Vous êtes sur la page 1sur 4

Résultats N° 574

des actions collectives

CONTRAINTES RÉSIDUELLES
ET PLIAGE DES TÔLES HLE
Les flèches télescopiques des grues sont constituées de caissons
obtenus par pliage. Ce procédé introduit des contraintes résiduelles qui
influent sur la tenue mécanique des structures, notamment en ce qui
concerne la fatigue.
Les industriels disposent actuellement de très peu d’informations sur les
relations entre les caractéristiques des produits (épaisseur,
caractéristiques mécaniques, etc.), les paramètres de pliage (rayon,
angle, etc.), et les contraintes résiduelles résultantes. L’utilisation des
aciers HLE rend ce problème encore plus délicat : comment évaluer la
sécurité des produits pliés par rapport aux profilés du commerce,
comment optimiser la conception (réduire les épaisseurs et améliorer le
guidage des chariots en réduisant les rayons de pliage) ?
Il était donc nécessaire de fournir aux constructeurs des données
quantitatives sur les contraintes résiduelles dans leurs produits actuels,
et des critères permettant de prévoir l’évolution de ces contraintes quand
les paramètres de fabrication varient, afin d’optimiser la tenue à la
fatigue des pièces.

Notre étude a été conduite en trois 2 - MISE AU POINT D’UN ESSAI


temps : REPRÉSENTATIF
Des essais de pliage ont été réalisés dans
1- ÉTUDE DE L’EXISTANT des conditions homogènes et sur quelques
pièces de la phase précédente, afin de
Il s’agissait tout d’abord d’évaluer les états de
déterminer des conditions expérimentales
contraintes dans les fabrications actuelles, et
représentatives.
de les situer par rapport à l’état des profilés
du commerce. Pour cela, quelques pièces
représentatives ont été choisies, et l’on a 3 - ÉTUDE PARAMÉTRIQUE
déterminé les contraintes résiduelles σR en
Des pliages ont été réalisés sur différentes
surface (dix points par pièce), les zones les
nuances, différentes épaisseurs et avec
plus sollicitées, et les gradients de la
différents rayons pliage, afin d’établir l’effet
contrainte dans ces zones.
de ces paramètres.

Centre technique des industries mécaniques www.cetim.fr


ÉTUDE DE L’EXISTANT De ce fait, afin de pouvoir étudier l’influence
des différents paramètres sur les contraintes
Les états de contraintes résiduelles dus au
de pliage uniquement, nous avons décidé
pliage, tels qu’ils affectent les caissons de
pour la suite de l’étude (mise au point d’un
grues fabriquées et utilisées par la
essai représentatif et étude paramétrique) de
profession, ont été évalués sur des tubes
travailler à partir de tôles non grenaillées.
(diamètre 38 et 57 mm) et des tôles (épais-
seur de 4 et 7 mm), sur un échantillonnage
de portions de caissons fournis par un
MISE AU POINT
industriel et représentatifs en termes
d’épaisseur, de rayon de pliage, de nuance
D’UN ESSAI REPRÉSENTATIF
ou de mode de fabrication. L’objectif de cette phase est de réaliser dans
Nous avons déterminé les contraintes des conditions bien spécifiques des pliages
résiduelles soit par diffraction de rayons X sur des coupons d’environ 1 m de longueur.
afin d’examiner l’état en surface, soit par la Dans ce but, on a commencé par réaliser
méthode du perçage incrémental pour en quelques pliages correspondant aux cas
quantifier le gradient suivant l’épaisseur de la étudiés dans la phase précédente, afin de
tôle. valider le procédé, sur des tôles E960 (6 et
L’un des caissons (épaisseur 4 mm) ayant 8 mm) et E700 (4, 6 et 8 mm). Les pliages
subi un sablage de nettoyage, nous avons selon des rayons importants (125 mm,
mesuré le gradient de contrainte hors de la 80 mm) ou à faible rayon (20 mm) ont été
zone de pliage, afin de mettre en évidence réalisés dans des entreprises extérieures.
les contraintes résiduelles introduites par La procédure de pliage, opérée sur des tôles
cette opération. Une mesure par diffraction de 1,25 x 1 m avec un pli suivant le sens de
de rayons X en surface a également été laminage ayant pu être validée, la série
effectuée. complète de pliages permettant de réaliser
On constate que cette opération introduit de l’étude paramétrique a été exécutée.
fortes contraintes de compression en surface
et sur une épaisseur de 0,5 mm. De plus,
cette opération n’étant pas en général bien ÉTUDE PARAMÉTRIQUE
maîtrisée et reproductible (nettoyage des Le programme de pliage est indiqué dans le
pièces par un opérateur), le niveau de tableau 1. Les mesures ont été conduites sur
contraintes dues au grenaillage peut ne pas la face interne et la face externe du pliage.
être identique d’une pièce à l’autre.

Tableau 1 : programme paramétrique.


