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Dermatologie esthétique
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Dans la même collection

Chirurgie dermatologique, 2e édition, de J.-M. Amici, 2017, 416 pages.


Dermatologie. De la clinique à la microscopie, de B. Cribier, 2015, 464 pages.
Dermatologie infectieuse, de M. Mokni, N. Dupin et P. Del Giudice, 2014, 360 pages.
Lupus érythémateux, de D. Lipsker, 2013, 316 pages.

Chez le même éditeur

Dermatologie de l’enfant, de A. J. Mancini et D. P. Krowchuk, traduit par A. Phan, 2019, 742 pages.
Dermatologie et infections sexuellement transmissibles, 6e édition, de J.-H. Saurat, J.-M. Lachapelle, D.
Lipsker, L. Thomas et L. Borradori, 2017, 1288 pages.
Dermatologie : l'essentiel, de J.-L. Bolognia, J. V. Schaffer, K. O. Ducan et C. J. Ko., traduit par G. Lorette,
2018, 1024 pages.
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COLLECTION DERMATOLOGIE
dirigée par Dan Lipsker

Dermatologie esthétique
Coordonné par
Serge Dahan
Catherine Raimbault
Olivier Cogrel
Jean-Michel Mazer
Bertrand Pusel
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Elsevier Masson SAS, 65, rue Camille-Desmoulins, 92442 Issy-les-Moulineaux cedex, France

Dermatologie esthétique, de Serge Dahan, Catherine Raimbault, Olivier Cogrel, Jean-Michel Mazer et Bertrand Pusel.
© 2020, Elsevier Masson SAS
ISBN : 978-2-294-74589-8
e-ISBN : 978-2-294-74655-0
Tous droits réservés.

Les praticiens et chercheurs doivent toujours se baser sur leur propre expérience et connaissances pour évaluer et
utiliser toute information, méthodes, composés ou expériences décrits ici. Du fait de l'avancement rapide des
sciences médicales, en particulier, une vérification indépendante des diagnostics et dosages des médicaments doit
être effectuée. Dans toute la mesure permise par la loi, Elsevier, les auteurs, collaborateurs ou autres contributeurs
déclinent toute responsabilité pour ce qui concerne la traduction ou pour tout préjudice et/ou dommages aux
personnes ou aux biens, que cela résulte de la responsabilité du fait des produits, d'une négligence ou autre, ou de
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Illustrations de Marc DONON.

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livres, au point que la possibilité même pour les auteurs de créer des œuvres nouvelles et de les faire éditer
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Auteurs et collaborateurs
Auteurs
Serge Dahan, dermatologue, exercice libéral, Toulouse ; président du Groupe de Dermatologie
Esthétique et Correctrice de la Société française de dermatologie. Ancien président du Groupe
Laser de la Société française de dermatologie
Catherine Raimbault, dermatologue, ancienne présidente du Groupe de Dermatologie
Esthétique et Correctrice de la Société française de dermatologie
Olivier Cogrel, praticien hospitalier, chef de l'unité de dermatologie interventionnelle, CHU
de Bordeaux. Président du Groupe Chirurgical de la Société française de dermatologie
Jean-Michel Mazer, dermatologue, exercice libéral, Paris ; ancien président du Groupe Laser
de la Société française de dermatologie
Bertrand Pusel, dermatologue, exercice libéral, Saint-Paul-de-Vence ; ancien président du Groupe
Laser de la Société française de dermatologie

Collaborateurs
Didier Augias, dermatologue, exercice libéral, Clermont-l'Hérault
Daniel Barolet, professeur associé de dermatologie, McGill University, Montréal, Canada
Martine Baspeyras, dermatologue, exercice libéral, Bordeaux
Laurence Beille, dermatologue, Meylan
Karim Benachour, dermatologue, exercice libéral, Paris
Claire Beylot, professeur émérite de dermatologie à l'Université de Bordeaux, ancien chef
de service de dermatologie, CHU de Bordeaux
Dominique Boineau, dermatologue, exercice libéral, Bordeaux
Sandrine Boivin, dermatologue, exercice libéral, Lille
Régine Bousquet-Rouaud, dermatologue, exercice libéral, Montpellier
Hugues Cartier, dermatologue, exercice libéral, Arras ; ancien président du Groupe Laser
de la Société française de dermatologie
Isabelle Catoni, dermatologue, Neuilly-sur-Seine
Anny Cohen-Letessier, dermatologue, exercice libéral, Paris
Phryné Coutant-Foulc, dermatologue, centre de la femme, Nantes
Muriel Creusot, dermatologue, exercice libéral, Lasne, Belgique
Philippe Deshayes, dermatologue, exercice libéral, Merville-Franceville-Plage
Magali Dubois, dermatologue, exercice libéral, Sanary-sur-Mer
Samy Fenniche, professeur hospitalo-universitaire, chef de service de dermatologie, Hôpital Habib
Thameur, Tunis, Tunisie
Thierry Fusade, dermatologue, exercice libéral, Paris ; ancien président du Groupe Laser
de la Société française de dermatologie
Isabelle Gallay, dermatologue, exercice libéral, Dijon
Véronique Gassia, dermatologue, exercice libéral, Toulouse
Nathalie Gral, dermatologue, exercice libéral, Grenoble
Houda Hammami-Ghorbel, maître de conférences agrégée, service de dermatologie, Hôpital
Habib Thameur, Tunis, Tunisie
Marie Jourdan, dermatologue, exercice libéral, Paris
Randa Khallouf, dermatologue, exercice libéral, Tours

IX
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X  Auteurs et collaborateurs

Hans Laubach, dermatologue, exercice libéral, président de l'ESLD (Société européenne des lasers
en dermatologie), Strasbourg
Sylvie Lederlé, dermatologue, exercice libéral, Aix-en-Provence
Anne Le Pillouer-Prost, dermatologue, exercice libéral, Marseille
Marie-Pierre Loustalan, dermatologue, exercice libéral, Bordeaux
Michel Magis, dermatologue, exercice libéral, Lyon
Cyril Maire, dermatologue, exercice libéral, Arras
Thierry Michaud, dermatologue, exercice libéral, Mulhouse ; ancien président du Groupe
de Dermatologie Esthétique et Correctrice de la Société française de dermatologie
François Michel, dermatologue, exercice libéral, Vichy
Marie-Jeanne Miniconi-Nigoghossian, dermatologue, exercice libéral, Nice
Michael Naouri, dermatologue, exercice libéral, Nogent-sur-Marne
Thierry Passeron, professeur des universités, chef du service de dermatologie du CHU de Nice
Yvon Perrillat, dermatologue, exercice libéral, Grenoble ; président du Groupe Laser de la Société
française de dermatologie
Béatrice Perrin, dermatologue, exercice libéral, Strasbourg
Denis Perrin, dermatologue, exercice libéral, Strasbourg
Nadine Pomarede, dermatologue, exercice libéral, Paris
Bernard Rossi, dermatologue, exercice libéral, Rouen
Denis Salomon, dermatologue, exercice libéral, Genève, Suisse
Noël E.C. Schartz, dermatologue, exercice libéral, Paris
Jack Smadja, dermatologue, exercice libéral, Paris
Gérard Toubel, dermatologue, exercice libéral, Rennes ; ancien président du Groupe Laser
de la Société française de dermatologie
Jean-Luc Vigneron, dermatologue, exercice libéral, Saint-Paul-de-Vence
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Avant-propos
Nous sommes heureux de vous proposer ce livre qui nous a semblé nécessaire, vu le développement
rapide des techniques de dermatologie esthétique en France et dans le monde. Ce domaine est devenu
de plus en plus complexe, avec une prise en charge toujours plus précise, évoluant de la correction
simple des symptômes spécifiques du vieillissement à un abord véritablement émotionnel de l'esthé-
tique, thérapeutique et préventif, incluant la correction des expressions négatives et le respect de la
dynamique faciale. Nous constatons la multiplication de ces techniques qui va de pair avec l'augmenta-
tion de la demande par nos patients qui, de plus en plus, souhaitent des techniques non chirurgicales,
peu invasives. Ainsi, les différentes branches de la médecine esthétique se développent en parallèle, qu'il
s'agisse de la cosmétologie, des peelings, des produits injectables, soit volumateurs, soit myorelaxants,
ou des lasers et autres appareils fondés sur l'émission d'énergies. Ceux-ci voient leur nombre sans cesse
augmenter, accompagnés d'une diversification même des sources d'énergies, qui ne reposent plus seule­
ment sur un effet thermique, mais aussi parfois sur l'émission d'ultrasons, de radiofréquences, de micro-
ondes, voire d'une extraction de chaleur visant à créer un refroidissement intense.
C'est pourquoi nous vous proposons pour chacune de ces sous-spécialités un chapitre particulier
visant à appréhender la médecine esthétique dans sa globalité. De plus, il faut tenir compte des
types de peaux : on ne peut pas traiter de la même façon un patient caucasien, asiatique, dans lequel
le risque d'hyperpigmentation post-inflammatoire est très important, ou un patient de phototype V
ou VI pour lequel il sera fondamental d'éviter tout risque d'achromie.
De même, nous insisterons sur les spécificités de la médecine esthétique : réaliser un traitement à
visée esthétique peut être considéré comme plus difficile qu'un traitement médical. Cela peut paraître
paradoxal, mais nous ne devons pas perdre de vue qu'en médecine nous évaluerons, avant de proposer
un traitement, la balance entre ces bénéfices attendus et les risques possibles. À l'inverse, en médecine
esthétique, nous ne devons prendre aucun risque et avons quand même la nécessité, au moins morale,
d'obtenir des résultats. Cela est forcément plus difficile  ! Notre expertise en physiologie, immunologie
et réparation cutanée alliée à notre compétence en esthétique incluant l'analyse complète de la
séméiologie du vieillissement nous placent en position privilégiée pour aborder cette nouvelle disci-
pline de façon scientifique avec toute la rigueur nécessaire pour en garantir la sécurité et l'efficacité.
Par ailleurs, on peut se poser la question de la place de la prévention dans la médecine esthétique :
celle-ci n'est pas seulement correctrice, elle est devenue également préventive, et en cela aide le
patient à bien vieillir, plutôt qu'à le faire rajeunir. De même, de plus en plus de patients réclament
des résultats naturels, progressivement visibles.
En conclusion, nous pensons que le développement de ces techniques justifie pleinement un enseigne­
ment spécifique de la dermatologie esthétique. Cela a déjà vu le jour grâce en particulier aux cours et
congrès déjà proposés par les groupes thématiques de la Société française de dermatologie, le gDEC,
Groupe de dermatologie esthétique et correctrice, et le Groupe Laser. Notre époque est devenue celle
de l'image, la génération des millennials est très soucieuse de son apparence et les mamy- et papy-­
boomers souhaitent vieillir en conservant des expressions émotionnelles positives. Ce livre de dermato-
logie esthétique résume l'ensemble des traitements actuellement validés pour répondre à cette demande
et sera un support pour les jeunes dermatologues et médecins esthétiques qui souhaitent se perfection-
ner et compléter leur formation dans ce domaine passionnant en constante évolution.
Nous espérons qu'il aidera chacun à acquérir le maximum de compétences. Et pour être compétent,
il faut non seulement connaître les techniques qu'on utilise régulièrement, mais aussi les autres, afin de
choisir pour chaque patient les meilleures techniques, la meilleure synergie. Ainsi les maîtres mots en
matière de médecine esthétique sont « synergie et sécurité ». Nous souhaitons que cet ouvrage vous y
aidera, et nous remercions tous les auteurs, libéraux et universitaires, qui y ont contribué.

Catherine Raimbault
Groupe de dermatologie esthétique et correctrice de la Société française de dermatologie
Jean-Michel Mazer
Groupe laser de la Société française de dermatologie

XI
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Préface
Dermatologie esthétique : depuis 20 ans,
que de chemin parcouru !
À la fin des années 1990, la dermatologie esthétique, déjà bien développée aux États-Unis, était
encore en France à l'état embryonnaire. Certes, quelques rares confrères, souvent formés à l'étranger,
exerçaient leur art en clientèle privée. Mais dans le milieu hospitalo-universitaire, l'esthétique était
mésestimée, jugée futile, sans bases scientifiques sérieuses et la plupart de nos collègues étaient très
réticents à admettre qu'il fallait s'y intéresser et ne pas l'abandonner aux chirurgiens plasticiens et
aux médecins esthéticiens. Certains étaient cependant sensibles à ces arguments, notamment
Brigitte Dreno qui, pendant sa présidence de la Société française de dermatologie (SFD) en 2004–
2005, a fait reconnaître la dermatologie esthétique comme partie intégrante de notre spécialité.
Avant cela, la dermatologie esthétique avait commencé à s'institutionnaliser, grâce à Jean-Paul
Ortonne, président de la SFD en 1996, qui m'avait chargée de la mise en place d'un diplôme interuni-
versitaire (DIU) de dermatologie esthétique, lasers dermatologiques et cosmétologie, dont je suis
restée coordonnateur national de 1997 à 2005, très aidée par des libéraux ayant la pratique de l'es-
thétique qui se sont beaucoup investis dans l'enseignement des plus jeunes. Bordeaux était l'Univer-
sité coordonnatrice, mais d'autres (Besançon, Lille, Nice, Paris) ont participé à ce DIU actuellement
coordonné par Thierry Passeron.
Parallèlement, sous l'égide de la SFD et la présidence très dynamique de Thierry Michaud, se met-
tait en place en 2008 le gDEC (Groupe de dermatologie esthétique et correctrice). Beaucoup d'ac-
tions visant à la promotion de la dermatologie esthétique ont été développées : l'ADEC (Académie du
gDEC) destinée à la formation initiale des internes, avec l'appui du Collège des enseignants et des
services hospitalo-universitaires de Nantes, Bordeaux, Besançon, Nice, Rouen, Marseille, Toulouse ; le
CADEC (Cours d'anatomie du gDEC), avec l'aide de nos amis chirurgiens plasticiens ; le CEDEC (Cercle
des experts du gDEC) pour des discussions informelles entre dermatologues investis en esthétique ;
VigiDEC qui, réunit avec Vigipil, est devenu le réseau de vigilance en esthétique ; la revue Dermatologie
Esthétique, organe d'expression du gDEC, dont j'ai été rédacteur en chef pendant 3 ans. Catherine
Raimbault-Gérard, devenue présidente du gDEC en 2016, a poursuivi ces actions et ajouté l'ADEC
approfondissement, la section d'analyse bibliographique animée par Isabelle Rousseaux, Anne Le
Pillouer Prost et ­moi-même. Depuis sa création, le gDEC a participé activement, par des formations
médicales continues et des forums aux Journées Dermatologiques de Paris, à des congrès sur le thème
de l'esthétique en Tunisie et au Maroc, et organisé les Journées annuelles parisiennes du gDEC
En même temps, l'avènement des injectables, toxine botulique et produits de comblement des
rides et de volumétrie (fillers) ainsi que les progrès technologiques dans le domaine des lasers révo-
lutionnaient la dermatologie esthétique, dont les moyens étaient jusqu'à la fin du siècle dernier
assez limités, et ces procédés interventionnels médicaux lui permettaient un essor considérable en
France et dans le monde entier. Ainsi les signes du vieillissement du visage pouvaient-ils être corrigés
et retardés ou même prévenus. Une prise en charge globale devenait possible, ne se limitant plus au
vieillissement cutané, mais concernant aussi le vieillissement des structures sous-cutanées, muscu-
laires responsables des rides dynamiques avec la toxine botulique, la ptose et/ou l'atrophie du tissu
adipeux par les fillers permettant le remodelage volumétrique des parties molles et même le camou-
flage de la perte osseuse. D'autres modifications inesthétiques du visage, cicatrices, petites asymé-
tries, etc., pouvaient aussi être très améliorées, ainsi que le vieillissement et certaines
modifications  inesthétiques extrafaciales. Actuellement, la demande du public s'est fortement
accrue pour ces techniques non chirurgicales, en raison de leurs bons résultats et de leur caractère
peu invasif. Mais il faut s'adresser à un praticien bien formé et expérimenté, respectant l'éthique et
l'information des patients, appliquant des techniques validées et se limitant à des indications raison-
nables. En France, les praticiens ont su garder le naturel et l'expressivité (French touch) auxquels
tiennent les patients et éviter l'écueil des visages figés et d'un excès de correction des volumes qui
ont parfois discrédité ces techniques. Mais attention, il peut y avoir des accidents, notamment avec
les fillers s'il y a embolisation malencontreuse d'un vaisseau, et une bonne connaissance de l­ 'anatomie

XIII
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XIV Préface

est indispensable pour l'éviter. Il faut bien choisir aussi, selon ses propriétés rhéologiques, le filler à
injecter en fonction de la localisation. Avec la toxine botulique, on doit tenir compte de la dyna-
mique du visage et de l'équilibre des balances musculaires. Dans les pays asiatiques, les patientes et
aussi les patients souhaitent souvent dès le plus jeune âge transformer leur visage et l'européaniser,
ce qui conduit parfois à des indications excessives et à un plus grand nombre d'accidents, car les
fillers sont alors injectés en trop grande quantité, pas toujours par des médecins, dans des zones à
risque, comme le nez et la racine du nez.
Il existe quelques ouvrages en langue française pour guider la pratique des médecins, des chirur-
giens et des dermatologues qui s'intéressent à l'esthétique. L'Encyclopédie Médico-Chirurgicale de
Cosmétologie et Dermatologie esthétique est le traité académique de référence. Il y a aussi la collec-
tion (éditée par Arnette), à vocation pratique, dirigée par Thierry Michaud et moi-même, dont un
des titres phares est L'Art de la toxine botulique en esthétique et des techniques combinées (L.
Belhaouari et V. Gassia). Il faut mentionner aussi l'ouvrage de référence conçu par le groupe Laser,
Les lasers en dermatologie (paru chez Doin), régulièrement mis à jour (4e édition en 2018) tant les
progrès dans ce domaine et dans celui des technologies apparentées sont rapides.
Mais pour synthétiser l'ensemble de ces techniques esthétiques, leurs indications, leurs perfec-
tionnements et leurs résultats, il manquait un livre pratique, un Vademecum pour les praticiens
débutants et même pour les plus chevronnés. C'est l'objectif de ce traité, Dermatologie esthétique,
élaboré le groupe gDEC et son partenaire le Groupe Laser qui, nous l'espérons, sera utile à tous.
Claire Beylot
Professeur émérite de dermatologie à l'Université de Bordeaux,
ancien chef de service de dermatologie, CHU de Bordeaux
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Préface
Pour une dermatologie esthétique rigoureuse
et de qualité
La dermatologie esthétique est une composante pleine et entière de la dermatologie. Sa pratique
nécessite des connaissances approfondies de l'anatomie mais aussi de la physiologie de la peau et
des principales dermatoses congénitales ou acquises. De même, l'utilisation des lasers et techniques
apparentées telles que la radiofréquence, la cryolipolyse ou les ultrasons focalisés n'est pas anodine
et nécessite, outre les connaissances sus-citées, de bien appréhender des notions physiques telles
que l'impédance, mais aussi de connaître les principaux chromophores de la peau et leurs pics d'ab-
sorption, ou bien encore les temps de relaxation thermique des cibles. Conscient de l'ensemble des
connaissances supplémentaires à acquérir afin de pratiquer les soins et actes esthétiques, le Collège
des enseignants en dermatologie de France (CEDEF), en lien avec la Société française de dermato­
logie (SFD) et avec l'aide d'enseignants universitaires et libéraux, a maintenant pleinement intégré la
dermatologie esthétique dans la formation des internes en dermatologie. Pour maintenir cette for-
mation et compléter les connaissances des médecins plus anciens, le diplôme interuniversitaire de
dermatologie esthétique propose chaque année à des étudiants francophones venant de très nom-
breux pays d'acquérir des connaissances approfondies dans tous les domaines de la dermatologie
esthétique. Les groupes thématiques de la SFD, tels que le Groupe Laser et le groupe de Dermatologie
esthétique et correctrice (gDEC), animés par des dermatologues passionnés, transmettent chaque
année leur expertise par des cours, forums et congrès de qualité qui permettent à l'ensemble des
praticiens de parfaire leurs connaissances, mais aussi de se tenir informés des avancées qui sont
nombreuses et fréquentes dans le domaine.
La demande esthétique est de plus en plus forte et de nombreux médecins la proposent sans par-
fois avoir acquis les connaissances nécessaires à une bonne compréhension de la peau et des derma-
toses, mais aussi dans la pratique des différentes techniques et différents actes aujourd'hui disponibles.
Cela n'est pas sans risque pour les patients (non-diagnostic d'un mélanome sur une demande de
traitement de « tache brune », méconnaissance d'une hypermélanocytose dermique acquise pouvant
mimer un mélasma, d'une malformation artérioveineuse sur une lésion pouvant faire évoquer une
« simple » atteinte capillaire, mauvais choix de paramètres laser ou injection intra-artérielle de pro-
duits de comblement, etc.). Ainsi, la diffusion du savoir est indispensable pour que tous les médecins
pratiquant la dermatologie esthétique soient formés de manière optimale. En ce sens, ce traité de
Dermatologie esthétique, coordonné par le Groupe Laser et le gDEC et écrit par des experts reconnus
dans leur domaine, est une excellente initiative qui offrira à tous les connaissances les plus actuelles
sur la dermatologie esthétique tout en restant pratique pour être utile à tous.

Pr Thierry Passeron
Service de dermatologie, CHU de Nice, et INSERM U1065, C3M

XV
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Abréviations
AAG alopécie androgénétique
AG acide glycolique
AH acide hyaluronique
AHA alpha-hydroxyacide
AINS anti-inflammatoire non stéroïdien
AL acide lactique
AMM autorisation de mise sur le marché
ANSM Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé
AQP aquaporines
ARS Agence régionale de santé
AS acide salicylique
AT acide tranexamique
AVV atrophie vulvovaginale
BDDE 1,4-butanediol diglycidyl éther
BoNT toxine botulinique (botulique)
CaHa hydroxyapatite de calcium
CMC carboxyméthylcellulose
CPL caprolactone
CSP Code de la santé publique
DUPA diffuse unpatterned alopecia
EBM evidence-based medicine
EIFC érythrose interfolliculaire du cou
EIGS événement indésirable grave associé à des soins
EMG électromyogramme
FDA Food and Drug Administration
FPS facteur de protection solaire
FUE follicular unit extraction
FUT follicular unit transplantation
GAG glycosaminoglycanes
GSM syndrome génito-urinaire de la ménopause
HA acide hyaluronique
HAS Haute autorité de santé
HIFU high intensity focused ultrasounds
HPI hyperpigmentation post-inflammatoire
HQ hydroquinone
HUD home use devices
IGF insulin-like growth factor
IPL intense pulsed light
IRM imagerie par résonance magnétique
LCP laser à colorant pulsé
LED light emitting diode
LFA laser fractionné ablatif
LFNA laser fractionné non ablatif
LHA lipo-hydroxy acide
MEP matériel à émission photonique
MMP métalloprotéinase

XIX
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XX Abréviations

MTZ microthermal zones


NAFP non-ablative fractional photothermolysis (photothermolyse fractionnée non ablative)
PBM photobiomodulation
PCL polycaprolactone
PDO polydioxanone
PDT photothérapie dynamique
PHA polyhydroxy-acide
PLLA acide L-polylactique
PRP plasma riche en plaquettes
PV photovieillissement
RCP responsabilité civile et professionnelle/résumés des caractéristiques des produits
RF radiofréquence
ROL rétinol
SMAS superficial musculo-aponeurotic system (système musculo-aponévrotique superficiel)
SOOF sub-orbicularis oculi fat
TB toxine botulique
TCA acide trichloracétique
TGF transforming growth factor
THS traitement hormonal substitutif
TLR Toll-like receptor
TRT temps de relaxation thermique
VEGF vascular endothelial growth factor
VIH virus de l’immunodéficience humaine
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du vieillissement Partie 1
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Chapitre 1
Évaluation clinique
du vieillissement cutané et global
du visage et du corps
Esquisse des possibilités thérapeutiques
C. Beylot

Introduction Cette évaluation préthérapeutique est clinique et néces­


site une bonne connaissance du vieillissement cutané et des
Prévenir, corriger les signes du vieillissement facial et même tissus sous-cutanés, dont il faudra apprécier le degré. Ce cha­
rajeunir est la demande prioritaire des patientes et aussi pitre sera donc essentiellement clinique et anatomique, et
des patients qui consultent en dermatologie esthétique. Le n'abordera pas la physiopathologie du vieillissement et très
poids démographique croissant des seniors, la pression peu l'histologie. En fonction des altérations observées, il
sociologique qui rejette impitoyablement tout signe appa­ esquissera les possibilités thérapeutiques qui ne seront pas
rent de vieillissement, la nécessité de paraître jeune le plus détaillées puisqu'elles font l'objet des chapitres suivants de
longtemps possible dans la vie professionnelle et person­ cet ouvrage.
nelle, la large information médiatique sur les performances
des traitements esthétiques expliquent cette demande en
forte croissance. Mais les seniors ne sont pas les seuls à Premier contact avec le patient
consulter dans ce but. Des personnes de plus en plus jeunes
voulant prévenir ou retarder le plus possible le vieillisse­
ment de leur visage par des méthodes interventionnelles le
Une première impression [1, 2]
font aussi.
Les progrès des thérapeutiques correctrices non chirurgi­ Âge perçu
cales, lasers, produits injectables, toxine botulique et comble­ L'estimation de l'âge apparent d'un patient et sa comparai­
ment, ont restreint les indications chirurgicales et leur son avec son âge chronologique réel sont un élément
caractère moins invasif encourage les patients à y recourir. important du bilan clinique initial (fig. 1.1). L'âge perçu, qui
L'efficacité de ces traitements, quand ils sont bien choisis et dépend à la fois de facteurs génétiques et environnemen­
effectués par un praticien compétent, fait que les souhaits taux, résulte des diverses composantes du vieillissement
des patients ont quitté le domaine de l'utopie pour devenir facial analysées plus loin, associées de façon très variable
des objectifs tout à fait réalistes. selon les individus. Ce premier coup d'œil médical peut
Mais la réussite du traitement nécessite une évaluation sembler une évaluation un peu sommaire, mais ce critère
précise du vieillissement, surtout facial, pour proposer au est tout à fait valable et a été mentionné dans la littérature,
patient le traitement personnalisé qui le satisfera, car notamment par Carruthers et al. [3], pour apprécier l'effi­
chaque visage vieillit différemment. Les patients veulent un cacité des traitements esthétiques réguliers et prolongés
résultat naturel, qui ne change pas trop leur aspect habituel, sur plusieurs années.
mais qui leur donne l'air reposé, une bonne mine, un visage
raisonnablement rajeuni, sans expressions négatives liées au Points positifs et négatifs
vieillissement ; en somme, il s'agit d'« être le même en Ce premier coup d'œil permet aussi de repérer les éléments
mieux » avec surtout pas de visage figé à cause d'un traite­ positifs à mettre en valeur – expressivité du visage, vivacité
ment excessif ou trop standardisé, conduisant au « clonage du regard, beauté du sourire – ou, au contraire, les expres­
esthétique ». sions inappropriées liées au vieillissement qu'il faudra

Dermatologie esthétique
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du vieillissement
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Chapitre 1. Évaluation clinique du vieillissement cutané et global du visage et du corps

c­ orriger – air anxieux, triste, sévère, fatigué, ne reflétant pas Interrogatoire et discussion
les sentiments du patient et l'image qu'il souhaite trans­ avec le patient
mettre à son entourage.
Il faut évaluer la motivation du patient pour le traitement
esthétique qu'il envisage, dans un but personnel, familial et/
ou professionnel, et savoir ce qu'il désire corriger en priorité.
Les patients demandent le plus souvent un effet de rajeu­
nissement raisonnable, en gardant leur personnalité et leur
naturel. Mais ils tiennent beaucoup à la correction des
expressions inappropriées.
Un plan de traitement sera établi, en accord avec le patient,
en fin d'examen analytique des différentes composantes du
vieillissement facial et extrafacial. Ce sera un compromis
entre les désirs du patient, ses possibilités financières et le
projet médical idéal de traitement. Ces éléments seront syn­
thétisés dans le courrier à son médecin traitant. Les règles
concernant l'information des patients en esthétique, sur le
bénéfice attendu de telle ou telle technique et ses risques
éventuels seront respectées et un devis détaillé sera établi
pour que le patient donne, après réflexion, son consente­
ment éclairé.
Des photographies avant traitement sont indispensables
pour comparaison avec le résultat ultérieur. Elles auront, en
cas de contestation sur la qualité de ce résultat, une valeur
médico-légale.
Bien entendu, l'interrogatoire fera le point sur les anté­
cédents médicaux du patient, les traitements en cours
ou prévus (l'interféron contre-indique l'injection de pro­
Fig. 1.1  Vieillissement chronologique au niveau des parties couvertes. duits de comblement). Il faudra aussi s'enquérir de trai­
A. Débutant, avec de fines ridules parallèles et un discret amincissement tements esthétiques antérieurs, rechercher notamment
cutané. B. Évolué : peau amincie et fripée formant des plis comme un vête­ l'injection de produits de comblement non résorbables
ment trop grand. susceptibles d'entraîner des complications si l'on injecte
Source  : [1], EMC Cosmétologie et Dermatologie Esthétique (© Elsevier
Masson SAS. Tous droits réservés).
à nouveau un produit autorisé résorbable. Mais, sou­
vent, il est difficile d'avoir des renseignements précis car
les patients ne savent pas ce qui leur a été injecté des
Autres points années avant.
Les autres points observés sont les suivants :
■ le morphotype du visage du patient qui conditionne son Analyse du vieillissement facial global
mode de vieillissement  : bréviligne au visage large qui a Longtemps, l'intérêt s'est limité au vieillissement cutané,
tendance à se ptoser, alors que les longilignes vont se seul accessible aux techniques de surface non chirurgi­
squelettiser ; cales. Mais la peau ne vieillit pas seule. Les tissus sous-cuta­
■ les asymétries : elles peuvent être constitutionnelles mais nés, musculaires, adipeux et osseux vieillissent aussi, leurs
aussi acquises, compensatrices de causes sous-jacentes altérations s'intriquant avec celles de la peau, de façon très
(problèmes de vision, ou dentaire) ; variable selon les individus. Une meilleure connaissance
■ le défaut dominant, qu'il faudra traiter en priorité. Il anatomique et fonctionnelle du vieillissement des tissus
n'est pas toujours le même pour le patient et le méde­ sous-cutanés et surtout l'avènement des injectables, toxine
cin. L'exemple fréquent est le patient qui demande botulique et produits de comblement, offrent maintenant
avant tout le comblement des sillons naso-géniens alors aux dermatologues un champ d'action beaucoup plus
qu'il faudrait d'abord rétablir les volumes du tiers vaste, pour comprendre et traiter le vieillissement facial
moyen du visage. dans sa globalité.
Bien entendu, le patient ne s'examine pas seulement au Le vieillissement facial résulte à la fois de facteurs géné­
repos, mais en dynamique, à sa mimique quand il parle, aux tiques et environnementaux, associés de façon variable. On
mouvements forcés, froncement des sourcils notamment [4]. distingue quatre types de vieillissement cutané, avec par
L'importance de la dynamique faciale fait l'objet du chapitre conséquent des aspects différents, dont l'évaluation clinique
suivant. appréciera le degré, en sachant qu'en réalité plusieurs types

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de vieillissement cutané peuvent se superposer chez le conjonctif insuffisant. De petites déchirures de la peau
même individu. sont suivies de pseudo-cicatrices stellaires dites sponta­
nées sur le dos des mains et aux faces d'extension des
Vieillissement cutané membres. L'âge n'est pas seul responsable de ces altéra­
tions, qui correspondent au stade initial de la dermatopo­
rose [5] décrite plus loin ; le PV y participe aussi et explique
Vieillissement cutané intrinsèque les localisations préférentielles en régions insolées. En
revanche, les incisions chirurgicales, notamment au visage
Vieillissement chronologique [1] après exérèse d'une tumeur cutanée, cicatrisent bien et les
Le vieillissement chronologique est lié à l'âge et génétique­ cicatrices sont rapidement moins visibles que chez un
ment déterminé, mais variable en fonction de l'horloge bio­ sujet jeune.
logique de chaque individu. La peau du sujet âgé se déshydrate et s'irrite assez facile­
Il concerne tout le corps, mais s'évalue plus facilement ment. Le prurit est fréquent, surtout en hiver si les bains ou
au niveau des parties couvertes, car sur les zones décou­ les douches sont trop chauds et trop prolongés.
vertes, notamment au visage, il est masqué par le photo­ Les proliférations bénignes sont très fréquentes : kératoses
vieillissement (PV), souvent dominant (fig.  1.2). séborrhéiques, surtout sur le tronc mais parfois aussi visage,
Cliniquement et à la biopsie, il y a un affaiblissement de papillomes pédiculés des grands plis, angiomes rubis, lacs
toutes les composantes de la peau, sauf de la couche cor­ sanguins séniles. Mais les tumeurs malignes, les carcinomes
née, plutôt épaissie. La peau est amincie, flétrie, déshy­ baso- et spinocellulaires, les mélanomes sont liés au PV plus
dratée, souvent finement squameuse. L'atrophie et la qu'au vieillissement chronologique.
perte de densité dermique se traduisent par la formation Les phanères vieillissent aussi ; les cheveux grisonnent puis
de fines ridules parallèles et au niveau des grands plis ; blanchissent, deviennent plus fins et se raréfient. La pilosité
chez les plus âgés, la peau devient flasque comme un diminue sur le corps et dans les régions ambosexuelles, les
vêtement trop grand. ongles poussent plus lentement, ceux des mains s'amin­
La fragilité cutanée explique la formation, au moindre cissent, avec des stries longitudinales, et deviennent cas­
traumatisme, de taches purpuriques, car les petits vais­ sants, alors que ceux des pieds, surtout aux gros orteils, ont
seaux dermiques sont mal protégés par un environnement tendance à s'épaissir et sont souvent atteints de mycose.

A B
Fig. 1.2  A. Contraste entre le photovieillissement (PV) majeur des parties découvertes et le vieillissement discret des parties couvertes, chez une paysanne
âgée. B. PV très marqué avec carcinome basocellulaire infiltrant (flèche), à ne pas confondre avec une simple cicatrice et à traiter en priorité.
Sources : fig. A [1], EMC Cosmétologie et Dermatologie Esthétique (© Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés) ; fig. B, Dr O. Cogrel.

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Vieillissement hormonal l'étude de populations d'origine celtique émigrées dans


Le « coup de vieux » de la ménopause [1] des pays très ensoleillés (Californie, Australie, Afrique
du Sud).
La chute brutale des œstrogènes se traduit par l'accentua­
Les altérations siègent sur les parties découvertes mais
tion rapide de signes proches de ceux du vieillissement chro­
sont généralisées chez les fanatiques du bronzage.
nologique, chez les femmes qui n'ont pas de traitement
L'évaluation clinique suffira à appréciera l'intensité du PV,
hormonal substitutif (THS). La peau s'amincit, se flétrit, s'as­
les classifications gradant le PV, dont la plus connue est celle
sèche, surtout au visage, plus riche en récepteurs des œstro­
de Glogau, étant peu utilisées en pratique [9].
gènes. Sur le plan histologique, il y a une diminution du
collagène dermique, estimée à 30 % pour les cinq premières
Au visage [2, 8, 10]
années d'une ménopause non substituée et ensuite 1 à 2 %
Altérations de la texture et des propriétés
par an, parallèle à celle de la trame osseuse et au risque biomécaniques de la peau
ostéoporotique. Le contenu dermique en acide hyaluro­
La peau est le plus souvent épaissie, jaunâtre, parcourue de
nique (AH) s'appauvrit aussi, d'où l'altération de la viscoélas­
rides plus ou moins profondes, les orifices folliculaires sont
ticité cutanée.
dilatés (peau citréine). Ayant perdu son élasticité, elle est
D'autres désagréments sont liés à la carence œstrogé­
flasque et relâchée. Ces altérations de texture et de viscoélas­
nique : bouffées vasomotrices et sudorales, sécheresse et
ticité entraînent celles de ses propriétés biomécaniques.
atrophie de la muqueuse génitale responsable de
Mais elles n'expliquent pas tout, car il ne faut pas négliger la
dyspareunie, plus rarement kératodermie palmoplantaire
participation du vieillissement des tissus sous-jacents. En
climatérique.
effet, la peau suit passivement la ptose du tissu adipeux et
Et ce n'est pas tout, car s'installe à la ménopause une hype­
épouse son atrophie (accentuation des plis naso-géniens,
randrogénie relative, les androgènes, bien que diminués, étant
altération de l'ovale du visage, bajoues).
toujours présents et leurs effets non contrebalancés par l'ef­
Chez les sujets à peau claire, la peau est plutôt amincie,
fondrement des hormones féminines, œstrogènes et proges­
finement ridée, avec peu de ptose, des télangiectasies, des
térone. On constate alors un renforcement de la pilosité au
lentigos solaires et un risque accru de cancers cutanés.
visage et une alopécie de type androgénique. Ces manifesta­
tions restent habituellement discrètes, mais nuisent à la qua­ Rides
lité de vie car perçues comme une perte visible de la féminité.
Les rides sont la préoccupation essentielle des patientes
Le THS peut éviter ou atténuer l'ensemble de ces manifes­
[2, 11]. Il y a deux types de rides principaux, que le clinicien
tations de la carence œstrogénique, mais d'une façon variable
doit savoir différencier car leur cause est différente et qu'ils
d'une femme à l'autre [6].
ne relèvent pas du même traitement. Mais en fait, les rides
Et chez l'homme ? sont souvent multifactorielles et une stricte distinction
risque d'être trop schématique.
Il y a une diminution des androgènes, mais elle est progres­
■ Les rides dynamiques (glabelle, patte d'oie, région péri­
sive, sans chute brutale et l'on préfère parler de « déficit
buccale –  fig.  1.3) résultent de l'action des muscles
androgénique lié à l'âge » plutôt que d'andropause. Le vieil­
peauciers sur la peau qui se plisse passivement en
lissement chronologique est plus progressif et lent que chez
accordéon. Chez le sujet jeune, l'élasticité cutanée est
la femme. Des crises d'hypersudation, comparables à celles
intacte et peau ne garde pas le pli. Mais plus tard, ces
qui accompagnent les bouffées vasomotrices chez la femme,
muscles restent en contraction permanente, compen­
ont été signalées.
satrice de leur vieillissement, et des rides définitives
s'impriment dans la peau photovieillie et distendue. La
Vieillissement cutané extrinsèque toxine botulique (TB) les efface quand le PV n'est pas
Le vieillissement cutané extrinsèque est lié à des facteurs trop marqué, mais s'il l'est davantage, les rides s'atté­
d'environnement, qu'un article récent propose d'appeler nuent sans disparaître et des techniques complémen­
« exposome », qui sont très variables d'un individu à l'autre, taires sont nécessaires (comblement des rides par les
en fonction du mode de vie [7]. fillers, parfois relissage par laser). Au niveau de la région
péribuccale, les rides dynamiques, en code-barre, légè­
Photovieillissement (ou héliodermie) rement obliques car perpendiculaires au sens de
Depuis les travaux novateurs d'A. et L. Kligmann A et L, contraction du muscle orbiculaire des lèvres, inté­
le terme de photovieillissement (PV), traduction de ressent les deux lèvres blanches avec extension au ver­
photoaging, est préféré à celui d'héliodermie [8]. Le PV millon, et doivent être différenciées des rides
prédomine nettement sur les autres types de vieillisse­ élastosiques, car elles sont améliorées par la TB et le
ment, en particulier au visage. Mais s'il est l'archétype comblement, mais peu ou pas par les lasers de
du vieillissement de cause environnementale, la géné­ relissage.
tique intervient aussi car le PV est beaucoup plus mar­ ■ Les rides élastosiques, statiques, sont directement liées

qué chez les sujets de photopype clair, comme le montre à l'élastose du derme superficiel qui caractérise le PV

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Fig. 1.3  Ces trois types de rides péribuccales diffèrent par leur séméiologie et leur traitement.
A. Rides héliodermiques, prédominant très nettement sur la lèvre blanche supérieure, verticales sur fond d'élastose actinique marquée. Elles épargnent
presque complètement la lèvre blanche inférieure, moins photo-exposée, alors que le PV est assez marqué sur le reste du visage. À traiter par laser de
relissage ou peeling au phénol localisé. B. Rides dynamiques péribuccales plus obliques car perpendiculaires au muscle orbiculaire des lèvres. À traiter
prudemment par toxine botulique et comblement. Les techniques de surface (laser, peeling) seront décevantes. C. Rides chez une fumeuse. Prédominance
au niveau de la lèvre supérieure, avec rides verticales évoquant des rides héliodermiques. Mais, bien qu'il n'y ait pas d'élastose actinique du visage, il y a aussi
des rides verticales sur la lèvre blanche inférieure et une pénétration accentuée des rides dans le vermillon, bien visible sur la lèvre rouge inférieure, témoi­
gnant du rôle direct du tabac sur l'ensemble de la région péribuccale. Traitement : arrêt du tabac et laser de relissage.
Source : [1], EMC Cosmétologie et Dermatologie Esthétique (© Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés).

et elles intéressent les zones les plus insolées du


visage. Le « plissé soleil » de la lèvre blanche supé­
rieure où des rides verticales se découpent dans la
peau élastosique, alors que la lèvre blanche inférieure
moins photo-exposée est indemne ou peu atteinte,
en est un des meilleurs exemples, marqueur d'exposi­
tions solaires excessives. Le vermillon supérieur,
moins insolé que le vermillon inférieur, est peu altéré.
Très inesthétique, ce plissé soleil est précoce sur les
phototypes clairs. Les techniques de surface (lasers
CO 2 impulsionnels ou fractionnés, peeling au phénol)
sont ici indiquées.
Il y a encore :
■ les rides de froissement dues au relâchement de la peau

photovieillie qui devient plus froissable que le matelas


graisseux et musculaire sous-jacent. Pour certains, la
pression nocturne de l'oreiller pourrait expliquer les
rides jugales et les rides verticales frontales (rides de
l'oreiller). Mais en fait, l'individualisation de ces rides est
Fig. 1.4  Lésions associées au photovieillissement.
discutable car leur mécanisme est proche de celui des A. Lentigos solaires  : taches pigmentées planes et lisses de dimensions
rides élastosiques et la dynamique musculaire pourrait variables. B. Kératoses actiniques du rebord photo-exposé de l'hélix. Risque
intervenir aussi puisque certaines d'entre elles sont amé­ d'évolution vers un carcinome épidermoïde.
liorées par la TB ; Source : fig. B [1], EMC Cosmétologie et Dermatologie Esthétique (© Elsevier
Masson SAS. Tous droits réservés).
■ les fines ridules parallèles superficielles, liées au vieillisse­

ment chronologique en zone couverte, sont majorées en Les kératoses actiniques sont de teinte grise ou rosée, mais
zone découverte par le PV, surtout au dos des mains et des surtout, elles sont rugueuses (voir fig. 1.4). Siégeant sur les
poignets. zones les plus photo-exposées du visage et chez l'homme sur
le cuir chevelu chauve, elles peuvent évoluer vers un cancer
spinocellulaire. Elles méritent donc d'être traitées par les
Autres lésions liées au photovieillissement diverses techniques possibles, azote liquide, 5-fluorouracile
Lésions pigmentées (5 FU), photothérapie dynamique (PDT).
La pigmentation inhomogène du visage est une des caracté­ Certains cancers cutanés se présentent comme des lésions
ristiques du PV. Les lentigos solaires lisses, de taille variable, pigmentées et relèvent de l'exérèse chirurgicale (mélanome
sont présents chez 90 % des sujets de type européen de plus de Dubreuilh à ne pas confondre avec un lentigo, carcinome
de 60 ans (fig. 1.4). Ils sont bénins et ne dégénéreront pas, basocellulaire pigmenté).
mais ils sont un marqueur d'expositions solaires excessives et Lésions vasculaires
des dégâts qui s'ensuivent. Ils seront traités par lasers pig­ La rosacée érythrocouperosique, plus fréquente chez les
mentaires ou IPL. sujets à peau claire (malédiction des Celtes) est ­multifactorielle,

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mais le PV en est un élément important, comme en À la nuque, chez les sujets professionnellement très exposés
témoignent ses localisations dans les zones les plus photo-­ au soleil, la peau épaissie et élastosique est sillonnée de rides
exposées du visage. profondes à disposition losangique (nuque rhomboïdale).
Enfin, au cou, des rides transversales, liées à la ptose et au
Autres lésions relâchement d'une peau flétrie, dissimulent mal le relief vertical
D'autres lésions disparates parsèment la peau photovieillie des cordes platysmales sous-jacentes. Au décolleté, l'EIFC se
du visage : poursuit et les rides, plus discrètes, sont obliques, mieux
■ élastoïdose à kystes et comédons de Favre et Racouchot, visibles quand la patiente se penche en avant, épaules rentrées.
siégeant surtout dans les régions orbitomalaires et parfois
au-delà (front, cuir chevelu), presque exclusivement chez Aux faces d'extension des membres
l'homme. Du fait des altérations de texture de la peau due Face dorsale des mains
au PV, la sécrétion sébacée, non augmentée, s'accumule La peau devient très atrophique, en pelure d'oignon. Elle est
dans des follicules sébacés distendus ; parsemée de lentigos solaires et de taches purpuriques et
■ adénomes sébacés dits séniles mais liés surtout au PV, qui laisse voir les structures sous-jacentes (veines dilatées et tor­
forment de petites papules ombiliquées multiples, à ne tueuses, grill osseux), en raison de l'atrophie musculo-­
pas confondre avec des microkystes ou même avec un car­ adipeuse. Il existe souvent des kératoses actiniques avec leur
cinome basocellulaire débutant ; risque de transformation spinocellulaire et des taches pur­
■ pseudomillium colloïde, en plaques jaunâtres ; puriques. Les doigts étant souvent demi-fléchis, la peau des
■ Trichostasis spinulosa, où de multiples et fins duvets deux phalanges distales est relativement épargnée par le PV,
sortent d'un même orifice folliculaire. Sur le nez, ils res­ contrastant avec celle des phalanges proximales, moins
semblent à des comédons et, groupés en placards, ils atteintes cependant que le dos de la main.
évoquent une mucinose folliculaire.
Jambes et avant-bras
Au cou et au décolleté Hypomélanose en gouttes
L'hypomélanose en gouttes, avec des taches blanches arron­
L'érythrose interfolliculaire du cou (EIFC), ou poïkiloder­
dies de quelques millimètres de diamètre, s'observe surtout
mie de Civatte, se présente comme de larges nappes poly­
chez les femmes, qui exposent davantage ces régions au
chromes, au fond rouge et atrophique ponctué de petites
soleil. Cela correspond à la disparition d'un mélanocyte qui
papules blanches correspondant au relief des follicules
ne distribue plus de mélanine aux kératinocytes de son unité
pileux non atrophiques et de taches brunes (fig. 1.5). Cet
épidermique de mélanisation.
aspect « chair de poule » inesthétique et irritable (sensa­
tion de brûlures, prurit) prédomine aux faces latérales du Dermatoporose
cou et se prolonge vers le décolleté, en respectant seule­ Sous l'influence conjointe du vieillissement chronologique et
ment un losange à l'ombre du menton. L'IPL est le traite­ du PV, la peau s'amincit, se fragilise, avec des taches purpu­
ment de choix. riques, des lentigos solaires, de petites déchirures cutanées,

A B
Fig. 1.5  A. Érythrose interfolliculaire du cou (flèche), avec micropapules blanches surélevées (follicules pileux non atrophiques) sur fond rouge atro­
phique. Le losange à l'ombre du menton est épargné de même qu'une petite zone protégée du soleil par le lobule de l'oreille (étoiles). B. Visibilité des
cordes platysmales, sous une peau atrophique. Du fait du vieillissement musculaire, le platysma est en contraction permanente et ses bords antérieurs et
postérieurs forment ces cordes inesthétiques.
Source : fig. B, Dr O. Cogrel.

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des pseudo-cicatrices stellaires spontanées de teinte nacrée [5]. Comme la clinique, l'histologie et les mécanismes physio­
L'appellation de dermatoporose (fig. 1.6) a été proposée par pathologiques sont proches de ceux du PV. L'atteinte arté­
Saurat et Kaya pour souligner cette fragilité cutanée, très fré­ riolaire est plus spécifique du tabagisme et la ménopause,
quente, en référence au terme d'ostéoporose désignant la fra­ plus précoce chez les fumeuses, est responsable du fait de la
gilité osseuse. Aux stades tardifs de la dermatoporose, la carence œstrogénique, d'une diminution du collagène der­
fragilité est extrême, avec des déchirures cutanées de cicatrisa­ mique comme dans le vieillissement.
tion difficile, surtout aux jambes, et des hématomes sous-­ Le traitement est simple : arrêter de fumer !
cutanés qui peuvent aboutir à de vastes plages de nécrose. Il
existe dans la dermatoporose une diminution importante de Vieillissement cutané et pollution
l'AH dermique liée à un déficit fonctionnel des voies du hyalu­ Le rôle de la pollution dans l'accélération du vieillissement
ronate synthétase. C'est une cible possible pour le traitement cutané est suspecté, mais difficile à prouver car impossible à
par application topique de fragments intermédiaires d'AH, qui dissocier d'autres facteurs intrinsèques ou extrinsèques
agissent comme facteurs de croissance CD  44-dépendants dominants, le PV surtout. Une étude réalisée dans la Ruhr
susceptibles de relancer la production d'AH. [13] a cependant montré chez les femmes soumises à une
forte densité de particules fines et de suie liée à la circulation
A 20 % de taches pigmentées de plus au visage que chez celles
d'un groupe vivant en zone résidentielle, mais avec peu de
corrélation avec les rides. Des travaux chinois signalent aussi
une augmentation des lésions pigmentées chez des sujets
soumis à la pollution.
B
Vieillissement des structures
sous-cutanées faciales
Associées de façon variable au vieillissement cutané, les
structures sous-cutanées faciales définissent le vieillissement
Fig.  1.6  A. Dermatoporose sur la face d'extension des avant-bras et des
mains sous l'effet conjoint du vieillissement chronologique et surtout du facial. Longtemps sous-évalué, le vieillissement de ces struc­
photovieillissement. Fragilité cutanée avec taches purpuriques et déchirures tures est capital pour comprendre et traiter le vieillissement
cutanées au moindre traumatisme, suivies de cicatrices stellaires sponta­ d'ensemble du visage.
nées. B. Détail avec taches purpuriques, croûtelles, cicatrices stellaires.
Source : fig. A [1], EMC Cosmétologie et Dermatologie Esthétique (© Elsevier
Masson SAS. Tous droits réservés). Comment les structures sous-cutanées
faciales vieillissent-elles ? [2, 11, 14–16]
Vieillissement cutané lié au tabac [12]
Les études épidémiologiques soulignent la réalité et l'impor­ Vieillissement musculaire : une hypertonie
tance du vieillissement cutané lié au tabac. Ainsi, le risque permanente [11]
d'avoir un visage prématurément ridé serait 4,7  fois plus Les muscles faciaux sont responsables de l'expressivité du
élevé chez les gros fumeurs que chez les non-fumeurs. Si le visage. Au cours du vieillissement, ces muscles compensent
tabagisme s'associe à des expositions solaires excessives, le leur atrophie et leur relâchement par une hypertonicité per­
risque est multiplié par 12 et fumer 20  cigarettes par jour manente, responsable des rides dynamiques, sur un visage
conduirait à un âge apparent supérieur de 10 ans à l'âge réel. crispé, triste et sévère. À cela s'oppose la perte d'élasticité de la
La comparaison de couples de jumeaux fumeurs et non peau qui se distend de façon passive sans aucun mécanisme
fumeurs confirme que celui qui fume est plus ridé et paraît compensatoire. Ce différentiel peau/muscle provoque les
plus âgé. rides dynamiques, surtout en région péri-orificielle où le
Le vieillissement cutané lié au tabac ressemble au PV et le réseau musculaire est plus dense et l'adhérence peau-muscle
majore : peau grisâtre, avec des rides profondes, et souvent plus étroite. Les muscles faciaux sont pour la plupart des mus­
kystes et comédons. Les rides sont particulièrement mar­ cles peauciers, avec une insertion osseuse profonde et une
quées en région péribuccale, surtout chez la femme. Elles insertion cutanée superficielle en regard de laquelle se pro­
s'associent aux rides du PV avec une atteinte plus marquée duit le plissement cutané en accordéon des rides dynamiques,
de la lèvre inférieure chez les fumeuses et poursuite des rides perpendiculaires au sens de contraction des muscles.
dans le vermillon, témoignant du rôle nocif de la fumée de Ces muscles peauciers sont très intriqués entre eux et unis
tabac sur tout le pourtour buccal qui y est directement dans les espaces intermusculaires par le fascia superficialis avec
exposé. lequel ils forment le SMAS (superficial musculo-aponeurotic
Le tabagisme entraîne aussi des difficultés de cicatrisation, system). Ils sont organisés en agonistes et antagonistes et, chez
liées à l'atteinte des artérioles cutanées, et les chirurgiens le sujet jeune, il y a un équilibre fonctionnel entre les muscles
plasticiens s'en méfient quand ils envisagent un lifting chez élévateurs et abaisseurs, notamment au niveau des deux
ces patientes et vont parfois jusqu'à récuser l'intervention. balances musculaires du visage, la balance ­frontoglabellaire qui
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équilibre la position des sourcils et la balance péribuccale. Le Analyse topographique


vieillissement peut perturber l'équilibre de ces balances au
profit des muscles abaisseurs impliqués dans les expressions
du vieillissement facial global
négatives (fatigue, amertume, tristesse), au détriment des en trois étages [2, 11, 14–17]
muscles élévateurs responsables des expressions positives de
En pratique, l'analyse du vieillissement facial se fait par étage,
joie et de dynamisme.
car les défauts dominants n'y sont pas les mêmes et une cor­
rection adaptée doit être proposée. Elle sera décrite de la
Tissu adipeux – ptose et/ou atrophie [2, 11, superficie à la profondeur.
14, 15]
Le tissu adipeux, qui donne sa plénitude harmonieuse au Tiers supérieur du visage
visage jeune, se ptose. Le haut du visage se vide, venant rem­ Cette zone s'étend de la lisière du cuir chevelu aux fentes
plir le bas, transformant sa forme dans la jeunesse (triangle à palpébrales.
sommet inférieur, pomme, cœur) en visage âgé (en triangle à
sommet supérieur, en poire) [11]. Photovieillissement cutané
En fait, c'est la graisse superficielle de la joue qui se ptose Le PV cutané intéresse particulièrement les bosses fron­
vers le bas et en dedans, venant buter sur la partie fixe de la tales, plus photo-exposées, surtout chez l'homme, et
lèvre supérieure, accentuant le pli naso-génien, qui n'est pas s'étend au cuir chevelu chauve. L'élastose solaire est sou­
une ride, mais un pli d'accumulation, contournant la com­ vent marquée, avec peau citréine épaissie, parsemée de
missure labiale et se prolongeant vers le bas par le pli lentigos solaires et de kératoses actiniques, d'adénomes
d'amertume. Au niveau du rebord mandibulaire, la graisse sébacés. Les traitements de surface par lasers sont indi­
ptosée entraîne la rupture de l'ovale et il y a formation de qués (fractionné ablatif pour l'élastose et les rides, pig­
bajoues. La ptose de la graisse superficielle se produit car mentaires pour les lentigos solaires, vasculaire pour
elle n'est pas fixée au plan profond, mais seulement en sur­ l'érythrocouperose).
face à la peau, elle-même distendue et ptosée. La graisse
étant cloisonnée par des expansions des fascias, sa ptose Hypertonie musculaire compensatrice et rides
n'est pas uniforme. Ces cloisons ont un certain rôle de sou­ dynamiques [11]
tien, de même que les retaining ligaments, notamment zygo­ L'évaluation doit se faire au repos, à la mimique, au fronce­
matique et massétérin, qui résultent aussi de la fusion de ment des sourcils et au sourire. La balance frontale (fig. 1.7)
barrières septales [14]. n'a qu'un seul muscle élévateur, le frontal, opposé à des mus­
La graisse profonde, fixée au plan osseux, ne se ptose pas, cles abaisseurs puissants, corrugateur et procerus et orbicu­
mais elle s'atrophie, de façon assez précoce dès la trentaine, laire des paupières. Avec le vieillissement survient un
comme le montre l'imagerie par résonance magnétique déséquilibre au profit des muscles abaisseurs, d'où rides
(IRM) [15], d'abord en région temporale chez la femme glabellaires (rides du lion), ptose des sourcils et diminution
(perte moyenne de 32  %), et chez l'homme surtout en de la fente palpébrale. C'est l'indication de choix de la TB en
région infraorbitaire (40 %) et à la partie interne de la joue respectant les principes détaillés dans un autre chapitre.
(22 %). Pour les corrugateurs, une injection profonde est réalisée
Mais chez certains sujets, l'atrophie existe aussi au niveau dans leur partie interne (zone de l'insertion osseuse et super­
de la graisse superficielle et prédomine sur la ptose. Le visage ficielle dans leur partie externe –  insertion cutanée). Il ne
s'émacie, se squelettise, avec creusement des joues et de la faut pas injecter le frontal dans sa partie inférieure, surtout
vallée des larmes, formation de cernes, creusement temporal chez l'homme, pour ne pas favoriser la chute des sourcils
et atrophie de la graisse péri-orbitaire. (déjà plus bas et horizontaux que la femme) et celle des pau­
pières supérieures.
Support osseux – résorption [16] Les rides de la patte d'oie ne sont pas inesthétiques chez le
Le support osseux détermine la forme du visage. La résorp­ sujet jeune quand ce ne sont que de fines ridules, n'apparais­
tion osseuse est constante au cours du vieillissement et sant qu'au sourire, mais leur traitement précoce est de plus
retentit sur le vieillissement facial. Elle est plus marquée en plus demandé dans un but préventif. Avec l'âge, ces rides
dans certaines zones : les orbites qui s'élargissent, la partie s'impriment de façon permanente dans la peau photovieillie,
interne et médiane de l'os malaire, la mandibule. Il y aura méritant alors un traitement par TB.
donc creusement orbitaire, aplatissement facial dans le tiers
moyen avec moins de projection antérieure des pommettes, Atrophie et ptose du tissu adipeux [11, 15]
formation de cernes, creusement de la vallée des larmes, ■ L'atrophie (fig. 1.8) est plus marquée chez les femmes. Le
recul des sinus piriformes, atrophie et recul mandibulaire et creusement temporal précoce, celui de la concavité fron­
de l'appui dentaire. tale transversale et la fonte de la graisse péri-orbitaire, qui

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Chapitre 1. Évaluation clinique du vieillissement cutané et global du visage et du corps

A B
f

C D

Fig. 1.7  Vieillissement musculaire de la balance frontale.


A. Muscles impliqués : 1, le frontal, seul muscle releveur (flèche bleue) ; les autres muscles sont tous abaisseurs : 2, corrugateur ; 3, orbiculaire ; 4, abaisseur du
sourcil (flèches rouges) ; 5, procérus (flèche jaune). B. Au repos, rides frontales (f) très discrètes, glabellaires (g) et à la racine du nez plus accentuées (p) par
action du procérus. C. Au froncement, accentuation des rides glabellaires et de la racine du nez. D. Regard vers le haut : accentuation des rides frontales.
Source : fig. A, [1], EMC Cosmétologie et Dermatologie Esthétique (© Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés).

B C
Fig. 1.8  Atrophie du tissu adipeux du visage. Aspect de squelettisation.
A. Creusement temporal et frontal très marqué. B. Atrophie de la graisse orbitaire plus marquée dans le cadran supéro-interne, zone où la perte osseuse
est aussi la plus importante. C. Creusement des joues (même patiente que B).
Sources : [1], EMC Cosmétologie et Dermatologie Esthétique (© Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés) ; fig. A, Dr M.-P. Loustalan.

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accentuent beaucoup le vieillissement facial, sont corrigés Résorption osseuse


par comblement [15]. La perte de volume des paupières La résorption osseuse se manifeste surtout par l'élargisse­
supérieures peut être compensée dans la plupart des cas ment du cadre orbitaire, surtout dans sa partie supéro-­
par l'injection d'AH, mais si un dermatochalasis est associé, interne. Associée à la fonte de la graisse orbitaire, elle
la blépharoplastie sera nécessaire. accentue l'aspect d'œil creux [16].
■ La ptose (fig. 1.9) concerne le coussinet de Charpy qui, par

son poids, contribue, avec la prédominance des muscles


abaisseurs, à la chute des sourcils, surtout chez l'homme Tiers moyen du visage [11, 14, 15]
[11]. L'injection de TB dans les muscles abaisseurs est Le tiers moyen s'étend du bord libre des paupières inférieures
décevante ; le comblement peut stabiliser le sourcil, mais jusqu'aux orifices narinaires. Latéralement, ses limites sont
pour le relever vraiment, il faut parfois en venir à la obliques vers le bas. Il comprend donc les joues, mais aussi la
chirurgie. pyramide nasale

A B

E
C
Fig. 1.9  Ptose du tissu adipeux du visage.
A. Vecteurs de la ptose de la graisse du visage dont le tiers moyen se vide au profit du tiers inférieur. B. En se ptosant, la graisse de la joue bute sur la partie
fixe de la lèvre supérieure, et s'accumule au-dessus du sillon naso-labio-génien, dont la profondeur s'accentue. C'est donc un pli d'accumulation prolongé
au-dessous de la commissure labiale par le pli d'amertume. C, E. Altération de l'ovale du visage avec formation de bajoues. Visibilité des cordes platysmales
et fanons au niveau du cou. D. La forme du visage jeune (triangle à sommet inférieur, pomme, cœur) se transforme progressivement en visage âgé (triangle
à sommet supérieur, poire). F, G. Du fait de la ptose, transformation du visage jeune (F) en visage âgé (G) avec altérations surtout au tiers moyen (cernes,
vallée des larmes, sillon naso-génien accentué) et au tiers inférieur (sillon labiogénien profond, pli d'amertume, bajoues).
Sources : [1], EMC Cosmétologie et Dermatologie Esthétique (© Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés) ; fig. A et D, Dr L. Belhaouari ; fig. B et C, Dr C. Beylot ;
fig. E, Dr O. Cogrel.

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Photovieillissement cutané tion osseuse), glissement vers le bas des tissus (muscle
Son intensité est variable selon les expositions solaires cumu­ orbiculaire fenêtré, laxité tissulaire, affaiblissement des retai-
lées et le phototype. Il concerne surtout les reliefs, notam­ ning ligaments). Le traitement, difficile, est habituellement
ment le dos du nez, avec souvent des kératoses actiniques chirurgical, mais de bons résultats ont été rapportés avec des
qui peuvent évoluer vers un carcinome spinocellulaire, les injections d'AH moins invasives à deux niveaux : profondes
joues, où lentigos solaires et couperose sont fréquents chez dans le SOOF (sub-orbicularis oculi fat) et superficielles dans
les sujets à peau claire. Chez l'homme, la région malaire pré­ le coussinet graisseux superficiel [18].
sente parfois une élastoïdose à kystes et comédons. Les lasers
Résorption osseuse [11, 16]
CO2 fractionnés, pigmentaires et vasculaires sont indiqués.
La résorption osseuse est marquée au tiers moyen du visage,
Hypertonicité et atrophie musculaire d'où la rétrusion du massif facial qui accentue l'impression
Cela participe moins à ce niveau au vieillissement facial et il d'atrophie liée au vieillissement des parties molles. C'est sur­
y a peu d'indications de la TB, sauf pour l'hypertonie des tout l'os maxillaire supérieur qui est concerné, essentielle­
rides nasales transversales de Bunny (référence au lapin de ment dans sa partie interne sous-orbitaire. La résorption
Disney qui fronce toujours le nez). Le muscle orbiculaire des osseuse au niveau de l'orifice piriforme entraîne le recul de la
paupières, dans sa partie inférieure, est atrophique, aminci et base narinaire et participe à l'accentuation du pli naso-­
même fenêtré et sa contraction n'a plus d'effet liftant sur les génien. La volumétrie par fillers au niveau des parties molles
tissus ptosés de la joue. permet de compenser en partie ces modifications.

Ptose du tissu adipeux Tiers inférieur du visage [11, 19]


Cette ptose est au premier plan. La graisse superficielle Cette zone s'étend de la région sous-narinaire à la ligne infé­
mobile des joues se ptose en entraînant la peau. La correc­ rieure mandibulaire. Elle comporte deux zones dont le vieil­
tion des volumes du tiers moyen est primordiale pour le lissement est assez différent : les joues et la bouche et son
rajeunissement de la forme du visage, car elle a un effet lif­ pourtour.
tant qui corrige et atténue les sillons naso-géniens et permet
de ne pas trop charger et alourdir le tiers inférieur. Sur le plan Photovieillissement
esthétique, l'injection d'un AH suffisamment volumateur Le PV concerne les zones les plus photo-exposées  : lèvre
dans la graisse malaire profonde et peu réticulé dans la blanche supérieure, marquée par les rides verticales hélioder­
graisse superficielle corrige la perte de projection antérieure miques qui relèvent des techniques de relissage laser ou des
du visage qui a tendance à s'aplatir et restaure le galbe des peelings localisés au phénol, vermillon de la lèvre inférieure,
pommettes. Un bolus profond d'AH sous le grand zygo­ parfois siège de kératoses et carcinomes spinocellulaires.
matique peut améliorer son support et renforcer l'action de
ce muscle élévateur par myomodulation [17]. Hypertonie des muscles de la bouche et de son
Le comblement des cernes est plus délicat. Il doit être réa­ pourtour [11]
lisé avec un AH pas trop hydrophile, placé profondément en Le puissant muscle orbiculaire des lèvres est responsable des
petite quantité, sous le muscle orbiculaire, contre le périoste, rides péribuccales dynamiques en code barre, qui peuvent être
juste au-dessous du rebord orbitaire. Si nécessaire, on améliorées par des injections de TB, minimes et très prudentes
comble aussi la partie inférieure de la vallée des larmes (­sillon pour ne pas risquer une incompétence buccale pour les
médio-jugal en prolongement du sillon nasojugal qui en est liquides et une gêne à l'élocution. L'injection se fait dans la lèvre
la partie supérieure). blanche, 2 mm au-dessus du vermillon, sur chaque hémilèvre.
Aux paupières inférieures, la ptose graisseuse et l'affaiblis­ Du comblement et/ou un relissage sont souvent associés.
sement du septum peuvent entraîner des hernies graisseuses Les autres muscles dont la relaxation par la TB est souvent
qui seront réséquées par voie conjonctivale chez le sujet utile sont l'abaisseur de l'angle de la bouche, qui attire la com­
jeune et s'il est plus âgé avec un excédent cutané, par voie missure labiale vers le bas, donnant une expression de tris­
sous-ciliaire. tesse et d'amertume, et le mentonnier, dont l'hyperkinésie
provoque l'aspect irrégulier, en peau d'orange du menton, et
Atrophie de la graisse profonde fixe éventuellement le risorius, s'il plisse et ride excessivement la
L'atrophie de la graisse profonde fixe, accompagnée parfois peau latéro-commissurale. Le masséter, qui n'est pas un mus­
d'une atrophie de la graisse superficielle, peut entraîner cle peaucier, n'est pas traité dans le cadre du vieillissement,
une squelettisation du visage et doit être corrigée par mais dans un but esthétique pour corriger un visage trop
volumétrie. carré ou fonctionnel dans des cas de bruxisme.

Poches malaires Ptose du tissu adipeux


Les poches malaires, relief mollasse en regard de la zone La ptose du tissu adipeux altère l'harmonie de l'ovale du
zygomatique, résultent de plusieurs facteurs : perte du sup­ visage. Si l'on divise verticalement l'hémiface de ce tiers infé­
port structural (atrophie de la graisse péri-orbitaire, résorp­ rieur en trois, comme le propose Belhaouari [19], on constate

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un différentiel de ptose entre proface (en avant), métaface La peau est relâchée et poïkilodermique
(en arrière) – qui ne se ptosent pratiquement pas car la peau Au cou, le relâchement cutané accentue la perte de la défini­
et le tissu sous-cutané sont adhérents au plan profond – et tion de la ligne mandibulaire, alourdie par la ptose du tissu
mésoface (zone intermédiaire), où il n'y a pas cette adhé­ adipeux. Cette peau flasque est marquée par des rides trans­
rence et où la graisse se ptose nettement, dessinant les versales et elle dissimule mal le relief vertical des cordes
bajoues. Le relief des bajoues est souligné par deux encoches : platysmales. Si le cou est amaigri et la peau distendue, un ou
en arrière, à la limite métaface et mésoface et en avant à la deux fanons apparaissent sous forme de plis verticaux sous
limite mésoface et proface, où la bajoue est ancrée par le le menton. Si le relâchement cutané est modéré, la remise en
retaining ligament mandibulaire. À ce niveau, l'injection pro­ tension de la peau par radiofréquence peut l'améliorer. Les
fonde de fillers doit se limiter aux encoches et respecter la rides transversales ne seront pas atténuées par la TB puisqu'il
bajoue pour ne pas alourdir davantage la ligne mandibulaire. ne s'agit pas de rides dynamiques, mais par le comblement.
Au-dessus, il faut combler le sillon naso-génien et le pli Si les altérations sont importantes, c'est un lifting cervico­
d'amertume qui soulignent la démarcation entre la graisse facial qu'il faudra envisager.
ptosée de la mésoface et la fixité de celle de la proface. On L'aspect poïkilodermique de l'EIFC du cou et du décol­
peut aussi améliorer la projection du menton, en cas de leté sera traité par IPL. Les rides obliques peuvent être atté­
rétrusion, par deux ou trois bolus d'AH au niveau du pogo­ nuées par un nappage d'AH très superficiel. Le peeling
nion. Ce lifting médical peut donner de bons résultats sur la moyen (TCA 25 %) peut en outre améliorer l'aspect fripé et
correction de l'ovale si la ptose n'est pas trop accentuée, dyschromique.
méritant alors un lifting chirurgical.

Atrophie du tissu adipeux Vieillissement musculaire et visibilité des cordes


platysmales [11]
L'atrophie du tissu adipeux entraîne une perte de volume
des lèvres et du pourtour de la bouche dont la correction est Le platysma, muscle très plat, pair et symétrique, qui engaine
complexe [11]. Les lèvres sont amincies, perdant leur projec­ les faces antérolatérales du cou, lutte contre le relâchement
tion antérieure ; la lèvre blanche, surtout supérieure, est apla­ et l'atrophie par une hypertonie permanente, et son bord
tie et verticalisée, ce qui peut être corrigé par nappage antérieur se ramasse pour former le relief très inesthétique
superficiel ; et les crêtes philtrales effacées seront reconsti­ des cordes platysmales bien visibles sous la peau distendue.
tuées par injection sous-dermique d'AH à l'aiguille, dans Les cordes platysmales postérieures qui résultent du même
leurs deux tiers inférieurs. Les rides péribuccales sont injec­ processus au niveau du bord postérieur du platysma sont
tées à l'aiguille. Le vermillon est aminci et aplati, la définition moins visibles, mais attirent vers le bas les tissus relâchés du
de son contour imprécise, mais l'injection profonde d'AH tiers inférieur du visage. La TB peut diminuer la visibilité de
derrière le muscle orbiculaire peut lui restituer volume et ces cordes et même les effacer. Mais l'injection doit être pru­
éversion ; pour lisser sa surface et l'hydrater, lui rendre sa dente, dans ces cordes pincées entre les doigts et relevées
concavité, on injecte en nappe sous la muqueuse ; l'ourlet pour éviter toute diffusion vers la profondeur et le risque de
des lèvres est enfin redéfini en injectant superficiellement de troubles respiratoires et de la déglutition, en petite quantité
façon linéaire entre lèvre blanche et lèvre rouge, et l'arc de de façon étagée, tous les 2 ou 3 cm.
Cupidon est redessiné.
Ptose et accumulation du tissu adipeux au niveau
Résorption du support osseux du double menton
La résorption du support osseux intervient au niveau de la La surcharge graisseuse, très inesthétique, modifie le profil en
mandibule et aussi à la partie inférieure du maxillaire supé­ ouvrant l'angle cervicomentonnier. L'alternative médicale à la
rieur, favorisant la perte de la projection antérieure et de liposuccion chirurgicale est l'injection d'acide désoxycholique.
l'éversion des lèvres [16]. Cela peut être corrigé par injection
profonde de filler sous le muscle orbiculaire. Parfois, la À la résorption osseuse s'ajoute l'arthrose
résorption conduit à l'édentation, avec rétrusion majeure de cervicale
l'orifice buccal et même des joues. Il faut alors avoir recours Cette arthrose est fréquente, responsable de douleurs et de
aux traitements odontologiques. la perte de mobilité du cou, lui conférant un aspect figé qui
majore l'effet du vieillissement.
Vieillissement des régions
extrafaciales Mains
L'atrophie cutanée, déjà décrite, laisse voir les veines dilatées
et tortueuses et le gril osseux des métacarpiens car il y a aussi
Région cervicale et décolleté une atrophie des muscles interosseux. Souvent, les mains
En continuité avec le tiers inférieur du visage, cette région en sont déformées par de l'arthrose. La rhizartrose du pouce est
est en pratique indissociable car ses altérations liées au vieil­ fréquente, avec une atrophie des muscles de l'éminence thé­
lissement majorent celles de l'ovale. nar. Les patientes souhaitent souvent, outre les traitements à

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Chapitre 1. Évaluation clinique du vieillissement cutané et global du visage et du corps

visée cutanée, des injections de fillers pour diminuer la visibi­ Synthèse


lité du plan osseux et des veines dilatées et pour repulper le
dos des mains. Au terme de cet examen, on fera la synthèse des modifications
liées au vieillissement observées chez le patient et de leur
Racine des membres degré, en les hiérarchisant et en déterminant le ou les défauts
L'aspect fripé de la peau peut être amélioré par la radiofré­ dominants à corriger en priorité. En fonction de cela, on pro­
quence et la flaccidité due au relâchement des tissus sous-­ posera au patient et on lui expliquera les moyens de correction
cutanés par la radiofréquence ou les ultrasons focalisés. Le possibles, et on établira le plan de traitement personnalisé en
lifting de la racine des membres avec cicatrice cachée dans le sachant que si le patient n'a pas les moyens financiers de réali­
pli axillaire ou inguinocrural est possible, mais plus invasif. ser tout le projet, le traitement du défaut dominant peut déjà
permettre d'obtenir une amélioration appréciable. Pour un
résultat optimal et durable, ces traitements esthétiques néces­
Abdomen, fesses
sitent tout de même de l'entretien, puisque l'injection de TB ne
Selon le degré de relâchement, on peut proposer ici aussi les sera efficace que 6 mois et celle d'un filler un an environ. Il est
techniques de remise en tension par radiofréquence ou donc souhaitable de fidéliser le patient et de renouveler les
ultrasons focalisés, voire la chirurgie. injections, avec souvent des doses inférieures, une à deux fois
par an sur des années pour stabiliser le rajeunissement obtenu
Hommes et femmes vieillissent- et freiner véritablement le vieillissement facial. Cela en vaut la
ils différemment ? peine, car dans l'étude de Carruthers [3], les patientes ainsi
traitées paraissent en moyenne 6,9 ans plus jeunes que leur âge
Oui, et il faut en tenir compte et éviter d'appliquer à l'homme et l'expérience de dermatologues experts français montre en
les principes du rajeunissement féminin qui aboutiraient à effet des patients qui semblent avoir, 10 ans après, un visage
une féminisation inappropriée du visage [20]. plus jeune que lorsqu'ils ont commencé un tel traitement.
■ La peau, soumise à l'action anabolisante des androgènes,

est plus épaisse et plus dense que la peau féminine, avec Références
une sécrétion sébacée plus abondante et une forte pilo­ [1] Beylot C. Vieillissement cutané. Vieillissement facial global : orienta­
sité. Elle est donc plus résistante au vieillissement, qui est tion thérapeutique. EMC Cosmétologie et Dermatologie Esthétique
progressif, sans accentuation marquée aux alentours de la (© Elsevier Masson SAS, tous droits réservés) 2016;11:1–27
cinquantaine, puisqu'il n'y a pas de carence androgénique (article 50-050-A-10).
[2] Gassia V. Analyse du vieillissement facial. Réalités thérapeutiques
brutale. Les rides sont moins nombreuses mais plus pro­ en dermato-vénéréologie. Dermatologie Esthétique 2014;(Suppl
fondes. Mais cette peau plus lourde se ptose davantage, au 5):5–91.
niveau des paupières inférieures, où les poches sont fré­ [3] Carruthers A, Sadick N, Brandt F, et al. Evolution of facial aesthe­
quentes, des sourcils, des joues et des bajoues. En fonction tic treatment over five or more years: a retrospective over five
des habitudes de vie, la peau masculine est habituellement years or more years: a retrospective cross-sectional analysis of
plus exposée aux méfaits du soleil et du tabagisme. continuous onabotulinum toxin treatment. Dermatol Surg 2015;
41:693–701.
■ Les muscles peauciers sont plus développés et puissants,
[4] Michaud T, Gassia V, Belhaouari L. facial dynamics and emotional
notamment à la glabelle, et leur neutralisation nécessite expressions in facial aging treatments. J Cosmet Dermatol 2015;
des doses jusqu'à deux fois supérieures. 14:9–21.
■ La graisse superficielle des joues se ptose davantage, en entraî­ [5] Dyer  JM, Miller  RA. Chronic skin fragility of aging. Current
nant une peau épaisse, et le double menton est plus fréquent. concept in pathogenesis, recognition, and management of der­
L'atrophie de la graisse prédomine dans la région infraorbi­ matoporosis. J Clin Aesthet Dermatol 2018;11:13–8.
[6] Lephart ED. A review of the role of estrogen in dermal aging and
taire, alors que c'est au niveau temporal chez la femme. facial attractiveness in women. J Cozsmet Dermatol 2018;17:
■ La structure osseuse est plus massive et puissante que chez
282–8.
la femme, avec des rebords orbitaires plus marqués, un [7] Krutmann J, Bouloc A, Sore G, et al. The skin aging exposome.
menton carré, mais avec moins de projection zygoma­ J Dermatol Sci 2017;85:152–61.
tique. La forme générale du visage s'inscrit dans un carré, [8] Kligman  LH. Photoaging. Manifestations, prevention and treat­
et non un ovale comme chez la femme. La résorption ment. Dermatol Clin 1986;4:S17–28.
[9] Dobos G, Lichterfeld A, Blume Peytavi U, Kottner J. Evaluation of
osseuse semble plus tardive, du fait sans doute de la persis­ skin aging: a systematic review of clinical scales. Br J Dermatol
tance des androgènes après la cinquantaine. 2015;172:1249–61.
■ L'utilisation des injectables devra respecter le morphotype [10] Gilchrest BA. Photoaging. J invest Dermatol 2013;133:E2–6.
masculin et veiller à ne pas féminiser la zone du regard et [11] Belhaouari L, Gassia V. L'art de la toxine botulique en esthétique et
le tiers moyen. Donc, il ne faut pas relever isolément la des techniques combinées. Paris: Arnette-Wolters Kluwer ; 2013.
queue du sourcil, ne pas donner trop de volume et de pro­ [12] Beylot C. Vieillissement cutané et tabac. Réalités thérapeutiques
en dermato-vénéréologie. Dermatologie Esthétique 2014;(Suppl
jection antérieure à la région malaire. Il faut se contenter 6):25–30.
d'atténuer les rides, mieux acceptées chez l'homme, sans [13] Vierkötter  A, Schikowski  T, Ranft  U, et  al. Airborne particle
vouloir les effacer au prix d'un aspect trop lisse et figé, sur­ exposure and extinsic skin aging. J Invest Dermatol 2010;130:
tout au niveau du front. 2719–26.

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Chapitre 1. Évaluation clinique du vieillissement cutané et global du visage et du corps

[14] Disant F, Château J. Rajeunissement du tiers moyen de la face. In: [18] Braz AV, Black JM, Pirmez M, et al. Treatment of malar mounds
Chirurgie plastique et esthétique de la face et du cou. Paris: with hyaluronic acid fillers: ana anatomical approach. Dermatol
Elsevier Masson;2012. p. 35–45. Surg 2018;44:S56–60.
[15] Wysong A, Kim D, Tim J, et al. Quantifying soft tissue loss in aging [19] Belhaouari  L. Embellissement et rajeunissement de l'ovale du
male face using magnetic resonance imaging: a study in women visage. J Méd Esth et Chir Derm 2016;173:19–27.
using magnetic resonance imaging. Dermatol Surg 2014;40: [20] Michaud T. Les particularités morphologiques du visage mascu­
786–93. lin  : intérêt pour le rajeunissement facial de l'homme par les
[16] Mendelson  B, Wong  CH. Changes in the facial skeleton with injectables. Réalités thérapeutiques en dermato-vénéréologie.
aging: implications and clinical applications in facial rejuvenation. Dermatol Esth 2017;(Suppl 12)19–24.
Aesthetic Plast Surg 2012;36:753–60.
[17] De Maio M. Myomodulation with injectable fillers: an innovative
approach to addressing facial muscle movement. Aesthetic Plast
Surg 2018;42:798–814.

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SÉMIOLOGIE DU VIEILLISSEMENT Partie 1
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Chapitre 2
Dynamique faciale
et expressions faciales
émotionnelles
Intérêt dans le traitement du vieillissement
du visage par les injectables1
T. Michaud, V. Gassia

Introduction çues comme étrangère par le sujet : « vieillir fait perdre au


sujet son visage de référence » (David le Breton). Ces expres-
La compréhension de la physiopathologie du vieillissement sions sont à l'origine d'une perception émotionnelle négative
facial, impliquant les quatre composantes anatomiques du par les patients et/ou leur entourage en raison du décalage
visage (os, graisse, muscle et peau) a permis d'établir le ainsi instauré entre image et personnalité, et cela aboutit à
concept de rajeunissement global, naturel et tridimension- une perte d'estime de soi et de qualité de vie. Il s'agit certaine­
nel du visage [1]. L'analyse séméiologique détaillée du visage ment là d'une motivation prégnante pour démarrer la
débouche sur un plan de traitement personnalisé en éva- démarche de rajeunissement facial.
luant précisément les pertes de volume, le relâchement, les Il y a donc une corrélation puissante entre la prise en
rides statiques et dynamiques et les altérations de la surface compte de la dynamique faciale et des expressions faciales
cutanée. Ses objectifs principaux sont la restauration des émotionnelles par le thérapeute et les attentes de résultats
volumes faciaux, le rajeunissement du regard, celui de la naturels de la part de nos patients qui veulent la correction
région buccale et péribuccale et enfin la correction des ano- des expressions négatives liées au vieillissement tout en res-
malies de surface. pectant le langage émotionnel du visage.
La prise en compte de la dynamique faciale représente une
évolution incontournable de ce concept : elle permet l'ob-
tention de résultats plus naturels pour nos patients en évi- Expressions faciales
tant les corrections excessives et/ou toute stéréotypie ; elle et émotions : le socle
obéit également à leur souhait de gestes de correction res- des processus relationnels
pectant les expressions faciales et le langage émotionnel du
visage en lien direct avec cette dynamique faciale. Le langage On sait depuis Darwin (1872) que les expressions faciales
émotionnel, socle de tous les processus relationnels, est en permettent d'informer l'entourage social de notre état émo-
effet fondamental dans la communication inter-­personnelle : tionnel et jouent à ce titre un rôle de communication essen-
« Sans émotion, pas de communication, et sans communica- tiel [2]. La théorie traditionnelle postule qu'il existe des
tion, pas de société » (Jacques Cosnier). L'un des freins prin- connexions innées, biologiquement déterminées, entre cer-
cipaux chez nos patients pour l'entrée dans les processus de tains états émotionnels et des expressions faciales prototy-
correction du vieillissement facial est certainement la crainte piques, ayant pour fonction de communiquer à autrui ce qui
de la perte du naturel de leur visage. est ressenti. Elles comprendraient notamment les émotions
Par ailleurs, les modifications anatomiques faciales liées au de joie, colère, peur, tristesse, surprise, dégoût, honte et
processus du vieillissement sont fréquemment à l'origine de mépris [3]. D'après Paul Eckman, les expressions de base sont
l'apparition d'expressions faciales inappropriées, telles la limitées aux émotions de colère, peur, surprise, dégoût, joie
fatigue, la tristesse, la sévérité ou l'amertume, qui sont per- et tristesse (fig. 2.1) [4].


1.
Ce chapitre repose en partie sur un travail commun réalisé avec le Dr Lakhdar Belhaouari et le Dr Véronique Gassia : qu'ils soient vivement
remerciés pour leur collaboration.

Dermatologie esthétique
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Chapitre 2. Dynamique faciale et expressions faciales émotionnelles

A B C D E F
Fig. 2.1  Expressions prototypiques de base selon Eckman.
A. Colère. B. Peur. C. Surprise. D. Dégoût. E. Joie. F. Tristesse.
Source : © Wiley Periodicals, Inc.

Ces émotions de base auraient un caractère universel, émotion (par exemple joie, tristesse). Ce système émotion-
modulé toutefois par les usages culturels et soumis à une nel est activé lors de l'exécution, mais aussi lors de l'observa-
régulation sociale. Des théories alternatives apparues vers tion d'une expression faciale émotionnelle. Ce phénomène
la fin du XXe siècle suggèrent en outre que les expressions suggère que ces deux fonctions cognitives seraient fonction-
faciales relèveraient plutôt d'une alchimie subtile inté- nellement nécessaires l'une à l'autre [6].
grant l'émotion, la communication, ainsi que des caracté- Par ailleurs, les mimiques faciales de l'autre tendent à
ristiques individuelles, liées au genre et au statut social être imitée de façon automatique et inconsciente, et cela
notamment. dès la petite enfance. On a démontré que l'observation
Au-delà de ces bases théoriques, il est indéniable que les de visages colériques ou joyeux produit chez l'observa-
émotions, dont la transmission est véhiculée par les expres- teur les réponses électromyographiques correspon-
sions faciales, sont le fondement de nos rapports interper- dantes. Par exemple, le potentiel électromyographique
sonnels et sociaux. C'est pourquoi, à coté des expressions d'activité du grand zygomatique a un niveau plus élevé à
faciales émotionnelles de base, il existe une riche palette la vue de visages joyeux qu'en présence de visages colé-
d'expressions faciales émotionnelles s'expliquant par des riques, tandis que celui du corrugateur du sourcil est plus
normes d'expressivité imposées par la culture (display rules, faible. Grâce à la simulation de l'expression faciale, ce
decoding rules) (fig. 2.2). phénomène d'imitation permet de mieux comprendre et
On sait par exemple que l'attirance qu'éprouvent deux de catégoriser les émotions exprimées par un autre indi-
personnes l'une pour l'autre est en partie conditionnée par le vidu. En outre, l'intensité des expressions faciales émo-
principe de l'affinité émotionnelle qui est une réaction émo- tionnelles imitées a un impact sur l'intensité de la
tionnelle commune à un même événement. Le phénomène réponse du système nerveux. C'est insister sur l'impor-
de contagion émotionnelle est une réponse involontaire aux tance cruciale de l'intégrité des systèmes sensorimoteurs
réactions émotionnelles d'autrui ; l'empathie est la compré- dans la reconnaissance des émotions exprimées par
hension des émotions d'un autre dont on adopte le point de autrui [6].
vue psychique, et favorise les comportements d'aide.
Lien émotionnel et communication sont intimement liés. Feed-back facial
Le « communicant » doit être capable d'extérioriser ses émo-
tions –  plus ou moins authentiques ou modulées selon le Nos propres expressions influent également sur nos
contexte – pour que son interlocuteur puisse les comprendre cognitions, ainsi qu'en témoigne le phénomène de feed-
et les ressentir afin de les partager. Les manifestations émo- back facial. Par exemple, une expression faciale positive
tionnelles, qui traduisent et affichent spontanément nos res- imposée expérimentalement conduit à des interpréta-
sentis, s'intègrent ainsi de façon complexe dans les processus tions plus drôles de dessins humoristiques. Il en est de
relationnels [5]. même pour les expressions négatives. De façon générale,
en adoptant de façon volontaire une expression faciale,
on majore le ressenti de l'émotion correspondante.
Reconnaissance des expressions en miroir L'inverse est vrai également  : le fait d'être incapable de
Quand nous sommes témoin d'une expression émotionnelle revêtir une expression réduit la capacité de ressentir
chez notre interlocuteur, nous mettons en route un circuit l'émotion correspondante. Par exemple, les patients ayant
neuronal identique à celui qui est activé lorsque nous ressen- eu des injections de toxine botulique au niveau de la
tons cette même émotion. C'est la reconnaissance de l'ex- glabelle (avec comme conséquence l'incapacité de fron-
pression faciale « en miroir ». Il semblerait qu'elle ait pour cer les sourcils) étaient moins dépressifs et moins anxieux
fonction la compréhension et l'anticipation du comporte- que des patients ayant reçu d'autres traitements esthé-
ment et des intentions de l'autre, et qu'elle intervienne de ce tiques [7]. D'autres expériences ont montré que le fronce-
fait dans la régulation adaptée de notre propre comporte- ment de sourcils rend l'humeur plus dépressive, l'élévation
ment. Ainsi, plus généralement, ce mécanisme permet de des sourcils augmente la capacité de se sentir surpris et la
comprendre ce qui survient lorsque autrui fait l'expérience création d'une expression de dégoût rend la perception
d'une sensation (par exemple douleur, toucher) ou d'une des odeurs plus désagréable [8].

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Fig. 2.2  Expressions complexes.


Source : © Wiley Periodicals, Inc.

Anatomie dynamique faciale correspondant chacune à un mouvement d'une partie du


visage et pouvant mettre en jeu plusieurs muscles [10].
Les expressions faciales émotionnelles sont la conséquence
de l'ensemble du jeu musculaire des muscles peauciers du Muscles impliqués
visage, mais intéressent aussi les mouvements ainsi induits
Les muscles masticateurs, masséter, temporal, ptérygoïdien
des éléments mous de la face et notamment des comparti-
interne et externe ne sont pas des muscles de la mimique stricto
ments graisseux.
sensu, mais leur mise en jeu s'intègre dans les expressions faciales.
En haut du visage, le muscle frontal est le seul muscle élé-
Musculature de la mimique vateur du sourcil, sa contraction plisse le front ; le muscle
Les muscles peauciers du visage sont tous à différents niveaux corrugateur du sourcil fronce le sourcil en le ramenant en
agonistes et antagonistes. Ils réalisent ainsi une intrication à bas et en dedans et provoque l'apparition des rides du lion ;
deux niveaux, anatomique et fonctionnelle, qui permet la le muscle procérus est abaisseur de la tête du sourcil et est à
réalisation complexe et subtile du jeu des expressions faciales l'origine des rides glabellaires horizontales.
de la mimique à l'origine du langage émotionnel du visage [8]. Dans la zone orbitaire, le muscle orbiculaire des paupières est
Duchenne de Boulogne, dès 1862, grâce à ses travaux élec- un sphincter qui permet l'occlusion palpébrale et dont l'hyper-
tromyographiques, a permis d'établir une corrélation entre tonie lors du vieillissement provoque pour sa partie palpébrale
l'action des muscles peauciers faciaux et le langage émotion- une réduction de la fente palpébrale et une microphtalmie
nel du visage, à l'origine de l'expression des passions et des relative et pour sa partie orbitaire les rides de la patte d'oie [11].
sentiments [9]. Le facial action coding system (FACS), déve- Au niveau du nez, trois muscles interviennent : le muscle
loppé plus récemment par les psychologues Ekman et myrtiforme est abaisseur de la pointe du nez et réduit trans-
Friesen (1978), est une méthode de description des mouve- versalement les orifices narinaires ; le muscle transverse du
ments du visage. Le système FACS décrit 46 unités d'action nez élève et avance l'aile du nez et entraîne des rides

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l­ atéronasales verticales légèrement obliques (bunny lines) ; le


muscle dilatateur des narines les ouvre [11].
La région buccale est complexe : le muscle orbiculaire des
lèvres, médian, est un muscle concentrique entourant l'ori-
fice buccal et l'attirant en dedans. Il est suspendu par les
muscles péribuccaux :
■ latéralement, le modiolus réalise un nœud musculaire, qui

représente le point de convergence des muscles mobilisant


la commissure labiale (latéralement : risorius ; latéralement et
en arrière : buccinateur ; vers le haut : releveur de l'angle de la
bouche ; vers le haut et latéralement : grand zygomatique ;
vers le bas et latéralement : abaisseur de l'angle de la bouche ; 1
■ en bas, l'abaisseur de la lèvre inférieure est l'unique abais-

seur pur de la lèvre inférieure, évasant en outre son bord


libre. Le platysma a également une action d'abaissement 2
3
de la lèvre inférieure et de la commissure en raison de l'in-
trication de ses fibres médiales avec tous les muscles de la 4
partie inférieure et latérale de la bouche ; 5
■ en haut, le releveur de la lèvre supérieure et le releveur

nasolabial ainsi que le petit zygomatique [11].


Enfin, le platysma attire la peau du menton et de la joue
vers le bas et abaisse la commissure labiale et la lèvre infé-
rieure en l'éversant. Il tend et plisse la peau du cou, pro-
voque l'élévation de celle de la région pectorale. Sa A
contraction lors de l'effort et de la colère forme les cordes
platysmales. Les fanons résultent de son atrophie lors du
vieillissement [11].

Mimiques fondamentales
Lors des expressions faciales témoignant de sentiments s'ap-
parentant à la joie, il existe une ascension globale du visage,
avec ouverture et dilatation des orifices transversaux. Le
muscle risorius, spécifique à l'homme, est le plus sollicité
dans le sourire, attirant la commissure transversale­ment et
combinant son action avec l'orbiculaire des lèvres qui se 1

détend, permettant ainsi l'ouverture de l'orifice buccal. Dans 2


le même temps, la libération et la mobilisation latérale du
modiolus par le risorius expriment la satisfaction, tandis que 3
4
son déplacement vers le haut et l'extérieur sous l'action du
grand zygomatique intègre l'expression de joie et de rire.
Dans le rire franc, la contraction synchrone du muscle orbi- 5
culaire des paupières plissera l'angle extérieur des paupières 6
en élevant légèrement la paupière inférieure (fig. 2.3) [11].
7
Dans la joie débordante complète, il s'y associe la contrac- 8
tion du releveur de la lèvre supérieure. Si le sourire est
réprimé, il y a contraction de l'orbiculaire de l'œil qui
bloque la mobilisation du modiolus. Le rire forcé ou la gri-
mace sont caractérisés par une contraction isolée du grand
zygomatique alors que le reste du visage reste immobile. B
Dans les expressions faciales émotionnelles apparentées à la Fig. 2.3  Mimique de la joie et de la tristesse.
tristesse, les muscles dépresseurs sont dominants avec abais- A. Mimique de la joie où dominent les muscles élévateurs et dilatateurs.
sement des orifices transversaux. Le muscle corrugateur du 1 : muscle orbiculaire des paupières. 2 : muscle dilatateur des narines. 3 : mus-
sourcil fronce et abaisse le sourcil, l'abaisseur de l'angle de la cle grand zygomatique. 4 : muscle risorius. 5 : muscle orbiculaire des lèvres.
B. Mimique de la tristesse où dominent les muscles abaisseurs. 1, 2 : muscle
bouche abaisse la commissure labiale, accentuant ainsi les plis
orbiculaire des paupières. 3 : muscle releveur de la lèvre supérieure. 4 : muscle
d'amertume et exprimant tristesse et mépris. Sa contraction grand zygomatique. 5 : muscle orbiculaire des lèvres. 6 : muscle abaisseur de
volontaire est observée lorsqu'on retient les pleurs. Le corru- la commissure labiale. 7 : muscle carré du menton. 8 : muscle mentonnier.

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gateur est important pour exprimer la tristesse, la concentra-


tion et de l'attention ; sa contraction marquée intervient dans
les expressions de colère, d'impatience et de préoccupation. La
contraction du procérus, plissant horizontalement l'espace
intersourcilier, exprime l'agressivité ou une grande douleur. Le
platysma participe à l'expression de frayeur et de colère.
L'action conjuguée des deux muscles orbiculaires (des pau-
pières et des lèvres), du muscle frontal et du corrugateur du
sourcil provoque une expression d'attention et de concentra-
tion. Elle entraîne un état de tension du masque facial avec
limitation de l'ouverture de ses orifices. Le frontal, en élevant
le sourcil, majore l'action de son antagoniste, l'orbiculaire des
paupières. Des rides frontales transversales et glabellaires sont
l'expression de l'action des muscles frontal et corrugateur.
La sensualité et la gourmandise mobilisent le grand zygo-
matique, le nasal, l'orbiculaire des lèvres, ce qui est objectivé
par des narines dilatées, une commissure légèrement élevée
et une lèvre retroussée [11].
L'expression de la surprise résulte de l'abaissement de la
mâchoire inférieure (muscles masséter, temporal et ptéry-
goïdien), l'élévation des sourcils sous l'action du frontal et
l'ouverture de l'œil par son muscle orbiculaire.

Les compartiments graisseux


dans les mimiques faciales
Le tiers moyen du visage (mid-face des Anglo-Saxons) corres-
pond à la zone des pommettes et de la région jugo-malaire.
Il se situe entre paupière inférieure et sillon naso-génien, et
est constitué d'un socle osseux sur lequel reposent les deux
Fig. 2.4  Compartiments graisseux malaires profond et superficiel.
compartiments graisseux malaires séparés par le muscle
Source : © T. Michaud, L. Belhaouari, V. Gassia.
orbiculaire de l'œil.
La graisse malaire profonde constitue un compartiment graisse malaire profonde et le muscle orbiculaire, mais aussi
profond fixe et statique, tandis que la graisse malaire super- entre le muscle orbiculaire et la graisse malaire superficielle.
ficielle est mobile dans la dynamique des expressions faciales En cas de traitements volumateurs dans cette région, il sera
et dans le relâchement lié au vieillissement. Ces deux com- essentiel d'analyser les déplacements des parties molles du
partiments graisseux sont séparés par le muscle orbiculaire visage lors de la mimique, pour juger s'il convient de combler
de l'œil. Ils contribuent grandement au galbe des pommettes le compartiment graisseux malaire profond fixe ou le com-
et à la plénitude jugo-malaire [12, 13]. partiment graisseux malaire superficiel mobile, ou les deux.
La graisse malaire profonde (SOOF des Anglo-Saxons pour
sub orbicularis oculi fat) réalise un coussinet dense, adhérant
au relief osseux qu'elle recouvre. Par son adhérence profonde,
cette graisse malaire profonde est fixe et statique. Elle n'est Vieillissement et expressions
pas mobilisée lors de la mimique et ne se ptose pas avec le faciales
relâchement lié au vieillissement. Elle subit toutefois un phé-
nomène d'atrophie partielle lors du vieillissement (fig. 2.4).
La graisse malaire superficielle est située au-dessus du Vieillissement facial global
muscle orbiculaire et de la graisse malaire profonde. Elle La chronodermie résulte d'un vieillissement cellulaire généti-
adhère à la peau. Sa structure est moins dense que la graisse quement programmé qui va affecter les différents plans ana-
malaire profonde (voir fig. 2.4). Elle est mobilisée lors de la tomiques : osseux, musculaire, graisseux et cutané, aboutissant
dynamique faciale et des expressions faciales émotionnelles, ainsi à l'apparition des signes du vieillissement. Le relâchement
dont un des principaux moteurs à ce niveau est le muscle cutané, aponévrotique, graisseux et musculaire, l'apparition
orbiculaire. Outre une atrophie partielle, le vieillissement des plis d'expression et des rides profondes auxquels parti-
entraîne son atrophie partielle ainsi que son relâchement et cipent l'hypertonie musculaire réactive au relâchement mus-
sa ptose dans un vecteur de rotation en bas et en dedans. culaire, l'atrophie des différents éléments anatomiques avec
La peau, le muscle orbiculaire et la graisse malaire superfi- les pertes de volumes et leur redistribution sont les consé-
cielles sont mobiles, avec un espace de glissement entre la quences de ce vieillissement chronodermique.

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Il s'y ajoute des facteurs extrinsèques ou intrinsèques tels Il entraîne l'inversion du triangle de jeunesse (fig.  2.5) à
que soleil, tabac, alcool, déséquilibres hygiéno-diététiques travers un mécanisme de relâchement et de ptose cutanéo-
et  alimentation, modifications hormonales, maladie et graisseuse qui vide la partie supérieure de la zone jugo­
troubles pathologiques, qui peuvent contribuer à sa préco- malaire et remplit la partie inférieure du visage.
cité et à sa rapidité. Cette transformation morphologique explique les trois prin-
cipaux sillons liés au vieillissement du visage : le sillon palpébro-
Vieillissement du tiers moyen malaire, le sillon médio-jugal et le sillon naso-génien (fig. 2.6).
Le vieillissement du tiers moyen du visage est un des élé- ■ Le sillon palpébromalaire définit la limite supérieure de la

ments clés du vieillissement facial. graisse malaire superficielle.

Fig. 2.5  Vieillissement du tiers moyen du visage : inversion du triangle de la jeunesse.


Source : © T. Michaud, L. Belhaouari, V. Gassia.

1
4
2

Fig. 2.6  Les trois principaux sillons liés au vieillissement du visage.


1 : Sillon palpébromalaire ; 2 : sillon médio-jugal ; 3 : sillon naso-génien ; 4 : partie interne du sillon palpébromalaire et partie supéro-interne du sillon
malo-jugal = vallée des larmes.

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■ Le sillon médio-jugal a un trajet oblique en bas et en


dehors en raison du relâchement tissulaire responsable
d'un vecteur de glissement vers le bas et le dedans.
Ces deux sillons s'unissent dans leur partie interne et des-
sinent un « Y » constituant la vallée des larmes.
■ Le sillon naso-génien réalise un point de blocage inférieur

pour le complexe cutanéograisseux jugo-malaire. Il des-


sine un pli lié à l'accumulation tissulaire. Le sillon naso-­
génien devient peu à peu labio-génien pour constituer
ensuite le pli d'amertume sous la commissure labiale. Par
son extension vers le bas, il dépasse le rebord mandibulaire
et forme la partie antérieure de la bajoue.
La partie partiellement déshabitée de la graisse malaire
superficielle se situe entre le sillon palpébromalaire et le sil- Fig. 2.7  Vieillissement du tiers supérieur du visage.
Source : © T. Michaud, L. Belhaouari, V. Gassia.
lon médio-jugal.
Au niveau du tiers moyen du visage, deux éléments essen-
En s'étendant plus bas, il dépasse le rebord mandibulaire et
tiels doivent être pris en compte et vont définir les indica-
forme la partie antérieure de la bajoue. Double menton,
tions thérapeutiques :
bajoues, fanons, peau flétrie remplacent progressivement un
■ le volume qui peut être insuffisant, normal ou excessif ;
ovale du visage et un angle cervicomentonnier bien dessinés.
■ le relâchement lié à l'âge et l'existence ou non d'une ptose.
Peu à peu, on assiste à une réduction du volume labial,
Belhaouari a observé qu'un apport relativement minime de
associée à une diminution du contre-appui rétrodentaire du
0,5 ml d'acide hyaluronique volumateur dans le tiers moyen
fait de la fonte osseuse. La lèvre devient peu à peu verticale,
induit entre autres un certain effet lifting, avec élévation du
rétruse, avec un allongement relatif de la lèvre blanche, tan-
sillon palpébromalaire, raccourcissement de la paupière infé-
dis que la lèvre rouge perd son galbe convexe et son obli-
rieure, atténuation du sillon naso-génien et amélioration de
quité. Les plis d'expression radiaires de surface sont dus au
la commissure labiale. Par hypothèse, il pense avec Lawers
jeu du couple muscle-peau et à l'atrophie du muscle orbicu-
que cet apport volumétrique stimule et  allonge la portion
laire qui donnait le galbe labial (fig. 2.8 et 2.9).
orbitaire du muscle orbiculaire dans cette zone et que, par
Le tissu cutanéograisseux cervical, comme ailleurs, perd
voie de réaction médullaire ou cérébrale, le muscle orbicu-
peu à peu son élasticité. Son relâchement s'inscrit dans la
laire se contracte, entraînant ainsi un certain effet lifting.
continuité vers le bas du relâchement jugal. Le muscle
Vieillissement du tiers supérieur platysma va se raccourcir, ses fibres vont s'unir entre elles
en amas, aboutissant à la formation des cordes platys-
Il existe avec le vieillissement une perte d'élasticité cutanée qui, males. Les rides cervicales horizontales sont des rides de
combinée avec le poids du sourcil et du coussinet adipeux de froissement et non pas des rides d'expression liées à l'ac-
Charpy, entraîne une ptose frontale et sourcilière. La contraction tion musculaire.
réactionnelle du muscle frontal engendre l'apparition des rides Le vieillissement induit ainsi deux phénomènes qui vont
d'expression horizontales frontales. Cette contraction réaction- influer sur l'expressivité du visage :
nelle peut compenser voire dépasser l'effet de ptose en relevant ■ les plissements cutanés liés aux expressions répétées
le sourcil excepté au niveau de la partie latérale du sourcil. deviennent avec le temps permanents, figeant les expres-
Par ailleurs, l'alourdissement de la paupière supérieure et l'ac- sions naturelles de l'individu (rides dynamiques  : pattes
centuation des poches palpébrales, moins bien maintenues par d'oie, rides frontales) ;
un septum orbitaire qui perd de sa tonicité avec l'âge, caracté- ■ le relâchement et la ptose, associés au glissement et à
risent le vieillissement de cette zone. La fente palpébrale se l'atrophie des volumes graisseux et à la fonte du support
rétrécit par hypertonie du muscle orbiculaire palpébral. osseux, sont à l'origine d'expressions inappropriées simu-
Le champ de vision est progressivement limité par la ptose lant l'effet des muscles abaisseurs  : sillons naso-géniens,
du sourcil et de la paupière supérieure, entraînant une plis d'amertume, vallée des larmes qui expriment tristesse,
accentuation réactionnelle de la contraction du frontal. fatigue, amertume, sévérité.
Dans certains cas, on assiste à une squelettisation de la
région péri-orbitaire par atrophie des parties molles.
Les rides verticales du lion signent la cassure provoquée Vieillissement et expressions négatives
par les contractions répétées du corrugateur du sourcil et les Comme cela a déjà été dit, l'âge peut conférer au visage des
rides horizontales de la racine du nez résultant de l'action du expressions négatives (fig. 2.10) à type de fatigue, de tristesse,
procérus (fig. 2.7). d'amertume ou encore de sévérité, qui sont la conséquence
directe du vieillissement et non le reflet de la personnalité du
Vieillissement du tiers inférieur sujet [14, 15]. La « lecture émotionnelle » du visage par l'en-
Le sillon naso-génien se modifie et devient labiogénien, entraî- tourage ou face au miroir en est altérée, et ces expressions
nant la formation du pli d'amertume sous la commissure labile. négatives peuvent retentir sur l'estime de soi et la qualité de

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A B

C D
Fig. 2.8  A-D. Vieillissement du tiers inférieur du visage.
C, D. Perte de volume ; allongement de la lèvre blanche ; rétrusion ; atrophie cutanée ; rides.
Sources : fig. A, B, © T. Michaud, L. Belhaouari, V. Gassia ; C, D, © T. Michaud.

Fig. 2.9  Vieillissement des lèvres.

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A B

C D E
Fig. 2.10  A-E. Le vieillissement simule les expressions négatives de tristesse, colère, dégoût.
Sources : fig. A, B, © T. Michaud, L. Belhaouari, V. Gassia ; fig. C-E, © Wiley Periodicals, Inc.

vie sociale et/ou professionnelle. Ainsi, très souvent, la ou un relâchement tissulaire modéré auront des répercussions
demande esthétique s'inscrit dans la volonté de tenter de importantes sur la perception de l'âge Ces pertes de volume
supprimer ce décalage inapproprié entre l'image et la person- peuvent alors être corrigées par des quantités faibles de fillers,
nalité pour retrouver son « visage de référence » (Le Breton). placées au bon endroit en implantation profonde au contact
Dans la prise en charge du vieillissement facial, l'étape cruciale osseux, permettant de suppléer un support osseux déficient.
est l'identification et l'analyse sémiologique des modifications Ces points clés du vieillissement et des expressions néga-
anatomiques liées au vieillissement. Cette analyse se fait étage par tives peuvent être analysés et définis dans chaque comparti-
étage. Ces signes de l'âge se combinent de façon variable selon les ment du visage. Ils sont schématisés succinctement, avec les
individus et vont conférer au visage une ou des expressions néga- principes de leur correction dans les figures 2.11 et 2.12. Bien
tives dépendant de leur association. Les éléments clés qui défi- entendu, une correction globale est indispensable à l'amélio-
nissent ces expressions négatives peuvent être catégorisés ainsi : ration de ces expressions négatives.
■ la balance musculaire des dépresseurs par rapport aux Voici enfin, à titre d'exemples cliniques, l'analyse séméiologique
élévateurs ; d'un visage plutôt longiligne et d'un visage plutôt bréviligne.
■ la perte des volumes liée à l'atrophie ; L'analyse du visage de la patiente triste et fatiguée (fig. 2.13)
■ le relâchement des parties molles (la ptose) ; permet d'identifier les altérations suivantes :
■ l'aspect de surface (la peau). ■ au niveau du tiers moyen  : on constate une perte de

Ces combinaisons sont influencées par le morphotype du volume avec constitution d'un sillon médio-jugal et d'un
visage. Schématiquement, un visage longiligne a tendance à sillon naso-génien marqués, des cernes en creux, un relâ-
se creuser et un visage bréviligne a tendance à se ptoser. chement des parties molles (zones d'ombre et creux) ;
Cette étape d'analyse est fondamentale et répertorie les ■ au niveau du tiers supérieur : on note une horizontalisa-

signes de relâchement, les rides et sillons, les pertes de volume tion des sourcils, une chute du sourcil, une ptose pal-
avec les effets d'ombre et les pertes de convexité qu'elles pébrale inférieure et des rides glabellaires ;
entraînent. Pour ces pertes de volume, on peut d ­ 'ailleurs s'ai- ■ au niveau du tiers inférieur : on observe des plis d'amer-

der dans cette analyse, surtout quand on débute dans le tume marqués, une perte de volume des lèvres avec atro-
domaine de l'esthétique, par des codes comme ceux définis phie, des rides péri-orales, une perte de l'ovale, l'apparition
par Di Maio [16]. Ces pertes de volume peuvent apparaître d'un pli mentonnier.
très précocement dans la vie, surtout chez les sujets dont le L'analyse du visage de la patiente avec une expression de
support anatomique osseux est faible. Le support osseux joue fatigue et d'amertume (fig. 2.14) révèle les éléments suivants :
un rôle essentiel : les sujets au support squelettique « pauvre » ■ au niveau du tiers inférieur : des plis d'amertume marqués,

sont prédisposés aux manifestations précoces du vieillisse- des sillons naso-géniens creusés avec relâchement, une
ment lié à la perte des volumes, notamment dans la région du chute des commissures labiales, une perte de l'ovale ;
tiers moyen de la face, du menton et de la ligne mandibulaire. ■ au niveau du tiers moyen : une perte de volume malaire,

Chez ces sujets et dans ces zones, des faibles pertes de volume des sillons médio-jugal et palpébromalaire marqués.

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Chapitre 2. Dynamique faciale et expressions faciales émotionnelles

Perte des volumes et des convexités :


visage creusé = fatigue, tristesse

Les points clés


• Région malaire et vallée des larmes
• Sillon naso-génien (partie haute)
• Région jugale pré-auriculaire
• Règion sous-malaire
• Rides jugales

La correction : comblement
et volumétrie

Les écueils
• Respect de la dynamique faciale
(attention au « syndrome K »)
A • le bon produit au bon endroit
• Pas de surcorrection

Rides d'expression
• Fatigue, sévérité

Perte des volumes


• Fatigue

Sourcil
et paupière
supérieure
• Fatigue, tristesse

Les points clés


• Corriger les rides d'expression
• Rajeunir le sourcil
– position
– volume
• Ouvrir le regard
• Corriger les volumes : cernes en creux,
volumes frontaux, tempes

La correction : toxine botulinique,


comblement et volumétrie

Les écueils
• La chute des sourcils
C – correction des rides glabellaires
– correction des rides frontales
• La correction excessive des cernes
en creux
Fig. 2.11  Les points clés des expressions négatives.
A. Tiers moyen du visage. B. Zone du regard. C. Zone du regard et principes de leur correction.

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Chapitre 2. Dynamique faciale et expressions faciales émotionnelles

Sillons et plis :
• Fatigue,
Lèvres tristesse,
• Rides amertume
et perte de
l'architecture
• Perte de
séduction

Relâchement
Menton et perte des
• Sillon et plis volumes
tristesse D • Fatigue,
dédain tristesse
sévérité

Les points clés


• La correction des sillons et rides
superficielles
• La correction des volumes
• La restauration de l'architecture
labiale en respectant l'anatomie
• L'horizontalisation de la ligne
interlabiale (élévation des
commisures labiales)

La correction : toxine botulinique,


comblement et volumétrie

E Les écueils
• La surcorrection du volume labial
• Le non-respect de l'anatomie
labiale et de sa dynamique
• L'augmentation excessive
du volume mentonnier
Fig. 2.11 Suite
D. Zone du sourire. E. Zone du sourire et principes de leur correction.
Source : © T. Michaud, L. Belhaouari, V. Gassia.

A B
Fig. 2.12  Prise en charge globale avec un recul de 7 ans. Fig. 2.13  Tristesse et fatigue.
Avec correction des masséters par la toxine botulinique. A. Avant traitement. B. Après traitement.
Source : © T. Michaud. Source : © T. Michaud.

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Chapitre 2. Dynamique faciale et expressions faciales émotionnelles

il s'agit probablement d'un stade où on peut poser une indica-


tion de traitement préventif par la toxine botulinique, même si
les rides statiques sont encore peu marquées.
La diffusion de la toxine botulinique doit être bien contrôlée,
de façon à obtenir des résultats précis, notamment dans les
régions glabellaire et frontale, et il ne faut pas hésiter pour cela
à faire appel aux hautes concentrations. Dans la région glabel-
laire par exemple, une diffusion à la partie basse du muscle
frontal aurait pour conséquence une chute de la tête des sour-
cils responsable d'une expression négative « méchante ». De
même, la ptose sourcilière accentuerait l'impression de fatigue
et renforcerait l'expression négative.
Les balances musculaires doivent être prises en compte en
A B favorisant les muscles élévateurs, tant dans le haut que dans le
Fig. 2.14 Amertume. bas du visage. Le but est, bien entendu, de lutter contre la ptose :
A. Avant traitement. B. Après traitement. ■ celle du front et du sourcil dans le haut du visage par l'ac-
Source : © T. Michaud.
tion sur les muscles corrugateurs du sourcil, le muscle pro-
cérus et le muscle orbiculaire des paupières, en favorisant
Implications thérapeutiques l'action du muscle frontal ;
■ celle des commissures labiales et des joues dans le bas du

Le traitement du vieillissement facial doit tendre à restaurer visage par l'action sur les muscles abaisseur de l'angle de la
le visage de référence, de façon à reconstruire le lien intime bouche et le platysma.
entre image et personnalité. Il consiste à recréer un état d'es- Dans le même esprit, l'action sur le muscle orbiculaire des
prit plutôt qu'une beauté figée ou stéréotypée. Pour ce faire, lèvres peut avoir une certaine action sur les rides labiales
la prise en compte de la dynamique faciale est capitale : il est radiaires et le traitement du muscle mentonnier prévient
nécessaire de corriger les expressions faciales inappropriées l'« enroulement » du menton et le pli sus-mentonnier ainsi
tout en préservant l'expressivité naturelle du visage. Les injec- que l'aspect en peau d'orange.
tables font appel à la toxine botulinique et aux injections de Il ne faut jamais figer et adapter les doses en fonction de
fillers. Pour ces derniers et par conviction personnelle, ne cet impératif et de l'âge du patient.
seront abordées ici que les injections d'acide hyaluronique. Enfin, il est important d'espacer suffisamment les injec-
tions pour respecter la dynamique faciale.
Les règles d'utilisation
de la toxine botulinique
dans le cadre de la dynamique faciale Les règles d'utilisation de l'acide
La toxine botulinique est incontournable dans le traitement du
hyaluronique dans le cadre
vieillissement facial. Elle entraîne presque toujours, si elle est bien de la dynamique faciale
réalisée, une grande satisfaction du patient quant aux résultats
obtenus et représente un élément clé de sa fidélisation. Ce taux a Quelques principes de base
récemment été évalué à plus de 90 % [17, 18]. Ses avantages sont Le respect du naturel du visage concerne évidemment aussi
nombreux et s'intègrent parfaitement dans une démarche de la correction des pertes de volume liées à l'âge.
prévention du vieillissement facial dont la demande est Nous avons vu plus haut l'importance du support osseux
aujourd'hui forte : précision et donc naturel des résultats, rapi- et la possibilité de pallier dans une certaine mesure sa défi-
dité d'action, durabilité correcte de ses effets, sécurité à long cience grâce à des injections d'acide hyaluronique judicieu-
terme [19]. Un autre élément important est l'amélioration pro- sement placées. C'est notamment le cas du tiers moyen, du
gressive des rides grâce aux traitements répétés par la toxine menton, de la région mandibulaire.
botulinique, permettant dans certains cas un véritable retour en Quand on parle de correction des volumes, il est classique
arrière et représentant un argument décisionnel fort. de dire que l'harmonie des volumes est plus importante que
Les règles d'utilisation de la toxine botulinique dans le cadre le volume lui-même, notamment chez le sujet jeune, mais
de la dynamique faciale sont assez simples et doivent avant aussi chez le patient plus âgé chez lequel il est illusoire de
tout être adaptées en fonction de l'âge du patient et du main- vouloir à tout prix chercher à corriger la ptose ou des sillons
tien du naturel du visage, d'autant que les patients consultent marqués en remplissant le visage de fillers, aboutissant à des
de plus en plus tôt avec le souci de la prévention du vieillisse- résultats particulièrement artificiels et inesthétiques.
ment du visage. Plus le sujet est jeune, plus il est important Les règles de correction volumétrique dans le cadre de la dyna-
qu'on ne puisse pas identifier la nature du geste correcteur. mique faciale obéissent en fait à des règles assez simples [20, 21] :
L'analyse du visage en dynamique est essentielle pour déceler ■ analyser avant toute correction les mouvements des tissus

précocement chez le sujet jeune un jeu musculaire important mous dans la dynamique faciale afin d'anticiper les zones
entraînant des plis marqués lors de la contraction musculaire ; d'injections en volumétrie ;

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Chapitre 2. Dynamique faciale et expressions faciales émotionnelles

■ injecter des quantités précises d'acide hyaluronique après selon un axe vont définir les paramètres de cohésivité. La cohési-
identification des points clés du vieillissement, en vérifiant vité définit ainsi les forces d'adhésion internes maintenant entre
l'absence d'excès en dynamique (« less is more ») ; elles les unités réticulées d'acide hyaluronique. Elle définit l'adhé-
■ bien connaître l'anatomie faciale pour injecter le comparti- sion du gel sur lui-même : plus un gel est cohésif, plus il résiste à la
ment anatomique adéquat en statique et en dynamique. compression/étirement. À G*/G′ égaux, un gel à faible cohésivité
Cela est particulièrement vrai pour le tiers moyen du visage perdra plus facilement sa capacité de projection qu'un gel à forte
où il est crucial d'identifier les pertes de volume relevant de cohésivité. Cette cohésivité dépend de la concentration en acide
la correction du compartiment graisseux profond et celles hyaluronique et de la technologie de réticulation. Sur un plan cli-
relevant de la correction des compartiments superficiels. nique, elle définit la projection verticale initiale donnée par le bolus
de gel d'acide hyaluronique injecté, avant toute contrainte de
La rhéologie des acides hyaluroniques cisaillement. Elle influence fortement la capacité de modeler le gel
L'utilisation des acides hyaluroniques est essentielle dans juste après l'injection.
tous les processus de rajeunissement facial. Or, l'implanta- Les autres propriétés fondamentales de l'acide hyaluro-
tion d'un acide hyaluronique dans une structure anatomique nique sont l'hydrophylie, l'intégration tissulaire, la durabilité
complexe soumet l'implant à des forces multiples résultant dans le temps et la tolérance du produit.
de contraintes mécaniques intrinsèques et extrinsèques. Ces Le visage présente une structure anatomique complexe
contraintes sont différentes selon la zone anatomique trai- soumise à des forces variées associant compression/­
tée, pour laquelle il est possible de définir un véritable étirement et cisaillement latéral, très variables en fonction de
« cahier des charges » rhéologique, variable évidemment en la région concernée. On peut schématiquement distinguer :
■ des forces intrinsèques : ce sont l'ensemble des tensions et
fonction de la région concernée. La bonne connaissance des
propriétés rhéologiques des acides hyaluroniques est indis- mouvements entre les différents tissus faciaux à l'état sta-
pensable afin de choisir le produit idéal pour chaque indica- tique et lors de la dynamique faciale ;
■ des forces extrinsèques liées à la vie quotidienne et aux
tion et chaque zone anatomique à corriger.
La rhéologie définit l'ensemble des propriétés de déformation activités inhérentes (sommeil, activités physiques, alimen-
et d'écoulement d'un matériau sous contrainte. L'acide hyaluro- tation, baisers, etc.).
nique est un gel viscoélastique comportant deux composantes : À chaque zone anatomique vont s'appliquer des
■ une composante visqueuse témoignant de sa capacité de
contraintes mécaniques variant en nature, en intensité et en
déformation ; fréquence, nécessitant l'utilisation pour le rajeunissement
■ une composante élastique définissant la capacité du gel de
facial d'un acide hyaluronique aux propriétés rhéologiques
retrouver tout ou partie de sa forme après déformation adaptées et répondant à un « cahier des charges » spécifique
initiale. (encadrés 2.1 à 2.3).
Il s'agit donc de combiner les composantes élastiques et
visqueuses afin d'obtenir un gel possédant les propriétés
recherchées. Quatre paramètres de viscoélasticité sont ainsi
définis et correspondent aux contraintes de cisaillement
latéral ou de torsion selon un axe : Encadré 2.1
■ module G* : il représente l'énergie totale nécessaire pour

déformer un matériau et définit la dureté du gel ; Le cahier des charges rhéologique


■ module élastique G′ : il correspond à la fraction d'énergie du tiers supérieur du visage
de G* restituée après déformation et définit la résistance à
la déformation ; Cernes
■ module visqueux G″ : il s'agit de la fraction d'énergie de G* Dans la région des cernes, les contraintes mécaniques sont
perdue après déformation et reflète l'incapacité du gel de représentées par des forces de compression et de cisaille-
retrouver sa forme initiale après déformation ; ment faibles.
■ tan δ : c'est le rapport G″/G′ et il permet de mesurer si un Ainsi, l'acide hyaluronique utilisé répond au cahier des
gel est plus élastique ou plus visqueux. charges rhéologique suivant  : peu de résistance à la com-
Par ailleurs, G* et G′ ont tendance à augmenter quand on pression, grande malléabilité. L'acide hyaluronique utilisé
réticule davantage l'acide hyaluronique, tandis que G″ a ten- doit donc posséder une cohésivité faible et une résistance à
dance à diminuer. la déformation (G′) faible à modérée.
Sur un plan clinique, les contraintes de cisaillement sont Il ne pas doit pas, en outre, être susceptible d'induire des
causées par des mouvements de glissement entre les diffé- œdèmes après injection (à différencier évidemment des
rents plans anatomiques (peau, muscles, graisse et peau). Un œdèmes liés au traumatisme du geste technique) ; son
gel à forts G* et G′ résistera mieux à ces mouvements et hydrophilie doit en conséquence être faible.
conservera mieux sa forme. Il doit être dépourvu d'effet Tyndall (gel lisse) et devra être
Cependant, un bolus de gel d'acide hyaluronique n'est invisible après injection, donc introduit en profondeur dans
pas constitué de gel mais d'un assemblage d'éléments réticulés plus le bon plan anatomique, au contact osseux.

oumoinscollésensemble :lescontraintesdec­ ompression-étirement
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Chapitre 2. Dynamique faciale et expressions faciales émotionnelles

Région frontale Correction des compartiments graisseux superficiels


Au niveau du front, les contraintes mécaniques sont repré- Au niveau des compartiments graisseux superficiels, les
sentées par des forces de compressions faibles à moyennes contraintes mécaniques sont représentées par des forces de
et par des forces de cisaillement modérées à fortes. compression plus faibles et des forces de cisaillement faibles
Le cahier des charges rhéologique est caractérisé par une à modérées.
bonne capacité de soulèvement mais aussi d'étalement. Le Le cahier des charges rhéologique nécessite peu de projec-
produit doit être indétectable en statique et lors de la tion, une bonne malléabilité et une bonne intégration tissu-
mobilisation du front en dynamique. laire de sorte que le produit soit indétectable en statique, à
Par conséquent, l'acide hyaluronique utilisé devra posséder la palpation et en dynamique.
une cohésivité moyenne et une résistance à la déformation Le produit devra posséder une cohésivité faible à moyenne
(G′) modérée. et une résistance à la déformation (G′) modérée.
Région temporale
Dans la région temporale, les contraintes mécaniques
sont représentées essentiellement par des forces de Encadré 2.3
compression, associées à des contraintes de cisaillement
faibles. Le cahier des charges rhéologique
Le cahier des charges rhéologiques dépend de la technique du tiers inférieur du visage
utilisée pour corriger la perte de volume temporale :
■ en cas d'injection profonde dans la fosse temporale, Lèvres
il faudra une bonne capacité de soulèvement et Il faut distinguer les lèvres rouges et les lèvres blanches.
une bonne résistance à la compression : l'acide
Lèvres rouges
hyaluronique utilisé devra posséder une cohésivité
Les contraintes mécaniques sont complexes, associant des
forte et une résistance à la déformation (G′) élevée ;
forces de compression/étirement fortes et de cisaillement
■ en cas d'injection dans le compartiment graisseux
faibles à moyennes.
superficiel, l'acide hyaluronique devra posséder une
Le cahier des charges rhéologique nécessite une bonne
moindre capacité de soulèvement mais tout de
projection, un respect du naturel en statique avec un
même suffisante pour obtenir un effet thérapeutique
produit indétectable et une excellente mobilité en dyna-
correct ; il devra également avoir une bonne
mique. Il faut également une bonne intégration
capacité de malléabilité et d'étalement afin d'être
tissulaire.
indétectable. L'acide hyaluronique utilisé aura une
Le produit devra donc posséder une bonne cohésivité
cohésivité faible à moyenne et une résistance à la
avec une résistance à la déformation (G′) modérée à
déformation (G′) modérée à moyenne.
moyenne.
Lèvres blanches
Les contraintes mécaniques associent peu de compression
Encadré 2.2 et peu de cisaillement. Il s'agit surtout d'un traitement
Le cahier des charges rhéologique superficiel visant à corriger des rides multiples soit d'hé-
liodermie, soit d'expression par la mise en jeu de l'orbicu-
du tiers moyen du visage laire de l'œil, soit une association des deux.
Le cahier des charges rhéologiques nécessite donc une
Volumétrie profonde du tiers moyen
excellente malléabilité, un bon étalement, le produit devant
Dans la région du tiers moyen, si l'on considère la correction être indétectable en statique et en dynamique.
volumétrique du compartiment graisseux profond, les L'acide hyaluronique injecté devra être caractérisé par
contraintes mécaniques sont représentés par des forces de une cohésivité et une résistance à la déformation (G′)
cisaillement latéral assez faibles, mais par des forces de com- faibles.
pression moyenne à élevées.
Le cahier des charges rhéologique nécessite une projection Zone péri-orale
avec maintien des contours, une bonne résistance à la com- Les contraintes mécaniques sont complexes, associant des
pression et à l'étirement. forces de compression/étirement faibles à modérées et des
Le produit utilisé doit de ce fait posséder une cohésivité forces de cisaillement également faibles à modérées.
élevée à moyenne avec une résistance à la déformation (G′) Le cahier des charges rhéologique nécessite un produit
moyenne à élevée. aisément modelable, indétectable en statique et en
Évidemment, le produit doit être indétectable et ne pas dynamique.
migrer ; il convient donc de l'injecter en bonne position Le produit devra donc posséder une cohésivité moyenne et
dans le compartiment graisseux profond, au contact osseux. une résistance à la déformation (G′) modérée.

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En cas de sillons profonds, un acide hyaluronique de plus migration du produit qui doit rester indétectable.
haute cohésivité peut être nécessaire. Il sera cependant plus L'acide hyaluronique injecté devra posséder une cohésivité
difficile à modeler et sera plus facilement détectable, sur- faible à moyenne et un G′ modéré.
tout en dynamique. Ovale du visage
Menton Les contraintes mécaniques associent des forces de com-
Les contraintes mécaniques associent des forces de pression/étirement moyennes à modérées et des forces de
compression importantes mais relativement peu de
­ cisaillement faibles à modérées.
cisaillement. Le cahier des charges rhéologique doit distinguer :
Le cahier des charges rhéologique nécessitera donc une ■ la correction profonde en appui osseux pour

bonne projection avec un produit qui ne devra en aucun restituer l'ovale du visage : il faudra dans ce cas une
cas migrer. bonne projection avec un produit qui ne migre pas.
L'acide hyaluronique injecté devra donc posséder une cohé- L'acide hyaluronique devra posséder une cohésivité
sivité élevée et une résistance à la déformation (G′) élevée. élevée et une résistance à la déformation (G′)
Nez élevée ;
■ la correction superficielle avec un produit aisément
Les contraintes mécaniques sont représentées par des
modelable et indétectable en statique et en dynamique :
forces de compression modérées, sans cisaillement.
l'acide hyaluronique devra être caractérisé dans ce
Le cahier des charges impose une bonne capacité de pro-
cas par une cohésivité moyenne et une résistance à la
jection, une bonne malléabilité, l'absence de possibilité de
déformation (G′) modérée (fig. 2.15).

A B

C D
Fig. 2.15  Traitement global du visage par la toxine botulinique et les acides hyaluroniques avant (A, C) et 15 jours après (B, D).
On observe la correction des expressions négatives au repos et le respect de la dynamique faciale.
Source : © Wiley Periodicals, Inc.

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Chapitre 2. Dynamique faciale et expressions faciales émotionnelles

Conclusion [10] Ekman P, Rosenberg EL. What the face reveals: basic and applied
studies of spontaneous expression using the facial action coding
system (FACS). 2nd Ed New York: Oxford University Press ; 2004.
La dynamique faciale est la quatrième dimension de la prise
[11] Belhaouari L, Gassia V. L'art de la toxine botulique. 2e éd Paris :
en charge globale du visage. Elle est essentielle aujourd'hui Arnette ; 2013.
pour permettre à la fois de respecter les expressions faciales [12] Rohrich R, Pessa J. The fat compartments of the face, anatomy
émotionnelles et de corriger les expressions négatives liées and clinical implications for cosmetic surgery. Plast Reconstr Surg
au vieillissement. Elle répond ainsi à l'une des préoccupa- 2007;119(7):2219–27.
tions majeures des patients, la recherche d'un résultat natu- [13] Belhaouari L, Teisseire P, Quinodoz P. Rajeunissement et embellis-
sement du tiers moyen du visage avec l'acide hyaluronique.
rel et harmonieux.
Vecteurs pour la volumétrie. J Med Esth Chir Derm 2012;XXXIX:
147–55.
[14] Gassia V, Raspaldo H, Niforos FR, Michaud T. Global ­3-dimensional
Références approach to natural rejuvenation: recommendations for perioral,
[1] Raspaldo H, Gassia V, Niforos FR, Michaud T. Global, 3­ -dimensional nose, and ear rejuvenation. J Cosmet Dermatol 2013;12(2):
approach to natural rejuvenation: part 1 – recommendations for 123–36.
volume restoration and the periocular area. J Cosmet Dermatol [15] Michaud  T. La prévention du vieillissement facial par les injec-
2012;11:279–89. tables (toxine botulinique et acide hyaluronique). Réalités
[2] Darwin  C. The expression of emotions in man and animals. Thérapeutiques en Dermato-Vénéréologie 2017; cahier 2:1–10.
Chicago: University of Chicago Press; 1965. [16] Di Maio M. Unlocking the code to facial rejuvenation: a step-by-
[3] Philippot P. Émotion et psychothérapie. Wavre: Mardaga ; 2007. step approach to using injectables. Allergan, EAME/009/2015.
p. 11–64. [17] Trindade De Almeida Carruthers J, Cox SE, et al. Patient satisfac-
[4] Ekman  P. Emotion in the human face. New York: Cambridge tion and safety with aesthetic onabotrulinum toxinA after at
University Press; 1982. least 5  years: a retrospective cross-sectional analysis of 4,402
[5] Tcherkassof  A. Les émotions et leurs expressions. Grenoble  : glabellar treatments. Dermatol Surg 2015;41:S19–28.
Presses Universitaires de Grenoble; 2008. [18] Carruthers A, Sadick N, Brandt F, et al. Evolution of facial aesthetic
[6] Mondillon  L, Tcherkassof  A. La communication émotionnelle  : treatments over five or more years: a retrospective cross-­sectional
Quand les expressions faciales s'en mêlent…. Revue Électronique analysis of continuous onabotulinum toxinA treatments. Dermatol
de Psychologie Sociale 2009;4:25–31. Surg 2015;41:693–701.
[7] Lewis MB, Bowler PJ. Botulinum toxin cosmetic therapy corre- [19] Rivkin A, Binder W. Long term effects of onabotulinum toxinA on
lates with a more positive mood. J Cosmet Dermatol 2009; facial lines: a 19-year experience of identical twins. Dermatol Surg
8:24–6. 2015;41:S64–6.
[8] Lewis  MB. Exploring the positive and negative implications of [20] Michaud T. Rheology of hyaluronic acid and dynamic facial reju-
facial feedback. Emotion 2012;12(4):852–9. venation: topographical specificities. J Cosmet Dermatol 2018;17:
[9] Duchenne de Boulogne  GB. Mécanisme de la physionomie 736–43.
humaine ou analyse électro-physiologique de l'expression des [21] Michaud T, Gassia V, Belhaouari L. Facial dynamics and emotionnal
passions. Paris: Librairie J.-B. Bailliere et Fils ; 1876. Consultable expressions in facial aging treatments. J Cosm Dermatol 2015;14:
sur : http://vlp.mpiwg-berlin.mpg.de/library/data/lit38953 ;. 9–21.

