste. Ces
employés sont âgés de 25 à 60 ans et possèdent environ 5 années d’expérience. La plupart
des personnes à ce poste tirent également profit d’un plus haut degré d’éducation
étant diplômée tant d’un institut technique que d’une université. Les institutions
d’enseignement les plus fréquemment mentionnées furent : Institut Supérieur du
commerce, ISC (6), Université de Lubumbashi (5) et IBTP (3).
Un gestionnaire des stocks gagne en moyenne 295 USD par mois (la médiane étant à
210 USD). La figure 4.10 illustre la distribution des salaires pour l’échantillon.
288
Maçon (MC): En moyenne, il y a 10 maçons par société (la médiane étant à 6). Les
employés sont âgés de 23 à 50 ans et ont 6 ans d’expérience. Les personnes occupant
ce poste ont suivi une formation auprès d’un institut technique (cité des jeunes a été
mentionnée 6 fois sur 16).
Le maçon médian gagne 180 USD par mois17. Notez que les salaires sont assez
dispersés. 70 % de l’échantillon gagne entre 100 USD et 200 USD, tel qu’illustré dans
la figure 4.11.
289
Recrutement
Nous avons par la suite posé certaines questions sur le recrutement des employés des
catégories d’emplois précédemment analysés. Une question pour laquelle nous avons
obtenu d’intéressants résultats fut pour les critères de sélection. Le Tableau 4.12 présente
les critères les plus importants qui ont été mentionnés pour les trois emplois (plusieurs
réponses étaient possibles).
290
Gestionnaire Gestionnaire
Critères Maçon
des travaux des stocks
Expérience 16 15 16
Éducation 20 19 15
Compétence* 11 10 13
Test 7 2 2
Références 1 2 2
Intégrité** 0 3 3
Nationalité 3 3 3
Source : Calculs des auteur
* Incluant CV et ** Incluant des éléments tels que : honnêteté, acceptation des conditions de l'entreprise, etc
Comme prévu, les critères les plus importants sont l’expérience, l’éducation et la
compétence. Il n’est pas surprenant que l’éducation soit un critère plus important pour
le choix des gestionnaires des travaux que pour les maçons, alors qu’il survient l’inverse
pour la « compétence ».
Quelques résultats intéressants apparaissent. Dont la rare mention explicite de
l’importance des références18. Un autre est la mention explicite de l’intégrité comme
étant un critère de sélection. Finalement, pour quelques sociétés (3 pour être précis), la
nationalité est ouvertement un critère de sélection.
La concurrence pour les emplois paraît être intense dans le secteur de la construction,
ainsi que de manière plus générale en RDC. Le Tableau 4.13 ci-dessous présente le
nombre de candidatures reçues et le nombre d’entrevues réalisées par emploi pour
chaque type d’emploi.
291
Gestionnaire Gestionnaire
Variable Maçon
des travaux des stocks
Nombre moyen de candidatures 11,7 12,1 30
Nombre médian de candidatures 7,5 6 20
Nombre moyen d’entrevues 7 6,4 19,6
Nombre médian d’entrevues 6 4 12
# Entrevues/# candidatures 0,86 0,88 0,92
# entrevues/# candidatures
(seulement les sociétés où le nombre 0,70 0,67 0,69
d’entrevues ≤ au nombre de
candidatures)
Observations 29 27 24
Observations entrevues ≤ candidatures 25 25 20
Source : Calculs des auteurs
En moyenne, les sociétés reçoivent plus de 10 candidatures par emploi pour les
gestionnaires des travaux et des stocks. Ce nombre augmente à 30 pour les maçons. De
même, les sociétés réalisent entre 6 et 7 entrevues pour un poste de gestion, alors qu’ils
en réalisent autour de 19 pour les maçons.
S’attardant davantage aux détails, il ressort que ces observations comprennent
quelques aberrations. D’abord, le nombre médian de candidatures et d’entrevues est
significativement plus petit que la moyenne. Ensuite, le ratio entrevues-candidatures est
exceptionnellement élevé, de plus de 80 % dans les trois cas. Ce ratio demeure élevé si
nous excluons les observations qui rapportent un nombre d’entrevues plus élevé que le
nombre de candidatures, allant de 67 % à 70 %.
Il semble donc que, dans plusieurs circonstances, le nombre de candidatures soit assez
petit et que tous les candidats potentiels soient appelés en entrevue. Ceci est illustré
dans la figure 4.12 qui présente la distribution du pourcentage des entrevues pour un
gestionnaire des travaux, où la colonne contenant un ratio de un (1), c.-à-d. un nombre
égal de candidatures et d’entrevues, montre la plus grande densité.
