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Biologie médicale
[90-10-0005]
Acides aminés
Laboratoire de biochimie B, hôpital Necker-Enfants-Malades, 145, rue de Sèvres, 75743 Paris cedex
15 France
Résumé
Les acides aminés sont présents dans de nombreux liquides physiologiques (sang, urine, liquide
céphalorachidien, liquide amniotique). Leur concentration dans ces divers liquides biologiques
rend compte de leur métabolisme (production et utilisation) dans l'organisme. Les variations de
concentration sont corrélées aux variations (physiologiques ou pathologiques) du flux à travers
les voies métaboliques impliquées. L'analyse des acides aminés est réalisée par
chromatographie d'échange d'ions avec coloration postcolonne à la ninhydrine. Le système
analytique utilisé doit permettre de séparer et quantifier environ 50 composés ninhydrine
positifs. Ce type d'analyse permet de diagnostiquer ou de suspecter de nombreuses
aminoacidopathies et d'en suivre le traitement diététique.
INTÉRÊT PHYSIOPATHOLOGIQUE
Dans les organismes vivants, les acides aminés ont une triple fonction : éléments constitutifs
des protéines, éléments du métabolisme intermédiaire et précurseurs des amines biogéniques.
Certains acides aminés ne sont pas des éléments constitutifs des protéines et n'existent dans
les organismes que sous forme libre. On distingue les acides aminés indispensables qui doivent
obligatoirement être fournis à l'organisme par l'alimentation car celui-ci est incapable de les
synthétiser et les acides aminés non indispensables que l'organisme est capable de synthétiser
à partir de précurseurs azotés et carbonés grâce à des systèmes enzymatiques appropriés. La
concentration des acides aminés dans les liquides biologiques résulte :
L'analyse des acides aminés dans les liquides biologiques présente un intérêt diagnostique
pour la plupart des aminoacidopathies, qu'elles soient liées à des anomalies de transport
membranaire ou à des enzymopathies affectant leur catabolisme. Elle est l'outil indispensable
au suivi thérapeutique de ces patients. À travers les nombreuses anomalies secondaires qui
peuvent être mises en évidence, elle est informative pour de nombreuses autres pathologies et
dysfonctionnements d'organes et permet d'orienter les investigations complémentaires. Enfin,
elle est largement utilisée dans le domaine nutritionnel.
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ÉTAPE PRÉANALYTIQUE
Sang veineux
Le prélèvement sanguin (au pli du coude) est effectué le matin à jeun après une nuit de jeûne
physiologique ou, lorsqu'il s'agit d'un nourrisson, le plus éloigné possible de la prise du biberon.
Le sang (3 mL), est recueilli sur héparine sèche. L'échantillon est soit transmis à +4 °C au
laboratoire dans la demi-heure qui suit, soit centrifugé à +4 °C. Le plasma est alors
immédiatement décanté et congelé à -20 °C (ou mieux à -80 °C).
Sang capillaire
Comme dans la phénylcétonurie, un prélèvement de quelques gouttes de sang capillaire
déposées sur papier «Guthrie» peut aussi être utilisé pour le suivi thérapeutique des patients
atteints de leucinose et de tyrosinémie de type II.
Urines
Un échantillon urinaire (10 mL) de la première miction matinale correspondant à la totalité des
urines de la nuit qui précède est recueilli. S'il existe des mictions nocturnes, elles sont
conservées au réfrigérateur à +4 °C puis soigneusement mélangées. L'échantillon est soit
transmis rapidement dans la glace au laboratoire soit congelé à -20 °C (ou mieux à -80 °C).
Dans certaines situations particulières, il peut être nécessaire de quantifier une élimination
journalière (suivi thérapeutique d'une cystinurie par exemple). Dans ce cas, les mictions du
nycthémère sont conservées au réfrigérateur à +4 °C, puis mélangées. Le volume total est noté
et un échantillon d'environ 10 mL prélevé puis transporté au laboratoire dans la glace.
En cas de décompensation, le recueil des urines correspondant à cette période est souhaitable.
