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Correspondant pour la communication
Si comme l’affirme certains praticiens « le territoire est un produit comme
un autre » , la mutation des politiques d’aménagement historiquement
promues par les gouvernements français dans les trente glorieuse est
désormais liée à une manière de penser le territoire comme une offre
comme les autres et se substitue alors la montée de la logique d’attractivité
(Lamarche, 2003).
L’économie territoriale peut alors se résumer aujourd’hui à un arbitrage
entre i) la mise en place de systèmes productifs localisés (grappes
d’entreprises, systèmes productifs locaux, Pôles de compétitivité, …) dans
une approche porterienne du développement économique (Porter, 1990,
1998), et ii) l’accompagnement de l’ascension de l’économie résidentielle
(Davezies, 2008) incarnée par la prise en compte des flux de nouvelles
populations (résidents ou de passage), de visiteurs et de touristes.
De fait, les collectivités territoriales ont un rôle central afin d’organiser,
animer, piloter et évaluer ces développement avec les parties prenantes
(entreprises, investisseurs, organisations, citoyens, …) et dans un contexte
d’environnement interne et externe. Le Sénat incitait récemment les
acteurs publics à réfléchir soit en terme de principe de subsidiarité pour
l’ancrage des politiques économiques, soit de porter grande attention aux
enjeux d’attractivité dans un souci de suppression des strates
institutionnelles nuisibles à l’efficience des (trop) nombreux dispositifs
(Fichet et Mazars, 2013).
L’origine de cette recherche est fondée sur un autre constat : si la mise en
place de la loi NOTRé2 clarifie les compétences dédiées aux collectivités
territoriales, en particulier pour la collectivité régionale dans son rôle de
« chef file en matière de développement économique et territoriale », elle
n’évite pas que les communes et agglomérations restent au centre du
pilotage d’une politique d’attractivité du territoire, condition sine qua non
du développement économique de ce dernier.
Par ailleurs, le mouvement de fusions de communes impulsé par cette
même loi dans un souci d’en réduire le nombre total afin de constituer des
ensembles à plus forte « masse critique » renforce une volonté de mise en
œuvre, de pilotage et de communication autour de politiques d’attractivité
territoriale dont la pierre angulaire semble ne pas se résumer au seul
marketing communicationnel sur les bases d’un diagnostic partagé.
A la suite de ces constats, de nombreuses collectivités territoriales
s’interrogent sur les résultats à attendre de politiques d’attractivité
territoriale et surtout de la manière d’en conduire un pilotage et une
évaluation.
2
Loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la
République (ou loi NOTRe)
On se heurte aussitôt à un écueil qui réside dans la difficile définition
d’indicateurs pertinents pour ce « mot-valise » qu’est le concept
d’attractivité associé à la discipline qui devrait en assurer une
maximisation opérationnelle à savoir le Marketing Territorial. Si la
littérature sur cette discipline est abondante (à l’instar des nombreux
ouvrages français qui y sont consacrés (Batat, 2016 ; Chamard et al., 2014 ;
Hatem, 2007 ; Meyronin, Gayet et Collomb, 2015), une étude exhaustive
de la littérature scientifique fait apparaitre que celle-ci est détachée des
considérations politico-institutionnelles dans lesquelles les territoires
s’inscrivent (pourtant cruciales en terme de management public), offrent
une part importante à la rhétorique des consultants (dans une optique de
partage de bonnes pratiques) et au final manque de preuves empiriques et
de contributions à caractère explicatif (les effets en terme d’attractivité
restent à démontrer) (Vuignier, 2016).
Le travail de recherche exploratoire présenté dans cette communication
propose alors une réflexion sur l’évaluation d’une politique publique
d’attractivité menées sur un territoire en interrogeant le rôle des outils de
gestion, de pilotage, de contrôle et d’évaluation de ces politiques,
notamment dans leur compatibilité avec un marketing territorial. Au final
nous interrogeons le triptyque Territoire, marketing et New Public
Management dans sa capacité de production d’une attractivité universelle
dans une perspective critique en management public.
1. REVUE DE LA LITTERATURE
Cette recherche est ancrée au sein des travaux relevant du New Public
Management (Hood, 1991). De manière générale, ce courant de pensée
analyse le transfert des pratiques traditionnellement mobilisées par les
organisations du secteur privé au sein des organisations appartenant à la
sphère publique (Ittner et Larcker, 1998). Cette revue de la littérature est
structurée en deux temps. Après avoir définit les notions de territoire et
marketing associé (1.1), nos propos se recentrent sur la place des outils de
gestion au sein des réformes publiques (1.2) ; ces deux temps étant
systématiquement reliés au concept d’attractivité.
