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Texts Canada (Francais)

18/08/2009

Développement communautaire et cultures


autochtones
Comment by Hugues de Varine: Le texte qui suit a été écrit par Elisabeth Kaine, professeure à l'Université
du Québec à Chicoutimi, et publié dans "Histoires et identités métisses : hommage à Gabriel Dumont",
sous la direction de Denis Gagnon, Denis Combet, Lise Gadoury-Diallo, Presses universitaires de Saint-
Boniface, pages 399 à 418. Nous remercions Elisabeth de son autorisation de publication. Pour des
raisons techniques, nous n'avons pas pu insérer les notes, ni les illustrations Contact: Élisabeth Kaine,
Département des arts et lettres, Université du Québec à Chicoutimi, 555 boul. de l’université, Saguenay,
G7H 2B1, Québec, Canada Elisabeth_kaine@uqac.ca On peut aussi trouver de nombreuses informations
sur le site suivant: http://alliance.uqac.ca (aller à la rubrique "Diffusion")

Un projet de sang-mêlé - Une volonté de métisser Le projet d’alliance de recherche


universités/communautés (ARUC-CRSH) Design et culture matérielle : développement
communautaire et cultures autochtones s’échelonne sur une période de cinq ans (2004-2009).
Muséologues, anthropologues, designers et artisans autochtones œuvrent ensemble, par la
recherche-action participative et la recherche fondamentale, à l’avancement des questions de
recherche en regard de la transmission de la culture autochtone. Nous travaillons, entre autres,
à l’élaboration de programmes de formation novateurs en design de produits, en nouvelles
technologies et en design graphique. Le volet Mémoire du territoire, sous la responsabilité de
Élise Dubuc, tente l’adaptation de la méthode de l’inventaire participatif développée par Hugues
de Varine en France au contexte des communautés autochtones du Québec. Grâce à une
subvention Réalités autochtones du CRSH, nous travaillons également au développement
d’une méthodologie communautaire pour une nouvelle muséologie autochtone. Nous menons
de nombreuses activités pour la transmission de la culture autochtone auprès des allochtones
et travaillons au développement d’une banque de données portant sur la culture matérielle
autochtone, traditionnelle et contemporaine, puisant à plusieurs domaines de connaissances .
L’ensemble de ces actions sont menées avec un objectif d’empowerment , c’est-à-dire qu’elles
visent à moyen terme à donner aux participants autochtones l’autonomie et les habiletés pour
qu’ils puissent déterminer comment ils veulent se représenter en opérant le choix des contenus
et des médiums et en réalisant eux-mêmes les outils de cette représentation. Mené par une
équipe interculturelle composée d’une cinquantaine de personnes, le projet s’active entre trois
communautés autochtones du Québec, Mashteuiatsh, Uashat mak Mani-Utenam, et Odanak ;
et deux universités, l’Université du Québec à Chicoutimi et l’Université de Montréal. Complexe
par son programme d’activités multiples, le projet vise d’abord le développement durable par le
biais d’actions culturelles et la valorisation des cultures autochtones en favorisant une meilleure
compréhension de celles-ci. La motivation existentielle des co-directrices, Élise Dubuc et moi-
même, fondamentale comme moteur à tout véritable projet, s’arrime à un profond désir de
rencontre avec les peuples des Premières Nations. C’est pourquoi une grande partie de la
recherche s’opère sur le terrain, dans les trois communautés partenaires, dans le but de
développer des méthodologies participatives pour favoriser la transmission culturelle des
savoir-faire et des valeurs considérés comme importants par les membres de ces
communautés pour la survie de leur culture. Dans cet article, il sera plus spécifiquement
question des ateliers de création en design que nous avons offerts dans les trois communautés
partenaires du projet depuis 2004 . Comme le souligne Debray (1996), la transmission est un
processus qui, plus que simple enregistrement ou archivage, engage un désir de communiquer
dans l’espace et le temps par souci de transmettre à d’autres. En affirmant que c’est par la
création que ce processus de transmission a le plus de chance de s’opérer dans le contexte
des communautés autochtones où les savoir-faire artisanaux sont présentement en grand
danger de disparition, nous adhérons au concept énoncé par Jeanne Pourrinet (2003; p. 11) en
préface de l’ouvrage Transmissions, voulant que la transmission ne se cantonne pas à la
cognition mais qu’elle implique un travail de transformation, d’appropriation de ce qui est
transmis par le médiateur. La transmission implique que le médiateur re-crée d’abord pour lui-
même le sens de ce qu’il transmet ce qui, comme nous le verrons plus bas, peut être très
difficile à accomplir pour les artisans autochtones dans le contexte post-colonial actuel. La
