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systèmes et les structures aux structures. Or tout système économique est d'abord
un vocabulaire et toute structure une structure mentale i.
En conséquence, pour progresser en tant que science humaine, l'analyse
historique doit s'adapter aux outils ainsi qu'au vocabulaire des sciences
réputées être ses « auxiliaires », lorsqu'elle s'autonomise dans ses objectifs.
Ainsi en va-t-il de l'histoire économique. Et nous devons considérer cet
aspect d'autant plus impérieusement que l'histoire économique représente,
comme l'a souligné Joseph Schumpeter, « de loin le plus important des
domaines fondamentaux » constituant l'Analyse économique (histoire,
statistique et théorie), clé d'aujourd'hui et science de l'avenir. Et le grand
économiste de rajouter à l'intention de l'Histoire :
Je souhaite marquer immédiatement que si, recommençant mon oeuvre d'éco-
nomiste, je recevais l'ordre de n'étudier que l'un des trois domaines, tout en
conservant la liberté de choix, c'est l'histoire économique que je choisirais...
D'abord, la matière de l'économie réside essentiellementdans un processus unique
à travers le temps historique. Personne ne peut espérer comprendre les phéno-
mènes d'aucune époque, y compris de l'époque actuelle, à moins de posséder une
maîtrise convenabledes faits historiques et une dose convenable de sens historique
ou de ce que l'on peut définir comme expérience historique. Ensuite, l'exposé his-
torique ne peut être purement économique, mais doit inévitablementrefléter aussi
des faits « institutionnels » : aussi fournit-il la meilleure méthode pour comprendre
comment faits économiques et extra-économiques sont liés les uns aux autres et
comment les diverses sciences sociales devraient être liées les unes aux autres.
Enfin, il faut alléguer, je pense, le fait que la plupart des erreurs fondamentales
communément commises en analyse économique sont dues au manque d'expé-
rience historique plus souvent qu'à toute autre insuffisance de l'outillage de
l'économiste 2.
Or cette définition de « l'utilité » historique comme déterminant de
la compréhension économique peut être appliquée avec les plus grands
espoirs à l'histoire de l'expansion maritime hollandaise aux xvir et
xvirr siècles.
Ainsi en est-il de l'histoire économique de cette partie du Brésil qui fut
conquise et adininistrée sous l'appelation de « Nouvelle-Hollande »3 par
les marins et commerçants de la West-Indische Compagnie (W. I. C.) de
1624 à 1634. Histoire chargée d'espérances et de devoirs, car les derniers
travaux de recherche fondamentale en cette matière remontent à 1921,
année qui vit la publication d'une excellente étude réalisée par l'un des
4. École qui devait tant inspirer M. Bloch au cours de son séjours à l'Université de
Strasbourg de 1919 à 1936, inspiration dont on sait quelles furent les suites magnifiques avec
avec L. Febvre...
5. Hermann WATJEN, DOS HollSndische Kolonialreich in Brasilien, ein Kapitel aus der
Kolonialgeschichte des 17. Jahrhunderts, Den Haag-Gotha, M. Nijhoff-F. A. Perthes, A. G., 1921,
xcx-352 p. Dans son excellente Critical Survey of studies on Dutch Colonial History (2e édition,
La Haye, 1980, p. 234). W. Ph. COOLHAAS nous indique avec justesse que cet ouvrage « écrit par
l'allemand H. Watjen, est une excellente étude et demeure encore le meilleur travail sur les
aspects économiques et financiers » de l'histoire hollandaise du Brésil.
6. Voir J. A. GONÇALVES DE MELLO-NETO, Tempo dos Flamengos. Inluencia da Ocupaçao
Holandesa na vida e na cultura do Norte do Brasil, Rio de Janeiro, 1946, avec une préface
de Gilberto FREYRE, 337 p. Mais voir surtout F. MAURO, Le Portugal et l'Atlantique au
XVII' siècle, 1570-1670, étude économique, Paris, EPHE-SEVPEN, 1960, Lvni-550 p. Tandis que
cet ouvrage majeur doit connaître très prochainement une réédition, il est possible de consulter
du même auteur Le Brésil du XV' à la fin du XVIII' siècle, Paris, SEDES, 1977, dans lequel
les pp. 95-131 fournissent une synthèse utile sur la présence hollandaise au Brésil.
7. Immanuel WALEERSTEIN, Le système du monde du XV' siècle à nos jours, tome 1, Capi-
talisme et Économie-monde, 1450-1640, Paris, 1980, p. 178. Cette dernière observation n'est, au
demeurant, pas une critique car les problématiques des auteurs en question sont tout simple-
ment différentes de la nôtre.
186 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE
riens imposent aux historiens que, comme tous les autres, ils s'efforcent de rechercher la
vérité pour elle-même. « Aucune prise n'est défendue » est une règle technique dans cer-
tains sports, mais aussi une excellente règle pour la recherche de la vérité. Clio se montre
cruelle à ceux qui confondent les fins et les moyens dans la recherche de l'intelligence de
l'histoire » (pp. 179-180).
14. J. A. SCHUMPETER, Théorie de l'évolution économique, Recherches sur le profit, le
crédit, l'intérêt et le cycle de la conjoncture, Paris, Dalloz, 2e édition 1935, réimprimée en 1983,
p. 83. Les mots entre crochets et en italiques sont de nous même. Pour en préciser le
sens, soulignons que 1' « état précédent total » considéré par Schumpeter constitue précisément
l'objet d'une histoire globale au sein de laquelle histoire et théorie économiques revêtent un
intérêt essentiel : c'est à ce point précis du raisonnement que les éléments historiques
globaux et individuels fournissent par leur agrégation, toute la densité et sa valeur à l'histoire
économique.
15. F. MAURO, op. cit., p. 28.
188 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE
Holland
(Amsterdam) 20 8 4/9°
Zeeland
(Middelburg) 14 4 2/9»
Maas (Meuse)
(Rotterdam) 12 1 1/9»
Stadt en Lande
(Groningue) 12 1 1/9--
Noorder Quartier
(Enkhuizen) 12 1 1/9*
Le poids des deux premières chambres ressort d'évidence et la rivalité entre celles-ci
sera d'une grande importance au cours de la brève histoire du Brésil Hollandais comme
plus tard au cours du XVITP siècle.
24. Il y aura deux compagnies : la première W.I.C. de 1621 à 1674, la seconde de 1676 à
1791. Voir également plus bas note 32. En ce qui concerne le rôle militaire et économique
de la W.I.C, nous ne partageons plus l'opinion sur ce point commune à plusieurs historiens
néerlandais. Ceux-ci sont, à notre avis, sensiblement trop négatifs et sévères à l'égard de la
W. I. C. par comparaison à la V. O. C. Mais nous y reviendrons plus loin.
25. Jan Andries MOERBEEK, Redenen waeromme de W.I.C. dient te trachten het landt
van Brazilia den Coninck van Spangiën te ontmachtigen. Pamphlet Verzameling, Koninklijke
Bibliotheek, 1624, N° 3541. Cité par J. J. REESSE, De Suikerhandel van Amsterdam van het
begin der 17de eeuw tôt 1813, èën bijdrage tôt de Handélsgeschiedenis des Vaderlands,
hoofdzakelijk uit de archieven verzameld en samengesteld, Haarlem, Kleynenberg, 1908,
18 + 276 + CLXXxrv p., bibl-, index, ills. et cartes. Nous souhaitons exprimer ici toute
notre gratitude et nos remerciements à M. Mauro de nous avoir confié pendant une très
longue durée son exemplaire personnel de cet ouvrage rare que nous n'avions pu consulter que
trop brièvement aux Pays-Bas en 1982 dans sa seconde édition (en deux volumes publiés
vers 1911). Sans sa générosité, nous n'aurions sans doute pas été en mesure de fonder aussi
sérieusement que nous l'espérons nos intuitions initiales.
