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Sciences de Gestion, n° 64, p.

43 à 58

De la valeur client à la valeur amont - management de


l’exploration et analyse de valeur

Gilles Garel
Professeur des Universités
Université Paris Est, OEP Prism, Paris
(France)

Rodolphe Rosier
Algoé, Paris
(France)

Cet article s’intéresse à la détermination de la valeur dans les


processus d’exploration. Comment valoriser ce qui n’existe pas
encore ? Comment déterminer la valeur en amont des filières et des
marchés ? La première partie souligne les limites des approches de la
valeur client pour répondre à la problématique de l’exploration tandis
que la seconde s’attache à définir un nouveau cadre de la « valeur
amont ». L’enjeu de l’exploration de la valeur est la transformation
des conditions d’activité de destinataires afin de produire de
nouveaux « effets utiles » pour ces destinataires.

Mots-clés : Valeur, exploration, innovation, client, service.

This paper focuses on the definition of value in an exploration


process. How assess value during upstream stages of products
development? The first part underlines the limitations of « customer
value » approaches to address the issue of exploration, while the
second part will establish a new framework for « upstream value ».
The challenge for value exploration is the transformation of activity of
users to produce new « useful effects » for them.

Keywords: Value, exploration, innovation, customer, service.


44 Gilles GAREL & Rodolphe ROSIER

El presente artículo se interesa por la determinación del valor en


los procesos de exploración. ¿Cómo se puede valorar lo que aún no
existe?; ¿Cómo determinar el valor más arriba de los sectores y de
los mercados? La primera parte del artículo destaca los límites de los
enfoques del valor cliente para responder a la problemática de la
exploración mientras que el segundo intenta definir un muevo marco
del « valor más arriba ». El interés de la exploración del valor es la
transformación de las condiciones de actividad de los destinatarios
con objeto de producir nuevos « efectos útiles” para dichos
destinatarios.

Palabras claves: Valor, exploración, innovación, cliente, servicio.

Dans le langage courant, l’exploration est généralement définie


comme la révélation au monde d’une réalité cachée ou inaccessible.
Cette définition, positiviste, sous entend que la réalité préexiste à
l’exploration et qu’elle sera révélée ex post. Dans notre conception
explorer, c’est produire, rassembler, un ensemble de connaissances, de
concepts sur un sujet mal délimité (une nouvelle architecture, un
problème mal posé, une idée originale…) afin d’orienter l’action d’un
collectif. Explorer c’est défricher des domaines méconnus, c’est
acquérir, construire des expertises, sur des questions ou des champs
pour lesquels on était précédemment démuni. En exploration, on ne
sait pas exactement ce que l’on cherche, puisque l’objet même de
l’exploration est de le définir. Il s’agit d’élaborer des modèles des
phénomènes observés, de faire la théorie de savoir-faire tacites. En
exploration, il ne s’agit pas de converger « vers » un objectif ou de
réaliser « pour » un client, mais d’explorer pour des résultats
intermédiaires et provisoires (nouvelles connaissances, nouveaux
concepts, « demi-produits » - Weil, 1999) bifurquant, le cas échéant,
vers de nouvelles explorations. L’exploration est donc une activité
incertaine, marquée par les surprises et les réorientations. Toutes les
publications utilisant le terme « exploration » font référence au texte
fondateur de James G. March (1991). March, explorateur des idées
déviantes en management, a défini l’exploration, qui expérimente tous
azimuts des alternatives nouvelles et incertaines, en tension avec
l’exploitation, qui perfectionne et étend les compétences, les
technologies et les procédures existantes. Selon lui l’exploration est
« la recherche de nouvelles idées, de nouveaux marchés, de nouvelles
relations ». Elle « inclut des choses comprises dans les termes tels que
VALEUR CLIENT/VALEUR AMONT : EXPLORATION - ANALYSE 45