292
Difficultés de recrutement
La sous-section suivante du questionnaire concernait les difficultés du recrutement. La
question était formulée de manière ouverte et la classification des réponses a donc été
quelque peu difficile. Puisque la plupart des réponses sont assez semblables, parmi les
différents types d’emplois, nous discuterons des réponses dans leur ensemble. Le Tableau
4.14 présente les réponses les plus importantes ainsi que le nombre d’occurrences dans
l’échantillon.
293
Gestionnaire Gestionnaire
Variable Maçon
des travaux des stocks
Qualification, Expérience,
8 8 10
Compétences
Loyauté 8 7 6
Salaire 3 1 1
Trop de travail 2 2 2
Trop de candidats 1 4 1
Trop peu de candidats 1 1 1
Aucun problème 1 1 -
Source : Calculs des auteurs
Dans cette classification plutôt brute, nous pouvons observer certaines différences parmi
les types d’emplois. D’abord, la disponibilité des candidats pour des postes incluant des
compétences de gestion (gestionnaire des travaux) semble rare, avec les deux tiers des
répondants qui indiquant des difficultés. De l’autre côté, les candidats ne semblent pas
être un problème pour le poste de gestionnaire des stocks et l’expérience est divisée pour
la maçonnerie.
De même, les compétences des travailleurs semblent être une difficulté pour le poste de
gestionnaire des travaux, mais non pour les autres types d’emplois. Le fait qu’un nombre
assez élevé de répondants ait indiqué qu’il n’y a pas de problème avec la qualification fut
une surprise. Cela est en contradiction avec d’autres sources d’information et avec les
indications du Tableau 4.14 ci-dessus.
Enfin, les salaires semblent être un problème général, avec au moins 50 % de réponses
affirmatives19.
Formation
Le sondage contient aussi des questions au sujet des programmes de formation, tant
internes qu’externes, qui sont offerts dans les sociétés. Le Tableau 4.16 indique la
distribution des sociétés avec ou sans formation.
295
Oui 13 6 19
Non 4 6 10
Total 17 12 29
Il n’y a pas de
formation dans la 12 41,38 17 58,62 12 46,15 14 53,85 12 48,00 13 52,00
compagnie
La formation n’est
21 84,00 4 16,00 20 86,96 3 13,04 18 78,26 5 21,74
pas nécessaire
La compagnie n’a
pas de ressources 27 84,38 5 15,63 21 84,00 4 16,00 19 82,61 4 17,39
financières
Y a-t-il des
institutions
28 87,50 4 12,50 25 89,29 3 10,71 22 84,62 4 15,38
publiques de
formation?
Y a-t-il des
institutions privées 15 62,50 9 37,50 11 64,71 6 35,29 13 61,90 8 38,10
de formation?
d. Capacité institutionnelle
Effectuer des appels d’offres de travaux publics
Selon nos experts locaux, il y a eu une amélioration considérable dans la manière dont les
appels d’offres publics sont gérés, particulièrement par BCECO. Le renforcement des
capacités fut beaucoup amélioré et l’opinion des experts est que l’institution travaille
maintenant de manière adéquate.
Un important problème restant à résoudre serait l’accès aux gros appels d’offres
publics des sociétés nationales. La plupart des projets importants, apparemment tant
dans le secteur public que dans le secteur privé, sont directement négociés (par exemple,
les swaps d’infrastructures pour les ressources ci-dessus mentionnés). De plus, comme
nous l’avons vu, il y a une importante concentration de gros appels d’offres qui sont
remportés par des sociétés internationales, principalement chinoises. La plupart des
compagnies internationales importent non seulement leurs capitaux, mais également
beaucoup de leur main-d’œuvre qualifiée. En conséquence, il n’y a pratiquement aucun
transfert de compétences particulièrement de management vers les compagnies locales
à partir de ces vastes projets, ce qui ralentit le processus de développement sectoriel et
exclut les sociétés locales des projets d’envergures.
Par ailleurs, les projets de petites et moyennes tailles présentent également un haut
degré de concentration. Une des contraintes à considérer serait la difficulté d’accès au
marché financier. Les sociétés œuvrent souvent sans avoir accès aux capitaux nécessaires,
ce qui implique la dépendance aux avances pour travaux provenant directement des
projets, précédemment mentionnée. De même, pour les plus petites compagnies, obtenir
les garanties financières pour les appels d’offres publics est difficile ou simplement
impossible.
