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Représentations

identitaires du corps
dans les littératures francophones

ë
© Editions Saint-Augustin Afrique, Lomé, 2019
Tél. : (00228) 22 22 27 22 ;
Cel. : (00228) 90 56 98 06 / 99 94 13 96
B.P. 61 204 Bè-Château Lomé,
e-mail : misselpdv@gmail.com
ISBN : 978-2-84693-366-7

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L’esthétique et la représentation
identaire du corps

ç
Esquisse de l’aventure de l’identité du corps
comme expression poétique de la mimésis
divine dans L’Odyssée d’Homère
ADJASSOH Christian, Université Alassane Ouattara Bouaké,
Côte d’Ivoire

ìí
ìì
Dans L’Odyssée d’Homère, les divinités investissent
l’univers humain en voilant leur corps par de multiples

éléments de l’univers suivant les circonstances et leur attente.


La poétisation de leur métamorphose emprunte des avatars de
formes anthropomorphes, zoomorphes ou météorologiques.

leur essence et font d’eux des êtres puissants qui charment et


accompagnent les humains dans leurs actions et leur existence.
La réécriture de leur identité qui les assimile à des hommes
à travers leur transformation les amène à partager les mêmes

caractère sacré à travers leur mimésis.

analogie.

In Homer’s Odyssey, divinities invade the human universe

by analogy, assimilate them to beings or elements of the


universe according to circumstances and their expectations.
The poeticization of their metamorphosis borrows avatars of
anthropomorphic, zoomorphic or meteorological forms. It also

and make them powerful beings who charm and accompany


humans in their actions and their existence. The rewriting
of their identity that assimilates them to men through their
transformation leads them to share the same passions and the
same feelings, eventually removing their sacredness through
their mimesis.

ìë
ìê
La mimésis se rapporte à l’imitation qui s’apparente à une
analogie. Elle induit depuis l’antiquité grecque la problématique
de la ressemblance. En prenant l’identité de l’homme ou des
éléments naturels à travers leurs différentes transformations, le
corps divin devient à la fois un constituant phatique (qui maintient
les dieux en contact permanent avec l’homme par une analogie
de leur existence) mais aussi un vecteur de communication
pour transmettre des directives aux hommes ou pour les aider

à travers la parole poétique. Le corps divin à travers l’identité

homérien, fait de son ouvrage poétique L’Odyssée17 un univers


où le monde des hommes et celui des dieux s’interpénètrent

poétique. Cette étude se propose donc de scruter les procédés

par l’emprunt de différentes identités dans les vers d’Homère


à travers le questionnement suivant : Comment le corps réel
observé nourrit-t-il la création poétique par sa réduplication en
empruntant de nouvelles identités chez Homère ? Comment la
parole poétique d’Homère traduit-elle la splendeur du corps
divin par ses diverses identités ? Et que révèle la transformation
des dieux par l’emprunt d’une nouvelle identité dans les
aventures d’Ulysse ?

ïéò La version de L’Odyssée d’Ulysse sur laquelle de fonde notre étude est celle traduite par
Philipe Jaccotet et enrichie par la science de l’helléniste François Hartog. Elle a été pu-
bliée aux Editions La Découverte pour la première fois en 1982 puis successivement en
2000 et en 2004. Pour rendre tous les relents de ce long récit, à la différence des autres
traducteurs, Philipe Jaccotet a choisi de le rendre en vers pour lui conférer la forme que
les aèdes l’enrobaient dans la l’antiquité et l’univers grec.

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La mimésis qui est inhérente à la ressemblance se rapporte
à l’imitation, à l’emprunt de l’apparence. Ce qui présuppose
une métamorphose de toute entité humaine ou divine dans la
perspective d’emprunt à travers le processus de la réduplication

ou son essence. Le mot métamorphose vient du grec. Il est


méta et de la racine morphè méta
exprime l’idée de changement, le passage d’un état à un autre
provenant du résultat d’une transformation. Tandis que morphè