recherche, variation, prise de risques, expérimentation, jeu, flexibilité,


découverte, innovation » (op. cit.).
Des enjeux forts conduisent les firmes à explorer. Après les
stratégies de chrono-compétition, de time-pacing (Brown et
Eisenhardt, 1997) ou de réactivité (Cohendet et alii, 1992), les
stratégies d’innovation continue (Verona et Ravasi, 2003), d’inno-
vation intensive (Chapel, 1997 ; Lenfle et Midler, 2003) ou encore
d’innovation en rafale (Deschamps et Nayak, 1997), toutes fondées
sur des renouvellements accélérés et variés des offres, les années 2000
ont vu l’émergence de nouvelles formes de compétition par
l’innovation. Les stratégies de variété et d’obsolescence des gammes
ont progressivement cédé la place à des stratégies visant le
renouvellement même de l’identité des produits ; la compétition se
déplaçant du paramétrique à l’identitaire. Les critères de performance
paramétriques sont bien connus : plus rapide, plus varié, moins cher,
plus petit, plus sûr… Ici, les modèles d’affaire sont donnés, les
dominant designs stables (Abernathy et Utterback, 1978) et les
compétences nécessaires à leur réalisation connue. Or, dans de
nombreux secteurs industriels, l’identité des objets est devenue
incertaine. Sous la pression de technologies diffusantes et évolutives,
des nouvelles valeurs sociales, des nouvelles régulations, des règles
financières et des compétiteurs low cost l’identité des objets est sans
cesse révisée. Les accessoires de la nouvelle mobilité illustrent bien
cette instabilité identitaire. Après le téléphone et le mobile,
l’informatique a colonisé les appareils photos qui ont envahi à leur
tour les téléphones mobiles. Si la montre existe comme objet nomade
depuis le XVème siècle, elle n’est devenue une bibliothèque
ambulante que très récemment. Quelle est aujourd’hui la fonction
d’une montre, d’un téléphone mobile, d’un téléviseur ? Où est la
frontière entre un aliment et un médicament ? Un journal gratuit est-il
encore un journal ? etc. L’innovation intensive provoque des crises
récurrentes de l’identité des biens et des services dans de nombreux
secteurs d’activité (Le Masson et alii, 2006). Comment, dans ces
conditions, penser des fonctions sans connaître a priori les techniques
existantes ? Comment concevoir lorsque les connaissances et l’identité
des produits connaissent des évolutions déroutantes et nouvelles ?
Comment imaginer des usages quand les conditions d’utilisation et les
utilisateurs n’existent pas encore ? Comment innover quand on ne sait
plus ce qu’on doit inventer ? En exploration, il ne s’agit pas ou plus
d’aller plus vite, de faire plus varié, mais d’aller ailleurs. L’explo-
ration déporte, déconnecte de ce qui est connu, cru et reconnu, brouille
les routines et les repères des organisations et de leurs acteurs. C’est
l’activité d’exploration en train de se faire que nous privilégions ici
plutôt qu’une rationalisation a posteriori.
46 Gilles GAREL & Rodolphe ROSIER

Cet article s’intéresse à l’analyse de la valeur (sans référence


aucune à méthodologie du même nom) ou à la détermination de la
valeur dans les processus d’exploration. Comment penser la valeur
sans clients ? Comment valoriser ce qui n’existe pas encore ?
Comment déterminer la valeur en amont des filières et des marchés ?
La première partie montrera les intérêts et les limites des approches
traditionnelles de la valeur pour répondre à la problématique de
l’exploration. La seconde s’attachera à définir un nouveau cadre de la
« valeur amont ».

1. – La prégnance de la valeur client

Le marketing et les courants stratégiques, de Porter à ceux qui


étudient la conception d’offres innovantes, empruntent beaucoup à la
« valeur client ».

1.1. La valeur client au fondement du marketing et de la stratégie

Du marketing concept au marketing mix, le client est la source de


la valeur : « consumer value is the difference between the benefits
customers get from owning and using a product and the costs
associated with acquiring a product » (Kotler et Gary, 1997). Porter
(1985), bien sûr, explique que « dans le cadre d’une stratégie de
différenciation, la valeur est ce que les clients sont prêts à payer, et
une valeur supérieure s’obtient, soit en pratiquant des prix inférieurs
à ceux des concurrents pour des avantages équivalents, soit en
fournissant des avantages uniques qui font plus que compenser des
prix plus élevés ». La valeur client repose sur deux hypothèses. D’une
part, le produit ou le service est conçu avec des fonctions précises qui
produisent des effets évaluables lors de l’usage. Autrement dit, le
client peut traduire instantanément les fonctions en avantages et son
activité reste inchangée pendant l’utilisation du produit. D’autre part,
la valeur est produite par l’interaction entre le produit et le client, sans
impliquer d’autres acteurs dans ce processus. Ces hypothèses nous
conduisent à formuler un cadre analytique et métaphorique : la valeur
client correspond à la règle des trois unités du théâtre classique.