En conclusion, l’accès pour les sociétés locales semble entravé à tous les niveaux du
processus d’appel d’offres. Les gros projets ne permettent pas de transfert de compétences
aux sociétés locales, alors que les projets de petite ou moyenne ampleur sont difficiles
d’accès, principalement dus au secteur financier limité en RDC.
298
e. Le secteur informel
C’est une pratique généralisée que les clients payent pour les matériaux en avance,
plus une partie des salaires et ainsi, les entrepreneurs informels peuvent manipuler
d’importantes sommes d’argent, sans forcément garder de compte écrit.
Problèmes : éducation, qualité, finance
Les interviewés ne réalisent pas toujours les obstacles qu’ils rencontrent dans leur
propre secteur. Certains entrepreneurs étant plus ou moins illettrés, ne tiennent
pas leurs comptes. D'autres étaient réticents à fournir des informations relatives
aux sommes manipulées. Ils étaient le plus souvent incapables de chiffrer leur
consommation mensuelle d’intrants, les heures travaillées et le roulement. Le
manque de formation formelle est également une contrainte qui pèse sur la qualité
de leur travail. Un des interviewés a passé du temps à travailler sous supervision d'un
ingénieur pour un projet de grande échelle durant la période où furent menées ces
interviews. Il déclara à l'issue de projet que cela lui avait permis de réaliser combien
des mauvaises habitudes, il avait acquises sans même s’en rendre compte, et les lacunes
qu’il avait à comprendre certains principes élémentaires de la construction (exemple :
le durcissement du béton). Dans les conditions de travail de l'informel, le potentiel
pour l’amélioration et le transfert de capacités et de technologies et presque inexistant.
Les clients n’ont aucune garantie sur la qualité et la durabilité du produit acheté.
L’absence d’éducation entraîne une absence quasi totale d’entrepreneur ayant un
compte bancaire, et ils n’ont quasiment jamais accès au crédit. Les investissements
nécessaires sont pris sur les budgets courant, et les jeunes voulant crées leur propre
entreprises dépendent en général de leur famille et amis pour le soutien financier,
qu’ils reconnaissent comme une dette sans conditions fixées.
Résumé
En conclusion, le secteur informel de la construction souffre de problèmes sérieux mais
a un fort potentiel. Si le niveau de formation est faible, les entrepreneurs exploitent
peu leur potentiel de croissance, et la qualité de leur travail est généralement faible,
au détriment de leurs clients. Cependant, ce secteur contribue à l’économie du pays,
de manière substantielle, et sur plusieurs dimensions : tout d’abord, nombre de petits
projets de construction (maison, petits commerces) sont réalisés par des entrepreneurs
informels, et prennent en charge leurs dépenses courante et les employés dépendants,
générant ainsi des opportunités d’emploi. Les firmes informelles sont une forte source
de la demande en matériaux de constructions, tels que le ciment, le métal, les outils
etc. Des liens existant entre le secteur formel et informel (et souvent dans la zone
grise entre les deux) ne devraient pas être sous-estimés. En plus, le secteur informel
ne peut être comparé au marché noir dans les pays industrialisés. En Afrique, et
en particulier en RDC, le secteur informel est un facteur social et commercial de
développement, ayant ses propres règles et sa propre identité.
300
La RDC se porte moins bien dans cette catégorie. Elle y occupe seulement le 118ème rang
(en hausse du 125ème rang en 2010). Les coûts plus élevés (qui n’incluent pas les pots-de-
vin potentiels) pour enregistrer une propriété sont importants et dépassés seulement par
ceux de la Namibie.
L’équipe du projet a également rassemblé de quelques informations portant sur
l’organisation institutionnelle des règlements et des normes dans le secteur de la
construction.
Officiellement, trois ministères sont impliqués dans ce processus :
V. Recommandations de politiques
a. Structure du marché et compétition
Le secteur de construction est fortement concentré. Avec une demande croissante pour
les années à venir, tant de la part des secteurs public que privé, le secteur de la construction
constituera un goulot d’étranglement majeur pour la croissance économique de la RDC.
La concentration du marché n’implique pas nécessairement un manque de
compétitivité et une faiblesse dans la prestation de biens et de services. À l’intérieur
du secteur de la construction, et particulièrement dans les travaux publics, il existe
plusieurs projets à forte économie d’échelle. Nous que quelques firmes dominent le
secteur. Cependant, une compétitivité, même marginale, qui entraîne des économies de
coûts, des pressions sur la compétitivité et la spécialisation sur la qualité et les prix, est
virtuellement inexistante au Congo.
