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Environnements périglaciaires n°9 — 2002

Association Française du Périglaciaire

Environnements Périglaciaires

Volume 9 — décembre 2002

Notes et Comptes-Rendus du Groupe de Régionalisation du Périglaciaire


n° XXVII
 Environnements périglaciaires n°9 — 2002

Photographie de couverture : Les Alpes, un des terrains d’expérimentation de l’équipe du Centre


de Géomorphologie du CNRS de Caen ; ici, l’Aiguille verte dans le massif du Mont-Blanc (cliché :
Marie-Françoise André, août 1990).

Association Française du Périglaciaire, 191 rue Saint-Jacques, 75005 Paris.


Président : Charles LE COEUR (Université de Paris I Panthéon-Sorbonne)
Secrétaire : Georges ROVERA (Université Joseph Fourier de Grenoble)
Trésorier : Hervé REGNAULD (Université de Rennes II)

La préparation et l’édition de ce volume ont été assurées par Samuel ETIENNE (Géolab,
Université Blaise-Pascal Clermont-Ferrand II).
Environnements périglaciaires n°9 — 2002 

SOMMAIRE

Communications écrites

Jean-Pierre COUTARD — Périglaciaire et expérimentation p. 3-11

Jean-Pierre COUTARD et Jean-Claude OZOUF — Bibliographie : Action du gel sur les roches et les
sols. Expériences de laboratoire menées au Centre de Géomorphologie du CNRS à Caen p. 12-17

Didier ROLIN — La solifluxion dans le bassin-versant de la Grande Sassière (Tignes, Savoie) :


vers une meilleure compréhension de la dynamique solifluante en haute altitude p. 18-35

Communication hors-thème

Etienne COSSART — Les écroulements rocheux en Clarée (Briançonnais, Hautes-Alpes) : une


origine paraglaciaire ? p. 36-51

Informations diverses

Virginie VERGNE, Bruno VRIELYNCK et Jean-Pierre PEULVAST — Présentation du programme


Péri-Thétys, les limites documentaires et cartographiques de la carte Quaternaire (22.000 - 18.000 BP) p. 52
 Environnements périglaciaires n°9 — 2002
Environnements périglaciaires n°9 — 2002 

PERIGLACIAIRE ET EXPERIMENTATION

Jean-Pierre COUTARD
CNRS UMR 6143 Morphodynamique Continentale et Côtière
Centre de Géomorphologie
24, rue des tilleuls 14000 Caen

Résumé :
Dans le domaine du périglaciaire, les expériences ont porté sur des processus très divers : fourniture de
matériaux par des processus mécaniques (cryoclastie), transport par les processus de versant (éboulisation,
cryoreptation, gélifluxion, flots de débris), tri et structuration des matériaux. L’intérêt principal de l’expéri-
mentation est de valider des hypothèses ou des modèles formulés après des études quantitatives sur le ter-
rain. Les avantages sont : la réduction des temps morts, la mesure à tout instant donc une approche plus
précise des paramètres intervenant dans le processus analysé, éventuellement une meilleure modélisation
physique et mathématique des phénomènes. On peut reprocher à certains essais une trop grande simplifica-
tion entraînant des difficultés lors du retour vers le milieu naturel (explication partielle des faits observés).
Mais jusqu’où peut-on accroître la complexité des expériences?

Mots-clés : périglaciaire, expérimentation, cryoclastie, gélifluxion

Introduction lorsqu’elle est vérifiée expérimentalement. La


démarche expérimentale implique une succes-
Pourquoi faire appel à l’expérimentation? comme
sion d’étapes précises et obéit à des règles bien
l’a bien exprimé A. Pissart, qui a consacré la
établies.
majeure partie de ses recherches aux dépôts et
structures périglaciaires, la méthode «descriptive- Il y a en premier lieu la formulation d’une
interprétative», largement utilisée, aboutit pres- hypothèse. En géomorphologie, celle-ci prend
que toujours à une situation de blocage. Des naissance après des études minutieuses de terrain,
hypothèses génétiques diverses s’accumulent sans qualitatives et, aujourd’hui, le plus souvent quan-
qu’elles soient clairement démontrées. Seule la titatives qui suggèrent l’existence d’interactions
méthode expérimentale va permettre un retour entre quelques paramètres essentiels. L’étude de
aux faits essentiels et apporter la preuve indénia- terrain fournit les valeurs de certains d’entre eux,
ble du rôle de chaque paramètre ou processus par exemple : teneur en eau du milieu, roche ou
(Pissart, 1973 a). sol, fourchettes de températures. Cette connais-
sance est indispensable pour que les expériences
Dans le domaine des processus périglaciai-
soient réalisées dans des conditions proches de
res, le champ de l’expérimentation est assez vaste
celles du milieu naturel.
puisqu’il a concerné et concerne encore la four-
niture des matériaux : gélifraction des roches, Le dispositif expérimental est ensuite cons-
leur mise en place sur les versants : éboulisation, truit de façon à ce que les paramètres retenus
gélifluxion, leur tri : cryoexpulsion, migration de dans la formulation de l’hypothèse puissent être
fractions fines, leur structuration : cryoturbation. contrôlés en permanence. Une instrumentation
Il faut ajouter que certains résultats d’expérien- est mise en place en fonction des besoins en
ces d’hydraulique fluviale et de transport éolien mesure (capteurs de température, dispositifs de
peuvent s’appliquer aux régions froides. mesure de teneur en eau, résistifs ou capacitifs,
capteurs de pression et de déplacement).
Problèmes généraux de l’expérimentation
L’expérience nécessite une surveillance cons-
Il est admis depuis les travaux de Claude Ber- tante et des mesures régulièrement opérées. Il est
nard, que, dans les sciences expérimentales, une souhaitable de renouveler l’expérience de façon
hypothèse ne peut être validée que lorsqu’elle à s’assurer de la répétitivité des processus et des
est soumise à l’épreuve des faits, c’est-à-dire résultats.
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A la fin de l’expérience, deux cas peuvent se thèses émises à propos de la genèse des cryo-
présenter. Dans le premier cas, l’hypothèse est turbations. Cela entraîne la diversification et la
validée et les résultats insérés dans la démarche multiplication des essais et la réunion de com-
scientifique poursuivie. Dans le second cas, l’hy- pétences complémentaires. Dans le domaine du
pothèse n’est pas clairement démontrée. Généra- froid, des physiciens, des géotechniciens et des
lement, l’expérience n’est cependant pas un échec géomorphologues se sont attelés à la tâche.
complet puisqu’elle peut suggérer de nouvelles
Au cours des expériences les plus complexes
idées ou bien mettre en évidence le rôle de
et les plus avancées, on aboutit à un véritable
paramètres auxquels une attention insuffisante
décorticage des processus. L’intervention de
avait été portée.
chaque paramètre intrinsèque ou extérieur est
Vient enfin la dernière étape, fréquemment prise en compte. Par exemple, pour le processus
la plus délicate à franchir, celle de la confronta- de gélifraction sont mis en évidence, d’une part,
tion des acquis expérimentaux avec les données le rôle de la porosité totale et de la porosité
de terrain. de fissure, ceux de la taille des pores et de la
résistance mécanique et, d’autre part ceux de la
L’expérimentation peut se faire en laboratoire,
teneur en eau, de l’intensité du gel, de la vitesse
où les conditions d’observation et de mesure
de descente en température. Dans le processus
sont les plus optimales, mais aussi dans le milieu
de gélifluxion sont surtout pris en compte :
naturel. C’est ainsi que grâce à des marqueurs
la granulométrie du matériau, plus particulière-
colorés mis en place sur le terrain dans le massif
ment ses teneurs en silt et argile, sa résistance
du Chambeyron A. Pissart (1973 et 1982) a
au cisaillement, sa teneur en eau, la valeur de la
démontré le rôle de la cryoexpulsion et de la
pression interstitielle et par ailleurs celle de la
migration latérale des pierres dans la genèse des
pente.
sols polygonaux triés.
Le stade le plus évolué de la recherche expéri-
L’expérimentation et le degré de développe- mentale est représenté par le couple expérimen-
ment des connaissances tation-modélisation. La synthèse des résultats
expérimentaux peut être exprimée sous forme
Toutes les expériences n’ont pas le même degré
d’abaques comme celles proposées par Letaver-
de précision. Cela tient à l’évolution générale
nier pour les roches calcaires (Letavernier, 1986
des connaissances. Il est normal, au début d’une
; Letavernier et Ozouf, 1987) qui donnent, en
investigation, de commencer par des choses sim-
fonction de la porosité, de la teneur en eau et de
ples pour mieux cerner un problème ou un phé-
la température, la résistance au gel de la roche
nomène géomorphologique. Les acquis succes-
ainsi que la forme et la taille des débris. De cette
sifs permettront ensuite d’aller vers des aspects
façon est établi une sorte de modèle prédictif du
physiques plus fondamentaux.
comportement au gel de ces roches.
Par exemple, au début des études de cryoclas-
Un processus peut être modélisé du point de
tie, des dizaines de faciès de roches diverses ont
vue physique et mathématique et, dans ce cas,
été soumis aux mêmes protocoles de gel à – 5° C
l’expérience servira à tester l’équation proposée.
et – 15° C (gel islandais et gel sibérien) dans les
Celle-ci sera validée s’il y a un bon ajustement
chambres froides du Centre de Géomorphologie
entre les valeurs calculées et celles mesurées au
du CNRS à Caen afin de tester globalement l’im-
cours de l’expérience. Citons en exemple la simu-
pact de l’intensité du gel et d’établir des échelles
lation en chenal expérimental, sous température
de gélivité générales. Ces dernières avaient pour
contrôlée, de l’érosion des berges des fleuves
but de mieux comprendre le rôle du gel dans
sibériens menée par Makhloufi et al. (1999).
l’érosion différentielle des reliefs.
L’équation fait intervenir la température du sol
Le développement des recherches conduit à gelé, celle de l’eau, le nombre de Reynolds et des
une multiplication des théories et des hypothèses coefficients de transfert de la chaleur établis par
(Coutard et al., 2000). C’est ainsi que pas moins Lunardini lorsqu’il y a écoulement d’eau sur la
de six théories ont été énoncées pour expliquer le glace.
processus de cryoclastie et trois ou quatre hypo-
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Intérêt et limites de l’expérimentation Le transfert des acquis au milieu naturel