LE BRÉSIL NÉERLANDAIS, 1624-1654 191
28. F. MAURO, Le Brésil du XV' à la fin du XVIII' siècle, Paris, SEDES, 1977, p. 55.
29. Ibid., p. 118.
30. Dans la plupart des cas, en effet, le conquérant s'efforce de circonvenir la plate-
forte ennemie en garantissant sinon la propriété privée du moins les plantations destinées
à être intégrées à son domaine colonial. Bien entendu, ceci exclut les raids à la pirate
destinés à demeurer sans lendemain ou fruits de plans coloniaux insuffisamment mûris. On
peut trouver ces descriptions pittoresques de ces coups de mains, et de première mains
car rédigées par un de leurs auteurs, in Alexander O. EXQUEMFTTN, De Americaensche Zee-
Roovers ; Behelsende een pertinente beschrijvinghe van aile de rooveryen en wreedheden
der Engelse en Transe rovers, tegens de Spanjaerden in America, Amsterdam, J. ten Hoorn,
1678. (Cet ouvrage connut plusieurs traductions en de multiples langues dont une en français
dès 1686 à Paris sous le titre Histoire des Aventuriers qui se sont signalez dans les Indes,
qui vient de faire l'objet d'une assez bonne réédition en 1980, également à Paris, aux Éditions
Maritimes et d'Outre-Mer, 323 p.
LE BRÉSIL NÉERLANDAIS, 1624-1654 193
31. J. A. SCHUMPETER, op. cit., pp. 106-107. En outre l'auteur précise bien dans une
note que « rien ne nous est plus étranger qu'une interprétation du concept linguistique ;
aussi ne nous arrêterons nous pas aux significations où, par exemple « entrepreneur » doit
être traduit en anglais par « contractor », ou bien où « entrepreneur » a une signification
qui amènerait la plupart des industriels à protester si on les comprenait dans ce concept ».
32. Voir en particulier le bel ouvrage de F. S. GAASTRA, De Geschiedenis van de V.O.C,
Haarlem, Fibula-Van Dishoek, 1982, 164 p., bibl., ills. et surtout de Léonard BLUSSE et
Jaap de MOOR, Nederlanders Overzee, Franeker, T. Wever, 1983, 256 p. Dans ce second ouvrage
avec une illustration d'une qualité remarquable, les auteurs posent nettement la question de
savoir si la V.O.C. n'est pas véritablement « la première multinationale » de l'Histoire
(p. 39). Toutefois, en bon spécialistes de l'Extrême-Orient néerlandais ils sont plus réservés
quant aux qualités de la W.I.C dont le domaine d'élection est circonscrit à l'hémisphère amé-
194 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE
ricain : « bien que le nom et l'organisation de la W.I.C suggère une parenté avec la V.O.C,
les deux Compagnies de commerce sont cependant difficilement rapprochables. En vérité, la
W.I.C ne fut pas une pure compagnie de commerce, mais davantage un instrument militaire
(porlogsinstrument : litt. « instrument guerrier ») de l'état (p. 70) ». Nous sommes sur ce
point sans doute en léger désaccord avec Blussé et de Moor, du moins en ce qui concerne
certains aspects de ses résultats économiques. Sur l'ensemble de la question, voir notre
discussion dans notre thèse de doctorat déjà mentionnée.
33. Cité par F. MAURO, Le Portugal et l'Atlantique, op. cit., p. 199. Gonçalves de Mello
s'est servi principalement, nous semble-t-il, du mémoire d'Adriaen van der Dussen de 1639.
34. H s'agit du « Sommiers discours over den Staet vande vier geconquesteerde Capi-
tanias Parnambuco, Itamarica, Paraïba ende Rio Grande inde Nooderdeelen van Brasil »
in Bijdragen en Mededelingen van het Historisch Genootschap te Utrecht, Amsterdam, J.
Miiller, 1904, dl. 25, pp. 257-362. Observons que ce document n'est notamment pas cité par le
meilleur historien contemporain du Brésil, Charles BOXER, dans son ouvrage The Dutch in
Brasil, 1624-1654, Oxford, 1957, 327 p., bibl., index et cartes. La traduction hollandaise de cette
étude en 1977 ne la mentionne également pas. Enfin, Hermann Watjen ne mentionne pas non
plus cette source pourtant très fiable et extraite des archives particulières d'A. van Hilten,
l'un des premiers administrateurs de la W.I.C. de l'époque.
35. F. MAURO, op. cit., p. 193 à 197.
LE BRÉSIL NÉERLANDAIS, 1624-1654 195
1638 1640
Enfin, pour compléter cette vision d'ensemble, il faut savoir que cer-
tains engenhos ont été abandonnés par leurs propriétaires portugais. Pour
cette raison, Jean Maurice de Nassau, souhaitant la remise en ordre tant
politique que sociale de la Nouvelle-Hollande, a fait procéder à une confis-
cation des exploitations arrêtées pour les mettre en vente. Ce faisant, il
« lance un appel à tous les portugais qui ont abandonné leur engenho pour
qu'ils reviennent : ils auront la liberté de conscience, leur propriété sera
restituée et ils seront à égalité de droits avec les Hollandais (les intéressés
ne répondent pas tout de suite) » 37.
Mais, si le produit des ventes de plantations arrêtées rapporte 2 millions
de florins entre 1637 et 1638, il demeure cependant que l'engagement direct
des hollandais dans le processus de production sucrier demeure limité.
A cet égard, nous pouvons dresser, à partir de la même source que dans
les deux précédents tableaux, un état de l'engagement hollandais dans le
système de production. Ce document de synthèse constitue à titre provisoire
un indicateur tendanciel du faible niveau de cet engagement. Or une telle
faiblesse est regrettable, car, dans le cas contraire, une forte participation
des capitaux amstellodamois ou middelbourgeois eût été de nature à renfor-
cer les volontés de modération fiscale souhaitée par Jean Maurice de Nassau
à l'endroit des planteurs : en effet, ceux-ci eussent été davantage entendus
dans leurs doléances fiscales par les représentants de la W. I. C. L'avantage
d'un tel engagement aurait donc été susceptible de faire mieux percevoir,
par l'administrationde la nouvelle puissance colonisatriceprésente à Recife,
le niveau élevé du risque d'entreprise que représentait le fonctionnementde
l'engenho. Nous nous trouvons en face de l'archétype de la problématique
coloniale latino-américaine qui devait détacher les colonies de leurs métro-
poles à la fin du xviir siècle, sous l'impulsion des élites créoles en rébellion
face à leurs autorités de tutelle. Dans le cas de la Nouvelle-Hollande,
comme l'a écrit Fernand Braudel, « leur faute [aux Hollandais] est d'avoir
voulu construire une superstructure marchande, sans coiffer la production,
sans coloniser au sens moderne du mot s 38. Cette erreur est évidente si
l'on examine le tableau 3, qui permet donc d'avoir une idée assez précise
de la structure foncière du Brésil à l'époque Hollandaise.
39. Ceci demeure bien entendu à préciser dans une enquête ultérieure à propos de
laquelle il existe plusieurs directions de recherches très précises, tel le recensement des
acquisitions hollandaises sur place qui a été conservé dans divers fonds d'archives aux
Pays-Bas.
LE BRÉSIL NÉERLANDAIS, 1624-1654 199
une journée la moitié de leur valeur. Les habitants en éprouvèrent les plus grands
dommages tandis que la Compagnie elle-même était touchée : elle dût en effet
procéder au débours d'énormes sommes pour assurer l'entretien de ses impor-
tants effectifs en militaires et en fonctionnaires, notamment en l'absence d'appro-
visionnements de toutes natures, tant alimentaires que vestimentaires qui devaient
finalement beaucoup tarder à arriver. Le tiers de son capital fut ainsi gaspillé
(verspild) en 16 mois de durée s2.
Mais ce ne sera que deux ans plus tard seulement, en avril 1638, au
terme de plusieurs péripéties, que la liberté du commerce pourra être
enfin rétablie. Encore convient-il d'observer que cette liberté demeurera
sérieusement limitée par les dispositions fiscales. Et de surcroît, le cadre se
fera de nouveau plus contraignant en Août 1648.
