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PHYSIQUE QUANTIQUE CORPUSCULAIRE | PHYSIQUE QUANTIQUE ONDULATOIRE
PHYSIQUE QUANTIQUE RELATIVISTE | PHYSIQUE NUCLÉAIRE
PHYSIQUE QUANTIQUE DES CHAMPS | PHYSIQUE DES PARTICULES ÉLÉMENTAIRES

43. PHYSIQUE QUANTIQUE RELATIVISTE


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LISTE DES SUJETS TRAITÉS SUR CETTE PAGE

L e lecteur attentif aura noté que la mécanique quantique (physique quantique ondulatoire)
est une théorie non relativiste: elle n'incorpore pas les principes de la relativité restreinte
d'Einstein (cf. chapitre de Relativité Restreinte). Nous allons donc nous efforcer à combler ce
manque en étudiant maintenant la version relativiste de la physique quantique ondulatoire
(probabiliste).

Avant de nous attaquer à la partie mathématique, nous tenons à souligner et à rappeler que
nous allons nous limiter uniquement aux développements théoriques effectués entre 1910 et
environ 1935 (au-delà la complexité des théories nécessite trop de pages pour un site Internet
généraliste).

1. ÉQUATION D'ÉVOLUTION RELATIVISTE DE SCHRÖDINGER

La physique des particules ne peut être correctement et totalement décrite dans le cadre de la
mécanique quantique. Comme les énergies sont généralement supérieures aux masses des
particules, il est nécessaire, en plus, de travailler dans le contexte de la théorie de la relativité
restreinte. Voyons comment inclure celle-ci par une première approche basique.

L'énergie-impulsion d'une particule libre de masse m, satisfait comme nous l'avons démontré
dans le chapitre de Relativité Restreinte à la relation:

(43.1)

Nous cherchons à quantifier cette équation. Pour cela, nous allons revenir à des relations que
nous avons démontrées lors de l'étude des opérateurs linéaires fonctionnels et de l'équation
évolutive de Schrödinger.

Rappelons que la quantité de mouvement est décrite par la relation (utilisant l'opérateur de
divergence):

(43.2)

et l'énergie totale par:

(43.3)

Ces deux relations ayant été démontrées dans le chapitre de Physique Quantique Ondulatoire!

Les substitutions des deux relations précédentes appliquées à la relation:


1
(43.4)

et multipliée par la fonction d'onde (cf. chapitre de Physique Quantique Ondulatoire) des deux
côtés de l'égalité conduisent au développement:

(43.5)

En utilisant le d'Alembertien (cf. chapitre d'Électrodynamique), nous pouvons écrire cette


dernière relation sous la forme condensée finale suivante appelée "équation d'évolution
relativiste de Schrödinger" ou plus fréquemment "équation de Klein-Gordon libre" (en
l'absence de champ magnétique!):

(43.6)

avec donc la signature +, -, - ,- pour la dérivée partielle:

(43.7)

Certain auteurs préfèrent la signature -,+,+,+, dès lors, nous avons (c'est par ailleurs le choix
que nous ferons dans le chapitre de Physique Quantique Des Champs puisque c'est la
tradition...):

(43.8)

avec:

(43.9)

Remarque: En physique des particules élémentaires, cette équation est nommée "équation
relativiste covariante des bosons" quelle que soit la signature choisie.

L'équation de Klein-Gordon libre est aussi souvent donnée sous la forme suivante (plus
esthétique):

(43.10)

Il est important de remarquer que l'équation de Klein-Gordon fait intervenir des scalaires et
caractérise donc des particules de spin zéro.

1
Remarques:

R1. Nous pouvons vérifier que les ondes planes de la forme:

(43.11)

sont des solutions de l'équation de Klein-Gordon libre (nous y reviendrons plus en détail
dans le chapitre de Physique Des Particules Élémentaires).

R2. Nous reviendrons lors de notre étude de l'équation de Dirac et du spin des fermions sur
l'équation de Klein-Gordon libre (afin de la généraliser).

1.1. ANTIMATIÈRE

Lors de la démonstration de l'équation de Klein-Gordon libre, nous avons laissé exprès de côté
un cas très intéressant du développement que nous avons effectué.

Peut-être ne l'avez-vous pas remarqué, mais l'équation :

(43.12)

peut prendre deux valeurs pour une impulsion donnée:

(43.13)

l'une positive et l'autre négative. La valeur de l'énergie pourrait donc prendre toutes les valeurs
de

Jusqu'ici, nous avions implicitement admis en mécanique classique que les solutions négatives
n'étaient pas physiques et devaient donc simplement être écartées. Cela ne peut se faire en
théorie des champs quantifiés sans conduire à des incohérences graves. Plutôt que d'ignorer ces
solutions d'énergie négative, il convient de leur trouver une interprétation physique.

Nous observons d'abord, que toutes les énergies négatives sont autorisées par la relation
précédente (aussi bien que pour l'énergie positive). Nous disons que les états d'énergie négative
sont tous occupés mais non observables; les électrons sont dits "électrons virtuels".

Imaginons un paquet d'onde constitué par une superposition d'ondes planes sur un intervalle
étroit en impulsion. Ce paquet se déplace dans l'espace. Dans le cas unidimensionnel, il se
propage à la vitesse:

(43.14)

Démonstration:

En nous nous basant toujours sur l'hypothèse que le champ de potentiel est nul, nous avons
donc:

(43.15)

et:

1
(43.16)

Donc pour résumer:

(43.17)

C.Q.F.D.

Considérons d'abord une particule d'énergie positive . Sa position en fonction du temps est
donnée par:

(43.18)

Une particule d'énergie négative se déplace selon:

(43.19)

En d'autres termes, et ce sera notre première conclusion, nous pouvons dire qu'une particule
d'énergie négative est équivalente à une particule d'énergie positive se
déplaçant à l'envers dans le temps et ceci est ce que nous nommons une "antiparticule".

Il nous reste maintenant à voir quelle est l'interprétation à donner à une particule se déplaçant
à l'envers dans le temps:

Pour simplifier, nous considérons une particule non relativiste de charge électrique (-q)
plongée dans un champ électrique et magnétique statiques. Elle satisfait à l'équation du
mouvement:

(43.20)

Nous avons étudié dans le chapitre d'Électrodynamique que les champs et pouvaient être
construits à partir du quadripotentiel . Donc nous pouvons réécrire l'équation précédente à
partir des deux relations déterminées en électromagnétisme:

et (43.21)

Cependant, il est toujours possible d'imposer la jauge suivante (nous laissons le soin au lecteur
de faire la vérification en utilisant exactement la même méthodologie que celle utilisée dans le
chapitre d'Électrodynamique):

(43.22)

L'équation du mouvement devient:

(43.23)

ou encore: 1
(43.24)

Comparant les deux dernières équations, nous arrivons à notre seconde conclusion: une
particule de charge q se déplaçant à l'envers dans le temps obéit aux mêmes équations du
mouvement qu'une particule de charge opposée -q se déplaçant vers l'avant dans le temps.
L'interprétation physique de la deuxième particule est évidente ("interpération de Feynman-
Stuckelberg").

