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Dermatologie esthétique
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Dans la même collection

Chirurgie dermatologique, 2e édition, de J.-M. Amici, 2017, 416 pages.


Dermatologie. De la clinique à la microscopie, de B. Cribier, 2015, 464 pages.
Dermatologie infectieuse, de M. Mokni, N. Dupin et P. Del Giudice, 2014, 360 pages.
Lupus érythémateux, de D. Lipsker, 2013, 316 pages.

Chez le même éditeur

Dermatologie de l’enfant, de A. J. Mancini et D. P. Krowchuk, traduit par A. Phan, 2019, 742 pages.
Dermatologie et infections sexuellement transmissibles, 6e édition, de J.-H. Saurat, J.-M. Lachapelle, D.
Lipsker, L. Thomas et L. Borradori, 2017, 1288 pages.
Dermatologie : l'essentiel, de J.-L. Bolognia, J. V. Schaffer, K. O. Ducan et C. J. Ko., traduit par G. Lorette,
2018, 1024 pages.
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COLLECTION DERMATOLOGIE
dirigée par Dan Lipsker

Dermatologie esthétique
Coordonné par
Serge Dahan
Catherine Raimbault
Olivier Cogrel
Jean-Michel Mazer
Bertrand Pusel
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Elsevier Masson SAS, 65, rue Camille-Desmoulins, 92442 Issy-les-Moulineaux cedex, France

Dermatologie esthétique, de Serge Dahan, Catherine Raimbault, Olivier Cogrel, Jean-Michel Mazer et Bertrand Pusel.
© 2020, Elsevier Masson SAS
ISBN : 978-2-294-74589-8
e-ISBN : 978-2-294-74655-0
Tous droits réservés.

Les praticiens et chercheurs doivent toujours se baser sur leur propre expérience et connaissances pour évaluer et
utiliser toute information, méthodes, composés ou expériences décrits ici. Du fait de l'avancement rapide des
sciences médicales, en particulier, une vérification indépendante des diagnostics et dosages des médicaments doit
être effectuée. Dans toute la mesure permise par la loi, Elsevier, les auteurs, collaborateurs ou autres contributeurs
déclinent toute responsabilité pour ce qui concerne la traduction ou pour tout préjudice et/ou dommages aux
personnes ou aux biens, que cela résulte de la responsabilité du fait des produits, d'une négligence ou autre, ou de
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Illustrations de Marc DONON.

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livres, au point que la possibilité même pour les auteurs de créer des œuvres nouvelles et de les faire éditer
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Auteurs et collaborateurs
Auteurs
Serge Dahan, dermatologue, exercice libéral, Toulouse ; président du Groupe de Dermatologie
Esthétique et Correctrice de la Société française de dermatologie. Ancien président du Groupe
Laser de la Société française de dermatologie
Catherine Raimbault, dermatologue, ancienne présidente du Groupe de Dermatologie
Esthétique et Correctrice de la Société française de dermatologie
Olivier Cogrel, praticien hospitalier, chef de l'unité de dermatologie interventionnelle, CHU
de Bordeaux. Président du Groupe Chirurgical de la Société française de dermatologie
Jean-Michel Mazer, dermatologue, exercice libéral, Paris ; ancien président du Groupe Laser
de la Société française de dermatologie
Bertrand Pusel, dermatologue, exercice libéral, Saint-Paul-de-Vence ; ancien président du Groupe
Laser de la Société française de dermatologie

Collaborateurs
Didier Augias, dermatologue, exercice libéral, Clermont-l'Hérault
Daniel Barolet, professeur associé de dermatologie, McGill University, Montréal, Canada
Martine Baspeyras, dermatologue, exercice libéral, Bordeaux
Laurence Beille, dermatologue, Meylan
Karim Benachour, dermatologue, exercice libéral, Paris
Claire Beylot, professeur émérite de dermatologie à l'Université de Bordeaux, ancien chef
de service de dermatologie, CHU de Bordeaux
Dominique Boineau, dermatologue, exercice libéral, Bordeaux
Sandrine Boivin, dermatologue, exercice libéral, Lille
Régine Bousquet-Rouaud, dermatologue, exercice libéral, Montpellier
Hugues Cartier, dermatologue, exercice libéral, Arras ; ancien président du Groupe Laser
de la Société française de dermatologie
Isabelle Catoni, dermatologue, Neuilly-sur-Seine
Anny Cohen-Letessier, dermatologue, exercice libéral, Paris
Phryné Coutant-Foulc, dermatologue, centre de la femme, Nantes
Muriel Creusot, dermatologue, exercice libéral, Lasne, Belgique
Philippe Deshayes, dermatologue, exercice libéral, Merville-Franceville-Plage
Magali Dubois, dermatologue, exercice libéral, Sanary-sur-Mer
Samy Fenniche, professeur hospitalo-universitaire, chef de service de dermatologie, Hôpital Habib
Thameur, Tunis, Tunisie
Thierry Fusade, dermatologue, exercice libéral, Paris ; ancien président du Groupe Laser
de la Société française de dermatologie
Isabelle Gallay, dermatologue, exercice libéral, Dijon
Véronique Gassia, dermatologue, exercice libéral, Toulouse
Nathalie Gral, dermatologue, exercice libéral, Grenoble
Houda Hammami-Ghorbel, maître de conférences agrégée, service de dermatologie, Hôpital
Habib Thameur, Tunis, Tunisie
Marie Jourdan, dermatologue, exercice libéral, Paris
Randa Khallouf, dermatologue, exercice libéral, Tours

IX
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X  Auteurs et collaborateurs

Hans Laubach, dermatologue, exercice libéral, président de l'ESLD (Société européenne des lasers
en dermatologie), Strasbourg
Sylvie Lederlé, dermatologue, exercice libéral, Aix-en-Provence
Anne Le Pillouer-Prost, dermatologue, exercice libéral, Marseille
Marie-Pierre Loustalan, dermatologue, exercice libéral, Bordeaux
Michel Magis, dermatologue, exercice libéral, Lyon
Cyril Maire, dermatologue, exercice libéral, Arras
Thierry Michaud, dermatologue, exercice libéral, Mulhouse ; ancien président du Groupe
de Dermatologie Esthétique et Correctrice de la Société française de dermatologie
François Michel, dermatologue, exercice libéral, Vichy
Marie-Jeanne Miniconi-Nigoghossian, dermatologue, exercice libéral, Nice
Michael Naouri, dermatologue, exercice libéral, Nogent-sur-Marne
Thierry Passeron, professeur des universités, chef du service de dermatologie du CHU de Nice
Yvon Perrillat, dermatologue, exercice libéral, Grenoble ; président du Groupe Laser de la Société
française de dermatologie
Béatrice Perrin, dermatologue, exercice libéral, Strasbourg
Denis Perrin, dermatologue, exercice libéral, Strasbourg
Nadine Pomarede, dermatologue, exercice libéral, Paris
Bernard Rossi, dermatologue, exercice libéral, Rouen
Denis Salomon, dermatologue, exercice libéral, Genève, Suisse
Noël E.C. Schartz, dermatologue, exercice libéral, Paris
Jack Smadja, dermatologue, exercice libéral, Paris
Gérard Toubel, dermatologue, exercice libéral, Rennes ; ancien président du Groupe Laser
de la Société française de dermatologie
Jean-Luc Vigneron, dermatologue, exercice libéral, Saint-Paul-de-Vence
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Avant-propos
Nous sommes heureux de vous proposer ce livre qui nous a semblé nécessaire, vu le développement
rapide des techniques de dermatologie esthétique en France et dans le monde. Ce domaine est devenu
de plus en plus complexe, avec une prise en charge toujours plus précise, évoluant de la correction
simple des symptômes spécifiques du vieillissement à un abord véritablement émotionnel de l'esthé-
tique, thérapeutique et préventif, incluant la correction des expressions négatives et le respect de la
dynamique faciale. Nous constatons la multiplication de ces techniques qui va de pair avec l'augmenta-
tion de la demande par nos patients qui, de plus en plus, souhaitent des techniques non chirurgicales,
peu invasives. Ainsi, les différentes branches de la médecine esthétique se développent en parallèle, qu'il
s'agisse de la cosmétologie, des peelings, des produits injectables, soit volumateurs, soit myorelaxants,
ou des lasers et autres appareils fondés sur l'émission d'énergies. Ceux-ci voient leur nombre sans cesse
augmenter, accompagnés d'une diversification même des sources d'énergies, qui ne reposent plus seule­
ment sur un effet thermique, mais aussi parfois sur l'émission d'ultrasons, de radiofréquences, de micro-
ondes, voire d'une extraction de chaleur visant à créer un refroidissement intense.
C'est pourquoi nous vous proposons pour chacune de ces sous-spécialités un chapitre particulier
visant à appréhender la médecine esthétique dans sa globalité. De plus, il faut tenir compte des
types de peaux : on ne peut pas traiter de la même façon un patient caucasien, asiatique, dans lequel
le risque d'hyperpigmentation post-inflammatoire est très important, ou un patient de phototype V
ou VI pour lequel il sera fondamental d'éviter tout risque d'achromie.
De même, nous insisterons sur les spécificités de la médecine esthétique : réaliser un traitement à
visée esthétique peut être considéré comme plus difficile qu'un traitement médical. Cela peut paraître
paradoxal, mais nous ne devons pas perdre de vue qu'en médecine nous évaluerons, avant de proposer
un traitement, la balance entre ces bénéfices attendus et les risques possibles. À l'inverse, en médecine
esthétique, nous ne devons prendre aucun risque et avons quand même la nécessité, au moins morale,
d'obtenir des résultats. Cela est forcément plus difficile  ! Notre expertise en physiologie, immunologie
et réparation cutanée alliée à notre compétence en esthétique incluant l'analyse complète de la
séméiologie du vieillissement nous placent en position privilégiée pour aborder cette nouvelle disci-
pline de façon scientifique avec toute la rigueur nécessaire pour en garantir la sécurité et l'efficacité.
Par ailleurs, on peut se poser la question de la place de la prévention dans la médecine esthétique :
celle-ci n'est pas seulement correctrice, elle est devenue également préventive, et en cela aide le
patient à bien vieillir, plutôt qu'à le faire rajeunir. De même, de plus en plus de patients réclament
des résultats naturels, progressivement visibles.
En conclusion, nous pensons que le développement de ces techniques justifie pleinement un enseigne­
ment spécifique de la dermatologie esthétique. Cela a déjà vu le jour grâce en particulier aux cours et
congrès déjà proposés par les groupes thématiques de la Société française de dermatologie, le gDEC,
Groupe de dermatologie esthétique et correctrice, et le Groupe Laser. Notre époque est devenue celle
de l'image, la génération des millennials est très soucieuse de son apparence et les mamy- et papy-­
boomers souhaitent vieillir en conservant des expressions émotionnelles positives. Ce livre de dermato-
logie esthétique résume l'ensemble des traitements actuellement validés pour répondre à cette demande
et sera un support pour les jeunes dermatologues et médecins esthétiques qui souhaitent se perfection-
ner et compléter leur formation dans ce domaine passionnant en constante évolution.
Nous espérons qu'il aidera chacun à acquérir le maximum de compétences. Et pour être compétent,
il faut non seulement connaître les techniques qu'on utilise régulièrement, mais aussi les autres, afin de
choisir pour chaque patient les meilleures techniques, la meilleure synergie. Ainsi les maîtres mots en
matière de médecine esthétique sont « synergie et sécurité ». Nous souhaitons que cet ouvrage vous y
aidera, et nous remercions tous les auteurs, libéraux et universitaires, qui y ont contribué.

Catherine Raimbault
Groupe de dermatologie esthétique et correctrice de la Société française de dermatologie
Jean-Michel Mazer
Groupe laser de la Société française de dermatologie

XI
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Préface
Dermatologie esthétique : depuis 20 ans,
que de chemin parcouru !
À la fin des années 1990, la dermatologie esthétique, déjà bien développée aux États-Unis, était
encore en France à l'état embryonnaire. Certes, quelques rares confrères, souvent formés à l'étranger,
exerçaient leur art en clientèle privée. Mais dans le milieu hospitalo-universitaire, l'esthétique était
mésestimée, jugée futile, sans bases scientifiques sérieuses et la plupart de nos collègues étaient très
réticents à admettre qu'il fallait s'y intéresser et ne pas l'abandonner aux chirurgiens plasticiens et
aux médecins esthéticiens. Certains étaient cependant sensibles à ces arguments, notamment
Brigitte Dreno qui, pendant sa présidence de la Société française de dermatologie (SFD) en 2004–
2005, a fait reconnaître la dermatologie esthétique comme partie intégrante de notre spécialité.
Avant cela, la dermatologie esthétique avait commencé à s'institutionnaliser, grâce à Jean-Paul
Ortonne, président de la SFD en 1996, qui m'avait chargée de la mise en place d'un diplôme interuni-
versitaire (DIU) de dermatologie esthétique, lasers dermatologiques et cosmétologie, dont je suis
restée coordonnateur national de 1997 à 2005, très aidée par des libéraux ayant la pratique de l'es-
thétique qui se sont beaucoup investis dans l'enseignement des plus jeunes. Bordeaux était l'Univer-
sité coordonnatrice, mais d'autres (Besançon, Lille, Nice, Paris) ont participé à ce DIU actuellement
coordonné par Thierry Passeron.
Parallèlement, sous l'égide de la SFD et la présidence très dynamique de Thierry Michaud, se met-
tait en place en 2008 le gDEC (Groupe de dermatologie esthétique et correctrice). Beaucoup d'ac-
tions visant à la promotion de la dermatologie esthétique ont été développées : l'ADEC (Académie du
gDEC) destinée à la formation initiale des internes, avec l'appui du Collège des enseignants et des
services hospitalo-universitaires de Nantes, Bordeaux, Besançon, Nice, Rouen, Marseille, Toulouse ; le
CADEC (Cours d'anatomie du gDEC), avec l'aide de nos amis chirurgiens plasticiens ; le CEDEC (Cercle
des experts du gDEC) pour des discussions informelles entre dermatologues investis en esthétique ;
VigiDEC qui, réunit avec Vigipil, est devenu le réseau de vigilance en esthétique ; la revue Dermatologie
Esthétique, organe d'expression du gDEC, dont j'ai été rédacteur en chef pendant 3 ans. Catherine
Raimbault-Gérard, devenue présidente du gDEC en 2016, a poursuivi ces actions et ajouté l'ADEC
approfondissement, la section d'analyse bibliographique animée par Isabelle Rousseaux, Anne Le
Pillouer Prost et ­moi-même. Depuis sa création, le gDEC a participé activement, par des formations
médicales continues et des forums aux Journées Dermatologiques de Paris, à des congrès sur le thème
de l'esthétique en Tunisie et au Maroc, et organisé les Journées annuelles parisiennes du gDEC
En même temps, l'avènement des injectables, toxine botulique et produits de comblement des
rides et de volumétrie (fillers) ainsi que les progrès technologiques dans le domaine des lasers révo-
lutionnaient la dermatologie esthétique, dont les moyens étaient jusqu'à la fin du siècle dernier
assez limités, et ces procédés interventionnels médicaux lui permettaient un essor considérable en
France et dans le monde entier. Ainsi les signes du vieillissement du visage pouvaient-ils être corrigés
et retardés ou même prévenus. Une prise en charge globale devenait possible, ne se limitant plus au
vieillissement cutané, mais concernant aussi le vieillissement des structures sous-cutanées, muscu-
laires responsables des rides dynamiques avec la toxine botulique, la ptose et/ou l'atrophie du tissu
adipeux par les fillers permettant le remodelage volumétrique des parties molles et même le camou-
flage de la perte osseuse. D'autres modifications inesthétiques du visage, cicatrices, petites asymé-
tries, etc., pouvaient aussi être très améliorées, ainsi que le vieillissement et certaines
modifications  inesthétiques extrafaciales. Actuellement, la demande du public s'est fortement
accrue pour ces techniques non chirurgicales, en raison de leurs bons résultats et de leur caractère
peu invasif. Mais il faut s'adresser à un praticien bien formé et expérimenté, respectant l'éthique et
l'information des patients, appliquant des techniques validées et se limitant à des indications raison-
nables. En France, les praticiens ont su garder le naturel et l'expressivité (French touch) auxquels
tiennent les patients et éviter l'écueil des visages figés et d'un excès de correction des volumes qui
ont parfois discrédité ces techniques. Mais attention, il peut y avoir des accidents, notamment avec
les fillers s'il y a embolisation malencontreuse d'un vaisseau, et une bonne connaissance de l­ 'anatomie

XIII
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XIV Préface

est indispensable pour l'éviter. Il faut bien choisir aussi, selon ses propriétés rhéologiques, le filler à
injecter en fonction de la localisation. Avec la toxine botulique, on doit tenir compte de la dyna-
mique du visage et de l'équilibre des balances musculaires. Dans les pays asiatiques, les patientes et
aussi les patients souhaitent souvent dès le plus jeune âge transformer leur visage et l'européaniser,
ce qui conduit parfois à des indications excessives et à un plus grand nombre d'accidents, car les
fillers sont alors injectés en trop grande quantité, pas toujours par des médecins, dans des zones à
risque, comme le nez et la racine du nez.
Il existe quelques ouvrages en langue française pour guider la pratique des médecins, des chirur-
giens et des dermatologues qui s'intéressent à l'esthétique. L'Encyclopédie Médico-Chirurgicale de
Cosmétologie et Dermatologie esthétique est le traité académique de référence. Il y a aussi la collec-
tion (éditée par Arnette), à vocation pratique, dirigée par Thierry Michaud et moi-même, dont un
des titres phares est L'Art de la toxine botulique en esthétique et des techniques combinées (L.
Belhaouari et V. Gassia). Il faut mentionner aussi l'ouvrage de référence conçu par le groupe Laser,
Les lasers en dermatologie (paru chez Doin), régulièrement mis à jour (4e édition en 2018) tant les
progrès dans ce domaine et dans celui des technologies apparentées sont rapides.
Mais pour synthétiser l'ensemble de ces techniques esthétiques, leurs indications, leurs perfec-
tionnements et leurs résultats, il manquait un livre pratique, un Vademecum pour les praticiens
débutants et même pour les plus chevronnés. C'est l'objectif de ce traité, Dermatologie esthétique,
élaboré le groupe gDEC et son partenaire le Groupe Laser qui, nous l'espérons, sera utile à tous.
Claire Beylot
Professeur émérite de dermatologie à l'Université de Bordeaux,
ancien chef de service de dermatologie, CHU de Bordeaux
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Préface
Pour une dermatologie esthétique rigoureuse
et de qualité
La dermatologie esthétique est une composante pleine et entière de la dermatologie. Sa pratique
nécessite des connaissances approfondies de l'anatomie mais aussi de la physiologie de la peau et
des principales dermatoses congénitales ou acquises. De même, l'utilisation des lasers et techniques
apparentées telles que la radiofréquence, la cryolipolyse ou les ultrasons focalisés n'est pas anodine
et nécessite, outre les connaissances sus-citées, de bien appréhender des notions physiques telles
que l'impédance, mais aussi de connaître les principaux chromophores de la peau et leurs pics d'ab-
sorption, ou bien encore les temps de relaxation thermique des cibles. Conscient de l'ensemble des
connaissances supplémentaires à acquérir afin de pratiquer les soins et actes esthétiques, le Collège
des enseignants en dermatologie de France (CEDEF), en lien avec la Société française de dermato­
logie (SFD) et avec l'aide d'enseignants universitaires et libéraux, a maintenant pleinement intégré la
dermatologie esthétique dans la formation des internes en dermatologie. Pour maintenir cette for-
mation et compléter les connaissances des médecins plus anciens, le diplôme interuniversitaire de
dermatologie esthétique propose chaque année à des étudiants francophones venant de très nom-
breux pays d'acquérir des connaissances approfondies dans tous les domaines de la dermatologie
esthétique. Les groupes thématiques de la SFD, tels que le Groupe Laser et le groupe de Dermatologie
esthétique et correctrice (gDEC), animés par des dermatologues passionnés, transmettent chaque
année leur expertise par des cours, forums et congrès de qualité qui permettent à l'ensemble des
praticiens de parfaire leurs connaissances, mais aussi de se tenir informés des avancées qui sont
nombreuses et fréquentes dans le domaine.
La demande esthétique est de plus en plus forte et de nombreux médecins la proposent sans par-
fois avoir acquis les connaissances nécessaires à une bonne compréhension de la peau et des derma-
toses, mais aussi dans la pratique des différentes techniques et différents actes aujourd'hui disponibles.
Cela n'est pas sans risque pour les patients (non-diagnostic d'un mélanome sur une demande de
traitement de « tache brune », méconnaissance d'une hypermélanocytose dermique acquise pouvant
mimer un mélasma, d'une malformation artérioveineuse sur une lésion pouvant faire évoquer une
« simple » atteinte capillaire, mauvais choix de paramètres laser ou injection intra-artérielle de pro-
duits de comblement, etc.). Ainsi, la diffusion du savoir est indispensable pour que tous les médecins
pratiquant la dermatologie esthétique soient formés de manière optimale. En ce sens, ce traité de
Dermatologie esthétique, coordonné par le Groupe Laser et le gDEC et écrit par des experts reconnus
dans leur domaine, est une excellente initiative qui offrira à tous les connaissances les plus actuelles
sur la dermatologie esthétique tout en restant pratique pour être utile à tous.

Pr Thierry Passeron
Service de dermatologie, CHU de Nice, et INSERM U1065, C3M

XV
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Abréviations
AAG alopécie androgénétique
AG acide glycolique
AH acide hyaluronique
AHA alpha-hydroxyacide
AINS anti-inflammatoire non stéroïdien
AL acide lactique
AMM autorisation de mise sur le marché
ANSM Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé
AQP aquaporines
ARS Agence régionale de santé
AS acide salicylique
AT acide tranexamique
AVV atrophie vulvovaginale
BDDE 1,4-butanediol diglycidyl éther
BoNT toxine botulinique (botulique)
CaHa hydroxyapatite de calcium
CMC carboxyméthylcellulose
CPL caprolactone
CSP Code de la santé publique
DUPA diffuse unpatterned alopecia
EBM evidence-based medicine
EIFC érythrose interfolliculaire du cou
EIGS événement indésirable grave associé à des soins
EMG électromyogramme
FDA Food and Drug Administration
FPS facteur de protection solaire
FUE follicular unit extraction
FUT follicular unit transplantation
GAG glycosaminoglycanes
GSM syndrome génito-urinaire de la ménopause
HA acide hyaluronique
HAS Haute autorité de santé
HIFU high intensity focused ultrasounds
HPI hyperpigmentation post-inflammatoire
HQ hydroquinone
HUD home use devices
IGF insulin-like growth factor
IPL intense pulsed light
IRM imagerie par résonance magnétique
LCP laser à colorant pulsé
LED light emitting diode
LFA laser fractionné ablatif
LFNA laser fractionné non ablatif
LHA lipo-hydroxy acide
MEP matériel à émission photonique
MMP métalloprotéinase

XIX
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XX Abréviations

MTZ microthermal zones


NAFP non-ablative fractional photothermolysis (photothermolyse fractionnée non ablative)
PBM photobiomodulation
PCL polycaprolactone
PDO polydioxanone
PDT photothérapie dynamique
PHA polyhydroxy-acide
PLLA acide L-polylactique
PRP plasma riche en plaquettes
PV photovieillissement
RCP responsabilité civile et professionnelle/résumés des caractéristiques des produits
RF radiofréquence
ROL rétinol
SMAS superficial musculo-aponeurotic system (système musculo-aponévrotique superficiel)
SOOF sub-orbicularis oculi fat
TB toxine botulique
TCA acide trichloracétique
TGF transforming growth factor
THS traitement hormonal substitutif
TLR Toll-like receptor
TRT temps de relaxation thermique
VEGF vascular endothelial growth factor
VIH virus de l’immunodéficience humaine
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du vieillissement Partie 1
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Chapitre 1
Évaluation clinique
du vieillissement cutané et global
du visage et du corps
Esquisse des possibilités thérapeutiques
C. Beylot

Introduction Cette évaluation préthérapeutique est clinique et néces­


site une bonne connaissance du vieillissement cutané et des
Prévenir, corriger les signes du vieillissement facial et même tissus sous-cutanés, dont il faudra apprécier le degré. Ce cha­
rajeunir est la demande prioritaire des patientes et aussi pitre sera donc essentiellement clinique et anatomique, et
des patients qui consultent en dermatologie esthétique. Le n'abordera pas la physiopathologie du vieillissement et très
poids démographique croissant des seniors, la pression peu l'histologie. En fonction des altérations observées, il
sociologique qui rejette impitoyablement tout signe appa­ esquissera les possibilités thérapeutiques qui ne seront pas
rent de vieillissement, la nécessité de paraître jeune le plus détaillées puisqu'elles font l'objet des chapitres suivants de
longtemps possible dans la vie professionnelle et person­ cet ouvrage.
nelle, la large information médiatique sur les performances
des traitements esthétiques expliquent cette demande en
forte croissance. Mais les seniors ne sont pas les seuls à Premier contact avec le patient
consulter dans ce but. Des personnes de plus en plus jeunes
voulant prévenir ou retarder le plus possible le vieillisse­
ment de leur visage par des méthodes interventionnelles le
Une première impression [1, 2]
font aussi.
Les progrès des thérapeutiques correctrices non chirurgi­ Âge perçu
cales, lasers, produits injectables, toxine botulique et comble­ L'estimation de l'âge apparent d'un patient et sa comparai­
ment, ont restreint les indications chirurgicales et leur son avec son âge chronologique réel sont un élément
caractère moins invasif encourage les patients à y recourir. important du bilan clinique initial (fig. 1.1). L'âge perçu, qui
L'efficacité de ces traitements, quand ils sont bien choisis et dépend à la fois de facteurs génétiques et environnemen­
effectués par un praticien compétent, fait que les souhaits taux, résulte des diverses composantes du vieillissement
des patients ont quitté le domaine de l'utopie pour devenir facial analysées plus loin, associées de façon très variable
des objectifs tout à fait réalistes. selon les individus. Ce premier coup d'œil médical peut
Mais la réussite du traitement nécessite une évaluation sembler une évaluation un peu sommaire, mais ce critère
précise du vieillissement, surtout facial, pour proposer au est tout à fait valable et a été mentionné dans la littérature,
patient le traitement personnalisé qui le satisfera, car notamment par Carruthers et al. [3], pour apprécier l'effi­
chaque visage vieillit différemment. Les patients veulent un cacité des traitements esthétiques réguliers et prolongés
résultat naturel, qui ne change pas trop leur aspect habituel, sur plusieurs années.
mais qui leur donne l'air reposé, une bonne mine, un visage
raisonnablement rajeuni, sans expressions négatives liées au Points positifs et négatifs
vieillissement ; en somme, il s'agit d'« être le même en Ce premier coup d'œil permet aussi de repérer les éléments
mieux » avec surtout pas de visage figé à cause d'un traite­ positifs à mettre en valeur – expressivité du visage, vivacité
ment excessif ou trop standardisé, conduisant au « clonage du regard, beauté du sourire – ou, au contraire, les expres­
esthétique ». sions inappropriées liées au vieillissement qu'il faudra

Dermatologie esthétique
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du vieillissement
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Chapitre 1. Évaluation clinique du vieillissement cutané et global du visage et du corps

c­ orriger – air anxieux, triste, sévère, fatigué, ne reflétant pas Interrogatoire et discussion
les sentiments du patient et l'image qu'il souhaite trans­ avec le patient
mettre à son entourage.
Il faut évaluer la motivation du patient pour le traitement
esthétique qu'il envisage, dans un but personnel, familial et/
ou professionnel, et savoir ce qu'il désire corriger en priorité.
Les patients demandent le plus souvent un effet de rajeu­
nissement raisonnable, en gardant leur personnalité et leur
naturel. Mais ils tiennent beaucoup à la correction des
expressions inappropriées.
Un plan de traitement sera établi, en accord avec le patient,
en fin d'examen analytique des différentes composantes du
vieillissement facial et extrafacial. Ce sera un compromis
entre les désirs du patient, ses possibilités financières et le
projet médical idéal de traitement. Ces éléments seront syn­
thétisés dans le courrier à son médecin traitant. Les règles
concernant l'information des patients en esthétique, sur le
bénéfice attendu de telle ou telle technique et ses risques
éventuels seront respectées et un devis détaillé sera établi
pour que le patient donne, après réflexion, son consente­
ment éclairé.
Des photographies avant traitement sont indispensables
pour comparaison avec le résultat ultérieur. Elles auront, en
cas de contestation sur la qualité de ce résultat, une valeur
médico-légale.
Bien entendu, l'interrogatoire fera le point sur les anté­
cédents médicaux du patient, les traitements en cours
ou prévus (l'interféron contre-indique l'injection de pro­
Fig. 1.1  Vieillissement chronologique au niveau des parties couvertes. duits de comblement). Il faudra aussi s'enquérir de trai­
A. Débutant, avec de fines ridules parallèles et un discret amincissement tements esthétiques antérieurs, rechercher notamment
cutané. B. Évolué : peau amincie et fripée formant des plis comme un vête­ l'injection de produits de comblement non résorbables
ment trop grand. susceptibles d'entraîner des complications si l'on injecte
Source  : [1], EMC Cosmétologie et Dermatologie Esthétique (© Elsevier
Masson SAS. Tous droits réservés).
à nouveau un produit autorisé résorbable. Mais, sou­
vent, il est difficile d'avoir des renseignements précis car
les patients ne savent pas ce qui leur a été injecté des
Autres points années avant.
Les autres points observés sont les suivants :
■ le morphotype du visage du patient qui conditionne son Analyse du vieillissement facial global
mode de vieillissement  : bréviligne au visage large qui a Longtemps, l'intérêt s'est limité au vieillissement cutané,
tendance à se ptoser, alors que les longilignes vont se seul accessible aux techniques de surface non chirurgi­
squelettiser ; cales. Mais la peau ne vieillit pas seule. Les tissus sous-cuta­
■ les asymétries : elles peuvent être constitutionnelles mais nés, musculaires, adipeux et osseux vieillissent aussi, leurs
aussi acquises, compensatrices de causes sous-jacentes altérations s'intriquant avec celles de la peau, de façon très
(problèmes de vision, ou dentaire) ; variable selon les individus. Une meilleure connaissance
■ le défaut dominant, qu'il faudra traiter en priorité. Il anatomique et fonctionnelle du vieillissement des tissus
n'est pas toujours le même pour le patient et le méde­ sous-cutanés et surtout l'avènement des injectables, toxine
cin. L'exemple fréquent est le patient qui demande botulique et produits de comblement, offrent maintenant
avant tout le comblement des sillons naso-géniens alors aux dermatologues un champ d'action beaucoup plus
qu'il faudrait d'abord rétablir les volumes du tiers vaste, pour comprendre et traiter le vieillissement facial
moyen du visage. dans sa globalité.
Bien entendu, le patient ne s'examine pas seulement au Le vieillissement facial résulte à la fois de facteurs géné­
repos, mais en dynamique, à sa mimique quand il parle, aux tiques et environnementaux, associés de façon variable. On
mouvements forcés, froncement des sourcils notamment [4]. distingue quatre types de vieillissement cutané, avec par
L'importance de la dynamique faciale fait l'objet du chapitre conséquent des aspects différents, dont l'évaluation clinique
suivant. appréciera le degré, en sachant qu'en réalité plusieurs types

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de vieillissement cutané peuvent se superposer chez le conjonctif insuffisant. De petites déchirures de la peau
même individu. sont suivies de pseudo-cicatrices stellaires dites sponta­
nées sur le dos des mains et aux faces d'extension des
Vieillissement cutané membres. L'âge n'est pas seul responsable de ces altéra­
tions, qui correspondent au stade initial de la dermatopo­
rose [5] décrite plus loin ; le PV y participe aussi et explique
Vieillissement cutané intrinsèque les localisations préférentielles en régions insolées. En
revanche, les incisions chirurgicales, notamment au visage
Vieillissement chronologique [1] après exérèse d'une tumeur cutanée, cicatrisent bien et les
Le vieillissement chronologique est lié à l'âge et génétique­ cicatrices sont rapidement moins visibles que chez un
ment déterminé, mais variable en fonction de l'horloge bio­ sujet jeune.
logique de chaque individu. La peau du sujet âgé se déshydrate et s'irrite assez facile­
Il concerne tout le corps, mais s'évalue plus facilement ment. Le prurit est fréquent, surtout en hiver si les bains ou
au niveau des parties couvertes, car sur les zones décou­ les douches sont trop chauds et trop prolongés.
vertes, notamment au visage, il est masqué par le photo­ Les proliférations bénignes sont très fréquentes : kératoses
vieillissement (PV), souvent dominant (fig.  1.2). séborrhéiques, surtout sur le tronc mais parfois aussi visage,
Cliniquement et à la biopsie, il y a un affaiblissement de papillomes pédiculés des grands plis, angiomes rubis, lacs
toutes les composantes de la peau, sauf de la couche cor­ sanguins séniles. Mais les tumeurs malignes, les carcinomes
née, plutôt épaissie. La peau est amincie, flétrie, déshy­ baso- et spinocellulaires, les mélanomes sont liés au PV plus
dratée, souvent finement squameuse. L'atrophie et la qu'au vieillissement chronologique.
perte de densité dermique se traduisent par la formation Les phanères vieillissent aussi ; les cheveux grisonnent puis
de fines ridules parallèles et au niveau des grands plis ; blanchissent, deviennent plus fins et se raréfient. La pilosité
chez les plus âgés, la peau devient flasque comme un diminue sur le corps et dans les régions ambosexuelles, les
vêtement trop grand. ongles poussent plus lentement, ceux des mains s'amin­
La fragilité cutanée explique la formation, au moindre cissent, avec des stries longitudinales, et deviennent cas­
traumatisme, de taches purpuriques, car les petits vais­ sants, alors que ceux des pieds, surtout aux gros orteils, ont
seaux dermiques sont mal protégés par un environnement tendance à s'épaissir et sont souvent atteints de mycose.

A B
Fig. 1.2  A. Contraste entre le photovieillissement (PV) majeur des parties découvertes et le vieillissement discret des parties couvertes, chez une paysanne
âgée. B. PV très marqué avec carcinome basocellulaire infiltrant (flèche), à ne pas confondre avec une simple cicatrice et à traiter en priorité.
Sources : fig. A [1], EMC Cosmétologie et Dermatologie Esthétique (© Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés) ; fig. B, Dr O. Cogrel.

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Vieillissement hormonal l'étude de populations d'origine celtique émigrées dans


Le « coup de vieux » de la ménopause [1] des pays très ensoleillés (Californie, Australie, Afrique
du Sud).
La chute brutale des œstrogènes se traduit par l'accentua­
Les altérations siègent sur les parties découvertes mais
tion rapide de signes proches de ceux du vieillissement chro­
sont généralisées chez les fanatiques du bronzage.
nologique, chez les femmes qui n'ont pas de traitement
L'évaluation clinique suffira à appréciera l'intensité du PV,
hormonal substitutif (THS). La peau s'amincit, se flétrit, s'as­
les classifications gradant le PV, dont la plus connue est celle
sèche, surtout au visage, plus riche en récepteurs des œstro­
de Glogau, étant peu utilisées en pratique [9].
gènes. Sur le plan histologique, il y a une diminution du
collagène dermique, estimée à 30 % pour les cinq premières
Au visage [2, 8, 10]
années d'une ménopause non substituée et ensuite 1 à 2 %
Altérations de la texture et des propriétés
par an, parallèle à celle de la trame osseuse et au risque biomécaniques de la peau
ostéoporotique. Le contenu dermique en acide hyaluro­
La peau est le plus souvent épaissie, jaunâtre, parcourue de
nique (AH) s'appauvrit aussi, d'où l'altération de la viscoélas­
rides plus ou moins profondes, les orifices folliculaires sont
ticité cutanée.
dilatés (peau citréine). Ayant perdu son élasticité, elle est
D'autres désagréments sont liés à la carence œstrogé­
flasque et relâchée. Ces altérations de texture et de viscoélas­
nique : bouffées vasomotrices et sudorales, sécheresse et
ticité entraînent celles de ses propriétés biomécaniques.
atrophie de la muqueuse génitale responsable de
Mais elles n'expliquent pas tout, car il ne faut pas négliger la
dyspareunie, plus rarement kératodermie palmoplantaire
participation du vieillissement des tissus sous-jacents. En
climatérique.
effet, la peau suit passivement la ptose du tissu adipeux et
Et ce n'est pas tout, car s'installe à la ménopause une hype­
épouse son atrophie (accentuation des plis naso-géniens,
randrogénie relative, les androgènes, bien que diminués, étant
altération de l'ovale du visage, bajoues).
toujours présents et leurs effets non contrebalancés par l'ef­
Chez les sujets à peau claire, la peau est plutôt amincie,
fondrement des hormones féminines, œstrogènes et proges­
finement ridée, avec peu de ptose, des télangiectasies, des
térone. On constate alors un renforcement de la pilosité au
lentigos solaires et un risque accru de cancers cutanés.
visage et une alopécie de type androgénique. Ces manifesta­
tions restent habituellement discrètes, mais nuisent à la qua­ Rides
lité de vie car perçues comme une perte visible de la féminité.
Les rides sont la préoccupation essentielle des patientes
Le THS peut éviter ou atténuer l'ensemble de ces manifes­
[2, 11]. Il y a deux types de rides principaux, que le clinicien
tations de la carence œstrogénique, mais d'une façon variable
doit savoir différencier car leur cause est différente et qu'ils
d'une femme à l'autre [6].
ne relèvent pas du même traitement. Mais en fait, les rides
Et chez l'homme ? sont souvent multifactorielles et une stricte distinction
risque d'être trop schématique.
Il y a une diminution des androgènes, mais elle est progres­
■ Les rides dynamiques (glabelle, patte d'oie, région péri­
sive, sans chute brutale et l'on préfère parler de « déficit
buccale –  fig.  1.3) résultent de l'action des muscles
androgénique lié à l'âge » plutôt que d'andropause. Le vieil­
peauciers sur la peau qui se plisse passivement en
lissement chronologique est plus progressif et lent que chez
accordéon. Chez le sujet jeune, l'élasticité cutanée est
la femme. Des crises d'hypersudation, comparables à celles
intacte et peau ne garde pas le pli. Mais plus tard, ces
qui accompagnent les bouffées vasomotrices chez la femme,
muscles restent en contraction permanente, compen­
ont été signalées.
satrice de leur vieillissement, et des rides définitives
s'impriment dans la peau photovieillie et distendue. La
Vieillissement cutané extrinsèque toxine botulique (TB) les efface quand le PV n'est pas
Le vieillissement cutané extrinsèque est lié à des facteurs trop marqué, mais s'il l'est davantage, les rides s'atté­
d'environnement, qu'un article récent propose d'appeler nuent sans disparaître et des techniques complémen­
« exposome », qui sont très variables d'un individu à l'autre, taires sont nécessaires (comblement des rides par les
en fonction du mode de vie [7]. fillers, parfois relissage par laser). Au niveau de la région
péribuccale, les rides dynamiques, en code-barre, légè­
Photovieillissement (ou héliodermie) rement obliques car perpendiculaires au sens de
Depuis les travaux novateurs d'A. et L. Kligmann A et L, contraction du muscle orbiculaire des lèvres, inté­
le terme de photovieillissement (PV), traduction de ressent les deux lèvres blanches avec extension au ver­
photoaging, est préféré à celui d'héliodermie [8]. Le PV millon, et doivent être différenciées des rides
prédomine nettement sur les autres types de vieillisse­ élastosiques, car elles sont améliorées par la TB et le
ment, en particulier au visage. Mais s'il est l'archétype comblement, mais peu ou pas par les lasers de
du vieillissement de cause environnementale, la géné­ relissage.
tique intervient aussi car le PV est beaucoup plus mar­ ■ Les rides élastosiques, statiques, sont directement liées

qué chez les sujets de photopype clair, comme le montre à l'élastose du derme superficiel qui caractérise le PV

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Fig. 1.3  Ces trois types de rides péribuccales diffèrent par leur séméiologie et leur traitement.
A. Rides héliodermiques, prédominant très nettement sur la lèvre blanche supérieure, verticales sur fond d'élastose actinique marquée. Elles épargnent
presque complètement la lèvre blanche inférieure, moins photo-exposée, alors que le PV est assez marqué sur le reste du visage. À traiter par laser de
relissage ou peeling au phénol localisé. B. Rides dynamiques péribuccales plus obliques car perpendiculaires au muscle orbiculaire des lèvres. À traiter
prudemment par toxine botulique et comblement. Les techniques de surface (laser, peeling) seront décevantes. C. Rides chez une fumeuse. Prédominance
au niveau de la lèvre supérieure, avec rides verticales évoquant des rides héliodermiques. Mais, bien qu'il n'y ait pas d'élastose actinique du visage, il y a aussi
des rides verticales sur la lèvre blanche inférieure et une pénétration accentuée des rides dans le vermillon, bien visible sur la lèvre rouge inférieure, témoi­
gnant du rôle direct du tabac sur l'ensemble de la région péribuccale. Traitement : arrêt du tabac et laser de relissage.
Source : [1], EMC Cosmétologie et Dermatologie Esthétique (© Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés).

et elles intéressent les zones les plus insolées du


visage. Le « plissé soleil » de la lèvre blanche supé­
rieure où des rides verticales se découpent dans la
peau élastosique, alors que la lèvre blanche inférieure
moins photo-exposée est indemne ou peu atteinte,
en est un des meilleurs exemples, marqueur d'exposi­
tions solaires excessives. Le vermillon supérieur,
moins insolé que le vermillon inférieur, est peu altéré.
Très inesthétique, ce plissé soleil est précoce sur les
phototypes clairs. Les techniques de surface (lasers
CO 2 impulsionnels ou fractionnés, peeling au phénol)
sont ici indiquées.
Il y a encore :
■ les rides de froissement dues au relâchement de la peau

photovieillie qui devient plus froissable que le matelas


graisseux et musculaire sous-jacent. Pour certains, la
pression nocturne de l'oreiller pourrait expliquer les
rides jugales et les rides verticales frontales (rides de
l'oreiller). Mais en fait, l'individualisation de ces rides est
Fig. 1.4  Lésions associées au photovieillissement.
discutable car leur mécanisme est proche de celui des A. Lentigos solaires  : taches pigmentées planes et lisses de dimensions
rides élastosiques et la dynamique musculaire pourrait variables. B. Kératoses actiniques du rebord photo-exposé de l'hélix. Risque
intervenir aussi puisque certaines d'entre elles sont amé­ d'évolution vers un carcinome épidermoïde.
liorées par la TB ; Source : fig. B [1], EMC Cosmétologie et Dermatologie Esthétique (© Elsevier
Masson SAS. Tous droits réservés).
■ les fines ridules parallèles superficielles, liées au vieillisse­

ment chronologique en zone couverte, sont majorées en Les kératoses actiniques sont de teinte grise ou rosée, mais
zone découverte par le PV, surtout au dos des mains et des surtout, elles sont rugueuses (voir fig. 1.4). Siégeant sur les
poignets. zones les plus photo-exposées du visage et chez l'homme sur
le cuir chevelu chauve, elles peuvent évoluer vers un cancer
spinocellulaire. Elles méritent donc d'être traitées par les
Autres lésions liées au photovieillissement diverses techniques possibles, azote liquide, 5-fluorouracile
Lésions pigmentées (5 FU), photothérapie dynamique (PDT).
La pigmentation inhomogène du visage est une des caracté­ Certains cancers cutanés se présentent comme des lésions
ristiques du PV. Les lentigos solaires lisses, de taille variable, pigmentées et relèvent de l'exérèse chirurgicale (mélanome
sont présents chez 90 % des sujets de type européen de plus de Dubreuilh à ne pas confondre avec un lentigo, carcinome
de 60 ans (fig. 1.4). Ils sont bénins et ne dégénéreront pas, basocellulaire pigmenté).
mais ils sont un marqueur d'expositions solaires excessives et Lésions vasculaires
des dégâts qui s'ensuivent. Ils seront traités par lasers pig­ La rosacée érythrocouperosique, plus fréquente chez les
mentaires ou IPL. sujets à peau claire (malédiction des Celtes) est ­multifactorielle,

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mais le PV en est un élément important, comme en À la nuque, chez les sujets professionnellement très exposés
témoignent ses localisations dans les zones les plus photo-­ au soleil, la peau épaissie et élastosique est sillonnée de rides
exposées du visage. profondes à disposition losangique (nuque rhomboïdale).
Enfin, au cou, des rides transversales, liées à la ptose et au
Autres lésions relâchement d'une peau flétrie, dissimulent mal le relief vertical
D'autres lésions disparates parsèment la peau photovieillie des cordes platysmales sous-jacentes. Au décolleté, l'EIFC se
du visage : poursuit et les rides, plus discrètes, sont obliques, mieux
■ élastoïdose à kystes et comédons de Favre et Racouchot, visibles quand la patiente se penche en avant, épaules rentrées.
siégeant surtout dans les régions orbitomalaires et parfois
au-delà (front, cuir chevelu), presque exclusivement chez Aux faces d'extension des membres
l'homme. Du fait des altérations de texture de la peau due Face dorsale des mains
au PV, la sécrétion sébacée, non augmentée, s'accumule La peau devient très atrophique, en pelure d'oignon. Elle est
dans des follicules sébacés distendus ; parsemée de lentigos solaires et de taches purpuriques et
■ adénomes sébacés dits séniles mais liés surtout au PV, qui laisse voir les structures sous-jacentes (veines dilatées et tor­
forment de petites papules ombiliquées multiples, à ne tueuses, grill osseux), en raison de l'atrophie musculo-­
pas confondre avec des microkystes ou même avec un car­ adipeuse. Il existe souvent des kératoses actiniques avec leur
cinome basocellulaire débutant ; risque de transformation spinocellulaire et des taches pur­
■ pseudomillium colloïde, en plaques jaunâtres ; puriques. Les doigts étant souvent demi-fléchis, la peau des
■ Trichostasis spinulosa, où de multiples et fins duvets deux phalanges distales est relativement épargnée par le PV,
sortent d'un même orifice folliculaire. Sur le nez, ils res­ contrastant avec celle des phalanges proximales, moins
semblent à des comédons et, groupés en placards, ils atteintes cependant que le dos de la main.
évoquent une mucinose folliculaire.
Jambes et avant-bras
Au cou et au décolleté Hypomélanose en gouttes
L'hypomélanose en gouttes, avec des taches blanches arron­
L'érythrose interfolliculaire du cou (EIFC), ou poïkiloder­
dies de quelques millimètres de diamètre, s'observe surtout
mie de Civatte, se présente comme de larges nappes poly­
chez les femmes, qui exposent davantage ces régions au
chromes, au fond rouge et atrophique ponctué de petites
soleil. Cela correspond à la disparition d'un mélanocyte qui
papules blanches correspondant au relief des follicules
ne distribue plus de mélanine aux kératinocytes de son unité
pileux non atrophiques et de taches brunes (fig. 1.5). Cet
épidermique de mélanisation.
aspect « chair de poule » inesthétique et irritable (sensa­
tion de brûlures, prurit) prédomine aux faces latérales du Dermatoporose
cou et se prolonge vers le décolleté, en respectant seule­ Sous l'influence conjointe du vieillissement chronologique et
ment un losange à l'ombre du menton. L'IPL est le traite­ du PV, la peau s'amincit, se fragilise, avec des taches purpu­
ment de choix. riques, des lentigos solaires, de petites déchirures cutanées,

A B
Fig. 1.5  A. Érythrose interfolliculaire du cou (flèche), avec micropapules blanches surélevées (follicules pileux non atrophiques) sur fond rouge atro­
phique. Le losange à l'ombre du menton est épargné de même qu'une petite zone protégée du soleil par le lobule de l'oreille (étoiles). B. Visibilité des
cordes platysmales, sous une peau atrophique. Du fait du vieillissement musculaire, le platysma est en contraction permanente et ses bords antérieurs et
postérieurs forment ces cordes inesthétiques.
Source : fig. B, Dr O. Cogrel.

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des pseudo-cicatrices stellaires spontanées de teinte nacrée [5]. Comme la clinique, l'histologie et les mécanismes physio­
L'appellation de dermatoporose (fig. 1.6) a été proposée par pathologiques sont proches de ceux du PV. L'atteinte arté­
Saurat et Kaya pour souligner cette fragilité cutanée, très fré­ riolaire est plus spécifique du tabagisme et la ménopause,
quente, en référence au terme d'ostéoporose désignant la fra­ plus précoce chez les fumeuses, est responsable du fait de la
gilité osseuse. Aux stades tardifs de la dermatoporose, la carence œstrogénique, d'une diminution du collagène der­
fragilité est extrême, avec des déchirures cutanées de cicatrisa­ mique comme dans le vieillissement.
tion difficile, surtout aux jambes, et des hématomes sous-­ Le traitement est simple : arrêter de fumer !
cutanés qui peuvent aboutir à de vastes plages de nécrose. Il
existe dans la dermatoporose une diminution importante de Vieillissement cutané et pollution
l'AH dermique liée à un déficit fonctionnel des voies du hyalu­ Le rôle de la pollution dans l'accélération du vieillissement
ronate synthétase. C'est une cible possible pour le traitement cutané est suspecté, mais difficile à prouver car impossible à
par application topique de fragments intermédiaires d'AH, qui dissocier d'autres facteurs intrinsèques ou extrinsèques
agissent comme facteurs de croissance CD  44-dépendants dominants, le PV surtout. Une étude réalisée dans la Ruhr
susceptibles de relancer la production d'AH. [13] a cependant montré chez les femmes soumises à une
forte densité de particules fines et de suie liée à la circulation
A 20 % de taches pigmentées de plus au visage que chez celles
d'un groupe vivant en zone résidentielle, mais avec peu de
corrélation avec les rides. Des travaux chinois signalent aussi
une augmentation des lésions pigmentées chez des sujets
soumis à la pollution.
B
Vieillissement des structures
sous-cutanées faciales
Associées de façon variable au vieillissement cutané, les
structures sous-cutanées faciales définissent le vieillissement
Fig.  1.6  A. Dermatoporose sur la face d'extension des avant-bras et des
mains sous l'effet conjoint du vieillissement chronologique et surtout du facial. Longtemps sous-évalué, le vieillissement de ces struc­
photovieillissement. Fragilité cutanée avec taches purpuriques et déchirures tures est capital pour comprendre et traiter le vieillissement
cutanées au moindre traumatisme, suivies de cicatrices stellaires sponta­ d'ensemble du visage.
nées. B. Détail avec taches purpuriques, croûtelles, cicatrices stellaires.
Source : fig. A [1], EMC Cosmétologie et Dermatologie Esthétique (© Elsevier
Masson SAS. Tous droits réservés). Comment les structures sous-cutanées
faciales vieillissent-elles ? [2, 11, 14–16]
Vieillissement cutané lié au tabac [12]
Les études épidémiologiques soulignent la réalité et l'impor­ Vieillissement musculaire : une hypertonie
tance du vieillissement cutané lié au tabac. Ainsi, le risque permanente [11]
d'avoir un visage prématurément ridé serait 4,7  fois plus Les muscles faciaux sont responsables de l'expressivité du
élevé chez les gros fumeurs que chez les non-fumeurs. Si le visage. Au cours du vieillissement, ces muscles compensent
tabagisme s'associe à des expositions solaires excessives, le leur atrophie et leur relâchement par une hypertonicité per­
risque est multiplié par 12 et fumer 20  cigarettes par jour manente, responsable des rides dynamiques, sur un visage
conduirait à un âge apparent supérieur de 10 ans à l'âge réel. crispé, triste et sévère. À cela s'oppose la perte d'élasticité de la
La comparaison de couples de jumeaux fumeurs et non peau qui se distend de façon passive sans aucun mécanisme
fumeurs confirme que celui qui fume est plus ridé et paraît compensatoire. Ce différentiel peau/muscle provoque les
plus âgé. rides dynamiques, surtout en région péri-orificielle où le
Le vieillissement cutané lié au tabac ressemble au PV et le réseau musculaire est plus dense et l'adhérence peau-muscle
majore : peau grisâtre, avec des rides profondes, et souvent plus étroite. Les muscles faciaux sont pour la plupart des mus­
kystes et comédons. Les rides sont particulièrement mar­ cles peauciers, avec une insertion osseuse profonde et une
quées en région péribuccale, surtout chez la femme. Elles insertion cutanée superficielle en regard de laquelle se pro­
s'associent aux rides du PV avec une atteinte plus marquée duit le plissement cutané en accordéon des rides dynamiques,
de la lèvre inférieure chez les fumeuses et poursuite des rides perpendiculaires au sens de contraction des muscles.
dans le vermillon, témoignant du rôle nocif de la fumée de Ces muscles peauciers sont très intriqués entre eux et unis
tabac sur tout le pourtour buccal qui y est directement dans les espaces intermusculaires par le fascia superficialis avec
exposé. lequel ils forment le SMAS (superficial musculo-aponeurotic
Le tabagisme entraîne aussi des difficultés de cicatrisation, system). Ils sont organisés en agonistes et antagonistes et, chez
liées à l'atteinte des artérioles cutanées, et les chirurgiens le sujet jeune, il y a un équilibre fonctionnel entre les muscles
plasticiens s'en méfient quand ils envisagent un lifting chez élévateurs et abaisseurs, notamment au niveau des deux
ces patientes et vont parfois jusqu'à récuser l'intervention. balances musculaires du visage, la balance ­frontoglabellaire qui
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équilibre la position des sourcils et la balance péribuccale. Le Analyse topographique


vieillissement peut perturber l'équilibre de ces balances au
profit des muscles abaisseurs impliqués dans les expressions
du vieillissement facial global
négatives (fatigue, amertume, tristesse), au détriment des en trois étages [2, 11, 14–17]
muscles élévateurs responsables des expressions positives de
En pratique, l'analyse du vieillissement facial se fait par étage,
joie et de dynamisme.
car les défauts dominants n'y sont pas les mêmes et une cor­
rection adaptée doit être proposée. Elle sera décrite de la
Tissu adipeux – ptose et/ou atrophie [2, 11, superficie à la profondeur.
14, 15]
Le tissu adipeux, qui donne sa plénitude harmonieuse au Tiers supérieur du visage
visage jeune, se ptose. Le haut du visage se vide, venant rem­ Cette zone s'étend de la lisière du cuir chevelu aux fentes
plir le bas, transformant sa forme dans la jeunesse (triangle à palpébrales.
sommet inférieur, pomme, cœur) en visage âgé (en triangle à
sommet supérieur, en poire) [11]. Photovieillissement cutané
En fait, c'est la graisse superficielle de la joue qui se ptose Le PV cutané intéresse particulièrement les bosses fron­
vers le bas et en dedans, venant buter sur la partie fixe de la tales, plus photo-exposées, surtout chez l'homme, et
lèvre supérieure, accentuant le pli naso-génien, qui n'est pas s'étend au cuir chevelu chauve. L'élastose solaire est sou­
une ride, mais un pli d'accumulation, contournant la com­ vent marquée, avec peau citréine épaissie, parsemée de
missure labiale et se prolongeant vers le bas par le pli lentigos solaires et de kératoses actiniques, d'adénomes
d'amertume. Au niveau du rebord mandibulaire, la graisse sébacés. Les traitements de surface par lasers sont indi­
ptosée entraîne la rupture de l'ovale et il y a formation de qués (fractionné ablatif pour l'élastose et les rides, pig­
bajoues. La ptose de la graisse superficielle se produit car mentaires pour les lentigos solaires, vasculaire pour
elle n'est pas fixée au plan profond, mais seulement en sur­ l'érythrocouperose).
face à la peau, elle-même distendue et ptosée. La graisse
étant cloisonnée par des expansions des fascias, sa ptose Hypertonie musculaire compensatrice et rides
n'est pas uniforme. Ces cloisons ont un certain rôle de sou­ dynamiques [11]
tien, de même que les retaining ligaments, notamment zygo­ L'évaluation doit se faire au repos, à la mimique, au fronce­
matique et massétérin, qui résultent aussi de la fusion de ment des sourcils et au sourire. La balance frontale (fig. 1.7)
barrières septales [14]. n'a qu'un seul muscle élévateur, le frontal, opposé à des mus­
La graisse profonde, fixée au plan osseux, ne se ptose pas, cles abaisseurs puissants, corrugateur et procerus et orbicu­
mais elle s'atrophie, de façon assez précoce dès la trentaine, laire des paupières. Avec le vieillissement survient un
comme le montre l'imagerie par résonance magnétique déséquilibre au profit des muscles abaisseurs, d'où rides
(IRM) [15], d'abord en région temporale chez la femme glabellaires (rides du lion), ptose des sourcils et diminution
(perte moyenne de 32  %), et chez l'homme surtout en de la fente palpébrale. C'est l'indication de choix de la TB en
région infraorbitaire (40 %) et à la partie interne de la joue respectant les principes détaillés dans un autre chapitre.
(22 %). Pour les corrugateurs, une injection profonde est réalisée
Mais chez certains sujets, l'atrophie existe aussi au niveau dans leur partie interne (zone de l'insertion osseuse et super­
de la graisse superficielle et prédomine sur la ptose. Le visage ficielle dans leur partie externe –  insertion cutanée). Il ne
s'émacie, se squelettise, avec creusement des joues et de la faut pas injecter le frontal dans sa partie inférieure, surtout
vallée des larmes, formation de cernes, creusement temporal chez l'homme, pour ne pas favoriser la chute des sourcils
et atrophie de la graisse péri-orbitaire. (déjà plus bas et horizontaux que la femme) et celle des pau­
pières supérieures.
Support osseux – résorption [16] Les rides de la patte d'oie ne sont pas inesthétiques chez le
Le support osseux détermine la forme du visage. La résorp­ sujet jeune quand ce ne sont que de fines ridules, n'apparais­
tion osseuse est constante au cours du vieillissement et sant qu'au sourire, mais leur traitement précoce est de plus
retentit sur le vieillissement facial. Elle est plus marquée en plus demandé dans un but préventif. Avec l'âge, ces rides
dans certaines zones : les orbites qui s'élargissent, la partie s'impriment de façon permanente dans la peau photovieillie,
interne et médiane de l'os malaire, la mandibule. Il y aura méritant alors un traitement par TB.
donc creusement orbitaire, aplatissement facial dans le tiers
moyen avec moins de projection antérieure des pommettes, Atrophie et ptose du tissu adipeux [11, 15]
formation de cernes, creusement de la vallée des larmes, ■ L'atrophie (fig. 1.8) est plus marquée chez les femmes. Le
recul des sinus piriformes, atrophie et recul mandibulaire et creusement temporal précoce, celui de la concavité fron­
de l'appui dentaire. tale transversale et la fonte de la graisse péri-orbitaire, qui

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Chapitre 1. Évaluation clinique du vieillissement cutané et global du visage et du corps

A B
f

C D

Fig. 1.7  Vieillissement musculaire de la balance frontale.


A. Muscles impliqués : 1, le frontal, seul muscle releveur (flèche bleue) ; les autres muscles sont tous abaisseurs : 2, corrugateur ; 3, orbiculaire ; 4, abaisseur du
sourcil (flèches rouges) ; 5, procérus (flèche jaune). B. Au repos, rides frontales (f) très discrètes, glabellaires (g) et à la racine du nez plus accentuées (p) par
action du procérus. C. Au froncement, accentuation des rides glabellaires et de la racine du nez. D. Regard vers le haut : accentuation des rides frontales.
Source : fig. A, [1], EMC Cosmétologie et Dermatologie Esthétique (© Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés).

B C
Fig. 1.8  Atrophie du tissu adipeux du visage. Aspect de squelettisation.
A. Creusement temporal et frontal très marqué. B. Atrophie de la graisse orbitaire plus marquée dans le cadran supéro-interne, zone où la perte osseuse
est aussi la plus importante. C. Creusement des joues (même patiente que B).
Sources : [1], EMC Cosmétologie et Dermatologie Esthétique (© Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés) ; fig. A, Dr M.-P. Loustalan.

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accentuent beaucoup le vieillissement facial, sont corrigés Résorption osseuse


par comblement [15]. La perte de volume des paupières La résorption osseuse se manifeste surtout par l'élargisse­
supérieures peut être compensée dans la plupart des cas ment du cadre orbitaire, surtout dans sa partie supéro-­
par l'injection d'AH, mais si un dermatochalasis est associé, interne. Associée à la fonte de la graisse orbitaire, elle
la blépharoplastie sera nécessaire. accentue l'aspect d'œil creux [16].
■ La ptose (fig. 1.9) concerne le coussinet de Charpy qui, par

son poids, contribue, avec la prédominance des muscles


abaisseurs, à la chute des sourcils, surtout chez l'homme Tiers moyen du visage [11, 14, 15]
[11]. L'injection de TB dans les muscles abaisseurs est Le tiers moyen s'étend du bord libre des paupières inférieures
décevante ; le comblement peut stabiliser le sourcil, mais jusqu'aux orifices narinaires. Latéralement, ses limites sont
pour le relever vraiment, il faut parfois en venir à la obliques vers le bas. Il comprend donc les joues, mais aussi la
chirurgie. pyramide nasale

A B

E
C
Fig. 1.9  Ptose du tissu adipeux du visage.
A. Vecteurs de la ptose de la graisse du visage dont le tiers moyen se vide au profit du tiers inférieur. B. En se ptosant, la graisse de la joue bute sur la partie
fixe de la lèvre supérieure, et s'accumule au-dessus du sillon naso-labio-génien, dont la profondeur s'accentue. C'est donc un pli d'accumulation prolongé
au-dessous de la commissure labiale par le pli d'amertume. C, E. Altération de l'ovale du visage avec formation de bajoues. Visibilité des cordes platysmales
et fanons au niveau du cou. D. La forme du visage jeune (triangle à sommet inférieur, pomme, cœur) se transforme progressivement en visage âgé (triangle
à sommet supérieur, poire). F, G. Du fait de la ptose, transformation du visage jeune (F) en visage âgé (G) avec altérations surtout au tiers moyen (cernes,
vallée des larmes, sillon naso-génien accentué) et au tiers inférieur (sillon labiogénien profond, pli d'amertume, bajoues).
Sources : [1], EMC Cosmétologie et Dermatologie Esthétique (© Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés) ; fig. A et D, Dr L. Belhaouari ; fig. B et C, Dr C. Beylot ;
fig. E, Dr O. Cogrel.

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Photovieillissement cutané tion osseuse), glissement vers le bas des tissus (muscle
Son intensité est variable selon les expositions solaires cumu­ orbiculaire fenêtré, laxité tissulaire, affaiblissement des retai-
lées et le phototype. Il concerne surtout les reliefs, notam­ ning ligaments). Le traitement, difficile, est habituellement
ment le dos du nez, avec souvent des kératoses actiniques chirurgical, mais de bons résultats ont été rapportés avec des
qui peuvent évoluer vers un carcinome spinocellulaire, les injections d'AH moins invasives à deux niveaux : profondes
joues, où lentigos solaires et couperose sont fréquents chez dans le SOOF (sub-orbicularis oculi fat) et superficielles dans
les sujets à peau claire. Chez l'homme, la région malaire pré­ le coussinet graisseux superficiel [18].
sente parfois une élastoïdose à kystes et comédons. Les lasers
Résorption osseuse [11, 16]
CO2 fractionnés, pigmentaires et vasculaires sont indiqués.
La résorption osseuse est marquée au tiers moyen du visage,
Hypertonicité et atrophie musculaire d'où la rétrusion du massif facial qui accentue l'impression
Cela participe moins à ce niveau au vieillissement facial et il d'atrophie liée au vieillissement des parties molles. C'est sur­
y a peu d'indications de la TB, sauf pour l'hypertonie des tout l'os maxillaire supérieur qui est concerné, essentielle­
rides nasales transversales de Bunny (référence au lapin de ment dans sa partie interne sous-orbitaire. La résorption
Disney qui fronce toujours le nez). Le muscle orbiculaire des osseuse au niveau de l'orifice piriforme entraîne le recul de la
paupières, dans sa partie inférieure, est atrophique, aminci et base narinaire et participe à l'accentuation du pli naso-­
même fenêtré et sa contraction n'a plus d'effet liftant sur les génien. La volumétrie par fillers au niveau des parties molles
tissus ptosés de la joue. permet de compenser en partie ces modifications.

Ptose du tissu adipeux Tiers inférieur du visage [11, 19]


Cette ptose est au premier plan. La graisse superficielle Cette zone s'étend de la région sous-narinaire à la ligne infé­
mobile des joues se ptose en entraînant la peau. La correc­ rieure mandibulaire. Elle comporte deux zones dont le vieil­
tion des volumes du tiers moyen est primordiale pour le lissement est assez différent : les joues et la bouche et son
rajeunissement de la forme du visage, car elle a un effet lif­ pourtour.
tant qui corrige et atténue les sillons naso-géniens et permet
de ne pas trop charger et alourdir le tiers inférieur. Sur le plan Photovieillissement
esthétique, l'injection d'un AH suffisamment volumateur Le PV concerne les zones les plus photo-exposées  : lèvre
dans la graisse malaire profonde et peu réticulé dans la blanche supérieure, marquée par les rides verticales hélioder­
graisse superficielle corrige la perte de projection antérieure miques qui relèvent des techniques de relissage laser ou des
du visage qui a tendance à s'aplatir et restaure le galbe des peelings localisés au phénol, vermillon de la lèvre inférieure,
pommettes. Un bolus profond d'AH sous le grand zygo­ parfois siège de kératoses et carcinomes spinocellulaires.
matique peut améliorer son support et renforcer l'action de
ce muscle élévateur par myomodulation [17]. Hypertonie des muscles de la bouche et de son
Le comblement des cernes est plus délicat. Il doit être réa­ pourtour [11]
lisé avec un AH pas trop hydrophile, placé profondément en Le puissant muscle orbiculaire des lèvres est responsable des
petite quantité, sous le muscle orbiculaire, contre le périoste, rides péribuccales dynamiques en code barre, qui peuvent être
juste au-dessous du rebord orbitaire. Si nécessaire, on améliorées par des injections de TB, minimes et très prudentes
comble aussi la partie inférieure de la vallée des larmes (­sillon pour ne pas risquer une incompétence buccale pour les
médio-jugal en prolongement du sillon nasojugal qui en est liquides et une gêne à l'élocution. L'injection se fait dans la lèvre
la partie supérieure). blanche, 2 mm au-dessus du vermillon, sur chaque hémilèvre.
Aux paupières inférieures, la ptose graisseuse et l'affaiblis­ Du comblement et/ou un relissage sont souvent associés.
sement du septum peuvent entraîner des hernies graisseuses Les autres muscles dont la relaxation par la TB est souvent
qui seront réséquées par voie conjonctivale chez le sujet utile sont l'abaisseur de l'angle de la bouche, qui attire la com­
jeune et s'il est plus âgé avec un excédent cutané, par voie missure labiale vers le bas, donnant une expression de tris­
sous-ciliaire. tesse et d'amertume, et le mentonnier, dont l'hyperkinésie
provoque l'aspect irrégulier, en peau d'orange du menton, et
Atrophie de la graisse profonde fixe éventuellement le risorius, s'il plisse et ride excessivement la
L'atrophie de la graisse profonde fixe, accompagnée parfois peau latéro-commissurale. Le masséter, qui n'est pas un mus­
d'une atrophie de la graisse superficielle, peut entraîner cle peaucier, n'est pas traité dans le cadre du vieillissement,
une squelettisation du visage et doit être corrigée par mais dans un but esthétique pour corriger un visage trop
volumétrie. carré ou fonctionnel dans des cas de bruxisme.

Poches malaires Ptose du tissu adipeux


Les poches malaires, relief mollasse en regard de la zone La ptose du tissu adipeux altère l'harmonie de l'ovale du
zygomatique, résultent de plusieurs facteurs : perte du sup­ visage. Si l'on divise verticalement l'hémiface de ce tiers infé­
port structural (atrophie de la graisse péri-orbitaire, résorp­ rieur en trois, comme le propose Belhaouari [19], on constate

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un différentiel de ptose entre proface (en avant), métaface La peau est relâchée et poïkilodermique
(en arrière) – qui ne se ptosent pratiquement pas car la peau Au cou, le relâchement cutané accentue la perte de la défini­
et le tissu sous-cutané sont adhérents au plan profond – et tion de la ligne mandibulaire, alourdie par la ptose du tissu
mésoface (zone intermédiaire), où il n'y a pas cette adhé­ adipeux. Cette peau flasque est marquée par des rides trans­
rence et où la graisse se ptose nettement, dessinant les versales et elle dissimule mal le relief vertical des cordes
bajoues. Le relief des bajoues est souligné par deux encoches : platysmales. Si le cou est amaigri et la peau distendue, un ou
en arrière, à la limite métaface et mésoface et en avant à la deux fanons apparaissent sous forme de plis verticaux sous
limite mésoface et proface, où la bajoue est ancrée par le le menton. Si le relâchement cutané est modéré, la remise en
retaining ligament mandibulaire. À ce niveau, l'injection pro­ tension de la peau par radiofréquence peut l'améliorer. Les
fonde de fillers doit se limiter aux encoches et respecter la rides transversales ne seront pas atténuées par la TB puisqu'il
bajoue pour ne pas alourdir davantage la ligne mandibulaire. ne s'agit pas de rides dynamiques, mais par le comblement.
Au-dessus, il faut combler le sillon naso-génien et le pli Si les altérations sont importantes, c'est un lifting cervico­
d'amertume qui soulignent la démarcation entre la graisse facial qu'il faudra envisager.
ptosée de la mésoface et la fixité de celle de la proface. On L'aspect poïkilodermique de l'EIFC du cou et du décol­
peut aussi améliorer la projection du menton, en cas de leté sera traité par IPL. Les rides obliques peuvent être atté­
rétrusion, par deux ou trois bolus d'AH au niveau du pogo­ nuées par un nappage d'AH très superficiel. Le peeling
nion. Ce lifting médical peut donner de bons résultats sur la moyen (TCA 25 %) peut en outre améliorer l'aspect fripé et
correction de l'ovale si la ptose n'est pas trop accentuée, dyschromique.
méritant alors un lifting chirurgical.