32
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Techniques Partie 2
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Section 1. Techniques cosmétiques

Chapitre 3
Les cosmétiques dans la prise
en charge du vieillissement
cutané et dans
l'accompagnement des actes
techniques
A. Cohen-Letessier, I. Gallay

Introduction déjà qu'elle ne dépend pas seulement des gènes, mais aussi
de l'épigénétique qui convertit l'information génétique
Selon la définition admise par l'Agence nationale de sécurité du (génotype) en traits observables (phénotype). Les facteurs
médicament et des produits de santé (ANSM) : « Un produit environnementaux qui influent sur les gènes, tels que le
cosmétique est une substance ou un mélange destiné à être tabac, le soleil, le sommeil, le stress, la pollution, l'alimenta-
mis en contact avec les diverses parties superficielles du corps tion, sont responsables d'environ 70  % des dégradations
humain (épiderme, systèmes pileux et capillaire, ongles, lèvres cutanées et devront être corrigés. Selon Jean-Claude
et organes génitaux externes) ou avec les dents et les muqueuses Ameisen : « L'ADN ne scelle pas aveuglément notre destin
buccales, en vue, exclusivement ou principalement, de les net- génétique ».
toyer, de les parfumer, d'en modifier l'aspect, de les protéger, de La cosmétique personnalisée est née de cette expertise
les maintenir en bon état ou de corriger les odeurs corporelles » des dermatologues dont les prescriptions de cosmétiques
(Directive européenne 76/768/CEE, amendée 7 fois depuis). découlent d'une analyse sémiologique de la peau et du
Comment peut-on aujourd'hui définir un produit cosmé- type de vieillissement de leurs patients. À côté d'un net-
tique « actif » ? C'est un produit destiné à améliorer la préven- toyant doux, une routine de soins associe diversement
tion et la réparation du vieillissement de la peau incluant actifs anti-oxydants, hydratants et photoprotecteurs,
systématiquement le ressenti des utilisateurs par des marqueurs appliqués dans cet ordre le matin, hydratants et restructu-
physiologiques sachant que, selon la formule look good, feel bet- rants le soir. Cette routine de base pourra être enrichie en
ter, la perception de l'apparence a un impact psychologique et alternance ou en cures successives par des actifs ciblés  :
social important, qui va produire des effets physiologiques. agents éclaircissants, lissants, anti-inflammatoires, ou de
Le prérequis d'un cosmétique est « d'abord ne pas synthèse selon les principes de la cosmétologie fonction-
nuire » ; il est indispensable avant tout acte technique  : nelle.
« pas d'interventions sur une mauvaise peau ». Il va enca-
drer l'acte technique (il le précède, l'accompagne et le suit). Les différents actifs cosmétiques
En cosmétique, il faut être davantage attentif aux effets
qu'aux actions. De l'universel au personnalisé, de l'antirides à l'antirelâche-
L'industrie cosmétique emprunte ses idées de développe- ment, il reste très difficile de mettre au point un cosmétique
ment au monde de la biologie, de la chronobiologie, de la actif qui va assurer toutes les modifications cutanées appa-
médecine de régénération et de prévention. raissant au cours du vieillissement, mais on peut retenir un
De nombreux axes de recherche sur le microbiome, les changement dans la continuité et surtout des molécules qui
cellules souches adultes, les cellules mésenchymateuses, les restent incontournables.
facteurs de croissance sont autant de voies suivies Les propriétés démontrées d'un cosmétique sont de main-
aujourd'hui pour la découverte d'actifs ciblés dans le vieil- tenir une hydratation optimale, de conserver ou réparer la
lissement cutané. Ces nouvelles approches tenteront de barrière cutanée, d'accélérer le renouvellement cellulaire, de
reculer les aiguilles de l'horloge biologique, dont on sait rétablir l'éclat du teint, de régulariser la pigmentation, d'être
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anti-oxydant et antiglycant, de lutter contre l'inflammation pilosébacées, réduit le nombre des mélanosomes, augmente
silencieuse, d'avoir un bon index neurosensoriel. la production de collagène, élastine et fibronectine, et des
De nombreuses molécules qui répondent à ces objectifs glycosaminoglycanes (GAG). Il favorise l'augmentation du
seront détaillées ci-dessous, parmi la grande famille des vita- nombre de cellules de Langerhans et réduit l'activité de la
mines, les alphahydoxyacides, les isoflavones et leurs dérivés, collagénase et de la gélatinase (métalloprotéinases [MMP]).
les peptides, l'acide hyaluronique, les protecteurs solaires. L'activation de la prolifération des fibroblastes, la synthèse de
Cette sélection d'actifs n'est pas exhaustive et est constam- collagène et la diminution du taux des MMP ont été vérifiées
ment évolutive. La recherche en cosmétologie permet de dans des biopsies de peau protégée du soleil (fesses) avant et
mieux appréhender la physiologie cutanée [1]. L'amélioration après application en occlusion pendant 7 jours avec une lotion
de l'éclat du teint qui est la réflexion de la lumière sur la peau de rétinol à 1 % en comparaison au véhicule seul [5]. Une étude
et une bonne réflexion de la lumière passent par un grain de sur 36  volontaires (moyenne âge 87  ans) contre excipient
peau régulier, une texture et une couleur homogène, une retrouve après application d'une lotion à 0,4 % de rétinol 3 fois
bonne hydratation suivis de l'amélioration des accidents de par semaine pendant 6 mois, sur l'un des avant-bras par rapport
« terrain » : des ombres portées par toutes les irrégularités : à l'autre qui recevait l'excipient, une réduction de tous les para-
rides, sillons, cicatrices volumes. La morphologie de la sur- mètres côté traité (évaluation cotée de 0 à 9 des stigmates du
face cutanée est corrélée à la fois à l'hydratation et à l'épais- vieillissement, des rides et rugosité, avant, à 2, 4, 8, 16 et
seur du stratum corneum [2]. 24  semaines). Des biopsies faites avant et après sur les deux
Les cosmétiques vont limiter la perte insensible en eau avant-bras montrent une augmentation de la production des
(PIE) et reconstituer l'équilibre de la barrière cutanée par la GAG et du procollagène du côté traité par la lotion au rétinol [6].
reconstitution des lipides clés avec un ratio : 3/1/1/1 de cho- La prolifération des cellules de l'épiderme du visage a été
lestérol, céramides, acides gras libres (palmitate, linoléate) vérifiée in vivo par spectrofluorimétrie chez des sujets après
par l'apport de substances hygroscopiques et humectantes 3 mois de traitement, alors que le véhicule n'a montré aucun
(natural moisturizing factor [NMF]  : acide lactique, urée, effet [7]. Rossetti et al. ont vérifié sur des explants de peau
acide pyrolidone carboxylique, glycérol), et des aquaporines humaine que le rétinol à faible concentration 0,04 % exerçait
(AQP3, aquaglycéroporine dans la couche basale épider- son activité anti-âge non seulement par l'amélioration de la
mique), dont l'expression diminue avec l'âge et le soleil [3]. prolifération épidermique et de la production de collagène,
La photoprotection solaire a démontré son intérêt sur mais aussi par une augmentation de la production d'élastine
l'élastose solaire, la prévention des kératoses actiniques et et de l'organisation du réseau élastique [8].
même certains types de mélanomes, objectivé par diffé-
rentes études [4]. Vitamine C
La vitamine C (acide L ascobique) a fait l'objet de nombreux
Protecteurs solaires travaux [9–13]. Elle est photoprotectrice (prévient l'immu-
Les facteurs de protection solaire (FPS 15 à 50 +) doivent nodépression induite par les UV) ; elle est anti-­inflammatoire,
être photo- et thermostables, couvrir UVB et UVA (15 % du anti-oxydante ; elle accroît le nombre de fibroblastes, et aide
FPS ont une protection contre les UVA courts ++), infra- ainsi à la réduction et à l'accumulation de l'élastine dénatu-
rouge et lumière visible, être résistants à l'eau et non toxiques. rée, en particulier dans l'héliodermie. Elle stimule la produc-
Les principales molécules sont le Tinosorb® M (+ S), tion de collagène (I, III) et, au niveau de la jonction
Mexoryl® SX et XL + Parsol® 1789 stabilisé, Zn0, Uvasorb®, dermo-épidermique, augmente le taux du collagène  IV et
VII ; elle a une action réductrice sur les MMP.
TiO2 + Parsol® 1789, stabilisé ; organique et inorganique. Plus
Les UV consomment la vitamine C par les mécanismes
de 10 000 tonnes de filtres solaires sont produits chaque
de défense naturels contre le stress oxydatif. La concen-
année sur le marché mondial.
tration d'acide ascorbique est fortement réduite après
Le calcul de la quantité appliquée est important pour être
exposition aux UV. L'apport par voie cutanée permet
en équation avec le FSP : 1,5 mg/cm2 à 6 mois (par exemple
d'apporter à la peau la vitamine  C manquante. La vita-
pour Azurdia RM®, Photodermatol®, Photoimmunol®, Pho- mine C réduit la synthèse du pigment mélanique par inhi-
tomed 2000®). bition de la tyrosinase. Ses esters sont utilisés depuis
En pratique, ces doses sont rarement respectées. quelques années pour les traitements dépigmentants.
Les formules doivent être biodégradables et plus difficile- Sous sa forme stabilisée, elle réduit la dendricité des
ment assimilables par les organismes marins pour le respect mélanocytes. Elle améliore la fonction de barrière cuta-
des océans. née en stimulant les sphingolipides.
Rétinol
Le rétinol (vitamine A) et ses dérivés – rétinaldéhyde, acide
Alpha-hydroxyacides
rétinoïque, esters rétinyliques  – sont impliqués dans de et bêta-hydroxyacides
nombreux mécanismes physiologiques de la peau. Le rétinol Il y a trois générations d'hydroxyacides : alpha-hydroxyacides
réduit la cohésion du stratum corneum, augmente la prolifé- (AHA ; acide glycolique), polyhydroxy-acide (PHA ; glucono-
ration épidermique, normalise la kératinisation des unités lactone), PHA complexe (acide lactobionique) [14–16]. Ils

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stimulent le turn-over cellulaire, augmentent l'épaisseur de sur la peau altèrent la barrière cutanée [20]. Les cosmétiques
l'épiderme vivant, diminuent des atypies cellulaires de la ciblés permettent une amélioration de ces perturbations.
couche basale, sont hydratants, repulpent et raffermissent la
peau. Les bêta-hydroxyacides (acide salicylique, acide Génistéine
citrique) augmentent l'épaisseur de l'épiderme vivant et le De nombreuses études ont démontré les effets anti-­oxydants
taux des GAG dans la peau insolée [17]. des isoflavones en topique, en particulier la génistéine, qui
Ces molécules sont souvent associées à l'acide kojique, augmente le carotène plasmatique et la vitamine C, inhibe
l'acide phytique, l'acide alguronique, l'arbutine, la génistéine l'inflammation photo-induite, bloque la réplication des cel-
en préparation cosmétique pour les taches pigmentées. lules endommagées, a une action dépigmentante et aug-
mente le taux du collagène [21].
Acide hyaluronique (HA) Anti-oxydants, antiradicalaires puissants, anti-inflammatoires,
L'HA est un glycosaminoglycane, polysaccharide à haut antitumoraux, les isoflavones stimulent la production des
poids moléculaire composant majeur des matrices extracel- macromolécules par l'intermédiaire du transforming growth fac-
lulaires dont la concentration totale chez l'homme est d'en- tor β (TGFβ) et de l'insulin-like growth factor 1 (IGF1) ; ils réparent
viron 15 g. La peau en est le principal réservoir ; elle contient la membrane basale, sont de bons hydratants ; ils réduisent la
la moitié de la masse totale de l'organisme. pigmentation photo-induite.
L'HA est synthétisé par les fibroblastes essentiellement et
les kératinocytes. Son taux se renouvelle d'un tiers tous les Pro-Xylane®
jours. Il joue un rôle majeur dans l'homéostasie cutanée et
Le Pro-Xylane® est une molécule dérivée de xylose naturel
dans la cicatrisation. Il exerce des fonctions différentes dans
qui joue un rôle clé dans l'initiation de la biosynthèse des
l'épiderme et le derme, deux compartiments où les phéno-
GAG ; il est de petite taille, donc de pénétration facile et très
mènes de synthèse et de dégradation sont indépendants.
bien toléré (biomimétisme). Il augmente l'expression du
L'HA est connu pour ses propriétés hygroscopiques très
récepteur épidermique à l'HA (CD44), favorise le recrute-
importantes ; il s'associe à un grand volume d'eau, ce qui lui
ment d'HA au niveau de l'épiderme et, de ce fait, son hydra-
confère un pouvoir hydratant énorme ; on l'appelle l'« éponge
tation. L'augmentation de l'expression du CD44 renforce la
moléculaire ». Il contrôle les flux ioniques.
cohésion entre les kératinocytes ainsi que leur prolifération.
Ces propriétés lui permettent de retenir électrolytes, nutri-
ments, facteurs de croissance. Il a des effets rhéologiques, Le Pro-Xylane® améliore l'ondulation de la jonction dermo-­
facilitant ainsi prolifération et migration cellulaire (rôle épidermique sur peau reconstruite [22].
important dans la cicatrisation). Il facilite l'adhésion cellulaire
Niacinamide
par le biais des intégrines. Il se lie à des protéines, les hyalad-
hérines ; le couple HA/hyaladhérine intervient dans les étapes C'est la forme active de la niacine ou vitamine  B3, connue
essentielles du métabolisme cellulaire cutané [18] : adhésion sous le nom de vitamine  PP (pellagra preventive). Cette
matrice/cellule, prolifération et migration des fibroblastes et molécule a des propriétés anti-oxydantes (photocarcinoge-
des kératinocytes, angiogenèse et synthèse du collagène. nèse et immunosuppression diminuées) ; elle inhibe le trans-
L'HA (macromolécule de 1 à 6 millions de daltons) reste en fert des mélanosomes des mélanocytes vers les kératinocytes,
surface et, par son pouvoir hygroscopique, va avoir un effet et donc réduit la pigmentation.
filmogène de protection et de reconstruction de la barrière Une étude a mis en évidence sur des femmes japonaises
cutanée et de piégeurs de radicaux libres. Les poids molécu- après 8 semaines d'application d'une crème contenant 5 %
laires intermédiaires (200 000 à 1 million de daltons), HAFi à de niacinamide sur des taches actiniques une amélioration
1 % associé au rétinaldéhyde, pénètrent dans l'épiderme et significative, contre excipient. Une autre étude sur des
auront de nombreuses propriétés démontrées sur la prolifé- Caucasiennes a démontré que la niacinamide topique à 5 %
ration kératinocytaire en application topique pendant contre excipient sur le visage de 40  femmes âgées de 35 à
1  mois chez les sujets porteurs d'une atrophie cutanée 60 ans pendant 12 semaines avec une analyse en 3D et en
postcorticothérapie ou liée à l'âge [19]. spectrophotométrie améliore les lentigos solaires et la tex-
Au cours du vieillissement, il y a diminution de la quantité et ture de la peau avec une tolérance excellente.
de la nature de l'HA (diminution de la forme libre), ce qui induit La molécule de niacinamide stimule la synthèse d'un
une détérioration de la qualité des tissus et des processus de néocollagène (+ 54  %) de fibroblastes de peau âgée en
réparation : ralentissement de la cicatrisation des plaies, dessè- culture, permet une augmentation des protéines totales de
chement très important, atrophie dermique et vergetures. 41 %, du nombre de cellules de 20 %, par rapport au véhicule,
On sait également qu'au cours de la ménopause et avec la régularise la synthèse des céramides, améliore la barrière
diminution de la quantité de progestérone et d'œstrogènes, cutanée et augmente la synthèse des marqueurs de la diffé-
le taux d'HA baisse de façon considérable dans le derme. renciation kératinocytaire (involucrine et filaggrine) [23, 24].
L'HA est une molécule de réponse au stress. Les petits poids
moléculaires d'HA, les plus rares (100 000 daltons), pénètrent Acide férulique
dans le derme et vont jouer un rôle de réparation et de cica- Dérivé phénolique extrait de la lignocellulose qui confère
trisation, et stimuler la densité cutanée. Les effets du stress leur solidité aux parois des cellules végétales de certaines

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graines (mais, riz, blé, avoine, etc.), on lui attribue une puis- Neurocosmétiques
sante activité anti-oxydante, une activité pro-apoptosique
Le système neuro-immunocutané est une cible importante
des cellules tumorales, et préventive des cancers induits par
du traitement du vieillissement cutané et de l'agression de la
l'exposition environnementale à certains cancérigènes
peau avec de nombreux neuromédiateurs synthétisés au
comme le benzopyrène. Il pourrait donc, en application
niveau du cerveau et de la peau réalisant des connexions
topique, avoir un rôle protecteur des polluants atmosphé-
entre ces deux organes. Ceux-ci jouent un rôle essentiel dans
riques. Mais c'est surtout associé à l'acide ascorbique et à la
la protection, les sensations et l'immunité (substance P, VIP,
vitamine  E que son rôle préventif du vieillissement cutané
CGRP, somatostatine, MSH, ACTH, ocytocine, GABA).
serait avancé, par un effet réducteur du stress oxydant et de
Cette approche semble prendre une importance dans la
la formation de dimères de thymine dans le derme [25].
formulation des cosmétiques et l'on définit le concept NICE-
Resvératrol TCM comme étant la prise en charge du système neuro-­
immunocutané endocrine (NICE) avec les principes de
Extraite du sarment de vigne, cette molécule qui est un médecine traditionnelle chinoise (traditional Chinese medi-
polyphénol a fait l'objet depuis 1997 de très nombreuses cine [TCM]). Les réseaux cellulaires sont interconnectés
publications. Elle inhibe les trois étapes majeures de la cancé- entre eux par le NICE system et l'influence des facteurs envi-
rogenèse : la mutation de l'ADN dans la cellule, la promotion ronnementaux. La membrane cellulaire externe doit mainte-
de la tumeur (la cellule devient cancéreuse) par inhibition de nir un environnement humide essentiel à la survie de la
la cyclo-oxygénase et la progression de la tumeur. cellule. L'énergie circule à partir de l'adénosine triphosphate
Ces actions sont dose-dépendantes : 15 à 25 μmol en topique (ATP) ; lorsque cette énergie est bloquée, la cellule meurt. Il
2 fois par jour pendant 18 semaines permettent 88 % d'inhibi- s'agit donc de maintenir un flux constant d'ingrédients et
tion des cancers cutanés chez la souris [26]. Les travaux du d'énergie pour moduler les messages intercellulaires médiés
Pr  Vercauteren depuis 2002 ont permis de comprendre les par des protéines (cytokines et chémokines).
nombreuses propriétés de cette molécule, notamment anti- Les nanofibrilles de chitine, polyglucoside électropositif,
vieillissement : par son pouvoir anti-­oxydant majeur, le resvéra- associées à l'HA (polymère électronégatif) auraient trois
trol protège toutes les structures cutanées et prolonge la durée actions : protection de la barrière cutanée, anti-­inflammatoire
de vie des cellules en boostant les sirtuines (classe d'enzymes, et réparatrice des dégâts environnementaux [30].
des histones désacétylases NAD-dépendantes régulant l'expres-
sion de certains gènes – épigénétique – chez les eucaryotes).
Peptides
Antiglycants
Les cibles cliniques ont évolué, mais les ambitions revendi-
Certains actifs cosmétiques (extraits titrés de romarin, cur- quées par les produits cosmétiques également. Leur mode
cuma, goyave, noyer, etc.) limitent le phénomène de glyca- d'action est aujourd'hui assez spécifique pour tenter d'agir sur
tion des protéines par lequel les protéines vieillies, se liant aux le cytosquelette, la mécanique cellulaire ou les flux ioniques,
sucres, résistent à la dégradation par les enzymes et s'accu- calciques notamment, pour réaliser une relaxation cellulaire
mulent (advanced glycation end product [AGE]), aboutissant avec des molécules comme le manganèse gluconate et les
à la « caramélisation des tissus » (réaction de Maillard). La peptides. La relaxation cellulaire est obtenue par l'inhibition
glycation favorise l'oxydation et l'inflammation silencieuse. de la contractilité des fibres de collagène à l'aide de peptides,
en particulier l'argiréline (acétyl hexapeptide-3) qui pourrait
Défensines inhiber la connexion nerfs-muscles et améliorer l'apparence.
Les défensines sont des peptides cationiques : alpha et bêta. Ces mêmes peptides sont employés dans le traitement du
Les bêta-défensines 1 et 2 sont présentes dans les épithéliums relâchement. Ces agents sont des vecteurs de communica-
et sont exprimées en cas d'inflammation ou d'infection [27]. tion ; ils stimulent le renouvellement cellulaire et diminuent
La dermcidine est spécifique de la peau. Ce peptide de les phénomènes de dégradation [31].
47 acides aminés semble jouer un rôle essentiel dans la réponse Le Matrixyl® est un lipopeptide de synthèse (fragment de
de la peau saine et pathologique aux agressions extérieures. procollagène I). Il stimule la synthèse du collagène I, III et IV,
Le taux des défensines baisse en cas de stress (glucocorti- et la synthèse des GAG. Associé au Lupin Blanc – inhibiteur
coïdes endogènes). des MMP  1, 9, 3  – et à l'acide ursolique (anti-oxydant,
anti-élastase), il forme le complexe profirmine IV qui stimule
Diméthylaminoéthanol (DMAE) de façon synergique le collagène IV et active la synthèse de
Le DMAE à 3 % dans un gel a été appliqué sur le visage de l'intégrine alpha 2 bêta 1.
156  sujets âgés de 35 à 60  ans contre excipient pendant Les peptides de troisième génération, Matrixyl Morphomics®,
18 semaines. On observe, d'après une évaluation en double utilisent le pouvoir de la technologie protéomique et sont
aveugle, jusqu'à 2 semaines après l'arrêt de l'application, une censés activer les gènes de la longévité. Les tests d'immunohis-
diminution des rides du front et de la patte d'oie, une amé- tochimie montrent que les nouveaux peptides augmentent
lioration du relâchement de la peau du cou et une augmen- les éléments de communication cross-talking entre le
tation de la fermeté [28, 29]. cytosquelette interne et la matrice extracellulaire.

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Une étude a montré après 6 semaines d'application de la rellement » conservatrices et sans test sur les animaux ; 5 %
formule, une diminution du volume et des contours des de conservateurs synthétiques antimicrobiens sont autorisés
rides intersourcilières de 9,5 % (p < 0,05) et 7,1 % par rapport et agréés par Ecocert (alcool benzylique, acide déshydroacé-
au placebo. Les rides dynamiques de cette région sont amé- tique, sorbate de potassium ; annexe  VI de la directive),
liorées de 12 à 13 % par rapport au groupe placebo [32]. indispensables à la stabilité de la formule.
En France, trois cahiers des charges sont destinés aux pro-
Les preuves d'efficacité duits bio, définis par les organismes Ecocert, Qualité France,
en cosmétologie du vieillissement Nature et Progrès qui garantissent tous :
■ le recours aux ingrédients végétaux issus de l'agriculture
cutané biologique ;
■ le recours à une forte teneur en ingrédients naturels ;
L'evidence-based medicine (EBM) se définit comme « l'utilisa-
■ le respect de l'environnement sur toute la chaîne de
tion consciencieuse, explicite et judicieuse des meilleures
données disponibles pour la prise de décisions concernant production.
les soins à prodiguer à chaque patient ». Si l'on se réfère à la Des pourcentages exacts figurent sur les étuis et les
médecine fondée sur les preuves, en 2010, avec 422 études conditionnements.
cliniques avec un dermocosmétique, 23 études randomisées Le logo ECO pour « cosmétique écologique » garantit que
à méthodologie faible, la majorité des études étaient de les produits ont été contrôlés par Ecocert ou Qualité France,
niveau C. Les actifs ont un niveau de preuve suffisant, mais avec les caractéristiques suivantes :
■ 95 % au minimum du total des ingrédients sont d'origine
les produits finis un niveau de preuve faible.
Mais doit-on exiger pour un cosmétique le même niveau naturelle ;
■ 5  % au minimum du total des ingrédients sont issus de
de preuve que pour un médicament ? Ne serait-il pas plus
adapté de créer une EBC (evidence-based cosmetic) qui inclue l'agriculture biologique ;
■ 5 % au maximum d'ingrédients de synthèse sont utilisés.
dans les critères principaux le ressenti ?
Il reste toutefois indispensable que tous les praticiens se Le logo BIO pour « cosmétique écologique et biologique »
familiarisent avec la recherche et les essais cliniques évaluant garantit que :
■ 95 % au minimum du total des ingrédients sont d'origine
les cosmétiques pour donner les meilleurs conseils à leurs
patients ; les chirurgiens esthétiques ont établi des échelles naturelle ;
■ 10 % au minimum du total des ingrédients sont issus de
de critères de recommandations [33] :
■ les molécules anti-âge ayant obtenu leur «  diplôme l'agriculture biologique ;
■ 5 % au maximum d'ingrédients de synthèse sont utilisés.
d'EBM », selon une étude [34] : le rétinol, la vitamine C et
les anti-oxydants (EBM sur biosynthèse du collagène) ;
■ les protecteurs solaires UVA, UVB associés aux anti-­
Actifs utilisés
oxydants, enzymes de réparation de l'ADN, le dexpanthé- Les actifs utilisés sont : les eaux florales de rose, d'oranger, les
nol, la glycérine (EBM sur prévention des kératoses huiles essentielles –  géranium (régénérant), bois de rose,
actiniques), la trétinoïne topique à 0,1  % et le rétinol à orange douce (antirides), immortelle bio (relâchement),
10 % (EBM sur pigmentations), l'urée, l'ammonium, le gly- lavande officinale bio (revitalisante et régénérante), huile de
cérol (EBM sur hydratation). jojoba (nourrissante), extrait de bourgeon de hêtre (hydra-
Une revue de la littérature a mis en évidence l'intérêt de tant et lissant), huile d'avocat (régénérante), extrait d'arnica
l'acide glycolique (héliodermie, dyschromie, hyperpigmenta- (apaisant) –, gingembre (énergisant et raffermissant).
tion, mélasma), de la vitamine C (hyperpigmentation, taches, Les allergies aux huiles essentielles sont de plus en plus
héliodermie, rides) du TGFβ1 (rides) et du palmitoyle de fréquentes.
pentapeptide lysine-thréonine-thréonine-lysine-sérine ou
PAL-KTTKS (rides) [35].
Cosmétiques et massage
Biocosmétiques L'acte de massage devrait être systématiquement réhabilité
dans les moyens de prévention du vieillissement faisant
appel aux mécanorécepteurs de la peau, et très probable-
Cosmétiques écologiques et biologiques ment aux cytokines. Les massages alternatifs activent la cir-
Le label de ces cosmétiques est délivré par Ecocert (orga- culation sanguine et les échanges cellulaires, facilitent la
nisme de contrôle et de certification de l'agriculture). Les pénétration des actifs et améliorent l'oxygénation des
produits contiennent 10  % d'ingrédients végétaux issus de tissus.
l'agriculture biologique (pas d'engrais chimiques, de pesti- Une étude canadienne sur les sportifs de haut niveau qui
cides et d'herbicides de synthèse). Ils sont sans colorant, sans ont eu 10 minutes de massage après exercice à vélo a permis
parfum de synthèse, sans parabène, sans silicone, sans PEG, de montrer que le massage atténuait la production des
sans OGM et fabriqués dans le respect de l'environnement cytokines inflammatoires TNFα et interleukine 6 (IL-6) par la
(EcoConception). Sont utilisées des molécules dites « natu- voie de la biogenèse mitochondriale qui serait activée [36].

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Une nouvelle technologie de mécanostimulation, antimicrobiens actifs en particulier contre les effets délétères
ErgoLift™, intègre un micromoteur permettant une stimula- de Staphylococcus aureus de l'environnement extérieur [45].
tion tissulaire par aspiration séquentielle pour régler la
­profondeur d'action dans la peau, et une vitesse de batte-
ment de clapets pour stimuler l'activité cellulaire ciblée. Les
résultats montrent après une dizaine de séances de 10 à
Cosmétiques pré- et probiotiques
30 minutes, une augmentation de la synthèse d'acide hyalu- Les prébiotiques (sucres et fibres) sont une bonne nourriture
ronique (+ 80  %) et de l'élastine (+ 46  %) ainsi qu'une pour la croissance des bonnes bactéries. Les postbiotiques
néocollagenèse [37]. (déchets des bactéries) comme l'acide lactique sont un bon
Une étude randomisée sur 20  femmes présentant des substrat pour leur développement. Les probiotiques (lacto-
signes modérés de photovieillissement montre l'intérêt de bacilles, etc.) rééquilibrent le microbiome. Les bactéries
l'utilisation d'une brosse à massage alternatif sur l'améliora- vivantes étant très difficiles à gérer, la plupart des fabricants
tion de l'hygiène cutanée et l'absorption des principes actifs experts utilisent des bactéries « désactivées » qui ont gardé
(+ 68 %) après 8 semaines versus soin manuel (5 %), avec une activité biologique.
une amélioration statistiquement significative sur les fines La composition microbienne varie dans les différentes
ridules (p < 0,0001), le velouté (p < 0,001) et la fermeté régions du corps, avec une variabilité remarquable chez les
cutanée (p < 0,0001) [38]. individus. Le mode de vie, l'environnement, l'hygiène et l'ali-
Certains travaux ont été menés sur les effets des massages mentation, ainsi que l'âge et le sexe, influent sur la composi-
Gua Sha avec une lame de jade qui permettent d'activer la tion du microbiome de la peau. L'expertise des industriels
circulation [39] et auraient un effet antidouleur par libéra- s'attache à décrypter le cross-talk entre les bactéries et le
tion de l'oxyde de carbone [40]. système immunitaire de la peau.
L'excès d'hygiène et de soins mal adaptés associé à un envi-
ronnement délétère vont déséquilibrer cette flore cutanée,
Cosmétiques du présent sensibiliser la peau et favoriser le développement de mau-
et du futur vaises bactéries au détriment des bonnes bactéries (dys-
biose). L'axe « peau-cerveau » joue un rôle non négligeable
dans les dysbioses. Cette théorie relie les perturbations liées
Cosmétiques personnalisés en fonction aux états émotionnels (stress, anxiété et dépression) qui
du microbiome entraînent des changements dans le mibrobiome intestinal
L'évolution scientifique et technologique a permis de préciser ainsi que l'hyperperméabilité des intestins. Ces changements
le rôle de la flore cutanée ou microbiome (100 000 milliards intestinaux créent une réponse inflammatoire qui peut
de micro-organismes, levures, champignons, bactéries), qui déclencher un certain nombre de problèmes dermatolo-
représente notre deuxième génome, encore plus unique que giques.
notre ADN, une « carte d'identité ». Les probiotiques à usage topique semblent adhérer à la kéra-
La composition du microbiome est déterminante dans le tine humaine et empêcher la formation de biofilm. La recherche
développement du système immunitaire [41]. Le microbiome montre que les produits topiques contenant des prébiotiques
possède une fonction de défense contre les infections et une et/ou des probiotiques peuvent aider la peau en modulant le
fonction anti-inflammatoire. Staphylococcus epidermidis système immunitaire. Un microbiome de peau bien équilibré
régule négativement l'inflammation cutanée chronique ; lors protège contre les agents pathogènes, favorise la barrière des
d'un traumatisme cutané, les cellules endommagées libèrent lipides naturels. Ces produits peuvent aussi fournir des avan-
de l'ARN qui stimule les TLR3 (Toll-like receptors  3), récep- tages thérapeutiques pour des maladies atopiques. Ils semblent
teurs de l'immunité innée exprimés par les kératinocytes qui, également améliorer la guérison des brûlures et des cicatrices,
à leur tour, déclenchent la sécrétion de cytokines initiant l'in- et améliorer le rajeunissement de la peau.
flammation constatée. S. epidermidis permet le contrôle de Cette notion s'applique aux peaux sensibles et réactives et
cette inflammation en sécrétant de l'acide lipotéichoïque, aux sujets exposés à des « techniques » cosmétiques inva-
ligand des TLR2 exprimés par les kératinocytes et dont la sti- sives ou à des habitudes d'hygiène excessives, ou après l'utili-
mulation inhibe le signal TLR3 [42]. sation prolongée de médicaments comme les antibiotiques
La stimulation des TLR2 par Vitreoscilla filiformis et les corticoïdes.
entraîne un effet anti-inflammatoire dans la dermatite Le Sérum Universel® de Synbionyme est un concentré de
atopique via l'induction de la différenciation de cellules T pré- et probiotiques (complexe Pro-B3) qui s'utilise en base
régulatrices [43]. sous n'importe quelle crème pour prévenir la dégradation
L'effet anti-inflammatoire de la flore saprophyte peut être due aux agressions multiples et renforcer les défenses au
gênant en cas d'inflammation aiguë, nécessaire pour la répara- niveau de trois barrières, le stratum corneum, la barrière
tion [44]. Toutefois, S. epidermidis représente le germe sapro- immunitaire et le microbiome [46, 47].
phyte le plus abondant sur la peau (1 à 2 millions par cm2). Prendre des probiotiques oraux et manger des aliments
Il a des effets hydratants par sa production de glycérine et riches en prébiotiques semble aider à résoudre les déséqui-
d'autres substances apparentées ; il contient des peptides libres de la flore intestinale et à rétablir une peau saine.

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Sirtuines et survivine rieure ; le nombre des mitoses kératinocytaires augmente


entre 23 heures 30 et 1 heure du matin [55].
Les sirtuines (pour silencing information regulator) sont au
Le pic de synthèse de l'ADN est à 16 heures ; il y a une cor-
nombre de sept protéines enzymatiques. La SIRT1 est impli-
rélation avec la périodicité jour/nuit de l'epidermal growth
quée dans la protection vis-à-vis du stress oxydant et de l'al-
factor (EGF) et ses récepteurs (pic salivaire entre 22 heures et
tération de l'ADN [48, 49]. Elle est activée par le resvératrol
7 heures) [56, 57].
et les extraits de myrrhe et de riz [50]. SIRT1 et SIRT2 auraient
La circulation capillaire (mesurée au niveau de la face pal-
un effet thérapeutique dans les maladies liées à l'âge  : en
maire des deux avant-bras (laser-Doppler) a un pic circadien
assurant la régulation endogène du taux de NAD+, ces proté-
du flux (skin blood flow) à 23 heures 30, ce qui favorise l'ap-
ines sont impliquées dans la longévité. SIRT1 est augmentée
port des nutriments et l'élimination des toxines.
chez des rongeurs soumis à un régime hypocalorique (régime
Pour optimiser les soins cosmétiques, il faut les program-
connu pour augmenter la longévité), et les molécules activa-
mer au meilleur moment : le matin, on aura recours à des
trices de SIRT1 (butéine, quercétine, resvératrol, acide cicho-
soins protecteurs et hydratants qui renforcent la barrière
rique extrait de l'Echinea mauve) miment les effets du régime
cutanée ; le soir, à des soins pour réparer et régénérer.
hypocalorique.
L'industrie cosmétique avance la nécessité d'une « resyn-
La survivine protège les kératinocytes de l'apoptose. La
chronisation » cellulaire avec l'âge. Des études sont encore
survivine et le facteur Notch1 jouent un rôle majeur dans la
nécessaires pour comprendre comment nos cellules cuta-
niche des cellules épidermiques. L'absence de survivine
nées fonctionnent sous l'influence de ces gènes horloges et
(silencing survivin) entraîne une grande susceptibilité des
pour démontrer les effets réels de la chronocosmétique
kératinocytes aux dommages induits par les UVB [51].

Extrêmophiles Cosmétotextiles
Un organisme est dit extrêmophile lorsque ses conditions de Hydratation, effet drainant, action apaisante et adoucis-
vie normales sont mortelles pour la plupart des autres orga- sante, anticellulite, élimination des toxines pourront être
nismes (températures, pressions, salinités, pH, etc. extrêmes). assurés par les cosmétotextiles ou textiles intelligents.
Ces micro-organismes produisent des métabolites d'une La révolution des fibres démarre avant le nouveau millé-
grande valeur car ils sont impliqués dans la protection contre naire avec les alchimistes de la matière. Les « texticaments »
les conditions environnementales extrêmes. Ce sont des pro- ou textiles qui soignent sont les suivants : bas et ceinture de
téines, des acides nucléiques, des glucides et des polysaccha- contention ; tissus protecteurs (champ opératoire imprégné
rides. Ainsi, un extrêmophile star, Deinoccocus radiodurans, d'un produit bactérien pour limiter les infections nosoco-
produit des agents capables de dégrader les protéines carbo- miales ; blouses étanches ou absorbantes des infirmières),
nylées qui s'accumulent avec l'âge. L'Arthrobacter agilis, une prothèses (implants vasculaires textiles utilisés pour rempla-
autre bactérie, inclus dans une crème est en mesure de pro- cer une artère hors d'usage ; implants pariétaux en chirurgie
téger la peau de l'oxydation par le rayonnement solaire. digestive) ; bandelettes pour incontinence urinaire (dont
certaines font l'objet de polémiques actuellement), etc.
Chronocosmétique Les cosmétotextiles représentent 16 % du marché des tex-
tiles techniques français.
La chronobiologie est l'étude des biorythmes qui découlent Pour l'Institut textile de France, nous sommes passés du
des cycles dont dépend notre organisme : alternance jour- tissu inerte au tissu actif et même interactif, avec la possibi-
nuit, saisons, cycle féminin, bouleversements hormonaux, lité de concevoir des tissus intelligents.
etc. La peau vit au rythme de notre horloge interne située Selon le Bureau de Normalisation des Industries Textiles et
dans le noyau suprachiasmatique (24 heures) et a sa propre de l'Habillement (BNITH, mars 2006), « un cosmétotextile est
horloge, deux gènes CLOCK et PER1, retrouvés dans les kéra- un article textile contenant une substance ou une préparation
tinocytes, les mélanocytes et les fibroblastes dermiques. La destinée à être libérée durablement sur les différentes parties
peau héberge le mécanisme de contrôle qui agit localement superficielles du corps humain, notamment sur l'épiderme, et
et interagit avec le « pace-maker central » [52]. revendiquant une (ou des) propriété(s) particulières telle(s)
La peau est une fenêtre sur l'horloge centrale du cerveau : que nettoyage, parfum, modification d'aspect, protection,
l'horloge circadienne périphérique se situe dans les fibroblastes maintien en bon état ou correction d'odeurs corporelles ».
de la peau ; l'oscillateur identique à l'oscillateur central [53, 54]. L'univers des cosmétiques et celui des textiles sont ainsi
Durant le jour, la peau se protège contre les agressions de fusionnés grâce au procédé de micro-encapsulation. « Le
l'environnement  : la peau favorise ses fonctions de protec- relargage des microcapsules des cosmétotextiles est déclen-
tion avec des cornéocytes plus serrés. ché par un impact, habituellement un mouvement de fric-
Dans la soirée et la nuit, elle assure ses fonctions de renou- tion ou de pression entre le corps et le tissu, provoquant la
vellement et son métabolisme. Les cornéocytes sont plus rupture des capsules en fragments et libérant les propriétés
grands ou plus étalés entre 20 heures et 23 heures ; le rythme cosmétiques » (« Les Textiles du futur », La Fédération, 2003).
circadien est de grande amplitude (30,8 %), détecté dans la La société Cosmétil Innovations est précurseur de la cosmé-
couche superficielle. La perméabilité de la peau est supé- totextile avec son procédé de fixation/restitution  : le « recul

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d'ionisation ». Cette technologie émergente utilise des micro- à restaurer un équilibre hydrolipidique, en limitant la perte en
capsules qui sont fixées sur le tissu, CosmeticWear® (Audresset). eau. Sur le plan infectieux, si la prévention herpétique doit être
Sur ce tissu, plus d'un million de microcapsules sont fixées uni- systématiquement orale, la prévention de l'infection bacté-
formément au centimètre carré. Celles-ci se brisent au fur et à rienne est essentielle, due à l'interruption de la barrière cutanée
mesure par frottement suivant les m ­ ouvements du corps, autant qu'à la déplétion en cellules de Langherans ; elle doit
lorsque les fibres se tendent puis se détendent. Les substances viser à restaurer un microbiome normal. Ainsi, il conviendra
actives sont ainsi libérées pour agir sur l'épiderme. d'orienter le patient dans un premier temps vers des topiques
Les textiles anticapitons permettent une augmentation de ayant toutes ces qualités, sans être trop occlusifs afin d'éviter
la souplesse et de la tonicité de la peau, une action apaisante d'éventuelles poussées d'acné ou de grains de millium, et si
et adoucissante. Ils font office de tonique veineux et ont un possible visant à accélérer la reconstruction épidermique.
effet drainant. Ils stimulent l'activité lipidique et accélèrent Dans les cas particuliers des phototypes IV à VI, ou des patients
l'élimination des toxines ; le lavage à la main permet une plus asiatiques ou bruns aux yeux verts réputés pour la fragilité de
grande longévité des microcapsules, les capsules résistant à leur système pigmentaire, l'hyperpigmentation post-inflamma-
environ 20 lavages. toire (HPI) est à prévenir, en amont de l'acte bien sûr, par une
La société Skintex Wolford propose Hydra Care 20® conte- éviction solaire et une photoprotection pendant 1 mois et des
nant de la vitamine  E, de l'huile de monoï, des acides gras topiques adaptés –  régulateurs de la pigmentation et anti-­
oxydants –, mais aussi en aval, avec, outre la photoprotection et
essentiels, de l'huile de squalane ; Slim Care 20®, contenant
l'éviction solaire pendant 2  mois, des actifs cosmétiques anti-­
des extraits d'algues marines, de la vitamine E, du rétinol, de
inflammatoires dès l'épidermisation, et surtout un contrôle de
l'huile de karité, de l'huile de noyau d'abricot, de l'huile
l'érythème qui doit déboucher ultérieurement vers une cosmé-
d'églantier et de la caféine.
tique à visée dépigmentante si celui-ci devait se prolonger. Il est
Enfin, à noter les vêtements antisolaires qui ont un indice
prudent de ne pas appliquer de dépigmentants avant 3 semaines,
50 + et arrêtent 97 % du rayonnement UV ; ce sont des tex-
au risque d'entraîner à l'inverse une hypopigmentation, qui ris-
tiles 100 % coton ou fibres synthétiques avec filtres intégrés ;
querait d'être encore plus problématique car parfois définitive ;
ils résistent à 50 lavages environ.
une surveillance serrée est donc essentielle, semaine après
semaine. Il est vrai que la photobiomodulation est d'une aide
précieuse également non seulement pour son action propre sur
Cosmétiques et actes techniques la cicatrisation, mais aussi pour inciter le patient au suivi.
Une prise en charge globale du patient en demande esthétique Le domaine des peelings est maintenant largement
améliore les résultats physiquement, mais aussi sur le plan psy- protocolisé, chaque firme proposant une cosmétique
­
chique, et renforce le lien de confiance qui se construit au d'accompagne­ment ; il n'en est pas de même pour les lasers
cours du temps entre le patient et le médecin. Ainsi, les soins qui sont donc plus opérateurs-dépendants, justement en
de la peau ne sont pas à négliger, dans l'acte technique comme raison de cette prise en charge globale qui implique l'exper-
dans l'encadrement de celui-ci, au cabinet comme au domicile tise du médecin.
du patient ; ils maximisent les résultats cliniques, améliorent ce Concernant les traitements par laser non ablatifs et IPL, la
qui n'est pas pris en compte par des injections, comme le teint, barrière cutanée, bien que désorganisée, reste en place. Il
la texture de la peau, la pigmentation, optimisent les effets des conviendra de réhydrater et d'apaiser la sensation de chaleur ;
techniques corpusculaires et des peelings. on note qu'avec n'importe quelle technique une chaleur
Un essai pilote réalisé par un dermatologue américain de intense peut conduire ultérieurement à des troubles de la cica-
l'Illinois a montré une meilleure estime de soi chez les patients trisation – cicatrices hypertrophiques, voire chéloïdes, surtout
conseillés sur le plan cosmétique et suivant une routine de sur les zones privées d'annexes comme le cou, les mains, ainsi
soins à domicile en plus des procédures injectables [58]. De que sur les zones osseuses (mandibule) et les zones péri-­
plus en plus de dermatologues en prennent conscience. orificielles. Outre la prévention et la surveillance, il conviendra
d'emblée de bien refroidir par un Zimmer ou autre système
synchrone au laser, et d'appliquer des topiques adaptés ayant
Quels cosmétiques pour quels actes une action anti-inflammatoire. Concernant la photother-
dermatologiques ? molyse fractionnée non ablative (non-ablative fractional photo-
Les actes techniques dermatologiques s'accompagnent fré- thermolysis [NAFP]), des études ont montré l'augmentation de
quemment d'effets collatéraux qui nécessitent, outre une infor- la pénétration transcutanée d'un sérum aqueux associant plu-
mation sans faille, une cosmétique d'accompagnement adaptée. sieurs anti-oxydants, et ce proportionnellement à la densité
Le patient peut en effet se trouver démuni devant une pléthore des puits thermiques (de 8 à 17 fois selon que la densité des
de cosmétiques sur le marché, dont une utilisation inappropriée puits thermiques va de 5 à 10 %, avec un NAFP à 1 927 nm) ; la
peut même influencer négativement le résultat escompté. réaction inflammatoire intense produite par la NAFP condui-
Après les lasers ablatifs et les peelings, les symptômes habi- sant à une déplétion en anti-oxydants naturels mobilisés pour
tuels que sont érythème, œdème et prurit, nécessitent de res- faire face à l'avalanche de radicaux libres (reactive oxygen spe-
taurer l'intégrité de la barrière cutanée avec des topiques cies [ROS]), il semble logique d'en apporter par voie externe
dénués de substances potentiellement nocives, mais qui visent afin de ré-équilibrer la balance destruction/reconstruction.

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Une autre étude avec la même association d'anti-­oxydants À côté de ces sérums, il existe des masques apaisants
utilisée conjointement à un home-device diode NAFP a m ­ ontré anti-oxydants et réhydratants post-acte, qui diminuent
l'amélioration de tous les paramètres du photovieillissement la perte insensible en eau (PIE) et stimulent la produc-
par rapport à un échantillonnage de patients utilisant le laser tion de collagène. Ils sont composés d'une feuille de
seul [59]. L'action anti-oxydante et productrice de collagène biocellulose forte­ment imprégnée d'acide hyaluronique
de la vitamine  C (acide L ascorbique) est particulièrement et de peptides anti-­inflammatoires, et soulagent dès leur
intéressante en post-laser immédiat. La vitamine  E (α-­ application. Dans le but de prévenir une HPI sur des pho-
tocophérol), autre anti-oxydant, soluble dans les lipides, a un totypes foncés, des masques similaires délivrent des
rôle protecteur des membranes cellulaires. L'acide férulique, actifs puissamment anti-­inflammatoires et anti-oxydants
polyphénol issu du son de blé ou de maïs, est un puissant (acide ellagique et glycyrrhizine). Une pose de 15 à
anti-oxydant qui de plus stabilise les deux précédents. Leur 30 minutes abaisse en moyenne l'inconfort et l'intensité
association est particulièrement indiquée puisqu'ils agissent de l'érythème postlaser de 34 % et l'inconfort du patient
en synergie pour activer la synthèse de collagène, diminuer le de 60  % (étude personnelle, voir tableau  3.1 ; fig.  3.1 à
stress oxydatif et améliorer la photoprotection [60]. 3.4).

Tableau 3.1  Évaluation sur 30 patients de l'application d'un masque biocellulosique contenant acide hyaluronique et peptides
anti-inflammatoires en post-laser immédiat pendant un quart d'heure*
Chaleur ressentie Chaleur ressentie
Patient n° Laser Érythème post-laser Érythème post-masque/5
post-laser/5 post-masque/5
1 REJ 5 3 5 3
2 VASC 5 3 5 2
3 VASC 5 2 0 0
4 VASC 5 3 5 2
5 VASC 5 2 5 3
6 REJ 5 2 5 3
7 REJ 5 2 5 2
8 REJ 5 4 5 4
9 VASC 5 5 5 2
10 REJ 5 4 5 3
11 VASC 5 4 5 0
12 REJ 5 3 5 2
13 REJ 5 3 5 1
14 REJ 5 4 5 3
15 REJ 5 2 5 3
16 REJ 5 3 5 4
17 REJ 5 3 5 3
18 REJ 5 4 5 3
19 VASC 5 4 5 3
20 VASC 5 3 5 2
21 REJ 5 3 5 2
22 VASC 5 3 5 2
23 REJ 5 3 5 3
24 VASC 5 4 5 3
25 VASC 5 4 5 2
26 VASC 5 5 5 4
27 REJ 5 3 5 2
28 REJ 5 3 5 1
29 REJ 5 4 5 2
30 VASC 5 4 5 3
Moyenne 3,30 4,83 2,40
Amélioration % 34 50,3
* Amélioration moyenne de l'érythème de 34 %, évaluée par deux examinateurs, et de la sensation de chaleur de 50 %, évaluée par le patient.

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Fig. 3.1  Patiente traitée par laser pour une érythrose post-traitement Fig.  3.4 Même patiente un quart d'heure après pose de masque de
immédiat. biocellulose délivrant acide hyaluronique, acide ellagique et glycyrrhi-
Source : I. Gallay. zine.
Amélioration de l'érythème de plus de 60 %. Amélioration de la pigmen-
tation globale de la peau (hormis les lentigos qui disparaîtront à J10 de
l'acte laser).
Source : I. Gallay.

À l'issue des traitements lasers non ablatifs, après le soin,


un correcteur minéral masque les rougeurs résiduelles ; les
produits appliqués doivent être neufs et les échantillons
sont particulièrement appréciés des patients. Après un
laser ablatif, le maquillage correcteur est possible dès la
phase de réparation épidermique. Dans tous les cas, une
photoprotection minérale est essentielle si le correcteur
n'en assure pas la fonction. En effet, les filtres chimiques, en
raison de leur profondeur de pénétration supposée accrue
par la procédure, ne sont pas recommandés. Concernant
les lasers ablatifs, ils peuvent même conduire à une sensibi-
lisation [61].
Fig. 3.2  Même patiente, un quart d'heure après une pose de masque de Les techniques radiofréquence et ultrasons sont optimi-
biocellulose délivrant acide hyaluronique et peptides a visée anti-­ sées par une prise en charge cosmétique. Une étude a mis en
inflammatoire.
évidence une supériorité des résultats obtenus sur la fermeté
Réduction de l'érythème d'environ 60 %.
Source : I. Gallay. et la texture de la peau lorsqu'un traitement de radiofré-
quence appliqué sur des zones corporelles est suivi de l'appli-
cation d'un cosmétique associant des peptides inducteurs
de collagène et des bêta-hydroxy-acides (étude en double
aveugle, comparaison d'une zone recevant le traitement
radiofréquence et le cosmétique avec la zone symétrique
recevant le traitement seul) [62].

De la cosmétique d'accompagnement
à l'acte technique cosmétique : la délivrance
assistée de cosmétiques
Aujourd'hui, la cosmétique s'intéresse à l'interaction des
molécules appliquées sur la peau avec les cellules par le
biais d'activation de voies de signalisation cellulaire ; tout le
défi est de trouver le vecteur qui peut conduire ces molé-
cules au plus près des cellules cibles. Les liposomes, nio-
somes et autres polymersomes, plus récemment les
Fig. 3.3  Patiente traitée par laser de réjuvénation (vasculaire et pigmen- nanosomes, sont nés des biotechnologies et inondent l'in-
taire) en postlaser immédiat.
Source : I. Gallay. dustrie des cosmétiques.

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Mésothérapie L'environnement des actes esthétiques


Plus simplement, le champ de la cosmétique s'est enrichi ne doit pas être négligé
d'une pratique déjà ancienne, la mésothérapie : de nom- L'effet des cosmétiques sur le bien-être n'est plus à démon-
breux dispositifs médicaux sont représentés par des cock- trer : l'impact psychologique que peuvent avoir les affections
tails injectables dans le derme. Sous des appellations de dermatologiques et, inversement, les effets cutanés des états
mésolift, mésocosmétique, biorevitalisation, etc., ces solu- dépressifs et des états de stress illustrent les interconnexions
tions stériles s'injectent dans le derme en multi­ - entre la peau et le cerveau. Quitter un cabinet de dermatolo-
micropunctures pour des effets transitoires inférieurs à un gie avec un visage rouge et vultueux est une épreuve, alors
mois, mais plus évidents et durables qu'ils ne le seraient que le passage par une salle de repos entre les mains expertes
par simple application cutanée. d'une esthéticienne ou d'une assistante entraînée aux soins
post-actes conduit à produire du bien-être, insuffler une
Laser assisted drug delivery (LAD)
confiance en soi et à faire oublier le contexte médical de la
Rapidement, l'idée est venue de faire pénétrer ces produits démarche initiale, ainsi que le cortège technique et adminis-
par les brèches provoquées par les techniques fraction- tratif que sont les documents médico-légaux indispensables
nelles ; ainsi un nouveau concept est né, la LAD, qui fait à la protection juridique des patients comme du médecin.
l'objet de très nombreuses publications qui ne concernent Un cadre agréable doit faire oublier la froideur de ce contexte.
d'ailleurs pas que la cosmétique, puisque de nombreux « Rien de plus profond que la peau et rien de plus vrai que
médicaments aux molécules trop volumineuses pourraient le cosmétique… Le cosmétique concrétise la conscience de
bénéficier de cette voie cutanée pour une destination soi » (Michel Serres).
locale (voir la photothérapie dynamique [PDT], déjà large-
ment mise en application), ou bien même systémique. Références
Reste à définir la technique de photothermolyse fraction- [1] Mondon P, Ringenbach C, Doridot E, Leroux R. Third generation
peptides just around corner. Personal Care Europe
née choisie (CO2 ou Erbium), les paramètres adaptés à la
2018;12(4):101–3.
taille des molécules et à la profondeur souhaitée de péné- [2] Kligman AM. Corneobiology and corneotherapy--a final chapter.
tration [63]. Int J Cosmet Sci 2011;33:197–209.
Des auteurs ont pu démontrer une accélération de la cica- [3] Sato J, Yanai M, Hirao T, Denda M. Water content and thickness
trisation après un laser fractionné ablatif lorsqu'un sérum of the stratum corneum contribute to skin surface morphology.
était appliqué associant vitamine C, vitamine E et acide féru- Arch Dermatol Res 2000;292:412–7.
[4]  Sore  G, Bernard  BA, Passeron  T. The skin aging exposome.
lique, immédiatement en postlaser et poursuivi à domicile,
J Dermatol Sci 2017;85(3):152–61.
sur un côté du visage, par rapport à l'autre côté ne recevant [5] Varani J, Warner RL, Gharaee-Kermani M, et al. Vitamin A antago-
pas le sérum. Ils ont mis en évidence également du côté nizes decreased cell growth and elevated collagen-degrading
traité avec le sérum une élévation du facteur de croissance matrix metalloproteinases and stimulates collagen accumulation
basique des fibroblastes [64]. in naturally aged human skin. J Invest Dermatol 2000;114:
Les techniques HIFU (ultrasons microfocalisés de haute 480–6.
[6] Tucker-Samaras S, Zedayko T, Cole C, et al. A stabilized 0.1 % reti-
intensité) ont fait l'objet de nombreuses études concer-
nol facial moisturizer improves the appearance of photodamaged
nant la pro-pénétration de molécules à travers la barrière skin in an eight-week, double-blind, vehicle-controlled study.
hémato-encéphalique et la peau, mise en évidence par la J Drugs Dermatol 2009;8:932–6.
constitution de perforations temporaires des membranes [7] Bellemère  G, Stamatas  GN, Bruère  V, et  al. Antiaging action of
cellulaires. Des études complémentaires sont nécessaires, retinol: from molecular to clinical. Skin Pharmacol Physiol
qui viendront compléter ce champ d'investigation très 2009;22(4):200–9.
[8] Rossetti D, Kielmanowicz MG, Vigodman S, et al. A novel anti-
actuel de la délivrance assistée de molécules par voie
ageing mechanism for retinol : induction of dermal elastin syn-
cutanée. thesis and elastin fibre formation. Int J Cosmet Sci 2011;33:
62–9.
Microneedling [9] Humbert P. Topical vitamin C in the treatment of photoaged skin.
Le microneedling [65], utilisé initialement pour son effet Eur J Dermatol 2001; $ 11(2):172–3.
mécanique inducteur de collagène (dermarollers, d ­ ermapens [10] Nusgens BV, Humbert P, Rougier A, et al. Topically applied vita-
min C enhances the mRNA level of collagens I and III, their pro-
[66], stamps, etc.), tout comme la radiofréquence fraction- cessing enzymes and tissue inhibitor of matrix metalloproteinase
née micro-aiguilles sont autant de techniques de pro-­ 1 in the human dermis. J Invest Dermatol 2001;116(6):853–9.
pénétration, qui ne nécessitent pas l'acquisition d'un laser. Il [11] Pinell SR. Cutaneous photodamage, oxidative stress, and topical
est bien évident que tout cosmétique ne peut pas être l'objet antioxidant protection. J Am Acad Dermatol 2003;48:1–19.
de ce mode d'utilisation : il est important d'utiliser des pro- [12] Catani MV, Savini I, Rossi A, et al. Biological role of vitamin C in
keratinocytes. Nutr Rev 2005;63(3):81–90.
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On peut encore citer à l'étude les timbres à micro-aiguilles and structural evaluation of the long-term effects of a topical
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Techniques
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Section 1. Techniques cosmétiques
Chaptire 3. Les cosmétiques dans la prise en charge du vieillissement cutané...

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Section 1. Techniques cosmétiques
Chaptire 3. Les cosmétiques dans la prise en charge du vieillissement cutané...

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TECHNIQUES Partie 2
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Section 1. Techniques cosmétiques

Chapitre 4
Maquillage correcteur
en dermatologie esthétique
P. Deshayes

Introduction Environnement du maquillage


On connaît l'intérêt du maquillage correcteur dans la pratique Avant la mise en place du maquillage, il faut appliquer sur la
dermatologique pour masquer certaines lésions (acné, rosacée, peau un soin hydratant adapté à ses besoins – crème apai-
vitiligo). Certaines équipes le considèrent même comme un sante, cicatrisante, pour peau grasse ou sèche, etc. On aura
outil thérapeutique à utiliser dans la prise en charge de lésions vérifié au préalable que cette crème est bien compatible avec
visibles, en particulier sur le visage, et utilisent le terme de le produit de maquillage que l'on va appliquer ensuite. S'il
« bridge therapy » [1]. Dans la pratique de la dermatologie s'agit de produits d'une même marque, il n'y a pas de souci,
esthétique, il existe également des moments où des manifesta- la compatibilité a déjà été testée. Si ce n'est pas le cas, la pre-
tions cliniques se trouvent momentanément aggravées par des mière fois que l'on tente cette association, il faut vérifier sur
soins, où des effets secondaires indésirables passent au premier le dos de sa main, en appliquant successivement le soin
plan, où le temps de réparation semble long avant de pouvoir hydratant puis le maquillage, qu'il n'y a pas d'effet de « plu-
juger du résultat. Il est important d'en parler avec les patients et chage » traduisant une mauvaise adéquation des produits.
de pouvoir leur proposer une solution [2]. Comme pour tout maquillage, un démaquillage soigneux
Il existe aussi des circonstances où il peut être bon d'at- est indispensable. Sur une peau enflammée, on conseille l'ap-
tendre avant de pratiquer un acte  : demande pressante plication d'un dermonettoyant que l'on applique en mas-
d'un(e) patient(e), doute sur la bonne indication d'un geste. sages doux avec les doigts et qu'on rince par des brumisations
Dans ce cas, le maquillage correcteur peut fournir un moyen d'eau thermale. On peut aussi utiliser une eau micellaire
d'attente tout en gardant le contact avec le patient et en dont on imprègne des cotons qu'on pose et laisse agir
étant bienfaisant. quelques instants sur la peau avant de les retirer.
Dans le cadre d'un poste ou d'un atelier de maquillage,
toutes les précautions d'hygiène doivent être prises : désin-
Les produits fection systématique du matériel utilisé (pinceaux, brosses,
etc.) entre deux patients (il existe des produits nettoyants
La formulation des produits de maquillage correcteur est gui-
spécifiques, mais on peut utiliser l'alcool à 70°, certes plus
dée par deux impératifs : être suffisamment couvrants tout en
agressif pour les instruments) ; les crayons sont taillés après
restant faciles à appliquer, ne présenter aucun risque d'allergie
chaque utilisation ; le rouge à lèvre est prélevé sur le stick
ou d'irritation sachant qu'ils seront parfois appliqués sur une
avec un abaisse-langue et appliqué ensuite sur les lèvres au
peau lésée – juste après un soin ou en cours de cicatrisation.
pinceau ; l'applicateur du mascara sert à charger en produit
Le caractère couvrant est obtenu par une forte concentra-
une brosse à cils qui servira à son application, etc.
tion en pigment. Si, pour un maquillage classique, les pig-
Ces éléments contribuent à la sécurité du maquillage cor-
ments représentent 5 à 8 % de la formule, dans un maquillage
recteur et à la tranquillité des patients.
correcteur, cette concentration monte à 20 à 25 % voire plus.
Toute la gageure est de formuler malgré cela un produit
facile à mettre en place et qui s'étale facilement ; on verra Correction du teint
qu'il existe une technique particulière d'application.
L'autre exigence est que ces produits ne présentent aucun
risque d'irritation ou d'allergie, au même titre qu'un soin der- Technique d'application
matologique ; c'est pour cette raison qu'on utilise aussi, pour Pour augmenter la fluidité du produit de maquillage correc-
définir ces produits, le terme de maquillage « médical », qui teur, on l'applique d'abord sur le dos de sa main en l'étalant
fait référence à la sécurité de leur emploi [3]. Plusieurs labo- légèrement pour le réchauffer, puis on le met en place au
ratoires ont développé une gamme de maquillages correc- doigt, en très petites touches, sur la zone à maquiller. Puis
teurs que l'on peut conseiller en toute sécurité ; ces produits immédiatement, on l'étale, en tamponnant, perpendiculaire­
sont disponibles en pharmacie. ment à la peau, avec une brosse droite (fig. 4.1).
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Section 1. Techniques cosmétiques
Chapitre 4. Maquillage correcteur en dermatologie esthétique

En cas de comblement d'un pli profond, il faut se souvenir


que l'application au fond du pli d'une teinte plus claire le fait
ressortir et ainsi amplifie le résultat obtenu en lissant le relief.

Neutraliser un contraste important


Dans le cas d'un contraste important de teinte entre la zone à
maquiller et la peau normale, il faut d'abord essayer le fond
de teint correcteur dont le résultat est souvent surprenant ;
même sur des hématomes ou des rougeurs importantes,
après traitement laser vasculaire par exemple (fig. 4.2). Si le
résultat n'est pas satisfaisant, avant d'appliquer le fond de
teint, on doit « neutraliser » la couleur de la zone à maquiller
par l'application d'un correcteur d'une teinte complémen-
taire ; classiquement, le vert pour neutraliser une couleur
Fig. 4.1  Technique d'application à la brosse, en tamponnant.
rouge et le jaune pour neutraliser une teinte bleu-violine
Source : P. Deshayes.
(cicatrice, cernes). En fait, le vert appliqué sur du rouge donne
une teinte blafarde, froide. C'est pourquoi j'utilise toujours le
Il épouse toutes les imperfections de relief sans qu'on ait à jaune pour neutraliser le rouge ou le bleu, avant l'application
frotter la peau. Aux limites de la zone maquillée, on peut uti- du correcteur de teint ou d'un simple poudrage.
liser cette brosse, dans un geste balayant, pour estomper la
bordure.
Cette correction est complétée par l'application, avec la même
brosse, d'une poudre libre qui a un rôle matifiant et fixe le
maquillage pour une meilleure durée dans le temps. Cette étape
est indispensable en cas d'utilisation de fard à joue ou blush, afin
qu'il glisse sur la peau et se répartisse de façon régulière.
Les fonds de teint compacts sont indiqués quand la peau
est saine. Ils se mettent en place à l'éponge et leur condition-
nement en coffret avec miroir rend les retouches faciles au
cours de la journée. Les fonds de teint en stick peuvent
convenir à des maquillages très localisés.

Choix de la teinte
Chaque gamme de correcteur de teint comporte, pour les
peaux européennes, quatre à six nuances allant des peaux les
plus claires aux peaux méditerranéennes. Trouver la teinte
qui convient à la couleur de la peau est une étape essentielle.
Pour ce faire, on dépose, sur une zone de peau saine du visage,
une faible quantité de correcteur qu'on met en place en tam-
ponnant avec la brosse. Si cette zone ne se remarque pas, c'est
que le choix de couleur est bon. Pour éviter de mauvaises
surprises, il est préférable de travailler en lumière naturelle. En
cas de doute entre deux teintes proches, il est préférable de
choisir la plus claire –  il sera toujours possible de foncer le
teint avec la poudre libre, mais l'inverse n'est pas vrai.
Pour les peaux ethniques, les nuances des produits sont beau-
coup plus nombreuses, sachant l'infinité des couleurs de la peau.
Elles ne sont disponibles que dans quelques gammes. Pour res- Fig. 4.2  Maquillage correcteur après une séance de laser KTP.
pecter les nuances naturelles de la peau noire sur le visage (zones Source : P. Deshayes.
plus claires des tempes et plus foncée du front), on utilise sou-
vent deux teintes que l'on applique sur les zones correspon-
dantes. L'objectif est d'obtenir un résultat naturel en évitant un
effet de « masque ». Si la zone à corriger est de petite surface et
Ne pas surcorriger – éviter l'effet masque
présente un fort contraste avec la peau normale, on peut s'aider, Si on examine de près la couleur de la peau, celle-ci n'est pas
avant la mise en place du correcteur, d'une application d'un uniforme. Outre les taches de rousseur, il existe de fines irré-
crayon à sourcil, brun ou noir, selon la teinte de la peau. gularités de teinte qui, respectées, rendent le maquillage

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Section 1. Techniques cosmétiques
Chapitre 4. Maquillage correcteur en dermatologie esthétique

invisible ; c'est ce résultat naturel que l'on recherche pour un Conclusion


maquillage correcteur réussi. Devant des troubles pigmen-
taires, qu'il s'agisse de taches pigmentées ou de dépigmenta- En dermatologie, qu'il s'agisse d'un traitement médical,
tion, l'écueil de la correction serait de créer un masque d'une chirurgie ou d'un geste esthétique, le résultat peut
uniforme. Il est préférable de choisir deux teintes, qu'on se faire attendre… Il faut de la patience. Le maquillage
applique, sans les mélanger, alternativement sur les zones correcteur n'est qu'une solution d'attente, mais il peut
claires et foncées puis qui sont estompées en tamponnant être réalisé en toute sécurité et apporte un résultat
avec la brosse. On respectera bien cette alternance des immédiat. Les gestes sont simples, faciles à apprendre
teintes sur le pourtour des lésions afin de rendre le maquil- et rapides à reproduire. C'est un acte complémentaire et
lage flou et invisible. simple de la dermatologie esthétique et correctrice à ne
pas oublier.
Protection solaire Références
Le maquillage correcteur, par sa forte charge en particules [1] Levy L, Emer J. Emotional benefit of cosmetic camouflage in the
pigmentées, peut, s'il est appliqué en couche épaisse sur une treatment of facial skin conditions: personal experience and
cicatrice, avoir un effet protecteur solaire. Néanmoins, il est review. Clin Cosmet Investig Dermatol 2012;5:173–82.
[2] David SE, Ahmed Z, Salek MS, Finlay AY. Does enough quality of
préférable d'appliquer, avant le maquillage, une protection
life-related discussion occur during dermatology outpatient
solaire d'indice maximal 50 +. En cours de journée, l'applica- consultations? Br J Dermatol 2005;153:997–1000.
tion d'une brume solaire 50 + permet de prolonger cet effet [3] Deshayes P. Le maquillage médical pour une meilleure qualité de vie
sans nécessiter de démaquillage. des patients. Ann Dermatol Venereol 2009 ;(Suppl 6):S372–4.

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TECHNIQUES Partie 2
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Section 2. Les peelings

Chapitre 5
Peelings superficiels
M. Baspeyras

Généralités [1, 2] Les acides alpha-hydroxyacides (AHA) sont un groupe d'acides


organiques, non toxiques utilisés en dermatologie médicale et
Les peelings superficiels (fig.  5.1) sont limités à l'ablation esthétique sous forme de cosmétiques ou de peelings. L'acide gly-
contrôlée des couches supérieures de l'épiderme, stratum colique (C2) et l'acide lactique (C3) ont les chaînes les plus courtes
corneum et granulosum, et sont ambulatoires. Plusieurs pee- et ainsi une pénétration cutanée plus rapide et homogène et sont
lings sont nécessaires pour obtenir un bon résultat clinique et les plus utilisés. Même si le nom d'acides de fruits est toujours uti-
une homogénéisation du teint, du relief cutané. Il faut donc lisé car ces acides sont retrouvés dans les aliments, leur synthèse est
les répéter et les intégrer dans un plan thérapeutique de prise chimique. On utilise aussi les acides malique, tartrique et citrique,
en charge du vieillissement. Ils s'adressent essentiellement mandélique et pyruvique, seuls ou associés [3].
aux lésions épidermiques, même si une petite action der- Les acides de fruits sont plus stimulants que destructeurs. Ce
mique a été montrée. Ils sont utilisables sur tous les types de sont des acides faibles, kératorégulateurs, qui stimulent la desqua-
peau, tous les phototypes et sur tout le corps, bien que l'utili- mation cutanée et le renouvellement cellulaire. Ils diminuent la
sation faciale soit la plus pratiquée. Il faut savoir poser les cohésion des cornéocytes en agissant sur les cornéodesmosomes.
indications et connaître les limites de ces peelings. L'acide glycolique (AG ; fig. 5.2A) est utilisé à des concentra-
tions de 20 à 70 %. La profondeur de pénétration du peeling
et son intensité augmentent avec la concentration de l'acide
et le temps d'exposition. Les AHA doivent être neutralisés par
une solution alcaline pour stopper leur effet exfoliant. À forte
concentration (30 à 70 % d'acide libre en solution aqueuse), si
la peau est mal préparée ou si elle est lésée, ils peuvent entraî-
ner une épidermolyse qui se traduit par un blanchiment ou
pseudofrosting qui peut être suivi de cicatrices [4, 5].
En histologie, ces effets sont réels : diminution de l'épaisseur
du stratum corneum, augmentation de l'épaisseur de l'épiderme
vivant (corps muqueux de Malpighi), différenciation plus régu-
lière, dispersion de la mélanine au niveau de la couche basale. Il
s'y ajoute des effets dermiques avec une augmentation de
l'épaisseur des papilles dermiques, une augmentation de la syn-
thèse du collagène, de la quantité d'acide hyaluronique, mais
aussi du nombre et de la qualité des fibres élastiques. Ces effets
sont associés à une prolifération des fibroblastes, qui ne dépend
pas de mécanisme inflammatoire [6–8].
La gluconolactone est un polyhydroxyacide cyclique, acide
faible, non toxique, utilisé aussi dans l'alimentation. Elle asso-
cie effet kératolytique et très bonne tolérance. L'association
AHA et gluconolactone agit sur la rigidification des fibres de
collagène (glycosylation), d'où l'effet anti-âge.
L'acide lactique (AL ; fig. 5.2B) est moins acide à concentra-
Fig. 5.1  Peeling superficiel. tion égale que l'AG, mais son efficacité est équivalente. Il a
Flèches bleu clair  :  peeling super superficiel. Flèches bleu foncé  : peeling également un effet sur la synthèse de la mélanine par inhibi-
superficiel. tion de la tyrosinase, expliquant ses effets éclaircissants.
L'acide mandélique est un phénol hydroxyacide. Son cycle
Principes actifs de benzène associé au glycolique lui donne une polarité par-
ticulière alliant hydrosolubilité et pénétration en milieu lipi-
Les substances employées sont des acides faibles, utilisés purs, dique. Il module la production sébacée avec un effet anti-acné
tamponnés, estérifiés ou partiellement neutralisés (tableau 5.1). chez le sujet jeune et une augmentation de la sécrétion

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Section 2. Les peelings
Chapitre 5. Peelings superficiels

Tableau 5.1  Principes actifs des peelings superficiels


Nom Propriétés Efficacité clinique
Pour tous : héliodermie modérée,
teint, ridules
Alpha-hydroxyacides Acide glycolique (AG) pKa 3,5 Acides faibles solubles dans l'eau, c'est-à- Inhibition de la tyrosinase
(AHA) Acide lactique (AL) dire que la réaction de dissociation dans Acné
Acide malique l'eau n'est pas totale
Acide tartrique Petits poids moléculaires pour AG et AL :
Acide citrique bonne pénétration
Acide mandélique Kératolytiques
Gluconolactone Doivent être neutralisés
Acide pyruvique pKa 2,39
Bêta-hydroxyacides Acide salicylique pKa 2,97 Lipophile kératolytique Acné
Lipohydroxyacide (LHA) Non neutralisé
Mélanges Jessner AS + résorcinol + AL + (éthanol) Préparation aux peelings TCA en
Autres Non neutralisé monocouche
TCA de 10 à 15 % Non neutralisé
Coagule les protéines
Rétinol, Non neutralisé Acné
Trétinoïne

s­ ébacée en début de ménopause, diminuant ainsi la séche- tion de brûlure. Elle ne se neutralise pas. Elle est surtout uti-
resse cutanée de la femme plus âgée. La taille plus grande de lisée en monocouche pour améliorer la pénétration d'un
cette molécule par rapport à l'AG induit une pénétration autre peeling, permettant une application plus homogène.
plus lente et une meilleure tolérance [9]. La solution de Jessner modifiée (formule de Monheit)
L'acide pyruvique se convertit en AL. Il est lipophile et un comporte de l'acide citrique (fig. 5.2D) à la place du résor-
peu hydrophile et doit être neutralisé. Cependant, son appli- cinol qui est allergisant.
cation est douloureuse et ses vapeurs sont âcres et irritantes. L'acide azélaïque normalise la kératinisation et induit une
La solution de Jessner comporte : AS, 14 g ; AL, 14 g ; résor- diminution de la teneur en acides gras libres des lipides de la
cinol, 14  g (qui peut être remplacé par de l'acide citrique, surface de la peau. Il a un effet bactériostatique et bactéricide
8  g) ; éthanol qsp 100  ml. Elle s'applique en deux ou trois sur les germes aérobies et anaérobies, d'où son utilisation dans
couches, très progressivement jusqu'à obtention d'un léger l'acné.
érythème et frosting irrégulier, et s'accompagne d'une sensa- Le résorcinol est chimiquement comparable au phénol. Il
détruit les ponts hydrogène interkératinocytaires, rompt les
membranes cellulaires. Il est bactéricide ; c'est un poison pro-
toplasmique qui agit par inactivation enzymatique et déna-
turation des protéines.
L'acide salicylique (AS) (fig. 5.2E) est kératolytique, très peu
hydrosoluble avec une grande affinité pour les lipides. Sa
faible taille lui assure une pénétration facile, rapide et pro-
fonde. Il pénètre directement dans les pores et les comédons,
où il a un léger effet antibactérien et anti-inflammatoire. Il
est autoneutralisé par les lipoprotéines cutanées.
Il s'utilise à des concentrations de 10 à 30 % dans une base
d'hydroéthanol ou de polyéthylène glycol. La sensation de
brûlure est faible lors de l'application car il a des propriétés
analgésiques. En fin de peeling, un dépôt de cristaux blancs
résulte de l'évaporation de la base de dissolution ; ce n'est
pas un frosting mais une fine couche de précipité blanc. S'il y
a un risque théorique de salicylisme en cas d'application sur
de très grandes surfaces, le peeling avec AS reste très sûr.
Le lipo-hydroxy acide (LHA) est un bêta-hydroxy acide,
dérivé de l'AS. Sa structure très lipophile explique son action
sur le follicule sébacé et son effet kératolytique supérieur à
celui de l'AS. Il est utilisé à des concentrations de 5 à 10 %
Fig. 5.2  Formule chimique des acides. sans neutralisation. Son application provoque moins
A. Acide glycolique. B. Acide lactique. C. Acide malique. D. Acide citrique. ­d'inconfort et d'érythème que l'AS [9]. Il est antimicrobien,
E. Acide salicylique. F. Acide trichloracétique. anti-inflammatoire et non comédogène.
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Section 2. Les peelings
Chapitre 5. Peelings superficiels

L'acide trichloracétique (TCA) (fig. 5.2F) est utilisé surtout pour Tableau 5.2  Indications des peelings superficiels (d'après [5])
les peelings moyens ; toutefois, à faible concentration (10 à 15 %) Lésions de l'épiderme Signes cliniques
avec un seul passage croisé, il peut être classé dans les peelings Héliodermie moyenne Ridules
superficiels (voir chapitre  6). Il est important de rappeler que ou modérée Peau épaisse et jaunâtre
l'action du TCA est proportionnelle à la quantité appliquée, qu'il Sécheresse
ne se neutralise pas et que même une concentration faible appli- Laxité augmentée
quée en plusieurs couches peut aboutir à un peeling moyen. Kystes et comédons
Le rétinol (ROL) et l'acide rétinoïque [10] sont liposolubles. Pores dilatés
Kératoses actiniques
Le métabolite actif est la trétinoïne après passage par une
forme intermédiaire, le rétinaldéhyde. Les effets métaboliques Hyperpigmentations Lentigines
Mélasma
du ROL et de ses dérivés par activation de récepteurs nucléaires
Hyperpigmentation post-inflammatoire
cellulaires sont bien connus et utilisés en dermatologie pour
Acné Acné inflammatoire ou microkystique
traiter acné et vieillissement [11]. Les peelings dosés à 5 % sont
Rosacée
répétés deux fois par mois. Une alternative proposée par
Teint et entretien de la Teint terne
Kligman et dénommée le « rapid retinization » consiste à appli-
peau Fumeur
quer au domicile, tous les soirs, un mélange de 0,25 % de tréti-
Toute localisation du Cuir chevelu
noïne dans 50 % d'éthanol et 50 % de propylène glycol.
corps Cou, décolleté
Les peelings ROL seraient mieux tolérés que l'application de Bras
trétinoïne crème quotidienne car ils sont stoppés au niveau Dos, épaules
du stratum corneum sans action sur les récepteurs rétinoïques
des cellules vivantes des couches profondes de l'épiderme.
Les associations d'actifs sont nombreuses et variées, leur Contre-indications
but étant d'associer les différents acides pour augmenter leur et précautions [5]
efficacité sans augmenter les effets secondaires. Par exemple,
une association de peeling AS 30 % immédiatement suivie de ■ Absolues  : infections bactériennes, virales ou fongiques
l'application soit de rétinol 0,25 %, soit de trétinoïne à 0,25 % évolutives ; allergie au produit.
est utilisée pour améliorer l'héliodermie [11]. ■ Relatives : isotrétinoïne, grossesse.

■ Prudence : si dermatoses inflammatoires (rosacée, atopie),

Facteurs influençant exposition solaire non contrôlée, patient non compliant.


la pénétration du peeling ■ Éviter la réalisation de peelings pendant la période ensoleillée.

■ Précautions : l'application topique de trétinoïne, d'adapa-

La peau a un film hydrolipidique de surface dont le pH et la com- lène, de peroxyde de benzoyle doit être suspendue
position vont influencer la pénétration du peeling. Le pH au 1 semaine avant le peeling en raison de l'augmentation de
niveau du stratum corneum varie de 4,2 à 6 : il est plus acide si la sa pénétration et des risques d'épidermolyse non souhai-
peau est sèche ou sur les zones moins séborrhéiques [12], plus tée lors des peelings superficiels.
élevé après la ménopause. La pénétration est plus rapide si les Tout acte traumatisant la peau doit également être évité
pores sont dilatés. Il existe aussi des variations ethniques de pH. les 2 ou 3 jours précédant le peeling : gommage, épilation,
Les peaux pigmentées ont un pH plus bas que les peaux claires rasage, masque exfoliant, etc.
(pH 4,6 versus 5,0) avec une intégrité du stratum corneum et une
fonction barrière plus importante, liée à l'augmentation des
Consultation préalable
lipides épidermiques et à la densité des corps lamellaires. La consultation préalable (encadré 5.1) permet de bien choi-
Le pH cutané est aussi modifié par des facteurs exogènes appli- sir le peeling, de vérifier s'il n'y a pas de contre-indications,
qués sur la peau tels les lavants ou les émollients. L'interruption d'examiner l'état cutané, de remettre les fiches de
de la barrière cutanée par un stripping, l'emploi d'acétone ou de ­recommandations pré- et post-peeling, d'établir un devis
lauryl sulfate de sodium agresse les kératinocytes et modifie l'aci-
dité de surface de 0,8 à 1 unité. Il est facile de comprendre que Encadré 5.1
toute action sur la surface précédant l'application de l'acide du
peeling aura un retentissement sur sa pénétration cutanée mais Les peelings superficiels : consultation
aussi son efficacité et d'éventuels effets secondaires. préalable et étapes
La consultation préalable est le temps « presque » le plus
Indications des peelings important afin de vérifier : la bonne indication, le bon choix
superficiels de peeling, la bonne compréhension du patient.
Le peeling superficiel est une valse à trois temps :
Les peelings superficiels améliorent les lésions épidermiques, ■ premier temps : préparer la peau ;
accélèrent le turn-over cellulaire, à condition de répéter les ■ deuxième temps : le peeling ;
séances pour être efficaces (tableau 5.2). ■ troisième temps : la phase postpeeling, maintien et

renforcement.
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Section 2. Les peelings
Chapitre 5. Peelings superficiels

mentionnant la fréquence et la répétition des peelings, de Cette période de préparation est déjà active. Elle réduit et
faire signer le formulaire de consentement éclairé. homogénéise la couche cornée, améliore la récupération
L'interrogatoire précise les antécédents médicaux, en postpeeling, limite les effets secondaires par une pénétration
particulier l'existence d'un diabète, de poussées d'herpès, mieux contrôlée du peeling.
d'une photosensibilité, d'antécédents esthétiques avec les
actes réalisés et leur résultat, d'éventuels troubles de la Le peeling
cicatrisation, de la pigmentation, les allergies et les traite- Le peeling est réalisé au cabinet médical. Le jour du peeling,
ments généraux ou locaux actuels, en particulier ceux qui le patient doit avoir la peau bien nettoyée, exempte de
peuvent influencer la pénétration du peeling comme les maquillage. Tous les bijoux seront enlevés, y compris boucles
topiques anti-acnéiques vus plus haut. Il faut noter les d'oreille et piercing. Le patient est installé allongé, cheveux
habitudes de vie : expositions solaires, sport de plein air, maîtrisés par un serre-tête ou une charlotte sous une très
tabac, hammam et s'il y a un désir de grossesse. bonne lumière. Avant le début du peeling, tous les produits
L'examen clinique précise le type de peau – sèche ou grasse, nécessaires à la procédure doivent être prêts : lotion prépeel
sensible ou réactive, relâchée ou ferme, fine ou épaisse  –, + peeling + neutralisant (ils sont habituellement fournis en
la  tendance à la couperose, les troubles p ­igmentaires ou kit par le fabricant), mais aussi eau thermale, crème postpee-
les cicatrices anormales et la présence de lésions cutanées. Il ling, dermocorticoïdes, sérum physiologique pour rincer les
faut évaluer le phototype selon la classification de Fitzpatrick yeux en cas de pénétration oculaire de l'acide (fig. 5.3).
qui permet de déterminer les risques de troubles pigmentaires Le premier temps consiste à appliquer une solution pré-
et le photovieillissement selon la classification de Glogau. peeling qui est une lotion dégraissante avec acétone pour
Une photographie sera réalisée avant tout traitement. éliminer le film hydrolipidique de surface et/ou un mélange
Les précautions (voir plus haut) doivent être rappelées au contenant différents acides à faible concentration. Le but est
patient. d'homogénéiser le pH de la peau. Avant l'application du pee-
Les explications concernant les avantages et inconvénients ling, les zones lésées ou érythémateuses (narines lors de
des peelings permettront de faire le bon choix en accord rhume, petite lésion excoriée) seront protégées par de la
avec le patient. Le point marquant des peelings superficiels vaseline ou une crème protectrice spécifique.
est l'absence d'éviction sociale ou sa modération ; ils ont la Concernant le peeling lui-même, le premier peeling à l'AG
réputation d'être des «  lunch peel ». est réalisé avec la concentration la plus faible (20 %) qui sera
Les phototypes I à III sont de bonnes indications. À partir du augmentée progressivement lors des séances ultérieures si la
phototype IV, le risque d'hyperpigmentation post-inflammatoire tolérance est bonne, jusqu'à une concentration de 70 %. En
est significatif et demande une prise en charge plus importante cas de rougeur, de croûtelles, la concentration du peeling
avec une préparation cutanée très stricte pour avoir une tolé- restera celle du peeling précédent.
rance optimale, associant des actifs mettant au repos la mélanine L'application de 2 à 3 ml de solution peeling se fait le plus sou-
si nécessaire et une photoprotection rigoureuse après le peeling. vent au pinceau, à la compresse ou au coton-tige spécifique en
commençant par le front, puis une joue, le menton et en remon-
Protocole du peeling AHA tant sur la joue opposée vers le front. Le nez et la lèvre supérieure
sont traités ensuite. Les peelings superficiels peuvent être appli-
qués sur le cou, application réalisée en dernier et qui sera la pre-
Phase prépeeling mière neutralisée (fig. 5.4). Le patient doit garder les yeux fermés
Préparation indispensable, réalisée au domicile par le patient, la pendant toute la procédure. Il faut en moyenne 1 à 2 minutes
phase prépeeling doit débuter au moins 15 jours avant le pee- pour appliquer l'acide sur l'ensemble du visage. Le praticien sur-
ling. Elle permet non seulement de préparer la peau au peeling, veille l'apparition de zones de rougeur et interroge le patient sur
mais aussi de vérifier la bonne tolérance aux acides utilisés. Les les sensations ressenties ; une sensation de brûlure importante
protocoles utilisent les acides qui serviront plus tard au peeling ou un prurit localisé doivent faire commencer la neutralisation.
avec un dosage plus faible. Ils ont souvent une acidité proche La neutralisation s'effectue avec une solution adaptée
de 3 qui permet déjà une stimulation de la peau. basique, bicarbonatée. Ces solutions neutralisantes stoppent
La crème contenant les actifs acides est appliquée soit tous l'action du peeling, mais comportent d'autres constituants
les soirs, soit matin et soir. Sa composition est fonction du limitant le dégagement de chaleur qui accompagne la neutrali-
type de peau et des indications du peeling  : en cas d'hé- sation. Elle est soit localisée au fur et mesure de l'apparition de
liodermie, AG, AL ou ROL associés à de la gluconolactone ou zones de rougeurs, soit intéresse l'ensemble de la zone traitée
à la vitamine C pour ses effets anti-oxydants. après le temps de pose recommandé, habituellement de 3 à
Une protection solaire quotidienne rigoureuse sera rajoutée 5 minutes. Il est utile de s'aider d'un chronomètre. Le contrôle
dès les premiers jours de soleil. Si le risque d'hyperpigmenta- visuel lors de la pose du peeling est une étape importante
tion est important, il faut prescrire un actif dépigmentant le ­permettant de neutraliser immédiatement si une rougeur ou
soir et y associer l'application d'une photoprotection au moins un aspect de frosting apparaît, sous peine d'effets secondaires
15 jours avant le peeling afin de mettre au repos les mélano- liés à l'épidermolyse non souhaitée (croûtes, cicatrices).
cytes. Pour certains auteurs, elle doit commencer au moins La neutralisation s'accompagne de l'apparition d'un
1 mois avant et continuer 3 mois après le peeling quel qu'il soit. érythème souvent modéré associé à une sensation de c­ uisson.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 5. Peelings superficiels

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Fig. 5.3  Le kit peeling acide glycolique (AG).
1. Crème protectrice. 2. Prépeel. 3. Neutraliseur. 4. Peel. 5. Pinceau. 6. Godet. 7. Eau thermale. 8. Dermocorticoïde. 9. Compresses.
Source : M. Baspeyras.

Il existe une variante de neutralisation avec contrôle visuel


coloré, «  neutralizer versicolor ». Le peeling neutralisé devient
bleu si la neutralisation est efficace.
En fin de peeling, une crème émolliente est appliquée ; elle
peut être associée à un dermocorticoïde en cas d'inflamma-
1 tion. Certains associent une séance de LED dans le but de
renforcer l'efficacité du peeling et de limiter les effets secon-
daires en cas de rougeur ou d'inflammation.

La phase postpeeling
La peau peut paraître rugueuse ou plus sèche durant 2 à
3  jours avec parfois une desquamation légère à modérée.
5 L'utilisation d'eau thermale et l'application d'une crème
2 4
hydratante cicatrisante haute tolérance plusieurs fois par
jour permettent une récupération rapide.
6 Les recommandations pendant cette phase sont les suivantes :
■ les expositions solaires sont contre-indiquées et une crème

solaire écran total est systématiquement prescrite ;


3 ■ il ne faut pas gratter ou arracher les croûtes survenant sur

d'éventuelles zones d'épidermolyse ;


■ éviter piscine, sauna, hammam ;
7 ■ ne pas gommer, exfolier, irriter la peau ;

■ prévenir son praticien en cas de réaction non prévue (per-

sistance anormale d'une sensation de brûlure, douleur, etc.).


Après 3 à 5 jours, dès que la peau a retrouvé un aspect
normal, la préparation prépeeling est reprise avant la réali­
Fig. 5.4  Schéma de l'application d'un peeling zone par zone. sation d'un autre peeling selon le schéma thérapeutique
préétabli. Selon les indications, les peelings sont réalisés
Lors de la neutralisation, la réaction chimique acide/base tous les 15 jours, ou toutes les 3 à 4 semaines, mais il faut
peut provoquer un effet de mousse. toujours plusieurs sessions pour obtenir un résultat.
La protection oculaire de cette étape par du coton doit être
soigneuse car le bicarbonate peut déclencher des kératites.
Ensuite, l'application d'eau thermale ou de compresses d'eau Séquences des peelings et concentration
froide rafraîchit le visage et finit d'enlever les produits Le peeling suivant peut être réalisé si la tolérance du précé-
chimiques. Elle est insuffisante pour neutraliser les acides forts. dent a été bonne et les suites conformes avec une reprise des

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Section 2. Les peelings
Chapitre 5. Peelings superficiels

soins prépeelings dans les délais prévus. Il faut à nouveau s'as- c­ icatrisante. La protection solaire doit être très rigoureuse
surer que les précautions ont été bien respectées. La concen- du fait du risque d'hyperpigmentation post-inflammatoire.
tration du peeling peut ainsi être augmentée p ­ rogressivement Comme pour les autres peelings, la préparation cutanée est
par palier à chaque séance pour atteindre 70 %. importante pour une pénétration homogène.

Protocole peeling acide Protocole peeling


trichloracétique (TCA) superficiel acide salicylique (AS)
Pour rester superficiel, la concentration du TCA ne doit pas L'application d'AS se fait au pinceau, sur une peau bien prépa-
dépasser 15 % (Masse/masse) et l'application doit se limiter à un rée. En fin d'application, les cristaux d'acide se déposent sur la
aller et retour (car un peeling TCA 15 % appliqué plusieurs fois de peau, réalisant un aspect de poudre blanche. Ce n'est pas un
façon superposée peut descendre dans les couches profondes de frosting, il n'y a pas de neutralisation ; la poudre est éliminée
l'épiderme et devenir un peeling moyen ; voir chapitre  6). Il par un rinçage à l'eau qui parfois déclenche des sensations de
nécessite de bien connaître les phases de coagulation de la peau brûlure. Une crème émolliente est ensuite appliquée.
liée au TCA. Le TCA 15 % est appliqué au coton-tige ou à la com-
presse non tissée, très progressivement zone par zone en surveil- Protocole peeling rétinol (ROL)
lant bien la couleur de la peau qui doit rester rosée, avec au
maximum un frosting léger. Le TCA ne se neutralise pas. Après utilisation d'une lotion prépeeling, le peeling, dont l'as-
L'application d'eau fraîche ou d'eau thermale soulage le pect est un peu huileux, est appliqué au pinceau (fig. 5.5). Il a
patient et sera suivie de celle d'une crème émolliente une odeur assez forte, parfois un peu gênante lors de

A B

C D
Fig. 5.5  Peeling rétinol : avant (A, C) et après (B, D) une seule séance.
Source : M. Baspeyras.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 5. Peelings superficiels

l­'application sur la lèvre supérieure. Le patient est surveillé Chez la femme enceinte
quelques minutes pour vérifier sa tolérance et repart ensuite
Les peelings superficiels aux acides de fruits sont réalisables
sans aucun rinçage ou aucune application de quoi que ce soit.
chez la femme enceinte. L'AG et l'AL sont utilisés sans diffi-
Le peeling peut rester en place jusqu'à 6 à 8 heures selon le type
culté et rendent de grands services lors d'acné. Ils sont sou-
de peau et sa tolérance ; il est ensuite rincé par le patient avec
vent associés aux LED rouge et jaune pour une action plus
de l'eau fraîche. Une crème émolliente postpeeling est alors
complète et rapide (fig. 5.6). La LED bleue est à éviter car elle
appliquée.
favorise et pérennise l'hyperpigmentation post-inflamma-
toire. En revanche, il ne faut pas utiliser les bêta-hydroxya-
Comment optimiser cides (AS) ou les rétinoïdes (ROL interdit pendant la
et cas particuliers grossesse). Il faut aussi éviter le TCA, certes non toxique,
mais à fort risque pigmentaire.
Optimisation des peelings superficiels
Le respect des protocoles, la répétition des séances toutes les Acné et isotrétinoïne
2 ou 3 semaines conditionnent le résultat. Pour un mélasma, Il est conseillé de ne pas utiliser de peelings pendant et au
il faut limiter au maximum le risque inflammatoire et les moins 6 mois après un traitement par isotrétinoïne pour évi-
séances seront plutôt mensuelles. ter la survenue d'un retard de cicatrisation ou d'autres com-
plications liées à l'atrophie pilosébacée. Une étude récente
Chez l'homme réalisée par Spring [14] a montré qu'il n'y a pas de preuve
Le peeling chez l'homme nécessite plus de traitements ou de suffisante pour ne pas réaliser de peelings ou de chirurgie au
plus fortes concentrations du fait de la plus grande quantité cours du traitement par isotrétinoïne. Les auteurs concluent
de glandes sébacées et de follicules pileux. Il faut interdire le que c'est au praticien de bien évaluer la balance bénéfice/
rasage avant et après le peeling [13]. risque (fig. 5.7).

Fig. 5.6  Femme enceinte : peeling acide glycolique et LED.


Source : M. Baspeyras.

Fig. 5.7  Avant-après nettoyage de peau, ablation des kystes et peelings.


Source : M. Baspeyras.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 5. Peelings superficiels

Association de techniques Effets secondaires


Il faut savoir associer d'autres techniques (fig. 5.8) : des peelings superficiels
■ LED en fin de séance pour renforcer l'efficacité et limiter
les effets secondaires ; Une bonne préparation de ces peelings associée à une bonne
■ mésothérapie et LED : la séance de mésothérapie est effec-
compréhension limitent les effets secondaires, qui sont rares,
tuée immédiatement après le peeling, après la neutralisa- mais qui exposent au risque de plainte judiciaire.
■ Effets secondaires immédiats et attendus  : sensation de
tion, et sera si possible suivie d'une séance de LED ;
■ nettoyage de peau dermatologique (ou dékystage) : temps
brûlures, desquamation superficielle et érythème sont les
important pour la prise en charge des acnés microkys- plus fréquents et cèdent en quelques jours avec l'applica-
tiques. Deux protocoles sont possibles selon le type de tion de crèmes cicatrisantes et/ou corticoïdes.
■ Effets secondaires plus tardifs : ils débutent tout de suite
peeling choisi : soit ouverture des kystes suivie d'applica-
tion de TCA à 15 ou 20 %, soit peeling aux AHA suivi de après le peeling ou apparaissent les jours suivants.
● Un œdème rare, pas toujours expliqué, cède en 2 à
l'ouverture des kystes (fig. 5.9 et 5.10) ;
■ injection d'acide hyaluronique en fin de séance du
3  jours avec des massages doux et l'application d'eau
peeling. thermale ou de compresses humides fraîches ; il faut
D'autres associations sont possibles (laser ou microneed- proscrire l'application de glace qui brûlerait la peau.
● Les allergies aux actifs des peelings sont rares et habi-
ling), mais celles-ci font passer le peeling de superficiel à
moyen avec perte de son caractère ambulatoire [10]. tuellement détectées, car ceux-ci ont déjà été utilisés

Fig. 5.8  Protocole combiné de 4 peelings d'acide glycolique et une injection d'acide hyaluronique.
Source : M. Baspeyras.

Fig. 5.9  Avant-après nettoyage de peau, TCA répétés.


Source : M. Baspeyras.

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Chapitre 5. Peelings superficiels

Fig. 5.10  TCA 20 %, LED rouge et jaune, avant-après 4 séances.


Source : M. Baspeyras.

lors de la phase prépeeling. En revanche, l'application de surface peut permettre une extension des lésions herpé-
produits en postpeeling non prescrits, en particulier des tiques et laisser des cicatrices atrophiques.
vaselines non purifiées, des huiles essentielles, peut ● Une surinfection microbienne est rare, sauf en cas de

déclencher des réactions sur les peaux fragilisées par le grattage.


peeling. ● Des poussées de folliculite ou d'acné peuvent nécessiter

● Une desquamation en quelques jours peut traduire une des antibiotiques locaux, parfois des antibiotiques per
pénétration trop importante, vite résolue par des hydra- os ou le changement du peeling utilisé (par exemple
tants. Il faut interdire les gommages et le grattage. La passer d'un acide de fruit à un AS).
desquamation peut être secondaire à l'application de ● Une épidermolyse (fig. 5.12) visible pendant le peeling

topiques non adaptés (fig. 5.11). aura été immédiatement traitée par neutralisation,
● Un prurit persistant existe parfois et doit faire modifier democorticoïde et cicatrisant ; elle est source de croûtes
le type de peeling. et de cicatrices habituellement temporaires.
● Un érythème persistant plusieurs jours peut traduire ● L'hyperpigmentation post-inflammatoire (HPI) est liée à

une intolérance aux acides plus concentrés ; il faut alors la mauvaise préparation de la peau, au mauvais choix de
rester à des concentrations plus faibles et vérifier la pré- peeling par rapport au phototype et à une mauvaise
paration de la peau. gestion du soleil. Son traitement est long et difficile,
● Des grains de milium traduisent souvent l'emploi de associant une protection solaire drastique, des agents
crèmes trop occlusives en postpeeling ; ils peuvent être dépigmentants, des peelings dépigmentants, des lasers
ouverts. ou IPL.
● Une poussée d'herpès  : des érosions douloureuses L'insatisfaction du patient ou l'insuffisance de résultat sont le
doivent être considérées comme un herpès et traitées fait d'une mauvaise compréhension des peelings superficiels par
comme tel ; en effet, du fait de la dissociation de la le patient qui attend beaucoup, et du médecin qui promet trop.
couche cornée, il n'y a souvent pas les signes cliniques La procédure des peelings superficiels est récapitulée dans
classiques de l'herpès et la diminution des défenses de l'encadré 5.2.

Fig. 5.11 Desquamation.
A. Application de peroxyde de benzoyle avant le troisième peeling AHA 50 %. B. Cicatrisation complète en 15 jours par crème cicatrisante et 5 LED rouge.
Source : M. Baspeyras.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 5. Peelings superficiels

répétition des peelings pour obtenir l'amélioration de l'hé-


liodermie avec homogénéisation du teint, de la texture de la
peau, des lésions d'acné.

Références
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[2] Fischer  TC, Perosino  E, Poli  F, et  al. Chemical peels in aesthetic
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Encadré 5.2 micals peels: a review of fundamentals and step-by-step algorith-
mic protocol for treatment. J Clin Aesthet Dermatol 2018;11(8):
Procédure des peelings superficiels 21–8.
(d'après [5]) [6] Van Scott EJ, Liu RJ. Alpha hydroxy acids: procedures for use in
clinical practice. Cutis 1989;43:222–8.
■ Consultation préalable : [7] Dinardo JC, Grove GL, Moy LS. Clinical and histological effects of
● antécédents, y compris cicatrice et troubles glycolic acid at different effects of AHA on photoaged skin: A
pigmentaires pilot clinical, histologic, and ultrastructural study. J Am Acad
Dermatol 1996;34:187–95.
● examen clinique, thérapeutique en cours
[8] Ditre CM, Griffin TD, Murphy GF, et al. Effects of alpha-hydroxy
● expliquer le peeling
acids on photoaged skin: a pilot clinical, histologic, and
● prescrire le traitement prépeeling, la prophylaxie ultrastructural study. J Am Acad Dermatol 1996;34(2 Pt 1):
antivirale, les soins pendant et le postpeeling 187–95.
● recueillir le consentement éclairé du patient [9] Wójcik A, Kubiak M, Rotsztejn H. Influence of azelaic and mande-
● photographie
lic acid peels on sebum secretion in ageing women. Postepy
Dermatol Alergol 2013;30(3):140–5.
■ Prépeeling : installer le patient, peau nette, lotion [10] Sumita JM, Ricci Leonardi G, Bagatin E. Tretinoin peel: a critical
prépeeling, protection des zones irritées, enlever les view. An Bras Dermatol 2017;92(3):363–6.
bijoux [11] De Kligman, Draelos ZD. Combination superficial peels with sali-
■ Peeling minuté et surveillé, neutralisé si besoin, eau cylic acid and post-peel reinoids. J Drug Dermaol 2016;15(4):
thermale, crème, LED 442–50.
■ Reprise de préparation avant les autres sessions [12] Proksch  E. pH in nature, humans and skin. J Dermatology

2018;45(9):1044–52.
[13] Reserva J, Champlain A, Seaver L, Tung R. Chemical peels: indica-
Conclusion tions and special considerations for the male patient. Dermatol
Surg 2017;43(Suppl 2):S163–73.
[14] Spring  LK, Krakowski  AC, Alam  M, et  al. Isotretinoin and
Les peelings superficiels sont faciles à réaliser, sans éviction
timing of procedural interventions: a systematic
sociale, pour tous les phototypes et toutes les zones, mais il review with consensus recommendations. JAMA Dermatol
faut bien comprendre l'importance de la préparation, de la 2017;153(8):802–9.

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Section 2. Les peelings

Chapitre 6
Peelings moyens
J.-L. Vigneron, S. Lederlé

Profondeur d'action des peelings partielle. Elles sont équivalentes en efficacité à un TCA 30.
L'inconvénient est la survenue fréquente d'un érythème de
moyens et produits utilisés quelques semaines, ce qui est rare avec un TCA pur.
Le principe actif du peeling imprègne l'épiderme et atteint la
jonction dermo-épidermique sans la détruire (voir fig. 6.1). Mode d'action de l'acide
Les peelings moyens sont pratiqués avec les produits
suivants.
trichloracétique (TCA)
La formule d'Unna comportant de la résorcine n'est presque Le TCA est la molécule reine des peelings moyens [1, 2].
plus employée car certains composants (ceyssatite) sont Celle-ci n'a pas de toxicité systémique. Plus le TCA est
devenus rares et les rebonds pigmentaires sont très fréquents. concentré et acide, plus il pénètre profondément à la
Son intérêt est l'absence quasi-totale de chaleur ressentie. recherche d'eau pour se neutraliser au fur et à mesure de sa
L'acide trichloracétique (TCA) est employé en solution de progression dans les différentes couches cutanées, provo-
20 à 30 %. Soulignons qu'il faut parler en masse/masse. Un TCA quant une coagulation des protéines. L'action du TCA est
30 % comporte 30 g de cristaux secs de TCA dilués dans 70 g reproductible ; elle est proportionnelle à la quantité appli-
d'eau. A contrario, aux États-Unis en particulier, un TCA 30, quée et doit être contrôlée visuellement grâce au change-
c'est 30 g de cristaux additionnés de 100 ml d'eau (masse pour ment de couleur de la peau (les différents degrés de givrage
volume, soit TCA 23). C'est pourquoi les publications améri- sont indiqués dans l'encadré 6.1). C'est un processus irréver-
caines concernant les TCA 50 ne sont en fait que des TCA 33. sible sans neutralisation. La couleur de la peau variera du
La solution peut être préparée par le pharmacien, avec l'avan- blanc floconneux ou moucheté au blanc intense. Un blanc
tage d'un faible coût, mais l'inconvénient d'être moins stable gris signifie une profondeur trop intense avec un risque
avec une pénétration inhomogène. Les laboratoires commer- cicatriciel.
cialisent des TCA tamponnés par l'addition de saponines et/ou
de glycérine qui stabilisent la molécule. La pénétration est mieux
contrôlée, l'acte est plus facilement reproductible. Résultats cliniques et indications
Les formules de TCA associé à un petit pourcentage de Les peelings moyens ont en commun de provoquer une des-
phénol présentent l'avantage d'induire une anesthésie locale quamation qui dure de J4 à J6 [3].

Fig. 6.1  Peeling TCA 30 %. Effet sur les taches pigmentaires, le teint, la tonicité.
A. Avant. B. Après 6 semaines.
Source : J.-L. Vigneron.

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Chapitre 6. Peelings moyens

Après le renouvellement épidermique forcé de la première La technique d'application doit faire l'objet d'un ensei-
semaine, on observe avec un « vrai » peeling moyen, dont la gnement pratique car la profondeur du peeling est contrô-
référence est le TCA 25 à 30 % : lée visuellement en temps réel pour atteindre différents
■ un très net éclaircissement du teint ; niveaux de givrage correspondant à différentes profon-
■ la disparition de la composante épidermique des taches pig- deurs (encadré  6.1). L'application est faite de façon
mentaires et de tout ou partie de la composante dermique ; « active » lors d'un TCA 30  %. On ne se contente pas de
■ la disparition des kératoses actiniques ; déposer le liquide sur la peau. Il faut frotter pour impré-
■ une action nette sur les rides, dont certaines peu pro- gner. On utilise soit une compresse tissée, soit un gros
fondes sont nivelées, sans toutefois que leur empreinte coton-tige résistant.
disparaisse totalement. Il est impératif de bien déterminer préalablement le niveau
Après environ 2 mois, il existe une amélioration de la fer- auquel il sera nécessaire de descendre pour obtenir la stimu-
meté de la peau conséquence des effets dermiques, à savoir lation et la desquamation. Ce niveau peut varier selon les
une relance des synthèses fibroblastiques. zones et les anomalies à corriger.
Ainsi, les peelings moyens seront proposés dans les Pendant l'application du peeling, il faut être capable de lire
héliodermies de niveau 2. Les niveaux 3 seront souvent amé- en temps réel l'effet clinique.
liorés, mais insuffisamment. Le but est de faire « givrer » la peau, d'obtenir un blanc uni-
forme, persistant 3  minutes et suivi d'un œdème. Pour
En pratique ­obtenir ce résultat, il faut surveiller l'évolution de la couleur
et de l'œdème des zones déjà traitées. Si ce n'est pas persis-
tant, il faut réappliquer.
Information à la patiente
Il est assez facile d'expliquer à une patiente les avantages et Encadré 6.1
les suites d'un peeling moyen en l'illustrant de quelques pho-
tographies. La desquamation de quelques jours n'inspire pas Peeling TCA : lecture en temps réel
de crainte, pour peu qu'on explique que cette desquamation La profondeur du peeling TCA semble corrélée avec l'intensité
est indolore. La rapidité du retour à un visage présentable du givrage cutané. Le TCA est un « cautère chimique » qui coa-
rassure. Quant à l'acte, il ne faut jamais utiliser le mot « brû- gule les protéines de la peau. C'est cette coagulation qui est à la
lure », et ne pas laisser la patiente l'utiliser. Il faut parler de base de la formation du givrage blanc observé lorsque le TCA
remplacement de l'épiderme, de stimulation. On s'enquiert est appliqué. C'est pourquoi le degré de givrage et celui d'œdème
de l'existence d'un herpès du visage depuis moins de 5 ans. cutané sont utilisés pour estimer la profondeur du peeling.
Le devis est joint aux documents d'information et à Les niveaux de pénétration et de givrage du TCA peuvent
l'ordonnance. être classés en quatre groupes :
■ niveau O – pas de givrage : la peau est lisse et brillante,
Conditionnement de la peau mais il n'y a pas de givrage et pas d'érythème. C'est un
peeling « très superficiel » qui au maximum décollera
Avant le peeling une partie du stratum corneum ;
La peau doit être préparée. Il faut accélérer le turn-over épider- ■ niveau 1 – léger givrage irrégulier (fig. 6.2) : en plus

mique et réduire la couche cornée afin d'uniformiser la perméa- d'apparaître brillante, la peau montre quelques points
bilité, au moyen d'acide rétinoïque ou d'acide g­ lycolique à 30 %. érythémateux avec quelques points blancs qui sont un
Il faut, sur certains phototypes, ralentir la mélanogenèse par givrage léger. C'est un peeling épidermique superficiel
l'hydroquinone. On prendra garde à ne pas aller jusqu'à l'irrita- qui provoquera un peluchage de 3 jours ;
tion qui créerait des points d'hyperpénétration du peeling.
Après le peeling
Le traitement à domicile sera poursuivi longtemps : vitamine C
haut pourcentage + écran solaire le matin et hydratation et/ou
rétinol le soir. Il faut rappeler qu'un peeling moyen peut avoir
comme effet secondaire une pigmentation post-inflammatoire
parfois très dense, survenant vers le 20e jour ; cela requiert de la
vigilance, avec corticothérapie locale à visée anti-inflamma-
toire et/ou dépigmentant selon la nécessité.

Peeling TCA 30 % sur le visage


Le nettoyage est réalisé au moyen d'une lotion à base d'acide
glycolique pendant 5  minutes, essuyage à l'alcool 60°, puis
des photographies sont prises [4]. L'utilisation d'acétone Fig. 6.2  Niveau 1 : léger givrage irrégulier.
n'est pas recommandée par l'auteur. Source : J.-L. Vigneron.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 6. Peelings moyens

C'est le TCA 30  % qui permet d'atteindre le niveau de


■ niveau 2 – givrage blanc ponctué de zones roses
givrage 3. Son application est cuisante et nécessite parfois,
(fig. 6.3). La peau est donc d'un blanc uniforme, mais on
selon la patiente (20 % des cas), une prémédication légère ou
perçoit derrière une autre couleur : un rose très net. C'est
une anesthésie tronculaire. Une cryoventilation (type
un peeling épidermique qui intéresse toute l'épaisseur
Zimmer) soulage bien cette sensation. Dans tous les cas, le
épidermique et va réépidermiser en 5 jours ;
calme et la voix de l'opérateur sont primordiaux : « Anesthésie
locale, anesthésie vocale  ! »
Le TCA additionné de phénol est beaucoup moins
douloureux.
On applique ensuite un baume « barrière » pendant les
6 jours nécessaires à la reconstitution de l'épiderme.

Les boosters du peeling TCA classique


Des techniques ont été proposées afin d'améliorer les résul-
tats juste avant ou pendant le peeling.

Application préalable de cryogène


(azote ou neige carbonique)
Fig.  6.3  Niveau 2  : givrage blanc, peeling de toute la hauteur de Sur un visage comportant des taches actiniques anciennes et
l'épiderme. « épaisses », une cryothérapie peu appuyée est pratiquée
Source : J.-L. Vigneron. juste avant le peeling.
niveau 3 – givrage blanc compact (fig. 6.4). La peau est

Application préalable de lumière pulsée
d'un blanc intense, le toucher est celui d'un œdème
dense. On ne perçoit pas de couleur rose en arrière-plan. Pour des taches actiniques très contrastées, un passage de
C'est un peeling qui atteint par point le derme papillaire lumière pulsée avec des paramètres faibles va déshydrater les
et la réépidermisation prendra 7 jours. taches et favoriser la pénétration élective du peeling. C'est le
« PhotoPeel » (voir encadré 7.1).

Traitement des cicatrices en pic à place


Les cicatrices sont plutôt la cible du peeling profond, mais une
technique a été proposée dès 2002 : l'utilisation précise au cure-
dent de TCA 70 % sur les cicatrices atrophiques en séances ité-
ratives. Cette technique avec une telle concentration nécessite
un apprentissage. Elle est très efficace sur les cicatrices étroites
et profondes. Le cure-dent en bois est l'outil de choix.
On prélève 0,5 ml dans une petite cupule très stable. On
laisse tremper 5 minutes l'extrémité du cure-dent dans le
TCA  70. En effet, le bois du cure-dent est très dense et il
faut quelques minutes pour l'imprégner. Il ne faut pas
déposer une goutte ; ce serait beaucoup trop et le résultat
serait une nécrose. La quantité déposée doit être très faible.
Le cure-dent semble sec ; on pose la pointe sur le fond de la
cicatrice, on attend 15 secondes et le liquide descend dans
la peau par capillarité. Ensuite, un givrage apparaît, mais
seulement après quelques dizaines de secondes et il s'élar-
git ensuite un peu. Quand on a fait une zone, on passe à la
suivante. Ensuite, on examine la zone précédente où les
points traités doivent toujours être d'un blanc compact. Si
ce n'est pas le cas, on réapplique comme fait initialement.
Fig. 6.4  Niveau 3 : givrage blanc compact.
Peeling jusqu'au derme papillaire. La réépidermisation prendra 7 jours. Actions préalables destinées à favoriser
Source : J.-L. Vigneron. la pénétration
Certains utilisent une action mécanique (toile émeri), une
Plus le peeling réalisé au TCA descend profond, plus le givrage
action photonique (laser CO2), une action d'électrodissection,
blanc s'installe vite et est intense. On peut choisir une action
afin de désépaissir la couche cornée. Ensuite, ils appliquent le
différenciée selon les zones et les anomalies à corriger.
TCA 30 et obtiennent ainsi une pénétration plus profonde.

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Chapitre 6. Peelings moyens

Il faut mettre en garde vis-à-vis de ce type de pratique Complications [5, 6]


qui crée souvent des cicatrices. La molécule de TCA est
petite, pénétrante et rompt la surface des cellules. Si l'on
veut agir plus profondément, il est plus sûr d'utiliser une Dyschromie
formule phénolée de peeling profond, équilibrée et Après cicatrisation, la surface peut parfois présenter des
p rogressive, dont l'action de stimulation est très
­ zones dyschromiques  : soit des zones blanches par une
supérieure. vasoconstriction réactionnelle trop intense –  c'est transi-
toire –, soit plus tard, après la 3e semaine, une pigmentation
Suites normales attendues post-inflammatoire, qui sera rapidement traitée par hydro-
quinone. Une hypopigmentation durable serait due à une
Le patient part après quelques minutes avec un léger œdème, pénétration trop profonde et à une altération des mélano-
une couleur rose blanchâtre. Ensuite, la peau évolue vers le cytes. Le TCA est une molécule de peeling moyen et n'est
brun et flétrit pour finalement desquamer d'abord au centre pas maîtrisable au-delà de l'épiderme.
du visage (fig. 6.5).
Les 6e à 7e jours, l'exfoliation est terminée. La peau est un
peu rose et souvent « rugueuse » car les kératinocytes ne Insuffisance de résultat
sont pas encore cohésifs. Il est important que le patient Réaliser un vrai peeling moyen uniforme nécessite un geste
comprenne qu'il ne faut pas enlever les croûtes qui se sont régulier avec un autocontrôle de son geste et toujours un œil
formées pendant cette phase desquamative. sur la zone traitée précédemment. Si une zone n'a pas été
Après la 1re  semaine, le pli sus-palpébral peut parfois suffisamment imprégnée, la desquamation ne sera pas assez
présenter un petit retard de cicatrisation. La peau dans profonde et le résultat insuffisant.
son ensemble peut rester sensible 3  jours de plus
(fig. 6.6).
Surinfection
L'infection bactérienne est très rare. On ne la rencontre que
dans des cas de manque d'hygiène caractérisé. Par précau-
tion, le visage doit être lavé chaque jour au moyen d'un anti-
septique classique.
L'herpès est évité par prescription d'un antiherpétique oral
5 jours avant le peeling et pendant la semaine de cicatrisa-
tion ou jusqu'à 20 jours pour certains. Nous conseillons cette
précaution si une poussée herpétique a existé dans les cinq
années précédentes.

Localisations extrafaciales
Le visage a d'extraordinaires capacités de réépidermisation, à
la différence du reste du corps où la densité d'annexes est
très inférieure. La réépidermisation est moins bonne et
expose à un risque de cicatrice. Certaines précautions per-
mettent cependant de descendre suffisamment pour obte-
nir une bonne stimulation et de bons résultats [7].

Cou et décolleté
On ne dépasse pas un TCA 20 et on ne va pas au-delà d'une
coloration rosée avec un blanc floconneux.
Sur le décolleté, nous préférons appliquer le même jour
successivement plusieurs méthodes utilisées à puissance
faible ; par exemple passage d'un IPL, puis TCA 18 au coton-
tige sans frotter, et éventuel needling (méthode dite
Fig. 6.5  Avec du TCA 33 %, desquamation classique au 5e jour. TriBoost®). Cette combinaison sera répétée deux ou trois fois
Source : J.-L. Vigneron. à 3 semaines d'intervalle.

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Chapitre 6. Peelings moyens

Fig. 6.6  Peeling moyen par TCA 30 % – effet sur le teint et la tonicité après 6 mois. Noter l'effet très net sur la peau fine des paupières chez une femme
jeune. Source : J.-L. Vigneron.

Membres séance. Un exsudat lymphatique persiste plusieurs


semaines et sera recouvert de pansements hydrocellu-
Mains, avant-bras, jambes peuvent être améliorés concer-
laires dans un premier temps puis hydrocolloïdes. Un
nant  : signes d'héliodermie, altération texturale, sécheresse
érythème persiste quelques semaines et une exposition
cutanée, lentigos et kératoses actiniques. La couche cornée
solaire mesurée sera autorisée après retour à une colora-
est très cohésive, comme vernissée. La pénétration est
tion normale.
longue à obtenir ; ne pas chercher plus qu'un blanc rosé. La
La motivation des patientes est telle que plusieurs
jambe ou l'avant-bras peuvent supporter un peeling plus
séances de cette intensité, plusieurs années successives,
appuyé, mais le résultat ne sera pas meilleur qu'avec une
sont parfois demandées. Le risque est l'hypopigmentation
combinaison de méthodes type TriBoost®.
(fig. 6.7).

Laxité et vergetures de l'abdomen Aspects médico-légaux


Le Dr Sylvie Lederlé a mis au point une technique très agres-
sive dans cette indication [8]. Il faut avertir son assureur de la réalisation de peeling moyen,
Du TCA 20 est appliqué. La douleur est atténuée par un qui doit faire l'objet d'une mention spéciale dans le contrat
flux d'air réfrigéré. Des corticoïdes sont appliqués en fin de de responsabilité civile professionnelle.

Fig.  6.7  Évolution sur 4  ans chez une jeune femme de 25  ans ayant eu deux grossesses précoces. Deux peelings TCA 20  % sont réalisés à 4  ans
d'intervalle.
A. Avant le traitement, 1er TCA à 20 %. B. 2 ans plus tard. C. 2 mois après le 2e TCA à 20 % et ablation des deux nævus.
Source : S. Léderlé.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 6. Peelings moyens

Conclusion [3] Fulton Jr JE, Porumb  S. Chemical peels. Their place within the
range of resurfacing techniques. Am J Clin Dermatol
2004 ;5(3):179–87.
Les peelings moyens sont très efficaces pour améliorer l'hé-
[4] Perkins  NW, Smith Jr SP, Williams 3rd EF. Perioral rejuvenation:
liodermie de niveau 2 et le TCA est la molécule la plus sûre complementary techniques and procedures. Facial Plast Surg Clin
et la plus performante. North Am 2007 ;15(4):423–32.vi.
Ce qui est nouveau est que certains états cutanés – kéra- [5] Fischer TC, Perosino E, Poli F, et al. Chemical peels in aesthetic der-
toses actiniques, vergetures – peuvent être traités et les pro- matology: an update 2009. J Eur Acad Dermatol Venereol
tocoles d'utilisation en extrafacial sont mieux définis. 2010 ;24(3):281–92.
[6] Duffy DM. Alpha hydroxy acids/trichloroacetic acids risk/benefit,
La poursuite de soins à domicile avec l'application d'actifs
strategies. A photographic review. Dermatol Surg 1998 ;24(2):181–9.
antivieillissement est un complément indispensable pour quiz 190-1.
prolonger l'efficacité du peeling. [7] Cook KK, Cook Jr WR. Chemical peel of nonfacial skin using glyco-
lic acid gel augmented with TCA and neutralized based on visual
Références staging. Dermatol Surg 2000 ;26:994–9.
[1] Dewandre  L. Peelings chimiques. Paris  : Elsevier Masson ; 2006. [8] Lederlé S. Choix d'un peeling en fonction de sa localisation. J Med
p. 3–9. Esth Chir Dermatol 2017 ;175.
[2] Landau M. Chemical peels. Clin Dermatol 2008 ;26:200–8.

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Section 2. Les peelings

Chapitre 7
Peelings dépigmentants
J.-L. Vigneron

Introduction Encadré 7.1

Avoir un teint uniforme et sans taches a toujours été très Protocole du PhotoPeel (utilisable sur le
recherché. Une belle peau lumineuse est immédiatement visage, le décolleté, les mains)
remarquée. Toutes les civilisations ont chanté les teints clairs
et, de nos jours, l'Asie est la plus exigeante. 1. Utilisation de l'IPL sur toute la zone ou du laser QSY uni-
Nous évoquons ici les taches pigmentaires. Parmi celles-ci, quement sur les taches à dose légèrement inférieure à la
il faut différencier : dose requise classique dans cette indication. On obtient
■ les lentigos actiniques provoqués par le soleil générale-
ainsi une dessication des taches actiniques, sans action
ment. Ces taches sont d'un diamètre inférieur à 7–8 mm et sur la peau non tachée.
aux contours anguleux ; 2. Application d'acide trichloracétique à 18 ou 20 %. Dans le
■ les pigmentations post-inflammatoires qui surviennent
cas précis du PhotoPeel, l'application n'est pas faite en frot-
sur le lieu d'une réaction cutanée après un traumatisme, tant avec la recherche d'un givrage ; elle est faite au moyen de
une inflammation ou un geste médical ou chirurgical ; deux cotons-tiges jumelés, simplement passés sans appuyer
■ le mélasma ou chloasma formant des nappes plus ou
avec deux passages perpendiculaires sur toute la zone.
moins étendues et généralement symétriques sur le visage. 3. Cette application légère provoque un givrage sélectif des
Ce chapitre portera principalement sur le mélasma. Les taches actiniques qui sont devenues plus perméables du
taches actiniques et post-inflammatoires sont plutôt traitées fait de l'action photonique préalable.
par les peelings moyens (voir chapitre 6). 4. Les suites consisteront en une exfoliation sélective des
taches actiniques.
L'intérêt du PhotoPeel est de rendre le peeling sélectif pour
Traitement des taches actiniques un type de cible, les pigmentations actiniques, sans pour
(lentigos actiniques) autant avoir les conséquences fréquentes de l'IPL seule, à
savoir les « touches de piano » qui nécessitent plusieurs
Pour les lentigos actiniques du visage, quand ils représentent séances complémentaires d'IPL pour uniformiser la peau, et
un grand pourcentage de la surface, ils sont traités par un pee- sans problème de limite abrupte périphérique de traitement.
ling moyen, acide trichloracétique (TCA) 25 ou 30 %. Quand ils
sont peu nombreux, ils sont traités par IPL ou par laser ou par
cryothérapie, technique pour laquelle existe un risque d'hypo- accessible à un traitement comme le peeling qui accélère
pigmentation définitive sur les phototypes à phéomélanine. le turn-over et fait remonter le pigment. Ce peeling doit
Nous pouvons évoquer ici l'intérêt du PhotoPeel. Cette être progressif afin de ne pas provoquer une nouvelle
méthode permet, sur les phototypes clairs, le traitement inflammation et donc une stimulation des mélanocytes.
de taches actiniques nombreuses avec un résultat uni- On utilisera soit deux ou trois peelings mandéliques, car
forme et sans risque de dépigmentation. Le PhotoPeel est ces peelings superficiels ont l'avantage de ne jamais provo-
utilisable partout sur le corps (encadré  7.1 et voir quer d'inflammation ni d'épidermolyse, soit un peeling
chapitre 6). moyen TCA 25 ou 30 %, pour lequel il est prudent de faire
ensuite 3 semaines d'application d'une préparation à l'hy-
droquinone 4 %.
Hyperpigmentation
post-inflammatoire (HPI)
Traitement du mélasma ou
Les HPI se développent lors d'une réparation cutanée chloasma
lorsque les mélanocytes sont très stimulés dans le proces-
sus de cicatrisation. La prévention fait appel en premier Ce type de traitement (fig. 7.1 et 7.2) demande la compré-
lieu à la corticothérapie locale si une inflammation pro- hension et l'adhésion de la patiente (encadré 7.2).
longée persiste après tout acte, qu'il s'agisse de peeling, Il n'existe pas de « traitement minute » du mélasma. Si une
d'abrasion ou de laser. Si l'HPI survient, la surcharge pig- patiente demande ou espère cela, il faut d'emblée clarifier
mentaire est principalement épidermique et donc plus l'objectif du traitement.
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Chapitre 7. Peelings dépigmentants

Fig. 7.1  A. Mélasma chez une patiente de phototype IV. B. Résultat après préparation dépigmentante et photoprotection.
Source : J.-L. Vigneron.

Fig. 7.2  A. Mélasma chez une patiente de phototype V. B. Résultat après préparation dépigmentante, photoprotection et peeling dépigmentant.
Source : J.-L. Vigneron.

Encadré 7.2 prend pas en charge des pigmentations considérées comme


relevant du domaine esthétique et non médical.
Mélasma Il faudra donc expliquer cela à la patiente, faire un ou des
Il faut la persévérance de la patiente, mais aussi celle du devis, insister sur la durée du traitement qui sera de 1 ou
médecin  ! 2 ans, sur la difficulté de prévoir le nombre de séances qui
Beaucoup de médecins déclarent à ces patientes : « C'est dépendra de la profondeur du mélasma, de l'observance
une maladie chronique, ça reviendra toujours. Protégez- des recommandations et de l'exigence de la patiente
vous du soleil et attendez la ménopause ». C'est sans tenir pour un résultat acceptable ou pour une disparition
compte du mal-être souvent important de ces patientes. complète.
Il faut bien admettre que la consultation initiale est longue La patiente sera d'autant plus motivée qu'elle aura, souvent
et que les peelings ensuite ne sont pas pris en charge. Il faut pendant des années, essayé des traitements cosmétiques
placer ces actes en dehors de l'assurance maladie qui ne chers et inefficaces.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 7. Peelings dépigmentants

Il est important de savoir qu'au-delà de l'étiologie hormonale ■ Rechercher des signes évoquant une pathologie ovarienne
classique du mélasma, la lumière du jour (rayonnement visible, ou bien la connaissance d'une telle pathologie. Mais para-
notamment le violet bleu), et pas uniquement les UVA et UVB, doxalement, le syndrome des ovaires polykystiques s'ac-
est reconnue aujourd'hui comme facteur d'entretien ou de réci- compagne rarement de mélasma.
dive du mélasma. Celle-ci induit une activité des mélanocytes. ■ Rechercher des pathologies pouvant (rarement) favoriser le

Ajoutons que nous savons maintenant que les modifica- mélasma : problème surrénalien, thyroïdien, hypophysaire.
tions dermiques telles l'élastose et les modifications vascu- ■ Rechercher une hyposidérémie, facteur souvent aggravant

laires ont un rôle. Ainsi, on peut affirmer que le mélasma est du mélasma. Ne pas hésiter à prescrire du fer pour 4 ou
une pathologie dépassant largement le cadre d'un désordre 6 mois.
mélanocytaire. Si l'interrogatoire et la clinique n'orientent pas vers une
Comme médicalement, dans l'état actuel de nos connais- pathologie vraie, mais se contentent de mettre en rapport
sances, nous n'avons d'action que sur l'effecteur, il est clair l'apparition du mélasma avec un événement hormonal
que nous ne « guérissons » pas le mélasma. banal, aucun examen complémentaire ne donnera une
information utile au traitement.
Une méthode Il sera toujours préférable de stopper les d'œstroprogesta-
tifs, surtout ceux qui contiennent un progestatif à radical
Traiter un mélasma est une méthode qui durera au moins un
nor-, mais ce n'est pas toujours possible.
an, souvent 2 ans ; le but est de traverser un été sans récidive.
À côté de cette classique cause hormonale, rappelons l'im-
Si la patiente ne comprend pas, il ne faut pas commencer le
portance de la lumière visible, surtout les bleus courts, sur
traitement.
une génétique prédisposée.
La patiente ne comprend généralement que si elle a
Il faut enfin vérifier l'absence de facteurs mécaniques
déjà essayé de nombreux autres traitements restés
aggravants comme les gommages, les frottements qui
inefficaces.
peuvent accentuer la pigmentation.
Il faut expliquer le principe de cette méthode. On agira sur
deux plans : Protocoles classiques
■ accélérer légèrement le turn-over cutané afin de faire
Le traitement fait appel classiquement à l'application d'une
remonter le pigment. L'acide rétinoïque est l'arme la plus
préparation dépigmentante le soir. Le trio dépigmentant
classique. Les acides de fruits à fort pourcentage sont éga-
selon Kligman comporte une association d'hydroquinone,
lement utiles ;
d'hydrocortisone, d'acide rétinoïque. Les trois composants
■ action directe chimique sur la mélanogenèse. Les molé-
agissent de façon synergique sur l'hyperpigmentation. La tré-
cules principales sont la classique et efficace hydroquinone
tinoïne prévient l'oxydation de l'hydroquinone et augmente
et le glutathion.
sa pénétration épidermique ; les stéroïdes diminuent l'irrita-
tion liée aux autres ingrédients.
En pratique En période estivale, l'acide rétinoïque, photosensibilisant,
L'examen en lumière de Wood n'a pas un grand intérêt car, peut être stoppé et la préparation ne comportera plus que
sur une zone donnée, le mélasma est aussi bien dermique hydroquinone et hydrocortisone.
qu'épidermique. Le pronostic sera toutefois meilleur si le pig- La formule classique est  : hydroquinone 5  % ; trétinoïne
ment est surtout superficiel. 0,1 % ; dexaméthasone 0,1 %.
Les formules modifiées permettent d'adapter le trio dépig-
Première consultation mentant aux phototypes élevés, par exemple en diminuant
Le diagnostic de mélasma est posé : existence de pigmenta- le pourcentage d'hydroquinone (3 à 4 %), d'acide rétinoïque
tions en nappes symétriques du visage. (0,05 %), ou de stéroïdes (hydrocortisone 1 %, triamcinolone
Il faut faire trois photographies : de face et les trois-quarts 0,01 % ou fluocinolone acétonide 0,01 %, etc.).
gauche et droit. Le matin est appliquée une crème dépigmentante dont
plusieurs formulations avec des actifs freinant la production
Interrogatoire et examen clinique de mélanine ont été développées par différents laboratoires.
■ Évaluer la motivation de la patiente pour un traitement Celles-ci peuvent comporter un écran solaire à large spectre.
prolongé. La photoprotection avec des filtres anti-UVB et UVA,
■ Faire l'historique du mélasma. Rechercher des modifica- lumière visible et bleue, sera appliquée régulièrement dans la
tions hormonales « naturelles » spontanées ayant pré- journée et toute l'année.
cédé de peu l'apparition du mélasma (répétition de Selon les résultats, des peelings dépigmentants pourront
modifications du cycle, de tension itérative des seins, de être réalisés. Plusieurs laboratoires commercialisent des kits
modifications des règles) ou provoquées par des phéno- comprenant tous les produits nécessaires à la réalisation du
mènes plus marquants (grossesse, fausse couche, avorte- peeling, de la phase préparatoire au peeling lui-même et aux
ment, début ou fin de prise d'œstroprogestatifs, ou crèmes cicatrisantes. Il est possible de renforcer leur activité en
changement d'œstroprogestatif, pose d'implant hormo- rajoutant de façon extemporanée de l'hydroquinone dosée à
nal, stérilet hormonal). 20 % selon les recommandations de certains fabricants.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 7. Peelings dépigmentants

Une à plusieurs séances seront nécessaires et le résultat ■ amélioration quasi complète. On continue le traitement à
sera maintenu en poursuivant l'application d'actifs dépig- domicile sans modifier les préparations ;
mentants plusieurs mois voire années. ■ amélioration nette, mais taches toujours visibles. C'est la

bonne indication du peeling.


Prescriptions et protocoles recommandés par l'auteur Le peeling au glutathion est un « peeling crème » conte-
L'expérience de l'auteur dans cette pathologie difficile et nant glutathion, gluconolactone et glycyrrhizine.
résistante aux traitements les a conduit à proposer le proto- L'acte comprend les étapes suivantes :
cole suivant. ■ 1 temps : nettoyer la peau avec une lotion nettoyante à
er

1. Le matin, une préparation à l'hydroquinone à 4 %, sans l'acide glycolique ;


autre principe actif. Deux minutes après, application ■ 2   temps  : la préparer avec un peeling mandélique (voir
e

d'une crème hydratante contenant si possible un haut chapitre 5) qui sera rincé incomplètement ;
pourcentage de vitamine C (20–30 %). ■ 3   temps  : application du peeling au glutathion, en trois
e

S'il existe une exposition solaire, faire appliquer un SPF 50. applications successives de 4 noisettes de crème de pee-
Nous ne sommes pas partisan d'une protection solaire ling. Aucune douleur n'est ressentie ;
absolue qui crée une situation artificielle. Nous conseillons ■ 4  temps : le visage n'est pas lavé et aucune autre crème
e

une protection rigoureuse si un épisode de plusieurs heures n'est appliquée pendant un minimum de 6 heures. Cette
au soleil est inévitable, même avec un chapeau (randonnée, crème peeling peut être laissée en place jusqu'au lende-
tennis, bateau, etc.). Mais pour la vie quotidienne, même si main matin.
existent des phases avec exposition, nous ne sommes pas Les suites sont les suivantes :
sévères vis-à-vis de l'oubli. Pour une patiente qui commence ■ pendant 2 jours, léger érythème du visage, suivi à partir du
sa journée par plusieurs heures à la maison, nous lui disons 3e jour d'une discrète desquamation, sans jamais gêner la
d'appliquer son écran 50 avant de sortir, pas avant. vie sociale ;
2. Le soir, selon la qualité de la peau : ■ 6 –7 jour : début de la réapplication de la préparation à
e e

■ sur peau fine, une préparation contenant hydroquinone l'hydroquinone 4  % matin et soir pendant 7 à 10  jours ;
4 %, acide rétinoïque 0,02 % et triamcinolone 0,03 % ; réintroduction de la préparation du soir ensuite (trio
■ sur peau épaisse ou si le mélasma est ancien, hydroquinone dépigmentant).
4 %, acide rétinoïque 0,04 % et triamcinolone 0,08 %.
Selon la résistance et la sensibilité estimées de la peau, l'ap- Troisième consultation : 3 à 4 semaines plus tard
plication du soir sera prescrite chaque soir, ou un soir sur (J50-J60)
deux ou deux fois par semaine. Les résultats sont estimés, avec l'aide des photographies ini-
Deux minutes après l'application de ce trio dépigmentant tiales. Il y a trois situations :
est appliquée une crème légère, mais hydratante. ■ peu d'amélioration. C'est très rare. Dans ce cas, on explique à
3. C'est dès cette première prescription qu'un rendez vous la patiente qu'elle est un cas difficile, que la stratégie adaptée
est pris pour 3 semaines plus tard (3 semaines, durée du continue, mais que, dans certains cas, on doit proposer après
turn-over épidermique) afin de pratiquer un peeling. Il quelques mois un peeling plus profond. Nous faisons alors
est précisé que ce peeling devra probablement être fait, appliquer le matin l'hydroquinone à 4 % et le soir, une prépa-
sauf si l'amélioration est radicale. ration de type hydroquinone 6 %, acide rétinoïque 0,04 % et
Plusieurs peelings ont été formulés spécialement pour le trai- triamcinolone 0,08 %. Il est évident que de telles préparations
tement du mélasma. Citons les principes à visée antipigmen- ne seront pas poursuivies des mois, et que la patiente sera
taire de trois peelings. L'un contient du résorcinol, et différents vue régulièrement afin d'évaluer l'efficacité du traitement ;
acides  : férulique, salicylique, azélaïque, phytique, citrique et ■ amélioration nette, mais taches toujours visibles. Sont
rétinol et arbutine ; le deuxième, acides  : azélaïque, kojique, alors prescrits, le matin, hydroquinone 4  %, le soir, aug-
citrique, salicylique, phytique, ascorbique et rétinol et arbutine ; mentation de la fréquence d'application de l'hydroquinone
le troisième est différent : glutathion, gluconolactone, rétinal, + acide rétinoïque.
acides mandélique et phytique. Nous utilisons depuis quelques ■ amélioration quasi complète :
années cette dernière formulation au glutathion. ● le soir : la préparation hydroquinone + acide rétinoïque

utilisée jusqu'alors est appliquée en diminuant la fré-


Deuxième consultation : 3 semaines quence d'application sur plusieurs mois pour finir à un
après (J20–J30) soir par semaine ;
Un peeling est prévu, mais comment allons-nous évaluer la ● le matin, simplement une crème hydratante et la pro-

nécessité de le faire ou de proposer autre chose ? tection antisolaire dans les conditions décrites précé-
Les résultats sont estimés, avec l'aide des photographies demment.
initiales. Il y a trois situations :
■ peu d'amélioration. On a l'impression de ne pas avoir eu
Et ensuite ?
prise sur le processus. C'est rare. Dans ce cas, on augmente Les armes sont connues : le matin, hydroquinone 4 et 6 % ; le
le pourcentage d'hydroquinone du matin à 6 % et on peut soir, trio dépigmentant avec hydroquinone, acide rétinoïque,
augmenter la fréquence d'application de la formule du soir ; triamcinolone et peeling au glutathion.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 7. Peelings dépigmentants

Après les trois premières consultations : Encadré 7.3


■ si l'amélioration est bonne ou très bonne, les conseils d'uti-
lisation des préparations et les adaptations de concentra- Hydroquinone. Qu'en penser ?
tions peuvent se faire après envoi de photographies par Au début des années 2000, les spécialités contenant de l'hy-
courriel et après échange téléphonique, pour les patientes droquinone n'ont plus été vendues en pharmacie, sauf en
très éloignées. On reverra dans tous les cas la patiente au Suisse où elles n'ont jamais été suspendues. Les préparations
début de l'été et à la fin de l'été ; magistrales ont toujours pu être prescrites. Après cette
■ si l'amélioration est relative, les concentrations d'hydro- phase de restriction, certains pays, comme le Canada en
quinone et les fréquences d'application seront plus éle- 2018, ont rétabli la commercialisation sur prescription
vées et les consultations plus fréquentes, toutes les médicale.
6 semaines. Le problème a toujours été l'utilisation prolongée de pour-
Avec cette méthode, nous obtenons une très large propor- centages élevés par la population noire cherchant à éclaircir
tion de résultats très satisfaisants après un an et le passage la peau avec des préparations associant souvent de l'hydro-
d'un été. quinone et des sels de mercure.
Les formes résistantes sont suspectées dès le troisième L'utilisation de pourcentages autour de 4  % avec une fré-
mois. quence d'application progressivement dégressive sur une
durée de 12 à 18 mois ne présente pas de risque.
En dernier recours Aspect pratique très important  : il faut souligner que la
Dans les cas de réponse faible à cette stratégie, ou de forme galénique de la préparation, sa composition et son
formes résistantes, il reste la possibilité d'agir plus radicale- mode préparatoire sont primordiaux et conditionnent l'ef-
ment en provoquant une exfoliation épidermique pro- ficacité à pourcentage « égal ».
fonde par un peeling moyen (TCA  30  %), ou même une
fonte épidermique complète par un peeling dermique pro- signes d'irritation apparaissent, les applications d'acide
fond au phénol. Le peeling évacue au sens physique les rétinoïque sont stoppées pour 3 jours et reprises ensuite
dépôts pigmentaires. à une fréquence moindre. L'irritation n'a aucun avan-
Les semaines préalables de traitement par hydroquinone tage. Elle n'accélère pas l'amélioration ; elle pérennise le
seront très positives sur la régulation de la mélanogenèse en mélasma.
postpeeling. ■ Les corticoïdes locaux ont pour effet une altération des
Nous avons traité plusieurs centaines de cas selon le capillaires superficiels, un affinement du derme. La triam-
protocole de base initialement énoncé. Et nous avons eu cinolone est classée « modéré ».
quelques dizaines d'échec. Sur ces quelques dizaines de ■ Le glutathion topique n'a aucun effet indésirable connu.
formes résistantes ou au résultat incomplet, la moitié
environ a effectué avec succès un peeling moyen type TCA
30 %. L'autre moitié a craint le peeling et n'a rien fait de Et l'acide tranexamique ?
plus. Des publications de 2018 ont confirmé l'efficacité de l'acide
Quant au peeling dermique profond, nous le pratiquons tranexamique par voie orale à la dose de 500  mg par jour
dans cette indication du mélasma résistant environ pour une avec évaluation à 3 mois. Nous utilisons également ce traite-
patiente chaque année. ment au long cours depuis quelque temps. Il nous est diffi-
cile de nous prononcer sur ce qui revient à ce traitement oral
Effets secondaires dans nos résultats. Il s'agit là d'un traitement d'appoint selon
la publication de Del Rosario [1]. L'acide tranexamique a
Quels sont les effets secondaires de l'utilisation prolongée de
pour effet de diminuer histologiquement le nombre des
ces préparations et du peeling au glutathion ?
vaisseaux et la charge mélanique.
■ L'hydroquinone (encadré 7.3) est connue pour provoquer
Des résultats de traitement du mélasma sont illustrés aux
des hypochromies en confettis. À la concentration de 4 %
figures 7.2 à 7.5.
et avec des applications qui s'espacent progressivement,
ce problème n'a jamais été rencontré. En revanche, cer-
taines patientes déjà traitées avec des concentrations bru- Conclusion
tales d'hydroquinone arrivent à nous en première
consultation avec de tels confettis. Ces cas sont souvent Nous utilisons le protocole décrit dans ce chapitre
non répondeurs à notre protocole. Dans ce cas, le peeling depuis 2008. Celui-ci est l'évolution d'une méthode que
TCA est rapidement proposé après 2  mois du protocole nous utilisions depuis 1998. Nous témoignons de son
décrit. Les concentrations supérieures à 4 % ne doivent pas efficacité et du succès du bouche à oreille quant à cette
être utilisées depuis 2 mois et uniquement après effet pré- technique.
alable très insuffisant du 4 %. Pour avoir un bon pourcentage de réussite, répétons que
■ L'acide rétinoïque peut irriter la peau en accélérant le le traitement du mélasma est une méthode, avec une straté-
turn-over, la dessécher et provoquer un érythème. Si des gie à partager avec la patiente pendant de longs mois.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 7. Peelings dépigmentants

Fig. 7.3  A. Mélasma ancien résistant. B. Résultat après préparation dépigmentante, photoprotection et 2 peelings dépigmentants espacés de 3 mois.
Source : J.-L. Vigneron.

Fig. 7.4  A. Mélasma modéré. B. Bon résultat à 6 mois après préparation dépigmentante, photoprotection et peeling dépigmentant.
Source : J.-L. Vigneron.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 7. Peelings dépigmentants

Fig. 7.5  A. Mélasma ancien, résistant. B. Amélioration modérée après préparation dépigmentante, photoprotection et peeling dépigmentant.
Source : J.-L. Vigneron.

Référence Pandya AG. Melasma: a critical update. Symposium disorders of pig-


[1] Del Rosario  E, Florez-Pollack  S, Zapata Jr L, et  al. Randomized, mentation. Int J Dermatol 2009;48:893–5.
placebo-controlled, double-blind study of oral tranexamic acid in Shankar K, Godse K, Aurangabadkar S, et al. Evidence-based treatment
the treatment of moderate-to-severe melasma. J Am Acad for melasma: expert opinion and a review. Dermatol Ther 2014;4(2):
Dermatol 2018;78(2):363–9. 165–86.

Pour en savoir plus


Gupta AK, Gover MD, Nouri K, Taylor S. The treatment of melasma: a
review of clinical trials. J Am Acad Dermatol 2006;55:1048–65.

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Section 2. Les peelings

Chapitre 8
Peelings profonds
J.-L. Vigneron, D. Augias

Introduction yeux de nombreux dermatologues, une technique difficile à


intégrer dans la pratique. Le terme de peeling dermique plu-
Avec le peeling profond, nous disposons d'une technique tôt que profond serait sans doute plus adapté et moins
inégalée contre l'héliodermie prononcée. Le peeling profond effrayant pour les patients comme pour les praticiens.
est un peeling dermique réticulaire par opposition au pee- Le but de ce chapitre est donc, avant tout, de faire parta-
ling moyen qui est dermique papillaire. ger l'expérience de ses auteurs afin que le peeling profond
Unna en Autriche, dès 1882, testa le phénol en tant que devienne un atout supplémentaire, parce qu'irremplaçable,
traitement rajeunissant de la peau. Les pionniers dans l'usage dans l'arsenal thérapeutique du plus grand nombre de der-
du phénol sont : le Dr Mackee, dermatologue américain, qui matologues possible.
publia sur le sujet en 1952 ; le Dr Lagassé, français ayant traité
les cicatrices de poudre noire de la Première Guerre mon-
diale ; sa fille Antoinette, infirmière, émigra aux États-Unis, sur
Formulations et méthodes
la côte Ouest, pour traiter les actrices du cinéma muet, au Les différentes formulations de peelings profonds reposent
moyen de ce lifting chimique. Cette technique a alors été lar- toujours sur une combinaison de phénol et d'huile de croton
gement utilisée dans les années 1950 par les lay peelers, non végétale.
médecins, ce qui a entraîné rejet et scepticisme de la part du Le phénol est un hydrocarbure aromatique dérivé du gou-
corps médical. Ce sont les travaux de deux chirurgiens plasti- dron de houille, se présentant sous forme de cristaux trans-
ciens américains, T.J.  Baker et H.L.  Gordon, dans les années parents à l'odeur caractéristique, utilisé initialement pour
1960, qui ont contribué à légitimer cette procédure. ses propriétés antiseptiques. Les différentes formulations
L'histoire des différentes formulations est passionnante. font varier sa concentration de 35 à 88 %. Il semble que plus
Retenons que les premières étaient brutales, trop rapide- la concentration est élevée, plus la nécrose de coagulation
ment pénétrantes, avec la formule de Baker Gordon. C'est des protéines qu'elle provoque est intense, limitant la péné-
Gregory Hetter qui, par ses nombreux travaux sur les consti- tration et donc la profondeur d'action du peeling. Une dilu-
tuants de cette formule ainsi que sur leur concentration, a tion de 50 % provoquerait, en plus de la kératocoagulation,
vraiment fait avancer les choses dans ce domaine [1]. Il a une kératolyse par rupture des ponts disulfure et donc une
contribué ainsi à réduire les complications tout en conser- pénétration plus importante (encadré 8.1).
vant l'extrême efficacité.
C'est le Dr Urkov qui eut l'idée de l'occlusion. Encadré 8.1
Au fil du XXe  siècle, 15 ou 20  formules se sont succédé
pour finalement s'adoucir, nécessitant pour être efficaces Toxicité du phénol
d'une part de multiples passages – avantage de la progressi-
La toxicité du phénol dépend de la concentration, de la
vité – et d'autre part une occlusion étanche de 24 heures. Il
vitesse d'application et de la surface traitée.
s'agit maintenant d'un véritable protocole, pas seulement
Le phénol est très rapidement absorbé. Il est éliminé à 25 %
d'un liquide à appliquer sur un visage. C'est la séquence des
par voie respiratoire, à 75 % par le foie puis le rein.
gestes et des réponses à donner du 1er au 8e jour qui consti-
Les complications cardiovasculaires à type de troubles du
tue cette méthode.
rythme peuvent apparaître après application rapide de 3 à
Les deux techniques les plus récentes sont nées à la fin des
4 g de phénol sur la face en 15 minutes. (Un peeling au phé-
années 1990 : la méthode Exoderm® de Yoram Fintsi (croton
nol tamponné comporte des doses inférieures (environ
0,6 à 0,7  %, phénol 67  %) et la méthode Exopeel® (croton
1,5 g de phénol), il doit être appliqué lentement en 1 heure
1,6 %, phénol 46 %) de Jean-Luc Vigneron. Elles utilisent des
au moins pour éviter ce risque)
solutions sans interface, limpides et homogènes.
Surveillance cardiaque pendant la procédure : pression arté-
Ces contributions successives ont progressivement amé-
rielle, monitoring cardiaque, oxymètre.
lioré les résultats et la sécurité de cette procédure pour en
Trousse d'urgence à proximité.
faire une technique esthétique sans équivalent.
Déclaration à son assurance responsabilité civile profes-
Malgré cela, après plus d'un siècle de pratique et d'amélio-
sionnelle.
rations successives, le peeling profond au phénol reste, aux

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Section 2. Les peelings
Chapitre 8. Peelings profonds

L'huile de croton est extraite des graines d'une plante tropi- de la première consultation, les avantages et inconvénients, en
cale, le Croton Cathartique ou Tiglium, et sa préparation com- particulier les suites immédiates, doivent être exposés claire-
merciale sous forme de résine remonte à 1932. Son action sur ment, notamment l'œdème intense du lendemain, le suinte-
la peau serait liée à des groupes hydroxyl libres provoquant ment et la sensation de tension ou la douleur parfois ressenties
une action vésicante qui faciliterait la pénétration du phénol. durant les premières heures. Il convient de préciser le type
C'est pourquoi Hetter prétend que, dans la formule de Baker d'anesthésie utilisé, le plus souvent tronculaire, mais celle-ci
Gordon, c'est l'huile de croton qui serait le composant le plus peut aussi être générale dans une structure adaptée ou, plus
actif, le phénol n'agissant que comme un véhicule. Cependant, rarement, de contact à l'aide d'une crème à la lidocaïne pour de
dans cette formule (phénol 50 %, croton 2,1 %), le croton trop petites zones. La présence d'un proche lors de cette consulta-
concentré induirait une pénétration trop rapide non contrô- tion est souhaitable afin d'éviter le désarroi inutile du patient
lée avec risque élevé de complications. ou de son entourage dans les suites immédiates. Il nous paraît
Hetter a repris cette formule, prouvant qu'une concentra- essentiel d'insister sur le fait que seul le dermatologue effec-
tion de phénol de 35 % était suffisante. Il insiste de plus sur le tuant cet acte est apte à en assumer les suites afin d'éviter les
fait qu'une concentration de croton variable allant de 0,1 % commentaires d'un autre intervenant « ignorant », pouvant à
à 1,6  % est nécessaire pour traiter les différentes zones du tort considérer ces suites immédiates comme une brûlure avec
visage en fonction de l'épaisseur du tégument et de l'impor- les conséquences médico-légales que cela pourrait impliquer.
tance des lésions à traiter. Certains praticiens préfèrent ne pas montrer les photogra-
Les autres éléments entrant habituellement dans la com- phies des suites immédiates (en dehors des photographies
position des peelings profonds sont le septisol, l'eau distillée, avant-après) car elles peuvent avoir un réel effet dissuasif. Ils
la glycérine et des huiles végétales. ne les produisent qu'à la demande expresse du patient ou de
Quoi qu'il en soit, c'est la combinaison de ces deux com- l'entourage. À vrai dire, Internet permettant d'avoir accès à
posants principaux, phénol et huile de croton, qui va per- ces images de suites instantanément, il peut être préférable
mettre au peeling d'agir jusqu'au derme réticulaire moyen, de les commenter. Il faut savoir expliquer, éviter certains
créant un effet inégalé de production de néocollagène et de mots (brûlure par exemple ; préférer liquéfaction épider-
fibres élastiques. mique), ressentir les points de blocage psychologique, afin
Traditionnellement, les solutions phénolées étaient prépa- de projeter le déroulé de l'acte dans un monde prévisible et
rées de manière extemporanée. Ces formules avaient toutes contrôlable, comme le fait la sophrologie.
l'inconvénient de ne pas être homogènes, de devoir être agi- Une feuille d'information détaillée sur la méthode et ses
tées pour tenter de disperser le surnageant huileux. Il revient suites sera remise lors de cette consultation et, comme pour
à Yoram Fintsi dans les années 1990 d'avoir mis au point une tout acte esthétique, un devis détaillé, un délai de réflexion
solution homogène et promu une méthode sûre et repro- et un consentement éclairé signé seront exigés. Nous conseil-
ductible à base d'une formulation stabilisée prête à l'emploi, lons de faire des photographies dès le jour du devis.
appelée Exoderm®. Après le décès de Yoram Fintsi (2002), Selon le souhait du patient, une deuxième consultation
Jean-Luc Vigneron a mis au point une formule également après le délai de réflexion légal permettra de répondre aux
homogène et sans interface avec un protocole modifié, la questions du patient ou de l'accompagnant. Cette seconde
méthode Exopeel®. consultation permet de lever les dernières craintes et de ren-
Ces mêmes auteurs ont pu montrer également que cette forcer la relation de confiance qui doit s'établir avec le
méthode permettait de traiter des patients à la peau mate praticien.
alors que les peelings profonds étaient jusqu'alors réservés
aux patients à la peau claire.
Préparation cutanée :
conditionnement prépeeling
Indications
L'efficacité du peeling sera supérieure et l'acte plus facile si la
Les meilleures indications du peeling au phénol sont le pho- peau est préalablement préparée de façon à diminuer et à
tovieillissement marqué, en particulier sur les peaux claires uniformiser l'épaisseur de la couche cornée et donc sa per-
avec des rides prononcées (plus les signes seront importants, méabilité. Nous utilisons les cosmétiques à haut pourcen-
plus le résultat sera spectaculaire), éventuellement les kéra- tage en acides de fruits ou les rétinoïdes topiques. Cette
toses actiniques (même si d'autres traitements maintenant à préparation sera idéalement commencée 2 à 3  semaines
notre disposition lui sont préférés) et les cicatrices d'acné. La avant l'acte.
peau plus épaisse des hommes répond en général moins
bien que celle des femmes.
Analgésie
Information préalable Depuis 2005, le Dr Vigneron n'utilise que les blocs troncu-
laires après une prémédication orale. La douleur n'est jamais
Plus que pour tout autre peeling, une information claire et présente pendant le peeling. On la retrouve dans 30 % des
loyale doit être donnée au patient préalablement à l'acte. Lors cas pendant les 3 heures qui suivent l'acte.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 8. Peelings profonds

Mais tous les modes d'anesthésie peuvent être envisagés, cheveux. Sur les zones à épaisse couche cornée, un deuxième
allant de l'hypnose jusqu'à l'anesthésie générale en passant voire un troisième passages peuvent être nécessaires, mais
par les blocs d'anesthésie locorégionale ou la sédation intra- cela peut aussi être l'utilisation, entre des mains expertes, de
veineuse. Le choix dépendra des préférences du praticien. toile émeri stérilisée avant l'application du produit, etc.
L'application se termine lorsqu'est atteint un givrage blanc
uniforme de la zone concernée qui, après quelques minutes,
Bilan préopératoire vire au rosé. C'est la vitesse du « déblanchiment » qui indique
En pratique, si le patient n'a pas de pathologie grave connue – le niveau de pénétration. Quand on traite une zone, on suit
­diabète type  1, insuffisance rénale, insuffisance hépatique du regard l'évolution de l'aspect des autres.
sévère, pathologie coronarienne –, aucun bilan n'est néces- Les paupières sont traitées en les déplissant bien, en res-
saire. Il faut également s'enquérir d'antécédent d'herpès pectant quelques millimètres près du bord libre et avec un
facial dans les cinq dernières années. coton-tige quasi sec.
Pour les rares praticiens qui travaillent en clinique avec un La procédure totale ainsi réalisée prend entre 1 heure 15 et
anesthésiste, ce dernier demandera un bilan. 1 heure 30.
Une sensation de chaleur intense est ressentie immédiate-
ment à l'application et cesse rapidement au bout de quelques
Environnement de l'acte secondes avant de réapparaître après quelques minutes (au
moment où la peau vire au blanc-gris et où commence à
En France, le peeling phénolé a une cotation dans la
apparaître un œdème) pour durer de 4 à 8 heures au total.
nomenclature au titre d'« exfoliation dermo-épidermique
L'anesthésie tronculaire supprime ou atténue drastiquement
profonde du visage entier par agent chimique  » codé
la chaleur post-peeling.
QANP004. Il est spécifié dans les notes de la Classification
Pour les suites, notre préférence va à la méthode occlusive.
commune des actes médicaux (CCAM) que l'acte doit être
En effet, il est possible de ne pas utiliser de pansement occlu-
réalisé dans un environnement spécifique permettant de
sif mais, outre le risque d'infection herpétique ou bacté-
reconnaître et de traiter un trouble cardiovasculaire. Dans ce
rienne plus grand, si l'absence de masque procure moins
contexte, un monitorage cardiaque et de la pression arté-
d'inconfort immédiat au patient, la méthode non occlusive
rielle et un oxymètre sont souhaitables durant la procédure
nécessite beaucoup plus de soins les jours suivants et son
et dans les 2 heures suivantes.
efficacité est bien moindre, équivalente à un peeling moyen
Remarque : l'entente préalable ne peut être demandée que
« appuyé ». Ainsi, en fin d'application, nous couvrons la tota-
dans le cas de cicatrices d'acné.
lité du visage à l'exception des paupières et de la bouche à
l'aide de petits morceaux d'un sparadrap occlusif spécifique
Procédure à base d'oxyde de zinc. Nous couvrons enfin avec un filet
type Surgifix® pour faciliter l'adhésion et le maintien du
La peau doit être soigneusement démaquillée et nettoyée à masque occlusif sur cette peau humide (fig. 8.1A).
l'eau savonneuse au préalable. Le praticien doit procéder à Le retrait de ce masque doit s'effectuer après 24 à 36 heures.
un dégraissage soigneux à l'éther ou à l'acétone de toute la L'œdème à ce moment-là est souvent important et il faut
zone à traiter afin de travailler sur une surface uniformément savoir rassurer le patient et son entourage. Le visage est alors
perméable. patiemment nettoyé à l'aide de sérum salé isotonique ou
Le patient doit être en position horizontale avec les yeux d'eau oxygénée ou d'une solution savonneuse antiseptique
fermés, dans lesquels on aura mis avant un gel-larmes, en afin d'enlever les résidus épidermiques grisés qui se détachent
prenant soin de ne pas en laisser couler vers la région des facilement du derme suintant. Sur certaines zones très ridées
tempes. Les cheveux sont maintenus par un bandeau. repérées la veille, un nouveau passage localisé de la solution
L'application de la solution phénolée se fait à l'aide d'un est effectué. Il n'y aura qu'une brève sensation d'intense cha-
bâtonnet en bois sur lequel on aura enroulé et bien serré du leur ou une brève sensation cuisante.
coton. Le coton-tige est trempé dans le petit flacon et essoré Enfin, une poudre jaune Mimosa, au sous galate de
soigneusement sur son rebord. bismuth, antiseptique, va être déposée uniformément sur
Les unités esthétiques du visage sont traitées successive- toutes les zones traitées à l'exception du vermillon pour for-
ment l'une après l'autre, chaque zone prenant en moyenne 10 mer en séchant un second masque (fig. 8.1B). Ce masque de
à 15 minutes, ceci afin de réduire le risque théorique de toxi- poudre est laissé en place 7 jours. Il n'y a donc pas de soin
cité par une application trop rapide. Chaque praticien a ses spécifique pendant la semaine. À l'issue de cette semaine, le
habitudes quant à l'ordre de traitement des unités du visage. 8e jour, ce masque sera facilement désagrégé par le patient
Un bon résultat est obtenu par l'addition d'astuces qui lui-même, à l'aide d'un corps gras et de passages successifs
sont enseignées lors de la formation pratique qui devrait être d'eau tiède (fig. 8.1C).
obligatoire ; par exemple, il faut dessiner en position debout La ré-épithélialisation est alors déjà effective et l'érythème,
la limite inférieure de l'application de la solution, 2 à 3 cm au assez intense, va décroître progressivement en 2 à 3  mois.
maximum sous la ligne mandibulaire, dans l'ombre. On n'ou- Sous maquillage et photoprotection adaptés, le patient peut
blie pas les lobes. On applique la solution jusque dans les reprendre rapidement une vie sociale normale (fig. 8.2 à 8.4).

