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Université de TOURS - L2S3 - ALGÈBRE - 2005/2006

Chapitre 3 : Matrices d’une application linéaire - Changement


de bases - Déterminants

Dans tout le chapitre, E et F sont deux K-espaces vectoriels respectivement de dimension m et n.


BE = (e1 , ..., em ) est une base de E et BF = (f1 , ..., fn ) est une base de F . u appartient à L(E, F ).

1 Matrices représentatives d’une application linéaire


Définition et Théorème 1 La matrice (représentative) de u dans les bases BE et BF est la matrice
A ∈ Mn,m (K) déterminée par
n
X
∀j ∈ {1, ..., m}, u(ej ) = ai,j fi .
i=1

Cette matrice est unique et ne dépend que de u, BE et BF . On dira que BE est la base (de l’espace) de
départ et BF la base (de l’espace) d’arrivée.

Preuve : u est entièrement déterminée par les u(ei ) qui sont eux-même entièrement déterminés par leurs
composantes dans la base BF . La matrice A existe et est unique. 

Remarque : La j ième colonne de A est constituée des coordonnées de l’image du j ième vecteur
de la base de départ dans la base d’arrivée.

Remarque : Quand E = F , on prendra très souvent la même base au départ et à l’arrivée.

Exemples :

1) E = F = R2 , (e1 , e2 ) la base canonique de R2 . Soit u ∈L(R2 ) telle


 que u(e1 ) = 2e1 + e2 et u(e2 ) =
2 −1
−e1 + 3e2 . La matrice de u dans la base canonique est A = .
1 3
2) E = R2 , F = R3 , (e1 , e2 ) la base canonique de R2 , (f1 , f2 , f3 ) la base canonique de R3 . Soit u ∈ L(R2 , R3 )
u(e1 ) = f1 +2f2 − 3f3 et u(e2 ) = −2f2 + 4f3 . La matrice de u dans les bases (e1 , e2 ) et (f1 , f2 , f3 )
telle que
1 0
est A =  2 −2 .
−3 4
3) E = K3 [X], F = K2 [X], (1, X, X 2 , X 3 ) la base canonique de K3 [X], (1, X, X 2 ) la base canonique de
0 2 3
K2 [X]. Soit u ∈ L(K
 3 [X], K2 [X])telle que u(P ) = P . La matrice de u dans les bases (1, X, X , X ) et
0 1 0 0
2
(1, X, X ) est A =  0 0 2 0 .
0 0 0 3
4) E = F alors la matrice de IdE dans une base quelconque de E est In à condition de choisir la même
base au départ et à l’arrivée.

5) Attention, la notion dépend des bases considérées. On reprend l’exemple 1 mais on choisit la base
(e1 + e2 , e1 − e2 ).  
5 3
u(e1 + e2 ) = u(e1 ) + u(e2 ) = 2e1 + e2 − e1 + 3e2 = e1 + 4e2 = .(e1 + e2 ) + − .(e1 − e2 ).
2 2

1
 
1 5
u(e1 − e2 ) = u(e1 ) − u(e2 ) = 2e1 + e2 + e1 − 3e2 = 3e1 − 2e2 = .(e1 + e2 ) + .(e1 − e2 ).
  2 2
5 3
 2 −2 
La matrice de u dans (e1 + e2 , e1 − e2 ) est B =  .
 
 1 5 
2 2
Les matrices représentatives de u dépendent des bases considérées. Il faut toujours préciser les bases à
l’arrivée comme au départ.

6) Soient F1 et F2 deux sous-espaces vectoriels supplémentaires dans E. On note p1 = dim F1 et p2 =


dim F2 . Soit BF1 une base de F1 et BF2 une base de F2 . La réunion des deux bases BF1 ∪ BF1 est une base
de E.  
1
..

 . 

1
 
La projection p sur F1 parallèlement à F2 a pour matrice P =  .
 
 0 

 . ..


0
 
1
..

 . 

1
 
La symétrie s par rapport à F1 parallèlement à F2 a pour matrice S =  .
 
 −1 

 . ..


