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Comptes rendus des séances de

l'Académie des Inscriptions et


Belles-Lettres

La chute de Phaëton (mosaïque trouvée à Sens)


Antoine Héron de Villefosse

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Héron de Villefosse Antoine. La chute de Phaëton (mosaïque trouvée à Sens). In: Comptes rendus des séances de l'Académie
des Inscriptions et Belles-Lettres, 54ᵉ année, N. 7, 1910. pp. 613-622;

doi : https://doi.org/10.3406/crai.1910.72705

https://www.persee.fr/doc/crai_0065-0536_1910_num_54_7_72705

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LA CHUTE DE PHAËTON 613
emporium de quelque importance de s'y développer librement^
II fallut gagner sur la mer les terrains nécessaires à la
construction, au cœur même de la cité, d'édifices publics aussi
considérables que les Thermes d'Antonin.
Le premier port de Garthage fut donc comblé, dès le début de
l'occupation romaine, par l'action combinée de la mer et des
hommes. Mais on pourrait en retrouver les traces et en
déterminer le plan. II subsiste encore aujourd'hui d'importants vestiges
non seulement du môle extérieur que signale M. le docteur
Carton, à quelques mètres en avant du rivage actuel, mais aussi
d'un quai intérieur, construit en blocs de tuf énormes,
admirablement appareillés, et dont M. Gauclder a pu reconnaître
l'amorce, à 4 mètres sous terre, dans le jardin du palais beylical
de Dermech, au cours des travaux d'aménagement exécutés à
cet endroit de 1898 à 1900 *.

COMMUNICATIONS

LA CHUTE DE PHAËTON (MOSAÏQUE TROUVÉE A SENS).


NOTE DE M. HÉRON DE V1LLEFOSSE, MEMBRE DE L'ACADÉMIE.

Dans les premiers jours du mois de mars dernier, à Sens,


dans un jardin dépendant d'une habitation située rue du
Général-Dubois, n° 35, on constatait l'existence, à 0m90 de
profondeur au-dessous du sol actuel, d'une mosaïque à fond
blanc ornée de combinaisons géométriques en cubes noirs
et rougeâtres.
A vrai dire, la découverte remontait déjà à quelques
années. En effet, ce pavage antique avait été entrevu en
1893 par l'entrepreneur Varache, chargé d'établir une fosse
d'aisances en cet endroit. Pour faire sa fouille, il avait été

1. Sur ces travaux, cf. Gauckler, Bull. arch. du Comité, 1899, p. clx,
et Marche du Service des antiquités en 1899, p. 11.
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obligé de briser un morceau de mosaïque blanche ; en outre,


en creusant un puisard, il avait trouvé un tuyau de plomb
de l'époque romaine. M. Julliot recueillit ces documents et
les déposa au Musée de Sens après les avoir communiqués
à la Société archéologique le 1er mai 1893 *.
Le marquis de Traynel, ayant entendu l'entrepreneur
Varache parler de cette trouvaille, se fit conduire par lui sur
le terrain et, après entente avec la propriétaire, Mme veuve
Renard, obtint l'autorisation d'y pratiquer des fouilles
régulières. Il se mit à l'œuvre le 4 ou le 5 mars 1910;
immédiatement il commença des recherches pour son
propre compte. Au-dessous des terres rapportées qui
constituaient le sol du jardin, il rencontra d'abord des poteries
calcinées, puis une couche de cendres mélangées de charbons.
Ces débris, restes d'un violent incendie, formaient une
épaisseur de 0 m 40 entre la mosaïque et la couche supérieure
du sol. On y recueillit des fragments d'enduits peints
imitant le porphyre ou la brèche, ainsi qu'une monnaie fruste
dont on ne pouvait tirer aucune indication. Le niveau actuel
de l'eau se trouve à 0 m 35 au-dessous de la mosaïque ; il suit
les mouvements de la couche d'irrigation du ruisseau du
Gravereau qui a été artificiellement relevé à une époque
reculée. Des sondages pratiqués aux points où la mosaïque
était effondrée ramenèrent des tuyaux de poterie brisés et
des pierres portant les traces d'un feu violent2.
On ne tarda pas à découvrir plusieurs fragments d'une

