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Sam Bateman
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Outre-terre | « Outre-Terre »
ISBN 9782918587026
Article disponible en ligne à l'adresse :
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http://www.cairn.info/revue-outre-terre1-2010-2-page-39.htm
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Sam Bateman 1
1. Professorial Research Fellow, Australian National Centre for Ocean Resources and Security (Ancors), Université de Wol-
longong, NSW 2522, Australia (email address : sbateman@uow.edu.au), et actuellement aussi Senior Fellow and Adviser to the
Maritime Security Programme at the S. Rajaratnam School of International Studies (RSIS), Nanyang Technological University,
Singapour, issambateman@ntu.edu.sg.
2. United Nations Conference on Trade and Development (UNCTAD), Review of Maritime Transport 2009, New York, Na-
tions unies, 2009, p. 7.
3. Selon une étude conduite en 1969, la valeur par tonne des matières premières va de 9 dollars par tonne de pierre, sable
et graviers à environ 144 dollars pour les céréales et à plus de 20 000 dollars pour l’électro-ménager et les textiles (l’expé-
dition de ce dernier article s’effectuant typiquement par conteneurs ), cf. Martin Stopford, Maritime Economics., Abingdon &
Oxon, Routledge, 2e éd. 2005, tableau 11, p. 386.
4. Cf. pour une présentation exhaustive Steven Jones, Maritime Security – A Practical Guide, Londres, The Nautical Institute,
2006.
5. Le CMA-CGM Strauss a été construit en Corée en 2004 avec un jauge brute (Gross Tonnage) de 65 247 tonneaux, une lon-
gueur totale de 277,3 mètres, une capacité de 5 782 équivalents vingt pieds (EVP) et une vitesse maximale de 24,5 nœuds ;
l’auteur présente ses vifs remerciements aux officiers et à l’équipage du CMA-CGM Strauss pour leur hospitalité, leur bonne
compagnie et les éclaircissements quant aux opérations effectuées par un grand bâtiment.
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bat pavillon des Bahamas ; il est armé en Grande-Bretagne ; l’opérateur est la ligne
Méditerranée Club Express (Mex) de la grande compagnie française CMA-CGM 6.
6. La CMA-CGM avait en 2009 une flotte de 280 porte-conteneurs ; c’est le troisième opérateur au monde dans le sec-
teur après le danois Møller-Mærsk et l’italien Mediterranean Shipping Company (MSC) basé en Suisse, UNCTAD, Review of
Maritime Transport 2009, op. cit., tableau 38, p. 100. La Mex assure un service d’expédition par conteneurs entre des ports
méditerranéens et des ports d’Asie du Nord-Est.
7. Classement des huit principaux terminaux de conteneurs dans le monde : Singapour, Shanghai, Hong-Kong, Shenzhen,
Pusan, Dubaï, Ningbo et Guangzhou, UNCTAD, Review of Maritime Transport 2009, op. cit., tableau 38, p. 113.
8. Cf. Kenji Nagamatsu, « Past and present vessel traffic in the Straits of Malacca and Singapore : Trends in the decade
1994-2004 », présenté au colloque de Kuala Lumpur sur les détroits de Malacca et de Singapour, Kuala Lumpur Meeting on
the Straits of Malacca and Singapore : Enhancing Safety, Security, and Environmental Protection, 18–20 septembre 2006.
9. Un recherche encore inédite de l’auteur montre que les vieux bâtiments, donc le cas échéant de qualité inférieure en
termes de compétence de l’équipage et d’entretien, sont plus vulnérables aux attaques de pirate que les navires bien armés
et bien entretenus.
Transport de conteneurs et sûreté maritime 41
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Table 1 Number and Tonnage of Vessels Using the Malacca Strait
by Ship Type 2004 (vessels above 100 GRT)
Ensuite, alors que dans les cas du pétrolier et du vraquier la sûreté porte sur le
bâtiment en tant que tel, elle est centrée en matière de conteneurs sur le contenu de
la « boîte » et sur le rôle du navire dans la chaîne logistique qui effectue le service
porte à porte « juste-à-temps ». Justement, les conteneurs apparaissent comme le
maillon faible de la sûreté maritime dans la mesure où des articles interdits peuvent
s’y dissimuler soit parmi les marchandises déclarées, soit dans les parois ou le fond ;
sans compter les difficultés à cibler et à fouiller à fond.
