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18ème Congrès Français de Mécanique Grenoble, 27-31 août 2007

Modèle auto-cohérent pour une inclusion ellipsoïdale

Mohamed RADI & Akrum ABDUL-LATIF*

Laboratoire de Mécanique, Matériaux et Modélisation (L3M)


IUT de Tremblay, 93290 Tremblay-en-France, France
* aabdul@iu2t.univ-paris8.fr

Résumé :
Ce travail consiste à traiter le problème du comportement élasto-inélastique des polycristaux métalliques
de type CFC. Le modèle est exprimé dans le cadre de l’approche auto-cohérente et de la plasticité
dépendante du temps. En se basant sur le tenseur d’Eshelby, ce modèle considère que le comportement
élastique est compressible. Pour une structure polycristalline, les grains se déforment par glissements
cristallographique situé dans les systèmes les plus favorablement orientés et qui supportent une forte
contrainte résolue τs. L’approche adoptée considère que la forme de l’inclusion est ellipsoïdale, de demi-
axes a, b et c tels que a≠ b= c. Une étude paramétrique est effectuée pour élucider le rôle des paramètres
de ce modèle liés en particulier à la forme de l’inclusion. Plusieurs testes numériques sont aussi réalisées
mettant en évidence le comportement élasto-inélastique des polycristaux sous différentes situations.

Abstract :
This work deals with the problem of the elasto-inelastic behavior of the FCC polycrystals. Expressed
within the framework of a self-consistent approach, the rate-dependent inelastic strain is examined at the
crystallographic slip system level describing a constitutive model for FCC metallic polycrystals, whereas
the elastic strain is determined at the granular level. Based on the Eshelby’s tensor, the elastic behavior
is assumed to be compressible. For a polycrystalline structure, the grains deform plastically by
crystallographic slip located at the most favorably oriented systems supporting a high resolved shear
stress τS. The approach considers that the inclusion (grain) form is ellipsoidal of half axes defining by a,
b and c such as a≠ b= c. A parametric study of the model parameters, particularly related to the
inclusion form, is conducted. Several numerical applications are also carried out highlighting the elasto-
inelastic behavior at the local and overall levels under different loading situations.

Mots-clefs : modèle auto-cohérent; inclusion ellipsoïdale; comportement élasto-inélastique

1 Introduction

Historiquement, la première étude signalée dans ce domaine avait été réalisée par Sachs
(1928) et puis Taylor (1938). Afin de satisfaire la condition d’équilibre au travers des joints de
grains et celle de compatibilité entre les grains et en même temps de décrire l’hétérogénéité
intergranulaire en petites déformations, Kröner (1961) a proposé un modèle auto-cohérent à
partir de la solution d’Eshelby (1957) du problème de l’inclusion uniformément plastifiée dans
une matrice élastique isotrope infinie uniformément sollicitée à l’infini. Ce modèle a été étendu
par Budianski et Wu (1962) pour le cas d’une inclusion sphérique. Ce modèle néglige les
interactions plastiques entre les grains et leur matrice. En ce qui concerne le comportement
élasto-inélastique non linéaire des polycristaux, les approches développées jusqu’à maintenant
représentent a priori des solutions approximatives. Quelle que soit l’approche auto-cohérente,
la déformation inélastique dans chaque grain est calculée en se basant généralement sur le
glissement cristallographique. La modélisation du monocristal par de telles approches, devient
quasiment standard. Puisque le comportement global des polycristaux est fortement influencé
par la loi d’interaction (grain /matrice), le champ de contraintes et de déformations hétérogènes