1. Le fragment de mosaïque est sans doute celui qui est signalé par
Blanchet dans l'Inventaire des mosaïques de la Gaule, sous le n° 892. —
Dans la même rue du Général-Dubois, vers 1807, à la tannerie Démange,
le contremaître Morel a ramené de nombreux cubes de mosaïque en
creusant un trou. M. le marquis de Traynel a bien voulu m'apprendre qu'entre
1845 et 1850 un entrepreneur nommé Laroche, encore vivant, avait constaté,
l'existence d'une mosaïque, avec personnages et feuillages, dans les
immeubles situés entré la rue des Trois-Croissants et le Grand séminaire
(partie est du Grand séminaire).
2. Je dois ces renseignements à l'obligeance de M. Joseph Perrin,
président de la Société archéologique de Sens.
LA CHUTE DE PHAËTON 615
bordure et quelques panneaux secondaires d'une mosaïque
de grandes dimensions. Le 7 mars, le motif central fut
dégagé ; il remplissait un médaillon mesurant lm 65 de
diamètre, entouré d'une bande rouge sur laquelle courait un
alignement de perles blanches en forme d'olives. Ce
médaillon était inscrit lui-même dans un encadrement carré
mesurant 1 m 70 de côté, de sorte que la combinaison de la
bande circulaire bordant le médaillon avec l'encadrement
carré laissait un espace libre dans chacun des angles
intérieurs de l'encadrement : là, sur un fond blanc, se
détachaient les têtes des Quatre Saisons ; celle du Printemps
était détruite. Malheureusement la scène représentée dans
le médaillon était fort dégradée : la partie supérieure
n'existait plus ; dans le milieu et dans la partie inférieure, on
distinguait encore cinq chevaux dont l'un portait un
cavalier. Des arrangements géométriques variés entouraient ce
motif central et constituaient le reste du pavage qui
s'étendait sur un espace de cent mètres carrés environ. La
bordure de l'ensemble se composait de rinceaux de lierre d'une
véritable élégance.
En somme, la mosaïque se trouvait dans un état
lamentable. Détruite ou gravement atteinte par le feu sur
plusieurs points, gonflée sur d'autres points par l'humidité
souterraine, elle apparaissait tantôt avec des bosses, tantôt
avec des creux, soulevée ou enfoncée ; les divers
mouvements du sol avaient désagrégé les cubes et causé de tels
ravages que le visiteur, en face de ce pavage disloqué, pouvait
croire à un désastre produit par. un tremblement de terre.
Il est rare de retrouver des mosaïques antiques dans un
état parfait de conservation. Aussi n'y a-t-il pas lieu d'être
surpris des dégradations que le temps et les hommes ont fait
subir à la nouvelle mosaïque. Grâce au zèle et à la vigilance
de la Société archéologique de Sens, elle a été enlevée du
jardin de Mme veuve Renard. Par les soins de M. de Vecchis,
l'habile artiste qui a restauré pour le Musée du Louvre la
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grande mosaïque trouvée par Renan à Kabr-Hiram près de
Tyr et la mosaïque des Travaux de l'année provenant de
Saint-Romain-en-Galle (Rhône), elle a été transportée dans
les ateliers de M. René Martin, à Saint-Denis, où elle reçoit
en ce moment les soins que réclame son état. Les morceaux
les mieux conservés seront consolidés et encadrés pour être
mis sous les yeux du public au Musée de Sens; un plan
d'ensemble permettra aux visiteurs de comprendre la disposition
du pavage antique et de reconnaître la place de chacun de
cesmorceaux. Ce qui subsiste du motif central est aujourd'hui
complètement nettoyé, il est devenu facile de l'étudier.
Comme j'ai eu la bonne fortune de l'examiner à loisir la
semaine dernière, je suis heureux de pouvoir en dire quelques
mots à l'Académie, le sujet du tableau présentant un réel
intérêt. A ma connaissance, ce sujet n'a encore été
rencontré sur aucune mosaïque ; je puis du moins l'affirmer pour
la Gaule.
Une description minutieuse de ce qu'on peut encore voir
sur le médaillon central est avant tout nécessaire. J'ai dit
plus haut qu'on y reconnaissait cinq chevaux dont un monté
par un cavalier. Déjà notre confrère M. Maurice Prou, dans
son rapport oral sur cette découverte au Comité
d'archéologie, le 14 mars dernier1, avait fait la même constatation.
Mais quel était le rôle de ces chevaux ? quel était celui du
cavalier? quel était en un mot le sujet du tableau? C'est ce
qu'il s'agit de déterminer avec précision et, pour y parvenir,
il faut entrer dans quelques détails supplémentaires. Je
répète que la moitié supérieure du tableau manque.
Dans le bas, au premier plan, apparaît un cavalier vu de
profil. 11 semble occuper la place principale de la
composition ; son cheval se dresse sur ses pieds de derrière dans
un mouvement très animé. La tête du cheval et le haut du
corps du cavalier sont détruits ; il reste cependant le bras