Liquide céphalorachidien
Un volume de 0,5 mL non hémorragique est recueilli dans un tube sec. Les conditions de
transport au laboratoire sont identiques à celles du plasma.
Liquide amniotique
Le dosage des acides aminés du liquide amniotique peut aussi être effectué comme aide au
diagnostic prénatal des déficits en argininosuccinate synthétase, argininosuccinate lyase et
sulfite oxydase.
Le respect scrupuleux des instructions définies permet d'éviter la transformation des acides
aminés instables ainsi que la disparition des acides aminés soufrés [2].
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largement répandue utilise l'acide sulfosalicylique à la concentration finale de 30 mg/mL
d'échantillon (plasma, urine, liquide céphalorachidien, liquide amniotique). Le surnageant peut
être congelé à - 20 °C (ou mieux à -80 °C). À -20 °C, en dehors du tryptophane qui est instable
et de la glutamine dont la stabilité est inférieure à 1 mois (transformation en acide glutamique),
tous les autres acides aminés peuvent être conservés pendant au moins 1 an [4].
Autres techniques
Des techniques de chromatographie en phase gazeuse et de chromatographie en phase
inverse avec dérivation précolonne des acides aminés ont aussi été développées. Elles ont
démontré leurs performances dans de nombreuses applications, en particulier pour le dosage
des acides aminés des hydrolysats de protéines nécessitant une grande sensibilité de détection
(<1 pmole). Elles sont aussi utilisées pour doser un acide aminé ou groupe d'acides aminés
(acides aminés ramifiés ou tyrosine-phénylalanine) dans des milieux peu complexes [9].
Des développements sont en cours pour adapter cette technique à la quantification dans les
liquides biologiques de l'ensemble des acides aminés qui présentent un intérêt diagnostique.
L'interprétation des résultats ne peut intervenir qu'après une très rigoureuse validation
analytique. Cette validation n'est pas automatisée. Avec les données des échantillons de
contrôle, elle repose sur l'analyse visuelle des chromatogrammes, des temps de rétention, des
surfaces, des modes d'intégration, des rapports d'absorbance 570/440 nm, des étalons
internes et de chacun des autres pics présents. Les variations de concentration d'un ou de
quelques acides aminés n'ont de sens qu'en regard de la concentration des autres acides
aminés des deux milieux biologiques étudiés (plasma et urine) [1, 6].
Les causes des variations de concentration des acides aminés sont multiples et les résultats
plasmatique et urinaire sont complémentaires pour en effectuer une interprétation. Le
laboratoire doit disposer de valeurs usuelles en fonction de l'âge déterminées dans les
conditions physiologiques et analytiques retenues. Comme cette mesure correspond à un
équilibre, le laboratoire doit aussi obligatoirement disposer des informations cliniques,
diététiques et thérapeutiques susceptibles de le modifier [3, 7].
Variations physiologiques
La durée du jeûne, la nature, la quantité et la qualité de l'alimentation, son mode d'apport ainsi
que l'âge du patient sont les principaux facteurs de variations physiologiques. Des variations
néonatales transitoires dues à l'immaturité de certains systèmes enzymatiques du catabolisme
et du transport membranaire des acides aminés peuvent être présentes : hypertyrosinémie,
hyperhydroxyprolinémie, iminoglycinurie, cystinurie-lysinurie par exemple. Des variations en
fonction du sexe ainsi que des variations nycthémérales ont été mises en évidence mais restent
limitées. Des valeurs de référence pour les différents milieux biologiques sont disponibles [1, 9],
y compris pour un régime normoprotidique de type hospitalier et dans les conditions définies
plus haut [2, 5].
Variations observées dans les pathologies les plus fréquemment rencontrées [8]
Les variations pour lesquelles le diagnostic peut être affirmé sont rassemblées dans le tableau
II.
Enfin, les autres causes de variations physiopathologiques figurent dans le tableau IV [1, 6].
Références
[1] Bremer HJ, Duran M, Kamerling JP, Przyrembel H, Wadman SK Disturbances of aminoacid
metabolism: C linical chemistry and diagnosis. Baltimore: Urban and Schwarzenberg1981
[2] Kamoun P, Parvy P, Rabier D Indications et interprétation de la chromatographie des acides
aminés pour le diagnostic des maladies métaboliques. In: Paris: Doin (Ed.) : 1991; 1-13.
