Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Ébullition libre
par Monique LALLEMAND
Ingénieur, Docteur-ès-Sciences
Professeur des Universités à l’Institut National des Sciences Appliquées de Lyon
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur BE 8 235 − 1
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
BE 8 235 − 2 © Techniques de l’Ingénieur
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur BE 8 235 − 3
Ligne σ
triple r*
Vapeur θ
P
Liquide Pv , Tv
σsv oσs
sl
Solide
T = Tv = T
Figure 3 – Bilan des forces de tension superficielle Figure 4 – Bulle de vapeur en équilibre avec le milieu environnant
pour une goutte déposée sur un support solide
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
BE 8 235 − 4 © Techniques de l’Ingénieur
p ∆Gnucl
∆Gs
p
psat, T ρv /∆ ρ 2σ/r * pv (T, r *)
ρl /∆ ρ 2σ/r *
p (T, r *)
e
p (T, r 1*)
an
pv
pl
ce
2σ/r *
fa
∆G *
er
t 0 nucl
In
p
∆Gv ∆Gnucl
Tsat T T
∆T r* r
∆T *
Figure 6 – Variation de l’enthalpie de formation d’un noyau, d’après [31]
4
T
∆G nucl = 4πr 2 σ – ----- πr 3 ( p v – p ) (13)
3
h v ρ ρ v ρ 2 σ
p ( T ) – p ( T sat ) =
∫
T sat
T ( ρ – ρv )
- dT – --------------------------------
----------------------------
( ρ – ρv ) r *
-
T
Elle présente un maximum pour une valeur égale au rayon
d’équilibre de la bulle déduit de l’équation (7). À ce maximum
ρ 2σ correspond un équilibre instable. Afin d’abaisser le potentiel ther-
+ ---------------------------------
( ρ – ρv ) r * T sat
modynamique, les bulles de rayon r < r * implosent. Inversement,
les germes de rayon r > r * grossissent spontanément.
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur BE 8 235 − 5
Liquide Liquide
θa1
Figure 7 – Exemples de cavités réentrantes
θa1 > 2β θr1
Solide Solide
0θa2 θr1 < 180° – 2β
θa2 < 2β
Du fait des fluctuations thermiques dans le liquide métastable, la 90° – β 90° – β 90° – β 90° – β
probabilité de formation d’un nucleus est d’autant plus élevée que
son rayon est plus faible. La probabilité de formation de germes
ayant le rayon critique r *, par unité de temps et de volume, est : a liquide avançant b liquide reculant
Angle de la rainure = 2β
3σ – 16 π σ 3
dn 1/2
--------- = N ----------- exp ---------------------------------------
dt πm 3 kT p v – p 2
(14) Figure 8 – Représentation schématique du piégeage de la vapeur
3σ – 16 π σ 3 T ou du liquide dans une cavité, d’après [8]
1/2
= N ----------- exp ------------------------------------------
πm 3 k ∆ T ρ v h v
2 2 2
avec N le nombre de molécules du liquide par unité de volume, pour des surfaces réelles, θ < 90o de sorte que 0,5 < F < 1. Cette
valeur de F ne permet pas généralement d’obtenir la nucléation
m la masse d’une molécule, pour les valeurs de surchauffe rencontrées expérimentalement.
k la constante de Boltzmann.
La vitesse de nucléation homogène dn /dt est très sensible à la 1.3.2.2 Nucléation à partir de vapeur ou de gaz piégés
surchauffe du liquide ∆T . Elle est très faible aux faibles surchauf- dans des cavités
fes, donc aux fortes valeurs de r *. On considère que la nucléation Dans le cas où il existe sur la paroi des cavités remplies d’air ou
est significative pour dn /dt de l’ordre de 109 à 1013 m–3 · s–1. plus généralement d’incondensables ou de vapeur, et dont le rayon
d’ouverture est supérieur au rayon critique de nucléation, la
Pour l’eau à la pression atmosphérique, avec dn /dt = nucléation est initiée pour des surchauffes relativement faibles. Le
volume d’incondensables piégés dans les cavités dépend des pro-
1013 m–3 · s–1, la surchauffe est de 221 K, ce qui est bien supé-
priétés interfaciales, de la forme de la cavité et des conditions
r i e u r a u x v a l e u r s m e s u r é e s e x p é r i m e n t a l e m e n t . Pa r
expérimentales.
conséquent, la nucléation homogène doit être éliminée comme
mécanisme de production de vapeur. Elle s’avère cependant La présence de gaz piégés crée une interface qui favorise la
possible pour les liquides organiques. nucléation, mais aussi qui diminue la différence de pression entre
les deux phases. Ainsi la surchauffe du liquide nécessaire à la
nucléation est également réduite :
1.3.2 Nucléation hétérogène
2σ
Pour expliquer les écarts entre valeurs prédites et mesurées, r*
--------- – p g T sat
∆T = ----------------------------------------- (16)
plusieurs hypothèses furent proposées. En effet, dans la majeure h v ρ v
partie des applications, la vapeur apparaît préférentiellement sur
une paroi solide chauffée selon différents mécanismes : Le critère correspondant au piégeage de gaz dans une cavité
— préexistence de vapeur-gaz incondensable dans des sites de conique ou une rainure, caractérisée par un angle au sommet 2β,
nucléation ; a été établi par Bankoff [2]. Si l’angle de contact est supérieur à 2β,
— cavités « réentrantes », non mouillables par le liquide le front de liquide convexe avançant sur une cavité remplie de gaz
(figure 7) ; touche l’extrémité opposée de la cavité avant qu’elle ne soit pleine
— ensemencement des sites de nucléation par un site actif de liquide : la vapeur est piégée au fond de la cavité (figure 8a ).
voisin. Cette condition s’écrit :
θa > 2 β
1.3.2.1 Nucléation hétérogène sur une paroi lisse L’angle de contact à l’avancée du fluide est supérieur à l’angle de
Si la paroi solide est parfaitement lisse, la bulle de vapeur à la contact statique, ce qui favorise le piégeage de la vapeur. Inver-
surface de la paroi peut être considérée comme une calotte sphé- sement, si un front liquide recule en passant sur une cavité remplie
rique. Sur la ligne triple apparaît l’angle de contact. L’énergie de de liquide (figure 8b ), la cavité restera remplie de liquide si :
formation d’un germe de vapeur sur la paroi lisse est plus faible θr < π – 2 β
que celle nécessaire en nucléation homogène. Le rapport F entre
ces énergies, dit facteur d’énergie, est donné par l’expression L’angle de contact de recul est inférieur à l’angle de contact
suivante : statique. En 1993, Wang et Dhir [40] ont montré que, pour un fluide
2 + 3 cos θ – cos 3 θ très mouillant, il est difficile d’obtenir des embryons de vapeur
F = ----------------------------------------------------- (15) préexistants et l’ébullition nécessite des surchauffes proches de
4
l’ébullition homogène. Cependant, du fait de la présence de gaz
Si θ est égal à 180o (paroi non mouillante), aucune surchauffe dissous, l’ébullition a souvent lieu pour des surchauffes plus
n’est nécessaire pour l’apparition d’une bulle puisque F = 0. Mais faibles. L’ébullition peut continuer par invasion de sites voisins.
