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Environnements Périglaciaires
La préparation et l’édition de ce volume ont été assurées par Samuel ETIENNE (Géolab,
Université Blaise-Pascal Clermont-Ferrand II).
Environnements périglaciaires n°9 — 2002
SOMMAIRE
Communications écrites
Jean-Pierre COUTARD et Jean-Claude OZOUF — Bibliographie : Action du gel sur les roches et les
sols. Expériences de laboratoire menées au Centre de Géomorphologie du CNRS à Caen p. 12-17
Communication hors-thème
Informations diverses
PERIGLACIAIRE ET EXPERIMENTATION
Jean-Pierre COUTARD
CNRS UMR 6143 Morphodynamique Continentale et Côtière
Centre de Géomorphologie
24, rue des tilleuls 14000 Caen
Résumé :
Dans le domaine du périglaciaire, les expériences ont porté sur des processus très divers : fourniture de
matériaux par des processus mécaniques (cryoclastie), transport par les processus de versant (éboulisation,
cryoreptation, gélifluxion, flots de débris), tri et structuration des matériaux. L’intérêt principal de l’expéri-
mentation est de valider des hypothèses ou des modèles formulés après des études quantitatives sur le ter-
rain. Les avantages sont : la réduction des temps morts, la mesure à tout instant donc une approche plus
précise des paramètres intervenant dans le processus analysé, éventuellement une meilleure modélisation
physique et mathématique des phénomènes. On peut reprocher à certains essais une trop grande simplifica-
tion entraînant des difficultés lors du retour vers le milieu naturel (explication partielle des faits observés).
Mais jusqu’où peut-on accroître la complexité des expériences?
A la fin de l’expérience, deux cas peuvent se thèses émises à propos de la genèse des cryo-
présenter. Dans le premier cas, l’hypothèse est turbations. Cela entraîne la diversification et la
validée et les résultats insérés dans la démarche multiplication des essais et la réunion de com-
scientifique poursuivie. Dans le second cas, l’hy- pétences complémentaires. Dans le domaine du
pothèse n’est pas clairement démontrée. Généra- froid, des physiciens, des géotechniciens et des
lement, l’expérience n’est cependant pas un échec géomorphologues se sont attelés à la tâche.
complet puisqu’elle peut suggérer de nouvelles
Au cours des expériences les plus complexes
idées ou bien mettre en évidence le rôle de
et les plus avancées, on aboutit à un véritable
paramètres auxquels une attention insuffisante
décorticage des processus. L’intervention de
avait été portée.
chaque paramètre intrinsèque ou extérieur est
Vient enfin la dernière étape, fréquemment prise en compte. Par exemple, pour le processus
la plus délicate à franchir, celle de la confronta- de gélifraction sont mis en évidence, d’une part,
tion des acquis expérimentaux avec les données le rôle de la porosité totale et de la porosité
de terrain. de fissure, ceux de la taille des pores et de la
résistance mécanique et, d’autre part ceux de la
L’expérimentation peut se faire en laboratoire,
teneur en eau, de l’intensité du gel, de la vitesse
où les conditions d’observation et de mesure
de descente en température. Dans le processus
sont les plus optimales, mais aussi dans le milieu
de gélifluxion sont surtout pris en compte :
naturel. C’est ainsi que grâce à des marqueurs
la granulométrie du matériau, plus particulière-
colorés mis en place sur le terrain dans le massif
ment ses teneurs en silt et argile, sa résistance
du Chambeyron A. Pissart (1973 et 1982) a
au cisaillement, sa teneur en eau, la valeur de la
démontré le rôle de la cryoexpulsion et de la
pression interstitielle et par ailleurs celle de la
migration latérale des pierres dans la genèse des
pente.
sols polygonaux triés.
Le stade le plus évolué de la recherche expéri-
L’expérimentation et le degré de développe- mentale est représenté par le couple expérimen-
ment des connaissances tation-modélisation. La synthèse des résultats
expérimentaux peut être exprimée sous forme
Toutes les expériences n’ont pas le même degré
d’abaques comme celles proposées par Letaver-
de précision. Cela tient à l’évolution générale
nier pour les roches calcaires (Letavernier, 1986
des connaissances. Il est normal, au début d’une
; Letavernier et Ozouf, 1987) qui donnent, en
investigation, de commencer par des choses sim-
fonction de la porosité, de la teneur en eau et de
ples pour mieux cerner un problème ou un phé-
la température, la résistance au gel de la roche
nomène géomorphologique. Les acquis succes-
ainsi que la forme et la taille des débris. De cette
sifs permettront ensuite d’aller vers des aspects
façon est établi une sorte de modèle prédictif du
physiques plus fondamentaux.
comportement au gel de ces roches.
Par exemple, au début des études de cryoclas-
Un processus peut être modélisé du point de
tie, des dizaines de faciès de roches diverses ont
vue physique et mathématique et, dans ce cas,
été soumis aux mêmes protocoles de gel à – 5° C
l’expérience servira à tester l’équation proposée.
et – 15° C (gel islandais et gel sibérien) dans les
Celle-ci sera validée s’il y a un bon ajustement
chambres froides du Centre de Géomorphologie
entre les valeurs calculées et celles mesurées au
du CNRS à Caen afin de tester globalement l’im-
cours de l’expérience. Citons en exemple la simu-
pact de l’intensité du gel et d’établir des échelles
lation en chenal expérimental, sous température
de gélivité générales. Ces dernières avaient pour
contrôlée, de l’érosion des berges des fleuves
but de mieux comprendre le rôle du gel dans
sibériens menée par Makhloufi et al. (1999).
l’érosion différentielle des reliefs.
L’équation fait intervenir la température du sol
Le développement des recherches conduit à gelé, celle de l’eau, le nombre de Reynolds et des
une multiplication des théories et des hypothèses coefficients de transfert de la chaleur établis par
(Coutard et al., 2000). C’est ainsi que pas moins Lunardini lorsqu’il y a écoulement d’eau sur la
de six théories ont été énoncées pour expliquer le glace.
processus de cryoclastie et trois ou quatre hypo-
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relles. Une fraction fine a été produite en quan- ments (Harris et al., 2000). Le comportement
tité non négligeable. géotechnique du matériau au cours des cycles
gel-dégel a été semblable dans les essais de
Pour des effets similaires d’un processus
Caen et de Cardiff de même que la répartition
donné, des décalages apparaissent parfois entre
des déplacements en surface et en profondeur.
les valeurs des paramètres enregistrées d’une
Cependant, les valeurs de ces derniers était un
part au cours des expériences et d’autre part
peu plus élevées dans l’expérience en machine
dans le milieu naturel. Un exemple, pour obte-
centrifuge.
nir le même degré de fragmentation d’un calcaire
bathonien de Caen, les températures enregistrées
Quelques acquis en cryoclastie
dans la paroi proche du Centre de Géomorpho-
logie du CNRS étaient moins basses que celles Le simple rôle de l’expansion volumique due au
déduites des abaques de Letavernier construites changement de phase eau-glace est controversé.
