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Aréna Richard. A propos de la convergence des prix courants vers les prix naturels : un commentaire de trois interprétations
récentes. In: Cahiers d'économie politique, n°6, 1981. La formation des prix: A. Smith, D. Ricardo, K. Marx. pp. 53-75;
doi : https://doi.org/10.3406/cep.1981.943
https://www.persee.fr/doc/cep_0154-8344_1981_num_6_1_943
Un commentaire
de trois interprétations récentes1
(4) Pour une caractérisation de cette représentation, cf. notre Note sur la conception
classique de la concurrence, Cahiers d'Economie politique, n° 5.
(5) Pi(°) et Qi(°) sont respectivement le prix unitaire du bien i et le niveau de
production de la branche i au temps o. pi représente le prix naturel (équivalent, pour l'auteur,
au prix de marché pour lequel l'offre et la demande sont égales) de la marchandise i
et qi figure le niveau d'intensité-étalon de la branche i, i.e. celui pour lequel le surplus
du bien i est proportionnel à la somme de ses utilisations productives dans toute
l'économie. Le cadre d'analyse est celui de la production simple.
(6) Nous reviendrons infra sur la procédure formelle qui permet à M. Egidi d'écrire
ces équations valides pour de petites variations de r^ dans un intervalle défini à partir
de 1 -f rjl + RM, cf. M. Egidi, op. cit., pp. 25-27.
(7) Cette question fait en revanche l'objet d'une analyse spécifique chez A. Smith
fondée sur la notion de« demande effective»; cf. sur ce point G. Benetti, Smith..., op. cit.,
et notre Note sur la conception..., op. cit.
(8) La possibilité de la coexistence d'une invariance des prix naturels et d'une
modification des niveaux de production est assurée par la formulation d'une hypothèse de
constance des rendements à l'échelle.
Prix courants et prix naturels 55
De même la variation des p^t) ne dépend que des écarts [ri — RM)
et [qt — <7i(£)] en raison des équations :
(9) Ici également, cf. M. Egidi, op. cit., pp. 25-27, pour un exposé du mode d'obtention
de ces équations.
(10) Nous reprenons l'expression employée dans le même contexte par P. Garegnani
(in On a change in the notion of equilibrium in recent work on value and distribution.
A comment on Samuelson, in Essays in modern capital theory, édité par M. Brown, K. Sato
et P. Zarembka, North Holland, 1976, p. 29).
(u) Comme le note et le montre P. Sraffa (in Production de marchandises, Paris, Dunod,
1970) à propos des systèmes de subsistance, les prix naturels p^ constituent en effet le
« seul ensemble de valeurs d'échange qui, s'il est adopté par le marché, rétablisse la
distribution originelle des produits et rende possible la répétition du procès » (p. 4). Dans
le cas des systèmes avec surplus, les prix fc restent les seuls qui sont susceptibles d'assurer
la reproduction sous contrainte d'une difficulté de production unique donnée.
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logie symbolisée par les (aiS) alors que la constance de ces coefficients
de production est une condition nécessaire de convergence. Bien plus,
quand bien même nous nous trouverions dans l'éventualité favorable
d'une praticabilité des aij} nous n'aurions aucune certitude quant
à la possibilité de produire, sur la base des quantités d'intrants repris
et investis au temps 0, les niveaux qi (1) exigés par la période
consécutive 1 et la suite du processus de convergence. Les mécanismes
concurrentiels décrits par notre auteur ne peuvent donc être que
virtuels, i.e. analogues à ceux que décrit, au sein d'une autre approche
théorique, la procédure walrasienne du tâtonnement sur bons. De
ce point de vue, la gravitation des prix courants vers les prix naturels
n'a chez M. Egidi qu'un intérêt logique, i.e. celui de montrer que
la reproduction d'ensemble de l'économie doit être pensée dans le
monde des prix naturels, en dehors de toute référence à la notion
de marché.
A partir des remarques précédentes, il est alors aisé de préciser
le statut du prix de marché dans l'analyse de notre auteur. Nous
savons déjà qu'il est un prix donné au hasard au temps o, puis un
prix dont la variation, au cours des périodes suivantes, est conditionnée
par celle des taux de profit. Deux caractéristiques supplémentaires
permettent d'en proposer une définition (12). En premier lieu, les vecteurs
p{t) (avec p{t) = (piit)) et i = 1, 2, ...,n; t = 1, 2, . . ., O. sont
toujours supposés vérifier la condition suivante : (I ■— ■ A) p(t) ^ o
où I est la matrice unitaire et A la matrice des (<%). Les « prix de
marché » assurent donc toujours un taux sectoriel de profit positif
ou nul; ils ne peuvent ainsi être associés à des productions non
rentables. En second lieu, les p^t) doivent vérifier la condition suivante :
(17) La critique reste évidemment valide si la première normalisation porte sur les
niveaux d'activité.