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
BE 8 235 − 6 © Techniques de l’Ingénieur
r /RC
5
5 2β = 5° 9° 13° 17° 21° 29° 41°
4 1
4
RC
0,8
5
3
3 4
3 0,6
2
2 2
1
0,4
1 1
0,2
RC /r
Figure 10 – Évolution du rayon du germe de vapeur avec l’angle
de contact et l’angle de la cavité selon le modèle de Lorenz et al. [28]
1
θ < β < 90° En supposant une variation linéaire de la température du liquide
2β < θ ≤ 90° dans la couche limite thermique d’épaisseur δt et dans le cas où yb
θ > 90° + β est égal à RC , on obtient la densité de flux nécessaire à la
0 nucléation [21] :
Volume λ h v ρ v
˙ 2
- ∆T sat
q nucl = ------------------------ (20)
8T sat σ
d
avec ∆Tsat = Tp – Tsat la surchauffe de la paroi.
2 σ T sat
D b = 0,020 8 θ ----------------------------
g ( ρ – ρv ) (21)
∆T > --------------------------
- pour R C /r 1 (18)
R C h v ρ v Les bulles ont une forme plutôt sphérique lorsque les forces de
tension de surface prédominent, et tendent vers une forme hémi-
Pour de petits angles de contact, fréquemment rencontrés, le sphérique lorsque les forces d’inertie prédominent. Elles sont oblon-
maximum de RC /r, supérieur à 2, correspond au rayon initial du gues lorsque ces deux forces sont du même ordre de grandeur.
germe dans la cavité. Un modèle a été développé par Lorenz et La fréquence d’émission des bulles f n’est pas uniforme pour
al. [28] pour prédire ce rayon. Sa variation, en adimensionnant par tous les sites. De plus, elle dépend du régime de croissance de la
le rayon de la cavité, Φ = r /RC est représentée sur la figure 10 en bulle. En général, on admet que le produit f Db est constant.
fonction de l’angle de contact et de l’angle de la cavité. La sur- Zuber [44] a donné l’expression suivante :
chauffe pour l’activation d’un site s’écrit :
1⁄4
σ g ( ρ – ρv )
2 σ T sat
∆T > -------------------------------
R C Φ h v ρ v
- pour R C /r > 1 (19)
fD b = 0,59 -------------------------------
ρ
2 (22)
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur BE 8 235 − 7
2. Transferts de chaleur
au cours de l’ébullition Tsat
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
BE 8 235 − 8 © Techniques de l’Ingénieur
(0)
Microcouche ˙
q D b a 2 ρ c p T sat D 2b h v D 2b ------- ρv ν ( ρ c p λ ) sat ρ – ρ v
-------------------
- ---------------- -------------------------------- ------------------- ρ ------- ---------------------------- -------------------
T sat λ σ D b 2 2 a ( ρ cp λ ) ρ
a a
(t > ta )1 (t > ta )2
1/2 1/3
-----------------
■ Zone de transition c p T p – T sat µ c p m
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur BE 8 235 − 9
■ Le nombre de Nusselt est défini comme suit : La géométrie de la paroi chauffée a une influence sur le flux
critique ; celle-ci a été particulièrement étudiée par Lienhard et
hD b Dhir [25] qui ont pris comme flux critique de référence la valeur
Nu = ------------
-
λ donnée par Zuber, q̇ crit, Z :
avec Db donné par l’équation (21).
L
q̇ crit = q̇ crit, Z ----- (31)
■ En 1982, Nishikawa et al. [29] ont proposé la relation suivante λ
(toutes les unités sont en SI sauf la rugosité de la paroi Rp exprimée
en micromètre) : Le flux critique dépend de la longueur capillaire λ et d’une gran-
deur caractéristique L, fonction de la géométrie. Les différentes
1/5 ˙ corrélations ainsi que leur domaine de validité sont données dans
31,4 p crit p/p crit 0,23 q 4/5
- 8R p 0,2 ( 1 – p/pcrit ) ------------------------------------------------------
h = ------------------------- - (28) le tableau 3. (0)
~1/10 1 – 0,99 p/p crit 0,9
M Tous les modèles prédictifs du flux critique donnent des résultats
avec Rp = 0,125 µm. relativement satisfaisants pour tous les fluides, excepté pour les
métaux liquides.
■ En 1984, Cooper [12] a établi une relation basée également sur la
~
pression réduite, la masse molaire du fluide M et la rugosité de la
paroi Rp (toutes les unités sont en SI sauf Rp exprimée en 2.4 Ébullition de transition et limite
micromètre) : inférieure de l’ébullition en film
˙ ~
q 1/3 p 0,12 – 0,21 lg R p p – 0,55 La zone de transition a été la zone la moins étudiée car elle ne
---------------- = 55 ------------
∆T sat p crit – lg -p----crit
------
M – 0,5 (29) peut être atteinte que lors d’un chauffage à température imposée.
Les mécanismes régissant les transferts de chaleur dans cette zone
■ Toutes les prédictions données par ces corrélations ne sont pas sont mal connus si ce n’est qu’ils semblent être affectés par les
très précises et ne sont applicables que sur le domaine de validité mêmes variables que celles qui interviennent dans l’ébullition
pour lequel elles ont été établies. Il existe un grand nombre de cor- nucléée. À partir d’études expérimentales, Berenson [3] a conclu
rélations pour l’ébullition nucléée mais, comme dans les échanges que le régime de transition est une combinaison des régimes
interviennent toujours la nature du fluide et de la paroi (angle de d’ébullition nucléée et d’ébullition pelliculaire existant alternative-
contact, rugosité, etc.), leur utilisation reste délicate. De plus, le ment sur la surface. C’est une zone où apparaissent de grandes
coefficient d’échange en ébullition nucléée étant très élevé, la résis- fluctuations de flux à température imposée.
tance thermique correspondante est souvent faible par rapport à Cette zone est limitée, d’une part, aux flux élevés par le flux cri-
celles introduites par d’autres échanges. tique, d’autre part, aux faibles flux par le point de Leidenfrost.
