3,00 € samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021 le figaro - N° 24 010 - www.lefigaro.

fr - France métropolitaine uniquement Première édition

lefigaro.fr
« Sans la liberté de blâmer, il n’est point d’éloge flatteur » Beaumarchais

repOrtaGe parIS 2024

la prOdUCtION d’hUIle À 1 000 jOUrS de l’OUVertUre,
d’OlIVe, UNe NOUVelle Où eN SONt leS ChaNtIerS
paSSION FraNçaISe PAGE 15 OlyMpIqUeS PAGE 13

Climat : un sommet pour

DrOiTE
l’affiche
du congrès

remobiliser le monde
se précise
PAGE 6

POLOgNE
le parlement
européen vise
Varsovie Repoussée d’un an en raison de la pandémie de Covid, la COP26 s’ouvre dimanche à Glasgow,
en Écosse. Objectif : obtenir des engagements concrets pour limiter le réchauffement à + 1,5 °C.
PAGE 7

CONjONCTurE
Au moment de l’accord de serre et formuler de nou- comptes. Et ils ne sont pas l’élection de Joe Biden à la de l’urgence climatique.
la France en route Paris, en 2015, les nations veaux engagements, plus bons : le monde est encore tête des États-Unis était Quant à la Chine, premier
vers une croissance s’étaient donné cinq ans ambitieux. Avec un an de re- loin d’une trajectoire com- porteuse d’espoir, le prési- émetteur mondial, elle reste
record pour faire le point sur leurs tard, pandémie oblige, le patible avec les objectifs for- dent n’a pas encore su toujours réticente à accélé-
PAGES 20 Et 21 émissions de gaz à effet de temps est venu de faire les mulés lors de la COP21. Si convaincre son propre pays rer sa transition.

éNErgiE è QUeLs sONt Les gaz à effet De seRRe et COmmeNt RéChaUffeNt-ILs La pLaNète ? è La ChINe peU pRessée De RéDUIRe ses émIssIONs è pOmpILI : « IL faUt sORtIR De La
RhétORIQUe De La DeRNIèRe ChaNCe » è Le pRésIDeNt améRICaIN aRRIVe Les maINs VIDes à gLasgOw è BORIs JOhNsON CRaINt UN éCheC Des NégOCIatIONs pAGes 2 à 5
edF perd
400 millions
en spéculant
sur le marché
de l’électricité Parents
PAGE 25
et psys
mémOirE
requiem pour
inquiets face
les chanteurs aux enfants
oubliés
PAGES 28 Et 29 qui veulent
heUre d’hIVer changer
Dans la nuit
de samedi
à dimanche,
de sexe
à 3 heures, il Qu’ils soient compréhensifs
sera 2 heures ou plus réfractaires, parents
et professionnels craignent
de voir enfants et ados pren-
Vidéo- dre des décisions aux consé-
Champs lIbRes

luDoVic marin/aFP

Après la crise des sous-marins, Biden et Macron

n

surveillance : quences irréversibles en en-

tamant une transition de
un entretien
avec Gaspard affichent leur entente retrouvée genre. Chez les jeunes, à
l’école et sur les réseaux so-
Koenig et la ciaux, une révolution des
À Rome, le président américain a regretté une « maladresse » des États-Unis, vendredi, manifestant ainsi sa volonté de identités est en cours.
tribune de de PAGES 10 à 12 Et l’éditoriAl
tourner la page lors de sa première rencontre avec le chef de l’État français depuis la brouille de l’affaire Aukus. PAGE 8
Nicolas Bouzou
n
la chronique
de Mathieu édItOrIal par Laurence de Charette ldecharette@lefigaro.fr
Bock-Côté

Confusion des genres

n
la tribune
de Stéphane

I
rozès
PAGES 16 Et 17 l n’y a pas si longtemps, l’un des pères raient plus des réalités mais des « catégories »
de la théorie du genre, le Canadien non exhaustives – il faut reconnaître aux

@
FIGARO OUI
FIGARO NON
Réponses à la question
de vendredi :
Le gigantisme de
Facebook est-il une
menace pour les libertés ?
NON
11 %
TOTAL DE VOTANTS : 127 443
Votez aujourd’hui
sur lefigaro.fr
Pensez-vous que
la COP26 va permettre de
3’:HIKKLA=]UXUUW:?l@a@d@k@a";
Christopher Dummitt, jetait un pavé
dans la mare en confessant avoir falsifié
ses travaux pour faire allégeance aux
déconstructivistes de tout poil de qui dépen-
dait sa carrière. En quelques phrases, l’histo-
rien repenti, pris de frissons devant l’expan-
sion d’un mouvement dont il connaissait
intimement les errements et la dangerosité,
avait dévoilé les grosses ficelles de cette idéo-
OUI logie mortifère importée des États-Unis : étu-
des spécieuses, puis intimidations, censure et
89 % harcèlement à tous les étages… au service
d’un endoctrinement de masse qui ne sup-
porte aucune contradiction. Ce salutaire mo-
ment de vérité ne fut malheureusement que
de très courte durée ! La fureur de la décons-
truction étend chaque jour son emprise.
Voici nos écoles gagnées par la « question
contempteurs de la « binarité arbitraire » une
inventivité hors norme - un nombre crois-
sant d’adolescents engage une « transition »
d’un sexe à l’autre à coups de médicaments
ou de chirurgie. Comment ne pas s’en alar-
mer ? Gare, pourtant, à ceux qui osent s’in-
quiéter du caractère irréversible de telles in-
terventions ! Le
Fureur de la procès en « pho-
déconstruction bie » n’est jamais
loin. L’injonc-
tion au « respect » est si forte que Jean-Michel
Blanquer lui-même s’est fendu d’une circu-
laire évoquant la « non-congruence entre le
genre de naissance et le genre vécu ». Un jour,
sans doute, des voix s’élèveront pour exiger,
entre autres, la réécriture du célèbre poème
de Rudyard Kipling, Tu seras un homme, mon

limiter le réchauffement trans » qui fait de chacun un être « non binai- fils (l’expression « personne sans utérus » se-
climatique ? re », ou « fluide », qu’il est devenu quasi cri- rait, paraît-il, moins offensante…). Et il n’est
minel d’oser qualifier d’après sa biologie. pas certain qu’il se trouvera encore assez de
M 00108 - 1030 - F: 3,00 E

Guillaume mollaret; SoliDeo / Dans ce contexte où, par une sorte de mysti- résistance pour défendre, face aux délires
Kreaction / VerGély architecteS /
Béal & BlancKaert architecteS / fication du réel, le sexe devient une affaire de victimaires qui gagnent la planète, l’accom-
atelier Gontier / Ghotmeh choix personnel, un questionnement tou- plissement de l’être dans les limites du monde
architecture/ lePenuel
architecteS / chaix & morel et jours ouvert où hommes et femmes ne se- plutôt que dans la course aux droits. ■
aSSociéS / triPtyque
NOUVELLE BR 05 GMT
AND : 3,20 € - BEL : 3 € - CH : 4,20 FS - CAN : 5,70 $C - D : 3,60 € - A : 3,60 € - ESP : 3,20 € - Canaries : 3,20 € - GB : 2,90 £ - GR : 3,40 € - DOM : 3,20 € - ITA : 3,30 €
A

LUX : 3 € - NL : 3,40 € - PORT.CONT : 3,30 € - MAR : 23 DH - TUN : 4,40 DT - ZONE CFA : 2.400 CFA ISSN 0182.5852
 samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021 le figaro
2 l'événement
Les À Glasgow, un sommet pour
remobiliser le monde sur le climat
décideurs
politiques qui
se réuniront
lors de la COP26
à Glasgow Cinq ans après l’accord de Paris, les engagements pris par les pays restent encore
sont appelés largement insuffisants pour tenir l’objectif de limiter le réchauffement en dessous de 1,5 °C.
d’urgence
à apporter
des réponses
efficaces
à la crise
écologique anne-laure frémont
actuelle et £@alaurefremont
à offrir ainsi un
LA 26E CONFÉRENCE mondiale
espoir concret sur le climat (COP26) va s’ouvrir
aux générations dimanche à Glasgow dans un
futures »
le pApe FrAnçois
contexte difficile. Repoussé d’un
an en raison de la pandémie de
Covid-19, c’est le rendez-vous le
dAns un messAGe vidéo plus attendu depuis l’accord de
Adressé à lA BBc, Paris conclu à l’issue de la COP21
le 29 octoBre en 2015. Il avait alors été fixé com-
me objectif ambitieux de limiter à
un niveau bien inférieur à 2 °C, de
préférence 1,5 °C, le réchauffe-
+1,1 °C ment de la planète par rapport à
son niveau préindustriel. Chaque
État avait alors été appelé à définir
Hausse ses propres objectifs en termes de
réduction des émissions de gaz à
de la température moyenne effet de serre (les fameuses
à la surface du globe « contributions déterminées au
depuis la fin niveau national » ou CDN) et à les
du XIXe siècle
mettre à jour tous les cinq ans.
Après une série de « conférences
Le fonctionnement de l’effet de serre
La lumière du Soleil réchauffe Les gaz à effet de serre
1 2
Soleil le sol, qui réémet une partie (vapeur d’eau, CO2,
de cette chaleur sous forme méthane, etc.) absorbent
de rayonnement infrarouge ce rayonnement et en
(invisible à l’œil nu). réémettent une partie
dans toutes les directions.
Dioxyde
de carbone
CO2
1 sortir de ce sommet avec un
L’effet de serre est vital : sans lui, la Terre serait un monde glacial. Toutefois, les activités humaines contribuent à une augmentation de la concentration
des gaz à effet de serre, ce qui provoque une hausse très rapide des températures, avec de nombreux effets délétères (hausse du niveau des océans,
fonte des pôles, augmentation des événements extrêmes : sécheresses, inondations, ouragans, etc.).
Quels sont les gaz à effet de serre et comment réchauffent-ils la planète ?
marc cHerKI mcherki@lefigaro.fr réchauffement qui dépend de sa
chimie et de son temps de résidence
dans l’air. Le premier d’entre eux,
Sans atmosphère, la Terre ne serait par ordre d’importance, est la vapeur
qu’une boule gelée. C’est la présence d’eau. Mais le volume global d’eau
de gaz à effet de serre qui permet de contenu dans l’atmosphère reste sta-
conserver une grande partie de ble avec le temps : son impact est
l’énergie qui nous vient du Soleil. donc négligeable pour expliquer l’ag-
Mais comment cela se passe-t-il ? gravation de l’effet de serre. Les
Chauffée par le Soleil, notre planète
réémet une partie de cette énergie
scientifiques ont démontré ces der-
nières décennies que la variabilité du
- en particulier la nuit - sous forme de climat était liée à la concentration du
rayonnement infrarouge. Les gaz à dioxyde de carbone (CO2) et à celles
effet de serre vont absorber ce rayon- d’autres gaz (méthane, protoxyde
nement et en réémettre une partie d’azote, chlorofluorocarbones, etc.)
dans toutes les directions. Une part émis par les activités humaines.
va être captée par d’autres gaz à effet
de serre et ainsi de suite (voir infogra- La hausse s’accélère
phie). Au final, la Terre est envelop- Le CO2 provient principalement de
pée dans une sorte de couverture la combustion d’hydrocarbures
chauffante qui recouvre le sol et les (pétrole, gaz naturel, etc.) qui sont
mers et fait grimper la température. restés confinés dans le sous-sol
A
Chaque gaz qui entre en jeu dans pendant des dizaines voire des cen-
l’effet de serre a sa propre capacité de taines de millions d’années. Lorsque
des parties » déjà tombées dans
l’oubli, la COP26 doit ainsi mar-
quer la fin d’un premier cycle et le
début d’un nouveau. Plus de 120
dirigeants (le président Emmanuel
Macron y sera lundi, de même que
l’Américain Joe Biden ou l’Indien
Narendra Modi), délégations, en-
treprises, experts, activistes et
médias des quatre coins du mon-
de, seront réunis sous la présiden-
ce britannique qui a affiché son in-
tention de faire de l’événement un
succès diplomatique (lire page 5).
Il y a du pain sur la planche. Pour
le moment, le monde est encore
loin d’une trajectoire qui permet-
trait d’atteindre la neutralité car-
bone d’ici 2050, un prérequis
pourtant indispensable pour espé-
rer limiter le réchauffement en
dessous de ce seuil de 1,5 °C.
« Quand je vois à quel point nous
sommes loin de là où nous devrions
être, je suis profondément inquiet »,
a même asséné le secrétaire général
de l’ONU Antonio Guterres. Le
Programme des Nations unies pour
l’environnement en a rajouté une
couche mardi en annonçant que les
engagements de réduction des
émissions actuelles de gaz à effet de
Ces infrarouges rayonnés
3 4
sont à nouveau absorbés
par d’autres molécules
de gaz à effet de serre,
qui en réémettent une
partie, et ainsi de suite.
Vapeur d’eau
H2O
2 CH4
ces hydrocarbures sont brûlés, de
nombreuses molécules de CO2 sont
émises dans l’air, ce qui déséquilibre
la machine climatique. Les méca-
nismes sont bien connus et modéli-
sés. L’histoire de la concentration
dans l’atmosphère du CO2 est
connue grâce aux bulles d’air pié-
gées dans des glaces de l’Antarcti-
que. Des carottages profonds ont
permis de reconstituer l’histoire du
climat sur plus de 800 000 ans et de
donner des précisions sur plus de
2 millions d’années. La concentra-
tion actuelle du CO2, à 413 ppm
(parties par million de molécules
d’air) est un record absolu sur cette
longue période. La hausse s’accélère
depuis les années 1970 et plus enco-
re ces dix dernières années.
Par rapport à la moyenne consta-
tée entre 1850 et 1900, la Terre est
aujourd’hui plus chaude de 1,1 °C.
Plus des deux tiers de cette hausse
serre des pays devraient être plus d’au moins +2,7 °C. « Un aller simple
de sept fois plus ambitieux pour es-
pérer atteindre cet objectif.
vers le désastre », résume Antonio
Guterres. Incendies monstres en
FABRICE COFFRINI/AFP
À ce jour, seuls trois quarts des Californie, canicule sans précédent
pays (qui ne représentent à eux tous
qu’un peu plus de la moitié des
au Canada, inondations spectacu-
laires en Allemagne ou en Belgi-
émissions mondiales) ont fait par- que… L’année passée a une nouvelle
venir des mises à jour de leur CDN.
Premier émetteur mondial, la
fois illustré l’ampleur de l’urgence.
Les scientifiques martèlent que cha-
Chine est certes venue gonfler les que fraction de degré supplémen-
Quand je vois rangs de cette liste jeudi en soumet- taire amplifiera la fréquence et
à quel point tant de nouveaux engagements cli- l’ampleur des catastrophes.
nous sommes matiques, mais il ne s’agit en réalité Il y a donc urgence à remobiliser
loin de là
où nous
que d’une reformulation d’objectifs
déjà annoncés, à savoir atteindre un
pic d’émissions « avant 2030 » et la
le monde sur l’enjeu climatique.
Parmi les grands dossiers qui se-
ront sur la table, la question du fi-
neutralité carbone « avant 2060 » nancement climat sera sans doute
devrions être, (lire page 4). Tout comme son ho- la plus explosive. En 2009, les pays
je suis mologue russe Vladimir Poutine, le les plus riches s’étaient engagés à
profondément président chinois a d’ailleurs décidé verser 100 milliards de dollars par
inquiet » de snober la COP. Il ne participera
pas plus au G20 qui se déroule ce
an jusqu’en 2025 à aux pays en dé-
veloppement, afin de les aider à la
Antonio Guterres,
secrétAire GénérAl
de l’onu
week-end en Italie, où le climat est
aussi à l’ordre du jour.
À ce rythme, les émissions ac-
fois à réduire leurs émissions et à
s’adapter aux conséquences du
changement climatique (sécheres-
tuelles de gaz à effet de serre de-
vraient croître de 16 % d’ici à 2030,
ses à répétition, érosion côtiè-
re, etc.). Mais la promesse n’a pas
alors qu’elles devraient au contraire été tenue : l’aide n’atteignait que
baisser de 45 % pour respecter l’ob- 79,6 milliards en 2019, selon les
jectif fixé par l’accord de Paris (voir derniers chiffres publiés par
infographie page 4). Le monde se di- l’OCDE, qui prévoit que les
rige plutôt vers un réchauffement 100 milliards ne seront atteints
qu’en 2023. Les États-Unis ont fait
un certes fait un grand pas en avant
en annonçant doubler leur engage-
ment (11,4 milliards de dollars
Au final, seul 5% en 2024) mais le dossier risque fort
de cristalliser les tensions entre le
du rayonnement infrarouge
émis par la Terre repart Nord et le Sud qui ont été entre-
temps accentuées par les inégalités
dans l’espace, le reste
d’accès au vaccin anti-Covid. Sans
étant piégé dans les sols, compter que « cette crise sanitaire a
les océans et l’atmosphère. révélé la capacité des pays riches à
mobiliser des milliards et des mil-
liards pour leur économie », rappelle
Pierre Cannet de l’ONG WWF.
Comment mieux encadrer la fi-
nance climat ? Comment aider plus
3 Méthane 4 ESPACE efficacement les pays les plus vul-
nérables à faire face au change-
ment climatique ? Faut-il donner
davantage ? « Les 100 milliards vont
mobiliser beaucoup de temps de dis-
cussions », prévoit ainsi Lola Valle-
jo, directrice du programme climat
de l’Iddri. Cette COP est aussi cen-
sée définir le mode d’emploi plus
concret de l’accord de Paris, no-
tamment sur les questions de
ATMOSPHÈRE transparence dans l’évaluation des
engagements de chaque partie, ou
sur le fonctionnement des marchés
carbone.
Faire de la COP26 un succès « ne
sera certainement pas facile », a
ainsi estimé Patricia Espinosa, la
Source : Columbia climate school
responsable climat de l’ONU, mais
« message d’espoir » est une « né-
cessité absolue ». Si les signaux sont
TERRE loin d’être positifs, un cap a été
franchi depuis la COP21 : la lutte
contre le réchauffement climati-
que reste l’un des seuls sujets sur
lequel le monde parvient encore à
Infographie se réunir autour d’une table. ■
proviennent uniquement du CO2, Terre mais ne subsiste heureusement
note le Giec (Groupe d’experts inter- que vingt ans. Il se décompose peu à
gouvernemental sur l’évolution du peu sous forme d’autres gaz à effet de
climat). La moitié du CO2 émis cha- serre beaucoup moins puissants
que année subsiste pendant plus d’un (ozone, vapeur d’eau et CO2). Des né-
413
siècle dans l’air (l’autre moitié est gociations à la COP26 sont donc at-
captée par l’océan, les plantes, les fo- tendues sur ce gaz pour diminuer le
rêts et le sol). La machine climatique pic du réchauffement. Par ailleurs, le
est comme une locomotive lancée à protoxyde d’azote, émis par l’usage
ppm pleine vitesse : elle a une grande iner-
tie et sera difficile à freiner. Par
d’engrais azotés dans l’agriculture, a
un pouvoir de réchauffement 300 fois
Concentration du CO2 ailleurs, au rythme actuel de supérieur à celui du CO2. Ce gaz,
en parties par million consommation d’hydrocarbures, d’une durée de vie de 120 ans dans
de molécules d’air, nous aurons dilapidé dans dix ans le l’air, contribue à 6 % au réchauffe-
un record absolu budget carbone dont nous disposons ment anthropique.
jusqu’à la fin du siècle pour limiter le D’autres gaz (dioxyde de soufre,
réchauffement en dessous de 1,5 °C… oxydes d’azote) et certains aérosols
Le méthane est le deuxième gaz (carbone suie, cendres volcani-
responsable de l’effet de serre (17 %). ques, etc.) ont au contraire un effet
Sa concentration est 200 fois moins inverse : ils bloquent ou atténuent le
élevée que celle du dioxyde de carbo- rayonnement solaire sur la Terre et
ne, mais il a un pouvoir réchauffant agissent comme de mini-parasols.
85 fois supérieur à celui du CO2. Il ab- Mais dans ce bilan, l’impact du CO2
sorbe mieux le rayonnement de la reste largement prépondérant. ■
 samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021 le figaro

4 l'événement
La Chine peu pressée de réduire ses émis
Si le pays a promis d’atteindre la neutralité carbone « avant 2060 », cette marche se fera à pas lents au moins jusqu’en

l’UE, des États-Unis et des ONG.
S’il participera finalement en vi-
déo au G20 du week-end, le diri-
geant de la seconde économie
mondiale n’a pas quitté l’empire
du Milieu depuis le début de la
SÉbASTIEN FALLETTI £@fallettiseb pandémie de Covid, barricadée
CORRESPOndAnt En ASIE
derrière sa grande muraille de
quarantaine. Les diplomates com-
L’OMBRE évanescente de Xi me la presse chinoise restent
Jinping planera sur le sommet cli- muets sur cette absence attendue à
matique mondial de Glasgow. Sauf la COP26. Si l’impératif de la sûre-
surprise, le président chinois ne té sanitaire et le calendrier de po-
fera pas le déplacement jusqu’en litique intérieure, marqué par un
Écosse, pour participer à la COP26 plénum du Parti communiste dé-
aux côtés des 120 dirigeants du but novembre à Pékin, l’empor-
monde entier attendus au tour- tent, l’absence de représentation
nant, plombant les perspectives au plus haut niveau de la Chine
d’une contribution plus ambitieu- amoindrit l’espoir d’une percée à
se du premier pollueur mondial, Glasgow afin de contenir le ré-
malgré les appels insistants de chauffement planétaire à 1,5 °C.
Pékin a déposé jeudi sa nouvelle vrait s’en tenir à l’objectif d’un pic souverain et reste déterminé à
feuille de route pour le climat d’émissions « avant 2030 », selon poursuivre son développement
(NDC) auprès de l’ONU, offrant de une longue marche patiente, bien économique. Toujours accro au
maigres avancées par rapport à ses loin de la cible de 2025 espérée par charbon et pris dans un contexte
engagements pris à Paris en 2015 Greenpeace. Xi met le cap sur le de crise énergétique croissante, le
et laissant sur sa faim les experts et long terme. Le pays assure vouloir pays devrait repousser le gros des
militants qui appellent à un coup atteindre la neutralité carbone efforts environnementaux à l’ho-
de frein rapide de ses émissions « avant 2060 » ce que le président rizon 2040 et 2050, malgré les
qui représentent aujourd’hui 27 % chinois pourrait appuyer lors pressions de Bruxelles et
du CO2 émis par l’humanité. « Au d’une possible intervention par Washington. « Il ne faut pas s’at-
vu des incertitudes économiques in- vidéoconférence à Glasgow. « Cela tendre à de nouveaux engage-
térieures, le pays apparaît hésitant requiert un dur travail, mais nous ments. La Chine a commencé sa ré-
à prendre des engagements plus ferons tout le nécessaire pour at- volution énergétique, et elle est déjà
forts à court terme, et a manqué teindre ces objectifs », avait déclaré au-delà de ce qu’elle peut faire »,
une opportunité de démontrer son le président à l’Assemblée généra- juge Dabo Guan, chercheur à
ambition », a réagi Li Shuo, repré- le de l’ONU, en septembre. l’Université Tsinghua, à Pékin.
sentant de Greenpeace en Chine, L’empire du Milieu est confron-
sur Twitter. La Chine, dont 56 % Grave crise énergétique té depuis plusieurs semaines à la
de l’énergie provient toujours du Le régime communiste, réticent à plus grave crise énergétique de-
charbon, résiste à un grand bond toute ingérence internationale, puis des décennies, marquée par
en avant environnemental et de- compte s’en tenir à son calendrier des coupures d’électricité massi-

La Chine et les États-Unis sont les deux plus gros émetteurs Le grand écart des émissions de CO2 dans le monde
ÉMISSIONS DE CO2 D'ORIGINE FOSSILE EN 2019, en milliards de tonnes de CO2/an
Émissions de co2
50 Trajectoire compte tenu
Canada des promesses actuelles
Allemagne Pologne 1,7
0,6 Russie Impact Trajectoire nécéssaire
des engagements pour limiter le réchauffement
Roy.-Uni 0,4 0,3
0,7 actuels climatique
5,3 France Turquie 40
0,3
États-Unis 0,3 Le groupe d’experts Climate action
0,4 10,2 1,1 Japon tracker (CAT) calcule un écart
Italie Chine 0,6
0,8 Objectif de l'accord de 20 à 23 milliards de tonnes
Arabie 0,6
0,4 Mexique saoudite Corée du Sud de Paris +1,5°C de CO2/an (GtCO2), en 2030
2,6
Inde 30 par rapport aux émissions
du scénario des engagements
Brésil Iran 0,6 Indonésie et des objectifs nationaux
0,5 annoncés.
26 GtCO2
Australie
0,4
0,5 Afrique du Sud 20
1990 2000 2010 2020 2030

CHINE ÉTATS-UNIS UNION EUROPÉENNE INDE

En Gt CO2 / par an En Gt CO2 / par an En Gt CO2 / par an En Gt CO2 / par an
Variation Impact
18 entre 1990 et 2020 des engagements 8 - 6% 5 - 35 % 4
actuels
+ 280 % 7 + 150 %
14 4
3
6
10 3
Objectif 5
2
6 de l'accord 2
de Paris +1,5°C 4
Émissions de co2 1 1
2 3
1990 2000 2010 2020 2030 1990 2000 2010 2020 2030 1990 2000 2010 2020 2030 1990 2000 2010 2020 2030
Sources : climate action tracker, Global carbon atlas Infographie

Barbara Pompili : « Il faut sortir de la rhétorique de la dernière chance qui

LE FIGARO.- Partagez-vous le pessimisme J’ai à titre personnel une forme d’enthou- l’ennemi public numéro un du climat, gements de baisse d’émissions d’ici
PROPOS RECUEILLIS PAR
ANNE-LAURE FRÉMONT ambiant sur l’échec annoncé de la COP26 ? siasme lucide car on voit que ces moments c’est le charbon. Une centrale émet autant à 2030 comme la France et l’Union euro-
£@alaurefremont Barbara POMPILI. - Il faut qu’on sorte de permettent de faire bouger les lignes. Ce qu’un million de voitures thermiques. Je péenne l’ont fait. Le président indien
ET TRISTAN QUINAULT-MAUPOIL la rhétorique de la dernière chance, qui rendez-vous a déjà permis des avancées : reste aussi lucide, car les engagements vient à la COP, j’espère qu’il en profitera
£@TristanQM enferme dans une logique de couperet et on a obtenu en mai que les pays du G7 ar- pris par les 148 pays sur les 192 (qui ont si- pour annoncer des ambitions rehaussées.
d’échec. C’est une COP de l’action, de la rêtent de financer de nouvelles centrales à gné l’accord de Paris), ne représentent Il faut des engagements rassurants sur
Barbara Pompili est ministre de la Transi- mise en œuvre de la COP21. Quelle que charbon à l’export ; en septembre, la que 60 % des émissions de gaz à effet de l’aide financière, notamment sur les
tion écologique. soit son issue, nous continuerons à agir. Chine s’est engagée dans la même voie. Or serre du monde. Cette trajectoire nous 100 milliards annuels promis par les pays
mène à une augmentation de 2,7 °C de la développés pour financer notamment
température globale d’ici la fin du siècle. l’adaptation au changement climatique
Et donc à la catastrophe. des pays en développement. On sait
aujourd’hui qu’on n’atteindra cette som-
Face aux choix de la Chine, le me qu’en 2023. La France fait sa part,
découragement n’est-il pas une menace ? puisque le président a annoncé l’an der-
F O N D É E N 17 0 7 Il est vrai que la puissance des centrales à nier qu’on portait notre contribution à
charbon qu’on a réussi à faire fermer l’an 6 milliards d’euros annuels. Tout le mon-
dernier au niveau mondial (30 GW), équi- de doit jouer le jeu, y compris les États-
vaut à peu près à ce qui est reconstruit dans Unis qui ont annoncé 11,4 milliards de
le même temps par la Chine… Le combat dollars, ce qui est encore en dessous de ce
est difficile, mais il faut avancer et Pékin qu’ils devraient financer
évolue aussi sur ses engagements. Il faut
garder à l’esprit qu’au-delà des chiffres Ce retard pris dans la finance climat
TABLEAUX DE MAÎTRES ANCIENS macroéconomiques, pour la Chine, c’est cristallise les tensions Nord-Sud.
six millions de mineurs, des territoires Au risque de faire échouer la COP26 ?
TABLEAUX DU 19ÈME SIÈCLE complètement dépendants de cette indus- Il faut travailler concrètement avec les
ANTIQUITÉS trie, on ne peut pas tout changer en un cla-
quement de doigts. Et si la Chine est dans
pays émergents sur des solutions pour
franchir ce cap de la transition énergéti-
cette situation, c’est aussi parce qu’on a dé- que. C’est dans cette optique que nous al-
localisé une grande partie de notre produc- lons annoncer, au moment de la COP, un
tion là-bas, qu’on achète énormément de accord de plusieurs milliards de dollars
Ventes de prestige Paris, Joëlle Thomas produits importés, donc nous contribuons entre l’Afrique du Sud, la France, les
Tél. +33-6 65 17 69 37 à ce système. Notre politique de réindus- États-Unis, l’Union européenne, le
4 – 11 novembre 2021 joelle.thomas@dorotheum.com trialisation en France et de mécanisme Royaume-Uni et l’Allemagne pour aider
www.dorotheum.com d’inclusion carbone aux frontières de l’Eu- l’Afrique du Sud à tenir son ambitieuse
rope est une réponse à ce déséquilibre. feuille de route en termes de réduction des
émissions. Rappelons que ce pays est for-
Qu’attendez-vous concrètement tement émetteur, 90 % de sa production
Pierre Paul Rubens et atelier (1577–1640) Palais Dorotheum Vienne | Tél. +43 1 515 60-570 de cette COP ? électrique provenant du charbon. L’ac-
A

€ 350.000 – 500.000, vente 10 novembre 2021 Düsseldorf | Munich | Rome | Milan | Londres | Paris | Bruxellles | Prague | Genève Que tout le monde revienne dans ce for- cord, basé à la fois sur des engagements
mat multilatéral pour prendre des enga- financiers et des échanges d’expertise

sions
2040, voire 2050.
ves plongeant dans le noir des
usines et des quartiers entiers,
dans un contexte de ralentisse-
ment structurel de la croissance.
Le sujet est très sensible. Obsédé
par la stabilité, le régime n’aime
pas étaler au grand jour les dys-
fonctionnements de son système
énergétique, pris en étau entre le
faible prix de l’électricité imposé
par le pouvoir central et les cours
des matières premières qui s’en-
volent. Les autorités provinciales
sont, elles, réticentes à abandon-
ner le charbon, pilier de leur éco-
nomie. Ainsi, 24 projets de nou-
velles centrales au charbon ont
été approuvés au premier semes-
tre 2021 à travers le pays selon
Greenpeace.
Soutien aux pays du Sud
À Glasgow, la délégation chinoise
emmenée par l’expérimenté négo-
ciateur Xie Zhenhua, mènera la
contre-offensive contre l’Occi-
dent, en se drapant en champion
des pays du « Sud », selon l’axe
central de la diplomatie décom-
plexée de l’ère Xi. « Les pays déve-
loppés, avec plusieurs centaines
d’années d’industrialisation, et une
lourde dette environnementale doi-
vent faire de plus grandes contribu-
tions, et cesser de pointer les res-
ponsabilités de la Chine et des autres
pays en développement », a déclaré
Zheng Zeguang, l’ambassadeur au
Royaume-Uni. Et d’appeler le
« Nord » à accroître « significative-
ment » son soutien au Sud en te-
nant sa promesse prise à Paris de
délivrer 100 milliards de dollars de
financement à la transition envi-
ronnementale des pays pauvres.
Cette stratégie répond égale-
ment à des intérêts économiques
bien compris pour le géant en
quête de débouchés. Déjà leader
de l’industrie solaire, des énergies
renouvelables et en pointe sur le
nucléaire, la Chine compte expor-
ter ses technologies « vertes »
vers les marchés émergents, de
l’Afrique à l’Amérique latine, ou
l’Asie du Sud-Est. « La Chine va
jouer un rôle leader dans le monde
en développement via l’investisse-
ment, et la formation prodiguée
par ses entreprises dans les renou-
velables », explique Dabo Guan.
Un champ de bataille clé dans la
compétition pour l’économie ver-
te de demain que Pékin mène
avec volontarisme, face aux
États-Unis, et à l’Europe. ■
enferme dans une logique d’échec »
« Il faut travailler concrètement avec les pays émergents sur des solutions
pour franchir ce cap de la transition énergétique », souligne Barbara Pompili.
- impliquant des entreprises comme EDF,
Alstom ou Total - permettra la fermeture
de 9 centrales à charbon, et aidera le pays
à basculer vers les énergies renouvelables,
tout en développant la filière hydrogène et
les véhicules électriques.
Le chef de l’État pourrait annoncer
la construction de nouveaux EPR.
Est-ce une ligne rouge pour vous ?
Je n’ai pas changé d’avis sur le nucléaire et
sur ses inconvénients. Mais je ne peux pas
dire à tout le monde d’écouter les experts
avant de s’exprimer et ne pas moi-même
faire la même chose. Je veux être une
pragmatique et avoir de l’honnêteté intel-
lectuelle sur ces sujets. Le rapport de RTE
Le président américain Joe Biden
ALBERTO PIZZOLI/AFP
arrive les mains vides à Glasgow
mAurin picArd £@MaurinPicard
new york
Je sais que
JOE BIDEN a repoussé son départ
nous avons jusqu’à la dernière minute. Mo-
le cadre teurs tournants sur le tarmac de la
d’un plan base aérienne Andrews, dans le
Maryland, le Boeing présidentiel
économique Air Force One devait attendre des
historique négociations de la dernière chance
[qui] créera au Congrès pour sauver de l’abîme
le grand œuvre législatif de l’Ad-
des millions ministration démocrate. Attendu à
d’emplois, Rome pour le G20, puis à Glasgow
pour la COP26, Joe Biden ne pou-
fera croître
vait quitter Washington les mains
l’économie, vides. Pas sans une version édulco-
investira dans rée de ce grand projet d’infrastruc-
notre nation ture appelé « Build Back Better »
(Reconstruire, en mieux). Sur les
et notre 1 850 milliards de dollars « resca-
peuple
joe biden
» pés » de semaines de pourparlers
entre radicaux et modérés démo-
crates (à partir d’un montant initial
de 3 500 milliards de dollars),
555 milliards demeuraient alloués
aux mesures environnementales,
et ce malgré le sabotage d’un ambi-
tieux Clean Energy Plan (150 mil-
liards supplémentaires) par le sé-
nateur de Virginie-Occidentale Joe
Manchin.
TOM NICHOLSON/REUTERS
Boris Johnson craint un échec des négociations
ArnAud de LA GrAnGe
£@arnodelagrange
Tous les Correspondant à Londres
pays [doivent] CETTE fois-ci, Boris Johnson pour-
revoir à la ra moins compter sur l’appui de
hausse leurs cette « diplomatie royale » dont le
Royaume-Uni a le secret, comme
ambitions ce fut encore le cas lors du G7 de
sur le Cornouailles en juin. Sur les grands
changement de ce monde, le charme d’une ré-
ception par la reine Elizabeth II agit
climatique toujours un peu… Le corps médical
à la COP26 lui enjoignant de se reposer, la sou-
et prendre veraine de 95 ans a dû renoncer à se
rendre à Glasgow pour l’ouverture
des mesures de la COP26.
concrètes Pour le premier ministre, le mo-
pour diminuer ment est pourtant important et ce à
double titre. Parce qu’il doit être
les émissions une pièce fondatrice du « Global
et accélérer Britain », la nouvelle stratégie d’in-
la transition fluence du Royaume-Uni post-
Brexit à travers le monde. Et parce
vers les que Londres se veut en pointe dans
énergies le combat climatique. Depuis 2016,
renouve- « BoJo » répète à l’envi que la sortie
lables »
boris johnson
de l’UE permettra au pays de deve-
nir un membre plus actif de la com-
munauté internationale. Et qu’il
FRANçOIS BOUCHON / LE FIgARO
(réseau du transport électrique) pose plu-
sieurs chemins qui ont tous leurs avanta-
ges et leurs inconvénients. On va choisir le
scénario le plus efficace pour atteindre no-
tre double objectif de baisse des émissions
de gaz à effet de serre et de sécurité d’ap-
provisionnement. Nous avons mis sur la
table toutes les options, parce que nous
sommes attachés au débat et à la transpa-
rence. C’est important que les différents
acteurs se positionnent pendant la prési-
dentielle. Nous proposerons une vision de
notre avenir énergétique à l’heure du défi
climatique. La concrétisation de ces choix
interviendra lors de l’examen de la loi de
programmation pluriannuelle de l’énergie
prévu en 2023.
Les heures passant, et les négo-
ciations se prolongeant sur une in-
finité de détails, Joe Biden a com-
pris qu’il n’obtiendrait pas de
résultats tangibles, et il a fini par
embarquer, bredouille, à bord
d’Air Force One. C’est un camou-
flet sérieux pour celui qui avait fait
de la lutte contre le changement
climatique une priorité électorale
en 2020 et fixé un objectif auda-
cieux : réduire de 50 % les émis-
sions de gaz à effet de serre de
son pays d’ici à 2030, en se basant
sur les chiffres de 2005. Le Clean
Energy Plan mort-né visait à offrir
de généreuses prébendes aux fir-
mes énergétiques se convertissant
aux énergies renouvelables et pré-
voyait également des pénalités
pour celles qui traîneraient la patte.
Crédibilité
Bredouille, Joe Biden doit affronter
le regard de ses pairs du G20 à
Rome, puis à Glasgow. Diplomati-
quement, l’échec prend des pro-
portions considérables : d’un côté, il
sera difficile pour le président amé-
ricain de faire la morale à ses homo-
logues chinois et indien, qui avaient
omis jusqu’ici de partager leurs
nouveaux engagements en termes
pourra ainsi œuvrer à la réforme du
commerce mondial, des règles in-
ternationales et à la lutte contre la
crise climatique. Mais Boris John-
son est critiqué pour son incohé-
rence internationale. Alors qu’il
veut jouer un rôle de premier plan
et demande à tous un effort supplé-
mentaire en matière de lutte contre
le réchauffement, il a en effet sabré
dans l’aide au développement. Sous
pression, y compris de son propre
camp, il a promis mercredi de la ré-
tablir à son niveau pré-Covid en
2024-2025.
Désarrimé de l’Europe, le
Royaume-Uni se veut plus allant
que le continent sur le front clima-
tique. Il affiche, il est vrai depuis
longtemps, un volontarisme cer-
tain sur le sujet. En 2019, il a été le
premier pays à graver dans sa loi la
cible d’une neutralité carbone à
l’horizon 2050, dans le cadre du
Climate Change Act. Et au début de
l’année, Boris Johnson a relevé à
78 % son objectif de réduction des
émissions de gaz à effet de serre
d’ici à 2035 (par rapport au niveau
de 1990). Le dirigeant conservateur
En 2022, votre soutien au chef de l’État
sera inconditionnel ?
Je ne comprends même pas que l’on me
pose cette question. Je travaille sur le
programme présidentiel sur les questions
écologiques. J’ai cofondé un mouvement
politique, « En commun », qui s’inscrit
dans la majorité. Nous avons d’ores et
déjà apporté des propositions. Si le prési-
dent se représente, évidemment je le
soutiendrai. Cette campagne va relégiti-
mer notre bilan. Quand EELV demande
50 milliards d’euros annuels d’investis-
sements écologiques, je me dois de rap-
peler qu’on a déjà investi 100 milliards
depuis que je suis ministre ! Il s’agit main-
tenant de pérenniser ce que l’on a fait. Je
pense que nous avons besoin d’une plani-
fication pour que toutes les filières, com-
me l’automobile ou le bâtiment, enta-
ment sereinement leur processus de
mutation. C’est ce que je veux porter.
Pensez-vous comme Emmanuelle
Wargon que les pavillons individuels
sont une hérésie écologique ?
Emmanuelle Wargon a elle-même dit
qu’elle comprenait que ses propos aient
pu choquer parce qu’ils avaient touché à
l’imaginaire français. Mais je trouve nor-
mal que l’on débatte de notre manière de
nous loger, d’habiter l’espace, de nous
déplacer. Le logement c’est un quart de
nos émissions de gaz à effet de serre. C’est
sain d’en parler, de confronter des idées,
de dire ce qui est souhaitable et ce qui ne
l’est pas. Notamment sur l’artificia- 7j/7 (ouvert les 1er et 11 novembre) • 01 45 77 80 40 • M° Boucicaut, P. gratuit
lisation des sols, une plaie dans notre
pays qui a des répercussions graves sur la
biodiversité. ■
le figaro
l'événement
de lutte climatique. De l’autre, il
sera tout aussi compliqué de de-
mander un effort supplémentaire
aux partenaires européens et asiati-
ques des États-Unis, en n’ayant rien
de concret à mettre sur la table. « Il
est sûr qu’il aurait été mieux de mon-
trer l’exemple », avertissait le séna-
teur Bob Menendez. Désireux de
sauver les meubles, les plus fervents
supporteurs du « paquet climat »,
comme le sénateur Brian Schantz,
se disent convaincus que le prési-
dent saura exposer combien l’Amé-
rique prend sérieusement la lutte
climatique, et ce même sans loi si-
gnée par lui depuis le Bureau ovale.
Les experts, eux, redoutent une
nouvelle entaille à la crédibilité de
Joe Biden auprès de ses partenaires
internationaux, après le retrait
bâclé d’Afghanistan et l’annonce
d’une alliance anglophone exclusi-
ve dans la sphère indo-pacifique.
Le 14 octobre, dans une interview
avec Associated Press, l’envoyé
spécial du président sur le climat,
John Kerry, prévenait qu’un Biden
arrivant les mains vides à Glasgow
serait « aussi mauvais » en termes
d’image pour le pays « que le retrait
de l’accord de Paris ordonné par
(Donald) Trump » en 2018. ■
entend « montrer l’exemple au reste
du monde ».
Si le monde salue ces objectifs
ambitieux, les spécialistes restent
sceptiques sur les capacités du pays
à les tenir. Si le gouvernement bri-
tannique a précisé sa stratégie pour
atteindre la neutralité carbone
en 2050, les détails restent flous.
Parmi les mesures annoncées,
120 millions de livres consacrés à
des projets nucléaires « pour décar-
boner la production d’électricité »,
620 millions de livres pour subven-
tionner l’achat de véhicules électri-
ques et 350 millions pour aider à
leur développement.
Pression de la réussite
Le gouvernement compte aussi sou-
tenir à hauteur de 180 millions de li-
vres le développement d’un carbu-
rant moins polluant pour l’aviation.
Enfin, il débloquera 3,9 milliards de
livres sur trois ans pour améliorer
l’efficacité énergétique des bâti-
ments, avec des subventions à hau-
teur de 5 000 livres pour aider les
ménages à remplacer les chaudières
à gaz par des systèmes moins pol-
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samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021
5
Les sénateurs
français pour
un accord
ambitieux
Le Sénat devrait
adopter mardi
un projet de résolution
transpartisane affirmant
« la nécessité d’un accord
ambitieux permettant
de garantir l’application
effective de l’accord
de Paris sur le climat »
lors de la COP26.
Porté par le groupe LR,
le texte soutient
« la position européenne
tendant à réduire
les émissions de gaz
à effet de serre de 55 %
d’ici à 2030 par rapport
à 1990 » et rappelle
« l’engagement
de la France pour
participer à l’atteinte
de cette cible ».
luants comme des pompes à cha-
leur. Pour vanter sa « révolution ver-
te », Boris Johnson a organisé un
sommet réunissant investisseurs et
multinationales. Il a annoncé dix
milliards de livres d’investisse-
ments étrangers, s’ajoutant aux
6 milliards du plan britannique. Et
avancé que ce dernier permettrait
de créer 440 000 emplois et de dé-
bloquer 90 milliards d’investisse-
ments d’ici à 2030.
Pour parer d’avance les critiques,
Boris Johnson a averti que la COP26
s’annonçait « très difficile » et ris-
quait d’échouer. D’ordinaire si op-
timiste, il s’est dit « très inquiet
parce que cela peut mal se passer ».
Certains acteurs manquant à l’appel
et d’autres étant affaiblis, la pres-
sion de la réussite pèse désormais
sur ses épaules. Dans les couloirs, il
devrait aussi déployer des efforts de
diplomatie bilatérale, dans le sillage
du G20 de ce week-end où est pré-
vue une rencontre avec Emmanuel
Macron alors que les relations fran-
co-britanniques sont au plus bas,
sur fond d’empoignade à propos de
la pêche ou de l’immigration. ■
©
A
 samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021 le figaro

6 Politique
Droite : l’affiche du congrès se précise
Avant la clôture des parrainages, cinq candidats sur six sont en passe de se qualifier pour le grand match.
emmanuel galiero
egaliero@lefigaro.fr
primaire Trois candidats sur six
ont déjà déposé leurs parrainages sur
le bureau des Républicains. Mais
avant l’annonce officielle des
candidatures, confiée jeudi prochain
à Philippe Bas, président de l’instan-
ce de contrôle, la droite sait déjà que
cinq candidats sur six devraient
franchir la première étape. Pour cer-
tains, la collecte des indispensables
signatures aura été un exercice diffi-
cile. Philippe Juvin, le candidat mai-
re de La Garenne-Colombes peut en
témoigner. Il a déposé ses 271 sou-
tiens vendredi à l’issue d’une course
marathon de plus de trois mois.
De son côté, l’équipe de Xavier
Bertrand n’a jamais été inquiète sur
la possibilité de dépasser largement
les 250 parrainages, mais après
avoir été convaincue de pouvoir en
aligner 550 mercredi, elle a revu ses
ambitions à la baisse, car une cen-
taine de fiches « pouvaient être su-
jettes à débat », pour diverses rai-
sons (documents incomplets,
tampons oubliés, photographies
inutilisables, écritures illisibles…).
Chez Michel Barnier aussi, on
était confiant vendredi. Daniel
Fasquelle croit pouvoir dépasser
confortablement le cap des 550 si-
gnatures d’ici à mardi, la date limi-
te. Le seuil est symbolique, mais il
permet aux partisans de l’ancien
ministre de consolider la dimension
d’un candidat déjà armé pour
concourir à la présidentielle.
Moment crucial
Les troupes d’Éric Ciotti sont égale-
ment satisfaites puisque, quatre jours
avant la date butoir, elles ont déjà 375
parrainages dans leur besace. Valérie
Pécresse, pour sa part, avait été la
De gauche à droite : Éric première a rendre plus de 250 par-
Ciotti, Xavier Bertrand, rainages début octobre.
Michel Barnier, Denis Finalement, seul Denis Payre se
Payre, Valérie Pécresse retrouve dans une situation « com-
Christian Jacob pliquée » malgré son passage au JT
et Philippe Juvin,
de TF1. En colère, l’entrepreneur
le 19 octobre, au siège
des Républicains, dénonce un « traitement discrimina-
à Paris. CéCile RiChez/lR toire » de la part du parti et appelle
Les Républicains à se « ressaisir », à
lui offrir une « solution » pour lui
permettre de se maintenir dans la
course en tant que « seul candidat li-
béral » de la compétition. Sinon, le
parti LR ne sera pas un « parti de ré-
forme ». Soutiendra-t-il néanmoins
un candidat LR ? « Je retrouverai ma
liberté », répond le participant, qui
s’était pourtant engagé à préserver
l’unité et le rassemblement des Ré-
publicains lors d’un petit déjeuner
organisé au siège du parti.
Face à la forte déception du
sixième candidat, Christian Jacob
veut simplement rappeler que les
« règles sont les mêmes pour tout le
monde ». Et au-delà de l’étape par-
rainages, le président des Républi-
cains anticipe les prochaines se-
maines comme un moment
crucial. « Nous serons dans un
temps médiatique fort avec quatre
débats, notre conseil national, un
congrès électronique le 4 décembre,
et un nouveau congrès de large ras-
semblement le 11 décembre à Pa-
ris », annonce le président, en se
félicitant du déroulé de la campa-
gne. « La mobilisation est bonne sur
le terrain comme le montrent les
100 000 adhésions. » Il prévoit des
débats télé « cadrés », loin des
« matchs de boxe ».
Quant à l’éventuelle candidature
d’Éric Zemmour et sa capacité à si-
phonner la droite, Christian Jacob
n’y voit aucun danger. « Éric Zem-
mour commence à patiner sérieuse-
ment. On voit bien qu’il stagne dans
les sondages et qu’au-delà des
constats, des incantations et des
quelques inepties qu’il a pu sortir, il
n’est pas au niveau. Quand on en est
au permis à points, c’est qu’on est
sacrément faible », mord le
président des LR. Une candidature
« de rassemblement » sortira du
congrès le 4 décembre et placera la
droite en position d’affronter la
présidentielle avec confiance cinq
mois plus tard, veut croire le pa-
tron des Républicains. ■

Nadine Morano : électoraux, ses émissions sont

dans une démarche à peine dissi-
jets depuis de nombreuses années,
tout comme Jean-François Copé,

« Pourquoi j’ai décidé de mulée de candidature. Oui, je

pense qu’il sera candidat. Mais on
qui a fait un travail remarquable à
Meaux en restructurant des quar-

soutenir Michel Barnier »

NADINE MORANO est députée
européenne, membre des
Républicains.
LE FIGARO. - Vous avez travaillé
avec la plupart des candidats
à l’investiture LR
pour la présidentielle.
Votre choix est-il arrêté ?
Nadine MORANO. - Parce que la
tâche du prochain chef de l’État
sera rude, j’ai décidé d’apporter
mon soutien à Michel Barnier,
dont personne ne peut nier la soli-
de expérience de son parcours. La
fermeté de son programme et sa
vision internationale sont des
atouts majeurs qui en font celui
qui, pour moi, a la stature pour
devenir président de la Républi-
que. Je suis bien placée pour dire
que nos candidats ont tous des
qualités. Mais après les quinquen-
nats désastreux Hollande-Ma-
cron, la France est abîmée, frac-
turée comme jamais, accablée de
dépenses inconsidérées que de-
vront supporter plusieurs généra-
tions. Michel Barnier incarne une
droite gaulliste, celle pour laquelle
je me suis engagée. Il se revendi-
que d’abord patriote et européen.
Dans cet ordre, je m’y retrouve
pleinement.
Comprenez-vous les réserves de
certains LR qui l’estiment trop bas
dans les sondages et croient son
profil trop centriste pour porter
un vrai projet de rupture ?
Les sondages d’octobre n’ont ja-
mais donné le président d’avril !
J’ai beaucoup travaillé avec lui sur
les questions migratoires et les
problèmes de sécurité. Il a l’avan-
tage d’avoir été un élu local de
terrain, parlementaire, ministre
puis commissaire européen. Il
connaît tous les rouages de l’État
et sait parfaitement ce qu’il faudra
changer tant sur le plan national
qu’au niveau de l’Europe. Opéra-
tionnel dès le début de son man-
dat, il prendra les mesures fortes
qui s’imposent sans aucune fébri-
lité ni hésitation.
Laurent Wauquiez a eu des mots
très aimables à son égard…
Pèsera-t-il dans le choix des
militants ?
Sans aucun doute. Il y a une consi-
« Michel Barnier sait dération et un respect réciproques
parfaitement ce qu’il entre eux. J’observe d’ailleurs que
faudra changer tant sur ceux qui avaient claqué la porte du
le plan national qu’au parti trouvant Laurent Wauquiez
niveau de l’Europe », « trop à droite » reprennent son
explique Nadine
discours « pour que la France reste
Morano. ColleCtion
PeRsonnelle
la France »…
La candidature d’Éric Zemmour
vous semble-t-elle probable ?
Ses réunions sont des meetings
ne s’improvise pas président de la
République, cela se ressent déjà
dans sa façon brutale de faire
campagne. Emmanuel Macron a
beaucoup péché par amateurisme
tout comme sa majorité parle-
mentaire. Les Français en paient
la facture chaque jour. Et puis,
gardons à l’esprit que depuis le
Brexit, la France est la seule puis-
sance européenne à disposer de
l’arme nucléaire. Dans un monde
en proie à des crises successives
dangereuses, cela exige d’avoir à
la tête de l’État, une personnalité
faisant preuve d’expérience et de
tempérance. Éric Zemmour frac-
ture le RN, et ses postures souvent
outrancières serviront à mettre en
lumière le sérieux des proposi-
tions des Républicains.
Un vif débat sur ce sujet vous
a opposé à Jean-François Copé
en conseil stratégique…
Zemmour a-t-il fracturé LR ?
Éric Zemmour est un ami avec le-
quel j’ai beaucoup débattu. S’il
pose sur la table des débats de
fond qui résonnent à l’esprit des
Français sur l’immigration, sur les
quartiers devenus des zones de
non-France et la dérive de l’islam,
je rappelle que j’ai fait des propo-
sitions publiquement sur ces su-
tiers entiers et en luttant ferme-
ment contre l’insécurité. Il est à
l’origine de la loi qui permet d’in-
terdire le port du voile intégral.
C’est la crédibilité de nos résultats
et nos propositions qui mettront
Éric Zemmour face à ses contra-
dictions flagrantes, ses excès et ses
lacunes, dans le respect du débat
démocratique.
En tant que proche de Nicolas
Sarkozy, savez-vous si l’ancien
président a un candidat en tête ?
À leur demande, le président
Sarkozy les a tous reçus. Il
rappelait récemment qu’il n’avait
jamais quitté sa famille politique
même dans les moments difficiles.
Pour lui, le courage, la fidélité et la
loyauté sont des qualités essen-
tielles et indispensables. Pour ma
part, je note que Michel Barnier,
contrairement à d’autres, n’a
jamais quitté Les Républicains.
Comment jugez-vous l’offre
politique de la gauche
à la macronie.
La gauche a disparu avec la candi-
dature d’Anne Hidalgo. Quant à
Emmanuel Macron, il tente une
opération sauvetage tant son bilan
est calamiteux. ■
propoS rEcuEilliS par e. g.