302
Malgré une concentration importante, le secteur évolue et montre des signes positifs:
i) de nouvelles entreprises entrent dans le marché. Le secteur présente des opportunités
d’affaires importantes alors que les marges d’exploitation sont élevées. L’accession à
ce marché s’avère intéressante comme l’indique l’entretien avec des dirigeants d’une
entreprise. Cet attrait devrait se poursuivre pour quelques années, alors que le secteur
de la construction évolue sur la base de la demande. ii) Le secteur public est toujours
dominant dans le volume de construction alors que la demande pour le secteur privé est
en hausse.
Les auteurs soutiennent qu’il y a un certain nombre de problèmes qui pourraient être
adressés avec des politiques adéquates.
• La concentration de travaux de grandes infrastructures, dans les mains de deux
compagnies chinoises pourrait représenter un de ces problèmes. Bien qu’elle
permette des coûts de construction réduits pour des infrastructures essentielles,
principalement grâce aux avantages de coûts. Néanmoins, certains coûts ne
pourraient pas représenter des prix de marché. De plus, certaines inquiétudes
apparaissent à l’égard de la pertinence des échanges « ressources contre
infrastructures ». Aucun contrôle ne semble avoir été mis en place.
• Les ententes « ressources contre infrastructures » devraient être (et sont)
analysées avec plus de détails, particulièrement pour les coûts réels de ces projets.
Le problème provient du fait qu’il n’y a pas de transfert de compétences vers les
compagnies locales. Avec les appels d’offres publiques, la participation aux projets
des entreprises locales devrait être soutenue. Cet appui pourrait être fourni via des
bonus octroyés aux entreprises nationales. Certains éléments doivent cependant
être considérés. D’abord, l’augmentation des prix ne devrait être permise que
pour des travaux qui seraient effectués par des organisations locales. Sinon, les
coûts pour le projet pourraient augmenter en conséquence des transferts de rentes
vers des entreprises locales (non-opérantes). En ce sens, les auteurs favoriseraient
plutôt ce système de bonification plutôt qu’ un pourcentage de sous-traitance fixe
aux entreprises locales. Bien que cette dernière mesure soit plus facile à contrôler,
la probabilité que les rentes soient versées et les travaux des firmes locales soient
effectués par des étrangers demeure plus élevée. Une analyse plus poussée doit
être effectuée sur la mise en œuvre efficiente d’un tel système de bonus.
• Un autre problème qui doit être pris en compte concerne la spécialisation des
entreprises. Contrairement aux pays développés, les entreprises de la RDC
n’opèrent que très rarement en consortium. Ce fait provoque divers éléments :
i) il réduit la spécialisation des compétences, particulièrement pour les PME;
ii) il exclut aux petites entreprises l’accès à des soumissions pour des appels
d’offre de plus grande envergure. Ainsi, une politique devrait être élaborée pour
favoriser la spécialisation des PME, afin qu’elles puissent mieux se regrouper et,
potentiellement, participer à des soumissions plus importantes.
303
b. Marché du ciment
Avant de présenter les recommandations pour le marché du ciment, il serait utile de
revoir certaines particularités de ce marché21.
Le ciment est essentiellement un monopole local naturel qui présente d’importantes
économies d’échelle. Même à l’échelle minimale d’efficience de près de 600 000 tonnes
par année, les coûts fixes représentent toujours 50% des coûts totaux. Ceci implique qu’il
y a une différence significative entre les coûts marginaux et moyens, même à un niveau
efficient de production. À un niveau sous l’échelle minimale d’efficience, cette différence
est encore plus marquée.
304
c. Capital humain
• Au plus grand étonnement des auteurs, le capital humain n’a pas été clairement
identifié comme un problème dans le sondage de compétences, alors qu’il est clair
que le secteur de la construction possède un énorme besoin de personnel qualifié.
• Au-delà du manque d’installations aux fins de formation et d’un niveau
d’éducation de qualité, on constate également un manque de certification
des compétences. Les travailleurs sont ainsi incapables d’émettre un signal
reconnu de leurs qualifications sur le marché du travail. Ainsi, l’embauche par
recommandations personnelles demeure omniprésente. Les travailleurs qui ne
possèdent pas un accès à ces canaux sont exclus des milieux formels de travail et
s’engageront dans des secteurs informels.
305
VI. Conclusions
Le secteur de la construction en République Démocratique du Congo pourrait être un
moteur économique et un catalyseur de croissance pour le pays. Cependant, comme le
démontre cette étude, ce secteur est loin d’avoir exploité son plein potentiel. Le secteur
est fortement concentré, ce qui limite sa compétitivité et son développement. De plus,
les prix pour ses intrants et son équipement sont très élevés. Finalement, le secteur vit
une pénurie de personnel qualifié.
