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Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
Atelier
de
Recherche
Encadrée
ARE-‐TROUNOIR
:
Évolution
des
étoiles
et
trou
noir
Frank
B.
Rosmej
Sorbonne
Université
2022
©
copyright
frank.rosmej@sorbonne-‐universite.fr
1
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
Partie
I.
La
puissance
des
étoiles
:
défaut
de
masse
et
fusion
1.
La
puissance
des
étoiles
1.1
Énergie
de
liaison
et
défaut
de
masse
:
ΔE=Δmc2
1.2
L’équation
de
Bethe-‐Weizsäcker
1.3
Fission
1.4
Radioactivité
1.5
Fusion
2.
La
fusion
dans
un
plasma
dense
2.
1
État
Plasma
2.2
Probabilité
d’une
réaction
nucléaire
et
section
efficace
2.3
Taux
de
réaction
dans
un
plasma
en
équilibre
thermodynamique
2.4
Expressions
analytiques
pour
les
coefficients
des
taux
2.5
Bilan
d’un
système
thermonucléaire
et
critère
de
Lawson
3.
Fusion
en
laboratoire
3.1
Fusion
magnétique
3.2
Fusion
inertiel
3.3
Fusion
avec
des
atomes
mésiques
4.
Fusion
aneutronique
:
production
d’énergie,
voyages
relativistes
5.
Fusion
dans
des
étoiles
5.1
Le
cycle
CNO
5.2
Le
cycle
pp
5.3
Réactions
pycnonucléaires
à
l’intérieur
d’une
étoile
5.4
Plasmas
dense
et
conditions
extrêmes
6.
Etoiles
explosives
et
supernovae
2
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2022
I.1
La
puissance
des
étoiles
Le
flux
du
rayonnement
du
soleil
est
3.826x1026
W,
ce
qui
conduit
à
une
énergie
rayonnée
par
an
de
365x24x60x60
sec
x
3.826x1026
W
=
1.21x1034
J.
Si
la
production
d’énergie
provenait
de
la
combustion
de
charbon
(à
rappeler
qu’1kg
de
charbon
libère
3.2x107
J),
toute
la
masse
solaire
serait
usée
au
bout
de
3.2x107
Jx1.9891x1030
kg/1.21x1034
J
≈
5000
ans,…et
notre
globe
sera
déjà
mort
depuis
longtemps.
En
1938,
les
deux
physiciens
H.
Bethe
(Etats-‐Unis)
et
C.
von
Weizsäcker
(Allemagne)
ont
appliqué
pour
la
première
fois
le
principe
de
défaut
de
masse
à
l’astrophysique
permettent
de
produire
de
l’énergie,
en
découvrant
une
première
chaîne
de
réactions
nucléaires
pouvant
se
produire
à
l’intérieur
des
étoiles
:
Le
cycle
carbone-‐azote-‐oxygène
(ou
cycle
CNO
avec
les
symboles
chimiques,
parfois
appelé
cycle
de
Bethe,
ou
cycle
de
Bethe-‐
Weizsäcker).
I.1.1
Énergie
de
liaison
et
défaut
de
masse
:
Δ E=Δmc2
Deux
sortes
de
réactions
nucléaires
permettent
de
produire
de
l’énergie
:
la
fusion
des
éléments
légers
et
la
fission
des
éléments
lourds.
Le
principe
est
basé
sur
le
«
défaut
de
masse
»
qui
correspond
à
l’énergie
de
liaison
entre
des
nucléons
(protons,
neutrons).
Dans
un
noyau
de
masse
m,
le
défaut
de
masse
Δm
sera
:
Δm = ZmP + ( A − Z ) mn − m
.
(I.1.1)
mp
=
1.672635x10-‐27
kg
et
mn
=
1.674941x10-‐27
kg
sont
les
masses
du
proton
et
du
neutron,
Z
est
le
nombre
de
protons
et
A
le
nombre
total
de
nucléons
(protons
et
neutrons).
L’équivalence
du
défaut
de
masse
en
énergie
est
donnée
par
la
célèbre
relation
d’Einstein
:
ΔE = Δm c 2 .
(I.1.2)
c=
2.997925x108
m/s
est
la
vitesse
de
la
lumière.
Selon
eqs.
(I.1.1)
et
(I.1.2)
le
défaut
de
masse
est
équivalent
d’une
énergie
de
liaison
ΔE
:
ΔE = { ZmP + ( A − Z ) mn − m} c 2 := B ( Z, A ) .
(I.1.3)
L'électronvolt
(symbole
eV)
est
une
unité
de
mesure
d’énergie.
Sa
valeur
est
définie
comme
étant
l’énergie
cinétique
d'un
électron
accéléré
depuis
le
repos
par
une
différence
de
potentiel
d’un
volt.
Un
électronvolt
est
donc
égal
à
environ
1eV=1.602177x10-‐19
J.
On
utilise
l'électronvolt
notamment
en
physique
de
particules
pour
exprimer
les
niveaux
d'énergie
rencontrés
dans
les
accélérateurs
de
particules
et
lors
de
fusion
thermonucléaire,
en
physique
des
semi-‐conducteurs
pour
exprimer
le
gap
de
ceux-‐ci
ou
en
physique
des
plasmas.
L'énergie
de
liaison
par
nucléon
n'est
pas
la
même
suivant
le
nucléide.
Elle
est
comprise
entre
2
MeV
et
9
MeV.
Fig.
I.1.1
montre
des
résultats
expérimentaux
:
énergie
de
liaison
per
nucléon
B/A
en
fonction
du
nombre
atomique
A
des
différents
noyaux
atomiques.
On
observe
un
maximum
autour
du
A
≈
56.
À
droite
du
maximum,
on
peut
libérer
de
l’énergie
en
brisant
un
élément
lourd
en
éléments
plus
légers.
Cette
réaction
s’appelle
«
fission
».
À
gauche
du
maximum
de
la
courbe
(Fig.
I.1.1),
on
peut
libérer
de
l’énergie
en
constituant
des
éléments
plus
lourds
à
partir
d’éléments
légers.
La
réaction
nucléaire
correspondante
est
appelée
«
fusion
».
3
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2022
Figure
I.1.1
:
Energie
de
liaison
par
nucléon
pour
les
isotopes
les
plus
courants
[Wapstra
&
Bos,
Atomic
Data
Nuclear
Data
Tables
19,
175
(1977)]
4
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BS ∝ SA .
(I.1.6)
Supposant
que
le
noyau
est
sphérique
avec
un
rayon
R,
son
volume
est
proportionnel
au
nombre
de
nucléons
A.
Le
rayon
est
alors
R = r0 A1/3
(I.1.7)
et
la
surface
SA ∝ R 2 .
(I.1.8)
Les
mesures
montrent
que
r0
=
1.2012x10
m
≈
1.2
fm.
En
utilisant
éqs.
(I.1.6-‐8)
l’énergie
de
-‐12
BA = −aA
( Z − A / 2 )2
.
(I.1.12)
A
aA
est
une
constante.
Les
dépendances
par
rapport
de
A
et
de
Z
sont
un
effet
de
la
mécanique
quantique,
qu’on
peut
montrer
en
utilisant
le
concept
d’un
gaz
de
Fermi
dans
un
potentiel
de
l’interaction
forte
(où
A
est
le
nombre
de
particules
dans
une
sphère
du
rayon
r0A1/3).
5
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l’énergie
de
liaison
est
plus
grande
si
les
spins
sont
parallèles.
L’effet
de
paire
peut
être
approximé
par
(aP
est
une
constante)
Les
constantes
aV,
aS,
aC,
aA,
aP
sont
déterminées
empiriquement
(comparaisons
avec
de
nombreuses
expériences)
:
235
92 U + 01n → 236
92 U* + 2 01n + 198MeV
,
(I.1.15)
↘ 94
37 Rb*
144
Ba*
↗ 56
235
92 U + 01n → 236
92 U* + 3 01n + 198MeV
.
(I.1.16)
↘ 89
36 Kr *
Le
déclenchement
de
la
fission
de
l’U235
par
des
neutrons
thermiques
est
particulièrement
efficace.
La
figure
I.1.2
montre
la
probabilité
de
cette
réaction.
La
probabilité
d’une
réaction
est
habituellement
exprimée
en
termes
de
section
efficace
(voir
plus
tard).
6
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L’énergie
totale
de
198
MeV
comprend
:
162
MeV
d’énergie
cinétique
de
fragments
de
fission,
6
MeV
d’énergie
cinétique
de
neutrons,
7
MeV
de
rayonnement
gamma
spontané,
5
MeV
de
rayonnement
beta,
6
MeV
de
rayonnement
gamma
de
fragments,
12
MeV
d’énergie
dans
des
neutrinos.
Pour
mieux
comprendre
l’ordre
de
grandeur
de
l’énergie
nucléaire,
comparons
les
énergies
libérées
respectivement
par
la
fission
d’un
kg
23592 U et
la
combustion
d’un
kg
de
charbon.
Un
kg
de
charbon
libère
WCharbon = 3.2 ⋅10 7 J / kg .
(I.1.17)
La
masse
atomique
de
U
est
mA
=
235,
alors
235
grammes
d’uranium
contient
un
mol
235
92
(NA=6.023x1023
particules)
et
l’énergie
de
la
fission
est
donnée
par
10 3 10 3 ⋅ 6.023⋅10 23
W 235U = N A EU = 198 ⋅10 6 ⋅1.602 ⋅10 −19 J ≈ 8.1⋅1013 J .
(I.1.18)
92
mA 235
L’énergie
libérée
par
la
fission
d’un
kg
d’Uranium
est
alors
2.5
millions
de
fois
supérieure
à
celle
libérée
par
la
combustion
d’un
kg
de
charbon.
Les
ressources
naturelles
dans
notre
globe
en
235 92 U
étant
très
limitées
(utilisation
pendant
50-‐
100
ans
encore
possible),
on
souhaite
générer
de
la
matière
première
par
des
réactions
nucléaires.
A
l’heure
actuelle,
on
s’intéresse
à
la
fission
de
233
92 U
et
de
plutonium
94 Pu
parce
239
que
le
déclenchement
d’une
réaction
de
fission
est
déjà
efficace
pour
des
neutrons
thermiques
(comme
pour
235 92 U ).
On
peut
générer
ces
éléments
par
des
réactions
suivantes
:
232
90 Th + 01n → 233
90 Th* ⎯beta
⎯→ 233
91 Pa ⎯ ⎯→ 92 U ,
* beta 233
(I.1.19)
238
92 U + 01n → 239
92 U * ⎯beta
⎯→ 239
93 Np ⎯ ⎯→ 94 Pu .
* beta 239
(I.1.20)
La
figure
I.1.3
montre
la
section
efficace
pour
thorium
232Th
:
on
observe
que
des
neutrons
rapides
sont
nécessaires
pour
avoir
une
probabilité
de
génération
des
éléments
acceptable.