La physique quantique relativiste implique donc l'existence d'antiparticules, qui sont


effectivement observées.

Tout cela pour en arriver où exactement?

- Premièrement, la découverte théorique de l'antimatière permet d'avoir une possible


explication de l'existence de l'Univers qui violait précédemment le principe de conservation de
l'énergie. La théorie que nous venons de voir, prédit donc que l'Univers devrait contenir autant
de matière que d'antimatière. Les scientifiques sont également à la recherche de la présence de
cette antimatière.

- Deuxièmement, si nous considérons dans le vide un photon d'énergie , il est


capable de porter un électron virtuel vers un état d'énergie positive, où il devient réel. Il
apparaît alors une lacune, ou un "trou" dans la région des énergies négatives. D'après le
principe de la conservation de la charge, on voit apparaître un électron positif, ou positron,
particule antimatérielle symétrique de l'électron.

Ainsi, le photon se matérialise sous la forme d'une paire , avec:

(43.25)

Remarque: Certains résultats expérimentaux semblent montrer que les antiparticules ne sont
pas les parfaits miroirs des particules que nous connaissons. Effectivement, la symétrie
droite/gauche et temporelle ne semble pas être respectée (il y a brisure de symétrie). Nous
n'avons encore rien rédigé à ce sujet sur le présent site mais nous le ferons dès que nous le
pourrons.

2. ÉQUATION DE KLEIN-GORDON GÉNÉRALISÉE

L'équation de Klein-Gordon libre que nous avons initialement présentée plus haut ne prend pas
en compte l'influence du champ magnétique sur l'observation du dédoublement des raies du
spectre des atomes (constat expérimental). C'est pour cette raison que Klein et Gordon
intégrèrent dans leur équation le champ magnétique. Cependant, ils le firent sans prendre en
compte le spin de l'électron. C'est seulement après leur travail que Pauli développa son
équation (dite "équation de Pauli") qui amena ensuite à l'équation de Dirac (voir plus loin).

Pour déterminer l'expression de l'équation de Klein-Gordon d'une particule chargée dans un


champ magnétique et un potentiel électrostatique, utilisons la puissance du formalisme
Lagrangien:

L'équation classique du mouvement admise (cf. chapitre de Mécanique Analytique), comme


valable aussi en relativité, est donnée nous le savons par (équation d'Euler-Lagrange):

(43.26)

Dans le chapitre de Relativité Restreinte, nous avons vu que le lagrangien d'une particule libre
a pour expression:

avec (43.27)
1
É
et dans le chapitre d'Électrodynamique que le lagrangien total était:

(43.28)

Pour des besoins ultérieurs, commençons par calculer:

(43.29)

Calculons le premier terme:

(43.30)

Comme le potentiel ne dépend pas de la vitesse, le terme :

(43.31)

est nul.

Le potentiel vecteur ne dépend pas de la vitesse de la particule dès lors:

(43.32)

Il vient dans ce cas:

(43.33)

L'hamiltonien classique s'écrit (cf. chapitre de Mécanique Analytique):

(43.34)

Nous avons donc démontré précédemment que:

(43.35)

Nous pouvons donc écrire avec cette relation l'hamiltonien sous la forme:

(43.36)

Le produit scalaire a pour expression (puisque sont colinéaires):

(43.37)

L'hamiltonien s'écrit alors:

(43.38)

En travaillant sur les deux premiers termes:


1
(43.39)

Or:

(43.40)

Dès lors:

(43.41)

Finalement, nous obtenons (pour un système conservatif):

(43.42)

Toujours dans le cas d'une particule se déplaçant dans un champ électromagnétique, la relation
entre l'énergie et l'impulsion (qui est différente de la quantité de mouvement par la présence
d'un terme comprenant le potentiel vecteur) se calcule comme suit:

Comme (nous venons de le démontrer):

(43.43)

et comme nous l'avons démontré dans le chapitre de Physique Quantique Ondulatoire:

(43.44)

où il faut donc voir le dernier terme comme étant un abus d'écriture pour le carré de la norme.

Alors en substituant dans:

(43.45)

nous obtenons (nous changeons de notation pour l'hamiltonien):

(43.46)

Si nous réécrivons cette relation en faisant usage des opérateurs correspondants (cf. chapitre de
Physique Quantique Ondulatoire) de l'énergie et de la quantité de mouvement (quantification
canonique):

et (43.47)

alors finalement nous pouvons écrire en analogie avec l'équation de Klein-Gordon libre (en
l'absence de champ) "l'équation de Klein-Gordon généralisée":

(43.48)

Cette équation est celle de Klein-Gordon qui s'applique à une particule de charge q sans spin se
déplaçant dans un champ électromagnétique.

Si alors la relation précédente s'écrit:


1
(43.49)

Nous retrouvons donc l'équation de Klein-Gordon d'une particule libre mais sans spin !

Il serait intéressant de regarder maintenant l'expression de l'équation de continuité (qui


exprime rappelons-le: la conservation de l'énergie) avec la prise en compte du champ
magnétique (parce qu'au fait elle posera toujours problème... et même un très gros). Pour cela,
considérons le cas d'une particule libre se déplaçant avec une quantité de mouvement et
ayant une énergie E. Nous avons vu que nous pouvions lui associer une onde plane de la
forme:

(43.50)

Soit l'équation Klein-Gordon libre et son expression en conjugué complexe (nous travaillons
avec les unités naturelles )

(43.51)

Nous multiplions (1) par et (b) par

(43.52)

Soit:

(43.53)

Par différence (1)-(2):

(43.54)

Le calcul des dérivées par rapport à t des fonctions suivantes:

(43.55)

Par différence (1)-(2)

(43.56)

Ce qui nous donne finalement:

1
(43.57)

Soit f un champ scalaire et et un champ vectoriel. L'analyse vectorielle donne:

(43.58)

Posons:

(43.59)

Dès lors:

(1)
(43.60)

Posons maintenant:

(43.61)

Dès lors:

(2)
(43.62)

Soustrayons (1)-(2):

(43.63)

Comme :

(43.64)

En changeant les signes:

(43.65)

Cette dernière relation et:

(43.66)

donnent:

(43.67)

À nouveau, rapprochons cette relation avec l'équation de continuité:

(43.68)

Rappelons que lors de notre première étude de l'équation de Klein-Gordon nous avons vu
qu'en mécanique quantique son équivalent est donné par la même équation mais avec les
significations suivantes: est la densité de probabilité, est la densité du flux de particules.

Nous avons donc:

(43.69)
1
Si la fonction d'onde associée et sa conjuguée complexe :

(43.70)

Les dérivées par rapport au temps de ces fonctions

(43.71)

Les gradients se calculent comme suit:

(43.72)

En reprenant l'expression de la densité de probabilité et compte tenu de différentielles


précédentes, il vient:

(43.73)

La densité de probabilité a donc pour expression:

(43.74)

En reprenant l'expression de la densité de courant et compte tenu des différentielles, il vient:

(43.75)

La densité de courant a pour expression:

(43.76)

En se plaçant dans la situation des connaissances de l'époque, l'équation de Klein-Gordon


présente plusieurs pathologies et inconvénients.