1. Bulletin archéologique du Comité, 1910, p. lu.


LA CHUTE DE PHAETON 617
droit dû cavalier avec sa main dans laquelle on remarque
le manche d'un fouet muni de deux lanières de cuir ; cette
même main vient de saisir les rênes d'un des quatre chevaux
non montés. Ce détail a une importance particulière. Ces
quatre chevaux sont emportés ; ils sont représentés au galop,
marchant à une allure vertigineuse, la crinière en désordre
et soulevée par le vent ; la rapidité de la course a dispersé
leurs crins sur le cou ; leurs naseaux sont en feu, les yeux
écarquillés par la frayeur, la langue pendante ; deux
s'avancent à droite du cavalier et deux à gauche. Ils
arrivent de front sur le spectateur, tandis que le cavalier placé
en travers paraît être venu là pour les arrêter ou leur barrer
la route. Il ne reste plus que la partie antérieure des corps
de ces quatre chevaux avec les jambes de devant. Les deux
chevaux les plus rapprochés du cavalier ont la tête baissée,
les deux chevaux de l'arrière-plan avaient la tête levée ; mais
l'une des deux têtes est complètement détruite, l'autre ne
subsiste qu'en partie. Cette dernière est celle du cheval
dont le cavalier vient de saisir la bride et qui, sous
l'impression de cette vigoureuse attaque, se cabre et relevé la tête.
Tels sont les grands traits de ce tableau mutilé. Il est
habilement composé ; il est formé de petits cubes de marbre
et d'émail d'une finesse remarquable dont les couleurs vives
et brillantes forment des gammes très variées. Les quatre
chevaux emportés sont blancs avec quelques ombres
grisâtres, leurs crinières sont noires, les naseaux et les langues
pendantes sont rouges. Ces chevaux portent des harnais :
les brides sont figurées par un double filet rouge et noir ; le
poitrail est muni d'une large bricole vert tendre, bordée de
franges jaunâtres que relèvent quelques flammèches rouge
vif ou blanc. Une telle uniformité dans le harnachement
permet d'affirmer que les quatre chevaux étaient attelés à
un quadrige, de sorte qu'on est autorisé à croire qu'un char
et son conducteur devaient compléter primitivement la scène
et occuper ta partie supérieure du médaillon maintenant
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détruite. Le cavalier monte un magnifique cheval, d'une
vigueur exceptionnelle et d'une couleur plus foncée que les
autres, presque bai; sa longue queue noire, bien fournie, se
développe avec ampleur ; son allure est pleine de noblesse et
de force. Comme le cavalier est vu de profil, les mouvements
de sa monture et les siens sont faciles à reconnaître. Ses
formes sont robustes, son corps est presque entièrement
nu; son pied droit est chaussé d'un brodequin verdâtre;
un manteau aux tons gris, rouges et bleus, soulevé en
arrière par le vent, est attaché sur ses épaules ; les petits
cubes très fins employés pour représenter la draperie ont été
combinés avec un art particulier. La bricole qui garnit le
poitrail de son cheval se distingue de celles des autres
chevaux par sa couleur ; elle est d'un ton bleu assez foncé et
bordée de deux galons jaunes. A la partie basse du
médaillon, au-dessous des chevaux, le sol est parsemé de petits
zigzags bleus qui figurent vraisemblablement de l'eau. Tous
les cubes de marbre sont encore en très bon état ; les cubes
d'émail au contraire ont beaucoup souffert du feu et de
l'humidité.
Le sujet de ce tableau mutilé était évidemment la chute
de Phaëton ; il me paraît impossible d'en douter. Le char
brisé et le corps de son imprudent conducteur occupaient la
partie supérieure du médaillon ; Phaëton y était représenté
mort, déjà frappé par la foudre de Jupiter : il n'en reste
actuellement aucune trace. Quant au cavalier qui se précipite
à la tête des chevaux et qui les arrête d'une main ferme et
vigoureuse, c'est le Soleil lui-même. Quoique la tête du dieu
manque, il est reconnaissable à son fouet à double lanière
qu'il tient dans la main droite et qui lui servait à conduire
ses coursiers. Il suffit d'ailleurs pour en être convaincu de
se reporter au texte d'Ovide où le mosaïste semble avoir
puisé toute son inspiration.
Les dieux effrayés de la chute de Phaëton se pressent
autour du Soleil et le conjurent de ne point plonger l'uni-
LA CHUTE DE PHAETON 61 9
vers dans les ténèbres. Le maître de l'Olympe lui-même
s'excuse d'avoir lancé ses feux; il ordonne au Soleil
d'arrêter la course folle des chevaux de son char. Phoebus
rassemble les quatre coursiers encore effarouchés et
haletants de frayeur, les dompte et les châtie avec son fouet :

Colligit ameutes et adhuc terrore paventes


Phoebus equos, stimuloque domans et verbere saevit i .