l’état d’une chose ou d’un être. Ainsi, la mimésis des dieux qui

changement ou transformation de forme qui tend à établir un


rapport de ressemblance totale ou partielle dans la réduplication
d’une forme ou d’un phénomène naturel donnée. Ce thème
chez les grecs prend sa racine dans la mythologie et la religion.
Dans la mythologie, l’univers des dieux et celui des hommes

l’existence des hommes établissent des correspondances par le


biais de leur mutation physiques entre leur corps et celui des

de leur existence pour le manipuler. En effet, les divinités et


les hommes ont en commun les mêmes sentiments, les mêmes
qualités et les mêmes défauts. Les mythes sont le réceptacle de
la mise en scène des archétypes humains que sont les divinités.
Cependant seuls les dieux et les déesses ont le pouvoir de se
transformer pour revêtir n’importe quelle apparence en vue de
sauver ou l’homme, comme c’est le cas dans les vers homériens
dans L’Odyssée.
La métamorphose ne produit ni mort, ni disparition, mais
elle se situe dans la transformation d’un élément ou d’un être
en un élément ou un être différent tout en entretenant un lien

ìè
de continuité lié à l’essence de la divinité. Chez Homère, elle
procède par la réduplication de l’apparence des divinités qui se
fonde sur une analogie dont les facteurs sont les dieux d’une part
et les hommes et les autres êtres de la nature d’autre part. Dans
cette mimésis divine, l’analogie peut se décliner comme suit.
Le phore qui est le comparé s’apparente à la divinité et le thème
qui est le comparant est l’homme ou tout phénomène naturelle
auquel s’assimile les dieux dans leur mimésis. Ainsi dans les
vers de L’Odyssée
apparaître à l’homme sous l’apparence zoomorphe. Il en est
ainsi d’une divinité dépendant de Poséidon qui fait obstruction
en barrant la route du retour du personnage d’Ulysse. L’action
de cette divinité contraint le personnage d’Ulysse à errer sur la
mer et les terre sans parvenir à retrouver sa patrie Ithaque, vingt
ans après la guerre de Troie où les grecs sortirent victorieux.
Cette divinité, se nommant Proté l’Egyptien, émerge de la mer
quand le soleil est au milieu du jour pour se prélasser entre
les phoques sous l’apparence d’un vieillard. Lors sa capture
pour révéler à Ulysse la cause de son errance, celui-ci pour
intimider et échapper à Ulysse et à ses compagnons opère des
transformations successives en prenant la forme animalière :
« C’est alors qu’en hurlant nous bondîmes pour l’empoigner :
mais le malin vieillard, n’ayant point oublié ses tours,
d’abord se transforma en lion de belle crinière,
puis en dragon, puis en panthère, puis en porc.
Nous cependant le tenions ferme, patiemment. »,
(Chant IV, v454-459, p.77.)
Bien des fois, les divinités dans leur rapport avec les hommes
transforment leur corps en phénomène météorologique pour
déployer toute leur puissance. Poséidon s’y adonne en se
transmuant en vent dans l’optique de faire chavirer l’embarcation
d’Ulysse et de ses compagnons qui ont causé la perte de l’unique
œil de l’un de ses enfants, le cyclope :

ìç
Ce disant, il rallia les nuages, troubla la mer
trident en main des quatre coins de l’horizon
il déchaina les quatre vents, et couvrit de nuées
la terre avec la mer ; du haut du ciel tomba la nuit.
Notos, Euros, Zéphyre hurlant, Boré d’azur
s’abattirent ensemble en soulevant d’énormes vagues.
Ulysse sentit son cœur et ses genoux rompre […].
(Chant V, v291-297, p.99.)

Pour se dérober à l’appréhension du regard humain, bien


des fois, les divinités pour passer inaperçues s’enrobent dans
la plupart des cas de forme anthropomorphe. L’apparence
humaine, de loin, est celle qui rassure l’homme et le persuade
à accomplir certains actes recommandés par la divinité. Ainsi
sous l’apparence de l’homme, ils déterminent les humains à
agir dans telle sens ou telle autre en dehors des oracles. Les

homme, comme opère la déesse Athéna :

« Elle fondit du haut des cimes de l’olympe


et en Ithaque s’arrêta devant l’entrée d’Ulysse,
sur le seuil de la cour ; sa lance de bronze à la main,
elle avait pris l’aspect de Mentès, prince de Taphos.

qui se distrayait l’âme en jouant avec des jetons »,


(Chant I, v102-107, p.15.)