à partir d’essais sur des échantillons parfaitement Il implique une saturation en eau totale des pores
sains (Coutard, 1995). Cette différence s’expli- et un gel par toutes les faces (création d’un milieu
que par une plus grande fragilité de la roche de clos). Expérimentalement on obtient un éclate-
la paroi qui a subi l’action cumulée de nombreux ment de blocs. Mais, dans le milieu naturel, les
cycles thermiques, avec passage ou non du zéro, deux conditions préalables sont rarement réu-
et hydriques tout au long des années (fatigue nies.
mécanique du matériau). La pression de croissance linéaire des cristaux
semble jouer un rôle dans la fragmentation des
Dernier problème posé, celui des rapports
parties les plus fissurées des roches (McGreevy,
d’échelle. Dans notre discipline, la géomorpho-
1982). La pression capillaire et la couche d’eau
logie, peu d’expérimentateurs ont respecté des
adsorbée (théorie d’Everett, 1961) interviennent
règles précises équivalentes à celles utilisées par
à de très basses températures indispensables
les concepteurs de modèles réduits en hydrauli-
pour provoquer le changement de phase de l’eau
que (modélisation du Port du Havre ou de la baie
adsorbée.
du Mont-Saint-Michel). Le modèle employé pour
de récentes expériences sur la mise en place de De nombreux auteurs ont démontré et insis-
dépôts hétérométriques de versant mesurait un tent sur le rôle de la formation de lentilles
mètre de large et deux mètres de long. L’épais- de glace dans la fragmentation des roches par
seur du matériau mobilisable était voisine de 30 écaillage, délitage, exploitation des fissures (voir
cm alors que dans le milieu naturel celle de la revue dans Prick, 1996). Plus récemment l’ex-
couche disponible pour abonder la formation de périmentation a mis en évidence celui du pergéli-
pente est de 100 à 170 cm. D’où la nécessité sol dans la naissance d’une couche intensément
d’éliminer les plus gros éléments qui auraient gélifractée dans les massifs rocheux au contact
immédiatement bloqué tout mouvement. Bien sommet du pergélisol-base de la couche active
entendu sur deux mètres de longueur de pente (Murton et al., 2001).
les masses de matériau et d’eau concernées sont En ce qui concerne les roches calcaires, les
sans commune mesure avec ce qui existe sur divers essais ont montré que le degré de gélivité
un grand versant. C’est la convergence entre les était en rapport avec l’importance de la porosité
processus prenant place au cours de l’expérience totale mais surtout avec les dimensions des pores
et ceux observés sur le terrain qui conduit, en et leur répartition ; ceci a été analysé avec préci-
fait, à valider cette dernière. Toutefois, pour des sion par Letavernier et Rémy. Le type d’endom-
essais en très petite cellule et dans les conditions magement de la roche est principalement lié à
particulières d’utilisation d’une machine centri- la géométrie du réseau poreux : réseau capillaire
fuge, des lois d’échelle strictes ont été appliquées. simple (roches les plus gélives) réseaux poreux
L’échelle au 1/10ème, par rapport aux grands complexes multimodaux où toute l’eau ne gèle
modèles de Caen, choisie pour un essai de géli- pas à la même température d’où des contraintes
fluxion entrepris à Cardiff a amené les concep- mécaniques plus progressives et mieux réparties
teurs à appliquer 10 g pour conserver la valeur de (roches moins gélives) comme le prouvent les
la force normale exercée par la colonne de sédi- travaux de Rémy (1993).
Environnements périglaciaires n°9 — 2002
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BIBLIOGRAPHIE
La bibliographie qui suit regroupe, d’une part, des travaux publiés par le Centre de Géomorpho-
logie du CNRS lui-même et, d’autre part, des publications : articles, thèses, extérieures à celui-ci
mais renfermant des résultats d’expériences ayant fait appel à ses moyens matériels et à son per-
sonnel. Trois rubriques ont été distinguées : action du gel sur les roches (cryoclastie), action du
gel sur les sols (structuration, gélifluxion, cryoexpulsion) et applications au génie civil.
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april 25-27, 1984, Carleton University, Ottawa
ed., 19-21.
Didier ROLIN
Université Paris XII – Val de Marne
94000 Créteil cedex
Laboratoire : Géodynamique des Milieux Naturels et de l’Environnement
stevdicel@interpc.fr
Résumé
Dans le bassin-versant de la Grande Sassière à Tignes (Savoie), la solifluxion est un processus périglaciaire
très actif. Sur l’ubac schisteux de la Pointe du Picheru (2953 m), les déplacements de 12 coulées de soli-
fluxion ont été suivis de 1996 à 1999. La méthode utilisée est celle des piquets à inclinométrie qui permet de
donner des ordres de vitesse sur tout un profil. Sur trois ans, les déplacements constatés sont très variables,
de 2,5 à 174 cm, mais dans l’ensemble plus importants que les observations déjà réalisées dans les Alpes.
Le processus est à 99 % d’origine périglaciaire. Certains éléments sur le terrain, comme le type de végéta-
tion recouvrant les coulées ou la forme de leur front, sont d’excellents indicateurs de vitesse. De même il
existe une relation nette entre les limites d’Atterberg et les variations de teneur en eau des coulées, qui vont
commander leur activité.
Introduction
françaises, les points abordés n’ont pas ou peu en banquettes, en lobes, en coulées, et autres ter-
porté sur les relations entre les déplacements et rassettes ou terrasses, qui résultent du processus
la végétation, les déplacements et la granulomé- de solifluxion.
trie, les déplacements et la variation des teneurs
en eau des coulées. Des études et des analyses Les causes de la solifluxion sont au nombre
fines ont été réalisées, des hypothèses ont fré- de quatre. On peut en qualifier trois d’externes :
quemment été émises, mais elles ont été rare- la gravité, les alternances gel-dégel, les variations
ment vérifiées. Il était donc nécessaire de mieux d’humidité, et une d’interne, les caractéristiques
connaître l’ampleur et les modalités de ce pro- physiques des coulées de solifluxion : texture,
cessus. granulométrie, porosité, perméabilité, cohésion,
conductivité thermique.
Boréal 8800-7700 BP), elles sont apparues à les trois possibilités peuvent se combiner mais le
partir de mouvements de masse et de glissements processus de solifluxion résulte surtout du troi-
le long des versants qui ont ensuite évolué en sième cas.
coulées grâce à des conditions climatiques favo-
rables. 2. METHODOLOGIE
1.2. Sur les lois physiques régissant la méca- Un certain nombre d’exigences ont conduit à réa-
nique des sols et la rhéologie des coulées de liser une sélection précise du matériel à employer
solifluxion. pour réaliser les mesures de déplacement. Il fal-
lait un appareillage capable de lire les mouve-
Du fait de l’action de la gravité, le comporte- ments en surface et en profondeur, à des pas
ment des coulées de solifluxion va dépendre de de temps répétés, que ce matériel soit utilisable
la loi de Coulomb. Elle correspond pour les mas- par une personne seule ou une équipe réduite, et
sifs en terre à la relation entre la contrainte nor- qu’il soit adapté aux conditions difficiles de ce
male et la contrainte tangentielle (t = c+s tg f). c milieu montagnard.