L’abondance
terrestre
du
thorium
232
est
environ
3
à
4
fois
plus
grande
que
celle
de
l’uranium
238U.
Cependant
les
problèmes
d'un
cycle
nucléaire
(I.1.19)
de
génération
sont
considérables,
du
fait
des
éléments
suivants
:
-‐
coût
élevé
de
fabrication
du
combustible,
nécessitant
un
cycle
externe
avec
une
source
de
neutrons
rapides
pour
créer
l'233U
(réacteur
hybride);
-‐
problèmes
similaires
sur
le
recyclage,
en
raison
du
thorium
hautement
radioactif
228Th,
qui
n'est
pas
transformé
en
U-‐233
et
s'accumule
au
fil
des
cycles;
-‐
caractère
proliférant
de
233U,
comme
pour
toutes
les
matières
fissibles;
-‐
problèmes
techniques
de
retraitement
non
encore
résolus
de
façon
satisfaisante.
Concernant
le
plutonium,
il
est
très
radioactif
et
extrêmement
toxique.
L’inhalation
de
quelques
dizaines
nano-‐grammes
suffit
pour
dépasser
la
limite
de
radioactivité
actuelle
par
an
(incorporation
des
éléments
radioactifs)
pour
l’homme.
7
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Figure
I.1.2
:
Probabilité
(section
efficace)
de
réaction
nucléaire
de
la
fission
235U
par
des
neutrons
en
fonction
de
l’énergie
de
neutron
qui
déclenche
la
réaction.
On
observe
une
probabilité
de
réaction
très
élevée
pour
des
neutrons
thermiques.
Figure
I.1.3
:
Section
efficace
de
réaction
nucléaire
de
la
fission
232Th
par
des
neutrons.
On
observe
une
probabilité
de
réaction
très
élevée
pour
des
neutrons
rapides.
8
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2022
I.1.4
Radioactivité
La
radioactivité
est
un
effet
par
lequel
des
noyaux
atomiques
instables,
dits
radio-‐
isotopes,
se
désintègre
spontanément
en
dégageant
de
l'énergie
sous
forme
de
rayonnement
divers,
pour
se
transformer
en
des
noyaux
atomiques
plus
stables
ayant
perdu
une
partie
de
leur
masse.
Les
rayonnements
ainsi
émis
sont
appelés
alpha
(particules
α= 24 He ),
beta
(β=électrons)
ou
gamma
(γ=photons).
Soit
N(t)
le
nombre
de
radionucléides
d'une
espèce
donnée
présents
dans
un
échantillon
à
un
instant
t.
Comme
la
probabilité
de
désintégration
ne
dépend
pas
de
la
présence
des
autres
radionucléides
ni
du
milieu
environnant,
le
nombre
total
de
désintégrations
dN
pendant
un
intervalle
de
temps
dt
à
l'instant
t
est
proportionnel
au
nombre
de
radionucléides
de
même
espèce
N
présents
et
à
la
durée
«
dt
»
de
cet
intervalle
:
dN ( t ) = − λ N ( t ) dt .
(I.1.21)
Le
signe
moins
(–)
indique
que
N
diminue
au
cours
du
temps
(la
constante
λ
est
positive).
En
intégrant
l'équation
différentielle,
on
trouve
le
nombre
N(t)
de
radionucléides
présents
dans
le
corps
à
un
instant
t
quelconque
:
N ( t ) = N 0 e− λt
(I.1.22)
avec
N ( t = 0 ) = N 0 .
(I.1.23)
La
durée
de
vie
t
est
donnée
par
1
τ= .
(I.1.24)
λ
La
durée
de
demi-‐vie
T1/2
est
la
durée
de
désintégration
de
la
moitié
d'un
échantillon
radioactif:
ln 2
T1/2 = = τ ln 2 .
(I.1.25)
λ
Exemple
:
Pour
visualiser
la
radioactivité
et
la
durée
de
vie,
considérons
le
Plutonium
239
qui
a
une
durée
de
demi-‐vie
de
T1/2
=
24.110
ans
(désintégration
α).
Combien
de
temps
faut-‐il
attendre
pour
qu’il
ne
reste
qu’un
microgramme
de
matériau
radioactif
dans
un
échantillon
initial
d’1kg
?
(à
noter
qu’un
microgramme
de
239Pu
incorporé
a
de
très
fort
risque
de
provoquer
le
cancer,
et
que
239Pu
reste
de
20
à
50
ans
dans
le
corps,
ce
qui
induit
un
effet
d’accumulation
très
dangereux).
⎛ 1µ g ⎞ 24.11⋅10 3 ans
ln (10 −9 ) = 7.21⋅10 5 ans
T
t = − 1/2 ln ⎜ ⎟ = −
ln 2 ⎝ 1kg ⎠ ln 2
Discutez
et
interprétez
ce
résultat.
9
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I.1.5
Fusion
Pour
libérer
de
l’énergie
à
partir
de
deux
éléments
légers,
il
faut
surmonter
la
force
de
répulsion
électrostatique,
parce
que
les
forces
nucléaires
capables
d’assurer
la
cohésion
du
noyau
résultant
de
la
fusion
ne
deviennent
prépondérantes
qu’à
très
courte
distance.
L’énergie
potentielle
d’un
noyau
de
charge
Z1
dans
le
champ
d’un
autre
noyau
de
charge
Z2
a
l’allure
représentée
dans
la
figure
I.1.4.
Figure
I.1.4
:
Barrière
coulombienne
Vm
Le
problème
est
donc
de
communiquer
aux
noyaux
que
l’on
veut
réunir
une
énergie
cinétique
suffisante
pour
qu’ils
aient
une
bonne
probabilité
de
franchir
la
barrière
de
potentiel
électrostatique
qui
les
entoure.
Il
faut
rapprocher
les
noyaux
suffisamment
pour
profiter
de
la
force
nucléaire
:
il
faut
donc
surmonter
la
barrière
coulombienne
entre
deutérium
et
tritium.
Comme
la
force
nucléaire
n’est
efficace
que
sur
des
petites
distances
de
quelques
fm
(10-‐15
m),
l’énergie
cinétique
nécessaire
pour
surmonter
la
barrière
coulombienne
est
:
1 Z1 e Z 2 e
E≈
4πε 0 R1−2 .
(I.1.26)
10
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présentant
la
barrière
de
potentiel
la
plus
faible,
sont
celles
qui
font
intervenir
les
isotopes
de
l’hydrogène
(un
seul
proton)
:
2
1 D + 12 D → 31T (1MeV ) + 11 p(3MeV ) ,
(I.1.27)
2
1 D + 12 D → 23 He(0.83MeV ) + 01n(2.44MeV ) ,
(I.1.28)
2
1 D + 31T → 24 He(3.52MeV ) + 01n(14.06MeV )
,
(I.1.29)
2
1 D + 23 He → 24 He(3.66MeV ) + 11 p(14.68MeV ) . (I.1.30)
La
réaction
entre
le
deutérium
et
le
tritium
est
la
plus
avantageuse:
elle
nécessite
une
énergie
très
faible
pour
franchir
la
barrière
de
potentiel
(Vm,
voir
Fig.
I.1.4),
et
libère
une
énergie
très
haute.
L’énergie
obtenue
par
la
fusion
d’un
kg
de
deutérium
et
tritium
est
de
25
millions
de
fois
supérieure
à
celle
produite
par
la
combustion
d’un
kg
du
charbon.
Le
tritium
a
une
demi-‐durée
de
vie
(radioactivité)
de
12,32
ans
:
3
1T → 23 He + e− + ν e .
(I.1.31)
La
réaction
dégage
une
énergie
de
18,6
keV;
l'électron
emporte
en
moyenne
une
énergie
cinétique
de
5,7
keV,
le
reste
étant
emporté
par
un
antineutrino
électronique
(pratiquement
indétectable).
Du
fait
de
la
radioactivité
β
de
faible
énergie,
les
électrons
émis
sont
rapidement
arrêtés
dans
l'eau
et
dans
les
tissus
biologiques,
après
avoir
parcouru
seulement
6
µm
tout
au
plus
(et
en
moyenne
environ
0.56
µm).
Un
rayonnement
externe
est
donc
rapidement
arrêté
par
la
simple
surface
«
morte
»
de
la
peau
humaine.
Cependant,
contrairement
à
leur
rayonnement,
la
plupart
des
molécules
tritiées
comme
l'eau
tritiée
sont
facilement
absorbées
à
travers
la
peau,
des
membranes
ou
tissus
biologiques
de
tous
les
êtres
vivants.
Sa
radioactivité
ne
le
rend
donc
potentiellement
dangereux
que
s'il
est
inhalé
ou
ingéré,
et
a
priori
uniquement
dans
les
cellules
vivantes
qu'il
aura
pénétrées.
A
noter
que
le
12 D
et
le
23 He
sont
stables
et
non-‐radioactifs.
11
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
I.2 La fusion dans un plasma dense
Pour
déclencher
une
réaction
de
fusion
entre
deux
noyaux
légers,
il
faut
communiquer
une
énergie
cinétique
suffisante
pour
qu’ils
aient
une
bonne
probabilité
de
franchir
la
barrière
de
potentiel
électrostatique.
Dans
le
cadre
de
la
production
d’énergie,
il
faut
communiquer
une
énergie
cinétique
de
l’ordre
de
100
keV
à
un
grand
nombre
de
particules.
Pour
une
station
nucléaire
d’un
GW
qui
transforme
environ
30
%
de
la
chaleur
en
électricité,
le
nombre
de
particules
fusionnées
nécessaires
par
seconde
est
10 9
N DT ≈ −19
≈ 10 21 particules DT / sec
0.3⋅17.57 ⋅10 ⋅1.602 ⋅10 sec
6
12
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
par
un
faisceau
transportant
une
densité
n1
de
particules
de
type
1
se
déplaçant
à
la
vitesse
V
par
rapport
aux
particules
2.
La
section
efficace
σ12
de
réaction
1-‐2
est
définie
par
la
relation
N := σ 12 (V )Vn1n2
(I.2.2)
où
N
représente
le
nombre
de
réactions
par
unité
de
volume
et
de
temps.
La
section
efficace
est
alors
donnée
par
N
σ 12 (V ) :=
,
(I.2.3)
Vn1n2
⎡⎣σ 12 (V ) ⎤⎦ := =
[N ]
m −3 s −1
= m 2 .
[V ][ n1 ][ n2 ] m m −3m −3
(I.2.4)
s
La
section
efficace
peut
être
alors
interprétée
comme
la
valeur
de
la
surface
de
section
d’un
obstacle
(«
potentiel
dur
»)
ayant
le
même
effet
que
le
centre
du
potentiel
en
termes
de
réactions
ou
d’interceptions
de
flux.
En
physique
nucléaire,
on
utilise
traditionnellement
le
barn
:
1
barn
(b)
=
10-‐24
cm2,
soit
la
surface
d'un
carré
de
dix
femtomètres
de
côté
(c'est-‐à-‐dire
l’ordre
de
grandeur
du
diamètre
d'un
noyau
atomique).