En prenant les traits de Mentès le prince de Taphos, elle

nouvelles de son père à Sparte pour attester qu’il est en vie, en


vue de dissuader les prétendants qui dilapident et amenuisent
les biens de Ulysse donner pour mort. Par ailleurs, pour consoler
Ulysse objet d’une insomnie car ne trouvant pas les moyens
pour venir à bout des nombreux prétendants de sa épouse, la

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propos réconfortants :
« Athéna s’approcha de lui, venant du haut du ciel, ayant pris
les traits d’une femme ;
elle se tint à son chevet et lui dit ces paroles :
« Pourquoi ne dors-tu pas, ô le plus heureux des hommes ?
Tu as là ta maison, et ta femme dans la maison,

(Chant XX, v30-35, p.360.)

informations aux hommes à qui ils veulent apporter une aide


dans le cadre d’une entreprise dont ils sont les instigateurs à
l’insu des hommes :

« Alcinos, roi inspiré des dieux, lui succéda.


C’est chez ce roi que se rendait Pallas aux yeux brillants
pour hâter le retour du généreux Ulysse
[…]

et, se tenant à son chevet, lui dit ces mots,


sous les traits d’un enfant de Dymas, l’armateur
qui était de son âge et faisait la joie de son âme. »,
(Chant IV, v12-24, p.109.)

procède par la réduplication de l’apparence du corps humain


pour intégrer l’univers de l’homme. Cette mimésis est fonction
de la visée de la présence des dieux dans le monde des humains.

des formes zoomorphes, anthropomorphes ou calquée sur des


phénomènes météorologiques. Ce qui confère aux dieux une

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réalité, leur identité est fonction de leur volonté et l’action qui
veulent impulser dans l’univers humain. Ce faisant, il faut noter

La poéticité est tout ce qui a un relent poétique. L’appréhension


de cette notion commande une approche de la poésie pour en
relever tous les effets. La poésie est un traitement particulier que
l’on fait du langage pour exprimer son rapport au monde tout
en procurant du plaisir. Dès lors, il y a poéticité quand la parole
provoque le contentement de l’esprit et de l’imagination. Ce
plaisir est engendré par la manipulation d’images lumineuses
qui génèrent une expression fortement connotée. En dehors des
vers qui déterminent la poéticité chez Homère, nous avons la

texte poétique. Ainsi, la manipulation des mots dans le cadre du


récit homérique conduit à la profération des propos suivants :

« Puis Athéna aux yeux brillants, faisant sortir


Télémaque des salles confortables, dit,
qui avait emprunté l’allure et la voix de Mentor […] »
(Chant II, v399-402, p.40.)

La construction de cet énoncé ébauche une image littéraire


qui est une synecdoque. L’image se percevant comme un

la surprise et l’étonnement, comme le soutient Boileau par ces


propos : « […], le but que l’on s’y propose dans la poésie,
c’est l’étonnement et la surprise ; au lieu que dans la prose,
c’est de bien peindre les choses, et les faire voir clairement. »18

ïèò Boileau, Le Traité du sublime attribué à Longin, Ed. Bibliothèque de la Pléiade, Paris,
1966, p. 363.

ëî
Ce faisant, il faut noter que la synecdoque est un trope par
connexion. Selon Pierre Fontanier, la synecdoque consiste
« dans la désignation d’un objet par le nom d’un autre objet
avec lequel il forme un ensemble, un tout, ou physique ou
métaphysique, l’existence on l’idée de l’un se trouvant comprise
dans l’existence ou l’idée de l’autre. »19 Dans la perspective de
Jean-Louis Joubert,

« la synecdoque se caractérise par une relation d’inclusion

la partie pour le tout et le tout pour la partie, la matière pour


l’être ou l’objet, le singulier pour le pluriel et réciproquement,
l’espèce pour le genre et le genre pour l’espèce, l’abstrait
pour le concret. »20

en ces termes : « La synecdoque est un écart paradigmatique


(= écart de substitution) par lequel on remplace un mot
normalement attendu(A) par un autre (B) selon un rapport
d’inclusion. La synecdoque correspond à une perception du
monde du particulier au général ou du général au particulier. »21

