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Le système du complément

Immunologie L2
2011-12
Faculté de médecine Rangueil

Pr Michel Abbal

1
Le système du complément
Système de défense anti infectieux

Elimination des complexes immuns

Générateur et régulateur de l’inflammation

Régulateur de la réponse anticorps (via les lymphocytes B)

et bien d'autres fonctions dont on parle peu

Première description fin du XIX siècle


2
Au XIXème siècle
Vers les années 1890

Sérum animal guéri (donc immunisé)


Frais

Sérum animal guéri


chauffé
Vibrium cholérique
vivant

Sérum animal non immunisé

Sérum animal
Guéri chauffé + sérum de non immunisé

3
Conclusions de cette expérience princeps
Il faut 2 éléments pour produire cet effet :

• Un propre à l’animal immunisé et thermostable :


l’anticorps

•Un présent chez tous les animaux (immunisés


ou non) et thermosensible :
Le complément, celui qui complète l’action de
l’Ac, que l’on croyait précédemment à lui seul
capable de tuer une cible.

4
Le complément = un système très ancien

Un peu plus de 30 protéines forment le système du


complément humain :
•certaines sont sous forme soluble dans le plasma
(et les espaces extra cellulaires)
•D'autres sont fixées à la surface de certaines cellules
(ce sont souvent des récepteurs)

La plus part des domaines fonctionnels de ces protéines sont déjà présents chez les
protostomes, mais leur assemblage n'est présent que chez les deuterostomes .

Le complément des ascidiens montre un degré de complexité (assemblage de différentes


molécules dans un système coordonné) comparable a celui des mammifères.

5
Une nomenclature complexe
(parfois incohérente : historique et non fonctionnelle)
Pour la voie classique : (fractions suivies d’un numéro)
C1 à C3
Pour la voie alterne :
facteurs : B,D,P
Pour le complexe MAC (Membran Atack Complex) :
C5 à C9
Pour les protéines régulatrices des noms spécifiques :
facteur H, I, DAF, MCP
Pour les récepteurs :
CR1, CR2, CR3
Pour les fragments d'activation :
en général : le petit = a et le gros = b

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Quelques Synonymes
CR1 / CD35
CR2 / CD21
CR3 / CD11b CD18
CR4 / CD11c CD18

MCP CD46
DAF CD55
HRF CD59

7
Le système du complément est comme
celui de la coagulation en attente
permanente d'un signal activateur
Il y en a 3 types :
Les anticorps couplés à un Ag
Les collectines (sensibles à des sucres)
Certains produits représentant un danger
Bactériens, viraux, ou dommages

qui empruntent 2 voies d’activation :


la voie classique
voie alterne
8
La cascade d'activation du complément
Chaque fraction
activée génère
Phénomène une protéase qui
initiateur dégrade la
Cn fraction suivante
Cna générant
l’activateur
suivant, d’où le
Cnb terme de
cascade
Cn+1a
Cn+1

Cn+1b
9
Les 3 activateurs et les 2 voies du complément

Immunité innée Immunité adaptative


Danger Collectine Complexe Ag-Ac

vaisseau C3a Chimiotactisme


Anaphylaxie
C3
Tronc commun Opsonisation C3b
inflammation Phagocytose
Mais aussi
C5a
activation des :
PN bactérie
Cellules épithéliales
Phagocytes PN
lymphocytes Cytolyse
C9 (bactériolyse)
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Le détail des différentes voies d’activation
Surface activatrice Mannanes etc.. Complexe Ag-Ac
V a V c C1INH C1q
C3b o l o l
MBL a C4bp
B i t i s
DAF
C4 ++
Mg++ e e e s Ca
D r i C2
q
n u C4bC2a
C3bBb e e

H et I
CR1 C3 C3a
C5a
V c
C5
o o
En encadré les Inhibiteurs
Ou protéines régulatrices
C6 i m
e m
C7
u
S C8 n
HRF e 11
C9
Les complexes antigène- anticorps
(activateurs de la voie classique)
Les complexes
antigène/anticorps
dont l'Ig est :
C1q
IgM
IgG1, IgG2, IgG3

Synergie importante avec l’immunité adaptative

Le sujet déjà immunisé aiyant produit des annticorps se


défendra encore mieux en &activant le complément
13
Les collectines

N acetyl glucosamine
Mannose
MBL
Analogues au C1Q
Ficolines

Parallèle avec les TLRs qui reconnaissent des PAMPs


14
COMPLEXE MBL-MAS C4a COMPLEXE C1Q-1

C4

C4b

C2
C2b

C4b C2a

C3
C3a

C4b C2a
C3b

ACTIVATION DU COMPLEMENT PAR LA VOIE CLASSIQUE 15


Activateurs de la voie alterne

Acide teichoique Produits bactériens (gram + et -)