- L’unité de lieu correspond au cadre dans lequel la valeur est


déterminée : il s’agit du contexte de l’activité du client. Ici, la
valeur est associée à un usage en vue de réaliser une tâche ou
une activité ; l’activité reste stable, ses finalités sont les
mêmes au début et à la fin de l’utilisation, et la valeur est
attachée au produit / service.
VALEUR CLIENT/VALEUR AMONT : EXPLORATION - ANALYSE 47

- L’unité de temps correspond au laps de temps qu’il faut à la


valeur pour être déterminée. La valeur se révèle instan-
tanément lors de l’usage du produit.

- L’unité d’action correspond à la finalité de la valeur, celle


d’être utile à l’activité du client. Les fonctionnalités du
produit sont connues et explicites au regard de l’utilité.

Les démarches d’exploration font éclater cette règle des trois


unités. L’unité de lieu et de temps éclatent : l’activité devient instable
et se transforme ; il y a pour le « client », ou plutôt le destinataire de la
conception, de nouvelles possibilités d’action ouvertes au fur et à
mesure du processus d’exploration. La valeur n’est plus seulement
centrée sur le produit ; elle est co-produite dans l’interaction entre les
destinataires et les concepteurs. Enfin, l’unité d’action n’est pas
garantie car les technologies explorées (par exemple) ont des identités
protéiformes et des fonctions non identifiables ex ante. La valeur ne
peut donc pas être inférée immédiatement lors des premières
situations d’utilisation. Les utilisateurs et les concepteurs devront,
chemin faisant, effectuer un travail de re-conception des fonctions et
des usages. En exploration, la valeur sera plurielle, passant par des
formulations et des degrés différents, au gré des situations qui
permettront de la déterminer.

1.2. Valeur et marketing des innovations technologiques

Le marketing des innovations technologiques constitue un cadre


pertinent pour penser la valeur amont (Miller, 2003). Ici, l’innovation
est suscitée par une démarche de créativité qui engendre des
applications potentielles, puis elle est organisée et orientée par
l’attaque graduelle de segments de marchés avec une optique
prudentielle (l’objectif est de minimiser les risques tant commerciaux
que techniques). La démarche d’exploration des marchés repose sur
deux étapes : la segmentation technico-comportementale et le
diagnostic des segments. La segmentation technico-comportementale
identifie des critères permettant de regrouper les clients selon les
caractéristiques techniques des produits qu’ils attendent et selon leurs
comportements d’achat. Les segments sont ensuite diagnostiqués
selon les risques techniques et économiques associés. A l’issue de
cette phase, les segments sont hiérarchisés et positionnés sur un
graphique qui permet de définir un plan d’action global tenant compte
des synergies techniques, industrielles et commerciales. Autrement
dit, à partir de l’identification de premières applications, les équipes
innovantes diagnostiquent chaque segment potentiel puis définissent
48 Gilles GAREL & Rodolphe ROSIER

un plan de ciblage progressif de ces segments en fonction de leur


difficulté d’atteinte et de leur intérêt commercial. Les premiers
contacts avec des utilisateurs peuvent s’avérer catastrophiques (Millier
donne l’exemple d’une fibre de verre innovante qui, à l’usage, coupe
les mains des ouvriers), pour autant ils ne remettent pas en cause
l’intérêt de la nouvelle technologie. Ils attirent l’attention sur le
contexte de sa mise en œuvre. Plutôt que de viser d’emblée les
marchés à gros volumes où l’on risque de ne pas se remettre
facilement d’un échec, ces travaux préconisent de privilégier des
clients professionnels aux logiques techniques pour lesquels les
performances priment sur les autres variables, comme le prix, et qui
sont prêts à contribuer au développement du produit en « essuyant les
plâtres ». La valeur se révèle ainsi, en co-construisant les connais-
sances techniques et les connaissances sur l’environnement.

Pour riche et séduisante qu’elle paraisse, cette approche présente


quelques limites. Nous en retiendrons deux.

