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1.

Préambule

La région méditerranéenne située entre 30° et 45° de latitude connait depuis la haute antiquité
une occupation humaine importante qui a fortement marqué ses paysages et ses espaces
naturels. Les ressources physiques dépendent des caractéristiques des principales
composantes du milieu naturel: le climat, le relief, le sol et les ressources en eau. Ces
caractéristiques varient beaucoup à l’intérieur de l’espace méditerranéen qui s’étend, en gros,
des Alpes au nord, au Sahara au sud et de l’Atlantique à l’ouest, à la mer Caspienne à l’est. Le
climat méditerranéen est généralement caractérisé par une longue saison sèche estivale, des
températures hivernales relativement clémentes et une pluviométrie faible et extrêmement
variable. En fait, ces traits généraux cachent une grande disparité marquée par des grandes
variations dans l’espace et des contrastes saisonniers extrêmement prononcés. Ce qui est dû
au fait que les régions méditerranéennes sont parcourues en hiver par les cyclones du front
polaire et envahies en été par les hautes pressions subtropicales.

Le terme « Méditerranéen » s'explique par sa présence caractéristique autour de la mer


Méditerranée, mais d'autres régions du monde possèdent les mêmes conditions climatiques. Il
s'agit des façades Ouest des continents, entre 30 et 40° de latitude (Californie, centre du Chili,
région du Cap en Afrique du Sud, Sud et Ouest de l'Australie).

Ce chapitre présente une description générale du climat méditerranéen. Son objectif est de
fournir des informations essentielles et une vision globale sur les phénomènes
météorologiques se produisant dans la région Méditerranéenne. Il vise à introduire les
circulations atmosphériques en Méditerranée et à décrire les conditions climatiques de la
région.

2. Le climat

Le climat désigne l’ensemble des phénomènes caractérisant l’état moyen de l’atmosphère, sa


variabilité et son évolution en un lieu donné. Si la météorologie étudie les phénomènes
atmosphériques à l’échelle du temps des processus physiques en jeu, les sciences du climat
procèdent donc d’une vision statistique destinée à décrire, comprendre et représenter les
évolutions de l’état de l’atmosphère sur des périodes de temps beaucoup plus longues, allant
de la saison au millénaire. Par phénomène extrême, on entend généralement un événement
remarquable par sa rareté, son intensité et/ou les dégâts qu’il est susceptible de provoquer :
canicule, inondation, tempête, sécheresse, vague de froid, etc.
La modélisation de ces événements en prévision numérique du temps vise à anticiper leur
arrivée quelques jours a l’avance en tachant d’apporter le maximum de précisions quant a
leurs caractéristiques (heure de début et de fin, intensité, localisation et extension spatiale,
etc.). Du point de vue du climat en revanche, ces phénomènes sont appréhendés par leur
fréquence d’occurrence et leur caractéristiques moyennes, ainsi qu’au travers de la variabilité
de ces grandeurs (variabilité interannuelle, décennale, voire au delà) ; et dans le contexte du
changement climatique, il faut adjoindre à cette perspective l’éventualité d’une évolution des
grandeurs moyennes caractérisant les événements extrêmes; fréquence, intensité, variabilité,
etc; on parle alors de tendances. L’exigence de précision dans la représentation de chaque
événement sera donc moindre dans un modèle de climat.

3. Principe de la formation de la pluie et des nuages

Lorsqu'une quantité suffisante de vapeur d'eau est entrainée au dessus du niveau de


condensation par des mouvements ascendants, les gouttelettes de nuages se forment. Un flux
d'humidité convergent de l'environnement vers le nuage est nécessaire dans les basses et
moyennes couches de l'atmosphère pour assurer le maintien et le développement du nuage.
Pour qu'il y ait production de précipitations, il faut que, d'une part, les mouvements
ascendants persistent suffisamment longtemps pour qu'il y ait condensation d'une grande
quantité d'eau nuageuse et, d'autre part, une transformation des petites gouttelettes en
particules précipitantes. Plusieurs mécanismes ont été identifiés conduisant à une croissance
rapide des hydrométéores pour aboutir aux précipitations. Un premier mécanisme de
croissance est la déposition de vapeur d'eau en sursaturation, d'abord sur les noyaux de
condensation, puis sur les gouttelettes, ce qui a pour effet d'augmenter leur diamètre. Un autre
mécanisme intervient alors: l'autoconversion, processus par lequel les gouttelettes vont
s'agglomérer. Celui-ci dépend à la fois des probabilités de collision et de coalescence des
gouttelettes. Les gouttelettes tombent alors hors du courant ascendant lorsque leur vitesse de
chute est assez grande. Elles grossissent ensuite par collection tant qu'elles restent dans l'air
nuageux. L'efficacité de ce mécanisme dépend des vitesses relatives des gouttelettes, de leur
diamètre et de la turbulence dans le nuage. Certaines gouttes éclatent et produisent de
nombreux fragments ; les plus petits sont entrainés par les courants ascendants, les autres
continuent leur chute.
Une partie s'évapore dans l'air sec sous le nuage avant d'atteindre le sol, l'autre produit les
précipitations. Lorsque les précipitations n'atteignent pas le sol, on est en présence d'un
phénomène appelé "virga". La figure 1 montre le cycle hydrologique de l’eau

Fig.1. Cycle hydrologique de l’eau

4. Précipitations Stratiformes et Convectives

D’un point de vue macroscopique, la nature des mouvements d’air verticaux permet de
distinguer fondamentalement deux types de précipitations : celles qualifiées de stratiformes et
celles dites convectives. Dans le premier cas, et contrairement au second, les processus
microphysiques se déroulent dans des mouvements verticaux relativement faibles ; par
définition :
𝐶𝑜𝑛𝑑𝑖𝑡𝑖𝑜𝑛 𝑠𝑡𝑟𝑎𝑡𝑖𝑓𝑜𝑟𝑚𝑒 ∶ 𝑉𝑎𝑖𝑟 < 𝑉𝑝𝑎𝑟𝑡𝑖𝑐𝑢𝑙𝑒𝑠
𝐶𝑜𝑛𝑑𝑖𝑡𝑖𝑜𝑛 𝑐𝑜𝑛𝑣𝑒𝑐𝑡𝑖𝑣𝑒 ∶ 𝑉𝑎𝑖𝑟 ≥ 𝑉𝑝𝑎𝑟𝑡𝑖𝑐𝑢𝑙𝑒𝑠