Avec Reesse, nous pouvons donc à bon droit déduire de cette évolution
mouvementée qu'un « sain développement des affaires ne pouvait que diffi-
cilement en être attendu » 53. Or cet aspect est également essentiel pour
mesurer la réussite ou l'échec hollandais au Brésil, comme nous y revien-
drons en fin de ce propos.
Et nous pouvons justement avoir la pleine perception du poids de la
structure fiscale, en essayant de décomposer le prix au stade de gros des
sucres blancs échangés sur le marché d'Amsterdam : tel est l'objet du
tableau 8.
Jusqu'ici l'on savait qu'au « total le prix de tous ces impôts (ceux
qui pèsent sur la production et ceux s'exerçant aux différents stades
commerciaux) (était) variable mais lourd. Vers 1624, un hollandais estime
qu'ils représentent 30% du prix du sucre x 54.
Or notre tableau démontre clairement que les seuls droits perçus par
la W. I. C, en y incluant le droit obligatoirement perçu au titre du trans-
port, se montent à 35 % du prix au stade du commerce de gros, tel que ce
prix est coté en Bourse. Et si l'on rajoute les impôts perçus au plan
provincial ou municipal aux Pays-Bas, l'ensemble de la fiscalité représente
presque 37 % de ce prix.
Par ailleurs, autre résultat significatif, la marge du producteur appa-
raît des plus réduites, avec seulement 5,87 % du prix final : à ce faible niveau,
elle ne représente même pas le cinquième de la marge nette de l'impor-
tateur, qu'il s'agisse de la Compagnie ou des « Régents » d'Amsterdam
et de Middelburg. A titre de comparaison, sur la base du cours du sucre
à Lisbonne d'avant-guerre (en 1618), la marge nette du producteur repré-
sentait 6,88 '% du même prix final, soit 1 % de plus qu'au cours de la période
hollandaise. Ainsi, sans que cet aspect ne vise à être déjà déterminant dans
notre propos, il est néanmoins susceptible de renforcer encore davantage
notre impression première, quant à l'intérêt très relatif de la présence des
Provinces-Unies au Brésil pour les résultats et le confort économique
des senhores de engenhos. Car c'est au cours de cette période hollandaise
qu'ils auront vu régresser leurs marges bénéficiaires en pourcentage sinon
s'est donc trouvée réalisée bien au-delà des espérances : les Provinces-
Unies ont ainsi pu dépasser les espoirs ou les prévisions durant les quelques
années d'accalmie que connaît la Nouvelle-Hollande vers 1639-1644. Ceci
donne encore une idée de la réussite dans la maîtrise et le stimulus de
l'activité commerciale considérée au plan macro-économique.
Par ailleurs, il est intrigant de constater que les marges unitaires
dégagées sur chaque type de produit sont croissantes et inversement
proportionnelles à la qualité ainsi qu'au prix des types de produits : pour
les sucres blancs de meilleure qualité, et les plus chers, la marge nette
est inférieure à 50 '%, tandis que pour les panellos de moindre valeur, cette
marge théorique est supérieure à 60 %, soit un différentiel marginal théo-
rique de 13,87 %. Une telle différence peut éventuellement se justifier par
l'existence d'une tare plus importante en valeur dans les caisses de sucres
blancs que dans celles de panellos, sans que nous soyons en mesure de la
déterminer avec plus d'exactitude pour l'instant.
Si l'on rapproche l'estimation de Moerbeek des premiers résultats
effectifs de l'entreprise, il y a de quoi décevoir les actionnaires : d'après
une liste récapitulative du total des captures réalisées en 1624-1636 fournie
par de Laët, liste à laquelle il convient pour nos observations d'ajouter les
importations du Brésil réalisées tant par la W.I.C. que par le commerce
particulier, le rythme annuel d'importations sucrières se situe entre 1624
et 1636 à 2 545 530 Livres d'Amsterdam.
Or ce chiffre est à rapprocher des 30 000 000 de Livres attendues annuel-
lement en moyenne par Moerbeek dans ses suppositions de 1623, soit une
différence de l'ordre de 78 % entre les prévisions et les réalisations des
douze premières années.
En valeur, sur la base des prix moyens courants des années considérées,
Moerbeek escomptait un produit annuel de l'ordre de 9 500 000 florins. Or la
moyenne annuelle du produit réalisé en valeur durant la période 1624-1636
s'élève à 3 346 194 florins, soit une différence sensiblement plus réduite de
l'ordre de 64,8 %. Dans cette période, on peut donc dire que les prévisions
auront été réalisées au tiers de leur valeur.
Toutefois, à l'aide du tableau 10, on peut observer aisément que les
estimations seront sensiblement dépassées en 1641-1643.
Comme nous le voyons, ces statistiques représentent désormais au
plan quantitatif le nouveau seuil d'évaluation minimale des exportations
globales de sucres du Brésil vers les Provinces-Unies durant presque
trente années. Les deux autres observations majeures qui résultent de ce
tableau tiennent d'une part à la structure et d'autre part à la conjoncture.
Quant à la structure, nous savons désormais avec une plus grande
précision ainsi qu'une meilleure connaissance en vue de l'analyse compa-
rative que plus de la moitié (53,44 % du total des exportations de Nouvelle-
Hollande sont à mettre au compte du « commerce particulier » ou com-
merce libre. En revanche, un quart seulement de ce même total des expor-
tations est à porter au crédit de la W.I.C. dans le cadre d'opérations
commerciales. Toutefois, le quart restant (22,72 % du total) est également
à porter au crédit de la Compagnie sous forme de captures réalisées par la
LE BRÉSIL NÉERLANDAIS, 1624-1654 207
marine de guerre : la W. I. C. ne faisait en fait que recevoir de la sorte
les dividendes des opérations militaires qu'elle a initialement financées.
Au plan conjoncturel, les exportations directement réalisées pour le
compte de la W. I. C. ont un rythme remarquablement stable au cours des
périodes 1624-1636,1637-1640 et 1641-1643 pour ne subir qu'un léger tassement
en 1644-1648. Observons au passage que la séquence chronologique envisagée
nous est indiquée par nos sources mais la durée de chacune de ces périodes
n'est pas du tout semblable : nous avons une période de 12 ans, une de 5,
une 4 et une de trois années. Mais dans l'ensemble cette séquence corres-
pond assez bien aux modifications des structures du commerce telles
qu'elles ont été présentées précédemment dans le tableau 7.
En revanche, toujours au plan conjoncturel, le commerce libre connaît
une croissance remarquable en 1637-1640, période de libéralisation com-
merciale au plan structurel nous l'avons vu, mais aussi période qui coïncide
avec l'arrivée de Jean-Maurice de Nassau à Recife. Par la suite, les années
1641-1643 représentent la « période dorée
» du commerce particulier :
en effet, celui-ci arrive à assurer près de 80 % de l'ensemble du commerce
sucrier, ne laissant à la West-Indische Compagnie que 21 % de l'ensemble.
Enfin, si l'on veut bien confondre en une seule globalité l'ensemble
des opérations d'exportations sucrières réalisées à partir de la Nouvelle-
Hollande par les agents économiques d'origine néerlandaise, il nous faut
constater que presque la moitié du total des exportations réalisées durant
l'existence de cette aventure coloniale est intervenue au cours des 7 années
qui s'écoulent entre 1637 et 1643. Or il faut rappeler que 1' entreprise de
colonisation hollandaise au Brésil s'étend sur une trentaine d'années,
soit à peine moins que la durée d'une vie d'homme au XVTT si nous voulons
bien exclure le cas de celle du grand Descartes... Aussi, par delà les opé-
rations d'ordre purement mîlitaire, ces sept années indiquent bien la
vivacité de la « reprise » de la production voulue et stimulée par l'action
éclairée de Jean Maurice de Nassau.
