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Transferts en changement de phase

Ébullition libre
par Monique LALLEMAND
Ingénieur, Docteur-ès-Sciences
Professeur des Universités à l’Institut National des Sciences Appliquées de Lyon

1. Principes fondamentaux des systèmes liquide-vapeur ................. BE 8 235 - 2


1.1 Notions de base de thermodynamique élémentaire ................................ — 2
1.1.1 Potentiels thermodynamiques........................................................... — 2
1.1.2 Conditions thermodynamiques de l’équilibre liquide-vapeur ........ — 2
1.2 Notions de physique des interfaces........................................................... — 3
1.2.1 Tension superficielle........................................................................... — 3
1.2.2 Relation de Laplace ............................................................................ — 3
1.2.3 Angle de contact ................................................................................. — 4
1.2.4 Longueur capillaire............................................................................. — 4
1.3 Formation de la vapeur ............................................................................... — 4
1.3.1 Nucléation homogène........................................................................ — 4
1.3.2 Nucléation hétérogène....................................................................... — 6
1.4 Croissance et détachement des bulles....................................................... — 7
2. Transferts de chaleur au cours de l’ébullition
en convection libre .................................................................................. — 8
2.1 Description phénoménologique de l’ébullition libre ................................ — 8
2.2 Transferts de chaleur en ébullition nucléée............................................... — 9
2.3 Flux critique.................................................................................................. — 10
2.4 Ébullition de transition et limite inférieure de l’ébullition en film........... — 10
2.5 Ébullition en film.......................................................................................... — 11
2.6 Effets paramétriques ................................................................................... — 12
2.6.1 Influence de la pression ..................................................................... — 12
2.6.2 Influence de l’état de surface............................................................. — 12
2.6.3 Influence des gaz dissous .................................................................. — 12
2.6.4 Influence de la taille et de l’orientation de la paroi.......................... — 12
2.6.5 Influence de la sous-saturation ......................................................... — 13
2.6.6 Influence de la mouillabilité de la paroi............................................ — 13
2.6.7 Influence de l’accélération de la pesanteur ...................................... — 13
3. Ébullition des mélanges ......................................................................... — 14
3.1 Équilibre de phases des mélanges............................................................. — 14
3.1.1 Définitions ........................................................................................... — 14
3.1.2 Diagramme d’équilibre de mélanges binaires ................................. — 14
3.2 Apparition de l’ébullition pour un mélange .............................................. — 15
3.2.1 Nucléation dans un mélange binaire ................................................ — 15
3.2.2 Croissance des bulles......................................................................... — 15
3.3 Transferts de chaleur en ébullition libre pour un mélange ...................... — 16
4. Ébullition en milieu confiné .................................................................. — 17
4.1 Effets importants aux dimensions millimétriques .................................... — 18
4.1.1 Forces contrôlant l’ébullition en milieu confiné............................... — 18
4.1.2 Effets de raréfaction............................................................................ — 18
4.1.3 Influence des conditions aux limites................................................. — 18
4.2 Configurations d’écoulement ..................................................................... — 18
4.3 Transferts de chaleur en ébullition confinée ............................................. — 19
Tableau de notations et symboles ............................................................... — 20
Références bibliographiques ......................................................................... — 21

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e processus d’ébullition, qui correspond au changement de phase


L liquide-vapeur associé à la formation de bulles, est un phénomène de
transfert de chaleur qui occupe une grande place dans le domaine industriel
car il permet d’atteindre des densités de flux élevées avec des écarts de
température relativement faibles. L’ébullition libre représente l’ébullition d’un
fluide naissant à partir d’une paroi chauffée, le fluide étant immobile en
l’absence de signal thermique imposé. Les résultats des études d’ébullition
libre sont fondamentaux pour la description des mécanismes de l’ébullition
convective (traité dans le dossier [BE 8 236]), dont le champ d’applications est
plus vaste. La technique des échangeurs diphasiques a évolué ces dernières
années vers le domaine des mini- voire des microéchelles, d’une part, en rai-
son d’une recherche de compacités accrues pour limiter les quantités de fluide,
d’autre part, grâce au développement des microtechnologies d’usinage. Cette
évolution a également été imposée du fait de la miniaturisation d’un grand
nombre de systèmes qui dissipent des densités de flux sans cesse croissantes,
en particulier les composants électroniques. Les lois macroscopiques établies
pour des géométries conventionnelles cessent d’être utilisables car d’autres
phénomènes interviennent aux petites échelles. Du fait de l’évolution de la
nature des fluides utilisés dans les évaporateurs, liée aux problèmes environ-
nementaux, les fluides frigorigènes sont de plus en plus des mélanges non
azéotropiques dont le comportement pour l’ébullition est modifié par la
diffusion d’une espèce au sein de l’autre. Ces différents aspects seront traités
dans ce document.

1. Principes fondamentaux Pour le changement d’état liquide-vapeur, la transition


s’accompagne d’une chaleur latente de vaporisation h v et d’une
des systèmes liquide-vapeur discontinuité de certaines grandeurs thermodynamiques, comme la
masse volumique ou l’entropie. Au cours d’une vaporisation iso-
therme et isobare, les variations des différentes fonctions d’état
s’expriment :
1.1 Notions de base de thermodynamique — énergie interne massique :
élémentaire
∆ u = h v – p ( v v – v  )
Les transitions de phases ou changements d’état sont connus
depuis très longtemps mais, du fait de la complexité des phéno- — énergie libre massique :
mènes physiques mis en jeu, ils font toujours l’objet d’un grand
nombre d’études. Lors du changement d’état liquide-vapeur, il ∆ f = – p ( vv – v )
apparaît des discontinuités des variables d’état caractérisant
chaque phase. — enthalpie massique :
∆ h = h v
1.1.1 Potentiels thermodynamiques — enthalpie libre massique :
L’équilibre thermodynamique d’un système traduit son état du ∆g = 0
point de vue mécanique, thermique et chimique. L’état d’une phase
est décrit par des variables intensives et extensives la caractérisant
(p, T, H, U, etc.). En thermodynamique, on montre qu’une phase est 1.1.2 Conditions thermodynamiques
stable si elle correspond à un maximum du potentiel thermo- de l’équilibre liquide-vapeur
dynamique :
À l’équilibre entre les phases liquide et vapeur, les variables
— énergie libre F si les variables sont T et V ;
intensives : pressions, températures et potentiels chimiques des
— enthalpie libre G si les variables sont p et T.
phases sont égales, ce qui suppose une interface liquide-vapeur
L’état d’équilibre d’une phase est donné par le critère de stabilité plane. La représentation des équilibres entre les différentes phases
de Gibbs-Duhem : est usuellement effectuée dans l’espace tridimensionnel (p, V, T )
(se reporter au dossier Thermodynamique chimique. Diagrammes
T dS – dU – p dV  0 (1) thermodynamiques dans notre collection). La projection de cette
Les grandeurs dS, dU et dV sont des variations infinitésimales surface dans le plan (p, T ), représentée sur la figure 1, fait appa-
autour de la position d’équilibre. Il en découle qu’un état est stable raître les trois courbes de saturation (sublimation, fusion et vapo-
pour un minimum des potentiels U à S et V constants, F à T et V risation) qui se raccordent au point triple (point de coexistence des
constants, H à S et p constants, G à T et p constants ou un trois phases). La projection dans le plan (p, V ), représentée sur la
maximum d’entropie S à U et V constants. Si ces conditions ne figure 2, est très utile pour l’étude des équilibres de phases.
sont plus respectées, l’équilibre est rompu et le système évolue Pour un corps pur, l’étude de l’équilibre liquide-vapeur est
vers un état métastable ou un état instable. souvent réalisée à partir des variables intensives p et T, facilement

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Il est possible d’observer une stabilité de la phase liquide en


p dehors des conditions de transition. Ainsi, si le liquide reste à l’état
liquide à une température supérieure à son point d’ébullition à une
pression donnée, il est surchauffé et se trouve dans un état méta-
stable. Il en est de même si le fluide est liquide à une pression
Point critique inférieure à son point d’ébullition à une température donnée. La
pcrit courbe correspondant à la limite de métastabilité est appelée
spinodale (figure 2). Ce phénomène traduit un retard à la transition
Solide Liquide de phase car, sous l’effet d’une faible perturbation (corps étranger
ou trace de la phase vapeur), on observe un retour à l’état stable.
La courbe spinodale sépare les états métastables des états
instables. Dans le domaine métastable, le liquide et la vapeur
restent en équilibre mécanique. La portion de courbe CD relative à
Point triple des augmentations conjointes de volume et de pression n’a jamais
ppt
pu être observée ; le système est instable. Toute modification d’un
Vapeur tel système (inclusions de vapeur, etc.) entraîne une évolution irré-
versible vers le palier LV des états stables. Sur l’isotherme LV, la
pression à laquelle apparaît le changement d’état est définie par la
règle de Maxwell : elle correspond à l’horizontale telle que les aires
des surfaces comprises entre l’isotherme et l’isobare soient égales.
Tpt Tcrit T

Figure 1 – Représentation de l’équilibre des phases


pour un corps pur en diagramme (p, T )
1.2 Notions de physique des interfaces
Les phénomènes qui apparaissent à l’interface liquide-vapeur,
frontière entre la matière condensée et la phase gazeuse, jouent un
grand rôle sur la transition de phases. Chaque phase possède des
p
A propriétés volumiques mais, dans la zone de transition qu’est
Point l’interface, les propriétés subissent une transition à l’échelle molé-
critique culaire et les forces intermoléculaires se traduisent par une
tension, dite tension superficielle.
Liquide Vapeur saturée
saturé
?????
1.2.1 Tension superficielle
T = Tcrit
D
Pour l’interface liquide-vapeur, la tension superficielle résulte du
L V déséquilibre des forces de cohésion existant entre les molécules
p0 constituantes du liquide et qui empêchent le liquide de devenir de
Liquide T < Tcrit
la vapeur. Selon la nature des fluides considérés, les forces de
B tension superficielle ont pour origine l’attraction moléculaire du
Spinodale
type Van der Waals, des liaisons métalliques ou des liaisons phy-
Vapeur
C siques secondaires. Tout accroissement de la surface libre d’un
Liquide Liquide Vapeur liquide nécessite d’amener à la surface des molécules situées au
métastable + vapeur métastable sein du liquide, ce qui nécessite un travail, correspondant à la rup-
ture des liaisons intermoléculaires, car les molécules de surface ont
V
moins de proches voisines que les molécules internes. La tension
superficielle σ, qui est l’énergie libre par unité de surface formée,
se traduit par une force par unité de longueur du périmètre  ; elle
Figure 2 – Représentation de l’équilibre des phases s’écrit :
pour un corps pur en diagramme (p, V )
σ =  ----------
∂E
∂A 
-
I T, p, n i
F
= -----

(2)

contrôlables. En suivant phénoménologiquement l’évolution du


fluide le long d’une isotherme (diagramme (p, V )), on constate avec E l’énergie libre de surface,
l’existence de trois états : AI l’aire interfaciale,
— phase liquide stable le long de AL (courbe de détente iso-
ni le nombre de moles du composant i,
therme du liquide) ;
— mélange liquide-vapeur entre L et V (palier isobare de vapo- F la force s’opposant à toute augmentation de surface.
risation du liquide) ;
— phase vapeur stable le long de VB.
Pour l’eau à 20 oC, la tension superficielle vaut 72,8 mN · m–1.
L’ensemble des points L et V forment la courbe de saturation, qui Ceci explique que les liquides tendent à avoir une forme qui
peut se diviser en une courbe de bulles ou d’ébullition (lieu des minimise leur surface et maximise le nombre d’interactions
points L) et une courbe de rosée (lieu des points V). Ces deux moléculaires.
dernières courbes se rejoignent au point critique. Pour l’isotherme
critique, passant par le point critique, il n’y a plus de palier de vapo-
risation mais on note un point d’inflexion de l’isotherme. Au-dessus
de l’isotherme critique, le fluide ne change plus de phase et reste 1.2.2 Relation de Laplace
à l’état gazeux. Pour le changement de phase liquide-vapeur, le
domaine d’étude correspond à des températures comprises entre Considérons une bulle de vapeur dont l’interface est sphérique
la température du point critique et celle du point triple. (rayon R ). L’équilibre des forces appliquées à l’interface, qui sont