Où Vair désigne la vitesse verticale de l’air et Vparticules la vitesse limite de chute correspondant
à des hydrométéores.
Dans une situation convective, les forts mouvements ascendants provoquent une condensation
rapide de la vapeur d’eau et génèrent de forts contenus en eau liquide nuageuse. Les processus
microphysiques dominants sont la coalescence et le givrage.
Ils conduisent à un développement très efficace des précipitations (liquides et solides) car ils
sont favorisés par les fortes ascendances qui augmentent la durée de résidence des
hydrométéores dans le système. Lorsque des particules deviennent suffisamment lourdes,
elles tombent au sol sous forme de pluies très fortes, de grésil voire de grêle. Les
cumulonimbus sont des exemples courants de précipitations convectives intenses : les
ascendances sont en moyenne comprises entre 1 et 5 m s-1. Les pluies convectives sont
caractérisées par des champs de précipitations de plus grande extension verticale et par une
forte variabilité spatiale et temporelle des intensités de pluie.
Dans une situation stratiforme, les ascendances sont moins fortes (< 1 m s-1), les contenus en
eau liquide nuageuse plus faibles et la croissance des précipitations se fait par les mécanismes
de diffusion et d’agrégation. Ces particules tombent dans le champ de pesanteur, grossissent
en formant quelques agrégats de neige, fondent au passage par l’isotherme 0 °C et
enrichissent les précipitations liquides qui atteignent parfois le sol. Si la température est
négative, les précipitations restent sous forme solide et de la neige se manifeste au sol. Ces
situations correspondent à des nuages de type nimbostratus. Les pluies stratiformes sont
caractérisées par des champs de précipitations de grande extension horizontale, de faible
extension verticale et par une faible variabilité spatiale et temporelle des intensités de pluie.
Selon Roux (1991), la quantité totale de précipitations en un endroit donné dépend de trois
facteurs principaux: la source, qui est la quantité d'humidité de l'air instable alimentant
l'orage, le moteur, qui est l'intensité des courants ascendants, et la durée du phénomène au
dessus de la zone concernée. Houze (1988) montre que les pluies subtropicales et tropicales
sont caractérisées par la présence de nuages stratiformes au sein des perturbations et que les
pluies stratiformes sont directement associées à la convection profonde. La figure 2 représente
les phénomènes mis en jeu ainsi que les mécanismes des précipitations. On distingue bien la
partie convective et la partie stratiforme avec d'autre part l'alimentation de la partie
stratiforme à partir des particules formées dans la partie convective. Les plus grandes
intensités des précipitations sont observées au sein de la partie convective, elles sont ensuite
suivies par de très faibles pluies, puis par des pluies stratiformes plus intenses.
Fig.2. Représentation schématique des mécanismes des précipitations dans un système
nuageux tropical. Les flèches indiquent les trajectoires des particules (d'après Houze, 1988).

Les principales formations nuageuses sont : les nuages de refroidissement isobarique


(brouillards), ceux dus à une détente adiabatique (nuages à développement vertical ou de type
stratiforme selon le type de convection), ceux dus à un accroissement d'humidité (nuages
d'advection).

5. Modélisation à toutes les échelles

Les nuages issus des systèmes cycloniques ou frontaux peuvent avoir une extension
horizontale de plusieurs centaines de kilomètres. Les cellules convectives locales peuvent
s’étendre sur des distances de l’ordre de la dizaine de kilomètres. L’étude des nuages devient
donc un problème multi-échelle d’un point de vue spatial.
Si nous regardons les processus de croissance des particules composant les nuages, il nous
faut pour cela étudier des processus faisant intervenir les molécules de vapeur d’eau
constituant l’air, ceci à une échelle de temps de l’ordre du millième de seconde. Et si nous
nous intéressons à l’impact climatique des nuages, il faut considérer une échelle temporelle de
plusieurs centaines d’années. L’étude des nuages est donc également un problème multi-
échelle d’un point de vue temporel.
La figure 3 montre les différentes échelles spatio-temporelles utilisées pour la modélisation de
la physique de l’atmosphère.

Dans le cadre de l’étude de l’atmosphère sur plusieurs mois ou années, on privilégie les
modèles qui couvrent le globe afin de suivre les éléments susceptibles de se propager sur la
zone d’étude (la surface de toute la Terre). Ces modèles sont appelés des GCM (Global
Circulation Model) et conviennent parfaitement pour étudier le temps à l’échelle globale avec
des résolutions spatiales relativement grossières. Toutes les informations sur la couverture
nuageuse, sa nature et son extension, sont données par des paramétrisations selon deux ou
trois variables au maximum. Par exemple, les nuages frontaux couvrent un nombre suffisant
de points de grille pour que leurs caractéristiques microphysiques soient représentées à l’aide
de paramétrisations simples. Cependant, les nuages convectifs ayant une extension
horizontale moins large ne peuvent être résolus et sont pris en compte au travers de
paramétrisations sous-maille de la convection qui prennent en compte, à la fois, leurs effets
dynamiques ainsi que microphysiques (Kuo, 1974; Bechtold et al., 2001). Il existe aussi des
modèles globaux qui utilisent une représentation plus détaillée des nuages (Fudeyasu et al.,
2008; Lee et Penner, 2010). Ils sont appelés GCRM (Global Cloud Resolving Models). Les
modèles de prévision, quant à eux, réalisent généralement une étude de l’atmosphère à
l’échelle synoptique et sur plusieurs jours avec une résolution spatiale maximale d’une
dizaine de kilomètres et une résolution temporelle de l’ordre de la dizaine de minutes.
Cependant, certains d’entre eux peuvent couvrir l’ensemble du globe. Par exemple, parmi les
modèles de prévision de Météo-France, l’Integrated Forecasting System (IFS) de l’ECMWF 1
et ARPÈGE (Action de Recherche Petite Échelle Grande Échelle, Salas et al. (2005))
couvrent l’ensemble de la planète, avec une maille étirée qui est plus fine (15 km) au-dessus
de la France pour le modèle ARPÈGE. Ces deux modèles peuvent également être utilisés pour
étudier le climat.
Le modèle ARPÈGE peut faire des prévisions jusqu’à trois jours, au-delà de cette échelle de
temps le modèle globale IFS-ECMWF lui est préféré. Le modèle AROME (Applications de la
Recherche à l’Opérationnel à Méso-Échelle), qui est le dernier modèle développé par Météo-
France, utilise une maille très fine de 2.5 km et couvre l’ensemble de la France
métropolitaine. Les modèles opérationnels ont la particularité d’être optimisés pour fournir
une prévision dans le meilleur délai possible.
Pour pouvoir étudier les nuages et l’atmosphère à une échelle régionale, nous utilisons des
modèles méso-échelles. Ces modèles ont la même approche que les domaines synoptiques.
Par exemple, les modèles RAMS (Regional Atmospheric Modeling System) de Cotton et al.
(1982), Méso-NH de Lafore et al. (1998), MM5 (Mesoscale Model 5th generation) de Dudhia
(1993); Grell et al. (1994), WRF (Weather Research and Forecasting model) de Skamarock et
al. (2008) et le modèle de Clark et Hall (Clark et al., 1996) permettent de modéliser les scènes
nuageuses à l’échelle régionale.
Dans les modèles méso-échelles, tous les types de nuage sont résolus par un nombre de points
suffisants pour prendre en compte les effets microphysiques internes.