exprime la cohésion, f exprime l’angle de frotte-
ment interne. c comprend la cohésion vraie (qui 2.1. Les méthodes d’évaluation du déplace-
dépend des liaisons ioniques et moléculaires), et ment des formes de solifluxion
la cohésion apparente (forces d’attraction liées
aux tensions capillaires). f est l’angle de frotte- Parmi toutes les méthodes de mesures possibles
ment interne correspondant à une pente d’équi- en surface comme en profondeur (Auzet, 1985),
libre lorsque la cohésion est nulle. L’angle de c’est l’appareillage de mesure d’inclinométrie en
frottement interne est fonction de l’organisation profondeur « Morand » qui a été retenu. Ce dis-
intergranulaire et du volume d’eau interstitielle. positif a servi à la station expérimentale de Cés-
Dans le cas de la solifluxion, la teneur en eau agit sieres (02), et il a été utilisé en Vanoise sur la
sur la cohésion et l’angle de frottement interne et crête de Lanserlia par B. Kaiser (1988). Il est
la loi de Coulomb devient : t = c’+s‘ tg f‘. c’, s‘, et précis, facile à utiliser dans les terrains difficiles,
f‘, font référence à la teneur en eau. La cohésion et permet de réaliser des mesures à de multiples
et l’angle de frottement interne, en relation avec pas de temps et de donner un ordre de dépla-
la teneur en eau, vont déterminer le comporte- cement moyen sur tout un profil. L’appareillage
ment des coulées de solifluxion. Ce comporte- de mesure inclinométrique de Morand permet, à
ment s’effectue en liaison directe avec les carac- partir de piquets plantés dans le sol, de lire leur
téristiques physiques de la formation concernée variation angulaire entre deux périodes de temps,
telles que la compacité du matériel, la granu- et d’en déduire un déplacement par un simple
lométrie, la forme des grains… Il faut garder calcul de différence angulaire. Une tige munie
en mémoire le rôle des argiles dont l’influence d’une réglette graduée (1 cm pour 1° d’angle) et
est plus complexe que les matériaux plus gros, d’un fil à plomb placé sur une tête de lecture
du fait de leur imperméabilité relative, de leur située au sommet d’un piquet enterré, permet
capacité de rétention d’eau, et de leur pouvoir de la lecture de son angle dans le sol. Le dépla-
cohésion. cement en profondeur est une valeur moyenne
Dans la pratique, on peut rencontrer trois car le piquet est rigide, il ne peut pas se défor-
types de comportement d’un sol face aux pres- mer comme le font des tubes-repères en pvc par
sions qu’il subit. Un sol va être élastique, lorsque exemple, mais qui sont à usage unique.
la déformation est suivie d’un retour à la position
initiale, plastique rigide, lorsque la formation est Pour évaluer les déplacements des coulées
soumise à un cisaillement, visqueux, lorsque la de solifluxion, un protocole d’étude a été établi
formation se déforme pour suivre un comporte- de façon à standardiser les mesures sur chaque
ment proche du liquide. Dans les deux premiers coulée afin de les comparer entre elles : mêmes
cas, on distingue une rupture une fois passé un dates de mesures d’une année à l’autre, même
certain seuil de résistance. Dans le troisième cas, emplacement des piquets d’une coulée à l’autre,
il y a déformation sans rupture. Dans les faits, prélèvements d’échantillons de terre au même
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endroit pour toutes les formes. Les piquets sont les déplacements des coulées que les piquets
au nombre de cinq par coulée, ils sont disposés en acier pleins, plus denses (± 7,9), qui étaient
à environ quatre mètres en amont de la conve- autrefois utilisés et qui pouvaient avoir tendance
xité du front terminant à l’aval les coulées. Trois à glisser plus vite que le sol si celui-ci était sursa-
d’entre eux ont une longueur de cinquante centi- turé en eau. De plus, cette disposition les rend
mètres et sont plantés dans le corps des coulées. difficilement expulsables par le gel car se sont les
Ce sont eux qui vont suivre les mouvements matériaux situés à l’intérieur qui sont éjectés, par
des coulées car ils sont considérés comme suffi- les piquets.
samment longs pour suivre le déplacement d’en-
semble, mais suffisamment courts pour ne pas Les mesures sont toujours effectuées à date
traverser le corps des coulées et se ficher dans le fixe, vers la fin du mois de juin et au début du
versant sous-jacent, ce qui les immobiliserait. Les mois de septembre. Eventuellement, des mesu-
deux autres piquets sont longs de quatre-vingts res supplémentaires ont pu être effectuées en
centimètres. Ils sont directement plantés dans le cas d’événement particulier (orage violent, pluie
versant de part et d’autre des coulées. Leur pro- durable, coup de froid...). Lors de chaque campa-
fondeur d’implantation leur permet de rester fixe gne de mesure, l’inclinaison de chaque piquet est
et de servir de repère « absolu » pour mesurer relevée ainsi que sa direction cardinale de plon-
les déplacements des piquets sur les coulées. Un gement par rapport au nord.
fil tendu entre ces deux bases sert à mesurer le
déplacement des piquets des coulées par rapport Les mesures sont destinées à connaître :
à leur position initiale. Les piquets (en fait des – le déplacement total sur un pas de temps
tubes en inox) ont la particularité d’être creux, ce donné,
qui les rend plus légers que des piquets pleins. – la part du déplacement par rotation dans le
Cette disposition leur permet de se remplir de mouvement total,
terre lors de leur implantation, ce qui leur con- – la part du déplacement revenant à la transla-
fère une densité plus proche de celle du milieu tion.
ambiant (± 1,5 pour les piquets en place contre
1,2 à 1,6 pour le sol). Ils suivent donc mieux Dans ce cas : 1 – Le déplacement total équivaut
à la distance séparant un piquet d’une coulée de moyenne de 50,4 cm parcourus en trois saisons.
sa perpendiculaire par rapport au fil tendu entre C‘est donc une progression de 15,6 à 16,8 cm par
les deux bases, 2 – Le déplacement par rotation an que connaissent les coulées de solifluxion sur
résulte de la différence d’inclinaison des piquets l’ubac du Picheru. Selon les années, les déplace-
à Txn+1-Txn-1. ments moyens varient de 13,9 cm en 1997-1998,
à 21,4 cm en 1998-1999.
La valeur du déplacement par rotation lue
avec l’inclinomètre est connue en utilisant deux Il faut relativiser la moyenne des déplace-
formules de trigonométrie relatives à la position ments car l’écart type de 56,4 cm signifie que
initiale des piquets : l’écart entre le déplacement d’une coulée et le
– le déplacement par translation correspond déplacement moyen des coulées de solifluxion
au déplacement total moins le déplacement par est de 56,4 cm, ce qui est beaucoup. Le dépla-
rotation (Tslt° = Dtot – Rot°). cement médian, de 31,1 cm, indique que les
mouvements sont soit plutôt faibles, soit plutôt
Dans la réalité, les possibilités de mouve- importants, mais pas moyens. En effet, 9 coulées
ments des formes solifluantes sont infinies. Elles ont parcouru moins de 50 cm en trois ans, 3
concernent des déplacements par rotation et/ou ont avancé de plus de 100 cm, mais aucune n’a
translation, simple ou composite. parcouru entre 50 et 100 cm. Par année hydro-
logique (01/10 au 30/09), 1998-1999 représente
On peut rencontrer des mouvements simples à elle seule 42 % de l’activité solifluante après
avec : une absence de déplacement, un dépla- 1996-1997, 30 %, et 1997-1998, 28 %. En sur-
cement d’ensemble sans rotation (translation), face, le fluage se distingue par une vitesse crois-
une rotation simple par déplacement accéléré en sante des bords vers le centre, qui progresse en
surface, une rotation inverse par déplacement moyenne de 10 cm en plus pour l’ensemble des
accéléré en profondeur, sans compter qu’un coulées. Les extrêmes variants de +1 à +88 cm
pivotement des piquets sur leur axe n’est pas par rapport aux côtés. Pour deux des coulées,
exclu. les mouvements sont plus rapides sur les bordu-
res qu’au centre. Cela résulte probablement d’un
On peut rencontrer des mouvements com- dégel inégal de leur corps. Des mesures de tem-
posites comprenant : une rotation simple et une pératures en surface et en profondeur à différen-
translation, une rotation inverse et une transla- tes périodes du mois de juin ont montré que les
tion, ou une succession de ces deux types de côtés et la surface dégèlent sur 10 à 25 cm au
mouvements. moins une semaine avant le centre.
Sur le terrain, 12 coulées de solifluxion ont été A titre d’observation plus que de comparai-
sélectionnées au hasard. Elle ont toutes reçues son, car les sites, les méthodes, et les pas de
un nom féminin au lieu d’un numéro trop ano- temps retenus sont très variés, on peut observer
nyme. les résultats donnés par d’autres auteurs dans les
Alpes. Il en ressort des mouvements importants
3. LES RESULTATS dans le bassin-versant de la Grande Sassière, sans
commune mesure avec les autres lieux cités. Il
3.1. Les déplacements moyens s’avère en effet que le processus de solifluxion
est particulièrement actif sur l’ubac du Picheru.