Atrophie du tissu adipeux Vieillissement musculaire et visibilité des cordes


platysmales [11]
L'atrophie du tissu adipeux entraîne une perte de volume
des lèvres et du pourtour de la bouche dont la correction est Le platysma, muscle très plat, pair et symétrique, qui engaine
complexe [11]. Les lèvres sont amincies, perdant leur projec­ les faces antérolatérales du cou, lutte contre le relâchement
tion antérieure ; la lèvre blanche, surtout supérieure, est apla­ et l'atrophie par une hypertonie permanente, et son bord
tie et verticalisée, ce qui peut être corrigé par nappage antérieur se ramasse pour former le relief très inesthétique
superficiel ; et les crêtes philtrales effacées seront reconsti­ des cordes platysmales bien visibles sous la peau distendue.
tuées par injection sous-dermique d'AH à l'aiguille, dans Les cordes platysmales postérieures qui résultent du même
leurs deux tiers inférieurs. Les rides péribuccales sont injec­ processus au niveau du bord postérieur du platysma sont
tées à l'aiguille. Le vermillon est aminci et aplati, la définition moins visibles, mais attirent vers le bas les tissus relâchés du
de son contour imprécise, mais l'injection profonde d'AH tiers inférieur du visage. La TB peut diminuer la visibilité de
derrière le muscle orbiculaire peut lui restituer volume et ces cordes et même les effacer. Mais l'injection doit être pru­
éversion ; pour lisser sa surface et l'hydrater, lui rendre sa dente, dans ces cordes pincées entre les doigts et relevées
concavité, on injecte en nappe sous la muqueuse ; l'ourlet pour éviter toute diffusion vers la profondeur et le risque de
des lèvres est enfin redéfini en injectant superficiellement de troubles respiratoires et de la déglutition, en petite quantité
façon linéaire entre lèvre blanche et lèvre rouge, et l'arc de de façon étagée, tous les 2 ou 3 cm.
Cupidon est redessiné.
Ptose et accumulation du tissu adipeux au niveau
Résorption du support osseux du double menton
La résorption du support osseux intervient au niveau de la La surcharge graisseuse, très inesthétique, modifie le profil en
mandibule et aussi à la partie inférieure du maxillaire supé­ ouvrant l'angle cervicomentonnier. L'alternative médicale à la
rieur, favorisant la perte de la projection antérieure et de liposuccion chirurgicale est l'injection d'acide désoxycholique.
l'éversion des lèvres [16]. Cela peut être corrigé par injection
profonde de filler sous le muscle orbiculaire. Parfois, la À la résorption osseuse s'ajoute l'arthrose
résorption conduit à l'édentation, avec rétrusion majeure de cervicale
l'orifice buccal et même des joues. Il faut alors avoir recours Cette arthrose est fréquente, responsable de douleurs et de
aux traitements odontologiques. la perte de mobilité du cou, lui conférant un aspect figé qui
majore l'effet du vieillissement.
Vieillissement des régions
extrafaciales Mains
L'atrophie cutanée, déjà décrite, laisse voir les veines dilatées
et tortueuses et le gril osseux des métacarpiens car il y a aussi
Région cervicale et décolleté une atrophie des muscles interosseux. Souvent, les mains
En continuité avec le tiers inférieur du visage, cette région en sont déformées par de l'arthrose. La rhizartrose du pouce est
est en pratique indissociable car ses altérations liées au vieil­ fréquente, avec une atrophie des muscles de l'éminence thé­
lissement majorent celles de l'ovale. nar. Les patientes souhaitent souvent, outre les traitements à

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Chapitre 1. Évaluation clinique du vieillissement cutané et global du visage et du corps

visée cutanée, des injections de fillers pour diminuer la visibi­ Synthèse


lité du plan osseux et des veines dilatées et pour repulper le
dos des mains. Au terme de cet examen, on fera la synthèse des modifications
liées au vieillissement observées chez le patient et de leur
Racine des membres degré, en les hiérarchisant et en déterminant le ou les défauts
L'aspect fripé de la peau peut être amélioré par la radiofré­ dominants à corriger en priorité. En fonction de cela, on pro­
quence et la flaccidité due au relâchement des tissus sous-­ posera au patient et on lui expliquera les moyens de correction
cutanés par la radiofréquence ou les ultrasons focalisés. Le possibles, et on établira le plan de traitement personnalisé en
lifting de la racine des membres avec cicatrice cachée dans le sachant que si le patient n'a pas les moyens financiers de réali­
pli axillaire ou inguinocrural est possible, mais plus invasif. ser tout le projet, le traitement du défaut dominant peut déjà
permettre d'obtenir une amélioration appréciable. Pour un
résultat optimal et durable, ces traitements esthétiques néces­
Abdomen, fesses
sitent tout de même de l'entretien, puisque l'injection de TB ne
Selon le degré de relâchement, on peut proposer ici aussi les sera efficace que 6 mois et celle d'un filler un an environ. Il est
techniques de remise en tension par radiofréquence ou donc souhaitable de fidéliser le patient et de renouveler les
ultrasons focalisés, voire la chirurgie. injections, avec souvent des doses inférieures, une à deux fois
par an sur des années pour stabiliser le rajeunissement obtenu
Hommes et femmes vieillissent- et freiner véritablement le vieillissement facial. Cela en vaut la
ils différemment ? peine, car dans l'étude de Carruthers [3], les patientes ainsi
traitées paraissent en moyenne 6,9 ans plus jeunes que leur âge
Oui, et il faut en tenir compte et éviter d'appliquer à l'homme et l'expérience de dermatologues experts français montre en
les principes du rajeunissement féminin qui aboutiraient à effet des patients qui semblent avoir, 10 ans après, un visage
une féminisation inappropriée du visage [20]. plus jeune que lorsqu'ils ont commencé un tel traitement.
■ La peau, soumise à l'action anabolisante des androgènes,

est plus épaisse et plus dense que la peau féminine, avec Références
une sécrétion sébacée plus abondante et une forte pilo­ [1] Beylot C. Vieillissement cutané. Vieillissement facial global : orienta­
sité. Elle est donc plus résistante au vieillissement, qui est tion thérapeutique. EMC Cosmétologie et Dermatologie Esthétique
progressif, sans accentuation marquée aux alentours de la (© Elsevier Masson SAS, tous droits réservés) 2016;11:1–27
cinquantaine, puisqu'il n'y a pas de carence androgénique (article 50-050-A-10).
[2] Gassia V. Analyse du vieillissement facial. Réalités thérapeutiques
brutale. Les rides sont moins nombreuses mais plus pro­ en dermato-vénéréologie. Dermatologie Esthétique 2014;(Suppl
fondes. Mais cette peau plus lourde se ptose davantage, au 5):5–91.
niveau des paupières inférieures, où les poches sont fré­ [3] Carruthers A, Sadick N, Brandt F, et al. Evolution of facial aesthe­
quentes, des sourcils, des joues et des bajoues. En fonction tic treatment over five or more years: a retrospective over five
des habitudes de vie, la peau masculine est habituellement years or more years: a retrospective cross-sectional analysis of
plus exposée aux méfaits du soleil et du tabagisme. continuous onabotulinum toxin treatment. Dermatol Surg 2015;
41:693–701.
■ Les muscles peauciers sont plus développés et puissants,
[4] Michaud T, Gassia V, Belhaouari L. facial dynamics and emotional
notamment à la glabelle, et leur neutralisation nécessite expressions in facial aging treatments. J Cosmet Dermatol 2015;
des doses jusqu'à deux fois supérieures. 14:9–21.
■ La graisse superficielle des joues se ptose davantage, en entraî­ [5] Dyer  JM, Miller  RA. Chronic skin fragility of aging. Current
nant une peau épaisse, et le double menton est plus fréquent. concept in pathogenesis, recognition, and management of der­
L'atrophie de la graisse prédomine dans la région infraorbi­ matoporosis. J Clin Aesthet Dermatol 2018;11:13–8.
[6] Lephart ED. A review of the role of estrogen in dermal aging and
taire, alors que c'est au niveau temporal chez la femme. facial attractiveness in women. J Cozsmet Dermatol 2018;17:
■ La structure osseuse est plus massive et puissante que chez
282–8.
la femme, avec des rebords orbitaires plus marqués, un [7] Krutmann J, Bouloc A, Sore G, et al. The skin aging exposome.
menton carré, mais avec moins de projection zygoma­ J Dermatol Sci 2017;85:152–61.
tique. La forme générale du visage s'inscrit dans un carré, [8] Kligman  LH. Photoaging. Manifestations, prevention and treat­
et non un ovale comme chez la femme. La résorption ment. Dermatol Clin 1986;4:S17–28.
[9] Dobos G, Lichterfeld A, Blume Peytavi U, Kottner J. Evaluation of
osseuse semble plus tardive, du fait sans doute de la persis­ skin aging: a systematic review of clinical scales. Br J Dermatol
tance des androgènes après la cinquantaine. 2015;172:1249–61.
■ L'utilisation des injectables devra respecter le morphotype [10] Gilchrest BA. Photoaging. J invest Dermatol 2013;133:E2–6.
masculin et veiller à ne pas féminiser la zone du regard et [11] Belhaouari L, Gassia V. L'art de la toxine botulique en esthétique et
le tiers moyen. Donc, il ne faut pas relever isolément la des techniques combinées. Paris: Arnette-Wolters Kluwer ; 2013.
queue du sourcil, ne pas donner trop de volume et de pro­ [12] Beylot C. Vieillissement cutané et tabac. Réalités thérapeutiques
en dermato-vénéréologie. Dermatologie Esthétique 2014;(Suppl
jection antérieure à la région malaire. Il faut se contenter 6):25–30.
d'atténuer les rides, mieux acceptées chez l'homme, sans [13] Vierkötter  A, Schikowski  T, Ranft  U, et  al. Airborne particle
vouloir les effacer au prix d'un aspect trop lisse et figé, sur­ exposure and extinsic skin aging. J Invest Dermatol 2010;130:
tout au niveau du front. 2719–26.

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Chapitre 1. Évaluation clinique du vieillissement cutané et global du visage et du corps

[14] Disant F, Château J. Rajeunissement du tiers moyen de la face. In: [18] Braz AV, Black JM, Pirmez M, et al. Treatment of malar mounds
Chirurgie plastique et esthétique de la face et du cou. Paris: with hyaluronic acid fillers: ana anatomical approach. Dermatol
Elsevier Masson;2012. p. 35–45. Surg 2018;44:S56–60.
[15] Wysong A, Kim D, Tim J, et al. Quantifying soft tissue loss in aging [19] Belhaouari  L. Embellissement et rajeunissement de l'ovale du
male face using magnetic resonance imaging: a study in women visage. J Méd Esth et Chir Derm 2016;173:19–27.
using magnetic resonance imaging. Dermatol Surg 2014;40: [20] Michaud T. Les particularités morphologiques du visage mascu­
786–93. lin  : intérêt pour le rajeunissement facial de l'homme par les
[16] Mendelson  B, Wong  CH. Changes in the facial skeleton with injectables. Réalités thérapeutiques en dermato-vénéréologie.
aging: implications and clinical applications in facial rejuvenation. Dermatol Esth 2017;(Suppl 12)19–24.
Aesthetic Plast Surg 2012;36:753–60.
[17] De Maio M. Myomodulation with injectable fillers: an innovative
approach to addressing facial muscle movement. Aesthetic Plast
Surg 2018;42:798–814.

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SÉMIOLOGIE DU VIEILLISSEMENT Partie 1
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Chapitre 2
Dynamique faciale
et expressions faciales
émotionnelles
Intérêt dans le traitement du vieillissement
du visage par les injectables1
T. Michaud, V. Gassia

Introduction çues comme étrangère par le sujet : « vieillir fait perdre au


sujet son visage de référence » (David le Breton). Ces expres-
La compréhension de la physiopathologie du vieillissement sions sont à l'origine d'une perception émotionnelle négative
facial, impliquant les quatre composantes anatomiques du par les patients et/ou leur entourage en raison du décalage
visage (os, graisse, muscle et peau) a permis d'établir le ainsi instauré entre image et personnalité, et cela aboutit à
concept de rajeunissement global, naturel et tridimension- une perte d'estime de soi et de qualité de vie. Il s'agit certaine­
nel du visage [1]. L'analyse séméiologique détaillée du visage ment là d'une motivation prégnante pour démarrer la
débouche sur un plan de traitement personnalisé en éva- démarche de rajeunissement facial.
luant précisément les pertes de volume, le relâchement, les Il y a donc une corrélation puissante entre la prise en
rides statiques et dynamiques et les altérations de la surface compte de la dynamique faciale et des expressions faciales
cutanée. Ses objectifs principaux sont la restauration des émotionnelles par le thérapeute et les attentes de résultats
volumes faciaux, le rajeunissement du regard, celui de la naturels de la part de nos patients qui veulent la correction
région buccale et péribuccale et enfin la correction des ano- des expressions négatives liées au vieillissement tout en res-
malies de surface. pectant le langage émotionnel du visage.
La prise en compte de la dynamique faciale représente une
évolution incontournable de ce concept : elle permet l'ob-
tention de résultats plus naturels pour nos patients en évi- Expressions faciales
tant les corrections excessives et/ou toute stéréotypie ; elle et émotions : le socle
obéit également à leur souhait de gestes de correction res- des processus relationnels
pectant les expressions faciales et le langage émotionnel du
visage en lien direct avec cette dynamique faciale. Le langage On sait depuis Darwin (1872) que les expressions faciales
émotionnel, socle de tous les processus relationnels, est en permettent d'informer l'entourage social de notre état émo-
effet fondamental dans la communication inter-­personnelle : tionnel et jouent à ce titre un rôle de communication essen-
« Sans émotion, pas de communication, et sans communica- tiel [2]. La théorie traditionnelle postule qu'il existe des
tion, pas de société » (Jacques Cosnier). L'un des freins prin- connexions innées, biologiquement déterminées, entre cer-
cipaux chez nos patients pour l'entrée dans les processus de tains états émotionnels et des expressions faciales prototy-
correction du vieillissement facial est certainement la crainte piques, ayant pour fonction de communiquer à autrui ce qui
de la perte du naturel de leur visage. est ressenti. Elles comprendraient notamment les émotions
Par ailleurs, les modifications anatomiques faciales liées au de joie, colère, peur, tristesse, surprise, dégoût, honte et
processus du vieillissement sont fréquemment à l'origine de mépris [3]. D'après Paul Eckman, les expressions de base sont
l'apparition d'expressions faciales inappropriées, telles la limitées aux émotions de colère, peur, surprise, dégoût, joie
fatigue, la tristesse, la sévérité ou l'amertume, qui sont per- et tristesse (fig. 2.1) [4].


1.
Ce chapitre repose en partie sur un travail commun réalisé avec le Dr Lakhdar Belhaouari et le Dr Véronique Gassia : qu'ils soient vivement
remerciés pour leur collaboration.

Dermatologie esthétique
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Chapitre 2. Dynamique faciale et expressions faciales émotionnelles

A B C D E F
Fig. 2.1  Expressions prototypiques de base selon Eckman.
A. Colère. B. Peur. C. Surprise. D. Dégoût. E. Joie. F. Tristesse.
Source : © Wiley Periodicals, Inc.

Ces émotions de base auraient un caractère universel, émotion (par exemple joie, tristesse). Ce système émotion-
modulé toutefois par les usages culturels et soumis à une nel est activé lors de l'exécution, mais aussi lors de l'observa-
régulation sociale. Des théories alternatives apparues vers tion d'une expression faciale émotionnelle. Ce phénomène
la fin du XXe siècle suggèrent en outre que les expressions suggère que ces deux fonctions cognitives seraient fonction-
faciales relèveraient plutôt d'une alchimie subtile inté- nellement nécessaires l'une à l'autre [6].
grant l'émotion, la communication, ainsi que des caracté- Par ailleurs, les mimiques faciales de l'autre tendent à
ristiques individuelles, liées au genre et au statut social être imitée de façon automatique et inconsciente, et cela
notamment. dès la petite enfance. On a démontré que l'observation
Au-delà de ces bases théoriques, il est indéniable que les de visages colériques ou joyeux produit chez l'observa-
émotions, dont la transmission est véhiculée par les expres- teur les réponses électromyographiques correspon-
sions faciales, sont le fondement de nos rapports interper- dantes. Par exemple, le potentiel électromyographique
sonnels et sociaux. C'est pourquoi, à coté des expressions d'activité du grand zygomatique a un niveau plus élevé à
faciales émotionnelles de base, il existe une riche palette la vue de visages joyeux qu'en présence de visages colé-
d'expressions faciales émotionnelles s'expliquant par des riques, tandis que celui du corrugateur du sourcil est plus
normes d'expressivité imposées par la culture (display rules, faible. Grâce à la simulation de l'expression faciale, ce
decoding rules) (fig. 2.2). phénomène d'imitation permet de mieux comprendre et
On sait par exemple que l'attirance qu'éprouvent deux de catégoriser les émotions exprimées par un autre indi-
personnes l'une pour l'autre est en partie conditionnée par le vidu. En outre, l'intensité des expressions faciales émo-
principe de l'affinité émotionnelle qui est une réaction émo- tionnelles imitées a un impact sur l'intensité de la
tionnelle commune à un même événement. Le phénomène réponse du système nerveux. C'est insister sur l'impor-
de contagion émotionnelle est une réponse involontaire aux tance cruciale de l'intégrité des systèmes sensorimoteurs
réactions émotionnelles d'autrui ; l'empathie est la compré- dans la reconnaissance des émotions exprimées par
hension des émotions d'un autre dont on adopte le point de autrui [6].
vue psychique, et favorise les comportements d'aide.
Lien émotionnel et communication sont intimement liés. Feed-back facial
Le « communicant » doit être capable d'extérioriser ses émo-
tions –  plus ou moins authentiques ou modulées selon le Nos propres expressions influent également sur nos
contexte – pour que son interlocuteur puisse les comprendre cognitions, ainsi qu'en témoigne le phénomène de feed-
et les ressentir afin de les partager. Les manifestations émo- back facial. Par exemple, une expression faciale positive
tionnelles, qui traduisent et affichent spontanément nos res- imposée expérimentalement conduit à des interpréta-
sentis, s'intègrent ainsi de façon complexe dans les processus tions plus drôles de dessins humoristiques. Il en est de
relationnels [5]. même pour les expressions négatives. De façon générale,
en adoptant de façon volontaire une expression faciale,
on majore le ressenti de l'émotion correspondante.
Reconnaissance des expressions en miroir L'inverse est vrai également  : le fait d'être incapable de
Quand nous sommes témoin d'une expression émotionnelle revêtir une expression réduit la capacité de ressentir
chez notre interlocuteur, nous mettons en route un circuit l'émotion correspondante. Par exemple, les patients ayant
neuronal identique à celui qui est activé lorsque nous ressen- eu des injections de toxine botulique au niveau de la
tons cette même émotion. C'est la reconnaissance de l'ex- glabelle (avec comme conséquence l'incapacité de fron-
pression faciale « en miroir ». Il semblerait qu'elle ait pour cer les sourcils) étaient moins dépressifs et moins anxieux
fonction la compréhension et l'anticipation du comporte- que des patients ayant reçu d'autres traitements esthé-
ment et des intentions de l'autre, et qu'elle intervienne de ce tiques [7]. D'autres expériences ont montré que le fronce-
fait dans la régulation adaptée de notre propre comporte- ment de sourcils rend l'humeur plus dépressive, l'élévation
ment. Ainsi, plus généralement, ce mécanisme permet de des sourcils augmente la capacité de se sentir surpris et la
comprendre ce qui survient lorsque autrui fait l'expérience création d'une expression de dégoût rend la perception
d'une sensation (par exemple douleur, toucher) ou d'une des odeurs plus désagréable [8].

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Fig. 2.2  Expressions complexes.


Source : © Wiley Periodicals, Inc.

Anatomie dynamique faciale correspondant chacune à un mouvement d'une partie du


visage et pouvant mettre en jeu plusieurs muscles [10].
Les expressions faciales émotionnelles sont la conséquence
de l'ensemble du jeu musculaire des muscles peauciers du Muscles impliqués
visage, mais intéressent aussi les mouvements ainsi induits
Les muscles masticateurs, masséter, temporal, ptérygoïdien
des éléments mous de la face et notamment des comparti-
interne et externe ne sont pas des muscles de la mimique stricto
ments graisseux.
sensu, mais leur mise en jeu s'intègre dans les expressions faciales.
En haut du visage, le muscle frontal est le seul muscle élé-
Musculature de la mimique vateur du sourcil, sa contraction plisse le front ; le muscle
Les muscles peauciers du visage sont tous à différents niveaux corrugateur du sourcil fronce le sourcil en le ramenant en
agonistes et antagonistes. Ils réalisent ainsi une intrication à bas et en dedans et provoque l'apparition des rides du lion ;
deux niveaux, anatomique et fonctionnelle, qui permet la le muscle procérus est abaisseur de la tête du sourcil et est à
réalisation complexe et subtile du jeu des expressions faciales l'origine des rides glabellaires horizontales.
de la mimique à l'origine du langage émotionnel du visage [8]. Dans la zone orbitaire, le muscle orbiculaire des paupières est
Duchenne de Boulogne, dès 1862, grâce à ses travaux élec- un sphincter qui permet l'occlusion palpébrale et dont l'hyper-
tromyographiques, a permis d'établir une corrélation entre tonie lors du vieillissement provoque pour sa partie palpébrale
l'action des muscles peauciers faciaux et le langage émotion- une réduction de la fente palpébrale et une microphtalmie
nel du visage, à l'origine de l'expression des passions et des relative et pour sa partie orbitaire les rides de la patte d'oie [11].
sentiments [9]. Le facial action coding system (FACS), déve- Au niveau du nez, trois muscles interviennent : le muscle
loppé plus récemment par les psychologues Ekman et myrtiforme est abaisseur de la pointe du nez et réduit trans-
Friesen (1978), est une méthode de description des mouve- versalement les orifices narinaires ; le muscle transverse du
ments du visage. Le système FACS décrit 46 unités d'action nez élève et avance l'aile du nez et entraîne des rides

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l­ atéronasales verticales légèrement obliques (bunny lines) ; le


muscle dilatateur des narines les ouvre [11].
La région buccale est complexe : le muscle orbiculaire des
lèvres, médian, est un muscle concentrique entourant l'ori-
fice buccal et l'attirant en dedans. Il est suspendu par les
muscles péribuccaux :
■ latéralement, le modiolus réalise un nœud musculaire, qui

représente le point de convergence des muscles mobilisant


la commissure labiale (latéralement : risorius ; latéralement et
en arrière : buccinateur ; vers le haut : releveur de l'angle de la
bouche ; vers le haut et latéralement : grand zygomatique ;
vers le bas et latéralement : abaisseur de l'angle de la bouche ; 1
■ en bas, l'abaisseur de la lèvre inférieure est l'unique abais-

seur pur de la lèvre inférieure, évasant en outre son bord


libre. Le platysma a également une action d'abaissement 2
3
de la lèvre inférieure et de la commissure en raison de l'in-
trication de ses fibres médiales avec tous les muscles de la 4
partie inférieure et latérale de la bouche ; 5
■ en haut, le releveur de la lèvre supérieure et le releveur

nasolabial ainsi que le petit zygomatique [11].


Enfin, le platysma attire la peau du menton et de la joue
vers le bas et abaisse la commissure labiale et la lèvre infé-
rieure en l'éversant. Il tend et plisse la peau du cou, pro-
voque l'élévation de celle de la région pectorale. Sa A
contraction lors de l'effort et de la colère forme les cordes
platysmales. Les fanons résultent de son atrophie lors du
vieillissement [11].

Mimiques fondamentales
Lors des expressions faciales témoignant de sentiments s'ap-
parentant à la joie, il existe une ascension globale du visage,
avec ouverture et dilatation des orifices transversaux. Le
muscle risorius, spécifique à l'homme, est le plus sollicité
dans le sourire, attirant la commissure transversale­ment et
combinant son action avec l'orbiculaire des lèvres qui se 1

détend, permettant ainsi l'ouverture de l'orifice buccal. Dans 2


le même temps, la libération et la mobilisation latérale du
modiolus par le risorius expriment la satisfaction, tandis que 3
4
son déplacement vers le haut et l'extérieur sous l'action du
grand zygomatique intègre l'expression de joie et de rire.
Dans le rire franc, la contraction synchrone du muscle orbi- 5
culaire des paupières plissera l'angle extérieur des paupières 6
en élevant légèrement la paupière inférieure (fig. 2.3) [11].
7
Dans la joie débordante complète, il s'y associe la contrac- 8
tion du releveur de la lèvre supérieure. Si le sourire est
réprimé, il y a contraction de l'orbiculaire de l'œil qui
bloque la mobilisation du modiolus. Le rire forcé ou la gri-
mace sont caractérisés par une contraction isolée du grand
zygomatique alors que le reste du visage reste immobile. B
Dans les expressions faciales émotionnelles apparentées à la Fig. 2.3  Mimique de la joie et de la tristesse.
tristesse, les muscles dépresseurs sont dominants avec abais- A. Mimique de la joie où dominent les muscles élévateurs et dilatateurs.
sement des orifices transversaux. Le muscle corrugateur du 1 : muscle orbiculaire des paupières. 2 : muscle dilatateur des narines. 3 : mus-
sourcil fronce et abaisse le sourcil, l'abaisseur de l'angle de la cle grand zygomatique. 4 : muscle risorius. 5 : muscle orbiculaire des lèvres.
B. Mimique de la tristesse où dominent les muscles abaisseurs. 1, 2 : muscle
bouche abaisse la commissure labiale, accentuant ainsi les plis
orbiculaire des paupières. 3 : muscle releveur de la lèvre supérieure. 4 : muscle
d'amertume et exprimant tristesse et mépris. Sa contraction grand zygomatique. 5 : muscle orbiculaire des lèvres. 6 : muscle abaisseur de
volontaire est observée lorsqu'on retient les pleurs. Le corru- la commissure labiale. 7 : muscle carré du menton. 8 : muscle mentonnier.

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gateur est important pour exprimer la tristesse, la concentra-


tion et de l'attention ; sa contraction marquée intervient dans
les expressions de colère, d'impatience et de préoccupation. La
contraction du procérus, plissant horizontalement l'espace
intersourcilier, exprime l'agressivité ou une grande douleur. Le
platysma participe à l'expression de frayeur et de colère.
L'action conjuguée des deux muscles orbiculaires (des pau-
pières et des lèvres), du muscle frontal et du corrugateur du
sourcil provoque une expression d'attention et de concentra-
tion. Elle entraîne un état de tension du masque facial avec
limitation de l'ouverture de ses orifices. Le frontal, en élevant
le sourcil, majore l'action de son antagoniste, l'orbiculaire des
paupières. Des rides frontales transversales et glabellaires sont
l'expression de l'action des muscles frontal et corrugateur.
La sensualité et la gourmandise mobilisent le grand zygo-
matique, le nasal, l'orbiculaire des lèvres, ce qui est objectivé
par des narines dilatées, une commissure légèrement élevée
et une lèvre retroussée [11].
L'expression de la surprise résulte de l'abaissement de la
mâchoire inférieure (muscles masséter, temporal et ptéry-
goïdien), l'élévation des sourcils sous l'action du frontal et
l'ouverture de l'œil par son muscle orbiculaire.

Les compartiments graisseux


dans les mimiques faciales
Le tiers moyen du visage (mid-face des Anglo-Saxons) corres-
pond à la zone des pommettes et de la région jugo-malaire.
Il se situe entre paupière inférieure et sillon naso-génien, et
est constitué d'un socle osseux sur lequel reposent les deux
Fig. 2.4  Compartiments graisseux malaires profond et superficiel.
compartiments graisseux malaires séparés par le muscle
Source : © T. Michaud, L. Belhaouari, V. Gassia.
orbiculaire de l'œil.
La graisse malaire profonde constitue un compartiment graisse malaire profonde et le muscle orbiculaire, mais aussi
profond fixe et statique, tandis que la graisse malaire super- entre le muscle orbiculaire et la graisse malaire superficielle.
ficielle est mobile dans la dynamique des expressions faciales En cas de traitements volumateurs dans cette région, il sera
et dans le relâchement lié au vieillissement. Ces deux com- essentiel d'analyser les déplacements des parties molles du
partiments graisseux sont séparés par le muscle orbiculaire visage lors de la mimique, pour juger s'il convient de combler
de l'œil. Ils contribuent grandement au galbe des pommettes le compartiment graisseux malaire profond fixe ou le com-
et à la plénitude jugo-malaire [12, 13]. partiment graisseux malaire superficiel mobile, ou les deux.
La graisse malaire profonde (SOOF des Anglo-Saxons pour
sub orbicularis oculi fat) réalise un coussinet dense, adhérant
au relief osseux qu'elle recouvre. Par son adhérence profonde,
cette graisse malaire profonde est fixe et statique. Elle n'est Vieillissement et expressions
pas mobilisée lors de la mimique et ne se ptose pas avec le faciales
relâchement lié au vieillissement. Elle subit toutefois un phé-
nomène d'atrophie partielle lors du vieillissement (fig. 2.4).
La graisse malaire superficielle est située au-dessus du Vieillissement facial global
muscle orbiculaire et de la graisse malaire profonde. Elle La chronodermie résulte d'un vieillissement cellulaire généti-
adhère à la peau. Sa structure est moins dense que la graisse quement programmé qui va affecter les différents plans ana-
malaire profonde (voir fig. 2.4). Elle est mobilisée lors de la tomiques : osseux, musculaire, graisseux et cutané, aboutissant
dynamique faciale et des expressions faciales émotionnelles, ainsi à l'apparition des signes du vieillissement. Le relâchement
dont un des principaux moteurs à ce niveau est le muscle cutané, aponévrotique, graisseux et musculaire, l'apparition
orbiculaire. Outre une atrophie partielle, le vieillissement des plis d'expression et des rides profondes auxquels parti-
entraîne son atrophie partielle ainsi que son relâchement et cipent l'hypertonie musculaire réactive au relâchement mus-
sa ptose dans un vecteur de rotation en bas et en dedans. culaire, l'atrophie des différents éléments anatomiques avec
La peau, le muscle orbiculaire et la graisse malaire superfi- les pertes de volumes et leur redistribution sont les consé-
cielles sont mobiles, avec un espace de glissement entre la quences de ce vieillissement chronodermique.

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Il s'y ajoute des facteurs extrinsèques ou intrinsèques tels Il entraîne l'inversion du triangle de jeunesse (fig.  2.5) à
que soleil, tabac, alcool, déséquilibres hygiéno-diététiques travers un mécanisme de relâchement et de ptose cutanéo-
et  alimentation, modifications hormonales, maladie et graisseuse qui vide la partie supérieure de la zone jugo­
troubles pathologiques, qui peuvent contribuer à sa préco- malaire et remplit la partie inférieure du visage.
cité et à sa rapidité. Cette transformation morphologique explique les trois prin-
cipaux sillons liés au vieillissement du visage : le sillon palpébro-
Vieillissement du tiers moyen malaire, le sillon médio-jugal et le sillon naso-génien (fig. 2.6).
Le vieillissement du tiers moyen du visage est un des élé- ■ Le sillon palpébromalaire définit la limite supérieure de la

ments clés du vieillissement facial. graisse malaire superficielle.

Fig. 2.5  Vieillissement du tiers moyen du visage : inversion du triangle de la jeunesse.


Source : © T. Michaud, L. Belhaouari, V. Gassia.

1
4
2

Fig. 2.6  Les trois principaux sillons liés au vieillissement du visage.


1 : Sillon palpébromalaire ; 2 : sillon médio-jugal ; 3 : sillon naso-génien ; 4 : partie interne du sillon palpébromalaire et partie supéro-interne du sillon
malo-jugal = vallée des larmes.

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■ Le sillon médio-jugal a un trajet oblique en bas et en


dehors en raison du relâchement tissulaire responsable
d'un vecteur de glissement vers le bas et le dedans.
Ces deux sillons s'unissent dans leur partie interne et des-
sinent un « Y » constituant la vallée des larmes.
■ Le sillon naso-génien réalise un point de blocage inférieur

pour le complexe cutanéograisseux jugo-malaire. Il des-


sine un pli lié à l'accumulation tissulaire. Le sillon naso-­
génien devient peu à peu labio-génien pour constituer
ensuite le pli d'amertume sous la commissure labiale. Par
son extension vers le bas, il dépasse le rebord mandibulaire
et forme la partie antérieure de la bajoue.
La partie partiellement déshabitée de la graisse malaire
superficielle se situe entre le sillon palpébromalaire et le sil- Fig. 2.7  Vieillissement du tiers supérieur du visage.
Source : © T. Michaud, L. Belhaouari, V. Gassia.
lon médio-jugal.
Au niveau du tiers moyen du visage, deux éléments essen-
En s'étendant plus bas, il dépasse le rebord mandibulaire et
tiels doivent être pris en compte et vont définir les indica-
forme la partie antérieure de la bajoue. Double menton,
tions thérapeutiques :
bajoues, fanons, peau flétrie remplacent progressivement un
■ le volume qui peut être insuffisant, normal ou excessif ;
ovale du visage et un angle cervicomentonnier bien dessinés.
■ le relâchement lié à l'âge et l'existence ou non d'une ptose.
Peu à peu, on assiste à une réduction du volume labial,
Belhaouari a observé qu'un apport relativement minime de
associée à une diminution du contre-appui rétrodentaire du
0,5 ml d'acide hyaluronique volumateur dans le tiers moyen
fait de la fonte osseuse. La lèvre devient peu à peu verticale,
induit entre autres un certain effet lifting, avec élévation du
rétruse, avec un allongement relatif de la lèvre blanche, tan-
sillon palpébromalaire, raccourcissement de la paupière infé-
dis que la lèvre rouge perd son galbe convexe et son obli-
rieure, atténuation du sillon naso-génien et amélioration de
quité. Les plis d'expression radiaires de surface sont dus au
la commissure labiale. Par hypothèse, il pense avec Lawers
jeu du couple muscle-peau et à l'atrophie du muscle orbicu-
que cet apport volumétrique stimule et  allonge la portion
laire qui donnait le galbe labial (fig. 2.8 et 2.9).
orbitaire du muscle orbiculaire dans cette zone et que, par
Le tissu cutanéograisseux cervical, comme ailleurs, perd
voie de réaction médullaire ou cérébrale, le muscle orbicu-
peu à peu son élasticité. Son relâchement s'inscrit dans la
laire se contracte, entraînant ainsi un certain effet lifting.
continuité vers le bas du relâchement jugal. Le muscle
Vieillissement du tiers supérieur platysma va se raccourcir, ses fibres vont s'unir entre elles
en amas, aboutissant à la formation des cordes platys-
Il existe avec le vieillissement une perte d'élasticité cutanée qui, males. Les rides cervicales horizontales sont des rides de
combinée avec le poids du sourcil et du coussinet adipeux de froissement et non pas des rides d'expression liées à l'ac-
Charpy, entraîne une ptose frontale et sourcilière. La contraction tion musculaire.
réactionnelle du muscle frontal engendre l'apparition des rides Le vieillissement induit ainsi deux phénomènes qui vont
d'expression horizontales frontales. Cette contraction réaction- influer sur l'expressivité du visage :
nelle peut compenser voire dépasser l'effet de ptose en relevant ■ les plissements cutanés liés aux expressions répétées
le sourcil excepté au niveau de la partie latérale du sourcil. deviennent avec le temps permanents, figeant les expres-
Par ailleurs, l'alourdissement de la paupière supérieure et l'ac- sions naturelles de l'individu (rides dynamiques  : pattes
centuation des poches palpébrales, moins bien maintenues par d'oie, rides frontales) ;
un septum orbitaire qui perd de sa tonicité avec l'âge, caracté- ■ le relâchement et la ptose, associés au glissement et à
risent le vieillissement de cette zone. La fente palpébrale se l'atrophie des volumes graisseux et à la fonte du support
rétrécit par hypertonie du muscle orbiculaire palpébral. osseux, sont à l'origine d'expressions inappropriées simu-
Le champ de vision est progressivement limité par la ptose lant l'effet des muscles abaisseurs  : sillons naso-géniens,
du sourcil et de la paupière supérieure, entraînant une plis d'amertume, vallée des larmes qui expriment tristesse,
accentuation réactionnelle de la contraction du frontal. fatigue, amertume, sévérité.
Dans certains cas, on assiste à une squelettisation de la
région péri-orbitaire par atrophie des parties molles.
Les rides verticales du lion signent la cassure provoquée Vieillissement et expressions négatives
par les contractions répétées du corrugateur du sourcil et les Comme cela a déjà été dit, l'âge peut conférer au visage des
rides horizontales de la racine du nez résultant de l'action du expressions négatives (fig. 2.10) à type de fatigue, de tristesse,
procérus (fig. 2.7). d'amertume ou encore de sévérité, qui sont la conséquence
directe du vieillissement et non le reflet de la personnalité du
Vieillissement du tiers inférieur sujet [14, 15]. La « lecture émotionnelle » du visage par l'en-
Le sillon naso-génien se modifie et devient labiogénien, entraî- tourage ou face au miroir en est altérée, et ces expressions
nant la formation du pli d'amertume sous la commissure labile. négatives peuvent retentir sur l'estime de soi et la qualité de

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A B

C D
Fig. 2.8  A-D. Vieillissement du tiers inférieur du visage.
C, D. Perte de volume ; allongement de la lèvre blanche ; rétrusion ; atrophie cutanée ; rides.
Sources : fig. A, B, © T. Michaud, L. Belhaouari, V. Gassia ; C, D, © T. Michaud.

Fig. 2.9  Vieillissement des lèvres.

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A B

C D E
Fig. 2.10  A-E. Le vieillissement simule les expressions négatives de tristesse, colère, dégoût.
Sources : fig. A, B, © T. Michaud, L. Belhaouari, V. Gassia ; fig. C-E, © Wiley Periodicals, Inc.

vie sociale et/ou professionnelle. Ainsi, très souvent, la ou un relâchement tissulaire modéré auront des répercussions
demande esthétique s'inscrit dans la volonté de tenter de importantes sur la perception de l'âge Ces pertes de volume
supprimer ce décalage inapproprié entre l'image et la person- peuvent alors être corrigées par des quantités faibles de fillers,
nalité pour retrouver son « visage de référence » (Le Breton). placées au bon endroit en implantation profonde au contact
Dans la prise en charge du vieillissement facial, l'étape cruciale osseux, permettant de suppléer un support osseux déficient.
est l'identification et l'analyse sémiologique des modifications Ces points clés du vieillissement et des expressions néga-
anatomiques liées au vieillissement. Cette analyse se fait étage par tives peuvent être analysés et définis dans chaque comparti-
étage. Ces signes de l'âge se combinent de façon variable selon les ment du visage. Ils sont schématisés succinctement, avec les
individus et vont conférer au visage une ou des expressions néga- principes de leur correction dans les figures 2.11 et 2.12. Bien
tives dépendant de leur association. Les éléments clés qui défi- entendu, une correction globale est indispensable à l'amélio-
nissent ces expressions négatives peuvent être catégorisés ainsi : ration de ces expressions négatives.
■ la balance musculaire des dépresseurs par rapport aux Voici enfin, à titre d'exemples cliniques, l'analyse séméiologique
élévateurs ; d'un visage plutôt longiligne et d'un visage plutôt bréviligne.
■ la perte des volumes liée à l'atrophie ; L'analyse du visage de la patiente triste et fatiguée (fig. 2.13)
■ le relâchement des parties molles (la ptose) ; permet d'identifier les altérations suivantes :
■ l'aspect de surface (la peau). ■ au niveau du tiers moyen  : on constate une perte de

Ces combinaisons sont influencées par le morphotype du volume avec constitution d'un sillon médio-jugal et d'un
visage. Schématiquement, un visage longiligne a tendance à sillon naso-génien marqués, des cernes en creux, un relâ-
se creuser et un visage bréviligne a tendance à se ptoser. chement des parties molles (zones d'ombre et creux) ;
Cette étape d'analyse est fondamentale et répertorie les ■ au niveau du tiers supérieur : on note une horizontalisa-

signes de relâchement, les rides et sillons, les pertes de volume tion des sourcils, une chute du sourcil, une ptose pal-
avec les effets d'ombre et les pertes de convexité qu'elles pébrale inférieure et des rides glabellaires ;
entraînent. Pour ces pertes de volume, on peut d ­ 'ailleurs s'ai- ■ au niveau du tiers inférieur : on observe des plis d'amer-

der dans cette analyse, surtout quand on débute dans le tume marqués, une perte de volume des lèvres avec atro-
domaine de l'esthétique, par des codes comme ceux définis phie, des rides péri-orales, une perte de l'ovale, l'apparition
par Di Maio [16]. Ces pertes de volume peuvent apparaître d'un pli mentonnier.
très précocement dans la vie, surtout chez les sujets dont le L'analyse du visage de la patiente avec une expression de
support anatomique osseux est faible. Le support osseux joue fatigue et d'amertume (fig. 2.14) révèle les éléments suivants :
un rôle essentiel : les sujets au support squelettique « pauvre » ■ au niveau du tiers inférieur : des plis d'amertume marqués,

sont prédisposés aux manifestations précoces du vieillisse- des sillons naso-géniens creusés avec relâchement, une
ment lié à la perte des volumes, notamment dans la région du chute des commissures labiales, une perte de l'ovale ;
tiers moyen de la face, du menton et de la ligne mandibulaire. ■ au niveau du tiers moyen : une perte de volume malaire,

Chez ces sujets et dans ces zones, des faibles pertes de volume des sillons médio-jugal et palpébromalaire marqués.

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Chapitre 2. Dynamique faciale et expressions faciales émotionnelles

Perte des volumes et des convexités :


visage creusé = fatigue, tristesse

Les points clés


• Région malaire et vallée des larmes
• Sillon naso-génien (partie haute)
• Région jugale pré-auriculaire
• Règion sous-malaire
• Rides jugales

La correction : comblement
et volumétrie

Les écueils
• Respect de la dynamique faciale
(attention au « syndrome K »)
A • le bon produit au bon endroit
• Pas de surcorrection

Rides d'expression
• Fatigue, sévérité

Perte des volumes


• Fatigue

Sourcil
et paupière
supérieure
• Fatigue, tristesse

Les points clés


• Corriger les rides d'expression
• Rajeunir le sourcil
– position
– volume
• Ouvrir le regard
• Corriger les volumes : cernes en creux,
volumes frontaux, tempes

La correction : toxine botulinique,


comblement et volumétrie

Les écueils
• La chute des sourcils
C – correction des rides glabellaires
– correction des rides frontales
• La correction excessive des cernes
en creux
Fig. 2.11  Les points clés des expressions négatives.
A. Tiers moyen du visage. B. Zone du regard. C. Zone du regard et principes de leur correction.

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Chapitre 2. Dynamique faciale et expressions faciales émotionnelles

Sillons et plis :
• Fatigue,
Lèvres tristesse,
• Rides amertume
et perte de
l'architecture
• Perte de
séduction

Relâchement
Menton et perte des
• Sillon et plis volumes
tristesse D • Fatigue,
dédain tristesse
sévérité

Les points clés


• La correction des sillons et rides
superficielles
• La correction des volumes
• La restauration de l'architecture
labiale en respectant l'anatomie
• L'horizontalisation de la ligne
interlabiale (élévation des
commisures labiales)

La correction : toxine botulinique,


comblement et volumétrie

E Les écueils
• La surcorrection du volume labial
• Le non-respect de l'anatomie
labiale et de sa dynamique
• L'augmentation excessive
du volume mentonnier
Fig. 2.11 Suite
D. Zone du sourire. E. Zone du sourire et principes de leur correction.
Source : © T. Michaud, L. Belhaouari, V. Gassia.

A B
Fig. 2.12  Prise en charge globale avec un recul de 7 ans. Fig. 2.13  Tristesse et fatigue.
Avec correction des masséters par la toxine botulinique. A. Avant traitement. B. Après traitement.
Source : © T. Michaud. Source : © T. Michaud.

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Chapitre 2. Dynamique faciale et expressions faciales émotionnelles

il s'agit probablement d'un stade où on peut poser une indica-


tion de traitement préventif par la toxine botulinique, même si
les rides statiques sont encore peu marquées.
La diffusion de la toxine botulinique doit être bien contrôlée,
de façon à obtenir des résultats précis, notamment dans les
régions glabellaire et frontale, et il ne faut pas hésiter pour cela
à faire appel aux hautes concentrations. Dans la région glabel-
laire par exemple, une diffusion à la partie basse du muscle
frontal aurait pour conséquence une chute de la tête des sour-
cils responsable d'une expression négative « méchante ». De
même, la ptose sourcilière accentuerait l'impression de fatigue
et renforcerait l'expression négative.
Les balances musculaires doivent être prises en compte en
A B favorisant les muscles élévateurs, tant dans le haut que dans le
Fig. 2.14 Amertume. bas du visage. Le but est, bien entendu, de lutter contre la ptose :
A. Avant traitement. B. Après traitement. ■ celle du front et du sourcil dans le haut du visage par l'ac-
Source : © T. Michaud.
tion sur les muscles corrugateurs du sourcil, le muscle pro-
cérus et le muscle orbiculaire des paupières, en favorisant
Implications thérapeutiques l'action du muscle frontal ;
■ celle des commissures labiales et des joues dans le bas du

Le traitement du vieillissement facial doit tendre à restaurer visage par l'action sur les muscles abaisseur de l'angle de la
le visage de référence, de façon à reconstruire le lien intime bouche et le platysma.
entre image et personnalité. Il consiste à recréer un état d'es- Dans le même esprit, l'action sur le muscle orbiculaire des
prit plutôt qu'une beauté figée ou stéréotypée. Pour ce faire, lèvres peut avoir une certaine action sur les rides labiales
la prise en compte de la dynamique faciale est capitale : il est radiaires et le traitement du muscle mentonnier prévient
nécessaire de corriger les expressions faciales inappropriées l'« enroulement » du menton et le pli sus-mentonnier ainsi
tout en préservant l'expressivité naturelle du visage. Les injec- que l'aspect en peau d'orange.
tables font appel à la toxine botulinique et aux injections de Il ne faut jamais figer et adapter les doses en fonction de
fillers. Pour ces derniers et par conviction personnelle, ne cet impératif et de l'âge du patient.
seront abordées ici que les injections d'acide hyaluronique. Enfin, il est important d'espacer suffisamment les injec-
tions pour respecter la dynamique faciale.
Les règles d'utilisation
de la toxine botulinique
dans le cadre de la dynamique faciale Les règles d'utilisation de l'acide
La toxine botulinique est incontournable dans le traitement du
hyaluronique dans le cadre
vieillissement facial. Elle entraîne presque toujours, si elle est bien de la dynamique faciale
réalisée, une grande satisfaction du patient quant aux résultats
obtenus et représente un élément clé de sa fidélisation. Ce taux a Quelques principes de base
récemment été évalué à plus de 90 % [17, 18]. Ses avantages sont Le respect du naturel du visage concerne évidemment aussi
nombreux et s'intègrent parfaitement dans une démarche de la correction des pertes de volume liées à l'âge.
prévention du vieillissement facial dont la demande est Nous avons vu plus haut l'importance du support osseux
aujourd'hui forte : précision et donc naturel des résultats, rapi- et la possibilité de pallier dans une certaine mesure sa défi-
dité d'action, durabilité correcte de ses effets, sécurité à long cience grâce à des injections d'acide hyaluronique judicieu-
terme [19]. Un autre élément important est l'amélioration pro- sement placées. C'est notamment le cas du tiers moyen, du
gressive des rides grâce aux traitements répétés par la toxine menton, de la région mandibulaire.
botulinique, permettant dans certains cas un véritable retour en Quand on parle de correction des volumes, il est classique
arrière et représentant un argument décisionnel fort. de dire que l'harmonie des volumes est plus importante que
Les règles d'utilisation de la toxine botulinique dans le cadre le volume lui-même, notamment chez le sujet jeune, mais
de la dynamique faciale sont assez simples et doivent avant aussi chez le patient plus âgé chez lequel il est illusoire de
tout être adaptées en fonction de l'âge du patient et du main- vouloir à tout prix chercher à corriger la ptose ou des sillons
tien du naturel du visage, d'autant que les patients consultent marqués en remplissant le visage de fillers, aboutissant à des
de plus en plus tôt avec le souci de la prévention du vieillisse- résultats particulièrement artificiels et inesthétiques.
ment du visage. Plus le sujet est jeune, plus il est important Les règles de correction volumétrique dans le cadre de la dyna-
qu'on ne puisse pas identifier la nature du geste correcteur. mique faciale obéissent en fait à des règles assez simples [20, 21] :
L'analyse du visage en dynamique est essentielle pour déceler ■ analyser avant toute correction les mouvements des tissus

précocement chez le sujet jeune un jeu musculaire important mous dans la dynamique faciale afin d'anticiper les zones
entraînant des plis marqués lors de la contraction musculaire ; d'injections en volumétrie ;

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Chapitre 2. Dynamique faciale et expressions faciales émotionnelles

■ injecter des quantités précises d'acide hyaluronique après selon un axe vont définir les paramètres de cohésivité. La cohési-
identification des points clés du vieillissement, en vérifiant vité définit ainsi les forces d'adhésion internes maintenant entre
l'absence d'excès en dynamique (« less is more ») ; elles les unités réticulées d'acide hyaluronique. Elle définit l'adhé-
■ bien connaître l'anatomie faciale pour injecter le comparti- sion du gel sur lui-même : plus un gel est cohésif, plus il résiste à la
ment anatomique adéquat en statique et en dynamique. compression/étirement. À G*/G′ égaux, un gel à faible cohésivité
Cela est particulièrement vrai pour le tiers moyen du visage perdra plus facilement sa capacité de projection qu'un gel à forte
où il est crucial d'identifier les pertes de volume relevant de cohésivité. Cette cohésivité dépend de la concentration en acide
la correction du compartiment graisseux profond et celles hyaluronique et de la technologie de réticulation. Sur un plan cli-
relevant de la correction des compartiments superficiels. nique, elle définit la projection verticale initiale donnée par le bolus
de gel d'acide hyaluronique injecté, avant toute contrainte de
La rhéologie des acides hyaluroniques cisaillement. Elle influence fortement la capacité de modeler le gel
L'utilisation des acides hyaluroniques est essentielle dans juste après l'injection.
tous les processus de rajeunissement facial. Or, l'implanta- Les autres propriétés fondamentales de l'acide hyaluro-
tion d'un acide hyaluronique dans une structure anatomique nique sont l'hydrophylie, l'intégration tissulaire, la durabilité
complexe soumet l'implant à des forces multiples résultant dans le temps et la tolérance du produit.
de contraintes mécaniques intrinsèques et extrinsèques. Ces Le visage présente une structure anatomique complexe
contraintes sont différentes selon la zone anatomique trai- soumise à des forces variées associant compression/­
tée, pour laquelle il est possible de définir un véritable étirement et cisaillement latéral, très variables en fonction de
« cahier des charges » rhéologique, variable évidemment en la région concernée. On peut schématiquement distinguer :
■ des forces intrinsèques : ce sont l'ensemble des tensions et
fonction de la région concernée. La bonne connaissance des
propriétés rhéologiques des acides hyaluroniques est indis- mouvements entre les différents tissus faciaux à l'état sta-
pensable afin de choisir le produit idéal pour chaque indica- tique et lors de la dynamique faciale ;
■ des forces extrinsèques liées à la vie quotidienne et aux
tion et chaque zone anatomique à corriger.
La rhéologie définit l'ensemble des propriétés de déformation activités inhérentes (sommeil, activités physiques, alimen-
et d'écoulement d'un matériau sous contrainte. L'acide hyaluro- tation, baisers, etc.).
nique est un gel viscoélastique comportant deux composantes : À chaque zone anatomique vont s'appliquer des
■ une composante visqueuse témoignant de sa capacité de
contraintes mécaniques variant en nature, en intensité et en
déformation ; fréquence, nécessitant l'utilisation pour le rajeunissement
■ une composante élastique définissant la capacité du gel de
facial d'un acide hyaluronique aux propriétés rhéologiques
retrouver tout ou partie de sa forme après déformation adaptées et répondant à un « cahier des charges » spécifique
initiale. (encadrés 2.1 à 2.3).
Il s'agit donc de combiner les composantes élastiques et
visqueuses afin d'obtenir un gel possédant les propriétés
recherchées. Quatre paramètres de viscoélasticité sont ainsi
définis et correspondent aux contraintes de cisaillement
latéral ou de torsion selon un axe : Encadré 2.1
■ module G* : il représente l'énergie totale nécessaire pour

déformer un matériau et définit la dureté du gel ; Le cahier des charges rhéologique


■ module élastique G′ : il correspond à la fraction d'énergie du tiers supérieur du visage
de G* restituée après déformation et définit la résistance à
la déformation ; Cernes
■ module visqueux G″ : il s'agit de la fraction d'énergie de G* Dans la région des cernes, les contraintes mécaniques sont
perdue après déformation et reflète l'incapacité du gel de représentées par des forces de compression et de cisaille-
retrouver sa forme initiale après déformation ; ment faibles.
■ tan δ : c'est le rapport G″/G′ et il permet de mesurer si un Ainsi, l'acide hyaluronique utilisé répond au cahier des
gel est plus élastique ou plus visqueux. charges rhéologique suivant  : peu de résistance à la com-
Par ailleurs, G* et G′ ont tendance à augmenter quand on pression, grande malléabilité. L'acide hyaluronique utilisé
réticule davantage l'acide hyaluronique, tandis que G″ a ten- doit donc posséder une cohésivité faible et une résistance à
dance à diminuer. la déformation (G′) faible à modérée.
Sur un plan clinique, les contraintes de cisaillement sont Il ne pas doit pas, en outre, être susceptible d'induire des
causées par des mouvements de glissement entre les diffé- œdèmes après injection (à différencier évidemment des
rents plans anatomiques (peau, muscles, graisse et peau). Un œdèmes liés au traumatisme du geste technique) ; son
gel à forts G* et G′ résistera mieux à ces mouvements et hydrophilie doit en conséquence être faible.
conservera mieux sa forme. Il doit être dépourvu d'effet Tyndall (gel lisse) et devra être
Cependant, un bolus de gel d'acide hyaluronique n'est invisible après injection, donc introduit en profondeur dans
pas constitué de gel mais d'un assemblage d'éléments réticulés plus le bon plan anatomique, au contact osseux.

oumoinscollésensemble :lescontraintesdec­ ompression-étirement
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Chapitre 2. Dynamique faciale et expressions faciales émotionnelles

Région frontale Correction des compartiments graisseux superficiels


Au niveau du front, les contraintes mécaniques sont repré- Au niveau des compartiments graisseux superficiels, les
sentées par des forces de compressions faibles à moyennes contraintes mécaniques sont représentées par des forces de
et par des forces de cisaillement modérées à fortes. compression plus faibles et des forces de cisaillement faibles
Le cahier des charges rhéologique est caractérisé par une à modérées.
bonne capacité de soulèvement mais aussi d'étalement. Le Le cahier des charges rhéologique nécessite peu de projec-
produit doit être indétectable en statique et lors de la tion, une bonne malléabilité et une bonne intégration tissu-
mobilisation du front en dynamique. laire de sorte que le produit soit indétectable en statique, à
Par conséquent, l'acide hyaluronique utilisé devra posséder la palpation et en dynamique.
une cohésivité moyenne et une résistance à la déformation Le produit devra posséder une cohésivité faible à moyenne
(G′) modérée. et une résistance à la déformation (G′) modérée.
Région temporale
Dans la région temporale, les contraintes mécaniques
sont représentées essentiellement par des forces de Encadré 2.3
compression, associées à des contraintes de cisaillement
faibles. Le cahier des charges rhéologique
Le cahier des charges rhéologiques dépend de la technique du tiers inférieur du visage
utilisée pour corriger la perte de volume temporale :
■ en cas d'injection profonde dans la fosse temporale, Lèvres
il faudra une bonne capacité de soulèvement et Il faut distinguer les lèvres rouges et les lèvres blanches.
une bonne résistance à la compression : l'acide
Lèvres rouges
hyaluronique utilisé devra posséder une cohésivité
Les contraintes mécaniques sont complexes, associant des
forte et une résistance à la déformation (G′) élevée ;
forces de compression/étirement fortes et de cisaillement
■ en cas d'injection dans le compartiment graisseux
faibles à moyennes.
superficiel, l'acide hyaluronique devra posséder une
Le cahier des charges rhéologique nécessite une bonne
moindre capacité de soulèvement mais tout de
projection, un respect du naturel en statique avec un
même suffisante pour obtenir un effet thérapeutique
produit indétectable et une excellente mobilité en dyna-
correct ; il devra également avoir une bonne
mique. Il faut également une bonne intégration
capacité de malléabilité et d'étalement afin d'être
tissulaire.
indétectable. L'acide hyaluronique utilisé aura une
Le produit devra donc posséder une bonne cohésivité
cohésivité faible à moyenne et une résistance à la
avec une résistance à la déformation (G′) modérée à
déformation (G′) modérée à moyenne.
moyenne.
Lèvres blanches
Les contraintes mécaniques associent peu de compression
Encadré 2.2 et peu de cisaillement. Il s'agit surtout d'un traitement
Le cahier des charges rhéologique superficiel visant à corriger des rides multiples soit d'hé-
liodermie, soit d'expression par la mise en jeu de l'orbicu-
du tiers moyen du visage laire de l'œil, soit une association des deux.
Le cahier des charges rhéologiques nécessite donc une
Volumétrie profonde du tiers moyen
excellente malléabilité, un bon étalement, le produit devant
Dans la région du tiers moyen, si l'on considère la correction être indétectable en statique et en dynamique.
volumétrique du compartiment graisseux profond, les L'acide hyaluronique injecté devra être caractérisé par
contraintes mécaniques sont représentés par des forces de une cohésivité et une résistance à la déformation (G′)
cisaillement latéral assez faibles, mais par des forces de com- faibles.
pression moyenne à élevées.
Le cahier des charges rhéologique nécessite une projection Zone péri-orale
avec maintien des contours, une bonne résistance à la com- Les contraintes mécaniques sont complexes, associant des
pression et à l'étirement. forces de compression/étirement faibles à modérées et des
Le produit utilisé doit de ce fait posséder une cohésivité forces de cisaillement également faibles à modérées.
élevée à moyenne avec une résistance à la déformation (G′) Le cahier des charges rhéologique nécessite un produit
moyenne à élevée. aisément modelable, indétectable en statique et en
Évidemment, le produit doit être indétectable et ne pas dynamique.
migrer ; il convient donc de l'injecter en bonne position Le produit devra donc posséder une cohésivité moyenne et
dans le compartiment graisseux profond, au contact osseux. une résistance à la déformation (G′) modérée.

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En cas de sillons profonds, un acide hyaluronique de plus migration du produit qui doit rester indétectable.
haute cohésivité peut être nécessaire. Il sera cependant plus L'acide hyaluronique injecté devra posséder une cohésivité
difficile à modeler et sera plus facilement détectable, sur- faible à moyenne et un G′ modéré.
tout en dynamique. Ovale du visage
Menton Les contraintes mécaniques associent des forces de com-
Les contraintes mécaniques associent des forces de pression/étirement moyennes à modérées et des forces de
compression importantes mais relativement peu de
­ cisaillement faibles à modérées.
cisaillement. Le cahier des charges rhéologique doit distinguer :
Le cahier des charges rhéologique nécessitera donc une ■ la correction profonde en appui osseux pour

bonne projection avec un produit qui ne devra en aucun restituer l'ovale du visage : il faudra dans ce cas une
cas migrer. bonne projection avec un produit qui ne migre pas.
L'acide hyaluronique injecté devra donc posséder une cohé- L'acide hyaluronique devra posséder une cohésivité
sivité élevée et une résistance à la déformation (G′) élevée. élevée et une résistance à la déformation (G′)
Nez élevée ;
■ la correction superficielle avec un produit aisément
Les contraintes mécaniques sont représentées par des
modelable et indétectable en statique et en dynamique :
forces de compression modérées, sans cisaillement.
l'acide hyaluronique devra être caractérisé dans ce
Le cahier des charges impose une bonne capacité de pro-
cas par une cohésivité moyenne et une résistance à la
jection, une bonne malléabilité, l'absence de possibilité de
déformation (G′) modérée (fig. 2.15).

A B

C D
Fig. 2.15  Traitement global du visage par la toxine botulinique et les acides hyaluroniques avant (A, C) et 15 jours après (B, D).
On observe la correction des expressions négatives au repos et le respect de la dynamique faciale.
Source : © Wiley Periodicals, Inc.

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Chapitre 2. Dynamique faciale et expressions faciales émotionnelles

Conclusion [10] Ekman P, Rosenberg EL. What the face reveals: basic and applied
studies of spontaneous expression using the facial action coding
system (FACS). 2nd Ed New York: Oxford University Press ; 2004.
La dynamique faciale est la quatrième dimension de la prise
[11] Belhaouari L, Gassia V. L'art de la toxine botulique. 2e éd Paris :
en charge globale du visage. Elle est essentielle aujourd'hui Arnette ; 2013.
pour permettre à la fois de respecter les expressions faciales [12] Rohrich R, Pessa J. The fat compartments of the face, anatomy
émotionnelles et de corriger les expressions négatives liées and clinical implications for cosmetic surgery. Plast Reconstr Surg
au vieillissement. Elle répond ainsi à l'une des préoccupa- 2007;119(7):2219–27.
tions majeures des patients, la recherche d'un résultat natu- [13] Belhaouari L, Teisseire P, Quinodoz P. Rajeunissement et embellis-
sement du tiers moyen du visage avec l'acide hyaluronique.
rel et harmonieux.
Vecteurs pour la volumétrie. J Med Esth Chir Derm 2012;XXXIX:
147–55.
[14] Gassia V, Raspaldo H, Niforos FR, Michaud T. Global ­3-dimensional
Références approach to natural rejuvenation: recommendations for perioral,
[1] Raspaldo H, Gassia V, Niforos FR, Michaud T. Global, 3­ -dimensional nose, and ear rejuvenation. J Cosmet Dermatol 2013;12(2):
approach to natural rejuvenation: part 1 – recommendations for 123–36.
volume restoration and the periocular area. J Cosmet Dermatol [15] Michaud  T. La prévention du vieillissement facial par les injec-
2012;11:279–89. tables (toxine botulinique et acide hyaluronique). Réalités
[2] Darwin  C. The expression of emotions in man and animals. Thérapeutiques en Dermato-Vénéréologie 2017; cahier 2:1–10.
Chicago: University of Chicago Press; 1965. [16] Di Maio M. Unlocking the code to facial rejuvenation: a step-by-
[3] Philippot P. Émotion et psychothérapie. Wavre: Mardaga ; 2007. step approach to using injectables. Allergan, EAME/009/2015.
p. 11–64. [17] Trindade De Almeida Carruthers J, Cox SE, et al. Patient satisfac-
[4] Ekman  P. Emotion in the human face. New York: Cambridge tion and safety with aesthetic onabotrulinum toxinA after at
University Press; 1982. least 5  years: a retrospective cross-sectional analysis of 4,402
[5] Tcherkassof  A. Les émotions et leurs expressions. Grenoble  : glabellar treatments. Dermatol Surg 2015;41:S19–28.
Presses Universitaires de Grenoble; 2008. [18] Carruthers A, Sadick N, Brandt F, et al. Evolution of facial aesthetic
[6] Mondillon  L, Tcherkassof  A. La communication émotionnelle  : treatments over five or more years: a retrospective cross-­sectional
Quand les expressions faciales s'en mêlent…. Revue Électronique analysis of continuous onabotulinum toxinA treatments. Dermatol
de Psychologie Sociale 2009;4:25–31. Surg 2015;41:693–701.
[7] Lewis MB, Bowler PJ. Botulinum toxin cosmetic therapy corre- [19] Rivkin A, Binder W. Long term effects of onabotulinum toxinA on
lates with a more positive mood. J Cosmet Dermatol 2009; facial lines: a 19-year experience of identical twins. Dermatol Surg
8:24–6. 2015;41:S64–6.
[8] Lewis  MB. Exploring the positive and negative implications of [20] Michaud T. Rheology of hyaluronic acid and dynamic facial reju-
facial feedback. Emotion 2012;12(4):852–9. venation: topographical specificities. J Cosmet Dermatol 2018;17:
[9] Duchenne de Boulogne  GB. Mécanisme de la physionomie 736–43.
humaine ou analyse électro-physiologique de l'expression des [21] Michaud T, Gassia V, Belhaouari L. Facial dynamics and emotionnal
passions. Paris: Librairie J.-B. Bailliere et Fils ; 1876. Consultable expressions in facial aging treatments. J Cosm Dermatol 2015;14:
sur : http://vlp.mpiwg-berlin.mpg.de/library/data/lit38953 ;. 9–21.