6. Les systèmes convectifs à méso-échelle (MCS)

La majeure partie des précipitations est apportée par les systèmes convectifs à méso-échelle
(Mathon et al., 2002) que l’on appelle plus couramment MCS (Mesoscale Convective
Systems, Figure 3). On parle de MCS lorsque les précipitations qui lui sont associées,
s’étendent sur environ 100 km dans au moins une direction horizontale et que l'organisation
du système dépend essentiellement de nuages convectifs. Ce type de système est composé de
plusieurs cumulonimbus reliés entre eux par une partie stratiforme. Ils peuvent être vus à
méso-échelle comme une seule entité de 2 à 3 ordres de grandeur plus grande qu’un simple
cumulonimbus, plus ou moins bien organisée selon les cas. Le temps de vie de ces systèmes
est très variable selon les conditions environnementales, il peut aller de plusieurs heures à
quelques jours. Le passage d’un MCS est caractérisé au sol par une importante chute de
température et de fortes rafales de vents qui peuvent soulever de grande quantité d’aérosols
désertiques. Houze (1993) note que la dynamique de ces systèmes est souvent plus complexe
qu’un simple cumulonimbus car une fois regroupés, des phénomènes supplémentaires
apparaissent du fait de la présence d’une très large zone de précipitations stratiformes situées
à l’arrière de la partie convective. Cette partie que l’on nomme aussi enclume (anvil), de par
sa forme, joue un rôle important dans le cycle de vie du MCS, car elle peut subsister plusieurs
heures après la dissipation de la partie convective. De plus, l’enclume du MCS contribue entre
25 et 50 % à la quantité totale des précipitations du système (Houze, 2004), et son impact
radiatif est très important car son extension horizontale couvre généralement une zone de plus
de 104 km2 et son épaisseur peut varier de 4 à 12 km.

Figure 1.6 : Représentation schématique d’un MCS en phase mature ( Houze et al., 1989). La
partie du haut représente une coupe verticale parallèle au déplacement du MCS et la partie du
bas représente les coupes horizontales des deux formes typiques de MCS observés selon le
cisaillement horizontal (symétrique : organisation en ligne ; asymétrique : organisation en arc
de cercle plus ou moins convexe).
Ces systèmes peuvent être classés en deux familles selon leur origine : les amas nuageux et
les lignes de grain. Les amas nuageux correspondent à un regroupement de plusieurs systèmes
convectifs individuels issus d’une profonde convection, ils se déplacent relativement
lentement (quelques mètres par seconde) et peuvent avoir des formes très variées. Les lignes
de grains quant à elles sont formées à partir d’instabilités à plus grande échelle, les ondes
d’est. Leur déplacement est plus rapide que l’écoulement moyen (Lilly, 1979) (10-20 m.s-1) et
la structure de leur partie convective est beaucoup plus organisée : en ligne (ligne de grains)
ou en arc de cercle plus ou moins convexe, selon les caractéristiques du cisaillement
horizontal. Par satellite, les lignes de grains sont facilement reconnaissables de par leur
importante couverture nuageuse, leur organisation et leur périodicité (3-5 jours) (Morel et
Sénési, 2002).
En fait, en Afrique de l’ouest, sur ce vaste continent, il existe une grande diversité de MCS.
La Figure 4 montre 5 MCSs différents de par leur morphologie, leur structure. Pour étudier
ces MCS spécifiques, elles ont été répertoriées suivant plusieurs types : les lignes de grains de
type linéaire (Lafore et Montcrieff, 1989), les Mesoscale Convective Complex (MCC) de type
circulaire (Maddox, 1980), les Organized Complex Systems (OCS) de Mathon (2001) qui
représentent la plupart des précipitations sur la bande sahélienne et enfin les super « clusters »

Fig.4. Zoom de satellite de MeteoSat dans le canal vapeur d’eau, montrant cinq MCS se
propageant d’Est en Ouest sur l’Afrique de l’Ouest le 17 juin 1997.
7. Cycle de vie d’un MCS

Le cycle de vie de tels systèmes peut être décomposé en quatre phases :