Toutefois, pour compléter et détailler notre analyse et toujours en
vue de travaux ultérieurs, il est également possible d'envisager annuel-
lement avec une assez grande précision la répartition qualitative, quanti-
tative et structurelle de ce mouvement d'exportations sucrières. Le tableau
11 nous permet ainsi de mieux travailler sinon
sur le long terme du moins
sur la moyenne durée.
L'ensemble de ces données met en évidence assez nettement le maxi-
mum des exportations atteint en 1641, après une prodigieuse poussée à
partir de 1638. Ce rythme élevé des exportations se poursuit jusqu'en
1645. Pour ce qui concerne les blancos, notre séquence périodique est donc
modifiée et nous observons les phases suivantes :
57. Calculés auxprix courants des années correspondantes pour les différentes qua-
lités de sucres considérées.
58. F. MAURO, op. cit., p. 234.
LE BRÉSIL NÉERLANDAIS, 1624-1654 209
GRAPHIQUE 1
Exportations brésiliennes et prix des sucres blancos brésiliens
à Amsterdam, 1624-1654
210 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE
GRAPHIQUE 2
Exportations brésiliennes et prix des sucres moscavados brésiliens
à Amsterdam, 1624-1654
LE BRÉSIL NÉERLANDAIS, 1624-1654 211
s'envolent à nouveau concurremment avec l'effondrement des exportations,
suivant une dynamique très classique. Cependant il convient de relativiser
davantage ces observations du premier degré.
En effet, les graphiques 1 et 2 sont autrement instructifs, car il nous
permettent, à partir de courbes indiciaires, des investigations plus profon-
des en même temps qu'ils offrent le moyen de relier les deux mouvements
de l'offre et des prix, mouvement qui concernent aussi bien les sucres
blancos que les sucres moscovados.
Nous remarquons que les courbes de prix évoluent assez modérément
bien que permettant de vérifier les lois de l'offre et de la demande avec
de sérieuses rigidités : l'évolution du cours de ces prix est en effet très
faiblement élastique à la baisse aussi bien qu'à la hausse pour ne pas dire
tout à fait inélastique.
Ceci se vérifie particulièrement bien à partir de 1634, avec la régulari-
sation des mouvements d'exportations, jusqu'à la disparition de celles-ci
liée à la fin du règne hollandais au Brésil : notons en particulier dans le
graphique 1 le caractère spéculatif du mouvement des prix qui baissent
chaque année d'exportations élevées et augmentent, mais modérément,
lorsque cet indicateur régresse. Ainsi, le prix d'équilibre du marché, si
difficile à déterminer conceptuellementdepuis des siècles, semble se déter-
miner, au cas considéré, pour une majorité d'années dans les limites d'une
variation de + 19 % à —10 % autour d'un prix de référence que nous avons
situé en 1635 à 66 florins pour 100 £ livres de blancos. Ce prix, que l'on a
utilisé comme axe compris entre les droites 12 et 13, représente ainsi le
prix tendanciel d'équilibre sur le marché au cours de l'occupation hollan-
daise, se situant à un niveau sensiblement plus élevé que le prix tendanciel
d'avant et d'après le conflit Luso-néerlandais (qui nous semble se situer
plutôt autour de 40 florins les 100 f, niveau que l'on retrouve d'ailleurs
les quatres seules années véritablement stables durant l'existence de la
Nouvelle-Hollande). Les amplitudes maximales de ce mouvement des
prix sont comprises dans la limite de 45 % en plus ou en moins par
rapport à l'indice de référence (droite 11 et 14).
Bien évidemment en ce qui concerne les moscovados, le même type
de phénomène avec des amplitudes sensiblement plus accentuées se
retrouve au cours des mêmes années, comme on peut l'observer dans le
graphique 2 illustrant les mouvements de cette catégorie. Mais remarquons
que, dans ce second cas davantage que précédemment, les prix tendent à se
stabiliser à partir de 1650 en dépit de la chute des exportations corres-
pondant à la fin du magistère hollandais au Brésil : cet aspect peut signifier
soit une plus forte inélasticité des prix des moscovados à l'offre, soit
correspondre à l'existence de marchés d'approvisionnement inconnus à
ce jour. Dans ce dernier cas, de tels marchés auraient été susceptibles
d'exercer une pression à la baisse sur ces prix qui auraient dû s'envoler
avec la raréfaction des importations en provenance d'une Nouvelle-
Hollande moribonde tant au plan économique que politique.
La conclusion d'ensemble qui se dégage de ces deux graphiques est
donc assez nette quant aux rigidités affectant le prix d'équilibre ou « prix
naturel » suivant la formulation Smitho-Marshallieniie des phénomènes
212 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE
1636/35
1637/36
+ 80 % - 10 % 90
-+ 9860 %% +- 20 %% 118
41 101
+ 31 %
-+133 -
19 %
+ 2
+ 29
%
%
29
48
-
+ 53 +
%
-
50 %
-3
1638/37 % 19 % 142 + 8 % + 80 % 72
1639/38 + 45 % + 3 % 48 + 23 - % 17 % 40+5 % + 10 % 5
1640/39
1641/40
+ 8 % - % 29
+ 62 % - %
21
7 69
-+594 % -+
% 8 %
22 %
12
81
-+ -+ 28
34 %
21 %
30 %
%
4
7
1642/41
1643/42
-+0,326 %% - 104 %% 4,3
— 16 -+ % --
38
116 %
10 %
9 %
28
25
+
+
+
-
60 %
45
70 %
5 %
%
55
115
1644/43
1645/44
-- 20 %% ++ 22 %% 22
15 17
-- 0,4 -+
%
29 %
3 %
30 %
2,6
59
+ -41 %
-- +- -
53 %
37 %
59 %
78
6
1646/45 - 62 % + % 41 103 - %+
62 46 % 108
59. Voir W. LEONTIEF, Thestructure of the American Economy, 1919-1939, New York,
1941. Son oeuvre et sa théorie devaient valoir à ce chercheur le prix Nobel d'économie en
1973.
au terme de « théorie » par Joseph Schumpeter, sens qui est en fait
60. Au sens donné
double, qu'il nous faut ici préciser en reprenant les termes mêmes du grand économiste :
« Selon le premier et le moins important, théories est synonyme d'Hypothèses Explica-
tives. De semblables hypothèses sont bien sûr des éléments également essentiels de l'his-
toriographie et de la statistique. Par exemple, même l'historien le plus farouchement
événementiel, en économie ou en un autre domaine, peut difficilement se garder de for-
mer une ou plusieurs hypothèses explicatives, ou théories, sur les origines des villes. Le
statisticien doit former une hypothèse ou une théorie sur la répartition des variables
stochastiques qui entrent dans son problème. Tout ce qu'il faut dire à ce sujet, c'est
qu'il y a erreur — même s'il s'agit d'une erreur répandue — à croire que l'unique ou
principal travail du théoricien de l'économie consiste à formuler de semblables hypo-
thèses (certains voudraient ajouter : des hypothèses tombées du ciel). La théorie écono-
mique a une tâche entièrement différente. Elle ne peut en effet, pas plus que la physique
théorique, se passer de schémas ou de modèles simplificateurs, qui sont destinés à rendre
certains aspects de la réalité et à prendre certaines choses pour établies, de manière à en
établir d'autres conformément à certaines règles de méthode. En l'occurence, les choses
(propositions) que nous prenons pour établies peuvent être nommées indistinctement hypo-
thèses, axiomes, postulats, suppositions ou même principes, et les choses (propositions) que
nous pensons avoir établies selon une méthode acceptable se nomment théorème. Bien
sûr une proposition peut figurer dans une discussion comme postulat et dans une autre
comme théorème. Des hypothèses de ce genre sont aussi suggérées par des faits — elles
sont façonnées en fonction des observations que l'on a faites —, mais en stricte logique
elles sont la création arbitraire de l'analyse. Elles diffèrent des hypothèses de la première
sorte en ce qu'elles ne contiennent pas les résultats définitifs de la recherche qui sont
supposés intéressants en eux-mêmes ; mais elles sont de simples instruments ou des
outils forgés dans le dessin d'établir des résultats intéressants. » {Hist. de l'Analyse Econ.,
t. 1, pp. 39-40).