LPS champignons
Zymosan
Inuline
C3b
Surfaces cellulaires pauvres en charges
négatives (responsables de la non biocompatibilité de
certains produits comme prothèses ou les premières
membranes de dialyse)

16
Le C3 plaque tournante du système
(2 complexes enzymatiques : les convertases classique & alterne)

C3
Bb
C2a

C3b C3b C3b C4b

C3 convertase C3 convertase
alterne classique
La voie classique et la membrane de la cellule cible

Complexe CINH C4a C2b


C3a
C1Q
C1r C5a
C1s
H2O
Ig C9
C4bC2a C3b C5b C6 C7 C8

Membrane
cellule cible

Cascade d’activation Création d’un canal ionique par


polymérisation du C9

27/03/2012 M.Abbal cours complement PII (Vulgairement « un trou ») 18


La cytotoxicité due à C9
Le complexe actif est :
MAC/perforine (C9) pour le complément
(Perforine pour les lymphocytes T)
les deux n'apparaissant que chez les vertébrés
(prognathes).
Ces cytotoxicités de l'immunité (innée et adaptative)
reposent sur le principe de la perforation de la
membrane de la cible. Perforin = pore-forming
protein (perforin).
C’est un mécanisme spectaculaire (in vitro) très rapide
très efficace, mais pas le plus important in vivo !

19
Rôle de défense anti infectieux
Seul et donc en réponse immédiate :
par activation directe de la voie alterne
par activation de la voie classique autre que la
présence d’anticorps

En synergie avec l'immunité adaptative, après activation


par des complexes immuns (Ac IgM ou IgG)

Les mécanismes :

Opsonisation :

Cytolyse (bactériolyse)
20
Chimiotactisme
Opsonisation
Phagocytose
C3b

Polynucléaire
Bactérie

21
Chimiotactisme
Opsonisation
Phagocytose

C3b

22
Complément bactériolyse

Membrane
Anticorps mannanes
bacterinenne

Bactérie

23
Complément bactériolyse

Membrane
Anticorps mannanes
bacterinenne

C9

Bactérie

24
Complément bactériolyse

C9

Bactérie

25
Complément bactériolyse

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Choc hypotonique
Complément et défense anti infectieuse

Bactériolyse
Bactérie + Ig + Complément

Phagocyte
Efficacité cumulée des Ig et du complément pour
faciliter la phagocytose des bactéries

Bactéries

Ig

Complément
(C3b)
Qui est important pour les
défenses anti infectieuses ?
Le fragment C3b
est capital pour l'élimination de nombreux agents
infectieux et de complexes immuns

Le complexe MAC cytotoxique


est moins essentiel
sauf : pour se débarasser des neisseria

29
Qui est le plus efficace
dans les défenses anti bactériennes ?
Cytolyse
bactériolyse
Phagocytose
bactériolyse C9 C9

C3b
Un exemple d'évolution :
le C9

A l’origine des molécules produites par les plantes,


certains bactéries, des poissons, …. pour se
défendre en faisant des trous dans les
membranes d’agresseurs (ou d’agressés).

Dans l’espèce humaine 2 "descendants" :


le C9 du complément
La perforine des lymphocytes cytotoxiques
Un exemple d'évolution :
le C9
Un poisson le "japanese flounder, Paralichthys
olivaceus",
Possède un gène de perforine avec 5 exons
et 4 introns.
L'homologie en acides aminés est de :
36% avec le rat
37% avec la souris.
37% avec l'homme
L’élimination des complexes immuns
grâce au complément
Comme on l’a vu les complexes immuns (le produit de
la fixation d’un Ac sur un Ag) activent le
complément par la voie classique

A leur tour les complexes Ag-Ac revêtus de


complément (C3b) sont liés par le récepteur CR1 du
3b porté par les :
Globules rouges qui vont les transporter
jusqu’aux cellules de Kuppfer qui vont les
phagocyter
Les PN et macrophages qui vont les phagocyter
L’élimination des corps
apoptotiques grâce au complément
Les corps apoptotiques dévoilent au niveau des
fragments membranaires des protéines qui vont
activer le complément et entrainer la fixation à
leur surface de C3 (puis C3b …)

Ces fragments apoptotiques seront transportes


comme les complexes immuns vers des cellules
phagocytaires, mais aussi captés par certaines
cellules présentatrices.
Complément et inflammation
L’inflammation est un puissant moyen de
défense par ses effets vasculaires
tissulaires cellulaires

Le complément par le biais du C3 surtout et


de ses produits de dégradation active les
cellules porteuses des récepteurs CR1, 2,
3 et 4 qui produisent entre autre de
nombreuses cytokines pro-inflammatoires
Un système à réguler

Efficace (à tempérer parfois)


