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i n f o a r t i c l e
Historique de l’article :
Disponible sur Internet le 22 mars 2012
0248-8663/$ – see front matter © 2012 Société nationale française de médecine interne (SNFMI). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.revmed.2012.02.008
S26 D.-C. Valla / La Revue de médecine interne 33S (2012) S25–S29
Comme on le voit dans la Fig. 1, la maladie peut être parfaite- l’obstruction permanente du tronc veineux est accompagnée du
ment contrôlée par des moyens peu vulnérants dans 20 % des cas. développement d’une circulation collatérale à partir des veines de
La mise en place du TIPS est délicate. L’expérience est un facteur la région. Cet ensemble de collatérales forme le cavernome propre-
déterminant de succès. Il y a une relation inverse entre le taux de ment dit. Lorsque le drainage de la totalité du système porte est
succès de la mise en place du TIPS, d’une part, et le taux de recours obstrué, il se produit une hypertension portale. C’est le cas lorsque
à la transplantation, d’autre part. le tronc de la veine porte ou ses deux branches de division droite et
gauche, ou ses deux racines mésentériques supérieure et splénique,
4.4. Pronostic sont obstruées. La principale complication est la rupture de varice
œsophagienne ou gastrique [3,4]. Plus rarement et à long terme, il
Le principal argument du pronostic initial est la sévérité de peut encore survenir une encéphalopathie infraclinique par shunt
l’atteinte hépatique et rénale comme au cours de toutes les mala- portosystémique, et un degré minime à modéré de diminution de la
dies hépatiques aiguës ou chroniques [1,3]. De fait, le taux de fonction hépatique. Le cavernome et l’augmentation du débit arté-
Quick, la bilirubinémie, l’albuminémie, la créatininémie, l’ascite riel hépatique compensent dans une large mesure la diminution de
et l’encéphalopathie, ainsi que leur groupement dans les scores perfusion portale hépatique.
de Child-Pugh, MELD ou dans divers scores spécifiques ont été Il n’est pas clair qu’en l’absence de cirrhose, une thrombose
parfaitement validés. Toutefois, la performance de ces scores est le l’axe portomésentérique puisse survenir en l’absence totale de
insuffisante pour permettre leur utilisation dans la prise de décision symptômes. En revanche, il est probable que les symptômes, non
individuelle [8]. spécifiques, puissent ne pas attirer l’attention. La thrombose est
Le pronostic à long terme est maintenant déterminé par alors découverte au stade chronique.
l’évolution des affections sous-jacente et le risque de survenue du
carcinome hépatocellulaire. La fréquence et la gravité potentielle
5.2.2. Diagnostic
des accidents des anticoagulants au long cours ne peuvent être
L’échographie Doppler et le scanner à barrettes multiples, avec
négligés [10].
et sans injection de produit de contraste vasculaire, sont les exa-
mens clés du diagnostic [3,4]. Ils montrent l’absence de flux ou le
5. Thrombose des veines du système porte extrahépatique
matériel endoluminal au stade aigu ; l’absence de tronc veineux et
les collatérales au stade chronique. Là encore, les points cruciaux
On peut distinguer la thrombose isolée de la veine splénique et
de l’efficacité diagnostique sont l’expérience et la prémonition du
la thrombose de l’axe mésentéricoportal (que ce dernier soit tota-
radiologue.
lement ou partiellement obstrué). Dans ce chapitre sont exclus les
obstructions liées à un cancer (hépatique, biliaire ou pancréatique).
5.2.3. Traitement
5.1. Thrombose isolée de la veine splénique Pour la thrombose aiguë du système porte, malgré l’absence
d’étude contrôlée, il y a un consensus pour recommander
Cette entité est le plus souvent la séquelle d’une poussée l’administration précoce d’une anticoagulation efficace pour une
de pancréatite. Le réseau veineux collatéral emprunte alors les durée d’au moins six mois [3,4]. En effet, l’administration précoce
veines de la grosse tubérosité gastrique pour rejoindre la veine d’un traitement anticoagulant, de préférence par héparine de bas
coronaire stomachique, de circulation hépatopète. Il y a donc poids moléculaire pendant quelques jours puis par anticoagulants
des varices fundiques, collatérales splénoportales. Des varices oraux, permet de prévenir pratiquement complètement le risque
œsophagiennes, collatérales spléno-azygos, sont plus rares. Des d’extension et de complication intestinale [2]. À six mois de traite-
hémorragies digestives sont possibles, parfois sévères. La splénec- ment, un taux de recanalisation de la veine porte de l’ordre de 40 %
tomie est un traitement définitif, mais vulnérant. Un traitement peut être espéré. Un taux plus élevé est observé avec la poursuite
endoscopique peut probablement lui être préféré en première du traitement pour la veine splénique et la veine mésentérique
intention. En l’absence d’hémorragie antérieure, l’application de ces supérieure, mais non pour la veine porte (Fig. 2). Pour l’instant,
traitements est discutable. L’efficacité des béta-bloquants adréner- aucun autre traitement que l’anticoagulation n’a vraiment fait la
giques n’a pas été évaluée de façon solide. preuve de son innocuité. Les agents thrombolytiques, administrés
par voie percutanée transhépatique ou par voie artérielle mésen-
5.2. Thrombose de l’axe mésentéricoportal en l’absence de bloc térique supérieure exposent à des complications graves. En cas de
intrahépatique ou suprahépatique thrombose étendue et d’épanchement péritonéal, il y a peut-être
une place pour une thrombolyse mécanique et pharmacologique
5.2.1. Manifestations par accès direct au système porte par voie transjugulaire transvei-
La présence ou l’absence d’un bloc intrahépatique ou suprahé- neuse.