3
Office Central de Développement Economique
et pour apporter une réponse plus pertinente aux besoins exprimés
par les citoyens, les usagers.
Concrètement, ces modèles se traduisent par des réformes qui viennent à
implanter des outils de gestion et notamment de contrôle de gestion
(Lapsley, 2009). Au sein de cette vision instrumentale du management de
l’organisation publique, les outils de contrôle visent à répondre à un double
impératif : être capable de piloter l’action publique en interne et dans le
même temps favoriser l’accountability et donc le reporting externe réalisé
auprès des citoyens. De nombreuses réformes vont porter cette double
ambition. De la Loi Organique relative à la Loi Finance (LOLF) en 2001 à
la Modernisation de l’Action Publique (MAP) en 2012 en passant par la
Révision Générale des Politiques Publiques (RGPP) en 2007, l’Etat
français tente de managérialiser son action. Mais, cette dynamique se
déploie aussi dans d’autres composantes de l’activité publique. Si le
rythme des réformes s’accélère, ces dernières vont aussi transcender les
frontières de l’Etat pour se diffuser au sein de l’ensemble des organisations
publiques.
A titre d’exemple, les hôpitaux et les universités se voient dans l’obligation
de mobiliser des outils du contrôle de gestion. Avec le volet de la loi
relative aux Libertés et Responsabilités des Universités (LRU) portant sur
les RCE (Responsabilités et Compétences Elargies), les universités doivent
faire face à de nouveaux enjeux. Parmi ces enjeux, la réforme initie une
plus grande autonomie budgétaire de la masse salariale des universités.
Pour atteindre cet objectif, les universités se voient transférées le pilotage
de leur budget. Elles s’engagent ainsi dans une modernisation de leur
gestion en mettant en œuvre un raffinement conséquent de leur gestion
budgétaire. De la même façon, la mise en place progressive depuis 2004
de la Tarification A l’Activité (T2A) conduit les hôpitaux à se doter
d’outils du contrôle de gestion. Cette réforme consiste à répartir une
enveloppe financière globale entre les hôpitaux présents sur leur territoire
en retenant comme critère d’allocation leur activité, et non plus le montant
du budget de l’année précédente. Cette orientation visant à inciter les
hôpitaux à engager une meilleure gestion de leurs coûts.
Face à ces mouvements, nous pouvons nous questionner sur la notion
d’attractivité. Cette dernière ne serait-elle pas le nouvel outil « à la mode »
(Abrahamson, 1996) dont s’empare le NPM ? Loin de révéler un jugement
esthétique, elle apparaitrait ainsi comme rationnelle et créatrice de
performance. Plus précisément, la recherche que nous menons vise à
répondre à la question de recherche suivante :
quels rôles jouent les outils de gestion dédiés aux politiques d’attractivité
territoriale ?
2. ANCRAGE THEORIQUE DE LA RECHERCHE
Dans un premier temps, nous apportons des précisions sur les fondements
conceptuels de notre recherche. Nous revenons sur le concept d’outil de
gestion et nous développons la théorie néo-institutionnelle pour appuyer
notre réflexion.
Les outils de gestion sont définis comme des instruments de gestion. Si le
terme outil fait référence à l’univers de la matérialité (Gilbert, 1997), la
terminologie d’instrument permet de mettre en évidence ses
caractéristiques sociales. Ainsi, l’instrument de gestion est construit par un
groupe d’acteurs et, dans son fonctionnement, il vise à favoriser l’action
collective (David, 1996). En résumant ces deux orientations, un outil de
gestion endosse une double dimension : instrumentale et symbolique. Il ne
repose pas uniquement sur des caractéristiques techniques, il est aussi le
reflet d’une vision managériale, d’un projet idéologique porté par ses
créateurs.
Afin de définir plus précisément ce concept, nous reprenons les travaux sur
les outils de gestion (Hatchuel et Weil, 1992) qui proposent de caractériser
ces derniers à partir de trois éléments :
1. Un « substrat technique » : il est constitué par les caractéristiques
scientifiques sur lesquelles se fonde l’outil. Il s’agit des logiques
mises en œuvre pour faire fonctionner l’outil dans son contexte
d’implantation. Pour (David, 1996), il s’agit de « l’abstraction qui
permet à un outil de gestion de fonctionner ».