Enfin, les porte-conteneurs sont plus sûrs dans la mesure même de leur vitesse
supérieure à celle de toutes les autres catégories de bâtiments. La vitesse est ici en
effet une caractéristique conceptionnelle 10. Les cargaisons de porte-conteneurs ont
de la valeur et des cargaisons d’aussi grande valeur appellent un inventaire coûteux,
d’où la motivation à les transporter rapidement 11. Ce qui veut généralement dire des
bateaux plus rapides dont la construction et l’armement sont chers 12.
Les porte-conteneurs représentent à peu près 13,6 % du tonnage de la flotte
mondiale 13. Au 1er juillet 2009, il y avait 4 678 porte-conteneurs, soit 8,8 % d’une
flotte mondiale de quelque 53 005 navires 14. En dépit de la crise financière et de
la phase déprimée dans laquelle se trouve le commerce international, la flotte mon-
diale de porte-conteneurs cellulaires intégraux a poursuivi une expansion substan-
tielle : 8,5 % d’augmentation en nombre pour l’année 2008 par rapport à l’année
précédente ; de 11,9 %, soit 17,3 millions de tonnes en port lourd (DWT) ; et de
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12,9 % de capacité en EVP. La taille des bâtiments continue à augmenter avec une
capacité moyenne qui est passée de 2 516 EVP en janvier 2008 à 2 618 EVP en
janvier 2009.
Les porte-conteneurs vont en taille des petits bâtiments de 1 200 tonnes de
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DWT à de grands bâtiments frisant les 14 000 EVP. Le plus grand porte-conteneur
entré en service en 2008, le MSC Daniela, battant drapeau panaméen, avec une
capacité de 13 800 EVP, a pour propriétaire et armateur la Mediterranean Shipping
Company 15. Les bâtiments les plus grands sont caractéristiquement employés sur
les voies principales tout autour du monde ; ceux de taille moyenne sur les routes
interrégionales (du Nord-Est au Sud-Est de l’Asie et du Nord-Est/Sud-Est de l’Asie
à l’Australasie ; ceux de plus petite taille, enfin, sur les routes des feeders (navires
collecteurs) à partir des hubs comme Singapour et Hong-Kong en direction de ports
moins importants. La vitesse va de 14 nœuds pour les plus petits navires à 25 nœuds
pour les plus grands bâtiments.
Facteurs de risques
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le rivage après que le MSC Napoli eut fait naufrage sur les côtes de Grande-Bretagne
en 2007 allait révéler que nombre de produits n’étaient pas déclarés et ne figuraient
pas sur le connaissement du navire 16. Nombre d’accidents spectaculaires ont aussi
résulté de la combustion ou de l’explosion du contenu de conteneurs. En mars 2006,
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le grand porte-conteneur Hyundai Fortune fut ravagé par une forte explosion et un
incendie massif des piles de conteneurs de sa plage arrière, probablement à cause
d’une cargaison dangereuse incorrectement arrimée et déclarée 17.
Les passagers clandestins sont un problème majeur pour les transporteurs de
conteneurs, en particulier dans les ports d’Afrique de l’Ouest et à Djibouti. Ils ont
plusieurs méthodes pour monter à bord, y compris en corrompant les dockers de
façon à accéder à des conteneurs vides après avoir grimpé par les chaînes de la ligne
de mouillage. Les conteneurs vides, normalement non scellés, ne sont en général
fouillés par l’équipage qu’après avoir été portés à bord. Les grands porte-conteneurs
évitent de recourir à des sociétés privées et d’employer des gardes en route, mais
ceux-ci peuvent être embauchés le temps du mouillage dans un port à clandestinité
fréquente en tant que supplétifs de patrouilles sur le pont supérieur.