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Section 2. Les peelings
Chapitre 8. Peelings profonds

Fig. 8.1  Peeling profond, masques.


A. Masque des 24 heures. B. Masque de poudre de mimosa. C. 8e jour, retrait du masque.
Source : J.-L. Vigneron.

Fig. 8.2  Peeling profond.


A. Avant. B. Après 2 mois.
Source : J.-L. Vigneron.

Complications voie respiratoire. Les taux sériques mesurés après application


de 3 ml de solution à 50 % sont d'environ 0,7 mg/dl alors que
des patients ont survécu à des ingestions accidentelles à des
Complications aiguës concentrations de 23 mg/dl, ce qui donne une grande marge
de sécurité au peeling du visage entier.
Complications cardiaques Il n'existe pas de facteurs prédictifs clairement établis de
survenue des troubles cardiaques. Cependant, Landau [3] a
La toxicité directe du phénol sur le myocarde est la compli-
bien montré qu'en respectant les règles évoquées plus tôt
cation la plus évoquée. Des études chez le rat [2] ont montré
(pas plus de 3 ml de solution Exopeel® à 46 % de phénol à
des troubles de la contractilité myocardique et de l'activité
résorption lente dans une base huileuse, déroulement lent
électrique après exposition systémique. L'absorption dans la
de la procédure supérieure à une heure, bonne hydratation
circulation se fait rapidement après l'application, puis 75 %
périprocédurale, bonne ventilation de la salle d'interven-
du phénol sont éliminés directement par le rein ou détoxi-
tion), l'incidence des troubles du rythme est de 6,6 %.
fiés par le foie alors que les 25 % restant sont éliminés par

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Section 2. Les peelings
Chapitre 8. Peelings profonds

Fig. 8.3  Peeling profond.


A. Avant. B. Après 2 ans.
Source : J.-L. Vigneron.

Fig. 8.4  Peeling profond.


A. Avant. B. Après 2 mois. C. Après 11 ans.
Source : J.-L. Vigneron.

Œdème laryngé décrites par le passé avec la méthode « ouverte » de cicatri-


Cette complication (dyspnée, polypnée, stridor) survien- sation dirigée par nettoyages répétés et pommadage par
drait dans les premières 24 heures et nécessiterait une prise corps gras. Elles doivent être traitées comme n'importe
en charge adaptée urgente. L'œdème du cou, par descente quelle autre impétiginisation secondaire.
de l'œdème facial les 2e et 3e  jours, peut parfois inquiéter Au moins trois cas de syndrome de choc toxique ont été
le patient. Ce n'est pas un œdème laryngé ; c'est un œdème décrits dans la littérature. La prise en charge en milieu spé-
cutané. cialisé sera la plus précoce possible. Les auteurs n'ont jamais
rencontré cette complication.
Les patients aux antécédents de poussées herpétiques
Infections dans les cinq dernières années doivent avoir un traitement
Les infections aiguës bactériennes sont devenues exception- débutant 5 jours avant le peeling et durant la phase de cica-
nelles avec la pose d'un masque de poudre et ont surtout été trisation ou, pour les auteurs, pendant 20 jours.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 8. Peelings profonds

Complications précoces Il est important de différencier l'hypochromie qui va vers le


blanc et un rosissement du visage. Avec les années, les fibres
Éruptions folliculaires élastiques et collagènes se fragmentent et la lumière inci-
dente arrivant sur la peau sera beaucoup plus l'objet d'une
Une folliculite, une efflorescence sébacée, touchant simulta- diffraction dans la peau que d'une réflexion. Les longueurs
nément de très nombreuses glandes sébacées, peut survenir d'onde réfléchies sont donc différentes de celles d'une peau
vers la 3e  semaine. Elle est due à l'application de topiques jeune et, les années passant, la couleur perçue par l'œil vire de
trop occlusifs, mais surtout au réveil de l'activité de toutes plus en plus vers le jaune. Après le traitement, les nouvelles
les glandes sébacées avec une difficulté de l'évacuation du fibres élastiques et collagènes sont plus nombreuses et sur-
sébum. Les cyclines orales résolvent ce problème en quelques tout plus horizontales et parallèles entre elles. Les longueurs
jours. Des grains de milium surviennent parfois après 1 ou d'onde réfléchies retrouvent un rose juvénile. Ce n'est pas une
2 mois. L'aiguille délicatement maniée est la solution. complication, c'est un effet de réjuvénation.
Prurit Cicatrices hypertrophiques
Un prurit peut exister après le 20e  jour et durer quelques Autre complication rare mais redoutée, les cicatrices hypertro-
semaines. On l'observe lorsque le geste a dû être très appuyé phiques surviennent en général vers le bas du visage et la ligne
du fait d'une héliodermie majeure type « iguana desert skin » mandibulaire, peut-être en raison d'une technique trop agres-
et lorsque l'on veut avoir un effet liftant par une action pro- sive. Un retard de cicatrisation, une rougeur avec induration
fonde sur les joues. persistante doivent alarmer le praticien et conduire à une prise
Érythème prolongé en charge précoce (corticothérapie locale forte ou intralésion-
nelle, cryothérapie, pressothérapie, laser à colorant pulsé).
L'érythème prolongé est défini par sa persistance au-delà de
3 mois. Plusieurs facteurs (topiques irritants, prise d'alcool,
rosacée, etc.) peuvent participer à ce phénomène. En fait, Méthodes combinées
tant que la trame collagène n'est pas reconstituée et redensi-
fiée, les vaisseaux restent un peu dilatés et visibles par trans- Il est possible dans certains cas de proposer un peeling com-
parence. Il faut éviter l'emploi de dermocorticoïdes qui, à biné (peeling mosaïque). Le principe est de pratiquer un
long terme, vont entretenir le problème. Les LED utilisées en peeling profond sur certaines zones et un peeling moyen sur
prévention et en postpeeling sont très utiles. le reste du visage (fig. 8.5).

Hyperpigmentation Indications
Bien que beaucoup plus rare qu'à la suite d'un peeling moyen À ces différences de puissance de peeling doivent correspondre
au TCA, une hyperpigmentation peut survenir après un pee- des différences dans les dommages cutanés. Si un visage est
ling phénolé, qu'il ait été appliqué soit trop légèrement, soit uniformément en héliodermie 4, il ne faudra pas proposer un
en périphérie de la zone traitée, en particulier le long de la peeling combiné, car l'amélioration radicale du peeling pro-
ligne mandibulaire. La régression spontanée ou à l'aide de fond contrasterait trop avec la zone insuffisamment améliorée
topiques dépigmentant est la règle. par le peeling moyen. On destine donc le peeling combiné à
des visages ayant les lèvres et/ou les zones orbitaires en
Complications définitives héliodermie 4 et le reste du visage en héliodermie 3.

Hypopigmentation ou rosissement ? Procédure


Presque constante après une méthode occlusive, l'hypopig- Les techniques d'application sont, selon la zone, celles
mentation est plus ou moins intense selon l'imprégnation, la décrites précédemment.
formulation utilisée et donc la puissance de pénétration, la La zone péri-orale s'arrête en haut aux sillons naso-géniens.
persistance de l'érythème, le faible phototype préalable et le En bas, soit le peeling profond n'est appliqué que sur 2 mm
comportement vis-à-vis du soleil ensuite. Les mélanocytes du bord de la lèvre inférieure, soit il est appliqué jusqu'au
sont d'autant plus fragiles que le phototype est bas. Le mau- sillon mentonnier.
vais cas est une patiente écossaise rousse golfeuse, installée La zone péri-orbitaire intéresse les deux paupières
depuis 20  ans sur la Côte d'Azur, avec des rides profondes jusqu'aux sourcils inclus. Vers le bas et l'extérieur, le peeling
nécessitant un travail appuyé. profond doit être appliqué en dégradé en transition avec le
L'hypochromie est rarement l'objet d'une plainte chez les peeling moyen (fig. 8.6).
patients lorsqu'ils en ont été prévenus au préalable. La diffi- Il peut y avoir chevauchement des deux produits, ce qui
culté technique est de créer une transition douce entre le est toujours mieux qu'un espace non traité entre les deux
visage « éclairci » et le cou non traitable en peeling profond, peelings.
mais pour lequel d'autres méthodes pourront être propo- Les parties traitées par le peeling profond seront couvertes
sées dans un second temps. avec l'adhésif qui débordera sur le peeling moyen.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 8. Peelings profonds

Fig. 8.5  Peeling combiné.


A. Peeling au TCA 30 % et peeling phénol Exopeel® en péribuccal. B. Résultat à 2 mois. Noter la grande différence d'effet des deux méthodes.
Source : J.-L. Vigneron.

Fig. 8.6  Peeling combiné.


A. Peeling TCA 30 % et peeling profond Exopeel® orbitaire. B. Au 5e jour, desquamation de la zone de peeling moyen, et pansement par poudre mimosa
sur la zone orbitaire traitée en peeling profond. C. Résultat.
Source : J.-L. Vigneron.

Résultats Conclusion
On attend d'un peeling profond une disparition des taches Le peeling profond est une technique qui permet un
pigmentaires quelle qu'en soit la nature, une action radicale rajeunissement cutané spectaculaire. Il ne peut être réa-
sur les rides qui sont lissées, un derme réépaissi, un effet lif- lisé qu'après une solide formation en respectant les pro-
tant sur les paupières et les joues, un grain de peau affiné. tocoles validés par l'expérience de médecins experts.
Ces effets sont d'autant plus stupéfiants que la peau est alté- C'est à cette condition que les risques seront maîtrisés
rée. Le rajeunissement est souvent de 10 à 15 ans  ! avec d'excellents résultats sur les héliodermies marquées
L'analyse histologique mais aussi les dosages histo- pour la plus grande satisfaction du patient et du prati-
chimiques confirment ce rajeunissement [4]. On parle cien. Cette technique actualisée, allégée, permet à tout
d'« effet reverse » dans les revues scientifiques. Les effets se dermatologue formé d'avoir accès au Nirvana des
prolongent plus de 10 ans. peelings.

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Section 2. Les peelings
Chapitre 8. Peelings profonds

Références [3] Landau  M. Cardiac complications in deep chemical peels.


[1] Hetter  GP. An examination of the  phenol-croton oil peel: Part I. Dermatol Surg 2007;33(2):190–3.
Dissecting the formula. Plast Reconstr Surg 2000;105(1):227–39. [4] de Mendonça  MCC, Segheto  NN, Aarestrup  FM, Aarestrup  BJV.
discussion 249-51. Punctuated 88% phenol peeling for the treatment of facial pho-
[2] Larson DL, Karmo F, Hetter GP. Phenol-croton oil peel: establishing toaging: a clinical and histopathological study. Dermatol Surg
an animal model for scientific investigation. Aesthet Surg J 2018;44(2):241–7.
2009;29(1):47–53.

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Section 3. Toxines botuliniques

Chapitre 9
Toxine botulinique – principe
et généralités
V. Gassia

Introduction L'utilisation se développe pour d'autres indications


comme le blépharospasme, l'hémispasme facial et le torti-
La toxine botulinique ou botulique (BoNT) est une pro- colis spasmodique (autorisation de la FDA en 1989 ; en
téine neurotoxique produite par des souches neurotoxi- France, AMM en 1993) [3].
gènes de bactéries sporulées anaérobies du genre
Clostridium. Les BoNT provoquent la paralysie flasque Développement en esthétique
du botulisme après ingestion de conserves contaminées En 1987, Jean et Alastair Carruthers (ophtalmologue et derma-
en inhibant la libération de neurotransmetteurs au tologue de Vancouver) découvrent les effets esthétiques du
niveau des terminaisons nerveuses cholinergiques péri- « Botox » dans les rides péri-oculaires. Après plusieurs études
phériques du système nerveux squelettique et cliniques, le BotN est approuvé dans cette indication [4].
autonome. En France, la première AMM en esthétique date de 2003 pour
Isolée puis purifiée, elle est devenue une molécule utili- « le traitement des rides verticales intersourcilières observées
sée en thérapeutique humaine depuis 1978 (autorisation lors du froncement des sourcils, lorsque ces rides entraînent un
de la Food and Drug Administration [FDA]). C'est un retentissement psychologique important chez le patient  ».
médicament unique, avec une action localisée et réver- Actuellement, les autres zones du tiers supérieur du visage sont
sible dont les indications se développent en permanence. également approuvées (patte d'oie et front) [2] (encadré 9.1).
L'utilisation en esthétique date de 1980 (première publi- Leur utilisation en dehors de ces localisations est hors-AMM en
cation) [1] et en France de 2003 (première autorisation de France, mais fait l'objet de multiples publications.
mise sur le marché [AMM]) [2] et permet essentiellement
de traiter les rides dynamiques du tiers supérieur du
visage et s'intègre dans une prise en charge globale non Encadré 9.1
chirurgicale du vieillissement facial.
Indications de la toxine botulique
en esthétique
Historique L'AMM en esthétique concerne :
■ les rides verticales intersourcilières modérées à sévères

observées lors du froncement des sourcils


Isolement et purification (rides glabellaires) ;
La BoNT est isolée en Belgique en 1897 par le Pr  Van ■ les rides canthales latérales modérées à sévères (pattes

Ermengen, puis purifiée en 1920 par le Dr Herman Sommer d'oie) observées lors d'un sourire forcé ;
(Université de Californie) et est obtenue sous sa forme cris- ■ les rides du front modérées à sévères observées

talline en 1946 par Edward Schantz (Université du lors de l'élévation maximale des sourcils, lorsque la
Wisconsin). sévérité des rides du visage entraîne un retentissement
psychologique important chez les patients adultes.
Première utilisation thérapeutique
dans le strabisme Développement des indications actuelles
Alan Scott (chirurgien ophtalmologue à San Francisco) et futures
réalise des expérimentations chez le singe pour le traite- Les indications thérapeutiques ayant l'AMM en France sont :
ment du strabisme. En 1980, il réalise sa première publica- le blépharospasme, le strabisme, le torticolis spasmodique, le
tion dans le traitement du strabisme chez l'homme. spasme hémifacial, la déformation dynamique du pied

Dermatologie esthétique
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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 9. Toxine botulinique – principe et généralités

équin, la spasticité des membres avec hyperactivité mus­ De récentes revues de consensus fondées sur des preuves
culaire, l'hyperhidrose axillaire, l'incontinence urinaire idio- sur les applications en médecine esthétique rapportent une
pathique [2]. D'autres indications sont en cours d'AMM : relation dose 1:1 pour ONA et INCO. Lors de la conversion
le bruxisme, la migraine chronique, etc. ABO et ONA, plusieurs publications proposent un rapport de
En dermatologie, les cicatrices hypertrophiques, la rosacée 1:2 à 3 [8]. Une étude de consensus menée par Carruthers pré-
et les flushs, les douleurs postherpétiques, le prurit et les suppose un rapport de 1:1,25 pour la conversion entre ABO et
situations avec hyperactivité des glandes sébacées (maladie ONA ou INCO dans les indications esthétiques [9, 10].
de Hailey-Hailey) sont en cours d'investigation [5].
Structure moléculaire
Pharmacologie La BoNT comprend la molécule de neurotoxine elle-même
de 150 kDa et un ensemble de protéines complexantes asso-
ciées à la neurotoxine (NAP) qui forment ensemble des com-
Sérotypes plexes de haut poids moléculaire.
Il existe huit sérotypes distincts de BoNT (A-G) produits par Tous les sérotypes sont constitués d'une chaîne simple qui
différentes souches de Clostridium. Tous les sérotypes ont est clivée de manière protéolytique en deux chaînes dis-
une architecture similaire. Des progrès récents ont permis la tinctes : une chaîne légère de 50 kDa et une chaîne lourde de
découverte de gènes codant pour de nombreuses nouvelles 100 kDa, reliées par des ponts disulfure (fig. 9.1).
BoNT pouvant être regroupées dans un sérotype existant La principale différence entre les différents produits
mais avec diverses séquences d'acides aminés. En outre, il concerne l'absence ou la présence de protéines complexantes.
existe certaines BoNT chimériques. Seuls les sérotypes A et INCO se compose uniquement de la protéine pure [11].
B sont largement utilisés pour les applications cliniques car
leur effet est plus durable [6]. Une toxine E serait en cours
de développement et aurait une durée très éphémère.
Mécanismes d'action
Les différents produits de BoNT A ont le même mécanisme
Les différentes toxines en pratique d'action.
Les trois produits BoNT/A les plus utilisés et disponibles en
France en esthétique sont Azzalure® (abobotulinum toxin A Neurophysiologie de la contraction normale
[ABO], Ipsen), Vistabel® (onabotulinum toxin  A [ONA], Au niveau de la partie terminale présynaptique du nerf
Allergan) et Bocouture® (incobotulinum toxin  A [INCO], sont stockées des vésicules pleines d'acétylcholine. La
Merz) selon la dénomination internationale (tableau  9.1). commande nerveuse, matérialisée par un influx, induit
Une quatrième toxine botulinique A vient d'être approuvée la fusion de ces vésicules avec la membrane présynap-
par la FDA : prabotulinum toxin A (Evolus) [7]. tique avec libération d'acétylcholine au niveau de la
Bien que le mécanisme d'action des trois premiers pro- fente synaptique, ce qui entraîne la contraction
duits soit le même, il existe des différences entre eux car la musculaire.
BoNT A produite et purifiée est spécifique à chaque fabri- Le stockage et la fusion des vésicules s'appellent le
cant et la formulation finale différente. Ainsi, les unités d'ac- « complexe de fusion synaptique ». Ce complexe est
tivité sont différentes pour chaque produit et ne sont pas constitué d'un groupe de protéines appelé SNARE
interchangeables  ! Les doses approuvées cliniquement sont (soluble N-ethylmaleimide-sensitive factor attachment
mesurées dans les unités respectives. protein receptors). Il existe un complexe vésiculaire

Tableau 9.1 Les différentes toxines


Onabotulinumt. A Abobotulinumt. A Incobotulinumt. A
Botox®, Vistabel® Dysport®, Azzalure® Bocouture®, Xeomin®
Fabricant Allergan Ipsen Galderma Merz Pharma
Présentation Poudre Poudre Poudre
Stockage Inférieur à 8 °C Inférieur à 8 °C Inférieur à 25 °C
Durée de vie 24 mois 15 mois 36 mois
Sérotype BoNT/A BoNT/A BoNT/A
Cible SNAP 25 SNAP 25 SNAP 25
Excipient Sérum albumine humaine Sérum albumine humaine Sérum albumine humaine
500 μ/vial sodium 125 μ/vial lactose 1 mg/vial sucrose
Unités par flacon 100 u ou 50 u 500 u ou 125 u 50 u ou 100 u
Conversion 1 1/2,5 (ou 1/3) 1
Poids moléculaire 900 kD 500–900 kD 150 kD

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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 9. Toxine botulinique – principe et généralités

Chaîne lourde : Chaîne légère :


PM 50kDa PM 50kDa
Activité neurotoxique

Chaîne lourde :
PM 50kDa
Domaine de translocation
et d’internalisation

Pont di-sulfure
Poids moléculaire de la toxine : 150 kDa

Fig. 9.1  Structure de la toxine botulinique.


La toxine de type A est composée de chaînes courtes, de chaînes longues et de ponts disulfures (S-S).

(v-SNARE) et un complexe membranaire (t-SNARE). La chaîne lourde se lie à des glycolipides, des gangliosides
Dans le cytoplasme, ces deux complexes sont unis par (GT1b) spécifiques et à un récepteur spécifique de la surface
deux protéines particulières  : la SNAP-25 et la VAMP2. cellulaire (SV2) situés sur les membranes externes présynap-
Elles constituent le site d'action des toxines. La protéine tiques des terminaisons nerveuses cholinergiques, ce qui
cible varie selon le sérotype. Toute altération d'une ou de permet son absorption par endocytose et favorise la trans­
plusieurs protéines du complexe SNARE peut induire location de la chaîne légère à travers la membrane endo­
une paralysie. somale et dans le compartiment cytosolique (après rupture
du pont disulfure). La chaîne légère a une activité protéoly-
Mécanisme d'action moléculaire tique et, après internalisation, se lie avec une spécificité éle-
vée à une protéine SNARE, qui est ensuite clivée. Les protéines
Les toxines agissent en bloquant la libération d'acétylcholine SNARE cibles varient selon les sérotypes, mais le sérotype
au niveau de la plaque motrice au niveau de la jonction BoNT A clive la protéine associée à la membrane synaptoso-
neuro­musculaire (fig. 9.2). male de 25 kDa (SNAP-25). Le clivage de SNAP-25 empêche
la fusion de la vésicule synaptique avec la membrane présy-
naptique, bloquant ainsi la libération d'acétylcholine dans la
BoNT/G
BoNT/B
TeNT
BoNT/D BoNT/C fente synaptique. En fonction du tissu cible, BoNT  A peut
BoNT/F bloquer l'innervation neuromusculaire cholinergique des
muscles lisses et striés ou l'innervation autonome choliner-
gique des glandes exocrines [12, 13].
Syntaxine
Ainsi, on comprend que la toxine n'endommage ni le nerf,
Acétylcholine
ni la production d'acétylcholine  : ce n'est qu'un blocage
Fente synaptique

VAMP/synaptobrévine
fonctionnel, qui en plus est réversible. L'effet sur le muscle
SNAP-25
sera abordé dans le paragraphe consacré aux complications.

Vésicule synaptique BoNT/C


BoNT/A
BoNT/E
Diffusion
Les particules d'un plus grand poids moléculaire diffusent plus
lentement dans un même milieu aqueux que les petites molé-
cules. En effet, les lois physiques de Fick ont démontré que plus
la taille et la masse moléculaire sont importantes, plus le coeffi-
cient de diffusion est faible et moins la molécule migre. A
contrario, plus la molécule est légère, plus elle diffuse vite et loin.
Par ailleurs, les différentes toxines botuliques de type A ont
Fig. 9.2  Les toxines agissent en bloquant la libération d'acétylcholine au des complexes moléculaires de masse, de taille et de structure
niveau de la plaque motrice au niveau de la jonction neuromusculaire.
différentes. Elles n'auront donc pas les mêmes propriétés de
Le clivage de SNAP-25 empêche la fusion de la vésicule synaptique avec la
membrane présynaptique, bloquant ainsi la libération d'acétylcholine dans diffusion  : Vistabel® =  complexe molécule de neuro­toxine
la fente synaptique. + protéine = 900 kD ; Azzalure®, 500 kD ; Bocouture®, 150 kD.

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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 9. Toxine botulinique – principe et généralités

Il faut savoir que cette diffusion du produit est aussi condi- Conclusion
tionnée par d'autres paramètres comme le volume, la
concentration et la vitesse d'injection. Plus le produit est La toxine botulinique représente une étape importante dans
dilué et donc le volume élevé, plus l'aire de diffusion est l'évolution de la prise en charge du vieillissement facial. Avec un
grande. Plus la dose est élevée, plus la diffusion est grande. recul de plus de 15 ans, on connaît aujourd'hui son haut profil
Les barrières anatomiques constituent un frein à la diffusion de sécurité, son efficacité, son haut degré de satisfaction pour
(aponévrose, fascia, septum, etc.). Les toxines A ne diffusent pas à les patients ainsi que son retentissement sur la qualité de vie. La
distance du point d'injection, ce qui limite les effets systémiques. technique d'injection est bien codifiée grâce à des consensus et
L'injection précise au niveau des plaques motrices permettrait de multiples publications (voir les chapitres suivants).
d'obtenir un meilleur effet ; cela est démontré chez l'animal. Il est
plus difficile de le mettre en évidence chez l'homme [14, 15].
Références
Durée d'action et réversibilité [1] Scott AB. Botulinum toxin injection into extraocular muscles as an
alternative to strabismus surgery. Ophtalmology 1980;87:1044–9.
Cliniquement, les effets débutent vers le 2e  jour et sont [2] RCP Vistabel® et Botox®, Allergan.
complètement effectifs vers le 10e ou le 15e jour, pour durer de [3] Scott  AB. Development of botulinum toxin therapy. Dermatol
2 à 5 mois, ce qui correspond à la durée d'efficacité clinique. Clin 2004;22(2):131–3. v.
La terminaison nerveuse inactivée par la neurotoxine va [4] Carruthers JD, Carruthers JA. Treatment of glabellar frown lines
with C. botulinum-A exotoxin. J Dermatol Surg Oncol
émettre de petites repousses nerveuses amyéliniques à par-
1992;18(1):17–21.
tir du 28e  jour qui vont participer à la régénération de la [5] Kim  YS, Hong  ES, Kim  HS. Botulinum toxin in the field of
jonction neuromusculaire. En effet, ces repousses libèrent de dermato­logy: Novel indications. Toxins (Basel) 2017;9(12):403.
l'acétylcholine qui va permettre le rétablissement d'une [6] Smith  TJ, Smith  TJ, Hill  KK, Raphael  BH. Historical and current
neuro­transmission fonctionnelle. Puis elles régressent après perspectives on Clostridium botulinum diversity. Res Microbiol
régénération de la jonction neuromusculaire. Ce phéno- 2015;166(4):290–302.
[7] Beer KR, Shamban AT, Avelar RL, et al. Efficacy and safety of pra-
mène prend de 2 à 5 mois, ce qui correspond à la durée d'ef-
botulinum toxin A for the treatment go glabelle lines in adult
ficacité clinique. subjects:results from 2 identical phase III studies. In: Dermatol
Ainsi peut se poser la question d'optimiser la rentabilité Surg ; 2019 Mar 18. doi:10.1097/DSS.0000000000001903. [Epub
des injections en les faisant au niveau des plaques motrices. ahead of print].
Celles-ci peuvent être anatomiquement identifiées par repé- [8] Scaglione F. Conversion ratio between Botox, Dysport and Xeomin
rage par électromyogramme (EMG) individuel, non réalisé in clinical practice. Toxins (Basel) 2016;8(3):E65. pii. Mar 4.
[9] Klein AW, Carruthers A, Fagien S, Lowe NJ. Comparisons among
en pratique esthétique [16, 17].
botulinum toxins: an evidence based review. Plast Reconstr Surg
2008;121(6):413e–22e.
Contre-indications [10] Samizadeh  S, De Boulle  K. Botulinum neurotoxin formula-
tions:overcoming the confusion. Clin Cosmet Investig
Les contre-indications absolues regroupent les maladies de Dermatol 2018;11:273–87.
la transmission neuromusculaire (myasthénie, syndrome de [11] Rossetto  O, Pirazzini  M, Montecucco  C. Botulinum neuro-

Lambert-Eaton) ; l'hypersensibilité connue à l'un des compo- toxins:genetic, structural and mechanistic insights. Nat Rev
sants (albumine) ; l'infection ou l'inflammation au site d'in- Microbiol 2014;12(8):535–49.
jection ; ainsi que la grossesse et l'allaitement. [12] Pirazzini  M, Rossetto  O, Eleopra  R, Montecucco  C. Botulinum
neurotoxins: biology, pharmacology, and toxicology. Pharmacol
L'utilisation de toxine botulique est contre-indiquée pen- Rev 2017;69(2):200–35.
dant la grossesse et l'allaitement (et chez la femme en âge de [13] Frevert  J. Pharmaceutical, biological, and clinical properties of
procréer sans contraception) en raison de l'absence d'études botulinum neurotoxin type A products. Drugs in R&D
contrôlées chez la femme enceinte. En clinique, il a été décrit 2015;15(1):1–9.
une prématurité et deux fausses couches chez des patientes [14] Dover JS, Monheit G, Greener M, Pickett A. Botulinum toxin in aestetic
traitées durant leur grossesse, mais il est aussi décrit de mul- medicine:myths and realities. Dermatol Surg 2018;44(2):249–60.
[15] Ramirez-Castaneda  J, Jankovic  J, Comella  C, et  al. Diffusion,

tiples grossesses menées à terme, dont un cas de botulisme spread, and migration of botulinum toxin. Mov Disord
chez une femme enceinte sans conséquence fœtale. En tout, 2013;28(13):1775–83.
38 cas d'exposition à la toxine pendant la grossesse ont été [16] Glogau R, Kane M, Beddingfield F, et al. Onabotulinum toxin A:A
rapportés dans cette étude sans que l'on dénombre une aug- meta-analysis of duration of effect in the treatment of galbellar
mentation des complications chez le fœtus [18]. lines. Dermatol Sur 2012;38:1794–803.
Les contre-indications relatives comprennent essentielle- [17] Moy R, Maas C, Monheit G, Huber B. Long term safety and effi-
cacy of a new botulinum toxin type A in treating glabelle lines.
ment les interactions médicamenteuses (par interférence au Arch Facial Plast Sure 2009;11(2):77–83.
niveau de la plaque motrice). Seraient potentialisateurs : les [18] Tan  M, Kim  E, Koren  G, Bozzo  P. Botulinum toxin type A in
aminosides, les curares et inhibiteurs, les amino-4-­quinoléines ­pregnancy. Can Fam Physician 2013;59(11):1183–4.
[19]. Comme pour toutes les indications esthétiques, les [19] Belhaouari L, Gassia V. L'art de la toxine botulique en esthétique.
­dysmorphophobies et les attentes irréalistes sont à détecter. 2e éd. Paris:Arnette ; 2013.

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Section 3. Toxines botuliniques

Chapitre 10
Toxine botulinique – tiers
supérieur du visage
C. Raimbault

Introduction centre du front, les deux chefs musculaires sont séparés par un
diastasis aponévrotique amusculaire en forme de V plus ou moins
Les muscles du tiers supérieur du visage sont responsables ouvert, mais cette zone aponévrotique peut manquer, réunissant
des expressions d'étonnement lors du soulèvement des alors les deux parties en un seul muscle recouvrant tout le front.
sourcils, de la colère lors du froncement ou, au contraire, Latéralement, le muscle s'insère sur la crête osseuse temporale. Il
de la joie et du sourire avec le plissement dans la zone ocu- est important de noter que le muscle frontal ne s'insère pas sur le
laire. Ce sont des muscles peauciers situés dans un plan tiers externe du sourcil, et est ainsi à l'origine de sa forme courbe
superficiel avec une adhérence à la peau au moins sur une avec abaissement de la queue du sourcil (fig. 10.1).
de leur extrémité. Leur contraction répétée conduit à l'ap-
parition des rides d'expression du haut du visage.
Trois groupes musculaires innervés par le nerf facial sont
responsables de ces mouvements :
■ le frontal, muscle large et plat sur le front, est à l'origine des

rides frontales horizontales ;


■ les muscles de la glabelle, les deux corrugateurs du sourcil et

le procérus, sont responsables des rides verticales du lion et


des rides horizontales de la zone intersourcilière. Un petit
muscle, l'abaisseur du sourcil, peut être individualisé ou non ;
■ le muscle orbiculaire de l'œil, large sphincter qui permet

l'occlusion des paupières, donne naissance aux rides de la


patte d'oie.
Ils sont pairs et symétriques (en dehors du procérus), agis-
sant ensemble de façon agoniste ou, au contraire, antago-
niste et sont responsables de la balance musculaire
fronto-orbitaire ainsi que de la position du sourcil.
La réussite d'un traitement par toxine botulinique va
dépendre d'une bonne analyse du vieillissement du tiers supé-
rieur et de l'action des muscles agonistes et antagonistes.

Description anatomique [1]


Fig. 10.1  Le muscle frontal est un muscle large et plat.
Il s'insère sur les deux tiers internes du sourcil. Il présente souvent un dias-
Muscle frontal tasis central amusculaire.
Ce muscle est responsable des rides horizontales du front.
C'est le seul muscle élévateur du sourcil. Sa contraction peut
aussi abaisser la ligne d'implantation des cheveux. Glabelle
C'est un muscle pair de forme quadrilatère, large et plat, qui Les muscles pairs symétriques à l'origine du froncement des
émane du muscle occipito-frontal à la lisière du cuir chevelu. Il est sourcils sont  : les muscles corrugateurs du sourcil, le muscle
engainé dans un dédoublement de la galéa et s'insère en bas à la procérus, et de façon plus anecdotique les muscles abaisseurs
face profonde de la peau sur les deux tiers internes du sourcil et la du sourcil. Leur contraction abaisse et rapproche les têtes du
région intersourcilière. Sa partie médiane dans la zone intersourci- sourcil à l'origine des rides verticales de la glabelle ou rides du
lière présente des interdigitations avec le muscle procérus. Au lion et des rides horizontales intersourcilières (fig. 10.2).
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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 10. Toxine botulinique – tiers supérieur du visage

Fig. 10.3  Le muscle corrugateur est un petit muscle cylindrique long de


3 à 4 cm.
Il est légèrement oblique en haut et en dehors. Son insertion interne est
profonde. Il est recouvert par l'orbiculaire de l'œil et le frontal.

Muscle procérus
Fig.  10.2  Muscles de la glabelle  : les deux muscles corrugateurs et le Ce muscle peut aussi être considéré comme une prolongation
muscle procérus.
Ils rapprochent et abaissent la tête du sourcil.
du muscle frontal dans sa partie médiane. Il s'insère sur les os
propres du nez, a une forme pyramidale inversée, et recouvre la
partie médiale du corrugateur du sourcil jusqu'à la peau inter-
sourcilière. Sa contraction abaisse la tête du sourcil et la peau. Il
Muscle corrugateur du sourcil
est à l'origine des rides glabellaires horizontales (fig. 10.4).
C'est un petit muscle cylindrique, long de 3 à 4 cm, légère-
ment oblique en haut et en dehors, qui suit la partie interne
du sourcil au-dessus de l'arcade supra-orbitaire. Il s'insère
profondément à sa partie interne sur l'éminence osseuse
glabellaire, environ à 11 mm au-dessus de l'arcade et à 7 mm
de la ligne médiane. Selon sa force musculaire, il est plus ou
moins épais et palpable dans cette zone lors de sa contrac-
tion. Il est recouvert par le procérus, le frontal et la portion
orbitaire de l'orbiculaire.
Dans sa partie externe, il s'insère superficiellement à la
peau et il est facile de repérer les cupules d'insertion cutanée
externe de ce muscle lors du froncement. À ce niveau, il
rejoint la face profonde du muscle orbiculaire et du frontal.
Il est séparé de l'arcade supra-orbitaire par le coussinet de
Charpy (fig. 10.3).

Fig. 10.4  Le muscle procérus est une pyramide inversée.


Il est considéré comme une émanation centrale du muscle frontal. Il
recouvre la partie médiane du corrugateur et s'insère à la peau dans la zone
intersourcilière. Il est à l'origine de rides glabellaires horizontales.
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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 10. Toxine botulinique – tiers supérieur du visage

Muscle abaisseur du sourcil Technique d'injection par toxine


Son existence est controversée  : il pourrait s'agir d'un fais-
ceau du frontal ou de l'orbiculaire. Petit muscle triangulaire Pour faciliter l'exposé, le taux de conversion entre les diffé-
situé sous le muscle orbiculaire, il s'insère sur la peau au rentes toxines sera de :
■ 1/1 pour ONABoNT (Vistabel®) et INCOBoNT (Bocouture®),
niveau de la tête du sourcil, qu'il abaisse.
exprimé en unités (u) ;
■ 1/2,5 pour ABOBoNT (Azzalure®), exprimé en unités
Muscle orbiculaire de l'œil Speywood (u Sp.).
Ce muscle permet l'occlusion des paupières et protège l'œil
(fig. 10.5). Il abaisse les sourcils, élève la joue et la paupière Rides frontales – muscle frontal
inférieure lors du sourire. Sa contraction entraîne l'appari-
tion des rides dynamiques de la patte d'oie qui deviennent Technique
progressivement permanentes au repos. C'est un anneau
large et plat, fait de fibres musculaires concentriques. Il est Le muscle frontal est mince ; l'injection sera intramusculaire
très adhérent à la peau. superficielle. Demander au patient de surélever les sourcils
Sa portion palpébrale permet le clignement de l'œil. pour apprécier la quantité de points nécessaires.
Sa portion orbitaire recouvre le rebord orbitaire, la partie Il faut éviter d'injecter sa partie inférieure pour ne pas abais-
antérieure de la fosse temporale, une partie du malaire, les ser les sourcils ; les points seront donc situés à une hauteur d'au
muscles zygomatiques. Les fibres se rejoignent dans la zone moins 2 cm par rapport à l'arcade orbitaire (au mieux à 4 cm au
du canthus interne de l'œil pour s'insérer en partie sur le liga- moins en cas de ptosis des sourcils ou de blépharochalasis).
ment palpébral interne. Il faut séparer les points de 2 cm environ, en raison de la
diffusion de 1 cm autour de chacun.
Selon la hauteur du front, 1 à 2 rangées de 4 à 8 points de
2 u à 4 u (0,05 ml à 0,1 ml) ou 5 à 10 u Sp. (0,025 ml à 0,05 ml)
seront nécessaires. Elles suivent la courbe des sourcils pour
les femmes ; l'injection est plus horizontale pour les hommes.

Fig. 10.5  Muscle orbiculaire de l'œil.


C'est un anneau large et plat, fait de fibres musculaires concentriques. Il est très adhérent à la peau.

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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 10. Toxine botulinique – tiers supérieur du visage

Schémas suivant l'anatomie Cas particuliers


Différents schémas sont proposés selon l'anatomie du patient : ■ Hommes chauves : 2 à 3 rangées seront nécessaires en sui-
■ une rangée de 6 points de 2 u sans point central, si pré- vant les golfes temporaux.
sence d'un diastasis musculaire central (fig. 10.6A) ; ■ Persistance d'une ride sus-sourcilière latérale si de petites fibres

■ un point central, utile si les rides sont horizontales sur du frontal se prolongent au-delà de la crête temporale : la cor-
toute la largeur du front ; dans ce cas, les deux frontaux rection par un point d'injection de 1 à 2 u situé juste au-dessus
sont réunis au centre sans diastasis ; de la ride peut se faire lors du contrôle après 10 jours (fig. 10.8).
■ 5 points de 4 u repartis en une rangée de 3 points de 4 uni- Ce point pourra être fait d'emblée lors des séances suivantes si
tés, dont un central et 1 rangée plus haute avec 2 points de le résultat s'est révélé satisfaisant. En cas de ptose du sourcil, de
4 u. Une étude randomisée a montré une diminution du blépharochalasis, il est préférable de combler cette ride à l'aide
risque de ptose des sourcils avec ce schéma (fig. 10.6B) [2] ; d'acide hyaluronique (AH) sous peine d'aggraver la ptose.
■ au contraire pour éviter l'effet Méphisto : les points les plus

externes seront situés à l'aplomb de la courbure des sourcils


pour traiter la partie externe du muscle frontal (fig. 10.7).

Fig.  10.8  Effet Méphisto avec persistance d'une ride sus-sourcilière et


ascension du sourcil.
Il doit être corrigé par un point de 1 à 2 u.
Source : C. Raimbault.
A

■ Certains patients souhaitent une élévation latérale du


sourcil qu'ils estiment plus esthétique  : pour l'obtenir, le
point le plus externe sera plus médial.
Le risque est l'apparition d'une hypertonie musculaire
réactionnelle de la partie la plus externe du muscle frontal
avec un aspect Méphisto. Il sera aisément corrigé lors de la
session de contrôle par un point latéral haut (fig. 10.9).
■ Dans certains cas (ptose des sourcils, blépharochalasis), il

vaut mieux ne pas traiter le frontal d'emblée, mais


B attendre la séance de retouche afin de ne délivrer que les
doses réellement nécessaires [3], car le frontal n'aura pas
Fig.  10.6  A. Traitement classique du muscle frontal par une rangée de
6 points de 2 u, situés à au moins 2 cm au-dessus de l'arcade orbitaire. Les d'hyperactivité compensatoire s'il n'est pas traité, contrai-
points suivent la forme des sourcils. Le point le plus externe est à l'aplomb rement à ce que l'on observe avec les autres groupes
de la courbure du sourcil pour éviter l'effet Méphisto. B. Schéma proposé musculaires.
pour diminuer le risque de ptose du sourcil : une rangée de 3 points de 4 u ; ■ Traitement d'une asymétrie  : les points d'injections ne
une deuxième rangée de 2 point haut situés.
Source : C. Raimbault. seront pas symétriques ; ils pourront être soit plus nom-

A B C
Fig. 10.7  Bien examiner le patient en dynamique pour adapter le traitement.
A. Examen en dynamique. B. Le point le plus latéral est à l'aplomb de la courbure du sourcil pour éviter l'effet Méphisto. C. Résultat à 15 jours. Si nécessaire
effectuer une retouche.
Source : C. Raimbault.

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Chapitre 10. Toxine botulinique – tiers supérieur du visage

■ inconfort lié à l'impossibilité de relever les sourcils, sensa-


tion de tension du front ;
■ difficulté à maquiller les yeux.

Rides de la glabelle
■ Les rides verticales sont liées aux muscles corrugateurs du
sourcil.
■ La ride horizontale est liée au muscle procérus.

Injection du corrugateur du sourcil


Technique
Deux points de 4 u (10 u Sp.) sont injectés par côté (fig. 10.10).
Le point d'injection interne est profond ; l'aiguille est insérée
Fig. 10.9  Recherche d'une élévation latérale du sourcil. verticalement presque au contact osseux. Il est localisé à
Le point frontal le plus externe est plus médial pour laisser la partie externe 11 mm au-dessus du rebord orbitaire et à 7 mm en dehors de
du muscle frontal active. Un point de 2 à 4 u dans l'orbiculaire permet d'ac-
centuer cette ascension de la queue du sourcil.
la ligne médiane. Il faut éviter la diffusion de la toxine en pro-
Source : C. Raimbault. tégeant l'orbite avec le doigt. Au mieux, pour s'adapter à
l'anatomie de chaque patient, le point d'injection est localisé
grâce au froncement qui fait bomber le muscle dans sa par-
breux, soit situés plus bas du côté ou le sourcil est le plus tie interne. Le point d'injection est alors situé au centre de ce
haut, soit plus internes et/ou plus hauts pour surélever le relief musculaire. Orienter le biseau de l'aiguille vers le haut,
sourcil le plus bas. injecter lentement, comprimer légèrement pour éviter tout
■ À un niveau expert, il est possible d'injecter le sourcil pour saignement qui pourrait augmenter la diffusion de la toxine.
relâcher l'orbiculaire à ce niveau avec des points en haute Le point externe est situé latéralement à 10 ou 15 mm du
concentration (pour éviter une diffusion vers le releveur premier point en suivant la courbure orbitaire, et à 11 mm en
de la paupière supérieur). haut par rapport au rebord osseux, donc légèrement plus
haut que le premier point. L'injection est intramusculaire
Effets secondaires moyenne ; l'aiguille est introduite avec un angle de 45° au
Ce sont les suivants : niveau des cupules d'insertion externes du corrugateur. Elle ne
■ ptosis des sourcils : l'effet secondaire le plus fréquent – ­traiter doit pas dépasser latéralement la ligne verticale passant par la
haut  ! pupille.

A B

C D
Fig. 10.10  A. Examen lors de la contraction des muscles de la glabelle, corrugateur et procérus. B. traitement de chaque corrugateur par 2 points de 4 u,
le point interne à l'aide d'une IM profonde, le point externe par une IM moyenne. C. Traitement du procérus par une IM profonde de 4 u. D. Résultat.
Source : C. Raimbault.

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Chapitre 10. Toxine botulinique – tiers supérieur du visage

Cas particuliers
■ Il n'est pas toujours utile d'injecter la partie externe du

corrugateur.
■ Il faut augmenter les doses si le froncement est marqué

avec un relief musculaire important, notamment chez


l'homme (6 u ou 15 u Sp.).
■ Il peut persister une contraction et un froncement dans la

partie latérale du corrugateur, où son insertion sous-­cutanée


se mêle aux fibres de l'orbiculaire et du frontal. Le traitement
par un point plus latéral entraîne un risque de diffusion vers
le releveur de la paupière supérieure. Il est possible d'utiliser
une haute concentration pour éviter ce risque. A
■ Lors de l'examen initial, prévenir le patient de la possibilité

de la persistance des rides de la glabelle lorsqu'elles sont


prononcées en statique. Un traitement complémentaire
par comblement sera nécessaire.

Injection du procérus (fig. 10.10C)


Technique
Un seul point d'injection central de 4 u (10 u Sp.) est suffi-
sant à la racine du nez. L'aiguille est introduite p
­ rofondément,
l'injection est lente. On évite le risque de diffusion en pin-
çant la racine du nez entre le pouce et l'index.
B
Cas particulier Fig. 10.11  Froncement de type oméga de la glabelle.
Traiter les corrugateurs en augmentant si nécessaire la dose du point le
Il n'est pas utile d'injecter ce point en l'absence de ride hori- plus interne et traiter le frontal dans la zone centrale par 2 points de 2 u.
zontale. Mais l'absence de traitement pourrait entraîner une Source : C. Raimbault.
hyperactivité compensatoire du procérus et augmenter son
tonus de repos avec une légère chute de la tête du sourcil.

Résumé du traitement de la glabelle


Classiquement, sont réalisés 5 points de 4 u (10 u sp), 2 par
côté pour les corrugateur, 1 pour le procérus.
Une publication de De Almeida en 2012 a distingué cinq
types de contraction glabellaire [4] : en U, en V, horizontale,
en oméga, en oméga inversé, avec des points d'injection et
des doses différents.
■ Froncement en U  : lors de la contraction de la glabelle, on

observe un rapprochement et une dépression des sourcils avec


une force modérée. Le schéma de traitement est classique.
■ Froncement en V : le froncement a une plus grande inten-
Fig. 10.12  Froncement oméga inversé.
sité et nécessite des doses plus élevées sur les corrugateurs
Le mouvement entraîne plus une dépression qu'un rapprochement des
et le procérus. sourcils. Augmenter la dose pour le procérus, diminuer les doses pour le
■ Froncement horizontal : le rapprochement des sourcils se corrugateur, traiter l'abaisseur du sourcil et le nasal.
produit sans abaissement ou sans surélévation. L'injection Source : C. Raimbault.
est plus horizontale, sans nécessité de traiter le procérus
ou le frontal.
■ Froncement oméga  : rapprochement et élévation de la
Rides de la patte d'oie – muscle
glabelle avec participation du frontal dans sa partie cen- orbiculaire (fig. 10.13)
trale qui doit être traitée et peu de participation du procé-
rus (fig. 10.11). Technique
■ Froncement oméga inversé : le mouvement entraîne plus une L'injection se fait à 1  cm de l'anneau osseux orbitaire en
dépression qu'un rapprochement des sourcils. Il faut 3 points de 2 à 4 u (5 à 10 u Sp.) : le premier à hauteur du
­augmenter les doses pour le procérus, et l'abaisseur du sourcil, canthus externe, le deuxième 1 à 1,5 cm plus haut en suivant
les diminuer pour les corrugateurs et traiter le nasal (fig. 10.12). la courbure de l'orbite, le troisième 1 à 1,5 cm plus bas.

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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 10. Toxine botulinique – tiers supérieur du visage

Cas particuliers
■ Rides palpébrales inférieures et rétrécissement de la
fente oculaire (fig. 10.14) : les faisceaux palpébraux infé-
rieurs du muscle orbiculaire peuvent entraîner une
hypertonie musculaire avec apparition des rides hori-
zontales de la paupière inférieure et/ou un rétrécisse-
ment de la fente. L'injection d'une petite papule à
l'aplomb de la pupille à 2  mm du rebord orbitaire et
latéralement par rapport à la ligne médiopupillaire peut
les atténuer et favoriser l'élargissement de l'ouverture de
l'œil (dose : 1 à 2 u). L'aiguille est orientée parallèlement
à la peau ; introduire juste le biseau de l'aiguille, injecter
une papule. Il est important d'évaluer la tonicité de la
peau par le snap test.
■ À un niveau expert, si des rides persistent à la partie

interne de la paupière inférieure, signifiant une hypercon-


tractilité de la partie palpébrale de l'orbiculaire, il est pos-
sible de rajouter des demi-u délivrées à l'aide de papules
très superficielles le long de la jonction paupière-joue.

Effets secondaires
Les effets secondaires sont les suivants :
■ risque de diffusion vers le grand zygomatique si le point

inférieur est trop bas, proche de l'insertion malaire de ce


muscle ;
■ risque de sécheresse oculaire chez les patients sensibles ;

■ risque d'augmentation des poches matinales par diminu-

tion des mouvements musculaires et donc du drainage


Fig. 10.13  Traitement des rides de la patte d'oie (points noirs), relâ- lymphatique. Dans ce cas, ne pas traiter le point inférieur
chement de la queue du sourcil (point jaune) et traitement des bunny
lines par 1 à 2 points de 2 u (point rouge) (avant-après). des pattes d'oie ou diminuer la dose ;
Source : C. Raimbault. ■ révélation d'une atrophie graisseuse sous-jacente à l'hy-

pertonie musculaire de repos permanente avec apparition


Orienter l'aiguille vers l'extérieur de l'orbite ; l'injection de creux disgracieux dans la partie inférolatérale de la zone
superficielle laisse une papule visible pendant quelques orbitaire (fig. 10.15) ;
minutes sous cette peau fine. Il faut protéger l'orbite avec le ■ apparition de «  bunny lines  »   : chez certains patients

doigt et s'aider d'une bonne lumière car la vascularisation est très expressifs, le fait de bloquer les mouvements de la
importante dans cette zone. glabelle et des pattes d'oie va entraîner la sollicitation
Pour le relèvement de la queue du sourcil, il n'y a pas de de muscles comme le nasal et l'apparition de rides
muscle releveur dans cette zone ; il est donc possible de relâ- nasales latérales obliques. Leur traitement, d'emblée
cher l'orbiculaire, abaisseur, par 1  point de 2  u injecté au ou lors de la séance de retouche se fait à l'aide d'un
niveau de la queue du sourcil en regard de l'encoche orbi- point ou deux d'injection de 2 u sur le bord latéral du
taire latérale. nez assez haut.

A B
Fig. 10.14  Traitement des rides de la patte d'oie et des rides de la paupière inférieure (avant-après).
Orbiculaire : 3 points classiques et 1 point pour relever la queue du sourcil. Hypertrophie de la portion palpébrale de l'orbiculaire de l'œil (point blanc). Ridules de
la paupière inférieure (niveau expert) par 1 ou 2 papules le long du sillon palpébrojugal (points bleus de 0,5 u). Attention à la tonicité de la paupière inférieure.
Source : C. Raimbault.

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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 10. Toxine botulinique – tiers supérieur du visage

Fig. 10.15  Hypertonie de l'orbiculaire de l'œil au repos.


Le traitement classique a révélé une hypotrophie graisseuse sous-jacente, disgracieuse. Il convient de diminuer la dose du point inférieur ou de ne pas le
traiter ou d'y associer un traitement par comblement.
Source : C. Raimbault.

Relever le sourcil Interrogatoire


■ Relever la queue du sourcil : comme vu précédemment, très L'interrogatoire précisera les antécédents ophtalmologiques
souvent associé au traitement des rides de la patte d'oie. (vision, antécédents chirurgicaux).
■ Relever la tête du sourcil  : traitement de la partie supé-

rieure et interne de l'orbiculaire et de l'abaisseur du sourcil Examen en statique


par 1 point de 2 u de chaque côté en haute concentration
■ Peau  : évaluer le degré d'héliodermie, d'élasticité de la
pour éviter tout risque de diffusion.
peau, la présence de rides au repos, leur profondeur,
■ Relever le corps du sourcil  : en cas d'asymétrie, niveau
notamment dans la glabelle, l'association avec des rides
expert. Utiliser une haute concentration avec, en plus des
zygomatiques au niveau de la patte d'oie.
2 points précédents, 1 ou 2 points en intradermique très
■ Paupières  : rechercher l'existence d'un relâchement de la
superficiel dans la partie médiane du sourcil.
paupière supérieure ou blépharochalasis, de la paupière
inférieure avec le snap test qui évalue son tonus en pinçant
Analyse du vieillissement la peau, d'un scleral show, d'un œdème matinal.
global et des balances ■ Graisse  : apprécier la fonte du coussinet de Charpy, la

malposition de la graisse avec présence de poches pal-


musculaires (fig. 10.16) pébrales supérieures ou inférieures, malaires, ou au
Un traitement harmonieux du tiers supérieur va débuter par contraire d'œil creux, d'atrophie de la graisse jugale.
■ Muscle orbiculaire : recherche d'une hypertonie au repos.
un examen attentif de la peau, de la position du sourcil, des
■ Position du sourcil : le vieillissement va influencer la position
rides statiques et dynamiques, mais aussi par l'évaluation de
la force des différents groupes musculaires de leur action du sourcil au repos par rapport à l'arcade orbitaire. Ainsi :
● la tête du sourcil, sous l'influence des abaisseurs toniques
agoniste ou antagoniste et du vieillissement global de la zone
frontale, glabellaire et péri-orbitaire. que sont les corrugateurs et le procérus, aura tendance à
se ptoser. Il en est de même pour la queue du sourcil
sans élévateur à ce niveau ;
● la partie médiane du sourcil pourra être située en position

normale, basse ou au contraire surélevée, asymétrique ;


● le relâchement de l'aponévrose épicrânienne, le poids du

sourcil et du coussinet de Charpy entraînent une ptose


du front et du sourcil. Si la contraction réactionnelle du
muscle frontal est plus forte que la ptose, le sourcil ascen-
sionne et les rides frontales horizontales apparaissent. Il y
a souvent une asymétrie de la position du sourcil ;
● si la contraction du frontal est insuffisante, il y aura une

ptose du sourcil qui s'horizontalise et peut parfois être


positionné en dessous l'arcade orbitaire.

Examen en dynamique
Cet examen sert à évaluer la force des différents groupes
Fig. 10.16  Analyse du vieillissement. musculaires en demandant au patient d'effectuer des
Elle conditionne les bons résultats par la toxine et permet d'établir un plan mimiques de froncement, d'étonnement, de sourire. Il appré-
de traitement associant si nécessaire le comblement de rides statiques, cie également la balance musculaire entre les agonistes et
l'association avec la chirurgie. Rides frontales et glabellaires ; blépharocha-
antagonistes. Le muscle frontal est le seul élévateur des deux
lasis ; asymétrie des sourcils (élévation à gauche, ptose à droite) ; poches
palpébrales ; snap test positif. tiers internes du sourcil. Il n'y a pas d'élévateur au niveau du
Source : C. Raimbault. tiers externe. Tous les autres muscles sont abaisseurs.

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Le sourcil est divisé en trois parties : À l'avenir, des flacons prêts à l'emploi seront commercialisés.
■ la partie interne où le muscle frontal élévateur est opposé Pour la reconstitution  : enlever l'opercule du flacon de
aux muscles abaisseurs, corrugateur, procérus, abaisseur toxine, désinfecter le bouchon à l'aide d'alcool. Prélever la
du sourcil ; quantité précise de sérum physiologique à l'aide d'une
■ la partie médiane où le frontal est opposé au muscle orbi- seringue pour la transférer dans le flacon de toxine à l'aide
culaire, abaisseur ; d'une aiguille traversant le bouchon. Le piston doit des-
■ la queue du sourcil, située latéralement par rapport à la cendre sans pression dans le corps de la seringue pour
crête temporale à partir de la courbure du sourcil. Il n'y a garantir la présence de vide dans le flacon et sa bonne
pas d'élévateur à ce niveau, le muscle orbiculaire est qualité.
abaisseur. La notice précise qu'après reconstitution, une utilisa-
tion immédiate de la solution injectable est recomman-
Stratégie thérapeutique dée. Elle peut être conservée pendant 24  heures au
■ Si les rides sont essentiellement dynamiques, la toxine sera réfrigérateur (entre 2  °C et 8  °C). Toutefois, des études
très efficace et préviendra le vieillissement du tiers supé- montrent que l'efficacité de la toxine reconstituée, si elle
rieur. Il faut interroger le patient pour savoir s'il souhaite est stockée dans de bonnes conditions, persisterait
un aspect figé ou plus souple, plus naturel pour évaluer les jusqu'à 4 semaines [5].
doses. L'injection de toxine se fera à l'aide de seringues à insu-
■ Si les rides sont profondes avec un photovieillissement
line de 1 ml ou, au mieux, de 0,5 ml avec une aiguille de
marqué, le traitement par toxine sera délicat et souvent 30 G ou de 32 G plus fine pour atténuer la sensation de
insuffisant. Il faudra le combiner avec d'autres techniques piqûre. De nouvelles seringues « à clics » pour délivrer une
esthétiques comme le comblement des sillons et creux, le quantité exacte d'unités de toxine sont maintenant
lissage de la peau avec les peelings ou les lasers. disponibles.
■ En cas de relâchement marqué, le recours à la chirurgie

sera nécessaire (blépharoplastie, chirurgie des poches pal- Réalisation de l'acte


pébrales, lifting temporal, etc.). ■ Désinfection de la peau, maintien des cheveux par un ban-
deau si nécessaire.
Traitement harmonieux et équilibré ■ Injection conforme à l'analyse faite et aux souhaits du

Le tiers supérieur comporte trois groupes musculaires, mais patient pour traiter un ou trois groupes musculaires, avec
la demande du patient peut se concentrer sur une seule un aspect naturel ou figé.
région, rides horizontales du front ou rides du lion ou pattes
d'oie. Si un seul groupe musculaire est traité, on observe fré- Recommandations après injection
quemment une hyperactivité compensatoire des autres
■ Ne pas masser, ne pas appuyer sur les points, ne pas porter
groupes musculaires. Pour l'éviter, il est conseillé de relâcher
de chapeau, casquette, lunettes de piscine, pour éviter une
au moins chacun des deux autres groupes par un ou deux
diffusion de la toxine, en particulier vers le releveur de la
points complémentaires ; par exemple :
paupière supérieure.
■ traiter la glabelle avec les doses recommandées et au
■ Éviter le sport, le sauna, le hammam au moins 6 heures.
moins relâcher la queue du sourcil ;
■ Ne pas mettre la tête vers le bas, bien que cette notion soit
■ traiter le frontal dans son ensemble, mais rajouter le point
controversée, ainsi que d'autres [6].
interne du corrugateur et relâcher la queue du sourcil.

Contrôle après 10 à 30 jours


Traitement par toxine L'effet de la toxine n'est pas immédiat et va s'installer pro-
Avant de débuter tout acte esthétique, la remise des devis, la gressivement à partir de 24 à 72 heures jusqu'à 2 semaines. Il
signature du consentement éclairé et la prise de photogra- est important de revoir le patient lors d'une session de
phies en position statique et dynamique sont indispensables. contrôle afin de vérifier l'efficacité du traitement qui doit
Le choix de la toxine dépendra des préférences du prati- rester harmonieux. En effet, le relâchement de certains
cien (voir le chapitre 9). groupes musculaires peut entraîner l'apparition d'une hype-
ractivité compensatoire de certains faisceaux insuffisam-
ment traités. C'est le cas d'apparition de rides frontales
Dilution, reconstitution hautes, de bunny lines qui pourront être corrigées, etc.
Vistabel® et Bocouture® sont présentés en flacon de 50  u Toutefois, il faudra bien exposer au patient les éventuels
contenant une poudre de complexes de neurotoxine à diluer inconvénients d'une retouche dans certains cas. Par exemple,
dans 1,25 ml de sérum physiologique ou, plus récemment, la persistance de rides suprasourcilières ne sera corrigée avec
en flacon de 100 u à diluer dans 2,5 ml, soit 4 u pour 0,1 ml. la toxine qu'en l'absence de risque d'abaissement disgracieux
Azzalure® est présenté en flacon de 125 u sp à diluer dans du sourcil (dans ce cas, il vaut mieux combler la ride). La per-
0,63 ml de sérum physiologique, soit 10 u sp pour 0,05 ml. sistance d'un froncement du sourcil peut être due à l'activité

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Chapitre 10. Toxine botulinique – tiers supérieur du visage

persistante de la partie la plus externe du corrugateur, à l'ex- traiter les rides dynamiques chez des sujets jeunes, avec des
térieur de la zone de sécurité représentée par la ligne verti- résultats très esthétiques et une action préventive sur le
cale médiopupillaire. Le risque de diffusion vers le releveur vieillissement. Lorsque celui-ci est plus marqué, l'examen
de la paupière en cas de retouche dans cette zone est attentif et le traitement adapté à chaque cas permettront
important. d'obtenir des résultats harmonieux, en association avec les
autres techniques esthétiques.
Fréquence des sessions
Références
L'efficacité de la toxine est de 4 à 6 mois. [1] Belhaouari L, Gassia V. L'art de la toxine botulique en esthétique et
Il est recommandé de respecter un délai minimal de des techniques combinées. 2e éd Paris : Arnette ; 2013.
12 semaines entre les sessions pour éviter l'apparition d'une [2] De Boulle K, Werschler WP, Gold MH, et al. Phase 3 study of ona-
résistance à la toxine, bien que cet effet secondaire ait été botulinumtoxinA distributed between frontalis, glabellar com-
rarement observé lors de traitements esthétiques. plex, and lateral canthal areas for treatment of upper facial lines.
Pour un « look  » plus naturel, certaines publications Dermatol Surg 2018 ;44(11):1437–48.
[3] Ballard TNS, Vorisek MK, Few JW. Impact of botulinum toxin type
recommandent des doses plutôt inférieures en renouvelant A treatment of the glabella and crow's feet on static forehead rhy-
les traitements tous les 4 mois [7]. tides. Dermatol Surg 2019 ;45:167–9.
Il est classique de dire que la répétition des séances dimi- [4] de Almeida  AR, da Costa Marques  ER, Banegas  R, Kadunc  BV.
nuera la force musculaire avec le temps et que les sessions Glabellar contraction patterns: a tool to optimize botulinum toxin
pourront être espacées. Toutefois, cela est rarement observé treatment. Dermatol Surg 2012 ;38(9):1506–15.
chez les patients jeunes, sportifs. [5] Alam M, Bolotin D, Carruthers J, et al. Consensus statement regar-
ding storage and reuse of previously reconstituted neuromodula-
Les effets secondaires seront abordés dans le chapitre 13. tors. Dermatol Surg 2015 ;41(3):321–6.
[6] Dover JS, Monheit G, Greener M, Pickett A. Botulinum toxin in aes-
thetic medicine: myths and realities. Dermatol Surg
Conclusion 2018 ;44(2):249–60.
[7] Hexsel CL, Siega C. Achieving natural look. In: Cohen JL, Ozog DM,
Un traitement par toxine débute par une analyse minutieuse editors. Botulinum toxins: cosmetic and clinical applications, John
du vieillissement de tout le tiers supérieur. Il est plus facile de Wiley & Sons Ltd ;2017.

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Section 3. Toxines botuliniques

Chapitre 11
Toxine botulinique – tiers
inférieur du visage
M.-J. Miniconi-Nigoghossian

Introduction
1 2

Les indications esthétiques de la toxine botulique se sont


3
étendues au bas du visage et au cou, dans la prévention et la
correction du vieillissement. 4

La technique doit être fondée sur une connaissance appro- 5


6
7
fondie de l'anatomie, de la physiologie, des muscles ciblés, 8
des structures environnantes ainsi que de la pharmacologie 9
10
et la toxicologie de la toxine botulique A.
Il est important de préciser que les indications esthétiques 11

de la toxine botulique dans le bas du visage sont hors autori-


sation de mise sur le marché (AMM).

Bases anatomiques 12 13 14 15 16 17 18

Fig. 11.1  Anatomie des muscles faciaux, vue de profil.


Les muscles de la face permettent les expressions du visage 1. M. orbiculaire des paupières ; 2. M. occipito-frontal ; 3. M. corrugateur du
sourcil ; 4. M. Procérus ; 5. M. nasal ; 6. M. élévateur de la lèvre supérieure et
et contribuent aux fonctions masticatrices et sphincté- de l'aile du nez ; 7. M. dilatateur de la narine ; 8. M. abaisseur du septum
riennes. Ils sont tous innervés par le nerf facial. À l'excep- nasal ; 9. M. petit zygomatique ; 10. M. élévateur de l'angle de la bouche ;
tion de l'orbiculaire des lèvres, ce sont des muscles pairs. 11.  M. abaisseur de la lèvre inférieure ; 12. M. masseter ; 13. M. risorius ;
Les expressions faciales reposent sur l'équilibre des 14.  M. buccinateur ; 15. M. grand zygomatique ; 16. M. orbiculaire des
lèvres ; 17. M. abaisseur de l'angle de la bouche ; 18. M. carré du menton.
balances musculaires entre les groupes abaisseurs et rele-
veurs, d'où l'importance d'une connaissance approfondie de
l'anatomie statique et dynamique (fig. 11.1).
L'injection de toxine botulique entraîne une diffusion de
1 cm environ autour de celle-ci. Elle doit être parfaitement
1 12
maîtrisée pour des résultats subtils en jouant sur les fron- 2 13
tières musculaires sans effet négatif. 3

Les repères d'injection sont pris après examen du patient


4
au repos et en dynamique et doivent tenir compte égale- 5 14
15
ment de la répartition des plaques motrices qui peut être 6
7 16
homogène sur toute la surface ou bien concentrée dans une 8 17
9
portion du muscle [1]. Les asymétries éventuelles devront 10
également être évaluées (fig. 11.2). 11

Fig. 11.2  Anatomie des muscles faciaux, vue de face.


Le sens des flèches indique si les muscles sont abaisseurs ou élévateurs.
1.  M. occipito-frontal ; 2. M. Procérus ; 3. M. orbiculaire des paupières ;
4.  M.  nasal ; 5. M. élévateur de la lèvre supérieure et de l'aile du nez ;
6. M. abaisseur du septum nasal ; 7. M. orbiculaire des lèvres ; 8. M. buccina-
teur ; 9. M. abaisseur de l'angle de la bouche ; 10. M. abaisseur de la lèvre
inférieure ; 11. M. carré du menton ; 12. M. abaisseur du sourcil ; 13. M. cor-
rugateur du sourcil ; 14. M. petit zygomatique ; 15. M. grand zygomatique ;
16. M. élévateur de l'angle de la bouche ; 17. M. risorius.
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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 11. Toxine botulinique – tiers inférieur du visage

Cibles musculaires
Muscles du nez
Muscle abaisseur du septum nasal
Description
Petit muscle médian en éventail allant en profondeur, de
l'épine nasale du maxillaire supérieur à la superficie vers le
Fig. 11.3  Injection du muscle nasal.
haut de la région septocollumellaire. Point rouge : traitement de l'abaisseur du septum nasal : 4 u (2 profondes
et 2 superficielles). Points bleus : traitement du muscle nasal : 2 u. Injection
Action tangentielle.
Source : C. Raimbault.
■ Il abaisse le septum et augmente le diamètre de l'orifice

narinaire.
■ Il participe à la mobilité de la pointe du nez. Muscles de la bouche
Indications de site d'injection Muscle orbiculaire des lèvres
■ Repositionnement de la pointe du nez. Description
■ Site médian dans l'épine nasale antérieure en deux plans : ■ Muscle impair.
● un plan profond au contact osseux ; ■ Ferme la bouche.
● un plan superficiel ; ■ Projette les lèvres en avant.
● 4 unités (2 U par plan).

Indications de site d'injection


Muscle dilatateur des narines ■ Rides radiaires.

ou muscle nasal, partie alaire ■ Lèvre supérieure : 4 sites.

Description ■ Lèvre inférieure : 2 à 4 sites.

■ 1 unité par site : injection hypodermique au niveau du ver-


Muscle pair mince, triangulaire sur le bord de l'aile du nez.
millon dans la zone de contraction maximale (faire pro-
Indications de site d'injection noncer les lettres E ou O pour repérer les rides radiaires).
■ Narines dilatées. ■ Doses inférieures pour la lèvre inférieure.

■ Site bilatéral, au-dessus du rebord narinaire. ■ Dose totale par lèvre : 2 à 4 unités.

■ Injection tangentielle par rapport à l'aile du nez. ■ Distribution uniforme des sites ; éviter la zone médiane et

■ 2 unités par côté (fig. 11.3). les commissures (fig. 11.4).

Fig. 11.4  Traitement du muscle orbiculaire des lèvres.


Quatre points de 1 u pour la lèvre supérieure ; 2 points de 1 u pour la lèvre inférieure. Injection hypodermique au niveau du vermillon dans la zone de
contraction maximale. Faire prononcer les lettres E ou O pour la repérer.
Source : C. Raimbault.

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Muscle abaisseur de l'angle de la bouche Muscle risorius


Description Description
■ Muscle triangulaire avec une large base profonde au ■ Petit muscle superficiel, variable, tendu entre le fascia parotidien

niveau de la ligne mandibulaire et une insertion plus en dehors et le modiolus en dedans (à 1 cm de la commissure).
étroite superficielle au niveau de la commissure labiale. ■ Impliqué dans la fossette du sourire et les grimaces.

■ Abaisseur des commissures.


Indications de site d'injection
■ Expression négative au sourire.
Indications de site d'injection
■ Site à 2 cm sur la ligne horizontale en passant par le coin
■ Rides marionnettes. de la bouche (soit à 1 cm du modiolus).
■ Commissures labiales tombantes. ■ 2,5  unités par côté en sous-cutané parallèle à la surface,
■ 1 à 2 sites par côté : vers l'extérieur (fig. 11.6).
● bord du maxillaire inférieur près de la limite antérieure

du masséter ;
● ou à 1  cm latéralement et 2  cm verticalement de la

commissure ;
● l'injection doit être symétrique en quantité et topo­

graphie
● 2 à 5 unités par côté (fig. 11.5).
2 cm

2,5 u

Fig. 11.6  Traitement du muscle risorius.


Injection de 1 point de 2,5 u à 2 cm de la commissure horizontalement.
Source : C. Raimbault.

Muscle élévateur de l'aile


du nez et de la lèvre supérieure
Description
■ Muscle étroit et long qui s'étend verticalement de son ori-

gine supérieure dans le processus frontal de l'os maxillaire


jusqu'à son insertion cutanée inférieure, dans la région de
la narine latérale (partie nasale), dans la partie supérieure
du pli nasolabial et dans la lèvre supérieure (partie labiale).
■ Muscle élévateur de la lèvre supérieure et élévateur nasolabial.

Indications de site d'injection


■ Correction du sourire gingival.

■ Site d'injection à 1 cm au-dessus de la partie supérieure du

sillon naso-génien.
■ 2,5 unités par côté en profondeur (fig. 11.7).

Muscle abaisseur de la lèvre inférieure


Description
Fig.  11.5 Relèvement des commissures après traitement du muscle ■ Participe au dynamisme de la lèvre inférieure.

abaisseur de l'angle de la bouche par 2 à 5 u par côté (points bleus). ■ Petit, losangique, situé dans la partie latérale du menton.
Souvent couplé avec le traitement du muscle mentonnier, 2,5 à 5 u par côté ■ Il naît du tiers antérieur de la ligne oblique externe de la
(points noirs).
Source : C. Raimbault.
mandibule et se dirige en haut et en dedans pour se termi-
ner sur la face profonde de la peau de la lèvre inférieure.

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Chapitre 11. Toxine botulinique – tiers inférieur du visage

de la partie basse de l'oreille au philtrum de la lèvre supé-


rieure perpendiculaire à la surface cutanée).
■ 3 à 5 sites par muscle.

■ 25 à 50 Unités par muscle (fig. 11.8).


2,5 u

Fig.  11.8  Injection du muscle masséter  : 20 à 50  u par côté (avant-


après).
Diminution du volume des masséters et ovalisation du visage.
Source : M.-P. Loustalan.

Muscle mentonnier
Fig. 11.7  Correction du sourire gingival par traitement du muscle éléva-
teur de l'aile du nez et de la lèvre supérieure (2,5 u par côté). Description
Source : C. Raimbault. ■ Muscle carré du menton, pair, à la partie centrale du
menton.
Indications de site d'injection ■ Orienté verticalement de l'insertion osseuse profonde

■ Asymétrie de la lèvre inférieure, lors d'une diffusion après


(symphyse mentonnière) à la superficie cutanée (peau du
injection de la toxine botulique dans l'abaisseur de l'angle menton).
de la bouche ou dans le mentonnier. Indications de site d'injection
■ Injection de 2,5 U dans la partie médiane du muscle.
■ Releveur de la peau du menton.
Releveur indirect de la lèvre inférieure.
Muscle masséter

■ Responsable de l'aspect peau d'orange.

■ 1 point central ou 2 points symétriques de chaque côté.


Description ■ Injection profonde perpendiculaire.
■ Principal muscle masticateur avec le muscle temporal. ■ 2,5 à 5 Unités par site.
■ Muscle puissant intervenant esthétiquement dans la défi- ■ Dose plus importante chez l'homme (fig. 11.5 et 11.9).
nition de l'ovale et pouvant donner un aspect masculin au
visage quand il est hypertrophique.
■ Muscle quadrilatère allant de l'arcade zygomatique et le
Muscle platysma
corps de l'os zygomatique jusqu'au bord inférieur et à la
face latérale de la branche mandibulaire. Description
■ Il est constitué de deux faisceaux : ■ Muscle pair superficiel sous-cutané, large et mince s'éten-
● superficiel antérieur ; dant obliquement vers le haut et l'intérieur depuis le mus-
● profond postérieur. cle thoracique antérosupérieur et le muscle deltoïde
jusqu'à la mandibule et la commissure labiale.
Indications de site d'injection ■ Les bandes platysmales ou cordes correspondent à la

■ Féminisation et adoucissement du visage en restituant contraction des bords antérieurs du muscle.


une forme triangulaire de la face. ■ Il contribue avec le mentalonnier à la formation du pli

■ Injection en deux plans (profond et superficiel) au niveau d'amertume.


de la partie inférieure du muscle (sous une ligne dessinée ■ Il est abaisseur du tiers inférieur de la face.

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Indications de site d'injection Sites d'injection


■ Relaxation des cordes platysmales pour améliorer la défi- ■ On dessine une ligne prolongeant la corde platysmale
nition de l'ovale et adoucir les contours. externe allant du rebord mandibulaire jusqu'au modiolus :
■ 2 à 4 points d'injection par corde à 1 cm d'intervalle depuis 3 points de 2 à 4 unités espacés de 1 cm, le dernier point
le maxillaire jusqu'à la clavicule. situé à 2 cm de la commissure.
■ 2,5 Unités par site. ■ Injection superficielle parallèle au plan cutané dirigée vers

■ Dose totale maximale : 50 unités (fig. 11.10). le lobe de l'oreille.


■ 4 unités en 1 ou 2 points sur le mentonnier (voir fig. 11.9).

Pli d'amertume
Nefertiti lift
Muscles impliqués
■ Muscle mentonnier. Indication
■ Portion mobile jugale du muscle platysma  : du rebord ■ Relaxer le muscle platysma abaisseur du tiers inférieur de
mandibulaire jusqu'au modiolus. la face contribuant à l'affaissement de l'ovale et à la forma-
■ La contraction synergique de ces deux muscles contribue à tion de la bajoue.
la formation du pli d'amertume ou « mimique du dégoût ». ■ Redéfinir le contour mandibulaire et le cou.

Fi. 11.9  Traitement du pli d'amertume.


Dessiner une ligne prolongeant la corde platysmale externe allant du rebord mandibulaire jusqu'au modiolus (3 points de 2 à 4 u espacés de 1 cm, Ie
dernier point situé à 2 cm de la commissure) et traitement du muscle mentonnier (2 points de 2 à 4 u).
Source : photo, C. Raimbault.

Fig. 11.10  Traitement de la corde platysmale droite.


De 2 à 4 points d'injection de 2,5 u par corde à 1 cm d'intervalle depuis le maxillaire jusqu'à la clavicule.
Source : C. Raimbault.

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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 11. Toxine botulinique – tiers inférieur du visage

Sites d'injection Fagien S, Raspaldo H. Facial rejuvenation with botulinum neurotoxin:


an anatomical and experential perspective. J Cosmet Laser Ther
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Ces injections nécessitent une connaissance parfaite de Angle Orthod 2009;79:70–7.
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Section 3. Toxines botuliniques

Chapitre 12
La toxine botulique
en pathologie dermatologique
D. Boineau

Introduction Hyperhidrose localisée

En dermatologie, la toxine botulique (TB) ne possède une


autorisation de mise sur le marché (AMM) que pour le trai-
tement des rides de tiers supérieur du visage et de l'hyperhi- Axillaire Palmaire

drose axillaire chez l'adulte et l'enfant de plus de 12 ans. Il


existe cependant un consensus de la profession pour étendre
Antiperspirants topiques Antiperspirants topiques
ses indications à diverses affections [1–3], le plus souvent en
rapport avec l'hyperhidrose, rares mais chroniques, souvent
très invalidantes et pour lesquelles il n'existe pas de traite- Toxine botulique A lonophorèse
ment codifié réellement efficace. Ces indications reposent
sur un certain nombre de publications où son utilisation,
seule ou associée, apporte des résultats encourageants Chirurgie Toxine botulique A
appelant des essais contrôlés, plus robustes, précisant l'effi-
cacité et la sécurité de la TB. Utilisée actuellement par voie
injectable, des essais de formes topiques sont en cours d'éva- Chirurgie
luation. Dans certaines situations, le remboursement de ce Fig. 12.1  Hyperhidrose, options thérapeutiques.
geste peut même être envisagé car son coût est souvent une Source : © Médecine & Hygiène.
entrave à son utilisation.
La TB est indiquée quand les thérapeutiques tradition-
Hyperhidrose localisée nelles s'avèrent insuffisantes et doit être envisagée avant
toute décision chirurgicale. La TB de sérotype A est utilisée ;
L'hyperhidrose est une production excessive de sueur par il en existe plusieurs sur le marché, chacune possédant ses
les glandes sudoripares eccrines, dépassant les besoins de la propriétés biologiques, ses effets cliniques et ses doses res-
thermorégulation, conséquence d'une hyperstimulation pectifs. Des injections répétées proposées aussi bien pour la
par les fibres cholinergiques du système nerveux autonome région palmaire que la région axillaire dans trois études
[4, 5]. Elle peut être primaire ou secondaire à une patholo- rétrospectives ont démontré un accroissement de la durée
gie interne ou à un médicament. Dans 90 % des cas, elle est de l'effet thérapeutique mais peuvent entraîner le dévelop-
localisée, bilatérale et symétrique, axillaire, palmaire ou pement d'anticorps neutralisants. Un intervalle minimal de
plantaire. Elle touche entre 0,6 % et 2,8 % des individus et 3 mois entre chaque injection paraît indiqué.
constitue une gêne socioprofessionnelle, souvent majeure, ■ L'hyperhidrose axillaire a été la plus étudiée. Selon

interdisant même certaines professions. Campanelli et Salomon [4], les études cliniques ont mon-
Lors de la prise en charge, il convient d'évaluer le retentis- tré que la dose optimale est de 50 U de Botox par aisselle
sement de ce symptôme sur la qualité de vie, en s'aidant réparties sur environ 30 sites, de 15 à 20 mm chacun, maté-
d'échelles validées et du test de Minor (mise en évidence de rialisés au crayon marqueur. Le but est d'obtenir une diffu-
zones d'hyperhidrose par réaction chimique iode/poudre sion du produit couvrant par chevauchement toute la
d'amidon entraînant un noircissement des zones concer- surface de la zone à traiter. La toxine est délivrée à la jonc-
nées). Il existe en effet plusieurs options thérapeutiques dont tion entre le derme moyen et profond de manière à obte-
le choix devra être décidé en fonction de la topographie, de nir une papule superficielle d'environ 5 mm de diamètre.
l'intensité des symptômes et de la demande des patients, Dans leur expérience, l'effet thérapeutique est obtenu avec
entre les antiperspirants d'application locale (sels d'alumi- des doses de 1,3 à 1,7 U de Botox par site. Les patients rap-
nium), l'ionophorèse, les traitements systémiques, la TB et portent un début d'efficacité après une semaine avec une
les traitements chirurgicaux (sympathectomie) (fig. 12.1). réduction de la transpiration de 80 à 90 % sur une durée
Dermatologie esthétique
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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 12. La toxine botulique en pathologie dermatologique

moyenne de 10 mois. La reprise de la transpiration se fait et du prurit au niveau du site traité. Une étude analogue
très progressivement sur plusieurs mois, nécessitant un fait état d'une réduction du nombre des rechutes.
second traitement en moyenne 12 mois plus tard. Aucun ■ Les hidrocystomes eccrines multiples, tumeurs bénignes

effet indésirable n'a été observé, hormis quelques rares cas kystiques des conduits sudoripares, se caractérisent par
d'hyperhidrose extra-axillaire et une faiblesse musculaire des papules translucides disgracieuses de la face, bleuâtres
transitoire des mains. ou couleur chair. Gheisari [7] a traité 20 patients par la TB
■ Dans l'hyperhidrose palmaire, en l'absence d'efficacité des intralésionnelle avec d'excellents résultats (disparition de
antiperspirants topiques ou de l'ionophorèse, on peut 75  % des lésions) sans aucun dommage cicatriciel ; elle
proposer un traitement par la TB. Les doses utilisées vont peut donc être envisagée, selon lui, comme le traitement
de 60 à 100 U de Botox par main. Campanelli et Salomon de première intention
[4] réalisent, selon l'étendue de l'hyperhidrose, entre 50 et ■ L'hidradénite suppurée, ou maladie de Verneuil, affection

70 injections par main (paume et doigts) séparées de 15 à inflammatoire chronique des glandes apocrines, affecte
20 mm. La réponse au traitement est comparable à celle principalement les aisselles et le périnée. Les patients
de l'hyperhidrose axillaire sans aucun effet secondaire, des subissent un inconfort majeur, et ce d'autant que le traite-
cas de faiblesse musculaire transitoire ayant cependant été ment mal codifié est extrêmement incertain. L'environne­
décrits après injection de l'éminence thénar. ment humide des plis procure les conditions idéales à la
■ La prise en charge de l'hyperhidrose plantaire par la TB s'est prolifération des bactéries et constitue un facteur précipi-
révélée plus décevante en raison des douleurs et de la diffi- tant. Des observations ponctuelles font état de succès thé-
culté à injecter avec précision le produit du fait de l'épaisseur rapeutiques avec la TB.
inégale de la couche cornée. Les données bibliographiques
sont pauvres, les doses variant de 50 à 250  UI de TB par
plante, avec une efficacité de 3 à 6 mois.
Dermatoses aggravées
■ Forme particulière de l'hyperhidrose, le syndrome de Frey par l'hyperhidrose [6]
est une séquelle handicapante et fréquente de la chirurgie
■ La maladie de Darier est une génodermatose rare, trans-
parotidienne (15 à 30 % des patients opérés), secondaire à
mise sur le mode dominant, caractérisée par l'association
une repousse aberrante des fibres parasympathiques du
d'une acantholyse et de troubles de la kératinisation.
glossopharyngien. Il se manifeste à distance de l'acte
Cliniquement, elle se manifeste par des lésions papulo­
chirurgical, plus de 6 mois après, par des sueurs très abon-
kératosiques prédominant sur les zones séborrhéiques et
dantes, rétro-auriculaires, pré-auriculaires, angulomandi-
par une atteinte acrale caractéristique. L'atteinte des
bulaires, temporales ou au niveau de la pommette, lors
grands plis et de la région anogénitale est fréquente. La TB,
d'une excitation gustative. L'usage de la TB a bouleversé le
insuffisante en monothérapie, constitue un traitement
traitement de cette complication par le blocage des
adjuvant potentiel facile et bien toléré.
synapses cholinergiques du système nerveux autonome.
■ Très similaire, la maladie de Hailey-Hailey ou dermatose
L'amélioration symptomatique est quasi constante et le
acantholitique familiale, est une génodermatose bulleuse
plus souvent totale.
rare affectant principalement les grands plis. Son traite-
Le principal effet indésirable de ces techniques est la dou-
ment est difficile et fait appel à la chirurgie, la vaporisation
leur, en particulier lors des injections de paumes et des
laser, les dermocorticoïdes, l'acitrétine, le tacrolimus
pulpes, à la pénétration de l'aiguille et à la diffusion de la
topique ou la photothérapie dynamique. Plusieurs publica-
solution dans le tissu cutané. L'application d'un anesthésique
tions ont montré récemment l'intérêt de la toxine botuli-
topique est inefficace, de même que l'inhalation de pro-
nique dans cette indication dont une étude bordelaise [8].
toxyde d'azote. Plusieurs stratégies ont été évaluées pour
L'efficacité de la toxine botulinique (Dysport®, dose
améliorer la compliance, avec des résultats mitigés, parmi
moyenne de 300 u) a été confirmée chez 8 patients atteints
celles-ci : la pression, la glace associée à la pression, l'anesthé-
de la maladie de Hailey-Hailey résistants aux traitements
sie générale, les blocs nerveux, les vibrations et les injections
habituels, avec une réponse clinique rapide dès le qua-
sans aiguille.
trième jour, complète pour 80  % des zones traitées, une
absence de récidive chez 2 patients à un an et une rémis-
Dermatoses associées sion prolongée pour les autres avec des traitements d'en-
à l'hyperhidrose [6] tretien tous les 6 mois. En 2016, Maza et al. [9] rapportent
les résultats préliminaires, à 3 mois, d'une étude prospec-
■ La dyshidrose est une affection vésiculobulleuse commune tive portant sur 21 patients, 18 atteints de la maladie de
des paumes et des plantes, une de ses caractéristiques Hailey-Hailey et 3 de maladie de Darier) ayant comme
étant la tendance à rechuter en réponse à des facteurs pro- objectif principal d'évaluer l'amélioration de la qualité de
voquants variés comme l'humidité, l'occlusion et l'hyper­ vie 3 mois après injections de TB. Il en résulte une amélio-
hidrose. Une étude intra-individuelle portant sur 10 cas a ration de la qualité de vie avec une disparition complète
évalué l'efficacité de la TB (162 U par paume) ; 70 % des des lésions (50 % des patients) avec quasi-disparition du
patients rapportent une amélioration de la transpiration prurit, des douleurs et des odeurs.

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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 12. La toxine botulique en pathologie dermatologique

■ La TB a été étudiée dans le psoriasis inversé connu pour être au contact du vestibule, une tension à la pression du vesti-
exacerbé par la transpiration excessive. Une étude pilote bule et des signes banals comme un érythème vulvaire pos-
portant sur 15 patients montre qu'une dose de 50–100 UI térieur et des troubles dysuriques, mais le plus souvent
de Botox® améliore 87 % des patients à 2, 4 et 12 mois. l'examen clinique est pauvre. L'injection de TB dans les mus-
■ La kératodermie palmoplantaire aquagénique est une cles périnéaux est, dans plusieurs essais méthodologique-
entité clinique rare caractérisée par l'épaississement ment solides, une option satisfaisante pour le traitement du
translucide blanchâtre des plantes et des paumes après syndrome vestibulaire réfractaire à la prise en charge stan-
immersion dans l'eau. Trois cas traités par TB ont été dard médicale et cognitivo-comportementale.
publiés avec une amélioration de quelques mois. ■ La névralgie postherpétique est une complication chronique

■ La pachyonychie congénitale est une génodermatose rare. fréquente du zona. Elle est définie comme une douleur dans
Les patients affectés ont une hypertrophie des ongles et un dermatome persistant au moins 90 jours après l'appari-
une hyperkératose plantaire extrêmement douloureuse. tion de l'éruption zostérienne. Le traitement classique inclut
Les quelques patients traités par TB ont bénéficié d'une les anesthésiques topique anti-inflammatoires non stéroï-
réelle amélioration diens, la gabapentine, les opioïdes et les antidépresseurs tri-
cycliques, mais la douleur peut être résistante à tous ces
médicaments, justifiant l'essai de la toxine, comme le sug-
Affections avec troubles gèrent un certain nombre d'essais contrôlés (dont l'un por-
tant sur 60 patients) qui ont montré, avec une dose unique
sensitifs cutanés et/ou atteinte de 200  U au maximum, une réduction significative des
neurologique scores EVA (échelle visuelle analogique) de douleur avec
très peu d'effets indésirables. Le mécanisme d'action sur la
■ Les fissures anales, motif de consultation fréquent, se déve-
douleur est encore obscur, mais paraît à la fois central et
loppent le long de la ligne médiane et postérieure de l'ano-
périphérique. Le coût du traitement reste la limitation prin-
derme, réalisant une ulcération linéaire entourée d'un
cipale à l'usage de la TB dans les douleurs postzostériennes.
tissu inflammatoire. La spasticité du sphincter anal est
■ Les cicatrices hypertrophiques et les chéloïdes représentent
souvent associée. La TB est largement utilisée avec des
une réponse aberrante au processus de cicatrisation des
doses variant de 15 à 20 U et des taux de guérison de 50 à
plaies, et sont caractérisées par une croissance dysrégulée et
96 %. Des effets secondaires à type d'incontinence sphinc-
une formation de collagène excessive. La TB a été rapportée
térienne légère et passagère ont été décrits.
comme une réponse thérapeutique aux cicatrices hypertro-
■ L'utilisation de la TB dans le traitement de certains ulcères
phiques, en particulier dans le prurit des séquelles de brû-
de jambe survenant sur des membres spastiques a égale-
lure dans un certain nombre de publications, le mécanisme
ment été jugée bénéfique.
de son action n'étant pas parfaitement élucidé, mais la
■ Le lichen simplex chronicus ou névrodermite circonscrite
toxine semble inhiber la prolifération de fibroblastes dérivés
est une dermatose eczématiforme, caractérisée par un
de tissus cicatriciel hypertrophique et supprimer l'expres-
prurit intense localisé et un épaississement de la peau. Cet
sion de facteurs de croissance. La réponse semble beaucoup
état peut être intense et récurrent et compromettre le
moins satisfaisante voire nulle dans les chéloïdes.
sommeil, la vie sexuelle et la qualité de vie des patients
■ L'accent est mis sur la nécessité d'une prévention active des
affectés. L'incidence dans la population générale est incon-
cicatrices en période postopératoire, un des facteurs péjo-
nue, mais une étude a démontré que 12  % des patients
ratifs en cause étant la tension des bords de la plaie durant
âgés présentant un prurit ont un lichen simplex. La TB est
la phase de cicatrisation. La TB entraîne une élimination
considérée comme une option pour le traitement.
presque complète de la tension musculaire dynamique et
■ La notalgie paresthésique est un syndrome neurologique
un bon nombre de publications ont rapporté l'efficacité
sensitif associant prurit, douleur, paresthésies, hypo-/
de la toxine dans la prévention des cicatrices, injectée en
hyperesthésie caractérisé par une plaque brunâtre de la
peropératoire ou rapidement après l'intervention.
zone affectée. Cette affection apparaît dans la vieillesse ou
en association avec des désordres musculosquelettiques
causés par une compression nerveuse, particulièrement à Divers
l'étage C4-C6. Au vu des quelques résultats publiés, l'injec-
tion de TB est une option thérapeutique, mais des ■ La rosacée est une dermatose commune caractérisée par
recherches ultérieures sont nécessaires pour confirmer un érythème persistant, des papules, des pustules et un
l'efficacité et la sécurité de la toxine botulique. flush facial, les thérapeutiques classiques étant sans effet
■ La vestibulite vulvaire appartient au cadre des vulvodynies, sur le flush. Le flush facial persistant est aussi un symp-
touchant 16 % des femmes dans la population générale. Il tôme de la ménopause. Un certain nombre de publica-
n'y a pas de critères cliniques ou histopathologiques spéci- tions démontrent l'action possible de la TB sur la rosacée
fiques pour le diagnostic autres que l'interrogatoire et l'exa- et les bouffées de chaleur. Des essais randomisés plus
men soigneux pour éliminer une autre cause de douleur. On importants sont nécessaires pour déterminer doses et
retrouve, de façon non permanente, des douleurs intenses durées optimales du traitement.

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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 12. La toxine botulique en pathologie dermatologique

■ Le bruxisme se manifeste par des mouvements involon- les plis, peuvent être améliorées par la toxine botulique par
taires répétitifs, le plus souvent nocturnes, des muscles de son effet anhidrotique réduisant la macération et la prolifé-
la mâchoire. Ses conséquences sont des manifestations ration bactérienne. Les limites à une utilisation plus large
dentaires (abrasion des dents, casse de prothèse), articu- résident dans son coût, sa sécurité et son acceptabilité étant
laires (douleur, blocage des articulations temporomandi- désormais établies. Le problème de son immunogénicité
bulaires) et musculaires (hypertrophie des muscles de la n'étant pas clarifié, cela impose donc la prudence dans le
mastication, masséters et/ou des temporaux). Le traite- rythme des injections.
ment repose actuellement sur une prise en charge ortho-
Références
dontique associée à des injections de TB, éventuellement
[1] Guida S, Farnetani F, Nistico SP, et al. New trends in botulinum toxin
sous contrôle électromyographique. Au bénéfice fonction-
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■ La peau grasse : le sébum contribue à l'apport d'anti-oxy- logy: novel indications. Toxins (Basel). 2017;9(12). pii : E403.
dants liposolubles sur la surface cutanée et a une activité [3] Campanati A, Martina E, Giuliodori K, et al. Botulinum toxin off-­
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En pratique, nous ne connaissons pas tous les mécanismes
[9] Maza A, Dreyfus I, Hoarau E, et al. Amélioration de la qualité de vie
moléculaires et physiopathologiques expliquant les effets des patients avec maladies de Hailey-Hailey ou de Darier après
thérapeutiques du médicament. D'un point de vue clinique, injection de toxine botulique : étude prospective. Ann Dermatol
la plupart de ces dermatoses, qui affectent majoritairement Vénéréol 2016;143:S257.

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Section 3. Toxines botuliniques

Chapitre 13
Toxine botulinique : effets
secondaires et gestion
des complications
V. Gassia

Introduction ■ dans leur étude qui explore le suivi de 192  patients sur
9,1 ans en moyenne, Carruthers et al. démontrent l'inno-
L'évaluation de la sécurité de l'utilisation de la toxine botuli- cuité et le maintien de l'efficacité à long terme des injec-
nique (BoNT) en esthétique repose sur un recul de plus de tions d'onabotulinumtoxine  A dans les rides faciales du
30 ans d'utilisation thérapeutique avec de très nombreuses tiers supérieur [4].
publications et plus de 20 ans d'utilisation en esthétique. En
2018, les chiffres de l'American Society for Aesthetic Plastic Effets secondaires liés à l'injection
Surgery (ASAPS) donnaient 1 million d'injections de BoNT elle-même
aux États-Unis. Ainsi, les injections de BoNT ont une popula-
Comme pour toute injection, on peut observer une douleur
rité croissante liée à leur efficacité, à la satisfaction élevée des
localisée, une sensibilité, une inflammation, un saignement
patients et à un haut niveau de sécurité. Cependant, une
ou un gonflement au point d'injection [5].
bonne connaissance anatomique et pharmacologique, une
bonne analyse et la sélection des patients permettent de Douleur
prévenir la majeure partie des effets secondaires potentiels.
L'injection de toxine botulinique est presque indolore ; l'utilisa-
tion d'une crème anesthésiante est possible chez les sujets sen-
Effets secondaires sibles, ainsi que l'aiguille la plus fine possible (33 G). La dilution
doit impérativement se faire avec du sérum physiologique car
locorégionaux à court terme l'eau pour préparation injectable est très douloureuse.

Ecchymoses
Revue générale
Les ecchymoses sont rares et peuvent être prévenues en stop-
Quelques méta-analyses permettent d'appréhender la pant les médicaments favorisants une semaine avant si possible
nature des effets secondaires et leur fréquence : (cortisone, anti-inflammatoires, vitamine  C, anticoagulants,
■ en 2004, Naumann et Jankovic reprennent 36 études ran-
etc.) ainsi que par un repérage visuel des trajets vasculaires. Elles
domisées représentant 2 309  patients, toutes indications n'ont aucune gravité et disparaissent spontanément.
confondues (thérapeutiques en particulier) et n'ont
retrouvé aucun effet sévère, seulement des effets localisés Céphalées
et transitoires [1] ; Les céphalées sont citées mais apparaissent aussi dans les
■ en 2009, Brin et  al. effectuent une méta-analyse sur
groupes placebo. Elles sont de survenue rapide et de courte
1 678  patients traités uniquement pour les rides faciales durée. A contrario, la BoNT est approuvée aux États-Unis
par onabotulinumtoxine A suivis sur 1 an et ne retrouvent (Food and Drug Administration [FDA], 2011) pour le traite-
pas d'effet secondaire nouveau  : 2,5  % de sensibilité pal- ment de la migraine et des céphalées de tension.
pébrale, 1,8  % de ptosis et encore moins d'œdème pal-
pébral. Ces pourcentages diminuent au fil des cycles [2] ;
■ dans une méta-analyse plus récente [3] de 16  études et
Effets secondaires liés à la diffusion
42 405  patients, il n'apparaît pas de différence avec le
placebo pour les pattes d'oie. Pour le front, il y a un taux Facteurs de diffusion
significativement plus élevé d'effets secondaires dans le Aux concentrations recommandées par les différents résu-
groupe BoNT avec maux de tête, ptosis et paupières més de caractéristiques du produit (RCP), on connaît la sur-
lourdes ; face de diffusion. Il est évident que la maîtrise technique et
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Chapitre 13. Toxine botulinique : effets secondaires et gestion des complications

anatomique doit prendre en considération cette diffusion. ■ La xérophtalmie, exceptionnelle, est due à une lagophtalmie
Les unités des différentes toxines ne sont pas interchan- paralytique  : il faut éviter la portion lacrymale de l'orbicu-
geables et nécessitent de connaître les particularités de la laire. Suivant le site d'injection, la BoNT peut diminuer ou
toxine utilisée. En dehors du tiers supérieur, c'est-à-dire hors augmenter le film lacrymal [7]. Il faut donc être particulière-
autorisation de mise sur le marché (AMM), l'intrication ana- ment précis et prudent en cas de syndrome sec préexistant.
tomique et la complexité fonctionnelle augmentent le risque ■ L'ectropion survient lors d'injection de la paupière inférieure

de complication par diffusion. par relâchement excessif de l'orbiculaire palpébral inférieur.


■ La chute de la commissure labiale au repos ou une asymé-
Au niveau du tiers supérieur trie au sourire survient lors de la diffusion au muscle zygo-
■ Ptosis palpébral : c'est l'atteinte du muscle releveur de la matique en cas d'injection trop basse au niveau de la patte
paupière supérieure par diffusion de la BoNT à travers le d'oie. On peut compenser par injection du muscle antago-
septum orbitaire, à partir de l'injection du corrugateur, ou niste (abaisseur de l'angle de la bouche) avec amélioration
de la portion externe de l'orbiculaire de l'œil pour relever seulement en statique.
la queue du sourcil, ou de la portion interne de l'orbicu-
laire pour relever la tête du sourcil (fig. 13.1). Cela se tra- Au niveau du tiers inférieur et du cou
duit par une chute de la paupière supérieure (à différencier ■ La parésie de l'orbiculaire des lèvres par injection directe
d'une chute du sourcil ; fig. 13.2) apparaissant entre le 3e et peut induire une incontinence salivaire et une incompé-
le 15e jour et totalement réversible en quelques semaines, tence labiale gênante pour boire, siffler, parler, etc. Elle
entraînant une gêne transitoire de la vision. La prévention peut survenir également par injection trop haute de
nécessite le dépistage d'un ptosis minime préexistant et l'abaisseur de l'angle de la bouche.
consiste à injecter en dehors du rebord orbitaire osseux et ■ La diffusion à l'abaisseur de la lèvre inférieure peut se faire lors

à éviter tout massage ou toute manipulation des points de l'injection de l'abaisseur de l'angle de la bouche et sera alors
injectés en post-injection. Le traitement consiste à stimu- à l'origine d'une fuite salivaire et d'un trouble de l'élocution.
ler la contraction du muscle de Müller soit en utilisant un ■ La diffusion au carrefour aérodigestif lors de l'injection des

collyre (apraclonidine à 0,3 % = Iopidine®), soit en injec- cordes plathysmales peut se traduire par une dysphagie ou
tant une goutte de BoNT dans la partie médiane prétar- une gêne respiratoire à l'inspiration forcée, mais reste
sale superficielle du muscle, hautement concentrée et à exceptionnelle en respectant les doses préconisées.
1 mm du rebord ciliaire [6]. Il est important de respecter les unités recommandées pour
■ Diplopie : elle est due à la diffusion de BoNT vers les mus- chaque toxine ainsi que les concentrations et les sites anato-
cles oculomoteurs intraorbitaires (muscle droit externe miques précis (notamment la profondeur).
par injection de la patte d'oie) réversible spontanément.
Effets secondaires liés à la balance
musculaire
Position et forme des sourcils
La position et la forme du sourcil sont conditionnées par
l'équilibre entre les forces des différents muscles de la balance
musculaire fronto-orbitaire (fig. 13.3). Il existe un seul mus-
cle élévateur, le frontal, et tous les autres muscles sont abais-
seurs : procérus, orbiculaire de l'œil, abaisseur du sourcil et
corrugateur. Il faut donc anticiper l'action de relaxation de la
toxine afin de rétablir une symétrie, ou de relever une des
Fig. 13.1  Les trois zones à risque de ptosis palpébral : corrugateur, portion trois parties ou la totalité du sourcil [8].
externe de l'orbiculaire de l'œil, portion interne de l'orbiculaire de l'œil. L'injection trop bloquante du muscle frontal peut entraî-
Source : C. Raimbault. ner une ptose des sourcils, alors que si la partie externe du
frontal est sous-traitée, on pourra observer le fameux effet
Méphisto qui sera facilement corrigé à J15 par une injection
externe et latérale du frontal (fig. 13.4).

Exagération des rides nasales


La mise au repos des muscles du sourire peut entraîner une
compensation par hypercontraction du muscle nasal et exa-
gération des bunny lines.
Fig.  13.2  Ptosis de la paupière supérieure gauche par diffusion de la
toxine vers le muscle releveur de la paupière.
Modification de l'expression faciale
Source : C. Raimbault. Voir [9].

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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 13. Toxine botulinique : effets secondaires et gestion des complications

1
3
2

Fig. 13.3  Balance fronto-orbitaire. Muscle élévateur/muscles abaisseurs.


1. Le muscle frontal est le seul muscle élévateur du sourcil, sauf dans son tiers externe. Les autres muscles sont tous abaisseurs :
2. Muscle corrugateur du sourcil. 3. Muscle procérus. 4. Muscle orbiculaire. Le petit muscle abaisseur du sourcil n'apparaît pas sur ce schéma.

Sécurité à long terme

Immunogénicité
Les facteurs de risque connus sont les doses par séance, les
intervalles interinjections, le type de toxine et probablement
une prédisposition génétique [12]. Quel est le rôle des com-
plexes protéiniques et des excipients ?
Certains défendent le fait que les BoNT sans complexes
protéiniques seraient moins antigéniques, mais aucune
étude ne prouve cette hypothèse [13]. Dans la méta-analyse
de Fabbri [14] sur 61 études et 8 525 patients, le dosage des
anticorps neutralisants montrent que nombre de patients
Fig. 13.4  Traitement excessif avec ptosis des deux sourcils. non répondeurs n'ont pas ces anticorps alors que d'autres
Source : C. Raimbault.
patients répondeurs en sont porteurs. La conséquence de
développer cette immunogénicité est la résistance au traite-
Complications systémiques ment qui pourrait nécessiter d'utiliser un autre sérotype. Il
apparaît donc très important de respecter la dose minimale
La toxicité aiguë est dose-dépendante : la dose létale 50 efficace ainsi que l'intervalle minimal recommandé de 3 mois
chez le singe est de 22 à 30  flacons de Botox® et 44 à interséance.
60  flacons de Dysport® en intramusculaire. Les BoNT
médicaments ne sont pas une arme biologique car elles
sont très fragiles dans le milieu extérieur. Ainsi, les doses Effets musculaires
utilisées en esthétique sont extrêmement faibles (75 U de L'atrophie musculaire apparaît après injections répétées de
Vistabel® sont utilisées au maximum pour le tiers toxine et est totalement temporaire et réversible, ce qui est
supérieur). très rassurant ; elle peut être minimisée en espaçant les injec-
Les manifestations systémiques observées sont  : un choc tions [15]. Elle explique la durabilité de l'effet et l'observation
anaphylactique, un malaise vagal, des manifestations de d'atrophie, par exemple creusement périoculaire après plu-
« botulisme » par probable passage dans la circulation sieurs années d'injections répétées dans une même zone.
sanguine. Cette atrophie est réversible à l'arrêt des injections.
Les symptômes sont : maux de tête, vertiges, insomnie, Plus récemment, une revue de 504  publications n'a pas
fatigue, vision trouble, troubles de l'ouverture des yeux, permis d'élucider le mécanisme de cette atrophie [16].
troubles de la parole, dysphagie, bourdonnements, consti-
pation et anxiété. Ces symptômes cliniques sont apparus
après l'injection de BoNT, en particulier du 2e au 6e  jour Conclusion
[10]. L'injection de sérum antitoxine botulique ou de
pyridostigmine peut constituer une approche efficace pour La revue de la littérature, le nombre croissant d'injections
améliorer les résultats cliniques des cas de botulisme [11]. dans le monde, le recul de plus de 20 ans démontrent que les

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Section 3. Toxines botuliniques
Chapitre 13. Toxine botulinique : effets secondaires et gestion des complications

effets secondaires sont minimes, localisés et transitoires. Les [7] Ho RW, Fang PC, Chang CH, et al. A review of periocular botuli-
éviter nécessite de bien connaître l'anatomie statique et num neurotoxin on the tear film homeostasis and the ocular
surface change. Toxins (Basel) 2019;11(2). pii : E66.
dynamique, de bien connaître les caractéristiques de la BoNT
[8] Carruthers  A, Carruthers  J. Eyebrow height after botulinum
choisie, de bien sélectionner les patients et de respecter les toxin type A to the glabella. Dermatol Surg 2007;33:S26–31. 1
règles d'injection. Ainsi, les effets secondaires sont minimisés Spec No.
et font des injections de BoNT une technique sûre avec une [9] Michaud T, Gassia V, Belhaouari L. Facial dynamics and emotional
haute satisfaction des patients et des médecins. expressions in facial aging treatments. J Cosmet Dermatol
2015;14(1):9–21.
Références [10] Bai  L, Peng  X, Liu  Y, et  al. Clinical analysis of 86  botulism cases
caused by cosmetic injection of botulinum toxin (BoNT).
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matic review and meta-analysis. Curr Med Res Opin 2004;20(7):981– [11] Rouientan  A, Alizadeh Otaghvar  H, Mahmoudvand  H,

90. Review. Tizmaghz A. Rare complication of botox injection: a case report.
[2] Brin  MF, Boodhoo  TI, Pogoda  JM, et  al. Safety and tolerability of World J Plast Surg 2019;8(1):116–9.
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Aesthetic Plast Surg 2016;40:769–77. [14] Fabbri M, Leodori G, Fernades RM, et al. Neutralizing antibody
[4] Carruthers A, Sadick N, Brandt F, et al. Evolution of facial aesthe- and botulinum toxin therapy: A systemic review and meta analy-
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2e éd. Paris : Arnette ; 2013. [16] Salari M, Sharma S, Jog MS. Botulinum toxin induced atrophy: an
[6] Wijemanne  S, Vijayakumar  D, Jankovic  J. Apraclonidine in the uncharted territory. Toxins (Basel) 2018;10(8):313.
treatment of ptosis. J Neurol Sci 2017;376:129–32.

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)

Chapitre 14
Généralités sur l'acide
hyaluronique
C. Raimbault

Composition lage hyalin, du liquide synovial et du cordon ombilical [1].


L'AH, très hydrophile, hydrate et protège la peau. Les
L'acide hyaluronique (AH) est un glycosaminoglycane natu- enzymes telles que la hyaluronidase et les radicaux libres
rel composé d'acide glucuronique et de N-acétyl glucosa- dégradent continuellement les polymères d'AH libres dont
mine disaccharide (fig.  14.1). Le corps humain moyen la demi-vie est de 1 à 2 jours. Sa production diminue avec
contient en moyenne 15 g d'AH. La moitié se trouve dans la l'âge.
peau, le reste est un composant du vitré de l'œil, du carti-

COO– H CH2OH

H O
H OH H
H O H O
H H H
O

NH O
OH OH

COCH3

Fig. 14.1  L'acide hyaluronique est un polymère linéaire formant des chaînes macromoléculaires composées d'acide glucuronique et de N-acétyl
glucosamine disaccharide.

Synthèse Enchevêtrement de chaînes


d'acide hyaluronique

L'AH est synthétisé principalement à partir de Streptococcus equi


et purifié par précipitation d'alcool pour éliminer les antigènes
réactifs [2]. Les produits Hylaform® étaient extraits de crêtes de
coqs et contre-indiqués chez les patients allergiques aux protéines
aviaires.
L'AH libre en solution doit être réticulé pour augmenter
sa durée de vie dans les tissus et diminuer sa dégradation
par les enzymes ou par les radicaux libres. Les agents réti-
culants, qui lient les molécules d'AH entre elles, sont prin-
cipalement le BDDE (1,4-butanediol diglycidyl éther) et Processus de réticulation
parfois le DEO (2,7,8-diépoxyoctane) ou le divinyl sulfone.
Le BDDE est rincé après la réticulation de telle sorte que
les quantités restant dans le gel sont infimes. Il serait non
toxique, mais cette notion est controversée [3]. D'autres
agents ou procédés de réticulation sont à l'étude. Plus le
taux de réticulation est élevé, plus le gel est rigide et résis-
tant à la déformation. Pour pouvoir être injecté à travers
une aiguille ou une canule, le gel doit être suffisamment Fig. 14.2  Technique de réticulation.
fluide et les firmes emploient des procédés de fabrication
ou de calibration différents (fig. 14.2).
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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 14. Généralités sur l'acide hyaluronique

Ainsi, un gel biphasique est constitué de particules réticu-


lées de taille calibrée en suspension dans l'AH libre (tech-
nique Nasha ; fig.  14.3). La taille des particules a une
influence sur le lieu d'injection, sa profondeur, la fluidité de
l'injection et le temps de dégradation du produit. Les gels
monophasiques, non particulaires, sont soit monodensifiés, Acide
hyaluronique
soit polydensifiés, et ont une consistance lisse. La technique de faible
de réticulation Vycross consiste en liaisons de chaînes d'AH masse
moléculaire
de faible masse moléculaire avec des chaînes de masse
moléculaire élevée (fig.  14.4). L'ajout de lidocaïne ou
d'autres anesthésiques comme la mépivacaïne peut amélio-
rer le confort du patient pendant l'injection sans compro- Acide hyaluronique
mettre considérablement les propriétés rhéologiques du de masse moléculaire élevée
filler [4]. Fig. 14.4  Technique de réticulation Vycross.
Liaison de chaînes d'acide hyaluronique de faible masse moléculaire avec
D'autres formulations existent comme l'adjonction de
des chaînes de masse moléculaire élevée.
mannitol aux propriétés anti-oxydantes dans un gel mono-
phasique d'AH [5].
Rhéologie
C'est une notion importante qui permet de décrire et
d'adapter les qualités de viscosité et d'élasticité d'un AH à
une zone anatomique donnée et à la correction souhaitée
allant de l'hydratation au traitement des rides, à la volu-
métrie en respectant au mieux la dynamique faciale [6].
Un degré de Dans chaque gamme d'AH, les fabricants développent dif-
réticulation férentes qualités d'AH en combinant leurs propriétés vis-
queuse et élastique, leur cohésivité, pour obtenir des gels
avec des propriétés spécifiques décrites par leur force d'ex-
trusion, leur malléabilité, leur capacité de soulèvement ou
d'intégration tissulaire, leur pouvoir hydratant.

Viscoélasticité
Particules de Un gel visqueux se déformera plus facilement pour son
extrusion à travers l'aiguille ou la canule ; un gel élastique
taille contrôlée
reprendra sa forme après déformation.
Quatre paramètres définissent les propriétés viscoélas-
tiques d'un gel :
■ force de cisaillement ou G* : mesure l'énergie totale néces-

saire pour déformer un matériau par cisaillement ou par


torsion autour d'un axe. C'est une mesure globale pour
définir les capacités viscoélastiques et la dureté d'un gel ;
■ élasticité ou G′ : mesure la capacité d'un gel à reprendre sa

forme après déformation, correspondant à la fraction de


l'énergie de G* restituée après cisaillement ;
Différentes ■ viscosité ou G″ : reflet de l'incapacité du gel à reprendre

textures de gel totalement sa forme après déformation correspondant à


la fraction de G* perdue après cisaillement ;
■ tan δ  : ratio G″/G′, indique si un gel est plus élastique

(tan δ < 1) ou plus visqueux. Si ce rapport est proche de 0,


le fluide est élastique, proche d'un solide. Plus le rapport
est proche de 1, plus le fluide est visqueux, moins sa com-
posante élastique est importante.
Gel ferme lyftant Gel viscoélastique
Par ailleurs, la résistance à la déformation d'un gel G* et
Fig. 14.3  Technique de calibration Nasha.
son élasticité G′ augmentent avec son degré de réticulation
(cross-linkage élevé).

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 14. Généralités sur l'acide hyaluronique

Cohésivité volumateurs [11]. Les enzymes tissulaires et les radicaux


libres les décomposent en fragments qui sont éliminés par
C'est la résistance à la compression et à l'étirement. Un gel
les macrophages circulants et ensuite par les canaux lympha-
d'AH est formé d'un mélange de particules qui adhèrent plus
tiques. La taille, la forme et l'hydrophilie des particules
ou moins les unes aux autres ; ainsi, la cohésivité représente
influencent la phagocytose.
ces forces d'adhésion internes qui lient les particules entre
elles. Elle augmente avec le degré de réticulation et de
concentration [7]. Plus un gel est cohésif, plus il gardera sa Recommandations
forme lors des mouvements et plus il aura une grande capa- avant traitement [12, 13]
cité de soulèvement des tissus ; moins un gel est cohésif, plus
il s'intégrera facilement dans les tissus et sera malléable. Les risques médicaux liés au patient, aux produits ou aux
procédures doivent être connus pour ne pas compromettre
la bonne réputation des techniques de comblement.
Autres propriétés
Consultation préalable
D'autres propriétés sont :
■ l'hydrophilie : capacités à absorber l'eau, qui détermine le
Une consultation préalable est indispensable pour détecter
risque immédiat d'œdème après injection d'un AH ; une contre-indication, vérifier l'état cutané, remettre les
■ la texture : fine ou avec particules ;
fiches d'information, de recommandations avant traite-
■ la vitesse d'intégration tissulaire ;
ment et faire signer le formulaire de consentement éclairé.
■ la durée de vie ;
Celui-ci doit mentionner les effets indésirables les plus fré-
■ la tolérance.
quents ainsi que les complications plus rares mais graves
telles que la nécrose cutanée et la déficience visuelle. Il est
indispensable de préciser les motivations du patient et de
repérer les attentes irréalistes, ou les dysmorphophobiques.
Intégration tissulaire [8, 9] La consultation permettra d'orienter le patient et d'obtenir
Une fois injecté, le gel s'ancre dans la peau et ne migre son accord dans le choix des zones à traiter pour corriger les
pas (fig. 14.5). Les gels biphasiques forment de gros agré- signes de vieillissement ou pour embellir un visage, de plani-
gats répartis régulièrement dans le derme et semblent fier le nombre de séances nécessaires et de remettre un
écarter les faisceaux de collagène. Les gels monopha- devis.
siques monodensifiés forment des agrégats plus petits, L'AH n'a pas de spécificité tissulaire ni d'espèce et est
tandis que les gels monophasiques polydensifiés s'in- considéré comme immunologiquement inerte. Il est
tègrent uniformément dans le tissu environnant, en rai- beaucoup moins allergisant que le collagène injecté aupa-
son de leur large spectre de tailles de particules. L'effet ravant. Les cas de réactions d'hypersensibilité retardée
Tyndall réalisant un aspect bleuté sous la peau résulte de sont rares et estimés à moins de 1 pour 5 000. Toutefois, il
l'injection trop superficielle de gros agrégats de gels est souhaitable de respecter les précautions qui peuvent
d'AH. être liées au patient, au produit ou à la procédure.

Dégradation tissulaire Précautions liées au patient


La longévité des produits de comblement dans la peau Les patients doivent être soigneusement sélectionnés en res-
dépend de leur vitesse de dégradation tissulaire [10]. Pour pectant les contre-indications cutanées ou systémiques.
les AH, elle est de 6 à 18 mois voire 24 mois pour certains AH Cette évaluation doit être renouvelée avant chaque acte afin

Fig. 14.5  Aspect de l'acide hyaluronique 5 mois après l'injection d'une papule de 0,1 ml sur l'avant-bras.
Photographies à partir d'une biopsie.
Source : C. Raimbault.

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 14. Généralités sur l'acide hyaluronique

de ne pas omettre une nouvelle pathologie ou une modifica- ■ antécédents chirurgicaux : une modification de l'anatomie
tion du terrain immunologique ou inflammatoire survenue et en particulier de la vascularisation est possible avec un
après le dernier traitement esthétique. risque vasculaire augmenté, par exemple lors de rhinoplas-
Les éléments suivants doivent être surveillés : ties médicales après chirurgie nasale ;
■ antécédents allergiques sévères ou anaphylaxie, allergie ■ antécédents esthétiques : il est conseillé d'évaluer le degré

aux anesthésiques locaux ; de satisfaction du patient lors des traitements esthétiques


■ traitements anticoagulants  : il ne s'agit pas d'une contre-­ antérieurs.
indication stricte. L'injection doit être prudente, réalisée à
la canule et suivie d'une compression prolongée de la zone ; Précautions liées aux produits
■ éviter la prise de médicaments anti-agrégants plaquet-
En Union Européenne, les produits doivent avoir un mar-
taires tels que l'aspirine, les anti-inflammatoires non sté-
quage CE, mais cela n'est pas une garantie suffisante. Il faut
roïdiens (AINS) une semaine avant la procédure. Certains
éviter l'achat sur Internet (contrefaçons).
aliments auraient aussi des propriétés fluidifiantes et leur
La fréquence des réactions d'hypersensibilité a diminué
éviction est recommandée dans certaines publications  :
depuis la purification des AH contenant moins de contami-
vin, huiles de saumon rouge, chocolat noir, pamplemousse,
nants protéiques.
Gingko biloba, vitamine E, etc. ;
L'agent réticulant le plus souvent utilisé est le BDDE. Le
■ état cutané : la peau doit être saine, sans inflammation ni
risque de toxicité au long cours semble faible, bien que non
infection. La prévention antiherpétique est utile chez les
évalué en proportion des quantités injectées. D'autres
patients à risque ;
moyens de stabilisation ou réticulation sont à l'étude.
■ état infectieux à distance : traitement différé recommandé
L'ajout d'anesthésiant de type lidocaïne ou mépivacaïne ne
[14]. Par exemple, il est préférable d'éviter les soins den-
semble pas modifier la rhéologie de façon significative [4].
taires et les visites chez l'hygiéniste buccodentaire pendant
les 2 à 4 semaines qui précèdent et qui suivent le traite-
ment afin de réduire le risque d'ensemencement bactérien
Précautions liées à la procédure
hématogène et le développement potentiel d'un biofilm ; Les photographies sont essentielles à des fins médico-légales,
■ contre-indications reposant sur des publications : notam- mais aussi pour évaluer l'efficacité des traitements. Elles seront
ment, description de granulomes sur la zone traitée ou à réalisées au mieux avec la même lumière, sur un fond uniforme,
distance lors de traitement par interféron [15, 16], par avec plusieurs prises de vues : face, trois quart et profil, dans la
omalizumab [17], par inhibiteurs de la tyrosine kinase [18] même position. Le patient est démaquillé et sans bijoux.
ou lors de sarcoïdose ; Les précautions sont les suivantes :
■ précaution concernant les patients porteurs de maladies ■ démaquillage soigneux, désinfection de la peau ;

auto-immunes ou inflammatoires chroniques : il y a peu ■ ambiance propre, pas de déchets qui traînent ;

de publications d'effets secondaires chez ces patients en ■ port de gants non stériles, plateau ou surface propre car

dehors de la survenue de rares cas de syndrome ASIA les seringues ne sont pas stériles ; mise en place d'un ban-
(auto-inflammatory syndrome induced by adjuvants), deau lors de l'utilisation de canule ;
mais il est vrai que peu de patients ont été traités car ils ■ pendant l'injection : ne toucher ni l'aiguille ni la canule ;

sont habituellement récusés pour les comblements, du changer fréquemment d'aiguille ou de canule. Les canules
moins lors des poussées inflammatoires [19, 20]. Toutefois, fines se comportent comme des aiguilles ; préférer des
des publications font état d'une bonne tolérance à long canules d'au moins 25 G, mobiliser constamment l'extré-
terme des AH lors de déficits structuraux acquis liés à des mité de la canule. Utiliser de préférence des aiguilles avec
maladies auto-immunes [21] ou des sclérodermies le plus petit diamètre. Injecter de petits bolus sous faible
[22–25]. Les effets secondaires lors des thyroïdites de pression, aspirer avant l'injection. Cependant, ce test
Haschimoto ont été surtout décrits avec le Dermalive® et d'aspiration ne serait pas toujours fiable car le comporte-
l'Artecoll® (gel polyacrylique et AH ou collagène, arrêt de ment d'un filler dans la lumière de l'aiguille dépend de sa
commercialisation en France). Avec l'Aquamid® (gel de rhéologie, de la taille de l'aiguille ou du biseau, du spasme
polyacrylamide, arrêt de commercialisation en France), ils des vaisseaux [26] ;
l'ont été lors de maladies inflammatoires du tube digestif. ■ surveiller la couleur de la peau et évaluer la douleur res-

La recherche bibliographique ne trouve pas de publica- sentie par le patient (signes précoces d'embolisation) ;
tion concernant ces pathologies et les réactions secon- ■ disposer de hyaluronidase ayant l'autorisation de mise sur

daires avec les AH ; le marché (AMM) en cas d'embole vasculaire [27] ;
■ antécédents d'injection de produit de comblement non ■ éviter de remaquiller après l'injection. Recommander

résorbable (Silicone®, Dermalive®, Artecoll® des années d'éviter le sport, le sauna, le hammam pendant 24 à
1998 à 2006, Aquamid®) : risque nettement accru de réac- 72 heures ou d'effectuer un voyage immédiatement après ;
tions granulomateuses chroniques ; il faut donc exiger de ■ remettre au patient les étiquettes de traçabilité fournies

connaître ce qui a été injecté auparavant en raison de avec les produits ;


grand nomadisme des patients ; ■ disposer d'un récupérateur d'aiguille et de canule.

124
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TECHNIQUES Partie 2
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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 14. Généralités sur l'acide hyaluronique

Conclusion [13] Signorini M, Liew S, Sundaram H, et al. Global aesthetics consensus:


avoidance and management of complications from hyaluronic
acid fillers—Evidence- and opinion-based review and consensus
L'excellente tolérance de l'hôte ainsi que ses propriétés vis-
recommendations. Plast Reconstr Surg 2016;137(6). 961e-71e.
coélastiques et hydratantes font de l'acide hyaluronique un [14] Beleznay  K, Carruthers  JD, Carruthers  A, et  al. Delayed-onset

produit de comblement idéal. nodules secondary to a smooth cohesive 20 mg/mL hyaluronic acid
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Section 4. Les produits de comblement (fillers)

Chapitre 15
Comblement du tiers supérieur
du visage
C. Raimbault

Introduction Front et glabelle


Le support osseux comporte l'os frontal jusqu'à la crête
Le tiers supérieur a une importance primordiale dans l'ex-
temporale et l'arcade orbitaire. En profondeur, la galéa
pression faciale des émotions.
est une aponévrose en forme de casque, d'où son nom.
Son vieillissement est surtout lié à l'action des muscles
Elle est tendue entre l'occiput, le front et les régions tem-
peauciers, corrugateur, procérus, frontal et orbiculaire qui
porales. Elle s'insère sur les rebords supra-orbitaires et
entraînent l'apparition de rides dynamiques pour lesquelles
sur la racine du nez. Latéralement, elle se confond avec le
l'action de la toxine botulinique est le traitement de pre-
fascia temporopariétal superficiel qui recouvre la région
mière intention [1]. Les produits de comblement étaient
temporale. Entre la galéa et le périoste existe un espace
utilisés pour corriger les rides du lion persistantes malgré
de glissement, mais des adhérences avec le périoste
l'immobilisation des muscles de la glabelle. Leurs indications
existent surtout à la partie basse du front. Elles sont
ont évolué et se sont élargies aux traitements du front, des
variables selon les individus. Le muscle frontal repose sur
sourcils, des tempes.
la galéa ; il s'insère sur les deux tiers internes du sourcil
Lors du vieillissement, les traits de la partie supérieure
jusqu'à la crête temporale, à l'aplomb de la courbure du
du visage se durcissent avec l'apparition d'arcades orbi-
sourcil. Le coussinet graisseux de Charpy est situé sous le
taires plus saillantes, d'une perte d'os facial en regard
sourcil.
des sinus, de dépression au niveau des tempes, et d'une
ptose des sourcils souvent associée à un blépharochala-
Vascularisation [2]
sis. Une squelettisation peut aussi survenir avec la dispa-
rition de la graisse péri-orbitaire et le creusement des Les artères supra-orbitaires et supratrochléaires sont
tempes. issues de la carotide interne et forment dans la zone naso-
L'amélioration des techniques de comblement, leur plus glabellaire une arcade vasculaire avec les artères nasales
grande sécurité et une meilleure connaissance anatomique dorsales et angulaires issues de la carotide externe
de cette zone à risque entraînent une augmentation des (fig. 15.1). Elles ont un trajet vertical et se divisent en plu-
procédures esthétiques, mais requièrent une bonne expé- sieurs branches réalisant un aspect de chandelier. Elles
rience. Ces techniques sont réservées aux injecteurs deviennent rapidement superficielles après leur sortie de
expérimentés. l'orbite et traversent la galéa le plus souvent au niveau de
Chez la femme, le front doit être légèrement convexe, les la première ride horizontale du front. Les artères supra-
tempes plates ou légèrement bombées, sans dépression ou trochléaires sont très proches des rides de froncement de
concavité. Le sourcil est idéalement situé au-dessus du la glabelle [3].
rebord orbitaire ; il a une forme courbe, la queue du sourcil
étant légèrement surélevée. Chez l'homme, il est plus bas,
Innervation
plus plat et horizontal, situé en regard de l'arcade orbitaire. Les nerfs comprennent le nerf supratrochléaire, qui court
Ces critères esthétiques peuvent varier selon les ethnies et avec le muscle corrugateur, sous le fascia frontalis pour
doivent être pris en compte. innerver le front médial et central, et le nerf supra-orbitaire,
qui sort du foramen ou de l'encoche orbitaire supérieure et
passe sous le fascia frontalis pour innerver la partie antérola-
Anatomie térale du crâne et le cuir chevelu.
Le tiers supérieur est limité en bas et latéralement par l'ar-
cade zygomatique, au centre par les os propres du nez, en Tempes
haut par la ligne d'implantation des cheveux. Il comporte le La fosse temporale est une dépression peu profonde sur la
front, la glabelle et les tempes. partie latérale du crâne délimitée par la crête temporale en

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 15. Comblement du tiers supérieur du visage

1 2 3 4 5

1. Artère et veine nasale dorsales


2. Artère et veine supratrochléaires
6 3. Artère et veine supra orbitaires
4. Artère et veine ophtalmiques
7 5. Artère et veine centrales de la rétine
6. Artère et veine nasociliaires
7. Artère et veine angulaires
8 8. Artère et veine zygomatiques
9 9. Artère et veine sous-orbitaires

7 1. Artère supratrochléaire
1 2 2. Artère supra-orbitaire
3. Arcade orbitaire
4. Arcade zygomatique
8 3 5. Artère nasale latérale
6. Artère nasale dorsale
7. Artère temporale superficielle
6 4 8. Réseau issu de la CI
9. Réseau issu de la CE
5
B 9
Fig. 15.1  Anatomie vasculaire du tiers supérieur.
A. Les artères supra-orbitaires et supratrochléaires sont issues de la carotide interne et forment dans la zone nasoglabellaire une arcade vasculaire avec les
artères nasales dorsales et angulaires issues de la carotide externe. B. Vascularisation du tiers supérieur : réseau issu de la carotide interne (CI) et réseau
vasculaire issu de la carotide externe (CE). Il existe de nombreuses anastomoses entre ces deux réseaux dans la zone nasoglabellaire. À la glabelle, les artères
deviennent rapidement superficielles et sont proches des rides du froncement. L'artère temporale superficielle est palpable devant la ligne d'implantation
des cheveux.
Sources : fig. A, d'après Carruthers JD, et al. 2014;134:1197–201, fig. B, C. Raimbault.

haut, le processus frontal de l'arcade zygomatique en avant, L'artère et la veine temporales moyennes se trouvent juste
et le processus temporal du zygoma en bas [4, 5]. En esthé- sous les vaisseaux superficiels, entre le fascia temporoparié-
tique, la limite postérieure est la ligne d'implantation des tal et le fascia temporal profond. Les vaisseaux temporaux
cheveux. De la superficie vers la profondeur, on distingue : la profonds se trouvent sous le muscle temporal, au-dessus de
peau et la graisse sous-cutanée, le fascia temporal superficiel la couche profonde du fascia temporal. La veine temporale
(ou temporopariétal), le fascia temporal profond, le tissu moyenne suit un trajet parallèle à l'arcade zygomatique et se
sous-aréolaire lâche, le muscle temporal, le périoste et l'os. situe au moins 1,5 cm au-dessus [6]. La région temporale est
riche en veines visibles sous la peau avec un bon éclairage.
Vascularisation
Toutes les branches dépendent de la carotide externe. Dans
la fosse temporale, trois niveaux de vaisseaux se succèdent. Traitement
L'artère temporale superficielle est située dans le fascia tem-
poropariétal, mais elle devient plus superficielle lorsqu'elle se
rapproche du bord latéral du muscle frontal à l'aplomb de la Traitement des rides de la glabelle
courbure du sourcil. Elle est sinueuse, palpable ou même Le risque d'embolisation vasculaire est très important dans
parfois visible en avant de la ligne d'implantation capillaire cette zone et fait l'objet de nombreuses publications car une
dans la partie postérieure de la tempe. nécrose cutanée peut survenir en l'absence de traitement
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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 15. Comblement du tiers supérieur du visage

­ récoce par la hyaluronidase [7]. Des cas de cécité ou d'acci-


p
dent vasculaire cérébral ont aussi été décrits si le filler est injecté
de façon rétrograde avec une forte pression jusqu'aux artères
rétiniennes ou carotidiennes, où il peut alors suivre un flux
antérograde [8].
L'injection à l'aiguille de 30 G doit être prudente, intrader-
mique rétrotraçante, superficielle sous la ride ou en multi-
ponctures avec un produit G′ modéré pour éviter tout
m
risque de compression vasculaire (fig. 15.2). L'injection à la 1c

1
canule sera réalisée de préférence avec une canule de 25 G.

cm
Veine temporale médiane

1,5 cm

Fig. 15.3  Injection des fosses temporales à l'aiguille.


Préférer la zone relativement avasculaire de la partie haute et antérieure de
la fosse temporale. Zone de sécurité en jaune. Injecter un bolus de 0,5 à
1 ml. Un point d'injection plus médial, juste en arrière de l'arcade orbitaire,
permet de relever légèrement la queue du sourcil.
Source : C. Raimbault.

Injection à l'aiguille
Les points de repère sont la crête temporale et le rebord
orbitaire. L'injection se fait par un point d'entrée situé
latéralement à 1 cm du rebord orbitaire et à 1 cm sous la
crête temporale [10]. Insérer l'aiguille perpendiculaire-
ment à la peau jusqu'au périoste, aspirer et injecter lente-
ment un bolus suprapériosté. Une pression digitale le
long de la ligne capillaire empêchera la propagation du
produit vers les cheveux. Après avoir retiré l'aiguille, il
faut exercer une compression de quelques minutes pour
éviter une ecchymose si une veine profonde est touchée.
Le volume injecté est de 0,5 à 1 ml par côté, parfois plus si
la perte de volume est marquée. Il faut éviter une injec-
tion trop postérieure, sous le corps du muscle temporal
qui pourrait entraîner la diffusion du produit de comble-
ment sous l'arcade zygomatique vers la joue. Comme l'in-
jection est profonde, on préférera un produit
volumateur.
Un deuxième point d'injection plus médial juste en arrière
de l'arcade orbitaire permet de relever la queue du sourcil et
Fig. 15.2  Rides de la glabelle. de compléter le comblement la partie antéro-interne de la
Injection rétrotraçante avec une aiguille fine ou en multiponcture. Elle doit tempe.
rester strictement superficielle intradermique en raison du danger vasculaire.
Source : C. Raimbault.
Injection à la canule
Traitement des tempes Le prétrou est situé au moins 1,5 cm au-dessus de l'arcade
Il faut repérer l'artère temporale qui est souvent palpable ou zygomatique en repérant bien les veines superficielles
parfois visible sous une peau fine (on peut la rendre turges- nombreuses dans cette zone, de préférence dans la zone
cente en tapotant la peau pour mieux la voir). Il faut éviter prétrichienne. On préfère une canule de 25  G qui sera
les zones postérieure et inférieure de la tempe et préférer la introduite dans un plan sous cutané. L'injection se fait en
zone relativement avasculaire de la partie haute et antérieure éventail en mobilisant de façon constante mais douce l'ex-
de la fosse temporale (fig. 15.3). trémité de la canule pour délivrer de façon régulière le fil-
L'injection peut se faire à l'aiguille ou à la canule [9]. ler et éviter une embolisation vasculaire (fig. 15.4).

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Chapitre 15. Comblement du tiers supérieur du visage

Fig. 15.4  Injection des tempes à la canule.


Le point d'entrée est situé dans la zone prétrichienne au-dessus de l'arcade zygomatique. L'injection sous-cutanée en éventail est prudente en raison des
nombreux vaisseaux superficiels dans cette zone. Bien masser pour répartir le produit. Prévenir le patient du risque de turgescence temporaire des veines
superficielles.
Source : C. Raimbault.

Elle est suivie d'un massage pour bien répartir le produit. Une injection à l'aiguille réalisant de multiples rétrotra-
Il faut prévenir le patient d'un risque de congestion tem- çantes dans le corps du muscle selon une forme rappe-
poraire des veines. Le filler doit être modérément visco­ lant celle d'une plume a aussi été décrite pour reconstituer
élastique pour être massé. le volume du sourcil [11]. Le risque d'ecchymose est
important et une compression est utile, mais tout le
Remodelage du sourcil sourcil peut être ainsi injecté, notamment dans sa partie
Les produits de comblement permettent de repositionner la interne.
queue du sourcil ou de restaurer son volume.
Restaurer le volume à l'aide d'une injection à la
Injection à l'aiguille pour lifter la queue du canule
sourcil Le prétrou est placé à l'extrémité de la queue du sourcil.
Insérer l'aiguille au niveau de la queue du sourcil juste en L'injection se fait de façon rétrograde régulièrement
arrière de l'anneau orbitaire, jusqu'au périoste (fig.  15.5). sous le muscle orbiculaire pour restaurer le volume
Aspirer et injecter un bolus en évitant la diffusion vers la (fig. 15.6).
paupière supérieure puis masser. Un deuxième point légère-
ment plus haut peut être utile en évitant le foramen
supra-orbitaire.

Fig. 15.6  Reconstitution du volume du sourcil.


Le prétrou est placé à l'extrémité de la queue du sourcil. L'injection se fait
de façon rétrograde régulièrement sous le muscle orbiculaire.
Source : C. Raimbault.

Fig. 15.5  Relever la queue du sourcil.


Insérer l'aiguille au niveau de la queue du sourcil juste en arrière de l'anneau Traitement des dépressions frontales
orbitaire, jusqu'au périoste. S'aider d'une bonne lumière pour éviter les
La zone de sécurité est profonde, sus-périostée, sous-galéale
veines superficielles, nombreuses dans cette zone. Aspirer, injecter un
bolus et masser. car les artères supratrochléaires ou supra-orbitaires deviennent
Source : C. Raimbault. rapidement superficielles après avoir traversé la galéa.

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Injection à l'aiguille Injection à la canule dans un plan horizontal


De 4 à 6 points sont situés au moins à 2 cm au-dessus de la L'aiguille de prétrou est orientée vers la profondeur. Le pré-
courbure des sourcils. Le point le plus externe est placé à l'ex- trou est placé à l'extrémité latérale des dépressions frontales,
trémité latérale des rides frontales. Deux autres points sont en position médiale par rapport à la crête temporale. Après
répartis entre les artères supra-orbitaires et supratrochléaires introduction de la canule d'au moins 25 G, il faut traverser la
ou entre les artères supratrochléaires et la ligne médiane galéa et donc soulever la peau avec la main controlatérale
(fig. 15.7). pour franchir l'aponévrose qui offre une légère résistance.
L'injection des bolus est profonde, sus-périostée. Aspirer L'injection profonde se fait par un nappage parallèle au sour-
avant d'injecter et masser soigneusement pour répartir le cil (fig. 15.8).
produit. Une autre technique peut être réalisée avec 3 à 5 points
d'entrée placés dans la partie supérieure du front, le trajet
de la canule étant vertical orienté vers les sourcils et
sous-galéal. Le premier se situe au centre entre les vais-
seaux supratrochléaires, les suivants, plus latéralement
entre les vaisseaux supratrochléaires et supra-orbitaires,
ou encore plus latéralement entre ces derniers et l'artère
temporale.