I.2.3
Taux
de
réaction
dans
un
plasma
en
équilibre
thermodynamique
Comme
expliqué
plus
haut,
il
est
souhaitable
de
conserver
l’énergie
des
particules
au
cours
des
nombreuses
collisions
qui
précèdent
les
réactions
de
fusion.
Ceci
nous
conduit
à
étudier
un
plasma
thermonucléaire
à
une
température
de
l’ordre
de
10-‐100
keV
(quelques
100
millions
degrés
Kelvin).
A
ces
températures,
le
grand
nombre
de
collisions
entre
des
particules
s’établit
selon
une
fonction
de
distribution
d’énergie
Maxwellienne
:
2 E exp ( −E / kT )
FM =
π ( kT )3/2 .
(I.2.5)
Selon
l’éq.
(I.2.2)
la
probabilité
d’une
réaction
dépend
de
la
vitesse
relative
des
particules
à
réunir
:
on
rencontre
donc
dans
un
plasma
un
ensemble
des
probabilités
très
différentes.
Pour
obtenir
la
probabilité
totale
d’une
réaction
donnée,
il
faut
calculer
la
somme
sur
toutes
les
probabilités
:
∞
V σ := ∫ σ ( E )V ( E ) F ( E ) dE .
ΔE
(I.2.7)
Les parenthèses indiquent une intégration sur la fonction de distribution.
13
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
p-‐11B
:
Q=
8.682
MeV
(3
%)
[C.
Angulo
et
al,
Nuclear
Physics
A656,
3
(1999)]
14
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
Range
:
0.087
<
T/keV
<
172
8.683⋅10 −11 cm 3 s −1 ⎛ 53.433 ⎞
Vσ p 11 B
≈ exp ⎜⎝ − 1/3 ⎟⎠ ⋅
T 2/3 T
{1 + 1.880 ⋅10 −2
T − 1.764 ⋅10 −4 T 2 + 4.063⋅10 −7 T 3 } .
(I.2.14)
−15 3 −1
2.816 ⋅10 cm s ⎛ 148.57 ⎞
+ exp ⎜⎝ − ⎟
T 3/2 T ⎠
Range
:
172
<
T/keV
<
862
1.892 ⋅10 −11 cm 3 s −1 ⎛ 53.433 ⎞
Vσ p 11 B
≈ exp ⎜⎝ − 1/3 ⎟⎠ ⋅
T 2/3 T
⎧⎪ −1 + 1.025 ⋅10 −2 T + 1.616 ⋅10 −6 T 2 ⎫⎪ .
(I.2.15)
⎨ ⎬
( )
−2 2/3 2
⎪⎩ 5.126 ⋅10 T − 1.47 + 0.187 ⎪⎭
D-‐Dn
:
Q=3.269
MeV
(4%),
[C.
Angulo
et
al,
Nuclear
Physics
A656,
3
(1999)]
Range
:
0.087
<
T/keV
<
862
1.513⋅10 −14 ⎛ 18.812 ⎞
Vσ DDn
≈
T 2/3
exp
T
−2
⎜⎝ − 1/3 ⎟⎠ ⋅ 1 + 1.252 ⋅10 T {
.
(I.2.16)
−5
−1.514 ⋅10 T + 8.875 ⋅10 T 2 −9 3
} cm s
3 −1
D-‐Dp
:
Q=4.033
MeV
(5%),
[C.
Angulo
et
al,
Nuclear
Physics
A656,
3
(1999)]
Range
:
0.087
<
T/keV
<
862
1.510 ⋅10 −14 ⎛ 18.812 ⎞
Vσ ⎜⎝ − 1/3 ⎟⎠ ⋅{1+ 8.807 ⋅10 T
−3
DDp
≈ 2/3
exp
T T
.
(I.2.17)
−6
−8.241⋅10 T + 4.344 ⋅10 T 2 −9 3
} cm s
3 −1
15
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
Figure
I.2.1
:
Taux
de
réactions
nucléaires
de
fusion
dans
un
plasma
Maxwellien
[Bosch
and
Hale,
Nuclear
Fusion
32,
611
(1992)].
16
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
1.2.5 Bilan d’un système thermonucléaire et critère de Lawson
Pour
maintenir
les
réactions
de
fusion
entre
deux
noyaux
légers,
il
faut
non
seulement
considérer
l’énergie
cinétique
produite
grâce
au
défaut
de
masse,
mais
aussi
les
mécanismes
de
perte
d’énergie
qui
vont
inévitablement
refroidir
le
plasma.
Même
dans
un
schéma
de
confinement
idéal,
les
lois
physiques
principales
induisent
des
pertes,
notamment
des
pertes
radiatives.
La
figure
I.2.2
indique
qu’il
faut
des
températures
supérieures
à
quelques
keV.
Comme
le
potentiel
d’ionisation
d’un
atome
deutérium/tritium
est
de
l’ordre
de
Rydberg
(1
Ry
=
13.6
eV),
tous
les
atomes
sont
complètement
ionisés.
En
conséquence,
le
plasma
est
constitué
de
particules
chargées
(Z=1),
et
chaque
particule
se
déplace
dans
un
champ
coulombien
créé
par
toutes
les
autres,
ce
qui
induit
une
accélération
pendant
toute
son
existence.
Selon
les
équations
de
Maxwell,
une
particule
chargée
soumise
à
une
accélération
rayonne
de
l’énergie
électromagnétique.
Ce
rayonnement
s’appelle
«
rayonnement
de
freinage
»
ou
«
Bremsstrahlung
».
La
puissance
rayonnée
par
une
particule
d’une
charge
q
est
( V!
est
l’accélération)
:
q 2V! 2
P=
6πε 0 c 3
.
(I.2.18)
Figure
I.2.2
:
Accélération
d’une
particule
au
cours
d’une
collision
électron-‐ion
Pour
estimer
l’accélération,
considérons
la
Fig.
I.2.2.
La
force
accélératrice
est
réalisée
par
le
champ
coulombien
entre
l’électron
(charge
q=–e)
et
l’ion
(charge
Ze)
:
! 1 Ze2
F = meV ≈
.
(I.2.19)
4πε 0 d 2
(I.2.19)
et
(I.2.18)
:
e2 1 Z 2 e4 Z 2 e6
P≈ = .
(I.2.20)
6πε 0 c 3 4 2 π 2ε 02 d 4 me2 3⋅ 2 5 π 3ε 03c 3 me2 d 4
La
durée
d’une
collision
est
environ
d
τ≈
(I.2.21)
V
et
l’énergie
totale
rayonnée
au
cours
d’une
collision
est
17
ARE-‐TROUNOIR
Frank
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Sorbonne
University
2022
Z 2 e6
W ≈ Pτ ≈
.
(I.2.22)
3⋅ 2 5 π 3ε 03c 3 me2 d 3V
Pour
calculer
la
puissance
rayonnée
par
volume
il
faut
prendre
en
compte
la
distribution
maxwellienne
pour
des
particules
(éq.
(I.2.5)),
la
somme
sur
tous
les
paramètres
d’impact
«
d
»
et
les
densités
de
particules:
PB ≈ α B neni Z 2 kTe .
(I.2.23)
α B = 5.34 ⋅10 −31 Wcm 3
(ne
et
ni
en
[cm-‐3],
kTe
en
[keV]).
La
puissance
rayonnée
par
le
Bremstrahlung
(I.2.23)
est
une
perte
d’énergie
qui
existe
toujours.
Elle
augmente
avec
le
carré
de
la
densité
et
de
la
charge
Z.
Le
bilan
d’énergie
est
relativement
complexe
à
cause
des
pertes
nombreuses
ayant
lieu
dans
un
plasma.
Cependant,
une
condition
minimale
pour
un
bilan
positif
est
obtenue
en
prenant
en
compte
la
perte
d’énergie
par
le
Bremsstrahlung,
l’énergie
nécessaire
pour
créer
un
plasma
avec
des
températures
thermonucléaires,
les
pertes
de
particules
pendant
le
confinement
et
l’énergie
libérée
par
la
fusion.
Un
tel
critère
est
connu
comme
le
«
Critère
de
Lawson
»
(physicien
britannique
J.D.
Lawson,
1957).
Considérons
un
plasma
deutérium-‐tritium.
L’énergie
thermique
du
plasma
est
3 3 3
E plasma = ne kT + nD kT + nT kT .
(I.2.24)
2 2 2
Aux
conditions
thermonucléaires,
les
atomes
D/T
sont
complètement
ionisés,
et
la
densité
électronique
est
donnée
par
ne = nD + nT .
(I.2.25)
Si
le
deutérium
et
le
tritium
sont
présents
en
proportions
égales,
c’est
à
dire
:
n
nD = nT =
(I.2.26)
2
la
densité
électronique
est
ne = n
(I.2.27)
et
l’énergie
totale
du
plasma
(thermique)
3 3n 3n
E plasma = nkT + kT + kT = 3nkT .
(I.2.28)
2 22 22
À
cause
d’un
confinement
de
particules
limité,
l’énergie
diffusée
est
3nkT
PL =
(I.2.29)
τE
où
τΕ
est
le
temps
caractéristique
de
confinement
d’énergie.
L’énergie
perdue
par
le
Bremsstrahlung
(rayonnement
de
freinage,
éq.
(I.2.23))
est
(avec
éqs.
(I.2.26,27))
:
PB = α B n 2 kTe
.
(I.2.30)
La
production
d’énergie
vient
de
réactions
nucléaire
:
PN = nD nT V σ DT Q .
(I.2.31)
Q
est
l’énergie
libérée
par
une
réaction
de
la
fusion
(17.6
MeV).
Avec
éq.
(I.2.26)
:
n2
PN = V σ DT Q .
(I.2.32)
4
18
ARE-‐TROUNOIR
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Sorbonne
University
2022
Pour
maintenir
la
réaction
thermonucléaire,
l’énergie
totale
du
plasma
est
convertie
avec
une
probabilité
η
dans
l’énergie
électrique
qui
est
ensuite
utilisée
pour
maintenir
un
plasma
chaud.
Une
production
d’énergie
«
nette
»
requiert
PB + PL ≤ η ( PB + PL + PN ) .
(I.2.33)
En
utilisant
les
éqs.
(I.2.23,
28,
32)
eq.
(I.2.33)
s’écrit
:
3kT
nτ E ≥
⎛ η V σ DT Q ⎞
.
(I.2.34)
⎜⎝ 1 − η − α B kT ⎟⎠
4
La
relation
(I.2.34)
s’appelle
le
«
Critère
de
Lawson
»
[Lawson
1957].
Pour
kT
=
10
keV
et
η=0.5
la
relation
(1.2.34)
donne
nτ E > 1014 cm −3 s
.
(I.2.35)
L’asymptote
nτ E → ∞
(I.2.36)
est
atteinte
pour
kT ≈ 3.5 keV
(η=0.5).
