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5p 198 Bahar R PDF
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Comportement des fondations d’ouvrages sur les sols mous de Béjaia renforcés par des
colonnes ballastées
Bahar R.*
Laboratoire de Géomatériaux, Environnement et Aménagement, Université Mouloud Mammeri de Tizi-Ouzou,
Algérie
Sadaoui O.
Département de Génie Civil, LGEA, Université Mira Abderrahmane de Béjaia, Algérie
Khiatine M.
Construction and Testing Engineering Laboratory, Alger, Algérie
Résumé
Cette communication présente quelques cas pathologiques liés au comportement des ouvrages industriels
fondés sur les sols mous et compressibles renforcés par micro pieux ou colonnes ballastées de la plaine
de Bejaia. Il s’agit de l’analyse et de la discussion des mesures de tassement de ces ouvrages, l’impact sur
leur comportement et l’évaluation du niveau de fiabilité des solutions de renforcement adoptées. Les
ouvrages expérimentés sont les bacs de stockage de pétrole du terminal marin, deux batteries de silos de
stockage de céréales respectivement en béton armé et métallique et la sphère de stockage de gaz du centre
emplisseur GPL.
1. INTRODUCTION
Les terrains situés dans la plaine alluviale de Bejaia, en particulier dans la zone portuaire de la ville,
présentent des caractéristiques géomécaniques défavorables sur une épaisseur pouvant dépasser les 40 m
(Bahar et al, 2010). La particularité du site est sa faible portance, sa compressibilité élevée et le risque
potentiel de liquéfaction et d’inondation (Sadaoui, 2006; Khiatine, 2011). Le développement industriel de
la région a engendré l’occupation des terrains proches de la zone portuaire. Plusieurs ouvrages fondés sur
des fondations superficielles sur ces sols sans renforcement ont subi des pathologies diverses,
affaissement des bacs de stockage d’hydrocarbures liquides, tassement des silos de stockage de céréales,
tassement de culée de ponts, etc. La construction d’ouvrages industriels lourds nécessite donc des
fondations profondes très coûteuses ou un traitement préalable des sols (Dhouib et Blondeau 2005).
Malheureusement, malgré le traitement de ces sols, certains ouvrages ont subi des tassements excessifs
nécessitant un renforcement supplémentaire très coûteux par une reprise en sous œuvre.
Cette communication présente quelques cas pathologiques liés au comportement des sols et à
l’exploitation des données d’auscultation de tassements sur les fondations d’ouvrages stratégiques
implantés sur les sols compressibles de la plaine de Bejaia. L’objectif recherché est la capitalisation du
retour d’expérience sur le comportement réel des fondations sur les sols compressibles, l’évaluation de
leur niveau de fiabilité, l’impact des tassements sur le comportement de ces ouvrages et les solutions de
traitement adoptées. Pour ce faire, nous avons collecté l’ensemble des données géotechniques existantes
auprès des maîtres d’ouvrages ainsi que tous les plans graphiques relatifs au génie civil des structures en
question. Dans ce cadre, nous nous sommes intéressés aux tassements subis par les ouvrages suivants :
Bacs de stockage de pétrole du terminal marin, Deux batteries Silos de stockage de céréales
respectivement en béton armé et métallique et la sphère de stockage de gaz du centre emplisseur GPL.
---------------------------------------
* Auteur correspondant: ramdane_bahar@mail.ummto.dz
La ville de Bejaia est située à environ 250 kms à l’Est de la capitale Alger. La plaine alluviale de Béjaia
s’étend sur une superficie d’environ 750 hectares. Elle est intercalée dans sa majeure partie aux
embouchures de deux oueds : Soummam et Seghir. Cette zone n’avait pas connu dans le passé de
développement urbain à cause des différents aléas mis en évidence par des études hydrauliques et
géotechniques réalisées dans la région. La faible portance du sol, sa forte compressibilité et le risque de
liquéfaction et d’inondation par les crues des deux oueds sont parmi ces aléas et constituent une contrainte
en matière d’urbanisation. Le débordement de l’oued Soummam en 2003 avait causé d’énormes
dommages aux infrastructures de base et aux équipements limitrophes (routes, aéroport, etc.). La rareté
des terrains au niveau du centre urbain et le développement des industries ont incité les promoteurs
immobiliers et industriels à l’occupation les terrains proches de la zone portuaire.