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Ligne σ
triple r*
Vapeur θ
P
Liquide Pv , Tv
σsv oσs
sl
Solide
T = Tv = T

Figure 3 – Bilan des forces de tension superficielle Figure 4 – Bulle de vapeur en équilibre avec le milieu environnant
pour une goutte déposée sur un support solide

surface, c’est-à-dire la hauteur au-delà de laquelle la gravité


les forces de pression pint et pext et les forces de surface, respecti- devient importante. Elle est définie par la relation :
vement normales et tangentielles à l’interface, s’écrit :
σ
2σ λ = ----------------------------- (6)
p int – p ext = --------- (3) g ( ρ – ρv )
R
Sa valeur permet de déterminer les échelles en-dessous des-
La relation de Laplace (équation (3)) peut être généralisée pour quelles les phénomènes de capillarité sont à considérer. Si le rayon
des inclusions dont l’interface est caractérisée par des rayons de de courbure d’une interface est inférieur à λ, la tension superficielle
courbure principaux R 1 et R 2 selon deux directions orthogonales : joue un rôle important.
σ σ
p int – p ext = ------ + ------ (4)
R1 R2
1.3 Formation de la vapeur
Si le rayon de courbure d’une bulle est faible, la différence de
pression entre les deux phases est élevée.
1.3.1 Nucléation homogène
1.2.3 Angle de contact Lorsqu’il y a rupture de l’état métastable et retour à un équilibre
stable, des germes ou noyaux de vapeur apparaissent au sein de
Si on dépose une goutte de liquide sur une paroi solide, elle a la phase liquide : c’est le phénomène de nucléation. L’apparition
généralement une forme de calotte sphérique caractérisée par un d’un germe, qui induit la création d’une interface entre les phases
angle de contact θ, angle entre le plan tangent à l’interface et le liquide et vapeur, est sous la dépendance des propriétés inter-
support (côté liquide) (figure 3). La valeur de cet angle dépend du faciales. Pour un corps pur, la nucléation au sein du liquide, dite
fluide mais aussi du support. Si θ tend vers zéro, le fluide est très nucléation homogène, met en jeu le phénomène de diffusion des
mouillant (cas du pentane sur une paroi parfaitement propre et atomes ou molécules qui s’agrègent pour former la nouvelle
polie ; l’hélium liquide est très mouillant) ; si θ est obtus, le liquide phase. La nucléation nécessite une enthalpie libre de nucléation
est peu mouillant (cas du mercure sur du verre). Dans de nom- ∆Gnucl composée de deux termes :
breux cas, l’angle est aigu. Sur la ligne triple, il y a trois interfaces : — d’une part, une enthalpie libre de formation de la nouvelle
liquide-vapeur, vapeur-solide et solide-liquide. Chaque interface est phase :
caractérisée par une tension superficielle (respectivement

σ v , σ sv et σ s ), σ v est la tension superficielle liquide-vapeur défi- ∆G v = --------- r 3 ∆g v
3
nie au § 1.2.1 et notée simplement σ . L’équilibre des forces interfa-
ciales agissant sur la ligne triple, qui se traduit par son immobilité, (avec ∆gv l’enthalpie libre volumique de formation de la vapeur) ;
s’écrit (projection dans le plan du support) – condition de Young : — d’autre part, une enthalpie libre de création de l’interface :
σ cos θ = σ sv – σ s (5)
∆Gs = 4πr 2 σ
La projection des forces interfaciales sur la normale à la paroi est Les conditions d’équilibre pour une interface liquide-vapeur
compensée par une force élastique de réaction du solide (non courbe, comme dans le cas d’un nucleus de vapeur sphérique de
représentée sur la figure 3). rayon r * (figure 4), conduisent à des pressions de chaque phase
Cet angle de contact, dit statique, varie avec l’état de surface différentes, qui du fait de l’équilibre mécanique sont liées par la
(chimique et physique). La présence d’une forte rugosité tend à relation de Laplace :
modifier l’angle de contact en amplifiant la tendance initiale. Une 2σ
paroi hydrophile le devient davantage si elle est rugueuse ; une p v – p  = --------- (7)
r*
paroi hydrophobe peut le devenir davantage. En présence d’une
substance tensioactive, le mouillage est fort ( θ proche de 0 o ). Pour un système à une température uniforme et constante
Lorsque la ligne triple est mobile, l’angle de contact varie et on T  = T v =T  , l’équilibre des potentiels chimiques permet
distingue un angle de contact d’avancée et un angle de recul. d’exprimer la pression de chaque phase en fonction de la pression
L’existence de films liquides fins, dont la présence joue un rôle sur de saturation psat,T pour une interface plane [37]. La courbure de
les transferts thermiques, est sous la dépendance de ces angles. l’interface minore la pression de la vapeur pour une interface
sphérique par rapport à celle correspondant à l’interface plane (on
suppose que la vapeur se comporte comme un gaz parfait) :
1.2.4 Longueur capillaire
ρv 2σ
La longueur capillaire λ permet de caractériser l’ascension d’un p v = p sat, T – -------------------
- --------- (8)
liquide le long d’une paroi verticale sous l’effet de la tension de ρ – ρv r *

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p ∆Gnucl

∆Gs
p
psat, T ρv /∆ ρ 2σ/r * pv (T, r *)
ρl /∆ ρ 2σ/r *

p (T, r *)

e
p (T, r 1*)

an
pv
pl
ce
2σ/r *

fa

∆G *
er

t 0 nucl
In
p

∆Gv ∆Gnucl
Tsat T T
∆T r* r

∆T *
Figure 6 – Variation de l’enthalpie de formation d’un noyau, d’après [31]

Figure 5 – Pressions de la vapeur et du liquide à l’équilibre


entre une bulle de vapeur sphérique et le liquide Si on prend en compte l’équation (9), on obtient :
T
h v ρ  ρ v ρ 2 σ
À partir des équations (7) et (8), la pression du liquide s’écrit : p  ( T ) = p sat,Tsat +
∫ ----------------------------
T (ρ – ρ )
T sat
 v
 (ρ – ρ ) r * 
- dT – ---------------------------------
 v T
ρ 2 σ
p  = p sat, T – ------------------
- --------- (9)
ρ – ρv r * Comme on a : p  ( T ) = p sat,Tsat , l’équation liant le rayon de la
bulle r * à la surchauffe du liquide s’écrit :
La représentation de ces relations est clairement mise en
évidence sur la figure 5. Lorsque le rayon de la bulle diminue T
r *1 < r * , l’équilibre est déplacé vers la droite, ce qui nécessite ρ 2 σ h v ρ  ρ v
une température plus élevée.
Ainsi, pour que la bulle reste à l’équilibre dans le liquide à la
 --------------------------------
( ρ – ρv ) r *
-
 T
=
∫ ----------------------------
T (ρ – ρ )
T sat
 v
- dT

pression p  , il est nécessaire que le liquide soit surchauffé de ∆T 


par rapport au système qui aurait une interface plane à cette La surchauffe du liquide étant généralement faible, cette équa-
pression (figure 5) : tion peut être simplifiée en développant chaque membre de l’équa-
tion en série de Taylor et en se limitant au premier ordre, ce qui
∆T  = T – T sat ( p  ) donne :
2 σ T sat ∆T ( ρ  – ρ v ) T sat d ρ σ
Pour calculer la surchauffe du liquide, on différentie l’équa- ρ v h v ∆T  
- 1 + ------------ -----------------------------------
r * = -----------------------------
T sat ρ σ dT ρ  – ρ v 
- --------- ------------------
-

tion (9) :
Pour de nombreux fluides, comme l’eau, le second terme de la
ρ p a r e n t h è s e e s t n é g l i g e a b l e e t l a s u r ch a u ff e d u l i q u i d e



dp dp sat, T d
------------ = --------------------
- – ---------- ------------------
- --------- (10) ∆T  = T  – T sat s’écrit :
dT dT dT ρ  – ρ v r *
2 σ T sat
∆T  = --------- ----------------
- (12)
La dérivée dpsat,T /dT est la pente de la courbe de vaporisation r * h v ρ v
pour une interface plane dans le diagramme p, T, donnée par
l’équation de Clapeyron : La taille du nucleus de vapeur à l’équilibre est d’autant plus fai-
ble que la surchauffe est plus grande, ce qui apparaît avec la dimi-
dp sat,T h v h v ρ  ρ v nution de la pression du liquide le long de la ligne LC (figure 2). Au
-------------------
- = ----------------------------
- = ----------------------------
- (11) voisinage du point C, le nucleus approche des dimensions molécu-
dT T ( vv – v ) T ( ρ – ρv )
laires.
On reporte cette valeur dans l’équation (10) et on intègre chaque La variation d’enthalpie libre associée à la formation d’un noyau
membre entre les limites Tsat et T = T sat + ∆T  : de rayon r, représentée sur la figure 6, s’écrit :

4
T
∆G nucl = 4πr 2 σ – ----- πr 3 ( p v – p  ) (13)
3
h v ρ  ρ v ρ 2 σ
p  ( T ) – p  ( T sat ) =

T sat
T ( ρ – ρv ) 
- dT – --------------------------------
----------------------------
( ρ – ρv ) r *
-
 T
Elle présente un maximum pour une valeur égale au rayon
d’équilibre de la bulle déduit de l’équation (7). À ce maximum
ρ 2σ correspond un équilibre instable. Afin d’abaisser le potentiel ther-

+ ---------------------------------
( ρ – ρv ) r *  T sat
modynamique, les bulles de rayon r < r * implosent. Inversement,
les germes de rayon r > r * grossissent spontanément.

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Liquide Liquide

Vapeur Liquide Vapeur


β
Vapeur Vapeur Liquide
θr1

θa1
Figure 7 – Exemples de cavités réentrantes
θa1 > 2β θr1
Solide Solide
0θa2 θr1 < 180° – 2β
θa2 < 2β
Du fait des fluctuations thermiques dans le liquide métastable, la 90° – β 90° – β 90° – β 90° – β
probabilité de formation d’un nucleus est d’autant plus élevée que
son rayon est plus faible. La probabilité de formation de germes
ayant le rayon critique r *, par unité de temps et de volume, est : a liquide avançant b liquide reculant

Angle de la rainure = 2β
3σ – 16 π σ 3
   
dn 1/2
--------- = N  ----------- exp ---------------------------------------
dt πm 3 kT  p v – p   2
(14) Figure 8 – Représentation schématique du piégeage de la vapeur
3σ – 16 π σ 3 T ou du liquide dans une cavité, d’après [8]
   
1/2
= N ----------- exp ------------------------------------------
πm 3 k ∆ T  ρ v h v
2 2 2

avec N  le nombre de molécules du liquide par unité de volume, pour des surfaces réelles, θ < 90o de sorte que 0,5 < F < 1. Cette
valeur de F ne permet pas généralement d’obtenir la nucléation
m la masse d’une molécule, pour les valeurs de surchauffe rencontrées expérimentalement.
k la constante de Boltzmann.
La vitesse de nucléation homogène dn /dt est très sensible à la 1.3.2.2 Nucléation à partir de vapeur ou de gaz piégés
surchauffe du liquide ∆T  . Elle est très faible aux faibles surchauf- dans des cavités
fes, donc aux fortes valeurs de r *. On considère que la nucléation Dans le cas où il existe sur la paroi des cavités remplies d’air ou
est significative pour dn /dt de l’ordre de 109 à 1013 m–3 · s–1. plus généralement d’incondensables ou de vapeur, et dont le rayon
d’ouverture est supérieur au rayon critique de nucléation, la
Pour l’eau à la pression atmosphérique, avec dn /dt = nucléation est initiée pour des surchauffes relativement faibles. Le
volume d’incondensables piégés dans les cavités dépend des pro-
1013 m–3 · s–1, la surchauffe est de 221 K, ce qui est bien supé-
priétés interfaciales, de la forme de la cavité et des conditions
r i e u r a u x v a l e u r s m e s u r é e s e x p é r i m e n t a l e m e n t . Pa r
expérimentales.
conséquent, la nucléation homogène doit être éliminée comme
mécanisme de production de vapeur. Elle s’avère cependant La présence de gaz piégés crée une interface qui favorise la
possible pour les liquides organiques. nucléation, mais aussi qui diminue la différence de pression entre
les deux phases. Ainsi la surchauffe du liquide nécessaire à la
nucléation est également réduite :
1.3.2 Nucléation hétérogène