Pour
un
plasma
de
deutérium
pur,
en
ne
considérant
que
la
réaction
thermonucléaire
D-‐D,
le
critère
de
Lawson
3kT
nτ E ≥
⎛ η V σ DD Q ⎞
(I.2.37)
⎜⎝ 1 − η − α B kT ⎟⎠
2
conduit
à
la
relation
(pour
kT
=
50
keV
et
η=0.5)
nτ E > 1016 cm −3 s
.
(I.2.38)
19
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
I.3
Fusion
en
laboratoire
I.3.1
Fusion
magnétique
Grâce
au
confinement,
on
peut
augmenter
considérablement
le
temps
de
vie
de
l’énergie
investie.
À
des
températures
autour
de
10
keV
aucun
matériau
ne
peut
supporter
un
contact
direct
avec
le
plasma
thermonucléaire
:
confiner
un
plasma
consiste
l’isoler
thermiquement
du
récipient
qui
l’entoure.
À
des
températures
raisonnables
pour
initier
une
réaction
de
la
fusion
nucléaire,
le
plasma
est
complètement
ionisé,
et
pour
confiner
ce
plasma
on
peut
agir
sur
les
particules
chargées
à
l’aide
des
champs
électriques
(confinement
électrostatique),
de
champs
électromagnétiques
(confinement
HF)
ou
de
champs
magnétiques
quasi
stationnaires
(confinement
magnétique).
À
l’heure
actuelle,
le
confinement
magnétique
suscite
de
réels
espoirs
comme
le
montre
le
grand
engagement
mondial
pour
le
projet
ITER
(International
Thermonuclear
Experimental
Reactor
:
http://www.iter.org/fr/accueil).
Pour
estimer
l’ordre
de
grandeur
des
champs
magnétiques
à
réaliser,
nous
considérons
d’abord
la
capacité
d’un
champ
magnétique
d’exercer
une
pression
(soit
disant
«
pression
magnétique
»)
sur
le
plasma.
Considérons
un
champ
magnétique
parallèle
à
la
direction
«
Z
»
avec
une
hétérogénéité
qui
dépend
seulement
de
«
X
»
:
⎛ 0 ⎞
! ⎜ ⎟
B=⎜ 0 ⎟ .
⎜⎝ BZ (x) ⎟⎠
(I.3.1)
La
force
sur
un
courant
(particules
chargées
en
mouvement)
exercé
par
ce
champ
magnétique
est
! ! !
f = j × B
.
(I.3.2)
Equation
de
Maxwell
(magnétostatique):
! !
∇ × B = µ0 j ,
(I.3.3)
! 1 ! !
f =
µ0
(
∇× B × B.
)
(I.3.4)
(I.3.1)
et
(I.3.3)
:
⎛ ∂B / ∂y − ∂B / ∂z ⎞ ⎛ ⎞
0
! 1 ⎜ ⎟ 1 ⎜
z y
! 1 ⎟
j = ∇ × B = ⎜ ∂Bx / ∂z − ∂Bz / ∂x ⎟ = ⎜ −∂Bz / ∂x ⎟
.
µ0 µ0 ⎜ ⎟ µ0 ⎜ (I.3.5)
⎜⎝ ∂By / ∂x − ∂Bx / ∂y ⎟⎠ ⎝ 0 ⎟⎠
20
ARE-‐TROUNOIR
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Sorbonne
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2022
⎛ 0 ⎞ ⎛ 0 ⎞
! 1 ! ! 1 ⎜
f =
µ0
( µ0
)
∇ × B × B = ⎜ −∂Bz / ∂x
⎟ ⎜
×
⎟ ⎜ 0
⎟
⎟
⎜⎝ 0 ⎟⎠ ⎜⎝ Bz ⎟⎠
1 ⎜
⎛
( −∂B z )
/ ∂x ⋅ Bz ⎞
⎟
,
(I.3.6)
= ⎜ 0 ⎟
µ0
⎜ ⎟
⎝ 0 ⎠
1 ∂Bz ∂ ⎛ 1 2⎞
fx = − Bz = − ⎜ B
µ0 ∂x ∂x ⎝ 2 µ0 z ⎟⎠ .
(I.3.7)
1 2
L’hétérogénéité
est
alors
à
l’origine
d’une
force
et
le
terme
BZ
peut
être
interprété
2 µ0
comme
une
pression
en
analogie
à
une
pression
thermique
p
qui
exerce
une
force
∇p .
La
pression
magnétique
exerce
une
force
depuis
une
région
à
densité
de
champs
magnétiques
élevée
vers
une
région
à
densité
faible.
Pour
confiner
un
plasma,
il
faut
que
la
pression
magnétique
soit
supérieure
à
la
pression
thermique
:
1 2
nkT < B
2 µ0 ,
(I.3.8)
(
2.48 ⋅1015 B 2 Tesla )
(
n cm −3
)< T ( keV )
.
(I.3.9)
Figure
I.3.1
:
Confinement
de
droite
et
fuite
de
particules
aux
extrémités
Avec
les
techniques
de
pointes
(supraconductivité),
on
peut
produire
aujourd’hui
des
champs
magnétiques
stationnaires
de
l’ordre
d’un
Tesla.
Selon
éq.
(I.3.9),
il
en
résulte
une
21
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
densité
critique
(c’est
à
dire
une
densité
maximale)
de
l’ordre
de
1014
cm-‐3
pour
une
température
de
10
keV.
Un
plasma
thermonucléaire
confiné
par
un
champ
magnétique
est
alors
un
plasma
à
faible
densité.
Selon
le
critère
de
Lawson
(éq.
(I.2.34,35))
le
confinement
doit
être
de
l’ordre
de
la
seconde
pour
démarrer
des
réactions
nucléaires
dans
un
sens
profitable.
À
cause
de
cette
longue
durée,
la
fuite
de
particules
aux
extrémités
des
configurations
linéaires
impose
des
contraintes
difficiles
pour
une
utilisation
en
pratique,
Fig.
I.3.1.
Dans
un
plasma
réel,
le
mouvement
de
particules
est
accompagné
par
des
collisions
entre
eux
et
toutes
les
directions
de
mouvements
existent.
Au
milieu
d’une
configuration
droite,
les
champs
magnétiques
permettent
un
confinement
grâce
au
mouvement
«
Larmor
»
autour
d’une
ligne
magnétique,
voir
Fig.
I.3.1.
Cependant,
aux
extrémités,
le
champ
magnétique
est
nul
et
un
mouvement
des
particules
selon
l’axe
Z
ne
peut
plus
être
redirigé
vers
l’intérieur
:
la
particule
s’échappe
de
la
configuration.
C’est
pourquoi
plusieurs
géométries
non
linéaires
ont
été
développées
pour
réduire
la
fuite
de
particules.
Les
expériences
menées
dans
des
années
50/60
ont
conduit
à
la
conclusion
:
quoi
qu’on
fasse
pour
réduire
les
fuites
des
particules
aux
extrémités
d’une
configuration
droite,
on
n’arrive
pas
à
un
confinement
suffisamment
élevé
pour
déclencher
des
réactions
nucléaires
de
la
fusion
entre
le
deutérium
et
le
tritium.
La
question
«
Comment
éviter
les
extrémités
»
a
une
solution
simple
en
géométrie
:
la
configuration
toroïdale
–
autrement
dit
on
prend
la
configuration
droite
et
met
les
deux
extrémités
ensemble
par
une
courbure
continue
de
la
droite.
Figure
I.3.2:
Le
tokamak
ITER
en
cours
de
construction
à
Cadarache,
France.
Haut
de
près
de
trente
mètres,
lourd
de
23
000
tonnes,
le
tokamak
ITER
est
une
machine
très
complexe.
La
silhouette
du
personnage
en
bleu
au
pied
de
la
machine
nous
donne
une
idée
de
sa
taille.
On
estime
à
un
million
le
nombre
de
composants
du
tokamak
ITER.
22
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
La
conception
d’une
configuration
magnétique
toroïdale
pour
la
fusion
est
due
aux
travaux
de
l’équipe
soviétique
de
l’Institut
Kurchatov
à
Moscow
en
Russie.
Inventé
dans
des
années
50
par
les
Russes
Igor
Tamm
et
Andreï
Sakharov,
le
terme
tokamak
vient
du
russe
«
тороидальная
камера
с
магнитными
катушками
»
(toroïdalnaïa
kamera
s
magnitnymi
katushkami
:
en
français,
chambre
toroïdale
avec
bobines
magnétiques).
Lorsque
l’Institut
Kurchatov
a
annoncé
l’obtention
d’une
température
de
l’ordre
de
keV
(ce
qui
correspond
à
l’ordre
de
grandeur
nécessaire
pour
la
fusion
thermonucléaire
contrôlée)
dans
une
configuration
de
Tokamak,
le
monde
entier
a
été
plongé
dans
le
doute.
En
1969,
l’anglais
Peakock
est
allé
en
Russie
pour
mesurer
la
température
avec
la
diffusion
Thomson
:
à
sa
surprise,
il
a
confirmé
une
température
de
l’ordre
de
keV,
et
ainsi
les
résultats
des
chercheurs
russes
à
Kurchatov.
L’époque
de
Tokamak
était
née.
Aujourd’hui,
les
efforts
mondiaux
ont
conduit
à
l’accord
sur
la
construction
d’ITER
(International
Thermonuclear
Experimental
Reactor,
Fig.
I.3.2)
à
Cadarache
en
France
(http://www.iter.org)
dans
les
10
prochaines
années
afin
d’étudier
la
production
d’une
énergie
propre
pour
après
demain….
I.3.2
Fusion
inertielle
Un
autre
principe
de
confinement
«
La
fusion
par
confinement
inertiel
»
est
montré
dans
la
Figure
I.3.3.
La
cible
pour
l’ignition
est
entourée
d’un
ablateur.
Lorsqu’elle
est
éclairée
par
laser,
la
matière
chauffée
est
éjectée
vers
l’extérieur
par
ablation,
ce
qui
induit,
par
contre-‐
réaction,
une
poussée
qui
comprime
et
chauffe
la
cible.
Au
moment
de
l’allumage,
l’ablateur
s’est
évaporé
et
les
réactions
thermonucléaires
se
déclenchent
en
premier
lieu
dans
la
partie
centrale
très
chaude.
Une
cible
comprimée
se
détend
après
quelques
dizaines
de
pico-‐secondes.
Il
est
évident
qu’il
faut
initier
l’allumage
auparavant.
Selon
le
critère
de
Lawson,
cela
conduit
à
une
densité
supérieure
à
1025
cm-‐3,
ce
qui
signifie
que
la
cible
doit
être
comprimée
1000
fois
plus
qu’un
solide
pendant
un
temps
extrêmement
court.
Seuls
les
lasers
de
puissance
comme
le
Laser
Megajoule
en
France
à
Bordeaux
(LMJ)
ou
le
National
Ignition
Facility
(NIF)
aux
Etats-‐
Unis
permettent
une
grande
concentration
d’énergie
pendant
un
temps
suffisamment
court.