32
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Techniques Partie 2
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Section 1. Techniques cosmétiques

Chapitre 3
Les cosmétiques dans la prise
en charge du vieillissement
cutané et dans
l'accompagnement des actes
techniques
A. Cohen-Letessier, I. Gallay

Introduction déjà qu'elle ne dépend pas seulement des gènes, mais aussi
de l'épigénétique qui convertit l'information génétique
Selon la définition admise par l'Agence nationale de sécurité du (génotype) en traits observables (phénotype). Les facteurs
médicament et des produits de santé (ANSM) : « Un produit environnementaux qui influent sur les gènes, tels que le
cosmétique est une substance ou un mélange destiné à être tabac, le soleil, le sommeil, le stress, la pollution, l'alimenta-
mis en contact avec les diverses parties superficielles du corps tion, sont responsables d'environ 70  % des dégradations
humain (épiderme, systèmes pileux et capillaire, ongles, lèvres cutanées et devront être corrigés. Selon Jean-Claude
et organes génitaux externes) ou avec les dents et les muqueuses Ameisen : « L'ADN ne scelle pas aveuglément notre destin
buccales, en vue, exclusivement ou principalement, de les net- génétique ».
toyer, de les parfumer, d'en modifier l'aspect, de les protéger, de La cosmétique personnalisée est née de cette expertise
les maintenir en bon état ou de corriger les odeurs corporelles » des dermatologues dont les prescriptions de cosmétiques
(Directive européenne 76/768/CEE, amendée 7 fois depuis). découlent d'une analyse sémiologique de la peau et du
Comment peut-on aujourd'hui définir un produit cosmé- type de vieillissement de leurs patients. À côté d'un net-
tique « actif » ? C'est un produit destiné à améliorer la préven- toyant doux, une routine de soins associe diversement
tion et la réparation du vieillissement de la peau incluant actifs anti-oxydants, hydratants et photoprotecteurs,
systématiquement le ressenti des utilisateurs par des marqueurs appliqués dans cet ordre le matin, hydratants et restructu-
physiologiques sachant que, selon la formule look good, feel bet- rants le soir. Cette routine de base pourra être enrichie en
ter, la perception de l'apparence a un impact psychologique et alternance ou en cures successives par des actifs ciblés  :
social important, qui va produire des effets physiologiques. agents éclaircissants, lissants, anti-inflammatoires, ou de
Le prérequis d'un cosmétique est « d'abord ne pas synthèse selon les principes de la cosmétologie fonction-
nuire » ; il est indispensable avant tout acte technique  : nelle.
« pas d'interventions sur une mauvaise peau ». Il va enca-
drer l'acte technique (il le précède, l'accompagne et le suit). Les différents actifs cosmétiques
En cosmétique, il faut être davantage attentif aux effets
qu'aux actions. De l'universel au personnalisé, de l'antirides à l'antirelâche-
L'industrie cosmétique emprunte ses idées de développe- ment, il reste très difficile de mettre au point un cosmétique
ment au monde de la biologie, de la chronobiologie, de la actif qui va assurer toutes les modifications cutanées appa-
médecine de régénération et de prévention. raissant au cours du vieillissement, mais on peut retenir un
De nombreux axes de recherche sur le microbiome, les changement dans la continuité et surtout des molécules qui
cellules souches adultes, les cellules mésenchymateuses, les restent incontournables.
facteurs de croissance sont autant de voies suivies Les propriétés démontrées d'un cosmétique sont de main-
aujourd'hui pour la découverte d'actifs ciblés dans le vieil- tenir une hydratation optimale, de conserver ou réparer la
lissement cutané. Ces nouvelles approches tenteront de barrière cutanée, d'accélérer le renouvellement cellulaire, de
reculer les aiguilles de l'horloge biologique, dont on sait rétablir l'éclat du teint, de régulariser la pigmentation, d'être
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anti-oxydant et antiglycant, de lutter contre l'inflammation pilosébacées, réduit le nombre des mélanosomes, augmente
silencieuse, d'avoir un bon index neurosensoriel. la production de collagène, élastine et fibronectine, et des
De nombreuses molécules qui répondent à ces objectifs glycosaminoglycanes (GAG). Il favorise l'augmentation du
seront détaillées ci-dessous, parmi la grande famille des vita- nombre de cellules de Langerhans et réduit l'activité de la
mines, les alphahydoxyacides, les isoflavones et leurs dérivés, collagénase et de la gélatinase (métalloprotéinases [MMP]).
les peptides, l'acide hyaluronique, les protecteurs solaires. L'activation de la prolifération des fibroblastes, la synthèse de
Cette sélection d'actifs n'est pas exhaustive et est constam- collagène et la diminution du taux des MMP ont été vérifiées
ment évolutive. La recherche en cosmétologie permet de dans des biopsies de peau protégée du soleil (fesses) avant et
mieux appréhender la physiologie cutanée [1]. L'amélioration après application en occlusion pendant 7 jours avec une lotion
de l'éclat du teint qui est la réflexion de la lumière sur la peau de rétinol à 1 % en comparaison au véhicule seul [5]. Une étude
et une bonne réflexion de la lumière passent par un grain de sur 36  volontaires (moyenne âge 87  ans) contre excipient
peau régulier, une texture et une couleur homogène, une retrouve après application d'une lotion à 0,4 % de rétinol 3 fois
bonne hydratation suivis de l'amélioration des accidents de par semaine pendant 6 mois, sur l'un des avant-bras par rapport
« terrain » : des ombres portées par toutes les irrégularités : à l'autre qui recevait l'excipient, une réduction de tous les para-
rides, sillons, cicatrices volumes. La morphologie de la sur- mètres côté traité (évaluation cotée de 0 à 9 des stigmates du
face cutanée est corrélée à la fois à l'hydratation et à l'épais- vieillissement, des rides et rugosité, avant, à 2, 4, 8, 16 et
seur du stratum corneum [2]. 24  semaines). Des biopsies faites avant et après sur les deux
Les cosmétiques vont limiter la perte insensible en eau avant-bras montrent une augmentation de la production des
(PIE) et reconstituer l'équilibre de la barrière cutanée par la GAG et du procollagène du côté traité par la lotion au rétinol [6].
reconstitution des lipides clés avec un ratio : 3/1/1/1 de cho- La prolifération des cellules de l'épiderme du visage a été
lestérol, céramides, acides gras libres (palmitate, linoléate) vérifiée in vivo par spectrofluorimétrie chez des sujets après
par l'apport de substances hygroscopiques et humectantes 3 mois de traitement, alors que le véhicule n'a montré aucun
(natural moisturizing factor [NMF]  : acide lactique, urée, effet [7]. Rossetti et al. ont vérifié sur des explants de peau
acide pyrolidone carboxylique, glycérol), et des aquaporines humaine que le rétinol à faible concentration 0,04 % exerçait
(AQP3, aquaglycéroporine dans la couche basale épider- son activité anti-âge non seulement par l'amélioration de la
mique), dont l'expression diminue avec l'âge et le soleil [3]. prolifération épidermique et de la production de collagène,
La photoprotection solaire a démontré son intérêt sur mais aussi par une augmentation de la production d'élastine
l'élastose solaire, la prévention des kératoses actiniques et et de l'organisation du réseau élastique [8].
même certains types de mélanomes, objectivé par diffé-
rentes études [4]. Vitamine C
La vitamine C (acide L ascobique) a fait l'objet de nombreux
Protecteurs solaires travaux [9–13]. Elle est photoprotectrice (prévient l'immu-
Les facteurs de protection solaire (FPS 15 à 50 +) doivent nodépression induite par les UV) ; elle est anti-­inflammatoire,
être photo- et thermostables, couvrir UVB et UVA (15 % du anti-oxydante ; elle accroît le nombre de fibroblastes, et aide
FPS ont une protection contre les UVA courts ++), infra- ainsi à la réduction et à l'accumulation de l'élastine dénatu-
rouge et lumière visible, être résistants à l'eau et non toxiques. rée, en particulier dans l'héliodermie. Elle stimule la produc-
Les principales molécules sont le Tinosorb® M (+ S), tion de collagène (I, III) et, au niveau de la jonction
Mexoryl® SX et XL + Parsol® 1789 stabilisé, Zn0, Uvasorb®, dermo-épidermique, augmente le taux du collagène  IV et
VII ; elle a une action réductrice sur les MMP.
TiO2 + Parsol® 1789, stabilisé ; organique et inorganique. Plus
Les UV consomment la vitamine C par les mécanismes
de 10 000 tonnes de filtres solaires sont produits chaque
de défense naturels contre le stress oxydatif. La concen-
année sur le marché mondial.
tration d'acide ascorbique est fortement réduite après
Le calcul de la quantité appliquée est important pour être
exposition aux UV. L'apport par voie cutanée permet
en équation avec le FSP : 1,5 mg/cm2 à 6 mois (par exemple
d'apporter à la peau la vitamine  C manquante. La vita-
pour Azurdia RM®, Photodermatol®, Photoimmunol®, Pho- mine C réduit la synthèse du pigment mélanique par inhi-
tomed 2000®). bition de la tyrosinase. Ses esters sont utilisés depuis
En pratique, ces doses sont rarement respectées. quelques années pour les traitements dépigmentants.
Les formules doivent être biodégradables et plus difficile- Sous sa forme stabilisée, elle réduit la dendricité des
ment assimilables par les organismes marins pour le respect mélanocytes. Elle améliore la fonction de barrière cuta-
des océans. née en stimulant les sphingolipides.
Rétinol
Le rétinol (vitamine A) et ses dérivés – rétinaldéhyde, acide
Alpha-hydroxyacides
rétinoïque, esters rétinyliques  – sont impliqués dans de et bêta-hydroxyacides
nombreux mécanismes physiologiques de la peau. Le rétinol Il y a trois générations d'hydroxyacides : alpha-hydroxyacides
réduit la cohésion du stratum corneum, augmente la prolifé- (AHA ; acide glycolique), polyhydroxy-acide (PHA ; glucono-
ration épidermique, normalise la kératinisation des unités lactone), PHA complexe (acide lactobionique) [14–16]. Ils

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stimulent le turn-over cellulaire, augmentent l'épaisseur de sur la peau altèrent la barrière cutanée [20]. Les cosmétiques
l'épiderme vivant, diminuent des atypies cellulaires de la ciblés permettent une amélioration de ces perturbations.
couche basale, sont hydratants, repulpent et raffermissent la
peau. Les bêta-hydroxyacides (acide salicylique, acide Génistéine
citrique) augmentent l'épaisseur de l'épiderme vivant et le De nombreuses études ont démontré les effets anti-­oxydants
taux des GAG dans la peau insolée [17]. des isoflavones en topique, en particulier la génistéine, qui
Ces molécules sont souvent associées à l'acide kojique, augmente le carotène plasmatique et la vitamine C, inhibe
l'acide phytique, l'acide alguronique, l'arbutine, la génistéine l'inflammation photo-induite, bloque la réplication des cel-
en préparation cosmétique pour les taches pigmentées. lules endommagées, a une action dépigmentante et aug-
mente le taux du collagène [21].
Acide hyaluronique (HA) Anti-oxydants, antiradicalaires puissants, anti-inflammatoires,
L'HA est un glycosaminoglycane, polysaccharide à haut antitumoraux, les isoflavones stimulent la production des
poids moléculaire composant majeur des matrices extracel- macromolécules par l'intermédiaire du transforming growth fac-
lulaires dont la concentration totale chez l'homme est d'en- tor β (TGFβ) et de l'insulin-like growth factor 1 (IGF1) ; ils réparent
viron 15 g. La peau en est le principal réservoir ; elle contient la membrane basale, sont de bons hydratants ; ils réduisent la
la moitié de la masse totale de l'organisme. pigmentation photo-induite.
L'HA est synthétisé par les fibroblastes essentiellement et
les kératinocytes. Son taux se renouvelle d'un tiers tous les Pro-Xylane®
jours. Il joue un rôle majeur dans l'homéostasie cutanée et
Le Pro-Xylane® est une molécule dérivée de xylose naturel
dans la cicatrisation. Il exerce des fonctions différentes dans
qui joue un rôle clé dans l'initiation de la biosynthèse des
l'épiderme et le derme, deux compartiments où les phéno-
GAG ; il est de petite taille, donc de pénétration facile et très
mènes de synthèse et de dégradation sont indépendants.
bien toléré (biomimétisme). Il augmente l'expression du
L'HA est connu pour ses propriétés hygroscopiques très
récepteur épidermique à l'HA (CD44), favorise le recrute-
importantes ; il s'associe à un grand volume d'eau, ce qui lui
ment d'HA au niveau de l'épiderme et, de ce fait, son hydra-
confère un pouvoir hydratant énorme ; on l'appelle l'« éponge
tation. L'augmentation de l'expression du CD44 renforce la
moléculaire ». Il contrôle les flux ioniques.
cohésion entre les kératinocytes ainsi que leur prolifération.
Ces propriétés lui permettent de retenir électrolytes, nutri-
ments, facteurs de croissance. Il a des effets rhéologiques, Le Pro-Xylane® améliore l'ondulation de la jonction dermo-­
facilitant ainsi prolifération et migration cellulaire (rôle épidermique sur peau reconstruite [22].
important dans la cicatrisation). Il facilite l'adhésion cellulaire
Niacinamide
par le biais des intégrines. Il se lie à des protéines, les hyalad-
hérines ; le couple HA/hyaladhérine intervient dans les étapes C'est la forme active de la niacine ou vitamine  B3, connue
essentielles du métabolisme cellulaire cutané [18] : adhésion sous le nom de vitamine  PP (pellagra preventive). Cette
matrice/cellule, prolifération et migration des fibroblastes et molécule a des propriétés anti-oxydantes (photocarcinoge-
des kératinocytes, angiogenèse et synthèse du collagène. nèse et immunosuppression diminuées) ; elle inhibe le trans-
L'HA (macromolécule de 1 à 6 millions de daltons) reste en fert des mélanosomes des mélanocytes vers les kératinocytes,
surface et, par son pouvoir hygroscopique, va avoir un effet et donc réduit la pigmentation.
filmogène de protection et de reconstruction de la barrière Une étude a mis en évidence sur des femmes japonaises
cutanée et de piégeurs de radicaux libres. Les poids molécu- après 8 semaines d'application d'une crème contenant 5 %
laires intermédiaires (200 000 à 1 million de daltons), HAFi à de niacinamide sur des taches actiniques une amélioration
1 % associé au rétinaldéhyde, pénètrent dans l'épiderme et significative, contre excipient. Une autre étude sur des
auront de nombreuses propriétés démontrées sur la prolifé- Caucasiennes a démontré que la niacinamide topique à 5 %
ration kératinocytaire en application topique pendant contre excipient sur le visage de 40  femmes âgées de 35 à
1  mois chez les sujets porteurs d'une atrophie cutanée 60 ans pendant 12 semaines avec une analyse en 3D et en
postcorticothérapie ou liée à l'âge [19]. spectrophotométrie améliore les lentigos solaires et la tex-
Au cours du vieillissement, il y a diminution de la quantité et ture de la peau avec une tolérance excellente.
de la nature de l'HA (diminution de la forme libre), ce qui induit La molécule de niacinamide stimule la synthèse d'un
une détérioration de la qualité des tissus et des processus de néocollagène (+ 54  %) de fibroblastes de peau âgée en
réparation : ralentissement de la cicatrisation des plaies, dessè- culture, permet une augmentation des protéines totales de
chement très important, atrophie dermique et vergetures. 41 %, du nombre de cellules de 20 %, par rapport au véhicule,
On sait également qu'au cours de la ménopause et avec la régularise la synthèse des céramides, améliore la barrière
diminution de la quantité de progestérone et d'œstrogènes, cutanée et augmente la synthèse des marqueurs de la diffé-
le taux d'HA baisse de façon considérable dans le derme. renciation kératinocytaire (involucrine et filaggrine) [23, 24].
L'HA est une molécule de réponse au stress. Les petits poids
moléculaires d'HA, les plus rares (100 000 daltons), pénètrent Acide férulique
dans le derme et vont jouer un rôle de réparation et de cica- Dérivé phénolique extrait de la lignocellulose qui confère
trisation, et stimuler la densité cutanée. Les effets du stress leur solidité aux parois des cellules végétales de certaines

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graines (mais, riz, blé, avoine, etc.), on lui attribue une puis- Neurocosmétiques
sante activité anti-oxydante, une activité pro-apoptosique
Le système neuro-immunocutané est une cible importante
des cellules tumorales, et préventive des cancers induits par
du traitement du vieillissement cutané et de l'agression de la
l'exposition environnementale à certains cancérigènes
peau avec de nombreux neuromédiateurs synthétisés au
comme le benzopyrène. Il pourrait donc, en application
niveau du cerveau et de la peau réalisant des connexions
topique, avoir un rôle protecteur des polluants atmosphé-
entre ces deux organes. Ceux-ci jouent un rôle essentiel dans
riques. Mais c'est surtout associé à l'acide ascorbique et à la
la protection, les sensations et l'immunité (substance P, VIP,
vitamine  E que son rôle préventif du vieillissement cutané
CGRP, somatostatine, MSH, ACTH, ocytocine, GABA).
serait avancé, par un effet réducteur du stress oxydant et de
Cette approche semble prendre une importance dans la
la formation de dimères de thymine dans le derme [25].
formulation des cosmétiques et l'on définit le concept NICE-
Resvératrol TCM comme étant la prise en charge du système neuro-­
immunocutané endocrine (NICE) avec les principes de
Extraite du sarment de vigne, cette molécule qui est un médecine traditionnelle chinoise (traditional Chinese medi-
polyphénol a fait l'objet depuis 1997 de très nombreuses cine [TCM]). Les réseaux cellulaires sont interconnectés
publications. Elle inhibe les trois étapes majeures de la cancé- entre eux par le NICE system et l'influence des facteurs envi-
rogenèse : la mutation de l'ADN dans la cellule, la promotion ronnementaux. La membrane cellulaire externe doit mainte-
de la tumeur (la cellule devient cancéreuse) par inhibition de nir un environnement humide essentiel à la survie de la
la cyclo-oxygénase et la progression de la tumeur. cellule. L'énergie circule à partir de l'adénosine triphosphate
Ces actions sont dose-dépendantes : 15 à 25 μmol en topique (ATP) ; lorsque cette énergie est bloquée, la cellule meurt. Il
2 fois par jour pendant 18 semaines permettent 88 % d'inhibi- s'agit donc de maintenir un flux constant d'ingrédients et
tion des cancers cutanés chez la souris [26]. Les travaux du d'énergie pour moduler les messages intercellulaires médiés
Pr  Vercauteren depuis 2002 ont permis de comprendre les par des protéines (cytokines et chémokines).
nombreuses propriétés de cette molécule, notamment anti- Les nanofibrilles de chitine, polyglucoside électropositif,
vieillissement : par son pouvoir anti-­oxydant majeur, le resvéra- associées à l'HA (polymère électronégatif) auraient trois
trol protège toutes les structures cutanées et prolonge la durée actions : protection de la barrière cutanée, anti-­inflammatoire
de vie des cellules en boostant les sirtuines (classe d'enzymes, et réparatrice des dégâts environnementaux [30].
des histones désacétylases NAD-dépendantes régulant l'expres-
sion de certains gènes – épigénétique – chez les eucaryotes).
Peptides
Antiglycants
Les cibles cliniques ont évolué, mais les ambitions revendi-
Certains actifs cosmétiques (extraits titrés de romarin, cur- quées par les produits cosmétiques également. Leur mode
cuma, goyave, noyer, etc.) limitent le phénomène de glyca- d'action est aujourd'hui assez spécifique pour tenter d'agir sur
tion des protéines par lequel les protéines vieillies, se liant aux le cytosquelette, la mécanique cellulaire ou les flux ioniques,
sucres, résistent à la dégradation par les enzymes et s'accu- calciques notamment, pour réaliser une relaxation cellulaire
mulent (advanced glycation end product [AGE]), aboutissant avec des molécules comme le manganèse gluconate et les
à la « caramélisation des tissus » (réaction de Maillard). La peptides. La relaxation cellulaire est obtenue par l'inhibition
glycation favorise l'oxydation et l'inflammation silencieuse. de la contractilité des fibres de collagène à l'aide de peptides,
en particulier l'argiréline (acétyl hexapeptide-3) qui pourrait
Défensines inhiber la connexion nerfs-muscles et améliorer l'apparence.
Les défensines sont des peptides cationiques : alpha et bêta. Ces mêmes peptides sont employés dans le traitement du
Les bêta-défensines 1 et 2 sont présentes dans les épithéliums relâchement. Ces agents sont des vecteurs de communica-
et sont exprimées en cas d'inflammation ou d'infection [27]. tion ; ils stimulent le renouvellement cellulaire et diminuent
La dermcidine est spécifique de la peau. Ce peptide de les phénomènes de dégradation [31].
47 acides aminés semble jouer un rôle essentiel dans la réponse Le Matrixyl® est un lipopeptide de synthèse (fragment de
de la peau saine et pathologique aux agressions extérieures. procollagène I). Il stimule la synthèse du collagène I, III et IV,
Le taux des défensines baisse en cas de stress (glucocorti- et la synthèse des GAG. Associé au Lupin Blanc – inhibiteur
coïdes endogènes). des MMP  1, 9, 3  – et à l'acide ursolique (anti-oxydant,
anti-élastase), il forme le complexe profirmine IV qui stimule
Diméthylaminoéthanol (DMAE) de façon synergique le collagène IV et active la synthèse de
Le DMAE à 3 % dans un gel a été appliqué sur le visage de l'intégrine alpha 2 bêta 1.
156  sujets âgés de 35 à 60  ans contre excipient pendant Les peptides de troisième génération, Matrixyl Morphomics®,
18 semaines. On observe, d'après une évaluation en double utilisent le pouvoir de la technologie protéomique et sont
aveugle, jusqu'à 2 semaines après l'arrêt de l'application, une censés activer les gènes de la longévité. Les tests d'immunohis-
diminution des rides du front et de la patte d'oie, une amé- tochimie montrent que les nouveaux peptides augmentent
lioration du relâchement de la peau du cou et une augmen- les éléments de communication cross-talking entre le
tation de la fermeté [28, 29]. cytosquelette interne et la matrice extracellulaire.

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Une étude a montré après 6 semaines d'application de la rellement » conservatrices et sans test sur les animaux ; 5 %
formule, une diminution du volume et des contours des de conservateurs synthétiques antimicrobiens sont autorisés
rides intersourcilières de 9,5 % (p < 0,05) et 7,1 % par rapport et agréés par Ecocert (alcool benzylique, acide déshydroacé-
au placebo. Les rides dynamiques de cette région sont amé- tique, sorbate de potassium ; annexe  VI de la directive),
liorées de 12 à 13 % par rapport au groupe placebo [32]. indispensables à la stabilité de la formule.
En France, trois cahiers des charges sont destinés aux pro-
Les preuves d'efficacité duits bio, définis par les organismes Ecocert, Qualité France,
en cosmétologie du vieillissement Nature et Progrès qui garantissent tous :
■ le recours aux ingrédients végétaux issus de l'agriculture
cutané biologique ;
■ le recours à une forte teneur en ingrédients naturels ;
L'evidence-based medicine (EBM) se définit comme « l'utilisa-
■ le respect de l'environnement sur toute la chaîne de
tion consciencieuse, explicite et judicieuse des meilleures
données disponibles pour la prise de décisions concernant production.
les soins à prodiguer à chaque patient ». Si l'on se réfère à la Des pourcentages exacts figurent sur les étuis et les
médecine fondée sur les preuves, en 2010, avec 422 études conditionnements.
cliniques avec un dermocosmétique, 23 études randomisées Le logo ECO pour « cosmétique écologique » garantit que
à méthodologie faible, la majorité des études étaient de les produits ont été contrôlés par Ecocert ou Qualité France,
niveau C. Les actifs ont un niveau de preuve suffisant, mais avec les caractéristiques suivantes :
■ 95 % au minimum du total des ingrédients sont d'origine
les produits finis un niveau de preuve faible.
Mais doit-on exiger pour un cosmétique le même niveau naturelle ;
■ 5  % au minimum du total des ingrédients sont issus de
de preuve que pour un médicament ? Ne serait-il pas plus
adapté de créer une EBC (evidence-based cosmetic) qui inclue l'agriculture biologique ;
■ 5 % au maximum d'ingrédients de synthèse sont utilisés.
dans les critères principaux le ressenti ?
Il reste toutefois indispensable que tous les praticiens se Le logo BIO pour « cosmétique écologique et biologique »
familiarisent avec la recherche et les essais cliniques évaluant garantit que :
■ 95 % au minimum du total des ingrédients sont d'origine
les cosmétiques pour donner les meilleurs conseils à leurs
patients ; les chirurgiens esthétiques ont établi des échelles naturelle ;
■ 10 % au minimum du total des ingrédients sont issus de
de critères de recommandations [33] :
■ les molécules anti-âge ayant obtenu leur «  diplôme l'agriculture biologique ;
■ 5 % au maximum d'ingrédients de synthèse sont utilisés.
d'EBM », selon une étude [34] : le rétinol, la vitamine C et
les anti-oxydants (EBM sur biosynthèse du collagène) ;
■ les protecteurs solaires UVA, UVB associés aux anti-­
Actifs utilisés
oxydants, enzymes de réparation de l'ADN, le dexpanthé- Les actifs utilisés sont : les eaux florales de rose, d'oranger, les
nol, la glycérine (EBM sur prévention des kératoses huiles essentielles –  géranium (régénérant), bois de rose,
actiniques), la trétinoïne topique à 0,1  % et le rétinol à orange douce (antirides), immortelle bio (relâchement),
10 % (EBM sur pigmentations), l'urée, l'ammonium, le gly- lavande officinale bio (revitalisante et régénérante), huile de
cérol (EBM sur hydratation). jojoba (nourrissante), extrait de bourgeon de hêtre (hydra-
Une revue de la littérature a mis en évidence l'intérêt de tant et lissant), huile d'avocat (régénérante), extrait d'arnica
l'acide glycolique (héliodermie, dyschromie, hyperpigmenta- (apaisant) –, gingembre (énergisant et raffermissant).
tion, mélasma), de la vitamine C (hyperpigmentation, taches, Les allergies aux huiles essentielles sont de plus en plus
héliodermie, rides) du TGFβ1 (rides) et du palmitoyle de fréquentes.
pentapeptide lysine-thréonine-thréonine-lysine-sérine ou
PAL-KTTKS (rides) [35].
Cosmétiques et massage
Biocosmétiques L'acte de massage devrait être systématiquement réhabilité
dans les moyens de prévention du vieillissement faisant
appel aux mécanorécepteurs de la peau, et très probable-
Cosmétiques écologiques et biologiques ment aux cytokines. Les massages alternatifs activent la cir-
Le label de ces cosmétiques est délivré par Ecocert (orga- culation sanguine et les échanges cellulaires, facilitent la
nisme de contrôle et de certification de l'agriculture). Les pénétration des actifs et améliorent l'oxygénation des
produits contiennent 10  % d'ingrédients végétaux issus de tissus.
l'agriculture biologique (pas d'engrais chimiques, de pesti- Une étude canadienne sur les sportifs de haut niveau qui
cides et d'herbicides de synthèse). Ils sont sans colorant, sans ont eu 10 minutes de massage après exercice à vélo a permis
parfum de synthèse, sans parabène, sans silicone, sans PEG, de montrer que le massage atténuait la production des
sans OGM et fabriqués dans le respect de l'environnement cytokines inflammatoires TNFα et interleukine 6 (IL-6) par la
(EcoConception). Sont utilisées des molécules dites « natu- voie de la biogenèse mitochondriale qui serait activée [36].

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Une nouvelle technologie de mécanostimulation, antimicrobiens actifs en particulier contre les effets délétères
ErgoLift™, intègre un micromoteur permettant une stimula- de Staphylococcus aureus de l'environnement extérieur [45].
tion tissulaire par aspiration séquentielle pour régler la
­profondeur d'action dans la peau, et une vitesse de batte-
ment de clapets pour stimuler l'activité cellulaire ciblée. Les
résultats montrent après une dizaine de séances de 10 à
Cosmétiques pré- et probiotiques
30 minutes, une augmentation de la synthèse d'acide hyalu- Les prébiotiques (sucres et fibres) sont une bonne nourriture
ronique (+ 80  %) et de l'élastine (+ 46  %) ainsi qu'une pour la croissance des bonnes bactéries. Les postbiotiques
néocollagenèse [37]. (déchets des bactéries) comme l'acide lactique sont un bon
Une étude randomisée sur 20  femmes présentant des substrat pour leur développement. Les probiotiques (lacto-
signes modérés de photovieillissement montre l'intérêt de bacilles, etc.) rééquilibrent le microbiome. Les bactéries
l'utilisation d'une brosse à massage alternatif sur l'améliora- vivantes étant très difficiles à gérer, la plupart des fabricants
tion de l'hygiène cutanée et l'absorption des principes actifs experts utilisent des bactéries « désactivées » qui ont gardé
(+ 68 %) après 8 semaines versus soin manuel (5 %), avec une activité biologique.
une amélioration statistiquement significative sur les fines La composition microbienne varie dans les différentes
ridules (p < 0,0001), le velouté (p < 0,001) et la fermeté régions du corps, avec une variabilité remarquable chez les
cutanée (p < 0,0001) [38]. individus. Le mode de vie, l'environnement, l'hygiène et l'ali-
Certains travaux ont été menés sur les effets des massages mentation, ainsi que l'âge et le sexe, influent sur la composi-
Gua Sha avec une lame de jade qui permettent d'activer la tion du microbiome de la peau. L'expertise des industriels
circulation [39] et auraient un effet antidouleur par libéra- s'attache à décrypter le cross-talk entre les bactéries et le
tion de l'oxyde de carbone [40]. système immunitaire de la peau.
L'excès d'hygiène et de soins mal adaptés associé à un envi-
ronnement délétère vont déséquilibrer cette flore cutanée,
Cosmétiques du présent sensibiliser la peau et favoriser le développement de mau-
et du futur vaises bactéries au détriment des bonnes bactéries (dys-
biose). L'axe « peau-cerveau » joue un rôle non négligeable
dans les dysbioses. Cette théorie relie les perturbations liées
Cosmétiques personnalisés en fonction aux états émotionnels (stress, anxiété et dépression) qui
du microbiome entraînent des changements dans le mibrobiome intestinal
L'évolution scientifique et technologique a permis de préciser ainsi que l'hyperperméabilité des intestins. Ces changements
le rôle de la flore cutanée ou microbiome (100 000 milliards intestinaux créent une réponse inflammatoire qui peut
de micro-organismes, levures, champignons, bactéries), qui déclencher un certain nombre de problèmes dermatolo-
représente notre deuxième génome, encore plus unique que giques.
notre ADN, une « carte d'identité ». Les probiotiques à usage topique semblent adhérer à la kéra-
La composition du microbiome est déterminante dans le tine humaine et empêcher la formation de biofilm. La recherche
développement du système immunitaire [41]. Le microbiome montre que les produits topiques contenant des prébiotiques
possède une fonction de défense contre les infections et une et/ou des probiotiques peuvent aider la peau en modulant le
fonction anti-inflammatoire. Staphylococcus epidermidis système immunitaire. Un microbiome de peau bien équilibré
régule négativement l'inflammation cutanée chronique ; lors protège contre les agents pathogènes, favorise la barrière des
d'un traumatisme cutané, les cellules endommagées libèrent lipides naturels. Ces produits peuvent aussi fournir des avan-
de l'ARN qui stimule les TLR3 (Toll-like receptors  3), récep- tages thérapeutiques pour des maladies atopiques. Ils semblent
teurs de l'immunité innée exprimés par les kératinocytes qui, également améliorer la guérison des brûlures et des cicatrices,
à leur tour, déclenchent la sécrétion de cytokines initiant l'in- et améliorer le rajeunissement de la peau.
flammation constatée. S. epidermidis permet le contrôle de Cette notion s'applique aux peaux sensibles et réactives et
cette inflammation en sécrétant de l'acide lipotéichoïque, aux sujets exposés à des « techniques » cosmétiques inva-
ligand des TLR2 exprimés par les kératinocytes et dont la sti- sives ou à des habitudes d'hygiène excessives, ou après l'utili-
mulation inhibe le signal TLR3 [42]. sation prolongée de médicaments comme les antibiotiques
La stimulation des TLR2 par Vitreoscilla filiformis et les corticoïdes.
entraîne un effet anti-inflammatoire dans la dermatite Le Sérum Universel® de Synbionyme est un concentré de
atopique via l'induction de la différenciation de cellules T pré- et probiotiques (complexe Pro-B3) qui s'utilise en base
régulatrices [43]. sous n'importe quelle crème pour prévenir la dégradation
L'effet anti-inflammatoire de la flore saprophyte peut être due aux agressions multiples et renforcer les défenses au
gênant en cas d'inflammation aiguë, nécessaire pour la répara- niveau de trois barrières, le stratum corneum, la barrière
tion [44]. Toutefois, S. epidermidis représente le germe sapro- immunitaire et le microbiome [46, 47].
phyte le plus abondant sur la peau (1 à 2 millions par cm2). Prendre des probiotiques oraux et manger des aliments
Il a des effets hydratants par sa production de glycérine et riches en prébiotiques semble aider à résoudre les déséqui-
d'autres substances apparentées ; il contient des peptides libres de la flore intestinale et à rétablir une peau saine.

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Sirtuines et survivine rieure ; le nombre des mitoses kératinocytaires augmente


entre 23 heures 30 et 1 heure du matin [55].
Les sirtuines (pour silencing information regulator) sont au
Le pic de synthèse de l'ADN est à 16 heures ; il y a une cor-
nombre de sept protéines enzymatiques. La SIRT1 est impli-
rélation avec la périodicité jour/nuit de l'epidermal growth
quée dans la protection vis-à-vis du stress oxydant et de l'al-
factor (EGF) et ses récepteurs (pic salivaire entre 22 heures et
tération de l'ADN [48, 49]. Elle est activée par le resvératrol
7 heures) [56, 57].
et les extraits de myrrhe et de riz [50]. SIRT1 et SIRT2 auraient
La circulation capillaire (mesurée au niveau de la face pal-
un effet thérapeutique dans les maladies liées à l'âge  : en
maire des deux avant-bras (laser-Doppler) a un pic circadien
assurant la régulation endogène du taux de NAD+, ces proté-
du flux (skin blood flow) à 23 heures 30, ce qui favorise l'ap-
ines sont impliquées dans la longévité. SIRT1 est augmentée
port des nutriments et l'élimination des toxines.
chez des rongeurs soumis à un régime hypocalorique (régime
Pour optimiser les soins cosmétiques, il faut les program-
connu pour augmenter la longévité), et les molécules activa-
mer au meilleur moment : le matin, on aura recours à des
trices de SIRT1 (butéine, quercétine, resvératrol, acide cicho-
soins protecteurs et hydratants qui renforcent la barrière
rique extrait de l'Echinea mauve) miment les effets du régime
cutanée ; le soir, à des soins pour réparer et régénérer.
hypocalorique.
L'industrie cosmétique avance la nécessité d'une « resyn-
La survivine protège les kératinocytes de l'apoptose. La
chronisation » cellulaire avec l'âge. Des études sont encore
survivine et le facteur Notch1 jouent un rôle majeur dans la
nécessaires pour comprendre comment nos cellules cuta-
niche des cellules épidermiques. L'absence de survivine
nées fonctionnent sous l'influence de ces gènes horloges et
(silencing survivin) entraîne une grande susceptibilité des
pour démontrer les effets réels de la chronocosmétique
kératinocytes aux dommages induits par les UVB [51].

Extrêmophiles Cosmétotextiles
Un organisme est dit extrêmophile lorsque ses conditions de Hydratation, effet drainant, action apaisante et adoucis-
vie normales sont mortelles pour la plupart des autres orga- sante, anticellulite, élimination des toxines pourront être
nismes (températures, pressions, salinités, pH, etc. extrêmes). assurés par les cosmétotextiles ou textiles intelligents.
Ces micro-organismes produisent des métabolites d'une La révolution des fibres démarre avant le nouveau millé-
grande valeur car ils sont impliqués dans la protection contre naire avec les alchimistes de la matière. Les « texticaments »
les conditions environnementales extrêmes. Ce sont des pro- ou textiles qui soignent sont les suivants : bas et ceinture de
téines, des acides nucléiques, des glucides et des polysaccha- contention ; tissus protecteurs (champ opératoire imprégné
rides. Ainsi, un extrêmophile star, Deinoccocus radiodurans, d'un produit bactérien pour limiter les infections nosoco-
produit des agents capables de dégrader les protéines carbo- miales ; blouses étanches ou absorbantes des infirmières),
nylées qui s'accumulent avec l'âge. L'Arthrobacter agilis, une prothèses (implants vasculaires textiles utilisés pour rempla-
autre bactérie, inclus dans une crème est en mesure de pro- cer une artère hors d'usage ; implants pariétaux en chirurgie
téger la peau de l'oxydation par le rayonnement solaire. digestive) ; bandelettes pour incontinence urinaire (dont
certaines font l'objet de polémiques actuellement), etc.
Chronocosmétique Les cosmétotextiles représentent 16 % du marché des tex-
tiles techniques français.
La chronobiologie est l'étude des biorythmes qui découlent Pour l'Institut textile de France, nous sommes passés du
des cycles dont dépend notre organisme : alternance jour- tissu inerte au tissu actif et même interactif, avec la possibi-
nuit, saisons, cycle féminin, bouleversements hormonaux, lité de concevoir des tissus intelligents.
etc. La peau vit au rythme de notre horloge interne située Selon le Bureau de Normalisation des Industries Textiles et
dans le noyau suprachiasmatique (24 heures) et a sa propre de l'Habillement (BNITH, mars 2006), « un cosmétotextile est
horloge, deux gènes CLOCK et PER1, retrouvés dans les kéra- un article textile contenant une substance ou une préparation
tinocytes, les mélanocytes et les fibroblastes dermiques. La destinée à être libérée durablement sur les différentes parties
peau héberge le mécanisme de contrôle qui agit localement superficielles du corps humain, notamment sur l'épiderme, et
et interagit avec le « pace-maker central » [52]. revendiquant une (ou des) propriété(s) particulières telle(s)
La peau est une fenêtre sur l'horloge centrale du cerveau : que nettoyage, parfum, modification d'aspect, protection,
l'horloge circadienne périphérique se situe dans les fibroblastes maintien en bon état ou correction d'odeurs corporelles ».
de la peau ; l'oscillateur identique à l'oscillateur central [53, 54]. L'univers des cosmétiques et celui des textiles sont ainsi
Durant le jour, la peau se protège contre les agressions de fusionnés grâce au procédé de micro-encapsulation. « Le
l'environnement  : la peau favorise ses fonctions de protec- relargage des microcapsules des cosmétotextiles est déclen-
tion avec des cornéocytes plus serrés. ché par un impact, habituellement un mouvement de fric-
Dans la soirée et la nuit, elle assure ses fonctions de renou- tion ou de pression entre le corps et le tissu, provoquant la
vellement et son métabolisme. Les cornéocytes sont plus rupture des capsules en fragments et libérant les propriétés
grands ou plus étalés entre 20 heures et 23 heures ; le rythme cosmétiques » (« Les Textiles du futur », La Fédération, 2003).
circadien est de grande amplitude (30,8 %), détecté dans la La société Cosmétil Innovations est précurseur de la cosmé-
couche superficielle. La perméabilité de la peau est supé- totextile avec son procédé de fixation/restitution  : le « recul

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d'ionisation ». Cette technologie émergente utilise des micro- à restaurer un équilibre hydrolipidique, en limitant la perte en
capsules qui sont fixées sur le tissu, CosmeticWear® (Audresset). eau. Sur le plan infectieux, si la prévention herpétique doit être
Sur ce tissu, plus d'un million de microcapsules sont fixées uni- systématiquement orale, la prévention de l'infection bacté-
formément au centimètre carré. Celles-ci se brisent au fur et à rienne est essentielle, due à l'interruption de la barrière cutanée
mesure par frottement suivant les m ­ ouvements du corps, autant qu'à la déplétion en cellules de Langherans ; elle doit
lorsque les fibres se tendent puis se détendent. Les substances viser à restaurer un microbiome normal. Ainsi, il conviendra
actives sont ainsi libérées pour agir sur l'épiderme. d'orienter le patient dans un premier temps vers des topiques
Les textiles anticapitons permettent une augmentation de ayant toutes ces qualités, sans être trop occlusifs afin d'éviter
la souplesse et de la tonicité de la peau, une action apaisante d'éventuelles poussées d'acné ou de grains de millium, et si
et adoucissante. Ils font office de tonique veineux et ont un possible visant à accélérer la reconstruction épidermique.
effet drainant. Ils stimulent l'activité lipidique et accélèrent Dans les cas particuliers des phototypes IV à VI, ou des patients
l'élimination des toxines ; le lavage à la main permet une plus asiatiques ou bruns aux yeux verts réputés pour la fragilité de
grande longévité des microcapsules, les capsules résistant à leur système pigmentaire, l'hyperpigmentation post-inflamma-
environ 20 lavages. toire (HPI) est à prévenir, en amont de l'acte bien sûr, par une
La société Skintex Wolford propose Hydra Care 20® conte- éviction solaire et une photoprotection pendant 1 mois et des
nant de la vitamine  E, de l'huile de monoï, des acides gras topiques adaptés –  régulateurs de la pigmentation et anti-­
oxydants –, mais aussi en aval, avec, outre la photoprotection et
essentiels, de l'huile de squalane ; Slim Care 20®, contenant
l'éviction solaire pendant 2  mois, des actifs cosmétiques anti-­
des extraits d'algues marines, de la vitamine E, du rétinol, de
inflammatoires dès l'épidermisation, et surtout un contrôle de
l'huile de karité, de l'huile de noyau d'abricot, de l'huile
l'érythème qui doit déboucher ultérieurement vers une cosmé-
d'églantier et de la caféine.
tique à visée dépigmentante si celui-ci devait se prolonger. Il est
Enfin, à noter les vêtements antisolaires qui ont un indice
prudent de ne pas appliquer de dépigmentants avant 3 semaines,
50 + et arrêtent 97 % du rayonnement UV ; ce sont des tex-
au risque d'entraîner à l'inverse une hypopigmentation, qui ris-
tiles 100 % coton ou fibres synthétiques avec filtres intégrés ;
querait d'être encore plus problématique car parfois définitive ;
ils résistent à 50 lavages environ.
une surveillance serrée est donc essentielle, semaine après
semaine. Il est vrai que la photobiomodulation est d'une aide
précieuse également non seulement pour son action propre sur
Cosmétiques et actes techniques la cicatrisation, mais aussi pour inciter le patient au suivi.
Une prise en charge globale du patient en demande esthétique Le domaine des peelings est maintenant largement
améliore les résultats physiquement, mais aussi sur le plan psy- protocolisé, chaque firme proposant une cosmétique
­
chique, et renforce le lien de confiance qui se construit au d'accompagne­ment ; il n'en est pas de même pour les lasers
cours du temps entre le patient et le médecin. Ainsi, les soins qui sont donc plus opérateurs-dépendants, justement en
de la peau ne sont pas à négliger, dans l'acte technique comme raison de cette prise en charge globale qui implique l'exper-
dans l'encadrement de celui-ci, au cabinet comme au domicile tise du médecin.
du patient ; ils maximisent les résultats cliniques, améliorent ce Concernant les traitements par laser non ablatifs et IPL, la
qui n'est pas pris en compte par des injections, comme le teint, barrière cutanée, bien que désorganisée, reste en place. Il
la texture de la peau, la pigmentation, optimisent les effets des conviendra de réhydrater et d'apaiser la sensation de chaleur ;
techniques corpusculaires et des peelings. on note qu'avec n'importe quelle technique une chaleur
Un essai pilote réalisé par un dermatologue américain de intense peut conduire ultérieurement à des troubles de la cica-
l'Illinois a montré une meilleure estime de soi chez les patients trisation – cicatrices hypertrophiques, voire chéloïdes, surtout
conseillés sur le plan cosmétique et suivant une routine de sur les zones privées d'annexes comme le cou, les mains, ainsi
soins à domicile en plus des procédures injectables [58]. De que sur les zones osseuses (mandibule) et les zones péri-­
plus en plus de dermatologues en prennent conscience. orificielles. Outre la prévention et la surveillance, il conviendra
d'emblée de bien refroidir par un Zimmer ou autre système
synchrone au laser, et d'appliquer des topiques adaptés ayant
Quels cosmétiques pour quels actes une action anti-inflammatoire. Concernant la photother-
dermatologiques ? molyse fractionnée non ablative (non-ablative fractional photo-
Les actes techniques dermatologiques s'accompagnent fré- thermolysis [NAFP]), des études ont montré l'augmentation de
quemment d'effets collatéraux qui nécessitent, outre une infor- la pénétration transcutanée d'un sérum aqueux associant plu-
mation sans faille, une cosmétique d'accompagnement adaptée. sieurs anti-oxydants, et ce proportionnellement à la densité
Le patient peut en effet se trouver démuni devant une pléthore des puits thermiques (de 8 à 17 fois selon que la densité des
de cosmétiques sur le marché, dont une utilisation inappropriée puits thermiques va de 5 à 10 %, avec un NAFP à 1 927 nm) ; la
peut même influencer négativement le résultat escompté. réaction inflammatoire intense produite par la NAFP condui-
Après les lasers ablatifs et les peelings, les symptômes habi- sant à une déplétion en anti-oxydants naturels mobilisés pour
tuels que sont érythème, œdème et prurit, nécessitent de res- faire face à l'avalanche de radicaux libres (reactive oxygen spe-
taurer l'intégrité de la barrière cutanée avec des topiques cies [ROS]), il semble logique d'en apporter par voie externe
dénués de substances potentiellement nocives, mais qui visent afin de ré-équilibrer la balance destruction/reconstruction.

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Une autre étude avec la même association d'anti-­oxydants À côté de ces sérums, il existe des masques apaisants
utilisée conjointement à un home-device diode NAFP a m ­ ontré anti-oxydants et réhydratants post-acte, qui diminuent
l'amélioration de tous les paramètres du photovieillissement la perte insensible en eau (PIE) et stimulent la produc-
par rapport à un échantillonnage de patients utilisant le laser tion de collagène. Ils sont composés d'une feuille de
seul [59]. L'action anti-oxydante et productrice de collagène biocellulose forte­ment imprégnée d'acide hyaluronique
de la vitamine  C (acide L ascorbique) est particulièrement et de peptides anti-­inflammatoires, et soulagent dès leur
intéressante en post-laser immédiat. La vitamine  E (α-­ application. Dans le but de prévenir une HPI sur des pho-
tocophérol), autre anti-oxydant, soluble dans les lipides, a un totypes foncés, des masques similaires délivrent des
rôle protecteur des membranes cellulaires. L'acide férulique, actifs puissamment anti-­inflammatoires et anti-oxydants
polyphénol issu du son de blé ou de maïs, est un puissant (acide ellagique et glycyrrhizine). Une pose de 15 à
anti-oxydant qui de plus stabilise les deux précédents. Leur 30 minutes abaisse en moyenne l'inconfort et l'intensité
association est particulièrement indiquée puisqu'ils agissent de l'érythème postlaser de 34 % et l'inconfort du patient
en synergie pour activer la synthèse de collagène, diminuer le de 60  % (étude personnelle, voir tableau  3.1 ; fig.  3.1 à
stress oxydatif et améliorer la photoprotection [60]. 3.4).

Tableau 3.1  Évaluation sur 30 patients de l'application d'un masque biocellulosique contenant acide hyaluronique et peptides
anti-inflammatoires en post-laser immédiat pendant un quart d'heure*
Chaleur ressentie Chaleur ressentie
Patient n° Laser Érythème post-laser Érythème post-masque/5
post-laser/5 post-masque/5
1 REJ 5 3 5 3
2 VASC 5 3 5 2
3 VASC 5 2 0 0
4 VASC 5 3 5 2
5 VASC 5 2 5 3
6 REJ 5 2 5 3
7 REJ 5 2 5 2
8 REJ 5 4 5 4
9 VASC 5 5 5 2
10 REJ 5 4 5 3
11 VASC 5 4 5 0
12 REJ 5 3 5 2
13 REJ 5 3 5 1
14 REJ 5 4 5 3
15 REJ 5 2 5 3
16 REJ 5 3 5 4
17 REJ 5 3 5 3
18 REJ 5 4 5 3
19 VASC 5 4 5 3
20 VASC 5 3 5 2
21 REJ 5 3 5 2
22 VASC 5 3 5 2
23 REJ 5 3 5 3
24 VASC 5 4 5 3
25 VASC 5 4 5 2
26 VASC 5 5 5 4
27 REJ 5 3 5 2
28 REJ 5 3 5 1
29 REJ 5 4 5 2
30 VASC 5 4 5 3
Moyenne 3,30 4,83 2,40
Amélioration % 34 50,3
* Amélioration moyenne de l'érythème de 34 %, évaluée par deux examinateurs, et de la sensation de chaleur de 50 %, évaluée par le patient.

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Fig. 3.1  Patiente traitée par laser pour une érythrose post-traitement Fig.  3.4 Même patiente un quart d'heure après pose de masque de
immédiat. biocellulose délivrant acide hyaluronique, acide ellagique et glycyrrhi-
Source : I. Gallay. zine.
Amélioration de l'érythème de plus de 60 %. Amélioration de la pigmen-
tation globale de la peau (hormis les lentigos qui disparaîtront à J10 de
l'acte laser).
Source : I. Gallay.

À l'issue des traitements lasers non ablatifs, après le soin,


un correcteur minéral masque les rougeurs résiduelles ; les
produits appliqués doivent être neufs et les échantillons
sont particulièrement appréciés des patients. Après un
laser ablatif, le maquillage correcteur est possible dès la
phase de réparation épidermique. Dans tous les cas, une
photoprotection minérale est essentielle si le correcteur
n'en assure pas la fonction. En effet, les filtres chimiques, en
raison de leur profondeur de pénétration supposée accrue
par la procédure, ne sont pas recommandés. Concernant
les lasers ablatifs, ils peuvent même conduire à une sensibi-
lisation [61].
Fig. 3.2  Même patiente, un quart d'heure après une pose de masque de Les techniques radiofréquence et ultrasons sont optimi-
biocellulose délivrant acide hyaluronique et peptides a visée anti-­ sées par une prise en charge cosmétique. Une étude a mis en
inflammatoire.
évidence une supériorité des résultats obtenus sur la fermeté
Réduction de l'érythème d'environ 60 %.
Source : I. Gallay. et la texture de la peau lorsqu'un traitement de radiofré-
quence appliqué sur des zones corporelles est suivi de l'appli-
cation d'un cosmétique associant des peptides inducteurs
de collagène et des bêta-hydroxy-acides (étude en double
aveugle, comparaison d'une zone recevant le traitement
radiofréquence et le cosmétique avec la zone symétrique
recevant le traitement seul) [62].

De la cosmétique d'accompagnement
à l'acte technique cosmétique : la délivrance
assistée de cosmétiques
Aujourd'hui, la cosmétique s'intéresse à l'interaction des
molécules appliquées sur la peau avec les cellules par le
biais d'activation de voies de signalisation cellulaire ; tout le
défi est de trouver le vecteur qui peut conduire ces molé-
cules au plus près des cellules cibles. Les liposomes, nio-
somes et autres polymersomes, plus récemment les
Fig. 3.3  Patiente traitée par laser de réjuvénation (vasculaire et pigmen- nanosomes, sont nés des biotechnologies et inondent l'in-
taire) en postlaser immédiat.
Source : I. Gallay. dustrie des cosmétiques.

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Mésothérapie L'environnement des actes esthétiques


Plus simplement, le champ de la cosmétique s'est enrichi ne doit pas être négligé
d'une pratique déjà ancienne, la mésothérapie : de nom- L'effet des cosmétiques sur le bien-être n'est plus à démon-
breux dispositifs médicaux sont représentés par des cock- trer : l'impact psychologique que peuvent avoir les affections
tails injectables dans le derme. Sous des appellations de dermatologiques et, inversement, les effets cutanés des états
mésolift, mésocosmétique, biorevitalisation, etc., ces solu- dépressifs et des états de stress illustrent les interconnexions
tions stériles s'injectent dans le derme en multi­ - entre la peau et le cerveau. Quitter un cabinet de dermatolo-
micropunctures pour des effets transitoires inférieurs à un gie avec un visage rouge et vultueux est une épreuve, alors
mois, mais plus évidents et durables qu'ils ne le seraient que le passage par une salle de repos entre les mains expertes
par simple application cutanée. d'une esthéticienne ou d'une assistante entraînée aux soins
post-actes conduit à produire du bien-être, insuffler une
Laser assisted drug delivery (LAD)
confiance en soi et à faire oublier le contexte médical de la
Rapidement, l'idée est venue de faire pénétrer ces produits démarche initiale, ainsi que le cortège technique et adminis-
par les brèches provoquées par les techniques fraction- tratif que sont les documents médico-légaux indispensables
nelles ; ainsi un nouveau concept est né, la LAD, qui fait à la protection juridique des patients comme du médecin.
l'objet de très nombreuses publications qui ne concernent Un cadre agréable doit faire oublier la froideur de ce contexte.
d'ailleurs pas que la cosmétique, puisque de nombreux « Rien de plus profond que la peau et rien de plus vrai que
médicaments aux molécules trop volumineuses pourraient le cosmétique… Le cosmétique concrétise la conscience de
bénéficier de cette voie cutanée pour une destination soi » (Michel Serres).
locale (voir la photothérapie dynamique [PDT], déjà large-
ment mise en application), ou bien même systémique. Références
Reste à définir la technique de photothermolyse fraction- [1] Mondon P, Ringenbach C, Doridot E, Leroux R. Third generation
peptides just around corner. Personal Care Europe
née choisie (CO2 ou Erbium), les paramètres adaptés à la
2018;12(4):101–3.
taille des molécules et à la profondeur souhaitée de péné- [2] Kligman AM. Corneobiology and corneotherapy--a final chapter.
tration [63]. Int J Cosmet Sci 2011;33:197–209.
Des auteurs ont pu démontrer une accélération de la cica- [3] Sato J, Yanai M, Hirao T, Denda M. Water content and thickness
trisation après un laser fractionné ablatif lorsqu'un sérum of the stratum corneum contribute to skin surface morphology.
était appliqué associant vitamine C, vitamine E et acide féru- Arch Dermatol Res 2000;292:412–7.
[4]  Sore  G, Bernard  BA, Passeron  T. The skin aging exposome.
lique, immédiatement en postlaser et poursuivi à domicile,
J Dermatol Sci 2017;85(3):152–61.
sur un côté du visage, par rapport à l'autre côté ne recevant [5] Varani J, Warner RL, Gharaee-Kermani M, et al. Vitamin A antago-
pas le sérum. Ils ont mis en évidence également du côté nizes decreased cell growth and elevated collagen-degrading
traité avec le sérum une élévation du facteur de croissance matrix metalloproteinases and stimulates collagen accumulation
basique des fibroblastes [64]. in naturally aged human skin. J Invest Dermatol 2000;114:
Les techniques HIFU (ultrasons microfocalisés de haute 480–6.
[6] Tucker-Samaras S, Zedayko T, Cole C, et al. A stabilized 0.1 % reti-
intensité) ont fait l'objet de nombreuses études concer-
nol facial moisturizer improves the appearance of photodamaged
nant la pro-pénétration de molécules à travers la barrière skin in an eight-week, double-blind, vehicle-controlled study.
hémato-encéphalique et la peau, mise en évidence par la J Drugs Dermatol 2009;8:932–6.
constitution de perforations temporaires des membranes [7] Bellemère  G, Stamatas  GN, Bruère  V, et  al. Antiaging action of
cellulaires. Des études complémentaires sont nécessaires, retinol: from molecular to clinical. Skin Pharmacol Physiol
qui viendront compléter ce champ d'investigation très 2009;22(4):200–9.
[8] Rossetti D, Kielmanowicz MG, Vigodman S, et al. A novel anti-
actuel de la délivrance assistée de molécules par voie
ageing mechanism for retinol : induction of dermal elastin syn-
cutanée. thesis and elastin fibre formation. Int J Cosmet Sci 2011;33:
62–9.
Microneedling [9] Humbert P. Topical vitamin C in the treatment of photoaged skin.
Le microneedling [65], utilisé initialement pour son effet Eur J Dermatol 2001; $ 11(2):172–3.
mécanique inducteur de collagène (dermarollers, d ­ ermapens [10] Nusgens BV, Humbert P, Rougier A, et al. Topically applied vita-
min C enhances the mRNA level of collagens I and III, their pro-
[66], stamps, etc.), tout comme la radiofréquence fraction- cessing enzymes and tissue inhibitor of matrix metalloproteinase
née micro-aiguilles sont autant de techniques de pro-­ 1 in the human dermis. J Invest Dermatol 2001;116(6):853–9.
pénétration, qui ne nécessitent pas l'acquisition d'un laser. Il [11] Pinell SR. Cutaneous photodamage, oxidative stress, and topical
est bien évident que tout cosmétique ne peut pas être l'objet antioxidant protection. J Am Acad Dermatol 2003;48:1–19.
de ce mode d'utilisation : il est important d'utiliser des pro- [12] Catani MV, Savini I, Rossi A, et al. Biological role of vitamin C in
keratinocytes. Nutr Rev 2005;63(3):81–90.
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On peut encore citer à l'étude les timbres à micro-aiguilles and structural evaluation of the long-term effects of a topical
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Techniques
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Section 1. Techniques cosmétiques
Chaptire 3. Les cosmétiques dans la prise en charge du vieillissement cutané...

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Section 1. Techniques cosmétiques
Chaptire 3. Les cosmétiques dans la prise en charge du vieillissement cutané...

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TECHNIQUES Partie 2
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Section 1. Techniques cosmétiques

Chapitre 4
Maquillage correcteur
en dermatologie esthétique
P. Deshayes

Introduction Environnement du maquillage


On connaît l'intérêt du maquillage correcteur dans la pratique Avant la mise en place du maquillage, il faut appliquer sur la
dermatologique pour masquer certaines lésions (acné, rosacée, peau un soin hydratant adapté à ses besoins – crème apai-
vitiligo). Certaines équipes le considèrent même comme un sante, cicatrisante, pour peau grasse ou sèche, etc. On aura
outil thérapeutique à utiliser dans la prise en charge de lésions vérifié au préalable que cette crème est bien compatible avec
visibles, en particulier sur le visage, et utilisent le terme de le produit de maquillage que l'on va appliquer ensuite. S'il
« bridge therapy » [1]. Dans la pratique de la dermatologie s'agit de produits d'une même marque, il n'y a pas de souci,
esthétique, il existe également des moments où des manifesta- la compatibilité a déjà été testée. Si ce n'est pas le cas, la pre-
tions cliniques se trouvent momentanément aggravées par des mière fois que l'on tente cette association, il faut vérifier sur
soins, où des effets secondaires indésirables passent au premier le dos de sa main, en appliquant successivement le soin
plan, où le temps de réparation semble long avant de pouvoir hydratant puis le maquillage, qu'il n'y a pas d'effet de « plu-
juger du résultat. Il est important d'en parler avec les patients et chage » traduisant une mauvaise adéquation des produits.
de pouvoir leur proposer une solution [2]. Comme pour tout maquillage, un démaquillage soigneux
Il existe aussi des circonstances où il peut être bon d'at- est indispensable. Sur une peau enflammée, on conseille l'ap-
tendre avant de pratiquer un acte  : demande pressante plication d'un dermonettoyant que l'on applique en mas-
d'un(e) patient(e), doute sur la bonne indication d'un geste. sages doux avec les doigts et qu'on rince par des brumisations
Dans ce cas, le maquillage correcteur peut fournir un moyen d'eau thermale. On peut aussi utiliser une eau micellaire
d'attente tout en gardant le contact avec le patient et en dont on imprègne des cotons qu'on pose et laisse agir
étant bienfaisant. quelques instants sur la peau avant de les retirer.
Dans le cadre d'un poste ou d'un atelier de maquillage,
toutes les précautions d'hygiène doivent être prises : désin-
Les produits fection systématique du matériel utilisé (pinceaux, brosses,
etc.) entre deux patients (il existe des produits nettoyants
La formulation des produits de maquillage correcteur est gui-
spécifiques, mais on peut utiliser l'alcool à 70°, certes plus
dée par deux impératifs : être suffisamment couvrants tout en
agressif pour les instruments) ; les crayons sont taillés après
restant faciles à appliquer, ne présenter aucun risque d'allergie
chaque utilisation ; le rouge à lèvre est prélevé sur le stick
ou d'irritation sachant qu'ils seront parfois appliqués sur une
avec un abaisse-langue et appliqué ensuite sur les lèvres au
peau lésée – juste après un soin ou en cours de cicatrisation.
pinceau ; l'applicateur du mascara sert à charger en produit
Le caractère couvrant est obtenu par une forte concentra-
une brosse à cils qui servira à son application, etc.
tion en pigment. Si, pour un maquillage classique, les pig-
Ces éléments contribuent à la sécurité du maquillage cor-
ments représentent 5 à 8 % de la formule, dans un maquillage
recteur et à la tranquillité des patients.
correcteur, cette concentration monte à 20 à 25 % voire plus.
Toute la gageure est de formuler malgré cela un produit
facile à mettre en place et qui s'étale facilement ; on verra Correction du teint
qu'il existe une technique particulière d'application.
L'autre exigence est que ces produits ne présentent aucun
risque d'irritation ou d'allergie, au même titre qu'un soin der- Technique d'application
matologique ; c'est pour cette raison qu'on utilise aussi, pour Pour augmenter la fluidité du produit de maquillage correc-
définir ces produits, le terme de maquillage « médical », qui teur, on l'applique d'abord sur le dos de sa main en l'étalant
fait référence à la sécurité de leur emploi [3]. Plusieurs labo- légèrement pour le réchauffer, puis on le met en place au
ratoires ont développé une gamme de maquillages correc- doigt, en très petites touches, sur la zone à maquiller. Puis
teurs que l'on peut conseiller en toute sécurité ; ces produits immédiatement, on l'étale, en tamponnant, perpendiculaire­
sont disponibles en pharmacie. ment à la peau, avec une brosse droite (fig. 4.1).
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Section 1. Techniques cosmétiques
Chapitre 4. Maquillage correcteur en dermatologie esthétique

En cas de comblement d'un pli profond, il faut se souvenir


que l'application au fond du pli d'une teinte plus claire le fait
ressortir et ainsi amplifie le résultat obtenu en lissant le relief.

Neutraliser un contraste important


Dans le cas d'un contraste important de teinte entre la zone à
maquiller et la peau normale, il faut d'abord essayer le fond
de teint correcteur dont le résultat est souvent surprenant ;
même sur des hématomes ou des rougeurs importantes,
après traitement laser vasculaire par exemple (fig. 4.2). Si le
résultat n'est pas satisfaisant, avant d'appliquer le fond de
teint, on doit « neutraliser » la couleur de la zone à maquiller
par l'application d'un correcteur d'une teinte complémen-
taire ; classiquement, le vert pour neutraliser une couleur
Fig. 4.1  Technique d'application à la brosse, en tamponnant.
rouge et le jaune pour neutraliser une teinte bleu-violine
Source : P. Deshayes.
(cicatrice, cernes). En fait, le vert appliqué sur du rouge donne
une teinte blafarde, froide. C'est pourquoi j'utilise toujours le
Il épouse toutes les imperfections de relief sans qu'on ait à jaune pour neutraliser le rouge ou le bleu, avant l'application
frotter la peau. Aux limites de la zone maquillée, on peut uti- du correcteur de teint ou d'un simple poudrage.
liser cette brosse, dans un geste balayant, pour estomper la
bordure.
Cette correction est complétée par l'application, avec la même
brosse, d'une poudre libre qui a un rôle matifiant et fixe le
maquillage pour une meilleure durée dans le temps. Cette étape
est indispensable en cas d'utilisation de fard à joue ou blush, afin
qu'il glisse sur la peau et se répartisse de façon régulière.
Les fonds de teint compacts sont indiqués quand la peau
est saine. Ils se mettent en place à l'éponge et leur condition-
nement en coffret avec miroir rend les retouches faciles au
cours de la journée. Les fonds de teint en stick peuvent
convenir à des maquillages très localisés.

Choix de la teinte
Chaque gamme de correcteur de teint comporte, pour les
peaux européennes, quatre à six nuances allant des peaux les
plus claires aux peaux méditerranéennes. Trouver la teinte
qui convient à la couleur de la peau est une étape essentielle.
Pour ce faire, on dépose, sur une zone de peau saine du visage,
une faible quantité de correcteur qu'on met en place en tam-
ponnant avec la brosse. Si cette zone ne se remarque pas, c'est
que le choix de couleur est bon. Pour éviter de mauvaises
surprises, il est préférable de travailler en lumière naturelle. En
cas de doute entre deux teintes proches, il est préférable de
choisir la plus claire –  il sera toujours possible de foncer le
teint avec la poudre libre, mais l'inverse n'est pas vrai.
Pour les peaux ethniques, les nuances des produits sont beau-
coup plus nombreuses, sachant l'infinité des couleurs de la peau.
Elles ne sont disponibles que dans quelques gammes. Pour res- Fig. 4.2  Maquillage correcteur après une séance de laser KTP.
pecter les nuances naturelles de la peau noire sur le visage (zones Source : P. Deshayes.
plus claires des tempes et plus foncée du front), on utilise sou-
vent deux teintes que l'on applique sur les zones correspon-
dantes. L'objectif est d'obtenir un résultat naturel en évitant un
effet de « masque ». Si la zone à corriger est de petite surface et
Ne pas surcorriger – éviter l'effet masque
présente un fort contraste avec la peau normale, on peut s'aider, Si on examine de près la couleur de la peau, celle-ci n'est pas
avant la mise en place du correcteur, d'une application d'un uniforme. Outre les taches de rousseur, il existe de fines irré-
crayon à sourcil, brun ou noir, selon la teinte de la peau. gularités de teinte qui, respectées, rendent le maquillage

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Section 1. Techniques cosmétiques
Chapitre 4. Maquillage correcteur en dermatologie esthétique

invisible ; c'est ce résultat naturel que l'on recherche pour un Conclusion


maquillage correcteur réussi. Devant des troubles pigmen-
taires, qu'il s'agisse de taches pigmentées ou de dépigmenta- En dermatologie, qu'il s'agisse d'un traitement médical,
tion, l'écueil de la correction serait de créer un masque d'une chirurgie ou d'un geste esthétique, le résultat peut
uniforme. Il est préférable de choisir deux teintes, qu'on se faire attendre… Il faut de la patience. Le maquillage
applique, sans les mélanger, alternativement sur les zones correcteur n'est qu'une solution d'attente, mais il peut
claires et foncées puis qui sont estompées en tamponnant être réalisé en toute sécurité et apporte un résultat
avec la brosse. On respectera bien cette alternance des immédiat. Les gestes sont simples, faciles à apprendre
teintes sur le pourtour des lésions afin de rendre le maquil- et rapides à reproduire. C'est un acte complémentaire et
lage flou et invisible. simple de la dermatologie esthétique et correctrice à ne
pas oublier.
Protection solaire Références
Le maquillage correcteur, par sa forte charge en particules [1] Levy L, Emer J. Emotional benefit of cosmetic camouflage in the
pigmentées, peut, s'il est appliqué en couche épaisse sur une treatment of facial skin conditions: personal experience and
cicatrice, avoir un effet protecteur solaire. Néanmoins, il est review. Clin Cosmet Investig Dermatol 2012;5:173–82.
[2] David SE, Ahmed Z, Salek MS, Finlay AY. Does enough quality of
préférable d'appliquer, avant le maquillage, une protection
life-related discussion occur during dermatology outpatient
solaire d'indice maximal 50 +. En cours de journée, l'applica- consultations? Br J Dermatol 2005;153:997–1000.
tion d'une brume solaire 50 + permet de prolonger cet effet [3] Deshayes P. Le maquillage médical pour une meilleure qualité de vie
sans nécessiter de démaquillage. des patients. Ann Dermatol Venereol 2009 ;(Suppl 6):S372–4.

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TECHNIQUES Partie 2
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Section 2. Les peelings

Chapitre 5
Peelings superficiels
M. Baspeyras

Généralités [1, 2] Les acides alpha-hydroxyacides (AHA) sont un groupe d'acides


organiques, non toxiques utilisés en dermatologie médicale et
Les peelings superficiels (fig.  5.1) sont limités à l'ablation esthétique sous forme de cosmétiques ou de peelings. L'acide gly-
contrôlée des couches supérieures de l'épiderme, stratum colique (C2) et l'acide lactique (C3) ont les chaînes les plus courtes
corneum et granulosum, et sont ambulatoires. Plusieurs pee- et ainsi une pénétration cutanée plus rapide et homogène et sont
lings sont nécessaires pour obtenir un bon résultat clinique et les plus utilisés. Même si le nom d'acides de fruits est toujours uti-
une homogénéisation du teint, du relief cutané. Il faut donc lisé car ces acides sont retrouvés dans les aliments, leur synthèse est
les répéter et les intégrer dans un plan thérapeutique de prise chimique. On utilise aussi les acides malique, tartrique et citrique,
en charge du vieillissement. Ils s'adressent essentiellement mandélique et pyruvique, seuls ou associés [3].
aux lésions épidermiques, même si une petite action der- Les acides de fruits sont plus stimulants que destructeurs. Ce
mique a été montrée. Ils sont utilisables sur tous les types de sont des acides faibles, kératorégulateurs, qui stimulent la desqua-
peau, tous les phototypes et sur tout le corps, bien que l'utili- mation cutanée et le renouvellement cellulaire. Ils diminuent la
sation faciale soit la plus pratiquée. Il faut savoir poser les cohésion des cornéocytes en agissant sur les cornéodesmosomes.
indications et connaître les limites de ces peelings. L'acide glycolique (AG ; fig. 5.2A) est utilisé à des concentra-
tions de 20 à 70 %. La profondeur de pénétration du peeling
et son intensité augmentent avec la concentration de l'acide
et le temps d'exposition. Les AHA doivent être neutralisés par
une solution alcaline pour stopper leur effet exfoliant. À forte
concentration (30 à 70 % d'acide libre en solution aqueuse), si
la peau est mal préparée ou si elle est lésée, ils peuvent entraî-
ner une épidermolyse qui se traduit par un blanchiment ou
pseudofrosting qui peut être suivi de cicatrices [4, 5].
En histologie, ces effets sont réels : diminution de l'épaisseur
du stratum corneum, augmentation de l'épaisseur de l'épiderme
vivant (corps muqueux de Malpighi), différenciation plus régu-
lière, dispersion de la mélanine au niveau de la couche basale. Il
s'y ajoute des effets dermiques avec une augmentation de
l'épaisseur des papilles dermiques, une augmentation de la syn-
thèse du collagène, de la quantité d'acide hyaluronique, mais
aussi du nombre et de la qualité des fibres élastiques. Ces effets
sont associés à une prolifération des fibroblastes, qui ne dépend
pas de mécanisme inflammatoire [6–8].
La gluconolactone est un polyhydroxyacide cyclique, acide
faible, non toxique, utilisé aussi dans l'alimentation. Elle asso-
cie effet kératolytique et très bonne tolérance. L'association
AHA et gluconolactone agit sur la rigidification des fibres de
collagène (glycosylation), d'où l'effet anti-âge.
L'acide lactique (AL ; fig. 5.2B) est moins acide à concentra-
Fig. 5.1  Peeling superficiel. tion égale que l'AG, mais son efficacité est équivalente. Il a
Flèches bleu clair  :  peeling super superficiel. Flèches bleu foncé  : peeling également un effet sur la synthèse de la mélanine par inhibi-
superficiel. tion de la tyrosinase, expliquant ses effets éclaircissants.
L'acide mandélique est un phénol hydroxyacide. Son cycle
Principes actifs de benzène associé au glycolique lui donne une polarité par-
ticulière alliant hydrosolubilité et pénétration en milieu lipi-
Les substances employées sont des acides faibles, utilisés purs, dique. Il module la production sébacée avec un effet anti-acné
tamponnés, estérifiés ou partiellement neutralisés (tableau 5.1). chez le sujet jeune et une augmentation de la sécrétion

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Section 2. Les peelings
Chapitre 5. Peelings superficiels

Tableau 5.1  Principes actifs des peelings superficiels


Nom Propriétés Efficacité clinique
Pour tous : héliodermie modérée,
teint, ridules
Alpha-hydroxyacides Acide glycolique (AG) pKa 3,5 Acides faibles solubles dans l'eau, c'est-à- Inhibition de la tyrosinase
(AHA) Acide lactique (AL) dire que la réaction de dissociation dans Acné
Acide malique l'eau n'est pas totale
Acide tartrique Petits poids moléculaires pour AG et AL :
Acide citrique bonne pénétration
Acide mandélique Kératolytiques
Gluconolactone Doivent être neutralisés
Acide pyruvique pKa 2,39
Bêta-hydroxyacides Acide salicylique pKa 2,97 Lipophile kératolytique Acné
Lipohydroxyacide (LHA) Non neutralisé
Mélanges Jessner AS + résorcinol + AL + (éthanol) Préparation aux peelings TCA en
Autres Non neutralisé monocouche
TCA de 10 à 15 % Non neutralisé
Coagule les protéines
Rétinol, Non neutralisé Acné
Trétinoïne

s­ ébacée en début de ménopause, diminuant ainsi la séche- tion de brûlure. Elle ne se neutralise pas. Elle est surtout uti-
resse cutanée de la femme plus âgée. La taille plus grande de lisée en monocouche pour améliorer la pénétration d'un
cette molécule par rapport à l'AG induit une pénétration autre peeling, permettant une application plus homogène.
plus lente et une meilleure tolérance [9]. La solution de Jessner modifiée (formule de Monheit)
L'acide pyruvique se convertit en AL. Il est lipophile et un comporte de l'acide citrique (fig. 5.2D) à la place du résor-
peu hydrophile et doit être neutralisé. Cependant, son appli- cinol qui est allergisant.
cation est douloureuse et ses vapeurs sont âcres et irritantes. L'acide azélaïque normalise la kératinisation et induit une
La solution de Jessner comporte : AS, 14 g ; AL, 14 g ; résor- diminution de la teneur en acides gras libres des lipides de la
cinol, 14  g (qui peut être remplacé par de l'acide citrique, surface de la peau. Il a un effet bactériostatique et bactéricide
8  g) ; éthanol qsp 100  ml. Elle s'applique en deux ou trois sur les germes aérobies et anaérobies, d'où son utilisation dans
couches, très progressivement jusqu'à obtention d'un léger l'acné.
érythème et frosting irrégulier, et s'accompagne d'une sensa- Le résorcinol est chimiquement comparable au phénol. Il
détruit les ponts hydrogène interkératinocytaires, rompt les
membranes cellulaires. Il est bactéricide ; c'est un poison pro-
toplasmique qui agit par inactivation enzymatique et déna-
turation des protéines.
L'acide salicylique (AS) (fig. 5.2E) est kératolytique, très peu
hydrosoluble avec une grande affinité pour les lipides. Sa
faible taille lui assure une pénétration facile, rapide et pro-
fonde. Il pénètre directement dans les pores et les comédons,
où il a un léger effet antibactérien et anti-inflammatoire. Il
est autoneutralisé par les lipoprotéines cutanées.
Il s'utilise à des concentrations de 10 à 30 % dans une base
d'hydroéthanol ou de polyéthylène glycol. La sensation de
brûlure est faible lors de l'application car il a des propriétés
analgésiques. En fin de peeling, un dépôt de cristaux blancs
résulte de l'évaporation de la base de dissolution ; ce n'est
pas un frosting mais une fine couche de précipité blanc. S'il y
a un risque théorique de salicylisme en cas d'application sur
de très grandes surfaces, le peeling avec AS reste très sûr.
Le lipo-hydroxy acide (LHA) est un bêta-hydroxy acide,
dérivé de l'AS. Sa structure très lipophile explique son action
sur le follicule sébacé et son effet kératolytique supérieur à
celui de l'AS. Il est utilisé à des concentrations de 5 à 10 %
Fig. 5.2  Formule chimique des acides. sans neutralisation. Son application provoque moins
A. Acide glycolique. B. Acide lactique. C. Acide malique. D. Acide citrique. ­d'inconfort et d'érythème que l'AS [9]. Il est antimicrobien,
E. Acide salicylique. F. Acide trichloracétique. anti-inflammatoire et non comédogène.
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Section 2. Les peelings
Chapitre 5. Peelings superficiels

L'acide trichloracétique (TCA) (fig. 5.2F) est utilisé surtout pour Tableau 5.2  Indications des peelings superficiels (d'après [5])
les peelings moyens ; toutefois, à faible concentration (10 à 15 %) Lésions de l'épiderme Signes cliniques
avec un seul passage croisé, il peut être classé dans les peelings Héliodermie moyenne Ridules
superficiels (voir chapitre  6). Il est important de rappeler que ou modérée Peau épaisse et jaunâtre
l'action du TCA est proportionnelle à la quantité appliquée, qu'il Sécheresse
ne se neutralise pas et que même une concentration faible appli- Laxité augmentée
quée en plusieurs couches peut aboutir à un peeling moyen. Kystes et comédons
Le rétinol (ROL) et l'acide rétinoïque [10] sont liposolubles. Pores dilatés
Kératoses actiniques
Le métabolite actif est la trétinoïne après passage par une
forme intermédiaire, le rétinaldéhyde. Les effets métaboliques Hyperpigmentations Lentigines
Mélasma
du ROL et de ses dérivés par activation de récepteurs nucléaires
Hyperpigmentation post-inflammatoire
cellulaires sont bien connus et utilisés en dermatologie pour
Acné Acné inflammatoire ou microkystique
traiter acné et vieillissement [11]. Les peelings dosés à 5 % sont
Rosacée
répétés deux fois par mois. Une alternative proposée par
Teint et entretien de la Teint terne
Kligman et dénommée le « rapid retinization » consiste à appli-
peau Fumeur
quer au domicile, tous les soirs, un mélange de 0,25 % de tréti-
Toute localisation du Cuir chevelu
noïne dans 50 % d'éthanol et 50 % de propylène glycol.
corps Cou, décolleté
Les peelings ROL seraient mieux tolérés que l'application de Bras
trétinoïne crème quotidienne car ils sont stoppés au niveau Dos, épaules
du stratum corneum sans action sur les récepteurs rétinoïques
des cellules vivantes des couches profondes de l'épiderme.
Les associations d'actifs sont nombreuses et variées, leur Contre-indications
but étant d'associer les différents acides pour augmenter leur et précautions [5]
efficacité sans augmenter les effets secondaires. Par exemple,
une association de peeling AS 30 % immédiatement suivie de ■ Absolues  : infections bactériennes, virales ou fongiques
l'application soit de rétinol 0,25 %, soit de trétinoïne à 0,25 % évolutives ; allergie au produit.
est utilisée pour améliorer l'héliodermie [11]. ■ Relatives : isotrétinoïne, grossesse.