Sur le total des trois années d’étude, les dépla-
cements varient de 2,5 cm à 173,8 cm, soit une 3.2. La différentiation des mouvements par
variabilité des déplacements de 69,5. Le déplace- rotation et translation
ment moyen par coulée est de 46,7 cm, en tenant
compte de l’absence de mesures en 1998-1999 En considérant un déplacement moyen sur trois
pour une coulée qui n’a pas pu être mesurée. ans de 46,7 cm, il en a été parcouru 19,4 (41,5 %)
En lui extrapolant une valeur égale à la moyenne par rotation, et 27,4 (58,5 %) par translation.
des deux années précédentes, on obtient une La translation est bien majoritaire mais pas de
24
Tableau 3 - Déplacement différentié du piquet central par rapport aux progressions moyennes des bordures de chaque coulée
manière flagrante. Ce chiffre moyen cache mal suivante. Mais, un certain nombre de facteurs
une réalité où les mouvements sont très dispara- autres que climatiques influent directement sur
tes d’une coulée à l’autre, et d’une année à l’autre le comportement des coulées de solifluxion. Ces
sur une même coulée, même si les coulées se facteurs sont : la pente, la végétation, le type de
déplaçant rapidement le font plus par transla- végétation, et la granulométrie. Cette dernière va
tion. contrôler la cohésion d’ensemble de la coulée ou
d’une partie de la coulée en intervenant sur l’im-
3.3. La dynamique saisonnière hiver/été portance de la glace de ségrégation, la teneur en
eau, la vitesse d’assèchement… Mais, si le rôle
Si on tient compte des déplacements par saison, de ces facteurs est connu, il est difficile de l’éva-
la sortie de l’hiver (juin) recueille 99 % de la luer précisément et de savoir quelle importance
dynamique, contre seulement 1 % (1,2 %) en été, l’un d’entre eux peut prendre dans l’ensemble
qui joue un rôle insignifiant. du processus de solifluxion. Un travail d’analyse
d’échantillons de terre en laboratoire et une étude
L’étude montre que le processus de soli- statistique a permis de mieux cerner ces aspects.
fluxion dans le bassin-versant de la Grande Sas-
sière résulte du fait périglaciaire. Plus que de 4.1. Un processus rythmé par l’apparition et
solifluxion, il s’agit ici de gélifluxion car au prin- la fin de la saison froide
temps, le dégel des coulées et la fusion du
manteau nival entraîne des déplacements par 4.1.1. La date de mise en mouvement des coulées
imbibition des parties dégelées en eau de fonte
et sursaturation des sols en eau. Lors de la sur- Les mesures de températures pratiquées sur
saturation en eau des formes au printemps, le le terrain et les comparaisons avec la station
mouvement se traduit par un fluage plastique nivométrique proche du Chevril (2450 m) ont
pouvant dans certains cas approcher un véritable montré que le processus de solifluxion se pro-
écoulement boueux. duit entre la dernière semaine de mai et le 10
juin. La présomption est très forte pour le début
4. L’INTERPRETATION DES RESULTATS du mois de juin, moment où les températures
moyennes redeviennent positives. Avant cette
Si les modalités de la fusion nivale et du dégel date, les coulées sont encore gelées, après, elles
sont cruciales dans l’activation du processus, ont toutes bougé.
les conditions de la réapparition du froid en
automne n’ont pas d’influence sur la saison active L’activation du processus de solifluxion
semble marqué par la régularité d’une année à fluxion et la variation de teneur en eau estivale
l’autre, car elle dépend des conditions thermi-
ques et la vitesse de fusion du manteau nival en 4.2.1. Une granulométrie pauvre en fines
fin de saison, qui connaissent elles-mêmes une
La part des matières organiques est faible, envi-
certaine régularité. C’est la conjonction d’une
ron 1,3 % du poids des échantillons de terre
fusion nivale rapide avec un dégel simultané et
prélevé dans le flanc des coulées à 25 cm de pro-
au moins partiel du corps des coulées de soli-
fondeur. Les argiles sont aussi faiblement repré-
fluxion qui va enclencher le fluage. La coulée
sentées avec des teneurs variant de 0,25 % à 1,7
évolue rarement d’un seul bloc mais de manière
% du poids total à sec des échantillons. La frac-
différentielle car le dégel n’est pas toujours égal
tion inférieure à 20 m reste là encore faible, entre
à l’intérieur des formes. Au printemps 1999, j’ai
0,9 et 15,8 % du poids total des échantillons
constaté des déplacements plus importants que
(moyenne à 4,4 %). Contrairement à d’autres
d’habitude dus au retour des températures posi-
auteurs comme Kaiser (1988), qui a trouvé en
tives plus lentes que les autres années. Simultané-
Vanoise à Lanserlia des proportions plus fortes
ment, la fonte des neiges a été assez lente en
(1,4 à 7,5 % à 20-25 cm de profondeur), l’argile,
relation avec cette évolution thermique. Il en a
par sa rareté, n’a pas d’influence directe sur
résulté un dégel très progressif des coulées et
la dynamique solifluante dans le bassin-versant
une imbibition en eau de fonte elle aussi progres-
de la Grande Sassière. Si influence il y a, elle
sive, ce qui a probablement entraîné des mou-
provient donc de l’absence de ce matériau qui
vements plus poussés que d’habitude (42 % du
entraîne une moindre cohésion des coulées, et
total des trois années). Il n’est donc pas impossi-
donc des déplacements importants lors de la
ble que plus le dégel des coulées et la fonte des
saturation en eau.
neiges se font graduellement, et plus le dépla-
cement possible soit important. Les années ont
4.2.2. L’évolution de la teneur en eau des coulées durant
manqué pour effectuer cette démonstration.
la saison estivale
4.1.2. L’engel des coulées en automne Entre le 10 et le 15 juin, la teneur en eau
moyenne des coulées alterne selon les années de
L’étude sur le terrain a montré que les modalités 18,2 à 21,7 % du poids des échantillons de terre
d’engel des coulées en automne, avec son cor- (moyenne 20,4 %). Pour atteindre la saturation
tège de variabilités climatiques fortes, n’influent des coulées, la teneur en eau moyenne doit être
pas sur l’activation et l’importance du processus de 23,3 % du poids des échantillons. Cette valeur
au printemps suivant. En octobre, les températu- est atteinte durant la première décade de juin
res minimales deviennent ou sont déjà négatives, car la plupart des coulées sont alors totalement
les températures moyennes négatives apparais- saturées d’eau. En moyenne, lors des prélève-
sent en novembre. Quel que soit l’état du man- ments vers le 10 juin, les coulées de solifluxion
teau neigeux qui peut s’installer précocément sont à 87,8 % de la valeur nécessaire pour attein-
(octobre) ou tardivement (décembre), à 2450 m, dre le stade de saturation, valeur qui varie de
il apparaît qu’à la fin du mois d’octobre, les 85,6 % à 89,3 % selon les années. On est donc
coulées sont gelées ou commencent à geler (0 à très proche du seuil fatidique de mise en mou-
–1° à 25 cm). vement par saturation en eau. Bien entendu, les
teneurs en eau sont très variables d’une coulée à
l’autre mais, dans l’absolu, elles sont toutes très
proches de la saturation.