Bien
que
le
schéma
d’attaque
directe
semble
le
plus
simple,
l’hétérogénéité
dans
l’éclairage
de
la
surface
provoque
des
instabilités
du
type
Rayleigh-‐Taylor.
Les
expériences
et
de
simulations
montrent
qu’elles
empêchent
la
compression
nécessaire
à
l’allumage
de
la
cible.
Figure
I.3.3
:
Principe
de
la
fusion
inertielle
L’avantage
de
l’attaque
indirecte
est
que
le
rayonnement
de
la
paroi
est
proche
de
celui
d’un
corps
noir,
et
garantit
une
meilleure
uniformité
d’éclairage
de
la
cible
et
en
conséquence
une
meilleure
compression,
Fig.
I.3.4.
23
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
Figure
I.3.4
:
Allumage
d’une
cible
par
attaque
directe
(a)
et
indirecte
(b).
Dans
(a)
les
faisceaux
laser
interagissent
directement
avec
la
cible.
Dans
(b),
ils
interagissent
avec
les
parois
de
la
cavité
cylindrique
contenant
le
microballon.
Les
parois
émettent
un
rayonnement
X
(en
jaune)
qui
interagit
à
son
tour
avec
ce
microballon.
Le
rayonnement
du
plasma
est
donc
un
sujet
de
recherche
très
important
pour
la
fusion.
Une
cible
chaude
et
comprimée
se
détend
à
la
vitesse
du
son
CS
permettant
un
temps
de
réaction
1/3
r r ⎛ n0 ⎞
τ= = 0 ⎜ n⎟
(I.3.10)
CS CS ⎝ ⎠
où
n / n0 ,
le
facteur
de
compression
et
r,
r0
sont
des
rayons
après
et
avant
la
compression.
La
vitesse
des
ions
dans
un
plasma
est
donnée
par
( ) ( )
1/ 2
kTe + γ ZkTi ⎛ 1+ γ ZT eV ⎞ cm
CS = ≈ 9.8 ⋅105 ⎜ ⎟
mi ⎝ µ amu ⎠ ( ) sec .
(I.3.11)
Pour
γ=3,
µ=3,
Z=1,
T=104
eV,
on
obtient
CS = 1.1⋅108 cm / sec .
Avec
un
facteur
de
compression
de
104,
et
un
rayon
initial
de
r0
=
1
mm,
le
temps
caractéristique
est
de
l’ordre
de
quelques
10
ps.
Le
confinement
inertiel
est
alors
un
confinement
de
l’ordre
de
quelques
10
ps.
Grâce
au
24
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
critère
de
Lawson
(voir
l’éq.
(I.2.34,35))
on
peut
estimer
immédiatement
la
densité
nécessaire
au
déclenchement
de
la
fusion
avec
une
production
d’énergie
nette
:
1014 cm−3 sec
n≥ −12
= 1025 cm−3 .
10 ⋅10 sec
Considérons
maintenant
l’énergie
WDT
libérée
par
les
réactions
de
fusion
:
WDT = nD nT V σ DT QτV
(I.3.12)
où
Q
est
l’énergie
libérée
par
une
réaction
de
la
fusion
(17.6
MeV)
et
V
est
le
volume
de
la
cible.
Avec
l’éq.
(I.3.12)
et
n
= nD = nT
(I.3.13)
2
l’éq.
(I.3.12)
s’écrit
4/3
π n2 4 ⎛ n0 ⎞
WDT = r V σ DT Q
3 CS 0 ⎜⎝ n ⎟⎠ .
(I.3.14)
Si
WL
est
l’énergie
du
laser
sur
cible
et
η
le
rendement,
l’énergie
investie
est
WL/η.
Après
le
tir
laser,
on
recoupe
l’énergie
thermonucléaire
WDT
et
l’énergie
laser
WL
avec
un
rendement
δ.
Le
bilan
sera
positif
si
WL
(
δ WDT + WL > ) η .
(I.3.15)
Si
ε
est
la
fraction
de
l’énergie
transmis
au
cible,
on
retrouve
une
énergie
4
εWL = π r 3 ⋅ 3nkT
3
(I.3.16)
dans
la
cible.
Le
bilan
sera
alors
positif
si
⎛ WDT ⎞ 1
⎜W + 1⎟ > ηδ
⎝ L ⎠ ,
(I.3.17)
WDT 1
> −1 .
WL ηδ
(I.3.18)
Avec
l’éq.
(I.3.12,
16)
2/3
WDT ⎛ n⎞ ε Q V σ DT 1
= n0 r0 ⎜ ⎟ > − 1 .
(I.3.19)
WL ⎝ n0 ⎠ 12kT ⋅ CS ηδ
L’éq.
(I.3.19)
indique
qu’il
existe
une
taille
critique
à
partir
laquelle
le
bilan
sera
positif
:
2/3
12 ⎛ 1 ⎞ kT ⋅ CS ⎛ n0 ⎞
rcrit = ⎜ − 1⎟
ε ⎝ ηδ ⎠ n0Q V σ DT ⎜⎝ n ⎟⎠ .
(I.3.20)
Les éqs. (I.3.16, 20) permettent d’estimer la taille du laser :
25
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
nkT
WL = 4π rcrit
3
,
ε
(I.3.21)
( )
3 3 2
nkT 123 ⎛ 1 ⎞ kT CS3 ⎛ n0 ⎞
WL = 4π −1 3⎜ ⎟
ε ε 3 ⎜⎝ ηδ ⎟⎠ n3Q 3 V σ ⎝ n⎠
(I.3.22)
0 DT
ou
( )
3 2 4
8 ⎛ 1 ⎞ ⎛ n0 ⎞ 1 kT CS3
WL = 3 ⋅ 2 π ⎜
3
−1
⎝ ηδ ⎟⎠ ⎜⎝ n ⎟⎠ ε 4 n02Q 3 V σ 3 .
(I.3.23)
DT
Estimons
la
taille
du
laser
:
n0 = 4.5⋅1022 cm−3 ,
kT=10
keV
( CS = 1.1⋅108 cm / sec ,
2
⎛n ⎞
−16 3 −1
V σ DT = 10 cm s ),
Q=17.6
MeV,
η=0.05,
δ=0.3,
ε=0.2
:
WL ≈ 3⋅10 ⎜ 0 ⎟ Joules .
Pour
un
14
⎝ n⎠
facteur
de
compression
de
104
(possible
selon
les
simulations)
on
arrive
donc
à
une
énergie
de
3
MJ
pour
un
bilan
positif.
Si
on
considère
les
lois
d’échelles
de
l’éq.
(I.3.23)
2
⎛ ⎞
6 −3 −3 −4 n0
WL ≈ 2 ⋅10 η δ ε ⎜ ⎟ Joules
(I.3.24)
⎝ n⎠
on
constate
que,
sans
un
facteur
de
compression
d’ordre
au
moins
104,
il
faudrait
un
laser
supérieur
à
quelques
GigaJoules
pour
qu’une
réaction
thermonucléaire
utile
puisse
être
amorcée
:
hypothèse
irréaliste
actuellement.
Pour
maintenir
le
processus
de
fusion
dans
la
cible
(c'est
à
dire
pour
déclencher
une
onde
de
combustion
-‐
en
anglais
"ignition"),
il
faut
que
le
chauffage
par
des
particules
α
(Pα)
compense
les
pertes
(les
neutrons
sortent
du
plasma):
(
Pα > PL + PB )
(I.3.25)
En
2014,
une
étape
importante
a
été
franchie
aux
Etats-‐Unis
(Laboratoires
Nationaux
de
Lawrence
Livermore,
installation
NIF
-‐
homologue
de
l'installation
MEGAJOULE).
La
publication
correspondante
est
liée
à
l'équation
(I.3.25)
:
[Hurricane
et
al.:
"Fuel
gain
exceeding
unity
in
an
inertially
confined
fusion
implosion
",
Nature
506,
343
(2014)].
Les
auteurs
Hurricane
et
al.
font
état
de:
a)
la
1ère
observation
d'un
chauffage
par
des
particules
a
(He++)
à
l'intérieur
d'une
cible
DT,
b)
une
production
d'énergie
par
fusion
des
éléments
Deutérium
et
Tritium
supérieure
à
l'énergie
déposée
dans
la
cible
("gain"
positif).
Les
chiffres
clés
sont
les
suivants:
Energie
du
laser
ELaser
=
1.9
MJ,
Energie
sur
cible
=150
kJ,
Energie
transmise
à
l'intérieur
de
la
cible
EDT,totale
=
9
kJ,
Energie
produite
par
la
fusion
EFusion=
17
kJ
(gain
=
17/9
>1),
Energie
déposée
par
des
particules
α
:
Ea
=
2.5
kJ,
Production
des
neutrons
NNeutron
=
6x1015.
26
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
Selon
les
auteurs,
le
"pulse
shaping
-‐
high
foot"
a
joué
un
rôle
important
dans
la
démarche
(un
seul
choc
ne
peut
comprimer
la
matière
que
d'un
facteur
4
environ,
voir
par
exemple
le
livre
de
[Landau
&
Lifschitz:
"Tom
VI
-‐
Hydrodynamique",
notamment
p.
430]
ou
le
livre
de
[Zeldovich
&
Raiser:
"Physics
of
shock
waves
and
high-‐temperature
hydrodynamic
phenomena",
notamment
p.
52]).
Figure
I.3.5
:
Diagramme
de
Lawson
(from
Glenzer
et
al.
2012,
LLNL-‐JRNL-‐523436).
Figure
I.3.5
résume
des
expériences
sur
les
installations
de
la
fusion
inertielle
(NIF
:
National
Ignition
Facility
aux
Etats-‐Unis)
et
de
la
fusion
magnétique.
On
peut
voir
que
les
résultats
de
NIF
en
2012
étaient
déjà
très
proches
de
l’allumage.
I.3.3
Fusion
avec
des
atomes
mésiques
La
figure
I.3.6
montre
qu’il
faut
une
énergie
cinétique
équivalente
au
potentiel
de
la
barrière
de
potentiel
électrostatique
qui
entoure
le
noyau
pour
la
franchir
et
profiter
de
l’interaction
forte,
car
cette
force
est
efficace
seulement
sur
des
petites
distances
de
quelques
fm
(10-‐15
m).
Cependant,
en
mécanique
quantique
une
particule
peut
franchir
une
barrière
qui
serait
impossible
selon
la
mécanique
classique.
L'effet
tunnel
désigne
l’effet
quantique
de
franchir
une
barrière
de
potentiel,
alors
que
l'énergie
de
la
particule
incidente
est
inférieure
à
l'énergie
potentielle
qu'elle
doit
acquérir.