■ Prudence : si dermatoses inflammatoires (rosacée, atopie),

Facteurs influençant exposition solaire non contrôlée, patient non compliant.


la pénétration du peeling ■ Éviter la réalisation de peelings pendant la période ensoleillée.

■ Précautions : l'application topique de trétinoïne, d'adapa-

La peau a un film hydrolipidique de surface dont le pH et la com- lène, de peroxyde de benzoyle doit être suspendue
position vont influencer la pénétration du peeling. Le pH au 1 semaine avant le peeling en raison de l'augmentation de
niveau du stratum corneum varie de 4,2 à 6 : il est plus acide si la sa pénétration et des risques d'épidermolyse non souhai-
peau est sèche ou sur les zones moins séborrhéiques [12], plus tée lors des peelings superficiels.
élevé après la ménopause. La pénétration est plus rapide si les Tout acte traumatisant la peau doit également être évité
pores sont dilatés. Il existe aussi des variations ethniques de pH. les 2 ou 3 jours précédant le peeling : gommage, épilation,
Les peaux pigmentées ont un pH plus bas que les peaux claires rasage, masque exfoliant, etc.
(pH 4,6 versus 5,0) avec une intégrité du stratum corneum et une
fonction barrière plus importante, liée à l'augmentation des
Consultation préalable
lipides épidermiques et à la densité des corps lamellaires. La consultation préalable (encadré 5.1) permet de bien choi-
Le pH cutané est aussi modifié par des facteurs exogènes appli- sir le peeling, de vérifier s'il n'y a pas de contre-indications,
qués sur la peau tels les lavants ou les émollients. L'interruption d'examiner l'état cutané, de remettre les fiches de
de la barrière cutanée par un stripping, l'emploi d'acétone ou de ­recommandations pré- et post-peeling, d'établir un devis
lauryl sulfate de sodium agresse les kératinocytes et modifie l'aci-
dité de surface de 0,8 à 1 unité. Il est facile de comprendre que Encadré 5.1
toute action sur la surface précédant l'application de l'acide du
peeling aura un retentissement sur sa pénétration cutanée mais Les peelings superficiels : consultation
aussi son efficacité et d'éventuels effets secondaires. préalable et étapes
La consultation préalable est le temps « presque » le plus
Indications des peelings important afin de vérifier : la bonne indication, le bon choix
superficiels de peeling, la bonne compréhension du patient.
Le peeling superficiel est une valse à trois temps :
Les peelings superficiels améliorent les lésions épidermiques, ■ premier temps : préparer la peau ;
accélèrent le turn-over cellulaire, à condition de répéter les ■ deuxième temps : le peeling ;
séances pour être efficaces (tableau 5.2). ■ troisième temps : la phase postpeeling, maintien et

renforcement.
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Section 2. Les peelings
Chapitre 5. Peelings superficiels

mentionnant la fréquence et la répétition des peelings, de Cette période de préparation est déjà active. Elle réduit et
faire signer le formulaire de consentement éclairé. homogénéise la couche cornée, améliore la récupération
L'interrogatoire précise les antécédents médicaux, en postpeeling, limite les effets secondaires par une pénétration
particulier l'existence d'un diabète, de poussées d'herpès, mieux contrôlée du peeling.
d'une photosensibilité, d'antécédents esthétiques avec les
actes réalisés et leur résultat, d'éventuels troubles de la Le peeling
cicatrisation, de la pigmentation, les allergies et les traite- Le peeling est réalisé au cabinet médical. Le jour du peeling,
ments généraux ou locaux actuels, en particulier ceux qui le patient doit avoir la peau bien nettoyée, exempte de
peuvent influencer la pénétration du peeling comme les maquillage. Tous les bijoux seront enlevés, y compris boucles
topiques anti-acnéiques vus plus haut. Il faut noter les d'oreille et piercing. Le patient est installé allongé, cheveux
habitudes de vie : expositions solaires, sport de plein air, maîtrisés par un serre-tête ou une charlotte sous une très
tabac, hammam et s'il y a un désir de grossesse. bonne lumière. Avant le début du peeling, tous les produits
L'examen clinique précise le type de peau – sèche ou grasse, nécessaires à la procédure doivent être prêts : lotion prépeel
sensible ou réactive, relâchée ou ferme, fine ou épaisse  –, + peeling + neutralisant (ils sont habituellement fournis en
la  tendance à la couperose, les troubles p ­igmentaires ou kit par le fabricant), mais aussi eau thermale, crème postpee-
les cicatrices anormales et la présence de lésions cutanées. Il ling, dermocorticoïdes, sérum physiologique pour rincer les
faut évaluer le phototype selon la classification de Fitzpatrick yeux en cas de pénétration oculaire de l'acide (fig. 5.3).
qui permet de déterminer les risques de troubles pigmentaires Le premier temps consiste à appliquer une solution pré-
et le photovieillissement selon la classification de Glogau. peeling qui est une lotion dégraissante avec acétone pour
Une photographie sera réalisée avant tout traitement. éliminer le film hydrolipidique de surface et/ou un mélange
Les précautions (voir plus haut) doivent être rappelées au contenant différents acides à faible concentration. Le but est
patient. d'homogénéiser le pH de la peau. Avant l'application du pee-
Les explications concernant les avantages et inconvénients ling, les zones lésées ou érythémateuses (narines lors de
des peelings permettront de faire le bon choix en accord rhume, petite lésion excoriée) seront protégées par de la
avec le patient. Le point marquant des peelings superficiels vaseline ou une crème protectrice spécifique.
est l'absence d'éviction sociale ou sa modération ; ils ont la Concernant le peeling lui-même, le premier peeling à l'AG
réputation d'être des «  lunch peel ». est réalisé avec la concentration la plus faible (20 %) qui sera
Les phototypes I à III sont de bonnes indications. À partir du augmentée progressivement lors des séances ultérieures si la
phototype IV, le risque d'hyperpigmentation post-inflammatoire tolérance est bonne, jusqu'à une concentration de 70 %. En
est significatif et demande une prise en charge plus importante cas de rougeur, de croûtelles, la concentration du peeling
avec une préparation cutanée très stricte pour avoir une tolé- restera celle du peeling précédent.
rance optimale, associant des actifs mettant au repos la mélanine L'application de 2 à 3 ml de solution peeling se fait le plus sou-
si nécessaire et une photoprotection rigoureuse après le peeling. vent au pinceau, à la compresse ou au coton-tige spécifique en
commençant par le front, puis une joue, le menton et en remon-
Protocole du peeling AHA tant sur la joue opposée vers le front. Le nez et la lèvre supérieure
sont traités ensuite. Les peelings superficiels peuvent être appli-
qués sur le cou, application réalisée en dernier et qui sera la pre-
Phase prépeeling mière neutralisée (fig. 5.4). Le patient doit garder les yeux fermés
Préparation indispensable, réalisée au domicile par le patient, la pendant toute la procédure. Il faut en moyenne 1 à 2 minutes
phase prépeeling doit débuter au moins 15 jours avant le pee- pour appliquer l'acide sur l'ensemble du visage. Le praticien sur-
ling. Elle permet non seulement de préparer la peau au peeling, veille l'apparition de zones de rougeur et interroge le patient sur
mais aussi de vérifier la bonne tolérance aux acides utilisés. Les les sensations ressenties ; une sensation de brûlure importante
protocoles utilisent les acides qui serviront plus tard au peeling ou un prurit localisé doivent faire commencer la neutralisation.
avec un dosage plus faible. Ils ont souvent une acidité proche La neutralisation s'effectue avec une solution adaptée
de 3 qui permet déjà une stimulation de la peau. basique, bicarbonatée. Ces solutions neutralisantes stoppent
La crème contenant les actifs acides est appliquée soit tous l'action du peeling, mais comportent d'autres constituants
les soirs, soit matin et soir. Sa composition est fonction du limitant le dégagement de chaleur qui accompagne la neutrali-
type de peau et des indications du peeling  : en cas d'hé- sation. Elle est soit localisée au fur et mesure de l'apparition de
liodermie, AG, AL ou ROL associés à de la gluconolactone ou zones de rougeurs, soit intéresse l'ensemble de la zone traitée
à la vitamine C pour ses effets anti-oxydants. après le temps de pose recommandé, habituellement de 3 à
Une protection solaire quotidienne rigoureuse sera rajoutée 5 minutes. Il est utile de s'aider d'un chronomètre. Le contrôle
dès les premiers jours de soleil. Si le risque d'hyperpigmenta- visuel lors de la pose du peeling est une étape importante
tion est important, il faut prescrire un actif dépigmentant le ­permettant de neutraliser immédiatement si une rougeur ou
soir et y associer l'application d'une photoprotection au moins un aspect de frosting apparaît, sous peine d'effets secondaires
15 jours avant le peeling afin de mettre au repos les mélano- liés à l'épidermolyse non souhaitée (croûtes, cicatrices).
cytes. Pour certains auteurs, elle doit commencer au moins La neutralisation s'accompagne de l'apparition d'un
1 mois avant et continuer 3 mois après le peeling quel qu'il soit. érythème souvent modéré associé à une sensation de c­ uisson.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 5. Peelings superficiels

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Fig. 5.3  Le kit peeling acide glycolique (AG).
1. Crème protectrice. 2. Prépeel. 3. Neutraliseur. 4. Peel. 5. Pinceau. 6. Godet. 7. Eau thermale. 8. Dermocorticoïde. 9. Compresses.
Source : M. Baspeyras.

Il existe une variante de neutralisation avec contrôle visuel


coloré, «  neutralizer versicolor ». Le peeling neutralisé devient
bleu si la neutralisation est efficace.
En fin de peeling, une crème émolliente est appliquée ; elle
peut être associée à un dermocorticoïde en cas d'inflamma-
1 tion. Certains associent une séance de LED dans le but de
renforcer l'efficacité du peeling et de limiter les effets secon-
daires en cas de rougeur ou d'inflammation.

La phase postpeeling
La peau peut paraître rugueuse ou plus sèche durant 2 à
3  jours avec parfois une desquamation légère à modérée.
5 L'utilisation d'eau thermale et l'application d'une crème
2 4
hydratante cicatrisante haute tolérance plusieurs fois par
jour permettent une récupération rapide.
6 Les recommandations pendant cette phase sont les suivantes :
■ les expositions solaires sont contre-indiquées et une crème

solaire écran total est systématiquement prescrite ;


3 ■ il ne faut pas gratter ou arracher les croûtes survenant sur

d'éventuelles zones d'épidermolyse ;


■ éviter piscine, sauna, hammam ;
7 ■ ne pas gommer, exfolier, irriter la peau ;

■ prévenir son praticien en cas de réaction non prévue (per-

sistance anormale d'une sensation de brûlure, douleur, etc.).


Après 3 à 5 jours, dès que la peau a retrouvé un aspect
normal, la préparation prépeeling est reprise avant la réali­
Fig. 5.4  Schéma de l'application d'un peeling zone par zone. sation d'un autre peeling selon le schéma thérapeutique
préétabli. Selon les indications, les peelings sont réalisés
Lors de la neutralisation, la réaction chimique acide/base tous les 15 jours, ou toutes les 3 à 4 semaines, mais il faut
peut provoquer un effet de mousse. toujours plusieurs sessions pour obtenir un résultat.
La protection oculaire de cette étape par du coton doit être
soigneuse car le bicarbonate peut déclencher des kératites.
Ensuite, l'application d'eau thermale ou de compresses d'eau Séquences des peelings et concentration
froide rafraîchit le visage et finit d'enlever les produits Le peeling suivant peut être réalisé si la tolérance du précé-
chimiques. Elle est insuffisante pour neutraliser les acides forts. dent a été bonne et les suites conformes avec une reprise des

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Section 2. Les peelings
Chapitre 5. Peelings superficiels

soins prépeelings dans les délais prévus. Il faut à nouveau s'as- c­ icatrisante. La protection solaire doit être très rigoureuse
surer que les précautions ont été bien respectées. La concen- du fait du risque d'hyperpigmentation post-inflammatoire.
tration du peeling peut ainsi être augmentée p ­ rogressivement Comme pour les autres peelings, la préparation cutanée est
par palier à chaque séance pour atteindre 70 %. importante pour une pénétration homogène.

Protocole peeling acide Protocole peeling


trichloracétique (TCA) superficiel acide salicylique (AS)
Pour rester superficiel, la concentration du TCA ne doit pas L'application d'AS se fait au pinceau, sur une peau bien prépa-
dépasser 15 % (Masse/masse) et l'application doit se limiter à un rée. En fin d'application, les cristaux d'acide se déposent sur la
aller et retour (car un peeling TCA 15 % appliqué plusieurs fois de peau, réalisant un aspect de poudre blanche. Ce n'est pas un
façon superposée peut descendre dans les couches profondes de frosting, il n'y a pas de neutralisation ; la poudre est éliminée
l'épiderme et devenir un peeling moyen ; voir chapitre  6). Il par un rinçage à l'eau qui parfois déclenche des sensations de
nécessite de bien connaître les phases de coagulation de la peau brûlure. Une crème émolliente est ensuite appliquée.
liée au TCA. Le TCA 15 % est appliqué au coton-tige ou à la com-
presse non tissée, très progressivement zone par zone en surveil- Protocole peeling rétinol (ROL)
lant bien la couleur de la peau qui doit rester rosée, avec au
maximum un frosting léger. Le TCA ne se neutralise pas. Après utilisation d'une lotion prépeeling, le peeling, dont l'as-
L'application d'eau fraîche ou d'eau thermale soulage le pect est un peu huileux, est appliqué au pinceau (fig. 5.5). Il a
patient et sera suivie de celle d'une crème émolliente une odeur assez forte, parfois un peu gênante lors de

A B

C D
Fig. 5.5  Peeling rétinol : avant (A, C) et après (B, D) une seule séance.
Source : M. Baspeyras.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 5. Peelings superficiels

l­'application sur la lèvre supérieure. Le patient est surveillé Chez la femme enceinte
quelques minutes pour vérifier sa tolérance et repart ensuite
Les peelings superficiels aux acides de fruits sont réalisables
sans aucun rinçage ou aucune application de quoi que ce soit.
chez la femme enceinte. L'AG et l'AL sont utilisés sans diffi-
Le peeling peut rester en place jusqu'à 6 à 8 heures selon le type
culté et rendent de grands services lors d'acné. Ils sont sou-
de peau et sa tolérance ; il est ensuite rincé par le patient avec
vent associés aux LED rouge et jaune pour une action plus
de l'eau fraîche. Une crème émolliente postpeeling est alors
complète et rapide (fig. 5.6). La LED bleue est à éviter car elle
appliquée.
favorise et pérennise l'hyperpigmentation post-inflamma-
toire. En revanche, il ne faut pas utiliser les bêta-hydroxya-
Comment optimiser cides (AS) ou les rétinoïdes (ROL interdit pendant la
et cas particuliers grossesse). Il faut aussi éviter le TCA, certes non toxique,
mais à fort risque pigmentaire.
Optimisation des peelings superficiels
Le respect des protocoles, la répétition des séances toutes les Acné et isotrétinoïne
2 ou 3 semaines conditionnent le résultat. Pour un mélasma, Il est conseillé de ne pas utiliser de peelings pendant et au
il faut limiter au maximum le risque inflammatoire et les moins 6 mois après un traitement par isotrétinoïne pour évi-
séances seront plutôt mensuelles. ter la survenue d'un retard de cicatrisation ou d'autres com-
plications liées à l'atrophie pilosébacée. Une étude récente
Chez l'homme réalisée par Spring [14] a montré qu'il n'y a pas de preuve
Le peeling chez l'homme nécessite plus de traitements ou de suffisante pour ne pas réaliser de peelings ou de chirurgie au
plus fortes concentrations du fait de la plus grande quantité cours du traitement par isotrétinoïne. Les auteurs concluent
de glandes sébacées et de follicules pileux. Il faut interdire le que c'est au praticien de bien évaluer la balance bénéfice/
rasage avant et après le peeling [13]. risque (fig. 5.7).

Fig. 5.6  Femme enceinte : peeling acide glycolique et LED.


Source : M. Baspeyras.

Fig. 5.7  Avant-après nettoyage de peau, ablation des kystes et peelings.


Source : M. Baspeyras.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 5. Peelings superficiels

Association de techniques Effets secondaires


Il faut savoir associer d'autres techniques (fig. 5.8) : des peelings superficiels
■ LED en fin de séance pour renforcer l'efficacité et limiter
les effets secondaires ; Une bonne préparation de ces peelings associée à une bonne
■ mésothérapie et LED : la séance de mésothérapie est effec-
compréhension limitent les effets secondaires, qui sont rares,
tuée immédiatement après le peeling, après la neutralisa- mais qui exposent au risque de plainte judiciaire.
■ Effets secondaires immédiats et attendus  : sensation de
tion, et sera si possible suivie d'une séance de LED ;
■ nettoyage de peau dermatologique (ou dékystage) : temps
brûlures, desquamation superficielle et érythème sont les
important pour la prise en charge des acnés microkys- plus fréquents et cèdent en quelques jours avec l'applica-
tiques. Deux protocoles sont possibles selon le type de tion de crèmes cicatrisantes et/ou corticoïdes.
■ Effets secondaires plus tardifs : ils débutent tout de suite
peeling choisi : soit ouverture des kystes suivie d'applica-
tion de TCA à 15 ou 20 %, soit peeling aux AHA suivi de après le peeling ou apparaissent les jours suivants.
● Un œdème rare, pas toujours expliqué, cède en 2 à
l'ouverture des kystes (fig. 5.9 et 5.10) ;
■ injection d'acide hyaluronique en fin de séance du
3  jours avec des massages doux et l'application d'eau
peeling. thermale ou de compresses humides fraîches ; il faut
D'autres associations sont possibles (laser ou microneed- proscrire l'application de glace qui brûlerait la peau.
● Les allergies aux actifs des peelings sont rares et habi-
ling), mais celles-ci font passer le peeling de superficiel à
moyen avec perte de son caractère ambulatoire [10]. tuellement détectées, car ceux-ci ont déjà été utilisés

Fig. 5.8  Protocole combiné de 4 peelings d'acide glycolique et une injection d'acide hyaluronique.
Source : M. Baspeyras.

Fig. 5.9  Avant-après nettoyage de peau, TCA répétés.


Source : M. Baspeyras.

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Chapitre 5. Peelings superficiels

Fig. 5.10  TCA 20 %, LED rouge et jaune, avant-après 4 séances.


Source : M. Baspeyras.

lors de la phase prépeeling. En revanche, l'application de surface peut permettre une extension des lésions herpé-
produits en postpeeling non prescrits, en particulier des tiques et laisser des cicatrices atrophiques.
vaselines non purifiées, des huiles essentielles, peut ● Une surinfection microbienne est rare, sauf en cas de

déclencher des réactions sur les peaux fragilisées par le grattage.


peeling. ● Des poussées de folliculite ou d'acné peuvent nécessiter

● Une desquamation en quelques jours peut traduire une des antibiotiques locaux, parfois des antibiotiques per
pénétration trop importante, vite résolue par des hydra- os ou le changement du peeling utilisé (par exemple
tants. Il faut interdire les gommages et le grattage. La passer d'un acide de fruit à un AS).
desquamation peut être secondaire à l'application de ● Une épidermolyse (fig. 5.12) visible pendant le peeling

topiques non adaptés (fig. 5.11). aura été immédiatement traitée par neutralisation,
● Un prurit persistant existe parfois et doit faire modifier democorticoïde et cicatrisant ; elle est source de croûtes
le type de peeling. et de cicatrices habituellement temporaires.
● Un érythème persistant plusieurs jours peut traduire ● L'hyperpigmentation post-inflammatoire (HPI) est liée à

une intolérance aux acides plus concentrés ; il faut alors la mauvaise préparation de la peau, au mauvais choix de
rester à des concentrations plus faibles et vérifier la pré- peeling par rapport au phototype et à une mauvaise
paration de la peau. gestion du soleil. Son traitement est long et difficile,
● Des grains de milium traduisent souvent l'emploi de associant une protection solaire drastique, des agents
crèmes trop occlusives en postpeeling ; ils peuvent être dépigmentants, des peelings dépigmentants, des lasers
ouverts. ou IPL.
● Une poussée d'herpès  : des érosions douloureuses L'insatisfaction du patient ou l'insuffisance de résultat sont le
doivent être considérées comme un herpès et traitées fait d'une mauvaise compréhension des peelings superficiels par
comme tel ; en effet, du fait de la dissociation de la le patient qui attend beaucoup, et du médecin qui promet trop.
couche cornée, il n'y a souvent pas les signes cliniques La procédure des peelings superficiels est récapitulée dans
classiques de l'herpès et la diminution des défenses de l'encadré 5.2.

Fig. 5.11 Desquamation.
A. Application de peroxyde de benzoyle avant le troisième peeling AHA 50 %. B. Cicatrisation complète en 15 jours par crème cicatrisante et 5 LED rouge.
Source : M. Baspeyras.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 5. Peelings superficiels

répétition des peelings pour obtenir l'amélioration de l'hé-


liodermie avec homogénéisation du teint, de la texture de la
peau, des lésions d'acné.

Références
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[2] Fischer  TC, Perosino  E, Poli  F, et  al. Chemical peels in aesthetic
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Encadré 5.2 micals peels: a review of fundamentals and step-by-step algorith-
mic protocol for treatment. J Clin Aesthet Dermatol 2018;11(8):
Procédure des peelings superficiels 21–8.
(d'après [5]) [6] Van Scott EJ, Liu RJ. Alpha hydroxy acids: procedures for use in
clinical practice. Cutis 1989;43:222–8.
■ Consultation préalable : [7] Dinardo JC, Grove GL, Moy LS. Clinical and histological effects of
● antécédents, y compris cicatrice et troubles glycolic acid at different effects of AHA on photoaged skin: A
pigmentaires pilot clinical, histologic, and ultrastructural study. J Am Acad
Dermatol 1996;34:187–95.
● examen clinique, thérapeutique en cours
[8] Ditre CM, Griffin TD, Murphy GF, et al. Effects of alpha-hydroxy
● expliquer le peeling
acids on photoaged skin: a pilot clinical, histologic, and
● prescrire le traitement prépeeling, la prophylaxie ultrastructural study. J Am Acad Dermatol 1996;34(2 Pt 1):
antivirale, les soins pendant et le postpeeling 187–95.
● recueillir le consentement éclairé du patient [9] Wójcik A, Kubiak M, Rotsztejn H. Influence of azelaic and mande-
● photographie
lic acid peels on sebum secretion in ageing women. Postepy
Dermatol Alergol 2013;30(3):140–5.
■ Prépeeling : installer le patient, peau nette, lotion [10] Sumita JM, Ricci Leonardi G, Bagatin E. Tretinoin peel: a critical
prépeeling, protection des zones irritées, enlever les view. An Bras Dermatol 2017;92(3):363–6.
bijoux [11] De Kligman, Draelos ZD. Combination superficial peels with sali-
■ Peeling minuté et surveillé, neutralisé si besoin, eau cylic acid and post-peel reinoids. J Drug Dermaol 2016;15(4):
thermale, crème, LED 442–50.
■ Reprise de préparation avant les autres sessions [12] Proksch  E. pH in nature, humans and skin. J Dermatology

2018;45(9):1044–52.
[13] Reserva J, Champlain A, Seaver L, Tung R. Chemical peels: indica-
Conclusion tions and special considerations for the male patient. Dermatol
Surg 2017;43(Suppl 2):S163–73.
[14] Spring  LK, Krakowski  AC, Alam  M, et  al. Isotretinoin and
Les peelings superficiels sont faciles à réaliser, sans éviction
timing of procedural interventions: a systematic
sociale, pour tous les phototypes et toutes les zones, mais il review with consensus recommendations. JAMA Dermatol
faut bien comprendre l'importance de la préparation, de la 2017;153(8):802–9.

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Section 2. Les peelings

Chapitre 6
Peelings moyens
J.-L. Vigneron, S. Lederlé

Profondeur d'action des peelings partielle. Elles sont équivalentes en efficacité à un TCA 30.
L'inconvénient est la survenue fréquente d'un érythème de
moyens et produits utilisés quelques semaines, ce qui est rare avec un TCA pur.
Le principe actif du peeling imprègne l'épiderme et atteint la
jonction dermo-épidermique sans la détruire (voir fig. 6.1). Mode d'action de l'acide
Les peelings moyens sont pratiqués avec les produits
suivants.
trichloracétique (TCA)
La formule d'Unna comportant de la résorcine n'est presque Le TCA est la molécule reine des peelings moyens [1, 2].
plus employée car certains composants (ceyssatite) sont Celle-ci n'a pas de toxicité systémique. Plus le TCA est
devenus rares et les rebonds pigmentaires sont très fréquents. concentré et acide, plus il pénètre profondément à la
Son intérêt est l'absence quasi-totale de chaleur ressentie. recherche d'eau pour se neutraliser au fur et à mesure de sa
L'acide trichloracétique (TCA) est employé en solution de progression dans les différentes couches cutanées, provo-
20 à 30 %. Soulignons qu'il faut parler en masse/masse. Un TCA quant une coagulation des protéines. L'action du TCA est
30 % comporte 30 g de cristaux secs de TCA dilués dans 70 g reproductible ; elle est proportionnelle à la quantité appli-
d'eau. A contrario, aux États-Unis en particulier, un TCA 30, quée et doit être contrôlée visuellement grâce au change-
c'est 30 g de cristaux additionnés de 100 ml d'eau (masse pour ment de couleur de la peau (les différents degrés de givrage
volume, soit TCA 23). C'est pourquoi les publications améri- sont indiqués dans l'encadré 6.1). C'est un processus irréver-
caines concernant les TCA 50 ne sont en fait que des TCA 33. sible sans neutralisation. La couleur de la peau variera du
La solution peut être préparée par le pharmacien, avec l'avan- blanc floconneux ou moucheté au blanc intense. Un blanc
tage d'un faible coût, mais l'inconvénient d'être moins stable gris signifie une profondeur trop intense avec un risque
avec une pénétration inhomogène. Les laboratoires commer- cicatriciel.
cialisent des TCA tamponnés par l'addition de saponines et/ou
de glycérine qui stabilisent la molécule. La pénétration est mieux
contrôlée, l'acte est plus facilement reproductible. Résultats cliniques et indications
Les formules de TCA associé à un petit pourcentage de Les peelings moyens ont en commun de provoquer une des-
phénol présentent l'avantage d'induire une anesthésie locale quamation qui dure de J4 à J6 [3].

Fig. 6.1  Peeling TCA 30 %. Effet sur les taches pigmentaires, le teint, la tonicité.
A. Avant. B. Après 6 semaines.
Source : J.-L. Vigneron.

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Chapitre 6. Peelings moyens

Après le renouvellement épidermique forcé de la première La technique d'application doit faire l'objet d'un ensei-
semaine, on observe avec un « vrai » peeling moyen, dont la gnement pratique car la profondeur du peeling est contrô-
référence est le TCA 25 à 30 % : lée visuellement en temps réel pour atteindre différents
■ un très net éclaircissement du teint ; niveaux de givrage correspondant à différentes profon-
■ la disparition de la composante épidermique des taches pig- deurs (encadré  6.1). L'application est faite de façon
mentaires et de tout ou partie de la composante dermique ; « active » lors d'un TCA 30  %. On ne se contente pas de
■ la disparition des kératoses actiniques ; déposer le liquide sur la peau. Il faut frotter pour impré-
■ une action nette sur les rides, dont certaines peu pro- gner. On utilise soit une compresse tissée, soit un gros
fondes sont nivelées, sans toutefois que leur empreinte coton-tige résistant.
disparaisse totalement. Il est impératif de bien déterminer préalablement le niveau
Après environ 2 mois, il existe une amélioration de la fer- auquel il sera nécessaire de descendre pour obtenir la stimu-
meté de la peau conséquence des effets dermiques, à savoir lation et la desquamation. Ce niveau peut varier selon les
une relance des synthèses fibroblastiques. zones et les anomalies à corriger.
Ainsi, les peelings moyens seront proposés dans les Pendant l'application du peeling, il faut être capable de lire
héliodermies de niveau 2. Les niveaux 3 seront souvent amé- en temps réel l'effet clinique.
liorés, mais insuffisamment. Le but est de faire « givrer » la peau, d'obtenir un blanc uni-
forme, persistant 3  minutes et suivi d'un œdème. Pour
En pratique ­obtenir ce résultat, il faut surveiller l'évolution de la couleur
et de l'œdème des zones déjà traitées. Si ce n'est pas persis-
tant, il faut réappliquer.
Information à la patiente
Il est assez facile d'expliquer à une patiente les avantages et Encadré 6.1
les suites d'un peeling moyen en l'illustrant de quelques pho-
tographies. La desquamation de quelques jours n'inspire pas Peeling TCA : lecture en temps réel
de crainte, pour peu qu'on explique que cette desquamation La profondeur du peeling TCA semble corrélée avec l'intensité
est indolore. La rapidité du retour à un visage présentable du givrage cutané. Le TCA est un « cautère chimique » qui coa-
rassure. Quant à l'acte, il ne faut jamais utiliser le mot « brû- gule les protéines de la peau. C'est cette coagulation qui est à la
lure », et ne pas laisser la patiente l'utiliser. Il faut parler de base de la formation du givrage blanc observé lorsque le TCA
remplacement de l'épiderme, de stimulation. On s'enquiert est appliqué. C'est pourquoi le degré de givrage et celui d'œdème
de l'existence d'un herpès du visage depuis moins de 5 ans. cutané sont utilisés pour estimer la profondeur du peeling.
Le devis est joint aux documents d'information et à Les niveaux de pénétration et de givrage du TCA peuvent
l'ordonnance. être classés en quatre groupes :
■ niveau O – pas de givrage : la peau est lisse et brillante,
Conditionnement de la peau mais il n'y a pas de givrage et pas d'érythème. C'est un
peeling « très superficiel » qui au maximum décollera
Avant le peeling une partie du stratum corneum ;
La peau doit être préparée. Il faut accélérer le turn-over épider- ■ niveau 1 – léger givrage irrégulier (fig. 6.2) : en plus

mique et réduire la couche cornée afin d'uniformiser la perméa- d'apparaître brillante, la peau montre quelques points
bilité, au moyen d'acide rétinoïque ou d'acide g­ lycolique à 30 %. érythémateux avec quelques points blancs qui sont un
Il faut, sur certains phototypes, ralentir la mélanogenèse par givrage léger. C'est un peeling épidermique superficiel
l'hydroquinone. On prendra garde à ne pas aller jusqu'à l'irrita- qui provoquera un peluchage de 3 jours ;
tion qui créerait des points d'hyperpénétration du peeling.
Après le peeling
Le traitement à domicile sera poursuivi longtemps : vitamine C
haut pourcentage + écran solaire le matin et hydratation et/ou
rétinol le soir. Il faut rappeler qu'un peeling moyen peut avoir
comme effet secondaire une pigmentation post-inflammatoire
parfois très dense, survenant vers le 20e jour ; cela requiert de la
vigilance, avec corticothérapie locale à visée anti-inflamma-
toire et/ou dépigmentant selon la nécessité.

Peeling TCA 30 % sur le visage


Le nettoyage est réalisé au moyen d'une lotion à base d'acide
glycolique pendant 5  minutes, essuyage à l'alcool 60°, puis
des photographies sont prises [4]. L'utilisation d'acétone Fig. 6.2  Niveau 1 : léger givrage irrégulier.
n'est pas recommandée par l'auteur. Source : J.-L. Vigneron.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 6. Peelings moyens

C'est le TCA 30  % qui permet d'atteindre le niveau de


■ niveau 2 – givrage blanc ponctué de zones roses
givrage 3. Son application est cuisante et nécessite parfois,
(fig. 6.3). La peau est donc d'un blanc uniforme, mais on
selon la patiente (20 % des cas), une prémédication légère ou
perçoit derrière une autre couleur : un rose très net. C'est
une anesthésie tronculaire. Une cryoventilation (type
un peeling épidermique qui intéresse toute l'épaisseur
Zimmer) soulage bien cette sensation. Dans tous les cas, le
épidermique et va réépidermiser en 5 jours ;
calme et la voix de l'opérateur sont primordiaux : « Anesthésie
locale, anesthésie vocale  ! »
Le TCA additionné de phénol est beaucoup moins
douloureux.
On applique ensuite un baume « barrière » pendant les
6 jours nécessaires à la reconstitution de l'épiderme.

Les boosters du peeling TCA classique


Des techniques ont été proposées afin d'améliorer les résul-
tats juste avant ou pendant le peeling.

Application préalable de cryogène


(azote ou neige carbonique)
Fig.  6.3  Niveau 2  : givrage blanc, peeling de toute la hauteur de Sur un visage comportant des taches actiniques anciennes et
l'épiderme. « épaisses », une cryothérapie peu appuyée est pratiquée
Source : J.-L. Vigneron. juste avant le peeling.
niveau 3 – givrage blanc compact (fig. 6.4). La peau est

Application préalable de lumière pulsée
d'un blanc intense, le toucher est celui d'un œdème
dense. On ne perçoit pas de couleur rose en arrière-plan. Pour des taches actiniques très contrastées, un passage de
C'est un peeling qui atteint par point le derme papillaire lumière pulsée avec des paramètres faibles va déshydrater les
et la réépidermisation prendra 7 jours. taches et favoriser la pénétration élective du peeling. C'est le
« PhotoPeel » (voir encadré 7.1).

Traitement des cicatrices en pic à place


Les cicatrices sont plutôt la cible du peeling profond, mais une
technique a été proposée dès 2002 : l'utilisation précise au cure-
dent de TCA 70 % sur les cicatrices atrophiques en séances ité-
ratives. Cette technique avec une telle concentration nécessite
un apprentissage. Elle est très efficace sur les cicatrices étroites
et profondes. Le cure-dent en bois est l'outil de choix.
On prélève 0,5 ml dans une petite cupule très stable. On
laisse tremper 5 minutes l'extrémité du cure-dent dans le
TCA  70. En effet, le bois du cure-dent est très dense et il
faut quelques minutes pour l'imprégner. Il ne faut pas
déposer une goutte ; ce serait beaucoup trop et le résultat
serait une nécrose. La quantité déposée doit être très faible.
Le cure-dent semble sec ; on pose la pointe sur le fond de la
cicatrice, on attend 15 secondes et le liquide descend dans
la peau par capillarité. Ensuite, un givrage apparaît, mais
seulement après quelques dizaines de secondes et il s'élar-
git ensuite un peu. Quand on a fait une zone, on passe à la
suivante. Ensuite, on examine la zone précédente où les
points traités doivent toujours être d'un blanc compact. Si
ce n'est pas le cas, on réapplique comme fait initialement.
Fig. 6.4  Niveau 3 : givrage blanc compact.
Peeling jusqu'au derme papillaire. La réépidermisation prendra 7 jours. Actions préalables destinées à favoriser
Source : J.-L. Vigneron. la pénétration
Certains utilisent une action mécanique (toile émeri), une
Plus le peeling réalisé au TCA descend profond, plus le givrage
action photonique (laser CO2), une action d'électrodissection,
blanc s'installe vite et est intense. On peut choisir une action
afin de désépaissir la couche cornée. Ensuite, ils appliquent le
différenciée selon les zones et les anomalies à corriger.
TCA 30 et obtiennent ainsi une pénétration plus profonde.

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Chapitre 6. Peelings moyens

Il faut mettre en garde vis-à-vis de ce type de pratique Complications [5, 6]


qui crée souvent des cicatrices. La molécule de TCA est
petite, pénétrante et rompt la surface des cellules. Si l'on
veut agir plus profondément, il est plus sûr d'utiliser une Dyschromie
formule phénolée de peeling profond, équilibrée et Après cicatrisation, la surface peut parfois présenter des
p rogressive, dont l'action de stimulation est très
­ zones dyschromiques  : soit des zones blanches par une
supérieure. vasoconstriction réactionnelle trop intense –  c'est transi-
toire –, soit plus tard, après la 3e semaine, une pigmentation
Suites normales attendues post-inflammatoire, qui sera rapidement traitée par hydro-
quinone. Une hypopigmentation durable serait due à une
Le patient part après quelques minutes avec un léger œdème, pénétration trop profonde et à une altération des mélano-
une couleur rose blanchâtre. Ensuite, la peau évolue vers le cytes. Le TCA est une molécule de peeling moyen et n'est
brun et flétrit pour finalement desquamer d'abord au centre pas maîtrisable au-delà de l'épiderme.
du visage (fig. 6.5).
Les 6e à 7e jours, l'exfoliation est terminée. La peau est un
peu rose et souvent « rugueuse » car les kératinocytes ne Insuffisance de résultat
sont pas encore cohésifs. Il est important que le patient Réaliser un vrai peeling moyen uniforme nécessite un geste
comprenne qu'il ne faut pas enlever les croûtes qui se sont régulier avec un autocontrôle de son geste et toujours un œil
formées pendant cette phase desquamative. sur la zone traitée précédemment. Si une zone n'a pas été
Après la 1re  semaine, le pli sus-palpébral peut parfois suffisamment imprégnée, la desquamation ne sera pas assez
présenter un petit retard de cicatrisation. La peau dans profonde et le résultat insuffisant.
son ensemble peut rester sensible 3  jours de plus
(fig. 6.6).
Surinfection
L'infection bactérienne est très rare. On ne la rencontre que
dans des cas de manque d'hygiène caractérisé. Par précau-
tion, le visage doit être lavé chaque jour au moyen d'un anti-
septique classique.
L'herpès est évité par prescription d'un antiherpétique oral
5 jours avant le peeling et pendant la semaine de cicatrisa-
tion ou jusqu'à 20 jours pour certains. Nous conseillons cette
précaution si une poussée herpétique a existé dans les cinq
années précédentes.

Localisations extrafaciales
Le visage a d'extraordinaires capacités de réépidermisation, à
la différence du reste du corps où la densité d'annexes est
très inférieure. La réépidermisation est moins bonne et
expose à un risque de cicatrice. Certaines précautions per-
mettent cependant de descendre suffisamment pour obte-
nir une bonne stimulation et de bons résultats [7].

Cou et décolleté
On ne dépasse pas un TCA 20 et on ne va pas au-delà d'une
coloration rosée avec un blanc floconneux.
Sur le décolleté, nous préférons appliquer le même jour
successivement plusieurs méthodes utilisées à puissance
faible ; par exemple passage d'un IPL, puis TCA 18 au coton-
tige sans frotter, et éventuel needling (méthode dite
Fig. 6.5  Avec du TCA 33 %, desquamation classique au 5e jour. TriBoost®). Cette combinaison sera répétée deux ou trois fois
Source : J.-L. Vigneron. à 3 semaines d'intervalle.

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Chapitre 6. Peelings moyens

Fig. 6.6  Peeling moyen par TCA 30 % – effet sur le teint et la tonicité après 6 mois. Noter l'effet très net sur la peau fine des paupières chez une femme
jeune. Source : J.-L. Vigneron.

Membres séance. Un exsudat lymphatique persiste plusieurs


semaines et sera recouvert de pansements hydrocellu-
Mains, avant-bras, jambes peuvent être améliorés concer-
laires dans un premier temps puis hydrocolloïdes. Un
nant  : signes d'héliodermie, altération texturale, sécheresse
érythème persiste quelques semaines et une exposition
cutanée, lentigos et kératoses actiniques. La couche cornée
solaire mesurée sera autorisée après retour à une colora-
est très cohésive, comme vernissée. La pénétration est
tion normale.
longue à obtenir ; ne pas chercher plus qu'un blanc rosé. La
La motivation des patientes est telle que plusieurs
jambe ou l'avant-bras peuvent supporter un peeling plus
séances de cette intensité, plusieurs années successives,
appuyé, mais le résultat ne sera pas meilleur qu'avec une
sont parfois demandées. Le risque est l'hypopigmentation
combinaison de méthodes type TriBoost®.
(fig. 6.7).

Laxité et vergetures de l'abdomen Aspects médico-légaux


Le Dr Sylvie Lederlé a mis au point une technique très agres-
sive dans cette indication [8]. Il faut avertir son assureur de la réalisation de peeling moyen,
Du TCA 20 est appliqué. La douleur est atténuée par un qui doit faire l'objet d'une mention spéciale dans le contrat
flux d'air réfrigéré. Des corticoïdes sont appliqués en fin de de responsabilité civile professionnelle.

Fig.  6.7  Évolution sur 4  ans chez une jeune femme de 25  ans ayant eu deux grossesses précoces. Deux peelings TCA 20  % sont réalisés à 4  ans
d'intervalle.
A. Avant le traitement, 1er TCA à 20 %. B. 2 ans plus tard. C. 2 mois après le 2e TCA à 20 % et ablation des deux nævus.
Source : S. Léderlé.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 6. Peelings moyens

Conclusion [3] Fulton Jr JE, Porumb  S. Chemical peels. Their place within the
range of resurfacing techniques. Am J Clin Dermatol
2004 ;5(3):179–87.
Les peelings moyens sont très efficaces pour améliorer l'hé-
[4] Perkins  NW, Smith Jr SP, Williams 3rd EF. Perioral rejuvenation:
liodermie de niveau 2 et le TCA est la molécule la plus sûre complementary techniques and procedures. Facial Plast Surg Clin
et la plus performante. North Am 2007 ;15(4):423–32.vi.
Ce qui est nouveau est que certains états cutanés – kéra- [5] Fischer TC, Perosino E, Poli F, et al. Chemical peels in aesthetic der-
toses actiniques, vergetures – peuvent être traités et les pro- matology: an update 2009. J Eur Acad Dermatol Venereol
tocoles d'utilisation en extrafacial sont mieux définis. 2010 ;24(3):281–92.
[6] Duffy DM. Alpha hydroxy acids/trichloroacetic acids risk/benefit,
La poursuite de soins à domicile avec l'application d'actifs
strategies. A photographic review. Dermatol Surg 1998 ;24(2):181–9.
antivieillissement est un complément indispensable pour quiz 190-1.
prolonger l'efficacité du peeling. [7] Cook KK, Cook Jr WR. Chemical peel of nonfacial skin using glyco-
lic acid gel augmented with TCA and neutralized based on visual
Références staging. Dermatol Surg 2000 ;26:994–9.
[1] Dewandre  L. Peelings chimiques. Paris  : Elsevier Masson ; 2006. [8] Lederlé S. Choix d'un peeling en fonction de sa localisation. J Med
p. 3–9. Esth Chir Dermatol 2017 ;175.
[2] Landau M. Chemical peels. Clin Dermatol 2008 ;26:200–8.

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Section 2. Les peelings

Chapitre 7
Peelings dépigmentants
J.-L. Vigneron

Introduction Encadré 7.1

Avoir un teint uniforme et sans taches a toujours été très Protocole du PhotoPeel (utilisable sur le
recherché. Une belle peau lumineuse est immédiatement visage, le décolleté, les mains)
remarquée. Toutes les civilisations ont chanté les teints clairs
et, de nos jours, l'Asie est la plus exigeante. 1. Utilisation de l'IPL sur toute la zone ou du laser QSY uni-
Nous évoquons ici les taches pigmentaires. Parmi celles-ci, quement sur les taches à dose légèrement inférieure à la
il faut différencier : dose requise classique dans cette indication. On obtient
■ les lentigos actiniques provoqués par le soleil générale-
ainsi une dessication des taches actiniques, sans action
ment. Ces taches sont d'un diamètre inférieur à 7–8 mm et sur la peau non tachée.
aux contours anguleux ; 2. Application d'acide trichloracétique à 18 ou 20 %. Dans le
■ les pigmentations post-inflammatoires qui surviennent
cas précis du PhotoPeel, l'application n'est pas faite en frot-
sur le lieu d'une réaction cutanée après un traumatisme, tant avec la recherche d'un givrage ; elle est faite au moyen de
une inflammation ou un geste médical ou chirurgical ; deux cotons-tiges jumelés, simplement passés sans appuyer
■ le mélasma ou chloasma formant des nappes plus ou
avec deux passages perpendiculaires sur toute la zone.
moins étendues et généralement symétriques sur le visage. 3. Cette application légère provoque un givrage sélectif des
Ce chapitre portera principalement sur le mélasma. Les taches actiniques qui sont devenues plus perméables du
taches actiniques et post-inflammatoires sont plutôt traitées fait de l'action photonique préalable.
par les peelings moyens (voir chapitre 6). 4. Les suites consisteront en une exfoliation sélective des
taches actiniques.
L'intérêt du PhotoPeel est de rendre le peeling sélectif pour
Traitement des taches actiniques un type de cible, les pigmentations actiniques, sans pour
(lentigos actiniques) autant avoir les conséquences fréquentes de l'IPL seule, à
savoir les « touches de piano » qui nécessitent plusieurs
Pour les lentigos actiniques du visage, quand ils représentent séances complémentaires d'IPL pour uniformiser la peau, et
un grand pourcentage de la surface, ils sont traités par un pee- sans problème de limite abrupte périphérique de traitement.
ling moyen, acide trichloracétique (TCA) 25 ou 30 %. Quand ils
sont peu nombreux, ils sont traités par IPL ou par laser ou par
cryothérapie, technique pour laquelle existe un risque d'hypo- accessible à un traitement comme le peeling qui accélère
pigmentation définitive sur les phototypes à phéomélanine. le turn-over et fait remonter le pigment. Ce peeling doit
Nous pouvons évoquer ici l'intérêt du PhotoPeel. Cette être progressif afin de ne pas provoquer une nouvelle
méthode permet, sur les phototypes clairs, le traitement inflammation et donc une stimulation des mélanocytes.
de taches actiniques nombreuses avec un résultat uni- On utilisera soit deux ou trois peelings mandéliques, car
forme et sans risque de dépigmentation. Le PhotoPeel est ces peelings superficiels ont l'avantage de ne jamais provo-
utilisable partout sur le corps (encadré  7.1 et voir quer d'inflammation ni d'épidermolyse, soit un peeling
chapitre 6). moyen TCA 25 ou 30 %, pour lequel il est prudent de faire
ensuite 3 semaines d'application d'une préparation à l'hy-
droquinone 4 %.
Hyperpigmentation
post-inflammatoire (HPI)
Traitement du mélasma ou
Les HPI se développent lors d'une réparation cutanée chloasma
lorsque les mélanocytes sont très stimulés dans le proces-
sus de cicatrisation. La prévention fait appel en premier Ce type de traitement (fig. 7.1 et 7.2) demande la compré-
lieu à la corticothérapie locale si une inflammation pro- hension et l'adhésion de la patiente (encadré 7.2).
longée persiste après tout acte, qu'il s'agisse de peeling, Il n'existe pas de « traitement minute » du mélasma. Si une
d'abrasion ou de laser. Si l'HPI survient, la surcharge pig- patiente demande ou espère cela, il faut d'emblée clarifier
mentaire est principalement épidermique et donc plus l'objectif du traitement.
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Chapitre 7. Peelings dépigmentants

Fig. 7.1  A. Mélasma chez une patiente de phototype IV. B. Résultat après préparation dépigmentante et photoprotection.
Source : J.-L. Vigneron.

Fig. 7.2  A. Mélasma chez une patiente de phototype V. B. Résultat après préparation dépigmentante, photoprotection et peeling dépigmentant.
Source : J.-L. Vigneron.

Encadré 7.2 prend pas en charge des pigmentations considérées comme


relevant du domaine esthétique et non médical.
Mélasma Il faudra donc expliquer cela à la patiente, faire un ou des
Il faut la persévérance de la patiente, mais aussi celle du devis, insister sur la durée du traitement qui sera de 1 ou
médecin  ! 2 ans, sur la difficulté de prévoir le nombre de séances qui
Beaucoup de médecins déclarent à ces patientes : « C'est dépendra de la profondeur du mélasma, de l'observance
une maladie chronique, ça reviendra toujours. Protégez- des recommandations et de l'exigence de la patiente
vous du soleil et attendez la ménopause ». C'est sans tenir pour un résultat acceptable ou pour une disparition
compte du mal-être souvent important de ces patientes. complète.
Il faut bien admettre que la consultation initiale est longue La patiente sera d'autant plus motivée qu'elle aura, souvent
et que les peelings ensuite ne sont pas pris en charge. Il faut pendant des années, essayé des traitements cosmétiques
placer ces actes en dehors de l'assurance maladie qui ne chers et inefficaces.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 7. Peelings dépigmentants

Il est important de savoir qu'au-delà de l'étiologie hormonale ■ Rechercher des signes évoquant une pathologie ovarienne
classique du mélasma, la lumière du jour (rayonnement visible, ou bien la connaissance d'une telle pathologie. Mais para-
notamment le violet bleu), et pas uniquement les UVA et UVB, doxalement, le syndrome des ovaires polykystiques s'ac-
est reconnue aujourd'hui comme facteur d'entretien ou de réci- compagne rarement de mélasma.
dive du mélasma. Celle-ci induit une activité des mélanocytes. ■ Rechercher des pathologies pouvant (rarement) favoriser le

Ajoutons que nous savons maintenant que les modifica- mélasma : problème surrénalien, thyroïdien, hypophysaire.
tions dermiques telles l'élastose et les modifications vascu- ■ Rechercher une hyposidérémie, facteur souvent aggravant

laires ont un rôle. Ainsi, on peut affirmer que le mélasma est du mélasma. Ne pas hésiter à prescrire du fer pour 4 ou
une pathologie dépassant largement le cadre d'un désordre 6 mois.
mélanocytaire. Si l'interrogatoire et la clinique n'orientent pas vers une
Comme médicalement, dans l'état actuel de nos connais- pathologie vraie, mais se contentent de mettre en rapport
sances, nous n'avons d'action que sur l'effecteur, il est clair l'apparition du mélasma avec un événement hormonal
que nous ne « guérissons » pas le mélasma. banal, aucun examen complémentaire ne donnera une
information utile au traitement.
Une méthode Il sera toujours préférable de stopper les d'œstroprogesta-
tifs, surtout ceux qui contiennent un progestatif à radical
Traiter un mélasma est une méthode qui durera au moins un
nor-, mais ce n'est pas toujours possible.
an, souvent 2 ans ; le but est de traverser un été sans récidive.
À côté de cette classique cause hormonale, rappelons l'im-
Si la patiente ne comprend pas, il ne faut pas commencer le
portance de la lumière visible, surtout les bleus courts, sur
traitement.
une génétique prédisposée.
La patiente ne comprend généralement que si elle a
Il faut enfin vérifier l'absence de facteurs mécaniques
déjà essayé de nombreux autres traitements restés
aggravants comme les gommages, les frottements qui
inefficaces.
peuvent accentuer la pigmentation.
Il faut expliquer le principe de cette méthode. On agira sur
deux plans : Protocoles classiques
■ accélérer légèrement le turn-over cutané afin de faire
Le traitement fait appel classiquement à l'application d'une
remonter le pigment. L'acide rétinoïque est l'arme la plus
préparation dépigmentante le soir. Le trio dépigmentant
classique. Les acides de fruits à fort pourcentage sont éga-
selon Kligman comporte une association d'hydroquinone,
lement utiles ;
d'hydrocortisone, d'acide rétinoïque. Les trois composants
■ action directe chimique sur la mélanogenèse. Les molé-
agissent de façon synergique sur l'hyperpigmentation. La tré-
cules principales sont la classique et efficace hydroquinone
tinoïne prévient l'oxydation de l'hydroquinone et augmente
et le glutathion.
sa pénétration épidermique ; les stéroïdes diminuent l'irrita-
tion liée aux autres ingrédients.
En pratique En période estivale, l'acide rétinoïque, photosensibilisant,
L'examen en lumière de Wood n'a pas un grand intérêt car, peut être stoppé et la préparation ne comportera plus que
sur une zone donnée, le mélasma est aussi bien dermique hydroquinone et hydrocortisone.
qu'épidermique. Le pronostic sera toutefois meilleur si le pig- La formule classique est  : hydroquinone 5  % ; trétinoïne
ment est surtout superficiel. 0,1 % ; dexaméthasone 0,1 %.
Les formules modifiées permettent d'adapter le trio dépig-
Première consultation mentant aux phototypes élevés, par exemple en diminuant
Le diagnostic de mélasma est posé : existence de pigmenta- le pourcentage d'hydroquinone (3 à 4 %), d'acide rétinoïque
tions en nappes symétriques du visage. (0,05 %), ou de stéroïdes (hydrocortisone 1 %, triamcinolone
Il faut faire trois photographies : de face et les trois-quarts 0,01 % ou fluocinolone acétonide 0,01 %, etc.).
gauche et droit. Le matin est appliquée une crème dépigmentante dont
plusieurs formulations avec des actifs freinant la production
Interrogatoire et examen clinique de mélanine ont été développées par différents laboratoires.
■ Évaluer la motivation de la patiente pour un traitement Celles-ci peuvent comporter un écran solaire à large spectre.
prolongé. La photoprotection avec des filtres anti-UVB et UVA,
■ Faire l'historique du mélasma. Rechercher des modifica- lumière visible et bleue, sera appliquée régulièrement dans la
tions hormonales « naturelles » spontanées ayant pré- journée et toute l'année.
cédé de peu l'apparition du mélasma (répétition de Selon les résultats, des peelings dépigmentants pourront
modifications du cycle, de tension itérative des seins, de être réalisés. Plusieurs laboratoires commercialisent des kits
modifications des règles) ou provoquées par des phéno- comprenant tous les produits nécessaires à la réalisation du
mènes plus marquants (grossesse, fausse couche, avorte- peeling, de la phase préparatoire au peeling lui-même et aux
ment, début ou fin de prise d'œstroprogestatifs, ou crèmes cicatrisantes. Il est possible de renforcer leur activité en
changement d'œstroprogestatif, pose d'implant hormo- rajoutant de façon extemporanée de l'hydroquinone dosée à
nal, stérilet hormonal). 20 % selon les recommandations de certains fabricants.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 7. Peelings dépigmentants

Une à plusieurs séances seront nécessaires et le résultat ■ amélioration quasi complète. On continue le traitement à
sera maintenu en poursuivant l'application d'actifs dépig- domicile sans modifier les préparations ;
mentants plusieurs mois voire années. ■ amélioration nette, mais taches toujours visibles. C'est la

bonne indication du peeling.


Prescriptions et protocoles recommandés par l'auteur Le peeling au glutathion est un « peeling crème » conte-
L'expérience de l'auteur dans cette pathologie difficile et nant glutathion, gluconolactone et glycyrrhizine.
résistante aux traitements les a conduit à proposer le proto- L'acte comprend les étapes suivantes :
cole suivant. ■ 1 temps : nettoyer la peau avec une lotion nettoyante à
er

1. Le matin, une préparation à l'hydroquinone à 4 %, sans l'acide glycolique ;


autre principe actif. Deux minutes après, application ■ 2   temps  : la préparer avec un peeling mandélique (voir
e

d'une crème hydratante contenant si possible un haut chapitre 5) qui sera rincé incomplètement ;
pourcentage de vitamine C (20–30 %). ■ 3   temps  : application du peeling au glutathion, en trois
e

S'il existe une exposition solaire, faire appliquer un SPF 50. applications successives de 4 noisettes de crème de pee-
Nous ne sommes pas partisan d'une protection solaire ling. Aucune douleur n'est ressentie ;
absolue qui crée une situation artificielle. Nous conseillons ■ 4  temps : le visage n'est pas lavé et aucune autre crème
e

une protection rigoureuse si un épisode de plusieurs heures n'est appliquée pendant un minimum de 6 heures. Cette
au soleil est inévitable, même avec un chapeau (randonnée, crème peeling peut être laissée en place jusqu'au lende-
tennis, bateau, etc.). Mais pour la vie quotidienne, même si main matin.
existent des phases avec exposition, nous ne sommes pas Les suites sont les suivantes :
sévères vis-à-vis de l'oubli. Pour une patiente qui commence ■ pendant 2 jours, léger érythème du visage, suivi à partir du
sa journée par plusieurs heures à la maison, nous lui disons 3e jour d'une discrète desquamation, sans jamais gêner la
d'appliquer son écran 50 avant de sortir, pas avant. vie sociale ;
2. Le soir, selon la qualité de la peau : ■ 6 –7 jour : début de la réapplication de la préparation à
e e

■ sur peau fine, une préparation contenant hydroquinone l'hydroquinone 4  % matin et soir pendant 7 à 10  jours ;
4 %, acide rétinoïque 0,02 % et triamcinolone 0,03 % ; réintroduction de la préparation du soir ensuite (trio
■ sur peau épaisse ou si le mélasma est ancien, hydroquinone dépigmentant).
4 %, acide rétinoïque 0,04 % et triamcinolone 0,08 %.
Selon la résistance et la sensibilité estimées de la peau, l'ap- Troisième consultation : 3 à 4 semaines plus tard
plication du soir sera prescrite chaque soir, ou un soir sur (J50-J60)
deux ou deux fois par semaine. Les résultats sont estimés, avec l'aide des photographies ini-
Deux minutes après l'application de ce trio dépigmentant tiales. Il y a trois situations :
est appliquée une crème légère, mais hydratante. ■ peu d'amélioration. C'est très rare. Dans ce cas, on explique à
3. C'est dès cette première prescription qu'un rendez vous la patiente qu'elle est un cas difficile, que la stratégie adaptée
est pris pour 3 semaines plus tard (3 semaines, durée du continue, mais que, dans certains cas, on doit proposer après
turn-over épidermique) afin de pratiquer un peeling. Il quelques mois un peeling plus profond. Nous faisons alors
est précisé que ce peeling devra probablement être fait, appliquer le matin l'hydroquinone à 4 % et le soir, une prépa-
sauf si l'amélioration est radicale. ration de type hydroquinone 6 %, acide rétinoïque 0,04 % et
Plusieurs peelings ont été formulés spécialement pour le trai- triamcinolone 0,08 %. Il est évident que de telles préparations
tement du mélasma. Citons les principes à visée antipigmen- ne seront pas poursuivies des mois, et que la patiente sera
taire de trois peelings. L'un contient du résorcinol, et différents vue régulièrement afin d'évaluer l'efficacité du traitement ;
acides  : férulique, salicylique, azélaïque, phytique, citrique et ■ amélioration nette, mais taches toujours visibles. Sont
rétinol et arbutine ; le deuxième, acides  : azélaïque, kojique, alors prescrits, le matin, hydroquinone 4  %, le soir, aug-
citrique, salicylique, phytique, ascorbique et rétinol et arbutine ; mentation de la fréquence d'application de l'hydroquinone
le troisième est différent : glutathion, gluconolactone, rétinal, + acide rétinoïque.
acides mandélique et phytique. Nous utilisons depuis quelques ■ amélioration quasi complète :
années cette dernière formulation au glutathion. ● le soir : la préparation hydroquinone + acide rétinoïque

utilisée jusqu'alors est appliquée en diminuant la fré-


Deuxième consultation : 3 semaines quence d'application sur plusieurs mois pour finir à un
après (J20–J30) soir par semaine ;
Un peeling est prévu, mais comment allons-nous évaluer la ● le matin, simplement une crème hydratante et la pro-

nécessité de le faire ou de proposer autre chose ? tection antisolaire dans les conditions décrites précé-
Les résultats sont estimés, avec l'aide des photographies demment.
initiales. Il y a trois situations :
■ peu d'amélioration. On a l'impression de ne pas avoir eu
Et ensuite ?
prise sur le processus. C'est rare. Dans ce cas, on augmente Les armes sont connues : le matin, hydroquinone 4 et 6 % ; le
le pourcentage d'hydroquinone du matin à 6 % et on peut soir, trio dépigmentant avec hydroquinone, acide rétinoïque,
augmenter la fréquence d'application de la formule du soir ; triamcinolone et peeling au glutathion.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 7. Peelings dépigmentants

Après les trois premières consultations : Encadré 7.3


■ si l'amélioration est bonne ou très bonne, les conseils d'uti-
lisation des préparations et les adaptations de concentra- Hydroquinone. Qu'en penser ?
tions peuvent se faire après envoi de photographies par Au début des années 2000, les spécialités contenant de l'hy-
courriel et après échange téléphonique, pour les patientes droquinone n'ont plus été vendues en pharmacie, sauf en
très éloignées. On reverra dans tous les cas la patiente au Suisse où elles n'ont jamais été suspendues. Les préparations
début de l'été et à la fin de l'été ; magistrales ont toujours pu être prescrites. Après cette
■ si l'amélioration est relative, les concentrations d'hydro- phase de restriction, certains pays, comme le Canada en
quinone et les fréquences d'application seront plus éle- 2018, ont rétabli la commercialisation sur prescription
vées et les consultations plus fréquentes, toutes les médicale.
6 semaines. Le problème a toujours été l'utilisation prolongée de pour-
Avec cette méthode, nous obtenons une très large propor- centages élevés par la population noire cherchant à éclaircir
tion de résultats très satisfaisants après un an et le passage la peau avec des préparations associant souvent de l'hydro-
d'un été. quinone et des sels de mercure.
Les formes résistantes sont suspectées dès le troisième L'utilisation de pourcentages autour de 4  % avec une fré-
mois. quence d'application progressivement dégressive sur une
durée de 12 à 18 mois ne présente pas de risque.
En dernier recours Aspect pratique très important  : il faut souligner que la
Dans les cas de réponse faible à cette stratégie, ou de forme galénique de la préparation, sa composition et son
formes résistantes, il reste la possibilité d'agir plus radicale- mode préparatoire sont primordiaux et conditionnent l'ef-
ment en provoquant une exfoliation épidermique pro- ficacité à pourcentage « égal ».
fonde par un peeling moyen (TCA  30  %), ou même une
fonte épidermique complète par un peeling dermique pro- signes d'irritation apparaissent, les applications d'acide
fond au phénol. Le peeling évacue au sens physique les rétinoïque sont stoppées pour 3 jours et reprises ensuite
dépôts pigmentaires. à une fréquence moindre. L'irritation n'a aucun avan-
Les semaines préalables de traitement par hydroquinone tage. Elle n'accélère pas l'amélioration ; elle pérennise le
seront très positives sur la régulation de la mélanogenèse en mélasma.
postpeeling. ■ Les corticoïdes locaux ont pour effet une altération des
Nous avons traité plusieurs centaines de cas selon le capillaires superficiels, un affinement du derme. La triam-
protocole de base initialement énoncé. Et nous avons eu cinolone est classée « modéré ».
quelques dizaines d'échec. Sur ces quelques dizaines de ■ Le glutathion topique n'a aucun effet indésirable connu.
formes résistantes ou au résultat incomplet, la moitié
environ a effectué avec succès un peeling moyen type TCA
30 %. L'autre moitié a craint le peeling et n'a rien fait de Et l'acide tranexamique ?
plus. Des publications de 2018 ont confirmé l'efficacité de l'acide
Quant au peeling dermique profond, nous le pratiquons tranexamique par voie orale à la dose de 500  mg par jour
dans cette indication du mélasma résistant environ pour une avec évaluation à 3 mois. Nous utilisons également ce traite-
patiente chaque année. ment au long cours depuis quelque temps. Il nous est diffi-
cile de nous prononcer sur ce qui revient à ce traitement oral
Effets secondaires dans nos résultats. Il s'agit là d'un traitement d'appoint selon
la publication de Del Rosario [1]. L'acide tranexamique a
Quels sont les effets secondaires de l'utilisation prolongée de
pour effet de diminuer histologiquement le nombre des
ces préparations et du peeling au glutathion ?
vaisseaux et la charge mélanique.
■ L'hydroquinone (encadré 7.3) est connue pour provoquer
Des résultats de traitement du mélasma sont illustrés aux
des hypochromies en confettis. À la concentration de 4 %
figures 7.2 à 7.5.
et avec des applications qui s'espacent progressivement,
ce problème n'a jamais été rencontré. En revanche, cer-
taines patientes déjà traitées avec des concentrations bru- Conclusion
tales d'hydroquinone arrivent à nous en première
consultation avec de tels confettis. Ces cas sont souvent Nous utilisons le protocole décrit dans ce chapitre
non répondeurs à notre protocole. Dans ce cas, le peeling depuis 2008. Celui-ci est l'évolution d'une méthode que
TCA est rapidement proposé après 2  mois du protocole nous utilisions depuis 1998. Nous témoignons de son
décrit. Les concentrations supérieures à 4 % ne doivent pas efficacité et du succès du bouche à oreille quant à cette
être utilisées depuis 2 mois et uniquement après effet pré- technique.
alable très insuffisant du 4 %. Pour avoir un bon pourcentage de réussite, répétons que
■ L'acide rétinoïque peut irriter la peau en accélérant le le traitement du mélasma est une méthode, avec une straté-
turn-over, la dessécher et provoquer un érythème. Si des gie à partager avec la patiente pendant de longs mois.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 7. Peelings dépigmentants

Fig. 7.3  A. Mélasma ancien résistant. B. Résultat après préparation dépigmentante, photoprotection et 2 peelings dépigmentants espacés de 3 mois.
Source : J.-L. Vigneron.

Fig. 7.4  A. Mélasma modéré. B. Bon résultat à 6 mois après préparation dépigmentante, photoprotection et peeling dépigmentant.
Source : J.-L. Vigneron.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 7. Peelings dépigmentants

Fig. 7.5  A. Mélasma ancien, résistant. B. Amélioration modérée après préparation dépigmentante, photoprotection et peeling dépigmentant.
Source : J.-L. Vigneron.

Référence Pandya AG. Melasma: a critical update. Symposium disorders of pig-


[1] Del Rosario  E, Florez-Pollack  S, Zapata Jr L, et  al. Randomized, mentation. Int J Dermatol 2009;48:893–5.
placebo-controlled, double-blind study of oral tranexamic acid in Shankar K, Godse K, Aurangabadkar S, et al. Evidence-based treatment
the treatment of moderate-to-severe melasma. J Am Acad for melasma: expert opinion and a review. Dermatol Ther 2014;4(2):
Dermatol 2018;78(2):363–9. 165–86.

Pour en savoir plus


Gupta AK, Gover MD, Nouri K, Taylor S. The treatment of melasma: a
review of clinical trials. J Am Acad Dermatol 2006;55:1048–65.