Mesures de sûreté
Les attaques terroristes du 11-Septembre à New York ont entraîné des change-
ments majeurs en termes de sûreté maritime. L’idée était que des terroristes pou-
vaient exploiter les failles du trafic international pour s’en prendre directement à un
navire et à des infrastructures portuaires, d’une part, ou bien introduire des armes
(très probablement) de destruction massive et autres matériels de terrorisme par le
bais d’un bâtiment dans un pays donné. De nombreuses mesures ont été adoptées
si bien que l’industrie navale dispose aujourd’hui d’une culture de la sûreté et d’un
cadre réglementaire bien plus amples qu’avant le 11-Septembre. Le transport de
conteneurs s’en est trouvé fortement marqué.
Les nouvelles mesures adoptées par l’Organisation maritime internationale
(Omi), soit l’organisation de l’Onu responsable des règlements internationaux en
matière de sécurité et de sûreté et de la prévention de la pollution par les navires, in-
cluent l’International Ship and Port Facility Security (ISPS) Code et une action coor-
donnée avec l’Organisation internationale du travail (OIT), c’est-à-dire la produc-
tion d’un document actualisé d’identification du bâtiment et de garantie de sûreté
pour les zones portuaires. Les États-Unis ont simultanément pris une série d’initiati-
ves au plan mondial de façon à élever le niveau de sûreté de la cargaison maritime, en
particulier à travers la Container Shipping Initiative (CSI) : la surveillance (localisa-
16. ������������������������������������������������������������������
Cf. Janet Porter, « Investigators scrutinise MSC Napoli boxes », Lloyd’s List online, 23 mars 2007, <www.lloydslist.com/
art/20017413448>, consulté le 26 mars 2007.
17. « Hyundai Fortune fire update : What was in the box ? », EagleSpeek, 13 avril 2006, <www.eaglespeak.us/2006/04/
hyundai-fortune-fire-update-what-was.html>, consulté le 26 février 2009.
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tion et préinspection) de conteneurs à haut risque en partance pour les USA par des
inspecteurs américains des douanes dans des ports étrangers. Nombre d’autres pays
se sont eux aussi employés à intensifier le contrôle en amont des conteneurs. Même
si l’objectif est d’ordre sécuritaire, cela bénéficie également au contrôle douanier et à
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18. Cf. Lloyds List, « No to 100 % box scans », 24 février 2009, <www.lloydslist.com/ll/home/blogView.htm?blogId=20001019181>,
consulté le 26 février 2009.
19. UNCTAD, Review of Maritime Transport 2009, op. cit., p. 7.
20. Cf. ����������������������������������������������������������
Kevin Brown, « Asian ship lines face threat of seizure », Financial Times online, 23 septembre 2009, <www.ft.com/
cms/s/0/d13466bc-a862-11de-9242-00144feabdc0.html?SID=google>, consulté le 2 octobre 2009.
Transport de conteneurs et sûreté maritime 45
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mauvaises conditions. Il y a eu les mesures de sûreté de l’après-11-Septembre et
maintenant ces personnels sont confrontés aux restrictions et aux épreuves supplé-
mentaires – réduction des salaires et des équipages – consécutives à la récession du
transport international elle-même due à la crise financière.
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Le commerce en conteneurs exige beaucoup plus des équipages que celui qui
s’effectue par pétroliers ou vraquiers. Les premiers sont particulièrement touchés par
la fatigue et le stress. Comparativement aux autres catégories de bâtiments, les porte-
conteneurs connaissent normalement de plus courtes périodes au port, mais l’acti-
vité de chargement au port est plus intensive et les vitesses de passage souvent plus
rapides entre les ports dans des eaux côtières où la navigation est complexe compte
tenu de la densité du trafic. Le commandant et ses officiers supérieurs sont soumis à
la pression de devoir à la fois s’en tenir au strict planning requis par la nature même
du commerce en conteneurs et d’offrir simultanément un service « juste-à-temps ».