Pour expliquer les écarts entre valeurs prédites et mesurées, r* 
--------- – p g T sat 
∆T  = ----------------------------------------- (16)
plusieurs hypothèses furent proposées. En effet, dans la majeure h v ρ v
partie des applications, la vapeur apparaît préférentiellement sur
une paroi solide chauffée selon différents mécanismes : Le critère correspondant au piégeage de gaz dans une cavité
— préexistence de vapeur-gaz incondensable dans des sites de conique ou une rainure, caractérisée par un angle au sommet 2β,
nucléation ; a été établi par Bankoff [2]. Si l’angle de contact est supérieur à 2β,
— cavités « réentrantes », non mouillables par le liquide le front de liquide convexe avançant sur une cavité remplie de gaz
(figure 7) ; touche l’extrémité opposée de la cavité avant qu’elle ne soit pleine
— ensemencement des sites de nucléation par un site actif de liquide : la vapeur est piégée au fond de la cavité (figure 8a ).
voisin. Cette condition s’écrit :
θa > 2 β
1.3.2.1 Nucléation hétérogène sur une paroi lisse L’angle de contact à l’avancée du fluide est supérieur à l’angle de
Si la paroi solide est parfaitement lisse, la bulle de vapeur à la contact statique, ce qui favorise le piégeage de la vapeur. Inver-
surface de la paroi peut être considérée comme une calotte sphé- sement, si un front liquide recule en passant sur une cavité remplie
rique. Sur la ligne triple apparaît l’angle de contact. L’énergie de de liquide (figure 8b ), la cavité restera remplie de liquide si :
formation d’un germe de vapeur sur la paroi lisse est plus faible θr < π – 2 β
que celle nécessaire en nucléation homogène. Le rapport F entre
ces énergies, dit facteur d’énergie, est donné par l’expression L’angle de contact de recul est inférieur à l’angle de contact
suivante : statique. En 1993, Wang et Dhir [40] ont montré que, pour un fluide
2 + 3 cos θ – cos 3 θ très mouillant, il est difficile d’obtenir des embryons de vapeur
F = ----------------------------------------------------- (15) préexistants et l’ébullition nécessite des surchauffes proches de
4
l’ébullition homogène. Cependant, du fait de la présence de gaz
Si θ est égal à 180o (paroi non mouillante), aucune surchauffe dissous, l’ébullition a souvent lieu pour des surchauffes plus
n’est nécessaire pour l’apparition d’une bulle puisque F = 0. Mais faibles. L’ébullition peut continuer par invasion de sites voisins.

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r /RC
5
5 2β = 5° 9° 13° 17° 21° 29° 41°
4 1
4
RC
0,8
5
3
3 4
3 0,6
2
2 2
1
0,4
1 1
0,2

θ < β < 90° 2β < θ ≤ 90° θ > 90° + β


0
a b c 0 10 20 30 40 50 60 70
θ (degré)

RC /r
Figure 10 – Évolution du rayon du germe de vapeur avec l’angle
de contact et l’angle de la cavité selon le modèle de Lorenz et al. [28]

1
θ < β < 90° En supposant une variation linéaire de la température du liquide
2β < θ ≤ 90° dans la couche limite thermique d’épaisseur δt et dans le cas où yb
θ > 90° + β est égal à RC , on obtient la densité de flux nécessaire à la
0 nucléation [21] :
Volume λ  h v ρ v
˙ 2
- ∆T sat
q nucl = ------------------------ (20)
8T sat σ
d
avec ∆Tsat = Tp – Tsat la surchauffe de la paroi.

Figure 9 – Évolution du rayon lors de la croissance d’une bulle


à partir d’une cavité, d’après [8] 1.4 Croissance et détachement des bulles
Lorsqu’un germe de vapeur a atteint une taille supérieure à celle
Griffith et Wallis [16] ont établi que la surchauffe nécessaire à de l’équilibre instable, la bulle croît spontanément. Aux premiers
l’ébullition à partir de germes de vapeur préexistants apparaît pour instants, la croissance de la bulle est contrôlée par l’inertie du
le rayon de courbure de l’interface minimal rmin : liquide environnant (régime inertiel), ensuite par la diffusion de la
chaleur (régime thermique). Au cours de sa croissance, une bulle
2 σ T sat est soumise à différentes forces :
∆T  = T  – T sat ( p  ) > -----------------------------
- (17)
r min h v ρ v — forces statiques : poids de la bulle, poussée d’Archimède,
force capillaire, force de pression de contact ;
Cette équation ne prend en compte ni l’angle de contact, ni le — forces hydrodynamiques : force d’inertie du liquide sur la
gradient de température dans la couche limite du liquide dont la bulle, forces visqueuses.
température diminue depuis la paroi jusqu’à l’infini. Pour une La bulle se détache de la paroi lorsque le bilan des forces qui
cavité de rayon d’ouverture RC , le rayon de courbure minimal agissent sur elle n’est plus vérifié. Si on ne considère que l’équi-
correspond au maximum du rapport RC /r (figure 9) lorsque le libre entre forces de flottabilité et forces de tension de surface [13],
germe croît jusqu’à l’ouverture de la cavité et en dehors de celle-ci. le diamètre de détachement d’une bulle s’écrit :
Pour un angle de contact élevé, le maximum a lieu pour RC /r = 1
de sorte que la surchauffe nécessaire à l’activation d’un site s’écrit : σ 1/2

2 σ T sat

D b = 0,020 8 θ ----------------------------
g ( ρ – ρv )  (21)

∆T  > --------------------------
- pour R C /r  1 (18)
R C h v ρ v Les bulles ont une forme plutôt sphérique lorsque les forces de
tension de surface prédominent, et tendent vers une forme hémi-
Pour de petits angles de contact, fréquemment rencontrés, le sphérique lorsque les forces d’inertie prédominent. Elles sont oblon-
maximum de RC /r, supérieur à 2, correspond au rayon initial du gues lorsque ces deux forces sont du même ordre de grandeur.
germe dans la cavité. Un modèle a été développé par Lorenz et La fréquence d’émission des bulles f n’est pas uniforme pour
al. [28] pour prédire ce rayon. Sa variation, en adimensionnant par tous les sites. De plus, elle dépend du régime de croissance de la
le rayon de la cavité, Φ = r /RC est représentée sur la figure 10 en bulle. En général, on admet que le produit f Db est constant.
fonction de l’angle de contact et de l’angle de la cavité. La sur- Zuber [44] a donné l’expression suivante :
chauffe pour l’activation d’un site s’écrit :
1⁄4
σ g ( ρ – ρv )
2 σ T sat
∆T  > -------------------------------
R C Φ h v ρ v
- pour R C /r > 1 (19) 
fD b = 0,59 -------------------------------
ρ
2  (22)

Si θ  2 β , Φ est nul et aucune vapeur n’est piégée. Pour un


angle de la cavité donné, il existe un maximum de θ pour lequel Φ Pour l’eau à la pression atmosphérique, les bulles ont un
est égal à 1 ; au-dessus de ce maximum la surchauffe est donnée diamètre de détachement de l’ordre de 1 à 2,5 mm et leur fré-
par l’équation (18). quence est de 20 à 40 s–1.

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2. Transferts de chaleur
au cours de l’ébullition Tsat

en convection libre Convection Bulles Ébullition Zone de Ébullition


naturelle isolées nucléée transition en film
pleinement
. développée
2.1 Description phénoménologique lg q
de l’ébullition libre E
Flux
L’ébullition qui prend naissance sur une paroi chauffée (avec le . C critique D
liquide au repos en l’absence de chauffage) est dite ébullition en qcrit
vase, ébullition en fluide stagnant ou ébullition libre (pool boiling ).
Les premiers travaux expérimentaux relatifs à l’ébullition libre sont
dus à Nukiyama [30]. Pour cette expérience, un fil de platine
chauffé électriquement est immergé dans un bain d’eau distillée
maintenue à 100 oC. La densité de flux est obtenue par mesures du
courant et de la tension aux bornes du fil et la température
moyenne de la paroi est déduite de la variation de la résistance du
fil avec la température. La courbe représentant la densité de flux q̇ . G
qmin
en fonction de la surchauffe de la paroi (∆T sat = T p – T sat ) en F
régime stationnaire est dite courbe d’ébullition. Pour l’expérience B' B
de Nukiyama, cette courbe est obtenue en imposant une succes-
sion de flux croissants ou de flux décroissants. L’allure de la courbe A
d’ébullition est représentée sur la figure 11. Les différents régimes lg ∆Tsat
observés pour une courbe décrite à flux imposé sont détaillés
ci-dessous.
Figure 11 – Courbe d’ébullition libre et les différents régimes observés
■ Régime de convection naturelle en fonction de la surchauffe de la paroi et du flux, d’après [21]

Aux très faibles densités de flux (zone AB), la température de la


paroi est insuffisante pour initier la nucléation. En raison des
gradients de température dans le liquide, la chaleur est transférée
monte en entraînant avec elle une partie de la couche limite ther-
par convection naturelle jusqu’à la surface du bain où a lieu une
mique dans son sillage. Ainsi, aux échanges par chaleur latente
évaporation (interface plane). Au point B, la surchauffe de la paroi
s’ajoutent des échanges convectifs locaux intenses dus à une des-
est importante. Des bulles apparaissent localement sur la paroi. Ce
truction périodique de la couche limite et un transport de chaleur.
phénomène est rapide et l’émission de bulles crée des mouve-
ments convectifs intenses, qui améliorent notablement les échan-
ges thermiques. Il s’ensuit une diminution notable de la ■ Point critique
température de la paroi (ou de la surchauffe) jusqu’au point B′.
Au point C, la vapeur formée en grande quantité empêche le
liquide de remouiller la paroi et d’assurer son refroidissement. À
■ Régime d’ébullition nucléée flux imposé, la température de la paroi augmente brusquement du
Ce régime d’apparition des premières bulles débute en B′ point C au point D (de plusieurs centaines de degrés Celsius). Si la
(figure 11). Aux faibles flux, les bulles après leur détachement température de la paroi du fil au point D est supérieure à sa
implosent en se condensant lors de leur ascension dans le liquide température de fusion, il est détruit. Le point C est appelé point
saturé. Lorsque le flux augmente, la quantité de vapeur formée critique ; il lui correspond un flux critique, qui est le flux thermique
croît et on assiste à une coalescence des bulles, soit latéralement maximal transmis en ébullition nucléée et sans risquer un endom-
sous forme d’amas de vapeur (direction parallèle à la paroi), soit magement de la paroi. On l’appelle communément aussi crise
verticalement sous forme de colonnes (normale à la paroi). On d’ébullition (burnout, departure from nucleate boiling, critical heat
passe de bulles isolées aux bulles coalescées et à des poches de flux ).
vapeur. La proportion de vapeur présente sur la paroi augmente
jusqu’au point C, dénommé point critique. ■ Ébullition en film
Ce domaine est caractérisé par des échanges thermiques Au point D apparaît un régime appelé ébullition en film ou ébul-
intenses. En effet, si on observe un cycle de croissance et de déta- lition pelliculaire car le fil est totalement entouré par un film de
chement des bulles (figure 12), à l’instant initial où une bulle vient vapeur (quelques centaines de µm d’épaisseur). Le transfert de
de partir de la paroi (t = 0), le site de nucléation représenté n’est chaleur s’effectue par conduction au travers du film de vapeur pour
pas actif car la paroi est refroidie par du liquide à la température provoquer la vaporisation du liquide à l’interface. Des grosses
de saturation, qui a remplacé la zone occupée par la bulle pré- bulles de vapeur quittent l’interface périodiquement. Une parti-
cédente. Pendant une durée, notée ta (temps d’attente), la couche cipation significative du rayonnement peut avoir lieu car, pour ce
limite se reconstruit jusqu’à ce que la surchauffe soit suffisante régime, la température de la paroi est de l’ordre de plusieurs
pour initier une nouvelle bulle. Cette bulle croît très rapidement centaines de degrés Celsius, en particulier aux forts flux (point E).
(régime inertiel) avec une forme hémisphérique favorisant la vapo-
risation de la microcouche de liquide présente à sa base. La crois- À flux décroissant, ce film de vapeur peut rester stable pour des
sance de la bulle se poursuit par vaporisation du liquide adjacent densités de flux bien inférieures à la densité de flux critique, selon
à l’interface en le désurchauffant. Durant cette phase, la diffusion la ligne EF. Le point F, dit point de Leidenfrost, correspond au flux
de la chaleur à l’interface est un facteur limitant. Puis la bulle prend thermique minimal ou à la température minimale du film stable. En
une forme plus sphérique contrôlée par la tension de surface. Lors- F, si le flux est abaissé, le régime devient instable et la courbe
que la bulle atteint son diamètre de détachement (t = td ), elle rejoint la courbe d’ébullition nucléée en G.