L’approche expérimentale offre plusieurs avan- Les expériences réalisées en série avec une varia-
tages : tion des valeurs des paramètres retenus mettent
- les conditions des essais sont définies et très souvent en évidence des seuils à partir
contrôlées et les protocoles peuvent être diversi- desquels un processus devient particulièrement
fiés de façon à isoler et à tenter de hiérarchiser actif  : seuils de température, seuils de teneur en
les paramètres entrant en jeu. eau. De ce fait, transférer des résultats expéri-
- les investigations sont beaucoup plus pré- mentaux vers le milieu naturel présuppose que
cises. Par exemple, les phénomènes cycliques les gammes de valeur des paramètres utilisés
comme le gel-dégel peuvent être décomposés en dans les essais soient proches de ce qui est enre-
plusieurs phases ayant chacune ses caractères ou gistré dans la nature. Ne pas respecter certaines
processus spécifiques puisque les observations et normes peut conduire à des effets inverses de ce
les mesures sont possibles à tout instant. Sur le qui est recherché. Par exemple, le gel brutal et
terrain, les mesures effectuées permettent rare- intense d’un sol ne favorise pas, contrairement à
ment d’atteindre ce détail ; en général, c’est le ce qu’une approche hâtive laisserait croire, une
bilan de plusieurs cycles, voire un bilan annuel formation abondante de glace de ségrégation
qui est donné. principale responsable de la fragmentation et de
- les dispositifs expérimentaux facilitent l’ob- la structuration des matériaux et de leur mobilité
tention relativement rapide de résultats puisqu’il au moment du dégel. Travailler dans des condi-
n’y a pas de «temps morts», période d’inactivité tions proches de celles du milieu naturel autorise
des processus, comme il en existe dans la nature. et facilite l’emploi des résultats expérimentaux
dans les raisonnements paléoclimatiques concer-
Les limites de l’expérimentation tiennent tout
nant les dépôts périglaciaires fossiles. La compa-
d’abord à une tendance à la simplification. Pen-
raison se fait par le biais des microstructures et
dant la presque totalité des expériences de géli-
des macrostructures pour les sols, par celui de la
fluxion menées à ce jour, l’apport d’eau a été
forme et de la taille des gélifracts pour la cryo-
assuré par un sous-écoulement dans le matériau
clastie.
soumis aux cycles gel-dégel ; il n’y a pas eu simu-
lation de chutes de pluie ou de la présence de Le choix des échantillons peut entraîner des
plaques de neige fondante, facteurs susceptibles divergences entre expérience et terrain. La com-
d’accélérer le mouvement. De même, les facteurs paraison des gélifrats obtenus expérimentalement
qui contribuent au ralentissement des déplace- à partir des calcaires des Charentes avec ceux
ments : végétation, présence de blocs de grande prélevés dans les dépôts de grèze de cette région
taille, n’ont pas été pris en considération. illustre bien la question. Si des cycles gel-dégel
répétitifs et très nombreux ont permis d’obtenir
Autre problème, l’expérience n’aborde le plus
des gélifracts homométriques et de petite taille
souvent qu’une partie de la chaîne des proces-
comme ceux des grèzes (Guillien et Lautridou,
sus qui interviennent dans la nature. Pour des
1970), il n’en est pas de même pour leur mor-
raisons scientifiques et techniques liées à l’obten-
phologie, en particulier l’aspect de leurs arêtes
tion des caractéristiques physiques des roches,
et de leurs faces (Ozouf, 1983). De plus, aucune
la plupart des expériences de cryoclastie ont
fraction fine ne s’est formée au cours des cycles.
porté sur des échantillons sains de petite taille.
L’analyse attentive des faits a aiguillé vers un rôle
C’est donc essentiellement la microgélifraction
de l’état initial de la roche. Lors des premières
et l’amenuisement des gélifracts qui ont été étu-
expériences, les blocs avaient été prélevés à la
diés. Les processus plus complexes concernant
base des fronts de carrières et étaient parfaite-
la fourniture de matériau à partir des versants
ment sains. Depuis, une autre expérience por-
rocheux, des parois et des corniches (macrogéli-
tant sur des blocs, légèrement altérés, pris en
fraction) ne sont encore abordés que de manière
subsurface sur les versants a donné comme les
incomplète.
précédentes des gélifracts calibrés mais, élément
nouveau, présentant des faces et des arêtes adou-
cies comme celles des fragments des grèzes natu-
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relles. Une fraction fine a été produite en quan- ments (Harris et al., 2000). Le comportement
tité non négligeable. géotechnique du matériau au cours des cycles
gel-dégel a été semblable dans les essais de
Pour des effets similaires d’un processus
Caen et de Cardiff de même que la répartition
donné, des décalages apparaissent parfois entre
des déplacements en surface et en profondeur.
les valeurs des paramètres enregistrées d’une
Cependant, les valeurs de ces derniers était un
part au cours des expériences et d’autre part
peu plus élevées dans l’expérience en machine
dans le milieu naturel. Un exemple, pour obte-
centrifuge.
nir le même degré de fragmentation d’un calcaire
bathonien de Caen, les températures enregistrées
Quelques acquis en cryoclastie
dans la paroi proche du Centre de Géomorpho-
logie du CNRS étaient moins basses que celles Le simple rôle de l’expansion volumique due au
déduites des abaques de Letavernier construites changement de phase eau-glace est controversé.
à partir d’essais sur des échantillons parfaitement Il implique une saturation en eau totale des pores
sains (Coutard, 1995). Cette différence s’expli- et un gel par toutes les faces (création d’un milieu
que par une plus grande fragilité de la roche de clos). Expérimentalement on obtient un éclate-
la paroi qui a subi l’action cumulée de nombreux ment de blocs. Mais, dans le milieu naturel, les
cycles thermiques, avec passage ou non du zéro, deux conditions préalables sont rarement réu-
et hydriques tout au long des années (fatigue nies.
mécanique du matériau). La pression de croissance linéaire des cristaux
semble jouer un rôle dans la fragmentation des
Dernier problème posé, celui des rapports
parties les plus fissurées des roches (McGreevy,
d’échelle. Dans notre discipline, la géomorpho-
1982). La pression capillaire et la couche d’eau
logie, peu d’expérimentateurs ont respecté des
adsorbée (théorie d’Everett, 1961) interviennent
règles précises équivalentes à celles utilisées par
à de très basses températures indispensables
les concepteurs de modèles réduits en hydrauli-
pour provoquer le changement de phase de l’eau
que (modélisation du Port du Havre ou de la baie
adsorbée.
du Mont-Saint-Michel). Le modèle employé pour
de récentes expériences sur la mise en place de De nombreux auteurs ont démontré et insis-
dépôts hétérométriques de versant mesurait un tent sur le rôle de la formation de lentilles
mètre de large et deux mètres de long. L’épais- de glace dans la fragmentation des roches par
seur du matériau mobilisable était voisine de 30 écaillage, délitage, exploitation des fissures (voir
cm alors que dans le milieu naturel celle de la revue dans Prick, 1996). Plus récemment l’ex-
couche disponible pour abonder la formation de périmentation a mis en évidence celui du pergéli-
pente est de 100 à 170 cm. D’où la nécessité sol dans la naissance d’une couche intensément
d’éliminer les plus gros éléments qui auraient gélifractée dans les massifs rocheux au contact
immédiatement bloqué tout mouvement. Bien sommet du pergélisol-base de la couche active
entendu sur deux mètres de longueur de pente (Murton et al., 2001).
les masses de matériau et d’eau concernées sont En ce qui concerne les roches calcaires, les
sans commune mesure avec ce qui existe sur divers essais ont montré que le degré de gélivité
un grand versant. C’est la convergence entre les était en rapport avec l’importance de la porosité
processus prenant place au cours de l’expérience totale mais surtout avec les dimensions des pores
et ceux observés sur le terrain qui conduit, en et leur répartition ; ceci a été analysé avec préci-
fait, à valider cette dernière. Toutefois, pour des sion par Letavernier et Rémy. Le type d’endom-
essais en très petite cellule et dans les conditions magement de la roche est principalement lié à
particulières d’utilisation d’une machine centri- la géométrie du réseau poreux : réseau capillaire
fuge, des lois d’échelle strictes ont été appliquées. simple (roches les plus gélives) réseaux poreux
L’échelle au 1/10ème, par rapport aux grands complexes multimodaux où toute l’eau ne gèle
modèles de Caen, choisie pour un essai de géli- pas à la même température d’où des contraintes
fluxion entrepris à Cardiff a amené les concep- mécaniques plus progressives et mieux réparties
teurs à appliquer 10 g pour conserver la valeur de (roches moins gélives) comme le prouvent les
la force normale exercée par la colonne de sédi- travaux de Rémy (1993).
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L’expérimentation a fait amplement progres- lement diminuent la viscosité et la résistance au


ser la connaissance des roches calcaires. Il reste, frottement du sol favorisant ainsi la gélifluxion
par contre beaucoup de recherches a mener sur (Harris et al., 1993, 1995, 1997).
les roches siliceuses, les roches éruptives. Un pre-
Dans le domaine appliqué, les mêmes phé-
mier bilan a été dressé en 1985 par Lautridou qui
nomènes physiques interviennent dans la perte de
a détecté quelques seuils de porosité concernant
portance des chaussées. Le programme commun
ces roches. Par exemple, les schistes ne sont pas
LCPC-CNRS mené à Caen de 1967 à 1975 a
gélifs si leur porosité totale est inférieure à 3%.
permis la mise hors gel du réseau routier français.
Un autre programme Canada-France a prouvé
Quelques acquis concernant le gel-dégel des
que le gonflement cryogénique différentiel était
sols
susceptible de déformer des gazoducs implantés
Le tri des matériaux par les cycles gel-dégel est dans l’Arctique et dégagé des règles de mise en
du à la cryoexpulsion des éléments grossiers vers place de ces équipements.
la surface du sol (Penner, 1974 ; Coutard et Van
Parmi les autres processus étudiés, l’ébouli-
Vliet-Lanoë, 1994) mais aussi à une répulsion
sation a fait l’objet d’expériences, avec, parmi
des fractions fines face au front de gel (Corte,
les dernières, celle de Hétu et al., 1995, consa-
1966).
crée aux coulées sèches de pierraille. Pour la mise
Des expériences comparées ont bien mis en en place des flots de débris, les essais les plus
évidence que les microstructures lamellaires des récents ont été ceux de H. Van Steijn (Van Steijn
sols fins et les coiffes silteuses qui se forment sur et al., 1988 ; Van Steijn et Coutard, 1989).
les éléments grossiers sont bien une spécificité
Dans le présent article, nous n’avons pu citer
du gel-dégel (Van Vliet-Lanoë et al., 1984).
de manière exhaustive tous les travaux réalisés
En ce qui concerne la genèse des cryotur- mais seulement essayé de montrer l’intérêt de
bations, le rôle du gonflement cryogénique dif- la recherche expérimentale en géomorphologie
férentiel est démontré (Corte, 1972 ; Pissart, périglaciaire tout en ayant un coup d’ oeil criti-
1987). Par contre, il n’existe pas d’essais con- que. Des compléments seront trouvés en ce qui
vaincants sur celui du load casting et aucune touche la cryoclastie dans Lautridou et Ozouf,
expérience employant des matériaux naturels n’a 1982, Lautridou, 1985, Prick, 1996, Matsuoka,
été entreprise sur le présumé processus de con- 2001. En ce qui concerne le gel des sols on
vection. La structuration des sols polygonaux se reportera à Pissart, 1987, Harris, 1987, Bal-
décimétriques et métriques se révèle être la com- lantyne et Harris,1994, Coutard, Lautridou et
binaison de la dessiccation, de la cryoexpulsion Ozouf, 2000.
des fragments grossiers et de leur cryoreptation
vers les bordures lors du gonflement, pendant le
gel, du centre des cellules (travaux de A. Pissart). Bibliographie

La cryoreptation et la gélifluxion ont fait l’ob-


jet de nombreuses expériences depuis celle de J. BALLANTYNE C. K. and HARRIS C., 1994. The
Tricart en 1956. Tout un programme a été déve- periglaciation of Great-Britain. Cambridge University
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de Caen à partir de 1988 en liaison avec l’univer- CORTE A., 1966. Particle sorting by repeated freezing
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gonflement du sol et sa mobilité au dégel a été Bulletin du Centre de Géomorphologie du CNRS, Caen,
mis en évidence. Le moteur du déplacement est n° 13-14-15, 157-175.
une perte des propriétés mécaniques, attestée par COUTARD J.-P., 1995. Les effets du gel sur la paroi
des essais de cisaillement, au moment du passage calcaire du Centre de Géomorphologie du CNRS
du front de dégel. De fortes teneurs en eau et la à Caen. Hivers 1980-1981 à 1986-1987. Bulletin de
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ACTION DU GEL SUR LES ROCHES ET LES SOLS


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(Morphodynamique Continentale et Côtière, CNRS, UMR 6143)

BIBLIOGRAPHIE

La bibliographie qui suit regroupe, d’une part, des travaux publiés par le Centre de Géomorpho-
logie du CNRS lui-même et, d’autre part, des publications : articles, thèses, extérieures à celui-ci
mais renfermant des résultats d’expériences ayant fait appel à ses moyens matériels et à son per-
sonnel. Trois rubriques ont été distinguées : action du gel sur les roches (cryoclastie), action du
gel sur les sols (structuration, gélifluxion, cryoexpulsion) et applications au génie civil.

ACTION DU GEL SUR LES ROCHES


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Bibliographie établie au 31 octobre 2002 par J.-P. Coutard et J.-C. Ozouf.


18 Environnements périglaciaires n°9 — 2002

LA SOLIFLUXION DANS LE BASSIN-VERSANT DE LA GRANDE SASSIERE


(TIGNES – SAVOIE) : VERS UNE MEILLEURE COMPREHENSION
DE LA DYNAMIQUE SOLIFLUANTE EN HAUTE ALTITUDE

Didier ROLIN
Université Paris XII – Val de Marne
94000 Créteil cedex
Laboratoire : Géodynamique des Milieux Naturels et de l’Environnement
stevdicel@interpc.fr

Résumé

Dans le bassin-versant de la Grande Sassière à Tignes (Savoie), la solifluxion est un processus périglaciaire
très actif. Sur l’ubac schisteux de la Pointe du Picheru (2953 m), les déplacements de 12 coulées de soli-
fluxion ont été suivis de 1996 à 1999. La méthode utilisée est celle des piquets à inclinométrie qui permet de
donner des ordres de vitesse sur tout un profil. Sur trois ans, les déplacements constatés sont très variables,
de 2,5 à 174 cm, mais dans l’ensemble plus importants que les observations déjà réalisées dans les Alpes.
Le processus est à 99 % d’origine périglaciaire. Certains éléments sur le terrain, comme le type de végéta-
tion recouvrant les coulées ou la forme de leur front, sont d’excellents indicateurs de vitesse. De même il
existe une relation nette entre les limites d’Atterberg et les variations de teneur en eau des coulées, qui vont
commander leur activité.

Introduction

Dans le bassin-versant de la Grande Sassière fonctionnement morphodynamique de ce pro-


(2300-3747 m - 45°27’N, 7°E) à Tignes, les pro- cessus, entièrement périglaciaire dans ce bassin-
cessus géomorphologiques ont fait l’objet de versant et de répondre à un certain nombre de
mesures stationnelles de 1996 à 1999. L’objectif questions non résolues.
était de connaître les modalités de leur fonction-
nement, leur intensité, mais aussi d’établir un 1. LA SOLIFLUXION DANS LE BASSIN-
bilan d’érosion pour l’ensemble de ce géosys- VERSANT DE LA GRANDE SASSIERE
tème inhabité de haute montagne, classé réserve
naturelle. Cette vallée glaciaire perchée de 20 km2 Le versant nord de la Pointe de Picheru (2953
appartient aux étages morphodynamiques péri- m) constitue un vaste versant de solifluxion. Sur
glaciaire et glaciaire. Sa configuration (altitude, environ 80 ha, les pentes sont parsemées de lon-
orographie, géologie, hydrologie), et la présence gues coulées de pierres et de terre. Sont-elles
de deux retenues EDF servant de pièges à sédi- actives ou ne sont-elles que des héritages de pro-
ments, ont facilité les investigations et permis cessus aujourd’hui non fonctionnels ? Si elles
une étude systémique, ce que peu de bassins-ver- sont actives, quelles sont les modalités et l’am-
sants montagnards autorisent. L’étude du terrain pleur des déplacements ? Sont-ils rythmés par
s’est effectuée selon une approche pratique à tra- des alternances saisonnières ou sont-ils cons-
vers des mesures et des observations in situ et tants durant l’année ? Dans quelle proportion le
une approche théorique à travers un travail de gel intervient ? D’ailleurs, s’agit-il d’un proces-
cartographie thématique, afin d’établir des rela- sus de solifluxion tempéré, ou peut-on parler de
tions avec les données de terrain. Parmi les pro- gélifluxion ? Dans quelle mesure la granulomé-
cessus observés, la solifluxion occupe une large trie intervient-elle dans le processus ? D’autre
place dans l’étude du terrain par son importance part, en dépit des recherches déjà effectuées sur
dans le bassin-versant. Des mesures sur un ubac le sujet par de nombreux auteurs, dont celles
schisteux ont permis de mieux comprendre le de Kaiser (1988), et Pech (1996) dans les Alpes
Environnements périglaciaires n°9 — 2002 19

françaises, les points abordés n’ont pas ou peu en banquettes, en lobes, en coulées, et autres ter-
porté sur les relations entre les déplacements et rassettes ou terrasses, qui résultent du processus
la végétation, les déplacements et la granulomé- de solifluxion.
trie, les déplacements et la variation des teneurs
en eau des coulées. Des études et des analyses Les causes de la solifluxion sont au nombre
fines ont été réalisées, des hypothèses ont fré- de quatre. On peut en qualifier trois d’externes :
quemment été émises, mais elles ont été rare- la gravité, les alternances gel-dégel, les variations
ment vérifiées. Il était donc nécessaire de mieux d’humidité, et une d’interne, les caractéristiques
connaître l’ampleur et les modalités de ce pro- physiques des coulées de solifluxion : texture,
cessus. granulométrie, porosité, perméabilité, cohésion,
conductivité thermique.