Usuellement, il est admis de calculer la densité de flux par interpo-
lation linéaire entre les valeurs maximale et minimale de la densité
2.3 Flux critique de flux sur la courbe :
q̇ = f ∆ T sat
Pour des systèmes fonctionnant à flux imposé, la connaissance
de la densité de flux maximal est d’un intérêt majeur pour éviter représentée en coordonnées logarithmiques.
toute transition vers le régime d’ébullition en film, qui entraînerait
une brusque augmentation de la température de la paroi. Le point de Leidenfrost correspond au flux minimal pour lequel
le film de vapeur est stable. En dessous de cette valeur, le flux est
Pour prédire le flux critique, différents modèles ont été déve-
trop faible pour assurer une production de vapeur suffisante pour
loppés. Les différentes étapes de la théorie classique du flux
qu’il n’y ait pas de contact du liquide avec la paroi. Cette densité
critique sont les suivantes :
de flux thermique minimale a été prédite par Berenson [3] qui a
— apparition d’une couche de vapeur sur la paroi chauffée. développé un modèle analytique pour une plaque horizontale :
Comme la vapeur est plus légère que le liquide qui la surmonte,
elle est instable avec la formation d’ondes à sa surface (dites σ g ( ρ – ρv ) 1/4
instabilités de Taylor), et l’interface se brise en différents points
d’où partent des colonnes de vapeur ;
q̇ min, h = 0,09 ρ v h v -------------------------------
( ρ + ρv ) 2 (32)
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
BE 8 235 − 10 © Techniques de l’Ingénieur
Tableau 3 – Corrélations du flux critique pour différentes géométries de l’élément chauffant [8]
Géométrie Corrélation Domaine de validité
q̇ crit L
Plaque plane infinie - = 1,14
--------------- ----- > 30
λ
q̇ crit,Z
2 L
Petite paroi verticale de largeur q̇ crit 1,14 λ 9 < ----- < 20
ou diamètre L, de surface Sp - = -------------------D
--------------- --- avec λ D = 2 π 3 λ λ
q̇ crit,Z Sp
q̇ crit R
Cylindre horizontal de rayon R - = 0,89 + 2,77 exp – 3,44 R / λ
--------------- ----- > 0,15
λ
q̇ crit,Z
q̇ crit R
Grand cylindre horizontal de rayon R - = 0,90
--------------- ----- > 1,2
λ
q̇ crit,Z
q̇ crit – 1/4 R
0,15 ----- 1,2
R
Petit cylindre horizontal de rayon R - = 0,94 -----
--------------- λ
q̇ crit,Z λ
q̇ crit – 1/4 H
0,15 ------ 2,96
Petit ruban horizontal de hauteur H, orienté H
- = 1,18 ------
--------------- λ
verticalement (2 faces chauffées) q̇ crit,Z λ
q̇ c – 1/4 H
0,15 ------ 5,86
Petit ruban horizontal de hauteur H, orienté H
- = 1,4 ------
----------- λ
verticalement (1 face isolée) q̇ c,Z λ
λ = longueur capillaire.
Pour des cylindres horizontaux de rayon R, Lienhard et La longueur caractéristique λcrit est la longueur d’onde critique
Wong [27] ont établi une corrélation du même type : correspondant à l’instabilité de Rayleigh-Taylor, telle que :
1/2
18
q̇ min = 0,515 ------------------------------------------------------- q̇ min, h
R/ λ 2 2 R / λ 2 + 1
(33)
σ
λ crit = 2π ----------------------------
ρ – ρv g
Pour obtenir le coefficient d’échange correspondant à ce point, il Dans cette relation les propriétés thermophysiques du liquide et
suffit de calculer la surchauffe pariétale pour l’ébullition en film. de la vapeur sont calculées respectivement à Tsat et à (Tp + Tsat )/2.
Pour une grande gamme de diamètres de tubes horizontaux,
2.5 Ébullition en film Breen et Westwater [6] ont modifié l’expression donnée par
Bromley en introduisant comme grandeur caractéristique λD qui
est la longueur d’onde la plus dangereuse telle que :
Pour des grandes différences de températures entre le fluide et
la paroi, le film de vapeur sur la paroi chauffée est stable et λD = 3 λ crit
constitue la principale résistance thermique. Le problème du trans-
fert thermique peut alors être traité d’une façon analogue à la Selon la valeur de λD /D, on utilise l’une des expressions
condensation en film (Panday, [BE 8 238]). suivantes :
Les premières études expérimentales et analytiques, dues à — pour λD /D < 0,8 :
Bromley [7], sont basées sur l’équilibre des forces de pesanteur, de h film = 0,6 F λ D
–1/4
(36)
viscosité et de frottement agissant sur un élément de volume du
film présent autour d’un tube horizontal. Pour un tube de diamètre — pour 0,8 < λD /D < 8 :
D, il a calculé le coefficient d’échange :
hfilm = 0,6 FD –1/4 (37)
3 1/4
h film
λ v ρ v ρ – ρ v gh v ′
= 0,62 -------------------------------------------------------
D µ v ∆ T sat
- (34) — pour λD /D > 8 :
λD
0,83
–1/4
avec h ′v = h v + 0,34c pv ∆ T sat (le dernier terme correspond à h film = 0,16 -------
- FλD (38)
D
la surchauffe de la vapeur),
3
λ v ρ v ρ – ρ v gh v
′ 1/4
λv la conductivité thermique de la vapeur.
Cette expression ne prend en compte que l’échange conductif au
avec F =
-------------------------------------------------------
µ ∆Tv sat
-
travers du film de vapeur sans échange radiatif.
Pour une paroi plane verticale, avec un écoulement de la vapeur
L’étude de l’ébullition en film sur une surface horizontale a été en régime laminaire, le coefficient d’échange local à la distance z
réalisée par Berenson [3], qui a proposé la relation suivante : à partir de laquelle apparaît l’ébullition en film s’écrit :
3 1/4 3
λ v ρ v ρ – ρ v gh v ′
λ v ρ v ( ρ – ρ v ) gh v ′ 1/4
h film = 0,425 -------------------------------------------------------
λ crit µ v ∆ T sat
- (35)
h film = 0,707 --------------------------------------------------------
z µ v ∆ T sat
-
(39)
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur BE 8 235 − 11
h film
h t = h film -------------
- + h rad ≈ h film + 0,75h rad (41)
ht
.
qcrit (W/m2)
σ T p – T sat
4 4
avec h rad = -------------------------------------------------------------------
- 4 × 106
1 1
------- + ------- – 1 T p – T sat
εp ε
3
σ la constante de Stefan-Boltzmann (5,67 × 108 W · m–2 · K–4),
εp l’émissivité de la paroi et ε celle du liquide, qui dans la plupart 2
des cas est égale à 1.