La géologie régionale matérialise la plaine de Béjaia dans les bassins synclinaux post nappe du Tell (Roth,
1950). La dépression située entre les monts Gouraya au Nord et Sidi Boudraham au Sud-Ouest a été
comblée par les alluvions fines des oueds Soummam et Seghir et interpénétrées dans les dépôts marins
transgressifs. Du point de vue stratigraphique, l’ensemble des dépôts est d’âge quaternaire. Il résulte de
l’histoire géologique que la zone portuaire prolongeant la plaine alluviale est constituée par des matériaux
fins plus ou moins vasards (limons, argiles) et sables déposés sur un substratum rocheux assez profond
rencontré à environ 40 à 50 m, de nature marno-calcaire du crétacé.
Sur le plan géotechnique, la plupart des terrains ont été couverts par des essais de reconnaissance pour
évaluer la résistance des sols et leur degré de constructibilité. Il s’avère que les couches superficielles de
nature alluvionnaire, à dominance sablo-argileuse et parfois hétérogènes, n’ont pas encore atteint un degré
de consolidation suffisant, par conséquent leur capacité portante est faible et leur compressibilité est
élevée. La faible portance et la compressibilité élevée des sols alluvionnaires de la plaine de Bejaia, et
particulièrement la zone portuaire, nécessitent des fondations profondes ou le traitement des sols pour
construire des ouvrages lourds. Plusieurs cas d’ouvrages réalisés sur fondations superficielles dans cette
zone ont subi des pathologies diverses tels que l’affaissement généralisé des bacs de stockage de pétrole,
tassement de silos et culée de pont, etc. (Sonatrach, 1991, 2004). La figure 1 présente quelques
caractéristiques mesurées sur les sols de la zone portuaire.
Pl, Ep (MPa) Résistance de pointe CPT (MPa)
Vitesses (m/s) Module de Cisaillement (MPa) NSPT-corrigé
0.1 1 10 2 4 6 8 10 12 14 16
0 500 1000 1500 2000 0 100 200 300 400 500 600 0 10 20 30 40 50
0 0
0 0 0
2 2
2 2 2
4 4
4 4 4
6 6
6 6 6
8 8
8 8 8
10 10
10 10 10
12 12
12 12 12
14 14
14 14 14
16 16
16 16 16
18 18
18 18 18
20 20
20 20
Profondeur (m)
20
Profondeur (m)
Profondeur (m)
Profondeur (m)
Profondeur (m)
22 22
22 22 22
24 24
24 24 24
26 26
26 26 26
28 28
28 28 28
30 30
30 30 30
32 32
32 32 32
34 34
34 34 34
36 36
36 36 36
38 38
38 38 38
40 40
40 40 40
42 42
42 42 42
44 44
44 Vitesses 44 44
Pression limite 46
Vp 46 46 Site Zone Portuaire de Béjaia 46
46 Site Zone Portuaire de Béjaia Module pressiométrique
Vs 48
48 48 48
48
Batterie de 24 silos
en béton armé
Bacs de stockage de
pétrole
Sphère de stockage
de gaz
marneuse. Cette investigation montre également une hétérogénéité latérale des couches alluvionnaires
sous les assiettes des bacs C9, R13 et R21 et semble être à l’origine de l’apparition des tassements
différentiels sur toute leur circonférence avec une amplitude importante (28 cm) et une perte de verticalité
au niveau du bac C9 à partir de 1990. Les tassements de consolidation de sol sous les bacs en question
sont accentués principalement par l’étendue des charges apportées par leur fondation, ayant une
influence importante en profondeur (diamètre de chargement supérieur à 50 m) et l’existence de couches
drainantes de graviers et de sables intercalées entre les couches cohérentes et compressibles favorisant
ainsi la consolidation des couches et le développement des tassements. La figure 4 montre la répartition
des tassements différentiels le long de la robe du bac C9 avant le confortement et après la reprise en sous
œuvre par micros- pieux. On note une stabilisation et une uniformité de ce tassement.