- La densité de probabilité peut devenir négative (puisque comme nous l'avons vu,
l'énergie peut l'être aussi), ce qui est inexplicable. Une telle situation n'existe pas avec
l'équation de Schrödinger.

- L'équation de Klein-Gordon a l'inconvénient d'être du second ordre en t (l'équation de


Schrödinger est elle du premier ordre). L'évolution temporelle nécessite dont la connaissance
non seulement de mais également de sa dérivée

- Si nous appliquions cette équation à l'atome d'hydrogène, nous ne retrouverions pas les
mêmes niveaux d'énergie en structure fine.

Tout ceci a conduit à l'époque qui précède les travaux de Dirac, à un rejet de cette équation qui,
de plus, ne tenait pas compte du spin.

3. ÉQUATION DE DIRAC LIBRE CLASSIQUE

Jusqu'à présent, toute particule a été considérée comme ponctuelle et sans aucune structure ou
degré de liberté interne. Dans cette optique, toute l'information sur l'état du système à l'instant t
est alors réputée entièrement contenue dans la connaissance de la fonction d'onde . 1
Une telle description est insuffisante, comme nous allons le voir. Cette insuffisance provient
des preuves expérimentales démontrant qu'une particule telle que l'électron possède un
moment magnétique propre, indépendamment de tout mouvement de rotation dans l'espace
autour d'un centre. L'existence de ce moment magnétique entraîne à son tour l'existence d'un
moment cinétique propre, ou intrinsèque, qui a été baptisé "spin" car on croyait au début que
ce degré de liberté était lié à une rotation de la particule sur elle-même. Ce degré de liberté est
"interne" - bien que l'électron continue à être considéré comme une particule ponctuelle ; c'est,
au même titre que la charge ou la masse, un attribut intrinsèque, donné une fois pour toutes. Il
s'avère impossible de donner du spin une image classique! Se représenter l'électron comme une
petite bille de rayon non nul qui tourne sur elle-même conduit à des absurdités (par exemple,
on trouve qu'un point situé à la périphérie de l'électron a une vitesse très supérieure à c). Il
reste cependant que le spin d'une particule massique est son moment cinétique dans le
référentiel où elle est au repos. L'hypothèse du spin de l'électron a été formulée par Uhlenbeck
et Goudsmit en 1925 pour rendre compte des atomes complexes comme nous l'avons vu en
physique quantique corpusculaire.

Le spin d'une particule est toujours demi-entier ou entier, c'est un fait d'expérience. Le
caractère entier ou demi-entier du spin définit deux grandes familles de particules, les bosons
(spin entier) et les fermions (spin demi-entier), obéissant à des statistiques très différentes
telles que celles que nous avons présentées dans le chapitre de Mécanique Statistique (d'où
l'existence d'une relation appelée "théorème spin-statistique").

Revenons au cas de l'électron. Les deux valeurs possibles révélées par une mesure de S (le
que nous avions dans le chapitre de Physique Quantique Corpusculaire) sont donc les valeurs
propres (cf. chapitre de Physique Quantique Ondulatoire) associées aux deux valeurs
possibles d'un nombre quantique lui-même associé donc à l'état libre ( ) au
moment cinétique:

(43.77)

Donc:

(43.78)

Une description complète de l'état de l'électron contient donc nécessairement une fonction
d'onde donnant comme d'habitude la densité de probabilité de présence, mais prenant
également en compte le degré de liberté du spin, d'où la notation . Si les
coordonnées d'espace prennent des valeurs réelles continues, en revanche la variable de spin
est donc essentiellement discrète.

En maintenant l'interprétation usuelle, la quantité est la probabilité de


présence autour du point choisi avec la valeur pour le spin. La condition de normalisation
des probabilités introduit comme toujours une sommation, qui porte non seulement sur les
degrés orbitaux (sommation continue, c'est-à-dire intégration) mais également sur les degrés de
spin (sommation discrète):

(43.79)

exprimant notamment le fait que nous épuisons toutes les possibilités du spin en sommant sur
les deux valeurs possibles. En tout état de cause, l'électron n'a plus une mais deux fonctions
d'onde, une pour chaque valeur de .

1
La notation précédente n'est pas forcément la meilleure pour les particules libres de spin
supérieur à 1/2 comme nous l'avons vu lors de notre étude du moment cinétique. S'agissant
d'une variable prenant des valeurs discrètes, il est tout aussi légitime de mettre en indice de
et de poser . Enfin, il est commode d'utiliser une notation matricielle, rangeant en
colonne les différentes fonctions correspondant aux valeurs possibles de la variable discrète
. Ainsi, pour l'électron, nous admettrons désormais que toute l'information au sens de la
physique quantique ondulatoire est contenue dans un vecteur-colonne à deux lignes appelé
"spineur" (cf. chapitre de Calcul Spinoriel) et noté:

ou (43.80)

Revenons maintenant sur l'équation de Klein-Gordon libre (plus générale que l'équation de
Schrödinger bien évidemment mais moins que celle comportant le champ magnétique):

(43.81)

Cette équation est comme nous le savons malheureusement incomplète car elle ne contient
aucune information sur le spin de l'électron.

Nous pouvons cependant, pour tenter de trouver une solution à ce problème, faire un parallèle
avec le champ électromagnétique. Celui-ci comporte aussi un spin, résidant dans la
polarisation du champ (cf. chapitre d'Électrodynamique). Cette polarisation est étroitement liée
à la nature vectorielle du champ électromagnétique et transparaît dans les équations de
Maxwell, qui sont du premier ordre en dérivées. Cependant, en combinant les équations de
Maxwell, nous avons vu dans le chapitre d'Électrodynamique que nous pouvions obtenir les
équations d'onde:

et (43.82)

qui sont (coïncidence très pertinente!) un cas particulier de l'équation de Klein-Gordon quand
:

(43.83)

Les équations d'onde recèlent cependant moins d'informations que les équations de Maxwell
originales: elles ne contiennent explicitement aucune relation entre les différentes composantes
des champs et , comme par exemple le fait que, dans une onde électromagnétique de
vecteur d'onde donné, les champs et sont mutuellement perpendiculaires et tous les deux
perpendiculaires au vecteur d'onde. Pour établir ces contraintes, il faut retourner aux équations
de Maxwell et donc à des équations avec des dérivées du premier ordre.

Il en est de même pour les fermions (les électrons en font partie). L'équation de Klein-Gordon,
quoiqu'elle ne soit pas fausse, est incomplète. Il faut tenter ici d'établir une équation du premier
ordre en dérivées qui décrive bien le spin 1/2 des électrons des fermions. Cette dernière
condition signifie que cette équation doit donc faire intervenir les deux composantes d'un
spineur (en analogie avec celui que nous nous déterminé plus haut):

(43.84)

Nous écrirons alors cette équation que nous cherchons comme:

(43.85)
1
où D est une matrice faisant intervenir des dérivées du premier ordre (un opérateur
différentiel du premier ordre).