−1
On remarque s = 2p − IdE et que S = 2P − In .
Théorème 2 Utilisation de la notion de matrice.
Soit A la matrice de u dans les bases BE et BF . On considère x ∈ E de coordonnées (x1 , ..., xm ) dans BE ,
m
X n
X
c’est-à-dire, x = xj ej . On pose y = u(x) de coordonnées (y1 , ..., yn ) dans BF , c’est-à-dire, y = yi fi .
j=1 i=1
   
m x 1 y1
ai,j xj , c’est-à-dire, en posant X =  ...  et Y =  .. , Y = AX.
X
On a ∀i ∈ {1, ..., n}, yi =
  
. 
j=1 xm yn
n
X
Preuve : photocopiée. La définition de la matrice A est ∀j ∈ {1, ..., m}, u(ej ) = ai,j fi . Donc
! ! ! i=1
m
X Xm m
X X n n
X Xm
u(x) = u xj ej = xj u(ej ) = xj ai,j fi = ai,j xj fi d’où
j=1 j=1 j=1 i=1 i=1 j=1
m
X
∀i ∈ {1, ..., n}, yi = ai,j xj ce qui s’écrit matriciellement Y = AX. 
j=1

(Remarque : Si on connaı̂t la matrice de u dans les bases BE et BF , on peut calculer l’image d’un vecteur
x par u. La décomposition de x sur la base BE donne le vecteur colonne X. Par le produit matriciel
Y = AX, on obtient la décomposition de u(x) sur la base BF .)
Théorème 3 Les bases BE et BF étant fixées, l’application ψ : L(E, F ) → Mn,m (K), u 7→ A avec A la
matrice de u dans les bases BE et BF est un isomorphisme d’espaces vectoriels.
Preuve : photocopiée. Si A est la matrice de u (dans les bases BE et BF ) et B la matrice de v, A + B
est la matrice de u + v et pour tout λ ∈ K, λA est la matrice de λu. Cela provient de la définition des

2
coefficients. ψ est donc linéaire. Une application linéaire est déterminée de manière unique par la donnée
des images des vecteurs d’une base de départ. Il y a donc une et une application linéaire. 

Remarque : à une matrice A, on associe souvent son application linéaire de Kp dans Kn . Attention,
malgré l’isomorphisme, une matrice n’est pas une application linéaire. Par ailleurs, on retrouve le fait que
dim L(E, F ) = nm.
Fin du cours du 24/10
——————————————————————————————————
Début du cours du 04/11
Proposition 4 Soit u ∈ L(E, F ) avec dimE = m et dim F = n. Il existe
 une base de E et une base de
1 0 ... 0 0 ... 0
.. .. ..
 0 1 . . .
 

 . . .. .. .. 
 .. .. . . . 
 
F dans lesquelles la matrice de u est Jr = 
 0 0 ... 1 0 ... 0  avec r = rg u.

 0 0 ... 0 0 ... 0 
 
 . . .. .. ..
 .. ..

. . . 
0 0 ... 0 0 ... 0
Preuve : photocopiée. Soit G un supplément de Ker u dans E. On a E = G ⊕ Ker u. Soient BG une base
de G et BKer une base du noyau. La réunion des deux bases forment une base de E. D’après le théorème
du rang, u|G est un isomorphisme de G sur u(G) ⊂ F . On prend comme base de u(G) l’image des vecteurs
de la base BG que l’on complète en une base de F par le théorème de la base incomplète. Jr est bien la
matrice de u dans les bases BG ∪ BKer et u(BG ) ∪ BH avec H un supplémentaire de u(G) dans F . Il y a
r nombres 1 dans la matrice Jr correspondant au rang de u. 