Nous allons revenir un plus bas sur les techniques liées à l'application de cette défi-
nition dans le cadre historique.
214 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE
L'évolution des rapports de l'année 1643 par référence à 1642 est parti-
culièrement parlante à cet égard. Il n'est que de rapprocher les pourcen-
tages d'évolution des exportations et prix des blancos (+ 0,3 % et —4%,
soit un différentiel de 4,3 points) des pourcentages correspondants pour
les esclaves (+ 70 % et — 45 °/o, soit un différentiel de 115 points) pour
s'en convaincre. De telles observations peuvent se vérifier également pour
les moscovados en 1644/45 aussi bien qu'en sens inverse (rupture de 1637
par rapport à 1636 pour les blancos, avec 101 points de différentiel contre
un équilibrage les années correspondantes en ce qui concerne les esclaves,
avec un différentiel de 3 points).
Une conclusion peut en être tirée simplement : d'une manière assez
semblable au récent constat d'Enrique Tandeter et Nathan Wachtel pour
le Pérou du xvnr siècle, il semble se développer « deux conjonctures non
seulement différentes mais opposées » 61 : une conjoncture affectant les
produits ainsi qu'une conjoncture concernant plus particulièrement le
coût des facteurs de production. Il va sans dire qu'un tel constat n'est pas
définitif et qu'il fera l'objet de précisions dans une prochaine réflexion
centrée sur la West-Indische Compagnie au Brésil.
Mais pour en revenir à un niveau plus général, cette construction
encore assez sommaire nous permet toutefois de prendre nettement
conscience de l'amplitude des mouvements que nous avons appelé « rup-
ture », désignant ainsi le phénomène de désorganisation du marché : des
ruptures sont particulièrement perceptibles pour le sucre en 1638 par
rapport à 1637 lorsque le différentiel de variation exportations-prix atteint
118 pour les blancos et 142 pour les moscovados. Le phénomène se repro-
duit en 1646 par rapport à 1645, avec quelques poussées de fièvre entre
temps, mais également avec la quasi-stabilisation de 1643.
Enfin munis de cet ensemble de données et de précisions, il est temps
de tirer le bilan de notre enquête précisément au plan théorique, à l'aide
d'un modèle économique simplifié 62.
laisser leur témoignage ou leur avis. Et l'absence physique de ces disparus représente
justement l'effort de reconstitution à mettre en oeuvre pour élucider une problématique.
Mais cette tâche de l'historien est également de souffrir éventuellement la remise en cause
de son modèle en raison de l'apparition de nouveaux éléments.
Cette remise en cause est susceptible d'intervenir aussi bien dans le présent que dans
l'avenir, tant en raison des progrès de la théorie économique que de la découverte de
nouvelles sources historiographiques ou l'apparition de nouvelles données quantitatives
de traitement. Et nous ne parlons pas des nouvelles méthodes historiques potentielles !
63. Joseph A SCHUMPETER, Théorie de l'évolution économique, p. 82.
216 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE
figure A Figure B
64. Ibid. p. 1.
LE BRÉSIL NÉERLANDAIS, 1624-1654 217
poleur, en l'occurence la West-Indische Compagnie, dont le système d'im-
position est directement assis sur le niveau de la production mais aussi
et surtout sur le niveau des prix.
La demi-droite pointillée E indique le niveau d'équilibre économique
de Yengenho ou plus exactement son seuil de rentabilité, au coût des
facteurs de production supposé constant et aux taux d'intérêt également
supposés constants.
Enfin, la demande sur le produit de luxe que représente le sucre au
xvrT siècle est faiblement élastique, ne répondant guère aux hausses de
prix : lorsque le prix s'élève cette demande continue malgré tout de
croître, comme l'indique le passage de la courbe de demande de D en
Dl.
Or, pour relier ce schéma théorique à la situation déjà analysée en
profondeur au plan statistique, rappelons à nouveau que de 1624 à 1634,
puis encore de 1636 à avril 1638, la W.I.C. dispose d'un monopole de
commerce avec le Brésil, lui permettant de peser de manière détermi-
nante sur la formation du prix final coté à la Bourse des Échanges
d'Amsterdam.
Aussi, durant ces deux périodes, les intérêts de la W. L C. et ceux de
ses actionnaires concordent avec les intérêts des senhores de engenhos,
du moins de la majorité d'entre eux. Ces derniers découvrent en parti-
culier le bénéfice à retirer d'un marché stable ainsi qu'une structure
commerciale remarquable pour l'écoulement de leur production à un prix
presque garanti par l'existence du monopole. Au demeurant, la meilleure
preuve du besoin d'organisation du marché sucrier brésilien n'est-elle pas
la création en 1648, alors que la W. I. C. nous paraît aujourd'hui (avec le
recul historique nécessaire) dans un état très difficile, d'une Compagnie
Portugaise des Indes Occidentales, à l'exemple hollandais ?
Mais surtout les senhores de engenhos découvrent le régime fiscal
préférentiel réservé aux importations de pays neutres (la formule utilisée
pour désigner ces pays concernait les biens Inkomende uyt neutrale landen,
Rhyn Wael ende Ijssel). Ce régime fiscal préférentiel est établi de manière
quasiment intangible, rappelons-le, depuis le 5 avril 1603. En revanche, le
commerce avec les pays ennemis des Provinces-Unies (vijandt landt, au
singulier, il n'y en a qu'un bien sûr...) s'il n'est pas interdit est cepen-
dant frappé d'impositions très lourdes.
Tout ceci explique pour partie, au demeurant, les affaires étant les
affaires, la rapide remise en production des engenhos que nous avons
mise en évidence et surtout le très bon accueil fait, à son arrivée, quoi
qu'en dise Mario Neme 65, à Jean-Maurice de Nassau.
En avril 1638 d'ailleurs, avec l'aveuglement qui caractérise générale-
ment les structures étatiques vis-à-vis des évolutions économiques conjonc-
turelles ou structurelles, les Heeren XIX (le conseil d'administration de
de la W. I. C. est présidé par le Stadhouder de Hollande, ne l'oublions pas)
s'arrogent les moyens d'obtenir en revenus fiscaux le tiers de la valeur
des sucres importés dans les Provinces-Unies à partir de l'hémisphère occi-
65. Mario NEME, Formulas Politicas no Brasil Holandès, Sâo Paulo, 1971.
218 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE
68. Dansune certaine mesure, et poussé jusqu'à son maximum, ce modèle pourrait
même être explicatif de la première vague de décolonisation consécutive aux guerres napo-
léoniennes.
69. F. MAURO, op. cit., p. 109.
70. op. cit., p. 131.
220 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE
François J. L. SOUTY.
LE BRÉSIL NÉERLANDAIS, 1624-1654 221
TABLEAUX
Engenhos Total
Capitaineries
Freguesias
et Engenhos Engenhos
au mode
de
==^^===
paroisses a eau à boeufs fonctioil En v.A. En %
imprécis
--
33 10 13 7 — 4
dont :
Pojuca 7 2 11 83 11
St Agostinho
StAmaro
Moribequa
9
6
3—
2
3 ____
3
32—
— —
—
2 12 4
639
628
86
16
Vargea
StLourenço
4
3
2
1
4
21—- 3
—
1
527 14
Paratibe 1 — — — — — 1— 1
Iguaracu — — — — 7 1 7 1 8 A 1 5
Itamarica — — 7 2 4 7 11 9 20 1 & 13
dont :
Goiana 4 45
Nostra Senh. de Penha
—
—
—
—
1
5 —
1
—
3
15 16 9
*Source : Sommier discours over den Staet vande vier Geconquesteerde Capi-
tanias inde noorderdeelen van Brasil, 19 januarij 1638 publié in B.M.H.G., 1904.