Pour donner un exemple avant d'aller plus loin, regardons comment l'équation de Klein-
Gordon peut s'exprimer sous une telle forme.

Nous avons donc (équation de Klein-Gordon libre):

(43.86)

ou (équation de Klein-Gordon généralisée):

(43.87)

Ce qui s'écrit aussi pour l'équation de Klein-Gordon libre:

(43.88)

ou pour l'équation de Klein-Gordon généralisée:

(43.89)

Restreignons-nous maintenant au cas de l'équation de Klein-Gordon libre (le raisonnement


étant similaire mais... plus long pour la version généralisée).

La dernière expression de l'équation de Klein-Gordon libre suggère d'introduire les deux


combinaisons trouvées après (paraît-il) de nombreux essais par nos prédécesseurs:

(43.90)

d'où résulte:

(43.91)

Dès lors:

(43.92)

peut s'écrire de deux façons après substitutions respectives:


1
(43.93)

Soit, sous forme matricielle:

(43.94)

ou encore:

(43.95)

Ce que nous pouvons écrire:

(43.96)

Donc par rapport à notre idée initiale d'avoir une relation sous la forme:

(43.97)

nous pouvons faire la similitude avec l'équation antéprécédente:

et (43.98)

où D est bien une matrice .

Mais nous, nous recherchons toujours (pour faire le parallèle avec les équations de Maxwell)
un système d'équations avec des différentielles du premier ordre. Dans l'objectif de chercher
une forme plus générale incluant sous forme naturelle le spin, nous allons poser en analogie
avec le résultat ci-dessus:

(43.99)

où A est un vecteur (mais représenté par tradition comme un scalaire), est un vecteur (et
noté tel quel) et un vecteur composé de matrices symétriques (en lisant la suite vous
verrez que poser cela permet de trouver ce que nous cherchons...).

Rappelons que la multiplication entre et constitue un produit scalaire tel que celui défini
dans notre étude du chapitre de Calcul Spinoriel.

1
Remarque: Il faut être très prudent dans les développements qui vont suivre, car les notations
traditionnelles dans le domaine rendent très difficiles les distinctions entre produits, produits
scalaires, et produits de composantes de vecteurs formant un vecteur.

Posons (au fait nos prédécesseurs ont aussi fait de nombreux essais avant de poser cela...):

(43.100)

Ce que nous cherchions initialement c'est-à-dire devient alors:

(43.101)

Ainsi, , et reste (imaginons...) inconnu. Il nous faut également déterminer


.

Toujours par analogie avec l'exemple fait plus haut, tentons de retrouver l'équation d'onde pour
déterminer la constante :

(43.102)

Pour que nous retrouvions l'équation d'onde, il faut donc que:

1.

Effectivement (attention il faut que le lecteur ait étudié idéalement le chapitre de Calcul
Spinoriel pour savoir en détails comment nous arrivons à ce développement!):

(43.103)

2. :

(43.104)

Il y a donc deux possibilités qui peuvent s'appliquer à des champs différents que nous noterons
et qui sont dénommés "spineurs de Weyl". Nous avons donc une sorte de double spineur
tel que:

(43.105)

Ces équations sont appelées "équations de Weyl".

Il nous faut maintenant généraliser les équations de Weyl au cas d'un fermion de spin demi-
entier avec masse. Cette nouvelle équation doit respecter les contraintes suivantes:

C1. Elle doit se réduire aux équations de Weyl quand la masse tend vers zéro. 1
C2. Elle doit mener à l'équation de Klein-Gordon libre.

C3. Elle doit décrire des particules possédant un spin.

La solution consiste alors à coupler les deux équations de Weyl par un terme proportionnel à la
masse:

(43.106)

Pour vérifier que les facteurs ont été correctement choisis, nous appliquons sur

la première équation et nous y substituons la deuxième. Nous trouvons:

(43.107)

ou encore:

(43.108)

à comparer avec:

(43.109)

Ce qui est bel et bien l'équation de Klein-Gordon libre (nous démontrons la même
correspondance pour la composante ) et renforce donc la validité des hypothèses et
développements faits jusqu'à maintenant.

Il est usuel de rassembler les deux spineurs dans un seul spineur (cela devient alors un
"bispineur") de quatre composantes (un spineur à quatre composantes dont deux sont en fait
associées aux particules et deux aux antiparticules comme nous le verrons):

(43.110)

et de définir les deux matrices (appelées communément "matrices gamma") suivantes


(sous une forme dite "forme chirale"):

(43.111)

où est la matrice unité traditionnelle définie par:

(43.112)

et:

(43.113)
1
où les sont les "matrices de Pauli" données par (cf. chapitre de Calcul Spinoriel):

(43.114)

qui doivent satisfaire rappelons-le (démontré plus haut):

(43.115)

qui est pour rappel une matrice . Les matrices de Pauli sont donc de bonnes candidates
pour résoudre notre problème!

Remarques:

R1. Comme nous l'avons vu dans le chapitre de Calcul Spinoriel (section d'Algèbre),
n'est pas vraiment une matrice de Pauli en soi. Cependant, dans certains ouvrages, elle est
indiquée comme en étant une (c'est aussi notre choix ici).

R2. Comme nous l'avons également vu dans le chapitre de Calcul Spinoriel, rappelons que
les matrices de Pauli représentent implicitement des rotations spatiales infinitésimales d'un
spineur.

R3. Attention dans les matrices de Pauli, l'écriture du 0 signifie qu'il s'agit des matrices
dont toutes les composantes sont nulles.

Ceci nous permet, enfin, de combiner les équations:

(43.116)

en une seule (ne pas oublier l'association des opérateurs ):

(43.117)

en utilisant la notation d'usage en calcul tensoriel et en choisissant les unités naturelles


nous avons:

(43.118)

ce qui constitue la forme habituelle de "l'équation de Dirac" (implicitement un système de


quatre équations différentielles couplées) ou "équation relativiste de l'électron" avec la
"dérivée covariante":

(43.119)

et où le vecteur nul est donc (pour rappel...) un vecteur à quatre composantes toutes nulles!

Remarque: En physique des particules élémentaires, la relation antéprécédente est appelée


"équation relativiste covariante des fermions" car elle décrit les particules de spin 1/2.

Les matrices sont appelées "matrices de Dirac". Sous forme encore plus condensée (en
utilisant le "slash de Feynman") l'équation de Dirac s'écrit parfois: 1
(43.120)

Nous avons ainsi, comme en analogie avec les équations de Maxwell, des équations
différentielles du premier ordre qui ont comme propriété:

P1. De permettre de retomber sur l'équation de Klein-Gordon, in extenso sur l'équation d'onde
(comme pour les équations de Maxwell)

P2. De prendre en compte (décrire) explicitement le caractère spinoriel des fonctions d'onde
comme nous allons le voir en nous penchant de plus près sur les matrices de Pauli.

Remarque: Comme l'équation de Dirac s'applique aux particules de spin 1/2 elle s'applique
aussi aux neutrinos dont la masse au repos est nulle (donc la résolution de l'équation de
Dirac se simplifie largement).