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Section 2. Les peelings

Chapitre 8
Peelings profonds
J.-L. Vigneron, D. Augias

Introduction yeux de nombreux dermatologues, une technique difficile à


intégrer dans la pratique. Le terme de peeling dermique plu-
Avec le peeling profond, nous disposons d'une technique tôt que profond serait sans doute plus adapté et moins
inégalée contre l'héliodermie prononcée. Le peeling profond effrayant pour les patients comme pour les praticiens.
est un peeling dermique réticulaire par opposition au pee- Le but de ce chapitre est donc, avant tout, de faire parta-
ling moyen qui est dermique papillaire. ger l'expérience de ses auteurs afin que le peeling profond
Unna en Autriche, dès 1882, testa le phénol en tant que devienne un atout supplémentaire, parce qu'irremplaçable,
traitement rajeunissant de la peau. Les pionniers dans l'usage dans l'arsenal thérapeutique du plus grand nombre de der-
du phénol sont : le Dr Mackee, dermatologue américain, qui matologues possible.
publia sur le sujet en 1952 ; le Dr Lagassé, français ayant traité
les cicatrices de poudre noire de la Première Guerre mon-
diale ; sa fille Antoinette, infirmière, émigra aux États-Unis, sur
Formulations et méthodes
la côte Ouest, pour traiter les actrices du cinéma muet, au Les différentes formulations de peelings profonds reposent
moyen de ce lifting chimique. Cette technique a alors été lar- toujours sur une combinaison de phénol et d'huile de croton
gement utilisée dans les années 1950 par les lay peelers, non végétale.
médecins, ce qui a entraîné rejet et scepticisme de la part du Le phénol est un hydrocarbure aromatique dérivé du gou-
corps médical. Ce sont les travaux de deux chirurgiens plasti- dron de houille, se présentant sous forme de cristaux trans-
ciens américains, T.J.  Baker et H.L.  Gordon, dans les années parents à l'odeur caractéristique, utilisé initialement pour
1960, qui ont contribué à légitimer cette procédure. ses propriétés antiseptiques. Les différentes formulations
L'histoire des différentes formulations est passionnante. font varier sa concentration de 35 à 88 %. Il semble que plus
Retenons que les premières étaient brutales, trop rapide- la concentration est élevée, plus la nécrose de coagulation
ment pénétrantes, avec la formule de Baker Gordon. C'est des protéines qu'elle provoque est intense, limitant la péné-
Gregory Hetter qui, par ses nombreux travaux sur les consti- tration et donc la profondeur d'action du peeling. Une dilu-
tuants de cette formule ainsi que sur leur concentration, a tion de 50 % provoquerait, en plus de la kératocoagulation,
vraiment fait avancer les choses dans ce domaine [1]. Il a une kératolyse par rupture des ponts disulfure et donc une
contribué ainsi à réduire les complications tout en conser- pénétration plus importante (encadré 8.1).
vant l'extrême efficacité.
C'est le Dr Urkov qui eut l'idée de l'occlusion. Encadré 8.1
Au fil du XXe  siècle, 15 ou 20  formules se sont succédé
pour finalement s'adoucir, nécessitant pour être efficaces Toxicité du phénol
d'une part de multiples passages – avantage de la progressi-
La toxicité du phénol dépend de la concentration, de la
vité – et d'autre part une occlusion étanche de 24 heures. Il
vitesse d'application et de la surface traitée.
s'agit maintenant d'un véritable protocole, pas seulement
Le phénol est très rapidement absorbé. Il est éliminé à 25 %
d'un liquide à appliquer sur un visage. C'est la séquence des
par voie respiratoire, à 75 % par le foie puis le rein.
gestes et des réponses à donner du 1er au 8e jour qui consti-
Les complications cardiovasculaires à type de troubles du
tue cette méthode.
rythme peuvent apparaître après application rapide de 3 à
Les deux techniques les plus récentes sont nées à la fin des
4 g de phénol sur la face en 15 minutes. (Un peeling au phé-
années 1990 : la méthode Exoderm® de Yoram Fintsi (croton
nol tamponné comporte des doses inférieures (environ
0,6 à 0,7  %, phénol 67  %) et la méthode Exopeel® (croton
1,5 g de phénol), il doit être appliqué lentement en 1 heure
1,6 %, phénol 46 %) de Jean-Luc Vigneron. Elles utilisent des
au moins pour éviter ce risque)
solutions sans interface, limpides et homogènes.
Surveillance cardiaque pendant la procédure : pression arté-
Ces contributions successives ont progressivement amé-
rielle, monitoring cardiaque, oxymètre.
lioré les résultats et la sécurité de cette procédure pour en
Trousse d'urgence à proximité.
faire une technique esthétique sans équivalent.
Déclaration à son assurance responsabilité civile profes-
Malgré cela, après plus d'un siècle de pratique et d'amélio-
sionnelle.
rations successives, le peeling profond au phénol reste, aux

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Section 2. Les peelings
Chapitre 8. Peelings profonds

L'huile de croton est extraite des graines d'une plante tropi- de la première consultation, les avantages et inconvénients, en
cale, le Croton Cathartique ou Tiglium, et sa préparation com- particulier les suites immédiates, doivent être exposés claire-
merciale sous forme de résine remonte à 1932. Son action sur ment, notamment l'œdème intense du lendemain, le suinte-
la peau serait liée à des groupes hydroxyl libres provoquant ment et la sensation de tension ou la douleur parfois ressenties
une action vésicante qui faciliterait la pénétration du phénol. durant les premières heures. Il convient de préciser le type
C'est pourquoi Hetter prétend que, dans la formule de Baker d'anesthésie utilisé, le plus souvent tronculaire, mais celle-ci
Gordon, c'est l'huile de croton qui serait le composant le plus peut aussi être générale dans une structure adaptée ou, plus
actif, le phénol n'agissant que comme un véhicule. Cependant, rarement, de contact à l'aide d'une crème à la lidocaïne pour de
dans cette formule (phénol 50 %, croton 2,1 %), le croton trop petites zones. La présence d'un proche lors de cette consulta-
concentré induirait une pénétration trop rapide non contrô- tion est souhaitable afin d'éviter le désarroi inutile du patient
lée avec risque élevé de complications. ou de son entourage dans les suites immédiates. Il nous paraît
Hetter a repris cette formule, prouvant qu'une concentra- essentiel d'insister sur le fait que seul le dermatologue effec-
tion de phénol de 35 % était suffisante. Il insiste de plus sur le tuant cet acte est apte à en assumer les suites afin d'éviter les
fait qu'une concentration de croton variable allant de 0,1 % commentaires d'un autre intervenant « ignorant », pouvant à
à 1,6  % est nécessaire pour traiter les différentes zones du tort considérer ces suites immédiates comme une brûlure avec
visage en fonction de l'épaisseur du tégument et de l'impor- les conséquences médico-légales que cela pourrait impliquer.
tance des lésions à traiter. Certains praticiens préfèrent ne pas montrer les photogra-
Les autres éléments entrant habituellement dans la com- phies des suites immédiates (en dehors des photographies
position des peelings profonds sont le septisol, l'eau distillée, avant-après) car elles peuvent avoir un réel effet dissuasif. Ils
la glycérine et des huiles végétales. ne les produisent qu'à la demande expresse du patient ou de
Quoi qu'il en soit, c'est la combinaison de ces deux com- l'entourage. À vrai dire, Internet permettant d'avoir accès à
posants principaux, phénol et huile de croton, qui va per- ces images de suites instantanément, il peut être préférable
mettre au peeling d'agir jusqu'au derme réticulaire moyen, de les commenter. Il faut savoir expliquer, éviter certains
créant un effet inégalé de production de néocollagène et de mots (brûlure par exemple ; préférer liquéfaction épider-
fibres élastiques. mique), ressentir les points de blocage psychologique, afin
Traditionnellement, les solutions phénolées étaient prépa- de projeter le déroulé de l'acte dans un monde prévisible et
rées de manière extemporanée. Ces formules avaient toutes contrôlable, comme le fait la sophrologie.
l'inconvénient de ne pas être homogènes, de devoir être agi- Une feuille d'information détaillée sur la méthode et ses
tées pour tenter de disperser le surnageant huileux. Il revient suites sera remise lors de cette consultation et, comme pour
à Yoram Fintsi dans les années 1990 d'avoir mis au point une tout acte esthétique, un devis détaillé, un délai de réflexion
solution homogène et promu une méthode sûre et repro- et un consentement éclairé signé seront exigés. Nous conseil-
ductible à base d'une formulation stabilisée prête à l'emploi, lons de faire des photographies dès le jour du devis.
appelée Exoderm®. Après le décès de Yoram Fintsi (2002), Selon le souhait du patient, une deuxième consultation
Jean-Luc Vigneron a mis au point une formule également après le délai de réflexion légal permettra de répondre aux
homogène et sans interface avec un protocole modifié, la questions du patient ou de l'accompagnant. Cette seconde
méthode Exopeel®. consultation permet de lever les dernières craintes et de ren-
Ces mêmes auteurs ont pu montrer également que cette forcer la relation de confiance qui doit s'établir avec le
méthode permettait de traiter des patients à la peau mate praticien.
alors que les peelings profonds étaient jusqu'alors réservés
aux patients à la peau claire.
Préparation cutanée :
conditionnement prépeeling
Indications
L'efficacité du peeling sera supérieure et l'acte plus facile si la
Les meilleures indications du peeling au phénol sont le pho- peau est préalablement préparée de façon à diminuer et à
tovieillissement marqué, en particulier sur les peaux claires uniformiser l'épaisseur de la couche cornée et donc sa per-
avec des rides prononcées (plus les signes seront importants, méabilité. Nous utilisons les cosmétiques à haut pourcen-
plus le résultat sera spectaculaire), éventuellement les kéra- tage en acides de fruits ou les rétinoïdes topiques. Cette
toses actiniques (même si d'autres traitements maintenant à préparation sera idéalement commencée 2 à 3  semaines
notre disposition lui sont préférés) et les cicatrices d'acné. La avant l'acte.
peau plus épaisse des hommes répond en général moins
bien que celle des femmes.
Analgésie
Information préalable Depuis 2005, le Dr Vigneron n'utilise que les blocs troncu-
laires après une prémédication orale. La douleur n'est jamais
Plus que pour tout autre peeling, une information claire et présente pendant le peeling. On la retrouve dans 30 % des
loyale doit être donnée au patient préalablement à l'acte. Lors cas pendant les 3 heures qui suivent l'acte.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 8. Peelings profonds

Mais tous les modes d'anesthésie peuvent être envisagés, cheveux. Sur les zones à épaisse couche cornée, un deuxième
allant de l'hypnose jusqu'à l'anesthésie générale en passant voire un troisième passages peuvent être nécessaires, mais
par les blocs d'anesthésie locorégionale ou la sédation intra- cela peut aussi être l'utilisation, entre des mains expertes, de
veineuse. Le choix dépendra des préférences du praticien. toile émeri stérilisée avant l'application du produit, etc.
L'application se termine lorsqu'est atteint un givrage blanc
uniforme de la zone concernée qui, après quelques minutes,
Bilan préopératoire vire au rosé. C'est la vitesse du « déblanchiment » qui indique
En pratique, si le patient n'a pas de pathologie grave connue – le niveau de pénétration. Quand on traite une zone, on suit
­diabète type  1, insuffisance rénale, insuffisance hépatique du regard l'évolution de l'aspect des autres.
sévère, pathologie coronarienne –, aucun bilan n'est néces- Les paupières sont traitées en les déplissant bien, en res-
saire. Il faut également s'enquérir d'antécédent d'herpès pectant quelques millimètres près du bord libre et avec un
facial dans les cinq dernières années. coton-tige quasi sec.
Pour les rares praticiens qui travaillent en clinique avec un La procédure totale ainsi réalisée prend entre 1 heure 15 et
anesthésiste, ce dernier demandera un bilan. 1 heure 30.
Une sensation de chaleur intense est ressentie immédiate-
ment à l'application et cesse rapidement au bout de quelques
Environnement de l'acte secondes avant de réapparaître après quelques minutes (au
moment où la peau vire au blanc-gris et où commence à
En France, le peeling phénolé a une cotation dans la
apparaître un œdème) pour durer de 4 à 8 heures au total.
nomenclature au titre d'« exfoliation dermo-épidermique
L'anesthésie tronculaire supprime ou atténue drastiquement
profonde du visage entier par agent chimique  » codé
la chaleur post-peeling.
QANP004. Il est spécifié dans les notes de la Classification
Pour les suites, notre préférence va à la méthode occlusive.
commune des actes médicaux (CCAM) que l'acte doit être
En effet, il est possible de ne pas utiliser de pansement occlu-
réalisé dans un environnement spécifique permettant de
sif mais, outre le risque d'infection herpétique ou bacté-
reconnaître et de traiter un trouble cardiovasculaire. Dans ce
rienne plus grand, si l'absence de masque procure moins
contexte, un monitorage cardiaque et de la pression arté-
d'inconfort immédiat au patient, la méthode non occlusive
rielle et un oxymètre sont souhaitables durant la procédure
nécessite beaucoup plus de soins les jours suivants et son
et dans les 2 heures suivantes.
efficacité est bien moindre, équivalente à un peeling moyen
Remarque : l'entente préalable ne peut être demandée que
« appuyé ». Ainsi, en fin d'application, nous couvrons la tota-
dans le cas de cicatrices d'acné.
lité du visage à l'exception des paupières et de la bouche à
l'aide de petits morceaux d'un sparadrap occlusif spécifique
Procédure à base d'oxyde de zinc. Nous couvrons enfin avec un filet
type Surgifix® pour faciliter l'adhésion et le maintien du
La peau doit être soigneusement démaquillée et nettoyée à masque occlusif sur cette peau humide (fig. 8.1A).
l'eau savonneuse au préalable. Le praticien doit procéder à Le retrait de ce masque doit s'effectuer après 24 à 36 heures.
un dégraissage soigneux à l'éther ou à l'acétone de toute la L'œdème à ce moment-là est souvent important et il faut
zone à traiter afin de travailler sur une surface uniformément savoir rassurer le patient et son entourage. Le visage est alors
perméable. patiemment nettoyé à l'aide de sérum salé isotonique ou
Le patient doit être en position horizontale avec les yeux d'eau oxygénée ou d'une solution savonneuse antiseptique
fermés, dans lesquels on aura mis avant un gel-larmes, en afin d'enlever les résidus épidermiques grisés qui se détachent
prenant soin de ne pas en laisser couler vers la région des facilement du derme suintant. Sur certaines zones très ridées
tempes. Les cheveux sont maintenus par un bandeau. repérées la veille, un nouveau passage localisé de la solution
L'application de la solution phénolée se fait à l'aide d'un est effectué. Il n'y aura qu'une brève sensation d'intense cha-
bâtonnet en bois sur lequel on aura enroulé et bien serré du leur ou une brève sensation cuisante.
coton. Le coton-tige est trempé dans le petit flacon et essoré Enfin, une poudre jaune Mimosa, au sous galate de
soigneusement sur son rebord. bismuth, antiseptique, va être déposée uniformément sur
Les unités esthétiques du visage sont traitées successive- toutes les zones traitées à l'exception du vermillon pour for-
ment l'une après l'autre, chaque zone prenant en moyenne 10 mer en séchant un second masque (fig. 8.1B). Ce masque de
à 15 minutes, ceci afin de réduire le risque théorique de toxi- poudre est laissé en place 7 jours. Il n'y a donc pas de soin
cité par une application trop rapide. Chaque praticien a ses spécifique pendant la semaine. À l'issue de cette semaine, le
habitudes quant à l'ordre de traitement des unités du visage. 8e jour, ce masque sera facilement désagrégé par le patient
Un bon résultat est obtenu par l'addition d'astuces qui lui-même, à l'aide d'un corps gras et de passages successifs
sont enseignées lors de la formation pratique qui devrait être d'eau tiède (fig. 8.1C).
obligatoire ; par exemple, il faut dessiner en position debout La ré-épithélialisation est alors déjà effective et l'érythème,
la limite inférieure de l'application de la solution, 2 à 3 cm au assez intense, va décroître progressivement en 2 à 3  mois.
maximum sous la ligne mandibulaire, dans l'ombre. On n'ou- Sous maquillage et photoprotection adaptés, le patient peut
blie pas les lobes. On applique la solution jusque dans les reprendre rapidement une vie sociale normale (fig. 8.2 à 8.4).

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Section 2. Les peelings
Chapitre 8. Peelings profonds

Fig. 8.1  Peeling profond, masques.


A. Masque des 24 heures. B. Masque de poudre de mimosa. C. 8e jour, retrait du masque.
Source : J.-L. Vigneron.

Fig. 8.2  Peeling profond.


A. Avant. B. Après 2 mois.
Source : J.-L. Vigneron.

Complications voie respiratoire. Les taux sériques mesurés après application


de 3 ml de solution à 50 % sont d'environ 0,7 mg/dl alors que
des patients ont survécu à des ingestions accidentelles à des
Complications aiguës concentrations de 23 mg/dl, ce qui donne une grande marge
de sécurité au peeling du visage entier.
Complications cardiaques Il n'existe pas de facteurs prédictifs clairement établis de
survenue des troubles cardiaques. Cependant, Landau [3] a
La toxicité directe du phénol sur le myocarde est la compli-
bien montré qu'en respectant les règles évoquées plus tôt
cation la plus évoquée. Des études chez le rat [2] ont montré
(pas plus de 3 ml de solution Exopeel® à 46 % de phénol à
des troubles de la contractilité myocardique et de l'activité
résorption lente dans une base huileuse, déroulement lent
électrique après exposition systémique. L'absorption dans la
de la procédure supérieure à une heure, bonne hydratation
circulation se fait rapidement après l'application, puis 75 %
périprocédurale, bonne ventilation de la salle d'interven-
du phénol sont éliminés directement par le rein ou détoxi-
tion), l'incidence des troubles du rythme est de 6,6 %.
fiés par le foie alors que les 25 % restant sont éliminés par

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Section 2. Les peelings
Chapitre 8. Peelings profonds

Fig. 8.3  Peeling profond.


A. Avant. B. Après 2 ans.
Source : J.-L. Vigneron.

Fig. 8.4  Peeling profond.


A. Avant. B. Après 2 mois. C. Après 11 ans.
Source : J.-L. Vigneron.

Œdème laryngé décrites par le passé avec la méthode « ouverte » de cicatri-


Cette complication (dyspnée, polypnée, stridor) survien- sation dirigée par nettoyages répétés et pommadage par
drait dans les premières 24 heures et nécessiterait une prise corps gras. Elles doivent être traitées comme n'importe
en charge adaptée urgente. L'œdème du cou, par descente quelle autre impétiginisation secondaire.
de l'œdème facial les 2e et 3e  jours, peut parfois inquiéter Au moins trois cas de syndrome de choc toxique ont été
le patient. Ce n'est pas un œdème laryngé ; c'est un œdème décrits dans la littérature. La prise en charge en milieu spé-
cutané. cialisé sera la plus précoce possible. Les auteurs n'ont jamais
rencontré cette complication.
Les patients aux antécédents de poussées herpétiques
Infections dans les cinq dernières années doivent avoir un traitement
Les infections aiguës bactériennes sont devenues exception- débutant 5 jours avant le peeling et durant la phase de cica-
nelles avec la pose d'un masque de poudre et ont surtout été trisation ou, pour les auteurs, pendant 20 jours.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 8. Peelings profonds

Complications précoces Il est important de différencier l'hypochromie qui va vers le


blanc et un rosissement du visage. Avec les années, les fibres
Éruptions folliculaires élastiques et collagènes se fragmentent et la lumière inci-
dente arrivant sur la peau sera beaucoup plus l'objet d'une
Une folliculite, une efflorescence sébacée, touchant simulta- diffraction dans la peau que d'une réflexion. Les longueurs
nément de très nombreuses glandes sébacées, peut survenir d'onde réfléchies sont donc différentes de celles d'une peau
vers la 3e  semaine. Elle est due à l'application de topiques jeune et, les années passant, la couleur perçue par l'œil vire de
trop occlusifs, mais surtout au réveil de l'activité de toutes plus en plus vers le jaune. Après le traitement, les nouvelles
les glandes sébacées avec une difficulté de l'évacuation du fibres élastiques et collagènes sont plus nombreuses et sur-
sébum. Les cyclines orales résolvent ce problème en quelques tout plus horizontales et parallèles entre elles. Les longueurs
jours. Des grains de milium surviennent parfois après 1 ou d'onde réfléchies retrouvent un rose juvénile. Ce n'est pas une
2 mois. L'aiguille délicatement maniée est la solution. complication, c'est un effet de réjuvénation.
Prurit Cicatrices hypertrophiques
Un prurit peut exister après le 20e  jour et durer quelques Autre complication rare mais redoutée, les cicatrices hypertro-
semaines. On l'observe lorsque le geste a dû être très appuyé phiques surviennent en général vers le bas du visage et la ligne
du fait d'une héliodermie majeure type « iguana desert skin » mandibulaire, peut-être en raison d'une technique trop agres-
et lorsque l'on veut avoir un effet liftant par une action pro- sive. Un retard de cicatrisation, une rougeur avec induration
fonde sur les joues. persistante doivent alarmer le praticien et conduire à une prise
Érythème prolongé en charge précoce (corticothérapie locale forte ou intralésion-
nelle, cryothérapie, pressothérapie, laser à colorant pulsé).
L'érythème prolongé est défini par sa persistance au-delà de
3 mois. Plusieurs facteurs (topiques irritants, prise d'alcool,
rosacée, etc.) peuvent participer à ce phénomène. En fait, Méthodes combinées
tant que la trame collagène n'est pas reconstituée et redensi-
fiée, les vaisseaux restent un peu dilatés et visibles par trans- Il est possible dans certains cas de proposer un peeling com-
parence. Il faut éviter l'emploi de dermocorticoïdes qui, à biné (peeling mosaïque). Le principe est de pratiquer un
long terme, vont entretenir le problème. Les LED utilisées en peeling profond sur certaines zones et un peeling moyen sur
prévention et en postpeeling sont très utiles. le reste du visage (fig. 8.5).

Hyperpigmentation Indications
Bien que beaucoup plus rare qu'à la suite d'un peeling moyen À ces différences de puissance de peeling doivent correspondre
au TCA, une hyperpigmentation peut survenir après un pee- des différences dans les dommages cutanés. Si un visage est
ling phénolé, qu'il ait été appliqué soit trop légèrement, soit uniformément en héliodermie 4, il ne faudra pas proposer un
en périphérie de la zone traitée, en particulier le long de la peeling combiné, car l'amélioration radicale du peeling pro-
ligne mandibulaire. La régression spontanée ou à l'aide de fond contrasterait trop avec la zone insuffisamment améliorée
topiques dépigmentant est la règle. par le peeling moyen. On destine donc le peeling combiné à
des visages ayant les lèvres et/ou les zones orbitaires en
Complications définitives héliodermie 4 et le reste du visage en héliodermie 3.

Hypopigmentation ou rosissement ? Procédure


Presque constante après une méthode occlusive, l'hypopig- Les techniques d'application sont, selon la zone, celles
mentation est plus ou moins intense selon l'imprégnation, la décrites précédemment.
formulation utilisée et donc la puissance de pénétration, la La zone péri-orale s'arrête en haut aux sillons naso-géniens.
persistance de l'érythème, le faible phototype préalable et le En bas, soit le peeling profond n'est appliqué que sur 2 mm
comportement vis-à-vis du soleil ensuite. Les mélanocytes du bord de la lèvre inférieure, soit il est appliqué jusqu'au
sont d'autant plus fragiles que le phototype est bas. Le mau- sillon mentonnier.
vais cas est une patiente écossaise rousse golfeuse, installée La zone péri-orbitaire intéresse les deux paupières
depuis 20  ans sur la Côte d'Azur, avec des rides profondes jusqu'aux sourcils inclus. Vers le bas et l'extérieur, le peeling
nécessitant un travail appuyé. profond doit être appliqué en dégradé en transition avec le
L'hypochromie est rarement l'objet d'une plainte chez les peeling moyen (fig. 8.6).
patients lorsqu'ils en ont été prévenus au préalable. La diffi- Il peut y avoir chevauchement des deux produits, ce qui
culté technique est de créer une transition douce entre le est toujours mieux qu'un espace non traité entre les deux
visage « éclairci » et le cou non traitable en peeling profond, peelings.
mais pour lequel d'autres méthodes pourront être propo- Les parties traitées par le peeling profond seront couvertes
sées dans un second temps. avec l'adhésif qui débordera sur le peeling moyen.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 8. Peelings profonds

Fig. 8.5  Peeling combiné.


A. Peeling au TCA 30 % et peeling phénol Exopeel® en péribuccal. B. Résultat à 2 mois. Noter la grande différence d'effet des deux méthodes.
Source : J.-L. Vigneron.

Fig. 8.6  Peeling combiné.


A. Peeling TCA 30 % et peeling profond Exopeel® orbitaire. B. Au 5e jour, desquamation de la zone de peeling moyen, et pansement par poudre mimosa
sur la zone orbitaire traitée en peeling profond. C. Résultat.
Source : J.-L. Vigneron.

Résultats Conclusion
On attend d'un peeling profond une disparition des taches Le peeling profond est une technique qui permet un
pigmentaires quelle qu'en soit la nature, une action radicale rajeunissement cutané spectaculaire. Il ne peut être réa-
sur les rides qui sont lissées, un derme réépaissi, un effet lif- lisé qu'après une solide formation en respectant les pro-
tant sur les paupières et les joues, un grain de peau affiné. tocoles validés par l'expérience de médecins experts.
Ces effets sont d'autant plus stupéfiants que la peau est alté- C'est à cette condition que les risques seront maîtrisés
rée. Le rajeunissement est souvent de 10 à 15 ans  ! avec d'excellents résultats sur les héliodermies marquées
L'analyse histologique mais aussi les dosages histo- pour la plus grande satisfaction du patient et du prati-
chimiques confirment ce rajeunissement [4]. On parle cien. Cette technique actualisée, allégée, permet à tout
d'« effet reverse » dans les revues scientifiques. Les effets se dermatologue formé d'avoir accès au Nirvana des
prolongent plus de 10 ans. peelings.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 8. Peelings profonds

Références [3] Landau  M. Cardiac complications in deep chemical peels.


[1] Hetter  GP. An examination of the  phenol-croton oil peel: Part I. Dermatol Surg 2007;33(2):190–3.
Dissecting the formula. Plast Reconstr Surg 2000;105(1):227–39. [4] de Mendonça  MCC, Segheto  NN, Aarestrup  FM, Aarestrup  BJV.
discussion 249-51. Punctuated 88% phenol peeling for the treatment of facial pho-
[2] Larson DL, Karmo F, Hetter GP. Phenol-croton oil peel: establishing toaging: a clinical and histopathological study. Dermatol Surg
an animal model for scientific investigation. Aesthet Surg J 2018;44(2):241–7.
2009;29(1):47–53.

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Section 3. Toxines botuliniques

Chapitre 9
Toxine botulinique – principe
et généralités
V. Gassia

Introduction L'utilisation se développe pour d'autres indications


comme le blépharospasme, l'hémispasme facial et le torti-
La toxine botulinique ou botulique (BoNT) est une pro- colis spasmodique (autorisation de la FDA en 1989 ; en
téine neurotoxique produite par des souches neurotoxi- France, AMM en 1993) [3].
gènes de bactéries sporulées anaérobies du genre
Clostridium. Les BoNT provoquent la paralysie flasque Développement en esthétique
du botulisme après ingestion de conserves contaminées En 1987, Jean et Alastair Carruthers (ophtalmologue et derma-
en inhibant la libération de neurotransmetteurs au tologue de Vancouver) découvrent les effets esthétiques du
niveau des terminaisons nerveuses cholinergiques péri- « Botox » dans les rides péri-oculaires. Après plusieurs études
phériques du système nerveux squelettique et cliniques, le BotN est approuvé dans cette indication [4].
autonome. En France, la première AMM en esthétique date de 2003 pour
Isolée puis purifiée, elle est devenue une molécule utili- « le traitement des rides verticales intersourcilières observées
sée en thérapeutique humaine depuis 1978 (autorisation lors du froncement des sourcils, lorsque ces rides entraînent un
de la Food and Drug Administration [FDA]). C'est un retentissement psychologique important chez le patient  ».
médicament unique, avec une action localisée et réver- Actuellement, les autres zones du tiers supérieur du visage sont
sible dont les indications se développent en permanence. également approuvées (patte d'oie et front) [2] (encadré 9.1).
L'utilisation en esthétique date de 1980 (première publi- Leur utilisation en dehors de ces localisations est hors-AMM en
cation) [1] et en France de 2003 (première autorisation de France, mais fait l'objet de multiples publications.
mise sur le marché [AMM]) [2] et permet essentiellement
de traiter les rides dynamiques du tiers supérieur du
visage et s'intègre dans une prise en charge globale non Encadré 9.1
chirurgicale du vieillissement facial.
Indications de la toxine botulique
en esthétique
Historique L'AMM en esthétique concerne :
■ les rides verticales intersourcilières modérées à sévères

observées lors du froncement des sourcils


Isolement et purification (rides glabellaires) ;
La BoNT est isolée en Belgique en 1897 par le Pr  Van ■ les rides canthales latérales modérées à sévères (pattes

Ermengen, puis purifiée en 1920 par le Dr Herman Sommer d'oie) observées lors d'un sourire forcé ;
(Université de Californie) et est obtenue sous sa forme cris- ■ les rides du front modérées à sévères observées

talline en 1946 par Edward Schantz (Université du lors de l'élévation maximale des sourcils, lorsque la
Wisconsin). sévérité des rides du visage entraîne un retentissement
psychologique important chez les patients adultes.
Première utilisation thérapeutique
dans le strabisme Développement des indications actuelles
Alan Scott (chirurgien ophtalmologue à San Francisco) et futures
réalise des expérimentations chez le singe pour le traite- Les indications thérapeutiques ayant l'AMM en France sont :
ment du strabisme. En 1980, il réalise sa première publica- le blépharospasme, le strabisme, le torticolis spasmodique, le
tion dans le traitement du strabisme chez l'homme. spasme hémifacial, la déformation dynamique du pied

Dermatologie esthétique
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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 9. Toxine botulinique – principe et généralités

équin, la spasticité des membres avec hyperactivité mus­ De récentes revues de consensus fondées sur des preuves
culaire, l'hyperhidrose axillaire, l'incontinence urinaire idio- sur les applications en médecine esthétique rapportent une
pathique [2]. D'autres indications sont en cours d'AMM : relation dose 1:1 pour ONA et INCO. Lors de la conversion
le bruxisme, la migraine chronique, etc. ABO et ONA, plusieurs publications proposent un rapport de
En dermatologie, les cicatrices hypertrophiques, la rosacée 1:2 à 3 [8]. Une étude de consensus menée par Carruthers pré-
et les flushs, les douleurs postherpétiques, le prurit et les suppose un rapport de 1:1,25 pour la conversion entre ABO et
situations avec hyperactivité des glandes sébacées (maladie ONA ou INCO dans les indications esthétiques [9, 10].
de Hailey-Hailey) sont en cours d'investigation [5].
Structure moléculaire
Pharmacologie La BoNT comprend la molécule de neurotoxine elle-même
de 150 kDa et un ensemble de protéines complexantes asso-
ciées à la neurotoxine (NAP) qui forment ensemble des com-
Sérotypes plexes de haut poids moléculaire.
Il existe huit sérotypes distincts de BoNT (A-G) produits par Tous les sérotypes sont constitués d'une chaîne simple qui
différentes souches de Clostridium. Tous les sérotypes ont est clivée de manière protéolytique en deux chaînes dis-
une architecture similaire. Des progrès récents ont permis la tinctes : une chaîne légère de 50 kDa et une chaîne lourde de
découverte de gènes codant pour de nombreuses nouvelles 100 kDa, reliées par des ponts disulfure (fig. 9.1).
BoNT pouvant être regroupées dans un sérotype existant La principale différence entre les différents produits
mais avec diverses séquences d'acides aminés. En outre, il concerne l'absence ou la présence de protéines complexantes.
existe certaines BoNT chimériques. Seuls les sérotypes A et INCO se compose uniquement de la protéine pure [11].
B sont largement utilisés pour les applications cliniques car
leur effet est plus durable [6]. Une toxine E serait en cours
de développement et aurait une durée très éphémère.
Mécanismes d'action
Les différents produits de BoNT A ont le même mécanisme
Les différentes toxines en pratique d'action.
Les trois produits BoNT/A les plus utilisés et disponibles en
France en esthétique sont Azzalure® (abobotulinum toxin A Neurophysiologie de la contraction normale
[ABO], Ipsen), Vistabel® (onabotulinum toxin  A [ONA], Au niveau de la partie terminale présynaptique du nerf
Allergan) et Bocouture® (incobotulinum toxin  A [INCO], sont stockées des vésicules pleines d'acétylcholine. La
Merz) selon la dénomination internationale (tableau  9.1). commande nerveuse, matérialisée par un influx, induit
Une quatrième toxine botulinique A vient d'être approuvée la fusion de ces vésicules avec la membrane présynap-
par la FDA : prabotulinum toxin A (Evolus) [7]. tique avec libération d'acétylcholine au niveau de la
Bien que le mécanisme d'action des trois premiers pro- fente synaptique, ce qui entraîne la contraction
duits soit le même, il existe des différences entre eux car la musculaire.
BoNT A produite et purifiée est spécifique à chaque fabri- Le stockage et la fusion des vésicules s'appellent le
cant et la formulation finale différente. Ainsi, les unités d'ac- « complexe de fusion synaptique ». Ce complexe est
tivité sont différentes pour chaque produit et ne sont pas constitué d'un groupe de protéines appelé SNARE
interchangeables  ! Les doses approuvées cliniquement sont (soluble N-ethylmaleimide-sensitive factor attachment
mesurées dans les unités respectives. protein receptors). Il existe un complexe vésiculaire

Tableau 9.1 Les différentes toxines


Onabotulinumt. A Abobotulinumt. A Incobotulinumt. A
Botox®, Vistabel® Dysport®, Azzalure® Bocouture®, Xeomin®
Fabricant Allergan Ipsen Galderma Merz Pharma
Présentation Poudre Poudre Poudre
Stockage Inférieur à 8 °C Inférieur à 8 °C Inférieur à 25 °C
Durée de vie 24 mois 15 mois 36 mois
Sérotype BoNT/A BoNT/A BoNT/A
Cible SNAP 25 SNAP 25 SNAP 25
Excipient Sérum albumine humaine Sérum albumine humaine Sérum albumine humaine
500 μ/vial sodium 125 μ/vial lactose 1 mg/vial sucrose
Unités par flacon 100 u ou 50 u 500 u ou 125 u 50 u ou 100 u
Conversion 1 1/2,5 (ou 1/3) 1
Poids moléculaire 900 kD 500–900 kD 150 kD

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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 9. Toxine botulinique – principe et généralités

Chaîne lourde : Chaîne légère :


PM 50kDa PM 50kDa
Activité neurotoxique

Chaîne lourde :
PM 50kDa
Domaine de translocation
et d’internalisation

Pont di-sulfure
Poids moléculaire de la toxine : 150 kDa

Fig. 9.1  Structure de la toxine botulinique.


La toxine de type A est composée de chaînes courtes, de chaînes longues et de ponts disulfures (S-S).

(v-SNARE) et un complexe membranaire (t-SNARE). La chaîne lourde se lie à des glycolipides, des gangliosides
Dans le cytoplasme, ces deux complexes sont unis par (GT1b) spécifiques et à un récepteur spécifique de la surface
deux protéines particulières  : la SNAP-25 et la VAMP2. cellulaire (SV2) situés sur les membranes externes présynap-
Elles constituent le site d'action des toxines. La protéine tiques des terminaisons nerveuses cholinergiques, ce qui
cible varie selon le sérotype. Toute altération d'une ou de permet son absorption par endocytose et favorise la trans­
plusieurs protéines du complexe SNARE peut induire location de la chaîne légère à travers la membrane endo­
une paralysie. somale et dans le compartiment cytosolique (après rupture
du pont disulfure). La chaîne légère a une activité protéoly-
Mécanisme d'action moléculaire tique et, après internalisation, se lie avec une spécificité éle-
vée à une protéine SNARE, qui est ensuite clivée. Les protéines
Les toxines agissent en bloquant la libération d'acétylcholine SNARE cibles varient selon les sérotypes, mais le sérotype
au niveau de la plaque motrice au niveau de la jonction BoNT A clive la protéine associée à la membrane synaptoso-
neuro­musculaire (fig. 9.2). male de 25 kDa (SNAP-25). Le clivage de SNAP-25 empêche
la fusion de la vésicule synaptique avec la membrane présy-
naptique, bloquant ainsi la libération d'acétylcholine dans la
BoNT/G
BoNT/B
TeNT
BoNT/D BoNT/C fente synaptique. En fonction du tissu cible, BoNT  A peut
BoNT/F bloquer l'innervation neuromusculaire cholinergique des
muscles lisses et striés ou l'innervation autonome choliner-
gique des glandes exocrines [12, 13].
Syntaxine
Ainsi, on comprend que la toxine n'endommage ni le nerf,
Acétylcholine
ni la production d'acétylcholine  : ce n'est qu'un blocage
Fente synaptique

VAMP/synaptobrévine
fonctionnel, qui en plus est réversible. L'effet sur le muscle
SNAP-25
sera abordé dans le paragraphe consacré aux complications.

Vésicule synaptique BoNT/C


BoNT/A
BoNT/E
Diffusion
Les particules d'un plus grand poids moléculaire diffusent plus
lentement dans un même milieu aqueux que les petites molé-
cules. En effet, les lois physiques de Fick ont démontré que plus
la taille et la masse moléculaire sont importantes, plus le coeffi-
cient de diffusion est faible et moins la molécule migre. A
contrario, plus la molécule est légère, plus elle diffuse vite et loin.
Par ailleurs, les différentes toxines botuliques de type A ont
Fig. 9.2  Les toxines agissent en bloquant la libération d'acétylcholine au des complexes moléculaires de masse, de taille et de structure
niveau de la plaque motrice au niveau de la jonction neuromusculaire.
différentes. Elles n'auront donc pas les mêmes propriétés de
Le clivage de SNAP-25 empêche la fusion de la vésicule synaptique avec la
membrane présynaptique, bloquant ainsi la libération d'acétylcholine dans diffusion  : Vistabel® =  complexe molécule de neuro­toxine
la fente synaptique. + protéine = 900 kD ; Azzalure®, 500 kD ; Bocouture®, 150 kD.

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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 9. Toxine botulinique – principe et généralités

Il faut savoir que cette diffusion du produit est aussi condi- Conclusion
tionnée par d'autres paramètres comme le volume, la
concentration et la vitesse d'injection. Plus le produit est La toxine botulinique représente une étape importante dans
dilué et donc le volume élevé, plus l'aire de diffusion est l'évolution de la prise en charge du vieillissement facial. Avec un
grande. Plus la dose est élevée, plus la diffusion est grande. recul de plus de 15 ans, on connaît aujourd'hui son haut profil
Les barrières anatomiques constituent un frein à la diffusion de sécurité, son efficacité, son haut degré de satisfaction pour
(aponévrose, fascia, septum, etc.). Les toxines A ne diffusent pas à les patients ainsi que son retentissement sur la qualité de vie. La
distance du point d'injection, ce qui limite les effets systémiques. technique d'injection est bien codifiée grâce à des consensus et
L'injection précise au niveau des plaques motrices permettrait de multiples publications (voir les chapitres suivants).
d'obtenir un meilleur effet ; cela est démontré chez l'animal. Il est
plus difficile de le mettre en évidence chez l'homme [14, 15].
Références
Durée d'action et réversibilité [1] Scott AB. Botulinum toxin injection into extraocular muscles as an
alternative to strabismus surgery. Ophtalmology 1980;87:1044–9.
Cliniquement, les effets débutent vers le 2e  jour et sont [2] RCP Vistabel® et Botox®, Allergan.
complètement effectifs vers le 10e ou le 15e jour, pour durer de [3] Scott  AB. Development of botulinum toxin therapy. Dermatol
2 à 5 mois, ce qui correspond à la durée d'efficacité clinique. Clin 2004;22(2):131–3. v.
La terminaison nerveuse inactivée par la neurotoxine va [4] Carruthers JD, Carruthers JA. Treatment of glabellar frown lines
with C. botulinum-A exotoxin. J Dermatol Surg Oncol
émettre de petites repousses nerveuses amyéliniques à par-
1992;18(1):17–21.
tir du 28e  jour qui vont participer à la régénération de la [5] Kim  YS, Hong  ES, Kim  HS. Botulinum toxin in the field of
jonction neuromusculaire. En effet, ces repousses libèrent de dermato­logy: Novel indications. Toxins (Basel) 2017;9(12):403.
l'acétylcholine qui va permettre le rétablissement d'une [6] Smith  TJ, Smith  TJ, Hill  KK, Raphael  BH. Historical and current
neuro­transmission fonctionnelle. Puis elles régressent après perspectives on Clostridium botulinum diversity. Res Microbiol
régénération de la jonction neuromusculaire. Ce phéno- 2015;166(4):290–302.
[7] Beer KR, Shamban AT, Avelar RL, et al. Efficacy and safety of pra-
mène prend de 2 à 5 mois, ce qui correspond à la durée d'ef-
botulinum toxin A for the treatment go glabelle lines in adult
ficacité clinique. subjects:results from 2 identical phase III studies. In: Dermatol
Ainsi peut se poser la question d'optimiser la rentabilité Surg ; 2019 Mar 18. doi:10.1097/DSS.0000000000001903. [Epub
des injections en les faisant au niveau des plaques motrices. ahead of print].
Celles-ci peuvent être anatomiquement identifiées par repé- [8] Scaglione F. Conversion ratio between Botox, Dysport and Xeomin
rage par électromyogramme (EMG) individuel, non réalisé in clinical practice. Toxins (Basel) 2016;8(3):E65. pii. Mar 4.
[9] Klein AW, Carruthers A, Fagien S, Lowe NJ. Comparisons among
en pratique esthétique [16, 17].
botulinum toxins: an evidence based review. Plast Reconstr Surg
2008;121(6):413e–22e.
Contre-indications [10] Samizadeh  S, De Boulle  K. Botulinum neurotoxin formula-
tions:overcoming the confusion. Clin Cosmet Investig
Les contre-indications absolues regroupent les maladies de Dermatol 2018;11:273–87.
la transmission neuromusculaire (myasthénie, syndrome de [11] Rossetto  O, Pirazzini  M, Montecucco  C. Botulinum neuro-

Lambert-Eaton) ; l'hypersensibilité connue à l'un des compo- toxins:genetic, structural and mechanistic insights. Nat Rev
sants (albumine) ; l'infection ou l'inflammation au site d'in- Microbiol 2014;12(8):535–49.
jection ; ainsi que la grossesse et l'allaitement. [12] Pirazzini  M, Rossetto  O, Eleopra  R, Montecucco  C. Botulinum
neurotoxins: biology, pharmacology, and toxicology. Pharmacol
L'utilisation de toxine botulique est contre-indiquée pen- Rev 2017;69(2):200–35.
dant la grossesse et l'allaitement (et chez la femme en âge de [13] Frevert  J. Pharmaceutical, biological, and clinical properties of
procréer sans contraception) en raison de l'absence d'études botulinum neurotoxin type A products. Drugs in R&D
contrôlées chez la femme enceinte. En clinique, il a été décrit 2015;15(1):1–9.
une prématurité et deux fausses couches chez des patientes [14] Dover JS, Monheit G, Greener M, Pickett A. Botulinum toxin in aestetic
traitées durant leur grossesse, mais il est aussi décrit de mul- medicine:myths and realities. Dermatol Surg 2018;44(2):249–60.
[15] Ramirez-Castaneda  J, Jankovic  J, Comella  C, et  al. Diffusion,

tiples grossesses menées à terme, dont un cas de botulisme spread, and migration of botulinum toxin. Mov Disord
chez une femme enceinte sans conséquence fœtale. En tout, 2013;28(13):1775–83.
38 cas d'exposition à la toxine pendant la grossesse ont été [16] Glogau R, Kane M, Beddingfield F, et al. Onabotulinum toxin A:A
rapportés dans cette étude sans que l'on dénombre une aug- meta-analysis of duration of effect in the treatment of galbellar
mentation des complications chez le fœtus [18]. lines. Dermatol Sur 2012;38:1794–803.
Les contre-indications relatives comprennent essentielle- [17] Moy R, Maas C, Monheit G, Huber B. Long term safety and effi-
cacy of a new botulinum toxin type A in treating glabelle lines.
ment les interactions médicamenteuses (par interférence au Arch Facial Plast Sure 2009;11(2):77–83.
niveau de la plaque motrice). Seraient potentialisateurs : les [18] Tan  M, Kim  E, Koren  G, Bozzo  P. Botulinum toxin type A in
aminosides, les curares et inhibiteurs, les amino-4-­quinoléines ­pregnancy. Can Fam Physician 2013;59(11):1183–4.
[19]. Comme pour toutes les indications esthétiques, les [19] Belhaouari L, Gassia V. L'art de la toxine botulique en esthétique.
­dysmorphophobies et les attentes irréalistes sont à détecter. 2e éd. Paris:Arnette ; 2013.

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Section 3. Toxines botuliniques

Chapitre 10
Toxine botulinique – tiers
supérieur du visage
C. Raimbault

Introduction centre du front, les deux chefs musculaires sont séparés par un
diastasis aponévrotique amusculaire en forme de V plus ou moins
Les muscles du tiers supérieur du visage sont responsables ouvert, mais cette zone aponévrotique peut manquer, réunissant
des expressions d'étonnement lors du soulèvement des alors les deux parties en un seul muscle recouvrant tout le front.
sourcils, de la colère lors du froncement ou, au contraire, Latéralement, le muscle s'insère sur la crête osseuse temporale. Il
de la joie et du sourire avec le plissement dans la zone ocu- est important de noter que le muscle frontal ne s'insère pas sur le
laire. Ce sont des muscles peauciers situés dans un plan tiers externe du sourcil, et est ainsi à l'origine de sa forme courbe
superficiel avec une adhérence à la peau au moins sur une avec abaissement de la queue du sourcil (fig. 10.1).
de leur extrémité. Leur contraction répétée conduit à l'ap-
parition des rides d'expression du haut du visage.
Trois groupes musculaires innervés par le nerf facial sont
responsables de ces mouvements :
■ le frontal, muscle large et plat sur le front, est à l'origine des

rides frontales horizontales ;


■ les muscles de la glabelle, les deux corrugateurs du sourcil et

le procérus, sont responsables des rides verticales du lion et


des rides horizontales de la zone intersourcilière. Un petit
muscle, l'abaisseur du sourcil, peut être individualisé ou non ;
■ le muscle orbiculaire de l'œil, large sphincter qui permet

l'occlusion des paupières, donne naissance aux rides de la


patte d'oie.
Ils sont pairs et symétriques (en dehors du procérus), agis-
sant ensemble de façon agoniste ou, au contraire, antago-
niste et sont responsables de la balance musculaire
fronto-orbitaire ainsi que de la position du sourcil.
La réussite d'un traitement par toxine botulinique va
dépendre d'une bonne analyse du vieillissement du tiers supé-
rieur et de l'action des muscles agonistes et antagonistes.

Description anatomique [1]


Fig. 10.1  Le muscle frontal est un muscle large et plat.
Il s'insère sur les deux tiers internes du sourcil. Il présente souvent un dias-
Muscle frontal tasis central amusculaire.
Ce muscle est responsable des rides horizontales du front.
C'est le seul muscle élévateur du sourcil. Sa contraction peut
aussi abaisser la ligne d'implantation des cheveux. Glabelle
C'est un muscle pair de forme quadrilatère, large et plat, qui Les muscles pairs symétriques à l'origine du froncement des
émane du muscle occipito-frontal à la lisière du cuir chevelu. Il est sourcils sont  : les muscles corrugateurs du sourcil, le muscle
engainé dans un dédoublement de la galéa et s'insère en bas à la procérus, et de façon plus anecdotique les muscles abaisseurs
face profonde de la peau sur les deux tiers internes du sourcil et la du sourcil. Leur contraction abaisse et rapproche les têtes du
région intersourcilière. Sa partie médiane dans la zone intersourci- sourcil à l'origine des rides verticales de la glabelle ou rides du
lière présente des interdigitations avec le muscle procérus. Au lion et des rides horizontales intersourcilières (fig. 10.2).
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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 10. Toxine botulinique – tiers supérieur du visage

Fig. 10.3  Le muscle corrugateur est un petit muscle cylindrique long de


3 à 4 cm.
Il est légèrement oblique en haut et en dehors. Son insertion interne est
profonde. Il est recouvert par l'orbiculaire de l'œil et le frontal.

Muscle procérus
Fig.  10.2  Muscles de la glabelle  : les deux muscles corrugateurs et le Ce muscle peut aussi être considéré comme une prolongation
muscle procérus.
Ils rapprochent et abaissent la tête du sourcil.
du muscle frontal dans sa partie médiane. Il s'insère sur les os
propres du nez, a une forme pyramidale inversée, et recouvre la
partie médiale du corrugateur du sourcil jusqu'à la peau inter-
sourcilière. Sa contraction abaisse la tête du sourcil et la peau. Il
Muscle corrugateur du sourcil
est à l'origine des rides glabellaires horizontales (fig. 10.4).
C'est un petit muscle cylindrique, long de 3 à 4 cm, légère-
ment oblique en haut et en dehors, qui suit la partie interne
du sourcil au-dessus de l'arcade supra-orbitaire. Il s'insère
profondément à sa partie interne sur l'éminence osseuse
glabellaire, environ à 11 mm au-dessus de l'arcade et à 7 mm
de la ligne médiane. Selon sa force musculaire, il est plus ou
moins épais et palpable dans cette zone lors de sa contrac-
tion. Il est recouvert par le procérus, le frontal et la portion
orbitaire de l'orbiculaire.
Dans sa partie externe, il s'insère superficiellement à la
peau et il est facile de repérer les cupules d'insertion cutanée
externe de ce muscle lors du froncement. À ce niveau, il
rejoint la face profonde du muscle orbiculaire et du frontal.
Il est séparé de l'arcade supra-orbitaire par le coussinet de
Charpy (fig. 10.3).

Fig. 10.4  Le muscle procérus est une pyramide inversée.


Il est considéré comme une émanation centrale du muscle frontal. Il
recouvre la partie médiane du corrugateur et s'insère à la peau dans la zone
intersourcilière. Il est à l'origine de rides glabellaires horizontales.
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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 10. Toxine botulinique – tiers supérieur du visage

Muscle abaisseur du sourcil Technique d'injection par toxine


Son existence est controversée  : il pourrait s'agir d'un fais-
ceau du frontal ou de l'orbiculaire. Petit muscle triangulaire Pour faciliter l'exposé, le taux de conversion entre les diffé-
situé sous le muscle orbiculaire, il s'insère sur la peau au rentes toxines sera de :
■ 1/1 pour ONABoNT (Vistabel®) et INCOBoNT (Bocouture®),
niveau de la tête du sourcil, qu'il abaisse.
exprimé en unités (u) ;
■ 1/2,5 pour ABOBoNT (Azzalure®), exprimé en unités
Muscle orbiculaire de l'œil Speywood (u Sp.).
Ce muscle permet l'occlusion des paupières et protège l'œil
(fig. 10.5). Il abaisse les sourcils, élève la joue et la paupière Rides frontales – muscle frontal
inférieure lors du sourire. Sa contraction entraîne l'appari-
tion des rides dynamiques de la patte d'oie qui deviennent Technique
progressivement permanentes au repos. C'est un anneau
large et plat, fait de fibres musculaires concentriques. Il est Le muscle frontal est mince ; l'injection sera intramusculaire
très adhérent à la peau. superficielle. Demander au patient de surélever les sourcils
Sa portion palpébrale permet le clignement de l'œil. pour apprécier la quantité de points nécessaires.
Sa portion orbitaire recouvre le rebord orbitaire, la partie Il faut éviter d'injecter sa partie inférieure pour ne pas abais-
antérieure de la fosse temporale, une partie du malaire, les ser les sourcils ; les points seront donc situés à une hauteur d'au
muscles zygomatiques. Les fibres se rejoignent dans la zone moins 2 cm par rapport à l'arcade orbitaire (au mieux à 4 cm au
du canthus interne de l'œil pour s'insérer en partie sur le liga- moins en cas de ptosis des sourcils ou de blépharochalasis).
ment palpébral interne. Il faut séparer les points de 2 cm environ, en raison de la
diffusion de 1 cm autour de chacun.
Selon la hauteur du front, 1 à 2 rangées de 4 à 8 points de
2 u à 4 u (0,05 ml à 0,1 ml) ou 5 à 10 u Sp. (0,025 ml à 0,05 ml)
seront nécessaires. Elles suivent la courbe des sourcils pour
les femmes ; l'injection est plus horizontale pour les hommes.

Fig. 10.5  Muscle orbiculaire de l'œil.


C'est un anneau large et plat, fait de fibres musculaires concentriques. Il est très adhérent à la peau.

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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 10. Toxine botulinique – tiers supérieur du visage

Schémas suivant l'anatomie Cas particuliers


Différents schémas sont proposés selon l'anatomie du patient : ■ Hommes chauves : 2 à 3 rangées seront nécessaires en sui-
■ une rangée de 6 points de 2 u sans point central, si pré- vant les golfes temporaux.
sence d'un diastasis musculaire central (fig. 10.6A) ; ■ Persistance d'une ride sus-sourcilière latérale si de petites fibres

■ un point central, utile si les rides sont horizontales sur du frontal se prolongent au-delà de la crête temporale : la cor-
toute la largeur du front ; dans ce cas, les deux frontaux rection par un point d'injection de 1 à 2 u situé juste au-dessus
sont réunis au centre sans diastasis ; de la ride peut se faire lors du contrôle après 10 jours (fig. 10.8).
■ 5 points de 4 u repartis en une rangée de 3 points de 4 uni- Ce point pourra être fait d'emblée lors des séances suivantes si
tés, dont un central et 1 rangée plus haute avec 2 points de le résultat s'est révélé satisfaisant. En cas de ptose du sourcil, de
4 u. Une étude randomisée a montré une diminution du blépharochalasis, il est préférable de combler cette ride à l'aide
risque de ptose des sourcils avec ce schéma (fig. 10.6B) [2] ; d'acide hyaluronique (AH) sous peine d'aggraver la ptose.
■ au contraire pour éviter l'effet Méphisto : les points les plus

externes seront situés à l'aplomb de la courbure des sourcils


pour traiter la partie externe du muscle frontal (fig. 10.7).

Fig.  10.8  Effet Méphisto avec persistance d'une ride sus-sourcilière et


ascension du sourcil.
Il doit être corrigé par un point de 1 à 2 u.
Source : C. Raimbault.
A

■ Certains patients souhaitent une élévation latérale du


sourcil qu'ils estiment plus esthétique  : pour l'obtenir, le
point le plus externe sera plus médial.
Le risque est l'apparition d'une hypertonie musculaire
réactionnelle de la partie la plus externe du muscle frontal
avec un aspect Méphisto. Il sera aisément corrigé lors de la
session de contrôle par un point latéral haut (fig. 10.9).
■ Dans certains cas (ptose des sourcils, blépharochalasis), il

vaut mieux ne pas traiter le frontal d'emblée, mais


B attendre la séance de retouche afin de ne délivrer que les
doses réellement nécessaires [3], car le frontal n'aura pas
Fig.  10.6  A. Traitement classique du muscle frontal par une rangée de
6 points de 2 u, situés à au moins 2 cm au-dessus de l'arcade orbitaire. Les d'hyperactivité compensatoire s'il n'est pas traité, contrai-
points suivent la forme des sourcils. Le point le plus externe est à l'aplomb rement à ce que l'on observe avec les autres groupes
de la courbure du sourcil pour éviter l'effet Méphisto. B. Schéma proposé musculaires.
pour diminuer le risque de ptose du sourcil : une rangée de 3 points de 4 u ; ■ Traitement d'une asymétrie  : les points d'injections ne
une deuxième rangée de 2 point haut situés.
Source : C. Raimbault. seront pas symétriques ; ils pourront être soit plus nom-

A B C
Fig. 10.7  Bien examiner le patient en dynamique pour adapter le traitement.
A. Examen en dynamique. B. Le point le plus latéral est à l'aplomb de la courbure du sourcil pour éviter l'effet Méphisto. C. Résultat à 15 jours. Si nécessaire
effectuer une retouche.
Source : C. Raimbault.

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Chapitre 10. Toxine botulinique – tiers supérieur du visage

■ inconfort lié à l'impossibilité de relever les sourcils, sensa-


tion de tension du front ;
■ difficulté à maquiller les yeux.

Rides de la glabelle
■ Les rides verticales sont liées aux muscles corrugateurs du
sourcil.
■ La ride horizontale est liée au muscle procérus.

Injection du corrugateur du sourcil


Technique
Deux points de 4 u (10 u Sp.) sont injectés par côté (fig. 10.10).
Le point d'injection interne est profond ; l'aiguille est insérée
Fig. 10.9  Recherche d'une élévation latérale du sourcil. verticalement presque au contact osseux. Il est localisé à
Le point frontal le plus externe est plus médial pour laisser la partie externe 11 mm au-dessus du rebord orbitaire et à 7 mm en dehors de
du muscle frontal active. Un point de 2 à 4 u dans l'orbiculaire permet d'ac-
centuer cette ascension de la queue du sourcil.
la ligne médiane. Il faut éviter la diffusion de la toxine en pro-
Source : C. Raimbault. tégeant l'orbite avec le doigt. Au mieux, pour s'adapter à
l'anatomie de chaque patient, le point d'injection est localisé
grâce au froncement qui fait bomber le muscle dans sa par-
breux, soit situés plus bas du côté ou le sourcil est le plus tie interne. Le point d'injection est alors situé au centre de ce
haut, soit plus internes et/ou plus hauts pour surélever le relief musculaire. Orienter le biseau de l'aiguille vers le haut,
sourcil le plus bas. injecter lentement, comprimer légèrement pour éviter tout
■ À un niveau expert, il est possible d'injecter le sourcil pour saignement qui pourrait augmenter la diffusion de la toxine.
relâcher l'orbiculaire à ce niveau avec des points en haute Le point externe est situé latéralement à 10 ou 15 mm du
concentration (pour éviter une diffusion vers le releveur premier point en suivant la courbure orbitaire, et à 11 mm en
de la paupière supérieur). haut par rapport au rebord osseux, donc légèrement plus
haut que le premier point. L'injection est intramusculaire
Effets secondaires moyenne ; l'aiguille est introduite avec un angle de 45° au
Ce sont les suivants : niveau des cupules d'insertion externes du corrugateur. Elle ne
■ ptosis des sourcils : l'effet secondaire le plus fréquent – ­traiter doit pas dépasser latéralement la ligne verticale passant par la
haut  ! pupille.

A B

C D
Fig. 10.10  A. Examen lors de la contraction des muscles de la glabelle, corrugateur et procérus. B. traitement de chaque corrugateur par 2 points de 4 u,
le point interne à l'aide d'une IM profonde, le point externe par une IM moyenne. C. Traitement du procérus par une IM profonde de 4 u. D. Résultat.
Source : C. Raimbault.

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Chapitre 10. Toxine botulinique – tiers supérieur du visage

Cas particuliers
■ Il n'est pas toujours utile d'injecter la partie externe du

corrugateur.
■ Il faut augmenter les doses si le froncement est marqué

avec un relief musculaire important, notamment chez


l'homme (6 u ou 15 u Sp.).
■ Il peut persister une contraction et un froncement dans la

partie latérale du corrugateur, où son insertion sous-­cutanée


se mêle aux fibres de l'orbiculaire et du frontal. Le traitement
par un point plus latéral entraîne un risque de diffusion vers
le releveur de la paupière supérieure. Il est possible d'utiliser
une haute concentration pour éviter ce risque. A
■ Lors de l'examen initial, prévenir le patient de la possibilité

de la persistance des rides de la glabelle lorsqu'elles sont


prononcées en statique. Un traitement complémentaire
par comblement sera nécessaire.

Injection du procérus (fig. 10.10C)


Technique
Un seul point d'injection central de 4 u (10 u Sp.) est suffi-
sant à la racine du nez. L'aiguille est introduite p
­ rofondément,
l'injection est lente. On évite le risque de diffusion en pin-
çant la racine du nez entre le pouce et l'index.
B
Cas particulier Fig. 10.11  Froncement de type oméga de la glabelle.
Traiter les corrugateurs en augmentant si nécessaire la dose du point le
Il n'est pas utile d'injecter ce point en l'absence de ride hori- plus interne et traiter le frontal dans la zone centrale par 2 points de 2 u.
zontale. Mais l'absence de traitement pourrait entraîner une Source : C. Raimbault.
hyperactivité compensatoire du procérus et augmenter son
tonus de repos avec une légère chute de la tête du sourcil.

Résumé du traitement de la glabelle


Classiquement, sont réalisés 5 points de 4 u (10 u sp), 2 par
côté pour les corrugateur, 1 pour le procérus.
Une publication de De Almeida en 2012 a distingué cinq
types de contraction glabellaire [4] : en U, en V, horizontale,
en oméga, en oméga inversé, avec des points d'injection et
des doses différents.
■ Froncement en U  : lors de la contraction de la glabelle, on

observe un rapprochement et une dépression des sourcils avec


une force modérée. Le schéma de traitement est classique.
■ Froncement en V : le froncement a une plus grande inten-
Fig. 10.12  Froncement oméga inversé.
sité et nécessite des doses plus élevées sur les corrugateurs
Le mouvement entraîne plus une dépression qu'un rapprochement des
et le procérus. sourcils. Augmenter la dose pour le procérus, diminuer les doses pour le
■ Froncement horizontal : le rapprochement des sourcils se corrugateur, traiter l'abaisseur du sourcil et le nasal.
produit sans abaissement ou sans surélévation. L'injection Source : C. Raimbault.
est plus horizontale, sans nécessité de traiter le procérus
ou le frontal.
■ Froncement oméga  : rapprochement et élévation de la
Rides de la patte d'oie – muscle
glabelle avec participation du frontal dans sa partie cen- orbiculaire (fig. 10.13)
trale qui doit être traitée et peu de participation du procé-
rus (fig. 10.11). Technique
■ Froncement oméga inversé : le mouvement entraîne plus une L'injection se fait à 1  cm de l'anneau osseux orbitaire en
dépression qu'un rapprochement des sourcils. Il faut 3 points de 2 à 4 u (5 à 10 u Sp.) : le premier à hauteur du
­augmenter les doses pour le procérus, et l'abaisseur du sourcil, canthus externe, le deuxième 1 à 1,5 cm plus haut en suivant
les diminuer pour les corrugateurs et traiter le nasal (fig. 10.12). la courbure de l'orbite, le troisième 1 à 1,5 cm plus bas.

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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 10. Toxine botulinique – tiers supérieur du visage

Cas particuliers
■ Rides palpébrales inférieures et rétrécissement de la
fente oculaire (fig. 10.14) : les faisceaux palpébraux infé-
rieurs du muscle orbiculaire peuvent entraîner une
hypertonie musculaire avec apparition des rides hori-
zontales de la paupière inférieure et/ou un rétrécisse-
ment de la fente. L'injection d'une petite papule à
l'aplomb de la pupille à 2  mm du rebord orbitaire et
latéralement par rapport à la ligne médiopupillaire peut
les atténuer et favoriser l'élargissement de l'ouverture de
l'œil (dose : 1 à 2 u). L'aiguille est orientée parallèlement
à la peau ; introduire juste le biseau de l'aiguille, injecter
une papule. Il est important d'évaluer la tonicité de la
peau par le snap test.
■ À un niveau expert, si des rides persistent à la partie

interne de la paupière inférieure, signifiant une hypercon-


tractilité de la partie palpébrale de l'orbiculaire, il est pos-
sible de rajouter des demi-u délivrées à l'aide de papules
très superficielles le long de la jonction paupière-joue.

Effets secondaires
Les effets secondaires sont les suivants :
■ risque de diffusion vers le grand zygomatique si le point

inférieur est trop bas, proche de l'insertion malaire de ce


muscle ;
■ risque de sécheresse oculaire chez les patients sensibles ;

■ risque d'augmentation des poches matinales par diminu-

tion des mouvements musculaires et donc du drainage


Fig. 10.13  Traitement des rides de la patte d'oie (points noirs), relâ- lymphatique. Dans ce cas, ne pas traiter le point inférieur
chement de la queue du sourcil (point jaune) et traitement des bunny
lines par 1 à 2 points de 2 u (point rouge) (avant-après). des pattes d'oie ou diminuer la dose ;
Source : C. Raimbault. ■ révélation d'une atrophie graisseuse sous-jacente à l'hy-

pertonie musculaire de repos permanente avec apparition


Orienter l'aiguille vers l'extérieur de l'orbite ; l'injection de creux disgracieux dans la partie inférolatérale de la zone
superficielle laisse une papule visible pendant quelques orbitaire (fig. 10.15) ;
minutes sous cette peau fine. Il faut protéger l'orbite avec le ■ apparition de «  bunny lines  »   : chez certains patients

doigt et s'aider d'une bonne lumière car la vascularisation est très expressifs, le fait de bloquer les mouvements de la
importante dans cette zone. glabelle et des pattes d'oie va entraîner la sollicitation
Pour le relèvement de la queue du sourcil, il n'y a pas de de muscles comme le nasal et l'apparition de rides
muscle releveur dans cette zone ; il est donc possible de relâ- nasales latérales obliques. Leur traitement, d'emblée
cher l'orbiculaire, abaisseur, par 1  point de 2  u injecté au ou lors de la séance de retouche se fait à l'aide d'un
niveau de la queue du sourcil en regard de l'encoche orbi- point ou deux d'injection de 2 u sur le bord latéral du
taire latérale. nez assez haut.

A B
Fig. 10.14  Traitement des rides de la patte d'oie et des rides de la paupière inférieure (avant-après).
Orbiculaire : 3 points classiques et 1 point pour relever la queue du sourcil. Hypertrophie de la portion palpébrale de l'orbiculaire de l'œil (point blanc). Ridules de
la paupière inférieure (niveau expert) par 1 ou 2 papules le long du sillon palpébrojugal (points bleus de 0,5 u). Attention à la tonicité de la paupière inférieure.
Source : C. Raimbault.

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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 10. Toxine botulinique – tiers supérieur du visage

Fig. 10.15  Hypertonie de l'orbiculaire de l'œil au repos.


Le traitement classique a révélé une hypotrophie graisseuse sous-jacente, disgracieuse. Il convient de diminuer la dose du point inférieur ou de ne pas le
traiter ou d'y associer un traitement par comblement.
Source : C. Raimbault.

Relever le sourcil Interrogatoire


■ Relever la queue du sourcil : comme vu précédemment, très L'interrogatoire précisera les antécédents ophtalmologiques
souvent associé au traitement des rides de la patte d'oie. (vision, antécédents chirurgicaux).
■ Relever la tête du sourcil  : traitement de la partie supé-

rieure et interne de l'orbiculaire et de l'abaisseur du sourcil Examen en statique


par 1 point de 2 u de chaque côté en haute concentration
■ Peau  : évaluer le degré d'héliodermie, d'élasticité de la
pour éviter tout risque de diffusion.
peau, la présence de rides au repos, leur profondeur,
■ Relever le corps du sourcil  : en cas d'asymétrie, niveau
notamment dans la glabelle, l'association avec des rides
expert. Utiliser une haute concentration avec, en plus des
zygomatiques au niveau de la patte d'oie.
2 points précédents, 1 ou 2 points en intradermique très
■ Paupières  : rechercher l'existence d'un relâchement de la
superficiel dans la partie médiane du sourcil.
paupière supérieure ou blépharochalasis, de la paupière
inférieure avec le snap test qui évalue son tonus en pinçant
Analyse du vieillissement la peau, d'un scleral show, d'un œdème matinal.
global et des balances ■ Graisse  : apprécier la fonte du coussinet de Charpy, la

malposition de la graisse avec présence de poches pal-


musculaires (fig. 10.16) pébrales supérieures ou inférieures, malaires, ou au
Un traitement harmonieux du tiers supérieur va débuter par contraire d'œil creux, d'atrophie de la graisse jugale.
■ Muscle orbiculaire : recherche d'une hypertonie au repos.
un examen attentif de la peau, de la position du sourcil, des
■ Position du sourcil : le vieillissement va influencer la position
rides statiques et dynamiques, mais aussi par l'évaluation de
la force des différents groupes musculaires de leur action du sourcil au repos par rapport à l'arcade orbitaire. Ainsi :
● la tête du sourcil, sous l'influence des abaisseurs toniques
agoniste ou antagoniste et du vieillissement global de la zone
frontale, glabellaire et péri-orbitaire. que sont les corrugateurs et le procérus, aura tendance à
se ptoser. Il en est de même pour la queue du sourcil
sans élévateur à ce niveau ;
● la partie médiane du sourcil pourra être située en position

normale, basse ou au contraire surélevée, asymétrique ;


● le relâchement de l'aponévrose épicrânienne, le poids du

sourcil et du coussinet de Charpy entraînent une ptose


du front et du sourcil. Si la contraction réactionnelle du
muscle frontal est plus forte que la ptose, le sourcil ascen-
sionne et les rides frontales horizontales apparaissent. Il y
a souvent une asymétrie de la position du sourcil ;
● si la contraction du frontal est insuffisante, il y aura une

ptose du sourcil qui s'horizontalise et peut parfois être


positionné en dessous l'arcade orbitaire.

Examen en dynamique
Cet examen sert à évaluer la force des différents groupes
Fig. 10.16  Analyse du vieillissement. musculaires en demandant au patient d'effectuer des
Elle conditionne les bons résultats par la toxine et permet d'établir un plan mimiques de froncement, d'étonnement, de sourire. Il appré-
de traitement associant si nécessaire le comblement de rides statiques, cie également la balance musculaire entre les agonistes et
l'association avec la chirurgie. Rides frontales et glabellaires ; blépharocha-
antagonistes. Le muscle frontal est le seul élévateur des deux
lasis ; asymétrie des sourcils (élévation à gauche, ptose à droite) ; poches
palpébrales ; snap test positif. tiers internes du sourcil. Il n'y a pas d'élévateur au niveau du
Source : C. Raimbault. tiers externe. Tous les autres muscles sont abaisseurs.