À Strasbourg, Guerini marche pour Macron

Le patron du LREM a commencé vendredi une opération de porte-à-porte géant pour sonder la population.
Stanislas Guerini,
délégué général
de LREM. FRançois
BoUChon/le FigaRo
A
loris Boichot £@lboichot
Envoyé Spécial à StraSbourg (baS-rhin)
présidentielle Sur le pas de la
porte, Stanislas Guerini s’est armé
de son plus grand sourire et d’un
peu de patience. Il toque plusieurs
fois, personne ne répond. Un étage
en dessous, on ouvre. « Bonjour
madame, je suis Stanislas Guerini,
député de Paris. Vous avez quelques
instants pour que je vous pose des
questions sur le quinquennat ? »
L’habitante, surprise, ne reconnaît
pas l’homme mais elle le fait entrer.
Ce vendredi 20 octobre, en ves-
te et col roulé, le patron de La Ré-
publique en marche (LREM) a
choisi un immeuble de Strasbourg
(Bas-Rhin) pour lancer « Cinq ans
dentiel. À la main, il tient une série
de tracts jaunes à l’effigie d’Em-
manuel Macron.
Le président de la République ne
s’est pas officiellement déclaré en
campagne pour sa réélection, mais
le chef du parti macroniste se char-
ge de lui ouvrir la voie. « Je viens
ici chercher des signaux faibles,
ces sujets que l’on entend moins
dans les médias, mais qui font par-
tie de la vie quotidienne des Fran-
çais », explique Stanislas Guerini.
L’opération doit durer un mois et
demi et déboucher sur une restitu-
tion en janvier.
L’objectif est assumé : « nourrir
la campagne » à venir du chef de
l’État. Et remobiliser les militants,
dans le sillage de la « grande mar-
che » de 2016, pendant que les
était temps que les têtes d’affiche se
lancent, notre campagne manquait
d’incarnation jusqu’à présent »,
remarque un membre de la direc-
tion de LREM.
« Beaucoup à faire »
Alors, à Strasbourg, assis dans le
canapé de Martine, 69 ans, Stanis-
las Guerini pose les unes après les
autres les dix questions préparées
avec les stratèges de LREM. « Est-
ce que vous avez l’impression que
notre pays a avancé ou reculé ? »,
« Qu’est-ce qui vous a déçu ? » Ou
encore : « En un mot, comment
qualifieriez-vous votre sentiment
par rapport à l’avenir ? »
Pêle-mêle, la retraitée approuve
la gestion de la crise sanitaire, s’in-
quiète toutefois du « peu de postes »
la réforme des retraites, « parce
qu’il y a trop d’avantages pour cer-
taines catégories ». Le patron de
LREM note ses réponses sur l’appli-
cation dédiée de son smartphone et
l’invite sur son terrain : « Vous par-
lez des régimes spéciaux ? » « On
vous rassure, on a bien prévu de me-
ner cette réforme des retraites si Em-
manuel Macron est réélu ! », insiste-
t-il, avec l’approbation du député
local, Thierry Michels. Quand la
Strasbourgeoise lui dit avoir
« peur » du « glissement vers les
extrêmes », le Marcheur savoure ce
grief en direction de Marine Le Pen
et d’Éric Zemmour.
Dans un autre appartement, une
habitante regrette les conditions de
travail « difficiles » des aidants.
Stanislas Guerini l’admet : « On a
beaucoup à faire. » À ses côtés, la
responsable LREM du Haut-Rhin,
Stéphanie Villemin, observe que la
majorité n’est pas toujours créditée
pour son action en matière de santé
ou de pouvoir d’achat : « Ça ne
marque pas, les gens sont rattrapés
par leur ressenti. Il faut aller à leur
rencontre pour leur apporter des in-
formations concrètes. »
Après une cinquantaine de mi-
nutes de porte-à-porte, Stanislas
Guerini a tenu à prévenir les mili-
tants locaux, réunis dans un res-
taurant. « Ce sont des semaines qui
ne seront pas faciles, l’agenda n’est
plus dicté par le gouvernement », a-
t-il déclaré. « Si l’on considère que
cette élection est jouée, on se trompe
complètement. » Le patron de
LREM devrait marteler ce message

à l’écoute », la nouvelle opération concurrents d’Emmanuel Macron en Ehpad, et décline sa « priorité » décidé un tarif minimum pour les dans une dizaine de départements
de porte-à-porte du parti prési- s’activent dans l’Hexagone. « Il pour un « prochain quinquennat » : aides à domicile, mais il reste encore d’ici à la fin de l’année. ■

InternatIonal
Le Parlement européen vise Varsovie
Les députés de Strasbourg ont saisi la Cour de justice de l’UE pour pousser la Commission à appliquer le règlement
conditionnant le versement des fonds européens au respect de l’État de droit en Pologne et en Hongrie.
léonor HuBaut £@LeonorHubaut
Bruxelles
Union eUropéenne Assez tergiversé.
Le Parlement européen a mis à exécu-
tion sa menace en attaquant juridique-
ment la Commission européenne. Il a
introduit un recours devant la Cour
européenne de justice pour non-acti-
vation du mécanisme de conditionnali-
té, liant le financement de l’UE au res-
pect de l’État de droit par un pays.
« Nous attendons de la Commission
européenne qu’elle agisse de manière co-
hérente », explique le président du Par-
lement européen, David Sassoli. En ef-
fet, la présidente de la Commission
européenne, Ursula von der Leyen,
s’était montrée particulièrement dure
il y a dix jours, martelant qu’il ne serait
pas « toléré que les valeurs communes
soient mises en danger ». Mais trois jours
plus tard, après un sommet européen,
le ton s’est substantiellement adouci.
« Les paroles doivent être suivies d’ac-
tes », fustige David Sassoli.
Le conflit entre les institutions euro-
péennes n’est pas nouveau. Le méca-
nisme de conditionnalité était une des
exigences du Parlement européen dans
les difficiles négociations du budget à
La Pologne barricade sa
frontière avec la Biélorussie
Hélène Bienvenu £@BienvenuLN
VarsoVie et Michalowo (Pologne)
LE SÉNAT polonais l’a approuvée ce
27 octobre : il y aura bien une clôture
frontalière à l’est de la Pologne, là où
aucun obstacle physique ne distingue
la Pologne de la Biélorussie, soit sur
presque 200 km. La majorité des séna-
teurs a voté le projet de loi, au prix de
quelques amendements ayant nécessi-
té que le texte repasse devant le Parle-
ment. L’édification de cette clôture ne
s’est toutefois pas imposée sans des
débats houleux entre les tenants de la
politique gouvernementale conserva-
trice défendant le bien-fondé de cette
barrière, et l’opposition, qui pour une
part la rejetait.
Marcin Bosacki, sénateur de KO (op-
position) a ainsi évoqué un « mur ab-
surde », quand Marek Pek du PiS (parti
au pouvoir) a soutenu un « projet qu’il
faut construire rapidement, efficacement
et avec des technologies modernes ». Le
leader de facto de la Pologne, Jaroslaw
Kaczynski, en sa position de vice-mi-
nistre à la Sécurité, a souligné, le 7 oc-
tobre, que « l’expérience de nombreux
pays européens comme, par exemple, la
Hongrie et la Grèce, montre que c’est la
seule méthode efficace ». La clôture mé-
tallique devrait faire 5,5 mètres de haut
– celle en Hongrie avec la frontière ser-
be est haute de 4 mètres – et devrait
être complétée par des caméras, des
détecteurs de mouvements, des tours
de surveillance. L’ensemble coûtera
plus de 1,6 milliard de zlotys (345 mil-
lions d’euros).
À Michalowo, une municipalité à
une vingtaine de kilomètres de la
frontière biélorusse, le fil de fer barbe-
lé est déjà là. Stocké sur le gazon, de-
hors, face au bureau des gardes-fron-
tières. Plus au nord de la frontière
biélorusse, des dizaines de kilomètres
sont déjà recouverts. Depuis cet été la
Pologne fait face à une vague migra-
toire inédite à sa frontière biélorusse :
des ressortissants irakiens, afghans,
libanais, yéménites, mais aussi congo-
lais ou somaliens, atterrissent en Bié-
lorussie, y reçoivent un visa et sont
conduits jusqu’à la frontière polonaise.
Le périple en Biélorussie se fait avec la
complicité du régime de Loukachen-
ko. Le dictateur biélorusse a mis à exé-
cution ses menaces, en représailles aux
sanctions européennes imposées après
le détournement de l’avion où voya-
geait son opposant blogueur Roman
Protassevitch. Si la Lituanie a connu le
même phénomène quelques semaines
avant la Pologne, c’est désormais vers
la Pologne, membre de l’espace
Schengen et pays frontalier de l’Alle-
magne, que les candidats à l’exil sont
les plus nombreux.
le figaro samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021
7
long terme de l’Union et du plan de re- D’autant que cela laisse du temps aux La démarche du Parlement est tains espèrent que cette pression aide-
lance européen, en juillet 2020. Depuis, services pour monter les dossiers, et ce donc surtout symbolique. Elle s’inscrit ra la Commission dans son bras
l’institution a tout fait pour pousser la travail a déjà commencé, insistent-ils. dans une démarche de pression, cou- de fer avec Varsovie sur le plan de
Commission européenne à se montrer Des demandes d’information devraient plée à un soutien envers la Com- relance polonais, qui prévoit 36 mil-
ferme face à la Hongrie et à la Pologne. être envoyées à certains gouvernements mission européenne. Au-delà du liards d’euros de subventions euro-
Sans succès jusqu’à présent. Et cette dans les prochaines semaines. mécanisme de conditionnalité, cer- péennes. ■
nouvelle décision, qui revient à déclen-
cher l’arme la plus puissante dont le
Parlement dispose, ne sera probable-
ment pas la solution. Non seulement la
procédure prendra de longs mois, mais
personne ne croit vraiment à une vic-
toire. Les services juridiques internes
avaient d’ailleurs exprimé des inquié-
tudes sur l’opportunité de sauter le pas.
Une démarche symbolique
L’explication est tant politique que juri-
dique. Si la Commission européenne
traîne à activer le mécanisme, en place
depuis le 1er janvier 2021, c’est parce que
les États membres lui ont demandé
d’attendre que la Cour européenne de
justice se prononce sur une plainte dé-
posée par la Pologne et la Hongrie, re-
mettant en cause la légalité de cette me-
sure. Ce qui ne devrait pas arriver avant
la fin de l’année, ou au début 2022. Pour
les experts de la Commission également,
il est plus judicieux de ne pas activer le
mécanisme avant que son existence et
sa base juridique ne soient sans appel.
KACPER PEMPEL/REUTERS
La clôture métallique
le long de la frontière
biélorusse
(ici, près du village
de Nomiki, en août).
La Pologne enregistre quelque 500 transporté au poste de garde-frontière vient : « Il faut les suivre, sinon c’est le Équipés de thermos, de couvertures
franchissements irréguliers de sa fron- de Michalowo, a insisté la fonctionnaire refoulement assuré. » Il ouvre la voie. de survie et de barres de céréales, mem-
tière par jour, soit près de 13 000 entrées polonaise. Un père et sa fille qui habi- Une dizaine de minutes plus tard, face bres d’ONG, bénévoles et résidents as-
entre le 1er et le 24 octobre. La réponse tent à proximité offrent un sac rempli au poste des gardes-frontières où cam- sistent au mieux ceux qui se retrouvent
de la droite conservatrice polonaise au de victuailles. Puis la fonctionnaire de pe l’armée, aucune trace de la camion- piégés dans la forêt entre la Pologne et la
pouvoir a été très ferme. En plus d’avoir Straz Graniczna finit par s’impatienter. nette. « Il a été refoulé », conclut le Biélorussie, par des températures gla-
modifié sa législation pour autoriser les La porte coulissante de la camionnette riverain. Une information confirmée ciales. À force d’être refoulés d’un côté
refoulements, la Pologne a mis en place des gardes-frontières se referme. Le dans un e-mail par la porte-parole de et de l’autre de cette frontière, neuf
un état d’urgence tout le long de la fron- père qui avait apporté à manger pré- Straz Graniczna en Podlachie. personnes ont déjà trouvé la mort. ■
tière biélorusse depuis le 2 septembre.
Des check-points ont fait leur apparition
interdisant l’accès aux non-résidents,
ainsi qu’aux médias dans 183 commu-
nes. De quoi rendre le travail des ONG
particulièrement difficile. La Pologne a
également déployé plus de 7 000 soldats
à la frontière. « La clôture, qui devrait
être technologique, va nous aider », pense
Anna Michalska, porte-parole de Straz
Ciné-dimanche
Graniczna (la police aux frontières polo-
naise) à Varsovie. « Cette pression mi-
gratoire n’est pas naturelle, tout dépend
du régime de Loukachenko. Ces personnes
Auditorium
ne fuient pas la guerre, elles cherchent à
améliorer leur niveau de vie. Il faut que
du musée d’Orsay
Loukachenko arrête d’inviter les migrants
et leur faire croire qu’ainsi ils rejoindront
facilement l’Allemagne. » La fonction-
naire argumente que la plupart des can-
didats à l’exil ne souhaitent pas deman-
der l’asile quand ils entendent que cela Dans le cadre
implique de rester six mois au minimum
en Pologne, sans pouvoir se déplacer. de l’exposition
Sauf que ces migrants – même quand ils
le souhaitent - n’ont en réalité pas l’oc- « Enfin le cinéma ! »
casion de demander l’asile : une fois in-
terpellés, ils sont presque immédiate-
ment reconduits à la frontière biélorusse
par les autorités polonaises.
Visa touristique
C’est ce que nous avons pu constater
sur place, le 17 octobre, avec Moham-
med (prénom changé), un ressortissant
syrien, recroquevillé à la sortie de la
forêt, sur la route entre Michalowo et
Narewka. Une camionnette de Straz
Graniczna troue la nuit noire avec ses
gyrophares. Mohammed tremble de
Retour de flamme
froid. Un de ses compagnons d’aven-
ture est embarqué dans une ambulance. Avec Serge Bromberg
Par l’intermédiaire d’un traducteur
arabophone, joint au téléphone, Un écran, un piano
Mohammed confesse n’avoir pas man- et une bonne dose de passion
gé depuis quatre jours. Arrivé en avion
à Minsk, en Biélorussie, grâce à un visa
touristique octroyé par le régime de
Loukachenko, il est arrivé ensuite à la
frontière polonaise.
Dimanche 7 novembre
Mohammed aimerait rejoindre les
Pays-Bas, où de la famille l’attend. Il ne
2021 – 17h
sait pas où sont passés deux de ses amis
qui étaient avec lui dans la forêt. Il s’in-
quiète. Quel sort lui réserve-t-on ?
Quand pourra-t-il récupérer son pas-
seport et son téléphone, saisis par la
fonctionnaire de Straz Graniczna ?
Mohammed l’a répété à plusieurs res- musee-orsay.fr – Tarifs de 8 à 16€
A
ponsables : il désire demander l’asile en
Pologne. Dans ce cas-là, il doit être
 samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021 le figaro
8 InternatIonal
Macron et Biden mettent
en scène leur réconciliation
Le président français et son homologue américain se sont entretenus pour la première
fois en tête à tête depuis la crise diplomatique des sous-marins australiens.
Nicolas Barotte nbarotte@lefigaro.fr
diplomatie Les symboles sont impor-
tants. Le président américain, Joe Biden,
y a été attentif pour réparer l’humeur
malmenée de son partenaire français.
Vendredi à Rome, avant le début de la
réunion du G20 qui se tient jusqu’à di-
manche en Italie, il s’est donc déplacé
pour rencontrer le chef de l’État, Em-
manuel Macron, dans une « emprise
française », souligne-t-on à l’Élysée.
« Évidemment, il y a dans tout cela un ca-
ractère politique qui est important », in-
siste-t-on dans l’entourage du prési-
dent. Joe Biden a été reçu à la Villa
Bonaparte, site de l’ambassade de Fran-
ce auprès du Vatican. Un mois et demi
après la crise diplomatique des sous-
marins australiens et du pacte Aukus
(États-Unis, Australie, Royaume-Uni)
conclu dans le dos de Paris, Washington
était prêt à quelques efforts pour calmer
son allié furieux de cette « trahison ». En
retard sur son agenda, le président amé-
ricain a toutefois fait patienter son hôte
pendant près d’une heure et demie
avant d’arriver…
Emmanuel Macron et Joe Biden
s’étaient déjà entretenus deux fois par té-
léphone depuis le « mauvais coup » du
15 septembre. Vendredi, ils se sont retrou-
vés physiquement pour la première fois
pour mettre en scène la réconciliation
franco-américaine. La poignée de main
sur le perron a donc été chaleureuse. Lors
d’une courte déclaration à la presse avant
leur entretien, Emmanuel Macron a laissé
Joe Biden tendre le bras vers lui pour lui
saisir la main, pour aller la chercher. Le
président américain a ensuite réitéré le
contact en signe affectif appuyé. « Nous
n’avons pas d’allié plus ancien et plus
loyal », a-t-il déclaré. « La France est un
partenaire précieux, c’est une puissance en
tant que telle », a-t-il insisté.
« Nous avons clarifié ce qui devait être
clarifié », a affirmé le président français
Le pape François juge le président américain
« bon catholique »
JeaN-Marie GuéNois jmguenois@lefigaro.fr
À ROME, ville éternelle, tout est affaire de
temps. Aussi étroit que cela puisse paraî-
tre, le minutage des rencontres entre le
pape et ses invités compte. Joe Biden a
ainsi rencontré le pape François vendredi
pendant soixante-quinze minutes ! Ce fut
davantage qu’avec le président Obama,
cinquante-deux minutes en 2014 et net-
tement plus qu’avec Donald Trump, tren-
te minutes en 2017… Autre détail impor-
tant, le sourire du pape et de son
interlocuteur, tous deux radieux, à l’ima-
ge de deux amis, ayant plaisir à se revoir
et qui se retrouvaient d’ailleurs pour la
quatrième fois. Même si c’était la premiè-
re pour Biden en tant que président. Le
contraste est net avec la moue papale au
côté du président Trump. « C’est bon
d’être de retour », a lancé Biden, tout sou-
rire, à son comité d’accueil dans la cour
San Damase du Vatican à peine descendu
de son imposante limousine et suivi de
son épouse, Jill, portant mantille noire.
Un dernier détail sur cette rencontre ne
trompe pas. Le président américain a re-
mis au pape un petit médaillon à l’effigie
du régiment où son fils, Beau Biden, servit
avant de mourir d’un cancer du cerveau à
l’âge de 46 ans. « Vous êtes le soldat de la
paix le plus important que j’aie jamais ren-
�/�
contré », a alors confié au pape, un Joe Bi-
den ému : « Mon fils aurait voulu que je
Le
MATHILDE
MUNOS
5H / 7H
TOUS LES LUNDIS À 6H44,
HISTOIRES POLITIQUES
AVEC ARTHUR BERDAH,
JOURNALISTE POLITIQUE
A
AU
pour clore la brouille. Il a cité des ques-
tions majeures pour la France comme la
défense européenne, la souveraineté
européenne, le partenariat stratégique
en Indo-Pacifique et l’engagement
américain au Sahel, en appui des opéra-
tions militaires françaises. Emmanuel
Macron a assuré vouloir se tourner
« vers l’avenir » pour renforcer la coo-
pération entre les deux pays.
La réconciliation serait scellée. En
torpillant un contrat majeur de vente
de sous-marins d’attaque à Canberra,
les États-Unis avaient suscité une colè-
re rare de la France, ramenée à un sta-
tut d’interlocuteur marginal. Paris
avait rappelé son ambassadeur, une
première dans l’histoire des deux na-
tions. « Ce qui s’est passé était mala-
droit », a convenu Joe Biden avant
d’assurer avec aplomb : « Je pensais que
la France était au courant (que) l’accord
(avec l’Australie) n’allait pas tenir. »
Emmanuel Macron n’a pas relevé l’im-
probable affirmation. En diplomatie, il
faut savoir engranger les succès et tenir
les apparences.
Joe Biden est un pragmatique et sa po-
litique est tournée vers le face-à-face
avec la Chine. L’enjeu du soutien fran-
çais aux intérêts américains est marginal
compte tenu du déséquilibre de puissan-
ce. Mais l’Administration Biden veille à
entretenir de bonnes relations apparen-
tes avec ses alliés, et notamment avec la
France, pour vanter les vertus du multi-
latéralisme. Après les années Trump, les
États-Unis veulent montrer qu’ils ne
sont pas isolés. Ils entendent aussi pou-
voir déléguer à d’autres la sécurité dans
certaines régions éloignées de leurs ob-
jectifs asiatiques, comme en mer Médi-
terranée ou en Afrique. « Au Sahel, vous
faites les gros du travail », a souligné le
président américain. Les États-Unis
« ont pris des décisions très opérationnel-
les », s’est réjoui Emmanuel Macron. Au
Mali, les drones et le renseignement
américains sont primordiaux dans la
vous donne cela. » De fait le pape François
se montra très proche de la famille Biden
lors de ce drame comme il n’hésite pas à le
faire avec beaucoup par des courriers
personnels ou des coups de téléphone.
Il y avait vendredi, dans ces longues mi-
nutes d’entretien, une dimension person-
nelle visible. Comme l’a révélé ensuite le
président américain, il a été effectivement
question avec le pape de la polémique sou-
levée par les évêques des États-Unis,
contre la politique de Joe Biden en faveur
de l’avortement qui devrait, selon la ma-
jorité des prélats américains, lui interdire
l’accès à la communion. Selon Joe Biden
lui-même, le pape lui aurait dit, vendredi,
qu’il pouvait « continuer à recevoir la com-
munion » et que le pape se réjouissait de
voir en lui « un bon catholique ».
Feu vert
Soit un feu vert pour Joe Biden, person-
nellement opposé à l’avortement mais
politiquement en faveur de son rembour-
sement par des fonds fédéraux en 2022,
cohérent avec ce que le pape avait déjà
déclaré à ce sujet le 15 septembre à son
retour de Slovaquie : « Je n’ai jamais refu-
sé l’eucharistie à personne, avait-il lancé.
La communion n’est pas une récompense
pour les parfaits ; la communion est un
don, un cadeau. » Même si l’avortement
demeure « un meurtre », les prêtres doi-
vent se comporter en « pasteurs » avec
« proximité » et « compassion » et « ne
pas condamner ».
Cet épisode personnel de l’échange en-
tre le souverain pontife et le deuxième
président catholique des États-Unis après
John F. Kennedy, n’apparaît ni dans le
communiqué officiel de la Maison-Blan-
che, ni dans celui du Vatican.
Selon le gouvernement américain, Joe
Biden a « remercié » le pape pour son « en-
gagement en faveur des pauvres, des per-
sonnes souffrant de la faim, de la guerre et
des persécutions ». Il lui a aussi « rendu
hommage pour son combat contre la crise
lutte contre les groupes djihadistes ar- qu’il n’y a pas de contradiction entre dé-
més. L’entretien devait ensuite durer fense européenne et Alliance atlantique ».
une heure dans un strict huis clos tout Les deux leaders se sont aussi enten-
d’abord. dus sur « plusieurs partenariats bilaté-
raux », a assuré Emmanuel Macron en
Engranger des gains concrets citant les exportations d’armes, le nu-
Après la crise diplomatique, le chef de cléaire, les énergies renouvelables, le
l’État espère engranger quelques gains spatial et « les technologies les plus in-
concrets : tout d’abord, se hisser au rang novantes ». « Ce sont des décisions ex-
d’interlocuteur crucial pour la première trêmement concrètes » qui viennent en
puissance mondiale, lever ensuite les ré- soutien « d’un processus de confiance
ticences au sein de l’Union européenne que nous bâtissons ensemble », a assuré
pour une plus grande autonomie straté- Emmanuel Macron. Le détail est à ve-
gique. Joe Biden n’en a pas dit un mot nir. Quant à Joe Biden, il peut se réjouir
explicitement toutefois. À l’Élysée, on d’avoir apaisé la brouille avec la Fran-
insistait avant la rencontre sur l’enjeu de ce. Il pourra se concentrer sur d’autres
« mettre tout le monde d’accord sur le fait enjeux. ■
Pendant deux jours Rome
a été placée en état d’alerte
Valérie seGoNd
Rome
PREMIER grand rassemblement des
chefs d’État depuis deux ans, ce G20 de
Rome est aussi pour les mouvements
protestataires la première occasion de-
puis longtemps de montrer leurs mus-
cles. Samedi à 15 heures, plus de 5 000
personnes représentants vingt mouve-
ments des univers alternatifs, environ-
VatICan MeDIa/VIa reUterS
nementaux (dont le mouvement de
Greta Thunberg, Fridays for Future),
étudiants et syndicaux, mais aussi les
salariés des entreprises en crise, tous
coordonnés sous la bannière « Vous le
G20, nous le futur » partiront de la pla-
ce Ostiense près de la pyramide, vers la
place de la Bocca della Verità. Au
même moment, une manifestation or-
Joe Biden et le pape François ganisée par le Comité « No Draghi »,
lors de sa visite au Vatican, vendredi. d’obédience communiste devait se te-
nir sur la place Saint-Jean de Latran, la
climatique de même que pour son engage- grande place romaine des manifesta-
ment en vue de la fin de la pandémie pour tions nationales. Et toute la journée de
tous avec un partage du vaccin et pour une dimanche, jusqu’à la fermeture du
économie globale équitable ». sommet du G20 à 16 heures, se tiendra
Des sujets qui ont été ensuite dévelop-
pés, toujours de sources américaines, entre
le président américain et le numéro deux Cela fait des décennies
du Saint-Siège, le secrétaire d’État, Pietro que Rome n’avait pas
Parolin : la défense de l’écologie « soutenue accueilli un sommet
par des centaines d’associations chrétien-
nes » qui a été saluée par Joe Biden mais
international de ce niveau
aussi une réflexion sur la façon de « rallier
un effort global en vue de la vaccination une assemblée nationale de conver-
contre le Covid-19 pour les pays en voie de gence des mouvements sociaux au
développement ». Les dossiers du Venezue- théâtre Garbatella, au cœur du quartier
la et de Cuba ont été aussi évoqués. Tout populaire éponyme. Trois semaines
comme celui de la « liberté religieuse » après une manifestation des No Green
dans le monde. Pass, les opposants au passe sanitaire,
Selon le Vatican le thème des « réfu- qui a dégénéré après l’infiltration de
giés et de l’accueil des migrants », celui mouvements néofascistes de Forza
de la « liberté de conscience » et de la Nuova, les forces de l’ordre sont sur
« promotion de la paix par le biais de la leur garde. Cela fait des décennies que
négociation politique » étaient aussi au Rome n’avait pas accueilli un sommet
menu des discussions. ■ international de ce niveau. L’Italie, qui
en brEF
Vingt ans de prison
pour un opposant birman
En Birmanie, la junte
a condamné vendredi U Win
Htein, un ex-député, proche
collaborateur de la dirigeante
Aung San Suu Kyi, à 20 ans
de prison pour trahison.
andrew Cuomo inculpé
pour agression sexuelle
L’ancien gouverneur de l’État
de New York Andrew Cuomo
a été inculpé jeudi devant un
tribunal pour agression sexuelle
sur une ancienne employée
et comparaîtra selon une source
judiciaire, pour une première
audition le 17 novembre, nouvelle
étape d’une affaire qui l’avait
contraint à la démission cet été.
Washington appelle l’armée
soudanaise à la retenue
Les États-Unis ont exhorté
vendredi l’armée soudanaise
à ne pas réprimer violemment
les manifestations prévues samedi
contre son coup d’État militaire.
KeVIn laMarQUe/reUter
Joe Biden
et Emmanuel Macron,
vendredi à la Villa
Bonaparte, le siège
de l’ambassade
de France auprès
du Vatican.
se souvient amèrement des trois
jours d’émeutes anti-G8 il y a vingt
ans à Gênes, faisant un mort et
600 blessés, ne peut pas risquer le
moindre incident.
Depuis des semaines, la police, qui
surveille internet et les réseaux so-
ciaux, ainsi que les services de rensei-
gnements sont en alerte et tentent
d’intercepter les agitateurs en amont.
Pour assurer « l’image de sérénité et de
sécurité absolues » que veut donner le
Palazzo Chigi, la liberté d’expression a
été garantie, mais de façon pacifique et
sans défilé. Les manifestations un tant
soit peu risquées pour l’ordre public
n’ont pas été autorisées ou ont été relé-
guées dans des zones éloignées.
Dans le quartier de l’Eur, construit
dans les années 1930 par Mussolini
dans le sud de Rome, se déroulent les
travaux du sommet. Autour du centre
de convention de la Nuvola, où tra-
vaillent les chefs d’État, et du palais des
congrès, où se trouve la presse, une
zone de sécurité de plus de 10 kilomè-
tres carrés a été fermée au public, et a
fait l’objet d’un nettoyage avec chiens
renifleurs et démineurs. Les forces de
police encerclent aussi le Palazzo Chigi
et le Quirinale, dans la Rome histori-
que, ainsi que les quartiers des ambas-
sades et les hôtels qui accueilleront les
délégations des 20 pays. La gare de
Termini sera très surveillée, l’accès aux
grandes places avoisinantes, aux mu-
sées et sites archéologiques fermés. La
surveillance est maximale aux frontiè-
res et les contrôles ont été renforcés
aux aéroports comme aux carrefours
routiers. L’espace aérien a été fermé
au-dessus de Rome. Outre les garni-
sons territoriales, 5 300 forces de l’or-
dre supplémentaires ont été mobili-
sées, dont les forces d’intervention
rapide, l’antiterrorisme, les tireurs
d’élite et les pompiers de la lutte contre
les menaces bactériologiques. ■
 le figaro samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021

Société 9

Au procès « V 13 »,
un psychiatre
analyse
le traumatisme
Le Pr Baubet a décrit les conséquences
très étendues que peut avoir un attentat. Un survivant rassure ses proches au téléphone après l’attaque au Bataclan, le 13 novembre 2015, à Paris. A. ANTONIOL/GeTTy ImAGes/AFP

Jean ChiChizola
AttentAts « Qu’est-ce qu’un expert
peut dire ? Les victimes et les proches des
victimes ont dit, je le pense, tout ce qu’il y a
à savoir sur le traumatisme d’un attentat
terroriste, le deuil et la douleur que cela
crée. » Entendu vendredi à la demande
vu des personnes mourir, mais nous ne
saurons jamais ce que c’est que d’être
mort. » « Le traumatisme, ajoute-t-il,
c’est faire un pas au-delà. Comme si la
mort était en soi. » Cette mort en soi est
d’autant plus angoissante qu’elle peut
frapper, comme l’explique le psychiatre,
des personnes qui seront considérées
comme des victimes par la médecine
L. BONAVeNTure/AFP
leur état se dégrade au fil du temps ». Le
psychiatre évoque aussi l’un des symp-
tômes les plus sournois de ces troubles
post-traumatiques, que l’on retrouve
chez les victimes de bien d’autres mas-
sacres : l’impression que nul ne pourra
“
Le traumatisme,
Spécialiste de l’enfance et de l’adoles-
cence, Thierry Baubet évoque longue-
ment les enfants confrontés aux consé-
quences des attentats. « Le jeune âge ne
protège pas du traumatisme », lâche-t-
il, mais ce dernier est parfois plus délicat
à percevoir, car l’entourage, « bien qu’il
soit aimant », peine à le reconnaître. Il
évoque même « des stratégies familiales
de l’annonce du décès. Mais aussi par le
fait que les symptômes enfantins, qui
vont handicaper l’individu dans son dé-
veloppement, sont « généralement dis-
crets ». Leur prise en charge est d’autant
plus essentielle que le Pr Baubet rappelle
que, par rapport à la population dans son
ensemble, le deuil d’un parent multiplie
par deux le risque de suicide au cours de

de parties civiles, Thierry Baubet, psy-
chiatre à l’hôpital Avicenne, a d’abord
tenu à saluer ainsi la force et les ensei-
gnements des semaines de témoignages
des parties civiles.
Puis le Pr Baubet, qui a compté et
compte encore des victimes parmi ses
patients, a éclairé la cour sur « l’après »,
sur les façons dont un être humain subit
ce traumatisme, le surmonte, ou som-
bre. Il emploie des formules parlantes et
saisissantes : « Nous savons tous que nous
devons mourir, nous avons éventuellement
mais pas par la justice. Et de prendre
l’exemple, comme cela s’est passé dans
la réalité, d’une personne qui assiste aux
massacres d’une terrasse depuis sa fenê-
tre et qui a pu « développer un trouble
post-traumatique grave ». De même un
proche d’un rescapé d’un attentat pour-
ra lui aussi souffrir d’un tel trouble.
Thierry Baubet évoque aussi la vigilance
nécessaire pour toutes les personnes
traumatisées, même les personnes ayant
l’air « d’aller bien », et on dit trop rapi-
dement « qu’ils sont résilients, alors que
c’est faire
un pas au-delà.
Comme si la mort
était en soi
”
ThIERRy BAUBET, PSyChIATRE
jamais comprendre ce qu’on a vécu. Un
constat qui, au passage, livre l’une des
clés de ce procès : il donne longuement la
parole aux victimes et offre ainsi la pos-
sibilité à tous les autres de les écouter, de
les entendre et de les comprendre.
dysfonctionnelles » avec dans certains
cas un silence total et dans d’autres un
trop-plein de paroles. Ce qui, dans les
deux cas, angoisse encore plus un enfant
qui a perdu un proche. Le deuil d’un pa-
rent détruit la vision du monde de l’en-
fant, qui repose notamment sur la
conviction que « papa et maman seront
toujours là pour le protéger ». Or l’am-
pleur de ce traumatisme est encore com-
pliquée par la détresse de proches en
manque de conseils sur le comporte-
ment à adopter, notamment au moment
l’existence.
Le risque s’étend enfin également aux
générations futures. Ainsi des préoccu-
pations médicales sur les femmes en-
ceintes souffrant de troubles post-trau-
matiques et sur les enfants qu’elles
portent en elles. Ou celles concernant les
enfants nés après un épisode traumati-
que des parents. Thierry Baubet précise
qu’à ses yeux les traumatismes concer-
nent en réalité toute la famille. Or, « une
famille sur dix seulement bénéficie d’une
approche familiale pour (les) traiter ». ■

Les Jésuites rassemblés à Marseille pour leurs 500 ans

L’ordre fondé par Ignace de Loyola, fort de 15 000 membres dans le monde, engage une réflexion sur les abus sexuels dans l’Église.
Jean-Marie Guénois £@jmguenois
religion « Inigo » a trente ans et ne
rêve que de gloire militaire. Inigo, c’est
le surnom d’Ignace de Loyola. En 1521,
cet impétueux chevalier espagnol dé-
fend la ville de Pampelune, en Navarre,
contre les assauts des troupes franco-
navarraises de François Ier. Blessé à une
jambe, il se bat comme un lion jusqu’à
ce qu’un boulet de canon lui brise
l’autre jambe. Il est à terre et pour long-
temps. Handicapé à vie, une lente
conversion intérieure au Christ s’opère
en lui. Elle conduira ce fulgurant
personnage à fonder la Compagnie de
Jésus, à Montmartre à Paris en 1534. Il
sera canonisé en 1622.
Cinq cents ans après ce coup de ca-
non fondateur des Jésuites, le plus
grand ordre religieux du monde, avec
ses 15 000 membres, fête cet anniver-
saire dans tous les pays. Pour la Fran-
ce, la famille ignatienne, quelque
7 000 personnes, religieux et laïcs or-
ganisés en différents mouvements, se
retrouvent ce week-end de la Tous-
saint à Marseille. D’où seront retrans-
mises, dimanche, la messe télévisée
sur France 2 et, lundi, la messe de la
Toussaint, sur KTO. Pour l’occasion,
le supérieur général des Jésuites à
Rome – appelé « le pape noir » dans
l’histoire, en raison de son pouvoir et
de la couleur de son vêtement, sera
présent. Il s’agit d’Arturo Sosa, un
Vénézuélien.
Une fête, toutefois, quelque peu gâ-
chée par un autre « boulet de canon »
blessant profondément les rangs des ca-
tholiques depuis la publication, le 5 oc-
tobre 2021, du rapport Sauvé sur les abus
sexuels dans l’Église. Thierry Lamboley,
père jésuite, en charge du rassemble-
ment de Marseille, constate : « Nous
avons tous pris une claque avec la publi-
cation du rapport de la Ciase. La honte
nous habite, l’écoute des victimes, qui
sont enfin devenues des témoins de l’indi-
cible, nous transforme de l’intérieur.
Nous avons donc modifié notre program-
me pour que le rapport Sauvé puisse faire
l’objet de paroles et de discernement. Du-
rant des temps de prière, personnelle ou
liturgique, ou encore durant une table
ronde, nous continuerons de recevoir ce
rapport pour en prendre connaissance et
voir ensemble à quels changements il nous
oblige et à quelle espérance il nous
convie. » Il conclut : « Ne rien faire, ne
rien modifier est impossible. La question
est ouverte et elle ne se refermera pas
sans décision concrète. »
Diversité de situations
Mais quelle voie de réforme concrète ? Le
père Thierry Anne, jésuite, insiste sur la
formation des prêtres : « Concrètement,
comme ancien responsable du noviciat, je
vois comment nous intégrons dans nos
programmes de formation, depuis des dé-
cennies, des sessions sur la dimension af-
fective et sexuelle de nos vies. Sessions qui
ne cessent de prendre de l’ampleur. Nous
les vivons en pluralité, hommes et femmes,
avec des intervenants extérieurs. Plus que
jamais nous faisons appel à des psycholo-
gues pour qu’ils nous aident lorsqu’une
fragilité apparaît, lorsqu’une souffrance
psychique se manifeste. »
Mais il n’y a pas que des prêtres dans
« la famille ignatienne », souligne
Christine Danel, la supérieure des Xa-
vières, ordre de religieuses fondé il y a
cent ans à Marseille : « La famille igna-
cienne est plus large que les Jésuites !
C’est une famille à l’image de la vie, avec
des jeunes, des aînés, des familles, des
hommes et des femmes consacrés, laïcs,
clercs. Une diversité de situations qui en-
traîne de la diversité, de l’altérité, de la
complémentarité vivant tous du même es-
prit ! Un esprit qui invite à chercher et
trouver Dieu en toutes choses. » ■

« Nos missions n’ont pas pris une ride ! »

LE PÈRE François Boëdec, S.J.,
est le supérieur provincial de la
province d’Europe Occidentale
Francophone.
LE FIGARO.- 500 ans !
Les jésuites ont-ils vieilli ?
Père François BOËDEC.- Nos
BruNO LeVy/DIVerGeNce
cices spirituels, et sont liés dans un
corps apostolique. Nous vivons
en communauté, lieu de discer-
nement mais aussi de fraternité.
des projets que nous portons
avec d’autres. Je pense à
l’ouverture récente d’un collè-
ge à Bruxelles, au projet du
ARTCURIAL
Centre Teilhard de Chardin à
Que vous dit votre expérience Saclay, ou d’un futur « écocen-
sur la crise des abus sexuels tre spirituel » , sans oublier des
dans l’Église ? propositions pour les familles.