La phase d’initiation: durant laquelle les cumulonimbus commencent à se former par
convection, alimentés par l’humidité des basses couches. A ce stade, des orages peuvent
apparaître et se dissiper « normalement », mais si certaines conditions thermodynamiques sont
présentes, notamment une importante énergie potentielle convective (CAPE, Convective
Available Potential Energy) et d’importants cisaillements verticaux et horizontaux associés à
un environnement fortement instable dans les basses couches (variation importante de la
température potentielle équivalente, Houze 2004), alors les parties convectives vont pouvoir
s’intensifier.
La phase d’intensification: les cumulonimbus se développent verticalement par convection
profonde jusqu’à atteindre la tropopause (environ 18 km dans les tropiques) et se regroupent
sous forme de ligne ou d’amas nuageux. A ce stage de développement du MCS, le
refroidissement de la colonne atmosphérique par les précipitations intenses (via l’évaporation)
entraîne un flux subsident froid, appelé courant de densité, qui va favoriser le soulèvement
des masses d’air à l’avant du système. Cette interaction entre le courant de densité et
l’environnement crée un front de rafale qui agit comme un front froid, permettant le
renouvellement des parties convectives et assurant ainsi le maintien (auto entretien) de la
convection (Lafore et Moncrieff, 1989). Les pluies convectives qui résultent de cette
intensification peuvent atteindre facilement des valeurs de plusieurs dizaines de mm.h-1, voire
supérieure à 100mm.h-1 localement.
La phase de maturité: Le MCS est à présent constitué d’une partie convective et d’une partie
stratiforme à l’arrière. Au fur et à mesure du déplacement de la partie convective active (ligne
de grains), les cellules plus anciennes sont détraînées à l’arrière du système formant dans un
premier temps la partie stratiforme du MCS avec des précipitations n’excédant pas les
quelques mm.h-1, puis dans un second temps, la partie cirriforme non précipitante. Le
regroupement de ces deux parties (stratiforme+cirriforme) constitue l’enclume du MCS.
La phase de décroissance: La convection à l’avant du MCS n’est plus active (diminution de
l’instabilité de l’atmosphère). Seule l’enclume du MCS accompagnée de ses précipitations
stratiformes perdurent. Cette phase peut durer plusieurs heures après l’arrêt de la convection.
8. Description du climat en méditerranée

Du point de vue climatique, la région méditerranéenne (fig.5) constitue une zone de transition
entre les climats semi-arides (le sud du bassin) et les climats tempérés (le nord du bassin),
sous l'influence des circulations synoptiques des latitudes moyennes et de la variabilité
climatique tropicale, particulièrement durant la période hivernale (en été, du fait de la
progression vers le nord de l'anticyclone des Acores, la région méditerranéenne est plus isolée
et largement sous l'influence de circulations atmosphériques locales). Au nord, une grande
partie de la variabilité atmosphérique est sous l'influence de flux atmosphériques d'ouest
contrôlées par les positions respectives de l'anticyclone des Acores et de la dépression
d'Islande et modulée par l'intensité et la phase de l'Oscillation Nord Atlantique (NAO) (Trigo
et al., 2004). Se situant au sud du "couloir" des tempêtes de l'Atlantique Nord ("storm track"),
le bassin ouest de la Méditerranée est sous l'influence des dépressions des moyennes latitudes
qui contrôlent le taux de précipitations, surtout pendant l'hiver quand l'influence de la NAO
est la plus importante (Rodriguez-Fonseca and Castro, 2002). Le sud du bassin est sous
l'influence de la partie descendante de la cellule de Hadley associée à l'anticyclone des Acores
et l'est du bassin est sous l'influence de télé-connections avec l'oscillation sud d'ElNi~no (El
Ni~no Souther Oscillation, ENSO) et la mousson asiatique (Mariotti et al., 2002).

Fig. 5. Carte du bassin méditerranéen. Les lignes noires représentent les cotés, et les régions
grises, l'orographie au dessus de 500 m d'altitude.
A petite échelle, l'orographie complexe de la région méditerranéenne est un acteur majeur de
la perturbation de l'écoulement synoptique, à l'origine la formation de structures énergétiques
de méso-échelle pouvant évoluer en systèmes météorologiques extrêmes à fort impact tels que
tempêtes, précipitations intenses et crues. Du fait de la forte urbanisation de cette région et de
l'activité anthropique, la détermination de ces extrêmes est d'une grande importance
socioéconomique. Relier les échelles spatio-temporelles de la météorologie (tels que les
événements extrêmes) et du climat est un des défis majeurs de la communauté scientifique. En
particulier, les progrès sur la prévision météorologique à moyenne échéance et climatique à
l'échelle saisonnière et interannuelle reposent sur la compréhension des circulations
atmosphériques récurrentes et sur les causes spécifiques responsables de leur occurrence,
persistance et/ou transition (Kondrashov et al., 2007).

8.1. Les régimes de temps

Le concept de circulation atmosphérique récurrente et persistante, ou "régime de temps" a été