4.2. La granulométrie des coulées de soli- Curieusement, la teneur en eau des coulées
28 Environnements périglaciaires n°9 — 2002
qui n’est que relatif, montre que des variables 4.3.1. Les relations entre les déplacements totaux des
interviennent en fait dans le processus, et que coulées et les variables de terrain
l’on ne peut s’en tenir à cette relation simple. Ces
variables expliquent les déplacements différen- Les relations statistiques entre les déplacements
ciés d’une coulée à l’autre, alors que toutes les totaux et les variables de terrain sont :
coulées atteignent la saturation au printemps, et — la relation déplacement / pente :
donc devraient bouger de manière homogène. r = 0,1 r2 = 0,013
x = 1,98 y + 60,65
La question est maintenant de savoir quelles
sont ces variables et quelle est leur importance — la relation déplacement / taux de végétali-
dans l’ensemble du processus ? A cela, une étude sation :
statistique simple peut apporter une réponse, en r = -0,9 r2 = 0,78
mettant en relation les différentes variables inter- x = -1,25 y + 120,7
venant dans la solifluxion avec leurs déplace-
ments totaux sur 3 ans. — la relation déplacement / type de végéta-
tion :
4.3. L’apport des statistiques pour une r = 0,82 r2 = 0,67
meilleure compréhension du processus de
solifluxion a. La relation déplacement / pente
Il s’agit d’aborder les relations statistiques exis- Il n’y a pas de rapport direct entre le déplace-
tant entre le déplacement des coulées de soli- ment et la pente des coulées dans la gamme de
fluxion, et des critères de terrain tels que la pentes où l’on rencontre le processus (15 à 25°).
pente, le taux de recouvrement végétal, le type Il est évident que la relation pente-processus
de végétation majoritaire, ou des critères mor- existe bien. Pour s’en convaincre, il suffit d’éta-
phologiques comme le rapport L/l des coulées, blir le coefficient de détermination 1. Le coeffi-
leur épaisseur, ou leur type de front, ou même cient égal à 0 ou presque indique bien que les
le déplacement et les limites d’Atterberg. Ces cal- valeurs de pentes n’expliquent pas la relation sta-
culs ont permis de tirer un certain nombre de tistique ci-dessus dans la mesure où il n’existe
conclusions intéressantes. pas de liaison fonctionnelle affine entre y et x.
Ce n’est donc pas la pente, car les valeurs entre
les coulées sont trop proches, qui explique l’im-
portance du déplacement dans le cas présent. La
pente agit comme une variable conditionnant la
présence du processus (au dessous, il y aurait
30 Environnements périglaciaires n°9 — 2002
Il existe une liaison relative négative très forte qui — La classe 1 s’applique aux pelouses alpines
démontre que plus le déplacement des coulées denses à fétuque de Haller (Festuca halleri), ses-
est important, plus le taux de recouvrement par lérie bleuâtre (Seslaria caerulea) et laîche courbée
la végétation est faible, ce qui semble logique. (Carex curvula).
Mais, est-ce la vitesse de déplacement qui expli- — La classe 2, aux surfaces recouvertes en
que le taux de recouvrement ou l’inverse ? Le majorité de dryades à huit pétales (Dryas octope-
coefficient de détermination de 0,78 indique une tala).
assez forte corrélation en X et Y qui autorise à — La classe 3, aux coulées partagées entre la
dire que le taux de recouvrement des coulées par pelouse et les dryades.
la végétation est expliqué à 78 % par la vitesse — La classe 4 se rapporte aux coulées à drya-
de déplacement. Plus les coulées évoluent rapi- des et végétaux dits « de rocaille et d’éboulis » :
dement, et moins la végétation n’a le temps de saule à feuilles émoussées (Salix retusa), saxifrage
les coloniser. La végétation, qui est un facteur faux bryum (Saxifraga bryoide), orpin noirâtre
de stabilité des formes géomorphologiques, n’est (Sedum atratum), armoise des glaciers (Artemisia
pas en mesure de s’installer durablement au-delà glacialis), achillée naine (Achillea nana), renoncule
d’un certain niveau d’activité morphodynamique, des glaciers (Raununculus glacialis), silène sans
qu’il n’est pas possible de définir ici. Malgré tout, pédoncule (Silene exscapa).
on constate qu’à partir d’un taux de végétalisa- — La classe 5, revient aux coulées seule-
tion de 50 %, les vitesses de déplacement se ment colonisées par des végétaux de rocailles et
ralentissent nettement. d’éboulis.
Environnements périglaciaires n°9 — 2002 31
Le taux de recouvrement, qu’il soit de 1 ou 4.3.2. La relation entre le déplacement des coulées de soli-
de 100 % n’a pas été pris en compte, seul le type fluxion et leurs critères morphologiques
de végétal l’a été. Le coefficient de corrélation
linéaire de 0,82 montre qu’il existe une liaison Les relations statistiques entre le déplacement et
relative, et donc que la végétation est un bon les critères physionomiques des coulées sont :
indicateur de l’activité morphodynamique. Les
pelouses se rapportent aux coulées stables (par- — la relation déplacement / rapport lon-
courant de 0 à 20 cm environ en 3 ans). De gueur x largeur des coulées :
même, les dryades seules représentent surtout r = 0,1 r2 = 0,01
des coulées lentes mais aux surfaces plus sèches
que les pelouses (déplacement -Dt- = 6,5 cm). — la relation déplacement / épaisseur des
Les dryades, lorsqu’elles sont mélangées à de la coulées :
pelouse indiquent une certaine activité (Dt = 10 r = 0,53 r2 = 0,28
à 50 cm), mais seulement quand elles ne recou-
vrent pas la majorité des surfaces (environ 50 %). — la relation déplacement / type de front :
Les coulées à végétation de rocaille se rappor- r = 0,9 r2 = 0,8 x = 64,3 y + 56,8
tent aux coulées rapides et instables que seuls
des végétaux à racines traçantes peuvent occu- On peut se demander si la dynamique des
per (Dt > à 100 cm). Donc, les végétaux occu- coulées de solifluxion n’a pas un lien direct avec
pant la surface des coulées témoignent bien de leurs formes. Est-ce que leur physionomie, leur
leur dynamisme. Ils permettent de donner un épaisseur, ou leur front ont une quelconque rela-
ordre de vitesse sans même réaliser de mesures. tion avec leur dynamique ? C’est ce que les cal-
Cependant, les dryades sont une exception car culs suivants vont tenter de démontrer.
elles se rencontrent aussi bien sur des coulées
stables et très végétalisées, que des formes rapi-
des mais peu recouvertes.
Figure 12 - Les types de fronts des coulées de solifluxion en fonction de leur vitesse
Environnements périglaciaires n°9 — 2002 33
a. La relation déplacement / rapport longueur- 4.3.3. Les relations entre le déplacement des coulées et les
largeur des coulées (L/l) limites d’Atterberg
En recherchant une éventuelle relation entre la
En plus de réaliser des relations entre les dépla-
vitesse des coulées et leur rapport longueur sur
cements des coulées et différents critères de ter-
largeur (L/l), il apparaît qu’il existe une indépen-
rain, les investigations ont abordé les relations
dance totale (r = 0,1) entre le déplacement des
pouvant exister entre les déplacements et les
coulées et leur rapport Longueur/largeur (L/l).
limites d’Atterberg. Il s’agissait de comparer les
Les formes des coulées n’ont donc aucune rela-
différentes limites d’Atterberg (retrait, plasticité,
tion avec leur vitesse.
liquidité) avec les teneurs en eau des coulées de
b. La relation déplacement / épaisseur des solifluxion et de voir si ces limites empiriques
coulées (car elles ne sont pas basées sur des lois physi-
ques) peuvent s’appliquer à la solifluxion dans la
L’épaisseur des coulées et leur relation avec les réalité. La détermination de ces limites permet
vitesses de déplacement (r = 0,5) indique qu’il d’évaluer à quel moment une coulée sur le ter-
y aurait un lien modéré entre vitesse et épais- rain va évoluer, et surtout à quel moment elle
seur. S’il existe véritablement une relation, il risque de se disloquer, c’est-à-dire d’évoluer en
faut penser que les vitesses de déplacement ont fluage, en évaluant sa teneur en eau. L’étude a été
peu de chose de déterminant quant à l’épaisseur menée sur cinq coulées sur des échantillons de
exacte des coulées. Le coefficient de détermina- terre prélevés au mois de juin.
tion (r2 = 0,28) semble montrer ce rôle modeste
du déplacement en relation avec l’épaisseur des Les limites établies en laboratoire sur de petits
coulées. volumes de terre sont :
— les limites d’Atterberg au stade de malléa-
c. La relation déplacement / types de fronts
bilité des échantillons (retrait),
La forme du front d’une coulée de solifluxion — les limites d’Atterberg au stade de défor-
peut-elle renseigner sur sa dynamique ? On mation des échantillons (plasticité),
observe sur le terrain trois formes de fronts pos- — les limites d’Atterberg au stade de disloca-
sibles : des fronts convexes, des fronts rectilignes, tion des échantillons (liquidité).
et des fronts d’abord convexes puis rectilignes.
