Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Hubert Faes
La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les
limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la
licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie,
sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de
l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage
dans une base de données est également interdit.
5. G.W.F. Hegel, Encyclopédie des sciences philosophiques II, Philosophie de la nature, Introd., Trad.
et Notes de B. Bourgeois, Vrin, Paris, 2004.
6. E. Morin, La méthode. 1. La nature de la nature, 2. La vie de la vie, 3. La connaissance de la
connaissance, Seuil, Paris, 1977, 1981 ; I. Prigogine, I. Stengers, La nouvelle alliance, Gallimard,
Paris, 1979 ; R. Thom, Modèles mathématiques de la morphogenèse, Christian Bourgois, Paris, 1980.
7. T. von Uexküll, Der Mensch und die Natur. Grundzüge einer Naturphilosophie, 1953 ;
A. Portmann, La forme animale, Payot, Paris, 1961. Voir également des textes de ces deux auteurs
dans Phénoménologie et philosophie de la nature. Études phénoménologiques N° 23-24, Ousia, Louvain-
la-neuve, 2006 ; J.-C. Gens, Éléments pour une herméneutique de la nature. L’indice, l’expression,
l’adresse, Cerf, Coll. Passages, Paris, 2009.
8. M. Serres, Le contrat naturel, François Bourdin, Paris, 1990.
9. L. Ferry, Le nouvel ordre écologique, Grasset, Paris, 1992.
5. Enfin, s’il paraît plus rare que les philosophes eux-mêmes prennent
des initiatives, il existe tout de même des tentatives d’origine proprement
philosophique, indépendantes des études nombreuses d’épistémologie et
de philosophie des sciences. Les plus connues sont d’ordre phénoméno-
logique, celles de Patocka10 et de Merleau-Ponty11.
Un tel inventaire ne permet pas de choisir entre les options distinguées
plus haut et de se prononcer sur ce qui est en train de se passer concernant
la philosophie de la nature. L’effervescence autour de la nature s’explique
aussi sans doute par l’épuisement des philosophies de l’histoire ou par
la fin des grands récits. Ne devrait-on pas retrouver du côté de la nature
ce qu’on a perdu du côté de l’histoire ? Rien en tout cas de bien dessiné
dans un sens déterminé n’apparaît dans la première vue d’ensemble. Il
convient donc d’examiner comment le problème d’une philosophie de la
nature se pose aujourd’hui.
10. J. Patocka, Le monde naturel comme problème philosophique, M. Nijhoff, La Haye, 1976 ; Le
monde naturel et le mouvement de l’existence humaine, Kluwer, Dordrecht, 1988.
11. M. Merleau-Ponty, La nature. Notes, Cours du Collège de France, Seuil, Paris, 1994.
12. A. N. Whitehead, Le concept de nature, Vrin, Paris, p. 39. Conformément à la suggestion
d’I. Stengers, Penser avec Whitehead. Une libre et sauvage création de concepts, Seuil, Paris, 2002, nous
modifions la traduction de la phrase citée. Voir son commentaire p. 45ss. La nature est ce dont
nous avons l’expérience dans la perception et non ce que nous observons dans celle-ci.
dans la nature, plus précisément, dans la nature qui est sur terre. C’est
ce fait qui aujourd’hui nous oblige à remettre en cause le dualisme et qui
modifie les perspectives tant de la cosmologie que de l’anthropologie.
17. Premiers principes métaphysiques d’une science de la nature, Vrin, Paris, 1971, p. 7.
Nature et univers
20. Ceci a été bien montré dès 1873 dans une conférence du mathématicien Clifford. Texte
traduit et cité par L. Boi, Le problème mathématique de l’espace. Une quête de l’intelligible, Springer
Verlag, p. 420-421.
21. Les considérations qui suivent s’appuient sur Whitehead, La science et le monde moderne,
Ontos Verlag, Frankfurt, 2006, Chapitres 4 et 7. Voir aussi Bernard D’Espagnat, Traité de phy-
sique et de philosophie, Fayard, Paris, 2002, Chapitre 2, à propos du « dépassement du cadre des
concepts familiers ».
La mathématisation
matique d’une quête visant à « découvrir un sens profond aux objets qui
existent dans l’espace et le temps, à leurs relations et aux actes intention-
nels qui nécessairement l’accompagnent »26. Pour cela une philosophie de
la nature est requise. Celle-ci devrait être « une nouvelle théorie de l’intel-
ligibilité qui réponde aux problèmes fondamentaux auxquels se trouvent
confrontées les sciences »27. Elle devrait faire revenir des concepts tombés
en désuétude (acte, puissance, cause formelle, cause finale, principe de
raison suffisante etc.)28.
L’intérêt de cette proposition est que tout en revendiquant un rôle déter-
minant des mathématiques dans l’explication de tous les phénomènes
naturels, l’auteur reconnaisse que les mathématiques ne déterminent pas
toute l’intelligibilité de ces phénomènes et que ce rôle même appelle l’in-
terprétation d’une philosophie de la nature. On peut douter cependant
que cette philosophie de la nature puisse retrouver et prolonger sans plus
les intentions de la philosophie naturelle traditionnelle et sa manière de
se rapporter à l’être même des choses. On peut reconnaître aujourd’hui
une puissance nouvelle des mathématiques qui leur permet de traiter des
formes naturelles et de leur genèse, mais non qu’elles retrouvent ainsi la
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.171.224.42 - 23/11/2019 17:47 - © Centre Sèvres
L’écosystème
La notion d’écosystème est l’une des notions nouvelles les plus signifi-
catives d’un sens nouveau et actuel de la nature. Elle est introduite par
l’écologie, c’est-à-dire par la science qui porte ce nom et non par l’écolo-
gisme, autrement dit le courant d’opinion ou l’idéologie favorables à des
pratiques écologiques. La biosphère, l’écosystème terrestre, est la nature
que l’homme habite.
L’écologisme est un courant de pensée dont l’orientation n’est pas
stabilisée. La tendance dominante a plusieurs fois changé au cours des
quarante dernières années. Actuellement, l’approche éthique a le vent en
poupe. La question majeure dans cette perspective est celle de la valeur
de la nature. La nature est-elle une valeur telle qu’elle mérite d’être res-
pectée en tant que telle, de se voir reconnaître des droits et d’être consi-
dérée moralement ? On envisage de restituer à la nature sa personnalité,
de la soustraire à l’utilisation ou à l’appropriation humaine29. Dans cette
démarche, on ne précise pas ce qu’on entend par nature ; on néglige en
fait ce que l’écologie scientifique nous a fait découvrir à savoir la condition
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 196.171.224.42 - 23/11/2019 17:47 - © Centre Sèvres
29. Voir les textes d’origine anglo-saxonne traduits dans : H.S. Afeissa (ed.), Éthique de l’envi-
ronnement. Nature, valeur, respect, Vrin, Paris, 2007.
les êtres vivants dont ils sont issus. Ils s’insèrent dans la biosphère de la
même façon. Le reconnaître implique un sens nouveau des rapports de
l’homme et de la nature, au-delà du dualisme de l’âge classique dont nous
parlions plus haut.
30. Pensée formelle et sciences de l’homme, Aubier, Paris, 1967 ; « Sur le traitement comme objets
des faits humains », in Formes, opérations, objets, Vrin, Paris, 1994.
31. Gilles-Gaston Granger, Pour la connaissance philosophique, Éd. O. Jacob, Paris, 1988, p 125.
Voir également Formes, opérations, objets, Vrin, Paris, 1994, Chapitre 16.
32. Pour la connaissance philosophique, p 13.
* *
*