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Frontière de la couche limite thermique


Tableau 1 – Valeurs du coefficient Csf de la corrélation
de Rohsenow (équation (23))
T T
Couple paroi-fluide Csf
Tp Tp
Eau – nickel .................................................... 0,006
Eau – platine .................................................. 0,013
t=0 t = ta Eau – cuivre poli............................................ 0,013
Eau – laiton .................................................... 0,006
a mouillage de la paroi par b reconstitution de la couche Eau – acier inoxydable poli .......................... 0,008
du liquide froid après limite thermique
le départ d’une bulle

(0)

T T Tableau 2 – Définition des groupements adimensionnels


Tsat des équations de Stephan et Abdelsalam [36]
X1 X2 X3 X4 X5 X6 X7 X8

Microcouche ˙
q D b a 2 ρ  c p  T sat D 2b h v D 2b ------- ρv ν ( ρ c p λ ) sat ρ  – ρ v
-------------------
- ---------------- -------------------------------- ------------------- ρ ------- ---------------------------- -------------------
T sat λ  σ D b 2 2  a ( ρ cp λ ) ρ
a a
(t > ta )1 (t > ta )2

c croissance inertielle de la bulle d croissance de la bulle


avec microcouche de liquide contrôlée par la diffusion
sous la bulle 2.2 Transferts de chaleur
en ébullition nucléée
Il est difficile de donner des méthodes précises de détermina-
tions des coefficients d’échange pour l’ébullition nucléée. En effet,
les grandeurs dont elle dépend (sites de nucléation, dont le
nombre est fortement dépendant des propriétés physiques, de
l’état de surface de la paroi, de la mouillabilité du fluide, de la pré-
sence d’incondensables, etc.) sont difficilement prédictibles.
L’ébullition nucléée commence avec l’apparition des premières
t = td bulles sur la paroi. La surchauffe nécessaire, qui correspond au
point B de la figure 11, est donnée par l’équation (18) ou (19) selon
e détachement de la bulle la taille de la cavité.
Par analogie avec les transferts monophasiques, on définit un
Figure 12 – Mécanismes de croissance d’une bulle coefficient d’échange, rapport entre la densité de flux et la diffé-
sur une paroi chauffée, d’après [8] rence de température entre la paroi et le fluide. La plus connue des
relations est celle de Rohsenow [33] :

1/2 1/3

    -----------------
■ Zone de transition c p T p – T sat  µ  c p m

Le cas d’une température de paroi imposée est moins fréquent


- = C sf
--------------------------------------
h v

 σ
------------------ ---------------------------
µ  h v g ( ρ  – ρ v ) λ  
(23)
dans les applications. La courbe d’ébullition correspondante est
identique depuis le régime de convection naturelle jusqu’au point avec Csf une constante spécifique du couple paroi/fluide, qui
C et pour l’ébullition pelliculaire. Par contre, le point C n’est plus dépend de l’angle de contact,
un point critique puisque la température est contrôlée. À partir du c p la capacité thermique massique du liquide,
point C jusqu’au point F, apparaît le régime de transition. Ce
régime très instable est caractérisé par la présence de grosses µ sa viscosité dynamique,
masses de vapeur sur la paroi, qui empêchent le mouillage correct λ sa conductivité thermique.
de la paroi par le liquide. De fortes fluctuations du flux et de la
température de la paroi sont observées. L’extraction du flux par Rohsenow a préconisé la valeur de m égale à 1,7 pour tous les
chaleur latente devient prépondérante par rapport à celle due aux fluides sauf pour l’eau où elle vaut 1. Le coefficient Csf , dont la
effets convectifs. valeur varie de 0,003 à 0,015, est donné dans le tableau 1 pour
l’eau avec différents matériaux. Pour d’autres couples paroi/ fluide,
■ Phénomène d’hystérésis une valeur moyenne de 0,013 est recommandée mais, pour plus de
précision, il faut avoir recours à l’expérience.
La courbe d’ébullition présente un phénomène d’hystérésis, qui
a été observé par de nombreux auteurs. Ce phénomène apparaît ■ En 1980, Stephan et Abdelsalam [36] ont établi une corrélation
lorsque le flux thermique est imposé par valeur croissante depuis dont l’expression varie selon la nature du fluide et dont les coef-
une valeur nulle jusqu’à des valeurs élevées (flux critique), puis par ficients ont été identifiés à partir d’un grand nombre de données
valeur décroissante. La courbe obtenue par valeur décroissante du expérimentales. Ces diverses expressions, pour lesquelles les grou-
flux est toujours située plus à gauche que celle à flux croissant. pements adimensionnels Xi sont donnés dans le tableau 2, sont les
Ceci est dû au fait que, à flux décroissant, le nombre de sites de suivantes :
nucléation actifs reste plus élevé. Il est possible d’éliminer cet effet ● Eau :
par cyclage. Les courbes d’ébullition sont, dans la plupart des cas, 0,673 – 1,58 1,26 5,22
données à flux décroissant. Nu = 2,46 × 10 6 X 1 X4 X3 X8 (24)

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pour : 10 –4  p/p crit  0,886 et θ = 45° . — apparition d’instabilités (dites de Kelvin-Helmoltz) de la


colonne de vapeur montant au sein du liquide. Du fait de sa
● Hydrocarbures : grande vitesse, la vapeur empêche le remouillage de la paroi par
le liquide.
Nu = 0,054 6  X 5 X 1 
0,5 0,67 4,33 0,248
X8 X4 (25) Les paramètres principaux contrôlant l’apparition du flux critique
sont la nature du fluide, la pression et l’accélération. À partir de
pour : 5,7 × 10 –3  p/p crit  0,9 et θ = 35° . l’analyse dimensionnelle, Kutateladze [24] a donné l’expression
suivante :
● Fluides cryogéniques :
q̇ crit = K K ρ v h v  σ g  ρ  – ρ v / ρ v 
2 1/4
(30)
0,624 0,117 0,257 0,374 – 0,329
Nu = 4,82 X 1 X7 X5 X3 X4 (26)
La valeur de la constante KK donnée par Kutateladze est de 0,16,
pour : 4 × 10 –3  p/p crit  0,97 et θ = 1° . alors que Zuber [43] a recommandé une valeur de 0,131. Cette
relation est applicable pour une plaque plane horizontale tant que
● Fluides frigorigènes : la dimension caractéristique de la plaque L (plus petite dimension)
0,745 0,581 0,533
est telle que :
Nu = 207 X 1 X5 X6 (27)
L
---------------------------------------------------------------- > 3
pour : 3 × 10 – 3  p / p crit  0,78 et θ = 35 ° . 2π 3  σ /g ( ρ  – ρ v ) 1/2

■ Le nombre de Nusselt est défini comme suit : La géométrie de la paroi chauffée a une influence sur le flux
critique ; celle-ci a été particulièrement étudiée par Lienhard et
hD b Dhir [25] qui ont pris comme flux critique de référence la valeur
Nu = ------------
-
λ donnée par Zuber, q̇ crit, Z :
avec Db donné par l’équation (21).
 
L
q̇ crit = q̇ crit, Z ----- (31)
■ En 1982, Nishikawa et al. [29] ont proposé la relation suivante λ
(toutes les unités sont en SI sauf la rugosité de la paroi Rp exprimée
en micromètre) : Le flux critique dépend de la longueur capillaire λ et d’une gran-
deur caractéristique L, fonction de la géométrie. Les différentes
1/5 ˙ corrélations ainsi que leur domaine de validité sont données dans
31,4 p crit p/p crit  0,23 q 4/5
- 8R p  0,2 ( 1 – p/pcrit ) ------------------------------------------------------
h = ------------------------- - (28) le tableau 3. (0)
~1/10 1 – 0,99 p/p crit   0,9
M Tous les modèles prédictifs du flux critique donnent des résultats
avec Rp = 0,125 µm. relativement satisfaisants pour tous les fluides, excepté pour les
métaux liquides.
■ En 1984, Cooper [12] a établi une relation basée également sur la
~
pression réduite, la masse molaire du fluide M et la rugosité de la
paroi Rp (toutes les unités sont en SI sauf Rp exprimée en 2.4 Ébullition de transition et limite
micromètre) : inférieure de l’ébullition en film
˙ ~
q 1/3 p 0,12 – 0,21 lg R p p – 0,55 La zone de transition a été la zone la moins étudiée car elle ne

---------------- = 55 ------------
∆T sat p crit   – lg -p----crit
------
 M – 0,5 (29) peut être atteinte que lors d’un chauffage à température imposée.
Les mécanismes régissant les transferts de chaleur dans cette zone
■ Toutes les prédictions données par ces corrélations ne sont pas sont mal connus si ce n’est qu’ils semblent être affectés par les
très précises et ne sont applicables que sur le domaine de validité mêmes variables que celles qui interviennent dans l’ébullition
pour lequel elles ont été établies. Il existe un grand nombre de cor- nucléée. À partir d’études expérimentales, Berenson [3] a conclu
rélations pour l’ébullition nucléée mais, comme dans les échanges que le régime de transition est une combinaison des régimes
interviennent toujours la nature du fluide et de la paroi (angle de d’ébullition nucléée et d’ébullition pelliculaire existant alternative-
contact, rugosité, etc.), leur utilisation reste délicate. De plus, le ment sur la surface. C’est une zone où apparaissent de grandes
coefficient d’échange en ébullition nucléée étant très élevé, la résis- fluctuations de flux à température imposée.
tance thermique correspondante est souvent faible par rapport à Cette zone est limitée, d’une part, aux flux élevés par le flux cri-
celles introduites par d’autres échanges. tique, d’autre part, aux faibles flux par le point de Leidenfrost.
Usuellement, il est admis de calculer la densité de flux par interpo-
lation linéaire entre les valeurs maximale et minimale de la densité
2.3 Flux critique de flux sur la courbe :
q̇ = f  ∆ T sat 
Pour des systèmes fonctionnant à flux imposé, la connaissance
de la densité de flux maximal est d’un intérêt majeur pour éviter représentée en coordonnées logarithmiques.
toute transition vers le régime d’ébullition en film, qui entraînerait
une brusque augmentation de la température de la paroi. Le point de Leidenfrost correspond au flux minimal pour lequel
le film de vapeur est stable. En dessous de cette valeur, le flux est
Pour prédire le flux critique, différents modèles ont été déve-
trop faible pour assurer une production de vapeur suffisante pour
loppés. Les différentes étapes de la théorie classique du flux
qu’il n’y ait pas de contact du liquide avec la paroi. Cette densité
critique sont les suivantes :
de flux thermique minimale a été prédite par Berenson [3] qui a
— apparition d’une couche de vapeur sur la paroi chauffée. développé un modèle analytique pour une plaque horizontale :
Comme la vapeur est plus légère que le liquide qui la surmonte,
elle est instable avec la formation d’ondes à sa surface (dites σ g ( ρ – ρv ) 1/4
instabilités de Taylor), et l’interface se brise en différents points
d’où partent des colonnes de vapeur ;

q̇ min, h = 0,09 ρ v h v -------------------------------
( ρ + ρv ) 2  (32)