1 - Concernant la valeur des idées engendrées. Les idées sont retenues


en fonction des avantages et des bénéfices reconnus par les
innovateurs ou les clients interrogés ; il n’y a donc que peu de place
pour les concepts innovants, c’est-à-dire des propositions d’activité
qui ne correspondent pas encore à des activités ou qui ne sont pas
encore assez mûres pour être évaluées comme produisant des
avantages. Sur ce point, le courant reste prisonnier d’une conception
de la « valeur client » (qu’il revendique d’ailleurs), même si cette
valeur évolue en fonction des connaissances techniques.

2 - Concernant le processus de segmentation / régénération : la


segmentation fige les groupes d’utilisateurs dans des activités et des
comportements qui n’évoluent que peu avec l’étape de régénération
(très peu décrite d’ailleurs). Que se passe-t-il si l’on découvre de
nouveaux bénéfices ou s’il y a transformation de l’activité ? Les
méthodes de segmentation, habituellement utilisées pour partitionner
en groupes homogènes, semblent peu pertinentes à un stade
exploratoire où les comportements des utilisateurs potentiels ne sont
pas stabilisés et où les usages sont encore indécis. Les méthodes de
segmentation employées masquent un potentiel de pistes inexplorées
en rigidifiant les contextes d’activité étudiés.

1.3. La valeur des espaces de marchés hors des frontières


habituelles

Des travaux en stratégie ont contribué à enrichir la réflexion sur


l’exploration de nouvelles valeurs sur des espaces de marché vierges.
VALEUR CLIENT/VALEUR AMONT : EXPLORATION - ANALYSE 49

1.3.1. La création de nouveaux espaces de marchés pour échapper à


l’hyper-concurrence

La « valeur innovation » (Kim et Mauborgne 1999, 2005) veut


incarner un renouveau dans l’approche des stratégies de concurrence
dominée par les « océans rouges » de l’hyper-compétition (D’Aveni,
1994). Kim et Mauborgne étudient de nouveaux espaces de marchés
en rupture avec les marchés établis ; ils les qualifient « d’océans
bleus ». Le ciblage des non-consommateurs est privilégié à
l’innovation sur des marchés établis car les entreprises leaders sont
dotées d’atouts importants (portefeuille-clients, réseau de
distributeurs, image de marque) pour la riposte. Les espaces de non-
consommation sont doublement intéressants : inexploités, ils
renferment des potentiels de croissance ; non identifiés ou non
valorisés par les leaders, ils sont des marchés idéaux pour le
développement et l’apprentissage. Kim et Mauborgne distinguent trois
sous-groupes (cf. Figure 1):
Figure 1 – Les trois sous-groupes de non-consommateurs (d’après Kim et
Mauborgne, 2005, p. 122)

Non-
consommateurs
Marché Non- « Refusants »
existant consommateurs
« Prêts à le Non
devenir » consommateurs
« inexplorés »

1) les non-consommateurs « prêts à le devenir » : sont prêts à devenir


des clients sous conditions de quelques modifications de l’offre ;

2) les non-consommateurs « refusants » ne sont pas satisfaits par les


offres établies, ce qui impose d’innover pour les attirer ;

3) les non-consommateurs « inexplorés ».


