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Lettre ouverte des représentants du personnel Le 29 mai 2018

LSI et ex-GM&S
ZI le Cheix
23300 La Souterraine

A
Mr Jean Pierre FLORIS
Délégué Interministériel

Monsieur,

Votre interview donnée au journal la Montagne, datée du 25 mai nous a interpellés et


mérite de notre part une réponse.

En effet, vous y renvoyez dos à dos tout le monde comme si actionnaires, donneurs
d'ordre et salariés avaient le même niveau de responsabilité. Nous voulons vous rappeler,
si besoin était, que les salariés ne sont décideurs ni de la stratégie industrielle de
l'entreprise, entre les mains du principal actionnaire, ni de la politique d'achat des
donneurs d'ordre. Nous renvoyer à un égal niveau de responsabilité comme si nous
avions nous aussi « un effort » à faire est une drôle de façon pour un représentant de
l'Etat de jouer son rôle d’arbitre. On attendrait au contraire du représentant de l'Etat qu'il
se place du coté de ceux qui sont les plus fragiles. En l'occurrence, ici ce sont les salariés.
Les vrais responsables de la situation ne sont pas les salariés et leurs représentants
syndicaux (une telle hypothèse est même grotesque) mais les donneurs d'ordre et les
actionnaires peu scrupuleux qu'ils ont installés successivement à la tête de l'entreprise.

Vous aimez à rappeler qu'il ne faut pas parler du passé. Pourtant pour aller de l'avant, il
faut bien comprendre où sont les responsabilités.

En ce qui concerne les anciens actionnaires, nous vous renvoyons aux révélations de
Médiapart du 26 juin 2017 sur les pratiques délictueuses des actionnaires d'Altia qui ont
suscité un dépôt de plainte par la BPI elle même.
Nous renvoyons également à celles de L'humanité dimanche du 7 mai 2018 qui mettent
en lumière le caractère pour le moins obscur des montages financiers de notre ex
actionnaire Gianpierro Colla et le rôle de PSA et Renault dans son installation à la tête de
GM&S.

Depuis des années déjà nous dénonçons le non respect des engagements et le sous-
investissement.
Fallait-il se taire ? Fallait-il accepter ce qui arrive à tant d'entreprises de la sous-traitance
automobile ? Les salariés de LSI ex-GM&S se sont toujours battus pour de la charge de
travail pour le site, et c'est pour cela qu'on n'en aurait pas selon vous ?
Si nous ne nous étions pas battus, notre usine serait déjà fermée, et ce depuis la mise en
redressement judiciaire le 2 décembre 2016. Mais dans votre brillante analyse, c'est ce
combat qui est la « mauvaise image » de LSI et non les pratiques des actionnaires
successifs avec la complicité des donneurs d'ordres. Dans votre logique, si on se bat, c'est
de notre faute, mais si on se tait, c'est la fermeture programmée dans le silence
médiatique.
Depuis des années déjà les constructeurs cherchent à se désengager de notre site sous
prétexte de surcapacité du secteur. Quelle est la réelle surcapacité du secteur alors que
depuis 2008, plusieurs entreprises du secteur ont fermé tel que Beaucourt, St Nicolas
d’Aliermont, etc. D’autres sont dans le viseur, tel que STEVA Bessines, FSD St Florent
Cher… Dans le même temps, des capacités sont installées ailleurs en Afrique du Nord,
ou en Europe de l’Ouest. Quelle est la réalité des performances de ces unités, quel coût
global d’installation ? Il semble y avoir une contradiction entre création de capacité et
surcapacité, qui ne semble pas vous étonner.

Vous nous demandez de laisser le temps à la reprise de s'installer. Là aussi un retour sur
l'histoire est nécessaire et éclairant. Lors des deux dernières reprises, au début nous
n’avons rien dit pour laisser le temps de faire. Sous ALTIA, 15 jours après l'entreprise
avait déjà recours à des intérimaires mais ALTIA a pris le temps de mettre en œuvre un
montage juridico-financier qui a vidé l’entreprise de ces capacités financières et permis
d’arrêter sa dépendance vis-à-vis du site.
Faites un effort de mémoire et rappelez vous : avez vous entendu parler de GM&S en
2015 ? ! Forts des engagements vis-à-vis des salariés pris par PSA et Renault en Juillet
2014, nous avons décidé de laisser mettre en œuvre la reprise.
Malgré nos inquiétudes nous n'avons rien dit publiquement en 2015. Mais nous alertions
déjà la préfecture à partir de décembre 2015, de la dégradation de la situation. Pendant ce
temps là PSA s'organisait pour envoyer ses productions ailleurs...
Ce sont les mêmes (PSA et Renault) qui ont pris des engagements de volume devant
l’Etat en Mai 2016 et qui devant les salariés s'étaient engagés en Juillet 2014 à laisser les
productions sur le site, et à contribuer à son développement. On voit maintenant comment
ces engagements ont été respectés !

