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Rev. Energ. Ren.

: Physique Energétique (1998) 33 - 38

Etude et Réalisation d’un Capteur Solaire à Air


D. Semmar *, S. Betrouni ** et D. Lafri *
*
Centre de Développement des Energies Renouvelables, B.P, 62, Route de l’Observatoire, Bouzaréah, Alger
**
Institut de Mécanique, Université de Blida, B.P, 270, Blida

Résumé – Le présent travail porte sur l’étude et la conception d’un capteur solaire à air destiné à la
production d’air chaud. Pour effectuer ce travail, on a adopté une approche théorique qui consiste à simuler
ce comportement par un programme informatique utilisant un modèle mathématique où tous les paramètres
caractérisant la performance du système sont évaluées instantanément durant la période d’ensoleillement.
La partie expérimentale consiste à la réalisation du modèle considéré. Enfin une interprétation des résultats
obtenus est donnée pour valider le modèle utilisé.
Abstract – This work deals with the air solar flat plate collector design intended for the hot air production.
To perform this work, one has adopted a theoretical approach that consists in the simulation of this
behaviour by a program using a mathematical model where all the parameters characterizing the system
performance evaluated instantaneously during the radiation period. The experimental part consists of the
realization of the model considered. Finally, the comparison of the result has been done so that to confirm
the theoretical model.
Mots clés : Energie solaire - Transferts de chaleur - Convection naturelle - Convection mixte - Capteur
solaire à air - Pertes de charge - Séchage.

1. INTRODUCTION
Les capteurs à air peuvent être utilisés dans beaucoup d’applications nécessitant des températures basses et
modérées, telles que le chauffage des locaux, le séchage des produits agricoles, le séchage du bois, le séchage
des briques, etc.

Fig. 1 : Schémas de quelques capteurs plans à air


R : Rayonnement incident ; T : Plaque transparente
A : Plaque absorbante ; I : Isolant thermique ; F : Ecoulement d’air
L’utilisation de l’air comme fluide caloporteur a été peu entreprise vu ses faibles caractéristiques de transfert
de chaleur. Ce travail permet le développement de nouveaux dispositifs d’utilisation de l’énergie solaire
thermique exploitant ce fluide et de donner des informations importantes pour le développement économique de
ce processus. Plusieurs travaux sont à l’origine de nombreuses études, tant numériques qu’expérimentales [1 –
5] etc. Les conclusions de ces études permettent ainsi de définir un certain nombre de règles et de critères pour
les systèmes utilisant l’air comme fluide caloporteur. La figure 1 représente quelques schémas de collecteurs
plans à air avec différentes dispositions de l’absorbeur.

2. MODELISATION MATHEMATIQUE
Le capteur choisi pour notre étude est représenté en figure 2. Le capteur reçoit un éclairement global (direct
et diffus) mais celui-ci n’est pas totalement récupéré dû aux pertes thermiques.
2.1 Pertes globales d’énergies
Les pertes thermiques sont dues à la différence de température entre l’absorbeur et le milieu ambiant. Elles
se divisent en trois catégories: pertes vers l’avant, pertes vers l’arrière et pertes latérales.

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34 D. Semmar et al.

Fig. 2 : Schématisation du collecteur plan à air


R : Rayonnement incident ; T : Plaque transparente
A : Plaque absorbante ; I : Isolant thermique ; F : Ecoulement d’air

Fig. 3 : Schéma thermoélectrique relatif au capteur à air

Pour évaluer toutes ces pertes, on adopte les hypothèses suivantes :


• régime quasi-stationnaire;
• résistance de la vitre à la conduction négligeable;
• conduction dans l’absorbeur négligeable;
• température d’entrée du fluide et température ambiante confondue.
Afin de faciliter l’évaluation des pertes thermiques, on établit le schéma thermoélectrique du capteur
représenté en figure 3.