50 Gilles GAREL & Rodolphe ROSIER

Kim et Mauborgne construisent des « courbes de valeur » au


niveau d’une filière ou d’un secteur d’industrie. En fait, ils revisitent
les composants de la chaîne de valeur en mettant l’accent sur le
déplacement des standards de la compétition et sur l’invention de
nouveaux modèles d’affaires. Autrement dit, les auteurs expliquent
moins un mécanisme de création de nouvelles valeurs qu’un
mécanisme de différenciation par rapport à des modèles d’affaires
déjà existants. Lorsqu’il s’agit d’identifier, en amont du marché, les
composantes de la valeur pour une technologie innovante donnée, ils
reviennent à la traditionnelle notion d’« utilité » comme critère sine
qua none de l’acceptation de la technologie. Ainsi, attribuent-ils les
échecs du CD-I de Philips ou du téléphone satellite Iridium de
Motorola à l’insuffisante prise en compte du critère d’utilité couplée à
des prix de lancement trop élevés. Pourtant, ces produits ne furent pas
des échecs et connurent même un succès retentissant… mais
seulement auprès de destinataires différents des consommateurs
initialement ciblés. L’Iridium connu un développement sans précédent
(alors même que le GSM était en plein essor) lorsque l’équipe
dirigeante recentra le produit sur des utilisateurs dont l’activité
reposait sur la capacité à passer des communications critiques
n’importe où dans le monde : les militaires, les navigateurs, les
humanitaires... La valeur du produit résidait dans la possibilité de
sauver des vies ou de transmettre des informations à très haute valeur
ajoutée. Les clients étaient prêts à payer cinq à dix fois le prix d’une
communication GSM pour atteindre ces finalités. En 2006, Iridium
était reconnu comme le leader mondial du téléphone satellitaire, après
avoir connu une faillite en 1999 parce qu’il avait défini ses utilisateurs
comme « monsieur tout-le-monde », marquant ainsi l’échec d’une
stratégie de substitution qui détermine la valeur de l’offre nouvelle en
décalquant la performance de l’offre établie.
La notion d’utilité mobilisée par Kim et Mauborgne (d’ailleurs nul
part définie) ne suffit à expliquer seule l’échec ou le succès
d’innovations technologiques. Elle occulte le mécanisme de
construction de la valeur. L’Iridium aurait-il pu, avec d’autres clés
d’analyse, éviter l’échec de son lancement qui conduisit l’entreprise à
la faillite en 1999 ? Les managers auraient-il pu anticiper la trajectoire
qui a démarré avec les applications militaires, puis s’est élargie aux
applications civiles à haute criticité, avant de proposer, une fois le
coût de la technologie abordable, des forfaits aux particuliers
nomades ?

Finalement, ces travaux oscillent entre :


- d’un côté, la relecture réussie de cas de création d’océans
bleus : l’exemple du Cirque du Soleil ou de J.C. Decaux sont
VALEUR CLIENT/VALEUR AMONT : EXPLORATION - ANALYSE 51

alors exemplaires ; les « courbes de valeur » expliquent bien


les transformations qualitatives de la valeur ; le Cirque du
Soleil réinvente le cirque en se démarquant de l’offre
traditionnelle ; en mêlant ballets, intrigue théâtrale et
politique tarifaire, il attire de nouveaux consommateurs et des
consommateurs qui avaient délaissé les chapiteaux ;
- de l’autre, une théorisation peu convaincante des stratégies
d’innovation pour des offres innovantes : le cadre d’analyse
explique mal par exemple comment créer de nouvelles
valeurs à partir de technologies à haut potentiel indépen-
damment d’un référence à un espace stratégique existant.