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à travers la matrice (l’agrégat) nécessite ainsi la prise en compte de l’interaction entre les grains.
La relation d’auto-cohérence est un des moyens qui décrivent cette interaction. A cet égard,
plusieurs lois d’interaction bien établies sont principalement fondées sur les déformations
élastiques et inélastiques et leurs hétérogénéités au niveau granulaire (e.g. Nemat-Nasser et
Obata, 1986; Molinari et al. 1997; Abdul-Latif et al. 1998, 2002 ; Sun et al, 2003).
L’approche adoptée, dans ce travail, considère que la forme de l’inclusion est ellipsoïdale, de
ce fait l’effet de la forme de l’inclusion sur le comportement élasto-inélastique des polycristaux,
doit être étudié. Il est supposé que l’inclusion sphéroïdale de demi axes a, b et c tels que a≠ b= c
est noyée dans une matrice homogène infinie. L’effet de la vitesse de déformation est également
pris en compte. A noter que l’effet de l’écrouissage cinématique est globalement et
naturellement décrit par la loi d’interaction ainsi développée. Ceci est dû à l’existence du
comportement élastique granulaire dans cette loi d’interaction, vu que l’accommodation
intergranulaire est de nature élastique. Cette loi d’interaction est simplifiée en remplaçant le
module tangent visqueux macroscopique par un nouveau paramètre constant. Une étude
paramétrique des coefficients de ce modèle, liés notamment à la forme de l’inclusion et au
nouveau paramètre de la loi d’interaction, est réalisée. Plusieurs testes numériques sont menées
mettant en évidence l’effet de la vitesse de déformation sur le comportement des polycristaux.

2 Présentation du Modèle développé

Récemment, Molinari et al. (1997) ont proposé une généralisation du modèle de Kouddane et
al. (1993) en considérant le cas d’un comportement élastoviscoplastique anisotrope et
compressible. Ils proposent de garder une structure de la loi d’interaction identique à celle de
Kouddane et al. (1993) avec une partie élastique et une partie viscoplastique :
−1 −1
 s −1   −1 
 J + C  : (σ& g − Σ& ) +  J 's + A  : (s g − S) = (ε& g − E& ) (1)
   
s
où C est le tenseur (d’ordre 4) des modules d’élasticité macroscopiques, J s et J ' représentent
les tenseurs (d’ordre 4) d’interaction et A est le module tangent macroscopique.
La simplification adoptée consiste à admettre l’isotropie du comportement élasto-inélastique.
La partie élastique peut être alors décrite (Abdul-Latif et al. 2002) par :
−1
 s −1 
 J + C  : (σ& g − Σ& ) = (ε& ge − E& e ) (2)
 
et la partie viscoplastique est présentée par :
−1
 's −1 
 J + A  : (s g − S) = (ε& gin − E& in ) (3)
 
avec Σ& = C : E& e est la relation de comportement élastique d’un polycristal, et S = A : E& in
représente la relation de comportement inélastique global.
En ce qui concerne la solution de la loi d’interaction générale de l’élasticité des milieux
hétérogènes (1), nous utilisons les coefficients du tenseur d’Eshelby (1957) pour une inclusion
ellipsoïdale représentés ci-dessous. La forme symétrique du tenseur d’élasticité J s est assurée
pour un comportement isotrope.

− 4πab2
Jijkl =
15µ( 3λ + 6 µ)
[
(3λ + 3µ )δijδ kl − (3λ + 8µ )Iijkl ] (4)

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où, a, b et c sont les trois demi-axes de l’ellipsoïde et λ et µ étant respectivement les coefficients
de Lamé. I est le tenseur d’identité d’ordre quatre.

Le tenseur d’élasticité C s’écrit :


C ijkl = λδ ijδ kl + µ(δik δ jl + δ il δ jk ) (5)
Puisque le tenseur des contraintes ainsi que celui de déformations sont symétriques, le
tenseur C s’écrit donc sous une forme symétrique.
Pour la partie viscoplastique, c’est la fonction de Green et la méthode d’intégrale qui sont
s
utilisées. Le tenseur viscoplastique J ' est alors défini par :
1
J 's ijkl = (Pijlkl + Pjikl + Pijlk + P jilk ) (6)
4
avec P (le tenseur de Green) est donné par :

π 2π
−1
4π ∫0
Pijkl = sinθi ∫ ψ jr K r ψ ks K s G il (k)dϕ )dθ (7)
0
A noter qu’un paramètre du modèle prenant en compte la viscosité macroscopique, γ (où γ ≥ 0),
s
intervient dans le tenseur viscoplastique J ' .

