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PROPOSITION DE LOI visant à rendre non identifiable les forces de l’ordre lors de la
diffusion d’images dans l’espace médiatique
De plus, l’exposé des motifs de cette proposition soutient prévenir un « risque pour chacun
d’entre eux (ndlr les forces de l’ordre) et leur famille » et contrer une « pratique du policier
bashing qui se développe dangereusement ». La circulation des vidéos montrant des
bavures policières et la mise en place de dispositif d’aides publiques comme l’application
Urgences violences policières aurait pour effet de « stigmatiser les forces de l’ordre » et de
faire circuler des « informations erronées sur celles-ci ». Ce texte de loi pose question sur la
forme.
Alors que durant le confinement les contrôles de police se sont multipliés (jusqu’à 19
millions en France selon Amnesty France), les vidéos de violences policières se sont
multipliés sur les réseaux. Les images de l’interpellation musclée d’un jeune livreur
d’Amazon aux Ulis, fin mars, celles d’un motard au sol, jambe fracturée, à Villeneuve-la-
Garenne à la suite d’une « bavure » policière en avril… Selon Laurent Muchielli, sociologue,
le contrôle policier est « plus intense et plus dur » dans les banlieues. La réponse du
gouvernement s’annonce claire. Si l’Assemblée nationale aurait pu renforcer le contrôle et
les sanctions contre de telles types de dérives afin de prévenir ces violences et du même
coup le développement de la « haine anti-flic » qui en découle, l’Assemblée a choisi d’édicter
une proposition de loi visant non à protéger l’intégrité des forces de police mais l’anonymat
des (potentiels) agresseurs.
Par ailleurs, le terme de « policier bashing » est d’autant plus inapproprié qu’il tend à
inverser les rôles, faisant passer les policiers, responsables de l’ordre publique, pour des
victimes, souffrant de la stigmatisation produite par les violences et dérives provenant…de
membres de cette même institution. De plus, l’emploi de ce terme semble oublier que les
dérives policières sont très peu sanctionnées ; en 2017, selon les données de l’IGPN
(Inspection Générale de la Police Nationale), sur 4800 manquements signalés, seulement 8%
ont fait l’objet d’investigations et 58 policiers ont soit fait l’objet d’un rappel à la règle, soit
ont été sanctionnés. L’emploi de ce terme dans de telles circonstances ne permet pas de
décrire la réalité et est donc peu pertinent.
Cette proposition de loi vise alors très clairement à protéger l’anonymat des forces de
l’ordre, et ce spécialement dans les cas où celles-ci commettent des dérives, abus et
violences policières. Cette proposition apparait comme une entrave au droit à l’information
et à la liberté d’opinion (une opinion basée sur des faits et non des choix de cadrage et de tri
de l’information émie par nos institutions étatiques). Dans un climat de tensions croissantes
entre les forces de l’ordre et les civils, ne faudrait-il pas plutôt durcir les sanctions vis-à-vis
des violences qui alimentent ces tensions plutôt que de mettre en place des lois visant à
limiter fortement la reconnaissance publique, notamment sur les réseaux, des abus et
dérives des forces de l’ordre ?
Sources :
Judith Butler, (2009, éditions Zones), Ce qui fait une vie
https://www.franceculture.fr/droit-justice/les-policiers-sont-ils-au-dessus-des-lois
http://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/textes/l15b2992_proposition-loi
https://mrmondialisation.org/filmer-les-forces-de-lordre-est-un-droit-et-doit-le-rester/
https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/c-est-un-accelerateur-comment-le-
confinement-attise-les-violences-urbaines_3930961.html