Pour
une
telle
particule,
la
fonction
d’onde,
dont
le
carré
du
module
représente
la
densité
de
probabilité
de
présence,
ne
s'annule
pas
au
niveau
de
la
barrière,
mais
s'atténue
à
l'intérieur
de
la
barrière,
pratiquement
exponentiellement
(courbe
bleue
dans
la
fig.
I.3.6)
pour
une
barrière
(potentiel
V)
assez
large.
Si,
à
la
sortie
de
la
barrière
de
potentiel,
la
particule
possède
une
probabilité
de
présence
non
nulle,
elle
peut
traverser
cette
barrière
(voir
courbe
rouge
non
-‐
nulle
à
droite
du
potentiel).
27
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
Figure
I.3.6
:
Effet
tunnel
En
1948
Andrei
Sacharov
(Russie)
a
proposé
des
atomes
mésiques
(l’électron
est
remplacé
par
un
muon)
pour
profiter
de
l’effet
tunnel
et
mieux
déclencher
une
réaction
de
fusion.
Le
muon
est
une
particule
d’une
masse
de
mµ
=
1,88353140
·
10−28
kg
et
d’une
charge
identique
à
celle
d’un
électron.
Selon
le
modèle
de
Bohr,
le
rayon
d’orbite
de
muon
est
largement
réduit
(environ
en
facteur
200)
par
rapport
à
un
électron
(me
=
9,10938188
·
10−31
kg)
:
h2 ε 0
aB := a0,e = = 5.29 ⋅10 −11 m ,
(I.3.26)
π me e 2
h2 ε 0
a0, µ = = 2.56 ⋅10 −13 m .
(I.3.27)
π mµ e 2
En
conséquence,
la
distance
entre
deux
noyaux
est
réduite
d’un
facteur
200,
ce
qui
induit
un
changement
exponentiel
pour
la
probabilité
de
la
transmission
de
la
barrière
coulombienne.
Les
calculs
de
mécanique
quantique
montrent
que
le
facteur
de
transmission
(c’est
à
dire
la
probabilité
de
franchir
la
barrière
par
l’effet
tunnel)
est
proportionnel
à
⎡ ⎛ rc mr ⎞ ⎤
1/2
28
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
1
E= mrVr2 ,
(I.3.31)
2
!
Vr = Vr ,
(I.3.32)
où
! ! !
Vr = V1 − V2
(I.3.33)
est
la
vitesse
relative.
Pour
la
réaction
DD
dans
une
molécule
D2,
rc
≈
aB
la
transmission
T
est
extrêmement
faible
:
T
≈
exp(-‐121)
=
2x10-‐53.
Cependant,
pour
une
molécule
mésique,
rc
≈
a0,µ
et
le
facteur
de
transmission
est
T
≈
exp(-‐8.42)
=
2x10-‐4
soit
environ
49
ordres
de
grandeur
plus
grand
que
dans
une
molécule
«
normale
».
Le
processus
DµT → 24 He + n + µ + 17.6 MeV ( 99.4 % )
(I.3.34)
semble
alors
favorable
pour
une
augmentation
de
probabilité
d’une
réaction
nucléaire.
Cependant,
il
existe
une
certaine
probabilité
que
le
muon
reste
collé
autour
de
l’hélium
:
DµT → 24 Heµ + n + 17.6 MeV ( 0.6 % ) Helium− sticking .
(I.3.35)
Compte
tenu
de
l'énergie
nécessaire
à
la
fabrication
des
muons
(3
GeV)
le
bilan
énergétique
de
la
fusion
ainsi
catalysée
est
positif
lorsqu’un
même
muon
peut
provoquer
plus
de
250
réactions
de
fusion.
La
probabilité
p
de
l’attachement
("sticking")
est
faible
mais
importante
(et
mal
connue
:
0.3-‐0.6
%).
Le
«
Helium
sticking
»
limite
effectivement
le
nombre
des
muons,
et
la
probabilité
PN
de
suivre
après
N
réactions
est
:
( )N
PN = 1− p
.
(I.3.36)
La
durée
de
vie
de
muon
de
2.2
msec
est
suffisamment
longue
pour
suivre
la
catalyse
de
P200 = (1 − 0.006 ) = 0.300
200
quelques
centaines
de
réactions
(remarque
:
,
P300 = (1− 0.006 ) = 0.164 ).
Cependant,
la
faisabilité
d’utilisation
des
molécules
mésiques
300
pour
la
fusion
reste
incertaine
à
cause
du
problème
de
He-‐sticking.
En
conclusion
la
«
fusion
froide
»
(mot
utilisé
par
Sakharov
à
l’époque)
catalysée
par
les
muons
demeure
une
possibilité
intéressante.
Mais,
dépendant
d’un
grand
accélérateur
producteur
de
muons,
c’est
une
solution
lourde
et
aussi
coûteuse
que
la
voie
thermonucléaire.
29
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
I.4
Fusion
aneutronique
:
production
d’énergie,
voyages
relativistes
La
fusion
aneutronique
est
une
réaction
de
fusion
nucléaire
au
cours
de
laquelle
la
proportion
d’énergie
libérée
sous
forme
de
neutrons
reste
minime,
typiquement
inférieure
au
seuil
d’1
%
de
l’énergie
totale.
A
noter
que
les
réactions
nucléaires
généralement
étudiées
aujourd’hui
peuvent
libérer
jusqu’à
80%
de
leur
énergie
sous
forme
de
neutrons.
À
l’inverse,
à
condition
qu’elle
puisse
être
maîtrisée,
la
fusion
aneutronique
serait
à
même
de
réduire
considérablement
les
inconvénients
associés
au
rayonnement
neutronique
(rayonnements
ionisants,
activation),
le
besoin
d’écrans
de
protection
ou
d’équipements
de
télémanipulation
et
les
problèmes
de
sûreté.
Seul
un
nombre
réduit
de
réactions
de
fusion
se
produit
sans
émission
de
neutrons.
Voici
celles
qui
présentent
la
plus
grande
probabilité
de
réaction
:
2
1 D + 23 He → 24 He(3.6MeV ) + 11 p(14.7MeV ) ,
(I.4.1)
2
1 D + Li → 2 He(22.4MeV ) ,
6
3
4
2
(I.4.2)
1
1 p + Li → He(1.7MeV ) + He(2.3MeV ) ,
6
3
4
2
3
2
(I.4.3)
2
3
He + Li → 2 He + p(16.9MeV ) ,
6
3
4
2
1
1
(I.4.4)
2
3
He + He → He + 2 p(12.89MeV ) ,
3
2
4
2
1
1
(I.4.5)
1
1 p + Li → 2 He(17.2MeV ) ,
7
3 2
4
(I.4.6)
1
1 p+ 11
5 B → 3 He(8.7MeV )
.
4
2
(I.4.7)
Les deux premières réactions
(I.4.1,
2)
utilisent
le
deutérium
comme
combustible,
or
certaines
réactions
secondaires
D-‐D
produisent
quelques
neutrons.
Bien
que
la
fraction
de
l'énergie
portée
par
les
neutrons
puisse
être
limitée
par
le
choix
des
paramètres
de
la
réaction,
cette
fraction
demeurera
probablement
supérieure
au
seuil
d'1%.
Il
est
donc
difficile
de
considérer
ces
réactions
comme
aneutroniques.
Le
rendement
des
deux
réactions
suivantes
(I.4.3,
4)
reste
faible
au
sein
d'un
plasma
thermonucléaire.
Le
problème
de
la
réaction
3He-‐3He
est
celui
de
la
disponibilité
du
combustible.
3He
n'étant
présent
sur
Terre
qu'à
l'état
de
traces,
il
serait
nécessaire
soit
de
le
produire
par
bombardement
neutronique
(ce
qui
est
contradictoire
avec
le
but
poursuivi),
soit
de
le
recueillir
dans
l'espace.
Les
premiers
mètres
de
la
surface
de
la
Lune
sont
relativement
riches
en
3He,
de
l'ordre
de
0,01
millionième
en
masse,
mais
extraire
cette
ressource
et
l'acheminer
sur
Terre
serait
très
difficile
et
coûteux.
3He
pourrait
en
théorie
être
extrait
de
l'atmosphère
des
géantes
gazeuses,
mais
le
défi
est
encore
plus
grand.
La
réaction
(I.4.6)
ne
présente
aucun
avantage
sur
la
réaction
(I.4.7),
la
section
efficace
est
même
inférieure.
Pour
toutes
ces
raisons,
les
recherches
sur
la
fusion
aneutronique
s'orientent
principalement
vers
la
réaction
p-‐11B.
La
figure
I.4.1
montre
la
section
efficace
de
la
fusion
aneutronique
avec
11B.
On
constate
une
section
efficace
du
même
ordre
de
grandeur
que
la
réaction
D-‐D
et
D-‐T.
Cependant,
les
conditions
requises
pour
déclencher
une
fusion
aneutronique
sont
beaucoup
plus
difficiles
que
celles
nécessaires
au
cycle
classique
du
D-‐T
parce
que
le
premier
maximum
de
la
réaction
p-‐11B
aura
lieu
à
une
énergie
cinétique
dix
fois
supérieure
à
celle
nécessaire
30
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
pour
une
réaction
de
D-‐T
de
probabilité
équivalente.
A
l’heure
actuelle,
les
développements
techniques
ne
sont
pas
encore
suffisamment
avancés
pour
étudier
un
réacteur
sur
la
base
de
la
réaction
p-‐11B.
Figure
I.4.1
:
Section
efficace
de
la
fusion
aneutronique
de
11B
vis
à
vis
des
réactions
D-‐T
et
D-‐D.
À
noter
que
l’énergie
est
en
«
Center-‐of-‐Mass-‐Energy
».
Bien
que
les
réactions
nucléaires
(I.4.1-‐7)
ne
produisent
pas
de
neutrons,
elles
généreraient
des
réactions
secondaires
:
11
5 B + 24 He → 147 N + 01n + 157keV ,
(I.4.8)
11
5 B + 11 p → 116 C + 01n − 2.8MeV .
(I.4.9)
A
noter
que
11C
est
radioactif,
mais
décroît
jusqu’à
des
niveaux
négligeables
en
quelques
heures
en
raison
de
sa
demi-‐vie
de
20
minutes
seulement.
Des
calculs
détaillés
montrent
qu’au
moins
0,1%
des
réactions
dans
un
plasma
thermonucléaire
p-‐11B
produiraient
des
neutrons,
et
que
l’énergie
de
ces
neutrons
compterait
pour
moins
de
0,2%
de
l’énergie
totale
libérée.
Les
réactions
de
fusion
aneutronique
produisent
l'écrasante
majorité
de
leur
énergie
sous
la
forme
de
particules
chargées
et
non
de
neutrons.
Cela
implique
que
l’énergie
peut
être
convertie
directement
en
électricité
par
diverses
techniques.
Nombre
de
ces
techniques
de
conversion
directe
sont
basées
sur
des
technologies
matures
dérivées
d’autres
domaines,
tels
que
la
technologie
des
micro-‐ondes.