Cette étude présente donc un nombre de politiques qui devraient être élaborées plus
en détails.
306
Notes
1. Cela correspond aux projets identifiés dans le Tableau 5-1 du rapport de Briceño-Foster. Notez que la liste
des projets inclut un port de 2 milliards US en eau profonde à Banana, un projet avec de forts rendements
négatifs.
2. Assessing the Economic Impact of Competition: Findings from Zambia (Ellis, Singh & Musonga, 2010)
pour tous les pays, excepté la RDC. Le prix pour la RDC correspond à la moyenne des prix courants de
Kinshasa pour 2007.
3. À titre d’exemple, un IHH de 1700 est largement considéré comme étant une concentration du marché
anticoncurrentiel.
4. De manière intéressante, en dépit du fait qu’il est réellement difficile pour ces sociétés d’obtenir de tels
appels d’offres.
5. Sur les problèmes généraux auxquels les sociétés font face en RDC voir The Potential for Growth : An
Investment Climate Assessment, World Bank 2007.
6. L’exemple le plus parlant serait le nombre de kilomètres pour un projet de route, combiné avec de
l’information potentielle sur la constitution des terrains (urbain, montagne, etc.).
7. La source de données pour tous les tableaux et schémas de cette section est la base de données des appels
d’offres réalisée pour ce rapport.
8. Néanmoins, cela pourrait très bien représenter la distribution actuelle des projets, également fortement
concentrée dans la région de Kinshasa.
9. Les observations avec seulement un soumissionnaire qualifié aboutiront naturellement en une dispersion
de zéro.
10. Voir « Unit Costs of Infrastructure Projects in Sub-Saharan Africa » AICD Background Paper 11, 2009,
au sujet de l’utilisation de la dispersion des soumissions en tant que mesure de la concurrence dans les
projets d’approvisionnement public.
11. http://www.heidelbergcement.com/global/en/company/press_media/press_releases_2010/2010-09-15.
htm.
12. Pour la défense de CILU, il doit être noté que, puisqu’ils étaient à l’origine de la rupture de production, la
compagnie n’a pas bénéficié de la hausse des prix.$
13. Le sondage ne comprend donc pas de question qui pouvant être comparée avec d’autres sondages.
14. Une série d’entrevues a été menée auprès d’un groupe de travail et deux questionnaires ont été remplis de
manière indépendante.
15. La source pour tous les tableaux et schémas de cette section est le sondage sur les compétences spécifiques
du projet.
16. Nous avons exclu l’observation rapportant 100 gestionnaires des travaux.
17. Si nous omettons l’observation rapportant un salaire mensuel de 1000 USD, alors la moyenne de
l’échantillon est aussi de 180 USD.
18. Cela peut être attribuable au fait que la compétence peut inclure des informations provenant de références.
19. Cette fois encore, il n’est pas clair si les répondants considèrent les salaires comme étant trop bas ou trop
élevés.
20. Nous excluons l’observation qui a rapporté cinq fois autant de participants en formation interne et externe
que le nombre total d’employés rapportés.
21. Cette section a profité de discussions avec le Prof. Von Ungern-Sternberg (Université de Lausanne).
22. On rapporte que les exportations depuis la Zambie ont atteint 120-180 ktonnes/année.
23. On rapporte que, durant le projet, des “étudiants” gradueraient en maçonnerie sans avoir mis pied sur un
chantier de construction.
307
1. Baissac, Claude
Claude Baissac possède dix-sept années d’expérience comme conseiller sur la réforme
du climat des investissements, la croissance et la promotion des activités exportatrices.
Il est un spécialiste reconnu des zones économiques spéciales et des pôles de croissance
et de développement, et est Secrétaire Général de l’Association Mondiale des Zones
Economiques (WEPZA). Il focalise son expertise sur les contraintes a une croissance
durable et équilibrée en Afrique sub-saharienne, et conseille les entreprises qui y
investissent. Doctorant en sciences politiques (Northern Arizona University), il détient
un DEA en sciences sociales et une maîtrise en géographie de l’Université de la Réunion.
2. Chausse, Jean-Paul
Jean-Paul Chausse est économiste agricole avec une longue expérience du secteur de
l'agriculture et des opérations d'investissement dans le secteur rural, surtout en Afrique,
avec la Banque mondiale, où il a été successivement directeur pour le secteur agricole en
Afrique australe directeur pour le secteur agricole en Afrique de l'Ouest, puis conseiller
régional en développement agricole. Depuis 2007, il travaille comme consultant pour la
Banque mondiale et a participé à de nombreux travaux sur le secteur de l'agriculture et
l'analyse de chaînes de valeur dans les pays africains.