missions n’ont pas pris une Notre tradition ne nous a pas

ride ! La formation de la jeunes-
se, l’accompagnement spirituel,
la réflexion théologique ou l’at-
tention aux plus pauvres… Tout
cela nous ramène aux questions
actuelles mais aussi au cœur de
l’Évangile. Nous avons effecti-
Nous avons vement une histoire riche, mais
effectivement nous avons surtout un charisme
toujours actuel. La conversion
une histoire de Saint Ignace, il y a cinq cents
prémunis : des jésuites se sont La popularité du pape aide-t-elle
rendus coupables d’abus la Compagnie de Jésus ?
sexuels et spirituels. Plus de Le pape n’est pas un « people ».
quatre-vingts personnes victi- Il ne cherche pas la popularité. Il
mes se sont adressées à nous en met devant nos yeux les exigen-
France depuis la création de ces d’une cohérence de vie à la-
notre cellule d’accueil et quelle nous invite l’Évangile. La
d’écoute. Leurs témoignages Compagnie de Jésus résonne
nous aident à faire la vérité sur bien aux intuitions du pape. Elle
ce passé que nous avons à re- y retrouve celles de Saint Ignace.
garder en face. Avec le rapport
Agrément cvv du 25/01/2001 - Commissaire-priseur : Stéphane Aubert

riche, mais ans, fut le début d’une extraor-
nous avons dinaire aventure humaine et
spirituelle. Cette longue tradi-
surtout tion est précieuse pour aborder
un charisme les enjeux d’aujourd’hui.
toujours
actuel »
PèRE FRAnçOIS BOëdEC
Qu’est-ce qu’être jésuite en 2021 ?
Les jésuites ont souvent du tem-
pérament ! Il en faut pour vivre,
ici ou au loin, des réalités aposto-
liques difficiles. Ce sont des hom-
mes de mission : ils la discernent
et la reçoivent de leurs supé-
rieurs. Ce que disait le pape
Paul VI est toujours actuel : les jé-
suites doivent aller « là où les exi-
gences brûlantes de l’homme et le
message permanent de l’Évangile
de la Ciase, nous désirons avan- Pourquoi êtes-vous aussi
cer et participer aux enjeux de respectés que craints ?
conversion et de renouvelle- Je ne vois vraiment pas qui nous
ment de notre Église. craindrait ! L’imaginaire ne cor-
SAINT-AUGUSTIN. Œuvres. Édition d’Érasme chez Froben 1528,
en reliure du temps.
respond guère à la réalité. Beau- Estimation : 30 000 - 40 000 €
Quelles sont vos priorités coup, cependant, nous font cré-
pastorales ?
Quatre préférences apostoli-
ques orientent actuellement
dit de pouvoir les aider,
notamment lorsqu’il s’agit de
faire des choix personnels ou EXPERTISES GRATUITES
notre mission dans le monde :
montrer le chemin vers Dieu
professionnels. J’aime bien ce
que me disait un évêque étran- & CONFIDENTIELLES
par les Exercices spirituels ; ac-
compagner les jeunes dans la
ger : “ Les Jésuites ? Libres, mais
fidèles ! ” La liberté fait toujours Livres & Manuscrits
construction de leur avenir ; peur… Cette liberté qui nous
marcher au côté des pauvres, vient des Exercices spirituels est Vente en janvier 2022
des personnes blessées dans liée à l’obéissance. Il y a des choix
leur dignité ; prendre soin de la à faire selon l’Évangile. Mais tou-
Création dans l’esprit de Lau- jours dans la fidélité à l’Église.
A

sont confrontés ». Tous vivent dato si’. Ces orientations nour- C’est central pour Saint Ignace. ■ +33 (0) 1 42 99 16 49 fharnisch@artcurial.com
l’expérience fondatrice des Exer- rissent un réel dynamisme dans PROPOS RECUEILLIS PAR J.-M. G.
 samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021 le figaro
10 Société
Le grand désarroi des
parents face aux ados qui
veulent changer de genre
Qu’ils soient compréhensifs ou plus réfractaires, tous sont inquiets
de voir leur enfant prendre des décisions aux conséquences
irréversibles, et blâment un « effet de mode » sur les réseaux sociaux.
Stéphane KovacS £@KovacsSt
identité Un jour, ils ont reçu un
SMS laconique. Une vidéo. Ou
même un diaporama. Avec des
mots, des expressions qu’ils ne
connaissaient pas dans la bouche
de leur enfant. Et plus aucune
faute d’orthographe : « À partir
de ce soir, vous m’appellerez
Louise* », a écrit Louis*.
Un jour, leur ado leur annonce
qu’il est transgenre, « sans aucun
signe avant-coureur », et ces pa-
rents se trouvent « complètement
désemparés ». Alors que le minis-
tère de l’Éducation nationale
vient de publier une circulaire
pour mieux « accompagner » les
élèves trans (lire page 12), que
l’Assemblée nationale vient de
voter l’interdiction des « théra-
pies de conversion » visant à
« modifier l’orientation sexuelle »,
mais aussi « l’identité de genre »
d’une personne, ils se disent très
inquiets : « Comment faire com-
prendre à nos enfants que leur
mal-être n’est pas forcément dû à
une transidentité ? s’émeut Ca-
mille, qui s’emploie à rassembler
d’autres parents dans un collec-
tif, en lien avec la fédération in-
ternationale de parents Genspect.
On a l’impression d’être plongés
dans un monde de science-fiction,
où énoncer le moindre conseil de
prudence devient transphobe. »
Petit, Louis était « plutôt bran-
ché dinosaures, jamais de robe à
paillettes ». Mais un jour, Corinne
tombe sur des photos de son fils
de 14 ans en sous-vêtements fé-
minins sur Instagram. Il voulait
juste « avoir des likes »… « Louis
est plongé dans la culture manga
du matin au soir, explique Corin-
ne. Dans ces BD, les personnages
passent d’un genre à l’autre sans
problème. C’est un gamin haut po-
tentiel, qui a été harcelé au collè-
ge. Chez nous, il est joyeux, cu-
rieux, mais il y a ces réseaux
sociaux… » En mars 2020, il lui
envoie un SMS : « Quand tu ren-
tres, tu me dis ‘‘elle” ». Ses pa-
rents l’entourent avec bien-
veillance. « Je lui ai trouvé les
coordonnées d’un psy trans, je l’ai
emmené au rayon fille, je lui ai
même proposé de lui apprendre à
mettre du fond de teint ! », énu-
mère Corinne. Mais le diagnostic
de la psychologue est clair : Louis
« n’est ni convaincu ni convain-
cant ». « Il ne se reconnaît pas
dans le modèle hypersportif et
masculin de son père, mais ce n’est
pas pour cela qu’il est une fille !,
s’exclame sa mère. J’ai vu qu’il
était allé sur des sites proposant
des hypnoses en transe profonde
pour faire une transition ‘‘male to
female’’, ou encore une ‘‘bimbofi-
cation’’ ! Et qu’il avait écouté la
séance quatre ou cinq fois ! Je ne
dis pas que cela n’existe pas, je dis
juste qu’il doit y avoir un nombre
infime d’enfants qui ne sont pas
nés dans le bon corps. Mais si
nous, parents, on émet une réser-
ve, c’est tout juste si l’Aide sociale
à l’enfance ne débarque pas… »
Issue « d’une famille de gauche,
laïque, très ouverte aux questions
LGBTQI+, je n’ai aucun problème
avec le changement de genre, an-
nonce d’emblée Camille. Mais
quand notre fille nous a annoncé
qu’elle voulait démarrer une tran-
sition, à 15 ans, nous nous sommes
demandé si elle ne se jetait pas là-
dedans comme dans une utopie,
tempère-t-elle. Très sensible aux
inégalités, à la crise climatique, à
la montée de l’extrême droite,
A
Anna a un QI élevé, des facilités
pour toutes les matières, et du
coup une anxiété : comment choi-
sir ? Elle n’arrête pas de changer
d’avis… Les explorations adoles-
centes, moi je trouve ça bien, tant
que ça n’est pas dangereux ni ir-
réversible ». Anna, qui « a vécu sa
puberté sans malaise particulier »,
n’a jamais demandé à changer de
pronoms ni de prénom. « Elle qui
m’avait dit qu’elle ne prendrait ja-
mais la pilule, parce que c’était
dangereux pour la santé, m’an-
nonce qu’elle veut des hormones !,
s’étrangle Camille. Je ne mets pas
du tout en doute sa souffrance,
mais pour nous ce n’est pas la
bonne explication. Elle a plein de
raisons de se sentir différente,
mais ce n’est pas grave d’être dif-
férente ! »
« On est totalement
démunis »
Trouver « des professionnels de
santé qui pourraient l’aider » n’est
pas une mince affaire. « Je ne
voulais surtout pas un réac, mais
pas non plus quelqu’un de militant,
qui l’autoriserait à faire une mas-
tectomie, qu’elle veut tout de sui-
te !, lance la maman. La bien-
veillance, ce n’est pas forcément
dire oui immédiatement ! » En at-
tendant, l’ado s’habille au rayon
homme, ne s’épile plus, mais
continue à se maquiller… et a
commencé le tricot. Pas question
cependant d’aller voir le gynéco.
« À l’âge où elle devrait avoir ses
premières relations amoureuses,
elle veut changer de genre avant
d’expérimenter cela, s’effare Ca-
mille. Elle me dit qu’elle est attirée
par les gens pour ce qu’ils sont, et
que c’est transphobe d’avoir des
préférences génitales ! »
Pas d’opposition frontale non
plus dans la famille de Julie,
bientôt 17 ans. « Si elle veut chan-
Pansexuel, gender fluid, non binaire… : au sein de la nouvelle géné
agnèS LecLair £@AgnesLeclair
À tout juste 13 ans, Anaïs (1) refuse
d’être « enfermée » dans une iden-
tité genrée. En famille, le sujet est
venu sur la table un soir de prin-
temps, au dîner. Sans préavis,
l’adolescente déclare qu’elle sou-
haite se rendre à la Gay Pride,
aujourd’hui renommée Marche des
fiertés. « Mais… tu penses que tu es
gay ? Tu ne nous en avais jamais
parlé ! », s’exclame son père, Vic-
tor. Étonné, le quadragénaire pari-
sien, créateur d’une agence de de-
sign, se dit alors prêt à accueillir un
coming out avec bienveillance.
« Mais t’es tellement has been !
Comment tu peux poser cette ques-
tion en 2021 ?, s’agace l’adolescen-
te, élève en cinquième dans un col-
ger de sexe, nous ne nous y oppo-
serons pas, assure sa mère Alice.
D’abord, il faut tout de même ex-
plorer d’autres pistes pour ce mal-
être ! » À 13 ans, Julie a été agres-
sée sexuellement par un adulte.
Elle a longtemps été suivie à la
Maison (des adolescents) de So-
lenn. Complexée par sa petite
taille, elle a commencé à s’ha-
biller de façon masculine, à ma-
nifester une préférence pour les
filles. « En seconde, elle a eu une
petite amie qui traversait une crise
identitaire et a voulu, comme elle,
prendre de la testostérone, racon-
te Alice. Depuis, toutes les amies
« changer
qu’elle ramène à la maison arbo-
rent un prénom masculin. » Le
psychiatre explique à Julie qu’il
ne lui donnera pas de traitement
avant que son problème psycho-
logique soit résolu. « Du coup, elle
ne veut plus voir ce médecin, et
cherche à se procurer les hormo-
nes de son côté, s’affolent ses pa-
rents. On a fait l’effort de l’appe-
ler Jules, mais ça ne lui suffit pas.
Quand on lui dit : “Regarde ce qui
se passe en Suède !” » (où le plus
prestigieux hôpital refuse désor-
mais les hormones aux mineurs,
NDLR), elle nous rabroue d’un
« transphobes ! ». Et quand on sait
que des associations organisent
des collectes pour la transition de
personnes qui n’en ont pas les
moyens… » Dans son lycée du
centre de Paris, plusieurs jeunes
ont annoncé être en transition.
« Je suis entrée en contact avec un
groupe de parents qui traversent
les mêmes affres, à savoir le senti-
ment d’avoir un enfant embrigadé
dans une secte, raconte Alice. Fu-
gues à répétition, soirées alcooli-
sées, drogue… Même mode opéra-
toire pour provoquer une rupture
de communication avec l’entoura-
lège catholique du centre de Paris.
Ça n’a rien à voir. Je suis gender
fluid. » Soit une personne qui ne se
caractérise pas par un genre fixe,
mais qui va varier au fil du temps.
En une réplique, la fille de Victor
venait de pulvériser ses schémas
de pensée. Lui, le papa poule, si à
l’écoute de ses enfants, s’est senti
appartenir à un autre monde.
Près d’un quart des 18-30 ans
(22 %) ne se sent ni homme ni
femme, pointait une enquête de
l’Institut français d’opinion publi-
que (Ifop), parue en novembre
2020. Même si la plupart des ado-
lescents restent très « normés »,
l’interrogation sur le genre est un
phénomène en pleine expansion.
Tout comme le recours à des caté-
gories très précises de sexualité
pour se définir et affirmer son
Si elle veut
de sexe,
nous ne nous
y opposerons
pas. D’abord,
il faut tout
de même
explorer ge. On est totalement démunis.
d’autres L’autorité, ce n’est plus nous, ce
pistes sont les réseaux sociaux. »
C’est d’ailleurs là que Julie a
pour ce trouvé comment se procurer des
mal-être ! »
aLice, mère de JuLie,
bandes de compression pour ca-
cher sa poitrine. « Un jour, je l’ai
bientôt 17 anS entendue hurler de douleur, ra-
conte sa mère : elle avait porté
cette bande bien plus que les 4 à
6 heures recommandées et n’arri-
vait plus à la décoller ! » Chez
Trans-Missie, un site de vente en
ligne d’accessoires pour person-
nes trans, basé aux Pays-Bas, on
assure avoir « de plus en plus de
clients français ». Pour les gar-
çons qui veulent devenir filles,
des corsets créent « une silhouette
féminine parfaite » et des culottes
au tissu « correctif extra-fort »
« masquent votre pénis aussi effi-
cacement et confortablement que
identité. À l’Inter-LGBT, on ob-
serve la tendance avec une pointe
de surprise sur son ampleur. La
dernière Marche des fiertés, en
juin - celle où Anaïs s’est rendue -,
a été submergée par « un océan
d’adolescentes ». « Des dizaines de
milliers », s’étonne Laurène
Chesnel, une des représentantes
de l’Inter-LGBT, habituée à voir
défiler un public plus adulte.
« Pourquoi toutes ces jeunes filles en
questionnement se retrouvent plus
dans nos valeurs que dans celles
d’autres mouvements militants ?,
s’interroge-t-elle. Si certaines
s’affirment comme lesbiennes, la
question centrale, c’est le refus de
Marche des fiertés,
le 4 juillet 2020,
à Paris.
l’organisation binaire de la société.
Une nouvelle génération vient ques-
tionner l’approche traditionnelle du
LioNEL PRéAu/RivA PRESS féminisme par le biais de la non-bi-
narité. Alors que les féministes des
années 1960-1970 avaient pour ob-
jectif de faire évoluer la condition
des femmes, la génération actuelle
refuse la case “femme”. Peut-être
que les adolescents ont le sentiment
qu’ils ne peuvent pas changer le
monde et choisissent de se changer
eux-mêmes à la place… »
Oubliez 50 Nuances de Grey !
En juin, le réseau social Yubo,
présenté comme un Tinder de
l’amitié pour les 13-19 ans, a dé-
cidé d’intégrer 35 nuances de
genres dans son application. Ses
membres peuvent désormais se
définir comme « agenre », « poly-
genre », « bigenre » ou encore
« gender questioning », pour les
plus indécis…
Sur TikTok, les vidéos sur le
style vestimentaire non binaire
possible ». Ces culottes qui « four-
nissent un sentiment de féminin »
existent à partir de la taille
5 ans… Pour les filles en transi-
tion, des petites prothèses pé-
niennes « permettent d’uriner de-
bout » et sont disponibles en trois
couleurs, « vanille, caramel et
chocolat ».
« L’estime de soi »
Sur les forums où ces ados discu-
tent, on peut lire « n’hésite pas à
quitter tes parents… » « C’est
comme si mon fils était sous em-
prise, qu’il s’était radicalisé, se
désole une maman. Lui qui avait
toujours été très proche de moi,
s’est fermé à tout contact. Jusqu’à
me lâcher : “Je ne t’aime pas, tu es
toxique. De toute façon, l’amour
maternel n’existe pas, c’est une
construction sociale.” Une phrase
cumulent des millions de vues. Le
hashtag #Comphet, qui dénonce
l’injonction à l’« hétérosexualité
obligatoire » fait un carton. Signe
des temps, la maison d’édition
DC Comics vient d’annoncer par
communiqué la bisexualité de Jon
Kent, fils du super-héros améri-
cain Superman. Sur la nouvelle
“ Je suis attirée
par la personnalité
des gens plus que
par leur genre. Homme,
femme, personne non
binaire… peu importe
JuLiette, 17 anS
”
scène musicale, on célèbre plus
que jamais - n’oublions pas les
androgynes David Bowie et Prin-
ce - la diversité des identités et
des penchants amoureux. Com-
me la chanteuse de Christine and
The Queens, rebaptisée « Chris »
pour s’affranchir de la dualité
homme-femme.
Pour sa part à l’aise avec sa fé-
minité, Juliette, 17 ans, affirme
avec son assurance de bonne élè-
ve, qu’elle ne « s’identifie pas
comme hétérosexuelle » mais
comme « pansexuelle ». « Je suis
attirée par la personnalité des gens
plus que par leur genre. Homme,
femme, personne non binaire… peu
importe, décrit-elle. C’est quelque
chose dont je parle beaucoup
autour de moi et qui me semble de
plus en plus intégré dans la “nor-
malité”. » En terminale dans un

qu’il n’a pas trouvée tout seul… »
L’an dernier, le suicide à Lille
d’une lycéenne transgenre avait
bouleversé l’institution scolaire.
Dans le cadre de la Semaine
contre les discriminations, orga-
nisée sous l’égide de l’Observa-
toire académique des LGBT+pho-
bies, le lycée Fénelon, à Paris,
avait invité Marie de la Cheneliè-
re, ancienne fonctionnaire de la
Santé publique. « Je n’ai qu’un
seul regret, c’est de ne pas avoir
pu faire ma transition quand
j’étais jeune », débute la confé-
rencière, selon la vidéo disponi-
ble en ligne. PowerPoint à l’ap-
pui, elle énumère ensuite les
« gains » à la transition :
« L’authenticité, l’énergie, la
créativité, l’estime de soi. » Mais
n’évoque, comme aspect négatif,
que… « les infections urinaires »
ération, une révolution des identités
grand lycée versaillais, elle a le
sentiment de participer à « une
dynamique de déconstruction des
codes sociaux ». « Homme-fem-
me, masculin, féminin… Aujour-
d’hui, on se rend compte que les
choses sont beaucoup moins binai-
res. On peut se sentir ni homme ni
femme ou alors cela change selon
la période », dit-elle.
Nom, prénom, mail et… pro-
nom : dans les clubs de son lycée,
la fiche de renseignements pour les
nouveaux inscrits s’est adaptée.
Comme c’est déjà le cas sur Insta-
gram par exemple, on peut cocher
la case « il » ou « elle », mais aussi
le neutre « iel ». « Moi, je me consi-
dère comme une femme et j’utilise le
pronom elle. Mais cette démarche
me semble importante, car cela peut
mettre très mal à l’aise de ne pas
être appelé par le bon pronom »,
plaide l’adolescente.
À quoi bon casser les codes pour
en réinventer d’autres, toujours
plus étroits ? Loin de se laisser dés-
tabiliser, la jeune fille riposte :
« Quand on est dans cette phase de
l’adolescence et qu’on se cherche,
cela permet de mettre des mots sur
ce que l’on ressent. Ces définitions
de plus en plus précises aident à se
reconnaître. On peut se dire : “Je ne
suis pas bizarre” ou ”Je ne suis pas
exclu”, car il y a un mot qui existe
pour cela. Dans une société où l’on
peut encore être discriminé sur ces
sujets, c’est important. » Sa mère,
moins enthousiaste, tente de met-
tre l’adolescente en garde contre
l’influence des réseaux sociaux
« qui enferment dans des bulles de
certitudes ».
plus fréquentes. « Que faire si
vous êtes trans ? Allez sur internet,
recommande-t-elle, mais gardez
votre sens critique, car vous avez
des sites - religieux ou autres - qui
vont vous expliquer gentiment
qu’il faut bien réfléchir, faut pas
changer de genre. » Personne,
ensuite, pour nuancer son « ap-
proche transaffirmative », qui
prend acte de « l’autodiagnostic
que nous faisons sur nous-mê-
mes ». La proviseur de l’époque,
Stéphanie Motta-Garcia, aujour-
d’hui à Henri IV, « ne souhaite
pas » répondre au Figaro.
Aucun député non plus n’a ré-
pondu à Camille, qui leur avait
pourtant écrit avant le vote sur
les thérapies de conversion. « La
dysphorie de genre est une souf-
france qui disparaît dans la plu-
part des cas à l’âge adulte, plai-
Alors qu’elle s’apprête à souffler
ses 18 bougies, faut-il relire le par-
cours de Juliette à la lumière des
bouleversements sociétaux qui ont
marqué ces dernières années ? Née
après l’adoption du pacs, elle a fêté
ses 9 ans au moment de la bataille
du « mariage pour tous ». En 2016,
alors âgée de 12 ans, elle n’a certai-
nement pas vu passer la loi simpli-
fiant le changement de sexe à l’état
civil en France. Mais, quand Juliet-
te a eu 13 ans, la vague de dénon-
ciation des violences sexuelles
#MeToo sur les réseaux sociaux ne
lui a pas échappé. Autant de chan-
gements qui ont une influence sur
les états d’âmes des ados ? « Ces
débats ont baigné leur enfance.
Aujourd’hui, quand une petite fille
dit vouloir épouser sa meilleure amie
quand elle sera grande, on ne lui ré-
dait-elle. De nombreux cas sont
liés à des syndromes de stress
post-traumatiques, à l’autisme et
aussi au haut potentiel. Les pré-
conisations médicales les plus ré-
centes sont de ne pas laisser l’en-
fant entamer de transition (ni
sociale, ni surtout hormonale ou
chirurgicale), avant d’avoir ef-
fectué un suivi psychothérapeuti-
que long. » Lors des débats à
l’Assemblée, la droite avait in-
sisté : « Sera-t-il toujours permis
aux parents d’accompagner l’en-
fant en le conduisant par exemple
à consulter un psychothérapeu-
te ? » La rapporteur, Laurence
Vanceunebrock (LREM) avait
balayé « cette notion de “dyspho-
rie de genre” de nature psychia-
trique, utilisée par nos détrac-
teurs pour laisser percevoir la
transidentité comme pathologi-
pond plus : “Ce ne sera pas possi-
ble”. Les adolescents ont grandi
dans un environnement qui a chan-
gé et s’en font aujourd’hui l’écho. Ils
sont le miroir des interrogations qui
ont été amorcées par les adultes,
notamment depuis les travaux de la
théoricienne Judith Butler sur la dis-
sociation du genre et du sexe aux
États-Unis », pointe le docteur
Jean Chambry, président la Société
française de psychiatrie de l’enfant
et de l’adolescent. Le pédopsy-
chiatre Pierre Lévy-Soussan fait
lui aussi le lien avec l’actualité de
ces dernières années, en portant
un regard plus inquiet sur ses ré-
percussions. « Depuis l’adoption
par les couples de même sexe ou la
vague MeToo, la sexualité est deve-
nue “identitaire” : un combat. Cela
fait violence sur l’enfance et les pro-
le figaro
Fille ou garçon, que : on peut qualifier les prati-
certains enfants ques en ce sens de thérapies de
ne se reconnaissent pas conversion. » Créer un délit spé-
dans le sexe assigné cifique pour empêcher ces
à la naissance. « pratiques, comportements ou
REKiNA KAtYA/EKAtERiNA-
propos répétés », certes, mais ne
StocK.AdobE.com
pas proposer toutefois « des pei-
nes trop lourdes », avait appuyé
la députée, cela « retiendrait
peut-être les victimes de déposer
plainte contre leurs parents, pour
juste des propos, ou quelque cho-
se de minime »…
Julie - « ou les associations qui
la manipulent », soupirent ses
parents - n’a en tout cas pas at-
tendu le passage du texte au Sé-
nat : en fugue depuis le week-
end dernier, elle a « demandé à
son avocat » de porter plainte
contre eux, pour « harcèlement
moral ». ■
* Tous les prénoms ont été changés.
cessus adolescents : leur intimité est
« l’adoption
Depuis un nouveau champ d’expression du
politique », alerte-t-il.
De Trystan Reese, « l’homme
par les couples enceint » transgenre qui a médiati-
de même sexe sé sa grossesse en 2017 aux États-
Unis, au chanteur Bilal Hassani
ou la vague - coiffé d’une perruque blonde pla-
MeToo, tine - pour représenter la France à
la sexualité l’Eurovision, « de nouvelles catégo-
ries identitaires sont de plus en plus
est devenue présentes dans l’espace public, note
« identitaire » : de son côté Serge Hefez (2), psy-
un combat. chiatre et thérapeute familial à la
Pitié-Salpêtrière, à Paris. Même s’il
Cela fait s’agit d’un pourcentage infime de la
violence population, les marges interrogent
sur l’enfance toujours la norme. D’autant que cet-
te interrogation rejoint un chantier
et les devenu majeur aujourd’hui, celui de
processus la remise en cause de la domination
adolescents : masculine et de l’égalité entre les
hommes et les femmes ».
leur intimité Volonté d’en finir avec les mo-
est un dèles traditionnels ? Contagion so-
nouveau ciale ? Crise d’ado version
XXIe siècle ? Dans sa consultation
champ au Ciapa (Centre intersectoriel
d’expression d’accueil pour adolescent), le doc-
du politique
Pierre Lévy-SouSSan,
» teur Jean Chambry reçoit notam-
ment des jeunes garçons en crop
top avec les ongles vernis, aussi
PédoPSychiatre
apprêtés que les Incroyables de la
France du Directoire. « Ils peuvent
me regarder droit dans les yeux en
disant qu’ils sont hommes, et ils ont
besoin d’être reconnus comme tels.
Un slogan pansexuel
C’est leur manière de jouer avec les
brandi par
des manifestants stéréotypes », explique-t-il, rassu-
lors de la Marche rant. Reste à savoir si ce jeu est
des fiertés, anodin. Tous les psys n’en sont pas
le 1er juin 2019, si sûrs, surtout quand ces revendi-
à Nantes. cations émergent dès le primaire.
J. LuSSEAu/HANS LucAS « Ces nouvelles catégories sur le
samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021
Société 11
au Canada,
un père condamné
pour n’avoir
pas accepté
la transition
de sa fille
Il refuse de parler de sa fille
autrement qu’au féminin.
« Son ADN ne changera pas,
malgré toutes ces expériences
qu’ils lui font ! », répète-t-il
à qui veut l’entendre.
Parce qu’il persistait
à « mégenrer » son ado,
qu’il la jugeait trop fragile
psychologiquement pour
effectuer une transition
de genre et le clamait
dans les médias, contrevenant
aux ordres de la justice
visant à protéger l’enfant,
un père de famille canadien
a été condamné, en mars 2021,
à six mois de prison.
Il y a quelques années,
ce facteur de Vancouver,
dénommé « CD » par le tribunal,
découvre que le prénom
de sa fille de 12 ans, « AB »,
a été remplacé
par un prénom masculin
dans des documents scolaires.
En classe, « influencée par
des militants LGBT », selon CD,
elle avait décidé de devenir
un garçon. Malgré les objections
du père, qui soutient
qu’AB est instable et souffre
de dépression depuis
la séparation de ses parents,
la justice estime qu’à 13 ans,
avec l’accord de sa mère,
l’ado peut débuter un traitement
hormonal. En 2019, CD,
qui persiste à utiliser
son prénom féminin
quand il parle à son enfant,
est condamné
pour « violence familiale ».
La cour d’appel de la Colombie-
Britannique interdit au père
de « tenter de persuader AB
d’abandonner son traitement
médical », et lui impose
d’utiliser des pronoms masculins
et de l’appeler par son nouveau
prénom. « Je ne peux pas
regarder un enfant en parfaite
santé être détruit ! »,
s’est insurgé le père,
qui finira par briser
la confidentialité en livrant
son histoire à la presse.
S. K.
genre et l’identité sexuelle viennent
devancer, voire figer dans des ca-
ses, un questionnement classique de
l’enfance et de l’adolescence. C’est
une vraie perte de liberté psychique.
Le processus d’interrogation, clas-
sique à ces âges, si important pour
se construire, peut en être bloqué.
Cette culture leur impose de passer
du “jeu” au “je” d’une identité : elle
fige le sujet à un âge où l’on a besoin
de chercher, de se chercher », alerte
le pédopsychiatre Pierre Lévy-
Soussan.
Quelles sont ma part de féminin
et ma part de masculin ? Comment
me définir par rapport à l’autre
sexe ? « Il s’agit d’interrogations
normales chez l’enfant et la diffé-
rence des sexes fait partie des alté-
rités les plus angoissantes pour
l’adolescent, souligne-t-il. Aujour-
d’hui on leur propose des réponses
toutes faites en écho au discours
identitaire sur la sexualité. » Le pé-
dopsychiatre Christian Flavigny
(3) dénonce de surcroît l’importa-
tion en France d’une rhétorique
militante venue des États-Unis,
adoptée par les ados comme une
« carapace sociale ». « Notre cultu-
re ne nous incitait pas à tout ranger
dans des catégories, car elle porte
un regard plus fin et moins jugeant
sur la diversité, relève-t-il. Mal-
heureusement, ce besoin de se met-
tre dans des cases pour s’exprimer
gagne du terrain. » ■
(1) Les prénoms ont été changés.
(2) Transitions. Réinventer
le genre (Calmann-Lévy).
(3) Le Débat confisqué.
PMA, GPA, bioéthique,
« genre », #MeToo… (Salvator).
 samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021 le figaro

12 Société

À l’école, une
circulaire pour
« accompagner »
les élèves trans
Le texte suscite le débat dans la
communauté éducative publique et privée.
Caroline Beyer £@BeyerCaroline
Éducation « Pour une meilleure prise
en compte des questions relatives à
l’identité de genre en milieu scolaire. » La
circulaire est parue le 29 septembre.
Elle fixe, pour les personnels de l’Édu-
cation nationale, les règles à suivre pour
« prendre en compte » les élèves trans-
genres et les « accompagner », en lien
avec les familles. Pour certains, c’est un
texte qui ne va pas suffisamment loin,
car il conditionne le changement de
prénom d’un élève mineur, à l’accord
de ses deux parents. Pour d’autres, cet-
te circulaire apporte des réponses sim-
plistes à une question sociétale comple-
xe - celle de la transition de genre -, qui
plus est à l’adolescence, âge de toutes
les interrogations d’identité.
« La transidentité est un fait qui
concerne l’institution scolaire », pose le
texte signé de Jean-Michel Blanquer,
qui rappelle que sa démarche s’inscrit
dans « une dynamique interministériel-
le » et « le plan national d’actions pour
l’égalité des droits contre la haine et les
discriminations anti-LGBT+ 2020-
2023 ». Bref, que l’école ne pouvait res-
ter à l’écart de ces questions, d’autant
plus que les personnels pouvaient se re-
trouver « légitimement déstabilisés » ou
« en difficulté ».
« De plus en plus d’élèves sont dans
une démarche de transidentité, à partir
du collège, constate Carole Zerbib, au
syndicat des personnels de direction
(SNDPEN-Unsa). L’école ne peut rester
en marge de cela ». Anonymement,
certains s’interrogent cependant sur un
« phénomène de mode ». « À partir du
moment où c’est possible, les jeunes se
disent “Pourquoi ne pas tenter l’expé-
rience ?” Avant, on était punk, mainte-
nant on est transgenre », confie un pro-
viseur de l’académie de Toulouse, qui a
vu deux jeunes filles vouloir devenir
garçons et entamer un changement
physique, avant de revenir sur ce choix.
« Ceux qui parlent d’effet de mode sont
les mêmes qui, il y a trente ans, tenaient
des propos identiques sur l’homosexuali-
té », rétorque Olivier Lelarge, secrétai-
re académique du Snes-FSU à Montar-
gis et membre du Collectif éducation Le texte, paru le 29 septembre, fixe, pour les personnels de l’Éducation nationale, les règles à suivre pour « prendre en compte »
LGBTIphobies. Si cette circulaire a, les élèves transgenres et les « accompagner », en lien avec les familles. RoMan BodnaRchuk - Stock.adoBe.coM
pour lui, « le mérite d’exister », il est ré-
servé quant au nécessaire accord des « En façade, M. Blanquer fait mine de versent les élèves dans leurs corps », en qui a participé l’an dernier à un groupe
parents pour le changement de pré- s’attaquer aux problèmes. En coulisses, il leur proposant de la danse pour tous, en de travail « pour accompagner les élèves
nom, et invoque « l’intérêt supérieur de intègre la possibilité de lyncher un ensei- commençant parfois ses séances par des qui présentent un trouble de genre », est
l’enfant ». gnant qui émettrait une réserve sur la lectures de textes philosophiques. Mais réservé. « Depuis deux trois ans, le phé-
transition de genre d’un élève », assène pour lui, « assigner les jeunes à ce ques- nomène croît et nous n’avons pas attendu
un professeur d’éducation physique et tionnement de genre » est « très problé- cette circulaire pour y réfléchir », expli-
“ Avant, on était punk,
maintenant
sportive, qui a été confronté à cette si-
tuation, il y a deux ans, et a refusé d’uti-
liser le prénom d’usage de l’élève
matique ». « Le risque, avec la dysphorie
de genre, est d’évacuer d’autres difficul-
tés, explique-t-il. Cette circulaire ne va
que cet enseignant au Collège des Ber-
nardins. Pour lui, il s’agit de « prendre
de la hauteur, comprendre ce qu’il se
on est transgenre
”
un proviseur de l’académie de Toulouse
concerné. « Je lui ai dit que je compre-
nais, mais qu’en tant que fonctionnaire
d’État, je continuerais de l’appeler du
pas aider des enseignants qui, comme
moi, ne suivent pas le progressisme am-
biant. »
joue » et, loin d’un « protocole unique »,
de « gérer chaque situation, individuel-
lement ». « Ce texte alimente l’idée que
La circulaire indique que si la deman- prénom figurant sur son état civil, ra- Du côté de l’enseignement catholique l’école forme des citoyens sans spécificité
de d’utilisation d’un « prénom d’usa- conte-t-il. J’ai respecté sa démarche, en sous contrat, on est très réservé. La cir- sexuée. Que fait-on de la dimension
ge » est faite avec l’accord des deux pa- évitant d’utiliser ce prénom quand je culaire y sera-t-elle appliquée ? Le tex- sexuée de l’enfant, de son corps, de son
rents d’un élève mineur, les personnels m’adressais à elle. Mais cela m’a valu des te portant « sur la vie scolaire et non sur affectivité ? interroge-t-il. Les établis-
devront utiliser « le prénom choisi », réprimandes de mon inspecteur et de mon la pédagogie », les établissements pri- sements catholiques doivent réfléchir à la
sur les listes d’appel, cartes de cantine, chef d’établissement. Ils m’ont fait savoir vés sous contrat « ne sont pas obligés de façon d’accueillir les élèves conformé-
de bibliothèque et dans les espaces nu- que j’étais passible de transphobie. » Ce l’appliquer, mais ils sont vivement en- ment aux principes de l’anthropologie
mériques. Une règle qui « soulage les professeur, qui enseigne depuis vingt- couragés à s’en inspirer », explique la chrétienne : la beauté du féminin et du
profs », estime Hubert Salaün à la Peep, cinq ans, explique pourtant avoir « tou- Rue de Grenelle. Mais au diocèse de Pa- masculin, au-delà de la simple référence
la 2e fédération de parents d’élèves, qui jours été attentif aux questions qui boule- ris, le père Laurent Stalla-Bourdillon, biologique. » ■
a participé, au même titre que tous les
représentants de la communauté édu-
cative, aux consultations lors de la ré-
daction du texte. « Je n’irais pas jusqu’à
dire qu’elle passe comme une lettre à la
poste, mais les gens comprennent que les
Dans les séries télévisées, les questions
choses changent », explique-t-il, évo-
quant, quelques années en arrière le
mariage des couples homosexuels, et
de genre sont désormais omniprésentes
plus loin encore, le divorce. Dans un ly- proposé par Euphoria (OCS, de-
cée de l’Oise, il raconte l’histoire de Céline Fontana puis 2019), glamour, sombre et
£@CelineFontana
cette jeune fille qui a voulu se faire ap- cru, via le personnage joué par
peler d’un « prénom neutre ». « Les Hunter Shafer, actrice et man-
enseignants avaient accepté, à l’excep- ENTRE MILITANTISME des nequin trans, et l’approche plus
tion de l’un d’entre eux. Il continuait de auteurs et volonté affichée de quotidienne voire pédagogique
faire l’appel en utilisant le prénom de représenter la société dans sa de la britannique Sex Education
l’état civil. Et marquait systématique- diversité, les chaînes de télévi- (Netflix, depuis 2019), qui a ac-
ment l’élève absent », poursuit-il, espé- sion et les plateformes traitent, cueilli en saison 3 un personna-
rant, avec cette circulaire, « davantage depuis bientôt vingt ans, de la ge « non binaire », Cal, qui ne se
de dialogue ». transidentité. Aux États-Unis, définit pas strictement comme
activiste de la cause LGBT, Ryan homme ou femme et question-
Murphy a toujours eu à cœur de ne donc le genre.
mettre en scène des personna-
Bons scores d’audience

ARTCURIAL
ges trans dans les shows qu’il
crée. Secondaires dans Nip-
Tuck (M6, 2003-2010) ou la sé-
rie musicale pour ados Glee (M6,
2009-2015), ils sont les flam-
boyants héros de Pose (Canal+,
2018-2021), plongée dans le
PATEK PHILIPPE New York culturel under-
Ref. 1518 « Big Arabic »,
circa 1943 ground dans les années 1980.
Vendu 883 000€ The L Word, racontant la vie de
lesbiennes, bisexuelles et trans-
genres à Los Angeles, œuvre
dans le même sens. Ainsi
qu’Orange is the New Black
(Netflix, 2013-2019), immersion
dans une prison de femmes
avec Laverne Cox, transgenre à
la ville comme à l’écran, deve-
nue une figure emblématique
du show. Ou Sense8 (Netflix,
2015-2018), série de science-
fiction, signée de sœurs Wa-
chowski (réalisateurs de Matrix
avant leurs changements de
Agrément cvv du 25/01/2001 - Commissaire-priseur : Stéphane Aubert
En France, les chaînes histori-
ques se sont emparées depuis
quelques années de sujets socié-
taux sensibles, souvent avec de
bons scores d’audience. TF1 a
lancé en 2017 et en prime time le
pilote d’une fiction avec Claire
Nebout dans le rôle d’une fem-
me transgenre qui revient dans
la vie de son ex-femme rema-
riée et de son enfant. Mais mal-
gré ses 4 millions de téléspecta-
teurs, elle n’a pas eu de suite. En
2019, c’est Fred Testot qui in-
carne un père de famille trans
dans L’Épreuve d’amour avec
Marie-Josée Croze (France 2).
Avant l’arrivée, en 2019 dans
Demain nous appartient (TF1),
de Morgane (Marie Catrix), in-
firmière dont la transidentité
sera révélée.
Le feuilleton suit les traces de
vers le genre féminin ou tenter TF1 proposera
de lui faire accepter son corps le 1er novembre
tel qu’il est ? « En tant que grou- Il est elle, un téléfilm
pe média, nous avons la double dans lequel
responsabilité d’être témoin et des parents sont
confrontés au désir
acteur de notre société dans toute
de leur fils ado
sa diversité, souligne la chaîne. de changer de sexe.
Et, à travers nos contenus, de la Manuelle touSSaint /
montrer sans zones d’ombre et tF1
sans stéréotypes. »
Mais, si ces fictions peuvent
apporter des éléments de ré-
ponses et un réconfort bienve-
nus à certaines personnes, elles
peuvent aussi susciter, chez les
jeunes, de par leur esthétique ou
l’état d’esprit distillé, des inter-
rogations qui n’auraient pas
forcément eu lieu d’être… ■

genre…). Plus belle la vie (France 3, depuis

Hors de ces contextes très
particuliers, la « banalisation »
du changement de sexe passe
plutôt par des fictions comme
Transparent (Amazon, 2014-
2004), dont les scénaristes ont
souvent été précurseurs pour
aborder, sous l’angle de la fic-
tion, nombre de thèmes déli-
cats, voire tabous (violences
Un spectacle de stand-up
crée le malaise chez Netflix
The Closer, un show de l’humoriste américain Dave

ESTIMATIONS GRATUITES 2019). Avec son héros, profes-

seur de fac, qui décide de vivre
sexuelles, mariage gay…). En
2018, est apparu Antoine, collé-
Chappelle produit par Netflix et disponible depuis
le 5 octobre sur la plateforme, suscite la polémique.

& CONFIDENTIELLES
sa vie de femme à 70 ans, la fic-
tion de Jill Soloway a abordé le
thème de manière frontale sur
Horlogerie de Collection le ton de la dramédie. Ou l’in-
troduction, par Shonda Rhimes,
qui a toujours prôné toutes les
Vente aux enchères à Monaco en préparation formes de diversités, d’un per-
Janvier 2022 sonnage trans, le Docteur Casey
Parker, dans la saison 14 de
Grey’s Anatomy (TF1, 2017).
+33 (0)1 42 99 16 53 msanna@artcurial.com
A
gien transgenre de 15 ans, joué
par Enola Righi, dont les inter-
rogations identitaires ont connu
un large écho sur les réseaux so-
ciaux. TF1 proposera le 1er no-
vembre « Il est elle », un télé-
film dans lequel des parents
(Odile Vuillemin et Jonathan
Zaccaï) sont confrontés au désir
de leur fils ado de changer de
Cette star du stand-up y tient des propos jugés
transphobes et homophobes qui ont généré de
nombreuses réactions de la part de militants LGBTQ,
comme des employés de la plateforme de streaming
qui ont appelé à manifester pour exprimer leur
désaccord. Des artistes ont même fait part de leur
volonté de ne plus collaborer avec le géant américain.
Ted Sarandos, le patron de Netflix, a reconnu que ses
salariés pouvaient être blessés, mais n’a pour l’instant
pas retiré le spectacle de la plateforme aux contenus

Chez les adolescents, on os- sexe, avec un dilemme : l’ac- pourtant habituellement très politiquement corrects. C. F.
cille entre le modèle iconique compagner dans une transition