Les chevaux affolés, le Soleil les maîtrisant avec son


fouet, rien ne manque au tableau. En bas, le mosaïste a
représenté les eaux delEridan (le Pô) où la légende plaçait
le lieu de l'accident. Ces deux vers pourraient donc être
inscrits au-dessous du médaillon de Sens ; ils en sont le
meilleur commentaire.
Sur une coupe d'Arezzo dont le moule existe au Musée de
Boston, c'estaussile Soleil qui maîtrise les chevaux emportés.
En publiant ce moule, le professeur P. Hartwig2 a rappelé,
outre les vers d'Ovide, plusieurs passages d'auteurs anciens
et notamment un passage de Lucrèce qui confirme
absolument cette interprétation 3. Un sarcophage de la galerie des
Offices à Florence me paraît devoir être également
rapproché de la mosaïque de Sens ; l'intervention du Soleil y est
représentée de la même manière. La figure du Soleil sur la
mosaïque semble être la répétition de celle du sarcophage :
même disposition du cheval et du cavalier, même manteau
flottant, même mouvement du bras droit, de telle sorte que
l'on est pour ainsi dire autorisé à se servir du sarcophage
de Florence pour compléter par la pensée ce qui manque
à la figure du Soleil sur la mosaïque de Sens. La main
gauche abaissée près de la hanche tenait une torche allu-

l.'Métam.,U, 398-399.
?. Elne aretinische Gefassf'orm mit Scenen aus der Phaethonsage, dans
le Philologus, LVIII (1899), p. 481-497, avec une planche.
3. De rerum natura, V, 402 et suiv.
620 LA CHUTE DE PHAËTON

mée, et la tête, brillante de jeunesse, portait une épaisse


chevelure couvrant entièrement le cou1. L'examen d'une
gemme offrant la même scène peut apporter aussi quelque
secours dans la question : sa forme arrondie est celle du
médaillon de la mosaïque; en face de ce petit monument,
on peut se rendre compte de l'adresse étonnante avec
laquelle les artistes de l'antiquité savaient utiliser un
espace forcément restreint et concentré pour y réunir les
divers éléments d'une scène très mouvementée dont le
développement demandait d'ordinaire plus de place2.
Il me reste à dire quelques mots des têtes des Saisons
placées dans les angles de l'encadrement carré. Elles se
détachent sur un fond blanc. De la figure du Printemps il
n'a été retrouvé aucun vestige ; elle occupait l'angle gauche
à la partie supérieure de l'encadrement. Dans l'angle droit
on a retrouvé le tête de l'Eté couronnée d'épis dorés et de
feuilles de laurier; un des côtés du visage est abîmé. En
bas, à droite, on voit l'Automne vêtu d'une tunique, la tête
chargée de grappes de raisin et de feuilles de vigne dont
les tons chauds indiquent la maturité. A gauche
apparaît l'Hiver avec des vêtements blancs, la tête cachée sous
un voile qui ne laisse que le visage à découvert. C'est ainsi
que dans sa brillante description du palais du Soleil, Ovide
nous présente les Saisons debout auprès du dieu :

Verque novum stabat, cinctum florente corona;


Stabat nuda Aestas et spicea serta gerebat ;
Stabat et Autumnus, calcatis sordidus uvis,
Et glacialis Hiems, canos hirsuta capillos3.