Le contraste entre la vie à bord d’un grand porte-conteneur moderne et celle du
navire à cargaison mixte d’il y a 40 ans est frappant. Les différences les plus évidentes
apparaissent avec des équipages beaucoup plus restreints et des périodes de mouilla-
ge dans les ports très raccourcies. Il y a 40 ans, la vie sociale à bord et les distractions
à terre étaient nettement plus diversifiées. Autrefois, de longues mouillages dans
un port permettaient d’aller faire du tourisme et de nouer des amitiés. Le navigant
contemporain, en particulier sur les porte-conteneurs, n’a pas ces occasions. Et la
pression du travail à bord est beaucoup plus intense. Problème supplémentaire :
nombre de nouveaux terminaux pour porte-conteneurs sont vastes et nécessaire-
ment situés assez loin de tout centre commercial. Aller à terre pour s’y distraire de-
vient physiquement difficile. D’ailleurs, les occasions d’aller à terre et de s’y distraire
sont encore plus réduites pour les équipages des grands porte-conteneurs, ceci s’ap-
pliquant en particulier aux officiers supérieurs de haut rang. Hautement répétitive,
l’activité de ces derniers devient routinière et ennuyeuse. Surchargés de travail et
sous-payés, les équipages ne sont pas très enclins à suivre les règlements de sûreté, les
armateurs de porte-conteneurs étant confrontés au défi considérable de maintenir le
moral de leurs équipages tout en gouvernant des bâtiments sécurisés et performants.
Un défi encore exacerbé par la crise financière avec des armateurs tentés de pratiquer
des coupes sombres tant au sein des équipages que dans les salaires.
21. Ce paragraphe se fonde sur les données de l’International Chamber of Commerce (ICC), International Maritime Bureau
(IMB), Piracy and Armed Robbery against Ships – Annual Report for the Period 1 January- 31 December 2009, janvier 2010.
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ques effectuées et tentées sur des porte-conteneurs pendant cette année. En effet, sur
406 incidents quelque 15,5 % concernent des porte-conteneurs, soit comme nous
l’avons vu environ 8,8 % de la flotte mondiale en nombre absolu. Mais ces chiffres
globaux sont trompeurs et il est nécessaire de les décortiquer.
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- L’Ellen S (9 957 tonneaux de jauge brute) a été attaqué au large de l’île de Man-
gkai en mer de Chine méridionale le 22 avril 23 ; le même bâtiment a de nouveau fait
l’objet d’une attaque le 24 octobre au mouillage devant Haiphong (Viêt-nam) ;
- Le Hansa Stavanger (15 988 tonneaux de jauge brute) a été détourné au large
des côtes somaliennes le 4 avril et acheminé vers le port de Eyl ; équipage et bâtiment
furent relâchés le 3 août après versement supposé de rançon ;
22. Un navire est dit « en route » quand il n’est pas à l’ancre, pas fixé par des lignes de mouillage, pas attaché à terre
(par exemple le long d’un quai ou d’un môle), ou encore échoué ; un bâtiment stoppé sur mer reste considéré comme en
route.
23. La zone est sinistrement réputée pour le nombre croissant des attaques qui s’y sont produites en 2008-2009, cf. éric
Frécon, « Piracy in the South China Sea – Maritime Ambushes off the Mangkai Passage », RSIS Commentary 100/2009,
9 octobre 2009.
Transport de conteneurs et sûreté maritime 47
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- Le Mærsk Alabama (14 120 tonneaux de jauge brute) a été pris d’assaut par des
pirates au large des côtes somaliennes le 7 avril, l’équipage réussissant à le reprendre
par la suite ; le commandant fut pris en otage mais délivré quelques jours plus tard
par des forces navales 24. Des pirates tentèrent une nouvelle fois d’attaquer ce navire
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au large des côtes somaliennes le 18 novembre mais ils furent repoussés par les tirs
des gardes armés embarqués à bord 25 ;
- Le Kota Wajar (16 772 tonneaux de jauge brute) a été détourné au large des
côtes somaliennes le 15 octobre et acheminé dans un port du pays ; l’équipage et le
bâtiment furent relâchés le 28 décembre après le versement supposé d’une rançon.
24. Cf. Thomas B. Hunter, « Swords at Sea : Pirates, SEALS, and the Mærsk Alabama », Counter Terrorism – Journal of
Counterterrorism & Homeland Security International, vol. 15, n° 3, 2009, p. 38-43.
25. Cf. Pauline Jelinek, « Admiral praises action off Somalia that foiled pirate attack against Mærsk Alabama », Washington
Examiner, 18 novembre 2009, <www.washingtonexaminer.com/politics/ap/70394057.html>.