Exemple : E = K3 [X], F = K2 [X], u ∈ L(K3 [X], K2 [X]) telle que u(P ) = P 0 . Ker u = Vect 1.
Vect(X, X 2 , X 3 ) est un supplémentaire du noyau dans E = K3 [X]. u(X) = 1, u(X 2 ) = 2X et u(X 3 ) = 3X 2
donc (1, 2X, 3X 2 ) forment une base de u(Vect(X, X 2 , X 3 )) = F car les deuxespaces ont lamême dimen-
1 0 0 0
sion. La matrice de u dans les bases (X, X 2 , X 3 , 1) et (1, 2X, 3X 2 ) est A =  0 1 0 0 .
0 0 1 0
Théorème 5 Composition d’applications linéaires et produit de matrices.
Soient E, F et G trois K-espaces vectoriels de dimension respectivement m, n et p munis des bases BE ,
BF et BG . Soient u ∈ L(E, F ) et v ∈ L(F, G) de matrices respectivement A dans les bases BE , BF et B
dans les bases BF , BG . Alors C = BA est la matrice de v ◦ u ∈ L(E, G) dans les bases BE et BG .
Preuve : photocopiée. BE = (e1 , ..., em ), BF = (f1 , ..., fm ) et BG = (g !1 , .., gpp ). Soit 1 ≤! j ≤ m. On a
n n n p n
X X X X X X
u(ej ) = ai,j fi donc (v ◦ u)(ej ) = ai,j v(fi ) = ai,j bk,i gk = bk,i ai,j gk . Or pour
i=1 i=1 i=1 k=1 k=1 i=1
n p
X X
1 ≤ k ≤ p, ck,j = bk,i ai,j d’où (v ◦ u)(ej ) = ck,j gk . C = BA est la matrice de v ◦ u dans les bases
i=1 k=1
BE et BG . 

Exemple : E = F = R2 , (e1 , e2 ) la base canonique de R2 . Soit u ∈ L(R2 ) telle que u(e1 ) = 2e1 + e2 et
 
2 −1
u(e2 ) = −e1 + 3e2 . La matrice de u dans la base canonique est A = .
1 3
G = R3 , (g1 , g2 , g3 ) la base canonique de R3 . Soit v ∈ L(R2 , R3 ) telle que v(e 2g2 − 3g3 et
1 ) = g1 +
1 0
v(e2 ) = −2g2 + 4g3 . La matrice de v dans les bases (e1 , e2 ) et (g1 , g2 , g3 ) est B =  2 −2 . Alors BA
−3 4

3
est la matrice de v ◦ u 
dans les bases
 (e1 , e2 ) et (g1 , g2 , g3 ).
2 −1
Vérification : BA =  2 −8 , (v ◦ u)(e1 ) = v(2e1 + e2 ) = 2v(e1 ) + v(e2 ) = 2g1 + 2g2 − 2g3 et
−2 15
(v ◦ u)(e2 ) = v(−e1 + 3e2 ) = −v(e1 ) + 3v(e2 ) = −g1 − 8g2 + 15g3 .
Proposition 6 Si u est un isomorphisme d’espaces vectoriels de E dans F et si A est la matrice de u
dans les bases BE et BF alors A−1 est la matrice de u−1 dans les bases BF et BE .
Preuve : photocopiée. uu−1 = IdE donc si B est la matrice de u−1 dans les bases BF et BE , AB = In avec
n = dim E = dim F donc B = A−1 . 
Proposition 7 Soient E un K-espace vectoriel de dimension n et BE une base de E. L’application
ψ : L(E) → Mn (K), u 7→ A avec A la matrice de u dans la base BE est un isomorphisme d’anneaux.
(Même base au départ et à l’arrivée)
(Preuve : On sait déjà que ψ est un isomorphisme de groupes. ψ(IdE ) = In et ∀(u, v) ∈ L(E)2 , ψ(v ◦ u) =
ψ(u)ψ(v) d’après le théorème précédent donc ψ est un isomorphisme d’anneaux. )