Conclusion
Le traitement du tiers supérieur par produit de comble-
ment ne doit pas être négligé, car il adoucit et harmo-
nise les traits de l'ensemble du visage. Il complète le
traitement par la toxine botulinique qui s'adresse sur-
tout à la correction des rides dynamiques, mais sans
restauration des volumes. Toutefois, les nombreuses
­
communications et anastomoses entre les réseaux
­carotidiens externe et interne de cette zone doivent
conduire à la plus grande vigilance quant au risque
d'embolisation artérielle.
Références
[1] de Maio M, Swift A, Signorini M, Fagien S. Aesthetic Leaders in Facial
Aesthetics Consensus Committee. Facial assessment and injection
Fig. 15.7  Injection des dépressions frontales à l'aiguille. guide for botulinum toxin and injectable hyaluronic acid fillers:
La zone de sécurité est profonde, sus-périostée, sous-galéale. Injecter 4 à focus on the upper face. Plast Reconstr Surg 2017;140(2). 265e-76e.
6 bolus au moins à 2 cm au-dessus de la courbure des sourcils. Masser pour [2] Carruthers JDA, Carruthers JA. Appreciation of the vascular anatomy of
une répartition homogène. aesthetic forehead reflation. Dermatol Surg 2018;44(Suppl 1):S2–4.
Source : C. Raimbault.

Fig. 15.8  Injection des dépressions frontales à la canule.


A. La canule doit plonger vers la profondeur et traverser la galéa qui offre une légère résistance. B. Nappage sous la galéa parallèle au sourcil.
Source : C. Raimbault.

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Chapitre 15. Comblement du tiers supérieur du visage

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TECHNIQUES Partie 2
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Section 4. Les produits de comblement (fillers)

Chapitre 16
Comblement du tiers
moyen du visage
K. Benachour, C. Raimbault

Introduction constitué à la partie supérieure de la joue par le SOOF


(suborbicularis oculi fat), graisse profonde fixe, séparé de la
Le tiers moyen a une grande importance dans la beauté et la graisse superficielle et mobile adhérente à la peau par le
jeunesse d'un visage. On observe idéalement une belle pro- muscle orbiculaire qui est un véritable sphincter. Il agit
jection des pommettes, des joues pleines, convexes et lisses comme un constricteur de la paupière, mais aussi comme un
de la paupière inférieure jusqu'au sillon naso-génien et la élévateur de la joue (fig. 16.2B).
région buccale. La vascularisation dépend des branches de l'artère faciale
Il est issu de la lame infra-orbitaire du deuxième arc issue de la carotide externe et de l'artère infra-orbitaire issue
branchial et constitue un support fondamental aussi bien du foramen infra-orbitaire qui vascularise la paupière infé-
pour le tiers inférieur que le supérieur. Ses altérations rieure, la partie latérale du nez et la lèvre inférieure, et pré-
peuvent aussi retentir sur le vieillissement de ces deux sente de nombreuses anastomoses avec les branches de
autres tiers.
La région, dont le nez est le centre, est délimitée en
dehors par la région temporo-parotidienne, en haut par
une ligne horizontale canthus externe/racine de l'hélix, en
bas par la ligne horizontale commissure labiale/lobule de
l'oreille.

Anatomie
Le tiers moyen repose sur le maxillaire et l'os zygomatique et
comprend la partie osseuse inférieure du cadre orbitoma-
laire qu'ils constituent.
Les tissus sous-cutanés sont composés essentiellement
des compartiments graisseux profonds et superficiels
(fig. 16.1 et 16.2A). Ce système, complexe et segmenté, est

Fig. 16.2  A. Compartiment graisseux profond. B. SOOF (sub-orbicularis


oculi fat) ; compartiment graisseux profond situé sous le muscle orbicu-
Fig. 16.1  Compartiment graisseux superficiel. laire de l'œil (OO).
Source : C. Winter et P. Kestemont. Source : C. Winter et P. Kestemont.

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 16. Comblement du tiers moyen du visage

2 3

11 mm

1
A B C
Fig. 16.3  A. Trajet de l'artère faciale. 1. L'artère faciale sort de la glande sous-maxillaire et traverse la ligne mandibulaire entre l'abaisseur de l'angle
de la bouche et le masséter. 2. Artère labiale supérieure située sous le muscle orbiculaire des lèvres. 3. Artère faciale sous le muscle grand zygoma-
tique. Elle prend ensuite le nom d'artère angulaire et devient superficielle à la partie supérieure du sillon. 4. Artère alaire supérieure s'anastomosant
avec les vaisseaux de la pointe du nez. B. Le foramen infra-orbitaire présente des variations anatomiques, mais il est schématiquement situé à la
verticale du bord médial de l'iris (point vert), jusqu'à un maximum de 11 mm en dessous du rebord infra-orbitaire (un peu moins d'un travers de
doigt). En pointillés noirs : rebord orbitaire. En rouge : position du foramen infra-orbitaire. C. Pédicule vasculonerveux infra-orbitaire.
Source : fig. A et C, C. Winter et P. Kestemont ; fig. B, C. Raimbault.

l'artère faciale (fig.  16.3A). Celle-ci devient superficielle en


haut du sillon naso-génien et prend le nom d'artère angu-
laire. Le foramen infra-orbitaire présente des variations ana-
tomiques, mais il est schématiquement situé à environ un
tiers de la distance entre le canthus médian et latéral des
1
yeux ou à la verticale du bord médial de l'iris, jusqu'à un
maximum de 11  mm en dessous du rebord infra-orbitaire 2
(un peu moins d'un travers de doigt) (fig. 16.3B,C). 3
La correction du vieillissement du tiers moyen est essen- 4
tielle pour supprimer les signes de fatigue et de relâchement 5
qui apparaissent progressivement et dont les mécanismes de
survenue ont bien été décrits dans les chapitres 1 et 2 :
■ atrophie de la graisse profonde fixe au plan osseux ;

■ glissement de la graisse malaire superficielle en bas et en Fig. 16.4  Retaining ligaments à l'origine des poches palpébrales et malaires.
1. Muscle orbiculaire des paupières ; 2. Orbicularis retaining ligament ;
dedans bloquant sur la zone fixe de la lèvre, accentuant le 3. Compartiment adipeux sous-orbitaire ; 4. Zygomatic cutaneous ligament ;
pli d'accumulation naso-génien et se prolongeant vers le 5. Compartiment adipeux malaire.
tiers inférieur à l'origine des bajoues ;
■ cloisonnement de la graisse par les retaining ligaments orbi-

culaires et zygomatiques dans la zone péri-oculaire à l'ori-


gine des poches palpébrales et malaires (fig. 16.4 et 16.5) ;
■ atrophie de la graisse latérale dans la zone prétragienne et

supérieure de la joue ;
■ amincissement du muscle orbiculaire qui devient fenêtré,

étirement du muscle grand zygomatique majoré par la 3 1


ptose cutanée ;
■ résorption osseuse prédominant à la partie interne et

médiane de l'os malaire, creusement orbitaire, recul de la 2


base narinaire par résorption osseuse pyriforme.
Ces phénomènes, plus ou moins marqués et précoces selon
le mode de vieillissement, aboutissent à la modification des
contours du visage avec l'aplatissement du tiers moyen, la 4
perte de projection antérieure de la pommette, la perte de
convexité de la partie supérieure et latérale de la joue.
L'inversion du triangle de la jeunesse est liée au creusement
de la région médiane de la joue, et s'associe à la survenue de Fig. 16.5  Cerne et vallée des larmes.
cernes et de poches malaires. Le sillon naso-­génien devient 1. Sillon palpébromalaire. 2. Sillon médio-jugal. 3. Vallée des larmes. 4. Sillon
profond, des rides jugales apparaissent (voir fig. 16.4 et 16.5). naso-génien.
Source : C. Raimbault.

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Chapitre 16. Comblement du tiers moyen du visage

Plan de traitement
C'est l'analyse précise et personnalisée du vieillissement qui
permettra d'établir le meilleur plan de traitement. Il peut
nécessiter plusieurs séances et des quantités parfois impor-
tantes de produit de comblement avec différentes rhéologies 1
2 3
(voir chapitre 15). La difficulté réside dans le fait que le patient
se focalise souvent sur une zone précise et demande par
exemple la correction de sillons naso-géniens profonds, de 4
rides jugales, sans en identifier l'origine et sans avoir la notion 5
de perte de volume et de ptose des tissus. Il est plus facile de 6
proposer un plan de traite­ment cohérent lorsque la personne
exprime des expressions négatives ressenties telles que la
fatigue ou le relâchement.
L'examen clinique se fait au repos et en dynamique, en
position assise pour analyser l'influence de la gravité. Il
Fig. 16.6  La région malaire est divisée en trois zones : latérale (1), anté-
faut évaluer le degré de perte du volume facial. Les traite­ rieure à l'apex de la joue (2) et interne ou médiale (3).
ments doivent être adaptés aux besoins de chaque Les zones vasculaires à risque sont les vaisseaux et les nerfs zygomatiques dans
patient, en tenant compte des différences ethniques la joue latérale (4), les vaisseaux et nerfs sous-orbitaires issus du foramen
dans la forme du visage, des idéaux esthétiques, du coût infraorbitaire dans la joue interne (5) et les vaisseaux angulaires à la base du
nez (6).
global.
Les photographies sont prises avec des vues de face, de pro-
fil, en oblique et depuis le haut avec la tête rejetée en arrière.
Chez la plupart des patients, le repositionnement vertical Technique d'injection
de la graisse malaire est considéré comme la première étape
du traitement dans le but de restaurer la perte de volume
de la graisse profonde et de redraper l'enveloppe cutanée
Restauration des volumes
sur la structure osseuse faciale. Le point de projection habi- malaires [2] (fig. 16.7 et 16.8)
tuel de la pommette est situé 10 mm latéralement par rap- L'injection peut être réalisée à l'aiguille ou à la canule, sauf
port au canthus latéral de l'œil et 15  mm en dessous de dans la zone du foramen infra-orbitaire où la canule est pri-
l'arcade orbitaire. vilégiée. L'injection de la partie malaire latérale peut se faire
La restauration se fera si besoin dans les trois zones malaires dans deux plans superposés  : à l'aiguille, elle est profonde
[1] : latérale, antérieure et médiale (fig. 16.6). Elle entraîne un effet sus-périostée à l'aide de petits bolus d'acide hyaluronique
lifting avec élévation du sillon palpébromalaire et un raccourcis- (AH) volumateur sur l'arcade zygomatique et nécessite 1 à
sement de la hauteur de la paupière inférieure. Le plus souvent, 3  bolus de 0,1  mL à 0,2  mL. Un bolus sous l'insertion du
elle précède le traitement de la région infra-orbitaire compre- muscle grand zygomatique aura une action de myomodula-
nant le sillon palpébromalaire et le cerne ou vallée des larmes tion en rétablissant son levier et sa force, entraînant une
chez les patients nécessitant une correction de la perte de ascension de la commissure labiale (voir chapitre 20).
volume dans les deux régions. Elle diminue également la profon- Elle peut être complétée par un nappage dans le plan
deur du sillon naso-­génien qui sera souvent traité dans un deu- sous-cutané à la canule, oblique en haut et en arrière chez les
xième temps, mais améliore aussi le pli d'amertume et la bajoue femmes ou plus horizontal chez l'homme pour accentuer le
dans le tiers inférieur. relief de la pommette et rétablir la convexité latérale du
L'injection dans la zone atrophique prétragienne contri- visage (voir fig. 16.8). Il faut éviter de traumatiser l'artère ou
bue aussi à cet effet lifting. le nerf zygomatique dans cette zone.

A B C
Fig. 16.7  Injections malaires.
A. Injection malaire latérale sus-périostée à l'aiguille. B. Injection malaire latérale à la canule. C. Injection malaire interne à la canule.
Source : C. Raimbault.

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Chapitre 16. Comblement du tiers moyen du visage

A B C
Fig. 16.8  Reconstitution du volume malaire et traitement du cerne (A. Avant / B. Injection / C. Après).
Source : C. Raimbault.

La partie malaire antérieure, qui représente l'apex de la doigt pour effacer temporairement le creux du cerne et véri-
pommette, peut être injectée par de petits bolus d'AH fier si cette manœuvre n'aggrave pas la hernie graisseuse
volumateur en position suprapériostée lorsqu'il y a un orbitaire ou la poche malaire.
défaut de projection, ou en sous-cutané avec un AH L'injection peut être réalisée à l'aiguille ou à la canule.
moins cohésif s'il s'agit d'une perte de volume de la Sa profondeur doit être soigneusement contrôlée en
graisse superficielle. Il convient d'éviter toute diffusion position sus-périostée sous le sillon palpébromalaire laté-
du filler vers la paupière inférieure en la protégeant avec ralement et sous le creux du cerne en protégeant le
le doigt. rebord osseux avec le doigt. L'aiguille, de préférence de
L'injection dans la partie malaire interne doit être pru- 30  G, est implantée perpendiculairement à la peau,
dente pour éviter de traumatiser ou d'emboliser le pédi- jusqu'au périoste, puis déplacée vers la zone interne.
cule infra-orbitaire. La zone de sécurité pour une injection L'injection est profonde rétrotraçante et nécessite 2 ou
sus-périostée à l'aiguille se situe latéralement par rapport à 3 points d'entrée espacés de quelques millimètres en res-
la ligne médiopupillaire. Il faut injecter très lentement tant à distance du sommet du sillon nasojugal pour éviter
après aspiration, et utiliser le majeur et l'index pour proté- d'emboliser l'artère angulaire à ce niveau (fig. 16.9). Le fil-
ger l'œil et le foramen infra-orbitaire. L'utilisation d'une ler peut être poussé dans la partie la plus interne à l'aide
canule d'au moins 25  G est préférée si l'injection doit se d'un coton-tige.
faire dans la zone malaire interne en dedans de la ligne La distance entre la peau et le périoste varie beaucoup
médiopupillaire ou si l'injection se fait dans un plan d'un sujet à l'autre ; elle est plus courte dans la partie interne
sous-cutané. Dans ce cas, un unique point d'entrée dans la du cerne où il n'y a pas de graisse profonde. Il est donc
partie moyenne de la joue peut suffire pour traiter l'en- important d'éviter toute surcorrection.
semble de la zone malaire. Si l'injection est effectuée à la canule (fig. 16.10), le pré-
Précautions : il est important d'éviter la surcorrection des trou est au mieux situé dans la région médiane afin de
joues, surtout lorsque le sujet sourit et rit. combler le sillon palpébromalaire et la vallée des larmes
Les quantités d'AH peuvent être importantes pour restau- par le même point d'entrée. On recommande d'utiliser
rer les volumes ; l'association de deux produits de comble- une canule de 25 G, plus rigide, pour mieux contrôler son
ment, un volumateur en profondeur et un AH moyennement trajet et sa profondeur. La canule doit être placée perpen-
viscoélastique en surface, permet de garder un aspect natu- diculairement à la peau, avancée jusqu'au périoste puis
rel lors de la mimique. déplacée vers l'avant jusqu'au sommet du sillon
nasojugal.
Cernes ou vallée des larmes Le produit de comblement doit être adapté à la zone peu
C'est une zone essentielle dans la prise en charge de l'aspect hydrophile et malléable. Les quantités sont en moyenne de
fatigué du regard, mais aussi une des plus difficiles à traiter 0,3 à 0,5 ml par côté : 0,3 à 0,4 ml est distribué en petits bolus
avec des complications fréquentes. La qualité de toutes les à la partie médiane et interne du cerne et 0,1 à 0,2 ml en 1 à
couches superposées doit être soigneusement analysée 2  bolus pour le sillon palpébromalaire. Il est important de
pour éviter les mauvais résultats : l'élasticité de la peau est sous-corriger et d'effectuer des retouches si nécessaire. Les
évaluée par le snap test ; la couleur sombre peut être due au ecchymoses sont plus fréquentes lors d'injection à l'aiguille,
creux mais aussi à l'hyperpigmentation cutanée et doit être les œdèmes transitoires plus fréquents après injection à la
signalée au patient. L'existence d'un défaut de tonicité du canule.
muscle orbiculaire, le prolapsus de la graisse péri-orbitaire, La durée moyenne de la correction dans cette zone est
les œdèmes et poches malaires sont des mauvaises de 18 mois à 2 ans. La technique de comblement devien-
indications. dra d'autant plus difficile que les patients solliciteront de
La palpation permet de vérifier que la dépression du cerne nouveaux traitements au fur et à mesure des années avec
repose bien sur l'os. Pour prédire le succès du résultat, il faut un vieillissement de plus en plus délicat à corriger
pousser vers le haut la peau de la région médiane avec le (fig. 16.11 et 16.12).

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 16. Comblement du tiers moyen du visage

Fig. 16.9  Injection à l'aiguille profonde sus-périostée en plusieurs points.


À l'angle interne, le filler doit être poussé à l'aide d'un coton-tige (C).
Source : C. Raimbault.

Fig. 16.10  A. Injection du cerne à la canule. B. Injection du sillon palpébromalaire à la canule.


Source : C. Raimbault.

Fig. 16.11  Comblement du cerne.


Source : K. Benachour.
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Chapitre 16. Comblement du tiers moyen du visage

Fig. 16.12  Comblement du cerne et du sillon palpébromalaire.


Source : C. Raimbault.

Traitement du sillon naso-génien profondeur (fig. 16.14). La qualité du résultat dépend de la


ptose des tissus malaires qui doit être corrigée dans un pre-
Dans la partie haute du sillon, l'artère faciale peut être située
mier temps si elle est trop marquée.
dans le tissu sous-cutané [3]. L'injection se fera donc de pré-
Le risque d'ecchymose, d'irrégularité est plus grand lors
férence à la canule ou par bolus profond au contact du
d'injection à l'aiguille ; la quantité d'AH nécessaire est plus
périoste. Le prétrou est situé à la partie inférieure du sillon ou
importante avec la canule. Dans certains cas, la peau est fine,
juste en avant, en regard de la commissure labiale.
le sillon peu profond, réalisant plutôt un pli cutané qui sera
La canule est introduite jusqu'au sommet du sillon ; l'injec-
difficile à corriger en une séance. Il est donc préférable d'uti-
tion est rétrotraçante, réalisant un éventail dans la partie
liser successivement deux AH avec une rhéologie différente
supérieure pour combler la dépression entre l'aile du nez et le
en deux séances.
sillon. Il faut éviter la surcorrection en regard de la commis-
sure qui peut réaliser un aspect de « boudin » très disgracieux,
surtout si les joues en arrière sont creuses et la peau fine. On
Traitement des rides jugales
peut dans ce cas préférer une injection à l'aiguille qui sera plus ou « rides en accordéon »
superficielle et délivrera une quantité moindre d'AH. Le traitement est souvent difficile, surtout si l'héliodermie est
Si l'injection est réalisée à l'aiguille (fig. 16.13), elle doit res- importante, et peut être réalisé de plusieurs façons qui
ter strictement intradermique dans la partie supérieure du peuvent être associées : remise en tension des tissus par volu-
sillon pour éviter d'emboliser l'artère faciale, ou préférer un métrie malaire comme décrit plus haut, reconstitution des
bolus profond contre l'os maxillaire pour combler le sinus volumes graisseux jugaux superficiels à la canule (fig. 16.15),
pyriforme. Le long du sillon, l'injection est rétro-traçante et injection rétro-traçante à l'aiguille sous chaque ride en accor-
doit être régulière. On délivre 0,5 à 1  ml par côté selon sa déon avec un risque nettement majoré d'ecchymose.

Fig.  16.13  A. Injection du sillon à l'aiguille. Rester strictement dans un plan dermique en raison du risque d'embolisation de l'artère angulaire.
Injection prudente en éventail. Préférer une injection à la canule. B. Injection du sinus pyriforme par un bolus profond à l'aiguille.
Source : C. Raimbault.

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Chapitre 16. Comblement du tiers moyen du visage

Fig. 16.14  Injection du sillon naso-génien, 0,5 à 1 ml par côté. (A. Avant / B. Après)
Source : K. Benachour.

Ini
pro
fon

Napage
de

canule

Fig. 16.15  Reconstitution des volumes de la pommette, nappage des rides jugales à la canule.
Source : C. Raimbault.

Traitement de l'atrophie graisseuse


pré-auriculaire
L'injection à la canule par un point d'entrée inférieur ou
supérieur déposera le produit de comblement en nappage
sous-cutané pour reconstituer les volumes graisseux superfi-
ciels (fig.  16.16). La quantité de filler peut être importante
dans cette zone.

Fig. 16.16  Reconstitution des volumes dans la zone préauriculaire.


Conclusion Source : C. Raimbault.

La volumétrie du tiers moyen a une grande importance pour quantités d'acide hyaluronique, sauf si les patients débutent
corriger le relâchement, l'aspect fatigué qui s'accentue lors les traitements suffisamment tôt pour restaurer les déficits
du vieillissement du visage. Elle nécessite d'importantes dès leur apparition.

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 16. Comblement du tiers moyen du visage

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Chapitre 17
Comblement du tiers
inférieur du visage
M.-P. Loustalan

Le tiers inférieur est un point clé de l'harmonie du visage. Le TVL


soutien apporté par le comblement des déficiences structu-
relles liées à l'âge redonne un support à l'ensemble du visage
et améliore ses proportions.
Il met en évidence le phénomène de myomodulation en
permettant une levée de l'hypertonie musculaire à l'origine THL
d'une cascade d'améliorations esthétiques.
Nous traiterons successivement les différentes parties du Columelle

tiers inférieur, puis nous nous intéresserons aux multiples et Stomion


belles répercussions esthétiques du comblement de cette
Sillon labiomentonnier
région.
Pogonium
Point menton

Examen du tiers inférieur Angle cervicomentonnier

Fig. 17.2  La ligne mandibulaire idéale doit être rectiligne depuis l'angle


L'examen doit être effectué de face et de profil. postérieur jusqu'au menton sans bajoue.
Il évaluera les proportions du visage tiers/deux tiers THL : true horizontal line (ligne horizontale reliant la partie supérieure du
tragus au plancher de l'orbite) ; TVL : true vertical line (perpendiculaire à la
(fig. 17.1) et la hauteur du menton, et notamment : THL passant par la columelle) ; Pogonium : point le plus antérieur ; Point
■ les plis d'amertume et la perte graisseuse ; menton : point le plus inférieur.
■ l'occlusion, le support osseux et dentaire ;

■ la projection du menton sur le profil (fig. 17.2) ;

■ le degré de ptose ; Indications


■ l'ovale et en particulier l'angle cervico-mentonnier (121°).
Les indications sont :
■ la perte du volume graisseux et les déficiences structu-
relles secondaires (fig. 17.3 et 17.4) ;
Nombre d'or
a/b = (a+b)/a
b = 1 , a = 1,618

Columelle
1/3
Stomion
Sillon labiomentonnier
2/3

Point menton

Fig. 17.1  Le respect des proportions donne l'harmonie au visage.


La position et la hauteur du menton ont une importance capitale pour le
respect des bonnes proportions du visage. Fig. 17.3  Atrophie de la graisse péribuccale.

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Sillon jugo-mentonnier Creux de la fosse mandibulaire

Encoche mentonnière

Sillon labio-mentonnier
Fig. 17.4  Atrophie graisseuse, adhérences et cassures du derme, apparition des sillons jugo-mentonnier, labio-mentonnier, des encoches menton-
nières, de la fosse mandibulaire.

THL

TVL Fille Mère


Fig. 17.5  Photographies comparatives mère/fille.
Rétrogénie et raccourcissement du menton. Fermeture de l'angle labio-mentonnier. Ouverture de l'angle cervico-mentonnier.

■ la rétrogénie et la diminution de la hauteur du menton Pli d'amertume (fig. 17.6)


(fig. 17.5) ;
L'injection peut être réalisée à la canule. Le point d'entrée est
■ la perte de l'ovale du visage.
placé à son pôle inférieur. La canule remonte jusqu'au
Lors du vieillissement, la déficience structurelle du visage
modiolus où elle dépose un petit bolus, puis l'injection est
entraîne une hypertonie musculaire réactionnelle respon-
rétrotraçante, progressive et adaptée avec un nappage trian-
sable de la rétrogénie et du raccourcissement du menton.
gulaire de la région.
Le comblement réalisé à l'aiguille est moins nappant mais
Techniques d'injection permet de placer facilement des lignes de soutien sous la
commissure.
Nous traiterons successivement les différentes parties du
tiers inférieur.

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Chapitre 17. Comblement du tiers inférieur du visage

A B
Fig. 17.6  A. Injection du pli d'amertume à la canule. B. Injection à l'aiguille.
Petit bolus dans le modiolus en haut, puis injection linéaire rétrotraçante sous-cutanée superficielle 0,2–0,3 ml.

Injection du sillon labio-mentonnier de la mandibule. Ils entraînent un préjudice esthétique


(fig. 17.7) important. Cela est accentué chez les personnes ayant un
trouble de l'occlusion dentaire qui présentent un « vieillisse-
ment prématuré » du menton.
L'injection de l'éminence mentonnière doit être logique-
ment réalisée après celle du sillon labio-mentonnier
(fig. 17.8). Elle est faite à l'aiguille et dépose au contact osseux
un à trois bolus de 0,2 ml environ. Il faut pincer le menton
entre deux doigts pour éviter le déplacement du produit,
aspirer avant injection pour éviter toute injection intravas-
culaire et injecter lentement.

Fig. 17.7  Injection du sillon labio-mentonnier de préférence à la canule.


Injection superficielle à la canule linéaire rétrograde de 0,5 à 0,7  ml.
Massage après injection.

Le sillon labio-mentonnier se développe avec le vieillissement.


Il est dû à la perte du volume graisseux et surtout à l'hyper­
tonie des muscles du bas du visage, en particulier du menton-
nier qui enroule le menton vers l'avant, accentuant ainsi le
sillon labio-mentonnier et les creux de la fosse mandibulaire.
Son injection donne du support aux commissures, réduit
la protrusion de la lèvre inférieure qui est valorisée, mais
Fig.  17.8  Injection de l'éminence mentonnière en contact osseux, à
aussi et surtout diminue la rétrogénie et allonge le menton. l'aiguille.
L'injection est réalisée de préférence à la canule et sera Bolus profond à l'aiguille 0,2 ml.
adaptée, en quantité souvent plus importante au niveau des
creux de la fosse mandibulaire. Elle est facilitée par une légère
ouverture de la bouche.
Un massage est réalisé sur le versant cutané, mais égale- Encoche mentonnière
ment muqueux en raison de la possibilité d'amas percep- Il s'agit de l'aire triangulaire située en avant de la bajoue. Le
tibles devant les dents. comblement se réalise de préférence à la canule (pour éviter
l'artère, la veine ou le nerf sous-mentonnier) par un nappage
Menton profond (fig. 17.9). Un bolus profond peut être réalisé à l'ai-
La rétrogénie et le raccourcissement du menton sont liés à guille (aspirer avant d'injecter et injection lente en contrô-
l'hypertonie du muscle mentonnier et à la résorption osseuse lant le placement du produit avec les doigts).

143
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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 17. Comblement du tiers inférieur du visage

A B
Fig. 17.9  Traitement de l'encoche mentonnière à la canule.
A. Nappage à la canule. B. Bolus profond à l'aiguille.

Ovale du visage Zones à risque


Pour rectifier l'ovale du visage (fig.  17.10), le comblement
Il faut éviter de piquer à l'aiguille les zones vasculaires à
peut être réalisé à plusieurs endroits.
risque (fig. 17.11 à 17.13).

Région de l'angle mandibulaire


Sur le rebord maxillaire, un à trois bolus sus-périostés 2
de 0,2  ml sont déposés à l'aiguille avec une injection
lente, après aspiration et en évitant de racler le
périoste. Chez la femme, pour éviter l'élargissement du 1
2
bas du visage, le bolus peut être placé en arrière de la
partie inférieure de la branche montante de la mandi- 1'
bule. Ces bolus vont réaliser une traction des tissus
3
mous vers l'arrière. 4

Région prétragienne
Une injection à la canule d'une quantité de produit adaptée
est réalisée.

Rebord mandibulaire Fig. 17.11  Zones vasculaires à risque.


1. Artère labiale supérieure. 1'. Artère labiale inférieure. 2. Trajet de l'artère
Son injection donne une meilleure définition du contour. faciale. 3. Pédicule vasculaire. 4. Foramen mentonnier.
L'injection est réalisée de préférence à la canule en raison de
la zone figurée en rouge sur la figure 17.10 et située en arrière
de la bajoue et en avant du muscle masséter où passent l'ar- La canule est conseillée dans ces régions, en particulier au
tère et la veine faciales. Une injection rétrotraçante de 0,3 à niveau du pédicule vasculaire situé à la partie médiane de la
0,5 ml sera réalisée. À l'aiguille, il faudra pincer la peau et placer mandibule en arrière de la bajoue et du foramen mentonnier
l'aiguille sur un plan superficiel pour éviter l'artère faciale. située en regard de la 2e prémolaire.

Injection à la canule

Bolus profond sur le rebord mandibulaire


à l'aiguille - 0,2 ml 3 fois

Injection à la canule

Canule ou aiguille
Zone rouge

Fig. 17.10  Traitement de l'ovale du visage à la canule ou à l'aiguille.

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 17. Comblement du tiers inférieur du visage

1 4

1
2 cm 2
2

3
5 4

3 5

Fig. 17.12  Vascularisation du tiers inférieur. Fig. 17.13  Les artères mentonnières.


1. Artères labiales supérieure et inférieure ; 2. Foramen mentonnier ; 3. Artère 1. Artère faciale ; 2. Artère labiale inférieure ; 3. Artère mentonnière (foramen
et veine sous-mentonnières ; 4. Artère faciale ; 5. Artère et veine faciales. mentonnier) ; 4. Artère labiomentonnière ; 5. Artère sous-mentonnière.

Analyse des résultats Exemple 1


Après une explication de la technique « pas à pas » , il Chez cette patiente (fig. 17.16) ayant un trouble de l'occlu-
est impératif de comprendre le phénomène de myo- sion dentaire, le soutien, apporté par le comblement métho-
modulation afin de mieux planifier les gestes. Nous dique des zones de déficience structurelle, lève l'hypertonie
allons, avec des exemples, étudier la « mécanique » du musculaire du mentonnier et entraîne la diminution de la
menton liée aux répercussions sur les fonctions muscu- rétrogénie et l'allongement du menton.
laires du comblement. Il n'y a eu aucun bolus antérieur ou inférieur sur l'émi-
Pour un soutien performant, nous devons adapter le com- nence mentonnière. Les commissures sont également amé-
blement  : il faut effectuer l'« opération de remplissage » liorées. L'avancée du menton améliore la région
méthodique guidée par le manque de structure que nous sous-mentonnière.
chercherons en statique et en dynamique (fig.  17.14 et
17.15).
Exemple 2
Chez l'homme, l'amélioration de la région sous-mentonnière
est intéressante. Ici, aucun bolus antérieur n'a été réalisé
(fig. 17.17).

Exemple 3
Un effet inattendu chez ce patient présentant une
hypertonie majeure du mentonnier est l'apparition
d'un angle cervico-mentonnier. Le déroulement posté-
rieur de l'éminence mentonnière allonge le menton
Fig. 17.14  Recherche des zones de déficience structurelle en statique. (fig. 17.18).
Combler le bas du visage, c'est lui apporter le soutien qu'il a perdu.

Exemple 4
Statique Sourire Baiser La seule injection du sillon labio-mentonnier entraîne, grâce à la
diminution de la rétrogénie qui étire la branche maxillaire, une
belle amélioration de l'ovale. On peut également remarquer chez
cette patiente une jolie valorisation de sa lèvre inférieure
(fig. 17.19).

Fig.  17.15  Recherche des zones de déficience structurelle en


dynamique.

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Chapitre 17. Comblement du tiers inférieur du visage

1 ml

Fig. 17.16  Exemple 1 : comblement du sillon labio-mentonnier.


Amélioration de la rétrogénie.

1,5 ml

Fig. 17.17  Exemple 2 : injection du sillon labio-mentonnier.


La diminution de l'hypertonie du mentonnier réduit la rétrogénie et améliore la région sous-mentonnière.

A B

Fig. 17.18  Exemple 3 : hypertonie du mentonnier améliorée par le traitement du sillon labio-mentonnier et de l'éminence mentonnière.
A. Photo avant. B. Photo après : projection et allongement du mention. Apparition d'un angle cervico-mentonnier (flèche verte). Amélioration des com-
missures sans injection à ce niveau. C. Sillon labio-mentonnier : 2 ml ; bolus antérieur 1 ml ; allongement par bolus 0,5 ml ; 0,5 ml de chaque côté de la saillie
mentonnière.

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Chapitre 17. Comblement du tiers inférieur du visage

Fig. 17.19  Exemple 4 : injection du sillon labio-mentonnier.


Elle entraîne la diminution de la rétrogénie et l'amélioration de l'ovale.

Analyse du résultat de notre patiente


modèle
Ce modèle a bénéficié du comblement du sillon labio-­
mentonnier et de la zone de l'encoche mentonnière. La
­réalisation de bolus antérieur du menton ou le traitement
de la région mandibulaire n'ont pas été nécessaires
(fig. 17.20).
Ainsi, grâce à la levée de l'hypertonie des muscles du bas
du visage, nous assistons chez elle à la cascade des améliora-
tions esthétiques (fig. 17.21) :
■ soutien et valorisation de la bouche qui se relève ;

■ disparition de la rétrogénie et allongement du menton ;

■ amélioration de l'ovale ;

■ diminution de l'hypertonie du masséter qui affine le

visage ;
■ petit effet lift du tiers moyen  : l’équilibre de la balance

musculaire entre les muscles dépresseurs du tiers infé-


rieur et les muscles élévateurs est rétabli. Nous observons
une remise en tension du muscle zygomatique, mais éga-
lement du releveur de la lèvre supérieure et de l’élévateur
de l’aile du nez.

Fig.  17.20  Comblement du sillon labio-mentonnier et de l'encoche


mentonnière.

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Avant Après
A B

C D

E F
Fig. 17.21  Résultat du traitement du sillon labio-mentonnier et de l'encoche mandibulaire : amélioration du tiers inférieur de face (A, B), de trois
quarts (C, D) et de profil (E, F).

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Chapitre 17. Comblement du tiers inférieur du visage

Conclusion Trevidic  P. Anatomy and volumizing injections. In: E2e Medical


Publishing ; 2011.
Vanaman Wilson MJ, Jones IT, Butterwick K, Fabi SG. Role of nonsurgi-
Le comblement du tiers inférieur doit être réfléchi et
cal chin augmentation in full face rejuvenation: A review and our
adapté. Alors que la prise en charge du traitement esthé- experience. Dermatol Surg 2018;44(7):985–93.
tique du visage commence habituellement par le traite- Zide  BM. The mentalis muscle: an essential component of chin and
ment du tiers moyen, celle du tiers inférieur seul permet lower lip position. Plast Reconstr Surg 2000;105:1213–5.
d'obtenir un réel embellissement. Notre stratégie théra-
peutique doit tenir compte du phénomène de
myomodulation.
Pour en savoir plus
Beylot  C. Vieillissement cutané  : prévenir, corriger et rajeunir. Med'com ;
2007.
De Maio  M. Myomodulation with injectable fillers: an innovative
approach to addressing facial muscle movement. Aesth Plast Surg
2018;42(3):798–814.

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)

Chapitre 18
Les lèvres
S. Boivin

Introduction De profil, la lèvre supérieure se projette 3,5 mm en avant de la


ligne de Steiner, la lèvre inférieure de 2,2 mm (fig. 18.1) [2–4].
Les lèvres constituent l'élément central du tiers inférieur du Ces lèvres parfaites vont vieillir et être particulièrement sen-
visage. Symbole de jeunesse et de sensualité, elles sont sibles aux facteurs d'environnement (tabac et soleil) (enca-
aussi le vecteur de toutes nos émotions. Poussée par la dré 18.1) [4, 5].
génération des millénials et leur quête d'attractivité, la pro- Une bonne connaissance anatomique est indispensable à
cédure d'injection des lèvres est devenue très populaire. l'obtention d'un résultat naturel, en statique comme en
Comment définir de belles lèvres ? Elles sont bien dessi- dynamique et en toute sécurité.
nées, bien ourlées et pulpeuses. Si la perception de la
beauté est influencée par des facteurs démographiques,
certains standards ont été établis. Ces repères objectifs Anatomie
mais surtout la notion de ratios et de proportions harmo-
nieuses demeurent le fondement d'une évaluation esthé- La lèvre a une composition particulière  : cutanéomu-
tique. L'erreur serait de se focaliser sur la taille ou le volume queuse en quatre couches (peau, couche musculaire,
des lèvres et d'en négliger l'harmonie avec le reste du visage. sous-muqueuse et muqueuse). La lèvre blanche a une
À nous médecins de rester vigilants face aux demandes structure identique à la peau (avec follicules pileux,
irréalistes de certain(e)s patient(e)s et de mettre en balance glandes sébacées ou sudoripares). La lèvre rouge humide
le désir et la réalité clinique de ce que l'on peut obtenir. est une muqueuse richement vascularisée, très sensible,
De face, le visage peut être divisé horizontalement en trois tiers dépourvue de glande (hormis les glandes salivaires). À la
équivalents. Le tiers inférieur, qui s'étend de la base du nez au jonction des deux, la lèvre rouge sèche (qui correspond au
menton, peut lui-même être divisé en trois autres tiers. Le golden vermillon) a une couleur rouge liée à la finesse de
ratio de la hauteur du vermillon lèvre supérieure/lèvre inférieure l'épithélium qui permet la visibilité des vaisseaux par
­
est établi à 1/1,6 pour les Caucasiens (1/1 pour les Africains ou transparence.
Asiatiques) [1]. Les commissures tombent à l'aplomb d'une ver- Les lèvres présentent différentes unités anatomiques cli-
ticale passant par le bord interne des pupilles (fig. 18.1). niques (fig. 18.3) [3, 6].

1/3

1/3
3,0 mm

1,2 mm
1/3 1
1,0
1/3
2/3

Fig. 18.1  Proportions harmonieuses des lèvres.


Source : S. Boivin.

Dermatologie esthétique
© 2020, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 18. Les lèvres

Encadré 18.1 sion labiale. Il est divisé en deux parties : interne, le pars labia-
lis qui sert au pincement des lèvres, et externe, le pars
Analyse séméiologique du vieillissement marginalis en périphérie qui sert à la projection antérieure
des lèvres des lèvres. Il forme avec la peau sus-jacente un couple très
étroit, ce qui explique sa responsabilité dans les rides radiaires
■ Lèvre blanche (fig. 18.2A) :
labiales ;
● Allongement (relâchement et perte de support
■ latéralement : on retrouve les muscles du modiolus, point
ostéodentaire)
mobile où s'intriquent six chefs musculaires, qui agissent
● Ridules ± profondes (« code barre ») dynamiques puis
sur la position des commissures (fig. 18.4A).
statiques (couple peau/muscle orbiculaire)
● Aplatissement des crêtes philtrales

■ Lèvre rouge (fig. 18.2B) :


● Perte de la définition de l'ourlet

● Aplatissement de l'arc de Cupidon

● Perte de volume, de couleur et d'hydratation

du vermillon 7
6
● Perte de l'éversion

● Chute des commissures


5
1
4

3 2

Fig. 18.2  A. Lèvre jeune. B. Lèvre vieillie.


Source : S. Boivin. 1
2

Crétes philtrales Arc de cupidon


Philtrum
3
GK
Vermillon 4

Commissures

Tubercules
Ourlet
B
Fig. 18.3  Unités anatomiques cliniques des lèvres.
Source : S. Boivin. Fig. 18.4  A. Muscles des lèvres. B. Vascularisation des lèvres.
A = 1. M. orbiculaire des lèvres ; 2. M. abaisseur de la lèvre inférieure ; 3. M.
Sur le plan musculaire, les muscles suivants participent à abaisseur de l'angle de la bouche ; 4. M. risorius ; 5. M. grand zygomatique ;
6. M. petit zygomatique ; 7. M. élévateur de la lèvre supérieure et de l'aile du
l'activité musculaire de la bouche : nez ; 8. M. carré du menton. B = 1. Branche cutanée de l'artère labiale supé-
■ un muscle médian  : le muscle orbiculaire des lèvres, situé rieure ; 2. Branche muqueuse de l'artère labiale supérieure ; 3. Branche ver-
dans l'épaisseur des lèvres et qui forme un sphincter d'occlu- millon de l'artère labiale supérieure ; 4. Artère labiale supérieure.

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 18. Les lèvres

La vascularisation est assurée par les artères labiales supé- Encadré 18.2
rieures et inférieures qui naissent de l'artère faciale en regard
de la commissure des lèvres (à 1–2 cm) et cheminent dans Étapes du traitement des lèvres
l'épaisseur des lèvres, entre muscle orbiculaire et muqueuse, ■ Définition des contours et de la structure :
pour s'anastomoser avec leurs homologues controlatérales ● Correction de l'ourlet
et former un cercle artériel complet autour de l'orifice buc- ● Définition des crêtes philtrales
cal. L'artère labiale supérieure donne des collatérales pour le ● Traitement des ridules de la lèvre blanche
nez (septum et ailes) [4]. Il faudra se méfier des nombreuses ● Position des commissures
variations anatomiques possibles (fig. 18.4B). ■ Traitement du vermillon :
L'innervation des lèvres est apportée sur le plan sensitif par ● Projection/éversion
le nerf infra-orbitaire (branche du V2) pour la lèvre ­supérieure ● Volume
et le nerf mentonnier (branche du V3) pour la lèvre ­inférieure.
L'innervation motrice est assurée par la branche buccale du
nerf facial [3, 5]. cielle, sous-dermique. On peut pincer la zone avec la main
La demande de prise en charge des lèvres peut couvrir controlatérale pour guider l'injection. L'injection se fait sur
deux catégories : la demande de réjuvénation pour corriger toute la hauteur (descendre la lèvre blanche dans le cadre
certains stigmates du vieillissement ou la demande de d'un sourire gingival) ou une partie (deux tiers inférieurs)
« beautification » pour corriger une anomalie morpholo- de sa hauteur (accentuer la concavité de la lèvre blanche
gique ou augmenter le volume d'une lèvre « normale ». et l'éversion de la lèvre rouge).
Avant d'établir le plan de traitement, une analyse séméio- ■ Le traitement des ridules de la lèvre blanche peut se faire
logique des lèvres est indispensable. Elle se fera de face et de par nappage léger à la canule avec un produit peu réticulé,
profil, en statique et en dynamique (sourire et bisou). sur toute la largeur et la hauteur de la lèvre blanche. L'effet
Elle déterminera les caractéristiques de la lèvre blanche et associé de dissection des adhérences (plan de clivage) et
de la lèvre rouge, relèvera une asymétrie préexistante. Cette de stimulation fibroblastique est intéressant. Le traitement
analyse sera étendue aux autres éléments du sourire : les dents peut être réalisé à l'aiguille : par rétrotraçantes dans l'axe
(couleur, position, existence d'une rétrognathie ou d'une des rides, à partir du vermillon ou par de multiples injec-
malocclusion), la gencive (le positionnement du vermillon au tions, très superficielles, perpendiculaires à l'axe des rides.
sourire par rapport à la ligne gingivale pour la lèvre supérieure Les traitements par canule ou aiguille peuvent être asso-
et la ligne inférieure des incisives supérieures pour la lèvre infé- ciés dans le cas de rides profondes.
rieure), le vieillissement péri-oral et du tiers inférieur en géné- ■ L'horizontalisation des commissures passe par une injec-
ral (plis d'amertume, menton, ligne mandibulaire) [6]. tion rétrotraçante superficielle à l'aiguille le long du bord
inférieur de la commissure. Le traitement doit ici s'associer
à la prise en charge du tiers inférieur (plis d'amertume et
Traitement menton) [5, 7].

Le traitement global des lèvres passe par différentes étapes. Traitement du vermillon
Chaque patient(e) n'aura pas besoin systématiquement de
chacune d'entre elles ; le plan de traitement découlera de Le traitement du vermillon peut répondre à plusieurs objec-
l'analyse initiale, de l'amélioration subtile à la restructuration tifs : hydratation, éversion, volumisation et projection. C'est
totale [2, 3, 6]. le plan d'injection qui va influer sur l'effet obtenu (voir
fig. 18.5). L'éversion et l'hydratation seront traitées par une
injection du vermillon, en position sous-muqueuse, en avant
Traitement des contours du muscle orbiculaire, à la canule par un point d'entrée
(encadré 18.2 et fig. 18.5 à 18.7) rétrocommissural, en 1 ou 2 lignes d'injections rétrotraçantes
■ La correction de l'ourlet peut se faire à l'aiguille ou à la parallèles, parallèles à l'ourlet, en commençant par la lèvre
canule, par injection dans le canal virtuel à la jonction supérieure. L'injection est douce et régulière, pas forcément
lèvre blanche-lèvre rouge sur tout le contour des lèvres. sur toute la longueur des lèvres (« effet saucisse »), non uni-
L'injection est rétro-traçante, douce, régulière, parallèle à forme, en respectant les volumes naturels de la lèvre
l'axe de la lèvre, en maintenant la lèvre en tension entre les (3 tubercules de la lèvre supérieure et 2 tubercules de la lèvre
doigts de la main libre. inférieure).
■ La restauration de l'arc de Cupidon se fait à l'aiguille, à Il faut veiller, en dehors de toute asymétrie préexistante, à
partir des points de Glogau-Klein par deux courtes injecter la même quantité dans chaque hémilèvre à l'aiguille :
rétrotraçantes. ■ soit par voie transmuqueuse  : très traumatisant pour la

■ La définition des crêtes philtrales se fait à l'aiguille, en muqueuse (œdème et ecchymose prolongés avec résorp-
entrant par les points de Glogau-Klein, en s'orientant vers tion accélérée de l'implant) et avec un risque de distor-
le bord interne de l'orifice narinaire (philtrum = forme de sions ; point d'entrée dans le vermillon, avec angle de 30°,
« V » inversé) ; l'injection est rétro-traçante, très superfi- injection linéaire ou de petits bolus [5, 7] ;

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Chapitre 18. Les lèvres

Fig. 18.5  Plan d'injection éversion/projection.

Fig. 18.6  Traitement des lèvres.


A. Ourlet. B. Éversion. C. Commissures. D. Crêtes philtrales.
Source : C. Raimbault.

■ soit par voie percutanée  : 3  points d'injection par quadrant, à la canule par le même point d'entrée rétrocommissural
entrée au niveau cutané, 2 mm au-dessus de l'ourlet pour la ou à l'aiguille dirigée en profondeur et perpendiculaire au
lèvre supérieure et 2 mm en dessous pour la lèvre inférieure ; bord libre du vermillon. Le dépôt des bolus est apprécié
injection de petits bolus dans le vermillon pour éversion et par la palpation avec l'index de la main controlatérale.
hydratation. Injecter superficiellement, en particulier au niveau
médian pour éviter l'artère labiale ou ses collatérales [5, 7]. Encadrement du geste
Volume et projection L'encadrement du geste nécessite peu d'éléments.
Le volume et la projection sont traités par une injection
profonde sous-musculaire, à la jonction muqueuse Avant le geste
humide-muqueuse sèche pour chercher l'appui ostéoden- Il faut s'assurer de la signature du consentement, prendre des
taire. Cela est réalisé par une injection douce rétrotraçante photographies, signaler une éventuelle asymétrie, prévenir

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Chapitre 18. Les lèvres

Fig. 18.7  Avant/après traitement.


Source : S. Boivin.

du risque d'œdème et d'ecchymoses, prescrire une Complications


­prévention antivirale en cas d'antécédent d'herpès, avoir de
la hyaluronidase à disposition au cabinet. Les complications sont généralement modérées et toujours
L'anesthésie peut être réalisée par un bloc nécessitant transitoires : érythème, œdème assez fréquent et hématome
deux voies d'abord (infra-orbitaire pour la lèvre supérieure (fréquence réduite par l'utilisation de la canule) ; asymétrie,
et mentonnier pour la lèvre inférieure). L'utilisation facilement corrigée par une réinjection ; des irrégularités
de packs de froid avant, pendant et après le geste améliore améliorées au massage, une récurrence herpétique. Plus
­
le confort du patient. L'association d'un anesthé- exceptionnellement, une ischémie par embole vasculaire peut
sique  topique 20 à 60  minutes avant l'injection et la se produire. Là encore, l'utilisation de la canule limite les
­présence de xylocaïne dans la plupart des acides hyaluro- risques et une bonne connaissance de la vascularisation locale
niques injectés permettent le plus souvent d'éviter une (et en particulier de la lèvre supérieure) est indispensable.
anesthésie locale et la distorsion associée. À noter l'intérêt
de nouveaux dispositifs de vibration qui, par saturation
des récepteurs sensitifs locaux, réduisent la douleur à l'in- Erreurs à éviter
jection [8].
Une bonne connaissance des qualités rhéologiques du pro- Certaines erreurs sont à éviter qui permettraient d'identifier
duit injecté est fondamentale pour obtenir l'effet souhaité. au premier coup d'œil une lèvre injectée : le non-respect des
La lèvre rouge est soumise à de fortes contraintes de proportions lèvre supérieure-lèvre inférieure [10], une perte
compression et d'étirement, mais de faibles forces de d'harmonie avec le reste du visage, une surinjection des
cisaillement. Le produit doit permettre une bonne projec- bords latéraux des lèvres, une injection uniforme de toute la
tion, avoir une excellente mobilité en dynamique, et une longueur des lèvres sans respecter les courbes et volumes
bonne intégration tissulaire. Le choix se portera vers un naturels des lèvres (« sausage lips »), une surcorrection de
produit avec une bonne cohésivité et un G' modéré à l'ourlet (bouche de canard) ou une surprojection antérieure
moyen. (effet tapir).
La lèvre blanche subit peu de contraintes mécaniques. Le
produit doit être malléable, avoir un bon étalement et être
invisible en statique comme en dynamique. Le choix se Conclusion
porte sur un produit avec une cohésivité faible et un G′
L'obtention d'un joli résultat, naturel et sécuritaire, nécessite
faible [9].
la combinaison d'une bonne connaissance anatomique des
lèvres et du tiers inférieur du visage, d'une compétence tech-
Après le geste nique par la maîtrise de l'injection (bon plan, bonne dose) et
Un massage doux est réalisé en fin d'injection, permettant d'une compétence pharmacologique permettant le bon
de lisser et d'uniformiser les petites irrégularités [3]. choix de produit. Néanmoins, chaque lèvre est différente et

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 18. Les lèvres

il n'existe pas de formule magique unique. Si le sens esthé- hyaluronic acid fillers: focus on the lower face. Plast Reconstr Surg
tique et artistique du médecin prend ici tout son sens, 2017;140(3):393e–404e.
[6] Surek CC, Guisantes E, Schnarr K, et al. “No-touch” technique for
l'adage « less is more » est ici plus qu'ailleurs fondamental.
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Section 4. Les produits de comblement (fillers)

Chapitre 19
Rhinoplastie médicale
C. Raimbault

Introduction
Le nez est un élément essentiel et central de l'esthétique du
1
visage. Sa forme idéale dépend de considérations anthropo-
métriques, mais aussi de préférences individuelles, de facteurs 2
psychosociaux, ethniques ou de genre [1, 2]. Le vieillissement 3
modifie la forme du nez avec un affaissement de la pointe,
une aggravation des bosses nasales, une diminution voire une 4
augmentation de sa largeur dans certains cas. L'injection de 5
produits de comblement est une bonne alternative à la rhi- 3
noplastie chirurgicale. Elle est limitée à la correction des
défauts visibles, surtout de profil, comme le relèvement de la
pointe du nez, l'effacement des bosses du dos du nez, et plus
rarement des défauts visibles de face, comme une légère
Fig.  19.1  Pyramide nasale constituée par un squelette osseux dans sa
déviation de l'arête nasale ou la diminution de la largeur des partie supérieure et cartilagineux dans sa partie inférieure.
ailes du nez [3]. De nombreuses publications asiatiques men- La cloison nasale médiane sépare les deux fosses nasales. 1. Os propre du
tionnent la possibilité d'une augmentation nasale dorsale nez ; 2. Cartilage triangulaire ; 3. Septum ; 4. Cartilage alaire ; 5. Petits
voire de la hauteur totale, en incluant une rotation cépha- ­cartilages alaires.
lique de la pointe du nez, afin de répondre aux critères esthé-
tiques caucasiens. Ils publient aussi le plus grand nombre
d'accidents vasculaires dans cette zone [4].

Anatomie
La pyramide nasale est une structure tridimensionnelle, située
1
dans le tiers moyen, en dessous du front, au centre du visage.
Elle a un squelette osseux dans sa partie supérieure avec les os
propres du nez et cartilagineux dans sa partie inférieure. Cette 2
tente ostéocartilagineuse est soutenue par la cloison nasale
médiane qui sépare les deux fosses nasales (fig. 19.1).
Son apparence est définie par les structures rigides, mais
3
aussi par les tissus mous qui la recouvrent.
4
Terminologie
De profil, le nez comprend, de haut en bas, la partie infé-
rieure de la glabelle, le radix qui correspond à la racine du
nez ou nasion, le rhinion à la jonction des os propres du nez
aux cartilages, le supratip, la pointe du nez et l'épine nasale à 5
la jonction nez-lèvre (fig. 19.2).
Il y a quatre couches successives entre les os ou cartilages
et la peau :
■ le périoste ou périchondrium ; Fig. 19.2  Terminologie, de haut en bas.
■ la graisse profonde ;
Le nasion ou radix (1) correspond à la racine du nez ; le rhinion (2) est à la
jonction entre les os propres du nez et les cartilages ; la pointe du nez (3) ;
■ la couche fibromusculaire (système musculo-aponévrotique
l'épine nasale (4) à la jonction nez-lèvre ; le pogonion (5), point antérieur
superficiel [SMAS]) ; du menton.
■ la graisse superficielle. Source : C. Raimbault.

Dermatologie esthétique
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Chapitre 19. Rhinoplastie médicale

La peau est épaisse à la racine du nez (radix ou nasion), à la l'artère nasale dorsale pour sa partie supérieure, avec un
pointe du nez. Elle est plus fine à sa partie médiane au niveau risque de nécrose glabellaire.
du rhinion. Il existe de nombreuses petites artères et plusieurs anasto-
La zone de sécurité pour les injections est profonde, suprapé- moses dans la région nasale dont le flux peut facilement être
riostée ou suprapérichondriale car les nombreux vaisseaux inversé par des injections de filler réalisées sous pression. Les
sont situés dans le SMAS ou dans la graisse superficielle. emboles empruntent de façon rétrograde les artères nasales
dorsales, supratrochléaires ou supra-orbitaires vers l'artère
Vascularisation (fig. 19.3) ophtalmique, puis il y a un flux antérograde vers l'artère cen-
Les vaisseaux de la face sont issus de la carotide externe à trale de la rétine avec un risque de cécité (fig. 19.4). Le traite-
l'exception de la région faciale centrale qui englobe la partie ment par hyaluronidase est indispensable : son injection dans
supérieure du nez, l'œil et la zone centrale du front qui la zone rétrobulbaire doit être effectuée avant 90  minutes.
dépendent de la carotide interne. L'artère ophtalmique issue Des cas d'embolisation jusqu'à la carotide interne avec acci-
de la carotide interne se ramifie en vaisseaux supra-orbitaire, dent vasculaire cérébral ont aussi été décrits lors de l'injection
supratrochléaire, nasal dorsal et lacrymal. de produit de comblement dans cette zone.
L'artère faciale issue de la carotide externe passe devant le
muscle masséter et suit un trajet tortueux et oblique vers
l'angle interne de l'œil [5]. Elle donne naissance aux artères
labiales inférieure et supérieure avec la branche columellaire,
puis à l'artère nasale latérale qui alimente la partie latérale du
nez. L'artère faciale prend le nom d'artère angulaire à partir
du sillon naso-génien. Elle s'anastomose avec l'artère nasale
dorsale reliant les systèmes carotidiens internes et externes.
L'artère nasale dorsale est située environ 5 mm au-dessus de
la ligne horizontale canthale médiane. Il y a de nombreuses
variations anatomiques. Les principales artères nasales à
risque de complication sont l'artère nasale latérale qui vas-
cularise la pointe du nez, avec un risque de nécrose alaire, et 1
2
3

7 8

6 6

5
4

6
3
4

1
5

Fig. 19.3  La vascularisation du nez dépend de la carotide externe et de Fig. 19.4  Un embole de produit de comblement injecté sous pression dans
sa branche, l'artère faciale, à l'exception de la région faciale centrale l'artère supra-orbitaire, supratrochléaire, nasale dorsale ou leurs anasto-
comprenant la partie supérieure du nez, l'œil et la zone centrale du moses peut atteindre de façon rétrograde l'artère centrale de la rétine.
front qui dépendent de la carotide interne. Le flux devient alors antérograde, à l'origine d'une cécité. Des cas d'accident
1. Artère faciale. 2. Artère labiale inférieure. 3. Artère labiale supérieure + vasculaire ont aussi été décrits si l'embole atteint la carotide interne. Le sens des
columellaire. 4. Artère angulaire. 5. Artère nasale latérale. 6. Artère nasale flèches indique le cheminement à contre-courant de l'embole vasculaire.
dorsale. 7. Artère supratrochléaire. 8. Artère supra-orbitaire. 1. Artère nasale dorsale ; 2. Artère supra-trochléaire ; 3. Artère supra-orbitaire ;
Source : C. Raimbault. 4. Artère ophtalmique ; 5. Artère carotide interne ; 6. Artère rétinienne centrale.

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Chapitre 19. Rhinoplastie médicale

H 115 à 135º

F 120 à 125º
180º

90 à 95º

A B C
Fig. 19.5  Proportions esthétiques des angles entre le front, le nez, la lèvre et le menton.
A. L'angle nasal dorsal est plat. B. L'angle nasofrontal mesure entre 115 et 135° pour les hommes et 120 et 125° pour les femmes. C. L'angle nasolabial
mesure 90 à 95°. La profilométrie apprécie également ces angles par rapport à la projection du menton.
Source : C. Raimbault.

Mesures anthropométriques
Chez les Caucasiens, les angles entre le nez, le front et la lèvre
supérieure doivent correspondre à certains degrés pour être 60°
esthétiques (fig.  19.5)  : l'angle nasal dorsal mesure 180° en
l'absence de bosses nasales ; l'angle nasofrontal idéal mesure
entre 115 et 135° pour les hommes et 120 à 125° pour les
femmes. Plus cet angle est grand ou ouvert, plus le nez est
long et la pointe basse [7]. L'angle nasolabial mesure entre 90
et 95° pour les hommes et 95 et 110° pour les femmes. La
largeur de la base du nez idéale est égale à la distance entre Lobule
les canthus internes des yeux, mais des variations ethniques
importantes existent avec des ailes narinaires plus larges ou
plus étroites (fig. 19.6). La pointe du nez doit être haute et
projetée, le dos du nez rectiligne sans bosse nasale. Columelle
L'examen de face évalue la rectitude et la symétrie du nez,
la présence d'une éventuelle déviation, la largeur osseuse ou Fig. 19.6  La largeur de la base du nez idéale est égale à la distance entre
les canthus internes des yeux, mais des variations ethniques impor-
cartilagineuse du dos du nez, la largeur de la pointe et la visi-
tantes existent avec des ailes narinaires plus larges ou plus étroites (cau-
bilité de la columelle. Il est important d'interroger le patient casiens : 60 ° ; asiatiques : 90° ; noirs : 120°).
sur ses antécédents chirurgicaux et de repérer d'éventuelles Source : C. Raimbault.
cicatrices car le risque d'accident vasculaire est nettement
augmenté en raison des modifications anatomiques induites. L'injection est réalisée à la canule ou à l'aiguille, mais dans
ce cas avec un risque majoré d'embole vasculaire.
Technique d'injection Injection à la canule
■ Relèvement de la pointe du nez : le prétrou est situé au
Préparation centre de la pointe du nez. (Il est idéalement situé au
L'injection est douloureuse ; il est donc indiqué d'appliquer niveau de la partie cutanée mobilisable juste devant les
un anesthésique de contact plutôt que de réaliser un bloc cartilages.) Injection de la colonne nasale antérieure : on
qui masquerait la douleur aiguë, symptôme essentiel et pré- préférera une canule d'au moins 25 G voire 22 G que l'on
coce d'embolisation vasculaire. dirige vers le maxillaire pour atteindre la partie inférieure
de la columelle où un bolus suprapériosté est délivré ; il
est suivi d'une injection rétrotraçante vers la pointe. Il
Plan de traitement faut éviter de délivrer l'injection entre les cartilages de la
Il est possible de commencer par le dos du nez ou par la rota- cloison antérieure ou dans les branches artérielles ou vei-
tion céphalique de la pointe du nez. neuses columellaires de l'artère labiale supérieure.

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■ Injection du dos du nez : la canule introduite par le même ■ Modification de la position de la pointe du nez : la pointe
point d'entrée est dirigée vers le radix, où un petit bolus du nez est parfois courbe ou mal dessinée, trop basse voire
est déposé. Une injection rétro-traçante est ensuite réali- fuyante. Il est possible de la redessiner de deux façons
sée de part et d'autre de la bosse nasale, le long du dos du complémentaires :
nez. L'injection doit rester strictement médiane (fig. 19.7). ● injection par abord latéral dans le derme profond sur

Un pansement transparent stérile sera appliqué pendant toute la largeur de la pointe du nez, selon le point
24 heures pour protéger et maintenir le remodelage. choisi pour la nouvelle position de la pointe
(fig. 19.9) ;

Fig.  19.7 Introduction de la canule à partir d'un point d'entrée situé au


centre de la pointe du nez, en direction du radix où un petit bolus est déposé.
Une injection rétrotraçante dépose le filler de part et d'autre de la bosse
nasale le long du dos du nez. Le point d'entrée de la canule est idéalement
situé à la jonction entre la partie fixe et mobile de la pointe du nez.
Injection à l'aiguille
■ Relèvement de la pointe du nez avec ouverture de l'angle
nasolabial par injection de l'épine nasale (fig.  19.8)  : l'ai-
guille de 27 à 30 G est introduite profondément avec un
angle de 45° à la base de la columelle entre les parties
médianes des cartilages alaires jusqu'au maxillaire. Injecter
un bolus suprapériosté d'acide hyaluronique (AH) au G′
élevé. Pincer la peau pendant l'injection, aspirer avant l'in-
jection et injecter très lentement à basse pression, en res-
tant profond et dans la ligne médiane.
B
Fig. 19.9  A. Modification de la position de la pointe du nez si la pointe
est mal dessinée ou courbe. Choisir à l'aide d'une vue de profil une nou-
velle position de la pointe. L'injection par abord latéral doit rester
superficielle, strictement intradermique en raison du risque vasculaire.
Bien surveiller la couleur de la peau lors de l'injection. B. Ici, le blanchi-
ment est lié à la tension cutanée.
Source : C. Raimbault.

● insertion verticale de l'aiguille à partir de l'apex


choisi. Introduire l'aiguille jusqu'au périchondre,
aspiration et injection d'un bolus suffisant pour rele-
Fig. 19.8  Relèvement de la pointe du nez.
ver la pointe. L'injection doit être lente et prudente
L'aiguille est introduite à l'épine nasale avec un angle de 45° jusqu'au maxil- car la tension cutanée est forte avec un risque d'ex-
laire. Injecter lentement un bolus suprapériosté d'acide hyaluronique trusion de l'AH. Il faut se limiter à 1 ou 2 points d'in-
volumateur. jection (fig. 19.10).
Source : C. Raimbault.

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Fig. 19.12  Injection du dos du nez en avant d'une bosse nasale.


Introduire l'aiguille jusqu'au périoste ou périchondre. Injecter de petits bolus
en restant médian et masser délicatement pour une répartition régulière. La
peau est très fine au niveau du rhinion, les quantités injectées sont minimes.
Fig. 19.10  Relèvement de la pointe du nez par injection profonde d'un Source : C. Raimbault.
bolus à l'aiguille au niveau du périchondre.
L'injection est lente et prudente avec un risque d'extrusion de l'acide hyaluronique
liée à la tension cutanée dans cette zone. Se limiter à 1 ou 2 points d'injection.
■ Comblement des déficits des bords latéraux pour une amé-
Source : C. Raimbault.
lioration de face (fig. 19.13) : il doit être prudent car les artères
nasales dorsales sont situées à une distance de 2 à 3 mm de
la ligne médiane. L'aiguille est introduite en position juxta-
médiale jusqu'à l'os ou le cartilage ; un petit bolus est injecté
et peut être massé vers le bas pour combler le déficit.

Fig. 19.11  Injection d'un bolus à la racine du nez. Introduire l'aiguille


avec un angle de 45° jusqu'au périoste.
Injecter un bolus strictement sur la ligne médiane en protégeant avec le
pouce et l'index pour éviter toute diffusion latérale du filler.
Source : C. Raimbault.

■ Traitement du dos du nez : il convient de commencer par le radix


pour réduire la profondeur de la concavité dorsale (fig.  19.11).
L'aiguille est introduite avec un angle de 45° profondément, dans Fig. 19.13  Correction des creux latéraux sur une vue de face.
la ligne médiane ; aspirer, injecter lentement un bolus contre l'os en Attention aux artères nasales qui sont situées à 2 à 3  mm de la ligne
pinçant le nez entre le pouce et l'index pour éviter toute diffusion médiane. Un bolus en position juxtamédiale peut être massé vers le bas
latérale du filler. Stopper l'injection avant de retirer l'aiguille. Masser pour combler le déficit.
Source : C. Raimbault.
délicatement pour une répartition homogène. Cette injection
permet d'ouvrir l'angle nasofrontal et de donner souvent l'illusion
d'un nez plus court. Le risque d'embole vasculaire est majeur dans Recommandations
cette zone : rester attentif à la couleur de la peau durant toute la
procédure. Traiter la pointe du nez si nécessaire, puis continuer le Pendant toute la procédure, il faut évaluer la couleur de la
comblement le long de l'arête du nez en avant et en arrière de la peau et la douleur pour repérer tout signe précoce d'embo-
bosse nasale sur la ligne médiane. La peau est très fine au niveau du lisation. Le patient doit éviter de porter des lunettes pendant
rhinion ; les quantités injectées sont minimes (fig. 19.12). Il faut quelques heures.
rester strictement médian. L'injection peut se faire point par point Le traitement de la pointe du nez doit être précédé d'une
par petits bolus suivis d'un massage, ou être rétro-traçante. injection de toxine lorsqu'elle s'abaisse lors du sourire.

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Après une rhinoplastie chirurgicale, la modification de la Complications en dehors


position des artères et la tension des tissus rendent la procé-
dure beaucoup plus difficile, avec un risque nettement
de la nécrose
accentué d'accident vasculaire. En raison de la riche vascularisation de cette zone, il y a un
risque élevé d'ecchymoses. Une sensation de tension doulou-
reuse pendant quelques jours est habituelle. Les œdèmes sont
Rhéologie liés à l'hydrophilie de l'AH. Une asymétrie, une surcorrection
L'AH doit avoir un G′ élevé pour résister à la déformation liée ou des irrégularités peuvent être visibles, surtout si la peau est
à la tension des tissus du nez, ainsi qu'une viscosité élevée fine ou en cas d'antécédent chirurgical. Un effet Tyndall peut
pour être facilement modelé ou sculpté, mais il doit pouvoir survenir si l'injection est superficielle ou si le produit migre en
être injecté au mieux avec une aiguille de 30 G. Il faut faire surface. Une migration du filler vers le front a aussi été décrite
attention à son hydrophilie pour éviter toute surcorrection. lorsque les quantités injectées sont importantes [9].
Un AH volumateur peut être injecté à l'aiguille 27  G au Mais ce sont aussi les complications psychologiques qu'il
niveau de l'épine nasale ou de l'angle nasofrontal. faut redouter, car les déformations du nez sont à l'origine de
Les volumes utilisés sont faibles, de 0,3 ml à 1 ml, lors du complexes ancrés depuis de nombreuses années et la modi-
relèvement de la pointe du nez. Ils peuvent être plus impor- fication de l'apparence, si elle ne correspond pas aux attentes
tants par exemple lors d'une augmentation de la hauteur du du patient, peut être mal vécue.
nez, demande fréquente chez les Asiatiques. Les traitements
peuvent être répétés, mais souvent l'amélioration persiste Conclusion
longtemps, avec une diminution des quantités au fur et à
mesure des traitements, sauf si le patient a tendance à abais- Les injections du nez sont réservées aux injecteurs expéri-
ser sa pointe du nez. mentés ayant un bon sens esthétique. De légères modifica-
L'hydroxyapatite de calcium peut aussi être utilisé. L'in- tions peuvent entraîner une amélioration esthétique notable
convénient est l'absence d'antidote en cas d'embole vas­ (fig. 19.14 et 19.15). Les risques vasculaires sont importants et
culaire [8]. nécessitent une grande vigilance durant toute la procédure.

A B
Fig. 19.14  A. Pointe du nez courbe. B. Modification de la position de la pointe du nez et traitement du radix.
Source : C. Raimbault.

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A B
Fig. 19.15  A. Bosse nasale. B. Injection du radix, de la pointe du nez et du dos du nez.
Source : C. Raimbault.

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Chapitre 20
Myomodulation
C. Raimbault

Le concept de myomodulation Si l'on rétablit la convexité musculaire par un bolus de filler


sous le muscle élévateur, on rétablit son levier et sa force et
En esthétique, on oppose la toxine botulique, qui diminue la on rééquilibre la balance musculaire (fig. 20.1).
force musculaire et les rides dynamiques, aux produits de Par opposition, un bolus au-dessus du muscle diminue sa
comblement, qui comblent les rides statiques et restaurent force (fig. 20.2).
les volumes. Cependant, tous les praticiens ont eu l'occasion
d'observer chez certains patients traités uniquement par Élévateur Masse graisseuse
produit de comblement une modification de l'activité mus-
Bolus de produit
culaire avec diminution ou restauration de la force des mus-
cles faciaux. Peau
Point d'ancrage

De Maio a tenté d'expliquer ces phénomènes en dévelop-


pant le concept innovant de myomodulation [1]. Celle-ci
résulte de l'observation à long terme de patients présentant
des déficits structurels congénitaux ou acquis, traités uni-
quement par produits de comblement, et suggère qu'ils Abaisseur

peuvent être utilisés pour moduler l'action musculaire et Sujet jeune Sujet âgé Filler sous
rétablir les balances entre les muscles abaisseurs et les E>A A>E l'élévateur
Balance E/A rétablie
élévateurs.
Fig. 20.1  Balance musculaire élévateur-abaisseur.
Les muscles mimétiques faciaux sont des muscles peau- Lors du vieillissement, l'étirement du muscle modifie son point d'ancrage
ciers sans tendon, sauf pour les muscles sphinctériens. Ils ont qui est abaissé, il perd sa force. Un bolus de produit sous le muscle lui
des propriétés biomécaniques qui dépendent de plusieurs redonne une forme convexe et le raccourcit. Son point d'ancrage est
facteurs : remonté et il retrouve une fonction plus performante.
Source : d'après M. De Maio.
■ la relation longueur-tension  : la composante contractile

représente la tension active. Lorsqu'un muscle est étiré, il


perd sa force. La composante élastique ou tension passive Élévateur
dépend de l'élasticité cutanée et tendineuse associée : le
muscle perd sa capacité à reprendre sa forme au repos Produit de
après contraction si la peau est distendue ; comblement
■ système de poulies et leviers : la restauration d'un levier à Muscle
l'aide d'un bolus de filler sous le muscle lui permet de
retrouver sa capacité contractile ;
■ action antagoniste des groupes musculaires élévateurs/

abaisseurs.
La dynamique faciale est conditionnée par l'équilibre entre
ces muscles, qui dépend de la qualité des supports osseux, Abaisseur
adipeux et cutanés.
Filler sous Filler sur
Si la structure faciale est normale et jeune, les fibres mus-
le muscle le muscle
culaires sont convexes et la contraction puissante des éléva-
Fig. 20.2  La répercussion sur l'activité du muscle est différente en fonc-
teurs et en équilibre avec celle des dépresseurs. tion du positionnement du filler qui peut être placé sur ou sous le
Lors du vieillissement, ou s'il existe une anomalie structu- muscle.
relle, la perte de volume osseux, graisseux et l'affaissement
de la peau entraînent une perte de convexité musculaire et ■ sous le muscle : augmentation de l'activité musculaire par
un étirement des muscles peauciers élévateurs qui perdent apport de support sous-jacent ;
leur force. Il en résulte une augmentation compensatrice de ■ sur le muscle : diminution de l'activité musculaire par créa-

la force des abaisseurs. tion d'un obstacle mécanique (voir fig. 20.2).

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 20. Myomodulation

Association produit ■ les produits de comblement :


reconstituent les volumes et corrigent une carence
de comblement-toxine botulique ●

structurelle ou acquise ;
● interviendraient par myomodulation pour rétablir la
L'association produit de comblement-toxine serait donc
intéressante et complémentaire : force musculaire ou la bloquer et ainsi rétablir la balance
■ la toxine botulique :
entre les élévateurs et les abaisseurs, mais de façon plus
● diminue l'activité musculaire, mais ne peut pas l'aug-
modérée qu'avec la toxine.
menter ; Ces deux traitements sont complémentaires mais néces-
● ne corrige pas les déficits structurels congénitaux ou acquis ;
sitent une bonne analyse de la dynamique faciale.
● rétablit la balance musculaire en diminuant fortement
Deux exemples cliniques sont fournis aux figures 20.3 et
l'activité des muscles dépresseurs pour une durée de 4 à 20.4.
6 mois.

Fig. 20.3  Le nappage du front à la canule lève l'hypertonie musculaire du muscle frontal et donne un effet « botox-like ».
Source : M.-P. Loustalan.

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Chapitre 20. Myomodulation

Fig. 20.4  Chez cette patiente, après placement de l'AH au-dessus des muscles abaisseurs, on observe une diminution de l'hypertonie du mentonnier
et un certain effet lift, le zygomatique retrouve sa force.
L'équilibre élévateur/abaisseur est amélioré. Le comblement des déficiences structurelles de la région du menton, principalement du sillon labiomenton-
nier, est ainsi à l'origine d'une cascade d'améliorations esthétiques.
Source : M.-P. Loustalan.

Autres hypothèses Conclusion


D'autres hypothèses ont été développées pour expliquer Ce sujet passionnant demande encore à être précisé, mais la
cette modulation de la force musculaire observée avec connaissance des effets modulateurs de l'acide hyaluronique
l'acide hyaluronique (AH) : il peut s'agir simplement de sur la fonction musculaire est une voie complémentaire
la décrispation du muscle lors d'injection d'AH dans ses intéressante pour agir contre le vieillissement.
fibres ou son environnement. Il pourrait aussi s'agir d'un
Références
réflexe myotatique d'extension comme cela a été décrit
[1] De Maio M. Myomodulation with injectable fillers: An innovative
par Belhaouari [2] pour le muscle orbiculaire qui se
approach to addressing facial muscle movement. Aesth Plast Surg
contracte sous l'effet d'un bolus profond, entraînant 2018;42(3):798–814.
avec lui la peau et la graisse superficielle de la région [2] Belhaouari  L, Gassia  V, Michaud  T, Lauwers  F. Dynamique et
malaire dans un effet liftant. embellissement du mid-face. J Méd Esth et Chir Derm
2014;164:203–9.

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 20. Myomodulation

Pour en savoir plus Vanaman Wilson MJ, Jones IT, Butterwick K, Fabi SG. Role of nonsurgi-
Beylot C. Vieillissement cutané : prévenir, corriger et rajeunir. Med'com cal chin augmentation in full face rejuvenation: A review and our
2007. experience. Dermatol Surg 2018;44(7):985–93.
Trevidic  P. Anatomy and volumizing injections. In: E2e Medical Zide  BM. The mentalis muscle: an essential component of chin and
Publishing; 2011. lower lip position. Plast Reconstr Surg 2000;105:1213–5.

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TECHNIQUES Partie 2
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Section 4. Les produits de comblement (fillers)

Chapitre 21
Mésothérapie, revitalisation
R. Khallouf

Introduction Des études ont montré une amélioration significative de


l'élasticité et de l'hydratation cutanée après injection d'AH
La peau subit des modifications importantes avec l'âge. Sa dans le derme [4–6]. Cliniquement, la peau est plus hydra­
prise en charge est essentielle lors de la réjuvénation du tée, moins terne, plus lumineuse ; cet effet est obtenu par
visage. l'épaississement du derme, le remodelage du collagène et la
Le vieillissement cutané est complexe. L'altération de captation d'eau par l'AH.
l'activité des fibroblastes s'accompagne d'une diminution L'AH injecté doit être compatible avec le tissu dermique ;
de la synthèse des fibres de collagènes et des fibres élas­ la réticulation et les propriétés viscoélastiques doivent être
tiques. L'acide hyaluronique (AH) de la matrice extracellu­ modérées. La plupart des laboratoires commercialisent des
laire ne se renouvelle plus. Cela se traduit cliniquement par produits pour cette indication. L'AH est soit réticulé avec
une peau sèche, moins élastique, terne et marquée par des une durée de vie de 3 à 9 mois, soit non réticulé avec une
ridules. durée de vie plus courte de 1 à 3 mois. Du mannitol, du gly­
Les techniques de réjuvénation cutanée vont viser à cérol ou du sorbitol sont parfois ajoutés à l'AH, dans le but
améliorer la qualité de l'épiderme, mais surtout du de le protéger du stress oxydatif, et de retarder sa dégrada­
derme, en apportant hydratation et réparation de la tion.
matrice extracellulaire, et en induisant la synthèse du
collagène.
La mésothérapie consiste à injecter dans la peau des prin­
Technique d'injection
cipes actifs en minuscules quantités dans le but d'hydrater La technique d'injection se fera à l'aiguille en point par point
ou d'améliorer l'aspect esthétique de la peau. Elle peut être pour les produits déposés à la jonction dermo-épidermique
très superficielle – le produit est déposé dans l'épiderme par et dans le derme superficiel ; à l'aiguille ou à la canule pour
une légère « scarification » qui permet la pénétration du pro­ les produits déposés dans le derme moyen ou profond. Le
duit dans l'épiderme  – ou plus profonde –  le produit est geste doit être contrôlé et précis. De toutes petites quantités
injecté dans le derme avec une aiguille, un mésoroller, ou un de produits sont injectées (0,01–0,02  ml) ; les seringues à
pistolet. Cette technique est désignée par le terme de clics et pistolets automatisés commercialisés par certains
«  mésolift ». laboratoires permettent un bon contrôle de la quantité.
Aussi, lors de l'utilisation de la canule, il faudra s'assurer en
permanence de la présence d'une rétraction cutanée lors de
Composition la tunnélisation pour ne pas déposer le produit dans l'hypo­
Les produits utilisés sont un mélange de vitamines, d'oligoélé­ derme. Un bon massage permet de répartir l'AH ; l'utilisation
ments et d'acide aminés : acide ascorbique, vitamine E, sili­ du coton-tige aide à « écraser » un excès de produit.
cium, magnésium, etc. Des cocktails polyrevitalisants ont été Les microtraumatismes provoqués par l'aiguille lors de l'ef­
proposés par plusieurs marques d'injectables. Si ces subs­ fraction cutanée et de la tunnélisation jouent aussi un rôle
tances sont connues pour leur action anti-oxydante et leur dans la réjuvénation. Cela stimule les mécanorécepteurs et
stimulation des fibroblastes in vitro, ils n'ont pas de niveau déclenche une réaction inflammatoire qui contribue au
de preuve suffisant pour leur effet clinique et leur utilisation remodelage [7].
empirique est réservée pour leur action bonne mine [1, 2].
L'ajout d'AH à ces mélanges a considérablement amélioré Effets secondaires
l'action des produits de mésothérapie. L'AH est le compo­
sant majeur de la matrice extracellullaire. Il est capable Les effets secondaires de la mésothérapie sont minimes.
d'absorber 500 à 1 000  fois son poids en eau. Il se lie aux Les suites classiques (œdème, érythème et ecchymose)
CD44 des fibroblastes, facilite leur prolifération ainsi que la sont minorées par l'utilisation des canules. Les nodules
synthèse de collagène de type  1 et le renouvellement de observés dans les suites sont le plus souvent dus à un excès
l'AH [3–5]. de produit. Des nodules persistants ont été rapportés lors

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 21. Mésothérapie, revitalisation

d'injection trop superficielle avec certains produits réticu­ Références


lés, d'où la nécessité de respecter scrupuleusement le [1] El-Domyati M, El-Ammawi TS, Moawad O, et al. Efficacy of meso­
niveau d'injection conseillé par le laboratoire. therapy in facial rejuvenation: a histological and immunohisto­
chemical evaluation. Int J Dermatol 2012;51(8):913–9.
[2] Prichninko S. Polycomponent mesotherapy formulations for the
Autres produits de revitalisation treatment of skin aging and improvement of skin quality. Clin
Cosmet Investig Dermatol 2015;8:151–7.
[3] Wang F, Garza LA, Kang S, et al. In vivo stimulation of de novo
Les injections de plasma riche en plaquettes (PRP) ont leur
collagen production caused by cross-linked hyaluronic acid der­
place dans la revitalisation cutanée [8]. Les facteurs de crois­ mal fillers injections in photodamaged human skin. Arch
sance libérés favorisent la réparation tissulaire ; ils stimulent Dermatol 2007;143:155–63.
les fibroblastes, la sécrétion de cytokines et l'angiogenèse ; ils [4] Deglesne P, Arroyo R, Ranneva E, Deprez P. In vitro study of RSS HA
augmentent la fabrication de collagène et réparent la matrice injectable mesotherapy/biorevitalization product on human
extracellulaire. Ces injections n'ont pas obtenu d'autorisa­ skinfibroblasts and its clinical utilization. Clin Cosmet Investig
Dermatol 2016;23:41–53.
tion de mise sur le marché (AMM) en France, ce qui limite
[5] Kercher M, Bayrhammer J, Reuther T. Rejuvenating influence of a
leur utilisation en esthétique. stabilized hyaluronic acid-based gel of nonanimal origin on facial
Les inducteurs de collagène n'ont pas leur place dans la skin aging. Dermatol Surg 2008;34:1–7.
revitalisation de la peau. Les injections devant se faire dans le [6] Baspeyras M, Rouvrais C, Liégeard L, et al. Clinical and biometrologi­
tissu sous-cutané ou le derme profond, une action indirecte cal efficacy of a hyaluronic acid-based mesotherapy product: a ran­
de réjuvénation peut être secondairement observée sur la domizsed controlled study. Arch Dermatol Res 2013;305:673–82.
[7] Hou A. CohenB, Haimovic A. Elbuluk N Microneedling : a compre­
peau ; elle est une conséquence indirecte de la néocollage­
hensive review dermatol surg 2017;43:321–39.
nèse dans les tissus profonds. [8] Yuksel  E, Sahin  G, Aydin  F, et  al. Evaluation of effects of plate­
Une liste des produits de réjuvénation est fournie au let-rich plasma on human facial skin. J Cosmet Laser Ther 2014;16:
tableau 21.1. 206–8.

Tableau 21.1  Liste (non exhaustive) des produits de réjuvénation


Nom du produit Réticulation Laboratoire Concentration Additifs Niveau d'injection Lidocaïne
Restylane Vital Réticulé Galderma 20 mg/ml Derme profond Avec ou sans
Skinbooster®
Juvederm Volite® Réticulé Allergan 12 mg/ml Derme profond Avec
Stylage Hydro max® Réticulé Vivacy 12,5 mg/ml Sorbitol Derme moyen et profond Sans
®
Belotero Soft Réticulé Merz 20 mg/ml Glycérol Derme superficiel ou profond Avec
Restylane Vital light® Réticulé Galderma 12 mg/ml Derme moyen et profond Avec ou sans
®
Juvederm hydrate Non réticulé Allergan 13,5 mg/ml Mannitol JDE et derme superficiel Avec
®
Belotéro Hydro Non réticulé Merz 18 mg/ml Glycérol JDE et derme superficiel Sans
Princess Rich® Non réticulé Croma 18 mg/ml Glycérol Derme superficiel ou profond Sans
®
Stylage Hydro Non réticulé Vivacy 14 mg/ml Mannitol JDE et derme superficiel Sans
Téosyal Redensity 1® Non réticulé Téoxane 15 mg/ml Acides aminés, Derme superficiel à moyen Avec
minéraux, etc.
Filorga NCTH 135HA® Non réticulé Filorga 5 mg/ml Vitamines, acides Épiderme ou derme Sans
aminés, etc.
JDE : jonction dermo-épidermique.

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TECHNIQUES Partie 2
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Section 4. Les produits de comblement (fillers)

Chapitre 22
Inducteurs tissulaires
M. Creusot, C. Raimbault

Principe d'induction tissulaire extracellulaire continue, entraînant une augmentation pro-


gressive de l'épaisseur dermique pendant au moins 2 ans [7].
Les inducteurs tissulaires représentent une catégorie à part Des analyses histologiques et histochimiques de biopsies
entière de produits de comblement. Ils jouent un rôle diffé- cutanées d'animaux traités ont montré que le collagène de
rent mais complémentaire à celui des acides hyaluroniques type I remplace progressivement le collagène de type III.
(AH) : outre leur effet volumateur, ils vont induire une néocol- C'est le seul produit de comblement devant être reconstitué
lagenèse au site d'injection, permettant une restauration du avant utilisation. Il se présente sous la forme d'un flacon conte-
soutien des tissus. Ces biostimulateurs du collagène ont un nant un lyophilisat qui doit être dilué avec de l'eau stérile pour
effet durable dans le temps, variable selon le type de produit. préparation injectable (eau PPI) au moins 24 heures avant l'utili-
La technique d'injection de chacun des produits présente sation (l'idéal étant au moins 48 heures) et qui doit être conservé
des particularités qui seront détaillées, mais d'emblée, il faut à température ambiante jusqu'à utilisation. Il peut aussi être
souligner le fait qu'aucun ne présente d'antidote équivalent maintenu au réfrigérateur pendant au maximum 3 à 4 semaines
à la hyaluronidase pour les AH, et qu'il ne sera pas possible avant l'injection. Juste avant la procédure, le produit obtenu est
de les éliminer en cas d'embole vasculaire ou de granulome. encore dilué avec 2 ml d'anesthésiant de type lidocaïne ou mépi-
Les inducteurs tissulaires sont composés de microsphères vacaïne pour diminuer la douleur et faciliter les massages.
(principe actif), suspendues dans un gel vecteur composé La quantité totale de la dilution a varié au cours du temps : de
principalement de carboxyméthylcellulose (CMC) [1–4]. 3 ml chez les patients atteints du VIH, elle est passée à 5–6 ml
La nature des microsphères est différente selon les fillers, selon le protocole Redaelli, voire plus après les recommanda-
alors que le gel de CMC, dérivé de cellulose et d'acide acé- tions européennes de 2014 (7 ml pour les injections profondes
tique, est commun à tous. Il est soluble dans l'eau, et permet à 9 ml pour les injections sous-cutanées, ajout d'anesthésiant
d'augmenter la viscosité du produit. Après injection, il est inclus). Plus la dilution est importante, plus on limite l'appari-
rapidement décomposé, tandis que les microsphères vont tion de papules ou nodules granulomateux autour des parti-
s'intégrer dans les tissus mous environnants, puis se résorber cules. La préparation, l'homogénéisation et le mode d'injection
lentement, tout en stimulant localement la synthèse de col- sont aussi primordiaux pour les éviter. Une nouvelle présenta-
lagène, d'où la dénomination d'inducteur tissulaire. tion commerciale pré-diluée est désormais disponible.

Acide L-polylactique Hydroxyapatite de calcium


(PLLA – depuis 1999) [5, 6] (CaHa – depuis 2005) [8–11]
Sculptra® (laboratoire Sinclair) est un lyophilisat injectable Les produits sont les suivants :
composé de 150 mg de PLLA sous la forme de particules de ■ Radiesse® et Radiesse +® contenant de la lidocaïne (labo-
40 à 63 μm de diamètre, de 90 mg de CMC de sodium et de ratoire Merz) ;
127,5 mg de mannitol. ■ Simetro (laboratoire Juves).

Le Newfill® [6, 7], ayant la même composition, est réservé Les seringues sont prêtes à l'emploi.
aux corrections des dépressions cutanées importantes liées à Le produit contient 30 % de microsphères de CaHa de 25 à
la perte de masse graisseuse au niveau du visage (lipoatro- 45 μm de diamètre, dans un gel aqueux composé d'eau puri-
phie), chez les patients atteints du virus de l'immunodéfi- fiée, de glycérine et de CMC de sodium. Ces particules de syn-
cience humaine (VIH) traités par antirétroviraux. thèse biocompatibles et biorésorbables ont une composition
Le PLLA est un inducteur tissulaire puissant. Il stimule la identique à celle de la portion minérale des os et des dents.
néocollagenèse, en déclenchant une réaction à corps étran- L'augmentation initiale du volume liée à l'injection est
ger au matériau injecté, suivie d'une réponse inflammatoire assurée par le gel de CMC qui se résorbe progressivement et
cellulaire qui entraîne la formation d'un tissu conjonctif vas- du CaHa. Après environ 9 à 12 mois, les particules de CaHa
cularisé. Il est ensuite hydrolysé en lactate, transformé en sont dégradées en calcium et phosphate et sont éliminées
pyruvate et oxydé en dioxyde de carbone. La réponse inflam- par le système rénal. La correction immédiate après l'injec-
matoire diminue en 6 mois, mais la stimulation de la matrice tion de ce produit hautement viscoélastique est suivie de

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 22. Inducteurs tissulaires

l'induction d'une prolifération des cellules dermiques Contre-indications


fibroblastiques, d'une néocollagenèse, de la production
d'élastine, de protéoglycanes, d'une néoangiogenèse. La Ces produits sont à éviter dans les situations suivantes :
peau devient plus ferme, plus élastique, plus épaisse et la ■ grossesse, allaitement ;
correction peut atteindre 18 mois (fig. 22.1). ■ antécédents allergiques graves ou évolutifs ;

■ allergie connue à l'un des composants ;

■ maladies auto-immunes ;

■ susceptibilité connue à la formation de chéloïdes ou aux

cicatrices hypertrophiques ;
■ traitement en cours par corticoïdes, l'augmentation des

fibres de tissu conjonctif pouvant alors être entravée ;


■ injections anciennes de produits non résorbables (sili-

cones notamment).
Les inducteurs tissulaires ne sont pas indiqués pour l'aug-
mentation des lèvres (risque de nodules indurés, perte de
souplesse), ni pour les cernes.

Indications

Fig.  22.1  Aspect en microscopie électronique des particules d'hy-


Indications médicales
droxyapatite de calcium de 25 à 45 μm dans un gel aqueux L'indication est une lipoatrophie faciale chez les patients séropo-
Source : Marmur ES, Phelps R, Goldberg DJ. Clinical, histologic and electron
sitifs traités par trithérapie, notamment avec le PLLA suite à
microscopic findings after injection of a calcium hydroxylapatite filler.
J Cosmet Laser Ther © 2004 Taylor&Francis healthsciences. l'inefficacité relative de la liposculpture. Les premières études
étaient avec le PLLA [13, 14] ; d'autres ont suivi avec le CaHa [15].

Polycaprolactone Indications esthétiques


(PCL – depuis 2009) Les inducteurs tissulaires sont des volumateurs et des régé-
nérants tissulaires et ne doivent pas être injectés dans le
Le produit commercialisé est l'Ellansé®. derme (sauf pour CaHa) qui est une région très riche en
C'est un polymère biocompatible et biorésorbable com- fibroblastes, ni dans les zones hyperdynamiques comme la
posé de 30 % de particules sphériques et totalement lisses de zone péri-orale, les commissures labiales, la zone péri-­
diamètre compris entre 25 et 50  μ, synthétisé à partir de oculaire. L'injection dans la zone pré-auriculaire doit rester
l'ε-caprolactone et de 70 % de CMC. Quatre versions de PCL sous-dermique pour éviter une fibrose de la glande parotide
prêtes à l'emploi sont disponibles avec une longévité in vivo ou du canal de Stenon.
attendue respectivement de 1, 2, 3 et 4 ans – Ellansé-S® (ver- Les trois inducteurs ne sont pas indiqués pour le traite-
sion courte, S) PCL  1 ; Ellansé-M® (version moyenne, M) ment de la glabelle.
PCL 2 ; Ellansé-L® (version longue, L) ; Ellansé-E® (extralong, Sur le front, le PLLA est contre-indiqué.
E version). La différence est liée à la longueur des chaines et à L'injection peut se faire dans le tissu sous-cutané selon les
leur dégradation progressive en deux phases : techniques habituelles de nappage à l'aiguille ou à la canule,
■ phase 1 – phase non enzymatique : scission aléatoire de la selon des trajets parallèles ou croisés, ou plus profondément
chaîne par clivage hydrolytique de groupes ester. Il n'y a en sus-périosté avec des bolus profonds.
pas de perte de masse, ni de volume des particules pen-
dant cette hydrolyse ; Traitement des cicatrices
■ phase 2 – phagocytose des petites particules : disparition

totale du produit en 1, 2 ans ou plus. Du PLLA dilué a été utilisé pour relever les cicatrices d'acné
Cette différence dans la dégradation des particules a été en dermopénétration ou dermique profond [16, 17].
montrée lors d'une étude histologique sur le dos de lapin
[4]  : injection sous-cutanée de PCL  1 et 2 ; réalisation de Utilisation sur le corps
biopsies après 9 mois et 21 mois ; à 9 mois : ■ Mains : rajeunissement des mains en restaurant les volumes
■ résorption complète des microsphères avec PCL  1 avec avec du CaHa (PLLA et PCL contre-indiqués dans cette zone).
formation d'un nouveau collagène ; ■ Corps : certains peuvent être utilisés sur le corps mais sou-

■ persistance de microsphères de PCL 2 entourées de colla- vent en étant dilués (dans ce cas hors-AMM).
gène de types I et III. Le CaHA peut être utilisé pour l'amélioration de la tonicité
Après 21 mois, il reste des microsphères de PCL 2 entou- et de la fermeté de la peau [18,  19], cou, décolleté, bras,
rées de collagène mature de type I [12]. cuisses, abdomen, vergetures.

172
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TECHNIQUES Partie 2
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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 22. Inducteurs tissulaires

Techniques d'injection Effets secondaires


selon les produits et effets Par le passé, les effets indésirables liés au PLLA étaient plus
importants, dans la mesure où la dilution du lyophilisat était
secondaires spécifiques de 3  ml. Actuellement, la dilution totale conseillée de 7 à
9  ml pour en faciliter l'utilisation a nettement réduit ces
Acide L-polylactique effets secondaires.
Outre les effets indésirables mineurs préalablement décrits
Contre-indications : lèvres et zone périlabiale, commissures,
avec les autres produits, le PLLA présente un risque plus
zone péri-oculaire, front, nez, dos des mains.
important de papules ou nodules (induration localisée liée à
Technique d'injection l'injection trop superficielle, au défaut d'homogénéisation
ou de répartition du PLLA), pouvant nécessiter le recours à la
Le PLLA est injecté dans le plan sous-cutané ou placé en posi-
biopsie pour le différencier d'un granulome inflammatoire
tion sus-périostée, à l'aiguille longue 22 ou 25 G (4 cm), créant
(fig. 22.2).
une tunnélisation, ou à la canule, en bolus ou en nappage, de
façon rétrotraçante, permettant un dépôt régulier de produit.
L'injection est devenue plus facile depuis l'augmentation des
dilutions avec une meilleure distribution du produit, moins de
risques d'obstruer le conduit de l'aiguille ou de la canule, une
diminution nette de la survenue de papules ou nodules.
Il ne faut pas utiliser plus d'un flacon par hémiface, et on
conseille de ne pas dépasser la dose de 0,3 ml/cm2 sur une zone
osseuse ou 0,1 ml/cm2 lors d'injection sous-dermique. La dilu-
tion peut être de 7 ml pour la reconstitution des volumes pro-
fonds, et de 9 ml lors d'utilisation en nappage sous-cutané.
Il est recommandé de masser au fur et à mesure chaque
zone traitée pendant la procédure pour bien répartir le pro-
duit, avant de continuer à traiter les autres zones.
Le patient continuera à masser 5 minutes matin et soir, pen-
dant 1  semaine au moins, ou selon le protocole  5-5-5, soit
5 minutes 5 fois par jour pendant 5 jours. Il faut bien lui expli-
quer que la correction obtenue immédiatement après l'injec- Fig.  22.2  Nodules palpables, visibles lorsque la peau est étirée, non
inflammatoires.
tion est liée au volume injecté, mais qu'elle va disparaître dans Source : C. Raimbault.
les jours suivants et que ce sont la stimulation fibroblastique
induite et le nouveau dépôt de collagène qui seront à l'origine
de l'amélioration esthétique. Néanmoins, le volume obtenu La fréquence des nodules a considérablement diminué
après la séance donne une bonne idée du résultat final. depuis les nouvelles recommandations de dilution, de quantité
Deux à trois traitements sont espacés de 4 à 6 semaines, injectée qui ne doit pas dépasser la dose de 0,1 à 0,3 ml/cm2,
selon l'âge et la perte de volume. et de massage après l'injection.
La restauration du volume et la production de collagène Le nodule étant le plus souvent asymptomatique, son trai-
sont progressives, et visibles après 2 à 3 mois et continuent tement est facultatif. Il est pertinent de rassurer le patient en
pendant quelques mois. Cela s'accompagne d'une améliora- lui indiquant qu'il s'agit d'un processus transitoire qui se
tion de la surface, de l'éclat cutané. Il faut traiter, attendre et résoudra spontanément avec le temps. Les papules peuvent
évaluer avant de recommencer une nouvelle session pour être atténuées par un massage vigoureux, et 95 % se résolvent
éviter toute surcorrection. d'elles-mêmes. L'erreur à éviter est d'injecter des stéroïdes en
La qualité du résultat et le nombre de flacons nécessaires intralésionnel car ils peuvent rendre le problème encore plus
dépendent de l'âge du patient, de son mode de vie (tabac, visible en provoquant une atrophie autour du nodule.
exposition solaire), mais on recommande en moyenne 1 fla- L'excision est une autre option thérapeutique mais entraîne
con par 10 années d'âge, répartis en 2 à 3 séances au moins. une cicatrice permanente. Les nodules ne répondent pas au
Après 2 ans, une nouvelle stimulation nécessitera une quantité 5-fluorouracile (5-FU).
moindre évaluée à 30 ou 50 % par rapport à la quantité initiale. Des nodules inflammatoires à apparition tardive (14 à
La combinaison avec des injections d'AH pour un résultat 24 mois) ont également été décrits et peuvent représen-
plus rapide est possible (par exemple le traitement des lèvres ter une dégradation en phase finale du produit de PLLA.
par AH), de même qu'avec les autres techniques – peeling, Cela peut aussi être traité avec des injections de stéroïdes
radiofréquence, lasers avant ou après 4 à 6 semaines (recom- ou de 5-FU, mais peut se résoudre spontanément avec le
mandations de 2014). temps.
Le PLLA a fait l'objet de quelques publications pour corri- Les granulomes (communs à tous les injectables, effet
ger des cicatrices d'acné ou de varicelle. secondaire non immédiat), souvent symptomatiques,

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 22. Inducteurs tissulaires

nécessitent un traitement médical local ou général. Les 2 %, ou 0,5 ml d'anesthésiant + 1 ml de solution saline). Il est
véritables granulomes cliniques sont une réponse inflam- important de noter que l'utilisation de CaHa dilué est hors-
matoire systémique montrant une surabondance de AMM [20, 21].
réaction de l'hôte (c'est-à-dire des cellules géantes à
corps étranger) à une quantité relativement faible de Corps
produit et se produisent donc simultanément dans tous Le CaHa peut être injecté sur différentes zones du corps :
les sites traités, contrairement aux nodules qui appa- ■ mains ; deux techniques sont proposées :
raissent dans une zone limitée. Leur fréquence est esti- ● on préférera une injection à la canule de 22 à 25  G.
mée entre 0,01  % et 0,1  %. Les granulomes répondent Rappelons que le dos de la main comporte trois couches
bien au traitement par corticoïdes en intralésionnel ou fibrograisseuses successives de la profondeur à la surface
au 5-FU. La disparition est généralement observée au séparées les unes des autres par de minces lames
bout de 2 à 3 semaines. fibreuses, reliées par de fins septums fibreux. La couche
la plus profonde comporte les tendons ; l'intermédiaire,
Hydroxyapatite de calcium
Contre-indications : lèvres, zone péri-oculaire.

Indications esthétiques
Visage
Le CaHA est généralement placé dans le derme profond
ou dans le plan sous-cutané de moyen à profond en uti-
lisant les techniques d'injection habituelles en fonction
de la zone traitée. C'est principalement la « technique
1
des vecteurs » qui a été mise en avant et qui met à profit
les capacités volumétriques du produit, à celle de stimu-
lation collagénique lorsque l'injection est plus superfi-
cielle, sous-dermique : l'épaississement du derme réalise
un soutien cutané à partir d'un point d'ancrage situé
dans la pommette. On préfère une canule de 22 G, longue 2
de 7 à 9 cm pour parcourir toute la distance séparant le
point d'ancrage du sillon naso-génien et du pli d'amer-
tume. L'injection est rétrotraçante, lente et homogène,
sans retirer la canule pour changer de direction. Les trois
premiers vecteurs traversent le sillon naso-génien. Les
trois autres vecteurs traversent le pli d'amertume
(fig. 22.3 à 22.5).
Le traitement du front dans la zone sous-galéale est pos-
sible, mais en diluant le produit avec un ratio de 1:1 (1 volume Fig. 22.3  Technique des vecteurs.
de CaHa pour 1 volume de diluant composé de lidocaïne à La quantité injectée est fonction du volume à suppléer (1 à 2 seringues).

A B C
®
Fig. 22.4  A-C. Patiente de 59 ans, injections 1,5 ml de Radiesse par côté.
Résultat à 3 mois (B).

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Chapitre 22. Inducteurs tissulaires

A B
Fig. 22.5  A. Patiente de 63 ans, 1 injection de Radiesse® 1,5 ml par côté. B. Résultat à 3 mois.

les veines et les nerfs. L'injection à la canule se fait dans Effets secondaires
la couche superficielle soit par un seul point d'entrée Les précautions avant injection sont les mêmes que celles
éloigné du poignet, soit par plusieurs points situés dans pour les AH. Les effets indésirables, non spécifiques aux
les espaces interdigitaux ; inducteurs tissulaires, sont transitoires, tels que ecchymoses,
● injection à l'aiguille : il faut rester strictement dans la
érythème, œdème, douleurs, prurit.
couche fibrograisseuse superficielle et donc bien L'érythème et l'œdème peuvent parfois nécessiter le
soulever la peau dorsale pour créer une tente et recours aux corticoïdes per os ; le prurit, aux corticoïdes
injecter à distance des tendons, des veines et nerfs. locaux puissants.
L'injection de petits bolus (0,2 à 0,5  ml) entre les Plus de 190 études cliniques et publications concernant le
métacarpes se fait à l'aiguille de 27  G. La main est CaHa ont montré son innocuité à long terme avec l'absence
immédiatement massée. Il est préférable d'éviter de calcification ou d'ossification, l'absence de migration, un
toute surcorrection, d'autant que l'effet peut perdu- faible risque de granulome à corps étranger.
rer au-delà de 2 ans. Par ailleurs, 21  études portant sur 5  081  injections de
■ Traitement du corps [18, 19] : de nouvelles indications sont
CaHA chez 2 779 patients ont rapporté les effets secondaires
liées aux propriétés du CaHa qui peut être utilisé pour amé- suivants [22]. Parmi les 173 effets secondaires signalés, l'ap-
liorer l'élasticité, la fermeté et l'épaisseur cutanée lorsqu'il parition de nodules est l'effet indésirable signalé le plus fré-
est injecté dans un plan sous-dermique à la canule ou à quent et son incidence dans cette cohorte est de 3 % (166 cas
l'aiguille dans les zones de relâchement cutané : cou, décol- sur 5 081) (fig. 22.6).
leté, face interne des bras, cuisses, genoux, vergetures, etc.
Dans ce cas, le CaHa est dilué selon un ratio de 1:1, 1:2, 1:4
jusqu'à 1:6, où l'on observe encore une stimulation
Nodules (n = 166)
fibroblastique. La dilution se fait à l'aide de deux grandes
seringues luerlock à travers un connecteur adapté en
Surcorrection (n = 1)
mélangeant soigneusement le CaHa au diluant par au
moins 20  passages juste avant l'injection. On utilise
Érythème persistant (n = 2)
1 volume de CaHa pour 1, 2, 4, 6 volumes de diluant com-
posé de lidocaïne à 2 % généralement pour 1 volume de
Inflammation/œdème
CaHa, complété par de la solution saline. Il faut rappeler persistant (n = 4)
que la dilution de CaHa est hors-AMM, mais des publica-
tions avec recommandations pour son utilisation diluée
ont montré son efficacité et sa sécurité. Le ratio concernant Fig. 22.6  Effets secondaires après 5 081 injections d'HACA chez 2 779
patients.
la dilution dépend de la qualité de la peau ; celle-ci est d'au- Source : © Wiley Periodicals, Inc., d'après [22].
tant plus grande que la peau est plus fine ou plus pigmen-
tée. L'injection, le plus souvent à la canule, doit délivrer une
couche fine uniforme avec des trajets parallèles sous la Les nodules se produisent rarement lorsque l'injecteur est
peau ou avec une technique de fanning. Elle est suivie d'un expérimenté. Ils peuvent être traités avec une injection de
massage vigoureux. La déposition d'un nouveau collagène solution saline normale et de lidocaïne pour dissiper la surac-
et d'élastine se produit vers le 4e  mois avec une stabilité cumulation de produit. Il n'existe pas actuellement d'agent
jusqu'à 9 mois. Un à trois traitements sont réalisés la pre- inhibiteur du CaHA qui permettrait de corriger des résultats
mière année avec un entretien tous les 12 à 18 mois. non satisfaisants tels que l'asymétrie, les surcorrections ou

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 22. Inducteurs tissulaires

pour la prise en charge des complications vasculaires immé- Aucune tendance d'effet secondaire spécifique n'a été rap-
diates. Toutefois, dans le futur, grâce à des publications de portée, mais la survenue tardive de granulomes à corps
succès de traitement de calciphylaxie par thiosulfate de étranger a été décrite [25].
sodium, il serait permis d'envisager un antidote au CaHa [23]. Plusieurs cas rapportés sont liés à la procédure d'injection
Pour le rajeunissement des mains, le CaHA a un profil d'ef- elle-même, comme un œdème qui disparaît spontanément
fet secondaire similaire. La plupart des effets indésirables après quelques jours. Les nodules ou les indurations semblent
après l'injection sont légers à modérés, transitoires et se généralement liés à des erreurs de techniques d'injection,
résolvent d'eux-mêmes, avec notamment la présence d'un telles que des injections trop superficielles ou des injections
œdème des mains déconseillant le port de bagues pendant en bolus (tableau 22.1).
cette période, et d'ecchymoses aux points d'injection. Une
antisepsie rigoureuse s'impose avant l'injection. Tableau 22.1  Effets indésirables liés au polycaprolactone après
Une étude de Carruthers et al. portant sur 58 patients a mise sur le marché.
été réalisée avec examen radiographique et tomodensitomé-
Taux (%), N = 490 000
trique afin de déterminer si le CaHA posait des problèmes de seringues
sécurité radiographique [24]. L'étude a déterminé que le
Totalité des effets indésirables 0,049
produit est généralement visible, mais n'obscurcit pas les
Principaux effets indésirables
structures sous-jacentes lors de la tomodensitométrie. En
outre, elle n'a pas mis en évidence de migration de CaHA, ni Œdème 0,0195
d'ostéogenèse du fait de son injection dans le derme pro- Papules/nodules 0,0177
fond et dans le plan sous-cutané. Inflammation/infection 0,0031
Ecchymoses/hématomes 0,0006
Induration 0,0004
Polycaprolactone
Contre-indications : lèvres, zones péri-oculaire, glabelle.

Technique d'injection Conclusion


Les injections doivent se faire lentement et profondément, Les inducteurs tissulaires sont des produits de comblement
dans le tissu sous-cutané, en hypodermique ou en sus-­ qui ont un intérêt pour améliorer la qualité des tissus
périosté. Elles doivent se faire en rétrotraçante ou en bolus sous-cutanés, stimuler la synthèse de tissu collagénique et
(dans ce cas, il ne faut jamais plus de 0,2 ml à 0,3 ml/bolus reconstituer les volumes. Ils sont bien tolérés si leurs indica-
pour éviter tout risque de formation de nodules). La dilution tions et leur technique d'injection sont bien respectées et
avec de la lidocaïne pour rendre l'injection moins d
­ ouloureuse sont une alternative intéressante aux injections d'acide
ne modifie pas les propriétés du filler. hyaluronique.
Il est nécessaire de masser doucement le matériel injecté
afin d'obtenir le résultat esthétique souhaité.
Références
Il est impératif de ne jamais surcorriger car le volume va
[1] Vleggaar D, Bauer U. Facial enhancement and the European expe-
augmenter lentement au fil du temps en 10 à 12 semaines,
rience with Sculptra (poly-l-lactic acid). J Drugs Dermatol
en raison d'une stimulation du tissu conjonctif. Il est préfé- 2004;3(5):542–7.
rable de ne pas réaliser de retouches avant 3 mois pour les [2] Zerbinati  N, Calligaro  A. Calcium hydroxylapatite treatment of
mêmes raisons. L'injection de PCL 1 et 2 est possible sur le human skin: evidence of collagen turnover through picrosirius
front. red staining and circularly polarized microscopy. Clin Cosmet
L'injection sur le dos des mains est possible en privilégiant Investig Dermatol 2018;11:29–35.
[3] Berlin AL, Hussain M, Goldberg DJ. Calcium hydroxylapatite filler
la canule, et en évitant la technique des bolus pour ne pas
for facial rejuvenation: a histologic and immunohistochemical
injecter dans les deux couches fibro-adipeuses profondes analysis. Dermatol Surg 2008;34(Suppl 1):S64–7.
contenant les tendons ou les veines et les nerfs. [4] de Melo  F, Nicolau  P, Piovano  L, et  al. Recommendations for
volume augmentation and rejuvenation of the face and hands
Effets secondaires liés with the newgeneration polycaprolactone-based collagen stimu-
lator (Ellansé®). Clin Cosmet Investing Dermatol 2017;10:
Les effets secondaires recensés sont identiques au CaHA. 431–40.
Le profil d'innocuité a été démontré dans les études d'effi- [5] Redaelli  A, Forte  R. Cosmetic use of polylactic acid: report of
cacité et d'innocuité cliniques. Depuis l'obtention de la 568 patients. J Cosmet Dermatol 2009;8(4):239–48.
licence de mise sur le marché, un système de pharmacovigi- [6] Alessio  R, Rzany  B, Eve  L, et  al. European expert recommenda-
tions on the use of injectable poly-L-lactic acid for facial rejuvena-
lance a été mis en place pour enregistrer les effets indési-
tion. J Drugs Dermatol 2014;13(9):1057–66.
rables dans le monde. Plus de 490  000  seringues ont été [7] Bohnert  K, Dorizas  A, Lorenc  P, Sadick  NS. Randomized,
utilisées depuis le lancement en 2009 jusqu'en décembre controlled, multicentered, double-blind investigation of injec-
2016 et le taux d'effets indésirables est faible, évalué à 0,049 % table poly-L-lactic acid for improving skin quality. Dermatol Surg
indiquant que le stimulateur à base de PCL est bien toléré. 2019;45(5):718–24.

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 22. Inducteurs tissulaires

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(Radiesse) for treatment of nasolabial folds: long-term safety and poly-L-lactic acid for the treatment of moderate to severe scar-
efficacy results. Aesthet Surg J 2010;30:235–8. ring from acne or varicella. Dermatol Surg 2007;33(Suppl 2):
[9] Robinson  DM. In  vitro analysis of the degradation of calcium S159–67.
hydroxylapatite dermal filler: a proof-of-concept study. Dermatol [18] Goldie K, Peeters W, Alghoul M, et al. Global consensus guidelines
Surg 2018;44(Suppl 1):S5–9. for the injection of diluted and hyperdiluted calcium hydroxylapa-
[10] Pavicic T. Complete biodegradable nature of calcium hydroxyla- tite for skin tightening. Dermatol Surg 2018;44(Suppl 1):S32–41.
patite after injection for malar enhancement: an MRI study. Clin [19] de Almeida AT, Figueredo V, da Cunha ALG, et al. Consensus recom-
Cosmet Investig Dermatol 2015;8:19–25. mendations for the use of hyperdiluted calcium hydroxyapatite
[11] Marmur ES, Phelps R, Goldberg DJ. Clinical, histologic and elec- (Radiesse) as a face and body biostimulatory agent. Plast Reconstr
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patite filler. J Cosmet Laser Ther 2004;6(4):223–6. [20] Van Loghem  JAJ. Use of calcium hydroxylapatite in the upper
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Mater 2013;3(1):19–26. [21] Kim  Jongseo. Novel forehead augmentation strategy: forehead
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implants (new-fill) to correct facial lipoatrophy in HIV-infected very after tumescent injection. Plast Reconstr Surg Glob Open
patients: results of the open-label study VEGA. AIDS 2018;6(9). e1858.
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3-year follow-up study. J Am Acad Dermatol 2008;59(6):923–33. fate for the treatment of calciphylaxis. JAMA Dermatol
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Chapitre 23
Hyaluronidase
P. Coutant-Foulc

Introduction La survenue de cas d'allergie de type hypersensibilité de


type  I à la hyaluronidase [4], avec accident sévère de type
La hyaluronidase est une enzyme qui dégrade l'acide hyalu- choc anaphylactique, a été responsable de la diminution de
ronique (AH). Elle est présente à l'état naturel dans les tissus son utilisation dans ces indications.
pour en abaisser la viscosité et augmenter ainsi la perméabi- De manière plus anecdotique, elle a été utilisée pour trai-
lité tissulaire. ter les sclérodermies cutanées et les myxœdèmes prétibiaux,
Dans le cadre de l'autorisation de mise sur le marché les cicatrices scléreuses, les chéloïdes et la cellulite fibreuse.
(AMM), elle est utilisée pour éviter les complications liées Sa forme PH20 recombinante humaine pégylée est utilisée
aux emboles vasculaires lors d'injection d'AH. Bien que le en cancérologie, en association avec des anticorps monoclo-
traitement des surcorrections ou des nodules soit hors naux et des chimiothérapies pour améliorer leur pénétration
AMM, elle peut être utilisée sous la responsabilité du méde- intratumorale. Mais ces formes recombinantes humaines
cin, pour hydrolyser l'AH [1]. sont récentes et onéreuses.
L'utilisation de hyaluronidase dans le traitement des effets
secondaires des injections d'AH a été décrite par Lambros en
Structure moléculaire 2004 [5] pour traiter des surcorrections ou des nodules, mais
et mécanisme d'action son utilité est majeure dans la prise en charge des complica-
tions graves de type embole vasculaire [6].
La hyaluronidase est une hyaluro-glucosaminidase de
La hyaluronidase d'origine animale, étant extraite de testi-
61 kDa ; elle hydrolyse l'AH au niveau de sa liaison β1, 4.
cules de bovins et ou d'ovins, a été interdite en France par
Il existe 6  isoformes  : hyaluronidase  1, 2, 3 et 4, PH20 et
l'Agence nationale de sécurité du médicament et des pro-
HYALP1 [2].
duits de santé (ANSM) en septembre 2011, en raison de l'en-
Sa demi-vie plasmatique est très courte, de l'ordre de
céphalopathie spongiforme bovine. Elle est à nouveau
2 minutes. Son élimination est hépatique. In vivo, elle per-
autorisée depuis fin 2017 mais dans un cadre législatif très
met une lyse protéique de la substance fondamentale
strict : autorisation d'utilisation restreinte à la Hyalase® pour
intercellulaire.
les seuls accidents emboliques vasculaires et usage réservé
Elle est naturellement présente dans les testicules des
aux cinq spécialités suivantes : dermatologie, chirurgie plas-
mammifères pour faciliter la pénétration des spermatozoïdes
tique, chirurgie maxillofaciale, ORL, ophtalmologie.
dans l'ovocyte, dans les venins de serpents et d'hyménop-
tères pour augmenter leur diffusion, et dans certaines bacté-
ries à Gram positif pour favoriser leur pathogénicité Protocoles d'utilisation
tissulaire.
Concernant son usage pour la dégradation de l'AH réticulé En France, on utilisait historiquement surtout le Desinfiltral®
injecté, il a été démontré que son efficacité est quasi immé- des laboratoires Skin Tech. Mais c'est la Hyalase® des labora-
diate et de courte durée [2] et qu'elle agit même sur un AH toires Negma Worckhard qui a bénéficié de cette nouvelle
injecté depuis des années. autorisation d'utilisation.

Précautions d'usage
Historique d'utilisation L'injection est réalisée sous la seule responsabilité du prati-
La hyaluronidase fut découverte en 1929 par Duran Reynald. cien. En raison du risque d'allergie immédiate sévère, celui-ci
Elle était utilisée en ophtalmologie à forte dose pour aug- devra garder le patient en observation au moins 30 minutes
menter la diffusion des anesthésiants dans les injections et disposer du matériel d'urgence, mais il n'a jamais été rap-
rétrobulbaires [3], et dans la chirurgie intracapsulaire pour porté de choc anaphylactique aux faibles doses utilisées en
faciliter la dissection de la zonule. esthétique.

Dermatologie esthétique
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Chapitre 23. Hyaluronidase

Dilution En janvier 2014, un groupe de praticiens experts a établi


un premier protocole thérapeutique, fondé sur une revue
Une ampoule de 1 500 unités de hyaluronidase devra être
de la littérature et sur leur expérience. Ils recommandent
diluée dans une quantité de 1 à 10  ml de sérum physio­
200 à 300 U de hyaluronidase injectées dans l'ensemble de
logique injectable (4-5 ml en moyenne). Une fois reconsti-
la zone à risque de nécrose, répétée 2 fois/jour jusqu'à dis-
tuée, la Hyalase® ne se conserve pas.
parition complète des signes de thrombose vasculaire. Une
dose totale supérieure à 1 500 U peut être nécessaire [7].
Test d'injection préalable En juin 2014, un deuxième groupe d'experts indépendants,
réunis à Las Vegas, ont établi un consensus à peu près simi-
En raison du risque d'hypersensibilité immédiate, et unique-
laire, mais d'efficacité plus rapide, la short pulse therapy  :
ment en l'absence de situation d'urgence, il est logique de pra-
200 U au moins, injectées tous les 3 à 4 cm dans la zone de
tiquer un prick test avant chaque injection de hyaluronidase.
nécrose et autour, toutes les 60 minutes, 3 ou 4 fois de suite
Sa positivité contre-indique son utilisation ; a contrario, un
ou plus si nécessaire jusqu'à disparition des signes de throm-
prick test négatif n'élimine pas le risque d'allergie immédiate.
bose [7]. Ils apportent en outre les deux notions suivantes : il
est intéressant de diluer la hyaluronidase avec de la xylocaïne
Contre-indications pour favoriser la vasodilatation et la diffusion, et la quantité
Les contre-indications suivantes sont relatives et ne s'ap- de hyaluronidase nécessaire est inférieure pour dissoudre les
pliquent évidemment pas en cas d'urgence (nécrose vascu- AH biphasiques que les monophasiques.
laire ou cécité) : L'injection de hyaluronidase doit avoir lieu précocement
■ antécédents de réaction immédiate à la hyaluronidase ;
au mieux dans les 6 heures, au plus tard dans les 48 heures
■ surinfection locale (risque fort d'aggravation de la diffu-
pour éviter la nécrose cutanée. Il est nécessaire d'injecter
sion des germes) ; massivement à la fois dans la zone où l'AH a été injecté et
■ injection de toxine botulique dans les 48  heures précé-
dans tout le territoire de drainage vasculaire de cette zone.
dentes sur la même zone (risque de diffusion de la toxine Les injections doivent être sous-cutanées et non intravas-
botulique) ; culaires (demi-vie plasmatique inférieure à 2 minutes).
■ grossesse ou allaitement.
En 2017, De Lorenzi, directeur médical des laboratoires Allergan,
a publié une nouvelle étude sur la dose de hyaluronidase, fondée
sur son expérience clinique de risque de nécrose cutanée [8]. Il
détermine la dose de hyaluronidase à injecter en fonction du
Modalités d'injection dans les accidents
volume du territoire atteint. Les territoires concernés sont les sui-
vasculaires par embolisation avec risque vants : lèvre supérieure, nez, glabelle, menton. Si un seul territoire
de nécrose cutanée est concerné, la dose à injecter est de 500 UI ; si deux territoires
Dans les cas d'embolisation vasculaire par l'AH (fig. 23.1), il sont concernés, la dose est de 1 000 UI ; si trois territoires sont
convient d'injecter une grande quantité de hyaluronidase concernés, elle sera de 1 500 UI, et ce toutes les heures jusqu'à dis-
pour obtenir une dissolution rapide de l'embole d'AH ; on parition des signes de nécrose cutanée. Dans son expérience, tous
utilisera une dilution de 1 ml par flacon de 1 500 U. Les doses les cas traités avec ce protocole ont guéri sans séquelles.
injectées observées dans la littérature varient de 300 à Dans les cas de cécité, l'injection de hyaluronidase doit
1 500 U. L'efficacité est jugée par la diminution de la douleur avoir lieu dans les 90  minutes, en position rétrobulbaire
et la recoloration de la peau. en passant par le rebord orbitaire inférieur, puis le long du
plancher de l'orbite. Les doses vont selon les études de
150 à 300  U. Cette injection pourra être complétée par
une injection dans la zone supra-­orbitaire [9].
On voit donc qu'à ce jour, il n'y a pas de consensus sur la
dose à injecter, mais on retiendra que :
■ la hyaluronidase devra être injectée dans tout le territoire

de drainage de l'artère embolisée et non pas juste sur la


zone injectée en AH ;
■ plus le territoire nécrosé est grand, plus on devra augmen-

ter les doses jusqu'à 1 500 U par heure ;


■ les injections seront répétées toutes les heures jusqu'à dis-

parition des signes de nécrose, recoloration des tissus et


atténuation de la douleur ;
■ les AH de tenue plus prolongée, comme ceux de la gamme

Vycross® nécessitent plus de hyaluronidase que les bipha-


Fig.  23.1  Livedo reticularis traduisant l'embolisation de l'artère faciale
à l'angle du sillon naso-génien par de l'acide hyaluronique.
siques pour être dissous ;
C'est une urgence. ■ dans tous les cas, cette injection devra être la plus précoce

Source : P. Coutant-Foulc. possible.

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TECHNIQUES Partie 2
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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 23. Hyaluronidase

Modalités d'injection Conclusion


dans les surcorrections ou les nodules
Il est impératif aujourd'hui que les praticiens injecteurs
La zone d'AH injecté en excès ou le nodule doivent être repé- d'acide hyaluronique connaissent les modalités d'injection
rés cliniquement et marqués pour injecter la hyaluronidase de la hyaluronidase. Compte tenu de cette nouvelle autori-
de manière précise (fig. 23.2). sation d'utilisation, il pourrait nous être reproché, en cas
La quantité de hyaluronidase injectée n'est pas consen- d'accident d'embolisation vasculaire à base d'acide hyaluro-
suelle [7]. On privilégiera une injection de faible quantité nique, de ne pas avoir eu à disposition au cabinet de la hya-
(0,025 à 0,05  ml par point, soit un dosage de 7,5 à 15  u. luronidase ou de ne pas avoir su comment l'injecter. En
par point selon le produit utilisé et la dilution effectuée). outre, il est fondamental de connaître les zones de danger et
L'efficacité de la hyaluronidase débute immédiatement. En l'anatomie vasculaire.
pratique, on considère que la fonte est obtenue en 48 heures.
Une étude récente a montré qu'une faible dose de hyaluroni- Références
dase était suffisante pour dissoudre l'AH, mais que la vitesse
[1] Buhren BA. Hyaluronidase : from clinical applications to molecu-
de dégradation était dose-dépendante [10]. lar and cellular mechanisms. Eur J Med Res 2016 ;21:5.
Aussi, dans les cas de surcorrection ou de nodule, il est [2] Menzinger S, Kaya A, Saurat JH, Kaya G. Injected hyaluronidase
conseillé d'utiliser une dilution plus importante de 4 ou 5 ml reduces the volume of exogenous hyaluronate fillers. Dermato­
pour 1 500 u, permettant ainsi d'injecter de petites quantités pathology 2016 ;3(3):61–7.
d'unités pour éviter les pertes de volume trop importantes [11]. [3] Etesse B. Hyaluronidase : plaidoyer pour un retour. Ann Fr Anesth
Rea 2009 ;28:658–65.
Dans les nodules, granulomes, ou biofilm, avec contexte
[4] Kirby B, Butt A, Morrison AM, Beck MH. Type I allergic reaction
infectieux, il est impératif d'instaurer une antibiothérapie to hyaluronidase during ophthalmic surgery. Contact Dermatisis
préalable et d'attendre la régression de l'infection avant 2001 ;44(1):52.
toute injection de hyaluronidase ; il existerait sinon un risque [5] Lambros V. The use of hyauronidase to reverse the effects of hya-
majeur de cellulite de la face (la hyaluronidase favorisant la luronic acid filler. Plast Reconstruct Surg 2004 ;114:277.
dissémination des germes au sein des tissus). [6] Rzany B, Becker-Wegerich P, Bachmann F, et al. Hyaluronidase in
the correction of hyaluronic acid-based fillers: a review and a
recommendation for use. J Cosmet Dermatol
2009 ;8(4):317–23.
[7] Cohen JL. Treatment of hyaluronic acid filler-induced impending
necrosis with hyaluronidase: consensus recommendations.
Aesthet Surg J 2015 ;35(7):844–9.
[8] DeLorenzi C. New high dose pulsed hyaluronidase protocol for
hyaluronic acid filler vascular adverse events. Aesth Surg J
2017 ;37(7):814–25.
[9] Chesnut C. Restoration of visual loss with retrobulbar hyaluroni-
dase injection after hyaluronic acid filler. Dermatol Surg
2018 ;44(3):435–7.
[10] Alam M, Poon E. Effectiveness of low dose of hyaluronidase to
remove hyaluronic acid filler nodules. JAMA Dermatol
2018 ;154:765–72.
[11] Burhen BA, Schrumpf H, Gerber PA. Standardized in votro analy-
sis of degradability of hyaluronic acid fillers by hyaluronidase. Eur
Fig. 23.2  Nodule suite à l'injection d'acide hyaluronique.
Source : P. Coutant-Foulc. J Med Res 2018 ;37:1–6.

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)

Chapitre 24
Produits de comblement :
effets secondaires et gestion
des complications
D. Salomon

Introduction un érythème, un prurit, une sensibilité au point de piqûre,


des ecchymoses punctiformes provoquées par la lésion de
Les produits de comblement se divisent en produits résor- petits vaisseaux. Bien que cette complication soit imprévi-
bables et non résorbables. Les réactions secondaires aux pro- sible, la prise d'anticoagulant ou d'anti-agrégant, une atro-
duits non résorbables ne seront pas traitées car, depuis plusieurs phie cutanée, une injection « en force » sont les principales
années, ceux-ci sont interdits au sein de la Communauté euro- causes d'ecchymose. La formation d'un hématome est
péenne [1]. Parmi les produits résorbables, l'ensemble du cha- exceptionnelle et ne peut survenir que lors d'une injection
pitre se concentre sur les acides hyaluroniques (AH), leur traumatisante avec dissection des plans anatomiques.
diversité d'offres et de propriétés en faisant la gamme de pro-
duits la plus largement utilisée aujourd'hui. Les réactions aux Réactions semi-retardées
autres produits de comblements, acide L-polylactique,
hydroxyapatite de calcium et des microsphères de polycapro- Lors de l'injection, une douleur inhabituelle peut être ressentie
lactone dans un gel aqueux de carboxyméthylcellulose, sont avec une intensité variable. Toutefois, la douleur peut être
traitées par les auteurs des chapitres respectifs. absente ou masquée par l'anesthésique associé au gel d'AH. Une
Bien que les données disponibles ne soient pas exhaus- sensation douloureuse peut aussi parfois survenir tardivement
tives, les réactions après injections d'AH ne concernent après l'injection. On peut observer après quelques minutes,
qu'environ 1 à 3  % des patients, et dans leur très grande heures, ou jours après l'injection un blanchiment dans la zone
majorité, elles sont mineures et transitoires [2]. Il faut sou- injectée, des plaques ecchymotiques et/ou un livedo (signe car-
ligner que, lorsqu'ils sont utilisés de manière appropriée, les dinal) s'étendant dans un territoire vasculaire antérograde et
AH sont des produits présentant une excellente tolérance. rétrograde par rapport au lieu d'injection (fig. 24.1).
Les médecins qui pratiquent des injections devraient avoir La survenue de ces signes doit conduire à une prise en
une connaissance approfondie de l'anatomie faciale et des charge immédiate et adaptée ainsi qu'à un suivi attentif car
zones à risque d'accident vasculaire, de la rhéologie du pro- ils sont annonciateurs de complications ischémiques qui
duit utilisé, maîtriser la technique en contrôlant la profon- peuvent être sévères [3, 4]. Néanmoins, dans la grande majo-
deur d'injection, le volume injecté. Ces «  réactions » rité des cas, ces lésions se résorbent sans séquelle avec une
peuvent survenir selon une séquence temporelle variable : prise en charge adéquate.
immédiate, semi-retardée, retardée et se diviser en
­
mineures ou majeures. Réactions retardées
Les réactions peuvent apparaître plusieurs mois ou années
après l'injection [5, 6]. Il s'agit d'érythèmes fluctuants par-
Séquence temporelle fois intenses, d'œdèmes inflammatoires ou non (fig.  24.2)
des réactions aux acides ou de nodules fermes plus ou moins profonds d'aspect peu
hyaluroniques spécifique. Le plus souvent, ce n'est pas le médecin ayant
effectué les injections qui voit le patient. Des injections
antérieures de produits résorbables et/ou non résorbables
Réactions immédiates ont été effectuées et un facteur déclenchant – soins den-
Les réactions immédiates ne comportent aucun risque autre taires, nouvelle injection, traumatisme local, infections
qu'un désagrégement transitoire. Elles sont limitées et locali- virales ou ­bactériennes de la sphère ORL – est à l'origine de
sées au point d'injection ou à la zone traitée et disparaissent la survenue des lésions. Selon leur origine, ces réactions évo-
généralement en 1 à 3 jours. On peut observer un œdème, luent sur un mode désespérément chronique.
Dermatologie esthétique
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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 24. Produits de comblement : effets secondaires et gestion des complications

Réactions sévères
aux gels d'acide hyaluronique
Ces réactions, dont la physiopathologie reste mal caractéri-
sée, sont extrêmement rares. Elles sont soit inflammatoires
chroniques, soit vasculaires avec une ischémie et une
inflammation plus ou moins marquée d'un territoire
anatomique.

Réactions inflammatoires
Ces réactions sont des complications locales retardées, clini-
quement peu spécifique dont l'origine est incomprise [7].
On peut observer un début brutal et « bruyant », avec des
œdèmes dans les zones injectées, voire des tableaux cli-
niques évoquant une cellulite de la face, ou progressif et peu
symptomatique avec des lésions très diverses  : nodules,
plaques infiltrées plus ou moins profondes et parfois des
abcès froids. L'examen histologique met en évidence une
réaction granulomateuse de type « corps étranger » entou-
rant le gel d'AH (fig. 24.3) avec souvent la présence de poly-
nucléaires éosinophiles.
Il est important de distinguer ces nodules consécutifs à
une réaction granulomateuse des « reliefs » visible à la sur-
face de la peau, provenant d'un positionnement trop super-
Fig. 24.1  Livedo et ecchymoses survenus après injection d'acide hyalu- ficiel ou d'une trop grande quantité du gel injecté. Enfin,
ronique dans le sillon naso-génien. selon la rhéologie du gel d'AH, le volume injecté et la région
Source : D. Salomon. traitée, une migration du « bolus » peut survenir avec le
temps et constituer un volume visible dans une région inap-
propriée du visage [8].
Les facteurs impliqués dans la survenue des réactions gra-
nulomateuses restent hypothétiques. Sont discutés : le ter-
rain auto-immun du sujet ; le rôle de bactéries et la formation
d'un biofilm ; les propriétés rhéologiques du gel ; un histo-
rique d'injections multiples, des soins dentaires peu avant ou
après l'injection.

Fig. 24.3  Des plages d'acide hyaluronique colorées au bleu alcian entou-


rées d'un infiltrat granulomateux avec des cellules géantes multinu-
cléées, des lymphocytes et de nombreux polynucléaires éosinophiles.
Source : D. Salomon.

Terrain auto-immun
Des observations de nodules ou réactions inflammatoires ont
été rapportées chez des sujets atteints de maladies auto-­
immunes ou granulomateuses [9]. Par principe de p ­ récaution,
Fig.  24.2  Volumineux nodules œdémateux glabellaires et des régions
malaires survenus au décours d'une probable virose 6 mois après l'injec- ces patients a priori ne devraient pas être injectés avec des
tion d'acide hyaluronique. produits de comblement. La présence d'auto-anticorps dirigés
Source : D. Salomon. contre la molécule d'AH a été observée dans de très rare cas.
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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 24. Produits de comblement : effets secondaires et gestion des complications

Infections et biofilm de solutés visqueux  : la dermite livédoïde de Nicolau


Une asepsie adéquate est nécessaire lorsqu'on pratique des [12, 13] dont le mécanisme pourrait être un spasme arté-
injections d'AH. La présence de bactéries ayant « pénétré » riel entraînant une ischémie locale avec possiblement un
lors de l'injection, ou faisant suite à une « diffusion » par voie processus de coagulation intravasculaire locale.
sanguine ou lymphatique lors de soins dentaires peut L'hypothèse d'une injection directement intra-artérielle
conduire à la formation d'un biofilm entourant le gel d'AH et du gel semble moins probable en raison de la difficulté de
être à l'origine de réactions inflammatoires chroniques [10]. passer la paroi artérielle, surtout avec une canule. Toutefois,
Les cas établis d'infections secondaires à une injection une diffusion du gel, en particulier de sa fraction non réticu-
d'AH sont extrêmement rares et même lorsqu'un germe a lée, dans le compartiment vasculaire ne peut pas être for-
été identifié, il n'a pas été possible d'établir s'il s'agissait de mellement exclue. Il peut aussi exister une compression
contaminants ou d'un « vrai » processus infectieux. vasculaire extrinsèque. Enfin, une stase veineuse peut être
causée par l'injection d'un volume excessif dans une zone
Rhéologie du gel cutanée peu extensible. Cette complication se manifeste par
une zone boursouflée de consistance dure, élastique et dou-
Quel que soit le gel d'AH, des réactions inflammatoires ont
loureuse qui tend à prendre une couleur bleuâtre. Il ne faut
pu être observées. Toutefois, certains gels présentent une
pas confondre la congestion veineuse avec une simple
inhomogénéité de taille et de forme des particules qui, par la
ecchymose post-traitement.
diversité de leur structure tridimensionnelle, pourrait induire
Selon l'importance de cette réaction inflammatoire vascu-
plus aisément des réactions inflammatoires sans que le
laire et la survenue d'une ischémie plus ou moins marquée
mécanisme déclenchant n'ait jusqu'à maintenant pu être
du territoire concerné, des nécroses cutanées peuvent s'ob-
caractérisé et expliqué.
server dans les jours qui suivent l'épisode aigu. Il faut néan-
Injections multiples moins souligner que la survenue de nécrose reste très rare
malgré parfois des situations cliniques très « marquées ».
On peut aussi observer des réactions inflammatoires après
Les divers types de réactions sont récapitulés dans
de multiples injections d'AH, mais plus particulièrement
l'encadré 24.1.
lorsqu'il y a eu des produits non dégradables injectés aupara-
vant. On peut supposer que la réaction granulomateuse
quiescente accompagnant le produit non dégradable est Encadré 24.1
« activée » par la présence de fragment du gel d'AH.
Réactions après injections d'acide
Réactions ischémiques hyaluronique (AH)
Le nombre de ces réactions, qui sont accidentelles, semble
très faible (1/100 000 injections ?), mais l'on peut penser que Réactions immédiates
les cas « a minima » n'ayant pas entraîné de nécrose cutanée ■ Papule œdémateuse

ne sont pas rapportés. Ces accidents sont liés à l'injection ■ Ecchymose punctiforme

dans certains territoires à risque de la face qui sont, par la ■ Réaction érythémateuse transitoire

fréquence des accidents et leur gravité : nez, glabelle, partie ■ Prurit localisé

haute du sillon naso-génien, zone temporale, région labiale ■ Induction d'une récurrence herpétique

commissurale [11]. Réactions semi-retardées


La séquence clinique est : lors de l'injection, une douleur
survient après l'introduction de l'aiguille ou de la canule Sans risques majeurs
avant même qu'un volume conséquent d'AH n'ait été ■ Réaction folliculaire acnéiforme après injection d'AH en

injecté. L'opérateur peut parfois voir un blanchiment nappage


fugace d'un territoire cutané dans la zone injectée. Puis Signes annonciateurs d'un processus d'ischémie pou-
vont apparaître des macules rouge violacé accompagnées vant aboutir à des nécroses cutanées
d'un livedo dans le territoire vasculaire concerné avec sou- ■ Douleur plus ou moins intense immédiate, après

vent une extension antérograde et rétrograde. Parfois, des quelques minutes ou heures
vésicules, bulles ou pustules peuvent survenir sur la zone ■ Dans la zone d'injection et s'étendant dans un territoire

après quelques jours. Ces lésions doivent être distinguées anatomique :


d'une poussée d'herpès ou d'une surinfection. Si une ● blanchiment

nécrose s'installe, ce n'est alors pas un ecthyma. Une situa- ● aspect livédoïde

tion particulièrement grave est celle de l'atteinte du réseau ● ecchymoses «  spontanées »

vasculaire orbitaire avec un risque de cécité. Dans ce cas, il


Réactions retardées
existe souvent une douleur intense de la région orbitaire
■ Papulonodule froid ou inflammatoire
et une baisse rapide ou immédiate de la vision, parfois une
■ Œdème inflammatoire localisé ou étendu
ptose de la paupière de l'œil douloureux [4]. Ces tableaux
■ Abcès avec ou sans ulcération
cliniques font penser à une entité décrite lors d'injection

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 24. Produits de comblement : effets secondaires et gestion des complications

Traitements des complications première ligne. L'association avec une antibiothérapie est
à évaluer selon le contexte [2]. Divers médicaments immu-
nosuppresseurs – l'infliximab, l'étanercept, la cyclosporine,
Éviter les complications le mycophénolate mofétil, l'éfalizumab et récemment le
Avant de traiter, mieux vaut prévenir en effectuant une méthotrexate à la dose de 10 à 15  mg/semaine pendant
anamnèse médicale détaillée comprenant  : maladie auto-­ 6  mois  – ont également été utilisés. La durée du traite-
immune, inflammatoire chronique ou granulomateuse  ; ment anti-inflammatoire et anti-infectieux sera condition-
injections antérieures de produits de comblement ; connais- née par l'importance des épisodes et leur fréquence.
sance des gels d'AH et emploi adapté à la rhéologie ; suivi des Certains nodules nécessitent parfois une excision
événements pré- et post-injection (soins dentaires, infec- chirurgicale.
tions virales récentes).
Sur le plan technique, il faut  : une asepsie rigoureuse ; Réactions ischémiques
injecter lentement avec des aiguilles de 27 à 30  G ou des Le traitement de ces accidents vasculaires [14] associera la
canules souples ; de faibles quantités d'AH, 0,1 à 0,5 ml, par prise d'aspirine à dose anti-agrégante (75 à 150 mg), si pos-
zone ; connaître l'anatomie de la face ; faire preuve de pru- sible associée à de l'héparine de bas poids moléculaire (20 à
dence dans les régions à risque ou cicatricielle ; ne pas injec- 30 000 U SC 1 fois/jour), de la prednisone 0,5 mg/kg et un
ter lors d'une trop forte « contre-résistance » des tissus. inhibiteur calcique (par exemple nifédipine, 30 mg), ou un
La nécessité d'un contrôle par aspiration est laissée à la dis- inhibiteur de la phosphodiestérase de type 5 (par exemple
crétion de l'opérateur tout en précisant qu'en pratique il est sildénafil, 50 à 100 mg) pour induire une vasodilatation. Ce
rarement effectué car, selon le calibre et la longueur de l'aiguille traitement est à adapter selon l'évolution. L'emploi de
ou de la canule, le test d'aspiration peut ne pas être concluant. patch de trinitrine mise en exergue est aujourd'hui
discuté.
Concernant la hyaluronidase, le consensus actuel est de
Réactions et accidents mineurs rapidement l'injecter selon la technique de nappage avec des
Si une ecchymose survient au point d'injection, il faut exer- injections de doses de 15 à 30 U/0,1 ml (1 500 U diluées dans
cer une pression immédiate sur la zone et appliquer des 5 à 10  ml). Les injections sous-cutanées doivent couvrir
compresses glacées après l'injection. toute la zone concernée et être répétées toutes les 1 à
Les nodules et papules visibles immédiatement lors de l'in- 2 heures jusqu'à recoloration de la peau et atténuation de la
jection traduisent soit un œdème immédiat qui va régresser douleur, si présente [13]. On peut néanmoins penser que de
rapidement, soit une injection trop superficielle ou asymé- nombreux accidents vasculaires n'ont pas bénéficié d'injec-
trique du gel d'AH. Un massage à l'aide d'un coton-tige avec tion de hyaluronidase en raison du manque de disponibilité
une pression ferme de la zone peut suffire pour répartir le gel ; du produit sans qu'une aggravation majeure survienne hor-
exceptionnellement, on peut faire une petite incision pour mis peut-être pour les atteintes oculaires, comme discuté
extruder l'excès de produit. Pour « digérer » cet excès de gel ci-dessous.
d'AH, on peut employer de la hyaluronidase (hors AMM) et Dans les cas, d'atteinte de la région orbitaire, il faut masser
faire une à quelques séries d'injections espacées de quelques et réchauffer la région et un auteur [4] préconise de respirer
semaines. La dilution usuelle est : 1 500 U de hyaluronidase dans un sac afin d'augmenter la perfusion artérielle. Il faut en
diluée dans 5 à 10 ml de sérum physiologique (15 à 30 U de urgence organiser l'hospitalisation dans un service d'ophtal-
hyaluronidase/0,1 ml) et injecter 0,1 à 0,2 ml pour un nodule mologie ou sera pratiquée une injection rétrobulbaire de
de quelques mm3 en injectant lentement dans le dépôt d'AH. hyaluronidase, dont l'efficacité est limitée si elle est tardive
(> 90 minutes) [4, 15]. En milieu hospitalier, une hyperoxy-
génation dans un caisson hyperbare et/ou des perfusions
Réactions et accidents majeurs d'iloprost sont aussi possibles.
En cas de retard de prise en charge hospitalière, le prati-
Réactions inflammatoires cien peut tenter de faire lui-même une injection rétrobul­
Pour contrôler ces réactions inflammatoires, les corti- baire en utilisant une aiguille rétrobulbaire et en effectuant
coïdes intralésionnels ou per os restent le traitement de une injection selon la figure 24.4.

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Section 4. Les produits de comblement (fillers)
Chapitre 24. Produits de comblement : effets secondaires et gestion des complications

Fig. 24.4  Injection rétrobulbaire à l'aide d'une canule 25 G.


Elle est introduite au point le plus bas à la partie externe du sillon orbitaire inférieur. Elle suit le plancher de l'orbite jusqu'à une profondeur de 35 mm au
maximum. Test d'aspiration et injection de 1 ml. Le patient regarde vers le haut et le côté controlatéral. L'injection légèrement douloureuse se fait dans la
graisse périorbitaire. Masser.
Source : E. Sarfati.