A la lumière de cette histoire pas si ancienne, on ne peut nous demander d'avoir


aveuglément confiance envers les engagements verbaux des uns et des autres, d'autant
que les éléments d'actualité ne nous incitent pas à nous réjouir. Sur le chiffre d'affaire
l'autosatisfaction n'est pas de mise.
Ainsi nous rappelons que Bruno LEMAIRE a annoncé dans son communiqué de presse
du 21 mai 2017, un chiffre d’affaire global de 25M€ pour 2018, dont 12M€ pour PSA et
10M€ pour Renault. Actuellement les prévisions sont à peine à 10M€ en tout.
Aujourd'hui vous semblez vous satisfaire de l'implication de PSA. Vous vous contentez de
peu. Actuellement, la charge de travail de PSA est de 650K€ par mois au lieu de 1M€. A
cette vitesse, on devrait atteindre 7M€ sur l'année. Loin des engagements !
Quand à Renault, la charge est de 350K€ par mois au lieu de 900K. A ce rythme, on
devrait attendre 3,5M€ de chiffre...Là aussi, Renault n'est pas au rendez vous !
On nous demande de faire confiance et de ne rien dire, alors que l’entreprise perd
350 000 à 400 000 euros par mois, alors que Mr Martineau devait mettre 2M€ de charge
sur la cataphorèse (engagement pris au tribunal de commerce, non concrétisé), alors que
PSA avait pris l’engagement de débloquer un ajout de 3M€ de CA avec des
équipementiers tel que Plastic Omnium, Valéo, Faurécia (non concrétisé), alors que vous
reconnaissez vous même que Mr Martineau n’a pas de plan industriel et commercial pour
le site 8 mois après la reprise! N'y a-t-il pas là une contradiction flagrante avec vos propos
sur la compétitivité de l'entreprise (ou alors y a-t-il une insinuation sournoise pour laisser
penser que seuls les salariés seraient concernés par cette question, comme si les salariés
étaient un frein à la compétitivité...) ?
S'il faut parler de compétitivité, alors parlons en, mais parlons en sérieusement, pas sous
forme d'allusions et de sous entendus faciles. Quand vous demande sur quels chiffres
vous vous appuyez, vous êtes en incapacité de nous répondre !
Est-ce ratio chiffre d’affaire/ effectif ? Mais dans ce cas, avec un chiffre d’affaire à la moitié
du prévisionnel, c’est plutôt normal d’être pas bon, mais à qui la faute ?
Est-ce en positionnement de la masse salariale ?
Nous rappelons que nous sommes dans la moyenne (basse maintenant) des salaires des
entreprises l’emboutissage en France, et en dessous de la moyenne de la Nouvelle
Aquitaine. De surcroit, si c’est vis-à-vis des autres entreprises de Mr Martineau, celles-ci
fonctionnent avec 100 à 150% d’intérimaires, ce qui n’est pas positionné sur la ligne
comptable de la masse salariale. Comparaison n'est pas toujours raison !
Est-ce en coût de presse ou en robotisation?
Le sous investissements stratégique chronique et planifié depuis de nombreuses années
est pénalisant néanmoins nous avons des presses qui restent performantes. Les premiers
robots ont été installés, il y a environ 30 ans sur le site et le dernier date de 2014
seulement.

Tout aussi scandaleux votre désintérêt pour la situation des salariés licenciés. Vous
n'avez même pas pris la peine d'assister aux discussions les concernant lors de la réunion
du 23 mai dernier.

Il est insupportable de vous voir sous entendre que le manque de charge de travail et de
perspectives seraient dus à la « mauvaise image de l'entreprise », qui ne serait le fait que
des actions des salariés. Cette tentative de nous caricaturer en syndicalistes qui ne sont
jamais contents, qui ne reconnaissent rien et qui contestent tout par principe n'est pas
digne de la situation.
En effet nous avons toujours reconnu les efforts et les apports dès lors qu'ils ont été autre
chose que des paroles. Nous avons salué le fait que l’Etat ait investi plusieurs millions
d’euros dans l’entreprise, nous avons salué le fait que Conseil Régional ait assuré la
poursuite d’activité avec un soutien financier important. Toutes ces actions ont permis à
l’entreprise de survivre et aux salariés de préserver leur emploi ces dernières années,
mais dans quelles conditions psychologiques ?
De même nous disons que les acteurs du reclassement font avec ce qu’ils ont à leur
disposition pour aider les salariés licenciés. 1500€ pour la mobilité et 2000€ pour la
création d’entreprise, tout le reste est le dispositif utilisé habituellement par Pôle Emploi
pour les salariés licenciés économiques. On jugera du caractère « exceptionnel » de cet
accompagnement.
Les personnels font ce qu’ils peuvent, mais force est de constater que les moyens ne sont
pas à la hauteur des difficultés spécifiques du reclassement sur notre territoire. Cela est
de la responsabilité de l'Etat que vous représentez

D’autres solutions sont possibles pour les repris et les licenciés :


 Au regard de l’activité du secteur automobile il est possible de retrouver rapidement
de la charge encore faut il que les constructeurs souhaitent le faire et/ou autorisent
Mr Martineau à transférer les productions.
 25 M€ de chiffre d’affaire comme les constructeurs s'y étaient engagés c’est 60
embauches nécessaires.
 Des mesures d’accompagnement doivent permettre une mobilité et des retours à
l’emploi des salariés licenciés avec des primes incitatives extra légales et des
mesures d’aide au retour à l’emploi.

Vous avez la responsabilité de la tenue des engagements des constructeurs et du


repreneur. Et ne vous en déplaise, vous avez aussi la responsabilité de la tenue des
engagements de l’Etat vis-à-vis des salariés licenciés.
Avec la volonté que ces précisions vous intéressent et permettent de clarifier les choses.
Nous vous adressons nos salutations.

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