Les « yeux brillants » dont il est question dans l’énoncé


renvoient à la face de la déesse Athéna. Ils sont caractérisés
par leur scintillement qui réfère à l’éclat du visage de la déesse.
La synecdoque, ce trope qui véhicule l’image suggérée, est la

ïçò Pierre Fontanier, , Coll. « Champs classiques », Paris, Flamma-


rion, 1977, p. 86.
îðò Jean-Louis Joubert (1992), La poésie, coll. « CRITICA », Tunis, Cirès Editions, 1997,
pp.177-178.
îïò Claude Peyroutet (1994), Style et rhétorique, coll. « Repères pratiques », Paris, NA-
THAN/VUEF, 2002, p. 62.

ëí
à un ensemble A qui lui appartient. »22 Dans cet énoncé
d’Homère, les « yeux brillant » évoquent l’éclat du visage

regard d’Athéna. Nous sommes dans le cas en présence d’une


synecdoque généralisante qui désigne le tout par une partie.

par communiquer à l’essence de la déesse d’Athéna la source


de toute beauté. L’éclat de son visage devient l’archétype de la
beauté dont l’imagination enchantée par elle peut se faire une
idée absolue de la beauté. De fait, l’éclat du visage de la déesse

déesse. Ainsi, la poéticité dans les vers homériens est établie

l’essence divine d’Athéna par son charme.

Par ailleurs, pour consoler Ulysse objet d’une insomnie car


ne trouvant pas les moyens pour venir à bout des nombreux

d’une femme pour lui tenir des propos réconfortants :

« Athéna s’approcha de lui, venant du haut du ciel, ayant pris


les traits d’une femme ;
elle se tint à son chevet et lui dit ces paroles :
« Pourquoi ne dors-tu pas, ô le plus heureux des hommes ?
Tu as là ta maison, et ta femme dans la maison,

(Chant XX, v30-35, p.360.)

La raison humaine semble être un moyen objectif de


la connaissance de l’univers. Si dans bien des cas elle est
parvenue à apaiser l’homme en lui apportant un ensemble de

îîò Idem.

ëì
réponses face à certains mystères, il n’en demeure pas moins
que certains phénomènes échappent à son emprise. C’est en ce
moment que le mythe prend toute sa place. De fait, le mythe
est un récit fabuleux mettant en scène des êtres incarnant sous
une forme symbolique des forces de la nature et des aspects la
condition de l’humanité. Dans la mythologie grecque, les dieux
incarnant les forces de la nature à travers la poétisation de leurs

pour instruire l’homme des choses qui échappent à sa raison.


Ainsi la poétisation du corps divin à travers leur transformation
traduit une symbolique, les fonctions de la transmutation et la
désacralisation du divin.

Dans leur rapport avec l’univers des hommes, aucune


transmutation des dieux n’est fortuite. Elle advient quand
une divinité veut communiquer un message ou déterminer
un homme à accomplir une action. Des lors, le corps divin
devient un vecteur de sens, il fonctionne comme un signe,

à qui la divinité apparait ou aux autres hommes à qui il doit


transmettre le message des dieux. Ainsi, la poétisation du corps
dans les vers homériens, selon David Le Breton, « […] produit
continuellement du sens, il insère ainsi activement l’homme à
l’intérieur d’un espace social et culturel donné. »23 Dans cette
perspective, pour Francis Bertholot, le corps par sa poétisation

devient alors un vecteur de sens qui donne à percevoir le corps


divin « […] considéré en tant qu’être sémantique », mais d’une
approche organique et narratologique […], pour parler d’un «
corps qui mange, boit et souffre, d’un personnage en chair et

îí David Le Breton, La sociologie du corps, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 1992, p.4.