1.3.2. Le ciblage des non-consommateurs dans le cas de technologies


disruptives

Christensen (1997) analyse les dynamiques de création de


nouveaux marchés pour des innovations technologiques. Il s’intéresse
aux logiques d’introduction sur le marché des innovations en termes
de gain de performance par rapport à l’existant. Christensen
différencie deux démarches. D’un côté, certaines innovations ciblent
uniquement des améliorations de performance pour des applications
déjà existantes. Christensen les qualifie de « sustaining innovations »,
que les améliorations de performances soient incrémentales ou
radicales (Tushman et Anderson, 1986). D’autres innovations visent la
création de nouveaux marchés, en changeant les dominant designs
établis, en suscitant de nouveaux comportements, de nouveaux.
Christensen parle alors de « disruptive innovations » car elles
proposent de réaliser des « activités que l’on ne pouvait pas faire
auparavant » (Christensen et Raynor, 1999). Autrement dit, les
innovations de soutien améliorent l’existant là où les innovations de
rupture transforment les règles du jeu en changeant le dominant design
des produits. La technologie innovante ne doit pas essayer de battre
les technologies établies sur les marchés existants où elle risque d’être
perçue par les clients comme sous-performante. En revanche, elle doit
cibler des clients qui recherchent des solutions simples, bon marché,
pour accomplir des tâches. La technologie qui permet d’innover peut
être très sophistiquée, mais son usage doit être simple, aisé, et intuitif.
Christensen préconise, lui aussi, des trajectoires prudentielles
ciblant graduellement des groupes d’utilisateurs traditionnellement
délaissés par les leaders afin de fiabiliser la technologie sans éveiller
l’attention des entreprises établies. Il s’agit bien de rester à couvert des
grandes entreprises leaders, sur des espaces de marchés où elles ne
percevront pas ex ante la pénétration comme une menace. L’objectif
est de créer un réseau de valeur complètement différent de celui que
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maîtrisent les leaders, pour des clients qui ne sont pas ou plus
satisfaits par les offres du marché. La stratégie disruptive, souvent
maladroitement traduite par « innovation de rupture », est bien une
stratégie de contournement des marchés établis via le ciblage de la
non-consommation. Jusque-là, le cadre théorique dominant de la
différenciation selon Porter ne faisait pas la distinction entre nouveaux
entrants, porteurs de technologies innovantes, et les autres acteurs, ni
ne concevait la différenciation comme une stratégie spécifique en
plusieurs coups. En revanche, la construction de la valeur via les
« tâches qui doivent être accomplies » est peu consistante.
Rétrospectivement, il est facile d’analyser le succès du premier
modèle de poste de radio portable lancé par Sony dans les années
1950 en expliquant que les adolescents étaient une cible de marché
idéal, cherchant à s’émanciper de leurs parents pour écouter leur
musique en dehors du foyer familial. Le modèle de Christensen
n’explique pas pourquoi Sony n’a pas ciblé d’autres catégories de
personnes, de surcroît solvables, cherchant elles-aussi à écouter la
radio en dehors d’un lieu fixe : les camionneurs, les VRP, les
randonneurs, ou les motards…. De même, le succès de la téléphonie
mobile se verrait expliqué rétrospectivement par l’existence de
besoins latents en communication… offrant ainsi une vision édulcorée
des étapes successives qui, pour le téléphone mobile, ont permis de
passer d’un concept de radiotéléphone utilisé dans les véhicules
d’urgences dans les années 1960 au premier prototype sorti par
Motorola en 1973, pesant 2 kg, puis, dans un second temps à un
téléphone pesant 800 gr. et coûtant 4000 dollars (en 1983), pour enfin
nous conduire aux téléphones que nous connaissons actuellement.
L’application des analyses de Christensen pour prédire les
innovations disruptives des prochaines années semble être limitée à
une analyse filière par filière. Le secteur médical, les transports
aériens ou l’enseignement supérieur sont ainsi étudiés (Christensen et
alii, 2005). Christensen ne donne aucune projection transversale à
plusieurs secteurs ou filières rendant, par là même, bien moins
féconde la notion de « valeur réseau ». On doute alors que son cadre
théorique de construction de la valeur soit applicable à des
technologies en quête d’usages pour des filières non encore
identifiées.

2. – Un cadre théorique de la valeur amont

Le marketing expérientiel et les récents travaux sur la conception


de nouveaux services constituent un cadre théorique de départ
pertinent pour penser la valeur amont.
VALEUR CLIENT/VALEUR AMONT : EXPLORATION - ANALYSE 53

2.1. La valeur de lien ou la valeur de l’expérience

Le marketing post-moderne a fait émerger la « valeur de lien » par


opposition à la valeur de bien. « La valeur de lien d’un produit ou
d’un service est ce que vaut ce bien ou ce service dans la construction
ou le renforcement, même éphémère, des liens entre personnes,
présentes ou passées, réelles ou imaginaires » (Badot et Cova, 2003).
La valeur de lien est construite non pas sur le produit, mais
s’expérimente dans l’interaction avec les autres. Elle n’est pas
construite sur la base de bénéfices a priori ou d’une utilité pré-définie
mais elle est co-construite dans l’échange. Ce n’est pas seulement le
vin de telle marque qui est consommé, mais le vin bu avec tels amis,
dans tel contexte, qui donne sa valeur au produit. La valeur de lien
implique « une expérience d’appropriation [qui] se caractérise par des
processus de découverte, des errements, des conduites de repérage que
manifeste le consommateur pour trouver des points d’ancrage dans sa
consommation » (Cova et Cova, 2001, p. 143). La valeur de lien exige
donc du temps pour être appréciée : c’est le temps nécessaire pour
construire le lien avec les autres acteurs de la situation, le temps de la
ré-appropriation par le collectif de l’expérience vécue ou encore temps
sacrifié pour une passion avec d’autres membres de sa communauté.
La valeur de lien constitue une reformulation complète de la règle des
trois unités (cf. Tableau 1).