Le module tangent est défini (Molinari et al, 2003) par :


1 1
Α ijkl = 2 µΚ ijkl avec K ijkl = (δik δ jl + δilδ jk ) − δijδ kl (8)
2 3

En replaçant tous les tenseurs relatifs aux parties élastique et inélastique définis auparavant
par les équations (2) et (3), la nouvelle loi d’interaction pour une forme d’inclusion ellipsoïdale
est alors déduite.
On utilise les équations constitutives du monocristal (Abdul-Latif et al, 2002) suivantes :

n
τs = σg:ms (9) ; R s = Q s ∑ H rs q r (10)
r =1

zs
τs − R s − k o
λ& s = (11) ; γ& s = λ& s sign(τ s ) (12)
Ks

g n
σ& λ
∑ γ&
g g g s s g g g
ε& e = − tr(σ& )I (13); ε& in = m (14) ; ε& = ε& e + ε& in (15)
2µ 2 µ( 2 µ + 3 λ) s =1

Au niveau du système de glissement, nous définissons une variable interne de l’écrouissage


isotrope intragranulaire (qs, Rs). Un système peut se plastifier quand la valeur absolue de la
contrainte de cisaillement résolue τs devient plus grande que le rayon réel de surface
d'écoulement : (Rs-ko) (Eq. 11), où ko est la valeur initiale de la contrainte critique résolue.
L'indice s∈{1,2,....,n} est associé au numéro du système avec n le nombre maximal de systèmes
octaédriques dans le grain (n=12 pour CFC). Après avoir déterminé le tenseur des contraintes

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s’exerçant sur chaque grain par la loi d’interaction (Eq. 1), la contrainte résolue τs sur chaque
système de glissement peut être ainsi exprimée en fonction de la contrainte granulaire σg et du
tenseur d’orientation de Schmid ms (Eq. 9). L’écrouissage isotrope intragranulaire sur le
système (s) est défini par son module Qs et son coefficient de non-linéarité bs (Eq. 10). La
matrice d’interaction de l’écrouissage isotrope Hrs (12x12 pour CFC) est censée décrire les
interactions de dislocation-dislocation, i.e., permettant de tenir compte de l’effet des autres
systèmes actifs, situés dans le même grain. Pour chaque système de glissement, le multiplicateur
viscoplastique se définit alors comme une fonction puissance de la surface de charge, défini par
Eq. (11). Ks et zs sont des constantes matérielles, permettant de décrire l’effet local de la
viscosité du matériau. L'effet de l’écrouissage cinématique est naturellement et globalement
décrit par la loi d'interaction (Eq. 1). La déformation élastique est présentée au niveau granulaire
(Eq. 8), où µ et λ sont les coefficients granulaires de Lamé. La vitesse de déformation
inélastique granulaire est déduite comme la somme de la contribution de tous les glissements
sur les systèmes activés de (Eq. 14).

3 Application du modèle

En ce qui concerne l’application du modèle, les calculs numériques sont effectués en


utilisant un agrégat de 400 grains et le jeu de coefficients présenté sur le tableau 1.