En
outre,
ces
techniques
mettent
en
œuvre
des
31
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
équipements
plus
compacts
et
potentiellement
moins
coûteux
que
ceux
utilisés
dans
la
production
thermique
conventionnelle
d’électricité.
En
comparaison,
les
combustibles
de
fusion
tels
que
le
mélange
deutérium-‐tritium
( D-‐ T),
qui
produisent
la
plus
grande
partie
de
leur
énergie
sous
forme
de
neutrons,
2 3
nécessitent
un
cycle
thermique
standard,
dans
lequel
les
neutrons
sont
utilisés
pour
porter
de
l’eau
à
ébullition,
la
vapeur
entraînant
une
grande
turbine
et
un
générateur
électrique.
Cet
équipement
est
suffisamment
coûteux
pour
qu’environ
80%
du
coût
de
construction
d’une
centrale
électrique
caractéristique
à
combustible
fossile
provienne
de
l’équipement
de
conversion
thermique.
Ainsi,
la
fusion
2D-‐3T
ne
pourrait
pas
réduire
de
façon
significative
le
montant
des
investissements
nécessaires
à
la
production
d'énergie
électrique,
même
si
le
réacteur
à
fusion
produisant
les
neutrons
était
gratuit
(les
dépenses
de
combustible
seraient
cependant
notablement
réduites).
En
revanche,
la
fusion
aneutronique
avec
conversion
directe
en
électricité
pourrait,
en
théorie,
assurer
une
production
d'électricité
avec
des
investissements
réduits.
Les
techniques
de
conversion
directe
peuvent
être,
soit
inductives,
fondées
sur
la
variation
de
champs
magnétiques,
soit
électrostatiques,
fondées
sur
le
travail
de
particules
chargées
à
l’encontre
d’un
champ
électrique.
Si
le
réacteur
à
fusion
fonctionne
en
mode
impulsionnel,
des
techniques
inductives
peuvent
être
employées.
Une
fraction
non
négligeable
de
l’énergie
libérée
par
la
fusion
aneutronique
ne
demeure
pas
dans
les
particules
chargées
produites,
mais
est
émise
sous
forme
de
rayons
X.
Une
partie
de
cette
énergie
peut
également
être
convertie
directement
en
électricité.
Par
effet
photoélectrique,
les
rayons
X
traversant
une
série
de
feuilles
conductrices
transfèrent
une
partie
de
leur
énergie
à
des
électrons
qui
peuvent
alors
être
capturés
par
un
procédé
électrostatique.
Les
rayons
X
pouvant
traverser
de
plus
grandes
épaisseurs
de
matériaux
que
ne
le
peuvent
les
électrons,
plusieurs
centaines
voire
même,
milliers
de
couches
seront
nécessaires
pour
absorber
la
plus
grande
partie
des
rayons
X.
À
noter
que
grâce
à
sa
faible
production
de
radioactivité,
la
réaction
aneutronique
présente
un
grand
intérêt
pour
établir
une
propulsion
nucléaire
de
navettes
spatiales.
La
fusion
aneutroniques
est
aussi
un
rêve
pour
établir
des
voyages
relativistes
(population
des
exoplanètes
grâce
au
dilatation
du
temps
de
la
théorie
de
relativité)
.
32
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
I.5
Fusion
dans
des
étoiles
I.5.1
Le
cycle
CNO
Le
cycle
carbone-‐azote-‐oxygène
(ou
cycle
CNO
avec
les
symboles
chimiques,
parfois
appelé
cycle
de
Bethe,
ou
cycle
de
Bethe-‐Weizsäcker)
est
l'une
des
deux
réactions
de
fusion
nucléaire
permettent
de
produire
de
l’énergie
par
lesquelles
les
étoiles
convertissent
de
l'hydrogène
en
hélium;
l'autre
réaction
est
la
chaîne
proton-‐proton.
Figure
I.5.1:
Cycle
CNO
de
Bethe-‐Weizsäcker
Alors
que
la
chaine
proton-‐proton
est
la
principale
voie
de
fusion
dans
les
étoiles
de
la
masse
du
soleil
ou
moindre,
les
modèles
théoriques
montrent
que
le
cycle
charbon-‐azote-‐
oxygène
est
la
source
principale
d'énergie
dans
les
étoiles
de
masse
plus
élevée.
Il
fut
proposé
par
Bethe
et
Weizsäcker
en
1938.
Ce
cycle
est
aussi
probablement
la
principale
source
de
production
d'azote,
qui
s'équilibre
avec
la
quantité
de
carbone
présente
selon
la
fréquence
relative
des
différentes
réactions.
Figure
I.5.1
montre
le
cycle
CNO
:
12
6 C + 11 H → 137 N + γ + 1.95MeV ,
(I.5.1a)
13
7 N → 136 C + e+ + ν e + 2.22MeV ,
(I.5.1b)
13
6 C + 11 H → 147 N + γ + 7.54MeV ,
(I.5.1c)
14
7 N + 11 H → 158 O + γ + 7.35MeV ,
(I.5.1d)
15
8 O → 157 N + e+ + ν e + 2.75MeV ,
(I.5.1e)
15
7 N + 11 H → 126 C + 24 He + 4.96MeV .
(I.5.1f)
33
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
Figure
I.5.2
:
Cycle
proton-‐proton
I.5.2
Le
cycle
pp
Le
cycle
est
le
résultat
de
la
fusion
de
quatre
noyaux
d'hydrogène
en
un
seul
noyau
d'hélium
(4He,
ou
particule
alpha)
et
fournit
de
l'énergie
en
concordance
avec
l'équation
(I.1.3).
Dans
ces
réactions,
le
carbone
sert
de
catalyseur,
il
est
régénéré
à
la
fin
du
cycle.
Au
centre
du
soleil
par
exemple,
où
l’on
évalue
une
température
de
l’ordre
de
1.3
keV
et
où
il
existe
une
très
forte
proportion
de
noyaux
d’hydrogène,
le
cycle
du
carbone
n’apporte
pas
une
contribution
prépondérante.
La
partie
la
plus
importante
est
attribuée
aux
réactions
de
fusion
de
la
chaîne
proton
–
proton,
Figure
I.5.2
:
1
1 H + 11 H → 12 D + e+ + ν + 9MeV ,
(I.5.2a)
1
1 H + D → He + γ + 5.5MeV ,
2
1
3
2
(I.5.2b)
2
3
He + He → He + 2 H + 2.8MeV .
3
2
4
2
1
1
(I.5.2c)
Le
cycle
p-‐p
se
boucle
par
la
réaction
(I.5.2c).
A
noter
que
d’autres
boucles
sont
possibles,
par
l’intermédiaire
du
béryllium
et
du
bore.
La
réaction
(I.5.2.a)
est
extrêmement
lente
:
sa
section
efficace
est
de
l’ordre
de
10-‐47
cm2
pour
des
protons
de
1
MeV,
et
la
durée
de
vie
de
l’hydrogène
dans
des
zones
où
la
température
est
de
1.3
keV
et
la
densité
100g/cm3
est
environ
de
l’ordre
de
1011
ans
au
centre
du
soleil.
La
lenteur
de
cette
réaction
explique
pourquoi
les
étoiles
sont
susceptibles
de
durer
aussi
longtemps
en
ne
faisant
rien
d’autre
que
brûler
leur
hydrogène.
Si
la
réaction
proton-‐proton
(I.5.2a)
n’était
pas
si
lente,
il
y
a
longtemps
que
notre
soleil
aurait
disparu
et
avec
lui,
la
Terre
et
ceux
qui
l’habitent.
34
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
La
faible
probabilité
de
réaction
(I.5.2a)
implique
qu’elle
ne
peut
pas
être
mesurée
au
laboratoire
car
il
faudrait
attendre
une
dizaine
d’années
pour
obtenir
une
seule
réaction
dans
un
accélérateur
:
elle
est
déterminée
théoriquement
(éq.
(I.2.13)).
A
noter
que
le
nombre
de
neutrinos
détectés
en
provenance
du
soleil
est
significativement
en
dessous
de
ce
que
les
calculs
théoriques
prévoient
pour
la
chaîne
proton-‐proton
selon
(I.5.2a)
:
c'est
le
problème
des
neutrinos
solaires.
I.5.3
Réactions
pycnonucléaires
à
l’interieur
d’une
étoile
Nous
avons
vu
précédemment
que
les
réactions
nucléaires
sont
limitées
par
la
répulsion
électromagnétique
entre
les
noyaux.
A
l’intérieur
d’une
étoile,
les
réactions
sont
rendues
possibles
par
l’agitation
thermique
violente
qui
projette
les
noyaux
les
uns
contre
les
autres,
franchissant
la
barrière
coulombienne.
Mais
dans
le
cœur
d’une
naine
blanche
évoluée,
la
température
n’est
plus
suffisante
pour
assurer
ces
réactions.
Cependant,
la
densité
y
est
tellement
grande
que
les
noyaux
sont
pressés
les
uns
contre
les
autres.
Et
dans
ces
conditions,
on
montre
que
des
réactions
nucléaires
peuvent
se
déclencher
à
basse
température.
Plus
précisément,
pour
une
masse
volumique
supérieure
à
106
g/cm3,
et
une
température
inférieure
à
1
keV,
la
dépendance
du
taux
de
réactions
à
la
température
chute,
alors
que
la
dépendance
vis-‐à-‐vis
de
la
densité
augmente.
A
masse
volumique
plus
élevée,
et
température
plus
basse,
les
réactions
produites
par
l’écrasement
deviennent
non
négligeables,
et
produisent
de
l’énergie.
Ces
réactions,
enclenchées
par
la
densité,
sont
nommées
réactions
pycnonucléaires.
Il
existe
une
densité
critique
au-‐dessous
de
laquelle
ces
réactions
ne
se
produisent
pas.
Lorsque
la
densité
critique
est
atteinte,
les
réactions
démarrent.
A
noter
que
la
densité
critique
n’est
pas
la
même
pour
les
différentes
réactions.
I.5.4
Plasma
dense
et
conditions
extrêmes
Inspirée
des
effets
de
haute
densité
favorables
sur
des
étoiles
à
la
fusion
thermonucléaire,
la
physique
des
plasmas
denses
est
devenue
un
axe
de
recherche
majeur
en
physique.
Les
aspects
appliqués
et
fondamentaux
de
la
fusion
dans
un
plasma
dense
sont
étroitement
liés.
D'une
part,
la
volonté
d'atteindre
le
critère
de
Lawson,
nécessaire
à
la
réaction
de
fusion
auto-‐
entretenue
(l'aspect
appliqué),
nécessite
d'atteindre
des
paramètres
de
plasma
encore
plus
élevés
(température
du
plasma,
densité,
temps
de
confinement
d'énergie),
et
donc
d'avancer
plus
loin
dans
des
paramètres
auparavant
inexplorés,
territoire
scientifique
(l'aspect
fondamental).