rencontre comme base de la méthodologie Je suis d’origine métisse huronne-wendate et euro-
québécoise (irlandaise). La reconnaissance graduelle des particularités de cette identité
métisse m’a amenée à adopter une vision positive du métissage qui m’apparaît non seulement
comme une possibilité de « plus », mais aussi et surtout comme une possibilité de « plus par la
différence », par la rencontre de l’autre, fut-il en soi. Pour moi, le métissage n’est pas un
handicap ou une perte mais un possible levier de transmission de ce qui caractérise chacune
des entités en présence. Ce projet repose sur le concept de métissage, à la fois comme
concept de référence et comme méthode puisque les rencontres entre les parties prenantes et
la façon dont se combinent les éléments au sein de ces rencontres, sont à la base de nos
questions et actions de recherche. Que ce soit au niveau interculturel (autochtone, allochtone),
intercommunauté (communauté universitaire, communauté autochtone) ou interdisciplinaire
(anthropologie, art, artisanat, design), l’ensemble de notre programme cherche les moyens de «
mettre ensemble » pour développer de nouvelles façons de voir et de faire qui s’enrichissent
des particularités de l’un et de l’autre et ce dans l’espoir que cette rencontre participe à
l’émancipation de l’un et de l’autre. Comme le soulignent Laplantine et Nouss ( 1997; p. 79 ), «
le métissage suppose la rencontre et l’échange entre deux termes, non pas l’un ou l’autre, mais
l’un et l’autre, l’un ne devenant pas l’autre, ni l’autre ne se résorbant dans l’un...La pensée du
métissage est une pensée de la médiation et de la participation à au moins deux univers. ».
Ainsi, le métissage est constitué de l’intégration des composantes qui se rencontrent dans une
nouvelle entité, non pas dans un processus de fusion mais plutôt de confrontation et de
dialogue : pour qu’il y ait métissage, les composantes doivent garder leur intégrité (1997; p. 9).
Hors, pour les sociétés ayant subi la colonisation, la rencontre de la différence de l’Autre a été
trop souvent dramatique pour pouvoir s’y appuyer sans en redéfinir les modalités, puisque dans
ces conditions, il est impossible de considérer la rencontre comme une occasion de reconnaître
et d’affirmer l’identité de chacun des partenaires en cause. Par nos activités, nous tentons non
pas d’annuler les différences mais plutôt d’instaurer un contexte où elles peuvent s’inscrire dans
une dynamique de complémentarité, ce qui suppose une attitude particulière de la part du «
dominant », de celui qui, dans la situation, semble détenir le plus de connaissances. Le concept
de rencontre semble à priori bien simple, mais lorsqu’il est appliqué à l’élaboration de
méthodologies visant la mise en chantier de projets d’échanges culturels, ici par le biais des
ateliers de design de produits; et que ces projets sont élaborés par des équipes multiculturelles,
designers allochtones et artisans autochtones, les modalités de cette rencontre ne peuvent être
laissées au hasard. C’est pourquoi, par exemple, une grande part de la méthodologie
développée repose sur l’acquisition d’attitudes particulières par les animateurs avant de pouvoir
œuvrer dans les ateliers. Pour atteindre nos objectifs de recherche, il nous faut donc produire
de « l’être bien ensemble », ce que Catherine Dolto ( citée dans Transmissions, 2003, p. 8 )
nomme « le vécu du bon partagé, de la réciprocité de l’être ensemble », ce qui implique un
choix judicieux des animateurs et assistants de recherche qui doivent démontrer ouverture,
disponibilité et flexibilité; de même que la programmation de nombreuses activités de
rencontres : repas communautaires, sorties en groupe, temps de loisir ensemble. Toutes les
volontés politiques, les stratégies opérationnelles ou les programmes ne pourront susciter la
véritable rencontre : son avènement est intimement lié au désir et au plaisir d’être ensemble, le
besoin seul ne suffit pas. C’est le sentiment qui permet d’apprécier, de comprendre et d’avoir
accès à plus que soi, à autre que soi. Pour que des entités différentes se rencontrent, il faut
aussi avoir quelque chose à accomplir ensemble, dans un temps donné ( le projet ). Les
contours et les limites des différentes appartenances se dissolvent lorsque la finalité recherchée
est plus grande que ce à quoi ces différences s’associent dans leurs actions spécifiques. Il peut
paraître dangereux de bâtir un programme de recherche sur le concept de plaisir puisque celui-
ci est perçu comme l’antithèse de la performance et du progrès qui, croit-on, doivent se
construire à force d’effort et de sueur au front. C’est pourtant lui qui fait en sorte que le tout
devient plus grand que la somme de ses parties. Mon appartenance métissée m’a peut-être
aussi dirigée vers une discipline qui l’est tout autant puisque le design est souvent défini comme
