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Prise en charge du paludisme chez l'enfant en Afrique


G. G. Sagbo, M. C. Rahimy Service de Pédiatrie et de Génétique Médicale CNHU-HKM, Cotonou, Bénin
02 JUILLET 2008

Le paludisme est une maladie infectieuse du globule rouge provoquée par le développement dans les
hématies humaines d'un parasite appelé plasmodium. Il est transmis à l'homme sain par la piqûre de la
femelle infectée d'un moustique, appelé anophèle.

Quatre espèces de plasmodium sont responsables de la maladie palustre chez l'homme : le Plas-
modium falciparum, le Plasmodium ovale, le Plasmodium vivax et le Plasmodium malariae. Parmi ces
quatre espèces, le Plasmodium falciparum est le plus fréquemment enregistré dans les zones
tropicales africaines et il est à la base des formes graves potentiellement mortelles.

Le paludisme est responsable de 300 à 500 millions d'accès par an dans le monde dont 1,5 à 2 millions
de morts par an. Plus d'un million de ces décès surviennent chez les enfants de moins de 5 ans vivant
dans la zone subsaharienne et 10 à 20 % des enfants qui survivent à un accès de paludisme grave sont
porteurs de séquelles neurologiques lourdes et handicapantes.

Face à ce �éau, l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) et les différentes autorités sanitaires ont
adopté plusieurs stratégies de lutte, dont la prise en charge correcte des cas, basée sur la distinction
entre le paludisme simple et le paludisme grave.

I. Rappels épidémiologiques et physiopathologiques du paludisme


Rappels épidémiologiques
1. Le paludisme est causé par le plasmodium. Il se transmet de l'homme infecté à l'homme sain et
l'anophèle femelle en est le vecteur. La transmission peut se faire également à partir d'une transfusion
de sang infecté par le parasite ou de la mère (femme enceinte) à son foetus : on parle de paludisme
congénital.

Le cycle de transmission se fait en trois phases. La première phase se déroule à l'intérieur du


moustique (sporogonique) et les deux autres chez l'homme, l'une en dehors des hématies
(exoérythrocytaire) et l'autre à l'intérieur des hématies (érythrocytaire).

a. La phase sporogonique
La phase chez le moustique commence par la piqûre de l'homme infecté. Il ingère le parasite sous
forme de gamétocytes qui vont se transformer en gamètes mâles et femelles. Ces gamètes mâles et
femelles vont s'unir pour donner des oeufs (oocyste). A l'intérieur de l'oocyste, le noyau se subdivise
en larves immatures (sporozoïtes) qui vont migrer vers les glandes salivaires.

b. La phase exoérythrocytaire
Lors de la piqûre d'un homme sain, l'anophèle femelle infectée va inoculer dans le courant sanguin des
larves de plasmodium immatures (sporozoïtes) contenues dans les glandes salivaires. Ces sporozoïtes
vont vers le foie où ils terminent leur maturation, se multiplient et deviennent des larves mures
(mérozoïtes). A la suite de cette multiplication, les cellules hépatiques vont éclater, libérant des
mérozôites dans la circulation sanguine où ils envahissent et pénètrent les globules rouges.

c. La phase érythrocytaire
Les mérozoïtes vont se multiplier à l'intérieur des globules rouges entraînant leur éclatement. Les
parasites libérés vont chercher à atteindre d'autres globules rouges non atteints jusque-là et ainsi de
suite. Certains mérozoïtes évoluent ensuite pour donner des gamétocytes mâles et femelles que le
moustique ingère lorsqu'il vient piquer cet homme parasité.

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2. Rappels physiopathologiques
L'éclatement des globules rouges parasités (rosaces) s'accompagne de multiples conséquences :

La �èvre qui résulte de la libération dans la circulation d'une substance malarique pyogène. En
cas d'éclatement asynchrone des rosaces, on observe une �èvre irrégulière ou apparemment
continue. Mais si l'éclatement est synchrone, la �èvre est intermittente, tierce ou quarte, selon
l'espèce.
L'anémie et l'ictère résultent de la lyse des hématies parasitées. Mais les hématies saines
peuvent également être détruites surtout dans les infections à Plasmodium falciparum sans doute
par un mécanisme immunologique.
La splénomégalie et accessoirement l'hépatomégalie sont témoins d'une hyperplasie des cellules
macrophages de ces organes, destinées à la phagocytose des hématies parasitées.