106
2.6 Effets paramétriques
0 0,2 0,4 0,6 0,8 1
2.6.1 Influence de la pression p/pcrit
Un des principaux facteurs agissant sur la courbe d’ébullition est
la pression. Pour un couple paroi-fluide, une augmentation de la
Figure 14 – Évolution de la densité de flux critique avec la pression
pression entraîne une diminution de la surchauffe, c’est-à-dire un
pour l’eau (pcrit = 221,9 bar), d’après [37]
décalage de la courbe d’ébullition vers la gauche (figure 13). Cela
correspond à une augmentation du coefficient d’échange. Le flux
critique dépend également fortement de la pression du fluide. Il
augmente avec la pression tant que celle-ci reste inférieure à un 2.6.3 Influence des gaz dissous
tiers de la pression critique ; au-delà il décroît notablement
(figure 14). Pour l’eau, la densité de flux maximale est de l’ordre de Lorsque des gaz dissous sont présents dans le liquide, il est
4 MW · m–2 pour une pression de 70 bar alors qu’à 1 bar elle est de possible d’observer des bulles de dégazage prématurément à
l’ordre de 1 MW · m–2. l’apparition de l’ébullition nucléée. L’ascension de ces bulles crée
des mouvements convectifs qui augmentent les échanges
thermiques.
2.6.2 Influence de l’état de surface
Une augmentation de la rugosité a pour effet de déplacer la 2.6.4 Influence de la taille et de l’orientation
courbe d’ébullition nucléée vers les faibles surchauffes de la paroi. de la paroi
Ainsi, la surchauffe correspondant au flux critique ∆Tmax est plus
faible alors que la surchauffe relative au point de Leidenfrost ∆Tmin Pour l’ébullition nucléée pleinement développée, la surchauffe
est inchangée (figure 15). L’écart ∆Tmax – ∆Tmin est d’autant plus de la paroi est indépendante des dimensions géométriques de la
élevé que la rugosité croît. En revanche, la rugosité n’a que peu surface. L’inclinaison de la paroi joue un rôle uniquement aux bas
d’influence sur la valeur des flux extrémaux. flux, sur les échanges en convection naturelle. Cependant, dans le
Cependant, en raison d’un vieillissement des surfaces, la cas d’une paroi horizontale orientée vers le bas, le coefficient
majeure partie du gain sur le coefficient d’échange due à la rugo- d’échange est très faible, ce qui implique que, dans un réservoir, le
sité disparaît dans le temps. flux critique apparaît préférentiellement sur la face supérieure.
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
BE 8 235 − 12 © Techniques de l’Ingénieur
Courbe d’ébullition
105 en film
θ croissant
∆Tsat
10 20 50 100 200 500
∆Tsat (K) Figure 17 – Influence de la mouillabilité de la paroi
sur la courbe d’ébullition, d’après [8]
q˙crit = 0,16 ρ v h v ---------------------------------
ρv
2
-
(43)
ρ
------------------------------------------
c p T sat – T ,∞
0,75
1 + 0,1 -------
ρv h v
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur BE 8 235 − 13
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
BE 8 235 − 14 © Techniques de l’Ingénieur
T
~ ~ ~ ~ ~ ~
y v A, v – v A, + 1 – y v B,v – v B,
avec ω = ------------------------------------------------------------------------------------------------
~ - T sat
σ vv
~
∂ σ vv
~ --------- ----------------------------------------------------------------------------------------------
-
y
∂T ~ ~ ~
y v A,v – v A, + 1 – y v B, v – v B,
~ ~ ~
~ ~ x
x y
~
x ∆T
Dans la plupart des cas, on peut négliger le terme ------------ ω devant
T sat
~
~ ~ 1 ∂--------
h
1 ainsi que le terme ( y – x ) ----------
~ ~- qui est bien inférieur à 1.
h v ∂ x T, p
L’équation (44) peut alors s’écrire :
~ ~ y~
x,
x azéotrope ~
2 σ v v T sat
r * = ----------------------------
~ - (45)
Figure 19 – Diagramme d’équilibre d’un mélange binaire avec azéotrope h v ∆T
à point bas
Cette équation est analogue à l’équation (12) du corps pur. Le
rayon d’équilibre dépend alors fortement des propriétés du
mélange, en particulier de la tension superficielle.
T
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur BE 8 235 − 15
∆T +/∆T .
ln q
0,8 Mélange
0,4
ln ∆Tsat
0,2
1/2 Le coefficient d’échange réel du mélange hmél est inférieur au
~ ~ a c p ∂ T- (48)
Sn = 1 – ( y – x ) ------
~- ---------- --------
~ coefficient d’échange idéal. Dans la plupart des cas, le rapport
D h v ∂x p
hmél /hid le plus faible est obtenu pour la différence de températu-
~ res ∆Tbr maximale (différence de températures entre les points de
∂T pT K–1 y rosée et de bulles pour la fraction molaire du liquide, notée sur la
avec ---------
~ = – ----------------- -----------~
--- et K = ----
~-
∂x p ρv h v 1–x x figure 18) et pour la plus grande différence de fractions molaires
~ ~
entre les deux phases y – x . Cette réduction du coefficient
Ainsi, pour un mélange il y a diminution du diamètre des bulles d’échange peut s’expliquer par la non-linéarité des propriétés ther-
et de leur temps de croissance. Comme les bulles ont un faible mophysiques du mélange avec la composition, par la variation de
diamètre lors de leur détachement, elles continuent à croître après la température de saturation avec la composition et par le transfert
leur détachement. de masse.