développé pour obtenir des informations sur le climat régional dans les basses couches de
l'atmosphère. La dérivation des régimes de temps requiert des techniques de classification
reposant sur la définition d'états de l'atmosphère ayant la plus grande probabilité d'occurrence
(e.g. Smith et al., 1998), ou sur la recherche de circulations "types" associées à des anomalies
de géopotentiel, persistant plus d'un certain nombre de jours (Michelangeli et al., 1995). Ces
méthodes classifient en général la circulation atmosphérique synoptique Nord Atlantique en 4
régimes de temps (Michelangeli et al., 1995) (certaines études classifient la circulation
atmosphérique synoptique Nord Atlantique entre 2 et 6 régimes de temps). Ce sont les
régimes de l'Oscillation Nord Atlantique (North Atlantic Oscillation, NAO) dans sa phase
positive et négative, le régime de la dorsale Atlantique caractérisé par un gonflement de
l'anticyclone des Acores recouvrant tout le bassin Atlantique et le régime de blocage
caractérisé par un anticyclone persistant sur le nord de l'Europe et la Scandinavie. Durant la
période d'hivers les conditions climatiques locales sur l'Europe centrale et Ouest ainsi que le
bassin méditerranéen sont étroitement liés à la circulation grande échelle de la région Nord
Atlantique. En effet, plusieurs études ont montré l'influence directe des régimes de temps sur
le climat régional et ces extrêmes (e.g. Sanchez Gomez and Terray, 2005 ; Casola and
Wallace, 2007). Les températures hivernales les plus chaudes se produisent sous l'influence
d'air maritime doux transportée zonalement vers la Méditerranée et l'Europe du Sud et
associée à la phase négative de la NAO (NAO-). Le régime zonal associé à la phase positive
de la NAO (NAO+), possède un flux atmosphérique d'ouest légèrement défléchit vers le nord
qui influence directement une grande partie de l'Europe. Le régime du blocage, avec une
composante méridionale du vent très marquée, remonte l'air doux directement vers le Nord du
continent. En ce qui concerne les températures basses, le régime de temps NAO- engendre des
températures froides en Europe Centrale et du Nord, alors que la dorsale Atlantique entraine
des valeurs basses de la température moyenne sur le Sud-Ouest de l'Europe. Le régime de
blocage transporte l'air froid continental sur la partie Sud-Est. En ce qui concerne les valeurs
extrêmes en températures froides, le régime NAO- est dominant sur la plupart du continent.
L'importance de l'Anticyclone du Groenland pour les températures froides de l'hiver
s'explique par le fait que pour ce régime les vents d'ouest sont affaiblis et déviés et donc ce
sont les masses d'air continentales polaires qui descendent vers l'Europe. Pendant le régime
NAO+, les routes dépressionnaires sont déplacées vers le nord de l'Europe, y provoquant des
hivers humides. Pendant le régime NAO-, les perturbations circulent plus au sud et se charge
d'humidité en Méditerranée, apportant la pluie au Sud du continent Européen. Sur l'Europe
Centrale et d'Est c'est la dorsale Atlantique qui est responsable des cas de précipitations. Le
régime de blocage en déviant la trajectoire des perturbations favorise les pluies sur les rivages
méditerranéens, liées aux particularités du climat local. Les précipitations extrêmes sont
caractérisées par une forte variabilité spatiale et représentent un lien très faible avec les
valeurs moyennes. Malgré leurs structures spatiales assez bruitées les cartes des régimes
caractérisés par les précipitations les plus extrêmes révèlent toutefois les traces de l'influence
de la grande échelle trouvée pour les précipitations moyennes.

La relation entre régimes de temps et circulations atmosphériques dans les basses couches (en
particulier celles à l'origine d'événements météorologiques intenses) est fortement dépendante
de la résolution horizontale et donc des échelles caractéristiques des circulations
atmosphériques produites par les modèles de circulation générale (general circulation model,
GCM) (sous forme de prévisions ou reanalyses), qui généralement résolvent les circulations
atmosphériques à des résolutions spatiales de l'ordre de centaines de kilomètres. Or, les
variables climatiques à proximité de la surface, comme la température, les précipitations et le
vent, sont particulièrement influencés par les effets locaux induits par la complexité du terrain
(orographie, transition terre/mer, hétérogénéités de surface).
Il est donc nécessaire de décrire les circulations atmosphériques à des échelles fines,
particulièrement pertinentes pour l'étude des impacts météorologiques et climatiques sur le
fonctionnement des sociétés (sécurité des infrastructures et des transports, aménagement du
territoire, économie, biodiversité,...).

8.1.1. Circulation de grande échelle du bassin Méditerranéen

La mer Méditerranée est une mer intercontinentale presque entièrement fermée, située entre
l'Europe, l'Afrique et l'Asie et qui s'étend sur une superficie d'environ 2,5 millions de
kilomètres carré. Son ouverture vers l'océan Atlantique par le détroit de Gibraltar est de
largeur seulement 14 kilomètres.
Du point de vu hydrodynamique, la Méditerranée occidentale est une région complexe où
coexiste différent type d’eau. Une eau Atlantique Modifiée (MAW) qui pénètre en surface
dans le bassin Méditerranéen par le détroit de Gibraltar, elle circule dans les zones côtières
d’Ouest en Est pour ensuite remontée vers le Nord en un circuit cyclonique dans le bassin
occidental. Plus vers l’Est, un tiers de MAW qui existe au niveau du détroit de Gibraltar entre
en mer Tyrrhénienne, longe la côte Nord de la Sicile et remonte la côte Italienne, où se
produit l’écoulement qui franchit le canal de Corse (courant Est) et un autre qui entoure les
côtes de la Sardaigne vers le Sud et remontée vers le Nord tout le long des côtes Ouest
(courant Ouest), dans ce courant se trouvent des tourbillons anticycloniques. Ces deux
courants fusionnent pour donner naissance au courant Nord, qui suit une circulation
cyclonique le long du talus continental des côtes Italiennes, Françaises et Espagnoles.
L’eau Levantine intermédiaire (LIW) est créée dans le bassin oriental et revient dans le bassin
occidental par le détroit de Sicile. Elle tourne sur sa droite en mer Tyrrhénienne en
poursuivant un circuit cyclonique et longe la côte Italienne, dont une partie franchit le canal
de Corse et une majeure partie poursuit son écoulement cyclonique vers le canal de Sardaigne
(200-600m). Comme pour MAW, LIW remonte les côtes Ouest de la Sardaigne et de la Corse
et rejoint l’eau Levantine issue du canal de Corse, suit le talus continental le long des côtes
Françaises et enfin des côtes Espagnoles, où une partie sort par le détroit de Gibraltar, tandis
que l’autre entraînée par l’eau de surface d’origine Atlantique, rejoint et suit les côtes
Algériennes vers l’Est; Cette masse d’eau est identifiée tout le long de son parcours par des
maximums relatifs en température et en salinité (Conan, 1996).
En hiver, l’évaporation et le refroidissement qui sévissent dans certaines zones de la
Méditerranée provoquent des mouvements verticaux de plongée d’eau, générant de nouvelle
masse (Dufau-Julliand., 2004), ainsi LIW est formée.
Fig.6:Schémas de la circulation générale de l’eau de surface en Méditerranée occidentale.