Conclusion [6] Artzi  O, Loizides  C, Verner  I, et  al. Resistant and recurrent late
reaction to hyaluronic acid-based gel. Dermatol Surg
2016;42:31–7.
Les matériaux de comblements ayant les normes médi-
[7] Bhojani-Lynch T. Late-onset inflammatory response to hyaluro-
cales européennes ou américaines ont atteint aujourd'hui nic acid dermal fillers. Plast Reconstr Surg Glob Open 2017;5 .
un très haut degré de sécurité en raison de l'amélioration e1532.
des techniques de production et d'une réglementation [8] Jordan DR, Stoica B. Filler migration: a number of mechanisms to
actuelle très stricte pour une mise sur le marché. Toute consider. Ophthal Plast Reconstr Surg 2015;31:257–62.
réaction accidentelle ou anormale observée doit faire l'ob- [9] Homsy A, Ruegg EM, Jandus P, et al. Immunological reaction after
facial hyaluronic acid injection. Case Reports Plast Surg Hand
jet d'une déclaration en vigilance à l'Agence nationale de
Surg 2017;4:468–72.
sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) [10] Saththianathan M, Johani K, Taylor A, et al. The role of bacterial
et au laboratoire fabricant en précisant le numéro du lot biofilm in adverse soft tissue filler reactions: a combined labora-
injecté. tory and clinical study. Plast Reconstr Surg 2017;139:613–21.
[11] Scheuer JF, Sieber DA, Pezeshk RA, et al. Facial danger zones: tech-
Références niques to maximize safety during soft-tissue filler injections. Plast
[1] Requena L, Requena C, Christensen L, et al. Adverse reactions to Reconstr Surg 2017;139:1103–8.
injectable soft tissue fillers. J Am Acad Dermatol 2011;64:1–34. [12] Andre  P, Haneke  E. Nicolau syndrome due to hyaluronic acid
[2] Urdiales-Galvez  F, Delgado  NE, Figueiredo  V, et  al. Treatment of injections. J Cosmet Laser Ther 2016;18:239–44.
soft tissue filler complications: expert consensus recommenda- [13] De Lorenzi C. Commentary on: efficacy of retrobulbar hyaluroni-
tions. Aesth Plast Surg 2018;42:498–510. dase injection for vision loss resulting from hyaluronic acid filler
[3] De Lorenzi Cl. Complications of injectable fillers, Part II Vascular embolization. Aesth Surg J 2017;38:23–7.
complications. Aesth Surg J 2014;34:584–600. [14] King M. Management of necrosis. J Clin Aesth Dermatol 2018;11.
[4] Thanasarnaksorn  W, Cotofana  S, Rudolph  C, et  al. Severe vision Es3-6.
loss caused by cosmetic filler augmentation: Case series with [15] De Lorenzi C. New high dose pulsed hyaluronidase protocol for
review of cause and therapy. J Cosmet Dermatol 2018;17:712–8. hyaluronic acid filler vascular adverse events. Aesth Surg J
[5] Beleznay  K, Carruthers  JA, Carruthers  A, et  al. Delayed-onset 2017;37:814–25.
nodules secondary to a smooth cohesive 20 mg/ml hyaluronic acid
filler: cause and management. Dermatol Surg 2015;41:929–39.

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TECHNIQUES Partie 2
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Section 5. Fils de traction

Chapitre 25
Fils tenseurs pour le visage
L. Beille

Introduction ment vers des interventions mini-invasives, d'autant que les


patients désirent des temps d'éviction sociale courts et
En Égypte ancienne, des hommes renforçaient déjà la peau refusent tout risque de complications irréversibles. Cependant,
du masque facial par des fils, mais ce n'est qu'à partir du pour certains, la perte de volume ne jouerait pas le rôle majeur
XXe  siècle que médecins et chirurgiens ont commencé à qui lui a été attribué dans le processus de vieillissement pen-
les utiliser en esthétique : fils d'or pour du maillage cutané, dant des années (théorie du bébé fantôme). Le relâchement
fils lisses en boucle concentrant les tissus lors de liftings et précoce des ligaments suspenseurs et des septums conjonctifs
ébauche des premiers fils crantés tenseurs aux États-Unis. aurait une action déterminante sur la délocalisation des
Les fils d'or, bien qu'inefficaces, ont sensibilisé le public volumes graisseux superficiels vers le bas et en avant donnant
aux fils, mais c'est le Géorgien Sulamanidzé qui, le premier, un aspect creusé au visage sans qu'il y ait, pour autant, une
diffusa les fils crantés permanents à base de polypropy- perte de graisse importante. Le décrochage de la joue mobile
lène au début du XXIe siècle. En raison de l'insuffisance de au niveau de la région malaire puis massétérine antérieure
ces premiers fils, la plupart des chirurgiens se détournèrent signe le vieillissement du masque facial avec l'exagération du
de cette technique pour revenir aux liftings, laissant le cerne et l'apparition des sillons palpébromalaire, médio-jugal
champ libre à quelques passionnés pour faire évoluer, en et naso-génien.
silence, les fils vers deux concepts différents : les fils per- Il est difficile d'envisager un lifting dès l'âge de 35  ans. Pour
manents et les non-permanents. cette raison, les fils peuvent prendre une grande place en renfor-
Les fils s'inscrivent de façon logique dans le soutien du mail- çant le tissu conjonctif en association avec des injections ciblées
lage conjonctif et leur heure est arrivée pour s'immiscer dans pour la correction de perte de matière même si celle-ci est
notre arsenal thérapeutique antivieillissement. Cependant, minime. Certains comparent fils et injections d'AH à un kilo de
l'évolution de la technologie des fils a donné lieu à deux plume (fil) contre un kilo de plomb (AH) !
conceptions très différentes : celle des fils permanents actuels Avant d'aborder le concept des fils pour leur action lif-
très élaborés, de conception française, prétendant rivaliser avec tante, un rappel sommaire de l'organisation conjonctive du
les liftings chirurgicaux et celle des fils résorbables à effet ten- masque facial et du système de fixation de la joue libre est
seur et d'induction tissulaire. Les fils non permanents se décli- nécessaire.
nant en fils lisses ou crantés provenant de Russie, des États-Unis
ou de Corée sont très utilisés dans le reste du monde et com- Système conjonctif du masque facial
mencent à se banaliser en France, en médecine esthétique, en Le Dr Guimberteau [1], dans ses balades sous la peau avec un
association avec les autres techniques mini-invasives. Les fils endoscope, nous a révélé un monde de fibres de collagène
permanents, relevant d'une grande recherche technologique, entremêlées selon une disposition apparemment anarchique
vont certainement séduire les acteurs les plus chirurgicaux de se répétant sur un mode fractal et baignant dans une gelée
l'esthétique non seulement français, mais aussi mondiaux et d'hydrocolloïdes. Ce maillage conjonctif, certainement la plus
vont peut-être détrôner les liftings chirurgicaux. belle et résistante architecture qui soit, constitue notre matière
Ce chapitre propose un panorama des fils pour l'indica- vivante s'étendant du derme au squelette inclus. Les fibres se
tion d'un effet liftant du visage selon deux concepts diffé- regroupent horizontalement en fascias ou aponévroses et ver-
rents : fils permanents et fils non permanents. ticalement en septums maillant le tissu graisseux, en cloisons
séparant des territoires fonctionnels et en ligaments accro-
chant les structures profondes au derme. Ce système de cloi-
Place des fils au sein sonnement transporte des éléments nobles, faisant du tissu
des théories du vieillissement conjonctif non seulement l'armature de notre corps, mais aussi
et système conjonctif du visage le grand tissu d'intégration puisqu'il permet d'amener sang et
innervation dans le moindre recoin de notre organisme.
En étant le siège de la mimique indispensable au lien social, le
Place des fils masque facial est l'organe majeur de communication. Ses quatre
La compréhension du vieillissement a beaucoup évolué depuis grandes fonctions sont le façonnement des sons, la protection du
20  ans et les stratégies thérapeutiques s'orientent actuelle- globe oculaire, la mimique et la mastication. Il est accroché au

Dermatologie esthétique
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Chapitre 25. Fils tenseurs pour le visage

périoste par un système élaboré [2], conjonctif (adhésions, cloisons Fils tenseurs permanents
et ligaments) et musculaire (muscles animateurs des peauciers)
véritable système d'haubanage du SMAS (superficial musculo-apo-
crantés
neurotic system). Il est divisé en deux territoires fonctionnels [3] : le
territoire visuel en lunettes haut et le territoire centrofacial bas Historique des fils crantés
dédié aux mouvements d'ouverture de bouche (parole, mimique
et mastication par l'action du buccinateur). La partie latéroposté- Aujourd'hui, les poses évoluées de fils permanents crantés
rieure fixe de la joue, sur la branche montante de la mandibule, est semblent rivaliser avec les liftings en cas de relâchement ne néces-
impliquée dans la mastication (non dans la mimique) et ne subit sitant pas de résection cutanée importante. Ces fils permettent le
pas de gros relâchement car elle est fixée à l'aponévrose paroti- repositionnement durable des régions temporale, malaire, jugale
do-massétérine. Le relâchement de la joue mobile est le signe de et des bajoues sans anesthésie générale, sans cicatrices, sans sec-
vieillissement le plus évident du visage. La zone malaire, point de tion des ligaments suspenseurs de la joue, sans plicature, sans
confluence des deux territoires de la mimique, est une zone clé du éviction sociale longue. Leurs auteurs revendiquent un effet com-
vieillissement du masque facial. La partie orbitaire du muscle orbi- parable à celui d'un lift centrofacial alors que les chirurgiens s'in-
culaire inférieur, élévateur superficiel de la joue, recouvre de façon terrogent sur leur positionnement au sein de leur activité [5] !
indirecte (par l'intermédiaire de la SOOF [sub-orbicularis oculi fat]) Leur concept évolue depuis plus de 20 ans [6] et a néces-
le malaire dans sa presque-totalité supérieure ; elle est séparée dans sité, tout comme pour les liftings chirurgicaux, de nombreux
sa partie inféro-interne de la joue mobile par un septum oblique ajustements. Leur évolution a été rendue possible grâce à
vers le haut s'étendant du ligament zygomatique (LZ ; entre les l'opiniâtreté, la passion et la créativité de quelques médecins
insertions des grand et petit zygomatiques en partie basse du avant-gardistes, privés d'actes chirurgicaux à visée de rajeu-
malaire) jusqu'au cerne. Ainsi, dans la partie inférieure du malaire, nissement facial dans les années 2000. Bien évidemment, l'uti-
le LZ, ou patch de McGregor, fixe le derme de la joue mobile au lisation des fils permanents a bénéficié de la réflexion globale
périoste. La joue mobile est accrochée latéralement par la ligne autour du rajeunissement facial et de l'évolution de l'en-
oblique des ligaments suspenseurs décrite par Sabban [4] : LZ en semble des solutions médico-chirurgicales esthétiques, mais
haut, ligaments cutanéo-massétérins (LCM) latéralement et liga- leur véritable essor est dû à l'amélioration conjointe de deux
ment mentonnier (LM) en bas (fig. 25.1). L'impact de l'ensemble paramètres fondamentaux : la qualité des fils et la technique
des mouvements d'ouverture de bouche et de la force de gravita- de pose selon des vecteurs spécifiques du territoire tracté.
tion altère progressivement ce système d'attache et entraîne la En dehors de quelques expériences infructueuses de fils
ptose de la joue libre. crantés aux États-Unis (Alcamo en 1964 et Bunckes en 1997),
leur histoire a véritablement débuté en 2000 par les fils
Aptos® du chirurgien géorgien Sulamanidzé. Il s'agissait de
fils de polypropylène, entaillés manuellement, courts, rigides,
pointus à leurs extrémités avec un crantage dur. Ils ont sus-
cité un engouement immédiat, même parmi les chirurgiens,
Septum palpébro jugal car ils permettaient un resserrement tissulaire avec effet lif-
tant. Ils ont eu le mérite d'ouvrir la voie. Cependant, en rai-
son d'effets secondaires –  douleurs locales, migration et
LZ extrusion [7]  –, la plupart des chirurgiens ont renoncé à
l'aventure des fils car beaucoup plus à l'aise avec les tech-
niques chirurgicales elles aussi en pleine évolution : apport
de l'endoscopie, liftings centrofaciaux, mini- et microlift, etc.
CM
[8, 9]. Cependant, le « top départ » des fils était lancé.
LCM Aux États-Unis, le chirurgien Ruff fonde la société Quill et
commercialise en 2004 les Contours threads® à crans unidirec-
tionnels, puis une nouvelle version en 2006, insuffisante, à crans
bidirectionnels, l'Articulus 400®, fixés par une attache temporale,
fragile et douloureuse. En 2007, le chirurgien américain Isse com-
mercialise un fil particulier, le Silhouette suture® ou Silhouette
lift®, constitué d'un fil de polypropylène supportant des petits
cônes unidirectionnels biodégradables, en acide polylactique et
glycolique, chacun séparé tous les centimètres par un nouage du
fil central. Ce système, fixé sur l'aponévrose temporale par une
LM ouverture chirurgicale, n'apportant qu'une satisfaction transi-
toire, Isse fait évoluer son fil vers une version entièrement résor-
bable, le fil Silhouette soft® à crantage bidirectionnel posé en
Fig. 25.1  Système ligamentaire de la joue.
hypoderme, sans attache aponévrotique, et commercialisé
Source : L. Beille. actuellement par le laboratoire Sinclair. En 2008, Sulaminidze

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Chapitre 25. Fils tenseurs pour le visage

présente un nouveau fil, l'Aptos Spring®, lisse et spiralé, qui ne se Les cinq règles de Guillot sont [11] : l'utilisation d'un fil effi-
révèle pas assez tractant pour obtenir un réel effet liftant durable ; cace, l'utilisation d'un nombre suffisant de fils pour chaque
en revanche, il étend sa gamme vers des fils résorbables induc- zone traitée, la juste orientation vectorielle des fils (tant celle
teurs tissulaires, en acide polylactique et caprolactone, crantés des crantés que celle des fils de suspension), le choix de la juste
de façon bidirectionnelle tout le long du fil, montés sur aiguille position tissulaire des fils en profondeur (dans la graisse super-
ou canule et qui font l'objet d'une autre philosophie. ficielle pour les crantés, sous la galéa pour les fils de suspension)
En France, les docteurs Guillo, Foumentèze et Santi poursuivent et en distribution, le choix de la pérennité, plutôt que le renou-
leur réflexion autour des fils et créent une association loi 1901, la vellement, avec un système de resserrage des fils tous les 3 ans.
SOMEREFs, spécialisée dans l'étude de fils médicaux de suspension Il divise le visage en quatre zones traitées séparément par un
et leur implantation. Pour eux, le fil idéal pouvant revendiquer un module de fil de suspension crânien (sous la galéa) soutenant
réel effet liftant durable du masque facial serait  : un fil souple, un fil cranté Spring thread® visage (en hypoderme), orienté
biocompatible, non extensible dans le temps, armé de crans bidi- selon un vecteur spécifique : la zone temporale (affaissement
rectionnels non traumatisants, parfaitement stable, non dégra- de la queue du sourcil et fermeture du regard), la région malaire
dable et pouvant s'extraire facilement. Frismand, ingénieur en (verticalisation de la paupière inférieure, affaissement de la
biomécanique dans la société Cousin Biotech spécialisée dans le pommette, apparition du cerne et des sillons jugo-malaire et
tressage de fils techniques dans diverses applications, conçoit en naso-génien), la région jugale inférieure (bajoue, pli d'amer-
2006 l'Upactiv®, un fil de polypropylène tricoté très souple, non tume, perte de l'ovale) et la région cervicale. Chaque fil lisse est
agressif et muni de multiples points d'attache bidirectionnels. Ce fil doublé et noué ou fixé par un clip en position sagittale au som-
représente un véritable tournant évolutif dans la technique des fils met du crâne et retombe de chaque côté en offrant une boucle
crantés permanents ; cependant, il est un peu trop extensible. Par de suspension en extrémité inférieure redirigée vers la superfi-
la suite, Frismand fonde sa propre société, 1st Surgiconcept, pour cie au point de repère du point d'entrée du fil cranté. Le fil
proposer un fil 100 % français le Spring thread®, plus performant, cranté de la zone à tracter est suspendu à cette boucle par sa
composé de deux matériaux : une âme en polyester parfaitement partie médiane selon un X et chaque brin est positionné dans
entourée d'une gaine souple de silicone supportant des petits la graisse superficielle selon le vecteur adéquat vers le bas et en
picots (ou cogs) moulés non traumatisants pour les tissus. Ce fil est avant et sort en avant des repères de sortie. L'efficacité de ce
long, bidirectionnel, souple, élastique, non agressif et potentielle- dispositif repose sur la direction adéquate des vecteurs des fils
ment réversible. Guillo préconise depuis 2006 un montage que crantés ainsi que sur celle des fils de suspension et du nombre
nous développerons par la suite, la technique Easylift avec les fils de brins crantés en fonction de l'importance du territoire à
Spring thread® crantés suspendus par un montage en X à des fils tracter : deux brins pour les zones temporales et malaire, quatre
lisses reposant en anse de panier sur le vertex.
Cependant, dès 2013, quelques médecins dont le
Dr Foumentèze signalent l'agression du tissu osseux du vertex par
les fils lisses d'autant qu'on en augmente la tension. Ce dernier
préfère alors expérimenter d'autres poses en faisant évoluer les
qualités techniques des fils. Il est à l'origine, avec un ingénieur en
biomécanique, d'un nouveau fil tenseur, le fil Infinite-Thread®,
approprié à la technique de pose « parallèle » qui ne nécessite plus
de système de suspension par fils lisses reposant sur le vertex.
Ainsi, aujourd'hui en France, deux techniques de pose de
fils crantés permanents se distinguent  : la « top technique
liftante Easy lift » du Dr Guillo avec le fil Spring thread® et la
technique « Parallèle » du Dr  J.-P. Foumentèze avec le fil
Infinite thread®. Ces deux techniques nécessitent bien évi-
demment un apprentissage, l'utilisation spécifique des fils
dédiés et des règles strictes d'asepsie. Ces fils ayant une
nature très sophistiquée ne doivent pas être dénaturés par la
suite par des séances de radiofréquences ou d'ultrasons.

Description des techniques


La top technique liftante Easy lift
du Dr Guillo [10] (fig. 25.2)
Il s'agit d'une technique exigeante d'une durée de 2 heures 30
environ, en milieu stérile, sous anesthésie locale et sédation
légère. Un temps important est consacré au marquage des
points d'entrée et sortie des repères anatomiques et le dessin Fig. 25.2  Technique parallèle, montage face.
Source : © Thread & Lift.
du trajet des fils courbe ou linéaire.
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Chapitre 25. Fils tenseurs pour le visage

pour la zone jugale basse et deux ou quatre pour la région cer- niques ont été très travaillées pour la réussite de pose dans le
vicale (si elle est traitée). La zone cervicale n'est pas toujours visage qui n'est pas une surface plane !
traitée et son amélioration est plus incertaine. Le principe de cette pose « parallèle » est aussi de suivre les
Les réglages des fils se font en deux temps. Les fils de sus- quatre vecteurs naturels tout en simplifiant l'implantation
pension sont resserrés les premiers en procédant du bas vers des fils. Le premier fil, le plus important, est le fil de soutien
le haut. Le deuxième temps, celui de la concentration tissu- malaire cette fois-ci posé très verticalement et proche du
laire, est le repositionnement des tissus tout au long des fils rebord orbitaire offrant un repositionnement malaire proche
en partant du bas et en se concentrant sur le haut. de celui permis par le lifting centromalaire. Il apporte de plus
Cette technique top Easy lift est longue, rigoureuse et très une discrète élévation de la queue du sourcil. Le point cen-
exigeante. Son point faible est la pression osseuse exercée tral du fil se situe dans les cheveux, très haut, dans la zone
par les fils de suspension linéaires. Un système en forme de temporale : environ 3 cm en avant et au-dessus de l'oreille.
semelle allongée est en cours d'évaluation et permettrait de Cette spécificité est un des points forts de cette technique
diminuer par vingt la pression sous les fils. dans laquelle tous les points centraux des fils sont situés très

Technique parallèle du Dr Foumentèze [12]


(fig. 25.3 et 25.4)
Le Dr Foumentèze, après avoir pratiqué des techniques plus
complexes pendant plusieurs années dont la technique
Easy lift, a simplifié son protocole au fur et à mesure que les
avancées technologiques le lui permettaient. Tout d'abord, il
ne pose plus de fils lisses de jonction implantés sous la galéa et
les remplace par des fils crantés, simplement accrochés à la
face profonde du cuir chevelu pour ne pas blesser la surface
osseuse crânienne. Ensuite, il a élaboré un fil cranté non élas-
tique pour ne pas avoir à resserrer le système tous les 2 à 3 ans.
Le fil doit aussi posséder une puissance d'accrochage adaptée
à tous les types de visage. Enfin, ce fil doit présenter un carac-
tère de réversibilité absolu pour garantir au médecin la faculté
de le retirer à tout moment même après de très nombreuses
années. Il a ainsi développé un nouveau fil cranté Infinite-
Thread® non élastique qui lui permet d'évoluer vers la tech-
nique parallèle de pose plus aisée. En effet, un fil ne s'allongeant
plus au fil des années et ne décrochant plus de sa fixation
supérieure autorise une simplification de la pose, synonyme
de procédure moins invasive et plus rapide (1 heure 15 pour
un praticien entraîné) suivie de suites simples. Le fil est serti
par une aiguille courbe (une courbure d'aiguille spécifique a Fig. 25.3  Technique parallèle, montage profil.
été conçue pour chaque trajet) dont les caractéristiques tech- Source : © Thread & Lift.

Fig. 25.4  Résultat de profil : avant, après.


Source : © Thread & Lift.

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Chapitre 25. Fils tenseurs pour le visage

haut dans la tempe, offrant ainsi la possibilité d'un vrai lifting Conclusion
du tiers supérieur, ce qu'aucune technique ne permettait
auparavant. L'extrémité inférieure du fil descend verticale- Les poses sophistiquées des fils permanents peuvent être
ment puis s'incline vers le sillon naso-génien qu'elle attein- proposées comme une alternative au lifting avec néanmoins
dra. L'extrémité supérieure est quant à elle implantée en une efficacité moindre sur la région cervicale. Leur évolution
direction du sommet du crâne jusqu'à l'apex. ne fait pas de doute car les tendances vont à la minimisation
Les deuxième et troisième fils seront également implantés des actes, de l'éviction sociale et des complications. Jusque-là,
depuis la tempe, en arrière du premier, avec un intervalle de les chirurgiens les ont boudés, mais il y a fort à parier qu'en
1 cm entre chacun, le deuxième descendant vers le pli d'amer- raison de leur très belle évolution, ils vont les utiliser isolé-
tume et le troisième vers la bajoue. Les extrémités supérieures ment plus précocement dans leur prise en charge du vieillis-
rejoindront, comme pour le premier, l'apex avec des points sement, mais également, plus tardivement, en association
de sortie séparés pour éviter de créer une ouverture trop avec un acte sur la région cervicale. Par ailleurs, pour les
large du cuir chevelu imposant la pose d'un point de suture. chirurgiens, la préservation des ligaments suspenseurs de la
Le réglage de la tension des fils est le point le plus délicat joue devient un argument positif important, car il est pro-
de l'acte. La moitié supérieure de chaque fil, située sous le bable que leur suture entraîne une moins bonne vascularisa-
cuir chevelu, est juste mise en tension délicatement, puis tion de la zone jugale. Ainsi, tous les concepts changent et
coupée à ras en son point de sortie. Les moitiés inférieures ces techniques vont très certainement évoluer ensemble.
seront, quant à elles, réglées de façon très différenciée. Le
tiers supérieur de cette moitié sera mis en tension dans un
mouvement ascendant homothétique (déplacement iden-
Fils résorbables (fig. 25.5 à 25.7)
tique sur toute la longueur du fil) de la peau qui glissera sur Ces fils, très utilisés dans le reste du monde, notamment en
un fil maintenu fermement tendu par l'autre main. Le réglage Géorgie, Russie et en Corée, commencent à pénétrer la
fin des deux tiers inférieurs sera ensuite réalisé en position ­médecine esthétique française. Ces fils ne peuvent absolument
assise, de façon concentrique sur la pommette et délicate- pas revendiquer un effet liftant durable, au plus 12 à 18 mois, et
ment homothétique sur les joues. Le nombre restreint de fils ne peuvent pas être mis en concurrence dans cette indication
et leur tension sans excès sont le gage d'une pose et d'une avec les fils permanents récents. Il s'agit d'un autre concept
convalescence confortable. décrié par certains [13], mais très valorisé par de nombreux
Le cou peut aussi bénéficier de cette pose avec un fil pas- auteurs. Leur utilisation en esthétique médicale à échelle mon-
sant derrière la mastoïde, mais les bénéfices sont inférieurs à diale est croissante et ils deviennent des acteurs incontour-
ceux d'un lifting cervicofacial. nables des nouvelles prises en charge esthétiques en association
Pour le Dr Foumentèze, cette technique offre, avec un nombre avec les autres techniques de médecine esthétique. Leur indica-
de fils très restreint, des résultats au niveau des tiers supérieur, tion est un effet resserrant du tissu conjonctif voire un effet liftant
moyen et inférieur dignes d'un lifting, notamment concernant transitoire. C'est ce caractère non permanent, leur facilité de pose,
leur durabilité. Après 3 ans de recul, il observe avec le fil Infinite- leur association possible avec les autres techniques et leur action
Thread® une stabilité des résultats qu'il n'avait jamais obtenue additive au fur et à mesure des poses qui intéressent autant les
auparavant. Par ailleurs, il essaie d'élargir ses indications vers le patients que les médecins. Ils proviennent essentiellement des
lifting vertical du front et celui de la lèvre supérieure par un fil États-Unis (Silhouette soft®, Dr Isse), de Géorgie (Aptos®, Dr
posé en U dans le philtrum depuis le cartilage du nez.

Fig. 25.5  Résultat de face : avant après.


Source : © Thread & Lift.

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en deux matériaux : les mini fils lisses, montés sur aiguille ultra-
fine, linéaires ou spiralés, posés en derme profond pour un
maillage cutané générant une induction tissulaire ; et les fils
crantés, plus longs, entre 10 et 30 cm, positionnés au milieu de
l'hypoderme pour un effet tenseur du tissu conjonctif. Ils sont
constitués soit en polydioxanone (PDO), résorbable en 5 à
6 mois, peu inducteur tissulaire, soit en matériaux inducteurs
tissulaires lentement résorbables (entre 12 à 18 mois), l'acide
L-polylactique (PLLA) ou la caprolactone (CPL).

Fils lisses ou fils Basics


Ces fils montés sur aiguille ultra-fine de 30 mm à 90 mm sont
positionnés en intradermique en imprimant une petite
ondulation pour augmenter leur ancrage. Ils sont d'origine
coréenne et s'inscrivent dans la tradition des aiguilles d'acu-
puncture. Ils sont en PDO. Il existe aussi des fils coréens plans
en PLLA plus inflammatoires pour le derme. Le polyes-
ter PDO est un polymère biodégradable composé d'atomes
de carbone, d'hydrogène et d'oxygène dont la dégradation
finale en CO2 et H2O ne laisse aucun résidu en 4 à 6 mois.
Ces fils, posés en grand nombre, en linéaire ou en maillage,
provoqueraient une induction tissulaire en 3 mois. Leur action
serait comparable à celle d'une mésothérapie à l'AH non réti-
Fig. 25.6  Kit fils PDO du laboratoire Croma.
PDO montés sur aiguille (Basics, Screw, crantés) et sur canule. culé  ; aussi appelle-t-on cette technique le Mésothread.
Source : L. Beille. Cependant, les résultats d'histologie selon les auteurs sont dis-
cordants ; pour Otto et Kwon, la fibrose est importante alors
qu'elle est quasi inexistante pour d'autres [15–17]. Ces fils ont
trois autres actions : une lipolyse mineure, une action de myo-
relaxation (utilisée pour les hypercontractions des masséters et
des muscles du mollet) et ils peuvent être utilisés comme des
aiguilles d'acupuncture ; le fil laissé en place prolongerait l'effet
des aiguilles seules.
Les basics sont utilisés parfois seuls ou plus avantageuse-
ment en association avec des fils crantés, resserrant. En Corée,
le Dr Kwon Han Jin pratique des « absorbable thread lifting » en
grand nombre par maillage de Basic car les patients ont sou-
vent été échaudés par les dispositifs permanents, fils ou injec-
tables. Il estime ses résultats très satisfaisants et les positionne
entre ceux obtenus par les radiofréquences ou les ultrasons et
les liftings chirurgicaux. Dans la Fishbone technique (fig. 25.8),
Kwon et Otto les a­ ssocient, en joue, à des fils crantés pour que
la fibrose dermique induite maintienne plus longtemps l'effet
liftant des fils crantés. Les basics sont souvent utilisés en asso-
ciation avec des injections d'AH pour combler des creux
(creux sous-orbitaire) ou renforcer des zones charnières (sil-
lon naso-génien, plis d'amertume). Ils sont implantés partout
en visage ou en corps pour lutter contre le relâchement
Fig. 25.7  Kit fils Aptos Excellence visage (fils crantés en PLLA montés cutané, l'aspect fripé, seuls ou en association avec des fils
sur canule).
Source : L. Beille.
crantés : patte d'oie, front, cou, nez, décolleté, face interne des
bras et des cuisses, fesses, etc. [18–20].
Sulumanidze) et de Corée, dont un des célèbres utilisateurs est le Les fils Screw ou spiralés sont une variante des basics : ce sont
Dr Kwon Han Jin, dermatologue à l'origine de l'Ultra V lift®. des fils lisses enroulés sur une aiguille ; leur implantation est un
En revanche, il est un peu difficile de s'y retrouver [14] ! Les tout petit peu plus difficile que celle des basics. Ils occupent
fils diffèrent par leur type de matériau, leur longueur, leur plus de volume et ont un certain effet ressort. Ils peuvent être
caractère lisse ou cranté, leur style de montage sur aiguille ou intercalés avec des Basic pour majorer à la fois tension et induc-
canule. Pour simplifier, on distingue deux types de fils existant tion. Ils sont utilisés pour la zone sous-mentonnière, les plis

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Chapitre 25. Fils tenseurs pour le visage

Les fils sont présentés soit en packs complets d'une dizaine


de fils, soit en packs partiels, soit encore à l'unité permettant
une grande modularité de traitements. Les Coréens pro-
posent aussi des packs comprenant fils crantés et basic PDO
lisses ou screw avec des schémas de traitement complets du
visage.
Des systèmes de crantage différents
Silhouettes Soft® [21–23]
Ces fils sont constitués par un fil de 30 cm en PLLA sur lequel
sont disposés des petits cônes séparés par des nœuds espa-
cés de 0,5 ou 0,8 cm. Les cônes sont répartis en deux séries,
orientées en sens contraire vers chaque extrémité de suture.
Les cônes, à l'instar d'une ancre de bateau, offrent une sur-
face de 360° pour résister à la traction et permettre une fixa-
tion forte. Ils créent une forte réaction inflammatoire et une
Fig. 25.8  Montage de différents fils selon la Fish Bone technique d'Otto
et Kwon.
capsule fibreuse autour d'eux que le laboratoire juge supé-
Source : L. Beille. rieure à celle des autres crans. Ils ne doivent pas être trop
près du derme sous peine de générer une réaction granulo-
mateuse cutanée.
d'amertume, les sillons naso-géniens, la face interne des bras
(quand la peau est cellulitique et modérément relâchée). Aptos excellence®
On trouve aussi des fils Basics et des Screw doublés sur les Ce sont des fils en PLLA et CPL munis sur toute leur longueur
aiguilles pour amplifier leur action inductrice. de petits crans ou « barb », chacun bidirectionnel, permet-
Leur pose se fait sur peau bien nettoyée par un antisep- tant un ancrage localisé très intéressant. Les canules sont des
tique. Ils sont implantés de façon oblique en derme profond, 20 G de 10 à 19 cm de long pour un fil USP 2-0, et pour le
en imprimant un petit mouvement ondulatoire. Les fils corps une canule 19 G et 20 cm de long pour un fil USP 2-0.
seront rejetés s'ils sont trop superficiels. Ils sont placés de Les canules permettent une délivrance très facile du fil qui
façon linéaire ou en maillage tous les 1 cm. Il est conseillé de peut être coupé selon la longueur implantée désirée ; ainsi, le
laisser l'ensemble du dispositif en place alors qu'on pose les reste du fil peut être utilisé, ce qui est très utile dans des
autres fils pour limiter le saignement. Les aiguilles sont reti- poses de fils élaborées (fils de longueur différente avec des
rées par leur manche en les faisant tourner légèrement. Les vecteurs d'orientation différents selon la zone traitée). La
suites sont comparables à celle d'une méso avec de nom- gamme Aptos® a d'autres fils montés sur aiguille permettant
breux petits hématomes. des poses encore différentes pour le front et la zone
sous-mentonnière.
Fils crantés
Fils coréens
Les fils crantés sont soit en PDO, soit en PLLA avec ou sans
CPL, soit en PLLA avec des cônes en lactide glycolique. Leurs Ces fils en PDO ou PLLA ont soit des crans à disposition héli-
différences reposent sur le type de montage (aiguille ou coïdale à 360° multidirectionnels (cog 3D 360°) sur toute leur
canule), leur temps de résorption, leur type de crantage. Ils longueur, soit des accroches moulées type cog en forme de
revendiquent un double effet : liftant immédiat et inducteur triangle se fixant à 360° avec des montages bidirectionnels. Il
tissulaire dans un deuxième temps pour le PLLA et CPL. existe différentes épaisseurs de fils pour les peux fines ou
épaisses : USP de 1-0 à 4-0 avec des canules allant de 18 G à
Types de montage 23 G de 10 cm. Certaines canules ne permettent pas de se
Il existe deux types de montage : sur canule ou sertis par une resservir du reste du fil. Ces fils, inspirés des fils occidentaux et
ou deux aiguilles à chaque extrémité. géorgiens, vont probablement inonder le marché mondial.
Pour les fils montés sur canule, le crantage intéresse le plus Techniques de pose
souvent toute la longueur avec des crans bidirectionnels ou
cogs. Il existe aussi des fils divisés en deux parties de crans Avant la pose des fils, les marquages doivent être faits en
unidirectionnels opposés séparées par une zone médiane fonction de l'examen clinique et de la stratégie choisie, seule
lisse. Le montage sur canule de 10 à 20 cm ne permet qu'un ou en association avec des injections d'AH. Il est intéressant
positionnement linéaire. de remodeler le menton et de renforcer les zones charnières
Les fils sertis par deux aiguilles à chaque extrémité sont en AH (sillons naso-géniens et plis d'amertume) avant de
constitués de deux séries de cônes ou de crans orientés en poser des fils en joue. L'injection peut être réalisée en même
sens contraire séparées par une zone médiane libre de 2 cm. temps. Après anesthésie locorégionale le long des trajets des
Ces fils plus longs, 30  cm, peuvent être positionnés en fils à la canule, il est nécessaire de réaliser cette technique
linéaire, en angle plus ou moins fermé, en U. avec des règles d'antisepsie stricte  : charlotte, champs et

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Section 5. Fils de traction
Chapitre 25. Fils tenseurs pour le visage

compresses stériles. Sur Internet, il est fréquent de voir des proposées de façon cohérente, apportent une amélioration
poses sans aucune règle d'antisepsie alors que ces fils crantés significative et une grande satisfaction aux patients avec un
ne pourront pas être retirés, en cas d'infection, en raison de effet cumulatif dans le temps (fig.  25.9). Les fils s'intègrent
leur ancrage fort dans l'hypoderme. parfaitement dans ce type de prise en charge esthétique. Il
Les techniques de pose diffèrent selon le montage sur faut savoir l'expliquer aux patients et les orienter vers une
canule ou sur aiguilles et selon la position du point d'an- pose de fils permanents ou un lifting chirurgical s'ils
crage. Cependant, comme le fil doit être positionné en hypo- recherchent un effet liftant durable. La principale indication
derme moyen, le dispositif sera toujours introduit de façon pour le visage est celle de la région jugale, les corrections des
perpendiculaire dans le derme par un prétrou (à l'ai- sourcils et du cou restant plus aléatoires.
guille 23 G), puis dirigé parallèlement à la peau une fois placé Les fils se développent dans les indications du corps en
dans l'hypoderme ; l'aiguille ou la canule reposeront forcé- association avec des fils crantés et basiques pour les aspects
ment sur les cheveux ou la charlotte qui doivent être recou- cellulitiques et relâchés de la face interne des bras, le ventre,
verts de champs stériles. les faces internes des cuisses, les fesses, les seins. Leur utilisa-
tion sera, dans quelques années, aussi banale que celle de
Montage des fils l'AH.
Un montage sur canule ne pourra permettre qu'une pose
linéaire selon des vecteurs plus ou moins obliques. Les crans
s'incorporent dans les tissus quand on retire la canule. La
canule doit être retirée doucement alors qu'avec l'autre main
on pousse les tissus vers le haut délicatement. Il est très impor-
tant de couper le fil très court après avoir tiré dessus pour qu'il
ne pointe pas par la suite sous le derme. La longueur des fils est
le plus souvent de 10 cm et peut aller jusqu'à 20 cm pour les
Aptos®. Il est souhaitable de poser au moins 4 à 5 fils sur l'en-
semble de la joue pour une bonne répartition des forces.
Le montage des fils bidirectionnels montés sur aiguille per-
met une grande variation de pose : soit une pose linéaire ou
en angle ouvert (les fils sont alors bidirectionnels avec une
partie haute suspensive et une partie basse tractante), soit
une pose fermée en V ou en U avec les deux brins tractant
dans une même direction. Les aiguilles sont plus traumati-
santes qu'une canule ; il faut être prudent dans les zones où
les artères se superficialisent.
A B
Point d'ancrage et techniques de pose pour la joue Fig. 25.9  Suivi d'une patiente à 43 ans (A) et à 50 ans (B).
Certains préconisent un point d'ancrage haut en temporal Association de techniques mini-invasives : injection d'AH, de toxine, laser,
pour faire des vecteurs semblables à ceux des permanents et fils résorbables.
Source : L. Beille.
utilisent alors préférentiellement des fils de type Silhouette®
en accrochant la zone suspensive en cuir chevelu et la zone
tractante en joue. Contre-indications
La plupart des poses dans le visage préconisée pour les fils
Aptos® et coréens montés sur canule se font par des points Les classiques sont la grossesse et l'allaitement, les maladies
de départ haut en avant de l'oreille, de l'arcade zygomatique auto-immunes, le mode de cicatrisation chéloïde, une infec-
jusqu'au lobe, avec des vecteurs obliques vers le bas : vers les tion en territoire concerné, les anticoagulants.
sillons naso-géniens et les plis d'amertume englobant joue Il est fort conseillé de ne pas utiliser cette technique sur
fixe et joue libre. Un autre point de départ en position haute des patients très perturbés par leur apparence physique,
de la pommette permet des vecteurs plus verticalisés en avec des attentes irréalistes ou dans un contexte familial
joue libre avec des fils posés en zone malaire et en bajoues. négatif.
Des laboratoires coréens proposent des « kits full face » pour
des traitements complets de visage. Effets secondaires et complications
Un hématome immédiat est possible en cas d'utilisation d'ai-
Indications guilles même si elles sont à bout mousse.
L'indication préférentielle est l'amélioration du relâchement L'effet secondaire obligatoire est une sensation de main-
modéré des joues. Ces fils sont aussi proposés aux patients tien un peu douloureux des joues pendant 1 à 2 semaines
refusant des techniques radicales (fils permanents ou liftings) obligeant le patient à dormir sur le dos et à limiter ses activi-
et à ceux qui ont déjà eu une intervention. Depuis plusieurs tés sportives pendant 2 à 3 semaines. Cette douleur cède au
années, nous observons que les techniques mini-­invasives, paracétamol.

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Section 5. Fils de traction
Chapitre 25. Fils tenseurs pour le visage

Fig. 25.10  Correction d'une traction persistante à 6 mois d'un fil à cône, par injection d'AH dans l'ensemble de la zone à la canule.
Source : L. Beille.

La protrusion de l'extrémité du fil au point d'ancrage peut peuvent être reposés tous les 1 an à 2 ans et leur effet sera
être évitée en coupant très court le fil après l'avoir bien tiré. probablement cumulatif et très satisfaisant en association
Des irrégularités et des tensions cutanées peuvent être avec l'ensemble des procédures esthétiques pour les méde-
présentes si les fils sont trop tirés et posés en nombre res- cins et les patients ne désirant pas de gestes irréversibles.
treint. Théoriquement, il ne sert à rien de trop resserrer les L'écheveau des fils est enfin démêlé et les prises en charge
tissus lors de la pose car il y a un relâchement progressif dans esthétiques des années 2020 seront certainement orientées
les jours qui suivent. vers les fils ou ne seront pas !
Des réactions inflammatoires en regard de cônes ou de
crans posés trop près du derme sont possibles quelques Références
mois après la pose. Si l'inflammation ne cède pas à un der- [1] Guimberteau  JC, Armstrong  C. L'architecture du corps humain
mocorticoïde, il faut extraire le segment responsable sous vivant. Paris: Sully 2014.
anesthésie locale. [2] Sinna  R, Herlin  C, Garson  S, et  al. Bases anatomiques du tégu-
Les infections le long du trajet du fil sont rares. ment facial appliquées à la chirurgie du rajeunissement facial.
Ann Chir Plast Esthet 2017;62(5):355–64.
Dans tous les cas, il est fortement conseillé de revoir les [3] Beille L. Anatomie fonctionnelle du masque facial. Body Language
patients 10 jours et 3 semaines après la pose pour réajus- 2017;10:51–65.
ter des plis ou des tensions éventuels. En cas de fils dou- [4] Saban Y, Polselli R. Anatomie du visage et du cou en chirurgie et
loureux ou de fil apparent, on peut injecter du sérum cosmétologie. Paris:Elsevier Masson 2015.
physiologique avec un peu de xylocaïne pour essayer d'hy- [5] Cornette de Saint Cyr B, Benouaiche L. Quelle est la place des fils ten-
drater le fil ou de l'AH pour corriger un décrochage persis- seurs pour rajeunir le visage ? Ann Chir Plast Esthet 2017;62:488–94.
[6] Somerefs. Historique commenté de l'utilisation des fils en esthé-
tant (fig. 25.10). tique. wwwsomerefs.org/fr.
[7] Guillo D, Facchinetti JP, Foumentèze JP, et al. Fils de suspension
Conclusion crantés : les complications classiques et leur solution. J Méd Esth
Chir Derm 2012;153:17–24.
[8] Bonnefon A. Le lifting centrofacial sous-périosté. Ann Chir Plast
L'ensemble des fils arrivent à maturité pour retendre et sou- Esthet 2006;51(2):170–7.
tenir le tissu conjonctif. Ils vont modifier et enrichir nos [9] Mitz  V. Le microlift biplan. Principes, technique, résultat. Ann
stratégies de prise en charge du vieillissement. Les deux Chir Plast Esthet 2018;63:262–9.
types de fils, permanents et non permanents, sont deux [10] Guillo D. Easylift : technique d'implantation de fils de suspension
concepts très différents. Les fils permanents peuvent être faciaux permanents. Concept et protocole d'implantation. J Méd
considérés comme un lifting mini-invasif sans résection Esth Chir Derm 2018;XXXXV(178):95–105.
[11] Guillo D. Lifting par fils de suspension crantés permanents. Les
cutanée pour des relâchements peu importants. Ils vont cinq règles pour un beau résultat. J Méd Esth Chir Derm 2016;XXX
probablement changer les choix thérapeutiques des chirur- XIII(172):215–26.
giens et de ceux qui voudront acquérir cette technique exi- [12]. www.thread&lift.com.
geante. Très sophistiqués, ils sont le fruit d'une grande [13] Guillo D. Fils permanents versus fils résorbables : de la distance
réflexion et n'ont rien à voir avec la constitution plus simple entre discours marketing et réalités biochimiques. J Méd Esth
des fils non permanents. Les fils non permanents vont, Chir Derm 2014;XXXXI(164):223–32.
[14] Beille L. Mise au point sur l'ensemble des fils utilisés en esthétique
quant à eux, probablement rentrer dans les gestes mini-­ en 2016. Réal Ther Dermato-Vénérol 2016;254:21–6.
invasifs quotidiens. Ils ont le mérite de ne pas alourdir un [15] Otto  J. Polydioxanone threads for skin rejuvenation and facial
visage et permettent d'obtenir un effet liftant transitoire. Ils tissue anti-ptosis. Body Language 2016;76:21–5.

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Section 5. Fils de traction
Chapitre 25. Fils tenseurs pour le visage

[16] Jin  Kwon Han. Absorbable thread lifting. Body Language


[21] Russo  PR, Fundaro  SP. The invisible lift. Officina editoriale

2015;76:27–8. Oltrarno 2014.
[17] Tonks S. Thread lifting treatments. Body Language 2015;76:31–2. [22] Nicolau P. Restaurer les volumes, corriger la ptose, redessiner les
[18] Can N. Lifting de la pointe du nez avec les fils Aptos:une approche lignes sans chirurgie. Compte rendu Réal Thér Derm Vénérol
non invasive pour un remodelage du nez. J Méd Esth Chir Derm 2015;242:4.
2018;XXXXV(180):187–92. [23] Nicolau P. Réponses aux questions que l'on se pose à propos des
[19] De Goursac C. Les fils tenseurs résorbables en PDO : une tech- fils tenseurs. Compte rendu de table ronde. Réal Thér Derm
nique médico-esthétique pour « lifter les fessiers ». J Méd Esth Vénérol 2016;249:19–25.
Chir Derm 2018;XXXXV(180):193–9.
[20] Amsalem  JP, Deutsch  J-J. Techniques utilisant les fils tenseurs
pour la correction de la peau de l'abodmen légèrement relâchée
Abtract. J Méd Esth Chir Derm 2018;XXXXV(178):112.

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Section 6. Lasers et autres appareils

Chapitre 26
Lasers esthétiques
J.-M. Mazer

L'utilisation des lasers en esthétique médicale est chaque Classification


année plus importante, du fait de la mise à disposition de
technologies nouvelles élargissant le champ d'indication,
selon les indications
et d'une demande grandissante d'actes pas ou peu La classification selon les indications est la seule possible
invasifs. dans la mesure où un laser peut être aussi bien d'usage
médical qu'esthétique, et qu'un même laser peut avoir plu-
sieurs types d'indications. Cette dernière notion est mise
Qu'est-ce qu'un laser en évidence par le laser Nd-YAG 1 064 nm, qui peut aussi
esthétique ? bien servir à l'épilation, à la sclérose de varicosités des
jambes qu'au remodelage dermique. Un laser fractionné
À l'évidence, un laser à visée esthétique n'est en rien différent ablatif ou non ablatif provoque une néosynthèse collagé-
d'un laser médical pour la simple raison qu'il s'agit des nique et, plus globalement, une régénération tissulaire qui
mêmes technologies  ! Précisons que les « lasers esthétiques » indifféremment justifient son utilisation médicale (cica-
ne se limitent pas aux seuls lasers. Les Américains utilisent le trices traumatiques ou de brûlures) ou esthétique (traite-
terme, jamais bien traduit en français, d'energy-based device ment des rides diffuses).
(EBD), que l'on peut traduire par « appareil reposant sur Ainsi, on peut classer les indications esthétiques selon le
l'énergie ». Ce groupe inclut aussi bien les lasers en général tableau 26.1. Ce tableau, évidemment trop simple, ne tient
(lasers thermiques, photomécaniques, lasers froids [lasers de pas compte de certaines problématiques que le médecin ne
lipolyse]) que les LED, les lumières intenses pulsées, les doit jamais perdre de vue.
micro-ondes courtes, les ultrasons focalisés, la cryolipolyse,
les radiofréquences, dont la variété est grande  : radiofré-
quences monopolaire, multipolaire, bipolaire, fractionnée, Quelles problématiques ?
par microneedling, etc.
Pour s'y retrouver, mieux vaut raisonner par indications, en
tenant compte des spécificités des lasers esthétiques. Limites des traitements
Nous devons connaître ces limites, et surtout nous assurer
que le patient les a bien comprises : le résultat parfait, l'efface-
Spécificités des lasers ment des rides, de petites cicatrices, de pores dilatés n'existent
esthétiques pas  ! Et évidemment, à une exception près (le traite­ment de
l'hyperhidrose axillaire par micro-ondes courtes), aucun
Si, sur un plan technologique, rien ne devrait différencier traite­ment ne peut revendiquer un caractère définitif, y com-
un laser esthétique d'un médical, nous devons garder en pris et surtout l'épilation ; l'expression « épilation définitive »
mémoire certains points : le principal, qui est fondamen- doit être bannie au profit de « épilation durable ».
tal, c'est qu'il est plus difficile d'utiliser un laser esthétique
qu'un laser médical ; en effet, la discussion de l'indication
d'un acte médical repose sur l'évaluation de la balance Données topographiques
entre les bénéfices attendus et les risques envisageables. Si On ne traite pas de la même façon des rides diffuses des
la balance est positive, on peut réaliser cet acte médical. joues et une élastoïdose du cou, même si l'aspect se res-
Cela implique que l'on accepte la notion de risques. Au semble. Un laser CO2 fractionné sera, s'il est bien utilisé, jus-
contraire, en cas d'acte esthétique, on ne peut pas accep- tifié sur le visage. Au niveau du cou, mieux vaut lui préférer
ter ces risques. C'est donc un acte plus difficile à propo- des techniques non ablatives pour éviter les risques de cica-
ser   ! Mais l'on doit différencier ces risques des effets trice et d'achromie propres à cette région.
secondaires « normaux ». Ceux-ci doivent être loyalement De même, on ne traitera pas de façon identique un bour-
explicités au patient qui, en fonction de sa vie sociale, de relet graisseux bien limité du ventre et un « ventre rond ».
ses attentes, de sa motivation, acceptera ou refusera l'évic- Dans le premier cas, la cryolipolyse constitue une véritable
tion sociale envisagée. alternative à la liposuccion. Dans le second cas, elle sera
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Section 6. Lasers et autres appareils
Chapitre 26. Lasers esthétiques

Tableau 26.1  Indications esthétiques des lasers radiofréquences. En matière de laser fractionné, on favori-
Atteinte Lasers indiqués sera les non-ablatifs, et en épilation, sur phototype élevé, le
Vasculaire Rosacée, érythroses Lasers KTP, à colorant laser Nd-YAG s'impose.
(visage, cou, pulsé,
décolleté) Laser Nd-Yag
Varicosités Lumières pulsées
Pièges diagnostiques
Télangiectasies On rappellera une règle : tout traitement, même esthétique,
Épilation Visage, corps Lasers diode, impose une certitude diagnostique. Cela prend toute son
Alexandrite, Nd-Yag long importance lorsque l'on traite des hyperpigmentations de
pulsé, lumières pulsées diagnostic pas toujours évident, alors que la notion de biop-
Dépigmentation Mélasma, lentigos Lasers cristal commutés sie préalable est antinomique avec la médecine esthétique,
Dyschromies diffuses Q-switched, nano- ou puisque source d'une cicatrice. Or, il n'est pas question de
Taches café au lait picoseconde (KTP, lasériser une lésion nævique, telle une mélanose de Dubreuil.
Alexandrite, Nd-Yag)
Cela implique donc la certitude diagnostique reposant sur la
Régénération Rides diffuses peu Lasers ablatifs pulsés maîtrise de l'examen dermatologique et de la dermoscopie.
tissulaire profondes Lasers fractionnés ablatif
Au moindre doute, il faudra demander biopsie cutanée
superficielle Cicatrices d'acné, et non ablatif
pores dilatés Radiofréquences
et/ou consultation en dermatologie.
Texture cutanée superficielles, LED En lasers vasculaires, il existe un piège classique : celui d'une
Régénération Laxité cutanée du Radiofréquences
lésion plus ou moins télangiectasique, chaude et pulsatile. Il
tissulaire visage (paupières, profondes peut alors s'agir d'une malformation artérioveineuse, laquelle
profonde ovale) Ultrasons microfocalisés risquerait d'être considérablement aggravée par tout traite-
(jusqu'au derme Laxité corporelle Radiofréquences par ment physique. Au moindre doute devant une lésion vascu-
profond et à (bras, cuisses, ventre, microneedling laire « bizarre », il faut savoir demander un écho-Doppler
l'hypoderme) etc.) pulsé qui apportera la réponse sans équivoque.
Lipolyses non Stéatomes bien Cryolipolyse Avec les lasers épilatoires, on éliminera un bronzage léger
invasives limités Ultrasons focalisés, mais récent, ou la prise de carotène.
Hypertrophie radiofréquence Pour les ultrasons microfocalisés pour le relâchement de
graisseuse pus monopolaire inductrice
diffuse d'apoptose, micro-ondes
l'ovale, le piège est anatomique : la région mentonnière ne
courtes doit jamais être traitée, car c'est le seul endroit où des
Laser 1 060 nm branches du nerf facial peuvent être suffisamment super­
Hyperhidrose Hyperhidrose Micro-ondes courtes ficielles pour être impactées par les ultrasons.
axillaire Ultrasons focalisés

La notion de synergie
­ ifficilement réalisable sans risquer un aspect irrégulier, à
d
Pour chaque patient, le meilleur traitement n'est pas le
moins de multiplier les séances, ce qui se traduira par un
« meilleur laser », mais la meilleure synergie entre des tech-
devis différent et conséquent.
niques complémentaires : lasers, fillers, toxine, peelings, etc.
De même, les varicosités des jambes seront traitées par
Donc, il faut établir un plan de traitement tenant compte
laser Nd-Yag alors que sur le nez, ce laser expose à un risque
des demandes principales du patient et de son budget.
de cicatrices varicelliformes.

Données «  ethniques »
Conclusion
Un chapitre particulier lui est consacré (voir chapitre 43). En
fonction de la pigmentation mais aussi des origines eth- La maîtrise d'une technique laser ou apparentée s'impose
niques, le risque d'hyperpigmentation post-inflammatoire tant sur le plan de l'utilisation pratique de la technique que
n'est pas le même. Signalons toutefois que certaines tech- des bonnes connaissances de l'anatomie, des autres tech-
niques sont peu sensibles au phototype : les ultrasons et les niques et des pièges auxquels on s'expose.

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TECHNIQUES Partie 2
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Section 6. Lasers et autres appareils

Chapitre 27
Lasers vasculaires
O. Cogrel

Principes des lasers vasculaires 50 % de la chaleur soit transférée en dehors de la cible. Il est
proportionnel au carré du diamètre du vaisseau.
Les lésions vasculaires représentent une des plus fréquentes ■ Si la durée d'impulsion du laser est beaucoup plus courte

indications de traitement par laser en dermatologie. Le prin- que le TRT du vaisseau, l'énergie est absorbée par la cible,
cipe du traitement est fondé sur la théorie de la photother- le vaisseau, qui explose. On parle de photothermolyse sélec-
molyse sélective, c'est-à-dire la capacité à cibler un chromophore tive. Cela se traduit par l'apparition d'un purpura qui dure
spécifique de la peau et limiter les dommages thermiques de quelques jours à 15 jours.
autour de la cible. Les lasers et les lumières pulsées qui ont été ■ Si la durée d'émission est de l'ordre du TRT, l'effet photo-

développés pour traiter les lésions vasculaires sont des tech- thermique reste confiné à la cible sans transfert aux struc-
niques efficaces et sûres. Le choix de la technique dépendra du tures de voisinage. On parle de photocoagulation sélective.
type de lésion et de facteurs qui influencent l'absorption de la Dans ce cas, les vaisseaux se sclérosent sans purpura, mais
lumière ou l'interaction lumière-tissu tels que le diamètre des avec un œdème transitoire de quelques jours plus ou
vaisseaux, leur profondeur, leur couleur, le site de traitement, moins important.
l'âge des patients, le phototype, la taille du spot, etc. ■ Si la durée de l'impulsion est supérieure au TRT, des dom-

Le chromophore «  cible  » des lésions vasculaires est mages thermiques non sélectifs des tissus périvasculaires
l'oxyhémoglobine présente dans les globules rouges. Celle-ci se produisent entraînant leur destruction et le risque de
possède trois pics d'absorption majeurs : 418 nm, 542 nm, formation de cicatrices.
577 nm ainsi qu'une bande d'absorption plus faible comprise
entre 800 et 1 100  nm (fig.  27.1). La longueur d'onde opti-
male est comprise entre 530 et 600 nm.
Choix des paramètres
L'énergie délivrée par le laser est absorbée par l'oxyhémo- en fonction de la cible [1–5]
globine contenue dans la lumière des vaisseaux et transférée
Plusieurs facteurs, tels que la taille des vaisseaux, leur profon-
en chaleur à la paroi vasculaire, induisant une destruction de
deur, la région du corps traitée, la taille du spot, le phototype
la paroi et un phénomène de coagulation. Pour minimiser le
modifient l'absorption du laser :
risque de diffusion thermique aux tissus environnants, la
■ diamètre des vaisseaux : les vaisseaux dont le diamètre est
durée d'émission (ou durée d'impulsion) du laser doit être
de 10 à 150 μm ont un TRT de 1 à 10 ms. Les vaisseaux de
égale ou inférieure au temps de relaxation thermique (TRT)
diamètre supérieur à 150  μm ont une TRT plus élevé et
de la cible qui dépend des dimensions du vaisseau et de son
nécessiteront donc une durée d'impulsion plus longue ;
volume. Le TRT correspond à la durée nécessaire pour que
■ profondeur du vaisseau : la profondeur des vaisseaux doit

20 000 également être prise en compte. Les lésions superficielles


10 000
(derme papillaire) répondront aux longueurs d'onde stan-
Hb
dard (532, 577, 585 nm) alors que les vaisseaux plus pro-
1 000 fonds nécessiteront des lasers avec une longueur d'onde
Absorption (cm–1)

Eau plus élevée. Une longueur d'onde plus élevée permet une
100
Mélanine
pénétration plus profonde, alors qu'une durée d'impulsion
plus longue permet de traiter des vaisseaux de gros calibre ;
10 ■ localisation des lésions vasculaires : les vaisseaux situés sur
HbO2 les jambes sont plus profonds et contiennent plus de
1 désoxyhémoglobine. Ils absorbent ainsi la lumière laser
dans un spectre de longueurs d'onde compris entre 800 et
0,1 1 200  nm. Les lasers qui émettent dans l'infrarouge
200 1 000 5 000 tendent à être plus efficaces sur des vaisseaux bleus plus
Longueur d'onde (nm) profonds, tandis que des longueurs d'onde plus courtes
Fig.  27.1  Pics d'absorption de l'oxyhémoglobine et des différents sont plus efficaces sur les télangiectasies superficielles
­chromophores de la peau. rouges. Les lésions du visage et du tronc répondent mieux
Source : S. Dahan, T. Michaud et H. Cartier, Les lasers en dermatologie © 2018
Éditions Doin.
que celles du bas du corps et des jambes. Les zones à

Dermatologie esthétique
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Section 6. Lasers et autres appareils
Chapitre 27. Lasers vasculaires

risque de cicatrices, comme la région thoracique anté- tions de LCP (585 à 595  nm) permettent maintenant de
rieure, le cou ou la région palpébrale, nécessitent une traiter des vaisseaux plus profonds, et offrent également la
réduction des fluences de 10 à 20 % ; possibilité de faire varier les durées d'impulsion de 1,5 à
■ âge des patients  : les enfants répondent mieux que les 40 ms, autorisant une meilleure adaptation à la taille du vais-
adultes, car les vaisseaux sont plus fins et plus seau. Le milieu du laser est un colorant organique (la rhoda-
superficiels ; mine) dont la durée de vie est limitée.
■ phototype : les peaux plus foncées nécessitent des impul-

sions plus longues, des intervalles plus longs entre les Laser Néodyme : Yttrium-Aluminium-
pulses, et une fluence a priori plus élevée car la mélanine Grenat (Nd-YAG) doublé d'un crystal KTP
épidermique absorbe l'énergie du laser : il faut alors veiller (potassium-titanyl-phosphate)
à ce que l'augmentation de fluence ne devienne la source
Le laser au potassium-titanyl-phosphate ou KTP est un laser
de cicatrices ; le traitement est donc plus difficile ;
très répandu et populaire pour traiter les lésions vasculaires
■ taille du spot : plus la taille du spot est large (ce qui permet
superficielles. Il produit une lumière verte à une longueur
théoriquement de traiter plus rapidement une lésion vas-
d'onde de 532  nm, ce qui est proche du premier pic d'ab-
culaire étendue), plus le rayonnement laser pénètre en
sorption de l'oxyhémoglobine. Les appareils disponibles pro-
profondeur. Compte tenu du risque cicatriciel accru, il est
duisent des durées d'impulsion allant jusqu'à 100 ms, ce qui
parfois recommandé d'utiliser des spots plus petits et de
permet un chauffage progressif des vaisseaux sanguins et
faire varier la fluence afin d'obtenir l'énergie souhaitée au
permet d'éviter le purpura. Cette absence de purpura
niveau de la cible ;
post-traitement est le principal avantage de l'utilisation des
■ fluence : la fluence est l'énergie laser fournie par unité de
lasers KTP par rapport au LCP pour la prise en charge de la
surface exprimée en Joules/cm2. Elle doit être adaptée à la
rosacée et des télangiectasies. Le principal inconvénient de
durée d'impulsion et à l'indication ; pour un angiome plan,
cette longueur d'onde est la plus grande absorption d'éner-
on recherchera, en fonction de la durée d'impulsion choi-
gie par la mélanine épidermique, avec un risque accru de
sie, la fluence la plus élevée restant bien tolérée. Compte
dyschromies, en particulier sur les peaux bronzées ou plus
tenu de la variabilité des paramètres du laser et aussi de la
foncées. On sait également que ces lasers peuvent causer des
possibilité de variations individuelles, il est parfois souhai-
cicatrices atrophiques, en particulier lorsqu'on utilise des
table de réaliser une zone test avant de traiter la totalité de
fluences élevées et des durées d'impulsions longues pour
la lésion ;
traiter les petites télangiectasies autour du nez.
■ rôle du refroidissement de l'épiderme  : les systèmes de

refroidissement qui ont été développés permettent de


protéger l'épiderme afin de minimiser les dommages cau-
Lasers émettant dans l'infrarouge
sés aux kératinocytes et aux mélanocytes. Le refroidisse- (700–1 200 nm)
ment fait donc partie intégrante des lasers vasculaires. Le Pour réduire le risque de troubles pigmentaires dus à l'ab-
refroidissement peut être assuré par différentes méthodes : sorption par la mélanine des longueurs d'onde inférieures,
cryo-spray, cryode de contact ou air froid soufflé à la sur- les lasers émettant dans le rouge ou l'infrarouge utilisent le
face de la peau. Le dispositif de refroidissement dynamique spectre d'absorption de l'oxyhémoglobine compris entre
(dynamic cooling device [DCD]) est donc un dispositif 700 et 1 200 nm. L'avantage de ces lasers est une pénétration
complémentaire ou intégré au laser. Le logiciel laser per- plus profonde et un coefficient d'absorption de la mélanine
met à l'utilisateur de définir les paramètres de pulvérisa- plus bas. Le laser Alexandrite long pulse, 755  nm, est un
tion et le délai du DCD, et le cryo-spray est pulvérisé avant traite­ment efficace des nodules sur angiome plan, des formes
l'impulsion laser pour refroidir la peau. hypertrophiques d'angiomes plans et pour les lacs veineux,
car la longueur d'onde peut pénétrer plus profondément. De
même, des lasers à diode ont été développés qui produisent
Classification des longueurs d'onde comprises entre 800 et 980 nm.
des lasers vasculaires [6] Le laser Néodyme : Yttrium-Aluminium-Grenat (Nd-YAG)
est un autre laser émettant dans l'infrarouge à une longueur
Plusieurs types de lasers sont utilisés pour traiter les lésions d'onde de 1 064 nm. Cette longueur d'onde permet de traiter
vasculaires. Les technologies anciennes comme les lasers des vaisseaux plus profonds. L'absorption est plus faible par
continus (CO2, argon, krypton) ont été remplacées par des l'hémoglobine (ce qui nécessite des fluences plus élevées) que
lasers présentant des durées d'impulsions plus courtes, en les longueurs d'onde plus courtes traditionnellement utilisées
raison d'un risque élevé de complications dyschromiques (KTP, colorant pulsé, IPL, diode), mais meilleure pour les vei-
(hypopigmentation ou hyperpigmentation) et de cicatrices. nules. Le laser Nd-YAG à 1 064 nm peut créer un effet de coa-
gulation jusqu'à une profondeur de 4 mm (la douleur est plus
Laser à colorant pulsé (LCP) intense). Il peut être utilisé sur des angiomes plans résistants
Le LCP développé en 1986 a révolutionné la prise en charge au LCP et pour les malformations veineuses. C'est également
des lésions vasculaires en optimisant la tolérance, permet- un excellent choix pour traiter les lacs veineux des lèvres et de
tant le traitement des nouveau-nés. De nouvelles généra- la muqueuse buccale. Il améliore significativement les veinules

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Section 6. Lasers et autres appareils
Chapitre 27. Lasers vasculaires

des membres inférieurs à des durées d'impulsion allant jusqu'à d'onde absorbées par la mélanine entraînant des brûlures et
100 ms. Ces durées d'impulsion chauffent théoriquement les des altérations dyschromiques sur les peaux pigmentées ou
vaisseaux de plus grand calibre tout en ménageant les vais- bronzées. Ces appareils ont une plus grande taille de spot et
seaux plus petits qui refroidissent plus rapidement. En raison par conséquent permettent des traiter des zones étendues
de l'absorption limitée de l'hémoglobine à cette longueur (même si cette plus grande taille s'associe à un risque plus
d'onde, des fluences élevées jusqu'à 300 J/cm2 sont nécessaires important d'effets indésirables). En divisant l'énergie en
et peuvent être obtenues avec des spots plus petits. deux ou trois impulsions et l'intervalle entre les pulses, la
Néanmoins, le risque de nécrose et de cicatrices est accru, et peau peut être refroidie entre chaque impulsion, ce qui
ce laser doit donc être utilisé avec prudence. Les nouveaux limite les risques de dommages épidermiques. En raison de
systèmes Nd-YAG disponibles utilisent des durées d'impul- la divergence rapide du faisceau lumineux, la pièce à main
sions plus courtes de l'ordre de la microseconde et peuvent doit être en contact (ou presque en contact) avec la peau.
être utilisés sur les télangiectasies et l'érythème facial diffus. La Un gel est préalablement appliqué, ce qui protège l'épi-
durée des impulsions varie de 300 à 650 ms et minimise les derme et augmente l'efficacité de la lumière. L'IPL est diffici-
dommages thermiques à la peau environnante. Ces appareils lement utilisable dans les zones concaves (télangiectasies
sont moins douloureux et ont donc un meilleur profil de tolé- du pli nasal) ou si la compression des vaisseaux est trop
rance que les lasers Nd-YAG traditionnels. forte (dos du nez).

Lasers à double longueur d'onde Indications esthétiques électives


Des plateformes utilisant deux longueurs d'onde ont été
développées. Le principe est fondé sur la production de
méthémoglobine par une première longueur d'onde à Érythrose et couperose télangiectasique
595 nm qui a un spectre d'absorption dans l'infrarouge et qui de la rosacée – télangiectasies faciales [7]
est ensuite ciblée par une longueur d'onde à 1 064 nm. Cette
Pour les formes érythrosiques, on utilise des durées d'impul-
action synergique pourrait diminuer l'incidence des compli-
sions courtes (photothermolyse), source de purpura, mais
cations, en particulier sur les peaux pigmentées.
apportant plus d'efficacité (fig. 27.2). En cas de télangiecta-
sies, les durées d'impulsions seront augmentées en respec-
Lumière intense pulsée (intense pulsed tant la notion de relaxation thermique (photocoagulation ;
light [IPL] ou lampe flash) fig. 27.3). Il est possible d'alterner les séances en photocoagu-
La lumière intense pulsée (IPL), qui n'est pas un laser mono- lation et en photothermolyse, ou de modifier les paramètres
chromatique, produit plusieurs longueurs d'onde de lumière au cours de la même séance en commençant le premier pas-
simultanément (faisceau lumineux non cohérent) à des sage par de la photocoagulation. Les patients qui ne sou-
énergies différentes. Le spectre de longueur d'onde varie de haitent pas d'éviction sociale seront traités plutôt avec des
500 à 1 200 nm. Plusieurs filtres peuvent être utilisés, ce qui durées d'impulsion longues, mais le blanchiment de l'éry-
permet d'être plus sélectif, donc de cibler l'oxyhémoglobine throse sera moins bon qu'en photothermolyse et plusieurs
et d'augmenter la longueur d'onde et ainsi la profondeur séances seront généralement nécessaires. Lorsque l'érythème
d'action. Ces dispositifs génèrent des fluences variables avec est discret ou paroxystique, il est possible de le majorer, donc
des impulsions simples ou multiples où la durée d'impul- de majorer la cible, en soufflant de l'air chaud sur le visage
sion et l'intervalle entre les pulses peuvent aussi être modi- avec un sèche-cheveux, ou en appliquant un topique à base
fiés. Certains filtres englobent néanmoins des longueurs d'acide nicotinique (vitamine PP). Le laser KTP est efficace

Fig. 27.2  Érythrocouperose.
Avant (A) et après (B) une séance de laser colorant pulsé (1,5 ms, 7,5 joules/cm2).
Source : O. Cogrel.

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Chapitre 27. Lasers vasculaires

Fig. 27.3  Télangiectasies péricicatricielles traitées par laser à colorant pulsé (mode photocoagulation : 11 joules/cm2, 40 ms).
Source : O. Cogrel.

sur les télangiectasies, mais induit plus d'œdème que le LCP.


Le laser YAG est efficace sur les télangiectasies, mais moins
efficace que le LCP sur l'érythème. Un laser Nd-YAG de petite
taille (1,5 mm) utilisant une durée d'impulsion de 20 ms ou
plus permet une disparition des télangiectasies du visage
dans 50 à 75 % des cas après un seul passage avec des effets
secondaires minimes [8]. L'IPL est une option possible pour
traiter la couperose. Les paramètres IPL utilisent des spectres
de 515 à 1 200  nm avec des durées d'impulsion entre 2 et
6 ms, en mode simple ou multiple avec un intervalle entre
les pulses de 15 ms. Les lasers améliorent non seulement les
télangiectasies et l'érythème, mais également les symptômes
associés à la rosacée.
Fig. 27.4  Poïkilodermie de Civatte ou erythrosis coli.
Source : O. Cogrel.
Poïkilodermie de Civatte (erythrosis coli)
Le traitement de la poïkilodermie de Civatte (PC) par photo- ciel, de l'association éventuelle avec des varices (qui
thermolyse sélective nécessite des longueurs d'onde absor- doivent être traitées préalablement) et la diminution
bées simultanément par deux chromophores différents, à d'oxyhémoglobine. Pour thermocoaguler des vaisseaux
savoir l'hémoglobine et la mélanine. L'érythème est secon- plus profonds et de plus grand diamètre, les lasers doivent
daire à l'atrophie cutanée (fig. 27.4). Il faut toujours être très pouvoir émettre des impulsions de très haute énergie par
prudent car la peau est amincie et fragile. Le LCP peut être le biais de spots de grande taille pour améliorer la diffu-
utilisé avec des spots de plus grand diamètre, des fluences sion dans le derme.
plus faibles et en chevauchant les spots en raison du risque Les lasers doivent être considérés comme une alternative à
d'effet résille. Les effets indésirables à ce niveau (cicatrices, la sclérothérapie. Les meilleures indications sont les
hypopigmentation retardée définitive, aspect marbré) sont suivantes :
plus fréquents. L'IPL est une bonne option et a montré de ■ télangiectasies essentielles ascendantes ;

bons résultats à la fois sur la composante pigmentaire et ■ zones à risque ;

l'atrophie cutanée associée. Une étude rétrospective a mon- ■ échecs de la sclérose ou effets indésirables ;

tré une réduction significative de 75 % à 100 % des modifica- ■ patients phobiques des aiguilles ;

tions de la PC observées chez 111  patients sur 135 (82  %) ■ fines télangiectasies du matting.

après trois traitements utilisant un filtre de 515 nm, impul- Le laser Nd-YAG est le laser de choix, mais peut être asso-
sion unique 3 ms/impulsion double de 2,4 et 4 ms (intervalle cié au laser KTP ou au LCP pour les vaisseaux plus superfi-
de 10 ms entre les pulses) et des fluences de 25 à 42 J/cm2 [9]. ciels. La taille du spot et la durée d'impulsion sont adaptés au
calibre et à la profondeur des vaisseaux. Les impulsions sont
espacées de 1  mm sans chevauchement. Un système de
Varicosités des membres inférieurs [10] refroidissement est indispensable. Le critère d'évaluation cli-
Les varicosités des membres inférieurs sont difficiles à nique est la contraction immédiate du vaisseau ciblé suivie
traiter par laser en raison de l'augmentation de la ­pression d'une papule urticarienne. Le blanchiment de la peau doit
aux membres inférieurs, de l'épaisseur du tissu adventi- être évité. Une hyperpigmentation régressive est fréquente.

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Chapitre 27. Lasers vasculaires

La récidive est habituelle et des séances d'entretien espacées Encadré 27.2


généralement de 6 à 8 semaines sont donc indispensables.
Consignes pré- et postopératoires
Autres indications
Avant traitement
Les autres indications, éventuellement proposées dans cer-
tains cas, sont résumées dans l'encadré 27.1. 1. Informations détaillées données aux patients avant
traitement.
2. Consentement éclairé.
Encadré 27.1 3. Photographie préopératoire.
4. Antécédents médicaux à la recherche d'une contre-in-
Autres indications des lasers vasculaires
dication (malformation artérioveineuse, infection évo-
(liste non exhaustive) (d'après [5]) lutive ; possibilité de traiter les patients sous isotrétinoïne).
1. Malformations vasculaires : angiome plan, hémangiome 5. Dépigmentants chez les patients de phototype élevé
(télangiectasies résiduelles et hémangiomes ulcérés), mal- (au moins 2 semaines avant laser).
formations veineuses –  ne jamais traiter les malforma- 6. Photoprotection par écran solaire d'indice élevé au
tions artérielles par laser moins 4 semaines avant la séance.
2. Tumeurs vasculaires bénignes 7. Un test thérapeutique sur une zone représentative peut
● Angiomes rubis être effectué.
● Angiomes stellaires 8. Topique anesthésiant possible en cas d'angiome plan
● Angiokératomes étendu, mais contre-indiqué pour les télangiectasies car
● Angiomatose de la maladie de Rendu-Osler diminue la cible ; anesthésie locorégionale ou générale à
● Blue rubber bleb naevus discuter pour les lésions diffuses (nourrissons).
● Angiofibromes débutants (± sclérose tubéreuse de 9. Des lunettes de protection adéquates sont nécessaires
Bourneville) pour toutes les personnes se trouvant dans la salle laser.
3. Kératose pilaire rouge 10. Pour le traitement sur les paupières, des coques cor-
4. Autres tumeurs néennes de protection seront positionnées.
● Xanthélasmas 11. Les données des patients doivent être consignées  :
● Verrues, molluscum contagiosum fluence utilisée, site de la lésion, longueur d'onde utili-
● Histiocytofibromes sée, nombre total d'impacts, apparition d'un effet indé-
● Tumeur glomique sirable en cours de traitement.
● Maladie de Kaposi
Soins post-laser
● Mastocytose télangiectasique
1. Refroidissement de la zone traitée (glace).
● Carcinomes basocellulaires superficiels
2. Consignes pour limiter l'œdème post-laser.
5. NEVIL : hamartome épidermique verruqueux inflamma-
3. Photoprotection stricte post-laser.
toire linéaire
4. Cosmétiques non irritants, vaseline officinale en cas de
6. Mélasma
croûte, topiques antibiotiques en cas de surinfection.
7. Cicatrices  : hypertrophiques et chéloïdes, brûlures,
5. Dépigmentants (dermocorticoïdes) chez les patients de
post-traumatiques, acné, vergetures (stade précoce)
phototype élevé (2 à 4 semaines).
8. Radiodermite
9. Dermatoses inflammatoires
● Acné

● Lupus érythémateux chronique, lupus tumidus, Références


télangiectasies résiduelles du lupus [1] Tanzi EL, Lupton JR, Alster TS. Lasers in dermatology:four decades
● Dermatomyosite (érythème résiduel) of progress. J Am Acad Dermatol 2003;49:1–31.
● Sclérodermie systémique : télangiectasies, limitation [2] Rothfleisch  JE, Kosmann  MK, Levine  VJ, Ashinoff  R. Laser treat-
de l'ouverture buccale ment of congenital and acquired vascular lesions:update on
lasers:A review. Dermatol Clin 2002;20:1–18.
● Sarcoïdose cutanée
[3] Garden  JM, Bakus  AD. Laser treatment of portwine stains and
● Psoriasis, psoriasis unguéal
hemangiomas. Dermatol Clin 1997;15:373–83.
● Granulome facial de Lever [4] Groot D, Rao J, Johnston P, Nakatsui T. Algorithm for using a long-
● REM syndrome pulsed Nd-YAG laser in the treatment of deep cutaneous vascular
lesions. Dermatol Surg 2003;29:35–42.
[5] Adamic  M, Troilius  A, Adatto  M, et  al. Vascular lasers and
IPLS:Guidelines for care from the European Society for Laser
Consignes Dermatology. J Cosmet Laser Ther 2007;9:113–24.
pré- et postopératoires [6] Garden  BC, Garden  JM, Goldberg  DJ. Light-based devices in the
treatment of cutaneous vascular lesions:An updated review.
Ces consignes sont indiquées dans l'encadré 27.2. J Cosmet Dermatol 2017;16:296–302.

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Chapitre 27. Lasers vasculaires

[7] Jallian HR, Levin Y, Wanner M. Physical modalities for treating acne [9] Weiss RA, Goldman MP, Weiss MA. Treatment of poikiloderma of
and rosacea. Semin Cutan Med Surg 2016;35:96–102. Civatte with an intense pulsed light source. Dermatol Surg
[8] Bevin  AA, Parlette  EC, Domankevitz  Y, Ross  EV. Variable-Pulse 2000;26:823–7.
Nd-YAG laser in the treatment of facial telangiectasias. Dermatol [10] Meesters  AA, Pitassi  LH, Campos  V, et  al. Transcutaneous laser
Surg 2006;32:7–12. treatemnt of leg veins. Lasers Med Sci 2014;29:481–92.

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Chapitre 28
Lasers pigmentaires
H. Cartier, C. Maire

Introduction dépigmentants. Ces lasers ciblent l'eau et seront utilisés en


mode continu ou fractionné : laser CO2 (10 600 nm), laser
Traiter une hyperpigmentation localisée constitue une erbium-YAG (2 940 nm).
demande fréquente. On prendra soin d'éliminer en premier
lieu une lésion nævique ou un mélanome qui doivent faire
l'objet d'une prise en charge médicale. Dans la majorité des Bilan prétraitement
cas, le laser peut être efficace, mais le traitement de l'agent
causal, qu'il soit endogène ou exogène, s'avérera toujours
nécessaire pour limiter les récidives, fréquentes dans ce type Éliminer les non-indications
de lésions. La principale non-indication est le nævus. Le risque de des-
truction d'un mélanome et de retard diagnostique n'est pas
acceptable. Leur exérèse chirurgicale avec analyse anatomo-
Type de laser utilisable pathologique est la seule possibilité.

Paramètres physiques nécessaires Paramètres intrinsèques


La plupart des lasers pigmentaires sont régis par le principe et extrinsèques à prendre en considération
de la photothermolyse sélective [1]. Elle a pour but, selon le
choix des longueurs d'ondes, d'induire une forte absorption La lésion
pour le pigment ciblé et une absorption minimale pour les Avant toute destruction laser d'une lésion pigmentée, il
deux autres cibles photoniques, à savoir l'eau et l'hémoglo- conviendra de s'assurer au mieux de la bénignité de la lésion
bine. Aussi, la durée du pulse doit être inférieure de 10 fois au pigmentée. Pour s'y aider, la dermoscopie est d'un usage
temps de relaxation thermique de la cible, afin d'être sélec- quasi systématique. La numérisation digitale est également
tive et de limiter les dégâts collatéraux. Le pigment le plus utile pour contrôler l'évolution sous traitement. En cas de
souvent visé correspond à la mélanine (temps de relaxation doute, l'exérèse chirurgicale sera la seule option. Il est à noter
de 1–10  μs). Ainsi, la durée de pulse doit être idéalement qu'en cas de lésion pigmentée, l'examen anatomopatho­
inférieure à 100 nanosecondes. logique de la lésion est toujours préférable. Il faut se méfier
des lentigos actiniques qui peuvent masquer un mélanome
Lasers adéquats disponibles de Dubreuilh débutant [2].
On distingue :
■ les lasers déclenchés (Q-switched) qui émettent leurs pho-
Le patient
tons en quelques dizaines de nanosecondes, ou pour la On tiendra compte du phototype et on évaluera le risque
nouvelle génération en centaines de picosecondes avec d'hyperpigmentation post-inflammatoire (HPI). Plus le photo­
des spectres identiques : 532–650 à 694–755–1 064 nm ; type est élevé, plus le risque augmente.
■ les lasers qui émettent leurs photons en plusieurs millise- La demande du patient est à bien évaluer. Les demandes
condes mais qui, grâce à leur photosélectivité, sont néan- de « suppression totale et définitive » de lésions pigmentées
moins une alternative aux nano/pico. Ainsi, on retiendra le devront être modérées, la plupart des lésions étant à risque
laser KTP 532 nm, le laser jaune 511 nm, le laser à colorant de récidive.
pulsé 595 nm et le laser Alexandrite long pulse ou le thu- On prendra soin de vérifier la bonne compréhension des
lium, etc. Les lampes-flash avec le filtrage adéquat ont soins post-thérapeutiques.
aussi leurs indications ;
■ les lasers ablatif et non ablatifs fractionnés. La destruction
Facteurs extrinsèques
de certaines lésions cutanées pigmentées par vaporisation Les habitudes solaires devront être appréciées afin d'optimi-
non sélective est utilisable pour certaines lésions. Elle peut ser le paramétrage du laser, de limiter le risque d'effet
également permettre d'augmenter la pénétration d'agents ­indésirable (HPI) et de récidive des lésions.

Dermatologie esthétique
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Chapitre 28. Lasers pigmentaires

Modalité de traitement

Indications purement esthétiques


Lésions mélaniques
Lentigos actiniques
Il est démontré que le traitement par laser est significative-
ment plus efficace et plus rapide que les traitements topiques
ou que l'azote liquide pour la prise en charge des lentigos
(fig. 28.1) [3].
Les lasers utilisables sont les lasers nano- et picosecondes
et les lasers Alexandrite long pulse. Une à deux séances
seront nécessaires :
■ dans le cas des lasers nano- et picosecondes, on utilisera

la fluence minimale permettant d'atteindre l'endpoint


Fig.  28.2  Aspect blanc floconneux typiquement observé après laser
(fig. 28.2) : un blanchiment à type de givrage modéré et 532 nm déclenché.
limité à la lésion sans purpura immédiat. Un purpura sur- Source : H. Cartier et C. Maire.
venant dans les quelques minutes suivant le tir est toute-
fois possible. Sur peau foncée, on préconise l'utilisation
d'une fluence minimale pour limiter le risque d'HPI ; Lentigo simplex et lentiginose
■ concernant les lumières pulsées et laser Alexandrite long En cas de lentigines, petites macules pigmentées de 1 mm à
pulse, on observe juste après le tir que les lentigos sont un parfois 1 ou 2 cm, on prendra soin de tenir compte de l'asso-
peu plus contrastés. S'ensuivront des croûtes durant ciation possible avec un syndrome génétique (syndrome de
quelques jours. Un bon paramétrage doit laisser la peau Peutz-Jeghers, complexe de Carney ou syndrome LEOPARD)
environnante normale, quoique parfois avec un érythème (fig. 28.3).
de quelques heures surtout avec les lampes-flash dont le Là encore, l'utilisation de lasers nano- et picosecondes
quartz de contact ne respecte pas la taille exacte des lenti- est la référence. Les lasers à colorant pulsé avec pièce de
gos. À cet égard, ils permettent ainsi de traiter toute une compression pour diminuer le purpura [4], le KTP
surface pour un résultat. Il est intéressant de noter que les 532  nm, l'Alexandrite long pulse ou les lasers ablatifs
lasers déclenchés et long pulse/lumière pulsée peuvent sont également utilisables, avec moins de sélectivité,
être combinés lors de la même séance afin d'optimiser les cependant, et donc un risque de complications
résultats cliniques esthétiques. Le laser déclenché ciblera supérieur.
les lentigos les plus clairs, car toujours plus difficiles à trai- La lumière pulsée peut également être utilisée notamment
ter avec les lumières pulsées qui pourront cependant, à dans le cas de lésions très superficielles.
leur tour, rendre un résultat homogène ; L'endpoint est l'obtention d'un grisé uniforme sur les
■ concernant les lasers ablatifs fractionnés, ils peuvent évi- lésions, qui deviennent discrètement plus foncées.
demment tout détruire, mais avec le risque d'une cicatri- Plusieurs séances sont parfois nécessaires et la récidive des
sation qui doit être maîtrisée. Le réglage des paramètres lentigines est fréquente dans le temps, sauf si on a provoqué
et la taille des spots en mode fractionné ont leur impor- une hypochromie définitive, ce qui n'est évidemment pas
tance et varient selon les appareils disponibles. souhaitable.

Fig. 28.1  A. Aspect de lentigos prenant une teinte grisâtre juste après une séance de lumière intense pulsée. B. Lentigos de la main droite
après une séance de lumière intense pulsée.
Source : H. Cartier et C. Maire.

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Chapitre 28. Lasers pigmentaires

Fig. 28.3  A. Lentiginose péri-orale avant tout traitement. B. Résultat après une séance de laser 532 nm déclenché.
Source : H. Cartier et C. Maire.

Éphélides acquired bilateral nævus of Ota-like macules – ou nævus de Hori


La récurrence inévitable des éphélides fait qu'un traitement sur le visage qui ne doit pas être confondu avec un mélasma.
par laser ne sera que d'effet temporaire et n'en fait pas une Seuls les lasers déclenchés 1 064 nm, éventuellement 755 nm,
indication thérapeutique importante. sont recommandables, au prix de nombreuses séances. La pro-
Dans la mesure où les éphélides sont le témoin d'une pro- tection intra-orbitaire pour le nævus d'Ota doit être absolue,
duction accrue de phéomélanine [5], celles-ci ont un spectre mais les résultats sont excellents et durables [6].
d'absorption plus proche de la longueur d'onde 532 nm. Là
encore, on utilisera de préférence un laser déclenché nano- Lésions non mélaniques
ou picoseconde, limitant ainsi les complications. Tous les Dépôts métalliques iatrogènes
autres lasers et lumière pulsée sont utilisables mais avec des Il s'agit de dépôts cutanés de sels métalliques liés à la prise
résultats variables non dénués de risque de brûlure. chronique de certains médicaments. Il peut s'agir par
exemple d'argyrie (dépôts d'argent), de chrysiasis (dépôts
Taches café au lait d'or), ou d'autres dépôts liés à la minocycline, les antimala-
Ces lésions bénignes font de plus en plus en souvent l'objet riques ou l'amiodarone entre autres. L'arrêt de l'administra-
d'une demande d'effacement. On ne peut que conseiller le tion de l'agent causal est bien sûr nécessaire.
laser déclenché 532 nm, 755 nm voire 964 nm si on ne craint Le laser Q-Switched Nd-YAG 1 064 nm est efficace pour
pas l'hypochromie. Un certain risque de résurgence existe, le traitement de l'argyrie. Dans le cas du chrysiasis, le laser
surtout si les tirs ne sont pas bien juxtaposés. à colorant pulsé 595 nm a montré son efficacité, comme le
laser Alexandrite 755 nm. On évaluera l'efficacité du traite-
Mélanocytose dermique acquise (ABNOM) ment à distance, la disparition de la pigmentation pouvant
Les hyperpigmentations par hypermélanocytose dermique les être effective seulement 6 à 18 mois après le traitement.
plus connues sont les taches mongoloïdes et les nævus d'Ota
(fig. 28.4) ou d'Ito. Elles sont plus fréquentes sur des peaux très Ochronose exogène
pigmentées, pas seulement asiatiques. Sur ce terrain, elles L'ochronose peut avoir une origine exogène ou endogène
peuvent aussi être acquises tardivement, probablement sous (alcaptonurie). L'ochronose exogène est due à l'application
l'influence de facteurs environnementaux  –  ABNOM ou prolongée de topiques à base d'hydroquinone. Cependant,

A B C
Fig. 28.4  Nævus d'Ota avant traitement (A), puis en fin de séance (B), puis 14 mois plus tard (C), après 4 séances de laser Q Switched Nd-Yag.
Source : H. Cartier et C. Maire.

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TECHNIQUES
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Section 6. Lasers et autres appareils
Chapitre 28. Lasers pigmentaires

d'autres substances comme le phénol, les injections de quinine La précocité de la prise en charge est importante afin de ne
et le résorcinol peuvent aussi en être responsables. Le traite- pas laisser la pigmentation s'aggraver. On gardera à l'esprit
ment de l'ochronose exogène est difficile ; la prévention tient que le laser peut aggraver l'hyperpigmentation.
toute sa place avec bien sûr l'arrêt du traitement en cause. L'HPI ne doit pas être confondue avec une résurgence de
mélasma. Elle disparaît en quelques mois à la différence du
Sidérose et hémosidérose mélasma qui évoluera au gré de l'exposition solaire.
Il s'agit de dépôts cutanés de fer. Le laser Q-Switched 532 nm Le laser Q-Switched Nd-YAG 1 064 nm présente un risque
est en théorie le plus adapté, le spectre d'absorption du fer réduit d'absorption par la mélanine, ce qui est sécurisant
étant situé vers 410 nm. Le laser à colorant pulsé 595 nm et chez les patients à peau foncée. Plusieurs sessions à de faible
Ruby 694  nm ou Alexandrite 755  nm peuvent également fluence seront nécessaires pour parvenir à l'amélioration.
être utilisés. Généralement, une à trois séances sont néces- Les lampes flashs avec filtres adaptés, seules ou en associa-
saires avec des effets indésirables limités. Le traitement de la tion avec le trio dépigmentant, ont montré une amélioration
cause permettra d'éliminer les récidives. significative.
Au final, les lasers dans les HPI peuvent être proposés mais
Dermatosis papulosa nigra en dernier recours, en sachant que, dans la grande majorité
Le dermatosis papulosa nigra se développe le plus souvent des cas, l'HPI s'amenuise spontanément en quelques mois
sur phototype sombre et fait parfois l'objet d'une demande avec une bonne photoprotection.
de prise en charge esthétique. Dans ce cas, le laser Erbium-
YAG se montre plus sécurisant car il présente un risque Mélasma
moindre d'hypopigmentation sur peau foncée. D'autres Le mélasma est un désordre pigmentaire résultant de fac-
techniques telles que le laser à colorant pulsé, le laser teurs multiples. Une prédisposition génétique s'associe à des
1 064 nm long pulse donnent d'excellents résultats cosmé- phénomènes hormonaux et à l'exposition à la lumière. La
tiques, mais le curetage doux ou une fine électrocoagulation lumière en cause inclut à la fois les UV et la lumière bleue [10].
sont bien plus sages d'utilisation. On sait également que les fibroblastes et les cellules endo-
théliales participent à la physiopathologie [11].
Indications médicales Le traitement est complexe. En premier lieu, il convien-
ou non exclusivement esthétiques dra d'expliquer que le mélasma est une pathologie chro-
Le nævus spilus et le nævus congénital géant sont des lésions nique dont les récidives sont extrêmement fréquentes. On
dont la prise en charge nécessite une expertise dermato­ associera toujours la photoprotection contre les UV et la
logique, et doit rester exceptionnelle. lumière bleue visible. La référence reste les traitements
dépigmentants topiques tels que le trio de Klingman.
Hyperpigmentation post-inflammatoire (HPI) D'autres topiques, succédanés de l'hydroquinone, ont
Il s'agit d'une hyperpigmentation acquise contenant de la démontré une certaine efficacité. Récemment, l'acide
mélanine, avec une répartition à la fois dermique et épider- tranexamique a montré une certaine efficacité [12]. Les
mique. Cette répartition est cependant inégale selon la peelings sont souvent proposés avec des résultats probants
nature de la cause et selon sa durée d'évolution. Selon la mais non définitifs.
répartition, les traitements seront plus ou moins efficaces. Quant au laser, c'est le débat perpétuel. Si une améliora-
L'HPI est classiquement réactionnelle à l'inflammation d'au- tion initiale est constatée, le suivi à long terme montre des
tant plus qu'on traite un phototype foncé. Les récidives sont récurrences, des hypopigmentations séquellaires et jusque
fréquentes et aggravées par la persistance de l'inflammation, 10  % de majoration de l'hyperpigmentation, attribuable à
le frottement itératif ou par l'exposition au soleil, et elle peut l'HPI.
de plus se surajouter à un mélasma [7, 8]. L'utilisation des lasers déclenchés à faible fluence selon les
La première ligne thérapeutique consistera en l'application protocoles asiatiques diminue ce risque et serait ainsi effi-
de préparations dépigmentantes qui ne peuvent agir que sur cace sans toutefois être suffisant.
la pigmentation épidermique. À tous les stades, on recom- Les lasers ablatifs et non ablatifs diminuent le mélasma,
mandera les écrans solaires et la protection de la lumière mais ces résultats sont limités par un risque de récidive
visible notamment bleue (attention aux LED) [9]. La prise en important et même d'aggravation. La comparaison aux
charge de l'inflammation causale est bien sûr primordiale et dépigmentants seuls est en faveur du dépigmentant [13].
les dermocorticoïdes (classes 1 et 2) sont le premier traite- L'utilisation du laser Erbium fractionné afin de permettre
ment à proposer. Il convient d'éviter tous les agents topiques une meilleure pénétration de la préparation dépigmentante
irritants. En effet, il faut réduire l'inflammation : plus elle se est une approche encourageante (laser-assisted drug deli-
prolonge, plus le risque augmente. En l'absence d'abrasion very). Les résultats à long terme ne sont pas encore évalués.
cutanée, on les préconise juste après le laser durant quelques L'utilisation de la lumière pulsée en combinaison avec les
jours. En cas d'abrasion cutanée, on attend la phase de dessi- dépigmentants est également une approche intéressante,
cation des croûtes pour éviter le risque de surinfection, mais avec un risque d'HPI réel mais inférieur à celui des lasers
cela reste discuté. Q-Switched.

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Chapitre 28. Lasers pigmentaires

L'utilisation combinée des préparations dépigmentantes Conclusion


et du laser à colorant pulsé a également sa place en raison de
la présence d'un réseau vasculaire associé au mélasma, ayant Le bon laser, la bonne indication, le bon paramétrage et le
une incidence sur sa genèse ou sa pérennité [10]. bon patient sont les garants du succès. Mais dans le registre
L'utilisation de lasers picosecondes est en cours d'évalua- des lésions pigmentaires, leur origine et leur mode évolutif
tion avec des résultats positifs à court terme. rendent finalement le sujet plus complexe. L'indication
La majorité des études confirment que les formulations à simple est le lentigo. La demande pour le mélasma est expo-
base d'hydroquinone sont, en monothérapie, plus efficaces nentielle ; pourtant, sa prise en charge ne peut se restreindre
que les lasers. Mais, dans le cadre complexe du mélasma, au seul laser.
la  notion de temps d'évolution et d'exposition solaire est
importante. Aussi, ce sont les combinaisons entres toutes Références
ces solutions qui peuvent satisfaire les patients. Il n'y a en [1] Anderson  RR, Parrish  JA. Selective photothermolysis:precise
microsurgery by selective absorption of pulsed radiation. Science
tout cas aucune recette miracle à proposer. (New York, NY) 1983;220:524–7.
[2] Lee PK, Rosenberg CN, Tsao H, Sober AJ. Failure of Q-switched
Mauvaises indications ruby laser to eradicate atypical-appearing solar lentigo:report of
et contre-indications two cases. J Am Acad Dermatol 1998;38:314–7.
[3] Imhof L, Dummer R, Dreier J, et al. A Prospective trial comparing
Q-switched ruby laser and a triple combination skin-lightening
Il n'y aucune contre-indication absolue, sauf le mésusage de cream in the treatment of solar lentigines. Dermatol Surg
l'appareil, le défaut de diagnostic et les attentes irréalistes. 2016;42:853–7.
[4] Kono  T, Chan  HH, Groff  WF, et  al. Long-pulse pulsed dye laser
Aspect pratique delivered with compression for treatment of facial lentigines.
Dermatol Surg 2007;33:945–50.
et effets secondaires habituels [5] Valverde P, Healy E, Jackson I, et al. Variants of the melanocyte-sti-
mulating hormone receptor gene are associated with red hair
L'usage d'une crème anesthésiante ou le protoxyde d'azote and fair skin in humans. Nat Genet 1995;11:328–30.
ne sont aucunement contre-indiqués. [6] Fusade  T, Lafaye  S, Laubach  HJ. Nevus of Ota in dark skin--an
Les effets immédiats et les suites sont fonction du type de uncommon but treatable entity. Lasers Surg Med 2011;43:960–4.
laser utilisé  : érythème, givrage grisâtre, noircissement des [7] Callender  VD, St Surin-Lord  S, Davis  EC, Maclin  M.
Postinflammatory hyperpigmentation: etiologic and therapeutic
lésions, purpura, décollement de lésions, croûtes.
considerations. Am J Clin Dermatol 2011;12:87–99.
L'HPI est l'effet indésirable le plus fréquent et peut sur- [8] Passeron T, Nouveau S, Duval C, et al. Development and validation
venir sur tous types de peaux. La prévention consistera en of a reproducible model for studying post-inflammatory hyper-
une photoprotection stricte et complète. Lorsque le pigmentation. Pigment Cell Melanoma Res 2018;31(5):649–52.
risque d'HPI est élevé, on peut recommander l'application [9] Passeron T, Picardo M. Melasma, a photoaging disorder. Pigment
de dermocorticoïdes quotidienne dans les 2 semaines qui Cell Melanoma Res 2018;31(4):461–5.
[10] Passeron  T. Long-lasting effect of vascular targeted therapy of
suivent la session. Il est important d'agir au plus vite pour
melasma. J Am Acad Dermatol 2013;69:e141–2.
limiter le développement de l'HPI. On peut également [11] Regazzetti C, De Donatis GM, Ghorbel HH, et al. Endothelial cells
utiliser l'hydroquinone seule ou dans une préparation promote pigmentation through endothelin receptor B activa-
associant hydroquinone et dermocorticoïdes [14]. tion. J Invest Dermatol 2015;135:3096–104.
[12] Del Rosario  E, Florez-Pollack  S, Zapata Jr L, et  al. Randomized,
placebo-controlled, double-blind study of oral tranexamic acid in
Effets secondaires inhabituels the treatment of moderate to severe melasma. J Am Acad
et risques Dermatol 2018;78(2):363–9.
[13] Kroon MW, Wind BS, Beek JF, et al. Nonablative 1550-nm fractio-
L'utilisation de trop fortes fluences peut induire une érosion nal laser therapy versus triple topical therapy for the treatment of
melasma:a randomized controlled pilot study. J Am Acad
superficielle voire des phlyctènes, source de séquelles hypo- Dermatol 2011;64:516–23.
chromiques ou de cicatrices. La récidive est un risque fré- [14] Passeron T. Post-inflammatory hyperpigmentation. Ann Dermatol
quent dont le patient doit être informé. Venereol 2016;143(Suppl 2). S15-9.

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Section 6. Lasers et autres appareils

Chapitre 29
Lasers CO2
et photorajeunissement
G. Toubel, J.-M. Mazer

La place des lasers  CO2 pulsés et CO2 fractionnés dans la est le même (eau), mais les effets tissulaires et les effets
prise en charge du photovieillissement ou héliodermie est secondaires ne seront pas identiques avec des impulsions si
indéniable, mais il faut bien connaître les vraies indications, différentes [2].
les limites de ces techniques ainsi que les effets secondaires Pour traiter efficacement une héliodermie du visage, le
classiques ou rares. laser CO2 ultrapulsé reste la référence et aucune autre tech-
Aux États-Unis, on parle de « fractioned CO2 laser » et on nique n'arrive aux mêmes résultats, mais il s'agit d'une tech-
aurait tendance à utiliser en français le terme « laser  CO2 nique douloureuse nécessitant une anesthésie locorégionale
fractionné », sauf que, dans le domaine de la lumière, on ou générale. On utilise cette technique depuis plus de 20 ans,
parle de fractionnement uniquement dans le temps et non mais après une période initiale euphorique de la part des
sur une surface. On pourrait utiliser l'anglicisme « fraxelisé » médecins, on a assisté à un nombre important d'accidents
en référence au laser Fraxel qui est le pionnier de cette tech- souvent liés à une méconnaissance de l'interaction laser-
nique, mais il s'agit d'un laser non ablatif, ce qui ne coïncide tissu qui se traduisait par des brûlures profondes. Cette tech-
pas avec le laser CO2. On ne sait donc toujours pas comment nique a donc été mise en sommeil, mais elle retrouve une
appeler parfaitement cette technique, mais tout le monde deuxième jeunesse actuellement car on maîtrise mieux les
parle maintenant de laser fractionné. dégâts thermiques et on n'hésite pas à utiliser, dans la même
séance, la technique fractionnée lors du 2e ou 3e  passage
laser sur une héliodermie.
Lasers CO2 ultrapulsés Les soins postopératoires sont très importants et doivent
Le laser au dioxyde de carbone ou CO2 (10 600 nm) est un être minutieux car le derme est à nu et on doit entretenir
laser à gaz, c'est-à-dire que le milieu amplificateur se trouve une ambiance humide jusqu'à la cicatrisation en utilisant
à l'état gazeux. Les lasers CO2 fonctionnent généralement en soit un pansement occlusif, soit des applications répétées de
mode continu [1]. Dans ce cas, l'émission est obtenue en vaseline stérilisée ou d'Aquaphor®. Un traitement prophylac-
maintenant la décharge électrique dans le tube de façon tique antiherpétique aura bien sûr été programmé 48 heures
continue. Il est cependant possible de faire fonctionner ces avant la séance.
lasers en mode impulsionnel en modifiant le régime de Les suites sont impressionnantes et cela entraîne une évic-
décharge électrique au niveau du tube. Un dispositif électro- tion sociale longue (15 jours) et pénible avec des soins pré-
nique engendre une décharge plus intense et plus courte. Il cis, mais aussi un risque d'effets secondaires non négligeables
est ainsi possible d'engendrer une impulsion dont la puis- comme des cicatrices hypertrophiques, des ectropions et
sance crête est de 20 à 100  fois supérieure à la puissance surtout des hypochromies définitives. Un érythème souvent
obtenue en continu pour des temps d'impulsion qui peuvent tenace oblige les patients à se maquiller durablement pen-
varier de 100 à 1 000 microsecondes suivant les lasers. Une dant 2 mois environ. Alors, doit-on préférer une lèvre supé-
terminologie très diverse est utilisée par les constructeurs de rieure ridée ou non ridée mais complètement achromique,
laser pour décrire ce mode fonctionnement impulsionnel de teinte ivoirine ?
(ultrapulse, superpulse, true pulse). Il est important de souli-
gner que ce mode impulsionnel est très différent du séquen-
cement de l'émission continue d'un laser qui est obtenue Lasers CO2 fractionnés ablatifs
généralement au moyen d'un obturateur mécanique. Si
celui-ci permet d'obtenir des temps courts (de l'ordre de la
milliseconde), la puissance n'est en aucun cas modifiée et Présentation
restera donc de l'ordre de quelques dizaines de watts pour Pour éviter les effets secondaires liés souvent à un traitement
des lasers médicaux. On voit donc la différence technique trop agressif avec des suites prolongées, l'équipe de Rox
essentielle entre les lasers CO2 superpulsés et les lasers CO2 Anderson (Wellman Institute à Boston) s'est penchée sur la
continus. Pour l'ensemble de ces appareils, le chromophore définition du spot idéal pour la peau. Leurs travaux [3] ont
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Section 6. Lasers et autres appareils
Chapitre 29. Lasers CO2 et photorajeunissement

conduit à une réduction de la taille du spot en laissant des effet thermique de surface (effet peeling comme avec un
intervalles de peau saine entre ces trous et en augmentant acide trichloracétique).
l'énergie par pulse. L'idée était de ne plus traiter la totalité de ■ Avec le temps d'exposition, on va jouer sur la coagulation

la surface cutanée afin de réduire les suites opératoires. Leur autour du puits d'ablation ; en effet, plus ce temps sera
première publication en 2004 [3] rapporte les résultats sur la long, plus la coagulation périphérique sera élevée, ce qui
texture cutanée et sur les rides avec un laser fractionné non peut être un inconvénient ou le but recherché.
ablatif (Fraxel à 1 550 nm). Ce concept de photothermolyse ■ L'énergie délivrée par spot va influer sur la profondeur de

fractionnée a été décliné selon différentes longueurs d'onde ce dernier ; en effet, plus l'énergie sera forte, plus la zone de
et tout naturellement avec les lasers CO2 continus qui pré- destruction sera profonde, à condition d'utiliser un petit
sentent l'avantage d'être robustes et peu onéreux. diamètre de spot et un temps d'exposition court.
Le principe repose sur la distribution de microspots régu- On voit donc que, selon le réglage de l'appareil, on pourra
lièrement espacés grâce à une pièce à main robotisée. Le but se servir de l'ablation ou de la coagulation, mais aussi des
est de créer un réseau dense de plaies thermiques en micro- deux selon l'indication à traiter.
puits ou microcolonnes épidermiques et dermiques que les On compte à peu près une vingtaine de lasers CO2 fraction-
Anglo-Saxons nomment MTZ (microthermal zones), entraî- nés sur le marché européen avec des puissances allant de 10 à
nant une réponse cicatricielle, donc de remodelage autour 100 watts. Il est quasi impossible de les passer tous en revue,
d'elles. On parle souvent de cicatrisation en 3D. Les zones mais ce qui demeure important c'est l'énergie délivrée sur
épidermiques non traitées vont accélérer la cicatrisation et chaque micropuits (MTZ) avec un petit diamètre de spot. On
minimiser les suites opératoires, ce qui permet de traiter des estime qu'avec 60 mJ on est capable d'être actif au-delà de 1 mm
zones extrafaciales (cou, dos des mains, poitrine, etc.) alors de profondeur. Certains lasers moins puissants proposent une
qu'il s'agit d'une contre-indication avec les lasers CO2 ultra- technique de « stacking », c'est-à-dire un empilage de tirs pour
pulsés. Pour une même longueur d'onde, les effets tissulaires aller plus profondément, mais cela risque aussi de provoquer
varient selon l'énergie délivrée par spot, la durée du pulse, le des dégâts thermiques périphériques plus importants. Il a
diamètre des microspots, leur espacement ou densité, etc. récemment été montré que le stacking améliorait effectivement
On pourra donc rechercher un effet superficiel plus ablatif la profondeur d'ablation, comme cela est mis en avant par cer-
ou un effet profond (jusqu'à 2 mm) avec plus d'effets ther- tains industriels, mais la zone de dégâts thermiques n'a pas été
miques, donc avec plus d'effet tenseur. aussi bien évaluée et, surtout, on ne retrouve pas les mêmes
Il faut bien comprendre que, lorsqu'on déclenche un puits résultats au niveau d'une peau abdominale (récupérée lors
d'ablation cutanée, il se produit autour de ce puits une zone d'une abdominoplastie) qu'au niveau facial (peau récupérée
thermique non ablative mais source d'effets tissulaires com- lors d'un lifting). Hélas, c'est au niveau de la peau du visage qu'on
plexes de remodelage [4]. Ce cône thermique sera plus ou retrouve la moins bonne action de ce stacking.
moins large en fonction de la durée du tir laser et de l'énergie Quelques publications montrent des images histologiques
employée. Il faut bien appréhender ce phénomène et ne pas prouvant la colonne de destruction bien individualisée [5].
trop rapprocher les trous d'ablation car les zones thermiques
pourraient se rejoindre et entraîner une absence de tissu Indications
sain, donc de sécurité. Il est de bon ton de ne pas dépasser
une densité de 25 % de tissu détruit et parfois de se conten- Héliodermie
ter de densités plus faibles si on cherche une zone de coagu- On propose les lasers CO2 fractionnés pour traiter les rides et
lation périphérique plus importante. les dommages liés à une surexposition solaire chronique
Selon le but thérapeutique et l'indication, on sera amené à comme avec les lasers CO2 ultrapulsés, mais avec moins de
privilégier plus ou moins d'ablation et plus ou moins de coa- risque cicatriciel (fig.  29.1). Les résultats sont en revanche
gulation, ce qui fait la difficulté de cette technique et rend moins spectaculaires bien que non négligeables. L'aspect
son apprentissage assez fastidieux. En effet, il faudra jouer cutané superficiel s'améliore grandement, avec unification
sur tous les paramètres à la fois, c'est-à-dire l'énergie, le temps du teint, disparition des lentigos, diminution des pores dila-
d'exposition, le diamètre du spot laser et la densité des puits tés et atténuation des rides fines. Si on veut intervenir super-
de traitements (MTZ). ficiellement, on utilisera des spots de 300 à 500 microns avec
■ Pour la densité, on a déjà soulevé la nécessité de ne pas des pulses autour de 10 ms et sans exagérer avec la fluence
dépasser des valeurs de 20 à 25 % pour éviter de trop gros car on doit rester superficiel. En revanche, pour atténuer des
dégâts thermiques, mais on pourra diminuer cette densité rides, il faudra être profond tout en ayant un peu de coagu-
à 5  % si on doit traiter des cicatrices ou essayer de faire lation autour des puits pour entraîner une néocollagenèse ;
pénétrer des substances dans la peau (par exemple photo- donc, on prendra des spots plus petits avec des pulses pas
thérapie dynamique [PDT]). trop courts et une forte fluence. Dans tous les cas, on ne
■ Pour la taille du spot, c'est plus simple. Comme l'absorp- dépassera pas 20 à 25 % de zone traitée. Le plissé solaire des
tion se fait essentiellement au niveau de l'eau cutanée, il joues répond bien à ce traitement assez agressif, mais atten-
faudra utiliser des spots très petits (100  microns) pour tion aux rides péri-oculaires, car ici la peau est très fine et il
pénétrer le plus profondément possible et, en revanche, ne sert à rien de traiter en profondeur. Si on veut être plus
utiliser des spots plus larges (300 à 500 microns) pour un performant, on précédera la séance de laser d'une injection

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Chapitre 29. Lasers CO2 et photorajeunissement

A B
Fig. 29.1  A. Héliodermie faciale avant traitement du visage entier par laser CO2 pulsé. B. Résultat 6 mois après le traitement.
Source : G. Toubel.

de toxine botulinique afin de bien déplisser cette zone. Ces pour améliorer en plus le côté vasculaire et les anomalies
rides péri-oculaires s'atténuent bien, mais ce n'est pas le cas pigmentaires secondaires à ces abus de soleil. La société
de celles du pourtour péribuccal car, avec cette technique, Deka a même inclus une radiofréquence aux côtés du scan-
on n'est pas assez agressif sur cette peau très épaisse. Ici, il ner du laser CO2 fractionné pour chauffer encore plus le tissu
faut pratiquer un premier passage ablatif à 100  % comme cutané et donc augmenter la néocollagenèse.
avec un laser CO2 ultrapulsé, puis utiliser la fonction frac-
tionnée en un ou deux passages profonds. Les suites res- Autres indications approuvées
semblent à celles du laser CO2 ultrapulsé, mais sans en dehors de l'héliodermie
hypopigmentation connue à ce jour (fig. 29.2). Ce sont les suivantes : les cicatrices [6], le passage transcutané
Certaines plateformes laser associent un laser  CO2 frac- de substances actives [7], l'amélioration de la rapidité du déta-
tionné à une autre technique afin d'avoir une action globale touage par le laser Q-switched, le traitement du rhinophyma
sur le photovieillissement, comme une lampe flash (IPL) et celui du vitiligo résistant aux traitements classiques [8].

A B

C D
Fig. 29.2  A. Rides péribuccales avant tout traitement. B. Aspect immédiat à la fin d'une séance de laser CO2 pulsé. C. Résultat à distance de la pre-
mière séance, avant la deuxième séance. D. Résultat à distance de la deuxième séance.
Source : G. Toubel.

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Chapitre 29. Lasers CO2 et photorajeunissement

Déroulement des séances l'American Society for Laser Medicine and Surgery (ASLMS) de
2014, les experts ont invité tous les congressistes à ne plus trai-
Ces séances sont un peu douloureuses ; aussi, il faudra appli-
ter les zones extrafaciales et surtout pas le cou. De rares cas de
quer au préalable une crème anesthésiante particulière qui
kératoses, de kératoacanthomes et de carcinomes spinocellu-
n'augmente pas la teneur en eau cutanée (risque de former
laires ont aussi été rapportés après traitement par laser CO2
une barrière défensive vis-à-vis de la pénétration du faisceau
fractionné, mais c'était au niveau des bras et des membres infé-
laser) et se servir de froid pulsé (Zimmer) pendant la séance.
rieurs, donc des zones interdites aujourd'hui.
Pour la zone péribuccale, on sera amené à proposer une
En résumé, pour traiter des rides, des cicatrices d'acné, des
anesthésie tronculaire car les puissances utilisées ici
cicatrices atrophiques ou des vergetures, il faudra provoquer
entraînent une forte douleur.
une stimulation collagénique importante, donc être profond
Doit-on programmer plusieurs séances peu agressives ou
et énergique.
une seule avec des paramètres forts ? Aujourd'hui, on préfé-
rera la deuxième solution car plusieurs séances entraînent
plusieurs évictions sociales et la profondeur d'action du laser
Conclusion
doit rester profonde, donc avec des paramètres puissants. Toutes ces techniques semblent aujourd'hui incontournables
pour la prise en charge des cicatrices post-traumatiques ou
Soins postopératoires atrophiques, mais aussi pour améliorer les héliodermies. En
Les soins postopératoires se résument à une crème cicatri- revanche, il faut oublier l'indication du mélasma car les
sante nourrissante, sauf pour la zone péribuccale où on utili- études sont pauvres, peu rigoureuses et ne montrent sou-
sera un traitement préventif antiherpétique, puis de la vent pas plus d'efficacité que le trio dépigmentant de
vaseline stérilisée ou de l'Aquaphor®. Kligman. D'autres indications existent, bien qu'elles soient
souvent anecdotiques, mais elles permettront de rentabili-
Suites ser ces techniques toujours onéreuses. Le point le plus
important reste de bien comprendre la différence entre
Les suites restent classiques mais peu impressionnantes com- l'ablation cutanée pure et la simple coagulation et de bien
parées à celles du laser  CO2 ultrapulsé. L'importance de ces connaître sa machine pour régler les paramètres en fonc-
suites augmente avec l'agressivité du traitement, c'est-à-dire si tion de l'indication.
on utilise une forte puissance ou une densité de travail élevée.

Suites classiques Lasers fractionnés non ablatifs


Les suites classiques se résument à des érythèmes, des
œdèmes et des croûtelles. Certains érythèmes peuvent res-
ter près d'un mois et demandent un bon maquillage pour le
Intérêt et complémentarité par rapport
cacher. Les œdèmes sont de courte durée mais parfois aux lasers ablatifs
impressionnants. Ce sont ces croûtelles qui entraînent une Les lasers pulsés CO2 ou Erbium de type ablatif sont toujours
gêne sociale car elles sont difficiles à masquer et restent pré- considérés comme le gold standard en matière d'efficacité
sentes pendant une bonne semaine. On peut rencontrer des dans le traitement de l'héliodermie faciale (fig.  29.3).
suintements, mais rarement plus de 3 jours. Assez fréquem- Toutefois, leur effets secondaires, comparables à ceux d'une
ment, on verra apparaître une petite éruption acnéiforme et dermabrasion, et, surtout, la fréquence des hypochromies et
même des grains de milium. L'apparition de douleurs, de achromies, non opérateur-dépendantes, ont justifié la
grosses croûtes et de suintement prolongé doit alerter le recherche d'autres modalités de traitement. Au début des
praticien qui doit savoir reconnaître une surinfection bacté- années 2000, l'équipe de R. Anderson a proposé, afin d'éviter
rienne ou virale. ces effets secondaires, une nouvelle technologie laser dite
« fractionnée » [9, 10]. Son principe est de faire en sorte qu'à
Suites non classiques et effets secondaires chaque traitement une partie des mélanocytes présents
Les suites non classiques ou effets secondaires restent rares dans la base de l'épiderme soit respectée.
mais assez prévisibles. Les hyperpigmentations post-inflamma- Historiquement, le premier laser proposé a été le Fraxel ; il
toires sont liées à un traitement trop agressif sur un phototype était de type non ablatif, et ses suites se sont révélées très
élevé ou un patient encore bronzé. Il ne faudra pas hésiter à simples, presque sans éviction sociale. Dans un deuxième
récuser certains patients et les diriger vers des techniques non temps sont apparus des lasers fractionnés de type ablatif, soit
ablatives ou leur prescrire un dermocorticoïde puissant en CO2, soit Erbium. Leur caractère fractionné évite le risque de
courte cure après la session laser. Quelques cas de cicatrices ont dépigmentation. Toutefois, les suites de ces derniers sont plus
été rapportés avec cette technique, mais l'analyse de ces cas importantes, surtout si l'on utilise les paramètres agressifs,
montre presque toujours une erreur humaine. Des ectropions garants d'une meilleure efficacité, mais que tous les patients
au niveau des paupières après un traitement associant une ne peuvent pas accepter. On peut débattre de l'intérêt res-
forte puissance et une densité élevée auraient pu être évités. pectif des deux types de lasers fractionnés : non ablatifs (avec
Des cicatrices atrophiques ou hypertrophiques commencent à ses suites simples mais une efficacité moindre) et ablatifs
être décrites lors de traitements en dehors du visage. Lors de (plus efficaces, mais aux effets secondaires plus importants).

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Section 6. Lasers et autres appareils
Chapitre 29. Lasers CO2 et photorajeunissement

Fig. 29.3  A. Héliodermie faciale avant tout traitement. B. Résultat 6 mois après 4 séances de laser fractionné non ablatif profond.
Source : J.-M. Mazer.

En réalité, les deux types de techniques sont plus complé- Ainsi, le traitement est réalisable sur tous les phototypes et
mentaires, synergiques, que « concurrentielles ». sur toutes les régions du corps, aussi bien le visage que
d'autres régions telles que le cou et les autres régions extrafa-
Principes du laser fractionnel non ablatif ciales, ce qui n'est pas le cas avec les lasers ablatifs [13, 14].
Ces lasers créent, de façon précise, reproductible, des Les complications observées sont rares et bénignes. Elles
colonnes, plus ou moins profondes, de coagulation tissu- sont dominées par des cas d'hyperpigmentations post-in-
laire appelées microzones thermiques (MTZ). Elles laissent flammatoires (HPI) toujours résolutives, plus fréquentes sur
entre elles des intervalles de peau saine. Ainsi, la peau res- peau asiatique et sur les phototypes élevés. Aucun effet
pectée entre les impacts permet une cicatrisation rapide, et secondaire sévère n'a jamais été observé, après une quin-
évite tout risque de dépigmentation alors que le caractère zaine d'années d'utilisation.
non ablatif, dans la mesure où l'épiderme n'est pas « per-
foré » mais coagulé, évite le risque d'infections et la forma- Indications
tion de croûtes, puisqu'il n'y a pas de suintement. Les indications relatives sont posées en fonction des zones
Au niveau du derme, sont créées des colonnes verticales de traitées, du phototype et des suites que le patient peut
nécrose de coagulation tissulaire. Leur résorption entraîne en accepter [15, 16]. La néosynthèse collagénique est moins
réaction, du fait du mécanisme de réparation, une néosyn- importante que celle obtenue avec un fractionné ablatif,
thèse collagénique. Après chaque traitement, la persistance mais elle peut être profonde ; cela est particulièrement inté-
de mélanocytes sains explique que tous les phototypes ressant lorsque l'on doit agir profondément, comme sur les
peuvent être traités sans risque de dépigmentation. La lon- cicatrices d'acné (où il existe des zones de fibrose sous-
gueur d'ondes de ces lasers est située dans l'infrarouge, entre jacente à l'atrophie dermique). Les suites sont simples, avec
1 440 nm et 1 927 nm, variant légèrement suivant les modèles. une éviction sociable faible. Ce laser pouvant être utilisé sur
tous les phototypes et toutes les régions, on comprend que
Paramètres de traitement les indications sont larges…
Le traitement repose sur le choix de deux paramètres : d'une
part la profondeur, d'autre part la densité [10]. Traitement de l'héliodermie du visage
La profondeur des colonnes de nécrose de coagulation est Ces régions peuvent être traitées sans risques [15], et au prix
corrélée à l'énergie (irradiance). Elle est très variable suivant de trois à quatre séances, les progrès sont évidents, même s'il
les différents lasers non ablatifs proposés : ne dépassant pas est clair que le traitement des rides profondes, en particulier
0,4 mm pour certains lasers, mais pouvant atteindre jusqu'à sus-labiales, est nettement moins efficace, et peut justifier
1,4 mm de profondeur pour d'autres. un autre traitement : laser ablatif ou injections [16, 17]. De
Il est remarquable de constater que les suites sont les plus, l'effet tenseur, nécessaire en cas de relâchement cutané,
mêmes, quelle que soit la profondeur obtenue. Elles sont est faible. L'indication élective de ces lasers est donc le traite-
marquées par un érythème, se prolongeant en moyenne 3 à ment des héliodermies d'intensité modérée. Un protocole
5 jours, associé à une xérose cutanée, puis un aspect pseu- de traitement intéressant consiste à traiter l'ensemble du
do-bronzé, et éventuellement un œdème. visage et à associer un laser ablatif sur les rides sus-labiales.
Le deuxième paramètre est la densité. En pratique, il définit Cela souligne l'intérêt des synergies entre les différentes
à la fois le pourcentage de peau traité à chaque séance, et donc techniques.
celui de peau respectée, et implicitement l'agressivité du trai-
tement. Cette densité peut atteindre raisonnablement 30 %. Rajeunissement du cou, du décolleté
et des mains
Tolérance Là encore, la tolérance de ces lasers non ablatifs prend toute
La reproductibilité et le caractère non ablatif de ce traitement son importance, alors que celle des ablatifs est plus problé-
expliquent son profil de tolérance exceptionnel [11, 12]. matique en extrafacial [15]. Un protocole de traitement

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Section 6. Lasers et autres appareils
Chapitre 29. Lasers CO2 et photorajeunissement

incluant trois à quatre séances espacées d'un mois permet leur relative simplicité, en termes de suites, leur absence d'ef-
habituellement d'obtenir des résultats satisfaisants. fets secondaires, et leur capacité à traiter de grandes sur-
faces, aussi bien sur le visage que le corps, et sur tout
Traitement des cicatrices d'acné atrophiques phototype. Lorsque l'efficacité est insuffisante, il est possible
Les cicatrices d'acné sont caractérisées par une atrophie, d'associer des lasers fractionnés ablatifs sur des zones pré-
associée à des zones de fibrose dermique généralement pro- cises (contour de bouche, paupières relâchées).
fondes. L'essentiel, pour être efficace, est d'assurer une néo- Ainsi, la bonne question est de déterminer la meilleure
synthèse collagénique importante pour réparer l'atrophie, synergie thérapeutique en fonction de chaque patient, de
mais aussi assurer la résorption de ces zones de fibrose ; d'où son phototype, des zones devant être traitées, de la sévérité
l'importance de pouvoir dépasser la profondeur d'un milli- de l'héliodermie et des suites qu'il acceptera, etc. [18].
mètre. À l'inverse, les lasers fractionnés ablatifs atteignent Références
cette profondeur au prix de suites marquées. Dans la plupart
[1] Mordon  S. Physique des lasers. In : Les lasers en dermatologie.
des cas, les résultats sont satisfaisants en trois à quatre 3e éd Paris : Doin;2011. p. 3–37.
séances et tous les phototypes peuvent être traités. Parfois, [2] Mordon S. Lasers ablatifs. In : Les lasers en dermatologie. 3e ed.
les résultats peuvent être limités par la persistance des bords Paris : Doin;2011. p. 159–65.
des cicatrices qui demeurent trop visibles. On peut alors pro- [3] Manstein D, Herron GS, Sink RK, et al. Fractional photothermoly-
poser un traitement superficiel, avec un laser CO2 fractionné sis:a new concept for cutaneous remodeling using microscopic
patterns of thermal injury. Laser Surg Med 2004;34:426–38.
utilisant des paramètres de type faible profondeur (donc
[4] Noe C, Le Pillouer-Prost A. Les lasers fractionnés ablatifs. Nouv
aux suites plus simples), mais grande densité afin d'être effi- Dermatol 2011;30:233–47.
cace sur les bords. [5] Marqa MF, Mordon S. Laser fractional photothermolysis of the
skin:Numerical simulation of microthermal zones. J Cosm Laser
Autres cicatrices Therap 2013;1–9.
[6] Anderson  RR, Donelan  MB, Hivnor  C, et  al. Laser treatment of
Les lasers fractionnés non ablatifs ont fait la preuve de leur effi-
traumatic scars with emphasis on ablative fractional laser resur-
cacité dans le traitement de nombreux types de cicatrices, que facing. Consensus report. JAMA Dermatol 2014;150(2):187–93.
celles-ci soient postchirurgicales, traumatiques, ou encore [7] Sklar  LR, Burnett  CT, Waibel  JS, et  al. Laser assited drug delivery: a
secondaires à des brûlures. Lorsque les cicatrices sont hypertro- review of an evolving technology. Lasers Surg Med 2014;46:249–62.
phiques, nous observons une amélioration au niveau de leur [8] Helou J, Maatouk I, Moutran R, et al. Fractional laser for vitiligo
souplesse, probablement liée à l'action sur la fibrose. Plusieurs treated by 10.600 nm ablative fractional carbon dioxide laser fol-
lowed by sun exposure. Laser Surg Med 2014;46(6):443–8.
études ont montré que les résultats étaient peu différents entre
[9] Manstein D, Herron GS, Sink RK, et al. Fractional photothermoly-
lasers fractionnés ablatifs et non ablatifs. Toutefois, les suites sis:a new concept for cutaneous remodeling using microscopic
sont toujours plus simples avec les lasers non ablatifs. patterns of thermal injury. Lasers Surg Med 2004;34(5):426–38.
[10] Laubach HJ, Tannous Z, Anderson RR, Manstein D. Skin responses to
Autres indications fractional photothermolysis. Lasers Surg Med 2006;38(2):142–9.
De multiples indications ont également été proposées avec ce [11] Graber EM, Tanzi EL, Alster TS. Side effects and complications of
fractional laser photothermolysis: experience with 961 treat-
type de laser. Mais leur niveau de preuve est faible [16–18]. ments. Dermatol Surg 2008;34(3):301–5. discussion 305-7.
Les kératoses actiniques, les porokératoses et de multiples [12] Clark  CM, Silverberg  JI, Alexis  AF. A retrospective chart review to
actions kératosiques peuvent être améliorées, en particulier assess the safety of nonablative fractional laser resurfacing in
au niveau du corps où il est possible de traiter de grandes Fitzpatrick skin types IV to VI. J Drugs Dermatol 2013;12(4):428–31.
surfaces en une seule séance [19]. [13] Fisher GH, Geronemus RG. Short-term side effects of fractional
photothermolysis. Dermatol Surg 2005;31(9 Pt 2):1245–9. discus-
sion 1249.
Modalités pratiques [14] Vaiyavatjamai P, Wattanakrai P. Side effects and complications of
L'écart habituel entre chaque séance est d'environ un mois. fractional 1550-nm erbium fiber laser treatment among Asians.
J Cosmet Dermatol 2011;10(4):313–6.
La séance est précédée par l'application d'une pommade
[15] Peukert N, Bayer J, Becke D, et al. Fractional photothermolysis for
anesthésiante à base de xylocaïne, une heure et demie avant the treatment of facial wrinkles - searching for optimal treatment
la séance. L'utilisation d'une irradiance élevée est recom- parameters in a randomized study in the split-face design. J Dtsch
mandée, puisque la tolérance est la même. La densité de Dermatol Ges 2012;10(12):898–904.
traitement sera fonction du phototype ; elle sera légèrement [16] Wanner M, Tanzi EL, Alster TS. Fractional photothermolysis: treat-
diminuée en cas de peau pigmentée, afin de limiter le risque ment of facial and nonfacial cutaneous photodamage with a
­1,550-nm erbium-doped fiber laser. Dermatol Surg 2007;33(1):23–8.
d'HPI, ce qui peut être compensé par plus de séances. Après
[17] Tierney EP, Kouba DJ, Hanke CW. Review of fractional photother-
la séance, il suffit d'appliquer une crème apaisante. molysis: treatment indications and efficacy. Dermatol Surg
2009;35(10):1445–61.
Conclusion [18] Alexiades-Armenakas MR, Dover JS, Arndt KA. The spectrum of
laser skin resurfacing: nonablative, fractional, and ablative laser
resurfacing. J Am Acad Dermatol 2008;58(5):719–37.
Les lasers fractionnés ont été proposés dans le but d'éviter [19] Weiss ET, Brauer JA, Anolik R, et al. 1927-nm fractional resurfa-
les achromies, l'élément le plus négatif des lasers ablatifs. cing of facial actinic keratoses: a promising new therapeutic
L'intérêt fondamental des lasers fractionnés non ablatifs est option. J Am Acad Dermatol 2013;68(1):98–102.

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Section 6. Lasers et autres appareils

Chapitre 30
Lasers épilatoires
et autres technologies
N. Gral, Y. Perrillat

Introduction ● 1 064 nm (laser Nd-YAG) : longueur d'onde peu absor-


bée par la mélanine, et qui pénètre profondément dans
La demande d'une épilation sûre, durable et efficace est en la peau en respectant l'épiderme. C'est le laser de choix
pleine expansion. Une variété de lasers et de systèmes de pour épiler les peaux foncées. L'utilisation de fortes
lumières intenses pulsées (IPL) sont disponibles et consti- fluences permet une bonne efficacité, qui semble cepen-
tuent la meilleure option pour l'épilation à long terme. dant moindre que celle d'un laser Alexandrite ; de plus,
L'épilation photonique est actuellement la procédure esthé- les séances sont plus douloureuses.
tique la plus répandue au monde. ■ La lumière pulsée est une technique d'épilation adap-

tée uniquement aux phototypes clairs I, II et III et aux


peaux non bronzées, car le risque à l'égard de l'épi-
Définition du type de laser derme est plus important qu'avec un laser. Certains
Le mécanisme d'action de ces systèmes consiste à émettre appareils récents bénéficient d'améliorations techno-
une lumière dont la longueur d'onde va être absorbée par la logiques qui permettent de traiter des phototypes plus
mélanine (principal chromophore) du follicule pileux. La élevés.
■ Durée d'impulsion : elle est fonction du temps de relaxa-
particularité de l'épilation laser est que la cible physique ne
correspond pas parfaitement à la cible biologique. En effet, la tion thermique de la cible et du tissu traversé (l'épiderme).
mélanine se situe dans le bulbe et dans la tige pilaire, alors Pour épiler, il faut utiliser des lasers longs pulse ; les lasers
que les cibles biologiques sont les zones germinatives du poil déclenchés ne permettent pas d'épilation à long terme.
(bulge et la papille dermique). Il faut donc un transfert de On considère qu'un temps d'impulsion entre 3 ms et 40 ms
chaleur de la cible physique vers la cible biologique [1]. permet d'avoir un effet optimal tout en épargnant l'épi-
derme, mais des temps d'impulsion plus longs de 100 ms
jusqu'à 400 ms seraient efficaces, entraînant une diffusion
Paramètres progressive de la chaleur de la cible physique vers la cible
biologique.
Le choix des paramètres est fonction du phototype, du
■ Fluence  : elle doit être suffisante pour permettre un
bronzage, de la couleur de la zone à traiter, du type et de la
échauffement brutal de la cible et sa destruction.
couleur des poils et de leur densité [2].
Cependant, certains lasers délivrent des fluences basses
■ Longueur d'onde : elle doit être absorbée par la mélanine
pendant une durée longue, entraînant l'élévation progres-
du poil avec une diffusion suffisante en profondeur, sans
sive de la température [3] avec une efficacité qui serait
trop d'interaction avec les tissus avoisinants (mélanine
identique.
épidermique et hémoglobine dans le derme). La fenêtre de
■ Diamètre du spot  : un grand spot augmente la quantité
longueurs d'onde comprises entre 600 et 1 200  nano-
d'énergie apportée en profondeur et raccourcit la durée
mètres semble être un bon compromis :
des séances.
● 694 nm (laser rubis) : le risque cutané pigmentaire délé-
■ Système de refroidissement : il est capital afin de diminuer
tère étant très important, il n'est pratiquement plus
la douleur, mais surtout d'épargner l'épiderme, chargé lui
utilisé ;
aussi en mélanine, permettant d'alléger les suites et de
● 755 nm (laser Alexandrite) : longueur d'onde très absor-
réduire les complications. Il en existe différents types : air
bée par la mélanine, adaptée aux phototypes clairs de I à
pulsé, spray cryogénique, saphir réfrigéré.
III. Diminuer les fluences et rallonger les temps de pulse
permet cependant  de traiter les phototypes  IV sur les
zones non insolées ; Bilan prétraitement
● 800  nm (laser diode)  : l'absorption dans la mélanine

étant plus faible qu'à 755 nm, ce type d'appareil est plus La consultation médicale avant de commencer une épilation
adapté aux épidermes plus foncés ; laser est indispensable.
Dermatologie esthétique
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Section 6. Lasers et autres appareils
Chapitre 30. Lasers épilatoires et autres technologies

L'interrogatoire recherche une exposition solaire récente, (gros diamètre et densité importante des poils augmentant
la prise de bêta-carotène, l'usage d'autobronzants qui néces- l'effet thermique et donc la douleur). En dehors de ces cas, la
siteront une attention particulière afin d'éviter les brûlures. séance est généralement peu douloureuse et s'effectue le
En revanche, il n'y a pas de risque à faire une épilation laser plus souvent sans anesthésie (la douleur étant une limite
chez un patient traité par un médicament photosensibili- naturelle à l'utilisation d'une fluence excessive).
sant (pas d'émission dans les ultraviolets). La grossesse ne Les poils doivent être rasés la veille de la séance mais pas
contre-indique pas le traitement, mais on évite de traiter la épilés à la cire, ni à la pince (l'utilisation de crème dépilatoire et
région pubienne pour des raisons médico-légales. la décoloration externe du poil sont autorisées). Le patient ne
L'examen dermatologique : doit pas s'exposer au soleil dans le mois qui précède la séance.
■ permet de définir le phototype (I à VI), d'évaluer l'intensité

du bronzage (les patients ne sont pas toujours conscients Indications esthétiques


de s'être exposés au soleil) et la pigmentation de la
peau sur les différentes zones à épiler (elle n'est pas uni- Les indications esthétiques représentent la majorité des cas.
forme : les grandes lèvres sont souvent très pigmentées) ; Chez les hommes, l'épilation laser est le motif de consulta-
■ recherche les signes évocateurs d'un vitiligo (qui risque de tion esthétique le plus fréquent. Les zones les plus deman-
provoquer une hypopigmentation définitive après laser) ; dées sont le dos, les épaules et la poitrine. Du fait de la
■ détermine la couleur des poils (les poils clairs, peu chargés stimulation hormonale, les résultats seront souvent incom-
en mélanine ou roux, chargés en eumélanine, sont moins plets (persistance d'un vellus) et nécessiteront plus de
sensibles au laser et sont donc de mauvaises indications ; les séances. Au niveau du visage, certaines zones sont plus spé-
poils blancs devront être traités par épilation électrique) ; cifiques de la demande masculine : les oreilles, le nez et les
■ les nævus situés sur une zone à épiler devront être exami- zones malaires (fig. 30.1).
nés et protégés par l'application d'un crayon blanc. Chez les femmes, la mode est à la peau glabre : on épile de
Un bilan biologique doit être prescrit devant des signes cli- plus en plus de « maillot intégral » et des femmes de plus en
niques évocateurs d'une hyperandrogénie, et un traitement plus jeunes. Le nombre de séances va dépendre du matériel
adapté doit être institué avant de débuter l'épilation laser. utilisé, de la zone traitée et de l'âge de la patiente. En
Un traitement préventif antiherpétique peut être proposé moyenne, l'épilation laser nécessite de 6 à 8 séances espacées
avant une séance laser au niveau de la région péribuccale ou de 8 semaines au niveau du corps, parfois plus au niveau du
génitale, chez les patients ayant des poussées herpétiques visage, espacées de 4 à 6 semaines. Les aisselles, le « maillot »
fréquentes. et les jambes sont les zones où l'efficacité est la meilleure.
La prescription d'une crème anesthésiante est conseillée Certaines zones sont plus résistantes comme les genoux (os)
pour certaines zones anatomiques comme la lèvre supé- et les grandes lèvres (peau très pigmentée et poils plus fins et
rieure, la zone périnéale et les aisselles ou chez l'homme plus clairs) (fig. 30.2).

Fig. 30.1  Épilation laser du dos, de demande fréquente chez l'homme.


Aspect avant traitement (A), juste après la séance (B), avec une réaction de type pseudo-urticarienne, puis épilation durable pendant quelques mois, avant
la repousse (C), moindre, mais nécessitant une nouvelle séance.
Source : N. Gral.

Fig. 30.2  Chez la femme, la demande d'épilation de la région génitale n'est pas rare.
Source : N. Gral.

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Chapitre 30. Lasers épilatoires et autres technologies

Il est plus facile d'obtenir un bon résultat à 50  ans qu'à


20 ans car le poil devient plus fragile et donc plus sensible au
traitement laser en vieillissant. En revanche, il faut intervenir
avant que les poils deviennent blancs et ne répondent plus
aux traitements.

Indications médicales
Ces indications sont :
■ l'hirsutisme ;

■ l'hyperpilosité constitutionnelle ;

■ l'hypertrichose ;

■ les pili incarnati, les folliculites postépilatoires et les pseudo­-


Fig.  30.3  Réaction immédiate à type de pseudo-folliculite (œdème
folliculites de la barbe dont l'inflammation s'améliore sou- périfolliculaire).
vent dès les premières séances ; Celle-ci sera spontanément réversible en quelques heures.
■ les kystes sacrococcigiens : l'épilation de la zone interfes- Source : N. Gral.
sière peut permettre d'éviter la chirurgie ;
■ l'hamartome de Becker ;

■ les lambeaux intrabuccaux après chirurgie réparatrice ;

■ l'hidradénite suppurée : indication en cours d'évaluation ;

■ les patients transgenres désirant le plus souvent une épila-

tion du visage. L'épilation laser doit être associée à un traite­


ment hormonal.

Mauvaises indications
et contre-indications
Les mauvaises indications sont les poils blancs et la contre-­
indication est le vitiligo.
Fig. 30.4  Réaction épidermique anormale après une séance.
Suites La peau était légèrement bronzée. Cette hyperpigmentation immédiate s'élimine
généralement avec le renouvellement de l'épiderme, éventuellement en pelant. Si
la réaction est très forte, elle peut être suivie d'une forte inflammation ; source
Dans les minutes qui suivent le traitement, le patient ressent d'hyperpigmentation post-inflammatoire ou, à l'inverse, d'une hypochromie.
une sensation de chaleur, puis apparaissent un érythème et Source : N. Gral.
un œdème périfolliculaire (end point). L'érythème disparaît
progressivement en quelques heures mais peut persister daptée au phototype, fluence excessive, temps d'impulsion
jusqu'à 24 à 48 heures. À la fin de la séance, il faut appliquer trop court), en cas de défaut du système de refroidissement ou
une crème émolliente, à faire renouveler par le patient pen- si le patient n'a pas respecté les consignes de protection solaire
dant une semaine. avant la séance (voir fig. 30.4 et 30.5). Il s'agit dans la plupart des
cas de brûlures du second degré superficiel (régénération de la
peau ad integrum en l'absence de surinfection) et donc sans
Effets secondaires et risques gravité. Elles peuvent parfois être prévisibles en fin de séance, si
l'on constate que l'érythème devient important, ou si le patient
Les croûtes sont les effets indésirables les plus fréquents ; décrit une douleur inhabituelle. Il faut alors appliquer du froid
elles disparaissent en une dizaine de jours, mais peuvent être (douche froide si possible), prévenir le patient qu'il doit contac-
suivies d'hyperpigmentation ou d'hypopigmentation persis- ter le cabinet pour une prise en charge dermatologique rapide
tant quelques mois. Les hypopigmentations peuvent être s'il voit apparaître des phlyctènes et ou des croûtes. La prescrip-
définitives si le patient présente un vitiligo. Le risque de tion de crèmes cicatrisantes, de dermocorticoïdes voire de
croûtes est plus ou moins important selon le phototype. pansements hydrocolloïdes sera adaptée à l'importance et
Pour les phototypes  I et II, il est de 2  % avec les lasers l'étendue des lésions ; elle est indispensable pour diminuer le
Alexandrite et Nd-YAG. Pour les phototypes IV à VI, il est de temps de cicatrisation et éviter les complications à type de
5 % avec un laser Nd-YAG [4] (fig. 30.3 à 30.5). cicatrices atrophiques.
Ces effets indésirables sont liés à une trop grande absorption Après épilation d'une zone à forte densité pilaire, on peut
d'énergie au niveau de l'épiderme. Ils peuvent survenir lors de voir apparaître une folliculite acnéiforme, qui peut être pré-
l'utilisation de paramètres inadéquats (longueur d'onde ina- venue par un traitement partiel répété. Les effets indésirables

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Section 6. Lasers et autres appareils
Chapitre 30. Lasers épilatoires et autres technologies

La repousse paradoxale, transformation de duvets en poils


de plus gros diamètre sur ou en périphérie d'une zone préa-
lablement traitée par laser épilatoire, survient principale-
ment au niveau de la région postérieure des joues, du
menton et du cou chez la femme, et plus rarement au niveau
du dos chez l'homme. Elle est plus fréquente dans les popu-
lations méditerranéennes ou de phototype foncé que dans
la population caucasienne. L'association avec une hyperan-
drogénie augmente son incidence. Cette stimulation appa-
raît principalement après un certain nombre de séances
(cinq en moyenne). Il est difficile de retenir une cause précise
(faibles doses d'énergies diffusées en périphérie de la zone
traitée ou fluences trop élevées qui généreraient une pilosité
post-inflammatoire ?). La repousse paradoxale se voit avec
les différents lasers épilatoires et les lumières pulsées, mais
serait moins fréquente avec le laser Nd-YAG. Afin de la pré-
venir, il est conseillé de refroidir largement la zone avec des
packs froids pendant les séances et, pour la traiter, de rap-
procher les séances et de changer de laser pour un laser
diode ou Nd-YAG [8].
Les croûtes peuvent être évitées par l'interdiction des
expositions solaires les semaines qui précèdent les séances, la
vérification du système de refroidissement en début de
séance et le choix des bons paramètres.

Conclusion
L'épilation photonique est devenue une procédure banale,
car elle est efficace avec des effets secondaires rares et la plu-
Fig. 30.5  Dans ce cas, un mauvais paramétrage sur cette peau légère-
ment pigmentée a conduit à une hypochromie reproduisant les impacts. part du temps bénins, à condition d'utiliser du matériel adé-
Heureusement, contrairement aux achromies, les hyperchromies se quat et de qualité, avec des paramètres optimisés pour
réparent spontanément en quelques mois. chaque patient et adaptés à chaque séance, et de savoir gérer
Source : N. Gral.
les suites éventuelles. Pour cela, le médecin doit avoir une
très bonne connaissance à la fois de la technologie laser et de
vasculaires (urticaire, vascularite urticarienne, érythème l'organe peau.
réticulé et hématomes) sont généralement peu sévères, en
dehors d'un cas de thrombophlébite superficielle dans la Références
région sous-mentonnière rapporté avec un laser  Nd-YAG. [1] Les lasers en dermatologie. 4e éd Paris : Doin ; 2017.
L'épilation laser réduit habituellement la sudation dans la [2] Gan SD, Graber EM. Laser hair removal: a review. Dermatol Surg
zone traitée, mais des cas d'hypersudation paradoxale et de 2013 ;39(6):823–38.
bromhidrose ont été décrits [5], guérissant spontanément [3] Braun M. Comparison of high-fluence, single-pass diode laser to
low-fluence, multiple-pass diode laser for laser hair reduction with
en général.
18 months of follow up. J Drugs Dermatol 2011 ;10(1):62–5.
Un syndrome de Fox-Fordyce peut apparaître au niveau [4] Lanigan SW. Incidence of side effects after laser hair removal. J Am
des aisselles. Acad Dermatol 2003 ;49:882–6.
Les complications oculaires ne surviennent que lors d'épi- [5] Helou  J, Habre  M, Soutou  B, et  al. Reversibility of hyperhidrosis
lation de la partie basse du sourcil [6] qui est à proscrire for- post axillary depilatory laser. Lasers Med Sci 2014 ;29(2):717–21.
mellement. Il s'agit d'uvéite, d'atrophie irienne, de synéchie [6] Anaya-Alaminos R, Muñoz-Ávila JI, González-Gallardo MC, et al.
Accidental foveal photocoagulation secondary to alexandrite
postérieure et de cataracte. Le port de coques de protection
laser. Eur J Ophthalmol 2014 ;24(5):808–10.
externe est nécessaire lors de toute épilation du visage. [7] Sillard  L, Mantoux  F, Larrouy  JC, et  al. Dermoscopic changes of
L'apparition d'une leucotrichie est possible chez des patients melanocytic nevi after laser hair removal. Eur J Dermatol
âgés. 2013 ;23(1):121–3.
Bien qu'aucun cas de mélanome après laser épilatoire n'ait [8] Desai S, Mahmoud BH, Bhatia AC, Hamzavi IH. Paradoxical hyper-
été publié, la modification de l'aspect dermoscopique et his- trichosis after laser therapy: a review. Dermatol Surg
2010 ;36(3):291–8.
tologique de nævus est avérée et doit inciter à la prudence [7].