2 Changement de bases
Définition et Théorème 8 Soit BE = (e1 , ..., em ) et BE0 = (e01 , ..., e0m ) deux bases d’un K-espace vectoriel
E de dimension m. On appelle matrice de passage de la base BE à la base BE0 la matrice P ∈ Mm (K)
dont la j ième colonne est formée des coordonnées dans BE du j ième vecteur de BE0 , c’est-à-dire,
que pour 1 ≤ i, j ≤ m, Pi,j est la iième coordonnée du vecteur e0j dans la base BE , c’est-à-dire,
Xm
0
∀j ∈ {1, ..., m}, ej = Pi,j ei .
i=1
Soit v ∈ L(E) tel que v(ei ) = e0i pour tout 1 ≤ i ≤ m. La matrice P est la matrice de v dans BE .
v ∈ GL(E) donc P ∈ GLm (K).
BE s’appelle l’ancienne base et BE0 la nouvelle base.
Exemple : B = (e1 , e2 ) est la base canonique de R2 . On pose e01 = e1 + e2 , e02 = e1 − e2 . La matrice de
 
0 0 0 1 1
changement de base de B à B = (e1 , e2 ) est P = .
1 −1  
1 1
e0 + e02 e0 − e02
Par calcul, e1 = 1 et e2 = 1 donc la matrice de passage de B 0 à B est  21 2 
1 =P .
−1

2 2 −
2 2
Proposition 9 Avec les notations précédentes, P −1 est la matrice de passage de BE0 à BE .
(Preuve : Soit v ∈ L(E) tel que v(ei ) = e0i pour tout 1 ≤ i ≤ m. La matrice P est la matrice de v dans
BE . v est un automorphisme de E. v −1 a pour matrice dans BE0 la matrice de passage de BE0 à BE . On
utilise la proposition 6. )
Proposition 10 E étant de dimension m, soit x ∈ E de coordonnées x1 , ..., xm dans BE et de coordonnées
x01 , ...,x0m dans 0
 BE . On 
pose lesvecteurs colonnes :
x1 x01
X =  ...  et X 0 =  ... . Alors X = P X 0 .
   
xm x0m
m m m
! m m
! m
X X X X X X
0 0 0 0
Preuve : (à savoir) x = xj ej = xj Pi,j ei = Pi,j xj ei d’où xi = Pi,j x0j pour
j=1 j=1 i=1 i=1 j=1 j=1
1 ≤ i ≤ m et X = P X 0 . 

4
Théorème 11 E étant muni des bases BE et BE0 et F des bases BF et BF0 , soit u ∈ L(E, F ) de matrice
A dans les bases BE et BF . Soient P la matrice de passage de BE à BE0 et Q la matrice de passage de BF
à BF0 . Si A0 est la matrice de u dans les bases BE0 et BF0 alors A0 = Q−1 AP .
Preuve : (à savoir) Soit x ∈ E de vecteurs colonnes (coordonnées) X et X 0 respectivement dans BE et BE0 .
On pose y = u(x). Soient Y et Y 0 les vecteurs colonnes (des coordonnées) de y respectivement dans BF et
BF0 .
Alors Y = AX et Y 0 = A0 X 0 . Donc Y = QY 0 = QA0 X 0 = QA0 P −1 P X 0 = QA0 P −1 X. Or Y = AX.
Finalement, A = QA0 P −1 et A0 = Q−1 AP . 

Exemple non traité : Trouver la matrice dans la base canonique de R2 de la symétrie s par rapport à
y = x parallèlement à y = −x. On cherche d’abord la matrice de la projection p sur y = x parallèlement
à y = −x.
Soit B = (e1 , e2 ) la base canonique de R2 et B 0 = (e01 , e02 ) la base e01 = e1 + e2 et e02 = e1 − e2 .
La droite y = x est Vect e01 et la droite
 y =−x est Vect e2 .
0

1 0
La matrice de p dans B 0 est A0 = car p(e01 ) = e01 et p(e02 ) = 0. La matrice de passage P de B à
  0 0  
0 1 1 0 −1 1 1 1
B est P = . Donc la matrice de passage de B à B est P = . La matrice de p
1 −1      2  1 −1
0 −1 1 1 1 1 0 1 1 1 1 1
dans B est A = P A P = = .
2 1 −1 0 0  1 −1 2 1 1  
1 1 1 0 0 1
s = 2p − IdR2 donc la matrice de s dans B est B = − = .
1 1 0 1 1 0

3 Rang d’une matrice


Définition 12 La matrice A dans la base B d’un espace vectoriel E de dimension n d’une famille de m
vecteurs (x1 , ..., xm ) est la matrice de Mn,m (K) dont la j ième colonne est composée des composantes de xj
Xn
dans la base B pour 1 ≤ j ≤ m, c’est-à-dire, ∀j ∈ {1, ..., m}, xj = ai,j ei .
i=1

Définition 13 Soit A ∈ Mn,m (K). Le rang de A noté rg A est le rang des vecteurs colonnes de Kn .
 