La plupart des corrélations permettant de calculer le coefficient
d’échange du mélange à partir du coefficient d’échange idéal,
3.3 Transferts de chaleur en ébullition donné par l’équation (51), peuvent se mettre sous la forme :
libre pour un mélange
h mél 1
------------- = --------------- (52)
La courbe d’ébullition d’un mélange binaire est décalée vers la h id 1+C
droite par rapport au corps pur, ce qui traduit une dégradation des
échanges thermiques (figure 22). On constate que l’apparition de (0)
l’ébullition nucléée nécessite une différence de température ∆T La valeur du coefficient C fournie par différents auteurs est don-
plus élevée : née dans le tableau 4. Dans certaines de ces relations, intervient la
différence de températures ∆Tbr . Toutes ces corrélations ne peu-
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
BE 8 235 − 16 © Techniques de l’Ingénieur
Tableau 4 – Différentes expressions du coefficient C de l’équation (52) pour calculer le coefficient d’échange
en ébullition pour un mélange binaire
Auteurs Valeur de C Remarques
~ ~ p en bar, A coefficient fonction des composants
Stephan et Körner [35] A | y – x | ( 0,88 + 0,12p ) (= 1,4 pour le mélange acétone/eau)
∆T sat ~ ~
q̇
Schlünder (1982) [34] --------------
∆T id β ρ h v
- y – x 1 – exp ------------------------- β = 10– 4 à 3 × 10– 4 m · s– 1
∆T br
q̇
Thome et Shakir [39]
∆T id
- 1 – exp -------------------------
-------------
β ρ h v
β = 2 × 10– 4 m · s– 1
∆T br
- 0,25 + 0,45 q̇ ⋅ 10
–5
Inoue et Monde [19] -------------
∆T id
2
∆T br – 60 q˙ ρν
1⁄4
Fujita et Tsutsui [15]
∆T id
- 1 – exp ----------------- --------------------------------
-------------
ρv h v σ g ( ρ – ρv )
vent s’appliquer que pour des densités de flux inférieures à celle Pour analyser l’évolution du flux critique, Lienhard et Keeling [26]
du point critique le plus faible des deux corps purs considérés ont introduit un « paramètre caractéristique de l’effet de la
puisque dans le terme hid , les coefficients hA et hB correspondent convection » I défini par :
à une même valeur de la densité de flux. Pour des flux supérieurs ρ σ L
au flux critique le plus faible, Cioulachtjian et Lallemand [10] ont
proposé de déterminer le coefficient d’échange par la relation : µ
2
I = ---------------
-
~ ~ avec L une dimension caractéristique, qui dépend de la géo-
1 x 1–x
------------- = --------- + -------------- (53) métrie de l’échantillon.
h mél hA hB
On définit une grandeur caractéristique adimensionnelle L′ telle
Les coefficients hmél , hA et hB sont pris pour un même flux que :
g ( ρ – ρ v ) 1/2
réduit q̇/q̇ crit .
Le flux critique pour un mélange peut être soit supérieur, soit
σ
L′ = L ----------------------------
-
inférieur à celui des constituants purs. Les corrélations établies Pour des valeurs de L ′ et I élevées (L ′ ≈ 50, I ≈ 1 500), le flux
pour les corps purs ne sont plus applicables, même en considérant critique peut être réduit par rapport à ceux des corps purs.
les propriétés du mélange. L’un des facteurs responsables de cette Cependant, il ne sera pas inférieur à 0,5q̇ crit,Z (densité de flux
modification est la présence de la diffusion qui réduit la vitesse de critique donnée par Zuber).
croissance et le diamètre de départ des bulles, ce qui augmente le
flux critique. Dans ce cas, le facteur d’augmentation doit dépendre
~ ~
de | y – x |. Ensuite, du fait d’une température d’ébullition plus éle-
vée que celle du liquide initial, le liquide peut être considéré 4. Ébullition en milieu confiné
comme localement sous-refroidi, ce qui se traduit par une dépen-
dance du nombre de Jakob, défini comme ρ c p ∆T br / ρ v h v . Ces dernières années, de nombreuses recherches ont été
Enfin, la convection Marangoni, liée à la variation de la tension consacrées à des études sur les transferts thermiques mono-
superficielle avec la fraction molaire, modifie également le flux cri- phasiques en microcanaux, pour réaliser un refroidissement
tique du mélange. En effet, la tension de surface augmente avec la intense. Puis une grande partie des recherches a été progres-
fraction molaire du constituant le moins volatil, ce qui augmente sa sivement dévolue à l’ébullition convective en microcanaux. Ceci est
valeur au voisinage de l’interface, en particulier près de la ligne tri- essentiellement lié à l’utilisation de l’ébullition afin d’intensifier les
ple où l’évaporation est la plus intense. Fujita et al. [14] ont échanges thermiques et évacuer des densités de flux importantes.
considéré que cette convection Marangoni est le phénomène Les transferts thermiques au cours de l’ébullition peuvent être
prépondérant : notablement modifiés si l’ébullition a lieu pour un fluide, qui est
confiné au voisinage de la paroi chauffée, aussi bien pour la phase
q˙ crit, mél = q˙ crit, Z 1 ± 4,18 × 10 Ma
–4 0,68
(54) liquide que pour la phase vapeur.
Pour étudier les transferts avec changement de phase
Le nombre de Marangoni est défini par : liquide-vapeur aux petites échelles et prendre en compte les parti-
cularités qui en découlent, il faut préciser quelles sont ces échelles.
∆σ σ 1/2
ρ v g ( ρ – ρv )
2
Ma = --------------- ----------------------------
Pr Kandlikar et Grande [22] ont proposé la classification suivante,
basée sur des considérations de raréfaction moléculaire et sur
certains résultats en écoulement diphasique dans des canaux de
La variation ∆σ = σC – σB est définie sur la figure 18. Pour déter- faible diamètre :
˙ — canaux conventionnels : Dh > 3 mm
miner la densité de flux critique de Zuber, q crit,Z , qui intervient
— minicanaux : 3 mm D h 200 µm
dans l’équation (54), il faut considérer les propriétés du mélange à
la concentration initiale. — microcanaux : 200 µm D h 10 µm .
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur BE 8 235 − 17
Par la suite, nous nous intéresserons principalement aux espa- moyen moléculaire λ augmente lorsque la pression diminue. Cette
ces ou canaux dont la dimension caractéristique varie entre 10 µm limite est généralement caractérisée à partir du nombre de
et 1 mm. Knudsen, défini par :
Lorsque les dimensions caractéristiques diminuent, on est
confronté à la connaissance des phénomènes à prendre en compte λ 1 µ π
Kn = --------- = --------- ---------------------- (55)
Dh Dh
dans les modèles, aux conditions aux limites, etc. En effet, la ρ 2R˜ T
grande augmentation du rapport surface/volume ou surface/ masse
affecte les bilans de masse, de quantité de mouvement et d’éner- Il peut aussi être écrit en fonction du nombre de Reynolds rap-
gie. Certaines approximations usuelles dans les dimensions centi- porté à la dimension caractéristique Dh du système et au nombre
métriques ne peuvent plus être faites et il faut considérer des effets de Mach M de l’écoulement :
négligeables à l’échelle macroscopique.
M
Kn Dh ≈ -------------
- (56)
Re Dh
4.1 Effets importants aux dimensions Comme le nombre de Knudsen dépend de la vitesse du fluide et
millimétriques de la pression, il évolue avec la longueur du canal car la pression
chute avec les forces visqueuses. L’accélération du fluide modifie le
Dans la littérature, un certain nombre d’effets ont été étudiés gradient de pression avec comme conséquence une variation non
pour expliquer les différences entre les résultats aux échelles linéaire de la pression. Ceci entraîne une augmentation de Kn tout
microscopiques et macroscopiques : prépondérance de certaines au long du tube. Cependant, cet effet n’est sensible que pour
forces sur les interfaces, rôle des forces électrostatiques, effet de la
Kn Dh ≈ 3 à 10 . On peut l’observer pour des microcanaux de
raréfaction des gaz, de la rugosité des parois, de la variation des
propriétés, effet d’entrée, rôle de la conduction de la paroi, pré- dimension inférieure à environ 10 µm.
cision des mesures, etc.