Dans le but maintenant d'interpréter le contenu physique de l'équation de Dirac, nous allons
utiliser une représentation différente des matrices de Pauli. Nous avons vu que la
représentation par les matrices :

(43.121)

était dite "représentation Chirale" alors que nous allons utiliser maintenant la "représentation
de Dirac" définie par:

(43.122)

Nous vérifions facilement (algèbre linéaire élémentaire) que cette représentation s'obtient par
la transformation:

où (43.123)

Rappelons que est la matrice adjointe (la conjuguée de la matrice transposée) de U. Or,
lorsque tous les éléments sont des réels comme c'est le cas ci-dessus et que la matrice est
carrée alors (cf. chapitre d'Algèbre Linéaire) nous savons que .

Démonstration:

(43.124)

et:

(43.125)

Cherchons maintenant les solutions particulières à l'équation de Dirac sous la forme:

(43.126)

1
En substituant dans l'équation de Dirac et après simplification par nous trouvons
facilement:

(43.127)

Effectivement en unités naturelles:

(43.128)

Avec la représentation de Dirac, nous obtenons après développement (calcul trivial):

(43.129)

ou plus explicitement:

(43.130)

Effectivement avec la convention de sommation d'Einstein:

1
(43.131)

Pour que cette équation matricielle ait des solutions non nulles, il faut comme d'habitude que le
déterminant de la matrice soit nul (cf. chapitre d'Algèbre Linéaire). Nous vérifions facilement
que:

(43.132)

Ce qui implique (ne pas oublier que nous sommes en unités naturelles!):

(43.133)

Il s'agit donc d'un système d'équation follement amusant à résoudre (ne pas oublier que chaque
terme de la relation ci-dessus en réalité une matrice ).

Avec la représentation Chirale, nous aurions obtenu (toujours en adoptant la notation


traditionnelle du site pour le produit scalaire):

1
(43.134)

et nous ne serions pas tombés sur une condition aussi esthétique et physique pour qu'il y ait des
solutions!

La masse étant toujours positive, l'équation de Dirac comporte donc quatre solutions
linéairement indépendantes, dont deux avec une énergie positive:

(43.135)

et deux avec une énergie négative:

(43.136)

Il s'agit donc bien des antiparticules que nous avions déterminées lors de notre étude de
l'équation de Klein-Gordon libre mais avec le spin en plus d'où le doublage des solutions
supplémentaires (deux orientations du spin possibles par particule et par antiparticule). Avec la
représentation Chirale, nous ne serions pas retombés sur ce résultat. D'où la nécessité de
l'utilisation de la représentation de Dirac des matrices de Pauli.

Nous savons donc qu'il existe des solutions à l'équation de Dirac. Déterminons maintenant
celles-ci. Posons:

(43.137)

où sont les deux doubles composantes du spineur. Nous écrivons ainsi le système
d'équations (nous utilisons, comme le faisait Dirac, le simple symbole de multiplication en lieu
et place du symbole du produit scalaire):

(43.138)

ce qui nous donne (ne pas oublier que le terme au dénominateur est en réalité une matrice
...):
1
et (43.139)

Ainsi, nous avons:

(43.140)

Nous savons qu'il existe des solutions et la physique quantique nous impose que ces solutions
soient linéairement indépendantes. Ainsi, choisissons les solutions pour comme étant
proportionnelles à:

ou (43.141)

et comme (cf. chapitre de Calcul Spinoriel):

(43.142)

nous avons alors les possibilités suivantes:

(43.143)

La question est maintenant... devons-nous utiliser ou ? Eh


bien, pour (1) et (2) nous devons utiliser sinon devient une singularité
pour . Pour (3) et (4) nous devons utiliser sinon devient une
singularité pour .

Remarque: Le terme est souvent appelé "solution particule" dans la littérature et le


terme "solution antiparticule". L'interprétation de ce résultat comme étant une anti-
particule serait parfois appelée comme nous l'avion déjà mentionné "interpération de
Feynman-Stuckelberg".

En reprenant

(43.144)

et en notant les spineurs (nous changeons de notation):

(43.145)

1
Nous avons finalement en utilisant (1) et (2) et en notant N( ) la partie de solution que nous
devrions normaliser, les solutions suivantes possibles et qui sont indépendantes:

(43.146)

avec ainsi que:

(43.147)

avec . Il est d'usage d'associer conventionellement les deux fonctions ci-dessus au


positron.

Ce qui peut s'abréger globalement:

(43.148)

Indiquons que le terme qui est donc la projection de la quantité de mouvement


(impulsion) sur une entité mathématique directement liée au spin est appelé "hélicité".

4. ÉQUATION DE DIRAC LIBRE LINÉARISÉE

Nous avons vu tout au début de notre étude la physique quantique ondulatoire que l'équation
de Schrödinger classique d'évolution était:

(43.149)

1
soit une équation différentielle d'un premier ordre par rapport au temps et du second par
rapport aux coordonnées spatiales.

Nous avions ensuite déterminé l'équation d'évolution relativiste de Schrödinger (équation de


Klein-Gordon libre) donnée par:

(43.150)

Nous remarquons qu'en passant à une forme relativiste, nous avons maintenant une équation
différentielle du second ordre dans le temps et dans l'espace.

Ensuite en passant par l'équation de Klein-Gordon généralisée qui contenait également une
équation différentielle du second ordre en temps et en espace:

(43.151)

et dans l'équation de Dirac libre, nous obtenons de même une équation différentielle
matricielle de premier ordre en temps et de deuxième ordre en espace:

(43.152)

Ces changements d'ordre des différentielles d'un modèle relativiste ou non imposent bien sûr
dans le cas d'un premier ordre de connaître les conditions initiales en temps et en espace de
l'équation d'onde, ce qui est faisable. Cependant, lorsqu'un second ordre apparaît, il faut alors
en plus connaître les conditions initiales des dérivées des fonctions d'onde (cf. chapitre de
Calcul Différentiel Et Intégral). De plus, même si mathématiquement la rigueur nous a amené
naturellement aux différents ordres obtenus, il est étrange en passant d'un modèle relativiste
que nous changions d'ordre. Pourquoi ?: pour la simple raison qu'en approximant les équations
relativistes, nous n'arrivons pas avec le facteur de la constante de Planck à faire des
approximations (développement en série de ) qui nous ramèneraient à du premier ordre.
Les équations relativistes et non relativistes sont donc a priori incompatibles dans les limites
non relativistes !

La méthode de Dirac pour résoudre ce problème aura été la suivante:

Les ordres de l'équation différentielle de Klein-Gordon venant à la base de la relation (voir les
débuts de nos développements de l'équation de Klein-Gordon libre) de l'énergie totale en
l'absence de tout champ:

(43.153)

Dirac aurait eu donc l'idée géniale de linéariser cet hamiltonien en posant:

(43.154)

dont nous devrons déterminer les paramètres qui pourront être des scalaires,
des vecteurs ou des matrices (attendons un peu... la réponse viendra). Il s'ensuit que
l'hamiltonien est lui aussi soit un scalaire, soit un vecteur, soit une matrice.

