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M.

Troper, Philosophie du droit, P.U.F., Que sais-je ?, 2003, p. 3 et s.



Nous vivons sous lempire du droit : ds la naissance il faut dclarer
lenfant, et le nom quil portera lui est attribu conformment certaines
rgles. Dautres rgles ordonneront quon linscrive lcole. Quand nous
achetons le moindre objet ou prenons lautobus, cest en application dun
contrat. Nous nous marions, nous travaillons, nous nous soignons selon le
droit. Pourtant, quoique conscients de cette omniprsence du droit et
capables dappliquer ou de produire des rgles, nous sommes souvent en
peine de le dfinir.
Mais pourquoi faudrait-il le dfinir ? La recherche dune dfinition relve,
comme cest le cas pour dautres phnomnes, dune spculation sur la
nature ou lessence du droit. Mais elle est aussi indispensable au travail
mme des juristes. On a souvent remarqu que les physiciens ne sattardent
pas dfinir la physique ni les chimistes la chimie, tandis que les juristes ne
peuvent se passer dune dfinition du droit. Cela tient avant tout ce quon
ne peut appliquer une rgle avant de lavoir identifie comme rgle de droit.
Quelle est la diffrence entre lordre du voleur et celui de percepteur ?
Tous deux nous ordonnent de leur remettre de largent et, dans les deux
cas, un refus nous expose des consquences dsagrables. Nous disons
pourtant que nous sommes obligs et contraints dobir au voleur, tandis
que nous avons lobligation dobir au commandement du percepteur.
Autrement dit, nous identifions lobligation dobir au prcepteur comme
juridique, conformment une dfinition du droit. Cette dfinition na rien
de philosophique. Cest le droit qui dterminer les critres de ce qui est
juridique et de que qui, comme le commandement du voleur, nest quune
violation du droit. Il suffit donc, pour la plupart de nos besoins pratiques de
connatre ces critres, contenus dans les rgles.

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