Tableau 1 – Comparaison entre « valeur client » et « valeur de lien »

Valeur client Valeur de lien

Interaction entre consommateurs


Activité du client –
Unité de lieu impliquant un produit ; « le lien
valeur centrée sur le
(contexte) importe plus que le bien » (Cova,
produit
2000)
La construction de la valeur
Valeur déterminée
Unité de temps demande du temps pour construire
instantanément
le lien

Unité d’action
Utilité pré-définie Utilité co-construite dans l’échange
(finalité)

La notion de production de la valeur par l’interaction collective est


également présent dans le courant du marketing expérientiel
(Holbrook et Hirchman, 1982 ; Carù et Cova, 2006) pour lequel le
consommateur achète des produits ou des services moins pour leur
attributs fonctionnels que pour les expériences émotionnelles qu’ils
autorisent. L’expérience désigne alors à la fois le cadre de la
54 Gilles GAREL & Rodolphe ROSIER

consommation (le contexte de l’achat) et la finalité de celle-ci. Elle


dépasse l’usage de fonctionnalités d’un produit, pour devenir un mode
d’accès à de nouveaux effets pour le consommateur. La littérature sur
les services a précisément défini la valeur en termes de conséquences
pour le destinataire du service, en termes d’effets utiles pour lui.

2.2. De la valeur de service à la valeur amont

La production de service transforme les conditions d’activité du


destinataire qui, dans le même temps, évalue les effets de cette
transformation (Bancel-Charensol et Jougleux, 1997). Dans un
processus d’exploration, la valorisation ne s’appuie pas sur une
connaissance de la valeur client, mais procède d’une reformulation des
conditions de l’activité des utilisateurs potentiels. Nous dirons que
l’enjeu de l’exploration de la valeur est la transformation des
conditions d’activité de destinataires dont la finalité est de « produire
de nouveaux effets utiles pour ces destinataires » (Gadrey et Zarifian,
2002). On appellera donc « effets-utiles », les effets des trans-
formations d’une offre innovante sur les conditions d’activité des
destinataires.
Imaginons un concept d’aspirateur ultra-silencieux vendu à un prix
supérieur à la concurrence. Si l’on raisonne en termes de valeur client
et qu’on organise en amont des séries de démonstrations avec des
utilisateurs potentiels, on obtiendra une évaluation des avantages
directs assez moyenne au regard du surcoût ; après-tout, les
utilisateurs passent l’aspirateur à des moments de la semaine où le
bruit ne les dérange pas, ni ne dérange leur entourage. Dans des
enquêtes comparatives, les utilisateurs évaluent à « iso-activité » en
comparant les fonctionnalités des produits ou des services. En
revanche, un raisonnement en termes d’effets-utiles conduirait ces
mêmes utilisateurs à interroger les transformations potentielles dans
leurs activités et à considérer un nouvel éventail des possibles. Le
produit pourrait alors être vu comme un nouveau moyen :
- de passer l’aspirateur pendant les siestes sans réveiller
l’enfant quand on est un jeune couple ;
- de ne pas troubler le repos de personnes âgées dans une
maison de retraite ;
- de nettoyer son appartement en semaine le soir à 23 heures de
manière à libérer du temps pour le week-end ;
- de faire le ménage en écoutant de la musique ou en suivant
une émission de radio.

Formuler ces effets-utiles et les faire évaluer aux futurs utilisateurs


est un changement de perspective. Il ne s’agit pas tant de suggérer de
VALEUR CLIENT/VALEUR AMONT : EXPLORATION - ANALYSE 55

nouveaux usages clés en main que de donner à ressentir un potentiel


de transformation des activités. Nous avons appliqué cette définition
de la valeur dans le cadre d’une recherche longitudinale chez Axane,
filiale du groupe Air Liquide qui explore des applications
commerciales de la technologie pile à combustible (PAC). Les
premiers prototypes de PAC réalisés par Axane sont de petites
puissances et s’apparentent à des groupes électrogènes non-polluant,
alimentés par des bouteilles d’hydrogène gazeux. Les premiers
utilisateurs interrogés sont des utilisateurs professionnels de groupes
électrogènes : les pompiers et les travailleurs du BTP (Rosier, 2007).
Au départ, ils ne considèrent le nouveau générateur qu’au regard de
leurs activités habituelles, le jugeant plus fragile et n’éprouvant
aucune nécessité (aucun « besoin » remontent les études marketing)
d’avoir un groupe non-polluant. Les sites d’opération sont en plein air
la plupart du temps et les utilisateurs considèrent que la réduction du
niveau sonore de leurs groupes électrogènes est plus importante que
de ne pas polluer. Pourtant, au fil des entretiens et des expéri-
mentations, il ressort principalement deux effets-utiles.