ëë
en os dont on raconte l’histoire »24
du divin est encline à prospecter le pendant du corps divin au-
delà de la métamorphose et de sa subjugation pour construire

des divinités sert à tisser des liens avec l’univers invisible qui
détermine l’archétype dans l’imaginaire de l’homme. Ainsi la
beauté d’Athéna ou la qualité aurifère de la baguette d’Hermès

par leur apparence qui charme les hommes apparaissent comme


des hommes idéaux, des êtres spirituels par leur poétisation. Ce
qu’atteste Richard Kearney en soutenant que :

de se diriger vers ce qui est absent (possible) et le représenter


ensuite comme monde. Le possible est le sens du monde ;

absent. »25

Au-delà de sa connotation symbolique qui idéalise les


divinités, la poétisation de la métamorphose des Dieux dénote
certaines fonctions de la mimésis divine.

Les fonctions de la mimésis divine dans le cas de la

moyen de protection et de désacralisation du divin.

îìò Francis Bertholot, Le corps du héros. Pour une sémiologie de l’incarnation roma-
nesque, Paris, Nathan, 1997, p.9.
îë Richard Kearney, -
tion, Paris, Beauchesne, 1984, p.48.

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Les dieux dans leur commerce avec les hommes élisent
certains humains comme leurs protégés. Dans ces conditions,

ces divinités en prenant telle forme ou telle autre veillent sur

transparait dans les vers suivants :


« Athéna dont l’œil étincelle eut alors une idée ;
sous les traits d’un homme, elle courut la ville,
s’arrêtant auprès de chacun et leur disant
de se retrouver tous les soirs au prompt navire ;

un bateau, celui-ci le promit volontiers. »


(Chant II, V382-387, p.40.)
En effet, Athéna qui veut aider Télémaque à avoir une
embarcation pour aller s’enquérir des nouvelles de son père,
prend la forme d’un jeune pour inciter certains habitants
d’Ithaque à accompagner Télémaque dans son entreprise,
contre la volonté des prétendants qui veulent attenter à sa vie.
Ce qui dénote de la fonction protectrice de la poétisation de la

comme moyen de séduction.

ëé
En effet, quand les dieux sont épris d’une déesse ou d’une
femme dont ils veulent jouir de leur charme, ils procèdent à la
transformation de leurs aspects physiques pour duper l’auteur

fonctionne comme une arme de séduction qui dans bien des


cas demeure imparable. Bien d’humains et des dieux ont été
victime de ce subterfuge qui permet aux divinités d’abuser
de plus d’un. Ainsi, comme le soutient Raymond Balestra et
al. , « Il arrive que les dieux pour mieux duper ceux ou celles
qu’ils veulent séduire, empruntent des formes […]. Cette
possibilité d’apparaître sous de nouvelles apparences est le
fait de leur pouvoir. La transformation est provisoire et dure
26
, comme opère Poséidon :

« je vis en premier lieu la princesse Tyro,


qui dit être un enfant de Salmonée l’irréprochable

aussi la voyait-on souvent longer ses belles eaux.


Empruntant son aspect, la Maître et l’Ebranleur des terres

et sa voûte cacha le dieu et la mortelle.


Lorsque le dieu eu achevé l’œuvre amoureuse,
il lui tendit la main […] »
(Chant XI, v235-247, p.202.)

Pour séduire la princesse Tyro, Poséidon, « l’Ebranleur

apparence, la belle Tyro ne se doute pas qu’elle est victime des

îêò D’après Raymond BALESTRA / Christine CHARLES / Richard ROUX

ëè
dont elle est éprise, il la séduit à son insu. Cette transmutation
de Poséidon engendre une analogie persuasive entre le corps
des deux divinités. De fait, la transformation opérée par
Poséidon lui permet d’épouser tous les traits d’Epinée de
manière à convaincre Tyro que lui et Épinée ne font qu’un à
travers l’établissement de cette ressemblance totale. En effet,
ce stratagème imparable lui permet sans coup férir de tromper
Tyro qui croyait être en présence d’Épinée son amant. C’est à

Cette pratique est l’apanage de tous les dieux. Bien des fois, la
poétisation de la mimésis des dieux « […] apparaît comme une
désacralisation de leur histoire exemplaire. »27

séduction et de protection, demeure à travers sa poétisation


un acte de désacralisation de l’histoire des dieux. Les vers
homériens participent à exposer la dimension humaine des
divinités. Les dieux étant par essence supérieurs aux hommes,
ils sont des modèles vers lesquels doivent tendre l’humanité.
En cela, ils apparaissent comme l’archétype de l’humanité.
De ce fait, ils sont exempts de reproche. Paradoxalement la

entités qui partage en partie le même destin que les hommes.