4.1.3 Influence des conditions aux limites
4.1.1 Forces contrôlant l’ébullition Du fait des forts gradients de pression dans les microcanaux, il
en milieu confiné est nécessaire d’avoir des canaux courts et des rapports L/D plus
Les différentes forces agissant sur l’interface liquide/vapeur faibles que pour des canaux traditionnels. Les effets d’entrée sont
d’une bulle se développant dans un microcanal ont été présentées également modifiés.
par Kandlikar [23]. Ce sont principalement les forces dues à la Les microcanaux sont souvent usinés dans des matériaux métal-
variation de quantité de mouvement lors de l’évaporation, l’inertie, liques dont la conductivité thermique est élevée. En particulier dans
la tension superficielle et les forces visqueuses. le cas du cuivre, du fait de sa forte conductivité, la conduction
En raison de la différence de masse volumique entre les deux longitudinale dans la paroi n’est pas négligeable, ce qui ne permet
phases, la vitesse de la vapeur à l’interface est bien supérieure à la pas d’imposer une condition aux limites uniforme. Or, cette
vitesse du liquide. La variation de quantité de mouvement qui condition de paroi a une influence notable sur les transferts ther-
résulte de l’évaporation est à l’origine d’une force à l’interface. miques, d’autant plus qu’une partie des échanges a lieu dans la
Celle-ci est d’autant plus élevée que l’on est proche de la paroi zone d’entrée. Une autre conséquence est une mauvaise
chaude en raison d’une vitesse de vaporisation plus grande dans connaissance des températures locales de paroi, qui ne peuvent que
la zone de la ligne de contact du liquide avec la paroi. difficilement être mesurées et doivent être estimées à partir de
bilans.
Alors que la force due à l’inertie joue un rôle en milieu confiné,
la force gravitationnelle est souvent négligeable. Les forces qui ont De ce fait, une évaluation des coefficients d’échange est délicate.
une importance significative sont les forces de capillarité, propor- La voie expérimentale nécessite des mesures locales qui ne sont
tionnelle à σ cos θ, et les forces visqueuses, proportionnelles à pas accessibles directement. Un autre problème pour évaluer ces
µ u . coefficients d’échange locaux provient de l’imprécision sur la
valeur des dimensions géométriques.
Du fait d’une ligne de contact étendue entre l’interface
liquide-vapeur et la paroi, des forces intermoléculaires d’adhésion
apparaissent dans les zones d’accrochage du film liquide sur la
paroi et sont responsables du maintien du film fin à la paroi. La
4.2 Configurations d’écoulement
contribution de cette zone au phénomène d’évaporation est
significative. Comme pour l’ébullition en canaux classiques, les transferts
thermiques en ébullition confinée dépendent de l’aspect hydro-
Du fait de son potentiel électrique de surface, une paroi isolante, dynamique. Trois régimes d’ébullition ont été décrits : ébullition
du type verre, quartz, plastiques, peut être porteuse de charges nucléée à bulles isolées déformées, bulles coalescées, assèche-
électrostatiques. Si un tel solide est au contact d’un liquide chargé, ment partiel et temporaire. Le régime d’ébullition nucléée à bulles
même d’une faible quantité d’ions, les charges électrostatiques du isolées déformées se produit aux faibles densités de flux. Sous
solide attirent les ions contraires du liquide et créent un champ l’effet du confinement, les bulles isolées acquièrent une forme
électrique dans le liquide. Les ions du liquide forment alors une aplatie. La déformation est d’autant plus nette que l’espace confiné
couche au voisinage de la paroi, dénommée double couche élec- est plus étroit. Pour un canal vertical, la vitesse d’ascension des
trique, qui induit une force de volume supplémentaire. La modifi- bulles est plus importante que dans le cas de l’ébullition libre sous
cation du profil de vitesses en présence d’une double couche l’effet de la réduction de la section de passage du mélange dipha-
électrique augmente les frottements pariétaux et dégrade les trans- sique. Lorsque la densité de flux augmente, c’est le régime d’ébul-
ferts thermiques. lition nucléée à bulles coalescées, caractérisé par de grosses bulles
aux formes très irrégulières. Sous l’effet du brassage intense du
4.1.2 Effets de raréfaction fluide diphasique dans le canal, les bulles isolées se regroupent
pour former des masses de vapeur, qui sont écrasées sous l’effet
Si la dimension du milieu confiné est proche du libre parcours du confinement. Enfin, à l’approche du flux critique, le régime
moyen moléculaire en phase gazeuse, on ne peut plus considérer d’assèchement partiel se produit. Il est caractérisé par une masse
le milieu comme continu. La limite de validité de l’hypothèse d’un de vapeur unique recouvrant la quasi-totalité de la paroi. Cette
milieu continu dépend de la pression puisque le libre parcours poche de vapeur est périodiquement expulsée brutalement pour
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
BE 8 235 − 18 © Techniques de l’Ingénieur
q*
crit = qcrit, e /qcrit, Assèchement la courbe 0,6 q˙crit
* . Aux faibles nombres de Bond, la dimension du
0,8 partiel
. canal est inférieure au diamètre de détachement des bulles, il en
0,6 q*
crit résulte un régime de bulles coalescées. Pour des nombres de Bond
0,6 plus grands, il n’y a pas d’interactions des bulles avec la paroi de
Ébullition nucléée
à bulles coalescées confinement.
0,4 .
0,25 q*
crit
0,2 Ébullition nucléée 4.3 Transferts de chaleur
à bulles isolées
0
déformées en ébullition confinée
0,1 1 10 Bo
En ébullition confinée, on obtient une amélioration des échanges
bulles isolées déformées bulles coalescées zones asséchées
thermiques aux faibles flux lorsque l’épaisseur du milieu confiné
diminue. Cette intensification s’accompagne d’une diminution de
Figure 23 – Configurations d’écoulements en milieu confiné, d’après [5] la densité de flux critique, ce qui constitue une limitation à l’utili-
sation de cette technique d’amélioration des échanges. Aux forts
flux, en particulier pour des espaces confinés étroits, le coefficient
d’échange est inférieur à celui obtenu en ébullition libre.