Par ailleurs, d’autres bacs en l’occurrence A8 et C4, ont été touchés par des affaissements différentiels
excessifs vers la fin des années 1990. La reprise en sous œuvre des fondations avait nécessité une étude de
sol complémentaire réalisée en 1998 à la périphérie des ouvrages en question. Les bacs C4 et A8 ont fait
l’objet de remise à niveau en 2004 par la technique de micros pieux injectés de mêmes caractéristiques
que ceux des bacs confortés en 1992. Les relevés des tassements effectués périodiquement par le maître
d’ouvrage au niveau des autres bacs de stockage, confirment l’évolution des tassements vers des valeurs
parfois inadmissibles, par conséquent il y a la nécessité de confortement des fondations de la totalité des
bacs pour se conformer aux normes techniques régissant l’exploitation de ce type d’ouvrages.
n° des repères
0 10 20 30 40
0
Tassements en (mm)
50
100
150
200
250
300
Figure 5. Profil géotechnique du sol au niveau du bac de stockage C9 (terminal marin nord).
substantiels en termes de délais de réalisation est le procédé des colonnes ballastées (Dhouib et Blondeau,
2005).
mesures permettent également d’orienter la décision sur l’arrêt d’exploitation quand les seuils critiques
sont atteints, au-delà desquels des confortements sont envisageables.
Le tassement partiel mesuré après six mois de suivi permanent depuis le 02/05/2006 est uniforme sur les
deux silos C17 et C21 avec une valeur maximale de 10.30 cm (Fig. 7(b)). La contrainte de service
maximale atteinte est de 2,17 bars, mais elle est d’une courte durée à cause du déchargement rapide des
silos (Fig. 7(a)). L’exploitation des courbes de contraintes- tassements montre que le déchargement est
suivie d’un léger soulèvement progressif du radier pour atteindre une valeur de 0,5 cm à une contrainte de
1.375 bars, cela peut s’expliquer par le fait que les colonnes ballastées n’ont encore pas atteint la phase
des grandes déformations, à ce stade de sollicitation. On note également l’augmentation subite des
tassements sous l’effet d’un palier de contraintes de l’ordre de 1.50 à 1.77 bars, maintenu durant un mois.
Ainsi, environ 30 % des tassements mesurés se sont développés durant ce palier. Cela est dû
probablement au rabaissement du niveau de la nappe phréatique accompagné d’une légère augmentation
du tassement.
Tenant compte des anciennes mesures de tassements, avant le 02/05/2006, il en résulte des tassements
totaux de 16.2 et 19.7 cm mesurés respectivement au niveau des silos C21 et C17. Le tassement
différentiel mesuré initialement de 3.5 cm n’est pas neutralisé, et les indices de faux aplomb au sommet
des silos sont toujours perceptibles. On remarque aussi que le tassement calculé par la méthode de Priebe
jusqu’à 54 m de profondeur pour une contrainte de 2.17 bars est le double du tassement mesuré in situ
cela est du à la nature variable des charges d’exploitation qui sont les plus prépondérantes dans le cas des
silos de stockage. Par ailleurs, le tassement calculé par les méthodes de Priebe et d’homogénéisation
simplifiée sur l’épaisseur de la couche traitée, qui est respectivement de 21.21 et 28.45 cm, est proche du
tassement mesuré in situ pour le seuil de contrainte de 2.17 bars. Il y a lieu de souligner que le caractère
potentiellement drainant des colonnes ballastées permet un développement rapide des tassements de
consolidation sur la couche traitée à l’encontre des tassements déviatoriques qui se manifesteront
lentement au niveaux des couches situées sous l’assise des colonnes ballastées.