Comme nous le verrons ci-dessous, la « Juridiction du sud » comprend les
paroisses de Porto Calvo, Alagoa del Norto, Alagoa del Zul, et Openodo.
222 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE
TABLEAU 3. —
Éléments sur la structure foncière de la Nouvelle-Hollande en 1638
(répartition par freguesias ou à défaut par camaras)
Engenhos déte-
Totaldes Engenhos Confis-
Freguesias nus par des
engenhos rachetés par des qués propriétaires
(rappel) des néerlandais totalx féminins£
12
t>
Sérinhaém 18 1 5 7
Pojuca 11 1 9 —
St. Agostinho 16 3 11 2
St. Amaro 9 —
Moribequa 8 — 4 1
Vargea 14 2 2 2
St. Lourenço 7 1 2 —
Paratibe 1 1
113
— —
Iguaraçu 8 — 1 —
Capitainerie de Pernam-
bouc 108 9 36 13
Goiana 9 7 8 —
N. S. da Penha França. 6
St. Laurenço de Jujucu-
papo 2 — — —
Araripe 3 — — —
Capitainerie de Itamarica 20 8 9 3
Capitainerie de Paraïba.. 21 6 7 2
Capitainerie de Rio
Grande 2 1 1 —
Total en valeur absolue. 150 24 55 18
Total en % 100 16 37 12
1. Les engenhos confisqués demeurent administrés le plus souvent par des Portu-
gais.
2. L'importance du nombre de femmes administrant directement des plantations
pour une raison ou une autre nous a frappé par sa fréquence, c'est pourquoi
cette colonne figure ici. Comme nous l'avons déjà vu précédemment, le fait déter-
minant de ce tableau réside dans la faiblesse de l'engagement direct néerlandais
au plan micro-économique : les Provinces-Unies demeurent encore beaucoup plus
mercantilistes que productivistes. L'engagement direct n'interviendra qu'environ
un demi-siècle plus tard en Guyane, et encore...
224 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE
Ration de
Région de Nombre Prod. exp. Métropole productivité
Année production d'engenhos en £ destinataire moyenne par
engenho
Pour 1570, 1610, 1639, 1645, les données sont extraites de Frédéric MAURO, op.
cit., p. 236-238 et 256-257, à partir de sources hétérogènes dont cet auteur indique
bien qu'il convient de les « manier avec précautions », conseil que nous reprenons
volontiers pour notre compte, sous réserves des précisions apportées par nos
soins dans l'ensemble de cette étude pour ce qui a trait à la Nouvelle-Hollande.
Pour 1638, nos calculs en ce qui concerne le nombre à'engenhos résultent du
Sommier discours over den staat..., op. cit. En ce qui concerne la production, les
conversions ont été effectuées sur la base d'une arrobe = 28 £ d'Amsterdam. Notre
estimation globale est le résultat d'une aggrégation de l'ensemble des différentes
qualités de sucres exportés au cours des années considérées par la W.I.C. et le
commerce particulier, telles que ces quantités ont été indiquées par Wâtjen.
Notons en outre, à propos du nombre à'engenhos productifs en 1638, que Wëtjen
en signalait (p. 269) seulement 85 sur 150 en état de produire.
Ce dernier chiffre eût impliqué un ratio de productivité moyenne par engenho
de l'ordre de 64597 £ par an. Toutefois, il n'est pas vraisemblable de retenir ce
dernier chiffre, compte tenu du fait que l'auteur du Sommier discours donne bien
le détail des noms de propriétaires ainsi que la location des plantations en même
temps que leur état sans qu'une confusion soit possible.
Pour 1638, 1639, 1640 et 1641, la « Nouvelle-Hollande» représente, suivant
l'appellation de l'époque, les quatre Capitaineries conquises par les Provinces-
Unies (Pernambouc, Itamarica, Paraïba, Rio Grande). Pour 1640 et 1641, cf. H.
WATJEN, op. cit., p. 269, qui nous indique le nombre de 120 engenhos en 1640 seule-
ment. Mais il est raisonnable de penser que ce décompte n'a pas été modifié d'une
année sur l'autre. A cet égard, soulignons ici encore que l'année 1641 représente la
meilleure année de production exportée durant la période de présence hollandaise
au Brésil.
Pour 1645, il faut naturellement exclure du Brésil la petite partie encore déte-
nue par les forces des Provinces-Unies. Enfin, deux observations quant aux ratios
de productivité comparée :
1) le ratio de productivité globale de Vengeriho étudié dans le compte d'exploita-
tion-type de 1640-1645 s'établit à environ 180 000 £ par an, donc à un niveau sensi-
blement plus élevé que le résultat des moyennes ci-dessus ;
2) dans sa thèse (p. 213-214), Frédéric MAURO nous précise que l'engenho de la
Compagnie de Jésus, situé dans la région de Sergipe, était susceptible de produire
dans les bonnes années de récolte, vers 1630-1635, 7 000 arrobes de blancos et 3 500
arrobes de moscovados, soit globalement environ 196 000 £.
LE BRÉSIL NÉERLANDAIS, 1624-1654 225
Débit Crédit
pp. 197-199. L'ensemble des postes et des chiffres sont ceux cités par Reesse, sauf
notes de renvoi.
Ce compte d'exploitation serait aujourd'hui, suivant les canons du « nouveau
plan comptable » français, un « compte de résultat » faisant figurer à la place du
« débit » les postes de « charges », et du « crédit » les postes de « produits »,
l'ensemble de ces postes devant être exprimés « hors taxes ». Cependant, compte
tenu d'une nécessaire conformité méthodologique par rapport à la science histo-
rique d'une part et, plus fondamentalement encore, en raison de l'état de notre
documentation historique, il va de soi qu'il demeure difficile de retenir des critères
aussi rigoureux. Toutefois l'on s'est efforcé de maintenir autant que possible cette
rigueur comptable, d'où l'abondance des notes de renvoi du présent tableau.
1. La valeur de 100 florins pour un esclave nous semble très nettement sous-
estimée. En effet, à partir des chiffres de Watjen présentés par ailleurs dans
notre étude et relatifs au nombre d'esclaves introduits en Nouvelle-Hollande entre
1636 et 1645, la valeur moyenne annuelle des esclaves vendus sur le marché de
Recife s'établit entre 155 et 482 florins, tandis que la moyenne annuelle sur dix ans
ressort à 290 florins. Par ailleurs, Watjen précise à partir de chiffres issus de docu-
ments à notre avis des plus faibles que « par tête », les acquéreurs devaient prévoir
environ 200 à 309 florins. Mais si les Noirs étaient des individus sains, bien bâtis
et robustes, alors leur prix s'établissait à un niveau bien plus élevé, parfois entre
600 et 800 florins » (Dos Hollandische Kolonialreich..., p. 311).
2. Reesse groupe le 10 % et le 1,5 % hors comptabilité, sans opérer de distinction
particulière, mais les valeurs indiquées sont bien les mêmes.
3. Reesse n'indique pas cet impôt. Nous avons obtenu ce montant à partir de
Watjen, qui indique {op. cit. p. 198) pour la seule Capitainerie de Pernambuco en
1637 un produit total des Zuckermuhlensteuernde 12 000 florins. Ceci, rapporté aux
75 moulins recensés dans la Capitainerie début 1638, représente environ 160 florins
par engenho. Nous avons arrondi à 200 florins compte tenu de la taille particu-
lièrement importante de l'engenho envisagé ici, mais il est à supposer que ce
poste d'imposition soit légèrement plus important encore, sans que nous ayons pu
déterminer avec précision son assiette.
4. Observons ici que les caisses de sucres sont évaluées en florins alors qu'en
produit elles le sont en Schelling flamands pour une valeur d'environ fl. fl. 5 : 10,
soit 67 % de la valeur exprimée au titre de la rémunération du maître de l'engenho.
Nous pouvons donc en déduire une relative sur-évaluation de la rémunération du
maître soit une sous-évaluation manifeste du produit.