Ainsi, l'équation d'onde d'évolution relativiste la plus simple que nous pourrons construire
sera:

(43.155)
1
Sous une forme beaucoup plus commune dans la littérature:

(43.156)

Comme ici:

(43.157)

nous retrouvons alors la relation antéprécédente aussi sous la forme:

(43.158)

Si la quantité de mouvement venait à être nulle, nous retrouverions ainsi l'énergie au repos
pour l'hamiltonien:

(43.159)

où comme nous allons le voir plus loin .

La validité de cette linéarisation devra être vérifiée en retrouvant les résultats obtenus lors de
notre étude précédente de l'équation de Dirac.

Élevons maintenant l'opérateur au carré soit:

(43.160)

et posons:

(43.161)

À ce stade, il est important de remarquer que nous travaillons peut-être avec des opérateurs
(des matrices typiquement) qui pourraient ne pas commuter car les sont inconnus. Dès
lors, l'élévation au carré sera effectuée comme suit:

(43.162)

soit simplement développé mais sans simplifier la somme AB+BA en un 2AB ou en un 2BA
puisque nous ne sommes pas sûr pour l'instant s'il y aura commutativité ou pas.

Nous développons ainsi l'hamiltonien de Dirac

(43.163)

En effectuant les produits des termes entre parenthèses et en respectant l'ordre des opérateurs,
il vient:

(43.164) 1
En groupant certains termes:

(43.165)

Pour être conforme à nos hypothèses de linéarisation, nous devons avoir:

(43.166)

et nous allons de suite voir que pour satisfaire à ces conditions les devront être des
matrices .

Écrit sous forme de commutateurs, nous avons donc les trois conditions suivantes à satisfaire:

(43.167)

Nous observons ce qui suit:

- Le carré de chaque opérateur et est égal à 1 (ou à la matrice unitaire s'il s'agit de
matrice...).

- est un anticommutateur.

- est un anticommutateur.

ces trois relations peuvent se résumer comme suit:

(43.168)

À ce stade, nous devons rechercher quels sont les objets mathématiques répondant aux trois
conditions ci-dessus. Nous pourrions montrer qu'une matrice carrée de dimension 2 ou 3 ne
répond pas aux trois conditions et un scalaire encore moins!

1
Dirac a alors adopté par analogie aux développements antérieurs, des matrices carrées de
dimension 4 incluant des matrices de Pauli (comme par hasard...) et a admis pour une
matrice unité (ce choix fait par Dirac est particulier, il y a d'autres choix possibles).

Donc ce que nous notions "1" avant est au fait une matrice unitaire carrée de dimension 4! Et
donc les fonctions d'onde doivent avoir 4 composantes et des êtres mathématiques qui ont cela
sont les spineurs!

Les matrices considérées par Dirac (qui sont un choix particulier!) sont donc pour :

(43.169)

et par exemple dans certains domaines de la physique quantique on utilise le choix de Weyl:

(43.170)

Dans le choix considéré par Dirac ou de Weyl, nous avons les matrices de Pauli et la matrice
unitaire suivantes:

(43.171)

Ce qui conduit aux matrices :

(43.172)

On peut vérifier que les conditions de linéarisation sont vérifiées par les matrices précédentes:

- Première condition:

(43.173)

De même pour les :

1
(43.174)

La première condition est donc bien remplie!

- Deuxième condition (attention aux notations qui dérapent un peu par tradition entre matrices
et scalaires!):

(43.175)

et:

(43.176)

Donc:

(43.177)

la deuxième condition est bien remplie.

- Troisième condition:

1
(43.178)

La troisième condition est bien remplie.

En se référant à l'équation de début écrite avec le formalisme de Dirac

(43.179)

Avec:

(43.180)

Ce qui donne finalement:

(43.181)

Nous nous retrouvons devant une fonction d'état possédant 4 composantes dans laquelle:

et (43.182)

sont des spineurs et l'ensemble:

(43.183)

est donc un "bispineur de Dirac" et nous notons:

(43.184)

la "fonction d'état de Dirac". Le lecteur remarquera que nous retrouvons les mêmes concepts
que lors de notre étude de l'équation de Dirac libre non linéarisée.

En développant, il vient:

1
(1)

(43.185)

Pour un électron libre, nous savons que la solution est:

(43.186)

Avec le bispineur de Dirac, nous avons:

(43.187)

avec:

(43.188)

où à sont les composantes du bispineur de Dirac.

Nous noterons:

avec (2)

(43.189)

En calculant leurs dérivées par rapport à t:

(3)

(43.190)

Avec (2) et (3) dans (1), il vient

1
(43.191)

soit un système d'équations dont les inconnues sont :

(4)

(43.192)

Nous aurons des solutions non toutes nulles si et seulement si le déterminant des coefficients
est nul (pour en connaître les raisons, se référer au chapitre d'Algèbre Linéaire) et donc une
infinité de solutions (pour les composantes du spineur de Dirac) possibles. Soit:

(43.193)

En simplifiant par c:

(43.194)

La division dans le déterminant précédent permet le calcul des déterminants partiels (cf.
chapitre d'Algèbre Linéaire):

(43.195)

En résolvant le déterminant précédent, il vient:

1
(43.196)

D'où la relation suivante:

(43.197)

Les valeurs de l'énergie données par l'équation de Dirac sont donc:

(43.198)

Soit:

(43.199)

Si nous adoptons pour , deux valeurs constantes pour et , nous disposons de deux
relations pour calculer et soit:

- Avec (4c):

(43.200)

Soit:

(43.201)

- Avec (4d):

(43.202)

Soit:

(43.203)

N.B: En adoptant , il vient:

(43.204)

En prenant les unités naturelles:

(43.205)
1
En adoptant , il vient:

(43.206)

En prenant les unités naturelles:

(43.207)

Si nous adoptons pour , deux valeurs constantes pour nous disposons de deux
relations pour calculer soit:

- Avec (4a):

(43.208)

Soit:

(43.209)

- Avec (4b):

(43.210)

Soit:

(43.211)

Notons, qu'en adoptant , il vient:

(43.212)

Avec les unités naturelles:

(43.213)

En adoptant , il vient:

(43.214)

Soit avec les unités naturelles:

(43.215)

1
Bien que la méthode soit différente, nous retrouvons donc les coefficients des spineurs que
nous avions obtenus dans notre étude de l'équation de Dirac libre classique. Cela nous rassure
donc dans les hypothèses posées au début de cette linéarisation et valide ces résultats. De plus,
les relations précédentes indiquent aussi une dégénérescence d'ordre deux de l'énergie pour
chaque valeur de l'impulsion. En l'absence de champ extérieur, l'électron libre n'est donc pas
influencé par l'orientation de son spin. Nous retrouvons donc les mêmes résultats que ce soit
pour l'équation de Dirac libre classique ou linéarisée.

Cependant, l'explication donnée par Dirac pour expliquer les énergies positives et négatives est
que son équation s'applique non seulement à l'état d'une particule à énergie positive (en
l'occurrence l'électron) mais également à l'état d'une particule à énergie négative (son
antiparticule soit le positron). La valeur absolue de ces deux énergies étant strictement égale.