Précieux (à économiser)
Potentiellement dangereux : (inflammation)

Donc à réguler grâce à :


des inhibiteurs des voies d’activation
de certaines effecteurs
Le complément et régulation de la
production des anticorps

antigène C3d antigène

CD21

CD19
S S
S S
Membrane
I
T
cellulaire
A
M

37
Transduction du signal
Grand polymorphisme
Des allèles :
Plus ou moins actifs
Sans grandes conséquence pathologiques
(susceptibilité lupus)
Des déficits
Parmi lesquels
Le déficit en C2 et C4 (auto-immunité)
Beaucoup d’autres
Le déficit en protéines régulatrices
C1INH (angioedemes)
C4bp (HNP)
H et I (SHU)
Exploration
et déficits
(fera l’objet d’un ED)

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Exploration du complément in vitro
Plasma ou sérum :
condition contraignantes d’acheminement du prélèvement
au labo (froid)
Mesure de l’activité cytotoxique (formation du complexe MAC)
par la voie classique (la voie alterne est rarement explorée)
Résultats exprimés en Unités : UCH50
taux très différents d’un laboratoire à l’autre
A Toulouse taux normal environ 400 U CH50
Dosage pondéral des fractions
C4 C3 Bf en routine
Dosages fonctionnels (laboratoires très spécialisés) 40
Interprétation des résultats
taux élevé = inflammation
taux abaissé =
déficit congénital
ou
déficit acquis (consommation)

Cas particulier du déficit en C1Inh


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Dosages "courants"
Taux normaux :
C3 : 0,70 à 1,50 g/l
C4 0,15 à 0,40 g/l
Facteur B 0,20 à 0,40 g/l
activité : selon norme du laboratoire
ACTIVITÉ C3 C4 BF INTERPRÉTATION
(CH50)
NORMAL NORMAL NORMAL NORMAL NORMAL

AUGMENTÉ AUGMENTÉ AUGMENTÉ AUGMENTÉ INFLAMMATION

DIMINUÉ NORMAL NORMAL NORMAL ARTEFACT (MAUVAISE CONDITIONS DE


TRANSPORT
TRÈS NORMAL NORMAL NORMAL DÉFICIT EN FRACTIONS AUTRE QUE C3
DIMINUÉ C4 OU FACTEUR B)

DIMINUÉ DIMINUÉ DIMINUÉ NORMAL ACTIVATION CLASSIQUE IN VIVO


(ex : LUPUS ..)
DIMINUÉ NORMAL DIMINUÉ NORMAL DÉFICIT EN C1INH

42
Déficit en molécules du
complément

Congénitaux (fréquents)
Acquis (rares)

43
Déficits congénitaux du Complément
Manifestations :
totalement asymptomatique ou engageant le
pronostic vital !
Déficit en fractions initiales C1, C2 (homozygote 1/10000), C4 :
- manifestations auto-immunes (lupus cutané,
glomérulonéphrite, vascularite)
- infections à pyogène (rares)
Déficit en C3 et sa molécule régulatrice I :
- infections à pyogène graves
Déficit en C5, C6, C7 : infections à neisseria
- méningite récidivante diagnostic capital !
Déficit en facteur H et I: glomérulonéphrites et SHU
Déficit en DAF : HNP Hémoglobinurie Nocturne
44
Paroxystique
Rôle possible dans le lupus

Mauvaise élimination des complexes immuns :


•Le transport normal est assuré en partie par les Globules
Rouges grâce au récepteurs pour le C3b, et l’échange est
fait dans dans le foie (Kuppfer) et dans la rate avec les
cellules phagocytaires.
• le transport et donc l’élimination sont altérés en cas dz
déficit en fractions initiales C2 et C4
•Dépôts au niveau de la peau et des glomérules

•Mauvaise élimination des corps apoptotiques par


fixation directe du C1q
45
Hémoglobinurie Nocturne Paroxystique

Déficit en molécule d'ancrage membranaire pour :


le DAF ( CD55)
et HRF ou protectine (CD59)

Déficit rarissime en :
DAF
Les GR ne sont pas protégés contre l’effet lytique
du complément

Premier succès d’une thérapeutique anti-


complément : l'anti C5 (eculizumab)

46
Syndrome Hémolytique Urémique
Rappel : I clive C3b en Cbi,
MCP est le cofacteur membranaire et H le
cofacteur soluble

SHU = forme de MAT avec :


insuffisance rénale aigue
anémie avec shizocytose
thrombopénie

Sous groupe de SHU par :


déficit génétique en :
Facteur H
Facteur I
MCP (CD46)
auto Ac anti H
47
L’angioedème par déficit en
C1Inh
Autrefois inclus dans les Œdème de Quincke :
terminologie historique couvrant des pathologies diverses parmi
lesquelles celle qui nous intéresse