patique distingue deux entités très différentes. En l’absence de tels
blocs, on peut séparer deux stades cliniquement très différents de
la thrombose mésentericoportale, le stade aigu de la thrombose
récente et le stade chronique du cavernome [3,4]. La thrombose
aiguë se manifeste habituellement par une douleur abdominale
prolongée souvent sévère et un syndrome inflammatoire marqué,
même en l’absence de facteur infectieux ou inflammatoire local [2].
L’évolution peut se faire dans deux directions. L’extension de
la thrombose en amont vers les arcades mésentériques expose
au risque d’ischémie et d’infarctus intestinal. L’apparition d’une
acidose lactique, de rectorragies, d’une ascite doit faire suspecter
cette complication. Même après résection des anses nécrosées, le
risque de décès est de l’ordre de 20 à 50 %. En l’absence de trai- Fig. 2. Taux de recanalisation sous traitement anticoagulant précoce, après throm-
tement anticoagulant, il semble qu’une thrombose mésentérique bose aiguë de la veine porte.
ou portale ne se résolve jamais spontanément [3,4]. Dans ce cas, D’après Plessier et al. [2].
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Recanalization rate (%) 100 Au cours de la cirrhose, la thrombose de la veine porte est
d’autant plus fréquente que la cirrhose est plus sévère [12]. Le
80 plus souvent, la thrombose est partielle, et il n’y a pas d’évolution
Splenic vein patent, no ascites
6. Conclusions
Au stade de cavernome, de nombreuses études indiquent
que les moyens habituels de prévention des hémorragies diges-
Les thromboses des veines splanchniques ne sont que la
tives de l’hypertension portale (bêta-bloquants adrénergiques
manifestation d’un ou plusieurs états prothrombotiques sous-
et traitement endoscopique) sont efficaces pour prévenir les
jacents. Le diagnostic rapide en est devenu relativement facile. La
hémorragies digestives. Il n’y a pas de consensus sur l’utilité et
mise en œuvre rapide du traitement des états prothrombotiques
l’inocuité des anticoagulants au long cours. Toutefois de nombreux
sous-jacent (incluant dans la plupart des cas les anticoagu-
experts s’accordent pour administrer des anticoagulants en cas
lants) a probablement été responsable de la forte amélioration
d’état prothrombotiques sévères ou en cas d’extension à la veine
de l’évolution de ces maladies au cours des récentes décades.
mésentérique supérieure [3,4]. Il semble que ni l’incidence, ni la
Les moyens pharmacologiques et endoscopiques permettent de
sévérité des hémorragies digestives ne soient augmentées par le
contrôler les complications de l’hypertension portale. Les moyens
traitement anticoagulant [11].
radiologiques non invasifs permettent de contrôler l’atteinte
hépatique du syndrome de Budd-Chiari. Les besoins sont donc
5.2.4. Pronostic maintenant de mieux connaître et de mieux traiter les déter-
Au stade aigu, les facteurs de risque d’infarctus intestinal ne minants des complications mortelles à long terme que sont les
sont pas parfaitement élucidés faute d’étude de puissance suffi- transformations graves des syndromes myéloprolifératifs ou de
sante dans cette affection rare. Les indicateurs (mal compris) de la l’hémoglobinurie paroxystique nocturne, et la survenue du carci-
recanalisation du tronc porte sous traitement anticoagulant sont la nome hépatocellulaire. L’élucidation du rôle de la thrombose porte
présence d’un épanchement péritonéal et l’atteinte de la veine splé- comme mécanisme d’aggravation de la cirrhose ou comme simple
nique [2]. Lorsque ces deux éléments sont présents, la probabilité marqueur de la sévérité de celle-ci devrait ouvrir des possibilités
de recanalisation paraît infime ou nulle (Fig. 3). thérapeutiques, notamment en précisant la place du traitement
Au stade chronique, le principal facteur de risque de récidive de anticoagulant.
thrombose est la présence d’un état prothrombotique permanent
[11]. Les facteurs de risque d’hémorragie digestive sont la taille des Déclaration d’intérêts
varices et les antécédents d’hémorragie digestive [11].