E (MPa) 71500 ν 0.3 γ 0.0000005 ko (MPa) 50.0


Ks 93.0 zs 14.0 bs 26.0 Qs (MPa) 475.0
b=c= 1.0 h1 1.0 h2 1.3 h3 1.3
h4 1.0 h5 1.1 h6 1.6

TABLEAU 1 – Les coefficients du modèle utilisés

500
alpha=1.5
gama=5x10-7
400
Contrainte axiale, Σ11(MPa)

300

vitesse=1e-5/s
200 vitesse=1e-4/s
vitesse=2e-4/s
vitesse=7e-4/s
100

0
0 0.02 0.04 0.06 0.08 0.1 0.12
Déformation axiale, E11

FIG. 1– Effet de la vitesse de déformation

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Afin de démontrer la sensibilité du modèle à la vitesse de déformation, 3 différentes valeurs


sont choisies: 7x10-4/s, 2x10-4/s, 1x10-4/s et 1x10-5/s. L’examen des données dans la Fig. 1
montre que, quelle que soit la vitesse utilisée, le modèle décrit convenablement l’évolution de la
contrainte axiale dans les parties élastique et inélastique. On constate que le modèle est sensible
à la vitesse de déformation dans la gamme choisie de 1x10-5/s -1x10-4/s. Cette sensibilité
diminue avec la diminution de la vitesse de déformation au delà d’une valeur de 1x10-4/s.

600
alpha=10
alpha=5
500 alpha=1.5
Contrainte axiale, Σ11(MPa)

alpha=0.5

400

300
b
200
a
-7
c
gama=5x10
100 α= a/b
vitesse de déformation= 2x10-4/s

0
0 0.02 0.04 0.06 0.08 0.1 0.12
Déformation axiale, E11

FIG. 2 – Effet de la forme de l’inclusion

Les résultats concernant l’effet de la forme du grain (via le rapport α) sont présentés dans la
Fig. 2. En fait, les testes numériques sont réalisées en traction monotone avec un agrégat de 400
grains. Il est clair que le paramètre α joue un rôle remarquable sur la réponse Σ11−Ε11 de
l’agrégat, i.e., plus on diminue α, plus la contrainte macroscopique augmente. De ce fait, pour
une déformation totale de 10%, à titre d’exemple, il est clairement démontré que la différence
entre la valeur maximale de la contrainte pour α= 0.5 et le minimum avec α= 10 est de 140
MPa. Une telle différence reflète l'importance de ce paramètre et son rôle sur le comportement
mécanique du polycristal.

L’effet du nouveau paramètre γ sur l'évolution de la contrainte globale (i.e., sur les
écrouissages cinématique et isotrope) est examiné. Pour cette raison, 3 valeurs de γ sont choisies
pour décrire son effet sur la réponse du polycristal. Enfin, d’après la Fig. 3, on note que le
modèle est tout à fait sensible à ce paramètre surtout pour la gamme de valeurs comprises entre
10-3 à 10-7 pour a et vitesse de déformation donnés. Autrement dit, plus la valeur de γ diminue
plus Σ devient importante.

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500

Contrainte axiale, Σ11 (MPa)


400

300

200
gama=5e-7
gama=5e-6
100 alpha=1.5 gama=5e-5
vitesse de déformation=10-4/s gama=5e-3

0
0 0.02 0.04 0.06 0.08 0.1 0.12
Déformation axiale, E11

FIG. 3– Effet du nouveau paramètre γ

4 Conclusions

Le modèle auto-cohérent proposé ayant une formulation non incrémentale a pour finalité de
générer une loi d’interaction grains/matrice plus douce par rapport aux autres modèles
incrémentaux, tout en adoptant le concept d’une inclusion ellipsoïdale. Cette loi d’interaction
est simplifiée en remplaçant le module tangent visqueux macroscopique par un nouveau
paramètre γ. Les prédictions obtenues pour un polycristal CFC montrent la capacité descriptive
du modèle à reproduire les effets de plusieurs paramètres tels que la forme des grains, la vitesse
de déformation et le paramètre γ.

Références

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Eshelby, J.D., 1957 The Determination of the Elastic Field of the Ellipsoidal Inclusion, and
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Kouddane, R., Molinari, A., Canova, G.R., 1993 Self-consistent Modeling of Heterogeneous
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