3. Particularités du nourrisson et de l'enfant


La prémunition n'apparaît qu'après l'âge de 5 ans chez les enfants vivant en zone subsaharienne qui
reçoivent plusieurs piqûres infestantes par jour d'anophèle transmettant le plus souvent le
Plasmodium falciparum, l'espèce qui tue. A cause des facteurs socio-économiques et
environnementaux défavorables, ces enfants sont plus exposés à la malnutrition, notamment l'anémie
par carence en fer et à d'autres infections répétées qui les fragilisent, favorisant l'apparition du
paludisme, notamment le paludisme grave.

Sur le plan clinique, on distingue 2 types de paludisme :

le paludisme simple ou l'accès palustre qui peut être causé par les quatre espèces de
plasmodium ;
et le paludisme grave dont le Plasmodium falciparum est la seule espèce incriminée.

II. Le paludisme simple


Il n'y a pas de signes cliniques spéci�ques au paludisme simple. Il s'agit d'un ensemble de signes
fonctionnels, polymorphes pouvant simuler n'importe quelle maladie infectieuse, mais dont la
particularité est l'absence de signes physiques. Parmi ces signes fonctionnels, la �èvre est présente,
associée à un frisson, des courbatures, une asthénie et des céphalées.

Le diagnostic positif repose sur un faisceau d'arguments :

la notion de séjour permanent ou passager dans une zone d'endémicité palustre ;


la présence de signes fonctionnels sans signes physiques évoquant une maladie dé�nie ;
la preuve biologique de l'infection peut être faite soit par une goutte épaisse, soit un frottis
sanguin ou par un test de diagnostic rapide.
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 les zones à forte densité palustre. Ces CTA associent un schizonticide à action rapide et un autre
dans
à action longue, et les plus utilisés sont les associations : Artémether - Luméfantrine et Artésunate -
Amodiaquine. Les tableaux ciaprès indiquent la posologie et la durée de traitement chez l'enfant. Les
tableaux 2 et 3 indiquent les deux principales CTA utilisées pour le traitement du paludisme simple.

Les conseils à prodiguer reposent sur l'utilisation de moustiquaire imprégnée, l'observance


médicamenteuse, le retour immédiat au centre de santé si aggravation de la maladie, l'importance de
la visite de suivi, la poursuite de l'alimentation pendant la maladie et l'hygiène du milieu de vie.

La faible accessibilité géographique (liée à l'éloignement des formations sanitaires des béné�ciaires de
soins et l'insuf�sance de moyens de transport adéquats), �nancière (coût élevé des prestations par
rapport au pouvoir d'achat des populations) et la non disponibilité permanente des services de santé,
l'absence ou la non application des protocoles de prise en charge, engendrent un retard au diagnostic
et à la prise en charge des cas de paludisme simple qui peuvent évoluer vers le paludisme grave.

La description des formes graves de paludisme permet de sensibiliser les professionnels de santé aux
critères pouvant faire craindre une évolution fatale, a�n de réduire la mortalité due au paludisme à
travers une prise en charge adéquate.

III. Le paludisme grave


Le paludisme grave est une véritable urgence médicale que l'on devrait normalement éviter mais qui
malheureusement survient suite à un retard de diagnostic et/ou à un retard de prise en charge du
paludisme simple. Sa prévention représente le principal objectif de lutte des politiques sanitaires, il est
dû au seul Plasmodium falciparum qui touche les nourrissons, les enfants, les femmes enceintes et les
personnes venant d'une zone non endémique. Les mécanismes physiopathologiques ne sont pas
clairement dé�nis et beaucoup de théories sont émises.