OANH Œdème Angio Neurotique Héréditaire


terminologie dépassée encore souvent utilisée de nos jours

Le vocable approprié : Angiœdème par déficit en C1INH

Regroupement actuel dans les angioedèmes bradykiniques

48
Les serpines
Site actif

C1Inh 49
Anti thrombine III
Activité comparée d'inhibiteurs de
protéases
Inhibiteurs de Ser-Protéase (serpin)

Ser- C1Inh a2 anti a2 macro a1 anti


Protéases plasmine globuline trypsine
C1r & C1s 100 % - -
Facteur XIIa 90 % 3% 5% -
Kallicréine 42-84 % - 16-58 % -
Facteur XIa 47 % - - -
Plasmine ?% 64-89 % 7-23 % -

50
Les particularités de cet Angiœdème
Maladie rare
1 / 50 000 classé de ce fait comme maladie orpheline

Maladie méconnue, errance diagnostique d'ou un retard de diagnostic


d'une dizaine d'années.
du fait de sa rareté
du fait de la confusion de l'expression clinique avec de l'allergie
du fait de la guérison spontanée en quelques jours sans
séquelles faisant croire au succès de thérapeutiques
pourtant inefficaces comme les corticoïdes.

Maladie héréditaire autosomique dominante, mais 30% de cas de Novo

Des formes cliniques particulières

51
Mutations du gène C1Inh
Exon (chromosome 11 q12-q13.1)

Intron

+ + + ++ +
+ ++ +++ + ++ ++ ++++
Plus d'une centaine de mutations différentes décrites
Clinique de cet angioedème
Œdème cutanéo muqueux isolé
d'apparition brutale
parfois provoqué (cause mécanique : frottement, pression, coup)
non douloureux (au niveau du visage et de la peau)
non prurigineux
non inflammatoire
non hémorragique
Localisation
n'importe ou dans le territoire cutané ou muqueux visible, asymétrique
contours bien délimités
profond :
digestif mésentère douleurs +++, occlusion, vomissements
laryngé : risque majeur (risque de décès)
L'expression clinique
très variable dans le temps et dans sa gravité, impression que dans
une même famille le tableau est comparable
Evolution
guérison spontanée en 3 jours environ sans séquelles
mais risque vital (œdème laryngé) si pas traité
53
Clinique de cet angioedème
Fréquence : environ 1/50 000 - Début : après 8 ans
Œdème cutanéo-muqueux, non prurigineux, insensible
aux corticoïdes :
- fréquence des crises très variable, extrêmes :
1/semaine, 1/an
- facteurs mécaniques déclenchants fréquents
- localisation particulière pour chaque patient ou
famille de patient
- œdème laryngé : risque majeur
- durée : 2 à 3 jours
- rémission sans séquelles( si pas décès)
Douleurs abdominales > 95% des malades
54
55
Diagnostic biologique du déficit en C1Inh
Dosage de l’activité du complément (voie classique)
activité abaissée
Dosage du C1Inh
pondéral
valeurs normales 260 à 360 mg/l
taux pathologiques
dans le type I : < normale
dans le type II : N ou
fonctionnel
dans le type I
(dosage inutile puisque le taux est abaissé)
dans le type II
< 70% de la valeur normale souvent 10%
Ces valeurs sont celles observées au cours de la crise ; en
dehors d’elle les valeurs peuvent être subnormales ! 56
Assez souvent
N
o
r
m
a
l

Normal Type I Type II

CH50C4 C1Inh C1Inh fonctionnel


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Plasmine & contact Impacts thérapeutiques
Acide tranexamique
DX-88

Danazol
XII *C1Inh XIIa

*C1Inh

Hépatocyte
Macrophage
Fibroblaste
PréKallicreine Kallicreine

*C1Inh

Kininogene Bradykinine

*C1Inh Icatibant

* C1Inh naturel ou recombinant


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Récepteur BK2R de la cellule endothéliale
Les déficits par auto-anticorps (rares)

Anti C1q :
lupus avec atteinte rénale
HUVS (Hypocomplementemic urticarial vasculitis syndrome)
angio œdème
(explique faux + techniques détection CIC)
C3nef :
auto Ac qui stabilise et augmente la durée de vie de la C3
convertase alterne (=> hypocomplémentémie).
=> glomérulonéphrites
=> lipodystrophie
=> lupus
Anti C1Inh
Angio oedème

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Traitements des anomalies du
complément en général
A ce jour pas de traitement inhibiteur médicamenteux
classique
Mais des perspectives ciblant C3 et C5
Une application l’anti C5 monoclonal dans le TTT de
l’hémoglobinurie nocturne paroxystique
Des essais en transplantation rénale

Pas de traitement substitutif dans les déficits


sauf pour le C1inh

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