1.1. Le site de la Pointe du Picheru

De 2350 m à 2550 mètres d’altitude, sur l’ubac


schisteux de la Pointe du Picheru, la solifluxion
modèle les pentes et engendre des accumula-
tions de formes allongées, d’épaisseurs variables,
où les colluvions sont disposées en vrac, sans
aucune organisation interne si ce n’est un mince
horizon humifère sur les 5 à 10 premiers centi-
mètres. Il en ressort une terminologie couram-
ment employée de lobes, langues et coulées selon
le dessin précis sur le versant. La pente générale
de l’ubac varie de 15 à 25°. La pente des forma-
tions est égale à celle du versant. La solifluxion se
présente sous l’aspect de langues ou de lobes un
Figure 1 - Localisation du bassin-versant de la Grande peu plus longs que larges. Les rapports longueur
Sassière sur largeur (L/l) varient de 0,7 à 3,5, avec une
moyenne de 1,6. 70 % des formes ont un rapport
Pour définir la solifluxion, il faut rejoindre la L/l proche de 1,5. Les formes sont très évocatri-
conception de Pissart (1987) citant Andersson ces d’une dynamique proche d’un écoulement ou
(1906), pour qui ce processus se définit ainsi : d’une bavure sur le versant. Leur front, dont la
« slow flowing from higher to lower ground of hauteur peut varier de 40 à 210 cm, se termine
masses of waste saturated with water ». Il s’agit toujours par un abrupt soit convexe, soit recti-
donc d’un fluage provoqué par la saturation ligne, ou soit convexe puis rectiligne. Certaines
d’un sol en eau pour des raisons diverses. Le coulées sont recouvertes d’une végétation typi-
terme de solifluxion peut être affiné en fonction que de l’étage alpin, adaptée à des ambiances
du milieu où le processus se produit. Dylik variées (humides ou sèches, mobiles ou stables),
(1951) a utilisé celui de congélifluxion lorsque le tandis que d’autres sont presque entièrement
phénomène intervient sur un pergélisol. Baulig recouvertes de débris schisteux. L’épaisseur des
(1956) a employé celui de gélifluxion lorsque la formations atteint et dépasse fréquemment le
solifluxion résulte de l’alternance de gel et de mètre, alors que leurs rebords sont la plupart du
dégel. Ce terme a d’ailleurs été repris par Pissart temps verticaux et sans dissymétrie d’un flanc à
(1987), Washburn (1979), et Van Vliet (1988), l’autre.
pour qui la gélifluxion concerne les régions froi-
des et entraîne un déplacement lié à un change- Sur ce terrain, les coulées de solifluxion
ment d’état du matériel sous les coups de gel et résultent de l’accumulation d’épaisses colluvions
du dégel du sol. Quoi qu’il en soit, le passage schisteuses sur les versants, mêlées à un peu
d’une phase solide à une phase plastique élabore de matière organique et à une matrice terreuse.
sur certains versants des formes caractéristiques A une date indéterminée (vraisemblablement au
20 Environnements périglaciaires n°9 — 2002

Boréal 8800-7700 BP), elles sont apparues à les trois possibilités peuvent se combiner mais le
partir de mouvements de masse et de glissements processus de solifluxion résulte surtout du troi-
le long des versants qui ont ensuite évolué en sième cas.
coulées grâce à des conditions climatiques favo-
rables. 2. METHODOLOGIE

1.2. Sur les lois physiques régissant la méca- Un certain nombre d’exigences ont conduit à réa-
nique des sols et la rhéologie des coulées de liser une sélection précise du matériel à employer
solifluxion. pour réaliser les mesures de déplacement. Il fal-
lait un appareillage capable de lire les mouve-
Du fait de l’action de la gravité, le comporte- ments en surface et en profondeur, à des pas
ment des coulées de solifluxion va dépendre de de temps répétés, que ce matériel soit utilisable
la loi de Coulomb. Elle correspond pour les mas- par une personne seule ou une équipe réduite, et
sifs en terre à la relation entre la contrainte nor- qu’il soit adapté aux conditions difficiles de ce
male et la contrainte tangentielle (t = c+s tg f). c milieu montagnard.
exprime la cohésion, f exprime l’angle de frotte-
ment interne. c comprend la cohésion vraie (qui 2.1. Les méthodes d’évaluation du déplace-
dépend des liaisons ioniques et moléculaires), et ment des formes de solifluxion
la cohésion apparente (forces d’attraction liées
aux tensions capillaires). f est l’angle de frotte- Parmi toutes les méthodes de mesures possibles
ment interne correspondant à une pente d’équi- en surface comme en profondeur (Auzet, 1985),
libre lorsque la cohésion est nulle. L’angle de c’est l’appareillage de mesure d’inclinométrie en
frottement interne est fonction de l’organisation profondeur « Morand » qui a été retenu. Ce dis-
intergranulaire et du volume d’eau interstitielle. positif a servi à la station expérimentale de Cés-
Dans le cas de la solifluxion, la teneur en eau agit sieres (02), et il a été utilisé en Vanoise sur la
sur la cohésion et l’angle de frottement interne et crête de Lanserlia par B. Kaiser (1988). Il est
la loi de Coulomb devient : t = c’+s‘ tg f‘. c’, s‘, et précis, facile à utiliser dans les terrains difficiles,
f‘, font référence à la teneur en eau. La cohésion et permet de réaliser des mesures à de multiples
et l’angle de frottement interne, en relation avec pas de temps et de donner un ordre de dépla-
la teneur en eau, vont déterminer le comporte- cement moyen sur tout un profil. L’appareillage
ment des coulées de solifluxion. Ce comporte- de mesure inclinométrique de Morand permet, à
ment s’effectue en liaison directe avec les carac- partir de piquets plantés dans le sol, de lire leur
téristiques physiques de la formation concernée variation angulaire entre deux périodes de temps,
telles que la compacité du matériel, la granu- et d’en déduire un déplacement par un simple
lométrie, la forme des grains… Il faut garder calcul de différence angulaire. Une tige munie
en mémoire le rôle des argiles dont l’influence d’une réglette graduée (1 cm pour 1° d’angle) et
est plus complexe que les matériaux plus gros, d’un fil à plomb placé sur une tête de lecture
du fait de leur imperméabilité relative, de leur située au sommet d’un piquet enterré, permet
capacité de rétention d’eau, et de leur pouvoir de la lecture de son angle dans le sol. Le dépla-
cohésion. cement en profondeur est une valeur moyenne
Dans la pratique, on peut rencontrer trois car le piquet est rigide, il ne peut pas se défor-
types de comportement d’un sol face aux pres- mer comme le font des tubes-repères en pvc par
sions qu’il subit. Un sol va être élastique, lorsque exemple, mais qui sont à usage unique.
la déformation est suivie d’un retour à la position
initiale, plastique rigide, lorsque la formation est Pour évaluer les déplacements des coulées
soumise à un cisaillement, visqueux, lorsque la de solifluxion, un protocole d’étude a été établi
formation se déforme pour suivre un comporte- de façon à standardiser les mesures sur chaque
ment proche du liquide. Dans les deux premiers coulée afin de les comparer entre elles : mêmes
cas, on distingue une rupture une fois passé un dates de mesures d’une année à l’autre, même
certain seuil de résistance. Dans le troisième cas, emplacement des piquets d’une coulée à l’autre,
il y a déformation sans rupture. Dans les faits, prélèvements d’échantillons de terre au même
Environnements périglaciaires n°9 — 2002 21

endroit pour toutes les formes. Les piquets sont les déplacements des coulées que les piquets
au nombre de cinq par coulée, ils sont disposés en acier pleins, plus denses (± 7,9), qui étaient
à environ quatre mètres en amont de la conve- autrefois utilisés et qui pouvaient avoir tendance
xité du front terminant à l’aval les coulées. Trois à glisser plus vite que le sol si celui-ci était sursa-
d’entre eux ont une longueur de cinquante centi- turé en eau. De plus, cette disposition les rend
mètres et sont plantés dans le corps des coulées. difficilement expulsables par le gel car se sont les
Ce sont eux qui vont suivre les mouvements matériaux situés à l’intérieur qui sont éjectés, par
des coulées car ils sont considérés comme suffi- les piquets.
samment longs pour suivre le déplacement d’en-
semble, mais suffisamment courts pour ne pas Les mesures sont toujours effectuées à date
traverser le corps des coulées et se ficher dans le fixe, vers la fin du mois de juin et au début du
versant sous-jacent, ce qui les immobiliserait. Les mois de septembre. Eventuellement, des mesu-
deux autres piquets sont longs de quatre-vingts res supplémentaires ont pu être effectuées en
centimètres. Ils sont directement plantés dans le cas d’événement particulier (orage violent, pluie
versant de part et d’autre des coulées. Leur pro- durable, coup de froid...). Lors de chaque campa-
fondeur d’implantation leur permet de rester fixe gne de mesure, l’inclinaison de chaque piquet est
et de servir de repère « absolu » pour mesurer relevée ainsi que sa direction cardinale de plon-
les déplacements des piquets sur les coulées. Un gement par rapport au nord.
fil tendu entre ces deux bases sert à mesurer le
déplacement des piquets des coulées par rapport Les mesures sont destinées à connaître :
à leur position initiale. Les piquets (en fait des – le déplacement total sur un pas de temps
tubes en inox) ont la particularité d’être creux, ce donné,
qui les rend plus légers que des piquets pleins. – la part du déplacement par rotation dans le
Cette disposition leur permet de se remplir de mouvement total,
terre lors de leur implantation, ce qui leur con- – la part du déplacement revenant à la transla-
fère une densité plus proche de celle du milieu tion.
ambiant (± 1,5 pour les piquets en place contre
1,2 à 1,6 pour le sol). Ils suivent donc mieux Dans ce cas : 1 – Le déplacement total équivaut

Figure 2 - La technique de calcul du déplacement par inclinométrie.


22 Environnements périglaciaires n°9 — 2002

Photos 1, 2, 3, 4 – Présentation du site étudié et de l’appareillage de mesure utilisé.


Environnements périglaciaires n°9 — 2002 23

à la distance séparant un piquet d’une coulée de moyenne de 50,4 cm parcourus en trois saisons.
sa perpendiculaire par rapport au fil tendu entre C‘est donc une progression de 15,6 à 16,8 cm par
les deux bases, 2 – Le déplacement par rotation an que connaissent les coulées de solifluxion sur
résulte de la différence d’inclinaison des piquets l’ubac du Picheru. Selon les années, les déplace-
à Txn+1-Txn-1. ments moyens varient de 13,9 cm en 1997-1998,
à 21,4 cm en 1998-1999.
La valeur du déplacement par rotation lue
avec l’inclinomètre est connue en utilisant deux Il faut relativiser la moyenne des déplace-
formules de trigonométrie relatives à la position ments car l’écart type de 56,4 cm signifie que
initiale des piquets : l’écart entre le déplacement d’une coulée et le
– le déplacement par translation correspond déplacement moyen des coulées de solifluxion
au déplacement total moins le déplacement par est de 56,4 cm, ce qui est beaucoup. Le dépla-
rotation (Tslt° = Dtot – Rot°). cement médian, de 31,1 cm, indique que les
mouvements sont soit plutôt faibles, soit plutôt
Dans la réalité, les possibilités de mouve- importants, mais pas moyens. En effet, 9 coulées
ments des formes solifluantes sont infinies. Elles ont parcouru moins de 50 cm en trois ans, 3
concernent des déplacements par rotation et/ou ont avancé de plus de 100 cm, mais aucune n’a
translation, simple ou composite. parcouru entre 50 et 100 cm. Par année hydro-
logique (01/10 au 30/09), 1998-1999 représente
On peut rencontrer des mouvements simples à elle seule 42 % de l’activité solifluante après
avec : une absence de déplacement, un dépla- 1996-1997, 30 %, et 1997-1998, 28 %. En sur-
cement d’ensemble sans rotation (translation), face, le fluage se distingue par une vitesse crois-
une rotation simple par déplacement accéléré en sante des bords vers le centre, qui progresse en
surface, une rotation inverse par déplacement moyenne de 10 cm en plus pour l’ensemble des
accéléré en profondeur, sans compter qu’un coulées. Les extrêmes variants de +1 à +88 cm
pivotement des piquets sur leur axe n’est pas par rapport aux côtés. Pour deux des coulées,
exclu. les mouvements sont plus rapides sur les bordu-
res qu’au centre. Cela résulte probablement d’un
On peut rencontrer des mouvements com- dégel inégal de leur corps. Des mesures de tem-
posites comprenant : une rotation simple et une pératures en surface et en profondeur à différen-
translation, une rotation inverse et une transla- tes périodes du mois de juin ont montré que les
tion, ou une succession de ces deux types de côtés et la surface dégèlent sur 10 à 25 cm au
mouvements. moins une semaine avant le centre.