étant un hybride entre art, science et technique. Pour chacun de ces champs, le design est un
bâtard : trop lié au marché pour être art, trop artistique pour être science, trop humain pour être
technique. D’où sa force : il est un lieu de complémentarité entre les savoirs, un spécialiste des
rencontres, des zones de frottement et des entre-deux. Pour se matérialiser, la pratique du
design doit puiser à plusieurs champs de connaissance de nature conceptuelle, pratique et
technique; et sa résultante exprime quelque chose de ces trois visions du monde. Devenue
profession lors de la révolution industrielle, cette pratique qui consiste à produire de la culture
matérielle utilitaire existe pourtant depuis les débuts de l’humanité, bien avant l’avènement de
l’Art pour l’Art. Il s’agit d’un des domaines les plus anciens de l’activité humaine, directement
relié à la survie des peuples sur leur territoire. Le processus de design, un médiateur Trois
postulats sont à la base du développement des ateliers en design de produits Design et culture
matérielle : 1. Les objets de design, s’ils sont créés avec une approche sensible, sont des
oeuvres d’art, c’est-à-dire des lieux d’expression de leur créateur; 2. les nouveaux produits sont
des vecteurs valables, au même titre que les artefacts traditionnels, pour la transmission de la
culture; 3. l’étude des objets issus des pratiques traditionnelles est féconde pour l'enseignement
et la pratique du design contemporain . Ce volet de recherche-action travaille à soutenir, par la
conception de projets utilisant la méthodologie de design, les artisans chevronnés des
communautés pour qu’ils puissent créer de nouveaux éléments de culture matérielle qui soient
porteurs des savoirs et savoir-faire contemporains et traditionnels. Ces nouveaux éléments sont
de trois natures : des produits de design ( objets utilitaires ); des expositions présentant les
résultats de la recherche ( objets et réflexions ) dans un but de valorisation de la culture
autochtone ; et enfin, des outils de communication à fort contenu visuel à l’intention des
communautés partenaires et du grand public en général ( catalogues, affiches, dépliants,
cartons d’invitation, journaux distribués en communauté, etc.). Notre travail consiste à
développer les approches et les moyens qui permettront aux participants de créer et de
produire eux-mêmes ces vecteurs de transmission de leur culture. Si plusieurs projets
s’intéressent depuis quelques années à l’utilisation du design comme outil de développement
économique pour les sociétés artisanes, à notre connaissance aucun ne s’intéresse
véritablement au design comme possible agent d’empowerment et de développement durable
visant l’accroissement des compétences de même que l’émancipation des artisans autochtones
et de leur communauté. Les initiatives actuelles considèrent le design comme une interface
entre tradition et modernité qui contribue à adapter la production artisanale aux besoins
contemporains et, comme le souligne Bhatt . « Toutes les interventions de design dans le
secteur de l’artisanat sont principalement centrées sur le produit(...)L’impact de ces
interventions est le plus souvent limité car elles excluent l’artisan du processus intellectuel du
design et du développement de produit(...)Bien que ces initiatives soient valides en termes du
besoin de réinterpréter les artisanats afin de les adapter aux réalités du marché contemporain,
pour l’artisan, la rétention actuelle de valeur est limitée(...)à la fin de l’interaction vous avez de
nouveaux produits, mais y a-t-il un changement et une nouvelle compréhension dans l’esprit
des artisans? Comment peut-on quantifier que ces personnes ont une nouvelle perception du
design et une plus grande confiance dans leur aptitude à créer un design ? Il s’ensuit que
s’occuper du design, des techniques et des compétences n’est pas suffisant. Nous devons
aussi forger leur capacité à concevoir un design. Nous devons leur donner accès à leurs
racines et leur apprendre comment travailler en réseau, en documentant et disséminant la
recherche et les informations. » Le design d’un produit comme processus de transmission
L’objet utilitaire est à la fois fonction (reflet des us et coutumes incluant les rituels d’utilisation),
matériaux et procédés (portraits des technologies développées par une société) et expression
(le champ esthétique qui inclut les langages plastiques et symboliques, à la fois lieux de
représentation du créateur et de sa culture d’appartenance). Ces trois facteurs rendent l’objet
de design très performant en tant que représentant culturel et ils doivent être abordés de façon
systémique dans le processus de design, c’est-à-dire que même si chacun peut être l’objet
d’une recherche-création en soi, c’est la pertinence de l’interaction qu’instaure cette trilogie
(fonction, technique et esthétique) avec l’humain et son environnement physique et culturel qui