La présence du signe négatif affectant l'énergie a posé problème à l'époque pour son
interprétation (dans le cadre où nous omettons la variable du temps puisque nous avions vu
lors de l'étude de l'équation de Klein-Gordon libre qu'une particule à énergie négative peut être
vue comme une particule qui remonte le temps).

Si nous raisonnons dans le cas où le terme est faible comparé à , nous nous posons
la question: comment et quelles sont les conséquences d'une transition entre un état d'énergie
à celui de l'état d'énergie avec un saut ("gap") de (nous retrouverons cette
valeur lors de notre étude de la matérialisation dans le chapitre de Physique Nucléaire).

Dirac a recours à l'image d'une mer d'énergie négative appelée "mer de Dirac" (puisque
rappelons-le, le nombre de solutions à notre système matriciel est infini, d'où l'analogie avec
une mer plus qu'un contexte discret) dans laquelle tous les états d'énergie négatives sont
occupés par les électrons et les états d'énergie positives seraient vides. Si un électron est
soumis à une transition (via, par exemple un photon d'énergie supérieure à ), il quitte
cette mer en laissant derrière lui une lacune (le fameux "trou" de charge positive auquel les
électroniciens font parfois référence...). Cette lacune devient une charge positive, d'énergie .
L'apparition de cette lacune est assimilée à l'apparition d'une particule ayant une charge
positive. Bien évidemment, nous pouvons nous imaginer le cas inverse, ce n'est qu'une
question de conventions.

5. ÉQUATION DE DIRAC GÉNÉRALISÉE

Dans le cas de l'électron libre, nous avons donc maintes fois vu et démontré que l'hamiltonien
a comme expression

(43.216)

Dans le cas d'un électron se déplaçant dans un champ électromagnétique, nous avons aussi
démontré lors de notre étude de l'équation de Klein-Gordon au début de ce chapitre:

(43.217)

Soit:

(43.218)

Bref fini pour le rappel!

Si maintenant, nous reprenons l'hamiltonien de Dirac pour l'électron libre démontré plus haut
(qui est pour rappel une matrice ):

(43.219)

1
et du fait qu'il faille rajouter à l'hamiltonien le terme de l'énergie potentielle électrostatique via
la potentiel vecteur, nous avons:

(43.220)

où le potentiel U devra dont aussi être exprimé sous la forme d'un matrice diagonale.

Nous obtenons alors l'hamiltonien de Dirac généralisé sous la forme traditionnelle suivante:

(43.221)

Nous avons donc sous une autre forme connue:

(43.222)

6. ÉQUATION DE PAULI

Considérons maintenant une représentation à deux composantes du spineur:

(43.223)

et rappelons que:

et (43.224)

Il vient alors:

(43.225)

Soit:

(43.226)

Ce qui après simplification donne:

(43.227)

Avant de continuer, ouvrons une parenthèse importante sinon quoi nous n'arriverons pas à
trouver une solution à ces deux équations.

Rappelons qu'un des spineurs solutions de l'équation de Dirac libre était donné par (nous
l'avons démontré plus haut):

(43.228)

Soit en unités S.I.:

(43.229)

1
Afin de simplifier le calcul des équations antéprécédentes nous abaisserons la situation à un
cas non relativiste, c'est-à-dire lorsque l'énergie de masse est beaucoup plus grande que
l'énergie cinétique. Donc la solution précédente devient (on oublie la deuxième qui poserait
problème...):

(43.230)

L'idée est simple mais il fallait y penser! À noter que suivant les auteurs et professeur c'est le
terme suivant qui est appelé "hélicité":

(43.231)

L'idée est alors de trouver une solution telle à:

(43.232)

qui lorsque nous faisons une approximation non relativiste et que nous annulons le champ
magnétique (in extenso le potentiel vecteur), nous retombons sur:

(43.233)

Après maints tâtonnements (eh oui la physique quantique ne s'est pas faite en un jour...) nous
trouvons qu'une solution particulière satisfaisant à notre idée précédente est:

(43.234)

Effectivement:

(43.235)

Nous avons finalement deux équations:

(43.236)

1
Maintenant, considérons uniquement la deuxième équation:

(43.237)

En supposant (gratuitement! après quoi il faudra comparer aux résultats expérimentaux) que le
terme est beaucoup plus petit que nous pouvons écrire:

(43.238)

En faisant la même hypothèse avec nous avons:

(43.239)

Nous avons alors (ne pas oublier que le dénominateur est une matrice diagonale en réalité...):

(43.240)

Or, nous voyons bien que si le champ magnétique (in extenso le potentiel vecteur) s'annule,
nous retombons sur bien notre idée de départ! Le pari est donc bon!

À cause de toutes ces approximations vers le bas, la composante est souvent prise comme
étant la "petite" composant de la fonction d'onde , relativement à la grosse composante .

La première équation:

(43.241)

peut maintenant être simplifiée facilement en prenant la solution précédente tel que:

(43.242)

Soit:

(43.243)

En utilisant l'identité remarquable démontrée dans le chapitre de Calcul Spinoriel:

(43.244)

Nous avons:

(43.245)

Détaillons le produit vectoriel en se rappelant qu'il agira comme opérateur sur :

1
(43.246)

Or, nous avons (cf. chapitre de Calcul Spinoriel):

(43.247)

Intéressons-nous juste à la composante dans le coin supérieur gauche (sinon les calculs sont
trop longs) de cette somme de matrices. Il ne faut pas oublier que cette composante de la
matrice agira sur la première composante en tant qu'opérateur sur (notée de même...):

(43.248)

Or:

(43.249)

Donc:

(43.250)

Or, nous reconnaissons ici la troisième composante d'un produit vectoriel n'agissant pas
comme opérateur. Finalement, il vient:

(43.251)

Soit:

(43.252)

Ainsi, la relation de la composante principale:

(43.253)

Devient:
1
(43.254)

Le lecteur remarquera que les notations ne sont pas des plus joyeuses (entre vecteurs, matrices
et constantes il faut bien suivre pour savoir qu'est-ce qui est quoi là-dedans...).

Après réarrangement:

(43.255)

ce qui constitue "l'équation de Pauli" et décrit donc de manière relativiste les deux
composantes de liberté du spin de l'électron (il s'agit donc en réalité d'un système deux
équations).

L'expression:

(43.256)

est appelée "terme de Stern-Gerlach" et représente l'énergie d'interaction du champ magnétique


avec le moment intrinsèque de l'électron (c'est une matrice pour rappel).