2.1.1 Coefficient de pertes thermiques vers l’avant du capteur


A l’avant du capteur, entre la couverture transparente et l’ambiance, on enregistre des dettes par convection
et par rayonnement, qui peuvent être déterminées comme suit :
• Coefficient d’échange par convection entre le vitrage et l’air ambiant dû au vent :
h cve = 5,67 + 3,86 Vvent

• Coefficient d’échange par rayonnement entre le vitrage et le ciel :


(
h rve = ε v . σ ( Tciel + Tv ) . Tciel
2
)( T − Tciel )
+ Tv2 . v
( Tv − Tamb )
La température du ciel est donnée par :
Tciel = 0,0522 . ( Tamb )1,5
• Coefficient d’échange par convection entre le vitrage et l’absorbeur :
K
h cav = Nu . air
b
avec :
 1708   X + X  Y + Y
Nu = 1 + 1,44 .  1 − . .  
 Gr . Pr . cos β   2  
  2 

où :

X =1−
1708 sin (1,8 β )
Y=
( Gr . Pr . cos β)1 / 3
Gr . Pr . cos β 5830

• Coefficient d’échange par rayonnement entre le vitrage et l’absorbeur :

h rva =
( )(
σ Tp + Tv Tp2 + Tv2 )
1 1
+ −1
εp εv
SIPE : Etude et Réalisation d’un Capteur… 35

Le coefficient de pertes thermiques global vers l’avant du capteur sera donné par la relation suivante :
1
U av =
1 1
+
h cve + h rve h cav + h rav

Cette procédure de calcul, étant très complexe, Duffie et Beckman donnent une relation empirique formulée
par Klein, permettant le calcul de Uav pour des températures comprises entre 0° et 200°C, avec nue précision de
0.3 [W/m2°C]. Donc, Uav devient :
−1
 
)( )
 
= 
 1
+
1 
+
(
σ . Tp + Tamb . Tp2 + Tamb
2
U av 
 C  Tp − Tamb 
2 h cve  ( εp + 0,00591 . N . h cve )
−1
+S
 .  
 
 Tp  N + f  
2 . N + f − 0,1333 ε p −1
S = − N
εv
où : f = ( )
1 + 0,089 h cve − 0,1166 . h cve . ε p . ( 1 + 0,07866 . N )

(
C = 520 1 − 0,000051.β2 ) pour 0° ≤ β ≤ 70°
C = β = 70° pour 70° ≤ β ≤ 90°

2.1.2 Coefficient de pertes thermiques vers l’arrière du capteur


Ce coefficient est peu important que celui d’avant, vue que le capteur est très bien isolé à l’arrière.
L’expression évaluant ce coefficient est donnée par :
K
U arr = is
Eis
où : Kis : Coefficient de conductivité thermique de l’isolant, Eis : Epaisseur de l’isolant.

2.1.3 Coefficient de pertes thermiques latérales


La valeur de ce coefficient est inférieure à celle du coefficient de pertes arrière, vue que la surface latérale du
capteur est peu importante. Il est exprimé par :
K A
U arr = is . lat
Eis A c
où : Alat : Aire latérale du capteur ; Ac : Aire du capteur
Le coefficient de pertes thermiques global vers l’extérieur est la somme des trois coefficients précédents
déterminés :
U T = U av + U arr + U lat

2.2 Equations régissant le transfert de chaleur dans le capteur


Notre étude s’est portée sur le modèle de collecteur représenté par la figure ci-dessous :