Sport
Visite de chantiers à 1 000 jours
des Jeux olympiques de Paris 2024
État des lieux des édifices en construction ou en rénovation qui doivent être prêts bien avant le 26 juillet 2024.
jean-julien ezvan
£@JeanJulienEzvan
JEUX OLYMPIQUES Ce diman-
che, Paris célèbre le cap symboli-
que des 1 000 jours avant les Jeux
olympiques 2024 (du 26 juillet au
11 août) avec une manifestation
spectaculaire illustrant le désir
d’ouverture des organisateurs.
Eliud Kipchoge, le double cham-
pion du monde du marathon,
sera sur les Champs-Élysées pour
relever sur 5 km le défi de
2 000 amateurs partis avant lui.
Ceux qui termineront avant le
Kényan décrocheront leur dos-
sard pour le marathon olympique
« grand public ». Si loin, si près
de l’événement…
En coulisses, le travail de fourmi
se poursuit. La carte répartit les
sites olympiques en trois pôles :
dans Paris (l’escrime et le
taekwondo au Grand Palais, le
beach-volley sous la tour Eiffel, le
tir à l’arc aux Invalides…), en Île-
de-France (la natation à la Dé-
fense, le cyclisme sur piste et le
golf à Saint-Quentin-en-Yveli-
nes, le tir à la Courneuve, …) et en
France (le handball à Lille, la voi-
le à Marseille, le surf à Tahiti…).
Au cœur des édifices à bâtir, Ni-
colas Ferrand, directeur général
de la Solideo (Société de livraison
des ouvrages olympiques, en
charge des ouvrages pérennes,
ceux qui seront reconfigurés pour
l’usage du grand public après les
JO) plante : « Ce projet olympique
a décidé de construire certains
équipements en plein centre-ville,
en reconstruisant la ville sur la vil-
le. La volonté posée dès le début
par le gouvernement, dès 2017, est
que les ouvrages olympiques ser-
vent de vitrine à toute une filière,
celle de la construction, soit une il-
lustration du savoir-faire français
par rapport aux JO de Tokyo, à
l’Exposition universelle de Dubaï
ou aux JO d’hiver de Pékin. Pour
une forme avancée de faire la ville
au XXIe siècle. Ce qui se joue là,
c’est certes les Jeux olympiques
mais c’est beaucoup plus, c’est le
rayonnement de notre pays, notre
capacité à faire des grands projets,
notre place dans le monde. Une es-
pèce de musée à ciel ouvert, avec
une pluralité d’écriture sous la
même contrainte, on construit
pour 2050, donc le carbone, la
chaleur, le vieillissement, comment
cela va se traduire ? On fait moins
de 50 % de carbone (47 % pour
être exact) sur l’ensemble des
ouvrages olympiques par rapport
aux constructions classiques, on
utilise du bois, du béton bas carbo-
ne, on garantit le confort sans
climatisation… On travaille pour
montrer le meilleur de notre
savoir-faire. »
uLes sites à construire :
le Village, le centre
aquatique, l’Arena 2…
Les chantiers majeurs sont le
Village olympique, le village des
médias, le centre aquatique
olympique (plongeon, natation
artistique, water-polo) à Saint-
Denis (un bassin de 50 m, un bas-
sin de plongeon, plus un bassin
temporaire d’échauffement), le
stade Yves-du-Manoir à Colom-
bes (hockey sur gazon), la colline
d’Élancourt (VTT), l’Arena 2 Por-
te de la Chapelle (badminton,
gymnastique rythmique) et le site
de voile à Marseille. Nicolas
Ferrand résume : « Le Village
olympique c’est le niveau 1 de la
difficulté, le principal chantier. Il
doit accueillir 15 000 athlètes pen-
dant les Jeux olympiques, 6 000
durant les Jeux paralympiques et
sera reconverti ensuite en quartier
sur les communes de Saint-Ouen,
Saint-Denis et de l’île Saint-Denis
qui accueillera 6 000 habitants et
6 000 salariés. Il s’étend sur
44 hectares, va faire sortir à peu
près 330 000 m2 de surface de
plancher. Ce sera le plus grand
chantier monosite de France. Nous
sommes dans une zone très dense,
avec des sujets logistiques compli-
qués, il faut qu’on enterre des li-
gnes à haute tension. En plein mi-
lieu du chantier il y a un puits de la
société du grand Paris express qui
doit continuer son activité, on re-
fait un lycée, on modifie un collège,
on construit deux écoles et un
gymnase. » Quatre promoteurs et
huit constructeurs sont mobilisés.
Vingt-huit grues sont déjà mon-
tées (quarante sont prévues lors
de l’activité maximale), cinq
cents poids lourds tournent au
quotidien. Au deuxième niveau
de difficulté, se situe le village
des médias, à côté de l’aéroport
du Bourget (environ le tiers du
Village olympique, moins de
100 000 m2 de surface de plan-
cher), projet qui a été interrom-
pu trois mois suite à un référé
suspension. Avant de rattraper le
temps perdu. Nicolas Ferrand
poursuit avec le troisième niveau
de difficulté : « les très gros bâti-
ments : le centre aquatique olympi-
que, un projet construit en face du
Stade de France porté par la Mé-
tropole du grand Paris. Le toit est
concave, en bois, on est à la limi-
te des forces molles. » Quatre
grues tournent. La première
pierre sera posée prochaine-
ment. Comme pour le stade
Yves-du-Manoir à Colombes qui
servit de cadre à la cérémonie
d’ouverture des Jeux olympiques
en 1924 (et deviendra l’unique site
à accueillir pour la deuxième fois
en France les JO). La construction
de l’Arena de la Porte de la Cha-
pelle (8 000 places) vient, elle,
de débuter. Nicolas Ferrand
ajoute : « Et on refait le site du
pôle de haut niveau de Marseille,
au Roucas Blanc. Un très beau
projet qui servira tous les amou-
reux de la voile. » Début des tra-
vaux en janvier.
uLes sites à rénover : le Stade
de france, Coubertin…
Cela concerne le Stade de France
(athlétisme, rugby à 7), des gym-
nases (comme le stade Pierre-de-
Coubertin) ou des piscines d’en-
traînement. « Il s’agit de la
remise à niveau de bâtiments
existants. On n’a pas la même
pression que celle de construire en
neuf. Il faut que ce soit fait, que ce
soit bien fait. On est en train de ter-
miner les études, les travaux vont
commencer l’année prochaine. Au
Vue d’artiste du centre
aquatique olympique
de Saint-Denis,
en cours d’exécution,
qui accueillera
les compétitions
de plongeon,
de natation artistique
et de water-polo.
Métropole du Grand paris
1,2
milliard d’euros
Coût du Village olympique
(dont 300 millions de subvention
de la Solideo), qui sera transformé
après les JO en logements
et bureaux
1,55
milliard
Montant des subventions publiques
des collectivités dans le budget
de la Solideo (4 milliards avec
l’argent privé, foncier,
promoteurs…)
791
jours
avant le 31 décembre 2023,
date de livraison
prévue des sites
11 000
emplois
Nombre maximum
de personnes mobilisées
en 2023 sur les chantiers
des JO
Stade de France, on a des sujets sur
les écrans, les écrans géants, le
poste de sécurité, le renforcement
des systèmes électriques. Des tra-
vaux qui, pour l’essentiel ne se
voient pas. Il n’y aura aucune in-
terruption dans le calendrier, le
Stade de France fonctionne 25 jours
par an, on a le temps de se glisser
entre les événements. Il n’est pas
question que l’utilisation du Stade
de France soit troublée. Le consor-
tium qui exploite le stade jusqu’en
2025 fait les travaux entre les
événements. Il y a, par exemple,
tout un travail pour les personnes à
mobilité réduite qui se fait balcon
par balcon », détaille Nicolas
Ferrand.
uLes sites temporaires :
la Concorde, Versailles…
Essentiellement à la Concorde
(sports urbains). Où les tribunes
temporaires accueilleront 37 000
spectateurs par jour. Les installa-
tions seront ensuite démontées
pour être installées dans d’autres
villes. « À côté des sites qui ont fait
l’histoire du sport français interna-
tional, rompus à de grands événe-
ments et qu’on va mettre en
lumière : Roland-Garros (tennis
et boxe), le Stade de France,
Bercy (basket-ball, gymnasti-
que, trampoline), le vélodrome de
Saint-Quentin-en-Yvelines ou le
Golf National qui a accueilli la
Ryder Cup, on complète avec des
sites éphémères qui apportent
quelque chose de différent en sor-
tant le sport et les Jeux de leurs
murs classiques, avec l’équitation
à Versailles ou les sports urbains
(basketball 3x3, BMX freestyle,
breaking, skateboard) à la
Concorde. Ce sont des choses qui
ont été faites lors des éditions
précédentes mais pas dans des
échelles comparables », récapi-
tule Michaël Aloïsio, directeur de
cabinet du président du Comité
d’organisation des JO de Paris
2024. Avant de prolonger : « On a
hâte d’offrir cela à tout le monde.
À 1 000 jours des Jeux, chaque jour
compte. On avance. On a bien le
compte à rebours en tête. On pen-
se que la France a rendez-vous
avec son histoire. On a la chance
d’être dans les temps de passa-
ge. Tous les voyants sont au
vert. L’avantage, c’est qu’on a
peu d’infrastructures à construi-
re par rapport aux éditions précé-
dentes, on a coutume de dire que le
seul équipement spécialement
le figaro
construit pour les Jeux, c’est le
centre aquatique. Le point d’inter-
rogation, c’était celui des partena-
riats l’an dernier, on ne savait pas
comment la crise allait impacter la
recherche de partenaires, on a
maintenu l’objectif ambitieux de
deux tiers de partenariats signés à
la fin de l’année (1,1 milliard
d’euros), on devrait y être. »
ulaLescérémonie
prochaines étapes :
d’ouverture
sur la Seine, le parcours
de la flamme, les volontaires…
Les autres sujets figurant au
calendrier des organisateurs
concernent le projet de cérémo-
nie d’ouverture sur les quais de la
Seine avec un Conseil d’adminis-
tration le 13 décembre (« le sens
du projet, c’est l’ouverture, Tony
Estanguet nous répète quotidien-
nement d’avoir en tête qu’on veut
ouvrir en grand les portes des
Jeux, on va faire quelque chose de
nouveau, spectaculaire et partici-
patif », souligne Michaël Aloisio),
le parcours de la flamme afin
d’engager le plus de territoires
possibles et le recrutement des
volontaires.
Programme
Nicolas Ferrand, pour qui 30 des
62 ouvrages à sortir dont la Soli-
déo est maître d’ouvrage sont en
travaux, dévoile sa feuille de rou-
te : « En 2022, on va finir le gros
œuvre. 2022, c’est le cœur de
chantier. Là où les choses vont se
passer, c’est en 2023. Le 31 dé-
cembre 2023 ou durant la première
quinzaine de janvier 2024, on va
tout livrer, tout transférer à Paris
2024 pour que le Cojo puisse les ré-
cupérer et les habiller aux couleurs
olympiques… » Si la pandémie n’a
pas eu trop d’impact sur le calen-
drier, Nicolas Ferrand raconte et
se projette : « Nous n’étions pas
encore en travaux, lorsque la pan-
démie est arrivée, on finissait les
études de permis de construire et
en parallèle nous étions en phase
de déconstruction d’un certain
nombre de sites. Il y a eu un mois
de retard qu’on a rattrapé. En
revanche, on est comme toutes les
industries de la construction, nous
Programme
sommes confrontés aux effets
induits de la pandémie, avec des
tensions sur les matériaux de
construction, singulièrement sur le
bois, on travaille pour garantir du
bois européen, on ne peut plus ga-
rantir autant de bois français que
prévu et on fait tout pour ne pas
avoir du bois exotique. Et si on ne
samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021
13
relève pas encore de problèmes sur
tout ce qui est appareillage des bâ-
timents (ventilation, ascenseurs…)
cela devrait arriver dans une gros-
se année. On pense que d’ici là les
chaînes logistiques seront réhabili-
tées. » Tenir les budgets, tenir les
délais. Des défis de taille dans une
course folle accompagnée par les
élus, observée à la loupe par les
riverains et les opposants… ■
en bref
Football : Lyon et Marseille
en reconquête
Lyon (9e), qui accueille Lens,
dauphin du Paris SG (opposé à
Lille vendredi soir), et Marseille
(4e), en déplacement à Clermont
(14e), sont en quête d’un succès
lors de la 12e journée de Ligue 1,
après avoir laissé échapper des
points ces dernières semaines.
En bas de tableau, le match
de la peur opposera Metz (19e)
à Saint-Étienne (20e).
12e journée ligue 1
pariS Sg (1) vend. lille (10)
metz (19) sam. 17 h St-étienne (20)
lyon (9) 21 h c+ lenS (2)
dim. nice (3)
angerS (6)
13 h amz
borDeaux (17) 15 h reimS (16)
montpellier (13) - nanteS (7)
StraSbourg (12) - lorient (11)
troyeS (15) - renneS (5)
breSt (18) 17 h c+ monaco (8)
clermont (14) 21 h amz marSeille (4)
Rugby : duel
Clermont-Toulon
sous le regard d’Azéma
Même s’il ne prendra
officiellement les commandes
qu’après la 9e journée du Top 14,
Franck Azéma, appelé au chevet
du RCT pour le sortir de la crise,
va pouvoir assister ce samedi
à l’opposition entre sa nouvelle
équipe (13e) et son ancien club
(7e), sur la pelouse de Clermont.
9e journée top 14
sam.
caStreS (6) briVe (9)
15 h
toulon (13) - biarritz (12)
pau (11) - St. françaiS (10)
perpignan (14) - la rochelle (5)
montpellier (8)17 h c+lyon (3)
borDeaux (2)21 h c+clermont (7)
A
racing (4)
dim. toulouSe (1)
21 h c+
samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021
14 LE CARNET DU JOUR
Les annonces sont reçues
du lundi au vendredi
de 9h à 13h et de 14h à 18h
(excepté les jours fériés)
et tous les dimanches
de 9h à 13h.
01 56 52 27 27
carnetdujour@media.figaro.fr
naissances
M. Jacques MARTIN
et Mme, née Caroline Raffi,
sont heureux de faire part
de la naissance de leur petit-fils
Armand
le 10 juillet 2021, à Paris, chez
Marc Emmanuel et Mélanie
COUPVENT des GRAVIERS
Le comte Gonzague
de MONTRICHARD
et la comtesse, née
Elizabeth Lynch,
partagent avec Charlotte,
Carolyn et Joséphine, la joie
d'annoncer la naissance de
Louis Gabriel Marie Peter
Philippe
le 12 octobre 2021,
à Boston, Massachusetts.
François VAUDOUR
partage avec
Charlotte et Richard
BOUGERIE
et Malo
la joie d'annoncer la naissance,
le 9 septembre 2021, de
Pia
baptisée en l'église
Sainte-Jeanne-d'Arc de Rouen,
par le père Geoffroy
de la Tousche,
ce samedi 30 octobre 2021.
hommages
Amnesty International France
souhaite rendre hommage
aux personnes
qui ont inscrit pour toujours
leur nom dans le combat
pour la défense des libertés
et des droits humains.
Par un legs
ou une assurance-vie,
elles contribuent ainsi à laisser
un monde plus juste
aux générations futures.
Nous ne les oublierons jamais.
Amnesty International France,
76, boulevard de la Villette,
75019 Paris,
téléphone : 01 53 38 66 24.
La Fondation de l'Avenir
souhaite faire part
de sa profonde gratitude
envers les personnes
lui ayant fait un legs en 2021.
Elle rend hommage
à ces personnes, aujourd'hui
disparues, qui rendent possible
la poursuite des recherches
médicales appliquées.
Fondation de l'Avenir,
255, rue de Vaugirard,
75719 Paris Cedex 15,
téléphone : 01 40 43 23 77.
La Fondation
Claude Pompidou
se souvient et exprime
sa grande reconnaissance
aux généreuses personnes
qui lui ont fait confiance
et légué leurs biens.
Fondation Claude Pompidou,
42, rue du Louvre,
75001 Paris.
En ce jour de mémoire,
et cette année de centenaire
de notre institution,
Orphéopolis
souhaite rendre hommage
aux généreux bienfaiteurs
qui, par leurs legs, donations
ou assurances-vie, ont désiré
améliorer l'avenir des
orphelins de policiers
Nous voulons aussi y associer
le souvenir des policiers
qui nous ont quittés
prématurément cette année.
Orphéopolis,
Orphelinat Mutualiste de la
Police Nationale-assistance,
44, rue Roger-Salengro,
94120 Fontenay-sous-Bois.
Téléphone : 01 49 74 22 28.
Le docteur Carine Rolland,
présidente,
et l'ensemble des salariés
et bénévoles de
Médecins du Monde
tiennent à honorer
la mémoire de toutes celles
et ceux qui au cours de l'année
écoulée ont, par un legs, permis
de rendre la santé accessible
aux plus vulnérables.
Médecins du Monde,
84, avenue du Président-Wilson,
93217 La Plaine-Saint-Denis.
Téléphone : 01 44 92 14 42.
La Société
de Saint-Vincent-de-Paul
témoigne sa profonde gratitude
à tous ses testateurs disparus
qui ont choisi de soutenir
les plus fragiles.
Que leur souvenir reste
pour toujours gravé
dans nos mémoires.
SOS Villages d'Enfants
a une pensée émue
pour les généreux testateurs
qui au cours de l'année écoulée
ont offert une vie de famille
en héritage
à des enfants en danger :
Christiane, Agnès,
Germain, Marcel, Lucette,
Jean-Joseph, Marie Louise,
Angèle, Dominique,
Fernand, Jeannine, Jasmine,
Brigitte, Suzanne,
Jean-Claude, Andrée,
Anne-Marie, Laurence,
Paulette, André, Ruth,
Christiane, Paulette,
Josette, Denise, Jeannine,
Louis, Françoise, Marie,
Maryvonne, Roger,
Marie Jeanne, Claude,
Josette, Patrice, Colette,
Simone, Jeannine, Yolande,
Simone, Simone, Charles,
Annick, Anne-Marie, Gabriel,
Simone, Mariette, Michelle,
Chantal, Henri, Elisabeth,
Monique, Monique, Françoise,
Suzanne, Marie-Elisabeth,
Catherine, Odette,
Marie-Louise, Monique,
Nicole, Pierrette, Ghislaine,
Etiennette, Marie, Jeanne,
Cecile, Veronique, Bernadette,
Arlette, Jacqueline, Maurice,
Micheline, Paulette
et Raymonde.
Leur générosité en faveur
des enfants accueillis
dans les villages d'enfants SOS
restera à jamais gravée
dans notre mémoire.
À l'approche de la Toussaint,
l'association VMF-Patrimoine
rend hommage aux bienfaiteurs
qui l'ont soutenue par un legs,
une donation
ou une assurance-vie.
En choisissant de laisser
une trace dans l'histoire
de notre pays,
ces personnes contribuent
à la préservation de notre
patrimoine et de nos traditions
architecturales régionales.
Qu'elles en soient ici
éternellement remerciées.
deuils
Marie-Louise Alexandre,
son épouse,
Nathalie et Francis Trocmé,
Sébastien et Marion Alexandre,
ses enfants,
Alice, Anaïs,
Victor, Olivier,
ses petits-enfants,
et toute la famille
ont la tristesse
de vous faire part du décès de
Georges ALEXANDRE
survenu le 15 octobre 2021,
à l'âge de 78 ans.
La cérémonie religieuse
a été célébrée
dans l'intimité familiale,
en l'église Saint-Pierre
de Neuilly-sur-Seine,
suivie de l'inhumation
dans le caveau familial,
à Fougères (Ille-et-Vilaine).
Mme Marie-Louise Besson,
son épouse,
M. Rémi Besson,
M. Olivier Besson,
Mme Magali Besson,
ses enfants,
ses dix petits-enfants
font part du rappel à Dieu de
M. Jean Armand BESSON
le 25 octobre 2021,
à l'âge de 88 ans.
La cérémonie religieuse
sera célébrée
en l'église Saint-Léger,
à Saint-Germain-en-Laye
(Yvelines),
le mercredi 3 novembre,
à 10 h 30.
Yves et Claudine,
Claude et Phuong,
Michel et Sylvie,
Philippe et Michèle
ont la tristesse
de vous annoncer
le rappel à Dieu
de leur maman,
Martine BARRIÈRE
née Curnillon,
dans sa 91e année.
La messe de funérailles aura
lieu le jeudi 4 novembre 2021,
à 10 heures, en l'église
Saint-Cyr-Sainte-Julitte
de Saint-Cyr-sur-Mer (Var).
Olivier et Pascale Breton,
Laure et Didier Macé,
Claire et Franck Covo,
ses enfants,
ses petits-enfants,
son arrière-petite-fille
ont la tristesse
de vous faire part
du rappel à Dieu de
Dominique BRETON
née Dassonville,
le 27 octobre 2021,
à l'âge de 85 ans.
La cérémonie religieuse
sera célébrée
le jeudi 4 novembre, à 10 h 30,
en l'église Saint-Jacques,
à Dieppe.
Cet avis tient lieu de faire part.
La comtesse Celier,
son épouse,
le comte et la comtesse
Alexandre Celier,
le comte et la comtesse
Clément Celier,
M. et Mme Antoine Ogerau,
M. et Mme
Benjamin Le Moing,
ses enfants,
Sidonie, Paloma, Pétronille,
Théodora,
Pierre, Charles, Marthe,
Eléonore,
Berthilde, Elisabeth,
Emmanuelle (†),
François, Geneviève
et Rozenn,
ses petits-enfants,
ont la tristesse
de vous faire part du décès de
Nicolas, comte CELIER
survenu le 28 octobre 2021.
La cérémonie religieuse
aura lieu
dans l'intimité familiale.
12, rue Berbier-du-Mets,
75013 Paris.
Lille.
Catherine Chalom
et Jean-Claude Lewin,
Maurice et Brigitte Chalom,
Brigitte et Patrick Bonnaud,
Gérard et Patricia Chalom,
ses enfants,
ses petits-enfants,
ses arrière-petits-enfants
et toute la famille
ont la tristesse
de vous faire part du décès de
Suzanne CHALOM
née Zlata Luksenberg,
veuve de
Nissim Chalom
à Cannes, le 26 octobre 2021,
dans sa 101e année.
Les funérailles ont eu lieu
le vendredi 29 octobre 2021,
au cimetière de Lille-Sud.
M. Alain Derome,
Patricia et Jacques Collin,
Paul-Eric Collin
ont la tristesse
de vous faire part du décès de
Mme Alain DEROME
née Claude Crescent,
le 26 octobre 2021,
leur épouse, mère
et grand-mère,
qui s'est endormie
dans la Paix du Seigneur
et a rejoint son fils Xavier
La cérémonie religieuse
sera célébrée
le mercredi 3 novembre,
à 9 h 30, en l'église
Saint-François-de-Molitor,
à Paris (16e).
Michèle Guillot,
née Pujol, sa mère,
Thomas Guillot,
son frère,
Antoine Guillot et son épouse
Elisabeth, née Migné,
son frère et sa belle-sœur,
Sofia, sa nièce,
vous font part du décès de
Marie GUILLOT
survenu le 24 octobre 2021,
à l'âge de 34 ans.
L'inhumation a eu lieu
le jeudi 28 octobre,
dans l'intimité familiale,
au cimetière
de Nogent-sur-Marne.
Cet avis tient lieu de faire-part.
16, avenue Charles-V,
94130 Nogent-sur-Marne.
Thibaud et Noémie Desforges,
ses parents,
Tarcis, Pio et Zénaïde,
ses frères et sœur,
Mme Henri Galmiche,
Mme Henri Desforges,
ses arrière-grands-mères,
M. et Mme Renaud Desforges,
M. et Mme Hubert de Cerval,
ses grands-parents,
ont le grand chagrin
de vous faire part
du rappel à Dieu de
Joseph DESFORGES
le 27 octobre 2021,
à Montbazin (Hérault),
au lendemain de ses 7 ans.
La cérémonie religieuse
aura lieu le samedi 30 octobre,
à 14 h 30, en l'église
de Poussan (Hérault).
Si vous souhaitez faire un don :
www.tombeedunid.fr/
#don-merci
Christine Jarraud de Vérac,
Aimery et Béatrix
Jarraud de Vérac,
Laurent Jarraud de Vérac,
Marie-Pierre Jarraud de Vérac,
Claire et Pierre Pape,
ses enfants et leurs conjoints,
ses petits-enfants
et arrière-petits-enfants
ont la tristesse
de vous faire part
du rappel à Dieu de
Elisabeth JARRAUD de VÉRAC
née Flipo,
le 18 octobre 2021,
à l'âge de 101 ans.
La cérémonie religieuse
a été célébrée en l'église
de Chouzy-sur-Cisse
(Loir-et-Cher),
suivie de l'inhumation,
dans l'intimité familiale.
Sa famille
nous prie d'annoncer le décès
de
Mme Henriette JUGE
La cérémonie religieuse
aura lieu le mercredi
3 novembre 2021, à 10 h 30,
en l'église Sainte-Jeanne-d'Arc
de Versailles.
Le gouverneur des Invalides,
le directeur,
le président du Foyer,
les pensionnaires
et les bénévoles de
l'Institution nationale
des Invalides
font part avec tristesse
du décès de
M. Gilles KADDOUR
hébergé à l'Institution
nationale des Invalides,
médaille militaire,
croix de guerre des TOE
avec palme.
Ils lui feront leurs adieux
le mardi 2 novembre 2021,
à 15 heures, sous le péristyle
de la cathédrale Saint-Louis
des Invalides, à Paris (7e).
M. et Mme
Jean François Braun,
le baron et la baronne Jacquelin
de Bronac de Vazelhes,
M. et Mme Raphaël Masgnaux,
ses enfants,
M. Baptiste Merlen,
M. et Mme Bertrand Vedovotto
et leurs enfants,
Mme Marie
de Bronac de Vazelhes
et M. Neuffer
et leurs enfants,
M. et Mme Grégoire
de Bronac de Vazelhes
et leurs enfants,
M. et Mme Régis
de Bronac de Vazelhes
et leur enfant,
M. et Mme Wilfrid Masgnaux,
ses petits-enfants
et arrière-petits-enfants,
ont la tristesse
de vous faire part du décès de
Mme Pierre MASGNAUX
née Odile Garric,
survenu le 28 octobre 2021,
à l'âge de 92 ans.
La cérémonie religieuse
aura lieu le jeudi 4 novembre,
à 14 h 30, en l'église
Sainte-Marguerite du Vésinet
(Yvelines).
florbraun@orange.fr
beatrice.de-vazelhes
@laposte.net
raphael.masgnaux@gmail.com
Le Seigneur a accueilli
dans Sa Paix éternelle
Mme Léon-Bernard LOTTHÉ
née Ketty Brabant,
décédée
le mardi 26 octobre 2021,
dans sa 87e année.
La célébration religieuse
se déroulera
le mardi 2 novembre 2021,
à 11 heures,
en l'église Saint-Nicolas,
à Wasquehal (Nord).
Assemblée à l'église à 10 h 45.
L'offrande tiendra lieu
de condoléances
De la part de :
Léon-Bernard Lotthé (†),
son époux,
Patrick-Léon et Marie-Laure
Lotthé-Tiberghien,
Axel et Alba,
Constance et Antoine
Adjoubel-Lotthé,
Gabrielle,
Martin et Sarah,
Catherine et Laurent
Dersy-Lotthé,
Antoine,
ses enfants, petits-enfants
et arrière-petite-fille,
les familles Lotthé-Vandeputte
et Brabant-Renouard.
Dans l'attente de
ses funérailles, elle repose
aux salons funéraires,
72, avenue de Flandre,
à Villeneuve-d'Ascq.
Visites de 10 heures à 18 heures.
Le présent avis tient lieu
de faire-part.
11, place Charles-de-Gaulle,
59270 Bailleul.
lotthe@orange.fr
enharmonie@gmail.com
Mme Xavier Mallet,
son épouse,
Scholastique et Emmanuel
de Tarlé,
Bruno et Anne-Marie Mallet,
Jean-Sébastien et Véronique
Mallet,
Marc-Antoine et Sophie
Mallet,
Donatien et Marie-Bénédicte
Mallet,
Grégoire et Sandrine Mallet,
ses enfants,
ses 25 petits-enfants
et leurs conjoints,
ses 8 arrière-petits-enfants
ont la tristesse de faire part
du décès de
M. Xavier MALLET
chevalier
de la Légion d'honneur,
officier
de l'ordre national du Mérite,
survenu le 26 octobre 2021,
à l'âge de 94 ans,
à Saint-Germain-en-Laye.
La cérémonie religieuse
sera célébrée en l'église
Saints-Martin-et-Laurent,
9, avenue du Maréchal-Foch,
à Orsay (Essonne),
le mardi 2 novembre, à 14 h 30.
L'inhumation aura lieu
le mercredi 3 novembre,
à 11 heures,
au nouveau cimetière
de Saint-Germain-en-Laye,
rue Pereire
et non à Nantes, comme
annoncé dans notre édition
du 29 octobre 2021.
Ni fleurs ni couronnes,
des dons à l'association
Eau Vive France
c/o Mme Fraenkel,
22, avenue des Haras,
78170 La Celle-Saint-Cloud.
eau-vive-internationale.org.
Nantes. Orvault.
Hélène Naux,
son épouse,
Christophe Naux,
Béatrice et Marc Allard,
ses enfants,
Etienne et Morgane Allard,
Blandine et Henry Préaux,
Mathilde Allard,
Cyprien Allard,
ses petits-enfants,
Garance et Jade Allard,
ses arrière-petites-filles,
les familles Naux
et Coupvent des Graviers
ont la tristesse de faire part
du décès de
M. Philippe NAUX
le 27 octobre 2021,
à l'âge de 86 ans.
La cérémonie religieuse
sera célébrée
le mercredi 3 novembre,
à 14 h 30, en l'église
Sainte-Thérèse de Nantes,
suivie de l'inhumation
au cimetière d'Orvault.
Lestre (Manche).
Lady Petrie,
Charles et Jeannette Petrie,
Leticia et Pierre André
de Chalendar,
Wilfrid et Fabienne Petrie,
ses neuf petits-enfants
ont la tristesse
de vous faire part du décès de
sir Peter PETRIE
baronet of Carrowcarden
chevalier
de la Légion d'honneur,
commandeur
de l'ordre de Saint-Michael
et Saint-Georges,
survenu le 28 octobre 2021.
La cérémonie religieuse
sera célébrée
en l'église de Lestre,
le mardi 2 novembre, à 14 h 30.
Cet avis tient lieu de faire-part.
4, hameau du Jardin,
50310 Lestre.
Le vicomte Brian
de Poulpiquet du Halgouët,
M. et Mme Fayssal Kabab,
Noor et Basile,
ses enfants et petits-enfants,
Mme Olivier de Lapeyrière,
sa filleule,
ont la tristesse
de vous faire part
du rappel à Dieu de la
vicomtesse Gaël
de POULPIQUET
du HALGOUËT
née Caroline de Hillerin
de la Touche de Boistissandeau,
« Caline »,
le 27 octobre 2021.
La cérémonie religieuse
aura lieu ce samedi 30 octobre,
à 14 h 30, en l'abbatiale
Saint-Sauveur de Redon
(Ille-et-Vilaine).
On y associera le souvenir
de son époux, le
vicomte Gaël
de Poulpiquet du Halgouët
Cet avis tient lieu de faire-part.
La Haye, 35550 Sixt-sur-Aff.
Laurent E. Momméja,
son époux,
Amandine Vincent,
Olivier Frayssineau
et Elena Koseva,
Henri,
Clémence Momméja
et Félicien Drevon,
Louis Momméja,
ses enfants et son petit-fils,
ont l'infinie tristesse
de vous faire part du décès de
Marie-Paule
QUERCY-MOMMÉJA
le 27 octobre 2021,
à l'âge de 68 ans.
Un culte d'action de grâces
sera célébré
le jeudi 4 novembre,
à 11 heures, en l'église
protestante unie de l'Etoile,
54-56 avenue
de la Grande-Armée,
à Paris (17e).
Ni fleurs ni couronnes.
« L'amour est comme un oiseau
libre d'aller partout,
le ciel tout entier
est sa liberté. »
Osho Rajneesh.
31, rue d'Anjou, 75008 Paris.
remerciements
M. Henri de Monteville,
son époux,
M. et Mme
Renaud Bouquet des Chaux,
M. et Mme
Hugues de Monteville,
M. et Mme
François de Monteville,
ses enfants,
ses petits-enfants,
ses frères, sœurs,
beaux-frères, belles-sœurs,
très touchés
des marques de sympathie
qui leur ont été témoignées
lors du rappel à Dieu de
Mme Henri de MONTEVILLE
née
Christiane Coye de Brunelis,
vous prient de trouver ici,
leurs sincères remerciements.
messes
et anniversaires
Une messe sera célébrée
en la chapelle
Sainte-Bernadette,
4, rue d'Auteuil, Paris (16e),
le samedi 6 novembre 2021,
à 11 heures, à l'intention de
Colette TALMON
née Thomas,
ancienne conseiller de Paris
de 1977 à 1995,
décédée le 6 novembre 2020.
messes
Une messe sera célébrée
en l'église
Saint-Germain-l'Auxerrois,
chapelle Saint-Pierre,
à Fontenay-sous-Bois,
le mardi 9 novembre 2021,
à 12 h 15, à l'intention de
M. Jean-Pierre DUPUY
décédé le 10 avril 2021.
De la part des familles
Dupuy, Comont, Vachey.
Pour le repos de l'âme
de ses généreux bienfaiteurs
qui, en léguant leurs biens,
prolongent leur engagement
au-delà de leur vie
pour l'éducation
des enfants pauvres
d'Asie du Sud-Est,
une messe sera célébrée
le jeudi 4 novembre 2021,
à 12 heures, au siège de
Enfants du Mékong
5, rue de la Comète,
92600 Asnières-sur-Seine.
Téléphone : 01 47 91 75 28.
Les diplômées HECJF
rendront hommage à
Yvette MÉNISSEZ
directrice honoraire
de l'École HECJF,
décédée le 9 mars 2021,
dans sa 100e année,
lors d'une messe qui se tiendra
le mardi 9 novembre 2021,
à 15 heures, en l'église
Saint-Honoré-d'Eylau,
Paris (16e).
Elles associeront à sa mémoire
Anne-Marie Carlisle,
secrétaire générale, et
Colette Deloire,
directrice des études.
Les familles seront présentes.
Messe des défunts
Le Secours catholique
fera célébrer une messe
en mémoire de ses membres
et donateurs disparus, le mardi
9 novembre 2021, à 12 h 15,
en la chapelle Saint-Laurent
de son siège parisien,
et ce, en présence
de bénévoles et salariés
du Secours catholique.
Il portera aussi dans la prière
les testateurs qui ont choisi
de léguer à l'association
pour que le combat contre
la pauvreté continue après eux.
Nous invitons les parents
et amis à s'y associer
par la prière.
Téléphone : 01 45 49 71 08.
souvenirs
À l'occasion de la fête
de la Toussaint 2021,
vous êtes invités
à commémorer la mort de
Jean-Claude CARRAYROU
survenue le 15 décembre 2020,
à l'âge de 84 ans.
Jean-Claude Carrayrou,
diplômé de HEC,
ancien directeur juridique
de Dassault International,
repose dans le caveau familial
situé dans l'allée centrale
du cimetière du Montparnasse,
à Paris (14e),
face à la tombe
d'Eugène Ionesco.
Jacques Carrayrou et
Angélique Diedhiou-Carrayrou,
son frère et sa belle-sœur,
résidence « Maeva »,
bâtiment AC,
405, boulevard Pierre-Delmas,
06600 Antibes.
En ces temps de mémoire
et de recueillement,
les Petits Frères des Pauvres
ont une pensée reconnaissante
pour tous ceux
qui les ont quittés :
fidèles donateurs,
personnes accompagnées,
bénévoles et salariés.
Leur souvenir nous guide
pour continuer à agir
auprès des plus isolés
et des plus pauvres
de nos aînés.
Petits Frères des Pauvres,
19, cité Voltaire,
75011 Paris.
Le 31 octobre 2011,
Guy RAINDRE
était rappelé à Dieu,
le 31 octobre 2014,
Ghislaine de LUPPÉ
était rappelée à Dieu.
Que ceux et celles
qui les ont connus et aimés
aient une pensée et des prières
à leur intention.

la cueillette des olives à Fontvieille (bouches-du-rhône). sur les 5 millions d’oliviers plantés entre Nyons (Drôme) et menton (alpes-maritimes), 75 % appartiennent à des oléiculteurs amateurs.
La production d’huile d’olive,
une passion française et familiale
Guillaume Mollaret
£@Newsdusud
N
Nîmes (Gard)
i les inondations, ni le feu, ni les guer-
res n’ont jamais eu raison de lui. L’oli-
vier survit à tout. Peut-être la raison
pour laquelle ses rameaux sont sym-
boles de paix. En Provence, il est en
tout cas un ambassadeur dont la
culture est aujourd’hui jalousement
entretenue. Que l’on ait hérité d’un hectare de terre ou
de deux spécimens, ce symbole de longévité est égale-
ment au cœur d’une tradition qui, l’automne venu,
quelques semaines après les vendanges, rassemble
familles et amis à son pied noueux pour organiser la
récolte. Les plus organisés disposent un filet au sol et
utilisent un peigne électrique qui secoue légèrement les
branchages de sorte à faire tomber les fruits avant de
replier la nasse. Les plus patients, eux, usent d’un sim-
ple escabeau pour cueillir une à une les olives posées
dans une cagette, un sandwich comme promesse de
salaire.
La France se positionne au 6e rang mondial des
consommateurs d’olives, avec une croissance en volu-
me de l’ordre de 10 % par an. Mais, côté production, elle
ne presse que 0,1 % de la production mondiale. Dès lors,
il n’est pas étonnant que les huiles vendues en super-
marché proviennent d’oliveraies étrangères. Et, même
si le fruit est pressé en France, il ne garantit pas sa pro-
venance hexagonale.
« La France produit environ 5 000 tonnes d’huile
d’olive par an avec de fortes variations d’une année sur
l’autre puisque, l’an dernier, 3 500 tonnes sont sorties
des moulins. Autrement dit, nous ne pouvons pas répon-
dre à l’intégralité des besoins des consommateurs fran-
çais avec exclusivement des huiles d’olive 100 % fran-
çaises », témoigne avec franchise la marque Puget
(groupe Avril), qui truste 18,8 % de part de marché
avec ses huiles provenant notamment d’Espagne et du
Maghreb. Dans son usine de Vitrolles, à un jet de
noyau de l’aéroport de Marseille, le précieux jus arrive
par camion-citerne avant de passer par le filtre exi-
geant du contrôle qualité, puis par le palais des assem-
bleurs, chargés de trouver la constance gustative
requise par la grande distribution.
« Sur une tranche de pain moelleuse »
L’autre raison pour laquelle l’industrie agroalimentaire
n’arrive pas à satisfaire la demande nationale, c’est que
75 % des 5 millions d’oliviers plantés entre Nyons
(Drôme) et Menton (Alpes-Maritimes) appartiennent à
des oléiculteurs amateurs, jaloux de préserver leur
patrimoine. Jean-Pierre Blanc est l’un d’eux. Vivant à
Gattières, un village proche de Nice et de Vence, ce sep-
tuagénaire a hérité des oliviers se trouvant sur la pro-
priété de 2 000 m² qu’il a acquise il y a plusieurs dizaines
d’années. « Un olivier demande de l’entretien et du soin.
Il faut lui consacrer une journée de taille et recréer les
rameaux. Il faut qu’il soit très clair à l’intérieur pour lais-
ser passer la lumière. C’est tellement beau un olivier dans
le soleil », s’extasie-t-il devant ses arbres avec une joie
renouvelée chaque jour.
champs libres
EnquêtE
En France, Parce que l’olivier est capricieux, la production de
Jean-Pierre Blanc oscille entre 180 et 900 kg de fruits
75 % des oléiculteurs
par an, qui, une fois apportés au moulin, donnent entre
30 et 150 litres d’huile. « Certains arbres ont plus de
600 ans », dit-il comme pour les excuser, avant de se
sont des amateurs.
confier sur son plaisir à déguster « une simple goutte
d’huile sur une tranche de pain moelleuse » en famille ou
Nouveaux acquéreurs entre amis. Quand bien même cet oliveron niçois est
professionnellement installé comme dirigeant d’une
ou héritiers de parcelles, société agroalimentaire, il est hors de question pour lui
de vendre son huile. « C’est pour la maison et pour les
reconvertis des villes proches », tranche-t-il.
Au reste, les oliverons qui gagnent leur vie avec leur
ou enfants du pays, huile sont rares. Et il a fallu, il y a quelque trente an-
nées, que des personnes ayant fait carrière et fortune
ils exploitent dans des vies professionnelles antérieures investissent
dans des terres et des moulins pour que la filière se
structure, notamment dans la vallée des Baux, près
le plus souvent moins d’Arles (Bouches-du-Rhône). Originaire de la région,
mais parti exercer son métier dans l’industrie outre-
d’un hectare de terre. Atlantique, Jean-Benoît Hugues est l’un d’eux. Revenu
en Provence il y a une vingtaine d’années, il reprend
Ils font vivre une centaine des terres familiales pour retrouver du sens et ses raci-
nes avant d’être piqué par la mouche de l’olivier. « Que
de moulins, l’on possède un arbre ou 50 hectares, le virus est le
même », explique ce passionné devenu l’un des trois
essentiellement plus importants producteurs d’huile d’olive française.
Sa PME, le Moulin Castelas (3 millions d’euros de chif-
concentrés dans la vallée fre d’affaires) exploite au total 100 hectares, dont la
moitié appartient à des tiers. Jean-Benoît Hugues est
du Rhône
toujours au four, mais c’est sa fille qui tient aujourd’hui
le moulin. Une transmission qui le ravit.
et la région Paca. Des terres mises en fermage
Depuis trente ans, le parc naturel régional des Al-
pilles et son voisin du Luberon, façonnés par la
culture de l’olivier, séduisent comédiens et grands
patrons, qui viennent y chercher le calme et la sim-
50 km plicité d’une vie de village. On cite souvent les noms
de Patrick Bruel, Jean Reno, Christian Latouche, pa-
tron de Fiducial, et Alain Taravella, PDG d’Altarea
Cogedim, comme des résidents soucieux de leurs
oliviers. Si l’intérêt immobilier de ces « estrangers »
fait immanquablement grimper le prix du foncier,
ITALIE chaque transaction passe par les fourches caudines
de la Safer, une société de service public qui veille à
FRANCE ce que ces résidences conservent leur vocation agri-
cole. Les stars ne cueillent pas forcément elles-mê-
Nyons mes leurs olives, mais mettent leurs terres en ferma-
Nîmes Menton ge. « Avec elles, on opère une sorte de troc. On leur
LUBERON
Gattières restitue 20 % de l’huile qu’ils ont permis de presser. Ils
Aigues-Vives St-Rémy-de-Prov.
ont ainsi leur production propre avec une étiquette à
ALPILLES Vence Nice
Garons
Arles leur nom », détaille Jean-Benoît Hugues.
Vitrolles Aussi connues soient-elles dans leurs activités, ces
Marignane personnalités, une fois au moulin, partagent les mêmes
Marseile
conditions que les oléiculteurs anonymes. Et ces der-
Mer Méditerranée Infographie
niers sont les plus nombreux ! « On compte sur notre ter-
L’olivier, c’est l’arbre de la paix,
»
celui qui unit la Méditerranée
JEan-ClaudE WoillEt, présidEnt dE l’assoCiation promolivE À nîmEs
qui rEçoit lEs réColtEs d’Environ 400 famillEs
samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021
le figaro
15
Guillaume mollaret
ritoire environ 65 % de producteurs, qui exploitent moins
de 1 hectare d’oliviers, soit moins de 300 arbres. Ils sont
aujourd’hui 734. Si l’on cumule ce parcellaire “familial ”
de 1 hectare maximum, il représente 12 % des arbres iden-
tifiés en AOP de la vallée des Baux », témoigne Nathalie
Serra-Tosio, la directrice du Syndicat interprofession-
nel de l’olivier de la vallée des Baux-de-Provence.
Pour produire sa propre huile, nul besoin de posséder
300 arbres, loin de là. Dans le Gard, le moulin Pattus, à
Aigues-Vives, accepte même de triturer 6 kg d’olives
qui, issues d’un seul arbre, ne donneront que 1 litre. « Il
faut voir l’œil des enfants briller quand ils viennent cher-
cher leur petit bidon », sourit Denis Goellner, qui a créé
ce moulin il y a quinze ans, triste de constater que nom-
bre de ses voisins laissaient tomber les olives dans leur
jardin sans les ramasser. À Nîmes, l’association Promo-
live, qui enregistre annuellement les apports de quelque
400 familles, est sur la même ligne : « L’olivier, c’est
l’arbre de la paix, celui qui unit la Méditerranée. C’est
pour cela qu’on fait venir chaque année des experts étran-
gers qui apportent de l’expérience à nos membres »,
défend son président, Jean-Claude Woillet.
« On doit faire de la pédagogie, abonde Jean-Philippe
Montagard, le président de l’AOP Baux-de-Provence,
qui vient d’acquérir un moulin. Il faut savoir expliquer
que la production est très irrégulière d’une année sur
l’autre. D’une part parce que certaines variétés font des
pauses, d’autre part parce que les aléas climatiques,
comme le gel ou la sécheresse, ont un impact sur la
production. Nous cherchons, pour comprendre et nous
améliorer. Cette année, nous espérons une production de
500 tonnes d’huile sur l’AOP alors qu’on en a produit 219
l’an dernier. »
En Provence, la culture de l’olive fascine : on ne
compte plus les reconversions professionnelles. An-
cien comptable au sein du groupe Eiffage, Gérald
Cathala est exploitant agricole professionnel depuis
quinze ans. « Je possédais une cinquantaine de pieds
à titre amateur. Puis j’ai suivi un certificat de spécia-
lisation oléicole au lycée agricole de Saint-Rémy-de-
Provence », témoigne-t-il. Aujourd’hui enseignant
dans ce lycée, en marge de son activité agricole, il don-
ne des cours au sein même de sa propriété. Ses élèves
sont tous des adultes. Stéphanie Berthelon, pharma-
cien à Marignane, aimerait faire de l’oléiculture « une
activité complémentaire » ; Robert Maupas, qui vient de
revendre sa start-up et acheter une propriété dans le
Luberon, veut vivre de l’olive ; Sophie Adao, directrice
des achats dans une société de métallurgie en Tourai-
ne, veut quant à elle reprendre l’exploitation agricole
qui était celle de ses grands-parents au Portugal.
Tout près de Nîmes, à Garons, le chef doublement
étoilé Michel Kayser a fait l’acquisition l’an passé
d’un olivier millénaire. Son ancien propriétaire, le
jardinier Bernard Pical, l’avait sauvé il y a trente-
cinq ans alors qu’il végétait sur une aire d’autoroute
près de Cuenca, au sud-est de Madrid. « On estime
l’âge de cet olivier à 1 350 ans. Cet arbre est un géant. Il
a connu les rois de Tolède ! Sa majesté a besoin de place,
alors je vais lui en faire davantage pour qu’il nous don-
ne ce qu’il veut bien nous offrir », s’émerveille le chef
Kayser. Cet automne, il récoltera les premières olives
de cet arbre qui, stressé par son déménagement, doit
encore s’acclimater à son nouvel environnement,
A
avant de donner plus de fruits et une huile à coup sûr
drapée dans un parfum d’éternité. ■
 samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021 le figaro
16 champs libres
Débats
La vidéosurveillance, liberticide ou libératrice ?
■ Après l’agression de plusieurs policiers à Lyon et à Alençon, le ministre de l’Intérieur,
Gérald Darmanin, a réagi en demandant l’installation de davantage de vidéosurveillance
dans les centres-villes. Où mettre le curseur entre l’efficacité de la police et la protection
des libertés individuelles ?
Deux intellectuels libéraux
donnent leur avis. Pour le
philosophe Gaspard Koenig,
« La société de surveillance
il faut être très vigilant et op-
poser un encadrement strict
à l’usage des nouvelles tech-
n’est pas une fatalité ! »
nologies de la suveillance.
L’essayiste Nicolas Bouzou péenne a publié récemment un projet de
PROPOS RECUEILLIS PAR
directive pour encadrer strictement un
estime que les inquiétudes aziliz le corre
tel usage préventif de l’intelligence artifi-
concernant la société de cielle. Elle imite ainsi la Californie, État
contrôle ne sont pas fondées LE FIGARO. - Gérald Darmanin a déploré pourtant technophile, qui a interdit
dans un État de droit comme le 26 octobre le manque de caméras l’usage de la reconnaissance faciale par
le nôtre. de vidéosurveillance dans certains les forces de police, tandis que la ville de
quartiers. La sécurité mérite-t-elle
que l’on sacrifie un peu de notre intimité ?
Gaspard KOENIG. - Voltaire disait qu’il
vaut mieux hasarder de sauver un coupa-
ble que de condamner un innocent.
Aujourd’hui, doit-on mettre des millions
d’innocents sous surveillance pour pré-
venir un dommage potentiel ? Dans une
société ouverte, il ne doit pas exister de
suspicion a priori, mais des sanctions
a posteriori. Nous sommes censés répri-
mer la faute, pas l’intention. C’est un
principe essentiel de l’État de droit. L’une
des premières mesures décidées par la
Révolution française fut l’interdiction de
l’ouverture des correspondances par le
cabinet noir du roi, une pratique dénon-
cée par la population dans les cahiers de
doléances. On préférait renoncer (un
peu) à sa sécurité, plutôt que (complète-
ment) à son intimité. Sur la question pré-
cise des caméras de surveillance, il ne me
paraît pas scandaleux de pouvoir utiliser
des images après qu’un délit a été com-
mis. Images qui en l’absence de problème
ne sont pas regardées, pas analysées, et
automatiquement
détruites. Il faut dis-
GasPard KoenIG tinguer cela de la re-
connaissance faciale
le philosophe*, créateur du mouvement simple, en temps réel, qui
qui lutte contre la bureaucratie, s’inquiète des yeux fait de tout citoyen
un délinquant po-
de chimène de nos gouvernants pour les sociétés
tentiel, en perma-
de contrôle asiatiques. la vidéosurveillance peut nence identifié dans
être légitime si elle n’emploie pas la reconnaissance l’espace public. La
faciale, « ligne rouge absolue » pour nos libertés. Commission euro-
Craindre la vidéosurveillance,
c’est avoir peur de la police et de la justice
A
près le passe sanitaire, c’est
la vidéosurveillance qui
fracture la famille de pensée
libérale. Indépendamment
de leur efficacité,
ces politiques seraient
néfastes en soi dans la mesure où elles
restreindraient les libertés et nous
placeraient dans un régime de surveillance
généralisé. Je crois en réalité exactement
l’inverse et je voudrais plaider, au nom
du libéralisme, pour la vidéosurveillance
comme j’ai défendu le passe sanitaire
au nom des mêmes valeurs.
Comme l’avait montré Raymond Aron,
il n’existe pas une liberté faite d’un bloc.
La liberté n’est pas une ampoule
qu’on allume ou qu’on éteint. Elle recouvre
dessins fabien clairefond
de multiples domaines : liberté de parole,
liberté économique, liberté sociale, liberté
de jouir de ses possessions… La protection
de ces libertés est garantie par l’État
de droit (c’est la condition première,
absolument nécessaire) et leur extension
est permise par des politiques publiques
libérales. Ainsi, autoriser la contraception
féminine
ou permettre
nIcolas bouzou l’avortement étaient
des lois libérales,
Puisque la délinquance restreint les libertés, on peut en ce sens qu’elles
tout à fait être libéral et défendre la vidéosurveillance apportaient une
liberté nouvelle.
qui permet de l’endiguer, argumente l’essayiste.
Le passe sanitaire
Il trouve hors de propos les comparaisons pouvait être
avec le modèle chinois dès lors que l’usage considéré comme
de ces technologies est en France très encadrée. libéral dans
ANNE HIDALGO
Maire de Paris
Candidate à l’élection présidentielle
DIMANCHE 12H-13H
En direct
A
Santa Cruz a renoncé l’année dernière au
predictive policing (« prévision policière », constamment justifier sa propre vie, au
NDLR). C’est une ligne rouge absolue à ne
pas franchir.
« Il faut laisser le plus de liberté possible
aux citoyens dans leurs choix, même
quand ceux-ci provoquent des externalités avec sa rétine. Déjà,
gênantes pour le reste du groupe
Pensez-vous que nous avons déjà basculé
dans une société de l’hypercontrôle ?
Le passe sanitaire en est incontestable-
ment un prodrome inquiétant. Sur cette
question, il y a d’un côté les utilitaristes, saction. Le visage est ce lieu de l’intersub-
qui pensent que l’on doit maximiser à tout
prix le bien-être collectif, et ceux qui res- par exemple, où se dévoile l’unicité de
tent fidèles au libéralisme classique et à sa chaque être humain. Quand il devient une
conception exigeante de l’individu. Pre-
nons aussi l’exemple de la gare. Aupara-
vant, chacun s’y croisait, s’embrassait et
se saluait sur le quai. C’était l’espace des monde rhizomatique où tout devient
possibles par excellence. Désormais, nous
devons faire la queue en nous tenant dans
les cercles dessinés au sol pour maintenir
le mètre de distance sanitaire, puis pré-
senter le QR Code de notre billet devant un
portique, faire vérifier notre billet par des
contrôleurs alignés sur le quai et quand
enfin nous entrons dans le train, écouter
l’énoncé interminable des règles sanitaires
et sécuritaires. Depuis un an, nous som-
mes même censés pouvoir prouver notre
identité, les billets étant devenus nomina-
tifs (y compris sur les TER), au grand dam
la mesure où un virus contagieux par voie
orale et susceptible d’engorger le système
de santé en quelques semaines était
en lui-même liberticide. En bonne logique,
les mesures censées le combattre, à partir
du moment où elles entrent dans le cadre
de l’État de droit et où elles sont
proportionnées, peuvent être considérées
comme libérales. C’était le cas du passe
sanitaire, mesure techniquement simple
qui a permis à la France de devenir
l’un des pays les plus vaccinés au monde
et qui a objectivement permis de regagner
de la liberté face au Covid-19.
C’est un raisonnement proche que
l’on peut appliquer à la vidéosurveillance.
Premièrement, on devrait pouvoir
s’accorder sur l’idée que la délinquance,
petite ou grande, restreint les libertés.
Qu’un groupe de caïds contrôle les entrées
d’une cité ou qu’un pickpocket vole
des portefeuilles dans les transports
en commun, il est difficile d’y voir
autre chose qu’un fait social liberticide
à combattre. Deuxièmement, et c’est
sans doute le point le plus important,
la technologie n’est jamais liberticide
en elle-même. Tout dépend des usages
qu’on en fait. Ainsi, affirmer que l’usage
de la vidéosurveillance (ou du passe
sanitaire) nous engage vers une voie
« à la chinoise » est un raccourci paresseux.
Ou alors autant dire que la présence
de policiers dans la rue nous engage
dans une voie « à la Stasi » puisque,
après tout, une police peut devenir
politique.
© Bertrand GUAY / AFP
de la Cnil, et soi-disant pour lutter contre
le terrorisme ! Je prends ces signaux faibles
au sérieux. Sinon, à terme, l’espace ne sera
plus commun, mais tronçonné en seg-
ments, dont l’accès sera conditionné au
renoncement à l’anonymat. On passe de la
libre déambulation de la cité grecque à la
construction de sas hermétiques. Il faudra
mépris de la présomption d’innocence. Le
plus grave est que tout le monde s’y habi-
tue. On s’approche de
la dystopie de Minority
Report, où l’on paie
son ticket de métro
» aux États-Unis, Ama-
zon a développé des
magasins où les clients
sont débités simplement après avoir mon-
tré leur visage à la caméra… Or la carte
bancaire permet de placer une distance
entre soi, son environnement et sa tran-
jectivité, bien décrit par Merleau-Ponty
simple métrique qui absorbe d’individu
dans sa transaction commerciale, nous ne
sommes pas loin de basculer dans un
réseau, où le soi disparaît.
Craignez-vous que l’on bascule
dans le modèle chinois ?
Les yeux de Chimène avec lesquels nos
gouvernants regardent l’Asie m’in-
quiètent (en mentionnant généralement
la Corée du Sud ou Singapour, pour rester
politiquement corrects). Ces pays de
culture confucéenne ne se préoccupent
pas du libre arbitre individuel, ce qui leur
donne un avantage certain dans le dé-
ploiement des nouvelles technologies. À
La vidéosurveillance, en France,
n’est pas utilisée pour conférer une note
de crédit social aux habitants,
comme en Chine, mais pour prévenir
la délinquance et se donner les moyens
de rattraper les coupables et de les traduire
devant la justice. Elle est encadrée
par une loi stricte : signalement obligatoire
de la présence de caméras, interdiction
de filmer les intérieurs d’habitation
et les entrées, destruction des images avant
un mois (c’est un grand maximum
dans la pratique), possibilité pour chaque
citoyen de saisir la Cnil… En Chine,
la vidéosurveillance est déployée
pour punir ceux qui ne respectent pas
les règles et pour gratifier ceux qui
les suivent. Outil de protection et de lutte
contre la délinquance chez nous, outil
politique de moralité publique là-bas.
Ce n’est pas une différence de degré,
mais de nature qui sépare les deux
systèmes. Et cette différence n’est pas liée
à la technologie mais au droit.
On comprend mieux ce point en allant
voir concrètement comment fonctionne
la vidéosurveillance. C’est ce que j’ai fait
en me rendant à Meaux, à l’invitation
de Jean-François Copé. Ce dernier a été l’un
des pionniers de la vidéosurveillance en
France, ce qui a permis de diviser de moitié
le taux de criminalité dans sa ville depuis
1995 et d’obtenir un taux d’élucidation
deux fois plus élevé que la moyenne
nationale. Concrètement, la
vidéosurveillance est un outil à disposition
de la police. Au centre de supervision
Benjamin SPORTOUCH
Marion MOURGUE
Adrien GINDRE
Questions et réactions #LeGrandJury
l’âge industriel, nos sociétés occidentales
estimaient que la croissance du PIB allait
de pair avec le respect des droits
fondamentaux. Notre prospérité validait
le modèle démocratique et assurait notre
supériorité sur les régimes autoritaires.
Désormais, l’émergence de l’intelligence
artificielle, qui exige d’accumuler et de
centraliser toujours plus de données per-
sonnelles, change la donne. Il nous faut
effectuer un arbitrage inédit entre res-
pect de la vie privée et développement
économique. De ce point de vue, l’Union
européenne est plus ferme sur ses princi-
pes que le gouvernement français, très
hésitant sur les questions de protection
de la vie privée. Au fond, l’Europe sait
qu’elle a déjà perdu la bataille de l’IA, qui
se joue entre la Chine et les États-Unis. Il
ne nous reste plus que la défense de nos
principes. Nous devons continuer d’affir-
mer que la seule société qui mérite d’être
vécue est une société libre, quitte à ac-
cepter un certain ralentissement. Sinon,
il ne nous restera plus rien.
Quels principes doivent nous guider
philosophiquement et politiquement ?
Il faut laisser le plus de liberté possible aux
citoyens dans leurs choix, même quand
ceux-ci provoquent des externalités gê-
nantes pour le reste du groupe. Foucault
dans ses leçons de biopolitique nous met-
tait déjà en garde contre la fascination du
biopouvoir, qui oblige le citoyen à se
contrôler lui-même. Dans le sillon de John
Stuart Mill ou de Tocqueville, forgeons un
droit à l’errance, à l’erreur, au faux pas et
à la divergence. Il n’y a pas de fatalité à
cette société de surveillance. Il faut que
des voix s’élèvent, et la contestent. ■
* Dernier ouvrage paru :
« Notre vagabonde liberté »
(Éditions de l’Observatoire).
urbaine de Meaux, 30 policiers municipaux
spécialisés surveillent 24 h/24 et 7 j/7 un
mur d’écrans. Ils sont formés pour repérer
et même anticiper des actes malveillants
et des troubles, ce qui permet aux
85 policiers qui patrouillent d’intervenir
rapidement s’ils perçoivent un problème.
La vidéosurveillance permet d’augmenter
la productivité de la police et de faciliter le
cours de la justice. L’intelligence artificielle
aidera à l’avenir les policiers qui scrutent
les écrans. Dans un État de droit, où est le
problème ? Craindre la vidéosurveillance,
c’est avoir peur de la police et de la justice,
auquel cas il faut le formuler clairement.
La liberté ne tombe pas du ciel.
Sa protection et son extension relèvent
de combats intellectuels mais aussi
politiques. Accepter de laisser un virus
détruire notre système de santé
ou des délinquants terroriser d’honnêtes
personnes sous couvert de libéralisme
relève d’une conception infantile
de la liberté. Ce qui fait de la Chine un pays
illibéral, ce n’est pas le passe sanitaire
ou la vidéosurveillance. C’est l’utilisation
des technologies au service d’un projet
politique de contrôle de la population.
À cette vision infantile, opposons
un « libéralisme adulte », qui utilise,
dans le cadre intangible de l’État de droit,
les moyens de la police et les technologies
afin de protéger et d’accroître les libertés
réelles des Français : liberté d’aller
et de venir en sécurité, de jouir
de leurs biens sans en être dépossédés,
de construire leur vie dans un pays sûr.
 samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021

champs libres
le figaro

OpiniOns 17
ChRonIque
Mathieu Bock-Côté Le présent confisqué

S
i l’histoire peut éclairer
le présent, elle peut aussi
le dévorer et le confisquer,
en poussant les hommes
d’une époque à revivre toujours
les querelles des précédentes,
ce qui déréalise la vie politique, et la rend
même spectrale. On le constate depuis
quelques semaines, alors que les
références obsessionnelles et terriblement
désincarnées à la Deuxième Guerre
mondiale saturent l’espace public, comme
si d’un coup, la France était condamnée
à revivre, à tout le moins de manière
théâtrale et parodique, les divisions
de cette époque, dont huit décennies
nous éloignent. Ajoutons, puisqu’il le faut,
qu’il y a quelque chose d’absurde à placer
la figure du maréchal Pétain au cœur
de l’élection présidentielle quand tous
les candidats sérieux, déclarés ou non,
se réclament, pour peu qu’on ne déforme
pas leurs propos, de l’épopée gaulliste
au point même de se réclamer d’un parti,
comme le RPR, qui a voulu la poursuivre
longtemps après la mort du Général.
Cet ensevelissement du présent,
nous le savons, relève du système
de défense d’un système qui fait
de la mémoire une arme rhétorique
de bannissement civique pour mater ceux
qu’il présente comme des dissidents
et des rebelles, en les transformant à coups
de citations déformées en héritiers
du pétainisme, de la collaboration. Il s’agit
de provoquer l’effroi en transformant
les contemporains détestés en revenants
d’hier, comme si toujours, la nation devait
revivre le traumatisme de 1940. Tout cela
lasse, tellement cette rhétorique est fausse
et usée. On y verra un système
d’épouvante ritualisé confirmant
la radicalisation du décalage entre
l’espace public officiel et médiatiquement
porté et les préférences populaires. Mais
l’antifascisme parodique a-t-il vraiment
de l’avenir ? Il a beau se décliner
aujourd’hui en néo-antiracisme
et en luttes spécialisées contre toutes
les phobies imaginables, peut-il encore
mordre sur une réalité qui lui échappe ?
Revenons-y: quelle heure est-il ? C’est
ce qu’Alain Finkielkraut a nommé la seule
exactitude. Quelle est la singularité
de notre temps, et à quelle épreuve
existentielle la France est-elle
confrontée ? L’honnêteté suffira à nous
convaincre que l’immigration massive
est la grande question du présent,
qui animent les civilisations. Mais il faut
en faire un usage subtil, comme nous y
invite Marcel Gauchet, dans le deuxième
tome de Comprendre le malaise français
(Gallimard), en évoquant une piste
intéressante. De manière aronienne,
Gauchet y suggère que la question
de l’immigration pourrait être
à la Ve République ce que la question
algérienne a été à la IVe. Le rapprochement
est saisissant et frappe d’un coup
l’imagination. L’incapacité du régime
à prendre à bras-le-corps une question
vitale entraîne à la fois son discrédit
et le rejet de la classe politique qui y est
associée, et la recherche d’une solution
qui lui soit extérieure, et qui vienne faire
éclater un cadre politique incapacitant
se retournant pratiquement contre
la nation qu’il doit servir. À moins
qu’une figure issue du système ne s’empare

@
d’autant qu’elle entraîne une mutation de cette préoccupation de manière
démographique condamnant le peuple crédible et résolue ?
100 000 citations
et proverbes sur evene.fr ENTRE GUILLEMETS historique français à devenir L’histoire, autrement dit, est utile
progressivement minoritaire chez lui. lorsqu’elle fournit des enseignements
30 octobre 1821 : naissance de l’écrivain russe Longtemps niée, cette révolution est et permet de penser par analogies,
Fiodor Dostoïevski à Moscou. aujourd’hui chantée par ceux qui veulent en dévoilant les angles morts du présent.
y voir une créolisation féconde Il y a assurément des structures narratives
de l’identité française, même si elle récurrentes dans l’histoire d’un peuple,
Fiodor Dostoïevski s’accompagne d’une partition ethnique comme si à travers elles se dévoilaient

Je crois que la meilleure objective du territoire et enclenche

une dynamique de racialisation
des rapports sociaux. Il n’est évidemment
des permanences mentales. Mais qui
se trompe d’époque se détourne
de ses contemporains. S’il ne s’agit pas
définition de l’homme pas permis de ne pas partager leur joie.
C’est l’existence même du peuple français
aujourd’hui de fantasmer sur une
VIe République mais de revenir à l’esprit
serait : créature qui est en question, pour peu qu’on
ne le définisse pas exclusivement
de la Ve, on comprend que le grand enjeu
demeure celui de la restauration de

à deux pieds à la manière d’un territoire impersonnel la souveraineté, et plus particulièrement,

Bridgeman images

seulement régulé par un système de la souveraineté populaire. Soit sortir

et ingrate»
de valeurs, aussi honorables soient-elles.
Qu’on se comprenne bien : il ne s’agit
pas de bannir la référence à l’histoire,
qui demeure une formidable école
permettant aux dirigeants de comprendre
les tendances lourdes et les passions
du gouvernement des juges qui n’est rien
d’autre qu’une falsification de l’État de
droit au service d’une oligarchie se faisant
passer pour une aristocratie éclairée.
Telle est peut-être la véritable constante
de l’histoire de France.