226
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TECHNIQUES Partie 2
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Section 6. Lasers et autres appareils

Chapitre 31
Appareils à usage domestique
(home use devices [HUD])
G. Toubel

Introduction dant plusieurs mois, puis une à deux fois par mois en
entretien. Des études [2] ont montré leur efficacité et leur
Il existe aujourd'hui des appareils à base d'énergie à usage sécurité, mais le succès commercial ne semble pas au ren-
domestique, proposés dans de nombreux domaines  : dez-vous, sans doute à cause des effets secondaires ren-
repousse pilaire, nettoyage de la peau, épilation, rajeunisse- contrés (douleur, érythème tenace) qui ne sont pas
ment, blanchiment dentaire, acné active, psoriasis, vitiligo et appréciés par les consommateurs.
même un appareil chinois émettant des ultrasons focalisés à ■ Un nouvel appareil produisant un massage de la peau par

haute énergie pour la tension sous-cutanée. des oscillations à fréquence variable [3] pourrait entraîner
Il faut noter que le nettoyage cutané à l'aide d'une brosse une réaction anti-âge in vivo et in vitro ; à suivre… Un autre
rotative et l'épilation avec de la lumière (laser et IPL) sont les reproduit la technique du « palpé roulé » bien connu pour
demandes les plus populaires, représentant environ 60 % du améliorer la cellulite, mais ici en petit format pour le visage.
marché de ces home use devices (HUD). Ce marché est sur- ■ De nombreux HUD à base de LED de différentes longueurs

tout représenté par les États-Unis (37  %) et l'Asie (36  %) ; d'onde plus ou moins associées à de l'infrarouge existent
l'Europe ne pèse que 19 %. également sur le marché, et mettent en avant les résultats
De nouvelles normes légales ont été publiées en juin 2015 : obtenus avec les mêmes LED utilisées par des médecins.
ILC 60335-2-113 FDIS. Ce sont les premiers standards dédiés Certains se demandent si ces LED professionnelles n'ap-
aux industriels visant ce marché et ils devaient être confir- partiennent pas au domaine du placébo, quand on
més plus tard et adaptés à partir de février 2016. Les pro- constate la faible énergie délivrée par ces HUD.
blèmes actuels liés aux usages des pointeurs laser sur un ■ On trouve aussi des HUD pour le remodelage corporel

mode malveillant ont freiné ces publications. (circonférence abdominale, cellulite, laxité cutanée, etc.),
mais leur action semble très limitée.
Photorajeunissement Au total, peu de systèmes ont fait l'objet d'évaluations cli-
niques avec des publications dans des revues à comité de
Concernant le photorajeunissement, on trouve sur le mar- lecture, et ayant un bon impact factor. Souvent, dans ces
ché de nombreux appareils à usage domestique qui essaient mêmes publications, les résultats ne retrouvent pas les
de copier les machines utilisées par les médecins dans leurs caractéristiques techniques décrites dans les brochures de
cabinets médicaux. L'argument commercial met en avant ces systèmes.
des longueurs d'onde efficaces sur une cible (eau, mélanine, On commence à trouver des publications sérieuses et cri-
vaisseau sanguin, fibres de collagène, etc.), une facilité d'em- tiques [2, 4] sur ce sujet, avec des auteurs reconnus dans des
ploi et un prix très abordable. revues très respectables. Ce sont souvent des méta-analyses
■ Le nettoyage du visage avec une brosse sonique suivi d'ap- qui ont l'avantage de passer en revue toutes les indications
plication d'une crème de jour ou de nuit améliore l'éclat proposées par ces HUD. On doit donc s'informer afin de déli-
de la peau avec un grain de peau affiné et un teint unifié. vrer un message honnête à nos patients qui s'interrogent vis-
Cette brosse sonique éliminerait beaucoup plus de parti- à-vis de ces techniques, et qui pourraient avoir des attentes
cules polluantes que le nettoyage à la main [1]. On trouve irréalistes.
au moins deux HUD israéliens à base de radiofréquence, La situation réglementaire de ces systèmes reste encore
dont un qui est fractionné, mais avec des puissances bien confuse, mais on espère que cela va évoluer, surtout depuis
faibles. que des grandes marques s'intéressent à ce marché, et que le
■ Les traitements par lasers fractionnés non ablatifs prati- grand public va être plus sensibilisé vis-à-vis de leur efficacité.
qués par des médecins sont efficaces et sûrs ; aussi, on a vu Si l'on est un peu curieux, il faut se rendre sur les forums de
arriver des HUD fondés sur cette technique à diode consommateurs où sont rapportées les déconvenues des
(1 440 nm et 1 550 nm). Ici, on l'utilise tous les jours pen- utilisateurs avec, aussi, des problèmes d'effets secondaires.

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Chapitre 31. Appareils à usage domestique (home use devices [HUD])

Conclusion Références
[1] Peterson G, Rapaka S, Koski N, et al. A robust sebum, oil, and par-
Beaucoup d'appareils n'ont pas les caractéristiques décrites ticulate pollution model for assessing cleansing efficacy on human
dans les brochures commerciales et ils n'ont qu'un marquage skin. Int J Cosmet Sci 2017;39:351–4.
CE électrique. [2] Leyden J, Stephens TJ, Herndon JH. Multicenter clinical trial of a
home-use nonablative fractional laser device for wrinckle reduc-
L'apparition des grandes marques va sensibiliser le grand tion. J Am Acad Dermatol 2012;67:975–84.
public vis-à-vis de ces systèmes, et cela ne devrait pas freiner [3] Caberlotto  E, Ruiz  L, Miller  Z, et  al. Effects of a skin-massaging
la demande de traitements professionnels, bien au contraire. device on the ex-vivo expression of human dermis protrins and
Les appareils à usage domestique mettent surtout en in-vivo facial wrinckles. Plos One 2017;12. e0172624.
avant leur sécurité d'emploi [3] souvent au détriment de [4] Hession MT, Markova A, Graber EM. A review of hand-held, home-
leur efficacité. De toute façon, lorsqu'on veut améliorer une use cosmetic laser and light devices. Dermatol Surg 2015;41(3):
307–20.
héliodermie, il faut à la fois désépidermiser sans risques la [5] Juhasz MLW, Levin MK, Marmur ES. A review of available laser and
peau, pour éliminer les imperfections superficielles, et chauf- intense light source home devices: A dermatologist's perpective.
fer le derme suffisamment pour provoquer une néocollage- J Cosmet Dermatol 2017;16(4):438–43.
nèse significative. Cela reste difficile à réaliser pour ces HUD, [6] Town G, Ash C. Are home-use intense pulsed light (IPL) devices
puisqu'il faut d'abord éviter les effets secondaires, afin de safe? Lasers Med Sci 2010;25(6):773–80.
rester disponible vis-à-vis du grand public.

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TECHNIQUES Partie 2
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Section 6. Lasers et autres appareils

Chapitre 32
Radiofréquences
S. Dahan, M. Naouri

Introduction Les RF peuvent être utilisées en externe et en mode frac-


tionné avec ou sans micro-aiguilles.
La remise en tension cutanée par des technologies non inva-
sives est en demande croissante. Elle peut être obtenue par
des radiofréquences (RF), ultrasons, lasers infrarouges, YAG Radiofréquences externes
1 064 nm long pulses, et vasculaires/pigmentaires dans une
moindre mesure.
Les RF sont des ondes électromagnétiques, invisibles à l'œil
Indications
humain avec un spectre compris entre 0,3 MHz et 100 MHz. L'intérêt majeur des RF est la recherche d'un remodelage
dermique avec une amélioration de la tonicité, de la qualité,
de l'éclat, de la texture, sur tous types de peaux, toutes zones,
Mode d'action avec éviction sociale minime. Les RF peuvent être proposées
de la radiofréquence chez des patients ne désirant pas d'injections ou en complé-
ment, dès les premiers signes de vieillissement cutané, en
Les ondes électromagnétiques sont générées par un courant « prévention », en association avec les autres techniques de
électrique aux caractéristiques précises, transmis aux tissus, dermatologie esthétique tant au niveau du visage que de
se transformant en chaleur grâce à la résistance tissulaire l'ensemble du corps.
(fig. 32.1). Plus le tissu est riche en eau, plus la conduction est
bonne (impédance basse) et chauffe de façon optimale.
Pour obtenir un effet maximal et donc un bon remodelage, Contre-indications
il faut maintenir une température externe de 40 à 42 °C (qui La contre-indication majeure est représentée par les disposi-
serait équivalente à une température interne de 60 à 65 °C) tifs électroniques implantés  : pace-maker, défibrillateurs,
pour produire un effet de dénaturation du collagène [1, 2]. pompes à insuline, etc. D'autres sont à discuter au cas par

Le spectre électromagnétique

Longueur d'onde (métres)

Radio Micro-onde Infrarouge Visible Ultraviolet Rayon X Rayon γ

103 10–2 10–5 10–6 10–8 10–10 10–12

Fréquence (Hz)

104 108 1012 1015 1016 1018 1020

Fig. 32.1  Place des radiofréquences, en termes de longueur d'ondes, comparées aux sources d'énergie.

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Section 6. Lasers et autres appareils
Chapitre 32. Radiofréquences

cas  : maladies dermatologiques ou auto-immunes évolu- Radiofréquences monopolaires [5]


tives, grossesse, etc. L'avantage essentiel des RF monopolaires est de prati-
quer classiquement une seule séance. Elles ont pour
Mode d'emploi, avantages, inconvénients inconvénients un traitement long à réaliser, douloureux,
Les RF peuvent être mono-, bi- ou multipolaires. des résultats non comparables à ceux de la chirurgie
Lorsque la RF est monopolaire, l'énergie est délivrée sur une pour une technique onéreuse, surtout si les résultats
électrode positive ; l'électrode négative est placée sur une autre sont modérés, avec apparition progressive des résultats
zone. Lorsque la RF est bi-/tri-/multipolaires, le courant passe jusqu'à 1 an.
entre les deux électrodes ou plus sur l'applicateur (fig. 32.2).
Radiofréquences bi-, tri-, multipolaires [5, 6]
Sélection des patients et mode de traitement [3, 4] Il existe de nombreuses RF bi-, multipolaires avec leurs spéci-
Les meilleures indications sont les patients avec ptose peu ficités propres, parfois associées à du laser ou de l'aspiration.
intense ou relâchement cutané modéré. Cela rend difficile de proposer une uniformisation des para-
On traitera zone par zone, en faisant observer au patient la mètres à utiliser.
contraction immédiate. Ainsi, au niveau du visage, on traite Du gel échographique est souvent nécessaire pour
l'hémivisage, puis l'autre. assurer la conduction. Le traitement est long à réaliser  :
On observe une contraction immédiate des fibres de col- 10  passages sont en moyenne nécessaires sur la même
lagène par la chaleur et un œdème discret donnant un effet zone pour obtenir un résultat. Cela nécessite une bonne
« bonne mine » après la séance de RF (fig. 32.3) mais il faut pratique du médecin. Il faudra proposer un protocole de
patienter 3 à 6 mois voire 1 an pour obtenir un remodelage traitement continu et régulier, en moyenne de 6 à
dermique sur un protocole de 6 séances à 1 mois d'intervalle 8  séances espacées de 8 à 15  jours en traitement initial,
par synthèse d'un néocollagène aboutissant à une meilleure puis entretien conseillé selon les résultats, tous les 3 à
tonicité et une meilleure qualité de la peau. 4 mois.

A B C
Fig. 32.2  A. Radiofréquence (RF) monopolaire. B. RF bipolaire. C. RF multipolaires.

A B
Fig. 32.3  Radiofréquences externes, effet bonne mine.
A. Avant. B. Après la séance.
Source : S. Dahan.

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Section 6. Lasers et autres appareils
Chapitre 32. Radiofréquences

A B
Fig. 32.4  Radiofréquence externe pratiquée sur l'ovale et le cou, avant (A) et après (B) traitement par radiofréquence.
Source : H. Cartier.

Ici aussi, le remodelage peut être modéré, mais les séances De nombreuses industries ont développé ces technolo-
multiples permettent de suivre et d'apprécier avec le patient gies. Les applicateurs présentent des embouts stériles, chan-
les améliorations de la tonicité de la peau. Il est utile de gés à chaque patient, avec un nombre d'impacts variable
suivre le patient sur 12 mois. selon la technologie employée, une ablation/coagulation
plus diffuse en profondeur et un remodelage induit par la RF
Les bonnes indications en périphérie de la zone traitée.
■ Visage (fig.  32.4) remodelage de l'ovale du visage, cou,
décolleté péri-orbitaire. On observe une amélioration du
volume et de la tonicité sur les joues. L'association avec
d'autres techniques lasers ou esthétique est utile.
■ Corps  : essentiellement patientes avec un relâchement

cutané modéré, au niveau de l'abdomen (après abdomi-


noplasties, accouchements, etc.)  ; cellulite avec peau
d'orange, même fibreuses pour tenter de les améliorer
avant d'autres traitements, vergetures. Il est possible
d'étendre ces indications à la silhouette, certaines études
ayant montré une diminution de circonférence des zones
adipeuses (abdomen, cuisses, etc.).
■ Au niveau de l'intime, chez la femme : voir chapitre 42.

Radiofréquences Fig. 32.5  Différentes radiofréquences fractionnées, multipolaires ou par


micro-aiguilles, chaque aiguille se comportant comme une électrode.
fractionnées [7, 8]
La RF peut être fractionnée en multipliant les électrodes, Indications, résultats
avec ou sans micro-aiguilles, de façon à chercher un effet de Les indications sont communes aux techniques fraction-
remodelage maximal (fig. 32.5). nées : vieillissement cutané (texture, teint, tonicité) et cica-
trices d'acné, vergetures, voire mélasma, améliorations de
Mode d'action, description des techniques l'acné active (fig. 32.6).
La RF bipolaire fractionnée en multipliant les électrodes aug- Les avantages de la RF fractionnée sont :
mente les énergies délivrées sur des impacts fins et profonds ■ les impacts plus fins et profonds, avec des suites postopé-

et induit un effet fractionné non ablatif ou ablatif, selon l'in- ratoires de moindre intensité et durant moins de temps
tensité, lorsque la barrière épidermique est rompue. (2 à 3 jours le plus souvent) ;
Ainsi, la RF est fractionnée, avec des impacts fins de ■ l'apport de la chaleur induite par la RF, qui entraîne un

300  microns de diamètre séparés par des espaces de peau remodelage en périphérie de la zone traitée ;
saine, et des profondeurs variables de 400 à 2 400 microns ■ le traitement possible de tous les phototypes, y compris

selon la technologie. de types IV et V ;

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Section 6. Lasers et autres appareils
Chapitre 32. Radiofréquences

Fig. 32.6  Radiofréquence fractionnée.


A. Avant. B. Après un traitement.
Source : S. Dahan.

■ la rapidité de la séance de traitement, avec anesthésie de


contact, la peau étant nettoyée avec de l'alcool puis
séchée.
Selon les patients et l'intensité des lésions, il faut prévoir 3
à 5 séances espacées de 1 mois. Il faut être prudent et utiliser
des intensités plus faibles et/ou un traitement non ablatif sur
les zones fragiles : cou, décolleté, péri-orbitaire.
Comme pour tout traitement fractionné avec remode-
lage, les résultats sont à observer après 3 à 6 à 9 mois.

Radiofréquences
avec micro-aiguilles
A
Mode d'action
La RF peut être appliquée directement au niveau du derme
à l'aide d'aiguilles très fines qui vont pénétrer la peau avec
un courant électrique associé délivrant des ondes de RF
(fig. 32.7).
Les aiguilles peuvent être isolées, avec un effet de chauffe
seulement à la pointe de l'aiguille ou non isolées, effet de
chauffe tout le long de l'aiguille.
L'effet thermique peut être porté jusqu'à 5 mm de profon-
deur selon la taille de l'aiguille, l'épiderme étant préservé,
d'où des suites postopératoires moindres et un effet de
« chauffe » maximal du derme.

Indications et résultats [9–15] B


Les indications sont les cicatrices d'acné atrophiques Fig. 32.7  Deux embouts de radiofréquences avec micro-aiguilles.
(fig.  32.8), le photovieillissement (ridules, texture, toni-
cité), l'amélioration de l'ovale, l'acné, l'hyperhidrose axil-
laire, la délivrance transcutanée de molécules. C'est pour Traitements combinés [15–17]
le traitement des cicatrices d'acné, même de type pic de
glace, que cette technologie semble avoir le plus De façon à optimiser les résultats, on pourra combiner – dans
d'intérêt. la même séance ou lors de séances différentes – la RF pour un
Ces traitements peuvent être proposés sur tous types remodelage dermique, une meilleure tonicité ; la RF fraction-
de peaux, même foncées, surtout si les aiguilles sont née ou à micro-aiguilles pour un traitement de la texture avec
isolées, avec un risque moindre de pigmentations des lampes ou lasers pour traiter les lésions épidermiques, le
post-inflammatoires. teint (fig. 32.9).

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Section 6. Lasers et autres appareils
Chapitre 32. Radiofréquences

Fig. 32.8  Radiofréquence avec micro-aiguilles, traitement de cicatrices atrophiques d'acné.


Source : M. Naouri.

Fig. 32.9  Combinaison dans la même séance de traitement par lampe + radiofréquence + radiofréquence fractionné ablatif (RFF).
Amélioration des stigmates de l'héliodermie (coloration, tonicité, texture, contour de l'ovale).
Source : S. Dahan.

Références improvement:a preliminary study. J Clin Aesthet Dermatol


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Section 6. Lasers et autres appareils

Chapitre 33
Ultrasons focalisés
B. Pusel

Introduction Indications électives


Les ultrasons focalisés ou HIFU (high intensity focused
ultrasounds) sont une technologie utilisée en dermato- Au niveau du visage,
logie esthétique, dans un objectif de remise en tension du cou et du décolleté
cutanée au niveau du visage, du cou et du décolleté, et
La technique est indiquée chez des patients avec un relâche-
aussi au niveau du corps pour la prise en charge des
ment cutané modéré du visage, du cou, en particulier de l'ovale
excès graisseux localisés et du relâchement cutané dans
du visage, et au niveau des paupières, avec l'objectif d'un « effet
certaines localisations, en particulier au niveau de
liftant » médical, sans chirurgie et sans période d'éviction sociale.
l'abdomen.
Dans une étude rétrospective, Fabi et Goldman [2]
démontrent une efficacité avec amélioration de la Global
Aesthetic Improvement Scale (GAIS) chez 77,7 % des patients,
Mode d'action et un résultat persistant 6 mois chez 67 % des patients après
une seule séance (fig. 33.1).
Les ultrasons focalisés sont émis par un transducteur : un D'autres études arrivent aux mêmes conclusions, avec éga-
courant alternatif passe à travers un dispositif dit piézoé- lement la démonstration de l'excellente tolérance associée, y
lectrique à base de céramique. Il en résulte l'émission compris sur les peaux asiatiques [3, 4].
d'une onde acoustique à travers les tissus, qui est concen- L'efficacité de la technique est également démontrée au
trée en un point focal où est délivrée, dans un temps de niveau des rides du décolleté [5], et de façon anecdotique il
l'ordre de la milliseconde, une émission de chaleur existe une possible amélioration de siliconomes au niveau
démontrée supérieure à 65 °C. L'effet de focalisation cor- des lèvres [6].
respond à une concentration des ultrasons en un point D'autres indications sont en cours d'évaluation comme la
précis, dit point focal, comparable à l'effet thermique que réduction des poches malaires, ou l'acné.
l'on peut obtenir avec une simple loupe et les infrarouges
de l'émission solaire. Cette élévation de température per- Au niveau du corps
met, au niveau du derme, de dénaturer le collagène, ou de
provoquer une nécrose cellulaire, s'il est situé sur les cel- Le traitement avec les ultrasons s'adresse aux excès graisseux
lules graisseuses de l'hypoderme. localisés, d'autant plus s'il existe en même temps un relâche-
Au niveau histologique, il se produit rapidement une réac- ment cutané. Les localisations préférentielles sont l'abdo-
tion inflammatoire suivie d'une néocollagenèse secondaire men et les flancs, voire la face interne des cuisses et des
expliquant le constat clinique de remise en tension cutanée [1]. genoux, et la face postérieure des bras.
La technique n'est pas intrinsèquement sélective, mais Les modalités pratiques et résultats seront développés
celle-ci est obtenue de façon indirecte pour atteindre la dans les chapitres correspondants.
cible choisie, par une mise à disposition d'une « palette »
de sondes ou cartouches de profondeur variable allant de Bilan prétraitement
1,5 à 13 mm, dépendant de la fréquence de l'onde acous-
tique. Il n'y a pas d'absorption des ultrasons par la méla- Une consultation initiale est systématique pour délivrer l'in-
nine :le traitement peut être réalisé sur tous les types de formation éclairée au patient et réaliser des clichés photo-
peau. graphiques.

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Section 6. Lasers et autres appareils
Chapitre 33. Ultrasons focalisés

A B C

D E F
Fig. 33.1  Traitement par HIFU (high intensity focused ultrasounds), avant (A–C) et 3 mois après une séance (D–F).
Source : B. Pusel.

Contre-indications fondeur focale  :1,5  mm au niveau du derme superficiel,


3,0  mm pour le derme moyen et l'hypoderme facial, et
Les contre-indications se résument à l'existence d'une der- 4,5  mm dans l'hypoderme, éventuellement au contact du
matose évolutive au niveau des zones à traiter. Il est impor- SMAS (superficial musculo-aponeurotic system).
tant également de déceler des attentes irréalistes des Chaque tir est constitué par une ligne de longueur variable
patients. selon les appareils (en moyenne 2,5 cm) avec une succession
de points de focalisation ou ITZ, espacés de 0,5 à 1,5  mm
selon le degré de densité souhaité.
Choix des paramètres Le traitement comporte un nombre de lignes préconisé
pour le visage, le cou et le décolleté par l'industriel, en déplaçant la cartouche de proche en
proche, après application d'une couche de gel échogra-
L'Ulthera™ (Merz Inc.) a été le premier appareil commercia-
phique, et en respectant les zones à risque, essentiellement
lisé avec la démonstration de son efficacité par différentes
au regard des émergences nerveuses et de la thyroïde.
études cliniques qui ont permis l'obtention de l'agrément de
Un traitement du visage et du cou nécessite un minimum
la Food and Drug Administration (FDA) pour le lifting de la
de 400 à 800 lignes selon le profil du patient et l'intensité du
paupière supérieure, du visage et du cou.
relâchement cutané.
Depuis, de nombreux appareils ont été mis sur le marché,
Une seule séance est suffisante en général, et il est possible
en provenance pour la plupart du continent asiatique. On
de répéter le traitement tous les 2 ans en moyenne.
peut regretter que peu d'entre eux aient donné lieu à des
publications dans des revues indexées, et il faut garder à
l'esprit la nécessité du marquage CE médical pour les
utiliser.
Suites opératoires
Quels que soient les appareils, le principe du traitement au Dans la majorité des cas, les suites opératoires se résument à
niveau du visage est identique et s'effectue avec des « car- un érythème, parfois accompagné d'œdème dans les zones
touches » permettant de sélectionner trois niveaux de pro- de peau fine, pendant quelques heures, de dysesthésies pen-

236
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TECHNIQUES Partie 2
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Section 6. Lasers et autres appareils
Chapitre 33. Ultrasons focalisés

dant quelques jours, essentiellement au niveau des zones séance, ce qui correspond aux comportements d'une patien-
mandibulaires et autres massifs osseux. tèle de plus en plus nomade aujourd'hui.
Références
Effets secondaires [1] Laubach HJ, Makin IR, Barthe PG, et al. Intense focused ultrasoun-
d:evaluation of a new treatment modality for precise microcoa-
Des ecchymoses sont retrouvées dans 6 % des cas. gulation within the skin. Dermatol Surg 2008;34:727–34.
Récemment, a été rapportée la possibilité de striations [2] Fabi SG, Goldman MP. Retrospective evaluation of micro-focused
ultrasound for lifting and tightening the face and neck. Dermatol
linéaires urticariennes, toujours réversibles, et un cas d'ulcéra-
Surg 2014;40(5):569–75.
tion de la zone sous-mandibulaire, avec atrophie résiduelle [7]. [3] Baumann L, Zelickson B. Evaluation of micro-focused ultrasound
for lifting and tightening neck laxity. J Drugs Dermatol
2016;15(5):607–14.
Conclusion [4] Chan  NP, Shek  SY, Yu  CS, et  al. Safety study of transcutaneous
focused ultrasound for non invasive skin-thightenning in Asians.
Les ultrasons peuvent s'effectuer sur tous les types de peaux Laser Surg Med 2011;43:366–75.
et à n'importe quelle période de l'année, car il n'y a pas de [5] Fabi SG, Goldman MP, Dayan SH, et al. A prospective multicenter
compétition entre la mélanine et les ondes acoustiques. Ils pilot study of the safety and efficacy of microfocused ultrasound
constituent une alternative sérieuse en cas de refus de la with visualization for improving lines and wrinkles of the décol-
chirurgie, dans le cadre de l'indication ou de la prévention leté. Dermatol Surg 2015;41(3):327–35.
[6] Kornstein AN. Ulthera for silicone lip correction. Plasr Reconsruc
d'un lifting cervicofacial, ou dans les années suivantes, dans Surg 2012;129:1014e–5e.
l'objectif du maintien du résultat obtenu. [7] Friedmann DP, Bourgeois GP, Chan HL, et al. Complications from
L'intérêt repose également dans ses modalités pratiques, micro-focused transcutaneous ultrasound:case series and review
sans éviction sociale, avec un effet attendu après une seule of literature. Laser in Surg 2018;50:13–9.

237
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TECHNIQUES Partie 2
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Section 6. Lasers et autres appareils

Chapitre 34
Photothérapie dynamique
esthétique
A. Le Pillouer-Prost, H. Cartier

Introduction ■ Les lumières pulsées sont fréquemment utilisées et


semblent donner des résultats aussi intéressants que les
Le principe de la photoréjuvénation ou photorajeunisse- LED, avec moins de douleurs.
ment photodynamique (PR-PDT) a vu le jour dans les années ■ L'utilisation de la lumière du jour, après seulement 30, et

2000 sous deux angles. D'une part, les cancérologues utili- maintenant plutôt 60  minutes d'incubation, et pour
sant la photothérapie dynamique (PDT) topique pour des 2 heures en continu, est devenue depuis quelques années
cancers superficiels étendus ont observé en post-acte un le concurrent de ces sources lumineuses « traditionnelles ».
relissage des zones traitées ; d'autre part, les dermatologues Quasi indolore, elle semble aussi efficace pour les champs
utilisant des lumières pulsées de réjuvénation, en appliquant de kératoses actiniques de grade I selon les données scien-
au préalable du 5-ALA, ont remarqué une bien plus grande tifiques actuelles [5]. Elle se prête bien à l'indication de
efficacité (fig.  34.1) [1]. L'idée a ensuite été reprise par de PR-PDT pour le visage entier, ou pour de vastes zones
nombreux praticiens et s'est étendue à l'utilisation du MAL extrafaciales comme le décolleté, les membres, la région
(aminolévulinate de méthyle) et d'autres sources lumineuses des épaules, etc.
avec des protocoles et des résultats variables, analysés uni- ■ Certains auteurs combinent l'utilisation de plusieurs

quement sur de petites séries. Depuis 2008, le niveau de sources lumineuses ; par exemple un double passage en
preuves des études s'est nettement amélioré, permettant à lumière pulsé puis, pour finir de consommer la protopo-
Morton et  al., dans une revue générale, de conférer à la rhyrine IX (PpIX), une illumination par LED rouge, ou une
PR-PDT dès 2013 un grade de recommandation A avec un exposition à la lumière du jour.
niveau de preuve I [2]. D'autres revues générales ont confirmé ■ La PR-PDT intensifiée par microporation préalable du

depuis l'intérêt de cette technique [3, 4]. stratum corneum est bien connue en PDT médicale, et
elle peut tout à fait être appliquée en photoréjuvéna-
Données actuelles tion ; mais attention : les suites opératoires sont nette-
ment majorées. Il est presque impossible de proposer
■ Le laser à colorant pulsé est rarement proposé pour les une PDT intensifiée avec LED rouge conventionnelle sur
grandes zones, pour des problèmes évidents de coût, de de vastes champs de cancérisation à visée esthétique ou
nombre de passages, de durée traitement. préventive, car les douleurs seront intolérables. En
■ Les protocoles conventionnels avec LED rouges et 3 heures revanche, en utilisant soit une lumière pulsée, soit la
d'incubation sont efficaces, mais s'accompagnent de fortes lumière du jour, on arrive à des protocoles quasi par-
douleurs pour traiter de vastes champs en réjuvénation. faits en termes de rapports bénéfices/effets secon-
On peut réduire les temps d'incubation, mais au détriment daires, et personnalisables selon les patients et les zones
de l'efficacité. Une étude a comparé LED bleues et rouges à traiter. Dans la dernière publication concernant des
en PDT et n'a pas montré de différence d'efficacité. patients traités par « lumière du jour PDT intensifiée

A B C
Fig. 34.1  A. Patiente de 51 ans, phototype clair, lentigos du dos des mains. B. Effet Q-switched-like à J8 après une séance de MAL 90 minutes et IPL.
C. Aspect à J21. Excellent résultat. Persistance d'un léger érythème.
Source : A. Le Pillouer-Prost.

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Chapitre 34. Photothérapie dynamique esthétique

par laser fractionné ablatif ­préalable », la cosmétique dermiques et les interactions épithélio-­mésenchymateuses
­globale, les troubles pigmentaires et la texture cutanée à l'origine du remodelage observé : augmentation du colla-
ont été améliorés de façon statistiquement significative gène, réduction des marqueurs d'élastose et de vieillisse-
[6]. ment, et augmentation des marqueurs de restauration
■ Le choix de la méthode d'intensification est fonction du dermique et épidermique (Ki67, CK16, p53, procoll  I
matériel à disposition  : micro-roller, microdermabrasion, ARNm, procoll III ARNm, etc.) [8].
laser ablatif fractionné CO2 ou Erbium à faibles paramètres
(8 mJ/MTZ et 5 % de densité pour le CO2) sont les tech-
niques les plus utilisées. Des études récentes de l'Université
de Copenhague ont montré que les lasers ablatifs fraction-
nés notamment CO2, étaient les plus efficaces, la zone de
dommage thermique faisant office de réservoir. Ils per-
mettent ainsi une nette augmentation de la pénétration et
de la biodisponibilité du photosensibilisant [7].
■ Le seul photosensibilisant commercialisé en France utili-

sable hors autorisation de mise sur le marché (AMM) en


réjuvénation est le Metvixia® (Galderma).
■ Les résultats cosmétiques sont excellents et reproduc-

tibles : après 8 à 15 jours (si intensification) d'érythème et


de croûtelles (fig. 34.2), puis desquamation, la peau appa-
raît plus lisse (sans kératose actinique ou prékératose, ni
sensation d'inconfort ou de tiraillement) et plus tonique
(la texture est légèrement raffermie, « remodelée »), le
teint est amélioré, les taches diminuées, de fines ridules
estompées (fig.  34.3). Après des séances à forts para-
mètres, ou intensifiées, on peut observer sur les photo-
types clairs un érythème intense prolongé (parfois 2 à
3 mois), ou, sur les phototypes mats, une période de pig-
mentation post-inflammatoire transitoire dont il faut
prévenir les patients. Fig. 34.2  Effets secondaires typiques attendus à J4 après une séance de
PR-PDT «  avancée ».
■ Plusieurs études avec histologie, immunohistochimie,
AFLCO2 – MAL 1 heure 30 ; IPL 2 passages, 30 minutes ; LED rouge. Aspect
polymerase chain reaction (PCR), etc. ont peu à peu « TCA-like » résolutif en 15 jours environ.
confirmé et identifié les modifications épidermiques et Source : A. Le Pillouer-Prost.

A B
Fig. 34.3  Femme de 72 ans, phototype clair, kératose actinique du dos du nez et demande de rajeunissement.
A. Avant. B. 1 mois après 2 séances de PR-PDT (AFLCO2 – MAL 1 heure 30 ; IPL 2 passages, 30 minutes ; LED rouge).
Source : A. Le Pillouer-Prost.

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Section 6. Lasers et autres appareils
Chapitre 34. Photothérapie dynamique esthétique

Conclusion [5] Zhao W, Guan M, Nong X, et al. The safety and efficacy of daylight
photodynamic therapy in the treatment of actinic keratoses:a syste-
matic review and meta-analysis. Int J Dermatol 2019;58(2):159–66.
La photoréjuvénation photodynamique est efficace et sûre.
[6] Wenande E, Phothong W, Bay C, et al. Efficacy and safety of daylight
Elle est d'autant plus intéressante à proposer que le sujet est photodynamic therapy (dPDT) after tailored pretreatment with
de phototype clair et présente de nombreux dommages ablative fractional laser or microdermabrasion:a randomized, side-
UV-induits. by-side, single-blind trial in patients with actinic keratosis and large
area field cancerization. Br J Dermatol 2019;180(4):756–64.
[7] Bay C, Lerche CM, Ferrick B, et al. Comparison of physical pretreat-
Références ment regimens to enhance protoporphyrin IX uptake in photody-
[1] Ruiz-Rodriguez R, Sanz-Sanchez T, Cordoba S. Photodynamic pho- namic therapy: a randomized clinical trial. JAMA Dermatol
torejuvenation. Dermatol Surg 2002;28(8):742–4. 2017;153(4):270–8.
[2] Morton CA, Szeimies RM, Sidoroff A, Braathen LR. European guide- [8] Kim SK, Koo GB, Kim YS, Kim YC. Epithelial-mesenchymal interac-
lines for topical PDT part 2:emerging indications - field canceriza- tion during photodynamic therapy-induced photorejuvenation.
tion, photorejuvenation and inflammatory/infective dermatoses. J Arch Dermatol Res 2016;308:493–501.
Europ Acad Dermatol Venerol 2013;27(6):672–9.
[3] Le Pillouer-Prost A, Cartier H. Photodynamic photorejuvenation:a
review. Dermatol Surg 2016;42(1):21–30.
[4] Sanclemente G, Ruiz-Cafias V, Miranda JM, et al. Photodynamic the-
rapy in facial photodamage:a systematic review. Actas Dermasifiliorg
201;109(3):218-29.

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Section 6. Lasers et autres appareils

Chapitre 35
Photobiomodulation
en dermatologie esthétique
F. Michel, D. Barolet

Introduction s'agisse d'ulcères post-traumatiques, postchirurgicaux, chro-


niques, ou d'autres types de blessures [2] (fig. 35.2). En fait,
La lumière visible et l'infrarouge peuvent être absorbés par la les trois phases classiques de la réparation des plaies (inflam-
peau et moduler certaines voies de signalisation cellulaire. mation, prolifération et remodelage) peuvent être modulées
Parmi les appareils fondés sur le transfert de l'énergie utilisés avec des traitements précoces – parfois seulement un traite-
en dermatologie (lasers, etc.), cette lumière de faible inten- ment – pendant la phase inflammatoire.
sité fait classe à part. Appelée initialement LLLT pour low Plusieurs essais comparatifs randomisés à l'aide de LED
level laser therapy, on l'a dernièrement renommée photobio- (jaune/rouge/NIR) montrent l'intérêt de l'utilisation de LED
modulation (PBM). pour améliorer la guérison et la récupération des plaies après
Malgré près de 5 000 publications scientifiques, la PBM se des traumatismes aigus, des traitements cutanés par laser
heurte encore à un certain scepticisme [1]. [3], des traitements vasculaires ou des peelings chimiques.
La gamme de longueur d'onde de rayonnement électro- Éventuellement, cela peut être fait avant le traitement pour
magnétique de la PBM est essentiellement entre 400 et préparer la peau avant l'acte agressif (effet préconditionne-
1 200 nm. Les plus importantes sont le rouge (600–700 nm) ment appelé photoprévention) et ensuite pour aider à la
et le proche infrarouge (770–1 200 nm). Plus récemment, le guérison [4]. L'effet optimal de la réduction des rougeurs et
bleu et le vert ont été étudiés malgré la faiblesse de leur des œdèmes se produit le 4e jour après l'agression.
pénétration optique.
Problèmes pigmentaires
Chromophores
Vitiligo
Le chromophore cellulaire le plus connu de PBM est la cyto-
chrome C oxydase. Globalement, la PBM agit par modifica- Bien que les résultats soient assez variables et bien que de
tion de l'état redox de la membrane mitochondriale nombreux traitements soient nécessaires pour repigmenter
(fig. 35.1). le vitiligo, l'association entre les longueurs d'onde bleue et
À des doses relativement faibles de lumière, les mito- rouge doit être mentionnée. Le vitiligo segmentaire a
chondries réagissent en augmentant le transport d'élec- répondu à la PBM (laser He-Ne, 632,8 nm, 3,0 J/cm2 avec sti-
trons, la consommation d'oxygène, le potentiel membranaire mulation ponctuelle une ou deux fois par semaine) [5].
mitochondrial et la synthèse de l'adénosine triphosphate
(ATP). Cependant, des doses excessives peuvent avoir l'effet
Hyperpigmentation
inverse. En ce qui concerne l'hyperpigmentation cutanée telle que le
mélasma et l'hyperpigmentation post-inflammatoire (HPI),
l'utilisation de la lumière infrarouge est un choix logique. Les
Paramètres longueurs d'onde infrarouges peuvent pénétrer profondé-
Les paramètres sont indiqués dans le tableau 35.1. ment dans le derme et, in vitro [6], peuvent inhiber la syn-
thèse de la mélanine et l'expression de la tyrosinase.
Une étude pilote menée par l'auteur (D. Barolet) montre
Propriétés cliniques une amélioration significative du mélasma et une tolérance
significative aux futures expositions solaires (photopréven-
tion) par l'utilisation de PBM [7]. La réduction moyenne de
Réparation des tissus l'indice de mélanine était de 25  % par rapport au côté
L'utilisation de PBM dans le spectre rouge et proche infra- témoin, même si les images cliniques montraient beaucoup
rouge (near infrared [NIR]) est maintenant validée, qu'il plus d'amélioration.

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243
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Section 6. Lasers et autres appareils
Chapitre 35. Photobiomodulation en dermatologie esthétique

Infrarouge proche

Lumière rouge Lumière verte

4 cyt

4 cyt 4
(ox)
Cu
e
e
Heme
O2
a Heme
Sous-unité 1 a3 Sous-unité 2
e
–Cu6
4H NO
2H2O

Cytochrome C Opsines (OPN 3, 4, 5)


oxydase

Infrarouge proche
Lumière bleue

Ca2+

Eau
structurée
Ca2+
Ca2+

Ca2+

Canaux ioniques Cryptochromes


à ouverture thermique (TRPV1) Flavoprotéines

Fig. 35.1  Les chromophores de la photobiomodulation (PBM).


La cytochrome c oxydase de la chaîne respiratoire mitochondriale absorbe essentiellement le rouge (et le proche infrarouge [IR]) via l'hème et le cuivre ;
les canaux ioniques « heat-gated TRP » absorbent le proche IR (et le bleu) par l'eau (structured water) ; les opsines absorbent principalement le bleu/vert
via le cis-rétinal, et les flavoprotéines et cryptochromes absorbent notamment la lumière bleue via les ptérines.
Source : d'après M.R. Hamblin, Mechanisms and applications of the anti-inflammatory effects of photobiomodulation, AIMS Biophysics, 2017, 4(3) : 337–61.

Tableau 35.1  Les paramètres de la photobiomodulation (PBM)


Paramètres
Unité de mesure Description
d'irradiation
Longueur nm Paramètre le plus important : détermine l'absorption par le chromophore et la
d'onde (LO) profondeur de pénétration optique
Irradiance mW/cm2 Plus importante que la fluence (loi de réciprocité) : détermine le seuil d'activation
cellulaire
Pulsation Fréquence (Hz), durée (s), duty cycle (%), Les pulsations séquentielles semblent être biologiquement supérieures aux
séquence (train, intervalle, etc.) pulsations régulières et au mode continu (CW mode)
Durée Secondes Le temps d'illumination minimal en PBM pour activer la cellule semble être d'au
d'illumination moins 2 minutes
Fluence Joule/cm2 La valeur classique à 4 joule/cm2 est pratique mais n'est pas universelle (plus
élevée pour l'induction neuronale)
Intervalle de Heure(s), jour(s), semaine(s), mois L'intervalle de temps entre les traitements peut influencer le résultat, bien que
traitement l'espacement de 48 heures soit le plus utilisé. Le nombre de traitements est aussi à
considérer selon l'indication clinique
Cohérence Dépend de la bande spectrale LED et lasers ont la même efficacité
Polarisation Polarisée linéaire ou circulaire La lumière polarisée perd sa polarité en milieu à forte diffusion (highly scattering
media) comme la peau.
Elle n'affecte donc pas réellement la PBM

244
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Chapitre 35. Photobiomodulation en dermatologie esthétique

Fig. 35.2  A. Ulcère post-traumatique avant traitement. B. Ulcère post-traumatique post-Lumiphase pendant 4 mois.
Source : F. Michel, D. Barolet.

En termes de photoprévention, la PBM peut également pré- haute fluence (1 200  J/cm 2) peut représenter une
venir l'HPI si elle est pratiquée dans la semaine (pendant 7 jours) n ouvelle approche pour traiter les cicatrices
­
précédant un traitement agressif comme le resurfaçage au laser hypertrophiques.
CO2, chez les patients prédisposés à ce phénomène [8] (fig. 35.3).
Puisque la plupart des crèmes de dépigmentation
(comme l'hydroquinone) ne peuvent pas atteindre la pig-
mentation cutanée dermique résistante comme dans le
mélasma et l'HPI, la PBM devient une alternative de premier
plan pour traiter ces troubles pigmentaires profonds.

Photographie UV à 30 jours
SS Sans SS

Contrôle

LED
x30 jours

LED
x7 jours

Avant Avant Avant Avant


et après et après
Fig.  35.4  Contrôle à 12  mois d'un traitement préventif de chéloïdes
Fig. 35.3  Hyperpigmentation post-inflammatoire (HPI). postlifting du côté droit en utilisant une LED 905 nm quotidiennement
HPI induite par laser CO2 avec ou sans exposition au simulateur de soleil 30 jours après l'intervention.
Oriel® (SS). La réduction de l'HPI est possible après l'exposition de LED de Du côté gauche non traité, on voit les chéloïdes sur la région opérée.
660 nm avant et après la séance de laser, particulièrement si elle est prati- Source : F. Michel, D. Barolet.
quée 7 jours avant le laser de CO2.
Source : RoseLab.
Rajeunissement cutané
Prévention des cicatrices chéloïdes Les effets antivieillissement de la monothérapie LED sont
et hypertrophiques controversés. La bibliographie retrouve cependant un cer-
La PBM peut être utilisée en prévention des chéloïdes tain nombre de publications de qualité. Le rouge (660 nm)
postlifting (fig. 35.4). De plus, les chéloïdes ou cicatrices associé ou non à l'infrarouge a fait l'objet des études les
hypertrophiques déjà présentes pourraient bénéficier plus fructueuses. Barolet, en utilisant de la peau humaine
de l'utilisation de dispositifs PBM avec une fluence éle- reconstituée et des sujets vivants, a mené une étude en
vée. Mamalis et al. ont montré que la PBM HF LED-RL à utilisant la lumière LED à 660 nm. Dans la dernière partie
160  J/cm2 peut moduler les caractéristiques cellulaires de cette enquête, 40 sujets ont été traités (hémiface seule-
clés conduisant à la fibrose [9]. L'irradiation laser à très ment) avec une réduction significative des rides sur le côté

245
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Section 6. Lasers et autres appareils
Chapitre 35. Photobiomodulation en dermatologie esthétique

traité. Une amélioration globale de l'apparence cutanée Conclusion


après le traitement par LED a été observée chez la plupart
des participants, avec des améliorations allant jusqu'à Dans le cadre de l'esthétique, on identifie trop souvent la
56  % [10]. Une autre étude a comparé l'efficacité de PBM à son seul effet sur le vieillissement cutané. En fait, ses
633 nm de rouge, de l'infrarouge 830 nm, et leur associa- propriétés réparatrices et même préventives lui donnent un
tion [11]. Dans ces trois groupes, les rides ont été amélio- spectre d'action beaucoup plus large, avec une place dans la
rées avec le traitement par LED, le plus nettement lorsque prise en charge de l'acné, de l'alopécie, de multiples troubles
les deux longueurs d'onde ont été associées. pigmentaires et en accompagnement des autres traitements.
Des études ont tenté de réfuter l'efficacité de la PBM ; par L'utilisation de petits dispositifs de PBM pour une utilisa-
exemple, Boulos et al. [12], mais avec des biais multiples qui tion à domicile va étendre les possibilités de prise en charge
ne permettent pas de tirer des conclusions. en dermatologie esthétique.
Les dispositifs d'utilisation à domicile ou home use
devices (HUD) sont apparus sur le marché et permettent Références
une utilisation fréquente à long terme menant à des résul- [1] Barolet  D. Light-emitting diodes (LEDs) in dermatology. Semin
tats antivieillissement plus uniformes très intéressants. Cutan Med Surg 2008:27(4):227–38.
[2] Franca  CM, Anders  JJ, Lanzafame  RJ. Photobiomodulation in
wound healing:what are we not considering ? Photomed Laser
Acné Surg 2016:34(2):51–2.
La PBM est efficace dans le traitement de l'acné inflamma- [3] Alster TS, Wanitphakdeedecha R. Improvement of postfractional
laser erythema with light-emitting diode photomodulation.
toire légère à modérée et la thérapie photodynamique (PDT)
Dermatol Surg 2009:35(5):813–5.
est utilisée pour les formes modérées à sévères. L'action [4] Barolet  D. Accelerating ablative fractional resurfacing wound
anti-inflammatoire de la lumière à 630 nm et 660 nm module healing recovery by photobiomodulation. Current Dermatology
les glandes sébacées. Le bleu (405 nm) cible les porphyrines Reports 2016:5(3):232–8.
de Propionibacterium acnes pour détruire les bactéries par [5] Wu CS, Hu SC, Lan CC, et al. Low-energy helium-neon laser the-
des radicaux libres [13]. rapy induces repigmentation and improves the abnormalities of
cutaneous microcirculation in segmental-type vitiligo lesions.
En outre, l'intégration de petits HUD achetés directement
Kaohsiung J Med Sci 2008:24(4):180–9.
par les patients va probablement changer la façon dont nous [6] Kim JM, Kim NH, Tian YS, Lee AY. Light-emitting diodes at 830
abordons ce problème dermatologique fréquent. and 850  nm inhibit melanin synthesis in  vitro. Acta Derm
Venereol 2012:92(6):675–80.
Alopécie [7] Barolet  DG. Cormack, LLLT for melasma. Lasers Surg Med
2015:47(S26):1–78.
Il existe déjà de nombreux dispositifs PBM validés par la Food [8] Barolet  D, St-Arnault  S. Reduction of CO2 laser-induced PIH by
and Drug Administration (FDA) aux États-Unis sur le marché prophylactic LLLT. Lasers Surg Med 2009:41(S21):65.
qui émettent du rouge pour le traitement de l'alopécie andro- [9] Mamalis  A, Koo  E, Garcha  M, et  al. High fluence light emitting
génogénétique. Bien que l'utilisation de rouge domine, l'opti- diode-generated red light modulates characteristics associated
misation des paramètres et l'introduction du proche infrarouge with skin fibrosis. J Biophotonics 2016:9(11-12):1167–79.
[10] Barolet D, Roberge CJ, Auger FA, et al. Regulation of skin collagen
sont prometteuses. Le mécanisme d'action proposé est lié à la metabolism in vitro using a pulsed 660 nm LED light source:clini-
mobilisation des cellules souches et à l'induction de leur proli- cal correlation with a single-blinded study. J Invest Dermatol
fération et de leur différenciation. 2009:129(12):2751–9.
La PBM fait maintenant partie des trois méthodes non [11] Lee SY, Park KH, Choi JW, et al. A prospective, randomized, place-
chirurgicales qui peut être proposée dans l'alopécie andro- bo-controlled, double-blinded, and split-face clinical study on
génique, avec le finastéride et le minoxidil [14]. LED phototherapy for skin rejuvenation:clinical, profilometric,
histologic, ultrastructural, and biochemical evaluations and com-
parison of three different treatment settings. J Photochem
Cellulite et modelage du corps Photobiol B 2007:88(1):51–67.
Ici, rouge et infrarouge sont utilisés pour atteindre les adi- [12] Boulos PR, Kelley JM, Falcão MF, et al. In the eye of the beholder--
skin rejuvenation using a light-emitting diode photomodulation
pocytes en profondeur. Les études scientifiques sur la PBM
device. Dermatol Surg 2009:35(2):229–39.
comme traitement unique dans la réduction des graisses [13] Hamilton FL, Car J, Lyons C, et al. Laser and other light therapies
sont souvent de faible niveau de preuve et restent insuffi- for the treatment of acne vulgaris:systematic review. Br J Dermatol
santes. En outre, il est difficile de tirer des conclusions sur 2009:160(6):1273–85.
l'efficacité réelle de la PBM dans cette indication puisque [14] Adil A, Godwin M. The effectiveness of treatments for androge-
les résultats dépendront également des changements ali- netic alopecia:a systematic review and meta-analysis. J Am Acad
Dermatol 2017:77(1):136. 41.e5.
mentaires simultanés et de l'activité physique accrue.

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Chapitre 37
Excès graisseux localisés
J.-M. Mazer

Introduction façon importante des calories, il a toutes les chances de


reprendre ce qu'il avait perdu.
La prise en charge de la silhouette repose sur deux objectifs : Il existe un autre objectif : l'adipocytolyse. Celle-ci consiste
traiter le relâchement cutané et réduire des excès de volume en la destruction réelle d'adipocytes. Plus celle-ci est impor-
graisseux. Certaines techniques, apparues ces dernières années, tante, plus la réduction du volume graisseux va l'être. On
le permettent. Plus que concurrentielles, ces techniques sont peut ainsi logiquement envisager un effet durable dans la
complémentaires, car leurs indications vont dépendre de l'im- mesure où la capacité de l'organisme à recréer de nouveaux
portance du stéatome (le bourrelet graisseux que le patient adipocytes est très faible. Cette adipocytolyse peut elle-
veut réduire), de sa localisation, de son caractère plus ou moins même reposer sur deux mécanismes différents : soit l'adipo-
diffus, de ses limites. Ces techniques ne peuvent pas prétendre cyte est détruit au cours de la séance par un effet de nécrose
être aussi efficaces qu'une volumineuse liposuccion, mais elles immédiate ; soit il va faire l'objet de microlésions cellulaires
sont particulièrement adaptées au traitement de plus petits importantes, entraînant une destruction secondaire dans les
volumes, alors que, de plus en plus, nos patients souhaitent semaines qui suivent par un effet d'apoptose progressive.
éviter les risques et les suites des traitements chirurgicaux. Cette induction d'apoptose prédominante peut être obte-
nue de diverses façons, tout d'abord par un refroidissement
intense et prolongé de la cellule adipocytaire, tout en préser-
Les différentes techniques vant le derme et l'épiderme d'un refroidissement trop
Il est fondamental de distinguer les différents types de mode important, afin d'éviter tout risque de nécrose cutanée. Cela
d'actions ; ils sont indiqués dans l'encadré 37.1. correspond à la cryolipolyse, qui provoque des microlésions
Certains appareils vont agir sur la membrane de l'adipo- par cristallisation des lipides intracellulaires, conduisant à
cyte, ce qui crée une fuite des triglycérides contenus à l'inté- l'apoptose secondaire. Une autre possibilité d'induction de
rieur de ces adipocytes. Cette purge adipocytaire entraînera l'apoptose est dite par « le chaud ». La technique, à base d'ul-
une réduction de volume. Cet effet, rapide, présente deux trasons, de radiofréquence monopolaire, ou d'infrarouge,
inconvénients : d'une part, il provoque une hypertriglycéri- permet un échauffement du pannicule adipeux, relative-
démie transitoire qui peut être plus ou moins gênante ; ment modéré (de l'ordre de 44 à 46 °C), mais prolongé sur
d'autre part, on peut craindre que cet effet ne soit que tran- une durée allant de 10 à 40 minutes, créant des microlésions
sitoire dans la mesure où, si le patient ne consomme pas de cellulaires. Actuellement, ces appareils sont soit un laser à
1 060  nanomètres, avec lequel 4  applicateurs peuvent être
utilisés en même temps, ce qui permet de traiter des super-
Encadré 37.1 ficies relativement importantes, soit des appareils utilisant
des ultrasons et des infrarouges, voire une onde de radiofré-
Classification des lipolyses par mode d'action quence monopolaire prolongée ou des micro-ondes courtes.
Purge adipocytaire : lasers froids, LED, infrarouges Ce qui différencie ces techniques (tableau  37.1) va être
Adipocytolyse leur capacité à induire plus ou moins de réduction du
■ Par lyse immédiate
volume adipeux, sur des surfaces plus ou moins diffuses, et à
● Effet thermique puissant, source de nécrose
produire plus ou moins de néosynthèse collagénique (afin
immédiate des adipocytes (> 60 °C) : ultrasons d'éviter tout risque de relâchement). Enfin, on ne perdra pas
focalisés haute fréquence de vue que le résultat doit être homogène, sans démarca-
● Effet mécanique (induction de vibrations
tion, ce qui serait très préjudiciable au patient.
des membranes adipocytaires, source de lyse Différentes des méthodes visant à induire de l'apoptose
adipocytaire) : ultrasons focalisés basse fréquence adipocytaire, les techniques de nécrose immédiate d'adipo-
■ Par induction prédominante d'apoptose adipocytaire
cytes impliquent un effet thermique important, de l'ordre
● Par refroidissement contrôlé : cryolipolyse
de plus 60 °C, afin d'induire cet effet immédiat. Cela est alors
● Par effet thermique modéré (44–46 °C), mais
assuré par l'émission d'ultrasons focalisés, leur concentration
prolongé : radiofréquence monopolaire ; ultrasons par focalisation dans l'hypoderme y créant un effet
focalisés, infrarouge, micro-ondes courtes ­thermique puissant, rapide, source de nécrose cellulaire
immédiate.
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Chapitre 37. Excès graisseux localisés

Tableau 37.1  Principaux avantages et inconvénients des différentes techniques


Importance Surfaces Durabilité
Douleur Suites Risques
de la lipolyse traitées du résultat
Purge adipocytaire + +++ Courte 0 0 0, sinon déception devant la
récidive
Ultrasons focalisés +++ +++ Durabilité Variable, de 0 Érythème, Très rares cas de brûlures
haute fréquence probable à +++ quelques douleurs superficielles
persistantes
Ultrasons focalisés ++ +++ Durabilité non + Érythème 0
basse fréquence établie
Cryolipolyse +++ + Durabilité établie + douleurs Simples, quelques Rares cas d'hyperplasies
intenses rares cas paradoxales
d'inflammation Le risque de nécrose ne se
voit qu'avec certains
appareils non agréés
Apoptose par effet ++ +++ Durabilité Pas ou peu Érythème Très rares cas de brûlures
thermique modéré probable Œdème superficielles
(laser 1060 nm,
radiofréquences,
micro-ondes courtes)

Indications relatives d'amour et le double menton (fig. 37.2). Les techniques qui


induisent une apoptose par le chaud et les ultrasons focali-
Afin de poser l'indication, il est essentiel de bien analyser l'ano- sés sont indiquées quand les lésions sont plus diffuses, sur le
malie de volume graisseux. Suivant que le stéatome est loca- ventre en particulier, et d'autant plus qu'existe un certain
lisé ou qu'il s'agisse de lésions diffuses, mal démarquées, degré de laxité.
comme un petit « ventre rond », le choix sera totalement dif- En fait, le point essentiel est la question de la complémen-
férent puisqu'il devra être en adéquation avec la capacité de la tarité, de la synergie de ces techniques chez un même
technique à traiter des superficies plus ou moins étendues. patient, lequel, pour un résultat optimal, peut nécessiter
Ainsi, il est essentiel de comprendre que traiter une hyper- plusieurs techniques.
plasie graisseuse assez diffuse sur le ventre avec une tech-
nique très localisée comme la cryolipolyse est a priori une Effets secondaires
mauvaise solution. À l'inverse, si le bourrelet est très localisé,
nous aurons alors l'indication majeure de cryolipolyse.
des techniques de lipolyses
Des techniques pourront être utilisées sur certaines zones, Les effets secondaires de la cryolipolyse sont développés dans
mais pas sur d'autres. Ainsi, les ultrasons doivent être évités le chapitre  36. Rappelons qu'ils sont peu importants et
en regard d'une paroi osseuse, car il existe un rebond des bénins. De rares cas de nécroses cutanées sévères ont été
ultrasons sur l'os, créant une sorte de double dosage, pou- observés, mais exclusivement avec des appareils ne disposant
vant se traduire par une nécrose cutanée. pas de l'agrément médical. On insistera donc sur notre res-
On peut considérer que les stéatomes très localisés sont ponsabilité dans le choix de l'appareil, lequel doit bénéficier
l'apanage de la cryolipolyse, même si les techniques capables d'études et aura obtenu au minimum l'agrément médical au
de traiter des régions diffuses peuvent aussi être utilisées sur niveau des normes européennes. L'hyperplasie paradoxale a
des régions plus réduites. Néanmoins, la cryolipolyse est été développée également dans le chapitre précédent ; elle
claire­ment la méthode provoquant la plus grande réduction est exceptionnelle, mal expliquée, probablement inférieure à
de volume. En revanche, dès que ces lésions sont plus dif- 1 cas sur 1 000, mais le patient doit en être prévenu.
fuses, telles que les lésions du type ventre rond, des bourre- Les techniques d'apoptose par le chaud ont fait l'objet,
lets assez larges situés au niveau des hanches, on préférera exceptionnellement, de signalement d'effets secondaires à
une technique capable de traiter de plus grandes surfaces, type de brûlure superficielle et d'abcédation d'un kyste au
comme les ultrasons focalisés, infrarouges et lasers 1 060 nm. niveau des cuisses. La réalisation préalable d'une liposuccion
Le positionnement de l'applicateur sera également fonda- dans la zone devant être traitée semble favoriser ce risque.
mental, car du fait même de l'efficacité de la technique, un Sinon, la plupart des effets secondaires se résument à des
positionnement inadéquat entraînera un résultat inesthé- cas de douleur modérée, un érythème persistant quelques
tique. Il s'agit là de la responsabilité du médecin qui doit jours, exceptionnellement une hyperpigmentation post-­
veiller personnellement à la pose de l'applicateur au moment inflammatoire. Le profil de tolérance est donc excellent, pour
de la séance. l'ensemble des techniques non invasives, et s'oppose aux tech-
Les meilleures indications de la cryolipolyse sont les bour- niques chirurgicales, irremplaçables, néanmoins, devant une
relets localisés du ventre et du dos (fig.  37.1), les poignées importante surcharge pondérable, si le régime ne suffit pas.

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Chapitre 37. Excès graisseux localisés

Fig. 37.1  Traitement des bourrelets graisseux des flancs réalisé en 2009 par cryolipolyse (A).
Résultat à 3 mois (B), puis à 3 ans (C), puis en 2019 (D), soit 10 années plus tard, démontrant le caractère durable du bénéfice obtenu si le poids, comme
dans ce cas, reste à peu près le même.
Source : J.-M. Mazer.

Fig. 37.2  Ce cas de traitement du « double menton » illustre parfaitement le fait que la cryolipolyse est d'autant plus efficace que l'excédent grais-
seux est de petit volume.
On remarquera que, 3 mois après l'unique séance (B), la peau n'est pas relâchée, l'inflammation accompagnant la cryolipolyse provoquant un certain degré
de néosynthèse collagénique.
Source : J.-M. Mazer.

Conclusion plus ou moins diffus ou localisé de celui-ci, on choisira la


technique la plus adéquate. De façon générale, on retiendra
Plutôt que de considérer que ces techniques sont concurren- que les techniques qui provoquent une adipocytolyse sont
tielles, on peut penser qu'elles sont complémentaires. Ainsi, beaucoup plus intéressantes que celles qui induisent une
de nombreux patients présentent à la fois des stéatomes très purge adipocytaire, car le résultat sera alors durable.
localisés et des zones d'infiltration adipeuse plus diffuses, Enfin, ces techniques ne doivent jamais occulter les possi-
avec éventuellement un peu de relâchement, et on peut bilités de la chirurgie – potentiellement plus efficace, mais
donc envisager que le même patient soit traité à certains bien plus invasive –, ni remplacer un régime, si celui-ci est
endroits par cryolipolyse, sur d'autres par un appareil à effet nécessaire, et doivent donc n'être proposées qu'à des
thermique. patients ne présentant pas ou peu de surcharge pondérale.
En fonction de chaque patient et de l'importance de son
relâchement, de l'importance du bourrelet et du caractère

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TECHNIQUES Partie 2
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Section 6. Lasers et autres appareils

Chapitre 36
Cryolipolyse
H. Laubach

Introduction Cette réponse inflammatoire augmente significativement au


cours des jours suivants. Bien que la quantité d'inflammation
Depuis plus d'un siècle, il est connu que l'exposition au froid dans un modèle animal soit fortement corrélée aux tempé-
du tissu adipeux sous-cutané peut entraîner une inflamma- ratures d'exposition, la corrélation entre la température d'ex-
tion localisée (panniculite), avec pour résultat une perte de position et l'importance de l'efficacité clinique n'a pas encore
volume du tissu adipeux permanente [1]. Cette sensibilité été établie dans un essai clinique humain. Les débris cellu-
particulière des adipocytes au froid a depuis lors été signalée laires dans la couche sous-cutanée, y compris les triglycé-
à plusieurs reprises dans la littérature médicale [2, 3]. Sur la rides libérés, sont ensuite progressivement digérés et
base de ces observations et de leurs propres expériences cli- absorbés au cours de la réponse inflammatoire des tissus,
niques, l'équipe réunie autour de Manstein et Anderson du puis recyclés dans le corps, sans qu'une augmentation san-
Centre Wellman à Boston, aux États-Unis, a mis au point une guine des taux des lipides ne soit observée [6]. Certains
technique qui utilise pour la première fois une différence mettent en avant l'induction d'apoptose comme principal
biologique de sensibilité au froid de populations de cellules mécanisme physiopathogénique responsable de l'efficacité
différentes, et ayant ici pour cible les adipocytes. La tech- clinique. Compte tenu de la forte réponse inflammatoire
nique de la cryolipolyse sélective était née. Manstein et al. due à la nécrose adipocytaire induite, la mort cellulaire apop-
décrivent [4] dans leur première publication à quel point totique, dite silencieuse, n'est peut-être responsable que
une exposition bien définie de froid sur la surface de la peau d'une certaine partie de l'efficacité de la cryolipolyse
induit, de manière prévisible, une panniculite localisée dans sélective.
le tissu sous-cutané, entraînant une réduction du volume
cliniquement significative du pannicule adipeux, tandis que
le derme et l'épiderme sus-jacents ne sont pas lésés.
Aspects pratiques et indications
La procédure clinique de cryolipolyse n'est malheureusement
Physiopathogénie pas normalisée et diffère selon les fabricants. Les tempéra-
tures utilisées en pratique, au niveau du contact avec l'appli-
La cryolipolyse sélective est utilisée en clinique depuis 2009, cateur, varient entre légèrement positives et –11 °C, avec des
et a changé depuis, du fait de son efficacité clinique repro- durées de traitement pouvant varier entre 30 et 90 minutes.
ductible, et de son bon profil de tolérance, le domaine des Encore une fois, la question de savoir dans quelle mesure ces
traitements non invasifs de la silhouette. paramètres différents modifient l'efficacité clinique et/ou l'in-
En revanche, le processus physiopathologique exact de la nocuité n'est pas bien étudiée, mais il semble que des tempé-
cryolipolyse sélective fait encore l'objet de recherches. ratures plus basses et des durées d'exposition plus longues
Certains pensent actuellement que l'application localisée de induisent une réponse inflammatoire plus forte. La sélection
froid, tout en inhibant le flux sanguin dermique par com- des patients est, comme dans toute autre procédure clinique,
pression ou aspiration de la peau, entraîne une diminution essentielle pour obtenir des résultats satisfaisants. D'après
suffisante de la température des tissus sous-cutanés, indui- l'expérience des auteurs, le candidat idéal présente une zone
sant la formation de cristaux de lipides dans les adipocytes. bien définie d'accumulation de graisse, bien localisée, sans
Ce processus de cristallisation intracellulaire conduit à la trop de rétention ni de fibrose, et qui se laisse pincer facile-
mort cellulaire d'un nombre important d'adipocytes, entraî- ment lors de la palpation (typiquement, poignées d'amour
nant la libération progressive du contenu intracellulaire dans ou bas-ventre ; fig.  36.1). Le volume du bourrelet graisseux
l'espace interstitiel. Cette mort cellulaire induit alors une doit être corrélé au profil de l'applicateur choisi. Ainsi, un
réponse tissulaire inflammatoire plus ou moins forte, comme large éventail d'applicateurs en forme de « U » ou en forme de
en témoignent cliniquement, dans les semaines qui suivent dôme est proposé par les différents industriels.
la procédure, l'apparition d'un gonflement localisé et une La cryolipolyse sélective peut agir également dans d'autres
sensibilité à la pression de la zone de traitement. Zelickson zones d'accumulation de graisse localisée, comme le haut
et al. ont montré dans leur étude histologique une infiltra- des bras et l'intérieur des cuisses [7]. Certaines zones de
tion significative du tissu sous-cutané avec des cellules traite­ment plus petites, telles que les coussinets de graisse du
inflammatoires dès 2  jours après l'exposition au froid [5]. double menton ou ceux situés au-dessus du genou, peuvent

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Section 6. Lasers et autres appareils
Chapitre 36. Cryolipolyse

Fig. 36.1  Traitement d'un bourrelet sus-ombilical par cryolipolyse.


Aspect avant (A) et 3 mois plus tard (B) : nette diminution du volume.
Source : H. Laubach.

Fig. 36.2  Traitement de la culotte de cheval par cryolipolyse.


Aspect avant (A) puis 3 mois (B) après la séance.
Source : H. Laubach.

être traitées, mais avec des applicateurs plus petits et adap- cité et une tolérance améliorées du fait du processus de
tés [8]. Le coussin de graisse caractérisant la culotte de che- photobiomodulation simultanément induit. Ces affirma-
val est une indication potentielle de la cryolipolyse sélective tions ne sont étayées par aucune donnée scientifique.
(fig. 36.2). Toutefois, en raison de son contenu fibreux élevé, Les jours suivants, la zone traitée reste généralement
il ne peut pas être mobilisé dans aucun des applicateurs clas- légère­ment érythémateuse et sensible à la pression, tandis
siques. Par conséquent, des applicateurs plats spécialement que les patients décrivent fréquemment une diminution de
développés sont utilisés pour traiter ces zones avec des la sensibilité de la peau persistant plusieurs semaines, proba-
temps d'exposition nettement plus longs. blement induite par l'exposition des terminaisons nerveuses
Dans la pratique, on ne saurait trop insister, comme avec cutanées au froid [11, 12]. Des ecchymoses postopératoires
tous les actes de la dermatologie interventionnelle, sur l'im- sont parfois observées, et étroitement corrélées à la force de
portance d'une procédure stricte, avec notamment une succion utilisée pendant le traitement. Une première réduc-
grande attention lors de la mise en place des applicateurs tion du volume du bourrelet peut être observée après plu-
pour un résultat optimal. Au début du cycle de refroidisse- sieurs semaines, atteignant son résultat maximal à 3  mois
ment, les patients décrivent généralement une sensation chez la plupart des patients [12]. Jusqu'à présent, le suivi à
désagréable pendant quelques minutes. Après cette période long terme de patients sur plus de 9 ans a montré une réduc-
initiale, la zone exposée va être généralement anesthésiée tion stable et significative du tissu sous-cutané, et la procé-
pendant le temps restant de l'exposition au froid. Au retrait dure peut être considérée comme définitive [13].
de l'applicateur, la peau prise dans celui-ci est érythéma- Plusieurs zones et régions peuvent être abordées au cours
teuse, reproduisant la forme de l'applicateur, en raison des d'une ou de plusieurs séances, faisant de la cryolipolyse une
lipides cristallisés dans les adipocytes sous-cutanés. Les véritable technique de « modelage du corps ».
minutes suivantes peuvent bénéficier d'un massage vigou-
reux, ce qui augmenterait l'efficacité clinique, mais qui peut Tolérance
être ressenti perçu comme inconfortable par certains
patients [9]. Un dispositif émettant des ondes de choc a été Les effets indésirables de la cryolipolyse sélective sont
développé pour standardiser davantage le processus de rares, mais leur connaissance ne doit pas être négligée.
massage, mais avec peu de données scientifiques [10]. De Ces effets secondaires indésirables sont pour la plupart
même, certains fabricants ont intégré des diodes électrolu- de nature temporaire et non sévères. Par exemple, la
minescentes dans les pièces à main, revendiquant une effica- douleur ou les démangeaisons tardives apparaissant

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TECHNIQUES Partie 2
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Section 6. Lasers et autres appareils
Chapitre 36. Cryolipolyse

­ lusieurs jours après la séance sont spontanément réso-


p Conclusion
lutives en quelques semaines [12]. Elles sont probable-
ment dues à la réinnervation de la peau et un traitement La cryolipolyse sélective a pris une place importante dans
médical approprié reposant sur des médicaments anti-­ le traitement de la silhouette, au cours de la dernière
inflammatoires et/ou anti-épileptiques peut éventuelle- décennie. Cela repose sur son profil de tolérance et d'effi-
ment y remédier. De rares cas de lésions n ­erveuses cacité démontrée, s'appuyant sur un rapport risques/avan-
motrices temporaires ont également été décrits dans la tages favorable, en faisant un outil important dans le
littérature, touchant une branche du nerf mandibulaire, domaine de la sculpture corporelle non invasive. Elle ne
ou les nerfs moteurs de la partie supérieure du bras [14, doit néanmoins pas être banalisée ; elle constitue un
15]. Encore une fois, un retour à la normale après authentique acte médical, impliquant la responsabilité du
quelques semaines ou mois a été constant pour ces médecin dans le choix des indications, qui ne doivent pas
lésions nerveuses. Rarement, une panniculite palpable a être irréalistes.
persisté plus d'un mois, spontanément résolutive, et s'est
révélée généralement corrélée à une forte efficacité Références
­clinique [12]. Par ailleurs, des cas d'hyperplasie ­paradoxale [1] Hochsinger C. Über eine akute kongelative Zellgewebsverhärtung
permanente du tissu sous-cutané traité ont été décrits in der Submentalregion bei Kindern. Mschr Kinderheilk
1902;1:323–7.
avec la plupart des dispositifs utilisés à ce jour [16–20].
[2] Haxthausen  H. Adiponecrosis e frigore. Bj J Dermatol 1941;53:
Celle-ci se traduit par une augmentation de l'ordre de 83–9.
20 % du bourrelet traité. Son mécanisme physiopathogé- [3] Epstein Jr. EH, Oren  ME. Popsicle panniculitis. N Engl J Med
nique exact reste incertain, mais on constate qu'environ 1970;282(17):966–7.
un mois après l'exposition, après une courte période de [4] Manstein D, Laubach H, Watanabe K, et al. Selective cryolysis:a
perte de tissu sous-cutané, une augmentation significa- novel method of non-invasive fat removal. Lasers Surg Med
2008;40(9):595–604.
tive du volume de tissu sous-cutané est observée. Les
[5] Zelickson B, Egbert BM, Preciado J, et al. Cryolipolysis for nonin-
échantillons de tissu provenant de la liposuccion des vasive fat cell destruction: initial results from a pig model.
patients affectés ne montrent que du tissu adi- Dermatol Surg 2009;35(10):1462–70.
peux-fibreux non spécifique. Certaines publications [6] Klein KB, Zelickson B, Riopelle JG, et al. Non-invasive cryolipolysis
évoquent le rôle des lésions vasculaires induites par le for subcutaneous fat reduction does not affect serum lipid levels
froid, mais les données sont trop rares et conflictuelles or liver function tests. Lasers Surg Med 2009;41(10):785–90.
[7] Wanitphakdeedecha  R, Sathaworawong  A, Manuskiatti  W. The
pour pouvoir conclure [18, 19]. Plus important encore,
efficacy of cryolipolysis treatment on arms and inner thighs.
l'incidence réelle de cet effet secondaire permanent reste Lasers Med Sci 2015;30(8):2165–9.
discutée dans la littérature médicale, et se situe raisonna- [8] Kilmer SL, Burns AJ, Zelickson BD. Safety and efficacy of cryoli-
blement entre 1 sur 20 000 et 1 sur 100, le nombre réel se polysis for non-invasive reduction of submental fat. Lasers Surg
situant probablement entre ces deux chiffres [18]. Des Med 2016;48(1):3–13.
traitements supplémentaires de cryolipolyse ne règlent [9] Boey  GE, Wasilenchuk  JL. Enhanced clinical outcome with
manual massage following cryolipolysis treatment:a
pas le problème de cette hyperplasie paradoxale, et
4-month study of safety and efficacy. Lasers Surg Med
peuvent même l'aggraver. Bien que la liposuccion par 2014;46(1):20–6.
tumescence demeure le traitement de choix de l'hyper- [10] Ferraro GA, De Francesco F, Cataldo C, et al. Synergistic effects of
plasie adipeuse paradoxale, certains rapports font état cryolipolysis and shock waves for noninvasive body contouring.
de l'efficacité de la phosphatidylcholine injectable [17]. Aesthetic Plast Surg 2012;36(3):666–79.
Malheureusement, des appareils prétendant être de [11] Coleman  SR, Sachdeva  K, Egbert  BM, et  al. Clinical efficacy of
noninvasive cryolipolysis and its effects on peripheral nerves.
­qualité médicale et n'ayant pas pour la plupart un mar-
Aesthetic Plast Surg 2009;33(4):482–8.
quage CE ont envahi le marché, avec même une diffusion [12] Dierickx  CC, Mazer  JM, Sand  M, et  al. Safety, tolerance, and
de la technique dans des établissements non médicaux au patient satisfaction with noninvasive cryolipolysis. Dermatol
cours des dernières années. Un mauvais contrôle du refroi- Surg 2013;39(8):1209–16.
dissement ou une mauvaise compréhension de la part de [13] Bernstein EF. Long-term efficacy follow-up on two cryolipolysis
l'opérateur de la nécessité absolue de la protection de la case studies: 6 and 9  years post-treatment. J Cosmet Dermatol
2016;15(4):561–4.
peau ont conduit à des cas de lésions de type engelures,
[14] Lee  SJ, Kim  YJ, Park  JB, et  al. A case of motor neuropathy
avec ulcérations, hyperpigmentation post-inflammatoire after cryolipolysis of the arm. J Cosmet Laser Ther
et cicatrices permanentes [21, 22]. Cette problématique est 2016;18(7):403–4.
totalement dépendante de la qualité de la machine utilisée [15] Lee  NY, Ibrahim  O, Arndt  KA, Dover  JS. Marginal mandibular
et/ou de l'opérateur, et n'a jamais été rapportée avec des injury after treatment with cryolipolysis. Dermatol Surg
machines utilisant un protocole de « protection contre le 2018;44(10):1353–5.
[16] Jalian HR, Avram MM, Garibyan L, et al. Paradoxical adipose hyper-
gel («  freeze protect »).
plasia after cryolipolysis. JAMA Dermatol 2014;150(3):317–9.
Les applications futures de la cryolipolyse sélective sont [17] Kelly ME, Rodríguez-Feliz J, Torres C, Kelly E. Treatment of para-
prometteuses, pour le domaine de la médecine esthétique, doxical adipose hyperplasia following cryolipolysis:a single-cen-
dans la prise en charge de la silhouette. ter experience. Plast Reconstr Surg 2018;142(1):17e–22e.

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TECHNIQUES
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Section 6. Lasers et autres appareils
Chapitre 36. Cryolipolyse

[18] Singh  SM, Geddes  ER, Boutrous  SG, et  al. Paradoxical adipose [21] Nseir I, Lievain L, Benazech D, et al. Skin necrosis of the thigh after
hyperplasia secondary to cryolipolysis: An underreported entity ? a cryolipolysis session:a case report. Aesthet Surg J
Lasers Surg Med 2015;47(6):476–8. 2018;38(4):NP73–5.
[19] Stroumza  N, Gauthier  N, Senet  P, et  al. Paradoxical adipose [22] Choong  WL, Wohlgemut  HS, Hallam  MJ. Frostbite following
hypertrophy (PAH) after cryolipolysis. Aesthet Surg J cryolipolysis treatment in a beauty salon:a case study. J Wound
2018;38(4):411–7. Care 2017;26(4):188–90.
[20] Ward CE, Li JY, Friedman PM. ATX-101 (deoxycholic acid injec-
tion) for paradoxical adipose hyperplasia secondary to cryoli-
polysis. Dermatol Surg 2018;44(5):752–4.

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Chapitre 38
Cellulite
R. Bousquet-Rouaud

Introduction L'influence des régimes hypocaloriques ou pauvres en glu-


cides, en lipides, en sel, riches en fibres a fait l'objet de nom-
La cellulite, largement répandue chez 80 à 90 % de la popula- breuses études. La population féminine en Asie développe
tion féminine après la puberté, se définit cliniquement par moins de cellulite que les femmes d'origine caucasienne ; une
un aspect de peau d'orange. hypothèse avancée est celle de leur consommation de
Anatomiquement, elle est présente au niveau des fesses où phyto-œstrogènes de soja qui diminuerait leur production
elle débute précocement, puis aux cuisses, à l'abdomen et d'œstrogènes d'origine surrénalienne et ovarienne.
aux bras. Le régime hypocalorique diminue le volume des lobules
Considérée comme physiologique, elle peut avoir en adipeux et réduit la cellulite sans qu'elle disparaisse vrai-
revanche un impact sérieux sur l'estime de soi et la qualité de ment. Il existe une prédisposition génétique liée à la présence
vie. de récepteurs aux œstrogènes génétiquement contrôlée au
niveau du bassin et de la taille.
Le vieillissement majore la cellulite car s'y associe le relâ-
Histologie chement avec la perte des fibres collagéniques et la modifi-
Histologiquement, on retrouve toujours dans le tissu cation de celles d'élastine.
sous-cutané un réseau de septums fibreux épaissis, perpen- Le derme profond est « déshabité », comme en témoignent
diculaires à la surface de la peau, et non obliques comme les échographies de la peau pratiquées à des âges différents.
chez l'homme [1, 2] dans lesquels les fibres de collagène et
d'élastine sont altérées  ; la jonction derme-hypoderme
manque de densité et les lobules adipeux font issue dans le Classification
derme profond, induisant l'aspect échographique «  en
La cellulite, souvent isolée chez la femme mince, peut être
gueule de requin » et, en clinique, celui de surface vallonnée
associée à une surcharge graisseuse localisée voire une
comme un matelas.
obésité. Au fil du temps, elle s'associe à une peau fine,
ridulée, et à un relâchement de l'hypoderme et des plans
Physiopathologie musculaires profonds, plus ou moins marqué selon les
zones du corps.
Le consensus fait défaut quant à la physiopathologie. Des La classification de Nurnberger et Müller est communé-
perturbations du retour lymphatique et veineux sont asso- ment admise dans toutes les études (encadré 38.1).
ciées et souvent majorent la cellulite au cours du cycle. Ces
anomalies de la circulation seraient responsables de la fibros-
clérose du tissu conjonctif des septums. Encadré 38.1
Les images fournies par la résonance magnétique nucléaire
montrent que ces cloisons fibreuses sont présentes dans le Classification de la cellulite
tissu adipeux sous-cutané et contribuent à attirer la peau selon Nurnberger et Müller
pour former les fossettes ou dépressions cellulitiques. Les
zones voisines de tissu adipeux qui sont surélevées sont à ce ■ Grade 0 : pas d'altération de la surface cutanée (pas de
jour peu étudiées. peau d'orange) en position debout ni au pincement de
La cellulite serait la résultante d'un processus inflamma- la peau
toire impliquant les métalloprotéases (collagénases  1 et ■ Grade I : surface cutanée lisse en position debout ou
gélatinases  A) qui sont sécrétées au cours des menstrua- couchée, aspect de peau d'orange au pincement ou
tions, comme en témoigne la présence de glycosaminogly- après la contraction musculaire
canes observées à la jonction du derme et du tissu ■ Grade II : léger, modéré ou sévère. L'aspect de peau
sous-cutané. Les collagénases ainsi progressivement sécré- d'orange est visible en position debout
tées contribuent à un affaiblissement du derme papillaire ■ Grade III : léger, modéré ou sévère. L'aspect de peau
et réticulaire ainsi qu'au développement des hernies de d'orange avec dépressions et nodules est visible en
tissu adipeux. position debout et couchée

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Chapitre 38. Cellulite

Traitements Les lasers de basse énergie (low level laser therapy [LLLT])
ont été proposées (635 nm, 650 nm, 680 nm). Ils émettent
Les traitements ciblent essentiellement le derme profond et de 2 à 200 mW avec une puissance de 0,05 W à 5 W/cm2
les septums fibreux de l'hypoderme. Le remodelage colla- sans élévation thermique selon un mécanisme de photo-
gène-élastine peut être induit par les lasers, la radiofréquence modulation  : augmentation de l'adénosine triphosphate
et les ultrasons en général, grâce à une augmentation significa- (ATP) intracellulaire et diminution de la production des
tive de la température du derme profond et de l'hypoderme. métalloprotéases principalement.
La liposuccion n'est pas indiquée. Les techniques chirurgi- Les résultats réels, visibles sur photographies, restent peu
cales de subcision visent à rompre les travées fibreuses dans nombreux et contradictoires selon les équipes.
les cellulites de grade III et restent symptomatiques.
Depuis plus de 10 ans, différents traitements de la cellulite Ondes de choc extracorporelles
ont été proposés avec une tendance à l'évaluation sérieuse
Utilisées en médecine du sport, ces ondes font l'objet de publi-
des résultats (cutométrie, échographie, résonance magné-
cités avantageuses. Le mécanisme d'action reste flou, fonction
tique nucléaire). C'est souvent lors d'un traitement par une
de leur puissance, de la fréquence et du nombre d'impulsions.
technique appliquée pour une surcharge graisseuse (ultra-
Une discrète amélioration de la peau similaire à l'effet de tout
sons de haute fréquence ou laser chaud) que l'on constate
massage est décrite, mais non confortée par les études. On peut
une amélioration non seulement de la circonférence de la
citer les vibrations de basse fréquence (5 à 45  Hz ; ceinture
cuisse ou de l'abdomen, mais également de l'aspect de peau
vibrante et appareil portable) qui augmentent la perfusion
d'orange.
tissulaire.
Lasers
Radiofréquence externe
Initialement, en 2004, le laser Nd-YAG 1 064 nm, largement
utilisé en épilation ou angiologie, avait été proposé en raison Principes
de la profondeur de pénétration. De nombreux tirs sont
nécessaires (spots de 18 à 20 mm) et plusieurs passages pour La radiofréquence est une onde électromagnétique qui est
obtenir un résultat intéressant, progressif en quelques générée entre deux électrodes et dont la fréquence varie
semaines et démontré par échographie [3] (fig. 38.1). selon les appareils de 0,3 à 100  MHz. Capable de produire
Plus récemment, le laser hyperthermique 1 060  nm ou une augmentation de la température des tissus sous-cutanés
« laser chaud », utilisé pour la lipolyse des surcharges grais- de 65 à 75 °C, elle provoque une dénaturation du collagène
seuses localisées, induit une élévation thermique de 44 à des septums fibreux. Cette température est corrélée avec
47 °C suivie d'une phase de refroidissement. La lipolyse et la celle de la surface cutanée de 40 à 43 °C.
rétraction cutanée obtenues améliorent la cellulite. La radiofréquence peut être délivrée de façon mono- ou uni-
polaire, bipolaire (les deux électrodes sont situées à la surface
de la peau). La profondeur de l'effet thermique obtenu est
égale à la moitié de la distance entre les deux électrodes. Toutes
Épiderme les radiofréquences tri- ou pluripolaires ne sont en fait que des
bipolaires qui se succèdent dans un intervalle de temps court.
Les deux principaux facteurs conditionnant l'efficacité du
traitement sont le pic de température atteint et sa durée. En
pratique, maintenir une température externe de 40 à 42 °C
(équivalente à une température interne de 60 à 65 °C) pen-
dant 5 minutes peut produire le même effet de dénaturation
du collagène qu'une température plus élevée pendant un
temps plus court. Le tissu adipeux a une résistance électrique
Graisse sous-cutanée plus importante que les cellules du derme ; il chauffe et se
refroidit plus lentement ; sa perfusion sanguine est moindre
et il conserve la chaleur. L'énergie thermique délivrée à l'adi-
pocyte induirait une augmentation de son métabolisme et
diminuerait son volume sans lyse cellulaire réelle.
La radiofréquence au niveau du tissu adipeux blanc semble
avoir un impact sur les collagènes de types I et III des septums
entre les lobules adipeux de l'hypoderme, mais surtout induit
une augmentation de la température de la matrice extracel-
lulaire péri-adipocytaire faite de collagènes de types IV et VI.
Derme La variété des tissus adipeux blancs, hypertrophiques ou
Fig. 38.1  Évaluation échographique. hyperplasiques, selon les patients et les zones du corps expli-
Source : R. Bousquet-Rouaud. querait les variations de réponse aux traitements.

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Chapitre 38. Cellulite

Appareils disponibles Protocole de traitement


Le premier appareil de radiofréquence monopolaire déve- Le nombre de séances pour une radiofréquence bipo-
loppé a obtenu l'agrément de la Food and Drug Administration laire est en moyenne de 5 à 10 séances espacées de 8 à
(FDA) en 2002 pour la remise en tension cutanée du visage, 10 jours.
du cou et du corps. L'absorption de bêta-carotènes est déconseillée et peut
Par la suite, des appareils bipolaires associés à l'aspiration et faciliter le développement d'une hyperpigmentation post-­
aux lasers infrarouges ont été proposés, agréés par la FDA inflammatoire. L'aspiration doit être réglée pour éviter les
pour la cellulite. L'application du laser infrarouge préchauffe ecchymoses à la face interne des cuisses. Les séances d'en-
le tissu cible et améliore la conductivité tissulaire, permettant tretien sont conseillées une à deux fois par an selon l'âge.
une meilleure pénétration du courant de radiofréquence. L'hygiène alimentaire, l'activité physique régulière et un
Depuis, de nombreuses radiofréquences avec plusieurs comportement raisonné vis-à-vis du soleil et des facteurs
pièces à mains ont vu le jour, avec ou sans aspiration, pou- de risque du vieillissement sont vivement conseillés.
vant être associées à des ultrasons de faible puissance, ou à
des champs électromagnétiques pulsés.
Enfin, de nouvelles radiofréquences externes avec des pan- Résultats
neaux externes se développent pour tenter de traiter les On obtient une diminution significative des irrégularités
patients de façon plus reproductive, les panneaux étant posés de surface et une amélioration de la texture et de la laxité
autour de la zone traitée durant le temps du traitement. de la peau en 3  mois [4] évaluée par cutométrie et
ultrasons.
Contre-indications La réponse est meilleure pour l'abdomen, tardive pour la
Outre les contre-indications classiques des radiofréquences face interne des bras où le photovieillissement est majeur, et
avec essentiellement les dispositifs électroniques implantés, s'associe à l'atrophie musculaire (fig. 38.2 et 38.3).
l'atrophie importante de la peau liée à l'âge ou à la génétique, La gestion des attentes des patients est capitale, d'où la
chez certains patients, de même que l'absence de pannicule nécessité de la première consultation avec prise de photo-
adipeux sont une contre-indication car la réponse aux traite- graphies en particulier, mesure du poids et revue générale
ments sera inexistante. des habitudes de vie.

Fig. 38.2  Radiofréquence unipolaire, une séance.


A. Avant. B. Après.
Source : R. Bousquet-Rouaud.

Fig. 38.3  Radiofréquence bipolaire.


A. Avant. B. Après 4 séances.
Source : R. Bousquet-Rouaud.

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Chapitre 38. Cellulite

Radiofréquence micro-aiguilles Subcision guidée


Une étude multicentrique récente intéressant 50 patientes [5] Technique invasive a minima, la subcision des fossettes cel-
a démontré une efficacité modérée à 6  mois de la radiofré- lulitiques est indiquée dans la cellulite de grade III exclusi-
quence délivrée par multi-aiguilles. En se fondant sur les résul- vement fibreuse des fesses et de la partie supérolatérale des
tats obtenus dans les rides du visage et du cou, les auteurs cuisses en l'absence de relâchement. La face antérieure des
proposent d'appliquer pendant 3 à 4  secondes les multi-­ cuisses est une contre-indication car l'hyperlaxité habi-
aguilles (température de 67 °C) après anesthésie locale dans le tuelle doit être traitée par la radiofréquence ou les
derme profond à la jonction derme-­hypoderme. ultrasons.
À noter l'emploi de radiofréquences plus invasives au
niveau du corps (abdomen, bras, cou) avec des sondes trans-
cutanées, qui vont pénétrer la peau de façon à chauffer plus Conclusion
profondément, avec ou sans liposuccion, et une bonne effi-
La cellulite, largement présente dans la population féminine,
cacité en lipolyse et remodelage cutané [6].
a fait l'objet de nombreux traitements. En se fondant sur les
observations histologiques, il est logique de cibler le remode-
Ultrasons lage collagène-élastine du derme profond et de l'hypoderme
Les ultrasons microfocalisés (MFU) utilisés pour la retente grâce aux techniques dont la profondeur permet d'atteindre
cutanée de l'ovale ciblent le derme réticulaire et l'hypoderme ces structures. Ainsi, lasers, radiofréquence et ultrasons
en fonction des sondes utilisées (jusqu'à 7 à 8 mm). La tem- peuvent être proposés précocement pour restaurer la texture
pérature au point de focale est de 60 à 70 °C et provoque une élastique de la peau et participer à l'harmonie de la
thermocoagulation suivie d'une activation de la contraction silhouette.
collagénique et d'une néosynthèse collagène-élastine.
Les ultrasons de haute intensité (HIFU) avec des sondes de Références
profondeur variable (4 à 13 mm) sont utilisés pour la lipolyse. [1] Pierard GE, Nizet JL, Pierard-Franchimont C. Cellulite: from standing
Ils sont focalisés dans le tissu adipeux sous-cutané, l'énergie fat herniation to hypodermal stretch marks. Am J Dermatopathol
acoustique étant transformée en chaleur. À 47 °C, on obtient 2000;22:34–7.
une dénaturation des protéines et à 57 °C une nécrose des [2] Avram  MM. Cellulite a review of its physiology and treatment.
adipocytes avec une amélioration de l'architecture des tra- J Cosmet Laser Ther 2005;7:1–5.
[3] Bousquet-Rouaud R, Bazan M, Chaintreuil J, Echague A. High fre-
vées interlobulaires.
quency ultrasound evaluation of cellulite treated with the 1064 nm
Seules deux études [7] rapportent que les HIFU suivis de Nd-YAG laser. J Cosmet Laser Ther 2009;11:34–44.
massage avec vacuum permettent une amélioration de la [4] Adatto MA, Adatto-Neilson RM, Morren G. Reduction in adipose
cellulite. tissue volume using a new high-power radiofrequency technology
combined with infrared light and mechanical manipulation for
Micro-ondes body contouring. Lasers Med Sci 2014;29(5):1627–31.
[5] Alexiades M, Munavalli G, Goldberg D, Berube D. Prospective mul-
Il a été récemment proposé un appareil émettant dans les ticenter clinical trial of a temperature-controlled subcutaneous
micro-ondes à 2,45  GHz. Ces « ondes froides » sont absor- microneedle fractional bipolar radiofrequency system for the
bées par les cellules graisseuses avec une action sur la cellu- treatment of cellulite. Dermatol Surg 2018;44:1262–71.
lite et les dépôts graisseux localisés. [6] Irvine Duncan D. Nonexcisional tissue tightening: creating skin
surface area reduction during abdominal liposuction by adding
Selon que l'on choisisse la pièce à main profonde ou de radiofrequency heating. Aesthet Surg J 2013;33(8):1154–66.
surface, l'action se fera sur l'amas graisseux ou le relâche- [7] Juhász M, Korta D, Mesinkovska NA. A review of the use of ultra-
ment cutané. Les études à venir devront confirmer l'effica- sound for skin tightening, body contouring, and cellulite reduction
cité de cette nouvelle technique. in dermatology. Dermatol Surg 2018;44:949–63.

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Chapitre 40
Cosmétiques pour l'homme
N.E.C. Schartz

« Les hommes ont le corps robuste fait de puissance […], la 4 % à avouer utiliser des soins du visage pour hommes en
peau rude est épaisse parce que les mœurs et conditions de 1990, ils étaient 21 % en 2001, 34 % en 2005 et 65 % en 2018.
l'homme sont accompagnées de gravité, de sévérité, audace et Le marché cosmétique mondial en 2017 ne représente pas
maturité », écrit Liébault en 1582 dans Trois livres de l'embellis- moins de 200 milliards d'euros (croissance de 4 à 5  % en
sement des femmes. Pour le poète Anacréon (550 av. J.-C.–464 2017), dont 37 % pour les seuls produits de soins de la peau
av. J.-C.), « l'homme pour affronter la vie a son courage, la (22  % pour les soins du cheveu, 19  % pour le maquillage,
femme sa beauté ». 12 % pour les parfums et 10 % pour les produits d'hygiène).
Le marché français des cosmétiques pour hommes suit la
tendance mondiale et ne cesse d'augmenter. Le chiffre d'af-
Une longue histoire faires pour les seuls produits de soin et de beauté a progressé
Les cosmétiques ne datent pas d'hier. Si les Grecs ont inventé de 294 % entre 1998 et 2003. En 2015, le marché de la beauté
la beauté, comme le pensait Jean d'Ormesson, les Romains se pour hommes, ou grooming, représentait des ventes mon-
sont, quant à eux, passionnés pour les cosmétiques. À la diales de 17,4  milliards d'euros, 30  % de plus qu'en 2011,
Renaissance, les rois de France n'échappent pas à la règle. selon le cabinet d'études Euromonitor. Le marché des cos-
Henri  III, dont on n'ignore pas la préciosité, redécouvre le métiques masculins représente actuellement 10,4 % du mar-
masque de Poppée et n'hésite pas à en faire usage. Louis XIV, ché cosmétique français. Sa croissance reste 1,5  fois plus
« le Roi le plus doux fleurant », est un grand consommateur rapide que celle du marché des cosmétiques pour femmes.
de cosmétiques. Teint pâle, lèvres rouges, le courtisan ainsi Si, au départ, les cosmétiques pour hommes se limitaient
paré est prêt pour la représentation. Caché sous une épaisse aux produits d'hygiène de base, comme les shampoings, gels
couche de fard, il n'affiche plus ni âge, ni sentiments. douche ou produits après-rasage, la gamme s'est considéra-
C'est avec le retour des croisades que le maquillage semble blement élargie, pour répondre désormais à tous les besoins
s'être répandu en Europe du Nord. La démocratisation des spécifiques de la peau masculine. Crèmes hydratantes, anti-
cosmétiques commence au XVIIe siècle, où ils seront utilisés rides, anticernes, masques, ou nettoyants visage, les hommes
par toutes les classes sociales. C'est après la Révolution fran- ont désormais leurs soins cosmétiques adaptés.
çaise que les hommes cessent de se maquiller. Dans les années Les hommes achètent principalement leurs produits sur
1930, seuls les produits destinés à l'hygiène corporelle sont Internet pour trois raisons : le choix est plus étendu, plus d'in-
utilisés par les hommes, à cause de l'image virile qu'ils se formations sont disponibles et la discrétion est assurée. Les
doivent de donner. Dans les années 1950, les premiers endroits à connotation très féminine, comme les parfume-
après-rasage arrivent et marquent un tournant dans l'indus- ries, n'attirant pas les hommes, les lieux de commercialisation
trie cosmétique pour homme. Pourtant, ces nouveaux gestes sont donc aménagés pour prévoir des emplacements qui leur
ont du mal à entrer dans les mœurs. Vers les années 1960, les sont réservés, distincts de ceux des femmes, mais avec aussi
déodorants sont mis en vente. L'homme viril, avec sa sueur et un libre accès aux produits, les hommes étant en général
ses muscles, est bousculé. Dans les années 1980, les marchés moins enclins à demander des conseils aux vendeuses.
stagnent à cause du retour en force du machisme. Mais la Les produits doivent donc être efficaces, simples et
mode de l'épilation et du styling des cheveux aussi dans les rapides à utiliser. Le packaging doit être adapté au public
années 1980, constitue une rupture par rapport à l'image masculin. Les produits destinés à l'homme doivent se distin-
naturelle du corps masculin. Il faut cependant attendre le guer nettement de ceux des femmes, puisque l'association
milieu des années 1990, avec la naissance de la presse mascu- avec les produits féminins est l'un des freins à l'achat.
line et l'évolution des mentalités des hommes, pour que la
cosmétique masculine commence vraiment à émerger. Des besoins en cosmétiques
spécifiques
Un marché en expansion
Les hommes ont des besoins cosmétiques différents de ceux
Depuis lors, les marchés sont relancés, car l'homme peut être des femmes. En effet, leur peau n'est pas la même (tableau 40.1)
à la fois viril et soigneux de son apparence. S'ils n'étaient que et nécessite des soins spécifiques et adaptés [1].

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Chapitre 40. Cosmétiques pour l'homme

Tableau 40.1  Propriétés des peaux masculines et féminines : une rouge (en moyenne plus de 18 %). La couleur de la peau mas-
comparaison culine est plus foncée en raison d'une quantité de mélanine
plus élevée, avec un risque de taches et d'hyperpigmentation
Propriétés de la Comparées à celle
Effets cliniques plus élevé. Le taux de sueur est plus élevé et la sueur est plus
peau des hommes des femmes
odorante, bien que les glandes apocrines soient moins nom-
Épaisseur de la peau ↑ Vieillissement lent,
breuses. La sueur est plus acide, en raison d'une teneur plus
(épiderme et derme) ↑ rides profondes
→ Densité en élevée en acide lactique. Les hommes commencent à transpi-
collagène rer à une température moins élevée [5].
Jonction Plus ondulée Vieillissement lent
dermo-épidermique Plus épaisse Des produits adaptés
Stratum corneum ↓ Peau fragile
 → Perte insensible ↑ Les hommes préfèrent une texture gel, moins grasse et moins
en eau collante, à temps de pénétration rapide. L'homme caucasien
pH ↓ Peau fragile aime les produits énergisants et est le premier consomma-
Pigmentation ↑ Risque : teur de produits destinés au contour des yeux, puisque c'est
hyperpigmentation, là que se forment les premières rides et qu'apparaissent les
taches signes de fatigue. Les ingrédients préférés des hommes sont
Vascularisation ↑ Érythème les actifs de référence : ceux qui accélèrent le renouvellement
Séborrhée ↑ Peau grasse, pores cellulaire (rétinol, alpha-hydroxyacide [AHA]), les anti-­
dilatés, acné oxydants dynamisants (vitamine C, guarana, thé vert), mais
Sueur ↑ Gêne sociale aussi les actifs bruts ancestraux (charbon, argile, eucalyptus,
etc.).
Compte tenu des spécificités du vieillissement masculin,
Par rapport aux femmes, les hommes ont une peau (épi- les crèmes hydratantes, antirides et anticernes figurent en
derme et derme) plus épaisse [2] en moyenne de 16 % à tous bonne place dans l'arsenal cosmétique [6]. Ainsi, en 2007,
les âges (visage + 22,5 %, cou + 8,8 %, dos + 12,4 %, membres les crèmes hydratantes représentaient 28 % du chiffre d'af-
supérieurs + 10,4  % et membres inférieurs + 5,8  %), car la faires des soins pour hommes et les soins anti-âge 20 %. Ces
densité de leur peau en collagène est plus élevée. Ainsi, à un deux types de produits représentent donc à eux seuls
âge donné, la teneur en collagène chez la femme correspond presque la moitié du chiffre d'affaires des soins pour
à celle d'un homme de 15  ans de plus. La jonction der- homme.
mo-épidermique est par ailleurs plus épaisse et plus ondulée. Ainsi, le marché des cosmétiques pour homme, plus récent
Il en résulte un vieillissement plus lent, mais des rides plus et moins mature que celui des femmes, connaît une crois-
profondes. Chez l'homme, le vieillissement cutané est pro- sance importante et plus rapide. De nouveaux produits qui
gressif, alors que, chez la femme, il est surtout notable après répondent à des besoins physiologiques spécifiques appa-
la ménopause. raissent (soin de la barbe) et font généralement l'objet d'un
Chez l'homme, le stratum corneum est plus fin et le ciment marketing ciblé. Néanmoins, on observe également le déve-
lipidique est moins épais, ce qui entraîne une perte insen- loppement de produits unisexes et un intérêt croissant pour
sible en eau plus élevée (de l'ordre de 5 %), aggravée après le les produits bénéficiant du label « bio ».
rasage (mesure par vapomètre). Le pH cutané est plus acide.
Tout cela explique une peau plus fragile [3]. Références
Chez l'homme, on note une hyperséborrhée relative liée [1] Elsner  P. Owerview and trends in male grooming. Br J Dermato
au rôle des androgènes [4]. Les glandes sébacées sont plus 2012;166(suppl 1):2–5.
volumineuses et plus nombreuses au niveau du visage, du [2] Diridollou S, Black D, Lagarde JM, et al. Sex- and site-dependent
variations in the thikness and mechanical properties of human
cuir chevelu et des organes génitaux que chez la femme. Le
skin in vivo. Int J Cosmet Sci 2000;22:421–35.
taux de sébum est aussi plus élevé chez l'homme [3] Mizukoshi K, Akamatsu H. The investigation of the skin characte-
comparative­ment à la femme dès la puberté (3 μg/cm2 chez ristics of males focusing on gender differences, skin perception,
l'homme versus 0,7  μg/cm2 chez la femme). La peau de and skin care habits. Skin Res Tech 2013;19:91–9.
l'homme est donc plus grasse, ses pores sont plus dilatés et [4] Giacomoni  PU. Gendre-linked differences in human skin.
les hommes ont une plus forte tendance à l'acné. Le taux de J Dermatol Sci 2009;55:144–9.
[5] Wilke K, Martin A, Terstegen L, Biel SS. A short history of sweat
sébum diminue après le rasage (mesure par Sébumètre®). gland biology. Int J Cosmet Sci 2007;29:169–79.
Par ailleurs, les hommes ont une vascularisation cutanée [6] Draelos  ZD. Cosmeceuticals for male skin. Dermatol Clin 2018;
plus développée que les femmes, et donc une peau plus 36:17–20.

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Chapitre 41
Toxine botulique et fillers
N.E.C. Schartz

Introduction r­ espectivement 47 % et 42 % des hommes interrogés. Ils sont


23 % à avoir peur de l'intervention esthétique en elle-même,
Les procédures esthétiques médicales chez les hommes sont plus particulièrement des aiguilles, tandis que seulement 2 %
en forte hausse depuis la fin des années 2000. Si seulement d'entre eux appréhendent la réaction de leurs amis ou de
9,4  % des actes esthétiques sont réalisés sur des hommes, leur famille. Enfin, ils sont près d'un sur quatre à ne pas envi-
contre 90,6  % sur des femmes, les hommes continuent de sager la médecine esthétique par simple conviction.
prendre des parts de plus en plus importantes dans le mar- Une étude de corrélation entre les zones du visage dont les
ché de l'esthétique. Ainsi, les actes esthétiques médicaux sur hommes se préoccupent particulièrement et celles pour les-
l'homme ont augmenté de 273 % entre 1997 et 2014 [1]. quelles un traitement est prioritairement envisagé a été
Le maintien des spécificités de genre impose des traite- menée. Dans les deux cas, la vallée des larmes, les rides
ments dédiés au genre masculin, afin d'éviter la féminisation péri-orbitaires (pattes d'oie), les rides transversales du front
des traits, l'aggravation des traits agressifs et l'hypercorrec- ou encore le double-menton arrivent en tête. La correction
tion. Ainsi, les injections de toxine botulique et de produits des tempes et l'augmentation du volume des lèvres arrivent,
de comblement trouvent tout leur intérêt dans la prise en quant à elles, en dernier [3].
charge du vieillissement masculin, mais elles doivent tenir
compte de nombreux paramètres, aussi bien liés aux motiva-
tions des patients qu'aux spécificités morphologiques et Spécificités morphologiques
ethniques de l'homme.
de l'homme
Quelques chiffres Les caractéristiques sexuelles secondaires et proprement mas-
culines de l'homme apparaissent dès la puberté, avec la pro-
Il existe peu de données traitant de l'intérêt des hommes duction de testostérone agissant sur différentes structures et
pour les actes esthétiques. Une étude transversale observa- divers organes exprimant des récepteurs spécifiques. L'homme
tionnelle a été réalisée entre 2015 et 2017 [2], sur une popu- a ainsi un contour du visage bien défini et anguleux, une
lation cible de 600  hommes volontaires, âgés de 25  ans et mâchoire marquée, un nez plutôt fort ainsi qu'un menton
plus ; 90 % des hommes interrogés ont déclaré adopter une puissant. Si bon nombre de traitements médico-esthétiques
routine de soins journalière et 54 % d'entre eux avaient aupa- sont identiques pour les hommes et les femmes, la morpho­
ravant réalisé des injections de toxine botulique. Par ailleurs, logie du visage masculin présente des spécificités qui doivent
77  % ont exprimé de l'intérêt pour les traitements esthé- être respectées afin d'obtenir des résultats harmonieux.
tiques par injection de neurotoxine et 83 % pour les fillers. En effet, non seulement le crâne de l'homme est plus grand
Ces traitements esthétiques rencontrent un fort succès que celui de la femme (qui n'en mesure que les quatre cin-
auprès de la patientèle masculine pour leur innocuité, l'ob- quièmes !), mais de plus sa forme diffère également. Les
tention rapide de résultats, l'éviction sociale étant de plus hommes ont tendance à avoir un front plus haut et plus
quasi inexistante. large. Ainsi, le muscle frontal peut être beaucoup plus large,
Les principales motivations chez l'homme sont, pour 70 %, offrant la possibilité de mouvements latéraux plus impor-
paraître « bien » à son âge, pour 51 %, avoir une apparence tants. La glabelle est plus large, avec des muscles corruga-
plus jeune, ou encore, pour 12  %, améliorer leurs relations teurs du sourcil plus étendus, notamment latéralement. Le
amoureuses. Fait intéressant, que l'on retrouve fréquem- regard masculin est surmonté d'une arcade sourcilière sail-
ment chez les femmes également, les actes médico-­ lante et le sourcil de l'homme est horizontal.
esthétiques ont vocation, dans 12 % des cas, à améliorer la Les hommes présentent des lèvres légèrement plus fines,
confiance en soi et à prévenir la concurrence dans le domaine surtout la lèvre supérieure qui est ordinairement légèrement
professionnel [3]. projetée en avant (de 1 à 2 mm). Le rapport volumique de la
En revanche, cette étude démontre également les freins lèvre supérieure à la lèvre inférieure est en général d'environ
qui concourent à décourager les hommes  : dans 47  % des un tiers (chez la femme, la lèvre supérieure peut être relative-
cas, les actes médico-esthétiques sont considérés comme ment plus charnue, sans dépasser une proportion de 1/1).
pas encore nécessaires. Par ailleurs, le coût de ces actes ainsi La couche adipeuse des structures sous-cutanées, et ce
que la peur de résultats d'aspect non naturel touchent quel que soit l'âge du patient, est beaucoup plus fine chez
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Chapitre 41. Toxine botulique et fillers

l'homme que chez la femme, même si les taux d'adipose Les tempes ne sont pas en reste, avec une diminution de
abdominale sont plus élevés. Ainsi, les femmes ont en 23  %, et les zones médianes latérale et médiane des joues
moyenne 3  mm de tissu sous-cutané en plus dans la zone présentent respectivement une perte de 22 % et 15 % [7].
malaire interne. Le rapport moyen entre la partie médiane et Il est également important de connaître les spécificités du
la partie latéro-externe des joues est de 1,5:1 chez les femmes vieillissement de l'homme en fonction de son ethnie. Ainsi,
et de 1,1:1 chez les hommes (fig. 41.1). Concrètement, cela se chez l'homme de type caucasien, les stigmates du vieillisse-
traduit par des joues plus plates et nettement plus angu- ment s'inscriront plus volontiers au niveau des rides de la
leuses chez les hommes, moins saillantes que chez les patte d'oie, du front et des sillons naso-géniens. Chez l'homme
femmes [4]. asiatique, ce sont particulièrement les paupières tombantes
D'un point de vue strictement esthétique, l'angle nasolabial qui sont marquées ainsi que les rides interoculaires. Enfin,
est de 97 degrés et chez les femmes de 104,9 degrés. En ce qui chez l'homme d'origine africaine, les rides nasolabiales, le
concerne le tiers inférieur du visage, la ligne de mâchoire est relâchement du cou et la ptose du menton sont
plus définie ; une mandibule saillante mène à un menton plus prédominants.
large et prononcé, présentant une projection plus en avant
[5]. Les hommes présentent également une masse muscu-
laire squelettique plus importante [6], qui concerne égale- Spécificités thérapeutiques
ment les muscles mimétiques du visage, plus toniques, et
plus particulièrement remarqués au niveau des masséters, du Les injections de produits de comblement et de toxine botu-
muscle mentonnier et des muscles de la glabelle. Il est néces- lique, en tant que procédures esthétiques peu invasives,
saire de ne pas exagérer les traits masculins, pour éviter qu'ils répondent au besoin des patients masculins de bénéficier
soient perçus comme agressifs ou menaçants. d'une prise en charge du vieillissement et de sa prévention
Ces variations anatomiques entre les genres ont une inci- avec un minimum d'effets secondaires et des résultats
dence sur le vieillissement et ses effets. Les rides des hommes visibles rapidement.
sont plus prononcées, sauf dans la région péribucale. Leur
tissu adipeux sous-cutané étant plus fin et en raison de la Toxine botulique [8, 9]
ptose graisseuse et musculaire liée à l'âge, l'apparition des Si un sillon profond au niveau de la glabelle peut donner un
rides d'expression est plus marquée chez les hommes que air colérique, voire agressif, à un visage masculin, les rides
chez les femmes (dont les rides restent plus superficielles). péri-orbitaires concourent, elles, à donner une impression de
C'est la perte de volume chez l'homme qui le fait paraître maturité. La plupart des patients ne souhaitent pas une
plus âgé que son âge. Le changement le plus important, en immobilisation ou un assouplissement complet des muscles.
termes de diminution des tissus mous, s'observe au niveau Le traitement par injection de toxine botulique doit être
de la zone infra-orbitaire, avec une perte de 40 % d'épaisseur. adapté spécifiquement au visage masculin. Par exemple,

A C

1 1,5

B D

1 1,1
Fig. 41.1  Les joues de l'homme sont plus plates et anguleuses que celles de la femme.
On observe un ratio partie médiane/partie latérale de la joue de 1,5/1 chez la femme et de 1,1/1 chez l'homme.
A, B. Avant. C, D. Après.
Source : © Merz Pharma France SAS.

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lors du traitement du muscle frontal, une technique avec suggéré que des doses plus élevées d'onabotulinumtoxine A
des points d'injection à l'horizontale (fig. 41.2), sur une zone renforçaient l'efficacité au niveau de la glabelle masculine.
latéralement étendue, est recommandée afin de minimiser Ces données suggèrent que les hommes nécessitent une
la cambrure des sourcils en circonflexe (effet Méphisto). dose totale de produit plus élevée (en moyenne deux fois
En effet, le sourcil de l'homme doit rester plat et horizontal. plus que la dose utilisée chez la femme).
Le praticien doit particulièrement veiller, lors du traitement
de la partie inférieure du muscle frontal, à rester le plus bas
possible (à environ 2  cm au-dessus du rebord orbitaire) Produits de comblement [10]
pour assurer la position naturellement basse des sourcils Les produits de comblement présentent un grand intérêt
chez l'homme, tout en évitant un alourdissement des sour- dans la prise en charge du vieillissement chez l'homme, en
cils et des paupières supérieures. La zone frontale étant plus raison du manque relatif de graisse sous-cutanée et de la
large et plus étendue chez l'homme, les points d'injection perte de volume inhérente à l'âge. Cependant, la restaura-
peuvent être plus nombreux et plus latéraux. En cas d'alopé- tion des volumes perdus avec des produits de comblement
cie androgénique, la toxine doit être injectée au-delà du dermiques comporte un risque de féminisation important.
front dans le cuir chevelu, afin d'éviter tout mouvement Le traitement du tiers moyen doit respecter scrupuleuse-
anormal et non naturel dans les zones d'alopécie. ment les proportions de la joue masculine. La correction par
Chez l'homme, davantage de points d'injection doivent injections de produits de comblement dermiques est préco-
parfois être réalisés lors du traitement de la partie latérale de nisée sur cette zone, lorsqu'elle présente des creux, liés ou
l'orbiculaire (fig. 41.3). Il est également recommandé de faire non à des lipodystrophies (fig.  41.4). Les produits voluma-
preuve de prudence dans le traitement de l'hypertrophie des teurs doivent être injectés latéralement le long de l'arcade
masséters, la toxine entraînant une diminution de volume et zygomatique, en évitant soigneusement un comblement
ayant ainsi une action féminisante. excessif dans les joues antérieures et médiales.
L'utilisation de la toxine botulique chez les hommes, Le caractère de séduction des femmes réside dans les
notamment en ce qui concerne la dose, mais aussi l'efficacité pommettes, tandis que chez l'homme, il se situe au niveau
et la sécurité des injections, ne fait pas l'objet d'une littéra- du menton et des masséters. L'utilisation de produits volu-
ture abondante. Les études prenant en compte le genre ont mateurs sur ces zones est donc particulièrement indiquée
révélé que l'onabotulinumtoxine A était moins efficace chez chez les patients masculins, notamment si le menton est en
l'homme que chez la femme à des doses identiques. Il a été retrait, ou pour élargir le menton et les mâchoires.

A B

Fig. 41.2  Traitement des rides du front par des points d'injection de toxine botulique sur une ligne horizontale et au niveau des golfes temporaux et
du cuir chevelu.
A. Avant. B. Après.
Source : © Merz Pharma France SAS.

A B

Fig. 41.3  Traitement de la patte d'oie.


Points d'injection de toxine botulique supplémentaires, par exemple en deux lignes. A. Avant. B. Après.
Source : © Merz Pharma France SAS.

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Chapitre 41. Toxine botulique et fillers

Fig. 41.4  Exemple de résultat après injection d'acide hyaluronique dans les pommettes et les vallées des larmes.
A. Avant. B. Après.
Source : N. E.C. Schartz.

Parmi les autres zones qui doivent être envisagées chez résorbables et les lasers ou les energy-based devices (ultra-
l'homme, l'injection des cernes creux donne des résultats sons, radiofréquence, etc.) s'avèrent très intéressants dans
particulièrement satisfaisants. La rhinoplastie constituant la la prise en charge esthétique masculine.
troisième indication chirurgicale la plus courante chez
l'homme, il convient de ne pas négliger de proposer une Références
rhino­ plastie médicale. Afin d'éviter tout risque de [1] Farhadian JA, Bloom BS, Brauer JA. Male aesthetics: a review of
­féminisation, le comblement de la lèvre supérieure doit être facial anatomy and pertinent clinical implications. J Drugs
Dermatol 2015;14(9):1029–34.
effectué avec beaucoup de précaution.
[2] Montes JR, Santos E. Evaluation of men's trends and experiences
Enfin, les spécificités du visage de l'homme peuvent in aesthetic treatment. J Drugs Dermatol 2018;17(9):941–6.
entraîner certains effets secondaires transitoires ; la den- [3] Jagdeo  J, Keaney  T, Narurkar  V, et  al. Facial treatment preferences
sité accrue du système vasculaire facial peut rendre les among aesthetically oriented men. Dermatol Surg 2016;42:1150–63.
hommes plus susceptibles de développer des ecchymoses [4] Scheib JE, Gangestad SW, Thornhill R. Facial attractiveness, symme-
avec des injectables, en particulier au niveau du bas du try and cues of good genes. Proc Biol Sci 1999;266(1431):1913–7.
[5] Donnelly SM, Hens SM, Rogers NL, Schneider KL. Technical note :
visage.
a blind test of mandibular ramus flexure as a morphologic indica-
tor of sexual dimorphism in the human skeleton. Am J Phys
Conclusion Anthropol 1998;107(3):363–6.
[6] Janssen I, Heymsfield SB, Wang ZM, Ross R. Skeletal muscle mass
Si les hommes représentent une petite proportion des and distribution in 468 men and women aged 18–88 yr. J Appl
Physiol (1985) 2000;89(1):81–8.
patients en médecine esthétique, ils n'en demeurent pas [7] Wysong A, Kim D, Joseph T, et al. Quantifying soft tissue loss in
moins un segment croissant de l'industrie cosmétique. Les the aging male face using magnetic resonance imaging. Dermatol
hommes présentent un intérêt pour les pratiques esthé- Surg 2014;40(7):786–93.
tiques peu invasives, offrant des résultats rapides et n'en- [8] Keaney TC, Alster TS. Botulinum toxin in men : review of relevant ana-
traînant que peu d'effets secondaires. Avec l'augmentation tomy and clinical trial data. Dermatol Surg 2013;39(10):1434–43.
du nombre de patients de sexe masculin à la recherche de [9] Scherer  MA. Specific aspects of a combined approach to male
face correction : botulinum toxin A and volumetric fillers. J Cosmetol
traite­ments médico-esthétiques, les praticiens sont de plus Dermatol 2016;15(4):566–74.
en plus amenés à prendre en compte les spécificités mor- [10] De Maio M. Ethnic and gender considerations in the use of facial
phologiques de l'homme. Enfin, des traitements esthé- injectables : male patients. Plast Reconstr Surg 2015;136(5 Suppl).
tiques à faible risque de féminisation, tels les fils tenseurs 40S-3S.

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Chapitre 42
Dermatologie esthétique
de l'intime chez la femme
M. Dubois, P. Coutant-Foulc, M. Jourdan

Introduction La première étude confirmant l'efficacité du laser CO2 frac-


tionné a été publiée en 2014 par l'équipe du Pr Salvatore. Il
L'ensemble des techniques de dermatologie esthétique s'agissait d'une étude pilote concernant 42  femmes méno-
peuvent presque toutes être adaptées à la sphère génitale. pausées présentant des symptômes d'AVV, et mettant en
C'est ce qui a été regroupé sous le nom de vaginal rejuvena- évidence une amélioration significative des sensations de
tion par les Anglo-Saxons, traduit en français par restaura- sécheresse et des dyspareunies après 3 séances [1].
tion génitale pour mieux prendre en compte la dimension La même équipe a publié deux études histologiques révé-
médicale de ces gestes. En effet, si certaines indications lant une amélioration de l'épaisseur de l'épithélium, des
purement esthétiques existent, il s'agit le plus souvent de signes d'activation des fibroblastes, et un relargage de glyco-
problèmes de sécheresse, dyspareunies, fissures récidi- gène, substrat principal du Lactobacillus, indispensable à la
vantes, ou béances qui affectent la qualité de vie de nos régulation du pH vaginal [2, 3].
patientes. Ces résultats initiaux ont été confirmés par d'autres études
Il s'agit de problèmes pour lesquels nous avions jusqu'à sur de plus larges effectifs rapportant également une amélio-
récemment peu d'outils à notre disposition alors qu'ils ration significative des symptômes d'AVV, de scores cliniques
affectent un très grand nombre de femmes. Le sujet deve- comme le VHIS (Vaginal Health Index Score), de la qualité de
nant moins tabou, la demande est croissante. vie sexuelle féminine, et de la qualité de vie générale [4–7].
Ce chapitre détaillera les principales techniques puis mon- Les résultats sont similaires chez les patientes suivies pour
trera lesquelles choisir en fonction des indications. cancer du sein sous anti-œstrogènes [8, 9].
Les signes urinaires du GSM ont également été étudiés
avec une amélioration notamment sur le nombre de mic-
Laser CO2 fractionné tions et d'épisodes d'urgenturie [10, 11].
L'amélioration de la trophicité cutanée est un effet bien Le laser CO2 fractionné semble améliorer également l'atro-
connu du laser CO2 fractionné sur la peau. Il est donc logique phie liée à un lichen scléreux, en complément des traite-
que cet outil soit intéressant dans la prise en charge des ments classiques, mais les études sont encore largement
troubles trophiques vulvovaginaux. insuffisantes [12].

En pratique
Intérêt au niveau génital Avant traitement, une consultation préalable est primor-
La muqueuse génitale est un épithélium malpighien non diale pour repérer un lichen scléreux à traiter par dermocor-
kératinisé. La lamina propria correspond au tissu conjonctif ticoïdes, un désir sexuel hypoactif (DSH), une conjugopathie,
sous-jacent, comparable au derme. ou une vulvodynie qui sont autant de facteurs de mauvaise
Le vieillissement et la carence œstrogénique liée à la méno- réponse au traitement laser.
pause sont à l'origine du syndrome génito-urinaire de la Le protocole de traitement classique comprend 3 séances
ménopause (GSM) qui comprend l'atrophie vulvovaginale à 1 mois d'intervalle, puis une séance annuelle d'entretien, à
(AVV) à l'origine d'une sécheresse et de dyspareunies, mais adapter au cas par cas.
aussi des signes urinaires type urgenturie, pollakiurie, cys- Une séance de laser CO2 fractionné au niveau génital dure
tites à ECBU stériles, etc. entre 8 et 15 minutes selon le praticien et le type de machine.
Les traitements classiques proposés jusqu'ici sont soit hor- On conseille à la patiente de stopper tout traitement local
monaux et parfois contre-indiqués, soit de simples hydra- 24 à 48  heures avant. Le praticien élimine au préalable les
tants et lubrifiants souvent insuffisants ou contraignants. Les sécrétions en passant une compresse endovaginale, puis
traitements laser apportent ainsi une alternative innovante introduit la pièce à main (fig.  42.1) sans lubrifiant aqueux
là où les praticiens avaient peu ou pas de solutions. pour ne pas interférer avec la cible du laser (échelle visuelle

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analogique [EVA] autour de 2–3/10 en moyenne à la pre- Au niveau génital, certaines machines proposent donc l'un
mière séance, diminuée aux suivantes). Les tirs lasers sont ou l'autre.
très peu ressentis, graduation par graduation, jusqu'aux der- Comme avec le laser CO2, les études actuellement à notre
niers centimètres vers l'introit où ils sont plus ou moins désa- disposition mettent en évidence une amélioration des signes
gréable, nécessitant parfois une diminution des paramètres. d'AVV, des signes urinaires du GSM [13, 14], mais également
Le nombre de passage dépend de l'appareil, selon si la des signes d'incontinence urinaire d'effort chez des femmes
pièce à main tire à 360° ou à 30°. jeune, avec des résultats modérés mais significatifs, nécessi-
On utilise ensuite une pièce à main vulvaire externe tant plus d'études.
(fig.  42.2) comparable à celle cutanée. Le passage vulvaire
externe est plus sensible. On insistera sur la zone du vesti-
bule postérieur souvent plus fragile entre l'introït et la four- Injections d'acide hyaluronique
chette, sur une éventuelle cicatrice d'épisiotomie, ou sur Les capacités de l'acide hyaluronique (AH) dans la prise en
toute zone cliniquement atrophiée voire fissuraire. charge thérapeutique vulvovaginale vont bien au-delà des
Les suites sont simples avec une sensation d'« échauffe- injections à visée volumatrice dans les grandes lèvres qui
ment » vulvaire pendant 24 heures, parfois quelques légers sont les seules à faire aujourd'hui l'objet de références biblio-
saignements ou modification des pertes pendant 24 à graphiques [15].
48  heures. Un arrêt des rapports avec pénétration et des Cette utilisation récente de l'AH nécessite bien sûr, comme
bains est préconisé pendant environ 1 semaine. toute nouvelle technique, de la prudence et quelques pré-
cautions : bien connaître les spécificités de l'anatomie vulvo-
vaginale afin d'éviter les risques d'embolisation vasculaire et
bien connaître les pathologies vulvaires afin d'identifier celles
susceptibles de compromettre le bénéfice de l'injection
d'AH.
Les propriétés hygroscopiques et élastiques intrinsèques
de l'AH le rendent particulièrement indiqué pour :
■ l'hydratation vulvovestibulaire des troubles trophiques

postménopausiques ;
■ la solidification d'une fourchette fine ou cicatricielle facile-

ment déchirable ;
■ l'assouplissement d'une cicatrice scléreuse ou d'une zone

rétractile de lichen ;
Fig. 42.1  Laser génital : pièce à main intravaginale. ■ la réfection de volume des grandes lèvres.
Source : M. Dubois. À ce jour, le seul acide commercialisé pour l'utilisation en
pathologie vulvovaginale est le Desirial® des laboratoires
Vivacy. Très possiblement, de nombreux autres AH utilisés
en skin booster pourraient donner le même résultat. Le
Desirial Plus® est quant à lui indiqué pour la réfection du
volume des grandes lèvres.

Indications
Injection du vestibule postérieur
L'injection d'AH dans la vulve présente de nombreux avan-
tages par rapport aux traitements classiques des troubles
trophiques induits par la ménopause :
■ il substitue efficacement un traitement hormonal qui peut

être contre-indiqué en cas d'antécédent ou de facteur de


risque de cancer hormonodépendant ;
■ il est beaucoup moins contraignant qu'une œstrogénothé-
Fig. 42.2  Laser génital : passage vulvaire externe.
Source : Dr P. Coutant-Foulc. rapie à applications pluri-hebdomadaires ;
■ il offre une meilleure efficacité que des topiques hydra-

tants.
Laser Er-YAG Ces injections, faciles à réaliser, sont à faire dans le vesti-
bule postérieur et latéral (fig. 42.3).
Avec une longueur d'onde à 2 940 nm, le laser Er-YAG peut Du fait de sa vascularisation importante et de la présence
avoir un effet purement thermique ou thermique et ablatif. de l'urètre, la paroi antérieure du vagin est à éviter.

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Chapitre 42. Dermatologie esthétique de l'intime chez la femme

la sécheresse de sa partie interne. L'injection d'un AH vis-


queux et volumateur, comme le Desiral Plus®, est plus facile-
ment réalisable que des injections de graisse autologue bien
plus documentées dans la littérature [17–19].

Les injections en pratique


Les injections seront réalisées sur une patiente en position
gynécologique, après avoir procédé à une désinfection de
toute la zone à la Bétadine® gynécologique, sous anesthésie
de contact par crème à la lidocaïne prilocaïne à 5 % (Emla®)
A B ou sous anesthésie locale par injection de xylocaïne non
Fig. 42.3  Lichen scléreux. adrénalinée à 1 %, à l'injection d'AH. À la date d'écriture de
A. Avant injection du vestibule postérieur. B. Après injection d'acide
ce texte, seuls les produits Vivacy Desirial® et Desirial Plus®
hyaluronique (AH) dans le vestibule postérieur.
Source : M. Dubois. (seringues préremplies à 1  ml) ont une autorisation pour
l'indication gynécologique.
Une ­ injection renouvelée annuellement garantira le Traitement de l'atrophie vulvovaginale
confort des relations sexuelles pendant 9 à 12 mois. Il est à
Des injections punctiformes, faites à l'aiguille 27 ou 30 gauge,
noter que le laser CO2 fractionné permettant de traiter tout
de faibles quantités de Desirial® seront réalisées dans le
le vagin sur toutes ses faces et toute sa longueur est une
derme superficiel à environ 0,5 à 1  cm de distance. Une
bonne alternative thérapeutique.
seringue est suffisante. Au niveau vaginal, les injections ne
Réparation de la fourchette sont pas ressenties comme douloureuses, alors qu'elles
peuvent l'être dans le vestibule, nécessitant une anesthésie
L'indication dans les cas de fissure de la fourchette n'est pas
locale plutôt que topique.
systématique. En effet, les fissures de la fourchette posté-
Un léger massage sera effectué en fin de traitement. Un
rieure peuvent être les conséquences de dermatoses vul-
discret saignement peut être observé dans les minutes qui
vaires (candidose, psoriasis, lichen scléreux) qu'il convient de
suivent le geste d'injection. Il est possible de constater de
traiter comme telles ou d'un vaginisme (contraction invo-
petits hématomes de la paroi postérieure du vagin. Les rap-
lontaire des muscles entourant l'orifice vaginal) qui nécessite
ports pourront être repris dans les 8 jours qui suivent.
une prise en charge spécifique de type relaxation périnéale.
Pourtant, les injections d'AH dans ces fissures de la four- Traitement des cicatrices, des brides scléreuses,
chette, associées à de la relaxation du périnée, peuvent ou des fissures vulvovaginales
constituer un traitement d'appoint intéressant en solidifiant
Une fois l'anesthésie obtenue, on injectera tangentiellement
cette zone fragilisée.
sous la zone concernée et 1 cm autour de part et d'autre 1 ml
de Desirial®. Les injections, rétro-traçantes, seront faites en
Injection de cicatrices ou bride scléreuse plusieurs plans dans le derme superficiel, moyen et profond.
L'efficacité des injections d'AH dans l'amélioration des cica- Elles pourront être faites à l'aiguille 27 gauge ou à la canule, en
trices cutanées n'est plus à démontrer. Il en va de même de éventail ou en quadrillage. Un léger massage de la zone trai-
son utilisation dans le traitement des cicatrices d'épisiotomie tée sera effectué. Les suites peuvent être marquées par des
ou bride scléreuses, rendant la pénétration difficile. L'effet microsaignements très transitoires et par des petites ecchy-
d'assouplissement sur le tissu cicatriciel durera même plus moses superficielles. Les rapports pourront être repris à J8.
longtemps que la présence de l'acide dans le derme grâce à la
néocollagenèse induite. Une injection tous les 18  mois Réfection de volume des grandes lèvres
semble, dans ce contexte, suffisante. Il est à noter que des Une seringue de 1 ml de Desirial Plus®, injectée à la canule
essais plutôt concluants ont été faits récemment avec de la 25 gauge dans chaque grande lèvre sous topique anesthésiant
graisse autologue ou du plasma riche en plaquettes (PRP). ou, au mieux, anesthésie locale au point d'entrée de la canule.
Dans ces indications, les lasers ablatifs fractionnés de remo- L'injection, profonde dans la zone sous dermique, doit être
delage se sont également avérés très efficaces. douce et suivie d'un massage. Une bonne connaissance ana-
tomique de la vascularisation et de l'innervation est indispen-
Volume des grandes lèvres sable avant de procéder à ce geste (fig. 42.4).
Même si l'on peut questionner l'utilité médicale de l'amélio-
ration de la plastique des grandes lèvres, il a été démontré Complications
que l'amélioration de l'aspect esthétique de la vulve renfor- Les complications immédiates sont des ecchymoses
çait l'estime de soi et donc la satisfaction sexuelle [16]. Par superficielles ou parfois des hématomes un peu plus pro-
ailleurs, certains auteurs rapportent que des grandes lèvres fonds ; un œdème post-injection peut apparaître pendant
épaisses et bien trophiques ferment mieux la vulve, limitant quelques jours, rendant les rapports douloureux. Les

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Chapitre 42. Dermatologie esthétique de l'intime chez la femme

A B C
Fig. 42.4  Atrophie des grandes lèvres.
A. Avant injections d'AH. B. Injection volumatrice des grandes lèvres à la canule. C. Restauration des volumes des grandes lèvres après injection d'AH.
Source : M. Dubois.

complications précoces sont une récurrence herpétique cacité́ durable de la RF monopolaire dans le traitement de la
qui peut être prévenue par un traitement prophylactique laxité vulvovaginale secondaire au post-partum chez 87  %
en cas d'antécédent, ou une nécrose par compression ou des patientes traitées ; l'amélioration de la laxité et des dys-
embolisation vasculaire. Il n'y a pas à ce jour de référence fonctions sexuelles persistait après 6 mois de suivi [21].
bibliographique. On peut considérer qu'il existe un chevauchement des indi-
cations entre les différentes techniques. En effet, la RF, par
amélioration du flux sanguin et épaississement du chorion,
Radiofréquences trouvera une indication chez des patientes ménopausées
souffrant d'atrophie vaginale et/ou de dyspareunie et/ou
d'infections urinaires à répétition [22], mais c'est surtout l'ef-
Principe et effets fet tenseur qui rendra compte de son intérêt dans le traite-
ment des béances vaginales et dans l'amélioration esthétique
Alors que la radiofréquence (RF) a montré son intérêt en
d'une vulve en perte de vitalité.
médecine esthétique pour la rétention cutanée depuis plus
de 15 ans, il paraissait logique de s'interroger sur ses effets
dans la sphère gynécologique. Physiquement, c'est l'appli- Indications
cation d'un courant électrique alternatif à travers le tissu On a souvent évoqué la distension des muscles périnéaux,
qui va engendrer une perturbation, une variation du champ leur fragilisation au moment de l'accouchement et l'intérêt
électrique et magnétique. À la rencontre d'une certaine de la rééducation périnéale, mais le vagin aura lui-même
résistance au sein des tissus biologiques, cette onde élec- subit des lésions de distension. Les fibres élastiques et mus-
tromagnétique va créer de la chaleur. Si la température de culaires lésées vont cicatriser en entraînant un degré variable
surface est mesurée à 40-43 °C, cela correspondrait à une de laxité, accentué à chaque accouchement, à l'origine d'une
température tissulaire efficace de 52 à 62  °C ; or, à véritable béance vaginale.
cette tempéra­ture, le collagène est dénaturé et on assiste à Concrètement, les béances vaginales s'évaluent à travers
une néocollagenèse. Cet échauffement des tissus, appelé des échelles encore très subjectives (VLQ, SSQ, FSFI, FSDS)
« diathermie », aura aussi pour conséquence d'augmenter qui aident à déterminer le degré de laxité, de gêne et de
le métabolisme cellulaire en général (notamment des retentissement. On recherchera les symptômes tels qu'une
fibroblastes) et la circulation sanguine. sensation d'un élargissement vaginal, une moindre percep-
Il y avait fort à parier que ces effets tissulaires soient trans- tion du sexe du partenaire entraînant une diminution du
posables à la muqueuse génitale. C'est effectivement une plaisir et une difficulté d'accès à l'orgasme, des « gaz vagi-
étude de 2010 qui a montré que les effets histologiques de la naux », l'extériorisation spontanée d'un tampon, une sensa-
RF génitale rejoignaient complètement ceux constatés sur la tion d'écoulement liquidien après un bain (signe de la
peau : activation des fibroblastes avec néocollagenèse jusque piscine). Sur le plan clinique, on évaluera les troubles péri-
dans la muscularis, se poursuivant au-delà de 6 mois après le néaux associés et on éliminera les diagnostics différentiels tel
traitement tout en conservant une surface intacte grâce à un que le véritable prolapsus, la pesanteur liée à une tumeur du
système de refroidissement [20]. bassin ou une atteinte neurologique périnéale liée à l'accou-
En pratique, la RF génitale est le plus souvent monopolaire chement, et les éventuels troubles psychologiques pour-
et c'est en 2010 que paraissait une première étude sur l'effi- voyeurs de dysfonction orgasmique.

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Jusqu'ici, la prise en charge pouvait faire appel à la rééduca- application d'un gel ou liquide de contact, la sonde va mas-
tion pelvienne, à la chirurgie (vaginoplastie, lipofilling surtout), ser, en petits mouvements circulaires ou va-et-vient, la vulve
aux injections d'AH, de PRP, au psychologue (sexologue) ; mais zone après zone (lèvre droite puis gauche, clitoris, périnée)
la RF semble aujourd'hui s'imposer comme une alternative de et toute l'aire endovaginale. Certaines RF nécessitent 4 à
premier choix, offrant confort et sécurité (fig. 42.5). 6  séances espacées de 1 à 2  semaines pour obtenir une
amélioration progressive de la laxité. D'autres machines
­
4
montrent des bénéfices après 3 séances espacées d'un mois
[23]. La plupart en tout cas comportent un système d'éva-
Variation laxité vaginale/tonicité

3
luation constante de la température transcutanée (retrans-
(versus prétraitement)

crit sur l'écran) avec rétrocontrôle sur l'énergie délivrée (il


2 module la puissance selon l'impédance du tissu mesurée), ce
qui permet de s'assurer du maintien constant d'une tempé-
1 rature souhaitée sur toute la zone du traitement. On constate
une amélioration de la tonicité vulvaire et vaginale ainsi
0
qu'une rétraction d'une vulve « flétrie » ou des lèvres trop
Avant Prétraitement 1 mois 3 mois 6 mois pendantes (fig.  42.6), une amélioration de la circulation
l'accouchement locale et de l'activité des fibres nerveuses autonomes per-
Fig. 42.5  Radiofréquence. mettant une meilleure lubrification (figure 3), une augmen-
83 % des patientes (25/30) ont rapporté une amélioration significative de
tation du plaisir féminin (mais aussi certainement du
la béance génitale jusqu'à atteindre un état proche d'avant l'accouche-
ment. L'efficacité était maintenue au-delà de 12 mois de suivi. Effet dès le partenaire) avec amélioration des fonctions orgasmiques
mois suivant le traitement Viveve®. [24], et une amélioration de petites gênes urinaires à type
Source : Yuki Sekiguchi, MD, PhD and al., Nonsurgical Treatment For Vaginal d'impériosité ou incontinence d'effort [25].
Introital Laxity With Radiofrequency Thermal Therapy: 12-Month Outcome Une autre RF monopolaire avec une délivrance profonde
Data © Viveve.
grâce à un gradient de température inversé permet un traite-
ment circonférentiel de l'introïtus vaginal, impact après
En pratique impact, et a publié qu'en une seule séance, la tension vagi-
Il existe actuellement plusieurs RF vulvovaginales. nale était revenue à des niveaux d'avant l'accouchement
Le traitement peut se dérouler sur 30 à 45  minutes, en chez 87 % des patientes ; ce résultat était même maintenu à
ambulatoire, sans anesthésie ni préparation préalable. Après 12 mois (fig. 42.7) [26].

Fig. 42.6  Avant (A) et après (B) 3 traitements de radiofréquence monopolaire transcutanée à température contrôlée.
Source : P. Coutant-Foulc.

Fig. 42.7  Avant (A) et après (B) 3 traitements de radiofréquence monopolaire transcutanée à température contrôlée.
Amélioration visible de la lubrification.
Source : P. Coutant-Foulc.
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Il n'y a pas de suites particulières à part un petit œdème Atrophie, sécheresse et dyspareunie
qui s'estompe en 24 à 48 heures. liées au syndrome génito-urinaire
de la ménopause (GSM) ou au traitement
Autres techniques d'un cancer du sein
En cas de dyspareunie, surtout d'intromission ou de pro-
Toxine botulique blèmes localisés, on commencera plutôt par des injections
La toxine botulique a été largement étudiée au niveau d'AH qui soulagent rapidement les patientes. Les rapports
génital dans la prise en charge du vaginisme et des vulvo- n'étant alors plus stoppés par la douleur d'intromission, si la
dynies provoquées. En effet, son injection permet de lut- patiente « découvre » une sécheresse plus interne, on peut
ter contre l'hypertonie de certains muscles du périnée proposer un complément de traitement laser.
mise en évidence en électromyographie (EMG) et aurait Si la patiente ressent une sécheresse plus globale et interne,
également un effet antalgique. Cette injection ne se subs- décrivant parfois une sensation de « papier de verre », le laser
titue pas à la prise en charge « classique », notamment CO2 sera plus approprié en première intention. Si, après les
psychosexologique et rééducationnelle, mais pourrait séances, la patiente note une amélioration globale mais la
accélérer la prise en charge quand l'indication est bien persistance d'une douleur localisée, souvent d'intromission,
posée. on complétera alors par une injection d'AH.
Les RF semblent avoir également un impact positif mais
nous les réserverons plutôt au cas de béance associée.
Lipofilling et plasma riche
en plaquettes (PRP) Signes urinaires
Au niveau génital, l'injection de graisse autologue per-
Plusieurs études ont mis en évidence une amélioration des signes
met d'améliorer la trophicité vulvaire dans des indica-
urinaires du GSM après traitement par laser  CO2 ou Er-YAG,
tions similaires à l'AH, mais pour des troubles souvent
égale­ment par les RF. Il s'agit surtout de patientes ménopausées,
plus importants ou pour un effet plus durable : volume
avec une amélioration surtout de la pollakiurie et l'urgenturie,
des grandes lèvres, fissures récidivantes ou atrophie
mais les items d'incontinence aussi sont améliorés et quelques
majeure dans le cadre par exemple de séquelles de radio-
études concernent des femmes jeunes, avec une incontinence
thérapie, injections vaginales pour béances, etc. C'est
urinaire d'effort du post-partum. Les résultats sont toujours
une technique sous anesthésie générale réservée aux
modérés, mais peuvent être intéressants dans certains cas.
chirurgiens.
Cela peut être accompagné d'injection de PRP, obtenu par
centrifugation après une prise de sang de la patiente. Fissures récidivantes
L'apport de facteurs de croissance améliorerait l'effet du Il faut avant tout éliminer une pathologie infectieuse ou
lipofilling et pourrait avoir un effet bénéfique en soi. inflammatoire (principalement candidose et lichen). Dans
les autres cas, une rééducation périnéale est souvent néces-
Photothérapie LED saire pour prendre en charge une hypertonie associée.
Les indications sont les mêmes que sur le plan cutané. Les Les injections d'AH ou de toxine botulique (sous contrôle
LED peuvent être utilisées pour leurs effets antalgiques, cica- EMG) peuvent cependant accélérer la guérison, les premières
trisants et anti-inflammatoires. La plupart des marques de en améliorant la trophicité locale, les secondes en diminuant
LED proposent désormais une pièce à main vaginale mais les l'hypertonie périnéale.
études manquent encore pour affirmer leur intérêt et affiner Certains proposent des séances de photothérapie LED, et
les paramètres d'utilisation. certaines sages-femmes s'équipent de RF multipolaires pou-
On peut s'inspirer de l'utilisation des LED au niveau de la vant favoriser la cicatrisation, mais les études manquent
muqueuse buccale. La photothérapie fait maintenant partie dans ces domaines.
des guidelines concernant la prise en charge des effets indési-
rables de la chimiothérapie et de la radiothérapie des Béance, diminution des sensations
cancers ORL. Les RF représentent la technique la mieux documentée dans
cette indication.
Les injections d'AH ou de graisse autologue au niveau du
Résumé par indications « zone G » mais également dans la paroi vaginale postérieure
pourraient également améliorer les sensations en cas de
Comme sur le plan cutané, plusieurs techniques peuvent béance avec troubles trophiques associés.
s'avérer intéressantes ou complémentaires pour la même L'effet des lasers CO2 et Er-YAG dans la prise en charge des
indication. Il n'existe pour le moment aucune étude compa- béances est souvent mis en avant par les commerciaux mais
rative. peu documentée.