Un exemple de courbe d’ébullition représentant la densité de
.
q (W/cm2) flux pariétale en fonction de la surchauffe de la paroi est repré-
25
senté sur la figure 24 pour un canal vertical étroit d’épaisseur e
variable (hauteur de la paroi : 120 mm, pentane, p = 1 bar). En
régime de bulles isolées, observable aux faibles flux et/ou pour
Libre une distance entre parois e relativement grande, la taille des bul-
20 les, leur croissance et leur ascension ne sont pas affectées par
l’effet du confinement. La coalescence entre bulles n’apparaît
e = 2,4 mm généralement qu’en haut du canal. Pour des espacements entre
plaques plus faibles ou des flux plus élevés, la taille d’une bulle
15 devient supérieure à la dimension du canal, elle est écrasée et
aplatie, ce qui entraîne une augmentation de sa taille parallèle à la
e = 1,2 mm
e = 0,8 mm paroi. Lorsque e diminue, deux bulles adjacentes peuvent coales-
cer. Dans ces conditions, la poche de vapeur a plus de difficultés à
10 e = 0,3 mm quitter la paroi, ce qui augmente la période d’ébullition. Aux forts
flux, les bulles coalescent violemment dans toutes les directions,
e = 0,4 mm
ce qui favorise de plus en plus l’assèchement. Il existe une dimen-
sion de canal optimale pour laquelle l’amélioration des transferts
5
thermiques est maximale. En dessous de cette valeur, les effets vis-
queux deviennent prépondérants par rapport aux effets gravitaires.
Afin de caractériser l’intensification des transferts thermiques,
0 les coefficients d’échange relatifs moyennés sur la hauteur du
0 5 10 15 20 25 canal ont été représentés sur la figure 25 en fonction du rapport
∆Tsat (K) q̇/q̇ crit et les différents régimes observés sont localisés (Stutz et
Lallemand [38]. Le rapport (h – hlibre)/hlibre est maximal pour le
régime de bulles isolées déformées. Il atteint des valeurs proches
Figure 24 – Courbes d’ébullition pour un canal vertical étroit, d’après [1] de 8 en présence d’une épaisseur de confinement optimale de
0,2 mm. Il décroît ensuite pour le régime de bulles coalescées et
devient nul, voire négatif au cours du régime d’assèchement.
laisser place au passage d’une masse de liquide permettant de
maintenir stable la température moyenne de la paroi. Des visualisations avec une caméra rapide permettent de mettre
en évidence l’apparition d’instabilités, dont la fréquence est de
Ces configurations d’écoulement dépendent notablement, d’une quelques hertz. Elles traduisent l’alternance entre des passages
part, de la dimension caractéristique e du canal, qui conditionne d’un front liquide et des périodes d’assèchement. Leur origine est
l’interaction entre les bulles et la paroi de confinement, d’autre liée au fort taux d’expansion des bulles qui ne peut avoir lieu selon
part, de la densité de flux. Une carte proposée par Bonjour et la normale à la paroi du fait de la paroi de confinement (Ait-Ameur
Lallemand [5] est basée sur le nombre de Bond : et al. [1]).
2 1⁄ 2
Bo = [ g ( ρ – ρ g )e / σ ] Corrélativement à l’amélioration des échanges thermiques avec
le confinement, on observe une diminution notable du flux criti-
et sur le rapport entre la densité de flux et la densité de flux que. Cependant, le flux critique n’est pas atteint simultanément sur
critique observée en ébullition libre (figure 23). La limite supé- toute la hauteur du canal, il apparaît prématurément au sommet du
rieure de la carte est le lieu des points définis par le rapport : canal et se propage ensuite régulièrement vers le bas. L’aug-
mentation du taux de vide avec la hauteur favorise en effet l’assè-
* = q̇ crit,e /q̇ crit, ∞
q̇crit chement de la surface à ce niveau. À l’inverse, pour des épaisseurs
de canal plus grandes, le flux critique apparaît tout d’abord au
entre la densité de flux critique mesurée pour une épaisseur du niveau de la base et se propage progressivement vers le haut avec
canal donnée et la densité de flux critique atteinte en absence de l’augmentation du flux imposé.
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur BE 8 235 − 19
Notations et symboles
(h – hlibre)/hlibre
4 H J Enthalpie
–2 Kn Nombre de Knudsen
0 0,2 0,4 0,6 0,8 . . 1
m Longueur
q/ qcrit, e
L m Dimension
m kg Masse d’une molécule
~
M kg · mol–1 Masse molaire
˙
Bulles Bulles Assèchement M kg · s–1 Débit massique
déformées coalescées partiel
isolées Ma Nombre de Marangoni
n mol · m–3 Nombre de moles par m3
Figure 25 – Évolution du coefficient de transfert relatif moyen
en fonction du rapport q̇/q̇ crit ni mol Nombre de moles du
constituant i
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
BE 8 235 − 20 © Techniques de l’Ingénieur
Références bibliographiques
[1] AIT-AMEUR (M.), STUTZ (B.) et LALLEMAND enhanced surface in saturated FC-72. J. Heat [17] HETSRONI (G.). – Handbook of multiphase
(M.). – Régimes d’instabilités en ébullition Transfer 118, 937-943 (1996). systems. Hemisphere Publishing Corpora-
naturelle convective. Congrès SHF tion, McGraw-Hill Company (1982).
[10] CIOULACHTJIAN (S.) et LALLEMAND (M.). –
« Microfluidique », Toulouse (2004).
Nucleate pool boiling of binary non azeotro- [18] HSU (Y.Y.) et WESTWATER (J.W.). – Approxi-
[2] BANKOFF (S.G.). – Entrapment of gas in the pic mixtures. Heat Transfer Engineering 25, 4, mate theory for film boiling on vertical surfa-
spreading of liquid over a rough surface. 32-44 (1994). ces. Chem Eng Prog Symp Ser 56, 30, 15
AIChE J 4, 24-26 (1958). (1960).
[11] COLLIER (J.G.) et THOME (J.R.). – Convective
[3] BERENSON (P.J.). – Experiments on pool-boi- boiling and condensation. Oxford Science [19] INOUE (T.) et MONDE (M.). – Pool boiling
ling heat transfer. J. Heat Transfer 83, 3, Publications (1994). heat transfer in binary mixtures. Trans Jpn
351-358 (1961). Soc Mech Eng 57, 544 B, 4197 (1991).
[12] COOPER (M.G.). – Heat flow rates in satura-
[4] BERENSON (P.J.). – Film boiling heat transfer ted nucleate pool boiling – a – wide-ranging [20] IVEY (H.J.) et MORRIS (D.J.). – On the rele-
from a horizontal surface. Int. J. Heat and examination using reduced properties. vance of the vapor/liquid exchange mecha-
Mass Transfer 5, 985-999 (1962). Advances in Heat Transfer, Academic Press, nism for subcooled boiling heat transfer at
[5] BONJOUR (J.) et LALLEMAND (M.). – Flow Orlando, 16, 157-239 (1984). high pressures. UKAEA rept, AEEW-R137,
patterns during boiling in a narrow space [13] FRITZ (W.). – Maximum volume of vapor Winfrith, Dorset, England (1961).
between two vertical surfaces. Int. J. Multi- bubbles. Physik Zeitschr 36, 379-384 (1935). [21] KANDLIKAR (S.G.), SHOJI (M.) et DHIR (V.K.).
phase Flow, 24, 947-960 (1998).