doit guider les choix du concepteur. Le programme des ateliers Design et culture matérielle
tente ce défi, en élaborant les différentes étapes des ateliers de façon à répondre aux grands
objectifs de la recherche liés aux besoins d’affirmation identitaire des participants et de leur
communauté. Pour ce faire, une méthodologie de conception puisant à la fois au processus de
design et à la pratique artistique est développée de manière à favoriser l'expression plutôt que
la seule résolution de problèmes. Nous croyons que cette approche permettra l’expression de
l'identité personnelle et culturelle des participants. Qui suis-je ? Qu’ai-je à dire, moi ? Plusieurs
stratégies pédagogiques doivent être utilisées avant d’arriver à la création d’un produit qui soit
novateur en regard de la pratique habituelle de l’artisan et transmetteur de son expérience. Il ne
s’agit pas seulement de passer la commande (créer un nouveau produit, reflet de la culture
contemporaine, qui soit aussi transmetteurs d’éléments de la culture traditionnelle); il faut
surtout donner les outils aux participants pour qu’ils puissent répondre à cette commande en
contournant le recours aux images stéréotypées qu’ils ont longtemps pratiqué. Depuis la fin du
19e siècle, une imposante imagerie romantique de l’indien a envahi l’univers de la culture
visuelle populaire par le biais du cinéma, de la bande dessinée et des produits touristiques.
Aucun autre sujet n’a inspiré autant de romans, de films, de jouets que celui des amérindiens .
Ces signes visuels ont grandement pollué l’univers symbolique des artistes et artisans
autochtones qui, de tout temps, ont grandement participé à la transmission culturelle en
concevant des objets capables de communiquer des informations sur leur culture d’origine à
travers l’espace et le temps. Un des défis auxquels nous avons donc à faire face dans la
conception des ateliers est de contrer le recours systématique que font les participants à ces
stéréotypes visuels en regard non pas de leur culture, celle qui s’ancre dans le réel du
quotidien, mais plutôt en regard d’une culture fantasmée par d’autres. Face à la problématique
de la transmission de la culture, cette question est fondamentale puisque l’identité se constitue
à partir de la réalité du sujet, c’est-à-dire de sa place dans le monde, là où s’inscrit sa parole à
même les signifiants qui le représentent et le déterminent (Belle-Isle, 2005). Cette difficulté est
vite apparue lors d’un premier projet pilote réalisé dans la communauté de Mashteuiatsh avec
quatre artisanes ilnues à l’automne 2000. Face à la commande, le premier réflexe de l’une des
participantes avait été de reproduire un objet déjà connu dans toutes les boutiques d’artisanat
indien qui vendent une panoplie de produits/symboles soi disant autochtones. Cette lampe en
forme de tipi présentait deux problèmes : elle n’était pas le résultat d’un véritable processus
créatif et en cela ne participait pas à la véritable expression/valorisation de l’artisane; et elle ne
référait pas à la culture de l’artisane mais plutôt à celle des peuples de l’Ouest canadien et
américain, le tipi ayant été très peu utilisé par les peuples du Nord-Est. Lors des discussions
autour des concepts, il était évident que même si les innus ont utilisé le wigwam dont la forme
se rapproche du tipi, la référence ici demeurait le tipi des peuples de l’Ouest. Était alors
apparue la question de savoir comment contourner ce recours systématique aux stéréotypes
pour les prochains ateliers. La réflexion à ce sujet tourne autour de quatre pôles à partir
desquels ont été élaborées les solutions appliquées dans les ateliers subséquents : 1) Le
recours aux stéréotypes visuels a lieu parce qu’il sécurise rapidement les participants face à la
commande; 2) ces derniers sont convaincus que c’est précisément ce que nous attendons
d’eux : produire de « l’indien », puisque c’est à ce rôle qu’ils furent confinés, à la fois à
l’extérieur de leur communauté ( le marché touristique ) et à l’intérieur de celle-ci puisque,
considérés comme gardiens de la tradition, les artisans sont souvent engagés par le Conseil de
bande pour des démonstrations artisanales traditionnelles lors d’événements culturels ; 3) cette
réalité produit une dévalorisation profonde du potentiel créateur : Qui suis-je ? Qu’ai-je à dire,
moi ? 4) une perte de la possibilité de créer un langage symbolique exprimant sa propre culture
contemporaine s’en suit : Qu’est-ce qui caractérise ma véritable culture ? Comment puis-je la
transmettre ? Plusieurs moyens ont été mis en place pour palier à ces problèmes, dont les
lignes suivantes donnent un aperçu. Détourner l’attention, pour un temps J’exposerai ici de
façon très succincte certains aspects du programme que nous avons développé pour répondre
à la problématique énoncée précédemment. Ces moyens sont simples et semblent avoir été