VOX
« Faut-il remettre en cause
…
le thermomètre de l’opinion ? » post-brexit
Pêche : « Nous assistons
à une montée en tensions
vanche, les sondages influent sur les juge- nous sommes aussi le pays où la défiance à
inédite des relations franco-
PROPOS RECUEILLIS PAR
Aziliz le Corre-Durget ments, choix et analyses des politiques et l’égard des sondages est également la plus
journalistes qui ont tendance à valoriser forte. La gauche qui procède d’abord de la
ceux qui ont momentanément les faveurs dispute se méfie de l’idée que l’on puisse britanniques » : entretien
LE FIGARO. - À six mois de l’électorat. Mais comme les citoyens unifier l’opinion publique au travers d’un
de la présidentielle, le quotidien Ouest- sont très critiques à l’égard des médias, ces chiffre. La droite qui procède du commun avec Aurélien Antoine,
France annonce qu’il couvrira la campagne derniers pèsent sur l’offre de candidats répugne à ce que la technique semble s’en
sans sondages. Les chiffres affichés mais pas sur l’opinion. accaparer la légitimité. Ainsi en 1972, Mau- directeur de l’Observatoire
dans ces études sont-ils responsables rice Druon parlait des sonda-
des dynamiques électorales ? ges comme des « pollutions de du Brexit
Stéphane ROZÈS. – Non. Les sondages ne
font que mesurer et porter à la connaissan-
ce de tous, l’opinion, les représentations et
« Le sondeur est un photographe. la démocratie », se substituant
Il incombe ensuite à l’analyste à la représentation politique
traditionnelle, c’est-à-dire à
… religion
intentions de vote qui les précèdent. Ils va-
et au politologue d’interpréter la nation souveraine. Cette « La loi de 1905 a trahi
rient selon les perceptions et modifications
du réel : le déroulement de la campagne,
les sondages avec pertinence »critique a abouti à la loi du
19 juillet 1977, commençant à la tradition gallicane
les attitudes et les comportements des
candidats, les changements de perception
D’expérience, j’observe que l’on s’interro-
ge sur la légitimité et qualité des sondages
encadrer fermement les sondages politi-
ques en France. Aujourd’hui prévaut l’idée
de la France »,
des enjeux…
Les citoyens construisent et envisagent
lorsque émergent des phénomènes politi-
ques que l’on peine à comprendre. Ce fut le
que la crise démocratique viendrait de ce
que les élus ne représenteraient pas bien et
par Jean-Loup
leur vote socialement, idéologiquement,
politiquement et selon les rebondissements
cas autrefois avec les phénomènes Ségolè-
ne Royal ou Emmanuel Macron, aujour-
ne comprendraient pas les Français. Les
sondages, ayant la charge d’éclairer ceux
Bonnamy, spécialiste
de la campagne. Les sondages s’intègrent d’hui Éric Zemmour. On met alors en cause qui gouvernent, auraient donc leur part de de philosophie politique
dans leur tableau de bord. Ils sont réinter- le thermomètre plutôt que ce qui se joue responsabilité.
prétés par eux en fonction de leurs préfé- dans les profondeurs du pays, ce que cela
rences individuelles. Les sondages concou- révèle de notre inconscient collectif, de Les sondages ont récemment été décriés
rent au choix démocratique en donnant des notre imaginaire à un instant donné. On pour avoir affiché de grands écarts
informations aux citoyens sur l’état des croit les sondages si on comprend et assu- d’un institut à un autre. les rencontres
du figaro
rapports de force. me ce qu’ils révèlent. Comment l’expliquez-vous ?
En tout état de cause, les citoyens ne sont Le succès de Zemmour fut d’abord celui de Il faut distinguer deux écoles méthodologi-
pas passifs face aux sondages. J’ai pu le ses audiences, de ses Audimat et succès de ques. L’école des sondeurs purs qui, une fois
dessin clairefond

constater comme ancien directeur général librairie basés sur ses analyses de la situa- établi que leurs chiffres sont justes, les don-
de l’Institut de sondage CSA, puis conseil à tion de la France. Il met avec fracas, ferveur ne dans leur brutalité par rapport au passé
Cap, toutes les campagnes, hormis l’avant- et constance au cœur de la présidentielle la immédiat. L’autre, qui intègre de la polito-
dernière, ont connu entre deux et cinq re- question de notre identité et de la survie de logie dans les redressements de ses chiffres
bondissements mesurés de très près par les notre modèle qui travaille notre imaginaire et qui vont lisser les mouvements d’inten-
intentions de vote. On national contrarié. Les sondages l’ont seu- tions de vote pour des raisons de prudence.
n’a pu démontrer si lement conforté. Il incombe ensuite à l’analyste et au polito-

Stéphane RozèS
une dynamique élec- logue de les interpréter avec pertinence et FABRICE LUCHINI
torale mesurée par les À quoi sont dues les critiques prudence. Le débat se poursuit aujourd’hui ET MICHEL ONFRAY
La défiance à l’égard des sondages sondages la renforce à l’égard des sondages ? avec le phénomène Zemmour. ■ CONFÉRENCE EN LIGNE
ou entraîne un effet de La France est le pays qui publie le plus de * Stéphane Rozès est président de la société
est récurrente et témoigne généralement réaction ou de lassitu- sondages au monde, car depuis des siècles de conseil Cap et ancien DG de l’institut le 22 novembre à 18 h
d’une incompréhension quant à ce qu’ils révèlent, de contre elle de la part le politique est ce qui nous tient ensemble de sondages CSA et enseignant réservations : 01 70 37 18 18
argumente l’ancien directeur de l’institut CSa. de l’opinion. En re- au travers de disputes communes. Mais à Sciences Po Paris. ou www.lefigaro.fr/rencontres.

“Sans la liberté de blâmer il n’est point d’éloge flatteur” Beaumarchais

Dassault Médias SOCIÉTÉ DU FIGARO SAS Directeur des rédactions Philippe Gélie (International), Directeur artistique FIGAROMEDIAS Impression L’Imprimerie, 79, rue de Roissy ce journal
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Costa de Beauregard, Benoît Anne-Sophie von Claer Sciences), Robert Mergui 14, boulevard Haussmann Club : 469 €. Semaine : 329 €. Week-end premium : 270 €. cahier TV 72 pages
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Rudi Roussillon directeur de la publication (Style, Art de vivre, F), Vincent Trémolet de Villers 75438 Paris Cedex 09 Imprimé sur papier issu de forêts gérées durablement. madame 128 pages
Origine du papier : Allemagne. Taux de fibres recyclées : 100%. Ce journal
A

Marc Feuillée Anne Huet-Wuillème (Édition, (Politique, Société, Débats Opinions) Tél. : 01 57 08 50 00 est imprimé sur un papier UPM porteur de l’Ecolabel européen sous
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Photo, Révision), direction.redaction@lefigaro.fr le numéro FI/011/001. Eutrophisation : Ptot 0.002 kg/tonne de papier. du territoire national
 samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021 le figaro - N° 24 010 - Cahier N° 2 - Ne peut être vendu séparément - www.lefigaro.fr

> Focus
lefigaro.fr/economie pÊCHe :
teNsioNs
et traCtatioNs
traNsport graNd témoiN Y aura-t-il de la morue au menu du
le leNt tHibault laNxade G20 de Rome ? Alors que les diri-
geants des vingt pays les plus puis-
redéCollage défeNd la CréatioN d’uN sants de la planète se penchent sur
de l’aérieN Page 22 « divideNde salarié » Page 24 la sortie de la pandémie et le climat,
Emmanuel Macron et Boris Johnson,
eux, vont tenter de régler le sort de

économie
quelques dizaines de pêcheurs.

Rebond historique
La bataille de la pêche post-Brexit
entre la France et la Grande-Bre-
tagne continue de provoquer des
tensions, à trois jours de l’entrée en

de la croissance française
vigueur de mesures de rétorsions
brandies par la France. Celle-ci esti-
me que près de la moitié des licences
demandées par des pêcheurs fran-
çais pour la zone côtière britannique
des 6 à 12 milles n’ont pas été satis-
Une croissance spectaculaire de 3 % au troisième trimestre a permis à l’économie faites. Faute de changements dans
française de revenir à son niveau d’avant-crise dès la fin de cet été. les prochaines heures, elle menace
de bloquer, dès mardi, tout débar-
quement de produits de la mer bri-
C’est une bonne nouvelle : entre s’est félicité Bruno Le Maire. Cette péens. L’Allemagne, par exemple, que suite à l’effondrement de l’ac- tanniques dans six ports français, et
juillet et septembre 2021, la crois- performance permet à l’économie voit sa reprise se faire plus lente- tivité en 2020, permettra à la crois- de mener des contrôles renforcés
sance de la France a progressé de de revenir quasiment à son niveau ment, avec un trimestre en hausse sance de dépasser les 6,25 % prévus des camions de marchandises fran-
3 %, du presque jamais-vu depuis d’avant-crise. de 1,3 % ; son PIB reste 1,2 % sous en 2021, mais ne se réitérera pas
chissant la frontière.
cinquante ans ! « C’est un chiffre qui La France est ainsi un peu en avance son niveau d’avant-Covid. Le net au 4e trimestre. Les entreprises
Jeudi, deux chalutiers britanniques
est au-delà de nos espérances », sur les grands pays voisins euro- rebond français, en partie techni- souffrent des pénuries.
avaient été interpellés par les autori-
tés françaises. L’un des deux a été
èl’imPact très hétérogène de l’inflation èle commerce extérieur, « l’angle mort » èdes nuages aPrès un fort rebond en euroPe Pages 20 et 21 dérouté vers le port du Havre. Son
capitaine, qui risque 75 000 euros
d’amende pour avoir pêché 2 160 kg
de coquilles Saint-Jacques sans li-
EDF perd cence, doit être jugé en août 2022.
frank peters/stock.adobe.com, corentin fohlen/divergence, elko hirsch/hanslucas, nestlé

Le Royaume-Uni lui a proposé son

400 millions « assistance consulaire » et a

convoqué l’ambassadrice de France

d’euros dans
pour protester contre ces méthodes.
À son tour, Londres a menacé ven-
dredi de procéder à des « contrôles
le trading rigoureux » sur les bateaux étran-
gers frayant dans ses eaux, si Paris
met ses projets à exécution. Le
Début octobre, le pari gouvernement britannique évoque
d’un trader sur les prix aussi le lancement d’une « procédu-
re de règlement des contentieux »
de l’électricité a mal auprès de l’Union européenne, dans
tourné et s’est traduit le cadre de l’accord sur le Brexit si-
gné fin 2020. La Commission de
par une énorme perte. Bruxelles a pour sa part proposé à
EDF ne commente Londres de mener un dernier
« round » de négociations sur le su-
pas, mais l’électricien jet ce week-end.
a sanctionné En parallèle, les Britanniques appel-
son trader à l’origine lent à une « désescalade » de ces
tensions. Cette tâche échoira au
de cette « paume » président français et au premier
historique et a lancé ministre de Sa Majesté, qui doivent
se rencontrer en marge du sommet
une enquête interne. du G20, dimanche. F. C.
Page 25

le PLUS du l'histoirE le fournisseur

FIGARO écO
après le jambon Herta, Nestlé ne veut e.leclerc énergies
MODE
de jeunes marques plus de purée mousline ferme le 31 octobre

L
africaines e jambon-purée n’a plus populaire grâce à sa recette de flocons C’est le premier fournisseur Les clients sur le carreau ont
à la conquête la cote chez Nestlé. Préférant évitant la corvée de l’épluchage des pommes d’énergie à fermer boutique pu subir de fortes hausses de
du monde Page 23 se concentrer sur ses de terre. Son slogan « Quand je fais après l’envolée historique des tarif en atterrissant chez
marques internationales haut de la purée Mousline, je suis sûre que tout prix de l’électricité et du gaz d’autres fournisseurs, à cause
de gamme, les eaux minérales le monde en reprend… » a bercé la France depuis septembre. E.Leclerc de la flambée des prix de
LA SÉANCE et les produits d’hydratation, le géant des années 1980. Comme le jambon Herta, énergies arrêtera de fournir l’énergie. Toutefois, un ac-
DU VENDREDI 29 OCTOBRE 2021 suisse de l’agroalimentaire a l’intention la purée Mousline est un précurseur de l’électricité à ses clients à cord avait été annoncé cet été
CAC 40 de se séparer de sa célèbre marque en son genre, leader de sa catégorie. partir du 31 octobre, avait avec Alpiq, grâce auquel les
de purée Mousline. Fin 2019, le groupe Mousline contrôle plus de 70 % de son prévenu au début du mois le clients de E.Leclerc énergies
6830,34 +0,38% médiateur de l’Énergie. Ini- peuvent bénéficier d’un tarif
s’est déjà séparé du jambon Herta, vendu marché, et peut s’enorgueillir
DOW JONES à hauteur de 60 % d’être un produit 100 % tialement, le fournisseur avantageux. De plus, ils ont
à l’espagnol Casa « made in France », voulait fermer boutique aussi la possibilité de re-
35773,33 +0,12%
Tarradellas. « Dans fabriqué dans l’usine quinze jours avant, le 15 oc- tourner chez EDF au tarif ré-
tobre. glementé de vente, qui
ONCE D’OR le cadre de la révision de Rosières-en-Santerre,
En début de semaine dernière, n’augmentera qu’en février,
1798,20 (1783,85) permanente de son en Picardie. Mais comme
seuls 5 000 à 10 000 clients sur et de seulement 4 %, grâce à
portefeuille », la charcuterie, les ventes
les 140 000 n’avaient pas en- des baisses de taxes, a promis
PÉTROLE (lond) sa direction en France de purées déshydratées core changé de fournisseur, le gouvernement.
84,310 (84,510) mène « une revue ont perdu de leur peps. d’après la Commission de ré- Le géant de la distribution
EUROSTOXX 50 d’options Nestlé préfère miser ailleurs gulation de l’énergie (CRE). s’était lancé en 2018 dans la
4247,09 +0,31% stratégiques, pouvant et confier à quelqu’un Les derniers qui auraient fourniture d’électricité aux
aller jusqu’à la vente d’autre le développement oublié de changer au 31 octo- particuliers et visait alors
FOOTSIE de ses activités de Mousline, qui a besoin bre seraient pris en charge « trois millions de clients d’ici
7237,57 -0,16% de purée de pommes de renforcer sa capacité quelque temps directement à 2025, soit 10 % du marché ».
de terre, en France d’innovation pour se par Enedis. De la même ma- Mais le marché de la fourni-
NASDAQ et à l’export ». relancer. Une décision sera nière que le fait le gestionnaire ture d’électricité génère peu
15750,29 -0,18% Lancée en 1963 prise au plus tard à l’été des réseaux électriques de dis- de marge. Lors d’une flambée
par Maggi, Mousline 2022. ■ tribution pour les clients cou- des cours, elle peut au
NIKKEI est devenu un succès mathilde visseyrias pés par leur fournisseur pour contraire provoquer de gros-
A

28892,69 +0,25% impayés. ses pertes. G. G.

 samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021 le figaro
20 l'événement
La France en route vers une croissance
Après un recul du produit intérieur brut (PIB) de 8 % en 2020, l’Hexagone va connaître cette année un rebond
anne de guigné £@adeguigne
conjoncture Après la baisse
spectaculaire du chômage mer-
credi, place à la hausse historique
de l’activité économique. Entre
juillet et septembre 2021, le
produit intérieur brut (PIB) de la
France a progressé de 3 %, du
quasiment jamais vu depuis
cinquante ans (à l’exception du
rebond de l’été 2020). « C’est un
chiffre qui est au-delà de nos espé-
rances », s’est réjoui le ministre
de l’Économie Bruno Le Maire,
évoquant un « résultat excep-
tionnel », qui place la France en
tête des rebonds européens au
troisième trimestre.
L’économie française est en
effet, dès cet été, revenue quasi-
ment au niveau d’avant-crise,
avec un écart de seulement
0,1 point par rapport à fin 2019,
selon l’Insee. Le choc du corona-
virus n’est pas effacé : pendant
près deux ans, entre début 2020
et aujourd’hui, le pays n’a produit
aucune richesse, comme l’illustre
l’envolée de sa dette publique.
Hausse
de la consommation
Le gouvernement s’était initiale-
ment fixé l’objectif de retrouver
l’étiage de fin 2019 avant l’été
2022 puis, anticipant le dynamis-
me de la reprise, avait raccourci
l’horizon à cette fin d’année. À la
surprise générale, le rebond aura
donc été encore plus rapide. Il y a
quelques mois encore, tous les
observateurs, dont le gouver-
nement, craignaient pourtant
l’avènement de murs de faillites
et pic de chômage.
Les massifs dispositifs publics
de relance et d’urgence, conju-
gués au bel optimisme des pa-
trons mais aussi des consom-
mateurs, sevrés après une année
L’impact très hétérogène de l’inflation
L’inflation semble s’installer dans
le paysage. En octobre, les prix à
la consommation ont augmenté
de 2,6 %, après 2,2 % en
septembre, selon l’estimation
provisoire réalisée par l’Insee.
L’institut explique ce sursaut par
une « accélération des prix des
services et de ceux de l’énergie ».
Les Français s’inquiètent de cette
tendance, comme l’illustre le
décrochage de l’indicateur mesu-
rant la confiance des ménages. Le
gouvernement n’est pas plus
serein. Pour éviter une cristalli-
sation des mécontentements sur
les questions de pouvoir d’achat à
quelques mois de la présidentielle,
il multiplie les dispositifs de
soutien : chèque énergie, indem-
nité inflation de 100 euros pour
les personnes touchant moins
de 2 000 euros par mois…
Cette fébrilité s’explique par le
caractère particulier de la situa-
tion, très éloignée du scénario
bien huilé des années 1970, avec
une inflation auto-entretenue par
une boucle de hausse des prix et
des salaires. Dans un tel cas,
l’augmentation des salaires annu-
lant celle des prix, le pouvoir
d’achat reste relativement stable.
En revanche, la compétitivité des
entreprises peut être attaquée, ce
qui classiquement pousse la
Banque centrale à augmenter ses
hausses.
Redistribution entre
créanciers et débiteurs
« À strictement parler, pour un
économiste, la France ne connaît
pas aujourd’hui de l’inflation, car
les hausses sont concentrées sur
quelques biens, souligne Xavier
Jaravel, professeur d’économie à
la LSE, à Londres. On parle dans ce
cas plutôt d’une hausse coût de la
vie qui, par nature, touche des
ménages de manière très ciblée ».
A
D’où la difficulté, pour la politique
économique, de bien calibrer sa
L'économie retrouve son niveau d'avant crise
ÉVOLUTION DU PIB FRANÇAIS EN BASE 100 AU 4E TRIMESTRE 2019
4e trim. 1er trim. 2e trim. 3e trim.
2019 2020
100
95
90
85
80 81,6
VARIATION DES COMPOSANTS DU PIB EN BASE 100 AU 4E TRIMESTRE 2019
4e trim. 1er trim. 2e trim. 3e trim. 4e trim. 1er trim. 2e trim.
2019 2020
110
Consommation
Investissements
des ménages des entreprises
100
90
80
70
VALEUR AJOUTÉE DE L'INDUSTRIE MANUFACTURIÈRE
ET DES SERVICES MARCHANDS ÉCART AU 4E TRIMESTRE 2019 (en %)
4e trim. 1er trim. 2e trim. 3e trim. 4e trim. 1er trim.
2019 2020
0 0
-5
-10
-15
Industrie
manufacturière
-20
-25
Source : Insee
réponse. Une note du Conseil
d’analyse économique de 2019,
« Pour le climat : une taxe juste,
pas juste une taxe », éclaire sur la
sensibilité hétérogène des
ménages aux hausses des prix de
l’énergie. L’impact d’une telle
augmentation varie selon les re-
venus des familles, bien sûr, mais
aussi leur localisation et leurs
types d’équipement (chaudière,
voiture…) Ainsi, dans le cadre de
l’hypothèse testée d’une aug-
mentation limitée de la taxe car-
bone, 10 % des ménages parmi le
groupe des 10 % les plus modestes
perdraient plus de 220 euros de
pouvoir d’achat par an, tandis que
Le commerce extérieur, « l’angle mort »
décryptage
Marie Visot
mvisot@lefigaro.fr
« La puissance d’une nation se me-
sure par le commerce extérieur. »
En prononçant cette petite phrase,
début septembre, le ministre de
l’Économie, Bruno Le Maire, ap-
puie clairement là où cela fait mal.
Dans le rouge depuis vingt-deux
ans - au siècle dernier, donc - le
déficit de la balance commerciale
française en fait aujourd’hui le
plus mauvais élève de l’Europe.
En 2020, le trou a atteint 65,2 mil-
liards d’euros ; il est prévu qu’il se
dégrade en 2021 à 86 milliards
d’euros et plonge même à 95 mil-
liards en 2022. Des montants
abyssaux et inédits.
« Le commerce extérieur est
l’angle mort de la politique écono-
mique française », insistait le loca-
taire de Bercy, qui juge que l’amé-
lioration de la situation est une
4e trim. 1er trim. 2e trim. 3e trim.
2021
99,9
3e trim.
2021
102
99
93
Exportations
2e trim. 3e trim.
2021
-4,3
Services
marchands
Infographie
10 % ne seraient pas affectés. Un
phénomène classique d’inflation
rebattrait les cartes en mettant en
œuvre de puissants mécanismes
de redistribution des créanciers
vers les débiteurs.
Durant les Trente Glorieuses, ces
mouvements ont été favorables
aux classes moyennes. La donne a
toutefois changé. « L’endettement
est aujourd’hui beaucoup plus élevé
chez les ménages les plus aisés,
note Charles-Henri Colombier,
directeur de la conjoncture de
Rexecode. Parmi les 25 % de
Français les plus riches, 68 % sont
endettés, contre 23 % parmi les
25 % les plus modestes ». A. G.
priorité. Le retournement de si-
tuation est cependant compliqué,
à court terme du moins. De fait,
les piètres performances du com-
merce extérieur sont certes la
conséquence d’une mauvaise or-
ganisation de notre appareil ex-
portateur, et la création de « gui-
chets uniques » successifs par
chaque gouvernement n’a pas
réellement changé la donne -
nous comptons 132 000 entrepri-
ses qui vendent leurs produits
hors de nos frontières, quand ce
chiffre monte à 220 000 en Italie et
300 000 en Allemagne.
Une stratégie à l’étranger
Mais c’est loin d’expliquer tout le
problème, notre balance commer-
ciale ne dépendant pas d’une seule
politique économique. Elle est en
réalité le résultat d’orientations et
de choix faits depuis des années.
Au premier rang desquels une éco-
nomie qui s’est tournée vers les
services en même temps qu’elle se
désindustrialisait. La question de la
de restrictions, auront permis à pourcentage), grâce à la nette
l’économie ce spectaculaire re- hausse des exportations (2,3 %) et
dressement. « En France, la la quasi-stagnation des importa-
croissance s’appuie sur la très for- tions (0,1 %) », décrivent les éco-
te progression de la consommation nomistes de BNP Paribas.
des ménages (5 %) et des adminis- Les résultats du troisième tri-
trations publiques (3 %). Une fois mestre vont permettre au gouver-
n’est pas coutume, le commerce nement de rehausser son estima-
extérieur apporte également une tion de croissance pour 2021 et,
contribution positive (0,6 point de par ricochet, ses prévisions de
recettes fiscales et donc de déficit.
Il table actuellement sur une haus-
se du PIB de 6,25 % ; or, même
Plan de relance : 24 milliards déjà avec une croissance nulle durant
décaissés pour les TPe et les PMe les trois derniers mois de l’année,
la croissance progressera pour
l’ensemble de l’année de 6,6 %.
Le plan de relance à des aides directes
de 100 milliards d’euros profite (3 milliards pour l’emploi Difficultés
aux petites entreprises, et le et les compétences, d’approvisionnement
gouvernement tient à le faire 3,2 milliards d’impôts de Alors que les effets de la réouver-
savoir. À fin août, un an après production, 980 millions ture s’estompent, les économistes
l’annonce du lancement pour la numérisation des TPE tablent pour le quatrième trimes-
du plan, plus de 24 milliards PME…) et près de 12,5 milliards tre sur une croissance toujours
destinés aux TPE et PME d’euros sont des aides positive, mais plus modeste. Les
avaient été engagés sur indirectes, comme économistes de chez HSBC
l’enveloppe totale dédiée de MaPrimeRénov’ ou s’avancent par exemple sur un
40 milliards. Sur cette somme, la rénovation thermique modeste 0,8 %. « Les indicateurs
11,5 milliards correspondent des bâtiments publics. a. g. mensuels d’activité suggèrent que
la normalisation a déjà commencé,
4,1 %
Inflation Des nuages après
dans la zone euro
compétitivité y est bien sûr corré- en octobre
Florentin ColloMp £@fcollomp
lée, sujet qui n’a été pris que pro-
gressivement à bras-le-corps à
1,8 %
partir de 2014 - et donc sur lequel Pendant le fort ralentissement
nous avons accumulé un retard. Ce de la croissance américaine et
qui a certainement contribué au chinoise au troisième trimestre,
fait que les entreprises françaises, l’Europe s’est distinguée par la
bien plus que les autres, ont de-
puis longtemps adopté une stra-
Hausse solidité du rebond de son écono-
mie. La hausse du PIB a atteint
tégie consistant à s’implanter à du pIB en allemagne 2,2 % en moyenne dans la zone
l’étranger pour produire et vendre au troisième euro, après 2,1 % au deuxième tri-
leurs produits plutôt que de les ex- trimestre mestre et une récession les deux
porter depuis le territoire national. trimestres précédents. Elle a été
2,6 %
Le déficit commercial récurent principalement tirée par la
est aussi le résultat des médiocres vigueur de la consommation des
performances de nos expor- ménages et du tourisme, tandis
tations combinées à la vigueur de que les goulots d’étranglement
nos importations. La France est
particulièrement dépendante de
Hausse ont pesé sur l’industrie.
Cela explique en partie
produits venant de l’étranger, du pIB en Italie les performances géographiques
pour répondre à la demande des au troisième respectives. L’Autriche (+3,3 %),
consommateurs en biens d’équi- trimestre la France (+3 %), le Portugal
pement de toutes gammes, (+2,9 %) et l’Italie (+2,6 %) se
et à celle des entreprises en situent dans le peloton de tête. À
matériaux, composants, etc. Et l’inverse, l’Allemagne déçoit,
toute cette structuration de notre avec une hausse de 1,8 % seule-
économie ne changera pas du jour ment. La première économie de la
au lendemain. ■ zone euro avait, certes, connu
 le figaro samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021

entreprises l'événement 21

record Les loueurs tentés par le gigantisme

Jean-cHrisTOPHe marmara/Le FigarO

historique.
avance Chantana Sam, l’expert de
la maison en charge de la France.
Ce mouvement d’atterrissage
se perçoit déjà au troisième tri-
mestre dans le fléchissement des
investissements des entreprises
(-0,1 après 1,7 au second trimes-
tre), comme dans celui de la ges-
tion de leurs stocks. Au-delà de
l’effet mécanique d’essoufflement
du rebond estival, les entreprises
commencent à souffrir des pénu-
ries de matières premières et de
main-d’œuvre.
En septembre, selon une en-
quête de la Banque de France, la
part des chefs d’entreprise ju-
geant que leur activité a été péna-
lisée par des difficultés d’appro-
visionnement atteignait 56 %
dans l’industrie (après 51 % en
août) et 62 % dans le bâtiment
(après 61 %). Ces pénuries provo-
quent des hausses des prix des
matières premières, peu encore
répercutées en France. Malgré ces
difficultés, le moral des patrons
reste solide, la majorité d’entre
eux anticipant une amélioration
ALD, filiale de la Société générale, espère s’unir au leader de la LLD.
valérie collet £@V_Collet
automobile Ils achètent des
centaines de milliers de voitures
neuves aux constructeurs auto-
mobiles, gèrent les flottes géantes
C’est un de véhicules de société de grandes
chiffre qui et de moins grandes entreprises.
Le tout en assurant de généreux
est au-delà de dividendes à leurs actionnaires.
nos espérances Les loueurs longue durée, comme
Arval, LeasePlan et ALD, incon-
(…) L’objectif nus du grand public, sont devenus
que nous nous en quelques années des poids
lourds du monde de l’automobile
étions fixé était mais aussi de la banque, même si
de retrouver le métier de la location de voitures
ne s’imposait pas spontanément
ce niveau au aux financiers.
Mercredi, la Société générale a
mieux fin 2021 montré une nouvelle fois son inté-
ou peut-être rêt pour cette activité en annon-
début 2022
Bruno Le Maire,
» çant publiquement ce qui se mur-
murait depuis plusieurs mois : des
discussions sont en cours pour
Le néerlandais LeasePlan,
spécialiste de la location
longue durée (LLD), gère
de 510 millions d’euros, en baisse
de 9,6 %, et un résultat opéra-
tionnel de 1,32 milliard d’euros,
de véhicules ne comptait que
298 000 véhicules. De son côté,
LeasePlan était déjà en pole posi-
Ministre de L’éconoMie qu’ALD, sa filiale de leasing une flotte de 1,9 million en repli de 3,9 %. De son côté, tion avec 595 000 unités. Arval,
et des finances (1,7 million de véhicules en de véhicules dans 29 pays. LeasePlan a affiché 355 millions créé à la fin des années 1980,
LeasePLan
gestion), acquière LeasePlan, son d’euros de résultat net au premier occupait la deuxième place.
concurrent néerlandais (1,9 mil- semestre 2021. Les loueurs profi- Au fil des années, la gestion de
lion de véhicules), mis en vente tent à fond de l’effet de volume de flotte s’est imposée auprès des en-

3%
de leur activité en octobre. ■ par ses actionnaires (TDR Capital, leur flotte. Ils achètent, louent et treprises et les loueurs ont vu leur
le fonds souverain d’Abu revendent ensuite leurs véhicules métier évoluer vers un ensemble
Dhabi…). Bloomberg avait dévoilé d’occasion. Ainsi ils obtiennent à plus large de services de fournitu-
ce projet en juin dernier. l’achat les prix les plus bas auprès re et de financement de la mobili-
Quel intérêt une grande banque des constructeurs et ils tirent le té. Il y a un an, ALD avait présenté
Croissance comme la Société générale, ou meilleur parti du marché de l’oc- son plan stratégique à horizon
même BNP Paribas avec sa filiale casion en plein boom. 2025. Il visait 2,3 millions de
du PIB de la France Arval, peut-elle trouver à donner contrats à gérer dont 200 000 de-
au troisième davantage de poids à la location De la gestion de flotte vaient concerner des modes de
longue durée et au management aux mobilités transport alternatifs. La filiale de
trimestre de flottes pour les entreprises ? Si ALD parvenait à mettre la main la Société générale prévoyait d’of-
« Les filiales de LLD - location sur LeasePlan, l’ensemble ainsi frir une « gestion multimodale »,
longue durée - ont apporté aux formé représenterait une flotte de allant du vélo à la voiture électri-
banques des revenus supplémentai- 3,6 millions de véhicules sous fiée en passant par les transports
res importants au moment où la contrat. L’occasion d’obtenir les en commun et la trottinette. Le
banque de détail leur en apportait meilleures conditions auprès des tout géré grâce à une application.
moins. C’est un relais de croissance industriels pour électrifier leur Celle de BNP Paribas, Arval, a
et une activité peu volatile, expli- parc à l’heure de la transition elle aussi imaginé une offre de
que un bon connaisseur de ce mé- énergétique. mobilité à 360 ° en proposant de
tier. Les entreprises sous contrat L’activité de loueur de la Société devenir un conseil en services de
offrent des revenus récurrents avec générale, consolidée il y a vingt mobilité aux entreprises. Les
une bonne visibilité. » ans après le rachat de filiales de contrats comprenant la mainte-
Le métier est surtout rentable. Deutsche Bank, dont ALD, a pris nance, les assurances… Une acti-
En 2020, une année pourtant noi- de l’épaisseur grâce à une série vité bien ancrée dans le paysage
re, ALD a dégagé un résultat net d’acquisitions. En 2001, son parc bancaire. ■

Contre la DMLA, Novartis mise sur le jeu

sérieux du français Tilak Healthcare
« OdySight », certifié dispositif médical, est aujourd’hui
utilisé à domicile par un peu plus de 3 000 patients en France.
Guillaume mollaret
£@Newsdusud
L’entrée du ministère
de l’Économie et des Finances
(ancien pavillon des Douanes), à Paris (12e). pharmacie Ce sont deux mala-
OLivier raTeau/OLraT-sTOck.adObe.cOm dies incurables dont on peut
seulement tenter de freiner la pro-
gression. Pourtant, 100 % des pa-
tients suivis pour une dégénéres-
cence maculaire liée à l’âge
Se présentant sous la forme
d’un puzzle, dont la représenta-
tion change en permanence, ce
jeu disponible sur tablette et mo-
bile est en fait promu gratuite-
ment par Novartis, qui paye un
forfait d’usage annuel à l’éditeur
français. Celui-ci vient d’annon-
cer la levée de 7 millions d’euros
d’argent frais auprès des fonds
directrice innovation, data et digi-
tal chez Novartis France. Les cho-
ses vont bouger très vite sur le plan
réglementaire car on voit bien le rôle
important que jouent certaines ap-
plications non médicamenteuses, en
complément des traitements phar-
maceutiques, pour améliorer la re-
lation patient-soignant. C’est le
système dans son ensemble qui en

un fort rebond en Europe (DMLA) et une rétinopathie diabé-

un effondrement moindre que
d’autres pays en 2020, mais sa re-
prise est lourdement affectée par
les pénuries qui freinent l’indus-
trie. Le gouvernement d’Angela
Merkel a révisé mercredi en nette
baisse sa prévision de croissance
pour l’année à 2,6 % (contre
3,5 % attendus au printemps).
« Reprise terminée »
Pour le continent, cette perfor-
mance « signifie que la phase de
reprise est quasiment terminée
dans la plupart des pays de la zone
euro ». L’Espagne reste encore à la
traîne, toujours 6 % en deçà de
son PIB d’avant-crise.
Après cette embellie, des nua-
ges s’accumulent à l’horizon. Le
choc de l’inflation pour octobre, à
4,1 % dans la zone euro, pèse sur
le moral des ménages, qui crai-
gnent pour leur pouvoir d’achat
(lire ci-contre). Il entraîne aussi la
nervosité des marchés financiers,
tique (1 million de patients en
France) ne sont pas observants.
spécialisés Elaia, de Swen Capital
Partners, Matmut Innovation et
iBionext Growth Fund, le cofon-
sortira grandi. »
« Cet accompagnement, qui
concerne Tilak et deux autres
C’est notamment pour lutter dateur et investisseur historique entreprises en Europe, ne passe pas
Banque centrale européenne, qui contre cet abandon de suivi de cette société née du jeu vidéo. forcément par une prise de parti-
Le jeu OdySight,
écarte toute hausse des taux di- que le laboratoire suisse Novartis cipation en capital », prend soin de
disponible Un suivi à distance
recteurs à court ou moyen terme. sur tablette et mobile propose aux malades, via préciser Gaëlle Recoursé-Richard,
La hausse des prix est largement sur prescription leur ophtalmologiste, l’utilisation Innovant sur son mode de distri- alors que Novartis a repris l’an
due à l’envolée des coûts de l’éner- d’un ophtalmologiste, gratuite d’un jeu sérieux baptisé bution, le jeu développé par Tilak dernier l’éditeur américain de jeux
gie (+23,56 %). Elle frappe particu- contribue à télésurveiller OdySight édité par le français Tilak Healthcare est aujourd’hui utilisé à sérieux dédié à l’ophtalmologie
lièrement l’Allemagne, l’Espagne, l’évolution de la maladie Healthcare. Son rôle : contribuer domicile par un peu plus de 3 000 Amblyotech. « Ce mode de distribu-
la Belgique, l’Irlande et les Pays chez le patient. à télésurveiller l’évolution de la patients en France, sur un poten- tion fondé sur la promotion ne
baltes. TiLak HeaLTHcare maladie chez leurs patients. tiel de 1 million de malades. Certi- constitue pas une fin en soi, précise
« L’atterrissage contrôlé se fié dispositif médical, OdySight en- pour sa part Édouard Gasser, le
transformera-t-il en atterrissage voie, une fois chaque jeu achevé, directeur général de Tilak
brutal ? », s’interrogent Hélène un compte rendu au médecin spé- Healthcare. Nous souhaitons,
Baudchon et Guillaume Derrien, cialiste qui, à distance, peut juger comme en Allemagne, que les jeux
économistes chez BNP Paribas. de l’évolution de la maladie de son sérieux puissent être remboursés par
La peur d’une spirale inflationniste patient pour mieux réévaluer son l’Assurance-maladie (une réforme
pourrait enrayer le soutien de besoin en traitement médicamen- mise en œuvre début 2021, NDLR)
la consommation à l’activité. teux. Le geste de Novartis, qui et que les médecins soient incités
Combinés aux perturbations dans commercialise - au même titre que financièrement à les prescrire. »
les chaînes d’approvisionnement, Bayer - un traitement contre ces La France s’apprête-t-elle à
les risques se multiplient sur la pathologies, n’est donc pas phi- franchir le pas ? Le 29 juin
croissance. En revanche, « les lanthrope. « Le secteur de la santé dernier, Emmanuel Macron affir-
créations d’emplois continuent de est ultra-régulé. Aussi, notre logi- mait vouloir investir notamment
surprendre par leur vigueur », que est tant d’accompagner des dis- sur une médecine « préventive,
poursuivent les économistes de positifs pas forcément matures que personnalisée, prédictive, partici-
BNP Paribas, témoignant de l’opti- la transformation du système de pative et basée sur les preuves ».
misme des entreprises. Le taux de soins, lequel va s’orienter rapide- Des propos que les acteurs de
A

de plus en plus sceptiques sur chômage continue de reculer dans ment vers des solutions numériques, l’e-santé prennent pour un
les discours temporisateurs de la la zone euro, à 7,5 % en août. ■ explique Gaëlle Recoursé-Richard, encouragement. ■
 samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021 le figaro
22 enTreprises
Depuis la rentrée, les vols se multiplient. Malgré cela, la très grande majorité
des compagnies perdront encore de l’argent cette année.
jean-yves guérin £@jyguerin
transport C’est Eurocontrol,
l’organisation européenne pour la
sécurité de la navigation aérienne
en Europe, qui escompte désormais
un retour à la normale du trafic aé-
rien sur le Vieux Continent en 2023
contre 2025 il y a encore quelques
mois. C’est la compagnie austra-
lienne Qantas qui avance au
1er novembre la reprise de ses vols
Sydney-Londres prévue initiale-
ment le 1er décembre. C’est la com-
pagnie américaine Delta Airlines
qui gagne de l’argent au troisième
trimestre. Ou Air France-KLM qui,
sur la même période, réduit sa per-
te nette à 192 millions d’euros et
dégage un bénéfice opérationnel de
132 millions.
Depuis la rentrée, les signaux po-
sitifs se multiplient dans le transport
aérien. « Ça va un peu mieux, estime
Xavier Tytelman, spécialiste de
l’aéronautique au sein du cabinet de
conseil Starburst. L’activité profite
du reflux progressif de l’épidémie. »
Du coup, les compagnies envisagent
un futur légèrement moins sombre :
« Le quatrième trimestre a l’air pro-
metteur », affirme Ben Smith, di-
recteur général d’Air France-KLM,
qui va remonter la capacité en sièges
dans une fourchette de 70 à 75 % et
vise désormais un excédent brut
d’exploitation « légèrement positif »
sur toute l’année pour le groupe.
Des compagnies
entre la vie et la mort
De son côté, la compagnie améri-
caine United Airlines déploiera au
printemps prochain le programme
de vols transatlantiques le plus am-
bitieux de son histoire. Mais ce lé-
ger rebond ne fait pas oublier le
marasme dans lequel le secteur res-
te englué : selon Iata, qui fédère 290
compagnies aériennes, le nombre
de voyages en avion va bien re-
monter cette année (2,4 milliards
contre 1,8 milliard). Mais il n’at-
teindra que 53 % de l’activité
de 2019. Et le secteur table encore
en 2021 sur des pertes cumulées de
52 milliards de dollars qui s’ajoute-
ront au trou abyssal de 2020
(138 milliards de dollars). « Dix-
huit mois après le début de la pandé-
mie, la situation reste plus critique
qu’au plus fort de la crise de 2008
suscitée par la chute de Lehman Bro-
thers », relativise Xavier Tytelman.
Alain Battisti, président de la
Fnam (Fédération nationale de
l’aviation et de ses métiers), parle
d’« une descente aux enfers » pour
les transporteurs aériens français
qui s’attendent encore à une baisse
des revenus de 60 % cette année.
Partout dans le monde, il y a tou-
jours des compagnies entre la vie et
la mort comme la scandinave SAS.
Si tous les acteurs du transport
aérien ne sont pas logés à la même
enseigne, c’est que l’embryon de
reprise ne se fait pas au même ryth-
me suivant les marchés et les parties
du monde. D’abord, le redécollage
est beaucoup plus vigoureux cette
A
année sur les vols domestiques
(75 % de l’offre de 2019) que sur les
Le lent redécollage
du transport aérien
Les acteurs du transport vols internationaux (22 %). Et le
aérien ne sont pas logés trou entre court-moyen-courrier
à la même enseigne, d’un côté et long-courrier de
notamment avec une l’autre, va rester béant en 2022 avec
reprise plus vigoureuse, une activité domestique qui devrait
cette année, sur les vols
revenir à la normale et seulement
intérieurs que sur
les vols internationaux. 44 % des vols internationaux.
James Thew- Cette nouvelle donne fait plutôt
sTock.adobe.com le jeu des compagnes low cost (lire
ci-dessous). Mais, suivant les pays,
la dynamique est différente. Rien
de semblable en août entre le trafic
domestique qui plonge en Australie
(- 83 %), limite la casse aux États-
Unis (- 13 %) et dépasse les niveaux
de 2019 en Russie de 32 %. Du coup,
la compagnie low cost du russe Ae-
roflot, Podeba, est une des rares
Début de reprise contrastée des vols intérieurs suivant les pays
VARIATION DE LA DEMANDE DES VOLS DOMESTIQUES ENTRE AOÛT 2021 ET AOÛT 2019 EN %,
Les vols intérieurs
représentent en nombre mesurée en revenus par passagers kilomètres
de passagers 54 %
de l'activité en août 2021
Monde Australie Japon Chine
54 %
- 32,2
- 59,8 - 57
- 83,3
Source : Association internationale du transport aérien (IATA)
Les low cost sortent en position de force de la crise
Les low cost devant et les compa-
gnies généralistes derrière. Alors
que souffle un léger vent de reprise
dans les cockpits, l’écart se creuse
entre les transporteurs aériens à bas
coût et les autres. Selon l’Anker Re-
« Les low cost
redressent
port, qui suit à la loupe le trafic aé-
rien européen, Ryanair avait récu-
péré le 9 octobre plus de 90 % de
la tête plus son activité de 2019 sur le conti-
nent, devançant d’une tête Wizz-
vigoureusement Air. En comparaison, les compa-
car, avec leurs gnies nationales, appelées
petits prix, « legacies », faisaient pâle figure.
elles attirent Air France assurait près de 60 % de
son programme dans cette région,
la clientèle loisir Lufthansa et British Airways étaient
revenue plus aux alentours de 50 %. Même trou
vite dans béant sur le remplissage des avions :
les avions que en septembre, Ryanair affichait un
les voyageurs taux de 81 %, easyJet de 78,5 %
d’affaires
guillaume hue,
» quand SAS - une des rares généra-
listes à communiquer ses données
mensuellement - plafonnait à 53 %.
expert de l’aviation Au cours du troisième trimestre,
au cabinet de conseil
Air France-KLM était à 64,8 %.
archery
« Les low cost redressent la tête
plus vigoureusement car, avec leurs
petits prix, elles attirent la clientèle
loisir revenue plus vite dans les avi-
ons que les voyageurs d’affaires »,
souligne Guillaume Hue, expert de
l’aviation au sein du cabinet de
conseil Archery. Spécialistes de la
clientèle « corporate », les « lega-
cies » ont un autre talon d’Achille : à
la différence des compagnies à bas
coût qui ne font pas de vols
intercontinentaux, elles dépendent
beaucoup des vols long-courriers,
dans le monde à enregistrer une
hausse de son trafic domestique
(+ 42%) sur les huit premiers mois
de l’année.
Si les grandes compagnies améri-
caines sont en meilleure forme, c’est
d’abord grâce au redémarrage du
trafic aérien aux États-Unis, mais
pas seulement. « Elles ont fait plus
d’efforts que leurs homologues euro-
péennes pour améliorer leur produc-
tivité, estime Didier Bréchemier,
consultant spécialiste du transport
aérien au sein du cabinet Roland
Berger. Elles ont donc limité la mon-
tée en puissance des low cost. » Aux
États-Unis, un seul transporteur à
bas coûts, Southwest, s’est immiscé
31,9
États-
Inde Brésil Unis
Russie
- 13,2
- 20,7
- 44,8
Infographie
qui repartent moins vite que les vols
domestiques ou moyen-courriers.
Ainsi, les low cost ont de moins
mauvais résultats : après avoir été
dans le rouge à hauteur de 815 mil-
lions d’euros lors de l’année fiscale
2020-2021, Ryanair envisage, lors
de l’exercice en cours, de faire une
petite perte ou d’être proche de
l’équilibre financier. De son côté,
Lufthansa ne promet pas mieux
pour cette année que de réduire ses
pertes, qui avaient atteint le niveau
record de 6,7 milliards en 2020.
Toujours plus de lignes
« Et les low cost, qui étaient déjà dans
une meilleure forme financière avant
la crise que les “legacies”, ont encore
creusé l’écart depuis 18 mois », sou-
ligne Xavier Tytelman, spécialiste
du transport aérien au sein du cabi-
net de conseil Starburst. Fin sep-
tembre, easyJet n’avait que 1,1 mil-
liard de dette, contre encore
8,1 milliards pour Air France-KLM.
Grâce à cette force de frappe fi-
nancière, les transporteurs à bas
coût lancent quantité de nouvelles
lignes avec un seul objectif : gagner
des parts de marché sur le moyen et
court-courrier. Ainsi, alors qu’Aus-
trian Airlines, filiale de Lufthansa, a
annulé 3 200 vols en novembre et en
décembre à Vienne, Ryanair assure-
ra 2 000 vols par mois dans la capi-
tale autrichienne cet hiver, un ni-
veau jamais atteint. De son côté,
pour la première fois, WizzAir a des-
servi cet été, depuis Rome, 32 desti-
dans le groupe des quatre qui domi-
nent le marché. Il pointe à la
deuxième place derrière American
Airlines. En Europe, ce sont deux
low cost (Ryanair et easyJet) qui
mènent la danse devant Lufthansa,
Air France-KLM et IAG.
Les États-Unis rouvrent
leurs frontières
« À l’opposé, les compagnies qui
sont quasi exclusivement basées sur
le long-courrier comme Singapore
Airlines ou les compagnies du Golfe
ont du souci à se faire vu la lenteur du
redémarrage des vols intercontinen-
taux », estime Xavier Tytelman. Au
premier trimestre de l’exercice
2021-2022 terminé fin juin, Singa-
pore Airlines a encore perdu
409 millions de dollars.
Ces acteurs et, à un degré moin-
dre, les compagnies nationales oc-
cidentales qui misent aussi beau-
coup sur les long-courriers sont
soumis au régime de la double pei-
ne : en plus de la faiblesse du trafic,
elles souffrent de la désaffection des
voyageurs d’affaires qui faisaient le
gros de leurs marges. La visio-
conférence a remplacé avantageu-
sement pas mal de déplacements.
« Les voyages d’affaires reprennent
lentement », reconnaît Ben Smith.
Et, même quand la crise sanitaire
ne sera qu’un mauvais souvenir, les
professionnels ne se déplaceront
nations (Dubrovnik, Corfou…). Et
cet hiver, il ajoute 21 routes aux
100 existantes à partir de l’Ukraine.
Face à cette attaque en règle, les
compagnies nationales ne restent
pas les bras croisés. « Sur le court et
moyen-courrier, elles ont compris
qu’elles ne gagneraient pas la
guerre avec leur offre traditionnelle,
souligne Xavier Tytelman. Alors
elles boostent leur propre compagnie
low cost. » Ainsi, la compagnie
à bas coûts d’Air France-KLM,
Transavia, a repris plusieurs lignes
domestiques assurées jusqu’ici par
Air France (Paris-Biarritz, Nantes-
Marseille… et Paris-Montpellier
dans quelques jours). À partir de la
fin mars 2022, elle disposera aussi
de onze avions supplémentaires (61
au lieu de 50), ce qui lui permettra
notamment de doubler sa capacité
vers l’Espagne par rapport à 2019.
Une stratégie qui commence à
porter ses fruits : au troisième tri-
mestre, Transavia a généré un résul-
tat d’exploitation de 105 millions.
Eurowings, le low cost de Lufthansa,
va aussi muscler son offre avec, dès
ce mois-ci, des vols à partir de
Prague et, en mars 2022, des liaisons
à partir de Stockholm. De son côté,
British Airways négocie avec ses
syndicats pour lancer une compa-
gnie low cost court-courrier qui aura
pour base le deuxième aéroport de
Londres (Gatwick). Reste à savoir, si,
en matière de petits prix, les clients
préféreront l’original ou la copie. ■
j.-y. g.
air france-KlM
commence à
rembourser le Pge
Air France-KLM profite de son léger
mieux pour commencer à rembourser
son PGE (prêt garanti par l’État) de
4 milliards d’euros accordé en avril
2020. Le groupe va rembourser
aux banques prêteuses 500 millions
« dans les prochaines semaines »,
précise son directeur financier, Steven
Zaat. Et, alors que le transporteur
franco-néerlandais devait tout
rembourser d’ici à 2023, il a obtenu
des banques qu’elles rééchelonnent
la dette jusqu’en 2025. Il devrait
rembourser 800 millions en 2023,
1,3 milliard en 2024 et autant en 2025.
Néanmoins, le transporteur planche
toujours sur une recapitalisation.
« Nous attendons le bon moment »,
explique Steven Zaat. C’est une
nécessité pour le groupe, qui doit
remettre dans le vert d’ici à fin 2023
ses fonds propres, qui étaient négatifs
(- 5,4 milliards) fin 2020.
La conversion d’un prêt d’État
de 3 milliards (accordé en avril 2020)
en obligations et une première
augmentation de capital de 1 milliard
en avril dernier n’ont pas suffi
pour y parvenir. j.-y. g.
pas autant qu’avant. « Selon une
enquête que nous venons de réaliser,
nous nous attendons à une baisse de
24 % des voyages d’affaires en avion
en Europe et un recul compris entre
19 % et 36 % aux États-Unis », es-
time Didier Bréchemier.
Certes, les compagnies atteignent
le point mort d’un vol avec un taux
de remplissage plus faible grâce au
boom du fret aérien qui profite de
l’engorgement du transport mariti-
me de marchandises. Au troisième
trimestre, Air France a vu son chif-
fre d’affaires cargo bondir de
23,4 % à 835 millions d’euros. Mais
ce n’est pas suffisant pour compen-
ser la baisse des déplacements pro-
fessionnels. Et il n’est pas question
d’augmenter le prix des billets : en
période de reprise, cela risquerait
de faire fuir les clients. « Ces trans-
porteurs devront plutôt améliorer
encore la productivité des avions et
des personnels de six à dix points »,
poursuit Didier Bréchemier.
Du sang et des larmes en
perspective avec une seule bonne
nouvelle, mais de taille : suivant
l’exemple des États-Unis qui
rouvrent leurs frontières le 8 no-
vembre, beaucoup de destinations
(Thaïlande, l’île Maurice, Singapour,
Bali en Indonésie…) redeviennent
accessibles. De quoi redonner quel-
ques couleurs au segment long-
courrier encore bien pâle. ■
en bref
États-Unis :
L’infLation inqUiète
£ Les consommateurs
américains sont inquiets de
l’inflation et leur confiance s’est
érodée en octobre (à 71,7 points
contre 72,8 en septembre), selon
l’estimation finale de l’enquête
de l’Université du Michigan
publiée vendredi.
dU mieUx poUr
La constrUction
de Logements
£ La construction de logements
en France a retrouvé son niveau
d’avant-crise au troisième
trimestre. Sur les douze derniers
mois, la progression est
de 15,6 % par rapport à la même
période un an plus tôt, et de
8,2 % pour les logements qui
ont commencé à être construits,
a annoncé le gouvernement.
Et, par rapport à la période allant
de mars 2019 à février 2020,
la progression est de 1,3 %
pour le nombre de permis de
construction délivrés et
de -0,1 % pour le nombre
de constructions commencées.
Des chiffres toutefois « bien
en deçà » des bonnes années.
+@ » Se loger
en Île-de-France coûte
six années de revenus
www.lefigaro.fr/economie