240 20
Contrainte de service Tassement
220 18 Point B2 (silo C17)
Contrainte de service (kPa)
180
Tassement (cm)
14
160 Mesures
140 12
inexistantes
120 10
100 8
80 6
60
4
40
20 2
0 0
0 200 400 600 800 1000 1200 1400 0 200 400 600 800 1000 1200 1400
Temps (jours) Temps (jours)
(a) (b)
Figure 7. Evolution de la contrainte de service et du tassement des silos C17, C18, C21et C22 depuis 01 juin
2003(t=0) au 30/10/2006 (t=1233 jours).
3 Ligne C22-C2
4
Tassement (cm)
Ligne C21-C1
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14
15
Figure 8. Allure des tassements des radiers des 24 silos jusqu’au 30/10/2005.
3.3. Site de la batterie de 10 silos métalliques de stockage de céréales
3.3.1. Description de l’ouvrage et du site
L’ouvrage est composé d’une batterie de dix silos métalliques destinés au stockage de céréales d’une
capacité totale de 76000 tonnes. Les silos sont fondés sur un radier général en béton armé de forme
rectangulaire de 75 cm d’épaisseur et de 122x51m2 de superficie surmontant deux galeries souterraines
communiquant avec les trémies de vidange aux extrémités (Fig. 9).
L’examen des coupes lithologiques des sondages montre une succession de couches sédimentaires de
limons et de sables vaseux jusqu’à 30 m de profondeur, puis on rencontre une couche de marne plastique
parfois vaseuse. Le niveau de la nappe phréatique est détecté à partir de 2 m de profondeur. La couche
superficielle du site sur les douze premiers mètres est caractérisée par un indice des vides variable de 1.06
à 1.30 et un indice de compressibilité Cc variant entre 37% et 54%. Ces résultats traduisent la nature très
meuble du sol et sa forte compressibilité. Les essais au pénétromètre dynamique ont mis en évidence une
certaine homogénéité horizontale de la formation alluvionnaire. La valeur minimale de la résistance en
pointe enregistrée est de 0.8 à 1.0 MPa sur les douze premiers mètres. A partir de cette profondeur les
résistances de pointe dynamique sont en générale supérieures à 10 MPa (entre 10 et 15 MPa).
Pour un ancrage du radier de 1.50 m, la contrainte admissible la plus défavorable, estimée à partir des
différents essais, est de 110 kPa. Pour un radier de grandes dimensions, la méthode oedométrique a été
utilisée pour l’estimation du tassement. Pour une contrainte de service de 120 kPa, le tassement de
consolidation des couches alluvionnaires sur 40 m de profondeur est estimé à 160 cm. Ces résultats ne
sont pas admissibles. Par conséquent, il y a nécessité de passer au système de fondations profondes ou
bien de procéder au renforcement de sol. L’expérience déjà acquise au niveau des projets agroalimentaires
antérieures réalisés au niveau de la zone portuaire de Bejaia fait que le maître de l’ouvrage en commun
accord avec le maître de l’œuvre ont opté, en 2004, pour le renforcement de sol par des colonnes
ballastées. Ce choix est également justifié par le coût de réalisation en comparaison aux fondations
profondes par pieux, la disponibilité localement du matériau de substitution (ballast) et la rapidité
d’exécution du procédé. La profondeur de traitement a été retenue sur la base de ces essais de contrôle
sans aucune justification théorique.