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Le sourcil est divisé en trois parties : À l'avenir, des flacons prêts à l'emploi seront commercialisés.
■ la partie interne où le muscle frontal élévateur est opposé Pour la reconstitution  : enlever l'opercule du flacon de
aux muscles abaisseurs, corrugateur, procérus, abaisseur toxine, désinfecter le bouchon à l'aide d'alcool. Prélever la
du sourcil ; quantité précise de sérum physiologique à l'aide d'une
■ la partie médiane où le frontal est opposé au muscle orbi- seringue pour la transférer dans le flacon de toxine à l'aide
culaire, abaisseur ; d'une aiguille traversant le bouchon. Le piston doit des-
■ la queue du sourcil, située latéralement par rapport à la cendre sans pression dans le corps de la seringue pour
crête temporale à partir de la courbure du sourcil. Il n'y a garantir la présence de vide dans le flacon et sa bonne
pas d'élévateur à ce niveau, le muscle orbiculaire est qualité.
abaisseur. La notice précise qu'après reconstitution, une utilisa-
tion immédiate de la solution injectable est recomman-
Stratégie thérapeutique dée. Elle peut être conservée pendant 24  heures au
■ Si les rides sont essentiellement dynamiques, la toxine sera réfrigérateur (entre 2  °C et 8  °C). Toutefois, des études
très efficace et préviendra le vieillissement du tiers supé- montrent que l'efficacité de la toxine reconstituée, si elle
rieur. Il faut interroger le patient pour savoir s'il souhaite est stockée dans de bonnes conditions, persisterait
un aspect figé ou plus souple, plus naturel pour évaluer les jusqu'à 4 semaines [5].
doses. L'injection de toxine se fera à l'aide de seringues à insu-
■ Si les rides sont profondes avec un photovieillissement
line de 1 ml ou, au mieux, de 0,5 ml avec une aiguille de
marqué, le traitement par toxine sera délicat et souvent 30 G ou de 32 G plus fine pour atténuer la sensation de
insuffisant. Il faudra le combiner avec d'autres techniques piqûre. De nouvelles seringues « à clics » pour délivrer une
esthétiques comme le comblement des sillons et creux, le quantité exacte d'unités de toxine sont maintenant
lissage de la peau avec les peelings ou les lasers. disponibles.
■ En cas de relâchement marqué, le recours à la chirurgie

sera nécessaire (blépharoplastie, chirurgie des poches pal- Réalisation de l'acte


pébrales, lifting temporal, etc.). ■ Désinfection de la peau, maintien des cheveux par un ban-
deau si nécessaire.
Traitement harmonieux et équilibré ■ Injection conforme à l'analyse faite et aux souhaits du

Le tiers supérieur comporte trois groupes musculaires, mais patient pour traiter un ou trois groupes musculaires, avec
la demande du patient peut se concentrer sur une seule un aspect naturel ou figé.
région, rides horizontales du front ou rides du lion ou pattes
d'oie. Si un seul groupe musculaire est traité, on observe fré- Recommandations après injection
quemment une hyperactivité compensatoire des autres
■ Ne pas masser, ne pas appuyer sur les points, ne pas porter
groupes musculaires. Pour l'éviter, il est conseillé de relâcher
de chapeau, casquette, lunettes de piscine, pour éviter une
au moins chacun des deux autres groupes par un ou deux
diffusion de la toxine, en particulier vers le releveur de la
points complémentaires ; par exemple :
paupière supérieure.
■ traiter la glabelle avec les doses recommandées et au
■ Éviter le sport, le sauna, le hammam au moins 6 heures.
moins relâcher la queue du sourcil ;
■ Ne pas mettre la tête vers le bas, bien que cette notion soit
■ traiter le frontal dans son ensemble, mais rajouter le point
controversée, ainsi que d'autres [6].
interne du corrugateur et relâcher la queue du sourcil.

Contrôle après 10 à 30 jours


Traitement par toxine L'effet de la toxine n'est pas immédiat et va s'installer pro-
Avant de débuter tout acte esthétique, la remise des devis, la gressivement à partir de 24 à 72 heures jusqu'à 2 semaines. Il
signature du consentement éclairé et la prise de photogra- est important de revoir le patient lors d'une session de
phies en position statique et dynamique sont indispensables. contrôle afin de vérifier l'efficacité du traitement qui doit
Le choix de la toxine dépendra des préférences du prati- rester harmonieux. En effet, le relâchement de certains
cien (voir le chapitre 9). groupes musculaires peut entraîner l'apparition d'une hype-
ractivité compensatoire de certains faisceaux insuffisam-
ment traités. C'est le cas d'apparition de rides frontales
Dilution, reconstitution hautes, de bunny lines qui pourront être corrigées, etc.
Vistabel® et Bocouture® sont présentés en flacon de 50  u Toutefois, il faudra bien exposer au patient les éventuels
contenant une poudre de complexes de neurotoxine à diluer inconvénients d'une retouche dans certains cas. Par exemple,
dans 1,25 ml de sérum physiologique ou, plus récemment, la persistance de rides suprasourcilières ne sera corrigée avec
en flacon de 100 u à diluer dans 2,5 ml, soit 4 u pour 0,1 ml. la toxine qu'en l'absence de risque d'abaissement disgracieux
Azzalure® est présenté en flacon de 125 u sp à diluer dans du sourcil (dans ce cas, il vaut mieux combler la ride). La per-
0,63 ml de sérum physiologique, soit 10 u sp pour 0,05 ml. sistance d'un froncement du sourcil peut être due à l'activité

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Chapitre 10. Toxine botulinique – tiers supérieur du visage

persistante de la partie la plus externe du corrugateur, à l'ex- traiter les rides dynamiques chez des sujets jeunes, avec des
térieur de la zone de sécurité représentée par la ligne verti- résultats très esthétiques et une action préventive sur le
cale médiopupillaire. Le risque de diffusion vers le releveur vieillissement. Lorsque celui-ci est plus marqué, l'examen
de la paupière en cas de retouche dans cette zone est attentif et le traitement adapté à chaque cas permettront
important. d'obtenir des résultats harmonieux, en association avec les
autres techniques esthétiques.
Fréquence des sessions
Références
L'efficacité de la toxine est de 4 à 6 mois. [1] Belhaouari L, Gassia V. L'art de la toxine botulique en esthétique et
Il est recommandé de respecter un délai minimal de des techniques combinées. 2e éd Paris : Arnette ; 2013.
12 semaines entre les sessions pour éviter l'apparition d'une [2] De Boulle K, Werschler WP, Gold MH, et al. Phase 3 study of ona-
résistance à la toxine, bien que cet effet secondaire ait été botulinumtoxinA distributed between frontalis, glabellar com-
rarement observé lors de traitements esthétiques. plex, and lateral canthal areas for treatment of upper facial lines.
Pour un « look  » plus naturel, certaines publications Dermatol Surg 2018 ;44(11):1437–48.
[3] Ballard TNS, Vorisek MK, Few JW. Impact of botulinum toxin type
recommandent des doses plutôt inférieures en renouvelant A treatment of the glabella and crow's feet on static forehead rhy-
les traitements tous les 4 mois [7]. tides. Dermatol Surg 2019 ;45:167–9.
Il est classique de dire que la répétition des séances dimi- [4] de Almeida  AR, da Costa Marques  ER, Banegas  R, Kadunc  BV.
nuera la force musculaire avec le temps et que les sessions Glabellar contraction patterns: a tool to optimize botulinum toxin
pourront être espacées. Toutefois, cela est rarement observé treatment. Dermatol Surg 2012 ;38(9):1506–15.
chez les patients jeunes, sportifs. [5] Alam M, Bolotin D, Carruthers J, et al. Consensus statement regar-
ding storage and reuse of previously reconstituted neuromodula-
Les effets secondaires seront abordés dans le chapitre 13. tors. Dermatol Surg 2015 ;41(3):321–6.
[6] Dover JS, Monheit G, Greener M, Pickett A. Botulinum toxin in aes-
thetic medicine: myths and realities. Dermatol Surg
Conclusion 2018 ;44(2):249–60.
[7] Hexsel CL, Siega C. Achieving natural look. In: Cohen JL, Ozog DM,
Un traitement par toxine débute par une analyse minutieuse editors. Botulinum toxins: cosmetic and clinical applications, John
du vieillissement de tout le tiers supérieur. Il est plus facile de Wiley & Sons Ltd ;2017.

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Section 3. Toxines botuliniques

Chapitre 11
Toxine botulinique – tiers
inférieur du visage
M.-J. Miniconi-Nigoghossian

Introduction
1 2

Les indications esthétiques de la toxine botulique se sont


3
étendues au bas du visage et au cou, dans la prévention et la
correction du vieillissement. 4

La technique doit être fondée sur une connaissance appro- 5


6
7
fondie de l'anatomie, de la physiologie, des muscles ciblés, 8
des structures environnantes ainsi que de la pharmacologie 9
10
et la toxicologie de la toxine botulique A.
Il est important de préciser que les indications esthétiques 11

de la toxine botulique dans le bas du visage sont hors autori-


sation de mise sur le marché (AMM).

Bases anatomiques 12 13 14 15 16 17 18

Fig. 11.1  Anatomie des muscles faciaux, vue de profil.


Les muscles de la face permettent les expressions du visage 1. M. orbiculaire des paupières ; 2. M. occipito-frontal ; 3. M. corrugateur du
sourcil ; 4. M. Procérus ; 5. M. nasal ; 6. M. élévateur de la lèvre supérieure et
et contribuent aux fonctions masticatrices et sphincté- de l'aile du nez ; 7. M. dilatateur de la narine ; 8. M. abaisseur du septum
riennes. Ils sont tous innervés par le nerf facial. À l'excep- nasal ; 9. M. petit zygomatique ; 10. M. élévateur de l'angle de la bouche ;
tion de l'orbiculaire des lèvres, ce sont des muscles pairs. 11.  M. abaisseur de la lèvre inférieure ; 12. M. masseter ; 13. M. risorius ;
Les expressions faciales reposent sur l'équilibre des 14.  M. buccinateur ; 15. M. grand zygomatique ; 16. M. orbiculaire des
lèvres ; 17. M. abaisseur de l'angle de la bouche ; 18. M. carré du menton.
balances musculaires entre les groupes abaisseurs et rele-
veurs, d'où l'importance d'une connaissance approfondie de
l'anatomie statique et dynamique (fig. 11.1).
L'injection de toxine botulique entraîne une diffusion de
1 cm environ autour de celle-ci. Elle doit être parfaitement
1 12
maîtrisée pour des résultats subtils en jouant sur les fron- 2 13
tières musculaires sans effet négatif. 3

Les repères d'injection sont pris après examen du patient


4
au repos et en dynamique et doivent tenir compte égale- 5 14
15
ment de la répartition des plaques motrices qui peut être 6
7 16
homogène sur toute la surface ou bien concentrée dans une 8 17
9
portion du muscle [1]. Les asymétries éventuelles devront 10
également être évaluées (fig. 11.2). 11

Fig. 11.2  Anatomie des muscles faciaux, vue de face.


Le sens des flèches indique si les muscles sont abaisseurs ou élévateurs.
1.  M. occipito-frontal ; 2. M. Procérus ; 3. M. orbiculaire des paupières ;
4.  M.  nasal ; 5. M. élévateur de la lèvre supérieure et de l'aile du nez ;
6. M. abaisseur du septum nasal ; 7. M. orbiculaire des lèvres ; 8. M. buccina-
teur ; 9. M. abaisseur de l'angle de la bouche ; 10. M. abaisseur de la lèvre
inférieure ; 11. M. carré du menton ; 12. M. abaisseur du sourcil ; 13. M. cor-
rugateur du sourcil ; 14. M. petit zygomatique ; 15. M. grand zygomatique ;
16. M. élévateur de l'angle de la bouche ; 17. M. risorius.
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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 11. Toxine botulinique – tiers inférieur du visage

Cibles musculaires
Muscles du nez
Muscle abaisseur du septum nasal
Description
Petit muscle médian en éventail allant en profondeur, de
l'épine nasale du maxillaire supérieur à la superficie vers le
Fig. 11.3  Injection du muscle nasal.
haut de la région septocollumellaire. Point rouge : traitement de l'abaisseur du septum nasal : 4 u (2 profondes
et 2 superficielles). Points bleus : traitement du muscle nasal : 2 u. Injection
Action tangentielle.
Source : C. Raimbault.
■ Il abaisse le septum et augmente le diamètre de l'orifice

narinaire.
■ Il participe à la mobilité de la pointe du nez. Muscles de la bouche
Indications de site d'injection Muscle orbiculaire des lèvres
■ Repositionnement de la pointe du nez. Description
■ Site médian dans l'épine nasale antérieure en deux plans : ■ Muscle impair.
● un plan profond au contact osseux ; ■ Ferme la bouche.
● un plan superficiel ; ■ Projette les lèvres en avant.
● 4 unités (2 U par plan).

Indications de site d'injection


Muscle dilatateur des narines ■ Rides radiaires.

ou muscle nasal, partie alaire ■ Lèvre supérieure : 4 sites.

Description ■ Lèvre inférieure : 2 à 4 sites.

■ 1 unité par site : injection hypodermique au niveau du ver-


Muscle pair mince, triangulaire sur le bord de l'aile du nez.
millon dans la zone de contraction maximale (faire pro-
Indications de site d'injection noncer les lettres E ou O pour repérer les rides radiaires).
■ Narines dilatées. ■ Doses inférieures pour la lèvre inférieure.

■ Site bilatéral, au-dessus du rebord narinaire. ■ Dose totale par lèvre : 2 à 4 unités.

■ Injection tangentielle par rapport à l'aile du nez. ■ Distribution uniforme des sites ; éviter la zone médiane et

■ 2 unités par côté (fig. 11.3). les commissures (fig. 11.4).

Fig. 11.4  Traitement du muscle orbiculaire des lèvres.


Quatre points de 1 u pour la lèvre supérieure ; 2 points de 1 u pour la lèvre inférieure. Injection hypodermique au niveau du vermillon dans la zone de
contraction maximale. Faire prononcer les lettres E ou O pour la repérer.
Source : C. Raimbault.

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Muscle abaisseur de l'angle de la bouche Muscle risorius


Description Description
■ Muscle triangulaire avec une large base profonde au ■ Petit muscle superficiel, variable, tendu entre le fascia parotidien

niveau de la ligne mandibulaire et une insertion plus en dehors et le modiolus en dedans (à 1 cm de la commissure).
étroite superficielle au niveau de la commissure labiale. ■ Impliqué dans la fossette du sourire et les grimaces.

■ Abaisseur des commissures.


Indications de site d'injection
■ Expression négative au sourire.
Indications de site d'injection
■ Site à 2 cm sur la ligne horizontale en passant par le coin
■ Rides marionnettes. de la bouche (soit à 1 cm du modiolus).
■ Commissures labiales tombantes. ■ 2,5  unités par côté en sous-cutané parallèle à la surface,
■ 1 à 2 sites par côté : vers l'extérieur (fig. 11.6).
● bord du maxillaire inférieur près de la limite antérieure

du masséter ;
● ou à 1  cm latéralement et 2  cm verticalement de la

commissure ;
● l'injection doit être symétrique en quantité et topo­

graphie
● 2 à 5 unités par côté (fig. 11.5).
2 cm

2,5 u

Fig. 11.6  Traitement du muscle risorius.


Injection de 1 point de 2,5 u à 2 cm de la commissure horizontalement.
Source : C. Raimbault.

Muscle élévateur de l'aile


du nez et de la lèvre supérieure
Description
■ Muscle étroit et long qui s'étend verticalement de son ori-

gine supérieure dans le processus frontal de l'os maxillaire


jusqu'à son insertion cutanée inférieure, dans la région de
la narine latérale (partie nasale), dans la partie supérieure
du pli nasolabial et dans la lèvre supérieure (partie labiale).
■ Muscle élévateur de la lèvre supérieure et élévateur nasolabial.

Indications de site d'injection


■ Correction du sourire gingival.

■ Site d'injection à 1 cm au-dessus de la partie supérieure du

sillon naso-génien.
■ 2,5 unités par côté en profondeur (fig. 11.7).

Muscle abaisseur de la lèvre inférieure


Description
Fig.  11.5 Relèvement des commissures après traitement du muscle ■ Participe au dynamisme de la lèvre inférieure.

abaisseur de l'angle de la bouche par 2 à 5 u par côté (points bleus). ■ Petit, losangique, situé dans la partie latérale du menton.
Souvent couplé avec le traitement du muscle mentonnier, 2,5 à 5 u par côté ■ Il naît du tiers antérieur de la ligne oblique externe de la
(points noirs).
Source : C. Raimbault.
mandibule et se dirige en haut et en dedans pour se termi-
ner sur la face profonde de la peau de la lèvre inférieure.

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Chapitre 11. Toxine botulinique – tiers inférieur du visage

de la partie basse de l'oreille au philtrum de la lèvre supé-


rieure perpendiculaire à la surface cutanée).
■ 3 à 5 sites par muscle.

■ 25 à 50 Unités par muscle (fig. 11.8).


2,5 u

Fig.  11.8  Injection du muscle masséter  : 20 à 50  u par côté (avant-


après).
Diminution du volume des masséters et ovalisation du visage.
Source : M.-P. Loustalan.

Muscle mentonnier
Fig. 11.7  Correction du sourire gingival par traitement du muscle éléva-
teur de l'aile du nez et de la lèvre supérieure (2,5 u par côté). Description
Source : C. Raimbault. ■ Muscle carré du menton, pair, à la partie centrale du
menton.
Indications de site d'injection ■ Orienté verticalement de l'insertion osseuse profonde

■ Asymétrie de la lèvre inférieure, lors d'une diffusion après


(symphyse mentonnière) à la superficie cutanée (peau du
injection de la toxine botulique dans l'abaisseur de l'angle menton).
de la bouche ou dans le mentonnier. Indications de site d'injection
■ Injection de 2,5 U dans la partie médiane du muscle.
■ Releveur de la peau du menton.
Releveur indirect de la lèvre inférieure.
Muscle masséter

■ Responsable de l'aspect peau d'orange.

■ 1 point central ou 2 points symétriques de chaque côté.


Description ■ Injection profonde perpendiculaire.
■ Principal muscle masticateur avec le muscle temporal. ■ 2,5 à 5 Unités par site.
■ Muscle puissant intervenant esthétiquement dans la défi- ■ Dose plus importante chez l'homme (fig. 11.5 et 11.9).
nition de l'ovale et pouvant donner un aspect masculin au
visage quand il est hypertrophique.
■ Muscle quadrilatère allant de l'arcade zygomatique et le
Muscle platysma
corps de l'os zygomatique jusqu'au bord inférieur et à la
face latérale de la branche mandibulaire. Description
■ Il est constitué de deux faisceaux : ■ Muscle pair superficiel sous-cutané, large et mince s'éten-
● superficiel antérieur ; dant obliquement vers le haut et l'intérieur depuis le mus-
● profond postérieur. cle thoracique antérosupérieur et le muscle deltoïde
jusqu'à la mandibule et la commissure labiale.
Indications de site d'injection ■ Les bandes platysmales ou cordes correspondent à la

■ Féminisation et adoucissement du visage en restituant contraction des bords antérieurs du muscle.


une forme triangulaire de la face. ■ Il contribue avec le mentalonnier à la formation du pli

■ Injection en deux plans (profond et superficiel) au niveau d'amertume.


de la partie inférieure du muscle (sous une ligne dessinée ■ Il est abaisseur du tiers inférieur de la face.

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Indications de site d'injection Sites d'injection


■ Relaxation des cordes platysmales pour améliorer la défi- ■ On dessine une ligne prolongeant la corde platysmale
nition de l'ovale et adoucir les contours. externe allant du rebord mandibulaire jusqu'au modiolus :
■ 2 à 4 points d'injection par corde à 1 cm d'intervalle depuis 3 points de 2 à 4 unités espacés de 1 cm, le dernier point
le maxillaire jusqu'à la clavicule. situé à 2 cm de la commissure.
■ 2,5 Unités par site. ■ Injection superficielle parallèle au plan cutané dirigée vers

■ Dose totale maximale : 50 unités (fig. 11.10). le lobe de l'oreille.


■ 4 unités en 1 ou 2 points sur le mentonnier (voir fig. 11.9).

Pli d'amertume
Nefertiti lift
Muscles impliqués
■ Muscle mentonnier. Indication
■ Portion mobile jugale du muscle platysma  : du rebord ■ Relaxer le muscle platysma abaisseur du tiers inférieur de
mandibulaire jusqu'au modiolus. la face contribuant à l'affaissement de l'ovale et à la forma-
■ La contraction synergique de ces deux muscles contribue à tion de la bajoue.
la formation du pli d'amertume ou « mimique du dégoût ». ■ Redéfinir le contour mandibulaire et le cou.

Fi. 11.9  Traitement du pli d'amertume.


Dessiner une ligne prolongeant la corde platysmale externe allant du rebord mandibulaire jusqu'au modiolus (3 points de 2 à 4 u espacés de 1 cm, Ie
dernier point situé à 2 cm de la commissure) et traitement du muscle mentonnier (2 points de 2 à 4 u).
Source : photo, C. Raimbault.

Fig. 11.10  Traitement de la corde platysmale droite.


De 2 à 4 points d'injection de 2,5 u par corde à 1 cm d'intervalle depuis le maxillaire jusqu'à la clavicule.
Source : C. Raimbault.

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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 11. Toxine botulinique – tiers inférieur du visage

Sites d'injection Fagien S, Raspaldo H. Facial rejuvenation with botulinum neurotoxin:


an anatomical and experential perspective. J Cosmet Laser Ther
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Ces injections nécessitent une connaissance parfaite de Angle Orthod 2009;79:70–7.
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Section 3. Toxines botuliniques

Chapitre 12
La toxine botulique
en pathologie dermatologique
D. Boineau

Introduction Hyperhidrose localisée

En dermatologie, la toxine botulique (TB) ne possède une


autorisation de mise sur le marché (AMM) que pour le trai-
tement des rides de tiers supérieur du visage et de l'hyperhi- Axillaire Palmaire

drose axillaire chez l'adulte et l'enfant de plus de 12 ans. Il


existe cependant un consensus de la profession pour étendre
Antiperspirants topiques Antiperspirants topiques
ses indications à diverses affections [1–3], le plus souvent en
rapport avec l'hyperhidrose, rares mais chroniques, souvent
très invalidantes et pour lesquelles il n'existe pas de traite- Toxine botulique A lonophorèse
ment codifié réellement efficace. Ces indications reposent
sur un certain nombre de publications où son utilisation,
seule ou associée, apporte des résultats encourageants Chirurgie Toxine botulique A
appelant des essais contrôlés, plus robustes, précisant l'effi-
cacité et la sécurité de la TB. Utilisée actuellement par voie
injectable, des essais de formes topiques sont en cours d'éva- Chirurgie
luation. Dans certaines situations, le remboursement de ce Fig. 12.1  Hyperhidrose, options thérapeutiques.
geste peut même être envisagé car son coût est souvent une Source : © Médecine & Hygiène.
entrave à son utilisation.
La TB est indiquée quand les thérapeutiques tradition-
Hyperhidrose localisée nelles s'avèrent insuffisantes et doit être envisagée avant
toute décision chirurgicale. La TB de sérotype A est utilisée ;
L'hyperhidrose est une production excessive de sueur par il en existe plusieurs sur le marché, chacune possédant ses
les glandes sudoripares eccrines, dépassant les besoins de la propriétés biologiques, ses effets cliniques et ses doses res-
thermorégulation, conséquence d'une hyperstimulation pectifs. Des injections répétées proposées aussi bien pour la
par les fibres cholinergiques du système nerveux autonome région palmaire que la région axillaire dans trois études
[4, 5]. Elle peut être primaire ou secondaire à une patholo- rétrospectives ont démontré un accroissement de la durée
gie interne ou à un médicament. Dans 90 % des cas, elle est de l'effet thérapeutique mais peuvent entraîner le dévelop-
localisée, bilatérale et symétrique, axillaire, palmaire ou pement d'anticorps neutralisants. Un intervalle minimal de
plantaire. Elle touche entre 0,6 % et 2,8 % des individus et 3 mois entre chaque injection paraît indiqué.
constitue une gêne socioprofessionnelle, souvent majeure, ■ L'hyperhidrose axillaire a été la plus étudiée. Selon

interdisant même certaines professions. Campanelli et Salomon [4], les études cliniques ont mon-
Lors de la prise en charge, il convient d'évaluer le retentis- tré que la dose optimale est de 50 U de Botox par aisselle
sement de ce symptôme sur la qualité de vie, en s'aidant réparties sur environ 30 sites, de 15 à 20 mm chacun, maté-
d'échelles validées et du test de Minor (mise en évidence de rialisés au crayon marqueur. Le but est d'obtenir une diffu-
zones d'hyperhidrose par réaction chimique iode/poudre sion du produit couvrant par chevauchement toute la
d'amidon entraînant un noircissement des zones concer- surface de la zone à traiter. La toxine est délivrée à la jonc-
nées). Il existe en effet plusieurs options thérapeutiques dont tion entre le derme moyen et profond de manière à obte-
le choix devra être décidé en fonction de la topographie, de nir une papule superficielle d'environ 5 mm de diamètre.
l'intensité des symptômes et de la demande des patients, Dans leur expérience, l'effet thérapeutique est obtenu avec
entre les antiperspirants d'application locale (sels d'alumi- des doses de 1,3 à 1,7 U de Botox par site. Les patients rap-
nium), l'ionophorèse, les traitements systémiques, la TB et portent un début d'efficacité après une semaine avec une
les traitements chirurgicaux (sympathectomie) (fig. 12.1). réduction de la transpiration de 80 à 90 % sur une durée
Dermatologie esthétique
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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 12. La toxine botulique en pathologie dermatologique

moyenne de 10 mois. La reprise de la transpiration se fait et du prurit au niveau du site traité. Une étude analogue
très progressivement sur plusieurs mois, nécessitant un fait état d'une réduction du nombre des rechutes.
second traitement en moyenne 12 mois plus tard. Aucun ■ Les hidrocystomes eccrines multiples, tumeurs bénignes

effet indésirable n'a été observé, hormis quelques rares cas kystiques des conduits sudoripares, se caractérisent par
d'hyperhidrose extra-axillaire et une faiblesse musculaire des papules translucides disgracieuses de la face, bleuâtres
transitoire des mains. ou couleur chair. Gheisari [7] a traité 20 patients par la TB
■ Dans l'hyperhidrose palmaire, en l'absence d'efficacité des intralésionnelle avec d'excellents résultats (disparition de
antiperspirants topiques ou de l'ionophorèse, on peut 75  % des lésions) sans aucun dommage cicatriciel ; elle
proposer un traitement par la TB. Les doses utilisées vont peut donc être envisagée, selon lui, comme le traitement
de 60 à 100 U de Botox par main. Campanelli et Salomon de première intention
[4] réalisent, selon l'étendue de l'hyperhidrose, entre 50 et ■ L'hidradénite suppurée, ou maladie de Verneuil, affection

70 injections par main (paume et doigts) séparées de 15 à inflammatoire chronique des glandes apocrines, affecte
20 mm. La réponse au traitement est comparable à celle principalement les aisselles et le périnée. Les patients
de l'hyperhidrose axillaire sans aucun effet secondaire, des subissent un inconfort majeur, et ce d'autant que le traite-
cas de faiblesse musculaire transitoire ayant cependant été ment mal codifié est extrêmement incertain. L'environne­
décrits après injection de l'éminence thénar. ment humide des plis procure les conditions idéales à la
■ La prise en charge de l'hyperhidrose plantaire par la TB s'est prolifération des bactéries et constitue un facteur précipi-
révélée plus décevante en raison des douleurs et de la diffi- tant. Des observations ponctuelles font état de succès thé-
culté à injecter avec précision le produit du fait de l'épaisseur rapeutiques avec la TB.
inégale de la couche cornée. Les données bibliographiques
sont pauvres, les doses variant de 50 à 250  UI de TB par
plante, avec une efficacité de 3 à 6 mois.
Dermatoses aggravées
■ Forme particulière de l'hyperhidrose, le syndrome de Frey par l'hyperhidrose [6]
est une séquelle handicapante et fréquente de la chirurgie
■ La maladie de Darier est une génodermatose rare, trans-
parotidienne (15 à 30 % des patients opérés), secondaire à
mise sur le mode dominant, caractérisée par l'association
une repousse aberrante des fibres parasympathiques du
d'une acantholyse et de troubles de la kératinisation.
glossopharyngien. Il se manifeste à distance de l'acte
Cliniquement, elle se manifeste par des lésions papulo­
chirurgical, plus de 6 mois après, par des sueurs très abon-
kératosiques prédominant sur les zones séborrhéiques et
dantes, rétro-auriculaires, pré-auriculaires, angulomandi-
par une atteinte acrale caractéristique. L'atteinte des
bulaires, temporales ou au niveau de la pommette, lors
grands plis et de la région anogénitale est fréquente. La TB,
d'une excitation gustative. L'usage de la TB a bouleversé le
insuffisante en monothérapie, constitue un traitement
traitement de cette complication par le blocage des
adjuvant potentiel facile et bien toléré.
synapses cholinergiques du système nerveux autonome.
■ Très similaire, la maladie de Hailey-Hailey ou dermatose
L'amélioration symptomatique est quasi constante et le
acantholitique familiale, est une génodermatose bulleuse
plus souvent totale.
rare affectant principalement les grands plis. Son traite-
Le principal effet indésirable de ces techniques est la dou-
ment est difficile et fait appel à la chirurgie, la vaporisation
leur, en particulier lors des injections de paumes et des
laser, les dermocorticoïdes, l'acitrétine, le tacrolimus
pulpes, à la pénétration de l'aiguille et à la diffusion de la
topique ou la photothérapie dynamique. Plusieurs publica-
solution dans le tissu cutané. L'application d'un anesthésique
tions ont montré récemment l'intérêt de la toxine botuli-
topique est inefficace, de même que l'inhalation de pro-
nique dans cette indication dont une étude bordelaise [8].
toxyde d'azote. Plusieurs stratégies ont été évaluées pour
L'efficacité de la toxine botulinique (Dysport®, dose
améliorer la compliance, avec des résultats mitigés, parmi
moyenne de 300 u) a été confirmée chez 8 patients atteints
celles-ci : la pression, la glace associée à la pression, l'anesthé-
de la maladie de Hailey-Hailey résistants aux traitements
sie générale, les blocs nerveux, les vibrations et les injections
habituels, avec une réponse clinique rapide dès le qua-
sans aiguille.
trième jour, complète pour 80  % des zones traitées, une
absence de récidive chez 2 patients à un an et une rémis-
Dermatoses associées sion prolongée pour les autres avec des traitements d'en-
à l'hyperhidrose [6] tretien tous les 6 mois. En 2016, Maza et al. [9] rapportent
les résultats préliminaires, à 3 mois, d'une étude prospec-
■ La dyshidrose est une affection vésiculobulleuse commune tive portant sur 21 patients, 18 atteints de la maladie de
des paumes et des plantes, une de ses caractéristiques Hailey-Hailey et 3 de maladie de Darier) ayant comme
étant la tendance à rechuter en réponse à des facteurs pro- objectif principal d'évaluer l'amélioration de la qualité de
voquants variés comme l'humidité, l'occlusion et l'hyper­ vie 3 mois après injections de TB. Il en résulte une amélio-
hidrose. Une étude intra-individuelle portant sur 10 cas a ration de la qualité de vie avec une disparition complète
évalué l'efficacité de la TB (162 U par paume) ; 70 % des des lésions (50 % des patients) avec quasi-disparition du
patients rapportent une amélioration de la transpiration prurit, des douleurs et des odeurs.

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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 12. La toxine botulique en pathologie dermatologique

■ La TB a été étudiée dans le psoriasis inversé connu pour être au contact du vestibule, une tension à la pression du vesti-
exacerbé par la transpiration excessive. Une étude pilote bule et des signes banals comme un érythème vulvaire pos-
portant sur 15 patients montre qu'une dose de 50–100 UI térieur et des troubles dysuriques, mais le plus souvent
de Botox® améliore 87 % des patients à 2, 4 et 12 mois. l'examen clinique est pauvre. L'injection de TB dans les mus-
■ La kératodermie palmoplantaire aquagénique est une cles périnéaux est, dans plusieurs essais méthodologique-
entité clinique rare caractérisée par l'épaississement ment solides, une option satisfaisante pour le traitement du
translucide blanchâtre des plantes et des paumes après syndrome vestibulaire réfractaire à la prise en charge stan-
immersion dans l'eau. Trois cas traités par TB ont été dard médicale et cognitivo-comportementale.
publiés avec une amélioration de quelques mois. ■ La névralgie postherpétique est une complication chronique

■ La pachyonychie congénitale est une génodermatose rare. fréquente du zona. Elle est définie comme une douleur dans
Les patients affectés ont une hypertrophie des ongles et un dermatome persistant au moins 90 jours après l'appari-
une hyperkératose plantaire extrêmement douloureuse. tion de l'éruption zostérienne. Le traitement classique inclut
Les quelques patients traités par TB ont bénéficié d'une les anesthésiques topique anti-inflammatoires non stéroï-
réelle amélioration diens, la gabapentine, les opioïdes et les antidépresseurs tri-
cycliques, mais la douleur peut être résistante à tous ces
médicaments, justifiant l'essai de la toxine, comme le sug-
Affections avec troubles gèrent un certain nombre d'essais contrôlés (dont l'un por-
tant sur 60 patients) qui ont montré, avec une dose unique
sensitifs cutanés et/ou atteinte de 200  U au maximum, une réduction significative des
neurologique scores EVA (échelle visuelle analogique) de douleur avec
très peu d'effets indésirables. Le mécanisme d'action sur la
■ Les fissures anales, motif de consultation fréquent, se déve-
douleur est encore obscur, mais paraît à la fois central et
loppent le long de la ligne médiane et postérieure de l'ano-
périphérique. Le coût du traitement reste la limitation prin-
derme, réalisant une ulcération linéaire entourée d'un
cipale à l'usage de la TB dans les douleurs postzostériennes.
tissu inflammatoire. La spasticité du sphincter anal est
■ Les cicatrices hypertrophiques et les chéloïdes représentent
souvent associée. La TB est largement utilisée avec des
une réponse aberrante au processus de cicatrisation des
doses variant de 15 à 20 U et des taux de guérison de 50 à
plaies, et sont caractérisées par une croissance dysrégulée et
96 %. Des effets secondaires à type d'incontinence sphinc-
une formation de collagène excessive. La TB a été rapportée
térienne légère et passagère ont été décrits.
comme une réponse thérapeutique aux cicatrices hypertro-
■ L'utilisation de la TB dans le traitement de certains ulcères
phiques, en particulier dans le prurit des séquelles de brû-
de jambe survenant sur des membres spastiques a égale-
lure dans un certain nombre de publications, le mécanisme
ment été jugée bénéfique.
de son action n'étant pas parfaitement élucidé, mais la
■ Le lichen simplex chronicus ou névrodermite circonscrite
toxine semble inhiber la prolifération de fibroblastes dérivés
est une dermatose eczématiforme, caractérisée par un
de tissus cicatriciel hypertrophique et supprimer l'expres-
prurit intense localisé et un épaississement de la peau. Cet
sion de facteurs de croissance. La réponse semble beaucoup
état peut être intense et récurrent et compromettre le
moins satisfaisante voire nulle dans les chéloïdes.
sommeil, la vie sexuelle et la qualité de vie des patients
■ L'accent est mis sur la nécessité d'une prévention active des
affectés. L'incidence dans la population générale est incon-
cicatrices en période postopératoire, un des facteurs péjo-
nue, mais une étude a démontré que 12  % des patients
ratifs en cause étant la tension des bords de la plaie durant
âgés présentant un prurit ont un lichen simplex. La TB est
la phase de cicatrisation. La TB entraîne une élimination
considérée comme une option pour le traitement.
presque complète de la tension musculaire dynamique et
■ La notalgie paresthésique est un syndrome neurologique
un bon nombre de publications ont rapporté l'efficacité
sensitif associant prurit, douleur, paresthésies, hypo-/
de la toxine dans la prévention des cicatrices, injectée en
hyperesthésie caractérisé par une plaque brunâtre de la
peropératoire ou rapidement après l'intervention.
zone affectée. Cette affection apparaît dans la vieillesse ou
en association avec des désordres musculosquelettiques
causés par une compression nerveuse, particulièrement à Divers
l'étage C4-C6. Au vu des quelques résultats publiés, l'injec-
tion de TB est une option thérapeutique, mais des ■ La rosacée est une dermatose commune caractérisée par
recherches ultérieures sont nécessaires pour confirmer un érythème persistant, des papules, des pustules et un
l'efficacité et la sécurité de la toxine botulique. flush facial, les thérapeutiques classiques étant sans effet
■ La vestibulite vulvaire appartient au cadre des vulvodynies, sur le flush. Le flush facial persistant est aussi un symp-
touchant 16 % des femmes dans la population générale. Il tôme de la ménopause. Un certain nombre de publica-
n'y a pas de critères cliniques ou histopathologiques spéci- tions démontrent l'action possible de la TB sur la rosacée
fiques pour le diagnostic autres que l'interrogatoire et l'exa- et les bouffées de chaleur. Des essais randomisés plus
men soigneux pour éliminer une autre cause de douleur. On importants sont nécessaires pour déterminer doses et
retrouve, de façon non permanente, des douleurs intenses durées optimales du traitement.

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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 12. La toxine botulique en pathologie dermatologique

■ Le bruxisme se manifeste par des mouvements involon- les plis, peuvent être améliorées par la toxine botulique par
taires répétitifs, le plus souvent nocturnes, des muscles de son effet anhidrotique réduisant la macération et la prolifé-
la mâchoire. Ses conséquences sont des manifestations ration bactérienne. Les limites à une utilisation plus large
dentaires (abrasion des dents, casse de prothèse), articu- résident dans son coût, sa sécurité et son acceptabilité étant
laires (douleur, blocage des articulations temporomandi- désormais établies. Le problème de son immunogénicité
bulaires) et musculaires (hypertrophie des muscles de la n'étant pas clarifié, cela impose donc la prudence dans le
mastication, masséters et/ou des temporaux). Le traite- rythme des injections.
ment repose actuellement sur une prise en charge ortho-
Références
dontique associée à des injections de TB, éventuellement
[1] Guida S, Farnetani F, Nistico SP, et al. New trends in botulinum toxin
sous contrôle électromyographique. Au bénéfice fonction-
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■ La peau grasse : le sébum contribue à l'apport d'anti-oxy- logy: novel indications. Toxins (Basel). 2017;9(12). pii : E403.
dants liposolubles sur la surface cutanée et a une activité [3] Campanati A, Martina E, Giuliodori K, et al. Botulinum toxin off-­
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En pratique, nous ne connaissons pas tous les mécanismes
[9] Maza A, Dreyfus I, Hoarau E, et al. Amélioration de la qualité de vie
moléculaires et physiopathologiques expliquant les effets des patients avec maladies de Hailey-Hailey ou de Darier après
thérapeutiques du médicament. D'un point de vue clinique, injection de toxine botulique : étude prospective. Ann Dermatol
la plupart de ces dermatoses, qui affectent majoritairement Vénéréol 2016;143:S257.

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Section 3. Toxines botuliniques

Chapitre 13
Toxine botulinique : effets
secondaires et gestion
des complications
V. Gassia

Introduction ■ dans leur étude qui explore le suivi de 192  patients sur
9,1 ans en moyenne, Carruthers et al. démontrent l'inno-
L'évaluation de la sécurité de l'utilisation de la toxine botuli- cuité et le maintien de l'efficacité à long terme des injec-
nique (BoNT) en esthétique repose sur un recul de plus de tions d'onabotulinumtoxine  A dans les rides faciales du
30 ans d'utilisation thérapeutique avec de très nombreuses tiers supérieur [4].
publications et plus de 20 ans d'utilisation en esthétique. En
2018, les chiffres de l'American Society for Aesthetic Plastic Effets secondaires liés à l'injection
Surgery (ASAPS) donnaient 1 million d'injections de BoNT elle-même
aux États-Unis. Ainsi, les injections de BoNT ont une popula-
Comme pour toute injection, on peut observer une douleur
rité croissante liée à leur efficacité, à la satisfaction élevée des
localisée, une sensibilité, une inflammation, un saignement
patients et à un haut niveau de sécurité. Cependant, une
ou un gonflement au point d'injection [5].
bonne connaissance anatomique et pharmacologique, une
bonne analyse et la sélection des patients permettent de Douleur
prévenir la majeure partie des effets secondaires potentiels.
L'injection de toxine botulinique est presque indolore ; l'utilisa-
tion d'une crème anesthésiante est possible chez les sujets sen-
Effets secondaires sibles, ainsi que l'aiguille la plus fine possible (33 G). La dilution
doit impérativement se faire avec du sérum physiologique car
locorégionaux à court terme l'eau pour préparation injectable est très douloureuse.

Ecchymoses
Revue générale
Les ecchymoses sont rares et peuvent être prévenues en stop-
Quelques méta-analyses permettent d'appréhender la pant les médicaments favorisants une semaine avant si possible
nature des effets secondaires et leur fréquence : (cortisone, anti-inflammatoires, vitamine  C, anticoagulants,
■ en 2004, Naumann et Jankovic reprennent 36 études ran-
etc.) ainsi que par un repérage visuel des trajets vasculaires. Elles
domisées représentant 2 309  patients, toutes indications n'ont aucune gravité et disparaissent spontanément.
confondues (thérapeutiques en particulier) et n'ont
retrouvé aucun effet sévère, seulement des effets localisés Céphalées
et transitoires [1] ; Les céphalées sont citées mais apparaissent aussi dans les
■ en 2009, Brin et  al. effectuent une méta-analyse sur
groupes placebo. Elles sont de survenue rapide et de courte
1 678  patients traités uniquement pour les rides faciales durée. A contrario, la BoNT est approuvée aux États-Unis
par onabotulinumtoxine A suivis sur 1 an et ne retrouvent (Food and Drug Administration [FDA], 2011) pour le traite-
pas d'effet secondaire nouveau  : 2,5  % de sensibilité pal- ment de la migraine et des céphalées de tension.
pébrale, 1,8  % de ptosis et encore moins d'œdème pal-
pébral. Ces pourcentages diminuent au fil des cycles [2] ;
■ dans une méta-analyse plus récente [3] de 16  études et
Effets secondaires liés à la diffusion
42 405  patients, il n'apparaît pas de différence avec le
placebo pour les pattes d'oie. Pour le front, il y a un taux Facteurs de diffusion
significativement plus élevé d'effets secondaires dans le Aux concentrations recommandées par les différents résu-
groupe BoNT avec maux de tête, ptosis et paupières més de caractéristiques du produit (RCP), on connaît la sur-
lourdes ; face de diffusion. Il est évident que la maîtrise technique et
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Chapitre 13. Toxine botulinique : effets secondaires et gestion des complications

anatomique doit prendre en considération cette diffusion. ■ La xérophtalmie, exceptionnelle, est due à une lagophtalmie
Les unités des différentes toxines ne sont pas interchan- paralytique  : il faut éviter la portion lacrymale de l'orbicu-
geables et nécessitent de connaître les particularités de la laire. Suivant le site d'injection, la BoNT peut diminuer ou
toxine utilisée. En dehors du tiers supérieur, c'est-à-dire hors augmenter le film lacrymal [7]. Il faut donc être particulière-
autorisation de mise sur le marché (AMM), l'intrication ana- ment précis et prudent en cas de syndrome sec préexistant.
tomique et la complexité fonctionnelle augmentent le risque ■ L'ectropion survient lors d'injection de la paupière inférieure

de complication par diffusion. par relâchement excessif de l'orbiculaire palpébral inférieur.


■ La chute de la commissure labiale au repos ou une asymé-
Au niveau du tiers supérieur trie au sourire survient lors de la diffusion au muscle zygo-
■ Ptosis palpébral : c'est l'atteinte du muscle releveur de la matique en cas d'injection trop basse au niveau de la patte
paupière supérieure par diffusion de la BoNT à travers le d'oie. On peut compenser par injection du muscle antago-
septum orbitaire, à partir de l'injection du corrugateur, ou niste (abaisseur de l'angle de la bouche) avec amélioration
de la portion externe de l'orbiculaire de l'œil pour relever seulement en statique.
la queue du sourcil, ou de la portion interne de l'orbicu-
laire pour relever la tête du sourcil (fig. 13.1). Cela se tra- Au niveau du tiers inférieur et du cou
duit par une chute de la paupière supérieure (à différencier ■ La parésie de l'orbiculaire des lèvres par injection directe
d'une chute du sourcil ; fig. 13.2) apparaissant entre le 3e et peut induire une incontinence salivaire et une incompé-
le 15e jour et totalement réversible en quelques semaines, tence labiale gênante pour boire, siffler, parler, etc. Elle
entraînant une gêne transitoire de la vision. La prévention peut survenir également par injection trop haute de
nécessite le dépistage d'un ptosis minime préexistant et l'abaisseur de l'angle de la bouche.
consiste à injecter en dehors du rebord orbitaire osseux et ■ La diffusion à l'abaisseur de la lèvre inférieure peut se faire lors

à éviter tout massage ou toute manipulation des points de l'injection de l'abaisseur de l'angle de la bouche et sera alors
injectés en post-injection. Le traitement consiste à stimu- à l'origine d'une fuite salivaire et d'un trouble de l'élocution.
ler la contraction du muscle de Müller soit en utilisant un ■ La diffusion au carrefour aérodigestif lors de l'injection des

collyre (apraclonidine à 0,3 % = Iopidine®), soit en injec- cordes plathysmales peut se traduire par une dysphagie ou
tant une goutte de BoNT dans la partie médiane prétar- une gêne respiratoire à l'inspiration forcée, mais reste
sale superficielle du muscle, hautement concentrée et à exceptionnelle en respectant les doses préconisées.
1 mm du rebord ciliaire [6]. Il est important de respecter les unités recommandées pour
■ Diplopie : elle est due à la diffusion de BoNT vers les mus- chaque toxine ainsi que les concentrations et les sites anato-
cles oculomoteurs intraorbitaires (muscle droit externe miques précis (notamment la profondeur).
par injection de la patte d'oie) réversible spontanément.
Effets secondaires liés à la balance
musculaire
Position et forme des sourcils
La position et la forme du sourcil sont conditionnées par
l'équilibre entre les forces des différents muscles de la balance
musculaire fronto-orbitaire (fig. 13.3). Il existe un seul mus-
cle élévateur, le frontal, et tous les autres muscles sont abais-
seurs : procérus, orbiculaire de l'œil, abaisseur du sourcil et
corrugateur. Il faut donc anticiper l'action de relaxation de la
toxine afin de rétablir une symétrie, ou de relever une des
Fig. 13.1  Les trois zones à risque de ptosis palpébral : corrugateur, portion trois parties ou la totalité du sourcil [8].
externe de l'orbiculaire de l'œil, portion interne de l'orbiculaire de l'œil. L'injection trop bloquante du muscle frontal peut entraî-
Source : C. Raimbault. ner une ptose des sourcils, alors que si la partie externe du
frontal est sous-traitée, on pourra observer le fameux effet
Méphisto qui sera facilement corrigé à J15 par une injection
externe et latérale du frontal (fig. 13.4).

Exagération des rides nasales


La mise au repos des muscles du sourire peut entraîner une
compensation par hypercontraction du muscle nasal et exa-
gération des bunny lines.
Fig.  13.2  Ptosis de la paupière supérieure gauche par diffusion de la
toxine vers le muscle releveur de la paupière.
Modification de l'expression faciale
Source : C. Raimbault. Voir [9].

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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 13. Toxine botulinique : effets secondaires et gestion des complications

1
3
2

Fig. 13.3  Balance fronto-orbitaire. Muscle élévateur/muscles abaisseurs.


1. Le muscle frontal est le seul muscle élévateur du sourcil, sauf dans son tiers externe. Les autres muscles sont tous abaisseurs :
2. Muscle corrugateur du sourcil. 3. Muscle procérus. 4. Muscle orbiculaire. Le petit muscle abaisseur du sourcil n'apparaît pas sur ce schéma.

Sécurité à long terme

Immunogénicité
Les facteurs de risque connus sont les doses par séance, les
intervalles interinjections, le type de toxine et probablement
une prédisposition génétique [12]. Quel est le rôle des com-
plexes protéiniques et des excipients ?
Certains défendent le fait que les BoNT sans complexes
protéiniques seraient moins antigéniques, mais aucune
étude ne prouve cette hypothèse [13]. Dans la méta-analyse
de Fabbri [14] sur 61 études et 8 525 patients, le dosage des
anticorps neutralisants montrent que nombre de patients
Fig. 13.4  Traitement excessif avec ptosis des deux sourcils. non répondeurs n'ont pas ces anticorps alors que d'autres
Source : C. Raimbault.
patients répondeurs en sont porteurs. La conséquence de
développer cette immunogénicité est la résistance au traite-
Complications systémiques ment qui pourrait nécessiter d'utiliser un autre sérotype. Il
apparaît donc très important de respecter la dose minimale
La toxicité aiguë est dose-dépendante : la dose létale 50 efficace ainsi que l'intervalle minimal recommandé de 3 mois
chez le singe est de 22 à 30  flacons de Botox® et 44 à interséance.
60  flacons de Dysport® en intramusculaire. Les BoNT
médicaments ne sont pas une arme biologique car elles
sont très fragiles dans le milieu extérieur. Ainsi, les doses Effets musculaires
utilisées en esthétique sont extrêmement faibles (75 U de L'atrophie musculaire apparaît après injections répétées de
Vistabel® sont utilisées au maximum pour le tiers toxine et est totalement temporaire et réversible, ce qui est
supérieur). très rassurant ; elle peut être minimisée en espaçant les injec-
Les manifestations systémiques observées sont  : un choc tions [15]. Elle explique la durabilité de l'effet et l'observation
anaphylactique, un malaise vagal, des manifestations de d'atrophie, par exemple creusement périoculaire après plu-
« botulisme » par probable passage dans la circulation sieurs années d'injections répétées dans une même zone.
sanguine. Cette atrophie est réversible à l'arrêt des injections.
Les symptômes sont : maux de tête, vertiges, insomnie, Plus récemment, une revue de 504  publications n'a pas
fatigue, vision trouble, troubles de l'ouverture des yeux, permis d'élucider le mécanisme de cette atrophie [16].
troubles de la parole, dysphagie, bourdonnements, consti-
pation et anxiété. Ces symptômes cliniques sont apparus
après l'injection de BoNT, en particulier du 2e au 6e  jour Conclusion
[10]. L'injection de sérum antitoxine botulique ou de
pyridostigmine peut constituer une approche efficace pour La revue de la littérature, le nombre croissant d'injections
améliorer les résultats cliniques des cas de botulisme [11]. dans le monde, le recul de plus de 20 ans démontrent que les

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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 13. Toxine botulinique : effets secondaires et gestion des complications

effets secondaires sont minimes, localisés et transitoires. Les [7] Ho RW, Fang PC, Chang CH, et al. A review of periocular botuli-
éviter nécessite de bien connaître l'anatomie statique et num neurotoxin on the tear film homeostasis and the ocular
surface change. Toxins (Basel) 2019;11(2). pii : E66.
dynamique, de bien connaître les caractéristiques de la BoNT
[8] Carruthers  A, Carruthers  J. Eyebrow height after botulinum
choisie, de bien sélectionner les patients et de respecter les toxin type A to the glabella. Dermatol Surg 2007;33:S26–31. 1
règles d'injection. Ainsi, les effets secondaires sont minimisés Spec No.
et font des injections de BoNT une technique sûre avec une [9] Michaud T, Gassia V, Belhaouari L. Facial dynamics and emotional
haute satisfaction des patients et des médecins. expressions in facial aging treatments. J Cosmet Dermatol
2015;14(1):9–21.
Références [10] Bai  L, Peng  X, Liu  Y, et  al. Clinical analysis of 86  botulism cases
caused by cosmetic injection of botulinum toxin (BoNT).
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matic review and meta-analysis. Curr Med Res Opin 2004;20(7):981– [11] Rouientan  A, Alizadeh Otaghvar  H, Mahmoudvand  H,

90. Review. Tizmaghz A. Rare complication of botox injection: a case report.
[2] Brin  MF, Boodhoo  TI, Pogoda  JM, et  al. Safety and tolerability of World J Plast Surg 2019;8(1):116–9.
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Aesthetic Plast Surg 2016;40:769–77. [14] Fabbri M, Leodori G, Fernades RM, et al. Neutralizing antibody
[4] Carruthers A, Sadick N, Brandt F, et al. Evolution of facial aesthe- and botulinum toxin therapy: A systemic review and meta analy-
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2e éd. Paris : Arnette ; 2013. [16] Salari M, Sharma S, Jog MS. Botulinum toxin induced atrophy: an
[6] Wijemanne  S, Vijayakumar  D, Jankovic  J. Apraclonidine in the uncharted territory. Toxins (Basel) 2018;10(8):313.
treatment of ptosis. J Neurol Sci 2017;376:129–32.

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)

Chapitre 14
Généralités sur l'acide
hyaluronique
C. Raimbault

Composition lage hyalin, du liquide synovial et du cordon ombilical [1].


L'AH, très hydrophile, hydrate et protège la peau. Les
L'acide hyaluronique (AH) est un glycosaminoglycane natu- enzymes telles que la hyaluronidase et les radicaux libres
rel composé d'acide glucuronique et de N-acétyl glucosa- dégradent continuellement les polymères d'AH libres dont
mine disaccharide (fig.  14.1). Le corps humain moyen la demi-vie est de 1 à 2 jours. Sa production diminue avec
contient en moyenne 15 g d'AH. La moitié se trouve dans la l'âge.
peau, le reste est un composant du vitré de l'œil, du carti-

COO– H CH2OH

H O
H OH H
H O H O
H H H
O

NH O
OH OH

COCH3

Fig. 14.1  L'acide hyaluronique est un polymère linéaire formant des chaînes macromoléculaires composées d'acide glucuronique et de N-acétyl
glucosamine disaccharide.

Synthèse Enchevêtrement de chaînes


d'acide hyaluronique

L'AH est synthétisé principalement à partir de Streptococcus equi


et purifié par précipitation d'alcool pour éliminer les antigènes
réactifs [2]. Les produits Hylaform® étaient extraits de crêtes de
coqs et contre-indiqués chez les patients allergiques aux protéines
aviaires.
L'AH libre en solution doit être réticulé pour augmenter
sa durée de vie dans les tissus et diminuer sa dégradation
par les enzymes ou par les radicaux libres. Les agents réti-
culants, qui lient les molécules d'AH entre elles, sont prin-
cipalement le BDDE (1,4-butanediol diglycidyl éther) et Processus de réticulation
parfois le DEO (2,7,8-diépoxyoctane) ou le divinyl sulfone.
Le BDDE est rincé après la réticulation de telle sorte que
les quantités restant dans le gel sont infimes. Il serait non
toxique, mais cette notion est controversée [3]. D'autres
agents ou procédés de réticulation sont à l'étude. Plus le
taux de réticulation est élevé, plus le gel est rigide et résis-
tant à la déformation. Pour pouvoir être injecté à travers
une aiguille ou une canule, le gel doit être suffisamment Fig. 14.2  Technique de réticulation.
fluide et les firmes emploient des procédés de fabrication
ou de calibration différents (fig. 14.2).
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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 14. Généralités sur l'acide hyaluronique

Ainsi, un gel biphasique est constitué de particules réticu-


lées de taille calibrée en suspension dans l'AH libre (tech-
nique Nasha ; fig.  14.3). La taille des particules a une
influence sur le lieu d'injection, sa profondeur, la fluidité de
l'injection et le temps de dégradation du produit. Les gels
monophasiques, non particulaires, sont soit monodensifiés, Acide
hyaluronique
soit polydensifiés, et ont une consistance lisse. La technique de faible
de réticulation Vycross consiste en liaisons de chaînes d'AH masse
moléculaire
de faible masse moléculaire avec des chaînes de masse
moléculaire élevée (fig.  14.4). L'ajout de lidocaïne ou
d'autres anesthésiques comme la mépivacaïne peut amélio-
rer le confort du patient pendant l'injection sans compro- Acide hyaluronique
mettre considérablement les propriétés rhéologiques du de masse moléculaire élevée
filler [4]. Fig. 14.4  Technique de réticulation Vycross.
Liaison de chaînes d'acide hyaluronique de faible masse moléculaire avec
D'autres formulations existent comme l'adjonction de
des chaînes de masse moléculaire élevée.
mannitol aux propriétés anti-oxydantes dans un gel mono-
phasique d'AH [5].
Rhéologie
C'est une notion importante qui permet de décrire et
d'adapter les qualités de viscosité et d'élasticité d'un AH à
une zone anatomique donnée et à la correction souhaitée
allant de l'hydratation au traitement des rides, à la volu-
métrie en respectant au mieux la dynamique faciale [6].
Un degré de Dans chaque gamme d'AH, les fabricants développent dif-
réticulation férentes qualités d'AH en combinant leurs propriétés vis-
queuse et élastique, leur cohésivité, pour obtenir des gels
avec des propriétés spécifiques décrites par leur force d'ex-
trusion, leur malléabilité, leur capacité de soulèvement ou
d'intégration tissulaire, leur pouvoir hydratant.

Viscoélasticité
Particules de Un gel visqueux se déformera plus facilement pour son
extrusion à travers l'aiguille ou la canule ; un gel élastique
taille contrôlée
reprendra sa forme après déformation.
Quatre paramètres définissent les propriétés viscoélas-
tiques d'un gel :
■ force de cisaillement ou G* : mesure l'énergie totale néces-

saire pour déformer un matériau par cisaillement ou par


torsion autour d'un axe. C'est une mesure globale pour
définir les capacités viscoélastiques et la dureté d'un gel ;
■ élasticité ou G′ : mesure la capacité d'un gel à reprendre sa

forme après déformation, correspondant à la fraction de


l'énergie de G* restituée après cisaillement ;
Différentes ■ viscosité ou G″ : reflet de l'incapacité du gel à reprendre

textures de gel totalement sa forme après déformation correspondant à


la fraction de G* perdue après cisaillement ;
■ tan δ  : ratio G″/G′, indique si un gel est plus élastique

(tan δ < 1) ou plus visqueux. Si ce rapport est proche de 0,


le fluide est élastique, proche d'un solide. Plus le rapport
est proche de 1, plus le fluide est visqueux, moins sa com-
posante élastique est importante.
Gel ferme lyftant Gel viscoélastique
Par ailleurs, la résistance à la déformation d'un gel G* et
Fig. 14.3  Technique de calibration Nasha.
son élasticité G′ augmentent avec son degré de réticulation
(cross-linkage élevé).

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 14. Généralités sur l'acide hyaluronique

Cohésivité volumateurs [11]. Les enzymes tissulaires et les radicaux


libres les décomposent en fragments qui sont éliminés par
C'est la résistance à la compression et à l'étirement. Un gel
les macrophages circulants et ensuite par les canaux lympha-
d'AH est formé d'un mélange de particules qui adhèrent plus
tiques. La taille, la forme et l'hydrophilie des particules
ou moins les unes aux autres ; ainsi, la cohésivité représente
influencent la phagocytose.
ces forces d'adhésion internes qui lient les particules entre
elles. Elle augmente avec le degré de réticulation et de
concentration [7]. Plus un gel est cohésif, plus il gardera sa Recommandations
forme lors des mouvements et plus il aura une grande capa- avant traitement [12, 13]
cité de soulèvement des tissus ; moins un gel est cohésif, plus
il s'intégrera facilement dans les tissus et sera malléable. Les risques médicaux liés au patient, aux produits ou aux
procédures doivent être connus pour ne pas compromettre
la bonne réputation des techniques de comblement.
Autres propriétés
Consultation préalable
D'autres propriétés sont :
■ l'hydrophilie : capacités à absorber l'eau, qui détermine le
Une consultation préalable est indispensable pour détecter
risque immédiat d'œdème après injection d'un AH ; une contre-indication, vérifier l'état cutané, remettre les
■ la texture : fine ou avec particules ;
fiches d'information, de recommandations avant traite-
■ la vitesse d'intégration tissulaire ;
ment et faire signer le formulaire de consentement éclairé.
■ la durée de vie ;
Celui-ci doit mentionner les effets indésirables les plus fré-
■ la tolérance.
quents ainsi que les complications plus rares mais graves
telles que la nécrose cutanée et la déficience visuelle. Il est
indispensable de préciser les motivations du patient et de
repérer les attentes irréalistes, ou les dysmorphophobiques.
Intégration tissulaire [8, 9] La consultation permettra d'orienter le patient et d'obtenir
Une fois injecté, le gel s'ancre dans la peau et ne migre son accord dans le choix des zones à traiter pour corriger les
pas (fig. 14.5). Les gels biphasiques forment de gros agré- signes de vieillissement ou pour embellir un visage, de plani-
gats répartis régulièrement dans le derme et semblent fier le nombre de séances nécessaires et de remettre un
écarter les faisceaux de collagène. Les gels monopha- devis.
siques monodensifiés forment des agrégats plus petits, L'AH n'a pas de spécificité tissulaire ni d'espèce et est
tandis que les gels monophasiques polydensifiés s'in- considéré comme immunologiquement inerte. Il est
tègrent uniformément dans le tissu environnant, en rai- beaucoup moins allergisant que le collagène injecté aupa-
son de leur large spectre de tailles de particules. L'effet ravant. Les cas de réactions d'hypersensibilité retardée
Tyndall réalisant un aspect bleuté sous la peau résulte de sont rares et estimés à moins de 1 pour 5 000. Toutefois, il
l'injection trop superficielle de gros agrégats de gels est souhaitable de respecter les précautions qui peuvent
d'AH. être liées au patient, au produit ou à la procédure.

Dégradation tissulaire Précautions liées au patient


La longévité des produits de comblement dans la peau Les patients doivent être soigneusement sélectionnés en res-
dépend de leur vitesse de dégradation tissulaire [10]. Pour pectant les contre-indications cutanées ou systémiques.
les AH, elle est de 6 à 18 mois voire 24 mois pour certains AH Cette évaluation doit être renouvelée avant chaque acte afin

Fig. 14.5  Aspect de l'acide hyaluronique 5 mois après l'injection d'une papule de 0,1 ml sur l'avant-bras.
Photographies à partir d'une biopsie.
Source : C. Raimbault.

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 14. Généralités sur l'acide hyaluronique

de ne pas omettre une nouvelle pathologie ou une modifica- ■ antécédents chirurgicaux : une modification de l'anatomie
tion du terrain immunologique ou inflammatoire survenue et en particulier de la vascularisation est possible avec un
après le dernier traitement esthétique. risque vasculaire augmenté, par exemple lors de rhinoplas-
Les éléments suivants doivent être surveillés : ties médicales après chirurgie nasale ;
■ antécédents allergiques sévères ou anaphylaxie, allergie ■ antécédents esthétiques : il est conseillé d'évaluer le degré

aux anesthésiques locaux ; de satisfaction du patient lors des traitements esthétiques


■ traitements anticoagulants  : il ne s'agit pas d'une contre-­ antérieurs.
indication stricte. L'injection doit être prudente, réalisée à
la canule et suivie d'une compression prolongée de la zone ; Précautions liées aux produits
■ éviter la prise de médicaments anti-agrégants plaquet-
En Union Européenne, les produits doivent avoir un mar-
taires tels que l'aspirine, les anti-inflammatoires non sté-
quage CE, mais cela n'est pas une garantie suffisante. Il faut
roïdiens (AINS) une semaine avant la procédure. Certains
éviter l'achat sur Internet (contrefaçons).
aliments auraient aussi des propriétés fluidifiantes et leur
La fréquence des réactions d'hypersensibilité a diminué
éviction est recommandée dans certaines publications  :
depuis la purification des AH contenant moins de contami-
vin, huiles de saumon rouge, chocolat noir, pamplemousse,
nants protéiques.
Gingko biloba, vitamine E, etc. ;
L'agent réticulant le plus souvent utilisé est le BDDE. Le
■ état cutané : la peau doit être saine, sans inflammation ni
risque de toxicité au long cours semble faible, bien que non
infection. La prévention antiherpétique est utile chez les
évalué en proportion des quantités injectées. D'autres
patients à risque ;
moyens de stabilisation ou réticulation sont à l'étude.
■ état infectieux à distance : traitement différé recommandé
L'ajout d'anesthésiant de type lidocaïne ou mépivacaïne ne
[14]. Par exemple, il est préférable d'éviter les soins den-
semble pas modifier la rhéologie de façon significative [4].
taires et les visites chez l'hygiéniste buccodentaire pendant
les 2 à 4 semaines qui précèdent et qui suivent le traite-
ment afin de réduire le risque d'ensemencement bactérien
Précautions liées à la procédure
hématogène et le développement potentiel d'un biofilm ; Les photographies sont essentielles à des fins médico-légales,
■ contre-indications reposant sur des publications : notam- mais aussi pour évaluer l'efficacité des traitements. Elles seront
ment, description de granulomes sur la zone traitée ou à réalisées au mieux avec la même lumière, sur un fond uniforme,
distance lors de traitement par interféron [15, 16], par avec plusieurs prises de vues : face, trois quart et profil, dans la
omalizumab [17], par inhibiteurs de la tyrosine kinase [18] même position. Le patient est démaquillé et sans bijoux.
ou lors de sarcoïdose ; Les précautions sont les suivantes :
■ précaution concernant les patients porteurs de maladies ■ démaquillage soigneux, désinfection de la peau ;

auto-immunes ou inflammatoires chroniques : il y a peu ■ ambiance propre, pas de déchets qui traînent ;

de publications d'effets secondaires chez ces patients en ■ port de gants non stériles, plateau ou surface propre car

dehors de la survenue de rares cas de syndrome ASIA les seringues ne sont pas stériles ; mise en place d'un ban-
(auto-inflammatory syndrome induced by adjuvants), deau lors de l'utilisation de canule ;
mais il est vrai que peu de patients ont été traités car ils ■ pendant l'injection : ne toucher ni l'aiguille ni la canule ;

sont habituellement récusés pour les comblements, du changer fréquemment d'aiguille ou de canule. Les canules
moins lors des poussées inflammatoires [19, 20]. Toutefois, fines se comportent comme des aiguilles ; préférer des
des publications font état d'une bonne tolérance à long canules d'au moins 25 G, mobiliser constamment l'extré-
terme des AH lors de déficits structuraux acquis liés à des mité de la canule. Utiliser de préférence des aiguilles avec
maladies auto-immunes [21] ou des sclérodermies le plus petit diamètre. Injecter de petits bolus sous faible
[22–25]. Les effets secondaires lors des thyroïdites de pression, aspirer avant l'injection. Cependant, ce test
Haschimoto ont été surtout décrits avec le Dermalive® et d'aspiration ne serait pas toujours fiable car le comporte-
l'Artecoll® (gel polyacrylique et AH ou collagène, arrêt de ment d'un filler dans la lumière de l'aiguille dépend de sa
commercialisation en France). Avec l'Aquamid® (gel de rhéologie, de la taille de l'aiguille ou du biseau, du spasme
polyacrylamide, arrêt de commercialisation en France), ils des vaisseaux [26] ;
l'ont été lors de maladies inflammatoires du tube digestif. ■ surveiller la couleur de la peau et évaluer la douleur res-

La recherche bibliographique ne trouve pas de publica- sentie par le patient (signes précoces d'embolisation) ;
tion concernant ces pathologies et les réactions secon- ■ disposer de hyaluronidase ayant l'autorisation de mise sur

daires avec les AH ; le marché (AMM) en cas d'embole vasculaire [27] ;
■ antécédents d'injection de produit de comblement non ■ éviter de remaquiller après l'injection. Recommander

résorbable (Silicone®, Dermalive®, Artecoll® des années d'éviter le sport, le sauna, le hammam pendant 24 à
1998 à 2006, Aquamid®) : risque nettement accru de réac- 72 heures ou d'effectuer un voyage immédiatement après ;
tions granulomateuses chroniques ; il faut donc exiger de ■ remettre au patient les étiquettes de traçabilité fournies

connaître ce qui a été injecté auparavant en raison de avec les produits ;


grand nomadisme des patients ; ■ disposer d'un récupérateur d'aiguille et de canule.