8.1.2. Le courant algérien


Le Courant algérien, où ses caractéristiques sont spécifiques, est un courant côtier initialement
(près 0° de longitude) d'une dizaine de Km de largeur et entre 100 à 200 Km d'épaisseur. La
plupart du temps, le courant algérien produit des tourbillons relativement petit (dizaine de km
dans le diamètre) et peu profond (100-200 m) qui n'ont pas de conséquences significatives sur
la circulation des masses d'eau. Cependant, à quelques occasions, ce courant se forme
relativement grand méandre qui a en réalité des conséquences pour la circulation de toutes les
masses d'eau. Les tourbillons peuvent donc être générés par des processus de déstabilisation
d'un courant longeant le talus tel que le courant algérien ou par le rotationnel du vent créé par
des effets de l'orographie. Ils peuvent tourner en sens cyclonique ou anticyclonique et ne sont
pas bloqués par la topographie mais ils peuvent se déplacer. Ceux sont des structure dites de
mésoéchelle (de l'ordre de 10 à 100 km de diamètre) qui peuvent être classifiés comme petits
(jusqu'a ~50 km) moyennes (50-150 km) et grandes (150-250 km).
8.2. La variabilité du climat méditerranéen

8.2.1. Le cycle saisonnier

Du fait de la double influence des circulations au nord et au sud, le cycle saisonnier du climat
méditerranéen se calque sur le balancement de la circulation générale. Les perturbations
d’origine atlantique qui atteignent la Méditerranée en hiver représentent environ le tiers de
l’ensemble des systèmes perturbés qui concernent la région.
Ces perturbations sont en partie réactivées à leur passage au dessus de la mer plus chaude en
moyenne que l’air, facteur qui favorise l’évaporation. Les deux autres tiers des perturbations
sont d’origine locale et leur développement est ici favorisé par le contraste thermique entre
l’air plus au nord et l’air relativement doux situé au dessus de la mer. Les hauts reliefs des
Balkans accentuent ce contraste thermique expliquant une plus forte cyclogénèse (naissance
des perturbations) au dessus de l’Adriatique, tout comme le relief des Alpes entraîne une plus
forte cyclogénèse dans le golfe de Gênes.
Les températures d’hiver sont douces, et le nombre de jours de gel est peu élevé excepté en
bordure de la zone de climat tempéré. L’été est marqué par une extension des hautes pressions
subtropicales (anticyclone des Açores) au dessus du domaine méditerranéen. Ici aussi l’océan
joue un rôle, du fait des températures plus fraîches à la surface de l’eau par rapport aux
régions continentales avoisinantes. Il s’ensuit un renforcement de la pression et donc des
conditions de sécheresse estivale.
Ce sont aussi ces hautes pressions qui expliquent la présence des « étésiens », ces vents de
nord-est qui soufflent dans la partie orientale du bassin. Les températures d’été sont souvent
très élevées avec des maxima mensuels pouvant dépasser 40°. Le caractère chaud et sec est
l’une des principales caractéristiques du climat méditerranéen. Il faut cependant noter que la
durée de la période de sécheresse est très variable localement car si elle est limitée aux mois
d’été à Perpignan ou à Rome, elle s’étend sur une moitié du printemps et de l’automne a
Athènes, Beyrouth ou Marrakech.

8.2.2. La variabilité interannuelle

La tendance générale est conforme à celle que l’on a observée pour la température globale, à
savoir un léger réchauffement sur la période (allant au delà de l’année 92). Les années 91 et
92 font ici exception car elles marquent une rupture dans cette tendance générale. A l’échelle
globale, le refroidissement relatif aussi constaté ces années-là a pu être attribué à une
conséquence de l’éruption volcanique du Mont Pinatubo (Philippines). Il est donc probable
que le refroidissement constaté soit au moins en partie consécutif à la dispersion des aérosols
volcaniques par la circulation générale dans la stratosphère.
Il est plus délicat de déceler une tendance sur la courbe correspondante des précipitations
cumulées car la variabilité interannuelle est importante.
Une fois sur deux, la variabilité d’une année à l’autre est en effet voisine de 10%. Il faut
apprécier cette variabilité à l’échelle du domaine considéré. Localement, la variabilité peut
être bien entendu beaucoup plus forte. On a ainsi par exemple observé 223mm de pluies à
Jérusalem en 1946 et plus d’un mètre en 1992. Cette variabilité n’est cependant pas
exceptionnelle si on la compare à celle d’autres régions de la planète comme les régions de
relief élevé ou celles qui sont concernées par le déplacement saisonnier de la zone de
convergence intertropicale. Sur la même période, la variabilité interannuelle des précipitations
sur l’ensemble de l’Europe est du même ordre de grandeur.