Le radier général de grandes dimensions est réalisé sur un sol renforcé sur douze mètres de profondeur par
des colonnes ballastées. Cette profondeur a été arrêtée sur la base des essais au pénétromètre dynamique
qui ont donnés des résistances dynamiques en pointe, Rp supérieures à 100 bars à partir de 12 m de
profondeur. Les colonnes ballastées réalisées par voie humide ont un diamètre moyen de 1 m et une
longueur de 12 m à partir de la plate forme de travail après le décaissement de la couche superficielle sur
une épaisseur de 0.50 m. Le maillage réalisé réellement sur le terrain est régulier et de forme
rectangulaire, la maille de référence est de 5.80 m2 (2.39mx2.43m). Le nombre total de colonnes réalisées
sur une superficie de 5871 m2 est de 1100 colonnes et la quantité approximative de ballast roulé mise en
place est estimé à 10400 m3. Un essai de chargement sur une colonne ballastée a été effectué
conformément aux normes en vigueur par l’entreprise chargée de la réalisation de l’ouvrage sous le
contrôle d’un organisme habilité et du maître de l’œuvre. Les résultats obtenus donnent un tassement de
l’ordre de 6.73 mm pour un chargement de 478 kPa. Les essais au pénétromètre dynamique lourd ont été
réalisés sur vingt colonnes ballastées dans le but de vérifier leurs caractéristiques mécaniques suivant les
prescriptions du DTU 13-2. L’analyse des résultats obtenus révèle que seulement 25% des essais ont
donné des résistances de pointe supérieures à 15 MPa à partir de 1.0 m de profondeur. 75 % des essais ont
donné des résistances dynamiques de pointe dynamiques comprises entre 3 et 9 MPa à partir de 2 à 4 m de
profondeur. Les travaux ont débuté en 2004 et achevé début 2005. Un système de suivi de tassement a été
placé sur les silos.
L’inexistence d’une note de calcul, nous a poussé à effectuer les calculs de capacité portante et de
tassements en prenant en compte les données réelles du projet. Le calcul de tassement est effectué par la
méthode de Priebe (1995). Pour le renforcement réalisé, le tassement total obtenu pour une contrainte de
service de 130 kPa est de 58.30 cm dont 14.60 cm sur la profondeur de traitement. L’utilisation de la
méthode d’homogénéisation simplifiée donne des tassements similaires à ceux obtenus par la méthode de
Priebe. Les tassements calculés ne sont pas admissibles pour un traitement du sol sur 12 m de profondeur.
Sur la base de ces résultats pessimistes, un suivi des tassements a été recommandé avant tout chargement.
Ce suivi a débuté juste après l’achèvement des travaux de la construction.
Le suivi des tassements du radier est effectué par des visées tachéométriques sur 20 cibles réfléchissantes
fixes (A1, B1, C1, D1, etc.), réparties sur l’ensemble des silos (Fig. 9). Quatre stations (ST1 à ST4) ont
été implantées sur le site loin du champ d’influence des chargements des silos et des vibrations d’engins
pour permettre le relevé altimétrique et planimétrique des différents repères suivant l’état des contraintes
appliquées. Ces relevés ont été effectués sur 545 jours entre le 01/09/2005 et le 01/03/2007. Pour éviter
d’éventuels mouvements relatifs des stations, celles-ci ont été fixées sur des caissons en béton armé
munis d’isolants en polystyrène. Deux stations libres, Z0 et Z5 ont été également implantées
respectivement à l’extérieur et au centre du radier. Pour permettre la mesure de tassement sur l’ensemble
des points du radier et faciliter les visées directes à partir des stations, les réflecteurs ont été fixés sur les
deux bords extérieurs et dans la partie centrale des silos à une même côte altimétrique initiale (Zref =
12,138 m). Les auscultations sont effectuées en général suivant les chargements et les vidanges des silos.
La figure 11 donne la courbe de contrainte de service (charge d’exploitation) et l’évolution des tassements
avec le temps mesurées au niveau des points A1, E1, G1 et G2 en fonction du temps pendant les 545 jours
de l’auscultation de l’ouvrage. Les figures 10 et 12 montrent respectivement une vue des tassements de
l’ensemble du radier à la fin de l’auscultation et l’évolution de la cuvette de tassement du radier dans le
sens longitudinal (A2 – E2) en fonction du temps. L’analyse des différents résultats obtenus a permis de
faire les observations suivantes :
- Après cinq mois de mise en chargement des silos sous l’effet des contraintes variables, les tassements
du radier ont évolué d’une manière substantielle pour atteindre des valeurs de l’ordre de 15 à 20 cm sur la
ligne centrale et de 7 à 13 cm aux bords du radier. Il en résulte ainsi un tassement différentiel maximal
de 10.8 cm lequel est enregistré au niveau du silo C23 (entre H1 et H2). Les tassements différentiels
apparus sont considérés préjudiciables pour la stabilité de l’ouvrage du fait que les premiers signes de
faux aplomb et de déformations à la base des viroles et des pieds commencèrent à apparaître au niveau de
la zone centrale (silos C13, C14, C23 et C24).