(18) Si on choisit tout d'abord un numéraire des quantités, on se trouve alors confronté
au problème symétrique d'une identité permanente entre quantités de marché d'équilibre
et de déséquilibre. En fait, les deux cas se confondent : l'équation q^-pi = Çi(t)-Pi(t), Vj,
t transforme une identité permanente des deux types de prix en identité permanente des
deux types de quantités (et vice versa).
(19) Cf. sur ce point notre contribution, Note sur le changement des méthodes de
production, LA, cnrs, n° 301, Nice, juin 1979, à paraître.
(20) On rejoint ainsi les problèmes posés par l'élaboration des nombres-indices; à
ce propos, cf. P. Chanier, L'inexistence des indices dans le cas général et ses conséquences
pour la théorie de l'équilibre, Economie appliquée, t. XXX, 1977, n° 1.
(21) Sur ce point, cf. G. Benetti et J. Cartelier, Prix de production et étalon, in
G. Benetti, C. Berthomieu et J. Cartelier, Economie classique, économie vulgaire. Essais
critiques, Grenoble, pug Maspero, 1975.
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et P,{t + 1) = A(
(24) Cf. notre contribution : Note sur la conception classique..., op. cit.
(25) Cf. M. Egidï, op. cit., p. 25.
(26) Ibid., pp. 25-26.
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/(X) —f(x) -f j— (X — x) + • • •
n'a pas de prise? Dans quel espace temporel, logique ou réel, a lieu
la reproduction décrite par les systèmes de prix de production si
la convergence est un processus effectif? La réponse à ces questions
nous conduit à un véritable dilemme théorique. Ou bien on admet
qu'un processus effectif de reproduction élargie de quantités a lieu
et implique la succession de vecteurs différents de prix naturels
correspondant aux diverses périodes de reproduction; la variation des
quantités interdit alors d'envisager la réalité des mécanismes
concurrentiels décrits. Ou bien la gravitation est réalisée et la reproduction
devient alors virtuelle, simple ou inexistante dans le cas où les
grandeurs naturelles se maintiennent sans modification ad vitam aeternam.
La solution la plus satisfaisante semble être de considérer les
mécanismes de la concurrence comme des mécanismes imaginaires et de
faire de la reproduction un processus effectif. Mais il est alors possible
d'envisager un écart entre une « demande effective » et une offre
virtuelle. Si QJ.Pf diffère de Q*f.Pf , le prix de marché (dès lors
imaginaire) ne peut plus être déterminé selon la procédure décrite
par C. Benetti. Bien plus, la réduction des écarts virtuels entre Q^.Pf
et Q^.Pf nécessite la variation de QJ ou de Pf . En effet, rien
ne justifie plus la constance de QJ et de Pf puisque aucune des
quatre grandeurs n'est réalisée (33). Dès lors, le processus de
convergence devient impossible. Pour fortes qu'elles soient, les conditions
d'invariance des grandeurs naturelles et d'effectivité des mécanismes
de concurrence constituent donc la voie d'accès obligatoire à la
convergence au sein de la construction proposée par G. Benetti.
La notion de prix de marché introduite par notre auteur présente
des points communs avec celle que nous avons examinée chez M. Egidi.
D'une part, la grandeur du prix courant doit être soumise à l'égalité :
QJ.P? = Q^(t).?f{t), Vi, t. D'autre part, elle est toujours
associée à un taux de profit différencié r^t). En revanche, à l'inverse
de ce qu'il est chez M. Egidi, le concept de prix courant relève
incontestablement chez G. Benetti d'une problématique de l'échange.
Le prix courant naît en effet sur le marché, à la suite de la
confrontation de la demande effective et de l'offre. Il ne peut toutefois être
assimilé à un « prix d'équilibre » analogue à celui que L. Walras
définit dans ses Eléments d'économie pure : l'existence de fonctions
d'offre et de demande est logiquement inutile à la formulation du
problème classique de l'articulation prix naturel - prix courant (34).
■
raison de l'équation (8) de l'article de J. Gartelier, p* — Ap° (48).
On notera, ce faisant, que, en raison de la loi de Say, les matrices
des quantités qui jouent un rôle essentiel dans l'établissement de la
grandeur de ce revenu sont celles qui ont permis la détermination
des prix naturels. Cette première constatation indique que nous avons
déjà changé de représentation. La divergence que décrit l'existence
du capital financier ne porte que sur des grandeurs de prix. Elle
ne concerne pas les quantités produites et utilisées dans la production.