Globalement, le pronostic de la thrombose portale n’est pas L’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation
aussi sombre que celui des autres maladies du foie puisque les taux avec cet article.
de mortalité sont de l’ordre de 7 à 20 % avec un recul de trois à six
ans. Les principaux facteurs du pronostic à long terme en l’absence
Références
de cirrhose et de cancer sont l’âge et la sévérité des affections sous-
jacentes [4,11]. [1] Darwish Murad S, Plessier A, Hernandez-Guerra M, Fabris F, Eapen CE, Bahr MJ,
et al. Etiology, management, and outcome of the Budd-Chiari syndrome. Ann
Intern Med 2009;151:167–75.
5.3. Thrombose de l’axe mésentéricoportal surajoutée à un bloc [2] Plessier A, Darwish-Murad S, Hernandez-Guerra M, Consigny Y, Fabris F, Tre-
intrahépatique ou suprahépatique bicka J, et al. Acute portal vein thrombosis unrelated to cirrhosis: a prospective
multicenter follow-up study. Hepatology 2010;51:210–8.
[3] DeLeve LD, Valla DC, Garcia-Tsao G. Vascular disorders of the liver. Hepatology
Dans tous ces cas, la thrombose de la veine porte est proba- 2009;49:1729–64.
blement fortement favorisée par la stagnation du flux portal. Il [4] Plessier A, Rautou PE, Valla DC. Management of hepatic vascular diseases. J
est assez clair que la présence d’affections prothrombotique géné- Hepatol 2012;56Suppl:S25–38.
[5] Hadengue A, Poliquin M, Vilgrain V, Belghiti J, Degott C, Erlinger S, et al. The
rales renforce ce risque de façon indépendante [12]. À cet égard, la changing scene of hepatic vein thrombosis: recognition of asymptomatic cases.
mutation du gène de la prothrombine semble particulièrement en Gastrœnterology 1994;106:1042–7.
cause. [6] Moucari R, Rautou PE, Cazals-Hatem D, Geara A, Bureau C, Consigny Y, et al.
Hepatocellular carcinoma in Budd-Chiari syndrome: characteristics and risk
Au cours du syndrome de Budd-Chiari, il n’est pas clair que
factors. Gut 2008;57:828–35.
la thrombose portale surajoutée aggrave le pronostic. Elle rend [7] Cazals-Hatem D, Vilgrain V, Genin P, Denninger MH, Durand F, Belghiti J, et al.
cependant difficile ou impossible le traitement par TIPS ou par Arterial and portal circulation and parenchymal changes in Budd-Chiari syn-
drome: a study in 17 explanted livers. Hepatology 2003;37:510–9.
transplantation.
[8] Rautou PE, Moucari R, Escolano S, Cazals-Hatem D, Denie C, Chagneau-
Au cours des blocs intrahépatiques non cirrhotiques (sclérose Derrode C, et al. Prognostic indices for Budd-Chiari syndrome: valid for
hépatoportale, hyperplasie nodulaire régénérative ou veinopathie clinical studies but insufficient for individual management. Am J Gastroenterol
portale oblitérante), le risque de survenue d’une thrombose porte 2009;104:1140–6.
[9] Plessier A, Sibert A, Consigny Y, Hakime A, Zappa M, Denninger MH, et al. Aiming
est très élevée (50 %, voire plus, à cinq ans) [13–15]. L’impact sur at minimal invasiveness as a therapeutic strategy for Budd-Chiari syndrome.
l’histoire naturelle est inconnu. Hepatology 2006;44:1308–16.
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[10] Rautou PE, Douarin L, Denninger MH, Escolano S, Lebrec D, Moreau R, et al. [15] Cazals-Hatem D, Hillaire S, Rudler M, Plessier A, Paradis V, Condat B, et al.
Bleeding in patients with Budd-Chiari syndrome. J Hepatol 2011;54:56–63. Obliterative portal venopathy: portal hypertension is not always present at
[11] Condat B, Pessione F, Hillaire S, Denninger MH, Guillin MC, Poliquin M, et al. diagnosis. J Hepatol 2011;54:455–61.
Current outcome of portal vein thrombosis in adults: risk and benefit of anti- [16] Francoz C, Belghiti J, Vilgrain V, Sommacale D, Paradis V, Condat B, et al.
coagulant therapy. Gastroenterology 2001;120:490–7. Splanchnic vein thrombosis in candidates for liver transplantation: usefulness
[12] Valla DC. Thrombosis and anticoagulation in liver disease. Hepatology of screening and anticoagulation. Gut 2005;54:691–7.
2008;47:1384–93. [17] Luca A, Miraglia R, Caruso S, Milazzo M, Sapere C, Maruzzelli L, et al.
[13] Schouten JN, Garcia-Pagan JC, Valla DC, Janssen HL. Idiopathic noncirrhotic Short- and long-term effects of the transjugular intrahepatic portosystemic
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[14] Hillaire S, Bonte E, Denninger MH, Casadevall N, Cadranel JF, Lebrec D, et al. 846–52.
Idiopathic non-cirrhotic intrahepatic portal hypertension in the West: a re-
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