Le canal de Panama enregistre un trafic record en 2021
La voie d’eau stratégique par laquelle transitent les porte-conteneurs géants n’a jamais accueilli autant de fret.
COMMERCE Les files d’attente qui
se prolongent depuis des mois
dans les grands ports asiatiques
comme à Los Angeles ou Long
Beach en Californie n’ont pas ra-
lenti le trafic maritime sur le canal
de Panama. Au contraire. La voie
d’eau stratégique de 80 kilomètres
de long qui relie l’Atlantique au
Pacifique n’a jamais accueilli
autant de marchandises. Sur l’an-
née fiscale qui vient de s’achever
(octobre 2020 à septembre 2021)
l’Autorité du canal a comptabilisé
Yves Saint Laurent redouble d’ambition
La filiale de Kering a transformé son modèle pendant la crise et devrait dépasser en 2021 son niveau de 2019.
YvEs-saint-laurEnt
Saint Laurent
sera plus solide
qu’en 2019,
car nous avons
accéléré
l’exécution de
notre stratégie
pendant
la crise »
Francesca Bellettini,
PDG Du GrouPe Yves
saint laurent
Les jeunes griffes de la mode africaine à la conquête du monde
Un nouveau fonds aide des marques comme Kente Gentlemen ou Umoja à se déployer.
Anne CheyviAlle £@AnneCheyvialle
AFRIQUE À 31 et 32 ans, Aristide
Loua et Lancine Koulibaly suivent le
même chemin. Nés et élevés en
Afrique, respectivement en Côte
d’Ivoire et en Guinée, tous deux ont
étudié et travaillé à l’étranger, l’un
aux États-Unis, l’autre en France.
Après une licence en mathémati-
ques à l’université de New York,
Aristide a entamé sa carrière
comme comptable dans une entre-
prise en Caroline du Sud. Son
master en actionnariat et statistique
en poche, Lancine s’est lancé dans
l’assurance. Il a passé plusieurs
années chez Groupama.
En cette fin octobre, ils se trou-
vent dans les locaux de l’Institut
français de la mode à Paris pendant
dix jours. Au programme : coa-
ching, suivi personnalisé, cours
thématiques sur la distribution, le
marketing, la finance et visites
d’entreprise. « Avant-hier, nous
étions aux ateliers de Louis Vuitton à
Asnières, hier chez 19M, le bâtiment
des métiers d’art de Chanel, nous
avons rencontré les acheteurs du
Printemps et, cet après-midi, nous
allons aux Galeries Lafayette. C’est
superintéressant ! », s’enthousias-
me Aristide, élégamment vêtu d’un
516 millions de tonnes ayant tra-
versé l’isthme à bord de 13 342 na-
vires, soit 36 par jour. Le trafic a
augmenté de 8,7 % par rapport à
l’année précédente. Même si
l’exercice 2019-2020 coïncide
avec la crise économique provo-
quée par le Covid-19 et un coup de
frein brutal au commerce mon-
dial, il représentait déjà un record
de trafic pour Panama.
L’augmentation du volume de
marchandises transporté ces dou-
ze derniers mois reflète la reprise
ivAn letessier£@IvanLetessier
lUxE Remontada en vue pour Saint
Laurent. « Si tout se passe comme
prévu, nous devrions dépasser en 2021
notre chiffre d’affaires de 2019, à plus
de 2 milliards d’euros », confie Fran-
cesca Bellettini, PDG d’une des filia-
les les plus performantes de Kering
(Gucci, Bottega Veneta, Balencia-
ga…). De bonnes ventes de Noël
pourraient faire oublier la pandémie.
L’an passé, les ventes ont plongé de
14 %, avant de rebondir de 45 % de-
puis janvier. Si d’autres maisons
(Louis Vuitton, Dior et Hermès en
tête) ont déjà largement dépassé leur
niveau d’avant crise, Saint Laurent
s’en rapproche. Cela n’est pas le plus
important. « Saint Laurent sera plus
solide qu’en 2019, car nous avons ac-
céléré l’exécution de notre stratégie
pendant la crise, explique-t-elle.
Nous avons arrêté les soldes et mis en
place un contrôle encore plus sélectif
de notre distribution. »
Saint Laurent a moins souffert que
d’autres de l’arrêt du tourisme
chinois depuis février 2020, le phé-
nomène le plus dur pour le luxe et les
boutiques d’Europe et d’Asie. La
marque est bien moins dépendante
de la clientèle chinoise. Et elle profite
de la relocalisation de ses achats en
Chine continentale, où elle venait
d’ouvrir des boutiques.
Les confinements n’ont pas
converti tous les clients du luxe au
streetwear. Privés de voyage et de
sortie, ils se sont récompensés en
Aristide Loua, créateur
de la marque Kente
Gentlemen.
paul-MariE akoh
de l’économie mondiale. Les deux de l’Autorité du canal, la progres-
tiers du fret qui transite entre les sion du tonnage s’explique par le
ports de Colon (Atlantique) et Pa- fait que la taille des bateaux y a
nama (Pacifique) proviennent ou considérablement grossi.
sont à destination des États-Unis.
La hausse de la demande chinoise Post-Panamax
en céréales américaines et l’aug- Depuis l’inauguration, en 2019, de
mentation de la demande asiati- la voie d’eau élargie et des nouvel-
que de gaz naturel liquéfié (GNL) les écluses, les plus gros porte-
acheminé par méthaniers ont lar- conteneurs, de la classe Post-Pa-
gement contribué à intensifier la namax (14 000 conteneurs sur un
fréquentation du canal. navire) l’empruntent. Ces mons-
Surtout, comme l’a rappelé à la tres des mers peuvent mesurer
presse Ricaurte Vasquez, le patron jusqu’à 366 mètres de long et
Le corner shop
Yves Saint Laurent,
à la Samaritaine.
s’offrant des vêtements en ligne. Saint Laurent et d’Anthony Vaccarello,
Après être restés à la maison en tee- ont vu leur vente s’accélérer. »
shirt et hoodie, ils ont eu envie de
s’habiller pour profiter de la réouver- Ouverture à Paris
ture des restaurants. « Le rôle du luxe Avant la pandémie, les ventes de
aujourd’hui est de répondre à une envie prêt-à-porter et de chaussures aug-
d’évasion, poursuit la dirigeante. mentaient moins vite que celle de
Pendant la pandémie, le casual wear sacs. Désormais, c’est l’inverse.
était de circonstance. Aujourd’hui, les « Nous avons remarqué une augmen-
gens veulent à nouveau sortir, s’ha- tation de nos clients très jeunes, ajoute
biller, être plus élégant. Cette envie de Francesca Bellettini. Voir dans nos
“dress-up” fait appel à un vestiaire boutiques des clients de 20 ans qui
plus sophistiqué, plus élégant. Des ca- achètent des cadeaux pour leurs amis
tégories comme les vestes, les tailleurs, me rend très fière, car la jeunesse cor-
qui correspondent à l’esthétique de respond à l’ADN de Saint Laurent.
blouson bomber bleu marine re- rique. Ses modèles empreints de
haussé d’un liseré jaune sur les po- « poésie, couleur et culture »
ches. Sa tenue est signée Kente comme il les définit, sont conçus à
Gentlemen, marque qu’il a lancée partir de pagnes tressés faits main
en avril 2017. Son projet entrepre- en Afrique de l’Ouest. « L’objectif
neurial est né du « mal du pays », est de valoriser le savoir-faire local,
d’une « crise d’identité » ressentie de se réapproprier la tradition en la
lorsqu’il vivait aux États-Unis et du rendant contemporaine », défend
goût pour la mode. « J’ai eu le déclic Aristide. Kente Gentlemen a voca-
en portant les chemises africaines tion à être porté aussi bien à Abid-
que ma mère m’envoyait », glisse le jan, Londres, Paris ou New York.
jeune homme. En 2015, il se décide,
rentre au pays, rencontre des arti- Baskets éthiques
sans ivoiriens et lance son petit bu- La même philosophie habite Lan-
siness avec 1 500 euros, aidé par cine Koulibaly, qui a créé Umoja
deux amis africains restés en Amé- (unité, en langue swahilie) une
marque de baskets éthiques, issue
de produits naturels (à partir de lait
d’hévéa, coton, lin et chanvre).
L’idée d’Umoja tient aussi de la
rencontre d’artisans locaux, burki-
nabés ou béninois. « On a découvert
une fabuleuse créativité s’inspirant
de la nature. Mais ils n’ont aucun
soutien et subissent la concurrence
des tissus de Chine vendus à bas coût
sur les marchés », déplore-t-il. Sa
petite entreprise compte aujour-
d’hui cinq salariés, qui travaillent
tous à distance entre Brest, Lyon,
Paris et Ouagadougou, plus un
sous-traitant portugais installé à
Porto, ville réputée pour son sa-
voir-faire dans la chaussure. Umoja
illustre ce nouveau monde post-
le figaro samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021
EntrEprisEs 23
46 mètres de large. La route mari-
time était auparavant limitée aux
Panamax, transportant « seule-
ment » 5 000 conteneurs. Cette
quête du gigantisme s’explique
par la recherche permanente
d’une meilleure rentabilité par les
armateurs.
Ricaurte Vasquez s’attend à une
poursuite de la progression du tra-
fic et table sur 535 millions de ton-
nes en 2022. Le canal de Panama
accueille environ 3,5 % du com-
merce maritime mondial. ■ F. n.-l.
roMualD MEiGnEuX/sipa
C’est très sain de parler à toutes les
générations »
Si Saint Laurent a conquis cette
nouvelle clientèle, directeurs de ma-
gasin et vendeurs ont changé leurs
méthodes. « Il est plus facile de ven-
dre un sac à un touriste chinois, qui va
le payer moins cher que dans son pays,
reconnaît un expert. Avec les clients
locaux, le processus de vente prend
plus de temps, et le conseil est plus in-
téressant. C’est plus épanouissant
pour les équipes : elles vendent moins
mais sont plus heureuses car elles font
plus de conseils. »
Covid, où tout se passe en numéri-
que. Enfin, s’il vend l’essentiel de
ses baskets via Instagram et son
site, Lancine compte bien passer au
Printemps qui commercialise de-
puis septembre les premières
baskets Umoja.
Les deux créateurs le reconnais-
sent, pour monter en puissance -
Aristide Loua travaille chez lui avec
une équipe de quatre couturiers - ils
ont besoin de financement et de re-
lais de distribution.
C’est tout l’intérêt du pro-
gramme d’accélération sur mesure
monté par le fonds d’investisse-
ment Birimian et l’IFM. Pour cette
première édition, dix marques afri-
caines émergentes, d’Afrique du
Sud, du Ghana ou du Nigeria ont été
sélectionnées par un comité d’ex-
perts parmi 35 dossiers.
« Les deux critères clés sont la
personnalité créative et la pérennité.
Il faut un minimum de chiffre d’affai-
res, au moins trois collections et une
existence sur les réseaux sociaux,
détaille le directeur général Xavier
Romatet. L’objectif est de les faire
passer du statut de créateur à celui
d’entrepreneur créatif. » 80 % de
ces marques affichent un chiffre
d’affaires supérieur à 50 000 dol-
lars. « Cette promotion incarne la
nouvelle garde créative africaine,
516
millions
de tonnes
de marchandises
ont transité
par le canal de Panama
en 2020-2021
Ce n’est pas le seul changement
impulsé par la dirigeante, qui a réuni
en octobre 2020 les dirigeants de la
maison à Château Latour, grand cru
classé de Bordeaux propriété des Pi-
nault. Objectif : les motiver et prépa-
rer l’après crise, en fixant des objec-
tifs à long terme encore plus
ambitieux que ceux d’avant. La PDG
a réduit la part des ventes en gros
(25 % en 2019). Ce chiffre va tomber
à 20 % cette année. La maison a signé
des contrats avec une sélection plus
de magasins partenaires en Europe et
aux États-Unis réduite de 40 %.
Résultat : le chiffre d’affaires en gros
a augmenté.
Même stratégie pour la vente en
ligne. « Nous avons convaincu tous
nos sites d’e-commerce de passer
d’un modèle wholesale à un modèle de
e-concession, où ils ne prennent pas
de risque d’inventaire mais sont ré-
munérés avec un pourcentage sur les
ventes, explique Francesca Bellettini.
De cette façon, nous avons un meilleur
contrôle de ce canal de distribution. »
Afin de poursuivre la nouvelle pério-
de de croissance, la dirigeante veut
« mettre l’accent sur toutes les caté-
gories de produits, y compris la
joaillerie, la soie et les ceintures… »,
délaissés ces dernières années. Et pas
question d’oublier la clientèle locale,
y compris en Europe de l’Ouest. Yves
Saint Laurent va ainsi ouvrir des ma-
gasins à Naples, Turin et Vérone (Ita-
lie) et surtout un flagship parisien sur
les Champs-Élysées en 2023. D’ici là,
les touristes chinois seront peut-être
revenus… ■
urbaine et digitalement tournée vers
le monde, témoigne Laureen
Kouassi-Olsson, PDG de Birimian, à
l’origine de l’initiative. Mais elle
reste fragile d’où la nécessité de ren-
forcer leurs fondamentaux et leur
apporter un appui opérationnel,
stratégique et financier. »
Laureen représente aussi cette
jeune génération qui mise sur le
continent. Passée par les grandes
banques d’affaires, Lehman Bro-
thers à Londres, puis Proparco, la
filiale de l’Agence française de dé-
veloppement dédiée au secteur
privé, et le fonds français Amethis,
la Franco-Ivoirienne s’est installée
à Abidjan pour créer la première
société d’investissement consacrée
aux marques de luxe et prêt-à-por-
ter d’Afrique. Birimian vise une
première levée de fonds d’ici à la fin
de l’année et prévoit d’investir
entre 30 000 euros et 3 millions
dans ces entreprises. Pour soutenir
les créateurs, Birimian a aussi signé
un partenariat avec WSN Dévelop-
pement, la société organisatrice des
salons pour la mode à Paris destinés
aux marques et distributeurs inter-
nationaux. Ces prochains mois,
Artistide et Lancine seront suivis
par un mentor avant un deuxième
A
séminaire IFM lors de la Fashion
Week au printemps 2022 à Paris. ■
 samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021 le figaro

24 EntrEprisEs

LE GRAND ThibAuLT
LANXADE
TÉMOIN PDG DU GROUPE JOUvE

PROPOS RECUEILLIS PAR

JaCques-Olivier Martin £@jocjom
qui a conduit peu à peu à un désinté-
rêt des entreprises et des salariés
« surmonté
Après avoir
pour ces produits. Il faut aujourd’hui
aller plus loin sur le partage de la va-
les problèmes
Thibault Lanxade, PDG du groupe leur en faveur des salariés. de pénurie
Jouve, publie Participation et inté- et d’inertie
ressement : le dividende salarié Que proposez-vous concrètement ?
(Éditions Télémaque), son mani- Je souhaite réconcilier les Français
liées au
feste pour un nouveau partage de la avec le capital, mieux les associer à redémarrage,
croissance. la création de valeur des entrepri- les industriels
ses. Pour y parvenir, rendons la
LE FIGARO. - Comment se portent participation obligatoire pour tou-
se
les PME et les jeunes entreprises
en cette sortie crise ?
L’ex- tes les entreprises de plus de 11 sala-
riés, contre 50 aujourd’hui, et sim-
retrouveront
au printemps
Thibault LANXADE. - Les PME sont
globalement en forme. Elles ont bé-
vice-président plifions son mode de calcul. En
supprimant le ½ au début de la for-
prochain
néficié d’aides publiques considéra-
du Medef mule de la participation, nous pou- avec leur
bles qui leur ont permis de traverser vons mécaniquement doubler son pleine
la crise, et aujourd’hui elles sont
portées par une reprise puissante
propose d’élargir montant qui est aujourd’hui en
moyenne de 1 500 euros par salarié.
capacité de
production
sauf encore dans certains secteurs.
et de renforcer Je défends aussi le versement obli-

Pour l’avenir, je suis prudent. La
croissance va ralentir en 2022 ce qui
ne sera pas sans poser des problè-
mes notamment aux entreprises
plus industrielles. Après avoir sur-
monté les problèmes de pénurie et
d’inertie liés au redémarrage, elles
se retrouveront au printemps pro-
chain avec leur pleine capacité de
production alors que l’économie
GillEs BAssiGnAC/DivErGEnCE
gatoire de la participation lors- alors que
les dispositifs qu’une entreprise verse un dividen-
de. Et à partir de là, je propose de
l’économie
d’intéressement renommer la participation en divi-
dende salarié, ce qui au passage rap-
décélérera »
ThIbAULT LANXADE.
et de proche le salarié de l’actionnaire.
J’espère que cela permettra d’éviter
participation. de crier au vol lorsqu’une entreprise
verse un dividende. Je suis aussi en
faveur d’un assouplissement des rè-

« allons plus loin sur

décélérera. gles de déblocage du PEE pour les
petits salaires.

Bio
Faut-il redouter des difficultés
lorsqu’il s’agira de rembourser les Ne serait-il pas plus simple d’ouvrir

le partage de la valeur
aides d’État et notamment les prêts le capital aux salariés ?
garantis par l’État, les fameux PGE ? Aujourd’hui, je constate que le capi- eXPress
Beaucoup de PME ne voudront pas tal des entreprises de taille intermé-
1996
ou n’auront pas la capacité de plei- diaire et des PME est cadenassé. Pour
Il commence
nement rembourser ces prêts. Il se protéger, notamment vis-à-vis

en faveur des salariés »

n’est pas exclu non plus que face à un
niveau d’endettement élevé de ces
entreprises, les banques refusent de
leur prêter plus. Il n’est pas impossi-
ble non plus que certaines entrepri-
ses soient tentées de déposer le bilan
pour ne pas rembourser leur PGE,
puis de relancer une nouvelle activi-
té. Pour toutes ces raisons, je pense
que le gouvernement va devoir met-
tre en place des mécanismes qui per-
mettront de faciliter la transforma-
tion d’une partie de ces mécanismes
d’aide en fonds propres ou en quasi-
fonds propres de manière simple.
Quels sont les défis auxquels
les entreprises sont confrontées
en cette sortie de crise ?
Ils sont nombreux, mais je crois que
la pénurie de main-d’œuvre est le
plus préoccupant d’entre eux. C’est
partout le cas mais la France a peut-
être plus de handicaps qu’ailleurs.
Aux États-Unis, où nous recrutons
1 500 personnes, je constate que les
Américains acceptent de changer
d’État pour un travail. Dans notre
pays, une récente étude montre que
les salariés sont difficilement flexi-
bles au-delà de 20 kilomètres. Au-
delà des freins à la mobilité, nous
sommes confrontés particulière-
ment dans les nouvelles technolo-
gies à un manque de compétences
disponibles malgré des salaires éle-
vés. Tout l’enjeu de la réforme de
la formation professionnelle était
d’adapter l’employabilité des sala-
riés au plus près des exigences des
entreprises. Il est clair que nous n’y
sommes pas encore parvenus.
Vous avez mené, à la demande
du gouvernement, une mission
sur l’intéressement et
la participation et venez de publier
un manifeste pour un nouveau
partage de la croissance dans lequel
vous prônez la création du
dividende salarié. De quoi s’agit-il ?
Le partage de la valeur est un sujet
qui me tient à cœur de longue date.
En 2018, j’ai mené à la demande du
gouvernement une mission sur l’in-
téressement et la participation qui a
nourri l’évolution de la loi Pacte. J’ai
la conviction que nous pouvons aller
beaucoup plus loin sur ce terrain.
C’est pourquoi j’ai écrit ce manifeste
dans lequel je fais des propositions
qui, j’espère, alimenteront le débat
public au cours de cette campagne
présidentielle et que les candidats
s’en empareront.
sa carrière chez
de l’administration ou du fisc, les ac-
Shell. Il devient PDG
tionnaires dirigeants recourent à des
de Gazinox en 2004.
montages complexes. Il n’est pas
2015
rare qu’ils dissocient les actifs de
Il prend la fonction
l’entreprise de la propriété intellec-
de vice-président
Quelles sont vos propositions ? tuelle ou qu’ils logent l’immobilier
en charge des PME
Elles partent d’abord d’un constat. dans une SCI. Dans ce contexte,
au sein du Medef.
L’intéressement est créé par le l’entrée au capital est complexe et
2017
Conseil national de la Résistance pas forcément intéressante pour les
Il devient PDG
avec l’idée de mieux associer les col- salariés. Le partage de la valeur par
du groupe Jouve.
laborateurs à la performance de le dividende salarié est bien plus
2018
l’entreprise. C’est un salaire défisca- simple, plus pertinent et probable-
Il est nommé
lisé et désocialisé qui repose sur des ment plus sûr. L’ouverture du capi-
ambassadeur
objectifs négociés entre la direction tal est plus simple et donc plus envi-
de la mission
et les salariés. En 1967, le général de sageable lorsqu’une entreprise
sur l’intéressement
Gaulle crée la participation, qui démarre ou déjà coté. C’est le cas des
et la participation par
consiste dans son esprit à donner start-up technologiques qui sont
le gouvernement.
une partie de la création de valeur nombreuses à ouvrir largement le
aux salariés au travers d’un calcul capital en contrepartie de salaires
très complexe, mais qui s’apparente plus modestes au démarrage. C’est
à un dividende salarié puisqu’il est une autre approche qui fonctionne
déterminé en fonction du bénéfice bien lorsque l’entreprise est un suc-
fiscal net. Au fil des années, les gou- cès. Pour la très grande majorité des
vernements successifs ont instauré entreprises, la meilleure option est le
des taxes et fait varier les règles, ce dividende salarié. ■

LES DÉCIDEURS PAR Carole Bellemare www.lefigaro.fr/decideurs

â CédriC Prouvé Joann Cheng : nouveau défi pour â ChristoPhe Mélard

Estée Lauder
Le Français, président d’Estée Lauder Interna-
tional depuis 2003, quittera le groupe de cos-
métique américain en juin prochain pour pren-
dre sa retraite.
â Florent Bonaventure
Sciences Po
Après avoir œuvré au cabinet Covid du ministère
des Solidarités et de la Santé, ce Sciences Po
agrégé d’histoire prend la direction exécutive
de l’École du management et de l’innovation de
Sciences Po. De 2006 à 2018, il y a déjà occupé
diverses responsabilités dont la direction de la
communication de Campus France.
â Xavier roChe
SNCF
À la SNCF depuis 2013, cet ancien de
l’armée de l’air et magistrat à la Cour
des comptes passé en 2006 dans le
transport (Alstom, ministère du Logement et de
la Ville, RFF) change de voie : il est désormais
directeur de la sûreté ferroviaire du groupe. Il
arrive à un moment clé avec la prochaine
ouverture à la concurrence et les grands événe-
ments sportifs de 2023 et 2024. En 2015, il avait
A
le chinois Fosun avec lanvin Group
Elle avait été propulsée sur
le devant de la scène lors du
rachat en 2018 de Lanvin,
dont elle avait pris la prési-
dence du conseil d’admi-
nistration mais aussi la direction générale par
intérim après le départ du dirigeant. Joann
Cheng a su en cinq ans s’imposer non seule-
ment auprès du président du conglomérat
chinois Fosun, Guo Guangchang, mais aussi
sur la planète luxe. Aujourd’hui, la création du
nouveau Lanvin Group, qu’elle vient tout juste
de porter sur les fonts baptismaux, témoigne
de sa volonté et de celle du big boss de passer à
l’offensive dans le secteur à l’international.
Arrivée en 2016 après avoir œuvré notamment
dans l’audit chez KPMG, chez General Electric,
dans le capital-investissement et comme
directrice financière du fabricant de drones
DJI, la diplômée en économie et finance de
l’université de Shanghaï et de la China Europe
International Business School a trouvé chaus-
sure à son pied et s’est peu à peu prise au jeu de
la mode haut de gamme. Un monde qui lui
était pourtant étranger. C’est par les finances
qu’elle avait rallié le groupe privé Fosun, coté à
la Bourse de Hongkong. Un géant qui « a tou-
jours misé sur les secteurs à forte croissance et
réussi à créer des écosystèmes axés sur les
Mellerio
Cet ex-directeur financier d’Yves
chinois est présent dans l’immobilier, les pro- Saint Laurent, puis PDG de Sergio
duits pharmaceutiques, les soins de santé, la Rossi, chez Kering, prend la direc-
gestion de patrimoine, les assurances et le tou- tion générale de la vénérable maison de
risme avec notamment le Club Med. joaillerie de la rue de la Paix. Après avoir aussi
dirigé le joaillier bijoutier Christian Bernard, le
Forte notoriété en Chine diplômé de Neoma avait roulé pour le Groupe
Le luxe est la plus jeune de ses activités. En une Bruxelles Lambert, puis June Partners.
poignée d’années, avec Fosun Fashion Group,
Joann Cheng a notamment investi chez le
tailleur italien Caruso, la marque allemande de â Marie-louise
sportswear Tom Tailor, les bijoux fantaisie
Folli Follie, le spécialiste du skinwear Wolford,
de ClerMont-tonnerre
la griffe féminine américaine St. John Knits et Chanel
en juin dernier le chausseur Sergio Rossi, Après cinquante ans de maison, la directrice
acquis à 100 %. Mais le rachat de Lanvin reste générale relations extérieures se retire. À son
son plus beau fait d’armes, la griffe ayant une actif notamment, la création des services re-
très forte notoriété en Chine. Cette femme lations publiques et presse des divisions haute
volontaire et souriante a joué un rôle clé dans couture, prêt-à-porter, parfums et cosméti-
son rachat, son redressement et son redéploie- ques, joaillerie et horlogerie.
ment, et on l’a souvent vue au premier rang
des défilés maison. Celle qui croit aux marques
à l’ADN fort voit loin. « Lanvin Group est en â didier MiChaud-daniel
passe de devenir l’un des plus grands acteurs du Bureau Veritas
secteur », dit celle qui planche sur une nouvelle
image de marque et un nouveau site internet. Le groupe de certification et de
Pour aller plus vite, elle va pouvoir compter contrôle de la qualité, qui vient d’an-
sur la puissance de feu de trois nouveaux noncer une forte croissance au troi-
investisseurs entrés dernièrement au capital. sième trimestre, conforte le directeur général
Un tour de table qui porte déjà à 1 milliard de dans son fauteuil. L’ancien CEO monde d’Otis

été chargé par Guillaume Pepy de la création de consommateurs », note-t-elle. Le conglomérat dollars la valorisation de Lanvin Group. C. B. verra son mandat renouvelé en février pro-
la direction des services partagés. chain.
 le figaro samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021

Marchés 25

EDF perd 400 millions questions

d’argent avec
en spéculant sur le Comment mettre son épargne
marché de l’électricité au service de la planète ?
GESTION Début novembre se
déroulera la conférence des
D’après une étude réalisée par
l’ONG InfluenceMap, la majorité
L’électricien a sanctionné son trader à l’origine de cette Nations unies pour le climat des fonds « climat » ne sont pas
(COP26) à Glasgow, en Écosse. alignés avec les objectifs de
« paume » historique et a diligenté une enquête interne. Difficile de mobiliser le monde l’accord de Paris, alors qu’ils
entier, alors que les 196 pays prétendent l’être.
signataires de l’accord de Paris Pour permettre aux investisseurs
garantie réclamés au trader aug- Le débouclage de la position du de 2015 peinent encore à s’en- d’y voir plus clair, l’État français a
Guillaume GuichaRd mentent à chaque fluctuation à la trader d’EDFT n’est pas passé ina- tendre sur les stratégies à mettre en développé deux labels publics : le
£@guillaume_gui
hausse. perçu sur les marchés : début octo- œuvre pour limiter à moins de 2 °C label ISR, porté par le ministère de
Sa position devenant intenable, le bre, l’envolée des cours en effet était la hausse de la température l’Économie, et le label Greenfin,
ÉNErGIE La flambée des prix de trader d’EDF a dû abandonner son telle que plus personne ne voulait moyenne de la planète d’ici à la fin soutenu par le ministère de la
l’énergie n’en finit pas de faire des pari au pire moment : dans les pre- acheter d’électrons. « Les marchés du siècle. Les épargnants sensibles Transition écologique. Ce dernier
victimes. Même les géants du sec- miers jours d’octobre, lorsque le ont été pris de stupeur et les fournis- aux problématiques environne- est plus exigeant sur le climat : les
teur peuvent y perdre des plumes, marché du « peak » (pointe, en an- seurs d’électricité, qui se fournissent mentales sont pourtant en mesure fonds l’ayant décroché ont la
tel EDF. Selon plusieurs sources au glais), selon le jargon anglo-saxon sur les marchés, ne voulaient plus d’apporter leur pierre à l’édifice. particularité d’exclure les entre-
fait du dossier, la filiale d’activité de en vigueur sur les marchés, a atteint faire d’offres à leurs clients profes- prises opérant dans le secteur
marché de l’électricien, EDF Tra-
ding (EDFT), aurait essuyé une perte
de l’ordre de 400 millions d’euros
début octobre. Une « paume » his-
torique dans le secteur, dans un
des niveaux records, aux alentours
de 200 euros le mégawattheure. À la
même époque l’année dernière, il ne
cotait qu’à 50 euros maximum.
«Le marché de l’électricité est re-
sionnels, raconte un courtier. Cette
semaine-là, tout le monde a levé le
stylo en attendant que ça se calme. »
Or, malgré ce gel des transactions
entre fournisseurs et clients pro-
1 Quels fonds privilégier ?
La solution la plus simple est
de se tourner vers les familles
de fonds dits « climat », parfois
dénommés « bas carbone » ou
nucléaire ou celui des énergies
fossiles.
Autre précaution à prendre avant
de souscrire à un fonds « climat » :
vérifier son classement dans le
contexte de marché jamais vu, avec lativement illiquide en situation fessionnels, le marché ne s’est pas encore « transition énergétique ». cadre de la nouvelle régle-
des prix quatre fois plus élevés que extrême, explique une source de calmé. Au contraire, le prix de la En général, les portefeuilles de ces mentation européenne SFDR,
d’habitude et des variations brus- marché. Le moindre mouvement « pointe hivernale France » a conti- fonds sont majoritairement devenue désormais obligatoire
ques de grande ampleur. provoque des variations très fortes. nué de s’envoler. Tous ceux qui constitués d’actions de sociétés pour les sociétés de gestion, seuls
« L’entreprise ne commente jamais Le prix du gaz est passé en quelques avaient les yeux rivés sur les cours à suivre sur mettant en œuvre une véritable les produits classés « article 9 » se
ses activités de trading », indique un jours de 90 à 160 euros, entraînant l’ont compris : un très gros acteur lefigaro.fr/bourse politique de réduction des fixant des objectifs précis en
porte-parole d’EDF, tandis que le marché de l’électricité dans son était en train d’acheter ce produit au émissions de gaz à effet de serre. termes d’investissement durable,
Bercy refuse de commenter le sujet. sillage. Dès lors, la position de ce tra- plus cher, à son désavantage, parce n Les matières C’est par exemple le cas de MAM ce qui est le cas d’environ
EDF, qui publie le 10 novembre ses der d’EDFT n’a plus eu de sens. De qu’il y était contraint. Ses achats ali- premières et les Transition Durable Actions. « Nous 400 fonds distribués en France, se-
résultats du troisième trimestre, ne plus, la taille de sa position était bien mentant encore davantage la hausse produits dérivés privilégions les entreprises opérant lon la société d’analyse Quantalys.
devrait pas avoir à évoquer sponta- trop grosse pour être maintenue. » du cours. des transformations profondes de

3
nément le dossier. Et pour cause : Une autre source d’ajouter : «Dans Il n’y a pas dix géants de l’électri- n Le crible leur modèle économique afin Pour quels impacts ?
cette perte aurait été compensée par un environnement aussi volatil, cité sur le marché français. Tous les des sicav d’optimiser leur consommation Certains gérants vont plus
des gains sur le marché. quand on a de grosses positions, il n’y yeux se sont tournés vers EDF. À et des fonds énergétique et de réduire leur loin pour prouver le bien-
Le pari d’un trader d’EDFT a mal a pas besoin d’être un Kerviel pour raison : l’entreprise, plus connue du empreinte environnementale, tout fondé de leur politique de gestion.
n Les cotations
tourné. Celui-ci spéculait sur une perdre beaucoup. » grand public pour ses réacteurs nu- en préservant les ressources Ils ont développé des fonds « à
baisse à venir de l’électricité dite cléaires que pour son activité très en direct naturelles », indique Guillaume impact », dont la finalité est de
« de pointe hivernale France » (pro- Le débouclage n’est pas secrète de trading, était bien à l’ori- sur iPhone Chaloin, responsable des gestions mesurer les progrès accomplis par
duite et livrée entre 8 heures et passé inaperçu gine du mouvement. « Il y a eu des actions chez Meeschaert Amilton les entreprises dans lesquelles
20 heures du lundi au vendredi). Or, La position du trader d’EDFT aurait pertes très importantes sur le tra- AM. ils investissent. « Nous publions
depuis début septembre, les prix ne été rendue d’autant plus intenable à ding, mais cela a été plus que com- En suivant cette même logique, chaque année un rapport montrant
font au contraire que grimper, à des cause d’achats techniques de gran- pensé par des gains, assure au Figaro certains gérants n’hésitent pas à l’intensité carbone du portefeuille
niveaux jamais vus. En bonne logi- des entreprises du secteur, dont… une source interne à EDF. L’extrême diversifier leurs investissements de notre fonds MAM Transition
que, le trader aurait pu conserver sa EDF France. « Ces mouvements ont volatilité des marchés a mis les modè- sur d’autres classes d’actifs, en se Durable Actions », indique
position et attendre patiemment fait grimper ce marché spécifique de la les en difficulté. » positionnant par exemple sur des Guillaume Chaloin.
que les prix s’assagissent. Ce n’était “pointe hivernale France” par rapport L’histoire rappelle celle d’Einar obligations dites « vertes », Même s’il n’existe pas encore de
pas si simple, car il fallait compter aux autres, du fait de la taille énorme Aas, ce trader norvégien multimil- destinées à financer un projet ou réglementation officielle enca-
sur les « appels de marge ». Lors de la position d’EDF Trading », lionnaire, qui a perdu 100 millions une activité bénéfique à la transi- drant ces fonds dits à impact,
d’un pari à la baisse, les dépôts de décrypte un acteur de marché. d’euros en 2018 sur le marché euro- tion énergétique et écologique. France Invest (Association des in-
péen de l’électricité. Si la perte est Ainsi, comme l’indique Miguel vestisseurs pour la croissance) et le
quatre fois supérieure, elle ne de- Rodrigues, cogérant du fonds Ecofi Forum pour l’investissement res-
vrait pas avoir de conséquence fi- Agir pour le climat, chez Ecofi, ponsable (FIR) en ont récemment
nancière pour l’électricien français. « nous avons par exemple acheté des publié une définition adoptée par
« La situation d’EDF est tellement titres obligataires émis par le 60 sociétés de gestion. Elle se doit
avantageuse en ce moment grâce à constructeur automobile allemand de répondre à trois conditions :
son rôle de producteur, que même si Daimler dont l’investissement a l’intentionnalité (la volonté de
EDF Trading était très mauvais, ils servi à soutenir la transformation de contribuer à générer un bénéfice
gagneraient de l’argent », observe leur outil de production pour la social ou environnemental en
gstockstudio - stock.adobe.com

un fin connaisseur du marché. fabrication de véhicules à moto- même temps qu’un retour finan-
Cette affaire a toutefois eu des risation électrique mais aussi cier), l’additionnalité (ses activités
conséquences en interne. Le trader hydrogène. » augmentent l’impact net positif) et
français à l’origine de la perte a ainsi enfin la mesure de l’impact.
vu ses accès aux logiciels de marché
suspendus, et une procédure de li-
cenciement serait engagée à son
encontre. Son manager, lui, a été
mis sur la touche, le temps de ré-
2 Comment les identifier ?
Au-delà du critère de la
performance financière, les
épargnants ne doivent pas investir
les yeux fermés dans n’importe
Il existe également des ETF
(Exchanged traded funds), notam-
ment chez BNP Paribas AM, qui
répliquent des indices boursiers
« verts », alignés avec les objectifs
pondre à l’enquête interne. Une quel fonds se targuant d’agir de l’accord de Paris, qualifiés de
source chez EDF précise qu’« il n’y a contre le réchauffement clima- « Paris Aligned Benchmark -
pas eu de licenciement chez EDF tique : les risques de « green- PAB ». ■
Le siège d’EDF, dans le quartier d’affaires de la Défense, à Courbevoie. Trading, à ce stade ». ■ washing » sont réels en la matière. Romain Thomas

La séanCe Du vEnDrEDi 29 oCtobrE

LE CAC JOUR %VAR. +HAUTJOUR +BAS JOUR %CAP.ECH 31/12 JOUR %VAR. +HAUTJOUR +BAS JOUR %CAP.ECH 31/12 LES DEVISES MONNAIE 1 EURO=
L’OR JOUR VEILLE 31/12
AUSTRALIE ................................................................................
DOLLAR AUSTRALIEN 1,5455 AUD
AIR LIQUIDE ........................... 144,24 +0,45 144,24 142,22 0,173 +7,44 MICHELIN ..............................................
135,7 +0,3 135,9 134,05 0,182 +29,3 CANADA ................................................................................
DOLLAR CANADIEN 1,4383 CAD
COTATION QUOTIDIENNE ASSURÉE PAR LOOMIS-CPOR
AIRBUS .............................................. 110,6 -1,25 112,9 109,88 0,209 +23,19 ORANGE ..............................................9,435 +0,01 9,455 9,37 0,366 -3,07
www.cpordevises.com
GDE BRETAGNE ................................................................................
LIVRE STERLING 0,8449 GBP
ALSTOM ..............................................30,78 -0,23 31,01 30,54 0,254 -33,96 PERNOD RICARD ........................... 198,7 -1,19 199,5 196,65 0,255 +26,72 HONG KONG ................................................................................
DOLLAR DE HONG KONG 9,0563 HKD
LINGOT DE 1KG ENV .....................................................
49890 49990 -0,22
JAPON ................................................................................
YEN 132,62 JPY
NAPOLEON ..................................................... 299,4 296,9 -1,8
ARCELORMITTAL SA ........................... 29,325 +1,3 29,35 28,66 0,429 +55,32 PUBLICIS GROUPE SA ..................... 57,94 +1,61 58,32 56,78 0,389 +42,15 PIECE 10 DOL USA .....................................................
859,75 859,75 -3,94
AXA .............................................. 25,16 +3,05 25,16 24,31 0,411 +28,95 RENAULT ..............................................31,06 +0,45 31,215 30,625 0,343 -13,14 SUISSE ................................................................................
FRANC SUISSE 1,0611 CHF PIECE 10 FLORINS .....................................................
306,9 306,9 -5,42
ETATS-UNIS ................................................................................
DOLLAR 1,1645 USD PIECE 20 DOLLARS .....................................................
1664,75 1601 -4,87
BNP PARIBAS ACT.A ........................... 57,9 +0,77 58,54 57,16 0,264 +34,32 SAFRAN ..............................................116,04 +1,72 119,08 115 0,287 +0,08
TUNISIE ................................................................................
DINAR TUNISIEN 3,271 TND PIECE 20F TUNISIE .....................................................
305 300 -3,79
BOUYGUES ..............................................35 +1,16 35,11 34,62 0,214 +4,01 SAINT GOBAIN ........................... 59,56 -2,18 60,46 57,86 0,366 +58,83 MAROC ................................................................................
DIHRAM 11,103 MAD PIECE 5 DOL US (H) .....................................................
440 440 -3,3
CAPGEMINI ..............................................
201,3 +1 201,6 196 0,427 +58,75 SANOFI ..............................................86,43 +0,51 86,53 85,26 0,207 +9,82 TURQUIE ................................................................................
NOUVELLE LIVRE TURQUE 11,1393 TRY PIECE 50 PESOS MEX .....................................................
1919,75 1899,75 -1,55
CARREFOUR ..............................................
15,655 +0,8 15,655 15,38 0,281 +11,58 SCHNEIDER ELECTRIC ..................... 148,9 0 148,96 144,98 0,186 +25,87 EGYPTE ................................................................................
LIVRE EGYPTIENNE 18,22 EGP PIECE FR 10 FR (H) .....................................................
170,9 170 +2,4
CREDIT AGRICOLE ...........................13,04 +0,68 13,142 12,878 0,153 +26,36 SOCIETE GENERALE ........................... 28,835 +1,76 29,17 28,11 0,525 +69,4 CHINE ................................................................................
YUAN 7,4488 CNY PIECE SUISSE 20F .....................................................
296,9 290,2 -1
INDE ................................................................................
ROUPIE 87,183 INR
PIECE LATINE 20F .....................................................
296,9 296,9 -2,66
DANONE ..............................................56,35 +0,55 56,35 55,66 0,256 +4,82 STELLANTIS NV ........................... 17,238 -0,38 17,276 16,98 0,093 +34,22 SOUVERAIN ..................................................... 370,9 370,9 -2,14
DASSAULT SYSTEMES ........................... 50,38 +0,76 50,45 49,33 0,124 +51,61 STMICROELECTRONICS ..................... 40,915 -0,97 41,09 40,215 0,278 +35,12 ALGERIE ................................................................................
DINAR ALGERIEN 158,91 DZD KRUGERRAND .....................................................
1649,75 1645 -1,49
ENGIE .............................................. 12,296 -0,79 12,448 12,284 0,195 -1,79 TELEPERFORMANCE ........................... 361,1 +0,11 361,4 357,5 0,27 +33,1
ESSILORLUXOTTICA ........................... 178,9 +3,49 179,1 174,58 0,218 +40,26 THALES ..............................................79,66 -1,07 80,72 79,42 0,183 +6,36
VALEURS LIQUIDATIVES EN EUROS (OU EN DEVISES), HORS FRAIS
EUROFINS SCIENT. ........................... 101,94 -0,93 103,44 101,62 0,252 +48,54 TOTALENERGIES ...........................43,37 +0,17 43,915 43,12 0,296 +22,86 VALEUR DATE DE
HERMES INTL ........................... 1370,5 +0,51 1370,5 1340 0,05 +55,81 UNIBAIL-RODAMCO-WE ..................... 61,81 -0,67 63,85 61,24 0,672 -4,29
retrouvez
LIQUID. VALORISAT.
Cybèle Asset Management
KERING ..............................................648,2 -0,41 648,6 640,5 0,146 +9,05 VEOLIA ENVIRON. ........................... 28,23 -1,84 28,76 28,16 0,285 +41,08 37 av. des Champs-Elysées
75008 Paris

L'OREAL ..............................................
394,95 +0,38 394,95 386,8 0,067 +27,08 VINCI .............................................. 92,37 +0,76 92,37 91,1 0,177 +13,53 Tel. : 01 56 43 62 50

LEGRAND ..............................................94,24 -1,09 95,02 92,46 0,204 +29,1 VIVENDI SE ........................... 11,135 +0,54 11,135 11,01 0,369 +2,13 BETELGEUSE ................................................
50,62 26/10/21
BELLATRIX C ................................................
349,17 26/10/21
sitE D’inFormations
LVMH .............................................. 677,2 +0,82 677,2 662 0,086 +32,55 WORLDLINE ..............................................
50,38 -3,58 53 50,21 1,044 -36,31 SIRIUS ................................................60,13 26/10/21 ExClusivEs www.wansQuare.Com

Valeo reVoit à la baisse ses préVisions de reVenus pour l’année 2021 vcollet@lefigaro.fr

Après Faurecia et Plastic Omnium, Valeo d’excédent brut d’exploitation (Ebitda) rie de composants électroniques pénali- Le groupe, qui produit des systèmes sions de CO2 du groupe et félicité ses
a répercuté sur ses prévisions de reve- entre 13 et 13,4 % du chiffre d’affaires. Il a sant la chaîne d’approvisionnement et les d’aide à la conduite (Adas), de propulsion, équipes pour avoir permis la livraison des
nus la baisse de la production automobile toutefois abaissé ses prévisions de chif- plannings de production de nos clients », de refroidissement ou encore d’éclairage clients « sans engendrer la moindre in-
d’ici à la fin de l’année. Le secteur ne de- fre d’affaires pour 2021 dans une four- indique Valeo dans un communiqué. Sur affiche sur les neuf premiers mois terruption, malgré la pénurie de semi-
vrait produire que 71 millions de véhicu- chette de 16,9 à 17,2 milliards d’euros, la période, « la production automobile af- de 2021, un chiffre d’affaires de près de conducteurs » et adapté la production
les alors qu’en août dernier, le cabinet contre 17,6-18,2 milliards d’euros précé- fiche une baisse de 18 % », précise Valeo. 13 milliards d’euros, en hausse de 15 % « à l’extrême volatilité des programmes
IHS Markit envisageait encore une pro- demment. Au troisième trimestre, Valeo a publié par rapport à 2020, année noire. Le PDG des constructeurs automobiles ». L’ac-
A

duction de 76,8 millions d’unités. L’équi- L’activité du troisième trimestre a été un chiffre d’affaires en baisse de 10 % par de Valeo, Jacques Aschenbroich, a confir- tion a terminé la séance de vendredi en
pementier français maintient son objectif « particulièrement affectée par la pénu- rapport à 2020 à 3,96 milliards d’euros. mé les objectifs de réduction des émis- recul de 0,78 % à 25,33 euros. ■
 samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021 le figaro