3. Domergue, Chloë
Mlle. Domergue, experte en économie politique des Etats fragiles; travaille à l’institut
IDEA International depuis Mai 2010 en tant que spécialiste en leadership et gestion
du changement. Elle a travaillé auparavant pour l’institut de la Banque mondiale, au
sein des unités Gouvernance et Etats Fragiles, sur des projets de recherche, des activités
de renforcement de capacités et des processus de reforme de la fonction publique. A
ce jour, elle a travaillé dans plus de 15 pays, principalement sur le continent africain.
Elle est titulaire d’un master en économie du développement, avec une spécialisation en
économie politique des Etats Fragiles et affectés par des conflits.
4. Herderschee, Johannes
Johannes Herderschee, ressortissant néerlandais, est diplômé de l'Université Erasmus
de Rotterdam. Il a étudié à Kiel Institute of World Economics (Allemagne) et a obtenu
un Doctorat en Economie de l'Australian National University. Avant de se joindre à
la Banque mondiale en 2008, il a travaillé à l'Institut néerlandais de l'économique, à
l'Organisation Mondiale du Commerce, à l'Institut Harvard pour le développement
International et le Fonds Monétaire International. Sa recherche porte sur le commerce,
308
5. Jametti, Mario
Mario Jametti a rejoint l'Université de Lugano comme Professeur Assistant en
Economie en 2008. Il a obtenu son doctorat à l'Université de Lausanne en 2004, à la suite
de laquelle il passe un temps comme boursier postdoctoral à l'Université McMaster et
Professeur Adjoint à l'Université York, au Canada. Ses intérêts de recherche principaux
sont en finances publiques, microéconomie appliquée et économétrie appliquée,
actuellement en mettant l'accent sur la concurrence fiscale, l'assurance catastrophe
naturelle et pensions privées. Les travaux de M. Jametti ont été publiés dans plusieurs
revues scientifiques. Son travail de consultation comprend les gouvernements nationaux,
la Banque interaméricaine de développement et la Banque mondiale.
6. Thomas, Kembola
Après les études d’agronomie à l’Université Lovanium de Kinshasa (1965 – 1971),
il a animé l’Unité de recherche de Radio agronomie du Centre Régional d’Etudes
Nucléaires de Kinshasa. Pendant son séjour dans ce Centre, il a produit une vingtaine de
publications scientifiques dans les domaines des applications de l’énergie nucléaire dans
l’Agriculture et dans la Biologie. Il est ensuite devenu Directeur d’Etudes et Planification
dans les Ministères de l’Agriculture et du Développement Rural. Dans ces fonctions,
il a été mêlé à la production, en qualité de Chef d’Equipe d’Experts, du premier Plan
Directeur du Développement Agricole et Rural, (1991) de la Revue du Secteur Agricole
(2003), de la Note de Politique Agricole et du Développement Rural (2007), du premier
exposé stratégique d’intervention du FIDA en R.D.Congo et de la Monographie de
la Province du Nord-Kivu (1998). Il est le Coordonnateur des Programmes Nationaux
de Sécurité Alimentaire pour lesquels il a coordonné les processus d’élaboration.
Récemment, de 2007 à 2011, il a coordonné l’exécution de l’Etude du Secteur Agricole
et Rural financée par la BAD. Il a aussi contribué à l’Etude sur le Développement par
l’Intégration du Commerce (EDIC). Outre le Diplôme d’Ingénieur Agronome, il
est détenteur d’un Diplôme Supérieur en Management de Développement, obtenu à
LUNTEREN aux Pays-Bas.
7. Salim, Maloof
Salim Maloof est présentement le Chef de Programmes à l’UNOPS en RDC.
Egalement, il a travaillé pour les Nations Unies dans plusieurs pays. Il est titulaire d’un
309
doctorat en Génie Civile de l’université NYU – Poly à New York. Il a des travaux
de recherche au sujet de la fracture des fluides qui sont publiées dans des journaux
scientifiques. En suite, il a approfondi les recherches dans le domaine des phénomènes
causant la fracture des sociétés et il a publié une théorie à ce sujet pour expliquer
mathématiquement ce qui peut être à l’origine. Cette théorie a été exposée dans plusieurs
conférences internationales.