- L’évolution de la contrainte de service à une valeur de 130 kPa maintenue constante durant un mois a
généré la progression des tassement jusqu’à atteindre 28 cm sur la zone centrale et 17 cm aux bords et
avec un tassement différentiel plus ou moins uniforme de 11 à 13.8 cm entre le centre et la périphérie. Le
tassement différentiel a été accentué par le non respect des recommandations de chargement et de
déchargement des silos.
- L’examen des profils de déformation du radier dans les sens transversal et longitudinal montre
clairement le fléchissement du radier dans le sens de sa largeur et aux extrémités longitudinales. Les
indices de tassements excessifs se révèlent sur le site par le changement de pente de la chape du radier, par
son incurvation vers la partie centrale, affaissement important de la voirie accompagné d’une
augmentation significative du divers et faux aplomb des silos accentués notamment au niveau de C13,
C14, C23 et C24.
- La différence de comportement entre les deux milieux vierge et celui traité par des colonnes ballastées,
situés de part et d’autre de la frontière (bords du radier), a favorisé le développement des tassements
différentiels. Le renforcement de sol a été arrêté à la limite du radier général. Le suivi de tassement du sol
non traité au point Z0 situé à 4 m du radier a donné un tassement d’environ 7 cm. Toutefois celui-ci
demeure tributaire de l’influence des charges mobiles transitant par la voirie de desserte.
- La valeur maximale du tassement expérimental, obtenu au centre du radier, est de 28 cm, sous l’effet des
contraintes variables de 24.60 à 130 kPa. Le tassement a tendance à se stabiliser du fait qu’il est
stationnaire durant un mois d’observation. Cependant, s’agissant de colonnes flottantes, il y a lieu
d’appréhender le tassement de consolidation lente de la couche compressible qui se trouve entre la base
des colonnes ballastées et le substratum marneux (18 à 23 m d’épaisseur). Le tassement obtenu par la
méthode de Priebe (58,3 cm) dont 14,60 cm au niveau de la couche traitée pour une contrainte de 130
kPa, ce résultat semble raisonnable du fait que l’influence du radier en profondeur est prépondérante et le
tassement de la couche non traitée apparaîtra à moyen et à long terme.
4m
4m
ZO ZO (6.8)
Z1 26.8
J2 I2 H2 G2 22.2 27.4 28.5 28.6
C21 C22 C23 C24 C25 F2 14.2
J1 I1 H1 G1 F1 13.8 14.7 15.3 14.8 14.6
122 m
Figure 9. Vue en plan de l’ouvrage. Figure 10. Tassements en (cm) au 01/03/2007.
140 32
Silos C12 & C24
Silo C24
28 Point G1
Contrainte de service (kPa)
120
Point G2
24
Tassement (cm)
100 Point B1
20 Point B2
80
16
60
12
40 8
20 4
0 0
0 50 100 150 200 250 300 350 400 450 500 550 0 50 100 150 200 250 300 350 400 450 500 550
Temps (jours) Temps (jours)
Figure 11. Diagramme des contraintes de service en fonction du temps depuis le 01/09/2005.
Distance (m)
A2 B2 C2 D2 E2
0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 110 120
0
12
Tassement (cm)
16
20
24
28
09/03/2006 11/06/2006 27/08/2006
40
Figure 12. Evolution de la cuvette des tassements en fonction du temps (profil A2-E2).