[3] Parvy P Modifications des acides aminés plasmatiques et urinaires induites par des
thérapeutiques. Ann Biol Clin 1982 ; 40 : 23-29
[4] Parvy P, Bardet J, Gasquet M, Rabier D, Kamoun P Stability of free amino acids in sulfosalicylic
filtrates. Clin Chem 1995 ; 41 : 145-146
[5] Parvy P, Bardet J, Rabier D, Kamoun P Age related reference values for free aminoacids in first
morning urine specimens. Clin Chem 1988 ; 34 : 2092-2095
[6] Parvy P, Bardet J, Rabier D, Kamoun P A scheme for the interpretation of primary and secondary
disturbances of plasma and urinary amino acid profiles. A possible way to an expert system. Clin
Chim Acta 1995 ; 235 : 1-10 [crossref]
[7] Parvy P, Bardet J, Rabier DM, Saudubray JM, Kamoun PP Ion-exchange chromatography and
clinical criteria in the screening of the aminoacidopathies. Clin Chim Acta 1988 ; 176 : 269-278
[8] Scriver C R, Beaudet AL, Sly WS, Valle D The metabolic basis of inherited disease. New York:
McGraw Hill1989
[9] Slocum RH, C ummings JG Amino acid analysis of physiological samples. In: New York: Wiley-
Liss (Ed.) : 1991; 87-126.
Tableaux
Tableau I
Tableau I - Acides aminés et dérivés ninhydrine positifs détectables par chromatographie d'échange d'ions
(abréviations usuelles).
Tableau II
Tableau II - Modifications des acides aminés caractéristiques d'aminoacidopathies.
Anomalies du métabolisme des acides aminés Augmentation de Val, Ile, Leu P+U
ramifiés Présence de aIle P+U
Leucinose (déshydrogénase des cétoacides
ramifiés)
helene.univ-reims.fr:2153/module/displayarticle/article/61007/impression/vue5 6/8
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Anomalies de transport Diminution de Lys, Orn, Arg P
Intolérance familiale aux protéines avec lysinurie Augmentation variable de P
Glu+Gln, Ala, C it, Gly U
Augmentation de Lys U
Augmentation variable de Orn,
Arg, (C ys)2 , C it, HC i, Glu+Gln
C ystinurie Aucune P
Forme homozygote ou hétérozygote composite Augmentation de (C ys)2 , Orn, U
Forme hétérozygote type II ou III Lys, Arg P
Aucune U
Augmentation de (C ys)2 et Lys
Tableau III
Tableau III - Modifications des acides aminés pouvant permettre une orientation diagnostique.
Plasma Urine
- Déficits en phénylalanine
Augmentation de Phe hydroxylase
- Déficits du métabolisme des
bioptérines
Augmentation variable de Gln, Augmentations variables de Gln, Ala, Lys - Déficit en N-acétylglutamate
Ala, Lys synthétase
Diminution variable de C it, - Déficits en carbamylphosphate
Orn et Arg synthétase
ou si hyperaminoacidurie généralisée - Déficit en ornithine
carbamyltransférase
- Dysfonctionnements de la chaîne
respiratoire
Augmentation de PEA
- Hypophosphatasie
- Maladies osseuses
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- Désordres endocriniens
Augmentation de Pip
- Acidémie pipécolique
- Maladies peroxysomales
Tableau IV
Tableau IV - Principales causes d'anomalies secondaires des acides aminés.
Hyperammoniémie
Augmentation de Gln
Augmentation variable de Ala et Lys
Hyperlactacidémie
Augmentation de Ala
Augmentation variable de Pro
Atteinte hépatique
Augmentation variable de Tyr et Met
Diminution des acides aminés ramifiés
Autres acides aminés normaux ou augmentés
Jeûne prolongé
Diminution de Ala
Augmentation des acides aminés ramifiés
Hyperaminoacidémie généralisée
Hypercatabolisme
Souffrance cellulaire
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