Sur le terrain, 12 coulées de solifluxion ont été A titre d’observation plus que de comparai-
sélectionnées au hasard. Elle ont toutes reçues son, car les sites, les méthodes, et les pas de
un nom féminin au lieu d’un numéro trop ano- temps retenus sont très variés, on peut observer
nyme. les résultats donnés par d’autres auteurs dans les
Alpes. Il en ressort des mouvements importants
3. LES RESULTATS dans le bassin-versant de la Grande Sassière, sans
commune mesure avec les autres lieux cités. Il
3.1. Les déplacements moyens s’avère en effet que le processus de solifluxion
est particulièrement actif sur l’ubac du Picheru.
Sur le total des trois années d’étude, les dépla-
cements varient de 2,5 cm à 173,8 cm, soit une 3.2. La différentiation des mouvements par
variabilité des déplacements de 69,5. Le déplace- rotation et translation
ment moyen par coulée est de 46,7 cm, en tenant
compte de l’absence de mesures en 1998-1999 En considérant un déplacement moyen sur trois
pour une coulée qui n’a pas pu être mesurée. ans de 46,7 cm, il en a été parcouru 19,4 (41,5 %)
En lui extrapolant une valeur égale à la moyenne par rotation, et 27,4 (58,5 %) par translation.
des deux années précédentes, on obtient une La translation est bien majoritaire mais pas de
24

Tableau 1 - Identification et caractéristiques des coulées étudiées


Environnements périglaciaires n°9 — 2002
Environnements périglaciaires n°9 — 2002 25

Tableau 2 - Déplacement des coulées par cycle annuel de 1996 à 1999


Déplacement en cm

Figure 3 - Déplacement des coulées par cycle annuel de 1996 à 1999

Tableau 3 - Déplacement différentié du piquet central par rapport aux progressions moyennes des bordures de chaque coulée

Tableau 4 - Comparaisons de déplacement par solifluxion dans les Alpes

Tableau 5 - Déplacement total des coulées de 1996 à 1999 et type de mouvement


26 Environnements périglaciaires n°9 — 2002

manière flagrante. Ce chiffre moyen cache mal suivante. Mais, un certain nombre de facteurs
une réalité où les mouvements sont très dispara- autres que climatiques influent directement sur
tes d’une coulée à l’autre, et d’une année à l’autre le comportement des coulées de solifluxion. Ces
sur une même coulée, même si les coulées se facteurs sont : la pente, la végétation, le type de
déplaçant rapidement le font plus par transla- végétation, et la granulométrie. Cette dernière va
tion. contrôler la cohésion d’ensemble de la coulée ou
d’une partie de la coulée en intervenant sur l’im-
3.3. La dynamique saisonnière hiver/été portance de la glace de ségrégation, la teneur en
eau, la vitesse d’assèchement… Mais, si le rôle
Si on tient compte des déplacements par saison, de ces facteurs est connu, il est difficile de l’éva-
la sortie de l’hiver (juin) recueille 99 % de la luer précisément et de savoir quelle importance
dynamique, contre seulement 1 % (1,2 %) en été, l’un d’entre eux peut prendre dans l’ensemble
qui joue un rôle insignifiant. du processus de solifluxion. Un travail d’analyse
d’échantillons de terre en laboratoire et une étude
L’étude montre que le processus de soli- statistique a permis de mieux cerner ces aspects.
fluxion dans le bassin-versant de la Grande Sas-
sière résulte du fait périglaciaire. Plus que de 4.1. Un processus rythmé par l’apparition et
solifluxion, il s’agit ici de gélifluxion car au prin- la fin de la saison froide
temps, le dégel des coulées et la fusion du
manteau nival entraîne des déplacements par 4.1.1. La date de mise en mouvement des coulées
imbibition des parties dégelées en eau de fonte
et sursaturation des sols en eau. Lors de la sur- Les mesures de températures pratiquées sur
saturation en eau des formes au printemps, le le terrain et les comparaisons avec la station
mouvement se traduit par un fluage plastique nivométrique proche du Chevril (2450 m) ont
pouvant dans certains cas approcher un véritable montré que le processus de solifluxion se pro-
écoulement boueux. duit entre la dernière semaine de mai et le 10
juin. La présomption est très forte pour le début
4. L’INTERPRETATION DES RESULTATS du mois de juin, moment où les températures
moyennes redeviennent positives. Avant cette
Si les modalités de la fusion nivale et du dégel date, les coulées sont encore gelées, après, elles
sont cruciales dans l’activation du processus, ont toutes bougé.
les conditions de la réapparition du froid en
automne n’ont pas d’influence sur la saison active L’activation du processus de solifluxion

Figure 4 - Déplacement total des coulées de 1996 à 1999 et type de mouvement


Environnements périglaciaires n°9 — 2002 27

Tableau 6 – La différentiation saisonnière du mouvement des coulées (en cm)

semble marqué par la régularité d’une année à fluxion et la variation de teneur en eau estivale
l’autre, car elle dépend des conditions thermi-
ques et la vitesse de fusion du manteau nival en 4.2.1. Une granulométrie pauvre en fines
fin de saison, qui connaissent elles-mêmes une
La part des matières organiques est faible, envi-
certaine régularité. C’est la conjonction d’une
ron 1,3 % du poids des échantillons de terre
fusion nivale rapide avec un dégel simultané et
prélevé dans le flanc des coulées à 25 cm de pro-
au moins partiel du corps des coulées de soli-
fondeur. Les argiles sont aussi faiblement repré-
fluxion qui va enclencher le fluage. La coulée
sentées avec des teneurs variant de 0,25 % à 1,7
évolue rarement d’un seul bloc mais de manière
% du poids total à sec des échantillons. La frac-
différentielle car le dégel n’est pas toujours égal
tion inférieure à 20 m reste là encore faible, entre
à l’intérieur des formes. Au printemps 1999, j’ai
0,9 et 15,8 % du poids total des échantillons
constaté des déplacements plus importants que
(moyenne à 4,4 %). Contrairement à d’autres
d’habitude dus au retour des températures posi-
auteurs comme Kaiser (1988), qui a trouvé en
tives plus lentes que les autres années. Simultané-
Vanoise à Lanserlia des proportions plus fortes
ment, la fonte des neiges a été assez lente en
(1,4 à 7,5 % à 20-25 cm de profondeur), l’argile,
relation avec cette évolution thermique. Il en a
par sa rareté, n’a pas d’influence directe sur
résulté un dégel très progressif des coulées et
la dynamique solifluante dans le bassin-versant
une imbibition en eau de fonte elle aussi progres-
de la Grande Sassière. Si influence il y a, elle
sive, ce qui a probablement entraîné des mou-
provient donc de l’absence de ce matériau qui
vements plus poussés que d’habitude (42 % du
entraîne une moindre cohésion des coulées, et
total des trois années). Il n’est donc pas impossi-
donc des déplacements importants lors de la
ble que plus le dégel des coulées et la fonte des
saturation en eau.
neiges se font graduellement, et plus le dépla-
cement possible soit important. Les années ont
4.2.2. L’évolution de la teneur en eau des coulées durant
manqué pour effectuer cette démonstration.
la saison estivale
4.1.2. L’engel des coulées en automne Entre le 10 et le 15 juin, la teneur en eau
moyenne des coulées alterne selon les années de
L’étude sur le terrain a montré que les modalités 18,2 à 21,7 % du poids des échantillons de terre
d’engel des coulées en automne, avec son cor- (moyenne 20,4 %). Pour atteindre la saturation
tège de variabilités climatiques fortes, n’influent des coulées, la teneur en eau moyenne doit être
pas sur l’activation et l’importance du processus de 23,3 % du poids des échantillons. Cette valeur
au printemps suivant. En octobre, les températu- est atteinte durant la première décade de juin
res minimales deviennent ou sont déjà négatives, car la plupart des coulées sont alors totalement
les températures moyennes négatives apparais- saturées d’eau. En moyenne, lors des prélève-
sent en novembre. Quel que soit l’état du man- ments vers le 10 juin, les coulées de solifluxion
teau neigeux qui peut s’installer précocément sont à 87,8 % de la valeur nécessaire pour attein-
(octobre) ou tardivement (décembre), à 2450 m, dre le stade de saturation, valeur qui varie de
il apparaît qu’à la fin du mois d’octobre, les 85,6 % à 89,3 % selon les années. On est donc
coulées sont gelées ou commencent à geler (0 à très proche du seuil fatidique de mise en mou-
–1° à 25 cm). vement par saturation en eau. Bien entendu, les
teneurs en eau sont très variables d’une coulée à
l’autre mais, dans l’absolu, elles sont toutes très
proches de la saturation.
4.2. La granulométrie des coulées de soli- Curieusement, la teneur en eau des coulées
28 Environnements périglaciaires n°9 — 2002

ne faiblit pas en s’éloignant de la date de mise particulièrement chargées en liquide au sortir de


en mouvement des formes. On peut penser que l’hiver et qu’elles s’assèchent durant l’été, même
les coulées s’assèchent avec le temps et que les s’il est pluvieux. La relation entre le fluage prin-
teneurs en eau vont en décroissant au fur et à tanier et la saturation en eau des sols résultant de
mesure que l’on s’éloigne de la date de mise en la fusion nivale est évidente ici. La granulomé-
mouvement des coulées, or, ce n’est pas le cas. La trie des coulées indique une faible représenta-
première semaine de juillet, soit un mois après les tion de la fraction fine, inférieure à 20 m et sur-
déplacements, les teneurs en eau sont à peu près tout à 2 m, laissant à penser que la cohésion des
les mêmes qu’au début du mois de juin. Elles sols est plus limitée que si cette fraction avait été
augmentent même légèrement (+3,5 % d’eau du conséquente. Les coulées nécessitent de fait une
début juin au début juillet). L’explication de ce charge en eau assez faible (très souvent inférieure
phénomène est simple. Fin mai-début juin, les à 30 % de leur masse) pour entrer en mouve-
coulées dégèlent en même temps qu’elles s’im- ment, contrairement à des sols riches en fines
prègnent en eau de fusion nivale tandis qu’une qui auraient demandé bien plus d’eau pour un
partie de leur corps peut rester encore gelée. même résultat. C’est aussi ce qui peut expliquer
Lorsqu’elles se déplacent, les parties encore le déplacement important de certaines coulées.
gelées servent de plan de glissement. Par la suite,
une fois le déplacement et le dégel réalisés, elles Un constat s’impose, les volumes d’eau dans
continuent à être alimentées en eau de fonte et les coulées sont toujours assez voisins, et sou-
du dégel des sols en amont (sans compter les vent proches de la saturation, et pourtant, certai-
pluies qui elles aussi peuvent s’infiltrer). A cette nes évoluent lentement alors que d’autres sont
époque, nombre de coulées sont mouvantes et rapides. Cela veut dire qu’il existe nécessaire-
boueuses en surface, ce qui indique l’importance ment des facteurs qui influent sur leur compor-
du volume d’eau présent dans les coulées tant tement, sinon pourquoi certaines formes attei-
que les versants n’ont pas eu le temps de se res- gnent tous les ans la saturation et ne connaissent
suyer de l’eau de l’hiver. Donc, malgré la pré- que des mouvements modérés, voire lents, tandis
sence plus grande d’eau vers le début de juillet que d’autres évoluent rapidement ? A ce titre,
qu’au mois de juin, il ne se produit pas de mou- il semble opportun de comparer le pourcentage
vement car le seuil critique d’activation n’est d’eau nécessaire pour arriver à la saturation avec
pas franchi même si il est pratiquement atteint le déplacement total des coulées. Par exemple,
comme en début juin. Ce phénomène s’explique est-ce qu’une coulée « rapide » ne demande pas
par l’absence en juillet de glace interstitielle dans plus d’eau pour arriver à saturation, et par consé-
les coulées qui ne favorise plus le glissement. quent se déplacer, qu’une coulée « lente » ? Pour
savoir si une relation existe entre la saturation
A la fin de l’été par contre, la situation est en eau et le déplacement, le mieux est de recou-
bien différente. La teneur en eau moyenne des rir à l’établissement du coefficient de corrélation
coulées est de 12,3 % du poids total des échan- linéaire et d’une droite d’ajustement pour établir
tillons (11,1 à 13,6 % selon les années) pour une une éventuelle relation entre ces deux paramè-
saturation estimée à 23,7 % de ce poids. Globa- tres.
lement, la population étudiée est à 50,3 % de la
saturation, soit 37,5 % de moins qu’en juin. On Le coefficient de corrélation linéaire (r =
le voit bien, les mois de juillet, août et septem- -0,65), indique qu’il existe une liaison négative
bre aboutissent à un assèchement des coulées de entre le déplacement des coulées et le pourcen-
solifluxion. Les pluies, même intenses et dura- tage d’eau nécessaire pour atteindre le niveau de
bles comme en juillet 1996 (120 mm/24h), ne saturation. Il existe donc un léger rapport inverse
parviennent pas à recharger suffisamment les entre la teneur en eau et le déplacement, mais qui
sols et n’engendrent donc pas de mouvements. ne permet pas de tirer de conclusion nette sur
la relation étudiée. En effet, il ne paraît pas du
tout certain que plus les coulées progressent, et
L’évaluation de la teneur en eau des coulées moins elles aient besoin d’eau au delà d’un seuil
de solifluxion montre donc bien qu’elles sont minimal d’activation du processus. Ce résultat,
Environnements périglaciaires n°9 — 2002 29

Figure 5 – La relation déplacement / rap-


port à la saturation en eau

qui n’est que relatif, montre que des variables 4.3.1. Les relations entre les déplacements totaux des
interviennent en fait dans le processus, et que coulées et les variables de terrain
l’on ne peut s’en tenir à cette relation simple. Ces
variables expliquent les déplacements différen- Les relations statistiques entre les déplacements
ciés d’une coulée à l’autre, alors que toutes les totaux et les variables de terrain sont :
coulées atteignent la saturation au printemps, et — la relation déplacement / pente :
donc devraient bouger de manière homogène. r = 0,1 r2 = 0,013
x = 1,98 y + 60,65
La question est maintenant de savoir quelles
sont ces variables et quelle est leur importance — la relation déplacement / taux de végétali-
dans l’ensemble du processus ? A cela, une étude sation :
statistique simple peut apporter une réponse, en r = -0,9 r2 = 0,78
mettant en relation les différentes variables inter- x = -1,25 y + 120,7
venant dans la solifluxion avec leurs déplace-
ments totaux sur 3 ans. — la relation déplacement / type de végéta-
tion :
4.3. L’apport des statistiques pour une r = 0,82 r2 = 0,67
meilleure compréhension du processus de
solifluxion a. La relation déplacement / pente

Il s’agit d’aborder les relations statistiques exis- Il n’y a pas de rapport direct entre le déplace-
tant entre le déplacement des coulées de soli- ment et la pente des coulées dans la gamme de
fluxion, et des critères de terrain tels que la pentes où l’on rencontre le processus (15 à 25°).
pente, le taux de recouvrement végétal, le type Il est évident que la relation pente-processus
de végétation majoritaire, ou des critères mor- existe bien. Pour s’en convaincre, il suffit d’éta-
phologiques comme le rapport L/l des coulées, blir le coefficient de détermination 1. Le coeffi-
leur épaisseur, ou leur type de front, ou même cient égal à 0 ou presque indique bien que les
le déplacement et les limites d’Atterberg. Ces cal- valeurs de pentes n’expliquent pas la relation sta-
culs ont permis de tirer un certain nombre de tistique ci-dessus dans la mesure où il n’existe
conclusions intéressantes. pas de liaison fonctionnelle affine entre y et x.
Ce n’est donc pas la pente, car les valeurs entre
les coulées sont trop proches, qui explique l’im-
portance du déplacement dans le cas présent. La
pente agit comme une variable conditionnant la
présence du processus (au dessous, il y aurait
30 Environnements périglaciaires n°9 — 2002