efficaces. Une des premières stratégies à mettre en place est de limiter, au début, les
influences externes de sorte à amener les participants à puiser au cœur de leur propre
expérience comme inspiration à la création. Tout créateur sait bien par ailleurs que rien ne part
de rien. Il nous faut donc offrir un autre canal d’inspiration, opérer une diversion en proposant
une expérience en nature comme départ au travail de création, pour qu’ainsi les référents
soient déviés du domaine culturel pour un temps. Le programme des ateliers inclut donc un
séjour en forêt de trois jours pour toute l’équipe, animateurs et artisans. Ces séjours sont
planifiés dès la troisième semaine et marquent une étape importante pour la suite. C’est à partir
de ce moment que tous s’aperçoivent que les rôles sont facilement inversables entre
enseignants et apprenants et qu’il suffit de changer de contexte et de territoire pour que cette
inversion advienne, produisant ainsi une expérience valorisante pour les artisans. Au retour, un
tournant important est perceptible dans les exercices de création dont les résultats sont de plus
en plus personnalisés et, par le fait même, beaucoup plus valables en regard des objectifs de la
recherche et valorisants pour les participants. En appliquant une méthode métissée puisant à la
fois dans les champs de l’art et du design, l’exercice « Les boîtes souvenir » permet aux
artisans d’exprimer leurs perceptions en regard de l’expérience vécue plutôt que de répéter les
stéréotypes formels « indiens » largement véhiculés. Cet exercice simple utilise une stratégie
souvent utilisée en art, soit la délimitation d’un espace d’expression (la boîte, le cadre, la vitrine)
de manière à sacraliser ce que l’artiste décidera de mettre dans ce contenant, donnant ainsi
une valeur particulière à ce contenu en regard de ce qui l’entoure. Cette incursion dans le
champ de l’expression artistique prépare le terrain pour la création d’un produit contemporain
original, transmetteur de la culture d’appartenance de son créateur. Plusieurs discussions
portant sur les résultats des exercices permettent d’aborder des thématiques reliées aux
valeurs individuelles, familiales et communautaires des participants, de manière à
continuellement recentrer ces derniers sur leur réalité identitaire . Cette expérience de séjour en
forêt et l’identification des valeurs créent des situations favorables à la comparaison par la mise
en présence de la différence, dynamique qui participe à l’affirmation identitaire culturelle car
même si cette dernière passe d’abord par la reconnaissance du même, de ce qui demeure
identique, de ce qui est constant, elle se cristallise aussi par la comparaison à l’autre culture. Il
en va de même pour l’identité personnelle qui se construit à la fois par la reconnaissance de soi
en l’autre (l’identification) mais aussi par la différenciation, la découverte de l’unicité de sa
propre voix. L'art est un mode de réflexion qui s’opère par l’action sur la matière et, par
l’expression artistique, se construit et se transmet une pensée personnelle. Dans le cadre des
ateliers Design et culture matérielle, une dynamique en boucle récursive s’instaure entre «
recherche du même » et « recherche du différent » grâce à la possibilité de rencontre de l’Autre
que met en place le projet et ce, pour l’ensemble de ses acteurs. À l’issue des rencontres : des
métissages entre passé et présent et entre expression personnelle et culturelle La cinquième et
dernière année du programme de recherche (2008) permettra d’évaluer la réussite des ateliers
en ayant recours à une grille systémique d’évaluation. Ainsi, nous travaillerons à mesurer, entre
autres facteurs, la capacité des produits à être vecteurs de la culture face à différents publics,
allochtones et autochtones; la capacité du processus à augmenter la réelle expression des
participants; et les effets à moyen et à plus long terme sur leur production artisanale. Dans les
produits issus des ateliers, se reconnaissent des éléments de la tradition transposés dans la
réalité contemporaine des artisans. Le cheminement qu’a exigé ce travail de création est
générateur de transformations pour chaque participant grâce à la valorisation qu’apporte la
conscience d’avoir créé une véritable œuvre personnelle mais aussi un produit dans lequel ses
semblables se reconnaissent. À travers lui, se crée et se transmet une nouvelle identité qui
intègre son passé et son présent, ceci grâce au métissage qu’opère la pédagogie des ateliers
entre l’art comme producteur de symboles, l’artisanat comme transmetteur des savoir-faire
traditionnels et le design comme facteur d’actualisation par le recours à l’innovation.
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03/10/2008
Reconhecer, valorizar e transmitir a cultura
Guarani
Reconnaître,valoriser et transmettre laculture guaranie