Le rapport de sol relatif au site indique que les couches de sol rencontrées sur les 35 premiers mètres sont
caractérisées par une faible résistance et une compressibilité élevée (Naftal, 2004). Elles sont composées
d’alluvions argilo-sableuses avec intercalation de lentilles vaseuses dans certains niveaux. Les essais
oedométriques réalisés sur les argiles sableuses ont mis en évidence le caractère sous consolidé à
normalement consolidé de ces formations sédimentaires et leur forte compressibilité avec des indices de
compressibilité variables de 25 % à 47%. Les résistances statiques en pointe mesurées sont généralement
faibles de 15 à 60 bars jusqu’à 28 m de profondeur, le maximum est atteint dans les couches de sables de
faible épaisseur intercalées entre les argiles. A partir de 28 m de profondeur, une évolution progressive de
cette résistance est constatée jusqu’au niveau du toit du substratum marneux détecté à partir de 35 m de
profondeur dont la valeur chute jusqu’à 30 bars à cause de son altération. Le niveau de la marne
compacte correspondant au refus absolu de la pointe du pénétromètre statique est localisé à 40 m de
profondeur en moyenne.
La sphère butane SB5 de 3000 m3 dont les travaux ont été réceptionnés en janvier 2005, est fondée sur dix
pieux forés en béton armé de diamètre 1.20 m, fichés dans le substratum marneux à 43 m de profondeur
(Fig. 13). Le tableau 1 présente les caractéristiques techniques de la sphère de 3000 m3. La sensibilité de
la sphère par rapport aux déformations du sol a nécessité la mesure des tassements des dix pieux pendant
les tests de chargement à l’eau en juillet 2004. Le chargement est réparti sur six paliers de 500 m3 chacun
durant douze jours d’épreuve. Le tassement maximal enregistré est de quatre 4 mm et un minimum de
deux 2 mm sur l’ensemble des pieux auscultés (Figure 14). Après deux années de mise en exploitation de
la sphère depuis janvier 2005, les relevés effectués n’ont détecté aucune évolution du tassement au niveau
des pieux. En outre, la fondation superficielle (radier) du pylône métallique de 24 m de haut et de 8.50
tonnes de poids propre, ancrée à 2.80m de profondeur et transmettant une contrainte de service à l’ELS de
l’ordre 0.55 bars, n’a subi aucun tassement après trois ans de sa réception en décembre 2003 (Naftal,
2004).
1
Tassement (mm)
4 Pieu n° 3
Pieu n° 8
5
Figure 14: Evolution du tassement des pieux n° 3 et 8 en fonction de la charge.
4. CONCLUSIONS
L’analyse du comportement des fondations de certains ouvrages stratégiques implantés sur les
sols compressibles de la plaine de Bejaia sur la base de l’interprétation des mesures de tassement
permet de tirer les conclusions suivantes :
- La construction d’ouvrages industriels lourds dans la zone portuaire nécessite des fondations
profondes ou un traitement préalable des sols pour réduire les tassements. Les fondations profondes et la
consolidation par micros pieux sont les mieux adaptées au site.
- Les sites des ouvrages renforcés par colonnes ballastées ont subi des tassements excessifs et des
désordres. Ces désordres sont dus à une mauvaise reconnaissance géotechnique qui a sous-estimé la
profondeur de traitement du site, au non respect des recommandations de l’exploitation des ouvrages qui
se sont traduits par des tassements différentiels inadmissibles. Concernant le contrôle d’exécution des
colonnes, un essai de chargement de colonne isolée ne peut valider un projet de colonnes ballastées car il
n’intègre pas le facteur d’échelle par rapport aux fondations de grandes dimensions.
- Le radier souple de la batterie de dix silos métalliques a subi des tassements différentiels
préjudiciables de l’ordre de 14 cm. Les fissures observées sur le radier ont commencé à
apparaître à partir d’un tassement différentiel de 7 cm, soit 1/400 du diamètre du silo. Le suivi de
l’évolution du tassement indique que 50 % du tassement total observé sur les 545 jours est atteint
sur les six premiers mois de l’exploitation de l’ouvrage.
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