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Tableau 3 – Corrélations du flux critique pour différentes géométries de l’élément chauffant [8]
Géométrie Corrélation Domaine de validité

q̇ crit L
Plaque plane infinie - = 1,14
--------------- ----- > 30
λ
q̇ crit,Z
2 L
Petite paroi verticale de largeur q̇ crit 1,14 λ 9 < ----- < 20
ou diamètre L, de surface Sp - = -------------------D
--------------- --- avec λ D = 2 π 3 λ λ
q̇ crit,Z Sp

q̇ crit R
Cylindre horizontal de rayon R - = 0,89 + 2,77 exp  – 3,44 R / λ 
--------------- ----- > 0,15
λ
q̇ crit,Z

q̇ crit R
Grand cylindre horizontal de rayon R - = 0,90
--------------- ----- > 1,2
λ
q̇ crit,Z

q̇ crit – 1/4 R
0,15  -----  1,2
 
R
Petit cylindre horizontal de rayon R - = 0,94 -----
--------------- λ
q̇ crit,Z λ

q̇ crit – 1/4 H
0,15  ------  2,96
 
Petit ruban horizontal de hauteur H, orienté H
- = 1,18 ------
--------------- λ
verticalement (2 faces chauffées) q̇ crit,Z λ

q̇ c – 1/4 H
0,15  ------  5,86
 
Petit ruban horizontal de hauteur H, orienté H
- = 1,4 ------
----------- λ
verticalement (1 face isolée) q̇ c,Z λ

λ = longueur capillaire.

Pour des cylindres horizontaux de rayon R, Lienhard et La longueur caractéristique λcrit est la longueur d’onde critique
Wong [27] ont établi une corrélation du même type : correspondant à l’instabilité de Rayleigh-Taylor, telle que :
1/2


18

q̇ min = 0,515 ------------------------------------------------------- q̇ min, h
R/ λ  2 2 R / λ  2 + 1
(33)
σ

λ crit = 2π ----------------------------
 ρ – ρv  g 
Pour obtenir le coefficient d’échange correspondant à ce point, il Dans cette relation les propriétés thermophysiques du liquide et
suffit de calculer la surchauffe pariétale pour l’ébullition en film. de la vapeur sont calculées respectivement à Tsat et à (Tp + Tsat )/2.
Pour une grande gamme de diamètres de tubes horizontaux,
2.5 Ébullition en film Breen et Westwater [6] ont modifié l’expression donnée par
Bromley en introduisant comme grandeur caractéristique λD qui
est la longueur d’onde la plus dangereuse telle que :
Pour des grandes différences de températures entre le fluide et
la paroi, le film de vapeur sur la paroi chauffée est stable et λD = 3 λ crit
constitue la principale résistance thermique. Le problème du trans-
fert thermique peut alors être traité d’une façon analogue à la Selon la valeur de λD /D, on utilise l’une des expressions
condensation en film (Panday, [BE 8 238]). suivantes :
Les premières études expérimentales et analytiques, dues à — pour λD /D < 0,8 :
Bromley [7], sont basées sur l’équilibre des forces de pesanteur, de h film = 0,6 F λ D
–1/4
(36)
viscosité et de frottement agissant sur un élément de volume du
film présent autour d’un tube horizontal. Pour un tube de diamètre — pour 0,8 < λD /D < 8 :
D, il a calculé le coefficient d’échange :
hfilm = 0,6 FD –1/4 (37)
3 1/4
h film 
λ v ρ v  ρ  – ρ v  gh v ′
= 0,62 -------------------------------------------------------
D µ v ∆ T sat
-  (34) — pour λD /D > 8 :
λD
 
0,83
–1/4
avec h ′v = h v + 0,34c pv ∆ T sat (le dernier terme correspond à h film = 0,16 -------
- FλD (38)
D
la surchauffe de la vapeur),
3
λ v ρ v  ρ  – ρ v  gh v
′ 1/4
λv la conductivité thermique de la vapeur.
Cette expression ne prend en compte que l’échange conductif au
avec F =
 -------------------------------------------------------
µ ∆Tv sat
-

travers du film de vapeur sans échange radiatif.
Pour une paroi plane verticale, avec un écoulement de la vapeur
L’étude de l’ébullition en film sur une surface horizontale a été en régime laminaire, le coefficient d’échange local à la distance z
réalisée par Berenson [3], qui a proposé la relation suivante : à partir de laquelle apparaît l’ébullition en film s’écrit :
3 1/4 3


λ v ρ v  ρ  – ρ v  gh v ′
 λ v ρ v ( ρ  – ρ v ) gh v ′ 1/4
h film = 0,425 -------------------------------------------------------
λ crit µ v ∆ T sat
- (35)

h film = 0,707 --------------------------------------------------------
z µ v ∆ T sat
-
 (39)

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Lorsque la paroi est verticale, le régime d’écoulement de la


vapeur devient turbulent à partir d’une certaine hauteur.
.
Pour des cylindres verticaux de diamètre D, Hsu et Westwater [18] q (W/m 2)
ont établi une corrélation empirique pour le coefficient d’échange 106
moyen pour le cylindre :
Flux critique
2 5
µv 1/3
h film
 --------------------------------------------
3
λ v ρv ( ρ – ρv ) g
-
 = 0,002
0,6
Re v (40)
2
Le nombre de Reynolds de la vapeur est calculé par la relation :
105
˙
Re v = 4 M v /πD µ v
5
Le débit de la vapeur au sommet du tube de hauteur L est tel
que :
1,4 pression (bar)
˙ 2 14,8 7,9 4,1
M v = q˙ πDL/h v 28,6 21,7
n-pentane
Le domaine de validité de cette relation est 800  Re v  5 000 . 104
1 2 5 10 20 50 100
Ces relations sont applicables aux surchauffes relativement
∆Tsat (K)
modérées car elles ne prennent pas en compte les transferts radia-
tifs. Au-delà d’une température de l’ordre de 300 oC, la contribution
du rayonnement devient significative. Bromley [7] a suggéré de
Figure 13 – Influence de la pression sur l’ébullition nucléée, d’après [17]
calculer le coefficient d’échange total ainsi :
1/3

 
h film
h t = h film -------------
- + h rad ≈ h film + 0,75h rad (41)
ht
.
qcrit (W/m2)
σ  T p – T sat 
4 4
avec h rad = -------------------------------------------------------------------
- 4 × 106

 
1 1
------- + ------- – 1  T p – T sat 
εp ε
3
σ la constante de Stefan-Boltzmann (5,67 × 108 W · m–2 · K–4),
εp l’émissivité de la paroi et ε  celle du liquide, qui dans la plupart 2
des cas est égale à 1.

106
2.6 Effets paramétriques
0 0,2 0,4 0,6 0,8 1
2.6.1 Influence de la pression p/pcrit
Un des principaux facteurs agissant sur la courbe d’ébullition est
la pression. Pour un couple paroi-fluide, une augmentation de la
Figure 14 – Évolution de la densité de flux critique avec la pression
pression entraîne une diminution de la surchauffe, c’est-à-dire un
pour l’eau (pcrit = 221,9 bar), d’après [37]
décalage de la courbe d’ébullition vers la gauche (figure 13). Cela
correspond à une augmentation du coefficient d’échange. Le flux
critique dépend également fortement de la pression du fluide. Il
augmente avec la pression tant que celle-ci reste inférieure à un 2.6.3 Influence des gaz dissous
tiers de la pression critique ; au-delà il décroît notablement
(figure 14). Pour l’eau, la densité de flux maximale est de l’ordre de Lorsque des gaz dissous sont présents dans le liquide, il est
4 MW · m–2 pour une pression de 70 bar alors qu’à 1 bar elle est de possible d’observer des bulles de dégazage prématurément à
l’ordre de 1 MW · m–2. l’apparition de l’ébullition nucléée. L’ascension de ces bulles crée
des mouvements convectifs qui augmentent les échanges
thermiques.
2.6.2 Influence de l’état de surface
Une augmentation de la rugosité a pour effet de déplacer la 2.6.4 Influence de la taille et de l’orientation
courbe d’ébullition nucléée vers les faibles surchauffes de la paroi. de la paroi
Ainsi, la surchauffe correspondant au flux critique ∆Tmax est plus
faible alors que la surchauffe relative au point de Leidenfrost ∆Tmin Pour l’ébullition nucléée pleinement développée, la surchauffe
est inchangée (figure 15). L’écart ∆Tmax – ∆Tmin est d’autant plus de la paroi est indépendante des dimensions géométriques de la
élevé que la rugosité croît. En revanche, la rugosité n’a que peu surface. L’inclinaison de la paroi joue un rôle uniquement aux bas
d’influence sur la valeur des flux extrémaux. flux, sur les échanges en convection naturelle. Cependant, dans le
Cependant, en raison d’un vieillissement des surfaces, la cas d’une paroi horizontale orientée vers le bas, le coefficient
majeure partie du gain sur le coefficient d’échange due à la rugo- d’échange est très faible, ce qui implique que, dans un réservoir, le
sité disparaît dans le temps. flux critique apparaît préférentiellement sur la face supérieure.

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. papier émeri 320 .


q (W/m 2) q
papier émeri 60
poli grossier
poli miroir

Courbe d’ébullition
105 en film
θ croissant

Courbe limite pour un fluide


non mouillant (θ → 180°)
104

∆Tsat
10 20 50 100 200 500
∆Tsat (K) Figure 17 – Influence de la mouillabilité de la paroi
sur la courbe d’ébullition, d’après [8]

Figure 15 – Effet de la rugosité de la paroi pour l’ébullition


du pentane sur une paroi de cuivre, d’après [4]
nucléée n’est que peu modifiée (figure 16). En revanche, on note
une forte influence de la sous-saturation sur la densité de flux
critique. En effet, la vapeur émise par la paroi chauffée a tendance
à se condenser dès qu’elle rencontre le liquide sous-refroidi, ce qui
. facilite le retour du liquide vers la paroi chaude. Ivey et Morris [20]
q
ont postulé que le flux critique en condition de sous-saturation est
plus élevé qu’en condition de saturation de la quantité de chaleur
Ébullition sous-saturée
nécessaire pour porter le liquide sous-refroidi à saturation :
Ébullition saturée
g σ ( ρ – ρv ) 1/4


q˙crit = 0,16 ρ v h v ---------------------------------
ρv
2
-

(43)
ρ
 ------------------------------------------
c p T sat – T ,∞ 
 
0,75
1 + 0,1 -------
ρv   h v

L’ébullition de transition est également modifiée par la


sous-saturation du fluide, mais il existe peu de données à ce sujet.
Ébullition Ébullition Le coefficient d’échange est augmenté pour l’ébullition en film,
nucléée en film
mais cet effet tend à disparaître lorsque la contribution des
Convection Zone de
naturelle transition échanges radiatifs devient grande.