A travers le mouvement de leur métamorphose, la plupart
des formes qu’ils empruntent les conduit à s’apparenter à un
homme ordinaire. Ils ont sujets aux mêmes sentiments, aux
mêmes passions et au même destin que l’homme, ils sont voués
à la mort. En partie leur existence se trouve confondue à celle
de l’homme ordinaire par leur capacité à avoir des sentiments,

îéò Truismes ou la métamorphose


au féminin Article in Transylvanian Review · January 2005, Raluca Lupu-Onet on 07
February 2016. P.5.

ëç
à duper leurs semblables ou des hommes en empruntant des
formes poétiques qui enchantent et voile leur essence dans le
déploiement de leurs différentes identités. Ce qui les apparente
à de simples mortels et leur enlève toute les envergure liée au
sacré faisant d’eux des êtres ordinaires qui ont seulement une
essence divines.

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La mimésis dans les vers homériens permet aux divinités
de prendre des formes zoomorphes, anthropomorphes et
météorologiques. Par le truchement de ces apparences les
dieux selon leurs désirs viennent dans le monde des hommes
pour déterminer leurs attitudes. Selon leur volonté, leur

faisant, leur transmutation engendre une poéticité qui procède


à travers l’usage de la périphrase et la synecdoque qui déclinent
leur métamorphose qui rebute ou enchante le lecteur. Au-delà de
sa forte dose de poéticité la mimésis divine révèle la puissance
et la splendeur des dieux tous en concourant à communiquer
des valeurs au peuple ou émane le mythe et au lecteur qui lisent
pour se enchanter par la beauté des propos d’Homère qui disent
le monde mythique grec.

êï
êî
BERTHOLOT Francis, Le corps du héros. Pour une sémiologie
de l’incarnation romanesque, Paris, Nathan, 1997.
BOILEAU Nicolas, Le Traité du sublime attribué à Longin,
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FONTANIER Pierre, , Coll. « Champs
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GANS Eric, « L’autre originaire de la poésie », dans Michel
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SULLIVAN Maryse et al.,
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/2008/02/03/7806750.html consulté le 08/01/2018
https ://www.researchgate.net/publication/293334867 Trui-
smes ou la métamorphose au féminin Article in Transylvanian
Review · January 2005, Raluca Lupu-Onet on 07 February
2016. P.5.

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L’esthétique et la représentation
identair du corps
Le Corps comme un espace d’expression : une lecture
postcoloniale de Murder in the cathedral de Thomas Stearns
Eliot et de La Secrétaire particulière de Jean Pliya
Ablam Djignéfa Agouzé, Université de Lomé, Togo ........ 13-42
Esquisse de l’aventure de l’identité du corps comme expression
poétique de la mimésis divine dans L’Odyssée d’Homère
ADJASSOH Christian, Université Alassane Ouattara Bouaké,
Côte d’Ivoire .......................................... 43-64
L’Esthétique de la représentation identitaire du corps dans
l’écriture poétique de Saint-John Perse : une consécration
humaniste
AHO Kouakou Bernard, Université Alassane Ouattara,
Bouaké, Côte d’Ivoire ..... 65-85
La Représentation du corps féminin
dans les contes ivoiriens, une esthétique valorisante
CAMARA Lonan, l’Université Alassane Ouattara,
Côte d’Ivoire ........ 87-101
Le corps de la femme dans l’art de Paul Ahyi
TCHALA Essoyodou, Togo ....... 103-127

travers, Le Voltaïque de Sembène Ousmane


Wendmy Désiré Garba, Université Ouaga I
Pr Joseph KI-ZERBO, Burkina Faso ...... 129-147

La poétique du corps dans My Body in Nine parts de Raymond


Federman
KOUADIO Kouassi Honoré,
Université Félix Houphouët-Boigny, Côte d’Ivoire. ........... 149-169