Nuance Épaisseur (mm) Rayon de pliage
(mm)
125
6 80
20
E960
125
8 80
20
125
4 80
125
6 80
E700 20
125
8 80
20

2
RÉSULTATS Ces contraintes se situent en surface à des
niveaux maximaux de 400 à 600 MPa pour la
Il est difficile de mettre en évidence un effet
direction transversale, et de 50 à 250 MPa
du rayon de pliage sur les contraintes
pour la direction longitudinale.
résiduelles : toutes les courbes obtenues
sont (sauf pour le faible rayon de pliage, que Compte tenu de la géométrie et du mode de
nous évoquerons ci-dessous) assez proches. sollicitation des caissons, on peut estimer
De même, l’influence de la nuance n’apparaît que les contraintes à prendre en compte sont
pas clairement. On peut toutefois noter que les contraintes maximales en traction, en
les contraintes de traction (face interne) sont surface et dans la direction longitudinale.
plus élevées dans le cas de la nuance E960.
En extrapolant les profils en surface pour
Les résultats obtenus ne permettent pas chacune des nuances, des épaisseurs et des
davantage de mettre en évidence une rayons de pliage considérés, il apparaît que
influence nette de l’épaisseur, quelle que soit les contraintes se situent en moyenne autour
la nuance ou le rayon de pliage. de 150 MPa pour la nuance E960, quels que
soient le rayon de pliage ou l’épaisseur.

NIVEAUX DES CONTRAINTES Pour la nuance E700, les valeurs restent


RÉSIDUELLES également dans la fourchette 50 à 200 MPa,
excepté pour le rayon 20 en épaisseur 6 mm
On note globalement la présence de
pour lequel la valeur maximale de traction en
contraintes de traction relativement élevées
surface dans la direction longitudinale est
dans la direction de pliage sur la face interne.
supérieure à 400 MPa.
Ces contraintes sont de l’ordre de 600 MPa
pour la nuance E960 et de 300 MPa pour la En fait, cette valeur est entachée d’une
nuance E690. Si l’on reporte ces valeurs à certaine erreur due à des problèmes
celles des limites d’élasticité, les rapports géométriques : le perçage est réalisé avec
sont de l’ordre de 40 à 60 %. une fraise de 4 mm à l’intérieur d’un V de
rayon 20 mm : il est donc très difficile
On peut comparer ces rapports à ce qui
d’estimer précisément les valeurs en surface,
existe dans la littérature sur des nuances
puisque lors des premiers incréments de
plus classiques de type E360 : les
perçage, la matière n’est pas enlevée sur
contraintes maximales en traction sont de
toute la surface de l’usinage.
l’ordre de 200 MPa pour une limite d’élas-
ticité de 350 MPa, ce qui conduit à un rapport
supérieur à 50 %. Les valeurs obtenues lors PRISE EN COMPTE DES CONTRAINTES
de nos essais sont donc cohérentes avec RÉSIDUELLES
celles trouvées dans la littérature sur des
Quand on examine la sollicitation des
nuances plus courantes.
flèches, il convient de prendre en compte les
contraintes résiduelles, une contrainte
statique correspondant au poids de
PROPOSITION D’UNE DÉMARCHE l’équipement (assimilé à une contrainte
POUR LA PRISE EN COMPTE DES moyenne), et la contrainte de sollicitation.
CONTRAINTES RÉSIDUELLES
La contrainte admissible peut être définie à
Les résultats montrent que, même s’il est l’aide du diagramme de Goodman comme
difficile de mettre en évidence une influence défini ci-dessous (Re étant la limite
nette de la nuance, de l’épaisseur ou du d’élasticité du matériau, Rm sa résistance à
rayon de pliage, il existe dans les zones la traction).
pliées des contraintes résiduelles de traction
qui peuvent influencer la tenue à la fatigue.

3
σD

Re

Rm/2
Droite de
σ admissible Goodman

Re
Rm σ
moyen
σ moyen

CONCLUSION
Le σmoyen est défini comme suit : Dans cette étude, des pliages sur
échantillons, reproduisant l’opération de
pliage sur tôles pour la fabrication de
caissons de grues télescopiques, ont été
réalisés. Cette démarche a permis de réaliser
des pliages sur des tôles de nuances et
d’épaisseurs différentes dans des conditions
∆σ
bien spécifiques de rayon de pliage.
Les résultats ne mettent pas en évidence une

σstatique
σmoyen influence marquée sur l’état de contraintes
résiduelles après pliage, de l’épaisseur ou du
rayon, bien que la gamme de rayons de
σR pliage soit assez large (de 20 à 125 mm).
Toutefois, les contraintes existantes dans les
zones pliées, lorsqu’elles agissent en
traction, peuvent avoir une influence sur la
On peut donc considérer que les contraintes
tenue à la fatigue. Ceci a conduit à proposer
résiduelles de pliage viennent agir comme
une démarche pour prendre en compte les
une contrainte moyenne supplémentaire, et
contraintes les plus sensibles, à savoir les
qu’elles n’ont pas d’effet tant que l’on reste
contraintes superficielles, en traction et dans
dans le domaine sous la courbe rouge
la direction longitudinale.
hachurée.

Ensemble pour les entreprises de la mécanique


Votre contact
Catherine Peyrac
Cetim – B.P. 80067
60304 Senlis Cedex
Tél. (Service Question Réponse) :
03 44 67 36 82

Vous aimerez peut-être aussi