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Radiothérapie, lichen scléreux [7] Sokol ER, Karram MM. An assessment of the safety and efficacy of
a fractional CO2 laser system for the treatment of vulvovaginal
On proposera plutôt un traitement par laser CO2 fractionné atrophy. Menopause 2016;23:1102–7.
pour améliorer la trophicité et l'élasticité des tissus. En cas [8] Pagano  T, De Rosa  P, Vallone  R, et  al. Fractional microablative
de fissure ou douleur localisée, les injections d'AH peuvent CO2 laser for vulvovaginal atrophy in women treated with
être proposées. Aucune étude n'assure que le laser CO2 peut ­chemotherapy and/or hormonal therapy for breast cancer: a
retrospective study. Menopause 2016;23:1108–13.
être utilisé en toute sécurité sur une muqueuse extrême- [9] Pieralli  A, Fallani  MG, Becorpi  A, et  al. Fractional CO2 laser for
ment fragilisée par la radiothérapie et il faut être très pru- vulvovaginal atrophy (VVA) dyspareunia relief in breast cancer
dent sur les paramètres. survivors. Arch Gynecol Obstet 2016;294:841–6.
[10] Pitsouni E, Grigoriadis T, Tsiveleka A, et al. Microablative fractio-
Vulvodynies nal CO2-laser therapy and the genitourinary syndrome of meno-
pause: An observational study. Maturitas 2016;94:131–6.
Les vulvodynies ne sont pas une indication aux techniques de [11] Perino A, Cucinella G, Gugliotta G, et al. Is vaginal fractional CO2
restauration génitale et, si elles ne sont pas correctement laser treatment effective in improving overactive bladder symp-
détectées au préalable, elles feront croire à un échec de celles-ci. toms in post-menopausal patients ? Preliminary results. Eur Rev
Cependant, en cas de GSM associée, l'amélioration de l'AVV Med Pharmacol Sci 2016;20:2491–7.
par laser ou AH pourra participer à l'amélioration de la vulvo- [12] Baggish MS. Fractional CO2 laser treatment for vaginal atrophy
dynie généralisée. De même, en cas de vulvodynie localisée and vulvar lichen sclerosus. J Gynecol Surg 2016;32:309–17.
[13] Gambacciani M, Levancini M. Short-term effect of vaginal erbium
provoquée, l'injection d'AH ou de toxine botulique peut sou- laser on the genitourinary syndrome of menopause. Minerva
lager partiellement et accélérer la prise en charge parallèle. Ginecol 2015;67:97–102.
[14] Gambacciani M, Levancini M, Cervigni M. Vaginal erbium laser:
the second-generation thermotherapy for the genitourinary syn-
Conclusion drome of menopause. Climacteric 2015;18:757–63.
[15] Fasola E, Gazzola R. Labia majora augmentation with hyaluronic
Les techniques de restauration génitale constituent une acid filler: technique and results. Aesthetic Surg J 2016;36:
réelle avancée pour améliorer la qualité de vie sexuelle et 1155–63.
générale de nos patientes, grâce à des procédures non inva- [16] Godman  MP, Hardwick-Smith  S. Evaluation of body image and
sives et efficaces. Les praticiens doivent donc savoir les pro- sexual satisfaction in women undergoing female genital plastic/
cosmetic surgery. Aesthet Surg J 2016;36(9):1048–57.
poser, mais également veiller à poser les bonnes indications [17] Vogt PM, Herold C, Rennekampff HO. Autologous fat tansplanta-
et connaître leurs limites, car la problématique génitale est tion for labia majora reconstruction. Aesthetic Plast Surg 2011;6:
souvent complexe et peut faire intervenir de nombreux fac- 215–8.
teurs associés nécessitant une prise en charge globale. [18] Salgado CJ, Tang JC, Desrosiers AE. Use of dermal fat graft for augmen-
tation of labia majora. J plast Reconstr Aesthet Surg 2012;65: 267–70.
[19] Jabbour S. Labia majora augmentation: a systematic review of the
Références literature. Aesthetic Surg J 2017;37:1157–64.
[1] Salvatore  S, Nappi  RE, Zerbinati  N, et  al. A 12-week treatment [20] Coad  JE, Vos  JA. Non-invasive radiofrequency tightening of the
with fractional CO2 laser for vulvovaginal atrophy: a pilot study. vagina in a sheep model. J Sex Med 2010;7(Suppl):131.
Climacteric 2014;17:363–9. [21] Millheiser LS, Pauls RN, Herbst SJ, Chen BH. Radiofrequency treat-
[2] Salvatore  S, Leone Roberti Maggiore  U, Athanasiou  S, et  al. ment of vaginal laxity after vaginal delivery : nonsurgical vaginal
Histological study on the effects of microablative fractional CO2 tightening. J Sex Med 2010;7(9):3088–95.
laser on atrophic vaginal tissue: an ex  vivo study. Menopause [22] Leibaschoff G, Izasa PG, Cardona JL, et al. Transcutaneous tempe-
2015;22:845–9. rature controlled radiofrequency (TTCRF) for the treatment of
[3] Zerbinati N, Serati M, Origoni M, et al. Microscopic and ultrastruc- menopausal vaginal/genitourinary symptoms. Surg Technol Int
tural modifications of postmenopausal atrophic vaginal mucosa 2016;XXIX:149–59.
after fractional carbon dioxide laser treatment. Lasers Med Sci [23] Alinsod RM. Temperature controlled radiofrequency for vulvova-
2015;30:429–36. ginal laxity: a pilot study. Lasers Surg Med 2016;48(7):641–5.
[4] Salvatore S, Nappi RE, Parma M, et al. Sexual function after frac- [24] Alinsod  RM. Transcutaneous temperature controlled radiofre-
tional microablative CO2 laser in women with vulvovaginal atro- quency for orgasmic dysfunction. Lasers Surg Med 2016;48(7):
phy. Climacteric 2015;18:219–25. 641–5. [Lasers Surg Med. 2017].
[5] Perino A, Calligaro A, Forlani F, et al. Vulvo-vaginal atrophy: a new [25] Magon N, Alinsod R. ThermiVa: The revolutionary technology for
treatment modality using thermo-ablative fractional CO2 laser. vulvovaginal rejuvenation and noninvasive management of
Maturitas 2015;80:296–301. female SUI. J Obstet Gynaecol India 2016;66(4):300–2.
[6] Filippini M, Del Duca E, Negosanti F, et al. Fractional CO2 laser: [26] Sekiguchi Y, Utsugisawa Y, Azekosi Y, et al. Nonsurgical treatment
from skin rejuvenation to vulvo-vaginal reshaping. Photomed for vaginal introital laxity with radiofrequency thermal therapy:
Laser Surg 2017;35(3):171–5. 12-month outcome data. J Sexual Med 2013;10:170–5.

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Chapitre 43
Particularités
de la dermatologie esthétique
sur peaux pigmentées
S. Fenniche

Introduction programmée génétiquement, cette classification est sou-


vent trompeuse et désavantageuse, ne pouvant prévoir
La notion de peau pigmentée ou de couleur ou ethnique est les réponses post-thérapeutiques agressives sur la peau.
un élément fondamental à appréhender avant d'envisager C'est ainsi qu'une nouvelle classification génético-­
tout acte esthétique. Le résultat d'un laser ou d'un peeling ethnique fut établie afin de réduire au maximum, avant
est directement corrélé à l'intensité de la couleur de la peau. un traitement agressif sur la peau, le risque de survenue
En effet, le principal risque lors d'un traitement d'une peau de complications (tableau  43.2). Cette classification va
pigmentée est la survenue d'une hyperpigmentation post-in- tenir compte, outre la couleur, l'épaisseur de la peau et les
flammatoire (HPI) persistant pendant de nombreux mois et traits du visage, de l'origine ethnique des patients (parents
de prise en charge difficile. L'hypopigmentation est moins et grands-parents). Six groupes ont pu être identifiés
fréquente, résultant d'une agression plus sévère de la peau selon un gradient Nord-Sud  : Nordiques, Européens,
pigmentée. Les troubles de la cicatrisation peuvent survenir Méditerranéens, Indo-Pakistanais, Africains et Asiatiques.
à la suite de toute lésion cutanée, pénétrant profondément Les patients provenant des régions les plus au nord
au niveau du derme et  altérant ainsi le processus de (Nordiques) ou les plus au sud (Indo-Pakistanais et
­réépithélialisation, chez des patients, par ailleurs, prédispo- Africains) sont les candidats les plus à risque, et c'est dans
sés à la formation de cicatrices hypertrophiques et de ché- cette catégorie où troubles pigmentaires et cicatriciels
loïdes. Plusieurs classifications ont été établies dans le but peuvent s'observer parfois de manière irréversible [2].
d'aider le praticien à prévenir toutes ces complications.
L'échelle de Fitzpatrick a permis de classer la peau en six
phototypes en fonction de la réponse aux UV
Lasers et dispositifs à base
(tableau 43.1) [1]. Les patients avec peau ethnique ont le d'énergie sur peaux pigmentées
plus souvent un phototype  IV, V ou VI. Cependant, en
raison d'une grande variabilité de la quantité des mélano-
cytes et de la distribution des mélanosomes entre les dif-
Photoépilation laser
férentes ethnies, et par conséquent d'une réponse Lors de l'utilisation d'un laser épilatoire, la mélanine épi-
dermique entre en compétition avec la mélanine du poil
et, par conséquent, le risque de complications liées à
Tableau 43.1  Classification de Fitzpatrick [1] l'agression de la peau devient plus grand par rapport aux
Phototype Peau
Érythème
Pigmentation
patients à peau plus claire. Pour éviter les dommages ther-
actinique miques et de léser l'épiderme, il faudra privilégier les lasers
I Très claire Toujours Nulle avec des longueurs d'onde plus longues, des durées de
II Très claire Toujours Faible pulses plus longues et avec des techniques de refroidisse-
III Claire Souvent Modérée ment adaptées.
IV Mate Fréquent Forte
Les longueurs d'ondes les plus sûres sont celles qui
émettent dans le spectre proche des infrarouges  : le laser
V Foncée Rare Très forte
Alexandrite 755 nm, le laser Diode 800–810 nm et le Nd-YAG
VI Noire Jamais Noire 1 064 nm.

Dermatologie esthétique
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Chapitre 43. Particularités de la dermatologie esthétique sur peaux pigmentées

Tableau 43.2  Caractéristiques et réponses des différentes catégories génético-ethniques [2]


Caractéristiques
Origine géographique Effets secondaires/ Classement
Catégorie ethnique de la peau et des traits
Habitat complications en tant que candidat
du visage
Nordiques Europe du Nord C : blanc à très blanc Érythème +++ Très bien
(ex. : Suédois, Irlandais) P : fine  Télangiectasie +
T : fins (petit nez, etc.)  Cicatrices
Européens Europe centrale C : bronzage blanc ou clair Faible incidence Excellent
(ex. : Français, Anglais) P : épaisseur moyenne
T : normes
Méditerranéens Europe du sud, les plus C : bronzage moyen Érythème + à ++ Très bien
(ex. : Espagnols, Grecs) au nord de l'Afrique, P : légèrement épaisse  HP + à ++
Asie de l'Ouest T : légèrement grossiers
Indo-Pakistanais Afrique du Nord, Asie C : bronzage foncé à brun HP +++ Bon pour les peelings moyens
(ex. : Pakistanais, du Sud foncé  HPo + Passable pour les peelings profonds
Thaïlandais) P : épaisse ou le resurfaçage léger au laser
T : modérés à marqués
Africains Moyenne et basse C : noire à noire profond HP +++ Passable pour les peelings légers à
(ex. : Noirs Américains, Afrique P : épaisse à très épaisse  HPo ++ moyens
Soudanais) T : légèrement marqués à Médiocre pour les peelings
très marqués profonds ou le resurfaçage au laser
Asiatiques Asie centrale Une classification séparée HP +++ Bien
(ex. : Japonais, Coréens) Asie orientale C : du clair au moyen au  Érythème ++,
sombre tendance à l'HP
P : épaisse à très épaisse
T : marqués à très
marqués
C : couleur ; HP : hyperpigmentation ; HPo : hypopigmentation ; P : peau ; T : traits.

■ Le plus faible taux de complications chez les peaux foncées des fluences faibles et rallonger le temps de pulse pou-
est observé avec le Nd-YAG 1 064 nm long pulse, qui consti- vant aller jusqu'à 400 ms sur les phototypes IV–VI et ainsi
tue la longueur d'onde de référence des patients ayant un éviter les dommages thermiques de l'épiderme. Des hypo-
phototype IV, V ou VI. En raison d'une plus grande pénétra- pigmentations peuvent être observées dans les suites du
tion de cette longueur d'onde, le t­raitement est plus dou- laser Diode sur les peaux les plus foncées et des zones
loureux, nécessitant une anesthésie topique au préalable. Il tests sont fortement conseillées.
faut éviter d'utiliser de fortes fluences sur ces peaux pigmen- ■ Le laser Alexandrite 755  nm long pulse, présentant une

tées car elles sont souvent associées à un risque accru de longueur d'onde courte très absorbée dans la mélanine,
troubles pigmentaires. Les doses maximales utilisées dans n'est théoriquement pas indiqué sur des peaux pigmen-
les différentes études sont comprises entre 14 et 36 J/cm2, en tées. Très peu d'études ont été menées sur des photo-
sachant que la plus forte fluence tolérée est de 100 J/cm2 types  IV-VI. La plus grande série rapportée est celle de
pour les phototypes  IV-V et 50  J/  cm2 pour les photo- Kutlubay [5] portant sur 2359 patients (phototypes II à V),
types  VI [3]. Des durées de pulse longues, de l'ordre de qui a conclu à l'efficacité du laser Alexandrite long pulse
30  ms, permettent un refroidissement efficace de l'épi- avec très peu d'effets secondaires, souvent transitoires
derme et minimisent ainsi le risque d'effets secondaires. (hyperpigmentation  : 0,7  % ; hypopigmentation  : 0,5  %).
■ Le laser Diode 810 nm peut être utilisé en mode statique Les paramètres utilisés étaient les suivants : 15–20 J/cm2,
à haute fluence (30–40 J/cm2, 30–55 ms, 1 Hz) ou dyna- 12–15 mm, 10–40 ms. Cependant, afin d'éviter des com-
mique à basse fluence (10 J/cm2, 20 ms, 10 Hz), avec des plications inattendues, nous recommandons la pratique
résultats comparables entre les deux techniques. Sur les de zones tests au préalable sur les peaux les plus foncés,
peaux pigmentées, le mode dynamique serait préférable, avec des fluences plus faibles de 8–10 J/cm2 en augmen-
permettant au bulbe pileux de chauffer progressivement tant progressivement les doses en fonction de la
jusqu'au point de destruction tout en protégeant l'épi- tolérance.
derme par la pièce à main refroidie. Avec cette fréquence ■ La lumière intense pulsée (intense pulse light [IPL]) est

élevée et en déplaçant constamment la pièce à main, une technique d'épilation adaptée aux phototypes
aucune partie de la peau n'est sur-empilée (over-stacked) clairs. Les études rapportant l'efficacité de l'IPL sur des
de plus de 10  J/cm2, et ainsi protégée des risques de phototypes élevés sont très rares. En général, les patients
­brûlures et de la douleur [4]. Il faudra toujours privilégier avec un phototype supérieur à IV ne pourront pas être

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traités, bien que la possibilité de traiter des phototypes laser CO2 fractionné et 1 à 1,5 KJ/séance pour le Fraxel, et
plus élevés ait été rapportée dans certaines publications, jusqu'à 125 mJ/cm2 et 30 % pour le laser CO2 fractionné et
en utilisant des filtres au-delà de 645 nm et en fraction- 3 à 4 KJ/séance pour le Fraxel pour les acnés sévères sans
nant les pulses avec de long délais interpulses. Ismail [6] troubles pigmentaires du visage [7]. En photorajeunissse-
a comparé l'IPL par rapport au laser Nd-YAG 1 064 nm ment, les paramètres utilisés sur peaux ethniques sont
sur 50 patientes avec un phototype IV, V et VI, pour une plus faibles et aussi bien l'énergie délivrée que la densité
épilation axillaire, et a conclu à l'efficacité des deux peuvent affecter le risque d'HPI ; cependant, la densité est
machines avec très peu d'effets secondaires, avec une un facteur déterminant plus fort chez les patients à
différence significative pour le laser  Nd-YAG. Les para- ­phototype foncé, et l'utilisation de faibles densités peut
mètres de l'IPL utilisés étaient  : longueur d'onde éviter les HPI, en minimisant les lésions de la jonction der-
610–1  000  nm, durée de pulse 25–45  ms, fluence mo-épidermique. En effet, sur une série de 30 patientes à
22–32 J/cm2 et un spot 3 cm2. phototype élevé [8], en variant les fluences et les densités,
Il est particulièrement recommandé en photoépilation les auteurs ont montré que les résultats étaient meilleurs
laser d'éviter les patients bronzés et de mettre au repos les quand les densités étaient faibles et les fluences fortes
mélanocytes grâce à une photoprotection efficace au (16 mJ et 125 MTZ > 8 mJ et 125 MTZ > 8 mJ et 250 MTZ
moins 2 semaines avant le traitement et d'utiliser un der- > 16 mJ et 250 MTZ).
mocorticoïde dans les suites de l'acte laser pendant
5 jours. Lasers pigmentaires
Détatouer sur peau pigmentée doit être réalisé avec
Lasers fractionnés ablatifs (LFA) grande précaution en raison d'un risque de dyschromie.
et non ablatifs (LFNA) La peau en périphérie et sous le tatouage peut aussi être,
Depuis l'avènement de la photothermolyse fractionnée, de façon accidentelle, la cible du laser. Cela peut entraî-
les lasers ablatifs conventionnels dits de relissage (CO2 ner une hypopigmentation en halo persistante et résis-
impulsionnel 10  600  nm, erbium-YAG 2  940  nm) sont tante. L'application d'une protection opaque en
exceptionnellement utilisés dans le traitement de l'hé- périphérie du tatouage est recommandée pour surseoir
liodermie sur les phototypes foncés en raison d'une abra- à tout risque. Il faut noter que cette hypochromie est
sion cutanée forte avec des risques élevés de complications due à l'interaction compétitive entre le laser et les
pigmentaires et infectieuses. Des complications, aussi mélanocytes et les kératinocytes chargés en pigment
bien cicatricielles qu'inflammatoires (HPI), s'observent mélanique de la région suprabasale. Pour cela, les
également dans les suites d'un laser fractionné si des pré- lasers Q-Switched ou déclenchés ou picosecondes émet-
cautions ne sont pas respectées. Elles surviennent beau- tant à 532  nm sont donc contre-indiqués sur la peau
coup plus après les LFA que les LFNA du fait d'un plus foncée ; de même, ils sont à éviter absolument pour trai-
grand dommage épidermique. Il faut noter qu'au niveau ter tout mélasma sur peau ethnique en raison d'un
de la face, les zones traitées réagissent différemment au grand risque d'HPI.
laser, et certains sites nécessitent un réajustement et une En considérant les résultats des principales publica-
diminution des paramètres (région sous-orbitaire par tions portant sur le mélasma et la peau pigmentée, les
exemple). En comparant le laser Fraxel 1  550  nm et le lasers recommandés après échec des traitements
laser CO2 fractionné 10  600  nm dans le traitement des topiques sont le Nd-YAG Q-switched 1  064  nm à faible
cicatrices d'acné sur des phototypes foncés, les auteurs fluence et forte fréquence (fig. 43.1) ciblant les mélano-
rapportent un taux proche d'HPI avec les deux machines somes et épargnant les mélanocytes, les lasers picose-
(17 et 14  % respectivement), mais une éviction sociale condes 755 et 1  064  nm, en plus des LFNA. Très peu
plus courte pour le Fraxel. Les paramètres recommandés d'études ont été rapportées sur tatouage chez des
dépendent de la profondeur des cicatrices et des traits du patients avec phototype V–VI. Dans une série portant sur
visage : si cicatrices légères avec troubles pigmentaires du 404 patients éthiopiens de phototype IV–V avec tatouage
visage, faible fluence 60  mJ/cm2, densité 10  % pour le bleu-noir au niveau du visage et du cou, traités par

Fig. 43.1  Mélasma après 10 séances de ND-YAG 1 064 nm Q-switché (2 J/cm2, 10 Hz).


Source : S. Fenniche.

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laser Nd-YAG Q-switched, les auteurs ont noté une HPI La cryolipolyse est la technique non invasive la plus large-
chez 44 % des patients régressant au bout de 2 à 4 mois ment utilisée avec succès pour la réduction du tissu adipeux
[9]. Des zones tests sont fortement recommandées chez sur une grande variété de peaux ethniques avec un très faible
ces patients en ayant recours toujours à la plus basse risque d'HPI.
fluence efficace.
Radiofréquence fractionnée
Lasers vasculaires La radiofréquence (RF) bipolaire peut être fractionnée en
En utilisant le laser à colorant pulsé (LCP) 595  nm, en multipliant les électrodes, augmentant les énergies déli-
mode de photothermolyse sélective avec des durées vrées sur des impacts fins et profonds. Cette technique
d'impulsions courtes de 0,5 à 6  ms, on privilégie moins permet ainsi de traiter les patients avec des phototypes
l'effet thermique, alors qu'en mode de photocoagulation élevés. Les RF à micro-aiguilles sont des dispositifs plus
sélective avec des durées de pulse plus longues de récents et un des avantages par rapport aux lasers frac-
10–30  ms, c'est l'effet thermique qui prédomine. Il est tionnés est que l'énergie est délivrée de façon plus sélec-
important alors de mettre une fluence suffisamment éle- tive du fait d'un espacement et d'une profondeur fixe de
vée pour être efficace, mais pas trop cependant de façon chaque aiguille. Plusieurs publications ont montré l'effica-
à ne pas craindre de risque ­cicatriciel et de dyschromie cité de cette procédure sur les peaux pigmentées [11],
sur les peaux pigmentées. Très peu de données sont dis- présentant des cicatrices d'acné modérées à sévères, sur
ponibles sur l'utilisation de lasers à colorant sur des peaux les acnés vulgaires particulièrement inflammatoires et en
pigmentées. Sharma et Khandpur [10], sur une série de réjuvénation faciale avec très peu d'effets secondaires en
25  patients indiens de phototype  IV–V (âge moyen de fin de traitements : croûtes (0–24 %), HPI (0–16 %), cica-
25 ans), présentant un angiome plan, ont conclu à l'effica- trisation (0–6 %).
cité du LCP 585  nm en utilisant le mode purpurique
(0,45 ms, 5–7 J/cm2, 7 mm) avec très peu d'effets secon- LED
daires à type d'HPI (7  patients) et d'hypopigmentation La LED (light emitting diode) est une lumière non cohé-
(1 patient). rente, quasi monochromatique, utilisée en réjuvénation,
Le laser KTP 532 nm est surtout indiqué pour traiter les sans risque d'effets secondaires des lasers ablatifs par
lésions vasculaires chez les phototypes  I, II ou III. Sur les absence d'effet thermique sur la peau. Sur des photo-
peaux foncées, ce laser peut induire des HPI ou des hypo- types foncés V et VI, la LED entraîne une amélioration de
chromies, plus rares, mais parfois définitives. la texture de la peau, réduit l'apparence des fines ridules
Le laser Nd-YAG 1 064 nm est indiqué chez les patients à et des pores dilatés. Dans une série de 60 femmes présen-
peau foncée, mais doit être utilisé avec prudence car il induit tant un mélasma (phototypes  V et VI), les patientes
un effet photothermique important, qui fait que la contrac- étaient exposées à une LED 633  nm, suivie 2  jours plus
tion vasculaire brutale peut induire brûlure et dyschromie tard d'une LED 830  nm, pour une durée totale de
parfois définitive. 36 séances sur une période de 9 mois, et les auteurs ont
Le laser Alexandrite 755 nm occupe une place intermé- montré une amélioration du mélasma et de la texture de
diaire entre le LCP et le Nd-YAG 1  064  nm long pulse. la peau [12].
L'absence d'un end point précis, reproductible, qui per-
met d'être certain de ne pas surexposer cette peau trai-
tée pigmentée, peut être source de complications Traitement par micro-aiguilles
cicatricielles. (microneedling)
Ultrasons focalisés (HIFU) Le microneedling, en préservant l'épiderme, permet de
réduire au maximum les risques de survenue d'effets
Les ultrasons focalisés à haute énergie sont indiqués dans le
secondaires, notamment de troubles pigmentaires
relâchement cutané du visage, du cou, des paupières et du
observés avec les techniques de relissage conventionnels,
décolleté. En raison de l'absence de compétition entre la
et constitue un très bon choix thérapeutique sur les pho-
mélanine et les ondes acoustiques, ce traitement peut s'ef-
totypes foncés. Cette technique est particulièrement
fectuer sur tous les phototypes de peau et à n'importe quelle
efficace sur les cicatrices d'acné, seule ou en association
période de l'année sans complications pigmentaires ou
avec le peeling à l'acide glycolique à 35  % ou l'acide
cicatricielles.
trichloracétique à 15 %, ou en association, par l'intermé-
diaire d'une délivrance assistée de médicaments, telle
Cryolipolyse que des micro-injections d'acide tranexamique pour le
Au contraire de la liposuccion, les appareils non invasifs uti- traitement du mélasma, ou d'infusions de produits anti-
lisés pour la réduction adipeuse n'entraînent pas de lésions âge associés à des dépigmentants pour les mélanoses
cutanées laissant des séquelles pigmentaires ou cicatricielles. péri-orbitaires [13].

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Peelings sévères par rapport aux peaux plus claires. Cependant, cer-
taines peaux ethniques développent plus de troubles pig-
Les peelings superficiels sont possibles sur les peaux pig- mentaires en rapport avec le rayonnement UV par rapport
mentées ou de couleur, mais les peelings moyens doivent aux Caucasiens.
être évités. Les peelings profonds sont contre-indiqués, Les rides touchent surtout le haut du visage, particuliè-
du fait du risque de survenue d'une dyschromie, de cica- rement la région glabellaire, et plus rarement la région
trices hypertrophiques ou de chéloïdes. Les peelings péri-orale. La ptose des sourcils et les rides de la patte
superficiels (acide glycolique 20–70 %, acide salicylique d'oie apparaissent plus tardivement sur les peaux de cou-
20–30 %, acide trichloracétique 10–30 %) pénètrent du leurs. Les techniques et les sites d'injections, les doses
stratum corneum vers le derme papillaire et sont sur- administrées de la toxine botulinique sont les mêmes que
tout utilisés sur les phototypes foncés en raison de leurs ceux des Caucasiens. Pour certaines peaux ethniques, la
efficacité et sécurité dans le traitement du vieillissement toxine peut avoir un effet plus prolongé et une efficacité
cutané (fig.  43.2). Les peelings moyens tels que l'acide supérieure avec l'aboBT-A [14].
trichloracétique [TCA] 30–50  % pénètrent jusqu'au
derme réticulaire et doivent donc être utilisés avec
beaucoup de précaution, et pourront se discuter au cas
Produits de comblement
par cas pour le traitement des mélasmas mixtes ou der- Le nombre d'études cliniques évaluant l'efficacité et la
miques, le photovieillissement modéré et les cicatrices sécurité des produits de comblement sur les phototypes
d'acné. L'héliodermie est généralement moins fréquente foncés est limité. D'excellents résultats esthétiques
et moins sévère chez les patients aux phototypes V et VI peuvent être obtenus chez les patients avec une peau de
et, par conséquent, les peelings seront moins utilisés couleur avec le choix correct de l'injectable, la profon-
dans cette indication. D'autres mesures peuvent être deur appropriée et la technique de l'injection. Pour dimi-
pratiquées pour diminuer le risque de complications, en nuer le risque de complications, certains auteurs
commençant toujours par de faibles concentrations recommandent de réduire le nombre de piqûres et d'in-
puis en augmentant progressivement, en espaçant les jecter au niveau du derme moyen pour éviter la destruc-
séances (2 à 4 semaines) et en arrêtant tout traitement tion de la jonction dermo-épidermique. Une étude
par rétinoïdes topiques une semaine au moins avant le clinique, dont 20  % des patients présentaient une peau
peeling [13]. de couleur, a montré que les injections interrompant la
jonction dermo-épidermique telles que la technique en
Toxine botulinique éventail, une vitesse d'injection rapide et des volumes
élevées sont responsables de la survenue d'effets
Sur les peaux de couleur de phototypes IV à VI, la pigmen- secondaires locaux [15]. En cas de survenue d'un
tation a un effet protecteur qui fait que les signes de photo- érythème intense, des applications de dermocorti-
vieillissement sont généralement plus tardifs et moins coïdes forts peuvent éviter le risque d'une dyschromie

Fig. 43.2  Résultat après 4 séances d'un peeling par TCA à 15 %.


Source : S. Fenniche.

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Chapitre 43. Particularités de la dermatologie esthétique sur peaux pigmentées

­ost-­
p inflammatoire. Toutes les études faites sur des ■ les traitements locaux ne seront plus efficaces ;
peaux pigmentées évaluant le risque de survenue de ■ discuter alors les lasers  : les lasers fractionnés non
cicatrices hypertrophiques, de chéloïdes, de dyschromie ablatifs, le laser Nd-YAG Q-switched 1 064 nm à faible
ou d'hypersensibilité, utilisant l'acide hyaluronique ou fluence et forte fréquence, le laser Nd-YAG 1 064 nm
l'hydroxylapatite de calcium, ont montré que le taux de picoseconde et le laser Alexandrite picoseconde
complications est identique à celui observé chez les 755 nm.
Caucasiens [16]. ■ il convient de retenir que l'hyperpigmentation post-in-

flammatoire disparaît au bout de 2 mois à 2 ans ou persiste


plusieurs années si l'incontinence pigmentaire a été très
Prise en charge profonde [16] ;
de l'hyperpigmentation ■ qu'aucun traitement préventif n'est efficace excepté

post-inflammatoire (HPI) une mise au repos des mélanocytes par une


sur peau pigmentée ­photoprotection adaptée – UVA, UVB, lumière visible
(bleu-violet) ;
■ qu'il faut privilégier les faibles fluences, les densités basses

Traitement préventif et de longues durées de pulse.


Des Recommandations pratiques chez le patient à peau
■ Pour les sujets à risque, il faut mettre au repos les mélano-
pigmentée sont fournies dans l'encadré 43.1.
cytes par une photoprotection à spectre large (UVA,
UVB, lumière visible) au moins 2 semaines avant l'acte et
jusqu'à 2  semaines après la disparition complète de Encadré 43.1
l'inflammation.
■ Éviter les actes agressifs sur les zones photo-exposées en
Recommandations pratiques chez le patient
été. à peau pigmentée
■ L'hydroquinone 2 à 4  % dans les 2  semaines précédant 1. Ne pas traiter des patients bronzés ou des zones photo-­
l'acte peut être discutée, mais n'a pas montré d'efficacité exposées en saison estivale.
prophylactique dans la majorité des études [17]. 2. Informer les patients sur les éventuels risques de
■ Le meilleur traitement préventif consiste en l'application dyschromies : faibles (RF, ultrasons, lasers fractionnés
d'un dermocorticoïde fort après l'acte réalisé pendant 3 à non ablatifs [LFNA], pigmentaire, vasculaire), modérés
5 jours, ou bien d'un topique cicatrisant à activité anti-in- (laser fractionné ablatif [LFA]), élevées (lasers
flammatoire en cas de contre-indication du dermocorti- ablatifs).
coïde (en raison de l'acte réalisé ou de la dermatose 3. Éviter l'apparition d'un érythème en post-acte, auquel
sous-jacente). cas l'application d'un dermocorticoïde fort peut s'avérer
nécessaire.
Traitement curatif 4. Éviter la formation d'ecchymose, de purpura, d'éro-
En cas d'HPI précoce sions ou de bulles facteurs de dyschromie également. Il
est préférable dans ce sens de ne pas travailler avec des
Le traitement est le suivant :
paramètres purpuriques pour le laser à colorant pulsé.
■ photoprotection à spectre large ;
5. Espacer les intervalles de traitement  : 2  mois ou plus
■ dermocorticoïde seul ou associé à l'hydroquinone à 4 % et
pour un relissage par LFNA, 1 mois au moins pour les
relais après 4  mois avec des dépigmentants topiques en
lasers vasculaires.
cas de bonne réponse ;
6. Utiliser de faibles fluences avec plus de séances de
■ peelings superficiels ou moyens possibles en cas de
traitements.
résistance ;
7. Privilégier de faibles densités pour obtenir une ré-épithé-
■ arrêt d'un éventuel traitement par la trétinoïne qui va
lialisation sans hyperpigmentation.
entretenir l'inflammation, sauf en cas d'une acné
8. Choisir de longues durées de pulse.
pigmentogène.
9. Les mélanocytes étant sensibles au changement de
En cas d'HPI tardive température, un froid intense va les détruire alors
qu'un froid plus modéré va les stimuler. Chez les sujets
■ Si la pigmentation est épidermique (dermoscopie, lumière
à risque, il faut toujours penser à baisser le système de
de Wood), on adopte le même protocole que les HPI
refroidissement.
précoces.
10. Ne pas multiplier les appareils durant la même séance.
■ Si la pigmentation est profonde (incontinence pigmen-

taire) :

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Chapitre 39
Relâchement cutané
de l'abdomen et des membres
S. Dahan

Introduction Le médecin devra bien faire comprendre au patient


les  résultats attendus et se garder de toute attente
Aujourd'hui, ce n'est pas seulement le visage que l'on affiche excessive.
à l'autre mais le corps tout entier. Le « remodelage » du corps Bien entendu, on pourra associer ces méthodes les
est une préoccupation forte des patients qui pratiquent du unes aux autres et avec les autres traitements d'embellis-
sport souvent avec un régime nutritionnel. sement corporel (ultrasons, cryolipolyse, etc.). La chirur-
Après les grossesses, les amaigrissements importants, les gie sera proposée en cas de relâchement cutané trop
troubles du comportement alimentaire, on peut observer important. Dans ce dernier cas, on devra bien prévenir le
un relâchement cutané inesthétique de l'abdomen et des patient d'un risque de cicatrice postopératoire parfois
bras. importante.
Le traitement du relâchement cutané par des techniques
non invasives est une demande croissante chez des patients
conscients de la bonne santé de leur corps. Radiofréquences
Plusieurs méthodes (encadré  39.1) permettent d'obtenir
Les ondes de radiofréquences sont des ondes électromagné-
un traitement du relâchement cutané. Nous détaillerons
tiques, générées par un courant électrique, transmises aux
dans ce chapitre l'emploi des radiofréquences, ultrasons,
tissus, se transformant en chaleur grâce à la résistance
lasers Nd-YAG 1 064 nm long pulse.
tissulaire.
Ces différentes méthodes permettent d'améliorer le relâ-
Pour améliorer le relâchement cutané et obtenir un
chement cutané de l'abdomen et des membres, les verge-
bon remodelage dermique, il convient de maintenir une
tures, la cellulite et la silhouette par diminution des
température externe chauffant la peau à 40–42 °C (qui
diamètres de l'abdomen et des membres (cuisses). Le
serait équivalente à une température interne de
traite­ment des vergetures fait l'objet d'un chapitre à part
60–65 °C) pendant 5 minutes au moins de façon à pro-
(voir chapitre 45).
duire un effet de dénaturation du collagène. La synthèse
Ces techniques peuvent être proposées sur tout type de
d'un néocollagène permet d'obtenir une meilleure toni-
peau, toutes les zones (avec pannicule sous-cutané), et il y a
cité cutanée.
peu d'effets secondaires.
La contraction des fibres de collagène par la chaleur permet
Les résultats sont retardés et l'effet ne se jugera qu'après
également d'obtenir une meilleure tonicité des travées conjonc-
3, 6 ou 9  mois, correspondant au temps du remodelage,
tives enserrant les lobules graisseux hypodermiques et de recher-
une contraction immédiate des fibres de collagène pou-
cher ainsi une efficacité sur le traitement de la cellulite [1, 2].
vant donner juste après la séance une première améliora-
tion visible.
Les différents types de radiofréquences
Encadré 39.1 et leurs modes de traitement
Techniques de remodelage corporel
Radiofréquences monopolaires
■ Radiofréquences
Ces radiofréquences peuvent être utilisées seules ou asso-
■ Ultrasons
ciées à des ultrasons. Le traitement est long à réaliser, parfois
■ Lasers Nd-Yag long pulse
inconfortable pour le patient, parfois douloureux. Les résul-
■ Ondes électromagnétiques de haute intensité (HIFEM)
tats doivent être appréciés après 3, 6 mois et à 1 an. Ils ne
■ LED (?)
sont pas comparables à la chirurgie, mais sans cicatrice bien
■ Stimulation mécanique, endermologie
sûr. On peut prévoir 1 à 3  séances en cas de résultats
■ Méthodes invasives
insuffisants.

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Chapitre 39. Relâchement cutané de l'abdomen et des membres

Radiofréquences bi- ou multipolaires ■ la cellulite avec peau d'orange. Ces indications peuvent
Ces radiofréquences sont utilisées seules ou associées à être élargies aux cellulites même fibreuses pour tenter de
des systèmes de « vacuum » avec aspiration. Le traitement les améliorer avant d'autres traitements ;
■ les vergetures ± en complément des autres techniques ;
est long à réaliser –  une demi-heure au moins par zone
■ le remodelage de la silhouette avec diminution de cir-
traitée –, de façon à maintenir un effet de « chauffe » suffi-
sant à la surface de la peau pour entraîner un bon conférence de l'abdomen [6, 7].
remodelage. En fonction des localisations des zones de traitement, les
Il conviendra de proposer un protocole continu et régulier, meilleurs résultats seront obtenus au niveau de l'abdomen,
de pratiquer des mesures (contour abdomen et membres), puis des fesses, hanches, cuisses. Au niveau des bras, les
des photographies à chaque consultation et de revoir les résultats sont encore plus difficiles à obtenir.
patients à 3, 6, 9 mois et 1 an [3].
Pour le premier traitement, proposer 6 à 10  séances en Contre-indications
moyenne, espacées de 8 à 15 jours, 1 mois, selon l'intensité En dehors d'attente excessive de la part du patient, les
du relâchement cutané à traiter. Des séances d'entretien contre-indications sont celles de la radiofréquence (déjà
sont conseillées à un rythme variable ensuite (tous les 2, 3 à détaillées dans le chapitre précédent), essentiellement des
4 mois) en fonction des résultats obtenus et du patient. matériaux implantés métalliques. En cas de grossesse, on
patientera après l'accouchement.
Radiofréquences à distance
Récemment se sont développés des radiofréquences à dis-
tance, avec des panneaux à distance de la peau qui vont agir Ultrasons
sans contact direct, dans le but d'obtenir un traitement plus
reproductible, sans application et « massage », donc moins Les ultrasons sont des ondes sonores inaudibles qui se
dépendant de l'opérateur. Ces traitements devront montrer propagent parfaitement en milieu liquide, mais également
leur efficacité dans les années à venir pour prendre toute leur dans les tissus biologiques naturellement riches en eau,
place [4]. s'ils ne sont pas calcifiés ou remplis d'air. Lorsque les ultra-
sons sont utilisés à forte puissance (1 000 fois plus élevée
Radiofréquences invasives dans le cas des ultrasons que dans le cas de l'imagerie à
Des radiofréquences invasives se développent avec des ultrasons), ils ont un effet biologique sur les tissus
sondes transcutanées, qui vont pénétrer la peau de façon à traversés.
chauffer plus profondément, avec ou sans liposuccion, pour
obtenir un remodelage corporel [5]. Mode d'action mécanique ou thermique
Mécanique : phénomène dit de cavitation (compression/
Indications des traitements ■

dilatation de l'onde) aboutissant à la formation de micro-


par radiofréquences et résultats bulles gazeuses au niveau des cellules entraînant leur
Sont concernés : destruction.
■ les patientes avec un relâchement cutané modéré de l'ab- ■ Thermique (high intensity focused ultrasons [HIFU])  :

domen ou des autres zones du corps, après abdominoplas- l'énergie concentrée permet d'obtenir en un point focalisé
ties, accouchements, etc. (fig. 39.1) ; une température entre 65 et 75 °C responsable de la déna-

Fig. 39.1  Radiofréquence – amélioration du relâchement cutané post-partum et des vergetures.


A. Avant. B. Après 4 traitements.
Source : S. Dahan.

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Chapitre 39. Relâchement cutané de l'abdomen et des membres

turation des protéines, en particulier du collagène, engen- Leur intérêt est indéniable également au niveau de la face
drant un processus de néocollagenèse. interne des genoux ou des cuisses, alors que leur utilisation
au niveau de la face postérieure des bras donne des résultats
Ultrasons de basse fréquence (action inconstants.
mécanique) [8] Le nombre de séances proposé est variable, 1 à 3 séances
en moyenne à 1 mois d'intervalle et évaluation des résultats
Ces ultrasons vont détruire les adipocytes en provoquant de façon différée à 6 mois au minimum.
leur apoptose par un effet vibratoire mécanique ou vibra-
toire. L'effet est purement mécanique, pratiquement sans
échauffement thermique, sans risques de brûlures. Lasers
La procédure est longue ; on propose 3 séances à 15 jours
d'intervalle avec résultats différés à 3  mois au moins. ■ Le laser Nd-YAG 1 064 nm long pulse peut entraîner égale-
L'appareil a vu plusieurs évolutions pour associer dans sa ment un remodelage et une amélioration de la tonicité
dernière version de la radiofréquence et une aspiration de la cutanée. Les résultats ont été objectivés cliniquement et
zone traitée afin d'avoir un effet tenseur. en échographie [12].
■ Le laser hyperthermique diode 1 060 nm avec refroidisse-

ment par contact, température délivrée à la surface de la


Ultrasons focalisés (HIFU) [9–11] peau de 42 à 47 °C, est peu douloureux ; mais ce laser est
L'énergie thermique concentrée fournit en un point focalisé coûteux, ce qui en limite l'utilisation [3] (fig. 39.3).
une température entre 65 et 75  °C responsable de la lyse
membranaire de cellules graisseuses et de la dénaturation du
collagène suivies d'un processus de néocollagenèse. Ondes électromagnétiques
Le traitement s'effectue à l'aide de sondes donc l'action sur de haute intensité (HIFEM)
la profondeur est fixe pour s'adapter aux différentes zones
anatomiques. C'est la dernière technologie proposée pour sculpter le
La technique a fait ses preuves pour traiter des excès grais- corps  : elle a essentiellement une action sur le muscle au
seux localisés sur des surfaces importantes, comme au niveau niveau abdominal et fessier avec une stimulation de haute
de l'abdomen ou des flancs avec des sondes profondes de 9 et fréquence.
13 mm. On traitera zone par zone (abdomen ou flanc, etc.). Cette technologie médicale, non invasive, est utilisée
Le traitement dure 30 minutes à 1 heure par séance. pour renforcer et tonifier les muscles grâce à l'action du
Une nouvelle génération d'appareil est maintenant dispo- champ magnétique focalisé avec une intensité mesurée en
nible pour diminuer la douleur pendant les séances qui était Tesla.
un facteur limitant jusqu'à présent. Ce champ électromagnétique interagit avec les neurones
Pour les sondes superficielles (de 4,5 à 10 mm environ), l'indi- moteurs pour déclencher des contractions musculaires for-
cation principale est le relâchement cutané modéré au niveau cées. L‘exposition des muscles à ces contractions entraîne un
de l'abdomen en post-partum, ou après perte de poids (fig. 39.2). renforcement musculaire, redessine et tonifie la silhouette.

A B
Fig. 39.2  HIFU chez une femme de 28 ans.
A. Avant. B. Résultats à 3 mois : circonférence au niveau du nombril –1,5 cm et –5 cm sous le nombril : –2,3 cm.
Source : B. Pusel.

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Chapitre 39. Relâchement cutané de l'abdomen et des membres

Fig. 39.3  Abdomen après une séance de laser hyperthermique diode 1 060 nm.


A. Avant. B. Après une séance, contrôle à 3 mois.
Source : R. Bousquet-Rouaud.

Une action au niveau des adipocytes est également à external radiofrequency energy and high voltage ultrashort pulse
l'étude. duration electrical fields. J Cosmet Laser Ther 2016;18(6):323–9.
[8] Shek SY, Yeung CK, Chan JC, Chan HH. The efficacy of a combina-
La combinaison de ces différentes technologies permet
tion non-thermal focused ultrasound and radiofrequency device
ainsi d'améliorer la silhouette en agissant sur différents para- for noninvasive body contouring in Asians. Lasers Surg Med
mètres [14, 15]. 2016;48(2):203–7.
[9] Rzepecki  AK, Farberg  AS, Hashim  PW, Goldenberg  G. Update on
Références noninvasive body contouring techniques. Cutis 2018;101(4):285–8.
[1] Jimenez Lozano  JN, Vacas-Jacques  P, Anderson  RR, Franco  W. [10] Coleman 3rd WP, Coleman 4th W, Weiss  RA, et  al. Multicenter
Effect of fibrous septa in radiofrequency heating of cutaneous and controlled study to evaluate multiple treatments with nonther-
subcutaneous tissues: computational study. Lasers Surg Med mal focused ultrasound for noninvasive fat reduction. Dermatol
2013;45(5):326–38. Surg 2017;43(1):50–7.
[2] Beasley  KL, Weiss  RA. Radiofrequency in cosmetic dermatology. [11] Lee HJ, Lee MH, Lee SG, et al. Evaluation of a novel device, high-­
Dermatol Clin 2014;32(1):79–90. intensity focused ultrasound with a contact cooling for subcu-
[3] Harth Y. Painless, safe, and efficacious noninvasive skin tightening, taneous fat reduction. Lasers Surg Med 2016;48(9):878–86.
body contouring, and cellulite reduction using multisource 3DEEP [12] Bousquet-Rouaud R, Bazan M, Chaintreuil J, Vila Echague A. High
radiofrequency. J Cosmet Dermatol 2015;14(1):70–5. frequency ultrasound evaluation of cellulite treated with the
[4] Hayre N, Palm M, Jenkin P. A clinical evaluation of a next generation, 1064 nm Nd-YAG laser. J Cosmet Laser Therapy 2009;11:34–44.
non-invasive, selective radiofrequency, hands-free, body-­shaping [13] Schilling L, Saedi N, Weiss R. 1060 nm diode hyperthermic laser
device. J Drugs Dermatol 2016;15(12):1557–61. lipolysis: the latest in non-invasive body contouring. J Drugs
[5] Hurwitz D, Smith D. Treatment of overweight patients by radiofre- Dermatol 2017;16(1):48–52.
quency-assisted liposuction (RFAL) for aesthetic reshaping and [14] Kent DE, Jacob CI. Simultaneous Changes in Abdominal Adipose
skin tightening. Aesthetic Plast Surg 2012;36(1):62–71. and Muscle Tissues Following Treatments by High-Intensity
[6] Elman M, Vider I, Harth Y, et al. Evaluation of the safety and effi- Focused Electromagnetic (HIFEM) Technology-Based Device:
cacy of an innovative multisource RF system for non-invasive body Computed Tomography Evaluation, J Drugs Dermatol. 2019 Nov
contouring and circumference reduction. J Cosmet Laser Ther 1;18(11):1098–1102.
2010;12:81–6. [15] Alexiades M., High Intensity Focused Electromagnetic Field
[7] Duncan DI, Kim TH, Temaat R. Quantification of adipose volume (HIFEM) Devices in Dermatology, J Drugs Dermatol. 2019 Nov
reduction with a prospective study analyzing the application of 1;18(11):1088.

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Chapitre 44
Traitement du mélasma
H. Hammami-Ghorbel

Description clinique des taux élevés de tyrosinase-related protein  1 (TYRP1) et


d'ARNm de tyrosinase [4]. Une augmentation d'expression de
Le mélasma est une hyperpigmentation acquise essentielle- la voie de Wnt (rôle de WNT inhibitory factor  1 [WIF1]) a
ment localisée au visage caractérisée par l'apparition de macules égale­ment été notée au sein des lésions de mélasma [4, 5].
brunâtres ou grisâtres, bilatérales et symétriques formant des Ces découvertes font que le mélasma ne peut pas être
placards. Il s'agit d'une affection essentiellement féminine. considéré comme un désordre pigmentaire lié uniquement
Les principaux facteurs de risque incriminés sont l'exposi- aux mélanocytes, mais comme une pathologie complexe [2].
tion aux ultraviolets (UV), un phototype élevé, un terrain
génétique prédisposant et des facteurs hormonaux. Traitements
Récemment, le rôle propigmentant des longueurs d'ondes
courtes de la lumière visible a été démontré [1]. L'âge de Le mélasma est chronique et les récidives sont fréquentes, en
début et la durée d'évolution sont variables en fonction du particulier après des expositions solaires (variation saison-
phototype. Le mélasma débute parfois après la ménopause nière de la pigmentation). La photoprotection rigoureuse
chez les sujets de phototype foncé. Le diagnostic est clinique, avec utilisation d'écrans couvrant les spectres UVA, UVB, la
avec trois formes topographiques prédominantes : centrofa- lumière visible (tableau  44.1) est donc primordiale dans la
ciale, malaire et mandibulaire. prise en charge des patients et sera associée dans tous les cas
La lampe de Wood permet, selon la variation du contraste, aux traitements dépigmentants (tableau 44.2).
de classer le mélasma en quatre types : épidermique, der- Le traitement de référence est le trio dépigmentant de
mique, mixte et indéterminé. Cependant, la microscopie Kligman associant l'hydroquinone (HQ), l'acide rétinoïque et
confocale et les études histologiques soulignent que la plu- l'acétate de dexaméthasone. Les crèmes dépigmentantes
part des patients ont des formes mixtes. cosmétiques peuvent être utilisées en relais ou en cas d'into-
Des avancées physiopathologiques ont été faites récem- lérance à l'hydroquinone.
ment. Le rôle de la vascularisation est souligné par l'augmenta- Les peelings et les lasers sont proposés en deuxième ­intention.
tion du nombre et de la taille des vaisseaux en peau lésionnelle Ils sont associés à un risque important ­d'hyperpigmentation
par rapport à la peau avoisinante et une expression plus
importante du vascular endothelial growth factor (VEGF) au Tableau 44.1  Liste non exhaustive des principaux écrans solaires
sein des kératinocytes et des vaisseaux dilatés. Le rôle du com- qui protègent contre la lumière visible
partiment dermique est primordial, avec une élastose solaire Photoderm M® (Bioderma)
marquée et un infiltrat inflammatoire fait de leucocytes et de Anthélios XL teinté® (La Roche-Posay)
mastocytes [2]. Les cytokines sécrétées par les fibroblastes et Dépiwhite M teinté® (ACM)
les cellules endothéliales sont capables de stimuler la pigmen- Neotone radiance® (Isispharma)
tation [3]. L'analyse du transcriptome révèle l'augmentation Sun secure mineral teinté® (SVR)
de la transcription des gènes contrôlant la mélanogenèse, avec Dermablend SPF35® (Vichy)

Tableau 44.2  Liste non exhaustive des crèmes dépigmentantes cosmétiques utilisées dans le traitement du mélasma
Principales crèmes éclaircissantes Laboratoire Principes actifs
Clairial sérum® SVR Micro-organisme marin (anti-EDNRB), dérivé de
férulate (augmente DKK1), complexe duowhite
Advanced pigment corrector® SKINCEUTICALS Acide ellagique 0,5 %
Acide hydroxyphénoxypropionique 1 %
Neotone sérum dépigmentant® Isispharma Diacétyl boldine
Licorice + α-arbutine + acide ascorbique
Acide glycolique + acide salicylique
Néotone sensitive® Isispharma Sans acide glycolique, mieux tolérée

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Chapitre 44. Traitement du mélasma

post-inflammatoire et d'aggravation du mélasma. L'acide Acide azélaïque


tranexamique est indiqué dans les mélasmas réfractaires. L'acide azélaïque inhibe l'activité de la tyrosinase, et endom-
Dans ce chapitre, nous détaillons les techniques, les indica- mage les mélanocytes hyperactifs. Cette molécule utilisée à
tions et les effets indésirables des agents topiques, des pee- 20 % est aussi efficace que l'HQ à 4 % avec peu d'effets secon-
lings, des lasers et de l'acide tranexamique dans le traitement daires. Plusieurs dermocosmétiques contiennent l'acide azé-
du mélasma. laïque à 5  %, 10  % et 20  %. Sa combinaison avec l'acide
mandélique, l'acide phytique, le résorcinol et l'acide férulique
Traitements topiques semble donner les meilleurs résultats, surtout les trois pre-
Les traitements topiques demeurent les plus utilisés en pre- miers mois de traitement [7].
mière ligne.
Perspectives thérapeutiques
Hydroquinone (HQ) Des essais cliniques randomisés et contrôlés ont rapporté
l'efficacité d'un nouvel agent dépigmentant, la cystéamine,
L'HQ (1,4-digydroxibenzène, dérivé phénolique), inhibiteur
un anti-oxydant biologique anticancéreux, qui inhibe la
de la tyrosinase qui est une enzyme clé dans la synthèse de
mélanogenèse mais sans les effets mélanocytotoxiques et
mélanine, est l'agent dépigmentant le plus étudié. Il est uti-
carcinogènes de l'HQ [8].
lisé à des concentrations de 2 à 5 %. Ses effets secondaires
sont l'irritation, la dermatite de contact allergique, l'hypo-
pigmentation en confettis et l'ochronose exogène quand il Peelings
est utilisé au long cours. Un peeling est une destruction contrôlée et limitée de l'épi-
derme et des couches superficielles du derme par des subs-
Trio de Kligman stabilisé tances chimiques. Son action exfoliatrice permet d'éliminer
les cellules chargées en mélanine des couches superficielles.
Le trio demeure le traitement de référence du mélasma avec Il potentialise l'action des crèmes dépigmentantes en aug-
le niveau de preuve le plus élevé. Il doit être proposé en pre- mentant la pénétration à travers l'épiderme.
mière intention. La formule de cette préparation magistrale Une préparation de la peau 2 à 4  semaines est systéma-
associe de l'hydroquinone, de la trétinoïne et des dermocor- tique avant tout peeling en utilisant de l'HQ à 2–4 % afin de
ticoïdes dans un onguent hydrophile (tableau  44.3). Cette mettre au repos les mélanocytes et de prévenir les HPI et les
triple association donne un éclaircissement plus important récidives du mélasma. La trétinoïne peut également être uti-
que l'HQ seule ou la combinaison de deux agents. Sur peaux lisée seule ou en association avec l'acide glycolique (6–12 %),
asiatiques et foncées, l'HQ à 4 % est mieux tolérée. Les appli- kojique ou l'arbutine en phase de prépeeling. Une zone test
cations doivent être quotidiennes pour une durée de 3 à peut être préconisée pour dépister une intolérance ou une
4 mois, associées à une éviction solaire rigoureuse. L'HQ est allergie de contact. Ces crèmes doivent être arrêtées 2 à
conservée à l'abri de la lumière et doit être changée en cas de 3 jours avant le peeling et sont poursuivies dès cicatrisation.
modification de la coloration. Une irritation dose-­ Une crème hydratante est utilisée en cas d'irritation. La pho-
dépendante peut se voir en début du traitement, obligeant toprotection est obligatoire.
parfois à espacer les applications pendant les deux premières Des études hétérogènes, en particulier indiennes, sur la
semaines. L'allergie de contact dépend du véhicule et de la place des peelings dans le mélasma ont été publiées. Les
stabilité de la préparation. L'ochronose surviendrait en cas méthodologies sont variables. Les peelings superficiels sont
d'usage prolongé et de non-respect des règles de photopro- les plus utilisés. Les peelings moyens ont un risque élevé de
tection. Un traitement d'entretien avec les autres agents PPI et les peelings profonds sont contre-indiqués.
dépigmentants cosmétiques permet de maintenir les résul-
tats et d'éviter les rebonds pigmentaires. Peelings superficiels
Une étude publiée en 1993 montre que l'usage de la tréti-
■ L'acide glycolique est le chef de file des alpha-­hydroxyacides
noïne crème (0,1 %) pendant 40 semaines permet un éclair-
et semble donner les meilleurs résultats. Il a une bonne
cissement de 68 % des plaques pigmentées. Les auteurs ont
pénétration cutanée et est utilisé à des concentrations de
noté dans ce travail une diminution de 36  % du taux de
20 à 70 % pendant 3 minutes. Une série de 4 à 6 peelings
mélanine épidermique sans changement du taux dans le
espacés de 2 à 3 semaines permet une amélioration modé-
derme. La longue durée d'application, l'érythème et les des-
rée dans plus de 50 % des cas [9]. L'efficacité est supérieure
quamations notés dans 88 % des cas en limitent son utilisa-
en cas de mélasma épidermique et en association avec
tion en monothérapie [6].
l'HQ ou le trio de Kligman. Les effets secondaires rapportés
sont une dermite d'irritation, une HPI, une hypopigmenta-
Tableau 44.3  Principales formules du trio de Kligman tion et un érythème persistant.
Hydroquinone 4 % Hydroquinone 5 % Hydroquinone 5 % ■ L'acide lactique à 92  % a montré des résultats équiva-
Trétinoïne 0,05 % Trétinoïne 0,1 % Trétinoïne 0,1 % lents à l'acide glycolique chez 12  patientes de photo-
Dexaméthasone Dexaméthasone 1 % Dexaméthasone type IV. Les résultats étaient maintenus 6 mois après les
0,01 % 0,1 %
peelings [10].

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Chapitre 44. Traitement du mélasma

■ L'acide mandélique a des propriétés kératolytiques et dépig- Elle peut être utilisée seule ou en association avec les
mentantes. Il est utilisé à 10–50 %. C'est un peeling doux, qui autres peelings.
pénètre lentement et uniformément l'épiderme, dédié aux
peaux sensibles. Il est utilisé seul ou en association avec d'autres Lasers pigmentaires
peelings. Le niveau de preuve de son efficacité est faible.
■ L'acide salicylique est un bêta-hydroxyacide, utilisé à des
Laser Neodymium:Yttrium-Aluminum-Garnet
concentrations de 20–30  %. Les résultats montrent une (Nd-YAG) Q-switched
efficacité modérée dans le mélasma mais un risque Les lasers Q-switched Nd-YAG, doublés en fréquence
moindre d'HPI. (532 nm) ou non doublés en fréquence (1 064 nm), ciblent et
■ Une étude pilote hémiface montre des résultats compa- détruisent la mélanine (photothermolyse sélective).
rables des peelings à la trétinoïne à 1  % aux peelings à Cependant, l'efficacité du Nd-YAG Q-switched à 532 nm est
l'acide glycolique à 70  % chez 10  patientes ayant un faible en raison de ses effets purpuriques entraînant une
mélasma [11]. inflammation et une HPI. Le laser Nd-YAG Q-switched
1 064 nm pénètre plus profondément dans le derme et cause
Peelings moyens moins de dégâts épidermiques, donc plus de sécurité sur les
■ L'acide trichloracétique (TCA) est utilisé à une concentra- phototypes foncés. Cependant, la diminution de l'hyperpig-
tion de 10 à 25 %. Son efficacité est comparable à l'acide mentation transitoire chez les patients ayant un mélasma est
glycolique (20–35  %) en plus de l'effet de réjuvénation rapidement suivie d'un taux important de récidives, d'HPI et
(fig. 44.1), mais le risque de récidive et d'HPI plus impor- de dépigmentation en confettis autour des lésions.
tant. L'effet dépigmentant est accentué en cas d'association Plusieurs études attestent de l'efficacité et de la meilleure
avec la solution de Jessner et l'acide ascorbique. Le peeling tolérance du laser Nd-YAG à 1 064 nm en utilisant des faibles
au TCA est utilisé à une concentration de 15 à 18  % sur fluences situées au-dessous du seuil de photothermolyse
phototypes foncés. La technique consiste à faire 2 à 3 appli- (tableau  44.4) [12–17]. Cette technique du «  laser toning »
cations successives du produit et bien sécher après chaque consiste à utiliser des fluences de 1,6 à 3,5 J/cm2, des spots
couche. Il faut appliquer la crème post-­peeling dès l'appari- larges (6–8 mm), avec de multiples passages et 5 à 10 séances
tion de points ou de nuages de blanchiment. La crème est à un rythme hebdomadaire ou mensuel (fig. 44.2). Ces résul-
rincée après 12  heures. Un dermocorticoïde est appliqué tats n'ont malheureusement pas été confirmés. Une étude
pour une durée courte en cas d'érythème intense ou persis- prospective randomisée en hémiface a comparé en effet
tant. Le peeling est répété 4 fois à 2 semaines d'intervalle. l'HQ 2 % seule versus l'HQ 2 % associée au laser Nd-YAG à
L'éviction solaire et une photoprotection rigoureuse sont 1 064 nm à faibles fluences ; elle a montré une amélioration
nécessaires tout au long du protocole. sensible à la fin du traitement dans le groupe laser mais les
■ La solution de Jessner est une association d'acide salicy- lésions ont récidivé chez tous les patients 12 semaines après
lique, d'acide lactique et de résorcinol dans de l'éthanol. la fin du traitement et des PPI étaient notées dans près de

Fig. 44.1  Mélasma avant (A) et après (B) 3 séances de peelings à l'acide trichloracétique (TCA 15 %).
Source : S. Ben Jennet.

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Chapitre 44. Traitement du mélasma

Tableau 44.4  Résumé des séries publiées sur l'efficacité du laser Nd-YAG Q-switché (QS) faible fluence dans le traitement du mélasma
Auteur,
Appareil Nb Séances Paramètres Résultats Effets indésirables
année
Choi, 2018 QX MAX™ 40 10 (5-150) 8 mm, 10 Hz 37,5 % des cas ont > 50 % 1 cas d'hypopigmentation
[12] 1,2-2 j/cm2 d'amélioration, augmente en confettis et 1 cas de
avec nombre de séances rebond
Kong, 2018 Cosjet TR™ ; 17 9 Nd-YAG QS seul Nd-YAG QS (1,2-2 J/ Amélioration significative HPI (1 cas) et effet rebond
[13] Cynergy ou associé à 3 LCP cm2, 7 mm, 10 Hz des deux côtés. (1 cas)
Multiplex™ LCP 595 nm 7-8 J/ Éclaircissement meilleur
cm2, 20 ms, 7 mm du côté LCP + QSNdYAG
si vaisseaux visibles
Saleh, 2018 Fontana™ 19 6 Nd-YAG QS à Nd-YAG 1,2-3,5 J/ Amélioration significative 21 % de dépigmentation en
[14] gauche et 3 Nd-YAG cm2, 6-8 mm, 10 Hz, des deux côtés sans confettis
QS alterné avec 3 2-5 passages différence entre les deux
Jessner peel modifié
Hofbauer Spectra™ 16 10 (1 ×/sem) Nd-YAG QS Amélioration significative Érythème léger
Parra, 2016 (0,8-1,6 J/cm2, 8 mm, après 1 mois mais pas de
[15] 10 Hz, 1-3 passages différence à 3 mois et
6 mois. Le taux de
récidive est de 81 % à
3 mois
Yue, 2016 Pixel™ 27 8 (2-3 sem) Nd-YAG QS Amélioration significative Érythème léger
[16] fractionné (2,6-3,6 J/ du MASI (p < 0,01), IM
cm2, 8,5 mm, densité mais récidive 40 % à
42,4 %, MTZ 3 mois
1,25 mm, 10 Hz,
1-3 passages
Yun, 2014 VRMIII™ ; 24 6 Nd-YAG QS + LP-F LP-F 13-15 J/cm2 Amélioration significative Érythème léger
[17] Lutronic™ versus 12 LP-F seule toute la face, puis du traitement combiné
d'un côté Nd-YAG versus LP-F seule (p < 0,1)
QS 1,5-2 J/cm2,
6 mm, 5-10 ns, 10 Hz

Fig. 44.2  Mélasma avant (A) et 3 mois après 10 séances de laser Nd-YAG Q switché faible fluence (2 J/cm2, 10 Hz) (B).
Source : S. Fenniche.

20 % des cas [18]. Une étude récente ayant utilisé la microsco- dommages vasculaires. Les premières études de Tse et Taylor
pie confocale et la mesure de la perte transépidermique d'eau publiées en 1994 attestent de l'inefficacité du LRQS dans le
suggère que la diminution de la quantité de mélanine épider- traitement du mélasma [20]. En 2011, Jang a appliqué 6 ses-
mique après laser Nd-YAG Q-switched altère la fonction bar- sions de LRQS faible fluence en mode fractionné (2–3 J/cm2,
rière cutanée. Il en résulte une activation des ­mélanocytes 40 ns, densité 27 %) sur 18 patientes ayant des mélasmas der-
pour restaurer la barrière et donc une récidive du mélasma miques ou mixtes. Une amélioration a été notée dans 30 % des
[19]. Les auteurs proposent l'usage d'une crème  réparatrice cas et une aggravation dans 2 cas [21]. Cette technique com-
pour minimiser ce risque (un dermocorticoïde ?). binée avec une sonophorèse à la vitamine  C a montré une
amélioration de 35 % des mélasmas, mais une récidive dans
Laser Rubis Q-switched (LRQS) 20  % des cas [22]. Des séances de LRQS fractionné suivies
La longueur d'onde du LRQS (694 nm) est fortement absorbée d'une séance d'IPL ont également conduit à une amélioration
par la mélanine, épargnant ainsi l'hémoglobine et réduisant les modérée à significative chez 73 % de patientes chinoises avec
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peu d'effets indésirables [23]. Une étude randomisée hémiface élevées, avec une cicatrisation rapide. Après resurfaçage
comparative au trio de Kligman aiderait à mieux définir la fractionné, une étude a montré la diminution du nombre de
place du LRQS fractionné faible fluence. mélanocytes et des mélanosomes dans les kératinocytes
épidermiques.
Laser Alexandrite Q-switched (LQSA) Les mécanismes impliqués sont une élimination de la
Le laser Alexandrite à 755 nm a une bonne pénétration cuta- mélanine épidermique et dermique dans les microcolonnes
née et est fortement absorbé par la mélanine. Une étude de dommage thermique, une destruction directe des
coréenne rétrospective publiée en 2016 a rapporté son effica- mélanocytes et un effet de remodelage dermique avec libé-
cité et sa tolérance chez 48  patientes (phototype  III-IV) ration de facteur de croissance fibrocytaire, ainsi qu'une aug-
atteintes de mélasma [24]. Ce laser Alexandrite long pulse (60 mentation de la vascularisation.
à 80 J/cm2, 15 mm, mode fractionné) utilisé au rythme de 2 à L'étude pilote de Rokhsar et Fitzpatrick portait sur
4 séances espacées de 2 à 3 semaines a permis une améliora- 10  patientes ayant un mélasma réfractaire traitées par 4 à
tion significative de 30 % du mMASI (modified Melasma Area 6 séances de laser Fraxel (1 535 ou 1 550 nm). Une amélioration
and Severity Index ou Score d'évaluation de l'intensité du de 75 à 100  % de la pigmentation a été notée chez
mélasma) 2 mois après la fin du traitement. Son effet sur le 6  patientes  [28]. Ces résultats ont cependant été remis en
remodelage cutané, son absorption par l'oxyhémoglobine question par Naito et Lee qui ont noté des taux élevés de réci-
engendrant une diminution de la vascularisation expliquent dive et d'HPI à 6 mois [29]. Différentes études, non compara-
aussi cette réponse. Cependant, on note une meilleure réponse tives, d'effectifs réduits, de méthodologies différentes
du mélasma épidermique et une satisfaction moindre des (photographies cliniques, évaluation clinique globale, durée de
patients. Une étude récente a utilisé le laser Alexandrite en suivi courte, etc.) ont été publiées. Les auteurs rapportent que
mode pulsé (6–7 J/cm2, 0,25 ms, 8 mm, 2 à 4 passages) pour la PF peut améliorer le mélasma, en particulier chez les sujets
traiter 23 patientes asiatiques ayant un mélasma. Une amélio- de phototype clair, mais la repigmentation est de règle.
ration à 30 % a été notée à 1 mois, mais avec une récurrence de Wanitphakdeedecha et al. ont montré dans une étude compa-
la moitié des cas après 3 mois [25]. L'absence d'études compa- rative intra-individuelle ayant inclus 30 patientes traitées par
ratives au trio dépigmentant de Kligman, le faible effectif et la PF 1 410 nm que la densité de 5 % minimise le risque d'HPI [30].
durée de suivi courte nécessitent des essais ultérieurs. La délivrance assistée de dermocorticoïdes grâce à la PF peut
limiter le risque d'HPI chez les patients à phototype I-III [31].
Lasers picosecondes Une étude contrôlée, incluant 51  patients ayant un
Les durées d'impulsion courtes des lasers picosecondes per- mélasma, a montré l'absence de différence entre le groupe
mettent de délivrer des énergies plus importantes et peuvent traité par 4 séances de laser 1 550 nm et le groupe utilisant
traiter des cibles plus petites. Ils sont associés à une meilleure un écran solaire à 3 mois de suivi. Les auteurs concluent à
tolérance (effet photo-acoustique plus que photother- l'absence de bénéfice de la PF dans le traitement du mélasma,
mique). De récentes publications ont montré l'intérêt du en la comparant aussi aux traitements conventionnels, en
laser picoseconde 1 064 nm combiné avec l'HQ comparé à particulier les peelings chimiques [32].
l'HQ à 4 % seule dans le traitement du mélasma dermique et Récemment, Badawi et Osman ont traité 30 patientes par
mixte [26]. Dans une étude hémiface, le laser picoseconde deux passages consécutifs de laser Erbium-YAG (Er-YAG)
755 nm Alexandrite résultait en plus d'éclaircissement avec fractionné (250–300  mJ, 7  mm, densité  2–3, bimensuel,
un délai plus court que le laser nanoseconde Nd-YAG 6 séances) combinés avec l'HQ à 4 % versus HQ seule. Cette
1 064  nm déclenché. Un érythème et une desquamation étude hémiface a montré que 73,4 % des patientes ont une
transitoire sont observés dans les suites du traitement [27]. amélioration > 50 % de du côté combiné versus 40 % du côté
Ces résultats encourageants nécessitent d'être confirmés par traité par HQ seule. Un érythème transitoire était observé de
des études plus larges et une durée de suivi plus longue. façon constante dans les suites du traitement laser. À 3 mois,
une récidive chez 2 patientes a été notée des deux côtés [33].
En conclusion, les lasers pigmentaires déclenchés de type Les lasers fractionnés non ablatifs sont proposés en deu-
Rubis, Alexandrite ou Nd-YAG même faible fluence sont par- xième intention dans les mélasmas réfractaires chez les sujets
fois efficaces mais au prix d'HPI fréquentes et de récidives de phototypes I-III.
constantes. Un nombre de séance élevé expose au risque de
dépigmentations en confettis. Ces lasers ne sont donc pas Laser CO2
recommandés dans le traitement du mélasma. Le laser CO2 est un laser ablatif qui a été peu étudié dans le
traitement du mélasma du fait de son effet thermique. La
Photothermolyse fractionnée non ablative place des lasers CO2 fractionnés dans la délivrance assistée de
La phothothermolyse fractionnée (PF) non ablative, intro- traitements locaux tels que le trio de Kligman ou l'acide
duite depuis 2004, a montré son efficacité dans le traitement tranexamique [34, 35] n'est pas bien établie. Un essai compa-
de l'héliodermie, des cicatrices d'acné, mais également des ratif en hémiface consistait en un passage par laser CO2 frac-
dyschromies telles que le mélasma. Elle crée des microzones tionné (12 W) sur toute la face précédée de ­micro-injections
de dommage thermique entourées par un réservoir de tissu d'acide tranexamique (AT) ou suivi de l'application d'AT
sain. Cette technique permet ainsi de délivrer des puissances topique d'un seul côté. Après 5  séances espacées de 4 à
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6  semaines, la différence du MASI était meilleure du côté phototypes foncés. Les résultats sont meilleurs en cas de
laser seul [35]. Le laser CO2 n'est pas recommandé car il altère mélasma épidermique [38]. Des paramètres vasculaires et
la barrière épidermique et est associé au risque de PPI. l'association avec l'HQ [39] semblent améliorer les
résultats.
Lasers vasculaires Acide tranexamique
En 2011, l'équipe du Pr Thierry Passeron a publié une étude L'acide tranexamique (AT), qui est un agent antifibrinoly-
prospective comparative en hémiface dont l'objectif était de tique, est actuellement considéré comme un traitement pro-
comparer l'efficacité du trio de Kligman versus trio de Kligman metteur du mélasma. L'AT a été initialement utilisé dans le
et le laser à colorant pulsé (LCP, 7 mm, 10 J/cm2, 20 ms). La dif- traitement des ménorragies et des syndromes hémorra-
férence moyenne entre les deux groupes pour le score hémi- giques dus à une fibrinolyse. La découverte fortuite d'une
MASI à 2 mois du traitement était de 1,9 (p = 0,019). L'utilisation amélioration du mélasma chez des femmes asiatiques utili-
du LCP a permis de prévenir les récidives après l'été et même à sant ce médicament a été rapportée en 1979.
long terme. Cependant, l'amélioration n'a pas été notée chez L'AT inhibe le transfert du plasminogène aux kératino-
les patients ayant un phototype élevé avec risque d'HPI [36]. cytes, diminue par conséquent la synthèse des prostaglan-
Le laser Dual Yellow émet simultanément une double lon- dines, qui sont des stimulateurs de l'activité tyrosinase. Il en
gueur d'onde, une jaune à 578 nm qui cible la composante résulte une diminution du contenu en mélanine de l'épi-
vasculaire et une verte à 511  nm qui cible la composante derme. La plasmine augmente les formes solubles de VEGF,
pigmentaire avec un ratio de 9/1. Une étude prospective entraîne une angiogenèse. Par conséquent, l'inhibition de la
pilote a rapporté l'intérêt d'utiliser ce laser dans le traitement plasmine par l'AT entraîne une réduction de la vascularisa-
du mélasma. Ces résultats n'ont pas été confirmés dans une tion au niveau du derme, mécanisme impliqué dans le
étude comparative ayant montré la supériorité du trio mélasma. Enfin, l'AT est le seul traitement qui peut prévenir
dépigmentant de Kligman par rapport à ce laser [37], ainsi l'activation des mélanocytes induite par les UV, les hormones
que dans une récente étude thaïlandaise. ou l'interaction avec les kératinocytes.
La majorité des études ont testé l'AT par voie orale
Lumière intense pulsée (tableau 44.5) [40–48]. La dose recommandée est de 250 mg
L'utilisation de lumière intense pulsée peut être proposée 2 à 3 fois par jour pendant 3 mois. L'AT est présenté dans des
pour les mélasmas résistants aux traitements topiques. Les ampoules de 5 ml contenant 500 mg ou en comprimé pelli-
résultats sont modestes et les récidives possibles. Elle est culé (Exacyl®, 500 mg). Un mois est nécessaire pour avoir un
proposée pour les patients de phototypes I-III car il existe effet. Les taux d'amélioration avoisinent les 50 % (fig. 44.3). La
un risque de cibler la mélanine de peau non lésée sur les durée du traitement conditionne la réponse clinique.

Tableau 44.5  Résumé des séries publiées sur l'efficacité de l'acide tranexamique (AT) seul ou combiné avec d'autres traitements dans
le mélasma
Auteur, année Participants Protocole Résultats Effets secondaires Suivi
Colferai, 2018 [40] 20 groupe A et Groupe A : AT Diminution significative Groupe A
17 groupe B 250 mg 2 ×/j versus dans groupe A du MASI et dysménorrhée
groupe B : IM (10 %), gastro-
placebo × 12 sem intestinaux (35 %)
Sharma, 2017 [41] 39 groupe A et Groupe A : AT Diminution significative Groupe A : 2 cas de récidives
41 groupe B 250 mg 2 ×/j et dans les deux groupes du oligoménorrhée dans groupe A
groupe B : AT MASI moyen : 21 % à S4, (15 %), épigastralgies
micro-injections en 53 % à S8 et 77 % à S12 dans (5 %), douleur et
ID 4 mg/ml groupe A et 18 %, 51 % et œdème transitoire au
mensuel) × 12 sem 79 % respectivement à S4, site d'injections
S8, et S12 dans groupe B, (26 %)
p non significatif entre les
deux groupes
Tan, 2017 [42] 25 AT 250 mg 2 ×/j × 2 Diminution du MASI à Aucun 72 % de récidive à
à 8 mois (3,7 ± 3 mois de 69 % (p < 0,01) 2 mois après arrêt de
0,3 mois) l'AT
Rosario, 2017 [43] 39 AT 250 mg 2 ×/j 49 % groupe traité versus Myalgie (1 cas) Récidive si mélasma
versus placebo 18 % groupe contrôle sévère
× 3 mois
Lejaverdi, 2017 [44] 100 Étude hémiface : AT Différence moyenne du Récidive à 3 mois
250 mg 3 ×/j avec MASI inférieure de 1,8 point (30 % AT + HQ
HQ 4 % versus dans groupe AT + HQ versus 26 % HQ)
HQ4 % seul × 3 mois versus HQ (p = 0,015)

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A B
Fig. 44.3  Mélasma avant (A) et après (B) des séances de peeling et exacyl 500 mg/j pendant 2 mois.
Source : K. Zouhair.

Les effets indésirables les plus fréquents sont les céphalées, Mélasma
les irrégularités menstruelles, les nausées, les troubles de la
vision des couleurs et les lombalgies. Ces effets étaient rare-
ment notés dans la majorité des études (voir tableau 44.5). Le Photoprotection (UVA, UVB,
lumière visible) toute l'année
risque thrombogène est faible, peut être accentué en cas de Limiter les facteurs aggravants
comorbidités, d'âge avancé, de prise de médicaments pro- (frottement, œstroprogestatifs)
thrombotiques (contraceptifs oraux), ou de doses élevées d'AT
ou pendant de longues périodes. Les contre-indications sont : la
Trio de Kligman
grossesse, l'allaitement, une coronaropathie, des troubles de la pendant 4 mois
coagulation, et la prise d'anticoagulants (aspirine, Plavix®, etc.).
L'AT topique, en micro-injection ou en intradermique, a
également fait l'objet de nombreuses études. Son utilisation Si Si échec
amélioration
seule n'a pas montré de résultats meilleurs que les traite-
ments classiques. L'association avec l'HQ, la photother- Peeling (précaution phototype foncé)
Crème
molyse fractionnée et les lasers déclenchés améliorent les dépigmentante Lampe pulsée paramètres vasculaires
résultats de ces derniers [35, 45, 46]. cosmétique LCP associé au trio de kligman
phototype I-III)
Des études contrôlées, rigoureuses avec moins d'hétérogé-
Laser fractionné non ablatif ou LFNA
néité dans les méthodes, un effectif plus large, touchant plu- (phototype I-III)
sieurs ethnies permettrait de mieux définir la place de l'AT
dans la prise en charge du mélasma. Si mélasma
réfractaire : acide
tranexamique
pendant 3 mois
Perspectives Fig. 44.4  Algorithme de prise en charge du mélasma.

Les perspectives sont les approches qui associent un


dépigmentant (HQ), une protection UVA-B et lumière
visible et agissent sur les facteurs sécrétés par les Kligman demeure le gold standard du traitement du mélasma.
fibroblastes, les mastocytes, les sébocytes et les cellules L'effet anti-âge de la trétinoïne et du dermocorticoïde peut expli-
endothéliales (inhibiteurs WNT topique, antiPPARɣ, quer sa supériorité. Les lasers déclenchés sont déconseillés et
anti-EDNRB, etc.) [2]. associés à des taux ­importants de récidives et d'HPI. Les peelings,
La figure 44.4 propose un algorithme de prise en charge du les lasers ­fractionnés non ablatifs, les lasers à colorant pulsé et les
mélasma. lampes flush sont à proposer en deuxième ligne chez les sujets de
phototypes I–III. L'acide tranexamique per os semble donner des
Conclusion résultats prometteurs et pourrait être proposé aux cas de mélas-
mas réfractaires. Ils sont destinés aux cas de mélasma réfractaire.
La prise en charge du mélasma est un véritable défi. La photopro- Cependant, des études plus rigoureuses sont nécessaires et ils ne
tection occupe une place capitale. Le trio dépigmentant de doivent être préconisés qu'en dernière ligne.

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Chapitre 45
Vergetures
S. Boivin

Introduction Formes cliniques


Les vergetures, lésions très fréquentes, représentent un véri- Cliniquement, deux formes, correspondant à des stades évo-
table challenge thérapeutique. Ces lésions dermiques, certes lutifs différents, sont décrites. Les vergetures rouges (phase
bénignes, ont un retentissement important sur l'estime de aiguë), se présentent sous forme de stries linéaires rouges ou
soi et impactent très fortement la qualité de vie des patients violacées voire pourpres, sans dépression marquée voire légè-
qui en sont atteints. De nombreux traitements plus ou rement surélevées. Leur largeur varie de quelques millimètres
moins invasifs ont été tentés avec des résultats très variables, à plusieurs centimètres et elles se regroupent en faisceaux de
encore trop rarement validés par des études contrôlées. plusieurs lignes parallèles, souvent bilatérales et symétriques.
Les vergetures apparaissent volontiers dans deux circons- Elles peuvent être symptomatiques, accompagnées de déman-
tances particulières : la grossesse (vergetures gravidiques, tou- geaisons ou de brûlures. Ces vergetures sont décrites sous
chant de 50 à 90  % des femmes enceintes) et l'adolescence forme de vergetures noires ou cearulea sur peaux
(lors des pics de croissance, touchant 40 % des garçons et 70 % pigmentées.
des filles). Certains facteurs de risque sont individualisés Avec le temps, ces vergetures perdent leur couleur rouge,
(tableau 45.1). D'autres terrains prédisposants sont identifiés : deviennent déprimées, atrophiques, flasques et hypopig-
l'obésité, la prise de poids rapide, certaines endocrinopathies mentées pour passer à la phase chronique cicatricielle des
(syndrome de Cushing), les pathologies du tissu conjonctif vergetures blanches.
(syndrome de Marfan), les traitements prolongés locaux ou
oraux par corticoïdes, l'hypertrophie musculaire des haltéro-
philes. Des cas idiopathiques sont plus rarement décrits [2, 3].
Physiopathologie
Les zones les plus fréquemment atteintes sont le ventre, Le mécanisme d'apparition des vergetures est encore
les seins, les fesses et les cuisses (tableau 45.2). inconnu, mais leur développement sur certains terrains
Tableau 45.1 Facteurs de risque d'apparition des vergetures physiologiques ou pathologiques fait soulever trois théo-
(d'après [1]) ries histopathogéniques principales  : l'étirement méca-
nique de la peau (les vergetures se disposent
Adolescents Antécédents familiaux
IMC élevé et obésité dans enfance perpendiculairement à l'axe de tension principal de la
peau), l'influence hormonale (tableau 45.3) et une réduc-
Femme Antécédents familiaux
enceinte Facteurs constitutifs : tion de l'expression ­génétique de la fibronectine, du colla-
Âge jeune gène et de l'élastine [3].
IMC élevé Sur le plan histologique, l'hypothèse du mécanisme initial
Facteurs liés à la grossesse : est celui d'un relargage d'enzymes (élastases) par les cellules
Âge gestationnel : apparition au 2e et 3e trimestre mastocytaires aboutissant à une élastolyse du derme moyen.
Poids élevé du bébé à la naissance Puis, l'afflux de macrophages activés va engloutir ces fibres
Prise de poids importante pendant la grossesse (> 15 kg)
élastiques fragmentées. Cette altération des fibres élastiques
IMC : indice de masse corporelle. a été retrouvée jusqu'à 3 cm au-delà des vergetures cliniques.
Une néoangiogenèse associée explique la coloration des ver-
Tableau 45.2  Répartition des vergetures par territoires (d'après [3]) getures à ce stade initial.
Femmes enceintes Ventre 48 % (disposition concentrique autour
de l'ombilic) Tableau 45.3  Focus sur les hormones et vergetures
Seins 25 % (disposition radiée autour de l'aréole)
– Augmentation de l'excrétion urinaire de corticoïdes chez les
Cuisses 25 % (disposition oblique)
patientes avec vergetures
Adolescents Bas du dos 28 % (le cortisol augmente le catabolisme protéique et donc l'altération
Genoux 25 % du collagène et des fibres élastiques)
Fesses 89 % – Augmentation des récepteurs aux œstrogènes et aux androgènes
Adolescentes Cuisses 46 % dans la peau présentant des vergetures versus peau normale
Mollets 30 % – Diminution du taux sérique de relaxine chez la femme enceinte
Fesses 86 % avec vergetures versus sans vergeture

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Chapitre 45. Vergetures

L'évolution se fait vers une atrophie épidermique, une Tableau 45.5  Recommandations de traitement (d'après [5])
diminution des mélanocytes, une réduction de la microcir- Première ligne Laser fractionné non ablatif (1 540 nm)
culation, une réorganisation des fibres collagènes en mottes Rétinoïdes
disposées parallèlement à la jonction dermo-épidermique et Deuxième ligne Peelings
un affinement des fibres élastiques. L'aspect de ces verge- Microdermabrasion
tures blanches est très proche histologiquement d'un aspect Microneedling
cicatriciel (tableau 45.4) [3, 4]. Radiofréquence (RF)
Sur le plan thérapeutique, un large panel de traitement a Centella asiatica et acide hyaluronique
été testé, des cosmétiques aux traitements les plus invasifs. Troisième ligne Gel de silicone
Peu d'entre eux ont fait la preuve de leur efficacité dans des IPL
RF fractionnée ou microneedling
études contrôlées, certaines apportant parfois des résultats
PRP + microneedling
contradictoires. Aucun protocole bien établi n'est validé à ce IR
jour (fig. 45.1 et tableau 45.5). UVA UVB
Le but des différents traitements proposés est d'améliorer Lasers ablatifs
ces lésions en réduisant leur visibilité sans en chercher l'éra- Ultrasons
dication complète. Les cibles de traitement sont soit d'ac-
croître la production de collagène, soit de réduire l'érythème
voire d'accroître la pigmentation. Une constante se dégage : Traitement préventif
les vergetures récentes (rouges) répondent mieux que les
Les traitements efficaces dans la prévention des vergetures
lésions anciennes ; la règle est donc d'intervenir le plus tôt
sont rares. Dans ce domaine, en particulier, nous manquons
possible pour maximiser les chances de réponse [2].
d'études rigoureuses bien conduites. Une meilleure connais-
sance physiopathologique pourrait aider au développement
de traitements préventifs plus efficaces.
Tableau 45.4  Histologie des vergetures (d'après [3, 4]) Certains actifs ont pu démontrer leur efficacité :
■ les préparations comprennent de la Centella Asiatica.
Vergetures rouges Vergetures blanches
Cette plante originaire du sud de l'Asie est utilisée en
Épiderme Augmentation de la Atrophie
mélanogenèse Perte des crêtes
médecine chinoise. Elle contient de l'asiaticoside qui sti-
Œdème intermélanocytes et épidermiques mule les fibroblastes et a un effet antagoniste aux gluco-
kératinocytes Réduction des corticoïdes. Son utilisation en prévention pendant la
mélanocytes grossesse permettrait de diminuer le développement et la
(leucodermie) sévérité des vergetures [3, 4, 6] ;
Derme Ectasies vasculaires et Réduction de la ■ il existe également de faible preuve d'efficacité de l'acide
angiogenèse microcirculation hyaluronique qui permet une stimulation fibroblastique et
Altération de structure des Collagène et fibres donc une augmentation de la production de collagène
fibres de collagène élastiques organisés [3, 4, 6] ;
Réduction et réorganisation des en mottes, parallèles
■ l'huile d'amande douce a démontré une efficacité préven-
fibres élastiques à la jonction
Diminution des microfibrilles dermo-épidermique tive supérieure lorsqu'elle est associée à un massage que
de fibrilline à jonction seule, laissant supposer le rôle intéressant du massage
dermoépidermique dans l'effet préventif [6, 7]. L'utilisation d'un simple émol-
Œdème du derme lient en massage pourrait être bénéfique [2] ;
Augmentation des ■ des études mesurant l'efficacité du beurre de cacao et de
glycosaminoglycanes
l'huile d'olive ont démontré leur absence d'effet [6, 7].

Vergetures

Préventif Curatif

Dispositif à Micro-
Agent topique Agent topique dermabrasion Microneedling PRP
base d'énergie

Huile
Centella Acide Acide
d'amande Peelings Gel de silicone Lasers IPL RF LED Autres
asiatica hyaluronique rétinoïque
douce

Vasculare Fractionné Excimer

Fig. 45.1  Traitements disponibles contre les vergetures.

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Chapitre 45. Vergetures

Traitement des vergetures plus efficace sur les vergetures récentes rouges qu'anciennes.
Son utilisation est limitée par les hyperpigmentations post-in-
installées flammatoires (HPI). Son efficacité est améliorée par l'associa-
tion avec le plasma riche en plaquettes (PRP) [1, 2, 4].
Agents topiques
Microneedling
Acide rétinoïque Son utilisation permet, par la création de micropuits attei-
gnant le derme papillaire, d'induire une augmentation de la
L'utilisation quotidienne, pendant au moins 6  mois, d'un
synthèse de collagène de types I et III et d'élastine (fig. 45.2).
topique à base d'acide rétinoïque à 0,1  % permet, par son
Cette technique peut être utilisée sur tous les phototypes
effet de stimulation fibroblastique, une réduction de la lon-
sans induire d'HPI et est rapportée plus efficace que la micro-
gueur et de la largeur des vergetures rouges. Cet agent n'a
dermabrasion ; 3 à 4 séances sont réalisées à 1 mois d'inter-
aucune efficacité démontrée sur les vergetures blanches. Ses
valle. C'est une technique simple, efficace et peu coûteuse.
effets secondaires se manifestent par une irritation voire une
Elle reste surpassée par les lasers factionnés, les effets secon-
desquamation [1, 4, 6].
daires en moins. Sont notés un érythème voire un œdème
Peelings transitoire et quelques points de saignotement en fin de
séance [1, 2, 4, 8].
Deux molécules sont utilisées : l'acide glycolique ou l'acide
trichloracétique voire l'association des deux permettant par Lasers
la stimulation de collagène une amélioration des vergetures
Lasers vasculaires
blanches ou rouges. Peu d'études contrôlées sont à disposi-
Laser colorant pulsé
tion [1, 4].
Sa forte affinité pour l'hémoglobine laissait suspecter son
Gel de silicone efficacité dans la réduction de l'érythème des vergetures
Utilisés traditionnellement dans l'amélioration des cicatrices, rouges. Son faible effet sur le collagène et l'élastine limite son
les gels de silicone permettent d'améliorer l'hydratation de la intérêt dans les vergetures blanches.
peau et la pigmentation des vergetures blanches [1, 3, 7]. Le risque important d'HPI limite son utilisation sur les
phototypes  IV à VI (compétition de la mélanine avec l'hé-
Techniques mécaniques moglobine) [1, 3, 4, 9].
Nd-YAG long pulse 1 064 nm
Microdermabrasion Ce laser permet d'améliorer la composante vasculaire des
Cette technique permet l'induction d'un remodelage der- vergetures récentes et stimule la production collagénique et
mique par stimulation du procollagène de type 1, se révélant la réorganisation des fibres élastiques, améliorant la texture

Fig. 45.2  Association LED et microneedling.


A. Avant. B. Après.
Source : S. Boivin.

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Chapitre 45. Vergetures

de la peau. Son utilisation permet un bon effet sur les verge- les résultats sont intéressants, au prix de très peu d'effet
tures rouges, mais également sur les vergetures blanches. Un secondaire hormis le risque d'HPI contre-indiquant son utili-
traitement précoce au stade de réversibilité des lésions reste sation sur les phototypes V et VI [1–3, 8].
souhaitable et plusieurs séances sont nécessaires (au mini-
mum trois) [1–3, 9]. Radiofréquence
Les appareils de radiofréquence permettent, par la chauffe
Lasers fractionnés ablatifs ou non ablatifs
de l'eau tissulaire, l'induction d'un remodelage collagénique
Les traitements par lasers fractionnés restent les plus promet- dermique. Leur utilisation est possible sur tout phototype et
teurs. L'objectif est de créer des zones de microdommages permet une amélioration des vergetures blanches essentiel-
thermiques pour stimuler une néocollagenèse, les fibres élas- lement [1, 2, 4].
tiques et augmenter l'épaisseur épidermique et dermique. Leur utilisation en mode fractionné ou en mode micronee-
Le laser le plus fréquemment rapporté dans le traitement dling voire en association (LCP, laser fractionné, PRP) amé-
des vergetures est le laser fractionné non ablatif Erbium- liore leur efficacité [2, 5].
Glass à 1 550 nm et le laser à 1 565 nm. La réalisation de plu-
sieurs séances permet l'obtention de bons résultats, sur les Infrarouge
vergetures blanches comme rouges. Les effets secondaires
L'induction d'une néocollagenèse se traduit plus sur le plan
sont limités : érythème, œdème, quelques cas d'HPI [3, 8, 9].
histologique que sur les résultats cliniques [4].
Les lasers ablatifs sont également efficaces mais le traite-
ment est plus douloureux et les suites plus lourdes. LED
Laser excimer 308 nm Il s'agit d'une association de lumière orange et infrarouge. Il
n'y a quasi pas de publications pour soutenir l'impression
Cet UVB laser permet de délivrer un rayonnement plus clinique d'efficacité, seule ou en association avec d'autres
rapide et plus précis qu'une lampe UV standard. Certaines techniques (microneedling) (fig. 45.2 et 45.3).
études montrent une amélioration de la pigmentation des
vergetures blanches, mais l'effet nécessite des séances répé- Plasma riche en plaquettes (PRP)
tées (une dizaine). Débuter à 50 mj/cm2 en deçà de la dose
érythémateuse minimale (DEM) ou à la DEM, puis augmen- L'injection intradermique d'une solution concentrée de
ter de 10 % par séance jusqu'à la fluence maximale n'indui- plaquettes autologues contenant facteurs de croissance
sant pas d'érythème persistant plus de 8 heures. Le résultat et cytokines permet de stimuler fibroblastes et produc-
n'est pas durable (comme avec l'association UVA +  UVB) tion collagénique. Son utilisation est plus intéressante
avec une régression au bout de 6 mois. Un traitement d'en- en association (radiofréquence, microneedling, micro-
tretien est donc nécessaire. Un renforcement de la pigmen- dermabrasion). Les résultats sont inconstants mais
tation de la peau saine en périvergetures est souvent constaté semblent plus intéressant sur les vergetures récentes
comme effet secondaire [1, 3, 4, 8]. rouges [4, 5].

IPL (512–1 200 nm)
Conclusion
L'utilisation d'une IPL présente un intérêt dans la prise en
charge des vergetures rouges en raison de leur composante Malgré le vaste choix de traitement à disposition pour la
vasculaire. Elle permet une augmentation de la synthèse col- prise en charge des vergetures, des protocoles précis restent
lagénique. Si elle est moins efficace que les lasers fractionnés, à établir, étayés par des études contrôlées de qualité.

Fig. 45.3  Cinq séances de LED.


A. Avant. B. Après.
Source : S. Boivin.

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Chapitre 45. Vergetures

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Chapitre 46
Cicatrices
T. Fusade, O. Cogrel

La demande d'amélioration esthétique de cicatrices, quelle Séquelles transitoires


que soit leur origine (chirurgicales, traumatiques, brûlures,
Ces séquelles regroupent les cicatrices maculeuses érythé-
dermatoses inflammatoires, etc.) est une demande fréquente
mateuses et pigmentées.
en dermatologie. Nous avons choisi de séparer arbitraire-
ment les cicatrices d'acné, qui constituent un modèle regrou- Cicatrices érythémateuses
pant toutes les formes primaires de cicatrices, et les cicatrices
hypertrophiques et chéloïdes. Ces cicatrices peuvent s'asso- Une acné récemment stabilisée laisse place à des macules éry-
cier chez un même patient. thémateuses, notamment jugales et frontales. On peut égale-
ment les rencontrer sur le tronc. Correspondant à la phase
finale de remodelage cicatriciel consécutive à la guérison de
Prise en charge des cicatrices papulopustules, ces macules érythémateuses disparaissent
d'acné en général spontanément en quelques mois ; dans certains
cas, elles peuvent persister jusqu'à 2 ans et parfois définitive-
La demande de correction cicatricielle est un motif classique de ment. Durant la consultation, il faut évaluer l'importance de
consultation de dermatologie interventionnelle. Dans ce cadre, la demande du patient. Pour certains patients, une simple
ce sont les cicatrices d'acné qui représentent le plus de explication quant au caractère transitoire de cet érythème
demandes. résiduel assortie de conseils de patience pour attendre la
Pour que la prise en charge des cicatrices d'acné soit optimale, résolution naturelle des rougeurs peut suffire à les satisfaire.
il faut que la stabilisation complète de l'acné responsable ait été À la lumière de l'utilité démontrée du traitement précoce de
antérieurement obtenue  : il arrive souvent que les patients cicatrices par laser vasculaire durant la phase de remodelage, il
soient adressés alors que leur visage présente encore de nom- peut être justifié de proposer de façon systématique cette
breuses lésions inflammatoires ou rétentionnelles. Entamer une prise en charge qui peut de surcroît se réaliser sous traitement
correction dans ce contexte occasionne deux écueils : la forma- par isotrétinoïne par voie orale [1,  2]. L'utilisation préféren-
tion de nouvelles lésions cicatricielles alors que la correction des tielle d'un laser à colorant pulsé sera proposée. Outre la dispa-
cicatrices les plus anciennes est en cours, mais également la rition rapide de l'érythème résiduel, cela permet, par effet
possible aggravation de l'acné liée à l'application de topiques thermique et vasculaire, de réactiver la synthèse collagénique
occlusifs utilisés dans le cadre des techniques correctrices. et d'améliorer l'aspect final de la peau traitée (fig. 46.1) [2].
Durant la première consultation, le praticien va devoir éta- Deux schémas de traitement sont possibles.
blir un véritable inventaire des différents types de cicatrices ■ un traitement avec purpura : il s'effectue en une à deux séances

propres à chaque patient. espacées de 2 mois. Les fluences sont choisies afin de provo-
Pour les cicatrices faciales, la peau doit être totalement déma- quer un purpura léger avec des durées d'impulsion courtes
quillée et le patient placé en face d'un miroir sous lumière entre 1,5 et 3 ms et une cryoprotection épidermique, para-
tangentielle verticale afin de parfaitement cerner sa demande. Il mètres adaptés en fonction de l'appareil utilisé. Le résultat
est rare que les cicatrices d'acné soient monomorphes ; il faut visible dès 15 jours s'optimise progressivement sur une durée
donc établir un véritable plan d'action en demandant au patient de quelques semaines légitimant l'espacement des séances ;
quelles sont les cicatrices qui le gênent le plus, puis en détermi- ■ un traitement infrapurpurique : les séances sont mensuelles

nant quelles vont être les différentes phases du traitement, en et les fluences choisies afin d'obtenir un érythème qui
fonction de ses souhaits et des possibilités thérapeutiques. durera entre 24 et 48 heures pour des temps d'impulsion
Il existe de nombreuses classifications des cicatrices d'acné. un peu plus longs entre 6 et 10 ms. Ce deuxième schéma
Utilisées pour hiérarchiser les dégâts cicatriciels induits afin peut s'adapter à l'utilisation d'autres matériels à émission
d'évaluer leur retentissement physique et leur impact psycholo- photonique (MEP) comme un laser vasculaire KTP 532 nm
gique, ces classifications sont parfois mal adaptées à une prise ou encore une lumière pulsée avec filtre vasculaire.
en charge correctrice. De surcroît, certains termes passés dans la
sémantique médicale s'avèrent très éloignés de la réalité qu'ils Cicatrices pigmentées
sont censés décrire. Durant son évolution prolongée, l'acné va Dans l'acné, les cicatrices pigmentées correspondent à des
laisser place à des séquelles variées ; on peut d'emblée scinder les hyperpigmentations post-inflammatoires (HPI). Celles-ci appa-
cicatrices en séquelles transitoires, évolutives et définitives. raissent surtout à partir du phototype III, mais en fonction de
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Chapitre 46. Cicatrices

A B
Fig. 46.1  Cicatrices érythémateuses d'acné.
A. Avant traitement. B. 3 mois après séance laser à colorant pulsé.
Source : T. Fusade.

l'origine ethnique elles peuvent survenir sur des phototypes angulomandibulaires, au niveau du thorax et des épaules.
inférieurs. S'installant en quelques jours sur les lésions inflam- Apparaissant fréquemment à l'initiation d'un traitement par
matoires d'acné, elles sont induites par l'exposition de la peau à isotrétinoïne à des doses élevées, les cicatrices hypertro-
la simple lumière du jour, notamment la composante bleue phiques et chéloïdes s'associent à des poussées inflamma-
violette du spectre lumineux sans avoir besoin d'une exposi- toires et prurigineuses qui pérennisent leur évolution.
tion UV. L'HPI est habituellement résolutive en quelques mois. Le traitement initial associe la fixation des cicatrices
Cette pigmentation à prédominance épidermique est tou- par hydrocolloïdes en plaque mince en port permanent
jours améliorée par l'application du trio de Kligman qui doit 24  heures sur 24 à des infiltrations intracicatricielles de
être proposé en première intention, mais aussi par l'utilisation corticoïdes retard injectables. Un traitement par MEP
de topiques hypopigmentants sans hydroquinone dispo- n'est associé que dans un deuxième temps lorsque le
nibles dans le commerce. Sur un plan pratique, la bonne tolé- processus hypertrophique est contrôlé, c'est-à-dire
rance des préparations à base de trétinoïne et d'hydroquinone lorsque le prurit a disparu et que la cicatrice s'est partiel-
est directement tributaire du mode d'utilisation par les lement affaissée et assouplie. On utilisera alors soit un
patients qui ont souvent tendance à en appliquer des quanti- laser à colorant pulsé avec un protocole infrapurpurique
tés trop importantes. L'irritation qui en découle limite l'ob- identique à celui utilisé pour les cicatrices érythéma-
servance. Lors de la première consultation, le praticien doit teuses, soit une lumière pulsée avec filtre vasculaire.
montrer le volume de crème à utiliser à chaque application.
Dans la grande majorité des cas, l'association de l'emploi des
crèmes dépigmentantes et de la stabilisation de l'acné conduit
Séquelles définitives
à la disparition des macules en quelques semaines. Ces séquelles revêtent des aspects variés qui doivent bien
En cas de résistance, l'utilisation d'un MEP peut être envi- être différenciés.
sagée. Dans cette indication, les lumières pulsées sont plus ■ Les pores dilatés ou dilatations ostiales sont les plus fré-

efficaces que les lasers pigmentaires qui provoquent trop quents ; ils sont induits par la dilatation progressive des
d'inflammation et entretiennent l'HPI. Pour les phototypes ostiums liée à l'hyperséborrhée. Certains microkystes vont
élevés, l'utilisation prudente avec des trains multipulsés est également progressivement aboutir à ces dilatations ostiales.
toujours précédée d'un test afin d'en vérifier la bonne tolé- ■ Les cicatrices déprimées varioliformes à fond plat (en U ou

rance. L'application éventuelle au décours de chaque séance « boxscars »), de quelques millimètres de diamètre, corres-
d'un dermocorticoïde pendant quelques jours peut égale- pondent à l'effondrement du toit de papulopustules par
ment limiter l'incidence des rebonds pigmentaires. nécrose ou excoriation.
■ Les cicatrices en pic à glace (en V ou « icepick scars ») sont

un évasement en cône inversé des ostiums, provoqué par


Séquelles évolutives l'évacuation brutale par le canal sébo-excréteur des
Ce sont les cicatrices hypertrophiques et chéloïdes, traitées microkystes enflammés.
par ailleurs dans ce chapitre. Dans l'acné, les cicatrices hyper- ■ Les dépressions en pente douce ou «  rolling scars », larges

trophiques et chéloïdes apparaissent surtout dans les zones et cupuliformes, sont liées à une fonte focalisée du matelas

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Chapitre 46. Cicatrices

hypodermique. Elles correspondent à des microfoyers de Remaniements dermo-épidermiques


stéatonécrose ne s'associant pas à des rétractions pro- Traitements possibles
fondes, l'ensemble cutané restant parfaitement mobile
Les lasers de fractionnement ablatifs et non ablatifs per-
par rapport au plan profond.
mettent d'améliorer la plupart des cicatrices d'acné dermo-­
■ Les dépressions fixées, beaucoup plus rares, sont provo-
épidermiques. Les meilleurs résultats sont attendus pour
quées par des brides fixant en profondeur ces lésions à la
des irrégularités superficielles et les ostiums dilatés [3, 4].
couverture aponévrotique. Dans ce cas, la mobilisation de
On peut schématiquement considérer l'action des lasers frac-
la peau en regard de la dépression s'accompagne d'une
tionnés sur la peau comme l'induction d'un phénomène ten-
attraction du plan profond.
seur, un peu à l'image d'une toile tendue progressivement à ses
■ Les cicatrices complexes, qu'elles soient en pont ou à multiples
quatre coins, le phénomène de rétraction entraînant
ouvertures adjacentes en pommeau d'arrosoir, sont plus rares.
mécaniquement :
■ Les excoriations traumatiques induisent également des
■ un resserrement ostial ;
dégâts cicatriciels qui ne sont pas à proprement parler des
■ un redrapage de lésions chalazodermiques ;
cicatrices d'acné puisque auto-infligées. Bien que de pré-
■ un émoussement des reliefs superficiels.
sentations variées, elles prennent souvent l'aspect de cica-
Le principe de fonctionnement des lasers fractionnés
trices déprimées achromiques.
repose sur la création de micropuits mesurant entre 100
et 200  microns de diamètre, correspondant soit à une
Quel traitement pour quelles lésions ?
vaporisation d'une colonne de tissu (fractionné ablatif),
En résumé, l'analyse des lésions permet de les séparer en soit à la formation d'une colonne de tissu dégradé par
deux groupes  : celles qui sont liées à des remaniements une augmentation de sa température à plus de 60  °C
­dermo-épidermiques et celles liées à des altérations plus sans perte de substance (fractionné non ablatif)
profondes hypodermiques (dépressions en pente douce, (fig. 46.2 et 46.3).
fixées et certaines cicatrices complexes).

A B
Fig. 46.2  A. Avant traitement. B. Après laser CO2 fractionné.
Source : T. Fusade.

Fig. 46.3  Cicatrices cervicales.


A. Avant traitement. B. Après 3 séances de laser CO2 fractionné ablatif.
Source : T. Fusade.

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Chapitre 46. Cicatrices

L'avantage de ces lasers est la vitesse de cicatrisation, infé- concerne le TCA, le geste doit être précis, le débordement
rieure dans tous les cas à une semaine. Les séances doivent pouvant aboutir a contrario à un élargissement accru de la
en revanche être renouvelées pour augmenter la proportion lésion traitée.
de surface de peau traitée au fur et à mesure des sessions. Pour les cicatrices déprimées en U à l'emporte-pièce,
Schématiquement, et bien que les réglages diffèrent d'un même si les lasers fractionnés apportent une amélioration,
laser à un autre, trois paramètres peuvent être modifiés  : le meilleur traitement à proposer reste la combinaison relè-
l'énergie délivrée (profondeur lésionnelle), la densité des vement suivi d'une abrasion photomécanique, également
micropuits (pourcentage de peau traitée) et la durée des appelée relissage [7, 8]. Devenu complémentaire des tech-
impulsions (diffusion thermique autour de chaque micro- niques de fractionnement, le relissage cutané par laser
puit). Dans ces indications cicatricielles, il est recommandé ablatif erbium ou CO2 permet d'obtenir un effet nivelant
de privilégier pour chaque traitement une énergie élevée et majeur avec plus ou moins d'effet tenseur en fonction du
une densité moyenne ; une forte densité ne semble pas matériel utilisé. En quelque sorte, si le fractionnement tra-
apporter des résultats supérieurs pour une tolérance vaille dans un plan vertical, l'abrasion le fait dans un plan
moindre [5]. Ce constat n'en est pas moins inconstant et horizontal. Elle est cependant impérativement réservée au
doit être adapté à la topographie de la zone traitée. Ainsi, la visage.
peau du visage est la plus tolérante tant pour les énergies
délivrées que pour la densité par rapport à d'autres zones En principe
comme la région cervicale où il faut être beaucoup plus ■ Le laser Erbium-YAG est utilisé lorsqu'un effet nivelant
prudent. prédominant est recherché. Émettant à 2 940 nm, le laser
La conduite du traitement nécessite plusieurs séances Erbium-YAG, par sa très grande affinité pour l'eau intra- et
espacées de 1 à 3 mois. En cas d'antécédents, une prévention extracellulaire, permet une abrasion avec un effet ther-
antiherpétique s'avère nécessaire. mique limité. Il est en pratique utilisé lors de correction
Nous avons pour notre part tendance à ne pas trop rap- cicatricielle sur des peaux jeunes et toniques.
procher les séances, l'effet remodelant s'optimisant au cours ■ Le laser CO impulsionnel est préféré lorsqu'un effet ten-
2
des semaines. Les suites de chaque intervention associent un seur est recherché associé à l'effet nivelant. Il est utilisé sur
aspect quadrillé brunâtre témoin de la juxtaposition des des peaux mûres ou hyperlaxes (fig. 46.4 et 46.5).
micropuits associée au bout de 24 heures à un œdème pou- Le relèvement est une étape préalable incontournable
vant persister 2 à 3 jours. En fonction du matériel et des para- pour les cicatrices en U avant toute technique abrasive. Les
mètres utilisés, il faudra prévoir une éviction sociale de 2 à relèvements sont effectués sous anesthésie locale à l'aide
6 jours après chaque séance. d'un punch d'un diamètre supérieur à celui de la cicatrice
La tolérance du traitement dépend des paramètres utili- traitée. Les cicatrices relevées sont ensuite fixées en léger
sés  : plus ceux-ci sont élevés, plus la douleur générée est débord par la coagulation spontanée qui se produit au bout
importante. Pour diminuer cette sensation douloureuse de quelques minutes plutôt que par des Stéri-Strips™ qui
durant le traitement, on peut utiliser de l'air froid pulsé ou anticipent moins la rétraction secondaire du fragment
une crème anesthésiante anhydre spécifique à cet usage. Les cutané relevé. Durant une séance de relèvement, ce sont
crèmes anesthésiantes disponibles en pharmacie, riches en quelques dizaines à quelques centaines de cicatrices en U qui
eau, sont déconseillées car elles peuvent diminuer la péné- peuvent bénéficier du traitement (fig. 46.6 et 46.7).
tration du laser par hyperhydratation et donc absorption Le relissage par laser a lieu au minimum un mois après
privilégiée épidermique. cette première étape. Il est réalisé par unité anatomique,
Trouvant également sa meilleure indication dans les cica- en fonction de la laxité cutanée et souvent de l'âge du
trices en pic à glace, la radiofréquence fractionnée véhiculée patient. On proposera le plus souvent une abrasion avec
par une platine de microaiguilles isolées permet de trans- faible effet thermique obtenue avec un laser Erbium-YAG.
mettre l'énergie thermique directement en intradermique En revanche, la demande de correction cicatricielle chez
(microneedling) [6]. Les paramètres de traitement peuvent des personnes plus âgées nécessitera l'utilisation de laser
être modifiés en choisissant des aiguilles de longueurs diffé- CO2 qui entraînera un réel redrapage dermique en plus de
rentes. Les résultats obtenus semblent cependant légère- son effet abrasif, mais aux dépens d'un érythème plus
ment inférieurs à ceux des lasers fractionnés non ablatifs. prolongé.
En ce qui concerne les cicatrices en pics à glace, une tech- Le traitement s'effectue selon la localisation et l'étendue
nique originale, la technique CROSS, a été proposée dès des lésions sous anesthésie locale ou générale. L'anesthésie
2008. Celle-ci consiste en l'application très précise d'une générale est privilégiée lorsque les surfaces à traiter sont trop
microgoutte d'une solution de 70 % à 100 % d'acide trichlo- importantes ou lorsque la zone à niveler est susceptible
racétique (TCA) au fond de chaque cicatrice à l'aide d'un d'être déformée par l'infiltration de l'anesthésique local.
vaccinostyle ou d'un bâtonnet pointu. Un blanchiment Le retissage doit s'effectuer sous éclairage adéquat, c'est-à-
immédiat de la cicatrice est alors observé, entraînant après dire en essayant d'obtenir une lumière rasante destinée à
cicatrisation un resserrement de l'ostium dilaté. Une tech- mettre en évidence au mieux les ombres portées qui aug-
nique équivalente par impulsion unique d'un laser CO2 foca- mentent dans la vie quotidienne la visibilité des cicatrices en
lisé sur le fond de la cicatrice peut être utilisée. En ce qui lumière ambiante.

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Chapitre 46. Cicatrices

A B
Fig. 46.4  Cicatrices d'acné.
A. Avant traitement. B. Après relissage au laser CO2.
Source : T. Fusade.

A B
Fig. 46.5 Cicatrices.
A. Avant traitement. B. Aspect à 4 mois après relissage au laser CO2.
Source : T. Fusade.

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Chapitre 46. Cicatrices

A B

C D
Fig. 46.6  Cicatrices jugales.
A. Aspect initial. B. Après relèvement. C. 2 mois après laser Erbium. D. Aspect final.
Source : T. Fusade.

A B
Fig. 46.7  Cicatrices sur phototype 5.
A. Avant traitement. B. HPI 2 mois après relèvement au laser Erbium.
Source : T. Fusade.

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Chapitre 46. Cicatrices

Conduite du traitement cicatriciels secondaires, une attention particulière devra être


La plupart des lasers Erbium permettent l'utilisation des apportée à la suture en deux ou trois plans avec affronte-
pièces à main de diamètre variable s'étendant de 6 à 7 mm ment parfait du plan profond.
jusqu'à 1 mm. Cet éventail de possibilités permet d'effectuer Les subcisions, longtemps proposées pour libérer les ponts
des abrasions pouvant être très limitées en surface. fibreux, sont parfois décevantes car conduisant à la reforma-
Chaque passage du laser Erbium-YAG permet d'augmen- tion de la bride fibreuse au bout de quelques semaines. La
ter progressivement la profondeur d'abrasion. Les passages meilleure solution pour éviter le renouvellement de la rétrac-
sont renouvelés jusqu'à ce que le nivellement fasse dispa- tion est d'interposer dans le même temps opératoire un
raître les ombres portées par le faisceau lumineux rasant matériau résorbable à base d'acide hyaluronique ou non
utilisé en peropératoire. La succession des passages sera sus- résorbable par microlipostructure, cette interposition (à la
pendue en cas d'apparition d'une suffusion hémorragique canule ou à l'aiguille) constituant en soi l'acte subcisionnel.
en nappe témoin d'une atteinte du derme réticulaire.
Les lasers  CO2 impulsionnels sont également utilisés en Altérations hypodermiques
plusieurs passages, limités en général à deux ou trois. Le Les dépressions en pente douce (rolling scars) entraînées par
laser CO2 fonctionnant par affinité pour l'eau, son pouvoir une fonte graisseuse sous-jacente sont trop profondes pour
abrasif est autolimité, les passages supplémentaires n'en- pouvoir être améliorées par laser. Il est illusoire de vouloir
traînant qu'une extension de la diffusion thermique. attendre des résultats significatifs par lasers fractionnés impul-
Les pansements sont toujours de type fermé pendant la sionnels ou relissage sur ce type de lésions, l'effet tenseur obtenu
première semaine, quotidiens ou biquotidiens, puis ouverts insuffisant ne se maintenant pas plus de quelques mois. La cor-
avec l'application de corps gras jusqu'à réépidermisation rection de ces cicatrices est avantageusement obtenue par
complète, obtenue en 12 à 15 jours. comblement par acide hyaluronique. Le choix de la réticulation
La période d'isolement social rendue nécessaire par le temps dépend de la profondeur des lésions à traiter. De résorption
de réépidermisation n'excède donc jamais 2  semaines, mais lente dans des sites peu mobilisés par les expressions du visage,
l'érythème postopératoire impliquant une protection solaire les résultats persistent souvent 18 à 24 mois (fig. 46.8). La lipos-
totale et un éventuel maquillage peut durer jusqu'à 4 mois. tructure n'est proposée qu'à titre exceptionnel sur les lésions les
Avec des peelings au phénol ou au TCA à des concentra- plus sévères, mais donne des résultats plus prolongés.
tions élevées, on peut obtenir des résultats équivalents à
un laser CO2 impulsionnel sur des peaux laxes. Ceux-ci ne
Conclusion
permettent pas, à l'inverse, le pouvoir sculptant des lasers.
La prise en charge des cicatrices d'acné nécessite une straté-
Cicatrices profondes gie thérapeutique à déterminer au cas par cas et ne peut
et remaniements hypodermiques s'appréhender qu'au travers de l'ensemble des techniques
Les cicatrices complexes en pont et les dépressions rétrac- correctrices existantes. Une bonne connaissance de la pra-
tiles fixées bénéficient d'une exérèse chirurgicale. Lors d'une tique des lasers mais aussi des autres techniques permettra
éventuelle reprise chirurgicale, pour éviter les élargissements de répondre au mieux à la demande des patients.

A B
Fig. 46.8  Dépressions cicatricielles hypodermiques.
A. Avant traitement. B. Aspect après injection d'acide hyaluronique.
Source : T. Fusade.

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Chapitre 46. Cicatrices

Prise en charge des cicatrices tiellement soit spontanément, soit avec des traitements
conventionnels. Les chéloïdes, qui ne sont pas toujours d'au-
hypertrophiques et des chéloïdes thentiques cicatrices dans le sens de séquelles chirurgicales, sont
Les cicatrices hypertrophiques et les chéloïdes correspondent souvent spontanées, en particulier dans les zones pileuses : ché-
à un processus de cicatrisation anormal survenant classique- loïdes après folliculite ou varicelle, chéloïdes post-acné (fig. 46.10
ment après une effraction cutanée jusqu'au derme réticulaire et 46.11), etc. Les chéloïdes de l'oreille sont fréquentes après
et responsable d'une production excessive de collagène. piercing du lobule ou de l'hélix (fig. 46.12) ou chirurgie rétro-­
auriculaire d'oreilles décollées. Les cicatrices hypertrophiques
ou les chéloïdes postchirurgicales surviennent principalement
Classification sur des zones ou les forces de tensions qui s'exercent sur plaie
Il est important de séparer les cicatrices hypertrophiques des sont importantes notamment au thorax ou au cou (cicatrices
chéloïdes, même si cela n'est pas toujours facile (tableau 46.1). post-sternotomie, post-thyroïdectomie). Les chéloïdes auront
En effet, les cicatrices hypertrophiques (fig.  46.9), souvent tendance à se développer de manière centrifuge le long des
post-traumatiques ou postchirurgicales, liées à une mauvaise lignes de tension avec parfois un aspect de pseudo-guérison
orientation des cicatrices en dehors des lignes de moindre ten- centrale, mais ne régresseront jamais spontanément, se com-
sion, sont de bon pronostic et auront tendance à régresser par- portant comme de véritables tumeurs extensives. L'une comme

Tableau 46.1  Cicatrices hypertrophiques et chéloïdes : épidémiologie, différences cliniques (d'après [9])
Cicatrices hypertrophiques Chéloïdes
Incidence 40 à 70 % après chirurgie, jusqu'à 91 % 6 à 16 % chez les patients à peau noire
après brûlure
Sex-ratio à 1 avec pic de fréquence entre 20 et 30 ans
Sites de prédilection Épaules, cou, région sternale, genoux et Région thoracique antérieure, épaules, lobe de l'oreille, partie
coudes supérieure du bras, joues
Zones rarement atteintes : paupières, paumes et plantes, muqueuses, appareil génital
Évolution En 4 à 8 semaines après la plaie, puis Après des années dans les suites de traumatismes mineurs ou
phase de croissance rapide jusqu'à d'apparition spontanée (thorax)
6 mois et régression en plusieurs années Pas de tendance à la régression spontanée
Faible taux de récidive après révision Très fort taux de récidive (voire d'aggravation) après révision
chirurgicale chirurgicale seule
Aspect Limitée au site de la plaie Extension en patte de crabe le long des lignes de tension

Fig. 46.9  Cicatrices hypertrophiques.


Source : O. Cogrel.

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Chapitre 46. Cicatrices

Fig. 46.10  Chéloïdes spontanées postfolliculite.


Source : O. Cogrel.

Fig. 46.11  Chéloïdes spontanées post-acné.


Source : O. Cogrel.

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Chapitre 46. Cicatrices

Tableau 46.2  Méthodes invasives et non invasives de traitement


des cicatrices hypertrophiques et des chéloïdes
Méthodes non invasives Méthodes invasives
Traitements validés par des essais
– Pressothérapie (pression – Injections de corticoïdes
continue de 15 à 40 mmHg retard
au moins 23 h/j > 6 mois) – Révision chirurgicale
– Pansements à effet plaque
– Plaque de silicone (> 12 h/j
> 2 mois) à débuter en
prévention 2 semaines après
cicatrisation
– Gel de silicone (2 ×/j pendant
2 mois à débuter 2 semaines
après suture)
Autres traitements (données de moins bonne qualité)
– Émollients (limitation du – Lasers
prurit) – Injections de bléomycine,
– Massages biquotidiens à 5FU, vérapamil, interféron
débuter 2 semaines après alpha
cicatrisation – Imiquimod
– Attelles – Cryothérapie, cryochirurgie
– Soutien psychologique – Radiothérapie

La stratégie thérapeutique proposée dépend du type de


cicatrice :
■ cicatrices hypertrophiques linéaires (fig.  46.13)  : panse-

ment à effet plaque, gel de silicone, compression pendant


6 mois ; si échec, injections de corticoïdes retard toutes les
4 semaines pendant 6 mois ; si échec, reprise chirurgicale
Fig. 46.12  Chéloïdes de l'oreille après piercing.
associée à une compression ;
Source : O. Cogrel. ■ cicatrices hypertrophiques étendues (fig. 46.14) (il s'agit le

plus souvent de brûlures prises en charge en milieu


­spécialisé) : vêtement compressif, chirurgie des brides cica-
l'autre sont à l'origine de signes fonctionnels (douleurs et prurit) tricielles et injections de corticoïdes retard toutes les 4
et d'un retentissement sur la qualité de vie des patients. semaines pendant 6 mois ; si échec, injections de b
­ léomycine,
5-FU ou vérapamil toutes les 4 semaines pendant 6 mois ; si
Recommandations échec à 1 an, reprise chirurgicale et compression ;
■ chéloïdes mineures et majeures (fig. 46.15) : pansement à
De multiples revues sont disponibles dans la littérature effet plaque, compression, injection de corticoïdes retards
concernant les stratégies de traitement ou de prévention des toutes les 4 semaines pendant 6 à 12 mois ; si échec, reprise
cicatrices hypertrophiques et des chéloïdes, mais il est encore chirurgicale et radiothérapie.
aujourd'hui difficile de proposer un algorithme de prise en
charge très clair compte tenu de la mauvaise qualité des essais Injections intralésionnelles
publiés (88  % des études publiées en 25  ans ont un faible
niveau de preuve). La plupart des séries ne sont pas contrô- Depuis le milieu des années 1960, les injections intralésionnelles
lées, avec souvent de faibles effectifs et un suivi trop limité, (IL) de corticoïdes retard ont été proposées, améliorant à la fois
alors que les chéloïdes ont tendance à récidiver de façon les signes fonctionnels (prurit et douleurs) et l'aspect esthétique
retardée. Le principal écueil méthodologique est surtout l'ab- [13]. L'absence de maîtrise technique pourrait dans certaines
sence de distinction claire entre chéloïdes et cicatrices hyper- situations expliquer l'échec du ­traitement. En ­fonction de la taille
trophiques, même si de nouveaux outils d'imagerie cutanée et de la localisation des chéloïdes, la concentration d'acétonide
disponibles permettront à l'avenir une meilleure évaluation de triamcinolone peut varier de 10 à 40 mg/ml avec des inter-
des traitements dans les essais thérapeutiques [10]. valles entre chaque injection de 4 à 6 semaines. La dilution s'ef-
Des recommandations internationales ont été publiées en fectue soit avec du sérum physiologique, soit avec de la lidocaïne.
2002 par un groupe d'experts et servent encore aujourd'hui Les injections rétro-traçantes avec des aiguilles adaptées à l'im-
de référence [11]. portance et à la densité des cicatrices vont tunnéliser le tissu
Un travail européen a actualisé les données et distingue chéloïdien et déposer le ­principe actif. Des injections au Dermojet
des méthodes invasives et non invasives [12] ­(tableau 46.2). complètent les injections rétro-traçantes en périphérie des

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Chapitre 46. Cicatrices

Fig. 46.13  Cicatrice hypertrophique linéaire. Fig. 46.15  Chéloïdes majeures.


Source : C. Beylot. Source : O. Cogrel.

c­ icatrices inaccessibles et à partir desquelles s'observe la progres-


sion ultérieure. Il ne faut pas injecter trop superficiellement pour
éviter une atrophie épidermique définitive. L'injection sous-­
cutanée expose aussi au risque de lipoatrophie parfois extensive,
mais pouvant s'améliorer spontanément en plusieurs mois. Les
autres effets indésirables les plus fréquents sont l'acné stéroï-
dienne, des télangiectasies (facilement traitées par laser vascu-
laire) et une hypopigmentation linéaire prolongée présente dans
9 à 50 % des cas. Une anesthésie sous-cutanée est toujours sou-
haitable avant une injection intrachéloïdienne à l'aiguille quelle
que soit la taille de la lésion compte tenu du caractère très dou-
loureux de la procédure. L'application de topique anesthésiant
préalable au geste peut être utile mais n'est, dans notre pratique,
pas suffisante. Les injections IL sont réalisées en monothérapie
ou combinées. L'association 5-FU-acétonide de triamcinolone a
démontré dans une étude sa supériorité par rapport aux injec-
tions d'acétonide de triamcinolone seul (15  % versus 40  %).
L'utilisation de 5-FU impose une surveillance biologique en rai-
son du risque de cytopénies. D'autres combinaisons pour limiter
les effets indésirables des corticoïdes ou potentialiser leur effet
sont possibles : laser à colorant pulsé (fig. 46.16 et 46.17), laser CO2
fractionné, ou cryochirurgie. Elles sont aussi pratiquées après une
chirurgie de réduction du tissu chéloïdien et ont alors un rôle de
prévention des récidives. Le taux de récidive après injections IL
de corticoïdes retard est très variable (9 à 50 % suivant les études
Fig. 46.14  Cicatrice hypertrophique étendue.
publiées) et plus important dans les régions mobiles, ce qui cor-
Source : C. Beylot. robore le rôle des forces de tension qui s'exercent sur les ­cicatrices.

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Chapitre 46. Cicatrices

D'autres traitements injectables sont en cours de dévelop-


pement : transforming growth factor β3 (TGF-β3) recombinant
ou avotermin, injections de cellules souches mésenchyma-
teuses, injections de mannose-6-phospate qui inhibe les
TGF-β1 et 2.

Lasers
Une méta-analyse a été publiée afin d'évaluer les différents
lasers qui ont été utilisés soit en préventif, soit en curatif
[15]  : laser à colorant pulsé 585/595  nm =  17, laser frac-
tionné non ablatif 1 540/1 550 nm = 4, laser 532 nm [KTP ou
Q-switched]) =  3, laser  CO2 continu 10  600  nm =  3, laser
diode 810 nm/830 nm = 2, laser Erbium 2 940 nm = 1, laser
Nd-YAG 1 064 nm = 1 ; soit 919 patients ont été inclus dans
ce travail. Cette étude confirme la bonne tolérance et l'effi-
cacité des lasers avec des taux de réponse de 71 % en préven-
tion, 68 % pour le traitement des cicatrices hypertrophiques
et 72 % pour les chéloïdes. Une revue récente confirme ces
données et démontre qu'intervenir précocement avec un
laser (laser CO2 fractionné, laser fractionné non ablatif, laser
diode, laser colorant pulsé) dès la phase inflammatoire
(après l'intervention), mais aussi pendant la phase proliféra-
tive (ablation des fils) ou de remodelage (avant 3 mois) amé-
liore très souvent la qualité de la cicatrice finale [16].

Fig. 46.16  Cicatrice chéloïde préauriculaire après lifting cervicofacial.


Avant (A) et après (B) traitement combiné associant injection intralésion-
nelle de corticoïdes retard et laser à colorant pulsé.
Source : O. Cogrel.

Fig. 46.17  Chéloïde mandibulaire après peeling au phénol.


Avant (A) et après (B, C) injection intralésionnelle de corticoïdes retard associés à du laser vasculaire et à une compression.
Source : C. Beylot.

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Chapitre 46. Cicatrices

Lasers vasculaires et lumières pulsées Laser épilatoire


Le laser à colorant pulsé (LCP) apporte les meilleurs taux de Dans notre expérience, les folliculites intrachéloïdiennes
réponse pour les cicatrices constituées. Dans notre expé- entretiennent les chéloïdes spontanées. Donc, de façon
rience, il est utilisé en première ligne thérapeutique sur des superposable à ce qui est proposé pour l'acné chéloï-
cicatrices récentes datant de moins d'un an, en particulier au dienne de la nuque, nous préconisons du laser épilatoire
niveau du visage, des épaules et des bras et en combinaison Alexandrite ou du YAG long pulse pour les chéloïdes en
avec des injections de corticoïdes retard. Les résultats sont zone pileuse en combinaison avec les autres traitements.
plus aléatoires lorsque la cicatrice se situe au thorax. Il n'est
jamais proposé sur des cicatrices anciennes, très fibreuses et Toxine botulique
donc avasculaires et chez les patients de phototype très
Plusieurs travaux ont rapporté que les forces de tension qui
élevé. Les fluences sont modérées (de 7 à 9 J/cm2 pour un
s'exercent sur une plaie participent à la qualité de la cicatri-
spot de 7 mm) avec des pulses courts et un intervalle entre
sation et leur rôle dans l'aggravation d'une chéloïde [21, 22].
les sessions de 4 à 6 semaines. En prévention (sujets à risque,
Cette théorie mécanique impose d'immobiliser les cica-
mauvaise orientation des cicatrices, localisation à haut
trices chirurgicales par des pansements à effet plaque pen-
risque), le traitement doit être débuté 2 semaines après cica-
dant plusieurs mois, le but étant d'absorber les tensions qui
trisation et répété toutes les 4 semaines pour un total de 3 à
s'exercent sur une plaie soumise à des forces de rappel.
6 sessions.
Le concept de chimio-immobilisation a été proposé par
Une étude a rapporté d'excellents résultats du laser Nd-YAG
Gassner, chirurgien plasticien américain qui a publié les pre-
1  064  nm chez 102  patients japonais, en particulier sur les
mières données, chez des primates, de l'amélioration cosmé-
cicatrices hypertrophiques [17]. Ce laser, qui pénètre plus
tique des cicatrices par la toxine botulique [23]. Depuis, de
profondément que le LCP, aurait donc une efficacité assez
nombreuses études ont confirmé le rôle préventif de la toxine
comparable et l'avantage de moins interagir avec la mélanine
sur des cicatrices soumises à des forces de rappel, en particulier
(donc moins de risques chez les patients de phototype élevé).
celles localisées sur des zones mobiles. Deux essais randomisés
Les lumières pulsées ont des résultats probablement compa-
d'excellente qualité ont démontré une action notable de la
rables au LCP sur les cicatrices inflammatoires, même si moins
toxine injectée dans le muscle orbiculaire des lèvres chez des
de données sont disponibles dans la littérature.
enfants opérés de fente labiopalatine, avec notamment des
cicatrices résiduelles plus fines [24, 25]. Son action significative
Lasers ablatifs continus, fractionnés ablatifs sur des cicatrices post-traumatiques, en particulier du front, a
et non ablatifs aussi été observée. Dans un essai randomisé, 17 patients ont
été traités à l'issue de l'intervention d'une chirurgie thyroï-
Les lasers ablatifs peuvent être proposés pour réduire le tissu
dienne. Un côté de la cicatrice a été injecté avec de la toxine
chéloïdien en combinaison avec un autre traitement (cryo-
botulique (de 20 à 60 UI de toxine botulique de type A), l'autre
chirurgie, injections) et faciliter la pénétration des der-
a reçu des injections de sérum physiologique. Une améliora-
mocorticoïdes, même si aucun essai randomisé utilisant un
tion très significative de l'aspect de la cicatrice de thyroïdecto-
laser ablatif (Erbium-YAG ou CO2) n'est actuellement dispo-
mie a été observée du côté injecté par toxine [26]. Si une action
nible. Un travail rapporte des résultats préliminaires intéres-
préventive est clairement démontrée, il manque encore beau-
sants du laser Erbium fractionné (ce laser aurait moins d'effet
coup de données pour déterminer la place de la toxine botu-
thermique, donc moins de risques de réaction paradoxale
lique dans le traite­ment des chéloïdes constituées. Une étude
sur les chéloïdes) effectué avant l'application de béthaméta-
rapporte néanmoins une action de la toxine botulique de
sone 2 fois/jour sous occlusion [18]. Une étude effectuée sur
type A sur l'expression des gènes impliqués dans la croissance
des cicatrices hypertrophiques de brûlures récentes inflam-
fibroblastique (S100A4, TGF-β1, VEGF, MMP-1 et PDGFA) [27].
matoires ou anciennes dans une population pédiatrique
montre que l'association de laser CO2 fractionné (90 à
150 mJ, 30 W, densité 8,4 %) suivi de l'application d'une sus- Révision chirurgicale
pension d'acétonide de triamcinolone à 10 mg/ml pendant
Une révision chirurgicale d'une cicatrice se discute en seconde
10  minutes puis d'un dermocorticoïde de classe très forte
intention lorsque les traitements non chirurgicaux n'ont pas
2  fois/jour pendant 7  jours améliore très significativement
apporté le bénéfice escompté. Celle-ci doit toujours faire l'objet
les cicatrices [19]. Le microneedling est une autre option
d'une discussion pluridisciplinaire préliminaire lorsqu'il s'agit
pour augmenter la pénétration des topiques
d'une authentique c­héloïde, car on assiste très souvent à des
anti-inflammatoires.
aggravations dramatiques de c­ héloïdes après gestes chirurgicaux
intempestifs. Elle ne se discute jamais en cas de bride cicatricielle
LED ou seront effectuées des plasties en Z ou V-Y. Elle doit s'envisager
L'action in vitro des LED (light emitting diode) rouge et bleue aussi sur des zones pileuses en cas de fistules sous-chéloïdiennes.
sur les fibroblastes est prometteuse [20], mais aucun essai Lorsqu'une révision chirurgicale est envisagée en limitant les ten-
n'est actuellement disponible pour justifier l'utilisation de sions de rappel et en brisant si possible les cicatrices par des plas-
ces dispositifs. ties en Z, un traitement associé est ­toujours proposé. Il s'agira

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Chapitre 46. Cicatrices

A B C

D E F G
Fig. 46.18  Chéloïdes rétro-auriculaires post-otoplastie.
Avant et après excision chirurgicale tangentielle suivie d'une cryochirurgie (résultats tardifs à 2 ans pour les fig. A-C).
Source : M. Beylot-Barry.

d'une pressothérapie systématique, d'injections préventives de acne scars in Asians: a randomized split-face trial. Dermatol Surg
toxine botulique, de laser (vasculaire), d'injections intralésion- 2014;40(5):545–52.
[6] Chae WS, Seong JY, Jung HN, et al. Comparative study on efficacy
nelles en cas de chéloïdes mineures, de cryochirurgie, notam-
and safety of 1550  nm Er: Glass fractional laser and fractional
ment pour les chéloïdes du lobe de l'oreille ou post-otoplastie radiofrequency microneedle device for facial atrophic acne scar.
qui, associée au shaving du tissu chéloïdien, donne d'excellents J Cosmet Dermatol 2015;14:100–6.
résultats dans cette l­ocalisation particulière, ou de radiothérapie [7] Jordan R, Cummins C, Burls A. Laser resurfacing of the skin for the
dans les formes majeures (fig. 46.18). improvement of facial acne scarring: a systematic review of the
evidence. Br J Dermatol 2000 Mar;142:413–23.
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Chapitre 46. Cicatrices

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Chapitre 47
Alopécies
J. Smadja

Introduction cité dans le traitement et la stabilisation de l'alopécie [3–5].


Le minoxidil à 2 et 5 % a un taux de réponse de 20 à 59 %
L'arsenal médico-chirurgical esthétique et cosmétique du avec un risque d'effluvium important à l'arrêt il ne doit pas
cuir chevelu concerne dans la très grande majorité des cas être suspendu, sous peine d'inefficacité voire de chute
l'alopécie androgénétique (AAG). La greffe de cheveux, accentuée.
inventée par le Dr  Orentreich en 1959 [1], a considérable- Le finastéride 1 mg/j (inhibiteur de la 5-alpha réductase de
ment progressé dans la précision et la réalisation technique type 2) bloque la transformation de la testostérone en dihy-
et permet aujourd'hui de réimplanter des microgreffes d'uni- drotestostérone. Les études ont montré une repousse de
tés folliculaires d'un, de deux et trois cheveux, en reprodui- 48 % à 1 an et 66 % à 2 ans, alors que le groupe placebo avait
sant une implantation au plus proche de l'implantation 7 % de repousse à 1 et 2 ans. À 4 ans, 55 % des patients étaient
physiologique de chaque patient. Les aspects en champs de améliorés et 0 % dans le groupe placebo [6].
poireaux ou en cheveux de poupées sont résolument du Les derniers communiqués de l'Agence nationale de
passé. sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM,
En dehors des traitements médicamenteux avec une auto- octobre 2017) mentionnent l'observation de cas de dépres-
risation de mise sur le marché (AMM) comme le minoxidil sions et, plus rarement, d'idées suicidaires chez les hommes
et le finastéride, de nombreuses autres techniques comme traités par finastéride 1  mg. Les risques de changements
les injections de plasma riche en plaquettes (PRP), la méso- d'humeur, d'idées suicidaires et de dépression figurent
thérapie ou le microneedling sont rapportées comme effi- donc dorénavant dans les résumés des caractéristiques des
caces dans le traitement de l'AAG. Aucune ne prétend produits (RCP) et notices des spécialités pharmaceutiques
redonner une chevelure aussi dense que celle qu'avait le Propecia® et Chibro-Proscar®. « Le traitement par finasté-
patient avant le début de son alopécie. ride devra ainsi être interrompu devant tout symptôme
psychiatrique. »
Les données actuelles montrent toutefois que ce risque de
Prise en charge médicale suicide serait de même fréquence que dans la population
de l'alopécie androgénétique générale [7].
Des cas de cancers du sein ont également été rapportés,
L'alopécie androgénétique (AAG) correspond à une patho-
mais il n'a pas été établi de différence de fréquence d'appari-
logie du cheveu dont l'involution se poursuit durant toute la
tion par rapport à la population générale [8].
vie des patients. Le processus est lentement progressif et se
Chez la femme, seul le minoxidil à 2 % est indiqué. Le finas-
traduit par une miniaturisation de la tige pilaire. Les cheveux
téride est contre-indiqué du fait des risques de malforma-
terminaux se transforment en duvets miniaturisés sous l'in-
tions fœtales en cas de grossesse pendant la prise du
fluence de facteurs héréditaires et hormonaux androgé-
traitement. Après la ménopause, peu d'études bien conduites
niques. Une alopécie définitive s'établit à plus ou moins long
rapportent l'efficacité du finastéride à 2,5 ou 5 mg.
terme en plusieurs années. Les zones atteintes sont les par-
Le syndrome post-finastéride (SPF) est décrit comme la
ties fronto-temporo-pariétales et le vertex, avec le plus sou-
persistance des dysfonctions sexuelles malgré l'arrêt du
vent respect de la zone occipitale et d'une frange antérieure
finastéride. L'ANSM rappelle les effets secondaires d'ordre
chevelue chez la femme. Il existe des formes sévères extrême-
sexuel, de diminution de la libido, de troubles de l'érection et
ment diffuses, où la miniaturisation atteint l'ensemble du
troubles de l'éjaculation qu'il est possible d'observer après
cuir chevelu, y compris la zone occipitale, ce qui rend impos-
l'arrêt d'un traitement par finastéride. Seuls deux cas de
sible la transplantation capillaire.
troubles sexuels persistants après l'arrêt du finastéride ont
été enregistrés dans la base nationale de pharmacovigilance,
Finastéride et minoxidil sans que le lien de cause à effet ne soit clairement établi.
Les recommandations européennes (actualisées en 2018) [2] À ce jour, l'existence d'un SPF n'est pas formellement
préconisent, chez l'homme, un traitement par le minoxidil démontrée. Les centres d'études extrapolent les effets secon-
et/ou le finastéride. Ces deux médications ont une AMM daires du finasteride à 5 mg et du dutastéride pour déduire
pour l'indication d'AAG. Elles ont montré une réelle effica- des effets secondaires du finastéride à 1 mg [9].