[14] FUJITA (Y.), BAI (Q.) et TSUTSUI (M.). – Criti- – Handbook of phase change : boiling and
[6] BREEN (B.P.) et WESTWATER (J.W.). – Effect cal heat flux of binary mixtures in pool boi- condensation. Ed : Taylor and Francis (1999).
of diameter of horizontal tube on film boiling ling. ASME/JSME Thermal Engineering Joint
heat transfer. Chem. Eng. Progr 58, 7, 67-72 [22] KANDLIKAR (S.G.) et GRANDE (W.J.). – Evol-
Conference 193-200 (1995). ution of microchannels flow passages – Ther-
(1962).
[15] FUJITA (Y.) et TSUTSUI (M.). – Heat transfer mohydraulic performance and fabrication
[7] BROMLEY (J.A.). – Heat transfer in stable film in nucleate boiling of binary mixtures (Deve- technology. Heat Transfer Engineering, 25, 1
boiling. Chem. Eng. Prog 46, 5, 221-227 lopment of a heat transfer correlation). JSME (2002).
(1950). Int. J. Ser 41, 7, 134-141 (1997).
[23] KANDLIKAR (S.G.). – Flow boiling in
[8] CAREY VAN (P.). – Liquid-vapor phase-change [16] GRIFFITH (P.) et WALLIS (J.D.). – The role of microchannels : non-dimensional groups
phenomena. Taylor et Francis (1992). surface conditions in nucleate boiling. Che- and heat transfer mechanisms. Congrès fran-
[9] CHANG (J.Y.) et YOU (S.M.). – Heater orienta- mical Engineering Proj Symposium Ser 30, çais de Thermique, Grenoble, 3-21, 3-6 juin
tion effect on pool boiling of micro-porous 49-63 (1960). 2003.
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur BE 8 235 − 21
[24] KUTATELADZE (S.S.). – On the transition to [31] PAPON (P.), LEBLOND (J.) et MEIJER (P.H.E.). [39] THOME (J.R.) et SHAKIR (S.). – A new corre-
film boiling under natural convection. Kotlo- – Physique des transitions de phase – lation for nucleate pool boiling of aqueous
turbostroenie, 10 (1948). Concepts et applications. Dunod (1999). mixtures. AIChE Symp Ser 83, 257, 46-55
[32] PEREZ (J.P.) et ROMULUS (A.M.). – (1987).
[25] LIENHARD (J.H.) et DHIR (V.K.). – Hydrodyna-
mic prediction of peak pool-boiling heat Thermodynamique : fondements et applica- [40] WANG (C.H.) et DHIR (V.K.). – On the gas
transfer from finite bodies. J. Heat Transfer tions. Masson (1993). entrapment and nucleation site density
95, 152-158 (1973). [33] ROHSENOW (W.M.). – Boiling in : Handbook during pool boiling of saturated water. J Heat
of heat transfer. Ed. W.M. Rohsenow, J.P. Har- Transfer 115, 670-679 (1993).
[26] LIENHARD (J.H.) et KEELING (K.B.). – An tnett, McGraw Hill, 13.1-13.75 (1973). [41] WHALLEY (P.B.). – Boiling and condensation
induced-convection effect upon the peak boi- and gas-liquid flow. Oxford Science Publica-
[34] SCHLÜNDER (E.U.). – Über den Wärmeüber-
ling heat flux. J. Heat Transfer 92, 1-5 (1970). tions (1987).
gang bei der Blasenverdampfung von
[27] LIENHARD (J.H.) et WONG (P.T.Y.). – The Gemischen. Verfahrenstechnik 16, 692-698 [42] ZAGHDOUDI (M.C.) et LALLEMAND (M.). –
dominant unstable wavelength and mini- (1982). Nucleate pool boiling under DC electric field.
mum heat flux during film boiling on a hori- [35] STEPHAN (K.) et KÖRNER (M.). – Berechnung Experimental Heat Transfer, 14, 157-180
zontal cylinder. J. Heat Transfer 86, 220-226 des Warmeübergangs Verdampfender (2001).
(1964). Binärer Flüssigkeitsgemische. Chemie Ing [43] ZUBER (N.). – Hydrodynamic aspects of boi-
Techn 41, 7, 409-417 (1969). ling heat transfer. AEC Rep, AECU-4439
[28] LORENZ (J.J.), MIKIC (B.B.) et ROHSENOW
[36] STEPHAN (K.) et ABDELSALAM (M.). – Heat (1959).
(W.M.). – Proc. Fifth Int. Heat Transfer Conf IV,
35 (1974). transfer correlations for natural convection [44] ZUBER (N.). – Nucleate boiling – the region of
boiling. Int. J. Heat Mass Transfer 23, 73-87 isolated bubbles – similarity with natural
[29] NISHIKAWA (K.), FUJITA (Y.), OHTA (H.) et (1980). convection. Int. J. Heat Mass Transfer – 53
HIDAKA (S.). – Effect of the surface rough- [37] STEPHAN (K.). – Heat transfer in (1963).
ness on the nucleate boiling heat transfer condensation and boiling. Springer-Verlag [45] VAN STRALEN (S.J.D.). – Bubble growth
over the wide range of pressure. in : Proc. 7th (1992). rates in boiling binary mixtures. Brit. Chem.
Int. Heat Transfer Conf, 4, 61-66 (1982). Engng., 12, 3, 390-395 (1967).
[38] STUTZ (B.) et LALLEMAND (M.). – Évolution
[30] NUKIYAMA (S.). – The maximum and mini- du coefficient d’échange thermique en ébulli- [46] THOME (J.R.). – Boiling heat transfer in
mum values of the heat transmitted from tion naturelle convective dans un canal binary liquid mixtures. NATO Advanced
metal to boiling water under atmospheric étroit. VIe Colloque Interuniversitaire Research Workshop on Advances in
pressure. J. Soc. Mech Engng Japan 37, Franco-Québécois, Thermique des systèmes, Two-Phase Flow and Heat Transfer, Spit-
367-374 (1934). article 01-06, Québec, 6 p., 26-28 mai 2003. zingsee, FRG, August 31-September 3 (1982).
Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
BE 8 235 − 22 © Techniques de l’Ingénieur