Elle ne se réfère qu'implicitement à des écarts entre quantités
produites et quantités vendues puisqu'on peut toujours remplacer Op
par l.p*.
La première étape du processus de la formation des prix consiste
à capitaliser le revenu p* — Ap°. On peut utiliser indifféremment le
taux de profit naturel r* ou le taux de profit moyen et les interpréter
comme des taux d'intérêt de référence. Le choix de r* pose
r*
évidemment problème. On notera d'abord que est, au moins, un taux
de rendement physique exprimant la difficulté unique de production
de l'économie (49) et, au plus, le taux de profit uniforme d'un système
ou
(53) A contrario, l'ensemble des remarques que nous venons de faire et qui concernent
le problème de réflectivité du processus de convergence semblent applicables à
l'interprétation de C. Benetti, moyennant quelques modifications mineures.
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première est celle de la loi des débouchés. Cette loi doit prévaloir
à toutes les étapes du processus. Il faut donc supposer, comme dans
les approches de G. Benetti et M. Egidi, la stabilité de l'égalité de
la part de la valeur « de marché » des différents secteurs dans la
production globale et de leur part « naturelle » pendant toute la
durée du processus. Un numéraire commun arbitraire doit en outre
être retenu. L'originalité de la position de J. Gartelier consiste ici
dans le choix de la marchandise étalon associée aux prix naturels (M) ;
l'importance de ce choix pour le processus de convergence est
soulignée dans l'annexe de l'article. Nous n'insisterons pas ici sur les
aspects restrictifs du choix d'un numéraire commun; nous avons
déjà eu l'occasion de les souligner.
(54) En fait, le recours possible au taux de profit moyen limite cette originalité puisqu'il
suppose l'expression des prix dans un numéraire différent de la marchandise homothétique.
(55) II faut alors supposer que cette égalité est une pure et simple hypothèse.
Prix courants et prix naturels 73
(56) Sur ce point, cf. W. Jaffe, Walras' theory of tâtonnement : a critique of recent
interpretations, The Journal of Political Economy, vol. 75, n° 1, février 1967.
(57) Sur ce point, cf. K. J. Arrow et L. Hurwicz, On the stability of the competitive
equilibrium, Econometrica, n° 26, 1958; K. J. Arrow, H. D. Block et L. Hurwicz, On
the stability of the competitive equilibrium, II, Econometrica, n° 26, 1959; K. J. Arrow
et F. Hahn, General competitive analysis, San Francisco, Holden Day, 1971, chap. 11 et 12;
T. Negishi, The stability of a competitive economy, a survey article, Econometrica, n° 30,
1962, et H. Uzawa, Walras' tâtonnement in the theory of exchange, Review of Economic
studies, 1959-1960.
(58) Sur ce point, cf. K. J. Arrow et F. Hahn, General competitive analysis, San Francisco,
Holden Day, chap. 13; F. Hahn et T. Negishi, A theorem on non tâtonnement stability,
Econometrica, n° 30, 1962; T. Negishi, The stability of a competitive economy : a survey
article, Econometrica, n° 30, 1962, et T. Negishi, General equilibrium theory and international
trade, Amsterdam, North Holland, 1972, chap. 14.
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A(*+l)=max{0,A(0 + /«(*)}
(59) Cf. H. Uzawa, Walras' tâtonnement..., op. cit., p. 184 à qui nous avons emprunté
la relation; le postulat d'un numéraire commun apparaît à la même page.
(60) Cf. K. J. Arrow et F. Hahn, General competitive analysis, op. cit., p. 322.
(61) On écrit alors que les agents ne sont pas price-makers mais price-takers.
(62) G. Benetti a plus particulièrement mis en lumière et caractérisé cette analogie
(cf. Smith..., op. cit., pp. 95-98). La contradiction soulignée entre la volonté de proposer
une représentation des mécanismes d'échange et de concurrence dans une société où
les agents sont autonomes et la nécessité de postuler, à cet effet, un mode ultra-centralisé
de formation des prix présente le même degré de gravité pour les théories classique et
walrasienne si on leur assigne comme objet cette représentation d'inspiration
microéconomique. En revanche, si on suppose que, dans l'approche classique, les nécessités
structurelles de la reproduction macrosectorielle contraignent les comportements des
« agents », cette dernière analogie ne revêt plus la même signification. Le souci de nos
trois auteurs d'éviter des hypothèses subjectivistes et microéconomiques de comportement
dans leur analyse ne peut se comprendre, à notre sens, que dans cette dernière optique.
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