ëèç
L’art corporel africain, de l’interartialité à l’intermédialité :
Cas de la danse du cheval du Burkina Faso
OUEDRAOGO Ousseni, Université Ouaga I Professeur
Joseph Ki-Zerbo, Burkina Faso. .........171-198
Sogolon kedjou ou le personnage au double genre dans
Soundjata ou l’épopée Mandingue de Djibril Tamsir Niane.
TOLA TIEGNON Gabriel, Ecole Normale Supérieure (E.N.S.)
Département d’Arts et Lettres, Lettres Modernes, Cocody /
Abidjan, Côte-d’Ivoire. ..........199-221.

Représentation identaire du corps


et liberté sexuelle
Formes corporelles-objets de désir et formes grammaticales
de désignation dans Les Frasques d’Ébintod’Amadou Koné
et L’épine de la rose de Mathias KYÉLEM
Adama OUÉDRAOGO, Université Norbert ZONGO,
Koudougou (Burkina Faso) ............... 225-251

Sexualité et construction identitaire chez la femme dans


Tremblement de corps245 de Hurcyle Gnonhoué
Bio Koudous BANDIRI,
Université d’Abomey-Calavi, Bénin .... 253-267
Approche sociologique des expressions érotiques chez les
Moose du Burkina Faso à travers les devises, les proverbes
et les chants

technologique (CNRST)-Institut des Sciences de Société(INSS),


Burkina Faso. ..... 269-302

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Le corps, le sexe et le marché de séduction chez Houellebecq
Olatubosoun D. C. LALÈYÈ, Département des Lettres Modernes,
Université d’Abomey-Calavi, Bénin. ............. 303-327
La manipulation et la dépossession du corps dans Kétala de
Fatou Diome
YAOU Hippolyte Florent,
Université Abomey-Calavi, Bénin ..... 329-354

Représentation traditionnelle
du corps et tabous sociaux

Le corps humain : Représentation – usages et enjeux dans le


roman Le Parachutage de Norbert Zongo
Ernest BASSANE, Université Norbert Zongo/Koudougou,
Burkina –Faso. ......... 357-381

Du corps Voilé au corps libéré de la femme dans Ombre


sultane d’Assia Djebar
GBESSE Mahudé Clotilde, Département des Lettres Modernes,
Faculté des Lettres, Langues, Arts et Communication Université
d’Abomey-Calavi, Bénin .......................... 383-408

Soigner le corps par le corps : les usages sociaux des soins de


traumatismes ostéo-articulaires chez les Tchakaloké à Dassa-
Zoumé (Centre-Bénin)
MELIHO Pierre Codjo, Université Nationale d’Agriculture,
UNA-Bénin ......409-438

et de la douleurchez les Peuls et les anciens captifs du nord


Bénin
Mohamed ABDOU, (ENAM/FASHS), Université d’Abomey,
Calavi-Bénin. .... 439-464

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Représentations traditionnelles du corps et métamorphoses
corporelles à travers quelques chansons populaires
camerounaises
Paul SAMSIA, Département de Littérature et Civilisations
Africaines, Faculté des Arts, Lettres et Sciences Humaines,
Université de Yaoundé I, Cameroun ...... 465-497

d’Ifeoma
Chinwuba
SILUE Lèfara, Université Félix Houphouët-Boigny,
Cocody-Abidjan ............. 497-518

Les tatouages corporels : une marque identitaire des commu-


nautés peulh à Ouèdo, Abomey-Calavi au Bénin
TAKPE Kouami Auguste, Département de sociologie-
anthropologie, Université d’Abomey-Calavi, Bénin. ........ 519-542

Transsexualité et identité corporelle


Travestissement et transsexualité
dans Mont Plaisant de Patrice N’Ganang
Boka Epi Bénédicte, Université Félix Houphouët Boigny
d’Abidjan, Côte- d’Ivoire .....545-566

Transsexualité et identité corporelle dans Kétala de Fatou


Diome
Elise Nathalie Nyemb,
Université de Yaoundé I/ Cameroun. 567-587

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