Um projeto de valorização das culturas e intercâmbio de competências criativas entre


indígenas canadenses e brasileiros segundo uma abordagem participativa e comunitária

Un projet de valorisation des cultures et d'échange d'expertises créatives entre autochtones


canadiens et brésiliens dans une approche participative et communautaire

Contact: laboiterougevif@yahoo.commailto:Elisabeth_Kaine@uqac.ca

Em parceria com as comunidades guaranis do Rio de Janeiro (Sapukai, Araponga, Rio


Pequeno, Mamanguá, Paraty-mirim), o Museu do Indio, a FUNAI, os representantes de quatro
comunidades indígenas do Quebec (Canadá) e La Boîte Rouge vif (Universidade do Quebec
em Chicoutimi)

Resumo

Esse projeto inovador, iniciado por La Boîte Rouge vif, visa criar uma oportunidade para o
intercâmbio de conhecimentos e técnicas, bem como fomentar uma inspiração entre as
culturas indígenas canadense e brasileira. Esse projeto torna possível aos Guarani do Rio de
Janeiro beneficiarem-se da expertise desenvolvida por La Boîte Rouge vif na retomada da
gestão de seu patrimônio. Bem como da expressão da identidade indígena em uma
perspectiva de valorização cultural e desenvolvimento sustentável. Através de um inventário
participativo, os membros das comunidades Guarani são convidados, na primeira etapa, a
identificar os elementos de seu patrimônio cultural que desejam perpetuar, sejam eles materiais
ou imateriais. Na segunda etapa, os Guarani valorizam esses elementos através de diferentes
métodos de conservação e divulgação (fotografia,vídeo,materiais sonoros, etc)

Texto completo do diário do evento:


http://www.uqac.ca/alliance/2008/pdf/BRv_ACDI_Bresil2008_metho.pdf

Un projet réalisé en collaboration avec les communautés guaranies de Rio de Janeiro


(Sapukai, Araponga, Rio Pequeno, Mamangua, Paraty-mirim), le Museu do Indio, la
FUNAI, des représentants de quatre communautés autochtones du Québec (Canada) et
La Boîte Rouge vif (Université du Québec à Chicoutimi)

Résumé

Ce projet novateur, initié par La Boîte Rouge vif, vise à créer une occasion d'échange
d'expertises et à favoriser une émulation entre des communautés autochtones canadiennes et
brésiliennes dans le domaine de la préservation du patrimoine culturel, de la muséologie
communautaire et de la création (design, photographie, vidéo). Ce projet vise à permettre aux
Guaranis de Rio de Janeiro de bénéficier de l'expertise développée par La Boîte Rouge vif dans
la reprise en main par les communautés autochtones de la gestion de leur patrimoine et
l'expression de leur identité dans une perspective de valorisation culturelle et de développement
durable. Par le biais d'un inventaire participatif, les membres des communautés guaranies sont
amenés, dans un premier temps, à identifier les éléments de leur patrimoine culturel, matériel et
immatériel, qu'ils désirent perpétuer et, dans un deuxième temps, à les mettre en valeur par le
biais de divers outils de conservation et de diffusion (photographie, vidéo, bande sonore, etc.)

Texte complet du journal de bord et ilustrations:


http://www.uqac.ca/alliance/2008/pdf/BRv_ACDI_Bresil2008_metho.pdf

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