Figures 6, 7, 8 – Les relations déplacements / variables de terrain

reptation, au dessus, glissement), mais pas sa c. La relation déplacement / type de végétation


dynamique propre, qui est le fait d’autres facteurs
(granulométrie, lithologie, végétation, climat...). Il a paru intéressant de mettre en relation les
vitesses de déplacement avec le type de végéta-
b. La relation déplacement / taux de recouvre- tion colonisant la surface des coulées. Les végé-
ment végétal taux ont été répartis en cinq classes :

Il existe une liaison relative négative très forte qui — La classe 1 s’applique aux pelouses alpines
démontre que plus le déplacement des coulées denses à fétuque de Haller (Festuca halleri), ses-
est important, plus le taux de recouvrement par lérie bleuâtre (Seslaria caerulea) et laîche courbée
la végétation est faible, ce qui semble logique. (Carex curvula).
Mais, est-ce la vitesse de déplacement qui expli- — La classe 2, aux surfaces recouvertes en
que le taux de recouvrement ou l’inverse ? Le majorité de dryades à huit pétales (Dryas octope-
coefficient de détermination de 0,78 indique une tala).
assez forte corrélation en X et Y qui autorise à — La classe 3, aux coulées partagées entre la
dire que le taux de recouvrement des coulées par pelouse et les dryades.
la végétation est expliqué à 78 % par la vitesse — La classe 4 se rapporte aux coulées à drya-
de déplacement. Plus les coulées évoluent rapi- des et végétaux dits « de rocaille et d’éboulis » :
dement, et moins la végétation n’a le temps de saule à feuilles émoussées (Salix retusa), saxifrage
les coloniser. La végétation, qui est un facteur faux bryum (Saxifraga bryoide), orpin noirâtre
de stabilité des formes géomorphologiques, n’est (Sedum atratum), armoise des glaciers (Artemisia
pas en mesure de s’installer durablement au-delà glacialis), achillée naine (Achillea nana), renoncule
d’un certain niveau d’activité morphodynamique, des glaciers (Raununculus glacialis), silène sans
qu’il n’est pas possible de définir ici. Malgré tout, pédoncule (Silene exscapa).
on constate qu’à partir d’un taux de végétalisa- — La classe 5, revient aux coulées seule-
tion de 50 %, les vitesses de déplacement se ment colonisées par des végétaux de rocailles et
ralentissent nettement. d’éboulis.
Environnements périglaciaires n°9 — 2002 31

Le taux de recouvrement, qu’il soit de 1 ou 4.3.2. La relation entre le déplacement des coulées de soli-
de 100 % n’a pas été pris en compte, seul le type fluxion et leurs critères morphologiques
de végétal l’a été. Le coefficient de corrélation
linéaire de 0,82 montre qu’il existe une liaison Les relations statistiques entre le déplacement et
relative, et donc que la végétation est un bon les critères physionomiques des coulées sont :
indicateur de l’activité morphodynamique. Les
pelouses se rapportent aux coulées stables (par- — la relation déplacement / rapport lon-
courant de 0 à 20 cm environ en 3 ans). De gueur x largeur des coulées :
même, les dryades seules représentent surtout r = 0,1 r2 = 0,01
des coulées lentes mais aux surfaces plus sèches
que les pelouses (déplacement -Dt- = 6,5 cm). — la relation déplacement / épaisseur des
Les dryades, lorsqu’elles sont mélangées à de la coulées :
pelouse indiquent une certaine activité (Dt = 10 r = 0,53 r2 = 0,28
à 50 cm), mais seulement quand elles ne recou-
vrent pas la majorité des surfaces (environ 50 %). — la relation déplacement / type de front :
Les coulées à végétation de rocaille se rappor- r = 0,9 r2 = 0,8 x = 64,3 y + 56,8
tent aux coulées rapides et instables que seuls
des végétaux à racines traçantes peuvent occu- On peut se demander si la dynamique des
per (Dt > à 100 cm). Donc, les végétaux occu- coulées de solifluxion n’a pas un lien direct avec
pant la surface des coulées témoignent bien de leurs formes. Est-ce que leur physionomie, leur
leur dynamisme. Ils permettent de donner un épaisseur, ou leur front ont une quelconque rela-
ordre de vitesse sans même réaliser de mesures. tion avec leur dynamique ? C’est ce que les cal-
Cependant, les dryades sont une exception car culs suivants vont tenter de démontrer.
elles se rencontrent aussi bien sur des coulées
stables et très végétalisées, que des formes rapi-
des mais peu recouvertes.

Figures 9, 10, 11 – Les relations déplacements / critères physionomiques


32 Environnements périglaciaires n°9 — 2002

Figure 12 - Les types de fronts des coulées de solifluxion en fonction de leur vitesse
Environnements périglaciaires n°9 — 2002 33

a. La relation déplacement / rapport longueur- 4.3.3. Les relations entre le déplacement des coulées et les
largeur des coulées (L/l) limites d’Atterberg
En recherchant une éventuelle relation entre la
En plus de réaliser des relations entre les dépla-
vitesse des coulées et leur rapport longueur sur
cements des coulées et différents critères de ter-
largeur (L/l), il apparaît qu’il existe une indépen-
rain, les investigations ont abordé les relations
dance totale (r = 0,1) entre le déplacement des
pouvant exister entre les déplacements et les
coulées et leur rapport Longueur/largeur (L/l).
limites d’Atterberg. Il s’agissait de comparer les
Les formes des coulées n’ont donc aucune rela-
différentes limites d’Atterberg (retrait, plasticité,
tion avec leur vitesse.
liquidité) avec les teneurs en eau des coulées de
b. La relation déplacement / épaisseur des solifluxion et de voir si ces limites empiriques
coulées (car elles ne sont pas basées sur des lois physi-
ques) peuvent s’appliquer à la solifluxion dans la
L’épaisseur des coulées et leur relation avec les réalité. La détermination de ces limites permet
vitesses de déplacement (r = 0,5) indique qu’il d’évaluer à quel moment une coulée sur le ter-
y aurait un lien modéré entre vitesse et épais- rain va évoluer, et surtout à quel moment elle
seur. S’il existe véritablement une relation, il risque de se disloquer, c’est-à-dire d’évoluer en
faut penser que les vitesses de déplacement ont fluage, en évaluant sa teneur en eau. L’étude a été
peu de chose de déterminant quant à l’épaisseur menée sur cinq coulées sur des échantillons de
exacte des coulées. Le coefficient de détermina- terre prélevés au mois de juin.
tion (r2 = 0,28) semble montrer ce rôle modeste
du déplacement en relation avec l’épaisseur des Les limites établies en laboratoire sur de petits
coulées. volumes de terre sont :
— les limites d’Atterberg au stade de malléa-
c. La relation déplacement / types de fronts
bilité des échantillons (retrait),
La forme du front d’une coulée de solifluxion — les limites d’Atterberg au stade de défor-
peut-elle renseigner sur sa dynamique ? On mation des échantillons (plasticité),
observe sur le terrain trois formes de fronts pos- — les limites d’Atterberg au stade de disloca-
sibles : des fronts convexes, des fronts rectilignes, tion des échantillons (liquidité).
et des fronts d’abord convexes puis rectilignes.
Il a été attribué à chacun de ces types de fronts En juin, les teneurs en eau sont normalement
une valeur déterminée, en l’occurrence : 1 pour proches de la saturation des coulées, et donc du
les fronts convexes, 2 pour les fronts convexo- stade de liquidité d’Atterberg (les déplacements
rectilignes, et 3 pour les fronts rectilignes, en sug- sont très frais). En fin de saison estivale (sep-
gérant une valeur de front (1,2, ou 3) d’autant tembre) on les suppose plus proches du stade
plus grande que la coulée semble active. Le de retrait car elles se sont asséchées. Les rela-
coefficient de corrélation de 0,9 indique une tions statistiques effectuées reprennent la satura-
liaison relative presque fonctionnelle. La vitesse tion en eau des échantillons avec deux des trois
de déplacement explique bien la forme du front limites d’Atterberg, le stade où l’échantillon se
des coulées. Un front convexe représente une déforme, et celui où il se disloque. Le stade mal-
coulée stable (0 à 20 cm environ en 3 ans), tandis léable ne présente pas d’intérêt ici car il se situe
qu’un front rectiligne indique une coulée rapide en deçà des limites de saturation des prélève-
(plus de 100 cm). La forme convexe puis rectili- ments et il signifie des coulées immobiles.
gne indique quant à elle une activité intermédiaire
(20 à 110 cm). Le coefficient de détermination Les résultats sont :
de 0,8 signale une forte corrélation entre y et x — pour la relation teneur en eau en juin /
(x = 64,3 y + 56,8). Mais, si le déplacement expli- limites d’Atterberg au stade de dislocation :
que la forme du front et permet de donner un r = 0,82 y = 0,77 x + 9,28
ordre de vitesse, il est clair que l’inverse n’est pas
vrai.
34 Environnements périglaciaires n°9 — 2002

— pour la relation teneur en eau en juin / toire et les différents seuils d’Atterberg ont été
limites d’Atterberg au stade de déformation : calculées. Ils montrent des liaisons quasi fonc-
r = 0,87 y = 0,83 x + 4,37 tionnelles :

— pour la relation entre la teneur en eau en saturation / dislocation : r = 0,98,


septembre / limites au stade de la dislocation : saturation / déformation : r = 0,98,
r = 0,72 y = 0,71 x + 12,8 saturation / stade malléable : r = 0,94.

On constate que la relation (r = 0,82) est


bonne entre les limites d’Atterberg au seuil de Plus on s’approche du seuil de dislocation
dislocation des échantillons et la teneur en eau des échantillons testés, et plus le mouvement
de ceux-ci lors de leur prélèvement. En juin, les sur le terrain risque d’être important car les
teneurs en eau des coulées sont élevées, elles coulées sont sursaturées en eau. J’ai pu le cons-
sont saturées d’eau car la fusion nivale est récente tater sur place car certaines coulées présentaient
ainsi que le déplacement qui s’en est suivi. Mais, des formes de fluage de matériaux ou de petits
les teneurs en eau très fortes à cette époque n’at- glissements localisés. Malgré tout, ces exemples
teignent pas les valeurs d’Atterberg de disloca- ne tiennent pas compte de l’hétérogénéité gra-
tion ce qui signifie qu’il y a un changement d’état nulométrique dans les coulées et de la teneur en
des coulées dû à leur imbibition en eau, mais pas argile et en matière organique qui vont influen-
au point d’entraîner une dislocation de celles-ci. cer le mouvement. Les relations entre les teneurs
en eau et les llimites d’Atterberg avec les dépla-
La relation entre les teneurs en eau des cements des coulées auraient été en effet plus
coulées en juin avec les limites d’Atterberg au délicats à aborder si les formes avaient contenues
seuil de déformation semble le plus proche de plus d’argiles ou de matière organiques suscep-
la réalité sur le terrain que la précédente. La rela- tibles d’influencer la cohésion d’ensemble. L’en-
tion est ici un peu plus forte (r = 0,87). Cela semble des conclusions tirées de cette étude ne
indique que les teneurs en eau en juin sont très peuvent donc être considérées que dans le cas de
proches de la limite de déformation des coulées formes pauvres en argiles ou d’éléments favori-
et qu’il existe bien une relation entre les teneurs sant une cohésion d’ensemble.
en eau en juin et le seuil de déformation d’Atter-
berg. Il va sans dire que la limite de déformation Conclusion
a été atteinte, et même certainement dépassée
quelques jours avant les prélèvements, lors de la Dans le bassin-versant de la Grande Sassière,
mise en marche du processus solifluant. en ubac, entre 2300 et 2550 m, le processus de
solifluxion est très actif. D’origine périglaciaire à
En septembre, il existe une liaison relative 99 %, il est commandé au début du mois de juin
plus réduite (r = 0,72). Le passage de l’été a par le dégel des sols et la fusion nivale simultanée
asséché les coulées, d’où ces valeurs faibles et qui entraîne une saturation en eau des colluvions.
éloignées des limites d’Atterberg au seuil de dis- Ce phénomène provoque un changement d’état
location et de déformation. Il n’y a donc plus de où les coulées de solifluxion passent d’une phase
relation directe entre ces deux paramètres. Par- solide à une phase visqueuse, voire liquide, en
tant de ce constat, on voit que les limites d’At- accord avec les limites d’Atterberg. Les modali-
terberg ne sont pas atteintes en été, et que la tés de cette phase de dégel et de fusion semblent
solifluxion ne joue donc que grâce à l’hiver. La influer sur le comportement des coulées, qui
périglacialité du processus est confirmée. pourraient être plus mobiles lorsque cette phase
s’effectue progressivement. De même, l’existence
Enfin, pour confirmer les résultats obtenu en de zones encore gelées à l’intérieur des coulées
étudiant les teneurs en eau et les limites d’At- abaisse le volume d’eau nécesaire pour provo-
terberg avec les déplacements des coulées, les quer un fluage car les coulées, une fois le dégel
coefficient de corrélation linéaire entre le taux totalement réalisé, n’évoluent plus ensuite même
de saturation des échantillons obtenus en labora- si elles contiennent plus d’eau. La faible teneur
Environnements périglaciaires n°9 — 2002 35

en argile de ces formations amoindrie probable- DUMAS B., RAFFY J., 1993 – Mise en évidence
ment leur cohésion, d’où un fluage plus impor- de la gélireptation en moyenne montagne méditer-
tant dans le cas présent par rapport aux constats ranéenne. Géomorphologie et aménagement de la monta-
d’autres auteurs dans les Alpes. Certains critères gne, Hommage à P. Gabert, CNRS, Caen, 181-189.
PARC NATIONAL DE LA VANOISE, 1993 - Fleur
tels que le type de végétation ou la forme du
de Vanoise, Ed. PNV, Edisud, Aix en Provence,
front sont d’excellents indicateurs de vitesse. 318 p.
D’autres comme la longueur et la largeur d’une GABERT P., LAUTRIDOU J.P.,1987 – Mesures de
coulée, son épaisseur, ou sa pente, n’ont pas de mouvements superficiels et des températures dans
relation directe avec la dynamique du processus. les Alpes du Sud. In Processus et mesure de l’éro-
La dynamique de ce processus peut donc être sion, 1987, CNRS, Paris, 455-476.
abordé de manière simple grâce à ces différents KAISER B., 1987 - Les versants de Vanoise, enjeux tradi-
critères, même si de nombreuses questions res- tionnels et fonctionnement morphoclimatique. Thèse, Uni-
tent posées, qui nécessiteraient des études avec versité Paris VII, 2 t., 425 et 638 p.
un matériel très précis. KAISER B., 1992 - Variations spatiales et temporel-
les dans les rythmes d’évolution des versants alpins.
Bulletin de l’Association des Géographes Français, 3, p.
Bibliographie 265-270.
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AVENARD J.M., 1962 - La solifluxion : ou quel- analyse des données de mesures de déplacement en
ques méthodes de mécanique des sols appliqués au problème milieu périglaciaire d’altitude. Bulletin 34 du centre de
géomorphologique des versants. Travaux du laboratoire Géomorphologie de Caen, CNRS, Caen, 87-118.
de géographie physique du Centre de Géographie MORAND F., WICHEREK S., 1987 – Douze parcel-
Appliquée, Strasbourg, 159 p. les de mesure d’érosion sur un versant de la France
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granitiques. Thèse de doctorat de l’Université Louis PECH P., 1991 - Groupement végétaux et processus
Pasteur, Strasbourg I, Strasbourg. 186 p. morphogéniques sur des versants de haute monta-
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36 Environnements périglaciaires n°9 — 2002

LES ECROULEMENTS ROCHEUX EN CLAREE (BRIANCONNAIS,


HAUTES-ALPES) : UNE ORIGINE PARAGLACIAIRE ?