1 1 0
Exemple : A = . rg A = rg (e1 + e2 , e1 − e2 , 2e2 ) où (e1 , e2 ) est la base canonique de R2 donc
1 −1 2
rg A = 2.
Proposition 14
1) Soient A ∈ Mn,m (K) et u ∈ L(Km , Kn ) l’endomorphisme associé à A dans les bases canoniques de Km
et de Kn . Alors rg A = rg u.
2) Plus généralement, si E et F sont deux espaces vectoriels de dimension finie respectivement de bases
BE et BF , le rang d’une application linéaire u ∈ L(E, F ) est égal au rang de sa matrice dans les bases BE
et BF .
3) Soit E un espace vectoriel de dimension n et (x1 , ..., xn ) une famille de n vecteurs de E. La famille
(x1 , ..., xn ) est une base de E si et seulement si la matrice de (x1 , ..., xn ) dans une base quelconque de E
est une matrice inversible.
(Preuve : 1) rg u = dim(Im u) = rg (u(e1 ), ..., u(em )) où (e1 , ..., em ) est la base canonique de Km .
2) Tout espace vectoriel de dimension p est isomorphe à Kp .
3) Soit B = (e1 , ..., en ) une base de E et u l’endomorphisme de E de matrice A la matrice de (x1 , ..., xn )
dans B. On a u(ei ) = xi par définition donc u est inversible si et seulement si (x1 , ..., xn ) est une base de
E ce qui équivaut à A inversible. )

5
Proposition 15 Une matrice A ∈ Mn,m (K) est de rang r si et seulement s’il existe P ∈ GLm (K) et
Q ∈ GLn (K) tels que A = QJr P .
Preuve : découle de la proposition précédente et de la proposition 4. 
Proposition 16 Une matrice et sa transposée ont le même rang.
Preuve : Soit r = rg A. A = QJr P donc t A = tP tJrt Q. t A et t Jr sont deux matrices représentant le même
endomorphisme mais dans des bases différentes. Elles ont donc le même rang. Or rg Jr = rg tJr donc
rg A = rg tA
Proposition 17 L’application transposition est un isomorphisme d’espaces vectoriels de Mn,m (K) sur
Mm,n (K).
Preuve : ∀A ∈ Mn,m (K), t (t A) = A et ∀B ∈ Mm,n (K), t (t B) = B donc A 7→ tA est bijective d’application
réciproque B 7→ tB. 
Fin du cours du 04/11
——————————————————————————————————
Début du cours du 07/11

4 Applications multilinéaires
Définition 18
Soit E1 , ..., Ep p K-espaces vectoriels et F un K-espace vectoriel. Une application f : E1 × ... × Ep
est dite p-linéaire (bilinéaire si p = 2, trilinéaire si p = 3) si pour tout entier j ∈ {1, ..., p} et pour
tout (a1 , ..., aj−1 , aj+1 , ..., ap ) ∈ E1 × ... × Ej−1 × Ej+1 × ... × Ep , l’application de Ej dans F définie par
xj 7→ f (a1 , ..., aj−1 , xj , aj+1 , ..., ap ) est une application linéaire.
Si F = K, on dit que f est une forme p-linéaire.
(Si on gèle toutes les composantes sauf j, c’est linéaire)
Exemples :
1) R2 → R, (x, y) 7→ xy est une forme bilinéaire.
2) Mn (K)p → Mn (K), (A1 , ..., Ap ) 7→ A1 ...Ap est une application p-linéaire.
3) Le produit scalaire sur R2 est bilinéaire.
4) Le déterminant de p vecteurs colonnes de Kp est p-linéaire.
Théorème 19 L’ensemble des applications p-linéaires de E1 × ... × Ep dans F est un sous-espace vectoriel
de l’espace vectoriel des applications de E1 × ... × Ep dans F . On le note Lp (E1 × ... × Ep , F ).
Remarque : L(E, F ) = L1 (E, F ).