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Chapitre 47. Alopécies

Cependant, la prudence s'impose et une prescription per- personnels et familiaux  : AAG, diabète, hypertension, etc.
sonnalisée, orientée et attentive à des notions antérieures de Une investigation sera faite quant aux traitements médica-
défaillance sexuelle, de baisse de la libido, de troubles dépres- menteux en cours et passés (prise d'anticoagulants ou
sifs ou d'idées suicidaires permettra de mieux sélectionner d'aspirine).
les patients et d'en diminuer les risques chez des sujets Cet interrogatoire devra préciser  : la date de début de
prédisposés. l'alopécie, si celle-ci est congénitale ou acquise ; les différents
traitements déjà prescrits ou en cours, Minoxidil, Finastéride,
Dutastéride traitements hormonaux  : acétate de cyprotérone
Le dutastéride est aussi un inhibiteur de la 5-alpha réductase (Lévothyrox®, ou spironolactone chez la femme). Les traite-
de types I et II. Il n'a pas d'AMM en France ou aux États-Unis, ments hormonaux à effet androgénique (pilule, stérilet au
au contraire de la Corée du Sud. Il a une efficacité bien supé- Lévonorgestrel®) seront à éliminer dans la mesure du possible,
rieure au finastéride, mais avec des effets secondaires plus car ils ont tendance à favoriser le développement d'une AAG.
fréquents. Lors de l'examen clinique, le médecin appréciera la densité
visuelle sur toutes les zones du cuir chevelu et les zones
atteintes par le processus alopéciant. Un test de traction
Supplémentation en micronutriments
évaluera l'importance d'une éventuelle chute de cheveux
Les nutriments tels que les acides gras oméga 3, les protéines, associée. On appréciera la souplesse, l'épaisseur, la mobilité
la quasi-totalité des vitamines B, l'acide folique, le zinc et les du cuir chevelu en particulier de la zone donneuse
vitamines C et E sont importants pour la croissance des che- occipitotemporale.
veux. La vitamine C, en synergie avec les acides aminés lysine
et proline, contribue à construire du collagène sain. La vita- Trichoscopie/vidéomicroscopie
mine C aide à protéger les cheveux contre les dommages
causés par les radicaux libres, ce qui peut rendre les cheveux La dermoscopie, appelée aussi trichoscopie, est devenue un exa-
fragiles et cassants. men clé de première intention dans l'exploration et le diagnostic
Classiquement prescrits per os ou en injections essentielle- des alopécies. L'examen trichoscopique du cuir chevelu est non
ment dans les effluviums télogènes et plus occasionnelle- invasif et permet une bonne fiabilité diagnostique. Il a été établi
ment dans l'AAG, les différents micronutriments n'ont pas par de nombreux auteurs [11, 12] une nouvelle microsémiologie,
prouvé leur efficacité, mais sont le plus souvent appréciés avec de nombreux signes, parfois pathognomoniques, de cer-
des patients. taines alopécies, permettant d'en faire plus rapidement le diag­
nostic, voire d'amener de nombreux éléments en faveur des
différentes pathologies explorées.
Transplantation capillaire Cette analyse du cuir chevelu au grossissement 10  fois à
16 fois permet de classifier les alopécies en deux groupes. Le
Plus de 630 000 interventions chirurgicales de transplanta- premier groupe est celui des alopécies non cicatricielles, lors-
tion de cheveux avaient été réalisées dans le monde en 2016, qu'il y a persistance des orifices folliculaires, comme dans l'AAG
avec une augmentation de 60 % du nombre de procédure ou la pelade. Le deuxième groupe rassemble les alopécies sans
depuis 2014. Les procédures non chirurgicales médicales et orifice folliculaire cicatriciel : lichen folliculaire, alopécie fibro-
cosmétiques ne sont pas en reste et ont, elles aussi, aug- sante en bande, alopécie épilante de Quinquaud, lupus, etc.
menté de 78  % depuis 2014 et représentent plus de La trichoscopie du cuir chevelu permet, par son fort gros-
1 240 000 actes [10]. sissement, de confirmer le diagnostic d'AAG par la recon-
Deux techniques de microgreffe de cheveux sont prati- naissance de certains signes dermoscopiques :
quées de façon standard, la FUT (follicular unit transplanta- ■ la variabilité des diamètres des tiges pilaires, supérieure à
tion) ou bandelette, pour 44 % des interventions, et la FUE 20 % [13], reflète la miniaturisation des cheveux [14], et est
(follicular unit extraction) ou excision folliculaire pour 52,6 % un des tous premiers signes de l'AAG (fig. 47.1) ;
des cas. Les 3,4  % restants comprennent une combinaison ■ la présence de points jaunes, un aspect visible de la glande
des deux techniques, les réductions de tonsure et les lam- sébacée et de la kératinisation de l'ostium vacant, corres-
beaux. Chacune de ces deux techniques opératoires majeure pond à des follicules pileux vides, révélant un retard de
a ses bonnes indications et ses propres limites, ses effets début de la phase anagène ;
secondaires et ses complications. Chaque patient devrait ■ des signes péripilaires sont un halo brun autour de la
être en mesure de choisir l'une ou l'autre de ces interventions racine folliculaire ;
en fonction de ses différents avantages ou points négatifs, ■ la présence d'un réseau pigmenté cutané décrit en nid
orienté par les conseils avisés du chirurgien. Encore faut-il d'abeille est due à la pigmentation de la peau après expo-
que celui-ci maîtrise parfaitement les deux techniques. sition du cuir chevelu au soleil.
En prévision d'une microgreffe de cheveux, la vidéomicros-
Consultation : exploration d'une alopécie copie (grossissement jusqu'à 400 fois, d'une qualité HD cou-
Préalable à toute intervention chirurgicale de microgreffe de plée à un programme d'analyse d'image) sera d'un intérêt
cheveux, la consultation se doit d'être complète et comporte majeur afin de vérifier la qualité de la zone donneuse. Elle per-
un interrogatoire du patient à la recherche d'antécédents mettra de mesurer la densité en cheveux par cm2, ou en unités
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Chapitre 47. Alopécies

Microgreffe de cheveux
Indications opératoires
Comme pour toute chirurgie, la qualité du résultat esthé-
tique est étroitement liée à une bonne indication opératoire.
Les données trichoscopiques et les mesures en vidéomicrosco-
pie permettront de préciser les bonnes indications opératoires.
Classiquement, sont concernés les patients à partir de 30 ans en
stades  III à V dans la classification de Norwood-Hamilton, ou
stade I, II ou III de la classification de Ludwig chez la femme, avec
une bonne densité capillaire de la zone donneuse sans miniaturi-
sation et avec une bonne épaisseur des tiges pilaires > 60 μ. La
qualité esthétique du résultat de la microgreffe de cheveux ne
dépend pas uniquement de la technique opératoire choisie, mais
aussi et essentiellement de la qualité de la zone donneuse tant
par sa densité que par l'épaisseur des tiges pilaires.
Il est important d'insister sur le traitement médical associé à
une transplantation de cheveux. En effet, le minoxidil et le finas-
téride ont bien montré leur efficacité dans la prise en charge
médicale de l'AAG [15, 16], mais également en association avec
la microgreffe de cheveux [17, 18] en augmentant la densité et la
qualité des cheveux préexistant autour des microgreffons. Il est
important de savoir que l'arrêt de ces traitements risque d'entraî-
ner une reprise évolutive de l'AAG et donc une diminution de la
densité chevelue de façon rapide, souvent irréversible.
Fig.  47.1  Image trichoscopique  : miniaturisation diffuse et variabilité Dans le cas de dysmorphophobie, qu'il faudra pouvoir détec-
des diamètres en rapport avec une AAG. ter, l'intervention de microgreffe de cheveu n'est pas indiquée,
Source : J. Smadja. car elle ne pourra pas apporter de satisfaction notable pour ces
patients sans y associer une prise en charge psychologique.

folliculaires par cm2, de quantifier les cheveux duvets (dia- Techniques opératoires
mètre inférieur à 40 μ) et le taux de miniaturisation qui corres- Deux techniques chirurgicales sont actuellement pratiquées.
pond au rapport des cheveux duvets sur le nombre de cheveux
terminaux, (normalement < 20 %) (fig. 47.2). Elle permettra FUT (follicular unit transplantation)
également de mesurer le calibre des cheveux des zones rece- C'est la technique la plus ancienne [19]. Elle consiste à prélever
veuse et donneuse. En effet, une augmentation de 10 % des chirurgicalement, sous anesthésie locale, une bandelette de cuir che-
diamètres donnera une augmentation de 20  % de la masse velu de la zone occipitale. Celle-ci sera disséquée sous microscope
volumique des cheveux (surface de coupe du cheveu = πr2). afin de produire des microgreffons d'unités folliculaires contenant
un, deux ou trois cheveux. Ces unités folliculaires seront ensuite
transplantées sur les parties clairsemées du cuir chevelu et repousse-
ront définitivement 3 à 6 mois après l'intervention (fig. 47.3).
Cette technique a l'avantage de ne pas avoir à raser le patient,
lui permettant de reprendre une activité sociale et profession-
nelle rapidement après 24 à 48 heures. Autre avantage, les uni-
tés folliculaires sont prélevées dans la safe zone où les cheveux
ont la plus grande longévité. Celle-ci sera préservée et mainte-
nue lors du transfert de ces cheveux sur la zone receveuse [1].
Cette technique est une indication de choix pour les
femmes, du fait qu'il n'y a pas de rasage du cuir chevelu. Elle
est aussi adaptée pour les hommes qui refusent de se raser
complètement et qui préfèrent reprendre leur activité
sociale rapidement sans changer leur apparence.
Depuis la description par Marzola [20] de la technique de
suture dite « trichophytique », l'aspect et la visibilité de la
Fig. 47.2  Vidéomicroscopie d'une zone occipitale. cicatrice occipitale se sont considérablement améliorés. La
Très forte densité à 311 ch/cm2 et 141 unités folliculaires au cm2. méthode consiste à désépidermiser la berge supérieure de la
Source : J. Smadja.

321
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Chapitre 47. Alopécies

perte de substance après avoir retiré la bandelette de cuir FUE (follicular unit excision)
chevelu, puis à réaliser la suture. La repousse des cheveux se La deuxième technique de prélèvement se fait par l'extraction ou
fait alors au travers de la cicatrice de rapprochement des l'excision folliculaire directement sur le cuir chevelu du patient
deux berges, la masquant d'autant plus (fig. 47.4 et 47.5). rasé. Cette technique décrite en 2002 par Rassman et Bernstein
[21] va, à l'aide d'un micropunch manuel ou électrique de 0,7 à
1 mm, inciser la peau autour d'une unité folliculaire jusqu'à la
partie dermique profonde, libérant ainsi cette unité folliculaire
de ses attaches dermo-épidermiques. Puis les microgreffons
seront extraits un à un, à l'aide de deux pinces et seront ensuite
rassemblés par groupe d'unités folliculaires et immergés dans du
sérum physiologique en attente de leur implantation. La zone de
prélèvement cicatrisera en quelques jours à l'aide d'application
d'une crème antiseptique cicatrisante (fig. 47.6).
Cette technique est toutefois plus à risque pour la vitalité
des greffons. En effet, la pénétration du punch dans le derme
est un geste aveugle qui ne peut pas maîtriser la courbure du
cheveu en sous-dermique dans tous les cas. Le taux de trans-
section est plus important que pour la FUT et peut atteindre
jusqu'à 20 % pour certains patients.
Elle a pour avantage de ne pas laisser de cicatrice linéaire à
Fig. 47.3  Bandelette occipitale.
Source : J. Smadja.
l'arrière du cuir chevelu, mais des microcicatrices puncti-
formes multiples qui permettront de porter les cheveux très
courts après cicatrisation (fig. 47.7 et 47.8).
Elle est également préconisée chez les patients ayant un
cuir chevelu trop tendu sans souplesse suffisante pour pou-
voir refermer la peau en cas de prélèvement d'une bande-
lette en FUT.

Fig. 47.4  Technique de désépidermisation au ciseau de la berge supé-


rieure pour une suture trichophytique.
Source : J. Smadja.

Fig.  47.5 Zone de prélèvement  : résultat à 9  mois après suture Fig. 47.6  Zone de prélèvement après prélèvements par extraction folli-
trichophytique. culaire FUE.
Source : J. Smadja. Source : J. Smadja.

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Chapitre 47. Alopécies

dans les premières semaines avant de repousser comme des


duvets qui grossissent progressivement en cheveux termi-
naux entre le 4e et le 6e  mois postopératoire. La repousse
complète est véritablement appréciée après une année.

Fig. 47.9  Implantation à l'aide d'implanteur de type Keep™.


Source : J. Smadja.

Complications et suites opératoires


Le cuir chevelu est une partie du revêtement cutané particu-
lièrement épaisse et très richement vascularisée. Le risque d'in-
Fig. 47.7  Zone de prélèvement après une semaine de cicatrisation. fection est moins observé que sur le reste du tégument.
Source : J. Smadja.
Cependant, il est possible de voir apparaître, après 24 à
72 heures, un œdème du front qui s'estompera spontanément
en descendant progressivement jusqu'aux joues. Des pares-
thésies peuvent se manifester pendant les premières semaines
de la cicatrisation. Elles disparaissent progressivement après
parfois plusieurs mois. À partir du 3e mois, la repousse des che-
veux peut entraîner des folliculites d'incarnation pilaire pen-
dant quelques semaines au début de la pousse des cheveux,
souvent associées à un prurit. Des nécroses ont été rapportées
sur la zone donneuse après une suture sous forte tension par
la méthode de la bandelette, mais aussi lors de prélèvement
par FUE sur la zone donneuse et sur la zone receveuse où sont
implantés les cheveux. Ces nécroses sont le plus souvent
décrites chez les grands fumeurs ou les diabétiques ou en cas
d'athérosclérose avec des troubles de la microcirculation arté-
rielle. Un effluvium télogène est particulièrement fréquent
chez les femmes en postopératoire, d'autant plus important
que la miniaturisation est forte sur les zones receveuses. Un
Fig. 47.8  Zone frontale et du vertex après implantation de 1 250 unités faible taux de repousse a été décrit, en particulier pour la
folliculaires. méthode FUE car les microgreffons sont extrêmement fins,
Source : J. Smadja.
sans tissu hypodermique protecteur, ce qui les rend
Après une anesthésie locale et tronculaire de la zone rece- ­particulièrement fragiles et sujets à la dessication et aux trau-
veuse, des micro-incisions de 0,9 à 1,2 mm sont pratiquées à matismes de manipulation lors de leur implantation.
une densité de 15 à 50 UF/cm2 selon les zones à densifier. Les Cependant, la plus grande cause de mauvais résultat
microgreffons sont ensuite délicatement insérés dans les esthétique d'une microgreffe de cheveux reste, comme déjà
fentes en les saisissant à l'aide de pinces ou grâce à des évoqué plus haut, une sélection des patients non adaptée. Il
implanteurs de type Choi™ ou Keep™ (fig. 47.9). est essentiel de distinguer les bonnes et les mauvaises indica-
Aucun pansement n'est nécessaire en fin d'intervention ou tions opératoires, voire les réelles contre-indications opéra-
les jours suivants. Les petites croûtelles de cicatrisation toires car, du fait de la visibilité du cuir chevelu, le patient en
durent une semaine à 10  jours, puis les greffons tombent gardera des traces l'impactant le reste de sa vie (fig. 47.10).

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Chapitre 47. Alopécies

Fig. 47.10  Mauvais résultat d'une greffe de cheveux.


Ligne antérieure trop basse, pas de respect des golfes temporaux, faible
densité du vertex.
Source : J. Smadja.

Recommandations chez les jeunes


de moins de 30 ans
Chez les patients les plus jeunes, au-dessous de 30 ans, la
demande de microgreffe de cheveux est extrêmement
forte, car la chute de cheveux est souvent brutale, rapide
et l'impact psychologique est majeur, d'autant plus quand
le père est atteint d'AAG. Ces jeunes patients ne se voient Fig. 47.11  Alopécie androgénétique de type DUPA (diffuse unpatterned
pas devenir « chauves » si jeunes et leur atteinte psycholo- alopecia).
Miniaturisation diffuse à l'ensemble du cuir chevelu et à la zone occipitale.
gique en devient souvent obsessionnelle. Néanmoins, ces
Contre-indication opératoire.
patients ne sont pas de bonnes indications opératoires Source : J. Smadja.
selon les consensus actuels. L'évolutivité de ces alopécies
est toujours plus sévère que chez les patients chez qui elle truire une ligne frontale antérieure. Cependant, la configura-
commence plus tard, et est donc amenée à donner après tion de l'alopécie peut parfois suivre un schéma masculin
quelques années un stade bien plus élevé, ne permettant avec un recul de la ligne frontale et l'apparition de golfs tem-
pas de proposer une reconstruction esthétique correcte. poraux. La technique de prélèvement chez la femme reste la
Pour ces jeunes patients, la prise en charge est essentielle- technique FUT ou de la bandelette, car il est difficile de pro-
ment médicale par minoxidil ou finastéride, avec un sou- poser de raser complètement le crâne chez ces patientes. Le
tien psychologique et une surveillance de l'évolutivité prélèvement d'une bandelette sans rasage permettra de
sous traitement par vidéomicroscopie. Le but de ces masquer les croûtes et la cicatrice, et d'avoir une reprise
­traitements sera de bloquer ou ralentir la progression de sociale quelques jours seulement après l'intervention.
l'AAG et d'opérer à partir de 30 ans sur une alopécie stabi-
lisée dans la mesure du possible. Particularités des implantations
en dehors de l'alopécie androgénétique
Particularités chez la femme Certaines alopécies stables peuvent elles aussi bénéficier
Plus de 30 % des femmes de type caucasien ont une AAG, d'une transplantation capillaire comme l'alopécie triangu-
avec une augmentation des cas après la ménopause. Il laire congénitale, certaines alopécies cicatricielles post-trau-
s'agit le plus souvent d'une alopécie diffuse donnant un matiques ou après chirurgie du cuir chevelu, exérèse de
aspect clairsemé, en particulier sur le vertex avec, dans la nævus du cuir chevelu, cicatrice postlifting, cicatrice d'inter-
majorité des cas, un respect de 1 à 2 cm de densité conser- vention de neurochirurgie, etc. L'indication se fera alors au
vée de la lisière frontale. Cette alopécie peut cependant cas par cas.
atteindre toutes les zones du cuir chevelu, vertex, tempo- Dans le cadre des alopécies cicatricielles inflammatoires, la
rales, pariétales et aussi occipitales dans les formes extrê- règle établit une possibilité d'indication opératoire lorsque
mement diffuses (diffuse unpatterned alopecia [DUPA]) celle-ci est totalement stabilisée après 1 an à 2 ans d'arrêt de
(fig. 47.11). tout traitement. Il reste, toutefois, difficile d'établir avec cer-
La technique de microgreffe de cheveux est particulière- titude que l'alopécie est totalement stabilisée et on s'aidera
ment adaptée chez la femme car le but est de proposer une des examens trichoscopiques voire histologiques pour étayer
densification par des unités folliculaires, sans avoir à recons- cette stabilisation avant tout opération.

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Chapitre 47. Alopécies

Prise en charge instrumentale De nombreuses études sur le PRP ont été réalisées.
Certaines rapportent des résultats cliniques prometteurs ;
des alopécies d'autres montrent aussi des résultats hétérogènes voire
contradictoires. La très grande variabilité des préparations
Mésothérapie de PRP non standardisée, ainsi que les nombreuses modali-
tés des protocoles cliniques, avec la quantité de liquide
La mésothérapie est la plus ancienne et toujours la plus pra- injecté, les différentes concentrations de plaquettes, l'inter-
tiquée les techniques alternatives à la microgreffe ; elle est valle à respecter entre chaque injection, la durée du traite-
très demandée par les patients. ment en font une procédure difficile à évaluer actuellement.
Développée par un médecin français, Michel Pistor, en Dans le cadre de la transplantation capillaire, le PRP peut soit
1958, elle connaît depuis un succès constant. Des injections être injecté dans le cuir chevelu durant l'acte chirurgical, soit
sont faites au niveau du cuir chevelu avec un mélange nutri- être utilisé comme milieu de conservation des greffons avant
tif et revitalisant à base de vasodilatateurs, minéraux, zinc, leur réimplantation. Toutes ces utilisations nécessitent égale-
cuivre et de vitamines ainsi que d'acides aminés ou d'acide ment d'autres études et essais cliniques plus complets.
hyaluronique. Ces injections sont répétées à intervalles régu- Le Conseil de l'ordre en France précise que « la manipula-
liers pendant plusieurs semaines jusqu'à l'obtention du tion du sang est d'utilisation exclusive des établissements
résultat sur la croissance du cheveu. La reprise de la chute de français du sang. Les faibles preuves d'efficacités ainsi que le
cheveux se ferait dans un délai plus ou moins rapide à l'arrêt manque d'études quant à sa non-toxicité à long terme en
des injections. Aucune publication ou étude ne rapporte font un traitement déconseillé en France. Ce dispositif médi-
clairement l'efficacité de ces injections ; cependant, des com- cal n'a pas fait l'objet d'une homologation ou d'une autorisa-
plications ont bien été rapportées comme une aggravation tion de mise sur le marché. Les conditions d'utilisation n'ont
de la chute de cheveux, des cicatrices, des œdèmes, des pas été soumises à l'HAS. Le PRP n'est donc pas aujourd'hui
abcès et des nécroses [22]. conforme à la réglementation en vigueur en France et com-
porte des risques sanitaires ».
Microneedling
La technique de microneedling qui consiste à faire pénétrer Low level laser therapy (LLLT)
des micronutriments à travers le cuir chevelu en faisant de ou traitement par LED infrarouge
multiples perforations avec un rouleau à micro-aiguilles
Le traitement par photothérapie LED (light emitting diodes
passé sur l'ensemble du cuir cheveu semble apporter des
ou diodes électroluminescentes) en infrarouge consiste à
résultats intéressants dans le traitement de l'AAG. Bien que
exposer le cuir chevelu à une lumière d'une longueur d'onde
les études actuelles ne permettent pas de conclure à la supé-
de 600 à 1 000 nm, 655 étant la longueur d'onde de choix
riorité du microneedling par rapport aux traitements stan-
dans le traitement des alopécies. Les effets de ces rayonne-
dard existants pour la perte de cheveux, le microneedling
ments sur le cuir chevelu permettraient une augmentation
semble prometteur pour améliorer la croissance des che-
de l'adénosine triphosphate (ATP), avec une stimulation des
veux, en particulier en combinaison avec du minoxidil ou du
cellules vivantes des follicules pileux en augmentant la den-
PRP [23].
sité des cheveux terminaux. Il n'y a pas d'effet thermique, ni
d'effet indésirable sérieux en dehors de cas de prurit et de
Plasma riche en plaquette (PRP) chute de cheveux. Les indications sont, dans le cadre des
Le PRP est une solution plasmatique autologue enrichie en pathologies du cuir chevelu, l'AAG, la pelade, voire les alopé-
plaquettes par centrifugation du sang. Ces éléments conte- cies chimio-induites, les alopécies cicatricielles dans une
nus en forte proportion dans la solution de PRP permet- moindre mesure [25, 26]. Il n'y a pas d'effets à long terme
traient un ralentissement de la chute des cheveux, un connus.
épaississement de la tige pilaire, l'augmentation de la densité De nombreux appareils existent pour ces traitements sous
capillaire, voire une certaine repousse après plusieurs séances forme de peignes, de casques ou casquettes émettant par
d'injections de PRP dans le cuir chevelu. des multiples diodes un rayonnement directement sur le
Ces injections sont déjà utilisées dans le domaine de la cuir chevelu. Ce traitement n'est pas actuellement claire-
cicatrisation en traumatologie sportive, en dentaire ainsi ment codifié et standardisé. Il faut plusieurs expositions par
qu'en orthopédie avec certains résultats [24]. Ce n'est que semaine, parfois tous les jours, d'une durée de 20 à 30 minutes
plus récemment que le PRP a été utilisé dans le cadre de par séance. Les multiples séances et leurs répétitions sur une
l'AAG seul ou parfois au décours de transplantation capil- durée prolongée voire indéfinie, car le bénéfice s'estompe
laire. Les très fortes diffusion et publicité sur Internet de rapidement à l'arrêt des expositions, en font un traitement
cette méthode en font un élément incontournable dans la onéreux et difficile à suivre pour nombre de patients.
demande de la part des patients pour le traitement de leur D'autres études permettraient d'en préciser les modalités
AAG. ainsi que les meilleures indications.

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Chapitre 47. Alopécies

Conclusion [7] Welk  B, McArthur  E, Ordon  M, et  al. Association of suicidality


and depression with 5α-reductase inhibitors. JAMA Intern Med
2017;177(5):683–91.
L'alopécie androgénétique (AAG) est la principale indica-
[8] Bird ST, Brophy JM, Hartzema AG, et al. Male breast cancer and
tion de la reconstruction chirurgicale par microgreffe de 5α-reductase inhibitors finasteride and dutasteride. J Urol
cheveux. Les examens trichoscopiques et vidéomicrosco- 2013;190:1811–4.
piques permettent aujourd'hui d'affiner de façon plus sûre [9] Than  JK, Rodriguez  K, Khera  M. Post-finasteride syndrome: a
le diagnostic d'AAG et de mieux préciser les bonnes indica- review of current literature. Current Sexual Health Reports
tions opératoires. 2018;10(3):152–7.
[10] International Society of Hair Restoration Surgery. Practice Census
Les nouvelles techniques de prélèvement, que ce soit par
Results. Chicago: Relevant Research Inc. 2017.
bandelette (FUT) avec suture trichophytique ou par extrac- [11] Rudnicka L. Atlas of trichoscopy, dermoscopie in hair and scalp
tion folliculaire (FUE), apportent une réelle avancée dans le disease. London: Springer-Verlag. 2012.
choix et la nature du prélèvement des unités folliculaires afin [12] Tosti A. Dermoscopy of hair and scalp disorders: with clinical and
d'établir les meilleurs résultats, tant au niveau de la zone pathological correlations. In: CRC Press. 2007.
donneuse que de la zone receveuse. [13] Lacharriere O, Deloche C, Misciali C, et al. Hair diameter diversity:
a clinical sign reflecting the follicle miniaturization. Arch
Les progrès récents acquis dans la prise en charge de ces
Dermatol 2001;137(5):641–6.
alopécies androgénétiques par la microgreffe de cheveux per- [14] Tosti A. Hair diameter diversity: a clinical sign reflecting the fol-
mettent de donner des résultats esthétiques au plus proche licle miniaturization. Arch Dermatol 2001;137(5):641–6.
de l'implantation naturelle des patients et de leurs attentes. [15] Olsen EA, DeLong ER, Weiner MS. Long-term follow-up of men
Les traitements médicaux, minoxidil et finastéride (chez with male pattern baldness treated with topical minoxidil. J Am
l'homme exclusivement), qui ont prouvé leur grande efficacité Acad Dermatol 1987;16(3 Pt 2):688–95.
[16] Kaufman KD, Olsen EA, Whiting D, et al. Finasteride in the treat-
sur le long terme devraient être systématiquement proposés aux
ment of men with androgenetic alopecia. Finasteride Male
patients en association avec les microgreffes. Cette prise en Pattern Hair Loss Study Group. J Am Acad Dermatol 1998;39(4 Pt
charge médico-chirurgicale apporte une réelle synergie du résul- 1):578–89.
tat esthétique et permet surtout de le prolonger dans le temps. [17] Leavitt  M, Perez-Meza  D, Rao  NA, et  al. Effects of finasteride
La mésothérapie, le microneedling, les injections de PRP (1 mg) on hair transplant. Dermatol Surg 2005;31(10):1268–76.
ou les traitements de photobiomodulation par laser diodes discussion 1276.
[18] Kassimir JJ. Use of topical minoxidil as a possible adjunct to hair
peuvent également apporter une amélioration de la prise en
transplant surgery. A pilot study. J Am Acad Dermatol 1987;16(3
charge de ces patients. Toutefois, de nouvelles études cli- Pt 2):685–7.
niques seraient nécessaires afin d'en préciser et d'en standar- [19] Limmer  BL. Elliptical donor stereoscopically assisted micrograf-
diser les protocoles et les indications. ting as an approach to further refinement in hair transplantation.
J Dermatol Surg Oncol 1994;20(12):789–93.
Références [20] Marzola  M. Trichophytic closure of the donor area. Hair

[1] Orentreich N. Autografts in alopecias and other selected derma- Transplant Forum International 2005;15(4):113–6.
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[2] Kanti V, Messenger A, Dobos G, et al. Evidence-based (S3) guideline extraction: minimally invasive surgery for hair transplantation.
for the treatment of androgenetic alopecia in women and in men – Dermatol Surg 2002;28(8):720–8.
short version. J Eur Acad Dermatol Venereol 2018 Jan;32(1):11–22. [22] Kadry R, Hamadah I, Al-Issa A, et al. Multifocal scalp abscess with
[3] Olsen EA, DeLong ER, Weiner MS. Long-term follow-up of men subcutaneous fat necrosis and scarring alopecia as a complica-
with male pattern baldness treated with topical minoxidil. J Am tion of scalp mesotherapy. J Drugs Dermatol 2008;7(1):72–3.
Acad Dermatol 1987;16(3 Pt 2):688–95. [23] Fertig RM, Gamret AC, Cervantes J, Tosti A. Microneedling for
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domisé versus minoxidil à 2 p. 100. Nouv Dermatol 1997;16:59–63. [24] Grambart ST. Sports medicine and platelet-rich plasma: nonsur-
[5] Kaufman  KD, the Finasteride Male Pattern Baldness Group. gical therapy. Clin Podiatr Med Surg 2015;32(1):99–107.
Clinical studies on the effects of oral finasteride, a type II 5α-re- [25] Noé  C. Photobiomodulation en dermatologie. Comprendre et
ductase inhibitor, on scalp hair in men with male pattern bald- utiliser les LED. Paris: John Libbey Eurotext;2014.
ness. In: Van Neste D, Randall V, editors. Hair research for the next [26] Jimenez  JJ, Wikramanayake  TC, Bergfeld  W, et  al. Efficacy and
millenium. Amsterdam: Elsevier Science;1996. p. 363–5. safety of a low-level laser device in the treatment of male and
[6] Yoshitake T, Takeda A, Ohki K, et al. Five-year efficacy of finaste- female pattern hair loss: A multicenter, randomized, sham device-
ride in 801 Japanese men with androgenetic alopecia. J Dermatol controlled, double-blind study. Am J Clin Dermatol
2015;42:735–8. 2014;15:115–27.

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Chapitre 48
Tatouage et détatouage au laser
M. Magis, Y. Perrillat

Histoire du tatouage exérèse chirurgicale pour les tatouages de petites tailles. Plus
récemment, la dermabrasion mécanique, puis la dermabrasion
et du détatouage par laser CO2 ont permis de diminuer la rançon cicatricielle [3].
L'histoire du tatouage remonte au néolithique. Ötzi, qui a été Depuis 25 ans, l'effaçage par laser déclenché nanoseconde,
retrouvé momifié en 1991 en Italie dans le glacier du et plus récemment par laser déclenché picoseconde, utili-
Hauslabjoch, était un chasseur d'une quarantaine d'années, sant le principe de la photothermolyse sélective, a révolu-
vivant il y a plus de 5000  ans, dont le corps était orné de tionné le détatouage, permettant au patient d'espérer une
57 tatouages. La signification de ces traits et points sur l'en- disparition complète de son tatouage sans cicatrice.
semble du tégument était probablement prophylactique ou
thérapeutique. L'intérêt des êtres humains pour le tatouage Des encres et des tatouages
reste présent dans de nombreuses civilisations, mais sa signi-
fication dans l'imaginaire collectif a été très différente selon Avec l'avènement des lasers déclenchés, plus spécifiques que
le lieu et l'époque  : « En Europe, il fut un temps considéré les anciennes techniques, la connaissance des encres (chro-
comme un signe d'exclusion sociale, de marginalisation. En mophores) qui constituent le tatouage est devenue essen-
Asie sa présence renvoyait à la pègre, alors qu'il était la tielle afin de choisir la longueur d'onde la mieux adaptée.
marque de prestige sociale chez les Océaniens » [1]. Plusieurs études montrent la grande diversité des compo-
Le tatouage permanent connaît depuis une vingtaine sés chimiques retrouvés dans les tatouages [5]. Les pigments
d'années un regain de popularité, surtout auprès de la popu- (sels métalliques) et les teintures (molécules organiques
lation la plus jeune. On estime que 30  % de la population solubles) ne représentent que 50  % du produit injecté. Le
générale est tatouée aux États-Unis, beaucoup plus dans cer- complément est formé de solvants, d'agent anti-infectieux,
taines catégories (50 % des 18–35 ans). de conservateurs et d'impuretés. Les composants varient en
Le phénomène est un peu moins marqué en France (10 % fonction de la couleur (aluminium, carbone, potassium ou
de la population générale, 25  % des plus jeunes). Les solvant tels que éthanol et phénol), les auteurs retrouvent
tatouages peu sophistiqués à l'encre de Chine noire ont fait certains composés plus spécifiques (tableau 48.1).
place à des tatouages artistiques aux couleurs vives, réalisés La quantité de produit déposé dans la peau est variable
par des artistes professionnels [2]. selon la couleur, mais également selon l'effet désiré.
Les complications (infection, allergie) sont assez rares,
même si l'innocuité au long cours du dépôt dans la peau Détatouage
d'agents exogènes reste à démontrer.
La philosophie du tatouage, au-delà de l'ornementation, Depuis 25  ans, les lasers déclenchés (Q-switched) se sont
est dominée par l'idée de l'inscription sur la peau d'événe- imposés comme la référence dans le traitement des
ments de sa propre histoire, censée accompagner la personne tatouages. La délivrance d'une grande quantité d'énergie,
jusqu'à la fin de sa vie. Mais avec les années, les tatouages durant un temps très court (inférieure au temps de relaxa-
deviennent parfois indésirables, du fait de l'âge, du change- tion thermique de la cible), avec une longueur d'onde adap-
ment de statut social ou familial, du changement de goût ou tée, aboutit à une fragmentation sélective de la cible par
de phénomènes de mode. On peut estimer que, en France, au effet thermomécanique, sans altération de l'épiderme [6].
moins 10 % des 5 à 10 millions de tatoués désireront se faire Le choix de la longueur d'onde est dicté par le niveau d'absorp-
détatouer dans les prochaines années. Afin de répondre à la tion du pigment pour chaque longueur d'onde. Une analyse
demande de ces patients, des techniques sont apparues. spectrale de l'absorption de la lumière a permis de définir préci-
En 1888, le Dr G. Variot mettait au point une technique de sément le minimum et le maximum d'absorption [7]. Celle-ci est
multipuncture avec injection d'acide tannique et de nitrate très variable pour une couleur, selon sa composition chimique.
d'argent, permettant la destruction escarotique du tatouage. Certaines règles générales sont tout de même applicables :
Cette technique a été remise au goût du jour et est commercia- le Nd-YAG 1 064 nm peut être utilisé sur les pigments bleus,
lisée sous différents noms  : e-raze®, Tatt2away®, Dermapen®. noirs et marrons, le Nd-YAG 532 nm sur les pigments rouges,
D'autres techniques archaïques ont également été utilisées  : le Rubis 694 nm sur le mauve, le violet, le vert, le bleu et le
application d'acide acétique, brûlure, électrocautérisation et noir, et l'Alexandrite 755 nm sur le bleu, le vert et le noir.

Dermatologie esthétique
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Chapitre 48. Tatouage et détatouage au laser

Tableau 48.1  Composants des tatouages


Couleurs Composants Absorption maximale Laser
Noir Carbone, oxyde de fer, bois Campèche 600–800 nm 694 nm, 755 nm, 1 064 nm
Rouge Rouge de sienne, bois Brésil, bois de santal, sulfure de 500–570 nm 532 nm
mercure, pigments azoïques
Marron Sulfate de fer 410–550 nm 532 nm, 1 064 nm
Vert Bichromate de potassium, oxydes de chrome, vert Guignet, 420–800 nm 694 nm, 755 nm
phtalocyanines, titane
Bleu Cobalt, titane, cuivre 590–808 nm 694 nm, 755 nm, 1 064 nm
Blanc Oxyde de titane, oxyde de zinc 790 nm 1 064 nm

Les encres contenant du titane sont particulièrement diffi- d'un film à base de perfluorodécaline, qui permettent de
ciles à détruire. Les publications font état de résultats plus diffi- traiter plusieurs fois sans être gêné par la formation des
ciles à obtenir avec les tatouages de couleur verte ou turquoise, bulles de gaz, responsables de l'aspect floconneux survenant
et de couleurs claires. Certains composants changent de cou- immédiatement après le tir laser. L'association laser
leur après absorption de la lumière (noircissement du titane, fractionné­-laser  Q-switched dans la même séance permet-
passage de l'oxyde ferrique [rouge] en oxyde ferreux [noir]). trait là encore l'élimination des bulles de gaz, et également la
Outre le choix de la bonne longueur d'onde, avec l'apparition destruction photothermique des encres résistantes.
des lasers picosecondes, le temps d'impulsion est également un Les différents types de tatouage vont répondre de façon
paramètre à prendre en compte. Plus la particule à fragmenter différente au traitement :
sera petite, plus le temps d'impulsion devra être court. Et plus ■ Dans les tatouages professionnels, l'encre est déposée dans

la durée d'impulsion est courte, plus l'impact photomécanique le derme superficiel et moyen. Ils sont souvent poly-
(responsable de l'efficacité) est élevé, alors que l'effet ther- chromes, nécessitant l'usage de plusieurs longueurs
mique (en partie responsable des effets secondaires) est réduit. d'ondes. La charge en pigment est importante et le traite-
La durée d'impact avec les premiers lasers déclenchés se ment long (10 à 15 séances) (fig. 48.1 à 48.4).
situait entre 5 à 60  nanosecondes. Depuis quelques années,
sont apparus les lasers picosecondes (1 picoseconde = 1 mil-
lième de nanoseconde) dont la durée d'impact oscille entre
450 et 750 picosecondes. Ces lasers, dont le rapport effet pho-
toacoustique/effet thermique est plus important, permet-
traient des résultats plus rapides, en rapprochant les séances
(cicatrisation plus rapide), et en diminuant le nombre global
de séances [8]. Ils sont aussi particulièrement intéressants sur
les tatouages fantômes, lorsque les particules qui persistent
sont de très petite taille. L'idéal serait d'associer dans le temps
les deux types de lasers, et de disposer de plusieurs longueurs
d'onde. Le problème majeur est le coût actuel de ces machines,
deux à trois fois celui d'un laser déclenché nanoseconde.
Certaines adaptations ont été proposées afin d'optimiser
les résultats  : la technique R20 et le traitement au t­ravers Fig. 48.1  Allergie au pigment rouge, aspect souffleté et vernissé.
Source : Y. Perrillat.

Fig. 48.2  Tatouage polychrome – traitement par laser 532 nm, 755 nm, 1 064 nm.


A. Avant traitement. B. Résultat après 8 séances.
Source : Y. Perrillat.

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Chapitre 48. Tatouage et détatouage au laser

A B C
Fig. 48.3  Tatouage polychrome – traitement par laser 532 nm, 755 nm, 1 064 nm.
A. Avant traitement. B. En cours de traitement. C. Résultat après 15 séances.
Source : N. Gral.

Fig. 48.4  Tatouage vert turquoise – traitement par laser QSW 755 nm.


A. Avant traitement. B. Persistance d'une hypochromie résiduelle.
Source : Y. Perrillat.

■ Dans les tatouages amateurs, le pigment est situé à des


profondeurs variables, mais souvent moindres et en moins
grande quantité. Le traitement en est logiquement plus
rapide, avec habituellement de bons résultats.
■ Les tatouages cosmétiques posent le problème du risque

de virage de couleurs ; les pigments blancs, roses ou beiges,


souvent utilisés par les esthéticiennes en maquillage per-
manent, contiennent de l'oxyde ferrique qui, sous l'effet du
laser, se transforme en oxyde ferreux de couleur grise. Ce
virage de couleur est systématique et instantané à la pre-
mière séance. Il est ensuite ­possible de poursuivre le traite-
ment, mais il faut bien prévenir la patiente de cette période
d'aggravation (fig. 48.5 à 48.7).
Fig.  48.6  Virage de couleur d'un tatouage cosmétique du sourcil par
laser 532 nm.
Source : M. Magis.

■ Les tatouages rituels sont réalisés avec de la cendre ou du


charbon de bois. Ils sont superficiels, et leur disparition est
A rapide, parfois en une seule séance (fig. 48.8).
■ Les tatouages de radiothérapie réagissent habituellement

très bien au traitement en 1 ou 2 séances, mais on peut


aussi en faire l'ablation au punch.
■ Les tatouages accidentels (goudron, encre, graphite)

peuvent être traités au laser si les inclusions ne sont pas


trop profondes, ou trop volumineuses.
B ■ Les inclusions de poudre d'arme à feu présentent un

Fig.  48.5  Virage de couleur du marron au noir après traitement d'un risque d'explosion responsable de cicatrices varioli-
tatouage cosmétique par laser 532 nm (A). formes. Il est important de réaliser un test avec un seul
Noter le blanchiment transitoire des sourcils (B).
impact laser.
Source : Y. Perrillat.

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Chapitre 48. Tatouage et détatouage au laser

A B
Fig. 48.7  Virage de couleur d'un tatouage cosmétique rouge de la lèvre par laser 532 nm.
Source : Y. Perrillat.

A B
Fig. 48.8  A. Tatouage rituel. B. Traitement par laser QSW 1 064 nm 2 séances.
Source : M. Magis.

Précautions avant tatouage. Il est ensuite nécessaire d'augmenter progres-


sivement la fluence pour atteindre les couches les plus
de débuter le traitement profondes. Les séances seront espacées de 1 à 2  mois,
La disparition complète des tatouages (en particulier plutôt 2  mois avec les nanosecondes, un seul pour les
colorés) est parfois illusoire et n'est obtenue que pour picosecondes. Un pansement gras peut être mis en place
seulement 60 % des patients après 10 séances. Ce sont durant quelques jours afin de permettre une cicatrisa-
les tatouages noirs ou bleus qui sont les plus faciles à tion rapide. Au fur et à mesure, l'aspect du tatouage va
traiter au laser. Pour les autres, les séances sont plus être de plus en plus estompé, et il faudra savoir décider,
nombreuses et le détatouage est donc progressif, s'éta- en accord avec le patient, en fonction de ses exigences
lant au-delà d'une voire parfois deux années. Le patient et de sa motivation, de l'arrêt du traitement.
doit donc en être informé avant de débuter les procé- L'amélioration peut néanmoins se poursuivre durant
dures, et doit savoir que le coût du traitement reste à sa plusieurs mois après la séance.
charge.
Complications et effets
indésirables du détatouage
Déroulement de la séance
L'incidence globale des effets indésirables est de l'ordre de
La longueur d'onde est choisie en fonction de la couleur 24 % [9, 10].
du tatouage. La fluence est ensuite déterminée en fonc- Le traitement est douloureux, rendant l'usage d'une
tion de la charge pigmentaire et de l'end-point (fluence crème anesthésiante nécessaire. Une suffusion hémorra-
modérée au départ). Plus le tatouage est riche en pig- gique et des croûtes sont quasi systématiques avec les
ment, plus la fluence sera basse. Les premières séances lasers nanosecondes ; une réaction d'œdème, voire la for-
fragmentent les couches les plus superficielles du mation de bulles est possible avec les lasers picosecondes.

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Chapitre 48. Tatouage et détatouage au laser

Une réaction urticarienne locale a été décrite [11], se Même si aucune étude épidémiologique n'est alarmiste
résolvant avec des dermocorticoïdes. Il a été décrit excep- quant à l'impact du tatouage massif de la population, l'inno-
tionnellement des réactions allergiques généralisées. cuité au long cours de dépôt dans la peau d'agents exogènes
À plus long terme, les complications les plus fréquentes reste à démontrer.
sont les troubles pigmentaires (hypo- ou hyperpigmenta- En dehors de ces complications médicales avérées
tions), souvent transitoires, les modifications de la tex- existent de nombreux désagréments pouvant générer une
ture cutanée et les cicatrices, en cas d'usage de fortes plainte du patient : hyperpigmentation, œdème chronique
fluences répétées. Elles sont plus courantes avec certaines ou sensation douloureuse persistante, cicatrices ponc-
longueurs d'onde (532  nm, 694  nm, 755  nm) qu'avec le tuées de l'aiguille (particulièrement visible après déta-
laser Nd-YAG (1 064 nm), du fait de la plus grande absorp- touage), tatouage mal réalisé ou «  bavant », gêne
tion par la mélanine épidermique. Le détatouage sur peau psychosociale.
noire est plus risqué que sur peau claire, mais réalisable
sous certaines conditions (surtout avec 1 064 nm).
Le problème le plus important est la déception du patient,
devant l'insuffisance de résultats, particulièrement lors de
Conclusion
traitement de tatouages professionnels polychromes. Le nombre de consultations en rapport avec le détatouage
a beaucoup augmenté depuis une dizaine d'années. Les
Les complications du tatouage ­progrès ont suscité l'espoir d'un effacement complet sans
et leurs traitements cicatrices, mais, dans le même temps, l'arrivée sur le mar-
ché d'encres plus difficiles à retirer tempère cela. Dans le
Nous disposons de peu d'études épidémiologiques concernant futur, de nouvelles technologies (laser à fibre, avec des
la fréquence des complications dans les suites de tatouage, temps d'impulsion de quelques picosecondes, voire moins,
mais celles-ci semblent assez rares (de l'ordre de 1 %) [4]. type femtoseconde) permettront peut-être de relever le
Les complications aiguës sont le plus souvent infectieuses : il défi.
s'agit d'infections bactériennes généralement locorégionales
(staphylocoque, streptocoque). Le traitement est Références
­l'antibiothérapie adaptée. Certains patients peuvent présenter [1] Tatoueurs, tatoués. Paris-Arles : Musée du quai Branly-Actes Sud ;
une réaction allergique de type urticarienne ou un rash éry- 2014.
thémateux pouvant entraîner un malaise dans les suites [2] Kluger  N. Tattooed people, who are you? Demographic and
behavioral characteristics of tattooed individuals. Ann Dermatol
immédiates du tatouage (allergie au nickel).
Venereol 2015;142:410–20.
Les complications chroniques sont dominées par les réac- [3] Kluger N. The risks of do-it-yourself and over-the-counter devices
tions inflammatoires. Il s'agit principalement de réactions for tattoo removal. Int J Dermatol 2015;54(1):13–8.
allergiques (plaques surélevées avec hyperkératose). Elles [4] Serup J, Bäumler W. Diagnosis and therapy of tattoo complica-
surviennent plus fréquemment avec les tatouages de cou- tions. Curr Probl Dermatol 2017;52:74–81.
leur (surtout rouge). Des granulomes inflammatoires non [5] Timko AL, Miller CH, Ross V. In vitro quantitative chemical analy-
sis of tattoo pigments. Arch Dermatol 2001;137:143–7.
allergiques se rencontrent lorsqu'il existe une surcharge pig-
[6] Naga  LI, Alster  TS. Laser tattoo removal: an update. Am J Clin
mentaire (pigment noir) ou dans le cadre d'une réaction Dermatol 2017;18(1):59–65.
sarcoïdosique. Le traitement de ces réactions inflammatoires [7] Beute TC, Miller CH, Timko AL, Ross EV. In vitro spectral analysis
passe par les dermocorticoïdes et surtout par le retrait du of tattoo pigments. Dermatol Surg 2008;34(4):508–15.
pigment responsable. La chirurgie et la vaporisation (laser [8] Lorgeou A, Perrillat Y, Gral N, et al. Comparison of two picose-
CO2 de relissage ou fractionné) seront retenues en cas d'al- cond lasers to a nanosecond laser for treating tattoos: a prospec-
tive randomized study on 49  patients. J Eur Acad Dermatol
lergie afin d'éviter le relargage systémique des molécules
Venereol 2018;32(2):265–70.
impliquées. Les lasers déclenchés peuvent être utilisés s'il [9] Khunger  N, Molpariya  A, Khunger  A. Complications of tattoos
s'agit de lésions inflammatoires non allergiques. La réactiva- and tattoo removal: stop and think before you ink. J Cutan
tion d'une sarcoïdose ancienne ou l'apparition d'une sar- Aesthet Surg 2015;8(1):30–6.
coïdose induite après tatouage est possible, particulièrement [10] Zhang M, Gong X, Lin T, et al. A retrospective analysis of the
avec les encres noires. Des réactions urticariennes chro- influencing factors and complications of Q-switched lasers in
tattoo removal in China. J Cosmet Laser Ther 2018;20(2):
niques sur les tatouages photo-­exposés peuvent également
71–6.
se voir. De nombreux cas d'infections à mycobactérie [11] Wilken R, Ho D, Petukhova T. Jagdeo. J. Intraoperative localized
(Mycobacterium chelonae) ont été rapportés et nécessitent urticarial reaction during Q-switched Nd-YAG laser tattoo
un traitement antibiotique adapté. removal. J Drugs Dermatol 2015;14(3):303–6.

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Chapitre 49
Organisation d'une consultation
en esthétique
N. Pomarede

La consultation esthétique doit obéir aux mêmes règles ■ la lumière ;


qu'une consultation médicale avec les mêmes rigueur et ■ le positionnement ;
éthique [1]. Elle nécessite cependant de développer d'autres ■ la couleur des photographies.

compétences dans les domaines de l'organisation, du coa- Des applications proposent aujourd'hui des vidéos pour
ching et de la formation de l'équipe médicale. mieux objectiver la dynamique des muscles du visage, per-
mettant de choisir le cliché le plus adéquat pour objectiver
les résultats  : un cliché de trois quarts montrera plus une
Une consultation de qualité amélioration de l'injection du cerne qu'un cliché de face par
exemple. L'utilisation d'appareils de métrologie cutanée [2]
Qualité des informations orale et écrite est aujourd'hui envisageable pour une prise en charge
experte et globale et de la peau. Ces appareils permettent de
La consultation esthétique doit atteindre certains objectifs. mesurer certaines données cutanées (rougeurs, capital
Il s'agit pour le médecin de cerner au mieux les attentes du solaire, hydratation, pores dilatés sébum, fermeté) difficiles à
patient, d'évaluer leur réalisme, d'établir un diagnostic, de appréhender par des photographies.
détailler la ou les solutions possibles et de proposer un plan
de traitement avec les différents actes et l'ordre dans lequel
Traçabilité des actes réalisés
ces actes devront idéalement être exécutés. Le patient attend
des réponses claires, compréhensibles sur les résultats des Tous les actes réalisés doivent être traçables. Classiquement,
techniques proposées de la part du médecin ; ces informa- il peut s'agir de la remise d'un carnet où sont notés les diffé-
tions peuvent être relayées voire ré-expliquées si nécessaire rents actes pratiqués avec les étiquettes des numéros de lot
par les assistant(e)s. utilisés pour les injectables. Encore faut-il que le patient rap-
porte son carnet à chaque consultation. Sensibiliser le
Transparence des actes patient à l'intérêt de ce document est important.
Les actes pratiqués en médecine esthétique sont hors
nomenclature. La remise d'un devis et un consentement Créer un environnement
éclairé sont obligatoires pour tout acte. Ces documents par- cohérent
ticipent aussi à la transparence sur les actes que le patient
envisage de réaliser. Si plusieurs actes sont envisagés, un plan
de traitement avec une priorisation des actes doit être remis Des assistant(e)s formé(e)s
au patient. Ce plan de traitement est un véritable tableau de Les assistant(e)s sont souvent le premier et le dernier contact
bord et les assistant(e)s sont une aide pour une parfaite réa- des patients avec un cabinet. La première impression qu'ils
lisation du planning des actes. (elles) donnent dès la prise de rendez-vous par téléphone est
importante. Surtout, ils (elles) doivent être capables de don-
Apporter la preuve : objectivation ner des informations précises et fiables sur les différentes tech-
des résultats niques réalisées au sein du cabinet [3]. Cela implique que le ou
L'objectivation des résultats des techniques réalisées est pri- les médecins prennent du temps pour former les assistant(e)s
mordiale. La prise de clichés de qualité, reproductibles, sur les techniques et les suites de celles-ci. Une information
avant/après un acte est indispensable en pratique esthé- claire délivrée par les assistant(e)s peut rassurer le patient.
tique. Face à des patients qui peuvent critiquer la qualité ou
la réalité de leurs résultats, il est important d'apporter la Une salle d'attente informative
preuve de l'amélioration apportée par nos actes. La qualité L'attente avant la consultation avec le médecin peut être un
des photographies réalisées va dépendre de trois facteurs : temps utile : la salle d'attente permet d'informer le patient

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ORGANISATION
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Chapitre 49. Organisation d'une consultation en esthétique

sur les actes pratiqués au sein du centre. C'est l'occasion de règles de déontologie édictées par le Conseil national de
faire connaître l'étendue de sa pratique médicale et d'infor- l'Ordre des médecins.
mer le patient sur son savoir-faire. Cela suppose :
■ d'écrire des fiches personnalisées et non celles distribuées Gérer la e-réputation
par les laboratoires sur les différents actes pratiqués ; Les médecins sont notés par Google avis (voir chapitre 53). Il
■ de réaliser des vidéos sur les différentes techniques prati-
est important de lire les avis qui y sont affichés, de toujours
quées dans le cabinet. y répondre et de demander à Google d'enlever les avis qui
sont calomnieux ou qui stigmatisent le médecin.
Le faire savoir
avec un site Internet de qualité Conclusion
La pratique de la dermatologie esthétique implique le savoir-
faire, mais il faut développer le faire savoir. L'activité esthé- L'organisation d'une consultation esthétique doit être cen-
tique doit être identifiable avant l'arrivée du patient dans la trée non seulement sur la qualité des soins, mais aussi sur la
salle d'attente. On sait aujourd'hui que les patients consultent qualité des informations qui sont délivrées au sein du cabi-
au moins trois différents réseaux pour se rassurer, même si le net tant par le médecin que par son équipe, ainsi que via le
bouche à oreille reste le meilleur outil de garantie d'une site Internet, qui en constitue le prolongement.
bonne réputation. Il fonctionne progressivement et s'installe Références
au fur et à mesure du temps, mais il est durable. [1] Penso-Assathiany D, Michaud T, Halioua B, Consoli S. L'intervention
Un autre moyen de rassurer le patient avant qu'il ne fran- esthétique. Regards croisés sur le consentement et l'information.
chisse la porte du cabinet reste un site internet de qualité qui Ann Dermatol Vénéréol 2010;137:843–54.
reflète au mieux les différentes facettes de l'activité. Le site [2] Humbert P. Bio-ingénierie cutanée : définition. EMC – Cosmétologie
et Dermatologie esthétique. Paris : Elsevier Masson ; 2000. p. 1–2.
Internet constitue une véritable vitrine de l'activité esthé-
Article 50-140-A-10.
tique. Il ne doit pas être figé dans le temps et nécessite une [3] Gassia V, Grognard C, Michaud T. La consultation esthétique au
actualisation dès qu'un nouvel acte ou une nouvelle tech- sein de l'activité du dermatologue. Ann Dermatol Vénéréol
nique est pratiqué au cabinet. Il doit bien sûr, respecter les 2009;136:390–2.

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.
Chapitre 50

Organisation
et sécurité d'un plateau laser
D. Perrin, B. Perrin

Avant de créer un plateau laser, il faut se poser les questions rendez-vous, des échanges téléphoniques ; la formation à la
du lieu d'exercice, de l'achat du matériel et surtout de l'orga- sécurité laser, une harmonisation des protocoles de traite-
nisation de la structure. La question de la sécurité reste à ment et de leurs tarifs sont également requises. Des réunions
tout moment un élément primordial. régulières et une bonne communication permettent d'opti-
miser le fonctionnement du centre.
Organisation d'un plateau laser
[1, 2] Budget
Les frais de fonctionnement sont divers et variés et doivent
Le prix, la complexité, la multiplication des appareils et la prendre en compte toutes les dépenses allant des loyers et
nécessité de faire évoluer les machines ne permettent charges du local, des matériels médical, administratif et
presque plus aujourd'hui de rester isolé. Plusieurs sujets informatique, des assurances, des salaires du personnel aux
nécessitent réflexion. honoraires comptables et juridiques. À noter que, pour les
lasers, en plus des remboursements d'emprunt souvent par
Lieu d'exercice crédit-bail, il faut compter environ 10 % du prix d'achat pour
■ Au sein d'un cabinet existant : pour une utilisation modé- la maintenance et rajouter le consommable. Il sera judicieux
rée, le médecin peut choisir la souplesse et la simplicité de d'intégrer un budget prévisionnel pour l'éventuel renouvelle-
la location de lasers, pour une utilisation selon les besoins ment du matériel ou l'imprévu.
ou le choix de l'achat de matériel en commun, capables
d'être transportés d'une structure médicale à une autre.
■ Dans le cadre d'un plateau laser : il s'agit d'un lieu privé où Sécurité
plusieurs médecins se regroupent afin de mutualiser les
coûts, et ainsi de mettre à disposition un matériel perfor- Les accidents ne sont pas fréquents et sont essentiellement
mant dans une structure commune. thermiques, rarement électriques ou chimiques. Ils sont dus à
■ Au sein d'une structure hospitalière publique ou privée :
une mauvaise utilisation des matériels, que l'on se doit d'éviter
surtout utile pour envisager des anesthésies générales, au maximum par une formation adaptée et continue [2–7].
parfois nécessaires (angiomes plans, maladie de
Recklinghausen, relissage CO2, etc.). Prévention collective : locaux et lasers
Locaux
Organisation et structure juridique Actuellement en France, il n'y a pas de norme obligatoire
C'est une étape importante qui permet de définir les intérêts pour un local laser, mais uniquement des préconisations
de chacun en faisant appel à des conseils juridiques et surtout européennes : panneau laser et signal lumineux à l'entrée des
de se protéger pour le futur en cas de conflit. Des statuts et salles ; surface suffisante (> 10 m2) prenant en compte la dis-
un règlement intérieur préciseront le fonctionnement et les tance nominale de risque oculaire. Les vitres sont opacifiées,
modalités d'entrée et de sortie de la structure. Ils seront sou- les rideaux ignifugés.
mis à l'approbation du Conseil national de l'Ordre des méde- On évitera les surfaces réfléchissantes et on affichera les
cins. Le type de structure choisie sera soit une simple mise en consignes de sécurité. L'évacuation des fumées tissulaires doit
commun d'appareils (SCM), soit une société plus complexe être optimisée [8, 9] : VMC renouvelant 3 à 6 fois le volume de
(SARL, SAS, ou SELARL), pour laquelle on évaluera les parti- la pièce/heure pour l'épilation et le laser CO2 ­surtout : masque
cularités fiscales, financières (apport extérieur possible). de protection adapté, aspirateur avec un système de filtre
La rédaction d'une « charte » est souhaitable pour privilé- adapté aux polluants biologiques pour limiter les irritants res-
gier la qualité relationnelle lors de l'accueil, de la prise de piratoires, les polluants chimiques voire biologiques (fig. 50.1).
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Chapitre 50. Organisation et sécurité d'un plateau laser

Fig. 50.1  Organisation et sécurité d'un plateau laser.


Source : M. Perrin.

Lasers La lumière visible et les infrarouges peuvent entraîner des


Il est obligatoire d'avoir un contrat de maintenance avec dégâts rétiniens avec risque de cécité en cas d'atteinte de la
contrôle annuel [10]. Le marquage  CE médical, les docu- macula.
ments de conformité, le manuel d'utilisation en français Pour les impulsions subnanosecondes, en plus d'effets
doivent être vérifiés. Les lasers médicaux sont de classe  4 optiques linéaires, on rencontre des effets de cavitation sur
(dangerosité pour l'œil et la peau), sauf les IPL. la mélanine de l'épithélium pigmentaire [20–22].
Les effets secondaires oculaires vont de l'éblouissement,
au scotome voire à la cécité, le plus souvent par défaut ou
Sécurité laser pour le personnel inefficacité de protection. Les lunettes de protection doivent
Une formation à la sécurité laser et la nomination d'un res- être adaptées à chaque laser, présentant un repère de cou-
ponsable sécurité sont obligatoires, comme une surveillance leur sur les branches de lunettes pour les différencier
en médecine du travail. Des vêtements de protection non aisément.
inflammables, des masques adaptés et surtout des lunettes
adéquates doivent être fournis [11–13].
Conclusion
Sécurité individuelle Dans le contexte actuel, il ne faut pas hésiter à prendre
La sécurité individuelle concerne les patients, le personnel conseil pour créer une structure laser. La formation du per-
du centre et de passage (fournisseurs), les médecins. sonnel et le respect des directives de sécurité collective et
Des protocoles écrits et affichés précisent les risques individuelle sont indispensables pour prévenir des complica-
[14–16]. tions des lasers, essentiellement cutanées et oculaires, et
assurer une sécurité optimale.
Risques cutanés
Références
L'exposition à un laser CO2 peut induire une lésion profonde.
[1] Jelen G, Carloz-Perrin B, Dallara JM, et al. Conception d'un centre
Les effets secondaires sont des brûlures cutanées plus ou laser monodisciplinaire : le centre laser dermatologique Sainte-
moins profondes. Odile de Strasbourg. Nouv Dermatol 1998;17:680–1.
[2] Will F, Perrin D. Élaboration d'un centre laser dermatologique. In :
Accidents oculaires Les lasers en dermatologie. 4e éd. Paris : Doin;2017. p. 327–35.
[3] Moutarajji AL. Intérêt des lasers en dermato-cosmétologie. Thèse
L'œil est aussi une cible des lasers [16–19]. Les lésions réti-
n° 82. Rabat 2016.
niennes sont les plus délétères. Elles dépendent de la lon- [4] Michel JL, Grognard C, Toubel G, et al. CO2, Er: YAG and pulsed
gueur d'onde, de la puissance, de la durée d'émission, de la dye laser treatment of angiofibromas in patients with tuberous
distance. sclerosis. Med Laser Appl 2004;19(3):136–45.

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Chapitre 50. Organisation et sécurité d'un plateau laser

[5] Wu  DC, Fitzpatrick  RE. Facial rejuvenation via the sequential [13] Décret n°  2010-750 du 2 juillet 2010 relatif à la protection des
combined use of multiple laser modalities: safety and efficacy. travailleurs contre les risques dus aux rayonnements optiques
Lasers Surg Med 2016;48(6):577–83. artificiels.
[6] Park  KY, Hyun  MY, Moon  NJ, et  al. Combined treatment with [14] Avis de la Commission de la sécurité des consommateurs en
595-nm pulsed dye laser and 1550-nm erbium-glass fractional date du 13 juin 2001 relatif à l'utilisation des lasers (ou autres
laser for traumatic scars. J Cosmet Laser Ther 2016;1–2. sources de puissance) dans le domaine de l'esthétique. BO de la
[7] Hée G, Balty I, Mayer A, Courant DM. Lièvre Les lasers : risques et concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes
prévention. INRS Hygiène et Sécurité du Travail 1998;173. 2001;13.
[8] Pierce JS, Lacey SE, Lippert JF, et al. Laser-generated air contami- [15] Arrêté de la Commission de la sécurité des consommateurs du
nants from medical laser applications: a state-of-the-science 3 juillet 2014.
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J Occup Environ Hyg 2011;8(7):447–66. ral dermatology: Part II. Safety related to cosmetic procedures.
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633–6. legal action in laser surgery. JAMA Dermatol 2013;149:188–93.
[10] Règlement (UE) 2017/745 du Parlement européen et du Conseil [18] Courant  D, Chapel  C, Paolacci-Riera  S, Pérot  JC. Rayonnement
du 5 avril 2017 relatif aux dispositifs médicaux, modifiant la laser : risques oculaires et normes de protection. Radioprotection
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ment (CE) n°  1223/2009 et abrogeant les directives du Conseil [19] Ray H, Chris A, Mathew M. Common causes of injury and legal
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document relatif à l'évaluation des risques pour la santé et la pulse retinal damage. Invest Ophthalmol Vis Sci 1996;37:3170–1.
sécurité des travailleurs, prévue par l'article L. 230-2 du code du [21] Jacques  SL, Katzir  A, Bellingham  WP, Roach, et  al. Minimum
travail et modifiant le code du travail (deuxième partie : Décrets visible retina lesions from pico- and femtosecond laser pulses. In :
en Conseil d'État). Proc. SPIE 2134, Laser-Tissue Interaction V ; and Ultraviolet
[12] Directive 2006/25/CE du Parlement européen et du Conseil du Radiation Hazards. 1994. p. 261–70.
5 avril 2006 relative aux prescriptions minimales de sécurité et de [22] Jacques SL, Glickman RD, Schwartz JA, et al. Internal absorption
santé relatives à l'exposition des travailleurs aux risques dus aux coefficient and threshold for pulsed laser disruption of melano-
agents physiques (rayonnements optiques artificiels) (19e direc- somes isolated from retinal pigment epithelium. In  : Proc. SPIE
tive particulière au sens de l'article 16, paragraphe 1, de la direc- 2681, Laser-Tissue Interaction VII; 1996. p. 468–77.
tive 89/391/CEE).

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Chapitre 51
Responsabilité médicale
en dermatologie esthétique
B. Rossi

Introduction attentifs et réserves faites de circonstances exceptionnelles,


conformes aux données actuelles de la science  » (arrêt
La responsabilité du dermatologue esthétique ne se différen- Mercier, Cour de Cassation, 1936).
cie pas de celle du médecin qu'il est. Même si le plus souvent L'obligation de moyens est bien sûr renforcée en matière
tout se passe bien et que la jurisprudence relative à l'esthé- esthétique  : le patient n'étant pas malade, les risques sont
tique en dermatologie est peu importante, il faut savoir que évalués plus sévèrement. Il faut également avoir à l'esprit que
nous sommes redevables d'à peu près toutes les juridictions. l'évaluation des procédures esthétiques est souvent subjec-
La responsabilité professionnelle médicale se caractérise par tive, que l'effet partiel d'une procédure doit être acté lors de
sa complexité. Le dermatologue esthétique exerce une activité l'information du patient et que, a contrario, une aggravation
au sein de sa profession médicale. En tant que citoyen, il est sus- de l'état antérieur est souvent assimilée à une faute.
ceptible de répondre de ses actes devant la société. En tant que La consultation préalable à l'acte esthétique est donc pri-
praticien, il en répond devant ses pairs et devant ses malades. mordiale et doit permettre une bonne sélection du patient
Qu'il commette une faute dans l'exercice de son art, il et lui délivrer une information claire, complète et honnête.
peut :
■ être sanctionné par les juridictions professionnelles
Demande du patient
(Conseil de l'ordre) ou par celles du droit commun (civiles,
administratives et pénales) ; La demande du patient doit être correctement explicitée,
■ être contraint à verser à sa victime des dommages et
afin que l'acte proposé y corresponde avec précision.
intérêts. L'expression « vieillissement du visage », par exemple, fré-
La mise en cause de la responsabilité médicale peut donc quemment employée par les patients, peut correspondre à
prendre soit un aspect de sanction, soit un aspect d'indem- des réalités cliniques bien différentes selon que sont mis en
nisation. Selon que cette activité est réalisée en pratique libé- exergue par le patient ses lentigos actiniques, ses rides péri-
rale ou dans un hôpital public, lors d'une activité buccales, chacune de ces éventualités nécessitant un traite-
thérapeutique ou dans le domaine de l'esthétique dont les ment laser bien particulier [1].
actes ne sont pas imposés par une nécessité thérapeutique, Le retentissement psychologique des lésions à traiter doit
les règles sont différentes. également être pris en compte (angiome plan chez l'enfant
De plus, au cours des ans, soit par des évolutions législa- et l'adulte, nævus d'Ota, érythrocouperose, etc.), surtout si
tives, soit par des évolutions jurisprudentielles, le pouvoir celles-ci sont situées sur des zones découvertes, notamment
politique a substitué la notion de réparation du dommage le visage.
médical du patient à la responsabilité du médecin.
Il existe également des modes de résolution des plaintes Antécédents
extrajuridictionnelles. Le développement de pratiques pure- L'interrogatoire sera minutieux ; outre l'âge, seront précisées
ment commerciales et de délégation de soins dans des la situation familiale, la profession, les habitudes de vie  :
contextes réglementaires flous ouvre par ailleurs des ouver- expositions solaires avec ou sans photoprotection, taba-
tures juridiques intéressantes… gisme, consommation d'alcool, statut hormonal, habitudes
cosmétiques.
Consultation Les antécédents médicaux doivent être détaillés : maladie
auto-immune, allergies, intervention chirurgicale antérieure
« Il se forme entre le praticien et son patient un véritable (qualité de la cicatrisation), herpès récurrent, allergie ou der-
contrat comportant pour le praticien l'engagement de lui matose de contact, traitements médicamenteux actuels ou
donner des soins, non pas quelconques, mais consciencieux, passés (isotrétinoïne per os, etc.).

Dermatologie esthétique
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Chapitre 51. Responsabilité médicale en dermatologie esthétique

Seront recherchés également les traitements esthétiques laires de l'autorité parentale ou par le tuteur. Ceux-ci reçoivent
antérieurs, leurs résultats, le degré de satisfaction et les com- l'information prévue par le présent article, sous réserve des
plications éventuelles. dispositions de l'article L. 1111-5. Les intéressés ont le droit de
recevoir eux-mêmes une information et de participer à la prise
Examen clinique de décision les concernant, d'une manière adaptée soit à leur
Le phototype est essentiel à considérer. Il conditionne en degré de maturité s'agissant des mineurs, soit à leurs facultés
effet la réponse au traitement et le risque de complications, de discernement s'agissant des majeurs sous tutelle.
notamment pigmentaires et cicatricielles. L'évolution jurisprudentielle n'a cessé d'agrandir le territoire
Les lésions à traiter doivent être correctement analysées : de cette information et ainsi les risques même exceptionnels
type, étendue, situation topographique et risque éventuel de doivent être informés (arrêt du 7 octobre 1998 de la Cour de
chéloïde, qualité des téguments en regard. L'examen doit cassation). De même, la loi du 4 mars 2002 stipule : « en cas de
être complet, à la recherche d'autres lésions à traiter le cas litige, il appartient au professeur ou à l'établissement de santé
échéant (pathologie tumorale notamment) ou de maladies d'apporter la preuve que la formation a été délivrée à l'inté-
dermatologiques devant rendre prudent dans la réalisation ressé dans les conditions prévues auprès ce présent article
du traitement (psoriasis, vitiligo, etc.). cette preuve doit être apportée par tout moyen ».

Appréciation de la psychologie du patient


Information a priori
Des lésions cutanées affichantes peuvent entraîner des
troubles psychologiques susceptibles d'altérer la relation
et consentement
médecin-patient. Ceux-ci doivent être pris en compte dès la Cette information incombe à tout professionnel de santé
première consultation, lors du traitement et des soins pos- dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles
topératoires en raison du surcroît d'anxiété qu'ils peuvent professionnelles qui lui sont applicables. Seule l'urgence ou
générer. l'impossibilité d'informer peuvent l'en dispenser. Cette infor-
D'une manière plus globale, la consultation esthétique mation est délivrée au cours d'un entretien individuel.
doit estimer la bonne compréhension du protocole théra- L'information doit être appropriée au cas du patient et la
peutique et des risques encourus, du résultat attendu et la remise d'un document écrit ne peut en aucun cas dispenser
compliance aux nécessités des soins postopératoires. de délivrer des explications orales. Celles-ci doivent com-
Enfin, il faut savoir écarter les patients dont la demande prendre le descriptif de l'acte : le bénéfice escompté (sa durée,
est irréaliste, notamment dans les cas de dysmorphophobie. le nombre de séances escomptées, la nécessité de séances
d'entretien, etc.), les conditions de l'intervention (type d'anes-
Droits du patient thésie éventuelle, niveau de douleur attendu, etc.), l'évolution
postopératoire (les suites opératoires normales, les précau-
La loi a accordé le terme de patients et celui d'usager, cette tions vis-à-vis d'une exposition solaire, la nécessité de repartir
variation sémantique n'étant pas anodine. accompagné[e], etc.) et les soins consécutifs ainsi que les
Le devoir d'information a priori : complications éventuelles inhérentes à l'acte.
■ article 35 du Code de déontologie médicale : « Le médecin Des recommandations de bonnes pratiques sur la déli-
doit à la personne qu'il examine, qu'il soigne ou qu'il conseille vrance de l'information sont établies par la Haute autorité de
une information claire, loyale et appropriée sur son état, les santé (HAS) et homologuées par arrêté du ministre chargé
investigations et les soins qu'il lui propose. Tout au long de de la Santé.
la maladie il tient compte de la personnalité du patient dans En cas de litige, il appartient au professionnel ou à l'établis-
ses explications et veille à sa compréhension » ; sement de santé d'apporter la preuve que l'information a été
■ article L. 1111-2 du Code de santé publique, modifié par la délivrée à l'intéressé(e). Cette preuve peut être apportée par
loi n°  2009-879 du 21  juillet 2009 – art.  37  : « Toute per- tout moyen.
sonne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette Ces obligations inciteront les médecins à remettre des
information porte sur les différentes investigations, traite- fiches conseils ou d'information. Ces fiches d'informations
ments ou actions de prévention qui sont proposés, leur doivent, si possible, être validées par les sociétés savantes et
utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les mises à jour régulièrement selon les données de la littéra-
risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils ture. Les autres moyens de preuve (dossier, témoignage,
comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et lettre à un confrère, etc.) sont très facilement contestables.
sur les conséquences prévisibles en cas de refus. Lorsque, Cette information doit laisser un libre choix au patient et
postérieurement à l'exécution des investigations, traite- lui laisser un temps de réflexion. Un délai de 15 jours est obli-
ments ou actions de prévention, des risques nouveaux sont gatoire pour les interventions « chirurgicales ». La loi ne
identifiés, la personne concernée doit en être informée, mentionne pas la durée du délai de réflexion pour les inter-
sauf en cas d'impossibilité de la retrouver. » ventions de type injection de produit de comblement,
Les droits des mineurs ou des majeurs sous tutelle mention- toxine botulique ou laser. Celui-ci doit donc être ni trop
nés au présent article sont exercés, selon les cas, par les titu- court, ni trop long.

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Chapitre 51. Responsabilité médicale en dermatologie esthétique

Depuis peu, le médecin peut être attaqué et éventuelle- tionnées ou conventionnelles. Le suivi postopératoire pré-
ment condamné sur un manque d'information isolé sans coce et répété est essentiel pour la détection et le
dommage. diagnostic de complications prédictives et leur prise en
charge médicale [2] ;
■ en cas de risques liés au patient, comme la prise en charge
Devis des hyperpigmentations inflammatoires chez les sujets de
Un devis écrit préalable précisant le tarif des actes effectués phototype élevé ;
■ en cas de l'intérêt de l'évaluation du résultat avec prise de
ainsi que la nature et le montant du dépassement facturé
doit être obligatoirement remis par le professionnel de santé clichés photographiques dans un but scientifique ou
à son patient dès lors que ses honoraires dépassent un seuil médico-légal.
fixé par arrêté des ministres chargés de la Santé et de la Comme après tout acte thérapeutique, le médecin doit
Sécurité sociale ou à la demande du patient. Il doit être émis être disponible pour son patient afin de gérer au mieux
en double exemplaire et signé par les deux parties. Ce devis d'éventuelles complications, mais aussi le stress postopéra-
possède une durée de validité à préciser. toire. Le patient peut comprendre qu'une complication
puisse survenir mais n'acceptera en aucune façon un
manque de disponibilité de la part de son thérapeute ;
Traitement esthétique cette attitude serait, bien entendu, susceptible d'entraîner
une crise relationnelle majeure pouvant être à l'origine de
Le traitement est la concrétisation de la consultation et doit
procédures judiciaires qui auraient pu être aisément évi-
donner lieu à la poursuite de l'enregistrement des renseigne-
tées [3].
ments concernant le patient et de l'acte réalisé pour l'établis-
En cas de complication grave, il faut saisir son assurance en
sement d'un dossier médical bien tenu qui aura une valeur
responsabilité civile et professionnelle (RCP), assurance seule
juridique non négligeable en cas de plainte.
habilitée à « négocier » avec le patient.
En préambule de l'acte esthétique, il est donc conseillé
d'établir une véritable check-list préopératoire reprenant
tous les impératifs de la consultation préopératoire : vérifica- Photographies et droit à l'image
tion de la bonne information du patient, recueil du devis,
réalisation des clichés photographiques préopératoires, res- La photographie médicale d'un patient avant, pendant ou
pect des consignes et des traitements prescrits (application après un traitement relève de « l'intimité de la vie privée et
de crème anesthésique, chimioprophylaxie herpétique du patient ». Le droit à l'image est régi par le principe du
débutée la veille par exemple). secret médical, le Code de santé publique, la loi informa-
À ce stade, il faut rappeler, d'une part, que des actes esthé- tique et liberté, la loi relative aux droits des malades du
tiques ne doivent pas être réalisés en dehors du domaine de 4 mars 2002.
compétence du médecin et, d'autre part, l'importance d'une La prise de photographies d'un patient permet de fixer l'état
formation appropriée. De plus, il est essentiel de ne prati- antérieur à une procédure. La comparaison des photogra-
quer que des traitements validés, conformes aux données phies, avant/après, pour autant qu'elles soient comparables,
acquises de la science. est un élément plus objectif que le degré de satisfaction ou
Le médecin doit, par ailleurs, disposer des moyens néces- d'insatisfaction du praticien et du patient. Ces photographies
saires et exercer dans un environnement adapté pour ne pas font partie intégrante du dossier médical. Leur utilisation hors
faire courir au patient des risques injustifiés. de celui-ci (présentations orales, articles, Internet, livres), que
À la fin du traitement, le médecin doit se rendre dispo- ce soit dans un but scientifique ou commercial, pose divers
nible pour expliquer les recommandations postopératoires, problèmes liés au secret médical et au droit à l'image.
notamment les précautions vis-à-vis de l'exposition solaire. Même en floutant et « anonymisant » les photographies,
Une ordonnance avec les produits nécessaires et la descrip- leur utilisation à titre d'information ou d'enseignement se fera
tion de leur utilisation en fonction du traitement laser effec- avec la plus grande prudence compte tenu de la possibilité de
tué doit être remise au patient. vol de ces images et de dissémination sur les réseaux sociaux.
En rappel, aucun arrêt de travail pris en charge par les assu- Des consentements écrits des patients pour l'utilisation
rances sociales ne peut être signé en cas de réalisation d'un non thérapeutique de ces images en garantissant l'anonymat
acte à visée esthétique. doit être demandée. L'utilisation de photographies médi-
cales dans un cadre commercial dépend évidemment du
droit commercial.
Consultation post-acte
La consultation postopératoire n'est pas systématique dans Assurance
les suites d'un acte esthétique. Cependant, elle a un carac-
tère obligatoire : L'assurance obligatoire de la responsabilité médicale découle
■ en cas d'acte laser avec effraction de l'épiderme comme de l'article L. 1142-2 du Code de la santé publique, modifié
tous les actes réalisés avec les techniques ablatives frac- par la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009, art. 75.

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Chapitre 51. Responsabilité médicale en dermatologie esthétique

« Les professionnels de santé exerçant à titre libéral, les éta- psychologique. Il faut particulièrement insister sur la qualité
blissements de santé, services de santé et organismes men- de l'information délivrée au patient, qui permet d'aboutir à
tionnés à l'article L. 1142-1, et toute autre personne morale, un consentement libre et éclairé. Celui-ci est véritablement
autre que l'État, exerçant des activités de prévention, de dia- un prérequis afin d'optimiser les résultats du traitement, de
gnostic ou de soins ainsi que les producteurs, exploitants et faire face en toute lucidité et confiance à des complications
fournisseurs de produits de santé, à l'état de produits finis, éventuelles, et d'éviter la déception d'un résultat postopéra-
mentionnés à l'article L.  5311-1 à l'exclusion du 5°, sous toire surestimé et, pour chacun de ces paramètres, source de
réserve des dispositions de l'article L. 1222-9, et des 11°, 14° et conflit potentiel.
15°, utilisés à l'occasion de ces activités, sont tenus de sous- La disponibilité du praticien avant, pendant et après l'acte
crire une assurance destinée à les garantir pour leur responsa- esthétique ainsi que ses qualités d'écoute sont le pendant
bilité civile ou administrative susceptible d'être engagée en naturel à une formation préalable de qualité.
raison de dommages subis par des tiers et résultant d'atteintes
à la personne, survenant dans le cadre de l'ensemble de cette Références
activité. » [1] Evenou P. Prise en charge globale du vieillissement cutané : indica-
Il faut bien sûr assurer sa pratique en spécifiant les actes tions respectives de la cosmétologie et des différentes techniques.
pratiqués. Encycl Med Chir (Cosmétologie et dermatologie esthétiques)
Seule une réclamation formelle (lettre ou assignation) est 2000;50-490:A 10.
constitutive d'un sinistre. [2] Horton S, Alster ST. Preoperative and postoperative considerations
for carbon dioxide laser resurfacing. Cutis 1999;64:399–406.
[3] McBurney  E. Side effects and complications of laser therapy.
Conclusion Dermatol Clin 2002;20:165–76.

L'acte esthétique impose, comme tout acte médical, une


prise en charge globale du patient, sans omettre le v­ ersant

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Chapitre 52
Déclaration des effets
secondaires
Gestion et vigilance esthétique
C. Raimbault

Introduction Matériovigilance
Marquage CE
La multiplication des procédures esthétiques entraîne inévi-
tablement une augmentation des effets secondaires. Ces À la différence du médicament, qui nécessite une AMM et
derniers font l'objet d'une vigilance exercée par les autorités de nombreuses études précliniques et cliniques, les disposi-
de santé qui analysent les critères d'imputabilité, de gravité tifs médicaux ne sont soumis qu'au marquage CE.
et de criticité. Les autorités de santé ont un objectif de santé Les missions de la matériovigilance sont la sécurité, l'inno-
publique et publient des alertes ou des bulletins d'informa- vation, l'information et la transparence.
tion après des enquêtes longues et minutieuses, qui peuvent Les produits de comblement, les peelings, les lasers sont
aboutir à la demande du retrait de certains dispositifs médi- classés parmi les dispositifs médicaux et sont soumis à des
caux, etc. Cependant, elles n'informent en aucune façon de normes dites « harmonisées » européennes.
manière individuelle le déclarant ou ne l'aident à gérer le C'est le fabricant qui doit démontrer et attester de la
problème aigu. Les médecins ont ainsi développé des outils conformité aux exigences essentielles en apposant le mar-
de communication avec des réseaux de vigilance confrater- quage CE sur son produit. L'objectif est de permettre la
nelle leur permettant de discuter des nouveaux procédés en libre circulation dans l'Union européenne de produits
esthétiques, des nouveaux produits mis à leur disposition industriels réputés sûrs. Il a le choix de la procédure à
par les firmes à but souvent commercial, mais surtout des suivre pour démontrer la conformité du produit : seul, ou
effets secondaires, de leur fréquence, de la meilleure façon avec l'intervention d'un organisme tiers (organisme noti-
de les gérer avec parfois une demande urgente. Cela devrait fié identifié par un numéro à 4 chiffres figurant à côté du
idéalement aboutir à la déclaration des effets indésirables sigle CE).
sur des fiches descriptives afin de recueillir le maximum d'in- Les trois acteurs du marquage CE peuvent être :
formations concernant le patient, le dispositif médical uti- ■ le fabricant responsable de la mise sur le marché, il choisit

lisé, la technique employée, les circonstances de survenue l'organisme notifié et il appose le marquage CE une fois
pour permettre une analyse médicale circonstanciée du pro- obtenu ;
cessus ayant abouti à l'effet secondaire. ■ l'organisme notifié : il évalue la conformité aux exigences

essentielles et délivre le certificat de marquage CE de


conformité ;
Vigilance exercée ■ l'autorité compétente  : elle désigne et inspecte les orga-

par les autorités de santé nismes notifiés ; surveille le marché ; centralise et évalue les
données de vigilance ; prend les mesures de police sani-
La surveillance des effets secondaires est sous la responsabi- taire appropriées.
lité de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des Les dispositifs médicaux sont répartis en quatre classes
produits de santé (ANSM) depuis sa mise en place le 1er mai dénommées classe I, classe IIa, classe IIb et classe III en fonc-
2012. Elle a succédé à l'Afssaps (1999-2012). tion du niveau de risque du dispositif par rapport aux cri-
En esthétique, les déclarations peuvent intéresser : tères suivants  : invasif, actif, implantable, court ou long
■ la pharmacovigilance pour les médicaments bénéficiant terme, etc.
d'une autorisation de mise sur le marché (AMM) comme Un guide d'application des directives européennes
la toxine botulinique. Les déclarations doivent être faites (MEDDEV) contient des lignes directrices sur la matériovi-
aux centres régionaux de pharmacovigilance ou à l'ANSM ; gilance, sur la classification des dispositifs médicaux, sur
■ la matériovigilance pour les dispositifs médicaux ; les produits à la frontière entre dispositif médical et médi-
■ la cosmétovigilance. cament ou sur les organismes notifiés.

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Chapitre 52. Déclaration des effets secondaires

Le guide MEDDEV 2.12 rev8 (janvier 2013) est dédié à la lien, le cas échéant, avec la structure régionale d'appui à la
vigilance et contient par exemple un modèle de rapport final qualité des soins et à la sécurité des patients. L'ARS transmet à
à compléter par le fabricant d'un dispositif médical suite à la Haute autorité de santé (HAS) les déclarations complètes.
son évaluation d'un incident de matériovigilance, et à trans- Sur la base de l'exploitation nationale des déclarations, la
mettre à l'autorité compétente. HAS élabore un bilan annuel comprenant des préconisations
pour l'amélioration de la qualité des soins et de la sécurité
Obligations législatives et réglementaires des patients. La démarche de retour d'expérience est un
en matériovigilance : que signaler ? levier fort pour l'amélioration des pratiques aussi bien au
Doit être signalé à l'ANSM : niveau local que national.
■ tout incident ou risque d'incident grave ayant entraîné ou
susceptible d'entraîner la mort ou la dégradation grave de Objectifs de la matériovigilance
l'état de santé d'un patient, d'un utilisateur ou d'un tiers Les objectifs sont d'éviter que ne se (re)produisent des inci-
mettant en cause un dispositif médical (art.  L.5212-2 et dents et risques d'incidents graves mettant en cause des dis-
R.5212-14 du Code de la santé publique) ; positifs médicaux en prenant les mesures préventives et/ou
■ tout rappel d'un dispositif médical du marché, motivé par correctives appropriées.
une raison technique ou médicale. Les autres événements La matériovigilance n'a pas pour objectif d'identifier la
indésirables peuvent être signalés selon une périodicité cause d'un incident particulier survenu à une date donnée
trimestrielle et de manière facultative (R.5212-15 et 22). dans un établissement donné.
Les professionnels de santé, quels que soient le mode et le L'évaluation menée doit essayer de répondre aux ques-
lieu d'exercice (secteur de ville, établissement de santé, éta- tions suivantes :
blissement ou service médico-social), et les représentants ■ Le dispositif médical peut-il être en cause ?

légaux d'établissement de santé ou d'établissement ou ser- ■ Le risque d'incident ou l'incident est-il grave ?

vice médico-social doivent déclarer tout événement indési- ■ Le risque d'incident ou l'incident est-il reproductible ?

rable grave associé à des soins (EIGS) survenu lors ■ Y a-t-il une mesure à prendre ?

d'investigations, de traitements, d'actes médicaux à visée La déclaration des effets secondaires se fait en téléchar-
esthétique, d'actions de prévention. geant le formulaire de déclaration sur le site de l'ANSM
Une première déclaration, effectuée sans délai, renseigne (www.ansm.santé.fr) et en l'adressant par e-mail (materiovi-
les circonstances et les conséquences de l'EIGS, ainsi que les gilance@ansm.sante.fr).
mesures immédiates prises.
Une deuxième déclaration, dans un délai de 3  mois, com- Évaluation des incidents par l'ANSM
porte les retours d'expérience comprenant une analyse appro- L'évaluation des incidents par l'ANSM se déroule selon les étapes
fondie des causes effectuée selon une méthode validée, un plan suivantes : après l'enregistrement et le tri à réception des signale-
d'actions et d'évaluation des actions correctives notamment. ments d'incidents, l'évaluation est organisée selon quatre niveaux
L'anonymat du ou des patients et des professionnels de procédures, puis elle se termine par un retour d'information.
concernés à l'exception du déclarant est garanti. Parmi les quatre niveaux de procédures, trois sont définis
La déclaration est transmise à l'Agence régionale de santé par la criticité : le niveau mineur, le niveau majeur et le niveau
(ARS) territorialement compétente. Elle pourra apporter, si critique. Le quatrième niveau, indépendant de la criticité,
nécessaire, un appui dans la réponse à l'événement signalé, en concerne les évaluations globales (fig. 52.1).

Évaluation des incidents de matériovigilance

Incident Évaluation Incident Incident


mineur globale majeur critique

Instruction fabricant
Pas d'évaluation Analyse de selon le Meddev Mesure conservatoire
individuelle tendance européen + questions à prendre ?
complémentaires Instruction immédiate
éventuelles

Analyse du Analyse de
Évalué en cas rapport final fabricant l'ensemble des
Traité en majeur si et des éventuels
de dérives informations recueillies
fréquence élevée éléments
identifiées Prise éventuelle
complémentaires de mesures

Fig. 52.1  Les niveaux de procédure d'évaluation des incidents par l'ANSM.


Source : ANSM.

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Chapitre 52. Déclaration des effets secondaires

Les informations et alertes (descendantes) sont les sui- conseils permettront de rassurer le praticien et d'envisager
vantes : une évolution favorable ?
■ les informations/recommandations rédigées par l'ANSM Souvent, il ne s'agit plus d'un effet secondaire grave avec la
sont diffusées à tous les établissements de santé ou phar- mise en jeu de la vie du patient, mais de l'accompagnement
maciens d'officine par le système d'alerte de l'Agence ; du médecin et par là même du patient, tous deux inquiets,
■ les actions correctives ou rappels émis(es) par le fabricant ce qui revêt une importance majeure. Des forums de discus-
et validé(e)s par l'Agence sont diffusé(e)s aux établisse- sion existent où chacun peut intervenir pour diffuser son
ments de santé ou aux utilisateurs directement par le expérience et ses conseils, le déclarant étant souvent protégé
fabricant ; par l'anonymat, mais avec l'inconvénient qu'aucune synthèse
■ les décisions de police sanitaire (interdiction, suspension n'est réalisée une fois le problème réglé. La nécessité de
de mise sur le marché, etc.) sont prises par le directeur mieux recueillir les données concernant la description de
général de l'ANSM. Elles sont publiées au Journal Officiel et l'effet secondaire et de l'ensemble des circonstances ayant
transmises aux fabricants pour qu'ils en informent leurs conduit à sa survenue est devenue évidente et a conduit à la
clients directement, sauf s'ils n'ont pas de traçabilité clients. création de fiches de recueil d'effet secondaire.
Vigilance esthétique (https://www.vigilance-esthetique.fr)
résulte de la fusion entre VIGIPIL et VIGIDEC (groupe de
Cosmétovigilance vigilance du Groupe de dermatologie esthétique et correc-
Depuis le 13 mars 2017, les professionnels de santé ou les trice [gDEC]). Ce site Internet d'accès gratuit est un réseau
usagers peuvent signaler en quelques clics aux autorités sani- de vigilance en dermatologie et médecine esthétique. Il
taires tout événement indésirable sur le site signale- sensibilise les médecins pratiquant des actes esthétiques
ment-sante.gouv.fr, dont les effets indésirables, incidents ou aux risques thérapeutiques et incite à leur déclaration.
risques d'incidents liés aux produits de santé. Il comporte quatre parties :
La cosmétovigilance est encadrée par le règlement (CE) ■ un forum de discussion réservé aux médecins inscrits gra-
n°  1223/2009 du Parlement européen et du Conseil du tuitement et identifiés par leur numéro de RPPS (réper-
30 novembre 2009 relatif aux produits cosmétiques (règle- toire partagé des professionnels de santé) ;
ment cosmétique), notamment l'article  23 et les articles ■ un accès SOS réservé à tout médecin souhaitant une
L.5131-5, L.5431-8 et  R.5131-6 à R.5131-15 du Code de la réponse urgente ; le message urgent est adressé à un
santé publique (CSP). groupe d'experts contacté directement par e-mail pour un
Les professionnels de santé, médecins, pharmaciens, infir- retour et une aide rapide ;
miers, dentistes, etc., ont l'obligation de déclarer sans délai à ■ une partie réservée aux fiches de déclaration de l'effet
l'ANSM tous les effets indésirables graves dont ils ont secondaire. Chaque fiche est conçue de façon à ce que le
connaissance, susceptibles de résulter de l'utilisation d'un pro- déclarant pense à noter le maximum de renseignements
duit cosmétique. Par exemple, pour l'année 2010, les princi- pertinents en fonction de la technique employée. Un
paux déclarants ont été les dermatologues dans 57 % des cas. accusé de réception comportant un numéro d'enregistre-
Ils peuvent également déclarer les autres effets indési- ment permettra de compléter la fiche ultérieurement
rables dont ils ont connaissance ainsi que les effets suscep- selon l'évolution du cas clinique. Sur le site, ces fiches sont
tibles de résulter d'un mésusage du produit (articles L.5131-5 accessibles aux dermatologues désignés comme adminis-
et R.5131-10 du CSP). trateurs experts et peuvent être analysées a posteriori
Les consommateurs et les professionnels de la beauté, les pour établir des alertes ou des recommandations ;
coiffeurs, etc. peuvent déclarer à l'ANSM tout effet indési- ■ une partie informative avec des fiches de recommanda-
rable ainsi que les effets indésirables susceptibles de résulter tions comme celle concernant le protocole d'utilisation de
d'un mésusage. la hyaluronidase en cas d'embole vasculaire.
La centralisation de ces données permet :
Vigilances confraternelles ■ d'assurer un retour rapide d'information au médecin

déclarant, et si besoin de le conseiller et le soutenir dans la


Les vigilances confraternelles sont nées d'un réel besoin gestion des complications (forum et SOS) ;
d'échange lorsqu'un événement médical indésirable sur- ■ de rapprocher les déclarations similaires et de prendre

vient. Le dermatologue, souvent isolé, a besoin de communi- contact avec le fabricant si nécessaire ;
quer avec ses confrères pour essayer de comprendre ce qui a ■ d'adresser aux membres du réseau Vigilance ayant parti-

pu occasionner un tel événement : le produit est-il en cause, cipé aux déclarations un message de « vigilance activée » à
la technique, le terrain du patient ? Y a-t-il une répétition la suite de signaux répétés et concordants ;
d'effets secondaires identiques ? Comment les gérer ? Quels ■ enfin, d'envisager une publication collective s'il y a lieu.

347
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Chapitre 52. Déclaration des effets secondaires

Conclusion confraternelles sont des espaces d'échange, de concertation


et d'aide parfois dans l'urgence, lorsqu'un événement indési-
À la différence des vigilances exercées par les autorités de rable survient. Elles visent à améliorer la prise en charge des
santé qui peuvent aboutir au rappel, à l'interdiction de dis- patients par une meilleure connaissance des processus ayant
positifs médicaux après de longues et minutieuses enquêtes, entraîné l'effet secondaire, mais se heurtent malgré tout au
ou à l'encadrement de certaines pratiques, les vigilances problème de la sous-déclaration.

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Chapitre 53
La e-réputation
des médecins libéraux
I. Catoni

Introduction mais les avis peuvent aussi se retrouver sur d'autres plate-
formes comme  : les Pages Jaunes, Yelp, StarOfservice ainsi
La e-réputation est le nom donné à l'ensemble des traces que des sites spécialisés tels Multiesthétique ou Estheticon.
numériques ayant trait à un jugement de valeur concernant On retrouve également des avis à propos du corps médical
une personne morale ou physique. Dans le domaine de la sur les grands forums Internet comme Au Féminin ou
médecine libérale, il s'agit la plupart du temps du médecin Doctissimo ainsi que sur les réseaux sociaux tels Facebook,
lui-même qui ne peut plus échapper à la mise en lumière de Twitter, ou encore sur Youtube.
son nom sur Internet. Même si celui-ci ne possède pas de site Cette vague de fond irrépressible interroge énormément les
Internet, la simple recherche de son nom sur un moteur de médecins qui ont plutôt été abrités du phénomène de nota-
recherches fera apparaître un nombre souvent très impor- tion virtuelle jusqu'à ces dernières années ; d'autant qu'une
tant d'occurrences, relatives à des annuaires, mais aussi des forme de contradiction de base existe avec leur déontologie. Le
forums, des plateformes de services, des réseaux sociaux qui Conseil national de l'Ordre des médecins rappelle clairement
agrègent un nombre colossal de données. dans sa communication que le médecin « ne peut utiliser des
Issue de la philosophie anglo-saxonne d'Internet et du par- exemples ou des témoignages flatteurs de patients » [1].
tage libre des données, la mise en ligne d'avis d'utilisateurs Qu'en est-il de tous ces avis publiés sur Internet concer-
ou de consommateurs est devenue une pratique extrême- nant un médecin avec des commentaires souvent subjectifs
ment courante depuis une quinzaine d'années dans le et peu factuels, qu'ils soient élogieux ou négatifs  : sont-ils
domaine de la grande consommation, le plus souvent large- licites ? Peuvent-ils être réglementés ?
ment encouragée par les sites Internet de vente en ligne. Lorsque l'on parle de e-réputation, on touche rapidement
Donner un avis et noter une entreprise ou un prestataire à la problématique des avis négatifs et au pouvoir légal et
s'est par la suite répandu à tous les secteurs d'activités, les technique de maîtriser cette réputation.
hôtels et restaurants ayant été les premiers concernés. Cette
notation est directement liée à l'« ubérisation » de notre éco-
nomie et à la domination des plateformes de services sur
D'un point de vue légal
Internet qui ont besoin d'un élément « humain » pour com- Légalement, un avis sur un médecin posté sur Internet est
pléter leur algorithme de classement purement informa- concerné par la déontologie médicale et la loi française.
tique. D'un point de vue ordinal, le médecin ne peut pas utiliser
Ainsi, nous pouvons noter notre chauffeur VTC à peu près des avis et des témoignages à son propos sur son site Internet
de la même façon que le dernier film que nous avons vu au ou sur sa page Facebook professionnelle, mais il assiste,
cinéma. Le futur nous promet déjà l'extension de cette habi- impuissant, à l'accroissement de commentaires et de notes
tude, avec dans sa version plutôt inquiétante le projet en sur un nombre toujours plus grand de sites.
Chine de notation sociale des citoyens, rejoignant la prévi- D'un point de vue légal, la liberté d'expression permet de
sion d'un célèbre épisode de la série télévisée anglaise Black publier un avis sur Internet à propos de son médecin.
Mirror. Néanmoins, la loi française reste un rempart de protection
efficace sur les commentaires dénigrants ou diffamatoires
Médecin 5 étoiles qu'un avocat est en capacité de qualifier facilement.
Tous les sites Internet qui relèvent de la juridiction fran-
Les médecins, bien que professionnels réglementés, sont çaise peuvent donc être contactés avec des demandes d'ano-
aussi soumis à cette règle. On constate depuis quelques nymisation, de modération ou de suppression des avis qui, la
années le développement fulgurant de la notation en ligne plupart du temps, sont prises en compte facilement et rapi-
des médecins et les commentaires des patients sur leur pra- dement. Ainsi, les avis déposés sur les Pages Jaunes, Yelp,
ticien sous forme d'avis. Les plus visibles sont bien entendu Doctissimo ou Au Féminin peuvent être traités efficacement
les avis gérés par Google reliés aux fiches Google My Business, en contactant ces sites directement.

Dermatologie esthétique
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Chapitre 53. La e-réputation des médecins libéraux

Le cas des fiches Google ■ aucune information sur le lieu d'hébergement des fiches
Google My Business n'est donnée aux utilisateurs et
Il est en tout autrement des fameux avis Google. D'ailleurs, aucune possibilité de recours ou de suppression des don-
lorsque l'on parle aujourd'hui de e-réputation pour les nées personnelles n'est prévue, en infraction avec la
médecins, on entend d'abord les avis Google ! récente loi européenne dite RGPD (règlement général sur
Depuis plusieurs années, Google a créé et perfectionné la protection des données), contrairement à d'autres ser-
une base de données professionnelle qui rassemble tous les vices de Google comme Google +, Gmail ou Youtube.
commerces, entreprises et prestataires de services. Chaque Face à ces problèmes de réputation sur Internet, de nom-
professionnel ou presque bénéficie d'une fiche le présentant breux médecins se sentent souvent légitimement désarmés.
avec sa localisation, son métier, ses coordonnées, etc. Cette Alors que, pour la plupart des sites, agir est désormais pos-
fiche existe même si le professionnel en question ne l'a pas sible, ce qui est facilité par les récents progrès législatifs euro-
sollicitée et ne possède pas de site Internet. À partir du péen, tout recours contre les avis Google est complètement
moment où Google valide par croisement d'autres signaux fermé.
existants (une fiche sur les Pages Jaunes par exemple) de
l'existence d'un professionnel, une fiche Google My Business
est créée. C'est ainsi qu'en quelques années une majorité de D'un point de vue technique :
médecins libéraux ont été fichés sur Google My Business. comment se protéger ?
Ces fiches sont rattachées essentiellement à une visibilité
de référencement local et bénéficient d'une forte exposition Se tourner vers le Conseil national de l'Ordre des médecins
dans les résultats de Google sur les recherches de proximité. (CNOM) semble à première vue un réflexe corporatiste
Elles sont aussi associées quasi systématiquement aux naturel. Celui-ci multiplie d'ailleurs les initiatives de commu-
recherches sur le nom du médecin avec un emplacement nication de bonne conduite concernant la e.santé alors que
très visible en haut des résultats. des bouleversements gigantesques impactent et vont
La particularité de ces fiches est liée à la possibilité d'ac- impacter de plus en plus la médecine dans le futur.
cueillir des avis. Tout internaute ayant un compte Google Concernant les avis Google, le CNOM communique sur sa
(une adresse gmail) peut inscrire directement sur la fiche prise de conscience du problème et sur l'interpellation effec-
une note sur 5 étoiles et un commentaire éventuel au sujet tuée en 2017 des services de la DGCCRF, de la CNIL et du
du praticien. ministère de la Santé.
Modérer et contrôler sa réputation sur sa fiche Google My Le CNOM a mis en ligne en septembre 2018 un guide pra-
Business est devenu mission impossible. Même si le médecin tique de la e-réputation, complet et bien réalisé qui permet
peut revendiquer sa fiche à l'aide d'un compte gmail permet- d'aider les médecins à gérer leur réputation sur Internet et
tant de modifier ses coordonnées, Google ne laisse en effet aborde l'ensemble des cas de figure pour intervenir face à
aucune alternative : ni les avis, ni même la fiche ne peuvent être des informations ou des avis publiés sur les différents types
supprimés. Le médecin a uniquement la possibilité de répondre de médias en ligne [2]. Malheureusement, la gestion des avis
aux avis ou de signaler à Google un avis inapproprié à l'aide une Google n'y trouve aucune solution miracle en dehors de la
procédure fermée… qui n'aboutit la plupart du temps à rien. possibilité visiblement autorisée par le CNOM d'y répondre.
Les professionnels de l'Internet regrettent le bon temps pas Un recours à la justice pour tenter de forcer Google à sup-
si éloigné où il était encore possible d'être en contact avec les primer un avis ou une fiche semble la seule possibilité offerte
équipes Google de modération des avis des fiches My Business au médecin pour gérer sa e.réputation sur Google My
pour gérer au cas par cas les litiges. Cependant, cette commu- Business. Il est possible que la récente loi européenne sur la
nication n'est plus possible. Au regard de la loi française et protection des données personnelles dite RGPD, appliquée
maintenant européenne sur la protection des données per- depuis mai 2018, permette de faire évoluer la situation. En
sonnelles ainsi que du code ordinal de bonne conduite du effet, cette loi oblige tous les sites Internet à permettre à
médecin, la situation des fiches Google My Business conte- leurs visiteurs de les contacter facilement pour modifier ou
nant des avis devient assez ubuesque pour plusieurs raisons : supprimer leurs données personnelles.
■ elle trahit le secret médical. Les patients qui témoignent Faire appel à un avocat sera probablement nécessaire pour
sur leur médecin avec un compte à leur nom révèlent leur agir plus efficacement et plus rapidement.
identité en public ; Pour les médecins n'étant pas encore fichés sur Google My
■ elle place d'une certaine façon le médecin en contradic- Business, il pourra être intéressant de prévenir l'apparition
tion avec les règles ordinales car si celui-ci revendique sa de leur fiche dans le cadre par exemple de leur affiliation à
fiche et répond aux avis, il gère des témoignages sur un une plateforme de prise de rendez-vous en ligne. Celles-ci
outil de sa communication en ligne qui peut être directe- sont très souvent à l'origine de la création des fiches Google
ment relié à son site Internet personnel ; My Business des médecins, sans forcément les avertir.
■ des avis diffamatoires ou dénigrants, publiés sous pseudo- Enfin, pour les médecins rompus à une présence sur
nyme, en infraction avec la loi française peuvent être Internet au moyen d'un site Internet de présentation, par
publiés sans modération ni recours ; exemple, et qui comptent sur cette visibilité, une éventuelle

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Chapitre 53. La e-réputation des médecins libéraux

suppression de leur fiche Google My Business ne constitue- L'utilisation de plus en plus importante d'Internet par
rait pas forcément un bon choix tellement cette fiche béné- les patients pour s'informer sur leur médecin, mais aussi à
ficie d'une mise en avant pour toutes les recherches locales propos des pathologies et des soins, la prise de rendez-vous
relatives à leurs noms ou spécialités. en ligne qui en découle directement doivent néanmoins
Dans ce cas, la tentation est forte de solliciter les témoi- solliciter la vigilance du médecin sur ces phénomènes qui
gnages de patients satisfaits pour faire remonter une notre n'ont pas terminé de bouleverser leur relation avec leurs
moyenne abaissée par des avis négatifs. Il faut savoir que patients.
cette pratique est interdite par le CNOM. Remerciements à Patrick Vandecasteele, dirigeant de
En revanche, rien n'interdit le médecin de se retourner l'agence web Tematic.
contre un patient insatisfait qui aurait publié un avis négatif
dénigrant ou diffamatoire pour le sommer de retirer son avis
qui enfreint la loi. Encore faut-il que l'avis en question ne soit Références
pas publié sous un pseudonyme. [1] Déontologie médicale sur le web. Le livre blanc du Conseil natio-
nal de l'Ordre des médecins, 2011. http://droit-medical.com/
wp-content/uploads/2012/05/livre-blanc-deontologie­-
web-2012.pdf
Conclusion [2] Préserver sa réputation numérique. Guide pratique. Conseil
national de l'Ordre des médecins, septembre 2018. https://
On le voit, veiller et gérer sa e-réputation pour un médecin www.conseil-national.medecin.fr/sites/default/files/external­-
représente une tâche non négligeable qui ajoute un surcroît package/edition/mmy1bs/cnom_guide_
de travail à des agendas déjà souvent bien chargés. pratique_e-reputation.pdf.

351
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Conclusion Partie 5
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Chapitre 54
L'esthétique du corps, une prise
en charge combinée
H. Cartier, S. Lederlé, D. Boineau, B. Pusel

Introduction reils, on réduit les érythèmes diffus, la couperose et les lentigos


solaires sur tout le corps. Leur niveau d'action concerne l'épi-
La coordination des différentes techniques que nous avons à derme et le derme superficiel, créant un remodelage du tissu
disposition afin de rajeunir ou de maintenir un idéal de jeu- cutané par toute une cascade d'actions pro-inflammatoires,
nesse est le travail quotidien du praticien esthétique. Chacun dont la primauté revient aux HSP (heat shock proteins).
d'entre nous a sa pratique, son expérience et en particulier
l'expertise de la pratique de techniques combinées parfois Lasers non ablatifs fractionnés
réalisées au cours de la même séance, ce qui représente une Ces lasers de type Erbium-Glass ont une longueur d'onde
véritable innovation depuis quelques années. comprise entre 1 540 et 1 565 nm, et ne pénètrent presque
L'œil de l'expert ne sera pas forcément en accord avec la pas au-delà de 1,2 mm d'épaisseur cutanée, tout comme les
demande du patient. Le praticien devra expliquer pour Nd-YAP 1  340  nm en deçà des 2,5  mm. En raison de leur
quelles raisons il est préférable de corriger ou d'améliorer sécurité d'utilisation, ils peuvent être utilisés sur le corps afin
certaines disgrâces que le patient ne remarque pas, ou sur de raffermir le tissu dermique par une néocollagenèse,
lesquelles il ne se focalise pas. Cependant, si l'association comme dans l'indication des cicatrices d'acné, et sont de
d'actes peut être synergique, elle peut être tout aussi bien plus utilisables sur presque tous les phototypes.
contre-productive.
Ce chapitre a pour but de synthétiser différentes pratiques Lasers fractionnés ablatifs
après un rappel des propositions techniques. C'est le traitement de référence pour le vieillissement du
visage. On distingue le laser Erbium-YAG fractionné et le
laser CO2. Pour ce dernier, certains appareils peuvent
Quelle cible, quelle profondeur, atteindre le derme au-delà de 3,5  mm sous condition de
quelle attente ? tailles de spots inférieures à 150  microns. Plus le spot est
large (au-delà des 500  microns jusqu'à 1,3  mm), plus on
Chaque technique intervient à un niveau privilégié dans la obtient un effet liftant mais qui reste en surface. La diversité
peau mais reste limitée à ses cibles privilégiées. En combi- des lasers ablatifs fractionnés à notre disposition tend néan-
nant les différents appareils, on a donc la possibilité de trai- moins à donner des résultats variables selon les caractéris-
ter la peau sur toute son épaisseur de l'épiderme à tiques techniques des différents appareils disponibles sur le
l'hypoderme. marché. En tout état de cause, le cumul thermique et la
charge photonique absorbée doivent être maîtrisés pour évi-
Lasers et ondes électromagnétiques ter des complications de types cicatriciels définitifs. En
Les rayonnements électromagnétiques, qu'ils soient issus de dehors du visage, leur usage est désormais déconseillé, ou
source monochromatique comme les lasers ou autres, tra- alors avec une solide expérience de son appareil et de la maî-
versent la peau pour être absorbés par certaines cibles cuta- trise de la cicatrisation, bien plus aléatoire que sur le visage.
nées : l'eau, la mélanine et les pigments, l'hémoglobine, mais
aussi la cellularité cutanée. Leur pénétration est donc déter- Lasers Nd-YAG
minée à une profondeur variable avec transformation de L'effet thermique induisant un renouvellement du tissu
l'énergie initiale en effet thermique ou photomécanique. conjonctif peut être obtenu avec des appareils en mode
balayage et faibles fluences (4 à 5 J/cm2), des temps de tirs
Lasers de rajeunissement courts (inférieurs à 0,5 ms) et de larges tailles de spot, autour
Ces lasers agissent sur le teint, les rougeurs, les taches solaires, de 10  mm. Le but est d'accumuler de la chaleur dans le
tels que le laser à colorant pulsé, le laser KTP, le laser jaune, la derme. Le résultat est toutefois aléatoire selon les sujets, le
lumière pulsée et même le laser Alexandrite long pulse pour les nombre de séances effectuées et le délai entre celles-ci.
lentigos solaires. En optimisant les paramétrages de ces appa- Toutes les zones du corps sont cependant accessibles.

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355
Partie 5 Pour plus de livres visitez notre canal télégram : https://t.me/medhhub
CONCLUSION
BIBLIOTHEQUE DE LA RECHERCHE BIBLIOGRAPHIQUE SCIENCE MEDICALE
Chapitre 54. L'esthétique du corps, une prise en charge combinée

Diode 1 060 nm Micro-ondes 2,45 Ghz dites froides


Celle-ci émet une chaleur infrarouge pendant plusieurs Celles-ci sont absorbées quasi sélectivement par les adipo-
minutes sur une profondeur de 2 à 3 cm. Elle vise à réduire cytes avec destruction des cellules par phénomène méca-
l'épaisseur cellulo-adipeuse dite cellulite et à raffermir son nique de cavitation pour un objectif de remodelage de la
tissu dermique sus-jacent. Le contact cutané est néanmoins silhouette.
refroidi par un effet Peltier afin d'éviter une brûlure de sur-
face. Cette diode est utilisable sur presque toutes les zones du Ondes électromagnétiques de haute intensité
corps avec de la cellulite, mais aussi les zones à petits amas (HIFEM)
graisseux comme la région sous-mentonnière ou les zones de C'est la dernière technologie proposée pour sculpter le corps
relâchement comme la face interne des cuisses et des bras. avec une action essentiellement sur le muscle exclusivement
au niveau abdominal et fessier avec une stimulation de haute
Radiofréquence
fréquence.
La radiofréquence agit par élévation thermique sur toute l'épais-
seur selon le type d'appareil. On en distingue plusieurs types. Roller ou microneedling
Radiofréquence de contact externe et bipolaire Il s'agit d'aiguilles disponibles sous forme de rouleau ou de
Cette technique consiste à « peindre » la zone à traiter avec des tampons qui transpercent la peau de 0,1 mm à 3 mm de pro-
pièces à main dont la profondeur d'action maximale corres- fondeur. La suffusion hématique est classique quand on
pond à la moitié de l'écartement en millimètres entre les deux dépasse le derme papillaire. On peut également les utiliser
électrodes. Le courant électrique fait un va et vient par une sur toutes les parties du corps et sans risque de pigmenta-
fonction de bipolarité, même s'il s'agit d'appareils annoncés tion post-inflammatoire pour les peaux foncées car elles
comme multipolaires. En ayant ainsi plusieurs pièces à main, on sont dénuées d'effet thermique.
peut traiter toutes les parties du corps. Certains appareils uti-
lisent des technologies combinées en leur sein et activées de Peelings
façon simultanée : LED, massages ou aspiration associée, etc. On distingue essentiellement trois types de peelings, super-
On distingue aussi d'autres formes de radiofréquence. Celle ficiels, moyens et profonds, avec comme molécule de réfé-
juste posée sur la peau pendant plusieurs minutes sur le même rence respective : l'acide glycolique, l'acide trichloracétique
principe que le laser 1 060 nm ou encore celle sous forme de et l'acide phénolique. Leur formulation est variable en termes
panneaux surplombant de quelques centimètres la zone trai- de concentration et d'ingrédients ajoutés afin d'obtenir une
tée avec pour un même but : accumuler de la chaleur suffi- pénétration la plus homogène possible et une action modu-
samment longtemps pour qu'elles induisent un remodelage. lée sur le teint ou le remaniement dermique. Le bénéfice
final est de redonner de l'éclat, de la fermeté jusqu'à un effet
Radiofréquence avec microaiguilles ou intratissulaire
lissant, en particulier pour le classique peeling profond asso-
Cette radiofréquence peut aller jusqu'à 5 mm de profondeur. ciant acide phénolique et huile de croton, mais à utiliser uni-
L'objectif est de délivrer l'énergie soit à la pointe en cas d'ai- quement entre des mains expertes. Autant le visage permet
guilles isolées, soit à une profondeur variable avec des de proposer toutes sortes de peelings, autant pour le reste
aiguilles non isolées. Elle est adaptée à toutes les parties du du corps, on se cantonnera aux peelings superficiels, moyens
corps en adaptant la profondeur des aiguilles et l'épaisseur ou dépigmentants.
cutanée traitée. Elle permet de raffermir les tissus par une
action thermique intense non ciblée, à la différence des
lasers qui sont soumis à leur photosélectivité.
Produits de comblement et de
régénération tissulaire
Radiofréquence fractionnée La référence des produits de comblement restant les acides
La radiofréquence fractionnée est encore différente. Elle hyaluroniques, il ne faut pas oublier les autres produits induc-
induit des micropoints de coagulation de l'épiderme au teurs d'une régénération tissulaire comme l'hydroxylapatite
derme superficiel et donc peut être comparée aux lasers de calcium, l'acide polylactique ou le polycaprolactone.
ablatifs fractionnés en mode faible fluence. Le rôle de ces produits est d'être placés au sein du tissu
conjonctif dermo-hypodermique, afin de projeter les tissus
HIFU cutanés sus-jacents et de redonner volume et courbes har-
Les ultrasons focalisés induisent des points de coagulation monieuses au visage ou à d'autres parties du corps, de com-
parfaitement linéaires à une profondeur définie par le trans- bler rides et ridules. Placés plus superficiellement, ces
ducteur, en général 1,5–3,0 et 4,5  mm pour le visage, avec produits ont aussi une action sur le teint, la texture ou la
induction d'une remise en tension cutanée, et jusqu'à 13 mm structure du tissu cutané. Si leur résorption est lente, voire
pour le remodelage de la silhouette. Adaptables à toutes les très lente pour certains, la quantité résiduelle même minime
parties du corps, leur intérêt est multiple : réduire l'épaisseur peut néanmoins persister comme tout corps étranger, et
cellulo-adipeuse par destruction des adipocytes, raffermir induire un granulome inflammatoire retardé dont la genèse
les tissus sous-dermiques et dermiques. est mal connue. La possibilité de réduire une asymétrie ou

356
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Conclusion Partie 5
BIBLIOTHEQUE DE LA RECHERCHE BIBLIOGRAPHIQUE SCIENCE MEDICALE
Chapitre 54. L'esthétique du corps, une prise en charge combinée

un excès d'injection d'acide hyaluronique avec de la hyaluro- dans le même temps opératoire ou non. La plupart du temps
nidase, rend ces produits plus rassurants pour la plupart des pour une même zone, on procède d'abord par les injections
praticiens. de toxine botulique pour réduire les rides d'expression, sui-
Ils sont utilisables sur toutes les parties du corps, des mains vies quelques semaines après des produits de comblement.
au galbe d'un dos de pied, du décolleté à la face interne des Ce qui est valable pour le visage ne l'est pas forcément pour
cuisses, etc. On sera forcément limité par le coût induit, le corps, l'intérêt de l'usage de la toxine pour le corps étant
variable selon la quantité utilisée pour le traitement de restreint.
grandes surfaces. Au total, la pratique et l'analyse statique et dynamique
laisse à chaque praticien le séquençage des injections.
Plasma riche en plaquettes (PRP)
La technique consiste à réinjecter le sang du patient après Produits de comblement, lasers
centrifugation. Elle fait l'objet de publications en médecine et autres sources électromagnétiques
et en dermatologie, notamment dans les pathologies inflam-
matoires, les alopécies, et en dermatologie esthétique. La En dehors des LED, pour lesquelles il n'existe pas de données,
législation française a limité récemment ces indications au l'effet thermique de toutes les sources irradiantes peut
domaine de la pathologie, ce qui reste à définir car le photo- modifier la structure rhéologique des produits.
vieillissement, la dermatoporose sont le cœur de la prise en Il faut considérer que toute source de chaleur intense
charge du vieillissement cutané dans un but esthétique et qui se dégage au même niveau qu'un, ou très proche d'un
préventif. produit de comblement peut modifier sa structure et le
voir se désagréger plus rapidement, notamment pour les
acides hyaluroniques. Il faut donc évaluer l'intérêt de faire
Toxine botulinique un acte laser ou usage d'un autre EBD (energy-based
Son action relaxante sur les muscles est d'une aide précieuse device) au décours d'injections, mais il n'y a pas réel
dans la prise en charge globale du vieillissement cutané ou consensus ni d'études qui déterminent le bon moment
pour en retarder les effets, avec des résultats spectaculaires pour procéder à ces actes [1]. Rappelons, toutefois, que
pour les rides dynamiques faciales ou d'expression. Son utili- l'acide hyaluronique en seringue subit un chauffage à
sation pour le corps est possible, comme regalber un mollet 125  °C durant une heure ; il n'y a donc pas uniquement
en agissant sur les muscles suraux, le décolleté, mais les résul- l'effet de chauffe d'un laser qui puisse expliquer une pos-
tats sont bien plus inconstants que pour le visage. La rosa- sible résorption plus rapide.
cée, la prise en charge de cicatrice rétractile, hypertrophique Pour le pourtour orbitaire, la situation est plus complexe
ou chéloïdienne sont autant d'autres indications potentielles car on peut aussi souhaiter réduire un cerne creux, traiter
à valider. des ridules, obtenir un certain relâchement cutané ou
réduire une pigmentation. Il est à ce titre conseillé de décaler
Fils fixants ou tenseurs les injections afin de ne pas surajouter un œdème ou des
ecchymoses au geste laser.
On distingue deux types de fils  : les non-résorbables et
Au contraire, dans les cicatrices d'acné ou chirurgicales en
ceux qui sont résorbables en 1 an environ. Ces derniers, à
lit de rivière, l'effet synergique de ces techniques est
base de PDO ou d'acide polylactique, revendiquent le fait
intéressant.
de fixer un état. Placé sous le derme, ils agissent comme
régénérant collagénique et, plus profondément, ils peuvent
tracter la peau relâchée. Les fils véritablement liftants, Produits de comblement et peelings
accrochés aux plans profonds, sortent du cadre dermatolo-
Quel que soit le type de formulation, il n'y a aucune
gique classique et nécessitent une formation appropriée. Il
contre-indication rhéologique à procéder aux injections
existe toutes sortes de fils pour le corps avec des techniques
avant, juste après ou à distance du peeling, à la différence des
plus ou moins élaborées. Leur texture doit être particuliè-
lasers.
rement adaptée pour résister à la tension et au poids
cutané.
Fils, lasers et autres sources
électromagnétiques
Action synergique, action Dans le domaine chirurgical, si le fil est incolore, il n'y a pas
contre-productive de contre-indication à utiliser un laser dans un spectre infra-
rouge, vasculaire ou pigmentaire, car celui-ci n'absorbera
que peu les photons. L'étude princeps [2] avec le laser diode
Acide hyaluronique et toxine botulique 1  210  nm a démontré après réduction mammaire l'intérêt
Nul ne conteste l'intérêt de cette association : l'acide hyalu- d'un traitement laser juste après une suture cutanée intra-
ronique comble et stimule le collagène, tandis que la toxine dermique exclusive avec une amélioration de la cicatrice
botulique relâche les muscles. Ceux-ci peuvent être injectés chirurgicale.

357
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CONCLUSION
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Mais, pour les fils tenseurs, si la chaleur induite par le tir d'empilement des tirs avec un même appareil est admis
laser, notamment les lasers  CO2 fractionnés à forte péné- mais toujours plus risqué, mis à part le laser à colorant
trance, mais aussi les HIFU ou les radiofréquences avec pulsé.
aiguilles, se concentre sur les brins des fils, alors leurs struc- ■ Il faut laisser aux experts les associations destinées aux

tures peuvent en être altérées quelles que soient leurs mêmes strates cutanées ou très contiguës. En effet, trop de
compositions. chaleur expose à la déstructuration dermique et à une
nécrose cutanée. Cela sera valable pour les lasers fraction-
Produits régénérants nés ablatifs avec des diamètres de spots variables ou avec
et propénétrations par lasers un empilement des tirs pour une pénétrance modulable,
et autres sources électromagnétiques pour les HIFU ou la radiofréquence avec microaiguilles, la
radiofréquence fractionnée associée aux micro-aiguilles,
Le PRP et le méthyl-ALA dans le cadre de la photothérapie ou les lasers fractionnés non ablatifs et ablatifs.
dynamique, pour le rajeunissement, mais aussi les corti- ■ Les combinaisons laser non ablatif fractionné Erbium-
coïdes pour les cicatrices inflammatoires sont des indica- Glass 1 540, 1 550, 1 565 nm ou Nd-YAP 1 340 nm, laser
tions autorisées et publiées. Leur pénétration et déclenché ou thulium ou lumière pulsée dans le même tir
l'homogénéisation de leur diffusion intradermique seront ou dans la même séance ont fait l'objet de publications
démultipliées avec les lasers fractionnés ablatifs, la radiofré- pour certaines associations de longueur d'ondes avec des
quence fractionnée ou à microaiguilles et les aiguilles froides résultats supérieurs en pratiquant le tout en une session
(microneedling). plutôt que séparément. Cependant, à chacun sa pratique
Pour les tous les autres produits dit régénérants, il faut et il faut pouvoir de toute façon disposer des appareils
s'assurer de leur innocuité au niveau dermique. Le passage adéquats [3, 4].
transdermique direct peut en effet provoquer des réactions Une bonne connaissance anatomique peut permettre
inflammatoires, allergiques ou toxiques. d'estimer l'épaisseur cutanée et ainsi d'évaluer quel type de
Dans le cadre des traitements associés, les peelings, laser utiliser. On peut proposer une combinaison synergique
quels qu'ils soient, acide de fruits, acide trichloracétique et dans la même session avec un décalage opérationnel de
acide phénique, sont à manier avec prudence. Seuls des quelques minutes selon les techniques utilisées et un ordre
praticiens ayant une grande expertise de ces produits qui varie selon les publications : radiofréquence fractionnée
pourront éventuellement les associer à des techniques de ou HIFU en profondeur, puis laser fractionné non ablatif plus
propénétration. En effet, le derme et l'épiderme servent de lumière pulsée ou laser déclenché, RF non ablative puis
barrière. Si des brèches au-delà du derme papillaire sont lumière pulsée et laser non ablatif fractionné [5]. Il faut gar-
créées, la réaction chimique va diffuser en profondeur et der en mémoire que la peau absorbe chaleur et photons
exposer à un risque de cicatrices et d'hypochromies défini- jusqu'à un seuil de saturation. On se doit donc de privilégier
tives. Rappelons que seule la coagulation des protéines la sécurité ainsi que la tolérance du patient.
dermiques bloque l'effet de ces produits et que seuls les
acides de fruits peuvent être tamponnés avec un produit
basique. Techniques combinées
Combinaisons lasers
selon le site anatomique
et autres sources électromagnétiques
Multiplier les sources dans un même temps opératoire Visage
démultiplie physiquement les réactions attendues. Le visage est largement abordé dans d'autres chapitres car il
■ En mode vasculaire, l'association laser à colorant pulsé et concentre toutes les techniques à lui tout seul. La combinai-
laser Nd-YAG est possible, notamment sur de gros vais- son des procédures est réalisée soit dans un même temps
seaux, les angiomes stellaires, les érythroses télangiecta- opératoire, soit de façon décalée. Selon le niveau de vieillisse-
siques et la rosacée. Il est également possible d'associer ment cutané, c'est l'expertise du praticien qui déterminera
les lasers vasculaires et/ou la lumière pulsée. On décale selon les moyens à sa disposition les meilleures combinai-
simplement les tirs en laissant la peau se « refroidir » sons pour optimiser le niveau de prise en charge global.
pour éviter une accumulation thermique, source de
brûlure. Teint, lentigos, mélanose dermo-épidermique,
■ En mode pigmentaire, l'association lumière pulsée et laser
désordres vasculaires, dommages solaires
déclenché est possible ponctuellement sur certaines Pour ce qui est de l'ordre vasculaire, les lasers sont les réfé-
taches solaires très claires. rences. Mais en répétant les sessions, on constate aussi une
■ En mode de photorajeunissement ou de remodelage pho- amélioration de la texture cutanée. Cette amélioration pro-
tonique, de nombreuses associations ont été décrites avec gressive, constatée il y a plus de 30 ans, en a fait le socle du
un intérêt qui mérite d'être discuté au cas par cas. Le mode photorajeunissement.

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Chapitre 54. L'esthétique du corps, une prise en charge combinée

De plus, la plupart des lasers vasculaires, sans oublier la permettent bien sûr de lutter contre la ptose en fixant un
lumière pulsée, impactent aussi les troubles pigmentaires, état de relâchement et, entre des mains adroites, de réaliser
améliorant de fait la globalité du vieillissement facial, mais un quasi-lifting. Le plasma riche en plaquettes (PRP) y
seulement pour la partie épiderme et derme. trouve aussi sa place, pour tous ceux qui préfèrent un pro-
Les lasers pigmentaires de type déclenché sont particu- duit autologue, comme le lipoffiling d'ailleurs. La toxine, en
lièrement efficaces sur les désordres pigmentaires superfi- agissant sur le muscle, permet un relâchement qui contri-
ciels. Ils n'ont que peu d'impact du fait de leur émission bue aussi à pérenniser le bénéfice des techniques suscitées
courte, inférieure à la dizaine de nanoseconde ou la cen- en réduisant les tensions mécaniques sur le derme et
taine de picoseconde, sur les problèmes vasculaires. l'hypoderme.
Néanmoins, en multipliant les longueurs d'onde courtes
(532, 755) et longue (1  064) soit dans la même séance, Techniques combinées
soit en mode décalé, on peut effacer lentigos solaires, Tous les procédés ont un intérêt, mais aussi des limites. La
améliorer le teint et renforcer la néocollagenèse induite médecine moderne a permis d'éviter les risques infectieux
par le rayonnement. C'est la raison pour laquelle les mais pas les risques des jusqu'au-boutistes de l'esthétique.
industriels ont développé toute une batterie de pièces à Certains dermatologues aux États-Unis sont même devenus
main adaptées au photorajeunissement (fractionné, des spécialistes du dégonflage avec de la hyaluronidase pour
focale, etc.). des visages bouffis d'acide hyaluronique.
Pour les peelings, le bénéfice attendu est identique Il faut éviter les HIFU ou la radiofréquence micro-ai-
aux lasers, sauf sur la composante vasculaire pure. Les guilles avec les fils tenseurs au risque de les fragmenter.
peelings moyens ou profonds sont affaire de praticiens Rappelons-le encore pour les fillers, toutes les sources à
expérimentés car il faut un résultat homogène sur la glo- très haute énergie comme les lasers CO2, les lasers non
balité du visage. La combinaison des concentrations est ablatifs fractionnés sur les zones a peau fine comme les
ainsi possible et nécessaire sur un visage où les lèvres, lèvres, les lasers déclenchés ou longue pulse type 1 064 nm,
par exemple, sont souvent plus marquées que le reste la radiofréquence micro-aiguilles ou les HIFU sont capables
avec les rides verticales dites en « code barre ». Il faudra d'altérer leurs structures. Pour la radiofréquence de
choisir un peeling acide trichloracétique (TCA) a contact, les lasers vasculaires et la lumière pulsée, les
concentration variable, TCA phénolé ou préparation quelques publications ne démontrent pas d'altération de
phénolée. structure de ces produits.
Les injectables de toutes sortes, et les fils placés le plus En revanche, proposer dans une même séance et à dif-
superficiellement possible contribuent aussi au résultat glo- férents niveaux cutanés, par exemple radiofréquence
bal en améliorant le support dermo-hypodermique. On est micro-aiguilles et fractionnée en surface, lumière pulsée
parfois même surpris des bénéfices inattendus mais non sys- et laser non ablatif fractionnée, puis quelques semaines
tématiques sur le teint, la couperose. après des inducteurs collagéniques, peut avoir du sens
La radiofréquence fractionnée, les lasers ablatifs fraction- pour « doper » le processus néocollagénique et structurel
nés ou en mode resurfacage sont évidemment efficaces pour de la peau.
améliorer le teint, la texture cutanée.
Cou et décolleté
Rides, plis, laxité Teint, lentigos, mélanose dermo-épidermique,
Deux cultures s'affrontent entre ceux pour qui les injec- dommages solaires
tables tous inducteurs collagéniques peuvent renforcer un La peau du cou et du décolleté diffère de celle du visage
derme vieillissant et projeter des tissus relâchés pour lutter (fig. 54.1). Très fine au niveau du cou (0,02 mm), elle peut
contre le relâchement ; et ceux qui prônent les procédés atteindre 2 mm au niveau du décolleté. Les peelings superfi-
physiques laser, radiofréquences de contact ou micro-ai- ciels répétés ou les peelings moyens pour les plus experts
guilles, les HIFU ou les peelings moyens à profonds. Les fils sont les seuls préconisés.

A B C
Fig. 54.1  Héliodermie du décolleté.
A. Avant traitement. B. Résultat après une séance de PDT. C. Suite de la PDT du décolleté.
Source : H. Cartier.
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Chapitre 54. L'esthétique du corps, une prise en charge combinée

Il faudra surveiller attentivement le déroulement, une épi- qui dispose de zone contact quartz ou saphir rectangulaire,
dermolyse pouvant survenir rapidement dans tous les cas. les faisceaux des spots laser étant circulaires, il faut bien ajus-
Sa neutralisation, s'il s'agit d'acide glycolique, devra être réa- ter les tirs afin d'éviter des résultats inesthétiques en nid
lisée avant les autres zones. L'association avec les micro-ai- d'abeille ou confetti.
guilles est à éviter dans une même séance, car elle augmente
le risque cicatriciel. Rides, plis, laxité
Au niveau du décolleté, la peau étant plus épaisse que sur Toutes les sources de chaleur permettent de raffermir la
le visage, le peeling sera laissé en place plus longtemps. Tous peau qui se relâche : les HIFU, la radiofréquence de contact
les peelings superficiels peuvent être proposés : acide glyco- ou à aiguilles, les lasers infrarouges ainsi que les lasers non
lique, acide salicylique, kogique, etc. ablatifs fractionnés. On privilégie des séances à répéter dans
Le peeling TCA peut aussi être utilisé sur ces zones. Il peut le temps pour respecter le processus de cicatrisation ; éven-
être « léger » (15  %, 20  %), induisant un givrage « rosé, flo- tuellement tous les 15 jours si l'on veut apporter une amélio-
conneux ». Il ne dépassera pas la jonction dermo-épider- ration rapide sur des peaux très fripées, mais plutôt toutes
mique et présentera alors peu de risque. Les peelings TCA les 6 semaines à 3 mois, en 3 à 5 séances, avec entretien régu-
plus concentrés (30 %) induisant un givrage « blanc, rose » et lier, en fonction des appareils.
les peelings combinés (TCA + AHA ou résorcine) doivent être Les lasers vasculaires et les lumières pulsées améliorent
réservés aux experts. En effet, la pauvreté des annexes pilosé- également la texture cutanée, toujours en répétant les
bacées ralentit la ré-épidermisation et il existe un risque de séances. Ce sont d'ailleurs les premiers appareils à avoir
cicatrices dyschromiques ou atrophiques. Les peelings pro- démontré un bénéfice dans le photorajeunissement et le
fonds au phénol sont contre-indiqués sur cette zone. remodelage collagénique.
Les lasers de type déclenchés pico- ou nanoseconde 532 et Les fils résorbables qui quadrillent la zone sont un com-
755 nm sont recommandés. Leurs temps de pulse extrême- plément, mais il faut en placer un certain nombre pour
ment court et leur bonne spécificité d'absorption per- avoir un effet visible. Les fils de tensions, fixés sur eux-
mettent de limiter les dégâts thermiques aux seules cibles mêmes ou par des micronœuds, sont soumis aux
pigmentaires. Ils allient rapidité, tolérance au tir et cicatrisa- contraintes des mouvements du corps avec des résultats
tion rapide. On peut focaliser uniquement sur les taches inconstants.
avec des fluences élevées. Cependant, pour éviter un effet En cas d'utilisation d'acide hyaluronique, on privilégie les
« confettis », on pourra réduire la fluence de 50 à 60  % et produits peu réticulés si l'on souhaite pratiquer un nap-
balayer la zone anatomique pour homogénéiser l'ensemble page de toute la zone du décolleté ou du cou. L'injection
de la zone anatomique traitée. peut se faire à l'aiguille ou, mieux, à la canule. Les micro-
La radiofréquence fractionnée ainsi que les lasers ablatifs traumatismes provoqués par le décollement ou la multipu-
fractionnés sont à manier avec une extrême prudence. En ncture d'un tissu souvent fibreux contribuent aussi à la
effet, la cicatrisation des brèches dermiques peut être com- régénération tissulaire. Dans les plis et les rides solaires du
promise, avec un risque d'hypochromie et de brides décolleté, on injecte plus localement un produit moyenne-
cicatricielles. ment réticulé afin de soulever le fond des plis sans amas.
La lumière pulsée avec des filtres adaptés, vert, jaune ou Les autres produits à fort potentiel d'induction doivent
orange, constitue une excellente indication et fait partie être dilués  : hydroxyapatite 1:2 dilution eau (peau nor-
des références pour traiter de grandes surfaces, tout male), 1:4 dilution (peau fine) et 1:6 dilution (peau atro-
comme le laser thulium ou jaune. Attention toutefois aux phique) ; acide polylactique, dilution dans 10 à 16 ml d'eau
héliodermies marquées et peaux fines tannées par le PPI avec une répartition soigneuse afin d'éviter les granu-
soleil. En effet, une quantité importante de cibles expose lomes inflammatoires [6].
à des réactions de brûlures si les paramètres sont opti- L'emploi de la toxine botulique intradermique est limité
mistes. Les marques avec effet zébré ou en touches de par le volume injecté sur de grandes surfaces ainsi que le
piano sont classiques si la pièce à main n'est pas correcte- risque de diffusion aux muscles fléchisseurs du cou ou de la
ment juxtaposée. déglutition. Les fanons du cou restent cependant une
Le photorajeunissement par photothérapie dynamique valeur sûre pour réduire les cordes platysmales dyna-
(classique LED, lumière du jour ou son équivalent, tissu miques, si elles ne sont pas trop distendues (BoNT < 50 U)
optique conformable) est aussi un procédé intéressant. Cela ce qui améliore parfois indirectement les rides et plis
améliore l'aspect cutané, détruit et prévient les lésions pré- horizontaux.
cancéreuses. Ses modalités pratiques peuvent être combi- Au vu de l'ensemble de ces techniques, on recomman-
nées avec les techniques de propénétration par laser dera  : dans les stades précoces, à titre préventif, l'injec-
fractionné ablatif. tion d'acide hyaluronique à faible viscosité, soit en
séances de multipuncture, soit en éventail rétrotraçant.
Erythrosis coli, poïkylodermie de Civatte Pour un stade avancé de restauration et de restructura-
Lumière pulsée, laser KTP et laser à colorant pulsé sont les tion des tissus, un panel d'experts préconise les associa-
références pour cette indication. Hormis la lumière pulsée tions dans le même temps opératoire  : toxine et acide

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Chapitre 54. L'esthétique du corps, une prise en charge combinée

hyaluronique ou inducteurs dilués, HIFU/RF-aiguilles et tion. Les lasers ablatifs fractionnés dans un mode de
toxine ou HIFU et inducteurs longue durée type hydroxy- paramétrage très doux peuvent être utilisés, mais la densité,
lapatite [7]. la durée du pulse, le diamètre du tir laser doivent être bien
maîtrisés par le praticien ainsi que la gestion des suites de la
Dos des mains cicatrisation, et bien expliquées au patient. La radiofré-
Le dos de main traduit souvent l'âge physiologique du quence fractionnée est une alternative à ce type de laser. Les
patient. Souvent constellée de taches solaires, témoin d'un HIFU et la radiofréquence non ablative sont peu référencés
capital solaire consommé, d'une finesse parfois extrême, dans les publications. Ce qui est logique, la peau étant très
cette zone emblématique fait l'objet de toutes les attentions. fine, il faut prendre en considération la cible, mais aussi
Le temps de cicatrisation est souvent long du fait de la pau- l'épaisseur cutanée afin de ne pas traumatiser inutilement
vreté en annexes pilaires. des tissus sous-cutanés.
Les peelings superficiels avec des acides de fruits qu'on peut
Injections, injectables tamponner à tout moment pour stopper leur propriété exfo-
liante peuvent être utilisés sans danger. Les peelings moyens
La finesse de la peau qui laisse apparaître le réseau vei-
pour ceux qui les maîtrisent sont une alternative à prendre en
neux et la proximité des gaines tendineuses laisse peu
compte avec l'effet brûlure qui doit toujours être évalué.
de  place à l'injection d'inducteurs collagéniques. Seuls
Les lasers non ablatifs fractionnés seuls ou associés aux
l'acide hyaluronique et l'hydroxyapatite de calcium
lasers pigmentaires ou à la lumière pulsée sont aussi intéres-
ont  l'autorisation en France dans cette indication,
sants car on peut faire varier la densité et l'énergie de chaque
ainsi  que  la graisse autologue, et peuvent donc être
point émis. Les énergies n'ont pas besoin d'être élevées pour
recommandés.
pénétrer du fait de la finesse de la peau. Bien sûr, la photo-
L'injection peut se pratiquer à la canule par voie rétrotra-
thérapie dynamique complète les possibilités d'association.
çante dans le plan sous-dermique sus-fascial, poings fermés
Une publication récente a passé en revue toutes les tech-
si on passe entre les phalanges, ou à partir de la zone du poi-
niques possibles pour prendre en charge le vieillissement des
gnet. L'injection peut aussi se pratiquer à l'aiguille par petits
mains. Des techniques comme la phlébectomie ou la sclé-
bolus en soulevant et en pinçant la peau. Le massage doit
rose des veines des mains étaient mentionnées, ce qui nous
être soigneux et prolongé, et est indispensable immédiate-
laisse dubitatifs sur les conséquences à long terme. Les
ment après l'injection et dans les jours qui suivent pour
auteurs concluent que des études comparatives ainsi qu'un
répartir le produit de façon homogène.
protocole fiable restent à établir [9].
L'acide polylactique a fait l'objet de publications pour
le dos des mains. L'injection répond au même principe
avec une dilution dans au moins 8 ml d'eau pour prépa- Membres, abdomen
ration injectable et de lidocaïne, par main. Comme pour et autres zones corporelles
le visage, une séquence de 3  séances toutes 6  semaines Il y a tout d'abord la prise en charge des excès graisseux loca-
est possible. lisés avec différentes techniques disponibles comme la cryo-
La diffusion des produits dans les gaines ou le réseau vas- lipolyse, les ultrasons focalisés, certaines radiofréquences et
culaire est à éviter, et nécessite dextérité et asepsie rigou- récemment les micro-ondes. La cible reste l'adipocyte, avec
reuse. Rappelons que seul l'acide hyaluronique dispose d'un une sélectivité d'action extrêmement variable selon les tech-
antidote, la hyaluronidase, permettant de faire fondre ce niques. Certaines ont une action sur le relâchement cutané
polysaccharide en quelques minutes [8]. associé (radiofréquences, ultrasons). Enfin, une action sur les
Les produits injectables sont listés dans le tableau 54.1. muscles peut être proposée avec les ondes électromagné-
tiques à hautes fréquences (abdomen et fesses surtout).
Lasers et autres technologies Pour compléter l'action à tous les niveaux de la peau,
Les lasers, en particulier déclenchés, et les lumières pulsées toutes les zones corporelles sont accessibles à tous les procé-
pour effacer ou au moins éclaircir les lentigos solaires, sur- dés sus-cités. La difficulté réside dans leur combinaison de
tout si la peau est très fine, sont à utiliser en première inten- larges surfaces.

Tableau 54.1  Produits injectables pour le dos des mains


Produits Techniques Volume/séance Durée
Acide hyaluronique 27–30 G, aiguilles/canule 1–3 ml 6–12 mois
Hydroxylapatite de calcium 22–25 G canule/26–28 G aiguilles 1,5–3 ml 12–15 mois
Dilution 1:1 à 1:4
Acide polylactique 25–26 G aiguilles ou canules 6–8 ml par main 18–24 mois
Graisse autologue Réservé aux chirurgiens Opéateur-dépendant Durable
Plasma riche en plaquettes 33–30 G aiguilles ou canules 6–12 ml ? Booster à répéter tous les 3 mois

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Chapitre 54. L'esthétique du corps, une prise en charge combinée

Comme pour le cou et le décolleté, toutes les zones en


dehors du visage ont un processus de cicatrisation plus lent,
lié à un renouvellement moins rapide de la peau et à une
faible densité en annexes pilosébacées. On aura donc une
moindre efficacité des appareils électromagnétiques ainsi
qu'une élimination plus lente des produits de comblement
ou de stimulation collagénique.
Le choix des techniques est large et il faudra estimer sur
quelle épaisseur et sur quelle surface on souhaite avoir des
résultats afin de décider quelle technique privilégier. Le
nombre de séances est variable, sujet à discussion. On pourra
alterner les différents procédés.
Pour les surfaces étendues, la multipuncture avec de la
radiofréquence, qui permet de descendre jusqu'à 5 mm de
profondeur, les HIFU, qui eux peuvent atteindre une strate
hypodermique à 13 mm de profondeur, peuvent déjà suffire.
Simplement « chauffer » avec la radiofréquence de contact,
les lasers infrarouges sont autant de choix possibles.
La tendance actuelle serait de les associer ou d'y trouver
une alternative aux inducteurs collagéniques à répartir sur de
larges surfaces ; par exemple, hydroxyapatite de calcium dilué
selon un rapport 1 pour 2 (3  ml Ca-AH + 1  ml lidocaïne
+ 5 ml sérum physiologique pour traiter 200 cm2, canule 22 G). Fig. 54.2  Relâchement cutané avec un plissé des faces internes des cuisses.
Action combinée de radiofréquence bipolaire et hydroxyapatite de Ca2 + en
Dans le cas particulier des capitons ou des dépressions nappage à la canule.
cupuliformes des fessiers ou des cuisses, on utilise des tech- Source : H. Cartier.
niques d'aspiration-décollement-chauffage des tissus, ou bien
la subcision manuelle ou à l'aide d'appareil dédié, plus ou
moins combinées avec la radiofréquence intradermique, voire Conclusion
ensuite des produits de comblement pour relever l'ensemble
afin de fixer durablement le bénéfice escompté (fig. 54.2). L'association des techniques en mode décalé ou dans la
Le tableau  54.2 établit un récapitulatif de combinaisons même session nécessite une bonne expertise des indications
possibles et discutables de traitement dans une même à traiter et une bonne évaluation du processus de remode-
session. lage et de cicatrisation qui va en découler. La boîte à outils

Tableau 54.2  Récapitulatif de combinaisons possibles et discutables de traitement dans une même session
Indication Recommandation Combinaison 1 Combinaison 2
Pigmentation, vasculaire, Lumière pulsée + peeling AHA + PRP
héliodermie (1) Ou LCP ou KTP ou LCP ou TCA 15 %
Ou QS sur pigment
Pigmentation, kératose actinique, Chimiothérapie topique PDT renforcée par laser + laser non ablatif fractionné
héliodermie (2) Ou PDT propénétrant + lumière pulsée
Ou
Peeling AHA, TCA 15 %
Héliodermie (1), relâchement (1) Lumière pulsée + AH ou fils PDO ou + RF fractionné + RF contact ou aiguilles
Ou LCP ou KTP ou LCP RF ou Nd-YAG ou roller  + PRP
Ou QS sur pigment
Héliodermie (2), relâchement (2) PDT ou peeling AHA, TCA + AH ou inducteurs tissulaires PDT renforcée par laser fractionné
15 % ablatif doux + AH ou inducteurs
Relâchement, perte de volume Inducteur tissulaire + laser non ablatif Ou RF contact ou aiguilles
(1) (respecter délai)
Relâchement, perte de volume RF contact + AH ou inducteurs tissulaires + RF contact ou aiguilles ou HIFU
(2)

362
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Chapitre 54. L'esthétique du corps, une prise en charge combinée

est disponible ; ce qu'elle contient autorise un large choix, [5] Kołodziejczak  AM, Rotsztejn  H. Mexametric and cutometric
mais l'artisan que nous devons rester doit l'utiliser en toute assessment of the signs of aging of the skin area around the eyes
after the use of non-ablative fractional laser, non-ablative radiofre-
sécurité.
quency and intense pulsed light. Dermatol Ther 2017 ;30(2).
Références [6] Yutskovskaya  YA, Kogan  EA. Improved neocollagenesis and skin
mechanical properties after injection of diluted calcium hydroxy-
[1] Hsu SH, Chung HJ, Weiss RA. Histologic effects of fractional laser
lapatite in the neck and decolletage: a pilot study. J Drugs Dermatol
and radiofrequency devices on hyaluronic acid filler. Dermatol
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[2] Capon  AC, Gossé  AR, Iarmarcovai  GN, et  al. Scar prevention by
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laser-assisted scar healing (LASH): a pilot study using an 810-nm
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