Il
n'y
a
pas
de
moyen
direct
de
mesurer
ces
paramètres
et
le
développement
de
méthodes
pour
étudier
les
plasmas
chauds
a
évolué
vers
une
branche
indépendante
de
la
science
du
plasma
[F.B.
Rosmej,
V.A.
Astapenko,
V.S.
Lisitsa,
Plasma
Atomic
Physics,
Springer
2021].
A
l’heure
actuelle,
la
recherche
autour
de
la
fusion
inertielle
et
les
expériences
sur
de
grandes
installations
laser
sont
une
source
impressionnante
de
recherche
sur
la
technologie
de
la
matière
sous
conditions
extrêmes.
Avec
ses
grandes
installations
laser
à
Bordeaux
(PETAL,
MEGAJOULE)
et
surtout
en
Ile
de
France
(LULI2000,
APOLLON),
la
France
joue
un
rôle
majeur
au
niveau
mondial
:
l’astrophysique
de
la
matière
dense
en
laboratoire
est
réalisée
aujourd’hui
avec
des
installations
laser
de
puissance
(par
exemple
laser
MegaJoule).
Les
conditions
extrêmes
(notamment
une
densité
supérieure
à
celle
d’un
solide)
sont
des
défis
actuels
en
physique
de
la
“Haute
énergie
densité”:
on
rencontre
une
forte
perturbation
du
champ
coulombien
des
atomes
et
des
ions
par
les
micro-‐champs
des
particules
chargées,
ce
qui
induit
des
nombreux
phénomènes
encore
mal
comprise
(abaissement
du
continuum,
c’est
à
dire
changement
d’énergie
d’ionisation;
changement
de
tous
le
processus
élémentaires
comme
les
coefficients
d’Einstein,
régle
d’or
de
Fermi
en
mécanique
quantique,….).
35
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
Considerons
l’effet
d’abaissement
du
continuum
dans
un
modèle
hydrogénoide.
Un
ion
hydrogénoïde
est
un
ion
monoatomique
ne
possédant
qu'un
seul
électron
lié
au
noyau.
Il
a
alors
une
structure
semblable
à
celle
de
l'atome
d'hydrogène,
à
la
différence
notable
que
la
charge
totale
du
système
n'est
plus
+e
mais
+(Z-‐1)e
pour
un
élément
de
numéro
atomique
Z.
C'est
un
atome
qui
a
perdu
tous
ses
électrons
sauf
un.
Le
modèle
de
Bohr
s’applique
donc
également
en
remplaçant
la
charge
du
potentiel
coulombien
du
noyau
+e
par
+Ze.
L'énergie
totale
de
l'électron
est
(Ry=13.6
eV)
:
Z 2 Ry
E totale
n
= − 2 .
(I.5.3)
n
La
distance
entre
le
noyau
et
l'électron
est
:
n2
rn = a0 .
(I.5.4)
Z
Dans
la
matière
dense,
le
potentiel
coulombien
est
fortement
perturbé
par
les
micro-‐
champs
électriques
des
particules
chargées.
En
conséquence,
la
physique
atomique
des
atomes
et
des
ions
isolés
est
modifiée
et
une
particule
est
corrélée
avec
les
autres,
Figs.
I.5.1.
En
conséquence,
l’énergie
selon
l’éq.
(I.5.3)
ainsi
que
le
rayon
Bohr
(éq.
(I.5.4))
sont
fortement
perturbés.
Figure
I.5.1
:
Corrélation
des
particules
dans
a
matière
dense
Dans
un
potentiel
coulombien
le
nombre
d’états
est
infini.
Cependant,
un
ion
est
entouré
par
d’autres
particules
chargées
(électrons,
ions
dans
des
états
différents)
et
leur
champ
électrique
baisse
le
potentiel
coulombien
et
limite
le
nombre
des
états.
Il
s’agit
d’un
abaissement
de
niveau,
et
les
niveaux
les
plus
hauts
ne
sont
plus
liés,
mais
se
trouvent
dans
le
continuum.
Une
approximation
simple
consiste
à
considérer
le
volume
moyen
Vi=4/3πRi3
d’un
seul
ion
dans
un
plasma
dense
:
36
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
1/3
⎛ 3 ⎞
Ri = ⎜ ⎟
.
(I.5.5)
⎝ 4 π ni ⎠
ni
(ni
=
un
ion
/
Vi)
est
la
densité
ionique
en
[cm-‐3]
et
Ri
en
[cm].
La
limite
du
nombre
d’états
nbound
lié
au
noyau
provient
du
fait
qu’il
n’y
a
plus
de
rayon
atomique
supérieur
au
rayon
Ri.
En
utilisant
l’éq.
(I.5.4)
pour
le
rayon
Bohr,
le
dernier
nombre
quantique
principal
existant
dans
un
ion
est
2
nbound
Ri ≈ rnbound = a0
,
(I.5.6)
Z eff
1/2 1/6
⎛ Z eff ⎞ ⎛ 3 ⎞
nbound ≈⎜
⎝ a0 ⎟⎠ ⎜⎝ 4 π n ⎟⎠ =1.1x10 4 Z eff ni−1/6 cm −3 ( ) .
(I.5.7)
i
Comme
l’énergie
du
nombre
quantique
nboud
est
(éq.
(I.5.3))
Z eff2 Ry
Ebound = 2
(I.5.8)
nbound
on
peut
estimer
l’abaissement
d’énergie
ΔE
≈
Ebound
:
1/3
⎛ 4π ni ⎞
ΔE ≈ Z eff Ry a0 ⎜
⎝ 3 ⎠
⎟ = 1.2 ⋅10−7 Z eff ni1/3 cm−3 ( ) [eV ]
.
(I.5.9)
Bien
que
l’effet
d’abaissement
des
niveaux
et
son
influence
sur
les
propriétés
de
la
matière
soient
qualitativement
identifiés,
la
théorie
et
la
façon
de
le
calculer
reste
encore
en
question.
Figure
I.5.2
:
Importance
de
la
matière
dense
et
tiède
dans
des
domaines
différents
37
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
Les
expériences
autour
des
installations
des
lasers
XUV/X
à
électrons
libres
(XFEL)
présentent
aujourd’hui
un
intérêt
mondial
dans
l’étude
de
la
matière
pour
créer
des
conditions
extrêmes
jamais
atteintes
en
laboratoire.
L’interaction
d’un
laser
avec
un
solide
est
très
différente
selon
qu’il
s’agit
du
domaine
VUV
ou
X,
ou
du
domaine
visible.
Alors
que
le
rayonnement
visible
ou
infrarouge
est
absorbé
à
la
surface,
un
photon
VUV
ou
X
peut
pénétrer
à
l’intérieur
de
la
cible
et
donc
chauffer
la
cible
en
son
cœur.
On
peut
donc
créer
des
conditions
extrêmes
de
la
matière
et
des
états
exotiques
jamais
atteintes
en
laboratoire
[F.B.
Rosmej:
“Exotic
states
of
high
density
matter
driven
by
intense
XUV/X-‐ray
Free
Electron
Lasers”,
"Free
Electron
Laser",
InTech
2012,
editor
S.
Varró,
p.
187
-‐
212,
ISBN
978-‐953-‐51-‐0279-‐3,
téléchargement
via
l'adresse:
http://www.intechopen.com/books/free-‐electron-‐lasers/exotic-‐states-‐of-‐high-‐density-‐matter-‐
driven-‐by-‐intense-‐xuv-‐x-‐ray-‐free-‐electron-‐lasers].
La
matière
dense
et
tiède
(WDM
:
Warm
Dense
Matter)
correspond
à
un
régime
de
haute
densité
et
température
finie
quand
les
électrons
libres
et
liés
deviennent
fortement
corrélés.
Ce
régime
est
un
sujet
de
recherche
important
en
science
des
planètes,
en
physique
des
étoiles
froides
et
dans
tous
les
processus
de
production
de
plasmas
démarrant
par
de
la
matière
froide
et
dense
(par
exemple
:
interaction
laser-‐matière
solide,
plasmas
produits
par
faisceaux
d’ions
lourds,
décharges
dans
des
capillaires,
explosion
de
fils
métalliques,
plasmas
de
pinch).
Il
s’agit
d’un
défi
pour
la
recherche
scientifique:
les
propriétés
radiatives
de
la
WDM
sont
décrites
par
le
système
composé
“ATOME
+
PLASMA”.
38
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
University
2022
I.6
Etoiles
explosives
et
supernovae
Les
scénarios
multiples
dans
l’évolution
des
étoiles
(naine
blanche,
géante
rouge,
trou
noir)
se
distinguent
par
la
masse
initiale
de
l’étoile
:
la
gravitation
et
les
effets
de
la
mécanique
quantique
(principe
de
Pauli,
constante
de
Planck,
dégénérescence,……)
et
l’équation
d’état
jouent
ensuite
un
rôle
majeur.
Figure
I.6.1
:
Sections
efficaces
de
réactions
nucléaires
(«
probabilité
»
de
réaction)
de
la
fusion
[Bosch
and
Hale,
Nuclear
Fusion
32,
611
(1992)].
Un
barn
(b)
est
10-‐24
cm2.
Comme
nous
l’avons
vu
à
travers
de
la
figure
I.6.1,
la
probabilité
d’une
réaction
nucléaire
peut
augmenter
rapidement
en
fonction
de
l’énergie
des
particules
(considérons
par
exemple
la
probabilité
pour
la
réaction
D-‐D,
fig.
I.5.1:
σ(20
keV)
≈
5x10-‐4
barn,
σ(200
keV)
≈
39
ARE-‐TROUNOIR
Frank
ROSMEJ
Sorbonne
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2022
7x10-‐2
barn).
En
conséquence
le
débit
d’énergie
peut
varier
de
façon
brusque
sans
être
compensé
par
une
augmentation
suffisante
de
la
pression
(gravitation).
Ceci
entraine
une
explosion
partielle
des
couches
de
l’étoile
où
se
déroule
cette
fusion.
On
a
alors
affaire
à
un
flash
d’hélium,
responsable
du
retour
d’une
partie
de
l’étoile
au
gaz
interstellaire.
Le
déclenchement
des
réactions
(I.5.1,
cycle
CNO)
est
lié
à
la
fin
de
la
fusion
d’hélium
dans
le
centre
de
l’étoile.
A
cause
de
la
gravitation,
l’étoile
devient
une
naine
blanche.
La
pression
étant
très
élevée,
l’effet
de
dégénérescence
électronique
devient
important
et
la
pression
devient
indépendante
de
la
température,
ce
qui
induit
des
réactions
nucléaires
massives
et
l’explosion
ensuite.
Les
supernovae
sont
des
étoiles
explosives.
Dans
le
modèle
à
détonation
du
carbone,
la
réaction
du
carbone
(I.5.1a-‐f)
se
déclenche
au
centre
de
l’étoile,
ce
qui
engendre
une
onde
de
détonation
qui
la
brise
complètement.
40