C'est ainsi qu'elles sont représentées la plupart du temps


sur les mosaïques romaines où elles se trouvent en rapport

1. Gori, Inscr. antiq. Etruriae, III, tab. xxxvn, p. cxxv, où il rappelle


les vers de Lucrèce et d'Ovide; Fr. Wieseler, Phaethon; eine archaeolo-
ffische Ahhandlung, Gottingen, 1857, in-4°, planche, n. 5.
2. Ibid., planche, n. 10.
3. Métam., II, 27-30.
LA CHUTE DE PHAËTON 621

avec le Soleil, Bacchus ou Apollon1. Il est donc naturel de


constater leur présence sur la mosaïque de Sens, autour
d'un épisode légendaire qui appartient au mythe solaire2.
Il y a sept ans, après avoir déterminé le sujet d'une des
mosaïques de Villelaure, celle qui représente l'aventure de
Callisto, je faisais remarquer que le mosaïste avait suivi
de très près le texte d'Ovide et qu'il en avait fidèlement
illustré quelques vers. La même observation s'applique à
la mosaïque de Sens. Les Métamorphoses offraient aux
artistes, peintres, mosaïstes ou sculpteurs, une série
inépuisable de sujets piquants, tous appréciés et par
conséquent souvent traités. Les aventures d'Europe, de Danaë,
de Callisto, de Ganymède, d'Actéon, de Narcisse, de
Méléagre, de Daphné, l'enlèvement de Proserpine, le
sacrifice d'Iphygénie, le changement de Glaucus en dieu marin,
Thésée et le Minotaure, Orphée charmant les animaux se
retrouvent sur les mosaïques dans toutes les contrées où
la civilisation romaine a pénétré3. On pourra ajouter
désormais à cette énumération la chute de Phaëton.
Les monuments relatifs à la chute de Phaëton sont
plutôt rares à l'époque romaine ; la plupart sont des sarr
cophages d'une date assez tardive. La mosaïque de Sens
fait exception; elle est plus ancienne. Le travail en est fin,
il indique une excellente époque. Je la crois du premier
siècle et presque contemporaine du moule d'Arezzo.

1. Héron de Villefosse, La mosaïque des Quatre Saisons à Lambèse


(Algérie), dans la Gazette archéologique, V (1879), p. 144-155, pi. 22.
2. Sur un sarcophage d'Ostie, la première scène à gauche, où l'on voit
Phaëton suppliant son père de lui confier la conduite du char, se passe
dans le palais du Soleil; les Quatre Saisons sont auprès du dieu. Wieseler
ne les a pas reconnues : il a pris la femme voilée pour une divinité locale,
c'est l'Hiver; les trois autres femmes avec des paniers de fleurs ou de
fruits seraient selon lui les Héliades ; néanmoins cette représentation lui
semble singulière. Ces trois femmes sont le Printemps, l'Été et l'Automne.
Plus loin, il propose de reconnaître les Saisons dans les quatre écuyers qui
tiennent les chevaux, ce qui est inadmissible. Cf. Sarcofago ostiense rappreT
sentante il mito di Felonte, dans les Annali delV Instituto, 1869, p. 130 et
suivantes.
3. Bulletin archéologique du Comité, 1903, p. 26.
622 TOPOGRAPHIE DES PORTS DE CARTHAGE
Le marquis de Traynel dont l'ardeur «t la perspicacité
ont amené cette découverte mérite les remerciements des
archéologues. Sans sa prompte décision, sans son initiative,
la fouille n'aurait probablement pas eu lieu. M. de Traynel
a fait plus : il a permis à la Société archéologique de Sens,
dont il est membre, de se substituer à lui. Tout en lui
laissant la direction des fouilles, cette Société a pris k sa
charge la totalité des frais depuis le premier jour. Dans
l'intérêt de l'histoire de la ville, elle n'a pas hésité à
s'imposer de véritables sacrifices afin d'assurer au Musée de
Sens la possession d'un précieux document dont
l'enlèvement, la consolidation et la présentation au public
nécessitent des dépenses assez considérables. M. Joseph
Perrin, son président, avec un zèle et un dévouement qui
ne sauraient étonner ses confrères, a contribué avec le
marquis de Traynel à assurer la conservation de cette
mosaïque : tous deux ont agi au nom de la Société
archéologique de Sens qui n'en est plus à compter ses succès
et qui, en intervenant d'une manière si efficace en cette
affaire, a rendu un nouveau service à la cause de nos
antiquités nationales.

NOTE SUR LA TOPOGRAPHIE DES PORTS DE CARTHAGE,


PAR M. LE DOCTEUR CARTON.

L'étude des vestiges du littoral de la Carthage antique a


été commencée, il y a quelques années, sur l'initiative de
l'Académie. Les circonstances ayant empêché les officiers
de marine qui en avaient été chargés de l'achever, je me
suis occupé , durant ces six dernières années , de combler
cette lacune. Ce sont les résultats des observations que j'ai
faites ainsi que j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui

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