2.6.6 Influence de la mouillabilité de la paroi


∆Tsat
Pour un liquide non mouillant (par exemple, eau sur une paroi
en Téflon), la courbe d’ébullition est représentée sur la figure 17.
Figure 16 – Effet de la sous-saturation sur la courbe d’ébullition
Il subsiste des incondensables ou de la vapeur dans des défauts ou
des cavités de la paroi, ce qui favorise le déclenchement de l’ébul-
lition. La vapeur générée a tendance à s’étaler sur la paroi pour
Ainsi, le flux critique est influencé par l’orientation de la paroi. Il former une couche de vapeur (coalescence latérale), ce qui peut
diminue de 25 % environ pour une paroi verticale par rapport à une engendrer une transition directe vers l’ébullition en film. Ainsi, le
paroi horizontale orientée vers le haut et ceci est d’autant plus flux croît de façon monotone avec la surchauffe. L’augmentation de
marqué que la taille de la surface est plus grande. Chang et You [9] l’angle de contact se traduit par une diminution du flux critique.
ont proposé la relation suivante basée sur des données expéri-
mentales obtenues avec du FC-72 (C6F14) pour une paroi faisant un
angle φ avec l’horizontale : 2.6.7 Influence de l’accélération de la pesanteur
L’accélération de la pesanteur, en particulier dans le cas de
q˙ crit, 0
- = 1 – 0,001 2 φ tan ( 0,414 φ ) – 0,122 sin ( 0,318 φ )
---------------- (42) niveaux de gravité réduits, ne modifie pas notablement les coef-
q˙ crit, φ ficients d’échange en ébullition nucléée. En état de gravité réduite,
les bulles atteignent un volume plus grand qu’en état de pesanteur
terrestre mais ont tendance à stagner sur la paroi. Cette présence
2.6.5 Influence de la sous-saturation d’une grande quantité de vapeur à la paroi abaisse le flux critique.
Il est donc nécessaire d’avoir recours à d’autres moyens pour aug-
Lorsque le liquide loin de la paroi chauffée est à une température menter le flux critique tels l’application d’un champ électrique
inférieure à la température de saturation, la courbe d’ébullition (Zaghdoudi [42]).

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3. Ébullition des mélanges Encadré 1 – Grandeurs caractérisant les quantités


relatives de chaque phase
De nombreuses applications industrielles impliquent l’utilisation
de mélanges de deux ou plusieurs corps purs. L’ébullition est ~
● Concentration molaire c i du constituant i :
largement utilisée pour les mélanges à des fins de séparation des
corps, par exemple pour la récupération de solvants, pour la dis- ρi
tillation de l’eau de mer, dans les procédés pétrochimiques, etc. c~i = --------
~-
Pour les mélanges, les transferts de chaleur et de masse sont étroi- Mi
tement liés, ce qui ralentit généralement les transferts de masse
interfaciaux. Même pour le mélange le plus simple, c’est-à-dire le ● Concentration molaire totale d’un mélange de n consti-
mélange binaire, les mécanismes de changement de phase sont tuants :
complexes, ce qui rend difficile la prédiction des transferts de n
~ ~
chaleur. Bien que dans la plupart des cas, les coefficients c = ∑ ci
d’échange soient réduits par rapport aux corps purs, on peut avoir i=1
des améliorations pour certains fluides.
~
● Fraction molaire x i du liquide pour le constituant i :
~
3.1 Équilibre de phases des mélanges ~ ci
x i = -----
~-
c
3.1.1 Définitions ~
● Fraction molaire y i de la vapeur pour le constituant i :
Pour caractériser les quantités relatives de chaque phase, on
~
définit différentes grandeurs (encadré 1). Certaines sont basées sur ~ ci
la notion de mélange idéal selon laquelle chaque constituant d’un y i = ------
~-
c
mélange n’a pas d’interactions avec les autres constituants du
mélange, en particulier chaque gaz se comporte comme un gaz ● Pression partielle du constituant i pour un mélange idéal
parfait. Cela se traduit par la linéarité des comportements. (loi de Dalton) :
~
pi = yi p
3.1.2 Diagramme d’équilibre de mélanges binaires ~
avec pi v = ni R T
Les différences de comportement d’un mélange par rapport à un
corps pur proviennent des conditions d’équilibre des phases. Elles ● Pression partielle du constituant i dans une solution très
peuvent être représentées sur un diagramme d’équilibre des diluée (i majoritaire) (loi de Raoult) :
phases : température en fonction de la composition du mélange. Ce
diagramme est donné sur la figure 18 pour un mélange binaire sans ~ 0
pi = xi p i
azéotrope. L’ordonnée correspond à la température et l’abscisse à
la fraction molaire du composé le plus volatil (composé qui a la 0
avec pi la pression de vapeur saturante du constituant i pur
température de vapeur saturante la plus faible pour une pression à la même température.
donnée ou la pression la plus élevée). La courbe supérieure, dite
courbe de rosée, sépare la phase vapeur et le fluide diphasique. La ● Pression partielle du constituant i minoritaire (loi de Henry) :
courbe inférieure, dite courbe de bulles, est la frontière entre le ~
liquide et le fluide diphasique. Au cours d’un chauffage isobare à pi = Ki xi
partir d’un point N à T N , la phase vapeur apparaît pour le point B
à la température T B situé sur la courbe de bulles. La vapeur est alors avec Ki le coefficient de partage pour le constituant i.
riche en constituant le plus volatil. Pour la température T M , pour
● Volatilité du constituant A ou B dans un mélange binaire de
laquelle les deux phases coexistent, la fraction molaire de la phase constituants A et B :
~ ~
vapeur y M est plus élevée que celle de la phase liquide x M. Au fur pA
— volatilité de A = --------
~-
et à mesure du changement de phase, le liquide et la vapeur xA
s’enrichissent en constituant le moins volatil. Pour le point R, situé
pB
sur la courbe de rosée et correspondant à la vaporisation totale du — volatilité de B = --------
~
fluide, la fraction molaire de la vapeur est égale à celle du liquide xB
initial.
Un tel diagramme d’équilibre est utile pour aider à l’analyse des ● Volatilité relative :
différents mécanismes apparaissant au cours de l’ébullition en paroi. ~
pA xB
Pour un mélange binaire présentant un azéotrope (cas cou- α = ----------------
-
~
pB xA
ramment rencontré pour les fluides frigorigènes), le diagramme
d’équilibre est totalement différent (figures 19 et 20) ([11]. Pour ces On peut en déduire :
mélanges, il existe un composé dont la fraction molaire des deux ~ ~
phases est identique. Cette composition peut correspondre soit à yA xA
-------
~ - = α --------
~ -
un maximum (figure 19), soit à un minimum de la température yB xB
(figure 20). Ainsi, lors du changement de phase, il n’y a aucune
évolution de la composition ; le composé se comporte comme un Ainsi, pour un mélange idéal, la volatilité relative représente
corps pur ayant les propriétés du mélange car il n’y a aucun effet le rapport des pressions de vapeur saturante des constituants
limitant dû aux transferts de masse. De tels mélanges sont appelés A et B à une même température.
azéotropes ou mélanges azéotropiques. Selon la composition ini- ~
tiale du mélange, la présence de l’azéotrope interdit l’obtention ● Coefficient de diffusion moléculaire D
d’un corps pur.

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3.2 Apparition de l’ébullition


T p = constante pour un mélange
3.2.1 Nucléation dans un mélange binaire
Courbe de rosée
Il a été montré au paragraphe 1.3 que la formation de la vapeur
peut avoir lieu lors d’un équilibre stable (interface plane) ou lors
y~ – x~ R Vapeur d’un équilibre métastable (interface courbe). La relation (7) reste
C
valable pour un mélange :
Courbe de bulles
∆Tbr
TM
M 2σ
p v – p  = ---------
B
r*
TB
Pour une interface courbe, la nucléation nécessite la présence
TN N
d’une surchauffe du liquide par rapport à l’interface plane. Comme
pour un corps pur, la surchauffe ∆T est inversement propor-
Liquide tionnelle au rayon d’équilibre r * de la bulle. Pour un mélange
binaire de constituants A et B, la relation entre ces deux grandeurs,
~ ~ donnée par Stephan [37], est la suivante :
~ ~ ~ ~
0 xM x yM y 1 x, y
~
2 σ v v T sat ∆T

- 1 + ------------ ω
r * = ------------------------------------------------------------------------------------------------
T sat 
 
Figure 18 – Diagramme d’équilibre d’un mélange binaire ~
~ ~ ~ 1 ∂ h
h v 1 – y – x  ---------- ~
h
 --------
∂x
~- T, p
∆T (44)
v

T
~ ~ ~ ~ ~ ~
y v A, v – v A,  + 1 – y  v B,v – v B, 
avec ω = ------------------------------------------------------------------------------------------------
~ - T sat
σ vv
~
∂ σ vv
 
~ --------- ----------------------------------------------------------------------------------------------
-
y
∂T ~ ~ ~
y  v A,v – v A,  +  1 – y   v B, v – v B, 
~ ~ ~
~ ~ x
x y
~
x ∆T
Dans la plupart des cas, on peut négliger le terme ------------ ω devant
T sat
~
~ ~ 1 ∂--------
 
h
1 ainsi que le terme ( y – x ) ----------
~ ~- qui est bien inférieur à 1.
h v ∂ x T, p
L’équation (44) peut alors s’écrire :
~ ~ y~
x,
x azéotrope ~
2 σ v v T sat
r * = ----------------------------
~ - (45)
Figure 19 – Diagramme d’équilibre d’un mélange binaire avec azéotrope h v ∆T
à point bas
Cette équation est analogue à l’équation (12) du corps pur. Le
rayon d’équilibre dépend alors fortement des propriétés du
mélange, en particulier de la tension superficielle.
T

3.2.2 Croissance des bulles


~
y La vitesse de croissance d’une bulle est fonction des mêmes
~ grandeurs que pour un corps pur. Mais pour un mélange binaire,
x l’enrichissement en constituant le plus volatil de la vapeur entraîne
~
y
un appauvrissement en ce constituant du liquide au voisinage de
l’interface. Pour que la vaporisation se poursuive, le composant le
~
x plus volatil doit diffuser depuis le liquide vers l’interface, ce qui
réduit la vitesse de croissance des bulles. Du fait de ce transfert de
masse, la température de saturation à l’interface de la bulle est
supérieure à celle du liquide initial. Il s’ensuit un abaissement de
la surchauffe nécessaire à la nucléation ∆T + par rapport à celle que
l’on aurait en absence de diffusion de masse ∆T . Cette réduction,
représentée sous forme adimensionnelle ∆T +/∆T pour le couple
~
x azéotrope
~ y~
x, eau-éthanol (figure 21), est d’autant plus importante que la dif-
férence des fractions molaires du composant le plus volatil entre
les deux phases est plus élevée. Cette diminution de la surchauffe
Figure 20 – Diagramme d’équilibre d’un mélange binaire avec azéotrope s’accompagne d’une diminution de la vitesse de croissance des
à point haut bulles.