Fig. 4 : Schéma du collecteur solaire à air


Afin d’établir les équations régissant le transfert d’énergie dans le capteur, on a procédé par élément :
a- Plaque absorbante : Cette équation exprime la relation entre la puissance reçue pas l’absorbeur et celle
dégagée par ce dernier, soit par convection entre l’air et l’absorbeur ou par rayonnement entre l’absorbeur et la
couche isolante :
( ) (
G I ( τ α )eff = U av Tp − Tamb + h1 Tp − Tmf + h r Tp − Ti ) ( )
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b- Fluide caloporteur : Le fluide caloporteur, qui est l’air emprunte une certaine énergie, lors de son passage dans
la gaine, par convection, d’une part de la plaque absorbante et d’autre part de l’isolant, ce qui lui permet
d’emmagasiner une chaleur dite: ‘utile’ Qu :
( )
h1 Tp − Tmf + h 2 ( Ti − Tmf ) = Q u = m Cp
dT
dx
c- Plaque postérieure : La plaque postérieure couverte par une couche d’isolant thermique, reçoit de l’énergie par
rayonnement provenant de la plaque absorbante. Cette énergie est transmise d’une part au fluide caloporteur, et
d’autre part à l’extérieur sous forme de pertes :
( )
h r Tp − Ti = U arr ( Ti − Tamb ) + h 2 ( Ti − Tmf )
Ainsi, on établit un système d’équations régissant le transfert de chaleur dans les élément du capteur. La
résolution de ce système, nous mène à l’équation différentielle suivante :
dT 1
m Cp =
U
[ G I T − U1 ( Tmf − Tamb )]
dx 1+ 1
h
1
avec : h = h1 +
1 1
+
h2 hr
h étant le coefficient de transfert de chaleur global dans le capteur. GIT représente le produit GI par (τ α)eff.
La résolution de l’équation différentielle précédente en utilisant les conditions aux limites :
x=0 T = T1 = TFE ; x = L T = T2 = TFS
G IT  G IT   x 
nous donne T = T1 + −  T1 − Tamb +  exp  − Fp . U1 . b .
U1 U1    m Cp 
 
L’équation nous permet de déterminer la température du fluide en tout point de la gaine de passage.
2.3 Rendements
2.3.1 Rendement instantané du capteur
L’analyse faite dans ce domaine par Hottel, Willier, Wortz et Bliss permet d’aboutir à une équation unique
donnant le rendement instantané du capteur que l’on définit par le rapport suivant :
Puissance thermique utile par m 2 de capteur
η =
Flux solaire incident sur le plan du capteur
Cette définition se traduit par l’expression :
Qu
η =
Ac . G I

2.3.2 Rendement journalier


C’est le rapport de la somme des énergies utiles prises au cours de la journée par la somme des
ensoleillements correspondants :

η =
∑ Qu
Ac ∑ G I

2.4 Détermination de la puissance utile


La puissance utile récupérée par le fluide est déterminée par l’équation suivante :
Qu = Ac [( τ α )eff G I − UT ( Tp − Tamb )]
2.5 Code de calcul
La simulation est faite en régime quasi-stationnaire avec un pas de temps de 15 minutes sur une période de
24 heures. Notre programme est constitué de deux subroutines; l’une pour le calcul du rendement optique et
l’autre pour le calcul des performances du capteur.

3. CONCEPTION ET EXPERIMENTATION
Le capteur solaire à air est constitué de plusieurs éléments de matériaux différents comme sur la figure
suivante. Le déroulement des expériences a été effectué au niveau de l’université de Blida (Algérie). Les
paramètres caractérisant le site sont : Latitude : 36°31 N. ; Longitude : 2°54 E. ; Altitude : 190 m ; Albédo : 0,2.
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Fig. 5: Coupe transversale du capteur à air


Les paramètres considérés dans notre expérience sont : Eclairement global - Température ambiante –
Température du fluide à l’entrée et à la sortie du capteur - Température de l’absorbeur - Température du vitrage.

4. RESULTATS ET DISCUSSIONS
Les résultats sont présentés sous forme de graphes en convection naturelle et forcée.
4.1 Convection naturelle
L’évolution de l’éclairement global pour la journée considérée présente une forme en cloche pour les deux
courbes, ce qui est conforme à la théorie. En prenant la courbe théorique comme référence, on constate que la
courbe expérimentale présente une irrégularité dans sa progression journalière, ceci est dû aux passages nuageux
qui ont pu interrompre le déroulement des expériences. L’écart noté entre les deux courbes n’a pu dépasser 10
%, et ce aux environs de midi où l’éclairement est maximal.
La courbe représentative de la puissance utile est portée en figure 7. La courbe théorique présente quelques
fluctuations, cela est dû au fait que le programme de calcul des performances du capteur nécessite l’admission de
la température ambiante comme donnée calculée, or cette dernière est une donnée mesurée. Pour la courbe
expérimentale, l’influence de la perturbation est plus explicite, vue que l’on a d’autres paramètres qui
interviennent comme la température de la plaque, température moyenne du fluide, température de sortie ainsi que
les pertes thermiques. On remarque aussi que la puissance utile mesurée est presque nulle en début de journée,
ceci s'explique du fait que le capteur est à la limite du seuil de production, il arrive juste à vaincre ses pertes.
La température de sortie (Fig. 8) a une relation directe avec la puissance utile ainsi que la température
ambiante par les fluctuations que représente la courbe théorique. La progression de la température de sortie
mesurée présente une diminution au voisinage de midi.
Pour le rendement instantané, il présente un écart moyen de 15 % entre le calculé et le mesuré au voisinage
de midi. Pour le reste de la journée, la valeur du rendement calculé varie entre 31 et 43 alors que le rendement
mesuré débute à 18 % pour atteindre 14 % en fin de journée.