2. Une « philosophie gestionnaire » : il s’agit du « système de
concepts qui désigne les objets et les objectifs qui forment la cible
de la rationalisation ». La philosophie gestionnaire correspond aux
idées qui ont porté l’outil lors de sa création. Ces idées donnent au
substrat technique une nature managériale.
3. Une « vision simplifiée des relations organisationnelles » : l’outil
de gestion fonctionne selon un schéma de relations entre les
acteurs participant aux processus d’instrumentation. Cette vision
simplifiée permet d’attribuer à chaque acteur un rôle précis au sein
de processus.
Afin d’analyser le rôle de ces outils au sein des réformes organisant
l’attractivité du territoire, la théorie néo-institutionnelle (Di Maggio et
Powel, 1983) est mobilisée. Pour ces tenants, les outils de gestion ne sont
pas seulement utilisés pour accroître l'efficacité des organisations, mais
aussi et surtout pour légitimer leurs actions. La TNI, ou nouvelle sociologie
institutionnelle, analyse les organisations comme des systèmes organisés
fonctionnant à l’intérieur de structures sociales composées de normes, de
valeurs et d’hypothèses acceptés par tous. Au sein de cet ensemble, le rôle
des institutions est particulièrement important. Elles déterminent le
comportement des organisations. La rationalité des agents ne dépend pas
uniquement de calculs économiques réalisés à partir de l’information
disponible, elle résulte aussi d’un comportement d’adaptation aux
contraintes imposées par ces institutions. Dis autrement, dans la mesure où
l’organisation interagit avec la société, elle va être soumise à des pressions
institutionnelles auxquelles elle devra se conformer pour atteindre une
certaine légitimité. La quête de légitimité pousse les organisations à se
modeler suivant celles qui ont réussi dans leur environnement. Trois
isomorphismes types peuvent être décrits :
1. Coercitif : cet isomorphisme est le procédé par lequel les
mandataires influencent les solutions développées par d'autres
organisations. La légitimité provient ici des pressions obligatoires
(lois par exemple). Nous retrouvons très souvent ce mécanisme
dans l'utilisation de dispositifs de gestion privée intégrés dans les
organisations publiques (Carpenter et Feroz, 2001).
2. Mimétique : cet isomorphisme renvoie à des prises de décision
dans des situations où les choix à faire ne sont pas clairs en raison
de l'incertitude de l'environnement. L’organisation va donc choisir
une solution en copiant le comportement dominant qui les entoure.
Dans ce cas, la légitimité vient du nombre d'anciens usagers et de
leur capacité à justifier leurs propres choix.
3. Normatif : cet isomorphisme fait référence à l'enracinement
culturel d'une organisation dans son environnement social. Il peut
être construit sur une même éducation, sur une même idéologie,
sur des compétences identiques, etc.
En synthèse, nous mobilisons le cadre théorique néo-institutionnelle pour
comprendre le rôle joué par les outils de gestion en matière d’attractivité.
Les collectivités les développent-elles pour répondre à pressions
institutionnelles ? Et dans ce cas, s’agit-il d’une pression mimétique,
coercitive ou normative ? Ou, a contrario, loin de véhiculer les principes
du NPM envisage-t-elle l’outil comme un moyen de mettre en œuvre une
véritable innovation managériale ?
3. METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE
Dans cette partie, nous présentons dans un premier temps la méthodologie
de notre recherche puis les caractéristiques de l’étude de cas unique que
nous avons menés.