Etienne COSSART

Equipe DYNMIRIS, UMR PRODIG 8586 CNRS


Université Paris 7 – Denis Diderot
Case 7001, place Jussieu
F- 75251 Paris Cedex 05
eedc1979@aol.com

Résumé

La vallée de la Clarée a conservé de nombreux héritages de la dernière glaciation, notamment des roches
moutonnées. Lors d’un travail de terrain, il a été remarqué que chaque roche moutonnée n’a pas évoluée de
façon identique depuis la déglaciation : certaines, intensément diaclasées ont donné lieu à des écroulements
rocheux, tandis que d’autres sont restées stables. Une analyse statistique multivariée discriminante met en
évidence que les écroulements se sont développés au sein d’affleurements fortement diaclasés, situés en bas
de versant. Les caractères du diaclasage (géométrie, intensité) semblent à mettre en relation avec le passage
du paléo-glacier, et la force de décompression qui a suivi sa disparition. En conséquence nous sommes
incités à qualifier ces écroulements rocheux de « paraglaciaires ».

Introduction

Nous devons à Church et Ryder (1972) la pre- Aussi proposons-nous d’alimenter ce débat
mière définition du terme paraglaciaire, carac- en analysant l’évolution de roches moutonnées
térisant les “ processus non glaciaires mais dans la haute vallée de la Clarée (Briançonnais,
conditionnés par la glaciation ” et la mise en évi- Hautes-Alpes). En effet, dans ce secteur de nom-
dence de la crise érosive suivant le recul des gla- breuses surfaces rocheuses polies par les glaces
ciers. Suite à cet article, de nombreux travaux ont ont évolué en écroulements rocheux. Est-ce
été menés sur ce thème, la majorité d’entre eux la marque de la décompression post-glaciaire,
se focalisant sur la morphodynamique fluviale et comme le considère notamment Lewis (1954) ?
cherchant à quantifier les taux de sédimentation D’autres facteurs (séismes, événements climati-
dans un contexte paraglaciaire (Becht, 1995 ; Bal- ques extrêmes…) peuvent-ils expliquer leur ori-
lantyne et Benn, 1996 ; Muller, 1999 ; Mercier, gine, pour reprendre l’hypothèse de Vivian (1975
2000 et 2001 ; etc.). Toutefois, les réajustements et 1997) ? Un moyen de répondre à ces questions
paraglaciaires ne se matérialisent pas uniquement est d’essayer d’identifier les facteurs qui régis-
au travers des systèmes fluviaux ; les dynamiques sent la localisation de ces écroulements. En nous
de versants comme les glissements de terrain ou basant sur la description d’un échantillon de
les écroulements rocheux peuvent être plus fré- roches moutonnées, nous allons rechercher par
quents en contexte paraglaciaire, sous l’effet du une analyse discriminante les différences existant
phénomène de décompression (André, 1997 ; entre les roches moutonnées évoluant en écrou-
Benn et Evans, 1998 ; Scavia et al., 1999). Si lement et celles qui sont restées stables.
nous nous référons aux descriptions de Lewis Notre objectif est donc double, il s’agit (1)
(1954), ce processus se matérialise par l’ouver- de décrire les roches moutonnées pour y déceler
ture de néo-diaclases sub-parallèles à la surface les paramètres pouvant expliquer leur évolution
topographique pouvant aboutir à des écroule- en écroulement (2) de réaliser un traitement sta-
ments rocheux. D’autres travaux (Vivian, 1975 tistique approprié pour modéliser les conditions
et 1997) mettent en doute l’existence de ce pro- dans lesquelles se développent les écroulements.
cessus et considèrent les parois façonnées par les
glaciers comme stables.
Environnements périglaciaires n°9 — 2002 37

Figure 1. Aperçu topographique et localisation


de la vallée de la Clarée

Le choix de la vallée de la Clarée : un contexte viron 2400 à 2450 mètres selon les secteurs,
paléo-glaciaire et une lithologie favorables ce qui permet d’estimer l’épaisseur des glaces à
environ 550 mètres. Au niveau de la confluence
Un paléo-glacier imposant au DMG avec la Durance, les placages morainiques s’éten-
dent jusqu’à une altitude proche de 2300 mètres
La vallée de la Clarée, située à la transition entre (fig. 3 et 4) : l’épaisseur du glacier devait alors être
les Alpes du Nord et du Sud, appartient au bassin d’au moins 900 mètres.
versant de la Durance, rivière avec laquelle elle Ces estimations doivent être considérées
conflue en rive droite à l’amont de Briançon (fig. comme des minima. On ne peut en effet pas
1). Bien qu’actuellement entièrement déglacée, exclure que le glacier ait été plus épais car les
à la différence des deux autres principales val- effets de son passage ont pu être en partie obli-
lées briançonnaises (la Guisane et la Vallouise),
la vallée de la Clarée contribuait pleinement au
développement du glacier durancien lors du Der-
nier Maximum Glaciaire (DMG). Le profil en
long de la vallée, accidenté de plusieurs verrous
(fig. 2), et les roches moutonnées, très présentes
dans le paysage à l’amont de Névache témoi-
gnent de la puissance érosive de ce paléo-glacier.
En associant les roches moutonnées avec les
dépôts glaciaires au sein d’une cartographie géo-
morphologique, nous avons pu reconstituer a
minima les dimensions du paléo-glacier, et notam-
ment son épaisseur (Cossart, 2001). En effet, Figure 2. Paysage de la Haute-Clarée en Amont de Névache.
en Haute-Clarée, nous retrouvons des surfaces Les roches moutonnées soulignées marquent la localisation de
polies et des erratiques jusqu’à une altitude d’en- verrous (voir également fig. 5)
38 Environnements périglaciaires n°9 — 2002

sane (estimée à environ 950 mètres), qui consti-


tuait le niveau de base dans le secteur. Or, la puis-
sance érosive d’un glacier, et notamment la force
de compression qu’il exerce sur son encaissant
est directement proportionnelle à son épaisseur.
En effet, d’après l’équation utilisée notamment
par Kerschner et al. (1999) et Lliboutry (2002),
on a :
t = r g h . sin a . f

Où t est la force de compression exercée par


le glacier (en pascals), r est la masse volumique
de la glace (900 kg.m-3), g est l’accélération de
la pesanteur (m.s-2), h est l’épaisseur de la glace
(m), a est la pente de surface du glacier, f est
Figure 3. Le paléo-englacement de la vallée de la Clarée au un facteur morphologique (0,5 pour une langue
DMG. glaciaire, 1 pour un glacier de cirque). Or, plus
Etablis à l’aide de critères de terrain, les contours du paléo- la pression exercée par la paléo-glacier a été
glacier sont établis a minima, quelques incertitudes subsis- forte, plus la force de décompression est suscep-
tent dans le raccordement de certains glaciers de cirque vers tible d’avoir une action géomorphologique. Aussi
le glacier principal.
pouvons-nous espérer observer en Clarée de tels
impacts. Néanmoins pourquoi ne pas avoir tra-
térés par le temps. Elles constituent cependant vaillé en Guisane ? Simplement parce qu’en Gui-
un point de repère non négligeable, qui par sane les conditions lithologiques sont défavora-
ailleurs cadre bien avec l’ampleur des glaciers bles à l’enregistrement des déformations suscep-
estimée dans les vallées voisines de la Cervey- tibles d’être créées par la décompression (schis-
rette (800 mètres d’épaisseur) et de la Guisane tes dominants).
(950 mètres d’épaisseur) (Lahousse, 1994 ; Bar-
féty et al., 1995 ; Cossart, 2000). Le contexte géologique
En somme, le paléo-glacier de la Clarée était
l’un des plus imposants du secteur, avec une D’un point de vue géologique, la vallée de la
épaisseur comparable à celle du glacier de la Gui- Clarée est située dans la zone Briançonnaise des

Figure 4. Profil longitudinal du paléo-glacier de la Clarée au DMG.


Environnements périglaciaires n°9 — 2002 39

Figure 5. Présentation géologique de la vallée de la Clarée.


Les grès, originalité de la vallée, n’affleurent qu’à l’amont de Névache.

Figure 6. Cartographie du secteur étudié.


40 Environnements périglaciaires n°9 — 2002

Figure 7. Aperçu de la partie septentrionale du secteur étudié.


Trois affleurements, situés dans la partie supérieure du secteur, n’ont pas donné lieu à des écroulements rocheux.

Alpes externes, qui se caractérise par l’empile- roches massives (granites par exemple) (Main-
ment de roches sédimentaires essentiellement guet, 1972 ; Peulvast et Vanney, 2001). Néan-
calcaires (calcaires et dolomies triasiques). Dans moins, les caractéristiques de ces grès (pendage,
la vallée de la Clarée, ces calcaires s’inclinent diaclasage) sont très variables, ce qui peut influen-
vers l’ouest suivant un pendage de 20° environ cer la réaction liée à la décompression, et le
(Lemoine et al. 1996). Mais l’originalité de la déclenchement des écroulements : ces paramè-
vallée de la Clarée est l’affleurement de grès du tres ne seront pas à négliger dans notre étude.
Carbonifère à l’amont de Névache, et notam-
ment en rive gauche (fig. 5). Ces grès apparem- Au total, au sein de la vallée de la Clarée se
ment très déformés présentent des pendages très conjuguent deux facteurs qui permettent d’envi-
variables en fonction des secteurs. Ainsi, d’après sager les conséquences éventuelles de la détente
nos mesures de terrain, ils plongent suivant une post-glaciaire : un paléo-glacier imposant (près
direction N-260° avec une inclinaison de l’ordre de 500 mètres d’épaisseur à l’amont de Néva-
de 20 à 25° aux environs de Névache, alors que che), et une lithologie susceptible d’enregistrer
dans la partie amont de la vallée le pendage les déformations liées à la décompression post-
s’oriente à N-70°, suivant une inclinaison variant glaciaire.
de 10 à 30°. De même le diaclasage varie sensi-
blement d’un endroit à un autre, aussi bien par Description des roches moutonnées étu-
son intensité que par la géométrie de son réseau ; diées
toutefois nous avons pu constater la présence
constante de diaclases orientées N-285° ayant Le choix du site d’étude
une inclinaison de 60 à 75°. Cette orientation,
comparable à celle de failles actives (faille de Notre travail avait commencé par l’étude d’un
la Cerveyrette notamment), peut correspondre transect dans la partie haute de la Clarée, au droit
aux conséquences du régime extensif tardi-alpin de la pointe de la Cassille. Néanmoins le besoin
(Barféty et al., 1995). Il est toutefois dommage s’était fait clairement sentir d’élargir notre terrain
que l’absence de carte géologique récente sur le d’investigation pour travailler sur davantage d’in-
secteur de Névache nous empêche de vérifier ces dividus (Cossart, com. orale, 2002). Nous avons
observations. réalisé ce travail complémentaire au cours de l’été
Ces affleurements gréseux sont une opportu- 2002.
nité remarquable pour étudier les impacts liés à la Le secteur a été choisi en raison du nombre
décohésion post-glaciaire, et ce pour deux prin- de roches moutonnées sur un espace restreint,
cipales raisons : (1) ce type de roche, massive, s’étendant quasi-uniquement dans les grès, nous
peut enregistrer la déformation post-glaciaire par y avons cartographié 21 affleurements mouton-
un néo-diaclasage, et (2) ce néo-diaclasage peut nés sur une surface d’environ 18 km² (fig. 6 et
se créer d’autant plus facilement que les grès 7). Sur un secteur aux dimensions réduites, nous
présentent une cohésion moindre que les autres espérons limiter tant que possible les variations
Environnements périglaciaires n°9 — 2002

Figure 8. Rose des vents des orientations du diaclasage pour chaque affleurement.
La géométrie du réseau de diaclases varie très sensiblement, même si la direction N-285° est constamment la plus fréquente.
41
42 Environnements périglaciaires n°9 — 2002

(de 1980 mètres à 2350 mètres) ; elles ont ainsi


été recouvertes par des épaisseurs de glace très
variables, et ont donc été soumises à des forces
de compression variables elles aussi. Cette variété
est indispensable pour tester l’action éventuelle
de la décompression post-glaciaire.
Sur les 21 affleurements cartographiés, 15
ont évolué en écroulement rocheux (fig. 6 et 8),
existe-t-il une logique de répartition de ces 15
écroulements ? Si oui dépend-elle de la force de
décompression, ou d’autres facteurs tels que la
topographie ou le topoclimat ?