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∆T +/∆T .
ln q

0,8 Mélange

0,6 Corps pur


~ – x~
y

0,4

ln ∆Tsat
0,2

Figure 22 – Courbes d’ébullition pour un corps pur et pour un mélange


0
0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 x~
Le flux critique peut être supérieur ou inférieur à celui du corps
pur alors que le point de Leidenfrost est plus élevé. Par contre,
Figure 21 – Influence de la diffusion de masse sur la surchauffe pour l’ébullition en film, dès que la contribution du phénomène
et la croissance d’une bulle pour un mélange eau-éthanol, d’après [37] radiatif est significative, les courbes sont confondues.
Il est possible de déterminer les coefficients d’échange d’un
mélange binaire en ébullition nucléée à partir des coefficients
Pour une bulle sphérique, la vitesse de croissance dépend du coef- d’échange des corps purs qui le composent. On introduit une
~
ficient de diffusion moléculaire D du constituant le plus volatil [45] : surchauffe « idéale » ∆Tid et/ou un coefficient d’échange « idéal »
hid . La surchauffe idéale est définie comme une moyenne des sur-
~ ~ ~ chauffes des deux composants purs A et B considérées pour une
ρ
   ----------------
~ ~-  -----------------------------------------
x0 – x D
R˙ = ------- ~ 1/2
(46) même densité de flux :
ρv y – x ( π/3 ) 1/2 D t 
~ ~
Du fait de la limitation de la vitesse de croissance par la dif- ∆T id = x ∆T A + ( 1 – x ) ∆T B (50)
fusion, à leur détachement les bulles ont un diamètre plus faible
pour un mélange que pour un corps pur. Thome [46] a montré que, À l’aide de l’équation (50), on peut définir un coefficient
pour des bulles dont le diamètre de détachement est contrôlé par d’échange idéal en fonction des coefficients d’échange de chaque
l’inertie, le rapport entre le temps de croissance d’une bulle pour constituant pur, évalué dans les mêmes conditions de pression et
un mélange binaire et celui pour le corps pur équivalent est : flux :
~ ~
1 x 1–x
t mél ---------- = --------- + -------------- (51)
- = Sn 2/5
----------- (47) h id hA hB
t cp
1 ∆T id 1 ∆T A 1 ∆T B
La définition du nombre de Scriven Sn est la suivante : avec ---------- = -------------, --------- = -----------
-, -------- = -----------
-
h id q ˙ h A q˙ h B q˙
–1

      
1/2 Le coefficient d’échange réel du mélange hmél est inférieur au
~ ~ a c p ∂ T- (48)
Sn = 1 – ( y – x ) ------
~- ---------- --------
~ coefficient d’échange idéal. Dans la plupart des cas, le rapport
D h v ∂x p
hmél /hid le plus faible est obtenu pour la différence de températu-
~ res ∆Tbr maximale (différence de températures entre les points de

    
∂T pT K–1 y rosée et de bulles pour la fraction molaire du liquide, notée sur la
avec ---------
~ = – ----------------- -----------~
--- et K = ----
~-
∂x p ρv h v 1–x x figure 18) et pour la plus grande différence de fractions molaires
~ ~
entre les deux phases y – x . Cette réduction du coefficient
Ainsi, pour un mélange il y a diminution du diamètre des bulles d’échange peut s’expliquer par la non-linéarité des propriétés ther-
et de leur temps de croissance. Comme les bulles ont un faible mophysiques du mélange avec la composition, par la variation de
diamètre lors de leur détachement, elles continuent à croître après la température de saturation avec la composition et par le transfert
leur détachement. de masse.
La plupart des corrélations permettant de calculer le coefficient
d’échange du mélange à partir du coefficient d’échange idéal,
3.3 Transferts de chaleur en ébullition donné par l’équation (51), peuvent se mettre sous la forme :
libre pour un mélange
h mél 1
------------- = --------------- (52)
La courbe d’ébullition d’un mélange binaire est décalée vers la h id 1+C
droite par rapport au corps pur, ce qui traduit une dégradation des
échanges thermiques (figure 22). On constate que l’apparition de (0)

l’ébullition nucléée nécessite une différence de température ∆T La valeur du coefficient C fournie par différents auteurs est don-
plus élevée : née dans le tableau 4. Dans certaines de ces relations, intervient la
différence de températures ∆Tbr . Toutes ces corrélations ne peu-

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Tableau 4 – Différentes expressions du coefficient C de l’équation (52) pour calculer le coefficient d’échange
en ébullition pour un mélange binaire
Auteurs Valeur de C Remarques
~ ~ p en bar, A coefficient fonction des composants
Stephan et Körner [35] A | y – x | ( 0,88 + 0,12p ) (= 1,4 pour le mélange acétone/eau)

∆T sat ~ ~
 

Schlünder (1982) [34] --------------
∆T id β  ρ  h v
-  y – x  1 – exp ------------------------- β  = 10– 4 à 3 × 10– 4 m · s– 1

∆T br
 

Thome et Shakir [39]
∆T id 
- 1 – exp -------------------------
-------------
β  ρ  h v
β  = 2 × 10– 4 m · s– 1

∆T br
-  0,25 + 0,45  q̇ ⋅ 10  
–5
Inoue et Monde [19] -------------
∆T id

2
∆T br – 60 q˙ ρν
  
1⁄4
Fujita et Tsutsui [15]
∆T id  
- 1 – exp ----------------- --------------------------------
-------------
ρv h v σ g ( ρ – ρv )

vent s’appliquer que pour des densités de flux inférieures à celle Pour analyser l’évolution du flux critique, Lienhard et Keeling [26]
du point critique le plus faible des deux corps purs considérés ont introduit un « paramètre caractéristique de l’effet de la
puisque dans le terme hid , les coefficients hA et hB correspondent convection » I défini par :
à une même valeur de la densité de flux. Pour des flux supérieurs ρ σ L
au flux critique le plus faible, Cioulachtjian et Lallemand [10] ont
proposé de déterminer le coefficient d’échange par la relation : µ
2
I = ---------------
-

~ ~ avec L une dimension caractéristique, qui dépend de la géo-
1 x 1–x
------------- = --------- + -------------- (53) métrie de l’échantillon.
h mél hA hB
On définit une grandeur caractéristique adimensionnelle L′ telle
Les coefficients hmél , hA et hB sont pris pour un même flux que :
g ( ρ – ρ v ) 1/2
réduit q̇/q̇ crit .
Le flux critique pour un mélange peut être soit supérieur, soit
 σ 
L′ = L ----------------------------
-

inférieur à celui des constituants purs. Les corrélations établies Pour des valeurs de L ′ et I élevées (L ′ ≈ 50, I ≈ 1 500), le flux
pour les corps purs ne sont plus applicables, même en considérant critique peut être réduit par rapport à ceux des corps purs.
les propriétés du mélange. L’un des facteurs responsables de cette Cependant, il ne sera pas inférieur à 0,5q̇ crit,Z (densité de flux
modification est la présence de la diffusion qui réduit la vitesse de critique donnée par Zuber).
croissance et le diamètre de départ des bulles, ce qui augmente le
flux critique. Dans ce cas, le facteur d’augmentation doit dépendre
~ ~
de | y – x |. Ensuite, du fait d’une température d’ébullition plus éle-
vée que celle du liquide initial, le liquide peut être considéré 4. Ébullition en milieu confiné
comme localement sous-refroidi, ce qui se traduit par une dépen-
dance du nombre de Jakob, défini comme ρ  c p ∆T br / ρ v h  v . Ces dernières années, de nombreuses recherches ont été
Enfin, la convection Marangoni, liée à la variation de la tension consacrées à des études sur les transferts thermiques mono-
superficielle avec la fraction molaire, modifie également le flux cri- phasiques en microcanaux, pour réaliser un refroidissement
tique du mélange. En effet, la tension de surface augmente avec la intense. Puis une grande partie des recherches a été progres-
fraction molaire du constituant le moins volatil, ce qui augmente sa sivement dévolue à l’ébullition convective en microcanaux. Ceci est
valeur au voisinage de l’interface, en particulier près de la ligne tri- essentiellement lié à l’utilisation de l’ébullition afin d’intensifier les
ple où l’évaporation est la plus intense. Fujita et al. [14] ont échanges thermiques et évacuer des densités de flux importantes.
considéré que cette convection Marangoni est le phénomène Les transferts thermiques au cours de l’ébullition peuvent être
prépondérant : notablement modifiés si l’ébullition a lieu pour un fluide, qui est
confiné au voisinage de la paroi chauffée, aussi bien pour la phase
q˙ crit, mél = q˙ crit, Z  1 ± 4,18 × 10 Ma 
–4 0,68
(54) liquide que pour la phase vapeur.
Pour étudier les transferts avec changement de phase
Le nombre de Marangoni est défini par : liquide-vapeur aux petites échelles et prendre en compte les parti-
cularités qui en découlent, il faut préciser quelles sont ces échelles.
∆σ σ 1/2

ρ v g ( ρ – ρv )
2 
Ma = --------------- ----------------------------
 Pr Kandlikar et Grande [22] ont proposé la classification suivante,
basée sur des considérations de raréfaction moléculaire et sur
certains résultats en écoulement diphasique dans des canaux de
La variation ∆σ = σC – σB est définie sur la figure 18. Pour déter- faible diamètre :
˙ — canaux conventionnels : Dh > 3 mm
miner la densité de flux critique de Zuber, q crit,Z , qui intervient
— minicanaux : 3 mm  D h  200 µm
dans l’équation (54), il faut considérer les propriétés du mélange à
la concentration initiale. — microcanaux : 200 µm  D h  10 µm .

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Par la suite, nous nous intéresserons principalement aux espa- moyen moléculaire λ augmente lorsque la pression diminue. Cette
ces ou canaux dont la dimension caractéristique varie entre 10 µm limite est généralement caractérisée à partir du nombre de
et 1 mm. Knudsen, défini par :
Lorsque les dimensions caractéristiques diminuent, on est
confronté à la connaissance des phénomènes à prendre en compte λ 1 µ π
Kn = --------- = --------- ---------------------- (55)
Dh Dh
dans les modèles, aux conditions aux limites, etc. En effet, la ρ 2R˜ T
grande augmentation du rapport surface/volume ou surface/ masse
affecte les bilans de masse, de quantité de mouvement et d’éner- Il peut aussi être écrit en fonction du nombre de Reynolds rap-
gie. Certaines approximations usuelles dans les dimensions centi- porté à la dimension caractéristique Dh du système et au nombre
métriques ne peuvent plus être faites et il faut considérer des effets de Mach M de l’écoulement :
négligeables à l’échelle macroscopique.
M
Kn Dh ≈ -------------
- (56)
Re Dh
4.1 Effets importants aux dimensions Comme le nombre de Knudsen dépend de la vitesse du fluide et
millimétriques de la pression, il évolue avec la longueur du canal car la pression
chute avec les forces visqueuses. L’accélération du fluide modifie le
Dans la littérature, un certain nombre d’effets ont été étudiés gradient de pression avec comme conséquence une variation non
pour expliquer les différences entre les résultats aux échelles linéaire de la pression. Ceci entraîne une augmentation de Kn tout
microscopiques et macroscopiques : prépondérance de certaines au long du tube. Cependant, cet effet n’est sensible que pour
forces sur les interfaces, rôle des forces électrostatiques, effet de la
Kn Dh ≈ 3 à 10 . On peut l’observer pour des microcanaux de
raréfaction des gaz, de la rugosité des parois, de la variation des
propriétés, effet d’entrée, rôle de la conduction de la paroi, pré- dimension inférieure à environ 10 µm.
cision des mesures, etc.
4.1.3 Influence des conditions aux limites
4.1.1 Forces contrôlant l’ébullition Du fait des forts gradients de pression dans les microcanaux, il
en milieu confiné est nécessaire d’avoir des canaux courts et des rapports L/D plus
Les différentes forces agissant sur l’interface liquide/vapeur faibles que pour des canaux traditionnels. Les effets d’entrée sont
d’une bulle se développant dans un microcanal ont été présentées également modifiés.
par Kandlikar [23]. Ce sont principalement les forces dues à la Les microcanaux sont souvent usinés dans des matériaux métal-
variation de quantité de mouvement lors de l’évaporation, l’inertie, liques dont la conductivité thermique est élevée. En particulier dans
la tension superficielle et les forces visqueuses. le cas du cuivre, du fait de sa forte conductivité, la conduction
En raison de la différence de masse volumique entre les deux longitudinale dans la paroi n’est pas négligeable, ce qui ne permet
phases, la vitesse de la vapeur à l’interface est bien supérieure à la pas d’imposer une condition aux limites uniforme. Or, cette
vitesse du liquide. La variation de quantité de mouvement qui condition de paroi a une influence notable sur les transferts ther-
résulte de l’évaporation est à l’origine d’une force à l’interface. miques, d’autant plus qu’une partie des échanges a lieu dans la
Celle-ci est d’autant plus élevée que l’on est proche de la paroi zone d’entrée. Une autre conséquence est une mauvaise
chaude en raison d’une vitesse de vaporisation plus grande dans connaissance des températures locales de paroi, qui ne peuvent que
la zone de la ligne de contact du liquide avec la paroi. difficilement être mesurées et doivent être estimées à partir de
bilans.
Alors que la force due à l’inertie joue un rôle en milieu confiné,
la force gravitationnelle est souvent négligeable. Les forces qui ont De ce fait, une évaluation des coefficients d’échange est délicate.
une importance significative sont les forces de capillarité, propor- La voie expérimentale nécessite des mesures locales qui ne sont
tionnelle à σ cos θ, et les forces visqueuses, proportionnelles à pas accessibles directement. Un autre problème pour évaluer ces
µ u . coefficients d’échange locaux provient de l’imprécision sur la
valeur des dimensions géométriques.
Du fait d’une ligne de contact étendue entre l’interface
liquide-vapeur et la paroi, des forces intermoléculaires d’adhésion
apparaissent dans les zones d’accrochage du film liquide sur la
paroi et sont responsables du maintien du film fin à la paroi. La
4.2 Configurations d’écoulement
contribution de cette zone au phénomène d’évaporation est
significative. Comme pour l’ébullition en canaux classiques, les transferts
thermiques en ébullition confinée dépendent de l’aspect hydro-
Du fait de son potentiel électrique de surface, une paroi isolante, dynamique. Trois régimes d’ébullition ont été décrits : ébullition
du type verre, quartz, plastiques, peut être porteuse de charges nucléée à bulles isolées déformées, bulles coalescées, assèche-
électrostatiques. Si un tel solide est au contact d’un liquide chargé, ment partiel et temporaire. Le régime d’ébullition nucléée à bulles
même d’une faible quantité d’ions, les charges électrostatiques du isolées déformées se produit aux faibles densités de flux. Sous
solide attirent les ions contraires du liquide et créent un champ l’effet du confinement, les bulles isolées acquièrent une forme
électrique dans le liquide. Les ions du liquide forment alors une aplatie. La déformation est d’autant plus nette que l’espace confiné
couche au voisinage de la paroi, dénommée double couche élec- est plus étroit. Pour un canal vertical, la vitesse d’ascension des
trique, qui induit une force de volume supplémentaire. La modifi- bulles est plus importante que dans le cas de l’ébullition libre sous
cation du profil de vitesses en présence d’une double couche l’effet de la réduction de la section de passage du mélange dipha-
électrique augmente les frottements pariétaux et dégrade les trans- sique. Lorsque la densité de flux augmente, c’est le régime d’ébul-
ferts thermiques. lition nucléée à bulles coalescées, caractérisé par de grosses bulles
aux formes très irrégulières. Sous l’effet du brassage intense du
4.1.2 Effets de raréfaction fluide diphasique dans le canal, les bulles isolées se regroupent
pour former des masses de vapeur, qui sont écrasées sous l’effet
Si la dimension du milieu confiné est proche du libre parcours du confinement. Enfin, à l’approche du flux critique, le régime
moyen moléculaire en phase gazeuse, on ne peut plus considérer d’assèchement partiel se produit. Il est caractérisé par une masse
le milieu comme continu. La limite de validité de l’hypothèse d’un de vapeur unique recouvrant la quasi-totalité de la paroi. Cette
milieu continu dépend de la pression puisque le libre parcours poche de vapeur est périodiquement expulsée brutalement pour