124
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TECHNIQUES Partie 2
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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 14. Généralités sur l'acide hyaluronique

Conclusion [13] Signorini M, Liew S, Sundaram H, et al. Global aesthetics consensus:


avoidance and management of complications from hyaluronic
acid fillers—Evidence- and opinion-based review and consensus
L'excellente tolérance de l'hôte ainsi que ses propriétés vis-
recommendations. Plast Reconstr Surg 2016;137(6). 961e-71e.
coélastiques et hydratantes font de l'acide hyaluronique un [14] Beleznay  K, Carruthers  JD, Carruthers  A, et  al. Delayed-onset

produit de comblement idéal. nodules secondary to a smooth cohesive 20 mg/mL hyaluronic acid
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Section 4. Les produits de comblement (fillers)

Chapitre 15
Comblement du tiers supérieur
du visage
C. Raimbault

Introduction Front et glabelle


Le support osseux comporte l'os frontal jusqu'à la crête
Le tiers supérieur a une importance primordiale dans l'ex-
temporale et l'arcade orbitaire. En profondeur, la galéa
pression faciale des émotions.
est une aponévrose en forme de casque, d'où son nom.
Son vieillissement est surtout lié à l'action des muscles
Elle est tendue entre l'occiput, le front et les régions tem-
peauciers, corrugateur, procérus, frontal et orbiculaire qui
porales. Elle s'insère sur les rebords supra-orbitaires et
entraînent l'apparition de rides dynamiques pour lesquelles
sur la racine du nez. Latéralement, elle se confond avec le
l'action de la toxine botulinique est le traitement de pre-
fascia temporopariétal superficiel qui recouvre la région
mière intention [1]. Les produits de comblement étaient
temporale. Entre la galéa et le périoste existe un espace
utilisés pour corriger les rides du lion persistantes malgré
de glissement, mais des adhérences avec le périoste
l'immobilisation des muscles de la glabelle. Leurs indications
existent surtout à la partie basse du front. Elles sont
ont évolué et se sont élargies aux traitements du front, des
variables selon les individus. Le muscle frontal repose sur
sourcils, des tempes.
la galéa ; il s'insère sur les deux tiers internes du sourcil
Lors du vieillissement, les traits de la partie supérieure
jusqu'à la crête temporale, à l'aplomb de la courbure du
du visage se durcissent avec l'apparition d'arcades orbi-
sourcil. Le coussinet graisseux de Charpy est situé sous le
taires plus saillantes, d'une perte d'os facial en regard
sourcil.
des sinus, de dépression au niveau des tempes, et d'une
ptose des sourcils souvent associée à un blépharochala-
Vascularisation [2]
sis. Une squelettisation peut aussi survenir avec la dispa-
rition de la graisse péri-orbitaire et le creusement des Les artères supra-orbitaires et supratrochléaires sont
tempes. issues de la carotide interne et forment dans la zone naso-
L'amélioration des techniques de comblement, leur plus glabellaire une arcade vasculaire avec les artères nasales
grande sécurité et une meilleure connaissance anatomique dorsales et angulaires issues de la carotide externe
de cette zone à risque entraînent une augmentation des (fig. 15.1). Elles ont un trajet vertical et se divisent en plu-
procédures esthétiques, mais requièrent une bonne expé- sieurs branches réalisant un aspect de chandelier. Elles
rience. Ces techniques sont réservées aux injecteurs deviennent rapidement superficielles après leur sortie de
expérimentés. l'orbite et traversent la galéa le plus souvent au niveau de
Chez la femme, le front doit être légèrement convexe, les la première ride horizontale du front. Les artères supra-
tempes plates ou légèrement bombées, sans dépression ou trochléaires sont très proches des rides de froncement de
concavité. Le sourcil est idéalement situé au-dessus du la glabelle [3].
rebord orbitaire ; il a une forme courbe, la queue du sourcil
étant légèrement surélevée. Chez l'homme, il est plus bas,
Innervation
plus plat et horizontal, situé en regard de l'arcade orbitaire. Les nerfs comprennent le nerf supratrochléaire, qui court
Ces critères esthétiques peuvent varier selon les ethnies et avec le muscle corrugateur, sous le fascia frontalis pour
doivent être pris en compte. innerver le front médial et central, et le nerf supra-orbitaire,
qui sort du foramen ou de l'encoche orbitaire supérieure et
passe sous le fascia frontalis pour innerver la partie antérola-
Anatomie térale du crâne et le cuir chevelu.
Le tiers supérieur est limité en bas et latéralement par l'ar-
cade zygomatique, au centre par les os propres du nez, en Tempes
haut par la ligne d'implantation des cheveux. Il comporte le La fosse temporale est une dépression peu profonde sur la
front, la glabelle et les tempes. partie latérale du crâne délimitée par la crête temporale en

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 15. Comblement du tiers supérieur du visage

1 2 3 4 5

1. Artère et veine nasale dorsales


2. Artère et veine supratrochléaires
6 3. Artère et veine supra orbitaires
4. Artère et veine ophtalmiques
7 5. Artère et veine centrales de la rétine
6. Artère et veine nasociliaires
7. Artère et veine angulaires
8 8. Artère et veine zygomatiques
9 9. Artère et veine sous-orbitaires

7 1. Artère supratrochléaire
1 2 2. Artère supra-orbitaire
3. Arcade orbitaire
4. Arcade zygomatique
8 3 5. Artère nasale latérale
6. Artère nasale dorsale
7. Artère temporale superficielle
6 4 8. Réseau issu de la CI
9. Réseau issu de la CE
5
B 9
Fig. 15.1  Anatomie vasculaire du tiers supérieur.
A. Les artères supra-orbitaires et supratrochléaires sont issues de la carotide interne et forment dans la zone nasoglabellaire une arcade vasculaire avec les
artères nasales dorsales et angulaires issues de la carotide externe. B. Vascularisation du tiers supérieur : réseau issu de la carotide interne (CI) et réseau
vasculaire issu de la carotide externe (CE). Il existe de nombreuses anastomoses entre ces deux réseaux dans la zone nasoglabellaire. À la glabelle, les artères
deviennent rapidement superficielles et sont proches des rides du froncement. L'artère temporale superficielle est palpable devant la ligne d'implantation
des cheveux.
Sources : fig. A, d'après Carruthers JD, et al. 2014;134:1197–201, fig. B, C. Raimbault.

haut, le processus frontal de l'arcade zygomatique en avant, L'artère et la veine temporales moyennes se trouvent juste
et le processus temporal du zygoma en bas [4, 5]. En esthé- sous les vaisseaux superficiels, entre le fascia temporoparié-
tique, la limite postérieure est la ligne d'implantation des tal et le fascia temporal profond. Les vaisseaux temporaux
cheveux. De la superficie vers la profondeur, on distingue : la profonds se trouvent sous le muscle temporal, au-dessus de
peau et la graisse sous-cutanée, le fascia temporal superficiel la couche profonde du fascia temporal. La veine temporale
(ou temporopariétal), le fascia temporal profond, le tissu moyenne suit un trajet parallèle à l'arcade zygomatique et se
sous-aréolaire lâche, le muscle temporal, le périoste et l'os. situe au moins 1,5 cm au-dessus [6]. La région temporale est
riche en veines visibles sous la peau avec un bon éclairage.
Vascularisation
Toutes les branches dépendent de la carotide externe. Dans
la fosse temporale, trois niveaux de vaisseaux se succèdent. Traitement
L'artère temporale superficielle est située dans le fascia tem-
poropariétal, mais elle devient plus superficielle lorsqu'elle se
rapproche du bord latéral du muscle frontal à l'aplomb de la Traitement des rides de la glabelle
courbure du sourcil. Elle est sinueuse, palpable ou même Le risque d'embolisation vasculaire est très important dans
parfois visible en avant de la ligne d'implantation capillaire cette zone et fait l'objet de nombreuses publications car une
dans la partie postérieure de la tempe. nécrose cutanée peut survenir en l'absence de traitement
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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 15. Comblement du tiers supérieur du visage

­ récoce par la hyaluronidase [7]. Des cas de cécité ou d'acci-


p
dent vasculaire cérébral ont aussi été décrits si le filler est injecté
de façon rétrograde avec une forte pression jusqu'aux artères
rétiniennes ou carotidiennes, où il peut alors suivre un flux
antérograde [8].
L'injection à l'aiguille de 30 G doit être prudente, intrader-
mique rétrotraçante, superficielle sous la ride ou en multi-
ponctures avec un produit G′ modéré pour éviter tout
m
risque de compression vasculaire (fig. 15.2). L'injection à la 1c

1
canule sera réalisée de préférence avec une canule de 25 G.

cm
Veine temporale médiane

1,5 cm

Fig. 15.3  Injection des fosses temporales à l'aiguille.


Préférer la zone relativement avasculaire de la partie haute et antérieure de
la fosse temporale. Zone de sécurité en jaune. Injecter un bolus de 0,5 à
1 ml. Un point d'injection plus médial, juste en arrière de l'arcade orbitaire,
permet de relever légèrement la queue du sourcil.
Source : C. Raimbault.

Injection à l'aiguille
Les points de repère sont la crête temporale et le rebord
orbitaire. L'injection se fait par un point d'entrée situé
latéralement à 1 cm du rebord orbitaire et à 1 cm sous la
crête temporale [10]. Insérer l'aiguille perpendiculaire-
ment à la peau jusqu'au périoste, aspirer et injecter lente-
ment un bolus suprapériosté. Une pression digitale le
long de la ligne capillaire empêchera la propagation du
produit vers les cheveux. Après avoir retiré l'aiguille, il
faut exercer une compression de quelques minutes pour
éviter une ecchymose si une veine profonde est touchée.
Le volume injecté est de 0,5 à 1 ml par côté, parfois plus si
la perte de volume est marquée. Il faut éviter une injec-
tion trop postérieure, sous le corps du muscle temporal
qui pourrait entraîner la diffusion du produit de comble-
ment sous l'arcade zygomatique vers la joue. Comme l'in-
jection est profonde, on préférera un produit
volumateur.
Un deuxième point d'injection plus médial juste en arrière
de l'arcade orbitaire permet de relever la queue du sourcil et
Fig. 15.2  Rides de la glabelle. de compléter le comblement la partie antéro-interne de la
Injection rétrotraçante avec une aiguille fine ou en multiponcture. Elle doit tempe.
rester strictement superficielle intradermique en raison du danger vasculaire.
Source : C. Raimbault.
Injection à la canule
Traitement des tempes Le prétrou est situé au moins 1,5 cm au-dessus de l'arcade
Il faut repérer l'artère temporale qui est souvent palpable ou zygomatique en repérant bien les veines superficielles
parfois visible sous une peau fine (on peut la rendre turges- nombreuses dans cette zone, de préférence dans la zone
cente en tapotant la peau pour mieux la voir). Il faut éviter prétrichienne. On préfère une canule de 25  G qui sera
les zones postérieure et inférieure de la tempe et préférer la introduite dans un plan sous cutané. L'injection se fait en
zone relativement avasculaire de la partie haute et antérieure éventail en mobilisant de façon constante mais douce l'ex-
de la fosse temporale (fig. 15.3). trémité de la canule pour délivrer de façon régulière le fil-
L'injection peut se faire à l'aiguille ou à la canule [9]. ler et éviter une embolisation vasculaire (fig. 15.4).

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Chapitre 15. Comblement du tiers supérieur du visage

Fig. 15.4  Injection des tempes à la canule.


Le point d'entrée est situé dans la zone prétrichienne au-dessus de l'arcade zygomatique. L'injection sous-cutanée en éventail est prudente en raison des
nombreux vaisseaux superficiels dans cette zone. Bien masser pour répartir le produit. Prévenir le patient du risque de turgescence temporaire des veines
superficielles.
Source : C. Raimbault.

Elle est suivie d'un massage pour bien répartir le produit. Une injection à l'aiguille réalisant de multiples rétrotra-
Il faut prévenir le patient d'un risque de congestion tem- çantes dans le corps du muscle selon une forme rappe-
poraire des veines. Le filler doit être modérément visco­ lant celle d'une plume a aussi été décrite pour reconstituer
élastique pour être massé. le volume du sourcil [11]. Le risque d'ecchymose est
important et une compression est utile, mais tout le
Remodelage du sourcil sourcil peut être ainsi injecté, notamment dans sa partie
Les produits de comblement permettent de repositionner la interne.
queue du sourcil ou de restaurer son volume.
Restaurer le volume à l'aide d'une injection à la
Injection à l'aiguille pour lifter la queue du canule
sourcil Le prétrou est placé à l'extrémité de la queue du sourcil.
Insérer l'aiguille au niveau de la queue du sourcil juste en L'injection se fait de façon rétrograde régulièrement
arrière de l'anneau orbitaire, jusqu'au périoste (fig.  15.5). sous le muscle orbiculaire pour restaurer le volume
Aspirer et injecter un bolus en évitant la diffusion vers la (fig. 15.6).
paupière supérieure puis masser. Un deuxième point légère-
ment plus haut peut être utile en évitant le foramen
supra-orbitaire.

Fig. 15.6  Reconstitution du volume du sourcil.


Le prétrou est placé à l'extrémité de la queue du sourcil. L'injection se fait
de façon rétrograde régulièrement sous le muscle orbiculaire.
Source : C. Raimbault.

Fig. 15.5  Relever la queue du sourcil.


Insérer l'aiguille au niveau de la queue du sourcil juste en arrière de l'anneau Traitement des dépressions frontales
orbitaire, jusqu'au périoste. S'aider d'une bonne lumière pour éviter les
La zone de sécurité est profonde, sus-périostée, sous-galéale
veines superficielles, nombreuses dans cette zone. Aspirer, injecter un
bolus et masser. car les artères supratrochléaires ou supra-orbitaires deviennent
Source : C. Raimbault. rapidement superficielles après avoir traversé la galéa.

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Injection à l'aiguille Injection à la canule dans un plan horizontal


De 4 à 6 points sont situés au moins à 2 cm au-dessus de la L'aiguille de prétrou est orientée vers la profondeur. Le pré-
courbure des sourcils. Le point le plus externe est placé à l'ex- trou est placé à l'extrémité latérale des dépressions frontales,
trémité latérale des rides frontales. Deux autres points sont en position médiale par rapport à la crête temporale. Après
répartis entre les artères supra-orbitaires et supratrochléaires introduction de la canule d'au moins 25 G, il faut traverser la
ou entre les artères supratrochléaires et la ligne médiane galéa et donc soulever la peau avec la main controlatérale
(fig. 15.7). pour franchir l'aponévrose qui offre une légère résistance.
L'injection des bolus est profonde, sus-périostée. Aspirer L'injection profonde se fait par un nappage parallèle au sour-
avant d'injecter et masser soigneusement pour répartir le cil (fig. 15.8).
produit. Une autre technique peut être réalisée avec 3 à 5 points
d'entrée placés dans la partie supérieure du front, le trajet
de la canule étant vertical orienté vers les sourcils et
sous-galéal. Le premier se situe au centre entre les vais-
seaux supratrochléaires, les suivants, plus latéralement
entre les vaisseaux supratrochléaires et supra-orbitaires,
ou encore plus latéralement entre ces derniers et l'artère
temporale.

Conclusion
Le traitement du tiers supérieur par produit de comble-
ment ne doit pas être négligé, car il adoucit et harmo-
nise les traits de l'ensemble du visage. Il complète le
traitement par la toxine botulinique qui s'adresse sur-
tout à la correction des rides dynamiques, mais sans
restauration des volumes. Toutefois, les nombreuses
­
communications et anastomoses entre les réseaux
­carotidiens externe et interne de cette zone doivent
conduire à la plus grande vigilance quant au risque
d'embolisation artérielle.
Références
[1] de Maio M, Swift A, Signorini M, Fagien S. Aesthetic Leaders in Facial
Aesthetics Consensus Committee. Facial assessment and injection
Fig. 15.7  Injection des dépressions frontales à l'aiguille. guide for botulinum toxin and injectable hyaluronic acid fillers:
La zone de sécurité est profonde, sus-périostée, sous-galéale. Injecter 4 à focus on the upper face. Plast Reconstr Surg 2017;140(2). 265e-76e.
6 bolus au moins à 2 cm au-dessus de la courbure des sourcils. Masser pour [2] Carruthers JDA, Carruthers JA. Appreciation of the vascular anatomy of
une répartition homogène. aesthetic forehead reflation. Dermatol Surg 2018;44(Suppl 1):S2–4.
Source : C. Raimbault.

Fig. 15.8  Injection des dépressions frontales à la canule.


A. La canule doit plonger vers la profondeur et traverser la galéa qui offre une légère résistance. B. Nappage sous la galéa parallèle au sourcil.
Source : C. Raimbault.

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Chapitre 15. Comblement du tiers supérieur du visage

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TECHNIQUES Partie 2
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Section 4. Les produits de comblement (fillers)

Chapitre 16
Comblement du tiers
moyen du visage
K. Benachour, C. Raimbault

Introduction constitué à la partie supérieure de la joue par le SOOF


(suborbicularis oculi fat), graisse profonde fixe, séparé de la
Le tiers moyen a une grande importance dans la beauté et la graisse superficielle et mobile adhérente à la peau par le
jeunesse d'un visage. On observe idéalement une belle pro- muscle orbiculaire qui est un véritable sphincter. Il agit
jection des pommettes, des joues pleines, convexes et lisses comme un constricteur de la paupière, mais aussi comme un
de la paupière inférieure jusqu'au sillon naso-génien et la élévateur de la joue (fig. 16.2B).
région buccale. La vascularisation dépend des branches de l'artère faciale
Il est issu de la lame infra-orbitaire du deuxième arc issue de la carotide externe et de l'artère infra-orbitaire issue
branchial et constitue un support fondamental aussi bien du foramen infra-orbitaire qui vascularise la paupière infé-
pour le tiers inférieur que le supérieur. Ses altérations rieure, la partie latérale du nez et la lèvre inférieure, et pré-
peuvent aussi retentir sur le vieillissement de ces deux sente de nombreuses anastomoses avec les branches de
autres tiers.
La région, dont le nez est le centre, est délimitée en
dehors par la région temporo-parotidienne, en haut par
une ligne horizontale canthus externe/racine de l'hélix, en
bas par la ligne horizontale commissure labiale/lobule de
l'oreille.

Anatomie
Le tiers moyen repose sur le maxillaire et l'os zygomatique et
comprend la partie osseuse inférieure du cadre orbitoma-
laire qu'ils constituent.
Les tissus sous-cutanés sont composés essentiellement
des compartiments graisseux profonds et superficiels
(fig. 16.1 et 16.2A). Ce système, complexe et segmenté, est

Fig. 16.2  A. Compartiment graisseux profond. B. SOOF (sub-orbicularis


oculi fat) ; compartiment graisseux profond situé sous le muscle orbicu-
Fig. 16.1  Compartiment graisseux superficiel. laire de l'œil (OO).
Source : C. Winter et P. Kestemont. Source : C. Winter et P. Kestemont.

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 16. Comblement du tiers moyen du visage

2 3

11 mm

1
A B C
Fig. 16.3  A. Trajet de l'artère faciale. 1. L'artère faciale sort de la glande sous-maxillaire et traverse la ligne mandibulaire entre l'abaisseur de l'angle
de la bouche et le masséter. 2. Artère labiale supérieure située sous le muscle orbiculaire des lèvres. 3. Artère faciale sous le muscle grand zygoma-
tique. Elle prend ensuite le nom d'artère angulaire et devient superficielle à la partie supérieure du sillon. 4. Artère alaire supérieure s'anastomosant
avec les vaisseaux de la pointe du nez. B. Le foramen infra-orbitaire présente des variations anatomiques, mais il est schématiquement situé à la
verticale du bord médial de l'iris (point vert), jusqu'à un maximum de 11 mm en dessous du rebord infra-orbitaire (un peu moins d'un travers de
doigt). En pointillés noirs : rebord orbitaire. En rouge : position du foramen infra-orbitaire. C. Pédicule vasculonerveux infra-orbitaire.
Source : fig. A et C, C. Winter et P. Kestemont ; fig. B, C. Raimbault.

l'artère faciale (fig.  16.3A). Celle-ci devient superficielle en


haut du sillon naso-génien et prend le nom d'artère angu-
laire. Le foramen infra-orbitaire présente des variations ana-
tomiques, mais il est schématiquement situé à environ un
tiers de la distance entre le canthus médian et latéral des
1
yeux ou à la verticale du bord médial de l'iris, jusqu'à un
maximum de 11  mm en dessous du rebord infra-orbitaire 2
(un peu moins d'un travers de doigt) (fig. 16.3B,C). 3
La correction du vieillissement du tiers moyen est essen- 4
tielle pour supprimer les signes de fatigue et de relâchement 5
qui apparaissent progressivement et dont les mécanismes de
survenue ont bien été décrits dans les chapitres 1 et 2 :
■ atrophie de la graisse profonde fixe au plan osseux ;

■ glissement de la graisse malaire superficielle en bas et en Fig. 16.4  Retaining ligaments à l'origine des poches palpébrales et malaires.
1. Muscle orbiculaire des paupières ; 2. Orbicularis retaining ligament ;
dedans bloquant sur la zone fixe de la lèvre, accentuant le 3. Compartiment adipeux sous-orbitaire ; 4. Zygomatic cutaneous ligament ;
pli d'accumulation naso-génien et se prolongeant vers le 5. Compartiment adipeux malaire.
tiers inférieur à l'origine des bajoues ;
■ cloisonnement de la graisse par les retaining ligaments orbi-

culaires et zygomatiques dans la zone péri-oculaire à l'ori-


gine des poches palpébrales et malaires (fig. 16.4 et 16.5) ;
■ atrophie de la graisse latérale dans la zone prétragienne et

supérieure de la joue ;
■ amincissement du muscle orbiculaire qui devient fenêtré,

étirement du muscle grand zygomatique majoré par la 3 1


ptose cutanée ;
■ résorption osseuse prédominant à la partie interne et

médiane de l'os malaire, creusement orbitaire, recul de la 2


base narinaire par résorption osseuse pyriforme.
Ces phénomènes, plus ou moins marqués et précoces selon
le mode de vieillissement, aboutissent à la modification des
contours du visage avec l'aplatissement du tiers moyen, la 4
perte de projection antérieure de la pommette, la perte de
convexité de la partie supérieure et latérale de la joue.
L'inversion du triangle de la jeunesse est liée au creusement
de la région médiane de la joue, et s'associe à la survenue de Fig. 16.5  Cerne et vallée des larmes.
cernes et de poches malaires. Le sillon naso-­génien devient 1. Sillon palpébromalaire. 2. Sillon médio-jugal. 3. Vallée des larmes. 4. Sillon
profond, des rides jugales apparaissent (voir fig. 16.4 et 16.5). naso-génien.
Source : C. Raimbault.

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Chapitre 16. Comblement du tiers moyen du visage

Plan de traitement
C'est l'analyse précise et personnalisée du vieillissement qui
permettra d'établir le meilleur plan de traitement. Il peut
nécessiter plusieurs séances et des quantités parfois impor-
tantes de produit de comblement avec différentes rhéologies 1
2 3
(voir chapitre 15). La difficulté réside dans le fait que le patient
se focalise souvent sur une zone précise et demande par
exemple la correction de sillons naso-géniens profonds, de 4
rides jugales, sans en identifier l'origine et sans avoir la notion 5
de perte de volume et de ptose des tissus. Il est plus facile de 6
proposer un plan de traite­ment cohérent lorsque la personne
exprime des expressions négatives ressenties telles que la
fatigue ou le relâchement.
L'examen clinique se fait au repos et en dynamique, en
position assise pour analyser l'influence de la gravité. Il
Fig. 16.6  La région malaire est divisée en trois zones : latérale (1), anté-
faut évaluer le degré de perte du volume facial. Les traite­ rieure à l'apex de la joue (2) et interne ou médiale (3).
ments doivent être adaptés aux besoins de chaque Les zones vasculaires à risque sont les vaisseaux et les nerfs zygomatiques dans
patient, en tenant compte des différences ethniques la joue latérale (4), les vaisseaux et nerfs sous-orbitaires issus du foramen
dans la forme du visage, des idéaux esthétiques, du coût infraorbitaire dans la joue interne (5) et les vaisseaux angulaires à la base du
nez (6).
global.
Les photographies sont prises avec des vues de face, de pro-
fil, en oblique et depuis le haut avec la tête rejetée en arrière.
Chez la plupart des patients, le repositionnement vertical Technique d'injection
de la graisse malaire est considéré comme la première étape
du traitement dans le but de restaurer la perte de volume
de la graisse profonde et de redraper l'enveloppe cutanée
Restauration des volumes
sur la structure osseuse faciale. Le point de projection habi- malaires [2] (fig. 16.7 et 16.8)
tuel de la pommette est situé 10 mm latéralement par rap- L'injection peut être réalisée à l'aiguille ou à la canule, sauf
port au canthus latéral de l'œil et 15  mm en dessous de dans la zone du foramen infra-orbitaire où la canule est pri-
l'arcade orbitaire. vilégiée. L'injection de la partie malaire latérale peut se faire
La restauration se fera si besoin dans les trois zones malaires dans deux plans superposés  : à l'aiguille, elle est profonde
[1] : latérale, antérieure et médiale (fig. 16.6). Elle entraîne un effet sus-périostée à l'aide de petits bolus d'acide hyaluronique
lifting avec élévation du sillon palpébromalaire et un raccourcis- (AH) volumateur sur l'arcade zygomatique et nécessite 1 à
sement de la hauteur de la paupière inférieure. Le plus souvent, 3  bolus de 0,1  mL à 0,2  mL. Un bolus sous l'insertion du
elle précède le traitement de la région infra-orbitaire compre- muscle grand zygomatique aura une action de myomodula-
nant le sillon palpébromalaire et le cerne ou vallée des larmes tion en rétablissant son levier et sa force, entraînant une
chez les patients nécessitant une correction de la perte de ascension de la commissure labiale (voir chapitre 20).
volume dans les deux régions. Elle diminue également la profon- Elle peut être complétée par un nappage dans le plan
deur du sillon naso-­génien qui sera souvent traité dans un deu- sous-cutané à la canule, oblique en haut et en arrière chez les
xième temps, mais améliore aussi le pli d'amertume et la bajoue femmes ou plus horizontal chez l'homme pour accentuer le
dans le tiers inférieur. relief de la pommette et rétablir la convexité latérale du
L'injection dans la zone atrophique prétragienne contri- visage (voir fig. 16.8). Il faut éviter de traumatiser l'artère ou
bue aussi à cet effet lifting. le nerf zygomatique dans cette zone.

A B C
Fig. 16.7  Injections malaires.
A. Injection malaire latérale sus-périostée à l'aiguille. B. Injection malaire latérale à la canule. C. Injection malaire interne à la canule.
Source : C. Raimbault.

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Chapitre 16. Comblement du tiers moyen du visage

A B C
Fig. 16.8  Reconstitution du volume malaire et traitement du cerne (A. Avant / B. Injection / C. Après).
Source : C. Raimbault.

La partie malaire antérieure, qui représente l'apex de la doigt pour effacer temporairement le creux du cerne et véri-
pommette, peut être injectée par de petits bolus d'AH fier si cette manœuvre n'aggrave pas la hernie graisseuse
volumateur en position suprapériostée lorsqu'il y a un orbitaire ou la poche malaire.
défaut de projection, ou en sous-cutané avec un AH L'injection peut être réalisée à l'aiguille ou à la canule.
moins cohésif s'il s'agit d'une perte de volume de la Sa profondeur doit être soigneusement contrôlée en
graisse superficielle. Il convient d'éviter toute diffusion position sus-périostée sous le sillon palpébromalaire laté-
du filler vers la paupière inférieure en la protégeant avec ralement et sous le creux du cerne en protégeant le
le doigt. rebord osseux avec le doigt. L'aiguille, de préférence de
L'injection dans la partie malaire interne doit être pru- 30  G, est implantée perpendiculairement à la peau,
dente pour éviter de traumatiser ou d'emboliser le pédi- jusqu'au périoste, puis déplacée vers la zone interne.
cule infra-orbitaire. La zone de sécurité pour une injection L'injection est profonde rétrotraçante et nécessite 2 ou
sus-périostée à l'aiguille se situe latéralement par rapport à 3 points d'entrée espacés de quelques millimètres en res-
la ligne médiopupillaire. Il faut injecter très lentement tant à distance du sommet du sillon nasojugal pour éviter
après aspiration, et utiliser le majeur et l'index pour proté- d'emboliser l'artère angulaire à ce niveau (fig. 16.9). Le fil-
ger l'œil et le foramen infra-orbitaire. L'utilisation d'une ler peut être poussé dans la partie la plus interne à l'aide
canule d'au moins 25  G est préférée si l'injection doit se d'un coton-tige.
faire dans la zone malaire interne en dedans de la ligne La distance entre la peau et le périoste varie beaucoup
médiopupillaire ou si l'injection se fait dans un plan d'un sujet à l'autre ; elle est plus courte dans la partie interne
sous-cutané. Dans ce cas, un unique point d'entrée dans la du cerne où il n'y a pas de graisse profonde. Il est donc
partie moyenne de la joue peut suffire pour traiter l'en- important d'éviter toute surcorrection.
semble de la zone malaire. Si l'injection est effectuée à la canule (fig. 16.10), le pré-
Précautions : il est important d'éviter la surcorrection des trou est au mieux situé dans la région médiane afin de
joues, surtout lorsque le sujet sourit et rit. combler le sillon palpébromalaire et la vallée des larmes
Les quantités d'AH peuvent être importantes pour restau- par le même point d'entrée. On recommande d'utiliser
rer les volumes ; l'association de deux produits de comble- une canule de 25 G, plus rigide, pour mieux contrôler son
ment, un volumateur en profondeur et un AH moyennement trajet et sa profondeur. La canule doit être placée perpen-
viscoélastique en surface, permet de garder un aspect natu- diculairement à la peau, avancée jusqu'au périoste puis
rel lors de la mimique. déplacée vers l'avant jusqu'au sommet du sillon
nasojugal.
Cernes ou vallée des larmes Le produit de comblement doit être adapté à la zone peu
C'est une zone essentielle dans la prise en charge de l'aspect hydrophile et malléable. Les quantités sont en moyenne de
fatigué du regard, mais aussi une des plus difficiles à traiter 0,3 à 0,5 ml par côté : 0,3 à 0,4 ml est distribué en petits bolus
avec des complications fréquentes. La qualité de toutes les à la partie médiane et interne du cerne et 0,1 à 0,2 ml en 1 à
couches superposées doit être soigneusement analysée 2  bolus pour le sillon palpébromalaire. Il est important de
pour éviter les mauvais résultats : l'élasticité de la peau est sous-corriger et d'effectuer des retouches si nécessaire. Les
évaluée par le snap test ; la couleur sombre peut être due au ecchymoses sont plus fréquentes lors d'injection à l'aiguille,
creux mais aussi à l'hyperpigmentation cutanée et doit être les œdèmes transitoires plus fréquents après injection à la
signalée au patient. L'existence d'un défaut de tonicité du canule.
muscle orbiculaire, le prolapsus de la graisse péri-orbitaire, La durée moyenne de la correction dans cette zone est
les œdèmes et poches malaires sont des mauvaises de 18 mois à 2 ans. La technique de comblement devien-
indications. dra d'autant plus difficile que les patients solliciteront de
La palpation permet de vérifier que la dépression du cerne nouveaux traitements au fur et à mesure des années avec
repose bien sur l'os. Pour prédire le succès du résultat, il faut un vieillissement de plus en plus délicat à corriger
pousser vers le haut la peau de la région médiane avec le (fig. 16.11 et 16.12).

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 16. Comblement du tiers moyen du visage

Fig. 16.9  Injection à l'aiguille profonde sus-périostée en plusieurs points.


À l'angle interne, le filler doit être poussé à l'aide d'un coton-tige (C).
Source : C. Raimbault.

Fig. 16.10  A. Injection du cerne à la canule. B. Injection du sillon palpébromalaire à la canule.


Source : C. Raimbault.

Fig. 16.11  Comblement du cerne.


Source : K. Benachour.
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Chapitre 16. Comblement du tiers moyen du visage

Fig. 16.12  Comblement du cerne et du sillon palpébromalaire.


Source : C. Raimbault.

Traitement du sillon naso-génien profondeur (fig. 16.14). La qualité du résultat dépend de la


ptose des tissus malaires qui doit être corrigée dans un pre-
Dans la partie haute du sillon, l'artère faciale peut être située
mier temps si elle est trop marquée.
dans le tissu sous-cutané [3]. L'injection se fera donc de pré-
Le risque d'ecchymose, d'irrégularité est plus grand lors
férence à la canule ou par bolus profond au contact du
d'injection à l'aiguille ; la quantité d'AH nécessaire est plus
périoste. Le prétrou est situé à la partie inférieure du sillon ou
importante avec la canule. Dans certains cas, la peau est fine,
juste en avant, en regard de la commissure labiale.
le sillon peu profond, réalisant plutôt un pli cutané qui sera
La canule est introduite jusqu'au sommet du sillon ; l'injec-
difficile à corriger en une séance. Il est donc préférable d'uti-
tion est rétrotraçante, réalisant un éventail dans la partie
liser successivement deux AH avec une rhéologie différente
supérieure pour combler la dépression entre l'aile du nez et le
en deux séances.
sillon. Il faut éviter la surcorrection en regard de la commis-
sure qui peut réaliser un aspect de « boudin » très disgracieux,
surtout si les joues en arrière sont creuses et la peau fine. On
Traitement des rides jugales
peut dans ce cas préférer une injection à l'aiguille qui sera plus ou « rides en accordéon »
superficielle et délivrera une quantité moindre d'AH. Le traitement est souvent difficile, surtout si l'héliodermie est
Si l'injection est réalisée à l'aiguille (fig. 16.13), elle doit res- importante, et peut être réalisé de plusieurs façons qui
ter strictement intradermique dans la partie supérieure du peuvent être associées : remise en tension des tissus par volu-
sillon pour éviter d'emboliser l'artère faciale, ou préférer un métrie malaire comme décrit plus haut, reconstitution des
bolus profond contre l'os maxillaire pour combler le sinus volumes graisseux jugaux superficiels à la canule (fig. 16.15),
pyriforme. Le long du sillon, l'injection est rétro-traçante et injection rétro-traçante à l'aiguille sous chaque ride en accor-
doit être régulière. On délivre 0,5 à 1  ml par côté selon sa déon avec un risque nettement majoré d'ecchymose.

Fig.  16.13  A. Injection du sillon à l'aiguille. Rester strictement dans un plan dermique en raison du risque d'embolisation de l'artère angulaire.
Injection prudente en éventail. Préférer une injection à la canule. B. Injection du sinus pyriforme par un bolus profond à l'aiguille.
Source : C. Raimbault.

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Chapitre 16. Comblement du tiers moyen du visage

Fig. 16.14  Injection du sillon naso-génien, 0,5 à 1 ml par côté. (A. Avant / B. Après)
Source : K. Benachour.

Ini
pro
fon

Napage
de

canule

Fig. 16.15  Reconstitution des volumes de la pommette, nappage des rides jugales à la canule.
Source : C. Raimbault.

Traitement de l'atrophie graisseuse


pré-auriculaire
L'injection à la canule par un point d'entrée inférieur ou
supérieur déposera le produit de comblement en nappage
sous-cutané pour reconstituer les volumes graisseux superfi-
ciels (fig.  16.16). La quantité de filler peut être importante
dans cette zone.

Fig. 16.16  Reconstitution des volumes dans la zone préauriculaire.


Conclusion Source : C. Raimbault.

La volumétrie du tiers moyen a une grande importance pour quantités d'acide hyaluronique, sauf si les patients débutent
corriger le relâchement, l'aspect fatigué qui s'accentue lors les traitements suffisamment tôt pour restaurer les déficits
du vieillissement du visage. Elle nécessite d'importantes dès leur apparition.

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 16. Comblement du tiers moyen du visage

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Chapitre 17
Comblement du tiers
inférieur du visage
M.-P. Loustalan

Le tiers inférieur est un point clé de l'harmonie du visage. Le TVL


soutien apporté par le comblement des déficiences structu-
relles liées à l'âge redonne un support à l'ensemble du visage
et améliore ses proportions.
Il met en évidence le phénomène de myomodulation en
permettant une levée de l'hypertonie musculaire à l'origine THL
d'une cascade d'améliorations esthétiques.
Nous traiterons successivement les différentes parties du Columelle

tiers inférieur, puis nous nous intéresserons aux multiples et Stomion


belles répercussions esthétiques du comblement de cette
Sillon labiomentonnier
région.
Pogonium
Point menton

Examen du tiers inférieur Angle cervicomentonnier

Fig. 17.2  La ligne mandibulaire idéale doit être rectiligne depuis l'angle


L'examen doit être effectué de face et de profil. postérieur jusqu'au menton sans bajoue.
Il évaluera les proportions du visage tiers/deux tiers THL : true horizontal line (ligne horizontale reliant la partie supérieure du
tragus au plancher de l'orbite) ; TVL : true vertical line (perpendiculaire à la
(fig. 17.1) et la hauteur du menton, et notamment : THL passant par la columelle) ; Pogonium : point le plus antérieur ; Point
■ les plis d'amertume et la perte graisseuse ; menton : point le plus inférieur.
■ l'occlusion, le support osseux et dentaire ;

■ la projection du menton sur le profil (fig. 17.2) ;

■ le degré de ptose ; Indications


■ l'ovale et en particulier l'angle cervico-mentonnier (121°).
Les indications sont :
■ la perte du volume graisseux et les déficiences structu-
relles secondaires (fig. 17.3 et 17.4) ;
Nombre d'or
a/b = (a+b)/a
b = 1 , a = 1,618

Columelle
1/3
Stomion
Sillon labiomentonnier
2/3

Point menton

Fig. 17.1  Le respect des proportions donne l'harmonie au visage.


La position et la hauteur du menton ont une importance capitale pour le
respect des bonnes proportions du visage. Fig. 17.3  Atrophie de la graisse péribuccale.

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Sillon jugo-mentonnier Creux de la fosse mandibulaire

Encoche mentonnière

Sillon labio-mentonnier
Fig. 17.4  Atrophie graisseuse, adhérences et cassures du derme, apparition des sillons jugo-mentonnier, labio-mentonnier, des encoches menton-
nières, de la fosse mandibulaire.

THL

TVL Fille Mère


Fig. 17.5  Photographies comparatives mère/fille.
Rétrogénie et raccourcissement du menton. Fermeture de l'angle labio-mentonnier. Ouverture de l'angle cervico-mentonnier.

■ la rétrogénie et la diminution de la hauteur du menton Pli d'amertume (fig. 17.6)


(fig. 17.5) ;
L'injection peut être réalisée à la canule. Le point d'entrée est
■ la perte de l'ovale du visage.
placé à son pôle inférieur. La canule remonte jusqu'au
Lors du vieillissement, la déficience structurelle du visage
modiolus où elle dépose un petit bolus, puis l'injection est
entraîne une hypertonie musculaire réactionnelle respon-
rétrotraçante, progressive et adaptée avec un nappage trian-
sable de la rétrogénie et du raccourcissement du menton.
gulaire de la région.
Le comblement réalisé à l'aiguille est moins nappant mais
Techniques d'injection permet de placer facilement des lignes de soutien sous la
commissure.
Nous traiterons successivement les différentes parties du
tiers inférieur.

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Chapitre 17. Comblement du tiers inférieur du visage

A B
Fig. 17.6  A. Injection du pli d'amertume à la canule. B. Injection à l'aiguille.
Petit bolus dans le modiolus en haut, puis injection linéaire rétrotraçante sous-cutanée superficielle 0,2–0,3 ml.

Injection du sillon labio-mentonnier de la mandibule. Ils entraînent un préjudice esthétique


(fig. 17.7) important. Cela est accentué chez les personnes ayant un
trouble de l'occlusion dentaire qui présentent un « vieillisse-
ment prématuré » du menton.
L'injection de l'éminence mentonnière doit être logique-
ment réalisée après celle du sillon labio-mentonnier
(fig. 17.8). Elle est faite à l'aiguille et dépose au contact osseux
un à trois bolus de 0,2 ml environ. Il faut pincer le menton
entre deux doigts pour éviter le déplacement du produit,
aspirer avant injection pour éviter toute injection intravas-
culaire et injecter lentement.

Fig. 17.7  Injection du sillon labio-mentonnier de préférence à la canule.


Injection superficielle à la canule linéaire rétrograde de 0,5 à 0,7  ml.
Massage après injection.

Le sillon labio-mentonnier se développe avec le vieillissement.


Il est dû à la perte du volume graisseux et surtout à l'hyper­
tonie des muscles du bas du visage, en particulier du menton-
nier qui enroule le menton vers l'avant, accentuant ainsi le
sillon labio-mentonnier et les creux de la fosse mandibulaire.
Son injection donne du support aux commissures, réduit
la protrusion de la lèvre inférieure qui est valorisée, mais
Fig.  17.8  Injection de l'éminence mentonnière en contact osseux, à
aussi et surtout diminue la rétrogénie et allonge le menton. l'aiguille.
L'injection est réalisée de préférence à la canule et sera Bolus profond à l'aiguille 0,2 ml.
adaptée, en quantité souvent plus importante au niveau des
creux de la fosse mandibulaire. Elle est facilitée par une légère
ouverture de la bouche.
Un massage est réalisé sur le versant cutané, mais égale- Encoche mentonnière
ment muqueux en raison de la possibilité d'amas percep- Il s'agit de l'aire triangulaire située en avant de la bajoue. Le
tibles devant les dents. comblement se réalise de préférence à la canule (pour éviter
l'artère, la veine ou le nerf sous-mentonnier) par un nappage
Menton profond (fig. 17.9). Un bolus profond peut être réalisé à l'ai-
La rétrogénie et le raccourcissement du menton sont liés à guille (aspirer avant d'injecter et injection lente en contrô-
l'hypertonie du muscle mentonnier et à la résorption osseuse lant le placement du produit avec les doigts).

143
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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 17. Comblement du tiers inférieur du visage

A B
Fig. 17.9  Traitement de l'encoche mentonnière à la canule.
A. Nappage à la canule. B. Bolus profond à l'aiguille.

Ovale du visage Zones à risque


Pour rectifier l'ovale du visage (fig.  17.10), le comblement
Il faut éviter de piquer à l'aiguille les zones vasculaires à
peut être réalisé à plusieurs endroits.
risque (fig. 17.11 à 17.13).

Région de l'angle mandibulaire


Sur le rebord maxillaire, un à trois bolus sus-périostés 2
de 0,2  ml sont déposés à l'aiguille avec une injection
lente, après aspiration et en évitant de racler le
périoste. Chez la femme, pour éviter l'élargissement du 1
2
bas du visage, le bolus peut être placé en arrière de la
partie inférieure de la branche montante de la mandi- 1'
bule. Ces bolus vont réaliser une traction des tissus
3
mous vers l'arrière. 4

Région prétragienne
Une injection à la canule d'une quantité de produit adaptée
est réalisée.

Rebord mandibulaire Fig. 17.11  Zones vasculaires à risque.


1. Artère labiale supérieure. 1'. Artère labiale inférieure. 2. Trajet de l'artère
Son injection donne une meilleure définition du contour. faciale. 3. Pédicule vasculaire. 4. Foramen mentonnier.
L'injection est réalisée de préférence à la canule en raison de
la zone figurée en rouge sur la figure 17.10 et située en arrière
de la bajoue et en avant du muscle masséter où passent l'ar- La canule est conseillée dans ces régions, en particulier au
tère et la veine faciales. Une injection rétrotraçante de 0,3 à niveau du pédicule vasculaire situé à la partie médiane de la
0,5 ml sera réalisée. À l'aiguille, il faudra pincer la peau et placer mandibule en arrière de la bajoue et du foramen mentonnier
l'aiguille sur un plan superficiel pour éviter l'artère faciale. située en regard de la 2e prémolaire.

Injection à la canule

Bolus profond sur le rebord mandibulaire


à l'aiguille - 0,2 ml 3 fois

Injection à la canule

Canule ou aiguille
Zone rouge

Fig. 17.10  Traitement de l'ovale du visage à la canule ou à l'aiguille.

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 17. Comblement du tiers inférieur du visage

1 4

1
2 cm 2
2

3
5 4

3 5

Fig. 17.12  Vascularisation du tiers inférieur. Fig. 17.13  Les artères mentonnières.


1. Artères labiales supérieure et inférieure ; 2. Foramen mentonnier ; 3. Artère 1. Artère faciale ; 2. Artère labiale inférieure ; 3. Artère mentonnière (foramen
et veine sous-mentonnières ; 4. Artère faciale ; 5. Artère et veine faciales. mentonnier) ; 4. Artère labiomentonnière ; 5. Artère sous-mentonnière.

Analyse des résultats Exemple 1


Après une explication de la technique « pas à pas » , il Chez cette patiente (fig. 17.16) ayant un trouble de l'occlu-
est impératif de comprendre le phénomène de myo- sion dentaire, le soutien, apporté par le comblement métho-
modulation afin de mieux planifier les gestes. Nous dique des zones de déficience structurelle, lève l'hypertonie
allons, avec des exemples, étudier la « mécanique » du musculaire du mentonnier et entraîne la diminution de la
menton liée aux répercussions sur les fonctions muscu- rétrogénie et l'allongement du menton.
laires du comblement. Il n'y a eu aucun bolus antérieur ou inférieur sur l'émi-
Pour un soutien performant, nous devons adapter le com- nence mentonnière. Les commissures sont également amé-
blement  : il faut effectuer l'« opération de remplissage » liorées. L'avancée du menton améliore la région
méthodique guidée par le manque de structure que nous sous-mentonnière.
chercherons en statique et en dynamique (fig.  17.14 et
17.15).
Exemple 2
Chez l'homme, l'amélioration de la région sous-mentonnière
est intéressante. Ici, aucun bolus antérieur n'a été réalisé
(fig. 17.17).

Exemple 3
Un effet inattendu chez ce patient présentant une
hypertonie majeure du mentonnier est l'apparition
d'un angle cervico-mentonnier. Le déroulement posté-
rieur de l'éminence mentonnière allonge le menton
Fig. 17.14  Recherche des zones de déficience structurelle en statique. (fig. 17.18).
Combler le bas du visage, c'est lui apporter le soutien qu'il a perdu.

Exemple 4
Statique Sourire Baiser La seule injection du sillon labio-mentonnier entraîne, grâce à la
diminution de la rétrogénie qui étire la branche maxillaire, une
belle amélioration de l'ovale. On peut également remarquer chez
cette patiente une jolie valorisation de sa lèvre inférieure
(fig. 17.19).

Fig.  17.15  Recherche des zones de déficience structurelle en


dynamique.

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Chapitre 17. Comblement du tiers inférieur du visage

1 ml

Fig. 17.16  Exemple 1 : comblement du sillon labio-mentonnier.


Amélioration de la rétrogénie.

1,5 ml

Fig. 17.17  Exemple 2 : injection du sillon labio-mentonnier.


La diminution de l'hypertonie du mentonnier réduit la rétrogénie et améliore la région sous-mentonnière.

A B

Fig. 17.18  Exemple 3 : hypertonie du mentonnier améliorée par le traitement du sillon labio-mentonnier et de l'éminence mentonnière.
A. Photo avant. B. Photo après : projection et allongement du mention. Apparition d'un angle cervico-mentonnier (flèche verte). Amélioration des com-
missures sans injection à ce niveau. C. Sillon labio-mentonnier : 2 ml ; bolus antérieur 1 ml ; allongement par bolus 0,5 ml ; 0,5 ml de chaque côté de la saillie
mentonnière.

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Chapitre 17. Comblement du tiers inférieur du visage

Fig. 17.19  Exemple 4 : injection du sillon labio-mentonnier.


Elle entraîne la diminution de la rétrogénie et l'amélioration de l'ovale.

Analyse du résultat de notre patiente


modèle
Ce modèle a bénéficié du comblement du sillon labio-­
mentonnier et de la zone de l'encoche mentonnière. La
­réalisation de bolus antérieur du menton ou le traitement
de la région mandibulaire n'ont pas été nécessaires
(fig. 17.20).
Ainsi, grâce à la levée de l'hypertonie des muscles du bas
du visage, nous assistons chez elle à la cascade des améliora-
tions esthétiques (fig. 17.21) :
■ soutien et valorisation de la bouche qui se relève ;

■ disparition de la rétrogénie et allongement du menton ;

■ amélioration de l'ovale ;

■ diminution de l'hypertonie du masséter qui affine le

visage ;
■ petit effet lift du tiers moyen  : l’équilibre de la balance

musculaire entre les muscles dépresseurs du tiers infé-


rieur et les muscles élévateurs est rétabli. Nous observons
une remise en tension du muscle zygomatique, mais éga-
lement du releveur de la lèvre supérieure et de l’élévateur
de l’aile du nez.

Fig.  17.20  Comblement du sillon labio-mentonnier et de l'encoche


mentonnière.

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Avant Après
A B

C D

E F
Fig. 17.21  Résultat du traitement du sillon labio-mentonnier et de l'encoche mandibulaire : amélioration du tiers inférieur de face (A, B), de trois
quarts (C, D) et de profil (E, F).

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Chapitre 17. Comblement du tiers inférieur du visage

Conclusion Trevidic  P. Anatomy and volumizing injections. In: E2e Medical


Publishing ; 2011.
Vanaman Wilson MJ, Jones IT, Butterwick K, Fabi SG. Role of nonsurgi-
Le comblement du tiers inférieur doit être réfléchi et
cal chin augmentation in full face rejuvenation: A review and our
adapté. Alors que la prise en charge du traitement esthé- experience. Dermatol Surg 2018;44(7):985–93.
tique du visage commence habituellement par le traite- Zide  BM. The mentalis muscle: an essential component of chin and
ment du tiers moyen, celle du tiers inférieur seul permet lower lip position. Plast Reconstr Surg 2000;105:1213–5.
d'obtenir un réel embellissement. Notre stratégie théra-
peutique doit tenir compte du phénomène de
myomodulation.
Pour en savoir plus
Beylot  C. Vieillissement cutané  : prévenir, corriger et rajeunir. Med'com ;
2007.
De Maio  M. Myomodulation with injectable fillers: an innovative
approach to addressing facial muscle movement. Aesth Plast Surg
2018;42(3):798–814.

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)

Chapitre 18
Les lèvres
S. Boivin

Introduction De profil, la lèvre supérieure se projette 3,5 mm en avant de la


ligne de Steiner, la lèvre inférieure de 2,2 mm (fig. 18.1) [2–4].
Les lèvres constituent l'élément central du tiers inférieur du Ces lèvres parfaites vont vieillir et être particulièrement sen-
visage. Symbole de jeunesse et de sensualité, elles sont sibles aux facteurs d'environnement (tabac et soleil) (enca-
aussi le vecteur de toutes nos émotions. Poussée par la dré 18.1) [4, 5].
génération des millénials et leur quête d'attractivité, la pro- Une bonne connaissance anatomique est indispensable à
cédure d'injection des lèvres est devenue très populaire. l'obtention d'un résultat naturel, en statique comme en
Comment définir de belles lèvres ? Elles sont bien dessi- dynamique et en toute sécurité.
nées, bien ourlées et pulpeuses. Si la perception de la
beauté est influencée par des facteurs démographiques,
certains standards ont été établis. Ces repères objectifs Anatomie
mais surtout la notion de ratios et de proportions harmo-
nieuses demeurent le fondement d'une évaluation esthé- La lèvre a une composition particulière  : cutanéomu-
tique. L'erreur serait de se focaliser sur la taille ou le volume queuse en quatre couches (peau, couche musculaire,
des lèvres et d'en négliger l'harmonie avec le reste du visage. sous-muqueuse et muqueuse). La lèvre blanche a une
À nous médecins de rester vigilants face aux demandes structure identique à la peau (avec follicules pileux,
irréalistes de certain(e)s patient(e)s et de mettre en balance glandes sébacées ou sudoripares). La lèvre rouge humide
le désir et la réalité clinique de ce que l'on peut obtenir. est une muqueuse richement vascularisée, très sensible,
De face, le visage peut être divisé horizontalement en trois tiers dépourvue de glande (hormis les glandes salivaires). À la
équivalents. Le tiers inférieur, qui s'étend de la base du nez au jonction des deux, la lèvre rouge sèche (qui correspond au
menton, peut lui-même être divisé en trois autres tiers. Le golden vermillon) a une couleur rouge liée à la finesse de
ratio de la hauteur du vermillon lèvre supérieure/lèvre inférieure l'épithélium qui permet la visibilité des vaisseaux par
­
est établi à 1/1,6 pour les Caucasiens (1/1 pour les Africains ou transparence.
Asiatiques) [1]. Les commissures tombent à l'aplomb d'une ver- Les lèvres présentent différentes unités anatomiques cli-
ticale passant par le bord interne des pupilles (fig. 18.1). niques (fig. 18.3) [3, 6].

1/3

1/3
3,0 mm

1,2 mm
1/3 1
1,0
1/3
2/3

Fig. 18.1  Proportions harmonieuses des lèvres.


Source : S. Boivin.

Dermatologie esthétique
© 2020, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 18. Les lèvres

Encadré 18.1 sion labiale. Il est divisé en deux parties : interne, le pars labia-
lis qui sert au pincement des lèvres, et externe, le pars
Analyse séméiologique du vieillissement marginalis en périphérie qui sert à la projection antérieure
des lèvres des lèvres. Il forme avec la peau sus-jacente un couple très
étroit, ce qui explique sa responsabilité dans les rides radiaires
■ Lèvre blanche (fig. 18.2A) :
labiales ;
● Allongement (relâchement et perte de support
■ latéralement : on retrouve les muscles du modiolus, point
ostéodentaire)
mobile où s'intriquent six chefs musculaires, qui agissent
● Ridules ± profondes (« code barre ») dynamiques puis
sur la position des commissures (fig. 18.4A).
statiques (couple peau/muscle orbiculaire)
● Aplatissement des crêtes philtrales

■ Lèvre rouge (fig. 18.2B) :


● Perte de la définition de l'ourlet

● Aplatissement de l'arc de Cupidon

● Perte de volume, de couleur et d'hydratation

du vermillon 7
6
● Perte de l'éversion

● Chute des commissures


5
1
4

3 2

Fig. 18.2  A. Lèvre jeune. B. Lèvre vieillie.


Source : S. Boivin. 1
2

Crétes philtrales Arc de cupidon


Philtrum
3
GK
Vermillon 4

Commissures

Tubercules
Ourlet
B
Fig. 18.3  Unités anatomiques cliniques des lèvres.
Source : S. Boivin. Fig. 18.4  A. Muscles des lèvres. B. Vascularisation des lèvres.
A = 1. M. orbiculaire des lèvres ; 2. M. abaisseur de la lèvre inférieure ; 3. M.
Sur le plan musculaire, les muscles suivants participent à abaisseur de l'angle de la bouche ; 4. M. risorius ; 5. M. grand zygomatique ;
6. M. petit zygomatique ; 7. M. élévateur de la lèvre supérieure et de l'aile du
l'activité musculaire de la bouche : nez ; 8. M. carré du menton. B = 1. Branche cutanée de l'artère labiale supé-
■ un muscle médian  : le muscle orbiculaire des lèvres, situé rieure ; 2. Branche muqueuse de l'artère labiale supérieure ; 3. Branche ver-
dans l'épaisseur des lèvres et qui forme un sphincter d'occlu- millon de l'artère labiale supérieure ; 4. Artère labiale supérieure.

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 18. Les lèvres

La vascularisation est assurée par les artères labiales supé- Encadré 18.2
rieures et inférieures qui naissent de l'artère faciale en regard
de la commissure des lèvres (à 1–2 cm) et cheminent dans Étapes du traitement des lèvres
l'épaisseur des lèvres, entre muscle orbiculaire et muqueuse, ■ Définition des contours et de la structure :
pour s'anastomoser avec leurs homologues controlatérales ● Correction de l'ourlet
et former un cercle artériel complet autour de l'orifice buc- ● Définition des crêtes philtrales
cal. L'artère labiale supérieure donne des collatérales pour le ● Traitement des ridules de la lèvre blanche
nez (septum et ailes) [4]. Il faudra se méfier des nombreuses ● Position des commissures
variations anatomiques possibles (fig. 18.4B). ■ Traitement du vermillon :
L'innervation des lèvres est apportée sur le plan sensitif par ● Projection/éversion
le nerf infra-orbitaire (branche du V2) pour la lèvre ­supérieure ● Volume
et le nerf mentonnier (branche du V3) pour la lèvre ­inférieure.
L'innervation motrice est assurée par la branche buccale du
nerf facial [3, 5]. cielle, sous-dermique. On peut pincer la zone avec la main
La demande de prise en charge des lèvres peut couvrir controlatérale pour guider l'injection. L'injection se fait sur
deux catégories : la demande de réjuvénation pour corriger toute la hauteur (descendre la lèvre blanche dans le cadre
certains stigmates du vieillissement ou la demande de d'un sourire gingival) ou une partie (deux tiers inférieurs)
« beautification » pour corriger une anomalie morpholo- de sa hauteur (accentuer la concavité de la lèvre blanche
gique ou augmenter le volume d'une lèvre « normale ». et l'éversion de la lèvre rouge).
Avant d'établir le plan de traitement, une analyse séméio- ■ Le traitement des ridules de la lèvre blanche peut se faire
logique des lèvres est indispensable. Elle se fera de face et de par nappage léger à la canule avec un produit peu réticulé,
profil, en statique et en dynamique (sourire et bisou). sur toute la largeur et la hauteur de la lèvre blanche. L'effet
Elle déterminera les caractéristiques de la lèvre blanche et associé de dissection des adhérences (plan de clivage) et
de la lèvre rouge, relèvera une asymétrie préexistante. Cette de stimulation fibroblastique est intéressant. Le traitement
analyse sera étendue aux autres éléments du sourire : les dents peut être réalisé à l'aiguille : par rétrotraçantes dans l'axe
(couleur, position, existence d'une rétrognathie ou d'une des rides, à partir du vermillon ou par de multiples injec-
malocclusion), la gencive (le positionnement du vermillon au tions, très superficielles, perpendiculaires à l'axe des rides.
sourire par rapport à la ligne gingivale pour la lèvre supérieure Les traitements par canule ou aiguille peuvent être asso-
et la ligne inférieure des incisives supérieures pour la lèvre infé- ciés dans le cas de rides profondes.
rieure), le vieillissement péri-oral et du tiers inférieur en géné- ■ L'horizontalisation des commissures passe par une injec-
ral (plis d'amertume, menton, ligne mandibulaire) [6]. tion rétrotraçante superficielle à l'aiguille le long du bord
inférieur de la commissure. Le traitement doit ici s'associer
à la prise en charge du tiers inférieur (plis d'amertume et
Traitement menton) [5, 7].

Le traitement global des lèvres passe par différentes étapes. Traitement du vermillon
Chaque patient(e) n'aura pas besoin systématiquement de
chacune d'entre elles ; le plan de traitement découlera de Le traitement du vermillon peut répondre à plusieurs objec-
l'analyse initiale, de l'amélioration subtile à la restructuration tifs : hydratation, éversion, volumisation et projection. C'est
totale [2, 3, 6]. le plan d'injection qui va influer sur l'effet obtenu (voir
fig. 18.5). L'éversion et l'hydratation seront traitées par une
injection du vermillon, en position sous-muqueuse, en avant
Traitement des contours du muscle orbiculaire, à la canule par un point d'entrée
(encadré 18.2 et fig. 18.5 à 18.7) rétrocommissural, en 1 ou 2 lignes d'injections rétrotraçantes
■ La correction de l'ourlet peut se faire à l'aiguille ou à la parallèles, parallèles à l'ourlet, en commençant par la lèvre
canule, par injection dans le canal virtuel à la jonction supérieure. L'injection est douce et régulière, pas forcément
lèvre blanche-lèvre rouge sur tout le contour des lèvres. sur toute la longueur des lèvres (« effet saucisse »), non uni-
L'injection est rétro-traçante, douce, régulière, parallèle à forme, en respectant les volumes naturels de la lèvre
l'axe de la lèvre, en maintenant la lèvre en tension entre les (3 tubercules de la lèvre supérieure et 2 tubercules de la lèvre
doigts de la main libre. inférieure).
■ La restauration de l'arc de Cupidon se fait à l'aiguille, à Il faut veiller, en dehors de toute asymétrie préexistante, à
partir des points de Glogau-Klein par deux courtes injecter la même quantité dans chaque hémilèvre à l'aiguille :
rétrotraçantes. ■ soit par voie transmuqueuse  : très traumatisant pour la

■ La définition des crêtes philtrales se fait à l'aiguille, en muqueuse (œdème et ecchymose prolongés avec résorp-
entrant par les points de Glogau-Klein, en s'orientant vers tion accélérée de l'implant) et avec un risque de distor-
le bord interne de l'orifice narinaire (philtrum = forme de sions ; point d'entrée dans le vermillon, avec angle de 30°,
« V » inversé) ; l'injection est rétro-traçante, très superfi- injection linéaire ou de petits bolus [5, 7] ;

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Chapitre 18. Les lèvres

Fig. 18.5  Plan d'injection éversion/projection.

Fig. 18.6  Traitement des lèvres.


A. Ourlet. B. Éversion. C. Commissures. D. Crêtes philtrales.
Source : C. Raimbault.

■ soit par voie percutanée  : 3  points d'injection par quadrant, à la canule par le même point d'entrée rétrocommissural
entrée au niveau cutané, 2 mm au-dessus de l'ourlet pour la ou à l'aiguille dirigée en profondeur et perpendiculaire au
lèvre supérieure et 2 mm en dessous pour la lèvre inférieure ; bord libre du vermillon. Le dépôt des bolus est apprécié
injection de petits bolus dans le vermillon pour éversion et par la palpation avec l'index de la main controlatérale.
hydratation. Injecter superficiellement, en particulier au niveau
médian pour éviter l'artère labiale ou ses collatérales [5, 7]. Encadrement du geste
Volume et projection L'encadrement du geste nécessite peu d'éléments.
Le volume et la projection sont traités par une injection
profonde sous-musculaire, à la jonction muqueuse Avant le geste
humide-muqueuse sèche pour chercher l'appui ostéoden- Il faut s'assurer de la signature du consentement, prendre des
taire. Cela est réalisé par une injection douce rétrotraçante photographies, signaler une éventuelle asymétrie, prévenir

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Chapitre 18. Les lèvres

Fig. 18.7  Avant/après traitement.


Source : S. Boivin.

du risque d'œdème et d'ecchymoses, prescrire une Complications


­prévention antivirale en cas d'antécédent d'herpès, avoir de
la hyaluronidase à disposition au cabinet. Les complications sont généralement modérées et toujours
L'anesthésie peut être réalisée par un bloc nécessitant transitoires : érythème, œdème assez fréquent et hématome
deux voies d'abord (infra-orbitaire pour la lèvre supérieure (fréquence réduite par l'utilisation de la canule) ; asymétrie,
et mentonnier pour la lèvre inférieure). L'utilisation facilement corrigée par une réinjection ; des irrégularités
de packs de froid avant, pendant et après le geste améliore améliorées au massage, une récurrence herpétique. Plus
­
le confort du patient. L'association d'un anesthé- exceptionnellement, une ischémie par embole vasculaire peut
sique  topique 20 à 60  minutes avant l'injection et la se produire. Là encore, l'utilisation de la canule limite les
­présence de xylocaïne dans la plupart des acides hyaluro- risques et une bonne connaissance de la vascularisation locale
niques injectés permettent le plus souvent d'éviter une (et en particulier de la lèvre supérieure) est indispensable.
anesthésie locale et la distorsion associée. À noter l'intérêt
de nouveaux dispositifs de vibration qui, par saturation
des récepteurs sensitifs locaux, réduisent la douleur à l'in- Erreurs à éviter
jection [8].
Une bonne connaissance des qualités rhéologiques du pro- Certaines erreurs sont à éviter qui permettraient d'identifier
duit injecté est fondamentale pour obtenir l'effet souhaité. au premier coup d'œil une lèvre injectée : le non-respect des
La lèvre rouge est soumise à de fortes contraintes de proportions lèvre supérieure-lèvre inférieure [10], une perte
compression et d'étirement, mais de faibles forces de d'harmonie avec le reste du visage, une surinjection des
cisaillement. Le produit doit permettre une bonne projec- bords latéraux des lèvres, une injection uniforme de toute la
tion, avoir une excellente mobilité en dynamique, et une longueur des lèvres sans respecter les courbes et volumes
bonne intégration tissulaire. Le choix se portera vers un naturels des lèvres (« sausage lips »), une surcorrection de
produit avec une bonne cohésivité et un G' modéré à l'ourlet (bouche de canard) ou une surprojection antérieure
moyen. (effet tapir).
La lèvre blanche subit peu de contraintes mécaniques. Le
produit doit être malléable, avoir un bon étalement et être
invisible en statique comme en dynamique. Le choix se Conclusion
porte sur un produit avec une cohésivité faible et un G′
L'obtention d'un joli résultat, naturel et sécuritaire, nécessite
faible [9].
la combinaison d'une bonne connaissance anatomique des
lèvres et du tiers inférieur du visage, d'une compétence tech-
Après le geste nique par la maîtrise de l'injection (bon plan, bonne dose) et
Un massage doux est réalisé en fin d'injection, permettant d'une compétence pharmacologique permettant le bon
de lisser et d'uniformiser les petites irrégularités [3]. choix de produit. Néanmoins, chaque lèvre est différente et

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 18. Les lèvres

il n'existe pas de formule magique unique. Si le sens esthé- hyaluronic acid fillers: focus on the lower face. Plast Reconstr Surg
tique et artistique du médecin prend ici tout son sens, 2017;140(3):393e–404e.
[6] Surek CC, Guisantes E, Schnarr K, et al. “No-touch” technique for
l'adage « less is more » est ici plus qu'ailleurs fondamental.
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Section 4. Les produits de comblement (fillers)

Chapitre 19
Rhinoplastie médicale
C. Raimbault

Introduction
Le nez est un élément essentiel et central de l'esthétique du
1
visage. Sa forme idéale dépend de considérations anthropo-
métriques, mais aussi de préférences individuelles, de facteurs 2
psychosociaux, ethniques ou de genre [1, 2]. Le vieillissement 3
modifie la forme du nez avec un affaissement de la pointe,
une aggravation des bosses nasales, une diminution voire une 4
augmentation de sa largeur dans certains cas. L'injection de 5
produits de comblement est une bonne alternative à la rhi- 3
noplastie chirurgicale. Elle est limitée à la correction des
défauts visibles, surtout de profil, comme le relèvement de la
pointe du nez, l'effacement des bosses du dos du nez, et plus
rarement des défauts visibles de face, comme une légère
Fig.  19.1  Pyramide nasale constituée par un squelette osseux dans sa
déviation de l'arête nasale ou la diminution de la largeur des partie supérieure et cartilagineux dans sa partie inférieure.
ailes du nez [3]. De nombreuses publications asiatiques men- La cloison nasale médiane sépare les deux fosses nasales. 1. Os propre du
tionnent la possibilité d'une augmentation nasale dorsale nez ; 2. Cartilage triangulaire ; 3. Septum ; 4. Cartilage alaire ; 5. Petits
voire de la hauteur totale, en incluant une rotation cépha- ­cartilages alaires.
lique de la pointe du nez, afin de répondre aux critères esthé-
tiques caucasiens. Ils publient aussi le plus grand nombre
d'accidents vasculaires dans cette zone [4].

Anatomie
La pyramide nasale est une structure tridimensionnelle, située
1
dans le tiers moyen, en dessous du front, au centre du visage.
Elle a un squelette osseux dans sa partie supérieure avec les os
propres du nez et cartilagineux dans sa partie inférieure. Cette 2
tente ostéocartilagineuse est soutenue par la cloison nasale
médiane qui sépare les deux fosses nasales (fig. 19.1).
Son apparence est définie par les structures rigides, mais
3
aussi par les tissus mous qui la recouvrent.
4
Terminologie
De profil, le nez comprend, de haut en bas, la partie infé-
rieure de la glabelle, le radix qui correspond à la racine du
nez ou nasion, le rhinion à la jonction des os propres du nez
aux cartilages, le supratip, la pointe du nez et l'épine nasale à 5
la jonction nez-lèvre (fig. 19.2).
Il y a quatre couches successives entre les os ou cartilages
et la peau :
■ le périoste ou périchondrium ; Fig. 19.2  Terminologie, de haut en bas.
■ la graisse profonde ;
Le nasion ou radix (1) correspond à la racine du nez ; le rhinion (2) est à la
jonction entre les os propres du nez et les cartilages ; la pointe du nez (3) ;
■ la couche fibromusculaire (système musculo-aponévrotique
l'épine nasale (4) à la jonction nez-lèvre ; le pogonion (5), point antérieur
superficiel [SMAS]) ; du menton.
■ la graisse superficielle. Source : C. Raimbault.

Dermatologie esthétique
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Chapitre 19. Rhinoplastie médicale

La peau est épaisse à la racine du nez (radix ou nasion), à la l'artère nasale dorsale pour sa partie supérieure, avec un
pointe du nez. Elle est plus fine à sa partie médiane au niveau risque de nécrose glabellaire.
du rhinion. Il existe de nombreuses petites artères et plusieurs anasto-
La zone de sécurité pour les injections est profonde, suprapé- moses dans la région nasale dont le flux peut facilement être
riostée ou suprapérichondriale car les nombreux vaisseaux inversé par des injections de filler réalisées sous pression. Les
sont situés dans le SMAS ou dans la graisse superficielle. emboles empruntent de façon rétrograde les artères nasales
dorsales, supratrochléaires ou supra-orbitaires vers l'artère
Vascularisation (fig. 19.3) ophtalmique, puis il y a un flux antérograde vers l'artère cen-
Les vaisseaux de la face sont issus de la carotide externe à trale de la rétine avec un risque de cécité (fig. 19.4). Le traite-
l'exception de la région faciale centrale qui englobe la partie ment par hyaluronidase est indispensable : son injection dans
supérieure du nez, l'œil et la zone centrale du front qui la zone rétrobulbaire doit être effectuée avant 90  minutes.
dépendent de la carotide interne. L'artère ophtalmique issue Des cas d'embolisation jusqu'à la carotide interne avec acci-
de la carotide interne se ramifie en vaisseaux supra-orbitaire, dent vasculaire cérébral ont aussi été décrits lors de l'injection
supratrochléaire, nasal dorsal et lacrymal. de produit de comblement dans cette zone.
L'artère faciale issue de la carotide externe passe devant le
muscle masséter et suit un trajet tortueux et oblique vers
l'angle interne de l'œil [5]. Elle donne naissance aux artères
labiales inférieure et supérieure avec la branche columellaire,
puis à l'artère nasale latérale qui alimente la partie latérale du
nez. L'artère faciale prend le nom d'artère angulaire à partir
du sillon naso-génien. Elle s'anastomose avec l'artère nasale
dorsale reliant les systèmes carotidiens internes et externes.
L'artère nasale dorsale est située environ 5 mm au-dessus de
la ligne horizontale canthale médiane. Il y a de nombreuses
variations anatomiques. Les principales artères nasales à
risque de complication sont l'artère nasale latérale qui vas-
cularise la pointe du nez, avec un risque de nécrose alaire, et 1
2
3

7 8

6 6

5
4

6
3
4

1
5

Fig. 19.3  La vascularisation du nez dépend de la carotide externe et de Fig. 19.4  Un embole de produit de comblement injecté sous pression dans
sa branche, l'artère faciale, à l'exception de la région faciale centrale l'artère supra-orbitaire, supratrochléaire, nasale dorsale ou leurs anasto-
comprenant la partie supérieure du nez, l'œil et la zone centrale du moses peut atteindre de façon rétrograde l'artère centrale de la rétine.
front qui dépendent de la carotide interne. Le flux devient alors antérograde, à l'origine d'une cécité. Des cas d'accident
1. Artère faciale. 2. Artère labiale inférieure. 3. Artère labiale supérieure + vasculaire ont aussi été décrits si l'embole atteint la carotide interne. Le sens des
columellaire. 4. Artère angulaire. 5. Artère nasale latérale. 6. Artère nasale flèches indique le cheminement à contre-courant de l'embole vasculaire.
dorsale. 7. Artère supratrochléaire. 8. Artère supra-orbitaire. 1. Artère nasale dorsale ; 2. Artère supra-trochléaire ; 3. Artère supra-orbitaire ;
Source : C. Raimbault. 4. Artère ophtalmique ; 5. Artère carotide interne ; 6. Artère rétinienne centrale.