Il a été attribué à chacun de ces types de fronts En juin, les teneurs en eau sont normalement
une valeur déterminée, en l’occurrence : 1 pour proches de la saturation des coulées, et donc du
les fronts convexes, 2 pour les fronts convexo- stade de liquidité d’Atterberg (les déplacements
rectilignes, et 3 pour les fronts rectilignes, en sug- sont très frais). En fin de saison estivale (sep-
gérant une valeur de front (1,2, ou 3) d’autant tembre) on les suppose plus proches du stade
plus grande que la coulée semble active. Le de retrait car elles se sont asséchées. Les rela-
coefficient de corrélation de 0,9 indique une tions statistiques effectuées reprennent la satura-
liaison relative presque fonctionnelle. La vitesse tion en eau des échantillons avec deux des trois
de déplacement explique bien la forme du front limites d’Atterberg, le stade où l’échantillon se
des coulées. Un front convexe représente une déforme, et celui où il se disloque. Le stade mal-
coulée stable (0 à 20 cm environ en 3 ans), tandis léable ne présente pas d’intérêt ici car il se situe
qu’un front rectiligne indique une coulée rapide en deçà des limites de saturation des prélève-
(plus de 100 cm). La forme convexe puis rectili- ments et il signifie des coulées immobiles.
gne indique quant à elle une activité intermédiaire
(20 à 110 cm). Le coefficient de détermination Les résultats sont :
de 0,8 signale une forte corrélation entre y et x — pour la relation teneur en eau en juin /
(x = 64,3 y + 56,8). Mais, si le déplacement expli- limites d’Atterberg au stade de dislocation :
que la forme du front et permet de donner un r = 0,82 y = 0,77 x + 9,28
ordre de vitesse, il est clair que l’inverse n’est pas
vrai.
34 Environnements périglaciaires n°9 — 2002
— pour la relation teneur en eau en juin / toire et les différents seuils d’Atterberg ont été
limites d’Atterberg au stade de déformation : calculées. Ils montrent des liaisons quasi fonc-
r = 0,87 y = 0,83 x + 4,37 tionnelles :
en argile de ces formations amoindrie probable- DUMAS B., RAFFY J., 1993 – Mise en évidence
ment leur cohésion, d’où un fluage plus impor- de la gélireptation en moyenne montagne méditer-
tant dans le cas présent par rapport aux constats ranéenne. Géomorphologie et aménagement de la monta-
d’autres auteurs dans les Alpes. Certains critères gne, Hommage à P. Gabert, CNRS, Caen, 181-189.
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front sont d’excellents indicateurs de vitesse. 318 p.
D’autres comme la longueur et la largeur d’une GABERT P., LAUTRIDOU J.P.,1987 – Mesures de
coulée, son épaisseur, ou sa pente, n’ont pas de mouvements superficiels et des températures dans
relation directe avec la dynamique du processus. les Alpes du Sud. In Processus et mesure de l’éro-
La dynamique de ce processus peut donc être sion, 1987, CNRS, Paris, 455-476.
abordé de manière simple grâce à ces différents KAISER B., 1987 - Les versants de Vanoise, enjeux tradi-
critères, même si de nombreuses questions res- tionnels et fonctionnement morphoclimatique. Thèse, Uni-
tent posées, qui nécessiteraient des études avec versité Paris VII, 2 t., 425 et 638 p.
un matériel très précis. KAISER B., 1992 - Variations spatiales et temporel-
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36 Environnements périglaciaires n°9 — 2002
Etienne COSSART
Résumé
La vallée de la Clarée a conservé de nombreux héritages de la dernière glaciation, notamment des roches
moutonnées. Lors d’un travail de terrain, il a été remarqué que chaque roche moutonnée n’a pas évoluée de
façon identique depuis la déglaciation : certaines, intensément diaclasées ont donné lieu à des écroulements
rocheux, tandis que d’autres sont restées stables. Une analyse statistique multivariée discriminante met en
évidence que les écroulements se sont développés au sein d’affleurements fortement diaclasés, situés en bas
de versant. Les caractères du diaclasage (géométrie, intensité) semblent à mettre en relation avec le passage
du paléo-glacier, et la force de décompression qui a suivi sa disparition. En conséquence nous sommes
incités à qualifier ces écroulements rocheux de « paraglaciaires ».
Introduction
Nous devons à Church et Ryder (1972) la pre- Aussi proposons-nous d’alimenter ce débat
mière définition du terme paraglaciaire, carac- en analysant l’évolution de roches moutonnées
térisant les “ processus non glaciaires mais dans la haute vallée de la Clarée (Briançonnais,
conditionnés par la glaciation ” et la mise en évi- Hautes-Alpes). En effet, dans ce secteur de nom-
dence de la crise érosive suivant le recul des gla- breuses surfaces rocheuses polies par les glaces
ciers. Suite à cet article, de nombreux travaux ont ont évolué en écroulements rocheux. Est-ce
été menés sur ce thème, la majorité d’entre eux la marque de la décompression post-glaciaire,
se focalisant sur la morphodynamique fluviale et comme le considère notamment Lewis (1954) ?
cherchant à quantifier les taux de sédimentation D’autres facteurs (séismes, événements climati-
dans un contexte paraglaciaire (Becht, 1995 ; Bal- ques extrêmes…) peuvent-ils expliquer leur ori-
lantyne et Benn, 1996 ; Muller, 1999 ; Mercier, gine, pour reprendre l’hypothèse de Vivian (1975
2000 et 2001 ; etc.). Toutefois, les réajustements et 1997) ? Un moyen de répondre à ces questions
paraglaciaires ne se matérialisent pas uniquement est d’essayer d’identifier les facteurs qui régis-
au travers des systèmes fluviaux ; les dynamiques sent la localisation de ces écroulements. En nous
de versants comme les glissements de terrain ou basant sur la description d’un échantillon de
les écroulements rocheux peuvent être plus fré- roches moutonnées, nous allons rechercher par
quents en contexte paraglaciaire, sous l’effet du une analyse discriminante les différences existant
phénomène de décompression (André, 1997 ; entre les roches moutonnées évoluant en écrou-
Benn et Evans, 1998 ; Scavia et al., 1999). Si lement et celles qui sont restées stables.
nous nous référons aux descriptions de Lewis Notre objectif est donc double, il s’agit (1)
(1954), ce processus se matérialise par l’ouver- de décrire les roches moutonnées pour y déceler
ture de néo-diaclases sub-parallèles à la surface les paramètres pouvant expliquer leur évolution
topographique pouvant aboutir à des écroule- en écroulement (2) de réaliser un traitement sta-
ments rocheux. D’autres travaux (Vivian, 1975 tistique approprié pour modéliser les conditions
et 1997) mettent en doute l’existence de ce pro- dans lesquelles se développent les écroulements.
cessus et considèrent les parois façonnées par les
glaciers comme stables.