26 médias et tech
Amazon souffre des retards de livraison
Pénurie de main-d’œuvre et difficultés d’approvisionnement devraient réduire le profit au quatrième trimestre.
Pierre-Yves Dugua
£@PDuguaa
Washington
e-commerce Amazon n’a pas
échappé au cours du troisième
trimestre aux pénuries qui affli-
gent de nombreux secteurs de
l’industrie et des services. Ses
actionnaires, confiants dans sa
capacité à faire à nouveau des
prouesses, malgré les ruptures
d’approvisionnement de multi-
ples composants, les retards de
livraison liés à la saturation des
ports, et la difficulté à trouver de
la main-d’œuvre, sont déçus.
Leurs anticipations de chiffre
d’affaires et de profits ne sont pas
au rendez-vous.
Plus inquiétant encore, Ama-
zon laisse entendre que les pro-
blèmes sont tellement graves
que ses profits pour le trimestre
en cours risquent d’être avalés
entièrement, notamment en rai-
son des surcoûts entraînés par
l’embauche de milliers d’em-
ployés supplémentaires dans ses
centres de traitement de com-
mandes.
Amazon prévoit par exemple
d’embaucher 275 000 personnes
de plus, soit à temps partiel, soit
à temps plein, pour faire face
à la hausse de la demande durant
la saison de fêtes qui commence.
La société de Seattle compte déjà
1,46 million d’employés, soit 30 %
de plus que l’année dernière, ce
qui en fait le deuxième em-
ployeur privé américain derrière
Walmart, numéro un de la dis-
tribution traditionnelle. Elle
tente de pourvoir par ailleurs
55 000 postes vacants de cols
blancs dans la technologie et le
management.
ses de coûts de fret de transport notre plateforme, durant les fêtes ner à vitesse accélérée : il s’agit cité numérique, qui a permis à
maritime », résume Andy Jassy. de fin d’année. » de sa filiale Amazon Web Servi- Google de produire des résultats
Les profits d’Amazon
de juillet à septembre « Dans le même temps, nous fai- Tout n’est pas noir pour Ama- ces (AWS) qui fournit des servi- trimestriels spectaculaires, il
sont divisés par deux, sons tout ce qui est possible pour zon, tant s’en faut. Le moteur de ces informatiques sur le cloud. La profite de plus en plus à Amazon
comparés à ceux réalisés minimiser l’impact sur nos clients profitabilité de l’empire du com- croissance de son activité atteint également.
l’an dernier. AMAZON et nos partenaires qui vendent sur merce en ligne continue de tour- 39 %. Quant au boom de la publi- La plateforme de vente en li-
gne recueille une grande quanti-
té de données sur les goûts et in-
térêts des internautes. Elle peut
les monétiser auprès d’annon-
ceurs et cibler leurs messages de
manière précise. La catégorie de
revenus qui englobe cette activi-
té relativement nouvelle pour
Amazon affiche un gain de 50 %
et atteint 8 milliards de dollars au
cours du trimestre.
La nouvelle est humiliante
pour Facebook qui subit au
contraire un fort ralentissement
de sa croissance dans ce métier
qui est au cœur de son modèle
économique. La divergence s’ex-
plique notamment par les nou-
velles protections offertes aux
internautes par Apple dans la
nouvelle version de son système
d’exploitation iOS. Il est désor-
mais plus facile aux utilisateurs
de tablettes et d’iphone d’empê-
cher Facebook de tout savoir sur
leurs passions et déplacements.
Voilà pourquoi, en dépit d’une
performance globalement déce-
vante, et malgré l’anticipation de
fêtes de fin d’année très compli-
quées pour le commerce en li-
gne, le cours d’Amazon n’a chuté
que de 3,7 % sur le marché ven-
dredi matin. ■
AWS se lance dans la course à l’ordinateur quantique
nouveaux traitements médicaux, du cloud computing dans les cinq ce, AWS a choisi de miser sur les

Offensive
« seOnrendre
va
ingriD vergara £@Vergara_i

quantique Amazon compte bien

dans la publicité
Les profits d’Amazon de juillet à
septembre sont divisés par deux,
comparés à ceux réalisés l’an
dernier. La firme désormais diri-
gée par Andy Jassy, ancien bras
droit de Jeff Bezos, ne dégage que
3,2 milliards de dollars de bénéfi-
ces, sur un volume de ventes de
110,8 milliards de dollars. Wall
Street anticipait près de 5 mil-
liards de bénéfices sur un chiffre
d’affaires de 111,6 milliards de
dollars.
« Nous anticipons plusieurs
milliards de dollars de coûts sup-
plémentaires dans notre activité
de service aux consommateurs, à
mesure que nous naviguons dans
les problèmes de pénurie de main-
d’œuvre, de hausses de salaires,
de difficultés de chaîne mondiale
d’approvisionnement, et de haus-
compte que développer son ordinateur quanti-
différentes que. Pour y parvenir, AWS a ouvert
cette semaine un centre de recher-
techniques che en plein cœur du campus de
peuvent l’institut technologique californien
coexister et Caltech. Dirigé par deux profes-
seurs de physique, mis en disponi-
que certaines bilité de la prestigieuse institution
seront américaine afin de travailler pour
meilleures Amazon, le centre a pour ambition
de contribuer à la création du
pour telle premier véritable ordinateur quanti-
ou telle que, celui capable un jour de réaliser
application »
sébastien tanzilli,
des calculs simultanés inatteignables
par l’informatique classique. Une
capacité nouvelle basée sur les pro-
directeur
de recherche priétés physiques de la matière à
au cnrs sa plus petite échelle (atome, pho-
ton, électron). Cette « autre façon
de penser » l’informatique révolu-
tionnera au sens premier du terme
une multitude d’industries en per-
mettant par exemple la création de
de nouveaux matériaux, la sécurité
des données ou l’élimination de
dioxyde de carbone pour lutter
contre le réchauffement climatique.
AWS a multiplié les recrutements
de chercheurs de haut vol ces der-
niers mois, mais ne dévoile pas
combien travailleront dans son
nouveau centre.
Via son service Braket, Amazon
offre déjà à ses clients un accès à des
simulateurs et à de premières ma-
chines quantiques embryonnaires
construites par d’autres (celles de
IonQ, Rigetti Computing ou D-Wave
Systems). Mais le groupe sait que le
ou les acteurs qui contrôleront la
chaîne de valeur seront ceux qui
auront la maîtrise technologique de
l’ordinateur quantique. Pour AWS,
qui détient aujourd’hui autour de
40 % du marché du cloud, l’enjeu
est vital de pouvoir demain offrir
ces capacités de stockage et de cal-
cul. « Ils pensent au coup d’après,
comment faire de l’informatique et
ou dix prochaines années », résume
Fernando Brandao, codirecteur du
AWS Center for Quantum Compu-
ting. D’autant que les investisse-
ments conséquents se multiplient
assez rapidement depuis l’an der-
nier dans cette industrie naissante
et que de nombreuses entreprises
planchent déjà sur des cas d’usage.
Nécessaire collaboration
Cette course à l’ordinateur quanti-
que reste très ouverte. Après plu-
sieurs années de recherche, quatre
approches principales, basées sur
des technologies complètement
différentes, se dégagent, ce qui laisse
penser que plusieurs ordinateurs
quantiques, verront peut être le jour.
« On va se rendre compte que diffé-
rentes techniques peuvent coexister et
que certaines seront meilleures pour
telle ou telle application », estime
Sébastien Tanzilli, directeur de re-
cherche au CNRS. Comme IBM et
Google qui ont pris un peu d’avan-
circuits supraconducteurs. Cette
technique permet d’agréger assez
rapidement des qbits - l’unité de
stockage dans l’informatique quan-
tique - mais leur manipulation né-
cessite de la cryogénie pour faire
descendre la température proche
du zéro absolu.
Quelle que soit l’approche choi-
sie, et malgré les fulgurants progrès
de ces dernières années, les défis
scientifiques et technologiques à
dépasser restent immenses. Tout
comme la quantité d’argent néces-
saire pour y arriver. D’où la néces-
saire collaboration entre cher-
cheurs et entreprises commerciales
dans ce domaine. La propriété in-
tellectuelle générée par les travaux
effectués dans son centre quantique
appartiendra à AWS, tandis que
celle générée dans le cadre de pro-
jets de recherche parrainés par
Amazon restera aux mains de Cal-
tech. Dans certains cas, elles se la
partageront. ■

Apple se prépare à une fin d’année difficile
Le groupe est rattrapé par les pénuries de semi-conducteurs qui affectent toute l’industrie.
Électronique Apple n’échap-
pe plus à la règle. Les difficultés
d’approvisionnement qui acca-
blent de nombreux secteurs de-
puis des mois ne sont plus sur-
montables. Même pour le géant
californien, réputé pour avoir mis
en place, depuis plus de vingt ans,
des achats de cadeaux de Noël,
sera lui aussi affecté par ces pro-
blèmes. Du reste, Tim Cook ne
fournit pas d’indications chiffrées
sur les perspectives de vente
d’Apple pour la période cruciale
en cours. Il précise toutefois qu’à
l’exception des iPad, toutes les
difficultés à trouver de la main-
d’œuvre qualifiée.
20 milliards de profits
Il est malgré tout difficile de
plaindre Apple. Ses profits tri-
mestriels atteignent 20,6 mil-
liards de dollars, contre 12,7 mil-
en bref
Harcèlement
et sexisme :
deux licenciements
à radiO France
£ Radio France a annoncé
deux licenciements et trois
pé de 47 % durant la période.
mises à pied avec suspension
L’attrait des nouveaux iPhone
de salaire, après une enquête
compatibles avec la 5G est un
externe et indépendante
moteur important de la demande.
En outre, Apple privilégie tou- menée à la suite de la diffusion
jours l’automne pour la sortie de d’un documentaire
nouveaux modèles, afin de maxi- sur le sexisme dans
miser ses ventes de fin d’année. les rédactions sportives.

83,4
la meilleure chaîne d’approvi-
sionnement du monde.
Les retards de production et de
livraison de composants ont am-
puté de quelque 7 % les ventes
milliards d’Apple au cours des trois der-
niers mois. La tendance va s’ag-
de dollars graver durant le dernier trimes-
chiffre d’affaires tre 2021, explique Tim Cook, le
patron du groupe. Le chiffre d’af-
d’apple de juillet
à septembre 2021 faires d’Apple de juillet à septem-
bre grimpe certes de 29 %, ce qui
est remarquable. Il n’atteint tou-
tefois que 83,4 milliards de dol-
lars, alors que Wall Street antici-
pait près de 85 milliards de
dollars.
Et Apple de mettre en garde ses
A
catégories de produit d’Apple de-
vraient voir leurs ventes progres-
ser. La tablette numérique se ré-
vèle en effet davantage affectée
par le manque de composants que
les autres gadgets d’Apple. La
mise en garde a fait chuter de
3,7 % le cours d’Apple, vendredi
en Bourse.
La firme de Cupertino (Califor-
nie) est touchée d’une part par la
pénurie mondiale de composants
électroniques qui plombe déjà la
production dans l’automobile et
l’électroménager, par exemple.
Mais la pénurie résulte aussi de
l’impact spécifique du Covid-19
sur les fournisseurs asiatiques
liards de dollars à la même
époque l’an dernier. La société de
Cupertino, qui est à la fois leader
dans la technologie et les produits
de grande consommation, a ainsi
engrangé 74 milliards de dollars
de profits au cours des trois der-
niers trimestres. C’est davantage
que durant l’ensemble de sa
meilleure année, 2018, où ses
profits avaient atteint 58, 5 mil-
liards…
Il est important de noter que le
nouveau modèle d’iPhone est
sorti trop tard le mois dernier
pour que ses ventes aient un effet
marquant sur les performances
du troisième trimestre. Malgré
Les nouvelles versions de ses
montres numériques, écouteurs
et de ses ordinateurs Mac de-
vraient aussi favoriser la crois-
sance d’Apple au cours des pro-
chaines semaines.
Les analystes anticipent main-
tenant une augmentation des
ventes d’Apple jusqu’à 120 mil-
liards de dollars sur les trois der-
niers mois de l’année 2021. Les
ventes de services, comme la mu-
sique et les abonnements à Apple
TV, sont moins directement af-
fectées par les difficultés
d’approvisionnement. Après un
gain de 26 % au troisième trimes-
tre, elles devraient à nouveau do-
la BBc va améliOrer
sOn impartialité
£ Sous forte pression
politique, la BBC
régulièrement accusée
au Royaume-Uni d’élitisme
londonien, a rendu public
vendredi un plan d’action
en 10 points pour améliorer
son impartialité. Le service
audiovisuel public anglais
prévoit notamment de mettre
en place des formations,
un passage en revue régulier
des contenus diffusés,
une transparence accrue ainsi

actionnaires : le dernier trimestre d’Apple. À cela s’ajoutent, com- cela, tous modèles confondus, les per la croissance d’Apple à l’en- qu’une politique en faveur
de l’année, si important en raison me pour Amazon notamment, des ventes d’iPhone ont encore grim- trée de l’hiver. ■ P.-Y. D. des lanceurs d’alerte.
 samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021 le figaro - N° 24 010 - Cahier N° 3 - Ne peut être vendu séparément - www.lefigaro.fr

œnologie gastronomie
kylie minogue, icône mondiale comment, en dix ans,
de la pop, lance avec succès le restaurant septime est devenu
sa marque de vin. Page 31 une institution parisienne Page 32
©Agip/BridgemAn imAges/LeemAge ; rue des Archives/©suddeutsche Zeitung/LeemAge ; ©Keystone/ZumA/LeemAge ; dArenote / photogrAphy By c. vermAAK ; © A. guirKinger - dAns septime, LA cAve, cLAmAto, d’une îLe (ed. phAidon)

requiem pour les chanteurs oubliés

sacha distel, gilbert bécaud, luis mariano… de grandes vedettes d’hier s’effacent Peu à Peu
de la mémoire collective. leurs séPultures restent les derniers lieux où les retrouver.
PageS 28 et 29

Pâques à aix, une édition éblouissante

la manifestation retrouvera le Public Pour 31 concerts, du 8 au 24 avril.
Thierry hillériTeau£@thilleriteau public, après une édition 2021 digitale. Au João Pires et Martha Argerich à Nelson

L
e programme du concert qui doit
ouvrir la manifestation, le 8 avril,
au Grand Théâtre de Provence,
donne le ton de cette édition 2022,
exceptionnelle à plus d’un titre.
L’un de nos plus grands orchestres français
- l’Orchestre philharmonique de Radio
France. Placé sous la baguette de l’une des
artistes les plus singulières et les plus atta-
chantes de ces dernières années - Barbara
Hannigan, dont on espère qu’un orchestre
de l’Hexagone lui proposera bientôt un pos-
te de directrice musicale.
800 artistes
Enfin et surtout, un programme où cohabi-
tent le Concerto pour violon de Berg, le Re-
quiem de Mozart et la rare monodie de Luigi
Nono sur la militante algérienne Djamila
Boupacha. Tout est dit : cette édition de la
« renaissance, avec son lot d’émotions et de
nouveautés », comme la définit le CIC
(principal mécène de l’événement), se veut
aussi généreuse qu’engagée. Ambitieuse
que solidaire. Comme si Renaud Capuçon et
Dominique Bluzet avaient voulu goûter
total, plus de 800 artistes ! Dont neuf or-
chestres symphoniques ! L’occasion de dire
combien ces grandes formations nous ont
manqué depuis le début de la crise. Et de sa-
luer leur résilience, en particulier dans no-
tre pays « où les collectivités se sont battues,
comme nulle part ailleurs, pour sauver les
pratiques culturelles », rappellent-ils. Outre
Radio France, les Orchestres de Nice, Mon-
te-Carlo, d’Auvergne, des Pays de la Loire,
de l’Opéra de Lyon, ainsi que leurs voisins
francophones de Lausanne et de la Suisse
romande seront à l’honneur, sous la ba-
guette de chefs de toutes générations mais à
la carrière internationale : de Lionel Brin-
guier à Gabor Takacs-Nagy, Kazuki Yama-
da ou Thomas Zehetmair (nouvellement
nommé à l’Orchestre d’Auvergne). Renaud
Capuçon empoignera quant à lui le pupitre
de Lausanne, après y avoir fait ses débuts
comme chef cet automne.
Côté solistes, le festival sert le violoncelle
français, avec un concert exceptionnel.
Dans les Six suites de Bach, Emmanuelle
Bertrand, Marc Coppey, Ophélie Gaillard,
Anne Gastinel, Jérôme Pernoo et Xavier
Phillips ! Le piano verra une fois de plus dé-
Goerner ou Stephen Kovacevich, en pas-
sant par la jeune génération, ADN de Pâques
à Aix : de Yuja Wang à Guillaume Bellom.
Mais ce sont les voix qui seront plus que ja-
mais représentées, avec les récitals de
chanteurs d’exception tels que Juan Diego
Florez, Stéphane Degout, Rachel Harnisch
ou Marina Viotti. Mais aussi une concentra-
tion de chœurs d’élite : Radio France, Pyg-
malion, Accentus ou encore les remarqua-
bles Vox Luminis, auxquels incombe cette
année la Passion selon saint Jean.
Enfin, le festival n’oublie pas son engage-
ment solidaire. Que ce soit au travers de
concerts à la symbolique forte, comme ce
Quatuor pour la fin du temps de Messiaen
(composé en détention au stalag VIII-A de
Görlitz) qui sera joué au Camp des mille, de
concerts en région à destination des publics
empêchés, ou des retransmissions internet,
qui, face au succès de l’édition digitale de
2021, continueront de cohabiter cette année
avec les concerts en public. Au total, ce ne
sont pas moins de 17 captations qui pour-
ront être suivies chaque soir, en InLive
Stream, sur le site du festival. ■
■ Festival de Pâques d’Aix-en-Provence : du 8 au
A

chaque seconde de ces retrouvailles avec le filer à Aix les plus grands noms, de Maria 24 avril. Réservations sur www.festivalpaques.com
 samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021 le figaro
28 l'événement
J’irai chanter sur vos tombes
c’étaient d’immenses
vedettes à leur
époque. aujourd’hui,
leurs chansons
ne sont plus
diffusées, les jeunes
générations
ne connaissent pas
leur nom et rares
sont les visiteurs
qui viennent honorer
leur mémoire
au cimetière.
Lena Lutaud£@llutaud
A
vec ses cailloux et ses co-
quillages, c’est une tombe
poétique qui ne ressemble à
aucune autre du Père-La-
chaise. Arthur, Ken et Izia, les
trois enfants de Jacques Higelin l’ont des-
sinée. Mais, trois ans après la disparition
du chanteur de Champagne, « certains
trentenaires ne le connaissent pas alors
qu’ils savent tous qui est Izia, sa fille », re-
grette Bertrand Beyern, le plus érudit des
guides de cimetière. Le contraste avec
Alain Bashung, qui repose à côté, est sai-
sissant. Le chanteur de Vertige de l’amour
fait l’objet d’un véritable culte. « Il reçoit
de la visite tous les jours, raconte Bertrand
Beyern. À force d’être embrassée par les
femmes, sa stèle est recouverte de baisers
rouges. »
À la veille de cette Toussaint 2021, de
toutes les sépultures de personnalités,
celles des chanteurs sont les plus recher-
chées. Mais, chez les grands noms de la
chanson française, tout le monde est loin
d’attirer la même ferveur. La quinzaine
d’artistes dont les chansons passent en-
core régulièrement à la radio et dont les
fans viennent de loin pour se recueillir
sur leur tombe sont une exception. Long-
temps dominé par Serge Gainsbourg, ce
club très fermé est désormais « dirigé »
par Christophe, objet d’une intense dé-
votion au cimetière du Montparnasse. À
Sète, la tombe de Georges Brassens reçoit
entre 50 et 80 000 visiteurs par an. Cette
année, où l’on fête le centenaire de sa
naissance et les quarante ans de sa dispa-
rition, la sépulture du très aimé chanteur
des Copains d’abord devrait voir encore
plus de fidèles affluer. À ce trio s’ajoutent
“ Décrocher son passeport
pour l’éternité ne suffit pas
avec de bonnes chansons
Jean-Pierre Pasqualini, directeur
des Programmes de la chaîne melody
” chercher. Mais qu’en sera-t-il de Mort
Johnny Hallyday, inhumé à Saint-Bar-
thélemy, Charles Aznavour, à Montfort-
l’Amaury, et, au Père-Lachaise, Édith
Piaf, Michel Delpech et Édith Lefel, la rei-
ne du zouk, dont la tombe est toujours
très fleurie, mais aussi Claude François, à
Dannemois, dans l’Essonne, Jean Ferrat à
Antraigues-sur-Volane, en Ardèche, et
Daniel Balavoine à Biarritz.
À l’inverse, certains artistes, immen-
sément connus de leur vivant, ne reçoi-
vent plus les honneurs qu’ils pourraient
attendre. « Les grands noms des années
1920-1950, dont la carrière était à son
apogée il y a un siècle, sont les plus touchés.
Leur mémoire s’est éteinte avec leur pu-
blic », regrette Jean-Pierre Pasqualini,
directeur des programmes de la chaîne
Melody. À Montparnasse, peu de gens vi-
sitent encore la tombe de Mireille. C’était
pourtant une grande dame. « Partie aux
États-Unis en 1928, elle a rapporté le
swing et le jazz vocal en France, rappelle
Jean-Pierre Pasqualini. Elle a composé
plus de 600 chansons, dont Puisque vous
partez en voyage, repris par Jacques
Dutronc et Françoise Hardy, puis a animé
A
“Le Petit Conservatoire”, qui, de 1955 à
1974, a lancé de nombreux chanteurs, dont
Alice Dona, Yves Duteil et bien sûr Fran-
çoise Hardy. » Au firmament dans les an-
nées 1940-1950, Jacqueline François et
Lucienne Delyle étaient les grandes
chanteuses sentimentales avec Édith Piaf.
Mais qui s’en souvient ? Idem pour Marie
Dubas (Mon légionnaire). « Décrocher son
passeport pour l’éternité ne suffit pas avec
de bonnes chansons. Il faut qu’on ait connu
leurs tourments, leurs amours. Piaf, elle ne
cachait rien, et le biopic qui lui a été consa-
cré, La Môme, sorti au cinéma en 2007 a
fait beaucoup de bien pour sa mémoire »,
fait remarquer Jean-Pierre Pasqualini.
Chez les chanteurs qui faisaient se
pâmer les femmes des années 1930, ce
n’est pas mieux. Jean Tranchant (Ici l’on
pêche), inhumé à Barbizon, comme la
« voix de velours », André Claveau, qui
repose dans le Tarn, n’ont jamais de
visites. Henri Garat (Avoir un bon copain)
est aussi tombé dans l’oubli. « Il a triom-
phé aux États-Unis, puis est mort en 1959
dans la misère après avoir tout flambé au
casino. Pour ne rien arranger, sa tombe au
Père-Lachaise est introuvable », raconte
Bertrand Beyern.
Pour rester dans la mémoire collective,
surtout au Père-Lachaise, où les célé-
brités reposent en nombre, l’emplace-
ment est aussi important. Mieux vaut
être y enterré, comme Moustaki et
Henri Salvador, en bordure d’une allée.
À Bagneux, Barbara est immanquable,
mais Lucienne Boyer et son épitaphe,
« Parlez-moi d’amour », n’ont pas cette Gloria Lasso. Gilbert Bécaud.
chance. Même regret pour Patachou,
bien oubliée au Père-Lachaise, Pascal
Sevran, perdu en Haute-Vienne, Rika
Zaraï, dans la Nièvre, et pour les Frères Gloria lasso
Jacques, « dont les tombes sont dispersées
entre la Haute-Vienne, la Drôme et l’Oise (1922-2005) sacha distel
et encore, il m’en manque un », soupire La grande rivale de Dalida dans les années 1950 (1933-2004)
Bertrand Beyern. Pour Fréhel et Damia,
repose dans la crypte de la cathédrale
les deux grandes chanteuses réalistes des Il y a dix-sept ans,
années 1930, c’est encore pire. « Leurs de Cuernavaca au Mexique avec comme épitaphe
le « French Lover » s’est
sépultures sont perdues dans les 107 hecta- « Buen Viaje » (« Bon voyage »),
éclipsé dans la torpeur de l’été
res du cimetière de Pantin , où aucun titre de l’un de ses grands succès. Icône gay
à 24 heures d’intervalle avec
touriste ne va jamais », souligne Bertrand à partir des années 1980 grâce aux émissions
Serge Reggiani. Au sommet
Beyern. de Pascal Sevran et aux photos de Pierre et Gilles,
Finalement, des stars des Années fol- de sa gloire dans les sixties
ses chansons sont totalement oubliées.
les, dont le souvenir reste vif et la mé- avec plusieurs tubes
moire honorée, il ne reste que Maurice internationaux (La Belle Vie/
Chevalier, enterré à Marnes-la-Coquet- Gilbert bécaud The Good Life ), (Toute la pluie/
te, et Joséphine Baker, remise dans la lu- Rain Drops Keep Falling on my
mière récemment. Le 30 novembre pro- (1927-2001) Head ), il sombre dans l’oubli
chain sur décision du président de la Située dans une allée très passante, dans les années 1980 mais
République Emmanuel Macron, la star de
les promeneurs s’arrêtent devant sa tombe reste l’idole des Anglaises.
La Revue nègre et résistante entrera au
Panthéon. Joséphine Baker restera néan- sans forcément l’avoir cherchée. Elle est souvent Et des publicitaires.
moins inhumée à Monaco entre Léo Ferré décorée d’un piano bleu et de cravates à pois. Le spot pour Savoie Mont
et Bob Azzam (Fais-moi du couscous, Peu de chanteurs peuvent se vanter Blanc actuellement diffusé
Chéri). d’avoir eu un tel succès mondial. Repris de son à la télévision est illustré
Au Père-Lachaise, les prochains jours vivant par Frank Sinatra et par Elvis, par La Belle Vie. Ses fans sont
diront si les hommages à Yves Montand Bécaud est aussi le recordman de l’Olympia. privés de lieu de pèlerinage
et Gilbert Bécaud, deux immenses artis- Les jeunes savent qu’il a été une star mais car Sacha Distel est enterré au
tes, stars de leur vivant, ont ravivé leur
cela s’arrête là. Les célébrations pour les vingt ans Rayol (Var) dans la propriété Sacha Distel.
souvenir auprès d’un public à la mémoire
volatile ou trop jeune pour s’en souvenir. de sa disparition vont peut-être changer les choses. de ses beaux-parents.
Le premier a bénéficié pour le centenaire
de sa naissance (13 octobre 1921) d’une
émission de télévision, « Montand est à
nous », qui vient de réunir 1,7 million de
téléspectateurs sur France 3 et de la sortie
d’un coffret de ses tubes (Universal
Music). Le 18 décembre prochain, on
célébrera les vingt ans de la mort de
Bécaud, dont le souvenir n’est plus aussi
vivace qu’à l’heure de sa disparition. Sa
fille Emily le sait et se démène. Elle pré-
VINcENT BOISOT pOuR LE FIgARO
pare avec Warner pour la fin du mois de
SEBASTIEN SORIANO/LE FIgARO
novembre la sortie du coffret Je reviens te
Schuman à Bordeaux alors que le 30e an-
niversaire de sa mort sera commémoré le
3 novembre, sans tambour ni trompette?
Un travail de transmission devenu obligé
pour que le public n’efface pas définitive-
ment les grands chanteurs de sa mémoire
collective. ■
Jean sablon
SUIVEZ LE GUIDE (1906-1994)
Yves Montand Enterré à Montparnasse (photo)
(1921-1991) Des visites proposées par Bertrand devant Renée Lebas qui a produit
avec sa sœur Germaine,
Beyern (*), celle dédiée aux grands Serge Lama et Régine, Henri
noms de la chanson française à Contet amant et parolier de Piaf créatrice du Chant des Partisans,
La simplicité de la sépulture
Montparnasse est la plus courue. (Padam Padam). Les tombes ce crooner qui susurrait
dans laquelle il repose aux côtés
« Je l’ai créée en 2021 pour la Fête de défilent : Serge Reggiani, Jean « J’attendrai le jour et la nuit »
de Simone Signoret étonne.
la musique », raconte le guide qui sait Sablon, Zizi Jeanmaire, Paul a été le premier à utiliser
Ni leurs dates, ni leurs vrais
des anecdotes drôles et émouvantes : Misraki, l’idole absolue de un micro en 1936. Le triomphe
noms n’y sont gravés. « Ici, Juliette Gréco, la dernière Brassens, pianiste de Ray Ventura de ses tournées internationales,
« La sublime couronne arrivée. Toujours vêtue de noir, elle et auteur de tubes comme Qu’est- notamment au Brésil, rendait fou
en feuilles d’automne offerte repose dans un cercueil blanc avec ce qu’on attend pour être heureux .
de jalousie Charles Trenet.
par Renaud n’est restée comme épitaphe “Chanteuse, actrice, Dans le caveau Séchan, reposent
que quelques jours après ses muse de l’existentialisme“. » Sur la les parents de Renaud et son frère
obsèques, raconte Bertrand tombe de Serge Gainsbourg (photo), Thierry. Et enfin, Joëlle Mogensen
Beyern. Avec le temps, s’est créé les fans déposent moins de choux du groupe Il était une fois.
mais énormément de tickets de Elle chantait J’ai encore rêvé d’elle
un véritable écosystème autour
métro : « Quand la RATP n’en vendra et reste, « très visitée et aimée,
de Montand. Francis Lemarque, plus, je me demande ce qu’on trente-neuf ans après sa mort ».
Michel Legrand, Jacques Plante déposera ». Notre guide s’arrête (*) www.bertrandbeyern.fr
reposent près de lui. »
 le figaro samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021

l'événement 29

PHILIPPE BATAILLON, LOUIS JOYEUX/ INA vIA AFP CLAUdE SCHwARTZ, RENE SAINT PAUL/BRIdGEmAN ImAGES/LEEmAGE
StarS deS
annéeS 1980
Carlos
(1943-2008)
Jean-Chrysostome Dolto,
ancien secrétaire
de Sylvie Vartan repose
à Bourg-la-Reine dans la tombe
familiale particulièrement
bien entretenue. Ses chansons
Rosalie (Doudou dis donc),
Big Bisou, Papayou ou encore
Tout nu et tout bronzé ne sont
plus du tout diffusées.
Elles le seraient, cris d’orfraie
garantis tant ses textes
ne sont plus du tout
dans le ton de notre époque.

DiCk rivers
(1945-2019)
Sa sépulture à Montmartre
vaut le déplacement.
Avec sa guitare gravée
et la Route 66 qui la traverse,
ses dates inscrites
dans des écussons
façon Harley-Davidson
et son portrait avec sa célèbre
banane, c’est une œuvre
autrement plus rock’n’roll
que celle en hommage
Tino Rossi. Mouloudji. à Johnny Hallyday à Bercy.

tino rossi
(1907-1983)
Jusqu’à sa fin, il a été invité
à la télévision grâce
à Petit Papa Noël mais ses
tubes des années 1930 comme
Marinella et Tchi-tchi étaient
oubliés depuis longtemps.
Dans le cimetière d’Ajaccio
composé de chapelles
avec des toits en tuile
qui depuis la mer
évoquent un village,
sa sépulture ultra-
contemporaine sort du lot.
Pierre BacheLet
(1944-2005)
Le chanteur des Corons qui a eu
dix ans de tubes entre 1975 (Elle
est d’ailleurs) et 1985
(Marionnettiste) est enterré là
où on ne l’attend pas : à Saint-
Tropez près d’Eddie Barclay et
de la sépulture réservée par
Eddy Mitchell.
Guy Béart
(1930-2015)
Malgré les efforts de ses filles, il est
peu à peu oublié. En plein Covid, un
album hommage par la jeune
génération dont Vianney est passé
inaperçu. Sa tombe à Garches dans
le même cimetière que Sidney
Bechet est très peu visitée.

MouLoudJi
(1922-1994)
Il repose sous une jolie
pierre en granit
à vingt mètres de Bécaud
au Père-Lachaise. Décédé
il y a vingt-sept ans,
« son nom ne dit rien
aux jeunes sauf si on leur
explique que sa chanson
L’Amour, l’amour, l’amour
illustre la publicité
Intermarché », explique
Bertrand Beyern.

JacqueLine
François
(1922-2009)
Enterrée à Neuilly
GAIZKA IROZ/AFP

près de Liliane Bettencourt,

elle était la star des 50’s,
notamment avec
Les Lavandières du Portugal
et était idolâtrée en
Amérique. Balayée par les
Luis Mariano yé-yé, elle a été oubliée, sauf
(1914-1970) par les musiciens, comme le
crooner Harry Connick Jr.
À Arcangues au Pays basque, « Quand il s’est mis
la tombe (photo) du prince à genoux devant elle,
du Bel Canto est magnifiquement à la brasserie La Lorraine,
fleurie deux fois par jour à Paris, toute la salle s’est
par Marcelle Charton, 75 ans. retournée, personne ne
La logistique des groupies seniors savait qui elle était. Mais
qui arrivent en pèlerinage pour Jacqueline François a trouvé
la célébration du 14 juillet, jour de la cela tout à fait normal »,
disparition de l’idole, c’est elle aussi. raconte en souriant Jean-
Contrairement aux fans de Claude Pierre Pasqualini, qui avait
François qui se vouent des haines organisé cette rencontre.
féroces, ceux de Luis Mariano
s’entraident. Mais voilà : les jeunes
générations n’ont jamais entendu
Mexico et La Belle de Cadix .
A
 samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021 le figaro
30 Culture
Pendant quarante ans,
ce Passionné éclairé
a acheté les créations
modernistes de Prouvé,
de Perriand ou de royère,
dont Personne ne voulait
encore. elles sont vendues
chez christie’s à Paris.
Béatrice de rocheBouët
bderochebouet@lefigaro.fr
A
ssurément, la collection de
Daniel Lebard, cet amateur
épris de modernisme, va
marquer le tournant de ce
début de siècle, en consa-
crant davantage encore des figures de-
venues stars, comme Jean Prouvé,
Charlotte Perriand ou encore Jean
Royère. Cet homme d’affaires qui, dans
un livre, fit éclater la vérité sur le scan-
dale politico-financier Rhodia, a eu
l’audace et la fortune de les acheter à un
moment où les pièces des pionniers du
modernisme ne valaient pour ainsi dire
rien. « Ce curieux a compris tout de suite
leur importance et son soutien fut essen-
tiel pour nous. Il avait les moyens de ses
ambitions. Il nous a servi de guide », ré-
sume le trio parisien formé par les mar-
chands Patrick Seguin, François Laffa-
nour et Philippe Jousse, qui a contribué
à bâtir sa collection.
Celle-ci nous replonge quarante ans
en arrière, vers 1980-1990. C’était juste
avant de commencer leur ascension de
défricheurs, livres et expositions à l’ap-
pui, que ces trois galeristes ont eu le
flair, et l’aplomb commercial, de les
imposer sur le marché. Au tournant des
années 2000, les prix allaient décoller
en flèche, prenant plusieurs zéros, pour
connaître un pic ces dernières années,
avec l’arrivée des acheteurs américains
et, depuis peu, des asiatiques. Entraî-
nant aussi une avalanche de pièces
fausses - et donc de procès tumultueux.
« Daniel Lebard a été l’un des tout
premiers à collectionner, le Français as-
surément le plus éclairé, le plus actif, en
Vibrant, charnel et drôle. Un coup de foudre.
A
L’œiL avant-gardiste de
Daniel leBarD
Table de bibliothèque éclairante,
par Charlotte Perriand et Jean Prouvé,
estimée entre 800 000
et 1 200 000 euros (ci-dessus).
Christie’s images Limited 2021
PAGE 114 PRÉSENTE
AU CINÉMA LE 3 NOVEMBRE
achetant toutes les typologies des princi-
paux acteurs du mouvement moderne,
toutes leurs œuvres iconiques qui
n’étaient alors pas du tout à la mode. Et
ce, sans fausse note ni intention spécula-
tive », confirme Patrick Seguin avant
d’ajouter au sujet de la vente actuelle :
« Dans notre secteur, il n’y en a encore
jamais eu une de ce niveau. » L’intéressé
porte un regard lucide, pas complaisant
mais reconnaissant, parfois attendri,
sur ces trois marchands parisiens, de-
PREMIÈRE
venus par la force d’une passion com-
mune de grands amis : « Patrick Seguin,
la tête chercheuse, minutieuse, soucieuse
d’asseoir ce marché par des publications,
comme son épaisse bible sur Jean Prouvé.
François Laffanour, avec son approche
polyvalente du domaine, aussi brillante
pour chiner que pour vendre ses décou-
vertes. Philippe Jousse, l’œil aiguisé, ter-
riblement défricheur, se souciant plus de
communiquer sa passion que de vendre à
tout prix. »
Des pièces devenues
iconiques
En parcourant cette collection de
372 lots, c’est comme si toute l’histoire
du design de 1930 à 1970 défilait sous
nos yeux, jalonnée par les pièces mo-
dernistes les plus marquantes. Rien n’a
échappé à l’œil aguerri de Daniel Le-
bard. À commencer par la table éclai-
rante iconique de Charlotte Perriand,
Jean Prouvé (et André Salomon pour la
lumière) que les collectionneurs ont
souvent reconvertie en table de salle à
manger.
C’est François Laffanour qui lui a ven-
du, vers 1980, l’un des deux grands
modèles en tôle d’acier pliée, peinture
gris Vermeer (le marchand possède
l’autre) réalisé en 1951 pour la Maison
de l’étudiant de médecine, à Paris. Elle
est estimée entre 800 000 et 1,2 million
d’euros. Soit beaucoup plus de zéros
depuis que le marchand Alan Grizot
avait acheté les deux grands modèles et
cinq petits pour quelques milliers de
francs auprès du Crous. Dans la vente
de ce marchand, « Le regard d’Alan »,
en 1991, un petit modèle fut préempté
pour environ 200 000 francs (frais in-
clus). En 2010, dans la vente du mar-
chand DeLorenzo à New York, un autre
petit modèle est monté à 872 000 dol-
lars (frais inclus).
Autres raretés : le bureau « Présiden-
ce », toujours de Prouvé, rarissime avec
son caisson rouge (vers 1951) estimé
entre 250 000 et 300 000 euros, ou la
chaise pliante avec sa toile orange du
même Prouvé, variante réalisée pour le
mariage de sa sœur. « On n’en voit ja-
mais sur le marché », estime Philippe
Jousse, qui lui a cédé ce modèle (esti-
mation de 200 000 à 300 000 euros)
ainsi que les panneaux de façades à hu-
blots que l’on retrouve dans toutes les
maisons en bois du designer nancéen.
L’une d’elles (conçue pour les sinistrés
de Lorraine en 1944) dormait en caisses
et a été remontée dans la cour de Chris-
tie’s, avant d’être vendue pour
400 000 à 600 000 euros.
D’autres signatures plus anciennes font
partie de la collection, telle celle de
Quand Daniel Lebard recevait dans sa
maison moderniste de Bruxelles, dans ses
bureaux meublés en Perriand ou Prouvé
de l’avenue Kléber, à Paris, ou dans son
appartement du 16e arrondissement, ses
amis lui disaient : « C’est quoi, ce mobilier
industriel en ferraille qui ne vaut pas un
clou sur lequel tu nous fais asseoir ? » Avec
humilité, ce collectionneur n’a jamais
douté d’aucune de ses acquisitions en ga-
lerie ou aux enchères, comme celle de la
table trapèze en tôle d’acier pliée noire
provenant de la vente orchestrée par Bi-
noche et Godeau, en 1991, de la collection
du marchand Alan Grizot. Elle est esti-
mée, aujourd’hui, par Christie’s, entre
600 000 et 800 000 euros.
Jean Prouvé, ce génie
« Quand j’ai travaillé à la tour Nobel, à la
Défense, je voyais de ma fenêtre un mur-
rideau fait par Jean Prouvé. Cela m’a
donné envie de découvrir qui était ce gé-
nie, passé d’apprenti ferronnier ayant
monté en 1924 un atelier à Nancy à l’ar-
chitecte renommé de l’habitat d’urgence.
Celui qui a imposé, en 1971, en tant que
président du jury, le projet du Centre
Pompidou par Renzo Piano et Richard
Rogers. Il a ensuite emporté dans son
sillage ses compagnons de l’UAM - Char-
lotte Perriand, Le Corbusier, Pierre Jean-
neret - et avant eux Pierre Chareau , se
souvient Daniel Lebard. Il m’a fortement
aidé à structurer ma ligne de collection.
Je suis admiratif de cet homme toujours
au front, humblement le meilleur tout en
subissant parfois le pire », ajoute-t-il.
Truffée aussi de Basquiat, Takis,
Gursky, Ruff, Raynaud, Sherman, La-
vier, Sottsass, les Becher - toute son
époque ! -, sa collection est à déguster
dans son jus, ce qui la rend encore plus
désirable. « Je suis par affinité allé d’em-
blée chez Christie’s, voir Sonja Ganne,
directrice du département, qui a travaillé
de 1990 à 1998 chez François Laffanour.
Je vends tout, à quelques exceptions près.
La boucle est bouclée. Il faut un jour avoir
le courage de rendre aux autres ce que la
vie a eu la chance de vous faire décou-
vrir », résume Daniel Lebard. Parole
d’un monsieur très élégant, l’œil tou-
jours alerte sur les nouveaux talents,
qui va faire sûrement le succès de cette
vente, estimée entre 13 et 19 millions
d’euros. Une page du marché se tour-
ne. ■
■ www.christie’s.com
Bibliothèque Nuage, par Charlotte
Perriand, estimée entre 200 000
et 300 000 euros.
Christie’s images Limited 2021
Canapé boule dit Ours polaire,
de Jean Royère, estimé entre 300 000
et 500 000 euros.
Christie’s images Limited 2021
Pierre Chareau avec une rare bibliothè-
que « Mu 1030 » des années 1930,
(achetée dans une vente Sotheby’s
en 1999). Elle affiche 300 000 à 500 000
euros. Ou encore de nombreuses bi-
bliothèques de Charlotte Perriand, cé-
lèbres par leur assemblage de damiers
jaune, rouge et bleu (à partir de
100 000 à 150 000 euros), ainsi que ses
tables bureaux en bois de forme libre
(300 000 à 500 000 euros).
Daniel Lebard poussa plus loin dans le
XXe siècle en achetant le canapé
(300 000 à 500 000 euros) et les fau-
teuils « Ours polaires » rouges de Jean
Royère. Et jusqu’à Roger Tallon (décédé
en 2011) connu pour ses assises en fonte
d’aluminium et mousse si caractéristi-
ques, que le fils de Philippe Jousse, Mat-
thias, a défendues ardemment. ■
B. de r.