5. II n'y a aucune indication quant à l'origine de ces intérêts au plan de l'em-
prunt initial. Mais Reesse fait opportunément remarquer que l'on peut déduire de
ce décompte un taux de mortalité des esclaves de l'ordre de 10 % par an. En outre,
il y a lieu d'observer qu'une tête de bétail est ici comptabilisée pour trois fois la
valeur d'un esclave. Ceci est intéressant à rapprocher de notre étude sur « l'Agri-
culture et le système agricole au Suriname au xviir siècle » in Revue Française
d'Histoire d'Outre-Mer, t. LXIX (1982), n° 256, p. 208 : il semblerait que la mortalité
des esclaves soit moins élevée en Nouvelle-Hollande au XVIIe siècle qu'au Suri-
name au XVIIIe !
6. 1 Schelling flamand = 6 Stuivers = 0,30 florins environ (Watjen, p. 277;
Reesse, p. 197). Une arrobe coûte donc fl. 5 : 8, ce qui fait la livre-pesant d'Amster-
dam de sucre à fl. 0 : 3 : 14 ou environ 7 Groot/£. Ceci est à rapprocher des prix
indiqués par Moerbeek en 1623.
7. Ce qui nous donne fl. 0 : 2 : 12 par £ ou environ 5 Groot/£.
8. Cf. note 4 ci-dessus. Y aurait-il sous-estimation de la valeur du produit, comme
nous l'avons déjà suggéré ? On peut le penser. D'autant que ce compte d'exploita-
tion théorique résulte d'une libelle destinée à faire de la publicité pour la W.I.C.
sans toutefois paraître trop avantageuse et risquer, de ce fait, de susciter l'éton-
nement de l'opinion publique vis-à-vis des pertes de la Compagnie. Cette sous-
estimation volontaire du produit serait donc une des conséquences, en fin de
chaîne, de la corruption des administrateurs de la W.I.C. présents au Brésil :
ceux-ci avaient en effet tout intérêt à ne pas donner de chiffres trop optimistes
sur la production afin de se réserver une partie de son appropriation, par des
LE BRÉSIL NÉERLANDAIS, 1624-1654 227
moyens fort divers et sans doute peu conformes aux intérêts des actionnaires de
la Compagnie...
Par ailleurs, si l'on avait retenu les prix indiqués en 1623 par Moerbeek, nous
aurions obtenu un produit sensiblement inférieur, ce qui est normal :
— sucres blancs : 123 200 £ à 8 Groot/£ = 2640 florins
— moscouades : 61600 £ à 4 Groot/£ = 6160 florins
total : = 30 800 florins, au lieu de 32340 flo-
rins
Toutefois, l'ensemble du Compte d'exploitation serait à refaire, puisque les
coûts unitaires des postes de charges peuvent raisonnablement avoir varié en une
vingtaine d'années.
Engenhos de
Engenhos du Brésil Nouvelle-Hollande
vers 1635 vers 1640.i645
idem, plus 8 %
des marchandises idem idem idem
transportées
1636 Commerce à nouveau interdit aux particuliers
-Nature
T , des .,
, coûts Valeur en Valeurrelative
„ .
florins (en
, %)
.
Fabrication 15: 6:13 33,4
dont : coût de production 1 12:12
marge du senhor de engenho 2 2:14:13 (5,9)
.
Impositions de toutes natures au profit de la W.I.C. 16: 2: 3 35
dont : impôts à la production 3 2: 3
droit de récognition 4
.
taxe 20 % 3:10
.
taxe sur les sucres de 1 groot/£ 2:10
droit de transport sur les vaisseaux de la
W.I.C. c 7: 5
Convois et licences 0:15
.
Marge brute de gros à l'importation * 14:11 31,6
dont : Veilgelt 0: 6: 3
Waergelt 0: 6
Makelaarsloon 8 0: 1:10
.
Marge nette de gros 13:17:3 (30)
.
Total 46 100
contre rinsécurité sur l'eau /.../ Les commerçants les plus aisés pouvant se per-
mettre sur ce plan d'avantage que d'autres, appareillèrent même des navires d'es-
corte ou convoyeurs, sous la protection desquels pouvaient se mettre les plus
pauvres, moyennant le payement d'un « droit de convoi » à titre de dédommage-
ment. La convention en vue de la protection contre payement s'appelait « ami-
rauté ».
Le commandement nautique de la flotte était aux mains d'un amiral. Les inté-
ressés formaient des associations qui élisaient des conseils d'administration pour
leurs affaires journalières, les « directions » qui jouèrent un rôle jusqu'au milieu
du xvir siècle /.../ »
Au terme d'une série de modifications du statut juridique, « un règlement
définitif intervint en 1597; le recouvrement et l'emploi des impôts de C. et L.
furent confiés définitivement aux cinq collèges d'Amirauté. Les revenus en étaient
versés dans leur caisse, et non dans celle de l'autorité centrale, la Généralité /.../
La Trêve de Douze ans qui suspendit la guerre contre l'Espagne de 1609 à
1621 ôta sa base à l'impôt de licence. Les impôts de C. et L. n'étaient d'ailleurs
plus depuis longtemps ce qu'ils avaient été à l'origine : impôt particulier se
rapportant à la protection par convoi et fin de la prohibition du commerce avec
l'ennemi. Ils avaient été transformés en droits d'exportation et d'importation
courants. Ils furent d'ailleurs joints, quant aux tarifs, par la Paix de Munster
(1648) ». (C'est nous qui soulignons).
Rappelons bien avec RESSE (op. cit., p. CXIX) que les deux Compagnies,
W. I. C. et V. O.C. étaient exemptées du paiement de ces droits de C. et L. Aussi
lorsque le commerce avec le Brésil fut ouvert au commerce particulier en 1634,
il fut décidé que les droits en question seraient acquittés par les personnes pri-
vées au profit de la W. I. C. en tant que Compagnie Souveraine et non à celui de
l'État.
7. Il convient de déduire de cette marge le Veilgelt, la taxe de prise, au taux de
1 % pour les valeurs importées, les sommes perçues à ce titre étant destinées aux
armateurs en course (Kruisers) ainsi qu'à la Flotte de Guerre (Oorlogsvloot).
En outre, une taxe de pesée, le Weachgélt ou Waaggeld, était prélevée au plan
provincial « sur les biens qui devaient faire l'objet d'une pesée sur les balances
municipales » (définition suivant J. J. REESSE, op. cit., ainsi qu'à partir de J.
VERDAM, Middelnederlandsch Woordenboek, 'S Gravenhage, M. Nijhoff, 1932).
Ces deux impôts doivent être considérés comme des impôts à la consom-
mation et il importe de souligner que le bénéficiaire n'en est plus la W. I. C. mais
l'une des traditionnelles collectivités constitutives de l'État (Villes ou Provinces).
8. Le makelaarsloon était la rémunération réglementaire due aux courtiers en
vertu d'une ordonnance municipale. Ainsi, à Amsterdam, l'Ordonnance du 27 jan-
vier 1612 stipulait même l'obligation d'un enregistrement et d'une commission
délivrée par le Bourgmestre aux makelaars. En contre-partie de cette protection
professionnelle, ceux-ci devaient tenir les livres de compte des parties contrac-
tantes « sur lesquels devaient figurer les noms des acheteurs et des vendeurs, la
date et les conditions de la vente, la qualité et la quantité des biens ». (J. J. REESSE,
op. cit., p. 17).
Par suite, aux termes de l'Ordonnance municipale d'Amsterdam du 1er janvier
1613, la rémunération du courtier était fixée à 10 Stuivers par caisse de sucre bré-
silien et madeirain.
Soulignons que, pour l'histoire des prix, cette institution des makelaars est
du plus haut intérêt. En effet, c'est par une délibération municipale du 31 janvier
1613 qu'il fut décidé que chaque semaine les prix de toutes les denrées seraient
collectés auprès des courtiers, dressés et imprimés sous le sceau de la ville
d'Amsterdam : telle est l'origine institutionnelle des Prijscouranten si parfaitement
rassemblés et étudiés par N. W. Posthumus dans les années 1930-1940.