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Chapitre 19. Rhinoplastie médicale

H 115 à 135º

F 120 à 125º
180º

90 à 95º

A B C
Fig. 19.5  Proportions esthétiques des angles entre le front, le nez, la lèvre et le menton.
A. L'angle nasal dorsal est plat. B. L'angle nasofrontal mesure entre 115 et 135° pour les hommes et 120 et 125° pour les femmes. C. L'angle nasolabial
mesure 90 à 95°. La profilométrie apprécie également ces angles par rapport à la projection du menton.
Source : C. Raimbault.

Mesures anthropométriques
Chez les Caucasiens, les angles entre le nez, le front et la lèvre
supérieure doivent correspondre à certains degrés pour être 60°
esthétiques (fig.  19.5)  : l'angle nasal dorsal mesure 180° en
l'absence de bosses nasales ; l'angle nasofrontal idéal mesure
entre 115 et 135° pour les hommes et 120 à 125° pour les
femmes. Plus cet angle est grand ou ouvert, plus le nez est
long et la pointe basse [7]. L'angle nasolabial mesure entre 90
et 95° pour les hommes et 95 et 110° pour les femmes. La
largeur de la base du nez idéale est égale à la distance entre Lobule
les canthus internes des yeux, mais des variations ethniques
importantes existent avec des ailes narinaires plus larges ou
plus étroites (fig. 19.6). La pointe du nez doit être haute et
projetée, le dos du nez rectiligne sans bosse nasale. Columelle
L'examen de face évalue la rectitude et la symétrie du nez,
la présence d'une éventuelle déviation, la largeur osseuse ou Fig. 19.6  La largeur de la base du nez idéale est égale à la distance entre
les canthus internes des yeux, mais des variations ethniques impor-
cartilagineuse du dos du nez, la largeur de la pointe et la visi-
tantes existent avec des ailes narinaires plus larges ou plus étroites (cau-
bilité de la columelle. Il est important d'interroger le patient casiens : 60 ° ; asiatiques : 90° ; noirs : 120°).
sur ses antécédents chirurgicaux et de repérer d'éventuelles Source : C. Raimbault.
cicatrices car le risque d'accident vasculaire est nettement
augmenté en raison des modifications anatomiques induites. L'injection est réalisée à la canule ou à l'aiguille, mais dans
ce cas avec un risque majoré d'embole vasculaire.
Technique d'injection Injection à la canule
■ Relèvement de la pointe du nez : le prétrou est situé au
Préparation centre de la pointe du nez. (Il est idéalement situé au
L'injection est douloureuse ; il est donc indiqué d'appliquer niveau de la partie cutanée mobilisable juste devant les
un anesthésique de contact plutôt que de réaliser un bloc cartilages.) Injection de la colonne nasale antérieure : on
qui masquerait la douleur aiguë, symptôme essentiel et pré- préférera une canule d'au moins 25 G voire 22 G que l'on
coce d'embolisation vasculaire. dirige vers le maxillaire pour atteindre la partie inférieure
de la columelle où un bolus suprapériosté est délivré ; il
est suivi d'une injection rétrotraçante vers la pointe. Il
Plan de traitement faut éviter de délivrer l'injection entre les cartilages de la
Il est possible de commencer par le dos du nez ou par la rota- cloison antérieure ou dans les branches artérielles ou vei-
tion céphalique de la pointe du nez. neuses columellaires de l'artère labiale supérieure.

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■ Injection du dos du nez : la canule introduite par le même ■ Modification de la position de la pointe du nez : la pointe
point d'entrée est dirigée vers le radix, où un petit bolus du nez est parfois courbe ou mal dessinée, trop basse voire
est déposé. Une injection rétro-traçante est ensuite réali- fuyante. Il est possible de la redessiner de deux façons
sée de part et d'autre de la bosse nasale, le long du dos du complémentaires :
nez. L'injection doit rester strictement médiane (fig. 19.7). ● injection par abord latéral dans le derme profond sur

Un pansement transparent stérile sera appliqué pendant toute la largeur de la pointe du nez, selon le point
24 heures pour protéger et maintenir le remodelage. choisi pour la nouvelle position de la pointe
(fig. 19.9) ;

Fig.  19.7 Introduction de la canule à partir d'un point d'entrée situé au


centre de la pointe du nez, en direction du radix où un petit bolus est déposé.
Une injection rétrotraçante dépose le filler de part et d'autre de la bosse
nasale le long du dos du nez. Le point d'entrée de la canule est idéalement
situé à la jonction entre la partie fixe et mobile de la pointe du nez.
Injection à l'aiguille
■ Relèvement de la pointe du nez avec ouverture de l'angle
nasolabial par injection de l'épine nasale (fig.  19.8)  : l'ai-
guille de 27 à 30 G est introduite profondément avec un
angle de 45° à la base de la columelle entre les parties
médianes des cartilages alaires jusqu'au maxillaire. Injecter
un bolus suprapériosté d'acide hyaluronique (AH) au G′
élevé. Pincer la peau pendant l'injection, aspirer avant l'in-
jection et injecter très lentement à basse pression, en res-
tant profond et dans la ligne médiane.
B
Fig. 19.9  A. Modification de la position de la pointe du nez si la pointe
est mal dessinée ou courbe. Choisir à l'aide d'une vue de profil une nou-
velle position de la pointe. L'injection par abord latéral doit rester
superficielle, strictement intradermique en raison du risque vasculaire.
Bien surveiller la couleur de la peau lors de l'injection. B. Ici, le blanchi-
ment est lié à la tension cutanée.
Source : C. Raimbault.

● insertion verticale de l'aiguille à partir de l'apex


choisi. Introduire l'aiguille jusqu'au périchondre,
aspiration et injection d'un bolus suffisant pour rele-
Fig. 19.8  Relèvement de la pointe du nez.
ver la pointe. L'injection doit être lente et prudente
L'aiguille est introduite à l'épine nasale avec un angle de 45° jusqu'au maxil- car la tension cutanée est forte avec un risque d'ex-
laire. Injecter lentement un bolus suprapériosté d'acide hyaluronique trusion de l'AH. Il faut se limiter à 1 ou 2 points d'in-
volumateur. jection (fig. 19.10).
Source : C. Raimbault.

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Fig. 19.12  Injection du dos du nez en avant d'une bosse nasale.


Introduire l'aiguille jusqu'au périoste ou périchondre. Injecter de petits bolus
en restant médian et masser délicatement pour une répartition régulière. La
peau est très fine au niveau du rhinion, les quantités injectées sont minimes.
Fig. 19.10  Relèvement de la pointe du nez par injection profonde d'un Source : C. Raimbault.
bolus à l'aiguille au niveau du périchondre.
L'injection est lente et prudente avec un risque d'extrusion de l'acide hyaluronique
liée à la tension cutanée dans cette zone. Se limiter à 1 ou 2 points d'injection.
■ Comblement des déficits des bords latéraux pour une amé-
Source : C. Raimbault.
lioration de face (fig. 19.13) : il doit être prudent car les artères
nasales dorsales sont situées à une distance de 2 à 3 mm de
la ligne médiane. L'aiguille est introduite en position juxta-
médiale jusqu'à l'os ou le cartilage ; un petit bolus est injecté
et peut être massé vers le bas pour combler le déficit.

Fig. 19.11  Injection d'un bolus à la racine du nez. Introduire l'aiguille


avec un angle de 45° jusqu'au périoste.
Injecter un bolus strictement sur la ligne médiane en protégeant avec le
pouce et l'index pour éviter toute diffusion latérale du filler.
Source : C. Raimbault.

■ Traitement du dos du nez : il convient de commencer par le radix


pour réduire la profondeur de la concavité dorsale (fig.  19.11).
L'aiguille est introduite avec un angle de 45° profondément, dans Fig. 19.13  Correction des creux latéraux sur une vue de face.
la ligne médiane ; aspirer, injecter lentement un bolus contre l'os en Attention aux artères nasales qui sont situées à 2 à 3  mm de la ligne
pinçant le nez entre le pouce et l'index pour éviter toute diffusion médiane. Un bolus en position juxtamédiale peut être massé vers le bas
latérale du filler. Stopper l'injection avant de retirer l'aiguille. Masser pour combler le déficit.
Source : C. Raimbault.
délicatement pour une répartition homogène. Cette injection
permet d'ouvrir l'angle nasofrontal et de donner souvent l'illusion
d'un nez plus court. Le risque d'embole vasculaire est majeur dans Recommandations
cette zone : rester attentif à la couleur de la peau durant toute la
procédure. Traiter la pointe du nez si nécessaire, puis continuer le Pendant toute la procédure, il faut évaluer la couleur de la
comblement le long de l'arête du nez en avant et en arrière de la peau et la douleur pour repérer tout signe précoce d'embo-
bosse nasale sur la ligne médiane. La peau est très fine au niveau du lisation. Le patient doit éviter de porter des lunettes pendant
rhinion ; les quantités injectées sont minimes (fig. 19.12). Il faut quelques heures.
rester strictement médian. L'injection peut se faire point par point Le traitement de la pointe du nez doit être précédé d'une
par petits bolus suivis d'un massage, ou être rétro-traçante. injection de toxine lorsqu'elle s'abaisse lors du sourire.

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Après une rhinoplastie chirurgicale, la modification de la Complications en dehors


position des artères et la tension des tissus rendent la procé-
dure beaucoup plus difficile, avec un risque nettement
de la nécrose
accentué d'accident vasculaire. En raison de la riche vascularisation de cette zone, il y a un
risque élevé d'ecchymoses. Une sensation de tension doulou-
reuse pendant quelques jours est habituelle. Les œdèmes sont
Rhéologie liés à l'hydrophilie de l'AH. Une asymétrie, une surcorrection
L'AH doit avoir un G′ élevé pour résister à la déformation liée ou des irrégularités peuvent être visibles, surtout si la peau est
à la tension des tissus du nez, ainsi qu'une viscosité élevée fine ou en cas d'antécédent chirurgical. Un effet Tyndall peut
pour être facilement modelé ou sculpté, mais il doit pouvoir survenir si l'injection est superficielle ou si le produit migre en
être injecté au mieux avec une aiguille de 30 G. Il faut faire surface. Une migration du filler vers le front a aussi été décrite
attention à son hydrophilie pour éviter toute surcorrection. lorsque les quantités injectées sont importantes [9].
Un AH volumateur peut être injecté à l'aiguille 27  G au Mais ce sont aussi les complications psychologiques qu'il
niveau de l'épine nasale ou de l'angle nasofrontal. faut redouter, car les déformations du nez sont à l'origine de
Les volumes utilisés sont faibles, de 0,3 ml à 1 ml, lors du complexes ancrés depuis de nombreuses années et la modi-
relèvement de la pointe du nez. Ils peuvent être plus impor- fication de l'apparence, si elle ne correspond pas aux attentes
tants par exemple lors d'une augmentation de la hauteur du du patient, peut être mal vécue.
nez, demande fréquente chez les Asiatiques. Les traitements
peuvent être répétés, mais souvent l'amélioration persiste Conclusion
longtemps, avec une diminution des quantités au fur et à
mesure des traitements, sauf si le patient a tendance à abais- Les injections du nez sont réservées aux injecteurs expéri-
ser sa pointe du nez. mentés ayant un bon sens esthétique. De légères modifica-
L'hydroxyapatite de calcium peut aussi être utilisé. L'in- tions peuvent entraîner une amélioration esthétique notable
convénient est l'absence d'antidote en cas d'embole vas­ (fig. 19.14 et 19.15). Les risques vasculaires sont importants et
culaire [8]. nécessitent une grande vigilance durant toute la procédure.

A B
Fig. 19.14  A. Pointe du nez courbe. B. Modification de la position de la pointe du nez et traitement du radix.
Source : C. Raimbault.

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A B
Fig. 19.15  A. Bosse nasale. B. Injection du radix, de la pointe du nez et du dos du nez.
Source : C. Raimbault.

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Chapitre 20
Myomodulation
C. Raimbault

Le concept de myomodulation Si l'on rétablit la convexité musculaire par un bolus de filler


sous le muscle élévateur, on rétablit son levier et sa force et
En esthétique, on oppose la toxine botulique, qui diminue la on rééquilibre la balance musculaire (fig. 20.1).
force musculaire et les rides dynamiques, aux produits de Par opposition, un bolus au-dessus du muscle diminue sa
comblement, qui comblent les rides statiques et restaurent force (fig. 20.2).
les volumes. Cependant, tous les praticiens ont eu l'occasion
d'observer chez certains patients traités uniquement par Élévateur Masse graisseuse
produit de comblement une modification de l'activité mus-
Bolus de produit
culaire avec diminution ou restauration de la force des mus-
cles faciaux. Peau
Point d'ancrage

De Maio a tenté d'expliquer ces phénomènes en dévelop-


pant le concept innovant de myomodulation [1]. Celle-ci
résulte de l'observation à long terme de patients présentant
des déficits structurels congénitaux ou acquis, traités uni-
quement par produits de comblement, et suggère qu'ils Abaisseur

peuvent être utilisés pour moduler l'action musculaire et Sujet jeune Sujet âgé Filler sous
rétablir les balances entre les muscles abaisseurs et les E>A A>E l'élévateur
Balance E/A rétablie
élévateurs.
Fig. 20.1  Balance musculaire élévateur-abaisseur.
Les muscles mimétiques faciaux sont des muscles peau- Lors du vieillissement, l'étirement du muscle modifie son point d'ancrage
ciers sans tendon, sauf pour les muscles sphinctériens. Ils ont qui est abaissé, il perd sa force. Un bolus de produit sous le muscle lui
des propriétés biomécaniques qui dépendent de plusieurs redonne une forme convexe et le raccourcit. Son point d'ancrage est
facteurs : remonté et il retrouve une fonction plus performante.
Source : d'après M. De Maio.
■ la relation longueur-tension  : la composante contractile

représente la tension active. Lorsqu'un muscle est étiré, il


perd sa force. La composante élastique ou tension passive Élévateur
dépend de l'élasticité cutanée et tendineuse associée : le
muscle perd sa capacité à reprendre sa forme au repos Produit de
après contraction si la peau est distendue ; comblement
■ système de poulies et leviers : la restauration d'un levier à Muscle
l'aide d'un bolus de filler sous le muscle lui permet de
retrouver sa capacité contractile ;
■ action antagoniste des groupes musculaires élévateurs/

abaisseurs.
La dynamique faciale est conditionnée par l'équilibre entre
ces muscles, qui dépend de la qualité des supports osseux, Abaisseur
adipeux et cutanés.
Filler sous Filler sur
Si la structure faciale est normale et jeune, les fibres mus-
le muscle le muscle
culaires sont convexes et la contraction puissante des éléva-
Fig. 20.2  La répercussion sur l'activité du muscle est différente en fonc-
teurs et en équilibre avec celle des dépresseurs. tion du positionnement du filler qui peut être placé sur ou sous le
Lors du vieillissement, ou s'il existe une anomalie structu- muscle.
relle, la perte de volume osseux, graisseux et l'affaissement
de la peau entraînent une perte de convexité musculaire et ■ sous le muscle : augmentation de l'activité musculaire par
un étirement des muscles peauciers élévateurs qui perdent apport de support sous-jacent ;
leur force. Il en résulte une augmentation compensatrice de ■ sur le muscle : diminution de l'activité musculaire par créa-

la force des abaisseurs. tion d'un obstacle mécanique (voir fig. 20.2).

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 20. Myomodulation

Association produit ■ les produits de comblement :


reconstituent les volumes et corrigent une carence
de comblement-toxine botulique ●

structurelle ou acquise ;
● interviendraient par myomodulation pour rétablir la
L'association produit de comblement-toxine serait donc
intéressante et complémentaire : force musculaire ou la bloquer et ainsi rétablir la balance
■ la toxine botulique :
entre les élévateurs et les abaisseurs, mais de façon plus
● diminue l'activité musculaire, mais ne peut pas l'aug-
modérée qu'avec la toxine.
menter ; Ces deux traitements sont complémentaires mais néces-
● ne corrige pas les déficits structurels congénitaux ou acquis ;
sitent une bonne analyse de la dynamique faciale.
● rétablit la balance musculaire en diminuant fortement
Deux exemples cliniques sont fournis aux figures 20.3 et
l'activité des muscles dépresseurs pour une durée de 4 à 20.4.
6 mois.

Fig. 20.3  Le nappage du front à la canule lève l'hypertonie musculaire du muscle frontal et donne un effet « botox-like ».
Source : M.-P. Loustalan.

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Chapitre 20. Myomodulation

Fig. 20.4  Chez cette patiente, après placement de l'AH au-dessus des muscles abaisseurs, on observe une diminution de l'hypertonie du mentonnier
et un certain effet lift, le zygomatique retrouve sa force.
L'équilibre élévateur/abaisseur est amélioré. Le comblement des déficiences structurelles de la région du menton, principalement du sillon labiomenton-
nier, est ainsi à l'origine d'une cascade d'améliorations esthétiques.
Source : M.-P. Loustalan.

Autres hypothèses Conclusion


D'autres hypothèses ont été développées pour expliquer Ce sujet passionnant demande encore à être précisé, mais la
cette modulation de la force musculaire observée avec connaissance des effets modulateurs de l'acide hyaluronique
l'acide hyaluronique (AH) : il peut s'agir simplement de sur la fonction musculaire est une voie complémentaire
la décrispation du muscle lors d'injection d'AH dans ses intéressante pour agir contre le vieillissement.
fibres ou son environnement. Il pourrait aussi s'agir d'un
Références
réflexe myotatique d'extension comme cela a été décrit
[1] De Maio M. Myomodulation with injectable fillers: An innovative
par Belhaouari [2] pour le muscle orbiculaire qui se
approach to addressing facial muscle movement. Aesth Plast Surg
contracte sous l'effet d'un bolus profond, entraînant 2018;42(3):798–814.
avec lui la peau et la graisse superficielle de la région [2] Belhaouari  L, Gassia  V, Michaud  T, Lauwers  F. Dynamique et
malaire dans un effet liftant. embellissement du mid-face. J Méd Esth et Chir Derm
2014;164:203–9.

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 20. Myomodulation

Pour en savoir plus Vanaman Wilson MJ, Jones IT, Butterwick K, Fabi SG. Role of nonsurgi-
Beylot C. Vieillissement cutané : prévenir, corriger et rajeunir. Med'com cal chin augmentation in full face rejuvenation: A review and our
2007. experience. Dermatol Surg 2018;44(7):985–93.
Trevidic  P. Anatomy and volumizing injections. In: E2e Medical Zide  BM. The mentalis muscle: an essential component of chin and
Publishing; 2011. lower lip position. Plast Reconstr Surg 2000;105:1213–5.

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TECHNIQUES Partie 2
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Section 4. Les produits de comblement (fillers)

Chapitre 21
Mésothérapie, revitalisation
R. Khallouf

Introduction Des études ont montré une amélioration significative de


l'élasticité et de l'hydratation cutanée après injection d'AH
La peau subit des modifications importantes avec l'âge. Sa dans le derme [4–6]. Cliniquement, la peau est plus hydra­
prise en charge est essentielle lors de la réjuvénation du tée, moins terne, plus lumineuse ; cet effet est obtenu par
visage. l'épaississement du derme, le remodelage du collagène et la
Le vieillissement cutané est complexe. L'altération de captation d'eau par l'AH.
l'activité des fibroblastes s'accompagne d'une diminution L'AH injecté doit être compatible avec le tissu dermique ;
de la synthèse des fibres de collagènes et des fibres élas­ la réticulation et les propriétés viscoélastiques doivent être
tiques. L'acide hyaluronique (AH) de la matrice extracellu­ modérées. La plupart des laboratoires commercialisent des
laire ne se renouvelle plus. Cela se traduit cliniquement par produits pour cette indication. L'AH est soit réticulé avec
une peau sèche, moins élastique, terne et marquée par des une durée de vie de 3 à 9 mois, soit non réticulé avec une
ridules. durée de vie plus courte de 1 à 3 mois. Du mannitol, du gly­
Les techniques de réjuvénation cutanée vont viser à cérol ou du sorbitol sont parfois ajoutés à l'AH, dans le but
améliorer la qualité de l'épiderme, mais surtout du de le protéger du stress oxydatif, et de retarder sa dégrada­
derme, en apportant hydratation et réparation de la tion.
matrice extracellulaire, et en induisant la synthèse du
collagène.
La mésothérapie consiste à injecter dans la peau des prin­
Technique d'injection
cipes actifs en minuscules quantités dans le but d'hydrater La technique d'injection se fera à l'aiguille en point par point
ou d'améliorer l'aspect esthétique de la peau. Elle peut être pour les produits déposés à la jonction dermo-épidermique
très superficielle – le produit est déposé dans l'épiderme par et dans le derme superficiel ; à l'aiguille ou à la canule pour
une légère « scarification » qui permet la pénétration du pro­ les produits déposés dans le derme moyen ou profond. Le
duit dans l'épiderme  – ou plus profonde –  le produit est geste doit être contrôlé et précis. De toutes petites quantités
injecté dans le derme avec une aiguille, un mésoroller, ou un de produits sont injectées (0,01–0,02  ml) ; les seringues à
pistolet. Cette technique est désignée par le terme de clics et pistolets automatisés commercialisés par certains
«  mésolift ». laboratoires permettent un bon contrôle de la quantité.
Aussi, lors de l'utilisation de la canule, il faudra s'assurer en
permanence de la présence d'une rétraction cutanée lors de
Composition la tunnélisation pour ne pas déposer le produit dans l'hypo­
Les produits utilisés sont un mélange de vitamines, d'oligoélé­ derme. Un bon massage permet de répartir l'AH ; l'utilisation
ments et d'acide aminés : acide ascorbique, vitamine E, sili­ du coton-tige aide à « écraser » un excès de produit.
cium, magnésium, etc. Des cocktails polyrevitalisants ont été Les microtraumatismes provoqués par l'aiguille lors de l'ef­
proposés par plusieurs marques d'injectables. Si ces subs­ fraction cutanée et de la tunnélisation jouent aussi un rôle
tances sont connues pour leur action anti-oxydante et leur dans la réjuvénation. Cela stimule les mécanorécepteurs et
stimulation des fibroblastes in vitro, ils n'ont pas de niveau déclenche une réaction inflammatoire qui contribue au
de preuve suffisant pour leur effet clinique et leur utilisation remodelage [7].
empirique est réservée pour leur action bonne mine [1, 2].
L'ajout d'AH à ces mélanges a considérablement amélioré Effets secondaires
l'action des produits de mésothérapie. L'AH est le compo­
sant majeur de la matrice extracellullaire. Il est capable Les effets secondaires de la mésothérapie sont minimes.
d'absorber 500 à 1 000  fois son poids en eau. Il se lie aux Les suites classiques (œdème, érythème et ecchymose)
CD44 des fibroblastes, facilite leur prolifération ainsi que la sont minorées par l'utilisation des canules. Les nodules
synthèse de collagène de type  1 et le renouvellement de observés dans les suites sont le plus souvent dus à un excès
l'AH [3–5]. de produit. Des nodules persistants ont été rapportés lors

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 21. Mésothérapie, revitalisation

d'injection trop superficielle avec certains produits réticu­ Références


lés, d'où la nécessité de respecter scrupuleusement le [1] El-Domyati M, El-Ammawi TS, Moawad O, et al. Efficacy of meso­
niveau d'injection conseillé par le laboratoire. therapy in facial rejuvenation: a histological and immunohisto­
chemical evaluation. Int J Dermatol 2012;51(8):913–9.
[2] Prichninko S. Polycomponent mesotherapy formulations for the
Autres produits de revitalisation treatment of skin aging and improvement of skin quality. Clin
Cosmet Investig Dermatol 2015;8:151–7.
[3] Wang F, Garza LA, Kang S, et al. In vivo stimulation of de novo
Les injections de plasma riche en plaquettes (PRP) ont leur
collagen production caused by cross-linked hyaluronic acid der­
place dans la revitalisation cutanée [8]. Les facteurs de crois­ mal fillers injections in photodamaged human skin. Arch
sance libérés favorisent la réparation tissulaire ; ils stimulent Dermatol 2007;143:155–63.
les fibroblastes, la sécrétion de cytokines et l'angiogenèse ; ils [4] Deglesne P, Arroyo R, Ranneva E, Deprez P. In vitro study of RSS HA
augmentent la fabrication de collagène et réparent la matrice injectable mesotherapy/biorevitalization product on human
extracellulaire. Ces injections n'ont pas obtenu d'autorisa­ skinfibroblasts and its clinical utilization. Clin Cosmet Investig
Dermatol 2016;23:41–53.
tion de mise sur le marché (AMM) en France, ce qui limite
[5] Kercher M, Bayrhammer J, Reuther T. Rejuvenating influence of a
leur utilisation en esthétique. stabilized hyaluronic acid-based gel of nonanimal origin on facial
Les inducteurs de collagène n'ont pas leur place dans la skin aging. Dermatol Surg 2008;34:1–7.
revitalisation de la peau. Les injections devant se faire dans le [6] Baspeyras M, Rouvrais C, Liégeard L, et al. Clinical and biometrologi­
tissu sous-cutané ou le derme profond, une action indirecte cal efficacy of a hyaluronic acid-based mesotherapy product: a ran­
de réjuvénation peut être secondairement observée sur la domizsed controlled study. Arch Dermatol Res 2013;305:673–82.
[7] Hou A. CohenB, Haimovic A. Elbuluk N Microneedling : a compre­
peau ; elle est une conséquence indirecte de la néocollage­
hensive review dermatol surg 2017;43:321–39.
nèse dans les tissus profonds. [8] Yuksel  E, Sahin  G, Aydin  F, et  al. Evaluation of effects of plate­
Une liste des produits de réjuvénation est fournie au let-rich plasma on human facial skin. J Cosmet Laser Ther 2014;16:
tableau 21.1. 206–8.

Tableau 21.1  Liste (non exhaustive) des produits de réjuvénation


Nom du produit Réticulation Laboratoire Concentration Additifs Niveau d'injection Lidocaïne
Restylane Vital Réticulé Galderma 20 mg/ml Derme profond Avec ou sans
Skinbooster®
Juvederm Volite® Réticulé Allergan 12 mg/ml Derme profond Avec
Stylage Hydro max® Réticulé Vivacy 12,5 mg/ml Sorbitol Derme moyen et profond Sans
®
Belotero Soft Réticulé Merz 20 mg/ml Glycérol Derme superficiel ou profond Avec
Restylane Vital light® Réticulé Galderma 12 mg/ml Derme moyen et profond Avec ou sans
®
Juvederm hydrate Non réticulé Allergan 13,5 mg/ml Mannitol JDE et derme superficiel Avec
®
Belotéro Hydro Non réticulé Merz 18 mg/ml Glycérol JDE et derme superficiel Sans
Princess Rich® Non réticulé Croma 18 mg/ml Glycérol Derme superficiel ou profond Sans
®
Stylage Hydro Non réticulé Vivacy 14 mg/ml Mannitol JDE et derme superficiel Sans
Téosyal Redensity 1® Non réticulé Téoxane 15 mg/ml Acides aminés, Derme superficiel à moyen Avec
minéraux, etc.
Filorga NCTH 135HA® Non réticulé Filorga 5 mg/ml Vitamines, acides Épiderme ou derme Sans
aminés, etc.
JDE : jonction dermo-épidermique.

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TECHNIQUES Partie 2
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Section 4. Les produits de comblement (fillers)

Chapitre 22
Inducteurs tissulaires
M. Creusot, C. Raimbault

Principe d'induction tissulaire extracellulaire continue, entraînant une augmentation pro-


gressive de l'épaisseur dermique pendant au moins 2 ans [7].
Les inducteurs tissulaires représentent une catégorie à part Des analyses histologiques et histochimiques de biopsies
entière de produits de comblement. Ils jouent un rôle diffé- cutanées d'animaux traités ont montré que le collagène de
rent mais complémentaire à celui des acides hyaluroniques type I remplace progressivement le collagène de type III.
(AH) : outre leur effet volumateur, ils vont induire une néocol- C'est le seul produit de comblement devant être reconstitué
lagenèse au site d'injection, permettant une restauration du avant utilisation. Il se présente sous la forme d'un flacon conte-
soutien des tissus. Ces biostimulateurs du collagène ont un nant un lyophilisat qui doit être dilué avec de l'eau stérile pour
effet durable dans le temps, variable selon le type de produit. préparation injectable (eau PPI) au moins 24 heures avant l'utili-
La technique d'injection de chacun des produits présente sation (l'idéal étant au moins 48 heures) et qui doit être conservé
des particularités qui seront détaillées, mais d'emblée, il faut à température ambiante jusqu'à utilisation. Il peut aussi être
souligner le fait qu'aucun ne présente d'antidote équivalent maintenu au réfrigérateur pendant au maximum 3 à 4 semaines
à la hyaluronidase pour les AH, et qu'il ne sera pas possible avant l'injection. Juste avant la procédure, le produit obtenu est
de les éliminer en cas d'embole vasculaire ou de granulome. encore dilué avec 2 ml d'anesthésiant de type lidocaïne ou mépi-
Les inducteurs tissulaires sont composés de microsphères vacaïne pour diminuer la douleur et faciliter les massages.
(principe actif), suspendues dans un gel vecteur composé La quantité totale de la dilution a varié au cours du temps : de
principalement de carboxyméthylcellulose (CMC) [1–4]. 3 ml chez les patients atteints du VIH, elle est passée à 5–6 ml
La nature des microsphères est différente selon les fillers, selon le protocole Redaelli, voire plus après les recommanda-
alors que le gel de CMC, dérivé de cellulose et d'acide acé- tions européennes de 2014 (7 ml pour les injections profondes
tique, est commun à tous. Il est soluble dans l'eau, et permet à 9 ml pour les injections sous-cutanées, ajout d'anesthésiant
d'augmenter la viscosité du produit. Après injection, il est inclus). Plus la dilution est importante, plus on limite l'appari-
rapidement décomposé, tandis que les microsphères vont tion de papules ou nodules granulomateux autour des parti-
s'intégrer dans les tissus mous environnants, puis se résorber cules. La préparation, l'homogénéisation et le mode d'injection
lentement, tout en stimulant localement la synthèse de col- sont aussi primordiaux pour les éviter. Une nouvelle présenta-
lagène, d'où la dénomination d'inducteur tissulaire. tion commerciale pré-diluée est désormais disponible.

Acide L-polylactique Hydroxyapatite de calcium


(PLLA – depuis 1999) [5, 6] (CaHa – depuis 2005) [8–11]
Sculptra® (laboratoire Sinclair) est un lyophilisat injectable Les produits sont les suivants :
composé de 150 mg de PLLA sous la forme de particules de ■ Radiesse® et Radiesse +® contenant de la lidocaïne (labo-
40 à 63 μm de diamètre, de 90 mg de CMC de sodium et de ratoire Merz) ;
127,5 mg de mannitol. ■ Simetro (laboratoire Juves).

Le Newfill® [6, 7], ayant la même composition, est réservé Les seringues sont prêtes à l'emploi.
aux corrections des dépressions cutanées importantes liées à Le produit contient 30 % de microsphères de CaHa de 25 à
la perte de masse graisseuse au niveau du visage (lipoatro- 45 μm de diamètre, dans un gel aqueux composé d'eau puri-
phie), chez les patients atteints du virus de l'immunodéfi- fiée, de glycérine et de CMC de sodium. Ces particules de syn-
cience humaine (VIH) traités par antirétroviraux. thèse biocompatibles et biorésorbables ont une composition
Le PLLA est un inducteur tissulaire puissant. Il stimule la identique à celle de la portion minérale des os et des dents.
néocollagenèse, en déclenchant une réaction à corps étran- L'augmentation initiale du volume liée à l'injection est
ger au matériau injecté, suivie d'une réponse inflammatoire assurée par le gel de CMC qui se résorbe progressivement et
cellulaire qui entraîne la formation d'un tissu conjonctif vas- du CaHa. Après environ 9 à 12 mois, les particules de CaHa
cularisé. Il est ensuite hydrolysé en lactate, transformé en sont dégradées en calcium et phosphate et sont éliminées
pyruvate et oxydé en dioxyde de carbone. La réponse inflam- par le système rénal. La correction immédiate après l'injec-
matoire diminue en 6 mois, mais la stimulation de la matrice tion de ce produit hautement viscoélastique est suivie de

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 22. Inducteurs tissulaires

l'induction d'une prolifération des cellules dermiques Contre-indications


fibroblastiques, d'une néocollagenèse, de la production
d'élastine, de protéoglycanes, d'une néoangiogenèse. La Ces produits sont à éviter dans les situations suivantes :
peau devient plus ferme, plus élastique, plus épaisse et la ■ grossesse, allaitement ;
correction peut atteindre 18 mois (fig. 22.1). ■ antécédents allergiques graves ou évolutifs ;

■ allergie connue à l'un des composants ;

■ maladies auto-immunes ;

■ susceptibilité connue à la formation de chéloïdes ou aux

cicatrices hypertrophiques ;
■ traitement en cours par corticoïdes, l'augmentation des

fibres de tissu conjonctif pouvant alors être entravée ;


■ injections anciennes de produits non résorbables (sili-

cones notamment).
Les inducteurs tissulaires ne sont pas indiqués pour l'aug-
mentation des lèvres (risque de nodules indurés, perte de
souplesse), ni pour les cernes.

Indications

Fig.  22.1  Aspect en microscopie électronique des particules d'hy-


Indications médicales
droxyapatite de calcium de 25 à 45 μm dans un gel aqueux L'indication est une lipoatrophie faciale chez les patients séropo-
Source : Marmur ES, Phelps R, Goldberg DJ. Clinical, histologic and electron
sitifs traités par trithérapie, notamment avec le PLLA suite à
microscopic findings after injection of a calcium hydroxylapatite filler.
J Cosmet Laser Ther © 2004 Taylor&Francis healthsciences. l'inefficacité relative de la liposculpture. Les premières études
étaient avec le PLLA [13, 14] ; d'autres ont suivi avec le CaHa [15].

Polycaprolactone Indications esthétiques


(PCL – depuis 2009) Les inducteurs tissulaires sont des volumateurs et des régé-
nérants tissulaires et ne doivent pas être injectés dans le
Le produit commercialisé est l'Ellansé®. derme (sauf pour CaHa) qui est une région très riche en
C'est un polymère biocompatible et biorésorbable com- fibroblastes, ni dans les zones hyperdynamiques comme la
posé de 30 % de particules sphériques et totalement lisses de zone péri-orale, les commissures labiales, la zone péri-­
diamètre compris entre 25 et 50  μ, synthétisé à partir de oculaire. L'injection dans la zone pré-auriculaire doit rester
l'ε-caprolactone et de 70 % de CMC. Quatre versions de PCL sous-dermique pour éviter une fibrose de la glande parotide
prêtes à l'emploi sont disponibles avec une longévité in vivo ou du canal de Stenon.
attendue respectivement de 1, 2, 3 et 4 ans – Ellansé-S® (ver- Les trois inducteurs ne sont pas indiqués pour le traite-
sion courte, S) PCL  1 ; Ellansé-M® (version moyenne, M) ment de la glabelle.
PCL 2 ; Ellansé-L® (version longue, L) ; Ellansé-E® (extralong, Sur le front, le PLLA est contre-indiqué.
E version). La différence est liée à la longueur des chaines et à L'injection peut se faire dans le tissu sous-cutané selon les
leur dégradation progressive en deux phases : techniques habituelles de nappage à l'aiguille ou à la canule,
■ phase 1 – phase non enzymatique : scission aléatoire de la selon des trajets parallèles ou croisés, ou plus profondément
chaîne par clivage hydrolytique de groupes ester. Il n'y a en sus-périosté avec des bolus profonds.
pas de perte de masse, ni de volume des particules pen-
dant cette hydrolyse ; Traitement des cicatrices
■ phase 2 – phagocytose des petites particules : disparition

totale du produit en 1, 2 ans ou plus. Du PLLA dilué a été utilisé pour relever les cicatrices d'acné
Cette différence dans la dégradation des particules a été en dermopénétration ou dermique profond [16, 17].
montrée lors d'une étude histologique sur le dos de lapin
[4]  : injection sous-cutanée de PCL  1 et 2 ; réalisation de Utilisation sur le corps
biopsies après 9 mois et 21 mois ; à 9 mois : ■ Mains : rajeunissement des mains en restaurant les volumes
■ résorption complète des microsphères avec PCL  1 avec avec du CaHa (PLLA et PCL contre-indiqués dans cette zone).
formation d'un nouveau collagène ; ■ Corps : certains peuvent être utilisés sur le corps mais sou-

■ persistance de microsphères de PCL 2 entourées de colla- vent en étant dilués (dans ce cas hors-AMM).
gène de types I et III. Le CaHA peut être utilisé pour l'amélioration de la tonicité
Après 21 mois, il reste des microsphères de PCL 2 entou- et de la fermeté de la peau [18,  19], cou, décolleté, bras,
rées de collagène mature de type I [12]. cuisses, abdomen, vergetures.

172
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TECHNIQUES Partie 2
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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 22. Inducteurs tissulaires

Techniques d'injection Effets secondaires


selon les produits et effets Par le passé, les effets indésirables liés au PLLA étaient plus
importants, dans la mesure où la dilution du lyophilisat était
secondaires spécifiques de 3  ml. Actuellement, la dilution totale conseillée de 7 à
9  ml pour en faciliter l'utilisation a nettement réduit ces
Acide L-polylactique effets secondaires.
Outre les effets indésirables mineurs préalablement décrits
Contre-indications : lèvres et zone périlabiale, commissures,
avec les autres produits, le PLLA présente un risque plus
zone péri-oculaire, front, nez, dos des mains.
important de papules ou nodules (induration localisée liée à
Technique d'injection l'injection trop superficielle, au défaut d'homogénéisation
ou de répartition du PLLA), pouvant nécessiter le recours à la
Le PLLA est injecté dans le plan sous-cutané ou placé en posi-
biopsie pour le différencier d'un granulome inflammatoire
tion sus-périostée, à l'aiguille longue 22 ou 25 G (4 cm), créant
(fig. 22.2).
une tunnélisation, ou à la canule, en bolus ou en nappage, de
façon rétrotraçante, permettant un dépôt régulier de produit.
L'injection est devenue plus facile depuis l'augmentation des
dilutions avec une meilleure distribution du produit, moins de
risques d'obstruer le conduit de l'aiguille ou de la canule, une
diminution nette de la survenue de papules ou nodules.
Il ne faut pas utiliser plus d'un flacon par hémiface, et on
conseille de ne pas dépasser la dose de 0,3 ml/cm2 sur une zone
osseuse ou 0,1 ml/cm2 lors d'injection sous-dermique. La dilu-
tion peut être de 7 ml pour la reconstitution des volumes pro-
fonds, et de 9 ml lors d'utilisation en nappage sous-cutané.
Il est recommandé de masser au fur et à mesure chaque
zone traitée pendant la procédure pour bien répartir le pro-
duit, avant de continuer à traiter les autres zones.
Le patient continuera à masser 5 minutes matin et soir, pen-
dant 1  semaine au moins, ou selon le protocole  5-5-5, soit
5 minutes 5 fois par jour pendant 5 jours. Il faut bien lui expli-
quer que la correction obtenue immédiatement après l'injec- Fig.  22.2  Nodules palpables, visibles lorsque la peau est étirée, non
inflammatoires.
tion est liée au volume injecté, mais qu'elle va disparaître dans Source : C. Raimbault.
les jours suivants et que ce sont la stimulation fibroblastique
induite et le nouveau dépôt de collagène qui seront à l'origine
de l'amélioration esthétique. Néanmoins, le volume obtenu La fréquence des nodules a considérablement diminué
après la séance donne une bonne idée du résultat final. depuis les nouvelles recommandations de dilution, de quantité
Deux à trois traitements sont espacés de 4 à 6 semaines, injectée qui ne doit pas dépasser la dose de 0,1 à 0,3 ml/cm2,
selon l'âge et la perte de volume. et de massage après l'injection.
La restauration du volume et la production de collagène Le nodule étant le plus souvent asymptomatique, son trai-
sont progressives, et visibles après 2 à 3 mois et continuent tement est facultatif. Il est pertinent de rassurer le patient en
pendant quelques mois. Cela s'accompagne d'une améliora- lui indiquant qu'il s'agit d'un processus transitoire qui se
tion de la surface, de l'éclat cutané. Il faut traiter, attendre et résoudra spontanément avec le temps. Les papules peuvent
évaluer avant de recommencer une nouvelle session pour être atténuées par un massage vigoureux, et 95 % se résolvent
éviter toute surcorrection. d'elles-mêmes. L'erreur à éviter est d'injecter des stéroïdes en
La qualité du résultat et le nombre de flacons nécessaires intralésionnel car ils peuvent rendre le problème encore plus
dépendent de l'âge du patient, de son mode de vie (tabac, visible en provoquant une atrophie autour du nodule.
exposition solaire), mais on recommande en moyenne 1 fla- L'excision est une autre option thérapeutique mais entraîne
con par 10 années d'âge, répartis en 2 à 3 séances au moins. une cicatrice permanente. Les nodules ne répondent pas au
Après 2 ans, une nouvelle stimulation nécessitera une quantité 5-fluorouracile (5-FU).
moindre évaluée à 30 ou 50 % par rapport à la quantité initiale. Des nodules inflammatoires à apparition tardive (14 à
La combinaison avec des injections d'AH pour un résultat 24 mois) ont également été décrits et peuvent représen-
plus rapide est possible (par exemple le traitement des lèvres ter une dégradation en phase finale du produit de PLLA.
par AH), de même qu'avec les autres techniques – peeling, Cela peut aussi être traité avec des injections de stéroïdes
radiofréquence, lasers avant ou après 4 à 6 semaines (recom- ou de 5-FU, mais peut se résoudre spontanément avec le
mandations de 2014). temps.
Le PLLA a fait l'objet de quelques publications pour corri- Les granulomes (communs à tous les injectables, effet
ger des cicatrices d'acné ou de varicelle. secondaire non immédiat), souvent symptomatiques,

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 22. Inducteurs tissulaires

nécessitent un traitement médical local ou général. Les 2 %, ou 0,5 ml d'anesthésiant + 1 ml de solution saline). Il est
véritables granulomes cliniques sont une réponse inflam- important de noter que l'utilisation de CaHa dilué est hors-
matoire systémique montrant une surabondance de AMM [20, 21].
réaction de l'hôte (c'est-à-dire des cellules géantes à
corps étranger) à une quantité relativement faible de Corps
produit et se produisent donc simultanément dans tous Le CaHa peut être injecté sur différentes zones du corps :
les sites traités, contrairement aux nodules qui appa- ■ mains ; deux techniques sont proposées :
raissent dans une zone limitée. Leur fréquence est esti- ● on préférera une injection à la canule de 22 à 25  G.
mée entre 0,01  % et 0,1  %. Les granulomes répondent Rappelons que le dos de la main comporte trois couches
bien au traitement par corticoïdes en intralésionnel ou fibrograisseuses successives de la profondeur à la surface
au 5-FU. La disparition est généralement observée au séparées les unes des autres par de minces lames
bout de 2 à 3 semaines. fibreuses, reliées par de fins septums fibreux. La couche
la plus profonde comporte les tendons ; l'intermédiaire,
Hydroxyapatite de calcium
Contre-indications : lèvres, zone péri-oculaire.

Indications esthétiques
Visage
Le CaHA est généralement placé dans le derme profond
ou dans le plan sous-cutané de moyen à profond en uti-
lisant les techniques d'injection habituelles en fonction
de la zone traitée. C'est principalement la « technique
1
des vecteurs » qui a été mise en avant et qui met à profit
les capacités volumétriques du produit, à celle de stimu-
lation collagénique lorsque l'injection est plus superfi-
cielle, sous-dermique : l'épaississement du derme réalise
un soutien cutané à partir d'un point d'ancrage situé
dans la pommette. On préfère une canule de 22 G, longue 2
de 7 à 9 cm pour parcourir toute la distance séparant le
point d'ancrage du sillon naso-génien et du pli d'amer-
tume. L'injection est rétrotraçante, lente et homogène,
sans retirer la canule pour changer de direction. Les trois
premiers vecteurs traversent le sillon naso-génien. Les
trois autres vecteurs traversent le pli d'amertume
(fig. 22.3 à 22.5).
Le traitement du front dans la zone sous-galéale est pos-
sible, mais en diluant le produit avec un ratio de 1:1 (1 volume Fig. 22.3  Technique des vecteurs.
de CaHa pour 1 volume de diluant composé de lidocaïne à La quantité injectée est fonction du volume à suppléer (1 à 2 seringues).

A B C
®
Fig. 22.4  A-C. Patiente de 59 ans, injections 1,5 ml de Radiesse par côté.
Résultat à 3 mois (B).

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Chapitre 22. Inducteurs tissulaires

A B
Fig. 22.5  A. Patiente de 63 ans, 1 injection de Radiesse® 1,5 ml par côté. B. Résultat à 3 mois.

les veines et les nerfs. L'injection à la canule se fait dans Effets secondaires
la couche superficielle soit par un seul point d'entrée Les précautions avant injection sont les mêmes que celles
éloigné du poignet, soit par plusieurs points situés dans pour les AH. Les effets indésirables, non spécifiques aux
les espaces interdigitaux ; inducteurs tissulaires, sont transitoires, tels que ecchymoses,
● injection à l'aiguille : il faut rester strictement dans la
érythème, œdème, douleurs, prurit.
couche fibrograisseuse superficielle et donc bien L'érythème et l'œdème peuvent parfois nécessiter le
soulever la peau dorsale pour créer une tente et recours aux corticoïdes per os ; le prurit, aux corticoïdes
injecter à distance des tendons, des veines et nerfs. locaux puissants.
L'injection de petits bolus (0,2 à 0,5  ml) entre les Plus de 190 études cliniques et publications concernant le
métacarpes se fait à l'aiguille de 27  G. La main est CaHa ont montré son innocuité à long terme avec l'absence
immédiatement massée. Il est préférable d'éviter de calcification ou d'ossification, l'absence de migration, un
toute surcorrection, d'autant que l'effet peut perdu- faible risque de granulome à corps étranger.
rer au-delà de 2 ans. Par ailleurs, 21  études portant sur 5  081  injections de
■ Traitement du corps [18, 19] : de nouvelles indications sont
CaHA chez 2 779 patients ont rapporté les effets secondaires
liées aux propriétés du CaHa qui peut être utilisé pour amé- suivants [22]. Parmi les 173 effets secondaires signalés, l'ap-
liorer l'élasticité, la fermeté et l'épaisseur cutanée lorsqu'il parition de nodules est l'effet indésirable signalé le plus fré-
est injecté dans un plan sous-dermique à la canule ou à quent et son incidence dans cette cohorte est de 3 % (166 cas
l'aiguille dans les zones de relâchement cutané : cou, décol- sur 5 081) (fig. 22.6).
leté, face interne des bras, cuisses, genoux, vergetures, etc.
Dans ce cas, le CaHa est dilué selon un ratio de 1:1, 1:2, 1:4
jusqu'à 1:6, où l'on observe encore une stimulation
Nodules (n = 166)
fibroblastique. La dilution se fait à l'aide de deux grandes
seringues luerlock à travers un connecteur adapté en
Surcorrection (n = 1)
mélangeant soigneusement le CaHa au diluant par au
moins 20  passages juste avant l'injection. On utilise
Érythème persistant (n = 2)
1 volume de CaHa pour 1, 2, 4, 6 volumes de diluant com-
posé de lidocaïne à 2 % généralement pour 1 volume de
Inflammation/œdème
CaHa, complété par de la solution saline. Il faut rappeler persistant (n = 4)
que la dilution de CaHa est hors-AMM, mais des publica-
tions avec recommandations pour son utilisation diluée
ont montré son efficacité et sa sécurité. Le ratio concernant Fig. 22.6  Effets secondaires après 5 081 injections d'HACA chez 2 779
patients.
la dilution dépend de la qualité de la peau ; celle-ci est d'au- Source : © Wiley Periodicals, Inc., d'après [22].
tant plus grande que la peau est plus fine ou plus pigmen-
tée. L'injection, le plus souvent à la canule, doit délivrer une
couche fine uniforme avec des trajets parallèles sous la Les nodules se produisent rarement lorsque l'injecteur est
peau ou avec une technique de fanning. Elle est suivie d'un expérimenté. Ils peuvent être traités avec une injection de
massage vigoureux. La déposition d'un nouveau collagène solution saline normale et de lidocaïne pour dissiper la surac-
et d'élastine se produit vers le 4e  mois avec une stabilité cumulation de produit. Il n'existe pas actuellement d'agent
jusqu'à 9 mois. Un à trois traitements sont réalisés la pre- inhibiteur du CaHA qui permettrait de corriger des résultats
mière année avec un entretien tous les 12 à 18 mois. non satisfaisants tels que l'asymétrie, les surcorrections ou

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 22. Inducteurs tissulaires

pour la prise en charge des complications vasculaires immé- Aucune tendance d'effet secondaire spécifique n'a été rap-
diates. Toutefois, dans le futur, grâce à des publications de portée, mais la survenue tardive de granulomes à corps
succès de traitement de calciphylaxie par thiosulfate de étranger a été décrite [25].
sodium, il serait permis d'envisager un antidote au CaHa [23]. Plusieurs cas rapportés sont liés à la procédure d'injection
Pour le rajeunissement des mains, le CaHA a un profil d'ef- elle-même, comme un œdème qui disparaît spontanément
fet secondaire similaire. La plupart des effets indésirables après quelques jours. Les nodules ou les indurations semblent
après l'injection sont légers à modérés, transitoires et se généralement liés à des erreurs de techniques d'injection,
résolvent d'eux-mêmes, avec notamment la présence d'un telles que des injections trop superficielles ou des injections
œdème des mains déconseillant le port de bagues pendant en bolus (tableau 22.1).
cette période, et d'ecchymoses aux points d'injection. Une
antisepsie rigoureuse s'impose avant l'injection. Tableau 22.1  Effets indésirables liés au polycaprolactone après
Une étude de Carruthers et al. portant sur 58 patients a mise sur le marché.
été réalisée avec examen radiographique et tomodensitomé-
Taux (%), N = 490 000
trique afin de déterminer si le CaHA posait des problèmes de seringues
sécurité radiographique [24]. L'étude a déterminé que le
Totalité des effets indésirables 0,049
produit est généralement visible, mais n'obscurcit pas les
Principaux effets indésirables
structures sous-jacentes lors de la tomodensitométrie. En
outre, elle n'a pas mis en évidence de migration de CaHA, ni Œdème 0,0195
d'ostéogenèse du fait de son injection dans le derme pro- Papules/nodules 0,0177
fond et dans le plan sous-cutané. Inflammation/infection 0,0031
Ecchymoses/hématomes 0,0006
Induration 0,0004
Polycaprolactone
Contre-indications : lèvres, zones péri-oculaire, glabelle.

Technique d'injection Conclusion


Les injections doivent se faire lentement et profondément, Les inducteurs tissulaires sont des produits de comblement
dans le tissu sous-cutané, en hypodermique ou en sus-­ qui ont un intérêt pour améliorer la qualité des tissus
périosté. Elles doivent se faire en rétrotraçante ou en bolus sous-cutanés, stimuler la synthèse de tissu collagénique et
(dans ce cas, il ne faut jamais plus de 0,2 ml à 0,3 ml/bolus reconstituer les volumes. Ils sont bien tolérés si leurs indica-
pour éviter tout risque de formation de nodules). La dilution tions et leur technique d'injection sont bien respectées et
avec de la lidocaïne pour rendre l'injection moins d
­ ouloureuse sont une alternative intéressante aux injections d'acide
ne modifie pas les propriétés du filler. hyaluronique.
Il est nécessaire de masser doucement le matériel injecté
afin d'obtenir le résultat esthétique souhaité.
Références
Il est impératif de ne jamais surcorriger car le volume va
[1] Vleggaar D, Bauer U. Facial enhancement and the European expe-
augmenter lentement au fil du temps en 10 à 12 semaines,
rience with Sculptra (poly-l-lactic acid). J Drugs Dermatol
en raison d'une stimulation du tissu conjonctif. Il est préfé- 2004;3(5):542–7.
rable de ne pas réaliser de retouches avant 3 mois pour les [2] Zerbinati  N, Calligaro  A. Calcium hydroxylapatite treatment of
mêmes raisons. L'injection de PCL 1 et 2 est possible sur le human skin: evidence of collagen turnover through picrosirius
front. red staining and circularly polarized microscopy. Clin Cosmet
L'injection sur le dos des mains est possible en privilégiant Investig Dermatol 2018;11:29–35.
[3] Berlin AL, Hussain M, Goldberg DJ. Calcium hydroxylapatite filler
la canule, et en évitant la technique des bolus pour ne pas
for facial rejuvenation: a histologic and immunohistochemical
injecter dans les deux couches fibro-adipeuses profondes analysis. Dermatol Surg 2008;34(Suppl 1):S64–7.
contenant les tendons ou les veines et les nerfs. [4] de Melo  F, Nicolau  P, Piovano  L, et  al. Recommendations for
volume augmentation and rejuvenation of the face and hands
Effets secondaires liés with the newgeneration polycaprolactone-based collagen stimu-
lator (Ellansé®). Clin Cosmet Investing Dermatol 2017;10:
Les effets secondaires recensés sont identiques au CaHA. 431–40.
Le profil d'innocuité a été démontré dans les études d'effi- [5] Redaelli  A, Forte  R. Cosmetic use of polylactic acid: report of
cacité et d'innocuité cliniques. Depuis l'obtention de la 568 patients. J Cosmet Dermatol 2009;8(4):239–48.
licence de mise sur le marché, un système de pharmacovigi- [6] Alessio  R, Rzany  B, Eve  L, et  al. European expert recommenda-
tions on the use of injectable poly-L-lactic acid for facial rejuvena-
lance a été mis en place pour enregistrer les effets indési-
tion. J Drugs Dermatol 2014;13(9):1057–66.
rables dans le monde. Plus de 490  000  seringues ont été [7] Bohnert  K, Dorizas  A, Lorenc  P, Sadick  NS. Randomized,
utilisées depuis le lancement en 2009 jusqu'en décembre controlled, multicentered, double-blind investigation of injec-
2016 et le taux d'effets indésirables est faible, évalué à 0,049 % table poly-L-lactic acid for improving skin quality. Dermatol Surg
indiquant que le stimulateur à base de PCL est bien toléré. 2019;45(5):718–24.

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 22. Inducteurs tissulaires

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(Radiesse) for treatment of nasolabial folds: long-term safety and poly-L-lactic acid for the treatment of moderate to severe scar-
efficacy results. Aesthet Surg J 2010;30:235–8. ring from acne or varicella. Dermatol Surg 2007;33(Suppl 2):
[9] Robinson  DM. In  vitro analysis of the degradation of calcium S159–67.
hydroxylapatite dermal filler: a proof-of-concept study. Dermatol [18] Goldie K, Peeters W, Alghoul M, et al. Global consensus guidelines
Surg 2018;44(Suppl 1):S5–9. for the injection of diluted and hyperdiluted calcium hydroxylapa-
[10] Pavicic T. Complete biodegradable nature of calcium hydroxyla- tite for skin tightening. Dermatol Surg 2018;44(Suppl 1):S32–41.
patite after injection for malar enhancement: an MRI study. Clin [19] de Almeida AT, Figueredo V, da Cunha ALG, et al. Consensus recom-
Cosmet Investig Dermatol 2015;8:19–25. mendations for the use of hyperdiluted calcium hydroxyapatite
[11] Marmur ES, Phelps R, Goldberg DJ. Clinical, histologic and elec- (Radiesse) as a face and body biostimulatory agent. Plast Reconstr
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patite filler. J Cosmet Laser Ther 2004;6(4):223–6. [20] Van Loghem  JAJ. Use of calcium hydroxylapatite in the upper
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Mater 2013;3(1):19–26. [21] Kim  Jongseo. Novel forehead augmentation strategy: forehead
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implants (new-fill) to correct facial lipoatrophy in HIV-infected very after tumescent injection. Plast Reconstr Surg Glob Open
patients: results of the open-label study VEGA. AIDS 2018;6(9). e1858.
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3-year follow-up study. J Am Acad Dermatol 2008;59(6):923–33. fate for the treatment of calciphylaxis. JAMA Dermatol
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Chapitre 23
Hyaluronidase
P. Coutant-Foulc

Introduction La survenue de cas d'allergie de type hypersensibilité de


type  I à la hyaluronidase [4], avec accident sévère de type
La hyaluronidase est une enzyme qui dégrade l'acide hyalu- choc anaphylactique, a été responsable de la diminution de
ronique (AH). Elle est présente à l'état naturel dans les tissus son utilisation dans ces indications.
pour en abaisser la viscosité et augmenter ainsi la perméabi- De manière plus anecdotique, elle a été utilisée pour trai-
lité tissulaire. ter les sclérodermies cutanées et les myxœdèmes prétibiaux,
Dans le cadre de l'autorisation de mise sur le marché les cicatrices scléreuses, les chéloïdes et la cellulite fibreuse.
(AMM), elle est utilisée pour éviter les complications liées Sa forme PH20 recombinante humaine pégylée est utilisée
aux emboles vasculaires lors d'injection d'AH. Bien que le en cancérologie, en association avec des anticorps monoclo-
traitement des surcorrections ou des nodules soit hors naux et des chimiothérapies pour améliorer leur pénétration
AMM, elle peut être utilisée sous la responsabilité du méde- intratumorale. Mais ces formes recombinantes humaines
cin, pour hydrolyser l'AH [1]. sont récentes et onéreuses.
L'utilisation de hyaluronidase dans le traitement des effets
secondaires des injections d'AH a été décrite par Lambros en
Structure moléculaire 2004 [5] pour traiter des surcorrections ou des nodules, mais
et mécanisme d'action son utilité est majeure dans la prise en charge des complica-
tions graves de type embole vasculaire [6].
La hyaluronidase est une hyaluro-glucosaminidase de
La hyaluronidase d'origine animale, étant extraite de testi-
61 kDa ; elle hydrolyse l'AH au niveau de sa liaison β1, 4.
cules de bovins et ou d'ovins, a été interdite en France par
Il existe 6  isoformes  : hyaluronidase  1, 2, 3 et 4, PH20 et
l'Agence nationale de sécurité du médicament et des pro-
HYALP1 [2].
duits de santé (ANSM) en septembre 2011, en raison de l'en-
Sa demi-vie plasmatique est très courte, de l'ordre de
céphalopathie spongiforme bovine. Elle est à nouveau
2 minutes. Son élimination est hépatique. In vivo, elle per-
autorisée depuis fin 2017 mais dans un cadre législatif très
met une lyse protéique de la substance fondamentale
strict : autorisation d'utilisation restreinte à la Hyalase® pour
intercellulaire.
les seuls accidents emboliques vasculaires et usage réservé
Elle est naturellement présente dans les testicules des
aux cinq spécialités suivantes : dermatologie, chirurgie plas-
mammifères pour faciliter la pénétration des spermatozoïdes
tique, chirurgie maxillofaciale, ORL, ophtalmologie.
dans l'ovocyte, dans les venins de serpents et d'hyménop-
tères pour augmenter leur diffusion, et dans certaines bacté-
ries à Gram positif pour favoriser leur pathogénicité Protocoles d'utilisation
tissulaire.
Concernant son usage pour la dégradation de l'AH réticulé En France, on utilisait historiquement surtout le Desinfiltral®
injecté, il a été démontré que son efficacité est quasi immé- des laboratoires Skin Tech. Mais c'est la Hyalase® des labora-
diate et de courte durée [2] et qu'elle agit même sur un AH toires Negma Worckhard qui a bénéficié de cette nouvelle
injecté depuis des années. autorisation d'utilisation.

Précautions d'usage
Historique d'utilisation L'injection est réalisée sous la seule responsabilité du prati-
La hyaluronidase fut découverte en 1929 par Duran Reynald. cien. En raison du risque d'allergie immédiate sévère, celui-ci
Elle était utilisée en ophtalmologie à forte dose pour aug- devra garder le patient en observation au moins 30 minutes
menter la diffusion des anesthésiants dans les injections et disposer du matériel d'urgence, mais il n'a jamais été rap-
rétrobulbaires [3], et dans la chirurgie intracapsulaire pour porté de choc anaphylactique aux faibles doses utilisées en
faciliter la dissection de la zonule. esthétique.

Dermatologie esthétique
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Chapitre 23. Hyaluronidase

Dilution En janvier 2014, un groupe de praticiens experts a établi


un premier protocole thérapeutique, fondé sur une revue
Une ampoule de 1 500 unités de hyaluronidase devra être
de la littérature et sur leur expérience. Ils recommandent
diluée dans une quantité de 1 à 10  ml de sérum physio­
200 à 300 U de hyaluronidase injectées dans l'ensemble de
logique injectable (4-5 ml en moyenne). Une fois reconsti-
la zone à risque de nécrose, répétée 2 fois/jour jusqu'à dis-
tuée, la Hyalase® ne se conserve pas.
parition complète des signes de thrombose vasculaire. Une
dose totale supérieure à 1 500 U peut être nécessaire [7].
Test d'injection préalable En juin 2014, un deuxième groupe d'experts indépendants,
réunis à Las Vegas, ont établi un consensus à peu près simi-
En raison du risque d'hypersensibilité immédiate, et unique-
laire, mais d'efficacité plus rapide, la short pulse therapy  :
ment en l'absence de situation d'urgence, il est logique de pra-
200 U au moins, injectées tous les 3 à 4 cm dans la zone de
tiquer un prick test avant chaque injection de hyaluronidase.
nécrose et autour, toutes les 60 minutes, 3 ou 4 fois de suite
Sa positivité contre-indique son utilisation ; a contrario, un
ou plus si nécessaire jusqu'à disparition des signes de throm-
prick test négatif n'élimine pas le risque d'allergie immédiate.
bose [7]. Ils apportent en outre les deux notions suivantes : il
est intéressant de diluer la hyaluronidase avec de la xylocaïne
Contre-indications pour favoriser la vasodilatation et la diffusion, et la quantité
Les contre-indications suivantes sont relatives et ne s'ap- de hyaluronidase nécessaire est inférieure pour dissoudre les
pliquent évidemment pas en cas d'urgence (nécrose vascu- AH biphasiques que les monophasiques.
laire ou cécité) : L'injection de hyaluronidase doit avoir lieu précocement
■ antécédents de réaction immédiate à la hyaluronidase ;
au mieux dans les 6 heures, au plus tard dans les 48 heures
■ surinfection locale (risque fort d'aggravation de la diffu-
pour éviter la nécrose cutanée. Il est nécessaire d'injecter
sion des germes) ; massivement à la fois dans la zone où l'AH a été injecté et
■ injection de toxine botulique dans les 48  heures précé-
dans tout le territoire de drainage vasculaire de cette zone.
dentes sur la même zone (risque de diffusion de la toxine Les injections doivent être sous-cutanées et non intravas-
botulique) ; culaires (demi-vie plasmatique inférieure à 2 minutes).
■ grossesse ou allaitement.
En 2017, De Lorenzi, directeur médical des laboratoires Allergan,
a publié une nouvelle étude sur la dose de hyaluronidase, fondée
sur son expérience clinique de risque de nécrose cutanée [8]. Il
détermine la dose de hyaluronidase à injecter en fonction du
Modalités d'injection dans les accidents
volume du territoire atteint. Les territoires concernés sont les sui-
vasculaires par embolisation avec risque vants : lèvre supérieure, nez, glabelle, menton. Si un seul territoire
de nécrose cutanée est concerné, la dose à injecter est de 500 UI ; si deux territoires
Dans les cas d'embolisation vasculaire par l'AH (fig. 23.1), il sont concernés, la dose est de 1 000 UI ; si trois territoires sont
convient d'injecter une grande quantité de hyaluronidase concernés, elle sera de 1 500 UI, et ce toutes les heures jusqu'à dis-
pour obtenir une dissolution rapide de l'embole d'AH ; on parition des signes de nécrose cutanée. Dans son expérience, tous
utilisera une dilution de 1 ml par flacon de 1 500 U. Les doses les cas traités avec ce protocole ont guéri sans séquelles.
injectées observées dans la littérature varient de 300 à Dans les cas de cécité, l'injection de hyaluronidase doit
1 500 U. L'efficacité est jugée par la diminution de la douleur avoir lieu dans les 90  minutes, en position rétrobulbaire
et la recoloration de la peau. en passant par le rebord orbitaire inférieur, puis le long du
plancher de l'orbite. Les doses vont selon les études de
150 à 300  U. Cette injection pourra être complétée par
une injection dans la zone supra-­orbitaire [9].
On voit donc qu'à ce jour, il n'y a pas de consensus sur la
dose à injecter, mais on retiendra que :
■ la hyaluronidase devra être injectée dans tout le territoire

de drainage de l'artère embolisée et non pas juste sur la


zone injectée en AH ;
■ plus le territoire nécrosé est grand, plus on devra augmen-

ter les doses jusqu'à 1 500 U par heure ;


■ les injections seront répétées toutes les heures jusqu'à dis-

parition des signes de nécrose, recoloration des tissus et


atténuation de la douleur ;
■ les AH de tenue plus prolongée, comme ceux de la gamme

Vycross® nécessitent plus de hyaluronidase que les bipha-


Fig.  23.1  Livedo reticularis traduisant l'embolisation de l'artère faciale
à l'angle du sillon naso-génien par de l'acide hyaluronique.
siques pour être dissous ;
C'est une urgence. ■ dans tous les cas, cette injection devra être la plus précoce

Source : P. Coutant-Foulc. possible.

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TECHNIQUES Partie 2
BIBLIOTHEQUE DE LA RECHERCHE BIBLIOGRAPHIQUE SCIENCE MEDICALE
Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 23. Hyaluronidase

Modalités d'injection Conclusion


dans les surcorrections ou les nodules
Il est impératif aujourd'hui que les praticiens injecteurs
La zone d'AH injecté en excès ou le nodule doivent être repé- d'acide hyaluronique connaissent les modalités d'injection
rés cliniquement et marqués pour injecter la hyaluronidase de la hyaluronidase. Compte tenu de cette nouvelle autori-
de manière précise (fig. 23.2). sation d'utilisation, il pourrait nous être reproché, en cas
La quantité de hyaluronidase injectée n'est pas consen- d'accident d'embolisation vasculaire à base d'acide hyaluro-
suelle [7]. On privilégiera une injection de faible quantité nique, de ne pas avoir eu à disposition au cabinet de la hya-
(0,025 à 0,05  ml par point, soit un dosage de 7,5 à 15  u. luronidase ou de ne pas avoir su comment l'injecter. En
par point selon le produit utilisé et la dilution effectuée). outre, il est fondamental de connaître les zones de danger et
L'efficacité de la hyaluronidase débute immédiatement. En l'anatomie vasculaire.
pratique, on considère que la fonte est obtenue en 48 heures.
Une étude récente a montré qu'une faible dose de hyaluroni- Références
dase était suffisante pour dissoudre l'AH, mais que la vitesse
[1] Buhren BA. Hyaluronidase : from clinical applications to molecu-
de dégradation était dose-dépendante [10]. lar and cellular mechanisms. Eur J Med Res 2016 ;21:5.
Aussi, dans les cas de surcorrection ou de nodule, il est [2] Menzinger S, Kaya A, Saurat JH, Kaya G. Injected hyaluronidase
conseillé d'utiliser une dilution plus importante de 4 ou 5 ml reduces the volume of exogenous hyaluronate fillers. Dermato­
pour 1 500 u, permettant ainsi d'injecter de petites quantités pathology 2016 ;3(3):61–7.
d'unités pour éviter les pertes de volume trop importantes [11]. [3] Etesse B. Hyaluronidase : plaidoyer pour un retour. Ann Fr Anesth
Rea 2009 ;28:658–65.
Dans les nodules, granulomes, ou biofilm, avec contexte
[4] Kirby B, Butt A, Morrison AM, Beck MH. Type I allergic reaction
infectieux, il est impératif d'instaurer une antibiothérapie to hyaluronidase during ophthalmic surgery. Contact Dermatisis
préalable et d'attendre la régression de l'infection avant 2001 ;44(1):52.
toute injection de hyaluronidase ; il existerait sinon un risque [5] Lambros V. The use of hyauronidase to reverse the effects of hya-
majeur de cellulite de la face (la hyaluronidase favorisant la luronic acid filler. Plast Reconstruct Surg 2004 ;114:277.
dissémination des germes au sein des tissus). [6] Rzany B, Becker-Wegerich P, Bachmann F, et al. Hyaluronidase in
the correction of hyaluronic acid-based fillers: a review and a
recommendation for use. J Cosmet Dermatol
2009 ;8(4):317–23.
[7] Cohen JL. Treatment of hyaluronic acid filler-induced impending
necrosis with hyaluronidase: consensus recommendations.
Aesthet Surg J 2015 ;35(7):844–9.
[8] DeLorenzi C. New high dose pulsed hyaluronidase protocol for
hyaluronic acid filler vascular adverse events. Aesth Surg J
2017 ;37(7):814–25.
[9] Chesnut C. Restoration of visual loss with retrobulbar hyaluroni-
dase injection after hyaluronic acid filler. Dermatol Surg
2018 ;44(3):435–7.
[10] Alam M, Poon E. Effectiveness of low dose of hyaluronidase to
remove hyaluronic acid filler nodules. JAMA Dermatol
2018 ;154:765–72.
[11] Burhen BA, Schrumpf H, Gerber PA. Standardized in votro analy-
sis of degradability of hyaluronic acid fillers by hyaluronidase. Eur
Fig. 23.2  Nodule suite à l'injection d'acide hyaluronique.
Source : P. Coutant-Foulc. J Med Res 2018 ;37:1–6.

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