Cette recherche exploratoire est fondée sur une étude de cas unique (Yin,
2003). Le choix de cette méthodologie s’explique, d’une part, par sa visée
compréhensive. Nous avons cherché à recueillir la parole des acteurs dans
le contexte de leur action, elle permet les « explications pleines de sens »
(Yin, 2012). D’autre part, il s’explique aussi par le contexte de la
collectivité lorsque nous l’avons rencontrée : celle-ci subie une mutation
institutionnelle et s’engage alors dans un changement organisationnel
d’envergure riche de contenus. En effet, elle bascule d’une communauté
d’agglomération à une communauté urbaine par fusion de cinq EPCI. Situé
sur un territoire rural à 50 %, cette ancienne capitale régionale avant la
fusion des régions portées par la loi NOTRè, compte environ 200 000
habitants. Concrètement, sa taille augmente fortement : de 12 communes
associées elle se transforme pour accueillir 40 communes. Ce changement
d’importance amène les responsables de la collectivité à redéfinir son
organisation. Parmi les décisions prises, la collectivité engage la création
d’une direction générale adjointe de l’attractivité ainsi qu’une direction
générale adjointe en charge de la politique territoriale. Dès sa mise en
œuvre, le directeur général de la collectivité émet le souhaite de mettre en
place une grille d’évaluation de la politique publique qui sera déployée en
matière d’attractivité économique du territoire. Notons à ce stade que dans
ce contexte « l’attractivité est avant tout un projet politique pour par la
communauté urbaine ce qui constitue une évolution par rapport à
l’historique de la communauté d’agglomération ancien modèle » et qu’ « il
y a un accord des élus pour en faire une priorité majeure qui
justifie/légitime sa transformation en communauté urbaine avec une très
large adhésion ».
Par le biais d’une observation non-participante (David, Hatchuel et Laufer,
2012), cette recherche accompagne l’organisation dans la mise en œuvre
de ce projet. Concrètement, différents types de données ont été collectées.
Dans un premier temps, des données primaires sont recueillies via des
entretiens Au cours des entretiens, quatre points sont abordés :
1. Les enjeux des transformations de la collectivité locale dans le
contexte porté par la loi NOTRé
2. La vision des acteurs sur la définition et le rôle de l’attractivité
3. Les possibilités de déployer des outils de gestion sur l’attractivité
et la politique publique mise en œuvre.
4. Et enfin, de manière plus globale, la confrontation des choix
réalisés en matière d’attractivité au regard du contexte
institutionnel
Ce guide d’entretien présente les intérêts habituels de l’entretien : il remplit
une de liste de contrôle des thèmes abordés et permet de gérer le temps.
D’autre part, il structure les données recueillies (Miles et Huberman,
1991), et facilite ainsi leurs traitements. Au total, quatre entretiens ont été
réalisés. Ils ont mené avec : le directeur général des services, un maire
Vice-président de la nouvelle Communauté Urbaine, le directeur de la
DGA « attractivité et développement économique », et enfin le directeur
de la DGA « Politique Territoriale ». Ces données primaires ont été
complétées par des données secondaires. Ces dernières ont pris la forme
d’analyse des articles parus dans la presse locale et des notes internes à la
collectivité sur la mise en place de cette direction. L’ensemble de ces
données (primaires comme secondaires) a été étudié par une analyse de
contenu (Bardin, 1993).
4. RESULTATS DE LA RECHERCHE
En premier lieu notons que les acteurs interrogés s’accordent pour
souligner le fait que « la notion d’attractivité renvoie à des valeurs
partagés : comment faire partager des valeurs, un sens, sur un territoire
et pour quelle vision du territoire ? ». Cette dernière interrogation amène
à la question suivante : « qu’est ce qui fonde les valeurs communes d’un
territoire pour autant qu’elles existent ? ». Déterminer des indicateurs
d’attractivité utiles pour le pilotage de l’action publique devient sur ces
bases difficiles d’autant plus que « l’attractivité est vécue aujourd’hui a
posteriori sur notre territoire alors que cela devrait être a priori ! ».
Comme « l’attractivité est la somme de beaucoup de chose et est similaire
à l’intelligence elle se caractérise par la capacité à répondre à une
équation qui corresponde à tes compétences/ambitions dans un
environnement qui est imposé mais sur lequel on peut agir » : « elle
échappe à la rationalité et est dynamique avec des décalages (attractivité<
vécu ou inversement) ». au final les acteurs interrogés soulignent qu’ « il
faut évaluer la performance mais pas seulement : il faut du qualitatif ».
L’application de la grille proposée par Hatchuel et Weil au cas de cette
collectivité apporte une première contribution sur les outils de gestion
dédiés à l’attractivité d’un territoire.