Environnements périglaciaires n°9 — 2002 37
Le choix de la vallée de la Clarée : un contexte viron 2400 à 2450 mètres selon les secteurs,
paléo-glaciaire et une lithologie favorables ce qui permet d’estimer l’épaisseur des glaces à
environ 550 mètres. Au niveau de la confluence
Un paléo-glacier imposant au DMG avec la Durance, les placages morainiques s’éten-
dent jusqu’à une altitude proche de 2300 mètres
La vallée de la Clarée, située à la transition entre (fig. 3 et 4) : l’épaisseur du glacier devait alors être
les Alpes du Nord et du Sud, appartient au bassin d’au moins 900 mètres.
versant de la Durance, rivière avec laquelle elle Ces estimations doivent être considérées
conflue en rive droite à l’amont de Briançon (fig. comme des minima. On ne peut en effet pas
1). Bien qu’actuellement entièrement déglacée, exclure que le glacier ait été plus épais car les
à la différence des deux autres principales val- effets de son passage ont pu être en partie obli-
lées briançonnaises (la Guisane et la Vallouise),
la vallée de la Clarée contribuait pleinement au
développement du glacier durancien lors du Der-
nier Maximum Glaciaire (DMG). Le profil en
long de la vallée, accidenté de plusieurs verrous
(fig. 2), et les roches moutonnées, très présentes
dans le paysage à l’amont de Névache témoi-
gnent de la puissance érosive de ce paléo-glacier.
En associant les roches moutonnées avec les
dépôts glaciaires au sein d’une cartographie géo-
morphologique, nous avons pu reconstituer a
minima les dimensions du paléo-glacier, et notam-
ment son épaisseur (Cossart, 2001). En effet, Figure 2. Paysage de la Haute-Clarée en Amont de Névache.
en Haute-Clarée, nous retrouvons des surfaces Les roches moutonnées soulignées marquent la localisation de
polies et des erratiques jusqu’à une altitude d’en- verrous (voir également fig. 5)
38 Environnements périglaciaires n°9 — 2002
Alpes externes, qui se caractérise par l’empile- roches massives (granites par exemple) (Main-
ment de roches sédimentaires essentiellement guet, 1972 ; Peulvast et Vanney, 2001). Néan-
calcaires (calcaires et dolomies triasiques). Dans moins, les caractéristiques de ces grès (pendage,
la vallée de la Clarée, ces calcaires s’inclinent diaclasage) sont très variables, ce qui peut influen-
vers l’ouest suivant un pendage de 20° environ cer la réaction liée à la décompression, et le
(Lemoine et al. 1996). Mais l’originalité de la déclenchement des écroulements : ces paramè-
vallée de la Clarée est l’affleurement de grès du tres ne seront pas à négliger dans notre étude.
Carbonifère à l’amont de Névache, et notam-
ment en rive gauche (fig. 5). Ces grès apparem- Au total, au sein de la vallée de la Clarée se
ment très déformés présentent des pendages très conjuguent deux facteurs qui permettent d’envi-
variables en fonction des secteurs. Ainsi, d’après sager les conséquences éventuelles de la détente
nos mesures de terrain, ils plongent suivant une post-glaciaire : un paléo-glacier imposant (près
direction N-260° avec une inclinaison de l’ordre de 500 mètres d’épaisseur à l’amont de Néva-
de 20 à 25° aux environs de Névache, alors que che), et une lithologie susceptible d’enregistrer
dans la partie amont de la vallée le pendage les déformations liées à la décompression post-
s’oriente à N-70°, suivant une inclinaison variant glaciaire.
de 10 à 30°. De même le diaclasage varie sensi-
blement d’un endroit à un autre, aussi bien par Description des roches moutonnées étu-
son intensité que par la géométrie de son réseau ; diées
toutefois nous avons pu constater la présence
constante de diaclases orientées N-285° ayant Le choix du site d’étude
une inclinaison de 60 à 75°. Cette orientation,
comparable à celle de failles actives (faille de Notre travail avait commencé par l’étude d’un
la Cerveyrette notamment), peut correspondre transect dans la partie haute de la Clarée, au droit
aux conséquences du régime extensif tardi-alpin de la pointe de la Cassille. Néanmoins le besoin
(Barféty et al., 1995). Il est toutefois dommage s’était fait clairement sentir d’élargir notre terrain
que l’absence de carte géologique récente sur le d’investigation pour travailler sur davantage d’in-
secteur de Névache nous empêche de vérifier ces dividus (Cossart, com. orale, 2002). Nous avons
observations. réalisé ce travail complémentaire au cours de l’été
Ces affleurements gréseux sont une opportu- 2002.
nité remarquable pour étudier les impacts liés à la Le secteur a été choisi en raison du nombre
décohésion post-glaciaire, et ce pour deux prin- de roches moutonnées sur un espace restreint,
cipales raisons : (1) ce type de roche, massive, s’étendant quasi-uniquement dans les grès, nous
peut enregistrer la déformation post-glaciaire par y avons cartographié 21 affleurements mouton-
un néo-diaclasage, et (2) ce néo-diaclasage peut nés sur une surface d’environ 18 km² (fig. 6 et
se créer d’autant plus facilement que les grès 7). Sur un secteur aux dimensions réduites, nous
présentent une cohésion moindre que les autres espérons limiter tant que possible les variations
Environnements périglaciaires n°9 — 2002
Figure 8. Rose des vents des orientations du diaclasage pour chaque affleurement.
La géométrie du réseau de diaclases varie très sensiblement, même si la direction N-285° est constamment la plus fréquente.
41
42 Environnements périglaciaires n°9 — 2002
A la recherche d’une méthode statistique la variable expliquée. Cette méthode est notam-
adaptée ment utilisée pour prévoir le risque d’avalanche :
les p prédicteurs sont alors les variables nivo-
a. Principe de l’analyse discriminante logiques et météorologiques, tandis que les k
catégories de la variable expliquée sont les dif-
Notre modèle doit avoir pour objectif de savoir férents niveaux du risque d’avalanche. En revan-
si les écroulements rocheux en Clarée ont une che cette méthode a été relativement peu utilisée
origine paraglaciaire, ou non : ce caractère est en géomorphologie, même si quelques travaux
notre variable expliquée. La méthode statistique ont cherché à prévoir de cette manière le risque
qui permet de dissocier ainsi deux, ou plusieurs, engendré par des glissements de terrain (Carrara,
catégories dans la variable expliquée et de mesu- 1983 ; Baeza et Corominas, 2001).
rer leurs différences à l’aide d’un corpus de varia-
bles indépendantes est l’analyse discriminante b. Méthode et Calculs
(Saporta, 1990).