Le paludisme grave est dé�ni comme un accès palustre associé à des signes d'atteintes graves des
organes qui menacent le pronostic vital. Sa prise en charge relève du domaine du médecin et le rôle de
l'in�rmier est de le reconnaître, d'assurer les soins urgents de pré-référence et de référer l'enfant vers
un hôpital au plus vite et dans de bonnes conditions.

La reconnaissance repose sur la présence d'un ou de plusieurs signes de gravité qui sont :

la prostration : faiblesse telle que l'enfant ne puisse ni marcher ni s'asseoir;


les troubles de la conscience : obnubilation ou coma ;
la détresse respiratoire : modi�cation du rythme respiratoire avec des signes de lutte
(geignements, tirage, battement des ailes du nez, etc. ...) et une cyanose (coloration bleue de la
peau et des muqueuses) ;
les convulsions multiples ;
le collapsus circulatoire : hypotension artérielle, peau froide et moite, pouls �lant ;
l'oligo-anurie : urines rares et concentrées avec une diurèse inférieure à 12 ml/kg/24h ;
le saignement anormal : hémorragie pouvant siéger aux gencives, aux fosses nasales ou au
tractus digestif ;
l'ictère ;
l'anémie sévère : pâleur palmaire et plantaire avec respiration rapide ;
les urines foncées (hémoglobinurie positive) ;
l'hypoglycémie (taux glucose sanguin inférieur à 0,4 g/l).

Les principaux signes cliniques du paludisme simple et du paludisme grave sont consignés dans le
tableau 4.

La prise en charge doit être précoce a�n d'éviter le décès ou les séquelles. Elle regroupe les soins de
pré-références et l'organisation de la référence. Les soins de pré-références comportent :

a) Les prélèvements indispensables pour faire une goutte épaisse, un hémogramme, une glycémie ;

b) la pose d'un abord veineux sûr ;

c) la mise en route d'une perfusion de quinine à raison de 10 mg/kg dans du sérum glucosé 10% 250 ml
;

d) le traitement symptomatique d'une �èvre (paracétamol 10 mg/kg) ou d'une convulsion (diazépam


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Chloroquine Comp à 100 10mg/kg Allergie Nausées,


mg et 300 pendant Rétinopathie vomissements,
mg 2 j et vertiges,
Sirop 5 5mg/kg troubles
mg/ml le 3e j visuels
Amp 100 5
mg/2ml mg/kg/j
en IM
pendant
5 j.

Amodiaquine Comp à 153 mg le1er j: Antécédent Hépatite,


d'amodiaquine 15 d'atteinte diminution des
mg/kg hépatique et globules
en 2 hématologique à blancs
prises la prise
2e et 3ej
:
l0mg/kg
en 2
prises

Halofantrine Comp à 250 24 mg/kg en 3 Femme Vomissements,


mg prises enceinte diarrhées, 
Sirop à 100 espacées de 6 Enfant de vertiges,
mg/5ml heures moins de 10 allergie
kg

Mé�oquine Comp à 50 25 mg/kg en Femme Vomissements,


mg une seule enceinte diarrhées,
Comp à 250 prise Enfant de vertiges,
mg moins de 15 allergie
kg
Insuf�sance
rénale et
hépatique

Sulfadoxine Comp 250 1/2 Atteinte Troubles


-piriméthamine mg/25mg comp/j/10kg grave du gastro-
Solution en prise foie, du rein intestinaux,
injectable : unique Allergie allergie,
400 mg/20 cutanée anomalies
mg Femme hépatiques
enceinte

Quinine* Comp. à 100 30 mg/kg/j en Dé�cit en G6PD, Vertiges,


mg, 125 mg, 3 prises �èvre bilieuse troubles
250 mg, pendant 5 à 7 hémoglobinurique digestifs,
300  mg et jours hypoacousie,
500 mg allergie
Ampoules à
400 mg et
500 mg

Artésunate omp à 50 mg 3,2mg/kg le1er Grossesse Rare éruption


et 200 mg jour puis cutanée
Suppositoire 1,6mg/kg du
à 200 mg 2e jour au 5e
jour
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La quinine est réservée actuellement pour le traitement du paludisme grave.