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confinement. La transition du régime des bulles isolées déformées


vers les bulles coalescées est représentée par la courbe 0,25 q˙crit
*
q/qcrit,

1 et la transition des bulles coalescées vers l’assèchement partiel par


. . .
. .

q*
crit = qcrit, e /qcrit, Assèchement la courbe 0,6 q˙crit
* . Aux faibles nombres de Bond, la dimension du
0,8 partiel
. canal est inférieure au diamètre de détachement des bulles, il en
0,6 q*
crit résulte un régime de bulles coalescées. Pour des nombres de Bond
0,6 plus grands, il n’y a pas d’interactions des bulles avec la paroi de
Ébullition nucléée
à bulles coalescées confinement.
0,4 .
0,25 q*
crit
0,2 Ébullition nucléée 4.3 Transferts de chaleur
à bulles isolées

0
déformées en ébullition confinée
0,1 1 10 Bo
En ébullition confinée, on obtient une amélioration des échanges
bulles isolées déformées bulles coalescées zones asséchées
thermiques aux faibles flux lorsque l’épaisseur du milieu confiné
diminue. Cette intensification s’accompagne d’une diminution de
Figure 23 – Configurations d’écoulements en milieu confiné, d’après [5] la densité de flux critique, ce qui constitue une limitation à l’utili-
sation de cette technique d’amélioration des échanges. Aux forts
flux, en particulier pour des espaces confinés étroits, le coefficient
d’échange est inférieur à celui obtenu en ébullition libre.
Un exemple de courbe d’ébullition représentant la densité de
.
q (W/cm2) flux pariétale en fonction de la surchauffe de la paroi est repré-
25
senté sur la figure 24 pour un canal vertical étroit d’épaisseur e
variable (hauteur de la paroi : 120 mm, pentane, p = 1 bar). En
régime de bulles isolées, observable aux faibles flux et/ou pour
Libre une distance entre parois e relativement grande, la taille des bul-
20 les, leur croissance et leur ascension ne sont pas affectées par
l’effet du confinement. La coalescence entre bulles n’apparaît
e = 2,4 mm généralement qu’en haut du canal. Pour des espacements entre
plaques plus faibles ou des flux plus élevés, la taille d’une bulle
15 devient supérieure à la dimension du canal, elle est écrasée et
aplatie, ce qui entraîne une augmentation de sa taille parallèle à la
e = 1,2 mm
e = 0,8 mm paroi. Lorsque e diminue, deux bulles adjacentes peuvent coales-
cer. Dans ces conditions, la poche de vapeur a plus de difficultés à
10 e = 0,3 mm quitter la paroi, ce qui augmente la période d’ébullition. Aux forts
flux, les bulles coalescent violemment dans toutes les directions,
e = 0,4 mm
ce qui favorise de plus en plus l’assèchement. Il existe une dimen-
sion de canal optimale pour laquelle l’amélioration des transferts
5
thermiques est maximale. En dessous de cette valeur, les effets vis-
queux deviennent prépondérants par rapport aux effets gravitaires.
Afin de caractériser l’intensification des transferts thermiques,
0 les coefficients d’échange relatifs moyennés sur la hauteur du
0 5 10 15 20 25 canal ont été représentés sur la figure 25 en fonction du rapport
∆Tsat (K) q̇/q̇ crit et les différents régimes observés sont localisés (Stutz et
Lallemand [38]. Le rapport (h – hlibre)/hlibre est maximal pour le
régime de bulles isolées déformées. Il atteint des valeurs proches
Figure 24 – Courbes d’ébullition pour un canal vertical étroit, d’après [1] de 8 en présence d’une épaisseur de confinement optimale de
0,2 mm. Il décroît ensuite pour le régime de bulles coalescées et
devient nul, voire négatif au cours du régime d’assèchement.
laisser place au passage d’une masse de liquide permettant de
maintenir stable la température moyenne de la paroi. Des visualisations avec une caméra rapide permettent de mettre
en évidence l’apparition d’instabilités, dont la fréquence est de
Ces configurations d’écoulement dépendent notablement, d’une quelques hertz. Elles traduisent l’alternance entre des passages
part, de la dimension caractéristique e du canal, qui conditionne d’un front liquide et des périodes d’assèchement. Leur origine est
l’interaction entre les bulles et la paroi de confinement, d’autre liée au fort taux d’expansion des bulles qui ne peut avoir lieu selon
part, de la densité de flux. Une carte proposée par Bonjour et la normale à la paroi du fait de la paroi de confinement (Ait-Ameur
Lallemand [5] est basée sur le nombre de Bond : et al. [1]).
2 1⁄ 2
Bo = [ g ( ρ  – ρ g )e / σ ] Corrélativement à l’amélioration des échanges thermiques avec
le confinement, on observe une diminution notable du flux criti-
et sur le rapport entre la densité de flux et la densité de flux que. Cependant, le flux critique n’est pas atteint simultanément sur
critique observée en ébullition libre (figure 23). La limite supé- toute la hauteur du canal, il apparaît prématurément au sommet du
rieure de la carte est le lieu des points définis par le rapport : canal et se propage ensuite régulièrement vers le bas. L’aug-
mentation du taux de vide avec la hauteur favorise en effet l’assè-
* = q̇ crit,e /q̇ crit, ∞
q̇crit chement de la surface à ce niveau. À l’inverse, pour des épaisseurs
de canal plus grandes, le flux critique apparaît tout d’abord au
entre la densité de flux critique mesurée pour une épaisseur du niveau de la base et se propage progressivement vers le haut avec
canal donnée et la densité de flux critique atteinte en absence de l’augmentation du flux imposé.

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Notations et symboles
(h – hlibre)/hlibre

10 Symbole Unité Définition

8 h J · kg–1 Enthalpie massique


0,2 mm
h v J · kg–1 Chaleur latente de vaporisation
6 massique

4 H J Enthalpie

0,8 mm 0,1 mm j m· s–1 Vitesse superficielle


2
0,4 mm
Ja Nombre de Jakob
0
1,5 mm k J · K–1 · molécule–1 Constante de Boltzmann

–2 Kn Nombre de Knudsen
0 0,2 0,4 0,6 0,8 . . 1
 m Longueur
q/ qcrit, e
L m Dimension
m kg Masse d’une molécule
~
M kg · mol–1 Masse molaire
˙
Bulles Bulles Assèchement M kg · s–1 Débit massique
déformées coalescées partiel
isolées Ma Nombre de Marangoni
n mol · m–3 Nombre de moles par m3
Figure 25 – Évolution du coefficient de transfert relatif moyen
en fonction du rapport q̇/q̇ crit ni mol Nombre de moles du
constituant i

N molécules · m–3 Nombre de molécules par unité


de volume

Nu Nombre de Nusselt basé sur L


Notations et symboles (hL /λ)
p Pa Pression
Symbole Unité Définition
pi Pa Pression partielle du constituant
a m2 · s–1 Diffusivité thermique i

A m2 Aire Pr Nombre de Prandtl (ν /a)


Bo Nombre de Bond q̇ W · m–2 Densité de flux
cp J· kg–1 · K–1 Capacité thermique massique r m Rayon

Csf Coefficient fonction du couple R m Rayon de courbure


paroi/fluide
˙ m · s–1 Vitesse de croissance
D m Diamètre R
~ Coefficient de diffusion R˜ J · mol–1 · K–1 Constante molaire du gaz
D m2 · s–1 parfait
moléculaire
e m Épaisseur du canal Re Nombre de Reynolds ( ṁD/ µ )
E J Énergie libre de surface S J · K–1 Entropie
f J · kg–1 Énergie libre massique T K Température
s–1 Fréquence
t s Temps
F J Énergie libre
Facteur d’énergie Tsat K Température de saturation

N Force ∆T  K Surchauffe du liquide


( T  – T sat )
g J · kg–1 Enthalpie libre massique
∆T sat K Surchauffe de la paroi
m· s–2 Accélération de la pesanteur (Tp – Tsat )
G J Enthalpie libre s J · kg–1 Entropie massique

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Notations et symboles Liste des indices

Symbole Unité Définition b Bulle


C Cavité
S J Entropie
cp Corps pur
Sn Nombre de Scriven
crit Critique
u J · kg–1 Énergie interne massique ext Externe
u m · s–1 Vitesse film Film
U J Énergie interne g Gaz incondensables
v m3 · kg–1 Volume massique h Horizontal
V m3 Volume id Idéal
x̃ Fraction molaire du liquide int Interne
ỹ Fraction molaire de la vapeur  Liquide
z m Cote m Moyen
Coefficient de transfert de max Maximum
β m · s–1 masse
mél Mélange
ε Émissivité
min Minimum
λ m Longueur capillaire
nucl Nucléation
W · m–1 · K–1 Conductivité thermique p Paroi
m Libre parcours moyen rad Radiatif
µ Pa · s Viscosité dynamique s Solide, surfacique
ν m2 · s–1 Viscosité cinématique sat Saturation
ρ kg · m–3 Masse volumique t Total
σ N· m–1 Tension superficielle v Vapeur, volumique
θ Angle de contact Z Zuber

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