Fig. 6: Variation du rayonnement instantané Fig. 7: Variation de la puissance utile

Fig. 8: Variation de la température de sortie du fluide Fig. 9: Variation du rendement instantané


38 D. Semmar et al.

4.2 Convection forcée


L’évolution de l’éclairement global pour le flux calculé présente une allure régulière et atteint une valeur
maximale de 943 W/m2, alors que le rayonnement mesuré présente une allure similaire, sauf qu’on note une
déformation dû à un passage nuageux. La puissance utile présente un dépassement de la courbe représentative
des résultats mesurés sur celle des résultats calculés dû au débit d’air convoyé par les ventilateurs à l’entrée du
capteur qui n’est pas uniforme.

Fig. 10: Variation du rayonnement instantané Fig. 11: Variation de la puissance utile

Fig. 12: Variation de la température de sortie du fluide Fig. 13: Variation du rendement instantané
La progression de la température de sortie présente un écart ne dépassent pas 6 °C comme valeur maximale.
Le rendement instantané calculé varie entre 40 et 50 %, alors que le mesuré varie entre 38 et 45 %. On note
quelques perturbations dans l’allure de la courbe mesurée dû aux paramètres extérieurs.

5. CONCLUSION
L’objectif de ce travail est l’étude et la conception d’un capteur solaire à air à partir d’un modèle sélectionné
parmi d’autres. Une étude comparative entre les paramètres de performance caractérisant le modèle théorique et
ceux présentés par le banc d’essai a été effectuée. On a noté aussi que dans le cas de la convection forcée, on a
un flux d’air chaud important en débits de la température de sortie qui est inférieur à celle obtenue pour la
convection naturelle où le flux est intérieur au premier. Ce qu’on a pu conclure en fin de cette démarche, que
l’écart enregistré entre les résultats calculés et ceux mesurés n’est pas considérable.

NOMENCLATURE
Ac : Aire du capteur Gr : Nombre de Grashof
Alat : Aire latérale du capteur GI : Rayonnement global
b : Epaisseur de la lame d’air séparant la vitre Kisi : Coefficient de conductivité thermique de
de la plaque absorbante l’isolant
Cp : Chaleur spécifique de l’air Pr : Nombre de Prandtl
Eis : Epaisseur de l’isolant σ : Constante de Spefan-Boltzman
N : Nombre de vitres ε : Emissivité de la vitre
Vvent : Vitesse du vent β : Angle d’inclinaison du capteur dépendant du site

REFERENCES
[1] Howell, Bannerot and Viliet, ‘Solar Energy Systems, Analysis and Design’, Mc. Graw Hill, 1982.
[2] A.A. Sfeir et Gharracino, ‘Ingénierie des Systèmes Solaires – Application à l’Habitat’, Tech. et Nomenclature’, 1981.
[3] Z.B. Maroulis and G.D. Saravacos, ‘Solar Heating of Air for Draying Agricultural Products’, Dpt of Chemical Engineering, National
Technical University, Gr 10682, Athens, Greece.
[4] P. Bernard, J.Y. Champagne, S. El Golli et P.H. Bournot, ‘Analyse Fondamentale des Ecoulements Intervenant dans le Fonctionnement
d’un Isolateur Plan à Air’, JITH, 1983, pp. 867-875.
[5] J.M. Chasseriaux, ‘Convection Thermique et Rayonnement Solaire’, Ed. Dunod, 1984.
[6] D. Semmar, ‘Etude Numérique des Ecoulements Laminaires dans les Cavités Bidimensionnelles – Approche au Cas du Capteur Solaire à
Air’, JITH, 1995, pp. 712-721.

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