Convention : si E1 = ... = Ep = E, on note Lp (E, F ) au lieu de Lp (E p , F ).


Définition 20 Une application p-linéaire f sur E à valeurs dans F est dite :
i) symétrique si ∀σ ∈ Sp , ∀(x1 , ..., xp ) ∈ E p , f (xσ(1) , ..., xσ(p) ) = f (x1 , ..., xp ),
ii) antisymétrique si ∀σ ∈ Sp , ∀(x1 , ..., xp ) ∈ E p , f (xσ(1) , ..., xσ(p) ) = ε(σ)f (x1 , ..., xp ),
iii) alternée si pour tout (x1 , ..., xp ) ∈ E p et pour tout (i, j) ∈ {1, ..., p} avec i 6= j, on a :
xi = xj =⇒ f (x1 , ..., xp ) = 0.
(S’il y a deux vecteurs égaux, c’est nul)
(Reprendre les exemples précédents)
Théorème 21 Soit f ∈ Lp (E, F ).
i) Si f est alternée alors elle est antisymétrique.
ii) Si K = R ou C et si f est antisymétrique alors f est alternée.
(Réciproque vraie si K = R ou K = C)

6
Théorème 22 L’ensemble des applications p-linéaires symétriques (resp. alternées) sur E à valeurs dans
F est un sous-espace vectoriel de Lp (E, F ). On le note Sp (E, F ) (resp. Ap (E, F )) et même Sp (E) (resp.
Ap (E)) dans le cas de formes, c’est-à-dire, si F = K.

Dans toute la suite du paragraphe, F = K.

Théorème 23 Déterminant dans une base B


Soit E un K-espace vectoriel de dimension n et B = (e1 , ..., en ) une base de E. Alors :
i) Pour tout entier p tel que p > n, la seule forme p-linéaire alternée sur E est l’application nulle de E p
dans K;
ii) Il existe une et une seule forme n-linéaire alternée sur E prenant la valeurs 1 sur (e1 , ..., en ). On
l’appelle déterminant dans la base B et on la note detB . L’espace vectoriel An (E) admet pour base (detB )
donc tout f ∈ An (E) s’écrit f = λf detB avec λf = f (e1 , ..., en ).
iii) Le scalaire detB (x1 , ..., xn ) est dit déterminant dans la base B des vecteurs (x1 , ..., xn ). On a
X Yn X n
Y n
X
detB (x1 , ..., xn ) = ε(σ) αj,σ(j) = ε(σ) ασ(j),j où ∀k ∈ {1, ..., n}, xk = αj,k ej .
σ∈Sn j=1 σ∈Sn j=1 j=1
(αj,k est la j ième composante de xk )

Définition et Théorème 24 Déterminant d’un endomorphisme


Soit u ∈ L(E) avec E un K-espace vectoriel de dimension n. Il existe un et un seul scalaire appelé
déterminant de u et noté det u tel que pour toute forme f ∈ An (E), on ait :
∀(x1 , ..., xn ) ∈ E n , f (u(x1 ), ..., u(xn )) = (det u)f (x1 , ..., xn ).
De plus, det u = detB (u(e1 ), ..., u(en )) pour toute base B = (e1 , ..., en ).

Proposition 25 ∀(u, v) ∈ L(E)2 , det(v ◦ u) = (det v)(det u).

Preuve : det(v ◦ u) = detB ((v ◦ u)(e1 ), ..., (v ◦ u)(en )) = (det v)detB (u(e1 ), ..., u(en )) = (det v)(det u) en
prenant f = detB . 

Théorème 26 Soit u ∈ L(E) avec E un K-espace vectoriel de dimension n. Le déterminant de u est égal
au déterminant de la matrice qui représente u dans une base B arbitrairement choisie de E.

Corollaire 27 ∀(A, B) ∈ Mn (K), det AB = (det A)(det B).

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