8.4.Les pluies intenses, caractéristique du climat méditerranéen

Une des caractéristiques du climat méditerranéen est le faible nombre annuel de jours de pluie
(moins de 80). Mais derrière cette faible pluviosité se cachent des épisodes courts mais
intenses conduisant à de forts cumuls de précipitations. Ces épisodes pluvieux naissent de la
conjonction entre la configuration géographique de la zone et la situation météorologique.
D’abord, la mer Méditerranée a une influence non négligeable sur l’occurrence de ces
évènements : la température de surface de la mer joue un rôle important sur le développement
des systèmes fortement précipitants (Lebeaupin et al., 2006). En effet, une mer chaude va
humidifier et réchauffer les basses couches atmosphériques. Un flux d’altitude provenant
généralement du nord ou nord-ouest, advectant de l’air froid, va donc facilement déstabiliser
la masse d’air. Ainsi en Méditerranée Occidentale, le maximum de fréquence d’occurrence
des évènements fortement précipitants (Fig. 7b) a lieu de septembre à décembre au moment
où la mer est encore chaude (Boudevillain et al., 2009). En Méditerranée Orientale, cette
période est décalée vers les mois d’hiver (décembre à février).
L’orographie joue aussi un rôle essentiel sur le déclenchement et l’évolution des systèmes
précipitants. Ainsi plusieurs perturbations successives bloquées par le relief peuvent affecter
une même zone pendant plusieurs jours. Les cumuls de pluie atteints sont alors importants
d’autant que le relief a aussi un effet d’accentuation des précipitations. Dans d’autres
situations, un système convectif de méso-échelle (ou MCS) stationne durant plusieurs heures
sur la même région (Rivrain, 1997). Souvent, ces MCS quasi-stationnaires sont formés d’une
succession de cellules orageuses qui naissent toujours au même endroit, puis se déplacent vers
l’arrière du système advecté par le vent en altitude : on parle de régénération rétrograde
(Ducrocq et al., 2003).
Pour que de tels phénomènes se développent et restent stationnaires, des interactions
complexes ont lieu entre l’environnement synoptique, les conditions de méso-échelle et la
configuration orographique locale. Les ingrédients météorologiques nécessaires ont été
identifiés par plusieurs auteurs (Nuissier et al., 2010 ; Ducrocq et al., 2008). Ils sont
schématisés sur la figure 7 pour des épisodes survenus sur le pourtour méditerranéen français.
Les ingrédients à l’échelle synoptique favorables au développement de systèmes conduisant à
des pluies intenses sont les suivants :
– en altitude, une descente d’air froid est associée à un courant d’ouest à sud-ouest cyclonique
et rapide, associé en général à un jet.
– dans les basses couches de l’atmosphère, un flux humide et chaud provenant de
Méditerranée vient buter sur le relief des Cévennes, des Alpes du sud ou des Corbières. On
peut observer, dans certaines situations, une convergence des vents en amont du relief qui
accentue le soulèvement de la masse d’air humide et instable.
Ces conditions favorables au déclenchement des précipitations persistent si l’environnement
synoptique évolue lentement. A ces facteurs principaux peuvent s’ajouter d’autres facteurs
propices. Massacand et al. (1998) ont mis en évidence des structures du tourbillon potentiel en
altitude, signes de divergence de haute atmosphère qui réduit la stabilité de la masse d’air.
A une échelle plus fine, Ducrocq et al. (2008) ont mis en évidence l’influence cruciale du
relief de la région et de la convection profonde elle-même pour maintenir la stationnarité :
– le relief, non seulement constitue un forçage orographique stationnaire qui permet le
soulèvement de la masse d’air et le déclenchement de la convection profonde, mais il peut
aussi, par les effets de contournement et de canalisation, renforcer la convergence de basses
couches et par conséquent le soulèvement de basses couches de la masse d’air (Fig. 7c).
– dans certaines conditions, une plage froide sous orage peut se créer par évaporation des
précipitations. Le relief de la région peut bloquer la propagation de cette plage froide. Ce
dôme d’air froid stationnaire peut alors agir comme un relief en forçant l’air à se soulever sur
son bord d’attaque (Fig. 7b).
Fig.7: Schémas conceptuels des différents mécanismes et ingrédients météorologiques
expliquant la formation et le caractère stationnaire : (a) d’un épisode de pluie intense sur les
Cévennes (13-14 octobre 1995), (b) de la catastrophe du Gard (8-9 septembre 2002) et (c) de
celle de l’Aude (12-13 novembre 1999). (Source : Ducrocq et al., 2008).

8.5. Climat méditerranéen et changement climatique


8.5.1. La modélisation climatique

Avant d’évoquer l’évolution du climat méditerranéen au cours des prochaines décennies, il


convient de présenter les outils qui servent à réaliser ces projections, et qui servent aussi à
tester les mécanismes du type de ceux évoqués dans la section précédente. Les modèles sont
des représentations du système climatique fondées sur des lois connues de la dynamique et de
la physique. Leur complexité est très variable, allant de simples modèles de bilan d’énergie
qui peuvent être résolus analytiquement, jusqu'à des modèles numériques dont les algorithmes
de calculs nécessitent l’utilisation des ordinateurs les plus puissants.
Dans ce dernier cas, la composante atmosphérique des modèles de climat est analogue à celle
des modèles utilisés quotidiennement pour la prévision du temps par les services
météorologiques.
Cependant, à la différence de ces derniers, les simulations climatiques portent sur des périodes
beaucoup plus longues, allant de plusieurs mois jusqu'à plusieurs milliers d’années dans le cas
des études de paléoclimatologie.
De façon à limiter le temps de calcul, il est alors nécessaire de réduire la résolution des
modèles. Les calculs ne sont en effet réalisés qu’en un nombre limité de point, chacun étant
représentatif d’un petit volume d’atmosphère dans lequel les paramètres météorologiques sont
supposés homogènes. La résolution fait référence à la dimension des boîtes élémentaires et
donc au nombre de points utilisés pour décrire l’ensemble de l’atmosphère. Dans les modèles
de climat, deux points consécutifs sont au mieux espacés de 50km, alors que cette distance est
réduite à moins de 10km dans certains modèles de prévision météorologique.
Autre spécificité des modèles de climat liée à la longueur de la période simulée, il est
nécessaire de représenter l’évolution de plusieurs composantes du système climatique.
Comme indiqué dans la section 1.1, ces différentes composantes présentent en effet des
échelles de temps caractéristiques qui dépendent des processus physiques et dynamiques
qu’elles mettent en jeu.
Pour des simulations de l’ENSO ou du changement climatique lié à l’effet de serre, il est ainsi
généralement nécessaire de représenter l’évolution conjointe de l’atmosphère et de l’océan
interagissant avec elle. La prochaine génération de modèles de climat devra aussi intégrer une
modélisation de la végétation complètement interactive avec l’atmosphère, ainsi qu’une
représentation élaborée des processus chimiques modifiant la composition de l’atmosphère.
Quelque soit le degré de perfectionnement du modèle de climat, sa crédibilité repose sur
l’analyse comparative entre ses résultats et les observations disponibles. Cette étape de
validation, conduite en général sur les quinze à vingt dernières années sur lesquelles on
dispose d’un nombre suffisant d’observations, est indispensable avant d’entreprendre une
étude de reconstitution d’un climat passé ou futur, ou une analyse de mécanismes permettant
d’interpréter la variabilité climatique.