TABLEAU 9. — Estimation par J. A. Moerbeek du potentiel d'exportations annuelles de sucres du Brésil en 1623 (masse et volume)
Prix de revient Prix de vente Marge brute Marge brute Marge nette unitaire
au Brésil 8 à Amsterdam globale unitaire (frais de transports déduits)
Quantités ^^^^^^^^^^^^^=^^^^^^^^^^^^= ==^^^^^^=^^^^^^=^= bu
(en £) Part Marge nette 8 &
Global Unitaire Global en florins en % des frais en florins en %
Unitaire (en fl, (en fl-) (en florins) pour pour de transport pour pour
1£100£ pourl00£' 1£ 100£
10.000.000 blancs... 8 groot/£ 2.000.000 18 groot/£* 4.500.000 2.500.000 0:5 25 55,55 9,8% 0:4:10 22:1148,88% I
ta
7. Voir ci-dessus note 2. La part des frais de transport pour 100 £ est calcu-
lée par rapport à la marge brute. Par rapport au prix de vente théorique final à
Amsterdam, cette part aurait été respectivement de :
— 5,44 % pour les blancs,
— 8,16 % pour les moscouades,
— 12,55 % pour les panelles.
8. La marge nette est bien évidemment obtenue par le calcul classique Prix de
..,,,.
vente — (Prix d'achat + frais de transports), le rapport exprimé en pourcentage
Marge nette
, ,, a. partir de 1 opération -=—.—;
étant calculé
Prix de vente.
Exportations Exportations
pour pour le Total Rythme
Périodes Captures le compte compte de général annuel
de la W.I.C. particuliers
Exporta-
Exporta- tiong Rythme
pour
ttons pour le compte
Captures Total annuel
le compte deg u. moyen
delaW./.C. oulierg sur 27 ans
1629 720.000
- -- 720.000
-
— — --
1630
1631 496.800 -- -
496.800 52.300
-
— 52.300
1632 908.400 908.400 119.672 119.672
1633 - -- - -- —
1634
1635
1.270.200
1.427.000 172.200
1.270.200
1.601.200 627.592
'
—
—
24.052
-
—
651.644
1636 1.090.000 1.782.000 2.872.200 308.738 551.264 859.992
1637 60.000 1.081.800 1.141.800 31.192 665.840 697.032
1638 1.225.800 2.186.400 3.412.200 377.552 1.177.652 1.555.204
1639 2.324.400 2.648.400 4.972.800 815.892 1.097.054 1.912.946
1640 1.108.800 4.275.600 5.384.400 135.898 1.703.632 1.839.530
1641 2.070.000 6.655.600 8.725.100 482.334 6.457.336 6.938.670
1642 2.089.000 4.353.600 6.442.600 463.764 1.337.196 1.800.960
1643 727.800 5.735.400 6.463.200 258.930 1.830.535 2.089.465
1644 478.200 4.674.000 5.152.200 182.686 1.898.470 2.081.156
1645 651.600 3.715.800 4.367.400 274.351 1.198.694 1.473.045
1646 1.227.000 395.400 1.622.400 387.436 176.904 564.340
1647 525.358 487.200 1.012.858 304.829 185.192 490.021
1648 525.358 428.400 953.758 304.829 203.000 507.829
1649
1650
-
—
577.800
322.800
577.800
322.800
- 267.000
120.800
267.000
120.800
1651 - 80.400 80.400
—
— 24.584 24.584
236 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE
En outre, comme nous l'avons déjà observé pour les sucres blancos ci-dessus,
J. J. Reesse fournit {op. cit., p. CXX) des chiffres légèrement plus élevés pour la
période 1637-1639 par rapport aux chiffres résultant de nos conversions à partir de
Watjen au titre des années correspondantes. Ces différences tiennent aux mêmes
raisons que celles développées ci-dessus. A toutes fins utiles, nous présentons les
chiffres de Reesse :
Sucres importés
Années Sucres importés Total
par les
par la W.I.C. particuliers
sucres importés
Années Sucres imP°rtés Total
par les
par *a W.I. C. particuliers
Comme dans le cas du sucre blanc, le différentiel est assez réduit bien que nos
calculs à partir des séries de Watjen soient tout de même inférieurs globalement
de 11 % aux estimations de Reesse. Aussi confirmons-nous que nos séries d'en-
semble, bien que relativement plus élevées que celles présentées jusqu'ici, repré-
sentent effectivement un seuil minimal.
TABLEAU 12. — Évolution du prix du sucre blanc brésilien et des moscouades à Amsterdam
de 16Z4 à 1675
1624 43 32 1646 65 57
1625
1626
47
51
38
42
1647
1648 60
- 43
—
1627
1628 57
- -
44
1649
1650
66
67
52
49
1629
1630 67
- -
57
1651
1652
73
69
53
50
1631 67 59 1653 66 51
1632 70 54 1654 69 51
1633 67 54 de 1655 à 1663, aucune donnée
1634 66 50 1664 39 31
1635 66 51 1665 40 31
1636
1637
60
85
52
67
1666
1667
-- --
1638
1639
68
(70)
54
(45)
1668
1669 35
- 25
-
1640
1641
55
51
49
38
1670
1671 29
- 22
-
1642 46 34 1672 32 22
1643
1644
44
(45)
31
(30)
1673
1674 29
- 22
-
1645 46 39 1675 28 20
* Sources : N. W. POSTHUMUS,op. cit., pp. 119 et 122. De 1624 à 1654, il est évi-
dent que la seule origine des blancos et des moscovados cotés comme tels est
brésilienne, origine dont on peut cependant douter après 1654 avec les démarrages
fort rapides des exploitations sucrières dans la Guyane et les Antilles Hollandaises.
LE BRÉSIL NÉERLANDAIS, 1624-1654 239
Il faut également se souvenir que ces possessions ne sont après tout qu'à quelques
journées de navigation pour un vaisseau qui chargerait en contrebande au Brésil...
Pour 1639 et 1644, il s'agit de la moyenne annuelle des cours recensés par J. J.
REESSE in De Suikerhandel van Amsterdam que l'on a déjà cité, p. LXXXVI et
CXX. Quant à la fiabilité de ces deux données, exogènes par rapport à l'ensemble
homogène de Posthumus, on peut observer dans des années où les deux auteurs
fournissent quelques chiffres, qu'à propos des chiffres de Reesse pour 1640, une
différence de prix de 10 % pour 100 £ de blancos peut être enregistrée par rapport
aux chiffres de Posthumus, mais que cette différence est de 1 % seulement en
1642. Ceci est évidemment très faible. En outre, notons que les chiffres de Reesse
s'intègrent parfaitement en niveau à la série de Posthumus qui n'avait consulté
que les Prijscouranten, tandis que le premier tire ses informations du fonds d'ar-
chives de l'ancienne W. I. C. : sources divergentes mais données convergentes donc,
ce qui est bien pour nous rassurer une fois de plus s'il était nécessaire.
Par ailleurs, Posthumus comme Reesse ont exprimé les valeurs de ces prix en
florins pour 1 £ tandis que nous préférons l'exprimer en florins pour 100 £. La
raison d'un tel choix est liée au fait que nous souhaitons conserver dans nos
compilations et travaux la même base monétaire et le même système de numéra-
tion qu'au XVIP siècle tandis que Posthumus avait converti l'ensemble de ses
données d'un système monétaire mixte duodécimal et hexagésimal en unités de
notre moderne système décimal. L'intention de Posthumus était tout à fait esti-
mable dans la mesure où sa compilation était notamment destinée à s'insérer
dans un programme comparatif international d'histoire des prix. Notre choix
résulte de la dimension plus limitée de notre cadre : celui de la conjoncture atlan-
tique luso-néerlandaise. En outre, ce choix permet de réduire sensiblement les iné-
vitables effets d'une dispersion trop accentuée,lors des conversions entre systèmes
de numération d'époques et de régions culturelles différentes.