Index
coût de transport 94, 95, 249, 266, 284 exploitation pétrolière 124, 143
crédit 27, 34, 36, 38, 42, 58, 65, 66, 67, 73, explosion démographique 192
136, 299
creuseur 139, 149, 182
F
creuseur artisanal 182 FAO 3, 10, 14, 15, 29, 68, 69, 72, 93, 95, 96
crise financière 17, 20, 22, 108 fiscalité 50, 74, 78, 79, 90, 100, 147, 148,
croissance démographique xv, 3, 10, 18, 32, 149, 212, 215, 216, 230
35, 194, 202 fonction publique 88, 89, 91, 307
croissance durable xi, xvii, xviii, 15, 101, 307 forêt amazonienne xvii, 151
croissance économique xi, xviii, xix, 18, 20,
23, 100, 101, 160, 191, 234, 245, 259,
G
261, 262, 281, 301, 310, 311 gestion foncière 213, 241
cuivre 101, 102, 108, 114, 116, 118, 121, gestion urbaine xiii, 200, 206, 210, 212, 213,
122, 123, 126, 149, 188, 190 214, 216, 229, 231, 232, 235, 236,
238, 239, 240, 250
D
gisement 3, 17, 18
décentralisation xviii, 80, 81, 85, 87, 88, 90, gouvernance xi, xiii, 51, 73, 92, 100, 136,
91, 96, 131, 169, 186, 209, 211, 212, 137, 142, 144, 145, 173, 175, 180,
215, 238, 239, 240, 245, 253, 269 182, 183, 239, 251
déconcentration 87, 186, 211, 214 groupes industriels 100, 114, 129, 172
déforestation xvii, 36, 157, 160, 163
dégradation forestière 157
H
démographie 15, 64 haricot 3, 4, 58
densification 194 hévéa xv, xvi, 2, 3, 5, 6, 37, 38, 56, 58, 69, 71,
dépense publique 243 78, 79, 94
développement agricole 12, 57, 67, 84, 85, hydrocarbures xvii, 64, 100, 101, 102, 104,
88, 89, 90, 91, 92, 307, 310 107, 113, 124, 125, 132, 143, 146,
Développement durable 163 169, 170, 173, 177, 178, 181, 182
Développement Rural 60, 164
diamant 101, 102 I
Dodd-Frank 136 importations xii, xv, xix, 3, 4, 7, 8, 10, 11, 14,
Droits fonciers 145 15, 16, 17, 18, 27, 33, 34, 55, 71, 74,
Droits superficiaires 147, 148 75, 77, 93, 188, 189, 201, 203, 206,
E 246, 249, 259, 260, 265, 266, 281,
282, 283, 284, 304
ELEVAGE 135 incidence de la pauvreté 199
entreprise publique 143 indice Herfindahl 259
exploitation artisanale 126, 127, 140, 141, industries extractives xvii, 99, 101, 108, 111,
160, 166, 172 127, 130, 137, 150, 157, 161, 170,
exploitation forestière 153, 154, 155, 157, 175, 177, 195
160, 162, 164, 181 industries forestières 159, 174
exploitation informelle 99, 100 infrastructures de base 248, 249
315
politique agricole xii, 11, 58, 80, 90 ressources minières xvi, 99, 100, 117
population rurale 59, 246 ressources naturelles xi, xii, xiv, xvi, xvii, xviii,
population urbaine 10, 157, 190, 191, 194, 3, 62, 64, 99, 100, 101, 145, 146, 167,
222, 254 168, 171, 172, 173, 176, 177, 179,
prix de référence 268 180, 191, 203, 309
prix du ciment xix, 259, 266, 268, 269, 283 rétrocession 131, 187, 212, 215, 230, 240,
production agricole xii, xv, xviii, 2, 15, 18, 247
27, 34, 56, 62, 68, 72, 83, 93, 95, 96, rétrocession aux provinces 212
185, 248, 249 Rift Albertin 152
production animale 9, 11 riz xv, 2, 3, 4, 16, 18, 24, 31, 32, 33, 58, 72,
production artisanale 103, 200 74
production laitière 9
production minière 110, 114, 123, 126, 131
S
productivité xv, 1, 2, 3, 16, 31, 32, 33, 34, 35, secteur de construction 301
36, 37, 43, 44, 45, 46, 51, 52, 58, 62, secteur minier artisanal 46, 47, 110, 111,
65, 73, 94, 100, 124, 140, 154, 161, 125, 126, 127, 128, 139, 141, 142,
199, 222, 243 148, 171, 172, 181
productivité agricole xv, 1, 2, 16, 31, 32, 33, secteur textile 189
34, 36, 43, 51, 58, 73 secteur urbain xiii, xviii, 185, 186, 192, 195,
productivité forestière 154 196, 210, 221, 232, 254
produits alimentaires 16, 18, 19, 74, 77, 114, sécurité alimentaire 3, 24, 55, 69, 70, 77, 310
172, 206 sécurité foncière 233, 241
produits animaux 7 semences 4, 5, 16, 23, 24, 25, 67, 68, 69, 70,