8.5.2. L'effet de serre et ses conséquences sur le climat méditerranéen

L’effet de serre est au premier rang des facteurs environnementaux susceptibles d’entraîner
une modification notable du climat méditerranéen au cours des prochaines décennies. L’effet
de serre est avant tout un phénomène naturel grâce auquel la température moyenne à la
surface du globe est voisine de 15°C, alors qu’elle serait de près de -18°C si il n’y avait pas
d’atmosphère. L’atmosphère agit en effet comme la vitre d’une serre: relativement
transparente au rayonnement du soleil, elle piège le rayonnement infrarouge d’origine
thermique qui est émis par la terre vers l’espace entraînant ainsi le réchauffement de la
surface. Certains gaz qui composent l’atmosphère sont en partie responsables de l’absorption
du rayonnement infrarouge. Au premier rang de ceux-ci, la vapeur d’eau contenue dans l’air,
même en dehors des zones nuageuses. Mais c’est le gaz carbonique (CO2), qui compose aussi
naturellement l’atmosphère, qui retient le plus l’attention car son volume ne cesse
d’augmenter du fait des activités humaines. On estime ainsi à 30% le taux d’augmentation du
CO2 atmosphérique depuis 1750, c’est-à-dire depuis le début de la période industrielle. Cette
augmentation, combinée à celle d’autres gaz comme le méthane, l’ozone de la basse
atmosphère et les Chlorofluorocarbones (CFCs), est responsable d’un effet de serre
additionnel susceptible de réchauffer la planète. Or les observations de température à l’échelle
globale reconstituées à partir de la plupart des données disponibles, montrent un
réchauffement à la surface du globe compris entre 0,3°C et 0,6°C depuis 1860. Cette
fourchette correspond aux incertitudes liées aux capteurs, aux méthodes de mesures et à la
mauvaise couverture de l’ensemble de la planète par les observations. Le lien entre
l’augmentation de la concentration des gaz à effet de serre et ce réchauffement ne peut
cependant pas être établi sans faire appel à la modélisation climatique. Les simulations du
climat les plus récentes ont permis de reproduire quantitativement le réchauffement sur le
dernier siècle et qualitativement, la répartition de ce réchauffement suivant l’altitude et
l’hémisphère terrestre concerné. Cet accord est à l’origine de la principale conclusion du
rapport du GIEC sur un « faisceau d’élément » suggérant « une influence perceptible de
l’homme sur le climat global ».
Les modèles de climat ont aussi été utilisés pour faire des projections du changement
climatique au cours des prochaines décennies. La fourchette des variations de température
moyenne globale calculée pour la fin du prochain siècle s’établit entre 1° et 4,5°. L’une de ces
simulations (Barthelet et al, 1998), réalisée au CERFACS (Centre Européen et Recherche et
de Formation Avancée en Calcul Scientifique) au moyen du modèle de climat de Météo-
France couplé au modèle océanique du LODYC (Laboratoire d’Océanographie Dynamique et
de Climatologie), conclut à un réchauffement de l’ordre de 1,6° pour un doublement de la
concentration du CO2, vers 2060, si la concentration du gaz carbonique augmente
régulièrement de 1% par an (proche du taux d’augmentation de 1990).
Comme indiqué dans la section 2.1-b, l’observation déduite de la ré-analyse du CEPMMT est
aussi reproduite en trait fin de même que sont reportés les résultats d’autres simulations
réalisées avec la seule partie atmosphérique du modèle de climat tant pour la période actuelle
(cercle bleu), que pour des conditions de doublement du CO2 (les 3 autres cercles). Les
dernières simulations citées ne diffèrent que par la façon dont la végétation est représentée
dans le modèle. Toutes les simulations, qui sont assez proches des observations pour la
période actuelle, calculent un réchauffement de l’ordre de 2°C sur le domaine méditerranéen.
Ce réchauffement apparaît plus important en été excepté sur le domaine maritime. Les valeurs
correspondantes de précipitations moyennes sur le même domaine ne mettent pas en évidence
de tendance sensible entre la période actuelle et celle d’un doublement du CO2
atmosphérique. Une analyse plus détaillée montre toutefois une tendance à l’augmentation des
précipitations sur le nord de la région en hiver et une tendance à l’assèchement en été dans le
sud du domaine. Ces résultats relativement convergents ne doivent pas masquer l’importante
incertitude qui les affecte. Le rapport du GIEC déjà cité (1995), fait en particulier état pour le
sud de l’Europe d’une fourchette de variation des températures simulées par différents
modèles de 1° à 4,5° en été et en hiver, elle s’étend de 0 à 30% pour les précipitations d’hiver
et de -35% à +15% pour les pluies estivales. Ces ordres de grandeur sont assez représentatifs
du degré d’incertitude sur l’évaluation du changement climatique d’une région de
relativement faible extension comme l’est le domaine méditerranéen. Les sources
d’incertitude à cette échelle sont multiples.
On peut citer, sans être exhaustif, l’incertitude sur les scénarios d’émission de gaz à effet de
serre, celles portant sur le rôle des nuages et celui de la surface des sols. D’autres facteurs plus
spécifiques au domaine méditerranéen, comme l’importance du relief, son caractère de zone
de transition entre deux climats de types différents, ou encore le rôle joué par les échanges
entre l’atmosphère et la mer, pourraient même conduire à une plus grande dispersion des
résultats.

9. Discussion

Le climat du domaine méditerranéen est un climat de transition entre un climat tempéré au


nord et un climat sub-tropical ou désertique au sud. Il est fortement influencé par la
circulation générale atmosphérique qui conditionne fortement son cycle saisonnier. Il est
également soumis à d’importantes influences locales de par le rôle joué par l’étendue
maritime et par le relief. La variabilité de ce climat, en particulier des précipitations, est
apparente à toutes les échelles de temps.
Il peut être influencé par des connexions avec des régions très éloignées. Il pourrait
notamment y avoir un lien entre la mousson indienne et la sécheresse estivale particulièrement
au dessus de la Méditerranée orientale. Si aucune étude statistique ne révèle de relation
significative avec le phénomène d’«ElNiño», une relation a été établie entre des températures
de fin d’hiver et de début de printemps plus froides que la normale lors des événements d’«El
Niña ».
Les simulations du changement climatique au cours des prochaines décennies réalisées à
partir des modèles du système climatique sont très incertaines à l’échelle du domaine
méditerranéen. Si ces simulations s’accordent pour projeter un réchauffement de quelques
degrés en moyenne à la fin du prochain siècle, la tendance sur l’évolution des précipitations
est beaucoup moins nette. Il est probable, qu’au contraire de la température, le changement
des précipitations soit fortement dépendant du cycle saisonnier.

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