L'équation de Pauli, et donc celle de Dirac (puisque cette dernière est plus générale), donnent
le facteur gyromagnétique correct de pour un électron libre. Pour vérifier ceci, prenons
comme il a été fait expérimentalement, un champ magnétique constant:

Nous vérifions facilement que le choix d'un potentiel vecteur correspondant à un champ
magnétique constant est alors:

(43.257)

Ce choix va avoir pour effet de faire disparaître le potentiel vecteur au profit du champ
magnétique dans l'équation de Pauli, ce qui fera apparaître l'interaction entre le moment
angulaire orbital et le champ magnétique comme nous allons le voir:

Effectivement, nous avons:

(43.258)

Démonstration:

(43.259)

Nous avons alors dans l'équation de Pauli:

1
(43.260)

Or, rappelons que nous avons vu dans le chapitre de Calcul Vectoriel que:

(43.261)

Cela nous donne donc:

(43.262)

où:

(43.263)

noté aussi (cf. chapitre de Mécanique Classique/Physique Quantique Corpusculaire) est


donc un opérateur représentant le moment cinétique.

Nous avons donc:

(43.264)

En faisant comme l'avait Dirac en définissant l'opérateur spin comme étant la matrice (oh! on
retrouve quelque chose de connu et vu dans le chapitre de Physique Quantique Ondulatoire!!
c'est magnifique non?):

(43.265)

Cette relation nous sera très utile dans le chapitre d'Informatique Quantique. Indiquons la
notation suivante courante (logique) dans la littérature pour le moment magnétique
intrinsèque:

(43.266)

L'équation de Pauli s'écrit alors:

(43.267)

ou encore:

(43.268)

ou encore en plus condensé en faisant bien attention à bien différencier ce qui est un opérateur,
d'un vecteur et ce qui est un produit d'un produit scalaire et ce qui est une fonction d'un
spineur... (que du bonheur...) et en posant:

(43.269)

comme étant le "facteur de Landé" ou "facteur gyromagnétique", nous avons: 1


(43.270)

avec étant donc le "moment magnétique orbital" (en comparant avec l'expression du
moment magnétique démontré dans le chapitre de Magnétostatique vous verrez qu'il a
effectivement la même forme et aussi les mêmes unités), le "moment magnétique de spin".

On retrouve parfois l'expression entre parenthèses dans la relation ci-dessus notée de la


manière suivante:

(43.271)

Avec tout cela le terme de Stern-Gerlach (moment magnétique) devient donc explicitement:

(43.272)

En se rappelant que:

(43.273)

est le magnéton de Bohr que nous avions introduit rigoureusement dans le chapitre de
Physique Quantique Corpusculaire, nous avons alors avec cette notation:

(43.274)

Chose intéressante... le neutron a (observation expérimentale) un moment magnétique de spin


non nul et pourtant sa charge est nulle... donc il doit être consituté de particules chargées (si
l'on reste dans le cadre d'un modèle d'explication de la nature par des particules...). Il est
intéressant de savoir que dans la pratique nous avons pour l'électron, le proton et le neutron:

(43.275)

et les valeurs suivantes ont été mesurées pour les particules de spin 1/2 telles que l'électron, le
proton et le neutron (attention le signe peut changer suivant la manière dont est notée
l'équation de Dirac!):

(43.276)

Donc la théorie de Dirac dans le cadre non relativiste prédit en bonne approximation que les
particules élémentaire de spin 1/2 ont un facteur gyromagnétique de 2, et cette prédiction
conforme à l'expérience pour l'électron est le plus grand triomphe de l'équation de Dirac. Les
déviations de la valeur théorique (déviations conséquentes!) pour le proton et le neutron sont
parfaitement expliquées dans le cadre de l'électrodynamique quantique. Ces déviations
montrent que la structure du proton et celle du neutron sont plus complexes (composition de
sous-particules) qu'une particule ponctuelle de spin 1/2 alors que dans le cas de l'électron, il
semblerait qu'il n'y ait pas de sous-structure.

1
Remarque: Le facteur gyromagnétique est pris parfois comme étant négatif mais ce n'est
qu'une question de convention.

C'est par ailleurs le terme d'interaction entre le champ magnétique et l'addition du moment
cinétique orbital et intrinsèque de spin:

(43.277)

de l'hamiltonien de Pauli qui donne les valeurs mesurées par l'effet Zeeman! Raison pour
laquelle cette expression est appelée parfois "énergie de Zeeman" et notée parfois sous la
forme d'opérateur d'Hamiltonien:

(43.278)

Nous savons que cette dernière relation peut aussi s'écrire pour toute particule seule (cf.
chapitre de Physique Quantique Ondulatoire) plongé dans un champ magnétique colinéaire à
l'axe Z et nul dans les autres directions:

(43.279)

où est le"rapport gyromagnétique" et le "magnéton de Bohr" (et nous avions vu lors de


la démonstration de cette relation que le magnéton de Bohr n'est qu'un cas particulier avec le
facteur g de Landé égal à celui de l'électron).

Intéressons-nous maintenant seulement à la plus petite variation d'énergie entre deux états du
moment cinétique orbital (puisque le plus petit pas de varation est de 1 de par la quantification
de l). Il sera alors toujours à spin égal de la forme:

(43.280)

Cette variation d'énergie sera restituée sous forme d'ondes électromagnétiques correspondant à:

(43.281)

d'où:

(43.282)

qui est la "relation de Larmor" (à ne pas confondre avec le "rayon de Larmor" vu dans le
chapitre de Magnétostatique). Mais dans la pratique nous utilisons surtout la relation:

(43.283)

qui donne ce que nous appelons la "fréquence de résonance" du moment cinétique orbital.

De même, en procédant pour le moment cinétique intrinsèque, nous obtenons à moment


cinétique orbital constant (lors du transition de spin de +1/2 à -1/2 ou inversement):

(43.284)

et en reposant il vient:
1
(43.285)

d'où:

(43.286)

et évidemment:

(43.287)

Cette dernière étude de variation d'énergie due à l'application d'un champ magnétique et les
fréquences d'émission d'énergie qui s'en suivent est à la base de la résonance magnétique
nucléaire (RMN) qui ne marche donc que pour les particules possédant le moment magnétique
de spin (par construction de l'hamiltonien de Pauli!).

La RMN consiste à modifier le moment magnétique nucléaire, autrement dit à faire passer le
noyau d'un niveau d'énergie à un autre, en appliquant des champs magnétiques à l'échantillon
qu'on veut étudier. Lorsque l'énergie des photons qui constituent ces champs magnétiques
correspond à l'énergie de transition d'un niveau d'énergie à l'autre, ces photons peuvent être
absorbés par le noyau: nous disons alors qu'il y a "résonance nucléaire".

Nous pouvons caractériser l'énergie de transition du moment magnétique de spin nucléaire en


donnant la fréquence de l'onde électromagnétique qui permet la résonance. Pour les champs
usuels (de l'ordre du tesla), la résonance du proton a lieu dans le domaine des ondes radio (100
[MHz] environ): 42 [MHz] dans un champ de 1.0 [T] et 63 [MHz] dans un champ de 1.5 [T].

Signalons au passage que dans certains ouvrages, puisque nous avons:

(43.288)

alors pour une particule avec que deux états de spin possible l'énergie de chacun des niveau est
alors évidemment la moitié de la différence ci-dessus, ce qui est souvent noté:

(43.289)

- Quantum Field Theory, A. Lahiri + P. B. Pal, Éditions CRC Press, ISBN-10: 0849309778
(380 pages) - Imprimé en 2005

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