Vin
Stéphane Reynaud sreynaud@lefigaro.fr
envoyé spécial aux arcs-sur-argens
E
lle repose la trottinette électri-
que tout terrain avec laquelle
elle est allée arpenter les vi-
gnes du château Sainte Roseli-
ne, aux Arcs-sur-Argens (83).
L’Australienne Kylie Minogue qui sait
concilier les “fun activities” et le travail,
profite d’un séjour dans l’arrière-pays
varois, dans la propriété d’Aurélie Ber-
tin, sa partenaire en affaires. D’ailleurs,
elle va rester une journée de plus que
prévu. Comme « elle est très accessible,
très détendue », nous dit-on, tout le
monde est ravi. La veille, elle est arrivée
de l’aéroport à minuit. L’équipe, aux
anges à l’idée de recevoir la star inter-
nationale aux 100 millions d’albums
vendus, était un peu stressée et en avait
même oublié de concocter un dîner à la
superstar. Mais oui, les idoles de la pop
mangent, elles aussi ! Erreur vite répa-
rée. Une collation fut préparée au dé-
botté avec les produits maison, et bien
servie, comme le vin.
Car Kylie Minogue, désormais, c’est
aussi du vin. Loin d’elle l’idée de dé-
brancher le micro. Elle prépare
d’ailleurs une tournée. Mais Bacchus est
entré dans sa vie, un soir, dans le Ten-
nessee. « C’était en 2017, à Nashville,
explique l’artiste. Je venais de terminer
l’enregistrement de mon quatorzième al-
bum. Nous avions eu des journées de stu-
dio très denses et comme souvent là-bas,
il faisait une chaleur dingue, très humide.
Mon manager et moi-même, nous nous
sommes laissés tomber dans les fauteuils
de l’hôtel, à bout de souffle. J’ai regardé
la carte des vins et j’ai commandé un rosé
de Provence. Il était très frais, très bon.
J’ai dit, un peu comme une blague “Je
voudrais faire un vin comme ça”. »
L’idée reste en suspens. Jusqu’à ce
qu’elle fasse la rencontre, à Londres où
elle réside une bonne partie de l’année,
de Paul Schaafsma, un importateur de
vin de la société Benchmark Drinks.
L’expert ès liquides la met en relation
avec plusieurs producteurs, en France,
en Italie. « Dans le monde de la musique,
on s’entoure des meilleurs compositeurs,
des meilleurs musiciens, des meilleurs in-
génieurs du son… Dans le vin, il me sem-
ble que c’est la même chose. » Elle va
tout de même déguster les échantillons
proposés, définir elle-même le type de
cuvées qu’elle souhaite. Elle choisit
aussi la forme des bouteilles, la typo-
graphie des étiquettes…
“ Des vins qui sont
comme des musiques
faciles à écouter
Kylie Minogue
” sont produites par
La marque « Kylie » est lancée le
28 mai 2020, le jour de son anniversai-
re. La chanteuse propose des vins d’en-
trée de gamme, parmi lesquels un pro-
secco rosé de la région de Gambellara,
en Italie, un sauvignon blanc des côtes
de Gascogne, un rosé et un merlot de
pays d’Oc, les deux en catégorie Vin de
France, ainsi qu’un cava espagnol :
« Des vins qui sont comme des musiques
faciles à écouter », dit-elle.
La gamme Collection se révèle plus
sophistiquée avec deux jus australiens
- un chardonnay de Margaret River et
un pinot noir de la Yarra Valley -, un
rosé côtes de Provence élaboré par châ-
teau Sainte Roseline et surtout un cru
classé Côtes de Provence du même do-
maine, la cuvée la plus prestigieuse,
vendue 31 euros au Royaume-Uni et
28 euros au caveau de la propriété.
La collaboration entre Kylie Minogue
et château Sainte Roseline s’annonce
vertueuse pour les deux parties. La
chanteuse obtient la garantie d’être ap-
provisionnée avec un des meilleurs ro-
sés sur le marché, bénéficiant en outre
de la mention cru classé. Le public
français est peu sensible à ce label ac-
cordé en 1955 à 23 domaines de Pro-
vence (dont cinq ont disparu depuis)
qui reste une garantie de qualité à
l’export. « La seule limite est liée aux vo-
lumes disponibles, note Aurélie Bertin,
car un cru classé est forcément produit
sur le domaine. » Le château de Sainte
Roseline compte 110 hectares en pro-
duction. 650 000 bouteilles sont pro-
duites chaque année sous la houlette de
l’œnologue Marc Bealessio.
Pour Aurélie Bertin, la collaboration
apporte un nouvel éclairage à la pro-
priété, de nouveaux axes de communi-
cation dans un registre léger et pop qui
colle bien à l’image contemporaine du
rosé, mais aussi des possibilités de ren-
forcer la présence du Château au
Royaume-Uni, un marché clé, et aux
États-Unis, l’eldorado des producteurs
de rosé. Kylie Minogue jouit d’une aura
La première gorgée de Kylie
La star austraLienne
de La pop KyLie Minogue
coMMence sur Les chapeaux
de roues une carrière
dans L’industrie du vin.
ses cuvées haut de gaMMe
Le château sainte roseLine,
en provence.
La pop star Kylie Minogue, à gauche,
et sa partenaire en affaires Aurélie
Bertin, propriétaire
du château Sainte Roseline (Var)
présentent un rosé, Côtes de Provence
classé. Darenote/Christian Vermaak
le figaro samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021
31
coups de cœur
CHÂTeaU SUDUiraUT
2016
Premier cru classé, sauternes
Dans le giron d’Axa Millésimes,
ce liquoreux dominé par
le sémillon à 94 %, le reste
en sauvignon, exhibe une robe
étincelante comme de l’or jaune
au soleil. Intense et puissant,
le nez développe une belle
palette aromatique entre épices
fruits confits et rôtis (pêche,
abricot, ananas). Des arômes
que l’on retrouve en bouche,
riche. Une sensation
moelleuse caresse le palais.
La texture est crémeuse,
onctueuse, dense. Quant
à la finale, très longue,
puissante, elle insiste sur
des saveurs salées-sucrées,
de miel, qui se prolongent
par des notes salivantes
et acidulées,
de clémentine.
Prix : 72,50 €
(millesima.fr)
Note Le Figaro : 95/100
SimoNNeT-FeBVre
2019
Chablis grand cru Preuses 2019,
bourgogne blanc
Un beau suprême de poulet
de Bresse à la crème ne saura
résister à l’appel de ce chablis
dont la richesse prolongera celle
du plat. Le grand cru aimera
Kylie Minogue dans les vignes également la compagnie
de château Sainte Roseline, des crustacés, dont la saveur
aux Arcs-sur-Argens. iodée s’accordera à merveille
Darenote/ christian verMaaK avec la minéralité saline du vin
pâle, lumineux, à reflets
d’argent, au nez fumé,
citronné, beurré. Il emplit
la bouche, montre déjà
une très belle harmonie,
tapisse le palais avec
suavité et sapidité. La finale
titille notre mémoire avec
formidable auprès d’un fan-club qui ne
boit pas que ses paroles.
sip of me (of me, baby) ». Ce qu’elle tra-
duit avec plus de retenue dans la vraie
le souvenir de la douceur
acidulée d’un bonbon
À ce jour, Sainte Roseline dispose déjà vie par « Je suis une épicurienne. J’adore Krema au citron.
de plusieurs atouts de taille. La qualité le vin. J’adore la vie ». Kylie Face A et Prix : 63 € (cavistes)
des vins ne fait pas débat. La propriété Kylie Face B. ■ Note Le Figaro : 93/100
est aussi un pôle d’attraction œnotouris-
tique. Le passage au caveau rime avec la
découverte de la chapelle de Sainte Ro-
seline de Villeneuve, prieuse de la char-
treuse de la Celle- Roubaud dans le dio-
cèse de Fréjus, à qui on attribue de
nombreux miracles. Le corps momifié de
la religieuse est toujours exposé sur pla-
ce. Il semble que l’air du coin conserve.
Le château Sainte Roseline est aussi un
centre d’art de premier plan, dont cer-
taines pièces sont présentées dans le
cloître rénové par l’architecte Jean-Mi-
chel Wilmotte. Le repas des anges, for-
midable fresque en mosaïque de Marc
Chagall est visible dans la chapelle, com-
me les vitraux signés Jean Bazaine et
Raoul Ubac. En outre, Aurélie Bertin or-
ganise des expositions régulières qui at-
tirent les initiés. Vin, tourisme, art… Peu
de propriétés parviennent à se hisser au
plus haut niveau dans l’ensemble de ces
secteurs.
Ces dernières années, la Provence a vu
arriver une cohorte de célébrités issues
du monde du divertissement, comme
Ridley Scott, John Malkovich et plus ré-
cemment George Lucas ou George Cloo-
ney. Dans le registre vinicole, la réussite
la plus manifeste est celle de Brad Pitt,
associé à la discrète et efficace famille
Perrin de Châteauneuf-du-Pape, pour
développer la marque Miraval. « C’est
ma référence », reconnaît Kylie Minogue.
Pour l’instant, le binôme Sainte Rose-
line-Kylie Minogue est plus comparable
à la collaboration entre le musicien amé-
ricain Jon Bon Jovi et le vigneron du
Languedoc Gérard Bertrand, commen-
cée il y a trois ans, qui a donné lieu à la
création du rosé Hampton Water,
aujourd’hui massivement distribué aux
États-Unis.
Quoi qu’il en soit, malgré le Covid, et
sans avoir acheté de domaine, Kylie Mi-
nogue a déjà vendu 2,3 millions de bou-
teilles à son nom, au Royaume-Uni, en
France, en Allemagne, en Australie, en
Belgique… Dont 1,2 million du seul pro-
secco. La gamme pourrait s’élargir. Et
l’idée d’ajouter un champagne dans l’es- chateau-issan.com
carcelle ? « Pourquoi pas ? », dit-elle.
Quant à son slogan, il est déjà distillé
dans son dernier album Disco, dans un
morceau intitulé Fine Wine. Elle y chante
L’A B U S D ’A LC O O L E S T DA N G E R E U X P O U R L A SA N T E .
« If you like the finer things in life/tastes
A
like fine wine/If you wanna take a sip to- A C O N S O M M E R AV EC M O D E R AT I O N .
night/Yeah baby follow me/Come take a
 samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021 le figaro
32 à table
Chez Septime, un
engagement durable
qui fait recette
Le duo Grébaut-Pourriat,
à La tête du restaurant
étoiLé Parisien ainsi que
de quatre autres adresses
dans Le 11e et Le Perche,
céLèbre ses dix ans
et se raconte dans un beau
Livre Paru chez Phaidon.
alice BoSio £@alicebosio
E
n ce début octobre, tout ce que
Paris compte de gastronomes
branchés est réuni rue de Cha-
ronne, dans le 11e arrondisse-
ment. Chefs, journalistes, « foo-
dies » : une centaine de personnes fête le
lancement de Septime, La Cave, Clamato,
D’une île, beau livre paru cette semaine
chez Phaidon. Ses auteurs, le chef Bertrand
Grébaut et son associé Théophile Pourriat,
proposent ce soir-là de déambuler entre
leurs trois enseignes - le gastronomique
Septime, le bistrot marin Clamato et le bar
à vins La Cave -, privatisées pour l’occa-
sion, à la découverte de leur univers, mais
aussi de ceux de trois amis invités à cuisi-
ner (Tatiana Levha, Kamal Mouzawak et
Rosio Sanchez).
La sortie de l’ouvrage coïncide avec les
dix ans de Septime, ouvert le 26 avril 2011
dans deux anciennes boutiques regroupées
(machines à écrire et électricité) de la po-
pulaire rue de Charonne par deux copains
qui s’étaient rencontrés à 15 ans dans le
Quartier latin. Grébaut, formé chez Pas-
sard, et Pourriat, gérant de restos italiens,
désirent alors proposer un lieu qui leur res-
semble, décontracté et décomplexé, « avec
une cuisine de haute volée, un beau cadre, un
service bienveillant, et une carte des vins na-
turels qu’on aime », écrivent-ils dans le li-
vre. De quoi dépoussiérer une haute gas-
tronomie qui s’encroûte sous les ors des
beaux quartiers. Étoilé depuis 2014, et clas-
sé depuis 2017 au World’s 50 Best (qui ne
compte aujourd’hui, rappelons-le, que
trois tables dans l’Hexagone), le restaurant
créatif de 35 couverts aux tables en bois
brut non nappées et serveurs en baskets
reste l’un des plus ardus à réserver de la ca-
La cuisine réParatrice de bernard Pacaud
Le chef de L’ambroisie, doyen des 3-étoiLes dans La caPitaLe, fait L’objet d’une bioGraPhie remarquabLe siGnée du Grand rePorter frédéric Laffont.
Stéphane durand-Souffland
sdurandsouffland@lefigaro.fr
Q
uand il sort de la cuisine
avec sa barbe de trois jours,
son vieux polo rouge et un
tablier de ménagère ficelé
dans le dos, on pourrait
croire que le plongeur va se
dégourdir les jambes. Il arrive d’ailleurs à
Bernard Pacaud de faire la vaisselle à
l’Ambroisie, mais il est nettement plus
connu pour inventer les plats qui ont valu
au restaurant de décrocher sa troisième
étoile il y a trente-cinq ans - ce qui en fait
le doyen de sa catégorie dans la capitale.
Ce matin d’octobre, on le surprend au
passe en train d’éplucher des cèpes, à
l’économe. Bernard Pacaud, 74 ans, est
un bourru gouailleur, un émotif au ca-
ractère trempé, un chef qui a plus que du
talent : un style. Un repas chez lui, c’est
une master class de l’épure, un traité de
gastronomie à la française que les équili-
bres gustatifs et visuels mettent à l’abri
du ringardisme. « Cuisiner sans affète-
rie », est-il écrit en exergue au menu,
dans lequel on retrouve des appellations
du répertoire (salmigondis, chartreuse,
sauce financière) avec le même bonheur
qu’on savoure les Köchel de Mozart.
Feuillantine de langoustines au curry.
Bar, émincé d’artichaut et caviar. Tarte
au chocolat et sa glace à la vanille. En
noir et blanc comme en Technicolor, les
recettes créées il y a plus de trente ans
A
ont résisté à toutes les tocades, depuis la
folie du moléculaire à l’invasion du yuzu.
Le grand reporter Frédéric Laffont
vient de publier un livre formidable sur
Bernard Pacaud, auquel il avait déjà
consacré un film, Secrets de cuisine. Dans
son ouvrage Une vie par le menu, qui ne
ressemble pas aux habituelles hagiogra-
phies culinaires, l’auteur s’adresse à son
sujet comme s’il lui révélait sa propre
histoire pour en atténuer les moments
douloureux, le père inconnu, la mère
trop absente. Né en 1947, élevé par ses
grands-parents en Bretagne, puis placé
dans un foyer pour orphelins de Lyon, le
jeune Bernard accomplit, à vélo, au dé-
but des années 1960, l’ascension du col
de la Luère au sommet duquel se trouve
la mythique auberge d’Eugénie Brazier,
De haut en bas : aubergine confite,
vinaigrette au miso de riz rouge, figues,
mûres sauvages, shiitakés, pollen de
fleurs, herbes aromatiques chez Septime.
Collier de thon rouge de ligne laqué,
épices douces, concombre au Clamato.
Tarte amandine aux fruits rouges
à D’une île. À droite : Théophile Pourriat
et Bertrand Grébaut. a. guirkinger
Le chef Bernard Pacaud devant
l’Ambroisie, place des Vosges, à Paris.
François Bouchon/Le Figaro
pitale. « Je ne l’explique pas, confie Théo
Pourriat, en charge plus particulièrement
de la salle et des vins. Peut-être est-ce par-
ce que nous n’avons jamais rien lâché. Nous
nous remettons constamment en question, et
chaque décision est longuement réfléchie
avec Bertrand. Quel que soit notre terrain de
jeu - aucune de nos adresses n’est semblable
-, nous essayons d’aller à l’os, d’épurer, de
ne pas tricher, en termes de cuisine, de vins,
de service, de déco et d’esthétique… »
Une sincérité qui transparaît clairement
à la lecture de l’ouvrage, véritable plongée
dans le quotidien, la façon de travailler, les
questionnements et les inspirations du pe-
tit groupe à succès. Très porté sur la photo-
graphie - 250 illustrations en couleur et
deux fois 3-étoiles - ici et au centre-ville
de Lyon. La mère Brazier, qui fut elle
aussi une gamine placée, le prend sous
son aile dodue.
Blessures d’enfant
Pendant son service militaire, il se retrou-
ve à faire la popote du général Joseph Katz
– encore un enfant qui n’a pas connu ses
parents, trouvé sous un porche d’église
un 1er janvier. Le militaire aux cinq étoiles
lui ouvrira par la suite bien des portes
dans le beau monde. Surdoué mais tour-
menté, Bernard Pacaud, adepte des arts
martiaux, envisage de devenir professeur
d’éducation physique. Eugénie, sa bonne
fée en tablier, l’exhorte à bien réfléchir
dans une lettre magnifique de tendresse et
d’autorité maternelles reproduite in ex-
tenso dans le livre. Il restera aux four-
neaux et, après avoir perfectionné sa
technique ici et là, fait une deuxième ren-
contre essentielle : Claude Peyrot, 3-étoi-
les au Vivarois, ancien élève du mythique
Fernand Point. Ce chef atypique, intello
torturé dont Jacques Lacan est un client
fidèle, cherche un second. Le CV lyonnais
du jeunot le fascine : il l’engage, mais la
brigade, fidèle au patron, l’empêche
d’opérer la moindre initiative.
Il présente sa démission, Mme Peyrot le
supplie de rester huit jours. Il accepte à
condition qu’on lui laisse les mains libres,
après quoi il s’en ira. Le chef découvre
alors l’immensité des ressources de son
second, le cajole, le gâte – l’adopte, en
réalité. Quand Pacaud part pour de bon
voler de ses propres ailes, il lui écrit un
billet bouleversant en son nom et en celui
noir et blanc de grande qualité, toutes pri-
ses à l’argentique, pendant deux ans et
demi, par Alexandre Guirkinger -, le livre
préfacé par le triple étoilé Alain Passard et
le vigneron nature Thierry Puzelat (Le Clos
du Tue Bœuf) prend le temps de présenter
leurs cinq adresses (les trois précitées,
D’une île, l’auberge de campagne du Per-
che, et Tapisserie, la petite dernière, pâtis-
serie artisanale, toujours rue de Charon-
ne), mais aussi les principes du duo, son
rapport à la terre et au végétal, ses produc-
teurs, son approche de la sommellerie…
Petites histoires
Pour finir par un carnet d’une cinquantai-
ne de recettes mêlant créations récentes de
Septime (en dix ans, aucun plat n’a figuré
deux fois au menu) et plats signatures de
Clamato ou D’une île : endive braisée au
savagnin, grillée au barbecue, velouté de
moules et pimenton, lard de porc noir de
Bigorre (Septime), coques de pêche à pied,
beurre blanc au vinaigre Tosazu (Clamato)
ou poularde fermière au foin en cocotte lu-
tée (D’une île). « Nous n’avions pas envie de
faire un livre de chef, mais plutôt de parler de
nos endroits, leur atmosphère, nos équipes,
nos fournisseurs… Comme pour nos restau-
rants, nous avons essayé d’imaginer un
ouvrage esthétique, plein de belles images,
qui s’adresse non seulement aux gens du
métier - qui sont pour nous les vrais VIP -
mais aussi au plus grand nombre. Les textes
sont courts, faciles à lire, comme autant de
petites histoires à feuilleter rapidement ou
dans lesquelles se plonger plus longuement si
on le souhaite. »
En guise d’avant-propos le duo écrit :
« Nous avons toujours voulu que nos restau-
rants soient engagés. » Rédigés avant la
crise du Covid, les textes prennent désor-
mais une autre dimension, dans un
contexte de pénurie de personnel, en cui-
sine comme en salle, qui touche toutes les
catégories de tables. « Il s’agit bien sûr
d’engagement écologique, mais aussi plus
globalement d’une démarche durable. À
l’heure où semble-t-il plus personne n’a en-
vie de faire ce métier, le restaurant doit être
engagé socialement, prendre parti, être plus
radical, dans ses choix de fournisseurs com-
me dans sa politique de ressources humaines
avec les équipes. »
Que souhaiter au duo de Septime, qui
emploie aujourd’hui 55 personnes dans ses
différents lieux, pour les dix années à ve-
nir ? « Je ne sais pas où nous serons. Nous
sommes très fiers de ce que nous avons ac-
compli, des multiples rencontres que nous
avons faites, de l’amitié qui s’est créée entre
tous les anciens passés chez nous. Après
avoir eu envie de nourrir très peu de gens
très très bien, ce qui nous anime aujourd’hui
est de donner à beaucoup mieux à manger.
Nos envies se sont en quelque sorte inver-
sées, nous tendons vers plus de convivialité
et de lien social. » ■
Septime, La Cave, Clamato, D’une île,
Bertrand Grébaut et Théophile Pourriat, avec
Benoît Cohen. Phaidon, 304 pages, 49,95 €.
de son épouse. Extrait : « Tu es Mozart, je
ne suis qu’un Karajan appliqué et honnête
(…) Nous t’aimons. Depuis longtemps. »
Combien de chefs 3-étoiles seraient-ils
capables d’une telle élégance, d’une telle
affection paternelle pour leur second ?
La première Ambroisie s’installe près
de Notre-Dame, 45 m² dont les sous-sols
sont inondés dès que la Seine se fâche.
Nous sommes en 1981, le restaurant est
sis rue de Bièvre, l’histoire est parfois
farceuse. Grand seigneur jusqu’au bout,
Peyrot lui envoie ses clients. Au bout de
huit mois, première étoile. L’année sui-
vante, deuxième étoile. Lors de sa visite
annuelle au Guide Michelin, le directeur
de l’époque, Bernard Naegelen, demande
à Pacaud, l’air de rien, quand il compte
déménager. Pour le cuisinier, c’est le si-
gne d’une rétrogradation imminente. Sa
femme, Danièle, le rassure. Complice de
chaque instant de son mari rencontré
chez Peyrot, elle y voit la promesse dé-
guisée d’une possible troisième étoile
qui, en effet, tombe en 1986, une fois
l’Ambroisie installée en grande pompe
place des Vosges.
Sûreté du geste, détestation de l’es-
broufe, discrétion médiatique, amour
immodéré du beau produit – dans Secrets
de cuisine on le voit succomber aux ron-
deurs d’une truffe blanche d’Alba –, Ber-
nard Pacaud panse ses blessures d’enfant
d’une cuisine qui répare tout. ■
Une vie par le menu, Frédéric Laffont,
Éditions de l’Iconoclaste, 208 pages, 20 €.
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François Rebsamen, maire de Dijon, en invité spécial

Immobilier : Les Clés de la ville à Dijon

Aménagements de la ville, tournant de la modernité, évolution du marché de l’immobilier, patrimoine et architecture... focus
sur le territoire de Dijon avec son maire, François Rebsamen et de nombreux experts locaux. Par OlivierMarin @OlivierMarin1.
Si certaines municipalités manquent cruellement
de nouveaux logements, François Rebsamen (PS),
se félicite du niveau de la construction à Dijon
« parce que cela est nécessaire », ajoute-t-il. Et de
préciser que la ville a joué la carte du développe-
ment économique. « Un tournant s’est produit,
il y a 20 ans. L’alternative était simple. Soit Dijon restait
un chef-lieu de province, de département, soit il prenait
le virage de la modernité, de la construction, ce qui fut
le cas. C’est une ville qui grandit mais raisonnablement.
Nous avons un horizon en 2030 à 170 000 habitants.
On peut le faire en ayant une construction heureuse.
Nous essayons de gérer au mieux notre foncier.
Nous allons aussi développer un programme de mai-
sons en ville. » Auteur du rapport national pour la
relance durable de la construction de logements,
François Rebsamen est sensible à l’acte de construire :
« Le logement est au cœur des préoccupations des
Français. Si l’on veut une société apaisée, on doit
pouvoir loger tout le monde.» souligne le maire
de Dijon.
L’ATTRACTIVITÉ DU MARCHÉ IMMOBILIER
Eric Cazier, président du fichier Amepi (partage
de mandats) à Dijon, décrypte l’évolution du mar-
ché de l’immobilier dont « l’activité se porte plutôt
bien » et livre des conseils sur les secteurs porteurs.
Avec des prix moyens autour de 2 400 €/m2 pour un
appartement ancien (source notaires de France), la
ville dispose d’un pouvoir d’attractivité notamment
auprès de parisiens à la recherche d’espace, de qua-
lité de vie à 1h40 de la capitale par le TGV. Figure
locale et ancien président de la FNAIM (Fédération
nationale de l’immobilier), Jean-François Buet
(groupe Buet) met en avant les atouts de Dijon,
© Figaro Immobilier
qu’ils soient géographiques, culturels, ou culinaires
dans la séquence « Bien dans sa ville ».
HISTOIRE ET INNOVATIONS
De son côté, Pierre Leroy (Heero) conseille sur les
enjeux de la rénovation énergétique, soulignant au
passage que Dijon est une ville résolument moderne
« très ouverte à l’innovation, l’une des premières
smart city ». Aurélien Deleu (directeur marché
immobilier chez Arkéa Banque entreprises et insti-
tutionnels) dresse l’état des lieux de la construction
neuve dans la séquence « Parlons Territoires ».
Enfin, le reportage de Fabienne Lissak nous
entraine dans une visite en immersion de la ville
aux 1 000 clochers et 2 000 ans d’Histoire avec
les témoignages d’Agnès Bournigault, chargée de
la médiation culturelle à Dijon (association Eco-
vil) et Paul Godart, architecte. L’épopée des Ducs
de Bourgogne, le Parlement, le Palais des Etats, la
centaine d’hôtels particuliers… Dijon a la chance
d’avoir conservé les traces de son fascinant passé.
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Télévision 35

IndIspensable
Jean-Louis trintignant
ce documentaire de Lucie cariès et Yves JeuLand dresse
un portrait fouiLLé et émouvant de L’acteur qui marqua tant
de générations grâce au fiLm « un homme et une femme ».
Et soudain, on a l’impression que tout
oLivier DeLcroix £@Delcroixx Trintignant tient dans cette onomato-

M
ême vieux, il reste sédui-
sant. Le timbre singulier
de sa voix envoûte. Ses
yeux noirs, son sourire
ambigu et parfois si écla-
tant fascinent. Jean-Louis Trintignant
est un acteur tour à tour malicieux, gra-
ve, enjôleur, inquiet… mais si attachant.
Plongeant dans plus de soixante-dix
ans d’archives, le tandem de réalisateurs
Lucie Cariès et Yves Jeuland retracent la
carrière d’un comédien à la gloire discrè-
te. Ils ne peuvent pas faire autrement que
de débuter ce Trintignant par Trintignant
par quelques images du film de Lelouch
Un homme une femme où, en gros plan, le
comédien conduit sa Ford Mustang dans
la nuit vers la plage de Deauville tout en
égrenant un monologue intérieur qu’on
connaît presque par cœur. Il parle volon-
tiers à la caméra, avec un mélange de pu-
deur et d’impudeur qu’il
sait parfaitement doser.
D’emblée, il surprend
en déclarant : « Moi, je
suis un acteur du type
chat. Les chats ne sont
○○○¡
pas spontanés, vous savez. Pendant des
années, je passais toutes mes scènes la tête
baissée, avec mon accent méridional, mon
ton monocorde. En moi, ça bouillonnait.
Mais les professeurs me disaient : “Tu n’es
pas bon, mais continue. ” Hin ! Hin !
“C’est pas bon, mais un jour tu seras
bien…” »
pée : « Hin ! Hin ! » Cette interjection dis-
crète, rapide, qui révèle que l’acteur
n’est pas dupe de ce qu’on lui dit. Comme
un mouvement de l’âme à la lisière du
cynisme et de la moquerie qui dit de lui
qu’il a traversé la vie en étant d’une luci-
dité absolue.
Une passion avec BB
Un extrait d’interview le montre en train
de décliner son identité comme un gangs-
ter acculé face à un mur blanc : « Trinti-
gnant, Jean-Louis Xavier, né le 11 décem-
bre 1930 à Piolenc, Vaucluse. Casier vierge,
malgré les apparences. » La carrière et la
vie de l’acteur de théâtre et de cinéma se
mêlent, indissociables. Alors que ses pa-
rents provençaux ne sont pas dans le sé-
rail, lui finit par décrocher un rôle à Paris.
En 1956, le film de Roger Vadim Et Dieu
créa la femme le révèle au grand public,
pour de mauvaises raisons. Le phénomè-
ne Brigitte Bardot explo-
se, et lui qui a vécu une
dimanche passion avec BB se re-
22.35 trouve entraîné dans le
sillage médiatique, « ce
qui le navre énormément »
dira-t-il plus tard. Après trois ans de ser-
vice militaire, il ne compte plus faire ce
métier. Mais Maurice Jacquemont le har-
cèle. En 1960, il triomphe dans Hamlet
(qu’il rejouera dix ans plus tard).
« Hamlet joue la folie. C’est un moyen
d’échapper à la vie, à la société. Tout est
pourri dans le royaume de Danemark,
commente-t-il. Je pense que tout est un
peu pourri dans notre société aussi. Et la fo-
lie est un refuge. J’ai le goût de la folie… »
Du Fanfaron de Dino Risi en 1962 à Ma
nuit chez Maud d’Éric Rohmer (1969), en
passant par Un homme une femme, Le
Conformiste de Bertolucci, Le Train* de
Granier-Deferre avec Romy Schneider
(1973) ou Z de Costa-Gavras, qui lui per-
met de remporter un prix d’interpréta-
tion en 1970, Trintignant file comme un
train dans la nuit. Il est convaincant quoi
qu’il dise.
Le documentaire revient sur ses diffé-
rentes passions. Le sport automobile qu’il
découvre à 40 ans (et qui faillit le tuer du-
rant les 24 heures du Mans), le poker, et
surtout sa famille, son clan. Sa femme
Nadine Trintignant, sa fille Marie qu’il
idolâtre. Il le dit lui-même : « Tout ce que
j’ai, c’est grâce aux femmes. » Il confie so-
brement : « Perdre sa fille, c’est inadmissi-
ble, inacceptable. Vous savez, je ne sais pas
comment faire… » Le jeune Jacques Jean-Louis Trintignant sera révélé
Audiard le remet en selle en 1994 avec au grand public en 1956, grâce à son rôle
l’excellent Regarde les hommes tomber. dans Et Dieu créa la femme,
En 2012, avec Amour de Michael Haneke, de Roger Vadim. Morgane Productions
il est de retour à Cannes et le film rem-
porte la palme d’or. Sur scène, il est bou-
leversant lorsqu’il lit un très court poème
de Prévert : « Et si on essayait d’être heu-
reux, ne serait-ce que pour donner l’exem-
ple. » En Avignon, les dernières images
du documentaire le montrent seul sur
l’immense scène à ciel ouvert du Palais
des papes, récitant un poème, assis sur
une chaise, sa canne à la main, avec ce
pull moutarde, unique tache colorée face
au gris souris des vieilles pierres. Il est
beau. Il émeut. Il est seul. On n’a qu’une
envie : le serrer dans ses bras… et lui dire
qu’il nous est indispensable tout en écou-
tant le « Chabadabada » de Francis Lai. ■
*À 20 h 55, rediffusion du film Le Train,
de Pierre Granier-Deferre, avec Jean-Louis
Trintignant et Romy Schneider.

20 ans de « star ac’ » en grande pompe

après un show en prime time, noLwenn LeroY ou encore éLodie frégé évoquent Le téLécrochet dans un documentaire.

de tableaux. Pendant quatre mois, en- taï, Kamel Ouali, Mathieu Gonet et Os- saisons confondue s», admet Nikos Alia-
Sarah Lecoeuvre £@SarahLecoeuvre tre 15 et 20 jeunes étaient enfermés car Sisto. Sans oublier des candidats gas. Comme les élèves, le présentateur a

C
Vainqueur de la saison 3 de la Star Ac’,
Élodie Frégé revient, lors de cette soirée
spéciale, sur le programme qui a réuni
jusqu’à 12 millions de téléspectateurs.
roMuaLd MeigneuX/siPa
oup de vieux pour les trente-
naires. La « Star Academy »,
« Star Ac’ » pour les aficiona-
dos, fête ses 20 ans. Pour
l’occasion, TF1 réunit les an-
ciens gagnants, candidats et profes-
seurs lors d’une soirée spéciale samedi
soir en prime time, présentée par l’ani-
mateur historique Nikos Aliagas. Un
show en chansons suivi, à 23 h 30, d’un
documentaire intitulé Que sont-ils de-
venus signé Karine Ferri.
« Star Academy »,diffusée de 2001 à
2008, c’est 138 élèves, des centaines de
primes, des milliers de chorégraphies et
dans un château à Dammarie-les-Lys
(77) et apprenaient le métier de star de
la chanson. Et au moins, pendant les
quatre premières saisons, ils le deve-
naient. À leur sortie, impossible de se
déplacer sans une horde de fans et de
paparazzis. Une séance de dédicaces de
la première promotion au Planet Hol-
lywood des Champs-Élysées a viré à
l’émeute. « L’effet Beatles », se souvient
Jenifer, la première gagnante, devenue
depuis jurée de « The Voice ».
Outre les anciens gagnants comme
Nolwenn Leroy ou Élodie Frégé, les
professeurs emblématiques ont accepté
de témoigner, à l’instar d’Armande Al-
marquants comme Jean-Pascal Lacos-
te, chouchou de la productrice et la di-
rectrice Alexia Laroche-Joubert (à la
tête de « Koh-Lanta », « Fort Boyard »
et Miss France aujourd’hui). Ne manque
que Georges-Alain, dernier de la classe
en saison 2, dommage.
Séquences cultes
Les fidèles de la première heure auront
plaisir à revoir des séquences cultes
comme la prestation du
regretté Grégory Le-
marchal sur SOS d’un
terrien en détresse. « Le
plus beau moment toutes ○○○¡
aussi appris le métier dans cette émis-
sion. De chroniqueur chez Christine Bra-
vo et présentateur du JT en Grèce, il est
devenu en quelques mois l’animateur
d’un gros barnum en prime time sur TF1.
Jusqu’à 12 millions de téléspectateurs
étaient réunis ! Au départ, il en perdait sa
voix avant la fin de chaque prime.
À l’époque, TF1 ne lésinait pas sur les
moyens. On faisait venir Madonna, Bri-
tney Spears, Mariah Carey, Beyoncé,
Rihanna en répondant à
tous leurs caprices. Jen-
samedi nifer Lopez s’était même
21.05 rendue au château… en
hélicoptère. ■

aLex beaupain : « une bonne musique coLLe aux intentions du réaLisateur »

Le chanteur et compositeur
proLifique, qui a créé La
bande originaLe de La fiction
PLein écran
pas vu les images. Pour Doutes, je suis pour le second, j’ai écrit des chan-
intervenu en postproduction quand le sons d’après un scénario. Quand un
montage a commencé. Il y avait deux personnage se met à chanter dans un
questions. D’abord, la musique la plus film, je n’y résiste pas, ça fait surve-

« doutes », diffusée sur arte
Le 5 novembre, nous confie
importante du film est Quelque chose nir quelque chose. On nous a beau-
dans mon cœur, le titre d’Elsa, qui agit
comme un révélateur et qu’il fallait
coup parlé de Jacques Demy et Mi-
chel Legrand mais, dans leurs
mettre en valeur. procédés, nos films ne se ressem-

Les secrets d’une musique

de fiLm réussie.
Alex Beaupain est l’auteur de la
bande originale de téléfilms comme
Jonas, Claire Andrieux, et Doutes,
brillant huis clos avec Muriel Robin,
déjà en ligne sur Arte.tv.
L’artiste, complice de longue date
de Christophe Honoré, nous en dit
plus sur son processus de création.
Le FIGARO. - Comment avez-vous
conçu la bande originale de Doutes ?
Alex BEAUPAIN.- J’ai mis du temps à
considérer que je savais faire de la
musique de film, car j’ai commencé
par écrire des chansons. L’instru-
mental est quelque chose de diffé-
rent. Pour ma part, je n’arrive pas à
imaginer une musique tant que je n’ai
Donc toute la musi-
que originale tour- Fictions blent pas. Quand nos personnages se
mettent à chanter, les choses ne
ne autour des har-
monies de cette interview s’arrêtent pas autour, on entend des
gens parler, les bruits de la rue… De
chanson que je me nombreux films français comportent
Par céLine Fontana
suis amusé à décor- £@celineFontana une chanson : Quand on s’promène au
tiquer. Ça me plai- bord de l’eau dans La Belle équipe ou
sait de pouvoir Ma ligne de chance dans Pierrot le fou.
m’appuyer sur de la variété, pop, ce Christophe Honoré, lui, en met qua-
que j’adore. C’est un morceau doux, « La musique doit m’emporter, m’émouvoir sans gâcher le plaisir du film », torze ! C’est un genre particulier de
où Elsa parle des émois de l’adoles- souligne Alex Beaupain. gaBrieLLe ceZard/Le Figaro comédie musicale.
cence. J’ai essayé de lui donner une
tonalité plus dramatique car le film Celle qui colle aux intentions du que, de Chantons sous la pluie à Mes Pourquoi aimez-vous faire chanter
est un thriller, avec du suspense. En- réalisateur : quand je fais ce travail, meilleurs copains, qui est un film ex- les actrices ?
suite, comme cette fiction comporte je me mets à son service. La musi- trêmement musical, entre les pasti- Depuis tout petit, elles m’intimi-
beaucoup de dialogues, nous pou- que ne doit pas se placer au-dessus ches ou les musiques additionnelles dent et m’épatent ! Elles n’ont sou-
vions rester dans le silence derrière du film. Elle doit m’emporter, qui rappellent l’époque. vent pas beaucoup de technique,
pour apprécier l’interprétation des m’émouvoir sans gâcher le plaisir comme moi lorsque je chante, mais
comédiens. Mais leur façon de jouer du film. Certaines œuvres, comme Votre travail avec Christophe elles compensent par une incroya-
permettait de glisser de la musique celles de Robert Bresson parfois, ne Honoré sur Les Chansons d’amour ble qualité d’émotion. Isabelle Ad-
sans que ce soit parasite ou pathos. comportent pas de musique. Mais si et Les Bien Aimés était assez inédit… jani est ma chanteuse préférée, je
je liste mes dix longs-métrages pré- Oui, pour le premier il s’agit d’un dis vraiment ma chanteuse, pas
Qu’est-ce qu’une bonne BO ? férés, il y a forcément de la musi- scénario écrit d’après mes chansons ; mon actrice-chanteuse.
A
 samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021 le figaro

36 télévision Tous les programmes

dans TV Magazine et sur l’appli TV Mag météo par

ÉPHÉMÉRIDE Ste-Bienvenue
L’essentiel Soleil : Lever 08h35 - Coucher 18h33 - Dernier croissant de Lune

21.05 21.05 21.05

du dimanche SAMEDI
Star Academy : on s’était Spectaculaire Commissaire Magellan 21.05 Rémi sans famille 15
dit rendez-vous dans 20... Divertissement Série. Policière Film. Jeunesse. Blg/Fra. 2018. 60
Réal. : Antoine Blossier. 1h44. 15
14 13 13
Avec Daniel Auteuil. Inédit. 15
Au XIXe siècle, un petit garçon 17
13 12
traverse la France avec un artiste 14
15 16 16
ambulant, se découvre un talent 11
de chanteur et retrouve la trace 16
16 18 15
de ses vrais parents.
17
Divertissement Prés. : Cyril Féraud et Fra. 2020. Saison 10. 21.05 Ad Astra
...ans. Prés. : Nikos Aliagas. 2h25. Jean-Marc Généreux. 2h30. Avec Jacques Spiesser. Le bonheur Film. Science-fiction. EU/Chn/ 50 17
Autour de Cyril Féraud et Jean-Marc des autres. Alors qu’il célèbrait le
17
Les anciens élèves, les gagnants, Bré. 2019. Réal. : James Gray. 20
les professeurs et Nikos Aliagas se Généreux, quatre invités Dave, mariage de sa fille, qu’il a élevée seul, 2h03. Avec Brad Pitt. Inédit. Afin 18
rassemblent pour fêter ensemble Anne Roumanoff, Jeanfi Janssens un organisateur de cérémonies est de sauver la planète en danger, un 20 19
ces 20 ans. et Lola Dubini viendront découvrir retrouvé mort, assassiné. astronaute entreprend un péril- 16 15
le meilleur du spectacle vivant. Magellan se charge de l’enquête. leux voyage spatial pour retrouver 19
23.30 Que sont-ils devenus ? 19 22
23.35 On est en direct. Talk-show. 22.45 Commissaire Magellan. son père qu’il croyait mort.
L’incroyable destin des stars des émis- 18 18
sions de télécrochet. Documentaire. Prés. : Léa Salamé et Laurent Ruquier. Série. Policière. Saignac Circus.
21.05 McDonald & 25 40
Dodds
20
Série. Policière. GB. 2020. Sai-
son 1. Avec Tala Gouveia. Un
DIMANCHE
21.05 20.50 21.05 désert de miroirs. Inédit. Dans une
clinique, une patiente est retrou- 90
16
Rugby : Top 14 Il était une fois NCIS : Los Angeles vée pendue dans sa chambre. Elle 16
Sport le musée du Louvre Série. Policière était traitée pour sa dépendance à
16 17 18
l’alcool. Suicide ? Ou meurtre ? 15 19
18 19
21.05 Rugby : Top 14 14
15 20 21
Sport. 9e journée : Racing 92/ 16
19
Toulouse. En direct. Match au
17 22 19
sommet du Top 14 entre des Tou-
19
lousains irrésistibles en ce début
de saison et des Racingmen bien
9e journée : Bordeaux-Bègles/Cler- Documentaire EU. 2019. Saison 11. Avec Chris calés dans le Top 4 du classement. 20 19
mont-Auvergne. En direct. L’Union Fra. 2021. Réal. : F. Wilner. 1h34. Inédit. O’Donnell. 2 épisodes. Inédit. Callen Avec le retour d’Henry Chavancy, 60 22 19
Bordeaux-Bègles réalise un très bon L’histoire tumultueuse du musée pari- et Sam collaborent toujours avec le après six mois d’absence à cause 21
d’une blessure à l’épaule, le Racing 21
début de saison, pointant à la 2e place sien et de ses fabuleuses collections, capitaine de la marine Harmon Rabb
92 a-t-il les moyens de faire tom- 19 17
du Top 14, derrière l’intouchable Stade reflet du destin de la France, à travers Jr, afin d’appréhender des espions à 18
Toulousain, au soir de la 6e journée. ses œuvres iconiques. bord du USS Allegiance. ber l’ogre toulousain, auteur de 23 22
six succès en autant de matches 19
23.01 Canal Rugby Club le débrief. 22.30 L’ARN messager : une révolu- 22.50 NCIS : Los Angeles. Série. 18
en ce début de championnat ? 70
En direct. tion médicale. Documentaire. Inédit. Policière. Piège-moi si tu peux. 21
20.55 Le train 17
Film. Drame. Fra/Ita. 1973. Réal. :
Pierre Granier-Deferre. 1h37.
T (en °c)
Avec Jean-Louis Trintignant. En
1940, pendant l’Occupation, une <-10 à 0 0 à 10 10 à 20 20 à 30 30 à >40
19.15 Le grand bêtisier. 19.30 La petite histoire de France. 19.50 Les mystères de l’amour. passion naît entre un habitant
du Nord, qui fuit sa région, et
21.08 Le grand bêtisier 21.05 La petite histoire 21.05 Columbo
une Juive allemande qui tente
Divertissement. 1h59. Noël. Inédit.
de France Série. Policière. EU. 1990. Saison 9. ALGER 18/25 AMSTERDAM 11/14 ATHÈNES 11/18
d’échapper à ses compatriotes.
Série. Humoristique. Fra. Avec Peter Falk. Couronne mortuaire. 18/22 9/16 6/15
Ce florilège de séquences hila- BARCELONE BELGRADE BERLIN
Avec Philippe Béglia. Tout le monde L’inénarrable lieutenant à l’imper-
rantes est l’occasion de revivre des
connait Jeanne d’Arc, Louis XIV et méable enquête sur la mort d’un
21.05 Miss Peregrine BERNE 5/10 BRUXELLES 12/15 BUDAPEST 5/17
moments drôles, insolites et surpre- et les enfants particuliers COPENHAGUE 10/12 DUBLIN 8/12 LISBONNE 20/21
Napoléon. Leurs cousins en revanche acteur populaire : un assassinat que
nants. Un rendez-vous placé sous le Film. Fantastique. EU/GB/Blg/
ne sont pas rentrés dans l’histoire. le meurtrier a tenté de maquiller en LONDRES 11/15 MADRID 15/20 PRAGUE 0/11
signe de la bonne humeur. Can. 2016. Réal. : Tim Burton.
accident de voiture. RABAT 17/23 ROME 9/21 TUNIS 15/22
23.09 Enquête sous haute tension.
23.00 La petite histoire de France. 2h01. Avec Eva Green. Inédit.
Magazine. Prés. : Carole Rousseau.
Série. Humoristique. Avec P. Béglia. 22.55 90’ Enquêtes. Magazine. Menacés par des monstres et des
nazis, des enfants aux étranges LUNDI MARDI MERCREDI
pouvoirs sont protégés par leur
professeure et un jeune garçon. 8/12 6/10
7/10
20.25 Nous présidents. 20.05 Mécanos express. 20.00 Historiquement Show. 9/13 11/12 10/11 7/10 6/11 7/9
20.55 Echappées belles 21.05 Retour à l’instinct 20.50 L’ombre d’un doute 9/13 9/11
Magazine. 1h30. Spéciale Martinique, primaire : Restons groupés Magazine. Prés. : Franck Ferrand. 6/11
l’aventure en partage. Documentaire. 2018. Après le début 1h13. Jeanne d’Arc, femme provi- 12/14
« Audition publique », 15/16 10/14 10/16 9/12 10/14
Ismaël Khelifa est accompagné de de l’épuisant défi de 40 jours, les sur- dentielle ? La Guerre de Cent Ans bat
« Points de vue », « Le Talk »,
Théo Curin, champion de natation vivalistes subissent une deuxième son plein quand Jeanne d’Arc assiste
« Le Buzz TV »...
lachainemeteo.com
paralympique, qui a réussi à se forger violente tempête, alors que des pluies au couronnement de Charles VII. En
un destin aussi éclatant que ses glaciales s’abattent sur la savane. un an, elle vient de faire basculer le Retrouvez toute l’actualité
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Samedi 30 octobre 2,99 €/appel La Chaîne Météo

MOTS CROISÉS Par Vincent Labbé SU DO KU

1 2 3 4 5 6 7 8 En partant des chiffres déjà placés, remplissez les grilles de manière à ce que chaque ligne, Chaque jour un peu plus difficile
PROBLÈME N° 5810 chaque colonne et chaque carré de 3 x 3 contienne une seule et unique fois tous les chiffres de 1 à 9.
HORIZONTALEMENT 1
1. Sortie de bain. - 2. Sportif dont les exploits sont à GRILLE 3806 FACILE GRILLE 3807 DIFFICILE GRILLE 3808 DIABOLIQUE
couper le souffle. - 3. Aussi nobles que Chateaubriand. 2
- 4. Au sud de Lima. Classé cinquième dans le tableau. 3 1 2 9 9 6 3 4 8 3 9 6
- 5. Ont fait certaines réserves. - 6. S’écoule à Nantes,
même à contre-courant. Marque de poulets. - 7. Réfutée.
3 8 3 9 5 6 7 9 7
En Jordanie et en Sardaigne mais plus en Europe de 4 5 4 6 1 8 7 2 4 9 7 5 8
l’Est. - 8. Utiles au maçon comme au dessinateur. Passif
en comptabilité. - 9. Trébucha en Savoie. - 10. Font étalage 5 2 4 6 3 1 2 5 6 8 1 2
de leurs titres. Fait revenir le berger. - 11. Est immunisé
6 6 5 8 9 2 2 4 5 9 9 4
car il fait chambre à part. - 12. Famille d’imprimeurs qui
a fait école.
7
4 7 6 8 8 3
VERTICALEMENT
5 2 7 6 3 1 8 5 1 2 7 9
8
1. Employée pour le dallage. - 2. Accordent une large 6 4 7 4 5 9 6 2 6 4 5
place au plaisir. - 3. Chauffé à blanc. - 4. Toute la Terre
passée en revue. Faisait rougir nos grands-mères.
9 2 1 9 5 1 7 4
M’exposai au scandale. - 5. Entourée d’un halo de mystère. 10
LETTRES EN PLUS LETTRES EN MOINS
SOLUTION DES MOTS MÉLANGÉS

Promis à l’acquittement. Personnel. - 6. Hôpitaux popu-

laires. On a beaucoup investi pour cet homme de loi. 11
- 7. Tokamak à Cadarache. Espèce atomique, de bas Composez un mot de six lettres avec la lettre en plus. Dans chacun des mots horizontaux, rayez une lettre afin de
12 créer un mot nouveau et reportez cette lettre dans la colonne
LE MOT À TROUVER EST : MICMAC.

en haut. - 8. Il peut prendre la braise du feu. Langue régionale

vide. Vous découvrez alors verticalement le mot mystère.
R A L E R + P =
Assistant du capitaine I N F O N D E C L A R T E
SOLUTION DU PROBLÈME N° 5809
S O N D E + C = MO U E T T E G E S I E R
HORIZONTALEMENT 1. Chargées. - 2. Ryder Cup. - 3. Adipeuse. - 4. Creuse. - 5. Houe. Lee. - 6. Oc.
Salto. - 7. ueL. Réal. - 8. Ipés. STO. - 9. Lhote. Ig. - 10. Lana. PSU. - 11. Élitiste. - 12. Rénettes. À détacher
C A L M E + U = P A R L E U R G L I S S E
VERTICALEMENT 1. Crachouiller. - 2. Hydrocéphale. - 3. Adieu. Léonin. - 4. Repues. State. - 5. Gré. Ar. It. V E I N E U X C H A I N E
A

Objet d’art
- 6. Écuelles. Pst. - 7. Eus. Étatiste. - 8. Spéléologues.
B O R N E + Z = T R O Q U E T G R E L E R

rebond Le petit-neveu
itaLien de pierre Cardin
a pris La suCCession
du Couturier peu avant
sa disparition. iL souhaite
vaLoriser L’empire bâti
par son grand-onCLe
et prépare pour
Le début 2022 un défiLé
hommage à Ce grand
monsieur de La mode.
Alyette Debray-Mauduy
adebray@lefigaro.fr
E
n deux heures d’entre-
tien, jamais il ne nous
avouera que sa relation
avec Pierre Cardin a été
quasi filiale. Faut-il y
voir un signe d’humili-
té, une forme de pu-
deur ou de respect vis-
à-vis de ce grand monsieur de la
mode ? Pourtant, Rodrigo Basilicati
Cardin a bel et bien marché dans les
pas de ce grand-oncle - rencontré sur
le tard, à l’âge de 25 ans - pendant de
nombreuses années. Et c’est lui que le
couturier a choisi pour assurer sa suc-
cession, comme s’il avait été le fils qu’il
n’a jamais eu. En 2018, alors qu’il a
96 ans, Pierre Cardin modifie les sta-
tuts de son entreprise et nomme son
petit-neveu directeur général de Pier-
re Cardin Évolution – qui compte
aujourd’hui 80 salariés en France et
350 licences dans le monde. Deux ans
plus tard, quelques mois avant sa dis-
parition, il le catapulte à la présidence
de son empire. Il faut dire qu’il a été à
bonne école, pris sous l’aile de Cardin
pendant plus de vingt-cinq ans.
Leur première rencontre a lieu à Tré-
vise. Un défilé y est donné pour le cou-
turier, alors nommé citoyen d’honneur
de la ville. Ce dernier a invité son frère,
Erminio - le grand-père maternel de
SKATEBOARD
« Un barley grind
est l’enchaînement,
dos à l’obstacle, d’un
frontside ollie 180 avec
un switch smith grind. »
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RodRigo Basilicati caRdin,
un héritage qui coule de source
Rodrigo - qui se fait accompagner par
son petit-fils. Dans la famille, d’origine
vénitienne, Cardin est un dieu vivant.
« Il m’a été présenté lors du cocktail or-
ganisé à l’issue de la cérémonie et a com-
mencé par me scanner de haut en bas.
J’en ai eu des frissons, des pieds à la
tête », se souvient celui qui s’exprime,
encore aujourd’hui, avec un fort accent
italien. Les deux hommes se trouvent
immédiatement des passions commu-
nes. À l’époque, Rodrigo Basilicati est
un touche-à-tout qui a plusieurs cordes
à son arc. À la fois ingénieur, designer
et pianiste. « Je l’ai interrogé sur ses
jusqu’en 2024
créations, que je trouvais semblables à
des sculptures et, en pointant du doigt sa
coupe, il m’a expliqué que la femme était
le champagne et le vêtement, le verre qui
l’entoure », raconte-t-il, encore médu-
sé par cette comparaison.
Sur tous les fronts
Cadet d’une fratrie de trois enfants,
Rodrigo a grandi à Padoue. Enfant, il
laisse déjà augurer de ses prédisposi-
tions artistiques. Virtuose du clavier,
diplômé du conservatoire - « subjugué
par l’élégance d’Arturo Benedetti
Michelangeli », explique-t-il - il cares-
le figaro
se l’idée d’être pianiste professionnel.
Il a aussi un joli coup de crayon et rêve
d’être designer. Mais, il finira par sui-
vre des études d’ingénierie civile – sur
les traces de ses parents, tous deux
mathématiciens – tout en poursuivant
l’apprentissage du piano à l’académie
Franz-Liszt de Budapest, une fois par
mois. Marqué au fer rouge par sa pre-
mière entrevue avec Pierre Cardin,
Rodrigo Basilicati l’invite, deux ans
plus tard, à découvrir une exposition
de dessins qu’il organise à Venise. Le
couturier est sous le charme de son
travail et de la manière dont il a scéna-
risé cette villa palladienne, à l’aban-
don, avec un budget d’à peine
100 euros. Petit à petit, les deux hom-
mes se rapprochent. Pierre Cardin
l’invite en vacances au Palais Bulles, à
Théoule-sur-Mer, lui propose d’ima-
giner des décors de théâtre pour l’Es-
pace Cardin ou encore de s’installer
dans son palais vénitien pour laisser li-
bre cours à ses créations. Ce qu’il fera
quelques mois plus tard. Cardin n’a
alors de cesse de mettre à l’épreuve son
petit-neveu. L’élève, quant à lui, cher-
che à étonner son maître. Manière de
gagner sa reconnaissance. « À Venise, il
m’a demandé d’imaginer un échiquier
d’un mètre sur un mètre. J’ai créé un
damier qui s’illuminait de LED rouges
qu’il a trouvé féerique. Il l’a fait exposer
au championnat du monde d’échecs, à
Aubervilliers, où Karpov était présent –
et aujourd’hui, celui-ci trône encore
dans les bureaux de la Maison Cardin.
Ensuite il m’a mis au défi d’imaginer un
prototype de gondole lumineuse. Il vou-
lait me tester, voir si j’étais capable de
respecter un cahier des charges, un
budget, des délais. » Pour le surpren-
dre, Rodrigo est prêt à tout. Apprendre
le français en deux mois, par exemple,
en suivant trois heures de cours, qua-
tre fois par semaine, alors que les deux
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samedi 30 - dimanche 31 octobre 2021
37
François Bouchon/Le Figaro
hommes avaient l’habitude de com-
muniquer en italien.
Inlassablement, Cardin poursuit
l’apprentissage de son petit-neveu,
sur tous les fronts. Il lui confie la
lourde tâche de redresser les comptes
de Stia, la société, qu’il possède en
Toscane, d’eau minérale qui est ser-
vie à la table de Maxim’s, son restau-
rant de la rue Royale. Rodrigo Basili-
cati découvre que l’associé dans cette
affaire est véreux et redresse la barre.
Son baptême dans le monde des affai-
res est réussi. Le voilà (enfin) para-
chuté à Paris pour revenir à ses pre-
miers amours, le design. Il crée des
meubles, dessine des lunettes pour
Safilo – un des licenciés Cardin –,
imagine une bouteille en verre pour
Maxim’s et, dans le même temps,
monte des spectacles à l’Espace Car-
din et au château de Lacoste. « En
permanence aux côtés de mon grand-
oncle, j’ai appris le métier et pris goût
à son monde. Pourtant, il était avare en
compliments. J’apprenais qu’il était
content de moi dans les médias »,
ajoute-t-il.
En 2018, pour asseoir un peu plus sa
légitimité, ce quinquagénaire, père
d’une petite fille de 8 ans, a adossé le
nom de jeune fille de sa mère, Cardin,
à son patronyme. Sa feuille de route :
continuer dans la lignée de son
grand-oncle, « perpétuer son style,
géométrique et épuré, reconnaissable
entre tous. Il voyait la mode comme du
design », précise-t-il. En janvier
2022, il organisera un défilé homma-
ge au couturier – décédé il y a un an -
au Musée de l’air et de l’espace. Un
show sur le thème du cosmos – un
univers cher à cet avant-gardiste –
qui mettra en scène 250 pièces, dont
une trentaine dessinée par Pierre
Cardin avant sa mort. Parallèlement,
Rodrigo Basilicati continuera à pro-
mouvoir l’art et la culture, notam-
ment à Lacoste, où il relancera l’an-
née prochaine le prix littéraire
Casanova, qui récompense un auteur
européen qui écrit en français. ■
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