Recherche des variables pouvant expliquer


la genèse des écroulements

Figure 9. Description des 21 individus. Les variables susceptibles d’intervenir dans le


Les unités sont : pente en %, altitude en mètres, ensoleille- déclenchement des écroulements rocheux sont
ment en heures annuelles, pendage en degrés, orientation du nombreuses. La topographie du versant notam-
diaclasage secondaire en azimut (°), intensité du diaclasage ment joue un rôle fondamental dans sa stabilité,
en nombre de diaclase par unité de surface (4 m²). de même que les caractéristiques lithologiques
(nature de la roche, fragilisation par les diacla-
de pendage et de diaclasage au sein des grès afin ses…) et structurales (pendage…) des affleure-
de nous concentrer sur les variables susceptibles ments. A ces facteurs nous devons ajouter ceux
de régir la force de décompression. Le pendage qui peuvent correspondre à l’activité paragla-
reste d’ailleurs constant dans son orientation sur ciaire (décompression), ainsi que les caractéristi-
l’ensemble du secteur, avec une inclinaison vers ques topoclimatiques qui sont à même d’influen-
l’azimut N-70. En revanche l’inclinaison varie cer la fragilité des affleurements rocheux (cycles
assez sensiblement, avec des angles de 9 à 30°. gel/dégel, maintien d’un couvert neigeux...). Au
La géométrie et l’intensité du réseau de diacla- total, nous pouvons regrouper ces facteurs en
ses, en revanche, varie sensiblement d’un affleu- quatre familles principales : les variables topocli-
rement à l’autre, même si l’on retrouve constam- matiques, topographiques, paléo-glaciologiques
ment la direction principale N-285° (fig. 7). et enfin lithologiques.
Les roches moutonnées s’étendent à toutes Dans le domaine topoclimatique nous avons
les gammes d’altitude où le versant a été englacé retenu (1) l’altitude, qui peut conditionner la fré-
quence des cycles gel / dégel, (2) la durée d’en-
soleillement annuelle, qui joue un rôle essentiel
dans la fonte des neiges, et donc dans l’insolation
du substrat et la circulation d’eau de fonte dans
les diaclases. La durée d’ensoleillement annuelle
a été déterminée en heures annuelles à l’aide de
la méthode du diagramme solaire.
D’un point de vue topographique, nous avons
tenu à déterminer la pente du versant au niveau
des affleurements considérés, la pente étant en
elle même un facteur d’instabilité. Elle a été
mesurée en pourcentage. Nous voulions égale-
Figure 10 . Comparaison des affleurements “ à écroulement ”
ment retenir une variable “ épaisseur du paléo-
avec ceux “ sans écroulement ”.
La différence entre les deux sous-groupes est supérieure ou
glacier ”, mais celle-ci s’avère inutile dans la
comparable aux écart-types seulement pour trois variables : mesure où, en travaillant sur un profil transversal
l’altitude, l’intensité du diaclasage et la pente. à la vallée, celle-ci est directement liée à l’altitude
Environnements périglaciaires n°9 — 2002 43

(épaisseur = altitude de la surface du glacier – plus attendue, apparaît au niveau de l’intensité du


altitude du point considéré). diaclasage : les affleurements les plus diaclasés
Enfin, concernant les variables d’origine litho- ayant tendance à évoluer en écroulements.
structurale, nous voulions prendre en compte : Enfin, la troisième différence s’observe au
(1) la densité du diaclasage, (2) l’orientation niveau des valeurs de pente, les affleurements à
du diaclasage, et (3) le pendage. Concernant le écroulement présentant (de façon attendue) des
diaclasage, nous avons déterminé pour chaque pentes plus fortes.
affleurement des carrés de 2 mètres de côté,
où nous avons mesuré l’orientation de chaque
diaclase. Nous avons ainsi pu déterminer à la
fois le nombre de diaclases par unité de surface
(4 m²) et réaliser des diagrammes fréquentiels
de l’orientation des diaclases. Ce travail nous a
permis de constater que l’orientation N-285° est
la direction la plus fréquente dans chacun des cas
(fig. 7). Aussi, préférons-nous caractériser chaque
affleurement par l’orientation secondaire du dia-
clasage afin de mieux les différencier. Quant au
Figure 11. Matrice des données de base dans le cas d’une
pendage sa direction est constante sur l’ensem-
analyse discriminante (d’après Saporta, 1990).
ble du secteur étudié (N-70°) mais la valeur de A : matrice décrivant les catégories de la variable expliquée
son inclinaison varie assez sensiblement selon les B : matrice décrivant les variables indépendantes.
affleurements, nous n’avons donc retenu que ce
dernier caractère.
Au total, six variables (pente, ensoleillement,
altitude, valeur du pendage, orientation du dia-
clasage secondaire et densité du diaclasage) vont
nous permettre de déterminer les différences
entre les affleurements évoluant en écroulements
rocheux et ceux qui sont stables.

Description des individus et premières hypo-


thèses
Nous avons recherché les valeurs prises par les
vingt et un individus sur chacune des six varia-
bles (fig. 9). En essayant de comparer les valeurs
prises par les roches moutonnées “ à écroule-
ment ” et celles “ sans écroulement ” plusieurs
différences sensibles apparaissent d’emblée (fig. Figure 12. Principe de l’analyse discriminante pour différencier
10). La différence entre deux sous-groupes peut plusieurs sous-groupes.
être qualifiée de sensible lorsqu’elle est supérieure
ou du même ordre de grandeur que l’écart-type.
La première différence notoire s’observe S’il est ainsi possible de dégager quelques
au niveau de l’altitude. En effet, les affleure- tendances explicatives, il reste à savoir si ces
ments sans écroulements présentent des altitudes différences sont réellement significatives. En
supérieures de l’ordre de 130 mètres aux affleu- outre ce genre de hiérarchie dans l’importance
rements à écroulement. Ce fait, déjà visible sur la des facteurs susceptibles d’expliquer la présence
cartographie du secteur (fig. 6) témoigne que les d’écroulements reste hasardeux dans la mesure
roches stables semblent se situer préférentielle- où les variables présentent des ordres de gran-
ment à proximité de la surface du paléo-glacier, deurs très différents. L’intérêt est à présent de
là où l’épaisseur était la moins forte. passer à une analyse multivariée pour limiter ces
La seconde différence importante, sans doute biais.
44 Environnements périglaciaires n°9 — 2002

A la recherche d’une méthode statistique la variable expliquée. Cette méthode est notam-
adaptée ment utilisée pour prévoir le risque d’avalanche :
les p prédicteurs sont alors les variables nivo-
a. Principe de l’analyse discriminante logiques et météorologiques, tandis que les k
catégories de la variable expliquée sont les dif-
Notre modèle doit avoir pour objectif de savoir férents niveaux du risque d’avalanche. En revan-
si les écroulements rocheux en Clarée ont une che cette méthode a été relativement peu utilisée
origine paraglaciaire, ou non : ce caractère est en géomorphologie, même si quelques travaux
notre variable expliquée. La méthode statistique ont cherché à prévoir de cette manière le risque
qui permet de dissocier ainsi deux, ou plusieurs, engendré par des glissements de terrain (Carrara,
catégories dans la variable expliquée et de mesu- 1983 ; Baeza et Corominas, 2001).
rer leurs différences à l’aide d’un corpus de varia-
bles indépendantes est l’analyse discriminante b. Méthode et Calculs
(Saporta, 1990).
D’après Saporta (1990), l’analyse discrimi- Posons en premier lieu la terminologie. Nous
nante est “ la prédiction d’une variable qualita- disposons de n individus constituant un nuage
tive à k catégories en fonction de p prédicteurs ”. E dans l’espace statistique Âp, et composé de
Il s’agit donc de rechercher les conditions dans k sous-nuages E1,…,Ek, de centres de gravités
lesquelles les variables de la base de données per- g1,…,gk ; p est le nombre de prédicteurs (variables
mettent de se situer dans l’une ou l’autre des explicatives ou indépendantes) et k le nombre de
catégories de la variable expliquée. catégories de la variable expliquée (ici 2). Cela
En appliquant cette formulation très sta- revient à représenter la matrice des données à la
tisticienne à notre cas, nous pourrions dire qu’il manière présentée figure 11.
s’agit de déterminer dans quelles conditions se
produit un écroulement, et ce en fonction des L’analyse discriminante va rechercher de nou-
valeurs prises par les variables de la base de don- velles variables qui correspondent à des direc-
nées. tions qui séparent le mieux possible en projec-
Cette méthode, qui vise à rechercher les com- tion les k sous-nuages (fig. 12). En projection sur
binaisons de variables permettant de différencier l’axe discriminant, les k centres de gravité doi-
les catégories de la variable expliquée, revêt éga- vent être aussi séparés que possible, et chaque
lement un aspect décisionnel. En effet, en fonc- sous-nuage doit se projeter de manière aussi
tion des valeurs prises par un nouvel individu groupée que possible autour de la projection de
sur chacun des prédicteurs, il sera possible de son centre de gravité. Cet axe discriminant est
le classer dans l’une ou l’autre des catégories de donc tel qu’il va maximiser l’inertie entre les dif-

Figure 13. Ajustement de l’axe discriminant dans le cas de deux sous-groupes.


Environnements périglaciaires n°9 — 2002 45

férents nuages. Cette condition est remplie lors-


que l’axe discriminant est la droite de régression
des centres de gravité, et, s’il n’y a que deux
catégories, lorsqu’il passe par le centre de gra-
vité des deux sous-nuages g1 et g2 (Saporta, 1990)
(fig. 13). Auquel cas, les coordonnées du vecteur
directeur sont directement calculées à partir des
coordonnées des deux points.
Dans la dernière étape, on ajuste l’axe discri-
minant sur le nuage de points, et on détermine le Figure 14. Coordonnées des centres de gravité pour chaque
seuil qui va permettre de différencier les catégo- sous-groupe.
ries sur l’axe : il est tel qu’un maximum d’indivi-
dus de chaque sous-nuage sera ainsi séparé (fig.
13). Dans le meilleur des cas, les individus de
chaque sous-nuage sont dissociés, et la discrimi-
nation est totale. Le seuil peut se résumer sous
forme d’une équation de plan à partir des varia-
bles de base, ce plan permet de séparer l’espace
statistique en fonction des catégories “ discrimi-
nées ” et permet le classement d’individus nou-
veaux.

c. application aux écroulements rocheux de


la Clarée

Dans notre cas, compte-tenu des différences


existant entre les ordres de grandeur des varia-
Figure 15. Caractéristiques de l’axe discriminant (coordon-
bles, il est préférable de travailler sur les variables nées et coefficient de corrélation avec chaque variable).
centrées-réduites.
A partir de ces variables “ normées ”, nous L’importance des trois variables altitude – pente – inten-
avons déterminé les coordonnées du centre de sité du diaclasage se retrouve.
gravité de chacun des sous-nuages (fig. 14), pour
en déduire ensuite les coordonnées du vecteur
directeur de l’axe discriminant (fig. 15). Ces coor-
données sont utiles (1) pour situer l’axe discrimi-
nant dans l’espace statistique, mais aussi (2) pour
calculer les coefficients de corrélation entre cet
axe et les différentes variables (prédicteurs). Ce
calcul, ainsi que le positionnement de l’axe dis-
criminant au sein de l’espace des variables (fig.
16), s’est opéré sous le logiciel MAPLE, avec
l’aide logistique du LAboratoire de MAthémati-
ques (LAMA) de l’université de Versailles – Saint
Quentin. Les résultats montrent une bonne cor-
rélation entre la variable discriminante et l’alti-
tude d’une part (-0,67) et l’intensité du diaclasage
d’autre part (0,54). Cependant, la discrimination
n’est pas totale, des recoupements subsistent
entre les deux sous-nuages (fig. 16). De plus, Figure 16. Positionnement de l’axe discriminant dans l’espace
même si la qualité de la corrélation entre la des variables.
pente et la variable discriminante n’est pas mau-
46 Environnements périglaciaires n°9 — 2002

Figure 17. Espace des individus. Même si la répartition entre les deux sous-groupes est clairement différente au sein de l’espace
factoriel, la discrimination n’est pas totale.

vaise (0,48), la corrélation n’est significative avec En repassant aux variables initiales, nous
aucune des autres variables (fig. 15). avons :
Int > 129,65 alt – 5,12
Pour simplifier ce schéma, nous allons nous
focaliser sur le plan défini par les deux variables Au delà de l’aspect purement numérique, il faut
correctement corrélées avec l’axe discriminant retenir que, pour une altitude donnée, il suffit
(fig. 18) : l’altitude et l’intensité du diaclasage. qu’un seuil d’intensité de diaclasage soit atteint
Dans ce plan, la discrimination apparaît presque pour qu’il y ait écroulement.
totale, seul un individu appartient à l’intersection
des deux sous-nuages. Aussi semble-t-il que les Interprétation géomorphologique
variables altitude et intensité du diaclasage suf-
fisent à expliquer les différences de localisation Discussion sur le rôle de l’intensité du diaclasage et de
entre les roches moutonnées “ à écroulement ” l’altitude
et celles “ sans écroulement ”. En déterminant le
seuil séparant au mieux les deux sous-nuages, il Même si le rôle de l’altitude était envisagé, le
est même possible de modéliser numériquement fait qu’elle apparaisse comme le facteur essentiel
les conditions régissant le développement des est inattendu. Etant donné que les écroulements
écroulements rocheux. En effet, la droite sépa- rocheux sont d’autant plus fréquents que l’al-
rant les deux sous-ensembles a pour équation : titude diminue, il semble qu’il faut voir dans
cette variable une relation avec l’épaisseur du
Int = 0,611 alt – 2,2 paléo-glacier plutôt qu’une signification topocli-
(Int. étant l’intensité du diaclasage, et alt. l’altitude) matique. En appliquant la formule modélisant
la pression exercée par un appareil glaciaire au
Si Int > 0,611 alt – 2,2 alors il y a écroulement paléo-glacier de la Clarée (Kercsner et al., 1999 ;
(en se basant sur les variables normées). Lliboutry, 2002 ; cf. supra), nous pouvons estimer
à 72 kPa la pression exercée par le glacier sur les
affleurements de fond de vallée, et à 36 kPa sur
Environnements périglaciaires n°9 — 2002 47

nus, 1995). Selon ce principe, la force de décom-


pression au sein de l’encaissant est nettement
moindre à mesure que l’on est proche des limites
du paléo-glacier, ce qui permet d’expliquer l’im-
portance du facteur altitude dans la localisation
des écroulements.
L’intensité du diaclasage exerce une influence
prévisible sur le déclenchement des écroulements
rocheux, il est logique que les écroulements appa-
raissent là où la roche est la plus fracturée. Mais
l’intensité de cette fracturation est-elle un simple
héritage des déformations pré-glaciaires ou elle-
même un effet de la décompression ? Même si
la corrélation entre l’altitude et l’intensité du dia-
clasage n’est pas satisfaisante (fig. 18, r = -0,2), il
apparaît que les affleurements les plus diaclasés
se situent aux altitudes les plus basses (fig. 20).
Ceci appuierait ainsi les travaux de Lewis (1954),
considérant que le diaclasage des roches mou-
tonnées est en partie lié à la décompression.