D’après Saporta (1990), l’analyse discrimi- Posons en premier lieu la terminologie. Nous
nante est “ la prédiction d’une variable qualita- disposons de n individus constituant un nuage
tive à k catégories en fonction de p prédicteurs ”. E dans l’espace statistique Âp, et composé de
Il s’agit donc de rechercher les conditions dans k sous-nuages E1,…,Ek, de centres de gravités
lesquelles les variables de la base de données per- g1,…,gk ; p est le nombre de prédicteurs (variables
mettent de se situer dans l’une ou l’autre des explicatives ou indépendantes) et k le nombre de
catégories de la variable expliquée. catégories de la variable expliquée (ici 2). Cela
En appliquant cette formulation très sta- revient à représenter la matrice des données à la
tisticienne à notre cas, nous pourrions dire qu’il manière présentée figure 11.
s’agit de déterminer dans quelles conditions se
produit un écroulement, et ce en fonction des L’analyse discriminante va rechercher de nou-
valeurs prises par les variables de la base de don- velles variables qui correspondent à des direc-
nées. tions qui séparent le mieux possible en projec-
Cette méthode, qui vise à rechercher les com- tion les k sous-nuages (fig. 12). En projection sur
binaisons de variables permettant de différencier l’axe discriminant, les k centres de gravité doi-
les catégories de la variable expliquée, revêt éga- vent être aussi séparés que possible, et chaque
lement un aspect décisionnel. En effet, en fonc- sous-nuage doit se projeter de manière aussi
tion des valeurs prises par un nouvel individu groupée que possible autour de la projection de
sur chacun des prédicteurs, il sera possible de son centre de gravité. Cet axe discriminant est
le classer dans l’une ou l’autre des catégories de donc tel qu’il va maximiser l’inertie entre les dif-
Figure 17. Espace des individus. Même si la répartition entre les deux sous-groupes est clairement différente au sein de l’espace
factoriel, la discrimination n’est pas totale.
vaise (0,48), la corrélation n’est significative avec En repassant aux variables initiales, nous
aucune des autres variables (fig. 15). avons :
Int > 129,65 alt – 5,12
Pour simplifier ce schéma, nous allons nous
focaliser sur le plan défini par les deux variables Au delà de l’aspect purement numérique, il faut
correctement corrélées avec l’axe discriminant retenir que, pour une altitude donnée, il suffit
(fig. 18) : l’altitude et l’intensité du diaclasage. qu’un seuil d’intensité de diaclasage soit atteint
Dans ce plan, la discrimination apparaît presque pour qu’il y ait écroulement.
totale, seul un individu appartient à l’intersection
des deux sous-nuages. Aussi semble-t-il que les Interprétation géomorphologique
variables altitude et intensité du diaclasage suf-
fisent à expliquer les différences de localisation Discussion sur le rôle de l’intensité du diaclasage et de
entre les roches moutonnées “ à écroulement ” l’altitude
et celles “ sans écroulement ”. En déterminant le
seuil séparant au mieux les deux sous-nuages, il Même si le rôle de l’altitude était envisagé, le
est même possible de modéliser numériquement fait qu’elle apparaisse comme le facteur essentiel
les conditions régissant le développement des est inattendu. Etant donné que les écroulements
écroulements rocheux. En effet, la droite sépa- rocheux sont d’autant plus fréquents que l’al-
rant les deux sous-ensembles a pour équation : titude diminue, il semble qu’il faut voir dans
cette variable une relation avec l’épaisseur du
Int = 0,611 alt – 2,2 paléo-glacier plutôt qu’une signification topocli-
(Int. étant l’intensité du diaclasage, et alt. l’altitude) matique. En appliquant la formule modélisant
la pression exercée par un appareil glaciaire au
Si Int > 0,611 alt – 2,2 alors il y a écroulement paléo-glacier de la Clarée (Kercsner et al., 1999 ;
(en se basant sur les variables normées). Lliboutry, 2002 ; cf. supra), nous pouvons estimer
à 72 kPa la pression exercée par le glacier sur les
affleurements de fond de vallée, et à 36 kPa sur
Environnements périglaciaires n°9 — 2002 47
diaclases achèvent de “ découper ” les roches tions qui varient de N-120° à N-150°, c’est à dire
moutonnées en différents blocs, en outre elles sub-parallèles à l’axe de la vallée. Etant donné
constituent des plans de glissement le long des- que ces diaclases semblent se développer en rela-
quels les blocs sont susceptibles de transiter. Ces tion avec celles qui sont sub-parallèles à la sur-
diaclases semblent se développer à des profon- face topographique, nous émettons l’hypothèse
deur variables, de 30 cm à presque 1 m (fig. 21 et qu’elles ne sont pas d’origine structurale, et qu’el-
22). Les raisons de ces différences restent obscu- les peuvent être dues à une expansion latérale du
res, sont-elles dues aux caractéristiques de cohé- matériel rocheux sous l’effet de la décompres-
sion de chaque affleurement ? sion. Des diaclases d’orientation comparable, en
Au sein de l’affleurement n°6, un écroule- général de taille modeste (30 à 40 cm de long
ment produit le long d’une diaclase de direction en surface des affleurements), sont observables
N-265° permet d’observer une “ coupe ” dans également au sein des affleurements n° 10 et 12
l’affleurement rocheux et de décrire son dia- : peuvent-elles avoir la même origine ? D’autres
clasage (fig. 22). Le néo-diaclasage subparallèle à études sur ce thème sont actuellement en cours,
la surface s’accompagne de diaclases très super- pour éventuellement confirmer ou infirmer cette
ficielles, le plus souvent orthogonales à la surface hypothèse.
des affleurements, et dont le plan se raccorde très
nettement avec le plan sub-parallèle à la surface, Par le biais de la force de décompression,
ce qui les différencie nettement du réseau de dia- d’une augmentation de la densité du diaclasage,
clases principales. Elles présentent des orienta- il semble que tout un contexte favorable au
Figure 23. Modèles d’évolution des vitesses de recul des parois Conclusion
rocheuses depuis le DMG (Trotternish Peninsula, Isle of
Skye, Scotland) (Ballantyne, 2002). L’analyse discriminante, quoique peu utilisée en
géomorphologie, semble probante pour “ éclair-
pouvant favoriser la circulation d’eau dans les cir ” les conditions dans lesquelles se déclenchent
diaclases, et l’augmentation brutale de la pression les écroulements rocheux. Dans le cas présent
hydrostatique, ou même ,(3) le sapement basal l’influence jouée par l’intensité du diaclasage des
par le torrent de la Clarée pour les roches mou- affleurements et l’altitude témoignent de l’im-
tonnées qui le bordent. portance de l’action glaciaire dans leur genèse.
Pour répondre à cette question, une autre En effet, l’intensité du diaclasage dépend certes
de paramètres lithologiques et structuraux, mais
50 Environnements périglaciaires n°9 — 2002
semble également fonction de la force de décom- BAEZA C., COROMINAS J., 2001 : Assess-
pression post-glaciaire. Quant à l’altitude, elle ment of shallow landslide susceptibility by
reflète directement l’épaisseur du paléo-glacier means of multivariate statistical techniques.
et donc la force de décompression elle aussi. Earth Surface Processes and Landforms, n°26, pp.
Ainsi, si l’on reprend la définition exposée par 1251-1263.
Church et Ryder (1972), alors les écroulements BARFETY JC., LEMOINE M., DE GRA-
rocheux de la Clarée étudiés peuvent être consi- CIANSKI PC., TRICART P., MERCIER D.,
dérés comme paraglaciaires. 1995 : Briançon, notice de la carte géologique.
Cette étude préliminaire nécessite toutefois Orléans, Editions du BRGM, 180 p.
d’être approfondie en travaillant sur davantage BENN DI. et EVANS D., 1998 : Glaciers and Gla-
d’individus, et en poursuivant les observations ciations. New York, Oxford University Press,
de terrain, notamment sur la géométrie du dia- 734 p.
clasage. De plus des incertitudes subsistent quant BECHT M., 1995 : Slope erosion processes in
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rôle. Un moyen d’éclaircir ce débat serait de CHURCH M. et RYDER J., 1972 : Paraglacial
savoir quand ces écoulements rocheux se sont sedimentation : a consideration of fluvial
déclenchés, en utilisant la méthode des radio- processes conditionned by glaciation. Geolo-
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Bruno Vrielynck
FRE 2400 Paléontologie et Stratigraphie,
Univ. Pierre-et-Marie Curie, Jussieu, 75252 Paris Cedex 05
Jean-Pierre Peulvast
Univ. Paris-Sud, laboratoire de Géologie Dynamique de la Terre et des Planètes,
91405 Orsay Cedex