Comme l’ont montré de récents travaux de recherche, le transfert des outils
de gestion au sein des organisations publiques questionnent principalement
des enjeux socio-organisationnels. L’adaptation de l’outil choisi se heurte
à la culture, à l’organisation, aux valeurs portées par les organisations
apparentant au secteur public. En reprenant la grille de Hatchuel et Weil,
les défis posés à ces organisations dans le cadre de l’implantation des outils
de contrôle de gestion se situent donc surtout sur les deux piliers suivants :
la philosophie gestionnaire et la vision simplifiée des relations
organisationnelles. Dans le cadre de cette étude de cas, nous avons pu
constater que ces deux piliers ne posaient finalement que très peu de
problèmes aux acteurs de l’organisation. En effet, comme l’indiquent les
verbatims suivant, les acteurs s’accordent sur la philosophie managériale
de l’outil comme sur la vision des relations organisationnelles que l’outil
serait chargé de véhiculer :
« Au niveau organisationnel, au sein de notre collectivité, nous
avons formalisé une DGA sur l’attractivité du territoire ». « Il est
nécessaire pour nous de placer l’attractivité, au cœur de notre
structure, de notre fonctionnement ».
« L’attractivité existe. Les élus se sont mis d’accord pour en faire
une priorité. La collectivité doit donc s’engager dans cette
direction ». « Nous devons mettre en place une gestion proactive
de l’attractivité. Nous avons déjà commencé avec le déploiement
d’une technopole, d’un projet territoire ou encore d’une réflexion
sur le développement d’une marque territoriale ».
Il ressort de ces verbatims une forte volonté de s’emparer du thème de
l’attractivité pour la collectivité. Plus fondamentalement, les acteurs
désirent montrer que celle-ci fait partie des gènes de cette organisation.
Elle constitue une finalité de l’action publique, enracinée jusque dans son
organisation.
Pourtant, il est surprenant de constater que, malgré l’importance du sujet
traité, l’ensemble des acteurs rencontrés n’évoque pas la possibilité
d’instrumentaliser les actions engagées dans ce domaine. Les seuls outils
de gestion convoqués dans les discours sont des outils stratégiques qui
justifient l’engagement de la collectivité dans ce domaine : « Nous devons
travailler sur une étude de marché précise qui fera ressortir les forces de
notre territoire » ; « nous allons interroger les citoyens sur leurs visions
du territoire ».
Ainsi, le pilotage des actions n’est jamais décrit. Il s’agit là d’un premier
résultat surprenant et paradoxal. Surprenant, car il semble que ce soit le
troisième pilier des outils de gestion, à savoir le substrat technique, qui
interroge la pratique des acteurs. En effet, pour les élus et agents
rencontrés, l’attractivité est une notion qui ne peut être instrumentée : « la
notion d’attractivité échappe à la rationalité et est dynamique car elle
induit des décalages (le niveau d’attractivité peut être inférieur au vécu et
inversement) ». Paradoxal, car comme nous l’avons évoqué en première
partie, alors que les organisations publiques sont poussées à intégrer de
plus en plus d’outils de gestion au centre de leur management,
l’instrumentation de l’attractivité n’est ni pensée, ni envisagée.
En synthèse, étudier les outils de gestion mobilisés pour évaluer
l’attractivité territoriale met à jour une tension de leurs rôles. Les outils
actuellement mobilisés ambitionnent de rendre des comptes aux élus, aux
agents, aux citoyens (la logique d’accountability est mise en avant). Or, les
enjeux actuels de l’évaluation des politiques territoriales devraient faire
émerger des outils qui favorisent une maîtrise de ces politiques territoriales
en développant, par exemple des systèmes de pilotage, via des indicateurs
de performance, de l’action publique territoriale. Ainsi face aux difficultés
de définition de l’attractivité, les acteurs se trouvent dans une impasse qui
rend impossible et même contre-productif tout système d’évaluation et de
pilotage.
CONCLUSION
En guise de conclusion, remarquons que l’entrée par les outils de gestion
permet de repenser la façon dont les acteurs pensent l’attractivité et semble
démontrer le fait que le triptyque Territoire / marketing / New Public
Management soit inconciliable pour une attractivité universelle. En soi
cette conclusion rejoint le constat que les intérêts divergents entre parties
prenantes pourraient exister que la réponse à une simple question pourrait
faire disparaître ou tout du moins atténuer (Gérardin et Poirot, 2010) :
l’attractivité pour quoi faire et au profit de qui ?
Pour reprendre les propos d’un acteur interrogé lors de cette recherche,
l’établissement d’un cahier de bord annuel de l’attractivité est un impératif,
l’affichage d’un objectif une nécessité, tout en étant conscient qu’en termes
d’attractivité « le réel devrait courir en permanence après la perception
pour la rattraper ».
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