A la recherche du processus sur le terrain


Figure 18. Position de l’axe discriminant dans le plan altitude
– intensité du diaclasage.
La discrimination gagne en qualité.
Au delà de cette approche théorique, il reste à
savoir si ces hypothèses trouvent un appui sur le
les affleurements situés à des altitudes d’environ terrain.
2230 à 2250 mètres. En revanche elle n’est plus Dans le paysage de la Clarée, la présence de
que de 18 kPa environ à 2350 mètres. Or la roche roches moutonnées presque démantelées, aux
réagit à cette contrainte par une force de réaction diaclases béantes, est assez fréquente. Sur les
de même ampleur, de même direction, mais de affleurements étudiés (fig. 21 et 22) nous pou-
sens opposé (fig. 19). Lorsque le glacier disparaît, vons remarquer le développement de néo-dia-
la force qu’il exerçait s’annule, en revanche la clases subparallèles à la surface : leur surface
roche, avec inertie, continue de réagir pendant courbe contraste avec les diaclases pré-existan-
une durée qui est inconnue, ce qui est à la base tes et notamment celles orientées N-265, très
même du processus de décompression (Augusti- rectilignes et strictement parallèles entre elles.
En recoupant ce système pré-existant, les néo-

Figure 19. Evaluation de la décompression en Clarée.


L’hypothèse retenue ici est celle d’un glacier épais d’environ 500 mètres au niveau du transect étudié (valeur a minima).
48 Environnements périglaciaires n°9 — 2002

Figure 20. Cartographie de l’intensité du


diaclasage.
Les affleurements les moins diaclasés se
situent vers les marges du paléo-glacier.

diaclases achèvent de “ découper ” les roches tions qui varient de N-120° à N-150°, c’est à dire
moutonnées en différents blocs, en outre elles sub-parallèles à l’axe de la vallée. Etant donné
constituent des plans de glissement le long des- que ces diaclases semblent se développer en rela-
quels les blocs sont susceptibles de transiter. Ces tion avec celles qui sont sub-parallèles à la sur-
diaclases semblent se développer à des profon- face topographique, nous émettons l’hypothèse
deur variables, de 30 cm à presque 1 m (fig. 21 et qu’elles ne sont pas d’origine structurale, et qu’el-
22). Les raisons de ces différences restent obscu- les peuvent être dues à une expansion latérale du
res, sont-elles dues aux caractéristiques de cohé- matériel rocheux sous l’effet de la décompres-
sion de chaque affleurement ? sion. Des diaclases d’orientation comparable, en
Au sein de l’affleurement n°6, un écroule- général de taille modeste (30 à 40 cm de long
ment produit le long d’une diaclase de direction en surface des affleurements), sont observables
N-265° permet d’observer une “ coupe ” dans également au sein des affleurements n° 10 et 12
l’affleurement rocheux et de décrire son dia- : peuvent-elles avoir la même origine ? D’autres
clasage (fig. 22). Le néo-diaclasage subparallèle à études sur ce thème sont actuellement en cours,
la surface s’accompagne de diaclases très super- pour éventuellement confirmer ou infirmer cette
ficielles, le plus souvent orthogonales à la surface hypothèse.
des affleurements, et dont le plan se raccorde très
nettement avec le plan sub-parallèle à la surface, Par le biais de la force de décompression,
ce qui les différencie nettement du réseau de dia- d’une augmentation de la densité du diaclasage,
clases principales. Elles présentent des orienta- il semble que tout un contexte favorable au

Figure 21. Formes de décompression sur une roche


moutonnée (n°6).
Le néo-diaclasage constitue un plan courbe situé
à une profondeur de 50 à 60 cm. Il vient recou-
per les diaclases originelles très rectilignes (souli-
gnées par les flèches) et constitue un plan incliné
favorisant le transit des blocs vers l’aval.
Environnements périglaciaires n°9 — 2002 49

Figure 22. “ Coupe ” du réseau de diaclase au sein de l’affleurement n°6.


NB : Le glacier de la Clarée s’écoulait depuis “ l’arrière de la figure ”.

déclenchement d’écroulements rocheux se met question se pose : quand ces écroulements se


en place dans un contexte paraglaciaire, cepen- sont déclenchés : peu après la déglaciation (hypo-
dant la décompression est-elle pour autant le thèse de déclenchement purement paraglaciaire),
facteur déclenchant ? Trois autres facteurs sont lors de phases de péjoration climatiques holo-
susceptibles de jouer ce rôle : (1) la sismicité cènes (hypothèse climatique) ou lors de phases
encore très active dans le secteur (Barféty et al., de sismicité active ? Par exemple, Ballantyne
1995), (2) des événements climatiques extrêmes, (2002) a établi 3 modèles résumant l’évolution
de la vitesse de recul de parois rocheuses depuis
le retrait glaciaire : en calant chronologiquement
les périodes où le recul est maximal il différencie
les écroulements d’origine paraglaciaire et péri-
glaciaire (fig. 23). Ainsi notre prochain objectif
serait de se rapprocher de l’un de ces modèles
d’évolution. Cependant, étant donnée la rareté
des dépôts organiques dans les milieux de haute
altitude, limitant les possibilités de datation au
carbone 14, et le pas de temps auquel on tra-
vaille, empêchant les datations par lichénométrie,
seules deux méthodes peuvent être utilisées : le
degré de météorisation des blocs écroulés, ou
la datation par radionucléides. En effet, les grès
carbonifères riches en quartz se prêtent à cette
méthode, que nous espérons mettre en œuvre
dans un futur proche.

Figure 23. Modèles d’évolution des vitesses de recul des parois Conclusion
rocheuses depuis le DMG (Trotternish Peninsula, Isle of
Skye, Scotland) (Ballantyne, 2002). L’analyse discriminante, quoique peu utilisée en
géomorphologie, semble probante pour “ éclair-
pouvant favoriser la circulation d’eau dans les cir ” les conditions dans lesquelles se déclenchent
diaclases, et l’augmentation brutale de la pression les écroulements rocheux. Dans le cas présent
hydrostatique, ou même ,(3) le sapement basal l’influence jouée par l’intensité du diaclasage des
par le torrent de la Clarée pour les roches mou- affleurements et l’altitude témoignent de l’im-
tonnées qui le bordent. portance de l’action glaciaire dans leur genèse.
Pour répondre à cette question, une autre En effet, l’intensité du diaclasage dépend certes
de paramètres lithologiques et structuraux, mais
50 Environnements périglaciaires n°9 — 2002

semble également fonction de la force de décom- BAEZA C., COROMINAS J., 2001 : Assess-
pression post-glaciaire. Quant à l’altitude, elle ment of shallow landslide susceptibility by
reflète directement l’épaisseur du paléo-glacier means of multivariate statistical techniques.
et donc la force de décompression elle aussi. Earth Surface Processes and Landforms, n°26, pp.
Ainsi, si l’on reprend la définition exposée par 1251-1263.
Church et Ryder (1972), alors les écroulements BARFETY JC., LEMOINE M., DE GRA-
rocheux de la Clarée étudiés peuvent être consi- CIANSKI PC., TRICART P., MERCIER D.,
dérés comme paraglaciaires. 1995 : Briançon, notice de la carte géologique.
Cette étude préliminaire nécessite toutefois Orléans, Editions du BRGM, 180 p.
d’être approfondie en travaillant sur davantage BENN DI. et EVANS D., 1998 : Glaciers and Gla-
d’individus, et en poursuivant les observations ciations. New York, Oxford University Press,
de terrain, notamment sur la géométrie du dia- 734 p.
clasage. De plus des incertitudes subsistent quant BECHT M., 1995 : Slope erosion processes in
au facteur déclenchant ces écroulements : la the Alps. In : Slaymaker O. (Ed), Steepland
décompression semble indéniablement créer un Geomorphology, pp. 45-61.
contexte favorable, mais est-elle pour autant le CARRARA A., 1983 : Multivariate models for
facteur déclenchant ? La sismicité ou des événe- landslide hazard evaluation. Mathematical Geo-
ments climatiques extrêmes peuvent jouer ce logy, Vol. 15 n°3, pp. 403-426.
rôle. Un moyen d’éclaircir ce débat serait de CHURCH M. et RYDER J., 1972 : Paraglacial
savoir quand ces écoulements rocheux se sont sedimentation : a consideration of fluvial
déclenchés, en utilisant la méthode des radio- processes conditionned by glaciation. Geolo-
nucléides, ou en travaillant sur l’intensité de la gical Society of America Bulletin, Vol. 83, pp.
météorisation des dépôts d’écroulement. 3059-3072.
COSSART E., 2001 : La déglaciation en Haute-
Remerciements Durance (Briançonnais, Hautes-Alpes), évolution
L’auteur remercie particulièrement Monique Fort paléo-environnementale et impacts morphodynami-
(Université Denis Diderot) qui a accepté de relire ques. Mémoire de DEA, Université Paris VII
le manuscrit, ainsi que l’équipe du LAboratoire –Denis Diderot, 126 p.
de MAthématiques (LAMA) de l’université de KERSCHNER H., IVY-OCHS S., SCHLUCH-
Versailles-Saint Quentin pour les conseils en TER C., 1999 : Palaeoclimatic interpretation
matière de traitement statistique. of the early Late-glacial glacier in the Gsch-
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solides. Tome 1 : Relief et structure. Paris, 1997-1, pp. 27-42.
52 Environnements périglaciaires n°9 — 2002

PRESENTATION DU PROGRAMME PERI-THETYS,


LES LIMITES DOCUMENTAIRES ET CARTOGRAPHIQUES
DE LA CARTE QUATERNAIRE (22.000 - 18.000 BP).

Virginie Vergne
Préhistoire et Quaternaire, ESA 8018 CNRS, USTL,
59655 Villeneuve-d’Ascq. virginie.vergne@univ-lille1.fr

Bruno Vrielynck
FRE 2400 Paléontologie et Stratigraphie,
Univ. Pierre-et-Marie Curie, Jussieu, 75252 Paris Cedex 05

Jean-Pierre Peulvast
Univ. Paris-Sud, laboratoire de Géologie Dynamique de la Terre et des Planètes,
91405 Orsay Cedex

A la suite du programme Téthys (1989-1993), le paléoécologiques (foraminifères, pollen et spores)


programme Péri-Téthys1 se proposait de mettre ont constitué à divers titres une des clés de réa-
en œuvre une synthèse géologique des données lisation et de points de validation de cette carte
disponibles concernant les bassins et les systè- Quaternaire. La typologie retenue des dépôts liés
mes pétroliers installés sur les plates-formes qui aux conditions climatiques froides peut être dis-
bordent (ou sont incluses dans) les chaînes téthy- cutée.
siennes. Le domaine d’application concerne plus
précisément les régions péri-téthysienne de la
1
programme Peri-Thétys, organismes participants : AGIP,
ARCO, BRGM, CHEVRON, CNRS-INSU, CONOCO,
marge de la mer du Nord à la plate-forme russe, EAP (ELF), EXXON, IFP, SHELL, SONATRACH,
les bassins périphériques de la plate-forme du TOTAL, UPMC, 1996
Maghreb jusqu’au Zagros, les bassins du Moyen-
Orient et de l’Iran et ceux de la corne de l’Afri-
que orientale (Soudan, Somalie…). Références :
Cette synthèse se présente selon plusieurs types
de documents : d’une part, un atlas de cartes PETIT-MAIRE N., BOUYSSE Ph., et coll. 1999-
paléogéographiques en 22 étapes et d’autre part, Cartes des environnements du Monde pendant
les Deux Derniers Extrêmes Climatiques à 1/25
une notice explicative. Un des documents con-
000 000 (Climex Maps – The Last Glacial Maxi-
cerne le Quaternaire, époque assez bien docu- mum : ca 18000 +/- 2000 years BP), 2 cartes en 2
mentée, caractérisée par de grands changements feuilles chacune, co.publi CCGM/ANDRA
climatiques et environnementaux, dont il était
important connaître les aspects géomorphologi- PEULVAST J.-P., BARRIER E., VERGNE V.,
ques (dépôts glaciaires, loess, dépôts marins,…). DOUBRE C., RAGALAR R., VANNEY J.-R.,
Ce document correspond à l’intervalle des con- BERGERAT F., BRUNET M.-F., CADET J.-P.,
ditions climatiques les plus extrêmes du Qua- VRIELYNCK B., 2000 – Map 24 : Last Glacial
ternaire, vers 18000 +/- 2000 BP – le dernier Maximum
maximum glaciaire – pourvu d’une documenta-
PEULVAST J.-P., VERGNE V., VANNEY J.-R.,
tion considérable même si des problèmes de cor-
BARRIER E. with collaboration of RAGALA R.
rélation et de densités variables de l’information et VRIELYNCK B., 2000- Map24 : Last Glacial
se sont posés. Deux approches, l’une palynologi- Maximum (Late Pleistocene, 22000-18000 years
que, l’autre sédimentologique, ont été mises en BP), notice de la carte. In : Dercourt J.,
œuvre donnant lieu à deux cartes à deux échelles Gaetani M., VRIELYNCK B., BARRIER
différentes (Petit-Maire, Bouysse et coll., 1999 ; E., BIJU-DUVAL B., BRUNET M.-F., CADET
Peulvast, Barrier et coll., 2000). Outre l’ensem- J.-P., CRASQUIN S., SANDULESCU M. (eds)
ble des données géomorphologiques (différents 2000, Atlas Peri-Tethys Palaeogeographical maps.
dépôts…), les données des longues séquences CCGM/CGMV, Paris
Environnements périglaciaires n°9 — 2002 53

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