produits halieutiques 7 72, 79, 89
Programme national Maïs 24 Service national de statistiques agricoles
projets d’infrastructures 178, 272 (SNSA) 7
Sinet, Anne 310
R Soh, Alphonse 310
recettes de l’Etat xvii, 100, 104, 105, 108, soumission 277, 278, 279, 303
148, 151, 173, 250 superficie 7, 10, 13, 24, 28, 34, 46, 104, 127,
REDD 160, 163, 164, 167, 169, 170, 171, 165, 183, 194, 219
174, 179, 181, 183
redevance 118, 165, 230, 231
T
Redevance minière 148, 150, 151 thé xv, xvi, 2, 3, 5, 6, 16, 17, 19, 20, 23, 40,
région des Grands Lacs 19, 95, 99, 172 41, 42, 43, 56, 58, 67, 68, 69, 70, 71,
réseau urbain 190, 253 75, 76, 79, 94, 95, 207, 247, 249
ressources aurifères 104 transport public 223, 235, 241, 250
ressources budgétaires 67, 80, 82, 84, 91, 96 transport rural 236
ressources forestières xvii, 96, 151, 152, 156, travaux publics xix, 195, 201, 205, 259, 260,
160, 162, 164, 166, 167, 176 261, 269, 272, 274, 278, 297, 301
ressources minérales xvii, 101, 102, 103, 104, Tshiula Tshimanga, Paul 311
117, 132, 148
317
Un Etat efficace, des infrastructures fiables, et un secteur privé dynamique ont longtemps été
entravés par des obstacles d’économie politique en République Démocratique du Congo. Ce
livre est le premier volume de la série intitulée «Résilience d’un Géant Africain» qui identifie ces
obstacles, lesquels empêchent le pays de réaliser son potentiel économique en tant que deuxième
plus grand pays en Afrique sub-saharienne, et qui décrit la façon dont ces obstacles peuvent, dans
certains cas, être surmontés. La série vise à rendre accessible à un public plus large l’analyse sur
les développements économiques du pays, afin de susciter le débat sur l’économie politique de ce
géant en puissance.
Le second volume analyse la situation des secteurs qui disposent d’un potentiel susceptible de
générer plus d’emplois et de stimuler la croissance économique, dont l’agriculture, les ressources
naturelles, l’urbanisation et la construction. Même s’il se dégage un consensus national que
la RDC devrait être plus compétitive dans ces secteurs; ces derniers demeurent encore bien
en dessous de leur potentiel. L’objectif de ce volume est de présenter l’état actuel des choses,
d’identifier les principaux obstacles à la croissance et de relever des options pour surmonter ces
contraintes.
“ La présente étude, fruit d’une synergie appréciable entre les experts congolais et ceux de la Banque
mondiale, est l’aboutissement d’un diagnostic profond dont les résultats permettent (…) d’attirer
l’attention des responsables congolais sur une gestion saine des ressources naturelles et un recadrage
macroéconomique susceptibles d’assurer une croissance durable et multisectorielle à ce Géant d’Afrique
centrale … nous reconnaissons qu’en s’engageant sur la voie de la reconstruction et de la bonne gouvernance,
notre pays, la République Démocratique du Congo, fera face à de nombreux défis. ”
Marcelin CISHAMBO RUHOYA
Gouverneur de la Province du Sud Kivu
“ Aujourd’hui, la pauvreté en RDC est encore essentiellement rurale, mais elle augmente rapidement
dans les villes. Dans une décade, la pauvreté urbaine pourrait dominer, les plus pauvres ayant quitté le
milieu rural pour rejoindre les villes, si rien n’est fait pour développer davantage l’agriculture et pour
relever le secteur urbain et faire des villes des vrais pôles de développement …Si l’on veut comprendre
mieux pourquoi la RDC est parmi les pays les plus pauvres au monde, malgré l’abondance des ressources
naturelles, et le lien avec la malédiction des ressources naturelles, ce chapitre (ou la présente analyse) est
une lecture obligatoire. ”
Professeur Eric TOLLENS
Université Catholique de Louvain