1) La PAC permet de travailler sans être asphyxié dans des lieux


confinés (tunnels ou caves, grottes, bâtiments confinés), là où
aujourd’hui il faut tirer des longs câbles qui entravent les
déplacements de ces professionnels ; le nouveau générateur peut être
alors considéré comme un moyen pour accroître la mobilité et la
capacité d’intervention dans des lieux très contraignants jusque là.

2) Le générateur a aussi été perçu comme une « énergie


d’intermodalité », c’est-à-dire une énergie capable d’accompagner des
déplacements mixtes entre des lieux en extérieur et des lieux
confinés ; par exemple, certains équipements, comme des couveuses
ou des glacières transportant des organes, ne doivent pas connaître de
rupture d’alimentation électrique, et ce, quels que soient les
environnements traversés. Le générateur chargé d’alimenter ces
équipements critiques pourrait alors être une énergie dédiée et
intermodale : transport en ambulance, transport en extérieur, attente
dans les couloirs d’un hôpital…

L’équipe d’Axane met au jour de nouvelles possibilités d’action là


où les pompiers et le BTP avaient a priori définitivement refermé un
problème, par nature insolvable, avec les technologies établies.
Explorer implique donc de multiplier les itérations et les expériences
in situ avec des utilisateurs potentiels, notamment sur la base de
prototypes démontrant un savoir-faire technique et révélant un design
(ici des PAC prototypées ad hoc ont été mises à disposition des
56 Gilles GAREL & Rodolphe ROSIER

utilisateurs) et d’intégrer les bifurcations les plus radicales comme


principe de management. Comme avec l’aspirateur, le raisonnement
par les effets-utiles fait émerger de nouvelles valeurs au-delà des
fonctionnalités ciblées par les concepteurs initialement : de générateur
électrique non-polluant, on passe à des concepts comme « énergie
d’intervention dans des lieux confinés » ou « énergie d’intermo-
dalité ». Au final, les concepts et les connaissances attachés à ces
effets utiles ont permis à Axane de concevoir et de réaliser des
applications pour… d’autres secteurs, totalement différents, comme
l’alimentation de relais de téléphonie mobile ou les studios de cinéma
pour les tournages en plein air.

Conclusion

La valeur d’une offre explorée n’est pas contenue dans les attributs
de la technologie comme chez Christensen ou Kim et Mauborgne,
mais se révèle à condition que les innovateurs fassent émerger des
transformations dans les activités des destinataires. La « valeur
amont » s’oppose à la « valeur client » (cf. Tableau 2).

Tableau 2 – Comparaison entre les notions de « valeur client »


et de « valeur amont »

Valeur client Valeur amont

Activité du client –
Unité de lieu Conditions d’activité transformées –
valeur centrée sur le
(contexte) nouveaux potentiels d’action
produit

Valeur évaluée La construction de la valeur nécessite un


Unité de temps
instantanément temps d’appropriation
Création de nouveaux effets-utiles pour
Unité d’action
Utilité pré-définie les utilisateurs actuels ou pour de
(finalité)
nouveaux destinataires

Cet article pose les bases d’une analyse renouvelée de la valeur en


amont du marché. Pour poursuivre cette analyse, il faudra d’abord
mieux fonder la notion d’exploration. Il s’agira aussi de préciser le
rôle des concepts dans le processus de formulation de la valeur (ils
synthétisent les propositions contenues dans les effets-utiles) et de
reboucler alors sur le raisonnement C-K de conception innovante en
intégrant la valeur dans « l’espace des connaissances » (Le Masson et
VALEUR CLIENT/VALEUR AMONT : EXPLORATION - ANALYSE 57

alii, 2006). Enfin, la valeur amont ne peut s’exonérer d’une définition


de la valeur économique : modèles d’affaires, chiffrage des
composants, évaluation des coûts cachés, des coûts de distribution et
de production. La valeur amont est une quête car les bénéfices de ce
qui est exploré ne se révèlent pas d’eux-mêmes, ni aux utilisateurs ni
aux concepteurs. Un management de l’exploration va, chemin faisant
(Avenier, 1999), révéler le « haut potentiel » ou les vertus en
puissance des futures offres.

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