L'organisation de la référence se fera avec les parents et/ou les représentants de la communauté dans
la gestion de la formation sanitaire. Cette référence se fera vers une structure médicale mieux
équipée ; après avoir donné des informations claires aux parents sur la maladie de l'enfant, prévenu la
structure d'accueil, rempli la �che de référence et recherché un moyen de transport adéquat.

Conclusion
Le paludisme reste une préoccupation majeure de santé de l'enfant africain vivant dans la zone
subsaharienne, malgré les efforts consentis.

Le diagnostic ne pose pas de problème, mais le retard à la consultation et/ou au démarrage du


traitement sont à la base des formes graves au pronostic redoutable.

Tableau 2 : posologie et durée du traitement de l'association Artémether - Luméfantrine chez


l'enfant selon le poids ou la tranche d'âge

Artémether - Luméfantrine Jour 1 Jour 2 Jour 3 Total


(20 / 120 mg) Posologie : 2
prises par jour

05 - 15 kg (6 mois à 3 ans) 1 1 1 6
comprimé comprimé comprimé comprimés

1 1 1
comprimé comprimé comprimé

15 - 24 kg (3 ans à 7 ans) 2 2 2 12
comprimés comprimés comprimés comprimés

2 2 2
comprimés comprimés comprimés

25 - 34 kg (7 ans à 10 ans) 3 3 3 18
comprimés comprimés comprimés comprimés

3 3 3
comprimés comprimés comprimés

Plus de 34 kg (11 ans et plus) 4 4 4 24


comprimés comprimés comprimés comprimés

4 4 4
comprimés comprimés comprimés

Tableau 3 : posologie et durée du traitement de l'association Artésunate - Amodiaquine chez


l'enfant selon le poids ou les tranches d'âge.

Artésunate (50 mg) Molécules Jour 1 Jour 2 Jour 3 Total


Amodiaquine (20 mg)
Posologie : 1 prise unique par
jour

Moins de 10 kg (< 1 an) Artésunate 1/2 1/2 1/2 1+1/2


comp comp comp comp

Amodiaquine 1/2 1/2 1/2 1+1/2


comp comp comp comp

10 - 20 kg (1 à 7 ans) Artésunate 1 1 1 3 comp


comp comp comp

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Amodiaquine 2 2 2 6 comp
comp comp comp

Plus de 40 kg (> 13 ans) Artésunate 4 4 4 12


comp comp comp comp

Amodiaquine 4 4 4 12
comp comp comp comp

Tabeeau 4 : signes cliniques du paludisme simple et du paludisme grave

Paludisme simple Paludisme grave

Fièvre Prostration
Frissons Trouble de la conscience
Sueurs Détresse respiratoire
Céphalées Convulsions répétées
Algies diffuses Collapsus circulatoire
Troubles digestifs parfois Urines rares et concentrées
(anorexie, vomissements, Saignement anormal
diarrhée) Anémie sévère
Urines foncées

Tableau 5 : critères de gravité de l'accès pernicieux (OMS)

Cliniques Biologiques

Prostration, coma Hypoglycémie (< 2,2 mmol/1)

Convulsions généralisées Anémie grave (< 6 g/dl)

Collapsus cardio-vasculaire Oligurie (< 400 ml/j)

Syndrome hémorragique Créatininémie (< 265 µmol/l)

OEdème pulmonaire Hémoglobinurie

Ictère Acidoses sanguine (pH < 7,25)

Développement et Santé, n°189, 2008

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Mé�ez-vous des contrefaçons


Candice Legris Extrait de la thèse de Mémoire du diplôme d'études spécialisées de pharmacie spécialisée,
Faculté de pharmacie de Nancy, 16 décembre 2005.
Les six Maloxine/Melaxime (sulfadoxine-pyriméthamine) Le Maloxine®(sulfadoxine-pyriméthamine)
représenté à l'extrême gauche sur la �gure est un antiparasitaire fabriqué par Gracure
Pharmaceuticals Ltd. (code No RA/DRUGS/1639) en Inde pour Exphar s.a. en Belgique. Exphar est
propriétaire de la marque Ma…

JUILLET 2008

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